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Conférence de presse de M. Sam Hamad, ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale

Présentation du projet de loi, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite principalement quant au financement des régimes de retraite à prestations déterminées

Version finale

Thursday, June 11, 2015, 15 h 30

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Quinze heures trente et une minutes)

M. Hamad : Alors, bonjour, mesdames et messieurs, on va… Aujourd'hui, c'est l'annonce du dépôt d'un projet de loi de régimes de prestations déterminées, régimes de retraite à prestations déterminées. On va juste un peu parler de l'histoire, conter un peu l'histoire pour se mettre dans le contexte.

En fait, on se rappelle la crise économique de 2008, crise importante, impact majeur sur les régimes de retraite parce que les taux d'intérêt… une baisse majeure de taux d'intérêt. Taux d'intérêt, ça veut dire une baisse de taux d'obligations, par le fait même un impact majeur sur le rendement des régimes de retraite. Et donc, je me souviens, à l'automne 2008, où les patrons et les syndicats, dans le temps, ils avaient une inquiétude majeure et ils avaient raison.

Donc, dans ce temps-là, le gouvernement… il fallait que le gouvernement réagisse à cette situation-là. Nous avons fait adopter, en 2009, mois de janvier 2009, la première loi qui donnait des allégements pour les régimes de retraite pour les aider à passer à travers la crise. Et, dans ce temps-là, on parlait d'un allégement de 2 milliards, et c'est ce qui nous a permis de sauver beaucoup de régimes, et le fait même de sauver les régimes, c'est-à-dire sauver des pensions, des retraites pour les retraités, et aussi permettre aux travailleurs d'avoir toujours de l'espoir d'avoir un régime de retraite plus tard, et évidemment alléger le poids sur la masse salariale des entreprises. Il y a eu, après, deuxième étape, une extension des mesures d'allégement, et aujourd'hui nous avons déposé un projet de loi qui va… En fait, il n'y a plus d'allégement, c'est qu'on s'en vient avec un projet de loi final qui va permettre à ces régimes-là d'avoir une pérennité beaucoup plus importante.

La démarche, il est important de le mentionner aujourd'hui… En fait, nous avons demandé… et c'est là que j'ai avec moi aujourd'hui, les… je suis entouré par M. Montour, qui est l'actuaire en chef de la Régie des rentes, et avec ses experts qui ont travaillé à préparer le projet de loi; M. François Lamoureux, qui est le responsable, le grand patron du Comité consultatif sur le travail et la main-d'oeuvre, et ça, c'est une table importante pour nous, et je vais expliquer le rôle important qu'ils ont joué; bien sûr, à ma droite, M. Norman Johnston, qui est le P.D.G. de la Régie des rentes; et M. D'Astous, qui est vice-président de la Régie des rentes, qui est responsable, entre autres, de la gestion des régimes.

Alors, nous avons… Évidemment, la régie avait déjà commencé à travailler pour mettre en place un nouveau régime, et nous avons demandé à CCTM de… CCTM, en fait, c'est une table composée des patrons et des chefs syndicaux, donc, qui étaient autour de la table. Nous avons demandé à la table de nous amener un consensus pour qu'on prépare le projet de loi. Et définitivement nous avons… la table a travaillé très fort, et le comité a travaillé très fort, et nous avons obtenu un consensus assez important — et, je dirais, dans les rares consensus — sur le projet de loi que nous avons déposé aujourd'hui. Et vous pouvez constater rapidement que les centrales syndicales, les représentants des patronats sont très heureux de voir notre dépôt de projet de loi.

Donc, vous savez, un projet de loi déposé avec un consensus, un appui des deux côtés, c'est important. Je veux remercier François pour le travail accompli avec ses partenaires. Puis, je vais vous le dire, c'est très complexe, ce projet de loi. Donc, je veux remercier la régie pour leur collaboration, le travail qu'ils ont effectué, beaucoup d'heures, beaucoup de conseils, beaucoup de… Et je leur ai demandé… nous sommes en avance, en fait, si on regarde les autres provinces, dans ce que nous proposons aujourd'hui.

Vous savez, les régimes de retraite, c'est complexe, mais je vais donner quand même quelques idées pour bien comprendre ce que nous faisons aujourd'hui, ce que le projet de loi présente. En fait, ça touche autour de 815 000 personnes au Québec. Ça touche 815 000 personnes, des Québécois, et il y a 200 quelques mille retraités, et le reste, c'est des personnes qui sont des travailleurs. Ça représente autour de 380 compagnies, et ça… il y a 500 régimes, à peu près, et on parle des actifs… ces régimes-là, c'est autour de 85 milliards de dollars, et le déficit, actuellement, de solvabilité de ces régimes-là, c'est autour de 10 milliards de dollars.

Alors, les changements sont inspirés quand même en partie par le rapport D'Amours, et les changements majeurs que nous amenons aujourd'hui… D'abord, le plus majeur, le plus important, c'est les régimes qui étaient basés sur la solvabilité. On s'en va vers un régime qui est basé sur la capitalisation. Et on prévoit aussi pour… Vraiment, lorsque j'ai parlé, le mot clé, c'est la pérennité de ces régimes-là, mais un facteur important pour la pérennité, c'est d'avoir un fonds de stabilisation qui permet de… dans les jours où on n'a pas le rendement nécessaire, ce fonds de stabilisation là vient combler des déficits ou des pertes.

Évidemment, ça va permettre une vie plus stable et une prévisibilité pour les entreprises dans la cotisation, et ça permet aussi, évidemment, de sauver les régimes et de donner une... en fait, parce que... Pourquoi sauver les régimes? Pourquoi on tient autant à déposer un projet de loi comme celui-là? Bien, parce que les régimes de retraite à prestations déterminées sont considérés parmi les meilleurs régimes de retraite parce que l'employé, il cotise, l'employeur est responsable de déficits, mais l'employé, quand il prend sa retraite, il sait combien il va avoir comme prestations quand il va prendre sa retraite, et ça, ça donne un genre de sécurité, un genre de prévisibilité pour l'employé qui va préparer un jour sa retraite, et, en même temps, la prévisibilité aussi pour les entreprises dans les cotisations qui vont être faites par les entreprises pour maintenir le régime.

Il y a plein d'autres détails techniques, mais, grosso modo, on a une nouvelle loi maintenant qui va faire le... c'est la suite des autres. Par contre, cette loi-là va permettre de... et il y a une question qui peut être posée. Pourquoi on part d'un régime de solvabilité vers la capitalisation? Il y a deux raisons : les mesures d'allégement terminent au 31 décembre 2015, et l'autre élément, c'est l'effet des... Vous savez, actuellement, les taux d'obligations au Canada où... c'est une des bases de calcul très importantes dans les régimes, les calculs de solvabilité de régimes basés sur le taux d'obligations, et les taux d'obligations sont les plus bas, ce qui affecte énormément les solvalibilités des régimes et crée un déficit de solvabilité.

M. Montour, l'actuaire Montour me disait que, si tout le monde disait que cette année on a fait en moyenne un rendement de 11 % des intérêts, ça rapportait, à la bourse, du 11 %, tout le monde est content. Cependant, le fait que les taux des obligations sont tellement bas, alors ça affecte la solvabilité, que le gain qu'on a fait sur les taux d'intérêt, on l'a perdu sur... par le fait de l'effet de taux d'obligations. Alors donc, finalement... donc, les régimes, ils ont fait des déficits dans ces années-là. On souhaite qu'ils s'améliorent, mais là on prend toutes les mesures pour aider les entreprises et les syndicats, les travailleurs à maintenir, évidemment... Et bien sûr, en faisant ainsi, on protège les retraités. C'est important parce que la pérennité des régimes signifie aussi la pérennité des cotisations... les prestations qu'on va donner aux retraités. Donc, c'est dans... le triangle, il est maintenu, l'équilibre entre les trois : retraités, employeurs et employés.

Et, vous savez, un autre élément qui affecte beaucoup la solvabilité, c'est la démographie, le vieillissement de la population au Québec, où on a... on appelle ça des régimes matures, la maturité des régimes lorsqu'on a plus de retraités que des participants dans un régime. Donc, les régimes, de plus en plus, à cause du vieillissement de la population, à cause de l'impact démographique... peut avoir un impact financier sur les régimes.

Alors, grosso modo, ce que nous voulons faire avec le projet de loi ici, ma fierté aujourd'hui, la fierté de notre gouvernement, c'est que c'est un travail qui a été accompli par la CCTM et un consensus obtenu par les deux parties, les patrons, les syndicats, c'est important, qui nous permet aussi d'avoir… Évidemment, les entreprises cherchent la prévisibilité, cherchent... s'avoir des conditions stables qui permettent de les maintenir, et ce que nous faisons aujourd'hui avec notre régime… avec le projet de loi, et évidemment nous souhaitons, bien sûr, l'adoption dui projet de loi le plus rapidement possible. Maintenant, probablement, c'est à l'automne que nous allons faire ça.

Alors, pour terminer, une dernière vue d'ensemble des régimes de retraite au Québec. Tout le monde se rappelle la loi n° 15 pour les régimes municipaux. On a adopté, il n'y a pas longtemps, au mois de février, les régimes interentreprises. C'est d'autres types de régimes qui existaient, qui touchaient pas mal les épiciers au Québec. Ça, on l'a réglé et on a réglé maintenant les régimes privés et les régimes universitaires aussi sont à 95 % réglés, 97 % peut-être, et, de l'autre côté, ça, c'est les régimes, les grands régimes de retraite au Québec, et on a la Régie des rentes comme la base, puis on a aussi mis en place, comme vous le savez, c'est le régime, aussi, volontaire de retraite, qui va bien aussi.

Donc, en matière de retraite, notre gouvernement, en quelques mois, nous avons vraiment, on va dire, attaqué et, je pense, plutôt réglé les problèmes majeurs dans les régimes. Alors, nous sommes très fiers de déposer ce projet de loi et le prochain projet de loi, ça va être le projet de loi sur les universités.

Alors, voilà. Si vous avez des questions…

M. Gentile (Davide) : Bonjour, M. Hamad. Dans ce cas-ci, l'argumentaire des syndicats, c'est que, dans ce cas-ci, on a réussi à trouver une solution en laissant les gens négocier. Pourquoi ne pas avoir eu la même approche? C'est la question qu'eux posent par rapport aux régimes municipaux.

M. Hamad : En fait, c'est deux contextes complètement différents. Dans l'autre contexte, c'était le contribuable qui payait les régimes, et aujourd'hui… les régimes privés, c'est des régimes privés. Des régimes privés, c'est… il y a deux partis qui paient, c'est le travailleur et l'employeur. Il y a une grosse différence, et la différence, on l'a… je le répète, là, c'est le citoyen qui paie les taxes dans une municipalité.

Ici, là, c'est l'entreprise qui paie, qui joue le rôle de l'employeur. Dans une municipalité, l'employeur, c'est le citoyen, et le participant, c'est le travailleur dans une municipalité; ici, c'est les entreprises privées et les travailleurs syndiqués. Donc, le contexte est complètement différent.

M. Gentile (Davide) : Est-ce que, justement, vous avez l'impression que les mesures que vous avez adoptées vont permettre de stopper la diminution? En fait, il y a de moins en moins d'employeurs qui souhaitent instaurer des régimes à prestations déterminées...

M. Hamad : Au contraire.

M. Gentile (Davide) : ...est-ce que vous pensez que c'est suffisant pour arrêter cette glissade-là ou, à tout le moins, assumer la survie des régimes qui existent toujours?

M. Hamad : En fait, après la crise de 2008 et 2009, beaucoup de monde se questionnait sur ces régimes-là parce qu'ils disaient qu'il est trop cher, beaucoup d'obligations, etc. Il y avait une tendance à... était partie pour faire des régimes à cotisations cibles déterminées, cotisations déterminées… et c'est plutôt cotisations déterminées. Mais ce que nous faisons aujourd'hui… Ce que je disais tantôt, il y a 815 000 personnes au Québec qui ont ces régimes-là. il y a 360 compagnies, 380 compagnies, c'est 85 milliards de dollars d'actifs. Il fallait vraiment prévoir une prévisibilité puis une pérennité de ces régimes-là.

Et ce qu'on vient de faire aujourd'hui, je pense que ça va maintenir tous ces régimes-là en place — ça, c'est une grande avancée — et ça va aider aussi à diminuer... La solvabilité, actuellement, de ces régimes-là, c'est 10 milliards. Si on s'en va à la capitalisation, ça va améliorer. Le régime de capitalisation permet d'avoir un déficit de 5 milliards aujourd'hui sans rien faire. Donc, il y a une diminution de pression, et ça va permettre aux entreprises de savoir exactement la cotisation... vont faire pendant des années. Donc, ça va permettre de consolider ces régimes, qui sont d'ailleurs très avantageux pour un retraité, un travailleur, parce que vous le savez combien... quel est le montant que vous allez avoir à votre retraite.

Les cotisations déterminées, on ne garantit jamais la prestation. Il faut avoir des prestations cibles, dans ce temps-là. Mais on est... Donc, c'est plus sécuritaire, plus avantageux. Il est devenu plus coûteux. Là, on essaie d'avoir un régime qui permet aux entreprises d'avoir moins de coûts.

M. Gentile (Davide) : Cependant, est-ce que le fonds de stabilisation que vous ajoutez, ça ne devient pas, ça, un fardeau qui va devenir un peu contrecarrer les avantages... en fait, les assouplissements — on n'entrera pas dans les détails, là — que vous avez consentis ailleurs?

M. Hamad : Oui. Oui, oui, c'est correct, c'est bien, très bien. Vos questions sont très pertinentes, très intéressantes parce que c'est complexe, le sujet, mais vous faites bien.

En fait, là, on... contons l'histoire des régimes. Dans les années 2000, les régimes faisaient un surplus, et là qu'est-ce qui est arrivé, c'est que le monde, ils ont mis la main dans le surplus... deux côtés. Puis, je me souviens, c'était plus, le problème, comment on partage les surplus. Et ce qui est arrivé, c'est qu'on n'avait pas de marge de manoeuvre. La crise économique arrive, et tout le monde tombait dans le déficit. Et là on était dans l'autre… le pendule, il était rendu complètement de l'autre côté. Là, on courait pour sauver les régimes.

Je disais tantôt, l'histoire, c'est que moi, je me souviens, j'étais le ministre responsable. Au mois de septembre, j'ai reçu Mme Carbonnneau, j'ai reçu les... c'était Michel Kelly-Gagnon qui était le président du patronat. Ils sont arrivés puis ils ont dit : Là il faut sauver les régimes, sinon il y a des entreprises ils vont fermer. Là, on était vraiment dans une période assez importante pour aller faire cette étape-là. On a donné de l'allégement, 2009, la loi 2009, on a allégé les régimes et on a prolongé l'allégement.

Là, ce qu'on vient de faire ici, on règle le problème une fois pour toutes. Comment on règle le problème? C'est que, là, au lieu de vivre la fluctuation puis dire : Là, il y a un problème, on ajoute la cotisation, là on demande à l'entreprise d'en mettre. Si l'entreprise n'en a pas dans ce moment-là, des fois, ça peut faire la pression sur l'entreprise à dire : Bien, moi, j'aime mieux fermer puis partir. Nortel, l'histoire de Nortel, une histoire triste pour les retraités.

Alors donc, il faut prévoir comment on peut faire. Le fonds de stabilisation, on le dit, tu vas faire graduellement. D'ailleurs, c'est jusqu'à 2019 à peu près. Donc, on donne une marge, là, pour les entreprises, d'aller faire le fonds de stabilisation. Et, je pense, on ne veut pas vivre 2008, on ne veut pas vivre le moment où tout le monde…

Puis l'autre élément qui est intéressant, le fonds de stabilisation, quand même, lorsqu'on l'atteint, on permet aux deux parties de retirer l'argent en trop là-dedans. Donc, on a vraiment établi les règles du jeu davantage mieux que ce qu'on avait avant. Ils appelaient ça aussi les clauses banquier, les fameuses clauses banquier, ça veut dire on peut rembourser les surplus s'il y a lieu.

M. Gentile (Davide) : C'est ça. J'ai compris qu'au-delà d'un certain seuil les entrepreneurs pouvaient récupérer, là, bon, leurs billes si les différents facteurs… si on respectait les différents facteurs. Ceci dit, pour les universités, quelle est la différence dans le cas des universités? Parce que…

M. Hamad : Les universités, c'est le même principe. C'est un peu le même… Les universités ne sont pas toutes dans le problème, actuellement, les universités. En passant, il y a quelques universités où le régime, c'est déficitaire énormément. Il y en a d'autres qui n'ont pas besoin d'aucun allégement.

M. Gentile (Davide) : Et ils sont déjà à 50-50?

M. Hamad : 50-50 de contribution? Oui, hein? Oui, dans certains cas…

M. Gentile (Davide) : Bon, dans la plupart des cas, oui.

M. Hamad : Plusieurs, mais les universités, c'est un peu… Il y a quelques différences techniques, peut-être. Allez-y…

M. Gentile (Davide) : Ce que je veux… En fait, la question est plus politique que technique, dans le sens où si vous êtes intervenus dans le municipal, que, là, vous ne le faites pas dans ce cas-ci, pourquoi? Quelle pourrait être l'approche pour les universités? Est-ce que vous avez un «deadline» là-dessus?

M. Hamad : Bien, en fait, on va trouver une solution viable pour les deux. Il faut… Les universités ne sont pas toutes dans le… Ils n'ont pas tous les mêmes problèmes. Il y en a quelques universités où ils ont des problèmes importants, puis il y en a d'autres qui n'en ont pas. Ils n'ont pas de régime de solvabilité dans les universités. Puis là, on se comprend, capitalisation, solvabilité… Ils ne sont pas dans ces régimes de solvabilité là. Donc, cette loi-là, elle ne peut pas… Les principes de cette loi-là ne peuvent pas appliquer pour eux, et donc on va favoriser une entente en premier. Puis, s'il n'y a pas d'entente, on va imposer des règles.

M. Gentile (Davide) : Combien de temps?

M. Hamad : En passant, on est… Nous sommes à 98 % du chemin. Alors, c'est… Je peux dire, à 98 %, en politique, c'est, normalement, réglé, mais on reste toujours 2 % de surprise.

M. Boivin (Simon) : …M. Hamad, le représentant de la FTQ était très satisfait du projet de loi, était très content, il disait que c'était équilibré, et tout. C'était un son de cloche tout à fait différent de ce qu'on avait entendu avec le projet de loi n° 3. La différence entre les deux, c'est que le gouvernement a, semble-t-il, laissé les parties s'entendre entre eux dans le cas qui nous concerne, alors que, pour le projet de loi n° 3, il est venu imposer sa solution. Est-ce qu'on n'a pas la démonstration qu'il n'était pas nécessaire d'arriver avec une solution imposée avec le projet de loi n° 3, que les gens auraient pu s'entendre entre eux?

M. Hamad : Absolument pas, et je vais vous le dire, pourquoi. Il y a une grosse différence entre les deux régimes. C'est l'approche que j'ai choisie, moi, en passant, là, d'aller par le… je disais tantôt, là, le comité consultatif sur la main-d'oeuvre et le travail, que les deux parties… j'ai demandé aux deux parties de m'arriver avec un consensus. Et effectivement ils ont travaillé très fort, ils sont arrivés avec un beau consensus qu'on présente aujourd'hui.

La grosse différence, c'est que nous sommes dans les régimes privés et de… Le régime privé, actuellement, c'est… l'argent appartient à l'entreprise et au syndicat. Aujourd'hui, là, c'est purement privé, et donc c'est l'argent de la compagnie. En fait, et c'est une entente de négociation entre les deux parties, c'est carrément dans… Et, vous savez, les régimes de retraite, souvent, c'est dans la négociation de convention collective entre deux parties.

Dans les municipalités, l'employeur, c'est qui, dans le fond? Qui qui finance l'employeur directement, directement, directement? C'est les taxes des citoyens. Et c'est là qu'on était obligés d'intervenir, pour les taxes des citoyens, alors… parce que c'était… l'impact immédiat, c'est l'impact sur les taxes des citoyens. Alors, si les régimes, mettons, ils allaient de plus en plus mal, à la fin de la journée, la municipalité, elle va faire quoi? Elle va virer vers les citoyens puis elle va demander une augmentation de taxes.

Alors, l'approche qu'on fait ici, c'est : C'est du privé, donc on laisse les parties privées… De toute façon, si la compagnie est prête à payer plus puis les syndicats sont prêts à accepter, ou vice versa, ou les syndicats vont faire des concessions… C'est vraiment une convention collective entre deux parties. C'est là, la différence.

Mais je rappelle quand même, parce que je ne sais pas si vous l'avez entendu : Ce qu'on parle aujourd'hui, c'est 85 milliards d'actifs, c'est 815 000 travailleurs, c'est 380 compagnies et 500 régimes, alors c'est quand même majeur, ce qu'on amène aujourd'hui comme modifications. Je vous disais tantôt, juste pour le bénéfice… c'est que ça, c'est une histoire qui a commencé, je disais tantôt, en l'an 2000, où il y avait des surplus, tout le monde pigeait là-dedans, a dit : Regarde, ça va bien, on ramasse l'argent. Puis à un moment donné, quand ça allait mal, c'est 2008, ça allait mal, là, les entreprises risquaient de faire faillite, le gouvernement est intervenu, en 2009, la première loi qui donnait des allégements. On a prolongé l'allégement, mais maintenant ce qu'on arrive, finalement, l'histoire, aujourd'hui, c'est une loi qui va être permanente, prévisible. On règle le problème pour longtemps. On n'a plus, après, à intervenir, là. C'est fini, les règles sont là, puis les règles sécuritaires, puis des règles qui permettent aux deux parties de...

M. Ouellet (Martin) : Dans le fond, M. Hamad, vous établissez un cadre, et vous introduisez aussi des mesures comme la clause banquier, fonds de stabilisation, et vous dites aux employeurs et aux employés de régler le dossier entre eux.

M. Hamad : Exact.

M. Ouellet (Martin) : Alors, c'est un modèle qui, à vos yeux, ne pouvait pas s'appliquer au secteur public, là, mettons, municipal?

M. Hamad : Surtout, c'est... absolument. Puis l'autre élément, j'ajouterai aussi un ajout important, c'est que, de l'autre côté, si les deux s'entendent, bien, à la fin, ils demandent d'ajouter plus d'argent parce que le rapport de force, il n'est pas là, on s'entend aussi, ce que la municipalité, à la fin, a payé. Puis qui qui payait? C'est le citoyen. Puis en plus, vous vous rappelez, l'inéquité là-dedans, c'est que le citoyen… moi je donnais toujours l'exemple... Le citoyen, en passant, il a autour de 1,5 million de perte... des Québécois qui n'ont rien comme régime de retraite, ils sont des payeurs de taxes qui payaient des taxes à la municipalité pour payer des régimes à d'autres.

Alors là, ce qu'on a voulu, c'est faire un genre d'équité puis avoir un bon régime pour les deux, un régime qui va être... Aussi, s'assurer aussi, dans le régime, de la pérennité parce que la pérennité, c'est penser aux retraités. Et, vous savez, les retraités, une fois qu'ils sont à la retraite, ils ont moins — malheureusement, mais le gouvernement va les défendre — de poids dans la négociation entre les deux parties. C'est au gouvernement... j'ai toujours dit que c'est au gouvernement de défendre les intérêts des retraités.

M. Caron (Régys) : Mais la notion de solvabilité, M. Hamad, si on la fait disparaître, pourquoi l'avait-on créée au départ, puisqu'elle n'est plus utile aujourd'hui?

M. Hamad : Oui, bien, bonne question. C'est qu'au départ les taux d'intérêt étaient très élevés. Moi, je me souviens, là, on avait des taux d'intérêt à 18 %, ça fait qu'on n'était pas inquiets, hein? Le taux d'obligations, quand ils disaient : Tu ne vas pas risquer, vas-y au taux d'obligation, aller chercher des pourcentages assez élevés. Et donc les régimes, ils étaient quasiment... on n'a pas...

M. Caron (Régys) : Capitalisés?

M. Hamad : Bien, oui, puis surcapitalisés avec le temps. Alors, ce qui arrive aujourd'hui, c'est que le taux d'obligations aujourd'hui, c'est un des plus bas depuis très longtemps. Et ce que je disais tantôt, ce que M. l'actuaire Montour me disait, c'est que, mettons, un rendement à la bourse… parce qu'il y en a qui va dire : Bien, oui, à la bourse, ça va bien, on fait de l'argent. La bourse fait de l'argent, taux d'intérêt, on va chercher un bon rendement, c'est vrai, mettons, prenons un 11 % de taux de rendement moyen. Mais ce qui arrive actuellement, le taux d'obligations, il est très bas, puis le calcul de solvabilité, il est basé sur le taux d'obligations. Alors, le taux d'obligations est tellement bas que le rendement, il devient négatif de moins 12, même si l'intérêt, taux d'intérêt, il est assez… ou le rendement, il est assez élevé, mais avec les taux d'obligations tellement bas qu'on devient déficitaires à la fin.

M. Caron (Régys) : O.K., donc, on allège le fardeau de l'employeur pour…

M. Hamad : Les deux.

M. Caron (Régys) : …en fait, les deux, pour, je vais dire, financer le fonds de retraite. Mais l'obligation de créer les fonds de stabilisation, ça… c'est une charge supplémentaire, mais ce n'est pas aussi fort que l'obligation d'éliminer les déficits de solvabilité?

M. Hamad : Mais c'est une recommandation de D'Amours, rapport D'Amours, qui disait, là, il faut aller vers une capitalisation ou solvabilité améliorée. Parce que c'est des calculs actuariels, là, des calculs actuels, des hypothèses actuarielles. C'est quoi les hypothèses? Entre autres, on dit : On a tant de personnes, tant de vie, le tableau de mortalité où les gens vont vivre tant d'années, puis là on regarde le taux d'intérêt qu'on a, puis on dit : Bon, bien, si on a un rendement de tant, on a besoin de payer tant pour maintenir le régime. Alors, vous voyez automatiquement que les hypothèses qu'on met en place, si le taux d'obligations est bas, on est obligés de mettre plus d'argent dans le régime.

Alors, tout ça, là, aujourd'hui, on le corrige, puis la recommandation D'Amours, la tendance s'en va vers une correction. Cette correction-là permet d'avoir… de gérer mieux le risque, dans le fond. Parce que c'est toujours en cas que et donc, c'est… Et là l'élément qu'on ajoute aujourd'hui aussi, c'est on protège les fonds par le fonds de stabilisation. Ça, c'est très important. Puis, à certaines étapes, là, on dit aux deux parties : Vous pouvez en prendre, les deux, là, les travailleurs puis les employeurs, vous pouvez, à certaines limites, c'est sécuritaire, c'est stable, ça va bien, ça va très bien, profitez-en, prenez-en. Les deux sont, bien sûr, contents.

M. Caron (Régys) : Cette charge financière là qu'on ajoute, elle est, j'imagine, moindre que celle représentée par l'obligation d'éliminer les déficits de solvabilité? C'est ça le sens de ma question.

M. Hamad : Comment? Pardon?

M. Caron (Régys) : La charge financière qu'on impose de plus, là, pour créer ces fonds de stabilisation là, ça coûte encore moins cher que l'obligation d'éliminer les déficits de solvabilité?

M. Hamad : Bien, en fait, actuellement, les déficits, si on fait les deux calculs, actuellement les déficits de solvabilité, c'est 10 milliards, le déficit de capitalisation, c'est 5 milliards. Ça vous donne une idée : en partant, dans les calculs des deux, il y a 5 milliards de différence. Donc, le calcul va être plus, mettons… plus, bien, vous voyez, 5 milliards. Donc, il y a une obligation moindre en partant. Ça c'est le premier élément.

Deuxième élément, ce qu'on dit : Ton fonds de stabilisation, tu vas l'atteindre d'ici quelques années. Alors là, on ne dit pas demain matin, là, on met le fonds, là, ça va faire une charge, on n'atteint pas notre objectif. Donc, on s'en va avec une façon graduelle de mettre l'argent dans le fonds de stabilisation puis en même temps, on met… on paie les cotisations. On donne une chance au régime de survivre avec des règles claires puis on donne la chance de comptabiliser plus tard, puis, si ça va bien, on dit aux deux parties : Vous allez partager, oui, mais il y a une marge de sécurité. Pourquoi? Parce que le film qu'on a vécu dans les années 2000, on ne le répétera pas aujourd'hui. Dans le temps, c'étaient les chicanes, comment on va prendre les surplus puis comment on les partage. Je me souviens de ça, première loi que j'ai amenée en 2008, je pense, 2007, c'était sur les régimes RCR qu'on appelait, régimes complémentaires de retraite, c'était ça, la question.

M. Caron (Régys) : Avec l'augmentation de l'espérance de vie, vieillissement de la population, les éventuels krachs boursiers, vous pouvez nous garantir aujourd'hui que vous ne revivrez pas le film de 2008?

M. Hamad : Je vais vous le dire, si je vous le garantis aujourd'hui, je vais lâcher mon métier, je vais aller voir M. Warren Buffett, puis je vais être à côté de lui! Mais c'est que, ce qu'on fait, on va minimiser les effets extérieurs, on va minimiser. C'est-à-dire comment, c'est quoi minimiser? C'est comme : vous gardez une contingence dans votre fonds. Si la bourse va mal, et ça va très, très mal, crise économique majeure, si votre fonds de stabilisation, qui est 20 % de plus, vous allez l'absorber, vous allez, la marge, jouer là-dedans, ça, c'est premier élément.

Deuxième élément, c'est, quand on dit que les règles du jeu sont établies d'avance puis on sait comment on fait, ça va permettre aux gens de savoir où ils s'en vont avec ça.

Alors donc, c'est… et l'autre élément aussi, qui était fragile avant, c'est les études actuarielles, on demande à trois ans parce qu'à un moment donné, à chaque année, c'est beaucoup plus difficile à suivre parce que ça se peut qu'il y ait un rendement, ça se peut que la bourse baisse cette année. Puis, si elle baisse beaucoup, on dit : Mais là il faut que tu mettes de l'argent parce que, là, la solvabilité n'est pas là. Alors, l'évaluation actuarielle, on le fait sur trois ans, donc ça donne encore une marge de fluctuation.

Vous savez, quand vous investissez de l'argent avec un courtier intelligent, il va vous le dire tout le temps : Il faut travailler sur trois, cinq ans, sauf si vous êtes impulsif. Ce n'est pas votre cas, mais, si quelqu'un est impulsif, puis il veut aller vite, un an, il peut faire l'argent, l'autre année, il peut tout perdre. Alors, sur trois ans, il y a une stabilité quand même, alors ça donne une prévisibilité.

Les mots clés, là : stabilité, prévisibilité, puis essayez d'enlever les marges, là, d'aller vite puis aller mettre l'argent ou retirer, etc.

M. Ouellet (Martin) : Peut-être une petite dernière question. Le fonds de stabilisation, O.K., lui, il sert à assurer le financement du régime, la capitalisation du régime, c'est bien ça?

M. Hamad : Oui, dans le cas où on a… si, mettons, ça va mal, il fait des pertes, au lieu de tomber en bas 100 % puis devenir déficitaire, il donne une marge.

M. Ouellet (Martin) : Bon. À ce moment-là, pourquoi qu'on ajoute une clause banquier?

M. Hamad : Bien, en fait, si on veut retirer de l'argent… Mettons, on a plus qu'il faut, donc on peut retirer de l'argent. Alors, pour retirer de l'argent, on a permis aux deux parties de retirer des cotisations qu'ils ont mises pour l'employeur sur le fonds de stabilisation. Peut-être ajouter sur les clauses banquier.

M. Montour (Michel) : Oui, en fait, avant, là, il y avait… l'appartenance des surplus n'était pas claire, donc il y avait un intérêt, un grand intérêt.

M. Hamad : Excusez, expliquez donc la clause banquier parce que Martin le sait, mais probablement d'autres qui nous écoutent qui, peut-être, ne savent pas. Juste parce que clause banquier, banquier c'est riche. C'est quoi, une clause banquier?

M. Montour (Michel) : La clause banquier, en fait, ce que ça veut dire, c'est qu'il y a comptabilisation de certaines cotisations que l'employeur verse, alors qu'il n'aurait pas besoin de les verser quand le régime est en surplus. Donc, on l'incite à être plus prudent, à continuer de verser ses cotisations plutôt que prendre des congés de cotisations jusqu'à tant qu'il accumule son fonds.

Mais, lorsque le fonds est vraiment sécuritaire, si on… là, il faut que l'utilisation des surplus soit bien gérée. Donc, en gros, là, la méthode de financement est plus sécuritaire, mais aussi elle permet de gérer tant les déficits que les surplus. Avant, les surplus, comme disait M. Hamad, le film qu'on a vu, les surplus n'étaient pas gérés. Donc, le fonds de stabilisation permet une gestion des surplus, c'est-à-dire force à accumuler des surplus, mais permet de les retirer lorsqu'il y en a assez.

M. Ouellet (Martin) : C'est parce que, tout à l'heure, à la FTQ, je pense que ce que j'avais compris, c'était que la clause banquier, ça consistait à permettre à l'employeur de se rembourser s'il y avait déficit. Là, c'est une autre chose que vous nous expliquez, là, qui est complètement différente, là.

M. Montour (Michel) : Le fonds de stabilisation va permettre d'éponger les déficits. La clause banquier, c'est autre chose. C'est lorsque les surplus atteignent un certain seuil, disons 20 %, à ce moment-là, l'employeur dit : Bien, moi, je ne continuerai pas à mettre de l'argent dans le fonds alors que j'ai des projets dans lesquels je pourrais investir l'argent, par exemple, des projets de développement. Donc, ça prend un équilibre dans les deux. Donc, ce projet de loi là, il est équilibré, il gère tant les surplus que les déficits.

M. Caron (Régys) : Donc, ça permet à l'employeur de se donner un congé de cotisations si le fonds de stabilisation est complet. C'est-u ça qu'on doit comprendre?

M. Montour (Michel) : À certaines conditions, l'employeur peut prendre un congé de cotisations d'un an, mais il ne peut pas vider tout le surplus. Puis, quand on parle de surplus, là, il ne peut pas descendre en bas de 20 % de surplus. En gros, la règle, là, c'est : il faut qu'il y ait 20 % de surplus avant qu'il commence à faire des retraits.

M. Boivin (Simon) : Tout à l'heure, ce qu'on s'est fait expliquer, c'est ce s'il y avait un déficit de capitalisation, mettons, de 5 % et que c'était de la responsabilité de l'employeur de le rembourser… de le combler. Bien, à partir du moment où on arriverait à 120 % avec le fonds de stabilisation, bien, l'employeur pourrait se rembourser le 5 % de déficit qu'il avait comblé au départ avec l'argent qui allait être en surplus du 120 %, incluant le fonds de stabilisation. Est-ce qu'on parle de la même chose?

M. Montour (Michel) : L'employeur va pouvoir se rembourser, effectivement, mais pas tout de suite. Il va falloir qu'il atteigne un seuil de sécurité, une provision raisonnable avant de pouvoir prendre l'argent.

M. Boivin (Simon) : Mais cette provision raisonnable là, c'est le fonds de stabilisation?

M. Montour (Michel) : Exact.

M. Boivin (Simon) : Donc, c'est ça, c'est la même chose, là. O.K.

M. Hamad : Mais… Ce qu'ils vous ont expliqué, probablement c'est bon, mais ce que je vous dis : Il y a une entente entre tout le monde, ils sont tous heureux de ce qu'on fait là. Et évidemment les employeurs, ils ont voulu avoir plus sur la clause banquier, sur le surplus, et là on a trouvé un équilibre entre les deux. Mais la bonne nouvelle aujourd'hui : prévisibilité, stabilité, puis on règle le problème pour longtemps, puis tout le monde est d'accord avec ça, en deux mots. Merci.

(Fin à 16 h 4)

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