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Commission spéciale sur le problème de
la liberté de la presse
Séance du mardi 1er juin 1971
(Quatorze heures vingt-neuf minutes)
M. VEILLEUX (Président de la commission spéciale sur le
problème de la liberté de la presse): A l'ordre, messieurs!
Avons-nous le consentement unanime?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avec le consentement unanime. Maintenant, M.
le Président, je voudrais vous faire observer, puisqu'on commence la
séance, qu'il est absolument inacceptable qu'une réunion
convoquée à deux heures commence à deux heures trente et
qu'il ne se trouve pas dans le parlement assez de députés pour
que nous constituions une assemblée délibérante normale
qui exige sept membres seulement sur une question aussi importante que
celle-là.
M. HARDY: Maintenant, M. le Président il faudrait
peut-être le souligner je suis sur le fond du principe d'accord
avec le député de Chicoutimi. Il reste un fait c'est que l'heure
de la séance n'est pas très orthodoxe, c'est-à-dire pas
tellement conforme à nos habitudes parlementaires. Je n'ai pas
souvenance qu'il y ait eu dans le passé des réunions de
commissions parlementaires à deux heures. Alors, peut-être que
sans vouloir excuser nos collègues absents c'est un des
motifs qui fait que le quorum ne se trouvait pas atteint à deux
heures.
M. CLOUTIER (Ahuntsic): Quoiqu'il en soit, M. le Président, si
nous pouvions procéder...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il va falloir les excuser sans les
absoudre.
M. LE PRESIDENT: Le comité directeur a voulu innover en ce sens
en convoquant la commission parlementaire à deux heures
exactement...
M. HARDY: Si j'étais...
M. LE PRESIDENT: ...comme la commission parlementaire elle-même a
innové en ayant un budget à la commission parlementaire.
M. HARDY: Puis-je poser une question, M. le Président?
Synthèse des mémoires
M. LE PRESIDENT: Alors, si vous voulez, je vais faire rapport du travail
accompli par le comité directeur lors de précédentes
réunions. M. Beausoleil, directeur du service de recherche de la
commission sur la liberté de la presse, a déposé un
document sur les premières recherches qu'il recommande à la
commission d'entreprendre. Dans ce document, M. Beausoleil a d'abord
mentionné le problème de la concentration dans les entreprises de
presse et, comme il y a de nombreux mémoires déjà
déposés à la précédente commission, la
commission Cloutier, M. Beausoleil propose, à partir des documents
existants, une synthèse de ces mémoires, synthèse qui
pourrait comporter un résumé de chacun des mémoires
organisé en un inventaire cohérent de toutes les propositions
émises. On pourrait y greffer une analyse comparée de la
situation dans quelques pays qui présentent des points communs avec le
Québec.
Un autre problème est actuellement traité en marge des
travaux de cette commission. Il s'agit de la profession de journaliste. On sait
que le ministère de l'Education a mis en route une recherche qui
traitera à la fois des besoins du Québec en informateur et des
programmes de formation professionnelle. Alors, plutôt que de doubler des
études, on pourrait tenter de suivre attentivement ces travaux,
particulièrement sur le premier point du chapitre 2 du programme du
comité directeur.
Statut du journaliste et secret professionnel
M. LE PRESIDENT: Dans le programme, vous avez le statut professionnel
des journalistes et le secret professionnel. Le secrétariat à la
recherche pourrait facilement se charger de faire un inventaire des
dispositions qui existent à l'heure actuelle dans d'autres
sociétés et, si la commission désire pousser plus loin ses
études, il est aussi possible de savoir si ces dispositions sont
opérationnelles et d'obtenir, au moins sommairement, les renseignements
sur le degré de satisfaction des parties en présence.
Rapport Davey
M. LE PRESIDENT: Il sera peut-être utile aussi aux membres de la
commission de prendre connaissance des travaux sur lesquels s'appuient les
rédacteurs du rapport Davey pour en tirer les éléments qui
intéressent les communications de masse au Québec.
Puis, vous avez le droit du citoyen à l'information qui implique,
entre autres choses, son accès à l'information. Or, de rapides
recherches démontrent, jusqu'à preuve du contraire, que l'on ne
possède pas une image suffisamment claire de la diffusion de
l'information au Québec. Ceci est particulièrement vrai de la
diffusion régionale.
Il est peu probable qu'un simple relevé des zones de distribution
fournisse toutes les indications pertinentes. Il devra peut-être
être complété par un sondage sur les habitudes de lecture
et d'écoute des consommateurs d'information et par une analyse
même sommaire des besoins exprimés en matière
d'information.
D'autre part, une meilleure connaissance du monde de l'information
pourra être obtenue par une prise de contact sur le lieu de travail avec
ceux qui sont chargés d'informer. Puisque la suggestion a
été faite, il est parfaitement possible de confier au
secrétariat le soin de préparer de telles rencontres avec les
différents milieux de la presse écrite et électronique du
Québec.
Enquête sur la diffusion
M. LE PRESIDENT: A la suite de ce document de travail ou de ces
idées de recherche émises par M. Beausoleil, un membre de la
commission, du comité directeur, souligne que le service de recherche
devrait dans un premier temps réaliser la synthèse des travaux
déjà faits et mettre en branle une enquête complète
sur la diffusion. Par exemple, l'examen des territoires desservis par les
divers media d'information, un examen des cotes d'écoute, les
consortiums. Et ce, afin d'obtenir comment la population de chaque
région est desservie, avec quelle force l'information se répand
dans chacune de ces régions, l'influence de certains consortiums sur la
population.
Un autre membre de la commission ajoute que l'examen devra
également porter sur le contenu de l'information véhiculée
par ces media d'information, compte tenu des besoins des gens et de ce qui les
satisfait.
Puis, un membre souligne que cette enquête, si vaste soit-elle,
lui paraît nécessaire vu l'inégalité flagrante entre
les diverses régions du Québec en matière
d'information.
Un autre député suggère que cette enquête se
fasse à partir d'un échantillonnage. Le comité directeur
s'entend donc pour suggérer qu'une première étape de
recherche porte sur les données suivantes: inventaire des mass media
actuellement existants au Québec, les propriétaires ou les
consortiums qui dirigent ces entreprises, l'accessibilité, le tirage,
etc.
L'examen clinique à réaliser devra porter, à la
fois, sur le contenu et sur le contenant, d'autant plus qu'il est quasi
impossible de séparer le contenu du contenant. Dans un même temps,
le service de recherche devrait s'attacher à résumer les
documents, déjà déposés devant la commission
présidée par M. Jean-Paul Cloutier, du précédent
gouvernement, qui traitent du problème de la concentration des
entreprises de presse au Québec.
Prochaines réunions
M. LE PRESIDENT: Le comité directeur suggère à la
commission de s'ajourner sine die, bien que ledit comité directeur se
réunira régulièrement, même au cours des vacances
parlementaires, afin de faire certaines recherches élémentaires
qui permettront aux membres de la commission de mieux comprendre le
problème de la presse et de mieux interroger les témoins qui
pourront être appelés à se présenter devant la
commission parlementaire. Le comité directeur déciderait alors
lui-même, face à ces travaux de recherche préalablement
faits, de la date de la convocation de la prochaine séance de la
commission parlementaire.
Est-ce qu'il y a des membres de la commission qui auraient des choses
à ajouter au sujet de ce rapport de la réunion du comité
directeur.
M. HARDY: J'aurais une question. Dans l'esprit des membres du
comité directeur, même si nous ajournons sine die, à quelle
date prévoit-on possible une réunion valable? En d'autres termes,
à quel moment les travaux que vous avez mentionnés tantôt
seront-ils suffisamment avancés pour permettre à la commission de
se réunir?
M. LAURIN: Il y a le fait que notre recher-chiste est parti et ne
reviendra que vers le 20 juin. Il ne pourra pas commencer ces études
avant la fin du mois. Après cela, il y aura...
M. HARDY: A toutes fins pratiques, cela voudra dire que la commission ne
se réunira pas avant l'automne.
M. CLOUTIER (Ahuntsic): C'est cela. Septembre...
M. LAURIN : A moins que le recherchiste ait des choses
intéressantes à nous communiquer.
M. HARDY: Est-ce qu'il y a possibilité qu'à mesure que le
recherchiste pourra compléter certains travaux s'il prépare des
rapports préliminaires, ces rapports soient adressés aux membres
de la commission afin que ceux-ci puissent suivre au moins de loin la
progression des travaux.
M. LE PRESIDENT: Oui, cela n'empêchera pas en même temps les
différents organismes ou les individus intéressés à
présenter des mémoires de présenter ces
mémoires-là. Cela permettra au service de recherche en même
temps de faire la synthèse des mémoires et, quand nous
convoquerons ceux qui auront écrit et présenté ces
mémoires, nous serons disposés, par une série de questions
préalablement construites, à questionner les témoins qui
viendront à la commission parlementaire.
M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que certains de ces documents ou
l'information qui va être compilée par le service de recherche
pourra être mise à la disposition aussi des organismes qui
voudront se faire entendre devant la commission?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous allons...
M. CLOUTIER (Montmagny): Je fais référence
particulièrement au document de synthè-
se qui va être préparé sur les travaux de l'ancienne
commission. Ce sont des documents qui sont maintenant publics, qui ont
déjà été donnés devant la commission. Est-ce
qu'un tel rapport pourra notamment être à la disposition des
organismes qui...
M. LE PRESIDENT: Je ne crois pas que le comité directeur soit
empêché d'une manière ou d'une autre parce que
pendant cette période-là le comité directeur se
réunira de décider si un tel document doit être
donné aux différents media d'information ou être
propagé, compte tenu de certaines choses qui pourront être
émises dans ces mémoires, dans ces documents. On a eu, à
un certain moment, des gens qui sont venus nous dire qu'ils pourraient
peut-être dévoiler publiquement certaines choses, mais que leur
sécurité de travail, par exemple, pourrait être mise en
danger. A ce moment-là, le comité directeur pourra juger de
l'à-propos et si, en émettant publiquement un tel document, cela
peut nuire à quelqu'un, le comité directeur peut décider
lui-même de dire: Cela demeurera au niveau du secrétariat.
M. HARDY: Ce sur quoi le député de Montmagny a
insisté, je pense personnellement je trouve que sa suggestion
était très valable c'est qu'il faisait mention plus
spécialement de l'inventaire relatif aux travaux déjà
faits. Comme il l'a souligné, c'est public, il n'y a pas de
problème et je pense que, si le recherchiste doit préparer un tel
inventaire, ce ne serait pas tellement plus dispendieux d'en faire
préparer un nombre plus considérable de copies que pour seulement
les membres de la commission et cela pourra sûrement être
très utile à ceux qui veulent préparer des
mémoires.
Je pense que c'est ce que le député de Montmagny
soulignait...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Voici, M. le Président...
M. HARDY: Si vous voulez me laisser une minute.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous en prie.
M. HARDY: Si nous ne voulons pas nécessairement favoriser le
travail des gens qui ont des mémoires à nous présenter
mais leur permettre de présenter des mémoires aussi substantiels
que possible, tenant compte de la réalité ou des travaux
déjà effectués, je me demande s'il ne serait pas bon que
tous ceux qui en feront la demande puissent obtenir ce document que le
recherchiste sera appelé à préparer constituant
l'inventaire des travaux déjà faits.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): En ce qui concerne l'inventaire des travaux
déjà faits, il n'y a évidemment pas d'objection de la part
du comité directeur à ce que ces documents soient
diffusés. En ce qui concerne les autres travaux de recherche
qu'effectuera le recherchiste, il s'agit de travaux que nous commanditons de
quelque façon et qui devront être soumis à l'approbation du
comité directeur et ensuite à l'approbation de la commission
parlementaire avant que d'être rendus publics. Nous ne voulons pas, d'une
part, priver les journalistes de l'information dont ils pourraient avoir
besoin, mais nous estimons, d'autre part, qu'ils ont droit à toute
liberté d'action et que nous n'avons pas par des documents que nous leur
fournirions à leur indiquer dans quel sens ils doivent orienter leurs
propres recherches lorsqu'ils comparaîtront devant nous.
M. HARDY: Vous ne voulez pas les diriger? M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non.
M. HARDY: Avec raison d'ailleurs.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ils ont exprimé le désir de ne
pas l'être lorsque nous leur avons offert d'être membres du
comité directeur. Ils ont dit bien clairement qu'ils entendaient
d'être libres et nous respectons cette liberté d'action qu'ils se
sont réservée.
M. HARDY: C'est pour ça que je faisais une nette distinction
entre l'inventaire des travaux déjà faits et les autres travaux
de recherches que vous mentionnez.
M. CLOUTIER (Montmagny): Je faisais particulièrement allusion aux
mémoires qui ont été présentés ici devant
l'ancienne commission et aussi à certains travaux techniques qui sont
dans une très grande proportion... Je pense que la plupart de ces
mémoires-là sont aussi inscrits dans le journal des Débats
mais là il s'agit d'un travail de synthèse. Il y a aussi au
niveau fédéral les travaux présentés devant la
commission Davey. Il y avait eu également échange de
renseignements entre les deux commissions.
Dans ce que vous avez dit, M. le Président, je retiens autre
chose aussi. Vous avez parlé d'un travail d'enquête sur la
façon dont les régions sont couvertes actuellement par les moyens
d'information. Quand le comité directeur aura pris connaissance d'une
telle étude si les renseignements contenus dans cette
étude peuvent être rendus publics je pense que ce serait
extrêmement intéressant pour ceux qui vont venir comparaître
devant la commission.
Il y aura là une source d'information importante pour eux, pour
orienter leurs mémoires, et les représentations qu'ils vont faire
devant la commission. Alors, ce genre d'information est peut-être moins
confidentiel que d'autres travaux de recherches qui pourront être faits
sur des aspects particuliers. Je suis parfaitement d'accord que le
comité directeur devra étudier chacun des documents de recherches
qui lui
seront soumis. A ce moment-là, tout ce qui pourra être
rendu public et de nature à aider à la qualité ou à
la préparation des mémoires qui nous seront soumis sera à
l'avantage de la commission.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions? Il s'agirait
d'avoir une proposition à l'effet qu'on laisse au comité
directeur le choix de fixer la prochaine rencontre publique de la commission
parlementaire de la liberté de la presse. Le service de recherches
pendant ce temps-là, travaillera en étroite collaboration avec le
comité directeur formé d'un représentant de chacun des
partis.
M. LAURIN: Et on laisserait les mémoires s'accumuler durant la
période d'été.
M. LE PRESIDENT: Pendant ce laps de temps, on demande je
renouvelle le message maintes fois formulé que les parties
intéressées fassent parvenir au secrétariat de la
commission parlementaire le texte de leur mémoire afin que, lorsque
viendra le moment de se présenter devant la commission parlementaire,
ces gens-là n'aient pas l'obligation de nous lire de longs
mémoires. Les membres de la com- mission seront préparés
à poser des questions relativement aux mémoires qu'ils auront
déposés devant la commission.
M. LAURIN: Il y avait dans mon propos une invitation discrète que
vous avez bien saisie.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tout le monde sait très bien...
M. LE PRESIDENT: Elle devient incitative.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... les journalistes le savent
eux-mêmes, que toute commission a le droit de faire témoigner qui
elle veut.
M. LE PRESIDENT: Qui proposerait que le comité directeur...
M. HARDY: Comme je suis habitué aux ajournements sine die, je
propose que nous ajournions sine die.
M. LE PRESIDENT: Je remercie les membres présents à la
commission parlementaire de leur effort.
(Fin de la séance: 14 h 47)