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Version finale

30e législature, 2e session
(14 mars 1974 au 28 décembre 1974)

Le mardi 11 juin 1974 - Vol. 15 N° 85

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du Conseil exécutif


Journal des débats

 

Commission permanente de la présidence du conseil,

de la constitution et des affaires intergouvernementales

Etude des crédits du Conseil exécutif

Séance du mardi 11 juin 1974

(Dix heures trente-cinq minutes)

M. HOUDE (Limoilou, président de la commission permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!

Les changements à la commission sont les suivants: M. Dionne (Mégantic-Compton) remplace M. Beauregard (Gouin); M. Dufour (Vanier) remplace M. Bourassa (Mercier); M. Lessard (Saguenay) remplace M. Charron (Saint-Jacques); M. Lafrance (Rivière-du-Loup) remplace M. Lacroix (Iles-de-la-Madeleine). C'est tout.

Le député de Saguenay.

Office de développement de l'Est du Québec (suite)

M. LESSARD: M. le Président, à la fin de séance de la commission parlementaire vendredi dernier, nous étions à discuter des structures au niveau de l'Est du Québec. Nous avions demandé au ministre si c'était possible d'obtenir un organigramme de ces structures. On n'a pas cet organigramme ce matin?

M. QUENNEVILLE: Oui, M. le Président, on est en mesure de déposer l'organigramme. On fait distribuer justement cet organigramme avec les explications qui s'y rattachent.

M. LESSARD: L'organigramme, un résumé de la situation actuelle, mais selon...

M. QUENNEVILLE: Exactement, oui, on a même une définition des fonctions de...

M. LESSARD: D'accord. A la page...

M. QUENNEVILLE: A partir de la page 5. A la page 9, vous avez une évaluation sommaire, naturellement, de ces structures, l'évolution qu'il y a eue depuis 1968 jusqu'à aujourd'hui, jusqu'en 1974. On peut lire le texte, mais je pense que ce serait un peu long.

M. LESSARD: Mais est-ce que le ministre pourrait quand même, comme je n'ai pas pu prendre connaissance du texte, nous en faire un résumé avec les fonctions? Par exemple, je constate, vous avez d'abord, c'est certain, l'organisme central qui est l'OPDQ auquel est rattaché l'ODEQ. Cette structure de l'ODEQ, le ministre avait commencé l'autre jour à en parler. Nous avions différents organismes à l'intérieur de l'Est du Québec.

Nous avons CAREQ qui est la conférence administrative des délégués de chacun des ministères, je pense, et qui fait la coordination entre les officiers du plan.

M. QUENNEVILLE: Pour répondre à la question de l'honorable député de Saguenay, je pense que toutes les explications sont déjà fournies dans le texte qui est là.

M. LESSARD: Nous venons de le recevoir.

M. QUENNEVILLE: Si vous voulez que je lise le texte, je pense que c'est assez condensé. C'est une question passablement complexe. C'est la question des structures de l'ODEQ. Je pense que, sans lire le texte, c'est assez difficile de répondre à cette question.

M. LESSARD: Nous n'avons reçu le texte que ce matin. J'aimerais bien revenir...

M. QUENNEVILLE: II n'y a pas eu de séance avant ce matin pour lire cela.

M. LESSARD: D'accord, mais il me semble, M. le Président, qu'il serait possible pour le ministre de faire un résumé. Nous avons parlé, l'autre jour, de SAGEQ, je pense que c'est une société avec but lucratif, dont le but est de faire telle chose, en particulier au niveau de développement industriel. Ce que j'aimerais, c'est que le ministre nous fasse un résumé de l'ensemble de ces organismes et nous dise comment cela s'intègre à l'intérieur de l'ODEQ. Je pourrais suivre sur l'organigramme que j'ai ici. Je n'ai pas d'objection à ce que le ministre lise le texte.

M. QUENNEVILLE: Je vais lire le texte, je pense que cela va être beaucoup plus simple. On va essayer de faire...

M. LESSARD: Ce serait d'ailleurs très important que ce soit inscrit au journal des Débats. Le ministre comprendra que de plus en plus c'est devenu complexe et les gens commencent à avoir des difficultés à se démêler avec les sigles.

M. QUENNEVILLE: Dans son rapport qu'il soumettait au gouvernement le 20 juillet 1966, le BAEQ proposait la structure suivante d'exécution du plan: Création d'un office régional de développement, ORD, ayant un statut de corporation publique financée par l'Etat et jouissant de l'autonomie de gestion chargée de seconder le gouvernement du Québec dans l'exécution du plan de développement préparé pour la région de l'Est du Québec, en exécutant certaines tâches prévues par le plan, en coordonnant les interventions de centres de décision publics et privés dans le but d'assumer la

compatibilité de telles interventions avec les objectifs fixés par le plan en conduisant les études nécessaires à la revision du plan, à l'approfondissement de certains aspects du même plan et à la préparation de plans ultérieurs.

Le BAEQ proposait aussi à moyen terme de créer un échelon administratif régional. Ainsi, la région doit servir de cadre d'action aux différents ministères et organismes gouvernementaux; chaque ministère intéressé par le développement économico-social doit nommer un coor-donnateur régional; les fonctionnaires d'un même ministère devraient se rencontrer régulièrement et les fonctionnaires dans la région devraient, le plus possible, être regroupés en commençant par la métropole régionale, les centres sous-régionaux et les municipalités locales agrandies.

Recommandations du COEQ au gouvernement en 1967. Il s'agit naturellement du Conseil d'orientation économique du Québec. Après l'étude du plan du BAEQ, les propositions suivantes sont faites au gouvernement: Faire de Rimouski la capitale régionale; inclure dans la région-plan, la sous-région de Rivière-du-Loup; exiger des ministères et organismes gouvernementaux d'avoir comme cadre d'action la région-plan; nommer des coordonnateurs régionaux (administrateurs) dans les principaux ministères; accorder à ces coordonnateurs des pouvoirs suffisants (voir pages 6 et 7 de ce texte pour une définition du rôle et des fonctions des coordonnateurs); regrouper le personnel des ministères à Rimouski dans les centres sous-régionaux et les centres intermédiaires; former la conférence des coordonnateurs régionaux et, enfin, nommer un délégué régional au plan.

L'entente Canada-Québec signée le 26 mai 1968 prévoit la création d'un certain nombre de mécanismes pour exécuter le plan. D'autres mécanismes d'exécution non spécifiquement inscrits dans l'entente seront aussi mis en place par les deux gouvernements.

Quant à la structure fédérale-provinciale, on la verra un peu plus loin.

Le comité de liaison, article 21 de l'entente: Les fonctions sont le réexamen des objectifs, l'évaluation des programmes, l'approbation des programmes et projets, la recommandation des modifications et, enfin, ce comité dirige le travail du comité directeur.

Composition : au moins six membres, répartition numérique égale de part et d'autre.

Le comité directeur. Le comité directeur est responsable de la direction pratique du plan, détermine les recherches à faire en vue de préparer de nouveaux programmes, révise les programmes ou projets à certaines étapes importantes de leur élaboration et en recommande les budgets au comité de liaison, fait rapport au comité de liaison, suggère les modifications nécessaires à l'exécution des tranches annuelles.

La structure provinciale. Un certain nombre de lois et d'arrêtés en conseil ont défini la nature des mécanismes d'exécution et leurs interrelations.

Mentionnons l'arrêté en conseil 1196 du 9 avril 1966 sur les structures et modalités administratives de l'exécution; l'arrêté en conseil 1497 du 21 mai 1968 sur l'ODEQ; l'arrêté en conseil 1498 du 22 mai 1968 sur l'entente: Loi modifiant la loi de l'Office de planification du Québec, le bill 28; l'arrêté en conseil 751 du 24 février 1970 sur l'intégration de l'ODEQ à l'OPDQ.

Vous avez, naturellement, dans la page suivante, l'organigramme des structures administratives fédérales et provinciales. Dans le comité de liaison, du côté du Québec, vous avez M. Yvon Tremblay, M. Duchesneau, M. Guy Coulombe, M. Arthur Tremblay, et du côté du Canada, M. Montreuil, M. Poirier, M. Tennier et M. Duquette.

Comme délégué régional au plan, M. Robin D'Anjou; au comité directeur, M. Robin D'Anjou et M. Pagé et du côté fédéral, M. François Pagé.

Conférence administrative régionale. Réunion des coordonnateurs régionaux de 15 ministères. Dans les comités mixtes, l'agriculture, transport, développement social, pêches, mines, habitation, aménagements touristiques et culturels.

Et enfin, la conférence de programmation régionale, ce sont les fonctionnaires fédéraux qui, naturellement, sont désignés à ce moment-là.

Dans la structure d'exécution du Québec, un vice-premier ministre, l'honorable Gérard-D. Lé-vesque, le ministre responsable de l'Est, l'OPDQ, le délégué régional du plan du secrétariat de la CAREQ et, naturellement, les représentants des 15 ministères. A l'Agriculture, M. Laurent Bouchard; aux Richesses naturelles, M. Bellemare; aux Travaux publics, M. Lomer Dumont; aux Transports, M. Claude Lortie; au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, M. Rodolphe Lafresnaye; aux Pêches, M. A. Lachance; à l'Industrie et au Commerce, M. Guy Leclerc; aux Affaires municipales, M. Jules Coulombe; au Travail et à la Main-d'Oeuvre, M. F. Raviolatti; à la Fonction publique, M. G. Jolicoeur; aux Affaires sociales, M. Jean-Claude Beaulieu; aux Communications, M. M. Thivier-ge; aux Affaires culturelles M. Denis Rivest; à l'Education, M. Georges Tousignant; aux Terres et Forêts, M. P.-H. Ouellet.

Le ministre responsable de l'OPDQ. En vertu de la loi qui a institué l'Office, c'est le premier ministre qui en assume la responsabilité. Il peut cependant désigner tout autre membre du Conseil exécutif pour assumer en son nom l'ensemble ou une partie de cette responsabilité. C'est ainsi qu'il a désigné le vice-premier ministre, l'honorable Gérard-D. Lévesque.

Le ministre responsable de l'exécution du plan. La lettre du 14 octobre 1971 s'appuie sur cette possibilité inscrite dans la loi de l'office. "Sous l'autorité de la loi de l'Office de planification et de développement du Québec, je désigne par la présente l'honorable Robert Quenneville, membre du Conseil exécutif pour

agir comme ministre responsable de la coordination générale de l'exécution du plan de développement de la région de l'Est du Québec, visé par l'arrêté en conseil no 751 du 24 février 1970 et défini au sous-paragraphe a) du paragraphe 1 dudit arrêté en conseil". Cette lettre était signée du premier ministre, M. Robert Bourassa.

Le délégué régional au plan. Sous l'autorité du président directeur général de l'OPDQ, le délégué remplit diverses fonctions:

A titre d'administrateur du bureau régional de l'OPDQ, il voit au fonctionnement de l'ensemble du bureau, établit des liaisons étroites avec la population régionale, les corps intermédiaires, les municipalités et plus particulièrement le CDR, assure une coordination interrégionale.

A titre de président de la CAREQ, il préside la conférence administrative régionale et participe à la préparation des programmations sectorielles des directeurs régionaux des ministères; présente annuellement, à la direction de l'OPDQ, une programmation pour l'année financière suivante; voit à ce que les programmes et projets élaborés à la CAREQ correspondent aux objectifs généraux du développement de la région.

A titre de membre du comité directeur de l'entente, il est responsable de la planification et de la coordination interministérielle, responsable de l'élaboration de projets interministériels; responsable d'exécuter ou de faire exécuter les études et recherches nécessaires devant servir à préciser les objectifs de développement de la région; dégage des priorités parmi les programmes ou projets et coordonne l'action des ministères chargés de les exécuter.

La conférence administrative régionale. La CAREQ, Conférence administrative régionale de l'Est du Québec, est la réunion des coordon-nateurs régionaux, présidée par le délégué régional au plan. A la lumière des informations que lui procurent l'OPDQ, d'une part, et les coor-donnateurs régionaux, d'autre part, elle doit harmoniser les programmes gouvernementaux entre eux de façon à assurer la réalisation la plus complète possible d'objectifs généraux de développement pour la région.

Les coordonnateurs régionaux sont des agents de l'administration provinciale aux fins de la coordination de l'exécution du plan. Certains d'entre eux n'assument que cette tâche. D'autres sont en même temps responsables de certains services réguliers de leurs ministères ou même de l'ensemble des services à titre de directeur régional.

Règle générale. Les coordonnateurs devraient pouvoir programmer les activités du ministère dans la région en fonction des objectifs du ministère concerné et en fonction des objectifs généraux de développement de la région tels qu'arrêtés par la conférence administrative régionale.

Pour étudier davantage certains problèmes spécifiques, des comités rattachés à la confé- rence ont été formés: Comité d'aménagement des zones touristiques, etc.

Principes sous-jacents à la structure d'exécution. Les ministères sont les maîtres d'oeuvre. Contrairement aux recommandations du BAEQ qui prévoyait la création d'un organisme régional et paragouvernemental de l'exécution du plan, l'ORD, le COEQ a recommandé au gouvernement, après étude du plan du BAEQ, de donner aux ministères concernés la responsabilité la plus entière possible en matière d'exécution du plan.

C'est ce principe qui a été retenu et explicité dans l'arrêté en conseil créant l'ODEQ.

La structure adoptée met l'accent sur la déconcentration administrative. Déconcentrer, c'est créer des instances administratives hiérarchiquement inférieures et leur déléguer des pouvoirs (administratifs) auparavant assumés par le niveau central. Tant le plan du BAEQ que le rapport du COEQ sur l'exécution du plan insistaient sur la nécessité d'adopter le principe de la déconcentration administrative.

Dans la structure retenue, les coordonnateurs régionaux sont des instances déconcentrées des administrations provinciales. Ils assument, sous la responsabilité des ministères concernés, des tâches de coordination et de planification intraministérielles et, pour certains, des tâches de direction administrative au niveau régional.

Importance des tâches de coordination. Enfin, la structure adoptée mise à fond sur les mécanismes de coordination pour donner à l'activité gouvernementale, quel que soit le domaine concerné, l'impact nécessaire pour réaliser des objectifs globaux de développement qui dépassent, en extension et en intensité, les objectifs qui peuvent être assumés dans n'importe quel des secteurs particuliers d'activité ou d'intervention gouvernementale.

Evaluation sommaire. La CAREQ, mécanisme de coordination interministérielle, période de 1968 à 1970. On pourrait être tenté de reprocher à la CAREQ les retards dans l'exécution de certains projets prévus dans le plan de développement. Cependant, les causes de ces retards furent surtout externes à la CAREQ. Celle-ci a dû faire face à certaines contraintes que toute organisation gouvernementale subit plus ou moins régulièrement: lenteurs administratives dans l'engagement du personnel supplémentaire nécessité par l'exécution du plan. Lenteurs dans les procédures d'adoption des projets et de disposition des fonds. Tous les ministères n'avaient pas nommé un coordonna-teur régional dès le début des activités de la CAREQ. Le temps requis pour permettre aux coordonnateurs régionaux de se familiariser avec toutes les activités de leur ministère et celles des autres ministères. Il importe de souligner que quelques coordonnateurs avaient leur point d'attache à Québec plutôt qu'à Rimouski. Cette situation était un obstacle à la coordination interministérielle.

La période de 1970 à 1974. Tous les ministères impliqués dans la réalisation des programmes de l'entente nomment un coordon-nateur régional dont le nombre passe ainsi de dix à quinze. Dans la majorité des cas, ces coordonnateurs régionaux relèvent directement du sous-ministre ou d'un sous-ministre adjoint. Cette formule a pour effet principal de réduire considérablement les délais administratifs qui, de 1968 à 1970, avaient retardé la mise en oeuvre des programmes de l'entente.

Une étude sommaire des performances budgétaires de 1968 à 1974 permet de constater l'évolution de la structure régionale d'exécution vers une plus grande efficacité. La performance budgétaire, c'est le pourcentage des dépenses par rapport au budget voté. 1968/1969: 45.7 p.c; 1969/1970: 53.3 p.c; 1970/1971: 76.8p.c.; 1971/1972: 89.3 p.c; 1972/1973: 95 p.c; 1973/1974, environ 90 p.c.

On attend, en ce moment, l'audition des dépenses pour préciser.

Même s'il reste beaucoup à faire, si on veut parler un jour d'une véritable déconcentration administrative, l'expérience réalisée dans l'Est du Québec au cours des six dernières années semble être un cheminement valable dans la poursuite des objectifs du développement régional.

M. LESSARD: Je vous remercie. Je pense qu'il s'agit d'un excellent texte qui méritait d'être lu, M. le Président, et consigné au journal des Débats.

M. QUENNEVILLE: Merci.

M. LESSARD: Nous avons la structure du ministère qui semble assez concrétisée, et coordonnée surtout quand on constate que chacun des ministères a nommé ses responsables, ses coordonnateurs régionaux.

Dans cette structure, naturellement, on ne retrouve pas deux autres structures qui existent, soit le CRD et la SAGEQ. Alors, le CRD en fait, comme le ministre l'expliquait, est strictement l'organisme de consultation de la population. Comment s'inscrit le CRD dans cette structure?

M. QUENNEVILLE: Le CRD est un organisme consultatif qui est considéré par l'OPDQ comme l'interlocuteur privilégié. Il reçoit des subventions annuelles pour fonctionner. Son rôle, surtout dans l'Est du Québec, a réellement été efficace. On peut dire qu'il y a eu aussi, d'ailleurs de la part de l'ODEQ, une consultation réelle au niveau du CRD.

Le délégué au plan rencontre régulièrement le conseil d'administration du CRD et, les commissions spécialisées à l'intérieur du CRD rencontrent aussi les coordonnateurs des différents ministères. A ce moment, il a sûrement une consultation nettement valable aux différents paliers.

M. LESSARD: Alors, le CRD est l'organisme où normalement doivent être réunis les différents organismes régionaux de la population. Des membres de la population, des délégués de la population font des recommandations sur certains projets au ministre responsable de l'ODEQ, qui ne sont pas nécessairement acceptés parce qu'elles sont étudiées; mais comme vous le dites, le CRD est quand même un interlocuteur qualifié.

Vous étudiez ces projets selon l'efficacité ou selon le fait que ces projets sont bons ou pas. C'est relatif.

M. QUENNEVILLE: Nous tenons compte des recommandations du CRD. C'est cela.

M. LESSARD: Maintenant, suite à certaines revendications, le ministre a accepté de former une société et de financer pour la première fois une société à but lucratif qui s'appelle la Société d'aménagement et de gestion de l'Est du Québec, soit SAGEQ.

M. QUENNEVILLE: Je m'excuse, M. le Président, c'est la Société d'administration et de gestion de l'Est du Québec.

M. LESSARD: D'accord, M. le Président. C'est important qu'on se démêle exactement dans ces sigles. Quelle est la nature de cette société? Comment s'inscrit-elle à l'intérieur des recommandations du BAEQ? Comment s'inscrit-elle à l'intérieur de la structure qui s'appelle l'ODEQ?

M. QUENNEVILLE: II s'agit d'une entreprise, comme l'a dit tantôt le député de Saguenay, ou d'une société à but lucratif et qui n'est pas rattachée à l'ODEQ. Il s'agit de respecter à ce moment un principe émis par le BAEQ et dans tous les programmes que nous avions... Elle provient d'une recommandation du CRD. Elle fonctionne d'une façon autonome depuis ce temps, depuis le 18 octobre dernier. Nous sommes en mesure de déposer le protocole d'entente tel qu'il a été demandé à la dernière séance.

M. LESSARD: Dans quel but cette société a-t-elle été établie? Quel est strictement son objectif? Il faut quand même qu'il y ait un certain contrôle de la part de l'ODEQ. Je pense que cette année, c'est un montant de près de $800,000 que vous accorderez à SAGEQ. Quels objectifs devront être poursuivis par cette société? Quels sont les moyens de contrôle du gouvernement sur cette société? Quelle coordination existe avec l'ODEQ?

M. QUENNEVILLE: Le but de cette société est le développement industriel. On s'adresse à ce moment à l'entrepreneurship régional, à ces fins de développement industriel. Quant au contrôle, vous pourrez le constater dans le

protocole d'entente, il est exercé par le ministère de l'Industrie et du Commerce, qui demande un rapport annuel de vérification des subventions données. Je pense que ce qui est assez important et qu'on a voulu respecter en instituant la SAGEQ ou du moins en donnant suite à cette recommandation, c'est sûrement l'entre-preneurship, et peut-être surtout prévoir qu'à l'intérieur des montants disponibles dans l'entente, il y ait quand même non seulement des fonds de suppléance, mais aussi qu'on puisse ajouter des budgets d'incitations quant au développement industriel.

M. LESSARD: Est-ce qu'il s'agit d'une société à but lucratif qui a pour but de faire des études sur la possibilité d'implantations industrielles ou s'il s'agit d'une société qui peut prendre l'initiative de créer de l'industrie, une société?

M. QUENNEVILLE: Exactement, M. le Président. Naturellement, il s'agit d'une expérience pilote.

Cette société, non seulement va promouvoir la création de nouvelles industries à l'intérieur de la région, mais elle peut aussi, en même temps, investir certains montants à l'intérieur même de ces entreprises ou de ces projets. Ils achètent alors des parts.

M. LESSARD: Alors, cette société devient donc une société à capital-actions. Si le ministère a donné ou a accepté de subventionner la somme de $800,000, est-ce que, d'autre part, les administrateurs de cette société ont également mis de l'investissement, de l'argent, du capital?

M. QUENNEVILLE: Pas au moment de la phase de démarrage, M. le Président, mais, par la suite, ces gens ont investi et on doit connaître le 30 juin les montants investis exactement, soit par la population ou les actionnaires de la SAGEQ. Ils se sont engagés à ramasser $500,000 pour le 30 juin.

M. LESSARD: Une société comme SAGEQ pourrait aller jusqu'à intervenir dans l'investissement d'une entreprise comme celle de Cabano?

M. QUENNEVILLE: Exactement.

M. LESSARD: Ce que je désirerais savoir maintenant, puisqu'il s'agit d'une société qui est largement subventionnée par le gouvernement — le ministre a accepté de déposer le protocole d'entente — c'est pourquoi, plutôt que de subventionner directement cette entreprise qui devient en fait une entreprise assez autonome, le gouvernement n'a-t-il pas choisi d'acheter du capital-actions à l'intérieur de l'entreprise?

M. QUENNEVILLE: II s'agit naturellement de s'adresser, comme je le disais tantôt, à l'entrepreneurship régional. Je peux vous dire qu'à ce moment-là, les sommes consenties par l'entente s'adressaient tout simplement à la phase de démarrage, mais cela ne va pas plus loin. C'est envoyé par le biais du CRD qui lui-même a transmis les montants à la SAGEQ.

M. LESSARD: Est-ce que le ministre responsable de l'ODEQ, en collaboration avec les autres ministres qui sont aussi responsables de toute cette planification régionale, a envisagé cette possibilité... Je comprends que le ministre nous dit qu'il s'agit d'une subvention de démarrage, mais est-ce qu'on a envisagé cette possibilité du capital-actions puisque le ministre me dit que les membres de cette société se sont engagés à trouver la somme de $500,000?

M. QUENNEVILLE: C'est cette société qui s'est engagée à trouver un montant de $500,000. Si on veut respecter l'esprit qui a sous-tendu l'implantation de la SAGEQ, il faut respecter cette volonté de l'entreprise privée et ce respect de l'entrepreneurship.

M. LESSARD: Est-ce que vous avez envisagé cette possibilité du capital-actions? Je comprends, M. le Président, qu'il s'agit de permettre le démarrage d'une société, mais si, par exemple, dans ma région — je comprends qu'il s'agit d'une expérience pilote — ou dans d'autres régions de députés libéraux, on décide de se réunir, un groupe de personnes, et de se former en société — on n'a pas de capital-actions et on fait la demande au gouvernement de nous donner une subvention de démarrage de $800,000 — il me semble que c'est quand même un précédent qui peut être assez dangereux. Il s'agit de former de toutes pièces une société avec l'argent des contribuables québécois.

M. QUENNEVILLE: Nous avons tout simplement respecté les voeux de la population. Nous avons simplement respecté aussi le projet tel que présenté par le CRD. Je reviens toujours sur le principe de respecter l'entrepreneurship local ou régional. On voit mal pourquoi nous irions investir. Il reste quand même qu'en dehors de cette société, l'ODEQ aussi a de l'argent prévu pour les infrastructures industrielles, différents programmes pour aider à la consolidation des projets qui sont là.

M. LESSARD: Est-ce que le CRD, dans ses recommandations, faisait état des différentes hypothèses, dont la possibilité du capital-actions?

M. QUENNEVILLE: Je ne vois pas qu'il y ait jamais eu de proposition dans ce sens. Pas à ma connaissance.

M. LESSARD: La nomination de ces personnes est quand même assez importante. Est-ce que ce sont des personnes qui se sont réunies et

ont decide de former cette société? Combien sont-elles à l'intérieur de la société?

M. QUENNEVILLE: Disons qu'il s'agit de nominations qui ont été faites par le CRD. On sait que le mouvement de la SAGEQ, ce projet, a été lancé par le président du CRD d'alors, M. Jourdain. Au départ, il y avait trois administrateurs. Ils ont élargi les cadres depuis et prévoient, d'ici le 30 juin, être treize membres administrateurs.

M. LESSARD: Maintenant, c'est ça...

M. QUENNEVILLE: C'est une société privée. Il appartient de définir au conseil d'administration, le nombre exact de membres. Si on veut respecter le grand principe que les affaires gaspésiennes doivent être gérées par des Gaspé-siens, je pense que c'est quand même un exemple assez frappant.

M. LESSARD: Je suis bien d'accord sur ce point, à savoir que les affaires de la Gaspésie soient administrées par les gens de la Gaspésie. Je suis bien d'accord aussi qu'il s'agit d'une société privée. Mais il s'agit d'une société privée qui s'est constituée en fait sans que les individus fournissent du capital. Ils se sont engagés à en fournir. Mais il s'agit d'une société privée qui recevra une somme d'environ $900,000, je pense, ou $910,000 du gouvernement. Ces $910,000 correspondent à un montant supérieur à l'engagement de ces "supposés actionnaires". La question que je me pose, qu'on pose aussi, dans la région de la Gaspésie est la suivante. C'est peut-être une recommandation du CRD, mais est-ce qu'une société comme celle-là peut être constituée, multipliée...? Pourquoi un groupe de personnes comme COGEMA, qui a été une société qui s'est regroupée et qui a fourni du capital-actions pour la construction d'un traversier-rail, pourquoi justement cette société a-t-elle dû, comme telle, fournir son capital-actions alors que ces treize personnes reçoivent du gouvernement la somme de $910,000 et deviennent une société à but lucratif?

M. QUENNEVILLE: Je pense bien que le montant de $900,000 n'est pas exact. En fait, nous nous sommes engagés à verser $60,000 à la phase de démarrage comme frais d'administration en 1974/75 et le même montant de $60,000 pour 1975/76. Pour l'étude de rentabilité, l'ODEQ s'est engagé à verser jusqu'à un montant de $125,000 pour 1974/75; mais on ne leur donne pas nécessairement. Pour 1975/76, le ministère de l'Industrie et du Commerce verra, s'il y a lieu, d'après les études de rentabilité, de donner $125,000. C'est un montant maximum. C'est loin d'être $900,000 comme le disait tantôt M. le député de Saguenay.

Au moment de la signature du protocole d'entente, il y a eu une erreur qui doit être corrigée vers le 30 juin, sur les montants.

M. LESSARD: Je reviens, car je veux que ce soit bien clair dans mon esprit.

Est-ce une société qui a pour but de faire des études techniques, des études de rentabilité dans le cadre du plan en vue de proposer à certains autres organismes ou à certains individus d'investir dans des secteurs qui peuvent être rentables? Ou est-ce qu'il s'agit d'une société autonome qui elle-même décide d'investir directement dans l'implantation d'industries?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, c'est justement dans ce sens que la SAGEQ a été établie et la dernière partie de l'allusion du député de Saguenay est exacte en ce sens qu'elle-même décide de la rentabilité des projets et investit à ce moment-là les montants.

M. LESSARD: Bon!

M. QUENNEVILLE: C'est une société privée purement et simplement.

M. LESSARD: C'est une société privée qui est assez spéciale quand même?

M. QUENNEVILLE: C'est une expérience pilote, on est dans un territoire pilote aussi, il faut le dire.

M. LESSARD: C'est une société très spéciale. C'est-à-dire qu'un groupe de personnes se réunissent, n'ont pas d'argent comme telles à investir, reçoivent une subvention

M. QUENNEVILLE: Je m'excuse, M. le Président, je voudrais faire remarquer ici que c'est le CRD qui a établi cette SAGEQ, qui a demandé surtout l'établissement de la SAGEQ.

M. LESSARD: Bon!

M. QUENNEVILLE: Ce ne sont pas des personnes...

M. LESSARD: Justement, mais est-ce...

M. QUENNEVILLE: On ne pouvait pas financer directement les individus en question, si vous voulez.

M. LESSARD: Mais le CRD peut avoir recommandé au gouvernement la possibilité d'intervenir dans l'investissement de sociétés privées dans le territoire, parce qu'on constate malheureusement qu'au niveau des lois du gouvernement, actuellement, la petite entreprise a extrêmement de difficulté à se financer comme telle. Mais, est-ce que — le ministre me dit toujours c'est le CRD qui a recommandé cela — le CRD a recommandé qu'une subvention soit accordée à une compagnie privée? Est-ce que le CRD a fait des recommandations en ce qui concerne les membres de cette société privée?

Est-ce que le CRD a fait des recommandations en ce qui concerne la structure et le fonctionnement de cette société privée? Est-ce que le CRD a fait des recommandations concernant le capital-actions que devra fournir chaque membre futur de la société? Est-ce que le CRD a recommandé que cette société puisse s'élargir, parce que quand le ministre dit que les gens de la Gaspésie doivent être capables de gérer eux-mêmes leurs propres affaires, j'ai dit: Oui, mais cela ne doit pas faire l'objet cependant d'un petit groupe d'individus qui profitent des subventions gouvernementales, qui se créent une propre société grâce à ces subventions gouvernementales et qui font des profits qu'ils conservent eux-mêmes.

Je suis bien d'accord — et on va y revenir — que le CRD a fait un certain nombre de recommandations, mais est-ce que c'est cette structure comme telle? Est-ce que le CRD a recommandé au gouvernement de ne pas participer sous forme de capital-actions? Ce sont ces réponses que je désirerais connaître. Et de plus, je désirerais connaître les administrateurs de cette société.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense que la meilleure façon de répondre au député de Saguenay, c'est sûrement de lui faire prendre connaissance du protocole d'entente intervenu entre le Conseil de développement de l'Est du Québec et la SAGEQ.

Article 1, objectif et généralités. L'objectif du présent protocole est de définir les modalités de démarrage et de financement initial de la Société d'administration et de gestion de l'Est du Québec.

Deuxièmement, les parties reconnaissent avoir pris connaissance du protocole d'entente à intervenir. De plus, le CRDEQ a pris connaissance des règlements généraux de la SAGEQ.

Les présidents de ces deux organismes ont dûment été mandatés pour signer le présent protocole d'entente.

Troisièmement, le présent protocole établit les droits et obligations de chacun.

Dispositions. Le CRD étant le canal par lequel les subventions d'administration seront transmises à la SAGEQ, elles le seront de la façon suivante : 1)Le CRDEQ paiera à la SAGEQ des montants correspondant exactement aux sommes qu'il recevra de l'ODEQ au nom de l'entente. 2)La SAGEQ deviendra une compagnie publique dès le début de la deuxième phase, soit le 30 juin prochain. 3)Entre autres classes d'actions, la SAGEQ créera une catégorie d'actions privilégiées classe A pour permettre au CRDEQ d'acheter des actions privilégiées de cette classe en échange de tous ses versements à la SAGEQ. Aucun dividende ne sera payable sur ces actions et, en cas de liquidation, le CRDEQ s'engage à remettre au liquidateur toute somme qui lui reviendrait en contrepartie de ses actions privilégiées. 4)La SAGEQ s'engage à constituer un conseil d'administration selon les modalités suivantes: a) II sera composé de treize membres; b) Deux de ces membres seront désignés par le détenteur d'actions privilégiées de classe A, dont au moins un sera choisi par des représentants de groupes syndicaux; c) Les autres seront élus par les actionnaires ordinaires selon le mode suivant: chaque détenteur d'actions ordinaires a droit, pour l'élection des administrateurs, à un nombre de votes égal au nombre de ses actions, mais chaque vote n'est donné que pour un seul candidat. Les candidats qui obtiennent le plus grand nombre de voix sont déclarés élus à concurrence du nombre à élire.

Cette disposition permet à plusieurs groupes d'actionnaires d'être certains d'avoir un représentant au conseil et empêche qu'un groupe important, mais minoritaire, puisse, grâce à des procurations, faire une liste complète d'administrateurs. Tout groupe d'actionnaires qui disposent d'au moins un onzième du capital est certain d'être représenté; d) Tout changement apporté au nombre des administrateurs ou au mode d'élection du conseil d'administration devra être approuvé unanimement par les détenteurs d'actions privilégiées de classe A, et ce, jusqu'au 31 mars 1976. Le CRD garde donc un droit de véto à l'égard de toutes modifications proposées. 5) Les dispositions prévues aux alinéas 3) et 4) pourront être révisées par le CRD à la demande de la SAGEQ et devront obligatoirement l'être advenant des objections d'ordre juridique émanant du ministère des Institutions financières ou de la Commission des valeurs mobilières. 6)Quinze jours après la réception par le comité ad hoc du CRD, chargé de préparer la mise sur pied de la SAGEQ, de l'acceptation du protocole d'entente entre le ministère de l'Industrie et du Commerce, le Conseil régional de développement de l'Est du Québec et la Société d'administration et de gestion de l'Est du Québec, le comité ad hoc sera dissous.

C'est signé par le président du CRDEQ, M. René Daigneault et par le président du conseil d'administration de la SAGEQ, M. Claude Jourdain.

Pour ce qui est des noms des trois administrateurs, ce sont M. Claude Jourdain, M. Paul-Emile Arsenault et M. Etienne Malenfant. Ce sont actuellement des gens du CRD.

Nous avons aussi le protocole signé entre le MIC, la SAGEQ et le CRD. Je pense que ce serait passablement long de le lire. Nous sommes prêts à déposer le document, à moins que vous teniez absolument à ce qu'on le lise. Il a été signé par l'honorable Guy Saint-Pierre, M. Claude Jourdain et, pour le CRD, par M. Louis-Philippe Rioux.

Je pense que l'article 3.01 de ce protocole d'entente permet de répondre d'une façon plus précise à la question du député de Saguenay. Permettez-moi d'en donner la lecture :

Afin de permettre la réalisation de la première phase, le ministère de l'Industrie et du Commerce s'engage à verser à la SAGEQ, par l'entremise du CRDEQ, une somme de $60,000. De plus, le ministère de l'Industrie et du Commerce met à la disposition de la SAGEQ, au cours de cette première phase, une somme n'excédant par $125,000 pour lui permettre de procéder à des études techniques et de rentabilité sur différents projets.

M. LESSARD: Donc, les montants maximaux prévus par le gouvernement pour subventionner cette société seraient de $60,000.

M. QUENNEVILLE: Et une autre somme n'excédant pas $125,000.

M. LESSARD: Une autre somme n'excédant pas $125,000.

M. QUENNEVILLE: Le 30 juin 1974, une évaluation aura lieu.

M. LESSARD: II est quand même possible que le gouvernement, par l'intermédiaire de l'ODEQ, subventionne à nouveau cette société.

M. QUENNEVILLE: Après le 30 juin, selon l'évaluation...

M. LESSARD: La création de cette société vient-elle directement d'une recommandation comme telle du CRD de l'Est du Québec?

M. QUENNEVILLE: Exactement. C'est une recommandation du CRD, M. le Président, du BAEQ au départ.

M. LESSARD: Du BAEQ au départ. Est-ce qu'il s'agit, quand on parle du BAEQ au départ, de la création d'une corporation publique qui serait financée par l'Etat?

M. QUENNEVILLE: Non, pas du tout, M. le Président.

M. LESSARD: Est-ce que la création de cette société fait suite à la demande du manifeste de Matane à la page 22, où nous lisons: "Ce que nous voulons, c'est créer une société de développement de l'Est du Québec autonome dans ses décisions, avec conseil d'administration où siégeraient des représentants des deux gouvernements et de la population? Ce n'est certainement pas cela.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, cela ne fait pas suite, naturellement, à la présentation du manifeste de Matane. Ce à quoi se réfère le député de Saguenay, c'est plutôt à l'Office régional de développement, l'ORD.

M. LESSARD: L'ORD.

M. QUENNEVILLE: Parce qu'en somme di- sons que cette question de la SAGEQ remonte à 1964. C'est passablement antérieur au manifeste de Matane.

M. LESSARD: Mais dans la création de cette société, il n'a pas été analysé par le gouvernement, principalement par le ministère responsable de l'ODEQ, la possibilité d'être impliqué dans cette société, la possibilité d'être participant comme tel, sous forme de capital-actions?

M. QUENNEVILLE: Pas du tout, M. le Président. Pas au niveau du capital-actions. Il s'agissait, à ce moment, encore une fois je le répète, de toujours respecter le principe de l'entrepreneurship régional.

M. LESSARD: M. le Président, je suis bien d'accord pour respecter l'entrepreneurship régional, mais cependant, par exemple, je suis aussi d'accord pour que les deniers publics soient soumis à un certain contrôle, que les deniers publics ne soient pas donnés à une société qui se crée de toutes pièces, même si c'est une recommandation du CRD. J'aimerais bien voir cette recommandation comme telle, j'aimerais bien que le ministre dépose cet avis du CRD concernant la constitution d'une telle société, mais ce que je mets en doute, M. le Président, c'est cette structure qui est complètement autonome du gouvernement, mais qui apporte quand même une dépense assez considérable du gouvernement — assez considérable, disons que c'est relatif par rapport aux sommes qui sont versées dans la région de l'Est du Québec — c'est que je me dis, à ce moment, si ce principe est accepté dans une région pilote, le développement de l'entrepreneurship, il va falloir aussi l'accepter pour d'autres régions du Québec.

M. QUENNEVILLE: Si c'est valable.

M. LESSARD: Cela devrait faire l'objet d'une loi générale...

M. QUENNEVILLE: Si c'est valable. M. LESSARD: Si c'est valable.

M. QUENNEVILLE: C'est une expérience pilote. M. le Président, je sais que, par le passé, le député de Saguenay a toujours été soucieux de respecter les désirs de la population, que ce soit à l'intérieur d'un manifeste ou en dehors des manifestes, et tout ce que nous avons fait en permettant l'implantation de la SAGEQ, le démarrage de la SAGEQ, c'est qu'on a respecté, justement, les désirs de la population qui voulait, d'elle-même, promouvoir l'entrepreneurship régional et le développement industriel. Je pense bien qu'on s'est rendu aux désirs de la population. De là à le répéter dans d'autres régions, il faudra voir ce que cela donne avant. Je pense que c'est une expérience pilote. On l'a répété tantôt. On fera une

évaluation à ce moment, et s'il y a lieu de le répéter dans d'autres régions, le gouvernement pourra envisager...

M. LESSARD: II s'est quand même formé d'autres sociétés dans l'Est du Québec. Je donnais l'exemple de COGEMA, tout à l'heure, où le gouvernement n'a pas eu, comme tel, à investir. Ces gens se sont regroupés, ont trouvé de l'argent, ont vendu des actions et ont créé une société qui va créer de l'emploi, qui va permettre le développement, en tout cas qui va aider le développement régional dans cette région, qui a été appuyée d'ailleurs par le ministre responsable de l'ODEQ, qui a été contestée, par ailleurs, par suite de la décision du Canadien Pacifique.

Je trouve cependant que COGEMA, comme toute autre société qui se forme dans l'Est du Québec, aurait, si on accepte ce principe du développement régional de lancer des projets d'investissement, recevoir exactement les mêmes montants que cette société a pu recevoir.

M. QUENNEVILLE: Je pense bien que la formation de cette compagnie COGEMA prouve le bien-fondé des politiques que nous avons implantées dans le territoire de l'Est du Québec et cette société de gestion est là pour promouvoir l'établissement de sociétés privées.

Lorsqu'on s'adresse à la SAGEQ, forcément il s'agit d'une société à l'échelle régionale. Il ne s'agit pas d'une entreprise spécifique comme COGEMA et on respecte à ce moment les principes du BAEQ et de l'ODEQ aussi. Nous sommes prêts, au besoin, par le biais des programmes que nous avons, à aider ces sociétés privées qui se développent, par le biais des programmes comme l'aide aux infrastructures industrielles, etc. On ne voit pas pourquoi on irait à ce moment subventionner chaque projet et investir directement, comme vous semblez le souhaiter, dans toutes ces entreprises privées.

C'est une expérience qu'on tente et je pense que c'est réellement valable.

M. LESSARD: Je suis d'accord qu'il s'agit d'une société régionale, mais une société régionale qui aurait pu investir dans un projet comme COGEMA.

M. QUENNEVILLE: Exactement.

M. LESSARD: Une société régionale qui peut devenir, par exemple...

M. QUENNEVILLE: II n'y a rien qui ne l'en empêche, M. le Président.

M. LESSARD: ... peut-être une grande société qui peut contrôler de nombreuses entreprises. En fait, le principe est de créer un genre de "holding" financer dans le coin.

M. QUENNEVILLE: Exactement. C'est le but de la SAGEQ de pouvoir investir à un certain moment dans telle ou telle entreprise. Nous respectons...

M. LESSARD: Une sorte de SGF... M. QUENNEVILLE: ... régionale.

M. LESSARD: ... régionale. Si c'est un genre de SGF régionale, je ne peux pas comprendre que le gouvernement ne se soit pas associé directement à l'intérieur de cette société. Ce n'est pas parce que le gouvernement aurait été impliqué financièrement dans cette société que cela n'aurait pas été pour autant une société régionale, que cela n'aurait pas permis pour autant à la population de l'Est du Canada d'administrer ses affaires. De plus, on sait que, dans cette région, il n'est pas facile de trouver du capital. Si le gouvernement s'était impliqué avec un contrôle à l'intérieur de cette société...

M. QUENNEVILLE: II y en a un contrôle, on l'a répété tantôt, il y a un contrôle annuel de la part du ministère de l'Industrie et du Commerce. Il y a un protocole qui est là et qui le stipule. Toutes les dépenses sont vérifiées à ce moment. Je me demande ce qu'on veut de plus comme contrôle.

M. LESSARD: Comme en fait n'importe quelle compagnie privée doit vous soumettre un rapport, c'est-à-dire non pas à vous, mais à un organisme gouvernemental. Ce que je veux dire, c'est que le contrôle que vous avez est un contrôle annuel. Vous n'avez pas, à ce moment, par la création de cette société, un contrôle sur les décisions de cette société. Je pense que, si le gouvernement s'était impliqué directement dans cette société pour y avoir un contrôle à capital-actions, cela aurait permis aussi à des organismes comme la Société générale de financement ou particulièrement la Caisse de dépôt et placement du Québec de participer à cette entreprise. C'est cela que je mets en doute, malgré le fait que cela soit signé entre le CRD et cette société, c'est le principe — c'est une expérience pilote d'accord — mais ce principe est un précédent et un précédent qui peut amener des conséquences ailleurs.

Le ministère et le gouvernement ayant strictement un contrôle annuel, de quelle façon le gouvernement peut-il contrôler les études qui seront faites ou les investissements qui seront faits dans telle autre société ou dans tel projet? En fait, on donne à une société... Je prends un autre exemple.

M. QUENNEVILLE: On ne donne pas, M. le Président.

M. LESSARD: On verse une subvention de $60,000...

M. QUENNEVILLE: Pour l'administration.

M. LESSARD: ... au début, et une autre de $125,000.

M. QUENNEVILLE: Pardon, un instant, je m'excuse, M. le Président. On ne donne pas $125,000. Cela reste au ministère naturellement d'évaluer à ce moment, selon la rentabilité, et d'aller jusqu'à un montant de $125,000, n'excédant pas $125,000. L'argent demeure au ministère.

M. LESSARD: Afin de permettre la réalisation de la première phase, le ministère de l'Industrie et du Commerce s'engage à verser à la SAGEQ...

M. QUENNEVILLE: La première phase.

M. LESSARD: ... par l'entremise du CRDEQ une somme de $60,000.

M. QUENNEVILLE: C'est la première phase.

M. LESSARD: C'est la première phase. Je compare...

M. QUENNEVILLE: C'est terminé, cela?

M. LESSARD: Oui. Je compare un peu cette décision à une autre décision qui a été prise dans la région de Sacré-Coeur. Dans cette région, les gens se sont groupés, ont investi du capital-actions, se sont réunis et ont mis un certain capital-actions. Actuellement, c'est rendu à près de $500,000, mais au début, c'était $200,000 ou $250,000, ou $300,000. Les gens ont participé réellement. Ce que le gouvernement a fait, il leur a prêté des techniciens pour étudier la rentabilité de ce projet. En fait, le gouvernement leur a donné un concours technique. Le gouvernement — mais il y avait eu un effort de fait — a fait certaines études techniques concernant la possibilité d'implantation d'une scierie dans la région de Sacré-Coeur, mais le gouvernement n'a pas comme tel, de toutes pièces, créé cette société. Cette société s'est d'abord créé. On a cherché un investisseur, qui a été M. Fradette, de la Chibougamau Lumber, par la suite. C'est après que le gouvernement est entré sous forme de subventions normales ordinaires prévues par la loi. Mais c'est dans ce sens que je m'interroge. Je ne dis pas — c'est une expérience pilote — que je suis absolument contre le principe de la création d'une société régionale pour le développement de certains secteurs spécifiques ou certains secteurs rentables dans cette région. Mais je ne veux pas que l'argent de l'Etat soit donné comme cela sans condition, qu'on accorde un montant de $60,000 sans condition et sans aucun contrôle futur sur cette société.

M. QUENNEVILLE: Je regrette infiniment, M. le Président, mais...

M. LESSARD: Quant à cela, je vais me fonder une toute petite société. Combien de fois avons-nous vu dans l'Est du Québec des sociétés — on se rappelle le Père-Nouvel—.

M. QUENNEVILLE: Ce sont des entreprises privées, M. le Président. Cela n'a rien à voir avec cela. H ne faut quand même pas charrier. D'ailleurs quand on vous parle, vous dites qu'il n'y a pas de contrôle. Depuis tantôt qu'on vous prouve qu'il y a des contrôles, un contrôle annuel. En plus de cela, en plus des contrôles dont on parlait tantôt, il y a une vérification qui se fait de la part du Vérificateur général du Québec, selon la Loi de l'administration financière. Je pense que c'est un contrôle quand même asses efficace. Je pense qu'on pourrait s'éterniser assez longtemps sur le point que soulève le député de Saguenay. Je vais lui poser une question: Etes-vous d'accord sur le respect des désirs de la population? Si vous êtes d'accord, c'est exactement ce qu'on a fait.

M. LESSARD: Je suis d'accord.

M. QUENNEVILLE: Si vous êtes d'accord, je pense bien qu'on n'a pas à discuter.

M. LESSARD: Je suis d'accord en principe, sur le désir d'une population, mais je ne suis pas d'accord sur n'importe quel désir d'une population. Vous pouvez satisfaire aux besoins d'une population donnée, mais selon — c'est simplement une question de modalités — des modalités assez précises. Je ne suis pas d'accord pour que l'argent, les deniers publics servent à créer comme cela des sociétés où le gouvernement n'aura aucun contrôle, des sociétés dont on ne sait même pas si cela va se concrétiser véritablement.

Je suis d'accord pour qu'on réponde aux aspirations de la population, mais il faut — c'est l'assurance que je veux avoir — que le gouvernement vérifie s'il ne s'agit pas des aspirations de quelques individus qui peuvent profiter des montants qui sont prévus dans le développement de l'Est du Québec à leurs fins personnelles.

M. QUENNEVILLE: Je pense bien, M. le Président, qu'on a prouvé, hors de tout doute, le contrôle du gouvernement sur le projet de la SAGEQ. Il faut dire qu'au moment où il était question de l'implantation de la SAGEQ, il y a différentes hypothèses qui ont été émises pour la création de cette SAGEQ. Cela a été analysé par le CRD, la possibilité d'une société mixte, d'une société privée ou autres types de sociétés. Le CRD a opté, après avoir analysé les différentes hypothèses, pour le type de société représenté par la SAGEQ. On respecte exactement ce que le CRD a demandé. Je pense bien que le député de Saguenay pourrait rencontrer le CRD et lui demander le dossier complet et je pense qu'il va être passablement convaincu non seule-

ment du bien-fondé de cette expérience pilote, mais aussi du contrôle exercé par le ministère de l'Industrie et du Commerce sur cette société. M. Parizeau, d'ailleurs, était à l'origine de cette hypothèse comme consultant.

M. LESSARD: Ce que nous avons proposé, M. le Président, c'est la création d'une société de développement de l'Est du Québec qui avait pour but d'appliquer les mesures proposées par le plan. Ce que nous proposions, ce n'était pas de créer de toutes pièces, à même les deniers publics, une société qui serait complètement autonome. Je suis d'accord sur le principe. Ce que je conteste, c'est le fait que le gouvernement ne se soit pas associé sous forme de capital-actions. Est-ce que le gouvernement pourra le faire dans l'avenir, s'il le désire, en vertu du protocole d'entente?

Je suis sûr que le député de Jonquière serait heureux d'avoir un montant comme celui-là pour pouvoir créer dans son milieu, avec des amis, une société comme celle-là qui pourrait investir dans des secteurs particuliers.

M. HARVEY (Jonquière): Je serais heureux, mais dans la vôtre, je ne serais pas actionnaire.

M. LESSARD: Comme ministre du Revenu, est-ce que vous aimeriez, à la suite de la création de cette société qui va peut-être faire des profits, recevoir des montants qui permettraient au ministre du Revenu d'avoir plus d'argent à dépenser?

M. HARVEY (Jonquière): Je peux vous dire plus, c'est que, s'ils faisaient des profits, je leur passerais un coup de tasse, comme ministre du Revenu.

M. LESSARD: Si...

M. HARVEY (Jonquière): Je leur ferais payer leurs impôts.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, encore une fois, il s'agit d'une expérience pilote et je pense bien qu'avant d'aller plus loin et de savoir si l'Etat devrait investir etc., ou si l'Etat devrait répéter cette expérience dans d'autres régions-ressources, j'ai l'impression qu'il faut attendre l'évaluation de la phase de démarrage et nous aurons cette évaluation le 30 juin. Si c'est positif, le gouvernement verra alors exactement quelle attitude prendre et quelle position adopter.

M. LESSARD: M. le Président, le ministre m'informe qu'il s'est soumis à la décision d'une recommandation du Conseil régional de développement de l'Est du Québec. Le Conseil régional de développement de l'Est du Québec avait aussi recommandé la création d'une société agricole et sylvicole mixte où le gouvernement était impliqué, ayant comme fonction de consolider, le plus rapidement possible, un maximum de territoire. Je lis, dans le journal Le Soleil de jeudi, le 12 avril 1973, ceci: Les sommes versées à la société devront être considérées comme un capital de roulement sans établir de chiffres précis. Le CRD signale que le montant devra être considérable, quitte à gruger au budget du secteur forestier. C'est là la principale recommandation que formule le CRD en matière agricole dans son avis sur le prochain exercice financier de l'ODEQ. Le CRD reprend ici à son compte l'idée du CAEQ, Conseil agricole de l'Est du Québec, qui, il y a quelques semaines, formulait une telle recommandation.

Il s'agit de la création d'une société mixte. Puisque le ministre me dit qu'il accepte les recommandations du CRD et qu'il l'a fait en ce qui concerne la création de SAGEQ, est-ce que le ministre a l'intention d'accepter cette recommandation, soit la création d'une société agricole et sylvicole mixte qui permettrait le réaménagement des terres, peut-être de façon plus efficace, qui permettrait d'aller jusqu'à aider les producteurs, à la fois agricoles et forestiers? Est-ce que le ministre a envisagé cette possibilité?

M. QUENNEVILLE: Je pense bien que nous avons une réponse toute prête pour le député de Saguenay, puisque actuellement il y a dix sociétés d'exploitation sylvicole et agricole qui sont en train d'être implantées, par le ministère des Terres et Forêts et aussi par la participation de la population. Je pense qu'on a donné suite, encore une fois, au désir de la population et c'est exactement ce qu'on fait et vous avez la participation, en même temps, du FRUL comme conseiller.

M. LESSARD: Mais le ministre nous dit qu'il y a dix sociétés sylvicoles qui sont formées...

M. QUENNEVILLE: Elles sont en train justement de s'implanter.

M. LESSARD: ... des groupements forestiers, des fermes forestières, etc. C'est une des mesures de développement que le ministère des Terres et Forêts est en train de faire, suite aux demandes, aux protestations et aux revendications des opérations Dignité I et Dignité IL Ce sont là des mesures très particulières. Ce que le CRD demandait — je pense que le CRD a insisté considérablement sur cette recommandation — c'est une société mixte qui aurait pour but de coordonner le travail de ces dix, douze ou peut-être prochainement quinze sociétés particulières de regroupement agricole, de ces fermes forestières, de ces regroupements forestiers. C'est une société qui chapeauterait le développement avec des montants considérables parce qu'on sait encore — le ministre a pu le constater — que le crédit forestier, qui est une mesure absolument nécessaire pour la région de l'Est du

Québec, comme d'autres régions, doit exister si on veut que ces petites terres, si on veut que les opérations Dignité I, Dignité II, qui ont été une réaction au BAEQ au fait que la Loi de l'aide aux migrants, au fait qu'on voulait plutôt planifier non pas le développement mais l'expatriation... Pour que ça puisse se faire, pour que ça puisse être rentable, il y a des montants considérables qui doivent être impliqués là-dedans et c'est ça, la demande du CRD. C'est ça la recommandation de créer une société agricole et sylvicole mixte où il y aurait des montants considérables impliqués.

Mais, actuellement, ce que le ministère des Terres et Forêts — je le sais puisque j'étais aux crédits de ce ministère — fait, c'est qu'il aide individuellement des groupes de fermiers à se regouper. Ce qu'on fait aussi, c'est que ces groupes s'unissent entre eux, forment un genre de ce qu'on appelle groupement forestier, selon certaines recommandations du rapport Lussier. Mais il y a plus que ça, c'est que ça prend une aide financière considérable pour permettre non seulement la création de ces groupes forestiers, mais l'investissement dont on a besoin dans la sylviculture et c'est ça la recommandation du CRD. Je ne pense pas qu'on ait donné suite à ça.

M. QUENNEVILLE: Pour répondre au député de Saguenay, disons qu'il y a déjà en marche un comité formé de l'Office des producteurs de bois et de l'UPA qui, avec le ministère des Terres et Forêts, vont former cette société mixte. C'est un début, mais on donne suite, contrairement à ce que M. le député affirmait tout à l'heure, aux recommandations, ce qu'on fait actuellement.

M. LESSARD: C'est ça que je vous demandais.

M. QUENNEVILLE: Vous disiez qu'on ne donnait pas suite, alors c'est pour ça que je précise.

M. LESSARD: Non, j'ai dit: Vous m'avez affirmé que vous donniez suite en ce qui concerne SAGEQ. Je vous demandais si vous aviez l'intention de donner suite à ça. Là, vous m'informez...

M. QUENNEVILLE: On y donne suite, exactement.

M. LESSARD: ... qu'un comité a été formé au niveau de l'ODEQ, regroupant des représentants du ministère de l'Agriculture et aussi du ministère des Terres et Forêts en vue d'étudier la possibilité de la création d'une société mixte.

M. QUENNEVILLE: Exactement.

M. LESSARD: Quel est le mandat de ce comité? Le mandat, c'est d'étudier, mais ce mandat a-t-il un délai de fixé pour présenter un rapport?

M. QUENNEVILLE: Nous pourrons sûrement donner exactement la définition du mandat après avoir consulté le ministère des Terres et Forêts qui est le martre d'oeuvre dans cette création de société mixte.

M. LESSARD: Mais le ministre ne veut pas me préciser ce matin le mandat précis de ce comité.

M. QUENNEVILLE: Pas ce matin. Je serai en mesure, après consultation avec le ministère des Terres et Forêts, de produire le mandat.

M. LESSARD: Quels sont les membres de chacun des ministères qui font partie de ce comité? Est-ce qu'on a beaucoup de comités qui ne siègent plus.

M. QUENNEVILLE: Je ne peux pas réellement répondre. Je pense bien qu'on entre dans des délais. Je ne suis pas en mesure de pouvoir vous donner le nom de tous ces gens qui sont à l'intérieur...

M. LESSARD: J'accepte la parole du ministre.

M. QUENNEVILLE: II ne faut tout de même pas exagérer.

M. LESSARD: J'accepte la parole du ministre, mais j'ai pu, à plusieurs reprises, constater que la meilleure façon de ne pas répondre à une question, c'est de dire: II y a un comité qui a été formé.

M. QUENNEVILLE: Je comprends, M. le Président, mais on est prêt à déposer n'importe quand le nom des gens qui sont à l'intérieur de ce comité.

M. LESSARD: Le ministre du Revenu a l'air d'accord avec moi.

M. HARVEY (Jonquière): Non, je ris tout simplement.

M. LESSARD: Est-ce que...

M. QUENNEVILLE: II faut que ce soit, de toute façon, en place cette année. Il faut que cette société soit en place cette année.

M. LESSARD: Cette année?

M. QUENNEVILLE: C'est prévu dans le budget.

M. LESSARD: Autrement dit, en principe, vous acceptez la recommandation du CRD concernant la création d'une société agricole mixte.

M. QUENNEVILLE: Assurément.

M. LESSARD : Est-ce que, dans le mandat de votre comité... D'abord, j'aimerais bien savoir si ce comité est...

M. QUENNEVILLE: Encore une fois, on vient de vous répondre là-dessus. On vous dit que, pour le mandat exact, je ne voudrais pas commettre d'erreur grossière ou vous donner une définition du mandat alors qu'on ne l'a pas et...

M. LESSARD: Est-ce que...

M. QUENNEVILLE: On est prêt à le déposer n'importe quand.

M. LESSARD: Vous êtes prêt à le déposer. M. QUENNEVILLE: Certainement.

M. LESSARD: Outre les trois ministères concernés, étant donné qu'on parle d'argent considérable, est-ce que le ministère des Finances a un délégué?

M. QUENNEVILLE: Non, M. le Président, il n'y a pas de représentant du ministère des Finances à l'intérieur de cette société mixte.

M. LESSARD: On aura à connaître le mandat, mais est-ce que ce comité a étudié la possibilité d'implantation d'une société agricole mixte? Qui sera responsable de l'étude, du financement de cette société?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, c'est le ministère des Terres et Forêts qui sera responsable de l'étude, du financement.

M. LESSARD: Par les crédits...

M. QUENNEVILLE: Par les crédits du ministère.

M. LESSARD: Et au ministère des Terres et Forêts, on nous répond qu'on attend encore les moyens financiers de proposer un crédit.

M. QUENNEVILLE: Forcément, il faut qu'ils attendent les budgets, j'imagine.

M. LESSARD: Alors, j'accepte le fait que le ministre puisse déposer le mandat. Maintenant, est-ce qu'il y a possibilité que des organismes gouvernementaux, tels que la Caisse de dépôt, puissent participer au financement d'une telle société?

M. QUENNEVILLE: Naturellement, nous attendrons le rapport qui sera déposé par la commission d'étude avant de préciser la possibilité d'investir.

M. LESSARD: Tel que nous le disait tout à l'heure le ministre dans une excellente déclara- tion sur la structure d'exécution du plan qui m'apparaît assez claire enfin, parce que c'était assez compliqué, on constate que le BAEQ, en 1966, avait recommandé la création d'un office régional de développement, l'ORD, ayant un statut de corporation publique, financé par l'Etat et jouissant de l'autonomie de gestion, chargé de seconder le gouvernement du Québec dans l'exécution du plan de développement préparé par la région de l'Est du Québec en exécutant certaines tâches prévues par le plan, en coordonnant les interventions de centres de décision publics et privés, dans le but d'assumer la comptabilité de telles interventions, avec les objectifs fixés par le plan, en conduisant les études nécessaires à la révision du plan, à l'approfondissement de certains aspects du même plan et à la préparation de plans ultérieurs.

Cette recommandation du BAEQ de juillet 1966 revient dans un document qui fut fort contesté à la fois par le ministre responsable de l'ODEQ comme par d'autres ministres et d'autres députés libéraux, soit le Manifeste de Matane, où on demande la création d'une société de développement de l'Est du Québec qui serait autonome dans ses décisions avec un conseil d'administration où siégeraient des représentants des deux gouvernements et de la population.

Je constate que c'est d'abord une recommandation du BAEQ de 1966. C'est aussi une recommandation des gens qui ont préparé le Manifeste de Matane. Est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il a l'intention d'accepter cette recommandation ou de la rejeter et pourquoi elle ne lui paraîtrait pas efficace?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, il faut dire d'abord que le gouvernement n'a pas retenu cette proposition. En 1967, d'ailleurs, le BAEQ n'a pas retenu non plus cette proposition. Pour ce qui est de la recommandation du BAEQ, recommandation reprise d'ailleurs par le Manifeste de Matane, voulant créer un Office régional de développement, ORD, pour remplacer l'ODEQ dans l'exécution de l'entente Canada-Québec, je doute fort, étant donné l'efficacité de la structure actuelle, qu'un ORD puisse améliorer quoi que ce soit, d'autant plus qu'il faudrait à cet organisme une période de rodage qui se traduirait inévitablement par un ralentissement des opérations.

De toute façon, un ORD aurait à traiter avec les ministères québécois, maîtres d'oeuvre des programmes gouvernementaux, d'aménagement et de développement, de même qu'avec l'entreprise privée pour ce qui est des programmes de développement industriel. En quelque sorte, la formule ORD proposée est pratiquement identique à la formule actuelle de l'ODEQ, sauf qu'elle comporterait tous les inconvénients de la mise en place d'une nouvelle structure.

D'ailleurs, la preuve de ce qu'on avance, c'est justement la courbe de la performance de l'ODEQ depuis — je ne reprendrai pas les

chiffres que j'ai donnés tantôt — 1970 en particulier, qui a été de 76.8 p.c. en 1970/71, de 89.3 p.c. en 1971/72 pour monter à 95 p.c. en 1972/73. Encore une fois, nous n'avons pas les chiffres précis, ils sont au-delà de 90 p.c. Ce qui veut dire qu'en implantant un ORD, il faudrait recommencer toute cette expérience qui, comme on le voit, prend un certain temps avant d'être rodée. L'organisme, si vous le voulez, qui remplacerait à ce moment-là l'ODEQ aurait à recommencer toute cette période de rodage et on voit mal pourquoi on appuierait une telle recommandation.

Le gouvernement, je pense, à ce moment-là, a opté pour une formule de déconcentration administrative qui nous semble nettement plus valable.

M. LESSARD: Je pense que cela a pris un certain temps...

M. QUENNEVILLE: Exactement...

M. LESSARD: ... à roder cette organisation, mais quand le ministre parle de déconcentration administrative, le problème est que cette déconcentration n'est pas suivie d'une décentralisation administrative, c'est-à-dire...

M. QUENNEVILLE: C'est une étape.

M. LESSARD: ... là où il y a des pouvoirs précis de décision qui sont donnés à des fonctionnaires.

M. QUENNEVILLE: Voici, M. le Président...

M. LESSARD: Parce qu'actuellement on fait de la déconcentration, mais, malheureusement, quand on fait de la déconcentration, les gens qui veulent certaines choses précises sont quand même obligés de toujours remonter au ministre en question car les responsables régionaux disent: On n'a pas de pouvoirs.

M. QUENNEVILLE: ... d'ailleurs, j'ai déjà eu l'occasion, en Chambre, de dire que la déconcentration administrative est une étape qui pourrait éventuellement déboucher sur une décentralisation, mais il n'en reste pas moins qu'avant d'arriver à une décentralisation, il faut quand même voir les bienfaits, si vous le voulez, de la déconcentration administrative. Nous ne sommes pas contre la décentralisation. Nous croyons quand même qu'il y a des étapes à franchir et que la déconcentration administrative en est une.

On peut dire que, jusqu'ici, de toute façon, si on s'en tient aux chiffres de performance, c'est plus que satisfaisant.

M. LESSARD: Pour ma part, je tiens à bien préciser au ministre que je ne m'obstinerai pas sur des questions de structure. Que ce soit une société de gestion régionale, que ce soit l'ODEQ, l'important, c'est la consultation, que la population soit consultée, que la population soit impliquée dans l'élaboration, c'est-à-dire la concrétisation du BAEQ, et surtout que la population n'ait pas à regretter ces fameuses lenteurs administratives dont on parlait probablement avec raison...

M. QUENNEVILLE: Avant 1970.

M. LESSARD: Oui, avant 1970, et même un petit peu après...

M. QUENNEVILLE: Oui.

M. LESSARD: ... je pense qu'à partir de 1972, d'ailleurs, c'est confirmé par les chiffres...

M. QUENNEVILLE: En 1971, c'est déjà pas si mal à 89.3 p.c. de performance.

M. LESSARD: Oui, c'est cela.

M. QUENNEVILLE: C'est acceptable.

M. HARVEY (Jonquière): Au 12 mai 1970.

M. LESSARD: Au 12 mai... Non, non. L'ex-ministre responsable de l'ODEQ, si je regarde les chiffres, n'a pas réussi...

M. QUENNEVILLE: Je reviendrai sur ces chiffres.

M. LESSARD: ... à dépenser les montants qui étaient prévus, parce que la structure n'était pas rodée, était plus ou moins efficace.

M. QUENNEVILLE: Je pense, M. le Président, que nous sommes passablement d'accord sur les voeux émis par le député de Saguenay. Je pense que nous l'avons prouvé. Les chiffres sont là. Je pense bien que le député de Saguenay va tenir pour acquis que, s'il y a des gens qui souhaitent le succès de cette expérience pilote, ce sont justement ceux qui en sont responsables.

M. LESSARD: Si vous me permettez, M. le ministre, maintenant que la discussion générale est terminée, nous allons discuter de votre document, c'est-à-dire le premier document que vous avez déposé, votre déclaration liminaire, l'entente Est du Québec.

En 1968 est signée la première entente Canada-Québec et un montant de $211 millions, je pense, est prévu. Le ministre pourra me corriger, parce qu'étant donné qu'il travaille continuellement là-dedans...

M. QUENNEVILLE: Je vais prendre des notes...

M. LESSARD: Est-ce qu'on peut suspendre les travaux quelques minutes, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): La séance est suspendue pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 58).

Reprise de la séance à 12 h 2

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, messieurs!

Le député de Saguenay.

M. LESSARD: Si on constate qu'à une heure, on peut terminer l'ODEQ... Quant à moi, on pourrait aller jusqu'à une heure, mais j'aimerais beaucoup mieux qu'on arrête à 12 h 30 si le ministre...

M. QUENNEVILLE: Je suis absolument disponible.

M. LESSARD: Je disais que, lors de la première entente en 1968, un montant de $211 millions était prévu...

M. QUENNEVILLE: $258 millions.

M. LESSARD: $258 millions. Très bien. Et cette entente est pour une période de trois ans, soit de 1968 à 1971.

M. QUENNEVILLE: Une période de cinq ans.

M. LESSARD: Une période de cinq ans. M. QUENNEVILLE: De 1968 à 1972. M. LESSARD: De 1968 à 1972.

M. QUENNEVILLE: Oui. Cela a été renégocié en 1971, mais cela était prévu pour 1972.

M. LESSARD: D'accord. On constate que ces $258 millions, lors du renouvellement de l'entente, ne sont pas complètement dépensés. Combien de ce montant avait été dépensé lorsqu'on a resigné l'entente?

M. QUENNEVILLE: II y avait $68 millions, à ce moment, de dépensés sur les $258 millions.

M. LESSARD: II y avait $68 millions de dépensés, ce qui veut dire qu'il y avait, à ce moment, $190 millions en réserve. Le gouvernement signe une nouvelle entente, et cette nouvelle entente est de $411 millions. Mais dans ce montant de $411 millions, sont compris les $258 millions qui avaient été prévus...

M. QUENNEVILLE: C'est une reconduction de l'entente.

M. LESSARD: C'est une reconduction de l'entente à laquelle on ajoutait simplement un montant de...

M. QUENNEVILLE: ... de $411 millions moins $258 millions.

M. LESSARD: C'est ce que j'essaie de calcu- ler. En fait, c'était $150 millions de plus qu'on ajoutait pour une période...

M. QUENNEVILLE: ... jusqu'à 1976.

M. LESSARD: Jusqu'à 1976.

M. QUENNEVILLE: Cinq ans encore.

M. LESSARD: Donc, une période de cinq ans. Cela veut donc dire que la reconduction était de $30 millions pour une période de cinq ans.

M. QUENNEVILLE: $30 millions par année.

M. LESSARD: Par année. Tout à l'heure, on va discuter de façon plus précise — d'une chose qu'on a le plus contestée et qui a même — je vais donner la possibilité au ministre tout à l'heure de faire la précision qu'il voulait faire concernant la déclaration de l'ex-ministre responsable de l'ODEQ, M. Tessier —...

M. QUENNEVILLE: Je reviendrai, M. le Président.

M. LESSARD: ... d'une chose que nous avons affirmée et qui a été reprise par le manifeste de Matane et par la population de l'Est du Québec, c'était qu'en réalité il y avait très peu d'argent nouveau dans cette nouvelle entente, par rapport au montant qui, de toute façon, aurait été investi. Est-ce que le ministre pourrait me dire le pourcentage, dans ce montant de $411 millions, qui sera investi ou qui a été investi par le gouvernement fédéral et par le gouvernement provincial?

M. QUENNEVILLE: Je pense bien qu'on peut discuter assez longtemps sur cette question de l'argent neuf à l'intérieur de cette entente Canada-Québec. Il n'en reste pas moins qu'il y a $153 millions du ministère de l'Expansion économique régionale qui est sûrement de l'argent neuf et une partie des $113 millions du Québec qui est sûrement de l'argent neuf aussi. Il est possible, comme le soulignait tantôt le député de Saguenay, que ces montants aient été dépensés dans le territoire sur dix ou quinze ans. Je pense que le bien-fondé, la justification de cette entente, réside dans le fait que ceci a permis d'accélérer le processus ou le cheminement de ces différents projets sur une période beaucoup plus courte dans une zone nettement défavorisée. Je pense que c'est là, en fait, toute la justification de cette entente.

Pour ce qui est de préciser exactement le montant d'argent neuf, je crois qu'il est assez difficile de le préciser. Il est sûr et certain que les $153 millions du ministère de l'Expansion économique régionale, sont de l'argent neuf et une bonne partie des $113 millions du gouvernement du Québec aussi.

M. LESSARD: Les $153 millions du minis-

tère de l'Expansion économique régionale ne sont-ils pas des montants qui étaient prévus à l'intérieur de ministères précis du gouvernement fédéral et qui sont dépensés par l'intermédiaire de cet organisme?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, ces montants n'étaient sûrement pas prévus par les ministères fédéraux pour être dépensés dans cette région.

M. LESSARD: Dans la partie des $113 millions du gouvernement provincial, le ministre pourrait-il nous dire quel est le pourcentage d'argent neuf?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, sans avoir précision exacte, je pense bien qu'on peut avancer le pourcentage des 80 p.c. des $113 millions.

M. LESSARD: Tout cela est basé naturellement sur une période de cinq ans, ce qui veut dire $30 millions par année. Combien de comtés sont couverts par l'entente? Douze comtés?

M. QUENNEVILLE: Dix comtés, M. le Président.

M. LESSARD: Dix comtés. Ce qui veut dire, environ une moyenne de $3 millions par comté?

M. QUENNEVILLE: Par année, vous voulez dire?

M. LESSARD: Par année.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, nous sommes prêts, pour éclairer la lanterne du député de Saguenay, à déposer l'exercice de spécialisation que nous avons présenté aux députés de la région, l'été dernier. Je pense que dans ce document, vous aurez tous les montants qui seront dépensés, par comté, depuis 1968, ce qui est plus juste que de prendre seulement une partie des cinq ans.

M. LESSARD: Quand est prévu dans l'entente un montant d'environ $80 millions pour la formation professionnelle, ce n'est pas de l'argent...

M. QUENNEVILLE: $86 millions.

M. LESSARD: $86 millions. Ce n'est pas de l'argent neuf. Dans les régions comme le Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord, nous avons aussi ces montants pour la formation professionnelle; ce que je souhaiterais, par exemple, c'est qu'il y ait une meilleure coordination des montants dépensés dans nos régions. Ce qui n'est souvent pas le cas.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pen- se que nous sommes parfaitement d'accord avec le député de Saguenay, sur cette question des $86 millions; mais il reste quand même que ces $86 millions sont compris à l'intérieur des $411 millions. Ceci ne touche pas les $153 millions du MEER le ministère de l'Expansion économique régionale, non plus que les $113 millions dépensés par le gouvernement du Québec. C'est un programme fédéral dans toute la province et nous sommes d'accord sur le fait que cet argent aurait été dépensé.

M. LESSARD: Le ministre parle...

M. QUENNEVILLE: Cela ne touche pas les montants que nous avons avancés, tantôt, comme de l'argent neuf.

M. LESSARD: C'est la même chose dans le transport routier. On va en parler au niveau des mines tout à l'heure. Pour la pauvre route 6, il va être temps, à un moment donné qu'on fasse un effort considérable là-dessus. Il faudrait que je parle de ma route 138 aussi.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense que là nous nous inscrivons en faux contre l'affirmation du député de Saguenay. Il y a quand même un montant de $100 millions qui sera dépensé d'ici la fin de l'entente et il est bien évident qu'il aurait fallu refaire certaines parties, comme je le disais tantôt, de cette route 6. Cette entente a permis d'accélérer les travaux. Il est bien évident que, lorsqu'un pont menace de tomber, il faut le remplacer. Je suis d'accord. On aurait peut-être fait des actions ponctuelles, mais nettement circonscrites. On a fait 150 milles de routes jusqu'à maintenant. Il ne faudrait pas oublier, pour l'information du député de Saguenay, qu'il reste encore $40 millions à dépenser à l'intérieur de ce budget de voirie.

M. LESSARD: Est-ce qu'en tenant compte de ce budget, de ces $40 millions qui restent à dépenser, on peut estimer que la route de ceinture de la Gaspésie sera terminée? Pas encore?

M. QUENNEVILLE: Non, pas au complet, M. le Président.

Mais on peut dire qu'une très grande partie de cette route sera terminée à ce moment-là. Il faut penser aussi que toute la question de la voirie touristique est terminée.

M. LESSARD: A la page 2 de la déclaration liminaire du ministre, nous constatons que des montants de $2.2 millions ont été consacrés au réaménagement foncier. D'abord, première question, ce réaménagement foncier, qui est responsable de l'application de son programme? Est-ce que c'est l'ODEQ ou le ministère des Terres et Forêts? Je ne veux pas revenir sur la discussion qu'on a eue tout à l'heure.

M. QUENNEVILLE: Comme dans tous les autres secteurs, c'est le ministère impliqué qui est le ministère maître d'oeuvre. Dans ce cas-ci, il s'agit du ministère de l'Agriculture.

M. LESSARD: Et des Terres et Forêts?

M. QUENNEVILLE: Pas le ministère des Terres et Forêts. Il s'agit à 100 p.c. de maîtrise d'oeuvre de la part du ministère de l'Agriculture.

M. LESSARD: Ah, excusez! Mais quel est le contrôle que possède le ministre responsable de l'ODEQ sur le respect du programme qui a été élaboré par le BAEQ?

M. QUENNEVILLE: C'est justement le rôle du ministre responsable de l'ODEQ, par le visa, de vérifier si les projets soumis par le ministère sont conformes aux plans. Sur chacun des CT, il y a un visa de l'office et c'est signé par le ministre responsable du plan.

M. LESSARD: Une demande qui avait été faite par la population, surtout par l'UPA de la région de l'Est du Québec, c'était de créer un office de commercialisation pour la vente de produits en tenant compte du fait que la Côte-Nord n'est pas une région agricole ou plus ou moins agricole. C'est assez relatif. Je pense que la Côte-Nord et la côte sud peuvent être deux régions assez complémentaires. Il serait important, dans ce réaménagement foncier pour rentabiliser l'agriculture, qu'il y ait une société de commercialisation pour aider l'Union des producteurs agricoles et les agriculteurs. Est-ce que cela a été envisagé par L'ODEQ?

M. QUENNEVILLE: Nous sommes parfaitement d'accord sur la création de cet office. Etant donné que notre rôle est un rôle de coordination, nous attendons la recommandation du ministère maître d'oeuvre, c'est-à-dire le ministère de l'Agriculture. Je pense bien que le geste que nous avons posé lors de l'acceptation du projet de traversier-rail prouve, hors de tout doute, notre prise de conscience vis-à-vis de la complémentarité de l'économie des deux rives.

M. LESSARD: Dans l'agriculture, comme dans l'ensemble des montants qui sont prévus pour le développement de l'Est du Québec, il y a une diminution assez considérable des montants qui sont prévus pour les prochaines années. Le ministre a expliqué que c'était en vue d'empêcher une diminution trop forte de...

M. QUENNEVILLE: Désengagement graduel.

M. LESSARD: ...désengagement.

Selon le bilan de 1968 à 1974, on constate que, vers 1970/71, on est arrivé à un maximum de dépenses de $4,289,000. Cette année, com- me l'a dit le ministre, on prévoit un montant de $2,210,500. On constate une diminution assez importante des crédits de ce ministère dans l'Est du Québec, alors que, par ailleurs, il y a une forte demande sur des projets nouveaux, projets par exemple, concernant l'élevage du boeuf de boucherie. Est-ce que, étant donné cette diminution, cela veut dire que le ministre responsable de l'ODEQ croit que nous avons atteint, dans ce secteur, la rentabilité qu'on visait, les objectifs qu'on visait?

M. QUENNEVILLE: Je pense que, pour ce qui est du programme de l'élevage du boeuf de boucherie, nous avons déjà lancé ce programme et nous avons investi $250,000. Nous sommes bien persuadés que, d'ici la fin de l'entente, nous n'aurons peut-être pas atteint tous les objectifs prévus dans ce secteur important de l'agriculture. Il n'en reste pas moins qu'à l'intérieur des budgets réguliers, il sera possible au ministère à ce moment-là de mener à terme ces différents projets.

M. LESSARD: Le montant de $225,000 a été investi en 1973/74...

M. QUENNEVILLE: Exactement.

M. LESSARD: C'est le seul montant qui a été investi?

M. QUENNEVILLE: Et $250,000 cette année, l'an prochain aussi. Je vous ferai remarquer que cette différence énorme entre le budget 1970/71, et celui de 1971/72 et l'autre budget, correspond à l'achat des terres des dix paroisses qui ont été fermées. C'est la raison de ce décalage prononcé.

M. LESSARD: Cela correspond à l'argent qui a été dépensé pour...

M. QUENNEVILLE: Le rachat des terres.

M.LESSARD: ...le rachat des terres. Mais dans ce programme d'élevage de bovins, est-ce que, d'après les rapports du ministre responsable de l'ODEQ, on a atteint une certaine rentabilité? Est-ce que cela s'avère efficace? Est-ce qu'on prévoit non seulement de l'élevage, mais de la commercialisation?

M. QUENNEVILLE: C'est ce qu'on vise. Je peux vous dire que, sans avoir les résultats définitifs de l'évaluation, étant donné que ce programme a été mis de l'avant seulement l'automne dernier, on peut présumer déjà d'un succès. Nous attendons le rapport qui nous sera soumis par le ministère de l'Agriculture.

M. LESSARD: Dans le secteur forestier, un montant de $3.2 millions a été affecté à l'aménagement forestier, au rachat des seigneuries, de droits des concessionnaires, à la restauration

forestière, au reboisement, etc. Le ministre vient de parler du fait qu'on a fermé une dizaine de paroisses et qu'on a racheté des terres.

L'un des problèmes que les gens de l'Est du Québec ont eu, c'est que, suite à ce rachat des terres, on avait établi une politique de rachat des terres, on avait établi une politique d'aide aux migrants, mais on n'avait pas déterminé les centres agro-forestiers comme tels. Quelles seront les paroisses spécifiques où on déménagera les gens et où on investira, de façon importante, avec tout ce que cela comporte, les services d'aqueduc, les services d'égouts? On dit qu'il y a actuellement énormément de paroisses et que le ministère ne peut naturellement pas investir dans la construction de tous les services d'aqueduc et d'égouts dans toutes les paroisses de l'Est du Québec. Est-ce que, dans le cadre du plan Lussier et dans le cadre des travaux du ministère des Terres et Forêts, ces centres agro-forestiers, tels que demandés, sont déterminés?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense bien que nous avons tenté, avec le ministère des Terres et Forêts, de suivre une politique cohérente pour la détermination des centres agro-forestiers. C'est la raison pour laquelle nous avons mis de l'avant un programme pour déterminer exactement les zones agroforestières.

Cette étape doit forcément précéder la détermination ou la précision des centres agro-forestiers. Cette opération est déjà commencée et doit être déposée d'ici mars 1975. D'ailleurs, je vais vous lire un paragraphe de l'arrêté en conseil 1452-74 qui concerne de façon plus précise ce programme: "Attendu que le Conseil régional de développement de même que la structure opérationnelle du programme sont d'accord pour recommander de suspendre l'application de l'arrêté en conseil no 2874-72 jusqu'à ce que des plans zonaux d'aménagement intégrés des ressources de l'arrière-pays aient été produits et acceptés par la population concernée et les autorités gouvernementales compétentes"...

On suit exactement ce qui a été déterminé par cet arrêté en conseil.

M. LESSARD: Vous dites qu'avant de déterminer les centres agro-forestiers, il faut faire une étude...

M. QUENNEVILLE: Du zonage.

M. LESSARD: ... du zonage. A ce moment-là, sur quelle base, puisqu'il se fait quand même du réaménagement foncier, se crée-t-il des groupements forestiers, des fermes forestières? On a déménagé un certain nombre de personnes. Sur quels critères et sur quelles normes se base-t-on pour préciser que ce sera dans tel secteur particulier qu'on va investir l'argent concernant le développement forestier? C'est qu'on continue de dépenser et qu'on ne connaît pas encore les centres agro-forestiers.

M. QUENNEVILLE: Je pense bien que, jusqu'ici, nous avons sûrement procédé à des actions ponctuelles, comme vous l'avez souligné tantôt, mais ce que nous sommes en train de faire actuellement, c'est de procéder à l'intégration de l'arrière-pays pour voir où est le potentiel au point de vue agro-forestier. Je pense que c'est une suite bien normale.

M. LESSARD: II y a un projet précis dont l'initiative revient à la population, au ministère de l'Agriculture et à l'ODEQ, le projet JAL. J'ai posé des questions au ministre de l'Agriculture sur le projet JAL lorsque nous avons discuté de ses crédits, et cela concerne trois municipalités: Saint-Just, Auclair et Lejeune. Lors d'une conférence à Rimouski, en date du 5 septembre 1973, le ministre de l'Agriculture, M. Norman Toupin, avait laissé entendre, dans cette conférence, que son ministère favorisait à plein le projet d'aménagement JAL, soit les municipalités de Saint-Just, Auclair, Lejeune, et que lui-même était d'accord pour la continuation des efforts communautaires de la population en vue d'aménager les ressources du milieu de façon intégrale, à condition toutefois, que l'ODEQ, Office de développement de l'Est du Québec, se décide. Est-ce qu'on pourrait savoir quels sont les montants qui sont prévus cette année à l'intérieur des cadres de l'ODEQ pour ce projet?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, nous sommes absolument d'accord, d'ailleurs, avec le ministre de l'Agriculture au sujet de cette déclaration, et le projet JAL est déjà en place. On nous a demandé cette année un budget de $57,000. Nous sommes prêts à verser les $57,000.

M. LESSARD: Qui est reponsable et maître d'oeuvre de ce projet? C'est le ministère de l'Agriculture?

M. QUENNEVILLE: Les responsables sont le ministère de l'Agriculture et la Coopérative de gestion du Témiscouata qui est incorporée...

M. LESSARD: Qui est constitutée... M. QUENNEVILLE: Des gens de...

M. LESSARD: ... des gens de ces trois paroisses.

M. QUENNEVILLE: Exactement.

M. LESSARD : En passant — je ne sais pas si je l'ai demandé au ministre, mais pendant que cela me revient — le ministre parlait de 105 projets, est-ce qu'il serait possible d'avoir le dépôt de ces 105 projets?

M. QUENNEVILLE : Nous avons déposé le bilan, je pense, tantôt, et vous avez tous les projets dedans.

M. LESSARD: D'accord! Oui, c'est vrai.

Dans le secteur des pêcheries, d'abord une question qui, actuellement, se discute très fortement, comme le sait le ministre, dans la région. C'est la question de l'Institut de marine.

M. QUENNEVILLE: Les pêcheries...

M. LESSARD: Je pense qu'il y a quand ; même...

M. QUENNEVILLE: II n'y a aucun rapport.

M. LESSARD: Non? Mais, en fait, à quelle place puis-je en discuter? M. le Président, dans les pêcheries, il faut former des capitaines, et l'Institut de marine, c'est-à-dire...

M. QUENNEVILLE: Les marins ne sont pas nécessairement des pêcheurs.

M. HARVEY (Jonquière): C'est une question de finance. Cela coûte bien cher. Discutez de cela...

M. LESSARD: Non, je ne comprends pas la réponse du ministre. C'est que, en vertu des règlements du gouvernement fédéral, il n'y a personne qui peut conduire soit un chalutier ou un bateau de cabotage sans qu'il ait son permis de pilotage.

M. QUENNEVILLE: On ne voit pas le lien entre votre Institut de marine...

M. LESSARD: Je vais essayer de vous faire le lien. Le ministre est responsable du développement de la région de l'Est du Québec. Je pense que, dans cette optique, il y a un certain nombre d'organismes culturels comme l'Université du Québec, le Centre océanographique, qu'on a constitués...

M. QUENNEVILLE: C'est justement pour cela.

M. LESSARD: ... et aussi l'Institut de marine. Or cet institut est en train de se déplacer vers Québec. Voici la question que je veux poser au ministre. Ce dernier participait l'autre jour à une réunion en présence du ministre de l'Education, M. Cloutier. Le ministre a bien dit devant les gens de la chambre de commerce, à ce moment, on me corrigera en vertu de l'article 96 s'il y a lieu...

M. QUENNEVILLE: Oui.

M. LESSARD: ... qu'il allait continuer, quant à lui, de favoriser le fait qu'on laisse l'Institut de marine dans la région, au nom du développement régional et qu'il allait intervenir, comme c'est sa responsabilité, auprès du ministre de l'Education pour faire en sorte que, dans les mesures des possibilités à la fois financières et selon les décrets aussi avec les enseignants, l'Institut de marine demeure à Rimouski.

Mais ce que je trouve curieux, c'est que le ministre étant responsable du développement régional de l'ODEQ, ne se soit pas préoccupé dès 1971 de cette question.

M. QUENNEVILLE: Je regrette infiniment, mais je n'étais pas, à ce moment, ministre responsable. Je dois dire aussi qu'il manque un petit point dans ce que rapporte le député de Saguenay quant à ma déclaration lors de cette réunion. J'ai dit naturellement que tout ce qui favorisait la relance économique de la région, forcément, comme ministre responsable de l'ODEQ, j'appuyais ces projets.

Il reste quand même qu'il faut tenir compte des contraintes, et comme vous le savez, je pense bien que la décision dépend beaucoup plus du ministère de l'Education. Le fait est d'ailleurs que ces gens ont demandé de rencontrer le ministre de l'Education. On m'a demandé d'assister à la rencontre. Je l'ai fait avec énormément de plaisir. Or, c'est antérieur...

M. LESSARD: Je suis d'accord que cette décision relève du ministre de l'Education, mais je suis aussi d'accord pour dire que comme ministre responsable de l'ODEQ, donc responsable du développement régional de cette région, il a quand même une responsabilité assez particulière.

Je sais que, quand le ministre est venu chez nous, on pensait que c'était Dieu le père qui arrivait avec tous les projets...

M. QUENNEVILLE: On est tombé.

M. LESSARD: ... et qui connaissait tous les dossiers de chacun des comtés du...

M. QUENNEVILLE: Je me suis occupé à corriger cette impression.

M. LESSARD: En passant, quand le ministre responsable de l'ODEQ vient chez moi, comme d'autres ministres le font, j'aimerais bien que je puisse être présent à ces réunions...

M. QUENNEVILLE : Certainement.

M. LESSARD: ... comme d'ailleurs vous le faites lorsqu'il s'agit de la région...

M. QUENNEVILLE: J'aviserai sûrement les autorités des municipalités en question de vous inviter. Cela me fera plaisir de vous rencontrer, enfin.

M. LESSARD: Ce que le ministre des Affaires sociales fait bien souvent, ce que font

d'autres ministres, le ministre responsable de la qualité de l'environnement. Ils avisent le député en question pour qu'il se rende à la réunion.

M. QUENNEVILLE: D'accord. Maintenant, je pense, que pour les réunions auxquelles j'ai participé, il y a toujours eu des organismes qui envoyaient des invitations.

M. LESSARD: Oui.

M. QUENNEVILLE: Je ne sais pas si le député de Saguenay a reçu les invitations. Chose certaine, c'est que, malheureusement, dans toutes ces rencontres sur la question de la planification et du développement, je n'ai pas rencontré le député. Je le regrette amèrement, remarquez bien.

M. LESSARD: Disons que c'est venu assez vite. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion de le faire remarquer dans la région, je pense que ce n'est pas seulement le ministre responsable de la région de l'Est du Québec qui peut promouvoir des dossiers. Je pense bien que, si on parle au ministre du fameux problème de l'hôpital Baie-Comeau-Hauterive, les gens étaient tout surpris de constater que le ministre n'était pas au courant de cela. Je leur ai dit: Ecoutez, il n'est quand même pas ministre de 25 comtés du Québec ou de 15 comtés du Québec. Il est quand même important que, dans ces discussions, le député soit présent et j'invite le ministre...

M. QUENNEVILLE: Je suis absolument d'accord. Je me suis même inquiété, M. le Président, à un moment donné de l'absence du député de Saguenay à ces réunions. J'ai demandé au maire de corriger cette situation, de façon qu'on puisse profiter des lumières que le député de Saguenay pourrait apporter.

M. LESSARD: Et ce qui m'a obligé par la suite à rencontrer chacun des organismes que le ministre avait rencontrés pour discuter exactement des mêmes problèmes.

M. QUENNEVILLE: Bien oui.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): II est 12 h 35, est-ce que les membres de la commission continuent à discuter jusqu'à 1 heure?

M. LESSARD: D'accord, on suspend les travaux.

M. QUENNEVILLE: Je n'ai aucune objection.

M. LESSARD: Nous reviendrons cet après-midi.

M. QUENNEVILLE: D'accord!

M. LESSARD: Je pense que je peux assurer le ministre qu'en une heure, qu'à six heures nous aurons terminé concernant l'ODEQ. Je ne m'engage pas, M. le Président. D'accord?

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): La commission suspend ses travaux jusqu'à cet après-midi après la période des questions.

(Suspension de la séance à 12 h 35)

Reprise de la séance à 16 h 15

M. PICARD (président de la commission permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales): A l'ordre, s'il vous plaît !

La commission continue cet après-midi l'étude des crédits du Conseil exécutif. Nous en étions au programme 4, élément 4: Entente "Est du Québec". Le député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, nous étions à discuter des pêcheries, concernant, justement, cet élément de programme, est-ce que le ministre pourrait nous dire quelles sont les mesures qui ont été prises pour donner des crédits supplémentaires aux pêcheurs, de l'aide à la commercialisation, la création de coopératives? L'un des reproches qu'on fait, justement, dans la région de l'Est du Québec, je pense, c'est que beaucoup de mesures, qui ont été prises par le gouvernement, ont favorisé certaines grosses entreprises et que, malheureusement, cela n'a pas été le cas pour les petites entreprises. Est-ce que le ministre pourrait nous dire, dans le cadre du programme de l'ODEQ, en collaboration avec le ministère de l'Industrie et du Commerce — nous parlons toujours, je pense, des pêcheries commerciales — quelles sont les mesures qui ont été prises pour aider à la formation de coopératives, aider le petit pêcheur?

M. QUENNEVILLE: Jusqu'ici, l'ODEQ s'est impliqué surtout dans les gros équipements de pêche, surtout au programme du complexe industriel de pêche à Rivière-au-Renard, en particulier, Cap-aux-Meules, Paspébiac et Grande-Rivière. Naturellement, au sujet des pêcheries, les projets s'adressent surtout aux équipages de terre, au complexe industriel, comme je l'ai dit tantôt, à la formation des produits de la pêche et des subventions surtout pour la construction des navires devant servir aux pêcheries.

Quant à l'aide aux petites entreprises, normalement, ceci relève des budgets réguliers du ministère de l'Industrie et du Commerce.

M. LESSARD: Pour l'achat de bateaux.

M. QUENNEVILLE: Pour l'achat de bateaux, les subventions pour la construction des navires, cela relève de l'ODEQ.

M. LESSARD: M. le Président, dans le secteur des mines, l'un des reproches qu'on faisait justement dans le manifeste de Matane et qui est un peu repris dans le journal Le Soleil, vendredi, par le journaliste Louis Tardif qui dit que depuis le Manifeste de Matane, il n'y a pas eu tellement de modifications ou d'appui aux réclamations que ces gens faisaient, mais en tout cas, au niveau du secteur des mines, l'un des reproches qu'on faisait est qu'on concentrait l'ensemble des investissements dans la construction de routes. C'était la route des monts McGerrigle. Je constate justement que cette année encore, dans ce secteur, nous prévoyons un montant de $1 million qui servira à terminer la route de ceinture des monts McGerrigle et à poursuivre le programme d'exploration minière. Je parle de $1 million et de construction de la route. Je voudrais savoir quelle sera la somme allouée à la construction de la route et pour la terminer, de ce montant de $1 million?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, dans ce domaine des mines, en fait, sur le budget de $1 million que l'on retrouve dans le secteur des mines, il y a $150,000 qui sont affectés à la construction des routes des monts McGerrigle, et le reste...

Il y a seulement $150,000 sur le $1 million qui servent à la construction de la route des monts McGerrigle, le reste servant à la recherche.

On peut déposer le document, ici, les cinq projets en question.

M. LESSARD: Le ministre conviendra que, malgré le fait qu'il n'y ait que $150,000 qui soient prévus pour la construction de la route des monts McGerrigle, quand nous discutons d'exploration minière, l'exploration pétrolière, parce que dans cette région on tente passablement de faire de l'exploration pétrolière et que le creusage d'un puits peut aller jusqu'à coûter $3 millions, ces montants sont absolument insatisfaisants pour permettre la découverte de gisements miniers ou pétroliers importants.

M. QUENNEVILLE: Je conviens, M. le Président... Naturellement, je pense qu'il y a une chose bien importante, c'est qu'il faut quand même se rendre aux mines et cela prend des routes. C'est la raison pour laquelle effectivement on termine cette année avec les $150,000 les routes des monts McGerrigle. Pour ce qui est de la prospection même, il faut penser que le secteur privé dépense aussi des sommes énormes au point de vue de la prospection et naturellement ceci permet justement au gouvernement d'orienter, à ce moment-là, son budget autrement.

Je suis prêt à déposer le document, ici.

M. LESSARD: Est-ce qu'il y a une certaine contribution? Est-ce que c'est le ministère des Richesses naturelles qui est maître d'oeuvre dans ce secteur? Il s'agit donc, à ce moment-là, de recherches du ministère comme cela se fait partout, dans toutes les autres régions du Québec.

M. QUENNEVILLE: Le ministère des Richesses naturelles, qui est maître d'oeuvre dans ce secteur, fait naturellement des relevés, des recherches aussi et soumet des rapports à la disposition de l'entreprise privée qui poursuit nécessairement l'exploitation.

M. LESSARD: Dans ce million de dollars, ne sont pas comprises les recherches qui peuvent être faites par SOQUEM et par SOQUIP?

M. QUENNEVILLE: Non, ce n'est pas compris dans ce montant.

M. LESSARD: Si vous me permettez, M. le Président, je voudrais simplement y revenir, comme d'ailleurs tout va bien et qu'il y a une excellente collaboration entre le ministre et le député de Saguenay; on reprendra les débats devant la télévision.

M. QUENNEVILLE: C'est cela. Je ne sais pas si vous allez vouloir encore !

M. LESSARD: Je suis encore complètement d'accord pour le faire.

M. QUENNEVILLE: Si c'est bon pour le développement de l'Est, je suis d'accord.

M. LESSARD: Oui, d'ailleurs, comme je l'ai toujours dit, M. le Président, quand il s'agit du développement régional, à la fois de la Côte-Nord et de l'Est du Québec, il n'y a pas de distinction.

M. QUENNEVILLE: Si vous voulez des leçons de là-bas, vous retournerez sur la Côte-Nord.

M. LESSARD: II n'y a pas de distinction de partis, on est simplement d'accord pour essayer de déconcentrer et décentraliser le développement de la région de Montréal vers les autres régions du Québec. Ce n'est peut-être pas, malheureusement, l'opinion du directeur général de l'OPDQ, mais en tout cas, on en discutera.

Je reviendrais à la pêche, c'est une question qui va être assez courte: Un montant de $10 millions a été consacré par le gouvernement fédéral pour un programme de consolidation de la pêche dans l'entente Canada-Québec, en particulier la relocalisation des pêcheurs, où était prévu ce montant de $10 millions. Il semble que ces $10 millions n'auraient pas été dépensés dans la région de l'Est du Québec. Est-ce que le ministre pourrait nous donner des informations? On sait d'ailleurs que plusieurs députés fédéraux ont protesté à ce sujet.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, il y a déjà dans ce programme $3 millions de dépensés sur les $10 millions et les $7 autres millions sont déjà engagés. Il y a passablement de travaux qui vont être exécutés cette année et dans les parcs industriels de pêche, ainsi que l'an prochain aussi; d'ailleurs, jusqu'en 1977.

M. LESSARD: Le ministre est donc prêt à me confirmer que ces $10 millions qui étaient prévus pour la relocalisation des pêcheurs vont être dépensés dans la région?

M. QUENNEVILLE: Oui. M. le Président, pour rassurer davantage le député de Saguenay, je peux lui dire que le gouvernement fédéral a même consenti, le 2 mai, $10 millions supplémentaires. Je pense bien que non seulement nous dépenserons les $10 millions, mais il y aura $10 autres millions qui seront dépensés au point de vue de l'infrastructure au niveau de ces parcs de pêche.

M. LESSARD: Pour une confirmation supplémentaire de la part du ministre, je voudrais savoir s'il a pris connaissance de déclarations de députés fédéraux dont M. Cyr qui avait expliqué que les quelque $10 millions devant être investis — ceci est daté du 18 février 1974 — dans les programmes de consolidation de l'industrie de la pêche dans la région-plan, impliquant en partie la relocalisation des pêcheurs — certains sont, en effet, déjà déménagés vers les points de débarquement et les parcs industriels, entre parenthèses — auraient été répartis comme suit: $5 millions en Colombie-Britannique; $4.3 millions à Terre-Neuve; $4.1 millions en Nouvelle-Ecosse; $2.1 millions au Nouveau-Brunswick et seulement $1.9 million au Québec au lieu des $10 millions prévus. Je cite, semble-t-il, des informations d'un député fédéral, M. Alexandre Cyr, le député de Gaspé aux Communes. Elles font suite d'ailleurs à d'autres déclarations d'un député que vous connaissez sûrement qui a été peut-être à l'origine ou qui a participé à l'élaboration, comme le ministre le disait, du Manifeste de Matane, mais qui est quand même un député libéral, M. Pierre DeBané. Ces mêmes déclarations avaient été faites à la fois par M. DeBané et par M. Alexandre Cyr.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense bien que le député de Saguenay a parfaitement raison si l'on tient compte de la date de la déclaration du député en question. Je viens justement de dire que c'est le 2 mai, effectivement, que le gouvernement fédéral a convenu d'investir $10 millions pour le même programme sur le territoire de l'ODEQ, qui s'additionneront aux $10 millions déjà dans l'entente.

M. LESSARD: Le ministre m'assure donc que les $10 millions dont parlait...

M. QUENNEVILLE: Au mois de février.

M. LESSARD: ... justement M. Alexandre Cyr et M. Pierre DeBané, députés fédéraux, vont être dépensés dans la région de l'Est du Québec au lieu d'être répartis comme, le 18 février 1974, les deux députés en question l'ont précisé. De plus, le ministre m'assure qu'un montant de $10 millions supplémentaire va être accordé pour la relocalisation des pêcheurs dans la région de l'Est du Québec.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je

répète naturellement que ces $10 millions vont servir pour la mise en place des équipements dans les parcs industriels. Je suis très heureux de rassurer une fois de plus le député de Saguenay.

M. LESSARD: Bon, cela me rassure, M. le Président.

M. QUENNEVILLE: Le voilà rassuré.

M. LESSARD: J'en suis fort heureux.

Le secteur du tourisme. On a discuté du secteur des mines et encore là, je fais la remarque au ministre, je pense qu'il en est fort conscient. Il s'agit d'une région assez riche au point de vue minier et je pense que ce montant est assez minime par rapport aux véritables besoins que l'on pourrait avoir.

M. QUENNEVILLE: Je ferais remarquer, M. le Président, au député de Saguenay, que nous comptons justement sur le concours de l'entreprise privée. Nous sommes bien conscients, nécessairement, que ce sont des montants insuffisants, mais ce sont quand même des sommes qui incitent, si vous voulez, l'entreprise privée à l'action.

M. LESSARD: Justement, j'inviterais le ministre responsable de l'ODEQ à intervenir auprès du ministre responsable des Richesses naturelles pour inciter les compagnies privées à faire de l'exploration chez nous. En particulier dans le pétrole, on constate que l'on a à peu près 2 p.c. des explorations qui se font chez nous au Québec, par rapport à 98 p.c. qui se font dans les autres régions. Malheureusement, je pense justement que nous n'avons pas, par rapport aux profits que les compagnies privées font ici, chez nous, au Québec, le pourcentage d'investissements dans l'exploration tant minière que pétrolière. Dans ce sens, j'invite donc simplement le ministre...

M. QUENNEVILLE: M. le Président, d'abord je remercie le député de Saguenay de sa suggestion, mais j'ai bien l'impression que le ministre des Richesses naturelles n'a pas besoin de mes conseils pour être sensibilisé à ce problème. Je crois que depuis longtemps il en est conscient et, naturellement, c'est un programme qui demande un certain temps avant d'être établi. Il s'agit du rattrapage.

M. LESSARD: Mais cela prend du temps; de toute façon, on a discuté de cela au ministère des Richesses naturelles.

Le secteur touristique. J'aimerais d'abord savoir, du ministre responsable de l'ODEQ, combien a coûté l'expropriation du parc Forillon et s'il y a encore des problèmes qui sont en appel actuellement en ce qui concerne le parc Forillon. Combien actuellement a coûté l'expropriation du parc Forillon?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, naturellement le gouvernement provincial par l'entente était responsable du rachat des terres et le montant s'est élevé à $6,800,000; il y a $2,600,000 qui viennent de l'entente et $4,200,000 qui sont pris à même les budgets réguliers.

M. LESSARD: Vous me dites $6,800,000 et $2,600,000 qui sont pris...

M. QUENNEVILLE: $2,600,000 à même l'entente et $4,200,000 qui proviennent des budgets réguliers.

M. LESSARD: Autrement dit, les $4,200,000, c'est le ministère des Travaux publics. Ils proviennent, à ce moment-là, de l'expropriation du ministère des Travaux publics. Est-ce que le ministre pourrait me dire combien il peut rester de cas en suspens actuellement, étant donné que certaines personnes sont allées en cour d'Appel à ce sujet?

M. QUENNEVILLE: II y a environ 20 à 30 cas encore en suspens devant la régie.

M. LESSARD: Ils seraient estimés, au point de vue...

M. QUENNEVILLE: C'est assez difficile naturellement, à ce moment-là...

M. LESSARD: D'accord, mais selon les normes et les critères que vous aviez établis?

M. QUENNEVILLE: Ils sont compris dans les $6.8 millions.

M. LESSARD: Ils sont compris dans les $6.8 millions.

Depuis l'expropriation du parc Forillon par le gouvernement provincial, parce que l'on sait qu'en vertu de l'entente sur les parcs nationaux, le gouvernement provincial est responsable de l'expropriation du parc et transmet ensuite au gouvernement fédéral ce parc...

Est-ce que je pourrais savoir — c'est un bail emphytéotique de 99 ans — combien d'argent a été dépensé depuis et combien d'argent prévoit-on être dépensé par le gouvernement fédéral? On me dit justement que plus de $7.5 millions ont servi à poursuivre les programmes suivants et je pense, $5.6 millions partageables pour la mise en place d'infrastructures touristiques et d'équipements de loisir. Mais, je m'excuse, en ce qui concerne le parc Forillon, combien d'argent a été dépensé et investi par le gouvernement fédéral suite, justement, à l'expropriation du gouvernement provincial?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, le montant à dépenser par le fédéral dans l'aménagement, d'ici 1976, correspond à $7,100,000.

M. LESSARD: L'expropriation a donc coûté

$6,800,000 et les montants dépensés par le gouvernement fédéral seront autour de $7 millions.

M. QUENNEVILLE: Exactement.

M. le Président, je ferais remarquer au député de Saguenay qu'il est possible que cela dépasse naturellement les prévisions et que cela se rende à tout près de $10 millions.

M LESSARD: J'ai bien hâte de pouvoir discuter, justement, d'un plan d'aménagement de la région de la Côte-Nord.

M. QUENNEVILLE: Cela viendra.

M. LESSARD: Dans les recommandations du BAEQ, Bureau d'aménagement de l'Est du Québec, en ce qui concerne le développement touristique, on proposait justement un accent très prioritaire sur le développement touristique dans cette région, d'en faire, en tout cas, un secteur prioritaire.

Et on proposait, en plus de l'aménagement du parc Forillon, l'aménagement de deux autres parcs, soit le parc du Bic et le parc Chic-Chocs. Alors, est-ce que le ministre pourrait nous dire où nous en sommes en ce qui concerne l'expropriation des personnes dans le parc du Bic, puis où nous en sommes en ce qui concerne l'application de ces recommandations concernant le parc Chic-Chocs?

M. QUENNEVILLE: II n'y a pas d'expropriation pour le moment. Il y a eu une entente entre les propriétaires qui sont à l'intérieur d'un territoire prévu pour l'implantation du parc du Bic et, pour dix ans, ces gens demeureront en place. Dans dix ans, on prendra juste les endroits effectivement où on a réellement besoin du terrain pour procéder. Il y a cette année, $1,265,000 prévus au budget pour le parc du Bic.

M. LESSARD: D'abord, je souligne que je suis heureux de constater, justement, qu'on a permis à ces gens de demeurer dix ans et même je pense que c'est possiblement renouvelable, selon l'expérience qu'on aura dans ce domaine. J'en ai discuté au ministère du Tourisme, mais je pense que c'est quand même bon que je souligne au ministre responsable de l'ODEQ. Je pense bien que la Joconde, c'est bien beau, mais on ne la regarde pas longtemps. Ce qui importe, c'est qu'à un moment donné, dans un parc fédéral... Le gouvernement fédéral l'a fait pour la Nouvelle-Ecosse; je me demande pourquoi justement, quand on fait un parc comme celui-là, on ne permettrait pas à des gens assez caractéristiques de rester à l'intérieur du parc. Cela amène une certaine humanité à l'intérieur de ce parc-là, contrairement à ce qu'on a fait malheureusement en ce qui concerne l'île Bonaventure où on a exproprié les cinq ou six cultivateurs qui étaient là et qui étaient bien amusants, d'ailleurs. On les a expropriés et on a perdu tout le caractère humain.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je suis parfaitement convaincu, que c'est une nouvelle philosophie que le ministère entend suivre dans ses transactions avec les gens qui sont situés à l'intérieur des parcs. Je peux vous dire ici que moi-même J'avais fait au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche cette proposition de laisser les gens au moins pour dix ans. Je suis très heureux de voir qu'il y a eu des suites concrètes et heureuses à cette suggestion.

M. LESSARD: A ce sujet-là, est-ce que le ministre responsable de l'ODEQ a eu à être consulté concernant l'expropriation des pécheurs au sud de la route 6 à Percé?

M. QUENNEVILLE: II n'y a pas eu d'expropriation.

M. LESSARD: C'est-à-dire qu'on a suspendu, pour le moment. C'est un peu le même problème; c'est que le jour où on exproprie...

M. QUENNEVILLE: II n'y a pas d'expropriation effectivement. Il y aura regroupement, à ce moment-là, des pêcheurs vers des ports bien spécifiques.

M. LESSARD: Je suis d'accord avec le ministre. On a suspendu les procédures, mais pendant un certain temps, on pensait à exproprier. C'est toujours dans cette même philosophie, c'est que le jour où...

M. QUENNEVILLE: Exactement, je pense que c'est la même philosophie qui s'applique à ce moment-là.

M. LESSARD: ... justement on enlève ces gens qui sont des gens assez caractéristiques, dans la région de l'Est du Québec, comme j'en ai dans la région de la basse Côte-Nord, on perd tout intérêt humain. Dans le développement touristique, je pense que l'intérêt humain est fort important.

M. QUENNEVILLE: Nous avons aussi fait à Percé une entente au sujet de la Coopérative des pêcheurs. Nous avons exproprié cette coopérative et, les pêcheurs vont continuer, quand même, à l'administrer et ils sont très heureux de la solution que nous avons apportée.

M. LESSARD: Cela va bien.

M. QUENNEVILLE: C'est extraordinaire.

M. LESSARD: Non, c'est parce qu'il y a une nouvelle philosophie qui est en train...

M. MALOUIN: Un bon gouvernement.

M. LESSARD: Non, non, c'est qu'il a fallu quand même des discussions importantes. Il a fallu que les gens se battent justement pour faire reconnaître ce principe. Je suis d'accord

qu'il faut que les gens se battent, à un moment donné. Pendant un certains temps, on devait exproprier justement ces gens. Je pense que c'est tout à fait normal qu'avant de passer à l'expropriation on consulte, puisqu'on informe la population de ce qu'on veut faire avec l'expropriation en question.

De toute façon ça allait bien, on ne faisait pas de politicaillerie, alors continuons comme ça, M. le Président. Soyez assurés, j'en informe les députés libéraux, que si vous avez des questions à poser concernant... Malheureusement, je remarque l'absence de députés de l'Est du Québec qui devraient être ici pour discuter de l'ODEQ, le député de Matane, le député de... Ils devraient être présents. Je suis d'accord: la langue aussi, je pourrais y aller, est très importante, mais c'est important de discuter de ces...

De toute façon, il semble qu'il y a un député régional qui représente l'Est du Québec et que ce soit le député de Saguenay.

M. QUENNEVILLE: II y a toujours le principe que la gestion des affaires gaspésiennes appartient aux Gaspésiens.

M. LESSARD: Oui, oui, je suis bien d'accord...

M. QUENNEVILLE: C'est seulement pour aller prendre des leçons que vous allez là.

M. LESSARD: Je suis bien d'accord, M. le Président, mais quelquefois je m'aperçois qu'ils ont besoin d'aide pour faire valoir leurs revendications auprès du...

LE PRESIDENT (M. Picard): A l'ordre! S'il vous plaît, messieurs, voulez-vous revenir au programme no 4.

M. LESSARD: Très bien, M. le Président, je me soumets à votre décision...

M. MALOUIN: ... à leur gouvernement puis ils ont reçu une bonne réponse.

M.LESSARD: Allez-y, si vous avez des questions à poser, il n'y a pas de problème, moi, ça me permet de me reposer.

Continuons, M. le Président, à discuter de choses sérieuses. Concernant le parc Chip-Chocs, est-ce qu'il y a des montants qui sont prévus cette année?

M. QUENNEVILLE: C'est terminé, les travaux en ce qui regarde le parc Chip-Chocs. On a dépensé $346,000, et c'est le budget régulier qui continue les efforts de l'ODEQ.

M. LESSARD: Maintenant, quel est le délai prévu, à la fois pour le parc du Bic et le parc Chip-Chocs? Quels sont les délais prévus, quand est-ce qu'on espère que ça va être terminé?

M. QUENNEVILLE: Le parc Chip-Chocs est complètement terminé.

M. LESSARD: Complètement terminé.

M. QUENNEVILLE: Oui, le parc du Bic, normalement, devrait être terminé d'ici 1976, et le montant prévu est de $2 millions dans le cadre de l'entente, à part le budget régulier.

M. LESSARD: Maintenant, ça va être un parc provincial. Actuellement, le lien entre les Iles-de-la-Madeleine et le Québec se fait par l'île du Prince-Edouard. Est-ce qu'au niveau de l'ODEQ il y a une étude particulière pour tenter de faire un lien direct entre...

M. QUENNEVILLE: Le transport maritime?

M. LESSARD: Oui, oui, c'est le transport maritime. D'accord, je reviendrai là-dessus. Très bien, c'est parce qu'en fait ça peut être dans le cadre du tourisme aussi, mais j'aime autant qu'on en discute au niveau du transport maritime. A ce moment-là, on pourra discuter.

M. QUENNEVILLE: II n'y a pas de projet actuellement, dans ce sens-là, dans les cadres du budget de l'entente.

M. LESSARD: Maintenant, il n'y a aucune étude qui est faite par l'ODEQ pour tenter de créer un lien direct entre la Gaspésie et les Iles-de-la-Madeleine?

M. QUENNEVILLE: Vous parlez toujours du transport maritime?

M. LESSARD: Disons que, puisque j'ai posé la question, je ne reviendrai pas à ce moment-là sur...

M. QUENNEVILLE: Vous voulez parler de liaison?

M. LESSARD: De lien direct entre le Québec et les Iles-de-la-Madeleine.

M. QUENNEVILLE: Par avion ou par bateau?

M. LESSARD: Par bateau. Très bien, je comprends la question du ministre, transport maritime.

M. QUENNEVILLE: Du transport maritime, il n'y en a pas actuellement. Il n'y a pas de projet dans ce sens-là.

M. LESSARD: Pas de projet dans ce sens. Maintenant, il n'y a aucune étude qui est faite sur la création d'un lien direct?

M. QUENNEVILLE: II n'y a pas eu d'étude non plus dans ce sens.

M. LESSARD: Et vous n'avez pas l'intention d'entreprendre des études dans ce sens? Parce que c'est quand même important,...

M. QUENNEVILLE: Oui, d'accord.

M. LESSARD: ... pour le député Louis-Philippe Lacroix, les Iles-de-la-Madeleine, la population. Si les gens sont obligés de passer par l'île du Prince-Edouard bien souvent un certain nombre de touristes demeurent à l'île du Prince-Edouard et ne se rendent pas aux Iles-de-la-Madeleine. Si on avait un lien direct, ça permettrait peut-être d'avoir beaucoup plus de touristes dans cette région?

M. QUENNEVILLE: Pour servir les mêmes fins, M. le Président, nous avons pensé justement établir une communication aérienne entre les Iles-de-la-Madeleine et le territoire pour les passagers et aussi les marchandises.

M. LESSARD: Je remarque un député de l'Est du Québec; vous êtes bienvenu. Dans le secteur des affaires, voici une autre des revendications de la population de l'Est du Québec. Mais avant, dans le secteur touristique, étant donné que le ministre du Tourisme a annoncé un certain programme concernant la construction de marinas, est-ce que ça couvre la région de l'Est du Québec?

M. QUENNEVILLE: II n'y en a pas de prévu dans l'Est, M. le Président.

M. LESSARD: II n'y en a pas de prévu dans l'Est. Est-ce que le ministre pourrait me dire pourquoi?

M. QUENNEVILLE: Pourquoi il n'y en a pas? Actuellement, il n'y en a pas de prévu. Notre rôle en est un de coordination. Nous attendons les suggestions de chaque ministère.

M. LESSARD: Là, je n'aime pas la réponse du ministre responsable de l'ODEQ quand il me dit "que c'est un rôle de coordination. Le ministre vient de me dire que vous n'avez qu'un rôle de coordination; je pense que c'est plus que cela, c'est un rôle d'initiation aussi parce qu'en fait c'est l'Office de développement de l'Est du Québec. Vous devez justement, comme responsable de cette direction, intervenir pour faire tous les efforts nécessaires afin de permettre que cette région pilote puisse profiter du développement.

Je comprends que le ministre, probablement, n'a pas voulu le dire dans ce sens-là.

M. QUENNEVILLE: Justement, M. le Président.

M. LESSARD: Si on a établi un plan de développement de cette région-là, c'est parce qu'on voulait en arriver à des résultats positifs, à des résultats précis. Non seulement le ministre responsable de l'ODEQ doit-il être un coordon-nateur des montants mais il doit être un initiateur dans la planification de cette région-là.

M. QUENNEVILLE: Justement. Le rôle, effectivement, c'est de présider aux grandes orientations à l'intérieur du plan de développement. La raison pour laquelle on a suggéré un changement dans la question des marinas, c'est que nous avons voulu orienter l'action du ministère du Tourisme beaocup plus du côté de la mise en place des réseaux de stations et d'étapes touristiques. Les stations, vous avez Mont-Saint-Pierre, Gaspé, Percé, Carleton; les étapes sont les Iles-de-la-Madeleine, Bonaventure, Amqui, Sain-te-Anne-des-Monts, Cap-Chat, Matane, Rimouski, Trois-Pistoles, Rivière-du-Loup, Notre-Dame-du-Portage, Saint-Patrice et Cabano.

Nous avons pensé, naturellement, qu'il était beaucoup plus important d'établir ce réseau d'étapes et de stations avec des équipements que de procéder à l'implantation d'une ou deux marinas dans l'Est du Québec.

M. LESSARD: II reste que dans le plan du BAEQ il était prévu l'aménagement de marinas. Encore là, cela doit s'intégrer dans un plan global au niveau du ministère du Tourisme. On ne commence pas à faire des marinas dans la région de Percé parce que les gens ne viennent pas de l'Atlantique; ils viennent surtout de la rivière Richelieu et du lac Champlain.

M. QUENNEVILLE: Je pense bien, comme le disait tanôt le député de Saguenay, que c'est en même temps le rôle de l'ODEQ de voir à l'orientation et d'établir certaines priorités. C'est la raison pour laquelle je disais tantôt qu'on avait pensé, nous, qu'il était beaucoup plus important d'établir des stations et des étapes touristiques bien équipées que procéder, en somme, à l'établissement de marinas qui s'adressent à une clientèle limitée et privilégiée aussi.

LE PRESIDENT (M. Picard): Le député de Gaspé.

M. FORTIER: Dans la ville de Gaspé, je pense bien que les officiers de l'ODEQ sont sensibilisés au projet, il est question de construire un nouveau pont.

Or, en construisant un nouveau pont, il y a un nouveau tracé de route qui va se faire sur les bords de la rive de la baie de Gaspé. En ce faisant, je sais que le ministre est au courant, de même que les fonctionnaires du ministère, qu'il y a là des quais qui servent pour des bateaux qui font, par exemple de la pêche touristique. Je veux savoir, de la part du ministre et des gens du ministère, si on a prévu que ces quais vont disparaître et qu'il va y avoir, pas une marina — je pense bien que le mot "marina", c'est difficile à prononcer — mais un réaménagement portuaire.

S'il y a un réaménagement portuaire à cause d'une décision ministérielle, moi, je me trouve un peu mal à l'aise pour expliquer aux gens qui profitent de ce port, ce que le ministère ou l'ODEQ va conseiller aux différents ministères de faire pour remplacer ce port de mer. Ces quais servent tout de même à des fins touristiques. D'ailleurs, je dois vous faire remarquer que Gaspé est tout près du parc Forillon et, dans un avenir très prochain, il devra y avoir tout de même une liaison maritime entre le parc Forillon et Gaspé. Je voudrais suggérer à l'ODEQ et au ministre concerné qu'ils pensent que, dans un avenir prochain, il faudra faire un réaménagement portuaire pour les voiliers qui vont se rendre à Gaspé de même que pour les bateaux de voyages touristiques qui, même actuellement, amènent beaucoup de gens à la pêche touristique et exploitent un excellent commerce.

Mais si on prend les ponts pour construire une route, va-t-on remplacer ces quais ou faire ce qu'on appelle soit un port de plaisance ou encore un réaménagement portuaire? Là vous êtes pris dans un dilemme. Vous enlevez quelque chose qui appartient à des gens qui se servent de ces quais pour faire un commerce touristique; si on les enlève, il faut les remplacer. Quelle va être l'intention de l'Office de développement de l'Est du Québec, de l'OPDQ, afin de voir à remplacer cet aménagement portuaire?

M. QUENNEVILLE: Pour répondre à ce problème complexe, qui a soulevé passablement de réactions de part et d'autre, il y avait deux solutions apportées par le ministère des Transports: la construction d'un pont-levis ou la construction d'un pont régulier. Naturellement, si le pont-levis est passablement plus dispendieux, selon les données qu'on nous a fait parvenir, le projet atteindrait les $6 millions; à ce moment-là, nous ne serions pas en mesure de procéder à un aménagement en aval. S'il s'agit de la construction d'un pont régulier, il y aura, à ce moment-là, sûrement des fonds disponibles nous permettant cet aménagement en aval. C'est à l'étude, pour le moment, et nous attendons la décision du gouvernement fédéral au sujet des eaux naviguables.

M. FORTIER: Pour renseigner la population de Gaspé, est-ce qu'on peut prévoir qu'il va y avoir une décision de prise prochainement à ce sujet-là?

M. QUENNEVILLE: On attend, très prochainement, la décision de la part du ministère des Transports du Québec.

M. FORTIER: Je comprends bien le ministre et je suis très heureux de la réponse, d'ailleurs. S'il y a un pont, qui n'est pas un pont-levis, avec un dégagement vertical de 21 pieds à haute marée alors que les quais en amont ne pourront plus servir aux voiliers, vous allez orienter votre politique et voir à avoir les budgets nécessaires pour construire en aval un aménagement portuaire.

M. QUENNEVILLE: Un aménagement, exactement. Sans que ce soit une marina.

M. FORTIER: On peut l'appeler port de plaisance, si vous voulez.

M. QUENNEVILLE: Disons qu'on va dire un aménagement; c'est tellement plus générique.

M. FORTIER: L'important... Cela passe mieux.

M. QUENNEVILLE: On est moins contraint par le mot "aménagement".

M. FORTIER: Je remercie le ministre. Très bien.

M. LESSARD: M. le Président, je souligne le fait qu'il est fort difficile de faire un plan d'aménagement régional quand ça ne s'inscrit pas dans un plan global de l'ensemble du Québec. Nous vivons justement le cas concernant les marinas, cela doit s'inscrire à l'intérieur d'un plan général. Mais avant de continuer le secteur des affaires, est-ce que, comme cela s'est fait dans d'autres régions du Québec, la région de Montréal, la région du Lac-Saint-Jean, la région de Québec avec la Commission Pluram-LaHaye, je pense, et pour donner suite au rapport du BAEQ, il y a eu des études sur l'affectation du sol? Par exemple, déterminer les secteurs touristiques, les coins touristiques qu'on devra développer, déterminer à quel endroit on va développer le secteur culturel? Cela rejoint toujours les centres agro-forestiers. Plutôt que d'avoir des politiques — puis je rejoins l'arrêté en conseil concernant l'aide aux migrants — de déménagement, peut-être qu'il faudrait penser à une politique d'aménagement et aussi aménagement des villes. Je sais que dans la région de la Côte-Nord, on m'informait qu'à la Quebec North Shore, à peu près 60 p.c. des ouvriers forestiers venaient de la rive sud. On a déterminé des centres d'accueil, si je me rappelle bien; si je me trompe, c'est de mémoire, le ministre me corrigera. En fait, pour quelqu'un qui déménageait dans tel endroit précis, un centre d'accueil, en particulier Sainte-Anne-des-Monts, pouvait recevoir une subvention du gouvernement.

Mais malheureusement, quand on fait du déménagement comme ça, il faut aussi en même temps prévoir que ces gens vont être capables de trouver de l'emploi dans cette région. Je pense que, malheureusement, cela n'a pas été le cas partout. Je me rappelle que certains organismes de la région, chez nous, avaient demandé, je ne sais pas si c'est au ministre responsable de

l'ODEQ ou ailleurs, de déterminer la région de Baie-Comeau comme un centre d'accueil, étant donné qu'il y avait quand même 40 p.c. ou 50 p. c. des ouvriers forestiers qui travaillaient pour Québec North Shore et qui, étant donné le coût de construction d'une maison à Baie-Comeau, par rapport à l'est du Québec, ne peuvent se permettre de déménager, même s'ils ont des coûts de transport assez considérables. Dans ce plan, ma question est bien générale, est-ce qu'on a un aménagement de l'espace, aménagement touristique, aménagement des parcs? On a précisé un peu, là, il y a eu une étude démographique du déplacement des populations. Au point de vue des centres de services, Rimouski c'est bien beau, on a fait une capitale administrative: Rimouski, mais Rimouski est presque la seule ville qui attire un peu de monde dans le coin. Dans la région de Carleton, la région de Gaspé...

M. QUENNEVILLE: Mont-Joli.

M. LESSARD: D'accord. Est-ce qu'on a décidé, de façon rationnelle, à la suite d'une étude, l'implantation de centres d'accueil dans ces quatre ou cinq villes qui seraient d'une certaine importance et qui pourraient attirer la population?

M. QUENNEVILLE: Pour répondre d'abord à la question du zonage touristique, tout est en marche actuellement. On sait que le ministère de l'Agriculture a procédé au zonage des terres agricoles, le ministère des Terres et Forêts, la même chose, et enfin, le ministère de l'Agriculture a terminé le zonage agricole. Pour le zonage touristique, c'est en voie d'être terminé.

Il reste la proposition de centres d'accueil. C'est déjà décidé au niveau des budgets de l'entente, et il y aura des centres d'accueil dans tous les centres de services; chacun des 17 comprendra un centre d'accueil.

LE PRESIDENT (M. Picard): Est-ce que vous avez un commentaire sur la réponse?

M. LESSARD: C'est parce que je parlais au premier ministre, M. le Président, et je n'ai pas entendu la réponse. Maintenant, on me dit que vous avez parlé de planification agricole, planification touristique.

M. QUENNEVILLE: C'est fini au point de vue agricole, il reste le tourisme.

M. LESSARD: Au point de vue de la planification routière, par exemple, est-ce que...

M. QUENNEVILLE: C'est la même chose.

M. LESSARD: Alors le secteur des affaires; le tourisme ça va. En parlant du secteur des affaires, Cabano, comment ça va?

M. QUENNEVILLE: D'après les nouvelles que nous avons de la part de M. Saulnier en particulier, nous devrions avoir des développements assez intéressants dans à peu près deux semaines. Je pense que ça répond passablement à votre question.

M. LESSARD: Cela répond, mais il y a un mois le ministre de l'Industrie et du Commerce m'avait parlé de trois semaines.

M. QUENNEVILLE: S'il vous a parlé de ça il y a une semaine, il reste deux semaines.

M. LESSARD: Non, il y a un mois.

M. QUENNEVILLE: Le dossier est dans la phase finale. En fait, on peut dire deux ou trois semaines, c'est une possibilité que ce soit trois semaines aussi, mais ça peut être aussi bien deux semaines et peut-être dix jours.

On a autant hâte que tout le monde là-bas.

M. LESSARD: Enfin, ce que je veux dire c'est qu'on n'attendra pas les prochaines élections pour encore discuter de la question de Cabano.

M. QUENNEVILLE: Pas du tout.

M. LESSARD: Qu'on dise au moins à la population...

M. QUENNEVILLE: On n'a même pas besoin de discuter de ces choses pour gagner des élections.

M. LESSARD: Qu'on dise au moins à la population: Ecoutez, c'est oui ou c'est non.

Etant donné qu'il y a des élections fédérales, concernant le port de Gros Cacouna est-ce que le ministre a des informations?

M. QUENNEVILLE: Pour ce qui regarde le port de Gros Cacouna, vous savez qu'il y a des études qui sont en marche. Veuillez croire que, nous aussi, nous trouvons que c'est plutôt long d'attendre, mais il faut attendre que ces études soient terminées.

M. LESSARD: Est-ce que les études sont faites par le gouvernement fédéral ou par le gouvernement provincial?

M. QUENNEVILLE: Les études sont faites par le ministère des Richesses naturelles.

M. LESSARD : Par le ministère des Richesses naturelles.

Est-ce que le ministre peut prévoir un délai précis?

M. QUENNEVILLE: Normalement, ça devrait être au mois de juillet, ce qui est le mois prochain.

M. LESSARD: Est-ce que vous pensez que

cette étude va être rendue publique par le ministère des Richesses naturelles, ou est-ce que vous comme ministre responsable de l'ODEQ...

LE PRESIDENT (M. Picard): Excusez-moi, messieurs, mais est-ce que cette question de l'implantation d'un tel port ne relève pas des Richesses naturelles?

M. LESSARD: M. le Président, simplement sur le point de règlement, je suis d'accord avec vous, mais le ministre responsable de l'ODEQ, dans la région de l'Est du Québec, est la responsable de toute la coordination des investissements qui peuvent se faire dans cette région.

LE PRESIDENT (M. Picard): Je suis d'accord.

M. LESSARD: De telle façon...

LE PRESIDENT (M. Picard): Je suis d'accord avec le député de Saguenay mais là vous parlez du contenu, ce qui revient au secteur des Richesses naturelles. Si vous parlez d'un cas spécifique.

M. LESSARD: A ce moment-là, on va arrêter de parler de l'ensemble de l'ODEQ. M. le Président, c'est plus que ça l'ODEQ. Je ne voudrais pas qu'on recommence la discussion générale, mais quant à l'ODEQ le ministère demeure le maître d'oeuvre de certaines décisions qui relèvent du ministère. C'est le cas de Gros Cacouna. Cependant, comme l'ODEQ est responsable de la coordination, il importe que le ministre responsable de l'ODEQ soit informé de ces négociations, de ces études. En fait, je ne demande pas au ministre ce qu'il y a à l'intérieur de l'étude, mais je lui demande si dans cette étude il y a eu consultation, s'il est informé concernant ce problème. Si vous rendez une décision comme celle-là, M. le Président, je ne puis plus parler du secteur des mines dans la région de l'Est du Québec, je ne suis plus capable de parler de l'agriculture.

LE PRESIDENT (M. Picard): C'est parce que là vous parlez d'un cas bien précis.

A ce moment-là, cela se trouve à être le contenu d'un programme sectoriel, en l'occurrence les richesses naturelles.

M. LESSARD: Non. Ce matin, nous avons parlé du projet JAL. Le projet JAL, M. le Président, c'est un projet qui...

LE PRESIDENT (M. Heard): De toute façon, moi, personnellement, je n'ai pas d'objection si le ministre veut donner les réponses, mais il n'est pas obligé de le faire.

M. MALOUIN: II n'y a plus d'autres questions, d'ailleurs.

M. LESSARD: J'en ai. Pourquoi? Vous êtes déjà fatigué?

M. MALOUIN: Non, non. Il ne semble pas y avoir d'autres questions.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, est-ce que je peux répondre à la question?

LE PRESIDENT (M. Picard): Vous êtes absolument libre de répondre.

M. LESSARD: M. le Président, je vous ferais remarquer que nous n'avons pas quorum. Encore pour montrer ma bonne collaboration, M. le Président, je n'en appellerai pas à l'article 146.

LE PRESIDENT (M. Picard): Je ferais remarquer au député de Saguenay que l'honorable premier ministre a été appelé d'urgence au salon rouge. C'est pour cela que nous n'avons pas quorum.

M. LESSARD: D'accord. Mais, pour montrer ma bonne collaboration, M. le Président, je ne ferai pas appel à l'article 146.

M. le Président, de toute façon, vous comprenez. Le ministre, oui.

M. QUENNEVILLE: Je pense bien que je ne peux sûrement pas engager d'avance le ministre des Richesses naturelles à rendre publics les rapports qui ont été confiés à deux firmes. Lui-même décidera, à ce moment-là, du bien-fondé de publier ou non ces rapports.

M. LESSARD: J'accepte, à ce moment-là, la réponse du ministre responsable de l'ODEQ. Le ministre responsable de l'ODEQ est quand même dans le dossier, il suit le dossier. C'est, d'ailleurs, sa responsabilité.

Dans le secteur des affaires, le ministre nous informe que $2.2 millions seront investis dans l'autodéveloppement des entreprises de la région, des activités complémentaires à l'implantation des entreprises. Cela rejoint justement SAGEQ sur laquelle je me pose certaines questions, mais sur laquelle je ne veux pas revenir. Mais, justement, le manifeste de Matane qui a été, M. le Président, appuyé, je pense, dans un avis, par le CRD de la région...

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je regrette infiniment, mais je pense que c'est une affirmation gratuite. Il se trouve que j'ai lu, moi aussi, l'avis du CRD sur le Manifeste de Matane. Je ne suis pas d'avis que le CRD appuie le manifeste de Matane. Il appuie le principe du manifeste sans appuyer nécessairement le contenu. Je pense que c'est fort différent. Il y a des nuances, d'ailleurs, quant au contenu.

M. LESSARD: Oui, d'accord. C'est qu'à un moment donné, M. le Président, le CRD affirme qu'il y a certainement quelques erreurs de

chiffres, puisque cela n'a pas été préparé par des experts, mais que, dans l'ensemble, il est d'accord sur les retards considérables que cela a causés, il est d'accord, globalement, sur l'ensemble des revendications.

M. QUENNEVILLE: II serait, M. le Président, assez important de souligner qu'à partir de chiffres qui ne sont pas exacts les conclusions risquent fort de ne pas être exactes.

M. LESSARD: En tout cas, disons qu'on ne fera pas une chicane. En ce qui me concerne, je pense bien avoir assez bien lu le rapport et globalement, tel que le ministre responsable de l'ODEQ le dit d'ailleurs, l'avis du CRD dit bien que cela n'a pas été présenté par des spécialistes, mais que, cependant, dans l'ensemble, les revendications des Gaspésiens, en ce qui concerne le manifeste de Matane, sont légitimes.

De toute façon, M. le Président, ce que je voudrais savoir de la part du ministre...

M. QUENNEVILLE: Vous me permettrez de rectifier. Je pense que c'est aussi une affirmation un petit peu gratuite. L'avis du CRD sur le manifeste de Matane se termine en disant: "II n'en demeure pas moins que ce manifeste, malgré ses faiblesses, fait la preuve que la population perçoit les grandes dimensions du développement de la région et de ce secteur et qu'il fait la preuve qu'en plus de comprendre la population veut s'impliquer dans son développement et y participer activement".

Je pense qu'il n'y a pas d'autres conclusions à tirer de l'avis du CRD sur le manifeste de Matane.

M. LESSARD: On a formé une société de gestion de l'Est du Québec. Le problème, c'est celui d'à peu près toutes les régions du Québec, mais cela rejoint, comme je vais le préciser, le problème du développement de l'Est du Québec. Selon les lois qui sont faites tant par le gouvernement provincial que par le gouvernement fédéral pour subventionner l'entreprise en particulier, par exemple la loi de la SDI, l'investissement minimum est de $150,000; on a très peu de lois pour aider la petite entreprise comme telle.

Les gens qui ont préparé le manifeste de Matane, qui ont été appuyés, le 3 juin 1973, par plus de 2,000 personnes qui étaient là présentes réclamaient un genre de fonds industriel pour la région. Est-ce que l'ODEQ a étudié cette possibilité de la création d'un fonds industriel et est-ce qu'on a l'intention de le mettre en application?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, nous sommes absolument conscients du problème. Il est difficile d'aider la petite entreprise dans un territoire marginal. La SAGEQ, justement, devait parer, jusqu'à un certain point, à cette lacune. Vous comprendrez facilement que le seul but, actuellement, que la SAGEQ peut viser, c'est de rationaliser les secteurs pour les rendre concurrentiels.

On sait qu'il s'agit d'une zone marginale et la petite industrie, sûrement, bénéficierait énormément de l'action de la SAGEQ.

M. LESSARD: Mais la SAGEQ ne pourrait pas subventionner. La SAGEQ, en fait, son objectif, c'est...

M. QUENNEVILLE: Elle peut participer aux entreprises, la petite entreprise aussi.

M. LESSARD: Je pense que cela ne répond pas au besoin d'avoir un genre de fonds industriel qui va financer les petits entrepreneurs.

M. QUENNEVILLE: La SAGEQ répond, M. le Président, à une partie des besoins. On est absolument d'accord qu'elle ne répond pas à tous les besoins.

M. LESSARD: Simplement comme exemple, c'est donc facile pour une compagnie comme Rayonier Québec de venir chercher $40 millions à un moment donné...

M. QUENNEVILLE: Là, on n'est plus dans l'ODEQ, je crois.

M. LESSARD: Simplement un exemple dans le projet...

M. QUENNEVILLE: Des zones spéciales.

M. LESSARD: ... des zones spéciales. Mais ce que je veux dire, c'est que bien souvent, pour le petit entrepreneur, c'est la première tranche de $25,000 ou de $50,000 qui est dure à avoir. Alors, je pense que de ce côté — cela pourrait s'appliquer à l'ensemble du Québec — il y a un besoin, si on veut développer l'entrepre-neurship, d'avoir des lois, un genre de crédit, comme on parlait, à un moment, du crédit hôtelier. Actuellement, vous donnez une subvention de $1,500 pour la construction des...

M. QUENNEVILLE: Des unités d'hébergement.

M.LESSARD: ...unités d'hébergement. Alors, comme on parlait du crédit forestier, je pense qu'il devrait y avoir un crédit industriel pour aider, en plus de SAGEQ.

Qu'on se comprenne bien, on discute des problèmes généraux, mais que le ministre soit bien informé que, lorsqu'il arrivera à la ventilation des crédits, cela ne m'intéressera pas de discuter de la couleur du chapeau du chauffeur.

M. QUENNEVILLE: Cela dépend de la couleur, peut-être!

M. LESSARD: Oui. Au niveau des affaires,

je pense que c'est à ce programme que nous devons discuter de l'infrastructure du traver-sier-rail. Quand je regarde le bilan 1968-1974, développement des affaires, secteur 1.6 de l'ODEQ, je constate qu'aucun montant n'est prévu dans les crédits.

M. QUENNEVILLE: C'est un projet qui est arrivé après la budgétisation des montants, et à même la réserve que l'ODEQ a continuellement, nous avons puisé un montant de $1 million devant servir aux infrastructures pour le traver-sier-rail à Matane.

Une somme de $1 million est prévue pour cette année pour les infrastructures à Matane.

M. LESSARD: Les infrastructures, la part de l'ODEQ, la part du gouvernement provincial.

M. QUENNEVILLE: Oui.

M. LESSARD: Maintenant, est-ce que ce traversier-rail...

M. QUENNEVILLE: Sur le côté sud.

M. LESSARD: Le côté sud, le côté nord? Ce seront toujours les deux points.

M. QUENNEVILLE: Dans les budgets réguliers du ministère des Transports, $3 millions sont prévus pour l'aménagement du côté de la rive nord.

M. LESSARD: Baie-Comeau et Godbout.

M. QUENNEVILLE: Baie-Comeau seulement, pour le moment.

Ce n'est pas le brise-glaces, c'est le traversier-rail.

M. LESSARD: D'accord, on parlera du brise-glaces tantôt.

Maintenant, d'après les informations que peut avoir le ministre, étant donné qu'il y a eu formation d'une compagnie privée pour administrer ce traversiers-rail, compagnie qui s'inquiète considérablement, suite à une décision de la compagnie Canadien Pacifique, est-ce que le ministre peut nous assurer que le problème ne reviendra plus à la surface et qu'il est en grande partie réglé?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, nous avons toutes les raisons au monde de croire que ce problème ne reviendra pas à la surface. Je pense que nous avons posé des gestes assez concrets, assez positifs, pour expliquer la position du Québec face à ce problème.

M. LESSARD: Concernant le traversier-rail, et le lien entre Matane, Godbout, Baie-Trinité concernant le brise-glaces, est-ce qu'à la suite de la suggestion que j'avais faite en 1971, suggestion qui a été reprise dernièrement par le député de Rimouski, M. Saint-Hilaire, le minis- tre responsable de l'ODEQ, étant donné les expériences fort malheureuses que nous avons vécues dans la région concernant les systèmes de traversiers, aurait l'intention de recommander que ce soit administré par le gouvernement plutôt que par une entreprise privée, quitte après cela à payer les pots cassés?

M. QUENNEVILLE: C'est une hypothèse qui a été envisagée mais nous attendons la décision du ministère des Transports à ce sujet-là. Elle est valable. Nous sommes d'accord sur cela.

M. LESSARD: Toujours en respectant le rapport Lalonde, la Loi sur les transports.

M. QUENNEVILLE: Suivant la recommandation.

M. LESSARD: En fait, il y a une logique, on ne fait pas administrer les routes par l'entreprise privée, et il me semble que ce sont là des routes secondaires fort importantes. Je ne pense pas que l'administration d'une entreprise comme celle-là coûte énormément cher, d'autant plus qu'en particulier le Père-Nouvel a coûté passablement cher au gouvernement. Alors il me semble que quant à payer les pots cassés on devra envisager la possibilité...

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense bien que le ministère des Transports est bien conscient de ce facteur et en tiendra compte dans sa décision.

M. LESSARD: En 1973-74, $344,600 étaient prévus pour la création de parcs industriels, en 1974-75, je ne vois pas de montant. Est-ce que...?

M. QUENNEVILLE: Cette année, M. le Président, un montant de $900,000 est prévu. L'an prochain, $255,400. C'est pour celui de Rimouski, Rivière-du-Loup. Je peux vous dire que celui de Matane est déjà complété et que celui de Mont-Joli est en voie d'être terminé.

M. LESSARD: En relation avec le schéma d'aménagement du BAEQ et toute la politique du transport qui est prévue pour la région de l'est du Québec, est-ce que le ministre responsable de l'ODEQ, en collaboration avec le ministre des Transports, a fait des représentations auprès du Canadien national ou de la Commission des transports pour qu'elle intervienne auprès du Canadien national pour prolonger son réseau ferroviaire vers le nord de la Gaspésie?

M. QUENNEVILLE: II n'en a pas été question du tout.

M. LESSARD: Aucunement. M. FORTIER: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Picard): Le député de Gaspé.

M. FORTIER: ...est-ce que je pourrais demander au ministre, vu que le ministère est là pour conseiller les autres ministères et parfois obtenir les budgets nécessaires, s'il y aurait possibilité d'inclure dans un programme spécial la réfection de la route entre Murdochville et Gaspé?

Je pose la question parce que vous savez que c'est une industrie des plus importantes qu' il y ait dans l'Est du Québec, qui emploie plusieurs ouvriers, plusieurs camionneurs et qui aide même à développer le port de Gaspé parce qu'il y a du minerai de cuivre qui vient de Terre-Neuve et qui est transporté à Murdochville. Comme cette route a été faite pour un camionnage qui était beaucoup moins lourd et que, maintenant, c'est un camionnage très lourd, les routes ne peuvent pas suffire pour tout ce camionnage. Est-ce qu'il y aurait possibilité de demander au ministère concerné d'inclure un programme spécial et un budget spécial pour la réfection de cette route entre Murdochville et Gaspé?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je dois dire au député de Gaspé que je suis très conscient de ce problème. J'ai effectivement rencontré des représentants de cette région de Murdochville et on leur a expliqué, à ce moment-là, qu'à la suite d'une entente au niveau des deux paliers de gouvernement, soit le fédéral et le provincial, il était entendu que les budgets de l'entente devaient être affectés exclusivement aux routes 6 et 10. Je peux vous dire qu'à la suite de cette rencontre avec les représentants de Murdochville et je pense qu'il y en avait de Chandler...

M. FORTIER: De Chandler, oui.

M. QUENNEVILLE: ...nous avons fait des pressions auprès du ministère des Transports pour que la construction de cette route soit considérée prioritaire à même les budgets réguliers du ministère.

M. FORTIER: Mais il ne faut pas se tromper, Chandler, ce n'est pas le même programme.

M. QUENNEVILLE: C'est la route...

M. FORTIER: Je parle de la route entre Murdochville et la ville de Gaspé.

M. QUENNEVILLE: C'est ça.

M. FORTIER: Parce que c'est là que le commerce, l'industrie...

M. QUENNEVILLE: Nous avons fait cette recommandation. Je ne me rappelle pas le numéro de la route, mais je peux vous dire...

M. FORTIER: C'est 198. Mais je crois qu'il faudrait tout de même faire un effort parce que je me rappelle — je suis content de voir que le ministre des Affaires intergouvernementales est ici — que quand la compagnie a décidé d'investir une somme de $100 millions pour de l'aménagement nouveau à son usine de Murdochville, il avait été entendu, à ce moment-là, par l'ancien ministre responsable de l'Office de développement de l'Est du Québec, qu'une somme de $5 millions serait investie pour réparer cette route.

Maintenant, je comprends que cette somme n'a pas été retenue par l'entente Canada-Québec, mais je demande, pour les ouvriers, pour les camionneurs et pour les compagnies qui font tout de même un effort considérable, qu'un budget spécial soit accordé pour refaire cette route.

M. LEVESQUE: Comme, M. le Président, j'ai été mis en cause par ma présence, je n'ai aucune objection à me rappeler, avec le député de Gaspé, qu'il avait certainement été question de cette route, lors des investissements en question. Mais, je suis bien conscient également que l'entente spécifie les routes 6 et 10. Je me demande cependant de quelle façon on a réussi à créer une route 6-A.

M. QUENNEVILLE: Un accident de parcours.

M. LEVESQUE: Parce que je ne sais pas jusqu'à quel point on pourrait considérer que c'est de la route 6-B que parle député de Gaspé.

M. QUENNEVILLE: D'accord, M. le Président. Encore une fois, nous voudrions tellement donner suite à la demande du député mais, malheureusement, tous les budgets sont engagés et il est absolument impossible de reconsidérer, même à l'intérieur des budgets de l'entente, un budget spécial. Il faudra définitivement — et nous sommes prêts, encore une fois, à revenir à la charge auprès du ministère des Transports — inscrire cette demande dans les priorités, mais à même les budgets réguliers.

LE PRESIDENT (M. Picard): Le député de Saguenay.

M. LESSARD: Maintenant, au niveau du transport — et ce seront les dernières questions, M. le Président — le fameux traversier brise-glaces, quand va-t-il entrer en service? D'abord, combien va-t-il coûter? Un bout de temps c'était $6 millions; là, il est rendu à $11 millions, à près de $11 millions.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, pour répondre à la question du député de Saguenay, il est absolument exact que le coût sera de $11 millions et il est aussi exact que le bateau sera en service en décembre 1974.

M. LESSARD: En ce qui concerne le traver-sier-rail...

M. QUENNEVILLE: A moins naturellement qu'il y ait des grèves ou des choses comme ça qui retardent.

M. LESSARD: ... est-ce que...

M. QUENNEVILLE: Mars 1975.

M. LESSARD: Mars 1975.

M. QUENNEVILLE: Le 31 mars 1975.

M. LESSARD: M. le Président, quant à moi, j'ai terminé en ce qui concerne l'Office de développement de l'Est du Québec. Le ministre, à un moment donné, nous a informé qu'il acceptait les recommandations du CRD, et je pense que l'une de ces recommandations fort importantes pour le CRD concerne la création d'une société mixte agricole-forestière. J'espère justement que le ministre responsable de l'ODEQ va en tenir compte et que cette société sera créée.

En ce qui me concerne, M. le Président, nous avons reçu des informations fort importantes, en particulier sur la structure. On sait que les gens commençaient à être passablement mélangés avec cela, et non seulement les gens mais même les députés. Le dépôt de la déclaration du ministre concernant cette structure me paraît donc fort important. La discussion nous permet de voir l'élaboration du plan; elle va nous permettre aussi, en même temps, de vérifier l'année prochaine, puisque nous n'avons pas encore entendu dire que le ministre responsable de l'ODEQ serait remplacé, quoique certaines rumeurs ont circulé à ce sujet.

Alors, je serais prêt à passer...

M. LEVESQUE: Ce serait une grande déception dans la région.

M. LESSARD: M. le Président, je pense que nous serions prêts à passer au Conseil exécutif. Cependant, le premier ministre a indiqué tout à l'heure...

M. LEVESQUE: Voici, à moins que... oui, peut-être que le ministre...

M. QUENNEVILLE: M. le Président, d'abord, je voudrais remercier les représentants de l'Opposition qui ont posé des questions pertinentes. Leurs observations, à mon avis, très importantes et susceptibles d'être retenues, en fait, ont mis en relief toute l'action de l'ODEQ, la même action qui, parfois, dans certains journaux, est passablement critiquée.

Je remercie donc les membres de l'Opposition pour leurs questions. Je remercie aussi mes collaborateurs de l'ODEQ qui sont ici, qui m'ont aidé de leur appui, et je vous remercie,

M. le Président, de la façon sereine avec laquelle vous avez conduit les débats.

LE PRESIDENT (M. Picard): Doit-on comprendre que l'élément 4 du programme 4 est adopté?

M. LESSARD: Adopté, M. le Président.

M. LEVESQUE: M. le Président, en attendant le premier ministre avec qui je viens de communiquer, et qui, je pense, a communiqué également avec le député de Saguenay à son arrivée, on me permettra de relever certains propos. Le député de Saguenay va écouter. Cela va le reposer parce qu'il n'a pas arrêté beaucoup depuis le matin; on va lui donner une chance.

M. LESSARD: On est certain d'engager une aitre discussion.

M. LEVESQUE: C'est ça. Disons que nous avons écouté attentivement les propos formulés par le député de Saguenay, hier, suite à l'exposé d'ouverture que nous avons fait au début de la discussion des crédits de l'Office de planification et de développement du Québec.

Nous formulerons d'abord, dans une première partie, des remarques à l'égard des propos préliminaires contenus dans son exposé et, dans une deuxième partie, nous commenterons les cinq principaux points de ses propos.

Dans ses remarques préliminaires, le député de Saguenay constate essentiellement trois faits: premièrement, que l'Etat est responsable de l'évolution économique, qu'il lui appartient de lutter contre les crises et le sous-emploi, d'orienter, de formuler et de coordonner les efforts en vue de l'expansion du progrès économique et social; en second lieu, les ressources tant économiques qu'humaines ne sont pas illimitées, il importe que ces ressources soient utilisées de la façon la plus rationnelle possible et de la façon la plus efficace possible pour l'ensemble des citoyens du Québec et aussi pour l'ensemble de l'aménagement du territoire québécois; et, troisièmement, le député de Saguenay constate qu'il y a au Québec une modification des mentalités, la démocratie traditionnelle, c'est-à-dire la délégation par le peuple de sa souveraineté politique entre les mains des représentants élus, à tout le moins à tous les quatre ans, est non seulement — c'est lui qui le dit, je ne voudrais pas prendre ses paroles — un style de démocratie inférieure, mais il ne peut plus être accepté par une population qui est de plus en plus éveillée et qui a compris que toute décision de l'Etat a des conséquences néfastes ou heureuses à la fois sur sa vie présente comme sur sa vie future. Fin de la citation du député de Saguenay.

Donc, si on me le permet, on peut examiner les trois points soulevés par le député. D'abord, il est vrai de dire que l'Etat est responsable de l'évolution de l'économie; il doit en effet voir à

la régularité des activités économiques, mais ceci ne signifie pas que l'Etat doit être l'unique agent de développement. L'Etat; influence par des législations, des réglementations, la fiscalité, les aides ou l'incitation financière à l'industrie, mais il n'est pas le seul à agir au palier du développement économique. De multiples agents, entreprises, corps intermédiaires, municipalités, agissent sur le développement économique et l'Etat doit se préoccuper dès lors de préciser les objectifs d'ensemble, de façon que ces différents agents puissent agir de concert pour un développement économique harmonieux. Cette démarche se fait en général par la planification du développement et par l'aménagement du territoire.

En second lieu, sur le second point, il est vrai de dire que les ressources au Québec, tant économiques qu'humaines, ne sont pas illimitées. Il importe de les utiliser de façon rationnelle. C'est ce qu'on peut appeler la détermination des priorités d'intervention, et, à cet égard, il s'agit du second volet de la planification qui consiste à proposer des priorités en fonction de stratégies, d'objectifs, donc qui obligent à faire des choix. Il ne s'agit pas là de quelque chose de nouveau, comme l'admettra bien volontiers mon ami d'en face.

Le troisième point concerne la modification des mentalités qui me paraît beaucoup plus fondamentale. Lorsque le député parle d'une démocratie inférieure à l'intérieur d'un système de délégation, par le peuple, de la souveraineté politique entre les mains des représentants élus et que, par la suite, il donne des exemples tels que Cabano. Sacré-Coeur, Marsoui, Mont-Brun et ainsi de suite, je pense qu'il mêle les choses. En effet, d'une part il existe, dans notre société, un système démocratique avec des gens élus tous les quatre ans, délégués par un peuple souverain. Ces députés, une fois élus, ont le mandat de légiférer, de réglementer en fonction des besoins perçus auprès de la population. Il ne s'agit pas d'un style de démocratie inférieure; il s'agit de la véritable démocratie. Par ailleurs, lorsque la population, par différents mouvements, désire participer à des actions de développement, il s'agit là tout simplement de l'expression d'une volonté qui doit s'insérer à l'intérieur de structures de développement selon les règles du jeu qui existent et que nous ne pouvons changer brutalement sans mettre en cause toute la structure de production du Québec.

Donc, d'un côté, il s'agit d'un système politique démocratique et d'un système parlementaire, ce qui est une chose et, de l'autre côté, il s'agit de la participation de groupes de la population à des actions de développement, ce qui est une autre chose. Il convient de bien distinguer ces deux points, il me semble, pour amorcer les autres éléments de discussion.

Quant aux cinq principaux points soulevés par le député, d'abord la discussion des objectifs de développement économique. Les éléments soumis par le député concernant la discussion sur ce thème se partagent en deux; d'une part, s'appuyant savamment sur une citation de M. Mendès-France, il affirme qu'une poignée d'hommes...

M. LESSARD: Boulanger-Canada.

M. LEVESQUE: ... fussent-ils riches de toutes les sciences économiques du monde ne peut décider de tout. D'autre part, les objectifs globaux de la planification doivent être déterminés par des techniciens qui possèdent un certain nombre d'informations que la population ne possède pas dans la plupart des cas et, en conséquence, les rapports qu'ils produisent dont, par exemple, le livre jaune, devraient dans les prochains mois être discutés par l'ensemble de la population du Québec et, en particulier, par les élus de la population, c'est-à-dire les députés.

Sur le premier point, nous sommes d'accord et les techniciens aussi le sont pour que les orientations de développement et d'aménagement du territoire ne peuvent être le fruit seulement de prévisions économiques et d'analyses statistiques.

Il s'agit évidemment de refléter, dans ces objectifs, un certain nombre de valeurs correspondant au système de valeurs d'une population et c'est là qu'il nous faut introduire la participation de la population, selon un certain déroulement. Ceci s'applique au document appelé livre jaune de l'OPDQ.

Quel est ce déroulement et ses différentes phases? Il y a plusieurs phases dans l'élaboration d'un document-synthèse sur le développement économique et l'aménagement du territoire. Dans un premier temps, les techniciens préparent la matière statistique nécessaire pour faire l'analyse d'une situation donnée. Ils dégagent, eux, à la lumière de ces analyses, une première série d'objectifs à atteindre. Dans un deuxième temps, ce document est soumis aux autorités gouvernementales pour en faire une première analyse.

M. LESSARD: Est-ce que le ministre n'aurait pas une copie de sa déclaration?

M. LEVESQUE: Non, parce que c'est une improvisation dictée par des notes, j'allais dire volumineuses, mais disons très...

M. CHARRON: C'est toujours permis en vertu des règlements.

M. LEVESQUE: ... remplies de l'inspiration du moment, mais également qui ont une force de persuasion presque instantanée.

Dans un premier temps, ce document est soumis aux autorités gouvernementales, comme je le disais, pour en faire une première analyse. C'est ce qui a été fait dans le cas du livre jaune puisque le document a été analysé par le groupe

ministériel de planification et de développement qui comprend six ministres. Dans un troisième temps, ce document — version préliminaire toujours, comme l'a d'ailleurs souligné le député, pour lui rendre justice — fait l'objet de ce que nous appelons une consultation technique. Il convient ici de distinguer entre une consultation dite technique et une consultation dite populaire. La consultation technique fait appel à des techniciens qui examinent surtout la qualité technique des dossiers; la consultation populaire fait surtout appel à des groupes représentant la population pour voir si les objectifs proposés correspondent aux valeurs existantes et voulues dans la population.

Dans un quatrième temps, les documents préliminaires du type livre jaune, une fois soumis à la consultation technique, c'est-à-dire au Conseil de la planification et de développement du Québec, aux ministères, aux organismes gouvernementaux, sont repris pour une deuxième rédaction de façon à faire ensuite cette consultation dite populaire.

Comme on le voit, il s'agit là d'un processus de planification qui fait appel à différents moments à des techniciens, à des groupes représentant la population et enfin à l'instance décisionnelle gouvernementale. Dans tous les pays du monde où il se fait de la planification dans le système occidental, c'est en général le processus qui est suivi et, dans tous les cas, l'élaboration des dossiers de synthèse, de développement et d'aménagement commande un déroulement des opérations sur une période de deux ou trois ans avant l'approbation de ses lignes directrices comme cadre d'orientation des activités de développement et d'aménagement du territoire. Je pense qu'il n'est pas juste de parler, d'un côté, des techniciens et, de l'autre côté, de la population. Comme vous pouvez le constater, il s'agit d'un processus un peu plus complexe que celui que décrivait le député.

Passons maintenant au document jaune de l'OPDQ et à l'entente-cadre de développement. Dans son exposé, le député a semblé voir une contradiction entre le rapport préliminaire que constitue le document jaune et la signature de l'entente-cadre qui intègre un certain nombre de lignes directrices présentées dans ce document.

Je pense qu'il n'a pas très bien lu le texte de l'entente-cadre de développement. Lorsque nous avons signé l'entente-cadre, nous avions en main la version préliminaire du document sur l'aménagement du territoire et des développements économiques. Nous devions préciser, en annexe à cette entente, les éléments de stratégie qui étaient les nôtres à cette époque. Nous ne pouvions pas nous permettre de signer un an ou deux après les autres provinces, ce qui entraînerait des pertes d'argent assez substantielles. Nous avons donc inclus, en annexe, des éléments de stratégie qui étaient les nôtres et nous avons inséré, à l'intérieur de l'entente, le mécanisme suivant: à chaque année, les ministres responsables de l'administration de cette entende se rencontrent avec leurs conjoints, avec leurs principaux collaborateurs pour revoir le déroulement de cette entente de même que pour évaluer les éléments de stratégie qui y sont intégrés, de façon à les modifier, si cela est nécessaire, à la fois en fonction de la conjoncture et à la fois en fonction des analyses plus profondes qui pourraient être faites. On ne doit pas arrêter tous les trains parce que l'on a décidé de planifier le système ferroviaire, pas plus que l'on doit arrêter tous les bateaux d'aller pêcher parce que l'on a décidé de planifier le secteur des pêches.

Si on me le permet, je continuerai à discuter du discours d'ouverture...

M. LESSARD: Très intéressant.

M. LEVESQUE: ... du député de Saguenay à une prochaine réunion et, comme il a été entendu et convenu, nous pourrions entendre immédiatement le premier ministre et étudier les crédits qui lui sont proprement affectés.

M. LESSARD: Est-ce que le ministre ne pourrait pas me remettre...

M. LEVESQUE: Ce que j'ai dit jusqu'à maintenant?

M. LESSARD: ... une déclaration...

M. LEVESQUE: Certainement.

M. LESSARD: ... et ce que vous allez dire.

M. LEVESQUE: Non, parce qu'il faut que je corrige le reste.

M. BOURASSA: M. le Président, c'est juste que j'ai seulement suggéré de faire cela immédiatement de manière que l'Opposition puisse prendre connaissance, et les membres de la commission, d'une déclaration que je voulais faire.

LE PRESIDENT (M. Picard): Si l'honorable premier ministre me le permet, nous procéderons maintenant à l'étude du programme 3: Organismes-conseils auprès du premier ministre et du Conseil exécutif.

L'honorable premier ministre.

Organismes-conseils auprès du premier ministre et du Conseil exécutif

M. BOURASSA: M. le Président, je pense qu'il convient, au début de l'étude de mes crédits, de la présidence de l'Exécutif et du Conseil exécutif, de faire part d'une déclaration. Il y a dix ou douze jours, j'avais dit que, aussitôt que possible, je ferais une déclaration sur la question des conflits d'intérêts et que je

déposerais le rapport de même que les directives. J'ai pensé de faire cela un peu avant six heures de manière que l'Opposition et les membres de la commission puissent examiner les documents. Ils pourront poser des questions, s'ils le veulent, à la reprise de la discussion, à 20 h 15.

M. LESSARD: Est-ce que je peux comprendre que le premier ministre pourrait déposer un document?

M. BOURASSA: Oui, d'accord. Je vais seulement le résumer d'abord.

M. LESSARD: D'accord.

M. BOURASSA: J'ai, dans plusieurs déclarations antérieures, affirmé que le principe de l'indépendance absolue des membres du Conseil exécutif doit continuer d'être respecté au Québec pour permettre aux ministres d'assumer leurs responsabilités en toute liberté.

Le respect de ce principe est, en effet, à la base du maintien de la confiance du citoyen, dans la valeur de nos institutions démocratiques et j'y ai toujours accordé personnellement la plus grande importance. Le Québec doit, lui aussi, participer à l'effort entrepris récemment par l'ensemble des gouvernements au Canada en vue de traduire désormais ce principe en des normes et directives claires précises et facilement accessibles au public.

Je viens d'informer les membres du conseil des ministres des mesures qui les concernent et une copie de ces directives leur sera remise d'ici quelques heures.

Pour ce qui a trait aux lois existantes, les ministres doivent, bien entendu, continuer de se conformer aux exigences des lois existantes en ce qui concerne le principe de l'indépendance des membres du Conseil exécutif.

Pour ce qui a trait aux activités professionnelles, commerciales ou d'affaires, les ministres doivent mettre fin pour toute la durée de leur mandat aux activités professionnelles, commerciales et d'affaires qui pourraient les empêcher de consacrer le temps qu'il faut à leurs fonctions.

Pour ce qui a trait aux sociétés privées, les ministres doivent faire en sorte que les compagnies privées dans lesquelles eux-mêmes et leur famille immédiate, c'est-à-dire leur épouse et leurs enfants mineurs, ont des actions directement ou par personne ou compagnie interposée, s'abstiennent de faire des marchés avec l'Etat, c'est-à-dire de fournir des biens ou des services au gouvernement du Québec et ses ministères, ou de recevoir de l'argent par voie d'emprunts ou de subventions du gouvernement du Québec et de ses ministères.

Les ministres doivent également voir à ce que de telles sociétés privées s'abstiennent de conclure des marchés avec les agences du gouvernement, à moins qu'ils n'aient qu'une proportion minime du capital-actions de ces sociétés, soit de l'ordre de 5 p.c. des actions émises, ou que le montant total de ces marchés se situe dans une proportion semblable du chiffre d'affaires pour l'exercice financier précédent. De plus, les ministres ne devront pas participer aux décisions de telles sociétés relatives à ces marchés et ces marchés devront être conclus suivant la procédure usuelle d'octroi de contrats publics et seulement avec les agences sur lesquelles aucun ministre n'a d'autorité administrative directe.

La présente règle n'a pas pour effet d'interdire à un ministre de participer à un marché avec l'Etat auquel il participait avant sa nomination au conseil des ministres, ou auquel il a commencé de participer après sa nomination par l'effet de son mariage, par l'effet de la loi ou par succession, mais le ministre doit mettre fin à cette participation le plus tôt possible après sa nomination ou après l'événement ayant donné naissance à cette participation et, dans tous les cas au plus tard, dans les douze mois suivants.

Le ministre qui participe à un marché avec l'Etat par la voie d'une société privée au moment de l'entrée en vigueur de cette règle devra mettre un terme à cette participation soit que la société renonce au marché, soit que le ministre dispose de ses intérêts dans la société dans les meilleurs délais, compte tenu du temps nécessaire à cette disposition.

Les deux paragraphes précédents s'appliquent mutatis mutandis à la famille immédiate du ministre.

Pour ce qui a trait à la propriété foncière. Pendant toute la durée de leur mandat, les ministres doivent de plus se soumettre à la restriction suivante. Sauf dans le cas d'une propriété foncière acquise pour leur usage personnel, à des fins de résidence, il leur sera interdit, ainsi qu'à leur famille immédiate, d'acheter pour des fins de spéculation, un terrain ou d'acquérir des intérêts dans une propriété foncière au Québec ou encore dans une société de mise en valeur immobilière faisant affaires au Québec. Rien n'empêche l'acquisition de terres agricoles pour un ministre qui se propose d'en faire l'exploitation, ni l'acquisition personnellement ou par des société privées d'immeubles devant servir à des fins commerciales normales, ni l'acquisition de terrains voisins de propriétés résidentielles déjà détenues dans le but d'améliorer ces dernières.

Compagnies publiques. Les ministres doivent se départir de leurs intérêts dans les compagnies publiques ou compte tenu du régime de la fiducie au Québec ou des implications fiscales, de les confier à un fiduciaire. Dans ce dernier cas, les ministres ne devront exercer aucune influence sur les décisions relatives au placement, ni sur la façon d'administrer les fonds.

Les ministres conservent toutefois la faculté de retirer des sommes des fonds ou d'y placer de nouveaux montants.

Cas particuliers: En raison de la nature des

attributions d'un ministre envers un type donné d'activités commerciales ou financières, il pourrait lui être demandé que lui-même, ou sa famille immédiate, se départisse d'un placement dans une compagnie privée ou publique. Exceptionnellement, dans des cas mettant en cause l'intérêt public, un marché avec l'Etat pourrait être conclu, même s'il déroge aux présentes directives, à la condition toutefois que les lois existantes sur l'indépendance des membres du Conseil exécutif soient rigoureusement respectées. La commission parlementaire des engagements financiers sera alors informée de tous les détails du marché et ce, avant sa conclusion, sauf pour les cas d'urgence.

Pour ce qui a trait à la divulgation, chaque ministre doit remettre au secrétaire général du Conseil exécutif, le ou vers le 1er août prochain, et le 1er août de chaque année, pendant la durée de ses fonctions, une déclaration contenant les informations suivantes, et tenir à jour ces dernières, lors de changements significatifs: le nom de toute société privée dans laquelle il détient des intérêts sous forme d'actions ou de créances et qui est susceptible d'être partie à un marché avec l'Etat, c'est-à-dire une société ou une compagnie privée offrant, dans un but lucratif, des biens ou des services dont le gouvernement et ses organismes pourraient se prévaloir; les terrains ou immeubles dont il est propriétaire, en tout ou en partie au Québec, sauf ceux qui sont occupés par le ministre, ou ses dépendants, et sauf les maisons ou logements destinés à l'usage résidentiel. Toutefois, tout immeuble faisant l'objet d'un avis d'expropriation de la part du gouvernement du Québec, ou de l'un de ses organismes, devra être ajouté à cette déclaration sans délai, s'il n'y est pas déjà.

Troisièmement, les nom, occupation et adresse de tout créancier individuel autre que les institutions financières, envers qui le ministre a une dette personnelle excédant $2,000 et qui résulte d'un emprunt d'argent non garanti, en indiquant le montant du solde dû, s'il excède $20,000.

Quatrièmement, toute entreprise ou société commerciale non incorporée, dans laquelle il est associé ou propriétaire et qui est susceptible de faire des marchés avec l'Etat.

Cinquièmement, la nature et la mesure de toute participation dans un marché avec une agence du gouvernement, depuis sa dernière déclaration.

Sixièmement, au meilleur de sa connaissance, les renseignements prévus aux paragraphes 1, 2, 3, 4 et 5, concernant son épouse et ses enfants mineurs.

Le ministre pour qui les dispositions des paragraphes un à six ne trouvent pas d'application doit déposer une déclaration à cet effet. Ces déclarations seront accessibles aux personnes qui en feront la demande et une copie de telle déclaration sera transmise aux ministères et organismes gouvernementaux mentionnés à la liste qui sera tenue à jour, au bureau du secrétaire général du Conseil exécutif.

Voilà les directives qui seront envoyées incessamment à mes collègues du conseil des ministres et dont j'avais déjà discuté verbalement. Elles représentent une synthèse de l'interdiction de la divulgation, de même que des mécanismes de contrôle. Dans le mémoire qui sera déposé en même temps, ou le document qui sera déposé et qui a été rédigé par le comité présidé par le ministre d'Etat au Conseil exécutif, le député de Marguerite-Bourgeoys, de même que par mon conseiller législatif, M. Jean-Claude Rivest et d'autres collaborateurs, on trouvera plus de détails et de justifications pour expliquer ces directives.

Je ne sais pas si le député a des questions à poser avant la suspension des travaux.

M. LESSARD: M. le Président, considérant l'importance de ce document, vous me permettrez de réserver mes commentaires ou les commentaires de mes collègues, que ce soit Me Robert Burns ou Me Jacques-Yvan Morin. En conséquence, je proposerais la suspension des travaux de la commission.

M. BOURASSA: J'ai dit au leader parlementaire de l'Opposition et député de Maisonneuve, qu'étant donné que je dois partir pour une conférence jeudi probablement, mes crédits commenceraient probablement aujourd'hui si on veut les terminer demain et je l'ai prévenu que je déposerais ce document. Quant aux commentaires, ils pourront certainement être exprimés plus tard.

M. LESSARD: D'accord. Cela veut dire que ce soir, à 8 h 15, nous discutons justement des crédits de la présidence du conseil.

M. BOURASSA: Et si nous n'avons pas terminé ce soir, vous pourrez continuer demain matin et on pourrait reprendre cela demain après-midi.

M. LESSARD: Alors, en conséquence, je pense que nous pourrions suspendre les travaux de la commission jusqu'à 8 h 15.

M. BOURASSA: Est-ce que je peux demander que, et le rapport et la déclaration soient mis en annexe au journal des Débats?

M. LESSARD: Oui.

LE PRESIDENT (M. Picard): Tout le monde est d'accord. La déclaration et le rapport en annexe au journal des Débats. (Voir annexe)

M. LESSARD: Mais, est-ce qu'il est possible, actuellement, d'obtenir justement...

M. BOURASSA: On va vous en distribuer tantôt. Je vais déposer ces deux copies des

directives et du rapport pour le journal des Débats.

LE PRESIDENT (M. Picard): La commission suspend ses travaux jusqu'à ce soir, 20 h 15, à la même salle.

(Suspension de la séance à 17 h 50)

Reprise de la séance à 20 h 21

M. PICARD (président de la commission permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales): A l'ordre, messieurs! La commission continuera ce soir l'étude des crédits du Conseil exécutif. Pour la séance de ce soir, M. Lachappelle (Chauveau) remplace M. Beaure-gard (Gouin) et M. Burns (Maisonneuve) remplace M. Charron (Saint-Jacques). D'accord? Au moment de la suspension des travaux avant le dfner, le premier ministre avait déposé un document. Je crois que le leader parlementaire de l'Opposition aurait quelques questions à poser en rapport avec ce document.

Directives sur les conflits d'intérêts

M. BOURASSA: J'avais dit au leader que je déposerais le document quand mes crédits commenceraient. Ils ont commencé vers cinq heures et demie et j'ai déposé le document de manière qu'il puisse en prendre connaissance durant une couple d'heure pour me donner ses commentaires.

M. BURNS: Je remercie le premier ministre. J'ai eu le temps brièvement d'en prendre connaissance, pas tellement à fond, de sorte que je ne me lancerai pas dans un long commentaire du document. Ce que j'aimerais que le premier ministre fasse, c'est qu'il nous donne quelques précisions relativement au projet. Déjà il y a un certain nombre de questions que le texte m'a suggérées. Peut-être la première de toute, c'est le fait que je ne retrouve pas dans le document ou dans les directives et puis, avant ça, soyons...

M. BOURASSA: Méthodique.

M. BURNS: Non, soyons de bonne guerre. Je félicite d'abord le premier ministre. Peut-être que ça lui a pris du temps, je pourrais le critiquer là-dessus, je passe par-dessus ça...

M. BOURASSA: C'est compliqué à faire ça.

M. BURNS: ... mais je félicite le premier ministre d'avoir posé le geste. C'est déjà une bonne chose. Quand j'engueule un ministre — et en particulier le premier ministre — je le fais gaiement; quand je le félicite, je le fais avec la même gaieté.

M. BOURASSA: Merci.

M. BURNS: Je pense que c'est déjà un geste dans le bon sens, dans le sens que nous voulions. Je ne suis pas certain, à un moment donné, qu'il ne faille pas en arriver à faire de la législation. Mais, comme je l'ai déjà dit au premier ministre lorsque nous en avons parlé à

d'autres occasions, déjà les directives, je pense, exercent une pression morale lorsqu'elles viennent du chef du gouvernement, surtout lorsqu'on sait, du moins je l'imagine, qu'elles ont passé par le biais du conseil des ministres et que probablement les ministres actuels seront d'accord sur ces directives.

Quant à l'idée d'en émettre, même si c'est sur le tard, comme on dit, je ne peux pas m'empêcher de féliciter le premier ministre à ce sujet. Cependant, et c'est la question générale qui se pose à mon esprit, je vois que ni les hauts fonctionnaires ni les députés ne sont couverts par ce document. Est-ce qu'il y a des raisons particulières, est-ce que le premier ministre et ses conseillers se sont penchés sur ce problème? Est-ce que, par hasard, après avoir étudié cette situation, ils auraient décidé que ce n'était pas faisable, que ce n'était pas acceptable, que ce n'était pas conforme à leur philisophie? C'est dans ce sens que je voudrais des précisions de la part du premier ministre.

M. BOURASSA: Je remercie le leader parlementaire de l'Opposition de ses paroles. Pour ce qui a trait aux haut fonctionnaires et aux députés, disons que le conseil des ministres, c'était une première étape. Le leader parlementaire va se rendre compte que ce n'était pas facile à rédiger, si on veut tenir compte du respect de la vie privée, de ce qui se fait dans d'autres provinces, du recrutement du personnel politique, de l'intégrité, non seulement de l'intégrité, en fait, mais du fait que toute possibilité de soupçon puisse être écartée de la part des gens raisonnables. Ce sont différents objectifs que nous avons essayé de rechercher avec les directives pour les ministres. Eventuellement, cela se fera sous forme de projet de loi.

Je crois que M. Rivest a communiqué avec un légiste ou avec un avocat qui va commencer incessamment à travailler cela pour le mettre sous forme de projet de loi. On aura probablement quelques mois d'expérience et on verra s'il doit y avoir des modifications. Cela devrait s'appliquer, éventuellement, aussi aux députés et aux hauts fonctionnaires. Je crois que dans le cas des fonctionnaires des travaux ont été faits et c'est assez avancé. Pour répondre précisément au leader parlementaire, c'est seulement une première étape.

M. BURNS: En somme, votre document, même s'il ne parle pas des hauts fonctionnaires et des députés, ne les écarte pas systématiquement.

M. BOURASSA: Non.

M. BURNS: C'est cela que je veux savoir.

M. BOURASSA: Peut-être que ce ne sera pas la même chose dans le cas des députés parce qu'ils n'ont pas à administrer.

M. BURNS: Oui, d'accord, ce ne sont peut- être pas les mêmes obligations qu'on pourrait imposer à des députés, ou encore on pourrait faire une autre catégorie, disons les hauts fonctionnaires. Mais vous ne l'écartez pas comme possibilité.

M. BOURASSA: II n'y a pas de limite dans ces questions de conflit d'intérêts. En Angleterre, on veut même inclure les chroniqueurs parlementaires parce qu'on dit que les journalistes peuvent faire... Je ne dis pas que je vais le faire, je dis qu'en Angleterre on parle d'inclure les chroniqueurs parlementaires parce qu'ils peuvent parler de telle entreprise.

M. BURNS: Evidemment, si on inclut les chroniqueurs parlementaires, ce sera dans une limite particulière, c'est-à-dire dans le cas...

M. BOURASSA: Moi, je n'ai pas...

M. BURNS: Ce ne sont pas eux qui décident des contrats.

M. BOURASSA: Non, mais je veux dire que la pression de l'opinion publique, le député de Maisonneuve en est conscient, peut se faire de toutes sortes de façons. Je ne dis pas que ce n'est pas la politique du gouvernement d'inclure les chroniqueurs parlementaires, mais je dis que dans certains pays on songe à le faire. Il s'agirait qu'on fasse une campagne de presse sur telle compagnie, que ce soit défavorable ou favorable, pour aider ou nuire à la compagnie. C'est une première étape.

M. LESSARD: Etant donné que c'est un projet préliminaire, que c'est une expérience que vous faites et étant donné que c'est très important, est-ce que le premier ministre envisage la possibilité de l'inscrire dans la Loi de la Législature? Soumettre une loi à l'Assemblée nationale?

M. BOURASSA: La plupart des autres provinces ont abordé cette question. Il faut admettre qu'on va plus loin que la plupart des autres provinces. La presque totalité des provinces se contentent de forcer la divulgation, parce qu'elles disent: Si tout est divulgué, si tout est connu et s'il y a des mécanismes de contrôle, il n'y a pas lieu d'interdire. C'est un peu l'avis de sept ou huit provinces, et du fédéral. Ils insistent pour la divulgation, comme en Colombie-Britannique, ils insistent pour la divulgation complète, mais ils ne font pas d'interdiction.

Nous, on va plus loin que la majorité des provinces, on va plus loin même que l'Ontario, qui a des interdictions sous certains rapports, dans le cas des dettes par exemple. On pourra en discuter tantôt. C'est une décision, puis elle est prise, mais que tous les hommes politiques soient obligés d'énumérer toutes leurs dettes en haut de $2,000, on le fait parce qu'il peut avoir des possibilités de conflit d'intérêts. On se trouve à aller plus loin que non seulement toutes les provinces qui se contentent de la

divulgation, mais que l'Ontario, je crois, qui, lui, ne va pas jusque-là. Inscrire ça dans un projet de loi, ça peut se faire dans deux semaines mais, si on veut discuter, si on veut aborder le problème d'une façon réaliste, il faut commencer avec des directives. Il s'agit d'une erreur, il s'agit que la femme d'un ministre décide de faire une transaction dans une compagnie à l'insu du ministre pour que le ministre, si on met ça dans une loi, soit obligé de démissionner. Si on fait ça trop vague dans la loi, on ne peut pas l'appliquer.

M. LESSARD: Quand vous parlez de démission, ce que je constate, c'est qu'il ne semble pas y avoir des sanctions qui sont prévues dans le cas où un ministre ne se soumettrait pas à ces directives.

M. LALONDE: Là-dessus, je pense qu'il faut bien se rendre compte que les directives ont une différence essentielle d'avec une loi. Les démarches qui sont faites dans les autres provinces actuellement s'inscrivent soit quand elles s'adressent seulement aux ministres par voie de directives ou par voie de projets de loi qui s'adressent à des députés comme tels. On ne fait pas la distinction entre un député et un ministre, mais c'est seulement dans la mesure où on s'adresse à un député qu'on peut l'inscrire dans la Loi de la Législature.

Maintenant, les directives, par la nature même du document ou du geste, ne peuvent pas comporter de pénalité, de sanction pénale parce que, justement, ce n'est pas une loi. La sanction non écrite, naturellement, c'est que si un ministre ne se conforme pas, je ne parle d'une question d'accident, c'est une question de discernement de la part du premier ministre, s'il y avait un viol de ces directives, il n'y a pas de doute que la seule possibilité est de quitter le conseil.

M. LESSARD: Mais le ministre responsable du Conseil exécutif nous dit que des directives ne donnent pas sujet à des sanctions. Est-ce que les directives concernant l'utilisation, par exemple, des avions gouvernementaux ne prévoient pas des sanctions, en particulier le remboursement quand l'utilisation est pour des fins personnelles?

M. BOURASSA: II y a eu des cas qui ont été soulevés par le député de Maisonneuve, le leader parlementaire, et le ministre des Transports a répondu à ces cas. Mais la loi est très claire. Pour les directives, disons que le premier ministre envoie des directives à ses collègues, c'est pour qu'elles soient respectées. Si elles ne le sont pas, je pense bien, à moins qu'il y ait des cas où le ministre est complètement ignorant ou n'est pas du tout responsable s'il y avait une transaction... C'est pour cela qu'avant de le mettre dans le projet de loi, il n'existe pas un tel projet de loi au Canada, à ma connaissance, il y a des directives qui existent en Ontario, il y a des projets de loi, mais dans les projets de loi qui ont été adoptés il s'agit simplement de divulgation. Il n'existe pas de projet de loi comme celui-là.

Je pense bien qu'on va faire le maximum, comme je le dis en terminant. La liste va être envoyée à toutes les personnes qui en feront la demande, ces déclarations seront accessibles et une copie de telles déclarations sera transmise aux ministères et organismes gouvernementaux mentionnés à la liste qui sera tenue à jour au bureau du secrétaire général du Conseil exécutif.

La commission des engagements financiers va examiner cela.

Il peut arriver un cas où le ministre n'est pas du tout en cause. Ce sera au premier ministre, à ce moment-là, d'examiner la situation. Est-ce qu'il doit exiger la démission de son ministre, est-ce qu'il doit exiger d'autres sanctions, est-ce qu'il doit annuler la transaction? Il y a différentes avenues qui lui sont possibles. Mais la sanction normale, c'est la démission du ministre, s'il ne respecte pas les directives.

Mais il peut arriver que des causes expliquent le geste et où le ministre n'est aucunement responsable. Alors, si le premier ministre — il pourrait y avoir quand même injustice pour le ministre en cause — par un projet de loi, force le ministre à démissionner, même s'il n'y a aucune espèce... Ce sont quand même des choses qui se font avec pleine divulgation, ce sont des choses qui se font avec la soumission la plus basse, avec des mécanismes de contrôle; alors, cela va être assez difficile de pouvoir recruter du personnel, s'ils se disent: S'il y a un fils, la femme ou une compagnie dont il a 3 p.a, 4 p.c. ou 6 p.c. des actions. Parce qu'il peut arriver que le ministre n'ait pas le contrôle. S'il a 6 p.c. des actions, il y a 94 p.c. des actions qui ne sont pas entre ses mains.

Alors, il peut arriver que les gens vont dire: Bon, c'est à nous de décider. On n'est pas pour être pénalisé. Le ministre devra vendre ses actions à ce moment-là. La sanction peut être de forcer le ministre à vendre ses actions ou de le forcer à démissionner, s'il a mauvaise foi. C'est le premier ministre qui jugera à ce moment-là.

M. LESSARD: C'est aussi fonction des compagnies. Si vous avez un éparpillement assez large des actions, avec 6 p.c. ou 7 p.c. des actions, vous pouvez quand même...

M. BOURASSA: Chez les compagnies privées, ce n'est pas le cas.

M. LESSARD: On va en reparler tantôt.

M. BOURASSA: D'accord. Dans les compagnies privées, celui qui est actionnaire majoritaire, c'est lui qui décide. Il peut refuser de s'occuper des représentations de l'actionnaire minoritaire.

Alors, le choix, pour le ministre, à ce moment-là, c'est de vendre ses actions. Comme c'est une compagnie privée, il faut qu'il trouve un acheteur. S'il est forcé de vendre, les acheteurs vont pouvoir avoir un bon prix pour ses actions. Cela peut aller assez loin, quand on regarde cela sous ce rapport.

M. BURNS: Justement, la critique générale qu'on pourrait faire au sujet de ces directives, c'est qu'il y a beaucoup de discrétion dedans. Le premier ministre, par la réponse qu'il vient de donner à mon collègue de Saguenay, le souligne davantage, c'est-à-dire que, chaque fois, on devra juger la situation, examiner s'il y a eu mauvaise foi de la part du ministre. Le premier ministre, dans le fond, sera celui qui exercera cette discrétion.

Est-ce que le premier ministre n'a pas envisagé — je le dis sans faire de blague — de s'enlever le plus possible de discrétion dans l'application de ces directives-là, par exemple en confiant à une commission parlementaire — celle de l'Assemblée nationale est toute désignée — la possibilité d'examiner un cas qui pourrait se soulever en cours d'application?

Je signale au premier ministre que, déjà, la Loi de la Législature fait de notre commission parlementaire de l'Assemblée nationale une espèce de tribunal à l'endroit des députés et des ministres. Par exemple, s'il a pris un privilège... Je ne reviens pas sur un cas récent que j'avais soulevé à l'Assemblée nationale. Le président de l'Assemblée a rendu une décision qui n'était pas favorable à ma thèse — et je ne reviendrai pas là-dessus — mais, si par hasard ma motion avait été adoptée, elle aurait amené un député devant la commission de l'Assemblée nationale ou encore elle aurait amené des individus extérieurs au Parlement devant la commission de l'Assemblée nationale pour répondre à des accusations. A ce moment-là, la commission de l'Assemblée nationale se transforme en véritable tribunal.

Je le lance au hasard; je ne dis pas que j'ai pensé à ça pendant des nuits, ni quoi que ce soit, mais, voyant l'ensemble des pouvoirs discrétionnaires qui sont laissés au premier ministre là-dedans, je me demande si cet instrument-là qui existe déjà ou un autre instrument ne pourrait pas décharger le premier ministre — je le dis en toute sincérité — de l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire.

M. BOURASSA: Je suis d'accord, si on trouve une formule, parce que cela peut être assez difficile pour le premier ministre parfois de trancher ces questions-là. Moi, j'avais pensé à ces cas, "exceptionnellement dans des cas mettant en cause l'intérêt public, à condition, toutefois, que la loi soit respectée, la commission parlementaire des engagements financiers sera alors informée de tous les détails du marché, et ce avant sa conclusion, sauf pour des cas d'urgence."

Evidemment, je ne voudrais pas changer le texte à ce stade-ci, mais on pourrait peut-être considérer que ce soit la commission de l'Assemblée nationale plutôt que la commission des engagements financiers. Si un cas se présentait, je peux dire au leader parlementaire de l'Opposition qu'entre l'une et l'autre je n'aurais pas d'objection à ce qu'on réfère soit aux engagements financiers ou à la commission de l'Assemblée nationale suivant le cas. Si c'est sérieux, évidemment, ce pourrait être la commission perlementaire de l'Assemblée nationale. Si ça reste assez secondaire, ça pourrait être la commission parlementaire des engagements financiers.

M. BURNS: Maintenant sur l'ensemble du projet, vous avez répondu tout à l'heure au député de Saguenay que, dans le fond, c'était à peu près une espèce de document de travail qui, éventuellement, donnerait probablement naissance à un projet de loi. Et c'était probablement, également, le premier jet de ce projet de loi. On voit que la mise en application des directives est reportée au 1er août prochain. Est-ce que ça va être en vigueur le 1er août, au moins sous cette forme-ci, même si elle est imparfaite et même si on pourrait éventuellement y formuler des critiques?

M. BOURASSA: C'est-à-dire...

M. BURNS: Est-ce que vous avez l'intention de mettre cela en vigueur, c'est-à-dire que vos ministres sachent immédiatement que, dès le 1er août, au moins cette directive va être en vigueur?

M. BOURASSA: J'ai envoyé une lettre à chaque ministre aujourd'hui, avec ces directives. Alors, elles sont en vigueur immédiatement, sauf que dans certains cas les ministres devront se départir de leurs actions, et il faut que je leur donne un temps raisonnable. Si je fixe une date précise, je pense bien que ça peut se faire d'ici quelques semaines, mais la divulgation est le 1er août; c'est-à-dire que le 2 août, l'opinion publique pourra connaître les éléments de divulgation qui sont inclus dans les directives.

Quant à la vente des actions, il faut que je donne un certain temps parce que si je fixe une date précise, l'action du ministre ne vaudra rien la veille de cette date parce qu'il va être forcé de s'en débarrasser. C'est pourquoi j'ai dit que ça devrait se faire dans un délai raisonnable et je pense que le 2 août il sera possible à l'opinion publique et aux membres de l'Assemblée nationale de voir exactement ce qui reste d'actions aux ministres en cause, aux entreprises qui peuvent faire affaires avec le gouvernement.

M. BURNS: Si je comprends bien le premier ministre, la directive est en vigueur au moment où on se parle.

M. BOURASSA: Oui.

M. BURNS: Le délai de divulgation est fixé au 1er août.

M. BOURASSA: C'est le 1er août. Quant au délai de vente des actions, j'ai marqué "délai raisonnable", mais ça ne peut pas aller tellement loin.

M. BURNS: Oui, d'ailleurs on va y venir, j'aurais des questions à poser au premier ministre à ce sujet. Maintenant, est-ce que je peux m'attacher au deuxième article qui s'appelle: Activités professionnelles, commerciales ou d'affaires? Ce qui m'a vraiment sauté aux yeux dans ce texte, c'est encore une fois son caractère flou. C'est une caractéristique qu'on peut retrouver à plusieurs endroits dans les directives. J'ai dit tout à l'heure que je ne ferais pas une critique générale; là, je n'ose pas me définir comme légiste, mais comme personne ayant l'habitude de lire des textes à caractère juridique, je sursaute un peu quand je lis les derniers mots du paragraphe 2 où on dit que tous les ministres doivent mettre fin, pour toute la durée de leur mandat, aux activités professionnelles, commerciales et d'affaires — ce sont les mots qui viennent qui me chicotent un peu — qui pourraient les empêcher de consacrer le temps qu il faut à leur fonction.

J'aurais pensé que dans le cas des ministres, en particulier, vu qu'on ne parle pas des députés et des hauts fonctionnaires — dans le cas des hauts fonctionnaires, je ne suis pas sûr que ça puisse s'appliquer parce que c'est une fonction à plein temps pour eux — on aurait pu dire carrément, à cet article-là, que c'est une fonction à plein temps, qu'il n'est pas question qu'un ministre ait des activités professionnelles, commerciales ou d'affaires à l'extérieur, autres que celles qui sont permises dans le reste des directives.

A moins que vous me disiez que certains ministres peuvent le faire, et j'en doute, même ceux qui ont un tout petit budget comme le ministre de l'Immigration; je suis convaincu qu'un ministre qui veut faire son travail véritablement, c'est une "job" à plein temps, si vous me passez l'expression.

Le texte actuel laisse sous-entendre qu'un ministre pourrait très bien consacrer encore du temps à ses activités professionnelles, commerciales ou d'affaires si ça ne nuit pas à son travail. Moi je dis que c'est un énoncé de bonnes intentions, mais qui dans le fond manque de mordant dans les faits. Il me semble qu'on devrait profiter de l'occasion pour consacrer le fait qu'un ministre est quelqu'un qui fait un travail à plein temps, qu'un ministre est quelqu'un qui n'a pas d'affaire à avoir d'activités professionnelles, commerciales ou d'affaires à l'extérieur, et déjà à ce moment-là, on reconnaît le fait qu'on lui évite, à lui, des possibilités éventuelles de conflits d'intérêts.

Supposons par exemple, M. le premier ministre, que je continue à avoir mon bureau d'avocat, même si le cas est déjà réglé, d'ailleurs, par la Loi de la Législature. Mais prenons le cas d'un bureau d'avocat, que je peux continuer à avoir mon bureau, et même si c'est vrai que je n'y vais jamais, que j'ai encore des intérêts là-dedans. Il est fort possible qu'à un moment donné, pas moi avec mes pressions, mais mon existence et ma pression morale dans le cabinet, le seul fait que je sois là fasse qu'on envoie des choses à ce bureau-là. L'Opposition n'est pas là comme une espèce de détective privé, pour suivre pas à pas chacun des ministres, pour vérifier ce qu'ils font puis sortir leur bilan puis savoir exactement ce qu'ils ont fait comme rapport d'impôt à la fin de l'année.

Moi, ce que j'aimerais qu'on dise une fois pour toutes, c'est qu'un ministre, à part les actions qu'il peut détenir légalement — si éventuellement la loi le permet — est à plein temps au service du Québec jusqu'à nouvel ordre, jusqu'à ce que la population lui dise de retourner à ses activités ou jusqu'à ce que lui-même décide d'y retourner. C'est pour ça que je trouve que la fin du paragraphe 2 de votre directive manque un peu de rigueur en ce sens qu'elle sous-entend que c'est encore possible de faire d'autres choses que d'être ministre, en autant que ça ne nuise pas aux fonctions de ministre. Et, encore là, qu'est-ce que ça veut dire que ça n'empêche pas de consacrer le temps qu'il faut aux fonctions du ministre? Déjà on est dans le domaine de l'interprétation puis de la discrétion quant à...

M. BOURASSA: Disons que des cas ont été soulevés, c'est pour ça que c'est assez difficile d'être restrictif. Par exemple le médecin qui est nommé ministre, évidemment, à toutes fins pratiques il laisse complètement sa pratique de médecine, mais il peut lui arriver des vieux clients ou, pour des questions de relations humaines, des gens qui tiennent absolument à garder le médecin qu'ils ont toujours eu, et qu'il fasse peut-être quelques consultations, extrêmement rarement, mais qu'il ne soit pas empêché par la loi d'en faire. Ou un cultivateur qui devient ministre peut, d'une façon très marginale, même durant les quelques vacances qu'il peut avoir, continuer son exploitation agricole.

J'ai eu la réaction du leader parlementaire, d'autant plus, aujourd'hui, que le ministre, normalement, ne devrait pas avoir cinq minutes pour s'occuper de son travail personnel, et c'est le cas. On m'a signalé, en réponse aux propos que je tenais, et que tient le député de Maisonneuve, qu'il pouvait y avoir des cas comme ça où on pouvait causer des problèmes humains. Mais avec une formule comme ça c'est mieux. A toutes fins pratiques, aucun ministre ne consacre du temps à son bureau, que ce soit comme médecin, comme avocat ou autrement.

Mais il serait possible, avec une loi qui n'est pas trop étanche ou des directives qui ne sont pas trop étanches, de permettre des cas comme ça. Je ne veux pas nommer de cas, j'ai quelques médecins dans mon conseil des ministres; des fois, il y en a que ça fait 20 ans qu'ils traitent les mêmes personnes et c'est possible que ces personnes-là demandent au médecin de continuer à les traiter pendant quelque temps. C'est plutôt pour des raisons humanitaires que pour n'importe quelle autre raison qu'on m'a signalé cela.

Dans un projet de loi, il faudrait que ce soit plus clair que cela, il faudra trancher dans un sens ou dans l'autre.

M. BURNS: Bon, pour le moment, en tout cas, je ne vais pas plus loin que cela. Je prends bonne note des explications du premier ministre. Je maintiens quand même mes doutes quant à la largeur de la rédaction du texte.

M. BOURASSA: D'accord.

M. BURNS: Si vraiment ce que le premier ministre mentionne pose un problème, il me semble qu'on pourrait trouver un texte, que je n'ai pas à l'esprit mais qui pourrait peut-être être plus adéquat que celui-là.

M. BOURASSA: D'accord.

M. BURNS: Celui-là, à mon avis, est même vexatoire pour les ministres. Peu importe l'estime ou le manque d'estime que je peux avoir pour les ministres, quant à la qualité de leur travail, il y a une chose que je suis en mesure de reconnaître, c'est que c'est une "job" à plein temps. Il n'y a pas un ministre, actuellement, qui peut sérieusement se consacrer à ses affaires, qui peut sérieusement se consacrer à ses activités professionnelles s'il fait son travail. Je n'ai qu'à suivre l'étude des prévisions budgétaires de chacun des ministères ou de la majorité des ministères que j'ai examinés et je sais fort bien que ces ministres-là sont totalement incapables de le faire mais je trouve que cela crée une ambiguïté, la façon dont on a rédigé ce texte-là.

M. BOURASSA: Je prends bonne note des remarques du député. Je lui ai donné les cas qui m'ont été soulevés et qui m'ont incité à accepter un texte un peu moins étanche, notamment dans le cas des médecins ou possiblement des cultivateurs. Le député se rend compte qu'en déposant cela je lie pas mal tous mes successeurs. Ce serait difficile pour eux d'aller moins loin que cela. Il peut arriver des cas comme cela, des cas exceptionnels, et je ne voudrais pas mettre les menottes aux mains à tous ceux...

M. BURNS: Je vous remercie de nous protéger.

M. BOURASSA: Je ne veux pas mettre les menottes aux mains, éventuellement, au leader parlementaire quand il sera ministre de la Justice, je ne sais pas en quelle année, en 1995 ou 1996, si, évidemment, il change de parti.

LE PRESIDENT (M. Picard): Le député de Saguenay.

M. LESSARD: Au paragraphe no 3, on lit: "Les ministres doivent faire en sorte que les compagnies privées dans lesquelles eux-mêmes et leur famille immédiate..." Est-ce que vous comprenez là-dedans les compagnies privées dont les actions sont cotées à la Bourse ou les compagnies privées dont les actions ne sont pas cotées en Bourse? Est-ce que vous comprenez toutes les compagnies privées?

M. LALONDE: Essentiellement, les compagnies privées sont les compagnies dont les actions ne sont pas cotées à la Bourse. C'est la différence qu'on fait dans le traitement des actions de compagnies publiques et des actions de compagnies privées.

M. BOURASSA: Parce que le contrôle est beaucoup plus grand dans les compagnies...

M. LESSARD: On veut donc dire toutes les compagnies dont les actions ne sont pas cotées à la Bourse. Maintenant, dans la deuxième partie...

M. LALONDE: Excusez-moi de vous interrompre. Si vous permettez, c'est possible — je ne veux pas être trop technique — qu'on ait des compagnies publiques qui ne soient pas cotées à la Bourse; elles auraient été rejetées de la Bourse, par exemple, pour toutes sortes de raisons, mais ce sont essentiellement des compagnies privées, ce sont des compagnies dont les actions n'ont pas de marché, ne sont pas négociables.

M. LESSARD: N'ont pas de marché.

M. LALONDE: Alors, les compagnies publiques sont les compagnies dont les actions sont négociables soit à la Bourse ou soit sur un marché parallèle. Il y avait des possibilités de faire un marché d'actions publiques hors Bourse.

M. LESSARD: Vous faites aussi une distinction entre des transactions qui sont faites directement avec l'Etat et les transactions qui sont faites avec des agences gouvernementales. Dans le cas des transactions qui sont faites avec des agences gouvernementales, vous incluez justement qu'à ce moment-là la personne ne devra pas être propriétaire d'un capital-actions supérieur à 5 p.c. Est-ce qu'on pourrait m'expli-quer pourquoi vous faites une distinction, pourquoi vous faites cette précision en ce qui

concerne les 5 p.c, alors que vous ne la faites pas en ce qui concerne des transactions qui sont faites directement avec l'Etat?

M. BOURASSA: Le ministre pourra compléter. Dans le cas du gouvernement, théoriquement, même s'il y a beaucoup de mécanismes de contrôle, le ministre a plus d'influence que dans le cas des agences. Les agences gouvernementales aujourd'hui, il y en a un très grand nombre. On vient d'en former une, le Bureau d'aide financière pour les inondations. Il y a toutes sortes d'agences. Il y en a un très grand nombre où le ministre n'a aucun contrôle. Sur SIDBEQ, le ministre n'a aucun contrôle, peut-être le ministre des Finances, mais les autres ministres n'ont aucun contrôle. Il peut arriver, par exemple, que dans un secteur il y ait un très petit nombre de compagnies. On peut peut-être appliquer ça pour le gouvernement et les ministères, mais, dans le cas des agences, SOQUEM, SOQUIP, l'Hydro-Québec il pourra arriver que ce soient les seules compagnies disponibles où le ministre peut avoir un pourcentage d'actions. Comme ce sont des compagnies privées dont il ne peut pas se départir des actions à un prix facile ou à court terme, nous avons pensé — encore là, on va plus loin que toutes les autres provinces — d'établir une proportion minime de 5 p.c. ou un chiffre d'affaires de 5 p.c. Cela à certaines conditions, c'est que les ministres ne devront pas participer aux décisions de telle société relative à ses marchés. Ces marchés devront être conclus suivant la procédure usuelle d'octroi de contrats publics et seulement avec les agences sur lesquelles aucun ministre n'a d'autorité administrative directe.

Je pense qu'il y a une triple protection, mais on ne peut pas... On se trouve à protéger, parce qu'il faut quand même éliminer les cas pour ne pas être pris toujours à examiner s'il y a eu faute ou pas. S'il arrive un cas, par exemple, où un ministre est propriétaire de 3 p.c. ou 4 p.c, ou même qu'il est propriétaire à 100 p.c, mais qu'il fait une transaction de moins de 5 p.c, avec des agences qui sont de plus en plus nombreuses, que le ministre ne soit pas forcé de démissionner. Indépendamment du ministre qui serait forcé de démissionner, c'est le recrutement du personnel politique. Imaginez si celui qui est intéressé à la politique se dit: Ma femme, mes enfants, puis moi, avec toutes les agences du gouvernement, est-ce que je peux avoir la garantie que jamais ils ne pourront avoir affaire directement ou indirectement avec une agence? Il n'a plus grand monde qui va vouloir venir en politique, parce que des agences, comme je disais tantôt, il s'en crée tous les mois. C'est pour ça qu'on a pensé peut-être — moi je trouve qu'on va plus loin que pas assez loin — qu'on va trop loin avec ça; peut-être qu'on va se rendre compte que ce n'est pas applicable.

M. BURNS: Moi, je trouve, au contraire, que vous n'allez pas assez loin là-dessus.

M. BOURASSA: On va quand même plus loin que toutes les autres provinces.

M. BURNS: II y a trois remarques que je pourrais ajouter à ce que le député de Saguenay vient de dire là-dessus.

La première m'est pratiquement dictée par la réponse du premier ministre. Je conteste l'affirmation du premier ministre à l'effet qu'un ministre ne peut pas avoir d'influence sur les organismes ou les agences gouvernementales. Cela ne m'entre pas dans la tête. Le ministre, qui est membre de l'Exécutif du gouvernement du Québec, est une personne qui en soi est influente, particulièrement sur des organismes qui ont à faire affaires avec le gouvernement régulièrement.

M. BOURASSA: Je les exclus là: "Sur lesquels aucun ministre n'a d'autorité administrative".

M. BURNS: Oui, il n'a peut-être pas d'autorité administrative; par exemple, si vous me dites que le ministre de la Justice, sa femme ou ses enfants mineurs ne doivent pas faire affaires avec la Commission de contrôle des permis d'alcool, vous me citez le cas exact où lui a une autorité administrative quelconque, ce n'est pas lui, évidemment, qui dicte les décisions de la Commission de contrôle des permis d'alcool.

Mais c'est quand même un ministre qui est omniprésent dans ces conditions.

M. BOURASSA: Dans ces cas-là, je pense,...

M. BURNS: Oui, c'est déjà prévu.

M. BOURASSA: ... cela s'appliquerait.

M. BURNS: Je vais plus loin que ça.

M. BOURASSA: Bien...

M. BURNS: Je dis même que le ministre des Affaires intergouvernementales, qui n'a, en théorie, rien à faire avec la Commission de contrôle des permis d'alcool, est une personne qui a suffisamment de poids moral auprès de cet organisme. C'est aussi simple que ça.

M. LEVESQUE: Ce n'est pas ce que les électeurs pensent.

M. BURNS: Non, non, mais écoutez...

M. LEVESQUE: Tous ceux qui attendaient des permis et à qui on les leur a refusés n'ont pas cette impression.

M. BOURASSA: Le leader, je comprends

son point de vue. Mais il devrait savoir, d'abord, comment cela se passe. Il y a quand même des dizaines et des dizaines — plusieurs vont même penser que c'est un faux problème — de fonctionnaires qui contrôlent et qui scrutent les moindres transactions. Et c'est soumis aux comptes publics, c'est soumis à la commission des engagements financiers, c'est soumis à l'examen des crédits,...

M. BURNS: Aux comptes publics! M. LESSARD: Quand?

M. BOURASSA: Bien oui, c'est publié dans les comptes publics. Tous peuvent...

M. BURNS: Alors, la commission des comptes publics, elle...

M. LESSARD: Ah! publié dans...

M. BOURASSA: II y a une divulgation totale. Cela va plus loin, je le répète, que tout ce qui se fait dans les autres provinces. Cela va plus loin que tout ce qui se fait dans les autres provinces. Je veux dire que vous ne pouvez pas empêcher...

M. BURNS: On ne commencera pas — on est en commission et on se parle autour d'une table — à se "péter les bretelles". Ce qu'on essaie de savoir, c'est véritablement où on s'en va avec ça. Ce n'est pas par sado-masochisme ni par masochismo-sadisme qu'on le fait.

LE PRESIDENT (M. Picard): Est-ce que le député pourrait aider...

M. BURNS: C'est parce que cela dépend sur quel mot on met l'accent. Ecoutez, M. le premier ministre, une fois pour toutes, parce que là on se parle dans une atmosphère calme et, semble-t-il, en Chambre on n'est pas capable de se le dire. Ce n'est pas dans le but de vous causer des problèmes qu'on fait ça, c'est dans le but de sauvegarder l'intégrité de l'Etat. C'est pour cela qu'on vous pose ce genre de questions. C'est pour vous protéger contre vous-même qu'on fait ça. Là, vous arrivez avec un texte et on est en droit — vous allez nous l'admettre, ce droit, comme Opposition — de dire: Peut-être que vous n'allez pas assez loin. Une des places où je prétends que vous n'allez pas assez loin, c'est où vous dites: Un ministre, lorsqu'il n'est pas administrativement lié à un organisme, n'a pas d'influence sur cet organisme-là. Je dis: Non, pas du tout. Je conteste cette affirmation.

Je dis que le ministre, de par sa fonction, de par sa position de membre de l'Exécutif, a — qu'on le veuille ou non — une influence. Allez voir le chef de bureau de n'importe quelle des agences et vous allez voir jusqu'à quel point — M. le premier ministre, vous n'êtes pas assez naïf pour ne pas m'admettre ça — un membre de l'Exécutif a de l'influence. Je ne blâme pas le chef de bureau en question. Je ne blâme pas le fonctionnaire, haut, moyen ou petit, d'un ministère d'être impressionné par un ministre. Il n'est que normal...

M. BOURASSA: Deux jours après, cela va être dans le journal que le ministre est intervenu.

M. BURNS: Ce n'est pas sûr parce qu'il y a des choses qui sont arrivées et qui ne sont dans les journaux encore. Qu'est-ce que vous voulez? Le premier ministre sait qu'il y en a qui ne sont pas dans les journaux.

M. BOURASSA: II y a un contrôle multiple de toutes les transactions qui peut se faire. Je dis que je ne vois pas comment —je ne pense pas seulement à moi et je ne pense pas seulement aux ministres en cause, il faut que je pense à l'avenir comme je le disais tantôt — un chef de gouvernement ou un chef de parti pourrait faire du recrutement politique si dans toutes les agences, dans tous les cas, il y a une interdiction absolue, dans tous les cas de toutes les agences, parce qu'il y en a. Je pourrai donner la liste tantôt au député de Maisonneuve. C'est impossible de contrôler — parce qu'il ne faut quand même pas bâtir une armée pour juste contrôler tout ça — tout ce qui peut se faire. Il peut y avoir des régions où les seules compagnies sont celles où, indirectement, le ministre peut avoir, à travers sa femme ou ses enfants mineurs... S'il faut qu'aujourd'hui celui qui se lance en politique soit obligé de tout vendre, que sa femme vende tout et que ses enfants vendent tout, quelle sorte de classe politique allons-nous avoir? Il faut penser à ça et encore là cela n'existe pas ailleurs. C'est du droit nouveau.

M. LALONDE: Si je peux ajouter peut-être un détail là-dessus. C'est une exception. D'ailleurs, vous allez la retrouver dans le rapport que nous avons fait, qui emprunte l'approche d'à peu près le plus grand nombre des autres provinces, qui ont adopté la formule de la divulgation avec certaines permissions.

Dans ce cas-ci, tout d'abord on a aussi injecté un peu le concept "de minimis non curat praetor": en mettant le plus, on a dit minime. Il faudrait que ce soit minime, si c'était permis. Non seulement cela, parce que vous savez probablement que les cas de conflits d'intérêts ne sont pas tous carrément identifiables. Souvent, le conflit vient de l'importance de l'intérêt qu'on a et non pas seulement de la nature de l'intérêt.

Deuxièmement, nous suggérons — et c'est dans les directives, je crois — qu'il y ait une divulgation, après coup, de ces marchés. Pour cela, tout d'abord avec tous les contrôles que le premier ministre vient de mentionner et ensuite

pourvu que l'intérêt soit minime, on emprunte la formule des provinces de droit anglais en exigeant une divulgation après coup. Autrement dit, s'il y en a, il faudra que ce soit divulgué annuellement ou périodiquement, de sorte que l'effet de dissuasion va peut-être rendre le moins important possible ce genre de transactions.

M. BOURASSA: A part cela, il peut y avoir conflits d'intérêts à l'inverse. Si le ministre sait, par exemple, qu'en étatisant ou en agrandissant le secteur public, il risque de créer des problèmes à ses compagnies, il va peut-être dire: Moi, pour ne pas avoir de problème, ou bien à cause de ma femme et de mes enfants ou à cause de mes biens, je ne ferai pas une extension du secteur public.

Quand on tombe dans les conflits d'intérêts, il n'y a plus de limites.

M. BURNS: Là aussi, je pense qu'il est important que je fasse la mise au point suivante. J'en ai fait une tout à l'heure sur nos intentions quand nous questionnions le gouvernement là-dessus. Il y en a une autre qui est sous-jacente à la première et qu'il faut faire.

Quand vous parlez de conflits d'intérêts prouvables, moi cela ne m'intéresse aucunement. Je vous le dis avec tout le respect que je vous dois. Ce que je dis, c'est que non seulement il ne faut pas qu'il y ait de conflits d'intérêts voulus, décidés par le ministre, mais il faut que le ministre ou toute personne participant à l'administration publique soit au-dessus de tout soupçon.

Le premier ministre se souvient sans doute d'un article qui n'était pas tellement méchant à l'égard de sa femme mais qui parlait de la femme de César. C'est ça, le principe. Je pense qu'on n'avait pas besoin de lire bien, bien longtemps cet article, un éditorial qui a paru il y a quelque temps et qui disait tout simplement: C'est peut-être vrai qu'il n'y a rien de malhonnête dans ça. Et ça, on n'a jamais dit le contraire, nous. C'est peut-être vrai qu'il n'y a rien de malhonnête. Ce qui est important, c'est qu'on soit sûr qu'il n'y a rien de malhonnête, parce qu'à partir du moment où la population, le citoyen se dit: Peut-être qu'il n'y a rien de malhonnête, peut-être que Bourassa a raison quand il dit que tout cela s'est fait selon les règles, à partir du moment où il dit "peut-être", je relie cela au premier principe que je mentionnais tantôt: on ne sauvegarde pas l'intégrité de l'Etat.

Il faut que les administrateurs publics soient véritablement au-dessus de tout soupçon, qu'ils puissent dire: Voici, venez voir. Je suis un grand livre ouvert. Je n'ai pas d'intérêts là-dedans. Après cela, toute discussion, M. le premier ministre, sur le fait que cela s'est fait par voie de négociation juste, que cela s'est fait par voie de soumissions publiques, que cela s'est fait dans des cas où il n'y avait pas de subventions, à cause du fait que c'étaient des questions d'urgence, toute discussion, à ce niveau, devient absolument fallacieuse vis-à-vis du but qu'on vise.

Je donne tout simplement un exemple. Encore une fois, il n'est pas question de laisser croire à de la malhonnêteté là-dedans. Vous avez le cas d'une compagnie qui appartient aux Simard, qui, à un moment donné, a renfloué — je ne sais pas le mot exact — radoué un bateau. Radoué? Qu'est-ce que c'est, le mot? En tout cas, vous savez ce que je veux dire, a remis en service un bateau qui n'était pas en service. Il y a un mot technique pour ça.

M. LEVESQUE: Radoubé. M. LALONDE: Radoubé.

M. BURNS: Radoubé. Bon, merci. Ecoutez, c'est sûr que c'était un cas d'urgence. J'ai écouté le ministre des Transports, lors de l'étude des crédits du ministère, dire pourquoi le contrat avait été accordé à la compagnie de touage de Sorel, qui est en grande partie propriété des Simard. C'est sûr que c'était un cas comme celui-là. Mais si, par hasard, dans cette compagnie, il n'y avait pas eu des intérêts qui sont près du premier ministre ou qui sont près du ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, je suis sûr que personne n'aurait dit un mot.

C'est ce que je dis quand je parle de se tenir au-dessus de tout soupçon: C'est sûr que ça fait mal, que ça embête le ministre à l'occasion, mais, s'il décide de se consacrer pendant X années au service de la population dans une fonction à caractère public s'il en est une, il est aussi obligé de s'imposer certains sacrifices et ces sacrifices, c'est de se placer au-delà de tout soupçon. C'est juste ça.

M. LEVESQUE: J'ai une question à poser, moi, au leader parlementaire de l'Opposition. Croit-il qu'il y a des catégories de citoyens qui ne devraient pas faire partie du gouvernement?

M. BURNS: Non, je n'ai jamais dit ça.

M. LEVESQUE: Deuxièmement, croit-il qu'il y a tellement de sécurité d'emploi dans le gouvernement, quand on sait que, dans le Parlement actuel, il y a 110 députés et que, de ceux que j'ai vus autour de moi quand j'ai commencé, il en reste deux? Alors, est-ce que les gens vont se départir raisonnablement, rationnellement de tous leurs intérêts pour essayer de servir l'Etat?

M. BURNS: Ils vont faire ça ou ils vont voir à ce que la compagnie dans laquelle ils ont des intérêts ne fasse pas affaire avec l'Etat.

M. LEVESQUE: C'est ce que nous faisons dans les directives.

M. BURNS: Oui, mais là j'arrive aux agences gouvernementales; on parle des agences gouvernementales, je dis que ça doit aller...

M. LEVESQUE: Dans le cas des agences gouvernementales, ne croit-il pas que, lorsque les intérêts de celui qui est en cause sont moins de 5 p.c, cela veut dire que les intérêts de l'extérieur sont de l'ordre de 95 p.c. et plus? Qui prend les décisions, à ce moment-là?

M. BURNS: C'est le deuxième point que je voulais soulever au premier ministre. J'en ai mentionné trois; le premier, c'est comme le disait le député de Saguenay, pourquoi fait-on une distinction pour les agences? Imaginez la situation suivante: une compagnie avec un capital-actions de $100 millions. Le ministre, à ce moment-là, a le droit de détenir $5 millions dans cette compagnie et être exempt de tout ça. C'est ce que ça veut dire?

M. LEVESQUE: Est-ce que le député de Maisonneuve prétend qu'il y a tellement de compagnies privées qui ont un capital-actions de $100 millions?

M. BURNS: Je vous donne un exemple, mettez n'importe quelle proportion.

M. LEVESQUE: Je voudrais un exemple de compagnie privée avec $100 millions.

M. BURNS: Je vous donne l'exemple le plus facile à calculer; c'est pour ça que je parlais de $100 millions et de $5 millions. Je n'en connais pas de compagnie; je ne suis pas un spécialiste en matière d'institutions financières. Que voulez-vous que je vous dise! Mais il y a une chose que je vous dis, toutefois, c'est que ces 5 p.c. dépendent drôlement de l'importance du capital-actions total émis, vous ne trouvez pas? C'est ça que j'essaie...

M. LEVESQUE: 5 p.c. peuvent être importants dans une compagnie publique qui a justement $100 millions, mais, quand on parle de sociétés privées, je pense que l'exemple que donne le député de Maisonneuve n'est pas réaliste.

M. BURNS: II y en a peut-être. Je ne connais pas ça.

M. LEVESQUE: Je n'en connais pas.

M. BURNS: Ce que je veux dire, c'est tout à coup il y en aurait une et qu'à un moment donné vous aviez un ministre qui, dans une compagnie qui a $100 millions...

M. LEVESQUE: II y a Henry Ford qui est resté longtemps dans cette situation-là, mais il n'y en n'a pas beaucoup.

M. BURNS: ... tout à fait par hasard, détient pour $5 millions d'actions, c'est ce que ça veut dire? Cela veut dire qu'il n'y a pas de problème et que cette compagnie peut faire affaires...

M. BOURASSA: Le député oublie un aspect, parce qu'il y a trois facteurs. Il y a la divulgation, l'interdiction et les mécanismes de contrôle. Je conçois les questions du député; nous discutons très franchement. J'aurais pu dire: Ce sont mes directives, mais j'accepte d'en discuter, parce que c'est un peu du droit nouveau et qu'on va plus loin que toutes les autres provinces. Quand on parle d'interdiction, il ne faut pas oublier la divulgation parce que, dans le cas des 5 p.c. tout sera divulgué. Je comprends que le député avait cité — je ne veux pas l'embarquer avec ça — la loi de la Colombie-Britannique. Il semble peut-être l'avoir lue complètement; ça nous arrive à tous et chacun. Dans la loi de la Colombie-Britannique...

M. BURNS: Est-ce que cela vous arrive bien souvent?

M. BOURASSA: Cela nous arrive chacun à notre tour.

Dans la loi de la Colombie-Britannique, que le député a citée, ils ont exclu les épouses et ils se contentent de la divulgation.

M. BURNS: Je ne veux pas lancer un débat là-dessus, mais je ne peux pas vous permettre de m'embarquer sur une "track" comme celle-là. Replacez ça dans le contexte et vous allez voir.

M. BOURASSA: Vous avez ça dans la Presse canadienne. C'est une bonne agence.

M. BURNS: Oui, j'ai dit: II y a des efforts qui se font à certains endroits; pourquoi on ne le ferait pas au Québec? Il y a un effort qui se fait en Colombie-Britannique, c'est exactement ce que j'ai dit. Je n'ai pas qualifié ce qui se passait en Colombie-Britannique.

M. BOURASSA: Vous avez dit: II faut faire quelque chose de pareil ou de semblable, je l'ai.

M. BURNS: Qu'il faudrait poser des gestes, c'est ça que j'ai dit.

M. BOURASSA: Non, de semblable, d'à peu près pareil.

M. BURNS: C'est cela, dans le sens de poser des gestes. Là, vous en posez un geste. Je vous ai dit tout à l'heure que je vous félicitais d'en poser un.

M. BOURASSA: Oui, et j'ai remercié le député. Mais je veux dire qu'il reste qu'en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan, au Manitoba, au fédéral, dans d'autres provinces, on se contente de la divulgation parce que pour eux, c'est ça qui est la garantie devant l'opinion publique.

La garantie à la population, dans toutes ces provinces, y compris les provinces social-démocrates, c'est que c'est divulgué. Et ils se disent: Si c'est pleinement divulgué, si toute l'opinion publique, tous les journalistes, toute l'Opposition peuvent examiner les moindres détails des transactions, il y a garantie pour la population.

Nous, nous allons plus loin que ça. Non seulement on va tout divulguer quand il va y avoir des causes comme ça, mais on interdit. Il me semble que j'en donne plus que le client en demande.

M. BURNS: Là-dessus, non, vous ne m'embarquerez pas, M. le premier ministre. Encore une fois, je ne veux pas personnaliser le problème, mais tout tourne autour de vous, qu'on le veuille ou non, ou autour de votre belle-famille.

M. BOURASSA: Bien, il n'y a pas...

M. BURNS: Cela a commencé par là. Non, mais qu'on le veuille ou non, cela a commencé par là. Et...

M. BOURASSA: Oui, mais les transactions qu'on m'a reprochées, avec toutes les nouvelles lois qu'on qualifie de très progressistes dans les autres provinces, dans certains milieux, sont permises dans toutes ces provinces. Alors que là, elles sont interdites.

M. BURNS: Oui, elles sont interdites, mais dès qu'il y a divulgation, vous semblez croire que tout est à l'épreuve de tout.

M. BOURASSA: ... pense cela.

M. BURNS: Bon, mais ça ne veut pas dire que nous autres au Québec...

M. BOURASSA: Et M. Barrett pense ça.

M. BURNS: ... on va penser la même chose. D'ailleurs, M. Barrett et nous, vous savez, on n'est pas toujours d'accord.

M. BOURASSA: Je pensais que c'était le contraire.

M. BURNS: Non, non. D'ailleurs, il a tenté...

M. BOURASSA: Pour l'annulation, vous n'êtes pas d'accord, mais pour d'autres choses...

M. BURNS: ... de nous faire amende honorable au fédéralisme mais vous savez ce qu'on lui a dit. Mais ce n'est pas ce que je veux dire. Vous parlez de divulgation; il y en a eu une, je parle d'un cas concret, Claurémiand, qui est propriétaire de la compagnie Paragon. Qu'est-ce qui est arrivé? Cela a été divulgué, peut- être pas par les moyens que vous proposez ici. Qu'est-ce qui est arrivé, au moment où on se parle? Qu'est-ce que ç'a changé? Pas grand chose, sinon à un moment donné de jeter un doute, et ça c'est malheureux de jeter un doute sur l'intégrité de l'Etat. Et c'est ça que je trouve malheureux et c'est ça qu'on doit vraiment protéger; on doit se mettre à l'abri de cela. Alors, la divulgation, encore une fois je ne veux pas entrer dans un débat avec le premier ministre mais je lui signale que ce paragraphe, en autres, me laisse des doutes. Et, même si le premier ministre dit que tout est réglé à partir du moment où il y a divulgation, je dis que non, tout n'est pas réglé.

M. BOURASSA: ... parce qu'autrement je n'aurais pas interdit.

M. BURNS: II n'y a pas de sanction. Il y en aura évidemment...

M. BOURASSA: II y a un paquet de conditions qui sont ajoutées dans ces cas-là, même avec seulement 5 p.c. des compagnies privées, il y a beaucoup de conditions qui sont ajoutées. Evidemment, je peux me tromper, mais je suis convaincu que non seulement ça va plus loin que ce qui existe partout au Canada mais que ça permet d'assurer de façon absolue l'intégrité du gouvernement, avec tous les contrôles et tous les moyens qui existent là-dedans et toutes les interdictions.

M. BURNS: Alors, je termine...

M. LEVESQUE: Si on me permet, je vais dire une autre chose, c'est que je suis bien solidaire, j'ai reçu mes directives comme tout le monde, j'ai regardé cela...

M. BURNS: Vous avez tout vendu ce soir?

M. LEVESQUE: Non, non. Mais je dis que...

M. BURNS: Vous en gardez encore?

UNE VOIX: II n'en a pas beaucoup, il peut le garder.

M. LEVESQUE: ... je suis bien d'accord avec les directives, je n'ai pas le choix. Mais si on prend cela à la lettre, c'est embêtant parce que dans nos sociétés...

M. BURNS: C'est bon que ce soit embêtant.

M. LEVESQUE: ... privées dont on ne se départira pas, ça c'est sûr, on ne fait pas affaires avec le gouvernement. Mais supposons que quelques "bright guys" péquistes quelque part dans une de nos sociétés décident de vendre au gouvernement, juste pour nous met-

tre dans de mauvais draps, même une affaire, une peccadille...

M. BURNS: D'abord, vous savez qu'aucun péquiste ne ferait cela.

M. LEVESQUE: Non! M. BURNS: Nulle part.

M. BOURASSA: II n'y a pas de péquiste au gouvernement à cause du contrôle qu'on fait?

M. BURNS: Non, non, vous...

M. LESSARD: II serait peut-être bon d'en avoir...

M. LEVESQUE: Mais supposons, sérieusement...

M. BURNS: On va vous en reparler de ça.

M. LESSARD: Ils ne sont pas au ministère du Tourisme.

M. LEVESQUE: Je demande justement une opinion de mon collègue, leader parlementaire de l'Opposition officielle. Supposons un employé dans le service X, Y, Z d'une compagnie privée dans laquelle on a des intérêts; on donne des directives, je transmets cela, disons, à des gens dans une société dans laquelle j'ai des intérêts: Nous ne vendons pas au gouvernement. C'est facile parce que je n'ai pas vendu au gouvernement. Mais, supposons que quelqu'un, pour me jouer un tour, vend au gouvernement. Qu'est-ce qui arrive?

M. BURNS: Le premier ministre a répondu d'avance...

M. BOURASSA: Bien oui, c'est ça.

M. BURNS: ... tout à l'heure, c'est une question de bonne foi.

M. BOURASSA: Dans quelle position serait le leader? Il y a des démagogues qui vont me demander la démission du leader et je ne peux pas me passer du leader parlementaire. Et ça va créer un doute. Je veux dire, il y a des cas pratiques; le député de Maisonneuve est d'une bonne foi exceptionnelle.

Je suis convaincu qu'on vise les mêmes objectifs, mais s'il avait passé à travers la même démarche depuis quelques mois et toutes les choses qui me sont proposées, j'en ai parlé avec le leader parlementaire. C'est lui qui a le plus d'expérience; le député a été élu en 1952... en 1946?

M. LEVESQUE: 1956.

M. BOURASSA: C'est facile d'arriver puis de dire: interdiction absolue partout, divulgation totale, mécanisme de contrôle étanche. Il y a des cas qui m'ont été soumis, puis on a dit: II faut assumer ses responsabilités d'une façon responsable, mais pas seulement à très court terme. Ce n'est pas parce qu'on a sorti une affaire, en soi peut-être défendable mais qui peut être ennuyeuse parce qu'on l'exploite politiquement, qu'on doit arriver avec des choses qui vont mettre les bâtons dans les roues pendant des années.

M. BURNS: Moi, je n'aime pas les mots "exploiter politiquement".

M. BOURASSA: Je ne pense pas tellement au député de Maisonneuve.

M. BURNS: En tout cas, c'est parce que mon nom a été relié à ça, alors...

M. BOURASSA: Le député a fait son boulot, il a lu ça dans le journal, il a posé des questions. Il ne peut pas faire autrement.

M. BURNS: Bien oui, c'est ça, d'accord.

Je reviens toujours à ce que je disais tout à l'heure, et c'est uniquement dans le but de sauvegarder l'intégrité de l'Etat. Sur ce deuxième point — en tout cas j'achève mes questions sur le deuxième point — les fameux 5 p.c, est-ce que le premier ministre — peu importe que le leader du gouvernement dise que ça n'existe pas une compagnie privée avec un capital-actions de $100 millions — n'accepterait pas de dire 5 p.c. ou un maximum de... je ne le sais pas, là, je n'ai pas de chiffre à la mémoire, je lance au hasard le chiffre de $100,000, par exemple? Le premier ministre, qui s'y connaît, du moins c'est ce qu'il nous dit, dans le domaine des institutions financières...

M. BOURASSA: J'ai fait mes preuves, cinq budgets sans... On ne va pas reprendre ça...

M. BURNS: C'est plus fort que lui, M. le Président, il n'est pas capable. Il l'a tellement apprise, celle-là, qu'elle revient tout le temps.

M. BOURASSA: Je suis prêt à examiner la suggestion de mettre un plafond sur le capital.

M. BURNS: De mettre un plafond, parce que le premier ministre sait fort bien que même si quelqu'un ne détient que 5 p.c. d'actions dans une compagnie, si ces 5 p.c. donnent une somme importante, cette personne a beaucoup d'influence à l'intérieur de la compagnie. En tout cas, c'est une suggestion que je fais en passant.

Une troisième remarque que j'ai...

M. BOURASSA: Je vais examiner la suggestion puis...

M. BURNS: La troisième chose.

M. BOURASSA: On me signale évidemment que les actions montent et varient continuellement; en tout cas je vais examiner la suggestion. Je comprends le point de vue du député, je vais essayer d'en tenir compte dans les changements que je pourrais apporter, mais on me signale que comme ça varie continuellement il pourrait arriver qu'à un moment...

M. BURNS: Cela peut causer un problème à cet égard.

M. LALONDE: En pratique, si on a une compagnie publique, c'est assez facile, parce qu'il y a une cote; pour une compagnie privée ce serait le capital, plus les surplus, moins les pertes et puis, à un moment donné, ça vaudrait $102,000, ensuite ça vaudrait $50,000...

M. BURNS: Le bilan annuel.

M. LALONDE: ... le bilan annuel, puis à un moment donné ça devient illégal, le lendemain ça ne l'est pas.

M. BURNS: Je pense qu'on se comprend, vous savez ce que je veux dire. C'est-à-dire qu'il s'agit...

M. LALONDE: D'un ordre de grandeur.

M. BURNS: ... peut-être de mettre un ordre de grandeur.

M. BOURASSA: C'est pour ça que l'on a dit "de l'ordre", parce que cela peut arriver à 5.2, le chiffre d'affaires ou tout ça; c'est la raison pour laquelle j'ai mis "de l'ordre de 5 p.c".

M. BURNS: La troisième remarque que j'avais à faire là-dessus, la troisième question est qu'on voit apparaître pour la première fois l'expression "agence du gouvernement", qu'on retrouve à la page 6; "le gouvernement du Québec ou l'un de ses organismes", c'est dans le paragraphe 2, à la page 6, juste en haut de la page, et dans le paragraphe 5, on voit encore une fois l'expression "une agence du gouvernement". Je pense qu'on aurait avantage à préciser dans le document ce qu'on veut dire par agence ou organisme du gouvernement. Est-ce que ça veut dire toutes les sociétés de la couronne, est-ce que ça veut dire seulement les corporations, ou si vous voulez dire les organismes du style Commission des accidents du travail? Est-ce que ça va jusqu'aux hôpitaux? Est-ce que ça va même jusqu'aux émanations du gouvernement qu'on appelle les municipalités? Je souligne le fait qu'il y a une ambiguïté, surtout qu'on utilise deux termes: organismes et agence du gouvernement.

M. BOURASSA: Cela exclut, d'après mes informations, les municipalités et les hôpitaux, mais l'Institut de police, par exemple, serait inclus là-dedans.

M. LALONDE: L'organisme, dans ce sens, n'a peut-être pas l'exactitude des légistes.

Je comprends que dans un projet de loi il faudrait que ce soit beaucoup plus précis, mais dans le contexte, organisme est plus large qu'agence. Je ne sais même pas si le mot agence est le mot exact au point de vue technique. L'organisme, cela comprendrait les ministères, cela comprendrait tout cela mais les agences excluraient nécessairement les ministères; ce seraient des organismes qui ont une certaine autonomie comme l'Hydro-Québec, comme les sociétés de la couronne.

M. BURNS: La Société des alcools.

M. LALONDE: La Société des alcools, je comprends, a aussi une certaine autonomie dans son administration.

M. BURNS: Cela visera cela? M. LALONDE: Les agences? M. BURNS: Oui.

M. LALONDE: Je pense que oui; techniquement, oui.

M. BURNS: Pendant qu'on est sur le sujet, est-ce qu'on peut avoir l'avis du premier ministre ou du ministre d'Etat au Conseil exécutif relativement aux hôpitaux, qui sont — tout le monde va l'admettre — un marché? Si on revient encore aux cas connus, si Paragon avait vendu autant de formules mécanographiques aux hôpitaux et aux autres organismes tels que les commissions scolaires et autres, peut-être que le chiffre dont on parlerait actuellement ne serait pas de trois quarts de millions mais il serait peut-être de $1 million et demi ou de $2 millions.

M. BOURASSA: Ce sont les conseils d'administration des hôpitaux.

M. BURNS: Je le sais mais encore une fois et malgré ce que dit le premier ministre...

M. BOURASSA: Ils ne sont même pas nommés par le gouvernement.

M. BURNS: Oui, je sais. Malgré ce que dit le premier ministre, ce sont des organismes tellement intimement liés, qui dépendent du gouvernement, à toutes fins pratiques, pour leur budget.

M. BOURASSA: Ils en dépendent pour les subventions, mais pas pour l'administration.

M. BURNS: Bien, c'est cela.

M. BOURASSA: C'est automatique, leur budget.

M. BURNS: A ce moment-là, quand vous avez un hôpital, n'importe quel...

M. BOURASSA: Si vous incluez tous les hôpitaux, toutes les commissions scolaires, toutes les municipalités, déjà les agences couvrent un nombre considérable d'activités économiques et ça s'accroît tout le temps. L'activité économique de l'Etat s'accroît constamment. Si on inclut tous les organismes subsidiaires, je ne sais pas s'il va rester un secteur où quelqu'un pourra être en affaires et pourra éventuellement faire...

M. BURNS: A partir du moment où il est ministre — surtout qu'on parle seulement des ministres — son affaire, c'est le gouvernement.

M. BOURASSA: C'est cela, mais je veux dire là qu'ils se départissent complètement de toutes ces actions. Le député parle de mon cas mais ça va...

M. BURNS: Bien, c'est le cas le plus connu. C'est pour ça que j'en parle.

M. BOURASSA: ... vouloir dire des problèmes de vente d'actions, même si, disons, tout a été fait — et le député l'a dit — je pense bien d'une façon tout à fait légale et honnête. Je ne pense pas qu'on ait prouvé aucun favoritisme dans les cas qui ont été soumis. Même dans ces cas-là il va falloir, en appliquant les directives — parce que c'est dans le cas des ministères — trouver des acheteurs aux actions. Cela peut être le cas pour d'autres de mes collègues s'ils avaient des actions. Tout cela sera connu le 1er août, quand la liste sera publique.

M. BURNS: En tout cas. La question que je soulève...

M. BOURASSA: Mais je suis d'accord que la définition des agences...

M. BURNS: Oui.

M. BOURASSA: Evidemment, je puis dire au leader parlementaire que ça ne comprend pas les municipalités, ça ne comprend pas les hôpitaux ou les commissions scolaires.

M. BURNS: Je veux simplement soulever au premier minsitre le problème à l'effet que les hôpitaux, entre autres, sont subventionnés dans une proportion absolument extraordinaire. Je me demande si ce n'est pas...

M. BOURASSA: Mais ils décident ce qu'ils veulent.

M. BURNS: Oui, d'accord, mais l'argent, lui, vient d'où exactement?

M. BOURASSA: Pardon?

M. BURNS: L'argent vient du gouvernement. L'argent qui fait fonctionner les hôpitaux.

M. BOURASSA: C'est un peu comme les subventions qu'on reçoit d'Ottawa; on fait ce qu'on veut.

M. BURNS: Je vais vous donner un autre cas, par exemple, les écoles privées qui sont subventionnées à 80 p.c. par le gouvernement.

M. BOURASSA: Oui, mais ce sont des subventions statutaires, à toutes fins pratiques.

M. BURNS: Bien, attendez un peu.

M. BOURASSA: Donc, les hôpitaux ne dépendent pas du gouvernement. Les conseils d'administration sont élus ou nommés; alors, à toutes fins pratiques, il y a autonomie complète. Si on élargit le concept d'agence, on va en venir avec les hauts fonctionnaires, les députés. On va s'arrêter où? Tous ceux qui font affaires avec... Il faudrait que le député réfléchisse un peu. Encore une fois, il est de bonne foi, mais...

M. BURNS: Si vous élargissiez le concept — vous comprendriez ce que je veux dire, si vous aviez assisté aux crédits au ministère du travail aujourd'hui — vous seriez tout à fait en accord avec vos homologues fédéraux, qui, eux, en sont rendus à s'insérer dans le domaine du travail. Le moindrement qu'il y a une construction payée d'une façon ou de l'autre par le gouvernement fédéral, ils jugent que ce sont des constructions qui relèvent du code fédéral du travail, et votre ministre du Travail — je vous le signale en passant — a de sérieux problèmes avec cela. Si vous voulez toujours suivre l'exemple de vos homologues fédéraux...

M. BOURASSA: ... la construction.

M. BURNS: ... il y a un exemple que vous pourriez suivre.

M. BOURASSA: On ne suit pas leur exemple parce qu'on va plus loin qu'eux, y compris pour les femmes.

M. BURNS: Oui, mais ce n'est pas cela que je vous dis. A tout bout de champ, vous nous dites que ce qui vient d'Ottawa c'est bien beau et c'est bien fin. Cela en est un...

M. BOURASSA: C'est de l'argent, cela diminue les taxes.

M. BURNS: C'en est un des cas où eux autres ont décidé que, le moindrement qu'ils se mettaient le nez dans quelque chose, ils étaient impliqués.

M. BOURASSA: Qu'est-ce qui arrive dans

une construction? Si un ministre construit une maison, là aussi il peut y avoir des conflits d'intérêts. C'est assez difficile de circonscrire ça. Mais on a pensé à mettre le gouvernement et les ministères où le ministre est directement impliqué, les agences comme SOQUEM ou SIDBEQ où l'autonomie de gestion, à toutes fins pratiques, est complète. Il reste peut-être une troisième catégorie.

M. BURNS: Vous savez que votre texte actuellement, on pourrait l'interpréter de la façon suivante: un ministre pourrait même avoir un hôpital privé pour malades chroniques, subventionné par le gouvernement, puis il n'y aurait pas de problème.

M. BOURASSA: Cela serait couvert par l'article 6. C'est incompatible.

M. BURNS: Par l'article 6: "II pourra lui être demandé que lui-même et sa famille..."

M. BOURASSA: Oui.

M. BURNS: Encore une fois, c'est un pouvoir discrétionnaire.

M. BOURASSA: C'est le premier ministre qui émet des directives à ses collègues et qui les applique. Tout est divulgué complètement. On suggère l'hôpital; ça va être divulgué, ça. L'opinion publique va dire : Comment se fait-il que le ministre a un hôpital pour malades chroniques? C'est évident que, le lendemain, on va demander qu'il se départisse...

M. BURNS: Si le premier ministre répond qu'il n'y a rien d'illégal là-dedans, qu'est-ce qui va arriver?

M. BOURASSA: C'est à la population de juger.

Il est possible que la population trouve qu'on va trop loin là-dedans.

M. LALONDE: Mais peut-être que, à moins que j'interprète...

M. BOURASSA: J'ai des gens très responsables qui m'ont signalé que ça allait trop loin inutilement.

M. LALONDE: Pour l'exemple de l'hôpital privé, ce serait une société privée qui ferait un marché d'Etat avec le gouvernement; c'est défendu. Il serait obligé de se départir de ses actions.

M. LESSARD: Qui reçoit des subventions.

M. LALONDE: Bien oui, un marché d'Etat, ça comprend recevoir des subventions. Alors, c'est défendu par un des premiers articles qui parle des marchés d'Etat.

M. BURNS: L'article 2. Je vous signale que, de ce côté, il y a peut-être quelque chose à scruter.

UNE VOIX: C'est positif.

M. BOURASSA: On interdit les terrains, vous avez remarqué ça?

M. LESSARD: Oui, c'est que, dans le cas où un individu est membre d'une corporation privée qui fait affaires avec le gouvernement et qui, à la suite d'une élection est élu député et par la suite est nommé ministre, il y a une clause qui précise qu'il doit se départir de ses actions dans une période de douze mois. Mais, dans le cas où le ministre qui participe à un marché avec l'Etat, par la voie d'une société privée au moment de l'entrée en vigueur de cette clause, le délai n'est pas précisé. On dit: "A ce moment-là, le ministre devra se départir de ses actions dans les meilleurs délais, compte tenu du temps nécessaire à cette disposition." Est-ce que la clause de douze mois qui est prévue ne pourrait pas s'ajouter dans ce cas-là aussi?

M. BOURASSA: En pratique oui, mais je n'ai pas voulu le fixer d'une façon précise pour des raisons évidentes, parce que, plus on va approcher de la date, moins le ministre pourra avoir un prix raisonnable pour ses actions. Déjà, il faut se demander si les ministres, comme le disait le député de Maisonneuve, doivent être prêts à assumer des pertes financières s'ils font de la politique.

M. LESSARD: Mais c'est la même chose lorsque...

M. BOURASSA: Mais c'est clair qu'avec la pression, il ne pourra pas attendre tellement longtemps; douze mois, c'est le grand maximum. Si je dis: D'ici telle date, il s'agira que les vendeurs conscients de la directive disent: On ne fera pas d'offre d'achat jusqu'à ce que le délai écoulé et il va être obligé de nous les donner.

M. LALONDE: Je voudrais apporter une précision là-dessus.

M. LESSARD: Mais quelle différence il y a...

M. LALONDE: Oui, il y a une différence justement. C'est que le député a mentionné le paragraphe 2 de la page 3 qui prévoit que, s'il devient député, ensuite ministre, il a un certain délai pour s'en départir. Le dernier paragraphe se lit comme suit: "Le ministre qui participe à un marché d'Etat par la voie d'une société privée au moment de l'entrée en vigueur de cette règle." C'est qu'à partir du 11 août 1974 on change les règles du jeu. Ce n'était pas prévu, ça, avant les élections et avant que le gars

accepte d'être porté candidat et soit nommé ministre. C'est pour ça que c'était plutôt une supposition de transition pour la période actuelle de l'entrée en vigueur, mais qui va devenir de moins en moins nécessaire à mesure que le temps va passer et que les règles auront été en vigueur depuis longtemps.

M. LESSARD: C'est une disposition qui s'applique aux ministres actuels, parce qu'on change les règles du jeu à la suite de cette nouvelle disposition.

M. LALONDE: II était plus difficile de prévoir une date précise ou une période précise.

M. LESSARD: Oui, mais dans un délai raisonnable, de toute façon, il est assuré, justement, que plus il va retarder, plus ses actions aussi, parce qu'il va y avoir une pression morale qui va être faite sur le ministre.

Le premier ministre me répond qu'il y a un danger que le prix de ces actions devienne de moins en moins important, de moins en moins élevé; plus il va retarder, plus cette tendance peut se faire sentir. Alors, je me demande s'il n'y aurait pas moyen quand même de préciser au moins, un délai maximum. Un délai raisonnable, c'est quoi "compte tenu du temps nécessaire à sa disposition". Cela veut dire, par exemple que, encore là, tout tourne autour, comme on le disait...

M. BOURASSA: Parce qu'il y a des implications financières.

M. LESSARD: Par exemple, dans le cas de M. Claude Simard, qui est ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, qui est actionnaire de Claurémiand, est-ce qu'un délai raisonnable pour lui va être 12 mois, ou 24 mois, ou 36 mois?

M.BOURASSA: Bien non! il n'est pas question de cet ordre de grandeur-là. Mais il va falloir faire des études pour vendre des actions. Comme ce sont des compagnies privées, il va falloir que des comptables évaluent ça d'une façon objective. Si c'était coté à la Bourse, j'aurais dit une semaine. Mais comme ce n'est pas coté à la Bourse, il va falloir que des comptables évaluent ça. Ils vont dire: Cela vaut tant. Alors, on peut être pris à attendre un peu, mais pas deux ans ou même inférieur à ça.

M. BURNS: Quand même, vous ne trouvez pas que douze mois, c'est un peu...

M. BOURASSA: Oui, oui. Je ne parle pas de cet ordre...

M. LALONDE: Les douze mois, le député se réfère à la règle précédente. Cela a été emprunté.

M. BOURASSA: Cela m'étonnerait énormément que cela aille jusque là. Je pense que cela va être beaucoup plus court que ça. Pour des raisons de valeurs des actions, je ne vois pas pourquoi on pénaliserait des gens qui font quand même déjà pas mal de sacrifices pour faire de la politique. Je me suis dit: On va mettre un délai raisonnable, mais ce n'est pas en termes d'années, certainement pas, en termes de semaines et, au mieux, en termes de mois.

M. LALONDE: Maintenant, pour les douze mois, est-ce que je peux préciser? A au moins deux endroits, je me souviens de l'avant-projet de loi fédéral, qui est annexé au livre vert de M. MacEachen, on mentionne cet ordre de grandeur, je pense que c'est douze mois. Je crois qu'un autre projet de loi ou une directive en vigueur ailleurs aussi le mentionne. Alors, cela peut être six mois. C'est une question de délai raisonnable.

M. BURNS: J'inciterais le premier ministre à diminuer sa directive parce que, quand même, douze mois, il peut se faire bien du batifolage durant cette période-là. Dans le fond, le but qu'on vise, c'est qu'il n'y en ait pas. Et cette nouvelle situation d'un individu, d'un simple citoyen qui se retrouve ministre, bien que je sois d'accord que cela transforme bien des choses dans sa vie, même juste devenir de simple citoyen à député, je pense que cela change bien des choses. Mais cela ne veut pas dire quand même que cela peut lui prendre une année complète pour mettre de l'ordre dans ses affaires.

En tout cas, je suggérerais très fortement au premier ministre de réviser ce délai en tentant de le diminuer le plus possible.

M. BOURASSA: Je n'ai pas d'objection. M. BURNS: Pour ce cas là...

M. BOURASSA: Je vais voir comment on peut faire ça.

Propriétés foncières.

M. BURNS: Juste avant ça... Non, cela va, c'est couvert par l'élément du député de Saguenay. Propriétés foncières.

M. LESSARD: D'abord, on dit: "Pour des ministres qui sont en fonction, il leur sera interdit — à la page 4, premier paragraphe — ainsi qu'à leur famille immédiate d'acheter, pour des fins de spéculation, un terrain ou d'acquérir des intérêts dans une propriété foncière". Pour des fins de spéculation, je comprends, généralement, ce qu'on entend par "fins de spéculation". Mais, à un moment donné, par exemple, lorsqu'il s'agit de le préciser, certains peuvent dire, par exemple, que lorsqu'ils achètent une propriété foncière, ils

ne l'achètent pas pour des fins de spéculation. Mais, quatre ou cinq ans après, ce n'est plus la même chose. Alors, est-ce que le terme n'est pas une imprécision? C'est difficile...

M. LALONDE: C'est imprécis dans la nature même parce que la spéculation, au moment de l'acquisition, est une question d'intention.

M. LESSARD: C'est ça.

M. LALONDE: C'est un peu comme dans les questions financières. Si vous vendez un investissement que vous avez depuis un certain nombre d'années, surtout dans le temps où il n'y avait pas d'impôt sur les gains de capitaux, là on essayait de déterminer, par toutes sortes de preuves circonstantielles, l'intention que vous aviez au moment où vous aviez fait le placement.

Par la nature même du concept de spéculation, cela doit nécessairement être sujet à toutes sortes de circonstances, jugé d'après les circonstances.

Je suis d'accord avec le député qui dit que c'est seulement après un certain temps qu'on s'aperçoit que le gars a voulu faire de la spéculation avec cela, mais c'est assez difficile, même dans une loi, de déterminer ce que c'est, la spéculation.

Je pense bien qu'on peut dire que quelqu'un qui achète un terrain sans l'exploiter pourrait avoir l'intention de faire de la spéculation, c'est-à-dire de le revendre avec profit seulement par l'effet de l'augmentation du marché, alors que celui qui achète un terrain et qui construit une maison ou un immeuble quelconque pour l'utiliser, pour lui ou pour d'autres, n'en ferait pas. En fait, il y a une série de circonstances qui peuvent déterminer quand il y a intention de spéculation.

La directive, je pense, exprime le désir du premier ministre que ses ministres ne se vouent pas à la spéculation consciente. C'est peut-être seulement au bout de six mois qu'on va s'apercevoir que, six mois avant, c'est ce qu'il avait fait. A ce moment-là, c'est une question difficile à régler.

M. BURNS: Le ministre sait-il qu'il existe une définition légale, actuellement, en Ontario, qui a été adoptée il y a moins d'une semaine?

M. LALONDE: Pour la spéculation?

M. BURNS: Oui.

M. LALONDE: Je ne sais pas à quelle...

M. BURNS: Dans la Loi créant l'Ontario Land Corporation, il y a une définition de la spéculation, en Ontario.

M. LALONDE: A ce moment-là, si elle était facilement empruntable et adaptable, peut-être que cela pourrait nous aider.

M. BURNS: Je ne sais pas si vous voulez aller là ou si vous voulez aller plus loin dans votre définition de la spéculation, mais cette définition s'attaque surtout à un terrain non construit...

M. LALONDE: C'est ça. Je pense qu'essentiellement c'est ça.

M. BURNS: ... qui est revendu avec profit sans qu'amélioration lui soit apportée.

M. LALONDE: Oui. Mais au moment de l'acquisition, comment prouvez-vous...

M. BURNS: C'est au moment de la revente.

M. LALONDE: C'est au moment de la revente que cela peut se faire. Cela s'est fait dans un certain nombre de circonstances. Comme le député de Maisonneuve le dit, deux sont assez faciles à établir : le défaut de faire des améliorations dessus ou de construire. Mais, au moment de l'acquisition, on doit nécessairement se fier à la déclaration de l'acquéreur.

M. LESSARD: Si le ministre, par exemple, par certaines informations, estime que la nouvelle route qu'on va construire dans deux, trois ou quatre ans va passer sur un terrain et décide de l'acheter, à ce moment-là, pour lui, il n'y a pas de spéculation...

M. LALONDE: Non.

M. LESSARD: ... dans son idée. Il peut avoir des informations, cependant, qui lui permettent de prendre un risque calculé. Mais c'est seulement sept ou huit mois ou un an ou deux ans après qu'on va constater qu'il y avait eu véritablement spéculation à ce moment-là.

M. LALONDE: Ou intention de faire un profit, non pas par le marché, mais par le fait qu'une route passerait là.

M. LESSARD: Des informations, comme ministre.

M. LALONDE: Je dois peut-être attirer l'attention du député sur la Loi de la Législature qui, sans mentionner particulièrement ce cas, défend à un député de vendre un terrain au gouvernement, sauf par voie d'expropriation. L'indemnité est déterminée nécessairement par la Régie des services publics et non pas de gré à gré pour les terrains qui sont vendus pour des fins de travaux publics.

Cela, c'en est une sauvegarde qui est déjà inscrite dans la loi.

M. BOURASSA: Compagnies publiques?

M. BURNS: Non, toujours dans cette page 4, M. le premier ministre, vous avez le dernier paragraphe...

M. BOURASSA: Compagnies publiques, cela va. Fiducies, il est possible...

M. BURNS: Non, non, on n'est pas rendu là encore.

M. BOURASSA: Ah ! Le dernier paragraphe de...

M. BURNS: Le dernier paragraphe de 4, à la page 4, où on lit que "rien n'empêche l'acquisition de terres agricoles par un ministre qui se propose d'en faire l'exploitation — je pense bien que c'est assez clair, on sait ce que cela veut dire — ni l'acquisition, personnellement ou par des sociétés privées, d'immeubles devant servir à des fins commerciales normales".

C'est quoi, cela, des "fins commerciales normales"?

M. LALONDE: Cela a été emprunté assez littéralement de l'Ontario. La directive de M. Davis faisait la distinction justement avec des fins commerciales anormales que j'ai interprétées comme étant de la spéculation. C'est pour ça que je crois que c'est mieux de mettre le terme spéculation. Dans la directive de l'Ontario il n'y avait pas ce terme. Je crois — en fait c'est une question d'opinion — que ce serait pour fins commerciales normales, c'est-à-dire acheter un duplex ou un édifice à bureaux, un édifice pour faire un commerce et non pas pour faire de la spéculation avec le terrain. Cela serait permis, sujet naturellement à toutes les obligations de divulgation qui sont ajoutées.

M. BURNS: C'est votre interprétation de l'affaire.

M. LALONDE: Pour s'acheter un édifice à bureaux, il y aurait évidemment l'interdiction de conclure un marché avec l'Etat, avec le gouvernement; parce que c'est un commerce susceptible de conclure un marché avec l'Etat, il ne pourrait pas louer au gouvernement.

M. BURNS: Même pas à la Société des alcools?

M. LALONDE: Non.

M. BURNS: Même pas par un fiduciaire?

M. LALONDE: Non, un fiduciaire, c'est seulement pour les compagnies publiques.

M. BURNS: C'est parce qu'un cas me vient à l'esprit. Celui qui a coûté tellement cher.

M. BOURASSA: Cela a coûté cher aussi au ministre. Des pertes financières importantes.

M. BURNS: Vous nous avez bien fait brailler, cette fois-là.

A l'article 5, M. le Président, Compagnies publiques, là encore il y a des mots, c'est peut-être ma mauvaise compréhension du texte...

M. BOURASSA: On n'a pas encore de trust aveugle au Québec. On me dit que l'office de révision va en proposer un. C'est pour ça que nous sommes obligés de parler de dépôt fiduciaire et de mandat.

M. BURNS: Oui, mais là...

M. BOURASSA: En attendant qu'on en ait un.

M. BURNS: ... où je me pose des questions, encore une fois, c'est peut-être que je n'ai pas le brio nécessaire pour interpréter le texte, c'est aux mots: "Compte tenu du régime de la fiducie au Québec et des implications fiscales". Que veut-on dire exactement?

M. BOURASSA: On n'a pas eu d'avis juridique ferme disant qu'il ne pourrait pas y avoir d'impôt, mais je crois que ça ne devrait pas être imposable. Si quelqu'un transfère un dépôt fiduciaire, il n'y a pas de taxe sur les gains de capital. C'est pour ça qu'on a mis cette réserve, mais je ne prévois pas que ça cause de problème. Deuxièmement, compte tenu du régime de la fiducie au Québec; on n'a pas encore de trust aveugle, quand on en aura un...

M. BURNS: J'avais compris cette partie-là, mais la partie sur laquelle j'insistais c'était: "Compte tenu... des implications fiscales".

M. BOURASSA: C'est-à-dire que, comme la plupart des ministres vont transférer leurs actions publiques, tous les ministres, à toutes fins pratiques, vont le faire en fiducie...

M. BURNS: Même votre action dans Bras-can?

M. BOURASSA: Non, je l'ai vendue pour ma contribution au congrès de leadership mais le congrès, momentanément, n'a pas lieu, quoi-qu'avec les récents sondages peut-être que ça va l'avancer. En tout cas j'ai mis l'argent en banque et le député me fera signe quand il voudra l'avoir.

M. BURNS: Quel congrès?

M. LESSARD: Allez-vous l'appuyer?

M. BOURASSA: On connaît mes tendances social-démocrates.

Qu'est-ce que le député me posait comme question? Pour la question de la fiscalité, comme tous les ministres vont transférer leurs actions de compagnies publiques, s'il y a des taxes sur les gains de capital, ça peut vouloir dire des montants considérables pour tous les

ministres. Je ne prévois pas qu'il y en ait. On a consulté certains experts fiscaux et ils n'en prévoient pas. Mais je veux être sûr et c'est pour cela que j'ai mis cette réserve-là. Parce que ça veut dire que toutes les actions qui vont être transférées, il faudra payer la taxe. Alors, là il faudrait peut-être penser à une autre formule mais je suis à peu près assuré que le dépôt fiduciaire n'implique pas une taxation.

Cela c'est en attendant le trust aveugle mais, quand les conclusions de l'Office de révision du code civil seront appliquées, il n'y aura pas de problème. Ce sera seulement en attendant que nous aurons cette formule.

M. BURNS: A l'article 6, encore une fois, je signale l'aspect discrétionnaire qui est encore une fois laissé...

M. BOURASSA: Est-ce en Ontario? Je pense que c'est à Ottawa. On a pris ça des directives fédérales.

M. BURNS: Vous risquez d'avoir des directives replâtrées si vous prenez quelque chose à Ottawa, quelque chose en Colombie-Britannique, quelque chose en Ontario.

M. BOURASSA: On a pris le meilleur de ce qui existait partout. En Colombie, ils excluent les femmes; nous, nous les avons incluses. On a pris ce que nous avons jugé de meilleur dans tout le système et nous avons abouti avec des interdictions, des divulgations et des mécanismes de contrôle.

M. BURNS: Je vous signale simplement — c'était le but de ma remarque — je vous signale encore...

M. BOURASSA: La quintessence de ce qui se fait ailleurs.

M. BURNS: ... le pouvoir discrétionnaire qu'on aperçoit à l'article 6 de la directive lorsqu'on mentionne qu'il "pourra" lui être demandé que lui-même ou sa famille immédiate se départisse d'un placement dans une compagnie privée. Il y a encore un manque de rigueur, je pense.

M. BOURASSA: Je pense au cas de la compagnie de téléphone Bell, avec le ministre des Communications ou le ministre des Richesses naturelles dans une compagnie minière publique ou...

M. BURNS: Encore une fois, je vous parle sur le plan de la forme.

M. BOURASSA: ... le ministre des Terres et Forêts dans les compagnies de pâtes et papiers.

M. BURNS: Non, mais je vous parle sur le plan de la forme en ce sens qu'il "pourra" lui être demandé. Pourquoi n'y va-t-on pas carrément et ne dit-on pas que...

M. BOURASSA: Là, il va falloir... M. BURNS: ... on exigera de lui...

M. BOURASSA: ... définir les cas. C'est pour ça que j'ai pris...

M. BURNS: Bien non, vous l'avez dit...

M. BOURASSA: Si je dis "ils ne peuvent pas", ils vont dire: Dans quels cas?

M. BURNS: Vous l'avez dit au début: En raison de la nature des attributions d'un ministre envers un type donné d'activités commerciales ou financières. Déjà, il y a du flou là.

M. BOURASSA: Bien, il "pourra" lui être demandé.

M. BURNS: Je pense qu'on doit l'exiger. On doit être très clair à cet endroit et dire: II devra s'en départir.

M. BOURASSA: II faut comprendre "pourra" par "devra", un peu comme on...

M. BURNS: Bon, dites-le.

M. BOURASSA: Je veux dire que ce sont les formules des juristes. Le député de Maisonneuve est plus près des juristes que je ne le suis.

M. BURNS: C'est ça, mais les juristes, j'en vois quelques-uns derrière vous qui savent comme vous et moi, peut-être comme moi et eux, que quand on dit quelque chose dans un texte, il faut que ça ait son plein sens.

M. BOURASSA: Je veux dire au député...

M. LESSARD: II faudrait que ce soit plus clair que le bill 22.

M. BOURASSA: ... qu'il l'interprète comme...

M. BURNS: En matière d'interprétation, justement, le mot "pourra" n'impose jamais une obligation.

M. BOURASSA: Mais je veux dire qu'il peut l'interpréter comme "devra".

M. BURNS: A ce moment-là, il faudrait écrire "devra". Qu'il exigera de lui, ou quelque formule du genre.

M. BOURASSA: La jurisprudence nous guide dans ces choses-là, on prend...

M. LESSARD: Au paragraphe...

M. BURNS: La jurisprudence vous dirait que ça n'impose aucune obligation dans ce cas-là. Or, je trouve qu'il devrait y avoir une obligation claire et que le texte ne devrait aucunement être ambigu. Quand on dit qu'il pourra lui être demandé, imaginez-vous, on utilise le "pourra" avec le "demandé". On va se mettre à genoux devant le ministre qui détient les trois quarts des actions de Bell; même s'il est ministre des Communications, on va se mettre à genoux devant lui.

M. BOURASSA: Des cas théoriques... M. BURNS: Non, non, mais...

M. BOURASSA: ... il n'y a pas de directive qui va...

M. BURNS: Si vous en voulez des grosses, on va vous en faire des grosses.

M. BOURASSA: ... à moins de se limiter aux Franciscains comme personnel politique, il n'y a pas de directive qui va satisfaire le député de Maisonneuve avec des cas théoriques. Je ne pense pas que le député de Deux-Montagnes puisse jamais avoir les trois quarts des actions de la compagnie de téléphone Bell, loin de là.

M. LALONDE: Maintenant, si je peux ajouter que si on avait écrit "il devra se départir d'un placement", il faudrait dire exactement quelle sorte de placement. C'est un peu dans le style de la phrase qui infère que selon la nature de ses fonctions, de ses attributions, la nature de son placement, il y aura une vente nécessairement.

M. BURNS: Je vous dis tout de suite que vous avez un texte qui n'aura jamais aucune application. Vous avez déjà du vague dans le début du texte; vous avez un "pourra" qui vient s'ajouter et une demande qui est faite.

M. BOURASSA: D'accord. Je dis au député, parce qu'on ne va pas faire de corrections, de considérer — et je le dis au journal des Débats — "pourra" comme "devra". Parce que c'est ce qu'on voulait dire, et si on a employé la formule "pourra", c'est que dans les textes similaires, c'est la formule qu'on employait. Mais je veux dire au député, que pour être très clair, c'est dans le sens de "devra", je veux dire juridiquement.

M. BURNS: Encore une fois vous avez pris des textes anglais et vous avez traduit. En anglais, ils ont peut-être un petit peu plus de poids que ça.

M. BOURASSA: Peut-être qu'en anglais... M. BURNS: Je le dis sérieusement... M. BOURASSA: D'accord.

M. BURNS: ... parce qu'en droit statutaire, une expression de ce type peut avoir plus de poids, selon le contexte, évidemment.

M. BOURASSA: II faut dire que le français n'est pas encore la seule langue officielle au Québec, mais il reste que je prends note de ce que dis le député de Maisonneuve. Ce texte est une traduction, c'est vrai, de ce qui se fait dans d'autres provinces et au fédéral. C'est pourquoi, pour une traduction, on a "pourra" plutôt que "devra". Exceptionnellement, ce sont les cas d'intérêt public ou les cas insignificants, je veux dire s'il arrive un cas...

M. LESSARD: II y a encore de la discrétion.

M. BOURASSA: Je veux dire que la commission des engagements financiers va examiner cela. Quels cas me signaliez-vous, M. le leader, là-dessus? Le leader m'a amené une centaine de cas en disant: Avez-vous de ces affaires-là? Il n'est pas...

M. BURNS: II n'a pas tant d'actions que cela.

M. BOURASSA: Non, mais ce sont des cas comme ça, des cas insignifiants, qui ne devraient pas engager la démission d'un ministre. Il faut se garder un peu de marge de manoeuvre c'est-à-dire au cas...

M. BURNS: Bien non, il ne faut pas. Justement, c'est ça. Voyez-vous, vous venez justement de lâcher l'affaire, là.

M. BOURASSA: Non, mais dans des cas comme ceux-là, je veux dire que c'est le bon sens. Un ministre est propriétaire d'une quincaillerie, puis un fonctionnaire va aller acheter un marteau, puis il va être obligé de démissionner?

M. BURNS: Bien, vous exagérez dans le sens contraire de celui que vous me blâmiez d'utiliser tout à l'heure.

M. LEVESQUE: Non, mais, si on suit les directives à la lettre, n'est-il pas vrai que le fonctionnaire du ministère des Transports, qui est à court d'un marteau ou d'une chaudière ou d'un balai; ça presse, puis il entre, il achète; le commis lui vend, sans même la connaissance du ministre qui est propriétaire de la quincaillerie en question ou de la chaîne de quincailleries. Qu'est-ce qu'il arrive si quelqu'un veut faire une cause au ministre?

M. BURNS: Vraiment, là, c'est en faire de l'enculage de mouche.

M. BOURASSA: Cela peut arriver. Qu'est-ce qui peut empêcher ça?

M. BURNS: Bien, écoutez, ce n'est pas...

M. BOURASSA: Ou un camion qui se fait réparer dans un garage du ministre; qui peut empêcher ça? Le ministre n'est pas là dans son garage pour vérifier tous les camions qui se font réparer, pour voir si c'est un camion de SOQUEM qui se fait réparer. Je ne veux pas... C'est pour ça... Je voudrais que le député de Maisonneuve réfléchisse cinq minutes. Il va voir qu'à moins d'être complètement cinglé, on va le plus loin possible, en tenant compte des interdictions, puis des divulgations.

M. BURNS: Est-ce que vous me conseillez de faire venir mon ancien chef parlementaire?

M. LALONDE: II y a une chose importante qu'il faut peut-être considérer dans le paragraphe b). C'est la commission parlementaire des engagements financiers qui est probablement l'organisme le plus indépendant, qui n'est pas du gouvernement, qui est une créature de l'Assemblée nationale.

M. BURNS: Ou la commission des comptes publics.

M. LALONDE: Bon, en fait, c'est celle des engagements financiers, une commission parlementaire, un organisme indépendant, qui pourrait scruter ça. C'est réellement, je crois, ajouter la garantie la plus éloignée possible de l'influence. Il y en a peut-être d'autres.

M. BURNS: M. le ministre, est-ce que je peux vous signaler — ça fait deux ou trois fois que vous et le premier ministre, vous référez à la commission des engagements financiers — qu'on ne sait pas quand elle va siéger, cette fameuse commission, parce qu'actuellement on a un léger conflit relativement à l'enregistrement des débats de cette commission.

M. BOURASSA: Le député a parlé de la commission de l'Assemblée nationale tantôt. Si c'est plus commode, disons que ce que je peux dire au député, c'est que, quand un cas comme ça me sera soulevé, mettons qu'un fonctionnaire va acheter un objet dans une quincaillerie qui appartient à un ministre, je vais communiquer avec le leader ou le chef de l'opposition, puis je vais dire: Voilà le cas. On va réunir la commission parlementaire.

M. BURNS: Avec le marteau.

M. BOURASSA: C'est ça. Le député va dire: Cela n'a pas de sens de demander la démission du ministre, parce qu'un fonctionnaire est allé acheter le marteau, puis on va mettre fin à la commission. Si on fait ça d'une façon trop... Encore une fois, ça n'existe nulle part ailleurs, sauf en Ontario, dans certaines catégories. Alors, il ne s'agit pas d'arriver avec des interdictions qui vont aboutir au ridicule ou à l'injustice.

Là, on est rendu à la divulgation?

M. BURNS: D'accord, on est rendu à la déclaration. Il y a un mot qui, encore une fois, me choque, me fait sursauter, à la fin du premier paragraphe: "lorsqu'il y a des changements significatifs". Moi, il me semble que cette déclaration devrait être faite quels que soient les changements, significatifs ou non, car qui va décider du côté significatif des changements? C'est peut-être pour le ministre en question un détail; il va peut-être dire...

M. BOURASSA: II n'y a pas de problème. C'est ce qu'on veut dire, c'est qu'à chaque année...

M. BURNS: Non, non, ce n'est pas ça. On dit que "le ou vers le 1er juillet prochain et le 1er août de chaque année, pendant la durée de ses fonctions, une déclaration contenant les informations suivantes et tenir à jour..." Cela veut dire que, s'il y a un changement qui se passe, il doit l'ajouter à sa déclaration. S'il fait sa déclaration le 1er août — c'est ainsi que je comprends le texte — et si, le 1er septembre, même s'il l'a faite le 1er août, il arrive quelque chose de nouveau dans sa situation financière, il doit mentionner le changement. Mais ce que je n'aime pas, c'est d'abord le mot significatif, parce qu'encore une fois on est dans le domaine de la discrétion. Cela prend quoi pour que ce soit singificatif? Est-ce qu'il faut que ce soit plus de $100, plus de $1,000 ou de $1,500 ou de $10,000?

M. LALONDE: Vous avez, par exemple, à l'article 3, le nom, l'occupation et l'adresse de tout créancier individuel, etc. Si ce créancier change d'adresse, est-ce un changement significatif?

M. BURNS: Non, ça ne change...

M. LALONDE: Pour cela, il n'est pas obligé d'amender sa déclaration.

M. BURNS: Non, non, mais...

M. LALONDE: Maintenant, s'il fait un emprunt...

M. BURNS: ... à ce moment-là spécifiez les changements concernant la situation financière elle-même. C'est sûr qu'on ne veut pas savoir que le gars a déménagé de la rue Saint-Jean à la Grande-Allée, ce n'est pas ça qui nous intéresse.

M. BOURASSA: II n'y a à peu près pas de divergence dans les remarques que fait le député de Maisonneuve ce soir. Il s'agit de serrer à certains endroits et, dans certains cas, le député va admettre qu'il faut quand même un peu... Je suis prêt à en tenir compte. On pense la même chose, sauf qu'on va peut-être l'écrire différemment.

M. LALONDE: On aura peut-être un mot plus heureux, je ne l'ai pas à l'idée.

M. BURNS: Je suis d'accord avec le ministre s'il veut dire "significatif" dans le sens que ce n'est pas significatif que son créancier ait déménagé de trois rues. Je suis d'accord avec lui. Ce que je veux dire, c'est que s'il achète, trois mois après avoir fait sa déclaration, des actions dans une autre compagnie...

M. LALONDE: Cela, c'est significatif.

M. BURNS: ... il me semble que ce n'est pas le montant des actions qui va faire que c'est un changement significatif.

M. BOURASSA: Le député se rend compte combien il va être difficile de mettre cela dans un texte de loi.

M. BURNS: J'ai des suggestions à faire au premier ministre sur le plan d'un projet de loi. Je lui offre, comme je l'ai fait à plusieurs reprises...

M. BOURASSA: Ses services.

M. BURNS: ... d'être son conseiller juridique.

M. BOURASSA: Ah! d'accord. M. BURNS: S'il veut m'écouter...

M. BOURASSA: Dans le cas du Soleil, cela avait été utile. Il avait été obligé de contredire son collègue, le député de Saint-Jacques.

M. BURNS: ... cette fois-là, peut-être qu'il se lancera dans une bonne voie.

M. BOURASSA: D'accord, j'accepte l'offre...

M. BURNS: D'ailleurs, le rôle de l'Opposition est d'aider le gouvernement.

M. BOURASSA: ... de services, à titre gratuit, du député de Maisonneuve. Parce que c'est contre les directives qu'il soit rémunéré.

M. BURNS: Ce n'est pas à titre gratuit, je suis déjà rémunéré pour cela, M. le Président.

M. LESSARD: Encore au niveau du paragraphe 7, concernant la déclaration, au sous-paragraphe 1 il est dit: Le nom de toute société... "Le ministre devra dévoiler le nom de toute société privée dans laquelle il détient..." Est-ce qu'on ne pourrait pas ajouter: Dans laquelle il détient directement ou par personnes interposées ou par compagnies interposées?

M. BOURASSA: Cela, ça se trouve...

M. LESSARD: Là, c'est au niveau de la déclaration.

M. BOURASSA: Je ne sais pas si ç'a été prévu. C'est ce que ça veut dire.

M. LESSARD: Oui, mais pourquoi ne l'ajouterait-on pas? D détient directement ou...

M. LALONDE: D'accord, on peut mettre tout le langage légaliste là-dedans.

M. BOURASSA: Je dis au député que c'est ce que ça veut dire.

M. LESSARD: Vous savez que les lois doivent être faites de la meilleure façon possible.

M. BOURASSA: Ah oui, d'accord!

M. LESSARD: Est-ce que le premier ministre accepterait d'ajouter, après "il détient", les mots "directement...

M. BOURASSA: Directement ou indirectement.

M. LESSARD: ... ou par personnes ou compagnies interposées...

M. LEVESQUE: II n'y a qu'à dire "directement ou indirectement".

M. LESSARD: ... des intérêts"?

M. LALONDE: Comme on l'a mis dans l'interdiction.

M. LESSARD: D'accord, c'est justement cela, directement ou indirectement. Pourquoi précise-t-on seulement les sociétés privées? Pourquoi ne pas préciser aussi les intérêts qu'il peut détenir dans les sociétés publiques?

M. BOURASSA: Parce qu'elles sont confiées à une Société de fiducie, les sociétés publiques. C'est en fiducie. Il est admis, dans toutes les autres juridictions, que dans le cas des sociétés publiques, si c'est remis en fiducie et si le ministre renonce quand c'est remis en fiducie, dans un "blind trust", il n'a aucun contrôle. Dans ces cas-là, il n'y a pas nécessité de divulgation parce qu'il n'y a pas de possibilité de conflit d'intérêts. Si le ministre refuse de confier cela à une société de fiducie, là, il sera obligé de les dévoiler. C'est cela?

M. LALONDE: Je regrette. S'il ne les confie pas à une société de fiducie, il faut qu'il s'en départisse. L'interdiction lui donne le choix soit de se départir des actions de compagnies publiques ou de les mettre en fiducie. Le choix, naturellement, existe pour être pratique. Le député qui a pour $500 d'actions dans une compagnie publique, il va sûrement probablement choisir de s'en départir parce

que le coût de la fiducie peut être assez prohibitif. On l'a mentionné dans notre rapport. C'est pour cela qu'on veut donner le choix. De toute façon, autrement dit...

M. LESSARD: S'il n'est pas obligé de dévoiler, justement, qu'il est propriétaire d'actions dans une société publique, comment le premier ministre pourra-t-il être assuré que ce ministre va confier à une société de fiducie l'administration de ses actions?

M. LALONDE: C'est un peu comme prouver l'absence, prouver la non-existence; du fait qu'il a une obligation de s'en départir ou de les confier, je crois, découle nécessairement l'impossibilité de divulguer ce qu'il a.

M. BOURASSA: S'il ne le fait pas, il ne respecte pas la loi...

M. LALONDE: II ne respecte pas...

M. BOURASSA: Si le ministre, par exemple, refuse de les mettre en fiducie...

M. LALONDE: Ce serait illogique de lui demander de divulguer des choses dont on vient de lui demander de se départir, soit par la fiducie soit en les vendant.

M. LESSARD: S'il s'en est départi, il n'est pas obligé de le déclarer, à ce moment-là.

M. BOURASSA: II n'a rien à déclarer.

M. LESSARD: C'est ça, il n'a rien à déclarer. Mais si par contre, il ne se soumet pas aux directives et ne s'en départit pas, qu'il ne déclare pas qu'il est actionnaire, par exemple, dans une société publique, comment va-t-on le savoir? Comment va-t-on être assuré que le ministre va confier l'administration de ses actions à une société de fiducie? Comment le premier ministre pourra-t-il, étant donné qu'il ne sait pas qu'il est actionnaire d'une société publique, demander à son ministre soit de s'en départir ou soit de les confier à une société de fiducie?

M. BOURASSA: Mais quel intérêt aurait le ministre à agir de la sorte? Il a tout intérêt à confier ça à une fiducie. Quel contrôle peut avoir un ministre dans une compagnie publique?

M. LALONDE: A part ça, c'est que s'il n'obéit pas, s'il viole l'obligation de s'en départir et de le confier à une fiducie, comment peut-on se fier à sa divulgation? C'est un peu comme la quadrature du cercle. Dans la divulgation on présume qu'il s'est conformé à l'obligation de s'en départir. Encore je pose la question. Comment peut-on lui demander de divulguer quelque chose dont on vient de lui demander de se départir?

M. LESSARD: Oui, mais il a deux choix: ou bien il peut s'en départir ou bien il peut les confier à une société de fiducie. Pour savoir...

M. BOURASSA: Les fonds mutuels, vous placeriez ça dans... C'est une fiducie de...

M. LESSARD: Les fonds mutuels, c'est un genre d'administration, un genre de fiducie, en fait, vous n'avez aucun contrôle dessus. Vous achetez des fonds mutuels et c'est de l'administration de prêt et revenu qui...

M. BOURASSA: C'est un genre de fiducie, c'est un peu ce qu'on propose pour toutes les compagnies publiques.

M. LALONDE: Je pourrais peut-être vous offrir une autre réponse. S'il ne s'est pas départi de ses actions, s'il les a confiées en fiducie, il ne peut pas les divulguer parce qu'il ne sait pas quelles sont ses actions.

M. LESSARD: Je suis d'accord.

M. LALONDE: Etant donné que la fiducie est sans droit de regard, la fiducie a le droit de les vendre, de les remplacer hors la connaissance du ministre. Alors, comment peut-il divulguer les actions qu'il a alors qu'il ne sait même pas lesquelles il a?

M. LESSARD: Mais je me demande si, lorsque vous confiez à une société de fiducie l'administration de vos biens, il n'y a pas quand même consultation? D'après ce que je peux savoir, avant d'échanger des actions, il y a une consultation. La société de fiducie ne peut pas vendre directement comme ça.

M. LALONDE: Là où je pense qu'on peut satisfaire à la demande du député c'est, dans la formule de divulgation, d'indiquer s'il a confié à une fiducie les actions de compagnies publiques qu'il avait.

M. LESSARD: C'est ça. Je pense qu'il serait facile de...

M. LALONDE: Une espèce de carré, oui ou non, ou s'il s'en est départi s'il en avait. Mais il ne peut pas les divulguer, parce que la divulgation, ce n'est pas de savoir qu'est-ce qu'on a fait, c'est de savoir qu'est-ce qu'on a. C'est pour ça que ça n'appartient pas à la divulgation comme telle. Mais dans la formule, il pourrait peut-être y avoir un paragraphe là-dessus, oui, mais qui n'est pas strictement de la divulgation, parce qu'il ne peut pas divulguer ce qu'il n'a pas, qu'il l'ait confié à une fiducie ou non, ou qu'il s'en soit départi, purement et simplement.

M. LESSARD: II peut quand même divulguer le fait qu'il a confié ses actions en fiducie.

M. LALONDE: A part ça, il faut quand

même reconnaître que la divulgation ici c'est un peu comme le témoignage, c'est basé sur la présomption que le ministre va dire la vérité, qui va dire ce qu'il a. C'est basé sur la confiance.

M. LESSARD: Comme les déclarations officielles des députés en Chambre.

M. LALONDE: Pas des ministres, vous voulez dire des députés.

M. LESSARD: Je comprends que, normalement, le ministre doit se soumettre à des directives. Cela arrive, dans certains cas, que le premier ministre apprend par après que son ministre était à ce moment-là propriétaire d'un certain nombre d'actions; mais pour que le premier ministre le sache, il faut qu'il fasse la déclaration qu'il est propriétaire d'un certain nombre d'actions, et là il aura le choix...

M. LALONDE: Ou s'il n'en a pas, ce ne serait pas une divulgation, ce serait une déclaration négative.

M. LESSARD: Je comprends que même si, en fait, on l'oblige à la divulgation, puisqu'il ne le fait pas, il peut ne pas la faire.

M. LALONDE: On peut le mettre dans la déclaration, mais ça apparaîtra difficilement dans le contexte de la divulgation. Parce que la divulgation, essentiellement, c'est divulguer ce qu'on a.

M. LESSARD: Maintenant...

M. BOURASSA: On pourrait ajouter une question dans la déclaration.

M. BURNS: Oui, d'accord.

M. LALONDE: Dans le sens de: Qu'est-ce que vous faites avec les actions de ces compagnies?

M. BOURASSA: S'il s'en est départi ou s'il les a confiées à des fiducies? Cela répond à la question.

M. LESSARD: C'est ça. Maintenant, dans certaines directives comme celles-là, on indique les dons que peut recevoir, par exemple, un ministre, des cadeaux qui peuvent être d'une certaine importance, par exemple au-delà de $200, $250 ou $300.

M. BOURASSA: Ce ne sont pas des bouteilles de scotch qu'on reçoit.

M. LESSARD: Non, je ne vous demande pas les bouteilles de scotch...

M. BOURASSA: Ce n'est pas moi qui les bois.

M. LESSARD: Je ne vous demande pas les bouteilles de scotch...

M. BURNS: Vous ne nous invitez pas souvent, d'ailleurs.

M. BOURASSA: Je vous enverrai ma prochaine bouteille.

M. LESSARD: Oui, mais un cadeau qu'un ministre peut recevoir, par exemple au-delà de $200, c'est quand même...

M. BOURASSA: Ils les refusent, je crois. En pratique et en principe.

M. LESSARD: Vous avez bien confiance à vos ministres.

M. BOURASSA: Ah oui! Ils sont d'une intégrité parfaite.

M. LESSARD: Mais on ne le sait pas.

M. BOURASSA: J'ai le meilleur conseil des ministres qu'aucun premier ministre ait jamais eu. Pour accepter ces directives...

M. BURNS: Vous avez remarqué que ce sont surtout des ministres qui applaudissent!

M. LESSARD: A la page 6...

M. LALONDE: On n'est pas pour attendre que ce soit les autres.

M. LESSARD: ... paragraphe 4, on indique: Le ministre devra justement déclarer...

M. BOURASSA: $2,000, cela va pour le chef?

M. LESSARD: Bien, $2,000, cela va.

M. BOURASSA: Le leader parlementaire de l'Opposition, $2,000, est-ce que ça va?

M. BURNS: Pardon?

M. BOURASSA: $2,000, les dettes... M. BURNS: $1,000 ou $2,000...

M. BOURASSA: ... excédant $2,000. M. BURNS: Cela va.

M. BOURASSA: Est-ce qu'il aime mieux $3,000?

M. BURNS: Cela pourrait être $1,000.

M. BOURASSA: Bien, j'avais mis $1,000, mais on m'a suggéré... De votre côté, on m'a dit que $2,000, cela aurait du sens.

M. BURNS: On n'est pas pour se battre pour $1,000.

M. LESSARD: Au paragraphe 4, au sujet de la divulgation, on dit: "... devra déclarer toute entreprise ou société commerciale non incorporée". Pourquoi ne pas ajouter aussi les sociétés incorporées et dire "sociétés commerciales incorporées ou non"?

M. LALONDE: Parce qu'on a déjà dit à 1, les compagnies incorporées.

M. LESSARD: Bon.

M. LALONDE: Alors, on s'est aperçu qu'au fond on laissait une grande porte ouverte parce qu'il est fort possible que des personnes soient associées sous une raison sociale...

M. LESSARD: J'ai encore une question...

M. LALONDE: Si vous me permettez de terminer ma réponse, le 4 est le pendant de 1.

M. LESSARD: D'accord.

M. LALONDE: 1 est pour les compagnies incorporées parce qu'on parle d'actions, et le 4, c'est la même chose, mais pour les sociétés commerciales non incorporées.

M. LESSARD: A 4, on ajoute "la société commerciale non incorporée dans laquelle il est associé ou propriétaire". On ne pourrait pas ajouter "ou employé ou conseiller"?

M. LALONDE: Bien là, l'intérêt...

M. LESSARD: Ou pensionné, par exemple?

M. LALONDE: L'intérêt...

M. LESSARD: II peut avoir une pension après avoir travaillé pendant un temps X.

M. LALONDE: Oui, je sais qu'il y en a qui ont des pensions. Cela a été suggéré dans d'autres juridictions, dans des projets. Je ne sais pas où, je ne sais pas si ce n'est pas au Manitoba. L'intérêt a été identifié comme un intérêt pécuniaire, un intérêt de propriétaire. Il s'agit de divulger ce que l'on a comme biens; les biens dont la nature pourrait amener des situations de conflits. C'est pour ça que la divulgation ne porte que sur les choses dont les ministres sont propriétaires, ou à titre d'associés. Je comprends que la distinction entre associé et propriétaire peut être un peu confuse parce que, essentiellement, un associé peut aussi être partiellement propriétaire. Mais ce que cela veut dire, s'il est propriétaire seul et a un commerce sous une raison sociale, il n'est pas incorporé, il est couvert par ça.

M. LESSARD: Et s'il est conseiller?

M. LALONDE: Conseiller. A ce moment-là, comment peut-il être conseiller?

M. LESSARD: En vertu du paragraphe 1, il peut — si cela ne nuit pas à ses fonctions — continuer de demeurer conseiller de la compagnie.

M. LALONDE: II peut, quoique l'interdiction, c'est justement d'avoir des activités professionnelles qui peuvent nuire à ses fonctions. Le premier ministre a démontré clairement que cela ne présumait pas qu'un ministre pouvait passer deux jours par semaine à son bureau et trois jours à faire des affaires. Essentiellement, on s'attend, comme le leader de l'Opposition l'a aussi mentionné, que les ministres passent tout leur temps à leur travail.

Je ne vois pas comment un conseiller d'une société privée ou d'une association, d'une société non incorporée, pourrait, de par ses fonctions, avoir un conflit, étant donné qu'il n'a pas d'intérêts de propriétaire.

M. BOURASSA: Cela va. Alors, on va prendre les crédits. En allant jusqu'à dix heures et demie, on peut finir mes crédits?

M. LESSARD: Le statut de la femme, M. le Président.

M. BOURASSA: Le statut de la femme, je vais laisser cela à mon personnel. Disons que moi, si je pouvais me libérer...

M. LESSARD: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Picard): Elément 1, cabinet du premier ministre et administration, toujours au programme 3.

M. BOURASSA: Ce n'est pas le lieutenant-gouverneur? On commence par ça d'habitude.

Bureau du lieutenant-gouverneur

LE PRESIDENT (M. Picard): Nous allons commencer par le programme 1, bureau du lieutenant-gouverneur.

M. LESSARD : Programme 1.

LE PRESIDENT (M. Heard): Programme 1, page 8-3.

M. LESSARD: II est prévu, au bureau du lieutenant-gouverneur, un montant de $169,300 et des traitements de $131,300 pour des effectifs de seize personnes. Est-ce qu'on pourrait avoir des détails? J'estime bien le lieutenant-gouverneur, l'Opposition déloyale de sa majesté, mais je trouve que ce montant de $169,300 est très élevé. Est-ce qu'on pourrait avoir des détails?

M. BOURASSA: Traitements et salaires, c'est $131,000 par rapport à $128,000.

M. LESSARD: C'est ça.

M. BOURASSA: Seulement $3,000 d'augmentation.

M. LESSARD: Je suis bien d'accord, M. le Président.

M. BOURASSA: C'est environ 2 p.c. d'augmentation.

M. LESSARD: Pour seize personnes.

M. BOURASSA: D'accord, mais il y a seulement $3,000 d'augmentation.

M. LESSARD: Ce n'est pas l'augmentation, M. le Président. Je dis qu'il y a $131,300 pour seize personnes.

M. BOURASSA: Cela ne fait pas $10,000 par personne. Il y a un chef de cabinet qui a $25,000. Je ne pense pas que ce soit exagéré. Je comprends que le député de Saguenay n'est pas plus royaliste qu'il ne faut, mais cela fait une moyenne de $8,000. Je comprends que le député de Saguenay est républicain, mais...

M. LESSARD: Pardon? Je n'ai pas compris, M. le Président.

M. BOURASSA: J'ai dit que vous aviez des tendances républicaines, que cela vous incitait à poser des questions sur... Je vais faire la liste.

M. LESSARD: Justement, est-ce que le premier ministre accepterait de déposer la liste des seize employés du lieutenant-gouverneur avec les postes occupés et les salaires payés.

M. BOURASSA: Gabriel Taschereau, $25,700, chef de cabinet. Marielle Gagné, attachée d'administration, $11,900. Jacques Huot, technicien en administration, $8,900. J'enlève les montants inférieurs. Marcel Guillemette, agent de bureau, $7,800. Micheline Dussault, employée de secrétariat, $9,050. Yvon Petit, auxiliaire de bureau, $4,900. Hilaire Aubin, journalier, $4,900. Marcel Gagnon, martre-jardinier, $7,100. Rose-Marie Lessard, aide domestique, $4,900. Cécile Lévesque, femme de chambre, $4,000. Marcel Koslowski, cuisinier, $9,000. Roger Beaupré, Raymond Laliberté, Jeannette Brochu et Philomène Koslowski.

M. LESSARD: Philomène Koslowski, combien?

M. BOURASSA: $5,381. Cela va?

M. LESSARD: Le lieutenant-gouverneur de- meure, en compagnie de son épouse, dans le nouvel édifice, et ces seize personnes sont...

M. BOURASSA: A côté de l'endroit où il demeure.

M. LESSARD: Oui, et ces seize personnes-là sont à son emploi exclusivement?

M. BOURASSA: Oui. $131,000, il y a $3,000 d'augmentation.

M. LESSARD: Non, mais.

M. BOURASSA: Je vois le député de Lafontaine, qui trouve que c'est plus que raisonnable.

M. LESSARD: Ce n'est sûrement pas sur la question des salaires, mais sur le nombre de personnes qui sont attachées au lieutenant-gouverneur.

M. BOURASSA: On transmettra vos représentations au représentant de la reine.

LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 1, adopté?

M. LESSARD: M. le Président, je constate que le lieutenant-gouverneur a autant de monde qui travaille pour lui que l'Opposition.

M. BOURASSA: Mais quel est le budget de l'Opposition?

M. LESSARD: C'est $65,000 je pense.

M. BOURASSA: Mais cela ne comprend pas tous les salaires.

Faites vos représentations.

M. LESSARD: Concernant l'utilisation du Bois-de-Coulonge, je pense que c'est un terrain qui appartenait au gouvernement fédéral et qui est donné au gouvernement provincial pour qu'il soit utilisé pour le service du lieutenant-gouverneur. Alors, est-ce qu'on a l'intention de faire quelque chose avec ça, de l'utiliser, construire une résidence au premier ministre ou...

M. BOURASSA: Non, tant que je serai premier ministre, il n'est pas question que je me fasse construire une résidence...

M. LESSARD: Présidentielle.

M. BOURASSA: ... présidentielle. L'expression est pertinente de la part du député de Saguenay. Il n'est pas question donc que je me fasse construire une résidence tant que je serai premier ministre. Ce sera transformé en parc, et c'est actuellement en négociation avec le gouvernement fédéral.

M. LESSARD: Ce sera transformé en...

M. BOURASSA: En parc public.

M. LESSARD: ... parc public, oui.

M. BOURASSA: En parc public provincial.

M. LESSARD: Bravo, M. le Président.

M. BOURASSA: Cela ferait des économies.

M. LESSARD: Alors, vous êtes convaincu que ça va être transformé en parc public.

M. BOURASSA: C'est-à-dire qu'il n'est pas question que je me fasse construire une résidence présidentielle, comme l'a dit le député de Saguenay.

M. LESSARD: M. Yvon Dupuis, s'il réussit à venir avec le parti présidentiel, pourra s'occuper de ça.

Adopté, en ce qui me concerne.

M. BOURASSA: Je préfère en faire un parc public pour les Québécois.

LE PRESIDENT (M. Picard): Est-ce que ça va?

M. LESSARD: Cela va, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 1, adopté.

M. BOURASSA: Alors, cabinet du premier ministre.

LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 2, Administration des élections. Elément 1, Loi électorale.

M. BOURASSA: Je remets cela à demain. M. LESSARD: C'est ça que je voulais savoir.

M. BOURASSA: Je me suis entendu avec le député de Maisonneuve; je vais faire ça demain, à quatre heures.

LE PRESIDENT (M. Picard): Alors, on suspend?

M. BOURASSA: On suspend, oui.

LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 2 suspendu.

M. BOURASSA: On va faire juste mon personnel, le cabinet du premier ministre.

LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 3, Organismes-conseils auprès du premier ministre.

M. LEGER: Programme 3, là, M. le Président?

M. LESSARD: II faut bien s'entendre. En ce qui concerne le Conseil du statut de la femme, on ne le discute pas ce soir?

M. BOURASSA: Si on a le temps. C'est le ministre d'Etat au Conseil exécutif qui est responsable du Conseil du statut de la femme; ça pourrait se faire demain, après le programme 2, Administration des élections.

M. LESSARD: D'accord.

M. BOURASSA: A moins qu'on n'ait le temps ce soir, mais je laisse cela à la discrétion du député.

M. LESSARD: Moi, je pense, M. le Président, être d'accord pour discuter du cabinet du premier ministre et qu'on remette cela à demain.

M. BOURASSA: L'administration des élections et le Conseil du statut de la femme.

M. LESSARD: C'est ça. M. BOURASSA: D'accord.

M. LEGER: Alors, M. le Président, programme 3.

LE PRESIDENT (M. Picard): Programme 3, élément 1.

Organismes-conseils auprès du premier ministre (suite)

M. LEGER: M. le Président, je vois une somme de $2,572,000; est-ce que le premier ministre pourrait nous dire quels sont les noms des personnes qui forment son personnel-cadre...

M. BOURASSA: Bon.

M. LEGER: ... ainsi que leurs fonctions et leur salaire?

M. BOURASSA: D'accord. Alors, j'ai le chef de cabinet, M. Benoit Morin qui est à mes côtés, $35,500; Jean-Claude Rivest, secrétaire législatif, $27,000; le directeur de...

M. LEGER: II y a eu une augmentation?

M. BOURASSA: ... l'information, Charles Denis, $27,000; Claude Trudel, chef de cabinet adjoint, $24,500; René Beaulieu, $18,000; Marcel Laliberté...

M. LEGER: Est-ce que vous pouvez aller un peu plus lentement? J'étais rendu à Claude Trudel.

M. BOURASSA: Oui, $24,500.

M. LEGER: Quelle est sa fonction?

M. BOURASSA: Chef de cabinet adjoint. Tout sera au journal des Débats dans une heure.

M. LEGER: A moins que le ministre n'attende que j'aie le journal des Débats pour lui poser d'autres questions.

M. BOURASSA: Ah! d'accord. Marcel Lali-berté, $18,500; Michel Guay, qui est au service de placement étudiant; Jean-Pierre Ouellet, secrétaire particulier adjoint, $16,700; Lawrence Cannon, $14,100; Berthe Drouin, ma secrétaire, attachée d'administration, $12,700; Louise Blanchette, secrétaire particulière adjointe, $9,800; Hélène Lemieux, attachée d'administration, $11,100; Normand Bolduc, secrétaire particulier adjoint...

M. LEGER: Normand Bolduc, combien dites-vous?

M. BOURASSA: $14,800. Est-ce que vous voulez toutes les secrétaires?

M. LEGER: Pas les secrétaires comme telles, mais les cadres.

M. BOURASSA: Les cadres, oui. Secrétaire particulier, François Coderre, $22,500. Là, ce sont des noms féminins, ce sont probablement des secrétaires. Roland Lebel, $7,500. Là, ce sont des secrétaires, téléphonistes, secrétaires. Le député est intéressé à connaître le nom de mes secrétaires et de mes téléphonistes? J'ai le cabinet du ministre d'Etat, Claude Vadebon-coeur, $18,300; Raymond Cantin, $13,000. Le reste, ce sont des secrétaires.

M. LEGER: Combien avez-vous de secrétaires et de téléphonistes?

M. BOURASSA: J'ai un service téléphonique 24 heures par jour. C'est pour ça que si le député veut me rejoindre le samedi ou le dimanche, il m'appelle...

M. LEGER: Sauf quand vous êtes à la radio ou à la...

M. BOURASSA: Bien là je suis à la radio, il peut m'écouter à la radio dans ce cas-là, il...

M. LESSARD: Le premier ministre a un numéro spécial privé?

M. BOURASSA: Non, non, le bureau, le no 643-5321; vous laissez votre nom, puis je vous rappelle.

M. LESSARD: Vous êtes sûr?

M. BOURASSA: Des fois, c'est le soir, des fois je rappelle le soir.

M. LEGER: Cela fait combien de secrétaires et de téléphonistes, même si vous avez le service téléphonique?

M. BOURASSA: II y a huit téléphonistes parce que c'est 24 heures par jour, donc elles se remplacent, sept jours par semaine, ce n'est quand même pas exagéré. Quant aux secrétaires, je pourrais faire le calcul, il doit y en avoir une douzaine, avec la secrétaire du chef de cabinet, la secrétaire du ministre d'Etat, ma secrétaire, la secrétaire de M. Rivest, la secrétaire de M. Denis. C'est normal.

M. LEGER: Je n'ai fait aucune remarque, je n'ai donné aucune expression d'opinion, même pas dans ma figure.

M. BOURASSA: Non, non, je ne vois pas pourquoi. Non je n'ai pas d'objection à mettre en relief la valeur de mes secrétaires.

M. LEGER: C'est ça, il paraît qu'un bon ministre doit être bien entouré.

M. BOURASSA: C'est mon cas.

M. LEGER: Je ne suis pas encore sûr. Alors, M. le Président, concernant le centre de documentation.

M. BOURASSA: Le prochain programme. Alors ça va pour mon personnel? Le centre de documentation, c'est sous la direction de M. Chouinard, oui.

M. LEGER: La question que j'avais posée au début. Est-ce que vous avez des consultants en plus de ça dans ce groupe de personnes qui sont payées là?

M. BOURASSA: Non, M. Desrochers a dé-misionné le 1er avril. D'ailleurs, sa santé déclinait depuis plusieurs mois et il s'est retiré le 1er avril, et M. Jean Prieur est consultant.

M. LEGER: A honoraires?

M. BOURASSA: A honoraires. Consultant à honoraires.

M. LEGER: C'est le seul consultant que vous avez à honoraires?

M. BOURASSA: Au bureau, oui, il a $29,000, pardon $32,000.

C'est payé avec un maximum de, mais c'est payé $30,000 environ. Maximum de $32,000.

M. LEGER: La première partie, crédits du conseil élément 1, c'est adopté en ce qui me concerne, à moins que les autres députés aient des questions.

M. BOURASSA: D'accord. Alors secrétariat

général. Le CAD qu'est-ce que vous voulez savoir sur le CAD?

M. LEGER: Le Centre d'analyse des données. Est-ce que le premier ministre pourrait nous donner le personnel qu'il y a là-dedans? Qui est directeur?

M. BOURASSA: Je l'ai déjà donné, cela.

M. LEGER: C'est dans le même groupe, c'est inclus?

M. BOURASSA: Cela n'a pas changé.

M. LEGER: Vous voulez dire que vous l'avez donné l'année passée ou dans les noms que vous venez de me donner?

M. BOURASSA: Je l'ai donné il y a quelques mois à l'Assemblée nationale, au député de Maisonneuve. Il s'en est déclaré satisfait, lui.

M. LEGER: II n'y a eu aucun changement là-dedans?

M. BOURASSA: Non.

M. LEGER: Qui est directeur, actuellement?

M. BOURASSA: M. Néron. C'est sous la direction de M. Chouinard; je n'ai pas tous les détails mais, à ma connaissance, il n'y a aucun changement. Aucun changement.

M. LEGER: Maintenant, est-ce que le premier ministre pourrait nous dire quel est le rôle précis ou l'objectif qu'il veut viser avec le CAD?

M. BOURASSA: C'est de tenir le gouvernement constamment informé des situations qui peuvent survenir dans la province. Le CAD a joué un rôle actif dans la question des inondations et cela a été très précieux. Il nous tient au courant des débrayages dans le monde de la construction. La meilleure façon de prendre de bonnes décisions est d'avoir une bonne qualité d'information et le CAD contribue à cela.

M. LEGER: Le premier ministre m'a donné deux exemples mais, en général, auprès de qui prend-il ses informations pour des cas précis comme ça? Est-ce qu'il y a des gens en place un peu partout?

M. BOURASSA: Les media d'information. Je peux envoyer du personnel, peut-être, pour examiner les endroits. M. Néron peut se déplacer lui-même.

M. LEGER: En plus des media d'information, le premier ministre est-il autorisé à avoir des informations auprès de la Sûreté du Québec de façon régulière?

M. BOURASSA: Occasionnellement, oui.

M. LEGER: Cela veut dire quoi, occasionnellement?

M. BOURASSA: A l'occasion. M. LEGER: Occasionally.

M. BOURASSA: La Sûreté du Québec est l'une des meilleures forces policières du monde, il est normal qu'on puisse l'utiliser.

M. LEGER: Sur quel genre de dossiers est appelé à se pencher le CAD?

M. BOURASSA: J'ai donné deux exemples. Ce sont des dossiers... Comment pourrait-on définir le genre de dossiers? Les situations d'actualité. L'an dernier, quand j'avais répondu aux questions du député de Maisonneuve, c'était la question de Cabano, par exemple, celle de Témiscamingue; là, c'est la construction. Il y a deux semaines, c'étaient les inondations et, dans trois semaines, cela pourrait être autre chose. C'est-à-dire les situations d'urgence ou les situations conflictuelles.

M. LEGER: Comme le problème...

M. BOURASSA: Les situations d'urgence, je pense.

M. LEGER: Comme sur les problèmes des déficiences actuelles de l'assurance-récolte, est-ce ici où vous avez des informations?

M. BOURASSA: C'est-à-dire qu'ils vont faire la synthèse du dossier pour le secrétaire général qui, lui, me le soumettra, s'il le juge à propos, pour le conseil des ministres.

M. LEGER: Est-ce que vous avez quelqu'un de chargé, en parlant des médias d'information, d'écouter tout ce qui se passe sur les "hot lines" et sur les différents organismes qui donnent les informations pour que le ministre en Chambre soit capable, avant de répondre à une question, de passer une remarque...

M. BOURASSA: Le premier ministre est extrêmement bien informé.

M. LEGER: C'est pour ça que vous avez un dossier bien prêt avant chaque période de questions pour éviter...

M. BOURASSA: C'est ça, quand le Parti québécois est obligé d'annuler le congrès à Hull ou quand le Parti québécois...

M. LEGER: Comme ça, Le Jour, vous l'aviez sur votre bureau le matin?

M. BOURASSA: Ou dans Louis-Hébert, lors-

qu'ils ont été obligés d'annuler également une réunion parce qu'il n'y avait pas quorum, il n'y avait pas 5 p.c. des inscrits. Mais cela ne vient pas du CAD.

M. LEGER: C'est parce qu'on fait des réunions de comté, nous autres.

M. HARVEY (Jonquière): 123 en fin de semaine.

M. BOURASSA: 123.

M. HARVEY (Jonquière): On m'avait dit 96.

M. LEGER: Plus ça va en montant, plus les chiffres descendent, parce que chez nous c'était 240.

M. HARVEY (Jonquière): On a été malchanceux, on a doublé notre structure, on a 43 gars qui ont été voir qu'est-ce qui se passait, ça fait que sur les 80...

M. BOURASSA: Cela n'est pas le CAD. Le CAD ne fait pas de politique.

M. HARVEY (Jonquière): Le CAD ne s'occupe pas de ça, c'est nous autres ça.

M. BOURASSA: Alors ça va pour le secrétaire général?

M. LEGER: Un instant, M. le Président, je suis en train d'assimiler les brillantes réponses du premier ministre. Il faut que je les digère et que je puisse arriver avec d'autres questions qui viennent à la suite de celles qui viennent d'être posées.

M. le Président, sur les fonctions du CAD, en général ce sont simplement des données que le premier ministre a besoin de savoir rapidement sur les situations d'urgence.

M. BOURASSA: Sur les situations d'urgence.

Le problème qui me préoccupe le plus et de loin, ces jours-ci, c'est la construction. Il est important. On sait les effets que cela peut avoir, la question des grèves dans la construction, sur l'économie en général. Il est important que je sois informé le plus exactement possible sur la situation.

M. LEGER: Est-ce que le CAD est aussi préoccupé de voir à des problèmes qui entraînent des situations où doivent intervenir des policiers ou des situations violentes possibles?

M. BOURASSA: Pas depuis plusieurs années. A ma connaissance, il y a eu le cas de la grève des policiers, il y a deux ou trois ans. On a été informé sur les postes de police qui étaient abandonnés dans la province.

Ils prenaient leurs informations là où ils pouvaient, mais au même titre que d'autres situations.

M. LEGER: Bon, M. le Président, en ce qui nous concerne, le CAD, pour le moment,...

UNE VOIX: Adopté.

M. BOURASSA: Alors, secrétariat général, adopté.

LE PRESIDENT (M. Picard): Dans le programme 3, les éléments 1 et 2 sont adoptés. L'élément 3, Conseil du statut de la femme, est retenu pour étude demain.

M. BOURASSA: Alors, il reste...

M. LEGER: M. le Président, il nous reste le Conseil exécutif et le bureau du premier ministre. A la suite du dépôt des directives concernant les ministres, est-ce que le premier ministre envisage la possibilité de poser des gestes semblables pour les membres du bureau du premier ministre?

M. BOURASSA: J'ai répondu...

M. LEGER: Est-ce que le premier ministre essaie d'éviter tout conflit d'intérêts?

M. BOURASSA: ... tantôt au député de Maisonneuve, je ne sais pas si le député était là mais le député de Maisonneuve, au nom de son parti, m'a félicité d'avoir posé ce geste.

M. LEGER: Au point de vue des ministres, oui.

M. BOURASSA: Je l'ai remercié de ses félicitations. J'ai dit que c'était une première étape.

M. LEGER: L'auriez-vous fait tout seul si on n'en avait pas parlé?

M. BOURASSA: Comment?

M. LEGER: Est-ce que le premier ministre l'aurait fait tout seul si on ne l'avait pas poussé à poser ce geste?

M. BOURASSA: Mais je l'ai dit que, l'été dernier, on avait formé un comité là-dessus. Je veux dire... Le député va se rendre compte, en lisant les directives, que ce n'est pas tellement facile à faire. Je veux dire qu'on va plus loin que la plupart des autres provinces, la presque totalité des autres provinces. Je pense qu'il est normal que cela prenne un certain temps pour les faire.

Alors, cela est une première étape, les ministres. Nous envisageons d'abord de mettre cela dans une loi. Là, le député de Maisonneuve

m'a offert ses services juridiques pour la rédaction de la loi,...

M. LEGER: Sans honoraires.

M. BOURASSA: ... à titre gratuit. Nous envisageons éventuellement, pour les hauts fonctionnaires, pour répondre à la question du député, pour les membres du bureau et pour les députés — on parle des chroniqueurs parlementaires dans d'autres pays. Mais disons que pour l'instant il n'est pas question que les chroniqueurs parlementaires soient inclus.

M. LEGER: Est-ce que le premier ministre veut dire par là que, dans son esprit, cela inclurait, quand il parle des hauts fonctionnaires, les gens de son bureau de premier ministre, son personnel?

M. BOURASSA: Oui, tous les fonctionnaires. On a un projet qui va être discuté demain au conseil des ministres pour ce qui a trait aux fonctionnaires. On a commencé par les ministres; les fonctionnaires et les députés vont suivre.

Alors, merci beaucoup, M. le Président.

M. LEGER: Un instant, M. le Président. Le premier ministre est réellement pressé. Est-ce qu'il a une émission de télévision?

M. BOURASSA: Bien...

M. LEGER: II veut voir ce qui sort sur la langue à la télévision. Je ne veux pas priver le premier ministre des résultats qu'il va constater à la télévision après nous avoir présenté son projet de loi en même temps que le début de l'étude du projet de loi 22. C'était bien placé comme "timing" pour...

M. BOURASSA: M. le Président, j'ai dit à plusieurs reprises aujourd'hui que c'était fait à l'occasion du début de mes crédits. Cela aurait pu être demain, cela aurait pu être jeudi dernier, cela aurait pu être il y a deux semaines.

Je pense que, là-dessus, avec des directives comme celles-là, le gouvernement avait tout intérêt à ce qu'elles soient connues. Durant toute la semaine, on pourra les commenter.

Alors, la question de temps, dans ces choses, compte très peu, parce que, les jours suivants, on peut toujours se reprendre d'une façon ou d'une autre.

M. LEGER: Alors, M. le Président, en ce qui nous concerne, nous allons permettre au premier ministre d'aller voir ce qui se passe à la télévision.

M. BOURASSA: Vous n'avez pas de questions sur les sondages de fin de semaine?

M. LEGER: Justement, je pourrais poser des questions, si le premier ministre le désire.

M. BOURASSA: Non, mais le député, avec son fédéralisme à deux, va commencer à être populaire dans son parti, après les sondages.

M. LEGER: Est-ce que le premier ministre veut me définir ce qu'il pensait que je voulais dire par fédéralisme à deux?

M. BOURASSA: Mais quelques jours après l'élection, le député de Lafontaine a dit...

M. LEGER: II ne répond pas à ma question! M. BOURASSA: Non, non!

M. LEGER: On n'est pas à l'Assemblée nationale, il me semble !

M. BOURASSA: Le député de Lafontaine a dit: Moi, je propose un fédéralisme à deux. Alors, du fédéralisme, c'est du fédéralisme. Là, je pense que les gens vont se rallier à la thèse du député, à la suite des derniers sondages qui expriment un déclin du Parti québécois. Ils vont dire: Le député de Lafontaine avait...

M. LEGER: Le sondage exprime un déclin du Parti québécois?

M. BOURASSA: Oui, oui. Vous lirez l'analyse de Pierre O'Neil, dans le Devoir de samedi. Je pense que le député a bien fait de mentionner cette hypothèse quelques jours après les élections.

Merci, M. le Président.

M. LEGER: M. le Président, je ne peux pas terminer. Le premier ministre a ouvert une porte. Je ne peux pas faire autrement qu'entrer.

Le fédéralisme à deux, il y a bien des interprétations à cela. C'est comme pour l'uni-linguisme, il y a bien des interprétations. Le fédéralisme à deux, c'était une association d'un Québec indépendant, souverain politiquement, qui s'associe avec le reste du Canada. Qu'on lui donne le nom qu'on veut. L'unilinguisme, M. le Président, dans le sondage...

M. BOURASSA: Le fédéralisme, cela veut dire un régime fédéral.

M. LEGER: Oui, mais un et un et non pas un et dix.

M. BOURASSA: Un régime fédéral, cela veut dire un régime au suffrage universel.

LE PRESIDENT (M. Picard): Je ferais remarquer aux honorables députés que les crédits du ministère...

M. LEGER: Sont presque adoptés.

LE PRESIDENT (M. Picard): ... des Affaires intergouvernementales ont été adoptés.

M. LEGER: Ils sont presque adoptés, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Picard): Ceux du ministère des Affaires intergouvernementales.

M. LEGER: Alors, sur le sondage, M. le Président, il faut quand même que le premier ministre réalise qu'aux questions posées sur l'unilinguisme les gens disent: C'est sûr qu'on ne veut pas parler seulement une langue. Mais l'unilinguisme collectif, ce n'est pas comme l'unilinguisme individuel.

M. BOURASSA: Non, non! mais je parle sur la popularité des partis, où on est plus fort qu'on ne l'était le 29 octobre.

M. LEGER: Avez-vous remarqué que vous avez baissé de 22 p.c, alors que nous n'avons baissé que de 12 p.c? Vous êtes passés de 55 p.c. à 33 p.c. et le Parti québécois est descendu de 30 p.c. à 18 p.c.

M. BOURASSA: On a 57 p.c. de ceux qui se sont prononcés et nous avons eu 55 p.c. à l'élection du 29 octobre. Combien cela vous en laisse, s'il y avait une élection, avec le pétrole et la langue officielle?

M. LEGER: On en a perdu 10 p.c. de moins que vous.

LE PRESIDENT (M. Picard): La commission suspend ses travaux jusqu'à 10 heures, demain matin, même salle.

(Fin de la séance à 10 h 37)

ANNEXE L'indépendance des administrateurs publics

L'administrateur public doit nécessairement faire passer l'intérêt qu'il sert avant tout autre intérêt. Si un intérêt personnel influence sa décision, il y a de fortes chances que celle-ci soit viciée et qu'elle ne rencontre pas les exigences de l'intérêt public et du maintien de la confiance du citoyen dans la valeur de nos institutions démocratiques.

Les principales lignes de conduite que l'administrateur public doit suivre dans l'exercice de ses fonctions lui sont évidemment dictées par sa conscience, son intégrité et son souci d'efficacité administrative.

Toutefois, il est nécessaire de chercher à améliorer les mesures destinées à assurer l'indépendance des administrateurs publics. Tout comme les autres gouvernements au Canada, le Québec doit s'engager dans cette voie afin de continuer à accroître la qualité de son administration publique.

Les membres du Conseil exécutif ont une responsabilité particulière à assumer dans la gestion des affaires publiques. Des lois fournissent déjà un ensemble de règles de conduite auxquelles ils doivent s'astreindre pour accomplir leur devoir en toute liberté. Dans plusieurs juridictions au Canada, on a récemment complété ce régime légal par des directives émises par le premier ministre ce que nous croyons être une formule souhaitable en raison de sa flexibilité. Les juridictions voisines

Un rapide examen des dispositions en vigueur dans les provinces voisines démontre une grande analogie d'une province à l'autre. Les lois du parlement et des législatures se ressemblent beaucoup au niveau des conditions d'éligibilité des parlementaires et des mesures visant à assurer l'indépendance des membres du Conseil exécutif. Plusieurs démarches ont été entreprises récemment par la majorité des provinces et par le gouvernement fédéral en vue d'améliorer ou de compléter les dispositions existantes. C'est au fédéral que l'on retrouve le document le plus articulé sur la question de l'indépendance des administrateurs publics, soit le Livre vert de monsieur Allan J.MacEachen, président du Conseil privé. En plus de contenir de nombreuses recommandations, le Livre vert est accompagné d'un avant-projet de loi qui révèle l'approche du gouvernement fédéral à l'égard de l'indépendance des parlementaires, c'est-à-dire relativement peu d'interdictions mais un régime articulé de divulgation des marchés avec l'Etat.

La plupart des autres juridictions adoptent également une attitude permissive quant aux marchés, accompagnée toutefois d'efforts de dissuasion réalisés par la divulgation. C'est ainsi que la Colombie britannique (Projet de loi 132 et 85), 1'Alberta (directives du Premier ministre Peter Lougheed, le 2 mai 1973), la Saskatchewan (projet de loi déposé récemment à la suite du Livre blanc de monsieur Roy Romanow, procureur général), le Manitoba (projet de loi 19), l'Ile du Prince-Edouard (rapport d'un comité spécial en date d'avril 1974), Terre-Neuve (Conflict of Interest Act 1973) et le Fédéral (Livre vert et avant-projet de loi proposé) exigent une divulgation

des intérêts des ministres tout en ne lui interdisant pas de conclure des marchés avec l'Etat par le truchement de sociétés. La loi en vigueur au Nouveau-Brunswick ne contient même pas l'exception qui dans toutes les autres provinces et au fédéral permet à un député de faire par une compagnie ce qu'il ne peut pas faire directement, c'est-à-dire des marchés avec l'Etat.

En Ontario, le Premier ministre William Davis a adopté dans ses directives du 14 septembre 1972 une formule différente: la divulgation accompagnée d'un régime plus large d'interdictions expresses. Il semble que cette formule dans la mesure où elle est applicable soit plus efficace, car l'effet de dissuasion recherché par la méthode suivie ailleurs peut être plus limité que prévu. Il ne nous semble en effet pas suffisant que les conflits d'intérêts soient connus, il importe plutôt de tendre constamment à les éviter.

C'est pourquoi nous croyons que les efforts de prévention sont très importants dans une telle question. Et, par voie de conséquence, le régime de divulgation, si nécessaire soit-il, peut être moins rigoureux et peut se concilier avec les exigences du respect de la vie privée des administrateurs publics. Dans l'introduction à son Livre vert, monsieur MacEachen fait l'analyse des formules de prévention et de divulgation et souligne que "Le principe de la divulgation représente une attitude différente à l'égard de la question des conflits d'intérêts. Plutôt que d'insister sur l'importance pour les représentants officiels de l'Etat d'éviter les conflits d'intérêts, certains partisans de réformes ont consacré le plus clair de leurs efforts à l'élaboration d'un système qui s'appuie sur la sensibilisation de l'opinion. Pour les tenants de ce principe, la divulgation des intérêts est la meilleure façon de contrôler les situations de conflit. Selon ce point de vue, les conflits d'intérêts ne doivent pas être encouragés, mais ils deviennent particulièrement odieux et désagréables lorsqu'ils sont dissimulés aux autres représentants officiels de l'Etat ainsi qu'à la population". "Dans sa forme idéale, le principe de la divulgation exprime l'engagement essentiel de réduire le nombre de violations et attache moins d'importance aux apparences de conflits. En fait les conflits peuvent paraître excusés pourvu qu'ils soient divulgués".

D'autre part, parlant de la prévention, c'est-à-dire des interdictions, monsieur MacEachen dit: "Selon le principe de la prévention, la fonction fiduciaire du député est sauvegardée de la façon le plus efficace lorsqu'il se départit de tous ses avoirs ou évite de quelque autre manière les intérêts qui peuvent être préjudiciables à ses fonctions officielles. Ce principe se caractérise essentiellement ainsi: plutôt que de devoir se retirer d'une situation embarassante de conflit d'intérêts, le député doit prendre toutes les précautions voulues pour éviter qu'elle ne se produise. Cela peut ne pas être toujours possible, mais des partisans de ce point de vue soutiennent qu'à moins d'une norme solidement établie, le public ne peut être assuré que les parlementaires feront tout leur possible pour éviter les conflits. Dans un bref passage d'un rapport publié récemment, l'Association du Barreau de la Ville de New York exprime en termes succincts la conviction qu'aucune autre attitude ne peut être satisfaisante:

L'argument fondamental du présent rapport et l'opinion du comité sont que tout conflit d'intérêts évitable doit normalement être évité.

Tout en visant clairement à éviter les conflits d'intérêts réels, le principe de la prévention a pour avantage principal de mettre l'accent sur l'importance d'éviter les apparences de conflits. Ses partisans soutiennent que l'interprétation stricte de la définition du conflit d'intérêts exige que le représentant du peuple doit s'efforcer non seulement de se dégager de toute situation conflictuelle, mais aussi de dissiper tout soupçon voulant qu'il soit tenté de profiter à des fins personnelles du poste de confiance auquel le peuple l'a commis. C'est en évitant toute situation potentielle de conflit d'intérêts que le député peut le mieux dissiper les apparences de tels conflits".

Il conclut: "Ni l'un ni l'autre de ces principes ne peut être adopté sans réserve comme convenant à tous les conflits d'intérêts. De plus, ils peuvent tous deux, dans une certaine mesure, éliminer les abus de pouvoir, atténuer les apparences d'abus et fournir des normes communes".

A la lumière des démarches entreprises dans les différentes juridictions et conformément aux objectifs d'une plus grande efficacité dans les politiques du gouvernement à propos de l'indépendance de ses administrateurs, nous préconisons donc un équilibre entre la dissuasion recherchée par la divulgation et la prévention visée par les interdictions. L'intérêt personnel

L'intérêt personnel peut être de différents ordres, mais se traduit ultimement en avantages pécuniaires, soit pour l'administrateur public, soit pour des personnes envers lesquelles il est lié. Cependant, pour les fins de renonciation de règles visant à assurer l'indépendance des administrateurs publics, il est généralement accepté de s'en tenir à l'administrateur public lui-même et à sa famille immédiate, soit son épouse et ses enfants mineurs. Les moyens

Dans l'élaboration-d'une structure visant à assurer aux administrateurs publics l'indépendance la plus complète possible dans l'exercice de leur fonction, nous retrouvons donc deux moyens, la prévention et la divulgation.

A- La prévention

Prévenir tous les conflits possibles supposerait une absence totale d'intérêts privés, de liens d'amitié, de famille, etc. Du strict point de vue pécuniaire, une telle prévention absolue exigerait que l'administrateur public se départisse de tous ses intérêts privés. On ne peut aller aussi loin et cela pour des raisons évidentes.

Il existe déjà des interdictions sanctionnées par nos lois: le Code criminel canadien, la Loi de la Législature, la Loi de l'Exécutif contiennent un certain nombre d'interdictions relativement: a) à la corruption (Code criminel, art. 108 et suivants) b) à la conclusion de contrats avec le gouvernement (ch. 6, art. 79.1 ) c) à l'état d'actionnaire d'une compagnie ayant un contrat d'exécution de travaux publics avec le gouvernement (ch. 6, art. 79.2) d) à la vente autrement que par voie d'expropriation, au gouvernement d'un immeuble destiné à des travaux publics (ch. 6, art. 80) e) pour un ministre, à l'occupation d'un poste d'administrateur de compagnies à but lucratif (ch. 9, art. 9) f) postes incompatibles avec la fonction de député (juge, député fédéral, fonctionnaire, etc.).

Ces interdictions ont trait à l'intégrité (a), aux marchés avec l'Etat (b) et (c), aux immeubles (d) et aux fonctions incompatibles (e) et (f ). L'intégrité

Les dispositions concernant la corruption sont fondamentales et doivent de toute évidence, demeurer en vigueur. Mais notre préoccupation va au-delà de cet aspect, car il ne suffit pas d'être incorruptible pour éviter de subir des influences indues. On doit d'abord chercher à éviter d'être placé dans une telle situation. Une décision prise dans une situation de conflit d'intérêts n'est pas nécessairement malhonnête mais elle est probablement mauvaise. En d'autres termes, si les dispositions concernant la corruption protègent la société contre les actes dérogatoires à la loi, les mesures visant à assurer l'indépendance des administrateurs publics cherchent à protéger ces derniers contre des situations où un intérêt personnel pourrait exercer sur eux une influence indue contraire à l'intérêt public. Les marchés de l'Etat

On a souligné la distinction faite entre un marché conclu directement par un député avec l'Etat et un marché fait avec l'Etat par une société dont le député serait actionnaire. En vertu de la loi, le premier est prohibé et le deuxiène ne l'est pas. Cette distinction n'est pas particulière à notre législation. Les lois présentement en vigueur dans presque toutes les autres juridictions permettent à une société dans laquelle un ministre a des intérêts de conclure avec l'Etat un marché qu'il ne peut pas faire personnellement. C'est notamment le cas du fédéral, de l'Ontario, de la Nouvelle-Ecosse, de l'Ile du Prince-Edouard, du Manitoba, de la Saskatchewan, de l'Alberta et de la Colombie britannique, le tout suivant des conditions particulières à chacune des juridictions.

Distinguer le cas où le ministre est personnellement intéressé dans un marché avec l'Etat et celui où il l'est par le truchement d'une société privée comporte de nombreux inconvénients sur le plan des exigences que la population est en droit d'avoir à l'égard de l'indépendance des membres du Conseil exécutif, et surtout dans le cas de compagnies privées où le ministre serait un actionnaire majoritaire.

La Commission québécoise d'enquête sur les méthodes d'achat utilisées au département de la Colonisation et au Service des achats du gouvernement a d'ailleurs recommandé d'amender la Loi de la Législature pour rendre inéligible tout député qui aurait la majorité ou une "partie importante" des actions d'une compagnie ayant des marchés avec Sa Majesté. Nous croyons pour notre part que, sous réserve des cas exceptionnels mettant en jeu l'intérêt public et qui devraient être soumis à l'examen d'un organisme indépendant, par exemple une commission parlementaire, l'on devrait purement et simplement interdire les marchés de l'Etat à toute compagnie privée dont un ministre est actionnaire.

Il pourrait toutefois y avoir une exception pour les marchés avec les agents de l'Etat, c'est-à-dire les organismes autres que les ministères du gouvernement. Cette exception serait assujettie à deux conditions expresses: premièrement, qu'aucun ministre n'ait d'autorité administrative directe sur cet organisme et, deuxièmement, que le nombre des actions détenues par un ministre dans une telle compagnie privée soit minime par rapport au nombre total des actions ou que le résultat de sa participation à un tel marché représente un très faible pourcentage du chiffre d'affaires de cette compagnie. De plus, cette exception devrait satisfaire à une double exigence, soit la divulgation périodique de la nature et de la mesure de la participation du ministre à de tels marchés et l'octroi de ces marchés conformément aux procédures usuelles pour les contrats publics.

Les immeubles

Déjà les dispositions applicables au Québec et dans les autres juridictions touchent la question des transactions immobilières des ministres sans doute afin d'éviter toute ouverture à des pratiques abusives de spéculation foncière.

Dans le but de garantir l'indépendance des ministres à l'égard de telles situations, il y aurait lieu que ces derniers s'abstiennent d'acquérir des immeubles pour fins de spéculation, c'est-à-dire des immeubles qui ne sont pas destinés à des fins commerciales ordinaires ou à des fins résidentielles.

Les fonctions incompatibles

La loi mentionne déjà des fonctions incompatibles avec celle de député. Toutefois, d'autres occupations peuvent entrer en conflit avec les fonctions d'un ministre qui doit consacrer à sa tâche toutes ses énergies. Il nous semble qu'il serait souhaitable que les ministres mettent fin à toute activité personnelle, commerciale ou d'affaires qui pourrait les empêcher de consacrer tout le temps nécessaire à leur travail. Les actions de compagnies publiques

Pour les actions qu'ils pourraient détenir dans les compagnies publiques, la formule la plus largement adoptée, afin de permettre aux législateurs de ne pas être tentés de favoriser leurs investissements par leurs décisions, est la fiducie. On remet ainsi les actions que l'on détient à une tierce partie experte en semblables matières et l'on renonce par contrat à toute intervention dans l'administration de ce portefeuille, de sorte que le tiers pourra les vendre et les remplacer sans autorisation particulière dans chaque cas et hors la connaissance du ministre.

Cette formule présente quelques problèmes dont l'un est inhérent à notre régime juridique du Code civil au Québec. En effet, c'est par le "Trust Agreement" que l'on crée ces liens juridiques dans les provinces de "common law". Or, au Québec, on ne peut créer de fiducie en vertu du Code civil, que par testament et donation. Notre droit civil n'est donc pas adapté à la situation qui nous occupe. Nous devons ainsi recourir à d'autres institutions juridiques qui participent au régime du dépôt et du mandat, sous réserve des incidences fiscales que cela pourrait entraîner.

Le deuxième problème est d'ordre pratique. Pour un portefeuille peu considérable, les coûts inhérents à cette formule d'administration sont prohibitifs. Sans doute pour obvier à cette difficulté, le gouvernement fédéral a récemment institué à l'un de ses ministères une fiducie dont pourront se prévaloir tes ministres qui ont des actions de compagnies publiques à lui confier. Il y aurait lieu de songer à une formule analogue au Québec si nécessaire.

En tenant compte de ces quelques difficultés, nous croyons que cette formule est souhaitable pour les ministres. B- La divulgation

L'autre moyen de plus en plus utilisé dans l'élaboration de formules visant à assurer l'indépendance des administrateurs publics est la déclaration de leurs intérêts. On a vu que dans l'approche que nous retenons la divulgation que nous jugeons nécessaire nous apparaît simplement complémentaire à la prévention.

Le Livre vert contient des remarques sur les avantages et les inconvénients de la divulgation. Il ne la recommande que pour rendre publics les marchés conclus avec l'Etat conformément aux règles proposées, et les intérêts financiers lors de débats ou de discussions sur des sujets pertinents à ces intérêts.

Nous croyons qu'une telle mesure est utile et nécessaire et nous sommes d'avis que la divulgation pour les ministres doit être retenue surtout à des fins de dissuasion.

En conséquence, nous préconisons une déclaration périodique des intérêts des ministres susceptibles d'entrer en conflit avec leurs fonctions tout en gardant à l'esprit que les intérêts personnels des administrateurs publics sont nécessairement reliés à la question fondamentale du droit à la vie privée. "Le public a incontestablement le droit de connaître certains facteurs qui pourront influencer le comportement d'un représentant, mais ce droit à l'information ne s'étend pas aux aspects de sa vie privée qui ne touchent pas à ses fonctions publiques". Livre vert, p. 4.

Il y a donc lieu de retenir un régime de divulgation sélective, c'est-à-dire un régime où l'administrateur public n'est tenu de dévoiler que ses intérêts susceptibles d'entrer en conflit avec ses fonctions. "En outre, si l'on devait utiliser la divulgation annuelle, il faudrait probablement l'appliquer

de façon sélective afin que le droit au respect de la vie privée ne soit pas violé par des exigences inconsidérées en matière de divulgation". Livre vert, p. 25.

Dans cette perspective, la déclaration périodique des ministres devrait couvrir: a) les sociétés privées incorporées ou non susceptibles de faire affaires avec l'Etat; b ) les immeubles détenus pour fins de spéculation ou dont la destination rendrait possibles des marchés avec l'Etat; c) les dettes personnelles résultant d'emprunts de complaisance non garantis et qui peuvent influencer le comportement du ministre; et d) de toute manière, au cas où l'on permettrait certains marchés avec l'Etat de la part de sociétés privées dans lesquelles un ministre aurait des intérêts minoritaires, la nature et la mesure de la participation du ministre à de tels marchés. La famille des ministres

En principe le conjoint du ministre devrait se soumettre aux mêmes exigences d'éthique. Il en va de même des enfants mineurs qui sont soumis à l'autorité des parents quant à leur patrimoine. Ainsi dans la majorité des autres juridictions au Canada, on a inclus dans les mesures visant à assurer l'indépendance des ministres, leur famille immédiate, c'est-à-dire leur conjoint et leurs enfants mineurs.

L'application de ce principe au conjoint doit cependant tenir compte de la réalité, à savoir que le régime légal québécois donne au conjoint une liberté totale quant à l'administration et à la disposition de ses biens.

Dans sa déclaration du 18 juillet 1973, le Premier ministre du Canada précisait: "II n'est pas demandé aux conjoints et aux familles des ministres de suivre les règles strictes qui s'appliquent à ces derniers. Cela ne serait guère réaliste et pourrait même être injuste. On sait pourtant qu'il serait possible de contourner les règlements et les principes concernant les conflits d'intérêts en cédant des biens à un conjoint ou à un enfant à charge. La seule solution, pour éviter les conflits d'intérêts, semble être d'insister sur la responsabilité individuelle du ministre en égard à la gestion de ses affaires... c'est au ministre qu'il incombe de prévoir les éventuels conflits d'intérêts qui pourraient découler, ou sembler découler, de transactions relatives à la propriété ou à la gestion de biens, et auxquelles le conjoint ou des enfants à charge peuvent être intéressés".

En Colombie-Britannique où un projet de loi récent est à l'étude on a exclu les conjoints comme tels de l'obligation de divulguer leurs intérêts.

On doit donc reconnaître qu'il n'est pas réaliste de prévoir une application stricte de ces règles au conjoint.

Toutefois, nous croyons que, dans la mesure du possible, tant au niveau de la prévention que de la divulgation, l'on devrait soumettre la famille immédiate du ministre aux mêmes exigences, de façon à permettre à ces derniers de s'assurer au meilleur de leur connaissance que la nature des biens et des transactions de leur conjoint n'entre pas en conflit avec leurs fonctions. Conclusion

Axées principalement sur l'objectif de la prévention des conflits d'intérêts par un régime d'interdictions expresses et accessoirement sur celui de la dissuasion par un régime de divulgation, les recommandations que nous formulons permettraient au Québec de disposer d'un ensemble de moyens relativement complet pour répondre aux exigences de l'indépendance des membres du Conseil exécutif.

Par delà les lois existantes et les règles de conduite émises il reste, comme le soulignait Me Patrice Garant, professeur à la Faculté de droit de l'Université Laval, dans une conférence prononcée le 5 avril dernier, à propos de l'éthique dans la Fonction publique: "... cette question de conflits d'intérêts si elle peut être résolue, d'une part, par des règles précises sanctionnées par le régime disciplinaire général, dans bien des cas elle ne peut l'être que par un éveil de la conscience professionnelle: c'est une question d'éthique ou de morale administrative et non de droit administratif".

Québec, le 11 juin 1974

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