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Version finale

31st Legislature, 4th Session
(March 6, 1979 au June 18, 1980)

Friday, March 21, 1980 - Vol. 21 N° 268

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition des représentants des parties impliquées dans la grève des cols bleus de la ville de Montréal


Journal des débats

 

Audition des parties impliquées

dans la grève des cols bleus

de la ville de Montréal

(Dix heures six minutes)

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre est réunie aux fins d'entendre les parties relativement au conflit qui oppose la ville de Montréal et le syndicat des cols bleus, en cette séance du vendredi 21 mars 1980.

Les membres de cette commission sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), remplacé par M. Laberge (Jeanne-Mance); M. Bellemare (Johnson), remplacé par M. Brochu (Richmond); M. Chevrette (Joliette-Montcalm), remplacé par M. Lefebvre (Viau); M. Gravel (Limoilou), remplacé par M. O'Neill (Chauveau); M. Johnson (Anjou), M. Lavigne (Beauharnois), M. Mailloux (Charlevoix), M. Pagé (Portneuf).

Parmi les intervenants, nous avons M. Gosse-lin (Sherbrooke), qui est remplacé par M. Bertrand (Vanier). Oui?

M. Pagé: M. le Président, M. Mailloux (Charlevoix), est remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeois), comme membre.

Le Président (M. Jolivet): M. Mailloux (Charlevoix), remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeois), comme membre de la commission.

Qui sera rapporteur à cette commission? M. Lefebvre?

M. Johnson: Du comté de Viau.

Le Président (M. Jolivet): M. Lefebvre du comté de Viau. Donc, la commission doit normalement siéger, aux fins normales des débats, de 10 heures ce matin à 13 heures après le déjeuner, à moins qu'il y ait entente entre les parties pour continuer plus tard au moment jugé opportun, s'il le faut.

Je demanderais à M. le ministre de commencer les travaux de cette commission.

Remarques préliminaires M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, nous sommes réunis, ce matin, pour entendre les parties dans le conflit qui oppose le local 301 du Syndicat canadien de la fonction publique, cols bleus de Montréal, et la ville de Montréal.

Cette commission, M. le Président, est devenue nécessaire pour permettre aux parlementaires, de part et d'autre de la Chambre, puisque c'est leur droit le plus strict, d'être saisis de ce conflit, compte tenu de l'importance et des répercussions qu'il a ou qu'il pourrait avoir.

J'aimerais d'abord souhaiter la bienvenue aux représentants; M. le maire de Montréal, M. le directeur du Syndicat canadien de la fonction publique et, évidemment, ses collègues, le président du syndicat et les fonctionnaires accompagnant le maire, et peut-être faire un résumé de ce qui s'est passé depuis le mois de juillet 1979, car les négociations, M. le Président, ont commencé au mois de juillet 1979, à la ville de Montréal.

Le 19 décembre 1979, le syndicat faisait une demande de conciliation alors que la convention collective n'était pas encore expirée. L'expiration de la convention collective vient au 31 décembre 1979. Le 2 janvier 1980, le syndicat avait acquis le droit de grève en vertu du Code du travail et, le 7 janvier, j'ai nommé M. Marcel Boisvert et M. Normand Gauthier comme conciliateurs dans ce dossier.

Le 11 janvier, il y eut une première séance de conciliation qui fut suivie de cinq autres séances jusqu'au 26 janvier alors que les offres patronales furent rejetées dans un vote par l'assemblée du syndicat. Le 12 février, il y eut une dernière séance de conciliation en même temps que le déclenchement de la grève.

A peine dix jours plus tard, compte tenu du fait que les parties ne semblaient pas s'asseoir et discuter, malgré le fait que cette grève perdurait déjà depuis dix jours, j'ai demandé aux deux conciliateurs de convoquer péremptoirement les parties, c'est-à-dire d'utiliser les pouvoirs qui leur sont dévolus en vertu du code et de forcer les parties en présence à une séance. La séance a donné lieu, quelques heures après à une rupture totale de la négociation.

Le 2 mars, j'ai offert aux parties une formule de médiation-arbitrage. En vertu de cette formule, j'offrais aux parties d'accepter la nomination d'un médiateur qui aurait le double mandat, d'une part, de tenter d'en arriver à un règlement ou favoriser un règlement, devrais-je dire, entre les parties, et s'il le constatait en cours de route, de décider de se transformer en arbitre sur certains objets au moment où il le jugerait opportun. Cette offre, que j'ai faite aux parties le 2 mars, a été refusée par les deux parties, bien que la ville de Montréal l'ait acceptée, mais disons qu'elle a rejeté la formule telle que proposée en disant qu'elle accepterait, mais sous forme de cinq conditions, une forme d'arbitrage différente de la médiation-arbitrage que j'offrais.

Le 4 mars, j'ai donc nommé M. Raymond Désilets, qui est directeur général des relations de travail au ministère, comme médiateur dans ce conflit. Le 13 mars, après 80 heures de médiation, M. Désilets a déposé un rapport de médiation qui a été accepté par la ville dans une lettre que m'envoyait le maire de Montréal, le 14 mars, et qui ne fut pas rendue publique, à ma demande d'ailleurs, lors de ces heures-là, et le syndicat, pour sa part, le 16 mars, rejetait le rapport de médiation de M. Désilets.

Les 17, 18 et 19 mars, à peu près jour et nuit, il y a eu d'autres rencontres au ministère du Travail dans des efforts de rapprocher les parties encore une fois. Le 20 mars, on assistait à une nouvelle assemblée générale du syndicat et il y a une impasse, ce qui fait d'ailleurs que le 21, aujourd'hui, nous sommes les représentants, de part et d'autre de la Chambre, de l'Assemblée nationale du Québec, en situation où nous demanderons tout à l'heure aux parties de nous expliquer le plus succinctement et le plus clairement possible ce qui se passe dans la ville de Montréal, ce qui fait qu'après 38 jours de grève, qu'après une négociation qui a commencé il y a maintenant près de neuf mois, qu'après de la conciliation, des convocations péremptoires, une médiation, des rencontres additionnelles, on n'en arrive pas à un règlement chez les cols bleus et à la ville de Montréal?

Je pense que la population est en droit de comprendre ce qui se passe et que les parlementaires doivent surtout être saisis, si ce n'est des contenus précis et des articles, tout au moins de ce long processus, de ce laborieux processus dans lequel le ministère a tout tenté pour amener les parties à s'entendre.

En terminant, je voudrais simplement souligner, puisqu'il vient d'arriver, la présence du président de la FTQ, qui sera peut-être appelé comme je le connais, à dire quelques mots et à souhaiter que, dans un climat qui se veut celui d'apprendre des choses, on puisse tout à l'heure entendre les parties pendant quelques minutes, une fois, je présume, que le député de Portneuf nous aura fait part de ses réflexions.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf. (10 h 15)

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais ajouter ma voix à celle du ministre pour souhaiter la bienvenue, ce matin, à M. Laberge, à M. le directeur du Syndicat canadien de la fonction publique, à M. le président du syndicat ainsi qu'à ses collaborateurs, à M. le maire de la ville de Montréal et à ses collaborateurs. Je voudrais aussi saluer cordialement M. Désilets, le médiateur, directeur au ministère du Travail.

M. le Président, nous sommes réunis aujourd'hui parce qu'une grève sévit à Montréal depuis quarante jours aujourd'hui, conflit à l'égard duquel l'Assemblée nationale a eu, à plusieurs reprises, à discuter, à échanger depuis l'ouverture de la session le 3 mars dernier, compte tenu de la situation qui a prévalu à Montréal depuis le déclenchement de cette grève, à la lumière des nombreux inconvénients, à la lumière de la situation qui a prévalu. Car, lorsqu'on a une grève de plus de 5000 travailleurs, dans une ville comme celle de Montréal, il va de soi que cela a des effets, des impacts et les pressions ont vite fait de se faire sentir auprès des députés, ici à l'Assemblée nationale, et ce, des deux côtés de la Chambre, par la population.

M. le Président, c'est un conflit où, dans les faits, dans les impacts, on a eu, à plusieurs re- prises, nous sommes revenus... On a posé des questions au ministre, on a demandé au gouvernement de prendre les responsabilités qui lui incombaient dans les circonstances, parce que je soutiens, nous soutenons, de notre côté, que, dans un conflit à caractère public comme celui-là, autant à la ville de Montréal que dans les nombreux conflits qu'on a connus en 1979, que ce soit dans le monde des hôpitaux, que ce soit à HydroQuébec, que ce soit à certaines sociétés d'Etat, transport en commun ici à Québec, transport en commun à Montréal, etc, le gouvernement a une responsabilité qui déborde la responsabilité qu'il a à l'égard d'un conflit privé.

Le gouvernement, à certains moments, est justifié d'intervenir lorsque la santé et la sécurité publique sont mises en cause. Il reste maintenant à déterminer, M. le Président — je pense qu'on peut avoir autant d'interprétations qu'on est de personnes à porter un tel jugement — si la situation est telle qu'un gouvernement se voit dans l'obligation d'intervenir. A quel moment la situation est-elle suffisamment détériorée et à quel moment la santé et la sécurité du public sont-elles suffisamment mises en cause pour que le gouvernement soit obligé d'intervenir?

C'est d'ailleurs dans ce sens que, depuis deux ans et demi, vont mes remarques au ministre du Travail et de la Main-d Oeuvre. Vous vous rappellerez, M. le Président, que je ne lui a jamais demandé d'intervenir directement ou que le gouvernement s'implique directement dans un conflit privé, quoique le gouvernement l'ait déjà fait, on se le rappellera, dans un conflit particulier dans le nord de Montréal, à la Commonwealth Plywood.

Par contre, de la part du gouvernement, et particulièrement du ministre du Travail, on a toujours eu beaucoup de difficulté à percevoir sa politique, sa position, à l'égard de cette obligation et du moment où le gouvernement devait intervenir dans un conflit public comme tel. Je conviens que le ministre du Travail a fait des déclarations pendant cette période. Le ministre du Travail nous a déclaré, à certains moments, que la situation était telle qu'on devait présumer une intervention bientôt, qu'on ne pouvait rester insensibles à cela. Le ministre du Travail nous a déclaré encore au début de la semaine que cela avait assez duré. Mais vous conviendrez, M. le Président, que d'après ces éléments, auxquels s'ajoutent les déclarations d'un ministre, membre du gouvernement, nos pressions se sont faites insistantes.

M. le Président, on a une commission parlementaire qui a été convoquée ce matin. Le gouvernement l'a décidée. L'Opposition l'a demandée. Et si on l'a demandée — là-dessus je suis d'accord avec le ministre — c'est qu'avant que soit enclenché un processus législatif, un processus décisionnel de la part du gouvernement qui peut ou qui pourrait aller dans le sens de la suspension du droit de grève, je pense qu'il est tout à fait légitime que les membres de l'Assemblée nationale soient en mesure de constater eux-mêmes s'il n'y a véritablement plus rien à faire au niveau de la négociation.

On aura des explications à demander aux parties. On aura des conclusions à prendre. Mais je dois cependant inscrire mon regret, M. le Président, que le gouvernement ait attendu à ce matin, le vendredi 21 mars, pour convoquer cette commission ou tout au moins pour enclencher ce processus de prise de responsabilités. On se rappellera ceci, M. le Président, extrait du rapport de M. Désilets et je cite: "Actuellement, les parties se sont mises dans une situation telle qu'il leur est maintenant difficile, sinon impossible, à l'une comme à l'autre, de faire marche arrière sans avoir à assumer la défaite".

Même si cette indication était contenue dans le rapport du médiateur Désilets, le gouvernement ne voulant pas intervenir, je ne sais trop pour quel motif, quel préjugé ou quel paravent il a à conserver, quelle image il a à garder et à conserver jalousement, précieusement, le gouvernement, au lendemain de cette indication de la part du médiateur, encore une fois, a fait confiance au mécanisme de négociation. On a vu les résultats que cela a donnés. C'était la semaine dernière, le dépôt de ce rapport.

Dimanche, les parties prenaient position; elles votaient sur ledit rapport et, encore une fois, on était devant une décision où on ne pouvait présumer de résultats concrets et de retour au travail.

Lundi, mardi, négociations et finalement, un vote, hier ou avant-hier, de la part de la partie syndicale disant: C'est non à la négociation qui a donné suite à notre vote sur le rapport comme tel. Alors, M. le Président, c'est légitime qu'aujourd'hui les parlementaires entendent les parties, pas pour de la négociation, parce que ce n'est pas là notre rôle, mais strictement pour voir s'il y a quelque chose à faire ou s'il n'y a rien à faire en termes de négociation. S'il n'y a rien à faire en termes de négociation, là, c'est au gouvernement à prendre sa responsabilité.

Le gouvernement dit: II n'y a rien à faire en termes de négociation, les parties demeurent sur leur position. Comme gouvernement, on accepte le principe du rapport de forces et la grève se poursuit. Ou le gouvernement dit: La santé et la sécurité publiques sont suffisamment mises en cause que, comme gouvernement, dans un geste politique, dans un geste administratif aussi, je prends la responsabilité qui m'incombe et j'enclenche un processus pour mettre fin à ce conflit. Ce processus peut être, comme je l'ai déjà indiqué, sous plusieurs formes: la suspension du droit de grève, une loi spéciale, etc. Mais c'est la seule question et c'est la seule conclusion auxquelles on peut en venir aujourd'hui.

Je voudrais être bien compris de la part de mes collègues, les membres de la commission, de la part des parties aussi qui ont accepté de venir et qui sont ici ce matin avec nous. On n'est pas ici pour faire la négociation. Il ne faudrait pas que cela le devienne. Nous sommes ici pour nous faire une opinion, nous faire un jugement et surtout pour voir s'il y a une chance ou s'il n'y en a pas. S'il n'y a pas de chance, ce sera au ministre du Travail à prendre sa responsabilité.

Si jamais on constate, à la lumière des discussions et des échanges qu'on aura ce matin, qu'il n'y a aucune chance, j'ose croire et j'ose espérer que le gouvernement qui a accepté d'imposer, qui a été tolérant, qui a accepté le principe ou les faits, qui a accepté que les gens de Montréal souffrent pendant quarante jours, prendra sa responsabilité une fois pour toutes. Il faudra qu'il le dise clairement.

C'est dans ce sens-là que j'espère que la commission parlementaire d'aujourd'hui donnera quelque chose parce que, trop souvent dans le passé — je termine là-dessus — on a eu des commissions parlementaires comme celle-là et on est parti en fin de journée, tout le monde bien heureux. On avait entendu les parties, mais cela a donné vous savez quoi. Cela n'a pas donné grand-chose. J'ose donc croire qu'aujourd'hui, vous ne vous serez pas déplacés de Montréal à Québec pour rien et qu'on ne sera pas ici pour rien quant à nous. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le maire, selon l'entente qui prévaut normalement, vous avez vingt minutes pour expliquer votre position et, ensuite, je donnerai vingt minutes aux gens du syndicat pour faire la même chose. J'aimerais aussi en même temps que vous présentiez chacun de vos représentants. M. le maire d'abord.

Point de vue de la ville de Montréal M. Jean Drapeau

M. Drapeau (Jean): M. le Président, je remercie le leader du gouvernement qui a convoqué, cette commission ce matin, à la suggestion, j'en suis sûr, du gouvernement et du ministre du Travail, et à la suggestion et suivant le désir d'autres membres de l'Assemblée nationale. La procédure n'est pas courante, à ma connaissance. Nous venons d'assister à un petit exposé de chacun des deux côtés du président.

Quel est le rôle qui m'est dévolu dans le moment? J'en profiterai peut-être pour dire que, contrairement, à ce qu'on a pu croire dans certains milieux, écrire et dire, le maire de Montréal et ses collaborateurs du comité exécutif se sont intéressés depuis le début et n'ont pas cessé de s'intéresser aux négociations. Nous n'avons pas voulu, pas plus que le député le disait tout à l'heure — pour ces travaux, la commissions n'est pas ici pour négocier — nous substituer aux organismes chargés par la loi et les règlements de négocier des contrats. C'est bien sûr que le directeur, le directeur adjoint, les négociateur du service du personnel et des autres service étaient en contact régulier avec le comité exécutif, faisaient rapport régulièrement et recevaient des mandats de l'administration. Il n'y avait donc aucun désintéressement.

Lorsque, à partir de dimanche dernier, la situation devenait différente, des relations se sont établies, à ce moment-là, entre administrateurs publics. J'étais heureux, dès dimanche, des con-

tacts qui se sont établis entre le ministre du Travail et moi. Au cours de ces relations, mes collègues du comité exécutif ont toujours été tenus au courant de tout, et, bien souvent, dans les conversations que nous avions par téléphone — le ministre le savait — je disais qui était autour de moi et, généralement, c'étaient les membres du comité exécutif, des membres du service du personnel. Donc, de ce côté, nous ne nous sommes pas désintéressés.

Nous ne nous sommes pas désintéressés, et c'est parce que c'est le même intérêt que nous avons manifesté dans toutes les négociations de travail que nous avons réussi à conclure des accords, cinq ou six, dont quelques-uns signés, et que les négociations vont se poursuivre harmonieusement, selon les renseignements que nous avons, entre les négociateurs de la ville et les autres syndicats. Je crois qu'il y a 18 contrats différents à signer, il y a cinq ou six ententes de conclues actuellement. Dans ce cas, cela accroche. Pourtant — on l'a souligné, j'en étais heureux — nous n'avons pas attendu que le conflit pourrisse. Trois mois avant le délai pour commencer les négociations, dès juillet, les travaux commençaient.

Je laisserais plutôt quelques minutes à M. Girard pour faire le résumé de ces travaux, qui vont de juillet jusqu'au moment de la nomination des négociateurs.

Donc, depuis dimanche, il s'est établi des relations à un plan, je n'ai pas la prétention de dire gouvernemental, mais gouvernement-administration, et nous avions raison, très sincèrement, de penser que ça allait se régler. Quant à moi, je ne formule aucun grief à l'endroit du gouvernement. Je ne suis pas ici pour le protéger, le ministre est capable de se défendre tout seul. Mais il a tout fait et, pour ma part, j'ai confiance d'avoir aussi tout fait pour tenter d'en arriver à une entente, au point que, mercredi soir, il restait deux choses, et c'était donnant donnant et ça se réglait. On est allé jusque-là. Donc, je crois que ni le gouvernement, ni l'administration municipale ne peuvent être, pas même accusés, mais soupçonnés de ne pas avoir épuisé tous les moyens d'entente possibles pour que, finalement, un accord intervienne.

Voilà donc les dispositions dans lesquelles nous sommes et dans lesquelles nous demeurons et si, puisqu'on a fait allusion à ça, et avec raison, la formule qui avait été proposée d'un médiateur se transformant en arbitre n'a pas été acceptée telle que formulée, nous en avons donné les raisons dans une lettre au ministre en réponse à son invitation à accepter cette formule. J'ai commencé, dans la première moitié de la lettre, par poser une question et, sans même avoir la réponse, j'ai dit: Nous favoriserions cette formule si elle était modifiée ainsi qu'il suit, afin de rapprocher cette formule, qui était absolument nouvelle d'après le droit des relations de travail, le plus possible de mesures connues et appliquées ici pour qu'elle soit moins disparate.

Elle était très bien inspirée et, dans la deuxième partie de ma lettre, nous suggérions, grâce à la compétence du service du personnel et de notre contentieux, des modifications qui auraient pu rendre cette formule applicable ou acceptable par les deux parties, puisque au fond, elle se transformait en véritable conseil d'arbitrage et nous étions prêts à accepter, comme nous sommes encore prêts à accepter, la formule de l'arbitrage. Donc, les modifications ne tendaient pas à un rejet. Il y avait une première question. En attendant la réponse, pour ne pas étendre les délais, je disais: Nous favoriserions la formule suivant telle et telle modification pour qu'elle se rapproche le plus près possible de la formule de l'arbitrage telle que connue ici. (10 h 30)

Quant aux travaux de négociation, je laisse à M. Pierre Girard le soin de le faire. Je vous le présente, il est le directeur adjoint du service du personnel, plus particulièrement chargé des relations avec les cols bleus; M. Perron est le directeur du service du personnel. Nous avons également ici le chef du contentieux. Nous avons l'actuaire, M. Guérard... Le chef du contentieux bien connu, Me Péloquin; M. Guérard, actuaire, parce que toutes les études que nous avons faites, nous les avons faites avec tout l'appui technique qu'il fallait. D'autres membres du personnel du contentieux et des divers services de la ville, ces collaborateurs étant chargés de l'application de la convention qui est terminée et qui seront chargés de l'application de la nouvelle convention. Il importe qu'ils nous disent, quand on veut accepter ou qu'on serait prêt à accepter une disposition, s'ils croient que, dans le fonctionnement de leurs services, elle sera applicable ou non. Voilà nos collaborateurs. J'espère n'avoir oublié personne.

M. Girard pourra parler des négociations qui se sont poursuivies.

M. Girard (Pierre): Merci, M. le maire. Je vais m'en tenir uniquement à ce qui s'est déroulé à partir du rapport de médiation, parce que ce qui a précédé, je ne pense pas qu'on doive y revenir.

A partir du moment où il y a eu un rapport de médiation, il y a eu une rencontre, samedi dernier le 15 mars, et le médiateur, M. Désilets, nous a demandé de corriger un certain nombre de choses dans le rapport de médiation. Je dois dire que toutes les erreurs techniques qui ont été soulevées par le médiateur, nous avons accepté de les corriger après discussion avec le syndicat.

Une fois les erreurs techniques corrigées, le syndicat nous a demandé de négocier par-dessus le rapport du médiateur, bien que nous ayons accepté le rapport du médiateur; nous l'avons fait, dans un esprit de conciliation le plus poussé possible et afin de mettre fin au conflit le plus rapidement possible; nous avons tenté d'en venir à une entente, même si, à notre sens, le rapport de conciliation était acceptable et même si le rapport de conciliation était loin de satisfaire la ville.

Malgré ces problèmes, nous avons accepté de discuter et le syndicat nous a soulevé à ce moment-là les points suivants:

En retour d'un contrat de trois ans, le syndicat nous demandait de contribuer à un régime d'assurance-groupe maladie, ce que le médiateur avait rejeté dans son rapport.

Egalement le médiateur avait rejeté une autre demande du syndicat concernant la rétrogradation, c'est-à-dire que lorsqu'un employé est rétrogradé pour des raisons de santé, on doit lui maintenir son salaire.

Cette demande du syndicat avait été rejetée par le médiateur, mais nous avons accepté, après le rapport du médiateur, d'en parler.

Également quant à la question du fonds de pension, c'est un problème extrêmement important, on en discute depuis quelques jours. Le syndicat voulait voir introduire dans la convention collective un mécanisme plus précis que ce que le médiateur avait proposé au sujet de l'indexation des rentes de retraite.

Également au sujet des sous-contrats, le médiateur avait refusé la demande syndicale ainsi que les demandes patronales là-dessus. C'était donc une solution de compromis, il nous proposait le statu quo et le syndicat nous a demandé de revenir sur cette question et de renégocier à nouveau.

Finalement, au sujet des salaires, puisque le rapport de médiation parlait simplement d'un contrat de deux ans et des augmentations de salaire pour deux ans, le syndicat nous demandait de discuter d'une nouvelle formule d'augmentation pour la troisième année.

Également, le syndicat nous a demandé que la tormule d'indexation des salaires ne porte plus uniquement sur le taux horaire moyen, mais sur le taux horaire de chacun des groupes de traitement. Nous avons accepté de nous rendre à la demande syndicale.

Finalement, le conciliateur n'avait pas accordé, concernant l'article 1922 — sans entrer dans les détails — une proposition que la ville avait déjà faite en cours de la négociation, bien que cela n'apparaissait pas dans le rapport de médiation, nous avons accepté de l'ajouter.

Alors en résumé, concernant l'assurance-groupe, la ville, bien que cela n'apparaissait pas dans le rapport de médiation, a accepté de bouger et de donner quelque chose là-dessus au syndicat.

Au sujet de la rétrogradation médicale, nous avons reconnu le principe, mais nous avons suggéré au syndicat que si un employé était rétrogradé pour des motifs d'accident du travail ou de maladie professionnelle, si nous devions lui maintenir son salaire, même s'il occupait un emploi inférieur, nous avons maintenu qu'en retour, un employé qui est accidenté, ne fasse pas plus d'argent qu'un employé qui demeure au travail.

La formule que nous avons proposée, c'est de voir à ce que l'employé accidenté reçoive son plein salaire net et non pas le salaire brut qu'il reçoit de façon générale puisqu'il y a toute une partie, lorsqu'un employé est accidenté, qui n'est pas imposable en vertu de la loi, de telle sorte que lorsqu'un employé est accidenté, il fait plus d'argent que lorsqu'il travaille. Alors, nous avons pro- posé au syndicat la formule suivante: nous sommes d'accord pour payer l'employé qui sera rétrogradé pour des raisons de santé attribuables à son travail, mais en retour vous allez accepter qu'en cas d'accident du travail nous assurions à l'employé son plein salaire net, c'est-à-dire qu'il ait le même revenu que s'il était demeuré au travail.

En ce qui concerne le fonds de pension, nous avons proposé qu'en dehors de la convention collective les parties puissent négocier la mise au point d'une formule d'indexation et que si les parties ne s'entendaient pas sur le partage des coûts de cette formule d'indexation, il n'y ait pas d'indexation. Je n'insiste pas davantage là-dessus, mais si vous désirez avoir des renseignements plus précis sur cette question qui est éminemment technique, notre actuaire ici présent pourra vous fournir les chiffres à cet effet. Je pense qu'on ne peut pas se lancer dans l'étude de l'indexation d'un fonds de retraite aussi considérable que le fonds de retraite des employés manuels de la ville sans prendre toutes les précautions pour éviter que cette question soit portée éventuellement à l'arbitrage ou fasse constamment l'objet d'une négociation chaque fois qu'il y a négociation. Il ne faut pas oublier que la caisse de retraite des employés municipaux est régie par un règlement municipal et chaque fois que les syndicats nous ont demandé de la négocier dans le cadre des conventions collectives, nous avons toujours refusé en nous appuyant sur les dispositions mêmes du Code du travail qui prévoit qu'on ne doit pas négocier des choses qui apparaissent déjà dans des lois.

Tous les syndicats ont accepté ce principe, tous les syndicats qui veulent discuter de nouveau la question du fonds de retraite, des indexations qu'on pourrait apporter aux différents régimes de retraite ont accepté que ces négociations se fassent en dehors des négociations concernant les conventions collectives. Je pense que c'est une question éminemment technique et qu'on ne doit pas la mêler à une période intensive de négociation avec tous les problèmes que cela peut poser. Je pense que ce genre d'étude doit être fait en dehors d'un contexte de négociation très émotif et les autres syndicats l'ont compris et ont accepté notre position. Il n'y a qu'un syndicat qui refuse cela, c'est le Syndicat des cols bleus. Je pense que la formule que nous proposions était très acceptable, très valable, mais elle a été refusée par le syndicat.

Au niveau des sous-contrats, nous avons expliqué qu'il était impensable qu'on modifie le statu quo. Déjà, avec le statu quo, nous avons énormément de difficulté, nous avons des contraintes énormes au niveau du statu quo. Je pense que le médiateur avait bien compris, d'ailleurs, la position de la ville puisqu'il avait refusé d'ajouter quoi que ce soit au niveau des sous-contrats, sachant pertinemment que nous avions déjà beaucoup de difficulté.

En ce qui concerne la troisième année, nous étions, évidemment, d'accord pour accorder une augmentation de 9% pour la troisième année du

contrat, comme nous l'avions fait avec tous nos autres syndicats pour lesauels des ententes sont intervenues et, en ce qui concerne le taux horaire moyen, c'est-à-dire la formule d'indexation qui ne s'appliquerait plus à l'avenir sur le taux horaire moyen, mais sur le taux horaire de chacun des groupes de traitement, nous avons accepté également cette demande-là ainsi que d'autres demandes du syndicat qui n'apparaissaient pas dans le rapport du médiateur afin d'en arriver à un compromis pour mettre fin une fois pour toutes à cette grève.

Or, quelle est la situation aujourd'hui? La situation aujourd'hui est la suivante. Nous avons accepté le rapport du médiateur, cela a été refusé par le syndicat. Nous avons accepté d'ajouter au rapport du médiateur, ce n'est pas encore suffisant pour le syndicat. Alors, je pense que la ville de Montréal a démontré sa bonne foi. Nous avons négocié. Nous n'avons pas compté nos heures, mais nous sommes encore devant une impasse aujourd'hui, malgré tous les efforts que nous avons faits. Jusqu'à maintenant, la ville a cédé constamment, mais je pense qu'il y a des limites à la capacité de payer des citoyens de Montréal. La convention collective qui est proposée dans le rapport de médiation plus les modifications que nous avons acceptées représentent un coût énorme pour les citoyens de la ville de Montréal. Je pense que nous avons démontré notre bonne foi et qu'on devrait mettre un point final à cette situation.

S'il y a des questions, je me ferai un grand plaisir d'y répondre, merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. Laberge, ou le représentant.

Point de vue du Syndicat canadien de la fonction publique

M. Louis Laberge

M. Laberge (Louis): M. le Président, M. le ministre, messieurs les députés, M. le maire, avec ses nombreux collègues, j'ai à ma droite ici, Roger Laramée, le directeur au Québec du Syndicat canadien de la fonction publique, Henri Massé, qui a été le négociateur au nom du syndicat, Réjean, le président du syndicat et André Asselin, qui voyait tout particulièrement à assurer les services essentiels.

S'il y a des membres de la commission qui veulent discuter des services essentiels, nous serions bien heureux de répondre. Il y a eu des déclarations faites par certains dirigeants de la ville, déclarations dont je' pourrais dire qu'elles sont quelque peu fantaisistes, pour ne pas dire autre chose.

Pour reprendre le conflit, il ne faut quand même pas charrier. Je ne pense pas que personne puisse dire que la ville de Montréal était en état de siège, que la population ne pouvait pas se déplacer. Evidemment, la température nous a aidés, le maire en semblait fort heureux, les entrepreneurs, les sous-traitants de la ville encore plus, mais on ne peut pas dire que la population a tellement souffert du conflit. Bien sûr, ce n'est pas agréable, il y a des sacs d'ordures qui traînent, nous sommes les premiers à le déplorer, sauf qu'à un moment donné, quand il n'y a pas moyen d'arriver à une entente — et on n'accuse personne de mauvaise foi — c'est l'économie du Code du travail qui le veut, il y a un conflit, il y a une épreuve de force.

Dans le cas des cols bleus de la ville de Montréal, il faut quand même reconnaître que c'est le groupe qui a le plus souffert de la détermination des autorités municipales de vouloir réorganiser et, Dieu sait qu'on n'est pas contre une réorganisation, elle était nécessaire. Il reste que les cols bleus ont vu leur groupe diminuer d'environ 1500 employés depuis quelques mois. Vous allez me dire qu'il n'y a pas un employé permanent qui a perdu son emploi, c'est un fait, mais il y a des employé avec plusieurs années de service qui étaient habitués à accomplir certaines tâches et, du jour au lendemain, on les envoyait dans des parcs, nettoyer et arroser des patinoires.

Enfin, disons que c'est différent. A certains âges, ça peut se prendre plus facilement qu'à d'autres âges. C'était un peu ça le noeud du conflit.

Je veux rendre hommage à M. Désilets, il a vraiment travaillé. Le ministère du Travail a tout fait pour essayer de rapprocher les parties, c'est peut-être assez rare que vous allez entendre dire des choses semblables, mais c'est un fait. On n'a pas à chialer contre le ministère du Travail, il a vraiment essayé de rapprocher les parties. Mais il y a quand même 5000 travailleurs et ce n'est pas de gaieté de coeur que 5000 travailleurs décident de sacrifier leur salaire pendant des semaines. Ils font eux aussi des sacrifices. S'ils ont décidé d'arrêter de travailler, c'est qu'ils croyaient qu'ils avaient de très bonnes raisons. Disons qu'il y avait une très grande inquiétude qui existait et qui existe encore parmi les cols bleus de la ville de Montréal avec toutes ces perturbations qu'on a connues depuis un an.

M. Girard dit que tous les autres syndicats l'ont accepté. Bien oui, les autres syndicats n'ont pas été aussi touchés que le groupe des cols bleus de la ville de Montréal. Bien sûr qu'il y a eu des mutations, bien sûr qu'il y a eu aussi des auxiliaires parmi les cols blancs qui ont été renvoyés, mais, comparativement parlant, il n'y en a pratiquement pas eu, tandis que les cols bleus ont été durement affectés et ils étaient plus inquiets.

Nous aussi, on pourrait démontrer que nous avons été de bonne foi. Pendant la durée de la convention collective, M. le maire nous a demandé d'exclure, par exemple, le restaurant Hélène-de-Champlain. Il voulait le rouvrir et ne voulait pas le faire en se servant des employés de la ville qui étaient régis par la convention collective des cols bleus et cela a pris un peu de temps. Je pense qu'on peut dire...

M. Drapeau: Deux ans et demi.

M. Laberge: Non, vous charriez un peu. Cela n'a quasiment pas pris plus de temps que les Olympiques.

Cela a pris à peu près un an et demi. On ne s'obstinera pas longtemps là-dessus, cela n'a pas d'importance, cela a été long, mais c'était quelque chose, n'oubliez pas que demander à des travailleurs de laisser aller un groupe qu'ils ont sous leur juridiction, c'était dans la convention collective. Finalement, on en a convenu et on a demandé, avec la ville de Montréal, d'exclure ces gens de la convention collective afin de permettre à la ville de Montréal de rouvrir le restaurant Hélène-de-Champlain.

Je ne veux pas que personne décide de donner de médailles au syndicat des cols bleus pour ça, mais c'est simplement pour vous dire, même si ce n'était pas facile à faire, que les cols bleus ont accepté de le faire. Cela prend beaucoup d'explications vis-à-vis des travailleurs qui voient déjà leur nombre, dans sa totalité, diminuer de semaine en semaine. (10 h 45)

Pourrais-je vous dire que, dans des situations normales, il y avait 1500 ou 1800 employés auxiliaires. C'était une protection pour les permanents parce qu'ils savaient fort bien que, lorsqu'il arrivait quelque chose, c'étaient les auxiliaires qui étaient mis à pied en premier et eux n'étaient pas dérangés dans leurs fonctions. Mais il reste beaucoup moins d'employés auxiliaires. Il n'en reste presque plus. Et c'est pour cela qu'ils sont plus inquiets.

Encore une fois, je tiens à dire que ce n'est agréable pour personne. Le conflit a duré trop longtemps, le ministère du Travail a fait des efforts pour rapprocher les parties. Je pense qu'en fait, les parties se sont rapprochées. Par exemple, on n'a pas fait un voyage inutile à Québec. Pour la première fois, je pense que Réjean et Henri viennent d'entendre une offre qui n'avait pas encore été faite en négociation, c'est-à-dire que, dans le cas du paiement du salaire pour les employés accidentés, cela couvre aussi maintenant ceux qui sont victimes de maladies professionnelles. La première fois qu'on en a discuté, c'était hier. Ils n'en avaient pas entendu parler. Nous ne sommes pas des sourds, nous autres.

Vous voyez, ce n'est pas inutile. Il y a encore un petit pas de fait. C'est le maire qui m'a appris que Saint-Exupéry avait dit que ce qui compte, c'est de faire un pas.

M. Drapeau: Et un autre, et un autre.

M. Laberge (Louis): On a fait un pas, et un autre et un autre. Mais, de toute façon, M. le Président, je pense que, pour les points de détail, je vais laisser le président du syndicat nous donner ces points, parce qu'il est beaucoup plus familier que moi dans ce domaine.

Le Président (M. Jolivet): M. Gauthier. M. Réjean Gauthier

M. Gauthier (Réjean): Je vous remercie, M. le Président. Je remercie mon confrère Louis Laberge qui a très bien énoncé...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, pour le journal des Débats, pourriez-vous vous identifier?

M. Gauthier: Réjean Gauthier, président du local 301. Je remercie donc M. Laberge, président de la FTQ, qui a très bien présenté la situation. Je ne ferai pas non plus un résumé du déroulement des négociations puisque M. le ministre l'a aussi très bien fait. Je vais me reporter au 16 mars, jour où les 5000 travailleurs cols bleus de la ville de Montréal rejetaient le rapport de médiation, même si le rapport de médiation a tenu compte de plusieurs objectifs syndicaux et qu'à l'intérieur de ces objectifs, ce n'est pas dans leur ensemble qu'ils ont été retenus, sur des sujets qui nous tenaient à coeur et qui faisaient foi de la raison d'une convention collective, de la sécurité au travail, de la mobilité, qu'on ne voulait pas assumer. Ce point litigieux a quand même été tranché par le rapport de médiation.

Il n'en demeure pas mois que les 5000 travailleurs s'étaient aussi donné d'autres objectifs syndicaux qu'ils avaient autant à coeur et qui n'ont pas été retenus dans le rapport de médiation. C'est la raison pour laquelle le rapport de médiation a été rejeté.

Les cinq points qui demeurent en suspens, qui ont nécessité des rencontres depuis dimanche, des rencontres ardues et tard dans la nuit, je vais vous les citer:

L'assurance collective, l'assurance-vie-médi-caments. Je vais citer les points qui demeurent en suspens et le porte-parole syndical, à la table de négociation, va compléter ces points-là.

Donc, l'assurance collective, qui fait partie d'un des principaux objectifs des 5000 travailleurs de la ville de Montréal.

Il y a aussi un autre élément très humanitaire qui fait aussi l'objet d'une des principales revendications, c'est la rétrogradation médicale en cas de maladie.

Troisième point tout aussi important que les deux premiers: Compte tenu des années d'ancienneté que la grosse majorité des travailleurs a cumulées depuis des années et aussi compte tenu de révolution du coût de la vie d'année en année, c'est l'indexation du fonds de retraite, compte tenu surtout du fait que, durant les cinq prochaines années, au-delà de 1000 travailleurs cols bleus devront prendre leur retraite.

Il y a aussi, comme quatrième point, le fait que, depuis les dernières années, de 7200 employés cols bleus que nous étions, nous en sommes à 5400 aujourd'hui. Cette hémorragie, on veut qu'elle arrête un jour, compte tenu du fait que nos emplois profitent à d'autres groupes qu'à celui auquel j'appartiens. On veut que les sous-contrats fassent partie de nos objectifs syndicaux, un des points les plus importants de l'ensemble des 5000 travailleurs.

Compte tenu aussi de l'évolution du coût de la vie, du pouvoir d'achat qui diminue de convention collective en convention collective plutôt que d'augmenter, compte tenu aussi de la masse sala-

riale qui faisait partie de l'augmentation offerte par l'administration municipale actuelle, compte tenu aussi de l'économie de la ville de Montréal et sûrement du budget, on a voulu diminuer les écarts des groupes de salariés par rapport aux autres. On n'a pas voulu avoir une augmentation de salaire supérieure aux autres, on veut tout simplement que, dans une prochaine négociation, on soit en mesure de se rapprocher, si peu soit-il, dés autres groupes à la ville de Montréal. On a soumis une formule qui aurait agi de la sorte sans que l'employeur soit obligé de donner un cent de plus à ce qu'il nous avait offert lors de la négociation.

Quant au maintien du pouvoir d'achat, on a toujours énoncé que les cols bleus avaient cette sécurité-là, on a voulu aussi que cela fasse foi dans la prochaine convention collective. On a aussi demandé à l'employeur que les augmentations de salaire et l'indexation du salaire soient rétribuées au taux horaire et non au taux moven horaire.

Finalement, quand ces cinq points-là feront partie de notre convention collective, il en demeure un qui sera le complément de l'ensemble, le protocole de retour au travail pour maintenir, pour améliorer surtout les relations de travail qui existent à la ville de Montréal.

Je laisse donc la parole à Henri Massé, porte-parole syndical, qui fera un résumé plus complet des cinq points qui demeurent toujours en suspens.

Le Président (M. Jolivet): La parole est à M. Massé.

M. Henri Massé

M. Massé (Henri): Je vais passer rapidement sur les points qui sont en suspens.

Pour les sous-contrats que la ville de Montréal accorde à l'entreprise privée, on a présentement une clause dans notre convention collective qui dit que les contrats forfaitaires, les travaux qui sont faits en tout par les cols bleus de la ville de Montréal continueront d'être faits en tout, les travaux qui sont faits en partie par la ville de Montréal continueront d'être faits en partie.

Le problème majeur, c'est que ce n'est pas défini que ce qui est fait en partie continuera d'être fait en même partie; si bien que, dans les quatre, cinq ou six dernières années et encore dans les deux dernières années, la ville de Montréal a augmenté considérablement l'octroi de contrats à l'entreprise privée; ce qui nous a fait perdre des emplois et ce qui fait en sorte que des employés de métier spécialisé, par exemple, se retrouvent dans des fonctions de journalier ou des fonctions non spécialisées.

Ce qu'on demande tout simplement au niveau syndical, c'est de maintenir en même partie ce que la ville faisait en partie. La ville a fait des déclarations publiques à ce sujet, à savoir qu'il n'était pas question de diminuer les sous-contrats. Elle a distribué des feuillets à tous les membres cols bleus leur disant qu'il n'était pas question d'augmenter les sous-contrats. Tout ce qu'on lui de- mande, c'est de préciser, dans un texte clair de la convention collective, qu'on continuera de faire en même partie ce qui était fait en partie.

Au niveau du mécanisme d'indexation de la caisse de retraite qui aurait pu faire l'objet d'une entente de principe, mercredi à 3 heures, le seul point qui demeure en litige, c'est d'intégrer le texte dans la convention collective plutôt que d'avoir une lettre d'intention, comme nous le soumet la ville de Montréal.

Au cours des dernières négociations, les négociations de 1977-1978, ou d'autres négociations antérieures, la ville a toujours refusé de négocier sur le fonds de retraite. Lorsqu'on est arrivé au niveau de la conciliation au ministère du Travail, la ville s'est même permis de dire aux conciliateurs que le fonds de retraite n'était pas négociable parce que couvert par un règlement du fonds de retraite. Plusieurs employeurs ont des règlements de fonds de retraite, comme celui d'Hydro-Qué-bec, entre autres, qui est régi par un projet de loi privé. Elle s'est permis de négocier avec son syndicat le fonds de retraite. Tout ce qu'on demande, c'est un mécanisme dans la convention collective pour dire que le fonds de retraite fait partie de la convention et qu'il sera indexé. On s'entendra sur la formule de partage des coûts pendant la durée de la convention.

On ne peut se satisfaire, après six semaines de grève, d'une lettre d'intention parce que, pour tous les grands problèmes majeurs qu'on a connus au cours des années passées où on a eu des lettres d'intention, on s'est rendu compte que ces lettres d'intention n'avaient pas été respectées pour différentes raisons. Entre autres, en 1965-1966, on avait une lettre d'intention sur le transport des vidanges où la ville, où M. Saulnier nous disait qu'il ferait faire le transport des déchets par les employés manuels de la ville et qu'on achèterait au fur et à mesure des camions pour le faire. C'est l'inverse qu'on a connu.

On a eu aussi un grand problème en 1972, en 1974, avec la communauté urbaine, concernant l'entretien de la flotte des véhicules automobiles.

A ce moment, le Conseil de sécurité de la communauté urbaine nous donnait une lettre d'intention disant que l'entretien de la flotte de véhicules automobiles continuerait d'être fait par les employés cols bleus de la ville de Montréal. Aujourd'hui, et depuis 1977, c'est fait complètement par l'entreprise privée. C'est pour cela qu'on ne peut pas accepter, à ce stade-ci une lettre d'intention.

Au niveau de la rétrogradation médicale, on a une cinquantaine d'employés par année qui sont rétrogradés parce qu'ils ne sont plus capables de remplir leurs fonctions, soit à la suite d'une maladie industrielle ou d'un accident du travail. On sait qu'on a plus de 2000 cas d'accidents du travail par année à la ville de Montréal; il y a eu plus de 321 000 heures de pertes en 1978-1979. On a plusieurs rétrogradations qui sont touchées directement à cause des accidents du travail. Dans le cas de maladie aussi, que ce soient des problèmes cardiaques ou autres, ce qu'on demande à la ville de Montréal, c'est que l'employé conserve son

groupe de salaire lorsqu'il est rétrogradé pour une raison médicale.

La ville de Montréal nous a fait une proposition en reliant cela au régime d'accidents du travail, lorsqu'un employé est sous le régime d'accidents du travail. La demande qu'on fait à la ville à l'heure actuelle peut se chiffrer, au niveau de la rétrogradation médicale, aux alentours de $30 000 à $40 000 par année. Pourquoi ne pas accepter la proposition de la ville? Ce qu'elle nous demande en retour, c'est une concession qui pourrait se situer entre $200 000 et $500 000. C'est un texte qu'on- nous a soumis mercredi soir à la dernière minute. Il faudrait, pour évaluer la demande de la ville, des économistes, des actuaires pour vérifier les données. On a dit à la ville qu'à ce moment-ci des négociations on ne pouvait s'engager dans un tel processus sans connaître la portée et la valeur réelle de sa demande. On ne voudrait pas, à ce moment-ci des négociations, laisser tomber des bénéfices qui représentent entre $200 000 et $500 000 pour une demande qui en coûte $40 000 à la ville.

De toute façon, ce qu'on dit au niveau de la rétrogradation médicale, c'est qu'une cinquantaine d'employés par année sont durement frappés. Cela ne devrait pas être une question d'argent, mais une question de principe. Ces employés subissent, même à leur retraite, les inconvénients de la rétrogradation médicale. Si un électricien, par exemple, qui est dans la classe 16, est rétrogradé dans le groupe 2, après vingt ans de service, cela veut dire que même à la retraite, puisque la retraite est calculée d'après les dernières années, il est pénalisé. Ce n'est pas normal parce que, dans bien des cas, il a subi cette incapacité à la suite d'un accident du travail ou à cause des mauvaises conditions de travail.

Au niveau de l'assurance collective, il y avait entente de principe entre la ville et le syndicat, sauf qu'il faut souligner à ce moment que la ville va participer à notre régime d'assurance collective, mais on a pris cet argent à l'intérieur même du rapport du médiateur sur nos bonis d'ancienneté, sur les salaires et sur d'autres bénéfices qui étaient prévus. Donc, la proposition que la ville nous fait sur l'assurance collective de nous verser $225 000 par année, on l'a tout simplement enlevé sur d'autres bénéfices. (11 heures)

Au niveau des salaires, ce que le syndicat a exigé et exige encore, c'est une répartition de la masse salariale sur la deuxième année autrement que la ville nous l'offre.

La politique salariale de la ville de 9%-9%-9%, qu'elle a offerte à ces différents groupes, défavorise les employés cols bleus de la ville de Montréal, parce qu'on est le groupe qui a le salaire moyen le plus faible. L'augmentation de 9%-9%-9% donnerait, pour la première année de (a convention, aux employés cols bleus $0.68 l'heure en moyenne, aux cols blancs, $0.825; aux ingénieurs $1.64 l'heure; aux contremaîtres $0.99; aux professionnels $1.30; aux pompiers $1.07 et aux policiers au-dessus de $1.25 l'heure.

Ce qu'on demande, nous, c'est qu'à l'intérieur des mêmes 9%, on réaménage autrement la masse salariale et on est prêt à y aller en deux augmentations au cours de la même année, afin d'aller chercher quelque $0.30 de plus pour diminuer l'écart avec les autres groupes et aussi pour maintenir la parité avec nos confrères de la CTCUM, les gens qui s'occupent de l'entretien à la CTCUM.

On a toujours eu la parité avec ces gens-là, et, comme ils ont prolongé cette année leur contrat de six mois et qu'ils finissent en même temps que nous, ils ont obtenu, pour ces derniers six mois, une augmentation de 4%. Il faudrait absolument avoir une augmentation de $0.30 l'heure pour maintenir notre parité avec ces gens-là. Encore là, on le dit: On était prêt à faire des concessions dans les dernières minutes de la médiation et de la conciliation pour aller chercher une solution à l'intérieur de la même masse salariale.

Enfin, il y a le problème de... On nous dit: On a réglé avec d'autres groupes d'employés à la ville. Ce qu'on veut soumettre, c'est que la plupart des demandes qu'on maintient encore en suspens, ça touche un groupe bien particulier, ça touche surtout les plus vieux employés à la ville de Montréal, que ce soit l'assurance-santé, que ce soit l'indexation du fonds de retraite; ces problèmes touchent les plus vieux salariés et, au niveau des cols bleus, on est le groupe qui a les conditions de travail les plus difficiles. On est le groupe qui a la moyenne d'âge la plus élevée, parce que les employés doivent d'abord travailler cinq, six, sept, huit ans comme employés auxiliaires avant de devenir titulaires.

Enfin, le dernier point, qui est le protocole de retour au travail où il n'y a pas eu d'entente et qui est encore en suspens, on demande que la grève ne constitue pas une interruption de services et ça, on retrouve ça dans tout bon protocole de retour au travail. On demande que les employés qui ont été malades ou accidentés oui qui étaient malades ou accidentés avant le début de la grève et qui ont perdu leurs prestations pendant la durée de la grève reçoivent ces prestations. On a même des cas de cardiologie, des gars qui ont été opérés à coeur ouvert quatre ou cinq jours avant la grève et qui se sont vu couper leurs prestations de congé de maladie durant la grève.

On demande enfin qu'il n'y ait pas de mesures disciplinaires imposées pour différentes activités afférentes à la grève. Ce qu'on dit, c'est que s'il y en a qui ont commis des actes répréhensibles selon les tribunaux, on va laisser les tribunaux les juger. Ce n'est pas à la ville de les juger.

Le Président (M. Jolivet): M. Laramée, deux minutes.

M. Roger Laramée

M. Laramée (Roger): Deux petites minutes. M. le Président, M. le ministre, M. le maire, M. le président de la FTQ, chers confrères, j'ai entendu M. le maire parler tout à l'heure de bonne foi et je pense

que la partie syndicale a manifesté, tout au cours de cette très longue négociation, une très bonne foi, et plusieurs fois aussi. D'abord, le fait qu'on ait négocié, qu'on ait commencé les négociations de façon prématurée en juillet, six mois avant, est une demande du syndicat pour essayer d'éviter d'entrer dans des délais et d'arriver dans un cul-de-sac au début de l'année.

Je voulais surtout relever un point que M. Girard a apporté en disant: Nous avions une entente mercredi dans le courant de la journée, le syndicat l'a rejetée. Si le syndicat a rejeté l'entente, c'est que la ville est revenue sur un des points fondamentaux des demandes de la partie syndicale sur l'indexation à la caisse de retraite. Nous avions la parole des employeurs que ce point-là était réglé et incorporé à la convention collective de travail. Cela a été évidemment un point qui a été très longuement discuté et contesté par les 90 délégués syndicaux du local 301 durant la nuit de mercredi à jeudi qui a précédé l'assemblée générale.

Je pense que ce n'est pas une façon de traiter en relations du travail que d'offrir quelque chose et de revenir ensuite sur cette position. On parle d'entente de principe à une table de négociation. Si on avait fait ça durant le front commun, si on avait fait ça durant la plupart des négociations que j'ai connues depuis quinze ou vingt ans, on aurait eu des conflits qui auraient perduré pendant des mois et des mois. Il y a des points bien précis qui ont été établis par la partie syndicale. Nous sommes bien disposés à la négociation. On n'accuse pas la ville de mauvaise foi. Il y a peut-être eu des erreurs de commises. Celle que je viens de mentionner en est une majeure.

Je pense qu'on ne doit pas, en négociation dans un conflit aussi important, faire une erreur aussi monumentale que celle-là. Nous sommes ouverts à la négociation et en tout temps; pendant la commission parlementaire, on est ouverts aux échanges et, à la suite de la commission parlementaire, nous informons le gouvernement et la ville de Montréal que nous sommes prêts à les rencontrer jour et nuit pour tenter de trouver un règlement. Au SCFP, on n'a jamais négocié de grève, pas plus à la ville de Montréal que dans d'autres secteurs.

Le Président (M. Jolivet): M. le maire. Discussion générale

M. Drapeau: M. le Président, je pense que tout ce débat aura peut-être permis de constater une chose. Le dernier intervenant a fait la confirmation de ce que j'avais dit. Nous étions très près, il y avait un point apparemment qui a fait rater tout le règlement.

Un autre intervenant a dit: "Nous tenons à tout ce que nous avons demandé".

Je formulerais la suggestion suivante, assuré que mes collègues du comité exécutif et que nos directeurs adjoints et autres collaborateurs des services municipaux l'acceptent, puisqu'il en a déjà été question. Pourquoi alors ne pas recourir à la formule d'arbitrage sur l'ensemble de toutes les questions déjà posées par les syndicats, déjà posées par la ville, au lieu de tenter de transformer cette commission en négociation, en négociateurs? Nous souhaiterions, nous serions prêts à l'accepter, nous formulons la suggestion qu'il y ait un conseil d'arbitrage suivant les lois ordinaires du Québec. Il en avait été question la journée du débrayage, mais, à ce moment-là, psychologiquement, j'admets que c'était peut-être un peu tard. Bon, mais c'est pour dire que ce n'est pas une formule nouvelle; j'avais suggéré, dans l'après-midi du débrayage du 12 février, que ça pourrait peut-être se régler par l'arbitrage.

Psychologiquement, j'admets que l'on n'a pas discuté longtemps parce que cela ne semblait pas... Psychologiquement, la température n'était pas favorable. Nous y sommes revenus dans la lettre que j'avais écrite au ministre, tentant de rapprocher sa formule le plus possible de l'arbitrage. Je dis: Pourquoi ne pas confier tout le problème depuis le début à l'arbitrage et la ville acceptera la décision du conseil d'arbitrage? C'est tout à fait dans notre ligne de pensée depuis le début et je crois que continuer les négociations, quand on est venu si près de régler et qu'on dit que le seul point qui restait, le maire est revenu sur son entente... Le texte que j'ai fait parvenir à la connaissance du négociateur du syndicat et du médiateur était le suivant, au sujet du fonds de retraite, puisque c'est de ce point-là qu'on parle et que c'était le point qui, ne se réglant pas, a fait échouer tout le règlement. Je disais: "Comme il n'est pas question du fonds de pension dans la convention collective de travail, mais dans un règlement" — il y a une différence; la convention de travail, c'est accepté, signé par le comité exécutif; un règlement, tout le monde le sait, c'est adopté et modifié par le conseil municipal — "il ne peut être question de modifier le règlement ni de tendre à le modifier par une disposition de la convention collective". Cela nous paraissait clair. "C'est donc sur le règlement et sur l'amendement au règlement du fonds de pension que l'entente doit porter. Le comité exécutif de la ville de Montréal m'autorise à vous donner l'assurance qu'il recommandera au conseil municipal l'adoption d'un projet d'amendement sur lequel les deux parties se sont déclarées d'accord, en suivant la procédure suivante: Les parties s'engagent à étudier conjointement — c'est le texte qui a été accepté par les autres syndicats — pendant la durée de la convention, la mise au point d'un mécanisme d'indexation des pensions. A cette fin, les parties s'échangeront tous les renseignements nécessaires ou utiles pour permettre à leurs actuaires, économistes et comptables de faire les vérifications et études appropriées.

Les travaux de cette étude conjointe incluent le réexamen des divers avantages accessoires aux fins de faciliter le cheminement de l'étude vers une formule ou un mécanisme d'indexation acceptable aux deux parties. Un mécanisme d'indexation ne pourra entrer en vigueur que du con-

sentement des parties sur la formule du partage des coûts".

C'est par ce texte-là qu'on vient dire ici et qu'on a dit ailleurs que le maire avait retiré une entente de principe. D'où vient cette distinction? Elle vient de ceci. Dans le texte, nous disons: Les parties s'engagent à étudier, et le syndicat voulait dire: Les parties s'engagent à négocier. La différence entre la négociation et l'étude, c'est que la négociation est soumise à l'arbitrage et, en aucun cas, la question de pension n'est soumise à l'arbitrage. On ne voulait pas laisser entrer cette distinction dans ce cas-là qui aurait créé un précédent qui influerait ensuite sur toutes les conventions, les 18 conventions de la ville. Nous voulions employer le même vocable ici que dans les autres cas.

Pour aller plus loin, pour témoigner de notre bonne foi, encore une fois, et de notre effort sérieux en vue d'un règlement, puisqu'on semblait tenir au mot "négocier", on a dit: S'il faut employer le mot "négocier", on va mettre cela dans un document séparé et on va dire que ce document ne fait pas partie de la convention. C'est cela qui a été dit dans un autre texte. Ou bien on met dans la convention le texte que je viens de lire où il est dit "s'engage à étudier..." Ou on s'engage à négocier, mais dans un document qui n'entre pas dans la convention, parce qu'aucune de nos conventions ne parle de négocier, mais parle d'étudier.

Toute l'économie des textes de relation de travail entre l'employeur, et cela ne comporte pas seulement la ville, je dois dire que la communauté urbaine aussi... alors, des diverses clauses que nous discutons dans le moment, il faudrait qu'elles soient acceptées également par la communauté urbaine. Or, nous savons, par les représentants mandatés par la communauté urbaine, qu'il n'est pas question d'une autre formule que de celle où nous donnons le choix. Nous employons le mot "étudier" et nous entrons le texte dans la convention, ou nous étudions le mot "négocier" et nous faisons un accord séparé, qui n'entre pas dans la convention, qui n'est pas déposé, donc qui jamais ne pourra être sujet à l'arbitrage, pour que ce cas-là soit exactement de la même nature juridique que tous les autres contrats pour lesquels la ville n'a pas eu de difficulté.

Si on confirme que c'est le seul point qui a fait rater le cheminement d'un règlement ou le règlement, je dis: Choisissons entre les deux. Ou bien, je reviens à ma formule de tout à l'heure, si l'on veut rediscuter tous les points soulevés depuis le mois de juillet dernier, nous suggérons l'arbitrage et la décision liera les parties. Est-ce que la bonne foi de la ville peut être plus évidente que cela?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, d'abord, je voudrais remercier M. Laberge, M. le maire, M. Girard, M. Laramée, M. Gauthier, M. Massé. J'aurais peut-être quelques questions à poser. D'abord, une première remarque, quant à l'exposé de M. Girard. Il a fait allusion au fait que le médiateur avait oublié la clause 19.22 dans son rapport de médiation. J'espère qu'il a soulevé cela comme un détail et non pas comme un vice fondamental, compte tenu du fait que la ville avait une cinquantaine de demandes et le syndicat à peu près 75 et 80 heures pour trancher là-dedans. M. Girard devrait le savoir, parce que lui-même, dans certains textes qu'il a été obligé de soumettre, il y avait aussi certaines erreurs techniques en fin de course. Ce sont des choses qui arrivent dans un processus de médiation.

Sur l'indexation, je pense que, sans entrer, encore une fois, dans les virgules, les parties ici disent que ce qui a fait achopper ce règlement, hier, c'est l'incapacité de s'entendre sur une clause, non pas touchant l'indexation elle-même, contrairement à ce qu'on aurait pu laisser entendre tout à l'heure, mais sur la façon d'en arriver à définir un mécanisme d'indexation quel qu'il soit, ce qui est le cas d'ailleurs d'Hydro-Québec et d'autres, où l'indexation n'est pas nécessairement l'indexation au coût de la vie, mais c'est une formule, qui en cours de route a été ou négociée ou entendue, etc. (11 h 15)

Le problème vient, entre autres, de l'interpré-tion juridique et, encore une fois on ne peut se transformer ni en cour de justice, ni en contentieux, ici. Le problème vient aussi du fait de l'existence ou pas, dans des conventions collectives, de clauses qui touchent la façon d'en arriver à une formule d'indexation par voie de négociation. Je vais poser la question peut-être à M. le maire ou à M. Girard, qui est au dossier: Est-ce que ça existe ailleurs, dans des conventions collectives, un texte semblable à celui de la lettre que m'a envoyée le maire, le 19 mars, qui commence par les mots: "Quant au fonds de pension, la ville s'engage à négocier conjointement avec le syndicat pendant la durée de convention," etc.?

Est-ce que ce type de clause existerait dans des conventions ou dans des lettres d'entente, M. Girard?

M. Laberge (Louis): Dans des conventions.

M. Johnson: Je pose la question du côté de la ville, je vous en prie, M. Laberge.

M. Girard: En fait, à la ville de Montréal, chaque fois qu'on a accepté de discuter ou de négocier le fonds de retraite, nous l'avons toujours fait en dehors des conventions collectives. Il y a effectivement des ententes avec d'autres syndicats pour discuter de ces questions. Dans la convention collective des cols blancs, entre autres, et dans celle des contremaîtres aussi que nous venons de régler, il est prévu que nous allons réviser l'ensemble des avantages accessoires, sans spécifier le fonds de retraite d'une manière précise. C'est sûr qu'un fonds de retraite, cela entre dans les avantages accessoires. Par conséquent, c'est un comité d'étude qui est prévu dans

la convention collective et ça confirme ce que le maire a dit, il n'y a aucune objection à ce que les parties étudient la question, mais nous avons des objections à ce que le fonds de retraite puisse faire l'objet de négociations au même titre que les salaires, compte tenu qu'il y a un règlement municipal qui traite de cette question.

M. Johnson: Vous ne répondez pas tout à fait à ma question, M. Girard. Ce que je demande, c'est si, à votre connaissance, comme négociateur, des clauses traitant de la négociabilité d'une formule d'indexation existent dans des conventions collectives municipales, sous forme carrément d'un texte qui dirait à peu près ce que dit la lettre que me faisait parvenir le maire, mais intégré à la convention ou sous forme de lettre d'entente annexée à la convention. Est-ce que ça existe, à votre connaissance?

M. Girard: A ma connaissance, dans la région de Montréal, ça n'existe pas, mais je ne prétends pas avoir une connaissance parfaite de tout ce qui se passe. A ma connaissance, je ne crois pas que ça existe. Je sais, pour répondre à votre question, que dans plusieurs conventions collectives le fonds de retraite est un objet de négociation, mais les entreprises où cela existe ne sont pas prises avec un règlement municipal comme chez nous.

M. Johnson: Je voudrais simplement, pour votre information et, encore une fois, sans prétendre qu'on puisse trancher sur le fond, dire, que dans les villes de Laval, Longueuil, LaSalle, Dorval, Sainte-Foy, Brassard, Sillery et quelques autres — en pratique, 13 municipalités sur 21 conventions recensées — il y a certains types de clauses qui touchent non pas l'indexation elle-même — et je ne suis pas d'accord avec ce que M. Gauthier dit dans sa façon de le présenter — mais qui touchent, comme sujet juridique, la négociation d'un fonds de retraite qui fait lui-même l'objet d'un règlement municipal, parce que les fonds de retraite des municipalités, en général, font l'objet d'un règlement municipal.

Encore une fois, la distinction est de taille, cependant; la convention collective ne prévoit pas le contenu du règlement; elle implique l'obligation pour les parties de négocier une formule visant elle-même à affecter éventuellement le fonds de retraite qui fait l'objet, par définition, d'une réglementation. Sur le plan statistique, c'est le genre d'étude qu'on aime rendre disponible aux parties: on s'organise au ministère, depuis un an, de ce côté. Je pense que du côté syndical comme patronal, cela peut être utile pour qu'on s'entende bien sur les objets discutés.

Du côté syndical, je poserais peut-être la question à M. Gauthier, cependant. M. Gauthier, je pense que vous avez admis, et j'ai entendu aussi le président de la FTQ tout à l'heure dire que l'essentiel, ce qui faisait le coeur de la "bataille" des cols bleus, c'étaient les problèmes posés par la mobilité, les difficultés que représente pour les travailleurs d'accepter de subir un régime de mobilité dans lequel ils perdent des usages auxquels ils se sont habitués avec le temps quant à l'exercice de leur métier, par exemple. Ce rapport, vous-même, comme le président de la FTQ, vous nous dites: Le coeur du problème est réglé, quant à nous, d'une façon raisonnable dans le rapport de médiation.

Mais là, on nous parle d'autre chose. On nous parle des autres objectifs syndicaux. Une négociation, c'est aussi, à un moment donné, le fait qu'il faut qu'une partie accepte que c'est aussi donnant donnant. On ne peut pas remplir et obtenir tous les objectifs syndicaux pas plus que la ville de Montréal d'ailleurs qui a tenté, dans cette négociation, d'obtenir des objectifs municipaux, si on veut. Il faut que les parties acceptent quelque part que cela doit arrêter, et il ne faut pas se mettre à établir des planchers constamment. Le rôle du ministère, c'est de tenter d'aider les parties à se rapprocher. C'est ce qu'on a fait là-dedans, et en conciliation et en médiation. Mais "jacker" le plancher — pour utiliser une expression qui est bien connue dans les garages en particulier — constamment, à un moment donné, cela ne mène pas à un règlement. Je voudrais qu'au moment où vous aurez à quitter cette enceinte d'ici midi et demi, vous y réfléchissiez.

Le Président (M. Jolivet): M. Laberge.

M. Laberge (Louis): M. le Président, si vous me le permettez, nous sommes forts conscients de cela. Je pense que, pour tous les syndicats affiliés à la FTQ, on a toujours tenté de les avoir, ces ententes. Cela n'a pas toujours réussi, je le concède. Mais n'empêche que je pense que c'est reconnu dans tous les milieux que, lorsque nous négocions, nous négocions pour en arriver à une entente. On n'essaie pas de faire durer des conflits pour le plaisir de la chose.

Comme M. le maire disait tantôt, et M. le maire, avec tout le respect que je vous dois, vous insistez un peu trop sur la bonne foi de la ville, on ne l'a jamais mise en question, on n'a pas dit que la ville était de mauvaise foi, on n'a pas dit cela. Mais cela prend deux parties pour faire une entente et cela prend deux parties pour faire une chicane. Il n'y a jamais personne qui se chicane longtemps tout seul.

Mais, au cours de la semaine, il s'est passé des choses. C'est vrai, ce que M. le maire a dit, dans l'essentiel, on ne s'enfargera pas dans les fleurs du tapis, c'est venu très près, très près. Mais, à un moment donné, il y a quelqu'un qui a eu la bonne idée de dire qu'il y avait une assemblée convoquée pour le jeudi matin. Ce n'était pas le syndicat. En fait, on a dû se virer vite et faire une assemblée convoquée par le syndicat.

Une Voix: C'est la ville!

M. Laberge: Je ne dis pas que c'est la ville. M. le maire!

M. Johnson: C'est une assemblée qui a été convoquée par les journalistes, si je comprends bien?

Une Voix: Surtout pas.

M. Laberge (Louis): Mais, de toute façon, le danger qu'il y a, vous savez que lorsque une assemblée de membres, ce n'est pas tout à fait comme une assemblée du conseil municipal.

M. Drapeau: Hélas!

M. Laberge (Louis): Je sais que vous avez une opposition farouche, mais vous vous arrangez assez bien avec votre opposition.

Nous autres, il y avait 5000 travailleurs ou à peu près, à l'assemblée. Le danger, quand on fait un rapport et que 5000 travailleurs disent non, ne vous imaginez pas que, le lendemain, on peut revenir avec le même rapport et qu'ils vont dire oui. Ce n'est malheureusement pas comme cela que cela fonctionne.

Je m'excuse si je m'éloigne un tout petit peu du sujet, mais je pense que c'est important de dire cela. C'est pour cela qu'il y en a parfois qui disaient: Comment se fait-il que vous ne retournez pas voir vos membres? Si on retourne voir les membres dans un moment qui n'est pas propice, bien souvent, cela vient de rendre la solution extrêmement plus difficile. C'est un peu la situation dans laquelle on est: 5000 travailleurs en assemblée qui commencent à regarder l'augmentation de 9% et qui commencent à réaliser qu'un policier, cela va lui donner $1.25 l'heure d'augmentation, alors que, eux, cela leur en donne $0.60... Si la livre de beurre a augmenté de $0.10, elle a augmenté de $0.10 pour le policier, pas plus, et $0.10 pour un col bleu. C'est la même affaire. Mais le col bleu, lui, a à peu près la moitié de l'augmentation d'un policier.

Ce sont des choses dont se parlent les gens, lorsqu'ils sont en assemblée. Ce sont des choses qui sont là, ce sont des choses qui sont véri-diques. On a beau dire que c'est les mêmes 9%, mais 9% pour un gars qui gagne $30 000, c'est deux fois plus que pour un gars qui en gagne $15 000. Pas besoin d'être avocat, statisticien, économiste ou n'importe quoi pour comprendre cela, cela se calcule très facilement. C'est cela l'affaire.

C'est vrai qu'on est venu très près. Je pense que M. le maire, qui a l'habitude du vocabulaire, c'est un homme aguerri, sait fort bien qu'il y a toute la différence au monde entre étudier et négocier. Je comprends que M. le maire ne veut pas être "poigné" pour qu'à un moment donné, le fonds de retraite soit décidé par un arbitre. On comprend cela.

Mais vous savez fort bien qu'il y a eu des commissions qui ont étudié des patentes et qui ont étudié cela fort longtemps. Cela ne mène jamais nulle part. Négocier, cela veut dire que les parties doivent, de bonne foi, essayer de régler ce problème.

Il y a un problème. La ville reconnaît qu'il y a un problème. Le maire nous a même lu, hier je pense, l'extrait d'un chapitre qu'il vous avait envoyé, M. le ministre, et que nous n'avons pas, nous autres, mais, enfin, la ville reconnaît qu'il y a un problème, la ville semble être intéressée à essayer de trouver des solutions au problème.

C'est ce qu'on veut, sauf que dire "étudier" et dire cela de façon un peu molle, on est rendu un peu loin pour cela. Il me semble que ce n'est pas la fin du monde qu'on demande. Je comprends, M. le ministre, le désappointement du ministère, vous avez fait tellement d'efforts là-dedans, sauf qu'il y a quand même 5000 travailleurs qui, de façon absolument spontanée et enthousiaste, ont dit non. C'est 5000 travailleurs. S'il y en a parmi vous qui pensent qu'ils peuvent faire un meilleur job, ils seraient les bienvenus d'aller les rencontrer.

M. Johnson: Si vous permettez, juste brièvement, M. Laberge. Il y a 5000 travailleurs, oui, c'est vrai. La négociation collective, c'est cela et je pense que tous les membres de cette commission sont conscients de cela. La ville de Montréal est consciente de cela. Une négociation et l'exercice d'un droit de grève, c'est un rapport de forces, mais le rapport de forces a ceci de particulier à la ville de Montréal, c'est que cela touche les citoyens qui, en même temps, soit dit en passant, sont ceux qui paient. Ils paient en termes d'absence de services dont ils sont les victimes, à cause d'allongement dans le temps de la grève et, deuxièmement, ce sont eux autres qui vont payer la facture au bout. Il faut être conscient de cela. Les employeurs, c'est aussi un peu tous les contribuables de Montréal. Enfin!

M. Laberge (Louis): On est habitué à payer bien des factures à Montréal.

M. Johnson: Oui, je sais cela. Tout le monde paie bien des factures à Montréal, pour le présent comme pour le passé, mais c'est pour cela que j'ai de la difficulté, M. Laberge, à me contenter simplement de discours: Oui, on va essayer d'en arriver à une entente, etc. On peut faire un bout, mais il faut que les travailleurs... Oui, mais il y a aussi les tiers, cela s'appelle le monde. Quant à moi, cela veut dire qu'il va falloir que quelqu'un s'en préoccupe. Je suis sûr qu'il n'y a personne qui se ferme les yeux là-dessus, ni au SCFP, ni au bureau du maire de la ville de Montréal. Tout le monde est bien conscient de cela. C'est beau d'en être conscient, mais il faut faire quelque chose. Faire quelque chose, c'est régler.

Je voudrais juste vous amener, ce matin, le plus possible à comprendre que, si cette commission est convoquée, c'est parce qu'elle veut vous faire sentir, de part et d'autre du Parlement, le sentiment d'urgence qu'on a et d'imminence nécessaire d'un règlement à la ville de Montréal pour les citoyens de Montréal. Dans ce contexte-là, on espère que vous allez y réfléchir solidement, d'ici pas longtemps.

M. Laberge (Louis): Pourrais-je ajouter deux mots, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. Laberge.

M. Laberge (Louis): Si vous me permettez, je vais être très bref. On est fort conscient de cela. On sait fort bien que vous n'avez pas décidé de convoquer la commission parlementaire juste pour le plaisir de nous voir la fraise. C'est bien sûr. On est fort conscient de cela.

M. Johnson: M. Laberge, disons que le pire des règlements vaut la meilleure des lois spéciales.

M. Laberge (Louis): On est fort conscient de cela. Si c'est vrai que c'est dangereux que la commission parlementaire du travail devienne une espèce de supercomité de négociation avec tout ce que cela pourrait entraîner, il est aussi vrai, M. le ministre et M. le Président, que, de l'autre côté, si vous réglez toujours par des lois spéciales, ce n'est pas non plus un encouragement pour ces gens à négocier et à trouver des ententes. L'un est aussi vrai que l'autre. J'espère que tout le monde est aussi conscient de cela.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, très brièvement, j'aurai quelques questions à poser. Même si, ce matin, conjointement, tout le monde a convenu qu'on ne devait pas ramener le débat à un débat de négociation, on a passé proche d'en arriver à la négociation à partir des questions de fond qui ont été soulevées et qui ont été abordées. C'est sur le bord, comme dirait le ministre.

J'ai été heureux de constater que le débat est assez serein jusqu'à maintenant; on a déjà vu pire que cela. On est dans une situation où le portrait est à peu près le suivant: On a une grève qui dure depuis quarante jours. Les travailleurs ont exercé un droit qui leur appartient, un droit qui est légitime, un droit qui est prévu dans nos lois et qui fait partie des règles du jeu de négociation de conventions collectives. (11 h 30)

Comme je disais au début, dans une entreprise privée, lorsque les parties sont en grève, la responsabilité du gouvernement est limitée à faire valoir et à faire en sorte que les mécanismes prévus au Code du travail fonctionnent et que cela agisse.

Dans un conflit public comme celui qui nous occupe ce matin, la responsabilité du gouvernement, des parties aussi, se situe et va vers un autre niveau. Entre autres, ce matin, un élément qui a été complètement absent dans notre débat, c'est le public à Montréal qui a à souffrir, certaines journées avec plus d'acuité que d'autres journées, des effets de la grève. On n'en a pas entendu parler, ce matin. On n'a pas abordé la question des services essentiels. On n'a pas abordé la question des effets négatifs pour certains groupes de la société. Sans vouloir dramatiser, tout le monde conviendra qu'une grève qui touche 5600 travailleurs, les cols bleus de Montréal, cela affecte particulièrement du monde à certaines périodes. On n'a pas parlé non plus de la responsabilité des parties, parce que les parties ont une responsabilité. Un syndicat, comme le Syndicat canadien de la fonction publique, qui a une bonne crédibilité selon moi, ne peut demeurer insensible à une obligation comme celle-là, une obligation qu'il a, non seulement envers ses membres, mais aussi envers le public en général, surtout dans un contexte où le conflit est dans une municipalité, où ces gens, somme toute, ne sont pas les employés de la ville, mais les employés des citoyens.

La municipalité a une responsabilité aussi. Autant je peux exprimer des réserves, personnellement, et ce, au nom de ma formation politique, à l'égard d'une déclaration disant qu'après 40 jours, c'est peut-être plus ou moins grave, on exerce un droit légitime, etc, — d'accord, mais on peut exprimer des réserves — autant on est en droit d'exprimer des réserves à l'égard d'une position de la ville qui, elle aussi, a une responsabilité non seulement budgétaire, mais une responsabilité de service devant ses citoyens, quand on en est rendu à discuter de l'effet ou de la différence du terme "négocier" et "étudier". Quant à la responsabilité des parties, malheureusement, dans le temps assez bref que nous avons ce matin, jusqu'à 13 heures possiblement, on aurait pu en parler et on aurait pu aborder la question une fois pour toutes; parce que trop souvent, dans des conflits publics comme celui-là, ces questions ne sont pas abordées et ne sont pas discutées.

Il y a eu des portes d'ouvertes, ce matin. Je comprends du conflit... sans revenir sur le fond, et ce, à la lumière des déclarations de M. le président, au lendemain du refus du rapport Désilets, je vais citer la Presse du 15 mars dernier: "Tout en admettant que le rapport Désilets répondait à plusieurs attentes syndicales, notamment au chapitre de l'ancienneté, de la mobilité de l'emploi, de la sécurité de santé et de la juridiction syndicale, etc." Je suspends la citation et je reviens à la nouvelle du journaliste. Je n'ai pas l'intention de leur imputer le motif... on n'impute pas de motif, c'est de l'autre côté. Quand cela ne va pas bien et quand cela n'est pas à leur goût, c'est de la faute-des journalistes ou du fédéral. Je n'impute pas de motif, ni aux journalistes, ni au ministre...

M. Johnson: En général, du fédéral.

M. Pagé: "Le président, M. Réjean Gauthier, demande et obtient à 80% un mandat clair pour retourner négocier les questions touchant l'indexation du fonds de pension, la rétrogradation médicale et l'assurance-groupe."

Le ministre du Travail, dans la Presse du 18 mars, je cite M. Johnson: "Les cols bleus de Montréal ont eux-mêmes reconnu que le médiateur, M. Raymond Désilets, leur avait donné satisfaction pour l'essentiel de leurs revendications, c'est-à-dire en ce qui concerne la sécurité d'emploi. Ils ont eux-mêmes qualifié tout le reste d'accessoire ou de moins important... ce qui ne signifie pas qu'il ne reste pas de problème de fond."

Je me dis qu'on a un conflit qui perdure, des gens sont affectés. Pour l'essentiel, on peut dire

qu'il y a plusieurs points qui sont réglés par le rapport de médiation. D'ailleurs, chapeau aux gens qui ont fait la médiation. Ils ont fait un bon job. Aujourd'hui, on arrive et on cerne le ou les points. D'ailleurs, cela a été cerné par vous autres, mercredi dernier, parce que les deux parties conviennent et acceptent que cela a passé proche, mercredi soir. Cela est passé tellement proche qu'à un moment donné, le ministre est entré en Chambre et, je suis pas mal convaincu — je le connais assez bien, vous savez, même si on n'est pas toujours d'accord — j'ai cru percevoir chez lui qu'il s'en venait avec une bonne nouvelle, mais heureusement, il ne l'a pas annoncée trop vite. D'ailleurs, vous en convenez, cela est passé proche.

On se retrouve aujourd'hui, et cela ne semble plus aller du tout. Il reste encore des points de fond, etc. M. le maire, vous avez ouvert la porte de l'arbitrage tantôt sur les points qui restent. C'est peut-être une solution, quoique je sois un peu surpris de voir que cela vienne d'un élu, parce que c'est, somme toute, laisser entre les mains d'un tiers, une responsabilité à l'égard de laquelle, une ville ou un élu est tributaire devant les électeurs en termes de piastres et de cents. Cela me surprend, mais quand même, on l'accepte. J'aimerais demander, soit à M. Gauthier, ou à M. Massé, ce que vous répondez à cela?

M. Laberge (Louis): Si vous permettez, je viens de vérifier avec M. le maire pour être bien sûr que tout le monde comprend la même chose. M. le maire a suggéré un arbitrage non pas sur les points qui restent, sur toute l'affaire. Nous calculons que ce n'est pas une offre bien raisonnable surtout particulièrement à ce moment-ci, après qu'il y a eu tellement d'efforts de déployés de la part du médiateur du ministère du Travail et des comités de négociation. Enfin, c'est pour ça qu'on ne l'a pas relevé tantôt, mais nous sommes conscients...

M. Pagé: Oui.

M. Laberge (Louis): ... qu'un conflit dans le secteur privé et un conflit dans le secteur public, ce n'est pas la même chose. Je pense qu'on l'a toujours démontré. Dans le secteur privé, si les gars tombent en grève, ils perdent leurs salaires et le "boss" perd son profit. Dans le secteur public, il n'y a que les travailleurs qui perdent leurs salaires; les administrateurs ne perdent jamais rien, eux. On est conscient que cela fait une grosse différence.

M. Laramée: Si vous permettez?

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. Laramée.

M. Laramée: Je voudrais répondre peut-être un peu plus à la question du député de Portneuf.

On a vécu l'arbitrage dans le mouvement syndical avant 1964, dans les secteurs public et parapublic, et on sait ce que cela a donné dans le temps. Je ne peux pas concevoir que les parties ne puissent pas s'asseoir et négocier honnêtement les cinq points qui restent à négocier, plus le protocole de retour au travail. Je ne vois pas comment un arbitre pourrait trancher la question et satisfaire les deux parties. Le plus grand danger, dans un arbitrage sur les points qui demeurent en litige, c'est que, justement, les deux parties ne soient pas satisfaites et qu'on crée plus de problèmes, durant la vie de la convention collective et sur les points imposés par l'arbitre, que si on pouvait négocier et même concéder, de part et d'autre, des points fondamentaux qui restent à régler. Ce ne sont pas des points qui sont du charriage de la partie syndicale. D'une part, la rétrogradation médicale, c'est une responsabilité sociale, je pense, envers les employés de la ville de Montréal. Bon Dieu! On a reculé dans les salaires à la ville de Montréal, comparativement à d'autres groupes de salariés dans l'arrondissement de la ville de Montréal et, plus particulièrement, pour les mêmes corps de métiers à la Commission de transport de la ville de Montréal, de $0.50 ou de $0.60 l'heure. On leur propose, dans la troisième année — ça, c'est fondamental pour nous — de nous permettre de récupérer un peu pour que les travailleurs, les mécaniciens de la ville de Montréal puissent se comparer un peu mieux avec les mécaniciens de la CTCUM. On dit:

A l'intérieur de la même masse salariale, M. le maire, M. Perron, M. Girard, divisons cette masse en deux pour faire en sorte que le taux horaire se rapproche un peu de celui d'autres salariés qui font exactement le même salaire. Il me semble que ça pourrait être compris.

Concernant la rétrogradation médicale, si quelqu'un a passé 20 ans dans un secteur et que parce que peut-être — et je dirais même que j'en suis certain — la ville n'a pas pris les précautions nécessaires, le bonhomme a travaillé dans le bruit pendant 20 ans et devient sourd, on va admettre que c'est raisonnable que le bonhomme perde $1.25 l'heure parce qu'il est devenu sourd, à la suite de son travail durant 20 ans? Ce n'était pas dans les propositions qui ont été faites au moment où on a été près d'un règlement. Cela a été discuté un peu hier dans une rencontre informelle et cela a été dit ce matin, peut-être par inadvertance, par M. Girard.

Caisse de retraite: il y a sûrement un moyen, bon Dieu! de trouver... Quand M. le maire me parle d'une lettre d'intention, aie! j'ai connu ça, depuis quinze ans dans le mouvement syndical, des lettres d'intention des patrons avec toute la bonne foi qu'ils ont démontrée. Cela n'a, trop souvent, rien donné. On veut que ce soit une clause précise de la convention collective qui nous donne des droits qu'on peut, ensuite, faire respecter. C'est un autre point fondamental, la moyenne d'âge des salariés à la ville de Montréal est assez élevée.

Vous savez, on avait une moyenne d'âge qui était relativement bonne quand on avait nos 1500 ou 1600 auxiliaires qui venaient à peine d'entrer à la ville de Montréal. On enlève ces 1500. Puis-je vous dire que la moyenne d'âge a augmenté et

que ça devient une préoccupation beaucoup plus forte en 1980 que ça ne l'était au cours des dernières négociations, parce que depuis la dernière négociation, il y a 1500 auxiliaires de moins à la ville de Montréal? C'est une préoccupation qui devient très forte et, quand on se rapporte devant 5000 personnes en assemblée générale et qu'on leur dit que, sur ces points-là, il y a une lettre d'intention du maire, avec tout le respect que les 5000 salariés ont pour le maire de Montréal, ce n'est pas possible.

Il y a également le protocole de retour au travail. Ecoutez, pour ma part, j'ai négocié des protocoles de retour au travail dans des secteurs très près du gouvernement, beaucoup plus que la ville de Montréal, parce que ce sont deux entités complètement distinctes. J'en ai négocié avec l'institution de haut savoir qu'est l'Université de Montréal et on est venu à bout de s'entendre pour dire: On met fin à un conflit et on essaie de rétablir la paix industrielle dans notre industrie pour le mieux-être de l'industre et le mieux-être des gens qu'on représente de part et d'autre.

J'ai même suggéré à M. le maire, au cours d'une couple de rencontres, qu'on ait un comité, un comité patronal-syndical pour regarder toutes les relations patronales-syndicales qui existent entre la ville et le syndicat.

Quand on dit que les gens ne veulent pas s'impliquer dans une lettre d'intention, quand on demande que les gens soient protégés pour des mesures disciplinaires, on dit: Ce n'est pas nécessairement pour le stupide qui est allé créer des problèmes sérieux et criminels, mais on sait fort bien, parce qu'on a 700 ou 800 griefs à l'arbitrage actuellement, et dans ça il y a beaucoup de mesures disciplinaires, ce sont des choses que l'on vient de vivre, que les 5000 cols bleus ont vécues, que là, on devrait prendre la parole de la ville pour dire: On ne sera pas trop sévère sur les mesures disciplinaires, quand on a 500, 600 ou 700 griefs qui sont portés à l'arbitrage parce qu'on n'a pas pu s'entendre.

On demande donc à la ville: Mettons fin au conflit, on est prêt, pour notre part, à faire le bout de chemin et à s'engager et même à avoir un comité pour essayer de regarder toutes les relations de travail. Je pense que c'est le pire endroit, sauf peut-être Hydro-Québec, qui existe à l'intérieur des 266 conventions collectives que l'on signe au SCFP au Québec et notre moyenne au bâton pour les grèves n'est pas si mauvaise que ça. Malheureusement, cette année, on en a connu deux grosses, Hydro-Québec et les cols bleus de la ville de Montréal, mais regarder l'ensemble et je pense que le SCFP fait une maudite belle job. On ne négocie pas des grèves, je le répète. Mais, sans douter de la bonne foi de la ville de Montréal, je lui demande, bon Dieu! de faire un effort, parce que c'est un effort qu'elle a à faire pour le respect des cols bleus; dans les mesures disciplinaires, qu'on cesse de le faire de façon quotidienne et qu'on s'engage, pour mettre fin au conflit, à ne pas en avoir. C'est un point fondamental. C'est une question de solidarité de 5000 travailleurs.

Le Président (M. Jolivet): M. le maire.

M. Drapeau: M. le Président, je m'emploie, nous nous employons à ne pas — pour nous rendre au désir de cette commission — transformer la commission en séance de négociation. Je ne relève pas chacun des points que l'on vient de souligner parce que je crois que ce n'est pas l'endroit.

Si on me dit que c'est l'endroit, on va les relever; on a toute la documentation et on a les collaborateurs. Ne sachant pas ce que seraient les travaux de cette commission ce matin, on est venu avec des collaborateurs. Si c'est ça on va en discuter à fond. Si ce n'est pas ça, je n'en remets à ce que j'ai dit tout à l'heure et je ferai précéder ça d'une considération sur la rétrogradation médicale, parce qu'on n'en a pas parlé.

Il ne faudrait pas croire qu'à la ville de Montréal nous sommes des sans-coeur et des meneurs d'esclaves. Nous sommes prêts, et nous l'avons dit, même si dans le rapport du médiateur, il n'en est pas question, si on veut corriger cette question, à dire qu'à la suite d'un accident, si un employé ne peut plus remplir exactement la même fonction qu'avant mais peut remplir une fonction pour laquelle il est moins payé, nous allons continuer de lui donner tous les avantages. Récemment, nous le disons, parce qu'à tout seigneur tout honneur et rendons à César ce qui est à César, c'est M. Laramée qui, hier après-midi, a posé la question de la possibilité de joindre à ça les maladies professionnelles. MM. Perron et Girard ont dit: C'est nouveau ça? On va regarder. Et dans la même conversation ils ont dit: "Oui, on serait prêt à recommander à l'administration d'ajouter non seulement les conséquences d'accidents, mais aussi les maladies professionnelles".

Donc, ce que je vais dire, ça s'appliquerait aux maladies professionnelles. Nous disons: Nous sommes prêts à accorder ça, mais, pour les raisons qui ont été expliquées plus tôt, nous disons: C'est le temps de corriger une autre anomalie puisque les accidentés — et là, ce seraient même les victimes de maladies professionnelles — se trouveraient à recevoir plus que ceux qui travaillent. On dit donc, pour corriger cette injustice ou cette anomalie sociale, que celui-là qui n'est pas capable de travailler autant qu'avant puisse avoir les mêmes privilèges et le même salaire, ainsi que tous les avantages qui en découlent, comme s'il continuait d'occuper sa fonction, il faudrait bien s'entendre que c'est le salaire net, parce que si ce n'est pas le salaire net, c'est plus payant d'être accidenté que de travailler. Alors, ça devient injuste pour tous ceux qui travaillent. C'est ça la suggestion qu'on a faite pour corriger. On a dit: On va l'accepter, mais, en même temps, on va s'entendre. Ce ne sera pas le plein salaire, ce sera le plein salaire net. Je le répète, parce que c'est tellement extraordinaire que ce n'est pas croyable. On a eu du mal à me convaincre de ça, tellement ça me paraissait loufoque. (11 h 45)

Quand les gens sont accidentés et que, pendant six mois, ils ne peuvent pas travailler, à la fin, ils sont payés plus que ceux qui ont travaillé. On dit: Corrigeons cela. Ce surplus qu'on donne à des gens comme un surplus quant à celui qui travaille, corrigeons cela et donnons à celui qui ne l'a pas; ce n'est pas un surplus, c'est un dédommagement. On va le lui donner, on est prêt, mais corrigeons l'autre anomalie qui fait que l'accidenté est mieux placé.

Cette situation n'est pas une interprétation, c'est une question de fait et c'est admis. Tout le monde admet qu'il faudrait que ce soit corrigé. On a dit: Profitons-en tout de suite. Nous admettons cela; même si le médiateur, voyant l'impasse dans laquelle c'était, disait: On n'y touche pas, nous disons: Nous allons rouvrir cela. Nous allons l'accorder et, en même temps, nous allons corriger une situation qui devient injuste pour tous les travailleurs non accidentés, puisque, quand on est accidenté, on reçoit plus que quand on travaille.

On parle de la rétrogradation médicale comme si on était des sans-coeur. On n'est pas des sans-coeur, mais c'est l'argent de tout le monde. Alors, on dit: Ce surplus qui ne devrait pas être payé, donnons-le à celui qui devrait avoir cela comme compensation et personne ne va perdre. Il y a quelqu'un qui va perdre un surplus, il va perdre un bénéfice, mais au-delà de ce à quoi il a droit quand il travaille. C'est cela, la vraie situation.

Je reviens donc à ceci parce qu'on s'approche quand même des limites. J'ai noté qu'au point de vue de l'arbitrage, il ne semble pas y avoir une réponse favorable de la part du syndicat. Je réitère donc: Ou bien c'est l'Assemblée nationale qui se voit contrainte d'adopter une loi, ce que nous ne voulons pas, ce que nous ne souhaitons pas depuis le début. Donc, qu'on ne tire pas de supposition, de conclusion, qu'on ne voie pas d'insinuation, les législateurs ne doivent pas ou doivent éviter d'avoir à adopter des lois pour régler des conflits. Comme il a été révélé ici, confirmé ici qu'on est venu très près...

Ou bien les parties pourraient, séance tenante, admettre qu'il n'y a plus que ce point-là et si, d'ici 24 heures, elles ne s'entendent pas, avant d'aller à la loi, il faudrait peut-être demander au syndicat d'accepter l'arbitrage obligatoire, l'arbitrage qui lie les parties. Mais c'est bien évident qu'autant pour le syndicat que pour la ville, l'employeur et les employés, si c'est un arbitrage, il faudrait, pour qu'il n'y ait pas de confusion ou de contradiction entre certains principes contenus dans la décision de l'arbitre sur certains points et certaines décisions ou recommandations contenues dans la médiation, comprendre que c'est tout le problème qui est étudié par un conseil d'arbitrage et souhaitons qu'à ce moment-là, cela serve pour bien des années à venir, parce que cela aura été un conseil d'arbitrage.

Donc, je résume. Ma solution est celle-ci. S'il y a une entente et une admission ici qu'il n'y a qu'un point, l'indexation, nous quittons; dans les 24 heures, les parties s'entendent, parce qu'on s'entend sur le fond. On s'entend tellement que M. l'actuaire Guérard est ici précisément pour témoigner, si c'est nécessaire, que, dans le cas des fonctionnaires, son travail est même commencé. Le comité conjoint a commencé son travail et c'est tellement long et difficile que, dans la convention qui s'est terminée et dans l'entente qui est renouvelée avec les syndicats, il est dit, de consentement, que le mandat de la commission conjointe est prolongé.

Le travail est commencé, les études sont très longues. M. Guérard est ici. Cela prend des mois et des mois pour trouver les éléments de base. C'est plus qu'une promesse; dans le cas des autres, le travail est commencé, les commissions ont été formées et le travail se poursuit. Nous nous entendons donc pour dire: II ne reste que cela. On essaiera de s'entendre et cela mettra fin au conflit. Et si, dans les 24 heures, cela n'est pas terminé, je réitère que la solution serait d'insister, de suggérer, pas d'imposer puisque ce serait une loi, mais de suggérer, pour éviter une loi, que l'arbitrage soit le recours final.

M. Laberge (Louis): M. le Président, la façon dont le maire nous montre ça, encore une fois, je ne veux pas dire que la ville est sans-coeur, ce n'est pas ça, mais il reste...

M. Drapeau: II y a des gens qui peuvent le penser.

M. Laberge (Louis): ... vu que vous l'avez mentionné, je suis obligé de relever ça. Mais il reste que depuis 50 ans qu'il y a des conventions collectives à la ville de Montréal, ceux qui sont malades, victimes de maladie professionnelle, ne sont pas couverts. Appelez ça comme vous voulez, ils ne sont pas couverts actuellement. Là, vous dites que vous êtes prêt à les couvrir. Bien oui, mais, les autres années? Je veux bien que vous regardiez la situation telle qu'elle est.

L'autre affaire, le maire a raison, il dit: On Dourrait profiter de l'occasion pour corriger une anomalie. C'est le mot que vous... On est d'accord avec ça, sauf que pas un cheval, un lapin. Pourquoi ne pas profiter de l'occasion pour corriger une autre anomalie aussi, on vous en a mentionné une tantôt. Si ça ne coûte pas plus cher à la ville, ça corrige une anomalie et, en même temps, on profite de ça pour corriger une autre anomalie. Cela m'amène quasiment à vous dire, M. le ministre, si vous nous donniez une salle quelque part et que vous barriez la porte, nous en sortirions avec une entente, peut-être bien.

Regardez les visages ouverts et souriants des négociateurs syndicaux et regardez-nous, vous allez voir qui s'entête.

Le Président (M. Jolivet): M. Laberge, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Très brièvement, M. le Président, je me demandais presque si M. Laberge avait repris l'école de pensée de notre ex-collègue, M. Bellemare, parce que c'était une façon qu'il privilégiait, à l'occasion.

J'aurais une très brève question. Je remercie M. Laramée, le directeur du syndicat, de ses commentaires qui sont certainement très intéressants, entre autres, à la lumière du dossier santé et sécurité à la ville de Montréal.

Je vous ai posé une question à laquelle vous m'avez répondu non; je vous la reformule autrement, parce que j'ai l'impression que si on vous laissait aller, vous seriez presque disposé à négocier et même ici. Si l'arbitrage se faisait à partir du ou des points qu'il restait à régler mercredi soir, là-dessus, seriez-vous d'accord?

M. Laberge (Louis): Là, j'ai l'impression que c'est de l'autre bord.

M. Pagé: La balle serait dans leur camp.

M. Laramée: Je crois que les règles du jeu établies à l'intérieur du Code du travail ont été rigoureusement respectées par la partie syndicale et nous nous opposerions farouchement à porter à l'arbitrage les cinq points qui restent, y compris le protocole de retour au travail. Je douterais fort qu'un arbitrage se prononce sur un protocole de retour au travail, d'une part, et, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, je suis persuadé que les points fondamentaux qui demeurent en négociation ne pourraient pas faire l'affaire de la partie patronale et syndicale dans un arbitrage.

Il y a une question de principe. Si jamais le ministre du Travail nous soumettait un amendement au Code du travail pour nous amener là, je vous dis qu'on aurait une bonne bataille en main et on la ferait à ce moment-là.

M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, c'est parce qu'il y avait le député de Chauveau, ça va? Allez-y.

M. Johnson: Allez-y.

M. O'Neill: J'aurais eu besoin de quelques éclaircissements dans ce débat concernant, entre autres, la question du statut des cols bleus, c'est-à-dire le statut de ceux qui ont la permanence et ceux qui ne l'ont pas, les occasionnels ou les auxiliaires. Dans ce cas-là, je voudrais savoir combien de temps on peut travailler au service d'une ville comme Montréal et ne jamais avoir de permanence. Je vous dis ça, parce qu'on m'a parlé de gens qui étaient occasionnels, la seule permanence qu'ils avaient, c'était d'être des occasionnels permanents.

M. Laberge (Louis): II y en a qui ont été huit ans ou neuf ans...

M. O'Neill: Je voulais seulement savoir ça. Deuxièmement, est-ce qu'on peut établir un lien direct entre cette diminution considérable de cols bleus et le système qui a été établi de la multiplication des sous-contrats? Est-ce que c'est un lien qu'on doit établir entre les deux ou si c'est simplement à cause d'une sorte de réorganisation plus efficace et d'affectation nouvelle?

M. Laberge (Louis): Les deux.

M. Drapeau: La réponse vient un peu vite, on corrigera tout à l'heure.

M. O'Neill: Ma troisième et dernière question est celle-ci. Je voudrais clarifier ce qui a été dit tout à l'heure, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Un instant, il y a du bruit, voulez-vous vous approcher du micro?

M. O'Neill: D'accord. Voici ma troisième question, M. le Président. C'est pour comprendre ce qui vient de se dire au cours des dernières minutes. Je pense qu'il s'est dit quelque chose qui m'apparaîtrait extrêmement important pour en arriver à une solution du problème.

La question, me semble-t-il, a été posée, à savoir si on était prêt, oui ou non, au moment où on se parle, à accepter une formule qui consisterait à un arbitrage sur les seuls points en suspens. J'ai cru qu'à un moment donné, la partie syndicale semblait d'accord sur cela, sauf vers la fin où j'en étais moins sûr, alors que du côté de M. le maire, si j'ai bien compris, M. le maire disait que lui, il était prêt à une formule d'arbitrage, pourvu qu'elle porte sur l'ensemble du problème, faisant appel à ce moment-là à quelque chose que je n'ai pas compris, sur lequel j'aimerais qu'il nous donne des explications, faisant appel au fait qu'il faudrait qu'un arbitre fasse une évaluation du lien qu'il y a entre des principes qui auraient été appliqués dans d'autres parties de la convention et les points eux-mêmes demeurés en suspens pour s'assurer qu'il n'y ait pas de contradiction entre les deux. Je voudrais qu'il nous donne des explications là-dessus. Cela nous aiderait à comprendre la raison de cette réticence à accepter un arbitrage qui porterait simplement sur les points qui sont demeurés en suspens.

Le Président (M. Jolivet): M. le maire.

M. Drapeau: Sur ce point, si on me permet, le médiateur rencontre les parties, ensemble et séparément, et il essaie ensuite d'en arriver à des conclusions qui seront ses recommandations. A ce moment-là, tenant compte de telle et telle chose, de tel et tel facteur dans l'appréciation de tel et tel point, il tient compte à son tour, sur un autre point, de tel et tel facteur ou de tel et tel élément qui joue. Finalement, cela devient un compromis que le médiateur soumet.

S'il y a arbitrage sur les points qui restent, il pourrait arriver que l'arbitre se prononce sur des points qui restent et cela semblerait contredire des principes qui ont servi à d'autres recommandations du médiateur, parce que lui avait décidé que, sur certains points, il pouvait mettre cela de côté.

Mais le médiateur— parce qu'il faut respecter son travail et je suis prêt à me joindre très spontanément aux éloges qu'on a faites quant au travail du médiateur — a fait un travail et, sur certains points, il a dit: Statu quo. Il a rendu des décisions sur des points où il croyait pouvoir les rendre, sans tenir compte des conséquences de ses conclusions sur les autres points sur lesquels il ne se prononçait pas.

Si on demande à un arbitre de se prononcer sur les autres, c'est tout à fait comme si on demandait à un juge de se prononcer sur une question, sur plusieurs questions. Le juge rend jugement sur certaines parties du débat et un autre juge rend jugement sur d'autres parties du débat.

Il y a eu, au cours de la médiation, des concessions faites de part et d'autre en considération de la concession de l'autre. Et puis le médiateur a vu jusqu'où il pourrait aller. Et même s'il ne nous donne pas satisfaction, ce rapport, nous disons que c'est de l'ouvrage bien fait, que nous allons l'accepter. Nous avons été les premiers à le dire. Et pour ne pas nuire, nous avons fait savoir au ministre, à sa suggestion: Nous vous donnons notre réponse tout de suite, vous la rendrez publique quand vous voudrez. On ne veut pas nuire psychologiquement à la décision de l'autre partie.

Il pourrait y avoir, malgré la meilleure volonté de l'arbitre, des difficultés dans lesquelles cette procédure est placée. Qu'est-ce qui va en résulter? Des précédents qui pourront se répercuter dans d'autres domaines.

Comme il y a une admission qu'il restait un point, ou bien on le conclut, parce que je pense que nous sommes d'accord sur ce point. Jouer toute une convention sur la décision d'un arbitre sur un point, c'est peut-être aller un peu trop loin dans l'intérêt des relations à venir entre employeur et employés. Ou bien on en vient à une entente sur ce point et cela met fin au conflit, ou bien on revient au point de départ et le conseil d'arbitrage étudie tout et sera en mesure — l'arbitre et les deux assesseurs — de faire ce que nous sommes tentés de faire ici et que nous ne devons pas faire, de voir comment les deux assesseurs peuvent convaincre l'arbitre, chacun de son côté, et peut-être l'arbitre convaincre l'un ou l'autre des assesseurs que ce qu'il y a de mieux, c'est telle et telle chose et que finalement, il y aura une décision sur l'ensemble des questions. (11 heures)

Là, il y aura dans la décision d'arbitrage une unité d'assurée qui n'existera pas, si une partie du débat a été tranchée par un médiateur et l'autre partie par un autre qui s'appellera arbitre, mais ce sera comme un rapport de médiateur qui lierait les parties.

Je crois que deux juges sur un même litige, ce n'est pas recommandable, à cause du précédent que cela peut créer. Mais, si on veut reprendre toute la question depuis juillet, nous le suggérons et, vu les efforts faits par les syndicats, par le médiateur, par les conciliateurs, ce serait la dernière chance d'éviter qu'il y ait une loi spéciale.

M. Laberge (Louis): M. le Président, je pense bien que le maire ne voudrait pas avoir des morts sur la conscience. S'il fallait qu'on soit assez sans dessein pour accepter de recommencer tout en neuf...

M. Drapeau: ... le retour au travail...

M. Laberge (Louis):... après sept semaines de grève, après médiation, après des nuits passées en négociation, je dis: On se fait lyncher bien raide.

M. Drapeau: Non, cela supposait le retour au travail pendant l'arbitrage, c'est bien sûr. Je ne suis pas assez fou pour...

M. Laberge (Louis): Non, mais on ne peut pas...

M. Drapeau: Pas à ce point-là, s'il vous plaît!

M. Laberge (Louis): Vous faites des admissions!

Une Voix: $3000.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf.

M. Drapeau: Pour l'avenir.

M. Pagé: M. le Président, il est bientôt midi, et il me semble que la commission a été convoquée pour siéger de 10 heures à 12 h 30. On prévoyait terminer entre 12 h 30 et 13 heures. On a dégagé, de part et d'autre, depuis quelques minutes des possibilités de formules sur lesquelles l'une ou l'autre des parties pouvait, à l'égard de la proposition de son vis-à-vis, être partiellement d'accord, pas d'accord, plus ou moins d'accord. Je ne pense pas, M. le Président, qu'on peut dans la demi-heure qui va suivre, dégager ensemble, de par les questions qu'on pose, les questions qu'on vous pose, les indications qu'on vous formule ou les invitations qu'on vous fait, dégager un règlement comme tel. C'est ce qui est malheureux, parce que, si on avait pu siéger, je pense, cet après-midi ou encore, si on avait eu plus de temps pour siéger, on en serait peut-être arrivé à une approche de solution ou à l'enclenchement d'un processus de solution. Mais vous avez une responsabilité en tant que parties, comme nous ici, la commission parlementaire, nous avons une responsabilité, je pense. Vous avez une responsabilité, comme je vous le disais tantôt, et je me permets d'y revenir, parce que c'est peut-être l'élément, le commun dominateur auquel il faut se rattacher dans ce conflit, les citoyens de Montréal.

Le mois de mars, c'est peut-être le mois le plus imprévisible. On peut avoir une tempête de neige demain et cela peut fondre partout demain. Le ministre nous parle des poubelles.

M. Johnson: Elles ne fondent pas.

M. Pagé: Les poubelles ne fondent pas, c'est vrai. Je ne veux pas revenir sur des circonstances bien particulières, mais tout le monde acceptera qu'il y a un degré d'absorption maximale de la tolérance et de la patience des gens à l'égard de ce services qui leur manquent.

J'ai cru comprendre — je peux peut-être me tromper — que, de part et d'autre, il n'était pas question de s'asseoir sur ses positions et de dire, comme dans le jargon, c'est "just too bad", on ne veut pas vous voir tant que vous n'accepterez pas ceci ou cela. J'ai confiance, à la lumière de la bonne foi des deux parties, que demain matin, cet après-midi, ce soir, cette nuit, vous pouvez négocier et vous pouvez régler, parce qu'il y a un autre commun dénominateur dans tout cela, c'est que vous ne voulez pas de loi spéciale, parce que vous savez pertinemment qu'une loi spéciale, c'est l'intervention directe de l'État, même si c'est une responsabilité qui lui incombe à certains égards et dans certaines circonstances. Vous savez pertinemment, en termes de négociation, d'une loi spéciale peut être avantageuse pour vous comme elle peut être désavantageuse pour vous aussi. Vous pouvez en avoir plus peut-être dans une loi spéciale et vous pouvez peut-être en avoir moins aussi. C'est la responsabilité qui vous incombe.

Nous, ici, nous avons une responsabilité comme parlementaires. Notre responsabilité a été d'abord de siéger ce matin, c'est le résultat d'interventions, de discussions, d'échanges. On a eu un débat d'urgence sur la question, où le ministre du Travail nous a dit: Ce n'est pas le temps que le gouvernement, que l'Assemblée nationale soit saisie par voie législative ou par proposition de suspension du droit de grève ou autre de ce problème-là. Laissez les parties s'arranger entre elles.

On a posé des questions, on a cité des procédures, des procédures se sont déroulées, la médiation, etc. On a pris nos responsabilités jusqu'à maintenant. Aujourd'hui, notre responsabilité était de siéger en commisssion parlementaire, de vous entendre et d'essayer de sonder le pouls, de placer le thermomètre sur le conflit pour dire: Est-ce que cela peut ou ne peut pas se régler?

Aujourd'hui, on pourrait ajourner la séance à 12 h 30 et dire: Sonne fin de semaine, on s'en va chacun chez soi et on revient mardi. Vous pourriez, chacune des parties, retourner chacune chez vous et attendre que l'autre partie appelle, ou que le ministre du Travail appelle en fin de semaine, ou que le médiateur ou que quelqu'un appelle. C'est comme cela que cela se passe. On ne peut pas, comme parlementaires, à la lumière de la responsabilité qu'on a, au-delà de la responsabilité des parties qui est une responsabilité à l'égard du public, ajourner la séance et dire: Bye-bye tout le monde, espérons croisons-nous les doigts et croyons à la bonne foi des deux parties. D'ailleurs, cela aurait été un exercice, peut-être pas inutile, mais cela aurait été un exercice ce matin à l'égard duquel je peux porter des doutes, si on sort d'ici sans aucune conclusion.

Vous ne voulez pas de loi spéciale. S'il y a une perspective de loi spéciale, comme il y en a une, il ne faut pas se le cacher, je vais le dire clairement, je ne le dirai pas demain matin, alors que vous serez partis, on le dit clairement, la perspective de loi spéciale est là et elle sur la table. Il y a deux possibilités de la part des parties: C'est que la perspective de la loi spéciale fasse en sorte que les parties s'assoient sur leurs positions et qu'elles l'attendent, mais il y a une possibilité à l'autre bout, c'est que la loi spéciale prévoie des choses qui ne feront pas l'affaire de la partie qui va s'asseoir.

Il y a une autre possibilité: C'est la possibilité de la porte barrée, et M. Laberge l'a évoquée tantôt. C'est que les deux parties conviennent, dans la perspective d'une loi spéciale, que la porte est barrée jusqu'à ce que la loi spéciale puisse être présentée à l'Assemblée nationale. Vous savez pertinemment que la loi spéciale ne peut pas venir avant mardi, à moins qu'il n'y ait une convocation d'urgence lundi. Je crois que la perspective de la loi spéciale pourrait être la porte barrée en fin de semaine et que vous vous assoyiez. Je suis convaincu qu'avec fa bonne foi que vous démontrez, de part et d'autre, tant la partie syndicale que la partie patronale, vous pouvez régler en fin de semaine.

C'est pourquoi je vous dis bien clairement que je présente une motion dans le moment. Je la présente et je suis peiné d'être obligé de la présenter, parce que cette motion implique l'obligation pour le gouvernement de prendre une responsabilité à l'égard d'une loi spéciale, alors que c'est fait pour jouer, que c'est fait pour agir; mais, quand on constate que la santé et la sécurité publiques peuvent être mises en cause, le législateur a une responsabilité qui va au-delà du droit des parties.

M. le Président, c'est pourquoi je présente la motion, en espérant que cette motion, premièrement, soit bien reçue, en espérant, deuxièmement, que cette motion n'entraînera pas et n'engendrera pas de prise de position définitive et draconienne des parties qui pourraient dire: On reste sur nos positions et adoptez la loi spéciale. Non, j'espère que cela va vous permettre de vous asseoir aujourd'hui, cet après-midi et demain, et de régler pour qu'on ne soit pas obligé mardi de légiférer là-dessus.

Motion sur l'adoption d'une loi de retour au travail

La motion que je formule est la suivante. Parce qu'une commission parlementaire peut formuler un voeu; on n'a pas de pouvoir décisionnel ici, on formule un voeu à l'Assemblée. Mardi, dans le rapport du rapporteur, si la motion est acceptée, le rapporteur va dire: M. le Président, MM. les membres du gouvernement et de l'Assemblée, la commission parlementaire a siégé vendredi matin, et le voeu formulé par la commission parlementaire est le suivant: "Que les membres de la commission parlementaire du travail et de la main-

d'oeuvre, à la suite de l'échec des moyens utilisés à ce jour en vue d'apporter un règlement à la grève des cols bleus de la ville de Montréal, invitent le gouvernement à prendre sa responsabilité et à faire adopter une loi spéciale qui mettrait un terme à ce conflit qui a déjà trop duré."

C'est ma motion. Cette motion ne sera pas rapportée avant mardi. J'espère que vous prendrez l'avenue de la porte barrée d'ici à ce que le rapport soit déposé mardi à l'Assemblée.

Le Président (M. Jolivet): Motion recevable.

M. Laberge (Louis): M. le Président, est-ce que je pourrais poser une question au député de Portneuf?

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Laberge (Louis): Le député de Portneuf est quand même un des membres de la commission qui connaît un peu les relations patronales-ouvrières. Il a eu l'occasion de discuter et d'être mêlé à plusieurs conflits et à des règlements. Est-ce que vous avez déjà vu un règlement où les travailleurs retournent au travail sans qu'il y ait un protocole de retour au travail? La ville, là-dessus — ce n'est pas souvent que je dis cela — me semble intransigeante.

M. Drapeau: C'était le point qui était réglé l'autre soir.

Le Président (M. Jolivet): La question a été posée au député de Portneuf.

M. Pagé: Très brièvement, M. le Président. Ma réponse s'en vient, M. Laberge. Ma réponse arrive.

M. Laberge (Louis): D'accord.

M. Pagé: D'accord? Je conviens quece n'est pas facile dans ce contexte-là et je l'ai dit clairement, ce matin. C'est regrettable, et ça, en tout temps, qu'un gouvernement soit obligé de procéder par loi spéciale. D'ailleurs, non seulement tout le monde en convient ici, mais vous-mêmes en convenez. Je conviens, de plus, qu'il sera peut-êtredifficile de régler la question du protocole de retour au travail, mais vous avez jusqu'à mardi. Vous avez vendredi, samedi, dimanche, lundi. Le rapport ne sera pas fait cet après-midi. Il va être fait mardi. D'ailleurs, il n'est même pas certain que la motion sera acceptée. Il faut qu'elle soit débattue et qu'elle soit votée.

Mais la porte barrée, dont vous parliez tantôt, pour ma part, je suis convaincu, à la lumière de la bonne foi que vous nous avez présentée ce matin — parce que je ne décèle pas de mauvaise foi dans votre affaire — que vous êtes capables de vous entendre et que vous êtes capables d'éviter une loi spéciale qui peut être défavorable à l'un ou l'autre. Vous savez, c'est un peu comme un arbitrage. Ce q u ' i I y au ra dans la loi spéciale, on ne le sait pas, mais ça peut engendrer des problèmes pendant toute la vie de la convention, parce que vous ne gagnerez pas tout et vous ne perdrez pas tout. Cela peut engendrer des griefs et d'autres problèmes. Cette motion c'est un appel au sens des responsabilité des parties pour qu'elle se réunissent d'ici mardi. Réglez-le, le problème. Vous êtes capables de le régler. Prenez la responsabilitéqui vous incombe. Pensez à la responsabilité qui nous incombe et pensez au public qui attend.

Le Président (M. Jolivet): Avant de vous donner la parole, M. le ministre, il y a M. Gauthier, je pense, qui voudrait ajouter quelque chose.

M. Gauthier: Merci, M. le Président, de me donner l'occasion de préciser quand même un objet du débat, qui fait foi depuis le début, c'est-à-dire qu'on tente de faire croire qu'on était à un point, sur «l'ensemble des points litigieux, d'en arriver à un règlement.

La précision que je veuxapporterest la suivante: On était à un point où on respecte l'entente de principe. Il y a une différence. C'est-à-dire que le comité de négociation syndicale avait accepté avant l'ouverture de l'Assemblée nationale, mercredi, de recommander à ses membres l'entente qui était intervenue entre les parties; telle entente n'a pas été respectée à la suite de la lettre de M. le maire à l'honorable Pierre-Marc Johnson. Elle ne faisait plus partie de l'entente de principe que le comité de négociation avait accepté de recommander à ses membres. A la suite de la convocation d'une assemblée spéciale, à notre insu, il nous a fallu, nous, le comité de négociation, rencontrer l'exécutif syndical, le conseil syndical et les membres. On se veut, à l'irltérieurdu301 et, plus précisément, à l'intérieurdu mouvement syndical, une structure très démocratique. Donc, il faut procéder de cette façon.

Ce qui a échoué, mercredi soir, ce n'est pas le règlement, mais l'entente de principe intervenue entre les parties où, lors de l'exécutif syndical et du conseil syndical et de l'assemblée d'hier, on a présenté quand même cette supposée entente de principe qui n'a pas été respectée et laquelle a été rejetée par l'exécutif, par le conseil et par l'assemblée convoquée à notre insu, hier matin.

On est obligé, à ce moment-là, de repartir de l'assemblée de la semaine précédente, du 16 mars, sur les points que j'ai énumérés plus tôt. Les points que j'ai énumérés plus tôt, en soi, n'impliquent pour l'administration actuelle aucune augmentation au sujet de la masse monétaire, sauf la demande syndicale au sujet de la rétrogradation médicale qui est bien plus une demande humanitaire qu'une demande syndicale.

L'assurance collective, c'était de prendre à l'intérieur des offres pour conserver notre plan d'assurance-collective qui va tomber à l'eau si on n'arrive pas à une entente, parce que la compagnie actuelle nous l'a clairement démontré durant la négociation. (12 h 15)

Donc, aucune augmentation des coûts. On prend à l'intérieur des offres pour conserver notre plan d'assurance. C'est une demande très importante, compte tenu de la moyenne d'âge des employés cols bleus, compte tenu des conditions de

travaiI difficiles au niveau del à santé et de la sécurité. D'ailleurs, M. Désilets, le médiateur dans le dossier, en a tellement tenu compte qu'il a donné dans ses recommandations des éléments très importants. C'est important compte tenu du fait aussi qu'il y a environ 2000 cas d'accidents du travail rapportés par la Commission des accidents du travail. C'est le seul élément qui aurait coûté de l'argent à l'intérieur de la masse monétaire actuelle.

L'indexation du fonds de retraite. Notre demande syndicale vise à trouver un mécanisme pour, dans l'avenir, pouvoir l'indexer à partir d'une entente sur les coûts. Si on ne s'entend pas, on n'indexe pas. Pas de coûts.

Concernant les sous-contrats, la demande syndicale vise à conserver les contrats, les travaux effectués actuellement par les employés cols bleus. On s'est tué à la table des négociations, on s'est tué, devant différents médias d'information, à dire que la réorganisation ou la position patronale ne veut pas donner davantage de sous-contrats. Précisons-le dans le texte. Laissons faire les lettres d'intention et précisons-le dans le texte si c'est vrai. Pas un sou à l'administration actuelle. On veut conserver ce qui existe actuellement.

Répartition de la masse monétaire pour tenter de s'approcher ou approcher, diminuer les écarts entre les salaires d'une unité de négociation par rapport aux autres parmi les employés à la ville de Montréal. Pas un sou. C'est simplement une modification à la répartition qui n'engage aucuns frais supplémentaires à l'intérieur de la masse monétaire.

L'indexation du salaire pour conserver notre pouvoir d'achat, même chose. Au lieu de donner sur le taux moyen, ceq ui fait que c'est legroupe inférieur qui en profite aux dépens du groupe supérieur, on dit: Donnez-le sur le taux horaire. Pas un sou, c'est la même chose.

Sur l'ensemble des cinq points, M. le Président, il y a seulement la rétrogradation médicale, ce qui implique une quarantaine de cas par année, où l'employeur aurait à mettre d'autres sous à l'intérieur de la masse monétaire. Je précise, ce n'est même pas une demande syndicale, c'est une demande humanitaire.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, sur la motion, maintenant.

M. Johnson: M. le Président, je pense que je partage en gros les volontés et les perceptions du député de Portneuf. Je pense que tout le monde ici partage des choses, de façon générale, quant à la responsabilité des parties, la nécessité de s'occuper des citoyens, mais je voterai contre la motion et j'explique pourquoi. D'abord les parties, j'espère que vous avez bien compris. Si vous ne vous entendez pas, l'Opposition va présenter un projet de loi la semaine prochaine. C'est ce que j'ai cru comprendre. Non?

M. Pagé: Ne vous aventurez pas sur ce terrain-là. Vous savez pertinemment, avec votre majorité, que... Vous nous avez imposé un débat référendaire à deux contre un. C'est votre majorité.

Le Président (M. Jolivet): Revenons à la motion, s'il vous plaît.

M. Johnson: Alors, les inconvénients...

M. Pagé: Oui, vous avez aimé mon intervention d'ailleurs, M. le député.

Le Président (M. Jolivet): Revenons à la motion, s'il vous plaît.

M. O'Neill: On ne peut pas vous demander l'impossible.

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Pagé: Mon intervention a dû vous faire plaisir. Que je plombe Claude Morin, cela a dû vous faire plaisir.

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Pagé: C'est le ministre qui a ouvert la porte.

Le Président (M. Jolivet): Revenons quand même à la motion.

M. Johnson: M. le Président, il y a deux inconvénients majeurs à cette motion. Je sais que c'est quand même avec un esprit de prudence, malgré tout, et je sais que le député de Portneuf veut en tenir compte, parce que je sais qu'il souhaite un règlement comme nous. Mais disons qu'il y a deux inconvénients à mon avis dans cette motion. Le premier est de fixer un carcan, mais de le fixer a priori, et fixer a priori un carcan dans les relations de travail, c'est toujours dangereux. C'est pour cela, entre autres, que j'avais suggéré la médiation-arbitrage, qui avait l'intérêt, si elle avait été acceptée, et si jamais un jour on décidait de la traduire dans des lois, de mettre les parties dans un entonnoir où elles ne savent pas exactement quand elles vont être prises pour sortir par le petit bout. Parfois, cela les amène peut-être à agir un peu plus vite ou à vouloir un peu plus le règlement.

Le deuxième désavantage, évidemment, c'est que cela limite la capacité pour le gouvernement dans le temps et même à certains égards quant au contenu. Je pense qu'il y a une responsabilité des parties et il y a une responsabilité du gouvernement, parce que les citoyens de Montréal ont des ennuis, des inconvénients, des ennuis profonds, particulièrement les citoyens plus âgées, auxquels il faut penser, des inconvénients qui commencent à être difficiles à supporter dans certains coins où il y a une accumulation de déchets. Dans ce contexte, il est très clair que les parties et le gouvernement sentent une responsabilité d'agir à très court terme, même s'il n'y a pas eu de grosses tempêtes qui empêcheraient, par exemple, les camions de pompiers de circuler ou des choses comme celles-là.

Je serai donc contre la motion, parce qu'elle vise à nous encarcaner dans un processus. Cependant, je pense que les interventions que j'ai faites au nom du gouvernement tout à l'heure sont claires. Vous avez une responsabilité, messieurs. Il faudra que vous y parveniez très rapidement quant aux choix du moment d'intervention du gouvernement qui devra intervenir, si vous ne réglez pas. Ce choix, c'est le Conseil des ministres, qui peut se réunir à 20 minutes d'avis, n'importe quand, même en fin de semaine, pour prendre cette décision. Je vous suggère donc effectivement d'y penser. Mon ministère est prêt à vous offrir des locaux, on a de belles grandes salles qui ne sont pas toujours occupées les fins de semaine, on a même une machine à café qui fonctionne bien. On est prêt à vous fournir des locaux à moins que vous aimiez mieux aller dans les hôtels; parfois, on sait que cela se fait dans les grandes suites des hôtels. On est prêt à fournir aux parties des locaux, mais rapidement, pas dans deux jours; rapidement.

Il faudra, par exemple, que, de part et d'autre, vous acceptiez de limiter les objets sur lesquels vous allez discuter. Il faut limiter les objets sur lesquels vous allez discuter. C'est ça, arriver à un règlement, c'est accepter ça. Quant au gouvernement, il aura à évaluer, selon ce qui arrivera, dans les heures qui viennent, de votre côté, l'opportunité d'une intervention et le contenu de cette intervention que je n'évoquerai pas ici, la sorte d'intervention; vous verrez quand cela arrivera si ça doit arriver, messieurs. Ce sera votre problème, à ce moment-là.

J'espère, pour les citoyens de Montréal, pour les collègues de l'Assemblée nationale, pour tous ceux... Et je suis sûr, de part et d'autre, M. le maire, M. le président du syndicat, MM. les représentants, qu'il n'y a personne qui souhaite que ça continue. Comme disait M. Laramée, je suis sûr que vous voulez négocier un règlement. Je vous rappelle aussi qu'il n'y a rien comme un règlement, pas tout à fait satisfaisant, comparé à n'importe quelle loi qui ne l'est jamais. Du côté de la ville de Montréal, j'ai tendance à dire que l'étalement dans le temps et même la dilution à certains égards de certains objectifs ou demandes sont nécessaires à un règlement. Je pense que le maire comprend ce que je veux dire. D'ailleurs, il a déjà accepté, en cours de route, ce type de contraintes, comme le syndicat en a accepté quelques-unes.

Il va falloir que ça continue, mais d'une manière encore plus draconienne dans les heures qui viennent. Je veux simplement vous dire que le gouvernement avisera, au temps où il le jugera opportun, et ça peut venir rapidement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je voudrais simplement intervenir quelques minutes pour appuyer la motion du député de Portneuf. Je pense que, dans son évaluation... J'ai été silencieux, mais très attentif jusqu'à maintenant à cette commission. Je pense que c'est évident pour tous les membres de cette commission que ça va prendre plus que des discours et des appels à la responsabilité, ça va prendre davantage que de la persuasion verbale, moyen auquel le ministre s'est restreint, jusqu'à maintenant.

Dans un éditorial paru justement aujourd'hui dans la Presse, Vincent Prince termine par ces quelques mots à l'adresse du ministre du Travail: "II a déjà assez tergiversé."

Que le ministre ait jusqu'à maintenant, et avec l'accord des deux parties, fait son boulot, qu'il ait mis à la disposition des parties ses meilleurs éléments — tout le monde est d'accord — qu'il ait pris les moyens qui soient prévus actuellement par la législation, on peut être d'accord là-dessus. Mais le temps a assez duré. Le ministre lui-même le disait: II est évident que cela ne peut continuer bien longtemps comme cela. Ce n'est pas hier qu'il disait cela, c'est au début de la semaine. On a déjà une semaine de plus. Nous sommes rendus à la quarantième journée. L'erreur du ministre, c'est de mal évaluer la situation à Montréal actuellement.

Lorsqu'on en arrive à des éditoriaux de cette façon, ce sont des gens qui sont des observateurs sur place, il me semble que le ministre devrait considérer le vote qu'il va donner contre cette motion. Il a fait un discours. En réponse à cette motion, il a fait appel au sens des responsabilités, il a offert des locaux et du café. Il me semble que c'est tout à fait ridicule. Il va voter contre un voeu de la commission que le gouvernement intervienne mardi. Trois jours de sursis. Cette grève va durer 45 jours.

M. Johnson: Nous ne sommes pas obligés. Tout à coup on voudrait intervenir avant.

M. Lalonde: M. le Président, le voeu de la commission n'engage même pas le gouvernement. Et en votant contre la motion, le ministre refuse à la commission le petit peu de pouvoir que la commission a et rend inutile ou presque... enfin, il lie les mains de la commission en votant contre cette motion qui n'engage pas... Si, comme membre du gouvernement, il ne veut pas se sentir engagé par ce voeu, il pourrait s'abstenir, et laisser le vote libre aux députés autour de la table, y compris ceux qui représentent des circonscriptions de Montréal. J'aurais espéré qu'il y en ait davantage de l'autre côté de la table, M. le Président. Mais peut-être qu'il y aurait un petit conflit d'intérêts s'il votait pour la motion et ensuite, se déclarait non lié par cette motion, mardi prochain. Il pourrait toujours s'abstenir et laisser ses députés libres de voter pour la motion.

Je pense que le ministre fait une erreur de jugement à deux égards. Premièrement, c'est une mauvaise évaluation de la situation qui existe à Montréal et qui se développe; deuxièmement, il musèle littéralement la commission en votant contre cette motion.

Le Président (M. Jolivet): Merci. S'il n'y a pas d'autre intervenant, je demanderais au député qui a proposé la motion de prendre son droit de réplique.

M. Pagé: Très brièvement, M. le Président, ce sera un droit de réplique très bref. Le ministre nous dit ce matin...

Le Président (M. Jolivet): Un instant. M. le député de Chauveau.

M. Pagé: Oui, allez.

M. O'Neill: Simplement, pour, très librement, dire que j'appuierai évidemment non pas la motion, mais la position du ministre du Travail, pour la raison suivante: Je crois qu'après la discussion que nous avons eue ce matin, M. le Président, il apparaissait évident qu'il n'y a aucune nécessité de tordre le bras ni à M. le maire, ni à M. Laberge et à ceux qui l'accompagnent et qu'ils ont très bien compris le message qui a été transmis ici. Je dirais qu'ils sentent aussi bien que chacun d'entre nous qu'on doit très bientôt en arriver à une solution. J'ai retenu cela comme message et je ne vois pas pourquoi on irait faire planer de cette façon-là cette menace aussi directe de la part d'une commission sur des hommes très responsables et qui nous laissent, finalement, entendre qu'en s'y mettant, on arrivera à une solution.

Je pense qu'à ce stade-ci, il n'y aurait vraiment pas de raison d'agir de cette façon, je dirais d'exercer cette sorte de pression morale que le député de Portneuf nous demande d'exercer qui, simplement, risquerait peut-être non pas de faire avancer les choses, mais de retarder une solution. (12 h 30)

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.

M. Johnson: Si vous permettez, avant de permettre au député de Portneuf de conclure sur sa motion, je voudrais simplement dire que le pouvoir législatif et le pouvoir du Conseil exécutif, ce n'est pas une chose dont on doit se servir, je pense — je suis sûr que ce n'est pas une mauvaise intention de la part du député de Portneuf— comme d'une menace. Le voeu a tendance encore une fois à nous encarcaner. Je pense qu'il y a deux choses distinctes. Il y a la responsabilité des parties et la responsabilité de l'État. Je suis prêt à dire, au nom du gouvernement, que l'État va prendre ses responsabilités. Il n'y a pas de problème. Je n'ai pas besoin d'une motion qui me le dise.

Deuxièmement, la motion du député de Portneuf exclurait — je lui dis tout de suite, de toute façon, je n'accepterai pas d'amendement — la possibilité d'une intervention antérieure à mardi.

Je pense que l'Etat doit pouvoir, que le gouvernement doit pouvoir agir comme il l'entend. Je considère qu'il y a deux choses distinctes qu'il ne faut pas relier sur le plan de cette motion: C'est la responsabilité de M. le maire et des représentants de la FTQ, et la responsabilité de l'État. Je peux vous assurer, et on l'a démontré dans le passé, que l'État est capable d'assumer ses responsabilités. Ce gouvernement n'a pas hésité à le faire, même dans des moments où cela n'a pas été particulièrement agréable, M. Laramée le sait d'ailleurs, puisque cela a déjà touché le SCFP.

En ce sens, je persiste à souhaiter et à dire aux parties que je suis convaincu, à partir de ce que j'ai entendu ce matin, encore une fois, dans un contexte où on accepte de limiter les discussions, quant aux objets et quant au temps, qu'on pourrait peut-être assister, si les parties s'y mettent dès aujourd'hui, à la meilleure solution possible d'une entente négociée. Mais, compte tenu du fait qu'il y a des citoyens à Montréal qui en souffrent, on évalue lasituation, avec d'autres moyens que ceux des éditorialistes, on la suit quotidiennement, on reçoit des rapports sur l'état de la situation à Montréal, et, parce que la population va l'exiger, il faut que cela se règle rapidement.

Encore une fois, je me fie à ce qu'on nous a dit. Je ne peux pas demander plus à M. Drapeau et à M. La berge que ce qu'ils nous ont dit quant au sentiment qu'ils ont de l'imminence et de la nécessité de régler. Je ne peux pas leur demander plus que cela.

Le reste, ce serait vouloir entrer dans leur tête. D'autre part, je le leur dis, et je pense qu'ils l'ont très bien compris, le gouvernement va prendre ses responsabilités. Si, malgré leurconscience de la nécessité de réglercela, ils n'arrivent pas à le régler, le règlement sera ce qu'il sera. Ils verront, à ce moment, l'un ou l'autre.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf, votre droit de réplique.

M. Pagé: M. le Président, je vais être bref. Cependant, je vais relever certains éléments de la déclaration du ministre. D'abord, je ne reprendrai pas les éléments relatifs au procès d'intention qu'il veut faire de par la motion qu'on a présentée ce matin. En termes de jugement et d'appréciation à l'égard de la contribution de l'Opposition sur sa participation aux travaux, je me fie davantage aux commentaires des gens qui nous voient évoluer qu'aux commentaires du ministre. Notre contribution était utile ce matin, elle aurait pu vous rendre service. Vous n'avez pas voulu sauter sur l'occasion, c'est votre problème, et vivez avec.

Deuxième élément, le ministre témoigne d'une méconnaissance profonde des procédures parlementaires. Je ne lui en sais pasgré, il est élu ici depuis trois ans, il n'a pas une longue expérience. Que voulez-vous? Il n'a pas été capable de se faire élire avant, ll a fallu qu'il attende une vague. D'ailleurs, il va sortir dessus probablement.

M. Johnson: C'est parce que je n'ai pas été candidat avant.

M. Pagé: M. le Président, le ministre devrait savoir deux choses. Premièrement, le ministre devrait savoir que la motion demande que le rapport soit nécessairement déposé dès que l'Assemblée siège. Donc, si l'Assemblée siège lundi, le rapport est déposé lundi. Cela, vous devriez le savoir en termes de procédure parlementaire. Il n'y a pas de

limite dans le temps. Il y a d'ailleurs tellement peu de limite dans le temps qu'il suffirait que le rapport, et ce, même si la Chambre... Premièrement, si la Chambre est convoquée pour lundi, le rapport peut se faire lundi. L'argument que vous avez ne tient pas en vertu de nos procédures parlementaires.

Deuxième élément: La Chambre siégeant mardi, le rapporteur pourrait déposer son rapport à l'Assemblée mercredi seulement. Pas de carcan. Le carcan que vous y voyez est dans votre esprit.

Troisième élément: La commission parlementaire, c'est l'émanation de l'Assemblée nationale. Ce n'est pas l'exécutif qui siège ici, c'est le législatif. Le rapport de la commission n'engage pas l'Assemblée nationale et lui est soumis pour approbation ou désapprobation. Cela veut donc dire que, si la motion avait été acceptée et peut-être qu'elle l'aurait été si le gouvernement l'avait un peu plus étudiée... Parce que peut-être qu'en fin de semaine, le ministre recevra des appels téléphoniques de son collègue pour lui dire: Comment se fait-il que tu n'as pas sauté sur l'occasion et la porte que Pagé t'a ouverte? En tout cas, ça, c'est une autre affaire.

Le rapport accepté, il aurait été soumis à l'Assemblée, au moment où le rapporteur aurait pu le faire, lundi, mardi ou mercredi. A ce moment-là, l'Assemblée nationale aurait pu voter contre le voeu formulé par la commission. Ce voeu n'engage pas le gouvernement. En tout cas, on a tenté de vous ouvrir la porte par une contribution qui est utile, comme d'habitude, mais vous n'avez pas voulu sauter dessus, parce que ça ne venait probablement pas de vous autres.

M. le Président, il n'empêche que le ministre n'a pas écarté la possibilité d'une loi spéciale, d'un recours. En tout cas, on va voir. Nous, on a fait la job qu'on avait à faire, la job d'obliger le gouvernement... D'abord, de l'inciter, de lui demander, de requérir de lui et enfin de l'obliger à prendre la responsabilité qui lui incombe. Le gouvernement s'est perdu en tergiversations en disant: Cela a assez duré. Il suffirait d'une tempête pour la catastrophe! patati! patata! Aujourd'hui, on offre des locaux et du café. Ecoutez! Cela, c'est votre responsabilité. J'ose espérer que vous la prendrez. D'ailleurs, vous nous disiez tantôt, M. le ministre: L'État va prendre sa responsabilité.

Je termine sur une grande question, la question que les gens de Montréal se posent depuis 40 jours, la question que les gens qui ont à souffrir du conflit se posent depuis 40 jours et peut-être la question que les parties se posent depuis déjà quelques jours, à savoir: Quand l'Etat va-t-il prendre sa responsabilité? C'est quand? la grande question.

Merci, M. le Président.

M. Lalonde: M. le Président, une question de règlement simplement, parce que je voudrais rectifier ce que M. le ministre a dit tantôt, à savoir que, si la motion était adoptée, cela empêcherait le gouvernement d'agir d'ici mardi, ce qui est complètement faux, c'est un voeu seulement. Si une situation de très grande urgence survenait dimanche, par exemple, le ministre pourrait recourir à tous les moyens qui sont à sa disposition.

Mise aux voix de la motion

Le Président (M. Jolivet): Vote sur la motion qui est la suivante: Que les membres de la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre, suite à l'échec des moyens utilisés à ce jour en vue d'apporter un règlement à la grève des cols bleus de la ville de Montréal, invitent le gouvernement à prendre ses responsabilités et à faire adopter une loi spéciale qui mettrait un terme à ce conflit qui a déjà trop duré. M Brochu?

M. Brochu: Pour.

Le Président (M. Jolivet): M. Laberge?

M. Laberge: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Lefebvre?

M. Lefebvre: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. O'Neill?

M. O'Neill: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Johnson?

M. Johnson: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Lavigne?

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Lalonde?

M. Lalonde: Pour.

Le Président (M. Jolivet): M. Pagé?

M. Pagé: Pour.

Le Président (M. Jolivet): Donc, la motion est rejetée à cinq votes contre trois.

M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Johnson: ... avant de suggérer d'ajourner nos travaux, je voudrais que ce soit bien clair pour les parties et peut-être aussi pour nos amis du quatorzième pouvoir, ou je ne sais trop, qu'il est très clair... Non, non, il est très clair. Je pense qu'il faut bien se comprendre sur ce qui se passe ici. Je comprends que le député... M. le Président...

M. Pagé: ...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Johnson: ... je comprends bien que le député de Portneuf a voulu parler des dernières élections qui ont laissé un goût amer après quatre ans, mais...

M. Pagé: Vous essaierez de résister à la vague, le prochain coup.

M. Johnson: ... je pense qu'il faut essayer de préférence de s'en tenir à l'essentiel. Cette commission a été convoquée aux fins d'entendre les parties, c'est ce que nous avons fait. J'ai trouvé regrettable que la dernière intervention du député de Portneuf vienne gâter ce qui, par ailleurs, était une excellence sauce à laquelle il avait participé.

M. Pagé: Ce sont vos procès d'intention.

M. Johnson: Non, mais contrairement à ce qu'il a affirmé, je pense que l'Opposition a collaboré de façon très correcte et je suis très heureux de sa participation à cette commission, mais ça s'est un peu gâté dans la dernière intervention.

M. Pagé: Merci.

M. Lalonde: Excusez-nous!

M. Johnson: C'est ça, on s'habitue avec le temps.

M. Lalonde: On a de mauvaises notes, on va avoir un mauvais bulletin. Est-ce assez dommage?

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Johnson: M. le Président, si vous me permettez de terminer, encore une fois, sur le fond, je veux qu'on s'entende clairement. Le gouvernement prendra ses responsabilités et il n'a pas besoin d'une motion ou d'un voeu de l'Opposition qui a tendance à être plus un phénomène de récupération politique qu'autre chose.

M. Pagé: On a vu ça dans Maisonneuve.

M. Johnson: Deuxièmement, je demande aux parties de s'asseoir, à compter d'aujourd'hui, derrière des portes closes — pour utiliser l'expression employée dans certaines occasions par des prédécesseurs — et de faire en sorte qu'ils en arrivent sur des objets limités à quelque chose de correct, d'honorable, à quelque chose qui n'est pas tout ce que tout le monde voulait, à quelque chose qui ne sauvegarde pas tous les objectifs, ni d'une part ni de l'autre, mais qui, à la fin, va être correct. Et quand ce sera correct, ce sera correct surtout pour les citoyens de Montréal, parce que la décision de l'Etat va être en fonction de cela, et non plus en fonction des parties. Merci, M. le Président.

Merci, M. le maire, M. Laberge et leurs collaborateurs.

M. Laberge (Louis): Est-ce qu'on pourrait avoir deux secondes pour remercier la commission...

Le Président (M. Jolivet): C'est ce que je voulais, une conclusion sans rouvrir aucun débat.

M. Laberge (Louis): Non. Vous êtes capable de faire cela tout seul.

M. le Président, je voudrais remercier la commission et assurer le ministre que nous sommes disposés, tout de suite, à nous rencontrer et à essayer de régler les "mautadits" points qui restent. Je remercie les membres de la commission. Je pense que tout le monde a été très attentif. C'est un conflit qui perdure. Nous sommes fort conscients qu'il y a bien des citoyens de Montréal qui commencent à en avoir plein leur chapeau. Nous sommes conscients de cela, mais je peux vous dire, M. le ministre, qu'en terminant votre appel comme vous l'avez fait, au moins, je pense que là c'est une demande expresse aux deux parties de mettre de l'eau dans leur vin et d'essayer d'avoir un règlement, parce que, autrement, il pourrait y avoir une intervention de l'État qu'on ne connaît pas encore. Si vous me permettez de vous le dire, je l'aime mieux comme cela parce que là, au moins, la pression est sur les deux. Avec une loi spéciale, la pression est seulement sur nous autres.

Le Président (M. Jolivet): M. le maire.

M. Drapeau: M. le Président, j'allais, moi aussi, demander la permission non pas de soulever une question de procédure, mais une question de gratitude, parce qu'une fois le débat terminé, l'assemblée est terminée. C'était pour vous remercier et remercier tous les membres de la commission qui ont utilisé du temps qu'ils auraient pu utiliser à autre chose, ce matin, ainsi que M. le ministre et M. le Président. Je veux réitérer ici ce que j'ai peut-être moins dit publiquement, parce que je m'étais donné comme règle, ainsi que tous mes collègues du comité exécutif, de ne pas intervenir publiquement dans le débat. Ce n'est pas parce que maintenant nous y sommes entrés depuis dimanche soir que je participerai publiquement au débat, mais nous n'en travaillerons pas moins au cours des prochains jours que nous y avons travaillé depuis longtemps.

Je voudrais rappeler qu'un des avantages de durer, c'est d'acquérir de l'expérience. Cela ne s'achète pas, mais quand on l'a, c'est un devoir de l'utiliser. J'ai vécu certaines expériences dans les relations industrielles, les relations de travail et je ne veux faire allusion à rien du tout, mais je serai bien obligé de tenir compte de l'expérience acquise, comme ce serait le devoir du syndicat et des présidents respectifs de tenir compte également de leur expérience. Tenant compte de toutes ces expériences-là, je conserve malgré tout l'espoir que les parties pourront trouver suffisamment de protection respective dans un texte, tenant compte de tout ce qui s'est dit ici qui ouvre la porte à l'espoir.

Le Président (M. Jolivet): Rapidement, M. Laramée.

M. Laramée: Je veux réitérer, M. le Président, que nous sommes disposés dès maintenant à rencontrer la partie patronale. Je crois qu'il serait très souhaitable, sinon essentiel, que les personnes impliquées dans le dossier à votre ministère puissent être disponibles. J'ose souhaiter, contrairement à vos habitudes, M. le ministre, que vous vous impliquiez directement dans le dossier, ce qui pourrait aider.

Le Président (M. Jolivet): La commission ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 12 h 44

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