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Commission permanente des Richesses naturelles
Société d'aménagement de la baie
James
Séance du jeudi 1er juin 1972
(Seize heures vingt-deux minutes)
M. SEGUIN (président de la commission permanente des richesses
naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!
La séance de la commission, appelée pour quatre heures,
commence ponctuellement à quatre heures trente.
M. PERREAULT: M. le Président, au début, est-ce qu'on
pourrait remplacer M. Arsenault par M. Bourassa; M. Drummond par M.
Saint-Pierre; M. Larivière par M. Marchand?
M. JORON: M. Lessard est remplacé par M. Joron.
M. ROY (Beauce): Pour nous, M. Tétrault par M. Roy (Beauce).
M. LE PRESIDENT: Et M. Simard (Témiscouata) par M. Lavoie
(Wolfe).
Nous attendions l'arrivée du rapporteur officiel. Nous allons
quand même débuter, il arrivera sans doute d'ici quelques minutes.
On m'informe que M. Dozois a une déclaration ou un commentaire à
faire.
Déclaration de l'Hydro-Québec
M. DOZOIS: M. le Président, vous me permettrez de lire le texte
suivant qui apportera sans doute quelque lumière sur ce qui s'est
passé récemment. Le texte que je lis a été
approuvé par les cinq membres de l'Hydro-Québec, y compris M.
Giroux.
Étant donné que toutes sortes d'affirmations ont
été faites ces jours derniers sur les prises de position de
l'Hydro-Québec concernant le développement des ressources
hydro-électriques de la baie James, nous croyons qu'il est opportun de
faire certains commentaires sur cette question.
Il faut tout d'abord se rappeler que dans la lettre que M. Roland Giroux
faisait parvenir au nom de l'Hydro-Québec à M. Robert Bourassa,
premier ministre, le 29 avril 1971, il était clairement établi
3e paragraphe que, "si un organisme était
créé pour réaliser le projet de la baie James et qu'il
était exclusivement d'ordre hydro-électrique, il serait normal
que l'Hydro-Québec demande à être autorisée à
l'exécuter seule".
Il faut également se rappeler que l'Hydro-Québec et la
Société de développement de la baie James sont deux
organismes mandataires du gouvernement du Québec.
L'Hydro-Québec est mandataire d'après l'ar- ticle 29 de sa
loi pour "produire, acquérir, vendre, transporter et distribuer de
l'énergie dans toute la province".
La Société de développement de la baie James est
mandataire pour le développement général du territoire de
la baie James avec cependant certaines restrictions quant au
développement des ressources hydro-électriques.
Le bill 50 prévoit que la Société de
développement de la baie James peut faire effectuer l'exploration et
l'exploitation des richesses naturelles du territoire autres que les ressources
hydro-électriques par des filiales dans lesquelles elle détiendra
51 p.c. des actions et comptera la majorité des administrateurs.
Quant aux ressources hydro-électriques, l'article 16 de cette
même loi dit que "le développement des ressources
hydro-électriques, la production et la distribution de
l'électricité dans le territoire ainsi que sa transmission seront
effectués par une compagnie dont au moins la majorité des
actions, comportant un droit de vote en toutes circonstances, seront
détenues par l'Hydro-Québec et dont, au plus, quarante pour cent
seront détenues par la société".
Conformément à ce qui précède une filiale a
été créée le 20 décembre 1971, sous le nom
de Société d'énergie de la baie James; le montant du
capital-actions est fixé à un milliard de dollars, divisé
en 10 millions d'actions ordinaires ayant une valeur nominale de $100
chacune.
Depuis la création de la Société d'énergie
de la baie James, la capitalisation de cette compagnie s'est effectuée
comme suit: 1)Au moment de l'incorporation, les cinq administrateurs ont
souscrit chacun une action de $100. 2)Le 21 janvier 1972, l'Hydro-Québec
offrait par résolution de souscrire 7 millions d'actions à $100
chacune, soit un total de $700 millions dont le versement serait réparti
sur une période de 10 ans. 3)Le 27 janvier, le conseil d'administration
de la Société d'énergie de la baie James invite la
Société de développement à souscrire au
capital-actions de la Société d'énergie de la baie James.
4)Le 3 février, le conseil d'administration de la Société
d'énergie de la baie James, étant informé que la
Société de développement de la baie James ne se
prévalait pas de cette invitation à souscrire au capital-actions,
accepte, sur proposition de M. Nadeau appuyé par M. Boulva, l'offre de
souscription de l'Hydro-Québec et, le même jour, les actionnaires
à l'unanimité ratifient cette décision.
Donc, depuis le 3 février, l'Hydro-Québec et les membres
de la commission détiennent la totalité des actions
émises, sauf deux actions qui sont détenues par MM. Nadeau et
Boulva.
L'Hydro-Québec étant, à toutes fins pratiques,
l'unique propriétaire de la Société d'énergie de la
baie James, qui est un organisme exclusivement d'ordre hydro-électrique,
ne voit pas la nécessité de bâtir de toutes pièces
un
personnel pour diriger l'implantation du complexe La Grande,
étant donné qu'elle peut, avec l'aide de ses cadres et de son
personnel dont la compétence est reconnue, organiser l'équipe
nécessaire à la direction d'un tel projet.
Quant à la gérance du projet, des offres de service ont
été reçues soit par la Société de
développement de la baie James, soit par la Société
d'énergie soit par l'Hydro-Québec. On peut citer, entre autres,
les propositions de la Société d'ingénierie Cartier,
d'ABBDL, de Techman Inc. et du consortium SNC-Montreal Engineering-Janin. De
plus, le conseil d'administration de la Société d'énergie
de la baie James s'est enquis des services que pouvait offrir la compagnie
Bechtel.
Cette dernière s'est verbalement dite intéressée
à assumer de telles responsabilités, mais n'a pas fait d'offres
formelles, ni à la Société d'énergie de la baie
James, ni à l'Hydro-Québec. Aucune des offres de service ci-haut
mentionnées n'a été discutée à une
assemblée de la Commission hydro-électrique de Québec.
L'Hydro-Québec croit qu'elle doit être investie par la
Société d'énergie du mandat de gérance de ce
projet. Comme le disait M. Giroux dans son exposé du 16 mai 1972, devant
la commission parlementaire, l'Hydro-Québec "pourra s'adjoindre les
services d'une firme reconnue dans le domaine de la gérance de grands
projets". Cela n'exclut pas, au départ, les firmes qui nous ont fait des
offres de services.
En ce qui concerne l'ingénierie, l'Hydro-Québec a
déjà reçu des offres et pourra confier des contrats
à plusieurs sociétés d'ingénieurs-conseils du
Québec, dont la compétence nous est connue en raison des services
rendus dans le passé. Nous croyons que cette attitude de
l'Hydro-Québec est en tout point conforme aux principes
énoncés dans la lettre du 29 avril 1971, citée
précédemment.
M. LE PRESIDENT: Le premier ministre.
M. BOURASSA: Si je comprends bien, m'a-dressant à la commission,
est-ce qu'on s'attaque au problème de la gérance
immédiatement? D'accord. M. Boyd, est-ce que vous aviez quelque chose
à ajouter sur la gérance?
M. LE PRESIDENT: J'ai deux demandes présentement: M. Boyd, tout
d'abord, et M. Nadeau. Ensuite, les questions pourront être
posées. M. Boyd.
M. BOYD: Concernant la gérance, j'aimerais ajouter quelques
détails, si cela peut aider aux discussions. C'est dans l'esprit que le
mandat est confié à l'Hydro-Québec par la
Société d'énergie pour réaliser le projet de la
baie James. L'organisation montre dans le moment tout n'est pas
complété, évidemment que la responsabilité
complète est confiée à l'Hydro-Québec.
L'exécution de ce mandat se fera par le personnel de
l'Hydro-Québec, avec la collaboration du personnel le plus
compétent provenant des différentes entreprises oeuvrant au
Québec.
Il y a là possibilité d'accorder certains contrats de
gérance mais cette possibilité est à l'étude; rien
n'est décidé à ce sujet.
Quant au recours à des spécialistes au besoin, comme
consultants, c'est une chose que fait l'Hydro-Québec depuis très
longtemps. Si on recule un peu dans le passé, on se rappelle que le
barrage de Manic 5, l'Hydro-Québec, par l'entremise de la compagnie SNC
qui groupe des ingénieurs-conseils, a employé Coyne et
Bélier une firme française; sur différents projets de
Manic-Outardes, on a employé, entre autres, les ingénieurs
Casagrande et dans le cas du contrat avec Churchill Falls, avant les signatures
définitives, on avait retenu les services d'Ebasco qui nous ont
été très favorables parce que ce sont des experts en
analyses de contrats et de tarifications pour quelque chose comme $100,000 et
on a pu faire des économies de plus de $400 millions.
Nous voyons la nécessité de recourir à certains
spécialistes. La gérance ou le "management" devrait avoir un seul
chapeau, soit celui de l'Hydro-Québec. Par là je veux dire qu'il
doit y avoir une équipe, et que le personnel vienne de
l'Hydro-Québec ou de certaines entreprises qui viendraient
compléter les forces de l'Hydro-Québec. Tous ceux, sur les
chantiers, qui s'occuperaient de gérance devraient être
identifiés comme étant de l'équipe HydroQuébec.
C'est la seule façon d'avoir une unité de pensée dans la
gérance.
Par contre, les différents bureaux d'ingénieurs-conseils
qui seraient employés pour l'ingénierie retiendraient leur
identité et leurs responsabilités. Par contre on voit que tous
ces spécialistes, ces ingénieurs devraient travailler sous le
même toit. L'ingénierie et la gérance seraient sous le
même toit afin de favoriser les contacts et d'avoir un meilleur
contrôle sur l'exécution des travaux d'ingénierie et de
gérance et diminuer les coûts de ce travail. L'équipe de
gérance aurait la responsabilité et la direction de
l'ingénierie, des approvisionnements, de la construction, du
contrôle des coûts et des programmes, de l'administration et des
services.
En somme, c'est un mandat global de gérance.
Comment, en quelques mots, ce groupe de gérance pourrait-il
exercer sa fonction et comment se rapporterait-il à ses
supérieurs ou à ceux qui en sont responsables? On voit que le
groupe de gérance soumettra tout rapport, compte-rendu ou recommandation
concernant le projet à la Société d'énergie et
à l'Hydro-Québec en même temps, dans le but
d'accélérer le processus de décision. La
Société d'énergie émettra les contrats après
l'émission d'appels d'offres, selon la politique d'achat de
l'Hydro-Québec. La Société d'énergie transmettra
les décisions prises pour que le groupe de gérance puisse le
mettre à exécution.
Concernant l'ingénierie, des contrats seraient octroyés
pour chaque projet à des bureaux d'ingénieurs-conseils du
Québec dont la compétence nous est connue en raison des services
rendus dans le passé. On voit là des projets et des contrats qui
seraient suffisamment nombreux pour intéresser et occuper tous nos
bureaux d'ingénieurs-conseils québécois qui ont la
compétence voulue et, également, les ingénieurs de
l'Hydro-Québec, selon leur compétence. Les approvisionnements se
feraient par l'entremise de l'Hydro-Québec, selon les politiques d'achat
de l'Hydro-Québec que tous connaissent.
Pour la construction, les contrats seraient octroyés à
l'entreprise privée selon les besoins et conformément aux
politiques suivies par l'Hydro-Québec.
C'est en somme, un résumé de ce qu'on voit dans le moment
comme mandat de gérance ou plutôt comme façon
d'exécuter un mandat pour le projet de la baie James.
M. LE PRESIDENT: M. Nadeau.
Commentaire du président
de la Société de
développement
de la baie James
M. NADEAU: M. le Président, je voudrais d'abord faire quelques
commentaires sur la déclaration que nous a lue M. Dozois. A la page 3,
on constate que la Société d'énergie a fait une demande
à la Société de développement de la baie James pour
qu'elle souscrive au capital de la société d'énergie.
Vous comprendrez comme moi qu'en bon administrateur, la
Société de développement de la baie James ne pouvait
engager des capitaux, qui étaient empruntés à des taux de
8 1/2 p.c. ou 8 3/4 p.c, dans la Société d'énergie, alors
que celle-ci n'en avait pas besoin, à ce moment. On aurait dû les
réinvestir, pour des termes courts ou moyens, à des taux de 5 1/2
p.c. ou 6 p.c. Cela aurait été de la mauvaise administration que
d'investir des millions de dollars à ce moment-là, des millions
de dollars dont nous n'avions pas besoin, d'ailleurs, à la
Société d'énergie. Première mise au point.
Deuxièmement, à la page 5, au dernier paragraphe, on dit:
"Nous croyons que cette attitude de l'Hydro-Québec est en tout point
conforme aux principes énoncés dans la lettre du 29 avril,
citée précédemment." Cette lettre était
signée par M. Giroux. La Société de développement
de la baie James fonctionne dans l'esprit de la loi no 50 et non pas dans
l'esprit de la lettre qui a pu être écrite par M. Giroux, le 29
avril. La loi, je crois, a été adoptée le 14 juillet et
nous nous en tenons strictement aux termes de la loi.
M. le Président, cette mise au point faite, je crois que nous
devrions, pour mieux situer la question de gérance dans l'ensemble de
tout ce qui a été dit, expliquer à la commission, à
l'aide d'un tableau, de quelle façon se définit la position de la
Société de développement de la baie James.
Si vous voulez me le permettre, j'aimerais me servir du tableau vert qui
est à votre gauche. Je regrette, mais l'on devra se retourner. Mais
c'est la meilleure façon, je crois, pour vous expliquer les
recommandations de la société.
M. le Président, la loi no 50 dit, à l'article 16, que le
développement des ressources hydro-électriques doit être
fait parce qui s'appelle, aujourd'hui, la filiale, la Société
d'énergie de la baie James. La loi précise donc, à
l'article 16, que le développement des ressources
hydroélectriques, la production et la distribution de
l'électricité dans le territoire ainsi que sa transmission seront
effectués je souligne "seront effectués", la loi ne dit
pas "pourront" par une compagnie constituée en vertu de l'article
21. On en a fait la lecture tout à l'heure. Alors, je vous
épargne ceci.
Donc, si vous voulez, ici, en haut, vous avez la province de
Québec, ou le gouvernement du Québec, en somme, les
Québécois qui sont propriétaires de la
Société de développement de la baie James et de
l'Hydro-Québec.
Ces deux sociétés paragouvernementales forment une
société qu'on appelle la Société d'énergie
de la baie James. Cette même société d'énergie, on y
reviendra, si vous voulez, un peu plus tard.
Si nous voulons, à ce moment-ci, faire un parallèle entre
ce qui s'est fait à Churchill Falls et ce qu'on a l'intention de faire,
vous avez ici, dans l'affaire de Churchill Falls, Brinco et
l'Hydro-Québec qui ont confié à deux
sociétés de l'entreprise privée, Acres et Becutal en
l'occurrence, la gérance du projet.
Ce que veut l'esprit de la loi, je crois, c'est que cette
Société d'énergie, qui a été
créée en vertu de l'article 16, soit le maître d'oeuvre des
aménagements hydro-électriques de la baie James. C'est donc la
Société d'énergie de la baie James qui, en vertu de la
loi, est responsable du développement des ressources
hydro-électriques de la région de la baie James. C'est encore la
Société d'énergie qui, conformément à la
loi, doit étudier les différents mandats de conception et
d'exécution à accorder à l'Hydro-Québec, à
d'autres organismes gouvernementaux ou paragouvernementaux ou à
l'entreprise privée.
Je vous ai dit tantôt qu'on reviendrait à la
Société d'énergie. Revenons-y encore. La
Société d'énergie est constituée comme ceci. Vous
avez d'abord le bureau de direction duquel trois représentants de
l'Hydro-Québec sont partie. Donc, ils ont la majorité. Ils y
détiennent aussi, évidemment, 70 p.c. des actions à ce
jour. Vous avez, en-dessous, le président. En-dessous du
président, son adjoint exécutif ou, si vous voulez, le directeur
général du projet. Ici, directement sous le président,
vous avez les finances, les relations publiques, le contentieux, le
secrétariat et aussi, peut-être, un bureau de consultants
extérieurs qui peuvent servir de conseillers techniques sur une haute
échelle.
Au-dessous de l'adjoint, vous avez un directeur de projet et au-dessous
du directeur de projet, vous avez toute une série de cadres ou
d'individus qui peuvent se situer, en chiffres, entre 94 et 134. Ce sont les
estimations qui ont été préparées selon un
organigramme copié sur celui de Churchill Falls.
Ces 94 ou 134 individus suivant la courbe d'intensité des
travaux peuvent nous venir de l'Hydro-Québec, s'ils sont
disponibles, en vertu des grands ouvrages que l'Hydro aura à faire
simultanément, soit pour des usines pompées ou nucléaires,
etc. On évite ainsi la création d'une société
immense. Et au-dessous de cette unité de contrôle, qui est la
Société d'énergie ou la Churchill Falls du Québec,
vous avez la gérance du proejt.
Et la gérance du projet, qui vient se situer au-dessous de la
Société d'énergie. Suivant l'intensité et la courbe
d'avancement des travaux la gérance pourra employer de 900
à 1,500 personnes à la pointe. Cette société de
gérance, qui est une entreprise privée, est
démembrée à la fin des travaux. Donc, on ne crée
pas une boutique permanente avec un nombre d'individus qu'on sera obligé
de garder lorsque les travaux seront terminés. Mais quand cette
société de gérance se démembre, les
ingénieurs qui sont affectés ici peuvent être
affectés à d'autres travaux suivant la demande à travers
le monde ou le Canada.
Prenons une autre hypothèse: Vous avez encore ici la SDBJ et
l'Hydro-Québec, avec toujours en haut la province de Québec, qui
ont formé la Société d'énergie. Cette
société confie à l'Hydro-Québec le contrat de
gérance. Ce qui veut dire que l'Hydro-Québec va fournir le
génie, etc. Elle doit ajouter le personnel de 94 à 134 que j'ai
mentionné tantôt, plus les 900 à 1,500 que j'ai
mentionnés. Et ces individus-là deviennent des permanents
à l'Hydro-Québec.
Dans ce contexte-là, l'Hydro-Québec devient le client, le
propriétaire, le concepteur, l'exécuteur et le contrôleur.
Par exemple les travaux de génie qui doivent être
surveillés par la gérance peuvent être critiqués par
la gérance et le génie, et ainsi de suite jusqu'en haut.
Alors continuons si vous voulez notre hypothèse, gardons ce
dessin, mais imaginons que l'Hydro-Québec à laquelle la
Société d'énergie aurait confié la gérance,
ait recours à son tour à l'entreprise privée. Alors, ce
qu'on vient de faire tout simplement, c'est de créer une entité
inutile, à un ou l'autre endroit. Mais on vient de créer une
entité qui est superflue et qui élimine à peu près
les responsabilités et les devoirs de contrôle que la
société d'Energie doit détenir afin de parfaire le
projet.
Je comprends mal cette bifurcation qu'on ferait quand tout simplement on
pourrait avoir, en-dessous de la Société d'énergie, la
gérance avec les contrôles que l'Hydro-Québec désire
avoir parce qu'elle a la majorité des administrateurs; elle a en
même temps ce contrôle et pour elle et pour la
Société d'énergie. Alors, nous conformant à
l'article 16, nos recommandations relativement â la gérance sont
les suivantes: Que le groupe de gérance soit directement sous le
contrôle de la Société d'énergie, que ce groupe de
gérance soit distinct de l'Hydro-Québec et que ce groupe de
gérance soit tiré des rangs de l'entreprise privée
québécoise.
Encore une fois, si nous recommandons que la gérance soit
directement sous la juridiction de la Société d'énergie,
c'est afin que la lettre et l'esprit de la loi 50 soient respectés.
D'un autre côté, devant l'ampleur du projet, nous sommes
d'avis, au sujet de la gérance, c'est-à-dire le groupe
responsable du respect des budgets et responsable du calendrier des travaux, de
l'exécution, que cet organisme doit être distinct du maître
d'oeuvre, si vous voulez, ou du client ou du propriétaire, mais
responsable devant lui.
Alors, M. le Président, je crois que nous avons exposé nos
idées assez clairement. Nous avons peut-être réussi
à situer un peu mieux les membres de cette commission devant nos
recommandations et dire comment nous voyons cet organigramme et cette
structure. En conclusion, nous croyons sincèrement que nous avons ici
des ressources, celles de la baie James qui font l'envie du monde entier, nous
en sommes convaincus, et l'objectif commun devrait être de les exploiter
au profit des Québécois et de la façon la plus rationelle
possible.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, M. Nadeau.
M. DOZOIS: Vous me permettrez, M. le Président, d'ajouter
quelques commentaires à ce que vient de dire M. Nadeau. Je veux tout
simplement faire remarquer, au tout début, que je n'ai imputé
aucun motif à la Société de développement de la
baie James pour l'acceptation ou la non-acceptation de l'invitation de
souscrire au capital-action de la Société d'énergie. J'ai
énoncé des faits. C'est tout ce que je veux corriger dans les
commentaires ayant trait à la déclaration que j'ai faite.
Je voudrais cependant ajouter que, lorsqu'on fait une analogie avec
Churchill Falls, il faut se rappeler que le capital-actions de cette compagnie
est détenu dans une proportion de 56 p.c. par Brinco, 34 p.c. par
l'Hydro-Québec et 10 p.c. par la province de Terre-Neuve. Or, Churchill
Falls, qui veut réaliser son projet de l'aménagement des chutes
Churchill, pour exécuter ces travaux, pouvait difficilement les faire
exécuter par l'actionnaire majoritaire qui est Brinco, puisque Brinco
n'est pas spécialisée dans ce domaine.
Elle pouvait également difficilement se retourner vers
l'Hydro-Québec qui, elle, était actionnaire minoritaire et, en
même temps, client presque unique de Churchill Falls. Je pense bien que
l'actionnaire majoritaire n'aurait pas accepté de confier
entièrement les travaux à l'actionnaire minoritaire qui
était, en l'occu-
rence, l'Hydro-Québec. Je pense bien qu'elle ne les aurait pas
confiés à la province de Terre-Neuve qui ne détient que 10
p.c. des actions de Churchill Falls.
Or, la Société d'énergie, il faut bien le
réaliser, est la propriété, comme je le disais tout
à l'heure, de l'Hydro-Québec, dans une proportion je n'ai
pas fait le calcul de peut-être 99.999 p.c. des actions.
L'Hydro-Québec sera le seul client à acheter cette énergie
et elle vendra cette énergie aux citoyens de la province de
Québec. L'intérêt de l'Hydro-Québec est de se
procurer cette énergie au meilleur coût possible. Nous avons un
intérêt primordial à-dedans, c'est de nous procurer cette
électricité, pour la vendre aux citoyens de la province de
Québec, à nos abonnés, au meilleur coût
possible.
Je ne dis pas que la Société de développement
n'aurait pas le même souci, mais il reste qu'elle n'est pas
spécialiste de cette question. On ne peut confier la totalité de
la gérance à une telle entreprise, quels que soient ses
mérites. Nous croyons qu'il appartient plutôt à
l'actionnaire majoritaire, qui est, en même temps, client et fournisseur
de cette précieuse denrée, de décider comment ces travaux
seront exécutés et de surveiller les coûts, etc. C'est dans
cet esprit que l'Hydro-Québec réclame la gérance, en
tenant compte de tous ces facteurs. L'Hydro-Québec n'aurait
sûrement pas d'objection je pense que c'est une affirmation que je
peux faire; mes collègues ne partageront pas mon opinion, si le coeur
leur en dit si la Société de développement veut
faire le développement, mais il faudrait qu'elle signe un contrat avec
l'Hydro-Québec et que nous acceptions d'acheter
l'électricité à un coût que nous jugerions
raisonnable afin de la revendre à des conditions raisonnables à
nos abonnés.
Si la Société de développement veut prendre le
risque de nous signer un contrat et de déterminer immédiatement
le prix, si elle arrive avec un déficit, c'est-à-dire que le prix
de vente de son électricité ne rencontre pas ses coûts,
elle en subira les conséquences. Comme propriétaires de la
compagnie qui va faire les travaux, nous avons avantage à les faire au
meilleur coût possible pour nous procurer la denrée dont nous
sommes responsables quant à sa distribution et quant à sa vente.
Ce sont les commentaires que je voulais faire.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Dozois. Le député de
Verchères.
M. SAINT-PIERRE: Merci, M. Dozois. Dans votre exposé, vous avez
mentionné l'Hydro-Québec, d'une part, et la Société
de développement de la baie James, d'autre part. Vous avez dit
vous venez de terminer par ces propos . Si la société
voulait bien le faire, nous n'avons pas d'objection, pour autant qu'elle
s'engage à le faire à un certain coût. Donc, vous parlez de
deux institutions: l'Hydro-Québec et la Société de
développement de la baie James.
L'article 16 de la loi 50 parle de la Société
d'énergie qui est un troisième organisme et elle confie à
celle-ci cette responsabilité. Tenant compte, comme vous l'avez
mentionné dans votre propre texte, que l'Hydro-Québec
détient actuellement 97 p.c...
M. DOZOIS: Plus de 99 p.c.
M. SAINT-PIERRE: ... plus de 99 p.c. des actions et qu'enfin, suivant la
loi, il y a quand même une majorité absolue tant chez les
actionnaires que chez les administrateurs, est-ce que l'Hydro-Québec ou
les commissaires considèrent que la Société
d'énergie de la baie James pourrait être un mécanisme
approprié pour être maître d'oeuvre du projet?
M. DOZOIS: Si la Société d'énergie veut confier le
mandat. Le seul litige, c'est qu'il y en a à la Société
d'énergie qui voudraient confier le mandat à un bureau
d'ingénieurs ou à un consortium de bureaux d'ingénieurs
alors qu'en tant qu'actionnaire majoritaire, c'est le consensus qu'on en
conclut puisque ce qui a été dit ici a été
approuvé par les cinq membres de la commission, nous croyons, nous,
qu'il est plus avantageux que la société d'énergie fasse
exécuter ces travaux, en tant que mandataire, par l'Hydro-Québec.
Comme je le disais tout à l'heure, nous avons le personnel qui a
l'expérience, la compétence, qui est bien versé
là-dedans et qui est en mesure de mettre sur pied, avec la surveillance
nécessaire comme je pense que M. Boyd l'a exposé tout
à l'heure une gérance qui, à notre avis, va
réaliser tout ce projet à des coûts qui selon nous seront
raisonnables.
M. SAINT-PIERRE: En s'attaquant à ces grands projets, on a de
plus en plus recours, non pas à un type d'organisation qui repose sur
des lignes de hiérarchie très bien déterminées,
mais plutôt sur le concept appelé communément de groupes de
travail, de "task force". On a l'exemple de plusieurs grands projets, que ce
soit l'Expo-67, la voie maritime du Saint-Laurent, l'aéroport de
Montréal. Dans d'autres pays, pensez à la NASA, où on
constitue un groupe de travail séparé qui reçoit un mandat
particulier pour un projet particulier. Si c'était fait à
l'intérieur de l'Hydro-Québec ma question s'adresse
à M. Boyd ou à M. Gauvreau est-ce que ce serait
l'intention, pour former ce groupe de travail, de former une nouvelle direction
générale à l'Hydro-Québec ou est-ce que ce serait
confié au groupe de génie ou au groupe de construction? Quelle
structure serait envisagée dans le cas où ça pourrait
être confié exclusivement, comme un blanc-seing, à
l'Hydro-Québec?
M. GAUVREAU: M. le ministre, je voudrais répondre clairement
à votre question, mais dans un premier temps, si vous me le permettez,
comme le premier ministre a formulé le voeu à
plusieurs reprises au cours de la semaine que la discussion
d'aujourd'hui soit claire, je crois qu'il faudrait faire quelques distinctions.
Il y a des termes qui ne sont pas très bien compris quand on dit:
gérance, maître d'oeuvre, propriétaire. Vous me permettrez,
au cours de la discussion, de préciser ces distinctions. En gros, il y a
quand même deux problèmes à régler aujourd'hui dans
la discussion. Il y a d'abord le problème des relations entre
l'Hydro-Québec et la Société d'énergie. Je crois
que tant qu'on ne l'aura pas réglé, on n'aura rien
éclairci. Ensuite, il y a le problème de l'entreprise
privée, les services achetés. L'Hydro-Québec a
déjà acheté des services de génie, elle a
déjà acheté des services de construction, elle pourrait
acheter des services de gérance.
Je crois qu'il faudra un peu faire la distinction de ça. Lorsque
nous parlons d'un contrat total d'ingénierie et de gérance,
peut-être que ça prête un peu à confusion parce qu'en
employant le mot gérance, l'Hydro-Québec se donnant la
gérance, par sa filiale, c'est comme si on excluait l'idée
d'acheter des services de l'entreprise privée pour nous venir en aide.
C'est une distinction que je voulais faire. Je crois que les
députés l'apprécieront et on pourra encore donner des
précisions là-dessus.
M. SAINT-PIERRE: M. Gauvreau, dans l'hypothèse où la
gérance serait complètement donnée à
l'Hydro-Québec, vous n'excluez pas, pour les fins de gérance, le
recours à des entreprises privées pour assister vos...
M. GAUVREAU: Non. Nous vous dirons dans quels termes et pourquoi. Encore
ici, M. Dozois tout à l'heure a dit peut-être qu'on n'est pas
d'accord. Je ne voudrais pas qu'on pense que si on ne dit pas les choses dans
les mêmes termes, ça veut dire qu'on peut n'être pas
d'accord. Vous savez, quand on n'a pas discuté une question ensemble
pendant un certain nombre de semaines, on ne peut pas être d'accord
dessus. On a pris la décision de faire La Grande le 11 mai et on n'a pas
eu grand temps depuis pour étudier vraiment les propositions, les
modalités d'organisation.
On fait beaucoup de reproches à l'Hydro-Québec, et
j'aimerais relever quelques-uns de ces reproches qui nous viennent un peu de
toutes parts: monstre, Etat dans l'Etat, etc.
Je suis heureux de cette formule, parce qu'on dit: Une organisation
très grosse comme l'Hydro-Québec qui a beaucoup de choses
à faire de l'exploitation à un certain rythme, de la
construction-distribution, de la distribution, des achats pour son
fonctionnement normal ne peut pas fonctionner avec la même
efficacité qu'une organisation qui est donnée entièrement
à un projet, précis, à un projet de construction qui a des
délais, des contraintes très différentes.
Or, vous avez fait allusion à l'organisation par projet et aussi
au "construction management", qui sont deux choses près l'une de
l'autre. L'une est hiérarchique à l'intérieur de
l'entreprise et le "construction management" est la même chose, mais sur
une base contractuelle. L'organisation par projet à
l'Hydro-Québec, nous ne l'avons jamais appliquée comme telle.
Mais nous y réfléchissons, comme toute entreprise en
évolution, nous avons un rapport. Je peux en citer un d'il y a quatre ou
cinq ans, de M. Boulet, qui nous faisait un rapport sur les organisations par
projet dans le monde. On donne toujours l'exemple de la NASA. Maintenant, les
exemples sont plutôt du côté des constructions
d'édifices, de buildings aux Etats-Unis. Nous avons un rapport du
comité de l'ingénierie. M. Baribeau, avant son départ de
l'Hydro-Québec, disait j'ai encore la lettre, la recommandation
ici: Pour fins de la baie James, nous devrions avoir une organisation par
projet, ce qui est une unité administrative semi-autonome avec beaucoup
plus de pouvoirs, tous les services sous un seul chef et pouvant fonctionner
beaucoup plus efficacement. Il y a les services techniques et services de
support comme les achats, les approvisionnements, etc. De temps à autre,
lorsque c'est nécessaire, elle peut avoir recours à la
société mère, qui a une longue expérience dans la
rédaction des contrats, dans l'embauchage du personnel, dans toutes
sortes de spécialités techniques.
Nous y pensons et il n'y a pas de doute que, si le projet de la baie
James n'avait pas été confié à la
société d'énergie, nous nous serions organisés,
nous nous serions dotés d'une organisation par projet. Nous aurions eu
une direction générale de la baie James. Est-ce que cela
répond à votre question?
M. SAINT-PIERRE: Oui, très bien. Je vous remercie, M. Gauvreau.
Mais si je comprends bien, sans avoir pris officiellement position, à
cause des délais vous n'avez pas eu le temps de discuter à
fond de la chose vous envisagez, presque unanimement, le fait d'un
concept d'une direction générale de la baie James à
l'intérieur de l'Hydro-Québec, si vous avez un mandat?
J'ai une deuxième question. Compte tenu du fait que vous
êtes fortement majoritaire sur tous les plans, en particulier les
actionnaires, le bureau de direction et plus encore la charte, qui quand
même donne beaucoup de pouvoirs à l'Hydro-Québec, est-ce
que la structure de la Société d'énergie de la baie James
n'est pas toute indiquée pour être l'équivalent de ce que
vous aviez envisagé comme direction générale de la baie
James?
M. GAUVREAU: Il faudrait peut-être en discuter et poser la
question à nos deux commissaires ici qui sont administrateurs de la baie
James. Moi, je ne le suis pas. Personnellement, je souhaiterais que ce soit la
formule acceptée. Je souhaiterais que le droit de regard, la
surveillance, les liens, la collaboration soient
assez harmonieux, assez étroits pour que cette
société, vraiment puisqu'elle existe devienne la
direction générale de la baie James.
Maintenant, est-ce que nous avons suffisamment de contrôle? Dans
les termes employés chez nous, nous nous sommes dit: Oui, mais ce sont
des contrôles négatifs, ce sont des contrôles a posteriori.
Je crois que le meilleur mot est celui employé par M. Dozois, qui a dit:
Nous n'avons pas toujours l'initiative. Alors, cet exemple, je le pose comme
ceci. M. Nadeau propose au conseil le consortium SNC et, après des
négociations de quelques mois, l'Hydro-Québec dit non. Alors,
tout ce qu'il peut faire, c'est de se retourner, aller en chercher un autre et
revenir. L'Hydro-Québec dit encore non jusqu'à ce qu'elle trouve
le bon. Au bout de quelque temps, c'est un peu lourd. Cela fait quand
même deux paliers de décision.
Il y a des difficultés aussi dans l'autre formule. Je finis ce
que j'ai à dire, vous me permettez? Il y a des problèmes
juridiques à résoudre qui ne sont pas très clairs encore.
J'ai pratiqué le droit d'une certaine manière, je ne suis pas un
spécialiste et cela fait longtemps que j'ai abandonné cela, mais
je crois qu'il faudrait des opinions juridiques très précises et
très claires pour nous dire que la Société
d'énergie peut nous confier un contrat. Le contrat que nous envisageons,
si nous voulons vraiment avoir ce contrôle, c'est une cession de
juridiction à toutes fins pratiques.
On vous dit: Cédez-nous la juridiction, le mandat qui vous a
été donné d'exécuter ça. Je me pose des
questions: Est-ce qu'elle a le droit de le faire? Au gouvernement d'en
décider avec les conseillers juridiques. Deuxième question:
Est-ce que l'Hydro-Québec peut l'accepter? En général,
l'Hydro-Québec a reçu mandat de faire exécuter des choses
mais elle n'est pas là pour recevoir des mandats d'exécution.
Alors, ce sont deux petits problèmes juridiques qui, probablement,
pourraient être résolus.
Mais, j'ai quand même l'impression, comme M. Nadeau l'a dit, que
faire ce contrat, c'est une façon de passer à côté,
si vous voulez, c'est court-circuiter la Société de la baie
James. Il me semble que ce serait plus clair pour tout le monde que le
gouvernement nous donne les pouvoirs que nous voulons avoir dans la
Société d'énergie de la baie James pour que nous ne soyons
pas obligés de signer ce genre de contrat. Pourquoi demandons-nous
beaucoup d'autorité? Là, je réitère ce qui a
été dit par mes collègues. Nous croyons que nous en avons
besoin parce que nous en avons de l'expérience, parce que nous devrons
augmenter les tarifs. Les problèmes de délais, les
problèmes de coûts, ce sont des problèmes importants et
cela, vous le savez.
Enfin, on voudrait que notre personnel de cadre je ne dis pas
qu'on en a des centaines à mettre à leur disposition ait
la priorité. On ne voudrait pas qu'un personnel d'expérience, de
premier niveau, soit placé au troisième niveau dans la
Société d'énergie. Alors, est-ce que cela répond
à votre question?
M. SAINT-PIERRE: Oui.
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Oui?
M. JORON : Question supplémentaire qui éclairerait
peut-être nos débats et qui est très courte, si vous me
permettez M. le Président. Quand le maître d'oeuvre devrait-il
être nommé? Cela nous donnera une idée des délais
qui sont impliqués et de l'urgence de cette décision.
M. LE PRESIDENT: Cette question simple, est-ce qu'on pourrait y
répondre?
M. GAUVREAU: Oui. Parce que maître d'oeuvre, parfois...
M. JORON: D'accord.
M. GAUVREAU: ... ce sont plutôt des clients, mais c'est le
propriétaire. Alors, on va dire le propriétaire et le
gérant.
M. JORON : Oui. Pour respecter le calendrier, tel que prévu, le
gérant devrait être nommé, au plus tard, quand?
M. GAUVREAU: J'aimerais qu'on ait encore six semaines pour y penser.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bellechasse.
M. GAUVREAU: Le plus tôt possible.
M. LOUBIER: M. le Président, j'ai écouté, tout
à l'heure, M. Dozois, là MM. Gauvreau et Nadeau. Est-ce que j'ai
bien saisi, d'après les propos qui sont tenus, que la
Société d'énergie même et à plus forte
raison, justement parce que l'Hydro-Québec est dans l'investissement
à 95 p.c. ou à 97 p.c, justement à cause du fait que, au
bureau de direction, l'Hydro-Québec est majoritaire par ses membres,
justement à cause de ces deux faits particuliers, assez
révélateurs trouve que c'est une structure qui ne devrait
pas exister? Comme le disait M. Dozois, que le mandat de la gérance soit
confié à la Société de développement ou
à l'Hydro-Québec, l'Hydro-Québec se refuse d'être
caution dans la Société d'énergie, de servir de tampon ou
encore d'être plus ou moins à l'aise pour avoir toute la latitude
voulue pour cette gérance. Est-ce que c'est un peu le sens des propos
qui ont été tenus par MM. Gauvreau et Dozois, en ce sens que la
Société d'énergie semble superflue dans le contexte
actuel? Lorsqu'on soutient l'existence de la Société
d'énergie, pourquoi l'Hydro-Québec s'en plaindrait-elle
puisqu'elle a déjà trois membres sur cinq, puisqu'elle
contrôle 97 p.c. ou 99 p.c. sur le
plan des investissements? Pourquoi l'Hydro-Québec ne veut-elle
pas accepter que ce soit la Société d'énergie alors que
c'est elle, en fait, qui a une voix prépondérante dans cette
Société d'énergie? La réponse de
l'Hydro-Québec, si je comprends bien, est la suivante: Justement
à cause de ces faits, pourquoi ne pas confier le mandat, de façon
très explicite, directement et sans passer par cette structure à
l'Hydro-Québec? Est-ce que c'est un peu ça le sens de vos
propos?
M. DOZOIS: Vous me posez la question. En ce qui me concerne, je dirai
ceci: Personnellement, je n'ai pas d'objection à ce que la
Société d'énergie existe et continue d'exister. Mais ce
sera peut-être très utile qu'il y ait ce lien entre la
Société de développement et l'Hydro-Québec. Il va
sûrement y avoir une foule de problèmes qui vont naître
quotidiennement dans la baie James.
La Société de développement de la baie James est
chargée de l'exploration minière et de l'exploitation des
forêts, de l'exploration pétrolière, du
développement touristique et de tout le développement de la baie
James. La Société d'énergie, elle, est strictement
chargée des ressources hydro-électriques. Il y aura
sûrement une collaboration nécessaire entre les deux organismes.
Je pense que c'est un organisme tampon entre les deux. Personnellement, je
crois cela. La différence, c'est que M. Nadeau, au nom de la
Société de développement de la baie James, croit que le
projet hydro-électrique serait mieux réalisé s'il
était confié à un groupe de gérance
indépendant, alors que nous, pour les raisons que j'ai données
tout à l'heure, nous croyons qu'il serait mieux dirigé par
l'Hydro-Québec, étant donné se compétence dans le
domaine, son expérience et les cadres qu'elle possède.
Maintenant, cela ne veut pas dire que la Société
d'énergie n'aurait plus rien à faire. J'estime que le
développement va se faire par la Société d'énergie,
mais que celle-ci va donner un mandat à l'Hydro-Québec.
M. SAINT-PIERRE: M. Dozois, si vous me le permettez, peut-être
pour clarifier, je ne sais pas si on pourrait mettre de l'avant un concept qui,
selon moi, illustre bien cela. Devant l'ampleur du projet, on ne parle pas d'un
mandat comme celui qu'une personne confie à un architecte pour faire les
plans de sa maison. Il y a une fonction que j'appelle de client averti et que,
je pense, M. Gauvreau appelait maître d'oeuvre. Il s'agit de celui qui
prend les décisions, qui permet que les lumières vertes
s'allument et qui dit: Oui, je suis prêt à endosser le projet.
Appelons cela, disons, un client averti.
Si je comprends bien votre intervention, compte tenu des pouvoirs de
décision que vous avez à l'intérieur de la
Société d'énergie, vous n'êtes pas opposé
à ce que ce soit la Société d'énergie qui joue ce
premier rôle de client averti.
M. DOZOIS: C'est cela.
M. SAINT-PIERRE: M. Nadeau a le même sentiment. Le deuxième
point touchant ce client averti, qui est contrôlé à 98 p.c.
par l'Hydro-Québec et qui voyons cela clairement
n'implique pas une ou deux personnes, mais peut impliquer, peut-être, une
centaine de personnes, parce qu'un client averti doit avoir suffisamment de
ressources pour être capable de juger de la qualité des avis qu'on
lui donne, est le suivant et c'est là qu'il y a peut-être
divergence. Nous pourrions en discuter dans un deuxième temps. Il s'agit
de savoir à qui ce client averti confie ce qu'on appelle proprement la
gérance, c'est-à-dire l'organisation de tous les jours de
l'ensemble du projet, la décomposition du projet dans des contrats
donnés, l'octroi de ces contrats, le contrôle des devis et de la
qualité, le contrôle des coûts et
l'échéancier. C'est là qu'il y a peut-être une
divergence. M. Nadeau, dans ce deuxième temps au premier temps,
on est d'accord que le client averti pourrait être la
Société d'énergie dit: Cela devrait être le
secteur privé, comme ce fut le cas à Churchill Falls. Si je
comprends bien, M. Dozois et M. Gauvreau, vous dites que l'Hydro-Québec
pourrait peut-être avoir ce mandat, avec des nuances, puisque vous dites,
dans votre texte, que le secteur privé pourrait également
être appelé à contribuer à ceci.
M. GAUVREAU: Je n'ai pas de texte.
M. SAINT-PIERRE: Non, mais dans le texte de M. Dozois.
M. GAUVREAU: Vous faites référence au client averti, M. le
ministre. Beaucoup de gens ne comprennent pas cela. Voici des précisions
que je voudrais donner sur la nature ou l'étendue de la
délégation qui peut être formulée dans un contrat de
gérance.
Des contrats de gérance, j'en ai une quinzaine dans mon dossier,
ici, qui existent dans le monde, qui ont été
exécutés et qui ont été donnés. En
général, quand un client est un petit propriétaire, qui ne
fait pas souvent des travaux, s'il emploie un gérant, il lui donne un
mandat très large à partir des études de recherche
préliminaire, de planification, etc. Si vous prenez un client de
dimension moyenne qui, de temps à autre, fait des travaux, comme une
municipalité, il est un peu plus ce que vous appelez un client averti.
Alors, il se garde une partie du travail et il en délègue plus au
gérant. Si c'est quelqu'un comme l'Hydro-Québec, qui fait, depuis
toujours, de la construction de même nature et qui a un
intérêt très direct dans les résultats de la
construction, évidemment, le mandat qu'il donnera à son
gérant sera beaucoup plus restrictif. Le propriétaire va faire
beaucoup plus de choses et le gérant en fera moins. A mon avis, nous
sommes à l'exemple extrême.
On cite le cas de Churchill Falls, qui avait
donné un très large mandat à Acres Bechtel, mais il
ne faut pas oublier que Churchill Falls n'a construit qu'une seule centrale. Il
y a seulement un projet. Par ailleurs, on s'était réservé
un droit de regard très poussé, même sur tout ce qu'on
avait délégué et même, à tout bout de champ,
on pouvait modifier le contrat et dire: Sur telle et telle chose, nous voulons
plus de contrôle qu'avant.
Il n'y a donc pas de doute, si c'est le sujet, que si
l'Hydro-Québec ou sa filiale ou la direction générale
donnait un contrat ou utilisait des services achetés, elle en ferait une
bonne part, elle-même. Elle s'équiperait en conséquence. Il
lui faudrait une équipe de 100, 125, 130 personnes, au départ,
pour vérifier ce qui serait donné au gérant. Et
peut-être plus, parce que j'en donnerais moins que ça encore au
gérant. Il y a des choses que nous aimerions faire nous-mêmes.
M. LE PRESIDENT: Sur le même sujet, en réponse?
M. DEGUISE: Sur le même sujet. Je me demande au fond si les deux
formules sont tellement distantes, s'il y a tellement d'écart entre
elles, et je m'explique. Pourquoi y a-t-il un peu d'ambiguité? Je
voudrais tout de suite préciser que c'est seulement, comme disait M.
Gauvreau, le 14 mai qu'on a décidé quel était le programme
d'aménagement de la baie James. Même l'Hydro-Québec n'a pas
encore fait connaître ce qu'elle fera en 1978 et en 1979. On peut
entrevoir Outardes, une centrale pompée, une centrale nucléaire,
etc. Et je crois que ce qui reste à faire à l'intérieur de
l'Hydro-Québec, c'est une projection des effectifs qui sont requis pour
tous les différents travaux, une analyse serrée du personnel qui
est actuellement disponible. M. Gauvreau parle de 5 ou 6 semaines parce que le
personnel dont dispose l'Hydro-Québec n'est pas tellement
considérable. Dans le texte que M. Dozois vous a lu, à la page 4,
au milieu, on dit: "...étant donné qu'elle peut, avec l'aide de
ses cadres et de son personnel, dont la compétence est reconnue,
organiser l'équipe nécessaire..." On ne dit pas qu'elle l'a.
Comme on vient de le mentionner, je pense qu'on est peut-être
à un pourcentage près. Est-ce que l'Hydro-Québec va
fournir 15 p.c, 20 p.c, 25 p.c. du personnel de gérance et qu'elle va
obtenir le reste d'ailleurs? Ou bien va t-elle le donner globalement â
l'extérieur? C'est peut-être la nuance qu'il nous reste à
préciser.
M. LOUBIER : Mais si vous me permettez de reprendre les propos du
ministre, j'étais en train de poser mes questions, le client averti
auquel se réfère le ministre c'est la Société
d'énergie. Or, la Société d'énergie a le droit, la
responsabilité, la possibilité de confier le mandat de la
gérance puisque c'est le client averti à qui elle
veut. C'est ça?
Etant donné que les membres de l'Hydro-
Québec sont majoritaires au bureau de direction, si ces membres
décident de le confier à l'Hydro-Québec, la
décision est-elle finale?
M. DEGUISE: Oui.
M. LOUBIER: Ou cette décision est-elle susceptible d'appel ou de
veto de la part de la Société de développement? Si la
Société d'énergie a pleins pouvoirs décisionnels et
que la décision est sans appel, étant donné que
l'Hydro-Québec est majoritaire à la Société
d'énergie, c'est bien évident que l'Hydro-Québec aura la
pleine latitude de donner le mandat à qui elle voudra le donner. Etant
donné que l'Hydro-Québec considère que c'est une condition
essentielle que la gérance lui soit confiée, pourquoi
s'embarrasser de la Société d'énergie quant au mandat de
la gérance, puisque l'on sait d'avance la volonté exprimée
par les membres de l'Hydro-Québec, qui seront majoritaires à ce
bureau de direction?
Et je me pose la question: Pourquoi se faire des chinoiseries avec tout
ça et ne pas déterminer tout de suite que la gérance sera
confiée à l'Hydro-Québec si la décision de la
Société d'énergie est sans appel? Comme cette
Société d'énergie est composée majoritairement de
membres de l'Hydro-Québec, je me demande pourquoi on perd son temps
à discuter de tout ça. Pourquoi ne pas le définir tout de
suite aujourd'hui, puisqu'on sait d'avance quelle sera la volonté de
l'Hydro-Québec?
M. GAUVREAU: J'ai demandé à des collègues qui sont
membres de la Société d'énergie, il y a quelques semaines,
s'ils croyaient pouvoir préparer ou faire préparer par nos
services un organigramme décrivant exactement les tâches, comment
ils veulent que ça fonctionne à la Société
d'énergie et s'ils pouvaient le déposer à son conseil
d'administration. J'ai demandé si cette proposition serait
acceptée. Je pense que la réponse est claire. Ce serait
certainement accepté parce qu'ils ont la majorité.
M. LOUBIER: Mais est-ce que le président de la
Société de développement, M. Nadeau, partage cette
opinion-là que le pouvoir de décision de la Société
d'énergie, quant au mandat de confier la gérance, est
illimité, absolu et sans appel?
M. NADEAU: En théorie, M. Loubier, vous avez raison.
M. LOUBIER: Là, c'est en pratique; je ne veux pas parler de la
théorie.
M. NADEAU: Enfin, il faudrait que le bureau de direction de la
Société d'énergie se réunisse et prenne une telle
décision. Mais, en théorie, oui, c'est vrai,
l'Hydro-Québec, étant majoritaire, peut décider, si les
membres du conseil d'administration représentant l'Hydro-
Québec sont tous d'accord, que le mandat lui sera
donné.
M. LOUBIER: Où se situe le dilemme, étant donné
que, dans le premier mémoire qui a été
présenté par M. Giroux et, dans son essence,
réitéré par M. Dozois aujourd'hui, on considère que
le mandat de gérance doit être absolument confié à
l'Hydro-Québec et que c'est essentiel si l'on veut que
l'Hydro-Québec exécute le mandat? Sinon, l'Hydro-Québec
dit: Bien, qu'on confie cette gérance-là à qui on voudra,
à la Société de développement, mais nous, à
ce moment-là, nous n'engageons pas notre responsabilité. Nous ne
mettons pas en jeu notre prestige; nous ne mettons pas en jeu, non plus, nos
cadres, parce que nous n'avons plus d'autorité et que nous servirions,
à toutes fins pratiques, de caution ou d'accessoire aux décisions
que pourrait prendre une autre société. C'est pourquoi je demande
si, en pratique, de fait, comme dirait mon ami Jean-Noël Tremblay, de
facto, la décision de la Société d'énergie est
définitive et sans appel. Etant donné la volonté
préalablement exprimée, de façon précise, par
l'Hydro-Québec qu'elle veut le mandat de gérance, pourquoi,
aujourd'hui, rediscuter de tout ça?
M. NADEAU: Vous avez raison. En pratique aussi bien qu'en
théorie, l'Hydro-Québec, étant majoritaire dans la
Société d'énergie de la baie James, peut prendre une telle
décision. Toutefois, la loi dit ceci à propos de la
Société d'énergie de la baie James ou de la filiale
créée pour fins d'aménagements hydro-électriques:
"Le développement des ressources hydro-électriques, la production
et la distribution de l'électricité dans le territoire, ainsi que
sa transmission seront effectués on ne dit pas pourront
par une compagnie constituée en vertu de l'article 21." Cette compagnie
est constituée depuis le 20 décembre.
Donc, si on vit dans l'esprit de la loi et qu'on veut appliquer la loi,
les aménagements hydroélectriques devront être
exécutés par la Société d'énergie, filiale
qui a été créée selon les termes de l'article 21 de
la Loi des compagnies.
M. LOUBIER: Et la Société d'énergie, à ce
moment-là, décidant que c'est l'Hydro-Québec qui a le
mandat de gérance...
M. NADEAU: Cela serait contourner ou court-circuiter, si vous voulez, la
loi ou l'esprit de la loi.
M. LOUBIER : Vous êtes en train de me mettre au courant, avec vos
courts-circuits.
M. DOZOIS: M. le Président, je pense qu'on peut
interpréter, d'une façon plus large, ces mots "seront
effectués par la Société d'énergie." Si la
Société d'énergie, comme le propose M. Nadeau, confie un
mandat au consortium qui lui a fait une offre, donc, elle ne les effectuera pas
elle-même. Je crois comprendre que M. Nadeau veut exposer devant cette
commission qu'en vertu de cet article ce serait la Société
d'énergie qui serait obligée de faire les travaux. Si on veut
l'interpréter d'une façon aussi restrictive, il faudrait que la
Société d'énergie engage tout le personnel et ne confie
absolument rien à l'extérieur.
Moi, je prétends que, du moment que la société a le
mandat d'effectuer les travaux et qu'elle peut confier un mandat au consortium,
elle peut également confier un mandat à l'Hydro-Québec. On
va dire: L'Hydro-Québec est intéressée. Sûrement
qu'elle est intéressée! C'est pour ça que
l'Hydro-Québec veut que le mandat lui revienne, parce qu'elle est
propriétaire, elle est cliente et, elle est chargée de
distribuer, puis de vendre cette électricité à de bonnes
conditions.
M. NADEAU: La seule chose, M. le Président, si vous me le
permettez, c'est que la Société d'énergie serait
constituée comme une société de contrôle je
l'ai expliqué tantôt avec les effectifs nécessaires,
qui se limiteraient entre 94 et 134 individus, selon la densité ou
l'intensité des travaux. Cette société-là,
évidemment, serait une société de contrôle.
Maintenant, tous ces contrôles-là ne seraient pas
transférés, si vous voulez à l'Hydro-Québec, mais
resteraient au sein de la Société d'énergie où les
cinq administrateurs ont droit de regard, avec la majorité
détenue par l'Hydro-Québec.
M. LOUBIER : A toutes fins pratiques, si vous me le permettez je
m'excuse de revenir, mais c'est la dernière fois, parce que je voudrais
donner la chance à mes collègues de poser des questions aussi
dans votre esprit, M. Nadeau, vous concevez très bien que
l'Hydro-Québec, étant majoritaire à la
Société d'énergie, par ses membres, c'est elle qui, en
définitive, va confier le mandat de gérance.
M. NADEAU: Oui, certainement, avec l'assentiment ou les opinions des
autres...
M. LOUBIER: Si vous permettez, sans vouloir vous questionner d'une
façon obsédée, étant donné le voeu
préalablement exprimé comme condition essentielle, absolue par
l'Hydro-Québec, pourquoi ne pas déterminer tout de suite que ce
sera l'Hydro- Québec qui aura la gérance? Autrement, on se laisse
aller à un paquet de procédures et de chinoiseries.
M. NADEAU: C'est une décision qui, je crois, devrait être
prise au niveau du bureau de l'administration de la Société
d'énergie de la baie James. Encore une fois, en théorie, oui
c'est vrai; en pratique, est-ce que ceux qui sont assis autour de la table du
bureau de direction de la Société d'énergie sont
d'accord?
M. LE PRESIDENT: Messieurs, je ne voudrais pas interrompre cette
discussion qui est des plus intéressante, mais il faudrait qu'on ait une
plus grande participation. Il y a déjà ici le
député de Beauce, le député de Gouin, le
député de Bellechasse et le ministre des Affaires sociales qui
ont demandé la parole. Il y en a plusieurs qui ont des questions
à poser. Probablement que les réponses que vous voulez donner
maintenant viendront à la suite de ces questions ou des autres
commentaires qu'on aurait à faire.
Afin de permettre une plus grande participation, si le
député de Bellechasse a à peu près terminé,
on passerait à autre chose.
M. LOUBIER: Je n'avais pas terminé mais je pense que mes
collègues ont la liberté de poser des questions.
M. LE PRESIDENT: Vous aviez fait la suggestion vous-même.
Peut-être que le ministre pourrait parler.
M. CASTONGUAY: M. le Président, il me semble ça va
un peu dans le sens de certaines des questions et des affirmations faites par
M. Loubier, je crois que si on se place sur un plan strict et si on suit
le cheminement des compagnies, de leur constitution, on en arrive à la
conclusion de l'Hydro-Québec, exprimée par M. Dozois.
Si on regarde, d'un autre côté, le plan plus pratique
là, je me réfère à ce que M. Gauvreau disait
j'avais l'impression de réentendre exactement ce que M. Nadeau
disait ou à peu près. M. DeGuise a dit tantôt: "Il nous
faut, à l'Hydro-Québec, voir quels sont nos projets outre celui
de la baie James, déterminer quels seront nos besoins en effectifs, voir
ceux qu'on peut affecter à la gérance du projet de la baie
James". Si on part du fait qu'il faut réaliser des travaux
d'aménagement à la baie James, que la base de direction par
projet est retenue, il semble que, sur ce plan, aussi bien
l'Hydro-Québec que la Société de la baie James sont
d'accord, dans une assez large mesure.
On parle de la création d'une direction générale
à l'Hydro-Québec. A ce moment-là, le cadre qui est
prévu, qui existe par la loi, est celui de la Société
d'énergie de la baie James, dans lequel, comme le disait M. Nadeau
tantôt, on pourrait faire appel à du personnel de
l'Hydro-Québec, dans le même sens mentionné par M. DeGuise;
et s'il y a besoin de personnel additionnel, on ira le chercher, comme disait
M. Nadeau, au Québec pour s'assurer des effectifs suffisants pour une
bonne gérance.
Il me semble que sur le plan très pratique, à partir du
moment où on dit que ce doit être fait selon le concept de la
direction par projet, on a là le cadre tout trouvé qui
protège en même temps l'Hydro-Québec, puisque
l'Hydro-Québec a la majorité des actions dans cette
Société d'énergie. Je ne sais pas si je conclus faussement
au nom d'individus mais je n'ai pas pu voir, à partir du moment
où on discute sur la base de direction par projet, de différence
entre ce que disent M. Gauvreau, M. DeGuise et M. Nadeau. Lorsqu'on se reporte
sur l'autre base, qui est purement celle des structures corporatives,
là, évidemment, on en arrive à la conclusion de M. Dozois,
Il me semble que la décision doit être prise à partir de
cette question fondamentale : est-ce qu'on y va par celle de la direction par
projet, qui semble avoir fait ses preuves pour ce type de travaux?
M. GAUVREAU: M. Castonguay, j'ai déjà dit que j'aimerais
avoir encore six semaines pour y penser. Avant de vous dire que j'accepte la
Société d'énergie comme la direction
générale de la baie James, j'aimerais qu'on en discute encore un
peu plus chez nous et qu'on discute aussi des problèmes de la
gérance, du personnel, quoique j'ai ici des chiffres très
précis sur les effectifs requis. Je sais combien d'effectifs sont
disponibles à l'Hydro-Québec, mais ce n'est pas encore assez. Il
y a peut-être un problème aussi d'initiative. Remarquez que les
deux directeurs qui ont une loyauté à l'égard de la
Société de développement sont à temps plein et que
les trois directeurs qui sont nommés par l'Hydro-Québec ne sont
pas à temps plein. Alors, il y a peut-être un problème
d'influence d'au jour le jour. On n'a pas de directeur général,
il n'est pas nommé par l'Hydro-Québec à la
Société d'énergie. Vous connaissez un peu les
corporations, vous savez quel est le rôle d'un directeur
général. Quoique M. Nadeau ait identifié, je crois, M.
Boulva comme le directeur général tout à l'heure... Je ne
le sais pas, je n'assiste pas à leurs séances, mais j'aimerais
regarder cela de plus près avant de vous dire que je suis satisfait. Je
crois cependant que vous avez bien interprété ma
pensée.
M. LE PRESIDENT: M. Boyd, en réponse, je pense aussi...
M. BOYD: Comme le disait M. Castonguay, il y a beaucoup de choses qui
sont reprochées mais il y a une chose capitale qui ne l'est pas: c'est
vrai qu'on reconnaît tous une fonction de contrôle à la
Société d'énergie. Dans les comptes rendus ou les
déclarations devant la commission, on l'a reconnu, chacun notre tour. Je
le reconnais aussi. Quand j'ai parlé de la façon dont le mandat
de gérance serait exécuté par l'Hydro-Québec, je
reconnaissais ce rôle de contrôle.
La question de gérance par projet, ce que j'ai défini
c'est ça. La différence, c'est que la minorité au conseil
d'administration de la Société d'énergie propose de
confier la responsabilité de la gérance à une entreprise
ou à un groupe d'entreprises privées tandis que la
majorité ou l'Hydro-Québec, comme actionnaire majoritaire,
propose que cette gérance lui soit confiée. Pour ça,
l'Hydro-Québec a des raisons
de responsabilités financières, des raisons de
compétence et d'expérience qui sont assez importantes. C'est
l'Hydro-Québec qui, comme actionnaire majoritaire et détenant la
majorité des actions, va être appelée à financer,
à acheter l'énergie et, au point de vue comptable, la
Société d'énergie est une filiale de
l'Hydro-Québec. Devant le peuple, le gouvernement et par sa loi, c'est
l'Hydro-Québec qui est responsable des coûts de l'énergie.
L'Hydro-Québec a démontré sa compétence et, je
pense bien, son expérience, dans les domaines qui la concernent, soient
les grands projets hydro-électriques.
Il faudrait que l'on confie, d'après l'élément
minoritaire de la Société d'énergie, cette
responsabilité de gérer et de mener à bonne fin ce projet
à des tiers quand, d'après la loi 50, d'après les actions
qu'on détient, d'après notre loi de l'Hydro-Québec, la
responsabilité des coûts relève de l'Hydro-Québec
qui est responsable vis-à-vis du gouvernement et vis-à-vis du
Parlement, vis-à-vis du peuple en ce qui touche les coûts de
l'énergie.
C'est là la différence. C'est que l'Hydro-Québec
veut avoir la responsabilité de la gérance et que les
actionnaires minoritaires veulent la donner à l'entreprise
privée.
M. LE PRESIDENT: J'interviens, j'ai cru comprendre que lorsque M.
Gauvreau s'est arrêté pour prendre son souffle, je lui ai
enlevé la parole. Je la lui remets tout de suite avec mes excuses.
M. GAUVREAU: Je ne sais pas comment M. Boyd peut dire que la
Société d'énergie s'est prononcée d'une
façon catégorique, irrévocable en faveur de ce
système parce que ça n'a pas été transmis à
l'Hydro-Québec dans ces termes. On a entendu parler d'une proposition et
ça finit là. La proposition ne nous a même pas
été transmise officiellement. Personnellement, je ne vois pas
qu'il n'y ait pas moyen de les convaincre et même d'imposer, s'il le
faut, à ces actionnaires minoritaires la façon dont nous voulons
que ça marche. Par ailleurs, pour ce qui est de la collaboration avec
l'entreprise privée dans le Québec, vous savez, nous sommes
très fiers et très sensibles à l'Hydro-Québec, nous
les commissaires ici, avec tout ce personnel derrière nous qui se
demande si nous allons prendre sa part.
Nous tenons à ce que l'Hydro-Québec ait la haute main, la
plus grande participation à la direction de ces travaux.
Si nous avons réalisé de grandes choses dans le
passé, nous ne pouvons pas nous attribuer le mérite exclusif de
ce qui a été fait. Cela a été fait avec des
services achetés en partie; nous avons collaboré avec toutes
sortes de bureaux. S'il faut céder une partie de la gérance
pas s'il le faut, parce qu'on nous le demande mais s'il est
opportun, s'il est utile nous l'envisagerons et nous le considérerons.
Mais je ne crois pas que l'Hydro-Québec puisse se laisser imposer une
solution de gérance totale accordée à l'entreprise
privée par la Société de la baie James, avec les pouvoirs
qu'elle détient.
M. LOUBIER: Je m'excuse, je le dis sans aucune malice, mais n'y a-t-il
pas certaines contradictions dans ce que vous venez de dire? Par exemple, vous
n'êtes pas disposé, aujourd'hui, à affirmer que la
Société d'énergie devra accorder à
l'Hydro-Québec la gérance. Vous voulez avoir encore quelques
semaines pour y songer.
M. GAUVREAU: L'aménagement des pouvoirs. Il y a assez des
règlements à passer...
M. LOUBIER: Je m'excuse, si vous voulez que je finisse ma question.
D'une part, vous prétendez que ce n'est pas assez mûri, ce n'est
pas encore décidé dans votre esprit et il faudrait qu'il y ait
d'autres rencontres avec les commissaires de l'Hydro-Québec pour pouvoir
prendre une décision finale à ce sujet, à savoir confier
le mandat de la gérance à l'Hydro-Québec, par le
truchement de la Société d'énergie. D'autre part, vous
dites sensiblement que ce serait impensable, que vous devez protéger
ceux qui sont en arrière de vous, que l'Hydro-Québec a
réalisé de grandes choses, etc. Vous voudriez que
l'Hydro-Québec ne soit pas mise de côté et que, si $le juge
à propos de donner les mandats partiels ou sectoriels à
l'entreprise privée ou ailleurs, il lui appartiendra de le
décider.
Or, je pense que, globalement, on peut déduire que vous
êtes d'accord avec MM. Dozois et Giroux, que la Société
d'énergie doit donner le mandat pour la gérance à
l'Hydro-Québec. Celle-ci après, si elle le juge à propos,
morcellera ou donnera des mandats partiels à l'entreprise privée
ou ailleurs. Mais, globalement, vous êtes favorable à ce que
l'initiative, la responsabilité entière de la gérance soit
confiée à l'Hydro-Québec, quitte à donner des
sous-mandats.
M. GAUVREAU: Je n'aime pas cette expression de mandat de
gérance...
M. LOUBIER: Choisissez-en une autre.
M. GAUVREAU: ... mandat d'exécution ou qu'elle accepte la
Société d'énergie comme sa direction
générale de la baie James, ce n'est pas tout à fait la
même chose. S'il faut, pour des raisons juridiques, procéder par
un mandat d'exécution, nous le ferons. Si ce n'est pas
nécessaire, nous l'accepterons. Ce serait mon point de vue.
M. LOUBIER : Mais, globalement, vous...
M. GAUVREAU: Nous accepterions que ce soit la Société
d'énergie qui le fasse pour nous, avec nos hommes. Quand je parle de
délais, il y
a des questions d'aménagement. Voyez-vous, il y a une question de
décisions. C'est déjà assez long de passer une
résolution dans une corporation. S'il faut qu'une décision de
l'Hydro-Québec soit rédigée par le secrétaire,
transmise à la Société et redécidée encore,
ratifiée ou, inversement, que la Société d'énergie
doive prendre une décision et la faire ratifier par
l'Hydro-Québec après, je crois qu'il y a une lourdeur. Il
faudrait tâcher d'aménager un système permanent par lequel
les décisions prises au niveau de l'Hydro-Québec seraient
exécutoires immédiatement.
Je n'ai pas eu le temps encore d'en parler avec des conseillers
juridiques, mais je me demande si ceci ne pourrait pas être
déterminé par les règlements de l'Hydro-Québec et
par les règlements de la Société d'énergie.
M. LE PRESIDENT: M. DeGuise, et le député de Beauce
enchaînera à la suite.
M. DEGUISE: J'aimerais préciser ma pensée en rapport avec
l'intervention de M. Castonguay. Je voudrais bien dire qu'à cause des
responsabilités de l'Hydro-Québec je suis en faveur qu'elle joue
un rôle prépondérant. J'ai exprimé des doutes. J'ai
parlé des effectifs que nous connaissons et ceux que nous pouvons
deviner devoir être nécessaires. Il apparaîtrait que nous
aurons à louer, dans une assez large mesure, des services de
l'extérieur ou nous aurons à bâtir une équipe
à ajouter à nos effectifs.
Quels seront les effectifs extérieurs, que ce soit de la baie
James, des ingénieurs-conseils? Je ne me prononce pas. En fait, je ne
crois pas qu'il appartienne à l'Hydro-Québec de fixer un
rôle à la Société d'énergie.
M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.
M. NADEAU: M. le Président, juste pour ajouter un peu à ce
que M. DeGuise vient de dire, je suis pleinement d'accord qu'on puisse
intégrer, au sein de la Société d'énergie, autant
de cadres que possible qui seront détachés de
l'Hydro-Québec. C'est donc dire que l'Hydro-Québec, encore une
fois, pourrait jouer là, dans la Société d'énergie,
un rôle prépondérant en plus de celui qu'elle joue comme
actionnaire majoritaire et en plus des administrateurs qu'elle détient
en majorité.
M. ROY (Beauce): M. le Président, depuis le début de la
séance, cet après-midi, nous écoutons, avec attention,
toutes les questions qui ont été posées et les
réponses. Je pense que M. Boyd, tout à l'heure, a très
bien situé le problème qui est devant nous et qui se situe,
à mon sens, à moins que j'aie mal compris, à un seul
niveau: qui va gérer le projet. Est-ce ça: Alors,
évidemment, il y a un conflit d'intérêts. Mais tout de
même, il y a une chose, à la suite de l'exposé que nous
avait fait M. Nadeau, tout à l'heure, au tableau, du rapport que M.
Dozois nous a remis, à la page 3: "Conformément à ce qui
précède, une filiale a été créée le
20 décembre 1971 sous le nom de Société d'énergie
de la baie James. Le montant du capital-actions est fixé à un
milliard de dollars, divisé en 10 millions d'actions ordinaires ayant
une valeur nominale de $100 chacune; ceci conformément à
l'article 16 de la section 3 du bill no 50." Dans cet article, on dit "... les
actions seront détenues majoritairement par l'Hydro-Québec et
pour au moins 40 p.c. par la Société."
M. DOZOIS: Pas plus.
M. ROY (Beauce): Pas plus de 40 p.c. C'est parce que j'avais le texte
original. Je me demandais si la loi n'avait pas été
amendée. On dit, plus loin, qu'au moment de l'incorporation, il y aura
cinq administrateurs, cela d'accord. Mais le 21 janvier 1972,
l'Hydro-Québec offrait, par résolution, de souscrire 7 millions
d'actions de $100 chacune. Est-ce que cette offre a été faite par
l'Hydro-Québec, sans la demande de la Société
d'énergie de la baie James, ou si cette demande avait été
faite par la Société d'énergie de la baie James, à
savoir qui serait intéressé et quand souscrire les actions?
M. DOZOIS: M. le Président, la loi prévoit que
l'Hydro-Québec doit détenir plus que la majorité des
actions. Or, conformément à la loi, l'Hydro-Québec, par
résolution, a fait cette offre à la Société
d'énergie. Lorsque la Société d'énergie a
reçu cette offre, nous avons adopté une résolution
invitant la Société de développement, comme je le relate
dans le mémoire que j'ai déposé, à faire une offre
de souscription au capital-actions de la Société
d'énergie. Alors, je dis qu'à telle assemblée,
étant informés que la Société de
développement ne répondait pas favorablement à cette
invitation, MM. Nadeau et Boulva ont proposé que l'offre de
l'Hydro-Québec soit acceptée. Elle l'a été, en
fait, à l'unanimité. Lea actionnaires ont ratifié cette
offre.
Or, depuis le 3 février, toutes les actions sont détenues
par l'Hydro-Québec et les cinq membres de la commission, et deux actions
par MM. Nadeau et Boulva.
M. ROY (Beauce): Mais ce qui m'étonne,...
M. NADEAU: M. le Président, si vous me permettez, pour faire
suite à votre question,...
M. ROY (Beauce): Oui.
M. NADEAU: ...dans le même ordre, lors de la souscription de
l'Hydro-Québec à la Société d'énergie, une
offre a été faite de 70 p.c. A ce moment-là, nous avons
résisté à cette offre disant que c'était
peut-être un peu fort. Mais la réponse qu'on a eue, c'est: ou on
souscrit 70 p.c. ou on ne souscrit pas du tout.
M. ROY (Beauce): Pardon?
M. NADEAU: La réponse que nous avons eue: Ou nous souscrivons 70
p.c. ou nous ne souscrivons pas du tout.
M. ROY (Beauce): Ah bon!
M. NADEAU: Autrement dit, c'était un genre d'ultimatum, ou si on
peut appeler cela ainsi, une condition expresse: ou on souscrivait 70 p.c. ou
on ne souscrivait pas du tout. Voulant vivre dans l'esprit de la loi, encore
une fois, et réaliser le projet, nous nous sommes vus forcés, si
vous voulez, d'accepter la souscription de 70 p.c.
M. ROY (Beauce): M. Dozois pourrait-il nous dire si c'est exact? Je ne
mets pas en doute les paroles de M. Nadeau.
M. NADEAU: Je pense que c'est une question d'interprétation.
M. ROY (Beauce): C'est que j'ai d'autres questions à poser, dans
le même ordre d'idées.
M. DOZOIS: Si vous me permettez, M. le Président, de
préciser. C'est que l'Hydro-Québec a offert de souscrire 70 p.c.
Dans la discussion qu'il y a eu au conseil d'administration, les membres
représentant la Société de développement de la baie
James ont dit : Pourquoi voulez-vous souscrire tant que cela? Laissez-nous donc
souscrire! Alors, le président, au nom de l'actionnaire majoritaire, a
dit : Si nous souscrivons moins que 70 p.c, nous ne souscrirons pas plus que 51
p.c. Comme, pour financer ce que j'expliquais la semaine dernière
les emprunts de plusieurs milliards de dollars, nous estimons qu'il
faudrait avoir une capitalisation d'au moins $700 millions, le
président, M. Giroux, a dit : Ou nous souscrivons 51 p.c. et la
Société de développement de la baie James souscrira 19
p.c. ou, si la Société de développement de la baie James
ne veut pas mettre 19 p.c., nous mettrons 70 p.c. La Société de
développement de la baie James, n'ayant pas voulu souscrire 19 p.c. des
actions, a accepté que nous fournissions la totalité des actions
qui ont été émises à ce jour.
M. ROY (Beauce): Mais pourquoi l'HydroQuébec a-t-elle
demandé de souscrire 70 p.c. des actions, alors que l'article 16 de la
loi est très clair et dit que la société doit
détenir 40 p.c. des actions?
M. DOZOIS: Non, non.
M. ROY (Beauce): La loi dit: Au moins 40 p.c. par là
société.
M. DOZOIS: Au plus 40 p.c, alors que la loi dit que
l'Hydro-Québec doit détenir plus que la majorité.
M. ROY (Beauce): Un instant, M. le Président. Je n'ai pas
terminé les questions que je voulais poser à ce sujet. Y avait-il
d'autres raisons la question s'adresse à M. Nadeau que
celles que vous nous avez données aujourd'hui qui ont motivé la
décision que vous avez prise au niveau de la Société de
développement de la baie James, lorsque vous nous avez dit, par exemple,
que les capitaux n'étaient pas nécessaires présentement et
qu'il vous fallait nécessairement payer un intérêt assez
élevé sur les sommes que vous deviez investir?
M. NADEAU: D'abord, laissez-moi faire une légère mise au
point. Je ne doute pas des paroles de M. Dozois, au contraire. Si ma
mémoire est fidèle, et cela peut être confirmé par
M. Boulva qui est au conseil d'administration, ainsi que par M. DeGuise. Ce que
j'ai dit tantôt, je crois, est exact. Nous nous sommes trouvés
devant un fait et, si ce fait n'était pas réalisé,
l'Hydro-Québec ne souscrivait pas.
La raison pour laquelle la Société de développement
de la baie James n'a pas souscrit est fort simple. D'abord, parce que les
capitaux n'étaient pas requis, à ce moment-là, et qu'il ne
servait à rien d'investir des sommes qui nous viennent du gouvernement
qui les emprunte, lui, à 8 1/2 p.c, 8 3/4 p.c. ou 9 p.c., je ne sais
pas. Nous, nous nous serions vus forcés de réinvestir, à
court terme ou à moyen terme, à des taux de 51/2 p.c. ou 6 p.c.
Je pense que vous auriez été les premiers à nous
blâmer de faire cela.
La souscription de la Société de développement de
la baie James dans la Société d'énergie, vous devez
réaliser qu'elle nous viendra du gouvernement du Québec. C'est
évident parce que la souscription au capital de la Société
de développement de la baie James n'est que de $10 millions par
année. Donc, il nous est impossible d'en consacrer une portion
raisonnable à la souscription de la Société
d'énergie parce qu'il y a, tout de même, les autres aspects du
développement de la baie James: les mines, les forêts, etc. Ces
capitaux sont requis pour ces développements.
Nous avons consulté le gouvernement du Québec pour
constater que ces souscriptions n'étaient pas requises, que la
Société d'énergie n'en avait pas besoin à ce
moment-là. Donc, on a dû retarder notre offre de souscription,
afin de ne pas grever le fonds du gouvernement du Québec en le faisant
investir dans une société qui n'en avait pas besoin.
M. ROY (Beauce): Vous n'avez pas refusé de souscrire les
montants, vous avez simplement retardé la souscription?
M. NADEAU: Pas du tout, au contraire, nous n'avons nullement
refusé de souscrire à la Société d'énergie.
Au contraire. Et nous tenons à ce que la Société de
développement investisse éventuellement quand les besoins se
feront sentir.
M. BOYD: Sur la même question, je crois qu'il faudrait distinguer
entre s'engager à souscrire et investir ou acheter des actions.
L'Hydro-Québec s'est engagée à souscrire $700 millions sur
une certaine période et demandait à la Société de
développement si elle voulait s'engager à souscrire. Il
n'était pas question d'investir, d'aller emprunter de l'argent pour
investir. Il s'agissait de s'engager à souscrire. C'est une grande
différence.
D'ailleurs, la Société d'énergie a besoin d'argent
en 1972. Elle a besoin de près de $100 millions. L'Hydro-Québec
à même les $700 millions a même déjà pris
l'engagement ferme d'acheter pour $50 millions en 1972 et pour $50 millions en
1973 des actions faisant partie du montant de $700 millions. Pour le reste des
$600 millions, le rythme auquel l'Hydro-Québec achètera les
actions dépendra des besoins du financement.
M. ROY (Beauce): Sur cette souscription de capitaux j'ai
remarqué que l'Hydro-Québec nous a dit qu'elle est
propriétaire de 99.99 p.c. des actions de la Société
d'énergie M. Nadeau nous a donné des réponses
à l'effet qu'il semblait prématuré de souscrire car,
évidemment, pour souscrire ces actions et les verser, la
Société de développement de la baie James devait avoir ces
capitaux.
Est-ce que vous disposiez de capitaux?
M. NADEAU: Non, pas pour investir dans la Société
d'énergie. Les capitaux que nous devrons investir dans la
Société d'énergie nous viendront du gouvernement. C'est
prévu dans la loi que le gouvernement peut nous prêter de
l'argent.
M. ROY (Beauce): Est-ce que ceci a constitué un obstacle pour
vous?
M. NADEAU: En ce sens que nous n'avons pas souscrit parce que les
capitaux n'étaient peut-être pas disponibles. S'ils avaient
été disponibles de la part du gouvernement nous aurions
souscrit.
M. ROY (Beauce): Si les capitaux avaient été disponibles
du gouvernement, vous auriez alors souscrit. Vous avez été en
quelque sorte pris de court du fait que le gouvernement ne vous avait pas
donné assez vite les capitaux dont vous aviez besoin pour rencontrer vos
obligations à la suite du mandat qui vous avait été
confié.
M. NADEAU: Non, à la suite de l'offre aussi de
l'Hydro-Québec, l'ultimatum de souscrire 70 ou rien. Il n'y avait pas
d'urgence non plus pour la Société de souscrire.
M. LOUBIER: M. Nadeau, je pense qu'il y a une nuance capitale entre
souscrire et payer.
M. LEGER: M. le Président, pendant deux heures nous n'avons pas
eu l'occasion de poser une question.
M. LOUBIER : Vous allez avoir votre publicité quand
même.
M. ROY (Beauce): Oui, vous avez posé la première.
M. LE PRESIDENT: J'essaie de diriger selon l'ordre ici. Il est six
heures. Donc, à huit heures et quart ce soir.
M. JORON: J'aurais une suggestion qui permettrait
d'accélérer les travaux à la reprise si les membres de la
commission voulaient m'enten-dre moins d'une minute.
M. LE PRESIDENT: Il est six heures. M. JORON : De la volonté des
membres... (Suspension de la séance à 17 h 52)
Reprise de la séance à 20 h 22
M. SEGUIN (président de la commission permanente des richesses
naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!
La commission qui devait siéger à 8 h 15 précises
commence à 8 h 30, à l'heure.
Le député de Beauce.
M. ROY (Beauce): M. le Président, au moment où nous avions
suspendu la séance à l'heure du repas, nous parlions justement de
la souscription et des versements du capital-actions dans la
Société d'énergie de la baie James. Et pour nous remettre
dans l'atmosphère, je vais, M. le Président, si vous me le
permettez, tenter de résumer un peu les réponses que nous avons
eues pour me permettre de poser d'autres questions.
J'ai demandé à M. Nadeau s'il y avait des raisons
particulières pour lesquelles la Société de
développement de la baie James n'avait pas souscrit les actions au
moment où l'Hydro-Québec a fait sa souscription d'actions,
c'est-à-dire le 27 janvier. On nous a répondu tout à
l'heure que, selon les ententes ou selon ce qui avait été
discuté, l'Hydro-Québec avait demandé de souscrire 70 p.c,
tel qu'indiqué à l'article 2 de la page 3, sinon
l'Hydro-Québec se limiterait à souscrire 51 p.c. des actions,
alors que la Société de développement de la baie James ne
peut pas, en vertu de la'loi, souscrire plus de 40 p.c.
Alors, je demandais à M. Nadeau, simplement, si le fait de ne pas
avoir souscrit ces actions venait de ce que les capitaux n'étaient pas
encore versés à la Société de développement.
Il y aurait peut-être eu moyen à ce moment-là de prendre
entente de façon que la Société de développement
souscrive les actions, quitte à attendre pour faire le
déboursé.
Je voudrais demander à M. Nadeau pour quelle raison on n'a pas
procédé de cette façon, et si effectivement d'autres
raisons vous ont incité, en tant que directeur de la
Société de développement de la baie James, à
retarder ou à différer la souscription du capital-actions dans la
Société d'énergie.
M. NADEAU: M. le Président, c'est qu'après consultation
avec le gouvernement, ce dernier n'a pas jugé opportun de fournir
à la Société de développement les capitaux
nécessaires pour souscrire au capital de la Société
d'énergie à ce moment-là. Ceci ne veut pas dire que la
Société de développement éventuellement n'aurait
pas souscrit plus que les 30 p.c. qu'on lui laisse maintenant.
Permettez-moi de retracer les faits tels qu'ils se sont produits::
l'Hydro-Québec offre de souscrire $700 millions et la
Société de développement, suggère que la
souscription de l'Hydro-Québec se limite à $650 millions afin de
conserver à la Société de développement plus de 33
1/3.
Deuxièmement, M. Giroux dit: Nous souscrivons $700 millions ou
$510 millions. Si nous souscrivons $510 millions, que la Société
de développement de la baie James souscrive $190 millions, ce qui aurait
formé les $700 millions. Après consultation avec le gouvernement,
encore une fois, nous constatons qu'il n'est pas utile ni possible de souscrire
immédiatement. Nous reformulons donc notre demande à M. Giroux de
ne souscrire que $650 millions afin, encore une fois, de nous laisser la
possibilité de souscrire au moins 35 p.c.
M. Giroux refuse et nous dit: Nous souscrirons $700 millions ou rien.
Donc, le dernier événement est que nous avons accepté la
souscription de $700 millions à la Société
d'énergie par l'Hydro-Québec.
M. ROY (Beauce): A l'heure actuelle, la Société de
développement n'a rien souscrit à la Société
d'énergie.
M. NADEAU: Parce qu'il n'y avait pas nécessité de le faire
et que nous ne voulions pas engager des capitaux qui, encore une fois,
pourraient servir au gouvernement à des fins plus utiles alors que le
besoin, dans la Société d'énergie, ne se faisait pas
sentir.
M. ROY (Beauce): Maintenant, quelles sont vos intentions si ce
n'est pas présumer un peu d'avance à ce sujet-là au
cours des prochaines semaines? Avez-vous l'intention effectivement de souscrire
le montant du capital qu'on vous demande ou si vous attendez tout simplement
que les décisions soient prises ici, au niveau de la commission
parlementaire, que de nouvelles recommandations ou de nouvelles demandes vous
soient faites ou qu'on vous donne de nouvelles directives?
M. NADEAU: Nous avons l'intention, dans la mesure où ce sera
possible, de souscrire les 30 p.c. qu'il restera.
M. ROY (Beauce): J'aurais une question mais l'honorable premier ministre
vient de sortir. J'aurais aimé demander à l'honorable premier
ministre...
M. LE PRESIDENT: Il sera de retour dans un instant, il n'est sorti que
pour quelques minutes.
M. ROY (Beauce): Je pourrais peut-être revenir sur la question de
la gérance puisqu'il semble que l'imbroglio, si on peut dire, le
différend est au niveau de la gérance. M. Nadeau vous avait
recommandé, dans le rapport que vous nous avez remis la semaine
dernière, que la gérance soit confiée à
l'entreprise privée alors que l'Hydro-Québec veut que la
gérance lui soit confiée à elle-même.
L'Hydro-Québec nous a expliqué les raisons pour lesquelles, elle
tient à ce que la gérance lui soit confiée.
Quels étaient les principaux arguments ou les principes de base
qui ont motivé votre décision ou votre recommandation de confier
à l'entreprise privée la gérance de ce projet?
M. NADEAU: C'est que nous considérons la réalisation du
projet de la baie James comme un tout, un ensemble, un complexe en soi. Nous
prévoyons que la seule façon de contrôler ces coûts
est d'attribuer au projet lui-même tous les coûts, que ce soit les
coûts du contentieux, des appels d'offres, des relations publiques et
ainsi de suite. Nous voulons que tous ces coûts soient attribués
au projet. Une des seules façons de le faire, c'est par le truchement de
la Société d'énergie, comme je l'ai expliqué cet
après-midi.
Si le projet était confié dans son entier à
l'Hydro-Québec, les chances seraient que certaines dépenses
pas par mauvaise volonté, remarquez bien ne seraient
probablement pas attribuées au projet, mais entreraient dans des budgets
globaux.
M. ROY (Beauce): Dans les budgets globaux de l'Hydro-Québec, dans
l'administration générale.
M. NADEAU: C'est ça.
M. ROY (Beauce): Et ceci pourrait empêcher le gouvernement...
M. NADEAU: C'est qu'à la fin du projet on ne saurait probablement
jamais exactement combien il aurait coûté, s'il y a des
dépenses qui sont attribuées à des budgets globaux ou qui
font partie des budgets d'exploitation de l'Hydro-Québec.
M. ROY (Beauce): En somme, c'est un des principaux arguments que vous
invoquez à ce sujet.
M. NADEAU: Bien, je pense qu'on devrait savoir exactement combien
coûtera le projet à la fin et qu'on devrait savoir, au cours du
projet aussi, où on s'en va exactement. Pour ce faire, il faut que les
dépenses soient attribuées exactement à tel ou tel
poste.
M. LOUBIER: Dans le même ordre d'idées que le
député de Beauce, est-ce que l'Hydro-Québec ne tiendrait
pas une comptabilité précise pour ses dépenses? Cela se
fait régulièrement dans toutes les compagnies; sur un chantier
donné, on délègue tant d'hommes et c'est
évalué à tel taux horaire, etc.
Moi, je ne vois pas un argument très fort à ce qu'on dise
qu'on ne pourrait pas évaluer le coût global. J'ai nettement
l'impression qu'à l'Hydro-Québec on doit avoir un service
d'administration, une direction de personnel, un coût de revient. Tout
doit être évalué à la perfection. A ce
moment-là, une comptabilité distincte serait tenue pour les
employés, pour les professionnels, pour les matériaux, etc.
Je ne vois pas du tout quel est l'impact de cette argumentation,
à moins qu'on prétende ou qu'on préjuge que
l'Hydro-Québec aurait une administration de broche à foin, comme
on dit populairement, ce que je me refuse de croire. A cause du sérieux
de l'entreprise et des projets qu'elle a menés à terme, je ne
pense pas que l'on puisse remarquez bien que je le dis en tout respect
pour les propos que vous avez tenus décerner un diplôme de
manque de discernement ou de manque de comptabilité précise
à l'Hydro-Québec dans sa participation. On pourrait facilement
évaluer le coût de ce que l'Hydro-Québec aurait à
investir pour sa participation.
M. ROY (Beauce): J'avais permis au député de Bellechasse
de poser une petite question...
M. LOUBIER: C'était dans le même ordre d'idées,
d'ailleurs.
M. ROY (Beauce): ... mais je m'aperçois qu'il a tenu à
faire une mise au point sur les questions que je voulais poser. De toute
façon, j'aimerais tout simplement revenir sur ce point. Etant
donné les circonstances et étant donné le fait que des
travaux sont effectués présentement, à quel niveau les
décisions qui ont été prises jusqu'ici l'ont-elles
été?
M. NADEAU: Est-ce que vous parlez des décisions en ce qui
concerne les aménagements hydro-électriques?
M. ROY (Beauce): En ce qui concerne l'aménagement
hydro-électrique justement.
M. NADEAU: Bien, il n'y en a pas eu.
M. ROY (Beauce): Est-ce que les décisions ont été
prises au niveau de l'Hydro-Québec ou au niveau de la
Société d'énergie?
M. NADEAU: En fait, jusqu'ici, nous nous sommes concentrés sur
les infrastructures et ces décisions ont été prises au
niveau de la Société de développement conjointement avec
la Société d'énergie. Quant aux aménagements
hydro-électriques, par exemple le fait de choisir La Grande au lieu de
la NBR, la décision même d'aller sur La Grande n'a pas
été prise encore. Les recommandations ont été
faites par l'Hydro-Québec et par la Société de
développement. Mais la décision, qui doit revenir à la
Société d'énergie, j'imagine, n'a pas été
prise encore.
M. ROY (Beauce): Autrement dit, ce que vous voulez dire, c'est qu'il n'y
aurait aucune décision de prise, à l'heure actuelle, qui aurait
dû relever, selon le bill no 50, de la Société
d'énergie et aucune décision par d'autres personnes que la
Société d'énergie.
M. NADEAU: Non, sauf que certaines déci-
sions prises au niveau du bureau de direction de la
Société d'énergie ont dû être ratifiées
par les actionnaires majoritaires, donc la Commission
hydro-électrique.
M. ROY (Beauce): Si on me le permettait, j'aimerais poser une question
à M. Boyd sur le même sujet. Est-ce qu'au niveau de
l'Hydro-Québec, à l'heure actuelle, étant donné que
des investissements sont commencés, que des recherches ont
été faites ainsi que différents travaux, vous avez mis en
place certains mécanismes ou certains postes budgétaires ou
certains postes au niveau de la nomination de certaines personnes, dans la
direction ou ailleurs, pour travailler sur ce projet précis de la baie
James?
M. BOYD: Evidemment, jusqu'à présent, cela a
été des études. On a dit précédemment que
l'Hydro-Québec étudiait, depuis 1964 et 1965, avec un arrêt
en 1967. On a parlé de $30 millions qui ont été
dépensés, jusqu'à présent. Toutes ces sommes
d'argent ont été comptabilisées, comme il se doit, par
l'Hydro-Québec. Au cours de 1972, il y a des travaux qui sont faits par
l'Hydro-Québec, des études, des sondages, etc., ainsi que de la
photographie. Certains à même les budgets de
l'Hydro-Québec, certains par mandats, la Société
d'énergie confiant à l'Hydro-Québec des mandats pour
exécuter des travaux. Mais, comme il se doit, c'est comptabilisé.
Au génie, en particulier, un groupe de personnes responsables s'occupent
de ce projet et des études qui sont faites là.
M. LE PRESIDENT: Je préviens le député qu'il ne
faudrait pas revenir sur les articles qui ont déjà
été discutés à fond en ce qui concerne les
études, le début des études, ce qui a été
fait depuis 1964, etc. Nous sommes sur le problème de la gestion et
j'aimerais bien que nous y restions sans retourner en arrière sur des
questions qui ont été discutées à fond et
auxquelles on a eu des réponses. Je pense que le député
lui-même a été un de ceux qui posaient des questions sur
ces problèmes. Il ne faudrait pas faire un retour en arrière.
M. ROY (Beauce): Je ne veux pas faire de retour en arrière.
J'étais simplement au niveau des décisions prises en ce qui
concerne la gérance de l'Hydro-Québec. Maintenant, pour faire
suite aux questions que nous avons posées tout à l'heure et,
également, à ce qu'a ajouté le député de
Bellechasse, est-ce que l'Hydro-Québec, au niveau de l'administration,
tient une comptabilité très particulière, très
précise de façon à connaître exactement les montants
d'argent qu'elle a investis au niveau de la baie James? Je vais prendre un
exemple. J'imagine facilement que c'est comme dans toutes les autres
entreprises, d'ailleurs. Vous avez du personnel qui travaille pendant un
certain temps dans un tel endroit, puis dans un autre endroit.
Avez-vous prévu des mécanismes ou des dispositions, au
niveau de l'administration, au niveau de la comptabilité, de
façon à pouvoir établir et comptabiliser clairement les
dépenses, le temps et tout ce qui a nécessité des
dépenses, soit en temps, en salaires, en équipement ou autres
pour établir le budget complet du coût de l'aménagement de
ce projet?
M. BOYD: M. Lemieux, directeur général de la finance et de
la comptabilité, pourrait peut-être répondre.
M. LEMIEUX: Bien sûr, nous tenons une comptabilité
complètement séparée, non pas un système comptable
mais nous tenons des comptes séparés pour tout ce que nous
dépensons pour le projet. Nous préparons des factures en
conséquence pour la Société d'énergie.
M. ROY (Beauce): Ne pensez-vous pas qu'il y aurait un danger
c'est ce qui m'apparaît. Je peux me tromper qu'en confiant le tout
à l'Hydro-Québec, directement, en la substituant à la
Société d'énergie de la baie James, comme on semble
vouloir le réclamer, qu'il y ait spéculation sur les coûts,
sur les imputations budgétaires, d'un poste à un autre, par
exemple? Vous ne prévoyez pas qu'il peut y avoir un danger, à ce
moment-là? Etes-vous capable de garantir aux membres de la commission
qu'il y a possibilité d'établir un contrôle assez strict
pour ne pas qu'il y ait de capitaux, de dépenses courantes qui s'en
aillent?
M. GAUVREAU: Je peux vous assurer que la principale préoccupation
de l'Hydro-Québec dans ce projet, qu'elle le fasse directement ou par
l'intermédiaire de sa filiale, ce sera d'en connaître les
coûts avec la plus grande précision possible, que nous
détenons les outils pour ce faire et que nous avons, à notre
disposition, des ingénieurs spécialisés en coûts et
des comptables experts en construction et en ingénierie, qui sont
absolument capables de faire toutes les imputations nécessaires. Il n'y
a aucun danger que les frais dits généraux, qui peuvent
être utilisés ailleurs, que le pourcentage utilisé de ces
frais généraux pour la baie James, ne soient pas bien
appréciés et évalués. Vous pouvez être
certain de cela parce qu'il n'y a personne qui se laisse imputer les frais des
autres.
M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.
M. JORON: M. le Président, cette question de la gérance
nous a conduits, m'a-t-il semblé, depuis le début de nos travaux,
dans un imbroglio juridique, pour reprendre le mot du député de
Beauce.
C'est un imgroglio inconcevable en fait, à en faire perdre son
latin même au député de Chicoutimi ou son grec au
député de Bourget.
Ce à quoi on assiste, c'est au spectacle déplorable de
différentes créatures de l'Etat, puisqu'il s'agit toutes de
sociétés de l'Etat qui,
en fait, sont en train de se dévorer entre elles. On se demande
si, un peu à l'image du Dr Frankenstein, le monstre n'est pas en train
de dévorer son créateur.
Parlant du créateur ou du maître, c'est là la source
du problème. On n'en a pas parlé jusqu'à maintenant, mais,
derrière tout ça, le maître, le propriétaire, c'est
l'Etat. L'Etat, pour le moment, est sous la responsabilité d'un
gouvernement. Je pense que, si on n'aborde pas cette question, qui est d'ordre,
en partie, politique, on va tourner autour du pot bien longtemps.
Effectivement, il faut bien se rendre compte que le gouvernement peut,
s'il le désire, avoir le mot final dans toute cette chinoiserie qui nous
concerne depuis quatre heures cet après-midi. Le gouvernement non
seulement est le propriétaire exclusif de toutes ces
sociétés dont on a parlé jusqu'à maintenant, mais,
en plus de ça, il peut, en autorisant les budgets et les
investissements, à toutes fins pratiques, bloquer ou donner son
autorité à un projet ou â un autre.
C'est lui, en définitive, qui va décider. Je dirais
même que, pour contourner des décisions de ces
sociétés d'Etat, il pourrait, à la rigueur, nommer des
commissaires supplémentaires ou aller jusqu'à faire des lois
spéciales. L'autorité suprême dans un pays, c'est le
Parlement. Alors, s'il veut légiférer, il peut
légiférer. A la rigueur, il pourrait présenter des lois
spéciales et défaire tout ce dont on est en train de discuter.
D'ailleurs, cela a été, plus ou moins, une de ses
spécialités, les lois spéciales depuis quelque temps. Je
ne veux pas m'aventurer là-dedans.
Pour nous, il nous apparaît qu'on ne sortira pas de cet imbroglio
tant et aussi longtemps que le gouvernement n'aura pas fait savoir sa position
sur cette question de gérance. Or, quelle est-elle?Il y a deux
propositions qui nous sont soumises essentiellement. L'une par la bouche des
représentants de l'Hydro-Québec, qui veulent confier à
l'entreprise d'Etat, c'est-à-dire à l'Hydro-Québec, la
gérance des travaux. L'autre, qui nous vient par la voix du
président de la Société de développement de la baie
James, qui vise à confier la gérance des travaux à
l'entreprise privée.
Nous, dans notre éternel rôle de saint Thomas, nous
voudrions scruter la valeur au mérite de ces deux propositions, pour
insister à la fin auprès du gouvernement et faire appel â
sa responsabilité de trancher la question. Je voudrais qu'on sorte
d'ici, si possible ce soir, et que le gouvernement décide. Que d'ici
là, pour éclairer la décision du gouvernement, il soit
possible de mettre sur la table les avantages et les désavantages des
deux formules dont il est question ici. C'est ça, le fond du
problème qui nous intéresse: l'entreprise privée ou
l'Hydro-Québec.
En somme, c'est ça le fond du problème.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, est-ce que le
député me permettrait juste une question? Je reconnais son
jugement et j'apprécie sa façon remplie de maturité avec
laquelle il tente de nous éclairer. Mais est-ce que ce n'est pas
simplifier trop le problème que de mettre dans la balance
l'Hydro-Québec et l'entreprise privée? Jusqu'ici je suis un peu
d'accord avec lui dans tout ce qu'il a dit, mais je ne pense pas que ce soit
aussi simpliste que ça, la question de mettre dans la balance
l'Hydro-Québec et l'entreprise privée. On pourrait même au
contraire je ne sais pas si le député est d'accord avec
moi dire que, dans les formules qui ont été
exposées cet après-midi et qui pouvaient sembler divergentes en
apparence, il y avait quand même beaucoup de points semblables,
c'est-à-dire que les deux groupes ont reconnu qu'à la fois la
Société d'énergie pouvait être un véhicule
par lequel on pouvait constituer un client averti, client qui pouvait avoir
autant qu'une centaine de personnes pour l'éclairer sur ce
sujet-là, et deuxièmement, autant M. Nadeau a dit qu'il
était incontestable que l'Hydro-Québec et son personnel devaient
avoir beaucoup à jouer soit dans la Société
d'énergie ou soit dans l'Hydro-Québec pour donner les
autorisations, suivre le projet, de la même façon, je pense,
différents commissaires ont dit que pour s'occuper du projet, il
était peut-être nécessaire et opportun de recourir à
des firmes québécoises.
En d'autres termes, je ne pense pas que les contradictions viennent de
l'entreprise privée puis de l'Hydro-Québec. Je pense que tous ici
admettent que l'Hydro-Québec, compte tenu de son expérience, a un
rôle extrêmement important à jouer, qu'au niveau du client
averti, il n'y a aucun doute que ce serait elle qui constituerait l'essentiel
des ressources, qu'au niveau de l'exécution, c'est-à-dire la
gestion de l'exécution du contrat, là il y a peut-être une
certaine marge, mais jamais peut-être dans le sens de la question
posée, l'Hydro-Québec, entreprise privée, je parle.
M. JORON: M. le Président, évidemment le ministre de
l'Industrie et du Commerce a droit à son avis. Il peut estimer que des
formules mixtes ou intermédiaires peuvent également exister,
c'est son avis. S'il les présente, moi je veux bien en discuter. Il m'a
semblé, selon les témoignages des gens qui sont passés
devant la commission depuis le début de l'après-midi, que,
jusqu'ici, ce sont principalement deux formules qui avaient été
mises de l'avant. Si vous me le permettez, M. le Président, j'aurais un
certain nombre de questions à poser à l'un et à l'autre
sur les mérites respectifs des deux propositions que l'un et l'autre ont
mises de l'avant. Et si vous me permettez de poser des questions aux membres de
l'Hydro-Québec, à M. Boyd, par exemple, en l'absence de M.
Giroux, je voudrais lui demander d'abord : étant donné que la loi
de l'Hydro-Québec donne comme responsabilité à
l'Hydro-Québec, entre autres choses et de mémoire, de fournir de
l'énergie au meilleur coût possible et ainsi de
suite, est-ce que, face à cette responsabilité que la loi
impose à l'Hydro-Québec, celle-ci estime qu'elle peut rendre
compte de cette responsabilité si elle laisse la gérance d'un
projet qui occupe une part aussi substantielle des revenus et des affaires de
l'Hydro-Québec, celle qui nous concerne aujourd'hui, la baie James
peut-elle garantir cette responsabilité si elle laisse la gérance
à quelqu'un d'autre? Et plus précisément, plus
spécifiquement dans cette question là je voudrais poser la
question suivante:
Le fait que l'Hydro-Québec détiennent une majorité
des actions à la Société d'énergie et ait la
possibilité de recommander trois des cinq commissaires se traduit-il,
dans la pratique, dans les opérations au jour le jour, par un
contrôle efficace des opérations de la Société de
l'énergie? Est-ce que ces deux faits-là suffisent pour garantir
à l'Hydro-Québec le contrôle et la surveillance directe sur
toutes les opérations qui pourraient être décidées
à partir de la Société d'énergie?
C'est une première question.
M. BOYD: A mon avis, au bureau de direction de la Société
d'énergie l'Hydro-Québec a trois représentants et deux
sont de la Société de développement. La différence
réside en ce qu'il y en a deux à plein temps et trois qui y vont
comme directeurs à des assemblées de directeurs. Si, comme le
veut le président de la Société d'énergie, il y a
une centaine de personnes qui travaillent à plein temps avec les deux
directeurs qui sont à plein temps, cela forme une équipe et il
est tout naturel qu'elle discute constamment des problèmes.
Les trois directeurs qui viennent aux assemblées de directeurs
n'ont pas la même connaissance des problèmes. A mon avis, il est
évident qu'on ne peut pas avoir le même contrôle que si on
est activement, à tous les jours, dans le problème et que les
gens travaillent avec soi. Cela s'applique dans n'importe quel cas. Les
commissaires sont à plein temps à l'Hydro-Québec et ils
travaillent de longues journées, ils sont constamment au coeur des
problèmes que soulève l'Hydro-Québec. Ce n'est
certainement pas la même chose que des commissaires qui seraient à
temps partiel.
L'importance de la baie James dans le financement et dans les
coûts, c'est évident qu'elle est grande. On vous a parlé
d'un programme de $7 milliards et un peu plus pour la période
$7,200 millions dont $5,800 millions sont pour la baie James. C'est
évident que les coûts de la baie James vont avoir une influence
directe sur les coûts de l'énergie à l'avenir. Au point de
vue comptable, je pense que tous les comptables admettront que la
Société d'énergie est une filiale de
l'Hydro-Québec. La loi dit autre chose mais, au point de vue comptable,
c'est différent. Dans ses bilans consolidés,
l'Hydro-Québec sera obligée de...
M. JORON: Du fait que l'Hydro-Québec détienne 51 p.c. et
plus des actions, la loi l'oblige à la consolidation des bilans,
n'est-ce pas?
M. BOYD : Oui. La pratique comptable oblige l'Hydro-Québec
à faire des bilans consolidés. Lorsque l'Hydro-Québec
à l'avenir en fait, c'est déjà commencé, je
crois ira sur le marché pour faire des emprunts, il faudra
qu'elle donne son bilan consolidé. Une chose est difficile à
concevoir. Tout à l'heure j'ai dit, et tous mes confrères ont dit
que nous reconnaissions un rôle de gestion de la Société
d'énergie mais nous voulons quand même être responsables de
l'exécution du projet. Par notre loi, par le bill 50, par nos actions,
par nos emprunts futurs, etc., devant nos abonnés, c'est
l'Hydro-Québec, ce sont les commissaires comme tels, chacun et en
groupe, qui auront à répondre de l'administration et des bilans
futurs.
M. JORON: En d'autres mots, qui porterait l'odieux d'une augmentation de
tarif supplémentaire si celle-ci s'avérait nécessaire
parce qu'il y aurait eu des dépassements de coûts et des choses
semblables?
M. BOYD: Je pense bien que ce serait l'Hydro-Québec.
M. JORON: Bon.
M. LE PRESIDENT: Un instant. M. Gau-vreau avait indiqué son
désir de faire un commentaire et je pense bien que c'était en
réponse à vos questions.
M. GAUVREAU: C'est parce que M. Joron insiste pour dire qu'il y a
seulement un problème. Il oppose l'Hydro-Québec à
l'entreprise privée. Moi, un peu dans le sens du ministre Saint-Pierre,
je maintiens ce que j'ai dit, qu'il y a deux problèmes.
Il y a le problème des relations entre l'Hydro-Québec et
la Société d'énergie. C'est-à-dire est-ce que c'est
l'instrument qui convient pour le faire ou pas? Il faudrait en discuter. Il y a
aussi le problème des entreprises privées. Mais même le
problème des entreprises privées devient secondaire à mon
avis parce qu'on n'exclut pas une proportion d'entreprises privées. On
n'est pas fermé à ça, ce n'est pas la citadelle
imprenable, monolithique où on va tout décider nous-mêmes,
tout faire nous-mêmes, où on ne se fera pas aider. Ce n'est pas
ça.
Alors, il n'y en a pas seulement un problème, il y en a deux.
M. JORON: Oui. D'ailleurs, j'avais une question qui allait venir sur ce
sujet.
M. SAINT-PIERRE: Question supplémentaire sur le même sujet,
M. le Président, M. Boyd ne m'a pas tout à fait convaincu. Il a
dit
que les trois représentants de l'hydro-Québec sont
à temps partiel, qu'ils ne sont pas à temps plein parce qu'ils
doivent donner une partie de leur temps pour les autres activités de
l'Hydro-Québec. C'est le sens de votre réponse? Ils ne peuvent
pas être à temps plein pour la Société
d'énergie parce qu'ils doivent s'occuper d'autres questions de
l'Hydro-Québec en général?
M. BOYD: D'ailleurs, les trois commissaires sont occupés à
l'Hydro-Québec. Ils sont au bureau de direction pour les
assemblées.
M. SAINT-PIERRE : Mais est-ce qu'on ne pourrait pas dire, retenant
l'hypothèse que la Société d'énergie va être
le client averti, que M. Nadeau est exactement dans la même position
puisqu'il doit consacrer une partie de son temps à la
Société d'énergie et que, si on peut aller plus loin,
même si on renvoie tout à l'Hydro-Québec, on va se
retrouver dans la même position, c'est-à-dire que vous ne pouvez
pas avoir trois commissaires qui vont donner tout leur temps à la baie
James car ils doivent donner la même proportion de leur temps à
d'autres fonctions de l'Hydro-Québec?
Est-ce que c'est réellement une différence importante si
le client averti, pour reprendre l'expression de cet après-midi, est la
Société d'énergie ou l'Hydro-Québec?
M. DOZOIS: Pour répondre à M. Saint-Pierre, je pense qu'on
peut consulter l'organigramme qui a été distribué par la
Société d'énergie par M. Nadeau où on
voit d'un côté la Société de développement de
la baie James et de l'autre côté l'Hydro-Québec. Les deux
ont des intérêts dans la Société d'énergie.
On voit que le président exécutif est M. Nadeau. Ensuite,
l'adjoint exécutif au président est M. Boulva. On voit, dans cet
organigramme de 132 personnes, qu'elles sont presque sous la directive
exclusive de M. Nadeau et de M. Boulva qui, eux, sont de la
Société de développement. Tous les autres qui pourraient
venir de l'Hydro-Québec ne sont que des employés, ils ne sont pas
au même niveau.
M. SAINT-PIERRE: Je me permets de poser la question. Si le
président était un des commissaires de l'Hydro-Québec et
si son adjoint exécutif était un autre commissaire de
l'Hydro-Québec, est-ce que le problème disparaîtrait?
M. DOZOIS: C'est difficile de répondre...
M. SAINT-PIERRE: Ce n'est pas hypothétique, je tente simplement
de cerner le problème. Est-ce que c'est parce que le président
est quelqu'un qui vient de la Société de développement ou
est-ce la structure elle-même...
M. DOZOIS: Bien, ce n'est pas une question de personnalité,
remarquez bien.
M. SAINT-PIERRE: Non, non, moi non plus d'ailleurs...
M. DOZOIS: C'est que l'Hydro-Québec détenant et
investissant la presque totalité de l'argent nécessaire pour le
développement, nous croyons, avec l'expérience que nous avons,
qu'il nous appartient de diriger le projet.
M. SAINT-PIERRE: Mais si vous ne...
M. DOZOIS: J'ai enlevé la parole à M. Boyd, cependant,
j'aimerais bien la lui redonner.
M. SAINT-PIERRE: Mais si le président de la Société
d'énergie était un des commissaires de l'Hydro-Québec,
vous sentiriez-vous plus confortable dans votre position?
M. DOZOIS : Ce n'est pas l'idée de placer à la
présidence de la Société d'énergie quelqu'un de
l'Hydro-Québec. Je pense que ce que nous avons en tête, c'est que
l'Hydro-Québec ait vraiment un contrôle efficace de la
gérance et de l'ingénierie. Je pense que c'est ça.
M. SAINT-PIERRE: Comme le suggérait M. Nadeau, je ne sais pas,
moi, 80 p.c, 85 p.c. enfin, M. Nadeau a même dit 99 p.c.
des cadres de la Société d'énergie pourraient être
des cadres de l'Hydro-Québec. Si un changement à la
Société d'énergie, au niveau de sa présidence, est
réellement le problème, est-ce que cela ne vous donne pas, quand
même, toute une structure qui vous permettrait d'avoir un
contrôle?
M. BOYD : Je ne pense pas que cela réponde réellement
à ce qu'on désire ou à ce qu'on exprime.
Premièrement, que le président de la Société
d'énergie soit un membre de l'Hydro-Québec, cela ne règle
pas du tout le problème. Que 100 p.c. même des cadres de la
Société d'énergie soient des cadres de
l'Hydro-Québec, cela ne règle pas le problème, non plus.
Parce que les cadres qui seraient là ne seraient plus des
employés de l'Hydro-Québec à temps plein. C'est la grosse
différence. L'Hydro-Québec est régie par une loi. Tant
qu'elle restera comme elle est et tant qu'on est commissaire de
l'Hydro-Québec, on a prêté serment, on a des
responsabilités, comme d'autres en ont ailleurs. On a la
responsabilité et la partager, c'est toujours embêtant.
Là, vous avez une situation où, comme le disait M. Dozois,
vous avez un président et un adjoint au président qui, eux,
décident de donner à une ou à des firmes la
responsabilité. Vous avez éloigné l'Hydro-Québec
qui, elle, va contrôler par assemblées de direction, par
assemblées d'actionnaires avec des choses négatives. C'est une
responsabilité partagée que les membres de la commission semblent
difficilement accepter.
M. SAINT-PIERRE: Je ne sais pas comment fonctionne la commission de
l'Hydro-Québec, mais, dans un conseil d'administration ordinaire
j'espère que la Société d'énergie est dans ce sens
lorsqu'on a trois directeurs sur cinq, il me semble qu'on peut
décider que, oui, ce sera telle firme ou, non, ce sera telle autre
firme. D'ailleurs, ayant lu la charte de la Société
d'énergie, vous gardez, quand même, énormément de
pouvoirs qui, à mon sens, ne sont pas uniquement des pouvoirs
négatifs. Ce sont des pouvoirs d'initiative. En d'autres termes, vous
dites que les cadres ne seraient pas des employés de
l'Hydro-Québec à temps plein. Je ne vois pas comment. Il me
semble que les cadres pourraient être mutés temporairement
à ce que vous appelez vous-mêmes une filiale de
l'Hydro-Québec. Ils seraient aussi à temps plein que si vous
déplacez quelqu'un du bureau de Montréal ici, au bureau de
Québec. D'autant plus que, pour ce qui est des directeurs, de
l'orientation, je ne vois pas la différence. J'essaie de comprendre,
parce que, cet après-midi, nous étions d'accord sur la
nécessité d'une organisation par projets. Je ne vois pas la
différence si c'est à l'intérieur de
l'Hydro-Québec, mené comme une direction générale
séparée, et si c'est mené à l'intérieur de
la Société d'énergie où vous avez la
majorité tant sur le plan des directeurs que sur le plan des
actionnaires.
M. BOYD: La différence est assez grande, parce que notre
contrôle sur la Société d'énergie, surtout par les
actionnaires...
M. SAINT-PIERRE: Par le bureau de direction également.
M. BOYD: Au bureau de direction également, mais les commissaires
sont habitués à fonctionner â temps plein et avec des
responsabilités. Ce ne sont pas des commissaires, comme on l'entend
généralement, qui sont dans un bureau de direction. Ce sont des
commissaires actifs. Administrer une entreprise comme l'Hydro-Québec et
travailler dans un bureau de direction, moi, je considère que c'est
très différent. C'est ça que nous essayons de
démontrer.
M. Nadeau a dit très clairement qu'il voulait confier cela
à l'entreprise privée. On voit qu'il y a un conflit si
l'Hydro-Québec veut se le confier à elle-même. Les
différents commissaires ont semblé dire des choses qui
n'étaient pas tout à fait les mêmes, cet après-midi,
sur ce point. Je pense que ce n'est pas exact. On a dit qu'on voulait que ce
soit confié à l'Hydro-Québec. Par la suite, selon nos
études, l'Hydro-Québec, sous sa responsabilité toujours,
confiera en plus ou moins grande quantité des contrats
d'ingénierie et des contrats de gérance, suivant les besoins
qu'elle aura déterminés.
Certains pensent que c'est plus, d'autres, moins et d'autres, pas du
tout, mais c'est aux commissaires de discuter de ce problème en
commission. Après étude, ils arriveront à dire que c'est
l'Hydro-Québec qui a la responsabilité et la gérance du
projet. Nous irons chercher des groupes, des firmes ou des personnes qui
prendront une partie de la responsabilité avec nous, mais la
responsabilité entière demeurera celle de
l'Hydro-Québec.
M. JORON: Si on me permet,...
M. LE PRESIDENT: On comprendra que nous sommes à
l'intérieur des commentaires du député de Gouin. La parole
est au député de Gouin.
M. JORON : Si le député de Beauce avait une question
supplémentaire...
M. LE PRESIDENT: Alors, je n'interviendrai plus.
M. ROY (Beauce): J'ai une question supplémentaire et elle va
être très courte, M. le Président. C'est parce qu'on a
posé une question, tout à l'heure. Lorsqu'on a parlé du
poste de président de l'exécutif de la Société
d'énergie de la baie James, on a dit, d'un côté, que ce
n'était pas un problème De l'autre côté, on a dit
que c'était un problème parce que le président de
l'exécutif et son adjoint semblaient vouloir orienter les contrats vers
telle ou telle personne. Alors, on a posé une question du
côté ministériel à l'effet que si des personnes
émanant de l'Hydro-Québec occupaient les fonctions de
président de l'exécutif ou de directeur adjoint, à ce
moment-là, étant donné qu'elles émaneraient de
l'Hydro-Québec, elles pourraient avoir plus d'influence. Du moins, c'est
ce que j'ai cru comprendre.
On a parlé d'un deuxième problème parce que le
député de Gouin est revenu sur le point tantôt. Il faut
tout de même étudier pour voir si c'est plus avantageux
l'entreprise privée ou l'Hydro-Québec. Je pense que ce ne doit
pas être une question sentimentale. Ce doit être une question
d'ordre pratique, une question d'affaires. On a dit qu'il y avait un
deuxième problème. Le deuxième problème, je le vois
là. J'aimerais qu'on m'éclaire sur ce point pour voir si
réellement c'est la question du poste de président de
l'exécutif. J'ai une question supplémentaire: Par quel
mécanisme M. Nadeau a-t-il été nommé
président de l'exécutif? Par qui a-t-il été
nommé?
M. BOYD : Je peux répondre à une partie de votre question.
A la deuxième, je ne peux pas répondre. La première
question est peut-être bonne mais elle est hypothétique. La loi
prévoit qu'il y aura trois directeurs nommés par le gouvernement,
sur recommandation de l'Hydro-Québec, et deux autres recommandés
par la Société de développement et nommés par le
gouvernement. C'est ce qui est arrivé et vous avez les cinq membres.
Parmi les cinq, il y en a
un qui a été choisi comme président. Il n'est pas
de l'Hydro-Québec. Votre question est hypothétique parce que je
pense que, si un commissaire de l'Hydro-Québec était
président, probablement qu'il faudrait qu'il soit là à
plein temps et il cesserait d'être membre de la Commission de
l'Hydro-Québec.
M. ROY (Beauce): Lorsqu'on a nommé le président, est-ce
que ce sont les membres de l'exécutif qui ont choisi un
président, comme cela se fait dans bien des cas?
M. BOYD: Je ne sais pas.
M. ROY (Beauce): Qui pourrait me répondre à cette
question? M. Nadeau?
M. NADEAU: Le bureau de direction, M. Roy.
M. ROY (Beauce): Alors, il y a trois personnes de l'Hydro-Québec
qui, effectivement, ont contribué, en quelque sorte, à ce que
vous soyez choisi président.
M. NADEAU: Et qui ont aussi nommé M. Boulva, adjoint
exécutif au président, et M. Giroux, président du
conseil.
M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.
M. JORON: M. le Président, j'adresse à la fois à M.
Boyd, peut-être, de l'Hydro-Québec et à M. Nadeau de la
SDBJ ma deuxième question. Toujours dans cet effort de comparer les deux
propositions, entreprise privée et Hydro-Québec, elle porte sur
l'expérience des deux groupes qui font des propositions. Quand on parle
d'expérience, ce qu'on a en tête, j'imagine, c'est la question des
dépassements de coût. L'expérience passée peut nous
donner un indice et nous assurer, dans une certaine mesure, que les estimations
seront respectées.
Alors, la question, que je veux adresser à l'Hydro-Québec
et à M. Nadeau, s'il peut se faire le porte-parole du premier groupe qui
vous a soumis une proposition, soit SNC, Montreal Engineering et Janin, est la
suivante : Quelle est l'expérience de ces deux groupes depuis une
dizaine d'années? Je m'adresse à l'Hydro-Québec d'abord.
Quelle est la valeur des travaux qui ont été
complétés? Quelle est l'expérience de
l'Hydro-Québec dans ces travaux quant aux dépassements? Est-ce
que l'Hydro-Québec, au cours de cette période, a accordé
des sous-contrats à l'entreprise privée? Quelle a
été l'expérience de cette partie que l'Hydro-Québec
aurait déléguée à l'entreprise privée quant
aux dépassements des estimations et des coûts?
M. BOYD: Je pense qu'on a mentionné ces chiffres. La
période de 1960 à 1971, c'est celle qu'on avait discutée.
On peut rappeler les chiffres: L'Hydro-Québec a géré, au
cours de cette période, pour plus de $2 milliards de travaux, dont
près de la moitié était pour des lignes et des postes.
Dans ces deux cas, les coûts des travaux terminés
étaient inférieurs aux estimations, tandis que, dans les
centrales, les dépenses étaient de $1,190 millions par rapport
à des estimations de $936 millions.
Quant â savoir si on a confié à l'entreprise
privée des contrats, il y a différentes sortes de contrats.
M. JORON: Au-delà de ces $2 milliards.
M. BOYD: Dans les lignes et les postes, habituellement, la
procédure, c'est que les estimations sont préparées par
les ingénieurs de l'Hydro-Québec. Les travaux sont confiés
à l'entreprise privée par soumissions, si vous voulez, en
général, et ils sont surveillés par les ingénieurs
et les techniciens de l'Hydro-Québec.
Dans le cas des centrales, les études d'avant-projets et
l'étendue des projets sont définies par l'Hydro-Québec. En
général, les contrats sont confiés aux
ingénieurs-conseils pour les plans et devis et, dans certains cas, pour
la surveillance de la qualité. L'Hydro-Québec gère les
travaux. Certains contrats sont donnés, dans ces cas. D'autres travaux
sont exécutés par l'Hydro-Québec.
M. JORON: Il y a des contrats dont la gérance a été
donnée à l'entreprise privée, à différentes
firmes d'ingénieurs-conseils, au cours de cette période, si je
vous comprends bien, en dehors des $2 milliards que l'Hydro-Québec a
gérés elle-même. Est-ce cela?
M. BOYD: Non, il n'y a pas eu de contrats de gérance. Dans aucun
cas, l'Hydro-Québec n'a donné de contrats de gérance. Dans
les lignes et les postes, l'Hydro-Québec a eu la responsabilité
de la gérance, du génie et de la surveillance. Dans les
centrales, l'Hydro-Québec a donné des contrats à des
ingénieurs-conseils et a surveillé la construction.
M. SAINT-PIERRE: Dans les contrats d'aménagement
hydro-électrique et de centrales, actuellement, M. Boyd, qui est le
gérant des travaux?
M. BOYD: C'est l'Hydro-Québec.
M. SAINT-PIERRE: Lorsque vous parlez des écarts substantiels qui
sont survenus pour certaines centrales, était-ce l'Hydro-Québec
qui était gérant?
M. BOYD: Oui.
M. JORON: Sur les $2 milliards de travaux, au total, quand on inclut les
centrales, les postes et les lignes, quelle a été
l'expérience des coûts estimés par rapport aux coûts
réels?
M. BOYD: Je vais vous donner les chiffres exacts. Dans les lignes, $560
millions d'estimations; $523 millions de dépenses. Dans les postes, $346
millions d'estimations et des réalisations de $340 millions.
M. JORON: Là, cela a été moins et, dans les
centrales, il y a eu un dépassement.
M. BOYD: Dans les centrales, les estimations, $936 millions, et les
dépenses, $1,189 millions.
M. JORON: D'accord.
M. BOYD : On a déjà donné des explications sur cela
à différentes commissions parlementaires. Une partie des
explications, c'était que les intérêts étaient
passés de 5 p.c, 5 1/2 p.c. au débat à 10 p.c. à la
fin. Mais aussi, une bonne partie était due à
l'inexpérience, si on peut dire, de ceux qui préparaient les
estimations.
M. JORON: Qui avait préparé les estimations, dans ces
cas?
M. BOYD: La plupart du temps, les estimations sont basées sur ce
que nous remettent les ingénieurs-conseils.
M. JORON: C'est d'après les estimations des firmes
d'ingénieurs-conseils?
M. BOYD: Oui.
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, M. Boyd. Comment expliquez-vous cela?
N'est-ce pas une des fonctions élémentaires d'un gérant,
lorsqu'on lui présente des estimations, d'être capable de dire si
elles sont réalistes ou non? Si des estimations qui n'étaient pas
réalistes vous ont été présentées, n'y
a-t-il pas une certaine responsabilité de ne pas les avoir
identifiées?
M. BOYD : Nous les avons identifiées dans certains cas, mais la
principale explication qu'on a donnée, ce sont les taux
d'intérêt.
M. SAINT-PIERRE: Mais comment expliquer que dans le cas des lignes et
des postes le gérant, qui était l'Hydro-Québec, avait de
bonnes estimations, qu'il n'a pas été influencé par les
variations des taux d'intérêt et que les travaux se sont accomplis
en dedans des estimations, alors que le même gérant, qui a la
responsabilité des centrales, n'aurait pas décelé des
estimations qui seraient fausses pour les centrales? Le même
gérant n'aurait pas eu les mêmes performances dans les centrales
que dans les postes et les lignes?
M. BOYD: C'est presque dire quelque chose que j'aimerais autant ne pas
dire. S'il faut entrer dans les détails, il va falloir nommer des
compagnies d'ingénieurs-conseils et ça peut être
désagréable. Mais sans les nommer ...
M. SAINT-PIERRE: D'après votre réponse, c'est toujours le
même groupe qui est gérant du projet, si je comprends bien.
C'est-à-dire que dans les lignes et les centrales, d'après votre
réponse, c'était l'Hydro-Québec, le gérant. Pour
Manic 3, dans le moment, je pense bien qu'on ne peut dire que c'est Asselin,
Benoit, Boucher, Ducharme et Lapointe qui est le gérant du projet. C'est
l'Hydro-Québec. S'il y avait des écarts, est-ce que ce n'est pas
là qu'on doit juger de la ...
M. BOYD: Pour Manic 3, on peut vous expliquer en détail, ainsi
que pour les autres, sans nommer de noms.
M. SAINT-PIERRE: Ils ont été nommés
déjà.
M. BOYD: Les compagnies qui avaient de l'expérience comme
ingénieurs-conseils nous ont présenté des estimations qui
étaient réalistes; les autres, leurs estimations n'étaient
pas réalistes parce qu'elles n'avaient pas l'expérience.
L'Hydro-Québec, elle-même, à ce moment-là, il faut
l'avouer... Si vous voulez qu'on fasse le portrait, il est peut-être bon
qu'on le fasse. Jusqu'en 1960 des projets de centrales, il n'y en avait pas
tellement et ils avaient été confiés en grande partie
à deux bureaux d'ingénieurs-conseils dont un bureau était
du Québec et l'autre pas.
M. MARCHAND (président): M. DeGuise a des commentaires à
faire sur le même sujet.
M. LAVOIE (Wolfe): Qui choisit les bureaux
d'ingénieurs-conseils?
M. BOYD: C'est l'Hydro-Québec qui les choisit.
M. DEGUISE : Pour répondre à une question de M.
Saint-Pierre, je crois qu'il y a peut-être une explication du fait que
les résultats sont différents pour les postes et les lignes, par
rapport aux centrales. Je crois que la période de construction
étant beaucoup plus courte pour un grand nombre de postes, au moment
où l'estimation se fait, l'intérêt n'a pas le temps de
changer tellement. Alors que dans une centrale, quand on fait l'estimation et
qu'on construit sur une période de 6 ou 7 ans, on est plus exposé
à des variations de main-d'oeuvre ou d'escalation. Je crois que
ça explique pourquoi, dans les postes et dans les lignes, on peut juger
d'une manière plus exacte du coût final.
M. JORON: Je pense que M. Boyd était à nous donner le
témoignage de l'expérience que l'Hydro-Québec avait connue
au cours des onze dernières années avec différentes firmes
d'ingénieurs-conseils quant aux estimations, mais sans nommer les noms,
toujours. Je comprends qu'il peut être délicat de le faire. Est-ce
que vous pourriez nous faire état de cette expérience?
M. BOYD: C'est que jusqu'en 1960, c'était des bureaux qui avaient
de l'expérience qui faisaient les plans. En 1960 et je pense que
la décision a été bonne on a décidé
qu'il fallait bâtir des bureaux québécois et on a
confié des travaux à des bureaux québécois qui ont
eu à apprendre tout en travaillant. L'Hydro-Québec
elle-même s'est vu confier énormément de travaux de
centrales d'un coup sec et elle n'était pas prête.
Mais il y a aussi le fait que jusqu'en 1964, il n'était
prévu aucune escalation dans les estimations. Par la suite, on a eu de
l'escalation, comme tout le monde le sait. Donc, parce que les prix
étaient assez stables, jusqu'en 1965 et il n'y avait pas d'escalation de
prévue. C'est ce qui a fait la grande différence. Ce sont des
choses que nous avons apprises, que les ingénieurs-conseils ont
apprises. Il y a deux bureaux, se basant sur leur expérience
passée, qui nous ont fait des estimations réalistes et les autres
ont appris entre-temps.
C'est pourquoi, lorsqu'on parle de confier les travaux
d'ingénierie de la baie James c'est quelque chose comme une
couple de $100 millions d'ingénierie qu'il va y avoir à faire
dans la baie James on propose de confier tout ça à nos
ingénieurs-conseils du Québec. Nous pensons qu'ils ont acquis
l'expérience au cours de ces années, mais nous pensons qu'ils
n'ont pas acquis l'expérience de la gérance.
Nous pensons que c'est trop risqué de confier la gérance
à des bureaux qui ont appris pendant des années à faire
des plans mais qui n'ont pas appris à gérer.
M. JORON: M. le Président, si vous permettez que je poursuive,
j'avais posé ma double question dont une partie s'adressait à
l'Hydro-Québec. L'Hydro-Québec vient de nous apprendre qu'elle a
fait état de son expérience, c'est-à-dire pour $2
milliards de travaux complétés, au cours des onze
dernières années qui se sont soldés, tout inclus, en
deça d'environ 10 p.c. des prévisions. Il y a eu des
dépassements qui n'ont pas été au-delà de 10 p.c.
M. Boyd nous a donné l'explication que c'était le facteur du
mouvement des taux d'intérêt au cours de cette
période-là qui a pu faire commettre des erreurs de
prévisions, tant à l'Hydro-Québec qu'aux firmes
d'ingénieurs privées qui avaient soumis des estimations.
La deuxième partie de la question s'adressait davantage à
M. Nadeau...
M. GAUVREAU: Pardon, M. Joron.
M. JORON: Si vous voulez ajouter quelque chose, M. Gauvreau, je vous en
prie.
M. GAUVREAU: A mon avis, l'exercice auquel vous essayez de vous livrer
est de nous forcer à faire des comparaisons entre la compétence
en estimation de l'Hydro-Québec et des maisons privées. Il me
semble que cet exercice- là est extrêmement simplificateur, de la
manière dont il est fait. On ne peut pas le faire comme ça.
D'abord, premièrement, M. Boyd donne sa mémoire des
événements. Il n'était pas à la construction dans
ce temps-là.
Moi je pense s'il y a des commissaires qui veulent me contredire,
qu'ils le fassent ici que les estimations ont été faites
en collaboration avec les ingénieurs-conseils et que
l'Hydro-Québec y a participé. Il n'y a pas eu tellement escalade
des écarts depuis 1960, c'est un événement
nord-américain absolument inconnu dans le passé pour les bonnes
raisons que M. Boyd vous a données. Si on lit les "Journal of
Engineering of General Construction", il y a des symposiums actuellement, on
cherche à trouver moyen d'améliorer les prévisions, mais
les écarts entre les estimations et les coûts sont
extrêmement nombreux dans tous les domaines.
Maintenant, si vous voulez que nous fassions ce soir le procès
des bureaux d'ingénieurs-conseils, il me semble que nous n'avons pas du
tout, du tout, du tout entre les mains les dossiers qu'il faudrait pour le
faire honnêtement. Je crois qu'à ce moment-là, il faudrait
examiner chaque bureau, son expérience passée, ses estimations et
ses efforts dans différents travaux. Je pense que l'exercice est
beaucoup trop simplificateur pour être honnête et envers
l'Hydro-Québec et envers les ingénieurs.
M. JORON: M. Gauvreau vous avez donné votre témoignage sur
un sujet, vous conviendrez qu'il m'appartient, par contre, de poser les
questions que je veux bien poser à qui je veux les poser.
Et sur la question de l'expérience, je veux demander à M.
Nadeau quelle est l'expérience de SNC, Montreal Engineering, et Janin
Construction, au cours, par exemple, de la même période, pour nous
permettre de la comparer à l'expérience de l'Hydro-Québec
dans des travaux de nature hydraulique. Avant, si vous me permettez, de nous
engager là-dedans, je voudrais poser une question, c'est dans la
proposition que vous soumettait SNC, Montreal Engineering, Janin Construction.
Est-ce qu'il était fait mention que Janin puisse se retrouver en
même temps gérant et exécutant s'ils se voyaient confier
des contrats d'exécution à titre d'entrepreneurs? Si
c'était le cas, est-ce qu'il n'y a pas là un conflit
d'intérêts parce qu'en fait c'est être juge et partie que de
se retrouver à la gérance et d'être un entrepreneur
à contrat.
Il y a cette question là spécifiquement sur le cas de
Janin. Ensuite, si vous voulez bien répondre sur l'expérience
passée des trois firmes concernées.
M. NADEAU: Dans le cas de Janin évidemment le contrat de
gérance devrait prévoir que Janin ne soit pas
l'exécutant.
M. JORON: Ne pourrait pas être exécutant, d'accord.
M. NADEAU: Maintenant, quant à l'expérience des maisons
dont vous venez de mentionner ici les noms, il ne faudrait pas que vous ayez
tout de même l'impression que nous avons arrêté notre choix
sur ces noms-là...
M. JORON:Oh! non.
M. NADEAU: ... et que nous avons décidé d'emblée
que c'était la maison qui devait satisfaire à nos besoins.
Toutefois cette maison-là ou ce groupe, ce consortium nous a remis une
offre de services, que nous avons d'ailleurs déposée à la
Société d'énergie. En coût terminé, les
travaux de gérance, j'entends, de ces trois organismes se chiffrent par
$3 milliards. Maintenant il faut considérer ici que ce sont des
organismes privés et que s'ils avaient dépassé les
coûts, si l'expérience avait été mauvaise, ces
maisons ne seraient plus en affaires, alors que toutes sont en affaires et
financièrement très solides.
Si vous permettez de finir la réponse à votre
question...
M. JORON: Je vous en prie.
M. NADEAU: Vous avez posé une hypothèse
d'expérience quant à la réalisation d'un projet. Nous
avons voulu modeler la Société d'énergie sur Churchill
Falls. Ici encore, les représentants de l'Hydro-Québec, qui sont
les clients de Churchill Falls et qui achètent
l'électricité, n'étaient pas à Churchill Falls
à temps plein, mais ils y étaient comme directeurs de la
compagnie Churchill Falls. Il y avait un contrat entre les deux;
l'électricité était achetée à tel prix. Cela
a été, dans l'esprit de tout le monde, je crois, un
véritable succès. Ce fut l'exemple d'un grand succès en
ingénierie, etc., parce que des contrôles avaient
été établis. Le modèle de ces contrôles est
entre nos mains; nous pouvons exercer les mêmes contrôles que
Churchill Falls a exercés vis-à-vis d'Acres Canadian Bechtel qui
avait la gérance.
Un contrat de gérance ne nous lie pas pour la durée du
projet, non plus. Si, toutefois, nous choisissions un consortium ou une maison
quelconque pour faire la gérance et que nous nous appercevions que cette
maison ou ce consortium n'est plus compétent, rien ne nous
empêcherait de changer, à ce moment-là, et de la confier
à une maison plus compétente, s'il y en a.
M. JORON: Pour que l'on puisse comparer des choses comparables,
l'Hydro-Québec nous a parlé de travaux complétés
sur une période allant de 1960 à 1971. Vous m'avez parlé
des trois sociétés en question, des travaux
complétés et en cours. Je vous ai posé une question
spécifique sur les travaux complétés de nature
hydraulique. Je sais que ces maisons ont aussi géré des travaux
d'ordres thermique, nucléaire, etc. Il ne faudrait pas mélanger
tout cela; on parle de travaux d'ordre hydraulique.
Par exemple, au cours des onze ou douze dernières années,
pour combien de travaux complétés dans l'hydraulique SNC,
Montreal Engineering et Janin ont-ils été gérants?
Avez-vous le détail de cela?
M. NADEAU: Je regrette, je ne saurais vous donner les détails
là-dessus. Il ne faut pas, non plus, penser que je tends à
diminuer l'importance ou la compétence de l'Hydro-Québec; au
contraire. C'est, d'ailleurs pour cela que nous avons, dans notre organigramme,
incorporé un nombre aussi grand que possible des gens qui viendraient de
l'Hydro-Québec. Maintenant, je peux poser la question: Combien de ces
cadres l'Hydro-Québec peut-elle remplir actuellement, quand je parle des
134 individus qui devraient oeuvrer au sein de la Société
d'énergie? Je ne sais pas si je pourrais avoir une réponse
là-dessus.
Si on pouvait avoir 134 individus, tel que projeté,
détachés de l'Hydro-Québec pour sauvegarder les
intérêts de l'actionnaire majoritaire dont ils sont les
employés ils seraient détachés, mais payés
par la Société d'énergie afin qu'on puisse en
comptabiliser les coûts, encore une fois à ce
moment-là, je ne vois pas comment il pourrait y avoir des conflits ou un
manque d'intérêt de la part de ces individus qui seraient, tout de
même, appelés à retourner au sein de l'Hydro-Québec,
une fois le projet terminé.
M. DOZOIS: Me permettriez-vous de compléter la
réponse?
M. JORON: Je vous en prie.
M. DOZOIS: J'ai ici la proposition de Sur-veyer, Henniger et Chenevert
et de Montreal Engineering. Il y a une section intitulée
"Expériences de gérance de projets", pour chacune des firmes.
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plait! Pourriez-vous rapprocher
le micro un peu? Merci.
M. DOZOIS: Surveyer, Nenniger et Chenevert donne, dans cette liste, un
projet, d'aménagement hydro-électrique aux Indes de $130
millions, dont la terminaison est prévue pour décembre 1975. Il y
a Montreal Engineering qui a sept projets, pour un total de $363 millions.
Certains de ces projets sont terminés et d'autres seront terminés
en 1972 et en 1975. Ensuite, la maison Janin, pour laquelle des services de
gérance ou d'entrepreneur général ont été
fournis, en a pour $382 millions, pour des travaux de galeries de
dérivation, de galeries d'amenée, pour l'installation et
l'entretien des blondins, pour des digues, des centrales
hydro-électriques, des lignes de transport d'énergie, digues,
barrages, centrales hydro-électriques, etc.
Cela vous donne un portrait de l'expérience. Le plus gros projet
hydro-électrique exécuté par
ces firmes est celui de Surveyer, Nenniger et Chenevert, aux Indes, pour
$130 millions, qui n'est pas terminé.
M. SAINT-PIERRE: M. Dozois, vous me permettrez d'être d'accord
avec M. Gauvreau pour dire que, dans ce type de question là, on pourrait
donner des réponses et prouver, sans utiliser des chiffres, à peu
près n'importe quoi. Je pourrais, moi aussi, être très
méchant et vous dire: Lorsqu'on gère des projets, il faut, au
moins, être capable de les concevoir.
Là, je pourrais retourner la question à
l'Hydro-Québec: Est-ce que vous avez fait des plans d'une centrale qui
ont été réalisés? Vous devriez me répondre
non, et ce n'est pas parce que vous n'êtes pas compétent, mais
c'est parce que c'est dans la nature des choses. Vous me corrigerez si j'ai
tort, l'Hydro-Québec n'a jamais fait les plans d'une seule centrale.
Mais je ne pose pas la question parce que je pense que ce serait une mauvaise
façon de tenter de juger la compétence de votre personnel. Il y a
un rôle pour chacun et c'est dans des contextes très
différents. On pourrait dire que ces trois firmes ont quand même
reçu des mandats de plusieurs clients, dont la Banque mondiale, des
organismes internationaux, des compagnies privées et que ces mandats ont
été renouvelés dans des conditions de concurrence alors
que pour l'Hydro-Québec il faut admettre qu'il y a un certain
marché captif. On pourrait dire, quant à ça, que les
estimations auraient pu être trois fois plus élevées que
vous ne les avez faites et les coûts trois fois plus élevés
et on arriverait à la même conclusion aujourd'hui: vous êtes
entré dans vos coûts. C'est un peu un marché captif. Mais
je dois admettre que c'était la façon la plus...
M. DOZOIS : Je ne porte pas de jugement sur la valeur des choses.
M. SAINT-PIERRE: Non, mais...
M. DOZOIS : J'avais compris la question du député de Gouin
comme étant: Quels sont les grands projets qu'ils ont
exécutés?
M. SAINT-PIERRE: Bien, j'enregistre...
M. DOZOIS : J'ai tout simplement donné la lecture...
M. SAINT-PIERRE: Mais j'enregistre ma dissidence. En citant les millions
des contrats, on peut arriver avec l'Hydro qui a fait $2 milliards puis eux qui
ont fait $150 millions, donc on pourrait dire que l'Hydro est huit fois
meilleure. Ce n'est pas tout à fait aussi simple que ça.
M. LE PRESIDENT: M. Boyd.
M. BOYD: M. le Président, pour le bien de nos ingénieurs
du génie, surtout, il faudrait quand même, sans éterniser
cette discussion qui pourrait devenir je l'admets comme vous
désagréable, dire que les ingénieurs de l'Hydro n'ont pas
fait de plans et devis détaillés de centrales, mais que depuis
1960 ils ont aidé considérablement à former les bureaux
d'ingénieurs-conseils à faire ces plans et devis. Il faut leur
donner le crédit d'avoir contribué à leur formation. Si on
le demandait à la plupart des bureaux qui ont travaillé pour
nous, je pense qu'ils admettraient que nos ingénieurs ont aidé
considérablement à les former pour ça.
M. SAINT-PIERRE: Admettriez-vous avec moi que vous aviez un peu le
rôle d'un client averti qui aide, évidemment, celui qui
reçoit un mandat et qu'effectivement dans aucune des centrales vous
n'avez pris vous-même, de A jusqu'à Z, la réalisation de
tous les plans et de tous les devis ainsi que la conception? Vous avez
approuvé des plans, vous avez même suggéré à
des ingénieurs-conseils de corriger tel ou tel détail parce que,
d'après votre expérience de client averti, il fallait demander
des modifications, mais vous n'avez pas fait, à ma connaissance, les
plans d'une centrale. On ne peut pas dire que Manic 3, ce sont les
ingénieurs de l'Hydro-Québec ou que Manic 5 ce sont les
ingénieurs de l'Hydro-Québec, tant sur les barrages que sur les
centrales.
M. BOYD: Je pense que c'est beaucoup plus que ça ce que les
ingénieurs de l'Hydro ont fait pour les ingénieurs-conseils. Ils
les ont aidés à faire les plans de centrales, sans aller dans le
détail.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que l'on pourrait considérer ce secteur
comme clos pour le moment? Je passe la parole au député de
Gouin.
M. JORON: Merci, M. le Président. Dernière question que je
voulais adresser à l'Hydro-Québec. Je voulais vous demander de
préciser ce que vous entendez dans votre proposition globale lorsque
vous parlez de recourir à l'assistance de l'entreprise privée,
des bureaux d'ingénieurs, et ainsi de suite. Quelle est l'étendue
du rôle que vous leur voyez? Plus spécifiquement, puisque
les journaux en ont fait état au cours de la dernière semaine
on a beaucoup parlé de Acres-Canadian Bechtel, je voudrais vous
demander, comprenant qu'il n'y a probablement rien de conclu puisque la
gérance des travaux n'a pas été déterminée,
à quel titre l'Hydro pensait faire appel à Acres-Canadian
Bechtel, entre autres?
M. BOYD: D'abord, vous parliez des bureaux d'ingénieurs-conseils.
Comme par le passé, et peut-être encore plus que par le
passé, l'Hydro va confier aux bureaux d'ingénieurs-conseils du
Québec les travaux d'ingénierie comme on l'a fait jusqu'à
maintenant à la baie
James. Et on peut identifier des ensembles de projets qui semblent de
très grande importance qui vont tenir des bureaux d'ingénieurs
québécois très occupés pour les réaliser
à temps. C'est en partie une réponse à votre question.
Quant à la gérance, on l'a dit de différentes
façons, mais je pense qu'on disait à peu près tous la
même chose.
L'Hydro-Québec peut se servir de son personnel et avoir la
collaboration des entreprises oeuvrant au Québec, qu'elle aille chercher
des individus qui sont chez des entrepreneurs ou des individus qui sont chez
des ingénieurs-conseils. Si tout cela n'est pas suffisant, et c'est
là que l'analyse devra se faire à l'Hydro-Québec pour voir
quels sont les besoins, il y aura possibilité de recourir à des
firmes d'ingénieurs-conseils du Québec ou à d'autres
firmes du Québec pour nous aider à compléter
l'équipe de gérance. Alors, ce sont, disons, les deux
premières parties de votre question.
La troisième, je dois vous dire que l'Hydro-Québec n'a
reçu aucune proposition officielle de la Canadian Bechtel.
L'Hydro-Québec n'a pas discuté du problème de la Canadian
Bechtel. On a beaucoup fait état de cela dans les journaux, mais il n'y
a pas de proposition, il n'y a aucune discussion formelle. Il y a eu des
demandes d'information; d'ailleurs la Société d'énergie a
aussi demandé des informations auprès de la Canadian Bechtel. M.
Dozois l'a dit dans son texte qui était préparé parles
commissaires. L'Hydro-Québec, également, dans certains cas, a
demandé des informations. Elle a reçu des offres de bureaux
d'ingénieurs-conseils du Québec, lesquels l'ont vue pour offrir
leurs services de génie, de gérance ou soit les deux.
Egalement, nous avons des offres qui nous viennent de bureaux des
provinces de l'Ouest. Il n'y a pas de proposition de la Canadian Bechtel ou de
la Bechtel américaine. Dans l'esprit de certains des commissaires, si on
avait recours à la Canadian Bechtel et je vous
répète que cette question n'est pas devant la commission
ce serait à titre de consultante seulement pour pouvoir acquérir
son expérience de "management"; comme consultante, pas plus.
Comme je le disais déjà, cet après-midi, nous avons
eu déjà recours à des consultants qui n'étaient pas
des Canadiens, comme dans le cas d'Ebasco, pour nous conseiller sur le contrat
de Churchill. Cela a été très bénéfique. Si
Bechtel ne nous convient pas, cela ne nous intéressera pas. C'est la
Commission qui le décidera. Mais dans le moment, ce serait limité
à cela, si jamais on y pensait.
M. JORON: Il n'est donc pas question pour l'Hydro-Québec de
réclamer la gérance pour ensuite la remettre à une tierce
partie. Vous pensez à la Bechtel, parmi d'autres, à titre de
consultants tout simplement.
M. BOYD: C'est ça.
M. JORON: Quels avantages y voyez-vous? Est-ce qu'il y a des incidences
sur le financement du projet?
M. BOYD: D'avoir une bonne gérance?
M. JORON : Non, cela va de soi, mais quant à l'assistance
technique que cette firme, en particulier, serait susceptible de vous
fournir?
M. BOYD: Je vous le répète, il faudrait que ses conditions
nous soient acceptables. Mais elle pourrait nous aviser comme consultante,
comme nous avons eu toutes sortes de consultants experts quand nous sommes
allés les chercher. Je crois que son expérience est très
valable et cela pourrait nous aider à améliorer nos
capacités en gérance. Churchill a la compagnie Acres, laquelle
était la contrepartie en génie, a eu l'assistance de Bechtel pour
la gérance. C'était une bonne compagnie de génie
très bien connue au Canada. Cela a été fructueux.
M. GAUVREAU: M. Joron, sur la question de savoir quel usage nous
entendons faire des entreprises privées, je suis d'accord avec M. Boyd
en disant qu'il y a de l'ouvrage pour tout le monde en ingénierie. On
peut en distribuer à beaucoup de monde. C'est probablement là que
sera le gros des services achetés. Du côté de la
gérance, on a parlé de délais, cet après-midi, et
je crois qu'on ne m'a pas très bien compris. Voici ce que je veux
dire.
Je veux dire qu'il me semble que nous n'aimons pas être
poussés dans le dos pour prendre une décision, demain,
après demain, dans une semaine ou dans quinze jours pour savoir comment
nous allons nous organiser pour réaliser le projet. Pour étudier
ces propositions, si cela prend quelques semaines, c'est parce que nous voulons
pouvoir évaluer nos forces, examiner nos effectifs, savoir ce que nous
pouvons faire, si c'est réaliste de s'engager là-dedans tout
seuls. Aussi, pour le faire, nous voulons consulter nos directeurs
généraux, le directeur général de la construction,
le directeur général du génie et leurs directeurs
spécialisés.
Lorsque nous aurons fait ce travail, qui peut durer quelques semaines,
je crois que nous pourrons vous dire et décider exactement s'il y a lieu
et avantage pour l'Hydro-Québec d'avoir recours à l'entreprise
privée pour de la gérance.
M. JORON : Je comprends très bien votre réponse, M.
Gauvreau. Je ne pense pas que vous soyez en mesure ce n'est pas votre
rôle, non plus de voir à l'aménagement final et aux
détails techniques. Mais tout cela n'a pas empêché les
commissaires de l'Hydro-Québec de réclamer, justement d'urgence,
cette fois-là, de se voir confier le mandat de gérance des
travaux de façon à pouvoir se mettre à l'oeuvre quant
à l'aménagement technique, si je peux m'exprimer ainsi, tel que
vous venez de le signaler.
M. GAUVREAU: Il n'y a pas lieu de mettre d'entrave et d'augmenter les
délais inutilement.
M. JORON: D'accord.
M. GAUVREAU: C'est évident.
M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: M. le Président, j'aimerais connaître
l'évolution de la pensée de l'Hydro-Québec. Dans le cours
de ses études, elle a vu, au début, la Société
d'énergie avec une importance telle qu'on a dû y investir $700
millions. Tout à coup, il semble que vous voulez faire de cette
compagnie une compagnie tampon, une compagnie qui va jouer un rôle de
beaucoup diminué. Je suis un peu surpris, autrement dit, de constater
que vous investissez $700 millions dans une compagnie ce qui est,
à mon avis, une somme très considérable et que,
subitement, après cette investissement, vous considériez cette
compagnie comme étant simplement une compagnie tampon entre la
Société de la baie James et l'Hydro-Québec. Quelle a
été l'évolution dans votre pensée?
M. DOZOIS: M. le Président, la somme investie dans la
Société d'énergie est pour permettre le financement,
n'est-ce pas? J'ai expliqué cela la semaine dernière. Vous n'y
étiez peut-être pas, M. le député de
Jacques-Cartier. Nous nous sommes basés un peu sur l'expérience
de Churchill Falls qui devait emprunter $600 millions sur le marché pour
réaliser son projet. La capitalisation est de $80 millions. Or, à
la Société d'énergie, si, éventuellement, elle veut
faire le financement elle-même et emprunter sur le marché quelque
chose comme $5 milliards ou $6 milliards, dans les mêmes proportions,
nous avons estimé qu'il fallait une capitalisation d'au minimum $700
millions.
Maintenant, les $700 millions que l'Hydro-Québec va verser comme
mise de fonds à la Société d'énergie vont
sûrement être employés, parce que la Société
d'énergie reste propriétaire des investissements et,
conformément à la loi, le développement
hydro-électrique sera effectué par elle. Elle en sera
propriétaire.
L'Hydro-Québec va fournir les $700 millions en capital.
Probablement, si la Société d'énergie ne fait pas les
emprunts sur le marché elle-même, l'Hydro-Québec fera des
emprunts et lui prêtera l'argent. C'est comme cela que je le vois.
M. SAINT-PIERRE: M. Dozois, sur l'ensemble du financement du projet,
jusqu'à quel point, d'après vous en dehors de la
rentabilité du projet lui-même, du coût estimé pour
produire tant d'électricité, enfin, de la nature même du
produit et de son marché la garantie de la province,
exprimée par l'article 28 de la Loi de l'Hydro-Québec, de
même que la garantie de la province sur la Société de la
baie James, sont-elles la même chose? Pour un investisseur
étranger, lorsqu'on arrive à l'article 27 où on dit: La
province a garanti cet emprunt de $7 milliards, que ce soit
l'Hydro-Québec ou la Société d'énergie, est-ce
qu'il y a véritablement une différence pour le financement du
projet?
M. DOZOIS: Il peut y avoir une différence. Je l'ai dit la semaine
dernière, M. le ministre.
Je suis d'avis que la Société d'énergie pourrait
faire des emprunts sur le marché, si elle avait un contrat en bonne et
due forme avec l'Hydro-Québec, qui achèterait son énergie
et lui procurerait des revenus, lui permettant de rembourser les emprunts
qu'elle ferait.
M. SAINT-PIERRE: On parle de bilans consolidés. Et comme on parle
de filiales à 91 p.c, actuellement, par l'Hydro-Québec, quelle
est la différence? Y a-t-il effectivement une différence quant
à la capacité d'emprunt d'une filiale? Celle-ci et la
société mère, peu importe le mécanisme
utilisé, ont la garantie de la province.
M. DOZOIS: Je pense que sur le marché c'est une norme
acceptée. M. Lemieux pourrait le confirmer, je pense. Si vous voulez
faire une émission d'une compagnie, il faut que votre capitalisation
soit proportionnée aux emprunts que vous voulez faire.
Je causais avec quelqu'un, lors de la suspension. Je lui citais cet
exemple. Si quelqu'un qui veut s'acheter un immeuble de $25,000 veut avoir une
hypothèque de $25,000, je pense bien que le prêteur va lui dire:
Mets un peu de tes économies, peut-être $2,000 ou $3,000.
M. SAINT-PIERRE: Mais jusqu'à quel point cela peut-il intervenir
lorsque, effectivement, on parle d'une chose comme la garantie d'une
province?
M. DOZOIS: La garantie de la province, je pense bien, aide la
Société d'énergie, si elle fait des emprunts, comme elle
aide l'Hydro-Québec à faire des économies dans ses
emprunts. Peut-être étes-vous au courant mais ces jours derniers,
le 11 mai c'est récent dans une revue américaine
intitulée Public Utilities et je vous pris de croire que ce n'est
pas nous qui avons fait paraître l'article on traite
précisément de toute cette question du financement.
On cite des statistiques, ici. Il y a les deux rapports, n'est-ce pas?
Le revenu peut garantir une fois et quart, une fois et demie, jusqu'à
cinq fois le président l'a dit l'intérêt
qu'il y a à payer sur les emprunts. On dit entre autres que, parmi les
autres facteurs, il y a le "quality of management" qui est important. Mais je
passe rapidement là-dessus. On parle, sur une période de 45 ans,
de compagnies d'électricité, en particulier, qui ont fait
défaut. Parmi celles
qui gagnaient plus de trois fois l'intérêt qu'elles avaient
à payer sur leurs emprunts, 2.1 p.c. ont fait faillite. Mais, pour
celles qui gagnaient entre 1 et 1.4, 34 p.c. ont fait faillite. C'est cela qui
prend les prêteurs prudents, quand ils constatent qu'une compagnie
d'utilité publique ne gagne que 1.4 ou 1.5.
C'est pour cela que dans le cas de l'Hydro-Québec et ce
sera le cas de la Société d'énergie, j'en suis convaincu
on se contente de 1.25 p.c, parce qu'il y a la garantie de la
province.
M. SAINT-PIERRE: Sur toutes les compagnies, aux Etats-Unis, il n'y en a
aucune qui a la garantie d'un Etat américain. Est-ce qu'il y en a?
M. DOZOIS: Il y en a peut-être, je ne sais pas.
M. SAINT-PIERRE: M. Lemieux? M. LEMIEUX: TVA.
M. SAINT-PIERRE: Oui. C'est un cas unique.
M. LEMIEUX: De toute façon, nous ne parlons pas uniquement de la
question de disponibilité de fonds mais de fonds disponibles au meilleur
taux possible. Si l'Office des autoroutes ce n'est peut-être pas
gentil de signaler une entreprise gouvernementale voulait demain sortir
une émission d'obligations, même garantie par la province, je suis
persuadé qu'il paierait au moins 1/4 de 1 p.c. de plus que pour une
émission de l'Hydro-Québec ou de la province de
Québec.
Avec les sommes en jeu, il faut absolument trouver les fonds aux
meilleures conditions possible. Nous parlons souvent de Churchill Falls. Mais,
comme je l'ai dit la semaine passée, à Churchill on avait une
compagnie qui avait tous les plans et devis. Elle avait $80 millions en
actions. Elle avait un contrat avec l'Hydro-Québec pour l'achat
d'énergie et elle avait une garantie de parachèvement. Ceci
était la chose la plus importante. Même avec tout cela, elle a pu
aller chercher la somme modeste de $500 millions, somme modeste
vis-à-vis d'un projet comme celui que nous envisageons.
Il n'est pas possible de songer à faire des emprunts pour $5
milliards, d'ici 1980, quand les centrales commenceront à produire des
revenus.
Nous prévoyons des emprunts par l'entremise de
l'Hydro-Québec pendant les cinq prochaines années. Les besoins de
l'Hydro-Québec, y compris le projet de La Grande, et aussi les
échéances de nos obligations et les achats de fonds
d'amortissement, tous ces besoins ne dépasseront pas $400 millions par
année d'ici 1976.
Pourquoi s'inquiéter des modalités de finan- cement durant
cette période? Les possibilités pour la société
d'emprunter à long terme en 1972 sont presque nulles, sauf pour des
montants qui ne seront pas très importants.
M. SAINT-PIERRE: Les montants requis pour l'exécution du projet,
M. Lemieux, si l'Hydro-Québec les demande en fonction du projet de La
Grande à $5.8 milliards et si vous avez besoin, en 1977, de $500
millions? Vous m'avez donné tantôt le cas hypothétique des
autoroutes. Si l'Hydro-Québec tente d'obtenir $500 millions sur le
projet de la baie James avec, suivant l'article 28, la garantie de la province
donc ça fait partie du programme d'emprunt de la province
et si, d'autre part, la Société d'énergie tente, pour le
même projet, aux mêmes fins, d'obtenir, avec également la
garantie de la province, $5.8 milliards, est-ce votre point de vue que la
société ne pourra pas obtenir l'argent?
M. LEMIEUX: Je crois que l'Hydro offre plus aux prêteurs en ayant
un pouvoir de gagner des revenus considérables durant les années
courantes, qui offrent une garantie additionnelle aux prêteurs.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que M. Nadeau voudrait commenter cette
même question? Vous avez une grande expérience sur le plan
financier.
M. NADEAU: Si, encore une fois, nous modelons le projet de la baie James
sur celui de Churchill Falls et que nous avons, entre la Société
d'énergie et l'Hydro-Québec, un contrat, le même
procédé qui s'est appliqué à Churchill Falls va
s'appliquer ici. Churchill Falls, pendant les 5 ou 6 années de sa
construction, n'a pas eu de revenus pour rembourser sa dette. Toutefois,
celle-ci était moindre, mais les temps ont changé et la
production de la baie James est plus élevée que celle de
Churchill Falls. Le même processus va prendre place. Et c'est nettement
l'impression que nous avons gardée des rencontres et des discussions que
nous avons eues.
M. JORON: M. le Président, si vous me permettez une question.
M. LE PRESIDENT: Un instant, je voudrais réserver, au nom de la
commission, toute observation ou commentaire autour des autoroutes ou leur
pouvoir d'emprunt, puisque le ministre n'est pas ici. Au cas où il y
aurait une divergence d'opinions, je pense qu'à ce moment-ci on ne
considérera pas ces comparaisons.
Le député de Gouin.
M. SAINT-GERMAIN: Si je comprends bien, si l'Hydro-Québec veut
rester le maître d'oeuvre du projet, vous voulez tout de même que
tout soit financé par la compagnie d'électricité.
M. LEMIEUX: Par l'Hydro-Québec, voulez-vous dire?
M. SAINT-GERMAIN: L'Hydro-Québec veut rester le maître
d'oeuvre des projets électriques de la baie James.
M. LEMIEUX: Oui, mais ce n'est pas cette question que je commente dans
le moment. Je commente le financement. Je dis que nous pouvons trouver
facilement les sommes nécessaires pendant les 5 prochaines
années, que l'Hydro-Québec peut emprunter les sommes
nécessaires pour ses propres fins et pour les fins de la
Société d'énergie, et que, actuellement, la
société n'a pas les données, plans, devis, contrats
nécessaires pour financer, en 1972, à long terme. La
Société pourrait immédiatement, sans doute, emprunter des
banques des sommes limitées qu'on aura à rembourser plus tard,
mais rembourser probablement au moment où nous aurons des emprunts
encore plus considérables à prévoir. Il n'est pas du tout
recommandable d'avoir recours à des emprunts à court terme d'ici
cinq ans. Il est essentiel qu'on emprunte le plus possible, chaque
année, à long terme.
Ces emprunts à long terme, en 72/73, peuvent être
contractés par l'Hydro-Québec et, selon moi, ils ne pourront pas
l'être avant que la société ait en main un contrat avec
l'Hydro-Québec et, de préférence, une garantie de
parachèvement. Cette garantie sera extrêmement difficile à
fournir et pas du tout semblable au cas de Churchill Falls.
Maintenant, on pourrait aller en Europe, au nom de la
société, emprunter $20 millions ici ou $30 millions parce qu'en
Europe les emprunts ne dépassent pas d'habitude $30 millions et aussi
parce qu'en Europe les gens sont moins sophistiqués, si vous voulez,
qu'aux Etats-Unis. Mais, si on voulait aller aux compagnies importantes
d'assurance aux Etats-Unis emprunter des sommes considérables, qui en
vaudraient la peine, pour financer un tel projet, ces compagnies exigeraient
sans doute la garantie de l'Hydro-Québec, c'est-à-dire le contrat
avec l'Hydro-Québec, qui, en somme, représente une garantie par
l'Hydro-Québec, en plus de la garantie de la province.
Je ne veux pas minimiser du tout l'importance de la garantie de la
province, mais je dis, tout simplement, que, pour toucher des fonds aux
meilleures conditions possible, les revenus de l'Hydro-Québec viennent
s'ajouter à toutes les autres garanties et favorisent des emprunts aux
taux les plus bas possible.
M. SAINT-GERMAIN: Mais, M. Dozois vient de mentionner que
l'Hydro-Québec a fait une promesse...
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. J'ai une demande de
parole de la part de M. Nadeau; peut-être en réponse.
M. NADEAU: Cela ne sera pas long. M. Lemieux a, jusqu'à un
certain point, raison. Maintenant, je vois trois moyens principaux de financer
la Société d'énergie. Le premier, ça pourrait
être, comme l'a dit M. Lemieux, des emprunts faits par le truchement de
l'Hydro-Québec qui prête, ensuite, à la
Société d'énergie. Le deuxième, c'est la
Société d'énergie qui fait son propre programme d'emprunts
ou de financement, en collaboration étroite avec l'Hydro-Québec.
Enfin, troisièmement, un programme mixte où les emprunts seront
effectués d'abord par l'Hydro-Québec et, à la mise en
service des centrales, la société pourrait devenir
elle-même emprunteuse.
Maintenant, quant à déterminer ce soir quelle est la
meilleure façon, moi, j'aimerais consulter, justement, ceux à qui
M. Lemieux faisait allusion tantôt, soit, ces gros prêteurs. Quelle
est la formule qu'eux aimeraient mieux dans les circonstances? Est-ce qu'ils
aimeraient mieux prêter directement aujourd'hui à la
Société d'énergie, avec un contrat entre
l'Hydro-Québec et la Société d'énergie? Est-ce
qu'ils aimeraient mieux prêter à l'Hydro-Québec qui
verserait ensuite des sommes à la Société
d'énergie? Les trois formules sont possibles. Les trois formules offrent
des avantages et des désavantages. Je pense qu'on ne peut pas
décider ça ce soir. On ne pouvait pas déterminer cela
avant de déterminer, au moins, où on s'en allait dans les
travaux. Une fois cette décision prise, on peut discuter avec ces
gens-là qui sont ouverts à la discussion et qui nous donnent la
meilleure formule.
Personne n'a le monopole des idées dans ce domaine-là et
je pense que ceux qui investissent des sommes peuvent nous guider et
probablement mieux que nous ici, ce soir.
M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: Cela a répondu à ma question.
M. LE PRESIDENT: La réponse était dans la question.
M. JORON: Sur la question du financement, M. Nadeau a mentionné,
il y a un moment, que des propositions lui avaient été faites,
à la suite des rencontres qui avaient eu lieu avec des financiers.
M. NADEAU: Ce n'étaient que des discussions.
M. JORON: Vous avez eu des discussions. Alors, je veux vous demander,
justement, si vous avez eu des propositions, quelle en était la nature,
s'il y avait des engagements fermes et si, d'autre part
l'Hydro-Québec nous a présenté un programme d'emprunts, et
d'investissements
pour tout le projet vous étiez en mesure de
présenter, à ce stade, le même bilan, si vous voulez, le
même programme d'emprunt.
M. NADEAU: Enfin, vous me demandez si on a eu des propositions fermes.
C'est impossible qu'on ait eu des propositions fermes; on ne savait même
pas ce qu'on allait développer et combien coûterait ce qu'on
allait développer. Donc, il était ridicule d'aller sur les
marchés et de dire: Faites-nous des propositions fermes; on vous fait
des demandes fermes.
Donc, on ne l'a pas fait, évidemment. Tout ce que nous avons
fait, c'est de sentir le pouls. Je peux vous dire que les impressions sont
extrêmement sympathiques. Maintenant, encore une fois, nous n'avons pas
l'argent dans nos poches. J'ai soumis tantôt, pour répondre
à votre question, trois façons différentes de financer le
projet. Encore là, il faudrait, je crois, s'asseoir avec les gens qui
ont les sommes à investir et dire: Quelle est la formule que vous
préférez? Certains groupes ont pu indiquer une
préférence pour la Société d'énergie, qui se
tiendrait par elle-même, c'est-à-dire avec des contrats.
M. JORON: Quelles étaient les raisons principales de cette
préférence de certains pour la Société
d'énergie?
M. NADEAU: Cela diminuerait la fréquence des emprunts de
l'Hydro-Québec. Si l'Hydro-Québec fait tous les emprunts
elle-même... Et encore là, ce n'est pas une réponse
définitive ou une solution au problème. Je pose cela comme
étant un problème qui peut se poser. Si les apparitions de
l'Hydro-Québec sur les marchés sont trop fréquentes,
ça peut causer un tort à l'Hydro-Québec et vice versa.
J'ai dit aussi l'autre jour qu'il y avait certains avantages à
créer trois entités, ce qui réduirait les
fréquences de ces trois différentes entités. Encore
là, ce sont des choses qui restent à déterminer et je ne
pense pas qu'on puisse les arrêter ce soir d'une façon
définitive.
M. JORON: Une dernière sous-question qui s'adresserait à
l'Hydro-Québec sur la question du financement. On a évoqué
à maintes reprises le cas de Churchill Falls. Evidemment, on a
mentionné que le fait que l'Hydro-Québec était l'acheteur
constituait en soi une garantie pour les prêteurs. Il y avait d'autres
types de garanties, par exemple l'engagement à fournir les
suppléments nécessaires je ne sais pas les termes exacts
mais si on ne parvenait pas...
M. LEMIEUX: Garanties de parachèvement.
M. JORON: Garanties de parachèvement, voilà les termes que
je cherchais. Est-ce que l'Hydro-Québec serait disposée à
donner une garantie identique advenant un contrat, par exemple, avec la
Société de développement de la baie James?
M. LEMIEUX: Ce n'est pas possible. Il n'est pas possible non plus de
prévoir à un seul coût le financement complet comme on l'a
fait pour Churchill Falls. J'aimerais préciser que je suis bien d'accord
avec M. Nadeau pour dire qu'une formule mixte, à la longue, pourrait
servir mais comme M. Nadeau le disait aussi, ce n'est pas du tout une
décision que nous devons prendre aujourd'hui.
Prévoyant des emprunts, pas modestes mais raisonnables, d'ici
cinq ans, je suggère qu'on est loin d'être obligé de
prendre une décision sur cette question. Pour l'année 1972, je
crois que la société est d'accord sur le fait que si elle a
besoin de fonds, en plus des $50 millions que l'Hydro-Québec lui verse
pour l'achat d'actions, ces fonds peuvent venir de l'Hydro-Québec. Pour
l'an prochain, on verra en temps et lieu.
M. ROY (Beauce): M. le Président, question de
règlement.
M. LE PRESIDENT: Un instant! Question de règlement.
M. ROY (Beauce): Nous étions à discuter tout à
l'heure de la question de la gérance. Je ne veux pas être
désagréable pour personne mais nous aurions encore des
observations à faire relativement à la gérance et nous en
sommes rendus au financement alors que nous ne savons même pas si le
projet sera dirigé et administré par la Société
d'énergie de la baie James ou par l'Hydro-Québec. Le
problème peut se poser différemment. Je demande une directive, M.
le Président. Si on aborde la question du financement, il faudrait tout
de même terminer la question de la gérance.
M. LOUBIER: M. le Président, sur le point de règlement. Je
m'apprêtais justement à soulever ce même genre de
réflexion. Depuis quelques heures, j'ai l'impression qu'on se laisse
ballotter sur une mer d'hypothèses, de perspectives, de
possibilités. On assiste même je le dis d'une façon
très amicale à de petites passes d'armes entre les
différents groupes et même, à l'intérieur de chaque
groupe, entre les individus. On le fait de bonne foi, j'en suis assuré,
mais je pense que le député de Beauce a parfaitement raison de
signaler que le noeud gordien que l'on doit trancher est de savoir tout
simplement... Si on l'avait réglé cet après-midi, on
serait peut-être rendu, à la grande joie du premier ministre,
à 12,000 ou 15,000 emplois. Il en avait annoncé 125,000 mais
là, on est resté à 3,000 depuis cet après-midi.
M. le Président, je pense que nous devrions, si possible, revenir
à la question de la gérance afin que l'on sache au moins,
à la fin de cette séance, si la gérance va être
confiée à l'Hydro-Québec ou si elle va être
confiée à l'Hydro-Québec par l'écran ou le biais de
la Société d'énergie, ce qui revient au même. Quant
à moi, c'est un paquet de chinoiseries.
M. le Président, je suggère très respectueusement
à tous les membres de la commission et aux respectables
compétences qui sont devant nous d'essayer de revenir à ce point
capital de déterminer au moins ce soir qui aura la gérance. Cela
fait deux ou trois semaines qu'on discute de cette fameuse gérance. Le
président de la Société de développement est
parfois très nuancé et dit que, sur le plan théorique, on
peut avoir raison de prétendre que c'est l'Hydro-Québec en
définitive qui aura la gérance puisque à la
Société d'énergie l'Hydro-Québec est
représentée majoritairement. D'autre part, en pratique, c'est
différent.
Ce soir, une fois pour toutes je pense que les journalistes et
tout le monde seraient heureux d'avoir quelque chose de précis il
faudrait savoir si oui ou non ce sera l'Hydro-Québec qui aura la
responsabilité de la gérance, quitte ensuite à y ajouter
que l'Hydro-Québec peut, comme l'a signalé M. Gauvreau, donner
des sous-contrats ou des secteurs de gérance à l'entreprise
privée, etc. Mais le point important, capital et primordial, c'est de
déterminer si ce sera l'Hydro-Québec qui aura la gérance.
Est-ce que ce sera la Société d'énergie? Et, encore
là, on dit que sur le plan théorique et, par prolongement, sur le
plan pratique ce sera encore l'Hydro-Québec. Qu'on le dise donc une fois
pour toutes ce soir. Je pense que le premier ministre pourrait intervenir et se
servir du sceptre de son autorité pour trancher la question une fois
pour toutes et faire en sorte qu'on sache quelque chose de précis. Il y
a ensuite toutes les questions que j'ai posées, que le
député de Gouin a posées, que le député de
Beauce a posées concernant le financement. C'est bien évident, je
n'ai pas été mêlé beaucoup aux finances dans mon
court passage au pouvoir, mais M. Dozois l'était davantage et Dieu sait
s'il avait une bonne paire de ciseaux. Sur la question de financement,
l'Hydro-Québec doit avoir un prospectus à présenter
lorsqu'elle fait des emprunts et on sait toujours que derrière
l'Hydro-Québec ou la Société d'énergie il y aura
toujours le gouvernement. Le ministre de l'Industrie et du Commerce sait fort
bien aussi on en a discuté un peu cet après-midi en
vertu de certains articles de la loi, article 27 ou je ne sais trop lequel,
qu'en définitive c'est toujours le lieutenant-gouverneur en conseil qui
peut intervenir.
Mais, pour la satisfaction du. grand public, qu'on détermine donc
ce soir, si oui ou non, c'est l'Hydro-Québec qui a la gérance et
on arrêtera de pérorer autour de tout cela.
M. JORON: Sur le point d'ordre, M. le Président, je suis d'accord
avec le député de Bellechasse. Je veux rappeler que
c'était justement dans ce sens qu'au début de la séance de
ce soir je souhaitais moi-même qu'avant la fin de cette séance le
gouvernement intervienne pour lever l'équivoque, car il y en a une
équivoque. C'est que, d'une part théorique- ment, on
prétend que le contrôle de l'Hydro-Québec de la
Société d'énergie est suffisant. D'autre part, les
témoignages des gens de l'Hydro-Québec nous disent qu'en pratique
cela ne se traduit pas par un contrôle suffisant pour assurer la
gérance. Nous avons prétendu le député de
Bellechasse vient de le redire et je le dis également que
finalement il appartient au gouvernement de trancher ce qu'il a appelé
le noeud gordien. C'est ce que nous attendons, à ce moment-ci, du
premier ministre.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres commentaires sur le point
d'ordre?
M. LOUBIER: Oui, le premier ministre.
M. SAINT-GERMAIN: Le chef de l'Opposition appelle toutes ces choses des
chinoiseries. J'avoue que pour un profane comme moi...
M. LOUBIER: Bien disons que c'est au sens figuré.
M. SAINT-GERMAIN: Oui. Mais pour un profane comme moi, c'est un peu de
la chinoiserie aussi. Alors, j'aimerais poser quelques questions bien
simples.
M. LOUBIER: Mais au moins, par votre profession vous pouvez voir plus
clair que nous autres!
M. SAINT-GERMAIN: J'aimerais, si vous le voulez bien, par quelques
questions bien simples essayer de situer ces questions de relations. Je prends,
par exemple, M. Boyd et je lui demande: Est-ce que vous faites partie de la
direction de la Société d'énergie?
M. BOYD: Non.
M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que vous en avez déjà fait
partie?
M. BOYD: Non.
M. SAINT-GERMAIN: Alors, si c'est la Société
d'énergie qui est le maître d'oeuvre, quel va être,
premièrement, votre rôle? Deuxièmement, si c'est
l'Hydro-Québec qui est le maître d'oeuvre, quel va être
votre rôle?
M. LOUBIER: Vous pouvez revenir la semaine prochaine pour
répondre, non?
M. LE PRESIDENT: Je vais vous demander, messieurs, s'il ne serait pas
mieux peut-être de continuer dans la finance?
M. LOUBIER: Je pense que cela ferait l'affaire de M. Boyd.
M. BOYD: Non, je ne vois pas le pourquoi des questions personnelles,
mais je peux quand
même répondre. Je ne suis pas au bureau de direction de la
Société d'énergie, c'est connu, on a nommé ceux qui
y étaient. Ce sont MM. Giroux, Dozois et DeGuise qui représentent
l'Hydro-Québec. Je suis commissaire à l'Hydro-Québec. Je
suis employé à plein temps. J'y suis depuis 28 ans. Je ne sais
pas si je puis ajouter, ce sont des notes personnelles...
M. LE PRESIDENT: Non, un instant. Je ne permettrai pas la question pour
la simple question qu'il s'agit ici d'entrer dans un problème de
personnalité et d'individu.
M. SAINT-GERMAIN: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Je ne crois pas que cette question...
M. SAINT-GERMAIN: Je veux bien m'expliquer, M. le Président.
J'aurais pu prendre un autre nom, mais je veux bien situer quelle sera la
responsabilité d'un commissaire de l'Hydro-Québec, si c'est la
Société d'énergie qui est le maître d'oeuvre, et
quelle serait la responsabilité du même commissaire de
l'Hydro-Québec si c'était celle-ci le maître d'oeuvre. Ce
n'est pas une question de personnalité. Je veux faire des comparaisons
entre les deux responsabilités. J'ai nommé M. Boyd à titre
de commissaire, je veux être bien clair là-dessus. C'est à
titre de commissaire. Je veux savoir quelle sera la responsabilité d'un
commissaire de l'Hydro-Québec si c'est la Société
d'énergie qui est le maître d'oeuvre et quelle sera sa
responsabilité vis-à-vis du projet si c'est l'Hydro-Québec
qui le maître d'oeuvre. Ce n'est pas une question personnelle.
M. LE PRESIDENT: Il y a tellement de si dans cette question que
ça devient quasiment et presque hypothétique. Advenant ceci ou
advenant cela.
M. SAINT-GERMAIN: M. le Président, il y a deux hypothèses
possibles.
M. LE PRESIDENT: Non, je regrette. Nous ne devons pas nous
aventurer...
M. SAINT-GERMAIN: Alors, je pose une question
générale.
M. LE PRESIDENT: Allez-y.
M. SAINT-GERMAIN: Quelle sera la responsabilité d'un commissaire
de l'Hydro-Quêbec vis-à-vis de ce projet si l'Hydro-Québec
est le maître d'oeuvre et quelle sera la responsabilité de ce
même commissaire si c'est la Société d'énergie qui
est le maître d'oeuvre?
M. LE PRESIDENT: Il vous faudra trouver quelqu'un pour
répondre.
M. SAINT-GERMAIN: Si M. Boyd veut me répondre, très bien.
Si un autre commissaire veut me répondre, c'est très bien
aussi.
M. BOYD: Je veux répondre à cela du mieux que je peux. Si
c'est l'Hydro-Québec qui est le maître d'oeuvre, les cinq
commissaires vont avoir une responsabilité immédiate de tous les
jours, 24 heures par jour, sept jours par semaine, parce que c'est comme
ça qu'on va faire à l'Hydro-Québec.
Si la responsabilité demeure à la Société
d'énergie, certains commissaires vont participer à
l'administration peut être une fois par semaine, plus ou moins, suivant
les besoins du conseil d'administration. En plus la responsabilité des
commissaires, si c'est à la Société d'énergie qui
est maître d'oeuvre, est de voter comme actionnaires. Alors chacun des
membres de la commission a une action en plus des 700,000 autres que
l'Hydro-Québec détient.
La responsabilité de voter comme actionnaires, nous en avons
parlé précédemment, nous avons dit que c'était un
genre d'opération négative. Le bureau de direction de la
Société d'énergie, par sa charte, doit présenter
à l'assemblée des actionnaires je simplifie, ceux qui
veulent en avoir davantage pourront lire la charte tout ce qui peut
affecter le coût du projet. Le bureau de direction présente des
projets à l'assemblée des actionnaires, c'est une formule qui est
lente et qui est lourde. Elle doit présenter des décisions
à prendre par les actionnaires, tel que prévu par la charte. Les
actionnaires disent oui ou non.
M. LE PRESIDENT: Merci. Le ministre des Richesses naturelles.
M. MASSE (Arthabaska): Deux questions d'information, toujours sur
l'aspect de la gérance. D'abord, on sait que l'année
dernière l'Hydro-Québec préconisait le complexe sud;
maintenant, cette année, on préconise d'aménager en
premier le complexe La Grande. Entretemps, il y a eu des études de
faites et je sais que la Société d'énergie de la baie
James n'a pas, évidemment, d'expérience. On ne peut pas dire
qu'elle a plusieurs années d'activité dans ce domaine. D'autre
part, j'aimerais demander â M. Nadeau si, effectivement, il a eu à
agir au niveau de l'hydro-électricité, à la
Société d'énergie ou à la Société de
développement?
M. NADEAU: En réponse à la question de M. Massé, il
semblait évident que le choix de l'Hydro-Québec était
arrêté ou, du moins, elle recommandait fortement le complexe sud.
Le rôle de la Société a été de recommander et
de faire valoir l'importance de développer d'abord le complexe nord, qui
s'avérait, à notre sens, beaucoup plus économique et
beaucoup plus rentable. Nous avons même poussé les études
sur le complexe nord de façon à optimaliser ce même
complexe, pour en arriver à la conclusion que nous pouvions
développer sur le complexe
nord un total de 12,550 mégawatts, au coût global de $7,100
millions.
Cela a été un peu le rôle que la
Société de développement a joué dans ces choix.
M. MASSE (Arthabaska): Etait-ce la Société
d'énergie ou la Société de développement?
M. NADEAU: La Société d'énergie avec la
Société de développement.
M. MASSE (Arthabaska): D'accord.
M. NADEAU: Evidemment, la Société de développement
a aussi pris d'autres facteurs en considération dans ses
recommandations, tels que les forêts, les mines, l'écologie, les
autochtones, etc.
M. MASSE (Arthabaska): Deuxième question, M. le
Président.
M. BOYD: M. le Président, est-ce que le ministre permettrait que
j'ajoute à la réponse?
M. MASSE (Arthabaska): Allez-y.
M. DEGUISE: Je n'ai pas la date à laquelle la
Société de développement a été
créée mais j'ai des extraits d'un rapport de mars 1971, d'un
ingénieur-conseil sur la Grande. Je ne me souviens pas si la
société a été créée avant ou
après mais, en mars 1971, il y a tout de même un rapport qui a
été fait par un bureau d'ingénieurs-conseils.
Si la société n'existait pas, il faut que ce soit à
la demande de l'Hydro-Québec.
M. LOUBIER: C'est après le 29 avril 1971, après le
Cotisée.
M. DEGUISE: Le 16 juillet.
M. LOUBIER: Il y a eu une grande fête, ce soir-là.
M. DEGUISE: Mars 1971. L'Hydro-Québec avait déjà
commencé des études avant que la Société de
développement soit là. Je ne vois pas tellement le but de la
question.
M. NADEAU: Avant la date où la société est
entrée en fonction, on semblait fortement recommander le NBR, alors que
la Société de développement s'est penchée sur le
complexe nord pour le faire valoir. Il est vrai que l'Hydro-Québec avait
étudié, par les ingénieurs-conseils, le complexe nord.
M. MASSE (Arthabaska): D'accord. Une deuxième question. Vous
avez, évidemment, énuméré plusieurs avantages
à ce que la gérance soit confiée à la
Société d'énergie. Vous avez mentionné que cela
assurerait moins de permanence au niveau du personnel de l'Hydro-Qué-
bec avec tout le problème de coordination des activités
hydro-électriques et des autres activités de la
Société de développement. On a mentionné un
rôle de contrôle de la Société d'énergie.
D'autre part, est-ce qu'il y aurait d'autres avantages qui viendraient
s'ajouter si la Société d'énergie avait la
responsabilité d'assumer ou de donner la gérance?
M. NADEAU: Je ne suis pas sûr, M. Massé, de saisir la
question.
M. MASSE (Arthabaska): On a mentionné plusieurs avantages
à ce que la gérance soit donnée à la
Société d'énergie. On a mentionné que, s'il y avait
gérance par l'entreprise privée, cela évitait à
l'Hydro-Québec de nouveaux engagements de personnel. On a dit que, par
la Société d'énergie, cela permettrait un meilleur
contrôle, etc. Mais, dans tout ce qui a été
mentionné, est-ce qu'il y a d'autres avantages que vous auriez à
ajouter?
M. NADEAU: Je crois que la coordination serait plus facile quant au
développement des autres richesses, d'abord. Vous avez mentionné
le fait d'engager une gérance par l'entreprise privée au lieu de
l'Hydro-Québec. C'est qu'on éviterait, évidemment, de
créer des cadres additionnels à l'Hydro-Québec, cadres qui
seraient appelés à disparaître éventuellement si
c'était l'entreprise privée, mais qui deviendraient permanents si
c'était l'Hydro-Québec, je crois. Alors, c'est déjà
un avantage. On n'accroît pas l'ampleur de la boutique, mais on la
maintient pour plus d'efficacité dans les opérations.
M. BOURASSA: M. le Président, si on me permet d'intervenir...
M. NADEAU: Il y a aussi d'autres avantages. Je crois qu'on l'a
mentionné plus tôt à cette commission. C'est que
l'Hydro-Québec, éventuellement, devra se diriger vers le
nucléaire. C'est inévitable. L'hydro-électricité
n'est pas une source intarissable. L'Hydro-Québec pourrait concentrer
ses efforts sur l'entraînement de son personnel technique vers le
nucléaire qui deviendra un fait auquel on devra faire face d'ici
quelques années.
M. BOURASSA: Pour ce qui a trait à la position du gouvernement,
je pense que j'ai eu l'occasion, au début de la semaine, de l'exprimer.
On a signalé tantôt on l'a fait de bonne foi qu'il y
avait beaucoup de discussions inutiles aujourd'hui. Je ne crois pas que ces
discussions soient inutiles, si l'on considère que la commission
parlementaire joue un rôle d'information.
D'ailleurs, ce n'est pas nous qui l'avons convoquée de
nous-mêmes, même si nous étions entièrement d'accord
pour la convoquer. C'est à la suite de représentations qui ont
été faites, et de la part du chef de l'Opposition officielle
et
des deux autres partis. Alors, je ne puis pas accepter qu'on accuse la
commission d'avoir fait un travail inutile aujourd'hui.
La position du gouvernement, c'est l'application de la loi 50. Dans la
loi 50, on a une filiale où l'Hydro-Québec a la majorité.
On a fait état, aujourd'hui, que la filiale ne s'était pas
réunie encore qu'elle n'avait pas encore pris de décision et
qu'il n'y avait pas eu de réunion formelle où la filiale aurait
donné le contrat de gérance à l'Hydro-Québec. Je
pense que c'est à cette réunion de la filiale, que le contrat de
gérance sera donné, si une majorité d'administrateurs est
d'accord pour donner ce contrat.
Le gouvernement a dit que lui, il a, en juillet 1971, proposé un
projet de loi et apporté des amendements qui impliquaient, à ce
moment-là, qu'il ne voyait aucune espèce d'objection à
accorder la gérance à l'Hydro-Québec. Mais à
l'intérieur de ce cadre, c'est la filiale, où
l'Hydro-Québec a la majorité qui, disons, fera la
recommandation.
Il n'y a pas de doute que d'ici à ce que la filiale prenne sa
décision, il y aura des communications de part et d'autre avec les
intéressés. On a entendu plusieurs expressions d'opinions. Un
commissaire a demandé un peu de délai. On a parlé du
rôle des entreprises privées. Comme chef du gouvernement, comme
individu et comme libéral également, puisque c'est nous qui avons
étatisé les compagnies d'électricité, je pense
qu'à compétence égale, nous avons un préjugé
favorable pour l'Hydro-Québec. Dans le cas qui nous occupe ici, on doit
également constater que les entreprises privées
québécoises, d'après ce qu'a dit M. Boyd, auront toutes
l'occasion de se faire valoir, étant donné la très grande
importance des contrats.
Par ailleurs, c'est également la responsabilité du
gouvernement, avec un projet d'une telle ampleur, de prendre toutes les mesures
nécessaires ou de faire prendre toutes les mesures nécessaires
pour le contrôle des coûts. On a eu des exemples depuis dix ans. On
en a dans d'autres secteurs. Il est donc important que le gouvernement, lorsque
plusieurs milliards sont en jeu, voie à ce que les coûts soient au
minimum.
Il y a des formules qui ont été suggérées,
pour le contrôle des coûts. Evidemment, je ne crois pas qu'on doive
demander à l'Hydro-Québec ou à la Société de
développement de la baie James ou au gouvernement de trancher
aujourd'hui si on doit recourir à une consultation avec une firme
américaine. J'ai dû descendre à la commission des affaires
culturelles. Je ne sais pas si les députés se sont
exprimés sur cette question. Encore là, nous croyons que la
priorité doit être donnée aux entreprises
québécoises, mais il est normal que nous examinions les arguments
qui peuvent être avancés par l'Hydro-Québec ou par la
Société de développement de la baie James. Si elles
croient qu'il est absolument nécessaire de recourir à une autre
firme, je pense qu'il est normal que nous examinions ces arguments, même
si le principe de notre politique est d'accorder la priorité aux
entreprises québécoises.
Je puis maintenant répondre à toutes les questions.
M. LOUBIER: M. le Président, je voudrais tout simplement dire au
premier ministre que c'est littéralement un capitaine merveilleux d'une
arche de Noé moderne. Lorsqu'on a dit, tout à l'heure, que l'on
tournait en rond, c'est que le président de la commission l'a
souligné, le député de Gouin l'a souligné, le
député de Beauce l'a souligné depuis des heures, on
nage dans toutes les hypothèses possibles et impossibles, mais on n'a
pas déterminé c'est ce que j'attendais du premier
ministre, lorsqu'il a demandé la parole, et il semble y avoir non
seulement divergence mais une certaine tour d'ivoire qui s'établit entre
la Société de développement de la baie James, d'une part,
et les commissaires de l'Hydro-Québec on ne semble pas vouloir
déterminer il me semble que c'est tellement facile qui
aura la gérance.
M. BOURASSA: Si je peux me permettre, M. le Président...
M. LOUBIER: Si le premier ministre me permet de terminer. Je pense que
le premier ministre veut jouer un petit peu la naiveté avec nous parce
qu'il sait fort bien que, comme chef du gouvernement on l'a
signalé tout à l'heure il y a des dispositions dans la
loi. Il a son poste de responsabilité et d'autorité. Je pense que
le premier ministre pourrait l'exercer facilement et nous aider à
trancher cette question, au lieu de s'en remettre à une rencontre
ultérieure. Ce sont tout de même les créatures du premier
ministre! Je me souviens qu'à l'époque, le premier ministre nous
avait vous n'étiez pas là fait un exposé
magistral sur toutes les merveilles que devait produire la planification
horizontale. Il appelait cela, à l'époque, des structures
horizontales.
Or, M. le Président, on est complètement perdu dans tous
les horizons. Avec les structures qui ont été mises au monde par
le premier ministre, étant donné que ce sont ses
bébés à lui, il doit les connaître un petit peu
mieux que nous. Il pourrait éviter tout ce tâtonnement que l'on
connaît depuis quelques semaines. Je ne dis pas dans un sens
péjoratif que nous perdons inutilement de notre temps.
Je ne dis pas non plus que les commissaires et le président de la
Société de développement et tous ceux qui ont pris la
parole ont versé dans le verbalisme ou ont tenu des propos qui ne se
tiennent pas. Pas du tout. Nous avons demandé à maintes reprises
les trois partis d'Opposition la convocation de cette commission
parlementaire, mais nous voulons tout de même que cette commission
parlementaire puisse sortir quelque chose de concret. Evidemment, ça
nous a donné des jalons, des préci-
sions, des perspectives, ça nous a permis de comprendre davantage
l'ampleur, la complexité du problème de l'aménagement,
mais on voudrait bien surtout qu'on est au terme de ces rencontres
finir avec quelque chose de concret. Et si on pouvait au moins
établir la responsabilité de la gérance, il me semble
qu'on aurait fait un grand bout de chemin et qu'on pourrait discuter de
façon beaucoup plus positive.
M. BOURASSA: Je ferai remarquer bien amicalement au chef de l'Opposition
qu'une commission parlementaire n'est pas un organisme de décision. Et
deuxièmement, je lui ferai remarquer qu'il n'y a personne au-dessus de
la loi y compris le premier ministre et la loi 50 dit clairement
que c'est la filiale qui doit prendre la décision. J'ai dit tantôt
qu'il y aurait sûrement des discussions.
Ce que me demande le chef de l'Opposition, c'est de dire à la
filiale qui va avoir une réunion cette semaine ou la semaine prochaine:
Vous allez décider telle chose.
M. LOUBIER: Le premie» ministre comprend fort bien s'il a
suivi la discussion, et je sais qu'il est intéressé aux propos
qui ont été tenus qu'on se ramasse avec une
Société d'énergie et l'on dit que cette
Société d'énergie sera majoritaire, tant par ses membres
que par la participation financière de l'Hydro-Québec, et que
c'est cette société-là qui déterminera le mandat de
la gérance.
Pourquoi passer par tout ce dédale-là et ne pas
établir immédiatement que l'Hydro-Québec a
l'autorité, aura la gérance, quitte par la suite,
subséquemment, selon ses possibilités et comme on l'a
signalé tout à l'heure selon ses ressources, à
donner des sous-contrats ou encore morceler cette gérance et en donner
une partie soit à l'entreprise privée ou d'autres façons.
C'est ça que nous voudrions savoir surtout.
M. BOURASSA: Comme je viens de le dire au chef de l'Opposition, nous
avons entendu différentes opinions de la part des commissaires de
l'Hydro-Québec et des dirigeants de la Société de
développement de la baie James, et des dirigeants de la filiale. On dit
qu'on ne s'est pas encore réuni. Nous nous réunissons en
commission parlementaire, pas en conseil des ministres. J'ai fait valoir la
position du gouvernement qui a été rendue publique il y a plus
d'un an. Il y a toutes sortes de points de vue qui sont exprimés et on
dit: La filiale va se réunir, elle va prendre une décision. Il va
y avoir des communications entre les deux groupes et entre le gouvernement. Et
je ne vois pas comment, comme chef de gouvernement, j'imposerais
immédiatement ce soir à la filiale d'adopter une telle
décision après ce qu'on a entendu au cours de la
journée.
M. LOUBIER: A moins que le premier ministre préfère
bâtir une tour de Babel, comme on est en train de faire là.
M. JORON : Est-ce que le premier ministre me permettrait une question?
Doit-on conclure, de votre déclaration de ce soir, qu'à toutes
fins pratiques vous donnez le feu vert à l'Hydro-Québec de se
prévaloir de sa majorité à la Société
d'énergie, de façon à se donner ce contrat-là
à elle-même dans le plus bref délai?
M. BOURASSA: J'ai dit en des termes relativement similaires que si
l'Hydro-Québec c'est un vote de confiance que nous lui avons
donné en adoptant la loi 50 décide de s'octroyer le
contrat de gérance, le gouvernement n'y mettra certainement pas
d'objection.
M. ROY (Beauce): Après les remarques que l'honorable premier
ministre vient de faire, je pense que nous allons sortir de la commission ce
soir pas plus avancés que nous ne l'étions il y a deux semaines,
parce qu'on ne prend pas les moyens d'examiner le problème là
où il se situe. Je me réfère tout simplement à
l'organigramme que nous a fait au début de la séance de
l'après-midi M. Nadeau, alors qu'il a indiqué sur le tableau
qu'en haut il y avait le Québec, le gouvernement provincial, d'un
côté il y avait la Société, de développement
de la baie James, de l'autre côté il y avait
l'Hydro-Québec, et les deux formaient ce qu'on appelle la
Société d'énergie de la baie James.
Je pense que tout le problème à l'heure actuelle
découle du fait que nous avons des hommes très compétents,
des hommes d'affaires avertis qui veulent marcher sur une base d'affaires, mais
qui sont dans une position inconfortable de part et d'autre.
Premièrement, on semble vouloir donner les pouvoirs à la
Société de développement de la baie James sans lui en
donner les moyens, et d'un autre côté, on impose des
responsabilités à l'Hydro-Québec parce qu'elle a les
moyens sans lui donner les pouvoirs.
Il me semble que le problème est là et je pense que le
gouvernement, en face de ce fait, devra examiner la situation. La
responsabilité incombe au gouvernement lui-même parce que je
trouve anormal, dans quelque entreprise que ce soit, qu'on accorde des pouvoirs
sans donner des moyens ou encore qu'on accorde des responsabilités
à quelqu'un sans lui donner des pouvoirs.
A l'heure actuelle, ...
M. BOURASSA: M. le Président, si je peux me permettre, pour
éclairer le député qui essaie de m'éclairer
à son tour, je ne comprends pas...
M. LOUBIER : Cela va finir par la Banque du Canada.
M. BOURASSA: C'est-à-dire que je comprends un peu l'impatience du
chef de l'Opposition officielle qui est un homme d'affaires et qui est
pressé d'agir, mais je ne comprends pas qu'on demande au gouvernement,
aujourd'hui, alors qu'il n'y a eu aucune recommandation de faite à la
filiale... Cela signifierait que théoriquement le gouvernement pourrait
dire que c'est l'Hydro-Québec qui va avoir la gérance, et
l'Hydro-Québec la semaine prochaine, théoriquement, pourrait
décider pour toutes sortes de raisons qu'elle ne prendra pas la
gérance et le gouvernement imposerait à l'Hydro-Québec de
prendre la gérance, même si elle décidait de ne pas la
prendre.
Ce que je dis, c'est que si l'Hydro-Québec veut avoir la
gérance elle a tous les moyens de se la donner.
M. LOUBIER: Mais, M. le Président, si vous permettez...
M. LE PRESIDENT: Un instant là. Il faudrait éviter de
tourner en rond. Le député de Beauce.
M. ROY (Beauce): Je disais donc qu'à l'heure actuelle, on accorde
des responsabilités à l'Hydro-Québec du fait de son
pouvoir de financement et on semble vouloir accorder à
l'Hydro-Québec par ricochet, du fait qu'elle contrôle 51 p.c. des
actions, le pouvoir de décider puisqu'elle doit intégrer, selon
la loi, son bilan à son bilan consolidé. C'est ça qu'on a
dit, je pense, ce soir.
A partir de ce fait, on peut se demander, dans quelle position
inconfortable se trouve ceux qui ont à diriger la Société
d'énergie de la baie James. Je pense que tout le problème est
là, M. le Président, je le souligne à l'attention du
premier ministre. D'un côté vous avez un organisme à qui on
donne des pouvoirs, et la loi est là, mais qui n'a pas les moyens, et
d'un autre côté, parce que l'Hydro-Québec a les moyens, on
lui confie des responsabilités, mais sans avoir les pouvoirs de
décision parce que les pouvoirs de décision se trouvent au niveau
de la Société d'énergie de la baie James, du fait que le
premier ministre a dit lui-même qu'il voulait contrôler les
coûts et peut-être autre chose. M. le Président, je pense
tout simplement qu'en face de ces faits le gouvernement n'a pas d'autre choix,
il devra peut-être amender la loi. Je pense que, dans cette situation, le
gouvernement lui-même est mal "enculotté", comme dirait le
député de Chicoutimi.
M. LOUBIER: M. le Président, le premier ministre tout à
l'heure me pointait très gentiment pour essayer de faire appel à
mon sens pratique, mais je dirai au premier ministre qu'il mettait tout au
conditionnel, alors que l'Hydro-Québec, M. Giroux, le président,
et les autres ont établi d'une façon absolue qu'il était
essentiel que la gérance soit confiée à l'Hydro-
Québec. Or, le premier ministre ne peut pas aujourd'hui nous
dire: Bien, si l'Hydro-Québec jugeait à propos... C'est
déjà jugé à propos et c'est déjà
inscrit, M. le Président, inséré dans les mémoires,
dans les représentations de l'Hydro-Québec.
M.BOURASSA: D'accord. Qu'on convoque une réunion de la filiale
puis ça va être réglé.
M. LOUBIER: Or, partant de là, M. le Président, je pense
que si le premier ministre se sent je le comprends un peu dans
l'eau bouillante avec toutes ces structures horizontales,
peut-être...
M. BOURASSA: Pas du tout. Pas du tout.
M. LOUBIER: Je comprends que, s'il avait près de lui un
conseiller tout à fait spécial on aurait peut-être d'autres
explications sur toutes les structures et sur tout ce "mêlâillage"
qu'on est en train de faire. De toute façon, le président me
soulignait, tout à l'heure, qu'il commençait à se faire
tard, qu'il serait bon que l'on prenne un sommeil bien mérité par
tous, que la nuit porte conseil, etc. Mais, au moins, si on pouvait avoir la
consolation, notre petite pitance, de savoir si, oui ou non, ce sera
l'Hydro-Québec ou si on s'en rapporte à une réunion de la
filiale qui, elle, décidera peut-être, selon la conjoncture ou
tout ce que vous voudrez, que ce sera l'Hydro-Québec ou pas. Je pense
que c'est le point crucial, en fait.
M. BOURASSA: M. le Président, le chef de l'Opposition s'obstine
peut-être à ne pas comprendre. Il mentionne le fait que
l'Hydro-Québec a décidé d'obtenir la gérance. A ce
compte-là, l'Hydro-Québec n'a qu'à convoquer la filiale et
on le verra.
M. LOUBIER: Cela fait deux ans que j'essaie de comprendre le premier
ministre et je ne suis pas capable.
M. JORON: Si vous le permettez, j'aurais une question à poser
à M. Nadeau dans cette optique. A titre de président de la
Société d'énergie, il lui appartient de convoquer la
prochaine réunion du conseil d'administration de la
société. Quand prévoit-il qu'elle aura lieu, d'une part?
D'autre part, advenant qu'à cette réunion la majorité, qui
appartient à l'Hydro-Québec, décide de confier la
gérance à l'Hydro-Québec, comment, à partir de
là, entrevoit-il le rôle de la Société
d'énergie et son rôle comme président de cette
société?
M. NADEAU: Pour répondre à votre première question,
il appartient au président du conseil d'administration de convoquer une
assemblée ou, à défaut, aux administrateurs. Je crois
qu'il serait opportun que nous en ayons une aussitôt que possible afin de
discuter de ces sujets.
Quant à la deuxième partie de votre question, advenant le
cas où un blanc-seing serait donné à
l'Hydro-Québec, je ne vois pas quel pourrait être le rôle de
la Société d'énergie et, conséquemment, de son
président.
M. LOUBIER: Quand y aura-t-il convocation?
M. NADEAU: Je crois que nous devrions avoir une réunion la
semaine prochaine.
M. LOUBIER: Une réunion de la Société de
développement de la baie James?
M. NADEAU: De la Société d'énergie.
M. LOUBIER: Ce sera la semaine prochaine qu'une décision sera
prise, fort probablement, quant à la gérance?
M. NADEAU: Je ne crois pas qu'une décision soit
nécessairement prise la semaine prochaine, mais on pourra certainement
en discuter.
M. LOUBIER: Qui fait l'ordre du jour de la réunion?
M. NADEAU: Le secrétaire.
M. LOUBIER: Sous les ordres du président?
M. NADEAU: Du président du conseil et d'autres membres du
bureau.
M. LOUBIER: Le président du conseil a-t-il l'intention de mettre
à l'ordre du jour la question de la gérance, la semaine
prochaine?
M. NADEAU: Je ne suis pas le président du conseil.
UNE VOIX: C'est M. Giroux.
M. NADEAU: M. Giroux est président du conseil; les autres membres
du bureau de direction peuvent aussi mettre des sujets à l'ordre du jour
pour fins de discussion et de décision.
M. JORON: Me permettez-vous une question? Est-ce que quelqu'un remplace
M. Giroux par intérim pendant son absence? Il est à
l'hôpital, si j'ai bien compris.
M. NADEAU: M. Lemieux.
M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Ouest.
M. AUDET: M. le Président... M. NADEAU: A
l'Hydro-Québec.
M. JORON: A l'Hydro-Québec, mais comme président du
conseil de la Société d'énergie? A ce moment-là, il
y a un siège vacant.
M. NADEAU: Selon l'article 31, je crois que je représente le
président du conseil.
M. JORON: En cas d'absence? M. NADEAU: En cas d'absence.
M. JORON: Quel est le quorum de vos assemblées?
M. NADEAU: Trois.
M. LOUBIER: Le quorum est de trois?
M. NADEAU: Sur cinq.
M. LE PRESIDENT: «Pavais déjà donné la parole
au député d'Abitibi-Ouest.
M. LOUBIER: Les autres ont besoin de surveiller leur santé, ceux
de l'Hydro-Québec.
M. AUDET: A la suite des déclarations du député de
Bellechasse et de tous les membres de la commission, je crois que nous sommes
unanimes à désirer que l'Hydro-Québec possède cette
gérance. Je crois que tous les commissaires de l'Hydro-Québec, en
général, ont manifesté le désir d'avoir cette
gérance ici, ce soir. La seule personne qui pourrait s'opposer à
cela semble être le président de la Société de
développement de la baie James.
Est-ce que le président a des arguments solides et sérieux
à l'effet que l'Hydro-Québec ne semblerait pas être un
agent efficace?
M. NADEAU: Vous me posez la question? Je vais vous dire que je
conçois opérer selon la loi 50 qui dit, à l'article 16,
encore une fois et je vais relire le texte "... le
développement des ressources hydro-électriques, la production et
la distribution de l'électricité dans le territoire, ainsi que sa
transmission seront effectués par une compagnie constituée en
vertu de l'article 21 qui suit, dont au moins la majorité des actions,
comportant un droit de vote..." ainsi de suite.
M. AUDET: Maintenant, vu que nous savons...
M. NADEAU: Alors, si je m'en tiens aux termes de la loi...
M. AUDET: L'Hydro-Québec détient majoritairement les
actions de cette société.
M. NADEAU: D'accord.
M. AUDET: Je crois réellement que là encore...
M. LE PRESIDENT: Je rappelle à l'ordre le député
d'Abitibi-Ouest. Au moins à deux occasions nous sommes entrés
dans ce détail et on a donné ces renseignements. Je pense qu'en
l'occurrence, à ce moment-ci, il faudrait que le député
lise le journal des Débats où il trouvera tous les commentaires,
toutes les références et toutes les réponses.
Je ne veux pas continuer à tourner en rond sur le même
sujet.
M. AUDET: Vous auriez pu me laisser faire. Je voulais justement poser
une question directe au président de la Société de
développement.
M. LE PRESIDENT: Voyez-vous, le problème? C'est qu'on recommence
encore le même tour d'horizon. Alors si vous avez d'autres questions
différentes de celles que vous avez posées depuis quelques
minutes, posez-les.
M. LOUBIER: Il faut éviter de poser, je pense, des questions
pertinentes, de la façon dont ça marché...
M. AUDET: Posez-en donc! Peut-être que vous allez avoir de
meilleures faveurs.
M. BOURASSA: M. le Président, je suis bien patient pour
écouter toutes les questions des députés. Evidemment, je
ne suis pas d'accord avec le chef de l'Opposition qui soutient que c'est une
discussion inutile, puisque ça informe les intéressés.
M. LOUBIER: M. le Président, je soulève un point de
règlement. Le premier ministre semble vouloir se faufiler dans les
coulisses, "abrier" tout ça en accusant le chef de l'Opposition de
trouver la commission inutile. Je dis, comme mes collègues, que l'on
n'avance pas malgré la bonne volonté, malgré les propos
tenus et répétés mille et une fois par les experts,
justement parce que la question fondamentale n'a pas été
vidée et il n'y a rien eu de tranché de façon
définitive.
M. BOURASSA: Une commission parlementaire n'est pas un organisme de
décision. Je crois que cela a été demandé, et je
pense que c'est le chef du Parti québécois, lui-même, qui
suggérait qu'on puisse discuter ou entendre les intéressés
avant que la décision soit prise, si ma mémoire est bonne.
M. JORON: M. le Président, j'aurais une question à poser
au premier ministre, si vous le permettez.
Je voudrais lui demander si le gouvernement a l'intention de nommer un
remplaçant intérimaire à M. Giroux au conseil
d'administration de la Société d'énergie.
Je comprends que c'est le gouvernement qui nomme les commissaires sur la
recommandation de l'Hydro-Québec. Etant donné qu'il y a un
siège vacant temporairement, est-ce que le gouvernement entrevoit nommer
un remplaçant à ce siège pour le moment vacant, vu
l'importance des décisions qui devront être prises aux prochaines
réunions de ce conseil d'administration?
M. BOURASSA: Il paraît évident pour le gouvernement et pour
tous, je pense, que si M. Giroux ne pouvait pas assister aux réunions
importantes, son remplaçant devrait exprimer le point de vue de M.
Giroux. J'en discuterai avec lui.
M. JORON: Et prendre sa place au conseil d'administration de la
Société d'énergie.
M. BOURASSA: Il n'est pas question de prendre des décisions d'une
telle importance en l'absence du président de l'Hydro-Québec, ou
de profiter de son absence pour orienter la décision dans un sens
différent. Je pense que cela va de soi.
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une question à
poser à M. Nadeau. Il a annoncé tout à l'heure qu'il y
aurait une réunion la semaine prochaine. J'aimerais que M. Nadeau nous
rassure parce que, franchement, je pense que le problème reste entier,
que le problème reste posé au complet. Vous avez, d'un
côté, la loi de la Société de développement
de la baie James avec sa Société d'énergie et d'un autre
côté, vous avez la réalité dans laquelle se trouve
l'Hydro-Québec. A la réunion de la semaine prochaine, c'est
peut-être une question hypothétique, soyez bien à l'aise
pour me répondre, est-ce que vous croyez qu'il y a possibilité
d'accorder les deux parties, dans les structures actuelles, telles qu'elles
sont?
M. NADEAU: Oui, je crois qu'avec un peu de bonne volonté, on peut
y arriver.
M. ROY (Beauce): Comme cela, on peut partir d'ici, ce soir, sur une note
d'optimisme, selon vous.
M. NADEAU: Je le crois.
M. ROY (Beauce): Est-ce qu'on pourrait demander la même chose
à M. Boyd?
M. BOYD: Moi, je levais la main, non pas pour répondre à
une question, mais parce qu'on a mentionné à quelques reprises,
dernièrement, l'absence de M. Giroux. Je lui ai parlé, ce matin
et il m'a demandé de communiquer un message à la commission. Il a
appris par la radio qu'il y avait des rumeurs de sa démission, alors il
m'a demandé d'insister pour que tout le monde le sache. Il est en
très bonne santé, bien qu'il soit à l'hôpital. Il
n'était pas question de rumeurs. Il a subi une intervention chirurgicale
qui a très bien réussi et il doit en subir une autre d'ici
quelques jours. Il m'a dit d'ajouter qu'il ne lâchait pas.
M. ROY (Beauce): Pourrait-on répondre à ma question?
M. GAUVREAU: Je réponds en mon nom personnel. Je dois dire que
j'ai l'intention de proposer une solution à mes collègues de la
commission, mais je ne suis pas à l'autre conseil.
C'est-à-dire...
M. ROY (Beauce): Est-ce qu'il serait indiscret d'avoir une idée
de la solution que vous avez l'intention de proposer?
M. GAUVREAU: Très indiscret.
M. ROY (Beauce): Ce serait très indiscret. Mais, tout de
même, nous pouvons être optimistes, selon vous?
M. GAUVREAU: Je ne sais pas.
M.BOURASSA: M. le Président, je pense que les derniers propos
viennent confirmer l'attitude du gouvernement, puisque l'Hydro-Québec
n'a pas encore fait de recommandation à la filiale. Je ne demande pas au
chef de l'Opposition officielle de me faire des excuses ou de retirer ses
paroles, mais je pense qu'il paraît assez clair que le gouvernement doit
respecter la loi.
M. le Président, je voudrais remercier les représentants
de l'Hydro-Québec et de la Société de la baie James, de
même que tous leurs collaborateurs, d'être venus dialoguer et
informer les membres de la commission parlementaire sur ce sujet
extrêmement important pour l'avenir économique des
Québécois. Je proposerais l'ajournement sine die de la
commission.
M. LOUBIER: Je résumerais la pensée du premier ministre en
vous disant cent mille fois merci pour tous les détails que vous nous
avez donnés.
M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.
M. ROY (Beauce): Je me joins aux propos du premier ministre et à
ceux du chef de l'Opposition officielle pour remercier, d'une façon
toute particulière, tous les représentants de la
Société de développement de la baie James et de
l'Hydro-Québec, qui ont bien voulu, au cours de ces longues heures,
avoir la patience de nous écouter et de répondre aux questions
que nous leur avons posées.
M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.
M. JORON: Je remercie tous ceux qui ont témoigné et les
autres membres de la commission pour leur collaboration. Pour nous, ces travaux
ont été loin d'être inutiles. Je crois que nous avons fait
la lumière sur un certain nombre de questions. Mais d'autres, pour
l'instant, restent encore dans le doute. Nous souhaitons qu'elles soient
réglées le plus rapidement possible. Je mentionne aussi, en
terminant, que pour notre part nous attendons, dans le plus bref délai
possible, les programmes que l'Hydro-Québec, la semaine dernière,
nous avait dit qu'elle ferait parvenir aux membres de la commission. Si j'ai
bien compris, c'est quelque chose qui devrait venir dans les prochains jours ou
les prochaines semaines. Je vous en remercie à l'avance.
M. LE PRESIDENT: Mes commentaires seront tout simples. Je veux remercier
les membres de la commission de leur coopération. Si vous avez pu
m'endurer pendant trois ou quatre séances, j'espère que vous
aurez encore l'avantage de m'endurer à l'avenir. Bonsoir et merci.
M. ROY (Beauce): M. le Président, avant d'ajourner, est-ce que
nous pouvons savoir vers quelle date il y aura une prochaine séance pour
ce qui a trait au financement?
M. LE PRESIDENT: Sine die.
M. ROY (Beauce): Est-ce que cela veut dire dans une semaine, quinze
jours?
M. BOURASSA: La question du financement n'est pas une question urgente
comme les autres.
M. ROY (Beauce): Une question importante.
M. BOURASSA: Bien, pensez à la Banque du Canada.
M. ROY (Beauce): Non, mais nous voulons que vous y pensiez. J'aimerais
savoir si la commission parlementaire va être reconvoquée pour
discuter de la question du financement.
M. BOURASSA: J'y penserai et je vous le dirai.
M. ROY (Beauce): Comme cela, il n'y a rien de définitif à
l'effet que nous pourrons discuter du financement de ce projet.
M. BOURASSA: Rien de définitif.
M. ROY (Beauce): M. le premier ministre, je tiens tout simplement
à dire ceci, en terminant.
M. BOURASSA: Vous poserez la question en Chambre.
M. ROY (Beauce): On nous a défendu de parler du financement lors
des autres séances sous prétexte que nous pourrions en parler
plus tard. Lorsque nous arrivons au moment de discuter de cet important sujet,
le plus impor-
tant à mon sens, on refuse aux membres de la commission de
l'aborder.
M. BOURASSA : Il n'y a pas de refus.
M. ROY (Beauce): M. le Président, je proteste tout
simplement.
M. BOURASSA: Il n'y a pas de refus d'en discuter. On dit qu'on verra
s'il y a lieu d'en discuter...
M. ROY (Beauce): Quand? L'an prochain?
M. BOURASSA: ...d'une façon utile, il y en a qui trouvent que les
commissions parlementaires sont une perte de temps.
M. ROY (Beauce): Ce n'est pas une perte de temps. Nous n'avons pas dit
que c'était une perte de temps. Je ne m'associe pas à ces propos.
Mais, M. le Président, je tiens et nous demandons que, à la
commission parlementaire, nous puissions discuter de la question du financement
du projet de la baie James.
M. BOURASSA: Alors, vous ferez vos représentations en temps
opportun et nous verrons ce que nous ferons.
M. ROY (Beauce): Je les ai faites ce soir. M. LE PRESIDENT: La
séance est levée.
(Fin de la séance à 22 h 27 )