(Treize heures dix-neuf minutes)
Mme
Hivon
:
Bonjour. Alors, je sors tout juste de l'étude des crédits du ministère de la
Culture, qui s'est révélée un exercice excessivement décevant, parce qu'il n'y
a eu aucune réponse et aucune, je dirais, avenue de la ministre mise de l'avant
pour rassurer le milieu de la culture qui est excessivement inquiet depuis le
dépôt du budget du gouvernement libéral, il y a quelques semaines. Il ne se
passe pas une journée, et on le voit, je pense, dans les médias, dans les
quotidiens, à chaque jour, il ne se passe pas une journée sans qu'il y ait un
groupe, quand ce n'est pas une coalition complète qui s'est formée, pour
dénoncer les mesures de compression très, très, très importantes du dernier budget
Leitão dans le domaine de la culture.
Donc, ce matin, c'était autour des musées
d'État de s'unir dans un geste sans précédent pour dénoncer ces coupes de 5 %
dans leurs budgets de fonctionnement, en nous faisant état des répercussions
excessivement importantes, qui remettent même, selon eux, en cause la mission
des musées d'État. Hier, c'était les artistes du milieu des arts médiatiques,
du cinéma d'auteur, de la vidéo, qui s'inquiétaient d'une coupure d'un
programme. Et, bien sûr, depuis des semaines, c'est tout le milieu de la
production culturelle, de la production de séries télé, de cinéma, des
diffuseurs, de l'édition du livre, de l'industrie du spectacle, du disque, qui
s'inquiètent des coupures de 20 % dans les crédits d'impôt destinés à la
production culturelle.
Alors, j'ai, ce matin, questionné longuement
la ministre, qui nous a dit il y a quelques semaines qu'elle invitait le milieu
à se mobiliser, donc qu'elle invitait le milieu à aller faire des
représentations à la commission sur la fiscalité, ce qui est assez inusité
comme processus, parce que, plutôt que d'avoir consulté avant, plutôt que d'avoir
fait des études d'impact avant, rien de cela ne s'est fait avant que les coupes
soient annoncées. Ça nous a d'ailleurs été confirmé ce matin à nouveau par la ministre,
aucune étude d'impact, aucune consultation. Elle demande maintenant aux acteurs
du milieu d'aller devant cette commission pour réviser en quelque sorte la
décision qui n'a aucun sens du budget Leitão de couper de manière paramétrique
de 20 % dans les crédits d'impôt destinés à la culture.
Donc, ce matin, elle a confirmé que c'est
toujours ce qu'elle demandait au milieu. Et je l'ai invitée, du fait qu'il n'y
a aucune étude d'impact, qu'il n'y a eu aucune consultation, à suspendre
l'application de la mesure. Donc, je demande à la ministre David de suspendre
l'application de la mesure des coupes de 20 % dans les crédits d'impôt
pour la production culturelle le temps que ces études d'impact, que ces
consultations et que ce travail auquel elle convie elle-même le milieu culturel
auprès de la commission de la fiscalité puisse se faire.
Pourquoi c'est urgent de décréter, donc,
cette suspension de la mesure? C'est parce qu'en ce moment on assiste à une
déstructuration et à une désorganisation du milieu de la production culturelle
parce que le milieu n'est pas capable de rassurer, donc, tous les artisans, les
artistes, les producteurs par rapport à ce qui va se passer avec ces coupes. Et
donc, si la ministre, elle, et si son collègue des Finances n'ont fait aucune
étude d'impact, eux en ont fait, la coalition en a fait, et ils estiment à plusieurs
milliers d'emplois perdus les répercussions des coupes qui ont été annoncées.
Alors, c'est pourquoi aujourd'hui nous
demandons à la ministre de la Culture et à son collègue de surseoir à cette
décision, le temps que les choses qui auraient dû être faites se fassent, le
temps que la commission sur la fiscalité entende les personnes concernées et qu'on
statue sur tous les impacts qui apparaissent énormes pour le milieu avant de
mettre de l'avant une telle mesure.
Et, compte tenu de l'actualité toute
récente et de ce qu'on vient d'apprendre des compressions énormes à la Société
Radio-Canada, donc une autre ronde de compressions qui a été annoncée
aujourd'hui, de plus de 100 millions, ce qui va entraîner 1 500
nouvelles pertes d'emploi, j'ai bien sûr questionné la ministre. Et je lui
demande formellement de rencontrer sa vis-à-vis fédérale pour lui faire part du
caractère tout à fait inacceptable et excessivement grave d'une telle décision
au Québec avec ces pertes d'emploi et avec, bien sûr, toutes les restrictions,
toute la désorganisation que ça va entraîner en termes de diffusion de contenu
pour les Québécois d'expression francophone.
Donc, je m'attends à une action très
vigoureuse de la part de la ministre de la Culture. La ministre de la Culture, lorsqu'elle
est entrée en poste, elle a déclaré qu'elle serait une battante de la culture,
qu'elle se battrait pour chaque sou. J'invite aujourd'hui la ministre, qui a
dit vouloir être une battante de la culture, à vraiment montrer ce côté,
montrer qu'elle peut se battre et donc faire renverser les décisions de son
collègue des Finances et faire renverser la décision du gouvernement fédéral.
Qu'elle passe donc d'une simple spectatrice, qui semble assister à la
désorganisation du milieu de la culture et des communications, à une véritable
battante pour la culture au Québec.
Mme Prince (Véronique)
:
Est-ce que vous êtes capable de dire… Est-ce que vous évaluez un petit peu les
impacts que ça peut avoir au-delà des emplois? Est-ce qu'à votre avis il y a
des festivals qui sont en péril? Est-ce qu'il y a des tournages qui sont prévus
ici, au Québec, qui pourraient aller se faire ailleurs?
Mme
Hivon
: Pour
les coupes dans les crédits d'impôt, les impacts de la coalition, qui a fait
une sortie la semaine dernière, ils sont évalués, oui, en termes de milliers
d'emplois, mais ils sont aussi évalués en termes de cessation de production,
donc de risque de non-reconduction de séries qui bénéficient des crédits d'impôt.
Donc, il y a toute une aura d'incertitude qui plane en ce moment à savoir si
certaines séries particulièrement affectionnées par les Québécois vont pouvoir
être reconduites, alors que c'était ce qui était prévu.
Parce qu'il faut comprendre que la coupe est
quand même importante. Ça peut représenter, sur un budget de 5 millions,
300 000 $ à 400 000 $ de coupes, donc c'est important pour
le milieu de la culture, où chaque dollar compte, même chose pour la production
de spectacles, pour la production de CD, de disques, pour le milieu, donc,
aussi du doublage, qui est déjà excessivement en difficulté. En coupant les
crédits d'impôt, il y a un risque que l'expertise s'en aille vraiment à
l'étranger, parce qu'on vit déjà une concurrence très importante de certains
pays pour l'industrie du doublage, même chose pour attirer des productions. On
sait à quel point notamment Montréal s'est développé une part intéressante pour
accueillir des productions étrangères dans la production, donc, de films.
Donc, tout ça, en ce moment, est mis en
cause, est mis en péril, et ce serait très simple, en fait, de simplement dire
qu'on va suspendre la mesure, parce que, pour cette année, la mesure a un
impact limité puisqu'elle arrive en cours d'année et qu'elle va s'appliquer
seulement à partir de septembre. Et la ministre nous dit que, dès l'automne,
ils vont faire une priorité d'entendre les acteurs du milieu de la culture lors
des travaux de la commission sur la fiscalité, donc la décision responsable,
compte tenu de toute cette incertitude, de ce budget catastrophe tel qu'il est
qualifié par les gens du milieu. Ce n'est pas ma caractérisation, c'est
les gens du milieu. Je pense qu'il faudrait prendre un moment d'arrêt, un
recul pour permettre aux gens d'être entendus, d'évaluer les impacts qui sont,
pour l'instant, estimés à être très, très sérieux par le milieu.
Mme Prince (Véronique)
:
Mais vous ne pensez pas qu'en même temps la commission sur la fiscalité, ça
peut être l'occasion de faire, entre guillemets, un peu un ménage dans les subventions
à la culture? Parce qu'il y a beaucoup, beaucoup de projets qui méritent effectivement
une subvention, mais il semble qu'il y en a d'autres qui en obtiennent facilement
et que ça ne donne pas nécessairement les résultats escomptés. Ça fait
plusieurs années qu'il y a des groupes qui disent qu'il faudrait justement
trouver une façon de faire un peu le ménage là-dedans.
Mme
Hivon
: En
fait, il y a la commission sur les programmes qui veut évaluer tous les
programmes. Ça, c'est une chose. Il y a la commission sur la fiscalité. Ce qui
ne fonctionne pas dans l'ordre des choses, c'est que… ce que la ministre nous
dit, c'est que la commission sur la fiscalité, en fait, elle va venir
potentiellement défaire des décisions qui ont été annoncées dans le budget.
Donc, comme je l'avais déjà questionnée en Chambre, je lui demande : Est-ce
que c'est un tribunal d'appel des décisions du ministre des Finances, cette commission
sur la fiscalité?
Parce que son mandat, ce n'est pas ça. Son
mandat, c'est supposé d'être de venir notamment identifier les centaines de
millions de coupes qui doivent encore être faites par le gouvernement pour
atteindre ses cibles et qui n'ont pas été identifiées dans le budget. Ce n'est
pas supposé de venir défaire des décisions qui ont déjà été prises. Mais,
compte tenu de la réaction excessivement négative du milieu, des impacts qui
semblent catastrophiques, on demande à la ministre, puisqu'elle semble dire
qu'il va falloir faire ces études, qu'il va falloir entendre les gens du
milieu, on lui demande donc de suspendre la décision le temps que ce travail-là
puisse être fait correctement. Ça aurait dû être fait avant, ça n'a pas été
fait avant, mais maintenant il faudrait au moins dire : On va attendre
avant de désorganiser tout le secteur de la production culturelle et on va
attendre d'entendre les gens avant de cristalliser la décision.
Mme Prince (Véronique)
:
Ça dérange-tu si je pose une dernière question? Ce n'est pas sur ce sujet-là,
par exemple. Tant qu'à vous avoir devant moi, bien, vous êtes une femme de
carrière, jeune, vous avez… vous êtes une maman. Qu'avez-vous pensé des propos
de M. MacKay dernièrement?
Mme
Hivon
: Je
trouve que ce sont des propos inadmissibles en 2014. Ce sont des propos, de la
part de quelqu'un qui occupe un poste d'une telle importance, qui sont très
graves parce qu'ils envoient une image d'un gouvernement qui ne met pas au
coeur de ses préoccupations l'égalité entre les hommes et les femmes, alors
qu'à chaque jour, à chaque jour, que ce soit dans le milieu de la politique,
que ce soit dans le milieu juridique, que ce soit dans la fonction publique,
que ce soit dans le journalisme, que ce soit dans le travail, dans les usines,
dans l'agriculture, on a des exemples extraordinaires, tous les jours, de
conciliation travail-famille, et je pense qu'au Québec on a fait des pas de
géant et que la répartition des tâches, elle est là, que les hommes sont
présents, et les femmes forment les leaders de demain, et les hommes changent
les couches aussi. Donc, je pense que ces propos-là n'avaient pas leur place.
Mme Plante (Caroline)
: Mrs. Hivon, when the Liberals
were elected to power, they said that they would cut across the board in pretty
much single ministry. So wasn't it predictable that they would cut in culture?
Mme
Hivon
: It's exactly the problem. Culture is not even 1 % of the whole Québec budget. Culture is something that has to
be considered apart when we know how just $1,000 can make a difference in
culture. So this is exactly the point. They just decided, without having done
any specific impact studies, without even having consulted any partner of the
cultural industry, to cut across the board including in culture.
And now we see the
reaction is very, very strong. It's not every day that you see all those people
coming together, the artists, the producers, people who broadcast. So everybody
is concerned because the cuts may have a really destructuring, disorganizing
effect among other things. And also it will lead to, as people from the «milieu»
say, thousands of job losses. And we know how precarious artist's status is. So
it's astonishing that those decisions have been made without even consulting,
without even studying the impact. And that was confirmed to us today. So this
is why I'm asking the minister for Culture to suspend the application of this
decision while as she herself asked the people to come forward and discuss the
impacts in front of the fiscality commission, to stop the application of this
decision while we take the time to really study the impact.
Mme Plante (Caroline)
:
Have you spoken to the representatives from the museums about their worries.
What are they particularly worried about?
Mme
Hivon
:
Well, today… because really what we see since the Liberal budget was tabled a
few weeks ago, is really every day new concerns, new worries and a sense of
disbelief from the people in the cultural industries. So today it is the four
national museums that state that the impact of their cuts, 5% cuts in their
budget, in their functioning budget. It is also
something that we've never seen before, all the museums which depend from the
minister — they are
State museums — to
say that they are exasperated, that it doesn't make any sense, that now their
mission in itself is compromised, that they will have to close the museums a
few days a week, that they will have to repeat the same exhibitions year after
year. So this is a real concern, and I wasn't able to get answers from the
minister on that topic also this morning. And they're really worried because
there is a total inconsistency between the Corbo Report, which was tabled just
a few months ago, which said that, if we want to make sure that this mission of
the State museums is still there, that there needs to be reinvestment of many
millions, $6 million at
least, and now we see just the opposite, almost $3 million of cuts in the museums.
So, if we see that, it's
because the situation is very serious, and this is why we ask the minister of
Culture to really battle for culture. That's what she said she wanted to be at
the beginning of her mandate. Then we saw the budget, and now she seems to be
just seeing what's going on without intervening, and that's not what we hope
from our minister of Culture.
Mme Montgomery
(Angelica)
: Mme Hivon, on these cuts
of tax credit, it's a 20% general cut, but the minister
says : We don't know whether that will be 20% on culture. It could be less on culture and more in a different
sector. It could be 5%. She says this could even be an increase in culture. So
what makes you so convinced that there will be a 20% cut in culture tax credits
specifically?
Mme
Hivon
:
What makes me convinced is just the facts, what is stated in the budget. So it
is stated that there is no exclusion for the culture credits. So everything is
being cut, so there is movie production as well as series, also the dubbing of
movies, everything is… the production of CDs, of concerts, of shows. Everything
is cut by 20%. She confirmed that today and she confirmed that it's an impact
of $85 million of cuts that is expected for the next three years.
So what we're asking her
is that, since she also confirmed today that those cuts apply starting in late
August, that there was no study done before to measure the impacts, also that
there wasn't any consultations done with the «milieu»,
the people who are concerned, who tell us that there will be thousands of less
jobs in the industry. What I asked her today is to stop the application of that
measure, because she, herself,
invites the people to come discuss the impacts and the measures in front of the
special fiscal committee. So
what I ask her is that she suspends it, because herself and Minister Leitão say that they
didn't conduct any study, that they didn't consult. So we should do things in
the normal order, and hear people, and hear what the impacts are before
applying that cut.
Mme Richer (Jocelyne)
:
Mme Hivon, nous étions plusieurs au point de presse de la ministre sur le même
sujet, donc on est arrivés un peu en retard. Pouvez-vous nous résumer votre
position sur votre demande de moratoire?
Mme
Hivon
: Oui.
Alors, ce que je demande à la ministre, c'est de suspendre l'application de la
coupe dans les crédits d'impôt pour la production culturelle. La ministre a
confirmé, tout comme son collègue des Finances, qu'il n'y avait eu aucune étude
d'impacts de menée, qu'il n'y avait eu aucune consultation avec le milieu de
menée. Ce sont des coupes paramétriques qui se sont faites clairement à
l'aveugle.
Or, ce qu'on voit, c'est une mobilisation
sans précédent des acteurs qui se sont tous unis dans une coalition, que ce
soit l'Union des artistes, que ce soit les diffuseurs, les producteurs, les
techniciens, autant de langue française que de langue anglaise. Les gens se
sont unis pour dire à quel point ces mesures-là, si elles étaient appliquées
tel qu'annoncé, allaient avoir des impacts déstructurants et de très, très
grandes désorganisations dans le milieu, des milliers de pertes d'emplois, ils
estiment. Et, quand on sait à quel point l'industrie notamment du doublage,
quand on sait à quel point, les artistes, chaque dollar compte pour leur survie,
quand on sait à quel point on a réussi à faire des séries de qualité et que là
la reconduction de plusieurs de ces séries-là est compromise, quand on sait
qu'on a réussi à obtenir des productions cinématographiques étrangères, notamment
à Montréal, et que là on voit qu'il y a cette épée de Damoclès qui plane au-dessus
de tout, je pense qu'il est urgent de décréter cette suspension dans
l'application de la mesure pour se donner le temps de faire les choses
correctement, d'évaluer les impacts, de consulter le milieu.
La ministre nous avait dit qu'elle serait
une battante de la culture, qu'elle se battrait pour chaque sou, que ce n'était
pas vrai que les compressions allaient atteindre le milieu de la culture. Or,
quelques semaines après cette déclaration, on voit le budget et on voit à peu
près des coupes dans tous les secteurs : la production culturelle via les
crédits d'impôt, les musées qui ont une coupe de près de 5 % dans leur
budget, en plus de devoir, évidemment, absorber les coûts de système, alors
qu'il y a des agrandissements qui sont en cours. Donc, c'est un peu une
énigme, comment des superficies plus grandes, des projets accentués vont
pouvoir être maintenus quand on coupe dans le fonctionnement. Même chose
pour le milieu des arts médiatiques, donc c'est tout le milieu de la culture
qui est excessivement inquiet.
Donc, ce qu'on demande à la ministre,
c'est de passer d'une simple spectatrice à une véritable battante et que, oui,
elle se batte pour la culture au Québec.
Mme Richer (Jocelyne)
:
Est-ce que ça vous inquiète le fait qu'elle refuse de dire si, vraiment, si
elle approuve cette décision-là due à des contraintes budgétaires ou si elle la
désapprouve et qu'elle va la contester? Elle ne se prononce pas. Ça vous
inquiète, ça vous dérange?
Mme
Hivon
: C'est
très inquiétant, l'attitude de la ministre dans ce dossier, je dirais,
particulier des coupes dans les crédits d'impôt pour la production culturelle, parce
qu'en fait elle se désolidarise de son milieu en disant au milieu : Faites
vos représentations. Elle est allée jusqu'à dire : Mobilisez-vous,
préparez des présentations étoffées pour aller devant la commission sur la
fiscalité.
Elle, où loge-t-elle? Où loge-t-elle dans
tout ce dossier? Quelle est sa position? Je n'ai toujours pas été en mesure d'avoir
des réponses ce matin. J'imagine qu'elle est inconfortable quand elle voit
quels vont être les effets de cette mesure, à quel point ça risque de
déstructurer. Mais sa position n'est pas connue. Tout ce qu'on sait, c'est
qu'elle demande aux gens de se mobiliser, ce qui est assez paradoxal, de dire
aux gens : Voici une décision de notre gouvernement. Maintenant,
contestez-la, venez faire des représentations devant la commission sur la
fiscalité, dont le mandat, je le répète, ne devait pas être… de venir être un
tribunal d'appel de décisions du budget, mais devait être là pour identifier
toute une autre série de compressions pour l'avenir, parce qu'il en manque
encore des centaines de millions pour qu'ils atteignent leur équilibre.
Donc, il y a un non-sens dans
l'ordonnancement des choses, il y a un non-sens dans la position de la ministre
et du gouvernement, et aujourd'hui ce qu'on lui demande, c'est de se battre, de
faire front commun et de faire en sorte de suspendre la mesure pour que tout le
monde puisse évaluer les choses correctement et qu'il n'y ait pas toute cette
déstructuration qui nous pend au bout du nez.
M. Bovet (Sébastien)
:
Je m'excuse d'avance si vous avez déjà répondu à la question, je suis arrivé un
peu en retard.
Est-ce qu'il devrait y avoir une exclusion
culturelle dans les compressions budgétaires? Est-ce que tous les programmes
culturels sont des vaches sacrées, auxquelles on ne devrait pas toucher, ou
est-ce qu'il peut y avoir des compressions?
Mme
Hivon
: En
matière de culture, chaque dollar compte. Et c'est pour ça que, s'il y a un
domaine où il faut être vigilant et où il faut faire des études d'impact, c'est
bien celui de la culture. La culture ne représente même pas 1 % du budget
global de l'État. La culture, ce n'est pas rien en soi. Évidemment, on sait
tous pourquoi c'est si important de défendre la culture. C'est parce que c'est
au coeur même de ce qu'on est comme peuple au Québec, c'est au coeur même de
notre identité, ça nous définit, et encore plus ici, au Québec, comme peuple
francophone dans cette mer anglophone.
Alors, ce qui est aberrant de la décision
du gouvernement, c'est d'être venu faire des coupes de 20 % paramétriques
dans tous les crédits d'impôt sans s'apercevoir… Et ce n'est pas des farces, la
CAQ, même la CAQ dit que cette décision-là de couper dans la production
culturelle, dans ces crédits d'impôt là, n'a aucun sens parce que ça va
déstructurer… La culture, c'est fort en soi. Ça doit être évidemment défendu
pour ce que ça représente en soi, comme vecteur de l'identité, mais c'est aussi
un vecteur économique extraordinaire qui est créateur de 130 000 emplois
au Québec qui dépendent du secteur culturel, qui vient amener énormément aussi
d'effets économiques stimulants, structurants avec les productions de séries
télé qui sont des grands succès, qui sont appréciées, productions
cinématographiques. Même chose pour le doublage. On est en train complètement
de se faire damer le pion, là, par d'autres juridictions pour le doublage.
Donc, ce qui est complètement aberrant,
c'est d'être venu décréter ces coupes sans aucune étude d'impact, sans aucune
consultation et de dire : On va y aller à rebours. Maintenant, on va venir
voir si ça avait du sens, notre décision. Il aurait fallu, je pense, y penser
avant. Et oui, l'exception culturelle, c'est quelque chose qui doit toujours
être dans la tête des décideurs. Quand on se dit pour la culture, quand on se
dit d'être défenseurs de la culture, on doit toujours se demander si les
mesures qui sont mises de l'avant vont avoir un effet délétère sur la culture.
M. Bovet (Sébastien)
:
Donc, vous êtes une défenderesse de la culture. Est-ce qu'il devrait y avoir…
Même si on va y réfléchir, est-ce que ça devrait être formel, l'exception
culturelle?
Mme
Hivon
:
Bien, l'exception culturelle, lorsqu'il y a des coupes paramétriques qui sont
faites comme ça, évidemment qu'il faut regarder toujours l'exception
culturelle. Ce n'est pas banal quand on se rend compte que ce n'est même pas
1 % du budget. Mais ce que je comprends, c'est que la ministre veut faire
tout un examen. Elle fera tous les examens qu'elle veut.
Moi, ce que je lui dis aujourd'hui, c'est
qu'il y a une décision qui a été prise par son gouvernement, qui est
extrêmement préoccupante, qui va avoir des impacts importants sur le milieu.
Donc, je lui demande d'arrêter. Ils aiment beaucoup le mot «cran d'arrêt». Je
lui demande de suspendre l'application de cette décision-là pour avoir le temps
de regarder les impacts correctement, ce qui aurait dû se faire évidemment à
l'avance, et qu'on n'en arrive pas dans la situation dans laquelle on est
maintenant.
(Fin à 13 h 44)