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Version préliminaire

43rd Legislature, 1st Session
(November 29, 2022 au September 10, 2025)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Wednesday, June 4, 2025 - Vol. 47 N° 98

Special consultations and public hearings on Bill 103, an Act mainly to regulate supervised consumption sites in order to promote their harmonious cohabitation with the community


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Journal des débats

11 h 30 (version non révisée)

(Onze heures quarante et une minutes)

Le Président (M. Provençal) :Alors, bon matin à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte.

La Commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 103, Loi visant principalement à réglementer les sites de consommation supervisée afin de favoriser une cohabitation harmonieuse avec la communauté.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Abou-Khalil (Fabre) est remplacée par Mme Boivin Roy (Anjou—Louis-Riel); Mme Caron (La Pinière) par Mme Prass (D'Arcy-McGee); et M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine) par Mme Gentilcore (Terrebonne).

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Ce matin, nous entendrons les témoins suivants : le Mouvement pour mettre fin à l'itinérance à Montréal et la Maison Benoît-Labre. Sur ce, je reçois ce… en début, les deux personnes suivantes Mme Chappaz, directrice générale, et Mme Julie Grenier, porte-parole pour le Mouvement qui… pour permettre… pour mettre fin, excusez-moi, à l'itinérance à Montréal. Alors, je vous cède la parole. Vous avez 10 minutes pour votre présentation et nous procéderons aux échanges. À vous la parole, madame.

Mme Chappaz (Michèle) : Merci beaucoup. Bonjour, M. le Président. Membres de la commission, je vous remercie de nous accueillir aujourd'hui. Je salue également les députés présents. Mon nom est Michèle Chappaz. Je suis la directrice générale du Mouvement pour mettre fin à l'itinérance maintenant à Montréal. Ce n'est pas un nom facile, je vous l'accorde. Je suis accompagnée par notre porte-parole Julie Grenier.

Comme vous le savez sans doute, le mouvement regroupe des acteurs de divers milieux qui veulent contribuer aux solutions durables pour prévenir et…

Mme Chappaz (Michèle) : ...et mettre fin à l'itinérance à Montréal.

Nous mettons notre vision commune en pratique à travers un plaidoyer collectif, une large offre de formation, de la recherche, des projets divers et le concours de plus de 50 membres communautaires, d'affaires et institutionnels. Nous sommes inspirés par les solutions durables qui peuvent être mises en place et sommes les instigateurs du premier dénombrement en 2015 et du seul tableau de bord sur les personnes en situation d'itinérance accompagnées vers le logement. À cet effet, dans les neuf dernières années, nos membres et partenaires ont accompagné 4 734 personnes vers le logement et nous en sommes très fiers.

La cohabitation est un enjeu qui nous touche toutes et tous et c'est pour cela que nous sommes ici aujourd'hui. Nos membres affaires nous en parlent, nos membres institutionnels nous en parlent et nos membres communautaires nous en parlent. Et quoi que tous aient à cœur des solutions, plusieurs sont à bout de souffle. Aussi, nous saluons votre volonté de chercher une solution aux problèmes de cohabitation, car nous en avons besoin. D'emblée, cependant, nous tenons à noter que nous ne pensons pas que le projet de loi répond aux réelles problématiques de la cohabitation. Comme tous les invités l'ont dit hier, nous faisons face à une crise sans précédent et d'une augmentation importante de l'itinérance pour des gens de tous âges et de tous horizons, comme le témoigne d'ailleurs le dénombrement de 2022.

La crise du logement qui s'y ajoute affecte grandement notre population et les surdoses touchent un nombre grandissant de personnes. Il y a de la détresse partout. Les gens sont inquiets pour leurs prochains et aussi sont fâchés parce qu'ils se sentent abandonnés, et nous le savons tous. Nous avons peut-être moins conscience des sommes engagées dans la sécurité actuellement au centre-ville et ailleurs à Montréal qui sont faramineuses et autres dépenses d'entretien. Votre projet de loi tente de rassurer les citoyens, et nous le comprenons, cependant, nous pensons qu'il n'est pas la voie à privilégier.

Dans ce contexte difficile, nous tenons à souligner que les organismes sans but lucratif rivalisent de créativité pour répondre à la multiplication des besoins et pour ouvrir des ressources qui répondent à ces besoins. Nous parlons d'ouverture de toutes sortes de ressources, dont les sites de consommation supervisés, les haltes-chaleur, les centres de jour, les ressources d'hébergement, les logements transitoires permanents, et nous avons, de notre côté, entendu beaucoup de belles histoires de cohabitation de nos membres, mais elles ne sont pas nécessairement partagées avec l'ensemble de la population.

Alors, malgré votre volonté de ne pas ajouter de fardeau aux organismes, à tous ces organismes qui font ces travaux, notre lecture du projet de loi nous indique que c'est le contraire qui y est indiqué. Le plan de cohabitation, qui est en soi une excellente proposition, doit venir avec les moyens de le mettre en place ainsi que l'aide du milieu dans son entier. Il ne doit pas reposer uniquement sur les épaules d'un organisme. Nous en reparlerons dans une minute de cet élément, mais je veux revenir sur l'élément qu'on ne retrouve pas dans ce projet de loi, et c'est-à-dire la prévention.

Nous aimerions, au mouvement, avoir un projet de loi qui vise la réduction de l'itinérance, ou, comme le maire Marchand l'a indiqué hier, évidemment, l'itinérance zéro fonctionnel, c'est notre vision. Cela permettrait évidemment une meilleure cohabitation, car celle-ci passe aussi par la diminution des crises multiples que nous traversons. Ce n'est que par la prévention primaire et secondaire de l'itinérance, en plus des réponses aux besoins des personnes déjà en situation d'itinérance, que nous y arriverons collectivement. Et, sur ce, je laisse la parole à ma collègue Julie Grenier.

Mme Grenier (Julie) : Merci Michèle. Alors, tel qu'introduit par ma collègue et les personnes avant nous, la cohabitation, pour nous, c'est en quelque sorte l'arbre qui cache la forêt. Les enjeux sont réels, les impacts sont troublants, mais procéder par projet de loi nous apparaît un raccourci inquiétant. Nous avons l'appréhension que cela... que cela est dans le sens de complexifier davantage un écosystème qui est déjà tiraillé notamment par des luttes politiques quant aux responsabilités qui incombent aux divers paliers gouvernementaux. Nous croyons également que cela peut causer une distraction quant à l'importance et à l'urgence de s'attaquer aux causes profondes de la crise. Nous y voyons en somme un pansement maladroitement posé à côté d'une plaie qui ne fait que s'aggraver.

Nous avons participé récemment aux audiences de l'Office de consultation publique de Montréal. Nous avons présenté des recommandations issues d'un panel que nous avons réalisé l'automne dernier dans le cadre de la conférence annuelle de l'Alliance canadienne pour mettre fin à l'itinérance à Ottawa. Ce panel, nous l'avons réalisé avec le concours des acteurs de plusieurs régions du Québec, tous préoccupés par la montée de l'itinérance et les enjeux de cohabitation. Outre la démonstration d'exemples de cohabitation fort réussie, cela mettait surtout en lumière l'importance des étapes préalables à l'intention de nouvelles ressources ainsi que de la communication claire et fluide pendant toute la durée d'un projet. Cela vaut donc également pour les ressources existantes. Les mécanismes doivent être clairs, y compris pour porter plainte, sentir qu'on est respecté, donc pour les citoyens. Il doit y avoir un pilote dans l'avion...

Mme Grenier (Julie) :  ...ce pilote, il a par contre aussi besoin de son équipage pour arriver à bon port. Il en va de même pour l'organisme qui doit pouvoir compter sur son arrondissement, son CIUSSS en soutien.

Donc, nous avons aussi, d'ailleurs, commencé graduellement, à Montréal, à expérimenter une méthode d'appropriation des projets sur... sur ce... de cette façon-là, et ça nous apparaît très porteur. Cela peut vous apparaître simpliste, mais pas tant que ça, car, ces étapes, ce sont celles qui ont souvent fait défaut dans les cas qui sont devenus tristement célèbres, et qui ont retenu notre attention ces dernières années, et probablement conduit à cette volonté de légiférer.

Il m'importe aussi de vous mentionner que l'expérience nous a démontré que la rareté des locaux et l'absence d'instance ou de mécanismes responsables d'un identifié lorsqu'un projet voit le jour actuellement est une grande part de ce qui est devenu l'enjeu de cohabitation. Je m'explique. Plusieurs organismes doivent composer avec des lieux inadéquats et indignes pour accueillir les gens faute de mieux, locaux qu'ils se font également retirer à répétition, provoquant des bris de services et des nouveaux enjeux de cohabitation. Ces locaux, ironiquement, sont également souvent proposés par les autorités elles-mêmes. Citons, en exemple, l'église Sainte-Bibiane, acquise contre le gré des organismes, qui la jugent inopérable dans sa forme actuelle, et qui suscite déjà toutes sortes de suppositions de la part du voisinage. Comment faire un plan de cohabitation quand un organisme... quand un lieu existe, mais qu'il n'y a pas de pilote dans l'avion? Il est impératif d'inclure, donc, des balises concertées de cohabitation en amont, incluant l'identification éclairée des endroits où sont érigés tant les ressources de consommation supervisée que tout autre type de services destinés. Car, vous aurez compris, notre regroupement... notre notre mouvement n'a pas de ressources de consommation supervisée... nos... Il s'agit d'un continuum de services, donc, évidemment, nos membres les utilisent. Alors, on porte la voix de l'ensemble des ressources.

Ce faisant, il importe d'avoir collectivement une meilleure lecture à l'effet que ces ressources sont de différents ordres et de différentes missions et peuvent avoir conséquemment des impacts variables sur le voisinage. Ça doit être apprécié au cas par cas. Cela doit être travaillé en amont. Et vous avez assurément cette même... site commun, par ailleurs, ces services. Ils sont dispensés par les organismes et ils s'adressent à des enjeux sociaux complexes qui doivent être considérés naturellement en appui et en complémentarité à l'intervention de l'État. Ils sont déjà aussi approuvés en amont par des comités qui regroupent villes, milieux communautaires... Nous craignons que Santé Québec ne puisse se substituer à ces subtilités, et l'expérience actuelle ne nous a pas démontré que la société d'État avait des ressources attitrées à un mandat clair dans le dossier de l'itinérance, du moins, pas dans l'intensité requise, si un tel projet de loi devait voir le jour. Cela nous fait craindre également une certaine forme de paralysie.

• (11 h 50) •

Dans le même esprit, la politique nationale en itinérance s'articule autour de cinq axes, dont celui de la cohabitation sociale et des enjeux de cohabitation, ainsi que le déploiement des plans concertés, nous apparaît être le rôle souhaité et attendu de la Santé. Et la bonne nouvelle, c'est qu'il existe déjà et qu'il donne la concertation intersectorielle et celle des gouvernements fédéral et provincial, du monde municipal et des communautés autochtones sous une gouverne déjà établie. De façon plus contemporaine, il y a une publication du ministère qui... qui trouve... où on retrouve notamment écho à l'axe dédié au vivre ensemble qui fait écho à cette notion de cohabitation là, et on y place des responsabilités particulières au niveau du ministère des Affaires municipales. Dans cette même optique, il y a une déclaration de réciprocité qui a été signée en décembre par notre premier ministre, les présidents des Fédération québécoise des municipalités, l'Union des municipalités, la mairesse de Montréal, le maire de Québec. Ça nous indique également une reconnaissance de l'importance de la situation et ça devrait également nous servir de levier d'action.

Pourquoi je cite tout cela? Parce que nous croyons que les leviers pour la concertation dans ses rôles et responsabilités, ils sont déjà définis, mais nous ne les employons pas adéquatement. La santé est certes le chef d'orchestre et le facilitateur que l'on attend dans ce dossier-là. Nous croyons donc que cela doit davantage être assumé et investi dans un esprit de collaboration intersectorielle qui favorise le travail en continuité, où le réseau de la santé assume à la fois sa responsabilité de chef d'orchestre intersectoriel, mais aussi la garantie de l'accès aux soins et aux services de santé, en travaillant en collaboration avec les organismes. On a plusieurs exemples très fructueux à cet égard.

En ce sens, nous... nous suggérons que le projet de loi, s'il est maintenu, devrait minimalement énoncer et assumer clairement les responsabilités du ministère de la Santé et des Services sociaux en matière d'itinérance, de vulnérabilité, de lutte aux dépendances et de réduction des méfaits, et non de se restreindre à un rôle de... Cela s'inscrirait davantage en cohérence avec les responsabilités définies dans le napperon du ministère de la Santé et des Services sociaux, c'est-à-dire en reconnaissant le rôle à la fois central et complémentaire du réseau de la santé dans une approche territoriale partagée, concertée et axée sur les besoins réels des personnes en situation d'itinérance.

Alors, je vais laisser, sur ce, ma collègue Michèle conclure notre présentation.

Le Président (M. Provençal) : Le temps est déjà écoulé, alors je vais demander à M. le ministre : Voulez-vous...

Le Président (M. Provençal) : ...alors, vous pouvez conclure.

Mme Chappaz (Michèle) : Alors, tout simplement pour dire c'est sûr que l'idéal, c'est d'avoir un plan clair, avant d'implanter une ressource, de faire toutes les démarches pour s'assurer que le voisinage est outillé pour accueillir la ressource, bien sûr. Mais, quand il y a des crises qui arrivent autour de ressources, les cellules de crise qui ont déjà existé doivent être outillées, là, pour prendre le relais et aider les organismes, là, à régler la situation. Je ne vais pas revenir sur le reste, mais on a vraiment parlé des leviers qui existent déjà, et c'est pourquoi qu'on pense que légiférer n'est pas nécessaire, mais qu'il faut plutôt se doter de moyens pour que tous puissent jouer leurs rôles respectifs et les assumer pleinement. Merci.

Le Président (M. Provençal) : M. le ministre.

M. Carmant : Oui. Merci, M. le Président. Rebonjour à tout le monde. Merci d'être là aujourd'hui pour la suite de... conversation qui a été fort intéressante. Merci au Réseau pour mettre fin à l'itinérance à Montréal d'être venu nous présenter ce matin. Vous savez, en théorie, là, j'appuie ce que vous dites. J'aimerais laisser les choses telles quelles et les gens s'organiser entre eux, mais la réalité, c'est que ça ne se fait pas toujours. Et, quand ça ne se fait pas, ce n'est pas une cellule de crise qu'on appelle, c'est le ministre qu'on appelle à l'aide. Donc, avec ce qui est disponible, comment s'assurer que ce travail-là se fasse?

Mme Grenier (Julie) : Si je peux me permettre, nous avons eu dans le passé une instance qui était issue, là, des rôles de la politique nationale et qui était une instance de concertation qui impliquait la mairesse de Montréal, à l'époque, le maire, juste un petit peu avant, la ministre responsable des Services sociaux, le CIUSSS, la Santé publique, où on avait un pouvoir d'agir selon une entente, là, qui était enchâssée dans la politique nationale et qui nous donnait une flexibilité d'agir. Donc, évidemment, on comprend l'intention derrière et on comprend que vous vous êtes retrouvé très seul au combat dans des... dans quelques situations tristes, récemment, et que c'est ça qui vous donne l'intention d'un projet de loi pour forcer les choses. Puis, ça, on ne le questionne pas.

C'est juste que le véhicule il nous apparaît arriver en réponse à, justement, cette problématique qu'on a où chacun doit assumer un rôle et le jouer pleinement, donc d'avoir des instances où on se dit qu'on est obligé d'agir comme on l'est, parce que tout est déjà existant. Mais est-ce que la loi va vraiment le rendre disponible davantage? J'ai l'impression que ça va créer une scission encore plus grande, puis c'est ce qui nous inquiète. Sans compter... puis sans tomber dans les effets factuels, mais obtenir un permis avec une société d'État, en plus de devoir déjà être très agile, ça nous fait craindre des délais absolument incroyables. On le vit dans d'autres secteurs, et ça peut prendre des mois, voire des années. Donc, on n'a pas ce luxe-là en itinérance.

M. Carmant : Non, mais c'est sûr qu'on va rendre ça le plus souple possible. Puis, de toute façon, il y a des demandes qui doivent être faites au fédéral, renouvelées après un an pour trois ans, là, j'ai fait les vérifications. Donc, si... je comprends qu'il va falloir s'inscrire dans quelque chose d'assez souple.

Également, quand on parle de Santé Québec, c'est sûr que Santé Québec, maintenant, c'est le bras opérationnel, là, du ministère. Et la personne ou l'individu qui va représenter Santé Québec dans tout ça, je pense qu'elle est déjà à la table, c'est la directrice régionale de la santé publique. Donc, tu sais, on parle de Santé Québec, mais en fait on nomme la directrice régionale, on pointe vers la directrice régionale de la santé publique, qui, selon moi, a déjà les capacités de rendre opérationnel tout ça, mais avec la volonté politique de le faire.

Mme Grenier (Julie) : Je dois dire que, là, vous me l'apprenez, parce que ça n'a jamais été la Direction régionale de santé publique qui a opéré cette concertation-là. Alors là, je... est-ce que c'est nouveau dans le cadre de Santé Québec? Je l'apprends à l'instant, donc je ne suis pas en mesure d'apprécier.

M. Carmant : Non, non, mais ce serait la personne que je verrais comme potentiellement être capable, puisqu'elle est assise à toutes ces tables de discussion.

Mme Grenier (Julie) : Actuellement, non.

M. Carmant : Actuellement... Ah! Non?

Mme Grenier (Julie) : Certains comités, mais c'est porté...

M. Carmant : Mais c'est eux qui approuvent...

Mme Grenier (Julie) : ...c'est porté par une autre direction.

M. Carmant : C'est eux qui approuvent les sites de consommation, je veux dire, c'est la santé publique régionale.

Mme Grenier (Julie) : Oui. Peut-être... peut-être que je dois faire une précision. En ce moment, on parle de l'ensemble des ressources, là, de notre côté. Excusez-moi, je pense que c'est la nuance, là, qu'on vient de s'entrechoquer... est au niveau des sites de consommation supervisée. Notre propos, au mouvement, là, est vraiment dans la perspective très large de l'autorisation de l'ensemble des sites liés aux clientèles en situation d'itinérance. Je pense que, là, c'est là qu'on vient de s'entrechoquer. Désolée, donc, pour mes propos préalables.

M. Carmant : O.K. Puis ça, je comprends aussi, pour les sites... général d'itinérance, comme vous savez, c'est un règlement qui ne sera pas appliqué, là. Puis il va falloir définir mieux les...

M. Carmant : ...qui nous porterait à aller plus large que juste les sites de consommation supervisée.

Quelques points... Écoutez, moi aussi, là... Vous savez, on a agi par... La crise de l'itinérance, ça nous a frappés, là, avec la pandémie, l'arrêt des activités en plein milieu d'un mois... du mois de mars, des gens qui n'avaient pas reçu leur chèque, qui sont tombés à la rue, des chiffres qui ont explosé. Tu sais, c'est quelque chose qui était incontrôlable.

Maintenant, on a doublé le nombre de refuges, on est allé dans le 24/7, etc. Là, on est rendus à l'étape de la prévention puis on est au même niveau que vous. Dans la dernière année, on a parlé de prévenir les problèmes de l'itinérance en sortie carcérale. Cette année, là, on commence, là, la sortie des centres jeunesse. Potentiellement, c'est 500 itinérants de moins par année, là, qu'on va venir prévenir. Je pense que l'étape qui nous manque, puis on regarde ça avec Mission Old Brewery, c'est au niveau des pertes de logement également, avec tous ceux qui font partie de votre groupe, là. Donc, je pense que c'est une orientation qui est claire, et qu'on veut mettre de l'avant aussi, là. Je tiens à vous rassurer là-dessus, ce n'est pas juste un enjeu législatif. L'autre point qui est important pour moi de discuter, là, c'est... Tu sais, je sais que la plupart des organismes font bien les choses, le font spontanément, l'enjeu qu'on veut régler, c'est quoi faire quand il n'y a pas de collaboration. Puis quels sont les moyens de l'imposer dans un système où, tu sais, moi, je respecte tout à fait l'autonomie des organismes communautaires, là, bien que, tu sais...

Mme Grenier (Julie) : Mais ce n'est pas l'autonomie qui nous inquiète. En fait, c'est de... je pense que c'est de plus le porter seule. Quand je vous parlais du pilote dans l'avion, moi, j'en suis tout à fait, puis vous connaissez bien Mission Bon Accueil notamment, vous êtes venu à l'inauguration d'un nouveau site récemment. Ce site-là, pour moi, fait vraiment exemple dans la façon dont la cohabitation a été planifiée. L'organisme a assumé qu'il développait ce projet-là, a donné aux élus l'information requise pour être en mesure de ne pas être pris par surprise s'il était questionné. Ensuite, bien soutenu par son CIUSSS, bien soutenu par l'arrondissement, a regardé toutes les parties prenantes, et a fait ce qu'il fallait, et a affiché sur sa porte : Voici ce qui s'en vient. Vous avez des questions, vous venez, a réunion le voisinage. Et ça, c'est un mécanisme en amont, mais ce mécanisme-là se poursuit aussi, parce que ce n'est pas une fois la ressource implantée, puis ma collègue du RAPSIM l'a bien mentionné hier, à un moment donné, il peut survenir quelque chose, un nouveau projet. Bon. Alors, il faut qu'il y ait... puis dans nos recommandations à l'OCPM, c'est ce qu'on disait, il faut que les mécanismes soient formels, y compris pour porter plainte, y compris pour revenir sur n'importe quoi, ça va de soi parce que tout le monde est légitimé là-dedans. Mais est-ce qu'une loi va nous permettre de mieux le faire? C'est ce qui nous fait craindre que ce n'est pas le bon Véhicule. Parce que pour le reste, on est absolument d'accord que c'est nécessaire.

• (12 heures) •

Et, en même temps, l'autre enjeu, ce que je veux soulever, c'est la disponibilité des locaux, parce que la façon dont les choses se passent actuellement, c'est souvent qu'il n'y a pas de locaux pour ériger les services. Donc, c'est ce bout-là qui se fait à la va-vite puis l'organisme porte l'odieux. Puis l'exemple de la société de développement social avec le refuge qui est passé de Guy-Favreau à Verdun et qui n'a pas réussi à s'implanter à... dans Ahuntsic. C'est exactement ça. L'organisme était forcé de déplacer son service au gré de ce qu'on lui offrait comme ressource. Comment voulez-vous qu'il fasse un plan de cohabitation puis qu'il s'allie avec les gens? La population a eu le droit de vie ou de mort sur le projet sans même le savoir. Mais l'organisme ne pouvait pas s'organiser, il s'est fait imposer.

Alors, je pense que c'est nos mécanismes à partir du moment où on travaille, tu sais, quand vous faites arriver des financements, les gens travaillent déjà ensemble à identifier des solutions. En ce moment, les plans de cohabitation, il faut qu'ils en fassent partie inhérente. On tend à le faire, mais c'est là, je pense, où il faut s'assurer que ce soit fait. Et ça risque d'être beaucoup plus opérationnel qu'un projet de loi. C'est notre humble avis.

M. Carmant : Mais...

Le Président (M. Provençal) : Merci.

M. Carmant : Ah, oui. O.K.

Le Président (M. Provençal) : Le temps est échu.

M. Carmant : Merci.

Mme Grenier (Julie) : J'ai trop parlé.

Le Président (M. Provençal) :Alors, Mme la députée de D'Arcy-McGee, s'il vous plaît.

Mme Prass : Merci, M. le Président. Bonjour et merci pour le travail, pour le mémoire et votre présentation aujourd'hui. Je vais reprendre un petit peu la conversation que vous aviez avec le ministre. Vous avez parlé de l'exemple du nouveau projet Maison Bon accueil, parce que, dans votre mémoire, vous parlez d'exemples de cohabitation réussie et vous établissez cinq éléments qui devraient en faire partie : la planification en amont de l'implantation de nouvelles ressources, le partage de toutes les informations avec tous les acteurs touchés, la communication continue avec ces acteurs, l'établissement de mécanismes de plainte claires et la réalisation des suivis avec la population avoisinante sur le long terme. Pouvez-vous nous donner un exemple où... de projets...


 
 

12 h (version non révisée)

Mme Prass : … où justement la cohabitation a été réussie parce que tous ces éléments ont été mis en place en… mis en place pour l'ouverture d'un projet?

Mme Grenier (Julie) : Bien, j'ai envie de vous dire qu'il y a des projets qui parlent d'eux-mêmes et qui sont ancestraux. Pensons au Chaînon, installé sur de l'esplanade en plein cœur de Montréal, dans un quartier somme tout cossu, où des femmes en très grande difficulté vivent, où on a des services en santé mentale, où on a des services d'hébergement d'urgence, où on a une paie panoplie de services. Est-ce qu'on entend quelque chose? Ils font partie du voisinage, ils font partie de la... de la... Ils font partie de la société depuis nombre de temps. Il existe une communication en continu avec ce voisinage-là. Moi, je pense que ce qui fait partie de la paix d'esprit dans ça aussi, c'est que c'est instauré. On est rassuré, on connaît notre voisin.

C'est comme dans la vie de tous les jours, quand on déménage à quelque part, on aime savoir où on arrive, on… on aime savoir qui est là puis on aime savoir qu'on peut aller voir notre voisin puis qu'il ne sortira pas une carabine si on a quelque chose à lui dire. Alors, je pense qu'il faut… c'est le principe.

Malheureusement, on a monté en épingle des situations… des situations réelles et préoccupantes, mais on s'est donné un focus sur les quelques-unes qui n'ont pas fonctionné et on a l'impression que ça vient immanquablement avec ça. L'autre chose que j'ai envie de dire, c'est que parfois, ces locaux-là n'ont même pas été choisis par l'organisme lui-même. Et là, on leur fait porter actuellement la chose. Mais je vous parlais de rareté des locaux tout à l'heure, et c'est tout à fait en lien, là, c'est tout à fait en lien. Le projet de Benoît-Labre était l'un des rares à l'époque qui était en construction où on allait avoir un nouvel endroit pour offrir des services. Donc, ça a été vu comme une opportunité, dire : Bien, on a un nouvel endroit où on n'en a pas d'autres. C'est si rare. On va aller mettre les services là. On oublie ça dans l'histoire, mais dans les faits, c'est comme ça que les choses ont commencé. Alors, aujourd'hui, on est en train de rétropédaler puis dire : Oui, ce n'était pas une bonne idée. Probablement que ce n'en était pas une, mais ce n'est pas… ce n'est pas nécessairement juste l'organisme lui-même à qui ça appartenu. Après ça, comment il a géré son quotidien, ça, ce n'est pas… Ce n'est pas nécessairement de notre ressort, mais il y a beaucoup de nuances. Et ces nuances-là, on trouve ça difficile de les apprécier par un simple projet de loi.

Mme Prass : Également, dans votre mémoire, vous exprimez une crainte que le projet de loi déresponsabilise certains paliers du gouvernement. À votre vue, quelle devrait être les responsabilités du ministre, du municipal, des... du CIUSSS, etc.? Comment est-ce que ces responsabilités devraient être réparties?

Mme Grenier (Julie) : Bien, en fait, ces responsabilités-là, elles sont déjà très bien indiquées dans la politique nationale qu'on cite, dans le récent napperon qui a été mis et même dans l'énoncé, là, qui a été publié un peu plus loin. Alors, on se dit : ces rôles-là, ils sont déjà là, mais on a… on s'est employé énormément dans les derniers mois, les dernières années, à se tirailler justement depuis la pandémie qui nous a tous mis un peu en tension sur : ceci, c'est mon rôle, ceci, c'est le vôtre, et c'est… je pense, laquelle dans le fond qu'on fait, c'est de dire : Il faut… il faut baisser d'un cran cette notion-là de baliser les rôles de chacun comme ayant un début, une fin, mais en assumant qu'ils sont en continuité. Et le projet de loi, encore une fois, en étant très cadrant, j'ai l'impression qu'il contribue potentiellement à cette notion-là de venir mettre des lignes qui délimitent. Et tout ce qui est cohabitation est beaucoup plus d'un ressort… Ironiquement également, encore une fois partagé avec l'organisme qui érige ces services et avec la santé qui appuie ces services-là. Donc, on ne peut pas compartimenter. En fait, notre grand message, c'est ça, c'est que c'est difficile de le compartimenter. Il faut vraiment se donner les moyens de le travailler avec toutes les responsabilités.

Mme Prass : Et un petit peu dans le même sens, vous suggérez que le ministère des… Santé et Services sociaux devienne le chef d'orchestre des actions liées à l'itinérance, mais est-ce que ce n'est pas déjà le cas?

Mme Grenier (Julie) : Absolument. C'est ce qu'on dit en somme, c'est que les leviers sont tous là. On ne les emploie pas adéquatement, on n'a pas… notre prétention, c'est qu'on n'a pas besoin d'ajouter une loi, c'est qu'on a besoin d'assumer chacun nos rôles et responsabilités et dans l'opérationnalisation, y compris. Le discours s'est élevé à un niveau politique à cause d'enjeux tristement célèbres et on a perdu de vue que les éléments du puzzle, ils étaient là. Et avant la pandémie, ça fonctionnait très bien. On a eu de la difficulté socialement, par épuisement, je pense, puis c'est légitime ça aussi, à y revenir, mais c'est… ça a déjà bien fonctionné.

Mme Prass : Donc, si vous… pour vous, les outils sont là, c'est juste question de les mettre en œuvre.

Mme Grenier (Julie) : Et d'assumer et chacun nos rôles pleinement. L'organisme… les organismes assument pleinement leur rôle. On est peut-être pris dans des batailles politiques avec les autres niveaux de gouvernement, puis c'est ce qu'on trouve qui met en otage la situation…

Mme Grenier (Julie) : …je l'exprime un petit peu plus clairement.

Mme Prass : Puis, justement, dans le cadre de l'organisme que vous représentez, qui se penche sur l'itinérance à Montréal, trouvez-vous qu'entre le municipal et le provincial, justement, que ça se travaille en silos, qu'il n'y a pas assez de collaboration ou de communication pour faire en sorte d'avancer ces projets pour que, justement, tous ces éléments soient pris en compte avant plutôt que par la suite?

Mme Grenier (Julie) : Je pense que les gens sont assis aux mêmes tables et qu'on est en train, sur le terrain, à Montréal, si je prends comme exemple, de se donner des mécanismes tout à fait différents pour que ce soit pris en compte. Donc, on a décliné, là, puis le… juste fait décliner les choses pour faire en sorte que les arrondissements et les CIUSSS, localement, soient impliqués dans chacun des nouveaux projets qui voient le jour. Donc, moi, je constate qu'en ce moment il y a une volonté d'utiliser ces leviers-là à bon escient. Je pense qu'il faut y donner de l'importance et je pense qu'en tant que chef d'orchestre il faut y donner de l'importance, il faut l'exiger, il faut s'assurer… il faut mettre la mécanique très formellement comme quelque chose d'attendu. Ça ne nécessite pas un projet de loi, à notre avis.

Mme Prass : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Merci. Alors, Mme la députée de Terrebonne, s'il vous plaît.

Mme Gentilcore : Merci. Je vais continuer là-dessus parce que je trouve ça fort intéressant puis c'était une de mes questions. Donc, plus clairement, est-ce que vous trouvez qu'il manque de mécanismes contraignants? Et là ce n'est pas un mot qu'on aime nécessairement, mais des mécanismes contraignants pour amener l'ensemble des parties à collaborer? Est-ce que c'est quelque chose qu'on devrait formaliser dans un projet de loi ou non? Mais c'est un peu ce que je retiens de votre discours. Puis là, tu sais, on parle incitatif ou contrainte, là, un des deux, là, je vais vous… laisser ça libre à vous, mais, moi, ce que j'entends de votre discours, ce que j'en comprends, c'est qu'il faut le formaliser quelque part.

Mme Grenier (Julie) : Oui, bien, vous me prenez un peu de court, là, parce que c'est… Comment je dirais ça? Il faut que ça soit naturel, il faut que ça soit assumé. On a de la difficulté à assumer chacun des rôles en ce moment. On se retourne facilement vers le voisin. Je ne suis pas capable de vous le résumer autrement.

Mme Gentilcore : Non, mais je le comprends. Bien, mettons, concrètement, donnez-moi un exemple concret, si vous êtes capable, qu'est-ce qui empêche, en ce moment, chacune des parties d'assumer pleinement son rôle? Où est-ce que ça accroche? Où est le sable dans l'engrenage en ce moment?

Mme Grenier (Julie) : Mon humble impression, c'est que tout ça a été exacerbé avec quelques cas tristement célèbres qui nous ont fait perdre les pédales et qui ont créé une grande effervescence, conjugué au fait qu'on est dans une crise monstrueuse où il y a des gens dans la rue, où les gens s'inquiètent, et c'est normal qu'on s'inquiète. Je pense que de remettre de l'ordre dans nos papiers, de réaffirmer notre politique nationale, les rôles de chacun, d'avoir des mesures peut-être plus musclées qui viennent du chef d'orchestre, qui disent : Écoutez, là, ça, c'est le rôle, voici ton instance… On s'attend à ce que ça soit ça puis on s'attend à ce que les arrondissements soient impliqués. Il le faut, c'est sine qua non. Il en va de la logique. Comment faire autrement un projet? C'est impossible.

• (12 h 10) •

Idem pour la santé, on est riches des ressources pour répondre à des besoins sociaux, des besoins de santé. Donc, il est tout naturel que le CIUSSS local soit présent. Donc, tu sais, il faut être capable… Quand je dis : Il y a un pilote dans l'avion avec son copilote et ses agents de bord, c'est exactement ça, c'est que l'organisme, il porte le projet puis il vient offrir le service, mais tout ça est intimement lié. Il faut rendre ça naturel, obligatoire et convenu entre les acteurs parce qu'un délai d'autorisation va ajouter du temps, tout simplement.

Le Président (M. Provençal) :Alors, je remercie les deux représentantes du Mouvement pour mettre fin à l'itinérance à Montréal pour leur participation à nos travaux.

Sur ce, je suspends ces derniers pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup de votre disponibilité à venir échanger avec les membres de la commission.

(Suspension de la séance à 12 h 11)

(Reprise à 12 h 14)

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous recevons les représentants de La Maison Benoît-Labre, alors Mme Andréane Desilets et Mme Sophie Tousignant. Alors, 10 minutes pour votre présentation, et par la suite, nous allons avec les échanges. Je vous cède immédiatement la parole.

Mme Desilets (Andréane) : Merci. Merci à tous de nous accueillir aujourd'hui. M. le ministre, Mmes, MM. les membres de la commission, merci de nous recevoir. Le projet de loi n° 103 est présenté parce que nous avons collectivement échoué dans l'implantation d'un service essentiel pour des personnes parmi les plus vulnérables de notre société. Nous respectons la volonté de notre gouvernement de légiférer, d'encadrer l'implantation des sites de consommation supervisée et de favoriser une meilleure cohabitation avec la communauté. Nous reconnaissons les difficultés que La Maison Benoît-Labre a vécues sur le terrain à la suite de l'ouverture de son nouveau centre multiservices de Saint-Henri au printemps 2024. C'est dans celui-ci que nous avons désormais un tout petit local permettant des services essentiels de consommation supervisée.

Notre intention aujourd'hui n'est pas de pointer le doigt accusateur vers quiconque. Nous aurions pu et aurions dû faire, tous, mieux ensemble. Notre intention aujourd'hui, c'est qu'on se mette sur la bonne voie, qu'on tire les bonnes leçons de ce qui est arrivé et qu'on réussisse les meilleurs... dans les meilleurs délais, à relocaliser un site de consommation supervisée dans le Sud-Ouest. Parce qu'à travers tout ce qui sera dit dans le cadre de ces consultations, il y a une réalité incontournable. Des femmes, des hommes, souvent, des jeunes, en situation de vulnérabilité extrême, meurent de surdose presque à chaque jour, et ce, partout au Québec. La crise des opioïdes est une tragédie qui n'épargne aucune grande ville nord-américaine. Les sites de consommation supervisée sauvent des vies, réduisent les méfaits, tous les intervenants en santé et en sécurité sont d'accord, et un tel site est nécessaire dans le sud-ouest de Montréal.

Le site de consommation supervisée de La Maison Benoît-Labre a déjà sauvé plusieurs vies. Les correctifs ont été apportés dans les derniers mois, en collaboration avec le SPVM, le CIUSSS, l'arrondissement, la santé publique, les citoyens ainsi que d'autres groupes communautaires, et ont permis de réduire de façon très importante les méfaits et les incidents. Vous pourrez demander au SPVM de voir leur plus récent rapport à cet effet, ce qui... ce sont les faits qui parlent. Nous avons trouvé les bonnes façons de travailler ensemble. Je tiens à le dire, parce que nous devons aussi assurer le maintien des services, le temps qu'il faudra relocaliser, pour s'assurer la préservation de ces liens mais aussi après le déménagement, et ce, pour ces lieux distincts, ces deux espaces distincts. On parle d'humains dans le besoin, des personnes qui nous... qui nous font confiance et qui, d'ailleurs, font partie de la population québécoise. C'est, littéralement, une question de vie ou de mort.

La Maison Benoît-Labre existe depuis 70 ans, le saviez-vous? Nous avons un long savoir-faire en matière de lutte contre l'exclusion, d'aide aux personnes démunies et itinérantes, d'accompagnement au logement, de réinsertion sociale dans le sud-ouest de Montréal. Au fil des... au fil des ans, nous avons fait face à des croissances de besoins, en partant d'une vieille maison dans le Griffintown, au sous-sol...

Mme Desilets (Andréane) : ...une église à Saint-Henri. Et en 2022, après plusieurs années de recherche pour un nouveau site et plusieurs occasions manquées, nous avons entamé la construction d'un bâtiment de quatre étages, rue Notre-Dame, près du marché Atwater. Je vous mentirais et la Ville de Montréal vous mentirait si on vous disait que tout... le tout fut possible en quatre ans sans soutien financier. Nous sommes donc enfin installés depuis le printemps 2004. Ce bâtiment, on trouve 36 appartements. C'est notre programme de logements transitoires où on aide des personnes à reprendre pied et à retrouver la dignité d'un toit. Il y a bien sûr au rez-de-chaussée notre halte-répit. Il y a les cuisines. Le tout est accessible 24/7. On dispense différents services, dont des repas, des douches, des friperies et des toilettes. Et, sur cet étage, on trouve aussi un site de consommation supervisée, essentiellement un petit local où les personnes peuvent consommer des substances sous supervision et de façon sécuritaire. L'implantation du site a reçu l'appui de nombreux partenaires locaux et institutionnels, organismes communautaires, établissements de santé, élus et tables de concertation qui ont témoigné de l'importance du projet dans l'amélioration des conditions de vie dans le sud-ouest. Nous avons joint quelques-unes de ces appuis dans notre mémoire. Nous remercions tous ces partenaires.

Des mois avant l'ouverture et depuis l'ouverture, nous avons travaillé activement la bonne implantation du projet à son acceptabilité sociale. Nous avons mis en place des mécanismes de concertation, instauré des brigades de cohabitation, collaborer avec les citoyens, les commerçants, l'école voisine ainsi que des partenaires institutionnels du milieu. Nous avons dû jongler avec une gouvernance fragmentée entre le palier municipal, le CIUSSS, la Direction régionale de la santé publique, le ministère et le politique. Ce leadership morcelé a contribué à la lourdeur administrative qui a elle-même favorisé des incidents de cohabitation qui ont usé la tolérance des citoyens. La pression est devenue trop forte et le projet de loi n° 103 en témoigne.

Il y a des leçons à tirer en termes de concertation, en termes de responsabilité collective devant la crise des vulnérabilités, itinérance, santé mentale, qualité de substance. J'ai entendu suffisamment d'histoires à briser le cœur pour savoir que personne n'est à l'abri. Il faut aider, apprendre à mieux aider ensemble, avoir le courage de regarder la vulnérabilité en face. Il n'y a ni plus ni moins de substance, il n'y a que des vies à sauver et c'est ce que nous faisons quotidiennement.

• (12 h 20) •

Notre position est évidente face au projet de loi n° 103, nous comprenons les préoccupations légitimes de la population. Nous souhaitons un véritable engagement du gouvernement pour éviter un bris de services communautaires essentiels à des personnes vulnérables. Si telle est la volonté du gouvernement, nous relocaliserons le site de consommation supervisée, mais je voudrais qu'on comprenne les implications.

Le projet de loi n° 103 dit qu'il ne peut y avoir un site de consommation supervisée à moins de 150 mètres d'écoles, de garderies ou de CPE. Actuellement, nous sommes à 143 mètres et, je le répète, la situation est maintenant maîtrisée. Les mécanismes sont en place. Pour ces sept mètres, nous allons devoir retrouver un autre immeuble, acquérir, l'adapter, et ça, nous n'en avons pas les moyens. Nous avons repéré des locaux à proximité juste assez grands afin d'accueillir le site de consommation supervisée. Le coût d'acquisition est de 3,5 millions. Ces locaux potentiels seraient à distance réglementaire de l'école, mais sont situés de l'autre côté de la rue Atwater. Il faut donc imaginer les personnes désorganisées, pour certaines, qui traversent la rue pour aller aux sites de consommation supervisée entre la halte-répit existante.

Pour ces sept mètres, il faudra tout reprendre, tout reprendre le processus de discussion, de concertation, de cohabitation qui a finalement mené à une concertation bien orchestrée, et la Maison Benoît Labre, ainsi divisée sur deux sites, va voir ses coûts de fonctionnement augmenter de façon importante. Nous allons offrir toute notre collaboration, notre écoute et notre professionnalisme si le gouvernement décide d'aller de l'avant. Nous demandons, et nos recommandations sont, premièrement, que le gouvernement joue un rôle actif dans la relocalisation du site de consommation supervisée en faisant en sorte qu'il n'y ait aucune rupture de services. Deuxièmement, que le gouvernement compense la Maison Benoît Labre pour les coûts d'acquisition, d'aménagement, de déménagement et de fonctionnement liés à la relocalisation du site de consommation supervisée.

Le projet de loi fixe un délai de quatre ans pour la... relocalisation. Excusez-moi. Nous n'avons aucune objection à procéder avant si la chose est possible. Entendez-nous bien, on veut se conformer à la loi...

Mme Desilets (Andréane) : ...le gouvernement doit, cela dit, assurer que c'est applicable et que, si elle exproprie des services essentiels, il les maintient par son soutien.

Je réitère mes remerciements à toutes les organisations et institutions qui nous accompagnent. Je réitère notre volonté de faire tout ce qui est possible pour favoriser l'acceptabilité sociale de notre mission. Je reconnais que l'extrême vulnérabilité de notre clientèle est difficile à accepter, mais il n'est pas... il n'est plus possible de fermer les yeux. Nous avons une responsabilité collective envers tout le monde et tous nos citoyens. Merci de votre attention.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup pour votre présentation. M. le ministre, je vous cède maintenant la parole.

M. Carmant : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, Mme Desilets, pour votre témoignage, là, aujourd'hui, puis les commentaires, là, qui sont appréciés.

Puis je pense que vous avez mis le doigt dessus, là, c'est... le projet de loi, son rôle, c'est vraiment de venir... éviter ce travail qui a été morcelé - puis, vous le savez, là, combien de fois je suis venu - puis essayer de rattacher les bouts ensemble, là, puis s'assurer que les choses soient faites de façon structurée. Puis, je l'ai mentionné, hier, là, le but n'est pas de mettre plus de poids sur les organismes communautaires. Le but, c'est vraiment de s'assurer qu'il y ait un rôle clair de Santé Québec et de la Direction régionale de la santé publique dans la gestion de ces sites-là, qui, en général, même, sont recommandés par la Direction régionale de la santé publique.

Vous, qu'est-ce que vous voyez comme... comme façon de s'assurer que ça se fasse, c'est cette communication-là? Vous qui l'avez vécu, là, tu sais, une consigne de ci, une consigne... tu sais, comment... comment... qu'est-ce qui doit être écrit pour s'assurer que ça ne survienne plus?

Mme Desilets (Andréane) : Tout à fait. Je pense qu'il y a beaucoup de choses qu'on peut... qu'on peut faire mieux. Vous avez raison. Mais je pense sincèrement que le nombre de mètres n'aura pas d'impact sur ce qu'on tente de faire. Vous avez raison, ça a été quand même un peu long, avant que tous les acteurs puissent s'asseoir. Ça prend des mécanismes pour ça. Vous avez... Ça, je suis tout à fait d'accord. Je pense que c'est une des raisons d'ailleurs pourquoi on est allés vers vous dire : Ça ne fonctionne pas.

Ceci dit, de la façon dont le projet de loi est orchestré actuellement, on y voit que la responsabilité vers l'organisme, et très peu, en fait envers les institutions. Et je pense que, pour remettre le pouvoir, il faut trouver des meilleurs mécanismes, mais il faut aussi travailler en amont et il faut donner les moyens aux groupes communautaires.

Nous, on l'a fait à bout de bras parce que je voulais bien le faire, mais personne ne me le demandait. Il faut que vous compreniez que, ça, cette énergie-là et cet argent-là, qu'on y a mis, est venu de nos poches pendant toutes ces années. Moi, c'était un emploi à temps plein, par-dessus mon emploi à temps plein. Donc, c'est ce qui est demandé aux groupes communautaires. Et d'ailleurs, il faut aller cogner aux portes à peu près partout dans le milieu, si ce n'est pas aux arrondissements, c'est au niveau de la santé publique, c'est au niveau du CIUSSS, pour être capables d'asseoir tout le monde et dire : On a besoin de réfléchir, on a besoin de mécanismes. Et, souvent, en fait, les réflexions sont là, l'argent pour mettre en place les moyens n'y sont pas. Donc, ça prend plus que ce qui se trouve dans ce projet de loi là pour faire en sorte qu'il y ait une mobilisation. On parle d'investissements, on parle de planification collective, mais il faut que ça se fasse avec les communautés et avec les groupes communautaires.

M. Carmant : Puis c'est sûr que je comprends le sept mètres, là, puis les distances de porte à porte. Mais c'est vraiment la proximité qui est un enjeu, là, tu sais, dans le... avec Benoît-Labre. Tu sais, on voit... tu sais, la cour d'école est... est juste là, là.

Mme Desilets (Andréane) : C'est le parc-école, hein? Ce n'est pas la cour d'école.

M. Carmant : Oui. Non. Je sais. Je suis allé visiter.

Mme Desilets (Andréane) : C'est un parc municipal.

M. Carmant : Oui. Mais l'entrée de l'arrière de l'école pour les jeunes qui rentrent à la garderie. Je veux juste que ce soit clair, là, ce n'est pas pour sept mètres, mais vraiment pour la proximité.

Hier, on nous a parlé beaucoup, là, de l'impact du logement transitoire. Est-ce que... Puis c'était bien. Est-ce que... Est-ce que ces gens-là utilisent également le centre de consommation supervisée?

Mme Desilets (Andréane) : Oui, oui, oui. Tout à fait. C'est sûr qu'il y a les gens qu'il faut peut-être plus «coaxer», excusez-moi le mot, inciter, parce que ça ne reste pas un réflexe, hein? Ce n'est pas parce que les espaces de consommation supervisée existent que les gens ont systématiquement le réflexe d'y aller. Ça prend du temps. Il faut développer une confiance...

Mme Desilets (Andréane) : ...il faut développer un lien, il faut... C'est beaucoup d'énergie déployée, et, au bout d'un an, je vous dirais que ceux qui auraient besoin de l'utiliser l'utilisent, mais ça a quand même pris beaucoup de temps.

M. Carmant : O.K. Puis un des enjeux qui nous amènent aussi, c'est la consommation à l'extérieur du site.

Mme Desilets (Andréane) : Tout à fait.

M. Carmant : Comment... Comment on améliore le contrôle de ça?

Mme Desilets (Andréane) : C'est sûr que quand, pour mes intervenants, puis là on parle plus au niveau du plancher, puis je vais passer la parole à ma collègue Sophie qui s'occupe justement de l'extérieur et de la cohabitation, qui est coordonnatrice, c'est sûr que, si le SCS est fermé, l'espace de consommation supervisée, et qu'on n'a pas d'autre option à donner aux gens, c'est plus difficile, à ce moment-là, de gérer la consommation à l'extérieur. Donc, bien sûr que quand l'espace de consommation supervisé est ouvert et que la personne consomme à l'extérieur, les équipes sur le terrain vont inciter la personne à venir à l'intérieur consommer.

Mme Tousignant (Sophie) : Absolument, oui. En fait, j'ai deux intervenants qui sont constamment sur le terrain pendant les heures d'école, en plus de brigades de propreté également qui se présentent et qui se promènent, et tous ces gens-là, en fait, sensibilisent les personnes qui se retrouvent aux abords de l'organisme à d'ailleurs ne pas consommer près de l'école, bien évidemment, quand les gens ne sont pas nécessairement au courant, d'ailleurs, que c'est une école. Mais nous, dès qu'on a averti les gens, en général, je peux vous dire que, 99,9 % du temps, ils se dirigent vers la ressource et ils sont contents qu'il y ait un site de consommation supervisée et d'être en sécurité à l'intérieur

M. Carmant : O.K. M. le Président, je passerais la parole à ma collègue.

Le Président (M. Provençal) : Oui. Alors, Mme la députée de Louis-Riel.

Mme Boivin Roy : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation jusqu'à maintenant et les explications que vous nous donnez. On comprend que c'est un engagement personnel depuis de nombreuses années, et c'est tout à votre honneur.

À la lumière de ce qu'on vient de se dire entre nous — merci — est-ce que vous pouvez nous en dire davantage sur les démarches de consultation, les démarches d'information, les démarches de concertation qui ont été entreprises en amont du projet, à la fois au niveau des résidents, au niveau des partenaires institutionnels, au niveau des milieux scolaires? Ce serait ma première question. Et ma deuxième question : Fortes de ces constats-là, comment est-ce que les... ce que vous avez réalisé est venu impacter les démarches que vous avez faites au niveau de l'implantation? Comment c'est venu influencer l'implantation et les stratégies de cohabitation?

• (12 h 30) •

Mme Desilets (Andréane) : Je vais passer la parole bientôt à ma collègue Sophie, qui va pouvoir, en fait, dire ce qui a été mis en place dernièrement, mais, bien en amont, en fait, de la construction du projet, on avait en effet rencontré l'école, on avait fait une consultation citoyenne avec la ville de Montréal, dans les locaux de la Ville de Montréal. On a fait aussi une consultation sur place avec les partenaires. Le SPVM était là, il y avait le CIUSSS, il y avait d'autres organismes, il y avait avait le... donc il y avait vraiment plusieurs personnes assises autour de la table pour répondre aux questions. Et aussi, tu sais, les citoyens pouvaient venir demander n'importe quelles questions. On n'était pas ouverts, là. Il n'y avait rien de fait. Donc, les gens, à ce moment-là, pouvaient poser des questions de... Comment ça fonctionne? Est-ce qu'on peut venir voir? Bon, tout ça. On a fait quand même beaucoup... On a fait du porte-à-porte, on a fait des brigades, on a déployé des brigades. Et là, ça, c'est, mettons, trois ans, deux ans avant la construction. Et, dans la... juste l'année avant, Sophie, elle va continuer sur la liste, là.

Mme Tousignant (Sophie) : Et on avait le comité bon voisinage. On est sur différents comités itinérance, dont celui de Verdun et de Saint-Henri. On a installé, en 2022, une brigade de propreté pour sillonner vraiment le quartier Saint-Henri au complet. On a également une intervenante en cohabitation qui est dédiée à l'école Victor-Rousselot, qui était là près d'un an avant l'ouverture du site et qui faisait des tournées avec également deux brigadiers qui nettoyaient les abords du parc-école. On est aussi en constante collaboration avec le SPVM, la ville de Montréal, les différents acteurs du quartier comme le... également, et on a rencontré à... des rencontres avec le poste de quartier 15. On a fait également la Rue en fête à plus de... la troisième édition, en fait, afin de préparer notre arrivée également dans le secteur.

Mme Desilets (Andréane) : Qui se faisait dans la cour d'école, qui est un événement, en fait, pour inviter les gens à venir nous parler. Ça, c'était en amont de l'ouverture, bien sûr.

Mme Tousignant (Sophie) : On a également fait des portes ouvertes pour inviter les gens à venir visiter l'organisme et voir, en fait, qu'est-ce que ça a l'air réellement à l'intérieur.

Mme Desilets (Andréane) : Et suite... on a fait aussi beaucoup d'actions, hein? On s'est réajustés quand on a vu qu'il y avait des choses... Vous le savez, je veux dire, quand on déploie des projets, des nouveaux projets, il y a des choses qu'on peut prévoir puis il y a des choses qui sont plus difficiles à prévoir. Donc, il faut être en constante évolution et constante collaboration aussi à ce moment-là...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

Mme Desilets (Andréane) : ...dès qu'on est arrivé, on a dû mettre les choses en place. Il y a une liste quand même assez importante de choses.  

Mme Tousignant (Sophie) : Dans le mémoire, on a ajouté, en fait, des intervenants supplémentaires. On a ajouté des offres de brigade de propreté. On a également... un déploiement par une tierce partie, l'ASDS, qui ont une dyade également autour de l'école pour s'assurer. Le SPVM déploie davantage de patrouilleurs à pied, plusieurs patrouilleurs à vélo également aux alentours de l'organisme. On a fait l'installation de l'éclairage et des caméras de sécurité supplémentaires à nos frais. On a également travaillé en partenariat avec les... On a également... Là, on fait vraiment de la sensibilisation également au quotidien à tous les gens qui nous approchent.

Mme Desilets (Andréane) : Oui. Puis on a fait aussi de la sensibilisation avec les travailleurs des travaux publics, aussi, avec la ville de Montréal. Donc, vraiment, là, on fait quand même beaucoup au niveau de la cohabitation, je pense qu'on démontre notre bonne foi ici.

Mme Tousignant (Sophie) : Nos intervenants sont très appréciés sur le terrain par tous les acteurs. Voilà.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Le temps est écoulé. Alors, la suite appartient à la députée de D'Arcy-McGee.

Mme Prass : Merci, M. le Président. Vous venez de mentionner que les caméras que vous avez dû installer, par la suite, étaient à vos frais. Les autres mesures d'atténuation, il semble qu'il y a des gardiens de sécurité qui ont dû être engagés pour l'extérieur, etc. Est-ce qu'il y a eu un agent additionnel qui vous a été fourni pour le gouvernement ou c'était tout amputé de votre budget dont la mission et de desservir cette population?

Mme Desilets (Andréane) : Non. Il y a eu un montant de M. Carmant qui a donné un montant de 50 000 $ pour nous permettre de faire différentes actions, dont, justement, les gardes de sécurité à la rentrée scolaire, malheureusement, qui n'a pas donné le résultat escompté. Mais aussi, on a ajouté une brigade de propreté de plus qui, ça, a quand même un excellent impact, mais c'est pour la première année. Donc là, cette année, il n'y a pas ces mesures-là non plus. Donc, pour la cohabitation et les frais qui pourraient en découler, présentement, c'est la ville de Montréal qui défraie.

Mme Prass : Et, pour vous, vous avez parlé des mesures que vous avez prises pour la concertation en amont. Pour vous, qu'est-ce qui a mal tourné? Parce que, clairement, on l'a vu dans les médias, les parents, surtout les parents des jeunes à l'école Victor-Rousselot, qui ont témoigné hier, ne ressentent... ressentent toujours ce sentiment d'insécurité...

Mme Desilets (Andréane) : Cette crainte, tout à fait.

Mme Prass : ...cette crainte. Qu'est-ce que vous pensez, a mal tourné ou qu'est-ce qui aurait pu être fait de façon différente? Justement parce que là, potentiellement, vous allez déménager justement pour s'assurer que la même chose ne se répète pas. Quelles sont les leçons que vous avez tirées et qu'est-ce que vous auriez fait différemment?

Mme Desilets (Andréane) : Bien, je pense que, pour notre part, parce qu'il y a mille et une choses qu'on aurait pu faire différemment, mais, mais pour notre part, je pense qu'au niveau de la communication, on a appris des choses aussi. Il y a peut-être des meilleurs mécanismes à utiliser. Je pense que, malheureusement, et, tu sais, on ne s'en sort pas, je veux dire, on a quand même fait lever un building de terre pendant la COVID, ce qui a quand même limité énormément notre temps, notre capacité de communiquer avec nos voisins malheureusement. Mais, après ça, l'acceptabilité sociale, tu sais, c'est gros pour La Maison Benoît-Labre à porter dans un contexte où, tu sais, les rues sont comme elles sont actuellement à Montréal et la situation et les crises ne font que se multiplier.

Donc, oui, nous, on aurait pu mieux communiquer. Est-ce que ça... on serait au même résultat? Je ne suis pas sûre, moi, que ça aurait eu tant d'impacts, sincèrement, je pense que ce qui va avoir des impacts, c'est si on communique à la population ce qui se passe, si on sensibilise, si on fait des campagnes pour expliquer l'ampleur des crises, des multiples crises et quels en sont les impacts. Parce que, quand on ne comprend pas un phénomène, on a peur. Quand on comprend ce qui se passe, c'est un peu moins épeurant. Souvent, c'est ce que les parents nous rapportent, c'est que ce n'est pas qu'ils ont tant peur, c'est qu'ils ne savent pas quoi faire. Et, à ce moment-là, nous, on en a des outils. Et ce qu'on pourrait faire et ce qu'on pourra faire, c'est, bien sûr, mieux outiller, en fait, notre communauté à mieux répondre ou savoir quoi faire à ce moment-ci, quand ils ne se sentent pas en sécurité. Mais je pense que ça va plus large que ça, bien sûr.

Mme Prass : Parce que vous mentionnez dans votre mémoire aussi que, quand vous vous êtes pointées vers la ville...

Mme Prass : ...certaines ressources du réseau de la santé, c'était des portes tournantes et, comme j'ai dit, justement pour éviter que la situation que vous vivez se reproduise avec un déménagement, qu'est-ce qui peut être amélioré? Qu'est-ce qui peut être changé, justement, pour s'assurer que vous avez tous les moyens à votre disposition pour faire cette sensibilisation, pour faire cette communication, pour vous assurer que, quand vous allez vous implanter la prochaine fois, que ce sera pour de bon, disons?

Mme Desilets (Andréane) : Je ne pense pas que ça va passer parce que moi, je vais être capable de faire, je pense que ça va passer parce que, collectivement, on va être capable de le faire. Et, collectivement, il faut comprendre que l'itinérance, la dépendance, la toxicité des drogues, c'est l'affaire de tous et de tous les paliers. On ne peut pas remettre la responsabilité de ça à une personne uniquement. Chacun a sa part de gâteau. Les groupes communautaires ont une part à jouer, mais le gouvernement et chacun de ses paliers en a.

Et ça, la journée où tout le monde sera capable d'être assis à la table ensemble et discuter autour de comment on fait les choses et comment chacun prend sa part de gâteau, je pense qu'on va arriver à quelque chose. Mais je réitère que je ne crois pas que ce qui est dans le projet de loi actuellement permet ça.

Mme Prass : Vous avez tout à fait raison, c'est une collaboration qui doit se faire avec tous les partenaires, et chacun a son rôle à jouer, et on espère qu'ils vous répondront présent cette fois-ci, justement, pour... parce qu'on comprend, évidemment, c'est un enjeu très important, c'est des ressources très importantes, c'est un investissement de la part du gouvernement. Personne ne va voir un projet comme ça qui est essentiel ne pas réussir. Donc, c'est de s'assurer que tout le monde qui est autour de la table joue le rôle qui lui est demandé, justement, pour s'assurer qu'il y a un sentiment de... harmonieux, disons, dans le coin.

Vous mentionnez également, puis on l'a évoqué, bien, je l'ai évoqué à plusieurs reprises hier, toute la question d'un accompagnement et un accompagnement financier dans le cas d'un déménagement. Et là je comprends que vous mentionnez que c'est seulement lors des crédits que, là, vous avez appris, par exemple, que le financement ne serait pas nécessairement là pour un déménagement. On comprend que, déjà, les organismes communautaires, vous êtes serrés dans toutes les directions, vous n'avez pas de surplus, des fonds à encaisser, etc.

Donc, encore une fois, je pense que le gouvernement a cru en vous en premier lieu pour développer le projet, et là il faut que ce soutien continue avec un déménagement qui serait en raison d'un projet de loi de la part du gouvernement. Donc, avez-vous commencé des conversations à ce sujet-là? Est-ce que vous avez bon espoir que cet accompagnement et ce financement sera là au moment où vous devriez déménager?

• (12 h 40) •

Mme Desilets (Andréane) : On n'a pas commencé, je pense qu'on s'est concentré sur ce qui... sur aujourd'hui, c'est quand même beaucoup pour... tu sais, pour nous, comme simples citoyens, ça fait que... Mais, tu sais, on a fait quand même nos devoirs, on est allé voir les locaux, dans une proximité, qui permettrait d'accueillir, on est allé quand même demander à des entrepreneurs qu'est-ce que ça coûterait si... tu sais, ont été chercher... pour se faire une tête aussi, parce que nous, on a besoin aussi d'avoir un minimum de... prévisibilité. Mon Dieu! je vais le dire et... je suis désolée, mais aussi, tu sais, quatre ans, ce n'est vraiment pas beaucoup. Moi, ça m'a pris sept ans, là, faire ce projet-là. Quatre ans, ce n'est vraiment pas beaucoup, là. En fait, je pense que c'est impossible, sincèrement, malheureusement.

Mme Prass : Compte tenu du temps que ça vous a pris, entre milieux, pour...

Mme Desilets (Andréane) : Compte tenu... Oui. Exact.

Mme Prass : L'expérience que vous avez vécue.

Mme Desilets (Andréane) : Oui, avec l'expérience, je vous dirais que c'est ça. Sept ans... peut-être, 10 ans, encore mieux, mais quatre ans, je ne sais pas comment.

Mme Prass : Et je vous avoue, moi, c'était un modèle unique, quand je suis venue visiter les logements d'inhalation, centres de jour. Pensez-vous maintenant que, compte tenu où vous êtes situés, que, peut-être, avoir tous ces services dans un même immeuble était un élément qui a mené à ce que ce soit problématique?

Mme Desilets (Andréane) : Je ne pense pas que c'est le modèle, le problème. Je pense que c'est comment on implante le modèle qui est plus complexe. Le modèle a fait ses preuves, hein, c'est... tu sais. Oui, nous, au Québec, on est comme surpris, là, mais je veux dire, ces modèles qui sont des centres multiservices existent partout à travers le Canada et...

Mme Desilets (Andréane) : ...en fait, c'est un modèle qui a démontré énormément, en fait, de bénéfices, incluant sur la mutualisation des coûts, là, de l'entièreté de l'espace. Ceci dit, je pense que c'est vraiment dans l'implantation que ça pourrait avoir un impact, bien sûr. Je pense qu'on a besoin de mieux travailler ce côté-là, tout le monde ensemble, définitivement.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup. Alors, je... le relais au député de Saint-Henri—Sainte-Anne.

M. Cliche-Rivard : Merci à vous deux. Merci à vous d'être là aujourd'hui puis merci de sauver des vies au quotidien, vous et les groupes qu'on a entendus dans les dernières semaines, bien, les derniers jours. Merci de votre travail.

C'est évident que pour moi, j'ai lu avec attention votre mémoire, puis il y a quand même là un léger changement de perspective, là, qu'on se le dise. Vous prenez, vous recevez le projet de loi, puis vous dites : Bon, O.K., mais ça va prendre de l'aide logistique, puis ça va prendre de l'argent, ça va prendre de l'aide financière. C'est quand même nouveau, ça, on l'absorbe. Puis, moi, je prends l'engagement de vous accompagner puis de vous soutenir là-dedans. Je pense que vous prenez la bonne position, vous prenez la bonne décision, mais encore faut-il que le ministre, lui, prenne les bonnes positions puis les bonnes décisions.

Vous l'avez dit, déménager le site, ça va coûter 7 millions, là, en tout et pour tout, c'est quand même beaucoup de sous. Vous, c'est impossible, je veux dire, ça peut être impossible de le faire. Pour moi puis pour les citoyens, là, une rupture de service, ce serait absolument catastrophique, ça, on ne peut vraiment pas se permettre ça, vous l'avez dit. Puis c'est quand le SCS est fermé que c'est pire. Puis on a le rapport récent de la coroner Godin qui nous dit qu'on peut éviter des morts, là, très clairement quand des sites de consommation supervisée puis des ressources sont disponibles.

Donc, j'utilise mon temps pour tendre la main au ministre pour qu'on se rencontre, là, ensemble cet été rapidement avec la ville de Montréal pour faire avancer des démarches conjointes, avec la SDC qui n'est pas très loin non plus, avec le marché Atwater qui n'est pas très loin non plus, pour qu'on trouve une solution. Moi, je vous vois en mode démarche. Vous avez déjà fait appel à des contracteurs, vous avez déjà vérifié la disponibilité de terrain. Moi, je suis quand même très, très heureux de votre proactivité puis de vos remarques constructives aujourd'hui. Ça fait que moi, je prends cet engagement-là, mais je demande au ministre de prendre aussi cet engagement-là, de vous accompagner, parce que je reviens là-dessus, là, puis je vais vous laisser là-dessus, si on perdait les services dans le sud-ouest, ce serait absolument catastrophique. Puis on sait qu'on perd deux personnes par jour au Québec de la crise des surdoses, ça pourrait être bien pire. Donc, il vous reste une minute, mais peut-être me dire qu'est-ce qui arriverait si on perdait les services dans le Sud-Ouest.

Mme Desilets (Andréane) : Mais, vous savez, le projet n'est pas né parce que je me suis réveillé un matin, hein, c'est des services qui étaient essentiels et nécessaires. On devait collectivement développer ces services-là. On s'est assis pendant plusieurs années pour essayer de réfléchir, voir qu'est-ce qu'on allait prioriser parce, hey, la, la, qu'il manquait des services dans le Sud-Ouest particulièrement. Et il faut comprendre qu'à Montréal il y a peu d'organismes dans l'Ouest. Il y a nous, en fait, qui est au sud-ouest et ensuite il y a Ricochet qui est quand même beaucoup plus loin dans le West Island. Donc, ce serait vraiment très catastrophique. Ça aurait un impact non seulement sur les personnes qui fréquentent la ressource, mais sur l'entièreté de l'écosystème de notre communauté. Ça veut aussi dire, tu sais, autant les enfants et autant les parents qui sont stressés de passer devant... devant, tu sais, certains espaces, mais là, les gens, nous, sont à l'intérieur puis il y a des intervenants, ça fait qu'on n'est plus là. Je vous dirais que la situation risque d'être un peu plus complexe, donc je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure façon d'arriver à nos fins, finalement.

Donc, bien sûr qu'il y aura énormément de travail à faire. On est prêts à faire ça, mais ça ne peut pas reposer, en fait, sur un espèce de quatre ans qu'on n'est pas trop certain où est-ce qu'on s'en va. Il faut que le plan soit clair, il faut que l'argent soit au rendez-vous, tu sais, il faut absolument... Nous, on réanime des gens à tous les jours, là. Ça n'a pas de bon sens puis c'est complètement inacceptable, on est au Québec, et c'est des jeunes, c'est des jeunes dans la vingtaine, c'est des jeunes qui sortent des centres jeunesse, qui n'ont pas eu le soutien nécessaire, qui se retrouvent complètement désaffiliés, et qu'on doit faire des manoeuvres de réanimation. Ça n'a pas de bon sens. Ça, moi, comme parent, ça me choque énormément. Je trouve ça épouvantable. Et c'est ça qui s'en vient.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Moi... très bien passer votre message. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Gentilcore : Merci. Moi, j'aimerais reculer un peu parce qu'hier on a reçu la mairesse de Gatineau et elle... en fait, ses ressources sont séparées, hein, elle a son site de consommation qui est dans un lieu, son centre de jour qui est ailleurs, puis elle nous disait : Je ne reçois aucune...

Mme Gentilcore : …par rapport à mon site de consommation, mais je reçois beaucoup de plaintes par rapport à mon centre de jour. Alors, ma question est la suivante. Du fait que vos ressources soient combinées dans un même lieu, est-ce qu'on est vraiment certains qu'avec ce projet de loi on s'attaque à la bonne chose? Vous, êtes-vous convaincue que, même si on vous déménage, là, ça va régler le problème?

Mme Desilets (Andréane) : Absolument pas, absolument pas, absolument pas. Les enjeux de cohabitation existaient. Quand on a emménagé, là, à Saint-Henri, au départ, dans le sous-sol de l'église, ça a fait exactement la même chose. Pendant à peu près un trois mois, on recevait des appels de façon continue. Les citoyens étaient comme en hypervigilance. On l'a vécu, mais, comme beaucoup, beaucoup, beaucoup décuplé, mettons, l'année passée, mais ça n'a rien à voir avec le SCS. Tout ça a à voir avec une partie d'un écosystème qui est ébranlé. On pourrait être n'importe quelle autre ressource qui aurait un impact sur l'écosystème, et je pense que ça donnerait le même résultat.

Mme Gentilcore : Donc, vous-mêmes, si on prend votre site de consommation supervisée, qu'on l'envoie ailleurs, dans les faits, au niveau des opérations, au niveau de l'impact, au niveau de la cohabitation, ça pourrait ne rien changer.

Mme Desilets (Andréane) : Bien, moi, je pense que ça va être plus complexe. Sincèrement, je pense que ça va être plus complexe, mais, comme je dis, on est ouverts.

Mme Gentilcore : Tout à fait, je l'entends, mais moi, je voulais quand même voir… très bien. Bien, je… c'est la question que j'avais pour vous. Donc, je pense que vous avez fait un bon tour, puis merci d'être venues. C'était très éclairant. J'avais hâte de vous entendre, de vous parler. Puis bonne chance pour la suite.

Mme Desilets (Andréane) : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Merci, Mme la députée. Alors, merci beaucoup à Mme Andréanne Désilets et Mme Sophie Tousignant pour leur participation, leur contribution, mais surtout d'être venues en présentiel pour échanger avec les membres de la commission.

Sur ce, je suspends des travaux jusqu'à 15 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 49)


 
 

14 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 15 h 01)

Le Président (M. Provençal) :Alors, bon après-midi à tous. La Commission de la santé et des services sociaux reprend ses travaux. Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 103, Loi visant principalement à réglementer les sites de consommation supervisée afin de favoriser une cohabitation harmonieuse avec la communauté.

Cet après-midi, nous entendrons les témoins suivants : BRAS-Montréal, monsieur... BRAS-Outaouais — ce n'est pas de ma faute! — BRAS-Outaouais, excusez-moi, excusez moi, M. Michel Parazelli et Mme Mylène Drouin.

Alors, sur ce, bienvenue aux représentants du BRAS-Outaouais, c'est-à-dire MM. Vaillant, St-Onge, Gauthier et Mme Provost-Auger. Alors, je vous cède la parole 10 minutes, et on procède aux échanges. À vous.

M. Vaillant (Logan) : Merci, M. le ministre, Mmes et MM. les membres des commissions, merci de nous accueillir aujourd'hui et de prendre le temps de nous entendre. Merci de nous donner l'opportunité de porter la voix du BRAS-Outaouais mais surtout celle des personnes que nous accompagnons, que nous soutenons et avec qui nous travaillons à chaque jour.

Mon nom est Logan Vaillant, je suis directeur général du Bureau régional d'action sida Outaouais, donc le BRAS. Je suis accompagné d'Andréanne Provost-Auger, notre responsable des communications, et d'Adrien St-Onge, le coordonnateur de notre service d'accompagnement à la consommation.

Je tiens à spécifier qu'au BRAS on parle de «service d'accompagnement à la consommation», qu'on appelle un SAC, plutôt que de «service de consommation supervisée», qui est le SCS qui est nommé dans le projet de loi. On estime qu'on utilise une approche qui est égalitaire, dans nos interventions. Notre rôle, c'est d'accompagner les personnes, plutôt que de les superviser, quand ils font l'utilisation de substances psychoactives.

Permettez-moi de commencer par vous parler du centre-ville de Gatineau, plus précisément du Vieux-Hull. C'est un secteur... Ce secteur est un lieu chargé d'histoire, marqué par l'effervescence, la mixité sociale et une culture de proximité unique. Pendant des décennies, le Vieux-Hull...


 
 

15 h (version non révisée)

M. Vaillant (Logan) : ...est un carrefour vibrant, un quartier ouvrier festif, vivant, où les cafés, les bars, les salles de spectacles et les commerces de quartier cohabitent avec les espaces publics et les réalités sociales plus dures. Le «nightlife» y a toujours occupé une place importante, c'est toujours vrai aujourd'hui, et on continue d'en faire partie intégrante. Cette vitalité s'accompagne aussi, depuis longtemps, de la présence de la pauvreté, de la consommation et de l'itinérance. Ces enjeux ne sont pas récents, ils sont enracinés dans l'histoire du quartier, ça en fait pratiquement partie, de l'ADN, et ils appellent des réponses humaines, structurées et cohérentes. C'est dans cet esprit que le BRAS-Outaouais œuvre depuis maintenant 35 ans.

Fondé en 1990, notre organisme est enraciné dans la région. Nous offrons des services de prévention, d'intervention, de réduction des méfaits, de soutien psychosocial, d'analyse de substances et d'accompagnement dans les soins. Nous travaillons avec des personnes vivant avec le VIH, à risque d'infection transmise sexuellement, ou par le sang, ou utilisant des substances psychoactives, toujours avec une approche centrée sur la dignité humaine. Ce travail ne serait pas possible sans notre équipe, plus de 35 personnes compétentes, engagées, qui créent, chaque jour, un espace sécuritaire, respectueux et humain, un espace d'écoute, un espace de répit, un espace de possibilités.

Depuis 2022, notre service d'accompagnement à la consommation, notre SAC, est installé de façon permanente au centre-ville, mais son histoire a commencé bien avant ça. Le SAC a été lancé il y a cinq ans, en 2020, dans une tente installée sur l'ancien site Guertin, que vous connaissez aujourd'hui comme l'espace Transition. Il s'agissait d'une réponse d'urgence à la montée des surdoses mortelles, notamment liées au fentanyl. Notre projet est né d'une collaboration forte avec la direction de la santé publique, la ville de Gatineau et notre service de police. C'est d'ailleurs la direction de la santé publique elle-même qui a recommandé en 2022 d'établir un site fixe, dans une optique de santé publique durable.

Et les résultats parlent d'eux-mêmes : près de 5 000 visites annuelles, aucune surdose mortelle recensée, plus de 100 références vers des services de soins, une baisse notable de la consommation visible dans le secteur, et une réduction du matériel abandonné sur la voie publique, un sentiment de sécurité accru au centre-ville de Gatineau, et ce, malgré la forte augmentation des personnes en situation d'itinérance. D'ailleurs, contrairement à ce que plusieurs imaginent, plus de la moitié des personnes qui utilisent nos services ne vivent pas en situation d'itinérance. Il s'agit de personnes comme vous et moi, qui avez un emploi, des personnes de tous les horizons, des gens avec des logements, des gens avec des enfants.

Mais toutes les personnes qui vivent une réalité de consommation ont un besoin d'accès à du matériel de consommation sécuritaire, à un service d'analyse de leurs substances, et surtout, à un lieu qui leur permet d'être accompagnées lorsqu'elles consomment. Mais voici une vérité concrète : ces personnes ne marcheront pas 30 ou 40 minutes pour recevoir ces services. Les données, et notre expérience, sont claires, la limite raisonnable d'accessibilité, c'est 15 minutes à pied. Au-delà de ça, les personnes ne viendront pas, nous perdrons le lien et nous perdrons des vies. C'est pourquoi notre emplacement actuel est essentiel. Nous sommes là où le besoin est, dans un secteur connu, accessible, fréquenté, où la cohabitation fonctionne, et cette cohabitation-là, elle n'est pas théorique, elle est réelle.

Oui, on est situés à moins de 100 mètres de deux services de garde, mais nous comptons, parmi nos alliés, le CPE, qui est situé à seulement 60 mètres de nos locaux, ainsi que les voisins immédiats de notre SAC. À ce sujet, les membres de la commission ont reçu, annexées à notre mémoire, 23 lettres d'appui à notre projet, dont les lettres d'un des CPE, de nos voisins, de la direction de la santé publique et de la ville de Gatineau. Un appui explicite, un témoignage fort, qui prouve que la cohabitation est non seulement possible, mais bien réelle à Gatineau. Or, avec le projet de loi tel qu'il est formulé, cet équilibre est menacé.

Le Vieux-Hull est un quartier dense, il est parsemé d'écoles, de garderies, de parcs. Il sera pratiquement impossible de se relocaliser dans le secteur tout en respectant les nouvelles distances minimales imposées. Et si nous devons quitter ce secteur, nous ne pourrons plus rejoindre les personnes les plus à risque. Une relocalisation aurait des conséquences graves pour nous. On estime que les coûts, à eux seuls, sont d'environ 4,7 millions. On est un organisme communautaire, on n'a pas cet argent-là. On perdrait la proximité avec la clientèle, il y aurait un réel risque de rupture de services, puis on verrait la fin d'une cohabitation qui est déjà réussie.

Alors, qu'est-ce qu'on demande aujourd'hui? Une clause de droit acquis pour les services bien implantés comme le nôtre, un soutien aux mécanismes de cohabitation, plutôt qu'une approche fondée sur l'exclusion géographique, et un financement complet si une relocalisation devait, malgré tout, avoir lieu. Le BRAS-Outaouais est prêt à collaborer, mais pour que cette collaboration porte fruit, elle doit s'appuyer sur la réalité du terrain, sur les résultats concrets et sur une volonté commune de protéger les...

M. Vaillant (Logan) : ...la santé publique ne se fait pas contre les communautés. Elle se fait comme elles.

M. St-Onge (Adrien) : J'aimerais prendre le temps simplement de remercier tout le monde au nom de l'ensemble des personnes qui oeuvrent au BRAS depuis plusieurs années dans la lutte au niveau du VIH, mais dans la lutte au niveau des surdoses présentement, de vous remercier de nous laisser une voix pour qu'on soit ici à porter la voix des gens qui sont décédés, qu'on a eu la chance d'accompagner, mais le malheur de constater leur décès. Surtout à compter de 2020, quand on a mis sur pied, en collaboration avec la Santé publique puis le CIPTO, notre site de prévention de surdose, je crois qu'il faut faire honneur à ces personnes-là, qui sont décédées, puis à leurs familles. Puis, pour nous, c'est important de venir aujourd'hui, puis de transmettre le savoir qu'ils nous ont transmis, puis que leurs morts n'ont pas été inutiles. Puis je tiens vraiment à remercier l'équipe de travail qui constate ça jour après jour. Puis c'est en leurs mots, en leur nom, merci de nous permettre ça ici. Merci.

M. Vaillant (Logan) : Pour conclure, M. le ministre, membres de la commission, on demande aujourd'hui à Québec d'octroyer au BRAS une clause de droit acquis et d'ainsi nous permettre de continuer à offrir un service essentiel à Gatineau.

On prend quand même le temps de vous remercier pour votre temps, pour votre écoute et pour votre considération aujourd'hui.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Mme, voulez-vous ajouter quelque chose? Non. Ça va. Alors, M. le ministre, on débute l'échange, s'il vous plaît, avec nos participants.

M. Carmant : D'accord. Bien, merci beaucoup pour ce beau témoignage. Puis bravo pour votre travail aussi.

Ramenez-nous dans le temps, là, de l'ouverture puis parlez-moi de comment ça s'est implanté, puis la collaboration que vous mentionnez avec la Santé publique et la ville. C'est quoi, les recettes du succès, là, tu sais? C'est un peu ça qu'on cherche dans le projet de loi, là, les recettes du succès.

M. Vaillant (Logan) : Je pense que... bien, on pense, en fait, que de chercher une solution mur à mur, ça ne va pas fonctionner parce que les milieux sont tous différents. Chez nous, ce qui fonctionne, c'est que notre organisme a 35 ans. Ça fait 30 ans qu'on a des travailleurs de rue qui sont sur le terrain, qui travaillent avec les populations. Nos services sont déployés à partir de l'expérience vécue des gens qu'on côtoie, de l'expérience de notre Direction de la santé publique, de ce qu'on peut témoigner au centre-ville de Hull et à Gatineau en général. Donc, de dire qu'il y a une solution magique, clé en main, je ne pense pas que ce soit réaliste. Puis je pense que ce serait de nier à d'autres organismes que le nôtre la possibilité d'avoir une solution qui répond à leurs besoins.

Pour nous, ce qui fonctionne, c'est qu'on travaille avec la ville, on travaille avec le service de police, on travaille avec la Direction de la santé publique. Puis, surtout, on est... on est présents dans le milieu depuis longtemps. Donc, pour répondre à votre question, je ne crois pas qu'il y a une solution clé en main, malgré que je comprends votre intention puis votre désir d'en trouver une.

M. Carmant : Mais c'est n'est pas... ce n'est pas tout le monde a la même chose. Mais il y a... tu sais, d'habitude, quand quelque chose fonctionne avec des caractéristiques fondamentales... La relation avec le CPE, par exemple, vous arrivez là : C'est quoi les premières interactions avec le CPE?

• (15 h 10) •

M. Vaillant (Logan) : Bien, dans notre milieu, en fait, notre présence vient diminuer la présence de consommation visible parce que les gens ont un lieu où ils peuvent se rendre. Donc, les CPE voient moins de personnes consommer sur la rue, voient moins de matériel souillé. Puis, ça, ça fonctionne très bien.

Je pense que la mesure de cohabitation... si on cherche un élément qui peut fonctionner partout, de bien financer les mesures de cohabitation pour qu'on ait des gens qui soient dédiés à travailler avec les secteurs, c'est... c'est probablement la meilleure solution. Puis, ça, c'est une solution qui pourrait être universelle. Parce qu'on a tous quand même besoin de faire connaître l'importance de nos services, de travailler avec les milieux, comme avec nos voisins, pour faire sûr qu'ils ont un port d'attache, quelqu'un avec qui ils peuvent parler quand il y a un problème. Plutôt que de se rendre faire une plainte à la ville, de se rendre à faire une plainte à la police, de pouvoir nous appeler, puis que nous, on puisse se rendre sur place puis intervenir avec les personnes qui en ont besoin et sensibiliser les gens à la vulnérabilité humaine, essentiellement, là.

M. Carmant : Donc, comment ça fonctionne?

M. St-Onge (Adrien) : Si je peux me permettre, on a une caractéristique qui est très particulière dans le centre-ville de Hull, le sentiment d'appartenance des gens qui l'habitent, mais des gens qui l'occupent simplement est très élevé à la base. Puis il y a un historique, comme l'a mentionné Logan. Ça fait 35 ans que le BRAS est là. Et, quand il y a des projets qui émergent et qu'il y a... que c'est le BRAS, il y a un sentiment de...

M. St-Onge (Adrien) :  …confiance qui est… qui est là à la base, parce que les gens du quartier nous connaissent depuis tellement longtemps. Puis merci à nos anciens collègues d'avoir, tu sais, semer ce chemin-là. Donc, quand on entreprend des projets… Ah! O.K., tu sais, vous allez aider. Puis il y a… cette confiance-là ouvre un dialogue qu'ils sont confiants que ce qu'on dit, ce n'est pas n'importe quoi. Puis de favoriser un sentiment d'appartenance des résidents envers notre site d'accompagnement à la consommation, ça, ça a été une clé qui est vraiment gagnante aussi.

M. Carmant : O.K., mais. Mais on s'entend qu'au CPE il n'y a personne qui consomme, là. Donc… tu sais, comme quand vous vous êtes implanté, qu'est-ce que vous avez dit au CPE à côté?

M. St-Onge (Adrien) : Bien, une réponse que le CPE nous a donnée, là, qui était très intéressante, c'est peut-être que, bon, je n'amènerai pas les enfants ou moi-même consommer là, mais par contre, si je vois quelqu'un consommer, je vais être capable d'aller dire : Aïe! Check, de l'autre bord de la rue, il y a... il y a ce service-là qui est là. Puis ça, c'est une rassurance pour cette personne-là. C'est ce qu'elle nous a dit.

M. Vaillant (Logan) : Je vais me permettre de rajouter, le CPE qui a signé la lettre d'appui pour nous, la propriétaire est dans le secteur depuis au-dessus de 50 ans et elle a toujours été là. Puis elle nous a parlé, bien, on a été la voir, naturellement, pour faire signer la lettre. Puis elle nous a expliqué que jadis, ses voisins, c'était une crack house, donc, le secteur a déjà la présence de consommation. Il y a déjà des crack house dans le milieu, il y a déjà des lieux de consommation très connus. La problématique était là bien avant nous. Donc, que nous, on s'implante puis qu'on dise : Bien, les gens qui consomment à la rue, on va leur donner un endroit où le faire, on va les accompagner, on va faire ça pour… ils ont… ils sont dans un état acceptable avant de les retourner, comme, qu'ils quittent notre site d'accompagnement essentiellement. C'est sécurisant pour nos voisins, c'est sécurisant dans le milieu. Puis on est très conscients que si on était retirés de cet environnement-là, la consommation ne quitterait pas avec nous. Elle serait là, elle serait présente, elle serait dans les rues, le matériel serait dans les rues. Sauf que nous, on n'y serait pas pour prévenir les surdoses mortelles.

M. Carmant : O.K., là, je vois que vous avez… juste me dire si c'est la bonne information, vous avez deux cubicules et un fumoir, c'est ça?

M. St-Onge (Adrien) : Oui, effectivement, le fumoir qui permet d'accueillir jusqu'à deux personnes, là, en simultané pour l'inhalation.

M. Carmant : Mais vous êtes 35 personnes, ça me semble… c'est quelque chose de gagnant, ça.

M. Vaillant (Logan) : On est 35 personnes à travailler au Bras Outaouais, mais on a une dizaine de services, mis à part le site d'accompagnement à la consommation. On a des travailleurs de rue, on a un centre d'hébergement pour femmes, un centre d'hébergement pour personnes avec le VIH, on fait de l'intervention, on a les groupes de soutien pour les hommes ayant des relations avec des hommes. On fait des ateliers dans les écoles, des ateliers en milieu de travail, puis on… notre offre de services est très large.

M. Carmant : Tout le monde vous connaît, là. O.K., ça aussi c'est gagnant. Et combien de personnes travaillent au site de consommation supervisée? Et quelles sont les heures d'ouverture?

M. St-Onge (Adrien) : Bien, c'est toujours selon la logique qu'on souhaite avoir deux intervenants ou intervenantes communautaires pendant les heures d'ouverture, mais aussi la présence d'un pair ou d'une paire aidante. Donc, ça… c'est trois personnes par quart de travail. On est ouvert sept jours sur sept, 365 jours par année, 7 heures par jour. On souhaiterait plus, mais c'est déjà quand même bon. Mais si on est capable de faire plus, on va être preneur, avec du financement. Mais dans le moment, pour nous, la formule gagnante, c'est minimum deux intervenants avec pair aidant, puis ça j'insiste parce que d'avoir une personne paire aidante qui a un vécu expérientiel, qui peut être présent pour faciliter le contact, mais faciliter le côté encore, tu sais, plus humain que la maison va procurer, bien, c'est extrêmement important.

M. Carmant : Et qui gère la... qui fait la… ce que vous parliez tantôt, là, la cohabitation, est-ce que c'est... Ça ne peut pas être ces trois intervenants-là?

M. St-Onge (Adrien) : Non, ça ne peut pas être ces trois intervenants-là. Sauf que je peux vous dire qu'on est une équipe avec beaucoup d'énergie puis beaucoup de cœur. Donc, ce qui se passe, c'est que l'équipe de travail, on va un peu se passer le flambeau pour, de un, tu sais, aller faire une petite marche autour avant l'ouverture. Moi, je vais prendre le temps avec ma collègue Andréanne au niveau des communications pour essayer de développer un comité, là, de cohabitation. Donc, c'est embryonnaire, mais tout ça, je vais être honnête, ça me crée une surcharge énorme parce que je dois investir beaucoup d'énergie. Est-ce que c'est nécessaire? Est-ce que j'aime ça? Est-ce que je suis content de voir les résultats? Oui, mais on...

M. St-Onge (Adrien) : ...on manque de ressources pour le faire.

M. Carmant : Puis quel est le soutien que vous avez pour ça de la ville et/ou de la Santé publique?

M. St-Onge (Adrien) : Dans le moment, au niveau de la ville puis de la Santé publique, on a des rencontres, là, une fois par mois ou un mois et demi, puis on brainstorm, on réfléchit à voir comment est-ce que, comme, on peut mettre en place différentes actions. L'ouverture est là, les discussions sont là, mais c'est quand on parle d'argent, je pense que vous... ça commence à être compliqué puis... Oui.

M. Vaillant (Logan) : La réalité actuelle, c'est que les demandes sont en croissance, mais notre capacité financière, elle ne l'est pas. Donc, on se retrouve à devoir faire des choix, présentement. Puis la cohabitation était déjà fragile, dans le sens qu'on n'a pas énormément de ressources pour aller sur le terrain à la rencontre des citoyens. On essaie, on a des comités de travail avec la ville et avec la Santé publique, mais on passait sous le radar. Puis là, avec le projet de loi qui a été déposé, on n'est plus sous le radar. Les gens parlent de nous, on a la préoccupation que les enjeux de cohabitation risquent... pas nécessairement de se pointer, mais que, maintenant que les gens savent qu'on est là, il va y avoir une sensibilité qui va s'être développée au niveau de notre milieu. Puis on veut mettre plus d'énergie à assurer une meilleure cohabitation puis à laisser comprendre aux gens que, par exemple, s'il y a quelqu'un qui consomme dans la cour d'école, on va aller les chercher puis on va les ramener chez nous, tu sais. On veut faire cette énergie-là, mais, présentement, on a des petits comités qui font un petit peu de travail ici et là, là.

M. Carmant : Bravo! Bravo! Et comment... avec seulement deux ou trois sites, là, comment vous faites pour éviter les files à l'extérieur? Parce que j'ai vu vos taux d'utilisation, là, qui sont quand même élevés. Comment ça se fait qu'il n'y a jamais de...

M. Vaillant (Logan) : Bien, on a un processus d'admission. Donc, les gens qui viennent utiliser les services sont accueillis, puis là je parle un peu à ta place, mais ils sont accueillis. On évalue les besoins. Il y a des gens qui viennent chercher du matériel de consommation, il y a des gens qui viennent voir si on a, parfois, une infirmière sur place, il y a des gens qui viennent chercher un café, de la soupe, il y a des gens qui viennent consommer. Donc, on évalue les besoins, puis ensuite il y a une trajectoire de services qui est déterminée. Puis tu peux ajouter.

M. St-Onge (Adrien) : Bien, je pense qu'il faut comprendre aussi, c'est que... je pense que je ne vous apprends rien, là, en Outaouais, la population qui consomme par inhalation est très élevée. Vous comprendrez que le rituel qui entoure fait en sorte aussi que, bon, la rapidité, là, puis l'hypervigilance qui s'ensuit pour des personnes qui consomme des stimulants, ça se passe plus vite. C'est là où je veux en venir. Donc, tu sais, c'est certain que, bon, les gens qui viennent inhaler vont... tu sais, on n'aura pas nécessairement une surveillance accrue à faire de 45 minutes, une heure, puis... parce que, bon, l'état d'inconscience, c'est beaucoup plus présent. Ça fait qu'il y a ça, mais il y a le fait qu'on a une équipe qui est vraiment chevronnée, puis, tu sais, on a mis des balises aussi assez claires que, comme, malheureusement, à cause du haut taux de fréquentation... puis plus ça s'en va, pour nous... ça nous inquiète, ceux qui consomment des opioïdes, par exemple, au-delà d'une heure, on ne peut pas continuer de faire une surveillance accrue, puis, dans le moment actuel, on n'a pas beaucoup de solutions pour diriger ces personnes-là. Vous comprendrez que l'urgence, ce n'est pas nécessairement l'endroit approprié quand la personne n'est pas en surdose mais c'est simplement qu'il y a un besoin de surveillance accrue.

M. Carmant : O.K. Bien, ça, c'est intéressant, ce que vous me dites là, parce qu'une des choses dont on n'a pas... peu parlé, à date, c'est... il y a un des articles qui... pas qui impose, là, mais qui demande d'avoir une trajectoire, justement, pour la... entre le site et les services médicaux. Donc, je pense que c'est quelque chose qui viendrait aider, également.

• (15 h 20) •

M. St-Onge (Adrien) : Bien, si je peux me permettre, on a... en Outaouais, on aime ça être rapides. Puis on... Tu sais, avec nos partenaires au niveau du CISSSO, du CRDO, avec par exemple Urgence-dépendance, il y a... il y a une trajectoire qui se dessine. Est-ce qu'il y a place à amélioration? Oui. Mais, heureusement, on est capables d'en discuter. Mais, tu sais, on est dans un contexte d'urgence. Il faut... Il faut mettre les bouchées doubles. Parce que, pour nous, tu sais, puis on l'a nommé, c'est beaucoup de pression.

Puis, tu sais, en dehors des heures d'ouverture, moi j'expliquais récemment, bon, j'arrive au SAC pour faire des heures administratives, tu sais, s'il y a quelqu'un que je vois sur le trottoir, qui n'est même pas sur le terrain, humainement, il faut intervenir. C'est important. Mais il n'y a pas 36 solutions dans le moment.

M. Carmant : Bien, je vous salue pour ça. M. le Président, je passerais la...

Le Président (M. Provençal) :Oui. Mme la députée de Louis-Riel.

Mme Boivin Roy : Merci, M. le Président. Merci à vous pour votre présentation aujourd'hui.

Je pense que vous nous avez bien parlé des conséquences concrètes pour une relocalisation, là, sur les usagers du service. Je pense que vous avez été clairs à ce niveau-là.

Si je vous amenais sur le fait que vous êtes l'un des deux seuls organismes qui offrent des...

Mme Boivin Roy : ...services de consommation supervisée en Outaouais. Comment vous voyez les conséquences régionales d'une éventuelle relocalisation pour le BRAS ou même la fermeture du site au niveau des services pour les personnes vulnérables? Comment vous voyez ça au niveau régional?

M. Vaillant (Logan) : Les gens vont mourir. Si on doit se relocaliser, c'est simple comme ça, les gens... c'est plate comme ça, mais les gens vont mourir. Parce que, si on n'est pas là où le problème existe, le problème continue d'exister. Donc, la raison pour laquelle on est ici pour vous parler aujourd'hui, c'est pour, justement, marteler le fait qu'on doit rester au centre-ville de Hull si on veut être efficaces dans notre approche.

On ajoute à ça, comme vous le mentionnez, qu'on n'est pas les seuls à offrir des services. Il y a le CIPTO, en Outaouais, qui a un site mobile, on a aussi un site mobile qui se déplace dans les festivals, qui permet de faire l'analyse de substances, qui permet de rejoindre les gens puis de les sensibiliser à ce qu'on fait, qui permet de l'accompagnement dans les festivals, pour les gens qui ont consommé puis qui ont un peu besoin de faire sûr qu'ils sont en sécurité. Donc, on est là. Si on devait fermer ou se relocaliser en dehors d'où il y a le besoin, dans un contexte où l'Outaouais est une des régions les plus touchées par les crises des surdoses, par la crise de la consommation, une région où les enjeux du système de la santé sont les plus pressants, bien, comme je l'ai dit tantôt, on est sûrs que les gens vont mourir de surdose parce qu'on ne sera pas là pour les aider et les soutenir.

M. St-Onge (Adrien) : Si je peux me permettre de rajouter, je pense qu'il y a beaucoup de gens de la population de l'Outaouais qui ont un sentiment d'être abandonnés en ce qui concerne le service de santé. Est-ce qu'ils ont raison ou tort, ce n'est pas à moi d'en répondre, nécessairement, mais ce sentiment-là est ressenti. Je pense que, s'il y avait une fermeture complète du site d'accompagnement en consommation, en Outaouais, il y a des gens qui vont être extrêmement choqués, avec un sentiment d'abandon et qu'ils sont littéralement exclus du système actuel. Puis j'ai plein de gens en tête, une communauté qui utilise le service, qui vont perdre espoir, littéralement.

Mme Boivin Roy : Il me reste encore du temps, M. le Président?

Le Président (M. Provençal) : Oui, une minute.

Mme Boivin Roy : Merci beaucoup. Comment vous voyez la mise en place et l'application de ce que vous appelez une clause grand-père ou une clause de droits acquis? Comment vous voyez ça en application, quand on garde à l'esprit l'essence même du projet de loi, évidemment, l'équité souhaitée entre les différents organismes, les enjeux qui sont soulevés depuis les deux derniers jours?

M. Vaillant (Logan) : Bien, on est sensibles à la motivation derrière le projet de loi, puis on comprend les préoccupations des gens, puis on veut continuer à y répondre. Donc, c'est sûr que pour nous, si on pouvait demeurer là où on est, on va quand même travailler ensemble pour s'assurer que nos services répondent et continuent de répondre aux besoins en cohabitation, aux besoins de la population puis qu'on ne crée pas de situations qui soient problématiques en l'Outaouais. Ce n'est pas ça qu'on souhaite. Mais on veut demeurer là où on est, parce que ça fonctionne puis on est capables de le prouver, on a les chiffres pour le démontrer : on a zéro plainte de police, zéro décès, zéro appel au 311, on a l'appui de la ville. Je pense que de nous déplacer, ça causerait plus de problèmes que ça répondrait à des problèmes, tu sais? Chez nous, il n'y en a pas, d'enjeu. Donc, on voudrait demeurer là où on est et travailler ensemble pour s'assurer que la cohabitation continue de bien se faire.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup, Mme la députée. Nous allons poursuivre l'échange avec Mme la députée D'Arcy-McGee.

Mme Prass : Merci, M. le Président. Merci pour le travail que vous avez fait dans le mémoire, et votre présentation, et pour ce que vous faites à tous les jours. Comme vous devez le savoir, la mairesse de Gatineau était là hier et a fait écho à plusieurs choses dont vous avez dit aujourd'hui, entre autres qu'il n'y a pas eu de plaintes depuis que vous êtes implantés. Et moi, j'ai des questions. Je comprends, de ce que vous avez dit aujourd'hui, que, quand vous êtes arrivé, en fait, vous avez fait... bien, vous avez fait un petit peu... vous êtes allés voir les voisins, les CPE, etc., mais les choses étaient de sorte que vous avez amélioré... votre venue est venue améliorer la situation. Donc, j'imagine, quand vous avez approché les voisins pour faire le bon voisinage, pour faire la cohabitation, il y avait une ouverture parce que, justement, vous alliez amener un élément positif plutôt qu'être vu comme un élément négatif.

Je suis curieuse. Quelles sont les démarches que vous avez entreprises en amont justement pour vous assurer que vos voisins comprenaient que vous étiez là en tant que partenaire? Je pense à ce que vous avez dit, pour que les gens aient un téléphone direct à appeler, c'est énorme. Moi, j'ai, dans mon comté, dans les deux dernières années, une halte-chaleur qui a ouvert et la première année, c'était un petit peu difficile, mais la deuxième année, c'est justement les gens impliqués sont allés voir les voisins et ils ont dit : Voici mon numéro de cellulaire. Puis ça les a rassurés de savoir que, quand il y avait un enjeu, ils allaient avoir quelqu'un de vive voix au bout de la ligne qui allait pouvoir...

Mme Prass : …leur parler tout de suite puis essayer de résoudre la situation. Donc, je suis curieuse. Quelles sont les démarches que vous avez prises pour parler à vos voisins et pour les rassurer, pour tisser ce lien de confiance?

M. Vaillant (Logan) : On a carrément fait du porte-à-porte. On a cogné à la porte des gens. On a été leur parler. On leur a donné l'espace pour qu'ils posent leurs questions, qu'on puisse répondre à leurs questions, puis qu'ils puissent mettre un visage comme sur les personnes qui vont intervenir au site d'accompagnement à la consommation. Donc, la solution qu'on a vraiment prise, c'est ça, c'est d'être visibles, d'être présents. C'est quelque chose qu'on continue de faire pas nécessairement tous les jours, mais, quand on sait qu'il y a des enjeux ou quand on ressent qu'il y a des choses qui se sont produites, on va là où on pense qu'il y aurait des problèmes puis on va parler aux gens. On est visibles, on est connus. On a… Comme on l'a dit plusieurs fois, on a 35 ans. Donc, notre organisme a une expérience. On a gagné plusieurs prix au fil des ans pour l'excellence de nos services puis notre présence. Est-ce que tu…

M. St-Onge (Adrien) : Oui, bien, si je peux me permettre, je pense que, ces derniers temps, on a excellé dans la gymnastique d'horaires pour être en mesure de faire du porte-à-porte puis de vraiment avoir la connexion nécessaire avec les résidents. Puis ça m'amène à dire… On veut continuer à le faire, mais, pour être en mesure de continuer de faire ça, puis, tu sais, si on avait l'occasion d'avoir un droit acquis, bien, on va avoir besoin de continuer de faire ça, mais de façon très soutenue et très régulière, bien, ça va prendre des fonds financiers puis il va falloir être capable de s'assire, cuisiner une belle tarte avec des pourcentages qui répartissent les responsabilités. Puis ce n'est pas obligé d'être nécessairement un projet de loi qui fait ça, mais il peut y avoir des directives administratives qui vont venir dire clairement qui doit faire quoi, à telle hauteur, puis, ça, je pense que c'est très important, puis ça peut remettre des choses en perspective, puis ça va nous aider concrètement.

Il y a déjà, nous, avec BRAS, un bon bout de chemin qui a été fait en aval de, bon, examiner quelles sont les conditions locales de… dans le Vieux-Hull, avec le service de police, avec la santé publique. Bien, c'est pour ça qu'on est là. Il y a eu une belle collaboration avec la ville puis la santé publique, mais là, pour cette analyse-là, maintenant, le concret sur le terrain, l'appui financier doit se faire. Ce qui est vraiment le fun, agréable de voir, c'est qu'avec notre comité on commence à déployer, l'ouverture y est, puis ce qui est merveilleux de voir, c'est qu'on a même des associations de résidents, des associations de gens d'affaires qui ont des commerces, qui, en ce moment, attendent juste de voir est-ce qu'on va être capables d'avoir l'argent pour développer des initiatives ensemble. À mon sens, on ne voit pas souvent, mais c'est beau.

Mme Prass : Bien, c'est vrai qu'à Gatineau… puis on a vu, excusez-moi, dans le contexte de l'itinérance, le privé qui s'est impliqué quand même pour être un partenaire dans tout ça. Donc, on salue toujours ces gestes-là. Je suis curieuse également… aux alentours de BRAS… parce que ce qu'on entend puis on lit dans les médias, tu sais, des seringues dans la rue, des méfaits à l'extérieur de l'emplacement. Est-ce que vous avez… Je suis curieuse. Avez-vous des caméras? Quelles sont les mesures d'atténuation, disons, que vous avez mises en place justement pour vous assurer que les activités, vraiment, se gardent à l'intérieur et non… et ne soient pas visibles à l'extérieur et dans l'espace public?

• (15 h 30) •

M. St-Onge (Adrien) : Je vais vous donner un exemple très concret. J'ai eu une bulle de folie l'été passé, puis un des besoins qu'on avait ciblés, qui est également un facteur de protection pour les personnes consommatrices au niveau des surdoses, l'hydratation, d'être bien hydraté, ça va réduire les risques de surdose. Bien, dans notre secteur, on avait besoin d'être en mesure d'offrir une source d'eau potable disponible 24 heures sur 24 à même notre site pour tout le monde, au final. Bien, ça, ça va faire en sorte que ça va probablement permettre à quelqu'un d'obtenir de l'eau directement là au lieu de, bon, voler une bouteille d'eau, aller dans un commerce sans avoir quoi que ce soit, tu sais, pour le payer.

Donc, ça semble banal, mais ça, c'est une mesure concrète. Pour nous, on a décidé que les caméras de sécurité, ce n'est pas quelque chose qu'on voulait préconiser nécessairement parce que nous, on veut mettre de l'avant que, si les gens s'approprient le… qui est une maison en soi, puis qu'ils ont envie d'en prendre soin, bien, ça va être la communauté qui va en prendre soin, un peu du même principe que ça prend un village, tout un village pour élever un enfant, bien, ça prend tout un quartier pour prendre soin d'un site comme ça. Ça fait qu'on le voit, s'il y a quelqu'un qui va commencer…


 
 

15 h 30 (version non révisée)

M. St-Onge (Adrien) : ...faire du grabuge, bien, c'est des discussions entre deux personnes, puis, généralement, ça cesse rapidement.

M. Vaillant (Logan) : Dans le quartier en général, on a aussi une équipe qui fait du nettoyage de la rue principale. Quand on est sur la rue Eddy, qui est une des rues principales au centre-ville de Hull, on a des gens impliqués, des citoyens, des commerces, d'autres organismes communautaires qui travaillent avec nous puis on se fait des journées où on va se promener où il pourrait y avoir des seringues ou du matériel souillé, on le ramasse.

M. St-Onge (Adrien) : Le BRAS-Outaouais on excelle... partenariat puis on travaille beaucoup en partenariat avec le... qui soutient aussi des travailleurs de rue puis un groupe de pairs aidants puis on travaille avec eux pour justement assurer ce nettoyage-là.

Mme Prass : ...parce que, ce que je constate, c'est au-delà de la question de la cohabitation, vous avez pu amener les gens dans le coin de vouloir s'impliquer, pas juste d'accepter de vous accueillir, mais vraiment de s'impliquer. Je trouve ça vraiment... je salue ce travail que vous avez fait pour y arriver à ce point-là, parce que je pense que c'est l'idéal, parce que, quand on parle de cohabitation, bien, c'est ça, ce n'est pas juste de vivre ensemble, c'est de s'entraider également. Donc...

M. St-Onge (Adrien) : Oui. C'est l'idéal, mais, je vais être honnête, on était essoufflé puis on a besoin de plus de moyens financiers pour aller plus loin.

Mme Prass : Bien, justement, ma prochaine question, puis ça a été évoqué à plusieurs reprises hier, on vous demande, comme vous dites, de faire ce travail, un travail qui est essentiel, un travail qui sort les intervenants de leur mission, disons, pour pouvoir faire ce travail-là. Je comprends qu'il y a déjà un comité sur place et, dans votre mémoire, vous suggérez de renforcer les comités de cohabitation locaux. Si vous auriez les moyens de le faire, des moyens financiers qui vous seraient accordés par le gouvernement, comment est-ce que vous voyez ce renforcement?

M. St-Onge (Adrien) : Bien, je pense que ce renforcement-là va passer par une clarification, comme je disais tantôt, la fameuse tarte avec les pourcentages de responsabilité, mais de mettre en place un plan d'action intersectionnel où est-ce qu'il va vraiment est clair. Puis je pense, nous, au BRAS, quelque chose qu'on excelle, c'est toujours d'arriver avec des idées innovantes, mais on a toujours besoin de partenaires pour ça, ça fait que nos partenaires dans le plan vont embarquer financièrement, mais de façon concrète aussi parce que c'est ce qu'on a besoin, vraiment un plan qui est précis, mais avec des engagements concrets puis des actions concrètes. Je vous donne un exemple, si on a besoin de créer un vidéo promotionnel, par exemple, d'une escouade nettoyage pour montrer, tu sais, à la population plus large comment ça se passe, bien, moi, je ne suis pas capable de faire du montage vidéo, mais, tu sais, par exemple, s'il y a quelqu'un à la Santé publique dans l'équipe de communications qui a ça avec une autre personne de la ville qui est capable de faire ça, bien, c'est en collaborant tout le monde ensemble qu'on va faire ce petit projet-là. Ça fait que je pense que c'est tout ça.

M. Vaillant (Logan) : Dans le concret, ce qu'on souhaiterait, c'est ajouter des gens à notre équipe, des personnes qui auraient le mandat spécifique de travailler dans le voisinage avec les autres organismes pour déployer des moyens. On souhaite travailler avec la ville, on souhaite continuer de travailler avec la Direction de la santé publique puis continuer de travailler avec les services de police pour nous assurer qu'on a une vision globale de comment on veut adresser les enjeux. Parce qu'on ne pense pas que ce soient des enjeux qui soient respectifs ou communautaires, on pense que les enjeux de personnes qui consomment, de personnes qui consomment dans la rue, de la sécurité publique, c'est des enjeux qui s'adressent à tous les paliers de gouvernement, des instances publiques. On veut... on est... naturellement, on fait partie de la solution, mais on ne pense pas qu'on doit porter tout le poids. Donc, ce qu'on souhaite, c'est de rajouter du monde dans l'équipe, mais aussi s'assurer qu'on a la collaboration des instances municipales, des instances gouvernementales pour qu'on en fasse un problème de tous puis qu'on amène des solutions ensemble.

Mme Prass : Puis est-ce que c'est... dans le mémoire, vous parliez d'appui structurel à la cohabitation, c'est ce que vous venez de dire?

M. Vaillant (Logan) : C'est de ça qu'on parle. Tu sais, on ne veut pas... on ne croit pas que les organismes communautaires doivent porter le fardeau de la sécurité publique, on pense que c'est un travail de tous et chacun. Notre rôle est là pour soutenir puis, naturellement, on a des personnes qui oeuvrent au sein des organismes communautaires, qui... c'est leur vocation. Leur passion, c'est aider l'autre. Puis on est chanceux d'avoir ces ressources-là, mais seuls, on n'y arrivera jamais, surtout pas dans un contexte où la crise de la consommation est à la hausse, les surdoses mortelles sont à la hausse, l'itinérance est à la hausse, les enjeux sont trop lourds pour que le BRAS puisse les porter en Outaouais.

Mme Prass : Donc, pour vous... puis encore, ne pas mettant toute la responsabilité sur les organismes communautaires, mais vous êtes d'accord, par exemple, lorsqu'un organisme fait une demande pour ouvrir un SCS, qu'il y ait un élément de cohabitation qui soit demandé parce que vous l'avez réussi. Comme vous dites, il n'y a pas de formule magique, mais on comprend que c'est un élément essentiel aussi dans notre société pour pouvoir... bien, c'est ça, pour qu'on puisse s'implanter de façon permanente et à long terme, justement de...

Mme Prass : ...de faire ce travail-là, de créer ces liens-là.

M. Vaillant (Logan) : Entièrement, la cohabitation est essentielle. Encore là, je ne pense pas que le fardeau doit reposer sur l'organisme communautaire. Ça doit être une responsabilité de la ville, une responsabilité du gouvernement et une responsabilité de la police et un partenariat. Il faut que ce soit une position qui se fasse globalement parce que si on met juste le poids sur l'organisme communautaire, on se retrouve souvent à patiner tout seul, à travailler fort juste pour aller chercher l'implication des personnes de qui on a besoin, puis ça compromet le succès des moyens qu'on essaie de mettre en place.

Mme Prass : Et je suis curieuse, je comprends qu'il n'y a pas eu de plainte depuis que vous êtes implantés. Votre relation avec le corps policier, est-ce qu'ils sont là en tant que partenaires quand vous avez besoin d'eux, également pour rassurer la population que s'il y a un accident, ils vont être présents.

M. Vaillant (Logan) : On travaille avec le corps de police si... Vas-y.

M. St-Onge (Adrien) : Si je peux me permettre, une semaine sur deux à moins de... Des fois, il y a des absences là, mais une semaine sur deux, à longueur d'année, on a des rencontres opérationnelles qui durent une heure puis que généralement les paramédics sont prêts, les responsables de paramédics, les responsables du service de police, responsables de la santé publique et notre partenaire... pour discuter directement des enjeux en lien avec le site fixe et le site mobile. Puis, en dehors de ça, on a des discussions avec les responsables du service de police à chaque fois que c'est nécessaire, puis la collaboration est au rendez-vous.

Mme Prass : Excellent. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Alors, M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, je vous cède la parole.

M. Cliche-Rivard : Merci. Merci, M. le Président. Merci à vous d'être là. On a lu avec attention ce que vous faites. On a eu la chance de se parler dernièrement, puis j'ai l'intention de venir vous visiter cet été. Pour le bon travail que vous faites, félicitations!

Petite question, vous dites : Exempter le BRAS des nouvelles contraintes d'implantation, vous parlez du 150 mètres ou vous parlez de l'ensemble de l'oeuvre du projet de loi, avec les autorisations, le plan de cohab, etc.?

M. Vaillant (Logan) : Ce qu'on vous demande spécifiquement en premier lieu, 150 mètres, mais si on est déjà là, je vois mal pourquoi on aurait besoin de commencer à faire un paquet de choses pour démontrer qu'on a le mérite d'être là. Ça fait déjà deux ans et demi qu'on est sur place, donc on demande de pouvoir continuer à opérer sans sentir de pression ou de crainte qu'on devra se relocaliser éventuellement.

M. Cliche-Rivard : Ça fait que c'est une demande d'exemption générale du projet de loi n° 103, si je comprends bien, là, juste pour comprendre votre demande.

M. Vaillant (Logan) : Oui, mais dans un contexte où on souhaite quand même collaborer puis travailler sur la cohabitation sociale.

M. Cliche-Rivard : Parfait. Vous avez aussi mentionné, si le projet doit être adopté tel quel puis qu'il faut partir, vous avez dit ça va coûter 5 millions à peu près, 4,7, à peu près 4,731, je pense. Qui va... qui va payer ça?

M. Vaillant (Logan) : Si le gouvernement n'est pas prêt à payer ce montant-là, nous, on devra fermer nos portes parce qu'on n'a pas les moyens de le faire. Le communautaire, on le sait, est déjà... revendique déjà pour qu'on soit financés à la hauteur de ce qu'on a besoin. Donc, si on doit débourser 4,7 millions, on comprend qu'on n'a pas cet argent-là, donc ça va être impossible pour nous de se relocaliser.

M. Cliche-Rivard : Donc, essentiellement, si le projet de loi ne vient pas avec des compensations financières, on a parlé de la maison Benoît Labre tout à l'heure, on risque de perdre deux centres de consommation supervisés au Québec.

M. Vaillant (Logan) : Dans deux des secteurs qui sont les plus touchés par la consommation.

M. Cliche-Rivard : Merci. On a une question sur les comités de bon voisinage, le rôle des organismes dans la coordination, l'organisation. Il y a des citoyens qui nous ont dit ce n'est pas toujours neutre parce que l'organisme, des fois, c'est par et pour. Sur la gestion du comité, il y a les partenaires, mais bref, selon vous, qui... qui devrait être le porte-étendard puis de tenir la responsabilité du comité de bon voisinage?

• (15 h 40) •

M. Vaillant (Logan) : C'est une excellente question. Je pense que, tu sais, d'emblée si... si le gouvernement exige qu'on ait des comités de cohabitation, le gouvernement devrait s'impliquer dans la réalisation de ces comités-là. Je pense qu'on a quand même... Le communautaire, le service de police, les villes et le gouvernement ont la responsabilité de travailler ensemble. Donc, je pense qu'il devrait y avoir des responsabilités dans chacune de ces instances-là pour s'assurer qu'on a toujours une représentation de chacun des paliers quand on parle de cohabitation.

M. Cliche-Rivard : Et donc...

M. St-Onge (Adrien) : Si...

M. Cliche-Rivard : Allez-y.

M. St-Onge (Adrien) : Si je peux me permettre, le meilleur exemple que je peux vous donner, les tables de concertation où est-ce qu'effectivement il y a des représentants de différentes instances et qui finalement forment une entité en soi, qui vont... qui vont porter un dossier complet. Je pense que ça, ça pourrait être une belle façon pour ne pas tomber dans le piège que ce soit uniquement un acteur.

M. Cliche-Rivard : Ce n'est pas aux organismes de porter ça à 100 %. Ce n'est pas ce que les citoyens demandent non plus. Ce n'est pas les...

M. St-Onge (Adrien) : Non, mais ce n'est pas non plus la ville, par exemple, de Gatineau qui aurait à 100 % à assumer tout ça. C'est... c'est une responsabilité collective de société, puis les acteurs qui représentent cette société-là, à mon avis, dans cette situation-là, sont le gouvernement...

M. St-Onge (Adrien) : ...c'est-à-dire la Santé publique, la ville, les organismes communautaires, les associations de citoyens. Puis, quand je dis la «ville», bien, c'est, oui, des représentants de la ville puis du politique, administratif, mais aussi au niveau de sécurité publique.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Ça va. Alors, je tiens à remercier les représentants du BRAS-Outaouais pour s'être déplacés et pour votre contribution à nos travaux.

Alors, sur ce, je vais suspendre temporairement pour pouvoir permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 15 h 43)

(Reprise à 15 h 47)

Le Président (M. Provençal) : Alors, on reprend nos travaux, et je souhaite la bienvenue à M. Michel Parazelli, professeur associé, École de travail social, Université du Québec à Montréal. Alors, vous avez 10 minutes pour votre présentation, et, par la suite, nous procédons aux échanges. Alors, vous avez la parole.

M. Parazelli (Michel) : Oui. Merci de m'avoir invité aujourd'hui. Écoutez, c'est à titre de chercheur retraité, mais, comme on l'a dit tantôt, toujours associé à l'École de travail social de l'UQAM que je souhaite partager mon avis avec vous sur le projet de loi n° 103.

Depuis 30 ans, avec des équipes de recherche, j'ai eu l'occasion d'étudier les marginalités urbaines à Montréal, telles que celles des pratiques identitaires des jeunes de la rue, plus spécifiquement, et, plus récemment, les enjeux de cohabitation avec les personnes en situation d'itinérance à Montréal et à Québec. Avec mes collègues, nous avons développé un cadre d'analyse qualitative de ces enjeux qui permet de mettre en...

M. Parazelli (Michel) : ...l'orientation des pratiques de gestion du partage d'espaces publics avec des personnes en situation d'itinérance.

Donc, le son est bon, vous m'entendez bien?

Le Président (M. Provençal) : Très bien.

M. Parazelli (Michel) : C'est bon. Bon, d'entrée de jeu, je vous dis que, si ce projet de loi dit favoriser une cohabitation harmonieuse en encadrant les conditions d'implantation et d'opération de sites de consommation supervisée, les mesures prescrites dans ce projet de loi risquent d'obtenir l'effet inverse, et je vais m'expliquer. Parce que, dans ce projet de loi, la conception implicite de la cohabitation pose problème, de même que les relations avec les ressources communautaires visées par le projet de loi.

Bon, si on commence par la conception de la cohabitation, si le projet de loi dit viser une cohabitation harmonieuse, aucune définition n'est proposée, mais il est possible d'en identifier l'orientation par le choix des stratégies promues. Même si les ressources offrant des services aux personnes en situation d'itinérance sont parfois pointées du doigt, les problèmes de cohabitation qui sont... qui se sont présentés durant les dernières années ne les concernent pas directement. C'est plutôt la présence et le comportement des personnes itinérantes elles-mêmes, dans les espaces communs de leur voisinage, qui dérangent.

Face à ce type de problèmes de cohabitation, les résultats de nos recherches ont permis de recenser plusieurs stratégies de gestion du partage de l'espace public avec les personnes en situation d'itinérance que différents groupes d'acteurs mettent en œuvre. Ces stratégies s'inscrivent dans une tension conflictuelle entre celles qui ont une visée d'invisibilisation, dans une perspective de gestion écosanitaire de nuisance publique, et celles ayant un objectif de visibilisation, dans une perspective démocratique de défense des droits. Donc, on voit bien, ici, une polarisation qui existe, et ce n'est pas... ce n'est pas propre au Québec, au Canada ou aux États-Unis. Partout dans le monde, c'est comme ça que ça... que ça s'inscrit, les tensions entre les manières de gérer, en fait, les enjeux de cohabitation.

Toutes ces stratégies ont en commun le fait qu'elles s'appuient sur le contrôle de la mobilité des personnes marginalisées. Par exemple, pour invisibiliser la présence des personnes en situation d'itinérance, nous avons observé quatre stratégies : l'expulsion — exemple, la judiciarisation, avec le profilage social — le repoussement, via le design hostile, notamment; la concentration — l'idée, c'est d'isoler les gens dans un lieu spécifique pour qu'ils ne dérangent pas — et la dilution, l'animation continue dans un parc, à travers l'animation d'activités, pour un peu noyer la présence des personnes en situation d'itinérance qui s'y regroupent. Quant à l'objectif de visibilisation, donc le deuxième objectif de cette tension, il se manifeste par la représentation et le rassemblement. À la représentation, c'est l'idée de sensibiliser le voisinage aux noms des personnes itinérantes, sur leur réalité, de façon à apaiser les tensions. Et le rassemblement, bien, pensons aux campements urbains, ou la Nuit des sans-abri, où les gens affirment leur autonomie de citoyens, même marginalisés, dans l'espace public.

Tous les acteurs qui adoptent ces stratégies prétendent tous améliorer la cohabitation. C'est là qu'il y a un problème dans la façon de comprendre la cohabitation. Cependant, selon la visée des stratégies que l'on adoptera, la vision de la cohabitation ne sera pas la même. Par exemple, la cohabitation ne se fait pas toujours à la suite d'ententes entre les parties qui habitent les lieux communs concernés, comme on le ferait dans un logement, entre deux colocs, par exemple. Certaines stratégies participent plutôt à la stigmatisation des personnes en situation d'itinérance et de leurs ressources communautaires, par voie d'association. C'est pourquoi il importe de bien reconnaître les orientations idéologiques des stratégies mobilisées afin d'éclairer le débat.

• (15 h 50) •

Si on revient au projet de loi plus spécifiquement, hein, c'est qu'en imposant une certaine distance géographique visant à faire écran entre les sites de consommation supervisée et les établissements scolaires et de petite enfance le projet de loi tente d'offrir une réponse au sentiment d'insécurité des familles et des acteurs institutionnels. Selon notre cadre d'analyse, les mesures prescrites dans le projet de loi s'inscrivent dans une double stratégie de contrôle de la mobilité des personnes en situation d'itinérance. Il s'agit des stratégies de repoussement et de concentration, qui visent une invisibilité locale spécifique des personnes en situation d'itinérance. On ne veut pas qu'elles soient autour du périmètre autour de ces institutions-là, donc on les repousse et on les concentre à l'intérieur des centres de consommation supervisée.

On peut penser que le ministre fait le pari que gérer la localisation des services et leurs effets de nuisance publique permettrait de contrôler la mobilité des personnes en situation d'itinérance, en favorisant leur concentration à des endroits où les interactions sociales ne feraient pas l'objet de controverse, hein? C'est comme ça que j'ai interprété la façon de voir la logique qui était à l'œuvre. Il est aussi exigé des organismes communautaires qu'ils régulent eux-mêmes les comportements des personnes itinérantes pouvant représenter des nuisances publiques. Nous parlons moins ici de cohabitation sociale que d'une intervention de mitigation...

M. Parazelli (Michel) : ...comme on le ferait dans le cas des problèmes d'inondation ou de zone de contamination. En fait, le contenu de ce projet de loi est moins un projet de santé publique que de sécurité publique. En voulant établir un périmètre de sécurité, on ne parle plus ici de protection défensive face à la présence de personnes en situation d'itinérance dans une perspective de cohabitation conflictuelle.

Certains pourraient dire que le projet de loi relève du gros bon sens, hein? Pourquoi faire exprès pour finalement mettre des ressources qui s'occupent des itinérants autour des garderies, par exemple? Et c'est effectivement tout à fait le cas, si c'est le gros bon sens qui parle, sauf qu'en milieu urbain, c'est extrêmement difficile de trouver des lieux qui sont à 150 mètres de distance de ces institutions-là. Donc, ça fait problème. Mais il n'y a pas que ce problème-là qui émerge dans tout ça. C'est qu'il y a vraiment une méconnaissance évidente des dynamiques de survie des personnes en situation d'itinérance dont l'habitat ne se réduit pas aux sites de consommation supervisée. Donc, on ne peut pas les concentrer à un endroit. L'habitat se trouve surtout dans les espaces publics et communs. Et même si l'espace public n'est pas prévu pour suppléer l'absence de logements, les personnes en situation d'itinérance essaient d'y survivre en tentant de reproduire les fonctions protectrices d'un habitat. On parle ici de pratiques précaires d'habiter par l'appropriation de lieux pouvant être maîtrisés de manière éphémère, mais dont l'occupation ne peut être stabilisée à cause de la répression, notamment.

En fait, l'objectif d'invisibilité localisée du projet de loi est illusoire étant donné les réalités complexes et instables de la mobilité des personnes en situation d'itinérance et auxquelles les organismes communautaires tentent quotidiennement de s'adapter. C'est pour ça qu'ils ont besoin de flexibilité et d'autonomie. De plus, le projet de loi renforce la représentation de dangers que représenteraient les personnes en situation d'itinérance en imposant l'établissement d'une distance sécuritaire avec les ressources, dont la mesure… donc, la mesure de 150 mètres est par ailleurs arbitraire et non fondée par des données objectives. En tout cas, on ne les a pas vues. On reconduit ainsi la stigmatisation de ces personnes déjà marginalisées.

Bon, je ne nie pas les inquiétudes et les craintes manifestées par des citoyens non marginalisés, hein, en disant ça, hein, c'est… des incidents réels se produisent bien tous les jours dans un contexte où les ressources font défaut et les lieux propices à l'appropriation se raréfient. L'insécurité et les frustrations qui augmentent aussi du côté des personnes itinérantes peuvent produire de l'agressivité et/ou du désespoir. Des incidents malheureux et des conflits sociaux nous rappellent donc la nécessité d'établir des relations de cohabitation démocratique permanente afin de pouvoir démêler ce qui relève des préjugés, de l'intolérance ou de la méconnaissance et des incidents réels afin de pouvoir s'en occuper localement.

L'autre problème de fond associé à la conception de la cohabitation, c'est comment favoriser une cohabitation harmonieuse sans que l'acteur concerné principal soit impliqué dans la discussion, hein, c'est comme l'éléphant dans la pièce qu'on ne voit pas. Les personnes en situation d'itinérance ne sont pas impliquées comme acteur compétent qui peut donner son analyse, la livrer et la négocier avec les autres acteurs. Il est bon de rappeler que cohabiter dans des lieux communs, c'est mettre en discussion des pratiques d'habiter mutuelles entre des citoyens. Je parle de citoyens qui sont contraints de se voisiner pour convenir d'un modus vivendi entre les parties impliquées. Donc, le projet de loi n° 103 ne fait mention d'aucune pratique de dialogue impliquant les premiers concernés qui habitent l'espace public. Comme ce type d'exercice ne s'improvise pas, effectivement, il n'y a rien de facile, pourquoi alors ne pas soutenir et expérimenter l'organisation collective des personnes en situation d'itinérance qui formeraient des collectifs avec qui négocier des règles de cohabitation? Bref, faute de définir les termes et les conditions d'une cohabitation harmonieuse, la loi ne fait que réguler la géographie des services sans offrir un plan d'ensemble concerté de la cohabitation.

L'autre problème, et là puis je termine un peu là-dessus en disant qu'au niveau des relations avec les ressources communautaires, c'est que le fait d'imposer des contraintes géographiques et des conditions d'opération des services offerts par les groupes, le ministre ajoute de la pression, suscite de l'inquiétude, crée de l'instabilité à un milieu qui est déjà… qui est déjà mis sous pression pour faire face aux urgences de la crise… que l'itinérance génère. La pénurie de services sociaux publics fait en sorte que le milieu communautaire représente les principales ressources sur lesquelles compter pour que la situation ne se dégrade pas davantage au Québec.

Faut-il rappeler qu'il s'agit de services qui sauvent des vies et que les diverses instances de santé publique reconnaissent que ces services de proximité sont adaptés aux réalités des personnes en situation d'itinérance. Elles font donc partie des solutions. Donc, au lieu de centraliser le pouvoir des décisions entre ses mains, le ministre devrait plutôt soutenir davantage ces organismes en respectant leur expertise et leur autonomie et non en les considérant comme faisant partie intégrante du réseau public de la santé.

Donc, je termine à vous proposant… en formulant trois recommandations qui résultent de mon analyse. Bien, il s'agit premièrement d'abandonner les stratégies d'invisibilisation pour renforcer plutôt la perspective démocratique des pratiques de cohabitation, en incluant les personnes en situation d'itinérance dans les dispositifs de dialogue et de médiation. Et le gouvernement…

M. Parazelli (Michel) : ...le gouvernement du Québec devrait reconnaître le droit à l'expression citoyenne à part entière de ces personnes en situation d'itinérance, en soutenant leur organisation collective au sein de petits collectifs autonomes, dans le but d'instaurer un dialogue continu avec elles sur les enjeux de cohabitation sociale.

Puis le dernier... dernière recommandation, c'est bien entendu, et c'est le nerf de la guerre, soutenir les organismes communautaires financièrement dans l'expérimentation de ces dispositifs de dialogue en des acteurs locaux ayant des pratiques d'habiter en interaction avec celle des personnes en situation d'itinérance. Bon.

Donc, je termine là-dessus. Je vous remercie de votre écoute.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup pour votre présentation. Alors, nous allons débuter les échanges avec les membres de la commission. M. le ministre, à vous la parole.

M. Carmant : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Piazzali, pour votre vos commentaires. J'aimerais mieux comprendre le processus d'organisation collective avec les personnes en situation d'itinérance et comment libérer leur voix, là. Expliquez-moi comment ça se fait puis où est ce que ça se fait. Puis si vous avez des exemples à me donner que je pourrais aller lire dessus, là.

M. Paranzellas (Michel) : Oui, d'accord. Oui, tout à fait. Écoutez, moi j'ai... ça fait déjà 25 ans, ça fait loin, mais il y a 25 ans, j'ai expérimenté un cadre de communication collective démocratique avec des jeunes de la rue, des élus municipaux à Montréal, et des intervenants jeunesse, et des policiers. Ils formaient chacun un groupe homogène. Bon, entre eux, il y avait une discussion, un dialogue continu, mais par la voie de l'écrit, avec une équipe de régulation qui faisait respecter des règles du jeu pour les échanges, parce que c'était un dialogue continu, non pas une consultation seulement, dans le sens qu'il s'agissait d'avoir... de créer un mode de... un temps de concertation au sein des groupes homogènes et après un temps de négociations entre les groupes pour discuter des préoccupations propres à chacun des groupes homogènes, mais dans une perspective d'amélioration des actes sociaux et des actes de travail qui s'adressaient aux jeunes de la rue comme tels. Et avec un dialogue continu avec obligation de répondre. En tout cas, je ne pourrais pas aller dans les détails, mais les gens à l'époque me disaient : Ça ne fonctionnera pas, les jeunes dans la rue n'aiment pas être structurés, c'est trop rigide. Mais c'était tout à fait l'inverse, lorsque ce cadre-là... lorsque les jeunes de la rue voyaient que ce cadre-là leur donnait l'occasion de s'exprimer et qu'ils avaient des réponses à leurs questions aussi de manière continue, et non pas seulement que donner leur point de vue et ne plus savoir de quoi... que comment était utilisé leur parole, eh bien là, cette fois-là, il y avait vraiment... ils étaient vraiment impliqués.

Ça a duré sept, sept ans, imaginez, avec deux administrations municipales différentes. Donc, la faisabilité, elle est réelle. Sauf qu'après la ville de Montréal a stoppé parce que c'était au moment le plus, je dirais, aigu sur le plan de la répression municipale, où la Commission des droits de la personne et de la jeunesse a reconnu qu'il y avait du profilage social. Donc, le conflit était tellement rendu grave qu'il n'y avait plus de possibilité de discuter. Mais, bon, finalement, il y a une possibilité de reprendre ces choses-là. Mais je parle... je parlerais pour l'instant, O.K.?

• (16 heures) •

Actuellement il y a la ville de Longueuil qui a expérimenté ce qu'on a... ce qu'ils ont appelé un projet d'atelier de correspondance inspiré de mon approche, O.K., l'approche que j'étudiais avec l'équipe avec qui j'étais, et qu'ils l'ont mis en œuvre pendant les consultations il y a quelques mois entre des personnes itinérantes, des résidents, et des commerçants, et puis je crois que des acteurs sociaux et institutionnels, et ils ont beaucoup apprécié l'échange. Et ça a été fort utile parce que, finalement, les personnes en situation d'itinérance, lorsqu'on leur demande de... entre elles de réfléchir sur leur propre situation, ils ont énormément de choses à se dire et ils voient bien qu'on leur fait confiance aussi sur la façon d'analyser leur situation et de mettre en discussion avec les autres groupes, ce qui a rarement lieu dans les... des les travaux de concertation ou de discussion. Donc là, c'est un pas de plus qu'on propose de faire pour la cohabitation, ce qui améliorerait les choses.       Et la ville de Granby s'est engagée à expérimenter un tel projet, un peu comme je l'ai expérimenté avec les jeunes de la rue, mais après les élections de novembre, ça fait que... parce que c'est un projet, vous le voyez bien, c'est un projet qui est au long cours, hein, ce n'est pas quelque chose qu'on fait en deux mois, là, mais donc c'est quelque chose qui devrait, à la limite, même être permanente à un rythme plus lent, dans le sens que les gens n'ont pas que ça à faire. Donc, si à tous les... peut-être, les deux, trois mois où on fait le point en sous-groupe homogène, on s'échange des communications par écrit.      Parce que je vais vous dire honnêtement, une des grandes difficultés pour la communication, c'est effectivement d'être en face à face. Imaginez seulement avec des groupes de jeunes de la rue, à l'époque, dans les années 2000, les jeunes...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Parazelli (Michel) : …avec les policiers et les élus municipaux autour d'une table. Ça ne durait pas longtemps. Et les jeunes de la rue disaient aux travailleurs de rue : Hé! là, vous, vous connaissez comment ils parlent, comment ils discutent, bien, dites-leur ce qu'on… ce qu'il faudrait faire. Et là, ils partaient. Donc, ça cassait la discussion. Donc, il y a… Bref, le message le plus important, ce n'est pas de vendre… de vendre le dispositif que j'ai mis en… que j'ai expérimenté, c'est davantage de dire : Est-ce qu'on peut penser les pratiques de dialogue démocratique avec les personnes en situation d'itinérance, et de… même de varier les types d'expérimentations pour pouvoir comparer et discuter justement des points forts, des points… les limites, les obstacles que ça représente? Parce que c'est une des clés selon moi, de la cohabitation. Ce n'est pas en créant de la distance qu'on va y arriver, là.

M. Carmant : O.K. Ça, je trouve ça très intéressant. Maintenant, pratico-pratique, là, qu'est-ce qu'on dit à des parents qui nous écrivent tous les jours que leurs enfants sont exposés à des risques? Ils… tu sais, ça prend une réponse concrète aussi. Puis je comprends que ce n'est pas idéal. Je n'ai jamais voulu dire que c'était idéal. Puis en fait beaucoup des gens focussent sur l'aspect de distance. Mais l'aspect le plus important du projet de loi, c'est deux choses, s'assurer qu'il y ait de la cohabitation faite en amont. Ça, je pense que c'est quand même important, là, mais… puis je suis très d'accord d'impliquer les personnes en situation d'itinérance, ça, c'est vraiment intéressant. Et aussi s'assurer qu'il y ait des trajectoires de soins entre ceux qui font la réduction des méfaits et ceux qui font du traitement des dépendances. Ça fait que c'est vraiment là-dessus qu'est axé le projet de loi. Donc, qu'est-ce qu'on dit aux parents, là, qui sont inquiets? Puis on a un monsieur hier qui nous… qui est venu nous faire un témoignage, là, à brailler, là, sur ce qui arrive à ses enfants.

M. Parazelli (Michel) : Non, non, mais ça, il y en a tous les jours, hein, on s'entend, hein, mais ça… en fait, cette question-là ne doit pas faire abstraction de comprendre pourquoi… Pourquoi nous vivons cette situation-là maintenant. Pourquoi on en est rendu là? O.K., ça a été des décennies de négligence, et ça, vous le savez, de l'investissement dans le logement social de… par le fédéral, surtout à l'époque, mais aussi par le provincial. Des décennies de négligence qui font en sorte qu'on est pris avec… puis aussi la financiarisation du logement comme tel qui empêche, qui limite énormément le développement du logement social comme tel. Déjà, et ça serait vraiment un gros morceau, là, on n'aurait pas à vivre comme crise de l'itinérance, et aussi l'érosion des services publics qui peuvent répondre aussi tout au long du parcours, en amont des épreuves que ces personnes-là rencontrent avant de devenir… de vivre l'itinérance. C'est presque que… il n'y a presque plus de services. Donc, à ce moment-là, il y a ça aussi qu'il faut considérer. Donc, il faut prendre conscience de ça en premier, je crois, parce que là on limite les dégâts actuellement. À la limite, si on est dans un… hein, damage control, c'est ça qu'on est en train de faire, là. Mais si… puis aussi, en amont, si on avait aussi investi sur les pratiques… mais pas uniquement comme une modalité technique de sécurité, que d'avoir des comités de cohabitation ou des comités de bon voisinage, mais il faut qu'il y ait… il faut qu'il y ait un plan, un plan d'intervention lié à la cohabitation, plus substantiel. Et c'est pour ça, et c'est… si ça avait existé, on n'aurait pas… On pourrait répondre, il y aurait des instances qui pourraient répondre à des citoyens qui disent : Bien, il y a un incident qui s'est passé à tel endroit. Ça, c'est inacceptable que ça arrive dans ma cour, etc. Et là, il y aurait des instances auxquelles s'adresser comme telles, localement, mais c'est pour ça qu'il faut laisser aussi… mais en fait laisser… soutenir, je ne dirais pas juste les laisser, mais soutenir, mais… l'autonomie de réalisation de ces dispositifs de cohabitation d'instances. Mais encore là, je viens de vous expliquer qu'il y avait deux façons polarisées de voir la cohabitation. Donc là, on est dans un contexte de conflit, O.K., on n'a pas la même vision de la cohabitation. Donc, à ce moment-là, la question que j'ai… pardon?

M. Carmant : Excusez, excusez…

M. Parazelli (Michel) : Bien, j'étais présent à la fin de la présentation de l'autre groupe. Puis la question est intéressante à savoir qui devrait… je pourrais dire, faire l'autorité, en fait, arbitrer, arbitrer les conflits potentiels, O.K. Bon, c'est clair que sur le plan local, la municipalité, c'est… En fait, c'est… on est en démocratie, donc c'est les gens qui sont élus, qui représentent les… tous les citoyens, pas seulement que les citoyens qui ne sont pas marginalisés. Donc, il y a… il devrait y avoir un dispositif d'arbitrage politique par les élus, O.K., locaux, mais aussi provinciaux, étant donné que c'est carrément une crise nationale qu'on vit. Donc, il devrait y avoir une entente, une coordination effectivement, entre le… entre le municipal et le provincial pour gérer les conflits lorsqu'ils sont… lorsqu'ils dépassent le...

M. Parazelli (Michel) : ...comme tel, ou lorsqu'ils sont insolubles, ou pour... au moins pour donner une orientation souhaitée, souhaitable. Et puis voilà.

M. Carmant : C'est ça. Mais, moi, mon message, c'est que, les directives, ce n'est pas toujours suivi. Donc, des fois, il faut imposer des choses.

Et, l'autre chose aussi où je suis... où je suis un peu en... diamétralement... pas... oui, opposé à ce que vous dites, c'est... c'est quand vous dites : L'enjeu de concentration. Parce qu'on entend souvent les organismes, qui prennent soin des personnes en situation d'itinérance, qui travaillent avec eux, que, quand on parle de campements, ils nous disent de maintenir les campements. Parce qu'il y a un effet quand même protecteur dans l'aspect concentration. Puis vous dites qu'il ne faut pas faire ça.

M. Parazelli (Michel) : Non. Parce que... Non. Non. C'est parce que le campement, dans notre analyse, n'est pas... ne résulte pas d'une stratégie de contrôle de la mobilité liée à la concentration, à moins qu'on les ait obligés à être là. Vous comprenez? C'est une question de... C'est la question du rapport de pouvoir, à savoir est-ce que c'est selon les personnes itinérantes qui se rassemblent. C'est la stratégie de rassemblement qui touche les campements qui sont autonomes. Les campements urbains, qui sont organisés par les personnes en situation d'itinérance par elles-mêmes, bien, c'est la stratégie de rassemblement, de visibilisation. La concentration, c'est lorsqu'on attribue des lieux que les personnes en situation d'itinérance n'ont pas choisis mais qu'elles sont obligées d'occuper. Là, oui, c'est de la concentration. Vous comprenez? C'est une question d'autonomie, là. Voilà. C'est la différence. C'est pour ça que c'est protecteur. Parce que, lorsqu'ils se mettent à être en mouvement pour s'approprier une piste de solution précaire, on s'entend, mais quand même une piste de solution, il y a là vraiment un début, je dirais, d'insertion sociale, d'une certaine manière, même par la marge. Vous comprenez? C'est ça. C'est les premiers pas. On voit bien qu'il y a là des capacités à essayer de trouver des pistes de solutions pour eux-mêmes, pour elles-mêmes. Et, ça, effectivement, lorsqu'on les démantèle, bien, ça déconstruit ces capacités-là, effectivement. Ça les affaiblit énormément.

M. Carmant : Mais, en tout cas, comme je vous dis, moi, ça fait plusieurs fois que je le dis, là, je ne suis pas là pour les masquer ou les cacher, mais vraiment pour les aider. Donc, c'est important de s'assurer qu'ils aient accès à tous ces services-là. M. le... M. le Président, je passerais la parole.

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée de Louis-Riel. Non? Ah! Mme, députée de Laporte. Excuse-moi.

Mme Poulet : Aucun souci. Merci, M. le Président. Merci beaucoup, M. Parazelli. C'est fort intéressant, votre expertise... votre expertise, votre... tout qu'est-ce que vous mentionnez avec... vous êtes... vous savez de quoi vous parlez. Ça paraît. Je trouve ça vraiment intéressant.

Vous parliez tantôt de pistes de solutions vers une intégration sociale, une meilleure intégration. Mais, moi, je voulais savoir si c'est possible de développer. Bon. Vous parlez aussi de dialogue continu. Quelles seraient les meilleures conditions de succès pour une meilleure intégration? Bon. Tantôt, vous avez parlé d'une coordination avec différentes instances, mais il y a-tu quelque chose de plus qu'on pourrait faire? Donnez des exemples aussi des suggestions.

M. Parazelli (Michel) : Mais vous parlez en fonction des pratiques de cohabitation ou...

Mme Poulet : Entre autres.

M. Parazelli (Michel) : De quoi parlez-vous?

Mme Poulet : Bien, d'une meilleure intégration des ressources en itinérance dans le quartier. Est-ce qu'il y a des exemples? Bon. Vous parlez d'une coordination tantôt. Mais est-ce que vous pouvez développer encore là-dessus? Est-ce que vous pouvez donner des exemples des choses qui ont fonctionné ailleurs qu'on pourrait... qui pourraient être un exemple à intégrer ici?

• (16 h 10) •

M. Parazelli (Michel) : Oui. Écoutez, je n'ai pas fait vraiment de recension. Ça aurait été ça qui aurait été sûrement la suite de ma carrière, si je n'avais pas été à la retraite, d'essayer de voir par ailleurs la cause de la crise de l'itinérance. C'est ça qui serait intéressant de voir, comment les autres la gèrent, là. Mais j'ai... on n'a pas besoin, selon moi, d'aller beaucoup... très loin... d'aller très loin pour aller chercher des exemples intéressants. Et je crois probablement que vous en avez entendu en commission aussi depuis deux jours, là. Mais je vais juste donner un exemple que j'ai entendu à Trois-Rivières. L'organisme Le Point de Rue, je crois, a impliqué des personnes en situation d'itinérance dans l'organisation des... la préparation des Jeux du Québec. Et puis, en les... en intégrant les personnes à situation d'itinérance dans la fabrication, je crois, des sacs d'accueil qu'ils vont donner aux athlètes, des choses comme ça, puis en manifestant leur présence sur les sacs aussi, en disant que c'est fait par nous, etc. Donc, il y a là des... une ouverture. Aussi, l'idée de faire des portes ouvertes aussi aux citoyens, aux résidents du voisinage pour venir voir ce que font les personnes en situation d'itinérance dans les centres, dans les lieux pour démystifier, d'autres me parlent de vidéo qui racontent la biographie et, tu sais, la trajectoire de vie des personnes en situation...

M. Parazelli (Michel) : ...d'itinérance pour expliquer d'où elles viennent. O.K.? En fait, tout est dans le rapprochement pour essayer de rencontrer. L'idée, c'est de favoriser des rencontres avec les personnes en situation d'itinérance parce que c'est beaucoup là que, tout d'un coup, on s'aperçoit que, O.K., bon, la personne a vécu tel... tel cheminement, elle a telle histoire de vie. Bien là, je comprends un peu plus. Ça ne veut pas dire que j'accepte ce qu'elle fait, mais je comprends un peu plus.

Et ça, c'est... pour une partie de la population, ça peut être... ça peut servir parce que, souvent, les gens ont peur de la question de la santé mentale, la toxicomanie, c'est très, très mystifié, tout ça. Mais, lorsqu'on est... on démystifie ces enjeux-là, eh bien, ça permet, effectivement, de faciliter les rapports de communication entre les gens.

Bon, là, je ne peux pas vous répondre par les résultats d'une recherche là-dessus, honnêtement, là, mais je vais juste vous dire aussi que, si la proposition que j'ai faite au ministre Carmant tantôt, d'instaurer des petits collectifs de communication... qui sont protecteurs pour tout le monde, hein? Quand on fait les groupes homogènes et qu'on échange par écrit ou par correspondance, eh bien, à ce moment-là, personne ne se sent jugé, nécessairement, ne se sent heurté ou a des craintes de s'exprimer non plus comme tel. C'est... En tout cas, il faut voir un peu comment on peut, dans le fond, diminuer les distances dans les... les représentations qu'on a des uns et des autres, là.

Mme Poulet : O.K. Bien, merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup pour cet échange. Alors, c'est maintenant au tour de Mme la députée de D'Arcy-McGee.

Mme Prass : Merci, M. le Président. La grande majorité de votre présentation a porté sur la question d'itinérance, et on comprend que pas toutes les personnes itinérantes sont toxicomanes, et vice versa. Est-ce que tout ce que vous avez mis de l'avant s'applique également à la population qui fréquenterait des sites d'injection... supervisée d'injection et d'inhalation?

M. Parazelli (Michel) : Bien, je crois que oui, dans le sens que c'est sûr qu'il y a des... il y a des personnes qui sont logées et qui vont dans ces centres-là aussi. Donc là, ces personnes-là, que... qu'elles soient à 150 mètres ou pas, ou... ou ça les concerne moins, effectivement. Parce que, comme je l'ai dit tantôt, ce qui dérange le plus, c'est la présence dans l'espace public dans le voisinage des résidents ou des commerçants lorsqu'une ressource s'installe à proximité. C'est dans ce cas-là.

Mais effectivement, les gens qui n'ont pas de logement, c'est... c'est davantage auprès de ces personnes-là que j'ai construit, bien, que je vous offre mon expertise comme telle, que je vous... que je vous ai livré mon avis là-dessus. Mais pour ce qui est des autres personnes qui sollicitent les centres de consommation supervisés, qui ne sont... qui sont logés, actuellement, eh bien, j'avoue que, là, je n'ai pas d'avis particulier, là, sauf celui de... de dire : Bien, probablement que... le projet de loi, c'est sûr que ce qui risque d'arriver avec, parce que les conditions que le projet de loi impose risquent de faire... de précariser des centres, quitte à les faire disparaître, éventuellement. C'est là qu'il y aurait un vide de ressources. Effectivement, là, elles seraient menacées, ces ressources-là, et là ça les concernerait, là, effectivement aussi, quand j'y pense, là, effectivement.

Mme Prass : Par exemple, le ministre évoquait hier soir... lors des consultations, on a eu un parent à côté de La Maison Benoît-Labre qui est venu témoigner, puis, tu sais, un des enjeux, c'est que les gens en situation de dépendance qui se retrouvent dans l'espace public, à l'extérieur, devant la maison, puis ça peut être des gens qui sont en situation d'itinérante, ça peut être des gens qui sont logés, mais c'est là-bas qu'ils se tiennent ensemble dans l'espace public, encore une fois, juste à côté d'une cour d'école, etc. Donc, vous comprendrez, évidemment, la crainte naturelle de la part des parents qui ne veulent pas exposer leurs jeunes à certaines réalités.

M. Parazelli (Michel) : Oui, oui, tout à fait, donc d'où l'importance de mettre en place rapidement un dispositif de communication avec l'ensemble des groupes qui sont touchés, des institutions, des... bon, des citoyens qui ont des choses à dire là-dessus, tout à fait. Puis d'investir de l'énergie là-dedans. Mais aussi, pour ça, il faut avoir un plan puis un soutien financier pour y arriver, parce que ça ne se fait pas sur le bras, là, comme on dit. Il faut que ça se pense aussi, la façon de communiquer et puis de faire une communication continue, et non pas uniquement lorsque la catastrophe arrive. Vous comprenez un peu. Bien, je pense qu'on n'a pas le choix si on veut vraiment que les choses ne dégradent pas.

Mme Prass : Bien, même à ça, il y a évidemment un travail à faire en amont et, comme vous avez dit, il faut que ça soit continu. Puis, si vous avez écouté les... les intervenants avant nous, avant vous, excusez-moi, BRAS-Outaouais, justement, ce qu'ils disaient, eux, ils ont des rencontres de façon mensuelle avec les partenaires municipaux, avec le réseau de la santé...

Mme Prass : ...et des rencontres, à chaque deux semaines, avec leur corps policier. Donc, comme vous dites, il faut absolument que ce soit continu, et également, d'accord — puis on l'a évoqué lors des deux dernières journées — qu'il faut qu'il y ait un financement qui soutienne cette initiative-là. Puis, encore une fois, ça ne peut pas juste être la responsabilité de l'organisme communautaire, il faut que tous les partenaires soient là. Donc, pour vous... bien, je pense qu'on est d'accord pour dire : Il y a du travail qu'il faut qui se fasse en amont, il faut... il y a un travail qu'il faut qui se fasse de façon continue, avec un soutien également.

Donc, est-ce que vous êtes d'accord, dans le projet de loi, qu'il demande, à tout le moins, dans le dépôt de projet pour les centres supervisés d'injection et d'inhalation... qu'il faut qu'il y ait un plan de cohabitation qui accompagne cette demande, pour qu'on comprenne que si on va accorder ce projet, bien, il y a un travail, déjà, qui est... qui est déterminé, qui va se faire, justement, pour essayer de s'assurer que, là où on va s'établir, on peut le faire de façon permanente, sans qu'il y ait des enjeux qui soulèvent la grogne par la suite?

M. Parazelli (Michel) : Oui, mais il faut voir aussi, comme le disait le groupe précédent... puis c'est... il représente plusieurs points de vue du milieu communautaire... c'est que ça ne devrait pas reposer seulement que sur la ressource communautaire, vous comprenez? Ce plan de cohabitation devrait être le résultat d'un... d'un travail concerté avec les instances qui sont responsables des aspects liés à la cohabitation comme tels, et qu'il soit présentés au ministre effectivement, pour pouvoir... Mais, en fait, il faut que ce soit... mais il faut... comment je pourrais dire ça?... il faudrait que ce soit discuté aussi... Comme j'ai dit tantôt, c'est... l'instance municipale joue un rôle important aussi dans la manière de gérer le bon voisinage aussi. Donc là, j'avoue que... Pardon?

Mme Prass : Ah! non, excusez-moi. Allez-y.

M. Parazelli (Michel) : J'avoue que là, ça reste... ça demeure compliqué, qu'il faudrait y réfléchir effectivement. Mais que la ressource de consommation supervisée... ce que... de présenter un plan de cohabitation, que ce soit conditionnel à son autorisation pour fonctionner, ça, je ne suis pas d'accord. Ça ne devrait pas reposer que sur cette ressource-là comme telle, et que... de concevoir ce plan de cohabitation là devrait être un projet en soi, mais un projet intersectoriel concerté localement.

Mme Prass : On se comprend aussi que les organismes peuvent faire appel, justement... Je comprends que c'est... c'est le processus initial de faire la demande, mais ils peuvent déjà faire appel à des partenaires pour s'assurer, tu sais, que ce soient la ville, le réseau de la santé, vous allez être là, on va travailler de concert, puis qu'ils établissent à tout le moins, un plan initial qui pourrait être bonifié par la suite, une fois que le projet est approuvé, mais que ça doit faire partie de tous les éléments qui sont analysés par le côté gouvernemental pour accorder ou ne pas accorder le permis, disons.

M. Parazelli (Michel) : Tout à fait, mais, encore là, à condition que ce travail-là soit soutenu financièrement, parce que c'est ça aussi qui est le problème. Mais il y a des groupes, des ressources qui sont débordés, ils ne répondent qu'à l'urgence actuellement, donc leur demander de faire ça en plus, sans être soutenus financièrement, c'est impossible. C'est pour ça qu'il y a beaucoup de nuances à apporter là. C'est plus complexe qu'uniquement dire oui ou non là...

Mme Prass : Oui, on est tout à fait d'accord, parce qu'on ne veut pas enlever à la mission première de l'organisme qui est soit d'adresser les enjeux d'itinérance ou les enjeux de dépendance. Ça, on est tout à fait d'accord, puis, comme j'ai dit, ça a été évoqué, durant les deux derniers jours, qu'il faut qu'il y ait un financement justement, parce que... et, comme, encore une fois, l'organisme avant vous a témoigné, ils pourraient en faire plus, mais ils ont besoin des moyens, parce qu'eux ils ont des responsabilités puis ils sont déjà étirés dans plusieurs directions. Ça fait qu'il ne faudrait pas en rajouter à leur charge de travail, disons.

• (16 h 20) •

M. Parazelli (Michel) : Voilà, oui. Puis moi, ce que j'ajoute dans ma présentation, c'est l'idée d'inclure les personnes en situation d'itinérance, de penser à la façon dont on peut les soutenir pour qu'elles puissent ensemble, se concerter et puis offrir leurs points de vue aussi, pas uniquement de la parole des intervenants, qui est aussi importante et essentielle, mais que de... que de rencontrer la réalité des personnes en situation d'itinérance elles-mêmes, que d'en avoir un écho, ça vient chercher autre chose qu'uniquement la portée de la parole des intervenants comme tels. On se sent touchés autrement quand on met... on peut être en dialogue avec les personnes elles-mêmes.

Le problème, aujourd'hui, c'est qu'effectivement... Vous le voyez, on a fait la même chose avec les jeunes, avec les personnes... avec les personnes en situation de handicap, en santé mentale, même... puis, plus loin, on l'a fait avec les groupes de femmes, les personnes racisées. Ces groupes, on les a... les gens se sont associés en groupe et ont pu exprimer leurs opinions, leurs points de vue, en discutant entre eux et entre elles, pour pouvoir négocier avec les autres groupes sociaux sur leur place sociale. Les personnes en situation d'itinérance n'ont pas...

M. Parazelli (Michel) : ...cette occasion-là, ne l'ont jamais eue, sauf de manière restreinte dans les organismes eux-mêmes comme tels, où il y a des comités d'usagers, etc. Mais pas sur la place publique, pour donner pour leur point de vue sur ce qu'on dit d'elles, ce qu'on dit des nuisances qu'on dit qu'elles provoquent, etc. Elles pourraient avoir beaucoup de choses à dire. Et là, il faut le faire en préservant, en tout cas, la sécurité de tout le monde, on s'entend, dans le sens que ça peut devenir agressant, le fait de se faire parler d'une certaine manière, hein? On s'entend. Donc, il y a tout un travail lié au cadre de communication qui devrait être fait si on veut vraiment améliorer la... on veut apaiser les tensions, en fait.

Mme Prass : Merci... Merci beaucoup, professeur.

Le Président (M. Provençal) :Ça va?

Mme Prass : Ça... Oui. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Alors, M. le député de Saint-Henri-Sainte-Anne.

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup, M. Parazelli. Très, très intéressant. C'est très clair. Puis vous mettez beaucoup de mots puis de concepts sur des choses qu'on a de la misère toujours à... des fois, à qualifier de manière très tangible, là. Donc, dans la dernière année... les dernières années, on a parlé beaucoup de cohabitation, mais là, les termes que vous apportez, notamment avec la mitigation, la concentration, je pense que ça nous aide... ça nous aide vraiment à mieux définir nos travaux puis de parler de concepts précis. Donc, je vous remercie pour votre contribution à nos échanges.

Je retiens aussi évidemment l'idée d'intégrer les bénéficiaires, les usagers, là, directement dans la discussion puis dans le débat. C'est quelque chose qui a... qui a été apporté par certains groupes, qui... donc certains SIS, là, qui ont... qui ont... SIS qui ont apporté des gens, paires aidants, mais aussi des gens qui ont un vécu expérientiel. C'est... C'est très nécessaire, c'est très utile, et je pense qu'il faut qu'on continue de le faire. Puis je pense qu'il faut qu'on les intègre, comme vous l'avez dit, à nos comités de cohabitation ou aux futurs comités de cohabitation pour que leur message, là... Puis là, vous vous soumettez une piste de solution, avec les enveloppes, les lettres, là, mais... à étudier. Comment on pourrait faire ça, je pense que c'est... c'est déterminant.

La question que j'ai pour vous. Il y a un cadre d'autorisation de quatre ans. Là, je ne parle pas du droit acquis, là, mais je parle de l'autorisation renouvelable à chaque quatre années. Je vous demande s'il n'y a pas là une idée de fragilisation sur l'appropriation, sur le sentiment d'appartenance? Question de financement également aussi, sur le fait qu'à chaque quatre ans, bon, il y a un renouvellement à refaire, est-ce que ce n'est pas une épée de Damoclès, là, au-dessus des gens qui s'approprient un lieu? Bref, qu'est-ce que vous pensez de la temporalité de quatre ans des autorisations délivrées par le ministre?

M. Parazelli (Michel) : Moi, en fait, je trouve que quatre ans, c'est arbitraire, dans le sens que pourquoi quatre ans? En fait, c'est pour mettre de la pression, de la pression à des organismes qui ont déjà de la pression. Donc, ce serait les rendre encore plus insécurisées elles-mêmes, là, et puis instables. Et puis finalement ça les détournerait de leur mission première en partie, là, pendant ces quatre années là. Je ne sais pas trop. Puis, pas juste ça, c'est-à-dire, ça dépend tout le temps des milieux dans lesquels ils sont insérés. Il y a des difficultés variables, hein, à penser un plan de cohabitation comme tel, selon les quartiers et puis... Donc, moi, je respecterais les réalités locales pour... Puis, par contre, je m'en informerais, si j'étais... tu sais, à savoir combien de temps avez-vous besoin pour faire un plan... Moi, je laisserais les groupes identifier la temporalité en question avec leurs partenaires comme tels pour pouvoir le faire. Et ça pourrait varier selon les quartiers parce que les difficultés ne sont pas les mêmes. Moi, c'est pour ça que je respecterais davantage autonomie et l'expertise de ces groupes-là, sur lesquels en tout cas sont... sont les principales portes d'entrée du réseau. Il ne faut surtout pas se les mettre à dos et les fragiliser, honnêtement, là.

M. Cliche-Rivard : Est-ce que le caractère temporel, la temporalité peut miner ou réduire le sentiment d'appartenance, là, à long terme? Le fait que les gens développent des habitudes finalement, sachant que ce n'est peut-être pas perrin, est-ce que ça peut limiter le sentiment d'appartenance puis d'attachement des usagers envers une ressource?

M. Parazelli (Michel) : Je ne comprends pas la question parce que...

M. Cliche-Rivard : La personne, ne sachant pas si dans deux ans, dans trois ans, la ressource...

M. Parazelli (Michel) : Ah oui! O.K.

M. Cliche-Rivard : Est-ce que vous sentez, versus le permanent, est-ce que vous sentez que ça a un impact?

M. Parazelli (Michel) : Bien, je crois que les personnes... les personnes qui fréquentent ces ressources-là ne se posent pas beaucoup ces questions-là, quand elles ne sont pas directement interpelées là-dessus, honnêtement, là. Elles, elles vont là où... C'est des questions de survie, honnêtement, là. Et puis, par contre, certaines personnes qui sont plus... qui ont un sentiment d'appartenance plus concret, bien, elles vont... elles vont essayer de s'impliquer pour essayer de voir comment elles peuvent conserver la ressource. Mais sinon, je ne crois pas que ça joue à ce point à ce niveau-là comme tel, là.

M. Cliche-Rivard : Bien, merci beaucoup pour la contribution à nos travaux. Très appréciés. Je vais aller lire votre bouquin, là, je pense que ça va nous aider cet été dans nos travaux aussi.

M. Parazelli (Michel) : Merci! Merci à tout le monde. Au revoir.

Le Président (M. Provençal) :Merci, M. Parazelli...

Le Président (M. Provençal) :...pour votre participation à nos travaux.

Alors, sur ce, moi, je vais suspendre les travaux pour laisser place aux prochains groupes. Merci encore de votre contribution.

(Suspension de la séance à 16 h 28)

(Reprise à 16 h 30)

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous allons conclure notre... cette consultation publique là avec la présence de Mme la Docteure Mylène Drouin, Directrice régionale de santé publique, Direction régionale de santé publique, Centre intégré universitaire de services de santé et de services sociaux du Centre-sud-de-l'île-de-Montréal. Elle est accompagnée par M. Philippe Robert, directeur par intérim de santé publique de la Capitale-Nationale, Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la capitale, et de Mme Roxane Beauchemin, coordonnatrice professionnelle, Service réduction des méfaits liés aux drogues, Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l'île-de-Montréal. Alors, vous avez 10 minutes pour votre présentation. Et, par la suite, nous procéderons aux échanges. Je vous cède immédiatement la parole.

Mme Drouin (Mylène) : Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre, les membres de la commission, merci énormément de nous inviter aujourd'hui pour nous permettre de participer à cet exercice démocratique, mais surtout de partager l'expertise et l'expérience de nos équipes de santé publique sur le terrain, qui travaillent au quotidien, là, avec les partenaires communautaires dans la crise des surdoses.

Tout comme vous, nous constatons évidemment que la cohabitation sociale pose des enjeux grandissants dans nos communautés et que ce que les citoyens et les parents rapportent sont légitimes, et on doit s'en préoccuper. Les tensions sociales qu'on voit et auxquelles on tente de répondre aujourd'hui sont... sont imbriquées dans deux crises concomitantes, soit celle évidemment de la crise du logement et de l'itinérance, et celle des drogues toxiques, amenant plus de surdoses, deux crises qui sont imbriquées, mais aussi qui ont des facteurs très distincts.

Les services de consommation supervisée sont... on en a maintenant 12 à travers la province. Et ils constituent une intervention centrale à la Stratégie nationale de prévention des surdoses. Ils sont reconnus efficaces évidemment pour prévenir les surdoses, réduire les infections, tel le VIH, ils nous permettent de donner des soins à des gens qui sont désaffiliés du réseau, donc ils désengorgent nos urgences, et évidemment, ils contribuent à la cohabitation sociale en réduisant évidemment la consommation et le matériel d'injection dans l'espace public. Donc, ce serait un mythe de penser...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

Mme Drouin (Mylène) : ...que ces sites-là créent et amènent davantage de consommateurs. Au contraire, ils répondent à des besoins dans des communautés pour lesquelles il y a déjà des consommateurs en présence.    Donc, évidemment, comme on l'a vu à la dernière présentation, la cohabitation sociale, c'est un phénomène très complexe, et on va le voir, ça prend une responsabilité partagée, une réponse concertée de différents partenaires, et ce, en amont. Avec l'envergure de la crise, on pourrait même penser qu'on en a besoin dans beaucoup de quartiers en même temps et non pas uniquement autour des installations qui sont soient liées à l'itinérance ou aux sites de consommation supervisés.

Dans les recommandations apportées par les directeurs, la première touche vraiment le préambule du projet de loi, où on pense qu'il est important de réaffirmer la place des SCS, à la fois comme réponse aux surdoses, mais aussi comme instrument de cohabitation sociale réussie. Il faut clairement expliciter, dans l'esprit de cette loi-là, qu'on ne souhaite pas freiner leur implantation et surtout miner l'agilité qu'on a dans le développement des services pour répondre à cette crise qui évolue, puis on le voit ce qu'il se passe dans les autres provinces canadiennes.

Évidemment, les sites de consommation sont déjà très bien encadrés par les exemptions, entre autres aussi les exemptions fédérales demandent des plans de cohabitation autour de l'acceptabilité sociale. Donc, on en a déjà eu et on les travaille des années avant de déposer les exemptions. Donc, l'ajout, évidemment, de contraintes administratives en plus avec des délais sont clairement pour nous... peuvent amener de l'incertitude et des risques pour les conseils d'administration de ces organismes et pourraient freiner leur engagement à développer des nouveaux services alors qu'on en a besoin de nouveaux.

On recommande donc, si le projet de loi est sanctionné, de vraiment s'assurer d'établir des critères clairs avec les organismes, des processus clairs, transparents, efficients pour éviter qu'on soit avec plus de bureaucratie et d'incertitude. Et comme d'autres l'ont mentionné, on recommande une clause de droits acquis pour les sites qui sont déjà en place puisqu'on le sait, les coûts associés, les démarches feraient en sorte qu'on aurait des bris de services dans des communautés.

Au niveau de la cohabitation réussie ou de la cohabitation sociale, il est essentiel évidemment de ne pas mettre l'ensemble de la responsabilité sur les organismes qui en ont déjà beaucoup avec leur mission de base. Une cohabitation sociale réussie, c'est vraiment lié à une responsabilité partagée où les rôles et responsabilités sont clarifiés entre les acteurs. Et je pourrais peut-être vous parler un petit peu de l'expérience qu'on a vécue avec la Maison Benoît Labre. Et je pense que cette collaboration intersectorielle pourrait être encadrée par des ententes locales et régionales adaptées à chaque quartier. Et, oui, ça va prendre quelqu'un qui va le porter, ça peut être une table de concertation, on a 30 tables à Montréal, par exemple Santé Québec, la Santé publique qui est intégrée à Santé Québec ou les municipalités. C'est tout... tout ça est à définir. Et donc il faut éviter des attentes irréalistes et surtout financer la capacité collective à travailler cette cohabitation sociale, puis il y a des approches de développement des communautés. Je vais te laisser la suite.

M. Robert (Philippe) : Donc, pour justement minimiser les... donc je vais aborder davantage nos articles qui prévoient une autorisation assortie de conditions et renouvelable aux quatre ans. Pour minimiser les contraintes administratives, aussi l'imprévisibilité que ça peut générer pour des organismes, on recommande d'élaborer une grille d'analyse avec des critères objectifs transparents qui seraient connus pour fonder les autorisations. Évidemment, c'est des exigences additionnelles, donc ça impliquerait un certain soutien aussi pour les organismes. Et on recommande aussi de baliser les conditions qui seraient exigées pour le plan de cohabitation s'il y en a, par exemple avec des critères, un processus transparent puis une possibilité aussi pour les organismes de faire appel et de dialoguer avec le ministère parce que... pour vraiment assouplir le plus possible et favoriser le développement. Ensuite, on voulait aborder les trajectoires de soins, parce que le projet prévoit des trajectoires pour la prise en charge des usagers par les services de santé usuels. On sait que les sites de consommation sont un moyen de rejoindre une clientèle désaffiliée. Donc, c'est certainement louable de vouloir favoriser l'accès aux autres services de santé. Par contre, on avait deux nuances qu'on souhaitait apporter.

D'une part, les services auxquels on réfère les usagers lors des trajectoires vont devoir à l'autre bout être respectueux, sécuritaires culturellement, notamment pour les personnes autochtones, et on voit qu'en ce moment les sites répondent à des... une clientèle qui n'irait pas vers les services et qui ne se sent pas accueillie. Évidemment, ça s'améliore, mais il faut travailler à l'autre extrémité aussi. Et, d'autre part...

M. Robert (Philippe) : ...ce n'est pas tous les utilisateurs qui sont prêts, à ce moment-ci de leur vie, à entamer une démarche de traitement en dépendance. Donc, l'important, c'est que ça reste volontaire et au rythme de la personne, là, selon la loi actuelle.

La dernière partie de notre mémoire concerne l'itinérance. Donc, c'est sûr que les préoccupations qu'on a présentées précédemment s'appliquent aussi pour les refuges répit et ressources en itinérance. Évidemment, comme facteur de santé publique, on sait que les personnes... font partie des groupes les plus vulnérables dans notre société, avec des états de santé très défavorables. Donc, on parle... on est... Moi, je fais partie, par exemple, de notre comité régional en itinérance, et on craint quand même que l'ajout de contraintes administratives, une certaine imprévisibilité, ça suscite des préoccupations chez des partenaires qui sont surchargés déjà. Par exemple, il faut avoir les reins assez solides comme organisme pour investir en immobilier et aménager un local quand il y a une autorisation qui pourrait ne pas être renouvelée aux quatre ans. Donc, on est à un moment où les besoins augmentent et aussi on travaille très fort. Et le gouvernement, également, a développé les services pour y répondre. Donc, c'est... on pense important de limiter, là, toute contrainte qui s'ajouterait à ça. Donc, on recommande d'exclure les ressources en itinérance du projet de loi actuel.

En conclusion, justement, face à l'augmentation des surdoses, également du nombre de personnes en situation d'itinérance qui se retrouvent à la rue, on sait que la cohabitation est un enjeu important, mais on pense que ça nécessite une réponse qui est collective, locale, concertée avec le réseau de la santé et des services sociaux, avec les municipalités et avec les services de police, les organismes communautaires. Donc, ça ne peut pas reposer seulement sur un organisme titulaire. Et on pense qu'il y a des services qui seraient plus nombreux, qui seraient plus petits, plus dispersés, plus proches des besoins mais permettraient de diminuer, justement, la concentration autour de certains services, de diminuer la consommation dans l'espace public aussi et de prévenir des décès par surdose. Donc, on est très conscients que nos concitoyens sont affectés par une réalité qui est exacerbée et on souhaite travailler avec le gouvernement et toutes les instances locales pour justement améliorer la cohabitation. Merci beaucoup de...

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup. Alors, on va débuter immigrant nos échanges. Alors, M. le ministre.

M. Carmant : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Dr Drouin, Dr Robert, Mme Beauchemin, merci beaucoup pour votre présentation. Puis je pense qu'on est en accord avec ce que... ce que vous venez de dire. Je pense que mon premier point serait... une des raisons du projet de loi, c'est que, récemment, les difficultés qu'on a eues avec certains sites entraînent que le développement de ressources en itinérance est très difficile et nécessite l'implication du ministre. Et, tu sais, il faut développer des règles claires qui vont venir rassurer la population. Et je pense qu'une des choses qui va venir rassurer la population, c'est l'implication plus nette du réseau de la santé. Dans le... Dans le texte, on parle de Santé Québec, mais vous vous imaginez que je pensais bien que c'était la Direction régionale de santé publique qui.. qui va soutenir ça, là.

Puis l'autre avantage qui va... de ce processus-là, c'est que, sur le terrain, il y a beaucoup d'inégalités interrégionales. Puis, moi, ce que je me rends compte, c'est que ça dépend beaucoup des tables de concertation régionales et ça dépend beaucoup de l'implication des établissements. Et l'avantage de Santé Québec, c'est que ça va permettre, tu sais, une certaine égalité territoriale entre les différentes régions du Québec.

Ceci étant dit, comment voyez-vous votre rôle dans ce processus de structuration ou, tu sais, d'amélioration de la cohabitation?

• (16 h 40) •

Mme Drouin (Mylène) : Bien, je pense qu'on a déjà... on est déjà bien impliqués, la direction de santé publique régionale, mais aussi on a des équipes de santé publique territoriales, donc avec des organisateurs communautaires qui sont très liés, dans le fond, avec les tables de concertation locales et les organismes sur le terrain.

Nous, dans l'ensemble des SCS, parce qu'avant les SCS à Montréal, les premiers, étaient sous la responsabilité de la Direction régionale de la santé publique, c'est seulement il y a quelques années que l'exemption a été transférée aux organismes communautaires, et c'est clair qu'à ce moment-là, on avait, dès le démarrage, des comités Bon voisinage qui se faisaient avec évidemment la population, les commerçants, des comités avec un plan d'action, avec des partenaires, des pairs aidants, et c'était beaucoup... la Santé publique était présente, mais, des fois aussi, il y avait un... un organisateur...

Mme Drouin (Mylène) : ...qui soutenaient le processus avec les organismes. La ville est là, le SPVM. S'il y a un métro proche, le STM est là aussi. Souvent, ces comités-là, ils vont se voir de manière intense durant des périodes, puis, quand ça va bien, bien, évidemment, on se permet de continuer les actions dans le plan d'action, mais de... sans se voir à chaque semaine. Et s'il y a un enjeu qui ressurgit, comme on l'a vu avec la rue Berger, par exemple, évidemment, là, le comité se réactive. C'est un peu le fonctionnement.

La réflexion qu'on se fait aussi, quand on regarde les recommandations autour de la cohabitation, si on... le fait que ça ne touche pas que les SCS. Ça touche l'itinérance, ça touche la santé mentale, ça touche la violence urbaine, tu sais, s'il y a... Les enjeux de cohabitation peuvent avoir différents visages. Comment on pourrait le travailler en amont, proactivement, comme la personne avant moi le disait, de manière permanente, on a une stratégie des surdoses, on a un plan de lutte à la pauvreté, on a un beau napperon qui définit les rôles et responsabilités. Est-ce qu'on est rendus à se dire en cohabitation sociale, à mieux définir comment, avec une... tout en l'adaptant aux caractéristiques de chaque quartier... mais comment devrait, minimalement, se travailler la cohabitation sociale en continu, pour que ces dialogues là soient là bien avant qu'on pense à implanter un centre de jour, un SCS ou une maison d'hébergement pour jeunes en difficulté, par exemple, ou une maison pour la santé mentale? Tous ces lieux-là créent... C'est beaucoup mieux de le travailler, évidemment, en amont.

Donc, le rôle de la santé publique, on est au cœur de ces démarches-là, mais c'est sûr que, dans cette responsabilité partagée, la municipalité, elle a un grand rôle. Dans un contexte montréalais, probablement que les tables de quartier auraient un rôle central. Elles sont financées par la ville, par la santé publique et par Centraide. Donc, probablement qu'on pourrait regarder avoir ce dialogue-là pour mieux cadrer les rôles et responsabilités, et le travailler en continu.

M. Carmant : ...est passée de la santé publique aux organismes communautaires?

Mme Drouin (Mylène) : Bien, c'est l'exemption. Et plus... avant ça, c'était plus avec un autre article, là. Donc, c'est comme si on achetait des services, on...

Mme Beauchemin (Roxane) : Oui, bien, au départ, au départ, les usagers des SCS montréalais étaient des... considérés comme des usagers, des patients du CIUSSS Centre-Sud, O.K. Donc, le... c'était la direction régionale de santé publique qui était le porteur des exemptions fédérales, O.K. Et, en cours de route, on a changé le modèle un peu, où est-ce que, maintenant, ce sont... les porteurs des exemptions fédérales à Montréal... ce sont les organismes communautaires qui sont porteurs, ils ont la responsabilité, et donc les usagers sont considérés comme leurs usagers à eux. Nous, nous sommes présents, notre équipe infirmière est là dans deux fonctions, une offre de soins directs aux patients, interventions d'urgence, et plein de soins qui sont offerts pour éviter les transports hospitaliers, l'intervention d'urgence se fait sur place. Et ça donne aussi un accès aux soins et services du réseau, faire du dépistage, du soin de plaies, etc., et on évite, là, le recours aux soins... Puis, comme on disait plus tôt, certaines de ces personnes sont réfractaires à aller fréquenter les... le réseau de la santé, alors ça permet une offre en amont.

Ceci étant dit, l'autre volet de notre offre, actuellement, en termes de collaboration, c'est une offre de formation et de simulation, formation aux intervenants communautaires. Donc, si les infirmières ne sont pas présentes pendant les heures de service, les intervenants communautaires sont formés pour l'intervention d'urgence, et il y a des simulations qui sont effectuées régulièrement pour assurer une assurance qualité des interventions d'urgence effectuées. Donc, les utilisateurs seront considérés comme des usagers de l'organisme communautaire. Nous n'avons plus la même responsabilité et le même rôle, puis on a une entente de collaboration de soins infirmiers, dans ce contexte-là, depuis maintenant 2018, 2019.

M. Carmant : O.K. Donc, en fait...

Mme Drouin (Mylène) : ...exemple, c'est 1 600 interventions d'urgence dans nos... dans nos SCS annuellement, donc c'est... avec seulement une centaine de transports ambulanciers. Donc, ce sont toutes des personnes qui auraient pu faire ça dans le parc, dans la rue, et qui se seraient ramassées, soit par les ambulances, soit par les policiers, à l'urgence. Et c'est plus de 6 000 soins infirmiers qui sont donnés, annuellement, à ces personnes, qui sont, souvent, désaffiliées du réseau.

M. Carmant : O.K. Donc, vous avez déjà joué ce rôle là plus prépondérant.

Mme Drouin (Mylène) : Et on est encore présents, oui.

M. Carmant : O.K. Maintenant, l'autre point, c'était... ah! oui... puis certains... on en a entendus beaucoup depuis les derniers jours, là, qui disent que les organismes communautaires se sentent un peu délaissés dans ce processus-là de gestion de la cohabitation. Moi, ce que... ce que je trouve intéressant, avec une plus grande implication de la santé publique, c'est que vous avez les moyens de mobiliser les partenaires, beaucoup plus qu'un organisme communautaire. Est-ce qu'on peut... est-ce que vous êtes d'accord avec ça?

Mme Drouin (Mylène) : La... Bien, je ne sais pas si on a les moyens, surtout dans le contexte actuel...

Mme Drouin (Mylène) : ...mais certainement, on a une certaine légitimité, tout comme l'arrondissement peut l'avoir ou une table de quartier. Puis, quand on a travaillé, par exemple, sur l'enjeu de la Maison Benoît Labre, dans les dernières années, on a appelé ça un plan d'action sur la cohabitation sociale du quartier Saint-Henri. Donc, c'est vraiment de le regarder à l'échelle d'un quartier et non pas uniquement stigmatiser un organisme, parce que, juste à côté, il y a le métro puis il y a des enjeux aussi autour du métro, puis, juste à côté, il y a des campements. Donc, on assoit les partenaires et c'est sûr qu'on avait un focus sur l'enjeu de la Maison Benoît Labre parce qu'il y avait un enjeu criant, mais on l'abordait aussi dans une perspective beaucoup plus large de quartier. Et si on veut le travailler en amont, la Santé publique a certainement un rôle à jouer localement, tout comme les partenaires en itinérance, et on doit l'aborder sous l'angle des quartiers, des quartiers locaux, avec leur dynamique chacune, qui est différente, là.

M. Carmant : O.K., j'ai beaucoup aimé en fait l'aspect de M. Parazelli. Participation citoyenne aussi, c'est un concept de santé publique, hein?

Mme Drouin (Mylène) : Bien oui, c'est un concept qu'on intègre...

M. Carmant : Que vous utilisez, en tout cas.

Mme Drouin (Mylène) : ...qu'on utilise, qui est quand même présent avec les SCS dans le temps. Dans certains comités, quand les comités sont actifs, des fois, comme on le disait, il y a des pairs-aidants, il y a des... comme à la Maison Benoît Labre, des gens qui habitent dans les logements au-dessus, donc sur les étages, mais clairement on pourrait aller un petit peu plus loin dans cette cette démarche-là pour intégrer la voix des personnes en situation d'itinérance ou des personnes consommatrices. Et on a la chance aussi en santé publique d'avoir une ressource anthropologue qui va sur le terrain. Quand il y a eu la crise à la Maison Benoît Labre, où on essayait de trouver des solutions collectives, bien, on a essayé de comprendre qui étaient ces gens-là, d'où ils venaient, leur trajectoire. Donc, on essaie aussi, vis des données anthropologiques, de comprendre les phénomènes, les déplacements, les changements de profil de consommation pour toujours adapter nos interventions.

M. Carmant : O.K. La seule chose qui m'a un peu surprise de votre rapport, c'était l'enjeu des droits acquis, surtout pour Benoît Labre, qui est vraiment par rapport aux écoles. Je sais que vous avez écrit un rapport récemment sur le développement des enfants de Montréal. Peut-être un commentaire, là, stress parental, développement des enfants. Pas d'inquiétudes de ce côté-là?

Mme Drouin (Mylène) : Bien, les enfants de Montréal, pas juste autour de la Maison Benoît Labre, mais un peu partout, sont exposés à des situations d'itinérance, de consommation, et c'est pour ça que la stratégie, si on veut vraiment la travailler, il faut la travailler par quartiers, en amont. La littérature n'est pas très claire sur les impacts réels sur le développement de l'enfant. Et, dans le contexte de la Maison Benoît Labre, si on déplace, dans le fond, le SCS, selon moi, on va aggraver la situation parce qu'actuellement le SCS, il est ouvert cinq jours semaine sur les heures scolaires, parce qu'on voulait couvrir la période où les enfants étaient proches. Mais dans un monde idéal, au lieu de mettre l'investissement sur le déménagement, moi, je rajouterais des heures la fin de semaine, le soir pour faire en sorte que la consommation vraiment puisse se faire dans le lieu sécuritaire qui est dédié. Donc, c'est sûr que moi, je crois que, quand je dis que les SCS font partie de la solution à une cohabitation sociale, une partie, pas toute, je pense qu'on va au contraire les renforcer dans un secteur comme celui-là.

M. Carmant : Et qu'est ce qu'on dit aux parents de l'école voisine?

• (16 h 50) •

Mme Drouin (Mylène) : Bien, on continue de les impliquer, on continue de les sensibiliser. Dans la stratégie qu'on a faite puis que j'ai animée pendant presque six mois... tous les vendredis matins, avec les partenaires intersectoriels, on a travaillé avec les brigadiers scolaires, on a travaillé... évidemment, il y avait le comité de bon voisinage avec les parents et je pense que... et moi, j'ai été même surprise de voir certains parents qui étaient quand même soucieux et inquiets, mais, en même temps, très empathiques à la situation qui se vivait. Et je pense que si les parents voient qu'il y a des plans d'action concrets et qui sont financés aussi, donc que les gens... Si on dit : Ça prend des blocs sanitaires... Parce que, dans le fond, un exemple comme la Maison Benoît Labre, c'est qu'il y a des gens dans des campements de partout qui viennent prendre leur douche à tous les jours ou que... peut-être pas à tous les jours, mais qui doivent se déplacer. Donc, si on se dit : Ça prend des blocs sanitaires, ça fait partie de la solution, bien, évidemment, il faut que les partenaires, on n'ait pas seulement des gens qui sont là pour discuter de l'enjeu, mais qui ont aussi les leviers pour aller chercher soit le financement ou mettre la solution en place. Et c'est ce qu'on a essayé de faire. Puis je pense que, globalement, avec les indicateurs de suivi... il va toujours y avoir certains méfaits qui peuvent arriver, mais, globalement, les plaintes à la fois de l'école, à la fois...

Mme Drouin (Mylène) : ...du SPVM ont diminué.

Mme Beauchemin (Roxane) : Effectivement. Alors, les mesures de mitigation au niveau des interventions psychosociales aux abords de l'organisme, les brigades pro-protect, etc., ça a eu un gain, des gains particuliers au niveau de nos indicateurs. Et où est-ce qu'on a eu... Un des objectifs, c'était de désengorger, au niveau de La Maison Benoît-Labre, et donc d'avoir des blocs sanitaires, d'avoir une autre offre ailleurs, pour éviter cette concentration-là. Puis là c'est là qu'au niveau de... on n'arrivait pas à baisser, diminuer le nombre de repas offerts quotidiennement, parce qu'il n'y avait pas d'autres offres de nourriture dans le quartier, puis, bon...

Et cet organisme-là est en activité depuis plus de 70 ans dans ce quartier-là, au départ, pour offrir, sous forme de soupes populaires, des repas parce que c'est un besoin dans le quartier depuis des décennies. Ils ont bonifié une offre pour répondre aux besoins existants et ils ont été un peu victimes de leur succès avec cet apport-là. Alors, le plan, dans les objectifs, c'était comment est-ce qu'on peut enlever cette pression-là puis on a réussi à certains égards, au niveau de l'intervention aux abords, la mitigation, etc., mais pas au niveau de l'apport supplémentaire.

M. Carmant : O.K. M. le Président, je passerais la parole à une collègue, qui lève la main.

Le Président (M. Provençal) :...

Mme Dorismond : Oui, merci. Merci, M. le Président. Il reste combien de temps?

Le Président (M. Provençal) : 2 min 30 s.

Mme Dorismond : 2 min 30 s. Dans votre mémoire, aussi, vous parlez d'une grille d'analyse. J'aimerais ça que vous en parliez un petit peu plus. Les objectifs, ce serait quoi, puis qui devrait participer à cette grille?

M. Robert (Philippe) : Effectivement. En fait, la grille d'analyse, on pense qu'elle devrait être développée par le ministère, mais en collaboration aussi avec, évidemment, la direction de... les directions de santé, qui vont pouvoir collaborer, et les organismes communautaires, pour s'assurer que l'analyse, en fait, soit objective, explicite. Ce ne sera pas simple, évidemment, à réaliser parce qu'on parle de cohabitation. Donc, c'est très complexe d'anticiper, dans un secteur, quels vont être les effets, parce que ça change aussi beaucoup au fil du temps. On l'a vu, nous aussi, à Québec, les substances consommées... qui changent les comportements des gens au fil des années. Il y a des déplacements en fonction de l'ouverture de d'autres sites. On le sait, quand il y a un autre répit, il y a un deuxième répit qui a été ouvert dans le quartier, bien, ça s'est amélioré autour du premier, justement, parce que... Donc, ce n'est pas simple, mais, au moins, s,il y a certains critères, que ce soit des normes de plaintes ou qui viennent, en quelque sorte, baliser qu'est-ce qu'on entend par cohabitation harmonieuse et quel genre de mesures devraient être mises en place, qu'est ce qu'on attend exactement, ça pourrait faciliter l'analyse et rendre ça aussi plus prévisible. Parce qu'autrement il y a toujours un risque d'imprévisibilité politique qui peut changer aussi un projet de loi, c'est là... Une loi, c'est là pour longtemps, donc, pour ne pas que les organismes soient en quelque... vivent une épée de Damoclès en quelque sorte, là.

Mme Dorismond : Les organsimes... depuis deux jours, ils nomment votre importance dans la collaboration, et tout ça. Je pense sincèrement que votre place est nécessaire pour les aider, même dans une grille d'évaluation ou dans un processus x, là, je pense que cette collaboration est essentielle. L'autre chose, vous avez parlé aussi qu'il y a eu certains enjeux avec La Maison Labre, dans la collaboration ou c'était d'autres spécificités problématiques en lien avec les enjeux qui sont arrivés?

Mme Beauchemin (Roxane) : La collaboration était très bonne, très, très bonne, oui, oui, oui. Ce qui est arrivé, c'est que La Maison Benoît-Labre est arrivée avec une offre de service note de service 24/7, un modèle qui n'existait pas, la seule au Québec. Donc, on a eu des... avec une offre de service de douche, de repas trois fois par jour, de l'hébergement en eau, etc., un service de consommation supervisée. Mais l'offre de service pour répondre aux besoins de base avec des besoins grandissants auxquels on est confronté partout, là, puis je crois que ça fait deux jours qu'on en entend parler, mais ils ont été victimes de ce succès-là. Alors, les collaborations ont toujours été excellentes.

C'est sûr qu'au début c'est une nouvelle structure qui est arrivée là, parce qu'il y a eu un déménagement qui a amené La Maison Benoît-Labre à cet endroit-là. Il y a un travail en amont de collaboration, de portes ouvertes, de visites, de flyers aux résidents, qui a été fait autour, aux riverains. Tout ça avait été fait en amont. Au début, oui, il y a un choc, parce qu'il y a eu un déplacement de population. Mais maintenant ce qu'on attend aussi, c'est des projets avec des initiatives. Comme tantôt, on parlait de projets d'implication de résidents de La Maison Benoît-Labre avec des élèves de l'école adjacente. Donc, il y a un projet artistique qui est en cours, actuellement, avec l'équipe-école et des intervenants psychosociaux.

Alors, quand on prend une photo de maintenant, en juin 2025, versus ce qu'on a vécu en mai 2024, on n'est pas à la même place. Alors, toutes les mesures de médication, d'intervention, etc., ont été maintenues ou, dans certains cas, ont été reprises avec le printemps en avril, mai. Mais on n'est pas du tout à la même place que l'année dernière.

Mme Dorismond : O.K. Merci.

Le Président (M. Provençal) : C'est maintenant au tour de Mme la députée de D'Arcy-McGee...

Le Président (M. Provençal) :...de D'Arcy-McGee.

Mme Prass : Merci, M. le Président. Juste pour faire référence à ce que vous venez de dire, on a un parent qui était là hier soir, qui habite dans le coin de Benoît-Labre, de la Maison Benoît-Labre, puis ce qu'il nous dit, oui, en fait, les choses se sont améliorées, mais il y a encore énormément d'enjeux. Et vous avez... Dre Drouin, en début de votre intervention, vous avez dit : Posez-moi la question sur l'expérience cohabitation avec Maison Benoît-Labre. Donc, je vous la pose.

Mme Drouin (Mylène) : Bien, je pense qu'on en a parlé, mais la... Bien, évidemment, il y a un comité de bon voisinage qui a été mis en place. Puis je pense qu'il y a certains élus qui sont venus même participer à une rencontre. Donc, c'est vraiment un endroit où on discute, les partenaires, la ville, la santé, évidemment, le communautaire est présent, puis on reçoit. Il y avait des actions qui émanaient de ça. Puis on a mis... Dans le contexte où, évidemment, il y avait une affluence puis des enjeux vécus, on a mis en place un comité intersectoriel. Et j'ai pris le leadership de l'animer, de par le fait qu'il y avait quand même une crise puis je ne voulais surtout pas que ça ferme, donc, je voulais m'assurer qu'on soit capables.

Donc, il y avait, évidemment, le SPVM, la STM, l'arrondissement, la ville centre, la Direction de Santé mentale et dépendances qui offre des services à l'intérieur de la Maison Benoît-Labre. Il y avait, évidemment, le communautaire, les cellules de médiation sociale du communautaire et l'école, incluant la commission scolaire. Et on a vraiment construit ensemble un plan d'action avec des objectifs très clairs de désengorger, de voir aussi... tu sais, est-ce qu'on doit adapter les heures des SCS pour... comment on amène la population à consommer à l'intérieur, tout le lien avec les campements, la ville avait une responsabilité de regarder comment elle pouvait mettre des blocs sanitaires ailleurs. Donc, je dirais que ça s'est très bien passé.

Mais il demeure toujours que, dans ce rôle et ces responsabilités, il faut s'assurer que les partenaires aient quand même aussi les leviers pour mettre en œuvre les actions qui vont permettre de désengorger. Il y a des choses qui ont bien fonctionné. Il y a des choses... malgré... on essayait d'avoir un deuxième lieu pour remettre des repas ou avoir des équipes qui allaient aller porter des repas dans les campements pour éviter que les gens se déplacent. Il y a des choses qui ont bien fonctionné. Il y a des choses pour lesquelles, évidemment, soit les ressources n'étaient pas disponibles ou on n'arrivait pas à trouver de locaux.

Mme Prass : Puis est-ce que la Santé publique a été impliquée en amont lors de... quand l'organisme communautaire...

Mme Drouin (Mylène) : Avant.

Mme Prass : ...ou avant l'ouverture? Quand ils ont commencé à rentrer dans la communauté pour en parler, vous étiez...

Mme Drouin (Mylène) : Oui, on est allés aux assemblées publiques. Et, au départ, par contre, quand ils ont déménagé du sous-sol vers le nouvel emplacement, il distribuait déjà du matériel de consommation, mais il n'y avait pas de SCS dans le sous-sol d'église. Et, au départ, c'était... Dans les plans, il n'y avait pas nécessairement de SCF, c'est venu un petit peu plus tard dans la configuration du projet, lorsqu'on a compris, surtout post-pandémie, que là, oups, les profils de consommation changeaient. Et là, comme on avait une opportunité avec une bâtisse, c'est là qu'on a réfléchi à ajouter. Donc, c'est sûr qu'on n'était pas au démarrage du projet, mais on est arrivés quand même avant l'ouverture des portes, là, plusieurs mois avant.

Mme Prass : Parce que moi, j'ai entendu parlé de plusieurs parents qui ont dit que ces vœux... les... disons, les sessions d'information sont venues très tard, juste vraiment très... peut-être deux mois avant l'ouverture de la Maison Benoît-Labre, qu'ils ne se sentaient pas impliqués dans ce processus-là. Qu'est-ce que vous... Si vous aviez à... Si toute l'aventure était à se refaire, qu'est-ce que vous... qu'est-ce qui n'a pas été fait que vous pensez aurait pu être fait pour que l'atterrissement soit mieux accueilli, disons?

• (17 heures) •

Mme Drouin (Mylène) : Bien, je pense, l'acceptabilité... Bien, dans l'exemption, on parle d'acceptabilité sociale, mais, certainement, il aurait pu avoir un comité de bon voisinage qu'on peut mettre en amont pour préparer le terrain, avoir des vis-à-vis. Puis, des fois, c'est aussi des commerçants qui peuvent être présents, là. Là, ça donne... c'était... L'enjeu était autour d'une école, principalement, et de parents, mais, selon le contexte... Mais je pense qu'il y a quand même eu... Là, je ne suis pas capable de me prononcer sur la démarche-là, là, je pense que la Maison Benoît-Labre serait mieux placée. Mais clairement, si on a déjà une structure permanente où on peut réfléchir et avancer... déposer les enjeux de cohabitation, puis on a des gens qui sont capables de prendre des décisions et de mettre des actions en place, clairement, quand on sait qu'un projet comme celui-là ou un autre... dans un autre quartier en santé mentale, en itinérance, se réalise, bien, on pourrait activer cette cellule-là en amont. Donc, la solution se veut... se doit d'être permanente, pas partout à travers le Québec, mais surtout dans certains quartiers, où on le sait, qu'il y a des problématiques de cohabitation.

Mme Prass : Et...


 
 

17 h (version non révisée)

Mme Prass : …dans votre mémoire, parmi les recommandations, vous suggérez de renforcer la capacité des collectivités à accueillir les tensions liées au vivre ensemble. Évidemment, tout… lié à la cohabitation. Comment est-ce que vous voyez renforcer cette capacité-là?

Mme Drouin (Mylène) : Tu veux-tu y aller? Oui.

M. Robert (Philippe) : Bien, en fait, dans nos directions de santé publique ou dans les établissements de santé, il y a des organisateurs, organisatrices communautaires. Au final, c'est un processus et, je pense, le processus qui a été décrit avant en est un aussi. Mais c'est essentiellement de rassembler des gens, d'avoir des espaces de dialogue avec les citoyens, avec les personnes en situation d'itinérance, avec les autres partenaires. Pour le moment, notre organisatrice communautaire, par exemple, a beaucoup travaillé autour du SCS pour ça, pour rassembler les gens. Il y a une question de ressources aussi, évidemment. On le mentionnait, il faut… ça prend un certain financement qui est au-delà du financement d'un organisme pour être capable de bien le faire. On a parlé d'anthropologue aussi, donc de comprendre, d'étudier les dynamiques. Donc, c'est sûr que je ne pourrai pas aller nécessairement plus loin parce qu'on n'est pas des experts de cet… à ce niveau-là. Mais dans les équipes de santé publique ou dans les équipes des établissements de santé avec des intervenants de proximité, on pense que c'est possible de le favoriser. Je sais que nos organisatrices communautaires développent des ateliers aussi où les gens peuvent dialoguer, échanger. Évidemment, c'est des solutions qui sont sur un certain temps. Il va rester des choses imparfaites, mais on pense qu'on peut atténuer quand même les tensions.

Mme Drouin (Mylène) : Et je reviens, l'importance aussi sur la triade santé publique, ou organisation communautaire dans les CIUSSS. Les agents de développement communautaire dans les arrondissements ou les villes et les tables de quartier qui sont un lieu de choix pour réfléchir ces enjeux-là et qui comprennent la complexité et les enjeux sociaux de leur quartier. Ça fait que, pour moi, quand on parle de responsabilité partagée puis là après ça qui prend le leadership, je pense que ça peut dépendre, il va falloir le déterminer, mais ça peut aussi être variable d'un territoire à l'autre selon les dynamiques locales.

Mme Prass : Vous suggérez également d'établir une mécanique claire, transparente et efficace pour les demandes d'autorisation pour les SCS. Il y a des mémoires, des groupes qui ont suggéré qu'un comité soit mis en place à l'intérieur de Santé Québec, celui qui va faire l'analyse justement pour amener les différents points de vue, les différentes réalités autour de la table, en faisant l'analyse de ces demandes-là. Est-ce que… et justement, quand vous dites « établir une mécanique claire », je comprends que vous ne faisez pas référence à un comité, mais pensez-vous que ça serait quelque chose qui serait utile justement pour que la décision ne soit pas remise à un département, mais plutôt qu'on fasse un petit peu le tour santé mentale? Parce qu'il y a des liens évidemment, itinérance également. Pensez-vous que c'est quelque chose qui serait utile?

Mme Drouin (Mylène) : Bien, je pense qu'il faut que l'idée de la mécanique claire, c'est aussi pour ne pas que ça soit une décision arbitraire, que le fait qu'il y ait trois ou quatre citoyens bien organisés puis qui sont contre un projet nous amènent à dire : Ah! non, finalement. Donc, l'idée c'est d'avoir la capacité… une instance qui est un peu plus indépendante, avec des critères, des balises, des délais et qui réduit… qui amène une analyse beaucoup plus objective et qui permet de prendre une décision et de réduire l'incertitude pour les conseils d'administration.

Moi, ma crainte, c'est que tranquillement on va chercher des sites, déjà que c'est dur, trouver des locaux, des espaces... Mais là, les conseils d'administration vont se dire : Wo! ça s'en vient compliqué, là, cette affaire-là. Puis là il faut faire ci, puis là on a telle responsabilité, dans quatre ans, ce n'est pas certain qu'on est encore capable d'opérer. Donc, clairement, toutes ces recommandations-là visent à ne pas freiner le développement des services et à rendre ça le plus objectif et clair. Et moi, je le répète, il y a déjà un très grand encadrement des services de consommation supervisée. On envoie des rapports aux trois mois soit à Santé Canada et pour certains au ministère sur différents indicateurs de suivi. Donc, si on veut vraiment s'attaquer à la cohabitation sociale, probablement que c'est beaucoup plus une stratégie qui va nous permettre de… de clarifier les rôles et responsabilités et les leviers de chacun qui va être la solution la plus gagnante.

Mme Prass : Vous proposez également… (Interruption), excusez-moi, que le plan d'habitation soit basé sur des standards minimaux élaborés par le ministère de la Santé et des Services sociaux et validés par les directions régionales de santé publique. Quels sont les éléments qui devraient figurer justement dans ces standards-là, disons?

M. Robert (Philippe) : Oui, bien, en fait, c'est… on n'a pas aujourd'hui une liste de standards exactement à proposer. Je pense que c'est le genre de chose qui doit être développé justement avec les… avec les directions de santé publique, les établissements de...

M. Robert (Philippe) : ...les municipalités, les organismes pour avoir une certaine base. L'idée, c'est de fournir une... qu'il y ait une obligation de moyens, mais pas nécessairement une obligation de résultat, parce que le résultat peut changer, il n'est pas... il n'est pas, en fait, sous le contrôle total d'un organisme. Donc, ça peut être d'avoir des... oui, d'assurer la salubrité, mais, encore une fois, ça va dépendre la municipalité pour l'installation, le ménage, etc. Les organismes en font. À notre site, les intervenants vont eux-mêmes, des fois, retarder l'ouverture pour aller nettoyer, mais ça prend aussi l'implication de la ville. Donc, je pense que ça peut être de décrire certaines de ces conditions-là, mais après c'est dans la... dans l'application, ça doit... ça ne peut pas reposer sur l'organisme seulement, ça doit... Et là comment... Est-ce que c'est dans le projet de loi ou comment on baliser? On le laisse évidemment au gouvernement, mais je pense que c'est important que ça soit une obligation de moyens, puis ça peut inclure tout ce qui est nettoyage, d'avoir des espaces de dialogue, etc.

Mme Prass : Et vous l'avez évoqué plus tôt, la question que les organismes aient un financement pour soutenir les efforts de cohabitation et des mesures d'atténuation, c'est une question qu'on pose depuis deux jours parce qu'évidemment on ne va pas enlever... on ne veut pas amputer le budget ou les ressources qui sont dédiées à la mission de l'organisation. Donc, il va falloir trouver une formule. Et je pense que vous êtes d'accord pour dire qu'il va falloir trouver une formule pour accorder les financements, pour que, justement, il y ait un programme, disons, de cohabitation et que ça ne revienne pas encore sur la charge financière de l'organisme communautaire qui, déjà, n'est pas riche, disons.

Mme Drouin (Mylène) : Bien, actuellement, dans l'exemption, on demande un plan de cohabitation ou des mesures d'acceptabilité sociale qu'ils appellent, mais le financement, actuellement, tout le financement qu'on donne pour l'opération du centre, donc, des services. Donc, oui, des fois, il va y avoir des intervenants qui vont aller à l'extérieur, s'assurer de la propreté, mais ce n'est pas inclus à l'intérieur des financements actuellement. Donc, oui, vous avez raison.

Mme Prass : C'est terminé?

Le Président (M. Provençal) : C'est terminé.

Mme Prass : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) : Merci beaucoup. Alors, on termine cet échange avec M. le député.

M. Cliche-Rivard : Merci, M. le Président. Merci, Dre Drouin. Merci pour votre travail au quotidien. On a effectivement eu l'occasion de se croiser à quelques reprises dans le quartier Saint-Henri ou ailleurs. Question. Tantôt, vous avez parlé d'un rapport aux trois mois que vous envoyez au ministère avec des indicateurs, c'est-tu disponible, ça, ces rapports-là? C'est-tu public?

Mme Drouin (Mylène) : Mais on envoie... tu sais, ça dépend, parce qu'il y a des sites qui ont une exemption fédérale, ça, c'est des rapports, mais c'est les organismes qui les envoient. Avant ça, c'était nous, mais là, maintenant, c'est les organismes qui les envoient. Puis les autres, pour les autres sites qui sont une exemption provinciale, c'est le ministère, là, qui... C'est envoyé au ministère aux trois mois. 

M. Cliche-Rivard : C'est envoyé au ministère, donc, ce n'est pas public. Donc, si on veut les obtenir, il faut faire la demande au ministère. C'est ce que vous me dites.

Mme Drouin (Mylène) : Oui, on ne les rend pas publics, non.

M. Cliche-Rivard : Parfait, parce que ce serait intéressant de voir c'est quoi, les indicateurs, qu'est-ce qui est évalué, qu'est ce qu'on peut intégrer au plan de cohabitation. C'est-tu possible de les avoir sans données? 

Mme Drouin (Mylène) : Il y a ces indicateurs-là qui sont suivis, mais peut-être, peut-être qu'on pourrait dire quelques mots sur... Lorsqu'on a fait le comité de cohabitation — puis ça, c'est intéressant, c'était la première fois qu'on le travaillait de cette façon-là — c'est souvent difficile de mettre des données du SPVM, de la STM, de l'organisme de la santé mentale ensemble. Donc, on a réussi à construire un tableau de bord avec des indicateurs très précis qui nous étaient fournis à peu près aux deux semaines par les organismes pour nous permettre de voir les tendances des plaintes. L'école nous fournissait aussi... Donc, c'est beaucoup ces éléments-là qu'on suivait.

M. Cliche-Rivard : Ça, ces données d'indicateur là, sans qu'on ait les rapports aux deux semaines, pour qu'on puisse encadrer notre travail sur  la cohabitation, ce que devrait contenir un plan de cohabitation, est-ce qu'on pourrait les avoir? Après les avoir, les.

Mme Drouin (Mylène) : Les indicateurs.

M. Cliche-Rivard : Les indicateurs.

Mme Drouin (Mylène) : Les indictateurs, certainement, oui.

• (17 h 10) •

Mme Beauchemin (Roxane) : Oui, oui, mais il faut voir quels sont les objectifs associés, parce que là, c'est sûr que bâtir un plan de cohabitation en amont d'un service d'un nouvel organisme, ce serait autre chose. On est allés dans l'objectif qu'il fallait enlever la pression sur La Maison Benît-Labre, il fallait désengorger. Donc, on avait le nombre de douches qui étaient prises, le nombre de repas servis par jour. On avait un objectif de baisse à ce niveau-là. Mais, en même temps, on avait les interventions de référencement vers l'agent de liaison de la santé mentale, dépendance, du service qui était là, ça, on s'attendait à avoir une augmentation.

Alors, c'est le type... ou les interventions extérieures quelles étaient-elles, les plaintes de l'école, ça devait diminuer, ça avait diminué, ça a marché, donc. Alors voilà, donc, il y en avait qui étaient à revoir à la baisse. Oui, bien ça, il n'y a pas de problème.

M. Cliche-Rivard : Parfait. Mais ça va nous aider à établir, nous aussi, la discussion puis le cadre de la discussion sur le plan de cohabitation, je pense que ce sont des éléments importants. Est-ce que la Santé publique de Montréal a été consultée dans l'élaboration du projet de loi n° 103?

Une voix : ...

M. Cliche-Rivard : Non. Et, à votre connaissance, est-ce que, dans les 17 directions régionales de Santé publique, est-ce que vos collègues ont été consultés à votre connaissance...

M. Robert (Philippe) : …je ne penserais pas.

M. Cliche-Rivard : Parfait. Une dernière question. Vous avez en main vous aussi le rapport de la coroner dans le décès de M. Wilson, la coroner Godin, j'imagine que vous l'avez regardé, r-7, «mettre en place des actions nouvelles pour faciliter l'implantation de nouveaux centres de consommation». Est-ce que vous pensez que le projet de loi n° 103 répond à la recommandation du coroner?

Mme Drouin (Mylène) : Bien, comme je l'ai dit, c'est des… c'est sûr qu'il y a des contraintes administratives pour les organismes. Donc, pour nous, c'est clair qu'il y a un risque de freiner certains organismes à vouloir déposer et développer des nouveaux projets avec nous.

M. Cliche-Rivard : En vous remerciant beaucoup pour votre travail. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous venons de conclure nos consultations particulières pour le projet de loi n° 103 avec la Dre Mylène Drouin, Mme Roxane Beauchemin et M. Philippe Robert. Alors, merci beaucoup de vous être déplacés pour venir échanger avec nous.

Ceci étant dit, la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Hein?

Une voix :

Le Président (M. Provençal) : Ah! et je procède au dépôt des mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques. Merci beaucoup. Et, si vous avez des statistiques à nous transmettre, vous pouvez les transmettre à la secrétaire de la commission, des indicateurs qui ont été mentionnés tout à l'heure. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 17 h 14)


 
 

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