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Version finale

31st Legislature, 4th Session
(March 6, 1979 au June 18, 1980)

Wednesday, March 21, 1979 - Vol. 21 N° 15

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Auditions concernant le projet de loi no 126 - Loi sur les normes du travail


Journal des débats

 

Projet de loi no 126

(Dix heures treize minutes)

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre est réunie pour poursuivre l'audition des mémoires sur le projet de loi no 126, Loi sur les normes du travail.

Les membres de la commission sont M. Belle-mare (Johnson), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Gravel (Limoilou), M. Johnson (Anjou), M. Lavigne (Beauharnois), M. Mailloux (Charlevoix) remplacé par Mme Lavoie-Roux (L'Acadie); M. Pagé (Portneuf) remplacé par M. Forget (Saint-Laurent); M. Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Jonquière).

Les intervenants sont M. Brochu (Richmond), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Jolivet (Laviolette), M. Laplante (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Paquette (Rosemont), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Springate (Westmount).

Aujourd'hui, nous entendons les organismes suivants: Le Conseil consultatif de l'immigration, le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, Roger Bédard et associés, et l'Association des manufacturiers canadiens. J'inviterais le Conseil consultatif de l'immigration à s'approcher pour nous présenter son mémoire.

Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'aimerais demander au ministre si c'est son intention d'entendre tous les mémoires. J'ai eu quelques appels téléphoniques; certains groupes avaient cru comprendre qu'ils ne seraient pas entendus et il désiraient se faire entendre. Je veux juste m'assu-rer que, compte tenu que c'est quand même un nombre restreint de mémoires, tous vont être entendus.

M. Johnson: Je voudrais d'abord m'excuser du retard que j'ai mis ce matin. Je pense que le député de Johnson sait que ce n'est pas dans mes habitudes. J'étais au Conseil des ministres, ce matin. En principe, oui, mais... Un nombre restreint, il faut s'entendre. Il y en a quand même 25, ce qui, en principe, n'est pas beaucoup. Il y en a déjà eu plus que cela sur la loi 101.

Mme Lavoie-Roux: Plus de 200.

M. Johnson: En principe, on les entend tous sauf qu'il va falloir, d'une façon ou d'une autre, qu'on essaie de trouver un moyen de se discipliner au niveau du temps si on ne veut pas que cette commission dure un mois avec 26 mémoires. A priori, oui, tous ceux qui ont déposé un mémoire dans le délai, c'est-à-dire avant le 1er mars, pourront être entendus. C'est mon intention de faire en sorte que nous entendions tous ceux qui ont déposé un mémoire dans les délais.

M. Bellemare: M. le Président, si vous me le permettez, j'appuie la proposition que fait Mme le député de L'Acadie au ministre. Nous sommes déjà très avancés; il y en a une douzaine au moins qui ont été entendus. Il y a la CSN et d'autres qui ont été entendus. Avec la journée d'aujourd'hui, il va en passer encore quatre ou cinq. Alors, cela déboule dans un temps raisonnable. Je ne pense pas qu'il y ait aucune objection. D'ailleurs, c'est bien fructueux pour la compréhension de chacun des différents groupes qui vient.

M. Johnson: Pourrais-je suggérer que, aujourd'hui, compte tenu du fait qu'on ne siège pas ce soir, on aurait, ce matin le Conseil consultatif de l'immigration, le Syndicat des fonctionnaires provinciaux, Roger J. Bédard, de Bédard et Associés, et l'Association des manufacturiers canadiens. Dans le cas du deuxième et du troisième, c'est-à-dire le Syndicat des fonctionnaires et Roger J. Bédard, ce sont des mémoires qui ont une page et demie. Je présume qu'une discussion assez brève devrait nous permettre de faire le tour de la question qu'on veut soulever. Le Conseil consultatif de l'immigration et l'Association des manufacturiers canadiens ont quand même des mémoires d'une certaine importance. Je suggéreraispeut-être qu'on procède d'abord avec le Syndicat des fonctionnaires provinciaux et Roger J. Bédard en se disant en principe, à moins qu'on me dise le contraire, que cela peut se faire rapidement et, ensuite, le Conseil consultatif de l'immigration, quitte à empiéter sur l'heure habituelle, 12 h 30, et, cet après-midi, entendre l'Association des manufacturiers canadiens et clore la liste pour la journée. Mais il faudrait évidemment que j'aie l'assurance... Je vois M. Harguindeguy, du Syndicat des fonctionnaires provinciaux, qui est là. Si je comprends bien, cinq minutes pour votre exposé, cela ira?

M. Harguindeguy (Jean-Louis): Oui.

M. Johnson: D'accord. M. Roger J. Bédard est-il là?

Une Voix: II n'est pas arrivé.

M. Johnson: II n'est pas arrivé. Oui?

Mme Lavoie-Roux: J'aurais préféré que vous passiez les immigrants. J'ai la grippe. Je vais être obligée de quitter dans un moment et je tenais beaucoup à entendre les immigrants.

M. Johnson: Bon! D'accord. Je m'étais rendu compte de cela. D'accord dans ce cas. Le Conseil consultatif de l'immigration.

Mme Lavoie-Roux: Je n'allongerai pas le débat.

Le Président (M. Marcoux): Je demanderais au Conseil consultatif de l'immigration de nous

présenter son mémoire. D'abord, présentez-vous, madame, et présentez votre collègue.

Conseil consultatif de l'immigration

Mme Fournaris (Irène): Je m'appelle Irène Fournaris. Je suis immigrante et...

Une Voix: Irène...?

Mme Fournaris: Fournaris. Et il y a Mme Sheila McLeod Arnopoulos. Nous sommes les deux membres du Conseil consultatif de l'immigration.

Une Voix: ... prendre une décision.

Le Président (M. Marcoux): Voudriez-vous répéter le deuxième nom?

Mme Fournaris: Sheila McLeod Arnopoulos.

Le Président (M. Marcoux): Nos règles, de façon normale, sont que vous avez une vingtaine de minutes pour présenter votre mémoire et, ensuite, une quarantaine de minutes pour les échanges avec les députés.

Mme Fournaris: Avant de commencer, je pourrais peut-être dire que nous, comme Conseil consultatif de l'immigration, nous sommes occupés, non du travail comme tel, mais seulement des immigrants, parce qu'on pense qu'ils ont des problèmes particuliers.

Au tout début, nous voudrions expliquer pourquoi le Conseil consultatif de l'immigration présente un mémoire à la commission parlementaire au sujet du projet de loi 126 sur les normes de travail. Au Québec, il y a un grand nombre d'immigrants qui ne sont pas syndiqués et qui ne reçoivent que le salaire minimum. En tant que travailleurs, ils ne sont protégés que par les lois sur les conditions minimales de travail comme le projet qui est présentement à l'étude.

Les chiffres démontrent que 60% de la main-d'oeuvre au Québec, environ 1 800 000 travailleurs, n'est pas organisée et tombe, par conséquent, sous la juridiction de la loi sur les conditions minimales de travail. De ces travailleurs, environ 300 000 sont employés par les industries à bas salaire telles que le textile, le vêtement, l'hôtellerie, la restauration et les services d'entretien et de conciergerie. On y paie le salaire minimum et parfois moins. Des études du ministère québécois du Travail et de la Main-d'Oeuvre démontrent que 75% de la main-d'oeuvre recevant le salaire minimum est constituée de femmes. Quoique nous n'ayons pas de chiffres précis à cet égard, nous savons qu'un nombre considérable d'entre elles sont immigrantes.

Beaucoup parmi ces immigrants ne parlent ni français ni anglais. Ils ont peu de scolarité et de formation. Par conséquent, ces personnes se trouvent confinées à des genres de travail peu rémunérateur et n'offrant aucune occasion d'améliorer leur sort. Il est important de souligner que ces gens ne connaissent pas leurs droits en tant que travailleurs. Naturellement, certains d'entre eux savent que la loi leur garantit un salaire minimum, du temps supplémentaire après une semaine de travail de 45 heures et deux semaines de vacances payées, cela sous l'empire de la loi actuelle. Mais ils ne savent pas comment présenter leurs griefs à la Commission du salaire minimum si leurs employeurs sont dans l'illégalité. Même ceux qui sont au courant des procédures à suivre hésitent souvent à se plaindre par crainte d'être congédiés ou d'être déportés par le ministère fédéral de l'Emploi et de l'Immigration. Par conséquent, ils se soumettent volontairement à des conditions de travail illégales.

Le Conseil consultatif de l'immigration croit qu'il est important de noter qu'au Québec, comme dans les autres provinces, certains groupes d'immigrants sont relégués à des types d'emplois auxquels les Québécois et les Canadiens de naissance ne tiennent plus. Ils ne veulent pas accomplir les tâches dures ou peu prestigieuses au bas de l'échelle du marché du travail. Ces emplois sont abandonnés aux nouveaux venus, sans éducation et sans formation — là, il fallait peut-être ajouter que, même s'ils ont la formation et l'éducation, ils n'ont pas l'expérience canadienne; alors, ils tombent dans le même groupe — qui ne peuvent faire autrement que les accepter.

Les immigrants sont disposés à prendre ces emplois sans se plaindre. Cependant, en retour, nous croyons que le gouvernement devrait s'assurer que ces immigrants reçoivent vraiment la protection à laquelle ils ont droit. Ceci veut dire que la Loi sur les normes du travail doit être suffisamment rigoureuse pour empêcher les employeurs d'exploiter les immigrants.

A part les immigrants reçus, il y a deux autres groupes d'étrangers qui sont victimes d'exploitation. Il y a ceux qui travaillent ici illégalement et ceux qui ont obtenu un permis de travail temporaire qui bénéficient de permis ministériel? On estime que le nombre de travailleurs illégaux au Québec se situe entre 60 000 et 100 000 personnes. Eliminer l'exploitation de ces catégories de travailleurs est extrêmement difficile et requerrait certains changements dans les politiques officielles, qui dépassent le cadre des normes du travail proposées par le projet de loi 126. Cependant, dans nos recommandations, nous mettrons de l'avant certaines mesures que la Commission des normes du travail et le ministère de l'Immigration du Québec pourraient appliquer afin de mettre fin à certains abus.

Ceci n'implique ni une approbation ni une désapprobation des politiques des ministères concernés. Ce sur quoi nous insistons est le droit de tout travailleur, quelle que soit sa situation juridique, à la protection de la loi sur les normes minimales du travail.

L'application de la loi. Le premier point que nous voulons soulever dans notre mémoire con-

cerne l'application de la loi. La législation actuelle, la Loi du salaire minimum, n'est pas appliquée d'une façon uniforme ou vigoureuse. Malheureusement, le projet de loi qui est à l'étude actuellement n'offre pas assez de garantie d'amélioration à cet égard.

Quels sont les faits? Au cours de 1976, la Commission du salaire minimum découvrait 2195 employeurs refusant de payer des sommes totalisant $1 825 474 à 10 779 employés qui y avaient droit selon les ordonnances émises en vertu de la Loi du salaire minimum. La commission arrivait à ces chiffres par deux moyens différents, grâce à 7900 enquêtes indépendantes menées par des inspecteurs à son service et aussi grâce aux 3100 plaintes adressées par des employés lésés.

Nous avons expliqué plus tôt pourquoi les travailleurs hésitaient à s'adresser à la commission. Mais le système d'inspection, lui non plus, n'est pas adéquat pour déceler les abus. Des études indépendantes sur le fonctionnement de la commission indiquent que seulement une faible proportion des infractions sont détectées d'une manière ou d'une autre.

Il y a à Montréal environ 55 000 établissements non syndiqués qui se trouvent sous la juridiction de la loi sur les conditions minimales de travail. Pour les surveiller, il n'y a que 135 inspecteurs et un total de 400 personnes à l'emploi de la Commission du salaire minimum.

La raison principale pour laquelle il y a si peu d'inspecteurs est l'insuffisance du budget de la commission. Le budget actuel est d'environ $12 millions. Or, selon les membres de la commission, un total de 500 inspecteurs nécessiterait un budget de $35 millions.

La Commission du salaire minimum ne prélève des employeurs qu'un dixième pour cent des salaires payés, alors qu'elle est autorisée à prélever un pour cent. La loi à l'étude maintient ce genre de disposition.

Cependant, nous proposons qu'on prélève le maximum permis afin de pouvoir quadrupler le nombre d'inspecteurs et améliorer les services de la nouvelle commission des normes du travail. D'autres raisons militent en faveur d'une augmentation du budget et du personnel de la commission. Cet organisme est maintenant responsable de l'application des règlements qui traitent des congés de maternité. Ceci contribue à augmenter de façon considérable la charge des inspecteurs. En outre, selon le projet de loi no 126, la commission devra assumer l'obligation de rembourser, en tout ou en partie, les salaires perdus à la suite d'une faillite. Par elles-mêmes, ces deux nouvelles dispositions entraîneront des dépenses supplémentaires et exigeront plus de personnel.

Les amendes. L'inspection doit et peut être améliorée. Néanmoins, nous croyons que les inspections ne seront jamais suffisantes à elles seules pour assurer le respect de la loi. Mais un moyen d'y arriver est d'imposer des amendes prohibitives à ceux qui ne se conforment pas aux dispositions de la loi. Les taux d'amendes en vigueur actuellement constituent presque une in- citation pour les employeurs à commettre des infractions. Si, par hasard, ils sont trouvés coupables d'avoir enfreint les ordonnances sur les salaires ou le temps supplémentaire, ils sont susceptibles d'une amende qui n'est que de $10. En outre, le salaire réclamé par un employé lésé ne peut couvrir une période de plus de six mois.

Selon le projet de loi no 126, les recouvrements de salaires pourront s'étendre sur une période d'un an, et des amendes de $200 à $500 peuvent s'appliquer à la première infraction, et de $500 à $3000 à la seconde si elle se produit à un intervalle de moins de deux ans de la première. Nous croyons que ces articles de la loi devront être renforcés pour être vraiment efficaces.

Premièrement, les employeurs doivent être tenus civilement responsables de toute la période de la durée de l'infraction. Ainsi, s'ils n'ont pas payé le salaire minimum et le temps supplémentaire requis durant deux ans, ils devront être tenus de rembourser le montant total avec intérêts à leurs employés.

Deuxièmement, il devrait y avoir autant d'infractions que d'employés qui n'ont pas reçu le minimum auquel ils avaient droit; à l'heure actuelle, la notion d'infraction porte sur l'ensemble des employés lésés à un certain moment. Naturellement, les amendes devront être imposables en conséquence.

Troisièmement, les amendes prévues pour la seconde infraction ne devraient pas être limitées à un intervalle de deux ans.

Quatrièmement, les amendes prévues pour la seconde infraction devront se situer entre $1000 et $5000 au lieu de $500 à $3000 comme dans le projet de loi.

Finalement, l'article 132 accorde un délai d'un an après l'infraction pour toute poursuite pénale. Nous croyons que ce délai doit être porté à deux ans.

Selon nous, seul un système d'amendes appliqué rigoureusement peut forcer les employeurs à respecter la loi. Ainsi, il serait alors possible pour 500 inspecteurs d'exercer une surveillance efficace. Autrement, ils ne suffiront jamais à la tâche.

La publicité. En plus d'un système d'inspection amélioré et des amendes plus sévères, nous croyons que les noms d'employeurs coupables d'infractions aux termes de la loi devraient être révélés au public. Actuellement, les seuls connus sont ceux qui ont été poursuivis devant les tribunaux, mais ils ne constituent que le tiers de ceux ayant commis des infractions. La commission ne publie pas le nom de ceux qui se sont reconnus coupables et qui ont volontairement accepté de rembourser leurs employés.

La participation des immigrants dans la Commission des normes de travail et au ministère de l'Immigration. Après la question de l'application de la loi, nous aimerions soulever celle de la participation des différents groupes d'immigrants à l'élaboration de certaines politiques gouvernementales. Nous suggérons que des représentants de diverses communautés ethniques fassent partie

du personnel de la Commission des normes du travail et du ministère de l'Immigration.

La Commission des normes du travail. L'article 8 du projet de loi no 126 propose la nomination de sept commissaires. La loi devrait prévoir que l'un d'entre eux fasse partie du milieu immigrant et ait une bonne connaissance des secteurs industriels à bas salaires. En outre, nous croyons que la commission devrait avoir parmi son personnel un chef de service spécialement affecté aux problèmes particuliers que rencontrent les immigrants en milieu de travail pour ce qui a trait aux normes minimales de rémunération. Un certain pourcentage des inspecteurs au service de la commission devraient également être d'origine immigrante. Ces suggestions devraient faire partie de la loi elle-même et non pas laissées à la discrétion de la commission.

Le ministère de l'Immigration. Le ministère de l'Immigration devrait s'impliquer davantage dans les problèmes des immigrants au travail. Il l'est déjà dans une certaine mesure grâce à un ombudsman pour les travailleurs immigrants qu'il nommait récemment. Mais, comme complément à ce geste, nous croyons que le ministère devrait aussi créer un service spécial qui s'occuperait de façon générale des problèmes touchant les travailleurs immigrants dans les industries et les services à bas salaires. (10 h 30)

Cette section se composerait surtout d'immigrants au fait des questions du travail. Ils devraient être des fonctionnaires à temps plein intégrés au ministère. Mais, afin de se tenir au courant de l'évolution du milieu, ils devraient pouvoir effectuer des recherches et des études parmi les communautés immigrantes. Ce service de travail immigrant aurait des contacts étroits avec la Commission des normes du travail, le ministère québécois du Travail et de la Main-d'Oeuvre, la Commission provinciale des droits de la personne, le ministère fédéral de l'Emploi et de l'Immigration, ainsi qu'avec le mouvement ouvrier. De cette façon on en arriverait à une meilleure coordination des politiques visant la population immigrante.

Les aides domestiques avec permis de travail. Un groupe de travailleurs auquel ce service pourrait s'intéresser dès maintenant est celui des aides domestiques étrangers venus au Québec grâce à des permis de travail temporaires accordés par les autorités fédérales. Ces travailleurs ne peuvent changer d'emploi sans le consentement du ministère fédéral de l'Emploi et de l'Immigration et ne peuvent modifier leur état pour devenir des immigrants reçus. Grâce au projet de loi no 126, le gouvernement se montre très progressiste en incluant les domestiques résidents, des femmes surtout, parmi les travailleurs protégés. A l'heure actuelle, il n'y a que Ile-du-Prince-Edouard qui le fait. La loi actuellement en vigueur au Québec exclut les aides domestiques. Cette situation est malheureuse pour les étrangères venues au Canada avec des permis de travail temporaires car beaucoup d'entre elles sont exploitées par des familles québécoises.

Le ministère fédéral de l'Emploi et de l'Immigration exige que ces travailleuses soient rémunérées au taux de $75 pour une semaine de 45 heures, mais les autorités fédérales ne font rien pour que ces exigences soient respectées. Conséquemment, les travailleuses étrangères reçoivent $50 ou $60 pour une semaine de 60 heures ou de 70 heures sans jour de congé. Ces faits sont parvenus à l'attention de l'Association du personnel domestique de Montréal qui est en contact constant avec les travailleurs étrangers. Ce problème a également été soulevé dans une étude faite par Sheila McLeod Arnopoulos sur les problèmes des femmes immigrantes sur le marché du travail. Ce rapport a été publié par le Conseil consultatif canadien de la situation de la femme à Ottawa.

Maintenant que les aides domestiques résidentes tombent sous la juridiction de la loi, la Commission des normes du travail et le ministère de l'Immigration peuvent intervenir pour que ces femmes étrangères soient traitées équitablement par leurs employeurs québécois. Cependant, à moins de mesures spécialement destinées à cette fin, l'exploitation continuera.

Nous proposons que tous les aides domestiques étrangers avec permis de travail soient requis de s'inscrire auprès du ministère de l'Immigration du Québec, à la section spécialement affectée aux problèmes des immigrants sur le marché du travail. Ces travailleurs feraient rapport régulièrement sur leurs conditions de travail et de rémunération et ces informations seraient partagées avec la Commission des normes du travail. Le service du ministère étant composé en grande partie d'immigrants, les travailleurs et travailleuses étrangers seront mieux disposés à se confier et à discuter de leurs problèmes. La Commission des normes du travail serait informée en cas d'irrégularités ou de présumées infractions et elle pourrait immédiatement procéder à des enquêtes.

Si un employeur était trouvé coupable d'une infraction, l'aide domestique souhaiterait probablement travailler au sein d'une autre famille. Or, dans une telle éventualité, le ministère fédéral s'engage à lui trouver un autre emploi, mais il n'est pas toujours en mesure de le faire, malgré la forte demande pour ce genre de travailleurs. Sans emploi et sans permis de travail qui l'accompagne, ces aides domestiques n'ont pas droit de résidence au pays et s'exposent à être déportés. Pour éviter ce problème, le service spécial du ministère québécois pourrait facilement collaborer avec le ministère fédéral pour trouver un nouvel emploi.

Autres étrangers avec permis de travail. Plusieurs autres catégories de travailleurs étrangers ont aussi besoin de protection. La plupart des étrangers qui sont au Canada grâce à un permis de travail temporaire hésitent à se plaindre par crainte de perdre leur emploi, ce qui annulerait leur permis et les forcerait à retourner immédiatement dans leur pays d'origine. Nous proposons donc que tout étranger qui perd son emploi après avoir formulé une plainte contre son employeur puisse obtenir automatiquement un nouvel emploi et un nouveau permis de travail. Ceci nécessiterait un accord avec les autorités fédérales.

Pour faciliter les procédures, nous suggérons que le service du travail aux immigrants au ministère de l'Immigration agisse comme intermédiaire entre ces travailleurs et les autorités fédérales. Si les travailleurs étrangers ont des plaintes à formuler, ils pourront le faire auprès du service du travail aux immigrants qui agirait alors comme coordonnateur. Ceci, cependant, exigerait que tous les travailleurs étrangers et non seulement les aides domestiques s'inscrivent au ministère.

Les travailleurs illégaux. Les travailleurs illégaux sont extrêmement difficiles à protéger. Il s'agit surtout d'étrangers qui viennent au Canada comme touristes et qui, durant leur séjour, acceptent des emplois peu rémunérés. Ce sont généralement des personnes de pays pauvres pour qui les sommes minimes qu'elles peuvent gagner ici constituent un rempart contre la misère qui démoralise leur famille. Or, lorsque ces personnes sont découvertes et déportées par les autorités fédérales, elles doivent partir souvent sans avoir touché les sommes qui leur sont dues par leur employeur canadien.

Nous proposons que tout étranger faisant l'objet d'un ordre de déportation soit interviewé par le service du travail aux immigrants. Si on constate que cette personne a reçu moins que le salaire légal, la Commission des normes du travail devrait être appelée à faire enquête, ceci avant même que l'ordre de déportation soit exécuté. Encore une fois, il serait nécessaire d'agir de concert avec les autorités fédérales.

L'affichage des normes exigibles selon la loi. Nous sommes d'avis que le projet de loi no 126 devrait exiger que tous les établissements non syndiqués prévoient l'affichage des principales normes minimales de travail. La commission devrait faire préparer en plusieurs langues des affiches expliquant les principaux points de la loi qui la gouverne et, surtout, la façon dont les travailleurs étrangers peuvent procéder pour obtenir justice en cas d'infractions commises par leurs patrons. Evidemment, des amendes seraient exigibles de la part de ceux qui refuseraient l'affichage.

Autres questions. Certaines dispositions du projet de loi à l'étude sont beaucoup moins généreuses que ce que d'autres provinces canadiennes peuvent offrir. Ainsi, le temps supplémentaire n'est payable qu'après 44 heures de travail dans une semaine, alors qu'il devrait être payable au-delà d'une journée de travail de huit heures. Le nombre de congés statutaires prévu est le plus bas au Canada. Le projet de loi 126 n'en prévoit que trois alors que les autres provinces en prévoient de cinq à neuf. Le salaire minimum ne devrait pas être plus bas dans le cas de ceux qui reçoivent des pourboires.

C'est à peu près tout.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Johnson: Merci, madame. D'abord, deux commentaires généraux. Votre mémoire est évidemment axé sur les personnes auxquelles vous vous intéressez par définition parce que vous êtes du Conseil consultatif de l'immigration. Cependant, il y a une sorte de tendance à vouloir, dans votre mémoire, conférer une espèce de statut particulier à l'immigrant, par exemple, en disant qu'il devrait y avoir des gens des milieux ethniques au niveau de la commission. On parle de mise sur pied de services spécifiquement destinés à ces personnes au sein de la commission et du ministère de l'Immigration où je sais, dans le cas du ministère de l'Immigration, qu'il y a d'énormes efforts qui sont faits. Bien que je sois conscient et que je sois de ceux qui pensent qu'il est extrêmement important que le Québec soit le plus accueillant possible et le plus juste possible à l'égard des immigrants, je pense qu'il ne faut pas non plus les cantonner dans une sorte de ghetto légal qui fait qu'ils ne sont pas traités comme des citoyens comme les autres. C'est un peu, si vous voulez, comme tout le problème de la condition féminine où on fera de la discrimination inversée comme cela se fait dans certains Etats. C'est peut-être nécessaire, et dans le cas des immigrants, cela l'est peut-être, mais de façon générale, je trouve que votre mémoire va peut-être un peu plus loin que je ne le souhaiterais quant à cela, au niveau de l'optique en tout cas.

Deuxièmement, vous soulevez le problème de fond que l'immense majorité des personnes qui sont payées au salaire minimum sont des femmes et que dans dès industries comme celles du vêtement, par exemple, du textile, de l'aide domestique, etc., ce sont dans bien des cas des gens qui sont des immigrants reçus. Je pense que c'est très juste comme remarque. Vous dites: Mais dans le fond, les gens ne peuvent pas se plaindre ou ont peur de se plaindre, ou n'ont pas de protection, etc. La loi 126 amène justement des précisions dans ce domaine. D'une part, on protège l'emploi. Le député de L'Acadie a déjà soulevé le problème que cela peut poser dans le cas des domestiques, cependant, les aberrations auxquelles cela pourrait mener, mais le principe général, au niveau industriel et commercial, est de protéger l'emploi. Deuxièmement, on prévoit des sanctions qui sont quand même très sévères. Troisièmement, on prévoit la possibilité pour la commission d'indemniser elle-même directement.

Je pense qu'il faudra, à un moment donné, qu'on vive dans une société où ce ne sont pas 500 inspecteurs qui font respecter la loi. C'est le fait que l'ensemble des entreprises, de façon générale, la respectent, et que les travailleurs québécois se sentent suffisamment protégés, effectivement, pour exercer leurs droits et faire appel aux services d'une commission. Je pense que la normalité dans une société, c'est cela, ce n'est pas une armée de 500 inspecteurs. La normalité, ce sont des lois qui sont respectées par l'ensemble des citoyens, y compris les citoyens corporatifs, si on me passe l'expression. Je pense que la loi contient des dispositions dans ce sens.

Ceci dit, je pense que vous avez également raison de souligner que, nettement, en termes de personnel, actuellement, c'est insuffisant, à la Commission du salaire minimum. C'est évidem-

ment l'intention du gouvernement d'augmenter le nombre d'inspecteurs, mais je ne pense pas qu'il faille pour autant s'imaginer qu'il faudra le quintupler ou le quadrupler à très court terme à cause des autres dispositions dans la loi qui la rendent profondément différente de la Loi du salaire minimum.

Au sujet des autres questions, en ce qui concerne les permis de travail, etc., vous n'êtes pas sans savoir que le ministère de l'Immigration fait des efforts de ce côté. Je ne suis pas sûr que c'est cette loi qui devrait s'occuper de ces questions.

L'affichage des normes exigibles selon la loi, je pense que c'est une excellente suggestion. Ce n'est pas mentionné dans la loi, mais nous nous penchons depuis quelque temps sur des textes pour rendre obligatoire l'affichage des dispositions par secteur ou, enfin, on va trouver les formules, mais je pense que c'est une excellente suggestion. Pardon?

M. Bellemare: Chez les domestiques, ce sera difficile.

M. Johnson: On regarde en pratique. Il ne faudrait pas non plus en arriver à des aberrations.

M. Bellemare: Oui, dans chaque maison...

M. Johnson: II y a autre chose que vous soulevez et, puisque le leader de l'Union Nationale vient de parler, je pense qu'il est normal, quand les droits des citoyens, des droits aussi fondamentaux que les conditions de travail auxquelles ils ont droit sont impliqués, qu'il faille faire des efforts considérables de publicité de ce côté-là. Je sais que le leader de l'Union Nationale et certains de ses députés s'élèvent contre la publicité que le gouvernement a faite de façon générale.

M. Bellemare: Oui, celle qui est partisane.

M. Johnson: Mais je pense que, de façon générale, quand on parle des conditions de travail, il faudra qu'il y ait un effort d'information. En ce qui concerne spécifiquement la clientèle que vous touchez, les immigrants, il y a des réseaux — il y a les COFI, les bureaux d'accueil, les bureaux du Québec dans les aéroports, etc. — qui pourraient être des sources privilégiées d'une information spécifique pour les immigrants dans ce cas-là. De ce côté-là, effectivement, nous demanderons à la commission de faire des efforts, une fois que la loi sera adoptée. J'espère qu'on n'aura l'accord du leader de l'Union Nationale pour le faire.

M. Bellemare: ... raisonner.

M. Johnson: C'est ce que j'avais à soulever au sujet de votre mémoire.

Le Président (M. Marcoux): Avez-vous des commentaires?

Mme Fournaris: Oui. Je vais commencer par ceci. On a mentionné l'histoire de ghettos. Cela n'est pas en ignorant une situation qu'elle va s'améliorer. Mais les ghettos existent présentement et c'est une réalité. Il y a des gens qui ne parlent pas la langue. Personnellement, je viens du milieu le plus immigrant travailleur. Dans la vie quotidienne, on voit cela; alors, on ne peut pas l'ignorer. Tant que l'immigrant ne sera pas autonome, ne saura pas la langue, il y aura ces problèmes-là. On ne dit pas qu'on divise les travailleurs pour les protéger un peu d'une façon différente, parce que c'est une réalité. Il y a des gens qui ont vécu toute une vie ici et qui ne parlent pas la langue; ils ignorent la loi et ils ignorent des choses tout à fait fondamentales. C'est incroyable. C'est comme cela et on n'améliore pas cette situation à seulement dire que c'est leur faute s'ils n'apprennent pas la langue. Il y a toujours un autre côté.

C'est pour cela qu'on propose qu'il y ait une protection. C'est la même chose pour les permis de travail. Là, on doit avoir quelque chose dans la pratique; je parle de mon expérience des contrats — . Il y a des travailleurs qui viennent ici — des musiciens pour travailler dans des clubs, et tout genre de travail — pour une certaine période de temps, même très courte. Il est arrivé plusieurs fois que les employeurs de ces gens-là ne respectaient pas leur signature dans les contrats. On les renvoie sans les payer. La personne qui est dans une situation comme celle-là, doit aller en cour et attendre les procédures de la cour avant d'être payée et s'en aller, parce qu'elle est venue ici uniquement pour ce travail. Mais, en attendant trois mois, elle ne peut même pas se permettre une chambre pour demeurer ici et attendre la décision de la cour pour être finalement payée. Alors, on doit prévoir dans ces cas-là une procédure plus rapide. (10 h 45)

C'est la même chose pour les illégaux qui sont déportés. On nous dit que ce sont des personnes non existantes. Ce sont des choses qui sont assez... Dans des cas de déportation, on dit que... On ne demande pas que cette personne... Il y a des employeurs qui dénoncent eux-mêmes leurs employés comme étant illégaux seulement pour garder un mois de salaire ou quelques semaines de salaire. Il y a des cas qui sont vrais.

Alors, cette personne a quand même travaillé, elle a droit à son salaire, même si elle est illégale. C'est une autre affaire; c'est une question humanitaire, si vous voulez. Ce n'est pas le fait qu'elle soit illégale qui permet à l'employeur d'avoir une main-d'oeuvre gratuite, à ce moment, puisque la personne est considérée non existante. Quant au nombre d'inspecteurs, c'est le cas, on n'a pas assez d'inspections. Si les employeurs avaient peur un peu de la loi... Maintenant, il y a des arguments. On a dit à nos travailleurs, et on a eu des cas déjà: Vas-y, fais tout ce que tu veux, j'ai un très fort comptable, les livres sont très bien tenus. Cela ne me fait pas peur.

Pour un gouvernement, un bon comptable qui dit qu'il peut passer à travers toutes les lois, c'est sérieux.

M. Johnson: M. le Président, juste une dernière chose au sujet des travailleurs immigrants avec permis, ou enfin des travailleurs qu'on appelle illégaux, ceux qui n'ont pas de permis. Si la loi disait, par exemple, que constitue une infraction pour un employeur d'utiliser les services de quelqu'un qui n'a pas de permis de travail, quant à vous, est-ce que cela réglerait des problèmes? En pratique, l'effet concret serait d'empêcher ou de dissuader les employeurs d'utiliser les services d'immigrants illégaux.

Mme Fournaris: Oui, une bonne partie.

M. Johnson: Une bonne partie. Cela ne donne pas plus de travail à ces immigrants, mais, au moins, en pratique, cela diminuerait leur présence.

Mme Fournaris: Nous ne sommes pas pour les illégaux, mais une fois qu'ils ont travaillé, ils ont absolument droit à leur salaire.

M. Johnson: D'accord, je prends bonne note.

Le Président (M. Marcoux): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je vous remercie de votre mémoire. Je pense qu'il est important que les travailleurs immigrants aient une voix ici, à cette commission parlementaire, parce que c'est vraiment, parmi le groupe de travailleurs, peut-être ceux qui sont pas nécessairement le plus souvent, mais très souvent exploités, peut-être même le plus souvent exploités.

Quand vous dites, à la page 3, au troisième paragraphe, où vous parlez de l'exploitation de certaines catégories de travailleurs, des travailleurs illégaux, etc., qu'il faudrait qu'il y ait des politiques officielles qui dépassent le cadre des normes de travail proposées par le projet de loi no 126, qu'est-ce que vous avez en tête?

Je sais, par exemple, que dans la loi 77 on s'est penché sur ce problème, mais sans vraiment non plus le cerner. J'ai deux questions. La première est: Quelle est votre position en tant que Conseil consultatif de l'immigration sur les travailleurs saisonniers, les travailleurs temporaires immigrants?

Deuxièmement, quelles sont ces mesures concrètes dont vous parlez à la page 3, que vous voudriez voir mettre de l'avant dans des politiques officielles?

Mme Fournaris: Pour la position officielle, nous ne l'avons pas encore, parce que nous sommes relativement nouveaux et que c'est le premier sujet de travail que nous avons touché. Nous sommes là seulement depuis le mois de décembre, alors, nous n'avons pas encore...

Mme Lavoie-Roux: Mais avant que vous soyez là, il y avait quelqu'un avant vous. Y avait-il une politique du Conseil consultatif de l'immigration là-dessus?

Mme Fournaris: Non. C'est cette année que le conseil consultatif va s'occuper des travailleurs. L'année passée, c'était plutôt pour les réfugiés.

Mme Lavoie-Roux: Alors, il n'y a aucune politique au Conseil consultatif de l'immigration sur la situation des travailleurs saisonniers ou temporaires.

Mme Fournaris: Non. A ma connaissance, au moins. Les mesures que nous visons, c'est justement cela: prévoir un service où les travailleurs pourront se plaindre, finalement, et avoir ce service que nous proposons.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous verriez cela intégré dans la loi 126 ou comme un service relié au ministère de l'Immigration?

Mme Fournaris: Cela touche les deux. On a vu cela plutôt dans le ministère de l'Immigration, mais, vu que c'est pour les problèmes que les travailleurs immigrants ont sur le marché du travail, on dit que cela prend une étroite collaboration des deux.

Mme Lavoie-Roux: Mais vous le verriez davantage du côté de l'Immigration.

Mme Fournaris: Oui, c'est comme cela qu'on l'a vu étant immigrant.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Parce que je suis quand même sensible à une remarque du ministre tout à l'heure. Je pense qu'il y a des besoins définitifs de protéger les immigrants, mais je pense qu'il ne faut pas, non plus, toujours tendre à les marginaliser et j'espère qu'un jour, normalement, la relève pour leur protection pourra se faire, soit par un immigrant ou soit par un autochtone, pour qu'ils ne soient pas toujours obligés de recourir aux autres parce qu'à ce moment la responsabilité ne sera jamais assumée par les autres. Je pense que c'est peut-être un danger. Il reste que, dans la pratique, vous avez peut-être raison de faire ce type de recommandation. Maintenant, en ce qui concerne les aides domestiques, est-ce que vous trouvez qu'elles sont suffisamment protégées par ce qui est prévu dans le projet de loi no 126?

Mme Fournaris: Non. Leur salaire n'est pas un salaire avec lequel on peut vivre finalement.

Mme Lavoie-Roux: Quelles sont vos suggestions ou vos recommandations sur ce point?

Mme Fournaris: II n'y a pas ici de suggestions...

Mme Lavoie-Roux: Non.

Mme Fournaris: ... parce qu'on a expliqué qu'on n'a pas touché les détails de leur travail, mais, finalement, je pense que tout le monde aurait droit à un minimum.

Mme McLeod Arnopoulos (Sheila): II s'agit de personnes qui travaillent 30 heures par semaine, par exemple. On a touché seulement cette question qui est traitée dans la loi à cause du fait que cela touche beaucoup de domestiques qui sont ici sur les permis de travail et eux, ils travaillent surtout plus de 30 heures par semaine et comme cela ils sont protégés par la loi. Mais on est d'accord avec l'Association des aides domestiques qui voudrait que tous les domestiques soient protégés par la loi, pas seulement les personnes qui travaillent à la maison plus de 30 heures et qui demeurent là. On voudrait que toute la catégorie soit couverte par la loi.

Mme Lavoie-Roux: A la page 12, en bas, vous dites: "Nous proposons que tout étranger qui perd son emploi après avoir formulé une plainte contre son employeur puisse automatiquement obtenir un nouvel emploi et un nouveau permis de travail." Je pense bien que c'est souhaitable pour tout le monde, mais je ne sais pas si c'est possible pour quelque travailleur que ce soit. L'employeur peut être condamné à payer une amende, etc., mais qu'il y ait cette protection automatique, est-ce que cela vous semble une recommandation possible, enfin, réalisable?

Mme Fournaris: Dans le cas des domestiques, oui, parce qu'il y a toujours une demande. Avec le taux de chômage qu'on a maintenant, je ne dis pas que cela serait possible dans tous les emplois. Aussi, dans la pratique, il n'y a pas beaucoup de personnes qui sont ici sur permis de travail à d'autres emplois où il y a déjà un grand taux de chômage. C'est presque seulement pour les domestiqués.

Mme Lavoie-Roux: C'est à peu près juste pour les domestiques.

Mme Fournaris: Ce qui se fait maintenant, ils ont un permis de travail pour un employeur. S'ils veulent changer, il faut changer les deux: avoir un autre permis de travail et trouver un autre employeur. Là, c'est compliqué parce qu'ils sont très...

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est parce qu'ici vous l'avez mis en relation justement avec les autres travailleurs et non pas nécessairement avec les travailleurs domestiques. Il y a plusieurs autres catégories de travailleurs qui ont besoin de protection. Les domestiques mis à part, cela semblait s'appliquer aux autres travailleurs.

Mme Fournaris: Pour les travailleurs saisonniers, c'est la même chose. S'ils ont besoin d'une certaine main-d'oeuvre en masse, c'est toujours plus ou moins facile d'aller à la ferme d'à côté si on a des problèmes avec notre employeur, mais ce n'est pas dans tous les métiers que cela se fait. D'ailleurs, j'espère qu'on ne donne pas aussi facilement les permis de travail dans les secteurs où il y a déjà un grand chômage ici.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, une dernière remarque. Evidemment, je suis d'accord sur vos remarques sur le fonctionnement de la Commission du salaire minimum. Je talonne souvent le ministre du Travail là-dessus, au moins depuis qu'on a le congé de maternité sur la table, et il nous annonce que cela se remodèle, que cela se renouvelle. Mais aux dernières questions que j'ai posées, je pense que c'était au mois de février, quand on a fait un rajustement pour inclure d'autres travailleurs qui pouvaient profiter du congé de maternité, je pense qu'il n'y avait pas encore concrètement de personnel qui avait été ajouté. Est-ce que la situation est encore la même?

M. Johnson: Non, effectivement.

Mme Lavoie-Roux: II n'y a pas de personnel qui a été ajouté?

M. Johnson: Non, pas au moment où on se parle.

Mme Lavoie-Roux: Le problème demeure entier.

M. Johnson: Dans la mesure où la loi n'est pas encore adoptée, cela donne encore du temps.

Mme Lavoie-Roux: Non, mais vos congés de maternité, ceux-là sont...

M. Johnson: Cela fait 30 ans que la Loi du salaire minimum existe, je pense que cela peut attendre encore six mois pour être capable de l'organiser adéquatement.

Mme Lavoie-Roux: On va attendre encore six mois, cela fait un an que je le demande. Merci, M. le Président.

M. Johnson: II va falloir avoir des budgets d'abord, donc procéder à des prélèvements, et procéder à des prélèvements c'est en vertu de la nouvelle loi.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Je vous félicite très sincèrement, Mme Fournaris, de représenter ce matin le Conseil consultatif de l'immigration sur le projet de loi no 126.

Mais vous me permettrez d'attirer votre attention sur cette phrase qui me semble un peu discriminatoire: "Cette situation est malheureuse

pour les étrangères venues au Canada avec des permis de travail temporaires, car beaucoup d'entre elles sont exploitées par des familles québécoises. ' Je trouve que cette formulation est une note de discrédit parce que c'est public, ce document. Si c'était reproduit dans d'autres pays, cela voudrait dire que dans la province de Québec, les Québécois, les familles québécoises font une exploitation de nos arrivants. Je pense que ce n'est pas le sens que vous vouliez y apporter, mais vu que c'est dans un document public, je proteste avec véhémence contre cette attitude de dire que les immigrants sont exploités par nos familles québécoises. Je ne pense pas que ce soit exact. Il peut arriver des exceptions, mais les exceptions, je l'espère, sont couvertes maintenant par la loi. Dans un document public comme celui que vous nous soumettez ce matin, que les étrangères sont exploitées par des familles québécoises, c'est malheureux que ce soit écrit de même. C'est malheureux que ce soit dans un document public et je proteste avec véhémence contre cette attitude que vous manifestez au nom du Conseil consultatif de l'immigration.

L'autre chose — je vais vous donner la chance de répondre dans quelques minutes — c'est la publicité dont a parlé le ministre disant que si l'Union Nationale fait des reproches au gouvernement sur certains sujets de publicité qui sont avant-gardistes, M y a aussi, je pense d'autres choses qui, en temps et lieu, pourront être démontrées à la population avec des faits à l'appui. Mais je ne suis pas contre la publicité, contre le fait de renseigner tous les employeurs. J'ai dit au ministre, tout à l'heure, que je voyais mal d'afficher dans une famille la liste des obligations de la nouvelle loi, mais je ne verrais pas mal l'attitude du gouvernement de faire imprimer la loi 126 et de l'envoyer à tous les employeurs, les petits comme les grands. En vertu de la Loi des accidents du travail, vous avez toute la liste complète de tous les employeurs à qui on pourrait envoyer ce fascicule des nouvelles normes, des nouveaux procédés, des nouvelles lois qui les avantageraient énormément, à part l'affichage raisonnable dans certaines industries. Je pense que ce serait bon de penser à l'envoyer à tous les employeurs de la province. (11 heures)

Madame, il y a une autre chose sur les pénalités. Je trouve que vous êtes avant-gardiste parce qu'il y a des gens qui sont beaucoup moins pénalisés pour des contraventions aux lois. Par exemple, dans le domaine des véhicules automobiles, les pénalités sont moindres que dans l'application de la Loi du salaire minimum. Je comprends que la peur est le commencement de la sagesse, mais ce n'est pas tout le monde qui a peur. Les pénalités qui sont là sont certainement plus élevées que celles qui existaient dans le cas du salaire minimum. Je suis persuadé que, s'il y avait une aggravation, il y aura de nouveaux et nombreux inspecteurs, nommés pour l'application de cette loi, à part les 500 qui sont là; cela justifiera le ministre de nous dire qu'il a dû, à cause de ces normes du travail, engager 500 employés de plus qui devront être attachés à un service spécial de l'inspection et de la coordination de la loi.

J'attends votre réponse sur le premier point et sur le deuxième aussi.

Mme Fournaris: On est au Québec, je pense. Les familles qui ont ces domestiques sont des familles québécoises même si elles sont d'origine ethnique. C'est le gouvernement qui nous dit toujours que tout le monde qui habite le Québec, ce sont des Québécois et j'espère que c'est bien ce qu'il veut dire. Si cela se fait, pourquoi avoir peur de le dire?

M. Bellemare: Est-ce qu'il se fait une exploitation, d'après vous, par les familles québécoises? Pour certains cas, peut-être. La généralité des immigrants est-elle exploitée, d'après vous, dans nos familles?

Mme Fournaris: Dans le cas des domestiques, c'est incroyable. Demain, vous allez entendre plus de détails sur cela et vous en serez persuadé, je ne parle pas au nom d'autres organismes, finalement. Si on est dans le milieu...

M. Bellemare: II y a une chose, Mme Fournaris. Autrefois, les domestiques n'étaient pas couverts et peut-être qu'il y a eu de l'exagération mais, maintenant que la loi sera spécifique sur le nombre d'heures pour le service d'une domestique dans une famille, il faut qu'elle reste là et qu'elle y soit au moins 30 heures par semaine. La loi doit être assez précise pour ne pas qu'il y ait de l'exploitation de ce côté-là. Il n'y avait pas de loi avant cela; les domestiques et les agriculteurs n'étaient pas couverts. Maintenant, ils le sont, ils vont l'être. Croyez-vous sincèrement que des familles québécoises ont exploité des immigrantes?

Mme Fournaris: Oui. J'espère que dans la nouvelle loi ce sera assez clair pour qu'elles soient finalement protégées.

M. Bellemare: D'accord. C'est pour cela que je vous dis que je ne vois pas pourquoi, dans un document public qui va peut-être faire le tour du monde, on dit que les domestiques sont exploités dans nos familles québécoises.

Mme Fournaris: Les servantes sont exploitées partout. Ici, on parle présentement de ce pays-ci.

M. Bellemare: Je n'aime pas cela parce que cela nous fait de la mauvaise publicité quant à nos familles québécoises.

Mme Fournaris: Non.

M. Bellemare: On pouvait peut-être le penser, mais l'écrire, je n'en suis pas. Maintenant que la loi y pourvoit c'est un argument qui n'aurait pas dû paraître là. C'est mon impression.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Je me serais abstenu de parler mais, compte tenu des dernières interventions, je voudrais dire que la vérité a sa place. Si vous le pensez, à la suite de certaines recherches en particulier...

M. Bellemare: Ils n'en ont pas fait.

M. Chevrette: ... si vous vous appuyez sur certaines recherches, tenant compte qu'il y a eu passablement de travail de fait par votre compagne, il ne faut pas avoir peur. Si on fait des comparaisons, même si cela sortait du Québec, les gens vont comparer le salaire d'une domestique au Québec par rapport à une domestique ailleurs. Les immigrants qui quittent leur pays parce qu'ils sont égorgés et qu'ils recherchent une sécurité peuvent quand même comparer. Cela ne veut pas dire pour autant, parce qu'on est plus haut, qu'il n'y a pas d'exploitation, une non-application de la loi. Je suis entièrement d'accord avec votre affirmation.

M. Bellemare: Est-ce que la même affirmation s'appliquerait à Toronto?

M. Chevrette: Je pense qu'au niveau d'une présentation de mémoires, avant l'étude ou l'adoption d'une loi article par article, lorsque les gens ont à s'exprimer de la façon qu'ils le font, et en me basant sur des faits personnels que je connais aussi, 60 heures, ce n'est pas rare. Ce que madame dit, c'est tout à fait vrai. C'est beaucoup plus fréquent qu'on peut le croire. Faut-il le cacher parce que ces choses-là sont vraies et pourraient nous donner un mauvais nom? Je pense que c'est le contraire. C'est aux gens mêmes qui sont impliqués à le dire pour forcer l'appareil gouvernemental à adopter une loi qui fasse en sorte de corriger des situations malheureuses. Je vous félicite de ce côté-là.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Beauharnois.

M. La vigne: M. le Président, c'était pour appuyer un peu ce que vient de dire le député de Joliette-Montcalm. Je pense que ce que madame écrit, elle l'a écrit avant que la loi soit adoptée. C'est sûr que le député de Johnson a l'air de dire qu'avec la venue de la nouvelle loi 126, ce sont des situations qu'on ne retrouvera peut-être plus ou peut-être plus autant. Mais au moment où l'étude a été faite, la loi n'était pas encore adoptée. Je pense que ce n'est peut-être pas dans tous les cas qu'on trouve que les familles québécoises exploitent des immigrants comme travailleurs domestiques, mais sans avoir fait une étude particulière, à titre personnel, sur la situation, je suis sûr que les gens qui ont écrit ce document sont des gens sérieux qui vivent dans ces milieux-là. S'ils l'ont écrit c'est probablement parce qu'il y a une certaine part de vérité.

M. Bellemare: Je suis convaincu que ce matin vous ne seriez pas fier de voir cela dans votre mémoire.

M. Lavigne: Evidemment, c'est...

M. Bellemare: On n'a pas besoin de cela quand la loi est déjà présentée et qu'elle va être...

M. Lavigne: Ce n'est pas, M. le député de Johnson, une fleur de plus à notre chapeau, bien sûr, de voir dans un document ce qui est écrit là. Est-ce que, parce que cela nous déplaît, on n'accepterait pas que cela soit écrit?

M. Bellemare: Pas avec la loi qui s'en vient.

M. Lavigne: On l'a écrit avant la venue de la loi. C'est là mon argumentation.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je voudrais revenir sur une question qui a été soulevée dans le mémoire au sujet des travailleurs illégaux. J'ai été un peu surpris de la réponse que madame a faite au ministre lorsqu'il a suggéré l'inscription d'une disposition nouvelle qui rendrait passible l'employeur d'une amende lorsqu'il emploie des immigrants qui sont illégalement au pays. Je suis surpris parce que je n'ai pas l'impression que cela va nécessairement régler le problème qui a été soulevé. Au contraire, cela peut peut-être le rendre plus difficile. Est-ce que, dans le fond, les possibilités de chantage — parce que c'est de cela qu'il s'agit — d'un employeur vis-à-vis d'un immigrant qui se trouve illégalement au pays... Le nombre de ces phénomènes va peut-être s'accroître, d'ailleurs, plus les règlements en immigration seront sévères, malheureusement. Est-ce qu'il ne devrait pas plutôt y avoir une disposition qui obligerait la nouvelle commission à considérer comme confidentielles les réclamations faites par les immigrants illégaux relativement à l'application de la Loi sur les normes de travail, de manière que les renseignements qu'ils fournissent à ce moment-là à la commission ne puissent être utilisés dans des procédures visant à faire appliquer la Loi de l'immigration?

N'est-ce pas là le véritable remède? Parce que faire imposer une amende à l'employeur est une pénalité bien faible par rapport à la pénalité qui attend possiblement le travailleur irrégulier qui risque d'être expulsé, ce qui est, présumons-le, une chose qu'il ne veut pas. Il risque bien de se contenter de ne pas être payé du tout ou d'être payé à un taux très inférieur au salaire minimum s'il sait que dès qu'il va porter plainte à la commission cela devient un fait public et que les inspecteurs de l'immigration peuvent se servir de sa réclamation comme d'une preuve de sa présence au pays. Est-ce que vous iriez aussi loin que de suggérer l'adoption d'une telle clause qui rendrait absolument confidentielles et non utilisables pour

les fins de l'application de la loi sur l'immigration les réclamations présentées à la commission?

Mme Fournaris: La confidentialité est quelque chose qu'on espère toujours avoir suffisamment, la protection de la confidentialité, la même pour tous les travailleurs, parce que, dans la pratique, ce n'est pas toujours confidentiel. Si on pense aux comités paritaires, par exemple, il y a des cas où l'employeur connaît toujours d'avance le jour de l'inspection et là il commence à nettoyer ses toilettes. Tout est propre et tout est bien dans la manufacture. Nous n'avons jamais pensé ou nous n'avons jamais espéré pouvoir aller si loin, mais ce serait vraiment souhaitable.

M. Forget: Merci.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie, Mme Fournaris et votre collègue, pour la présentation de votre mémoire. J'inviterais maintenant le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec en la personne de M. Jean-Louis Harguindeguy à venir nous présenter son mémoire, le numéro 8. M. Harguindeguy, voulez-vous présenter votre collègue?

Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec

M. Harguindeguy: C'est Pierre Chassé, le vice-président de l'exécutif, avec également deux autres vice-présidents, Roland Saint-Jean et Marcel Lemieux.

Nous allons sûrement exaucer le voeu des membres de la commission en étant extrêmement brefs. On va strictement résumer. Je pense que la principale revendication qui est quand même fondamentale, même si on n'est peut-être pas longtemps — on a déjà été plus longtemps à la commission parlementaire — c'est que la Loi sur les normes du travail s'applique de façon intégrale également au gouvernement en tant qu'employeur. C'est depuis les récentes lois, en fait, un des seuls projets de loi dont le gouvernement n'a pas statué l'application sur lui-même. A cause des dispositions nouvelles, particulièrement le recours auprès des commissaires-enquêteurs prévu au Code du travail sur les déplacements qui peuvent être faits d'une personne qui est enceinte, un congé de maternité, pour nous, c'est également une nécessité puisqu'on représente quand même près de 15 000 membres féminins qui travaillent pour le gouvernement puisqu'il y a près de 52% de la main-d'oeuvre syndiquée qui est de sexe féminin. Il est important pour nous qu'une telle disposition s'applique également de façon intégrale aux employés du gouvernement. On peut être porté à croire que déjà, les dispositions actuelles de 13, 14, 15 dans le cas des activités syndicales ne s'appliquent pas au gouvernement. Cependant, dans les faits, il s'avère que nous devons aussi malheureusement faire appel à ces commissaires-enquêteurs puisque, effectivement, il y a des contraintes qui s'exercent sur nos représentants syndicaux; il y a des déplacements et il y a même eu des congédiements. Donc, dans le cas de maternité, il peut aussi s'avérer utile qu'une telle disposition s'applique.

Egalement, au gouvernement, il existe quand même près de 3000 employés qui ne sont assujettis à aucune convention collective, ceux qui justement en vertu des dispositions du Code du travail sont considérés comme n'étant pas des salariés, mais des employés confidentiels qui se retrouvent actuellement sans aucun recours, si ce n'est dans le cas de congédiement éventuellement auprès de la nouvelle Commission de la fonction publique. Il y a quand même des normes minimales qui devraient également être appliquées à ces employés comme à certaines catégories d'employés occasionnels pour lesquels même à l'heure actuelle, dans les présentes négociations, le gouvernement n'accepte pas de réglementer un maximum d'heures de travail. Il y a des employés pour lesquels le gouvernement ne propose aucune limite d'heures de travail sur une base hebdomadaire. Ils sont disponibles sept jours par semaine. Je pense que, pour ces employés qui sont des occasionnels à l'emploi du gouvernement pour des périodes plus ou moins longues variant de trois à six mois, il est quand même important qu'il y ait des conditions minimales.

C'est peut-être essentiellement nos principales revendications. C'est sûr que l'ensemble des dispositions ne s'appliquerait pas puisqu'il y a quand même des conventions collectives qui sont négociées dans le secteur public, sauf qu'il y a quand même des minima qui, pour nous, seraient également nécessaires. A preuve, on peut vous donner comme exemple encore récent — on en a discuté encore hier — le refus du gouvernement de transmettre à ses propres employés les chèques de paie sous enveloppe scellée. C'est donné à la vue de tout le monde. Le refus aussi d'accepter comme principe la définition de conjoint que vous avez déjà prévue dans le projet de loi 126. Il nous semble quand même qu'il y a des situations comme cela qui sont également identiques pour les employés du gouvernement. C'est pourquoi nous revendiquons que le projet de loi 126 sur les normes de travail soit également applicable aux employés de l'Etat du Québec.

C'est à peu près en bref, ce que... (11 h 15)

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Johnson: Je vous remercie, M. Harguindeguy. Vous allez bien?

M. Harguindeguy: Assez bien. Cela pourrait aller mieux, mais cela coûterait plus cher, semble-t-il.

M. Johnson: Bon!

M. Harguindeguy: On négocie cet après-midi. Parfois, on se rencontre au moins.

M. Johnson: C'est cela. On va essayer d'être très bref parce qu'on sait que vous êtes bien occupé de ce temps-ci. D'abord, une de vos reven-

dications essentielles, ce n'est pas tellement que les fonctionnaires, qui sont syndiqués et couverts par les accréditations, ont besoin de cela, parce que, en gros, de façon générale, les conventions collectives — même en général, dans la société — prévoient des conditions qui sont supérieures à celles qui sont établies ici. Le problème, c'est celui des employés non syndiqués ou non syndicables, à toutes fins utiles, de la fonction publique. J'avoue que vous soulevez là un problème important et intéressant. Maintenant, je m'interroge sur l'opportunité de régler cela dans le cadre de la loi des conditions minimales par opposition à des modifications, par exemple, à la Loi de la fonction publique.

M. Harguindeguy: On connaît le résultat.

M. Johnson: Enfin, disons que vous avez peut-être une opinion à ce sujet.

M. Harguindeguy: On connaît les résultats de nos revendications sur le projet de loi 50. On n'a pas frappé dans le mille.

M. Johnson: Bon!

M. Harguindeguy: Alors, on essaie quand même ici aussi parce que, éventuellement, même si les employés occasionnels ne sont pas couverts par la Loi de la fonction publique, qui sont nommés par un écrit du ministre, mais qui ne sont pas des fonctionnaires au sens légal du terme, il y a aussi une partie importante des employés que vous semblez peut-être oublier: les employés féminins. Le recours prévu à l'article 114 du projet de loi ne pourrait pas être exercé si la loi ne s'applique pas aux employés féminins de l'Etat parce que, dans la convention collective, on ne peut sûrement pas prévoir un recours à un commissaire-enquêteur du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Cela n'est pas possible. Donc, il faut que la loi y pourvoie.

M. Johnson: D'accord.

M. Harguindeguy: II y a au moins cette partie-là.

M. Johnson: L'autre question que vous soulevez maintenant. A l'article 64, qui touche l'exercice des congés, des jours fériés, c'est peut-être une question de formulation, mais je trouve que la formulation de la loi est plus généreuse que ce que vous semblez souhaiter.

M. Harguindeguy: Je ne pense pas.

M. Johnson: C'est peut-être une question d'interprétation. Dans le fond, notre formulation prévoit que le salarié qui est absent avec autorisation bénéficie quand même du congé, tandis que votre formulation suggérait que le salarié soit obligé d'avoir travaillé la veille et le lendemain. Je pense qu'on se comprend bien sur l'objectif. C'est peut- être une question d'interprétation des textes, mais...

M. Harguindeguy: En tout cas, l'objectif, c'est que le congé férié soit payé, alors que selon le texte tel que rédigé, nous prétendons qu'il aura l'effet contraire. Il y aura très rarement des personnes qui vont être payées pour leurs jours fériés.

M. Johnson: Enfin, disons que je tiens bonne note de votre remarque sauf que, dans le fond, je pense qu'on vise tous les deux le même objectif. C'est une question de rédaction.

M. Harguindeguy: D'accord.

M. Johnson: J'espère. L'autre question que vous soulevez, c'est évidemment la cotisation de l'Etat en tant qu'employeur pour contribuer au fonds. Le raisonnement du gouvernement là-dessus — on aura l'occasion d'y revenir... D'ailleurs, votre revendication est identique à celle du Conseil du patronat à ce sujet. On dit: Dans le fond, l'Etat ne devrait-il pas, lui aussi, et ses organismes être soumis à la perception du dixième ou du cinquième ou du 1% de la masse salariale, selon le cas? Le raisonnement qu'on a fait derrière cela, c'est que tout ce qui est dans le secteur concurrentiel de la part de l'Etat — exemples: Société des alcools, les sociétés d'Etat à vocation commerciale, que ce soit SIDBEC, les filiales de la SGF — tout ce qui oeuvre dans le secteur commercial est soumis au prélèvement à cause des conditions de la concurrentialité. Tout ce qui n'est pas soumis à la concurrence, tout ce qui, finalement, est un monopole d'Etat ou un service de l'Etat, à partir du principe que c'est payé à même les fonds publics et que les salariés ainsi que les entreprises, pour une part, qui ne sont pas énormes quand même, ont contribué au financement de ces choses-là par la taxation foncière ou la taxation directe sur les revenus, on ne voit pas pourquoi ils repaieraient une seconde fois, à toutes fins utiles.

M. Harguindeguy: C'est ce qu'on demande également. On prétend que le gouvernement ne devrait pas être assujetti au prélèvement, selon le paragraphe h) de l'article 29 ou à notre sixième paragraphe. Comme les commissions scolaires qui ne paient pas, le gouvernement ne devrait pas non plus payer.

M. Johnson: Je m'excuse. Je suis peut-être passé par-dessus le mot "pas"... Je pense qu'on se comprend très bien à ce sujet.

M. Harguindeguy: Parce que, habituellement, on n'est pas trop d'accord avec ces...

M. Johnson: II demeure quand même, cependant, que les sociétés à vocation commerciale, dans notre optique, doivent être taxées.

M. Harguindeguy: D'accord. M. Johnson: D'accord.

M. Harguindeguy: On n'est pas toujours sur la même longueur d'onde que le Conseil du patronat.

M. Johnson: O.K.

M. Harguindeguy: Ce n'est pas dans nos habitudes.

M. Johnson: C'est tout ce que j'avais. Je vous remercie, M. Harguindeguy.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais demander à M. Harguindeguy de préciser la première remarque qu'il a faite selon laquelle le projet de loi 126 ne serait pas destiné à s'appliquer aux employés de l'Etat, aux fonctionnaires provinciaux du Québec. En vertu de quelle disposition précise? Je ne sais pas si on le lit de la même façon.

M. Harguindeguy: C'est en vertu — je ne suis pas juriste — des règles d'interprétation. Dès le moment qu'une loi ne prévoit pas l'application de la loi au gouvernement, la loi ne s'applique pas. Si on veut que la loi s'applique, il faut nécessairement que le gouvernement le précise dans la loi.

M. Forget: C'est en vertu, non pas de ce qui est mentionné, mais de ce qui...

M. Harguindeguy: C'est peut-être un oubli. M. Forget: En effet, je pense que...

Le Président (M. Marcoux): Les règles d'interprétation.

M. Forget:... c'est une remarque qui est tout à fait appropriée et je me demande, en effet, pourquoi le ministre ne l'accepte pas. Il me semble que, s'il y a un exemple à donner, c'est bien par le gouvernement dans la rémunération de ses employés. C'est une suggestion qui devrait être acceptée d'office par le ministre, sans autre hésitation. Je pense que c'est un très bon point que vous avez mentionné, M. Harguindeguy, et on va certainement l'utiliser...

M. Johnson: Dans le débat.

M. Forget: ... dans le débat article par article et au niveau de la deuxième lecture. Etant donné le caractère du mémoire, je n'ai pas d'autre question à poser.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: M. le Président, vous dites que certaines précisions devraient être apportées à l'article 64 du projet de loi, traitant des jours fériés. Est-ce que vous avez pensé que, si le jour férié du 24 juin, par exemple, était un mardi ou un mercredi, il soit reporté à la fin de la semaine?

M. Harguindeguy: II y a la Loi sur la fête nationale qui prévoit, spécifiquement pour cette journée. Pour les autres, c'est l'article actuel qui s'applique, l'article 59 qui permet au gouvernement, par règlement, d'établir d'autres congés fériés.

M. Bellemare: Est-ce que vous me dites que, dans la Loi sur la fête nationale, cette journée peut être reportée un samedi, si c'est un mercredi ou un jeudi?

M. Harguindeguy: II me semble qu'il est prévu que, si un employé doit travailler, cette journée peut être reportée, sauf qu'il faut que l'employé ait congé.

M. Johnson: La veille ou le lendemain. Dans la Loi sur la fête nationale, il faut absolument que ce soit la veille ou le lendemain; cela ne peut pas être reporté à une semaine plus tard.

M. Bellemare: Dans la même semaine, si le congé férié arrive en plein milieu de la semaine, qu'il soit reporté à la fin de semaine.

M. Johnson: Non. C'est toujours la veille ou le lendemain. En d'autres termes...

M. Bellemare: S'il travaille.

M. Johnson: C'est cela. En d'autres termes, prenons un exemple, si la fête nationale est un dimanche, le congé sera le lundi; si c'est un samedi, il sera un vendredi. Si c'est un mercredi, Noël, c'est Noël, c'est le mercredi; la fête nationale, c'est la fête nationale et c'est le mercredi.

M. Bellemare: C'était pour éclairer ma lanterne parce que j'avais de la misère à saisir ce point sur les trois jours fériés, pour tous ceux qui vont pouvoir bénéficier des trois jours fériés, Noël, le jour de l'An et le 24 juin.

Merci, M. Harguindeguy. Je vous souhaite bonne chance avec le gouvernement dans vos négociations. D'ailleurs, vous avez l'air d'avoir changé d'hurneur.

M. Harguindeguy: Je suis toujours optimiste, mais cela ne change pas les problèmes de place.

M. Bellemare: Je vous ai déjà vu plus aguerri que cela.

M. Harguindeguy: Cela dépend des projets de loi. Il y a des choses qui s'en viennent et il y a des places pour cela, aussi.

Le Président (M. Marcoux): Je remercie le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, M. Harguindeguy et ses collègues. J'inviterais maintenant le troisième groupe que nous rencontrons ce matin, M. Roger Bédard & Associés. Est-ce que M. Bédard est arrivé? Comme M. Bédard n'est pas arrivé, j'inviterais l'Association des manufacturiers canadiens, le no 15-M.

M. Bellemare: Vous n'aviez pas dit qu'on entendrait 9-M avant, ce matin?

Le Président (M. Marcoux): Oui, mais il n'est pas là.

M. Johnson: II n'est pas là, M. Bédard. Le Président (M. Marcoux): M. Massé.

Association des manufacturiers canadiens

M. Massé (Maurice-A): J'ai changé de fauteuil.

Le Président (M. Marcoux): Voulez-vous présenter vos collègues. Selon nos règles, vous avez une vingtaine de minutes pour présenter votre mémoire. Ensuite, ce sera la période d'échanges avec les députés.

M. Massé: Merci, M. le Président. Ici, Maurice Massé, directeur de l'Association des manufacturiers canadiens, division du Québec. A mon extrême droite, Me Suzanne Thibodeau, puis Me Roy Heenan, Me Alain Bilodeau, M. Jean Bleau, M. Georges Lachance et M. Guy Hurtubise.

L'Association des manufacturiers canadiens, division du Québec, est le porte-parole de 1650 membres dont 75% représentent la petite et moyenne entreprises. Si nous représentons des entreprises de toutes dimensions, nos services sont surtout requis par les petites et moyennes entreprises qui ne peuvent s'assurer les services d'experts pour les aider dans les différentes sphères de leurs activités. Nous avons pu constater, cependant, que c'est au chapitre de l'interprétation des lois et règlements qui les régissent qu'elles éprouvent le plus de difficultés. Ainsi, notre mémoire visera à faire ressortir dans le projet de loi les éléments qui sont susceptibles de causer des difficultés d'interprétation et d'entraîner, de ce fait, des problèmes dont les employeurs se dispenseraient volontiers.

Les employeurs du secteur manufacturier s'élèvent également contre les dispositions du projet de loi qui viennent en conflit avec les pratiques de gestion qu'ils ont rodées avec le temps, souvent par essais et erreurs, de concert avec leurs salariés, représentés ou non par un syndicat. Enfin, il nous semble qu'une étude approfondie des coûts résultant de l'application des normes nouvelles et des règlements les appuyant devrait être faite pour que nous n'ayons pas, après coup, à regretter des mesures qu'au nom de la sacro-sainte théorie des droits acquis, il nous sera impossible d'abolir. Si vous me permettez, je demanderais à Me Roy Heenan de continuer à lire le mémoire.

M. Heenan (Roy): II y a deux aspects que l'association trouve très positifs dans le projet de loi. D'abord, nous reconnaissons que c'est la responsabilité d'un gouvernement de fixer les normes minimales de travail. Dans ce contexte, nous sommes donc d'accord avec la démarche entreprise. En deuxième lieu, nous reconnaissons également qu'il est important que toutes les normes de travail se trouvent dans une même loi car cela cause des complications pour l'employeur d'être toujours obligé de parcourir le fouillis d'une série de lois. Dans ces deux aspects, nous appuyons le projet tel que présenté. Il faut cependant que les termes de la loi soient clairs et sans ambiguïté.

Le problème qui se pose surtout pour l'employeur, ce sont les taux de salaire minimum. Cela a toujours un impact direct sur les négociations collectives. La majorité, je dirais, de nos membres sont syndiqués et sont assujettis au Code du travail. Il y a un impact énorme des normes minimales sur ces négociations. Il ne faut pas oublier ce point. Toutes les normes de travail, prises une à une, peuvent difficilement faire l'objet de contestation. Cependant, elles ont toutes pour effet d'entraîner une hausse des coûts de production. Il y a donc lieu de se demander si, dans le contexte actuel, le Québec a les moyens d'aller aussi loin, aussi vite. Le Québec est dans une position concurrentielle précaire. Il ne faudrait pas que le bien qu'on veut faire cause un tort plus grand. Il vaut sûrement mieux un travail comportant des normes sujettes à amélioration que des normes idéales sans un travail pour les faire s'appliquer.

Ici, comme je le dis, le coût est affecté surtout au niveau des négociations, car ceci forme la base, le tremplin à partir duquel les négociations vont continuer. Chaque fois que vous mettez quelque chose dans une norme minimale, cela a un effet direct sur les négociations et sur les conventions collectives. Cela peut représenter des coûts considérables. (11 h 30)

Deuxième aspect. Quand on a augmenté le taux du salaire minimum, une des raisons qui furent invoquées pour justifier un taux si élevé, c'était que les autres bénéfices étaient moindres dans le Québec qu'ailleurs. Maintenant, avec la loi, je pense qu'on va amener les autres bénéfices au même niveau ou dans la moyenne des autres régions, ce qui va faire que le total de compensation va rester plus haut ici.

Le projet de loi, par ailleurs, a le défaut de prévoir que les normes seront fixées par règlement, c'est-à-dire sans passer par l'analyse que permettent les débats de l'Assemblée nationale et l'étude en commission parlementaire. Ainsi donc, par règlement et non pas par la Loi sur les normes du travail, le salaire minimum va être fixé, les congés payés vont être fixés, les congés de maternité et les autres normes telles que primes,

indemnités, allocations diverses, etc. Tout cela n'est pas assujetti à la loi, mais va être fait par réglementation.

La fixation de normes, de même que l'établissement des modalités de mise en application par voie de règlements sont un moindre mal lorsque leur publication précède de deux mois la date à laquelle ils prennent effet. La loi y pourvoit en son article 32. Cependant, nos mandants ne peuvent voir le bien-fondé des articles 36 et 37 qui donnent au gouvernement le pouvoir de passer outre aux dispositions de l'article 32. Nous croyons que les articles 36 et 37 constituent une échappatoire beaucoup trop facile et qui sera utilisée à outrance pour pallier les carences des bureaucrates et pour étouffer dans l'oeuf les revendications des employeurs. Nous ne pouvons imaginer une situation tellement urgente qu'elle justifierait le changement, sans préavis de deux mois, d'une norme. C'est quand même une norme et c'est très important pour les manufacturiers qu'ils soient avisés au moins deux mois avant pour savoir à quoi s'en tenir. Sinon, on peut aller à rencontre de la loi en ignorant le changement.

Le pouvoir d'imposition de la commission est exorbitant en regard des fonctions qu'elle assume. Cette liberté que le projet laisse à la commission de fixer elle-même le taux de cotisation qu'elle prélèvera des employeurs du secteur privé ne constitue sûrement pas une incitation à la rentabilité. La loi de Parkinson n'est pas une création récente.

Il faut penser ici que, sous l'ancienne Commission du salaire minimum, la commission avait quand même plusieurs pouvoirs: celui de fixer le taux du salaire minimum, celui de fixer des vacances, celui de fixer des congés rémunérés, celui de fixer des congés de maternité et autres conditions de travail. Tout cela relevait de la Commission du salaire minimum. Tout cela disparaît maintenant. La commission n'a pas ces pouvoirs. Cela passe au gouvernement, mais quand même, on a une anomalie du fait qu'on laisse la commission privée de tous les pouvoirs qui justifient effectivement son existence, à un moment donné. A ce moment, on se demande quelle est la fonction de la commission. Est-ce que cela justifie l'imposition d'un prélèvement de 1% de la masse salariale qui est quand même un montant imposant, sans les pouvoirs qui justifiaient autrefois ce prélèvement?

On passe maintenant à quelques commentaires sur quelques articles spécifiques. Je demanderais à Me Thibodeau de commencer.

Mme Thibodeau (Suzanne): Alors, le premier article qui a retenu l'attention de l'association, c'est l'article 32 du projet de loi.

L'association considère qu'il est d'importance capitale que les règlements visés à l'article 31 ne prennent effet qu'au moins 60 jours après leur publication dans la Gazette officielle. Les employeurs pourront ainsi identifier les mesures proposées, les analyser, formuler des objections ou encore simplement émettre des suggestions pour en faciliter la mise en application.

Comme le disait M. Heenan tout à l'heure, il y a effectivement énormément de règlements qui, en vertu de la loi, seront adoptés pour finalement réglementer les différentes normes de travail. On sait qu'il est souvent difficile par voie de règlements ou dans toute loi de prendre en considération toutes les réalités pratiques de l'entreprise et tout cela. D'où l'importance effectivement d'un débat public sur le contenu des règlements.

Les articles devraient être biffés. A ce sujet, Me Heenan a déjà fait des commentaires sur les raisons qui justifient la position de l'association.

L'article 39 prévoit que le gouvernement fixe par règlement le salaire minimum. Le salaire minimum n'est finalement autre chose qu'une norme et devrait donc être fixé dans la loi. Tout changement au salaire minimum pourrait donc faire l'objet d'un débat public. Nous croyons que le salaire minimum a une telle importance sur le plan social aussi bien qu'économique qu'il mérite l'attention que nous voulons lui porter. Au pis aller, nous pourrions accepter qu'il soit fixé par règlement, à condition toutefois qu'un délai semblable à celui paraissant à l'article 32 soit accordé pour la formulation de commentaires et/ou d'objections.

Comme on le disait tout à l'heure, le niveau ou le taux du salaire minimum a une importance capitale en ce qu'il représente un plancher comme point de départ dans les négociations. On sait également que le salaire minimum crée un coût d'impact sur différentes autres normes, par exemple, les vacances, les congés, etc., d'où l'importance d'un débat public sur la question du salaire minimum et les conséquences qu'il peut avoir dans l'entreprise au point de vue économique.

En ce qui concerne l'article 45, les mentions qui doivent paraître sur le bulletin de paie sont beaucoup trop nombreuses et ne tiennent pas compte de situations particulières. Ainsi, dans de très nombreuses entreprises du secteur manufacturier, un salarié peut occuper jusqu'à cinq ou six emplois différents au cours d'une même semaine. Il faudrait à tout le moins permettre un peu plus de souplesse dans ces cas particuliers. Effectivement, si on regarde le texte du projet de loi actuel, il a ajouté beaucoup de mentions sur les chèques de paie qui étaient inexistantes dans l'état actuel de la Loi du salaire minimum et de l'ordonnance no 14.

Les conséquences de cela effectivement, surtout, comme on le dit, dans des cas très fréquents d'ailleurs où on a, dans une même semaine ou deux semaines de période de paie, plusieurs transferts temporaires, on aboutit finalement avec un bulletin de paie interminable. Vous pourriez apprécier effectivement les coûts que cela peut représenter pour l'employeur et finalement une perte de temps productif pour remplir celui-ci. Je pense que le but du bulletin de paie est d'informer le salarié, lui permettre de calculer le montant qui lui est dû. Plusieurs des mentions exigées actuellement sont inutiles à cette fin. Je soumets le fait que de toute façon, s'il y a un problème qui se pose particulièrement, l'employeur doit tenir un registre de travail qui contient toute l'information

pertinente. En cas de problème, il peut toujours s'y référer. Nous suggérons qu'il y aurait lieu de simplifier les exigences actuelles.

M. Heenan: J'aimerais ajouter un commentaire, messieurs, sur l'article 51. Ce n'est pas le fait que la semaine normale de travail soit réduite de 45 heures à 44 heures qui nous dérange, mais l'impact que cela peut avoir sur certaines conventions collectives. Le problème — je vais le soulever plus tard — est que dans l'ancienne loi, il y avait une disposition, à l'article 25, qui prévoyait qu'il y avait possibilité, à moins que ce ne soit expressément interdit par ordonnance, d'utiliser les clauses de louage de travail qui sont valides et licites, nonobstant les dispositions des articles 23 et 24, dans la mesure où elles prévoient pour le salarié une rémunération en monnaie courante plus élevée ou des compensations ou avantages plus étendus que ceux fixés par l'ordonnance. Cela permettait la liberté, en négociation, de faire des choses qui n'étaient pas nécessairement identiques à la loi; elles permettaient une certaine souplesse.

On remarque que cette disposition ne se retrouve pas dans la loi actuelle. Le problème qu'on a est qu'il y a tellement de négociations, il y a tellement de pressions des syndicats pour avoir un système un peu différent, pour tenir compte des conditions de travail dans l'industrie en général qu'on peut se retrouver avec des situations qui sont peut-être plus avantageuses que la loi, mais on est pris avec les deux: avec la convention et avec la loi qui sont contradictoires. Je pense que c'est un point très important; par exemple, cette question des 44 heures de travail, M. le ministre.

Comme vous le savez, dans l'industrie chimique, il y a bien une pression qui se fait pour un horaire de 12 heures par jour. Et c'est le syndicat. Je sais qu'à Contrecoeur les métallos en font la demande à Stelco; ils veulent un horaire de douze heures par jour. Pour faire cet horaire, le système normal est de quatre jours de douze heures dans une semaine et trois jours de douze heures la semaine suivante, ce qui donne trois jours de congé et quatre jours de congé dans chaque semaine. Mais si on regarde la loi et la façon dont cela est fait, je ne pense pas qu'on pourra avoir cela dans une convention collective sans être obligés de payer le temps supplémentaire tel que prévu dans cet article, pour la première semaine. C'est la sorte de choses qui causent énormément de difficultés pratiques car on est assujetti à des pressions de négociation. On veut faire, et normalement on fait mieux que les normes qui sont prévues là. Mais, à moins qu'il y ait une possibilité d'avoir une certaine flexibilité dans les négociations, on va se trouver toujours en contradiction avec les dispositions de la loi. C'est un point assez important dont il faut tenir compte. Je vous suggérerais de regarder la formulation de l'article 25 de l'ancienne loi qui permet cette sorte d'avantages négociés qui, dans l'ensemble, sont meilleurs malgré qu'une ou deux des dispositions peuvent venir à rencontre d'une ou deux des dispositions de la loi actuelle.

A ce sujet, la remise du temps supplémentaire — c'est l'article 54 — en congés payés est une formule largement étendue et qui a pour effet de satisfaire les salariés en même temps qu'elle contribue à réduire les frais d'exploitation. De très nombreuses conventions collectives le permettent d'ailleurs lorsqu'il y a entente entre les employeurs et les salariés. Les salariés sont souvent heureux de pouvoir, pour des motifs personnels, s'échanger du temps de travail. C'est ainsi qu'un salarié peut travailler seize heures, à sa demande, dans une journée, pour permettre à un compagnon d'être libéré. En d'autres mots, on demande un peu plus de flexibilité, étant donné que cela va avoir un impact direct sur les négociations. D'un autre côté, par le Code du travail, le gouvernement encourage les négociations collectives et individuelles mais, si on veut trop normaliser, la difficulté va être sentie à la table de négociations et dans les frustrations qui seront causées par la loi. Je demanderais à Me Bilodeau de continuer.

M. Bilodeau (Alain): M. le Président, nous avons également des commentaires à faire, entre autres sur l'article 56, lequel prévoit qu'un salarié est réputé être au travail lorsqu'il est à la disposition de son employeur. Il nous semble que cet article comporterait certaines ambiguïtés dans le sens suivant: Nous avons pensé au cas des infirmières, par exemple, qui demeurent chez elles ou l'employé qui, de par sa fonction, doit demeurer chez lui, être en disponibilité, pour une fin de semaine; il serait réputé être au travail. Si c'est le cas, nous pensons que l'article doit nécessairement être modifié pour tenir compte de cette réalité. En fait, M. le ministre, nous faisons référence à toutes les personnes qui sont appelées communément en "stand by". Il y aurait probablement lieu, à ce moment-ci, d'ajuster l'article 56 en conséquence.

Si vous me le permettez, je ferai un court commentaire sur l'article 58, bien que non indiqué dans le mémoire. Il est court: "Un salarié est réputé être au travail durant la pause café." Nous suggérons qu'on devrait peut-être ajouter au début ou à la fin de l'article: "...aux fins du calcul du temps supplémentaire". J'imagine que c'était probablement l'intention du législateur de faire référence aux fins de calcul du temps supplémentaire seulement dans cet article, mais, comme ce n'est pas indiqué, on pense que cela peut effectivement créer une ambiguïté assez évidente puisque le titre de la section est: La durée du travail. Alors, si le salarié est réputé être au travail durant la pause café, il me semble que si c'était uniquement comme cela il y aurait un argument possible comme quoi, dorénavant, tout le monde serait obligé de payer la pause café. Dans certains cas, Dieu sait que cela représenterait des coûts qui, je ne pense pas, aient été prévus par le législateur. Ce serait facile de corriger cela en ajoutant: "Aux fins du calcul du temps supplémentaire, un salarié est réputé...". Ou, encore, aux fins de l'article 57, ce qui a peut-être été le cas; c'est ce qu'on veut peut-être faire ressortir de la loi, aux fins de l'article 57,

"le salarié est réputé être au travail durant la pause café."

Maintenant, relativement à l'article 59, qui est le premier article concernant les jours fériés. Nous croyons que le nombre de jours fériés et chômés constitue effectivement une norme dont il nous semble inapproprié de laisser la détermination à d'autres instances que le législateur ou l'Assemblée nationale. Nous soumettons que la loi, plutôt que des éventuels règlements, devrait être claire sur ces questions, à savoir quels sont les jours fériés. (11 h 45)

II nous semble que, finalement, la détermination des jours fériés correspond à certaines habitudes sociales des gens, des travailleurs, des citoyens du Québec, et ne devrait être déterminée par personne d'autre que — comme cela s'applique à tout le monde et à l'ensemble de la population — l'Assemblée nationale elle-même. Cependant, évidemment, l'article, tel qu'il est rédigé actuellement en son paragraphe c), a nécessairement ou aurait, s'il était adopté comme tel, pour effet d'ajouter des jours fériés et payés à des salariés visés par des conventions collectives déjà généreuses sur ce point. Dans ce dernier cas, il y aurait lieu de prévoir un moratoire pour que les salariés et leurs employeurs puissent ajuster leur convention collective en conséquence.

En d'autres termes, peut-être que la question devrait se poser de la façon suivante: Est-ce que c'est le nombre de jours fériés qui importe au législateur, au gouvernement, ou est-ce le jour, la qualification du jour comme tel?

Mon collègue faisait des remarques tout à l'heure concernant l'ancienne loi. Je pense que c'est pertinent. Dans l'ancienne loi, étant donné qu'on avait la possibilité d'accorder des conditions de travail au moins équivalentes à celles qui étaient prévues dans la loi, il n'était pas nécessaire que ce soit le jour qui est fixé par... dans le temps, c'était la commission, maintenant, ce sera le gouvernement. Il peut arriver, c'est une réalité dans notre entreprise et, je pense, dans bien d'autres genres d'entreprises que l'entreprise manufacturière, que les salariés — bien souvent les syndicats le demandent; ce sont des demandes qu'on a quotidiennement à la table de négociation — demandent d'avoir telle journée dans l'année. Pour vous donner un exemple, il y en a qui veulent avoir le Rosh Ha-Shanah. Cela pourrait être une autre journée. Il y en a qui veulent avoir des journées supplémentaires durant le temps des Fêtes, quitte à éliminer certaines autres journées durant l'année.

C'est bien évident, M. le Président, que si on avait la nomenclature obligatoire éventuelle d'un certain nombre de jours, cela ne coïnciderait pas nécessairement avec ce qu'attendent vraiment les salairiés et, finalement, les entreprises et les syndicats également. Peut-être y aurait-il lieu à ce moment-ci de réfléchir à ce sujet. Si c'est le nombre de congés, c'est facilement adaptable. D'ailleurs, il y a peut-être une certaine antithèse, jusqu'à un certain point, entre le Code du travail, qui permet justement aux parties, les compagnies et les syndicats, de négocier des choses qui sont en fonction des besoins des parties, et les besoins qui ne sont pas nécessairement toujours les mêmes d'une entreprise à l'autre. D'autre part, la présente législation imposerait des choses et ferait en sorte qu'on se ramasserait avec des revendications minimales et un nombre de jours fériés qui serait astronomique. Il y a actuellement des conventions collectives qui prévoient évidemment un grand nombre de jours fériés qui sont adaptés justement aux besoins des employeurs. Je fais cette remarque dans ce sens.

Egalement, sur cette question, on parlait tout à l'heure du problème du jour avant ou du jour après. Si la loi prévoit qu'un jour férié tombe sur une journée non juridique, que le congé doit être pris le lundi et que la convention collective — parce qu'il y a bien des conventions collectives dans ce cas — prévoit spécifiquement, dans ce cas-là, que ce serait le vendredi, il y a un danger réel qu'on soit pris avec les deux, qu'on nous réclame l'exécution de l'obligation contractée en vertu de la convention et l'exécution de l'obligation évidemment imposée par le législateur en vertu de la loi. Cela peut être un problème évident aussi.

Maintenant, M. le ministre, à l'article 61, l'indemnité pour un congé doit être égale au salaire que perd le salarié du fait qu'un jour férié prévu à l'article 59 est un jour chômé. Ne faudrait-il pas parler de salaire régulier afin d'éviter le paiement de primes qui sont établies et payées pour compenser les événements inhérents à l'exécution du travail dans les circonstances données? Je vous donne un exemple: la prime de quart qui est accordée bien souvent par convention pour compenser le fait qu'un individu ait à travailler le soir ou la nuit. Telle que rédigée, la législation comprendrait ceci, alors qu'il n'y a pas lieu puisque l'individu ne travaille pas cette journée-là et qu'il ne se dérange évidemment pas le soir ou la nuit, d'accorder cette prime. Si on parlait du salaire régulier plutôt que du salaire perdu, ce serait peut-être une précision plus réaliste à apporter. Nous vous le soumettons.

A l'article 64, j'ai certains commentaires qui n'entrent évidemment pas dans la ligne de pensée de mon prédécesseur, M. Harguindeguy, qui a parlé tout à l'heure sur cet article. Il nous semble que cet article est relativement ambigu à deux égards.

Nous demandons ici: Faut-il verser l'équivalent d'un jour de salaire à un salarié qui reçoit déjà une compensation pour un tel jour en vertu d'un régime d'assurance-salaire. L'emploi des mots "ou à une indemnité" à l'article 64 pose un problème sérieux parce que cela amène évidemment la possibilité bien claire d'une double compensation qui n'est pas justifiée. Si l'individu se trouve déjà sous un régime où il reçoit des prestations d'assurance-salaire, je ne vois pas pourquoi son salaire serait payé en plus. C'est une première question.

Une deuxième question qui nous apparaît également extrêmement importante et à propos de laquelle nous avons souvent des problèmes en

négociation, ce sont les mots "ou sans une raison valable" à l'avant-dernière ligne de l'article: "sans l'autorisation de l'employeur ou sans une raison valable, la veille ou le lendemain de ce jour". Je suis évidemment en désaccord, avec respect, avec l'opinion de M. Harguindeguy qui disait, tout à l'heure, que peu de gens vont être payés dans ce cas. Etant donné que c'est une norme, il nous semble que la norme devrait prévoir le principe seulement que l'individu doit travailler la veille et le lendemain de la fête, mais on ajoute les mots "ou sans une raison valable". On peut convenir que le but d'un article comme celui-là — au moins, quand on négocie des conventions collectives, c'est comme cela qu'on le voit — c'est d'empêcher ou de contrôler, jusqu'à un certain point, la tentation bien humaine de prendre une grande fin de semaine. L'invididu n'a qu'à appeler l'employeur et à lui dire: Je suis malade. Cela ne se contrôle pas. La seule forme de contrôle qui est retenue par l'employeur sur l'absentéisme dans ce cas-là — dans plusieurs cas, c'est un problème réel — c'est l'obligation de travailler la veille. Alors, l'individu qui a cette obligation-là a tendance à venir travailler et à faire sa journée de travail pour avoir le paiement de son congé. Mais, si on indique simplement "ou sans une raison valable... On essaie d'éviter cela autant que possible dans les conventions collectives et, effectivement, on trouve d'autres formules. Par exemple, un individu qui serait malade une semaine avant ou une semaine après, cela pourrait se comprendre parce qu'il n'y a pas de danger que l'individu prenne la chance de se déclarer malade pendant une semaine pour avoir le paiement de son congé. Cela ne serait pas payant pour lui. Le simple fait d'ajouter "ou sans une raison valable" enlève toute forme de contrôle sur l'absentéisme. C'est dans ce sens, M. le Président, que je fais ces remarques. Je repasse la parole à mon collègue.

M. Johnson: Je m'excuse, M. Heenan. Est-ce que vous pourriez accélérer le tempo sur le reste des articles, s'il vous plaît?

M. Heenan: On va certainement essayer de le faire, M. le ministre. Je vais sauter quelques articles. On essaie de répondre à quelques-unes de vos questions à l'avance. C'est pour cette raison que cela prend du temps.

Concernant la question des congés annuels payés, il y a deux ou trois questions que vous devriez regarder. A l'article 65, vous avez changé la formule qui existait il y a cinq ans, mais il y a bien des compagnies qui ont changé avec l'ancienne loi et qui ont une année de référence qui est peut-être différente du 1er mai au 30 avril qui existait il y a cinq ans. Maintenant, quand vous employez le mot "intéressées", s'il y a un syndicat, il n'y a pas de problème. Mais, s'il n'y a pas de syndicat, quelles sont les parties intéressées qui négocient cela? Vous pouvez trouver toute une série de compagnies qui vont être prises, car il n'y a pas de partie intéressée avec laquelle elles pourraient s'entendre à ce sujet, à moins que ce ne soit des ententes individuelles. A ce moment-là, il faut le prévoir.

A l'article 72, vous dites qu'il est interdit à l'employeur de remplacer le congé visé dans les articles 66, 67 et 68 par une indemnité compensatrice. Cela est très bien quand il s'agit des deux semaines. Mais vous ajoutez une troisième semaine. Dans bien des endroits, c'est permis — comme dans la loi actuelle — de monnayer la troisième semaine à la demande de l'employé. Assez souvent, un employé veut avoir plus de semaines de congé l'année suivante et moins cette année. Cela serait impossible dans le cadre actuel. Cela enlève toute négociation possible à ce sujet.

Le troisième point, c'est que l'article 73 est assez important. Un salarié peut, en raison de la maladie ou à l'occasion d'un congé sans paie, continuer d'être un salarié même s'il ne justifie d'aucun jour de travail au cours d'une période de référence. Le projet de loi prévoit qu'un tel salarié aurait quand même droit à son congé annuel et à une compensation au moins égale à l'équivalent de deux ou trois semaines de salaire selon le cas. Une compensation établie au pourcentage des gains nous semble seule devoir se justifier. C'est là le système actuel. On peut avoir des employés qui sont malades toute une année et qui vont recevoir quand même deux ou trois semaines de paie en même temps qu'ils reçoivent leur chèque pour maladie, un en vertu de l'assurance prévue par la convention collective et l'autre en vertu de cela. Si c'est 4% ou 6% des gains, c'est le système qu'on connaît.

L'article 78 est un article assez important. Dans cet article, M. le Président, on ignore la pratique en vigueur dans de nombreux établissements, et confirmée dans de nombreuses conventions collectives, à l'effet que les salariés qui ne travaillent pas dans des équipes rotatives ne prennent qu'une demi-heure sans paie pour leur repas. C'est monnaie courante. Il y a bien des syndicats qui veulent que les employés soient au travail le moins de temps possible. Ils négocient avec l'employeur le fait que les employés ne prennent qu'une demi-heure payée ou non payée. Votre loi défendra toute période de repos d'une demi-heure sans paie. Cela se négocie couramment, bien des syndicats ne veulent pas que les employés soient en dehors de chez eux pendant 9 heures, ils veulent que ce soit seulement huit heures et demie et demandent qu'il y ait une période de repos, de repas d'une demi-heure, sans paie.

Je pense qu'ici, on ne tient pas compte des réalités en négociation collective. C'est un point extrêmement important que je vous demanderais de regarder. Même dans le cas des opérations continues, il y a trois équipes de huit heures. L'employé reste au travail pendant ces huit heures et c'est normal de trouver, dans une convention collective, un article accordant un temps approprié — sans temps défini — pour le repas, un temps alloué pour celui-ci. Je pense à des mécaniciens de machines fixes qui mangent tout en regardant leur machine. Ils n'ont pas de travail manuel à faire, ils regardent, ils mangent là. De la

façon dont la loi est rédigée, ce sera illégal. A ce moment-là, on sera obligé soit de donner une demi-heure supplémentaire de paie, garder l'employé huit heures et demie ou accorder une heure sans paie pour le repas. Cela ne tient pas compte de la réalité conventionnelle.

A l'article 80... je pense que je ne ferai pas la lecture de l'article 80, pour faire plaisir au ministre.

M. Bisaillon: C'est très bon, l'article 80. Vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Heenan: A l'article 81, si on reconnaît que le salarié qui justifie de douze mois de service continu a droit à un préavis de deux semaines avant d'être licencié, il me semble qu'il sera utile de prévoir qu'un salarié doit justifier d'une durée de service minimale de trois mois, comme période de probation, pour que l'employeur soit obligé de lui donner un préavis d'une semaine. Une chose qui est extrêmement importante: le mot "licenciement" a déjà apporté beaucoup de difficultés en droit de travail. Ce même mot, comme vous le savez, se trouve dans la loi...

M. Johnson: ...

M. Heenan: C'est cela. La Cour supérieure a défendu le règlement, récemment, à cause de cela. Il ne faut pas que cela s'applique à des mises à pied.

M. Johnson: C'est vous qui l'aviez contesté, M. Heenan? Il me semble que oui.

M. Heenan: C'est bien cela. Vous voyez qu'on le connaît bien.

M. Johnson: Vous connaissez bien ce problème.

M. Heenan: Je le connais très bien, c'est pour cela qu'on insiste.

Dans l'article 82, vous introduisez un autre concept. En droit du travail, quand vous introduisez un autre concept, c'est difficile. On est tous habitués à congédier pour cause; c'est le terme usuel, si vous voulez. Ici, vous introduisez le concept de faute grave, qu'il faut payer à moins d'une faute grave. Normalement, on dirait qu'il faut payer à moins qu'il soit congédié pour cause. Le problème, c'est que cela va tout simplement donner lieu à beaucoup de litiges pour savoir si "faute grave" et "cause", c'est la même chose ou si c'est quelque chose de différent. Je pense qu'on devrait en rester au langage que tout le monde connaît, qui a quand même une certaine jurisprudence qui a établi ce qu'est "cause" et ce qui n'est pas "cause". Je vous suggère cela.

J'ai deux autres commentaires assez courts à apporter, mais qui sont quand même importants. Nous voulons encore insister, aux articles 91 et 92, sur le fait que l'ordre public s'applique seulement à quelques-uns et que vous laissez aux parties qui négocient avec les syndicats en vertu du Code du travail le droit de faire d'autres ententes et que vous prévoyez un article comme l'article 25 dans l'ancienne loi. (12 heures)

L'autre commentaire est le suivant. Aux articles 94 et 96, vous importez dans cet acte le concept de l'article 36 du Code du travail. Vous savez la difficulté que l'article 36 a causée à tout le monde dans le droit du travail. L'aliénation ou concession totale, d'après le juge Geoffroy dans la décision d'Ambulance Godin, c'est une hypothèse sur un immeuble. Maintenant, si oui, n'importe qui qui achète un immeuble peut se retrouver avec une action, en vertu de ces choses, de personnes qu'il ignorait. Il achète l'immeuble, mais il y avait des employés qui travaillaient là autrefois qui n'étaient pas payés, et il y a une réclamation qui suit. C'est un concept qui peut causer énormément de tort car le Tribunal du travail a décidé qu'il s'agit d'une hypothèque sur un immeuble. Ce concept de passer le contrat individuel de travail pourrait causer énormément de tort. Pensez-y, n'importe qui qui achète des immeubles, il ne sait pas dans quoi il s'embarque avec tout cela. Je vous rappelle l'usine de Soma, qui est désaffectée, que personne ne veut acheter, depuis dix ans qu'elle est là; c'est une excellente usine, mais personne ne veut l'acheter, pour ne pas acheter tous les problèmes qui existaient là autrefois.

Depuis cinq ans, personne ne peut vendre cet édifice à Saint-Bruno car personne ne veut l'acheter. Maintenant, je pense, pour terminer-Une Voix: Est-ce que je peux faire une correction...

M. Johnson: Je pense que Bélanger-Tappan l'a acheté.

M. Heenan: Exactement, Bélanger-Tappan l'a acheté. Je m'excuse, mais cela a pris, je pense...

M. Johnson: Cela a pris un bon bout de temps.

M. Heenan: Cela a pris un bon bout de temps et on a essayé d'intéresser deux autres personnes.

M. Johnson: Cela a pris une grève dans la Beauce.

Une Voix: A Montmagny.

M. Johnson: A Montmagny, pardon.

M. Bilodeau: Maintenant, M. le Président, trois commentaires additionnels pour terminer. Un sur l'article 100, enfin, vous avez sûrement eu des commentaires sur celui-là. C'est probablement une erreur de rédaction, mais cela dit: "Tout règlement d'une réclamation entre un employeur et un salarié qui comporte une réduction du montant réclamé est nul." C'est bien évident que la facture de cet article peut laisser entendre qu'un salarié

ne pourrait pas, dans le cas où il aurait, par erreur, exagéré sa réclamation originale, corriger telle réclamation; enfin, je pense qu'on s'entend là-dessus. Il faudrait plutôt formuler que les deux parties ne peuvent s'entendre sur un règlement qui représenterait un montant moindre que ce que prévoit la loi. Sans cela, il n'y aurait pas de règlement possible si on ne pouvait pas régler pour moindre que le montant qui est réclamé. Par définition, cela ne serait pas un règlement.

Maintenant, sur l'article 108, nous croyons qu'il faudrait circonscrire le pouvoir de l'inspecteur aux "autres documents pertinents" plutôt qu'aux "autres documents". Enfin, M. le ministre, très brièvement, sur l'article 114d, je voudrais faire le commentaire suivant. On dit qu'il est interdit de déplacer une salariée pour la raison qu'elle est enceinte. Ceci nous mettrait en conflit avec l'ordonnance qui existe actuellement comme vous le savez, qui confère à la salariée la possibilité de demander elle-même d'être déplacée dans les cas où son travail pourrait comporter des dangers. L'article 114d tel qu'il est rédigé actuellement constitue une prohibition stricte. Il faudrait le corriger peut-être.

M. Johnson: Si vous pensez qu'il y a un conflit entre une loi et un règlement, attendez que la loi de la santé et sécurité arrive. On va être aux prises avec trois conflits. On va les concilier à un moment donné.

M. Bilodeau: En effet, il y aura cela. Je voulais le mentionner également, il y aura ce troisième élément additionnel. Evidemment, il va falloir qu'il y ait une corrélation entre les dispositions pour nous éviter de se placer dans des drôles de situations. Je vous remercie.

M. Massé: M. le Président, en conclusion, on pourrait constater par la teneur de notre mémoire que notre association est loin de s'élever contre l'essentiel du projet de loi. Nous nous sommes plutôt arrêtés, dans le peu de temps qui nous était départi, compte tenu de notre structure, à soulever des points d'ordre pratique. Nos membres sont d'accord pour suivre l'évolution du milieu, mais ils sont très sensibles à tout ce qui peut compromettre un tant soit peu la rentabilité de leurs entreprises. C'est heureux pour toute la population du Québec qu'il en soit ainsi. Leur analyse des mécanismes mis en place par les lois et les règlements s'inspire des expériences qu'ils vivent et qui sont le lot de leur quotidien. Par notre mémoire, nous avons voulu faire valoir que la loi, si elle était adoptée telle que présentement rédigée, entraînerait des difficultés énormes pour l'entreprise et surtout pour la petite entreprise. Nous de notre association, croyons beaucoup que les PME au Québec ont besoin d'appui. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, si je comprends bien, en principe, nous ajournons à 12 h 30. Est-ce que les députés de l'Opposition auraient objection à ce que nous continuions jusqu'à 12 h 45, 13 heures pour pouvoir libérer l'association, ensuite pour ne pas les obliger à revenir à 16 heures? D'accord, cela vous irait? Deuxièmement, dans un geste qu'il ne faudrait pas considérer comme un précédent, je n'ai pas d'objection à ce que le député de Saint-Laurent adresse les premiers commentaires, compte tenu du fait que je lui ai déjà expliqué que je dois m'absenter pour à peu près dix minutes; je devrai revenir et ensuite on reprendra l'ensemble. Je peux laisser au député de Saint-Laurent le soin de commencer.

M. Bellemare: Si vous devez vous absenter, je crois qu'il serait préférable d'ajourner à 16 heures parce que cela va être un peu trop long que de faire cela à la sauvette dans ce mémoire qui est très bien fait.

M. Johnson: On a quand même presque une heure pour passer à travers tout cela, ce qui est considérable. On a pris à peu près 20 minutes même pour des mémoires aussi importants.

M. Bellemare: II ne faudrait pas non plus...

M. Johnson: L'alternative, à ce moment, c'est que je me livre immédiatement à mes commentaires, mes réflexions et mes questions.

M. Bellemare: J'aimerais mieux que vous soyez là...

M. Johnson: Je me fierai sur mon collègue de Sainte-Marie...

M. Bellemare:... pour entendre nos réflexions.

M. Johnson: Oui, mais je relis les bleus de la commission. Je pense que M. le député de Johnson, cela va faire son affaire d'entendre cela. Je relis les bleus de la commission à l'occasion. J'entends même les rubans magnétoscopiques de temps en temps. Il me fait toujours plaisir d'avoir les commentaires du député de Johnson.

M. Bellemare: Moi aussi, je...

M. Johnson: Compte tenu de la difficulté que cela semble poser pour le leader de l'Union Nationale, je vais peut-être procéder immédiatement à quelques commentaires.

D'abord, je pense qu'un des problèmes... D'abord, je dois vous rassurer, M. le Président... Vous êtes le président, je pense, de la section québécoise?

M. Massé: Directeur.

M. Johnson: Le directeur de la section québécoise. Je dois vous assurer qu'effectivement, ce gouvernement, comme il a eu l'occasion de le redire lors du sommet économique, croit égale-

ment à l'importance de la PME dans notre économie et dans notre société. C'est pour cela d'ailleurs qu'on tient des commissions parlementaires pour entendre les parties, y compris la PME, là-dessus.

D'abord, la qualité de votre mémoire ne fait aucun doute. Il y a évidemment des questions d'opinions là-dedans sur lesquelles on risque de ne pas être d'accord, mais il y a, je pense, des problèmes très pratiques et très concrets que vous soulevez, qui ont déjà été soulevés ou d'autres qui sont nouveaux à nos yeux, sur lesquels nous nous pencherons.

De façon générale, je pense que le coeur de votre argumentation — je me réfère surtout à la partie de l'exposé faite par M. Heenan — c'est la difficulté de concilier des normes qui sont dites d'ordre public avec ce qui est librement négocié, que ce soit sur les horaires de travail, sur la possibilité de reporter les congés fériés, sur la notion du temps supplémentaire, etc. Je pense que nous sommes bien sensibles à ce type de préoccupations que vous avez. Maintenant, il s'agit d'autre part, dans certains secteurs — parce que peut-être que le monde syndical n'a pas fait ou n'a pas été capable de faire son travail — d'imposer vraiment des choses à l'ensemble des entreprises, comme, par exemple, tout ce qui a trait aux congés de maternité. On sait que dans certains cas, il y a des syndicats qui ont eu besoin du développement des quatre, cinq dernières années sur la condition féminine pour commencer à aller chercher des choses qui touchent le congé de maternité. Il y a des conventions collectives qui vont beaucoup plus loin que l'ordonnance actuelle de la Commission du salaire minimum. Il y en a qui sont vraiment en deçà de cette ordonnance. C'est ce type de préoccupation qui nous a amenés à dire que les conditions minimales devaient être d'ordre public.

Maintenant, les problèmes concrets que vous soulevez et le type de formulation sur lequel on travaille, c'est cela: Est-ce qu'il n'y a pas une série de ces normes qui pourraient trouver leur équivalence ou leur reconnaissance dans le seul fait qu'elles sont négociées librement, ce qui permettrait, dans beaucoup des industries que vous représentez, de régler un tas de problèmes, non seulement pour vous autres, mais également pour les associations de salariés? Par exemple, l'affaire du temps supplémentaire 4-3, douze heures par quart? Les articles 51 et 52 peuvent être interprétés comme vous l'avez dit, mais je pense qu'ils peuvent également être interprétés autrement. Chose certaine, ce n'est pas clair, si on n'a pas l'air de s'entendre a priori sur les articles 51 et 52. Mais l'objectif, c'est quand même de permettre cette souplesse et on verra à refaire les formulations, si nécessaire.

L'autre aspect — je me permettrai une parenthèse là-dessus — c'est que vous avez soulevé le fait que sur vos quelque 1600 membres, M. le directeur général, vous en aviez 75% qui étaient dans les PME et, par la suite, j'ai entendu M. Heenan nous dire que la majorité de vos membres étaient syndiqués. Je ne sais pas où vous recrutez vos membres de la PME, mais les statistiques que je connais, c'est qu'il y a 20% de syndicalisation dans le secteur privé au Québec et que 85% des entreprises ont moins de 20 employés. Je pense qu'elles se classent dans le PPME, c'est-à-dire les petites petites moyennes entreprises. J'essaie de concilier vos effectifs et ce que M. Heenan dit. Je me demande si vous représentez effectivement du monde où il y a beaucoup de syndicats. A ce moment, si c'est le cas, je ne suis pas sûr que ce sont des PME. Enfin, c'est une parenthèse à laquelle vous serez appelés sans doute à fournir une...

M. Massé: Restons au texte, si vous voulez.

M. Johnson: Pardon?

M. Massé: Restons au texte.

M. Johnson: Oui, absolument. M. Heenan n'avait peut-être pas un mandat spécifique sur cette phrase, d'accord.

Rapidement, au sujet de toute la question des articles 32, 36 et 37, sur la publication, on a eu un long débat avec une autre association qui vous a précédés la semaine dernière. Je ne le reprendrai pas ici. La question de l'article 39 de la loi, à savoir que le salaire minimum devrait être dans la loi, c'est également une demande de la CSN.

Je présume que les raisons doivent être différentes, cependant, et que les formulations que vous recherchez seraient sans doute un peu différentes. La CSN voudrait voir le salaire minimum imposé par la loi à $4.25 et indexé au Consumer's Price Index, pour utiliser l'expression que vous connaissez. Je ne pense pas que ce soit votre objectif.

Je pense, d'autre part, que le gouvernement doit être capable de prendre ses responsabilités dans des choses comme le salaire minimum. On peut toujours me citer l'exemple américain. Le Congrès américain, après un débat qui a duré un an, a fini par arrêter dans la loi une gradation du salaire minimum sur une base de trois ans. Cela ne tient pas nécessairement compte, à mon avis, de ce qui peut être une conjoncture très précise. Quand on regarde le prix des aliments qui a augmenté récemment, quand on regarde l'inflation, quand on regarde une série d'autres conditions dans notre société, il peut s'avérer important que le gouvernement prenne ses responsabilités et décide de modifier le salaire minimum à la hausse, bien entendu.

Ceci dit, je pense que le gouvernement doit s'astreindre à une procédure qui l'oblige à être confronté avec des opinions divergentes; cela s'appelle, à notre avis, la prépublication et la possibilité, dans le cadre de la période des questions en Chambre, pour le gouvernement d'être obligé de se justifier, sans compter les réponses qu'il doit donner aux multiples conférences de presse auxquelles vous participez, avec le Conseil du patronat, les chambres de commerce, etc. La dernière fois qu'on a eu ce débat au Québec, je pense que cela a occupé pas mal de place dans

les journaux et dans les media et qu'il y a un vrai débat qui s'est fait. Ultimement, le gouvernement a pris ses responsabilités, par exemple, et je pense qu'il s'agit de vivre dans une société où le monde porte ses culottes. Je pense que porter ses culottes au gouvernement, c'est statuer sur le salaire minimum et être capable de le justifier économiquement, politiquement et socialement.

M. Forget: Est-ce une remarque sexiste?

M. Johnson: Absolument pas. Je pense que la mode féminine me permet de dire que ce n'est pas une remarque sexiste.

L'article 45, maintenant, la question du talon des chèques de paie. Je comprends que vous ne voulez pas rentrer dans la relance de l'industrie des pâtes et papiers par des talons un peu longs sur les chèques de paie. Je comprends très bien le problème que vous y voyez. Le problème, c'est que je ne vois pas de solution concrète à cela. J'aimerais peut-être, en cours de route, vous entendre là-dessus. Comment peut-on simplifier le talon? D'autre part, si je comprends bien, les ordonnances actuelles de la Commission du salaire minimum prévoient une série d'exigences qui sont à peu près celles qu'on retrouve dans la loi.

L'article 54, à lire avec les articles 51 et 52, je l'ai évoqué tout à l'heure, c'est toute cette question du temps supplémentaire des conventions collectives.

L'article 56. Je pense que soulever le problème, c'est fort pertinent sur cette question de la disponibilité — est-ce au travail, est-ce à domicile ou autrement? — pour les fins de la computation du temps supplémentaire, etc. Soulever le problème, c'est pertinent à nos travaux.

L'article 59. Je dois vous dire d'abord, sur les jours fériés et chômés, que le gouvernement entend effectivement conserver ce pouvoir réglementaire pour une raison, essentiellement. Si on doit se diriger vers ce qui est la moyenne canadienne dans ce domaine, il va falloir qu'on en ajoute beaucoup. Je pense qu'en ajouter beaucoup au niveau de la loi immédiatement pourrait représenter une contrainte considérable sur les entreprises. Il faut envisager cela progressivement.

Deuxièmement, vous demandiez — ce n'est pas Me Thibodeau, c'est Me...

M. Bilodeau: Me Bilodeau.

M. Johnson: ... Bilodeau — si c'est le nombre de jours qui est important ou si c'est le jour sur lequel cela tombe. Je pense que cela peut être un peu des deux. D'abord, le nombre de jours, au bout de la ligne, cela m'apparaît pertinent et l'on s'inspire, pour cela, entre autres de la codification des conventions collectives qui est faite pour voir, en gros, ce qui se fait à gauche et à droite. D'ailleurs, le professeur Hébert, de l'Université de Montréal, a rendu une communication qui me paraît extrêmement intéressante et qui confirme l'essentiel des travaux effectués par les fonctionnaires du ministère sur les clauses qu'on retrouve dans l'ensemble des conventions collectives. D'une façon générale, cela colle, sauf sur deux ou trois sujets. Cela colle de façon générale à ce qu'on retrouve dans les moyennes des conventions collectives. (12 h 15)

Le jour lui-même est important. Choisir entre le premier lundi de septembre, qui est le moment où tout le monde peut se dire qu'il peut aller à Plattsburg une longue fin de semaine, et le 1er mai qui est revendiqué par le monde syndical et des éléments pour qui la Fête des travailleurs, par opposition à la Fête du travail, est plus importante, c'est un choix à faire dans une société. Cela a une signification, ne serait-elle que symbolique, mais cela a une "mosus" de signification sociologique. Je pense qu'on pourrait difficilement dire aux gens qu'ils ne peuvent plus avoir la Fête du travail. Le choix entre le lundi de la Fête du travail qui, indépendamment de l'appellation qu'on lui donne, est une longue fin de semaine, quelque part au mois de septembre, qui est l'annonce de la rentrée, cela a une signification concrète dans notre société. Le 1er mai deviendra peut-être également, un jour, important dans ce sens, mais je pense que ce sont des choix qui peuvent être posés dans une société, sans charrier, non plus, sur ces choses-là.

L'article 61, dans le fond, vise à couvrir la perte réelle encourue, et dans ce sens-là, cela répond également aux considérations de l'article 64 sur les régimes d'assurance-salaire. S'il y a des problèmes de formulation, on y reverra, on I'étudiera. Il s'agit de faire en sorte que la perte réelle encourue par le salarié soit comblée; que ce soit par un régime d'assurance-salaire, que ce soit par l'employeur lui-même, que cela tienne compte ou pas des primes, cela dépend de la situation du travailleur. Si le travailleur est un travailleur qui travaille toujours sur un quart de soir et que, par définition, il a une prime de soir, je pense que la perte réelle encourue à cause d'un congé, c'est la perte réelle à cause du fait qu'il n'a pas travaillé le soir ce jour-là, donc avec la prime. Par contre, s'il peut être, à l'occasion, assigné au soir, cela devient une autre chose. Je pense qu'on verra à essayer de raffiner cela.

A l'article 73, vous soulevez encore une fois d'une façon pertinente la question de l'étalement pour la période de référence, pour les fins du congé.

J'aimerais, peut-être un peu plus tard, quand je serai revenu de mon absence très courte, que vous reveniez sur des exemples, dans l'article 78, concrètement, encore une fois, que vous m'expliquiez cela pour que je le comprenne. Je sais que cela pose des difficultés. J'ai rencontré, lors du congrès de l'Ecole des relations industrielles de l'Université de Montréal, un représentant d'une compagnie qui a de nombreux employés, qui est conventionnée depuis bien des années. Il me parlait de l'évaluation en argent, de ce que coûterait une disposition comme celle-là. J'ai trouvé cela assez frappant. J'aimerais que vous me donniez des exemples.

A l'article 80, je suis heureux de voir que vous considérez qu'on doit ajouter le jour du mariage des salariés. Je pense que c'est assez unanime et je trouve cela bien intéressant. Je pense que cela va vouloir dire qu'au Québec, il va y avoir beaucoup de mariages, maintenant, les lundis et vendredis. On n'a pas consulté l'Eglise ni le protonotaire de la Cour supérieure pour voir s'ils étaient capables d'absorber cela le lundi et le vendredi, mais c'est sans doute une excellente chose.

L'article 81. Je vous ferai remarquer que le Code civil, à l'article 1668, n'impose pas en ce moment le type de conditions que vous voudriez y voir et que la nécessité d'avoir, par exemple, dites-vous, mais vraiment comme exemple, trois mois de service minimum continu, le Code civil n'exige même pas cela. Je pense qu'à partir du moment où le préavis de deux semaines présuppose... Le préavis est en fonction du nombre de mois et à partir d'une année, etc.; je pense qu'on n'a pas à être moins sévère que le Code civil.

C'est à peu près ce que j'avais à souligner de façon générale à la suite de vos commentaires. Il y a d'autres éléments. On en a pris note ici. Les représentants de la commission et du ministère sont bien affairés avec leur crayon et leur papier. On a d'ailleurs analysé votre mémoire et je pourrai peut-être vous apporter quelques réponses un peu plus tard sur certaines choses. Je vous remercie, messieurs. Si vous me le permettez, je vais m'absenter pendant dix minutes.

Le Président (M. Marcoux): Vos commentaires, maintenant.

M. Forget: Tout d'abord...

M. Heenan: Nous retenons nos commentaires jusqu'au retour du ministre.

Le Président (M. Marcoux): D'accord. M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Merci, M. le Président. Premièrement, je voudrais féliciter les auteurs d'un mémoire qui est très détaillé et qui porte sur un très grand nombre d'articles d'une manière spécifique. Ce sera très utile au moment où la commission se penchera sur l'étude article par article des dispositions du projet de loi 126. Mais si on veut s'en tenir à certains points plus généraux, vous avez mentionné, au sujet des articles 91 et 92, un problème d'intérêt général au sujet duquel le ministre a d'ailleurs fait quelques commentaires, laissant entendre qu'il n'était pas fermé à la notion de restreindre le caractère d'ordre public à seulement certaines dispositions de la Loi sur les normes du travail. Dans le même esprit, je me demande si vous avez réfléchi aux dispositions qui, selon vous, devraient rester d'ordre public, donc, de façon un peu individuelle, aux dispositions qui pourraient être modifiées par des ententes.

Relativement au deuxième aspect, vous mentionnez suffisamment de points précis au sujet desquels, par des ententes ou des conventions collectives, il serait possible de déroger. Tout en prévoyant des dispositions équivalentes, il serait possible de déroger aux dispositions de la Loi sur les normes du travail. Mais cela laisse quoi, comme dispositions qui, à votre avis, devraient être d'ordre public?

M. Bilodeau: M. le député de Saint-Laurent, nous sommes d'avis que les éléments suivants, à savoir le salaire minimum, les vacances, les jours fériés et la question des congés de maternité, qui est déjà effectivement l'objet d'une ordonnance, sont des choses qui pourraient être d'ordre public. Quant au reste, c'est surtout sur les autres matières que les commentaires de Me Heenan ont porté, à savoir ce qu'on appelle "autres normes" actuellement et qui peuvent comprendre des choses comme des primes, des uniformes, des questions d'hygiène. Ce sont des questions qui sont applicables d'une façon différente, parfois fort dissemblables, d'une entreprise à une autre. Ce ne sont pas des choses de nature telle qu'elles puissent, à notre avis, faire l'objet d'une loi d'ordre public parce que cela imposerait des changements bien souvent inutiles dans certaines entreprises où l'équivalent peut exister ou quelque chose qui colle mieux à cette réalité.

Il nous semble que, dans le cadre d'une loi qui porte sur les normes, cela devrait être des normes générales ou universelles, applicables à l'ensemble de la population. Les quatre éléments que j'ai mentionnés nous semblent être ceux qui devraient être d'ordre public, à l'exclusion des autres.

M. Heenan: Si je peux ajouter quelque chose d'autre à ce sujet, évidemment, le taux de salaire minimum est d'ordre public. Il n'y a pas de problème à ce sujet. Pour les vacances, la quantité des vacances, il n'y a pas de problème. Mais il y a une modalité dans toutes et chacune de ces sections. Si tout est d'ordre public, cela veut dire que, dans les négociations, il y a des dispositions qui viennent à l'encontre de dispositions continuelles dans des conventions collectives. Si toutes les modalités sont également d'ordre public, on se trouve à ne pas pouvoir négocier. Evidemment, le syndicat, parfois, dans des endroits où il a de meilleurs bénéfices, veut d'autres modalités.

M. Forget: Dans les circonstances où il serait possible de prévoir des modalités différentes ou des normes différentes, mais équivalentes, est-ce que vous prévoyez que cela serait possible seulement à la faveur de négociations collectives, c'est-à-dire essentiellement de faire les exceptions seulement lorsqu'il y a un syndicat qui peut représenter ses membres et à qui on peut normalement, j'imagine, faire confiance pour aller chercher au moins l'équivalent, ou si cela s'étendrait à d'autres circonstances, par exemple, à des ententes individuelles?

M. Heenan: Mais cela ne cause pas de problème à l'heure actuelle, M. le député. La façon dont cela se passe à l'heure actuelle, c'est la

suivante: Une compagnie qui n'a pas de syndicat est obligée de prouver que ses conditions, données généralement à tout le monde, sont meilleures que celles qui existent ici. Il faut qu'elle prouve que ce qu'elle fait est mieux que ce qui se trouve dans la loi. En d'autres mots, si elle a une politique — il y a bien des compagnies assez grandes qui ne sont pas syndiquées et qui ont quand même une obligation d'offrir tous les bénéfices que sont la pension, etc.. Maintenant, il faut que ce qu'elle accorde, par exception, mais de façon régulière à tous les employés, soit mieux que ce qui se trouve dans la loi. On a eu ce débat concernant les vacances à plusieurs reprises pour prouver que le régime de vacances, de congés annuels, pour une compagnie, est mieux que ce qui se trouve dans l'ordonnance no 3 à l'heure actuelle. Cela ne cause pas de complications. Donc, je prévois cela, pas seulement pour celles qui sont syndiquées, mais également pour des compagies qui ont des politiques parfois plus généreuses mais qui, sous un aspect ou deux, ne sont pas exactement les mêmes que les modalités prévues dans l'ordonnance no 3, par exemple.

M. Bilodeau: M. le député, si vous me le permettez, j'aimerais également compléter la réponse que je vous donnais tout à l'heure concernant la deuxième partie de votre question. C'est bien sûr que les commentaires relativement à ce que nous considérons comme devant faire partie de l'ordre public sont faits sous la réserve des remarques qu'on a faites quant aux congés fériés et aux vacances dans l'optique qu'a le législateur de ce qu'est l'ordre public. Par exemple, quand on parlait des congés fériés, il était question du nombre de congés. Il est bien évident que si le législateur désirait qu'il y ait, supposons, six congés fériés à plus ou moins long terme dans le temps, il nous semble, en tout cas, préférable qu'il s'agisse plutôt du nombre de ces congés, bien qu'il puisse arriver que la plupart d'entre eux soient, de toute façon, des congés respectés par tout le monde, comme Noël et le Jour de l'An, mais, quant au reste, qu'il y ait une possibilité de fluctuer. C'est dans ce sens-là que l'ancienne loi nous permettait, même si c'était d'ordre public également, une certaine fluctuation sur des choses qui étaient d'ordre public mais nous permettait aussi de les adapter à l'entreprise.

Quant aux vacances, c'est la même chose. La durée des vacances, à savoir trois semaines après dix ans, cela ne serait pas contestable si c'était une disposition et ce serait d'ordre public. Par contre, la possibilité de monnayer la troisième pour rencontrer les voeux non seulement des compagnies, mais plus souvent des employés, ce devrait aussi être quelque chose de négociable ou qui pourrait être convenu avec les salariés. C'est sous réserve de ces remarques.

Pour reprendre la deuxième partie de votre question, il y a tous ces éléments qui ne devraient pas être d'ordre public et qui pourraient être modifiés par convention collective. Quant à cette partie des normes dites publiques qui pourrait nous laisser un minimum de fluctuations à l'instar de la loi précédente, on pourrait l'adapter à notre entreprise quant à sa forme, mais non quant au fond.

M. Forget: Vous avez dit également, dans le dernier élément de votre réponse: qui pourrait être modifié par convention collective. Si je comprends bien, cela pourrait aussi, dans votre esprit, être modifié par des ententes individuelles ou par la décision de l'employeur.

M. Bilodeau: Quand je dis par convention collective, je pense, évidemment, aux entreprises qui sont syndiquées. Dans d'autres cas, cela pourrait faire l'objet d'ententes entre employés et employeurs qui sont des parties contractantes au même titre que les autres, sauf qu'ils ont des contrats personnels, mais cela pourrait être fait. Il y a des exemples où on peut penser à certains individus dans certains types d'entreprises particulières qui s'entendent avec leurs employeurs pour organiser ou agencer leur période de vacances à tel moment. Il y a des employeurs qui accordent des conditions de travail qui ne sont pas similaires à celles qui existent dans les conventions collectives, mais qui sont supérieures à la loi, bien qu'ils ne soient pas syndiqués. Ils ont cette marge de manoeuvre de choisir ce qui leur convient le mieux et c'est une méthode qui est appréciée de tout le monde.

M. Forget: Selon vous, l'obligation de faire la preuve devant la Commission des normes du travail de cette équivalence ne pose pas de problème particulier. Il s'agit toujours d'une preuve d'équivalence monétaire, j'imagine.

M. Heenan: L'équivalence monétaire. Je pense que le terme actuel implique des équivalences ou des bénéfices plus avantageux. Cela n'a pas causé tellement de problèmes, surtout si on peut démontrer que, par exemple, pour les vacances annuelles, l'entente est mieux que ce qui était proposé.

M. Forget: II y a un autre point, M. le Président, sur lequel vous n'avez pas fait de représentations et je dois dire que cela m'a causé une certaine surprise. Il y a dans l'article 86 qui permet au gouvernement de faire des règlements des dispositions assez exceptionnelles où on dit que non seulement le gouvernement a le pouvoir de faire des règlements, mais qu'il a également le pouvoir d'exclure par ces règlements l'application, en tout ou en partie, de la loi à certains organismes sans donner aucune autre spécification à savoir s'il s'agit d'organismes publics ou privés et sans même mentionner de critères. Dans le fond, il a le pouvoir d'abroger la loi par un arrêté en conseil vis-à-vis de tel ou tel organisme non spécifié. Il a également la possibilité de décréter des règlements qui introduiraient des normes de travail minimales — je ne sais pas ce que veut dire minimales dans ce cas-là — des normes de travail

différentes pour des catégories différentes de tavail leurs.

Je me demande si vous vous êtes penchés un peu sur ce pouvoir réglementaire et si un tel pouvoir très large détenu par le gouvernement d'abroger la loi en quelque sorte, de décréter que ce qui est minimum à un endroit ne l'est pas à tel endroit, est approprié et résout, quant à vous, des problèmes pratiques importants. (12 h 30)

M. Heenan: Je pense que vous avez soulevé un excellent point. Dans les commentaires généraux, on s'attaquait à ce pouvoir de réglementation, peut-être pas spécifiquement vis-à-vis de l'article 86, mais certainement de l'article 87. On a passé des commentaires, mais les commentaires généraux étaient que, pour nous, nous aimerions que, si c'est une loi des normes du travail, que les normes du travail se trouvent dans la loi et pas dans ses pouvoirs de réglementation.

Une des choses qui nous déplaisent le plus dans la loi, ce sont les articles 36 et 37. Même si on accepte, et on n'aime pas l'idée que ce soit par règlement, qu'au moins on ait deux mois de préavis pour faire des représentations, pour apporter tes aspects pratiques. Des fois, c'est l'aspect pratique de l'application qui nous touche. On a fait des commentaires généraux contre cela. Evidemment, toute possibilité de réglementer spécifiquement cause plus de problèmes dans ce sens. C'est vrai que, malheureusement, on n'a pas eu le temps, c'était le temps qui nous manquait pour faire une chose longue, mais certainement, surtout l'article 87, on n'a pas discuté spécifiquement sur cela. Mais tous ces pouvoirs étaient autrefois de la commission, et à la commission siégeait l'employeur comme les syndicats pour discuter de ces modalités, de ces pouvoirs face au gouvernement. C'est pour cela qu'on suggère que cela se fasse par loi, qu'il y ait une modalité pour qu'on puisse avoir notre mot à dire.

M. Forget: Pour poursuivre dans la même veine, vous admettez tout de même que s'il y avait dans la loi plutôt que dans des règlements la détermination du salaire minimum et du taux de salaire minimum et des autres conditions de travail, il pourrait malgré tout y avoir un article 86 qui dirait que même si tout ce qui est marqué dans la loi est vrai, le gouvernement, par règlement, a le pouvoir d'exempter qui il veut, par catégorie d'entreprise ou non, par catégorie de travailleurs ou non. Je me demandais si vous croyiez que ce pouvoir est un pouvoir approprié dans une loi qui prétend établir des conditions minimales pour tout le monde, qui, enfin c'est mon opinion, devraient être les mêmes effectivement pour tout le monde, de manière à ne pas causer, soit entre les travailleurs ou entre les entreprises, de la discrimination relativement à l'application de règlements soi-disant minimums et universels.

M. Bilodeau: C'est bien sûr M. le ministre, qu'effectivement nous aurions dû...

M. Chevrette: M. le député.

M. Bilodeau: M. le député, je m'excuse.

M. Forget: Pas de projection.

M. Chevrette: Ne soyez pas jaloux.

M. Bilodeau: Je reprends. C'est un lapsus, M. le député de Joliette. M. le député de Saint-Laurent, c'est très vrai que nous aurions dû, il n'y a pas de doute, utiliser l'article 86 comme un argument additionnel pour appuyer nos remarques concernant les fameux articles 36 et 37 et aussi pour y apporter des commentaires, si ce sont des choses encore moins importantes, sans diminuer, qui ont fait déjà l'objet de commentaires. Il va de soi que ce pouvoir nous semblerait exorbitant évidemment puisqu'il s'agit d'une chose aussi importante que d'exclure un groupe de personnes de l'application d'une loi et, en plus, de fixer les normes de travail. C'est bien évident, M. le député, que nous sommes totalement de votre avis sur cette question, d'autant plus qu'évidemment si c'était laissé comme tel, ceci pourrait se faire d'une façon unilatérale, c'est-à-dire en ayant l'option ou le choix même — cela va aussi loin que cela, 37 — de publier ou de ne pas publier la norme en question ou les normes en question. Je ne peux pas trouver la justification en dessous de cela.

Mais, lorsqu'il s'agit, c'est bien évident, de viser un groupe de personnes au Québec qui vont être exclues de l'application d'une loi générale pour se voir imposer d'autres normes, c'est bien évident que notre opinion, c'est aussi important pour nous d'être consultés aujourd'hui sur l'ensemble de la loi, aussi important que nous considérerions d'être entendus sur la détermination des normes applicables à un autre groupe de travailleurs. A cet effet, c'est un oubli malheureux, mais nous aurions dû utiliser cet argument. A tout événement, nous sommes d'avis, comme vous l'avez mentionné, qu'il s'agirait d'un pouvoir exorbitant et que le législateur devrait en tenir compte. Nous espérons que vous en ferez les remarques en temps opportun.

M. Heenan: J'aimerais apporter deux autres choses. Le problème avec une telle disposition, c'est que des fois, étant donné que ce pouvoir est là, on ne pense pas assez aux définitions dans la loi. Par exemple, dans la loi, à l'heure actuelle, la définition du mot "cadres" n'est pas suffisante. Par cela, on ne sait pas qui est couvert. Est-ce que cela va être tout? En anglais c'est traduit "executive officers". Est-ce que tous les autres vont être assujettis ou pas? Il y a bien des dispositions qui ne s'appliquent pas. Donc, ce pouvoir de réglementation que vous avez soulevé nous cause des problèmes car les termes ne sont pas définis dans une loi, je suppose sachant que cela peut toujours s'arranger par réglementation par la suite.

Mon deuxième commentaire, c'est que moi j'aime toujours les lois où le gouvernement, où les fonctionnaires sont eux-mêmes assujettis comme les entreprises. A ce moment, les problèmes pratiques sont pensés beaucoup plus à fond que quand il y a une exception pour le gouvernement et que c'est seulement les autres qui sont affectés. En principe, c'est mieux quand les fonctionnaires sont assujettis.

M. Forget: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: M. le Président, je suis entièrement de l'avis qui est contenu dans votre mémoire quant à l'application des articles 36 et 37. Je vois cela d'un mauvais oeil qu'on puisse, en vertu de l'article 32, établir un règlement de la commission sans publication préalable, surtout qu'on est, en vertu de l'article 37, exempté des sanctions qui rendraient invalide ce règlement. Je pense que le gouvernement devrait être très attentif à ces deux articles qui sont répétés dans plusieurs autres mémoires. On attire l'attention du gouvernement pour dire dans plusieurs autres mémoires que les articles 36 et 37 ne sont pas "up to date", ne sont pas selon les us et coutumes qu'on puisse aujourd'hui endurer dans une loi telle que celle-là. On pourrait approuver un règlement sans publication préalable, s'il y a urgence de la situation ou intérêt public. Ce sont les deux normes qui sont appelées, d'après l'article 36, à être invoquées pour que ce soit valide en vertu de l'article 37.

Sur cela, je vous donne entièrement raison et j'attire l'attention du gouvernement sur cette faille. Cela veut peut-être couvrir certaines choses d'intérêt public qui arrivent dans l'application de la loi. Mais, je ne vois pas pourquoi on dispense dans une loi de la publication préalable, s'il y a urgence et intérêt public; on impose une approbation immédiate sans que le règlement soit invalide.

Je dis au gouvernement que cela devrait être regardé. Un autre point qui est bien important et je n'ai entendu aucun commentaire de votre association, c'est la Loi sur la faillite qu'on impose en vertu de l'article 123.

Il y a là, dans la Loi sur la faillite, trois causes qui sont, je pense, bien définies: lorsqu'une ordonnance de séquestre est rendue contre lui, contre l'employeur; deuxièmement, lorsqu'il y a une cession au sens de ladite loi, quand il s'agit d'une corporation, et, troisièmement, lorsqu'une ordonnance de liquidation est rendue contre elle en vertu de la loi concernant la liquidation, en vertu de la loi fédérale.

Je me réfère à l'article 29f qui dit: "déterminer la nature des créances qui donnent droit aux prestations qu'elle peut verser à un salarié à la suite de la faillite d'un employeur, les conditions d'admissibilité de ces prestations, leur montant et les modalités de leur versement au salarié". J'aimerais bien vous entendre sur ce point-là particulier.

M. Bilodeau: Effectivement, M. Bellemare, nous avons omis de faire des commentaires sur cette question. Il y a évidemment des éléments qui nous paraissent insuffisants, c'est bien clair. D'abord, comment se situera la commission elle-même eu égard à ces choses-là?

M. Bellemare: Première réponse: Comment va se situer la commission vis-à-vis de la faillite?

M. Bilodeau: C'est une question. M. Bellemare: C'est cela?

M. Bilodeau: Oui, je pose la question. Je ne le retrouve pas dans la loi. Actuellement, cela mérite...

M. Bellemare: Je voudrais que cela soit bien inscrit au journal des Débats parce que c'est important, votre première réponse. Et votre deuxième?

M Bilodeau: Maintenant...

M. Bisaillon: C'est ce que vous vouliez lui entendre dire.

M. Bilodeau: D'autre part, il y a d'autres questions qui pourraient être soulevées.

M. Bellemare: Je ne voulais pas le lui dire, mais la première réponse, il me l'a enlevée de la bouche. C'est mieux que ce soit lui qui le dise; si c'est moi qui le dis, je vais avoir l'odieux de l'affaire. Si c'est lui...

M. Bilodeau: Je ne répéterai peut-être pas ce que souhaite M. le député de Johnson, mais cela devient une question, au bout de la ligne, à savoir: Qui va absorber la note, qui va payer, de qui la commission va-t-elle retirer son argent, quel genre de créancier, en d'autres termes, va-t-on trouver et à l'égard de qui? C'est une question à laquelle on ne répond pas dans la loi.

M. Bellemare: D'après vous, est-ce la commission ou le gouvernement qui va payer? Dans la loi sur les normes du travail, on dit: "La commission peut, à même ses fonds, et de la manière prévue par un règlement adopté en vertu du paragraphe f)..."

M. Bilodeau: Ce sera l'employeur de toute façon. Actuellement, les fonds...

M. Bellemare: A l'article 29f), on dit: "déterminer la nature des créances qui donnent droit aux prestations qu'elle peut verser à un salarié à la suite de la faillite d'un employeur, les conditions d'admissibilité à ces prestations, leur montant et les modalités de leur versement au salarié;..

M. Bilodeau: Actuellement, M. le député, on ne peut faire autrement que de voir cela pour nous. C'est nous, finalement, qui allons payer jusqu'à un certain point parce que les fonds de la commission, c'est nous qui les payons d'une façon exclusive dans le moment. Il y a un prélèvement, et c'est un problème additionnel pour nous.

M. Bellemare: Oui, je comprends, le prélèvement de 1%; vous n'en avez pas parlé non plus de ce 1%...

M. Bilodeau: On pourrait...

M. Bellemare: ... qui est peut-être prévu dans la loi comme objectif suprême.

M. Bilodeau: Effectivement, c'est un objectif suprême parce qu'il dépasse d'au moins vingt fois les besoins actuels...

M. Bellemare: Oui.

M. Bilodeau:... dans les circonstances actuelles de l'exercice des pouvoirs de la commission qui sont diminués en vertu de la loi 126 parce que le gouvernement en absorbe la majeure partie. Il y a eu une adéquation évidente entre ça, à savoir la façon de se financer, et, d'un autre côté, enlever des pouvoirs. Cela nous paraît évident aussi. Ce sont des questions qu'on aurait pu soulever.

M. Bellemare: Je vais en revenir à la Loi sur la faillite. Répétez-moi donc vos deux objections.

M. Bilodeau: Les questions essentielles que nous nous posons sont celles-ci. Finalement, il y en a une: Comment la commission se situe-t-elle eu égard à cette affaire-là, à savoir de quelle façon paie-t-elle, comment fait-elle pour se rembourser, quelle sorte de créancier est-ce et, au bout de la ligne, qui se trouve à payer, quels sont ces fonds? Ce sont les questions. Et, là, évidemment, ce n'est pas la loi qui nous répond!

M. Bellemare: Sur le chapitre VI, la faillite, il est bien entendu que "la commission peut — non pas doit, vous avez dû remarquer cela — à même ses fonds, et de la manière prévue par un règlement... Je viens ce vous le lire, d'accord. "Ou d'un règlement". Cela ne vous a pas frappés! J'aimerais bien vous entendre sur cela.

M. Heenan: M. le député, je pense que la question que vous posez est excellente. Cela nous a frappés.

M. Bellemare: J'aimerais que vous nous le disiez! A force de vous "tortiller", je vais finir par le savoir.

M. Heenan: Nous pourrions certainement en parler. Mais notre association essaie plutôt de se pencher sur ceux qui sont toujours en vie et non pas sur ceux qui sont en faillite. Effectivement, cependant, le point que vous faites ressortir est très important. La question d'où vient cet argent, ce n'est pas prévu, par exemple, que la commission va devenir...

M. Bellemare: Ne me faites pas de longs discours; j'ai compris cela en vous voyant, parce que je vous connais un peu. Je vous ai eu comme conciliateur dans certains dossiers et on ne s'est pas toujours entendu, mais cela passe.

M. Heenan: Nous nous sommes entendus.

M. Bellemare: Non, non. Mais quand je vois: "... ou d'un règlement", que je vois les articles 36 et 37, je me demande si ce règlement va être urgent et d'intérêt public, sans publication, et s'il ne sera pas invalide. Est-ce qu'il n'y a pas une certaine concordance entre...

M. Bilodeau: Eu égard aux deux derniers problèmes qui ont été soulevés par vous et par M. le député de Saint-Laurent, c'est très évident que nous nous sommes peut-être trop attachés à faire des commentaires généraux qui sont nécessairement applicables à ces cas particuliers. Ici, évidemment, nous aurions peut-être dû en faire sur chacun des éléments particuliers. C'est bien sûr que les caractères généraux continuent de s'appliquer. Quand on parlait de règlements tout à l'heure, ce sont les règlements qui sont soumis aux mêmes dispositions qu'on critiquait tout à l'heure. C'est bien évident que cela s'applique d'emblée, M. le député.

M. Bellemare: J'avais pensé que ce qui vous ferait le plus mal serait d'en parler. Là, je n'entends rien! Je suis obligé de me servir de mon esprit "légal", entre guillemets, pour vous demander ce que vous ressentez à la promulgation des articles 123 et 124.

M. Heenan: Mais, certainement, M. le député. La question de la réglementation, toute la réglementation, et le point que vous avez soulevé sur les articles 36 et 37 sont tout à fait à point. Cela représente un point de vue. (12 h 45)

M. Bellemare: J'admets cela...

M. Heenan: D'accord.

M. Bellemare: ... et j'admets que plusieurs autres associations ont fait les mêmes revendications.

M. Heenan: D'accord.

M. Bellemare: Cela, c'est pour dire au ministre: Prenez garde!

M. Heenan: D'accord.

M. Bellemare: II y a plusieurs mémoires qu'on entend et ils sont tous contre l'application des articles 36 et 37. Quand je vois le règlement qui est contenu à l'article 123, je me demande, mon cher monsieur, si, à un moment donné, on n'invoquera pas l'urgence et l'intérêt public pour le rendre valide. Je me demande cela.

M. Heenan: II n'y a pas de doute que cela peut se faire.

M. Bellemare: Oui, et, à ce moment-là, vous n'aurez plus rien à dire. Ce matin, c'est moi qui vous force le bras pour que vous nous en parliez!

M. Heenan: Je vais vous en parler. L'article 123 prévoit effectivement que la commission peut dédommager et peut passer le règlement.

M. Bellemare: Peut ou, par règlement...

M. Heenan: Ou, par règlement, décider comment dédommager. Notre intérêt à nous, c'est: Qui va payer cela? Evidemment, la réponse est: L'imposition jusqu'à 1%. A ce moment-là, le 1% peut être atteint. Donc, il y a une carence évidente dans la loi qui ne prévoit pas que la commission devra devenir une créancière privilégiée dans la faillite, etc. Certainement. Notre point de vue sur le règlement est que cela ne devrait pas passer par les articles 36 et 37.

M. Bellemare: Vous avez passé deux heures à nous parler de toutes sortes d'arguments qui étaient futiles pour moi, parce que la loi générale va s'appliquer. C'est certain. Mais là, par exemple, cela vous fait mal et vous n'en dites pas un maudit mot.

M. Heenan: Mais on parle du coût pour l'Association des manufacturiers...

M. Bellemare: C'est là, en somme, le nouveau dans la loi, la faillite que vous allez être obligés d'assumer.

M. Heenan: Mais l'association...

M. Bellemare: L'avis de tous les salariés, les anciens salariés... Et on n'entend pas un maudit mot de vous ce matin. Vous avez l'air de vouloir encenser le gouvernement: C'est une bonne réforme, d'accord. On a entendu cela dans tous les autres mémoires.

M. Johnson: Vous n'aimez pas cela, n'est-ce pas?

M. Bellemare: Comment! C'est pour cela Minute! Qu'ils en parlent, par exemple! C'est surtout... Bonjour!

M. Johnson: Bonjour!

M. Bellemare: Je vous salue. Je ne savais pas que vous étiez revenu.

M. Heenan: M. le ministre, je pense que... M. Bellemare: Non, pas le ministre, le député.

M. Heenan: M. le ministre, bienvenue. M. le député, je vais répondre à votre question. Cela fait trois fois et je ne le répéterai pas. Nos commentaires les plus vigoureux peut-être sont contre les articles 36 et 37 qui sont la base de cela.

M. Bellemare: A la base. M. Heenan: D'accord.

M. Bellemare: Tous les autres mémoires l'ont dit, mais la faillite...

M. Heenan: C'est la base de cela, mais la faillite...

M. Bellemare:... qui est un droit nouveau dans le droit du travail qui n'existait pas et qui existe aujourd'hui...

M. Heenan: D'accord.

M. Bellemare: ... c'est une très bonne chose, magnifique, mais quand on regarde d'un peu plus près la bonne chose, on se dit: La commission peut par règlement. Ah! Ah! Cela va être quoi, leur règlement? Et on n'en a pas dit un mot, pas un mot!

M. Heenan: M. le député...

M. Bellemare: Ils se sont laissés:..

M. Heenan: ... l'Association des manufacturiers canadiens représente quand même les employés qui sont vivants, mais pas ceux qui sont en faillite. C'est peut-être pour cela qu'on a commenté les effets de cela qui...

M. Bellemare: Ah! Cela est bonnet blanc, blanc bonnet. Ah!

M. Bilodeau: D'autre part...

M. Bellemare: Vous les représentez quand cela va bien, quand cela paie, mais vous ne les représentez pas quand cela ne paie plus.

M. Bilodeau: M. le député de Johnson, c'est sûrement notre esprit de synthèse qui, probablement, nous a poussés un petit peu loin. Les commentaires que nous avons faits, comme vous le disiez, pendant deux heures à la commission, en pratique et juridiquement parlant, couvraient nécessairement ces problèmes. Bien sûr, on ne les a pas abordés un par un. On a peut-être raison d'en avoir abordé certains. On a peut-être tort d'en avoir négligé certains autres, eu égard à leur aspect spécifique. Mais c'est bien clair que je ne pense pas que cela soit futile d'avoir passé le temps, la majorité du temps à passer des commentaires...

M. Bellemare: On a compris.

M. Bilodeau: ... applicables à des articles qui visent nécessairement les parties les plus importantes de la loi. Attribuons...

M. Bellemare: Seulement, M. le... maître...

M. Bilodeau: ... cela plutôt à notre esprit de synthèse.

M. Bellemare: Me Bilodeau, supposons, par exemple, que, dans le règlement qui va être... Allons au pire: En vertu des articles 36 et 37, on les met en application sans publication parce que cela est d'intérêt public. C'est clair. On porte le un dixième pour cent à neuf dixièmes pour cent pour payer la faillite. Qu'allez-vous répondre? C'est là que cela doit vous faire mal.

M. Heenan: Mais on a commenté cela, M. le député.

M. Bellemare: Vous avez commenté cela.

M. Heenan: Mais cela n'est pas en vertu de l'article 123. Notre premier commentaire à ce sujet, c'était ce pouvoir d'imposition, d'impôt. Cela devient effectivement un impôt. On a commenté cela longuement. Le coût de la commission et le droit de la commission, on s'oppose entièrement à cela.

M. Bellemare: Je vous ai entendu, mais bien faiblement.

M. Heenan: Je m'excuse. Je suis même allé, M. le député...

M. Bellemare: Non, je...

M. Heenan: Je suis même allé jusqu'à demander quelle était l'utilité de la commission et à dire que, peut-être, cela devrait être le gouvernement qui...

M. Bellemare: Si on disait plutôt: "la commission doit, à même ses fonds, de la même manière prévue par un règlement adopté en vertu de l'article 29f, dédommager un salarié, de façon partielle ou totale, de la perte du salaire ou d'un autre avantage pécuniaire résultant de la présente loi ou d'un règlement — voilà — et qu'il a encouru comme conséquence de la faillite d'un employeur". Le mot "peut" ne devrait-il pas être remplacé par le mot "doit" en ce qui a trait à la commission?

M. Heenan: A ce moment-là, le coût pour nous, pour l'association, va certainement être plus élevé, si la commission "doit" au lieu de "peut".

M. Bellemare: Oui, mais admettez donc, M. Heenan...

M. Heenan: Le problème pour nous, c'est une question de coût.

M. Bellemare: ... pour une fois, que vous n'avez pas parlé. C'est clair?

M. Heenan: On n'a pas parlé de cela. C'est vrai.

M. Bellemare: C'est cela. C'est important pour nous autres.

M. Heenan: On a parlé de... D'accord. M. Bisaillon: M. le Président...

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bellemare: Est-ce que j'ai fini? Une Voix: Oui.

M. Bellemare: Est-ce que j'ai terminé mon temps? L'horloge n'est pas correcte.

M. Johnson: Vous l'avez bien assassiné.

M. Bellemare: Non, je le connais, je sais ce qu'il vaut.

M. Johnson: Je parlais de votre temps.

M. Bellemare: Je pensais que vous parliez de M. Heenan.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, quelques commentaires rapides et une question à M. Heenan. J'ai noté, tout au long de votre représentation, un certain nombre de choses sur lesquelles je trouvais que l'argument présenté pouvait être valable. Ce qui m'a étonné, c'est que sur plusieurs articles, vous êtes revenu en disant que tel que la loi était rédigée actuellement, vous avez expliqué la non-application à cause des négociations ou des conventions collectives, en tenant pour acquis qu'il pourrait y avoir dans la loi une clause indiquant que des conventions collectives ou des négociations peuvent aller au-delà ou aménager le minimum requis par la loi. Votre argumentation ne s'applique plus pour le reste. Ce projet de loi, je le percevais comme s'appliquant, au départ, à ceux qui n'étaient pas représentés par des organisations syndicales. Vous avez justifié beaucoup de vos objections par l'existence des négociations, donc des associations syndicales. Il me semble qu'il y a une certaine contradiction là-dedans.

Par ailleurs, s'il y avait dans la loi cet article qui permettait des aménagements du contenu de la loi au moment de la négociation, ne voyez-vous pas aussi le danger qu'on assiste à la naissance d'une foule de syndicats de boutique qui se créeraient peut-être seulement pour essayer de contrer la loi? Selon vous, est-ce que cela ne pourrait pas être un danger? Vous pourrez me répondre globalement.

Ma dernière intervention n'est pas une question, c'est plutôt un commentaire. J'ai été surpris de voir qu'il n'y avait rien dans votre mémoire qui visait à recommander au gouvernement que le temps supplémentaire soit facultatif. Je m'attendais à vous voir revenir, après la grève de United Aircraft pour dire: J'ai pensé à ce problème,

maintenant je suis prêt à recommander que le temps supplémentaire soit facultatif.

M. Bellemare: II pourrait ajouter les fonctionnaires de l'Etat, aussi.

M. Heenan: Pour répondre à cette dernière question, vous vous souviendrez sans doute qu'au cours de cette fameuse grève, le temps supplémentaire était facultatif. Cela a été donné bien avant cela, je ne pense pas que ce soit là le problème. Pour revenir à vos deux premières questions, quand vous imposez une loi ou des normes, cela a deux effets. Evidemment, cela couvre les personnes qui ne sont pas syndiquées, c'est le but. Par contre, cela a un effet énorme sur les conventions collectives. Pourquoi favorise-t-on les conventions collectives? Pour permettre à des personnes de faire des ententes particulières, négocier chez elles, les employés avec leurs employeurs, en connaissance de tous les aspects. Le problème avec une loi de normes, c'est qu'elle affecte la convention de deux façons, surtout si les normes sont élevées.

D'abord, c'est un tremplin pour les demandes et, donc, cela a un effet, pas que le minimum ne soit pas déjà en application dans la grande majorité des compagnies qui sont syndiquées, mais cela donne une autre poussée à la négociation. On renforce les syndicats par le Code du travail pour qu'ils puissent négocier, mais on leur donne un tremplin plus élevé et cela a un effet.

M. Bisaillon: Oui, mais vous êtes d'accord qu'actuellement, dans l'ensemble des conventions collectives, ces normes minimales sont déjà dépassées par l'ensemble des conventions collectives.

M. Heenan: Pas dans toutes... M. Bisaillon: Dans l'ensemble.

M. Heenan: ... et, évidemment, je ne connais pas les règlements. Cela dépend énormément de ce qui se trouve dans les règlements. Il y a l'autre aspect. C'est qu'on peut très bien écrire des conditions qui sont en général, moins que ce qu'on trouve dans des conventins collectives, mais qui viennent à l'encontre dans un ou deux détails. Le problème, c'est que ce n'est pas un problème qu'on peut régler tout simplement par l'article 25 de l'ancienne loi. Il y a bien des cas où les deux s'ajoutent l'un à l'autre et cela a un impact énorme sur la convention collective et sur les coûts.

M. Bisaillon: Je pourrais vous donner deux exemples, seulement, de cas où cela pourrait s'ajouter à la convention collective.

M. Heenan: II y en a en vacances, en congés statutaires, mais je vous décris mon expérience. Justement, Me Bilodeau a donné l'exemple d'un congé tombant un dimanche. Par le décret, c'était reporté au lundi et par la convention, au vendredi; le syndicat réclamait les deux. Ils avaient droit aux deux. C'était tout simplement la rédaction de l'un ou de l'autre. Le syndicat avait choisi un jour et la loi en prévoyait un autre. Cela s'ajoute. Chaque fois qu'il y a une carence entre la loi et les dispositions de la convention collective, c'est un ajout qui se fait. Par exemple, c'est là le problème des heures supplémentaires et des coûts supplémentaires. Chaque fois que vous prévoyez quelque chose ici, par exemple, que la pause-café est présumée être temps de travail, quelle demande le syndicat fera-t-il? Cela veut dire que nonobstant notre convention collective, ces pauses sont maintenant payées. Si on a, par exemple, une demi-heure non payée dans la convention collective pour le repas, avec la formulation qui se trouve dans la loi, on risque que le syndicat nous dise: Maintenant, en vertu de la convention collective, ce n'est pas payé, mais en vertu de la loi, il est payé. Il faut que ce soit payé, on est aux prises avec les deux. A ce moment...

M. Bisaillon: II y a les conditions minimales. Vous êtes pris dans l'exemple que vous me donnez à appliquer à une convention collective une condition minimale qui n'était pas prévue dans la convention collective. Mais c'est marginal.

M. Heenan: Exactement. M. Bellemare: C'est 23 et 24.

M. Bisaillon: Je pensais que vous m'auriez parlé des effets de cet article, sur l'ensemble de ceux qui ne sont pas syndiqués, qui n'ont pas de pause-café.

M. Heenan: Mais le problème, c'est qu'encore, même s'ils ne sont pas syndiqués, il y a pour toutes les compagnies des programmes de base, car les bénéfices sont donnés dans une forme de convention collective quand ils sont syndiqués, mais ils existent quand même quand ils ne sont pas syndiqués.

D'ailleurs, sur l'ordonnance no 3, par exemple, les modalités de cela, il y a bien des compagnies assez grandes qui ont des bénéfices qui dépassent énormément l'ordonnance no 3, qui étaient affectées par l'ordonnance no 3. Je vais vous donner un exemple. Des compagnies prévoyaient que, dès l'engagement de quelqu'un, dans la même première année, on donnait deux semaines de vacances. C'était mieux que l'ordonnance qui prévoyait que, pour y avoir droit, il fallait passer une période d'une année et entrer dans l'autre année de calendrier. Il y a bien des compagnies qui étaient beaucoup plus généreuses que cela et qui donnaient deux semaines. Si vous étiez engagés le 1er mai, on vous donnait deux semaines de vacances durant l'été. Maintenant, quel était l'effet de l'ordonnance? L'employé le prenait et, à la fin de son emploi, il réclamait toujours les deux semaines. L'attitude de la Commission du salaire minimum, c'est que si vous avez donné cela, vous l'avez donné gratuitement, mais vous

êtes obligés aussi de donner ce que la loi prévoit. C'était la sorte de problèmes qu'on voyait beaucoup. Effectivement, ce ne sont pas toutes les compagnies qui ont un plan de vacances identique et les détails que vous mettez dans l'ordonnance no 3 ont causé beaucoup de problèmes, pas aux personnes qui étaient en bas des normes, mais à celles qui étaient en haut et qui n'avaient pas exactement les mêmes modalités. On trouvait que l'année de référence n'était pas exactement la même que celle de la compagnie et on était parfois obligé de payer deux fois.

Le même problème se pose, par exemple, pour les employés qui sont à commission, les vendeurs à commission. Est-ce qu'ils sont couverts ou non par cette affaire? Il y a des personnes qui gagnent $35 000, $40 000 en vendant des ordinateurs, mais entièrement à commission. Quand ils vendent, ils reçoivent la commission. Quand prennent-ils leurs vacances? Ils peuvent les prendre en n'importe quel temps. Est-ce qu'on est obligé, à ce moment, de payer trois semaines ou deux semaines de paie? Est-ce qu'il va falloir qu'on élimine ce système de vendeurs à commission?

M. Johnson: Ils sont exclus.

M. Heenan: Ils sont exclus.

Les agents d'immeubles sont exclus, mais je pense, M. le ministre, à moins que je me trompe... (13 heures)

M. Johnson: A l'article 76. Les articles 65 à 75 ne s'appliquent pas aux personnes suivantes: conjoint de l'employeur, étudiant-employé, vendeur au sens b) de l'article 1 de la Loi du courtage immobilier entièrement rémunéré à commission...

M. Heenan: D'accord.

M. Johnson: ... vendeur au sens de 12, la Loi des valeurs mobilières...

M. Heenan: D'accord.

M. Johnson: ... salarié surnuméraire pendant la période du stagiaire dans le cadre du programme de formation.

M. Heenan: Vous voyez, les seuls qui sont exclus là, c'est le courtage immobilier et les valeurs mobilières. Il y a bien des personnes, dans l'industrie manufacturière, qui vendent des ordinateurs à commission...

M. Bellemare: II y a les cultivateurs.

M. Heenan: ... qui vendent deux ou trois ordinateurs pendant leur année. Ces gens reçoivent des salaires assez élevés, mais ils réclament quand même des vacances payées de deux ou trois semaines. C'est un problème assez grave. Il y a bien des compagnies manufacturières qui vendent presque entièrement par commission. Elles ont des vendeurs à commission.

M. Bisaillon: Si une compagnie peut se permettre de payer $40 000 de commission, elle devrait pouvoir se permettre — cela ne doit pas la mettre à terre — de payer deux semaines de vacances.

M. Heenan: Cela implique un autre système, entièrement. Le problème est que cela implique un autre système. Ce que ces gens sont obligés de faire, c'est de ne pas payer à commission, mais de payer sur une base de salaire et de refaire leur système. Les "direct sellers", par exemple, sont toujours assujettis à ce problème. C'est la sorte de problèmes pratiques qui nous frappent.

M. Bilodeau: M. le député, j'aimerais faire une remarque.

M. Bellemare: M. le Président, j'ai seulement une question à vous poser. J'ai eu la permission du président. Je pense qu'il m'a fait signe, oui. Le "standby" que vous invoquez dans l'article 56, voudriez-vous nous l'expliquer bien sommairement, le "standby' des infirmières?

M. Bilodeau: Nous avons donné cet exemple particulier parce que cela en est un qui nous est venu à l'esprit. Peut-être que M. Massé en a d'autres.

M. Bellemare: C'est peut-être l'exemple le plus frappant dans les négociations.

M. Bilodeau: Ce sont tous ces gens qui sont tenus, à cause de leur fonction, de ne pas être présents immédiatement sur les lieux de travail, mais qui demeurent en "standby", qui demeurent "on call", sur appel.

M. Johnson: En disponibilité.

M. Bilodeau: En disponibilité. J'ai employé cette expression parce que c'est l'expression couramment utilisée.

M. Bellemare: Qu'est-ce que vous trouvez d'ambigu dans cela?

M. Bilodeau: Ces gens-là ne travaillent pas. Les conditions de travail de ces gens-là ne sont pas... Vous allez être rémunérés, par exemple, pour une période de 10 heures pleines, de 12 heures pleines, par exemple, si vous êtes chez vous à attendre qu'on vous appelle. Il y a des périodes de temps où la personne doit être requise, doit être en disponibilité pour travailler. A ce moment-là, pour les fins du salaire, elle n'est pas entièrement rémunérée pour le total des heures. C'est cet esprit-là que nous avons.

M. Bellemare: Vous voulez dire que cette ambiguïté devrait tenir compte de cette réalité. Est-ce ce que vous voulez dire?

M. Bilodeau: En effet, ce sont des cas où cela devrait être exclu.

M. Bellemare: Bon, c'est ça.

M. Bilodeau: C'est ce que je veux dire. Maintenant, j'ai un commentaire sur la première partie de votre question à Me Heenan, M. le député. Il semble y avoir confusion à ce sujet. Il ne faut pas minimiser l'importance de s'appuyer sur un grand nombre de conventions collectives lorsqu'on vous présente nos arguments. On a à peu près 25% — c'est vrai — de ce qu'on pourrait appeler la grande entreprise qui a des employés très majoritairement syndiqués qui représentent 75% des salariés que nous représentons dans notre association. Il y a cela, et c'est carrément gros et important. Ces gens-là sont couverts par des contrats. Ensuite, de l'autre fraction qui reste des PME, il y a une partie, comme le mentionnait M. le ministre tout à l'heure, qui est syndiquée elle aussi. Ce n'est pas un argument négligeable que de s'appuyer sur ces arguments, parce que c'est une réalité plus grande que celle qui n'est pas syndiquée en termes de nombre d'employés couverts. Je voulais faire la précision pour qu'il n'y ait pas de confusion.

Le Président (M. Marcoux): Avez-vous des questions à poser, M. le ministre?

M. Johnson: Je pense que, étant donné que j'ai dû m'absenter un peu plus longtemps que prévu, y a-t-il des commentaires à ajouter aux questions que j'avais posées, brièvement?

M. Heenan: M. le ministre, vous avez surtout posé une question qui nous touche beaucoup, la question de l'article 78. C'est la question de la période de repas. La façon dont c'est prévu, on ne pourra pas avoir les deux dispositions qui sont peut-être majoritaires dans la convention collective. La demi-heure de lunch, de repas non payée, ou dans des opérations continues un temps qu'on pourra allouer pour le repas, où l'employé est présent au travail seulement durant huit heures, il a un temps, mais pas un temps défini comme une heure ou une demi-heure. Il est payé pour huit heures, mais il n'a pas une période où il peut s'absenter de sa machine. C'est surtout le cas de personnes qui sont aux machines, qui n'ont rien à faire sauf de surveiller les machines. Ces gens peuvent prendre leur repas, ils l'apportent avec eux, ils peuvent faire n'importe quoi, mais on ne leur donne pas spécifiquement une demi-heure pour s'absenter de leur travail. C'est une chose. L'autre chose est que, de plus en plus, les syndicats ne veulent pas que les employés soient absents de chez eux, de leur foyer, durant neuf heures. Ils veulent que ce temps soit réduit le plus possible. Surtout si l'entreprise est loin et que l'employé n'a pas un endroit ou un restaurant où aller, il va manger à la cafétéria, il demande, il préfère que l'employé ait une demi-heure non payée pour le repas, mais qu'il soit à l'ouvrage durant huit heures, plus la demi-heure, afin qu'il retourne chez lui plus tôt. Donc, c'est très important qu'on ait cette flexibilité. A l'heure actuelle, c'est discrétionnaire pour un enquêteur. Mais c'est effectivement accordé, il n'y a pas de problème. De la façon dont c'est rédigé à l'heure actuelle, ce sera défendu et il y aura une chicane énorme sur l'aspect pratique de votre texte.

M. Bilodeau: Sur cette question, M. le ministre, l'option — peut-être que vous pourriez nous donner ce qui a précédé à la pensée d'accorder ce genre d'option — de 30 minutes payées ou d'une heure non payée — parce que cela se trouve finalement à être l'un ou l'autre — il faut être réaliste. Dans un très grand nombre de cas, il est bien évident qu'à cause de l'impact financier que cela aura, cela va forcer l'employeur à donner la période d'une heure non payée au salarié, donc, forçant les gens à rester une demi-heure de plus sur les lieux de travail. Cela le force à faire cela. Il n'a pas le choix parce qu'il n'est pas capable de rencontrer l'autre option à cause des coûts. Il y a cet élément.

M. Johnson: Je pense que la difficulté que vous soulevez est réelle. La réponse à la première partie de votre question, au fond, je prends l'exemple des employés dans le commerce, les vendeurs dans les magasins, des choses comme celles-là. On sait que ces personnes qui sont souvent au salaire minimum, qui ont très peu de protection, sont appelées à devoir manger un sandwich en même temps qu'elles travaillent, à toutes fins utiles, parce qu'il n'y a pas d'autre commis préposé dans ce magasin, etc. Ce qu'on dit, l'objectif qui était visé, c'est de dire: L'employeur va accorder une demi-heure qu'il va payer. Il va payer l'employé pour huit heures et demie s'il l'oblige à manger un sandwich et qu'il n'est pas capable de prendre un temps raisonnable pour se reposer ou, encore, il va lui donner un congé d'une heure et il va fermer le magasin à toutes fins utiles.

Les difficultés que vous soulevez, évidemment, on y pense et vous n'êtes pas les premiers à les soulever. Même si on visait un secteur où cela nous apparaissait normal d'introduire des dispositions comme celles-là pour la protection d'un groupe de travailleurs, il est bien clair que ce que vous soulevez, c'est qu'ultimement, dans certaines entreprises — et c'est là votre argument majeur — le coût de la demi-heure payée, vous n'aurez pas les moyens de l'assumer. L'entreprise n'aura pas les moyens de la payer. Donc, ce qu'il va faire, c'est de dire: Je vous donne une heure. Donc, il va obliger les gens, pour faire une production de huit heures par jour, à passer neuf heures sur les lieux de travail. Je ne crois pas que les citoyens veuillent cela non plus, à moins que les gens ne soient tous tombés en amour avec leur travail, ce qui est souhaitable, mais on n'en est pas rendu là. On y pense, on tient bien compte de vos remarques.

Le Président (M. Marcoux): Je remercie... Oui?

M. Bilodeau: J'avais simplement un commentaire à faire. Le ministre nous avait invité...

M. Johnson: Oui.

M. Bilodeau: ... à en faire sur ses propres remarques. Je prenais note — je ne sais pas si c'est une indication de l'intention du législateur à la deuxième lecture — de ses commentaires quant à l'article 59. Il nous parlait de l'introduction progressive de certaines mesures, ce qui est au moins un élément peut-être encourageant. On espère que ce sera au même rythme que l'évolution de notre contexte économique à nous.

Maintenant, quant au choix et quant à la question du choix, M. le ministre, vous mentionnez qu'il faut à un moment donné faire un choix entre telle journée ou telle autre journée. C'est là que nos commentaires divergeaient un petit peu de l'opinion du gouvernement à cet égard. Il nous semblait que, dans le cas de certaines fêtes, si vous décidiez d'instaurer le 1er mai, par exemple, c'est bien clair que la réalité est telle qu'un très grand nombre d'employés aimeraient mieux, et ils le demandent effectivement, avoir une autre date que celle-là. Si c'était une question de nombre de jours, comme je le soulignais à la commission tout à l'heure, cela ne poserait pas de problème. Cela nous obligerait à respecter la loi en termes de nombre, mais, d'un autre côté, cela nous permettrait également de répondre aux voeux des employés ou au caractère propre à notre entreprise. Ce choix, à un certain niveau, selon le nombre de jours de congé et de ces jours précis, je ne vois pas d'objection à ce que, socialement, il soit exercé par les parties qui sont les plus impliquées. Ce sont mes remarques sur cet article.

Quant à l'article 81, M. le ministre, je vous soumets bien respectueusement que, nonobstant le Code civil, il n'existe telle chose nulle part au Canada que l'obligation de payer une semaine de salaire ou de donner une semaine d'avis à un individu qui vient d'être engagé la veille pour une journée ou pour deux jours... Si l'on doit faire une loi concernant les normes de travail, il me semble que c'est le forum approprié pour vous représenter que, finalement, ceci devrait être précisé. Vous conviendrez avec moi que l'article 16.68 du Code civil, auquel vous faites référence, est là depuis des années et cela fait des années qu'on l'applique plus ou moins bien. Personne ne l'applique de la même façon et les tribunaux ne l'interprètent pas de la même façon, suivant le genre de fonctions. J'apprécierais beaucoup que le législateur, parce qu'il a l'occasion d'éclairer cette disposition — ce n'est pas l'article 16.68 comme tel, mais c'est quelque chose qui lui ressemble quant au contenu — pour une fois, ait des guides plus certains que l'article 16.68 et que cela se conforme à une réalité et, qu'il ne soit pas exagéré de demander, par exemple, que cela se situe à trois mois. C'est le cas, je pense, de la majorité des provinces canadiennes, que se situe à trois mois l'emploi de l'individu avant d'avoir l'obligation de lui donner une semaine d'avis. Cela ne nous paraît pas exagéré.

M. Bellemare: Pas un...

M. Bilodeau: Ce sont les remarques que je voulais faire sur l'article 81. J'espère qu'on en tiendra compte.

M. Johnson: Très bien.

Le Président (M. Marcoux): Je remercie les représentants de l'Association des manufacturiers canadiens...

M. Johnson: M. le Président, avant que les représentants nous quittent, je voudrais les remercier encore une fois de la qualité et des détails très précis dans lesquels ils sont entrés. Je pense qu'ils nous ont éclairés beaucoup. Je voudrais vous dire que je ne suis pas responsable des commentaires de l'Opposition de façon générale.

M. Bellemare: Vous ne les avez pas entendus non plus.

M. Johnson: J'en ai assez entendu pour me dire que, si tout le reste était sur le même ton, cela ne rendrait peut-être pas justice au mémoire qui nous a été présenté, mais c'est peut-être une question d'opinion.

M. Bellemare: On verra cela.

M. Johnson: Je voudrais vous remercier, messieurs et Mme Thibodeau, de vous être déplacés.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie également, au nom de tous les membres de la commission.

Je voudrais vérifier une dernière fois si M. Roger Bédard est ici. Comme le secrétariat des commissions a essayé de le rejoindre ce matin, qu'on n'a pas réussi et qu'il n'est pas ici, nous devons ajourner les travaux de cette commission sine die.

Fin de la séance à 13 h 13

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