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Commission permanente de la présidence du
conseil,
de la constitution et des affaires
intergouvernementales
Etude des crédits du Conseil
exécutif
Séance du mardi 11 juin 1974
(Dix heures trente-cinq minutes)
M. HOUDE (Limoilou, président de la commission permanente de la
présidence du conseil, de la constitution et des affaires
intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!
Les changements à la commission sont les suivants: M. Dionne
(Mégantic-Compton) remplace M. Beauregard (Gouin); M. Dufour (Vanier)
remplace M. Bourassa (Mercier); M. Lessard (Saguenay) remplace M. Charron
(Saint-Jacques); M. Lafrance (Rivière-du-Loup) remplace M. Lacroix
(Iles-de-la-Madeleine). C'est tout.
Le député de Saguenay.
Office de développement de l'Est du
Québec (suite)
M. LESSARD: M. le Président, à la fin de séance de
la commission parlementaire vendredi dernier, nous étions à
discuter des structures au niveau de l'Est du Québec. Nous avions
demandé au ministre si c'était possible d'obtenir un organigramme
de ces structures. On n'a pas cet organigramme ce matin?
M. QUENNEVILLE: Oui, M. le Président, on est en mesure de
déposer l'organigramme. On fait distribuer justement cet organigramme
avec les explications qui s'y rattachent.
M. LESSARD: L'organigramme, un résumé de la situation
actuelle, mais selon...
M. QUENNEVILLE: Exactement, oui, on a même une définition
des fonctions de...
M. LESSARD: D'accord. A la page...
M. QUENNEVILLE: A partir de la page 5. A la page 9, vous avez une
évaluation sommaire, naturellement, de ces structures,
l'évolution qu'il y a eue depuis 1968 jusqu'à aujourd'hui,
jusqu'en 1974. On peut lire le texte, mais je pense que ce serait un peu
long.
M. LESSARD: Mais est-ce que le ministre pourrait quand même, comme
je n'ai pas pu prendre connaissance du texte, nous en faire un
résumé avec les fonctions? Par exemple, je constate, vous avez
d'abord, c'est certain, l'organisme central qui est l'OPDQ auquel est
rattaché l'ODEQ. Cette structure de l'ODEQ, le ministre avait
commencé l'autre jour à en parler. Nous avions différents
organismes à l'intérieur de l'Est du Québec.
Nous avons CAREQ qui est la conférence administrative des
délégués de chacun des ministères, je pense, et qui
fait la coordination entre les officiers du plan.
M. QUENNEVILLE: Pour répondre à la question de l'honorable
député de Saguenay, je pense que toutes les explications sont
déjà fournies dans le texte qui est là.
M. LESSARD: Nous venons de le recevoir.
M. QUENNEVILLE: Si vous voulez que je lise le texte, je pense que c'est
assez condensé. C'est une question passablement complexe. C'est la
question des structures de l'ODEQ. Je pense que, sans lire le texte, c'est
assez difficile de répondre à cette question.
M. LESSARD: Nous n'avons reçu le texte que ce matin. J'aimerais
bien revenir...
M. QUENNEVILLE: II n'y a pas eu de séance avant ce matin pour
lire cela.
M. LESSARD: D'accord, mais il me semble, M. le Président, qu'il
serait possible pour le ministre de faire un résumé. Nous avons
parlé, l'autre jour, de SAGEQ, je pense que c'est une
société avec but lucratif, dont le but est de faire telle chose,
en particulier au niveau de développement industriel. Ce que j'aimerais,
c'est que le ministre nous fasse un résumé de l'ensemble de ces
organismes et nous dise comment cela s'intègre à
l'intérieur de l'ODEQ. Je pourrais suivre sur l'organigramme que j'ai
ici. Je n'ai pas d'objection à ce que le ministre lise le texte.
M. QUENNEVILLE: Je vais lire le texte, je pense que cela va être
beaucoup plus simple. On va essayer de faire...
M. LESSARD: Ce serait d'ailleurs très important que ce soit
inscrit au journal des Débats. Le ministre comprendra que de plus en
plus c'est devenu complexe et les gens commencent à avoir des
difficultés à se démêler avec les sigles.
M. QUENNEVILLE: Dans son rapport qu'il soumettait au gouvernement le 20
juillet 1966, le BAEQ proposait la structure suivante d'exécution du
plan: Création d'un office régional de développement, ORD,
ayant un statut de corporation publique financée par l'Etat et jouissant
de l'autonomie de gestion chargée de seconder le gouvernement du
Québec dans l'exécution du plan de développement
préparé pour la région de l'Est du Québec, en
exécutant certaines tâches prévues par le plan, en
coordonnant les interventions de centres de décision publics et
privés dans le but d'assumer la
compatibilité de telles interventions avec les objectifs
fixés par le plan en conduisant les études nécessaires
à la revision du plan, à l'approfondissement de certains aspects
du même plan et à la préparation de plans
ultérieurs.
Le BAEQ proposait aussi à moyen terme de créer un
échelon administratif régional. Ainsi, la région doit
servir de cadre d'action aux différents ministères et organismes
gouvernementaux; chaque ministère intéressé par le
développement économico-social doit nommer un coor-donnateur
régional; les fonctionnaires d'un même ministère devraient
se rencontrer régulièrement et les fonctionnaires dans la
région devraient, le plus possible, être regroupés en
commençant par la métropole régionale, les centres
sous-régionaux et les municipalités locales agrandies.
Recommandations du COEQ au gouvernement en 1967. Il s'agit naturellement
du Conseil d'orientation économique du Québec. Après
l'étude du plan du BAEQ, les propositions suivantes sont faites au
gouvernement: Faire de Rimouski la capitale régionale; inclure dans la
région-plan, la sous-région de Rivière-du-Loup; exiger des
ministères et organismes gouvernementaux d'avoir comme cadre d'action la
région-plan; nommer des coordonnateurs régionaux
(administrateurs) dans les principaux ministères; accorder à ces
coordonnateurs des pouvoirs suffisants (voir pages 6 et 7 de ce texte pour une
définition du rôle et des fonctions des coordonnateurs); regrouper
le personnel des ministères à Rimouski dans les centres
sous-régionaux et les centres intermédiaires; former la
conférence des coordonnateurs régionaux et, enfin, nommer un
délégué régional au plan.
L'entente Canada-Québec signée le 26 mai 1968
prévoit la création d'un certain nombre de mécanismes pour
exécuter le plan. D'autres mécanismes d'exécution non
spécifiquement inscrits dans l'entente seront aussi mis en place par les
deux gouvernements.
Quant à la structure fédérale-provinciale, on la
verra un peu plus loin.
Le comité de liaison, article 21 de l'entente: Les fonctions sont
le réexamen des objectifs, l'évaluation des programmes,
l'approbation des programmes et projets, la recommandation des modifications
et, enfin, ce comité dirige le travail du comité directeur.
Composition : au moins six membres, répartition numérique
égale de part et d'autre.
Le comité directeur. Le comité directeur est responsable
de la direction pratique du plan, détermine les recherches à
faire en vue de préparer de nouveaux programmes, révise les
programmes ou projets à certaines étapes importantes de leur
élaboration et en recommande les budgets au comité de liaison,
fait rapport au comité de liaison, suggère les modifications
nécessaires à l'exécution des tranches annuelles.
La structure provinciale. Un certain nombre de lois et
d'arrêtés en conseil ont défini la nature des
mécanismes d'exécution et leurs interrelations.
Mentionnons l'arrêté en conseil 1196 du 9 avril 1966 sur
les structures et modalités administratives de l'exécution;
l'arrêté en conseil 1497 du 21 mai 1968 sur l'ODEQ;
l'arrêté en conseil 1498 du 22 mai 1968 sur l'entente: Loi
modifiant la loi de l'Office de planification du Québec, le bill 28;
l'arrêté en conseil 751 du 24 février 1970 sur
l'intégration de l'ODEQ à l'OPDQ.
Vous avez, naturellement, dans la page suivante, l'organigramme des
structures administratives fédérales et provinciales. Dans le
comité de liaison, du côté du Québec, vous avez M.
Yvon Tremblay, M. Duchesneau, M. Guy Coulombe, M. Arthur Tremblay, et du
côté du Canada, M. Montreuil, M. Poirier, M. Tennier et M.
Duquette.
Comme délégué régional au plan, M. Robin
D'Anjou; au comité directeur, M. Robin D'Anjou et M. Pagé et du
côté fédéral, M. François Pagé.
Conférence administrative régionale. Réunion des
coordonnateurs régionaux de 15 ministères. Dans les
comités mixtes, l'agriculture, transport, développement social,
pêches, mines, habitation, aménagements touristiques et
culturels.
Et enfin, la conférence de programmation régionale, ce
sont les fonctionnaires fédéraux qui, naturellement, sont
désignés à ce moment-là.
Dans la structure d'exécution du Québec, un vice-premier
ministre, l'honorable Gérard-D. Lé-vesque, le ministre
responsable de l'Est, l'OPDQ, le délégué régional
du plan du secrétariat de la CAREQ et, naturellement, les
représentants des 15 ministères. A l'Agriculture, M. Laurent
Bouchard; aux Richesses naturelles, M. Bellemare; aux Travaux publics, M. Lomer
Dumont; aux Transports, M. Claude Lortie; au ministère du Tourisme, de
la Chasse et de la Pêche, M. Rodolphe Lafresnaye; aux Pêches, M. A.
Lachance; à l'Industrie et au Commerce, M. Guy Leclerc; aux Affaires
municipales, M. Jules Coulombe; au Travail et à la Main-d'Oeuvre, M. F.
Raviolatti; à la Fonction publique, M. G. Jolicoeur; aux Affaires
sociales, M. Jean-Claude Beaulieu; aux Communications, M. M. Thivier-ge; aux
Affaires culturelles M. Denis Rivest; à l'Education, M. Georges
Tousignant; aux Terres et Forêts, M. P.-H. Ouellet.
Le ministre responsable de l'OPDQ. En vertu de la loi qui a
institué l'Office, c'est le premier ministre qui en assume la
responsabilité. Il peut cependant désigner tout autre membre du
Conseil exécutif pour assumer en son nom l'ensemble ou une partie de
cette responsabilité. C'est ainsi qu'il a désigné le
vice-premier ministre, l'honorable Gérard-D. Lévesque.
Le ministre responsable de l'exécution du plan. La lettre du 14
octobre 1971 s'appuie sur cette possibilité inscrite dans la loi de
l'office. "Sous l'autorité de la loi de l'Office de planification et de
développement du Québec, je désigne par la présente
l'honorable Robert Quenneville, membre du Conseil exécutif pour
agir comme ministre responsable de la coordination
générale de l'exécution du plan de développement de
la région de l'Est du Québec, visé par
l'arrêté en conseil no 751 du 24 février 1970 et
défini au sous-paragraphe a) du paragraphe 1 dudit arrêté
en conseil". Cette lettre était signée du premier ministre, M.
Robert Bourassa.
Le délégué régional au plan. Sous
l'autorité du président directeur général de
l'OPDQ, le délégué remplit diverses fonctions:
A titre d'administrateur du bureau régional de l'OPDQ, il voit au
fonctionnement de l'ensemble du bureau, établit des liaisons
étroites avec la population régionale, les corps
intermédiaires, les municipalités et plus particulièrement
le CDR, assure une coordination interrégionale.
A titre de président de la CAREQ, il préside la
conférence administrative régionale et participe à la
préparation des programmations sectorielles des directeurs
régionaux des ministères; présente annuellement, à
la direction de l'OPDQ, une programmation pour l'année financière
suivante; voit à ce que les programmes et projets élaborés
à la CAREQ correspondent aux objectifs généraux du
développement de la région.
A titre de membre du comité directeur de l'entente, il est
responsable de la planification et de la coordination
interministérielle, responsable de l'élaboration de projets
interministériels; responsable d'exécuter ou de faire
exécuter les études et recherches nécessaires devant
servir à préciser les objectifs de développement de la
région; dégage des priorités parmi les programmes ou
projets et coordonne l'action des ministères chargés de les
exécuter.
La conférence administrative régionale. La CAREQ,
Conférence administrative régionale de l'Est du Québec,
est la réunion des coordon-nateurs régionaux,
présidée par le délégué régional au
plan. A la lumière des informations que lui procurent l'OPDQ, d'une
part, et les coor-donnateurs régionaux, d'autre part, elle doit
harmoniser les programmes gouvernementaux entre eux de façon à
assurer la réalisation la plus complète possible d'objectifs
généraux de développement pour la région.
Les coordonnateurs régionaux sont des agents de l'administration
provinciale aux fins de la coordination de l'exécution du plan. Certains
d'entre eux n'assument que cette tâche. D'autres sont en même temps
responsables de certains services réguliers de leurs ministères
ou même de l'ensemble des services à titre de directeur
régional.
Règle générale. Les coordonnateurs devraient
pouvoir programmer les activités du ministère dans la
région en fonction des objectifs du ministère concerné et
en fonction des objectifs généraux de développement de la
région tels qu'arrêtés par la conférence
administrative régionale.
Pour étudier davantage certains problèmes
spécifiques, des comités rattachés à la
confé- rence ont été formés: Comité
d'aménagement des zones touristiques, etc.
Principes sous-jacents à la structure d'exécution. Les
ministères sont les maîtres d'oeuvre. Contrairement aux
recommandations du BAEQ qui prévoyait la création d'un organisme
régional et paragouvernemental de l'exécution du plan, l'ORD, le
COEQ a recommandé au gouvernement, après étude du plan du
BAEQ, de donner aux ministères concernés la responsabilité
la plus entière possible en matière d'exécution du
plan.
C'est ce principe qui a été retenu et explicité
dans l'arrêté en conseil créant l'ODEQ.
La structure adoptée met l'accent sur la déconcentration
administrative. Déconcentrer, c'est créer des instances
administratives hiérarchiquement inférieures et leur
déléguer des pouvoirs (administratifs) auparavant assumés
par le niveau central. Tant le plan du BAEQ que le rapport du COEQ sur
l'exécution du plan insistaient sur la nécessité d'adopter
le principe de la déconcentration administrative.
Dans la structure retenue, les coordonnateurs régionaux sont des
instances déconcentrées des administrations provinciales. Ils
assument, sous la responsabilité des ministères concernés,
des tâches de coordination et de planification intraministérielles
et, pour certains, des tâches de direction administrative au niveau
régional.
Importance des tâches de coordination. Enfin, la structure
adoptée mise à fond sur les mécanismes de coordination
pour donner à l'activité gouvernementale, quel que soit le
domaine concerné, l'impact nécessaire pour réaliser des
objectifs globaux de développement qui dépassent, en extension et
en intensité, les objectifs qui peuvent être assumés dans
n'importe quel des secteurs particuliers d'activité ou d'intervention
gouvernementale.
Evaluation sommaire. La CAREQ, mécanisme de coordination
interministérielle, période de 1968 à 1970. On pourrait
être tenté de reprocher à la CAREQ les retards dans
l'exécution de certains projets prévus dans le plan de
développement. Cependant, les causes de ces retards furent surtout
externes à la CAREQ. Celle-ci a dû faire face à certaines
contraintes que toute organisation gouvernementale subit plus ou moins
régulièrement: lenteurs administratives dans l'engagement du
personnel supplémentaire nécessité par l'exécution
du plan. Lenteurs dans les procédures d'adoption des projets et de
disposition des fonds. Tous les ministères n'avaient pas nommé un
coordonna-teur régional dès le début des activités
de la CAREQ. Le temps requis pour permettre aux coordonnateurs régionaux
de se familiariser avec toutes les activités de leur ministère et
celles des autres ministères. Il importe de souligner que quelques
coordonnateurs avaient leur point d'attache à Québec plutôt
qu'à Rimouski. Cette situation était un obstacle à la
coordination interministérielle.
La période de 1970 à 1974. Tous les ministères
impliqués dans la réalisation des programmes de l'entente nomment
un coordon-nateur régional dont le nombre passe ainsi de dix à
quinze. Dans la majorité des cas, ces coordonnateurs régionaux
relèvent directement du sous-ministre ou d'un sous-ministre adjoint.
Cette formule a pour effet principal de réduire considérablement
les délais administratifs qui, de 1968 à 1970, avaient
retardé la mise en oeuvre des programmes de l'entente.
Une étude sommaire des performances budgétaires de 1968
à 1974 permet de constater l'évolution de la structure
régionale d'exécution vers une plus grande efficacité. La
performance budgétaire, c'est le pourcentage des dépenses par
rapport au budget voté. 1968/1969: 45.7 p.c; 1969/1970: 53.3 p.c;
1970/1971: 76.8p.c.; 1971/1972: 89.3 p.c; 1972/1973: 95 p.c; 1973/1974, environ
90 p.c.
On attend, en ce moment, l'audition des dépenses pour
préciser.
Même s'il reste beaucoup à faire, si on veut parler un jour
d'une véritable déconcentration administrative,
l'expérience réalisée dans l'Est du Québec au cours
des six dernières années semble être un cheminement valable
dans la poursuite des objectifs du développement régional.
M. LESSARD: Je vous remercie. Je pense qu'il s'agit d'un excellent texte
qui méritait d'être lu, M. le Président, et consigné
au journal des Débats.
M. QUENNEVILLE: Merci.
M. LESSARD: Nous avons la structure du ministère qui semble assez
concrétisée, et coordonnée surtout quand on constate que
chacun des ministères a nommé ses responsables, ses
coordonnateurs régionaux.
Dans cette structure, naturellement, on ne retrouve pas deux autres
structures qui existent, soit le CRD et la SAGEQ. Alors, le CRD en fait, comme
le ministre l'expliquait, est strictement l'organisme de consultation de la
population. Comment s'inscrit le CRD dans cette structure?
M. QUENNEVILLE: Le CRD est un organisme consultatif qui est
considéré par l'OPDQ comme l'interlocuteur
privilégié. Il reçoit des subventions annuelles pour
fonctionner. Son rôle, surtout dans l'Est du Québec, a
réellement été efficace. On peut dire qu'il y a eu aussi,
d'ailleurs de la part de l'ODEQ, une consultation réelle au niveau du
CRD.
Le délégué au plan rencontre
régulièrement le conseil d'administration du CRD et, les
commissions spécialisées à l'intérieur du CRD
rencontrent aussi les coordonnateurs des différents ministères. A
ce moment, il a sûrement une consultation nettement valable aux
différents paliers.
M. LESSARD: Alors, le CRD est l'organisme où normalement doivent
être réunis les différents organismes régionaux de
la population. Des membres de la population, des délégués
de la population font des recommandations sur certains projets au ministre
responsable de l'ODEQ, qui ne sont pas nécessairement acceptés
parce qu'elles sont étudiées; mais comme vous le dites, le CRD
est quand même un interlocuteur qualifié.
Vous étudiez ces projets selon l'efficacité ou selon le
fait que ces projets sont bons ou pas. C'est relatif.
M. QUENNEVILLE: Nous tenons compte des recommandations du CRD. C'est
cela.
M. LESSARD: Maintenant, suite à certaines revendications, le
ministre a accepté de former une société et de financer
pour la première fois une société à but lucratif
qui s'appelle la Société d'aménagement et de gestion de
l'Est du Québec, soit SAGEQ.
M. QUENNEVILLE: Je m'excuse, M. le Président, c'est la
Société d'administration et de gestion de l'Est du
Québec.
M. LESSARD: D'accord, M. le Président. C'est important qu'on se
démêle exactement dans ces sigles. Quelle est la nature de cette
société? Comment s'inscrit-elle à l'intérieur des
recommandations du BAEQ? Comment s'inscrit-elle à l'intérieur de
la structure qui s'appelle l'ODEQ?
M. QUENNEVILLE: II s'agit d'une entreprise, comme l'a dit tantôt
le député de Saguenay, ou d'une société à
but lucratif et qui n'est pas rattachée à l'ODEQ. Il s'agit de
respecter à ce moment un principe émis par le BAEQ et dans tous
les programmes que nous avions... Elle provient d'une recommandation du CRD.
Elle fonctionne d'une façon autonome depuis ce temps, depuis le 18
octobre dernier. Nous sommes en mesure de déposer le protocole d'entente
tel qu'il a été demandé à la dernière
séance.
M. LESSARD: Dans quel but cette société a-t-elle
été établie? Quel est strictement son objectif? Il faut
quand même qu'il y ait un certain contrôle de la part de l'ODEQ. Je
pense que cette année, c'est un montant de près de $800,000 que
vous accorderez à SAGEQ. Quels objectifs devront être poursuivis
par cette société? Quels sont les moyens de contrôle du
gouvernement sur cette société? Quelle coordination existe avec
l'ODEQ?
M. QUENNEVILLE: Le but de cette société est le
développement industriel. On s'adresse à ce moment à
l'entrepreneurship régional, à ces fins de développement
industriel. Quant au contrôle, vous pourrez le constater dans le
protocole d'entente, il est exercé par le ministère de
l'Industrie et du Commerce, qui demande un rapport annuel de
vérification des subventions données. Je pense que ce qui est
assez important et qu'on a voulu respecter en instituant la SAGEQ ou du moins
en donnant suite à cette recommandation, c'est sûrement
l'entre-preneurship, et peut-être surtout prévoir qu'à
l'intérieur des montants disponibles dans l'entente, il y ait quand
même non seulement des fonds de suppléance, mais aussi qu'on
puisse ajouter des budgets d'incitations quant au développement
industriel.
M. LESSARD: Est-ce qu'il s'agit d'une société à but
lucratif qui a pour but de faire des études sur la possibilité
d'implantations industrielles ou s'il s'agit d'une société qui
peut prendre l'initiative de créer de l'industrie, une
société?
M. QUENNEVILLE: Exactement, M. le Président. Naturellement, il
s'agit d'une expérience pilote.
Cette société, non seulement va promouvoir la
création de nouvelles industries à l'intérieur de la
région, mais elle peut aussi, en même temps, investir certains
montants à l'intérieur même de ces entreprises ou de ces
projets. Ils achètent alors des parts.
M. LESSARD: Alors, cette société devient donc une
société à capital-actions. Si le ministère a
donné ou a accepté de subventionner la somme de $800,000, est-ce
que, d'autre part, les administrateurs de cette société ont
également mis de l'investissement, de l'argent, du capital?
M. QUENNEVILLE: Pas au moment de la phase de démarrage, M. le
Président, mais, par la suite, ces gens ont investi et on doit
connaître le 30 juin les montants investis exactement, soit par la
population ou les actionnaires de la SAGEQ. Ils se sont engagés à
ramasser $500,000 pour le 30 juin.
M. LESSARD: Une société comme SAGEQ pourrait aller
jusqu'à intervenir dans l'investissement d'une entreprise comme celle de
Cabano?
M. QUENNEVILLE: Exactement.
M. LESSARD: Ce que je désirerais savoir maintenant, puisqu'il
s'agit d'une société qui est largement subventionnée par
le gouvernement le ministre a accepté de déposer le
protocole d'entente c'est pourquoi, plutôt que de subventionner
directement cette entreprise qui devient en fait une entreprise assez autonome,
le gouvernement n'a-t-il pas choisi d'acheter du capital-actions à
l'intérieur de l'entreprise?
M. QUENNEVILLE: II s'agit naturellement de s'adresser, comme je le
disais tantôt, à l'entrepreneurship régional. Je peux vous
dire qu'à ce moment-là, les sommes consenties par l'entente
s'adressaient tout simplement à la phase de démarrage, mais cela
ne va pas plus loin. C'est envoyé par le biais du CRD qui lui-même
a transmis les montants à la SAGEQ.
M. LESSARD: Est-ce que le ministre responsable de l'ODEQ, en
collaboration avec les autres ministres qui sont aussi responsables de toute
cette planification régionale, a envisagé cette
possibilité... Je comprends que le ministre nous dit qu'il s'agit d'une
subvention de démarrage, mais est-ce qu'on a envisagé cette
possibilité du capital-actions puisque le ministre me dit que les
membres de cette société se sont engagés à trouver
la somme de $500,000?
M. QUENNEVILLE: C'est cette société qui s'est
engagée à trouver un montant de $500,000. Si on veut respecter
l'esprit qui a sous-tendu l'implantation de la SAGEQ, il faut respecter cette
volonté de l'entreprise privée et ce respect de
l'entrepreneurship.
M. LESSARD: Est-ce que vous avez envisagé cette
possibilité du capital-actions? Je comprends, M. le Président,
qu'il s'agit de permettre le démarrage d'une société, mais
si, par exemple, dans ma région je comprends qu'il s'agit d'une
expérience pilote ou dans d'autres régions de
députés libéraux, on décide de se réunir, un
groupe de personnes, et de se former en société on n'a pas
de capital-actions et on fait la demande au gouvernement de nous donner une
subvention de démarrage de $800,000 il me semble que c'est quand
même un précédent qui peut être assez dangereux. Il
s'agit de former de toutes pièces une société avec
l'argent des contribuables québécois.
M. QUENNEVILLE: Nous avons tout simplement respecté les voeux de
la population. Nous avons simplement respecté aussi le projet tel que
présenté par le CRD. Je reviens toujours sur le principe de
respecter l'entrepreneurship local ou régional. On voit mal pourquoi
nous irions investir. Il reste quand même qu'en dehors de cette
société, l'ODEQ aussi a de l'argent prévu pour les
infrastructures industrielles, différents programmes pour aider à
la consolidation des projets qui sont là.
M. LESSARD: Est-ce que le CRD, dans ses recommandations, faisait
état des différentes hypothèses, dont la
possibilité du capital-actions?
M. QUENNEVILLE: Je ne vois pas qu'il y ait jamais eu de proposition dans
ce sens. Pas à ma connaissance.
M. LESSARD: La nomination de ces personnes est quand même assez
importante. Est-ce que ce sont des personnes qui se sont réunies et
ont decide de former cette société? Combien sont-elles
à l'intérieur de la société?
M. QUENNEVILLE: Disons qu'il s'agit de nominations qui ont
été faites par le CRD. On sait que le mouvement de la SAGEQ, ce
projet, a été lancé par le président du CRD
d'alors, M. Jourdain. Au départ, il y avait trois administrateurs. Ils
ont élargi les cadres depuis et prévoient, d'ici le 30 juin,
être treize membres administrateurs.
M. LESSARD: Maintenant, c'est ça...
M. QUENNEVILLE: C'est une société privée. Il
appartient de définir au conseil d'administration, le nombre exact de
membres. Si on veut respecter le grand principe que les affaires
gaspésiennes doivent être gérées par des
Gaspé-siens, je pense que c'est quand même un exemple assez
frappant.
M. LESSARD: Je suis bien d'accord sur ce point, à savoir que les
affaires de la Gaspésie soient administrées par les gens de la
Gaspésie. Je suis bien d'accord aussi qu'il s'agit d'une
société privée. Mais il s'agit d'une société
privée qui s'est constituée en fait sans que les individus
fournissent du capital. Ils se sont engagés à en fournir. Mais il
s'agit d'une société privée qui recevra une somme
d'environ $900,000, je pense, ou $910,000 du gouvernement. Ces $910,000
correspondent à un montant supérieur à l'engagement de ces
"supposés actionnaires". La question que je me pose, qu'on pose aussi,
dans la région de la Gaspésie est la suivante. C'est
peut-être une recommandation du CRD, mais est-ce qu'une
société comme celle-là peut être constituée,
multipliée...? Pourquoi un groupe de personnes comme COGEMA, qui a
été une société qui s'est regroupée et qui a
fourni du capital-actions pour la construction d'un traversier-rail, pourquoi
justement cette société a-t-elle dû, comme telle, fournir
son capital-actions alors que ces treize personnes reçoivent du
gouvernement la somme de $910,000 et deviennent une société
à but lucratif?
M. QUENNEVILLE: Je pense bien que le montant de $900,000 n'est pas
exact. En fait, nous nous sommes engagés à verser $60,000
à la phase de démarrage comme frais d'administration en 1974/75
et le même montant de $60,000 pour 1975/76. Pour l'étude de
rentabilité, l'ODEQ s'est engagé à verser jusqu'à
un montant de $125,000 pour 1974/75; mais on ne leur donne pas
nécessairement. Pour 1975/76, le ministère de l'Industrie et du
Commerce verra, s'il y a lieu, d'après les études de
rentabilité, de donner $125,000. C'est un montant maximum. C'est loin
d'être $900,000 comme le disait tantôt M. le député
de Saguenay.
Au moment de la signature du protocole d'entente, il y a eu une erreur
qui doit être corrigée vers le 30 juin, sur les montants.
M. LESSARD: Je reviens, car je veux que ce soit bien clair dans mon
esprit.
Est-ce une société qui a pour but de faire des
études techniques, des études de rentabilité dans le cadre
du plan en vue de proposer à certains autres organismes ou à
certains individus d'investir dans des secteurs qui peuvent être
rentables? Ou est-ce qu'il s'agit d'une société autonome qui
elle-même décide d'investir directement dans l'implantation
d'industries?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, c'est justement dans ce sens que
la SAGEQ a été établie et la dernière partie de
l'allusion du député de Saguenay est exacte en ce sens
qu'elle-même décide de la rentabilité des projets et
investit à ce moment-là les montants.
M. LESSARD: Bon!
M. QUENNEVILLE: C'est une société privée purement
et simplement.
M. LESSARD: C'est une société privée qui est assez
spéciale quand même?
M. QUENNEVILLE: C'est une expérience pilote, on est dans un
territoire pilote aussi, il faut le dire.
M. LESSARD: C'est une société très spéciale.
C'est-à-dire qu'un groupe de personnes se réunissent, n'ont pas
d'argent comme telles à investir, reçoivent une subvention
M. QUENNEVILLE: Je m'excuse, M. le Président, je voudrais faire
remarquer ici que c'est le CRD qui a établi cette SAGEQ, qui a
demandé surtout l'établissement de la SAGEQ.
M. LESSARD: Bon!
M. QUENNEVILLE: Ce ne sont pas des personnes...
M. LESSARD: Justement, mais est-ce...
M. QUENNEVILLE: On ne pouvait pas financer directement les individus en
question, si vous voulez.
M. LESSARD: Mais le CRD peut avoir recommandé au gouvernement la
possibilité d'intervenir dans l'investissement de sociétés
privées dans le territoire, parce qu'on constate malheureusement qu'au
niveau des lois du gouvernement, actuellement, la petite entreprise a
extrêmement de difficulté à se financer comme telle. Mais,
est-ce que le ministre me dit toujours c'est le CRD qui a
recommandé cela le CRD a recommandé qu'une subvention soit
accordée à une compagnie privée? Est-ce que le CRD a fait
des recommandations en ce qui concerne les membres de cette
société privée?
Est-ce que le CRD a fait des recommandations en ce qui concerne la
structure et le fonctionnement de cette société privée?
Est-ce que le CRD a fait des recommandations concernant le capital-actions que
devra fournir chaque membre futur de la société? Est-ce que le
CRD a recommandé que cette société puisse
s'élargir, parce que quand le ministre dit que les gens de la
Gaspésie doivent être capables de gérer eux-mêmes
leurs propres affaires, j'ai dit: Oui, mais cela ne doit pas faire l'objet
cependant d'un petit groupe d'individus qui profitent des subventions
gouvernementales, qui se créent une propre société
grâce à ces subventions gouvernementales et qui font des profits
qu'ils conservent eux-mêmes.
Je suis bien d'accord et on va y revenir que le CRD a fait
un certain nombre de recommandations, mais est-ce que c'est cette structure
comme telle? Est-ce que le CRD a recommandé au gouvernement de ne pas
participer sous forme de capital-actions? Ce sont ces réponses que je
désirerais connaître. Et de plus, je désirerais
connaître les administrateurs de cette société.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense que la meilleure
façon de répondre au député de Saguenay, c'est
sûrement de lui faire prendre connaissance du protocole d'entente
intervenu entre le Conseil de développement de l'Est du Québec et
la SAGEQ.
Article 1, objectif et généralités. L'objectif du
présent protocole est de définir les modalités de
démarrage et de financement initial de la Société
d'administration et de gestion de l'Est du Québec.
Deuxièmement, les parties reconnaissent avoir pris connaissance
du protocole d'entente à intervenir. De plus, le CRDEQ a pris
connaissance des règlements généraux de la SAGEQ.
Les présidents de ces deux organismes ont dûment
été mandatés pour signer le présent protocole
d'entente.
Troisièmement, le présent protocole établit les
droits et obligations de chacun.
Dispositions. Le CRD étant le canal par lequel les subventions
d'administration seront transmises à la SAGEQ, elles le seront de la
façon suivante : 1)Le CRDEQ paiera à la SAGEQ des montants
correspondant exactement aux sommes qu'il recevra de l'ODEQ au nom de
l'entente. 2)La SAGEQ deviendra une compagnie publique dès le
début de la deuxième phase, soit le 30 juin prochain. 3)Entre
autres classes d'actions, la SAGEQ créera une catégorie d'actions
privilégiées classe A pour permettre au CRDEQ d'acheter des
actions privilégiées de cette classe en échange de tous
ses versements à la SAGEQ. Aucun dividende ne sera payable sur ces
actions et, en cas de liquidation, le CRDEQ s'engage à remettre au
liquidateur toute somme qui lui reviendrait en contrepartie de ses actions
privilégiées. 4)La SAGEQ s'engage à constituer un conseil
d'administration selon les modalités suivantes: a) II sera
composé de treize membres; b) Deux de ces membres seront
désignés par le détenteur d'actions
privilégiées de classe A, dont au moins un sera choisi par des
représentants de groupes syndicaux; c) Les autres seront élus par
les actionnaires ordinaires selon le mode suivant: chaque détenteur
d'actions ordinaires a droit, pour l'élection des administrateurs,
à un nombre de votes égal au nombre de ses actions, mais chaque
vote n'est donné que pour un seul candidat. Les candidats qui obtiennent
le plus grand nombre de voix sont déclarés élus à
concurrence du nombre à élire.
Cette disposition permet à plusieurs groupes d'actionnaires
d'être certains d'avoir un représentant au conseil et
empêche qu'un groupe important, mais minoritaire, puisse, grâce
à des procurations, faire une liste complète d'administrateurs.
Tout groupe d'actionnaires qui disposent d'au moins un onzième du
capital est certain d'être représenté; d) Tout changement
apporté au nombre des administrateurs ou au mode d'élection du
conseil d'administration devra être approuvé unanimement par les
détenteurs d'actions privilégiées de classe A, et ce,
jusqu'au 31 mars 1976. Le CRD garde donc un droit de véto à
l'égard de toutes modifications proposées. 5) Les dispositions
prévues aux alinéas 3) et 4) pourront être
révisées par le CRD à la demande de la SAGEQ et devront
obligatoirement l'être advenant des objections d'ordre juridique
émanant du ministère des Institutions financières ou de la
Commission des valeurs mobilières. 6)Quinze jours après la
réception par le comité ad hoc du CRD, chargé de
préparer la mise sur pied de la SAGEQ, de l'acceptation du protocole
d'entente entre le ministère de l'Industrie et du Commerce, le Conseil
régional de développement de l'Est du Québec et la
Société d'administration et de gestion de l'Est du Québec,
le comité ad hoc sera dissous.
C'est signé par le président du CRDEQ, M. René
Daigneault et par le président du conseil d'administration de la SAGEQ,
M. Claude Jourdain.
Pour ce qui est des noms des trois administrateurs, ce sont M. Claude
Jourdain, M. Paul-Emile Arsenault et M. Etienne Malenfant. Ce sont actuellement
des gens du CRD.
Nous avons aussi le protocole signé entre le MIC, la SAGEQ et le
CRD. Je pense que ce serait passablement long de le lire. Nous sommes
prêts à déposer le document, à moins que vous teniez
absolument à ce qu'on le lise. Il a été signé par
l'honorable Guy Saint-Pierre, M. Claude Jourdain et, pour le CRD, par M.
Louis-Philippe Rioux.
Je pense que l'article 3.01 de ce protocole d'entente permet de
répondre d'une façon plus précise à la question du
député de Saguenay. Permettez-moi d'en donner la lecture :
Afin de permettre la réalisation de la première phase, le
ministère de l'Industrie et du Commerce s'engage à verser
à la SAGEQ, par l'entremise du CRDEQ, une somme de $60,000. De plus, le
ministère de l'Industrie et du Commerce met à la disposition de
la SAGEQ, au cours de cette première phase, une somme n'excédant
par $125,000 pour lui permettre de procéder à des études
techniques et de rentabilité sur différents projets.
M. LESSARD: Donc, les montants maximaux prévus par le
gouvernement pour subventionner cette société seraient de
$60,000.
M. QUENNEVILLE: Et une autre somme n'excédant pas $125,000.
M. LESSARD: Une autre somme n'excédant pas $125,000.
M. QUENNEVILLE: Le 30 juin 1974, une évaluation aura lieu.
M. LESSARD: II est quand même possible que le gouvernement, par
l'intermédiaire de l'ODEQ, subventionne à nouveau cette
société.
M. QUENNEVILLE: Après le 30 juin, selon
l'évaluation...
M. LESSARD: La création de cette société vient-elle
directement d'une recommandation comme telle du CRD de l'Est du
Québec?
M. QUENNEVILLE: Exactement. C'est une recommandation du CRD, M. le
Président, du BAEQ au départ.
M. LESSARD: Du BAEQ au départ. Est-ce qu'il s'agit, quand on
parle du BAEQ au départ, de la création d'une corporation
publique qui serait financée par l'Etat?
M. QUENNEVILLE: Non, pas du tout, M. le Président.
M. LESSARD: Est-ce que la création de cette société
fait suite à la demande du manifeste de Matane à la page 22,
où nous lisons: "Ce que nous voulons, c'est créer une
société de développement de l'Est du Québec
autonome dans ses décisions, avec conseil d'administration où
siégeraient des représentants des deux gouvernements et de la
population? Ce n'est certainement pas cela.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, cela ne fait pas suite,
naturellement, à la présentation du manifeste de Matane. Ce
à quoi se réfère le député de Saguenay,
c'est plutôt à l'Office régional de développement,
l'ORD.
M. LESSARD: L'ORD.
M. QUENNEVILLE: Parce qu'en somme di- sons que cette question de la
SAGEQ remonte à 1964. C'est passablement antérieur au manifeste
de Matane.
M. LESSARD: Mais dans la création de cette société,
il n'a pas été analysé par le gouvernement, principalement
par le ministère responsable de l'ODEQ, la possibilité
d'être impliqué dans cette société, la
possibilité d'être participant comme tel, sous forme de
capital-actions?
M. QUENNEVILLE: Pas du tout, M. le Président. Pas au niveau du
capital-actions. Il s'agissait, à ce moment, encore une fois je le
répète, de toujours respecter le principe de l'entrepreneurship
régional.
M. LESSARD: M. le Président, je suis bien d'accord pour respecter
l'entrepreneurship régional, mais cependant, par exemple, je suis aussi
d'accord pour que les deniers publics soient soumis à un certain
contrôle, que les deniers publics ne soient pas donnés à
une société qui se crée de toutes pièces,
même si c'est une recommandation du CRD. J'aimerais bien voir cette
recommandation comme telle, j'aimerais bien que le ministre dépose cet
avis du CRD concernant la constitution d'une telle société, mais
ce que je mets en doute, M. le Président, c'est cette structure qui est
complètement autonome du gouvernement, mais qui apporte quand même
une dépense assez considérable du gouvernement assez
considérable, disons que c'est relatif par rapport aux sommes qui sont
versées dans la région de l'Est du Québec c'est que
je me dis, à ce moment, si ce principe est accepté dans une
région pilote, le développement de l'entrepreneurship, il va
falloir aussi l'accepter pour d'autres régions du Québec.
M. QUENNEVILLE: Si c'est valable.
M. LESSARD: Cela devrait faire l'objet d'une loi
générale...
M. QUENNEVILLE: Si c'est valable. M. LESSARD: Si c'est valable.
M. QUENNEVILLE: C'est une expérience pilote. M. le
Président, je sais que, par le passé, le député de
Saguenay a toujours été soucieux de respecter les désirs
de la population, que ce soit à l'intérieur d'un manifeste ou en
dehors des manifestes, et tout ce que nous avons fait en permettant
l'implantation de la SAGEQ, le démarrage de la SAGEQ, c'est qu'on a
respecté, justement, les désirs de la population qui voulait,
d'elle-même, promouvoir l'entrepreneurship régional et le
développement industriel. Je pense bien qu'on s'est rendu aux
désirs de la population. De là à le répéter
dans d'autres régions, il faudra voir ce que cela donne avant. Je pense
que c'est une expérience pilote. On l'a répété
tantôt. On fera une
évaluation à ce moment, et s'il y a lieu de le
répéter dans d'autres régions, le gouvernement pourra
envisager...
M. LESSARD: II s'est quand même formé d'autres
sociétés dans l'Est du Québec. Je donnais l'exemple de
COGEMA, tout à l'heure, où le gouvernement n'a pas eu, comme tel,
à investir. Ces gens se sont regroupés, ont trouvé de
l'argent, ont vendu des actions et ont créé une
société qui va créer de l'emploi, qui va permettre le
développement, en tout cas qui va aider le développement
régional dans cette région, qui a été
appuyée d'ailleurs par le ministre responsable de l'ODEQ, qui a
été contestée, par ailleurs, par suite de la
décision du Canadien Pacifique.
Je trouve cependant que COGEMA, comme toute autre société
qui se forme dans l'Est du Québec, aurait, si on accepte ce principe du
développement régional de lancer des projets d'investissement,
recevoir exactement les mêmes montants que cette société a
pu recevoir.
M. QUENNEVILLE: Je pense bien que la formation de cette compagnie COGEMA
prouve le bien-fondé des politiques que nous avons implantées
dans le territoire de l'Est du Québec et cette société de
gestion est là pour promouvoir l'établissement de
sociétés privées.
Lorsqu'on s'adresse à la SAGEQ, forcément il s'agit d'une
société à l'échelle régionale. Il ne s'agit
pas d'une entreprise spécifique comme COGEMA et on respecte à ce
moment les principes du BAEQ et de l'ODEQ aussi. Nous sommes prêts, au
besoin, par le biais des programmes que nous avons, à aider ces
sociétés privées qui se développent, par le biais
des programmes comme l'aide aux infrastructures industrielles, etc. On ne voit
pas pourquoi on irait à ce moment subventionner chaque projet et
investir directement, comme vous semblez le souhaiter, dans toutes ces
entreprises privées.
C'est une expérience qu'on tente et je pense que c'est
réellement valable.
M. LESSARD: Je suis d'accord qu'il s'agit d'une société
régionale, mais une société régionale qui aurait pu
investir dans un projet comme COGEMA.
M. QUENNEVILLE: Exactement.
M. LESSARD: Une société régionale qui peut devenir,
par exemple...
M. QUENNEVILLE: II n'y a rien qui ne l'en empêche, M. le
Président.
M. LESSARD: ... peut-être une grande société qui
peut contrôler de nombreuses entreprises. En fait, le principe est de
créer un genre de "holding" financer dans le coin.
M. QUENNEVILLE: Exactement. C'est le but de la SAGEQ de pouvoir investir
à un certain moment dans telle ou telle entreprise. Nous
respectons...
M. LESSARD: Une sorte de SGF... M. QUENNEVILLE: ...
régionale.
M. LESSARD: ... régionale. Si c'est un genre de SGF
régionale, je ne peux pas comprendre que le gouvernement ne se soit pas
associé directement à l'intérieur de cette
société. Ce n'est pas parce que le gouvernement aurait
été impliqué financièrement dans cette
société que cela n'aurait pas été pour autant une
société régionale, que cela n'aurait pas permis pour
autant à la population de l'Est du Canada d'administrer ses affaires. De
plus, on sait que, dans cette région, il n'est pas facile de trouver du
capital. Si le gouvernement s'était impliqué avec un
contrôle à l'intérieur de cette
société...
M. QUENNEVILLE: II y en a un contrôle, on l'a
répété tantôt, il y a un contrôle annuel de la
part du ministère de l'Industrie et du Commerce. Il y a un protocole qui
est là et qui le stipule. Toutes les dépenses sont
vérifiées à ce moment. Je me demande ce qu'on veut de plus
comme contrôle.
M. LESSARD: Comme en fait n'importe quelle compagnie privée doit
vous soumettre un rapport, c'est-à-dire non pas à vous, mais
à un organisme gouvernemental. Ce que je veux dire, c'est que le
contrôle que vous avez est un contrôle annuel. Vous n'avez pas,
à ce moment, par la création de cette société, un
contrôle sur les décisions de cette société. Je
pense que, si le gouvernement s'était impliqué directement dans
cette société pour y avoir un contrôle à
capital-actions, cela aurait permis aussi à des organismes comme la
Société générale de financement ou
particulièrement la Caisse de dépôt et placement du
Québec de participer à cette entreprise. C'est cela que je mets
en doute, malgré le fait que cela soit signé entre le CRD et
cette société, c'est le principe c'est une
expérience pilote d'accord mais ce principe est un
précédent et un précédent qui peut amener des
conséquences ailleurs.
Le ministère et le gouvernement ayant strictement un
contrôle annuel, de quelle façon le gouvernement peut-il
contrôler les études qui seront faites ou les investissements qui
seront faits dans telle autre société ou dans tel projet? En
fait, on donne à une société... Je prends un autre
exemple.
M. QUENNEVILLE: On ne donne pas, M. le Président.
M. LESSARD: On verse une subvention de $60,000...
M. QUENNEVILLE: Pour l'administration.
M. LESSARD: ... au début, et une autre de $125,000.
M. QUENNEVILLE: Pardon, un instant, je m'excuse, M. le Président.
On ne donne pas $125,000. Cela reste au ministère naturellement
d'évaluer à ce moment, selon la rentabilité, et d'aller
jusqu'à un montant de $125,000, n'excédant pas $125,000. L'argent
demeure au ministère.
M. LESSARD: Afin de permettre la réalisation de la
première phase, le ministère de l'Industrie et du Commerce
s'engage à verser à la SAGEQ...
M. QUENNEVILLE: La première phase.
M. LESSARD: ... par l'entremise du CRDEQ une somme de $60,000.
M. QUENNEVILLE: C'est la première phase.
M. LESSARD: C'est la première phase. Je compare...
M. QUENNEVILLE: C'est terminé, cela?
M. LESSARD: Oui. Je compare un peu cette décision à une
autre décision qui a été prise dans la région de
Sacré-Coeur. Dans cette région, les gens se sont groupés,
ont investi du capital-actions, se sont réunis et ont mis un certain
capital-actions. Actuellement, c'est rendu à près de $500,000,
mais au début, c'était $200,000 ou $250,000, ou $300,000. Les
gens ont participé réellement. Ce que le gouvernement a fait, il
leur a prêté des techniciens pour étudier la
rentabilité de ce projet. En fait, le gouvernement leur a donné
un concours technique. Le gouvernement mais il y avait eu un effort de
fait a fait certaines études techniques concernant la
possibilité d'implantation d'une scierie dans la région de
Sacré-Coeur, mais le gouvernement n'a pas comme tel, de toutes
pièces, créé cette société. Cette
société s'est d'abord créé. On a cherché un
investisseur, qui a été M. Fradette, de la Chibougamau Lumber,
par la suite. C'est après que le gouvernement est entré sous
forme de subventions normales ordinaires prévues par la loi. Mais c'est
dans ce sens que je m'interroge. Je ne dis pas c'est une
expérience pilote que je suis absolument contre le principe de la
création d'une société régionale pour le
développement de certains secteurs spécifiques ou certains
secteurs rentables dans cette région. Mais je ne veux pas que l'argent
de l'Etat soit donné comme cela sans condition, qu'on accorde un montant
de $60,000 sans condition et sans aucun contrôle futur sur cette
société.
M. QUENNEVILLE: Je regrette infiniment, M. le Président,
mais...
M. LESSARD: Quant à cela, je vais me fonder une toute petite
société. Combien de fois avons-nous vu dans l'Est du
Québec des sociétés on se rappelle le
Père-Nouvel.
M. QUENNEVILLE: Ce sont des entreprises privées, M. le
Président. Cela n'a rien à voir avec cela. H ne faut quand
même pas charrier. D'ailleurs quand on vous parle, vous dites qu'il n'y a
pas de contrôle. Depuis tantôt qu'on vous prouve qu'il y a des
contrôles, un contrôle annuel. En plus de cela, en plus des
contrôles dont on parlait tantôt, il y a une vérification
qui se fait de la part du Vérificateur général du
Québec, selon la Loi de l'administration financière. Je pense que
c'est un contrôle quand même asses efficace. Je pense qu'on
pourrait s'éterniser assez longtemps sur le point que soulève le
député de Saguenay. Je vais lui poser une question: Etes-vous
d'accord sur le respect des désirs de la population? Si vous êtes
d'accord, c'est exactement ce qu'on a fait.
M. LESSARD: Je suis d'accord.
M. QUENNEVILLE: Si vous êtes d'accord, je pense bien qu'on n'a pas
à discuter.
M. LESSARD: Je suis d'accord en principe, sur le désir d'une
population, mais je ne suis pas d'accord sur n'importe quel désir d'une
population. Vous pouvez satisfaire aux besoins d'une population donnée,
mais selon c'est simplement une question de modalités des
modalités assez précises. Je ne suis pas d'accord pour que
l'argent, les deniers publics servent à créer comme cela des
sociétés où le gouvernement n'aura aucun contrôle,
des sociétés dont on ne sait même pas si cela va se
concrétiser véritablement.
Je suis d'accord pour qu'on réponde aux aspirations de la
population, mais il faut c'est l'assurance que je veux avoir que
le gouvernement vérifie s'il ne s'agit pas des aspirations de quelques
individus qui peuvent profiter des montants qui sont prévus dans le
développement de l'Est du Québec à leurs fins
personnelles.
M. QUENNEVILLE: Je pense bien, M. le Président, qu'on a
prouvé, hors de tout doute, le contrôle du gouvernement sur le
projet de la SAGEQ. Il faut dire qu'au moment où il était
question de l'implantation de la SAGEQ, il y a différentes
hypothèses qui ont été émises pour la
création de cette SAGEQ. Cela a été analysé par le
CRD, la possibilité d'une société mixte, d'une
société privée ou autres types de sociétés.
Le CRD a opté, après avoir analysé les différentes
hypothèses, pour le type de société
représenté par la SAGEQ. On respecte exactement ce que le CRD a
demandé. Je pense bien que le député de Saguenay pourrait
rencontrer le CRD et lui demander le dossier complet et je pense qu'il va
être passablement convaincu non seule-
ment du bien-fondé de cette expérience pilote, mais aussi
du contrôle exercé par le ministère de l'Industrie et du
Commerce sur cette société. M. Parizeau, d'ailleurs, était
à l'origine de cette hypothèse comme consultant.
M. LESSARD: Ce que nous avons proposé, M. le Président,
c'est la création d'une société de développement de
l'Est du Québec qui avait pour but d'appliquer les mesures
proposées par le plan. Ce que nous proposions, ce n'était pas de
créer de toutes pièces, à même les deniers publics,
une société qui serait complètement autonome. Je suis
d'accord sur le principe. Ce que je conteste, c'est le fait que le gouvernement
ne se soit pas associé sous forme de capital-actions. Est-ce que le
gouvernement pourra le faire dans l'avenir, s'il le désire, en vertu du
protocole d'entente?
Je suis sûr que le député de Jonquière serait
heureux d'avoir un montant comme celui-là pour pouvoir créer dans
son milieu, avec des amis, une société comme celle-là qui
pourrait investir dans des secteurs particuliers.
M. HARVEY (Jonquière): Je serais heureux, mais dans la
vôtre, je ne serais pas actionnaire.
M. LESSARD: Comme ministre du Revenu, est-ce que vous aimeriez, à
la suite de la création de cette société qui va
peut-être faire des profits, recevoir des montants qui permettraient au
ministre du Revenu d'avoir plus d'argent à dépenser?
M. HARVEY (Jonquière): Je peux vous dire plus, c'est que, s'ils
faisaient des profits, je leur passerais un coup de tasse, comme ministre du
Revenu.
M. LESSARD: Si...
M. HARVEY (Jonquière): Je leur ferais payer leurs
impôts.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, encore une fois, il s'agit d'une
expérience pilote et je pense bien qu'avant d'aller plus loin et de
savoir si l'Etat devrait investir etc., ou si l'Etat devrait
répéter cette expérience dans d'autres
régions-ressources, j'ai l'impression qu'il faut attendre
l'évaluation de la phase de démarrage et nous aurons cette
évaluation le 30 juin. Si c'est positif, le gouvernement verra alors
exactement quelle attitude prendre et quelle position adopter.
M. LESSARD: M. le Président, le ministre m'informe qu'il s'est
soumis à la décision d'une recommandation du Conseil
régional de développement de l'Est du Québec. Le Conseil
régional de développement de l'Est du Québec avait aussi
recommandé la création d'une société agricole et
sylvicole mixte où le gouvernement était impliqué, ayant
comme fonction de consolider, le plus rapidement possible, un maximum de
territoire. Je lis, dans le journal Le Soleil de jeudi, le 12 avril 1973, ceci:
Les sommes versées à la société devront être
considérées comme un capital de roulement sans établir de
chiffres précis. Le CRD signale que le montant devra être
considérable, quitte à gruger au budget du secteur forestier.
C'est là la principale recommandation que formule le CRD en
matière agricole dans son avis sur le prochain exercice financier de
l'ODEQ. Le CRD reprend ici à son compte l'idée du CAEQ, Conseil
agricole de l'Est du Québec, qui, il y a quelques semaines, formulait
une telle recommandation.
Il s'agit de la création d'une société mixte.
Puisque le ministre me dit qu'il accepte les recommandations du CRD et qu'il
l'a fait en ce qui concerne la création de SAGEQ, est-ce que le ministre
a l'intention d'accepter cette recommandation, soit la création d'une
société agricole et sylvicole mixte qui permettrait le
réaménagement des terres, peut-être de façon plus
efficace, qui permettrait d'aller jusqu'à aider les producteurs,
à la fois agricoles et forestiers? Est-ce que le ministre a
envisagé cette possibilité?
M. QUENNEVILLE: Je pense bien que nous avons une réponse toute
prête pour le député de Saguenay, puisque actuellement il y
a dix sociétés d'exploitation sylvicole et agricole qui sont en
train d'être implantées, par le ministère des Terres et
Forêts et aussi par la participation de la population. Je pense qu'on a
donné suite, encore une fois, au désir de la population et c'est
exactement ce qu'on fait et vous avez la participation, en même temps, du
FRUL comme conseiller.
M. LESSARD: Mais le ministre nous dit qu'il y a dix
sociétés sylvicoles qui sont formées...
M. QUENNEVILLE: Elles sont en train justement de s'implanter.
M. LESSARD: ... des groupements forestiers, des fermes
forestières, etc. C'est une des mesures de développement que le
ministère des Terres et Forêts est en train de faire, suite aux
demandes, aux protestations et aux revendications des opérations
Dignité I et Dignité IL Ce sont là des mesures très
particulières. Ce que le CRD demandait je pense que le CRD a
insisté considérablement sur cette recommandation c'est
une société mixte qui aurait pour but de coordonner le travail de
ces dix, douze ou peut-être prochainement quinze sociétés
particulières de regroupement agricole, de ces fermes
forestières, de ces regroupements forestiers. C'est une
société qui chapeauterait le développement avec des
montants considérables parce qu'on sait encore le ministre a pu
le constater que le crédit forestier, qui est une mesure
absolument nécessaire pour la région de l'Est du
Québec, comme d'autres régions, doit exister si on veut
que ces petites terres, si on veut que les opérations Dignité I,
Dignité II, qui ont été une réaction au BAEQ au
fait que la Loi de l'aide aux migrants, au fait qu'on voulait plutôt
planifier non pas le développement mais l'expatriation... Pour que
ça puisse se faire, pour que ça puisse être rentable, il y
a des montants considérables qui doivent être impliqués
là-dedans et c'est ça, la demande du CRD. C'est ça la
recommandation de créer une société agricole et sylvicole
mixte où il y aurait des montants considérables
impliqués.
Mais, actuellement, ce que le ministère des Terres et
Forêts je le sais puisque j'étais aux crédits de ce
ministère fait, c'est qu'il aide individuellement des groupes de
fermiers à se regouper. Ce qu'on fait aussi, c'est que ces groupes
s'unissent entre eux, forment un genre de ce qu'on appelle groupement
forestier, selon certaines recommandations du rapport Lussier. Mais il y a plus
que ça, c'est que ça prend une aide financière
considérable pour permettre non seulement la création de ces
groupes forestiers, mais l'investissement dont on a besoin dans la sylviculture
et c'est ça la recommandation du CRD. Je ne pense pas qu'on ait
donné suite à ça.
M. QUENNEVILLE: Pour répondre au député de
Saguenay, disons qu'il y a déjà en marche un comité
formé de l'Office des producteurs de bois et de l'UPA qui, avec le
ministère des Terres et Forêts, vont former cette
société mixte. C'est un début, mais on donne suite,
contrairement à ce que M. le député affirmait tout
à l'heure, aux recommandations, ce qu'on fait actuellement.
M. LESSARD: C'est ça que je vous demandais.
M. QUENNEVILLE: Vous disiez qu'on ne donnait pas suite, alors c'est pour
ça que je précise.
M. LESSARD: Non, j'ai dit: Vous m'avez affirmé que vous donniez
suite en ce qui concerne SAGEQ. Je vous demandais si vous aviez l'intention de
donner suite à ça. Là, vous m'informez...
M. QUENNEVILLE: On y donne suite, exactement.
M. LESSARD: ... qu'un comité a été formé au
niveau de l'ODEQ, regroupant des représentants du ministère de
l'Agriculture et aussi du ministère des Terres et Forêts en vue
d'étudier la possibilité de la création d'une
société mixte.
M. QUENNEVILLE: Exactement.
M. LESSARD: Quel est le mandat de ce comité? Le mandat, c'est
d'étudier, mais ce mandat a-t-il un délai de fixé pour
présenter un rapport?
M. QUENNEVILLE: Nous pourrons sûrement donner exactement la
définition du mandat après avoir consulté le
ministère des Terres et Forêts qui est le martre d'oeuvre dans
cette création de société mixte.
M. LESSARD: Mais le ministre ne veut pas me préciser ce matin le
mandat précis de ce comité.
M. QUENNEVILLE: Pas ce matin. Je serai en mesure, après
consultation avec le ministère des Terres et Forêts, de produire
le mandat.
M. LESSARD: Quels sont les membres de chacun des ministères qui
font partie de ce comité? Est-ce qu'on a beaucoup de comités qui
ne siègent plus.
M. QUENNEVILLE: Je ne peux pas réellement répondre. Je
pense bien qu'on entre dans des délais. Je ne suis pas en mesure de
pouvoir vous donner le nom de tous ces gens qui sont à
l'intérieur...
M. LESSARD: J'accepte la parole du ministre.
M. QUENNEVILLE: II ne faut tout de même pas exagérer.
M. LESSARD: J'accepte la parole du ministre, mais j'ai pu, à
plusieurs reprises, constater que la meilleure façon de ne pas
répondre à une question, c'est de dire: II y a un comité
qui a été formé.
M. QUENNEVILLE: Je comprends, M. le Président, mais on est
prêt à déposer n'importe quand le nom des gens qui sont
à l'intérieur de ce comité.
M. LESSARD: Le ministre du Revenu a l'air d'accord avec moi.
M. HARVEY (Jonquière): Non, je ris tout simplement.
M. LESSARD: Est-ce que...
M. QUENNEVILLE: II faut que ce soit, de toute façon, en place
cette année. Il faut que cette société soit en place cette
année.
M. LESSARD: Cette année?
M. QUENNEVILLE: C'est prévu dans le budget.
M. LESSARD: Autrement dit, en principe, vous acceptez la recommandation
du CRD concernant la création d'une société agricole
mixte.
M. QUENNEVILLE: Assurément.
M. LESSARD : Est-ce que, dans le mandat de votre comité...
D'abord, j'aimerais bien savoir si ce comité est...
M. QUENNEVILLE: Encore une fois, on vient de vous répondre
là-dessus. On vous dit que, pour le mandat exact, je ne voudrais pas
commettre d'erreur grossière ou vous donner une définition du
mandat alors qu'on ne l'a pas et...
M. LESSARD: Est-ce que...
M. QUENNEVILLE: On est prêt à le déposer n'importe
quand.
M. LESSARD: Vous êtes prêt à le déposer. M.
QUENNEVILLE: Certainement.
M. LESSARD: Outre les trois ministères concernés,
étant donné qu'on parle d'argent considérable, est-ce que
le ministère des Finances a un délégué?
M. QUENNEVILLE: Non, M. le Président, il n'y a pas de
représentant du ministère des Finances à
l'intérieur de cette société mixte.
M. LESSARD: On aura à connaître le mandat, mais est-ce que
ce comité a étudié la possibilité d'implantation
d'une société agricole mixte? Qui sera responsable de
l'étude, du financement de cette société?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, c'est le ministère des
Terres et Forêts qui sera responsable de l'étude, du
financement.
M. LESSARD: Par les crédits...
M. QUENNEVILLE: Par les crédits du ministère.
M. LESSARD: Et au ministère des Terres et Forêts, on nous
répond qu'on attend encore les moyens financiers de proposer un
crédit.
M. QUENNEVILLE: Forcément, il faut qu'ils attendent les budgets,
j'imagine.
M. LESSARD: Alors, j'accepte le fait que le ministre puisse
déposer le mandat. Maintenant, est-ce qu'il y a possibilité que
des organismes gouvernementaux, tels que la Caisse de dépôt,
puissent participer au financement d'une telle société?
M. QUENNEVILLE: Naturellement, nous attendrons le rapport qui sera
déposé par la commission d'étude avant de préciser
la possibilité d'investir.
M. LESSARD: Tel que nous le disait tout à l'heure le ministre
dans une excellente déclara- tion sur la structure d'exécution du
plan qui m'apparaît assez claire enfin, parce que c'était assez
compliqué, on constate que le BAEQ, en 1966, avait recommandé la
création d'un office régional de développement, l'ORD,
ayant un statut de corporation publique, financé par l'Etat et jouissant
de l'autonomie de gestion, chargé de seconder le gouvernement du
Québec dans l'exécution du plan de développement
préparé par la région de l'Est du Québec en
exécutant certaines tâches prévues par le plan, en
coordonnant les interventions de centres de décision publics et
privés, dans le but d'assumer la comptabilité de telles
interventions, avec les objectifs fixés par le plan, en conduisant les
études nécessaires à la révision du plan, à
l'approfondissement de certains aspects du même plan et à la
préparation de plans ultérieurs.
Cette recommandation du BAEQ de juillet 1966 revient dans un document
qui fut fort contesté à la fois par le ministre responsable de
l'ODEQ comme par d'autres ministres et d'autres députés
libéraux, soit le Manifeste de Matane, où on demande la
création d'une société de développement de l'Est du
Québec qui serait autonome dans ses décisions avec un conseil
d'administration où siégeraient des représentants des deux
gouvernements et de la population.
Je constate que c'est d'abord une recommandation du BAEQ de 1966. C'est
aussi une recommandation des gens qui ont préparé le Manifeste de
Matane. Est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il a l'intention d'accepter
cette recommandation ou de la rejeter et pourquoi elle ne lui paraîtrait
pas efficace?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, il faut dire d'abord que le
gouvernement n'a pas retenu cette proposition. En 1967, d'ailleurs, le BAEQ n'a
pas retenu non plus cette proposition. Pour ce qui est de la recommandation du
BAEQ, recommandation reprise d'ailleurs par le Manifeste de Matane, voulant
créer un Office régional de développement, ORD, pour
remplacer l'ODEQ dans l'exécution de l'entente Canada-Québec, je
doute fort, étant donné l'efficacité de la structure
actuelle, qu'un ORD puisse améliorer quoi que ce soit, d'autant plus
qu'il faudrait à cet organisme une période de rodage qui se
traduirait inévitablement par un ralentissement des
opérations.
De toute façon, un ORD aurait à traiter avec les
ministères québécois, maîtres d'oeuvre des
programmes gouvernementaux, d'aménagement et de développement, de
même qu'avec l'entreprise privée pour ce qui est des programmes de
développement industriel. En quelque sorte, la formule ORD
proposée est pratiquement identique à la formule actuelle de
l'ODEQ, sauf qu'elle comporterait tous les inconvénients de la mise en
place d'une nouvelle structure.
D'ailleurs, la preuve de ce qu'on avance, c'est justement la courbe de
la performance de l'ODEQ depuis je ne reprendrai pas les
chiffres que j'ai donnés tantôt 1970 en particulier,
qui a été de 76.8 p.c. en 1970/71, de 89.3 p.c. en 1971/72 pour
monter à 95 p.c. en 1972/73. Encore une fois, nous n'avons pas les
chiffres précis, ils sont au-delà de 90 p.c. Ce qui veut dire
qu'en implantant un ORD, il faudrait recommencer toute cette expérience
qui, comme on le voit, prend un certain temps avant d'être rodée.
L'organisme, si vous le voulez, qui remplacerait à ce moment-là
l'ODEQ aurait à recommencer toute cette période de rodage et on
voit mal pourquoi on appuierait une telle recommandation.
Le gouvernement, je pense, à ce moment-là, a opté
pour une formule de déconcentration administrative qui nous semble
nettement plus valable.
M. LESSARD: Je pense que cela a pris un certain temps...
M. QUENNEVILLE: Exactement...
M. LESSARD: ... à roder cette organisation, mais quand le
ministre parle de déconcentration administrative, le problème est
que cette déconcentration n'est pas suivie d'une décentralisation
administrative, c'est-à-dire...
M. QUENNEVILLE: C'est une étape.
M. LESSARD: ... là où il y a des pouvoirs précis de
décision qui sont donnés à des fonctionnaires.
M. QUENNEVILLE: Voici, M. le Président...
M. LESSARD: Parce qu'actuellement on fait de la déconcentration,
mais, malheureusement, quand on fait de la déconcentration, les gens qui
veulent certaines choses précises sont quand même obligés
de toujours remonter au ministre en question car les responsables
régionaux disent: On n'a pas de pouvoirs.
M. QUENNEVILLE: ... d'ailleurs, j'ai déjà eu l'occasion,
en Chambre, de dire que la déconcentration administrative est une
étape qui pourrait éventuellement déboucher sur une
décentralisation, mais il n'en reste pas moins qu'avant d'arriver
à une décentralisation, il faut quand même voir les
bienfaits, si vous le voulez, de la déconcentration administrative. Nous
ne sommes pas contre la décentralisation. Nous croyons quand même
qu'il y a des étapes à franchir et que la déconcentration
administrative en est une.
On peut dire que, jusqu'ici, de toute façon, si on s'en tient aux
chiffres de performance, c'est plus que satisfaisant.
M. LESSARD: Pour ma part, je tiens à bien préciser au
ministre que je ne m'obstinerai pas sur des questions de structure. Que ce soit
une société de gestion régionale, que ce soit l'ODEQ,
l'important, c'est la consultation, que la population soit consultée,
que la population soit impliquée dans l'élaboration,
c'est-à-dire la concrétisation du BAEQ, et surtout que la
population n'ait pas à regretter ces fameuses lenteurs administratives
dont on parlait probablement avec raison...
M. QUENNEVILLE: Avant 1970.
M. LESSARD: Oui, avant 1970, et même un petit peu
après...
M. QUENNEVILLE: Oui.
M. LESSARD: ... je pense qu'à partir de 1972, d'ailleurs, c'est
confirmé par les chiffres...
M. QUENNEVILLE: En 1971, c'est déjà pas si mal à
89.3 p.c. de performance.
M. LESSARD: Oui, c'est cela.
M. QUENNEVILLE: C'est acceptable.
M. HARVEY (Jonquière): Au 12 mai 1970.
M. LESSARD: Au 12 mai... Non, non. L'ex-ministre responsable de l'ODEQ,
si je regarde les chiffres, n'a pas réussi...
M. QUENNEVILLE: Je reviendrai sur ces chiffres.
M. LESSARD: ... à dépenser les montants qui étaient
prévus, parce que la structure n'était pas rodée,
était plus ou moins efficace.
M. QUENNEVILLE: Je pense, M. le Président, que nous sommes
passablement d'accord sur les voeux émis par le député de
Saguenay. Je pense que nous l'avons prouvé. Les chiffres sont là.
Je pense bien que le député de Saguenay va tenir pour acquis que,
s'il y a des gens qui souhaitent le succès de cette expérience
pilote, ce sont justement ceux qui en sont responsables.
M. LESSARD: Si vous me permettez, M. le ministre, maintenant que la
discussion générale est terminée, nous allons discuter de
votre document, c'est-à-dire le premier document que vous avez
déposé, votre déclaration liminaire, l'entente Est du
Québec.
En 1968 est signée la première entente
Canada-Québec et un montant de $211 millions, je pense, est
prévu. Le ministre pourra me corriger, parce qu'étant
donné qu'il travaille continuellement là-dedans...
M. QUENNEVILLE: Je vais prendre des notes...
M. LESSARD: Est-ce qu'on peut suspendre les travaux quelques minutes, M.
le Président?
LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): La séance est suspendue pour
deux minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 58).
Reprise de la séance à 12 h 2
LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, messieurs!
Le député de Saguenay.
M. LESSARD: Si on constate qu'à une heure, on peut terminer
l'ODEQ... Quant à moi, on pourrait aller jusqu'à une heure, mais
j'aimerais beaucoup mieux qu'on arrête à 12 h 30 si le
ministre...
M. QUENNEVILLE: Je suis absolument disponible.
M. LESSARD: Je disais que, lors de la première entente en 1968,
un montant de $211 millions était prévu...
M. QUENNEVILLE: $258 millions.
M. LESSARD: $258 millions. Très bien. Et cette entente est pour
une période de trois ans, soit de 1968 à 1971.
M. QUENNEVILLE: Une période de cinq ans.
M. LESSARD: Une période de cinq ans. M. QUENNEVILLE: De 1968
à 1972. M. LESSARD: De 1968 à 1972.
M. QUENNEVILLE: Oui. Cela a été renégocié en
1971, mais cela était prévu pour 1972.
M. LESSARD: D'accord. On constate que ces $258 millions, lors du
renouvellement de l'entente, ne sont pas complètement
dépensés. Combien de ce montant avait été
dépensé lorsqu'on a resigné l'entente?
M. QUENNEVILLE: II y avait $68 millions, à ce moment, de
dépensés sur les $258 millions.
M. LESSARD: II y avait $68 millions de dépensés, ce qui
veut dire qu'il y avait, à ce moment, $190 millions en réserve.
Le gouvernement signe une nouvelle entente, et cette nouvelle entente est de
$411 millions. Mais dans ce montant de $411 millions, sont compris les $258
millions qui avaient été prévus...
M. QUENNEVILLE: C'est une reconduction de l'entente.
M. LESSARD: C'est une reconduction de l'entente à laquelle on
ajoutait simplement un montant de...
M. QUENNEVILLE: ... de $411 millions moins $258 millions.
M. LESSARD: C'est ce que j'essaie de calcu- ler. En fait, c'était
$150 millions de plus qu'on ajoutait pour une période...
M. QUENNEVILLE: ... jusqu'à 1976.
M. LESSARD: Jusqu'à 1976.
M. QUENNEVILLE: Cinq ans encore.
M. LESSARD: Donc, une période de cinq ans. Cela veut donc dire
que la reconduction était de $30 millions pour une période de
cinq ans.
M. QUENNEVILLE: $30 millions par année.
M. LESSARD: Par année. Tout à l'heure, on va discuter de
façon plus précise d'une chose qu'on a le plus
contestée et qui a même je vais donner la
possibilité au ministre tout à l'heure de faire la
précision qu'il voulait faire concernant la déclaration de
l'ex-ministre responsable de l'ODEQ, M. Tessier ...
M. QUENNEVILLE: Je reviendrai, M. le Président.
M. LESSARD: ... d'une chose que nous avons affirmée et qui a
été reprise par le manifeste de Matane et par la population de
l'Est du Québec, c'était qu'en réalité il y avait
très peu d'argent nouveau dans cette nouvelle entente, par rapport au
montant qui, de toute façon, aurait été investi. Est-ce
que le ministre pourrait me dire le pourcentage, dans ce montant de $411
millions, qui sera investi ou qui a été investi par le
gouvernement fédéral et par le gouvernement provincial?
M. QUENNEVILLE: Je pense bien qu'on peut discuter assez longtemps sur
cette question de l'argent neuf à l'intérieur de cette entente
Canada-Québec. Il n'en reste pas moins qu'il y a $153 millions du
ministère de l'Expansion économique régionale qui est
sûrement de l'argent neuf et une partie des $113 millions du
Québec qui est sûrement de l'argent neuf aussi. Il est possible,
comme le soulignait tantôt le député de Saguenay, que ces
montants aient été dépensés dans le territoire sur
dix ou quinze ans. Je pense que le bien-fondé, la justification de cette
entente, réside dans le fait que ceci a permis d'accélérer
le processus ou le cheminement de ces différents projets sur une
période beaucoup plus courte dans une zone nettement
défavorisée. Je pense que c'est là, en fait, toute la
justification de cette entente.
Pour ce qui est de préciser exactement le montant d'argent neuf,
je crois qu'il est assez difficile de le préciser. Il est sûr et
certain que les $153 millions du ministère de l'Expansion
économique régionale, sont de l'argent neuf et une bonne partie
des $113 millions du gouvernement du Québec aussi.
M. LESSARD: Les $153 millions du minis-
tère de l'Expansion économique régionale ne
sont-ils pas des montants qui étaient prévus à
l'intérieur de ministères précis du gouvernement
fédéral et qui sont dépensés par
l'intermédiaire de cet organisme?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, ces montants n'étaient
sûrement pas prévus par les ministères
fédéraux pour être dépensés dans cette
région.
M. LESSARD: Dans la partie des $113 millions du gouvernement provincial,
le ministre pourrait-il nous dire quel est le pourcentage d'argent neuf?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, sans avoir précision
exacte, je pense bien qu'on peut avancer le pourcentage des 80 p.c. des $113
millions.
M. LESSARD: Tout cela est basé naturellement sur une
période de cinq ans, ce qui veut dire $30 millions par année.
Combien de comtés sont couverts par l'entente? Douze comtés?
M. QUENNEVILLE: Dix comtés, M. le Président.
M. LESSARD: Dix comtés. Ce qui veut dire, environ une moyenne de
$3 millions par comté?
M. QUENNEVILLE: Par année, vous voulez dire?
M. LESSARD: Par année.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, nous sommes prêts, pour
éclairer la lanterne du député de Saguenay, à
déposer l'exercice de spécialisation que nous avons
présenté aux députés de la région,
l'été dernier. Je pense que dans ce document, vous aurez tous les
montants qui seront dépensés, par comté, depuis 1968, ce
qui est plus juste que de prendre seulement une partie des cinq ans.
M. LESSARD: Quand est prévu dans l'entente un montant d'environ
$80 millions pour la formation professionnelle, ce n'est pas de l'argent...
M. QUENNEVILLE: $86 millions.
M. LESSARD: $86 millions. Ce n'est pas de l'argent neuf. Dans les
régions comme le Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord, nous avons aussi
ces montants pour la formation professionnelle; ce que je souhaiterais, par
exemple, c'est qu'il y ait une meilleure coordination des montants
dépensés dans nos régions. Ce qui n'est souvent pas le
cas.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pen- se que nous sommes
parfaitement d'accord avec le député de Saguenay, sur cette
question des $86 millions; mais il reste quand même que ces $86 millions
sont compris à l'intérieur des $411 millions. Ceci ne touche pas
les $153 millions du MEER le ministère de l'Expansion économique
régionale, non plus que les $113 millions dépensés par le
gouvernement du Québec. C'est un programme fédéral dans
toute la province et nous sommes d'accord sur le fait que cet argent aurait
été dépensé.
M. LESSARD: Le ministre parle...
M. QUENNEVILLE: Cela ne touche pas les montants que nous avons
avancés, tantôt, comme de l'argent neuf.
M. LESSARD: C'est la même chose dans le transport routier. On va
en parler au niveau des mines tout à l'heure. Pour la pauvre route 6, il
va être temps, à un moment donné qu'on fasse un effort
considérable là-dessus. Il faudrait que je parle de ma route 138
aussi.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense que là nous nous
inscrivons en faux contre l'affirmation du député de Saguenay. Il
y a quand même un montant de $100 millions qui sera dépensé
d'ici la fin de l'entente et il est bien évident qu'il aurait fallu
refaire certaines parties, comme je le disais tantôt, de cette route 6.
Cette entente a permis d'accélérer les travaux. Il est bien
évident que, lorsqu'un pont menace de tomber, il faut le remplacer. Je
suis d'accord. On aurait peut-être fait des actions ponctuelles, mais
nettement circonscrites. On a fait 150 milles de routes jusqu'à
maintenant. Il ne faudrait pas oublier, pour l'information du
député de Saguenay, qu'il reste encore $40 millions à
dépenser à l'intérieur de ce budget de voirie.
M. LESSARD: Est-ce qu'en tenant compte de ce budget, de ces $40 millions
qui restent à dépenser, on peut estimer que la route de ceinture
de la Gaspésie sera terminée? Pas encore?
M. QUENNEVILLE: Non, pas au complet, M. le Président.
Mais on peut dire qu'une très grande partie de cette route sera
terminée à ce moment-là. Il faut penser aussi que toute la
question de la voirie touristique est terminée.
M. LESSARD: A la page 2 de la déclaration liminaire du ministre,
nous constatons que des montants de $2.2 millions ont été
consacrés au réaménagement foncier. D'abord,
première question, ce réaménagement foncier, qui est
responsable de l'application de son programme? Est-ce que c'est l'ODEQ ou le
ministère des Terres et Forêts? Je ne veux pas revenir sur la
discussion qu'on a eue tout à l'heure.
M. QUENNEVILLE: Comme dans tous les autres secteurs, c'est le
ministère impliqué qui est le ministère maître
d'oeuvre. Dans ce cas-ci, il s'agit du ministère de l'Agriculture.
M. LESSARD: Et des Terres et Forêts?
M. QUENNEVILLE: Pas le ministère des Terres et Forêts. Il
s'agit à 100 p.c. de maîtrise d'oeuvre de la part du
ministère de l'Agriculture.
M. LESSARD: Ah, excusez! Mais quel est le contrôle que
possède le ministre responsable de l'ODEQ sur le respect du programme
qui a été élaboré par le BAEQ?
M. QUENNEVILLE: C'est justement le rôle du ministre responsable de
l'ODEQ, par le visa, de vérifier si les projets soumis par le
ministère sont conformes aux plans. Sur chacun des CT, il y a un visa de
l'office et c'est signé par le ministre responsable du plan.
M. LESSARD: Une demande qui avait été faite par la
population, surtout par l'UPA de la région de l'Est du Québec,
c'était de créer un office de commercialisation pour la vente de
produits en tenant compte du fait que la Côte-Nord n'est pas une
région agricole ou plus ou moins agricole. C'est assez relatif. Je pense
que la Côte-Nord et la côte sud peuvent être deux
régions assez complémentaires. Il serait important, dans ce
réaménagement foncier pour rentabiliser l'agriculture, qu'il y
ait une société de commercialisation pour aider l'Union des
producteurs agricoles et les agriculteurs. Est-ce que cela a été
envisagé par L'ODEQ?
M. QUENNEVILLE: Nous sommes parfaitement d'accord sur la création
de cet office. Etant donné que notre rôle est un rôle de
coordination, nous attendons la recommandation du ministère maître
d'oeuvre, c'est-à-dire le ministère de l'Agriculture. Je pense
bien que le geste que nous avons posé lors de l'acceptation du projet de
traversier-rail prouve, hors de tout doute, notre prise de conscience
vis-à-vis de la complémentarité de l'économie des
deux rives.
M. LESSARD: Dans l'agriculture, comme dans l'ensemble des montants qui
sont prévus pour le développement de l'Est du Québec, il y
a une diminution assez considérable des montants qui sont prévus
pour les prochaines années. Le ministre a expliqué que
c'était en vue d'empêcher une diminution trop forte de...
M. QUENNEVILLE: Désengagement graduel.
M. LESSARD: ...désengagement.
Selon le bilan de 1968 à 1974, on constate que, vers 1970/71, on
est arrivé à un maximum de dépenses de $4,289,000. Cette
année, com- me l'a dit le ministre, on prévoit un montant de
$2,210,500. On constate une diminution assez importante des crédits de
ce ministère dans l'Est du Québec, alors que, par ailleurs, il y
a une forte demande sur des projets nouveaux, projets par exemple, concernant
l'élevage du boeuf de boucherie. Est-ce que, étant donné
cette diminution, cela veut dire que le ministre responsable de l'ODEQ croit
que nous avons atteint, dans ce secteur, la rentabilité qu'on visait,
les objectifs qu'on visait?
M. QUENNEVILLE: Je pense que, pour ce qui est du programme de
l'élevage du boeuf de boucherie, nous avons déjà
lancé ce programme et nous avons investi $250,000. Nous sommes bien
persuadés que, d'ici la fin de l'entente, nous n'aurons peut-être
pas atteint tous les objectifs prévus dans ce secteur important de
l'agriculture. Il n'en reste pas moins qu'à l'intérieur des
budgets réguliers, il sera possible au ministère à ce
moment-là de mener à terme ces différents projets.
M. LESSARD: Le montant de $225,000 a été investi en
1973/74...
M. QUENNEVILLE: Exactement.
M. LESSARD: C'est le seul montant qui a été investi?
M. QUENNEVILLE: Et $250,000 cette année, l'an prochain aussi. Je
vous ferai remarquer que cette différence énorme entre le budget
1970/71, et celui de 1971/72 et l'autre budget, correspond à l'achat des
terres des dix paroisses qui ont été fermées. C'est la
raison de ce décalage prononcé.
M. LESSARD: Cela correspond à l'argent qui a été
dépensé pour...
M. QUENNEVILLE: Le rachat des terres.
M.LESSARD: ...le rachat des terres. Mais dans ce programme
d'élevage de bovins, est-ce que, d'après les rapports du ministre
responsable de l'ODEQ, on a atteint une certaine rentabilité? Est-ce que
cela s'avère efficace? Est-ce qu'on prévoit non seulement de
l'élevage, mais de la commercialisation?
M. QUENNEVILLE: C'est ce qu'on vise. Je peux vous dire que, sans avoir
les résultats définitifs de l'évaluation, étant
donné que ce programme a été mis de l'avant seulement
l'automne dernier, on peut présumer déjà d'un
succès. Nous attendons le rapport qui nous sera soumis par le
ministère de l'Agriculture.
M. LESSARD: Dans le secteur forestier, un montant de $3.2 millions a
été affecté à l'aménagement forestier, au
rachat des seigneuries, de droits des concessionnaires, à la
restauration
forestière, au reboisement, etc. Le ministre vient de parler du
fait qu'on a fermé une dizaine de paroisses et qu'on a racheté
des terres.
L'un des problèmes que les gens de l'Est du Québec ont eu,
c'est que, suite à ce rachat des terres, on avait établi une
politique de rachat des terres, on avait établi une politique d'aide aux
migrants, mais on n'avait pas déterminé les centres
agro-forestiers comme tels. Quelles seront les paroisses spécifiques
où on déménagera les gens et où on investira, de
façon importante, avec tout ce que cela comporte, les services
d'aqueduc, les services d'égouts? On dit qu'il y a actuellement
énormément de paroisses et que le ministère ne peut
naturellement pas investir dans la construction de tous les services d'aqueduc
et d'égouts dans toutes les paroisses de l'Est du Québec. Est-ce
que, dans le cadre du plan Lussier et dans le cadre des travaux du
ministère des Terres et Forêts, ces centres agro-forestiers, tels
que demandés, sont déterminés?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense bien que nous avons
tenté, avec le ministère des Terres et Forêts, de suivre
une politique cohérente pour la détermination des centres
agro-forestiers. C'est la raison pour laquelle nous avons mis de l'avant un
programme pour déterminer exactement les zones
agroforestières.
Cette étape doit forcément précéder la
détermination ou la précision des centres agro-forestiers. Cette
opération est déjà commencée et doit être
déposée d'ici mars 1975. D'ailleurs, je vais vous lire un
paragraphe de l'arrêté en conseil 1452-74 qui concerne de
façon plus précise ce programme: "Attendu que le Conseil
régional de développement de même que la structure
opérationnelle du programme sont d'accord pour recommander de suspendre
l'application de l'arrêté en conseil no 2874-72 jusqu'à ce
que des plans zonaux d'aménagement intégrés des ressources
de l'arrière-pays aient été produits et acceptés
par la population concernée et les autorités gouvernementales
compétentes"...
On suit exactement ce qui a été déterminé
par cet arrêté en conseil.
M. LESSARD: Vous dites qu'avant de déterminer les centres
agro-forestiers, il faut faire une étude...
M. QUENNEVILLE: Du zonage.
M. LESSARD: ... du zonage. A ce moment-là, sur quelle base,
puisqu'il se fait quand même du réaménagement foncier, se
crée-t-il des groupements forestiers, des fermes forestières? On
a déménagé un certain nombre de personnes. Sur quels
critères et sur quelles normes se base-t-on pour préciser que ce
sera dans tel secteur particulier qu'on va investir l'argent concernant le
développement forestier? C'est qu'on continue de dépenser et
qu'on ne connaît pas encore les centres agro-forestiers.
M. QUENNEVILLE: Je pense bien que, jusqu'ici, nous avons sûrement
procédé à des actions ponctuelles, comme vous l'avez
souligné tantôt, mais ce que nous sommes en train de faire
actuellement, c'est de procéder à l'intégration de
l'arrière-pays pour voir où est le potentiel au point de vue
agro-forestier. Je pense que c'est une suite bien normale.
M. LESSARD: II y a un projet précis dont l'initiative revient
à la population, au ministère de l'Agriculture et à
l'ODEQ, le projet JAL. J'ai posé des questions au ministre de
l'Agriculture sur le projet JAL lorsque nous avons discuté de ses
crédits, et cela concerne trois municipalités: Saint-Just,
Auclair et Lejeune. Lors d'une conférence à Rimouski, en date du
5 septembre 1973, le ministre de l'Agriculture, M. Norman Toupin, avait
laissé entendre, dans cette conférence, que son ministère
favorisait à plein le projet d'aménagement JAL, soit les
municipalités de Saint-Just, Auclair, Lejeune, et que lui-même
était d'accord pour la continuation des efforts communautaires de la
population en vue d'aménager les ressources du milieu de façon
intégrale, à condition toutefois, que l'ODEQ, Office de
développement de l'Est du Québec, se décide. Est-ce qu'on
pourrait savoir quels sont les montants qui sont prévus cette
année à l'intérieur des cadres de l'ODEQ pour ce
projet?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, nous sommes absolument d'accord,
d'ailleurs, avec le ministre de l'Agriculture au sujet de cette
déclaration, et le projet JAL est déjà en place. On nous a
demandé cette année un budget de $57,000. Nous sommes prêts
à verser les $57,000.
M. LESSARD: Qui est reponsable et maître d'oeuvre de ce projet?
C'est le ministère de l'Agriculture?
M. QUENNEVILLE: Les responsables sont le ministère de
l'Agriculture et la Coopérative de gestion du Témiscouata qui est
incorporée...
M. LESSARD: Qui est constitutée... M. QUENNEVILLE: Des gens
de...
M. LESSARD: ... des gens de ces trois paroisses.
M. QUENNEVILLE: Exactement.
M. LESSARD : En passant je ne sais pas si je l'ai demandé
au ministre, mais pendant que cela me revient le ministre parlait de 105
projets, est-ce qu'il serait possible d'avoir le dépôt de ces 105
projets?
M. QUENNEVILLE : Nous avons déposé le bilan, je pense,
tantôt, et vous avez tous les projets dedans.
M. LESSARD: D'accord! Oui, c'est vrai.
Dans le secteur des pêcheries, d'abord une question qui,
actuellement, se discute très fortement, comme le sait le ministre, dans
la région. C'est la question de l'Institut de marine.
M. QUENNEVILLE: Les pêcheries...
M. LESSARD: Je pense qu'il y a quand ; même...
M. QUENNEVILLE: II n'y a aucun rapport.
M. LESSARD: Non? Mais, en fait, à quelle place puis-je en
discuter? M. le Président, dans les pêcheries, il faut former des
capitaines, et l'Institut de marine, c'est-à-dire...
M. QUENNEVILLE: Les marins ne sont pas nécessairement des
pêcheurs.
M. HARVEY (Jonquière): C'est une question de finance. Cela
coûte bien cher. Discutez de cela...
M. LESSARD: Non, je ne comprends pas la réponse du ministre.
C'est que, en vertu des règlements du gouvernement
fédéral, il n'y a personne qui peut conduire soit un chalutier ou
un bateau de cabotage sans qu'il ait son permis de pilotage.
M. QUENNEVILLE: On ne voit pas le lien entre votre Institut de
marine...
M. LESSARD: Je vais essayer de vous faire le lien. Le ministre est
responsable du développement de la région de l'Est du
Québec. Je pense que, dans cette optique, il y a un certain nombre
d'organismes culturels comme l'Université du Québec, le Centre
océanographique, qu'on a constitués...
M. QUENNEVILLE: C'est justement pour cela.
M. LESSARD: ... et aussi l'Institut de marine. Or cet institut est en
train de se déplacer vers Québec. Voici la question que je veux
poser au ministre. Ce dernier participait l'autre jour à une
réunion en présence du ministre de l'Education, M. Cloutier. Le
ministre a bien dit devant les gens de la chambre de commerce, à ce
moment, on me corrigera en vertu de l'article 96 s'il y a lieu...
M. QUENNEVILLE: Oui.
M. LESSARD: ... qu'il allait continuer, quant à lui, de favoriser
le fait qu'on laisse l'Institut de marine dans la région, au nom du
développement régional et qu'il allait intervenir, comme c'est sa
responsabilité, auprès du ministre de l'Education pour faire en
sorte que, dans les mesures des possibilités à la fois
financières et selon les décrets aussi avec les enseignants,
l'Institut de marine demeure à Rimouski.
Mais ce que je trouve curieux, c'est que le ministre étant
responsable du développement régional de l'ODEQ, ne se soit pas
préoccupé dès 1971 de cette question.
M. QUENNEVILLE: Je regrette infiniment, mais je n'étais pas,
à ce moment, ministre responsable. Je dois dire aussi qu'il manque un
petit point dans ce que rapporte le député de Saguenay quant
à ma déclaration lors de cette réunion. J'ai dit
naturellement que tout ce qui favorisait la relance économique de la
région, forcément, comme ministre responsable de l'ODEQ,
j'appuyais ces projets.
Il reste quand même qu'il faut tenir compte des contraintes, et
comme vous le savez, je pense bien que la décision dépend
beaucoup plus du ministère de l'Education. Le fait est d'ailleurs que
ces gens ont demandé de rencontrer le ministre de l'Education. On m'a
demandé d'assister à la rencontre. Je l'ai fait avec
énormément de plaisir. Or, c'est antérieur...
M. LESSARD: Je suis d'accord que cette décision relève du
ministre de l'Education, mais je suis aussi d'accord pour dire que comme
ministre responsable de l'ODEQ, donc responsable du développement
régional de cette région, il a quand même une
responsabilité assez particulière.
Je sais que, quand le ministre est venu chez nous, on pensait que
c'était Dieu le père qui arrivait avec tous les projets...
M. QUENNEVILLE: On est tombé.
M. LESSARD: ... et qui connaissait tous les dossiers de chacun des
comtés du...
M. QUENNEVILLE: Je me suis occupé à corriger cette
impression.
M. LESSARD: En passant, quand le ministre responsable de l'ODEQ vient
chez moi, comme d'autres ministres le font, j'aimerais bien que je puisse
être présent à ces réunions...
M. QUENNEVILLE : Certainement.
M. LESSARD: ... comme d'ailleurs vous le faites lorsqu'il s'agit de la
région...
M. QUENNEVILLE: J'aviserai sûrement les autorités des
municipalités en question de vous inviter. Cela me fera plaisir de vous
rencontrer, enfin.
M. LESSARD: Ce que le ministre des Affaires sociales fait bien souvent,
ce que font
d'autres ministres, le ministre responsable de la qualité de
l'environnement. Ils avisent le député en question pour qu'il se
rende à la réunion.
M. QUENNEVILLE: D'accord. Maintenant, je pense, que pour les
réunions auxquelles j'ai participé, il y a toujours eu des
organismes qui envoyaient des invitations.
M. LESSARD: Oui.
M. QUENNEVILLE: Je ne sais pas si le député de Saguenay a
reçu les invitations. Chose certaine, c'est que, malheureusement, dans
toutes ces rencontres sur la question de la planification et du
développement, je n'ai pas rencontré le député. Je
le regrette amèrement, remarquez bien.
M. LESSARD: Disons que c'est venu assez vite. D'ailleurs, j'ai eu
l'occasion de le faire remarquer dans la région, je pense que ce n'est
pas seulement le ministre responsable de la région de l'Est du
Québec qui peut promouvoir des dossiers. Je pense bien que, si on parle
au ministre du fameux problème de l'hôpital Baie-Comeau-Hauterive,
les gens étaient tout surpris de constater que le ministre
n'était pas au courant de cela. Je leur ai dit: Ecoutez, il n'est quand
même pas ministre de 25 comtés du Québec ou de 15
comtés du Québec. Il est quand même important que, dans ces
discussions, le député soit présent et j'invite le
ministre...
M. QUENNEVILLE: Je suis absolument d'accord. Je me suis même
inquiété, M. le Président, à un moment donné
de l'absence du député de Saguenay à ces réunions.
J'ai demandé au maire de corriger cette situation, de façon qu'on
puisse profiter des lumières que le député de Saguenay
pourrait apporter.
M. LESSARD: Et ce qui m'a obligé par la suite à rencontrer
chacun des organismes que le ministre avait rencontrés pour discuter
exactement des mêmes problèmes.
M. QUENNEVILLE: Bien oui.
LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): II est 12 h 35, est-ce que les
membres de la commission continuent à discuter jusqu'à 1
heure?
M. LESSARD: D'accord, on suspend les travaux.
M. QUENNEVILLE: Je n'ai aucune objection.
M. LESSARD: Nous reviendrons cet après-midi.
M. QUENNEVILLE: D'accord!
M. LESSARD: Je pense que je peux assurer le ministre qu'en une heure,
qu'à six heures nous aurons terminé concernant l'ODEQ. Je ne
m'engage pas, M. le Président. D'accord?
LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): La commission suspend ses travaux
jusqu'à cet après-midi après la période des
questions.
(Suspension de la séance à 12 h 35)
Reprise de la séance à 16 h 15
M. PICARD (président de la commission permanente de la
présidence du conseil, de la constitution et des affaires
intergouvernementales): A l'ordre, s'il vous plaît !
La commission continue cet après-midi l'étude des
crédits du Conseil exécutif. Nous en étions au programme
4, élément 4: Entente "Est du Québec". Le
député de Saguenay.
M. LESSARD: M. le Président, nous étions à discuter
des pêcheries, concernant, justement, cet élément de
programme, est-ce que le ministre pourrait nous dire quelles sont les mesures
qui ont été prises pour donner des crédits
supplémentaires aux pêcheurs, de l'aide à la
commercialisation, la création de coopératives? L'un des
reproches qu'on fait, justement, dans la région de l'Est du
Québec, je pense, c'est que beaucoup de mesures, qui ont
été prises par le gouvernement, ont favorisé certaines
grosses entreprises et que, malheureusement, cela n'a pas été le
cas pour les petites entreprises. Est-ce que le ministre pourrait nous dire,
dans le cadre du programme de l'ODEQ, en collaboration avec le ministère
de l'Industrie et du Commerce nous parlons toujours, je pense, des
pêcheries commerciales quelles sont les mesures qui ont
été prises pour aider à la formation de
coopératives, aider le petit pêcheur?
M. QUENNEVILLE: Jusqu'ici, l'ODEQ s'est impliqué surtout dans les
gros équipements de pêche, surtout au programme du complexe
industriel de pêche à Rivière-au-Renard, en particulier,
Cap-aux-Meules, Paspébiac et Grande-Rivière. Naturellement, au
sujet des pêcheries, les projets s'adressent surtout aux équipages
de terre, au complexe industriel, comme je l'ai dit tantôt, à la
formation des produits de la pêche et des subventions surtout pour la
construction des navires devant servir aux pêcheries.
Quant à l'aide aux petites entreprises, normalement, ceci
relève des budgets réguliers du ministère de l'Industrie
et du Commerce.
M. LESSARD: Pour l'achat de bateaux.
M. QUENNEVILLE: Pour l'achat de bateaux, les subventions pour la
construction des navires, cela relève de l'ODEQ.
M. LESSARD: M. le Président, dans le secteur des mines, l'un des
reproches qu'on faisait justement dans le manifeste de Matane et qui est un peu
repris dans le journal Le Soleil, vendredi, par le journaliste Louis Tardif qui
dit que depuis le Manifeste de Matane, il n'y a pas eu tellement de
modifications ou d'appui aux réclamations que ces gens faisaient, mais
en tout cas, au niveau du secteur des mines, l'un des reproches qu'on faisait
est qu'on concentrait l'ensemble des investissements dans la construction de
routes. C'était la route des monts McGerrigle. Je constate justement que
cette année encore, dans ce secteur, nous prévoyons un montant de
$1 million qui servira à terminer la route de ceinture des monts
McGerrigle et à poursuivre le programme d'exploration minière. Je
parle de $1 million et de construction de la route. Je voudrais savoir quelle
sera la somme allouée à la construction de la route et pour la
terminer, de ce montant de $1 million?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, dans ce domaine des mines, en
fait, sur le budget de $1 million que l'on retrouve dans le secteur des mines,
il y a $150,000 qui sont affectés à la construction des routes
des monts McGerrigle, et le reste...
Il y a seulement $150,000 sur le $1 million qui servent à la
construction de la route des monts McGerrigle, le reste servant à la
recherche.
On peut déposer le document, ici, les cinq projets en
question.
M. LESSARD: Le ministre conviendra que, malgré le fait qu'il n'y
ait que $150,000 qui soient prévus pour la construction de la route des
monts McGerrigle, quand nous discutons d'exploration minière,
l'exploration pétrolière, parce que dans cette région on
tente passablement de faire de l'exploration pétrolière et que le
creusage d'un puits peut aller jusqu'à coûter $3 millions, ces
montants sont absolument insatisfaisants pour permettre la découverte de
gisements miniers ou pétroliers importants.
M. QUENNEVILLE: Je conviens, M. le Président... Naturellement, je
pense qu'il y a une chose bien importante, c'est qu'il faut quand même se
rendre aux mines et cela prend des routes. C'est la raison pour laquelle
effectivement on termine cette année avec les $150,000 les routes des
monts McGerrigle. Pour ce qui est de la prospection même, il faut penser
que le secteur privé dépense aussi des sommes énormes au
point de vue de la prospection et naturellement ceci permet justement au
gouvernement d'orienter, à ce moment-là, son budget
autrement.
Je suis prêt à déposer le document, ici.
M. LESSARD: Est-ce qu'il y a une certaine contribution? Est-ce que c'est
le ministère des Richesses naturelles qui est maître d'oeuvre dans
ce secteur? Il s'agit donc, à ce moment-là, de recherches du
ministère comme cela se fait partout, dans toutes les autres
régions du Québec.
M. QUENNEVILLE: Le ministère des Richesses naturelles, qui est
maître d'oeuvre dans ce secteur, fait naturellement des relevés,
des recherches aussi et soumet des rapports à la disposition de
l'entreprise privée qui poursuit nécessairement
l'exploitation.
M. LESSARD: Dans ce million de dollars, ne sont pas comprises les
recherches qui peuvent être faites par SOQUEM et par SOQUIP?
M. QUENNEVILLE: Non, ce n'est pas compris dans ce montant.
M. LESSARD: Si vous me permettez, M. le Président, je voudrais
simplement y revenir, comme d'ailleurs tout va bien et qu'il y a une excellente
collaboration entre le ministre et le député de Saguenay; on
reprendra les débats devant la télévision.
M. QUENNEVILLE: C'est cela. Je ne sais pas si vous allez vouloir encore
!
M. LESSARD: Je suis encore complètement d'accord pour le
faire.
M. QUENNEVILLE: Si c'est bon pour le développement de l'Est, je
suis d'accord.
M. LESSARD: Oui, d'ailleurs, comme je l'ai toujours dit, M. le
Président, quand il s'agit du développement régional,
à la fois de la Côte-Nord et de l'Est du Québec, il n'y a
pas de distinction.
M. QUENNEVILLE: Si vous voulez des leçons de là-bas, vous
retournerez sur la Côte-Nord.
M. LESSARD: II n'y a pas de distinction de partis, on est simplement
d'accord pour essayer de déconcentrer et décentraliser le
développement de la région de Montréal vers les autres
régions du Québec. Ce n'est peut-être pas, malheureusement,
l'opinion du directeur général de l'OPDQ, mais en tout cas, on en
discutera.
Je reviendrais à la pêche, c'est une question qui va
être assez courte: Un montant de $10 millions a été
consacré par le gouvernement fédéral pour un programme de
consolidation de la pêche dans l'entente Canada-Québec, en
particulier la relocalisation des pêcheurs, où était
prévu ce montant de $10 millions. Il semble que ces $10 millions
n'auraient pas été dépensés dans la région
de l'Est du Québec. Est-ce que le ministre pourrait nous donner des
informations? On sait d'ailleurs que plusieurs députés
fédéraux ont protesté à ce sujet.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, il y a déjà dans
ce programme $3 millions de dépensés sur les $10 millions et les
$7 autres millions sont déjà engagés. Il y a passablement
de travaux qui vont être exécutés cette année et
dans les parcs industriels de pêche, ainsi que l'an prochain aussi;
d'ailleurs, jusqu'en 1977.
M. LESSARD: Le ministre est donc prêt à me confirmer que
ces $10 millions qui étaient prévus pour la relocalisation des
pêcheurs vont être dépensés dans la
région?
M. QUENNEVILLE: Oui. M. le Président, pour rassurer davantage le
député de Saguenay, je peux lui dire que le gouvernement
fédéral a même consenti, le 2 mai, $10 millions
supplémentaires. Je pense bien que non seulement nous dépenserons
les $10 millions, mais il y aura $10 autres millions qui seront
dépensés au point de vue de l'infrastructure au niveau de ces
parcs de pêche.
M. LESSARD: Pour une confirmation supplémentaire de la part du
ministre, je voudrais savoir s'il a pris connaissance de déclarations de
députés fédéraux dont M. Cyr qui avait
expliqué que les quelque $10 millions devant être investis
ceci est daté du 18 février 1974 dans les programmes de
consolidation de l'industrie de la pêche dans la région-plan,
impliquant en partie la relocalisation des pêcheurs certains sont,
en effet, déjà déménagés vers les points de
débarquement et les parcs industriels, entre parenthèses
auraient été répartis comme suit: $5 millions en
Colombie-Britannique; $4.3 millions à Terre-Neuve; $4.1 millions en
Nouvelle-Ecosse; $2.1 millions au Nouveau-Brunswick et seulement $1.9 million
au Québec au lieu des $10 millions prévus. Je cite, semble-t-il,
des informations d'un député fédéral, M. Alexandre
Cyr, le député de Gaspé aux Communes. Elles font suite
d'ailleurs à d'autres déclarations d'un député que
vous connaissez sûrement qui a été peut-être à
l'origine ou qui a participé à l'élaboration, comme le
ministre le disait, du Manifeste de Matane, mais qui est quand même un
député libéral, M. Pierre DeBané. Ces mêmes
déclarations avaient été faites à la fois par M.
DeBané et par M. Alexandre Cyr.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense bien que le
député de Saguenay a parfaitement raison si l'on tient compte de
la date de la déclaration du député en question. Je viens
justement de dire que c'est le 2 mai, effectivement, que le gouvernement
fédéral a convenu d'investir $10 millions pour le même
programme sur le territoire de l'ODEQ, qui s'additionneront aux $10 millions
déjà dans l'entente.
M. LESSARD: Le ministre m'assure donc que les $10 millions dont
parlait...
M. QUENNEVILLE: Au mois de février.
M. LESSARD: ... justement M. Alexandre Cyr et M. Pierre DeBané,
députés fédéraux, vont être
dépensés dans la région de l'Est du Québec au lieu
d'être répartis comme, le 18 février 1974, les deux
députés en question l'ont précisé. De plus, le
ministre m'assure qu'un montant de $10 millions supplémentaire va
être accordé pour la relocalisation des pêcheurs dans la
région de l'Est du Québec.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, je
répète naturellement que ces $10 millions vont servir pour
la mise en place des équipements dans les parcs industriels. Je suis
très heureux de rassurer une fois de plus le député de
Saguenay.
M. LESSARD: Bon, cela me rassure, M. le Président.
M. QUENNEVILLE: Le voilà rassuré.
M. LESSARD: J'en suis fort heureux.
Le secteur du tourisme. On a discuté du secteur des mines et
encore là, je fais la remarque au ministre, je pense qu'il en est fort
conscient. Il s'agit d'une région assez riche au point de vue minier et
je pense que ce montant est assez minime par rapport aux véritables
besoins que l'on pourrait avoir.
M. QUENNEVILLE: Je ferais remarquer, M. le Président, au
député de Saguenay, que nous comptons justement sur le concours
de l'entreprise privée. Nous sommes bien conscients,
nécessairement, que ce sont des montants insuffisants, mais ce sont
quand même des sommes qui incitent, si vous voulez, l'entreprise
privée à l'action.
M. LESSARD: Justement, j'inviterais le ministre responsable de l'ODEQ
à intervenir auprès du ministre responsable des Richesses
naturelles pour inciter les compagnies privées à faire de
l'exploration chez nous. En particulier dans le pétrole, on constate que
l'on a à peu près 2 p.c. des explorations qui se font chez nous
au Québec, par rapport à 98 p.c. qui se font dans les autres
régions. Malheureusement, je pense justement que nous n'avons pas, par
rapport aux profits que les compagnies privées font ici, chez nous, au
Québec, le pourcentage d'investissements dans l'exploration tant
minière que pétrolière. Dans ce sens, j'invite donc
simplement le ministre...
M. QUENNEVILLE: M. le Président, d'abord je remercie le
député de Saguenay de sa suggestion, mais j'ai bien l'impression
que le ministre des Richesses naturelles n'a pas besoin de mes conseils pour
être sensibilisé à ce problème. Je crois que depuis
longtemps il en est conscient et, naturellement, c'est un programme qui demande
un certain temps avant d'être établi. Il s'agit du rattrapage.
M. LESSARD: Mais cela prend du temps; de toute façon, on a
discuté de cela au ministère des Richesses naturelles.
Le secteur touristique. J'aimerais d'abord savoir, du ministre
responsable de l'ODEQ, combien a coûté l'expropriation du parc
Forillon et s'il y a encore des problèmes qui sont en appel actuellement
en ce qui concerne le parc Forillon. Combien actuellement a coûté
l'expropriation du parc Forillon?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, naturellement le gouvernement
provincial par l'entente était responsable du rachat des terres et le
montant s'est élevé à $6,800,000; il y a $2,600,000 qui
viennent de l'entente et $4,200,000 qui sont pris à même les
budgets réguliers.
M. LESSARD: Vous me dites $6,800,000 et $2,600,000 qui sont pris...
M. QUENNEVILLE: $2,600,000 à même l'entente et $4,200,000
qui proviennent des budgets réguliers.
M. LESSARD: Autrement dit, les $4,200,000, c'est le ministère des
Travaux publics. Ils proviennent, à ce moment-là, de
l'expropriation du ministère des Travaux publics. Est-ce que le ministre
pourrait me dire combien il peut rester de cas en suspens actuellement,
étant donné que certaines personnes sont allées en cour
d'Appel à ce sujet?
M. QUENNEVILLE: II y a environ 20 à 30 cas encore en suspens
devant la régie.
M. LESSARD: Ils seraient estimés, au point de vue...
M. QUENNEVILLE: C'est assez difficile naturellement, à ce
moment-là...
M. LESSARD: D'accord, mais selon les normes et les critères que
vous aviez établis?
M. QUENNEVILLE: Ils sont compris dans les $6.8 millions.
M. LESSARD: Ils sont compris dans les $6.8 millions.
Depuis l'expropriation du parc Forillon par le gouvernement provincial,
parce que l'on sait qu'en vertu de l'entente sur les parcs nationaux, le
gouvernement provincial est responsable de l'expropriation du parc et transmet
ensuite au gouvernement fédéral ce parc...
Est-ce que je pourrais savoir c'est un bail emphytéotique
de 99 ans combien d'argent a été dépensé
depuis et combien d'argent prévoit-on être dépensé
par le gouvernement fédéral? On me dit justement que plus de $7.5
millions ont servi à poursuivre les programmes suivants et je pense,
$5.6 millions partageables pour la mise en place d'infrastructures touristiques
et d'équipements de loisir. Mais, je m'excuse, en ce qui concerne le
parc Forillon, combien d'argent a été dépensé et
investi par le gouvernement fédéral suite, justement, à
l'expropriation du gouvernement provincial?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, le montant à
dépenser par le fédéral dans l'aménagement, d'ici
1976, correspond à $7,100,000.
M. LESSARD: L'expropriation a donc coûté
$6,800,000 et les montants dépensés par le gouvernement
fédéral seront autour de $7 millions.
M. QUENNEVILLE: Exactement.
M. le Président, je ferais remarquer au député de
Saguenay qu'il est possible que cela dépasse naturellement les
prévisions et que cela se rende à tout près de $10
millions.
M LESSARD: J'ai bien hâte de pouvoir discuter, justement, d'un
plan d'aménagement de la région de la Côte-Nord.
M. QUENNEVILLE: Cela viendra.
M. LESSARD: Dans les recommandations du BAEQ, Bureau
d'aménagement de l'Est du Québec, en ce qui concerne le
développement touristique, on proposait justement un accent très
prioritaire sur le développement touristique dans cette région,
d'en faire, en tout cas, un secteur prioritaire.
Et on proposait, en plus de l'aménagement du parc Forillon,
l'aménagement de deux autres parcs, soit le parc du Bic et le parc
Chic-Chocs. Alors, est-ce que le ministre pourrait nous dire où nous en
sommes en ce qui concerne l'expropriation des personnes dans le parc du Bic,
puis où nous en sommes en ce qui concerne l'application de ces
recommandations concernant le parc Chic-Chocs?
M. QUENNEVILLE: II n'y a pas d'expropriation pour le moment. Il y a eu
une entente entre les propriétaires qui sont à l'intérieur
d'un territoire prévu pour l'implantation du parc du Bic et, pour dix
ans, ces gens demeureront en place. Dans dix ans, on prendra juste les endroits
effectivement où on a réellement besoin du terrain pour
procéder. Il y a cette année, $1,265,000 prévus au budget
pour le parc du Bic.
M. LESSARD: D'abord, je souligne que je suis heureux de constater,
justement, qu'on a permis à ces gens de demeurer dix ans et même
je pense que c'est possiblement renouvelable, selon l'expérience qu'on
aura dans ce domaine. J'en ai discuté au ministère du Tourisme,
mais je pense que c'est quand même bon que je souligne au ministre
responsable de l'ODEQ. Je pense bien que la Joconde, c'est bien beau, mais on
ne la regarde pas longtemps. Ce qui importe, c'est qu'à un moment
donné, dans un parc fédéral... Le gouvernement
fédéral l'a fait pour la Nouvelle-Ecosse; je me demande pourquoi
justement, quand on fait un parc comme celui-là, on ne permettrait pas
à des gens assez caractéristiques de rester à
l'intérieur du parc. Cela amène une certaine humanité
à l'intérieur de ce parc-là, contrairement à ce
qu'on a fait malheureusement en ce qui concerne l'île Bonaventure
où on a exproprié les cinq ou six cultivateurs qui étaient
là et qui étaient bien amusants, d'ailleurs. On les a
expropriés et on a perdu tout le caractère humain.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, je suis parfaitement convaincu,
que c'est une nouvelle philosophie que le ministère entend suivre dans
ses transactions avec les gens qui sont situés à
l'intérieur des parcs. Je peux vous dire ici que moi-même J'avais
fait au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche cette
proposition de laisser les gens au moins pour dix ans. Je suis très
heureux de voir qu'il y a eu des suites concrètes et heureuses à
cette suggestion.
M. LESSARD: A ce sujet-là, est-ce que le ministre responsable de
l'ODEQ a eu à être consulté concernant l'expropriation des
pécheurs au sud de la route 6 à Percé?
M. QUENNEVILLE: II n'y a pas eu d'expropriation.
M. LESSARD: C'est-à-dire qu'on a suspendu, pour le moment. C'est
un peu le même problème; c'est que le jour où on
exproprie...
M. QUENNEVILLE: II n'y a pas d'expropriation effectivement. Il y aura
regroupement, à ce moment-là, des pêcheurs vers des ports
bien spécifiques.
M. LESSARD: Je suis d'accord avec le ministre. On a suspendu les
procédures, mais pendant un certain temps, on pensait à
exproprier. C'est toujours dans cette même philosophie, c'est que le jour
où...
M. QUENNEVILLE: Exactement, je pense que c'est la même philosophie
qui s'applique à ce moment-là.
M. LESSARD: ... justement on enlève ces gens qui sont des gens
assez caractéristiques, dans la région de l'Est du Québec,
comme j'en ai dans la région de la basse Côte-Nord, on perd tout
intérêt humain. Dans le développement touristique, je pense
que l'intérêt humain est fort important.
M. QUENNEVILLE: Nous avons aussi fait à Percé une entente
au sujet de la Coopérative des pêcheurs. Nous avons
exproprié cette coopérative et, les pêcheurs vont
continuer, quand même, à l'administrer et ils sont très
heureux de la solution que nous avons apportée.
M. LESSARD: Cela va bien.
M. QUENNEVILLE: C'est extraordinaire.
M. LESSARD: Non, c'est parce qu'il y a une nouvelle philosophie qui est
en train...
M. MALOUIN: Un bon gouvernement.
M. LESSARD: Non, non, c'est qu'il a fallu quand même des
discussions importantes. Il a fallu que les gens se battent justement pour
faire reconnaître ce principe. Je suis d'accord
qu'il faut que les gens se battent, à un moment donné.
Pendant un certains temps, on devait exproprier justement ces gens. Je pense
que c'est tout à fait normal qu'avant de passer à l'expropriation
on consulte, puisqu'on informe la population de ce qu'on veut faire avec
l'expropriation en question.
De toute façon ça allait bien, on ne faisait pas de
politicaillerie, alors continuons comme ça, M. le Président.
Soyez assurés, j'en informe les députés libéraux,
que si vous avez des questions à poser concernant... Malheureusement, je
remarque l'absence de députés de l'Est du Québec qui
devraient être ici pour discuter de l'ODEQ, le député de
Matane, le député de... Ils devraient être présents.
Je suis d'accord: la langue aussi, je pourrais y aller, est très
importante, mais c'est important de discuter de ces...
De toute façon, il semble qu'il y a un député
régional qui représente l'Est du Québec et que ce soit le
député de Saguenay.
M. QUENNEVILLE: II y a toujours le principe que la gestion des affaires
gaspésiennes appartient aux Gaspésiens.
M. LESSARD: Oui, oui, je suis bien d'accord...
M. QUENNEVILLE: C'est seulement pour aller prendre des leçons que
vous allez là.
M. LESSARD: Je suis bien d'accord, M. le Président, mais
quelquefois je m'aperçois qu'ils ont besoin d'aide pour faire valoir
leurs revendications auprès du...
LE PRESIDENT (M. Picard): A l'ordre! S'il vous plaît, messieurs,
voulez-vous revenir au programme no 4.
M. LESSARD: Très bien, M. le Président, je me soumets
à votre décision...
M. MALOUIN: ... à leur gouvernement puis ils ont reçu une
bonne réponse.
M.LESSARD: Allez-y, si vous avez des questions à poser, il n'y a
pas de problème, moi, ça me permet de me reposer.
Continuons, M. le Président, à discuter de choses
sérieuses. Concernant le parc Chip-Chocs, est-ce qu'il y a des montants
qui sont prévus cette année?
M. QUENNEVILLE: C'est terminé, les travaux en ce qui regarde le
parc Chip-Chocs. On a dépensé $346,000, et c'est le budget
régulier qui continue les efforts de l'ODEQ.
M. LESSARD: Maintenant, quel est le délai prévu, à
la fois pour le parc du Bic et le parc Chip-Chocs? Quels sont les délais
prévus, quand est-ce qu'on espère que ça va être
terminé?
M. QUENNEVILLE: Le parc Chip-Chocs est complètement
terminé.
M. LESSARD: Complètement terminé.
M. QUENNEVILLE: Oui, le parc du Bic, normalement, devrait être
terminé d'ici 1976, et le montant prévu est de $2 millions dans
le cadre de l'entente, à part le budget régulier.
M. LESSARD: Maintenant, ça va être un parc provincial.
Actuellement, le lien entre les Iles-de-la-Madeleine et le Québec se
fait par l'île du Prince-Edouard. Est-ce qu'au niveau de l'ODEQ il y a
une étude particulière pour tenter de faire un lien direct
entre...
M. QUENNEVILLE: Le transport maritime?
M. LESSARD: Oui, oui, c'est le transport maritime. D'accord, je
reviendrai là-dessus. Très bien, c'est parce qu'en fait ça
peut être dans le cadre du tourisme aussi, mais j'aime autant qu'on en
discute au niveau du transport maritime. A ce moment-là, on pourra
discuter.
M. QUENNEVILLE: II n'y a pas de projet actuellement, dans ce
sens-là, dans les cadres du budget de l'entente.
M. LESSARD: Maintenant, il n'y a aucune étude qui est faite par
l'ODEQ pour tenter de créer un lien direct entre la Gaspésie et
les Iles-de-la-Madeleine?
M. QUENNEVILLE: Vous parlez toujours du transport maritime?
M. LESSARD: Disons que, puisque j'ai posé la question, je ne
reviendrai pas à ce moment-là sur...
M. QUENNEVILLE: Vous voulez parler de liaison?
M. LESSARD: De lien direct entre le Québec et les
Iles-de-la-Madeleine.
M. QUENNEVILLE: Par avion ou par bateau?
M. LESSARD: Par bateau. Très bien, je comprends la question du
ministre, transport maritime.
M. QUENNEVILLE: Du transport maritime, il n'y en a pas actuellement. Il
n'y a pas de projet dans ce sens-là.
M. LESSARD: Pas de projet dans ce sens. Maintenant, il n'y a aucune
étude qui est faite sur la création d'un lien direct?
M. QUENNEVILLE: II n'y a pas eu d'étude non plus dans ce
sens.
M. LESSARD: Et vous n'avez pas l'intention d'entreprendre des
études dans ce sens? Parce que c'est quand même important,...
M. QUENNEVILLE: Oui, d'accord.
M. LESSARD: ... pour le député Louis-Philippe Lacroix, les
Iles-de-la-Madeleine, la population. Si les gens sont obligés de passer
par l'île du Prince-Edouard bien souvent un certain nombre de touristes
demeurent à l'île du Prince-Edouard et ne se rendent pas aux
Iles-de-la-Madeleine. Si on avait un lien direct, ça permettrait
peut-être d'avoir beaucoup plus de touristes dans cette
région?
M. QUENNEVILLE: Pour servir les mêmes fins, M. le
Président, nous avons pensé justement établir une
communication aérienne entre les Iles-de-la-Madeleine et le territoire
pour les passagers et aussi les marchandises.
M. LESSARD: Je remarque un député de l'Est du
Québec; vous êtes bienvenu. Dans le secteur des affaires, voici
une autre des revendications de la population de l'Est du Québec. Mais
avant, dans le secteur touristique, étant donné que le ministre
du Tourisme a annoncé un certain programme concernant la construction de
marinas, est-ce que ça couvre la région de l'Est du
Québec?
M. QUENNEVILLE: II n'y en a pas de prévu dans l'Est, M. le
Président.
M. LESSARD: II n'y en a pas de prévu dans l'Est. Est-ce que le
ministre pourrait me dire pourquoi?
M. QUENNEVILLE: Pourquoi il n'y en a pas? Actuellement, il n'y en a pas
de prévu. Notre rôle en est un de coordination. Nous attendons les
suggestions de chaque ministère.
M. LESSARD: Là, je n'aime pas la réponse du ministre
responsable de l'ODEQ quand il me dit "que c'est un rôle de coordination.
Le ministre vient de me dire que vous n'avez qu'un rôle de coordination;
je pense que c'est plus que cela, c'est un rôle d'initiation aussi parce
qu'en fait c'est l'Office de développement de l'Est du Québec.
Vous devez justement, comme responsable de cette direction, intervenir pour
faire tous les efforts nécessaires afin de permettre que cette
région pilote puisse profiter du développement.
Je comprends que le ministre, probablement, n'a pas voulu le dire dans
ce sens-là.
M. QUENNEVILLE: Justement, M. le Président.
M. LESSARD: Si on a établi un plan de développement de
cette région-là, c'est parce qu'on voulait en arriver à
des résultats positifs, à des résultats précis. Non
seulement le ministre responsable de l'ODEQ doit-il être un
coordon-nateur des montants mais il doit être un initiateur dans la
planification de cette région-là.
M. QUENNEVILLE: Justement. Le rôle, effectivement, c'est de
présider aux grandes orientations à l'intérieur du plan de
développement. La raison pour laquelle on a suggéré un
changement dans la question des marinas, c'est que nous avons voulu orienter
l'action du ministère du Tourisme beaocup plus du côté de
la mise en place des réseaux de stations et d'étapes
touristiques. Les stations, vous avez Mont-Saint-Pierre, Gaspé,
Percé, Carleton; les étapes sont les Iles-de-la-Madeleine,
Bonaventure, Amqui, Sain-te-Anne-des-Monts, Cap-Chat, Matane, Rimouski,
Trois-Pistoles, Rivière-du-Loup, Notre-Dame-du-Portage, Saint-Patrice et
Cabano.
Nous avons pensé, naturellement, qu'il était beaucoup plus
important d'établir ce réseau d'étapes et de stations avec
des équipements que de procéder à l'implantation d'une ou
deux marinas dans l'Est du Québec.
M. LESSARD: II reste que dans le plan du BAEQ il était
prévu l'aménagement de marinas. Encore là, cela doit
s'intégrer dans un plan global au niveau du ministère du
Tourisme. On ne commence pas à faire des marinas dans la région
de Percé parce que les gens ne viennent pas de l'Atlantique; ils
viennent surtout de la rivière Richelieu et du lac Champlain.
M. QUENNEVILLE: Je pense bien, comme le disait tanôt le
député de Saguenay, que c'est en même temps le rôle
de l'ODEQ de voir à l'orientation et d'établir certaines
priorités. C'est la raison pour laquelle je disais tantôt qu'on
avait pensé, nous, qu'il était beaucoup plus important
d'établir des stations et des étapes touristiques bien
équipées que procéder, en somme, à
l'établissement de marinas qui s'adressent à une clientèle
limitée et privilégiée aussi.
LE PRESIDENT (M. Picard): Le député de Gaspé.
M. FORTIER: Dans la ville de Gaspé, je pense bien que les
officiers de l'ODEQ sont sensibilisés au projet, il est question de
construire un nouveau pont.
Or, en construisant un nouveau pont, il y a un nouveau tracé de
route qui va se faire sur les bords de la rive de la baie de Gaspé. En
ce faisant, je sais que le ministre est au courant, de même que les
fonctionnaires du ministère, qu'il y a là des quais qui servent
pour des bateaux qui font, par exemple de la pêche touristique. Je veux
savoir, de la part du ministre et des gens du ministère, si on a
prévu que ces quais vont disparaître et qu'il va y avoir, pas une
marina je pense bien que le mot "marina", c'est difficile à
prononcer mais un réaménagement portuaire.
S'il y a un réaménagement portuaire à cause d'une
décision ministérielle, moi, je me trouve un peu mal à
l'aise pour expliquer aux gens qui profitent de ce port, ce que le
ministère ou l'ODEQ va conseiller aux différents
ministères de faire pour remplacer ce port de mer. Ces quais servent
tout de même à des fins touristiques. D'ailleurs, je dois vous
faire remarquer que Gaspé est tout près du parc Forillon et, dans
un avenir très prochain, il devra y avoir tout de même une liaison
maritime entre le parc Forillon et Gaspé. Je voudrais suggérer
à l'ODEQ et au ministre concerné qu'ils pensent que, dans un
avenir prochain, il faudra faire un réaménagement portuaire pour
les voiliers qui vont se rendre à Gaspé de même que pour
les bateaux de voyages touristiques qui, même actuellement,
amènent beaucoup de gens à la pêche touristique et
exploitent un excellent commerce.
Mais si on prend les ponts pour construire une route, va-t-on remplacer
ces quais ou faire ce qu'on appelle soit un port de plaisance ou encore un
réaménagement portuaire? Là vous êtes pris dans un
dilemme. Vous enlevez quelque chose qui appartient à des gens qui se
servent de ces quais pour faire un commerce touristique; si on les
enlève, il faut les remplacer. Quelle va être l'intention de
l'Office de développement de l'Est du Québec, de l'OPDQ, afin de
voir à remplacer cet aménagement portuaire?
M. QUENNEVILLE: Pour répondre à ce problème
complexe, qui a soulevé passablement de réactions de part et
d'autre, il y avait deux solutions apportées par le ministère des
Transports: la construction d'un pont-levis ou la construction d'un pont
régulier. Naturellement, si le pont-levis est passablement plus
dispendieux, selon les données qu'on nous a fait parvenir, le projet
atteindrait les $6 millions; à ce moment-là, nous ne serions pas
en mesure de procéder à un aménagement en aval. S'il
s'agit de la construction d'un pont régulier, il y aura, à ce
moment-là, sûrement des fonds disponibles nous permettant cet
aménagement en aval. C'est à l'étude, pour le moment, et
nous attendons la décision du gouvernement fédéral au
sujet des eaux naviguables.
M. FORTIER: Pour renseigner la population de Gaspé, est-ce qu'on
peut prévoir qu'il va y avoir une décision de prise prochainement
à ce sujet-là?
M. QUENNEVILLE: On attend, très prochainement, la décision
de la part du ministère des Transports du Québec.
M. FORTIER: Je comprends bien le ministre et je suis très heureux
de la réponse, d'ailleurs. S'il y a un pont, qui n'est pas un
pont-levis, avec un dégagement vertical de 21 pieds à haute
marée alors que les quais en amont ne pourront plus servir aux voiliers,
vous allez orienter votre politique et voir à avoir les budgets
nécessaires pour construire en aval un aménagement portuaire.
M. QUENNEVILLE: Un aménagement, exactement. Sans que ce soit une
marina.
M. FORTIER: On peut l'appeler port de plaisance, si vous voulez.
M. QUENNEVILLE: Disons qu'on va dire un aménagement; c'est
tellement plus générique.
M. FORTIER: L'important... Cela passe mieux.
M. QUENNEVILLE: On est moins contraint par le mot
"aménagement".
M. FORTIER: Je remercie le ministre. Très bien.
M. LESSARD: M. le Président, je souligne le fait qu'il est fort
difficile de faire un plan d'aménagement régional quand ça
ne s'inscrit pas dans un plan global de l'ensemble du Québec. Nous
vivons justement le cas concernant les marinas, cela doit s'inscrire à
l'intérieur d'un plan général. Mais avant de continuer le
secteur des affaires, est-ce que, comme cela s'est fait dans d'autres
régions du Québec, la région de Montréal, la
région du Lac-Saint-Jean, la région de Québec avec la
Commission Pluram-LaHaye, je pense, et pour donner suite au rapport du BAEQ, il
y a eu des études sur l'affectation du sol? Par exemple,
déterminer les secteurs touristiques, les coins touristiques qu'on devra
développer, déterminer à quel endroit on va
développer le secteur culturel? Cela rejoint toujours les centres
agro-forestiers. Plutôt que d'avoir des politiques puis je rejoins
l'arrêté en conseil concernant l'aide aux migrants de
déménagement, peut-être qu'il faudrait penser à une
politique d'aménagement et aussi aménagement des villes. Je sais
que dans la région de la Côte-Nord, on m'informait qu'à la
Quebec North Shore, à peu près 60 p.c. des ouvriers forestiers
venaient de la rive sud. On a déterminé des centres d'accueil, si
je me rappelle bien; si je me trompe, c'est de mémoire, le ministre me
corrigera. En fait, pour quelqu'un qui déménageait dans tel
endroit précis, un centre d'accueil, en particulier
Sainte-Anne-des-Monts, pouvait recevoir une subvention du gouvernement.
Mais malheureusement, quand on fait du déménagement comme
ça, il faut aussi en même temps prévoir que ces gens vont
être capables de trouver de l'emploi dans cette région. Je pense
que, malheureusement, cela n'a pas été le cas partout. Je me
rappelle que certains organismes de la région, chez nous, avaient
demandé, je ne sais pas si c'est au ministre responsable de
l'ODEQ ou ailleurs, de déterminer la région de Baie-Comeau
comme un centre d'accueil, étant donné qu'il y avait quand
même 40 p.c. ou 50 p. c. des ouvriers forestiers qui travaillaient pour
Québec North Shore et qui, étant donné le coût de
construction d'une maison à Baie-Comeau, par rapport à l'est du
Québec, ne peuvent se permettre de déménager, même
s'ils ont des coûts de transport assez considérables. Dans ce
plan, ma question est bien générale, est-ce qu'on a un
aménagement de l'espace, aménagement touristique,
aménagement des parcs? On a précisé un peu, là, il
y a eu une étude démographique du déplacement des
populations. Au point de vue des centres de services, Rimouski c'est bien beau,
on a fait une capitale administrative: Rimouski, mais Rimouski est presque la
seule ville qui attire un peu de monde dans le coin. Dans la région de
Carleton, la région de Gaspé...
M. QUENNEVILLE: Mont-Joli.
M. LESSARD: D'accord. Est-ce qu'on a décidé, de
façon rationnelle, à la suite d'une étude, l'implantation
de centres d'accueil dans ces quatre ou cinq villes qui seraient d'une certaine
importance et qui pourraient attirer la population?
M. QUENNEVILLE: Pour répondre d'abord à la question du
zonage touristique, tout est en marche actuellement. On sait que le
ministère de l'Agriculture a procédé au zonage des terres
agricoles, le ministère des Terres et Forêts, la même chose,
et enfin, le ministère de l'Agriculture a terminé le zonage
agricole. Pour le zonage touristique, c'est en voie d'être
terminé.
Il reste la proposition de centres d'accueil. C'est déjà
décidé au niveau des budgets de l'entente, et il y aura des
centres d'accueil dans tous les centres de services; chacun des 17 comprendra
un centre d'accueil.
LE PRESIDENT (M. Picard): Est-ce que vous avez un commentaire sur la
réponse?
M. LESSARD: C'est parce que je parlais au premier ministre, M. le
Président, et je n'ai pas entendu la réponse. Maintenant, on me
dit que vous avez parlé de planification agricole, planification
touristique.
M. QUENNEVILLE: C'est fini au point de vue agricole, il reste le
tourisme.
M. LESSARD: Au point de vue de la planification routière, par
exemple, est-ce que...
M. QUENNEVILLE: C'est la même chose.
M. LESSARD: Alors le secteur des affaires; le tourisme ça va. En
parlant du secteur des affaires, Cabano, comment ça va?
M. QUENNEVILLE: D'après les nouvelles que nous avons de la part
de M. Saulnier en particulier, nous devrions avoir des développements
assez intéressants dans à peu près deux semaines. Je pense
que ça répond passablement à votre question.
M. LESSARD: Cela répond, mais il y a un mois le ministre de
l'Industrie et du Commerce m'avait parlé de trois semaines.
M. QUENNEVILLE: S'il vous a parlé de ça il y a une
semaine, il reste deux semaines.
M. LESSARD: Non, il y a un mois.
M. QUENNEVILLE: Le dossier est dans la phase finale. En fait, on peut
dire deux ou trois semaines, c'est une possibilité que ce soit trois
semaines aussi, mais ça peut être aussi bien deux semaines et
peut-être dix jours.
On a autant hâte que tout le monde là-bas.
M. LESSARD: Enfin, ce que je veux dire c'est qu'on n'attendra pas les
prochaines élections pour encore discuter de la question de Cabano.
M. QUENNEVILLE: Pas du tout.
M. LESSARD: Qu'on dise au moins à la population...
M. QUENNEVILLE: On n'a même pas besoin de discuter de ces choses
pour gagner des élections.
M. LESSARD: Qu'on dise au moins à la population: Ecoutez, c'est
oui ou c'est non.
Etant donné qu'il y a des élections
fédérales, concernant le port de Gros Cacouna est-ce que le
ministre a des informations?
M. QUENNEVILLE: Pour ce qui regarde le port de Gros Cacouna, vous savez
qu'il y a des études qui sont en marche. Veuillez croire que, nous
aussi, nous trouvons que c'est plutôt long d'attendre, mais il faut
attendre que ces études soient terminées.
M. LESSARD: Est-ce que les études sont faites par le gouvernement
fédéral ou par le gouvernement provincial?
M. QUENNEVILLE: Les études sont faites par le ministère
des Richesses naturelles.
M. LESSARD : Par le ministère des Richesses naturelles.
Est-ce que le ministre peut prévoir un délai
précis?
M. QUENNEVILLE: Normalement, ça devrait être au mois de
juillet, ce qui est le mois prochain.
M. LESSARD: Est-ce que vous pensez que
cette étude va être rendue publique par le ministère
des Richesses naturelles, ou est-ce que vous comme ministre responsable de
l'ODEQ...
LE PRESIDENT (M. Picard): Excusez-moi, messieurs, mais est-ce que cette
question de l'implantation d'un tel port ne relève pas des Richesses
naturelles?
M. LESSARD: M. le Président, simplement sur le point de
règlement, je suis d'accord avec vous, mais le ministre responsable de
l'ODEQ, dans la région de l'Est du Québec, est la responsable de
toute la coordination des investissements qui peuvent se faire dans cette
région.
LE PRESIDENT (M. Picard): Je suis d'accord.
M. LESSARD: De telle façon...
LE PRESIDENT (M. Picard): Je suis d'accord avec le député
de Saguenay mais là vous parlez du contenu, ce qui revient au secteur
des Richesses naturelles. Si vous parlez d'un cas spécifique.
M. LESSARD: A ce moment-là, on va arrêter de parler de
l'ensemble de l'ODEQ. M. le Président, c'est plus que ça l'ODEQ.
Je ne voudrais pas qu'on recommence la discussion générale, mais
quant à l'ODEQ le ministère demeure le maître d'oeuvre de
certaines décisions qui relèvent du ministère. C'est le
cas de Gros Cacouna. Cependant, comme l'ODEQ est responsable de la
coordination, il importe que le ministre responsable de l'ODEQ soit
informé de ces négociations, de ces études. En fait, je ne
demande pas au ministre ce qu'il y a à l'intérieur de
l'étude, mais je lui demande si dans cette étude il y a eu
consultation, s'il est informé concernant ce problème. Si vous
rendez une décision comme celle-là, M. le Président, je ne
puis plus parler du secteur des mines dans la région de l'Est du
Québec, je ne suis plus capable de parler de l'agriculture.
LE PRESIDENT (M. Picard): C'est parce que là vous parlez d'un cas
bien précis.
A ce moment-là, cela se trouve à être le contenu
d'un programme sectoriel, en l'occurrence les richesses naturelles.
M. LESSARD: Non. Ce matin, nous avons parlé du projet JAL. Le
projet JAL, M. le Président, c'est un projet qui...
LE PRESIDENT (M. Heard): De toute façon, moi, personnellement, je
n'ai pas d'objection si le ministre veut donner les réponses, mais il
n'est pas obligé de le faire.
M. MALOUIN: II n'y a plus d'autres questions, d'ailleurs.
M. LESSARD: J'en ai. Pourquoi? Vous êtes déjà
fatigué?
M. MALOUIN: Non, non. Il ne semble pas y avoir d'autres questions.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, est-ce que je peux
répondre à la question?
LE PRESIDENT (M. Picard): Vous êtes absolument libre de
répondre.
M. LESSARD: M. le Président, je vous ferais remarquer que nous
n'avons pas quorum. Encore pour montrer ma bonne collaboration, M. le
Président, je n'en appellerai pas à l'article 146.
LE PRESIDENT (M. Picard): Je ferais remarquer au député de
Saguenay que l'honorable premier ministre a été appelé
d'urgence au salon rouge. C'est pour cela que nous n'avons pas quorum.
M. LESSARD: D'accord. Mais, pour montrer ma bonne collaboration, M. le
Président, je ne ferai pas appel à l'article 146.
M. le Président, de toute façon, vous comprenez. Le
ministre, oui.
M. QUENNEVILLE: Je pense bien que je ne peux sûrement pas engager
d'avance le ministre des Richesses naturelles à rendre publics les
rapports qui ont été confiés à deux firmes.
Lui-même décidera, à ce moment-là, du
bien-fondé de publier ou non ces rapports.
M. LESSARD: J'accepte, à ce moment-là, la réponse
du ministre responsable de l'ODEQ. Le ministre responsable de l'ODEQ est quand
même dans le dossier, il suit le dossier. C'est, d'ailleurs, sa
responsabilité.
Dans le secteur des affaires, le ministre nous informe que $2.2 millions
seront investis dans l'autodéveloppement des entreprises de la
région, des activités complémentaires à
l'implantation des entreprises. Cela rejoint justement SAGEQ sur laquelle je me
pose certaines questions, mais sur laquelle je ne veux pas revenir. Mais,
justement, le manifeste de Matane qui a été, M. le
Président, appuyé, je pense, dans un avis, par le CRD de la
région...
M. QUENNEVILLE: M. le Président, je regrette infiniment, mais je
pense que c'est une affirmation gratuite. Il se trouve que j'ai lu, moi aussi,
l'avis du CRD sur le Manifeste de Matane. Je ne suis pas d'avis que le CRD
appuie le manifeste de Matane. Il appuie le principe du manifeste sans appuyer
nécessairement le contenu. Je pense que c'est fort différent. Il
y a des nuances, d'ailleurs, quant au contenu.
M. LESSARD: Oui, d'accord. C'est qu'à un moment donné, M.
le Président, le CRD affirme qu'il y a certainement quelques erreurs
de
chiffres, puisque cela n'a pas été préparé
par des experts, mais que, dans l'ensemble, il est d'accord sur les retards
considérables que cela a causés, il est d'accord, globalement,
sur l'ensemble des revendications.
M. QUENNEVILLE: II serait, M. le Président, assez important de
souligner qu'à partir de chiffres qui ne sont pas exacts les conclusions
risquent fort de ne pas être exactes.
M. LESSARD: En tout cas, disons qu'on ne fera pas une chicane. En ce qui
me concerne, je pense bien avoir assez bien lu le rapport et globalement, tel
que le ministre responsable de l'ODEQ le dit d'ailleurs, l'avis du CRD dit bien
que cela n'a pas été présenté par des
spécialistes, mais que, cependant, dans l'ensemble, les revendications
des Gaspésiens, en ce qui concerne le manifeste de Matane, sont
légitimes.
De toute façon, M. le Président, ce que je voudrais savoir
de la part du ministre...
M. QUENNEVILLE: Vous me permettrez de rectifier. Je pense que c'est
aussi une affirmation un petit peu gratuite. L'avis du CRD sur le manifeste de
Matane se termine en disant: "II n'en demeure pas moins que ce manifeste,
malgré ses faiblesses, fait la preuve que la population perçoit
les grandes dimensions du développement de la région et de ce
secteur et qu'il fait la preuve qu'en plus de comprendre la population veut
s'impliquer dans son développement et y participer activement".
Je pense qu'il n'y a pas d'autres conclusions à tirer de l'avis
du CRD sur le manifeste de Matane.
M. LESSARD: On a formé une société de gestion de
l'Est du Québec. Le problème, c'est celui d'à peu
près toutes les régions du Québec, mais cela rejoint,
comme je vais le préciser, le problème du développement de
l'Est du Québec. Selon les lois qui sont faites tant par le gouvernement
provincial que par le gouvernement fédéral pour subventionner
l'entreprise en particulier, par exemple la loi de la SDI, l'investissement
minimum est de $150,000; on a très peu de lois pour aider la petite
entreprise comme telle.
Les gens qui ont préparé le manifeste de Matane, qui ont
été appuyés, le 3 juin 1973, par plus de 2,000 personnes
qui étaient là présentes réclamaient un genre de
fonds industriel pour la région. Est-ce que l'ODEQ a
étudié cette possibilité de la création d'un fonds
industriel et est-ce qu'on a l'intention de le mettre en application?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, nous sommes absolument
conscients du problème. Il est difficile d'aider la petite entreprise
dans un territoire marginal. La SAGEQ, justement, devait parer, jusqu'à
un certain point, à cette lacune. Vous comprendrez facilement que le
seul but, actuellement, que la SAGEQ peut viser, c'est de rationaliser les
secteurs pour les rendre concurrentiels.
On sait qu'il s'agit d'une zone marginale et la petite industrie,
sûrement, bénéficierait énormément de
l'action de la SAGEQ.
M. LESSARD: Mais la SAGEQ ne pourrait pas subventionner. La SAGEQ, en
fait, son objectif, c'est...
M. QUENNEVILLE: Elle peut participer aux entreprises, la petite
entreprise aussi.
M. LESSARD: Je pense que cela ne répond pas au besoin d'avoir un
genre de fonds industriel qui va financer les petits entrepreneurs.
M. QUENNEVILLE: La SAGEQ répond, M. le Président, à
une partie des besoins. On est absolument d'accord qu'elle ne répond pas
à tous les besoins.
M. LESSARD: Simplement comme exemple, c'est donc facile pour une
compagnie comme Rayonier Québec de venir chercher $40 millions à
un moment donné...
M. QUENNEVILLE: Là, on n'est plus dans l'ODEQ, je crois.
M. LESSARD: Simplement un exemple dans le projet...
M. QUENNEVILLE: Des zones spéciales.
M. LESSARD: ... des zones spéciales. Mais ce que je veux dire,
c'est que bien souvent, pour le petit entrepreneur, c'est la première
tranche de $25,000 ou de $50,000 qui est dure à avoir. Alors, je pense
que de ce côté cela pourrait s'appliquer à
l'ensemble du Québec il y a un besoin, si on veut
développer l'entrepre-neurship, d'avoir des lois, un genre de
crédit, comme on parlait, à un moment, du crédit
hôtelier. Actuellement, vous donnez une subvention de $1,500 pour la
construction des...
M. QUENNEVILLE: Des unités d'hébergement.
M.LESSARD: ...unités d'hébergement. Alors, comme on
parlait du crédit forestier, je pense qu'il devrait y avoir un
crédit industriel pour aider, en plus de SAGEQ.
Qu'on se comprenne bien, on discute des problèmes
généraux, mais que le ministre soit bien informé que,
lorsqu'il arrivera à la ventilation des crédits, cela ne
m'intéressera pas de discuter de la couleur du chapeau du chauffeur.
M. QUENNEVILLE: Cela dépend de la couleur, peut-être!
M. LESSARD: Oui. Au niveau des affaires,
je pense que c'est à ce programme que nous devons discuter de
l'infrastructure du traver-sier-rail. Quand je regarde le bilan 1968-1974,
développement des affaires, secteur 1.6 de l'ODEQ, je constate qu'aucun
montant n'est prévu dans les crédits.
M. QUENNEVILLE: C'est un projet qui est arrivé après la
budgétisation des montants, et à même la réserve que
l'ODEQ a continuellement, nous avons puisé un montant de $1 million
devant servir aux infrastructures pour le traver-sier-rail à Matane.
Une somme de $1 million est prévue pour cette année pour
les infrastructures à Matane.
M. LESSARD: Les infrastructures, la part de l'ODEQ, la part du
gouvernement provincial.
M. QUENNEVILLE: Oui.
M. LESSARD: Maintenant, est-ce que ce traversier-rail...
M. QUENNEVILLE: Sur le côté sud.
M. LESSARD: Le côté sud, le côté nord? Ce
seront toujours les deux points.
M. QUENNEVILLE: Dans les budgets réguliers du ministère
des Transports, $3 millions sont prévus pour l'aménagement du
côté de la rive nord.
M. LESSARD: Baie-Comeau et Godbout.
M. QUENNEVILLE: Baie-Comeau seulement, pour le moment.
Ce n'est pas le brise-glaces, c'est le traversier-rail.
M. LESSARD: D'accord, on parlera du brise-glaces tantôt.
Maintenant, d'après les informations que peut avoir le ministre,
étant donné qu'il y a eu formation d'une compagnie privée
pour administrer ce traversiers-rail, compagnie qui s'inquiète
considérablement, suite à une décision de la compagnie
Canadien Pacifique, est-ce que le ministre peut nous assurer que le
problème ne reviendra plus à la surface et qu'il est en grande
partie réglé?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, nous avons toutes les raisons au
monde de croire que ce problème ne reviendra pas à la surface. Je
pense que nous avons posé des gestes assez concrets, assez positifs,
pour expliquer la position du Québec face à ce
problème.
M. LESSARD: Concernant le traversier-rail, et le lien entre Matane,
Godbout, Baie-Trinité concernant le brise-glaces, est-ce qu'à la
suite de la suggestion que j'avais faite en 1971, suggestion qui a
été reprise dernièrement par le député de
Rimouski, M. Saint-Hilaire, le minis- tre responsable de l'ODEQ, étant
donné les expériences fort malheureuses que nous avons
vécues dans la région concernant les systèmes de
traversiers, aurait l'intention de recommander que ce soit administré
par le gouvernement plutôt que par une entreprise privée, quitte
après cela à payer les pots cassés?
M. QUENNEVILLE: C'est une hypothèse qui a été
envisagée mais nous attendons la décision du ministère des
Transports à ce sujet-là. Elle est valable. Nous sommes d'accord
sur cela.
M. LESSARD: Toujours en respectant le rapport Lalonde, la Loi sur les
transports.
M. QUENNEVILLE: Suivant la recommandation.
M. LESSARD: En fait, il y a une logique, on ne fait pas administrer les
routes par l'entreprise privée, et il me semble que ce sont là
des routes secondaires fort importantes. Je ne pense pas que l'administration
d'une entreprise comme celle-là coûte énormément
cher, d'autant plus qu'en particulier le Père-Nouvel a
coûté passablement cher au gouvernement. Alors il me semble que
quant à payer les pots cassés on devra envisager la
possibilité...
M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense bien que le
ministère des Transports est bien conscient de ce facteur et en tiendra
compte dans sa décision.
M. LESSARD: En 1973-74, $344,600 étaient prévus pour la
création de parcs industriels, en 1974-75, je ne vois pas de montant.
Est-ce que...?
M. QUENNEVILLE: Cette année, M. le Président, un montant
de $900,000 est prévu. L'an prochain, $255,400. C'est pour celui de
Rimouski, Rivière-du-Loup. Je peux vous dire que celui de Matane est
déjà complété et que celui de Mont-Joli est en voie
d'être terminé.
M. LESSARD: En relation avec le schéma d'aménagement du
BAEQ et toute la politique du transport qui est prévue pour la
région de l'est du Québec, est-ce que le ministre responsable de
l'ODEQ, en collaboration avec le ministre des Transports, a fait des
représentations auprès du Canadien national ou de la Commission
des transports pour qu'elle intervienne auprès du Canadien national pour
prolonger son réseau ferroviaire vers le nord de la Gaspésie?
M. QUENNEVILLE: II n'en a pas été question du tout.
M. LESSARD: Aucunement. M. FORTIER: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Picard): Le député de Gaspé.
M. FORTIER: ...est-ce que je pourrais demander au ministre, vu que le
ministère est là pour conseiller les autres ministères et
parfois obtenir les budgets nécessaires, s'il y aurait
possibilité d'inclure dans un programme spécial la
réfection de la route entre Murdochville et Gaspé?
Je pose la question parce que vous savez que c'est une industrie des
plus importantes qu' il y ait dans l'Est du Québec, qui emploie
plusieurs ouvriers, plusieurs camionneurs et qui aide même à
développer le port de Gaspé parce qu'il y a du minerai de cuivre
qui vient de Terre-Neuve et qui est transporté à Murdochville.
Comme cette route a été faite pour un camionnage qui était
beaucoup moins lourd et que, maintenant, c'est un camionnage très lourd,
les routes ne peuvent pas suffire pour tout ce camionnage. Est-ce qu'il y
aurait possibilité de demander au ministère concerné
d'inclure un programme spécial et un budget spécial pour la
réfection de cette route entre Murdochville et Gaspé?
M. QUENNEVILLE: M. le Président, je dois dire au
député de Gaspé que je suis très conscient de ce
problème. J'ai effectivement rencontré des représentants
de cette région de Murdochville et on leur a expliqué, à
ce moment-là, qu'à la suite d'une entente au niveau des deux
paliers de gouvernement, soit le fédéral et le provincial, il
était entendu que les budgets de l'entente devaient être
affectés exclusivement aux routes 6 et 10. Je peux vous dire qu'à
la suite de cette rencontre avec les représentants de Murdochville et je
pense qu'il y en avait de Chandler...
M. FORTIER: De Chandler, oui.
M. QUENNEVILLE: ...nous avons fait des pressions auprès du
ministère des Transports pour que la construction de cette route soit
considérée prioritaire à même les budgets
réguliers du ministère.
M. FORTIER: Mais il ne faut pas se tromper, Chandler, ce n'est pas le
même programme.
M. QUENNEVILLE: C'est la route...
M. FORTIER: Je parle de la route entre Murdochville et la ville de
Gaspé.
M. QUENNEVILLE: C'est ça.
M. FORTIER: Parce que c'est là que le commerce,
l'industrie...
M. QUENNEVILLE: Nous avons fait cette recommandation. Je ne me rappelle
pas le numéro de la route, mais je peux vous dire...
M. FORTIER: C'est 198. Mais je crois qu'il faudrait tout de même
faire un effort parce que je me rappelle je suis content de voir que le
ministre des Affaires intergouvernementales est ici que quand la
compagnie a décidé d'investir une somme de $100 millions pour de
l'aménagement nouveau à son usine de Murdochville, il avait
été entendu, à ce moment-là, par l'ancien ministre
responsable de l'Office de développement de l'Est du Québec,
qu'une somme de $5 millions serait investie pour réparer cette
route.
Maintenant, je comprends que cette somme n'a pas été
retenue par l'entente Canada-Québec, mais je demande, pour les ouvriers,
pour les camionneurs et pour les compagnies qui font tout de même un
effort considérable, qu'un budget spécial soit accordé
pour refaire cette route.
M. LEVESQUE: Comme, M. le Président, j'ai été mis
en cause par ma présence, je n'ai aucune objection à me rappeler,
avec le député de Gaspé, qu'il avait certainement
été question de cette route, lors des investissements en
question. Mais, je suis bien conscient également que l'entente
spécifie les routes 6 et 10. Je me demande cependant de quelle
façon on a réussi à créer une route 6-A.
M. QUENNEVILLE: Un accident de parcours.
M. LEVESQUE: Parce que je ne sais pas jusqu'à quel point on
pourrait considérer que c'est de la route 6-B que parle
député de Gaspé.
M. QUENNEVILLE: D'accord, M. le Président. Encore une fois, nous
voudrions tellement donner suite à la demande du député
mais, malheureusement, tous les budgets sont engagés et il est
absolument impossible de reconsidérer, même à
l'intérieur des budgets de l'entente, un budget spécial. Il
faudra définitivement et nous sommes prêts, encore une
fois, à revenir à la charge auprès du ministère des
Transports inscrire cette demande dans les priorités, mais
à même les budgets réguliers.
LE PRESIDENT (M. Picard): Le député de Saguenay.
M. LESSARD: Maintenant, au niveau du transport et ce seront les
dernières questions, M. le Président le fameux traversier
brise-glaces, quand va-t-il entrer en service? D'abord, combien va-t-il
coûter? Un bout de temps c'était $6 millions; là, il est
rendu à $11 millions, à près de $11 millions.
M. QUENNEVILLE: M. le Président, pour répondre à la
question du député de Saguenay, il est absolument exact que le
coût sera de $11 millions et il est aussi exact que le bateau sera en
service en décembre 1974.
M. LESSARD: En ce qui concerne le traver-sier-rail...
M. QUENNEVILLE: A moins naturellement qu'il y ait des grèves ou
des choses comme ça qui retardent.
M. LESSARD: ... est-ce que...
M. QUENNEVILLE: Mars 1975.
M. LESSARD: Mars 1975.
M. QUENNEVILLE: Le 31 mars 1975.
M. LESSARD: M. le Président, quant à moi, j'ai
terminé en ce qui concerne l'Office de développement de l'Est du
Québec. Le ministre, à un moment donné, nous a
informé qu'il acceptait les recommandations du CRD, et je pense que
l'une de ces recommandations fort importantes pour le CRD concerne la
création d'une société mixte agricole-forestière.
J'espère justement que le ministre responsable de l'ODEQ va en tenir
compte et que cette société sera créée.
En ce qui me concerne, M. le Président, nous avons reçu
des informations fort importantes, en particulier sur la structure. On sait que
les gens commençaient à être passablement
mélangés avec cela, et non seulement les gens mais même les
députés. Le dépôt de la déclaration du
ministre concernant cette structure me paraît donc fort important. La
discussion nous permet de voir l'élaboration du plan; elle va nous
permettre aussi, en même temps, de vérifier l'année
prochaine, puisque nous n'avons pas encore entendu dire que le ministre
responsable de l'ODEQ serait remplacé, quoique certaines rumeurs ont
circulé à ce sujet.
Alors, je serais prêt à passer...
M. LEVESQUE: Ce serait une grande déception dans la
région.
M. LESSARD: M. le Président, je pense que nous serions
prêts à passer au Conseil exécutif. Cependant, le premier
ministre a indiqué tout à l'heure...
M. LEVESQUE: Voici, à moins que... oui, peut-être que le
ministre...
M. QUENNEVILLE: M. le Président, d'abord, je voudrais remercier
les représentants de l'Opposition qui ont posé des questions
pertinentes. Leurs observations, à mon avis, très importantes et
susceptibles d'être retenues, en fait, ont mis en relief toute l'action
de l'ODEQ, la même action qui, parfois, dans certains journaux, est
passablement critiquée.
Je remercie donc les membres de l'Opposition pour leurs questions. Je
remercie aussi mes collaborateurs de l'ODEQ qui sont ici, qui m'ont aidé
de leur appui, et je vous remercie,
M. le Président, de la façon sereine avec laquelle vous
avez conduit les débats.
LE PRESIDENT (M. Picard): Doit-on comprendre que l'élément
4 du programme 4 est adopté?
M. LESSARD: Adopté, M. le Président.
M. LEVESQUE: M. le Président, en attendant le premier ministre
avec qui je viens de communiquer, et qui, je pense, a communiqué
également avec le député de Saguenay à son
arrivée, on me permettra de relever certains propos. Le
député de Saguenay va écouter. Cela va le reposer parce
qu'il n'a pas arrêté beaucoup depuis le matin; on va lui donner
une chance.
M. LESSARD: On est certain d'engager une aitre discussion.
M. LEVESQUE: C'est ça. Disons que nous avons écouté
attentivement les propos formulés par le député de
Saguenay, hier, suite à l'exposé d'ouverture que nous avons fait
au début de la discussion des crédits de l'Office de
planification et de développement du Québec.
Nous formulerons d'abord, dans une première partie, des remarques
à l'égard des propos préliminaires contenus dans son
exposé et, dans une deuxième partie, nous commenterons les cinq
principaux points de ses propos.
Dans ses remarques préliminaires, le député de
Saguenay constate essentiellement trois faits: premièrement, que l'Etat
est responsable de l'évolution économique, qu'il lui appartient
de lutter contre les crises et le sous-emploi, d'orienter, de formuler et de
coordonner les efforts en vue de l'expansion du progrès
économique et social; en second lieu, les ressources tant
économiques qu'humaines ne sont pas illimitées, il importe que
ces ressources soient utilisées de la façon la plus rationnelle
possible et de la façon la plus efficace possible pour l'ensemble des
citoyens du Québec et aussi pour l'ensemble de l'aménagement du
territoire québécois; et, troisièmement, le
député de Saguenay constate qu'il y a au Québec une
modification des mentalités, la démocratie traditionnelle,
c'est-à-dire la délégation par le peuple de sa
souveraineté politique entre les mains des représentants
élus, à tout le moins à tous les quatre ans, est non
seulement c'est lui qui le dit, je ne voudrais pas prendre ses paroles
un style de démocratie inférieure, mais il ne peut plus
être accepté par une population qui est de plus en plus
éveillée et qui a compris que toute décision de l'Etat a
des conséquences néfastes ou heureuses à la fois sur sa
vie présente comme sur sa vie future. Fin de la citation du
député de Saguenay.
Donc, si on me le permet, on peut examiner les trois points
soulevés par le député. D'abord, il est vrai de dire que
l'Etat est responsable de l'évolution de l'économie; il doit en
effet voir à
la régularité des activités économiques,
mais ceci ne signifie pas que l'Etat doit être l'unique agent de
développement. L'Etat; influence par des législations, des
réglementations, la fiscalité, les aides ou l'incitation
financière à l'industrie, mais il n'est pas le seul à agir
au palier du développement économique. De multiples agents,
entreprises, corps intermédiaires, municipalités, agissent sur le
développement économique et l'Etat doit se préoccuper
dès lors de préciser les objectifs d'ensemble, de façon
que ces différents agents puissent agir de concert pour un
développement économique harmonieux. Cette démarche se
fait en général par la planification du développement et
par l'aménagement du territoire.
En second lieu, sur le second point, il est vrai de dire que les
ressources au Québec, tant économiques qu'humaines, ne sont pas
illimitées. Il importe de les utiliser de façon rationnelle.
C'est ce qu'on peut appeler la détermination des priorités
d'intervention, et, à cet égard, il s'agit du second volet de la
planification qui consiste à proposer des priorités en fonction
de stratégies, d'objectifs, donc qui obligent à faire des choix.
Il ne s'agit pas là de quelque chose de nouveau, comme l'admettra bien
volontiers mon ami d'en face.
Le troisième point concerne la modification des mentalités
qui me paraît beaucoup plus fondamentale. Lorsque le député
parle d'une démocratie inférieure à l'intérieur
d'un système de délégation, par le peuple, de la
souveraineté politique entre les mains des représentants
élus et que, par la suite, il donne des exemples tels que Cabano.
Sacré-Coeur, Marsoui, Mont-Brun et ainsi de suite, je pense qu'il
mêle les choses. En effet, d'une part il existe, dans notre
société, un système démocratique avec des gens
élus tous les quatre ans, délégués par un peuple
souverain. Ces députés, une fois élus, ont le mandat de
légiférer, de réglementer en fonction des besoins
perçus auprès de la population. Il ne s'agit pas d'un style de
démocratie inférieure; il s'agit de la véritable
démocratie. Par ailleurs, lorsque la population, par différents
mouvements, désire participer à des actions de
développement, il s'agit là tout simplement de l'expression d'une
volonté qui doit s'insérer à l'intérieur de
structures de développement selon les règles du jeu qui existent
et que nous ne pouvons changer brutalement sans mettre en cause toute la
structure de production du Québec.
Donc, d'un côté, il s'agit d'un système politique
démocratique et d'un système parlementaire, ce qui est une chose
et, de l'autre côté, il s'agit de la participation de groupes de
la population à des actions de développement, ce qui est une
autre chose. Il convient de bien distinguer ces deux points, il me semble, pour
amorcer les autres éléments de discussion.
Quant aux cinq principaux points soulevés par le
député, d'abord la discussion des objectifs de
développement économique. Les éléments soumis par
le député concernant la discussion sur ce thème se
partagent en deux; d'une part, s'appuyant savamment sur une citation de M.
Mendès-France, il affirme qu'une poignée d'hommes...
M. LESSARD: Boulanger-Canada.
M. LEVESQUE: ... fussent-ils riches de toutes les sciences
économiques du monde ne peut décider de tout. D'autre part, les
objectifs globaux de la planification doivent être
déterminés par des techniciens qui possèdent un certain
nombre d'informations que la population ne possède pas dans la plupart
des cas et, en conséquence, les rapports qu'ils produisent dont, par
exemple, le livre jaune, devraient dans les prochains mois être
discutés par l'ensemble de la population du Québec et, en
particulier, par les élus de la population, c'est-à-dire les
députés.
Sur le premier point, nous sommes d'accord et les techniciens aussi le
sont pour que les orientations de développement et d'aménagement
du territoire ne peuvent être le fruit seulement de prévisions
économiques et d'analyses statistiques.
Il s'agit évidemment de refléter, dans ces objectifs, un
certain nombre de valeurs correspondant au système de valeurs d'une
population et c'est là qu'il nous faut introduire la participation de la
population, selon un certain déroulement. Ceci s'applique au document
appelé livre jaune de l'OPDQ.
Quel est ce déroulement et ses différentes phases? Il y a
plusieurs phases dans l'élaboration d'un document-synthèse sur le
développement économique et l'aménagement du territoire.
Dans un premier temps, les techniciens préparent la matière
statistique nécessaire pour faire l'analyse d'une situation
donnée. Ils dégagent, eux, à la lumière de ces
analyses, une première série d'objectifs à atteindre. Dans
un deuxième temps, ce document est soumis aux autorités
gouvernementales pour en faire une première analyse.
M. LESSARD: Est-ce que le ministre n'aurait pas une copie de sa
déclaration?
M. LEVESQUE: Non, parce que c'est une improvisation dictée par
des notes, j'allais dire volumineuses, mais disons très...
M. CHARRON: C'est toujours permis en vertu des règlements.
M. LEVESQUE: ... remplies de l'inspiration du moment, mais
également qui ont une force de persuasion presque
instantanée.
Dans un premier temps, ce document est soumis aux autorités
gouvernementales, comme je le disais, pour en faire une première
analyse. C'est ce qui a été fait dans le cas du livre jaune
puisque le document a été analysé par le groupe
ministériel de planification et de développement qui
comprend six ministres. Dans un troisième temps, ce document
version préliminaire toujours, comme l'a d'ailleurs souligné le
député, pour lui rendre justice fait l'objet de ce que
nous appelons une consultation technique. Il convient ici de distinguer entre
une consultation dite technique et une consultation dite populaire. La
consultation technique fait appel à des techniciens qui examinent
surtout la qualité technique des dossiers; la consultation populaire
fait surtout appel à des groupes représentant la population pour
voir si les objectifs proposés correspondent aux valeurs existantes et
voulues dans la population.
Dans un quatrième temps, les documents préliminaires du
type livre jaune, une fois soumis à la consultation technique,
c'est-à-dire au Conseil de la planification et de développement
du Québec, aux ministères, aux organismes gouvernementaux, sont
repris pour une deuxième rédaction de façon à faire
ensuite cette consultation dite populaire.
Comme on le voit, il s'agit là d'un processus de planification
qui fait appel à différents moments à des techniciens,
à des groupes représentant la population et enfin à
l'instance décisionnelle gouvernementale. Dans tous les pays du monde
où il se fait de la planification dans le système occidental,
c'est en général le processus qui est suivi et, dans tous les
cas, l'élaboration des dossiers de synthèse, de
développement et d'aménagement commande un déroulement des
opérations sur une période de deux ou trois ans avant
l'approbation de ses lignes directrices comme cadre d'orientation des
activités de développement et d'aménagement du territoire.
Je pense qu'il n'est pas juste de parler, d'un côté, des
techniciens et, de l'autre côté, de la population. Comme vous
pouvez le constater, il s'agit d'un processus un peu plus complexe que celui
que décrivait le député.
Passons maintenant au document jaune de l'OPDQ et à
l'entente-cadre de développement. Dans son exposé, le
député a semblé voir une contradiction entre le rapport
préliminaire que constitue le document jaune et la signature de
l'entente-cadre qui intègre un certain nombre de lignes directrices
présentées dans ce document.
Je pense qu'il n'a pas très bien lu le texte de l'entente-cadre
de développement. Lorsque nous avons signé l'entente-cadre, nous
avions en main la version préliminaire du document sur
l'aménagement du territoire et des développements
économiques. Nous devions préciser, en annexe à cette
entente, les éléments de stratégie qui étaient les
nôtres à cette époque. Nous ne pouvions pas nous permettre
de signer un an ou deux après les autres provinces, ce qui
entraînerait des pertes d'argent assez substantielles. Nous avons donc
inclus, en annexe, des éléments de stratégie qui
étaient les nôtres et nous avons inséré, à
l'intérieur de l'entente, le mécanisme suivant: à chaque
année, les ministres responsables de l'administration de cette entende
se rencontrent avec leurs conjoints, avec leurs principaux collaborateurs pour
revoir le déroulement de cette entente de même que pour
évaluer les éléments de stratégie qui y sont
intégrés, de façon à les modifier, si cela est
nécessaire, à la fois en fonction de la conjoncture et à
la fois en fonction des analyses plus profondes qui pourraient être
faites. On ne doit pas arrêter tous les trains parce que l'on a
décidé de planifier le système ferroviaire, pas plus que
l'on doit arrêter tous les bateaux d'aller pêcher parce que l'on a
décidé de planifier le secteur des pêches.
Si on me le permet, je continuerai à discuter du discours
d'ouverture...
M. LESSARD: Très intéressant.
M. LEVESQUE: ... du député de Saguenay à une
prochaine réunion et, comme il a été entendu et convenu,
nous pourrions entendre immédiatement le premier ministre et
étudier les crédits qui lui sont proprement affectés.
M. LESSARD: Est-ce que le ministre ne pourrait pas me remettre...
M. LEVESQUE: Ce que j'ai dit jusqu'à maintenant?
M. LESSARD: ... une déclaration...
M. LEVESQUE: Certainement.
M. LESSARD: ... et ce que vous allez dire.
M. LEVESQUE: Non, parce qu'il faut que je corrige le reste.
M. BOURASSA: M. le Président, c'est juste que j'ai seulement
suggéré de faire cela immédiatement de manière que
l'Opposition puisse prendre connaissance, et les membres de la commission,
d'une déclaration que je voulais faire.
LE PRESIDENT (M. Picard): Si l'honorable premier ministre me le permet,
nous procéderons maintenant à l'étude du programme 3:
Organismes-conseils auprès du premier ministre et du Conseil
exécutif.
L'honorable premier ministre.
Organismes-conseils auprès du premier ministre
et du Conseil exécutif
M. BOURASSA: M. le Président, je pense qu'il convient, au
début de l'étude de mes crédits, de la présidence
de l'Exécutif et du Conseil exécutif, de faire part d'une
déclaration. Il y a dix ou douze jours, j'avais dit que, aussitôt
que possible, je ferais une déclaration sur la question des conflits
d'intérêts et que je
déposerais le rapport de même que les directives. J'ai
pensé de faire cela un peu avant six heures de manière que
l'Opposition et les membres de la commission puissent examiner les documents.
Ils pourront poser des questions, s'ils le veulent, à la reprise de la
discussion, à 20 h 15.
M. LESSARD: Est-ce que je peux comprendre que le premier ministre
pourrait déposer un document?
M. BOURASSA: Oui, d'accord. Je vais seulement le résumer
d'abord.
M. LESSARD: D'accord.
M. BOURASSA: J'ai, dans plusieurs déclarations
antérieures, affirmé que le principe de l'indépendance
absolue des membres du Conseil exécutif doit continuer d'être
respecté au Québec pour permettre aux ministres d'assumer leurs
responsabilités en toute liberté.
Le respect de ce principe est, en effet, à la base du maintien de
la confiance du citoyen, dans la valeur de nos institutions
démocratiques et j'y ai toujours accordé personnellement la plus
grande importance. Le Québec doit, lui aussi, participer à
l'effort entrepris récemment par l'ensemble des gouvernements au Canada
en vue de traduire désormais ce principe en des normes et directives
claires précises et facilement accessibles au public.
Je viens d'informer les membres du conseil des ministres des mesures qui
les concernent et une copie de ces directives leur sera remise d'ici quelques
heures.
Pour ce qui a trait aux lois existantes, les ministres doivent, bien
entendu, continuer de se conformer aux exigences des lois existantes en ce qui
concerne le principe de l'indépendance des membres du Conseil
exécutif.
Pour ce qui a trait aux activités professionnelles, commerciales
ou d'affaires, les ministres doivent mettre fin pour toute la durée de
leur mandat aux activités professionnelles, commerciales et d'affaires
qui pourraient les empêcher de consacrer le temps qu'il faut à
leurs fonctions.
Pour ce qui a trait aux sociétés privées, les
ministres doivent faire en sorte que les compagnies privées dans
lesquelles eux-mêmes et leur famille immédiate,
c'est-à-dire leur épouse et leurs enfants mineurs, ont des
actions directement ou par personne ou compagnie interposée,
s'abstiennent de faire des marchés avec l'Etat, c'est-à-dire de
fournir des biens ou des services au gouvernement du Québec et ses
ministères, ou de recevoir de l'argent par voie d'emprunts ou de
subventions du gouvernement du Québec et de ses ministères.
Les ministres doivent également voir à ce que de telles
sociétés privées s'abstiennent de conclure des
marchés avec les agences du gouvernement, à moins qu'ils n'aient
qu'une proportion minime du capital-actions de ces sociétés, soit
de l'ordre de 5 p.c. des actions émises, ou que le montant total de ces
marchés se situe dans une proportion semblable du chiffre d'affaires
pour l'exercice financier précédent. De plus, les ministres ne
devront pas participer aux décisions de telles sociétés
relatives à ces marchés et ces marchés devront être
conclus suivant la procédure usuelle d'octroi de contrats publics et
seulement avec les agences sur lesquelles aucun ministre n'a d'autorité
administrative directe.
La présente règle n'a pas pour effet d'interdire à
un ministre de participer à un marché avec l'Etat auquel il
participait avant sa nomination au conseil des ministres, ou auquel il a
commencé de participer après sa nomination par l'effet de son
mariage, par l'effet de la loi ou par succession, mais le ministre doit mettre
fin à cette participation le plus tôt possible après sa
nomination ou après l'événement ayant donné
naissance à cette participation et, dans tous les cas au plus tard, dans
les douze mois suivants.
Le ministre qui participe à un marché avec l'Etat par la
voie d'une société privée au moment de l'entrée en
vigueur de cette règle devra mettre un terme à cette
participation soit que la société renonce au marché, soit
que le ministre dispose de ses intérêts dans la
société dans les meilleurs délais, compte tenu du temps
nécessaire à cette disposition.
Les deux paragraphes précédents s'appliquent mutatis
mutandis à la famille immédiate du ministre.
Pour ce qui a trait à la propriété foncière.
Pendant toute la durée de leur mandat, les ministres doivent de plus se
soumettre à la restriction suivante. Sauf dans le cas d'une
propriété foncière acquise pour leur usage personnel,
à des fins de résidence, il leur sera interdit, ainsi qu'à
leur famille immédiate, d'acheter pour des fins de spéculation,
un terrain ou d'acquérir des intérêts dans une
propriété foncière au Québec ou encore dans une
société de mise en valeur immobilière faisant affaires au
Québec. Rien n'empêche l'acquisition de terres agricoles pour un
ministre qui se propose d'en faire l'exploitation, ni l'acquisition
personnellement ou par des société privées d'immeubles
devant servir à des fins commerciales normales, ni l'acquisition de
terrains voisins de propriétés résidentielles
déjà détenues dans le but d'améliorer ces
dernières.
Compagnies publiques. Les ministres doivent se départir de leurs
intérêts dans les compagnies publiques ou compte tenu du
régime de la fiducie au Québec ou des implications fiscales, de
les confier à un fiduciaire. Dans ce dernier cas, les ministres ne
devront exercer aucune influence sur les décisions relatives au
placement, ni sur la façon d'administrer les fonds.
Les ministres conservent toutefois la faculté de retirer des
sommes des fonds ou d'y placer de nouveaux montants.
Cas particuliers: En raison de la nature des
attributions d'un ministre envers un type donné
d'activités commerciales ou financières, il pourrait lui
être demandé que lui-même, ou sa famille immédiate,
se départisse d'un placement dans une compagnie privée ou
publique. Exceptionnellement, dans des cas mettant en cause
l'intérêt public, un marché avec l'Etat pourrait être
conclu, même s'il déroge aux présentes directives, à
la condition toutefois que les lois existantes sur l'indépendance des
membres du Conseil exécutif soient rigoureusement respectées. La
commission parlementaire des engagements financiers sera alors informée
de tous les détails du marché et ce, avant sa conclusion, sauf
pour les cas d'urgence.
Pour ce qui a trait à la divulgation, chaque ministre doit
remettre au secrétaire général du Conseil exécutif,
le ou vers le 1er août prochain, et le 1er août de chaque
année, pendant la durée de ses fonctions, une déclaration
contenant les informations suivantes, et tenir à jour ces
dernières, lors de changements significatifs: le nom de toute
société privée dans laquelle il détient des
intérêts sous forme d'actions ou de créances et qui est
susceptible d'être partie à un marché avec l'Etat,
c'est-à-dire une société ou une compagnie privée
offrant, dans un but lucratif, des biens ou des services dont le gouvernement
et ses organismes pourraient se prévaloir; les terrains ou immeubles
dont il est propriétaire, en tout ou en partie au Québec, sauf
ceux qui sont occupés par le ministre, ou ses dépendants, et sauf
les maisons ou logements destinés à l'usage résidentiel.
Toutefois, tout immeuble faisant l'objet d'un avis d'expropriation de la part
du gouvernement du Québec, ou de l'un de ses organismes, devra
être ajouté à cette déclaration sans délai,
s'il n'y est pas déjà.
Troisièmement, les nom, occupation et adresse de tout
créancier individuel autre que les institutions financières,
envers qui le ministre a une dette personnelle excédant $2,000 et qui
résulte d'un emprunt d'argent non garanti, en indiquant le montant du
solde dû, s'il excède $20,000.
Quatrièmement, toute entreprise ou société
commerciale non incorporée, dans laquelle il est associé ou
propriétaire et qui est susceptible de faire des marchés avec
l'Etat.
Cinquièmement, la nature et la mesure de toute participation dans
un marché avec une agence du gouvernement, depuis sa dernière
déclaration.
Sixièmement, au meilleur de sa connaissance, les renseignements
prévus aux paragraphes 1, 2, 3, 4 et 5, concernant son épouse et
ses enfants mineurs.
Le ministre pour qui les dispositions des paragraphes un à six ne
trouvent pas d'application doit déposer une déclaration à
cet effet. Ces déclarations seront accessibles aux personnes qui en
feront la demande et une copie de telle déclaration sera transmise aux
ministères et organismes gouvernementaux mentionnés à la
liste qui sera tenue à jour, au bureau du secrétaire
général du Conseil exécutif.
Voilà les directives qui seront envoyées incessamment
à mes collègues du conseil des ministres et dont j'avais
déjà discuté verbalement. Elles représentent une
synthèse de l'interdiction de la divulgation, de même que des
mécanismes de contrôle. Dans le mémoire qui sera
déposé en même temps, ou le document qui sera
déposé et qui a été rédigé par le
comité présidé par le ministre d'Etat au Conseil
exécutif, le député de Marguerite-Bourgeoys, de même
que par mon conseiller législatif, M. Jean-Claude Rivest et d'autres
collaborateurs, on trouvera plus de détails et de justifications pour
expliquer ces directives.
Je ne sais pas si le député a des questions à poser
avant la suspension des travaux.
M. LESSARD: M. le Président, considérant l'importance de
ce document, vous me permettrez de réserver mes commentaires ou les
commentaires de mes collègues, que ce soit Me Robert Burns ou Me
Jacques-Yvan Morin. En conséquence, je proposerais la suspension des
travaux de la commission.
M. BOURASSA: J'ai dit au leader parlementaire de l'Opposition et
député de Maisonneuve, qu'étant donné que je dois
partir pour une conférence jeudi probablement, mes crédits
commenceraient probablement aujourd'hui si on veut les terminer demain et je
l'ai prévenu que je déposerais ce document. Quant aux
commentaires, ils pourront certainement être exprimés plus
tard.
M. LESSARD: D'accord. Cela veut dire que ce soir, à 8 h 15, nous
discutons justement des crédits de la présidence du conseil.
M. BOURASSA: Et si nous n'avons pas terminé ce soir, vous pourrez
continuer demain matin et on pourrait reprendre cela demain
après-midi.
M. LESSARD: Alors, en conséquence, je pense que nous pourrions
suspendre les travaux de la commission jusqu'à 8 h 15.
M. BOURASSA: Est-ce que je peux demander que, et le rapport et la
déclaration soient mis en annexe au journal des Débats?
M. LESSARD: Oui.
LE PRESIDENT (M. Picard): Tout le monde est d'accord. La
déclaration et le rapport en annexe au journal des Débats. (Voir
annexe)
M. LESSARD: Mais, est-ce qu'il est possible, actuellement, d'obtenir
justement...
M. BOURASSA: On va vous en distribuer tantôt. Je vais
déposer ces deux copies des
directives et du rapport pour le journal des Débats.
LE PRESIDENT (M. Picard): La commission suspend ses travaux
jusqu'à ce soir, 20 h 15, à la même salle.
(Suspension de la séance à 17 h 50)
Reprise de la séance à 20 h 21
M. PICARD (président de la commission permanente de la
présidence du conseil, de la constitution et des affaires
intergouvernementales): A l'ordre, messieurs! La commission continuera ce soir
l'étude des crédits du Conseil exécutif. Pour la
séance de ce soir, M. Lachappelle (Chauveau) remplace M. Beaure-gard
(Gouin) et M. Burns (Maisonneuve) remplace M. Charron (Saint-Jacques).
D'accord? Au moment de la suspension des travaux avant le dfner, le premier
ministre avait déposé un document. Je crois que le leader
parlementaire de l'Opposition aurait quelques questions à poser en
rapport avec ce document.
Directives sur les conflits
d'intérêts
M. BOURASSA: J'avais dit au leader que je déposerais le document
quand mes crédits commenceraient. Ils ont commencé vers cinq
heures et demie et j'ai déposé le document de manière
qu'il puisse en prendre connaissance durant une couple d'heure pour me donner
ses commentaires.
M. BURNS: Je remercie le premier ministre. J'ai eu le temps
brièvement d'en prendre connaissance, pas tellement à fond, de
sorte que je ne me lancerai pas dans un long commentaire du document. Ce que
j'aimerais que le premier ministre fasse, c'est qu'il nous donne quelques
précisions relativement au projet. Déjà il y a un certain
nombre de questions que le texte m'a suggérées. Peut-être
la première de toute, c'est le fait que je ne retrouve pas dans le
document ou dans les directives et puis, avant ça, soyons...
M. BOURASSA: Méthodique.
M. BURNS: Non, soyons de bonne guerre. Je félicite d'abord le
premier ministre. Peut-être que ça lui a pris du temps, je
pourrais le critiquer là-dessus, je passe par-dessus ça...
M. BOURASSA: C'est compliqué à faire ça.
M. BURNS: ... mais je félicite le premier ministre d'avoir
posé le geste. C'est déjà une bonne chose. Quand
j'engueule un ministre et en particulier le premier ministre je
le fais gaiement; quand je le félicite, je le fais avec la même
gaieté.
M. BOURASSA: Merci.
M. BURNS: Je pense que c'est déjà un geste dans le bon
sens, dans le sens que nous voulions. Je ne suis pas certain, à un
moment donné, qu'il ne faille pas en arriver à faire de la
législation. Mais, comme je l'ai déjà dit au premier
ministre lorsque nous en avons parlé à
d'autres occasions, déjà les directives, je pense,
exercent une pression morale lorsqu'elles viennent du chef du gouvernement,
surtout lorsqu'on sait, du moins je l'imagine, qu'elles ont passé par le
biais du conseil des ministres et que probablement les ministres actuels seront
d'accord sur ces directives.
Quant à l'idée d'en émettre, même si c'est
sur le tard, comme on dit, je ne peux pas m'empêcher de féliciter
le premier ministre à ce sujet. Cependant, et c'est la question
générale qui se pose à mon esprit, je vois que ni les
hauts fonctionnaires ni les députés ne sont couverts par ce
document. Est-ce qu'il y a des raisons particulières, est-ce que le
premier ministre et ses conseillers se sont penchés sur ce
problème? Est-ce que, par hasard, après avoir
étudié cette situation, ils auraient décidé que ce
n'était pas faisable, que ce n'était pas acceptable, que ce
n'était pas conforme à leur philisophie? C'est dans ce sens que
je voudrais des précisions de la part du premier ministre.
M. BOURASSA: Je remercie le leader parlementaire de l'Opposition de ses
paroles. Pour ce qui a trait aux haut fonctionnaires et aux
députés, disons que le conseil des ministres, c'était une
première étape. Le leader parlementaire va se rendre compte que
ce n'était pas facile à rédiger, si on veut tenir compte
du respect de la vie privée, de ce qui se fait dans d'autres provinces,
du recrutement du personnel politique, de l'intégrité, non
seulement de l'intégrité, en fait, mais du fait que toute
possibilité de soupçon puisse être écartée de
la part des gens raisonnables. Ce sont différents objectifs que nous
avons essayé de rechercher avec les directives pour les ministres.
Eventuellement, cela se fera sous forme de projet de loi.
Je crois que M. Rivest a communiqué avec un légiste ou
avec un avocat qui va commencer incessamment à travailler cela pour le
mettre sous forme de projet de loi. On aura probablement quelques mois
d'expérience et on verra s'il doit y avoir des modifications. Cela
devrait s'appliquer, éventuellement, aussi aux députés et
aux hauts fonctionnaires. Je crois que dans le cas des fonctionnaires des
travaux ont été faits et c'est assez avancé. Pour
répondre précisément au leader parlementaire, c'est
seulement une première étape.
M. BURNS: En somme, votre document, même s'il ne parle pas des
hauts fonctionnaires et des députés, ne les écarte pas
systématiquement.
M. BOURASSA: Non.
M. BURNS: C'est cela que je veux savoir.
M. BOURASSA: Peut-être que ce ne sera pas la même chose dans
le cas des députés parce qu'ils n'ont pas à
administrer.
M. BURNS: Oui, d'accord, ce ne sont peut- être pas les mêmes
obligations qu'on pourrait imposer à des députés, ou
encore on pourrait faire une autre catégorie, disons les hauts
fonctionnaires. Mais vous ne l'écartez pas comme possibilité.
M. BOURASSA: II n'y a pas de limite dans ces questions de conflit
d'intérêts. En Angleterre, on veut même inclure les
chroniqueurs parlementaires parce qu'on dit que les journalistes peuvent
faire... Je ne dis pas que je vais le faire, je dis qu'en Angleterre on parle
d'inclure les chroniqueurs parlementaires parce qu'ils peuvent parler de telle
entreprise.
M. BURNS: Evidemment, si on inclut les chroniqueurs parlementaires, ce
sera dans une limite particulière, c'est-à-dire dans le
cas...
M. BOURASSA: Moi, je n'ai pas...
M. BURNS: Ce ne sont pas eux qui décident des contrats.
M. BOURASSA: Non, mais je veux dire que la pression de l'opinion
publique, le député de Maisonneuve en est conscient, peut se
faire de toutes sortes de façons. Je ne dis pas que ce n'est pas la
politique du gouvernement d'inclure les chroniqueurs parlementaires, mais je
dis que dans certains pays on songe à le faire. Il s'agirait qu'on fasse
une campagne de presse sur telle compagnie, que ce soit défavorable ou
favorable, pour aider ou nuire à la compagnie. C'est une première
étape.
M. LESSARD: Etant donné que c'est un projet préliminaire,
que c'est une expérience que vous faites et étant donné
que c'est très important, est-ce que le premier ministre envisage la
possibilité de l'inscrire dans la Loi de la Législature?
Soumettre une loi à l'Assemblée nationale?
M. BOURASSA: La plupart des autres provinces ont abordé cette
question. Il faut admettre qu'on va plus loin que la plupart des autres
provinces. La presque totalité des provinces se contentent de forcer la
divulgation, parce qu'elles disent: Si tout est divulgué, si tout est
connu et s'il y a des mécanismes de contrôle, il n'y a pas lieu
d'interdire. C'est un peu l'avis de sept ou huit provinces, et du
fédéral. Ils insistent pour la divulgation, comme en
Colombie-Britannique, ils insistent pour la divulgation complète, mais
ils ne font pas d'interdiction.
Nous, on va plus loin que la majorité des provinces, on va plus
loin même que l'Ontario, qui a des interdictions sous certains rapports,
dans le cas des dettes par exemple. On pourra en discuter tantôt. C'est
une décision, puis elle est prise, mais que tous les hommes politiques
soient obligés d'énumérer toutes leurs dettes en haut de
$2,000, on le fait parce qu'il peut avoir des possibilités de conflit
d'intérêts. On se trouve à aller plus loin que non
seulement toutes les provinces qui se contentent de la
divulgation, mais que l'Ontario, je crois, qui, lui, ne va pas
jusque-là. Inscrire ça dans un projet de loi, ça peut se
faire dans deux semaines mais, si on veut discuter, si on veut aborder le
problème d'une façon réaliste, il faut commencer avec des
directives. Il s'agit d'une erreur, il s'agit que la femme d'un ministre
décide de faire une transaction dans une compagnie à l'insu du
ministre pour que le ministre, si on met ça dans une loi, soit
obligé de démissionner. Si on fait ça trop vague dans la
loi, on ne peut pas l'appliquer.
M. LESSARD: Quand vous parlez de démission, ce que je constate,
c'est qu'il ne semble pas y avoir des sanctions qui sont prévues dans le
cas où un ministre ne se soumettrait pas à ces directives.
M. LALONDE: Là-dessus, je pense qu'il faut bien se rendre compte
que les directives ont une différence essentielle d'avec une loi. Les
démarches qui sont faites dans les autres provinces actuellement
s'inscrivent soit quand elles s'adressent seulement aux ministres par voie de
directives ou par voie de projets de loi qui s'adressent à des
députés comme tels. On ne fait pas la distinction entre un
député et un ministre, mais c'est seulement dans la mesure
où on s'adresse à un député qu'on peut l'inscrire
dans la Loi de la Législature.
Maintenant, les directives, par la nature même du document ou du
geste, ne peuvent pas comporter de pénalité, de sanction
pénale parce que, justement, ce n'est pas une loi. La sanction non
écrite, naturellement, c'est que si un ministre ne se conforme pas, je
ne parle d'une question d'accident, c'est une question de discernement de la
part du premier ministre, s'il y avait un viol de ces directives, il n'y a pas
de doute que la seule possibilité est de quitter le conseil.
M. LESSARD: Mais le ministre responsable du Conseil exécutif nous
dit que des directives ne donnent pas sujet à des sanctions. Est-ce que
les directives concernant l'utilisation, par exemple, des avions
gouvernementaux ne prévoient pas des sanctions, en particulier le
remboursement quand l'utilisation est pour des fins personnelles?
M. BOURASSA: II y a eu des cas qui ont été soulevés
par le député de Maisonneuve, le leader parlementaire, et le
ministre des Transports a répondu à ces cas. Mais la loi est
très claire. Pour les directives, disons que le premier ministre envoie
des directives à ses collègues, c'est pour qu'elles soient
respectées. Si elles ne le sont pas, je pense bien, à moins qu'il
y ait des cas où le ministre est complètement ignorant ou n'est
pas du tout responsable s'il y avait une transaction... C'est pour cela
qu'avant de le mettre dans le projet de loi, il n'existe pas un tel projet de
loi au Canada, à ma connaissance, il y a des directives qui existent en
Ontario, il y a des projets de loi, mais dans les projets de loi qui ont
été adoptés il s'agit simplement de divulgation. Il
n'existe pas de projet de loi comme celui-là.
Je pense bien qu'on va faire le maximum, comme je le dis en terminant.
La liste va être envoyée à toutes les personnes qui en
feront la demande, ces déclarations seront accessibles et une copie de
telles déclarations sera transmise aux ministères et organismes
gouvernementaux mentionnés à la liste qui sera tenue à
jour au bureau du secrétaire général du Conseil
exécutif.
La commission des engagements financiers va examiner cela.
Il peut arriver un cas où le ministre n'est pas du tout en cause.
Ce sera au premier ministre, à ce moment-là, d'examiner la
situation. Est-ce qu'il doit exiger la démission de son ministre, est-ce
qu'il doit exiger d'autres sanctions, est-ce qu'il doit annuler la transaction?
Il y a différentes avenues qui lui sont possibles. Mais la sanction
normale, c'est la démission du ministre, s'il ne respecte pas les
directives.
Mais il peut arriver que des causes expliquent le geste et où le
ministre n'est aucunement responsable. Alors, si le premier ministre il
pourrait y avoir quand même injustice pour le ministre en cause
par un projet de loi, force le ministre à démissionner,
même s'il n'y a aucune espèce... Ce sont quand même des
choses qui se font avec pleine divulgation, ce sont des choses qui se font avec
la soumission la plus basse, avec des mécanismes de contrôle;
alors, cela va être assez difficile de pouvoir recruter du personnel,
s'ils se disent: S'il y a un fils, la femme ou une compagnie dont il a 3 p.a, 4
p.c. ou 6 p.c. des actions. Parce qu'il peut arriver que le ministre n'ait pas
le contrôle. S'il a 6 p.c. des actions, il y a 94 p.c. des actions qui ne
sont pas entre ses mains.
Alors, il peut arriver que les gens vont dire: Bon, c'est à nous
de décider. On n'est pas pour être pénalisé. Le
ministre devra vendre ses actions à ce moment-là. La sanction
peut être de forcer le ministre à vendre ses actions ou de le
forcer à démissionner, s'il a mauvaise foi. C'est le premier
ministre qui jugera à ce moment-là.
M. LESSARD: C'est aussi fonction des compagnies. Si vous avez un
éparpillement assez large des actions, avec 6 p.c. ou 7 p.c. des
actions, vous pouvez quand même...
M. BOURASSA: Chez les compagnies privées, ce n'est pas le
cas.
M. LESSARD: On va en reparler tantôt.
M. BOURASSA: D'accord. Dans les compagnies privées, celui qui est
actionnaire majoritaire, c'est lui qui décide. Il peut refuser de
s'occuper des représentations de l'actionnaire minoritaire.
Alors, le choix, pour le ministre, à ce moment-là, c'est
de vendre ses actions. Comme c'est une compagnie privée, il faut qu'il
trouve un acheteur. S'il est forcé de vendre, les acheteurs vont pouvoir
avoir un bon prix pour ses actions. Cela peut aller assez loin, quand on
regarde cela sous ce rapport.
M. BURNS: Justement, la critique générale qu'on pourrait
faire au sujet de ces directives, c'est qu'il y a beaucoup de discrétion
dedans. Le premier ministre, par la réponse qu'il vient de donner
à mon collègue de Saguenay, le souligne davantage,
c'est-à-dire que, chaque fois, on devra juger la situation, examiner
s'il y a eu mauvaise foi de la part du ministre. Le premier ministre, dans le
fond, sera celui qui exercera cette discrétion.
Est-ce que le premier ministre n'a pas envisagé je le dis
sans faire de blague de s'enlever le plus possible de discrétion
dans l'application de ces directives-là, par exemple en confiant
à une commission parlementaire celle de l'Assemblée
nationale est toute désignée la possibilité
d'examiner un cas qui pourrait se soulever en cours d'application?
Je signale au premier ministre que, déjà, la Loi de la
Législature fait de notre commission parlementaire de l'Assemblée
nationale une espèce de tribunal à l'endroit des
députés et des ministres. Par exemple, s'il a pris un
privilège... Je ne reviens pas sur un cas récent que j'avais
soulevé à l'Assemblée nationale. Le président de
l'Assemblée a rendu une décision qui n'était pas favorable
à ma thèse et je ne reviendrai pas là-dessus
mais, si par hasard ma motion avait été adoptée, elle
aurait amené un député devant la commission de
l'Assemblée nationale ou encore elle aurait amené des individus
extérieurs au Parlement devant la commission de l'Assemblée
nationale pour répondre à des accusations. A ce moment-là,
la commission de l'Assemblée nationale se transforme en véritable
tribunal.
Je le lance au hasard; je ne dis pas que j'ai pensé à
ça pendant des nuits, ni quoi que ce soit, mais, voyant l'ensemble des
pouvoirs discrétionnaires qui sont laissés au premier ministre
là-dedans, je me demande si cet instrument-là qui existe
déjà ou un autre instrument ne pourrait pas décharger le
premier ministre je le dis en toute sincérité de
l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire.
M. BOURASSA: Je suis d'accord, si on trouve une formule, parce que cela
peut être assez difficile pour le premier ministre parfois de trancher
ces questions-là. Moi, j'avais pensé à ces cas,
"exceptionnellement dans des cas mettant en cause l'intérêt
public, à condition, toutefois, que la loi soit respectée, la
commission parlementaire des engagements financiers sera alors informée
de tous les détails du marché, et ce avant sa conclusion, sauf
pour des cas d'urgence."
Evidemment, je ne voudrais pas changer le texte à ce stade-ci,
mais on pourrait peut-être considérer que ce soit la commission de
l'Assemblée nationale plutôt que la commission des engagements
financiers. Si un cas se présentait, je peux dire au leader
parlementaire de l'Opposition qu'entre l'une et l'autre je n'aurais pas
d'objection à ce qu'on réfère soit aux engagements
financiers ou à la commission de l'Assemblée nationale suivant le
cas. Si c'est sérieux, évidemment, ce pourrait être la
commission perlementaire de l'Assemblée nationale. Si ça reste
assez secondaire, ça pourrait être la commission parlementaire des
engagements financiers.
M. BURNS: Maintenant sur l'ensemble du projet, vous avez répondu
tout à l'heure au député de Saguenay que, dans le fond,
c'était à peu près une espèce de document de
travail qui, éventuellement, donnerait probablement naissance à
un projet de loi. Et c'était probablement, également, le premier
jet de ce projet de loi. On voit que la mise en application des directives est
reportée au 1er août prochain. Est-ce que ça va être
en vigueur le 1er août, au moins sous cette forme-ci, même si elle
est imparfaite et même si on pourrait éventuellement y formuler
des critiques?
M. BOURASSA: C'est-à-dire...
M. BURNS: Est-ce que vous avez l'intention de mettre cela en vigueur,
c'est-à-dire que vos ministres sachent immédiatement que,
dès le 1er août, au moins cette directive va être en
vigueur?
M. BOURASSA: J'ai envoyé une lettre à chaque ministre
aujourd'hui, avec ces directives. Alors, elles sont en vigueur
immédiatement, sauf que dans certains cas les ministres devront se
départir de leurs actions, et il faut que je leur donne un temps
raisonnable. Si je fixe une date précise, je pense bien que ça
peut se faire d'ici quelques semaines, mais la divulgation est le 1er
août; c'est-à-dire que le 2 août, l'opinion publique pourra
connaître les éléments de divulgation qui sont inclus dans
les directives.
Quant à la vente des actions, il faut que je donne un certain
temps parce que si je fixe une date précise, l'action du ministre ne
vaudra rien la veille de cette date parce qu'il va être forcé de
s'en débarrasser. C'est pourquoi j'ai dit que ça devrait se faire
dans un délai raisonnable et je pense que le 2 août il sera
possible à l'opinion publique et aux membres de l'Assemblée
nationale de voir exactement ce qui reste d'actions aux ministres en cause, aux
entreprises qui peuvent faire affaires avec le gouvernement.
M. BURNS: Si je comprends bien le premier ministre, la directive est en
vigueur au moment où on se parle.
M. BOURASSA: Oui.
M. BURNS: Le délai de divulgation est fixé au 1er
août.
M. BOURASSA: C'est le 1er août. Quant au délai de vente des
actions, j'ai marqué "délai raisonnable", mais ça ne peut
pas aller tellement loin.
M. BURNS: Oui, d'ailleurs on va y venir, j'aurais des questions à
poser au premier ministre à ce sujet. Maintenant, est-ce que je peux
m'attacher au deuxième article qui s'appelle: Activités
professionnelles, commerciales ou d'affaires? Ce qui m'a vraiment sauté
aux yeux dans ce texte, c'est encore une fois son caractère flou. C'est
une caractéristique qu'on peut retrouver à plusieurs endroits
dans les directives. J'ai dit tout à l'heure que je ne ferais pas une
critique générale; là, je n'ose pas me définir
comme légiste, mais comme personne ayant l'habitude de lire des textes
à caractère juridique, je sursaute un peu quand je lis les
derniers mots du paragraphe 2 où on dit que tous les ministres doivent
mettre fin, pour toute la durée de leur mandat, aux activités
professionnelles, commerciales et d'affaires ce sont les mots qui
viennent qui me chicotent un peu qui pourraient les empêcher de
consacrer le temps qu il faut à leur fonction.
J'aurais pensé que dans le cas des ministres, en particulier, vu
qu'on ne parle pas des députés et des hauts fonctionnaires
dans le cas des hauts fonctionnaires, je ne suis pas sûr que ça
puisse s'appliquer parce que c'est une fonction à plein temps pour eux
on aurait pu dire carrément, à cet article-là, que
c'est une fonction à plein temps, qu'il n'est pas question qu'un
ministre ait des activités professionnelles, commerciales ou d'affaires
à l'extérieur, autres que celles qui sont permises dans le reste
des directives.
A moins que vous me disiez que certains ministres peuvent le faire, et
j'en doute, même ceux qui ont un tout petit budget comme le ministre de
l'Immigration; je suis convaincu qu'un ministre qui veut faire son travail
véritablement, c'est une "job" à plein temps, si vous me passez
l'expression.
Le texte actuel laisse sous-entendre qu'un ministre pourrait très
bien consacrer encore du temps à ses activités professionnelles,
commerciales ou d'affaires si ça ne nuit pas à son travail. Moi
je dis que c'est un énoncé de bonnes intentions, mais qui dans le
fond manque de mordant dans les faits. Il me semble qu'on devrait profiter de
l'occasion pour consacrer le fait qu'un ministre est quelqu'un qui fait un
travail à plein temps, qu'un ministre est quelqu'un qui n'a pas
d'affaire à avoir d'activités professionnelles, commerciales ou
d'affaires à l'extérieur, et déjà à ce
moment-là, on reconnaît le fait qu'on lui évite, à
lui, des possibilités éventuelles de conflits
d'intérêts.
Supposons par exemple, M. le premier ministre, que je continue à
avoir mon bureau d'avocat, même si le cas est déjà
réglé, d'ailleurs, par la Loi de la Législature. Mais
prenons le cas d'un bureau d'avocat, que je peux continuer à avoir mon
bureau, et même si c'est vrai que je n'y vais jamais, que j'ai encore des
intérêts là-dedans. Il est fort possible qu'à un
moment donné, pas moi avec mes pressions, mais mon existence et ma
pression morale dans le cabinet, le seul fait que je sois là fasse qu'on
envoie des choses à ce bureau-là. L'Opposition n'est pas
là comme une espèce de détective privé, pour suivre
pas à pas chacun des ministres, pour vérifier ce qu'ils font puis
sortir leur bilan puis savoir exactement ce qu'ils ont fait comme rapport
d'impôt à la fin de l'année.
Moi, ce que j'aimerais qu'on dise une fois pour toutes, c'est qu'un
ministre, à part les actions qu'il peut détenir légalement
si éventuellement la loi le permet est à plein
temps au service du Québec jusqu'à nouvel ordre, jusqu'à
ce que la population lui dise de retourner à ses activités ou
jusqu'à ce que lui-même décide d'y retourner. C'est pour
ça que je trouve que la fin du paragraphe 2 de votre directive manque un
peu de rigueur en ce sens qu'elle sous-entend que c'est encore possible de
faire d'autres choses que d'être ministre, en autant que ça ne
nuise pas aux fonctions de ministre. Et, encore là, qu'est-ce que
ça veut dire que ça n'empêche pas de consacrer le temps
qu'il faut aux fonctions du ministre? Déjà on est dans le domaine
de l'interprétation puis de la discrétion quant à...
M. BOURASSA: Disons que des cas ont été soulevés,
c'est pour ça que c'est assez difficile d'être restrictif. Par
exemple le médecin qui est nommé ministre, évidemment,
à toutes fins pratiques il laisse complètement sa pratique de
médecine, mais il peut lui arriver des vieux clients ou, pour des
questions de relations humaines, des gens qui tiennent absolument à
garder le médecin qu'ils ont toujours eu, et qu'il fasse peut-être
quelques consultations, extrêmement rarement, mais qu'il ne soit pas
empêché par la loi d'en faire. Ou un cultivateur qui devient
ministre peut, d'une façon très marginale, même durant les
quelques vacances qu'il peut avoir, continuer son exploitation agricole.
J'ai eu la réaction du leader parlementaire, d'autant plus,
aujourd'hui, que le ministre, normalement, ne devrait pas avoir cinq minutes
pour s'occuper de son travail personnel, et c'est le cas. On m'a
signalé, en réponse aux propos que je tenais, et que tient le
député de Maisonneuve, qu'il pouvait y avoir des cas comme
ça où on pouvait causer des problèmes humains. Mais avec
une formule comme ça c'est mieux. A toutes fins pratiques, aucun
ministre ne consacre du temps à son bureau, que ce soit comme
médecin, comme avocat ou autrement.
Mais il serait possible, avec une loi qui n'est pas trop étanche
ou des directives qui ne sont pas trop étanches, de permettre des cas
comme ça. Je ne veux pas nommer de cas, j'ai quelques médecins
dans mon conseil des ministres; des fois, il y en a que ça fait 20 ans
qu'ils traitent les mêmes personnes et c'est possible que ces
personnes-là demandent au médecin de continuer à les
traiter pendant quelque temps. C'est plutôt pour des raisons humanitaires
que pour n'importe quelle autre raison qu'on m'a signalé cela.
Dans un projet de loi, il faudrait que ce soit plus clair que cela, il
faudra trancher dans un sens ou dans l'autre.
M. BURNS: Bon, pour le moment, en tout cas, je ne vais pas plus loin que
cela. Je prends bonne note des explications du premier ministre. Je maintiens
quand même mes doutes quant à la largeur de la rédaction du
texte.
M. BOURASSA: D'accord.
M. BURNS: Si vraiment ce que le premier ministre mentionne pose un
problème, il me semble qu'on pourrait trouver un texte, que je n'ai pas
à l'esprit mais qui pourrait peut-être être plus
adéquat que celui-là.
M. BOURASSA: D'accord.
M. BURNS: Celui-là, à mon avis, est même vexatoire
pour les ministres. Peu importe l'estime ou le manque d'estime que je peux
avoir pour les ministres, quant à la qualité de leur travail, il
y a une chose que je suis en mesure de reconnaître, c'est que c'est une
"job" à plein temps. Il n'y a pas un ministre, actuellement, qui peut
sérieusement se consacrer à ses affaires, qui peut
sérieusement se consacrer à ses activités professionnelles
s'il fait son travail. Je n'ai qu'à suivre l'étude des
prévisions budgétaires de chacun des ministères ou de la
majorité des ministères que j'ai examinés et je sais fort
bien que ces ministres-là sont totalement incapables de le faire mais je
trouve que cela crée une ambiguïté, la façon dont on
a rédigé ce texte-là.
M. BOURASSA: Je prends bonne note des remarques du député.
Je lui ai donné les cas qui m'ont été soulevés et
qui m'ont incité à accepter un texte un peu moins étanche,
notamment dans le cas des médecins ou possiblement des cultivateurs. Le
député se rend compte qu'en déposant cela je lie pas mal
tous mes successeurs. Ce serait difficile pour eux d'aller moins loin que cela.
Il peut arriver des cas comme cela, des cas exceptionnels, et je ne voudrais
pas mettre les menottes aux mains à tous ceux...
M. BURNS: Je vous remercie de nous protéger.
M. BOURASSA: Je ne veux pas mettre les menottes aux mains,
éventuellement, au leader parlementaire quand il sera ministre de la
Justice, je ne sais pas en quelle année, en 1995 ou 1996, si,
évidemment, il change de parti.
LE PRESIDENT (M. Picard): Le député de Saguenay.
M. LESSARD: Au paragraphe no 3, on lit: "Les ministres doivent faire en
sorte que les compagnies privées dans lesquelles eux-mêmes et leur
famille immédiate..." Est-ce que vous comprenez là-dedans les
compagnies privées dont les actions sont cotées à la
Bourse ou les compagnies privées dont les actions ne sont pas
cotées en Bourse? Est-ce que vous comprenez toutes les compagnies
privées?
M. LALONDE: Essentiellement, les compagnies privées sont les
compagnies dont les actions ne sont pas cotées à la Bourse. C'est
la différence qu'on fait dans le traitement des actions de compagnies
publiques et des actions de compagnies privées.
M. BOURASSA: Parce que le contrôle est beaucoup plus grand dans
les compagnies...
M. LESSARD: On veut donc dire toutes les compagnies dont les actions ne
sont pas cotées à la Bourse. Maintenant, dans la deuxième
partie...
M. LALONDE: Excusez-moi de vous interrompre. Si vous permettez, c'est
possible je ne veux pas être trop technique qu'on ait des
compagnies publiques qui ne soient pas cotées à la Bourse; elles
auraient été rejetées de la Bourse, par exemple, pour
toutes sortes de raisons, mais ce sont essentiellement des compagnies
privées, ce sont des compagnies dont les actions n'ont pas de
marché, ne sont pas négociables.
M. LESSARD: N'ont pas de marché.
M. LALONDE: Alors, les compagnies publiques sont les compagnies dont les
actions sont négociables soit à la Bourse ou soit sur un
marché parallèle. Il y avait des possibilités de faire un
marché d'actions publiques hors Bourse.
M. LESSARD: Vous faites aussi une distinction entre des transactions qui
sont faites directement avec l'Etat et les transactions qui sont faites avec
des agences gouvernementales. Dans le cas des transactions qui sont faites avec
des agences gouvernementales, vous incluez justement qu'à ce
moment-là la personne ne devra pas être propriétaire d'un
capital-actions supérieur à 5 p.c. Est-ce qu'on pourrait
m'expli-quer pourquoi vous faites une distinction, pourquoi vous faites cette
précision en ce qui
concerne les 5 p.c, alors que vous ne la faites pas en ce qui concerne
des transactions qui sont faites directement avec l'Etat?
M. BOURASSA: Le ministre pourra compléter. Dans le cas du
gouvernement, théoriquement, même s'il y a beaucoup de
mécanismes de contrôle, le ministre a plus d'influence que dans le
cas des agences. Les agences gouvernementales aujourd'hui, il y en a un
très grand nombre. On vient d'en former une, le Bureau d'aide
financière pour les inondations. Il y a toutes sortes d'agences. Il y en
a un très grand nombre où le ministre n'a aucun contrôle.
Sur SIDBEQ, le ministre n'a aucun contrôle, peut-être le ministre
des Finances, mais les autres ministres n'ont aucun contrôle. Il peut
arriver, par exemple, que dans un secteur il y ait un très petit nombre
de compagnies. On peut peut-être appliquer ça pour le gouvernement
et les ministères, mais, dans le cas des agences, SOQUEM, SOQUIP,
l'Hydro-Québec il pourra arriver que ce soient les seules compagnies
disponibles où le ministre peut avoir un pourcentage d'actions. Comme ce
sont des compagnies privées dont il ne peut pas se départir des
actions à un prix facile ou à court terme, nous avons
pensé encore là, on va plus loin que toutes les autres
provinces d'établir une proportion minime de 5 p.c. ou un chiffre
d'affaires de 5 p.c. Cela à certaines conditions, c'est que les
ministres ne devront pas participer aux décisions de telle
société relative à ses marchés. Ces marchés
devront être conclus suivant la procédure usuelle d'octroi de
contrats publics et seulement avec les agences sur lesquelles aucun ministre
n'a d'autorité administrative directe.
Je pense qu'il y a une triple protection, mais on ne peut pas... On se
trouve à protéger, parce qu'il faut quand même
éliminer les cas pour ne pas être pris toujours à examiner
s'il y a eu faute ou pas. S'il arrive un cas, par exemple, où un
ministre est propriétaire de 3 p.c. ou 4 p.c, ou même qu'il est
propriétaire à 100 p.c, mais qu'il fait une transaction de moins
de 5 p.c, avec des agences qui sont de plus en plus nombreuses, que le ministre
ne soit pas forcé de démissionner. Indépendamment du
ministre qui serait forcé de démissionner, c'est le recrutement
du personnel politique. Imaginez si celui qui est intéressé
à la politique se dit: Ma femme, mes enfants, puis moi, avec toutes les
agences du gouvernement, est-ce que je peux avoir la garantie que jamais ils ne
pourront avoir affaire directement ou indirectement avec une agence? Il n'a
plus grand monde qui va vouloir venir en politique, parce que des agences,
comme je disais tantôt, il s'en crée tous les mois. C'est pour
ça qu'on a pensé peut-être moi je trouve qu'on va
plus loin que pas assez loin qu'on va trop loin avec ça;
peut-être qu'on va se rendre compte que ce n'est pas applicable.
M. BURNS: Moi, je trouve, au contraire, que vous n'allez pas assez loin
là-dessus.
M. BOURASSA: On va quand même plus loin que toutes les autres
provinces.
M. BURNS: II y a trois remarques que je pourrais ajouter à ce que
le député de Saguenay vient de dire là-dessus.
La première m'est pratiquement dictée par la
réponse du premier ministre. Je conteste l'affirmation du premier
ministre à l'effet qu'un ministre ne peut pas avoir d'influence sur les
organismes ou les agences gouvernementales. Cela ne m'entre pas dans la
tête. Le ministre, qui est membre de l'Exécutif du gouvernement du
Québec, est une personne qui en soi est influente,
particulièrement sur des organismes qui ont à faire affaires avec
le gouvernement régulièrement.
M. BOURASSA: Je les exclus là: "Sur lesquels aucun ministre n'a
d'autorité administrative".
M. BURNS: Oui, il n'a peut-être pas d'autorité
administrative; par exemple, si vous me dites que le ministre de la Justice, sa
femme ou ses enfants mineurs ne doivent pas faire affaires avec la Commission
de contrôle des permis d'alcool, vous me citez le cas exact où lui
a une autorité administrative quelconque, ce n'est pas lui,
évidemment, qui dicte les décisions de la Commission de
contrôle des permis d'alcool.
Mais c'est quand même un ministre qui est omniprésent dans
ces conditions.
M. BOURASSA: Dans ces cas-là, je pense,...
M. BURNS: Oui, c'est déjà prévu.
M. BOURASSA: ... cela s'appliquerait.
M. BURNS: Je vais plus loin que ça.
M. BOURASSA: Bien...
M. BURNS: Je dis même que le ministre des Affaires
intergouvernementales, qui n'a, en théorie, rien à faire avec la
Commission de contrôle des permis d'alcool, est une personne qui a
suffisamment de poids moral auprès de cet organisme. C'est aussi simple
que ça.
M. LEVESQUE: Ce n'est pas ce que les électeurs pensent.
M. BURNS: Non, non, mais écoutez...
M. LEVESQUE: Tous ceux qui attendaient des permis et à qui on les
leur a refusés n'ont pas cette impression.
M. BOURASSA: Le leader, je comprends
son point de vue. Mais il devrait savoir, d'abord, comment cela se
passe. Il y a quand même des dizaines et des dizaines plusieurs
vont même penser que c'est un faux problème de
fonctionnaires qui contrôlent et qui scrutent les moindres transactions.
Et c'est soumis aux comptes publics, c'est soumis à la commission des
engagements financiers, c'est soumis à l'examen des
crédits,...
M. BURNS: Aux comptes publics! M. LESSARD: Quand?
M. BOURASSA: Bien oui, c'est publié dans les comptes publics.
Tous peuvent...
M. BURNS: Alors, la commission des comptes publics, elle...
M. LESSARD: Ah! publié dans...
M. BOURASSA: II y a une divulgation totale. Cela va plus loin, je le
répète, que tout ce qui se fait dans les autres provinces. Cela
va plus loin que tout ce qui se fait dans les autres provinces. Je veux dire
que vous ne pouvez pas empêcher...
M. BURNS: On ne commencera pas on est en commission et on se
parle autour d'une table à se "péter les bretelles". Ce
qu'on essaie de savoir, c'est véritablement où on s'en va avec
ça. Ce n'est pas par sado-masochisme ni par masochismo-sadisme qu'on le
fait.
LE PRESIDENT (M. Picard): Est-ce que le député pourrait
aider...
M. BURNS: C'est parce que cela dépend sur quel mot on met
l'accent. Ecoutez, M. le premier ministre, une fois pour toutes, parce que
là on se parle dans une atmosphère calme et, semble-t-il, en
Chambre on n'est pas capable de se le dire. Ce n'est pas dans le but de vous
causer des problèmes qu'on fait ça, c'est dans le but de
sauvegarder l'intégrité de l'Etat. C'est pour cela qu'on vous
pose ce genre de questions. C'est pour vous protéger contre
vous-même qu'on fait ça. Là, vous arrivez avec un texte et
on est en droit vous allez nous l'admettre, ce droit, comme Opposition
de dire: Peut-être que vous n'allez pas assez loin. Une des places
où je prétends que vous n'allez pas assez loin, c'est où
vous dites: Un ministre, lorsqu'il n'est pas administrativement lié
à un organisme, n'a pas d'influence sur cet organisme-là. Je dis:
Non, pas du tout. Je conteste cette affirmation.
Je dis que le ministre, de par sa fonction, de par sa position de membre
de l'Exécutif, a qu'on le veuille ou non une influence.
Allez voir le chef de bureau de n'importe quelle des agences et vous allez voir
jusqu'à quel point M. le premier ministre, vous n'êtes pas
assez naïf pour ne pas m'admettre ça un membre de
l'Exécutif a de l'influence. Je ne blâme pas le chef de bureau en
question. Je ne blâme pas le fonctionnaire, haut, moyen ou petit, d'un
ministère d'être impressionné par un ministre. Il n'est que
normal...
M. BOURASSA: Deux jours après, cela va être dans le journal
que le ministre est intervenu.
M. BURNS: Ce n'est pas sûr parce qu'il y a des choses qui sont
arrivées et qui ne sont dans les journaux encore. Qu'est-ce que vous
voulez? Le premier ministre sait qu'il y en a qui ne sont pas dans les
journaux.
M. BOURASSA: II y a un contrôle multiple de toutes les
transactions qui peut se faire. Je dis que je ne vois pas comment je ne
pense pas seulement à moi et je ne pense pas seulement aux ministres en
cause, il faut que je pense à l'avenir comme je le disais tantôt
un chef de gouvernement ou un chef de parti pourrait faire du
recrutement politique si dans toutes les agences, dans tous les cas, il y a une
interdiction absolue, dans tous les cas de toutes les agences, parce qu'il y en
a. Je pourrai donner la liste tantôt au député de
Maisonneuve. C'est impossible de contrôler parce qu'il ne faut
quand même pas bâtir une armée pour juste contrôler
tout ça tout ce qui peut se faire. Il peut y avoir des
régions où les seules compagnies sont celles où,
indirectement, le ministre peut avoir, à travers sa femme ou ses enfants
mineurs... S'il faut qu'aujourd'hui celui qui se lance en politique soit
obligé de tout vendre, que sa femme vende tout et que ses enfants
vendent tout, quelle sorte de classe politique allons-nous avoir? Il faut
penser à ça et encore là cela n'existe pas ailleurs. C'est
du droit nouveau.
M. LALONDE: Si je peux ajouter peut-être un détail
là-dessus. C'est une exception. D'ailleurs, vous allez la retrouver dans
le rapport que nous avons fait, qui emprunte l'approche d'à peu
près le plus grand nombre des autres provinces, qui ont adopté la
formule de la divulgation avec certaines permissions.
Dans ce cas-ci, tout d'abord on a aussi injecté un peu le concept
"de minimis non curat praetor": en mettant le plus, on a dit minime. Il
faudrait que ce soit minime, si c'était permis. Non seulement cela,
parce que vous savez probablement que les cas de conflits
d'intérêts ne sont pas tous carrément identifiables.
Souvent, le conflit vient de l'importance de l'intérêt qu'on a et
non pas seulement de la nature de l'intérêt.
Deuxièmement, nous suggérons et c'est dans les
directives, je crois qu'il y ait une divulgation, après coup, de
ces marchés. Pour cela, tout d'abord avec tous les contrôles que
le premier ministre vient de mentionner et ensuite
pourvu que l'intérêt soit minime, on emprunte la formule
des provinces de droit anglais en exigeant une divulgation après coup.
Autrement dit, s'il y en a, il faudra que ce soit divulgué annuellement
ou périodiquement, de sorte que l'effet de dissuasion va peut-être
rendre le moins important possible ce genre de transactions.
M. BOURASSA: A part cela, il peut y avoir conflits
d'intérêts à l'inverse. Si le ministre sait, par exemple,
qu'en étatisant ou en agrandissant le secteur public, il risque de
créer des problèmes à ses compagnies, il va
peut-être dire: Moi, pour ne pas avoir de problème, ou bien
à cause de ma femme et de mes enfants ou à cause de mes biens, je
ne ferai pas une extension du secteur public.
Quand on tombe dans les conflits d'intérêts, il n'y a plus
de limites.
M. BURNS: Là aussi, je pense qu'il est important que je fasse la
mise au point suivante. J'en ai fait une tout à l'heure sur nos
intentions quand nous questionnions le gouvernement là-dessus. Il y en a
une autre qui est sous-jacente à la première et qu'il faut
faire.
Quand vous parlez de conflits d'intérêts prouvables, moi
cela ne m'intéresse aucunement. Je vous le dis avec tout le respect que
je vous dois. Ce que je dis, c'est que non seulement il ne faut pas qu'il y ait
de conflits d'intérêts voulus, décidés par le
ministre, mais il faut que le ministre ou toute personne participant à
l'administration publique soit au-dessus de tout soupçon.
Le premier ministre se souvient sans doute d'un article qui
n'était pas tellement méchant à l'égard de sa femme
mais qui parlait de la femme de César. C'est ça, le principe. Je
pense qu'on n'avait pas besoin de lire bien, bien longtemps cet article, un
éditorial qui a paru il y a quelque temps et qui disait tout simplement:
C'est peut-être vrai qu'il n'y a rien de malhonnête dans ça.
Et ça, on n'a jamais dit le contraire, nous. C'est peut-être vrai
qu'il n'y a rien de malhonnête. Ce qui est important, c'est qu'on soit
sûr qu'il n'y a rien de malhonnête, parce qu'à partir du
moment où la population, le citoyen se dit: Peut-être qu'il n'y a
rien de malhonnête, peut-être que Bourassa a raison quand il dit
que tout cela s'est fait selon les règles, à partir du moment
où il dit "peut-être", je relie cela au premier principe que je
mentionnais tantôt: on ne sauvegarde pas l'intégrité de
l'Etat.
Il faut que les administrateurs publics soient véritablement
au-dessus de tout soupçon, qu'ils puissent dire: Voici, venez voir. Je
suis un grand livre ouvert. Je n'ai pas d'intérêts
là-dedans. Après cela, toute discussion, M. le premier ministre,
sur le fait que cela s'est fait par voie de négociation juste, que cela
s'est fait par voie de soumissions publiques, que cela s'est fait dans des cas
où il n'y avait pas de subventions, à cause du fait que
c'étaient des questions d'urgence, toute discussion, à ce niveau,
devient absolument fallacieuse vis-à-vis du but qu'on vise.
Je donne tout simplement un exemple. Encore une fois, il n'est pas
question de laisser croire à de la malhonnêteté
là-dedans. Vous avez le cas d'une compagnie qui appartient aux Simard,
qui, à un moment donné, a renfloué je ne sais pas
le mot exact radoué un bateau. Radoué? Qu'est-ce que
c'est, le mot? En tout cas, vous savez ce que je veux dire, a remis en service
un bateau qui n'était pas en service. Il y a un mot technique pour
ça.
M. LEVESQUE: Radoubé. M. LALONDE: Radoubé.
M. BURNS: Radoubé. Bon, merci. Ecoutez, c'est sûr que
c'était un cas d'urgence. J'ai écouté le ministre des
Transports, lors de l'étude des crédits du ministère, dire
pourquoi le contrat avait été accordé à la
compagnie de touage de Sorel, qui est en grande partie propriété
des Simard. C'est sûr que c'était un cas comme celui-là.
Mais si, par hasard, dans cette compagnie, il n'y avait pas eu des
intérêts qui sont près du premier ministre ou qui sont
près du ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, je suis
sûr que personne n'aurait dit un mot.
C'est ce que je dis quand je parle de se tenir au-dessus de tout
soupçon: C'est sûr que ça fait mal, que ça
embête le ministre à l'occasion, mais, s'il décide de se
consacrer pendant X années au service de la population dans une fonction
à caractère public s'il en est une, il est aussi obligé de
s'imposer certains sacrifices et ces sacrifices, c'est de se placer
au-delà de tout soupçon. C'est juste ça.
M. LEVESQUE: J'ai une question à poser, moi, au leader
parlementaire de l'Opposition. Croit-il qu'il y a des catégories de
citoyens qui ne devraient pas faire partie du gouvernement?
M. BURNS: Non, je n'ai jamais dit ça.
M. LEVESQUE: Deuxièmement, croit-il qu'il y a tellement de
sécurité d'emploi dans le gouvernement, quand on sait que, dans
le Parlement actuel, il y a 110 députés et que, de ceux que j'ai
vus autour de moi quand j'ai commencé, il en reste deux? Alors, est-ce
que les gens vont se départir raisonnablement, rationnellement de tous
leurs intérêts pour essayer de servir l'Etat?
M. BURNS: Ils vont faire ça ou ils vont voir à ce que la
compagnie dans laquelle ils ont des intérêts ne fasse pas affaire
avec l'Etat.
M. LEVESQUE: C'est ce que nous faisons dans les directives.
M. BURNS: Oui, mais là j'arrive aux agences gouvernementales; on
parle des agences gouvernementales, je dis que ça doit aller...
M. LEVESQUE: Dans le cas des agences gouvernementales, ne croit-il pas
que, lorsque les intérêts de celui qui est en cause sont moins de
5 p.c, cela veut dire que les intérêts de l'extérieur sont
de l'ordre de 95 p.c. et plus? Qui prend les décisions, à ce
moment-là?
M. BURNS: C'est le deuxième point que je voulais soulever au
premier ministre. J'en ai mentionné trois; le premier, c'est comme le
disait le député de Saguenay, pourquoi fait-on une distinction
pour les agences? Imaginez la situation suivante: une compagnie avec un
capital-actions de $100 millions. Le ministre, à ce moment-là, a
le droit de détenir $5 millions dans cette compagnie et être
exempt de tout ça. C'est ce que ça veut dire?
M. LEVESQUE: Est-ce que le député de Maisonneuve
prétend qu'il y a tellement de compagnies privées qui ont un
capital-actions de $100 millions?
M. BURNS: Je vous donne un exemple, mettez n'importe quelle
proportion.
M. LEVESQUE: Je voudrais un exemple de compagnie privée avec $100
millions.
M. BURNS: Je vous donne l'exemple le plus facile à calculer;
c'est pour ça que je parlais de $100 millions et de $5 millions. Je n'en
connais pas de compagnie; je ne suis pas un spécialiste en
matière d'institutions financières. Que voulez-vous que je vous
dise! Mais il y a une chose que je vous dis, toutefois, c'est que ces 5 p.c.
dépendent drôlement de l'importance du capital-actions total
émis, vous ne trouvez pas? C'est ça que j'essaie...
M. LEVESQUE: 5 p.c. peuvent être importants dans une compagnie
publique qui a justement $100 millions, mais, quand on parle de
sociétés privées, je pense que l'exemple que donne le
député de Maisonneuve n'est pas réaliste.
M. BURNS: II y en a peut-être. Je ne connais pas ça.
M. LEVESQUE: Je n'en connais pas.
M. BURNS: Ce que je veux dire, c'est tout à coup il y en aurait
une et qu'à un moment donné vous aviez un ministre qui, dans une
compagnie qui a $100 millions...
M. LEVESQUE: II y a Henry Ford qui est resté longtemps dans cette
situation-là, mais il n'y en n'a pas beaucoup.
M. BURNS: ... tout à fait par hasard, détient pour $5
millions d'actions, c'est ce que ça veut dire? Cela veut dire qu'il n'y
a pas de problème et que cette compagnie peut faire affaires...
M. BOURASSA: Le député oublie un aspect, parce qu'il y a
trois facteurs. Il y a la divulgation, l'interdiction et les mécanismes
de contrôle. Je conçois les questions du député;
nous discutons très franchement. J'aurais pu dire: Ce sont mes
directives, mais j'accepte d'en discuter, parce que c'est un peu du droit
nouveau et qu'on va plus loin que toutes les autres provinces. Quand on parle
d'interdiction, il ne faut pas oublier la divulgation parce que, dans le cas
des 5 p.c. tout sera divulgué. Je comprends que le député
avait cité je ne veux pas l'embarquer avec ça la
loi de la Colombie-Britannique. Il semble peut-être l'avoir lue
complètement; ça nous arrive à tous et chacun. Dans la loi
de la Colombie-Britannique...
M. BURNS: Est-ce que cela vous arrive bien souvent?
M. BOURASSA: Cela nous arrive chacun à notre tour.
Dans la loi de la Colombie-Britannique, que le député a
citée, ils ont exclu les épouses et ils se contentent de la
divulgation.
M. BURNS: Je ne veux pas lancer un débat là-dessus, mais
je ne peux pas vous permettre de m'embarquer sur une "track" comme
celle-là. Replacez ça dans le contexte et vous allez voir.
M. BOURASSA: Vous avez ça dans la Presse canadienne. C'est une
bonne agence.
M. BURNS: Oui, j'ai dit: II y a des efforts qui se font à
certains endroits; pourquoi on ne le ferait pas au Québec? Il y a un
effort qui se fait en Colombie-Britannique, c'est exactement ce que j'ai dit.
Je n'ai pas qualifié ce qui se passait en Colombie-Britannique.
M. BOURASSA: Vous avez dit: II faut faire quelque chose de pareil ou de
semblable, je l'ai.
M. BURNS: Qu'il faudrait poser des gestes, c'est ça que j'ai
dit.
M. BOURASSA: Non, de semblable, d'à peu près pareil.
M. BURNS: C'est cela, dans le sens de poser des gestes. Là, vous
en posez un geste. Je vous ai dit tout à l'heure que je vous
félicitais d'en poser un.
M. BOURASSA: Oui, et j'ai remercié le député. Mais
je veux dire qu'il reste qu'en Colombie-Britannique, en Alberta, en
Saskatchewan, au Manitoba, au fédéral, dans d'autres provinces,
on se contente de la divulgation parce que pour eux, c'est ça qui est la
garantie devant l'opinion publique.
La garantie à la population, dans toutes ces provinces, y compris
les provinces social-démocrates, c'est que c'est divulgué. Et ils
se disent: Si c'est pleinement divulgué, si toute l'opinion publique,
tous les journalistes, toute l'Opposition peuvent examiner les moindres
détails des transactions, il y a garantie pour la population.
Nous, nous allons plus loin que ça. Non seulement on va tout
divulguer quand il va y avoir des causes comme ça, mais on interdit. Il
me semble que j'en donne plus que le client en demande.
M. BURNS: Là-dessus, non, vous ne m'embarquerez pas, M. le
premier ministre. Encore une fois, je ne veux pas personnaliser le
problème, mais tout tourne autour de vous, qu'on le veuille ou non, ou
autour de votre belle-famille.
M. BOURASSA: Bien, il n'y a pas...
M. BURNS: Cela a commencé par là. Non, mais qu'on le
veuille ou non, cela a commencé par là. Et...
M. BOURASSA: Oui, mais les transactions qu'on m'a reprochées,
avec toutes les nouvelles lois qu'on qualifie de très progressistes dans
les autres provinces, dans certains milieux, sont permises dans toutes ces
provinces. Alors que là, elles sont interdites.
M. BURNS: Oui, elles sont interdites, mais dès qu'il y a
divulgation, vous semblez croire que tout est à l'épreuve de
tout.
M. BOURASSA: ... pense cela.
M. BURNS: Bon, mais ça ne veut pas dire que nous autres au
Québec...
M. BOURASSA: Et M. Barrett pense ça.
M. BURNS: ... on va penser la même chose. D'ailleurs, M. Barrett
et nous, vous savez, on n'est pas toujours d'accord.
M. BOURASSA: Je pensais que c'était le contraire.
M. BURNS: Non, non. D'ailleurs, il a tenté...
M. BOURASSA: Pour l'annulation, vous n'êtes pas d'accord, mais
pour d'autres choses...
M. BURNS: ... de nous faire amende honorable au
fédéralisme mais vous savez ce qu'on lui a dit. Mais ce n'est pas
ce que je veux dire. Vous parlez de divulgation; il y en a eu une, je parle
d'un cas concret, Claurémiand, qui est propriétaire de la
compagnie Paragon. Qu'est-ce qui est arrivé? Cela a été
divulgué, peut- être pas par les moyens que vous proposez ici.
Qu'est-ce qui est arrivé, au moment où on se parle? Qu'est-ce que
ç'a changé? Pas grand chose, sinon à un moment
donné de jeter un doute, et ça c'est malheureux de jeter un doute
sur l'intégrité de l'Etat. Et c'est ça que je trouve
malheureux et c'est ça qu'on doit vraiment protéger; on doit se
mettre à l'abri de cela. Alors, la divulgation, encore une fois je ne
veux pas entrer dans un débat avec le premier ministre mais je lui
signale que ce paragraphe, en autres, me laisse des doutes. Et, même si
le premier ministre dit que tout est réglé à partir du
moment où il y a divulgation, je dis que non, tout n'est pas
réglé.
M. BOURASSA: ... parce qu'autrement je n'aurais pas interdit.
M. BURNS: II n'y a pas de sanction. Il y en aura
évidemment...
M. BOURASSA: II y a un paquet de conditions qui sont ajoutées
dans ces cas-là, même avec seulement 5 p.c. des compagnies
privées, il y a beaucoup de conditions qui sont ajoutées.
Evidemment, je peux me tromper, mais je suis convaincu que non seulement
ça va plus loin que ce qui existe partout au Canada mais que ça
permet d'assurer de façon absolue l'intégrité du
gouvernement, avec tous les contrôles et tous les moyens qui existent
là-dedans et toutes les interdictions.
M. BURNS: Alors, je termine...
M. LEVESQUE: Si on me permet, je vais dire une autre chose, c'est que je
suis bien solidaire, j'ai reçu mes directives comme tout le monde, j'ai
regardé cela...
M. BURNS: Vous avez tout vendu ce soir?
M. LEVESQUE: Non, non. Mais je dis que...
M. BURNS: Vous en gardez encore?
UNE VOIX: II n'en a pas beaucoup, il peut le garder.
M. LEVESQUE: ... je suis bien d'accord avec les directives, je n'ai pas
le choix. Mais si on prend cela à la lettre, c'est embêtant parce
que dans nos sociétés...
M. BURNS: C'est bon que ce soit embêtant.
M. LEVESQUE: ... privées dont on ne se départira pas,
ça c'est sûr, on ne fait pas affaires avec le gouvernement. Mais
supposons que quelques "bright guys" péquistes quelque part dans une de
nos sociétés décident de vendre au gouvernement, juste
pour nous met-
tre dans de mauvais draps, même une affaire, une peccadille...
M. BURNS: D'abord, vous savez qu'aucun péquiste ne ferait
cela.
M. LEVESQUE: Non! M. BURNS: Nulle part.
M. BOURASSA: II n'y a pas de péquiste au gouvernement à
cause du contrôle qu'on fait?
M. BURNS: Non, non, vous...
M. LESSARD: II serait peut-être bon d'en avoir...
M. LEVESQUE: Mais supposons, sérieusement...
M. BURNS: On va vous en reparler de ça.
M. LESSARD: Ils ne sont pas au ministère du Tourisme.
M. LEVESQUE: Je demande justement une opinion de mon collègue,
leader parlementaire de l'Opposition officielle. Supposons un employé
dans le service X, Y, Z d'une compagnie privée dans laquelle on a des
intérêts; on donne des directives, je transmets cela, disons,
à des gens dans une société dans laquelle j'ai des
intérêts: Nous ne vendons pas au gouvernement. C'est facile parce
que je n'ai pas vendu au gouvernement. Mais, supposons que quelqu'un, pour me
jouer un tour, vend au gouvernement. Qu'est-ce qui arrive?
M. BURNS: Le premier ministre a répondu d'avance...
M. BOURASSA: Bien oui, c'est ça.
M. BURNS: ... tout à l'heure, c'est une question de bonne
foi.
M. BOURASSA: Dans quelle position serait le leader? Il y a des
démagogues qui vont me demander la démission du leader et je ne
peux pas me passer du leader parlementaire. Et ça va créer un
doute. Je veux dire, il y a des cas pratiques; le député de
Maisonneuve est d'une bonne foi exceptionnelle.
Je suis convaincu qu'on vise les mêmes objectifs, mais s'il avait
passé à travers la même démarche depuis quelques
mois et toutes les choses qui me sont proposées, j'en ai parlé
avec le leader parlementaire. C'est lui qui a le plus d'expérience; le
député a été élu en 1952... en 1946?
M. LEVESQUE: 1956.
M. BOURASSA: C'est facile d'arriver puis de dire: interdiction absolue
partout, divulgation totale, mécanisme de contrôle étanche.
Il y a des cas qui m'ont été soumis, puis on a dit: II faut
assumer ses responsabilités d'une façon responsable, mais pas
seulement à très court terme. Ce n'est pas parce qu'on a sorti
une affaire, en soi peut-être défendable mais qui peut être
ennuyeuse parce qu'on l'exploite politiquement, qu'on doit arriver avec des
choses qui vont mettre les bâtons dans les roues pendant des
années.
M. BURNS: Moi, je n'aime pas les mots "exploiter politiquement".
M. BOURASSA: Je ne pense pas tellement au député de
Maisonneuve.
M. BURNS: En tout cas, c'est parce que mon nom a été
relié à ça, alors...
M. BOURASSA: Le député a fait son boulot, il a lu
ça dans le journal, il a posé des questions. Il ne peut pas faire
autrement.
M. BURNS: Bien oui, c'est ça, d'accord.
Je reviens toujours à ce que je disais tout à l'heure, et
c'est uniquement dans le but de sauvegarder l'intégrité de
l'Etat. Sur ce deuxième point en tout cas j'achève mes
questions sur le deuxième point les fameux 5 p.c, est-ce que le
premier ministre peu importe que le leader du gouvernement dise que
ça n'existe pas une compagnie privée avec un capital-actions de
$100 millions n'accepterait pas de dire 5 p.c. ou un maximum de... je ne
le sais pas, là, je n'ai pas de chiffre à la mémoire, je
lance au hasard le chiffre de $100,000, par exemple? Le premier ministre, qui
s'y connaît, du moins c'est ce qu'il nous dit, dans le domaine des
institutions financières...
M. BOURASSA: J'ai fait mes preuves, cinq budgets sans... On ne va pas
reprendre ça...
M. BURNS: C'est plus fort que lui, M. le Président, il n'est pas
capable. Il l'a tellement apprise, celle-là, qu'elle revient tout le
temps.
M. BOURASSA: Je suis prêt à examiner la suggestion de
mettre un plafond sur le capital.
M. BURNS: De mettre un plafond, parce que le premier ministre sait fort
bien que même si quelqu'un ne détient que 5 p.c. d'actions dans
une compagnie, si ces 5 p.c. donnent une somme importante, cette personne a
beaucoup d'influence à l'intérieur de la compagnie. En tout cas,
c'est une suggestion que je fais en passant.
Une troisième remarque que j'ai...
M. BOURASSA: Je vais examiner la suggestion puis...
M. BURNS: La troisième chose.
M. BOURASSA: On me signale évidemment que les actions montent et
varient continuellement; en tout cas je vais examiner la suggestion. Je
comprends le point de vue du député, je vais essayer d'en tenir
compte dans les changements que je pourrais apporter, mais on me signale que
comme ça varie continuellement il pourrait arriver qu'à un
moment...
M. BURNS: Cela peut causer un problème à cet
égard.
M. LALONDE: En pratique, si on a une compagnie publique, c'est assez
facile, parce qu'il y a une cote; pour une compagnie privée ce serait le
capital, plus les surplus, moins les pertes et puis, à un moment
donné, ça vaudrait $102,000, ensuite ça vaudrait
$50,000...
M. BURNS: Le bilan annuel.
M. LALONDE: ... le bilan annuel, puis à un moment donné
ça devient illégal, le lendemain ça ne l'est pas.
M. BURNS: Je pense qu'on se comprend, vous savez ce que je veux dire.
C'est-à-dire qu'il s'agit...
M. LALONDE: D'un ordre de grandeur.
M. BURNS: ... peut-être de mettre un ordre de grandeur.
M. BOURASSA: C'est pour ça que l'on a dit "de l'ordre", parce que
cela peut arriver à 5.2, le chiffre d'affaires ou tout ça; c'est
la raison pour laquelle j'ai mis "de l'ordre de 5 p.c".
M. BURNS: La troisième remarque que j'avais à faire
là-dessus, la troisième question est qu'on voit apparaître
pour la première fois l'expression "agence du gouvernement", qu'on
retrouve à la page 6; "le gouvernement du Québec ou l'un de ses
organismes", c'est dans le paragraphe 2, à la page 6, juste en haut de
la page, et dans le paragraphe 5, on voit encore une fois l'expression "une
agence du gouvernement". Je pense qu'on aurait avantage à
préciser dans le document ce qu'on veut dire par agence ou organisme du
gouvernement. Est-ce que ça veut dire toutes les sociétés
de la couronne, est-ce que ça veut dire seulement les corporations, ou
si vous voulez dire les organismes du style Commission des accidents du
travail? Est-ce que ça va jusqu'aux hôpitaux? Est-ce que ça
va même jusqu'aux émanations du gouvernement qu'on appelle les
municipalités? Je souligne le fait qu'il y a une ambiguïté,
surtout qu'on utilise deux termes: organismes et agence du gouvernement.
M. BOURASSA: Cela exclut, d'après mes informations, les
municipalités et les hôpitaux, mais l'Institut de police, par
exemple, serait inclus là-dedans.
M. LALONDE: L'organisme, dans ce sens, n'a peut-être pas
l'exactitude des légistes.
Je comprends que dans un projet de loi il faudrait que ce soit beaucoup
plus précis, mais dans le contexte, organisme est plus large qu'agence.
Je ne sais même pas si le mot agence est le mot exact au point de vue
technique. L'organisme, cela comprendrait les ministères, cela
comprendrait tout cela mais les agences excluraient nécessairement les
ministères; ce seraient des organismes qui ont une certaine autonomie
comme l'Hydro-Québec, comme les sociétés de la
couronne.
M. BURNS: La Société des alcools.
M. LALONDE: La Société des alcools, je comprends, a aussi
une certaine autonomie dans son administration.
M. BURNS: Cela visera cela? M. LALONDE: Les agences? M. BURNS: Oui.
M. LALONDE: Je pense que oui; techniquement, oui.
M. BURNS: Pendant qu'on est sur le sujet, est-ce qu'on peut avoir l'avis
du premier ministre ou du ministre d'Etat au Conseil exécutif
relativement aux hôpitaux, qui sont tout le monde va l'admettre
un marché? Si on revient encore aux cas connus, si Paragon avait
vendu autant de formules mécanographiques aux hôpitaux et aux
autres organismes tels que les commissions scolaires et autres, peut-être
que le chiffre dont on parlerait actuellement ne serait pas de trois quarts de
millions mais il serait peut-être de $1 million et demi ou de $2
millions.
M. BOURASSA: Ce sont les conseils d'administration des
hôpitaux.
M. BURNS: Je le sais mais encore une fois et malgré ce que dit le
premier ministre...
M. BOURASSA: Ils ne sont même pas nommés par le
gouvernement.
M. BURNS: Oui, je sais. Malgré ce que dit le premier ministre, ce
sont des organismes tellement intimement liés, qui dépendent du
gouvernement, à toutes fins pratiques, pour leur budget.
M. BOURASSA: Ils en dépendent pour les subventions, mais pas pour
l'administration.
M. BURNS: Bien, c'est cela.
M. BOURASSA: C'est automatique, leur budget.
M. BURNS: A ce moment-là, quand vous avez un hôpital,
n'importe quel...
M. BOURASSA: Si vous incluez tous les hôpitaux, toutes les
commissions scolaires, toutes les municipalités, déjà les
agences couvrent un nombre considérable d'activités
économiques et ça s'accroît tout le temps.
L'activité économique de l'Etat s'accroît constamment. Si
on inclut tous les organismes subsidiaires, je ne sais pas s'il va rester un
secteur où quelqu'un pourra être en affaires et pourra
éventuellement faire...
M. BURNS: A partir du moment où il est ministre surtout
qu'on parle seulement des ministres son affaire, c'est le
gouvernement.
M. BOURASSA: C'est cela, mais je veux dire là qu'ils se
départissent complètement de toutes ces actions. Le
député parle de mon cas mais ça va...
M. BURNS: Bien, c'est le cas le plus connu. C'est pour ça que
j'en parle.
M. BOURASSA: ... vouloir dire des problèmes de vente d'actions,
même si, disons, tout a été fait et le
député l'a dit je pense bien d'une façon tout
à fait légale et honnête. Je ne pense pas qu'on ait
prouvé aucun favoritisme dans les cas qui ont été soumis.
Même dans ces cas-là il va falloir, en appliquant les directives
parce que c'est dans le cas des ministères trouver des
acheteurs aux actions. Cela peut être le cas pour d'autres de mes
collègues s'ils avaient des actions. Tout cela sera connu le 1er
août, quand la liste sera publique.
M. BURNS: En tout cas. La question que je soulève...
M. BOURASSA: Mais je suis d'accord que la définition des
agences...
M. BURNS: Oui.
M. BOURASSA: Evidemment, je puis dire au leader parlementaire que
ça ne comprend pas les municipalités, ça ne comprend pas
les hôpitaux ou les commissions scolaires.
M. BURNS: Je veux simplement soulever au premier minsitre le
problème à l'effet que les hôpitaux, entre autres, sont
subventionnés dans une proportion absolument extraordinaire. Je me
demande si ce n'est pas...
M. BOURASSA: Mais ils décident ce qu'ils veulent.
M. BURNS: Oui, d'accord, mais l'argent, lui, vient d'où
exactement?
M. BOURASSA: Pardon?
M. BURNS: L'argent vient du gouvernement. L'argent qui fait fonctionner
les hôpitaux.
M. BOURASSA: C'est un peu comme les subventions qu'on reçoit
d'Ottawa; on fait ce qu'on veut.
M. BURNS: Je vais vous donner un autre cas, par exemple, les
écoles privées qui sont subventionnées à 80 p.c.
par le gouvernement.
M. BOURASSA: Oui, mais ce sont des subventions statutaires, à
toutes fins pratiques.
M. BURNS: Bien, attendez un peu.
M. BOURASSA: Donc, les hôpitaux ne dépendent pas du
gouvernement. Les conseils d'administration sont élus ou nommés;
alors, à toutes fins pratiques, il y a autonomie complète. Si on
élargit le concept d'agence, on va en venir avec les hauts
fonctionnaires, les députés. On va s'arrêter où?
Tous ceux qui font affaires avec... Il faudrait que le député
réfléchisse un peu. Encore une fois, il est de bonne foi,
mais...
M. BURNS: Si vous élargissiez le concept vous comprendriez
ce que je veux dire, si vous aviez assisté aux crédits au
ministère du travail aujourd'hui vous seriez tout à fait
en accord avec vos homologues fédéraux, qui, eux, en sont rendus
à s'insérer dans le domaine du travail. Le moindrement qu'il y a
une construction payée d'une façon ou de l'autre par le
gouvernement fédéral, ils jugent que ce sont des constructions
qui relèvent du code fédéral du travail, et votre ministre
du Travail je vous le signale en passant a de sérieux
problèmes avec cela. Si vous voulez toujours suivre l'exemple de vos
homologues fédéraux...
M. BOURASSA: ... la construction.
M. BURNS: ... il y a un exemple que vous pourriez suivre.
M. BOURASSA: On ne suit pas leur exemple parce qu'on va plus loin
qu'eux, y compris pour les femmes.
M. BURNS: Oui, mais ce n'est pas cela que je vous dis. A tout bout de
champ, vous nous dites que ce qui vient d'Ottawa c'est bien beau et c'est bien
fin. Cela en est un...
M. BOURASSA: C'est de l'argent, cela diminue les taxes.
M. BURNS: C'en est un des cas où eux autres ont
décidé que, le moindrement qu'ils se mettaient le nez dans
quelque chose, ils étaient impliqués.
M. BOURASSA: Qu'est-ce qui arrive dans
une construction? Si un ministre construit une maison, là aussi
il peut y avoir des conflits d'intérêts. C'est assez difficile de
circonscrire ça. Mais on a pensé à mettre le gouvernement
et les ministères où le ministre est directement impliqué,
les agences comme SOQUEM ou SIDBEQ où l'autonomie de gestion, à
toutes fins pratiques, est complète. Il reste peut-être une
troisième catégorie.
M. BURNS: Vous savez que votre texte actuellement, on pourrait
l'interpréter de la façon suivante: un ministre pourrait
même avoir un hôpital privé pour malades chroniques,
subventionné par le gouvernement, puis il n'y aurait pas de
problème.
M. BOURASSA: Cela serait couvert par l'article 6. C'est
incompatible.
M. BURNS: Par l'article 6: "II pourra lui être demandé que
lui-même et sa famille..."
M. BOURASSA: Oui.
M. BURNS: Encore une fois, c'est un pouvoir discrétionnaire.
M. BOURASSA: C'est le premier ministre qui émet des directives
à ses collègues et qui les applique. Tout est divulgué
complètement. On suggère l'hôpital; ça va être
divulgué, ça. L'opinion publique va dire : Comment se fait-il que
le ministre a un hôpital pour malades chroniques? C'est évident
que, le lendemain, on va demander qu'il se départisse...
M. BURNS: Si le premier ministre répond qu'il n'y a rien
d'illégal là-dedans, qu'est-ce qui va arriver?
M. BOURASSA: C'est à la population de juger.
Il est possible que la population trouve qu'on va trop loin
là-dedans.
M. LALONDE: Mais peut-être que, à moins que
j'interprète...
M. BOURASSA: J'ai des gens très responsables qui m'ont
signalé que ça allait trop loin inutilement.
M. LALONDE: Pour l'exemple de l'hôpital privé, ce serait
une société privée qui ferait un marché d'Etat avec
le gouvernement; c'est défendu. Il serait obligé de se
départir de ses actions.
M. LESSARD: Qui reçoit des subventions.
M. LALONDE: Bien oui, un marché d'Etat, ça comprend
recevoir des subventions. Alors, c'est défendu par un des premiers
articles qui parle des marchés d'Etat.
M. BURNS: L'article 2. Je vous signale que, de ce côté, il
y a peut-être quelque chose à scruter.
UNE VOIX: C'est positif.
M. BOURASSA: On interdit les terrains, vous avez remarqué
ça?
M. LESSARD: Oui, c'est que, dans le cas où un individu est membre
d'une corporation privée qui fait affaires avec le gouvernement et qui,
à la suite d'une élection est élu député et
par la suite est nommé ministre, il y a une clause qui précise
qu'il doit se départir de ses actions dans une période de douze
mois. Mais, dans le cas où le ministre qui participe à un
marché avec l'Etat, par la voie d'une société
privée au moment de l'entrée en vigueur de cette clause, le
délai n'est pas précisé. On dit: "A ce moment-là,
le ministre devra se départir de ses actions dans les meilleurs
délais, compte tenu du temps nécessaire à cette
disposition." Est-ce que la clause de douze mois qui est prévue ne
pourrait pas s'ajouter dans ce cas-là aussi?
M. BOURASSA: En pratique oui, mais je n'ai pas voulu le fixer d'une
façon précise pour des raisons évidentes, parce que, plus
on va approcher de la date, moins le ministre pourra avoir un prix raisonnable
pour ses actions. Déjà, il faut se demander si les ministres,
comme le disait le député de Maisonneuve, doivent être
prêts à assumer des pertes financières s'ils font de la
politique.
M. LESSARD: Mais c'est la même chose lorsque...
M. BOURASSA: Mais c'est clair qu'avec la pression, il ne pourra pas
attendre tellement longtemps; douze mois, c'est le grand maximum. Si je dis:
D'ici telle date, il s'agira que les vendeurs conscients de la directive
disent: On ne fera pas d'offre d'achat jusqu'à ce que le délai
écoulé et il va être obligé de nous les donner.
M. LALONDE: Je voudrais apporter une précision
là-dessus.
M. LESSARD: Mais quelle différence il y a...
M. LALONDE: Oui, il y a une différence justement. C'est que le
député a mentionné le paragraphe 2 de la page 3 qui
prévoit que, s'il devient député, ensuite ministre, il a
un certain délai pour s'en départir. Le dernier paragraphe se lit
comme suit: "Le ministre qui participe à un marché d'Etat par la
voie d'une société privée au moment de l'entrée en
vigueur de cette règle." C'est qu'à partir du 11 août 1974
on change les règles du jeu. Ce n'était pas prévu,
ça, avant les élections et avant que le gars
accepte d'être porté candidat et soit nommé
ministre. C'est pour ça que c'était plutôt une supposition
de transition pour la période actuelle de l'entrée en vigueur,
mais qui va devenir de moins en moins nécessaire à mesure que le
temps va passer et que les règles auront été en vigueur
depuis longtemps.
M. LESSARD: C'est une disposition qui s'applique aux ministres actuels,
parce qu'on change les règles du jeu à la suite de cette nouvelle
disposition.
M. LALONDE: II était plus difficile de prévoir une date
précise ou une période précise.
M. LESSARD: Oui, mais dans un délai raisonnable, de toute
façon, il est assuré, justement, que plus il va retarder, plus
ses actions aussi, parce qu'il va y avoir une pression morale qui va être
faite sur le ministre.
Le premier ministre me répond qu'il y a un danger que le prix de
ces actions devienne de moins en moins important, de moins en moins
élevé; plus il va retarder, plus cette tendance peut se faire
sentir. Alors, je me demande s'il n'y aurait pas moyen quand même de
préciser au moins, un délai maximum. Un délai raisonnable,
c'est quoi "compte tenu du temps nécessaire à sa disposition".
Cela veut dire, par exemple que, encore là, tout tourne autour, comme on
le disait...
M. BOURASSA: Parce qu'il y a des implications financières.
M. LESSARD: Par exemple, dans le cas de M. Claude Simard, qui est
ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, qui est actionnaire de
Claurémiand, est-ce qu'un délai raisonnable pour lui va
être 12 mois, ou 24 mois, ou 36 mois?
M.BOURASSA: Bien non! il n'est pas question de cet ordre de
grandeur-là. Mais il va falloir faire des études pour vendre des
actions. Comme ce sont des compagnies privées, il va falloir que des
comptables évaluent ça d'une façon objective. Si
c'était coté à la Bourse, j'aurais dit une semaine. Mais
comme ce n'est pas coté à la Bourse, il va falloir que des
comptables évaluent ça. Ils vont dire: Cela vaut tant. Alors, on
peut être pris à attendre un peu, mais pas deux ans ou même
inférieur à ça.
M. BURNS: Quand même, vous ne trouvez pas que douze mois, c'est un
peu...
M. BOURASSA: Oui, oui. Je ne parle pas de cet ordre...
M. LALONDE: Les douze mois, le député se
réfère à la règle précédente. Cela a
été emprunté.
M. BOURASSA: Cela m'étonnerait énormément que cela
aille jusque là. Je pense que cela va être beaucoup plus court que
ça. Pour des raisons de valeurs des actions, je ne vois pas pourquoi on
pénaliserait des gens qui font quand même déjà pas
mal de sacrifices pour faire de la politique. Je me suis dit: On va mettre un
délai raisonnable, mais ce n'est pas en termes d'années,
certainement pas, en termes de semaines et, au mieux, en termes de mois.
M. LALONDE: Maintenant, pour les douze mois, est-ce que je peux
préciser? A au moins deux endroits, je me souviens de l'avant-projet de
loi fédéral, qui est annexé au livre vert de M. MacEachen,
on mentionne cet ordre de grandeur, je pense que c'est douze mois. Je crois
qu'un autre projet de loi ou une directive en vigueur ailleurs aussi le
mentionne. Alors, cela peut être six mois. C'est une question de
délai raisonnable.
M. BURNS: J'inciterais le premier ministre à diminuer sa
directive parce que, quand même, douze mois, il peut se faire bien du
batifolage durant cette période-là. Dans le fond, le but qu'on
vise, c'est qu'il n'y en ait pas. Et cette nouvelle situation d'un individu,
d'un simple citoyen qui se retrouve ministre, bien que je sois d'accord que
cela transforme bien des choses dans sa vie, même juste devenir de simple
citoyen à député, je pense que cela change bien des
choses. Mais cela ne veut pas dire quand même que cela peut lui prendre
une année complète pour mettre de l'ordre dans ses affaires.
En tout cas, je suggérerais très fortement au premier
ministre de réviser ce délai en tentant de le diminuer le plus
possible.
M. BOURASSA: Je n'ai pas d'objection. M. BURNS: Pour ce cas
là...
M. BOURASSA: Je vais voir comment on peut faire ça.
Propriétés foncières.
M. BURNS: Juste avant ça... Non, cela va, c'est couvert par
l'élément du député de Saguenay.
Propriétés foncières.
M. LESSARD: D'abord, on dit: "Pour des ministres qui sont en fonction,
il leur sera interdit à la page 4, premier paragraphe
ainsi qu'à leur famille immédiate d'acheter, pour des fins de
spéculation, un terrain ou d'acquérir des intérêts
dans une propriété foncière". Pour des fins de
spéculation, je comprends, généralement, ce qu'on entend
par "fins de spéculation". Mais, à un moment donné, par
exemple, lorsqu'il s'agit de le préciser, certains peuvent dire, par
exemple, que lorsqu'ils achètent une propriété
foncière, ils
ne l'achètent pas pour des fins de spéculation. Mais,
quatre ou cinq ans après, ce n'est plus la même chose. Alors,
est-ce que le terme n'est pas une imprécision? C'est difficile...
M. LALONDE: C'est imprécis dans la nature même parce que la
spéculation, au moment de l'acquisition, est une question
d'intention.
M. LESSARD: C'est ça.
M. LALONDE: C'est un peu comme dans les questions financières. Si
vous vendez un investissement que vous avez depuis un certain nombre
d'années, surtout dans le temps où il n'y avait pas d'impôt
sur les gains de capitaux, là on essayait de déterminer, par
toutes sortes de preuves circonstantielles, l'intention que vous aviez au
moment où vous aviez fait le placement.
Par la nature même du concept de spéculation, cela doit
nécessairement être sujet à toutes sortes de circonstances,
jugé d'après les circonstances.
Je suis d'accord avec le député qui dit que c'est
seulement après un certain temps qu'on s'aperçoit que le gars a
voulu faire de la spéculation avec cela, mais c'est assez difficile,
même dans une loi, de déterminer ce que c'est, la
spéculation.
Je pense bien qu'on peut dire que quelqu'un qui achète un terrain
sans l'exploiter pourrait avoir l'intention de faire de la spéculation,
c'est-à-dire de le revendre avec profit seulement par l'effet de
l'augmentation du marché, alors que celui qui achète un terrain
et qui construit une maison ou un immeuble quelconque pour l'utiliser, pour lui
ou pour d'autres, n'en ferait pas. En fait, il y a une série de
circonstances qui peuvent déterminer quand il y a intention de
spéculation.
La directive, je pense, exprime le désir du premier ministre que
ses ministres ne se vouent pas à la spéculation consciente. C'est
peut-être seulement au bout de six mois qu'on va s'apercevoir que, six
mois avant, c'est ce qu'il avait fait. A ce moment-là, c'est une
question difficile à régler.
M. BURNS: Le ministre sait-il qu'il existe une définition
légale, actuellement, en Ontario, qui a été adoptée
il y a moins d'une semaine?
M. LALONDE: Pour la spéculation?
M. BURNS: Oui.
M. LALONDE: Je ne sais pas à quelle...
M. BURNS: Dans la Loi créant l'Ontario Land Corporation, il y a
une définition de la spéculation, en Ontario.
M. LALONDE: A ce moment-là, si elle était facilement
empruntable et adaptable, peut-être que cela pourrait nous aider.
M. BURNS: Je ne sais pas si vous voulez aller là ou si vous
voulez aller plus loin dans votre définition de la spéculation,
mais cette définition s'attaque surtout à un terrain non
construit...
M. LALONDE: C'est ça. Je pense qu'essentiellement c'est
ça.
M. BURNS: ... qui est revendu avec profit sans qu'amélioration
lui soit apportée.
M. LALONDE: Oui. Mais au moment de l'acquisition, comment
prouvez-vous...
M. BURNS: C'est au moment de la revente.
M. LALONDE: C'est au moment de la revente que cela peut se faire. Cela
s'est fait dans un certain nombre de circonstances. Comme le
député de Maisonneuve le dit, deux sont assez faciles à
établir : le défaut de faire des améliorations dessus ou
de construire. Mais, au moment de l'acquisition, on doit nécessairement
se fier à la déclaration de l'acquéreur.
M. LESSARD: Si le ministre, par exemple, par certaines informations,
estime que la nouvelle route qu'on va construire dans deux, trois ou quatre ans
va passer sur un terrain et décide de l'acheter, à ce
moment-là, pour lui, il n'y a pas de spéculation...
M. LALONDE: Non.
M. LESSARD: ... dans son idée. Il peut avoir des informations,
cependant, qui lui permettent de prendre un risque calculé. Mais c'est
seulement sept ou huit mois ou un an ou deux ans après qu'on va
constater qu'il y avait eu véritablement spéculation à ce
moment-là.
M. LALONDE: Ou intention de faire un profit, non pas par le
marché, mais par le fait qu'une route passerait là.
M. LESSARD: Des informations, comme ministre.
M. LALONDE: Je dois peut-être attirer l'attention du
député sur la Loi de la Législature qui, sans mentionner
particulièrement ce cas, défend à un député
de vendre un terrain au gouvernement, sauf par voie d'expropriation.
L'indemnité est déterminée nécessairement par la
Régie des services publics et non pas de gré à gré
pour les terrains qui sont vendus pour des fins de travaux publics.
Cela, c'en est une sauvegarde qui est déjà inscrite dans
la loi.
M. BOURASSA: Compagnies publiques?
M. BURNS: Non, toujours dans cette page 4, M. le premier ministre, vous
avez le dernier paragraphe...
M. BOURASSA: Compagnies publiques, cela va. Fiducies, il est
possible...
M. BURNS: Non, non, on n'est pas rendu là encore.
M. BOURASSA: Ah ! Le dernier paragraphe de...
M. BURNS: Le dernier paragraphe de 4, à la page 4, où on
lit que "rien n'empêche l'acquisition de terres agricoles par un ministre
qui se propose d'en faire l'exploitation je pense bien que c'est assez
clair, on sait ce que cela veut dire ni l'acquisition, personnellement
ou par des sociétés privées, d'immeubles devant servir
à des fins commerciales normales".
C'est quoi, cela, des "fins commerciales normales"?
M. LALONDE: Cela a été emprunté assez
littéralement de l'Ontario. La directive de M. Davis faisait la
distinction justement avec des fins commerciales anormales que j'ai
interprétées comme étant de la spéculation. C'est
pour ça que je crois que c'est mieux de mettre le terme
spéculation. Dans la directive de l'Ontario il n'y avait pas ce terme.
Je crois en fait c'est une question d'opinion que ce serait pour
fins commerciales normales, c'est-à-dire acheter un duplex ou un
édifice à bureaux, un édifice pour faire un commerce et
non pas pour faire de la spéculation avec le terrain. Cela serait
permis, sujet naturellement à toutes les obligations de divulgation qui
sont ajoutées.
M. BURNS: C'est votre interprétation de l'affaire.
M. LALONDE: Pour s'acheter un édifice à bureaux, il y
aurait évidemment l'interdiction de conclure un marché avec
l'Etat, avec le gouvernement; parce que c'est un commerce susceptible de
conclure un marché avec l'Etat, il ne pourrait pas louer au
gouvernement.
M. BURNS: Même pas à la Société des
alcools?
M. LALONDE: Non.
M. BURNS: Même pas par un fiduciaire?
M. LALONDE: Non, un fiduciaire, c'est seulement pour les compagnies
publiques.
M. BURNS: C'est parce qu'un cas me vient à l'esprit. Celui qui a
coûté tellement cher.
M. BOURASSA: Cela a coûté cher aussi au ministre. Des
pertes financières importantes.
M. BURNS: Vous nous avez bien fait brailler, cette fois-là.
A l'article 5, M. le Président, Compagnies publiques, là
encore il y a des mots, c'est peut-être ma mauvaise compréhension
du texte...
M. BOURASSA: On n'a pas encore de trust aveugle au Québec. On me
dit que l'office de révision va en proposer un. C'est pour ça que
nous sommes obligés de parler de dépôt fiduciaire et de
mandat.
M. BURNS: Oui, mais là...
M. BOURASSA: En attendant qu'on en ait un.
M. BURNS: ... où je me pose des questions, encore une fois, c'est
peut-être que je n'ai pas le brio nécessaire pour
interpréter le texte, c'est aux mots: "Compte tenu du régime de
la fiducie au Québec et des implications fiscales". Que veut-on dire
exactement?
M. BOURASSA: On n'a pas eu d'avis juridique ferme disant qu'il ne
pourrait pas y avoir d'impôt, mais je crois que ça ne devrait pas
être imposable. Si quelqu'un transfère un dépôt
fiduciaire, il n'y a pas de taxe sur les gains de capital. C'est pour ça
qu'on a mis cette réserve, mais je ne prévois pas que ça
cause de problème. Deuxièmement, compte tenu du régime de
la fiducie au Québec; on n'a pas encore de trust aveugle, quand on en
aura un...
M. BURNS: J'avais compris cette partie-là, mais la partie sur
laquelle j'insistais c'était: "Compte tenu... des implications
fiscales".
M. BOURASSA: C'est-à-dire que, comme la plupart des ministres
vont transférer leurs actions publiques, tous les ministres, à
toutes fins pratiques, vont le faire en fiducie...
M. BURNS: Même votre action dans Bras-can?
M. BOURASSA: Non, je l'ai vendue pour ma contribution au congrès
de leadership mais le congrès, momentanément, n'a pas lieu,
quoi-qu'avec les récents sondages peut-être que ça va
l'avancer. En tout cas j'ai mis l'argent en banque et le député
me fera signe quand il voudra l'avoir.
M. BURNS: Quel congrès?
M. LESSARD: Allez-vous l'appuyer?
M. BOURASSA: On connaît mes tendances
social-démocrates.
Qu'est-ce que le député me posait comme question? Pour la
question de la fiscalité, comme tous les ministres vont
transférer leurs actions de compagnies publiques, s'il y a des taxes sur
les gains de capital, ça peut vouloir dire des montants
considérables pour tous les
ministres. Je ne prévois pas qu'il y en ait. On a consulté
certains experts fiscaux et ils n'en prévoient pas. Mais je veux
être sûr et c'est pour cela que j'ai mis cette
réserve-là. Parce que ça veut dire que toutes les actions
qui vont être transférées, il faudra payer la taxe. Alors,
là il faudrait peut-être penser à une autre formule mais je
suis à peu près assuré que le dépôt
fiduciaire n'implique pas une taxation.
Cela c'est en attendant le trust aveugle mais, quand les conclusions de
l'Office de révision du code civil seront appliquées, il n'y aura
pas de problème. Ce sera seulement en attendant que nous aurons cette
formule.
M. BURNS: A l'article 6, encore une fois, je signale l'aspect
discrétionnaire qui est encore une fois laissé...
M. BOURASSA: Est-ce en Ontario? Je pense que c'est à Ottawa. On a
pris ça des directives fédérales.
M. BURNS: Vous risquez d'avoir des directives replâtrées si
vous prenez quelque chose à Ottawa, quelque chose en
Colombie-Britannique, quelque chose en Ontario.
M. BOURASSA: On a pris le meilleur de ce qui existait partout. En
Colombie, ils excluent les femmes; nous, nous les avons incluses. On a pris ce
que nous avons jugé de meilleur dans tout le système et nous
avons abouti avec des interdictions, des divulgations et des mécanismes
de contrôle.
M. BURNS: Je vous signale simplement c'était le but de ma
remarque je vous signale encore...
M. BOURASSA: La quintessence de ce qui se fait ailleurs.
M. BURNS: ... le pouvoir discrétionnaire qu'on aperçoit
à l'article 6 de la directive lorsqu'on mentionne qu'il "pourra" lui
être demandé que lui-même ou sa famille immédiate se
départisse d'un placement dans une compagnie privée. Il y a
encore un manque de rigueur, je pense.
M. BOURASSA: Je pense au cas de la compagnie de téléphone
Bell, avec le ministre des Communications ou le ministre des Richesses
naturelles dans une compagnie minière publique ou...
M. BURNS: Encore une fois, je vous parle sur le plan de la forme.
M. BOURASSA: ... le ministre des Terres et Forêts dans les
compagnies de pâtes et papiers.
M. BURNS: Non, mais je vous parle sur le plan de la forme en ce sens
qu'il "pourra" lui être demandé. Pourquoi n'y va-t-on pas
carrément et ne dit-on pas que...
M. BOURASSA: Là, il va falloir... M. BURNS: ... on exigera de
lui...
M. BOURASSA: ... définir les cas. C'est pour ça que j'ai
pris...
M. BURNS: Bien non, vous l'avez dit...
M. BOURASSA: Si je dis "ils ne peuvent pas", ils vont dire: Dans quels
cas?
M. BURNS: Vous l'avez dit au début: En raison de la nature des
attributions d'un ministre envers un type donné d'activités
commerciales ou financières. Déjà, il y a du flou
là.
M. BOURASSA: Bien, il "pourra" lui être demandé.
M. BURNS: Je pense qu'on doit l'exiger. On doit être très
clair à cet endroit et dire: II devra s'en départir.
M. BOURASSA: II faut comprendre "pourra" par "devra", un peu comme
on...
M. BURNS: Bon, dites-le.
M. BOURASSA: Je veux dire que ce sont les formules des juristes. Le
député de Maisonneuve est plus près des juristes que je ne
le suis.
M. BURNS: C'est ça, mais les juristes, j'en vois quelques-uns
derrière vous qui savent comme vous et moi, peut-être comme moi et
eux, que quand on dit quelque chose dans un texte, il faut que ça ait
son plein sens.
M. BOURASSA: Je veux dire au député...
M. LESSARD: II faudrait que ce soit plus clair que le bill 22.
M. BOURASSA: ... qu'il l'interprète comme...
M. BURNS: En matière d'interprétation, justement, le mot
"pourra" n'impose jamais une obligation.
M. BOURASSA: Mais je veux dire qu'il peut l'interpréter comme
"devra".
M. BURNS: A ce moment-là, il faudrait écrire "devra".
Qu'il exigera de lui, ou quelque formule du genre.
M. BOURASSA: La jurisprudence nous guide dans ces choses-là, on
prend...
M. LESSARD: Au paragraphe...
M. BURNS: La jurisprudence vous dirait que ça n'impose aucune
obligation dans ce cas-là. Or, je trouve qu'il devrait y avoir une
obligation claire et que le texte ne devrait aucunement être ambigu.
Quand on dit qu'il pourra lui être demandé, imaginez-vous, on
utilise le "pourra" avec le "demandé". On va se mettre à genoux
devant le ministre qui détient les trois quarts des actions de Bell;
même s'il est ministre des Communications, on va se mettre à
genoux devant lui.
M. BOURASSA: Des cas théoriques... M. BURNS: Non, non,
mais...
M. BOURASSA: ... il n'y a pas de directive qui va...
M. BURNS: Si vous en voulez des grosses, on va vous en faire des
grosses.
M. BOURASSA: ... à moins de se limiter aux Franciscains comme
personnel politique, il n'y a pas de directive qui va satisfaire le
député de Maisonneuve avec des cas théoriques. Je ne pense
pas que le député de Deux-Montagnes puisse jamais avoir les trois
quarts des actions de la compagnie de téléphone Bell, loin de
là.
M. LALONDE: Maintenant, si je peux ajouter que si on avait écrit
"il devra se départir d'un placement", il faudrait dire exactement
quelle sorte de placement. C'est un peu dans le style de la phrase qui
infère que selon la nature de ses fonctions, de ses attributions, la
nature de son placement, il y aura une vente nécessairement.
M. BURNS: Je vous dis tout de suite que vous avez un texte qui n'aura
jamais aucune application. Vous avez déjà du vague dans le
début du texte; vous avez un "pourra" qui vient s'ajouter et une demande
qui est faite.
M. BOURASSA: D'accord. Je dis au député, parce qu'on ne va
pas faire de corrections, de considérer et je le dis au journal
des Débats "pourra" comme "devra". Parce que c'est ce qu'on
voulait dire, et si on a employé la formule "pourra", c'est que dans les
textes similaires, c'est la formule qu'on employait. Mais je veux dire au
député, que pour être très clair, c'est dans le sens
de "devra", je veux dire juridiquement.
M. BURNS: Encore une fois vous avez pris des textes anglais et vous avez
traduit. En anglais, ils ont peut-être un petit peu plus de poids que
ça.
M. BOURASSA: Peut-être qu'en anglais... M. BURNS: Je le dis
sérieusement... M. BOURASSA: D'accord.
M. BURNS: ... parce qu'en droit statutaire, une expression de ce type
peut avoir plus de poids, selon le contexte, évidemment.
M. BOURASSA: II faut dire que le français n'est pas encore la
seule langue officielle au Québec, mais il reste que je prends note de
ce que dis le député de Maisonneuve. Ce texte est une traduction,
c'est vrai, de ce qui se fait dans d'autres provinces et au
fédéral. C'est pourquoi, pour une traduction, on a "pourra"
plutôt que "devra". Exceptionnellement, ce sont les cas
d'intérêt public ou les cas insignificants, je veux dire s'il
arrive un cas...
M. LESSARD: II y a encore de la discrétion.
M. BOURASSA: Je veux dire que la commission des engagements financiers
va examiner cela. Quels cas me signaliez-vous, M. le leader, là-dessus?
Le leader m'a amené une centaine de cas en disant: Avez-vous de ces
affaires-là? Il n'est pas...
M. BURNS: II n'a pas tant d'actions que cela.
M. BOURASSA: Non, mais ce sont des cas comme ça, des cas
insignifiants, qui ne devraient pas engager la démission d'un ministre.
Il faut se garder un peu de marge de manoeuvre c'est-à-dire au
cas...
M. BURNS: Bien non, il ne faut pas. Justement, c'est ça.
Voyez-vous, vous venez justement de lâcher l'affaire, là.
M. BOURASSA: Non, mais dans des cas comme ceux-là, je veux dire
que c'est le bon sens. Un ministre est propriétaire d'une quincaillerie,
puis un fonctionnaire va aller acheter un marteau, puis il va être
obligé de démissionner?
M. BURNS: Bien, vous exagérez dans le sens contraire de celui que
vous me blâmiez d'utiliser tout à l'heure.
M. LEVESQUE: Non, mais, si on suit les directives à la lettre,
n'est-il pas vrai que le fonctionnaire du ministère des Transports, qui
est à court d'un marteau ou d'une chaudière ou d'un balai;
ça presse, puis il entre, il achète; le commis lui vend, sans
même la connaissance du ministre qui est propriétaire de la
quincaillerie en question ou de la chaîne de quincailleries. Qu'est-ce
qu'il arrive si quelqu'un veut faire une cause au ministre?
M. BURNS: Vraiment, là, c'est en faire de l'enculage de
mouche.
M. BOURASSA: Cela peut arriver. Qu'est-ce qui peut empêcher
ça?
M. BURNS: Bien, écoutez, ce n'est pas...
M. BOURASSA: Ou un camion qui se fait réparer dans un garage du
ministre; qui peut empêcher ça? Le ministre n'est pas là
dans son garage pour vérifier tous les camions qui se font
réparer, pour voir si c'est un camion de SOQUEM qui se fait
réparer. Je ne veux pas... C'est pour ça... Je voudrais que le
député de Maisonneuve réfléchisse cinq minutes. Il
va voir qu'à moins d'être complètement cinglé, on va
le plus loin possible, en tenant compte des interdictions, puis des
divulgations.
M. BURNS: Est-ce que vous me conseillez de faire venir mon ancien chef
parlementaire?
M. LALONDE: II y a une chose importante qu'il faut peut-être
considérer dans le paragraphe b). C'est la commission parlementaire des
engagements financiers qui est probablement l'organisme le plus
indépendant, qui n'est pas du gouvernement, qui est une créature
de l'Assemblée nationale.
M. BURNS: Ou la commission des comptes publics.
M. LALONDE: Bon, en fait, c'est celle des engagements financiers, une
commission parlementaire, un organisme indépendant, qui pourrait scruter
ça. C'est réellement, je crois, ajouter la garantie la plus
éloignée possible de l'influence. Il y en a peut-être
d'autres.
M. BURNS: M. le ministre, est-ce que je peux vous signaler
ça fait deux ou trois fois que vous et le premier ministre, vous
référez à la commission des engagements financiers
qu'on ne sait pas quand elle va siéger, cette fameuse commission, parce
qu'actuellement on a un léger conflit relativement à
l'enregistrement des débats de cette commission.
M. BOURASSA: Le député a parlé de la commission de
l'Assemblée nationale tantôt. Si c'est plus commode, disons que ce
que je peux dire au député, c'est que, quand un cas comme
ça me sera soulevé, mettons qu'un fonctionnaire va acheter un
objet dans une quincaillerie qui appartient à un ministre, je vais
communiquer avec le leader ou le chef de l'opposition, puis je vais dire:
Voilà le cas. On va réunir la commission parlementaire.
M. BURNS: Avec le marteau.
M. BOURASSA: C'est ça. Le député va dire: Cela n'a
pas de sens de demander la démission du ministre, parce qu'un
fonctionnaire est allé acheter le marteau, puis on va mettre fin
à la commission. Si on fait ça d'une façon trop... Encore
une fois, ça n'existe nulle part ailleurs, sauf en Ontario, dans
certaines catégories. Alors, il ne s'agit pas d'arriver avec des
interdictions qui vont aboutir au ridicule ou à l'injustice.
Là, on est rendu à la divulgation?
M. BURNS: D'accord, on est rendu à la déclaration. Il y a
un mot qui, encore une fois, me choque, me fait sursauter, à la fin du
premier paragraphe: "lorsqu'il y a des changements significatifs". Moi, il me
semble que cette déclaration devrait être faite quels que soient
les changements, significatifs ou non, car qui va décider du
côté significatif des changements? C'est peut-être pour le
ministre en question un détail; il va peut-être dire...
M. BOURASSA: II n'y a pas de problème. C'est ce qu'on veut dire,
c'est qu'à chaque année...
M. BURNS: Non, non, ce n'est pas ça. On dit que "le ou vers le
1er juillet prochain et le 1er août de chaque année, pendant la
durée de ses fonctions, une déclaration contenant les
informations suivantes et tenir à jour..." Cela veut dire que, s'il y a
un changement qui se passe, il doit l'ajouter à sa déclaration.
S'il fait sa déclaration le 1er août c'est ainsi que je
comprends le texte et si, le 1er septembre, même s'il l'a faite le
1er août, il arrive quelque chose de nouveau dans sa situation
financière, il doit mentionner le changement. Mais ce que je n'aime pas,
c'est d'abord le mot significatif, parce qu'encore une fois on est dans le
domaine de la discrétion. Cela prend quoi pour que ce soit singificatif?
Est-ce qu'il faut que ce soit plus de $100, plus de $1,000 ou de $1,500 ou de
$10,000?
M. LALONDE: Vous avez, par exemple, à l'article 3, le nom,
l'occupation et l'adresse de tout créancier individuel, etc. Si ce
créancier change d'adresse, est-ce un changement significatif?
M. BURNS: Non, ça ne change...
M. LALONDE: Pour cela, il n'est pas obligé d'amender sa
déclaration.
M. BURNS: Non, non, mais...
M. LALONDE: Maintenant, s'il fait un emprunt...
M. BURNS: ... à ce moment-là spécifiez les
changements concernant la situation financière elle-même. C'est
sûr qu'on ne veut pas savoir que le gars a déménagé
de la rue Saint-Jean à la Grande-Allée, ce n'est pas ça
qui nous intéresse.
M. BOURASSA: II n'y a à peu près pas de divergence dans
les remarques que fait le député de Maisonneuve ce soir. Il
s'agit de serrer à certains endroits et, dans certains cas, le
député va admettre qu'il faut quand même un peu... Je suis
prêt à en tenir compte. On pense la même chose, sauf qu'on
va peut-être l'écrire différemment.
M. LALONDE: On aura peut-être un mot plus heureux, je ne l'ai pas
à l'idée.
M. BURNS: Je suis d'accord avec le ministre s'il veut dire
"significatif" dans le sens que ce n'est pas significatif que son
créancier ait déménagé de trois rues. Je suis
d'accord avec lui. Ce que je veux dire, c'est que s'il achète, trois
mois après avoir fait sa déclaration, des actions dans une autre
compagnie...
M. LALONDE: Cela, c'est significatif.
M. BURNS: ... il me semble que ce n'est pas le montant des actions qui
va faire que c'est un changement significatif.
M. BOURASSA: Le député se rend compte combien il va
être difficile de mettre cela dans un texte de loi.
M. BURNS: J'ai des suggestions à faire au premier ministre sur le
plan d'un projet de loi. Je lui offre, comme je l'ai fait à plusieurs
reprises...
M. BOURASSA: Ses services.
M. BURNS: ... d'être son conseiller juridique.
M. BOURASSA: Ah! d'accord. M. BURNS: S'il veut m'écouter...
M. BOURASSA: Dans le cas du Soleil, cela avait été utile.
Il avait été obligé de contredire son collègue, le
député de Saint-Jacques.
M. BURNS: ... cette fois-là, peut-être qu'il se lancera
dans une bonne voie.
M. BOURASSA: D'accord, j'accepte l'offre...
M. BURNS: D'ailleurs, le rôle de l'Opposition est d'aider le
gouvernement.
M. BOURASSA: ... de services, à titre gratuit, du
député de Maisonneuve. Parce que c'est contre les directives
qu'il soit rémunéré.
M. BURNS: Ce n'est pas à titre gratuit, je suis
déjà rémunéré pour cela, M. le
Président.
M. LESSARD: Encore au niveau du paragraphe 7, concernant la
déclaration, au sous-paragraphe 1 il est dit: Le nom de toute
société... "Le ministre devra dévoiler le nom de toute
société privée dans laquelle il détient..." Est-ce
qu'on ne pourrait pas ajouter: Dans laquelle il détient directement ou
par personnes interposées ou par compagnies interposées?
M. BOURASSA: Cela, ça se trouve...
M. LESSARD: Là, c'est au niveau de la déclaration.
M. BOURASSA: Je ne sais pas si ç'a été
prévu. C'est ce que ça veut dire.
M. LESSARD: Oui, mais pourquoi ne l'ajouterait-on pas? D détient
directement ou...
M. LALONDE: D'accord, on peut mettre tout le langage légaliste
là-dedans.
M. BOURASSA: Je dis au député que c'est ce que ça
veut dire.
M. LESSARD: Vous savez que les lois doivent être faites de la
meilleure façon possible.
M. BOURASSA: Ah oui, d'accord!
M. LESSARD: Est-ce que le premier ministre accepterait d'ajouter,
après "il détient", les mots "directement...
M. BOURASSA: Directement ou indirectement.
M. LESSARD: ... ou par personnes ou compagnies interposées...
M. LEVESQUE: II n'y a qu'à dire "directement ou
indirectement".
M. LESSARD: ... des intérêts"?
M. LALONDE: Comme on l'a mis dans l'interdiction.
M. LESSARD: D'accord, c'est justement cela, directement ou
indirectement. Pourquoi précise-t-on seulement les
sociétés privées? Pourquoi ne pas préciser aussi
les intérêts qu'il peut détenir dans les
sociétés publiques?
M. BOURASSA: Parce qu'elles sont confiées à une
Société de fiducie, les sociétés publiques. C'est
en fiducie. Il est admis, dans toutes les autres juridictions, que dans le cas
des sociétés publiques, si c'est remis en fiducie et si le
ministre renonce quand c'est remis en fiducie, dans un "blind trust", il n'a
aucun contrôle. Dans ces cas-là, il n'y a pas
nécessité de divulgation parce qu'il n'y a pas de
possibilité de conflit d'intérêts. Si le ministre refuse de
confier cela à une société de fiducie, là, il sera
obligé de les dévoiler. C'est cela?
M. LALONDE: Je regrette. S'il ne les confie pas à une
société de fiducie, il faut qu'il s'en départisse.
L'interdiction lui donne le choix soit de se départir des actions de
compagnies publiques ou de les mettre en fiducie. Le choix, naturellement,
existe pour être pratique. Le député qui a pour $500
d'actions dans une compagnie publique, il va sûrement probablement
choisir de s'en départir parce
que le coût de la fiducie peut être assez prohibitif. On l'a
mentionné dans notre rapport. C'est pour cela qu'on veut donner le
choix. De toute façon, autrement dit...
M. LESSARD: S'il n'est pas obligé de dévoiler, justement,
qu'il est propriétaire d'actions dans une société
publique, comment le premier ministre pourra-t-il être assuré que
ce ministre va confier à une société de fiducie
l'administration de ses actions?
M. LALONDE: C'est un peu comme prouver l'absence, prouver la
non-existence; du fait qu'il a une obligation de s'en départir ou de les
confier, je crois, découle nécessairement l'impossibilité
de divulguer ce qu'il a.
M. BOURASSA: S'il ne le fait pas, il ne respecte pas la loi...
M. LALONDE: II ne respecte pas...
M. BOURASSA: Si le ministre, par exemple, refuse de les mettre en
fiducie...
M. LALONDE: Ce serait illogique de lui demander de divulguer des choses
dont on vient de lui demander de se départir, soit par la fiducie soit
en les vendant.
M. LESSARD: S'il s'en est départi, il n'est pas obligé de
le déclarer, à ce moment-là.
M. BOURASSA: II n'a rien à déclarer.
M. LESSARD: C'est ça, il n'a rien à déclarer. Mais
si par contre, il ne se soumet pas aux directives et ne s'en départit
pas, qu'il ne déclare pas qu'il est actionnaire, par exemple, dans une
société publique, comment va-t-on le savoir? Comment va-t-on
être assuré que le ministre va confier l'administration de ses
actions à une société de fiducie? Comment le premier
ministre pourra-t-il, étant donné qu'il ne sait pas qu'il est
actionnaire d'une société publique, demander à son
ministre soit de s'en départir ou soit de les confier à une
société de fiducie?
M. BOURASSA: Mais quel intérêt aurait le ministre à
agir de la sorte? Il a tout intérêt à confier ça
à une fiducie. Quel contrôle peut avoir un ministre dans une
compagnie publique?
M. LALONDE: A part ça, c'est que s'il n'obéit pas, s'il
viole l'obligation de s'en départir et de le confier à une
fiducie, comment peut-on se fier à sa divulgation? C'est un peu comme la
quadrature du cercle. Dans la divulgation on présume qu'il s'est
conformé à l'obligation de s'en départir. Encore je pose
la question. Comment peut-on lui demander de divulguer quelque chose dont on
vient de lui demander de se départir?
M. LESSARD: Oui, mais il a deux choix: ou bien il peut s'en
départir ou bien il peut les confier à une société
de fiducie. Pour savoir...
M. BOURASSA: Les fonds mutuels, vous placeriez ça dans... C'est
une fiducie de...
M. LESSARD: Les fonds mutuels, c'est un genre d'administration, un genre
de fiducie, en fait, vous n'avez aucun contrôle dessus. Vous achetez des
fonds mutuels et c'est de l'administration de prêt et revenu qui...
M. BOURASSA: C'est un genre de fiducie, c'est un peu ce qu'on propose
pour toutes les compagnies publiques.
M. LALONDE: Je pourrais peut-être vous offrir une autre
réponse. S'il ne s'est pas départi de ses actions, s'il les a
confiées en fiducie, il ne peut pas les divulguer parce qu'il ne sait
pas quelles sont ses actions.
M. LESSARD: Je suis d'accord.
M. LALONDE: Etant donné que la fiducie est sans droit de regard,
la fiducie a le droit de les vendre, de les remplacer hors la connaissance du
ministre. Alors, comment peut-il divulguer les actions qu'il a alors qu'il ne
sait même pas lesquelles il a?
M. LESSARD: Mais je me demande si, lorsque vous confiez à une
société de fiducie l'administration de vos biens, il n'y a pas
quand même consultation? D'après ce que je peux savoir, avant
d'échanger des actions, il y a une consultation. La
société de fiducie ne peut pas vendre directement comme
ça.
M. LALONDE: Là où je pense qu'on peut satisfaire à
la demande du député c'est, dans la formule de divulgation,
d'indiquer s'il a confié à une fiducie les actions de compagnies
publiques qu'il avait.
M. LESSARD: C'est ça. Je pense qu'il serait facile de...
M. LALONDE: Une espèce de carré, oui ou non, ou s'il s'en
est départi s'il en avait. Mais il ne peut pas les divulguer, parce que
la divulgation, ce n'est pas de savoir qu'est-ce qu'on a fait, c'est de savoir
qu'est-ce qu'on a. C'est pour ça que ça n'appartient pas à
la divulgation comme telle. Mais dans la formule, il pourrait peut-être y
avoir un paragraphe là-dessus, oui, mais qui n'est pas strictement de la
divulgation, parce qu'il ne peut pas divulguer ce qu'il n'a pas, qu'il l'ait
confié à une fiducie ou non, ou qu'il s'en soit départi,
purement et simplement.
M. LESSARD: II peut quand même divulguer le fait qu'il a
confié ses actions en fiducie.
M. LALONDE: A part ça, il faut quand
même reconnaître que la divulgation ici c'est un peu comme
le témoignage, c'est basé sur la présomption que le
ministre va dire la vérité, qui va dire ce qu'il a. C'est
basé sur la confiance.
M. LESSARD: Comme les déclarations officielles des
députés en Chambre.
M. LALONDE: Pas des ministres, vous voulez dire des
députés.
M. LESSARD: Je comprends que, normalement, le ministre doit se soumettre
à des directives. Cela arrive, dans certains cas, que le premier
ministre apprend par après que son ministre était à ce
moment-là propriétaire d'un certain nombre d'actions; mais pour
que le premier ministre le sache, il faut qu'il fasse la déclaration
qu'il est propriétaire d'un certain nombre d'actions, et là il
aura le choix...
M. LALONDE: Ou s'il n'en a pas, ce ne serait pas une divulgation, ce
serait une déclaration négative.
M. LESSARD: Je comprends que même si, en fait, on l'oblige
à la divulgation, puisqu'il ne le fait pas, il peut ne pas la faire.
M. LALONDE: On peut le mettre dans la déclaration, mais ça
apparaîtra difficilement dans le contexte de la divulgation. Parce que la
divulgation, essentiellement, c'est divulguer ce qu'on a.
M. LESSARD: Maintenant...
M. BOURASSA: On pourrait ajouter une question dans la
déclaration.
M. BURNS: Oui, d'accord.
M. LALONDE: Dans le sens de: Qu'est-ce que vous faites avec les actions
de ces compagnies?
M. BOURASSA: S'il s'en est départi ou s'il les a confiées
à des fiducies? Cela répond à la question.
M. LESSARD: C'est ça. Maintenant, dans certaines directives comme
celles-là, on indique les dons que peut recevoir, par exemple, un
ministre, des cadeaux qui peuvent être d'une certaine importance, par
exemple au-delà de $200, $250 ou $300.
M. BOURASSA: Ce ne sont pas des bouteilles de scotch qu'on
reçoit.
M. LESSARD: Non, je ne vous demande pas les bouteilles de scotch...
M. BOURASSA: Ce n'est pas moi qui les bois.
M. LESSARD: Je ne vous demande pas les bouteilles de scotch...
M. BURNS: Vous ne nous invitez pas souvent, d'ailleurs.
M. BOURASSA: Je vous enverrai ma prochaine bouteille.
M. LESSARD: Oui, mais un cadeau qu'un ministre peut recevoir, par
exemple au-delà de $200, c'est quand même...
M. BOURASSA: Ils les refusent, je crois. En pratique et en principe.
M. LESSARD: Vous avez bien confiance à vos ministres.
M. BOURASSA: Ah oui! Ils sont d'une intégrité
parfaite.
M. LESSARD: Mais on ne le sait pas.
M. BOURASSA: J'ai le meilleur conseil des ministres qu'aucun premier
ministre ait jamais eu. Pour accepter ces directives...
M. BURNS: Vous avez remarqué que ce sont surtout des ministres
qui applaudissent!
M. LESSARD: A la page 6...
M. LALONDE: On n'est pas pour attendre que ce soit les autres.
M. LESSARD: ... paragraphe 4, on indique: Le ministre devra justement
déclarer...
M. BOURASSA: $2,000, cela va pour le chef?
M. LESSARD: Bien, $2,000, cela va.
M. BOURASSA: Le leader parlementaire de l'Opposition, $2,000, est-ce que
ça va?
M. BURNS: Pardon?
M. BOURASSA: $2,000, les dettes... M. BURNS: $1,000 ou $2,000...
M. BOURASSA: ... excédant $2,000. M. BURNS: Cela va.
M. BOURASSA: Est-ce qu'il aime mieux $3,000?
M. BURNS: Cela pourrait être $1,000.
M. BOURASSA: Bien, j'avais mis $1,000, mais on m'a
suggéré... De votre côté, on m'a dit que $2,000,
cela aurait du sens.
M. BURNS: On n'est pas pour se battre pour $1,000.
M. LESSARD: Au paragraphe 4, au sujet de la divulgation, on dit: "...
devra déclarer toute entreprise ou société commerciale non
incorporée". Pourquoi ne pas ajouter aussi les sociétés
incorporées et dire "sociétés commerciales
incorporées ou non"?
M. LALONDE: Parce qu'on a déjà dit à 1, les
compagnies incorporées.
M. LESSARD: Bon.
M. LALONDE: Alors, on s'est aperçu qu'au fond on laissait une
grande porte ouverte parce qu'il est fort possible que des personnes soient
associées sous une raison sociale...
M. LESSARD: J'ai encore une question...
M. LALONDE: Si vous me permettez de terminer ma réponse, le 4 est
le pendant de 1.
M. LESSARD: D'accord.
M. LALONDE: 1 est pour les compagnies incorporées parce qu'on
parle d'actions, et le 4, c'est la même chose, mais pour les
sociétés commerciales non incorporées.
M. LESSARD: A 4, on ajoute "la société commerciale non
incorporée dans laquelle il est associé ou propriétaire".
On ne pourrait pas ajouter "ou employé ou conseiller"?
M. LALONDE: Bien là, l'intérêt...
M. LESSARD: Ou pensionné, par exemple?
M. LALONDE: L'intérêt...
M. LESSARD: II peut avoir une pension après avoir
travaillé pendant un temps X.
M. LALONDE: Oui, je sais qu'il y en a qui ont des pensions. Cela a
été suggéré dans d'autres juridictions, dans des
projets. Je ne sais pas où, je ne sais pas si ce n'est pas au Manitoba.
L'intérêt a été identifié comme un
intérêt pécuniaire, un intérêt de
propriétaire. Il s'agit de divulger ce que l'on a comme biens; les biens
dont la nature pourrait amener des situations de conflits. C'est pour ça
que la divulgation ne porte que sur les choses dont les ministres sont
propriétaires, ou à titre d'associés. Je comprends que la
distinction entre associé et propriétaire peut être un peu
confuse parce que, essentiellement, un associé peut aussi être
partiellement propriétaire. Mais ce que cela veut dire, s'il est
propriétaire seul et a un commerce sous une raison sociale, il n'est pas
incorporé, il est couvert par ça.
M. LESSARD: Et s'il est conseiller?
M. LALONDE: Conseiller. A ce moment-là, comment peut-il
être conseiller?
M. LESSARD: En vertu du paragraphe 1, il peut si cela ne nuit pas
à ses fonctions continuer de demeurer conseiller de la
compagnie.
M. LALONDE: II peut, quoique l'interdiction, c'est justement d'avoir des
activités professionnelles qui peuvent nuire à ses fonctions. Le
premier ministre a démontré clairement que cela ne
présumait pas qu'un ministre pouvait passer deux jours par semaine
à son bureau et trois jours à faire des affaires.
Essentiellement, on s'attend, comme le leader de l'Opposition l'a aussi
mentionné, que les ministres passent tout leur temps à leur
travail.
Je ne vois pas comment un conseiller d'une société
privée ou d'une association, d'une société non
incorporée, pourrait, de par ses fonctions, avoir un conflit,
étant donné qu'il n'a pas d'intérêts de
propriétaire.
M. BOURASSA: Cela va. Alors, on va prendre les crédits. En allant
jusqu'à dix heures et demie, on peut finir mes crédits?
M. LESSARD: Le statut de la femme, M. le Président.
M. BOURASSA: Le statut de la femme, je vais laisser cela à mon
personnel. Disons que moi, si je pouvais me libérer...
M. LESSARD: D'accord.
LE PRESIDENT (M. Picard): Elément 1, cabinet du premier ministre
et administration, toujours au programme 3.
M. BOURASSA: Ce n'est pas le lieutenant-gouverneur? On commence par
ça d'habitude.
Bureau du lieutenant-gouverneur
LE PRESIDENT (M. Picard): Nous allons commencer par le programme 1,
bureau du lieutenant-gouverneur.
M. LESSARD : Programme 1.
LE PRESIDENT (M. Heard): Programme 1, page 8-3.
M. LESSARD: II est prévu, au bureau du lieutenant-gouverneur, un
montant de $169,300 et des traitements de $131,300 pour des effectifs de seize
personnes. Est-ce qu'on pourrait avoir des détails? J'estime bien le
lieutenant-gouverneur, l'Opposition déloyale de sa majesté, mais
je trouve que ce montant de $169,300 est très élevé.
Est-ce qu'on pourrait avoir des détails?
M. BOURASSA: Traitements et salaires, c'est $131,000 par rapport
à $128,000.
M. LESSARD: C'est ça.
M. BOURASSA: Seulement $3,000 d'augmentation.
M. LESSARD: Je suis bien d'accord, M. le Président.
M. BOURASSA: C'est environ 2 p.c. d'augmentation.
M. LESSARD: Pour seize personnes.
M. BOURASSA: D'accord, mais il y a seulement $3,000 d'augmentation.
M. LESSARD: Ce n'est pas l'augmentation, M. le Président. Je dis
qu'il y a $131,300 pour seize personnes.
M. BOURASSA: Cela ne fait pas $10,000 par personne. Il y a un chef de
cabinet qui a $25,000. Je ne pense pas que ce soit exagéré. Je
comprends que le député de Saguenay n'est pas plus royaliste
qu'il ne faut, mais cela fait une moyenne de $8,000. Je comprends que le
député de Saguenay est républicain, mais...
M. LESSARD: Pardon? Je n'ai pas compris, M. le Président.
M. BOURASSA: J'ai dit que vous aviez des tendances républicaines,
que cela vous incitait à poser des questions sur... Je vais faire la
liste.
M. LESSARD: Justement, est-ce que le premier ministre accepterait de
déposer la liste des seize employés du lieutenant-gouverneur avec
les postes occupés et les salaires payés.
M. BOURASSA: Gabriel Taschereau, $25,700, chef de cabinet. Marielle
Gagné, attachée d'administration, $11,900. Jacques Huot,
technicien en administration, $8,900. J'enlève les montants
inférieurs. Marcel Guillemette, agent de bureau, $7,800. Micheline
Dussault, employée de secrétariat, $9,050. Yvon Petit, auxiliaire
de bureau, $4,900. Hilaire Aubin, journalier, $4,900. Marcel Gagnon,
martre-jardinier, $7,100. Rose-Marie Lessard, aide domestique, $4,900.
Cécile Lévesque, femme de chambre, $4,000. Marcel Koslowski,
cuisinier, $9,000. Roger Beaupré, Raymond Laliberté, Jeannette
Brochu et Philomène Koslowski.
M. LESSARD: Philomène Koslowski, combien?
M. BOURASSA: $5,381. Cela va?
M. LESSARD: Le lieutenant-gouverneur de- meure, en compagnie de son
épouse, dans le nouvel édifice, et ces seize personnes
sont...
M. BOURASSA: A côté de l'endroit où il demeure.
M. LESSARD: Oui, et ces seize personnes-là sont à son
emploi exclusivement?
M. BOURASSA: Oui. $131,000, il y a $3,000 d'augmentation.
M. LESSARD: Non, mais.
M. BOURASSA: Je vois le député de Lafontaine, qui trouve
que c'est plus que raisonnable.
M. LESSARD: Ce n'est sûrement pas sur la question des salaires,
mais sur le nombre de personnes qui sont attachées au
lieutenant-gouverneur.
M. BOURASSA: On transmettra vos représentations au
représentant de la reine.
LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 1, adopté?
M. LESSARD: M. le Président, je constate que le
lieutenant-gouverneur a autant de monde qui travaille pour lui que
l'Opposition.
M. BOURASSA: Mais quel est le budget de l'Opposition?
M. LESSARD: C'est $65,000 je pense.
M. BOURASSA: Mais cela ne comprend pas tous les salaires.
Faites vos représentations.
M. LESSARD: Concernant l'utilisation du Bois-de-Coulonge, je pense que
c'est un terrain qui appartenait au gouvernement fédéral et qui
est donné au gouvernement provincial pour qu'il soit utilisé pour
le service du lieutenant-gouverneur. Alors, est-ce qu'on a l'intention de faire
quelque chose avec ça, de l'utiliser, construire une résidence au
premier ministre ou...
M. BOURASSA: Non, tant que je serai premier ministre, il n'est pas
question que je me fasse construire une résidence...
M. LESSARD: Présidentielle.
M. BOURASSA: ... présidentielle. L'expression est pertinente de
la part du député de Saguenay. Il n'est pas question donc que je
me fasse construire une résidence tant que je serai premier ministre. Ce
sera transformé en parc, et c'est actuellement en négociation
avec le gouvernement fédéral.
M. LESSARD: Ce sera transformé en...
M. BOURASSA: En parc public.
M. LESSARD: ... parc public, oui.
M. BOURASSA: En parc public provincial.
M. LESSARD: Bravo, M. le Président.
M. BOURASSA: Cela ferait des économies.
M. LESSARD: Alors, vous êtes convaincu que ça va être
transformé en parc public.
M. BOURASSA: C'est-à-dire qu'il n'est pas question que je me
fasse construire une résidence présidentielle, comme l'a dit le
député de Saguenay.
M. LESSARD: M. Yvon Dupuis, s'il réussit à venir avec le
parti présidentiel, pourra s'occuper de ça.
Adopté, en ce qui me concerne.
M. BOURASSA: Je préfère en faire un parc public pour les
Québécois.
LE PRESIDENT (M. Picard): Est-ce que ça va?
M. LESSARD: Cela va, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 1, adopté.
M. BOURASSA: Alors, cabinet du premier ministre.
LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 2, Administration des
élections. Elément 1, Loi électorale.
M. BOURASSA: Je remets cela à demain. M. LESSARD: C'est ça
que je voulais savoir.
M. BOURASSA: Je me suis entendu avec le député de
Maisonneuve; je vais faire ça demain, à quatre heures.
LE PRESIDENT (M. Picard): Alors, on suspend?
M. BOURASSA: On suspend, oui.
LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 2 suspendu.
M. BOURASSA: On va faire juste mon personnel, le cabinet du premier
ministre.
LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 3, Organismes-conseils auprès
du premier ministre.
M. LEGER: Programme 3, là, M. le Président?
M. LESSARD: II faut bien s'entendre. En ce qui concerne le Conseil du
statut de la femme, on ne le discute pas ce soir?
M. BOURASSA: Si on a le temps. C'est le ministre d'Etat au Conseil
exécutif qui est responsable du Conseil du statut de la femme; ça
pourrait se faire demain, après le programme 2, Administration des
élections.
M. LESSARD: D'accord.
M. BOURASSA: A moins qu'on n'ait le temps ce soir, mais je laisse cela
à la discrétion du député.
M. LESSARD: Moi, je pense, M. le Président, être d'accord
pour discuter du cabinet du premier ministre et qu'on remette cela à
demain.
M. BOURASSA: L'administration des élections et le Conseil du
statut de la femme.
M. LESSARD: C'est ça. M. BOURASSA: D'accord.
M. LEGER: Alors, M. le Président, programme 3.
LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 3, élément 1.
Organismes-conseils auprès du premier ministre
(suite)
M. LEGER: M. le Président, je vois une somme de $2,572,000;
est-ce que le premier ministre pourrait nous dire quels sont les noms des
personnes qui forment son personnel-cadre...
M. BOURASSA: Bon.
M. LEGER: ... ainsi que leurs fonctions et leur salaire?
M. BOURASSA: D'accord. Alors, j'ai le chef de cabinet, M. Benoit Morin
qui est à mes côtés, $35,500; Jean-Claude Rivest,
secrétaire législatif, $27,000; le directeur de...
M. LEGER: II y a eu une augmentation?
M. BOURASSA: ... l'information, Charles Denis, $27,000; Claude Trudel,
chef de cabinet adjoint, $24,500; René Beaulieu, $18,000; Marcel
Laliberté...
M. LEGER: Est-ce que vous pouvez aller un peu plus lentement?
J'étais rendu à Claude Trudel.
M. BOURASSA: Oui, $24,500.
M. LEGER: Quelle est sa fonction?
M. BOURASSA: Chef de cabinet adjoint. Tout sera au journal des
Débats dans une heure.
M. LEGER: A moins que le ministre n'attende que j'aie le journal des
Débats pour lui poser d'autres questions.
M. BOURASSA: Ah! d'accord. Marcel Lali-berté, $18,500; Michel
Guay, qui est au service de placement étudiant; Jean-Pierre Ouellet,
secrétaire particulier adjoint, $16,700; Lawrence Cannon, $14,100;
Berthe Drouin, ma secrétaire, attachée d'administration, $12,700;
Louise Blanchette, secrétaire particulière adjointe, $9,800;
Hélène Lemieux, attachée d'administration, $11,100;
Normand Bolduc, secrétaire particulier adjoint...
M. LEGER: Normand Bolduc, combien dites-vous?
M. BOURASSA: $14,800. Est-ce que vous voulez toutes les
secrétaires?
M. LEGER: Pas les secrétaires comme telles, mais les cadres.
M. BOURASSA: Les cadres, oui. Secrétaire particulier,
François Coderre, $22,500. Là, ce sont des noms féminins,
ce sont probablement des secrétaires. Roland Lebel, $7,500. Là,
ce sont des secrétaires, téléphonistes,
secrétaires. Le député est intéressé
à connaître le nom de mes secrétaires et de mes
téléphonistes? J'ai le cabinet du ministre d'Etat, Claude
Vadebon-coeur, $18,300; Raymond Cantin, $13,000. Le reste, ce sont des
secrétaires.
M. LEGER: Combien avez-vous de secrétaires et de
téléphonistes?
M. BOURASSA: J'ai un service téléphonique 24 heures par
jour. C'est pour ça que si le député veut me rejoindre le
samedi ou le dimanche, il m'appelle...
M. LEGER: Sauf quand vous êtes à la radio ou à
la...
M. BOURASSA: Bien là je suis à la radio, il peut
m'écouter à la radio dans ce cas-là, il...
M. LESSARD: Le premier ministre a un numéro spécial
privé?
M. BOURASSA: Non, non, le bureau, le no 643-5321; vous laissez votre
nom, puis je vous rappelle.
M. LESSARD: Vous êtes sûr?
M. BOURASSA: Des fois, c'est le soir, des fois je rappelle le soir.
M. LEGER: Cela fait combien de secrétaires et de
téléphonistes, même si vous avez le service
téléphonique?
M. BOURASSA: II y a huit téléphonistes parce que c'est 24
heures par jour, donc elles se remplacent, sept jours par semaine, ce n'est
quand même pas exagéré. Quant aux secrétaires, je
pourrais faire le calcul, il doit y en avoir une douzaine, avec la
secrétaire du chef de cabinet, la secrétaire du ministre d'Etat,
ma secrétaire, la secrétaire de M. Rivest, la secrétaire
de M. Denis. C'est normal.
M. LEGER: Je n'ai fait aucune remarque, je n'ai donné aucune
expression d'opinion, même pas dans ma figure.
M. BOURASSA: Non, non, je ne vois pas pourquoi. Non je n'ai pas
d'objection à mettre en relief la valeur de mes secrétaires.
M. LEGER: C'est ça, il paraît qu'un bon ministre doit
être bien entouré.
M. BOURASSA: C'est mon cas.
M. LEGER: Je ne suis pas encore sûr. Alors, M. le
Président, concernant le centre de documentation.
M. BOURASSA: Le prochain programme. Alors ça va pour mon
personnel? Le centre de documentation, c'est sous la direction de M. Chouinard,
oui.
M. LEGER: La question que j'avais posée au début. Est-ce
que vous avez des consultants en plus de ça dans ce groupe de personnes
qui sont payées là?
M. BOURASSA: Non, M. Desrochers a dé-misionné le 1er
avril. D'ailleurs, sa santé déclinait depuis plusieurs mois et il
s'est retiré le 1er avril, et M. Jean Prieur est consultant.
M. LEGER: A honoraires?
M. BOURASSA: A honoraires. Consultant à honoraires.
M. LEGER: C'est le seul consultant que vous avez à
honoraires?
M. BOURASSA: Au bureau, oui, il a $29,000, pardon $32,000.
C'est payé avec un maximum de, mais c'est payé $30,000
environ. Maximum de $32,000.
M. LEGER: La première partie, crédits du conseil
élément 1, c'est adopté en ce qui me concerne, à
moins que les autres députés aient des questions.
M. BOURASSA: D'accord. Alors secrétariat
général. Le CAD qu'est-ce que vous voulez savoir sur le
CAD?
M. LEGER: Le Centre d'analyse des données. Est-ce que le premier
ministre pourrait nous donner le personnel qu'il y a là-dedans? Qui est
directeur?
M. BOURASSA: Je l'ai déjà donné, cela.
M. LEGER: C'est dans le même groupe, c'est inclus?
M. BOURASSA: Cela n'a pas changé.
M. LEGER: Vous voulez dire que vous l'avez donné l'année
passée ou dans les noms que vous venez de me donner?
M. BOURASSA: Je l'ai donné il y a quelques mois à
l'Assemblée nationale, au député de Maisonneuve. Il s'en
est déclaré satisfait, lui.
M. LEGER: II n'y a eu aucun changement là-dedans?
M. BOURASSA: Non.
M. LEGER: Qui est directeur, actuellement?
M. BOURASSA: M. Néron. C'est sous la direction de M. Chouinard;
je n'ai pas tous les détails mais, à ma connaissance, il n'y a
aucun changement. Aucun changement.
M. LEGER: Maintenant, est-ce que le premier ministre pourrait nous dire
quel est le rôle précis ou l'objectif qu'il veut viser avec le
CAD?
M. BOURASSA: C'est de tenir le gouvernement constamment informé
des situations qui peuvent survenir dans la province. Le CAD a joué un
rôle actif dans la question des inondations et cela a été
très précieux. Il nous tient au courant des débrayages
dans le monde de la construction. La meilleure façon de prendre de
bonnes décisions est d'avoir une bonne qualité d'information et
le CAD contribue à cela.
M. LEGER: Le premier ministre m'a donné deux exemples mais, en
général, auprès de qui prend-il ses informations pour des
cas précis comme ça? Est-ce qu'il y a des gens en place un peu
partout?
M. BOURASSA: Les media d'information. Je peux envoyer du personnel,
peut-être, pour examiner les endroits. M. Néron peut se
déplacer lui-même.
M. LEGER: En plus des media d'information, le premier ministre est-il
autorisé à avoir des informations auprès de la
Sûreté du Québec de façon
régulière?
M. BOURASSA: Occasionnellement, oui.
M. LEGER: Cela veut dire quoi, occasionnellement?
M. BOURASSA: A l'occasion. M. LEGER: Occasionally.
M. BOURASSA: La Sûreté du Québec est l'une des
meilleures forces policières du monde, il est normal qu'on puisse
l'utiliser.
M. LEGER: Sur quel genre de dossiers est appelé à se
pencher le CAD?
M. BOURASSA: J'ai donné deux exemples. Ce sont des dossiers...
Comment pourrait-on définir le genre de dossiers? Les situations
d'actualité. L'an dernier, quand j'avais répondu aux questions du
député de Maisonneuve, c'était la question de Cabano, par
exemple, celle de Témiscamingue; là, c'est la construction. Il y
a deux semaines, c'étaient les inondations et, dans trois semaines, cela
pourrait être autre chose. C'est-à-dire les situations d'urgence
ou les situations conflictuelles.
M. LEGER: Comme le problème...
M. BOURASSA: Les situations d'urgence, je pense.
M. LEGER: Comme sur les problèmes des déficiences
actuelles de l'assurance-récolte, est-ce ici où vous avez des
informations?
M. BOURASSA: C'est-à-dire qu'ils vont faire la synthèse du
dossier pour le secrétaire général qui, lui, me le
soumettra, s'il le juge à propos, pour le conseil des ministres.
M. LEGER: Est-ce que vous avez quelqu'un de chargé, en parlant
des médias d'information, d'écouter tout ce qui se passe sur les
"hot lines" et sur les différents organismes qui donnent les
informations pour que le ministre en Chambre soit capable, avant de
répondre à une question, de passer une remarque...
M. BOURASSA: Le premier ministre est extrêmement bien
informé.
M. LEGER: C'est pour ça que vous avez un dossier bien prêt
avant chaque période de questions pour éviter...
M. BOURASSA: C'est ça, quand le Parti québécois est
obligé d'annuler le congrès à Hull ou quand le Parti
québécois...
M. LEGER: Comme ça, Le Jour, vous l'aviez sur votre bureau le
matin?
M. BOURASSA: Ou dans Louis-Hébert, lors-
qu'ils ont été obligés d'annuler également
une réunion parce qu'il n'y avait pas quorum, il n'y avait pas 5 p.c.
des inscrits. Mais cela ne vient pas du CAD.
M. LEGER: C'est parce qu'on fait des réunions de comté,
nous autres.
M. HARVEY (Jonquière): 123 en fin de semaine.
M. BOURASSA: 123.
M. HARVEY (Jonquière): On m'avait dit 96.
M. LEGER: Plus ça va en montant, plus les chiffres descendent,
parce que chez nous c'était 240.
M. HARVEY (Jonquière): On a été malchanceux, on a
doublé notre structure, on a 43 gars qui ont été voir
qu'est-ce qui se passait, ça fait que sur les 80...
M. BOURASSA: Cela n'est pas le CAD. Le CAD ne fait pas de politique.
M. HARVEY (Jonquière): Le CAD ne s'occupe pas de ça, c'est
nous autres ça.
M. BOURASSA: Alors ça va pour le secrétaire
général?
M. LEGER: Un instant, M. le Président, je suis en train
d'assimiler les brillantes réponses du premier ministre. Il faut que je
les digère et que je puisse arriver avec d'autres questions qui viennent
à la suite de celles qui viennent d'être posées.
M. le Président, sur les fonctions du CAD, en
général ce sont simplement des données que le premier
ministre a besoin de savoir rapidement sur les situations d'urgence.
M. BOURASSA: Sur les situations d'urgence.
Le problème qui me préoccupe le plus et de loin, ces
jours-ci, c'est la construction. Il est important. On sait les effets que cela
peut avoir, la question des grèves dans la construction, sur
l'économie en général. Il est important que je sois
informé le plus exactement possible sur la situation.
M. LEGER: Est-ce que le CAD est aussi préoccupé de voir
à des problèmes qui entraînent des situations où
doivent intervenir des policiers ou des situations violentes possibles?
M. BOURASSA: Pas depuis plusieurs années. A ma connaissance, il y
a eu le cas de la grève des policiers, il y a deux ou trois ans. On a
été informé sur les postes de police qui étaient
abandonnés dans la province.
Ils prenaient leurs informations là où ils pouvaient, mais
au même titre que d'autres situations.
M. LEGER: Bon, M. le Président, en ce qui nous concerne, le CAD,
pour le moment,...
UNE VOIX: Adopté.
M. BOURASSA: Alors, secrétariat général,
adopté.
LE PRESIDENT (M. Picard): Dans le programme 3, les
éléments 1 et 2 sont adoptés. L'élément 3,
Conseil du statut de la femme, est retenu pour étude demain.
M. BOURASSA: Alors, il reste...
M. LEGER: M. le Président, il nous reste le Conseil
exécutif et le bureau du premier ministre. A la suite du
dépôt des directives concernant les ministres, est-ce que le
premier ministre envisage la possibilité de poser des gestes semblables
pour les membres du bureau du premier ministre?
M. BOURASSA: J'ai répondu...
M. LEGER: Est-ce que le premier ministre essaie d'éviter tout
conflit d'intérêts?
M. BOURASSA: ... tantôt au député de Maisonneuve, je
ne sais pas si le député était là mais le
député de Maisonneuve, au nom de son parti, m'a
félicité d'avoir posé ce geste.
M. LEGER: Au point de vue des ministres, oui.
M. BOURASSA: Je l'ai remercié de ses félicitations. J'ai
dit que c'était une première étape.
M. LEGER: L'auriez-vous fait tout seul si on n'en avait pas
parlé?
M. BOURASSA: Comment?
M. LEGER: Est-ce que le premier ministre l'aurait fait tout seul si on
ne l'avait pas poussé à poser ce geste?
M. BOURASSA: Mais je l'ai dit que, l'été dernier, on avait
formé un comité là-dessus. Je veux dire... Le
député va se rendre compte, en lisant les directives, que ce
n'est pas tellement facile à faire. Je veux dire qu'on va plus loin que
la plupart des autres provinces, la presque totalité des autres
provinces. Je pense qu'il est normal que cela prenne un certain temps pour les
faire.
Alors, cela est une première étape, les ministres. Nous
envisageons d'abord de mettre cela dans une loi. Là, le
député de Maisonneuve
m'a offert ses services juridiques pour la rédaction de la
loi,...
M. LEGER: Sans honoraires.
M. BOURASSA: ... à titre gratuit. Nous envisageons
éventuellement, pour les hauts fonctionnaires, pour répondre
à la question du député, pour les membres du bureau et
pour les députés on parle des chroniqueurs parlementaires
dans d'autres pays. Mais disons que pour l'instant il n'est pas question que
les chroniqueurs parlementaires soient inclus.
M. LEGER: Est-ce que le premier ministre veut dire par là que,
dans son esprit, cela inclurait, quand il parle des hauts fonctionnaires, les
gens de son bureau de premier ministre, son personnel?
M. BOURASSA: Oui, tous les fonctionnaires. On a un projet qui va
être discuté demain au conseil des ministres pour ce qui a trait
aux fonctionnaires. On a commencé par les ministres; les fonctionnaires
et les députés vont suivre.
Alors, merci beaucoup, M. le Président.
M. LEGER: Un instant, M. le Président. Le premier ministre est
réellement pressé. Est-ce qu'il a une émission de
télévision?
M. BOURASSA: Bien...
M. LEGER: II veut voir ce qui sort sur la langue à la
télévision. Je ne veux pas priver le premier ministre des
résultats qu'il va constater à la télévision
après nous avoir présenté son projet de loi en même
temps que le début de l'étude du projet de loi 22. C'était
bien placé comme "timing" pour...
M. BOURASSA: M. le Président, j'ai dit à plusieurs
reprises aujourd'hui que c'était fait à l'occasion du
début de mes crédits. Cela aurait pu être demain, cela
aurait pu être jeudi dernier, cela aurait pu être il y a deux
semaines.
Je pense que, là-dessus, avec des directives comme
celles-là, le gouvernement avait tout intérêt à ce
qu'elles soient connues. Durant toute la semaine, on pourra les commenter.
Alors, la question de temps, dans ces choses, compte très peu,
parce que, les jours suivants, on peut toujours se reprendre d'une façon
ou d'une autre.
M. LEGER: Alors, M. le Président, en ce qui nous concerne, nous
allons permettre au premier ministre d'aller voir ce qui se passe à la
télévision.
M. BOURASSA: Vous n'avez pas de questions sur les sondages de fin de
semaine?
M. LEGER: Justement, je pourrais poser des questions, si le premier
ministre le désire.
M. BOURASSA: Non, mais le député, avec son
fédéralisme à deux, va commencer à être
populaire dans son parti, après les sondages.
M. LEGER: Est-ce que le premier ministre veut me définir ce qu'il
pensait que je voulais dire par fédéralisme à deux?
M. BOURASSA: Mais quelques jours après l'élection, le
député de Lafontaine a dit...
M. LEGER: II ne répond pas à ma question! M. BOURASSA:
Non, non!
M. LEGER: On n'est pas à l'Assemblée nationale, il me
semble !
M. BOURASSA: Le député de Lafontaine a dit: Moi, je
propose un fédéralisme à deux. Alors, du
fédéralisme, c'est du fédéralisme. Là, je
pense que les gens vont se rallier à la thèse du
député, à la suite des derniers sondages qui expriment un
déclin du Parti québécois. Ils vont dire: Le
député de Lafontaine avait...
M. LEGER: Le sondage exprime un déclin du Parti
québécois?
M. BOURASSA: Oui, oui. Vous lirez l'analyse de Pierre O'Neil, dans le
Devoir de samedi. Je pense que le député a bien fait de
mentionner cette hypothèse quelques jours après les
élections.
Merci, M. le Président.
M. LEGER: M. le Président, je ne peux pas terminer. Le premier
ministre a ouvert une porte. Je ne peux pas faire autrement qu'entrer.
Le fédéralisme à deux, il y a bien des
interprétations à cela. C'est comme pour l'uni-linguisme, il y a
bien des interprétations. Le fédéralisme à deux,
c'était une association d'un Québec indépendant, souverain
politiquement, qui s'associe avec le reste du Canada. Qu'on lui donne le nom
qu'on veut. L'unilinguisme, M. le Président, dans le sondage...
M. BOURASSA: Le fédéralisme, cela veut dire un
régime fédéral.
M. LEGER: Oui, mais un et un et non pas un et dix.
M. BOURASSA: Un régime fédéral, cela veut dire un
régime au suffrage universel.
LE PRESIDENT (M. Picard): Je ferais remarquer aux honorables
députés que les crédits du ministère...
M. LEGER: Sont presque adoptés.
LE PRESIDENT (M. Picard): ... des Affaires intergouvernementales ont
été adoptés.
M. LEGER: Ils sont presque adoptés, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Picard): Ceux du ministère des Affaires
intergouvernementales.
M. LEGER: Alors, sur le sondage, M. le Président, il faut quand
même que le premier ministre réalise qu'aux questions
posées sur l'unilinguisme les gens disent: C'est sûr qu'on ne veut
pas parler seulement une langue. Mais l'unilinguisme collectif, ce n'est pas
comme l'unilinguisme individuel.
M. BOURASSA: Non, non! mais je parle sur la popularité des
partis, où on est plus fort qu'on ne l'était le 29 octobre.
M. LEGER: Avez-vous remarqué que vous avez baissé de 22
p.c, alors que nous n'avons baissé que de 12 p.c? Vous êtes
passés de 55 p.c. à 33 p.c. et le Parti québécois
est descendu de 30 p.c. à 18 p.c.
M. BOURASSA: On a 57 p.c. de ceux qui se sont prononcés et nous
avons eu 55 p.c. à l'élection du 29 octobre. Combien cela vous en
laisse, s'il y avait une élection, avec le pétrole et la langue
officielle?
M. LEGER: On en a perdu 10 p.c. de moins que vous.
LE PRESIDENT (M. Picard): La commission suspend ses travaux
jusqu'à 10 heures, demain matin, même salle.
(Fin de la séance à 10 h 37)
ANNEXE L'indépendance des administrateurs publics
L'administrateur public doit nécessairement faire passer
l'intérêt qu'il sert avant tout autre intérêt. Si un
intérêt personnel influence sa décision, il y a de fortes
chances que celle-ci soit viciée et qu'elle ne rencontre pas les
exigences de l'intérêt public et du maintien de la confiance du
citoyen dans la valeur de nos institutions démocratiques.
Les principales lignes de conduite que l'administrateur public doit
suivre dans l'exercice de ses fonctions lui sont évidemment
dictées par sa conscience, son intégrité et son souci
d'efficacité administrative.
Toutefois, il est nécessaire de chercher à
améliorer les mesures destinées à assurer
l'indépendance des administrateurs publics. Tout comme les autres
gouvernements au Canada, le Québec doit s'engager dans cette voie afin
de continuer à accroître la qualité de son administration
publique.
Les membres du Conseil exécutif ont une responsabilité
particulière à assumer dans la gestion des affaires publiques.
Des lois fournissent déjà un ensemble de règles de
conduite auxquelles ils doivent s'astreindre pour accomplir leur devoir en
toute liberté. Dans plusieurs juridictions au Canada, on a
récemment complété ce régime légal par des
directives émises par le premier ministre ce que nous croyons être
une formule souhaitable en raison de sa flexibilité. Les juridictions
voisines
Un rapide examen des dispositions en vigueur dans les provinces voisines
démontre une grande analogie d'une province à l'autre. Les lois
du parlement et des législatures se ressemblent beaucoup au niveau des
conditions d'éligibilité des parlementaires et des mesures visant
à assurer l'indépendance des membres du Conseil exécutif.
Plusieurs démarches ont été entreprises récemment
par la majorité des provinces et par le gouvernement
fédéral en vue d'améliorer ou de compléter les
dispositions existantes. C'est au fédéral que l'on retrouve le
document le plus articulé sur la question de l'indépendance des
administrateurs publics, soit le Livre vert de monsieur Allan J.MacEachen,
président du Conseil privé. En plus de contenir de nombreuses
recommandations, le Livre vert est accompagné d'un avant-projet de loi
qui révèle l'approche du gouvernement fédéral
à l'égard de l'indépendance des parlementaires,
c'est-à-dire relativement peu d'interdictions mais un régime
articulé de divulgation des marchés avec l'Etat.
La plupart des autres juridictions adoptent également une
attitude permissive quant aux marchés, accompagnée toutefois
d'efforts de dissuasion réalisés par la divulgation. C'est ainsi
que la Colombie britannique (Projet de loi 132 et 85), 1'Alberta (directives du
Premier ministre Peter Lougheed, le 2 mai 1973), la Saskatchewan (projet de loi
déposé récemment à la suite du Livre blanc de
monsieur Roy Romanow, procureur général), le Manitoba (projet de
loi 19), l'Ile du Prince-Edouard (rapport d'un comité spécial en
date d'avril 1974), Terre-Neuve (Conflict of Interest Act 1973) et le
Fédéral (Livre vert et avant-projet de loi proposé)
exigent une divulgation
des intérêts des ministres tout en ne lui interdisant pas
de conclure des marchés avec l'Etat par le truchement de
sociétés. La loi en vigueur au Nouveau-Brunswick ne contient
même pas l'exception qui dans toutes les autres provinces et au
fédéral permet à un député de faire par une
compagnie ce qu'il ne peut pas faire directement, c'est-à-dire des
marchés avec l'Etat.
En Ontario, le Premier ministre William Davis a adopté dans ses
directives du 14 septembre 1972 une formule différente: la divulgation
accompagnée d'un régime plus large d'interdictions expresses. Il
semble que cette formule dans la mesure où elle est applicable soit plus
efficace, car l'effet de dissuasion recherché par la méthode
suivie ailleurs peut être plus limité que prévu. Il ne nous
semble en effet pas suffisant que les conflits d'intérêts soient
connus, il importe plutôt de tendre constamment à les
éviter.
C'est pourquoi nous croyons que les efforts de prévention sont
très importants dans une telle question. Et, par voie de
conséquence, le régime de divulgation, si nécessaire
soit-il, peut être moins rigoureux et peut se concilier avec les
exigences du respect de la vie privée des administrateurs publics. Dans
l'introduction à son Livre vert, monsieur MacEachen fait l'analyse des
formules de prévention et de divulgation et souligne que "Le principe de
la divulgation représente une attitude différente à
l'égard de la question des conflits d'intérêts.
Plutôt que d'insister sur l'importance pour les représentants
officiels de l'Etat d'éviter les conflits d'intérêts,
certains partisans de réformes ont consacré le plus clair de
leurs efforts à l'élaboration d'un système qui s'appuie
sur la sensibilisation de l'opinion. Pour les tenants de ce principe, la
divulgation des intérêts est la meilleure façon de
contrôler les situations de conflit. Selon ce point de vue, les conflits
d'intérêts ne doivent pas être encouragés, mais ils
deviennent particulièrement odieux et désagréables
lorsqu'ils sont dissimulés aux autres représentants officiels de
l'Etat ainsi qu'à la population". "Dans sa forme idéale, le
principe de la divulgation exprime l'engagement essentiel de réduire le
nombre de violations et attache moins d'importance aux apparences de conflits.
En fait les conflits peuvent paraître excusés pourvu qu'ils soient
divulgués".
D'autre part, parlant de la prévention, c'est-à-dire des
interdictions, monsieur MacEachen dit: "Selon le principe de la
prévention, la fonction fiduciaire du député est
sauvegardée de la façon le plus efficace lorsqu'il se
départit de tous ses avoirs ou évite de quelque autre
manière les intérêts qui peuvent être
préjudiciables à ses fonctions officielles. Ce principe se
caractérise essentiellement ainsi: plutôt que de devoir se retirer
d'une situation embarassante de conflit d'intérêts, le
député doit prendre toutes les précautions voulues pour
éviter qu'elle ne se produise. Cela peut ne pas être toujours
possible, mais des partisans de ce point de vue soutiennent qu'à moins
d'une norme solidement établie, le public ne peut être
assuré que les parlementaires feront tout leur possible pour
éviter les conflits. Dans un bref passage d'un rapport publié
récemment, l'Association du Barreau de la Ville de New York exprime en
termes succincts la conviction qu'aucune autre attitude ne peut être
satisfaisante:
L'argument fondamental du présent rapport et l'opinion du
comité sont que tout conflit d'intérêts évitable
doit normalement être évité.
Tout en visant clairement à éviter les conflits
d'intérêts réels, le principe de la prévention a
pour avantage principal de mettre l'accent sur l'importance d'éviter les
apparences de conflits. Ses partisans soutiennent que l'interprétation
stricte de la définition du conflit d'intérêts exige que le
représentant du peuple doit s'efforcer non seulement de se
dégager de toute situation conflictuelle, mais aussi de dissiper tout
soupçon voulant qu'il soit tenté de profiter à des fins
personnelles du poste de confiance auquel le peuple l'a commis. C'est en
évitant toute situation potentielle de conflit d'intérêts
que le député peut le mieux dissiper les apparences de tels
conflits".
Il conclut: "Ni l'un ni l'autre de ces principes ne peut être
adopté sans réserve comme convenant à tous les conflits
d'intérêts. De plus, ils peuvent tous deux, dans une certaine
mesure, éliminer les abus de pouvoir, atténuer les apparences
d'abus et fournir des normes communes".
A la lumière des démarches entreprises dans les
différentes juridictions et conformément aux objectifs d'une plus
grande efficacité dans les politiques du gouvernement à propos de
l'indépendance de ses administrateurs, nous préconisons donc un
équilibre entre la dissuasion recherchée par la divulgation et la
prévention visée par les interdictions. L'intérêt
personnel
L'intérêt personnel peut être de différents
ordres, mais se traduit ultimement en avantages pécuniaires, soit pour
l'administrateur public, soit pour des personnes envers lesquelles il est
lié. Cependant, pour les fins de renonciation de règles visant
à assurer l'indépendance des administrateurs publics, il est
généralement accepté de s'en tenir à
l'administrateur public lui-même et à sa famille immédiate,
soit son épouse et ses enfants mineurs. Les moyens
Dans l'élaboration-d'une structure visant à assurer aux
administrateurs publics l'indépendance la plus complète possible
dans l'exercice de leur fonction, nous retrouvons donc deux moyens, la
prévention et la divulgation.
A- La prévention
Prévenir tous les conflits possibles supposerait une absence
totale d'intérêts privés, de liens d'amitié, de
famille, etc. Du strict point de vue pécuniaire, une telle
prévention absolue exigerait que l'administrateur public se
départisse de tous ses intérêts privés. On ne peut
aller aussi loin et cela pour des raisons évidentes.
Il existe déjà des interdictions sanctionnées par
nos lois: le Code criminel canadien, la Loi de la Législature, la Loi de
l'Exécutif contiennent un certain nombre d'interdictions relativement:
a) à la corruption (Code criminel, art. 108 et suivants) b) à la
conclusion de contrats avec le gouvernement (ch. 6, art. 79.1 ) c) à
l'état d'actionnaire d'une compagnie ayant un contrat d'exécution
de travaux publics avec le gouvernement (ch. 6, art. 79.2) d) à la vente
autrement que par voie d'expropriation, au gouvernement d'un immeuble
destiné à des travaux publics (ch. 6, art. 80) e) pour un
ministre, à l'occupation d'un poste d'administrateur de compagnies
à but lucratif (ch. 9, art. 9) f) postes incompatibles avec la fonction
de député (juge, député fédéral,
fonctionnaire, etc.).
Ces interdictions ont trait à l'intégrité (a), aux
marchés avec l'Etat (b) et (c), aux immeubles (d) et aux fonctions
incompatibles (e) et (f ). L'intégrité
Les dispositions concernant la corruption sont fondamentales et doivent
de toute évidence, demeurer en vigueur. Mais notre préoccupation
va au-delà de cet aspect, car il ne suffit pas d'être
incorruptible pour éviter de subir des influences indues. On doit
d'abord chercher à éviter d'être placé dans une
telle situation. Une décision prise dans une situation de conflit
d'intérêts n'est pas nécessairement malhonnête mais
elle est probablement mauvaise. En d'autres termes, si les dispositions
concernant la corruption protègent la société contre les
actes dérogatoires à la loi, les mesures visant à assurer
l'indépendance des administrateurs publics cherchent à
protéger ces derniers contre des situations où un
intérêt personnel pourrait exercer sur eux une influence indue
contraire à l'intérêt public. Les marchés de
l'Etat
On a souligné la distinction faite entre un marché conclu
directement par un député avec l'Etat et un marché fait
avec l'Etat par une société dont le député serait
actionnaire. En vertu de la loi, le premier est prohibé et le
deuxiène ne l'est pas. Cette distinction n'est pas particulière
à notre législation. Les lois présentement en vigueur dans
presque toutes les autres juridictions permettent à une
société dans laquelle un ministre a des intérêts de
conclure avec l'Etat un marché qu'il ne peut pas faire personnellement.
C'est notamment le cas du fédéral, de l'Ontario, de la
Nouvelle-Ecosse, de l'Ile du Prince-Edouard, du Manitoba, de la Saskatchewan,
de l'Alberta et de la Colombie britannique, le tout suivant des conditions
particulières à chacune des juridictions.
Distinguer le cas où le ministre est personnellement
intéressé dans un marché avec l'Etat et celui où il
l'est par le truchement d'une société privée comporte de
nombreux inconvénients sur le plan des exigences que la population est
en droit d'avoir à l'égard de l'indépendance des membres
du Conseil exécutif, et surtout dans le cas de compagnies privées
où le ministre serait un actionnaire majoritaire.
La Commission québécoise d'enquête sur les
méthodes d'achat utilisées au département de la
Colonisation et au Service des achats du gouvernement a d'ailleurs
recommandé d'amender la Loi de la Législature pour rendre
inéligible tout député qui aurait la majorité ou
une "partie importante" des actions d'une compagnie ayant des marchés
avec Sa Majesté. Nous croyons pour notre part que, sous réserve
des cas exceptionnels mettant en jeu l'intérêt public et qui
devraient être soumis à l'examen d'un organisme
indépendant, par exemple une commission parlementaire, l'on devrait
purement et simplement interdire les marchés de l'Etat à toute
compagnie privée dont un ministre est actionnaire.
Il pourrait toutefois y avoir une exception pour les marchés avec
les agents de l'Etat, c'est-à-dire les organismes autres que les
ministères du gouvernement. Cette exception serait assujettie à
deux conditions expresses: premièrement, qu'aucun ministre n'ait
d'autorité administrative directe sur cet organisme et,
deuxièmement, que le nombre des actions détenues par un ministre
dans une telle compagnie privée soit minime par rapport au nombre total
des actions ou que le résultat de sa participation à un tel
marché représente un très faible pourcentage du chiffre
d'affaires de cette compagnie. De plus, cette exception devrait satisfaire
à une double exigence, soit la divulgation périodique de la
nature et de la mesure de la participation du ministre à de tels
marchés et l'octroi de ces marchés conformément aux
procédures usuelles pour les contrats publics.
Les immeubles
Déjà les dispositions applicables au Québec et dans
les autres juridictions touchent la question des transactions
immobilières des ministres sans doute afin d'éviter toute
ouverture à des pratiques abusives de spéculation
foncière.
Dans le but de garantir l'indépendance des ministres à
l'égard de telles situations, il y aurait lieu que ces derniers
s'abstiennent d'acquérir des immeubles pour fins de spéculation,
c'est-à-dire des immeubles qui ne sont pas destinés à des
fins commerciales ordinaires ou à des fins résidentielles.
Les fonctions incompatibles
La loi mentionne déjà des fonctions incompatibles avec
celle de député. Toutefois, d'autres occupations peuvent entrer
en conflit avec les fonctions d'un ministre qui doit consacrer à sa
tâche toutes ses énergies. Il nous semble qu'il serait souhaitable
que les ministres mettent fin à toute activité personnelle,
commerciale ou d'affaires qui pourrait les empêcher de consacrer tout le
temps nécessaire à leur travail. Les actions de compagnies
publiques
Pour les actions qu'ils pourraient détenir dans les compagnies
publiques, la formule la plus largement adoptée, afin de permettre aux
législateurs de ne pas être tentés de favoriser leurs
investissements par leurs décisions, est la fiducie. On remet ainsi les
actions que l'on détient à une tierce partie experte en
semblables matières et l'on renonce par contrat à toute
intervention dans l'administration de ce portefeuille, de sorte que le tiers
pourra les vendre et les remplacer sans autorisation particulière dans
chaque cas et hors la connaissance du ministre.
Cette formule présente quelques problèmes dont l'un est
inhérent à notre régime juridique du Code civil au
Québec. En effet, c'est par le "Trust Agreement" que l'on crée
ces liens juridiques dans les provinces de "common law". Or, au Québec,
on ne peut créer de fiducie en vertu du Code civil, que par testament et
donation. Notre droit civil n'est donc pas adapté à la situation
qui nous occupe. Nous devons ainsi recourir à d'autres institutions
juridiques qui participent au régime du dépôt et du mandat,
sous réserve des incidences fiscales que cela pourrait
entraîner.
Le deuxième problème est d'ordre pratique. Pour un
portefeuille peu considérable, les coûts inhérents à
cette formule d'administration sont prohibitifs. Sans doute pour obvier
à cette difficulté, le gouvernement fédéral a
récemment institué à l'un de ses ministères une
fiducie dont pourront se prévaloir tes ministres qui ont des actions de
compagnies publiques à lui confier. Il y aurait lieu de songer à
une formule analogue au Québec si nécessaire.
En tenant compte de ces quelques difficultés, nous croyons que
cette formule est souhaitable pour les ministres. B- La divulgation
L'autre moyen de plus en plus utilisé dans l'élaboration
de formules visant à assurer l'indépendance des administrateurs
publics est la déclaration de leurs intérêts. On a vu que
dans l'approche que nous retenons la divulgation que nous jugeons
nécessaire nous apparaît simplement complémentaire à
la prévention.
Le Livre vert contient des remarques sur les avantages et les
inconvénients de la divulgation. Il ne la recommande que pour rendre
publics les marchés conclus avec l'Etat conformément aux
règles proposées, et les intérêts financiers lors de
débats ou de discussions sur des sujets pertinents à ces
intérêts.
Nous croyons qu'une telle mesure est utile et nécessaire et nous
sommes d'avis que la divulgation pour les ministres doit être retenue
surtout à des fins de dissuasion.
En conséquence, nous préconisons une déclaration
périodique des intérêts des ministres susceptibles d'entrer
en conflit avec leurs fonctions tout en gardant à l'esprit que les
intérêts personnels des administrateurs publics sont
nécessairement reliés à la question fondamentale du droit
à la vie privée. "Le public a incontestablement le droit de
connaître certains facteurs qui pourront influencer le comportement d'un
représentant, mais ce droit à l'information ne s'étend pas
aux aspects de sa vie privée qui ne touchent pas à ses fonctions
publiques". Livre vert, p. 4.
Il y a donc lieu de retenir un régime de divulgation
sélective, c'est-à-dire un régime où
l'administrateur public n'est tenu de dévoiler que ses
intérêts susceptibles d'entrer en conflit avec ses fonctions. "En
outre, si l'on devait utiliser la divulgation annuelle, il faudrait
probablement l'appliquer
de façon sélective afin que le droit au respect de la vie
privée ne soit pas violé par des exigences
inconsidérées en matière de divulgation". Livre vert, p.
25.
Dans cette perspective, la déclaration périodique des
ministres devrait couvrir: a) les sociétés privées
incorporées ou non susceptibles de faire affaires avec l'Etat; b ) les
immeubles détenus pour fins de spéculation ou dont la destination
rendrait possibles des marchés avec l'Etat; c) les dettes personnelles
résultant d'emprunts de complaisance non garantis et qui peuvent
influencer le comportement du ministre; et d) de toute manière, au cas
où l'on permettrait certains marchés avec l'Etat de la part de
sociétés privées dans lesquelles un ministre aurait des
intérêts minoritaires, la nature et la mesure de la participation
du ministre à de tels marchés. La famille des
ministres
En principe le conjoint du ministre devrait se soumettre aux mêmes
exigences d'éthique. Il en va de même des enfants mineurs qui sont
soumis à l'autorité des parents quant à leur patrimoine.
Ainsi dans la majorité des autres juridictions au Canada, on a inclus
dans les mesures visant à assurer l'indépendance des ministres,
leur famille immédiate, c'est-à-dire leur conjoint et leurs
enfants mineurs.
L'application de ce principe au conjoint doit cependant tenir compte de
la réalité, à savoir que le régime légal
québécois donne au conjoint une liberté totale quant
à l'administration et à la disposition de ses biens.
Dans sa déclaration du 18 juillet 1973, le Premier ministre du
Canada précisait: "II n'est pas demandé aux conjoints et aux
familles des ministres de suivre les règles strictes qui s'appliquent
à ces derniers. Cela ne serait guère réaliste et pourrait
même être injuste. On sait pourtant qu'il serait possible de
contourner les règlements et les principes concernant les conflits
d'intérêts en cédant des biens à un conjoint ou
à un enfant à charge. La seule solution, pour éviter les
conflits d'intérêts, semble être d'insister sur la
responsabilité individuelle du ministre en égard à la
gestion de ses affaires... c'est au ministre qu'il incombe de prévoir
les éventuels conflits d'intérêts qui pourraient
découler, ou sembler découler, de transactions relatives à
la propriété ou à la gestion de biens, et auxquelles le
conjoint ou des enfants à charge peuvent être
intéressés".
En Colombie-Britannique où un projet de loi récent est
à l'étude on a exclu les conjoints comme tels de l'obligation de
divulguer leurs intérêts.
On doit donc reconnaître qu'il n'est pas réaliste de
prévoir une application stricte de ces règles au conjoint.
Toutefois, nous croyons que, dans la mesure du possible, tant au niveau
de la prévention que de la divulgation, l'on devrait soumettre la
famille immédiate du ministre aux mêmes exigences, de façon
à permettre à ces derniers de s'assurer au meilleur de leur
connaissance que la nature des biens et des transactions de leur conjoint
n'entre pas en conflit avec leurs fonctions. Conclusion
Axées principalement sur l'objectif de la prévention des
conflits d'intérêts par un régime d'interdictions expresses
et accessoirement sur celui de la dissuasion par un régime de
divulgation, les recommandations que nous formulons permettraient au
Québec de disposer d'un ensemble de moyens relativement complet pour
répondre aux exigences de l'indépendance des membres du Conseil
exécutif.
Par delà les lois existantes et les règles de conduite
émises il reste, comme le soulignait Me Patrice Garant, professeur
à la Faculté de droit de l'Université Laval, dans une
conférence prononcée le 5 avril dernier, à propos de
l'éthique dans la Fonction publique: "... cette question de conflits
d'intérêts si elle peut être résolue, d'une part, par
des règles précises sanctionnées par le régime
disciplinaire général, dans bien des cas elle ne peut
l'être que par un éveil de la conscience professionnelle: c'est
une question d'éthique ou de morale administrative et non de droit
administratif".
Québec, le 11 juin 1974