(Quatorze heures vingt et une minutes)
Mme David (Gouin) : Merci.
Bien, alors, bonjour à tout le monde. Nous revoici à l'Assemblée nationale à la
veille d'une nouvelle session parlementaire, d'un automne qui va certainement
être chargé.
D'emblée, je veux indiquer, au cas où
certains ne l'auraient pas encore compris, que Québec solidaire va s'opposer
avec la plus grande vigueur à toutes les compressions, toutes les coupes budgétaires
que le gouvernement Couillard est en train de faire. Qu'il le fasse directement
ou qu'il oblige les commissions scolaires à le faire, le résultat est le même.
Dans le domaine de l'éducation, encore une fois, des aberrations, là. On va finalement
couper dans l'aide alimentaire aux enfants défavorisés. C'est un comble. Et c'est
trop facile de dire aux commissions scolaires : Non, non, ça, vous ne
pouvez pas le faire, il faut garder les livres, il faut garder l'aide
alimentaire, il faut garder l'aide aux devoirs. Coupez ailleurs. Mais c'est où,
ça, ailleurs?
Alors, M. Couillard et M. Bolduc vont
avoir à répondre devant la population de toutes ces coupes qui font mal à qui?
Bien, aux gens ordinaires, aux travailleurs, aux travailleuses, aux familles,
aux enfants. Et nous serons vraiment présents, les députés solidaires, pour
être aux côtés de tous ceux, de toutes celles qui déjà… nous le savons par tous
les contacts que nous avons avec les mouvements sociaux, déjà, il y a des gens
qui réfléchissent sérieusement à la meilleure façon de contrer ensemble ces
politiques d'austérité qui font mal et qui n'apportent aucun résultat intéressant.
De façon plus spécifique, on veut parler
aujourd'hui du projet de loi n° 190 et du projet de loi n° 3, celui
du gouvernement libéral, bien sûr, sur les retraites. Alors, je vais tout de
suite commencer avec le projet de loi n° 190. Le projet de loi
n° 190, c'est celui que j'ai déposé à l'Assemblée nationale le 27 mai
dernier. C'est un tout petit projet de loi, deux articles seulement, mais ces
deux articles sont très importants pour protéger les locataires aînés
d'éviction abusive et, même dans le cas où des évictions sont jugées conformes,
légales, etc., protéger les aînés contre un déracinement qui leur fait très
mal, qui leur fait perdre leurs repères, leurs voisins, leurs services du CLSC,
leur club de l'âge d'or au coin de la rue. C'est vraiment l'idée de demander
aux propriétaires, qui légalement ont le droit d'évincer un locataire pour
agrandissement ou subdivision, de trouver un logement à ce locataire ou cette
locataire — on parle, la plupart du temps, de
femmes — lorsque ce sont des aînés en situation de vulnérabilité, que
cette vulnérabilité soit économique ou psychosociale.
Vous vous rappelez sans doute que le
gouvernement libéral avait accepté de recevoir ce projet de loi. Il y a eu un
premier débat de 1 h 15 min à peu près autour du projet de loi
en juin. J'ai eu ensuite l'occasion de rencontrer le ministre Moreau. Je dois
dire qu'il ne s'est pas montré d'une très grande ouverture, mais on a quand
même convenu de continuer de se parler. Nous venons de lui renvoyer un document
avec toutes les explications qu'il demandait sur le projet de loi et avec beaucoup
de précision et de clarification.
Ce que je veux maintenant obtenir, c'est que
ce projet de loi s'en aille en consultations particulières, que les groupes qui
sont pour et les groupes qui sont contre puissent s'exprimer : les associations
de locataires, les regroupements nationaux qui s'occupent des aînés. Moi, je
sais déjà qu'ils sont pour, ils ont déjà indiqué qu'ils appuyaient le projet de
loi. Puis on entendra aussi l'Association des propriétaires, qui, le jour même
du dépôt — en fait, le projet de loi était à peine déposé, c'est un
peu comme s'ils l'avaient déjà lu — ils étaient déjà contre. Alors,
ils viendront s'exprimer, on fera le débat au mérite. Et moi, je suis toujours
prête au dialogue, à la discussion, pourvu qu'à la fin ce projet de loi là,
quand même, réponde à un besoin qui est celui de protéger les locataires aînés.
Alors, je vous reviendrai là-dessus, mais je peux déjà vous indiquer que, cet
automne, j'ai l'intention que ce projet de loi soit adopté.
M. Khadir
: Alors, c'est
sûr qu'un autre projet de loi qui va nous occuper beaucoup, qui est d'une
importance majeure dans les prochaines semaines et les prochains mois, c'est le
projet de loi que dépose le gouvernement, le projet de loi n° 3 sur les
retraites. C'est tout à fait, disons, vrai qu'il y a un problème avec les banques
de revenus de retraite. On a un problème dans la pérennité des caisses de
retraite. On a également un problème très important, qui est en partie...
et qui est la cause du premier problème, qui est le sous-financement des
municipalités qui ont eu toutes sortes de problèmes au cours des dernières
années. Et une saine gestion des finances publiques, il faudrait que le
gouvernement voie à ça également.
Mais la solution proposée par le
gouvernement actuel, ce n'est pas une bonne réponse au problème des pensions de
retraite, dont l'ensemble de la population a besoin, parce qu'après tout il
faut se demander... et c'est ce que Québec solidaire va tâcher de rappeler à la
fois aux élus, mais aussi à tous ceux qui l'auraient oublié au détour de tout
ce qu'on a eu, au cours des dernières semaines, comme affrontements sur la
place publique alentour de ce projet de loi là : ce n'est pas en coupant
les fonds de retraite ou en diminuant la qualité des fonds de pension
d'employés, comme, par exemple, une secrétaire de municipalité, qu'on va
ajouter quoi que ce soit au travailleur autonome qui n'aura pas plus une
retraite garantie parce qu'on aura coupé dans la retraite de ceux qui disposent
d'une caisse de retraite.
Je reviens d'une rencontre informelle avec
un ministre ontarien qui montre la voie à suivre pour le gouvernement libéral
actuel, le gouvernement libéral ontarien, qui est un autre gouvernement
libéral, mais qui a pensé régler, plutôt que de niveler la situation, l'avenir,
en fait, de sa population et leur retraite par le bas, a décidé d'améliorer les
revenus de retraite pour l'ensemble de la population, exactement ce que Québec
solidaire propose depuis l'élection de 2012, parce que, nombre d'entre vous
l'avez sans doute noté, nous sommes le seul parti au Québec qui, depuis 2012,
avons un programme sur les retraites comme axe principal de notre activité
politique et de deux campagnes électorales.
Et c'est dans cette perspective-là, parce
qu'on refuse de niveler les fonds de retraite par le bas, parce qu'on pense
qu'au Québec la population du Québec mérite qu'on améliore les revenus de
retraite pour l'ensemble de la population, que nous allons nous opposer
fermement à l'adoption du projet de loi n° 3 tel qu'il est actuellement.
Nous sommes extrêmement déçus de voir la fermeture du premier ministre sur ce
dossier. C'est sûr que nous allons nous opposer, à toutes les étapes, à ce
projet de loi dans son introduction à l'Assemblée nationale et nous allons,
disons, sur la place publique, participer activement à montrer qu'il y a des
solutions, qu'il y a des manières de répondre aux préoccupations de notre
population sur leur retraite autrement qu'en nivelant les choses par le bas.
La Modératrice
: Des
questions?
Mme Biron (Martine)
:
Oui. Bonjour. Sur les intentions ou l'agenda du gouvernement, vous avez dit :
On va s'opposer fermement. Dans le camp politique, là, c'est-à-dire à
l'Assemblée nationale, est-ce que vous tissez des alliances? Est-ce que vous
avez le PQ avec vous, la CAQ avec vous? Vous en êtes où dans ces démarches pour
vous opposer à l'agenda du gouvernement?
Mme David (Gouin) : Oui. Quand
vous parlez de l'agenda, j'imagine que vous parlez de l'ensemble de l'oeuvre, là,
et non seulement du projet de loi n° 3.
Mme Biron (Martine)
:
Dans tout. Oui, oui.
Mme David (Gouin) : D'accord.
Alors, sur l'ensemble de l'oeuvre qui se résume en un seul mot, là : austérité,
austérité, austérité, ça va être difficile de faire des alliances avec la
Coalition avenir Québec parce qu'au fond les libéraux sont en train de leur
tirer la couverte sous le pied. Les libéraux veulent faire à peu près tout ce
que la CAQ voudrait faire. Alors, je pense que M. Legault et nous, nous ne
serons pas d'accord.
Quant au Parti québécois, il faudra voir
pièce par pièce. J'aimerais rappeler que lorsqu'ils gouvernaient, ça ne fait
pas si longtemps, le Parti québécois a aussi opéré des coupures dans les
services de garde, par exemple, dans l'aide sociale, tout le monde s'en
rappellera. On s'est assez battus sans réussir à les convaincre. Est-ce que
l'opposition péquiste, donc un PQ nouvelle mouture, va finalement s'objecter à
des mesures d'austérité? Bien, il faudra voir. Et c'est sûr que, chaque fois
qu'on pourra être d'accord pour se battre contre ces mesures, on ne se privera
certainement pas d'alliances.
Mme Biron (Martine)
:
Est-ce que finalement votre action sera plus dans la rue que nécessairement ici
pendant les travaux parlementaires? Est-ce que je comprends bien?
M. Khadir
: Ce qui est
intéressant, là, et on est excessivement contents d'apprendre que diverses
couches de la population, des gens qui sont touchés par les coupures dans les
écoles, dans les milieux de garderie, dans d'autres secteurs de l'activité
sociale, sont en train de réfléchir ensemble, sont en train de s'unir pour
opposer une fin de non-recevoir à cette politique d'austérité.
Moi, je pense qu'ils ont tout à fait
raison, et on a hâte, justement, d'offrir notre collaboration et d'être à leurs
côtés, d'être leur porte-voix lorsque c'est nécessaire ici, à l'Assemblée
nationale, parce que ces politiques-là, comme en France, comme ailleurs en
Europe, les politiques d'austérité sont largement déconsidérées. Le prix Nobel
d'économie Paul Krugman le rappelle à François Hollande, ces politiques ne sont
là que parce que les partis au pouvoir veulent obéir aux milieux financiers et
aux banquiers. Il n'y a aucune raison. L'économie, dans tous les pays où ça a
été appliqué depuis une dizaine d'années, en a pâti plutôt que s'être
améliorée.
S'il y a quelque chose, c'est une politique
de relance de l'emploi, c'est une politique de dépense sociale, c'est une politique
surtout courageuse, qui ferait en sorte que les États, dans une perspective de
saine gestion des finances publiques, parce qu'il faut gérer les finances
publiques, n'accorderait plus de rabais d'impôt puis de cadeau à des amis du
pouvoir.
M. Lacroix (Louis)
:
Pourriez-vous proposer, par exemple, des amendements au projet de loi n° 3
lors de… et est-ce que vous allez le faire? Est-ce que vous pourriez en
profiter pour faire un peu d'obstruction par le fait même?
Mme David (Gouin) : On ne se
gênera certainement pas. D'abord, il faut qu'on soit très au clair, nous allons
voter contre le principe. Au moment de l'adoption du principe de cette loi,
nous allons voter contre parce qu'elle est intrinsèquement mauvaise puisqu'elle
veut mettre fin, dans le fond, à un régime de libre négociation au niveau
municipal. On entend dire aussi que le gouvernement pourrait peut-être penser
s'occuper des fonds de retraite des employés des universités avec un peu la
même médecine. Alors, ça va s'arrêter où tout ça? C'est pour ça qu'on va voter
contre le principe.
Maintenant, le gouvernement étant
majoritaire, le principe sera sans doute adopté quand même. Alors, la réponse à
votre question, c'est oui, on va être là. On rencontre demain la coalition
syndicale pour discuter ensemble, pour voir de façon plus précise quels
amendements jugent-ils les plus importants. Nous avons déjà commencé à y
travailler nous-mêmes. Nous avons des amendements à apporter et nous allons
nous battre pied à pied. Mais c'est sûr qu'au terme de l'exercice, si le projet
de loi n° 3, pour l'essentiel, demeure le même, bien, nous voterons encore
contre.
Mme Prince (Véronique)
:
Si, justement, des syndiqués qui se sentent brimés, des gens de diverses
couches de la société qui se sentent pris à la gorge par les politiques
d'austérité, tout ça, est-ce que vous pourriez les encourager à se faire
entendre, à sortir dans la rue, à manifester? Est-ce que vous allez faire ça?
M. Khadir
: Ils n'ont
pas besoin de nous, d'abord, pour sortir dans la rue, j'espère, mais nous leur
disons, nous sommes à leur service pour faire entendre leur voix également à
l'Assemblée nationale, dans les commissions. Et n'oublions pas que, dans le
fond, ce n'est pas uniquement les travailleurs, les employés, les petits
commerçants aussi sont pris à la gorge. Pendant qu'on accorde 27 milliards
de dollars de rabais d'impôt… 27 milliards, ça, c'est le montant des
revenus encaissés par les actionnaires qui ont touché des dividendes, et qui
sont imposables, et qui ont été soustraits de leurs impôts parce que… 50 %
de rabais pour tous les actionnaires. Pendant qu'on donne, donc,
27 milliards de rabais à des actionnaires — souvent les plus
riches, hein, ce n'est pas M. et Mme-Tout-le-monde qui touche des
dividendes — bien, on coupe dans l'aide aux devoirs, on coupe dans
l'aide dans le petit déjeuner pour les quartiers défavorisés dans les écoles,
on coupe dans tout, et je pense que la population, les employés, les écoliers,
leurs parents mais également les petits commerçants devraient demander des
comptes à ce gouvernement. Dans une saine gestion des finances publiques, on ne
laisse pas échapper l'impôt comme ça, on ne laisse pas échapper les revenus
comme ça, on ne donne pas des cadeaux à des banques et à des compagnies
financières pendant qu'on coupe dans les services essentiels.
M. Bélair-Cirino (Marco) : Vous
êtes face à un gouvernement majoritaire qui jouit d'une grande majorité,
également un gouvernement en début de mandat. Qu'est-ce qui vous dit que vous
allez réussir à faire fléchir ce gouvernement-là sur son objectif principal qui
est de rétablir l'équilibre budgétaire en 2015‑2016?
Mme David (Gouin) : Vous
savez, M. Charest a déjà été premier ministre d'un gouvernement majoritaire. Ça
n'a pas empêché l'arrêt du forage et de l'extraction du gaz de schiste. Ça n'a
pas empêché la vente… de mettre fin aux velléités de vendre un parc national
qui était celui du Mont-Orford, ça n'a pas empêché qu'il n'y a pas eu de port
méthanier à Lévis et qu'il n'y a pas eu de centrale nucléaire… thermique,
pardon, dans le Suroît.
Autrement dit, quand une population, un
moment donné, décide que ça va faire, qu'on n'a pas voté pour ça, comme ça se
disait beaucoup sous M. Charest, quand des segments de plus en plus larges de
la société se mettent ensemble — on l'a vu lors du printemps érable,
parce que, là aussi, M. Charest… enfin, il a été battu, et donc le Parti
québécois a indexé les frais de scolarité mais ne les a pas augmenté comme M.
Charest voulait le faire — il y a des moments, et ils sont nombreux
dans l'histoire des peuples, où ça n'est pas parce qu'il y a un gouvernement
majoritaire, là, qu'on n'est pas capable de gagner des batailles. Alors, je
vous en ai nommé quelques-unes, il y en aurait certainement d'autres. Alors, ce
qu'on vous dit, ce qu'on vous répète : On est convaincus que ces batailles
vont avoir lieu, c'est écrit dans le ciel.
On n'a pas encore parlé des organismes
communautaires. Ils sont très touchés par ces coupes-là, pas nécessairement
parce qu'ils le sont eux-mêmes, quoique oui, dans certains cas. Mais, même ceux
qui ne subissent pas de coupe, qu'est-ce qu'ils subissent? Quand l'État donne
de moins en moins de services, qui, pensez-vous, ramasse la note? Qui paie les
pots cassés? Qui doit suppléer à tout ce que l'État ne fait plus? Tous ces
organismes communautaires pleins de femmes qui travaillent, sous-payés, pas de
fonds de pension, tiens, rien. Et donc, oui, il va venir un
moment — nous, on en est intimement convaincus — où il y
aura des couches, il y aura des gens, il y aura des secteurs, puis, à un moment
donné, ça sera tout le monde ensemble que les gens diront à M. Couillard :
Vous avez beau avoir un gouvernement majoritaire, vous n'avez pas été élus pour
faire ça. C'est juste trop.
M. Pépin (Michel)
:
Est-ce que vous le sentez, là? Est-ce que vous le sentez en ce moment, ça, là?
Mme David (Gouin) : Nous le
savons.
M. Pépin (Michel)
:
Parce que ce n'est pas si évident que ça, là. Puis je vais vous dire,
personnellement, c'est sûr, et je ne veux pas… je retiens, là, les exemples que
vous que vous avez donnés, mais là est-ce qu'on dans une situation où, justement,
il y a une bonne chance de fédérer ça? Et je vais poursuivre, là, il y a les
policiers, là, avec leurs fonds de pension. Oui, très bien, mais il y a peut-être
des groupes qui sont moins enthousiastes pour venir à leur défense et, bon, il
y a peut-être des situations comme ça. Est-ce qu'il y a une possibilité vraiment
que ça se fédère, tout ça?
M. Khadir
: Je
voudrais rappeler une chose. La coalition, là, qui regroupe les gens qui sont
touchés par le projet de loi n° 3, ne regroupe pas uniquement des
policiers et des pompiers. En grande majorité, c'est des employés modestes des
services publics, des services municipaux. Il faut le rappeler. Et il y a
actuellement, oui, une braise qui est ardente en dessous de ce… je dirais, des
cendres. Bien sûr, ça prend du temps, ces gens-là sont en train de se
concerter, de discuter, mais le gouvernement libéral ne perd rien pour
attendre, puis ce n'est pas vrai que l'objectif du gouvernement libéral, c'est
d'équilibrer le budget. Ce n'est pas vrai, ça, c'est un mensonge. Si le
gouvernement avait vraiment l'intention d'équilibrer le budget, il ne
laisserait pas tant de cadeaux aux barons de la finance et de l'industrie qui
sont les amis du Parti libéral. Si, vraiment, son objectif était de régler la
dette, je rappelle que M. Couillard pourrait faire en sorte de resserrer les
mailles du filet de la fiscalité qui permet à ses amis d'avoir des abris
fiscaux dans toutes sortes de paradis dont M. Couillard connaît quelques
adresses.
Mme Biron (Martine)
:
Est-ce qu'il n'y aurait pas un décalage? Est-ce qu'il n'y a pas un décalage?
Parce que, bon, M. Couillard est majoritaire comme Marco le faisait remarquer,
mais vous avez aussi mentionné que la CAQ n'était pas loin derrière, ce qui
veut dire que la majorité de la Chambre appuierait finalement la démarche
d'austérité. Est-ce qu'il n'y a pas un décalage finalement entre ce que vous
entendez et le Parlement?
Mme David (Gouin) : Mais je
vous rappellerai une fois de plus que, moi, je serais très étonnée, puis c'est
ce qu'on va voir dans les prochaines semaines, mais surtout dans les prochains
mois… Il faut avoir une ardente patience, hein, comme disait Pablo Neruda. On
va voir plein de gens qui vont dire : Non, mais, attendez, oui, j'ai voté
libéral peut-être parce que j'étais contre la charte, peut-être parce que je ne
voulais pas de référendum tout de suite, mais je n'ai jamais voté pour qu'on
vienne couper dans mon transport scolaire pour mes enfants, dans l'aide aux
devoirs, dans le soutien alimentaire. Je n'ai pas voté pour que des organismes
communautaires aient plus de difficultés — comme moi, j'en ai dans
mon comté, là — à avoir des mesures d'insertion pour personnes
assistées sociales. On coupe même dans ces programmes-là, aberration totale.
Je pense que, de plus en plus, c'est ça
qui va arriver. Et toutes ces infirmières dans les hôpitaux qui n'en peuvent
plus, ces travailleuses sociales qui me disent : Mme David, on est submergées,
ce n'est plus possible, pendant qu'on parle d'abroger encore des postes, de ne
pas remplacer encore les gens qui partent. Il y a une limite, à un moment
donné, je pense, à ce qu'une population va endurer. Et, à cause de ça, oui, moi
aussi, comme mon collègue, je pense — on est le 15 septembre, là; il
faut quand même laisser aux gens un peu le temps d'atterrir — je
pense que, oui, on verra ce feu sous la cendre grossir de plus en plus. C'est
une question de temps.
Mais je suis certaine que M. Couillard va
trouver une opposition, qui ne sera peut-être pas, ici, aussi grande qu'on le
voudrait, mais, oui, qui va venir non seulement de la rue, là, au sens où on
l'entend... Je sais que, dès que vous parlez de rue, vous parlez de
manifestations, mais il y a tellement de façons de s'opposer, et je suis
certaine que ça viendra.
M. Lacroix (Louis)
: M.
Khadir, vous nous avez dit tout à l'heure, en parlant de l'équilibre budgétaire,
vous avez dit que c'était un mensonge...
M. Khadir
: C'est un prétexte.
M. Lacroix (Louis)
:
...et que M. Couillard connaissait quelques adresses. Est-ce que vous
soupçonnez M. Couillard d'entretenir un système qui lui profite?
M. Khadir
: Bien, à
lui personnellement, non, mais c'est clair que les riches et puissantes
fortunes du Québec, qui supportent le Parti libéral, tout le milieu des
affaires, c'est eux qui profitent de ces trous dans notre loi qui laissent
échapper des milliards de dollars en revenus. Si l'exercice d'équilibre budgétaire,
d'éponger la dette, donc une saine gestion des finances publiques, était
sincère, on irait chercher une partie de ces revenus-là. On cesserait de donner
autant de cadeaux, après que ça ait été amplement démontré que c'est inefficace
et inutile, c'est jeter notre argent par la fenêtre à des firmes
pharmaceutiques. Ça fait cinq ans que je suis à l'Assemblée nationale. On nous
aurait écoutés quand on dit : Pourquoi on ne passe pas au logiciel libre?
Plusieurs parlements le font dans le monde. C'est des centaines de millions d'économies
qu'on aurait occasionnées au cours des dernières années. Et on trouve toujours
matière à remettre ça à plus tard ou à dire : Non, ce n'est pas possible,
c'est trop compliqué. Mais, quand il s'agit de couper dans les universités,
quand il s'agit de couper en recherche, quand il s'agit de couper en culture,
quand il s'agit de couper dans les services, c'est toujours très...
Non, c'est une offensive idéologique. C'est
un prétexte. Ne nous laissons pas embobiner par ce gouvernement qui ment sur
ses intentions. Les économistes au service de ce gouvernement ont une idée, c'est
de détruire l'état social, c'est de détruire nos services publics, de détruire
l'idée qu'on se fait de l'État, que l'État doit être au service de l'ensemble
de la population, de fournir de bons services et il faut qu'il aille chercher
de bons revenus. Eux autres, ce qu'ils veulent d'un État, c'est juste un État
qui gère les finances et qui veut que la business se passe au profit des plus
nantis.
Mme Plante (Caroline)
:
So, about school boards, where do you think they should cut?
M. Khadir
: We don't think that school boards should cut. They
should cut on the gross advantages given to rich people and corporations that
have billions of dollars of reductions on their taxes since the last 10 years.
It's something between… depending on the estimation of different experts,
between $5 to $12 billion have been given as tax exemptions, since the last 10
years, to a lot of people that don't need it. Why can't we begin to look into
that?
We are paying our drugs
much higher than any other province in Canada, in North America. Why aren't we
doing something about that?
Mme Plante (Caroline)
: …savings could be made…
M. Khadir
: They could be, but these savings
are… these savings, if there are not important cuts in the services, would be just negligible in front of what we
can do savings if we handle, in a responsible manner, public funds. That means
less «cadeaux», less gifts to those who control the economy and support the
Liberal Party. We're giving them billion of dollars of unneeded gifts.
Mme Plante (Caroline)
: What is most problematic about what you are seeing right now in the
school boards, that they are threatening to cut, you know, food aid, book
purchasing?
Mme David (Gouin) : I think, now, we see really what happened with these cuts in school
boards. In the beginning many people said : OK, they have a lot of money, so they won't cut in the services. But
now what we see is they have to cut something because on the administration, I
think they made cuts. In fact, in Montréal, the administration
expenses are not really high. So, now, many school boards are obliged to cut on
transportation, on the help to make «les devoirs».
M. Khadir
: Homework.
Mme David (Gouin) : Homework, «c'est ça», etc. It's unacceptable. We can't accept to
see school boards and schools cut on fundamental services, and I am very proud
of my school board in Montréal
who said to the Government :
We refuse to cut more, we can't, it's impossible, and I hope they will…
M. Khadir
: Stand up.
Mme David (Gouin) : …stand up.
Mme Plante (Caroline)
: What do you make of the fact that the minister is saying : I'm
telling them not to cut direct services to students, yet they are and, you
know…
M. Khadir
: It's hypocritical.
Mme Plante (Caroline)
:OK. So what's going
on...
M. Khadir
: It's hypocritical. The minister has no competence in saying that,
first. And the Minister is asking them to cut and then, in front of you,
journalists : Oh! I told them : Don't cut into these services. That's
not true.
M. Hicks (Ryan) : What did you make of the minister's announcements today about
giving almost a quarter billion dollars to expand schools, you know, the day before
we're coming back to the Legislature, the day before they are going to have
some more bad news to come?
Mme David (Gouin) : Don't mix many things. We need some new schools. For example, in Montréal, there are a lot of children, more
than we expected. So we need really to have new schools, really. So we can't
oppose building new schools and school boards cuts. It's two different things.
I agree with these constructions, but, in another way, we are against all these
cuts. Education is so important.
M. Khadir
: But, of course, it might be a
manipulation of the media in public opinion announcing this, so the people think :
Oh! They're spending on schools. No. They're spending on what is needed,
infrastructures and investments and, on the other hand,
they are cutting on needed services.
Mme David (Gouin) :
Merci. Woups!
M.
Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce qu'on pourrait vous entendre rapidement
en français sur les nouvelles compressions qui sont demandées aux universités,
donc 172 millions de dollars supplémentaires, selon Le Soleil,
ou…
Une voix
: Plus de 200.
M. Bélair-Cirino (Marco) : …
170 millions de dollars? Est-ce que les recteurs, les directions
d'université ont la capacité de revoir leurs façons de faire et de faire ces
coupes-là sans menacer les services aux étudiants?
Mme David (Gouin) : Moi, je ne
peux pas imaginer, encore une fois, comment ils peuvent faire. Bon, à moins que
certains recteurs consentent à baisser leur niveau de salaire, ce qui ne serait
pas forcément une mauvaise idée, en passant, mais, comme ils ne le feront pas,
ça va nécessairement toucher les services aux étudiants.
Là, ce qui m'étonne un peu, moi, c'est que
cette annonce ou, enfin, cette velléité, à ce que je sache, n'a pas été tant
que ça critiquée par les universités. On se demande pourquoi, elles qui
montaient tellement aux barricades durant les dernières années. Est-ce que ça
se pourrait que ça soit parce que, là, il y a une espèce de troc, un
gouvernement qui leur dit : On va bientôt s'occuper des fonds de retraite?
Vous aurez peut-être à payer moins pour vos employés, mais, en contrepartie, on
coupe dans vos budgets? Ça serait une question très intéressante à fouiller.
M. Khadir
: Merci
beaucoup.
(Fin à 14
h 47)