(Huit heures vingt minutes)
M. Legault
: Bien, écoutez,
ce matin, on a, dans un article de Louis Lacroix, des révélations qui sont très
troublantes, qui sont très préoccupantes. On apprend, donc, qu'au ministère des
Transports, encore une fois, il semble y avoir des problèmes de transparence,
des problèmes de gestion. On parle d'abord d'un problème d'organigramme, où des
personnes qui vérifient leur propre patron, évidemment, sont en conflit
d'intérêts. On parle aussi d'une espèce de comptabilité créative des extras.
Donc, l'idée, là, ce n'est pas de changer la comptabilité pour éliminer les
extras, ça devrait être vraiment d'éliminer les extras.
On parle aussi de contrats très importants
qui sont donnés à des anciens employés, et je pense, la question qu'on doit se
poser, c'est pourquoi Philippe Couillard a mis Robert Poëti dehors du Conseil
des ministres. Je pense qu'on a le droit de savoir pourquoi exactement M. Poëti
a été mis de côté. Est-ce que c'est parce qu'il posait des questions trop
embarrassantes à propos des façons de faire du ministère des Transports? Je
crois que M. Couillard, là, nous doit des explications ce matin, là, sur les
vraies raisons qui ont amené au départ de Robert Poëti comme ministre des
Transports.
La Modératrice
: On va prendre
les questions, commencer par Louis Lacroix, Cogeco.
M. Lacroix (Louis) : Bonjour,
M. Legault. Qu'est-ce qu'il faut faire au ministère des Transports, à votre
avis, pour régler la situation, pour régler le problème? Parce qu'il semble que
ce que Jacques Duchesneau avait noté en 2011 se perpétue encore. Ça existe
aujourd'hui encore au ministère des Transports.
M. Legault
: Bien,
exactement. Écoutez, moi, je me serais attendu qu'avec toutes les révélations
qu'on avait eues de Jacques Duchesneau, entre autres, que ça soit réglé
aujourd'hui, mais là ce qu'on apprend, c'est que Robert Poëti nous dit :
Je n'ai pas eu le temps de faire ce ménage-là. Ça ne semble pas clair, ce que
Jacques Daoust a fait depuis qu'il est en poste, mais, si ce qui est rapporté
est vrai, c'est totalement inacceptable puis ça vient confirmer que le ménage
n'a pas été fait, ni dans les pratiques de vérification, ni dans les pratiques
comptables.
Et actuellement, bien, je pense qu'avec
tout l'argent qui est dépensé chaque année par le ministère des Transports,
c'est urgent que M. Couillard fasse enfin preuve de leadership et d'abord
s'assure exactement de ce qui s'est passé au ministère des Transports depuis
deux ans, depuis qu'il est premier ministre. Il ne peut pas mettre ça sur le
dos de personne d'autre que lui-même, et moi, je pense qu'on a le droit de
savoir pourquoi que Philippe Couillard s'est débarrassé de Robert Poëti.
Pourquoi M. Couillard a décidé de tasser
Robert Poëti, de mettre à sa place Jacques Daoust, qui avait déjà eu des
difficultés au ministère de l'Économie? Est-ce que c'est parce que Robert Poëti
posait des questions trop embarrassantes à propos des révélations de Jacques
Duchesneau, de la comptabilité, parce qu'il voulait revoir l'organigramme, que
ce ne soit plus imputable? Est-ce que la sous-ministre au ministère des
Transports protège le gouvernement face à l'UPAC? Je pense qu'il y a beaucoup
de questions, là, ce matin, puis M. Couillard, là, nous doit des réponses. Puis
c'est très grave, c'est très préoccupant.
M. Lacroix (Louis) : Il n'y a
pas juste M. Poëti, il y a aussi le député de Jean-Lesage, André Drolet, qui va
demander aujourd'hui en commission parlementaire qu'il y ait une enquête de
l'UPAC et une vérification de la Vérificatrice générale sur un important
contrat qui a été accordé à la STO et dont le ministère des Transports doit
payer 85 % de la facture. Qu'est-ce que ça vous dit sur le fait qu'il y
ait deux libéraux qui semblent, en fait, dire au gouvernement : Il y a des
choses pas correctes qui se passent en ce moment?
M. Legault
: Bien,
exactement. Quand c'est rendu qu'un député libéral utilise une commission
parlementaire pour faire faire une enquête, parce que le premier ministre ne
veut pas le faire, bien là, ça en dit beaucoup. On se retrouve dans une situation,
là, où il ne faut pas juste faire une enquête sur le contrat de la STO, il faut
faire une enquête sur tous les contrats au ministère des Transports, sur tout
l'organigramme du ministère des Transports, sur toute la comptabilité du ministère
des Transports, sur tous les contrats qui sont donnés à des anciens employés du
ministère des Transports.
Et je voudrais aussi qu'on trouve une
façon de poser des questions à Robert Poëti. Je pense que Robert Poëti aussi
doit nous dire la vérité et puis doit nous dire ce qu'il a vu pendant qu'il
était là. Puis, quand il nous dit qu'il n'a pas eu le temps de finir son
travail, bien, exactement quel travail il voulait faire, quels sont les
problèmes qu'il a identifiés.
M. Lacroix (Louis) : Est-ce
qu'il faudrait lui demander qu'il vienne en commission parlementaire?
M. Legault
: Bien, moi,
je pense qu'il faut trouver une formule, là, pour qu'il y ait une enquête puis
que tout le monde soit rencontré, que ça soit Robert Poëti, que ça soit la
sous-ministre au Transport, que ça soit... tous les intervenants importants
dans le dossier.
M. Lacroix (Louis) : Est-ce
que la Vérificatrice générale — une dernière, s'il vous plaît...
La Modératrice
: C'est
bon.
M. Lacroix (Louis) : ...pourrait
être la bonne personne pour faire une enquête de ce genre-là?
M. Legault
: Je pense
qu'il ne faut pas exclure que ça soit nécessaire, effectivement, d'avoir la
Vérificatrice générale pour avoir une approche qui est vraiment indépendante,
là, parce que moi, j'ai de la difficulté à faire confiance à Philippe
Couillard, là. Quand c'est rendu qu'on se débarrasse d'un ministre qui pose
trop de questions, je pense qu'on a besoin, effectivement, d'avoir une source
indépendante.
La Modératrice
:
Alexandre Robillard, LaPresse canadienne.
M. Robillard (Alexandre) :
Robert Lafrenière de l'UPAC, qui est un ancien sous-ministre qui a travaillé
dans des cabinets de ministres libéraux, pensez-vous que les faits qui nous
sont exposés concernant des plaintes au ministère des Transports montrent qu'il
peut être en conflit d'intérêts quand il y a des appels à enquêter sur des
pratiques du gouvernement?
M. Legault
: Écoutez,
on n'a aucune preuve, mais ce qui est rapporté dans l'article de M. Lacroix, c'est
qu'il y avait une espèce de compétition entre les anciens qui travaillaient
pour Jacques Duchesneau puis les nouveaux qui travaillent pour M. Lafrenière.
Bien, écoutez, il faut que M. Couillard,
là, fasse preuve de leadership puis regarde, effectivement, est-ce que M.
Lafrenière est la bonne personne. On avait suggéré, puis le PQ aussi, que ça
soit un vote des deux tiers pour nommer le responsable de l'UPAC. Ça n'a pas
été accepté par le gouvernement, donc, pour l'instant, on n'a pas... en tout
cas, moi, je n'ai pas de preuve, mais je pense qu'on doit aller au fond du
dossier puis ne rien exclure à ce moment-ci.
M. Robillard (Alexandre) :
Mais, sur le plan des apparences, est-ce que vous pensez que c'était une bonne
idée? On sait quand même que les sous-ministres sont nommés par le Conseil des
ministres, donc par le gouvernement. Donc, est-ce que vous pensez qu'au départ
ça ne pouvait pas prêter flanc à des perceptions qui aujourd'hui pourraient
être accentuées par les faits nouveaux, là?
M. Legault
: Comme je
vous dis, on n'a pas de preuve, pour l'instant, qu'il y a un problème de
conflit d'intérêts, mais c'est préoccupant. Si c'est vrai, ce qu'on voit dans
l'article, puis il n'y a pas de raison de croire que ça ne soit pas vrai, là,
que l'UPAC n'a pas fait d'enquête sur le MTQ à la demande de la sous-ministre,
c'est très, très, très troublant.
M. Robillard (Alexandre) : Petit
truc sur Anticosti, Pétrolia dit qu'ils ont tout soumis les informations, ils
ont répondu à toutes les demandes du ministère de l'Environnement dans les
délais que... le ministère de l'Environnement confirme que ça devait être avril
où il y aurait une réponse. Donc, ce n'est plus seulement l'entreprise qui dit
que la réponse à la demande de certificat d'autorisation devait être donnée à
la fin avril. Donc, qu'est-ce que vous pensez de ça? On est devant des versions
contradictoires, donc j'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Legault
: Bien,
écoutez, vous avez vu comme moi, hier, à la période de questions, on a un
député du PQ, M. Therrien, qui pose une question au ministre Arcand, puis c'est
notre premier ministre géant vert qui se lève pour dire : Écoutez, là, le
PQ a accepté de faire de la fracturation hydraulique, c'est effrayant.
Écoutez, là, moi, je pense qu'actuellement,
sur une île où il y a 250 habitants, c'est possible de regarder des façons de
faire qui n'affectent pas la population. Et actuellement, ce qui semble clair,
c'est que M. Couillard, là, comme il l'a déjà dit, il ne veut pas même explorer
sur Anticosti. C'est comme s'il avait peur de trouver du pétrole, peur que les
Québécois fassent de l'argent. Moi, je ne reconnais pas le Parti libéral, puis
actuellement il y a un très mauvais message qui est envoyé par M. Couillard.
Maintenant, est-ce que M. Couillard a
donné des directives aux fonctionnaires comme il l'avait promis? On ne le sait
pas. Mais une chose qui est sûre, c'est qu'il envoie un très mauvais message,
non seulement pour ceux qui travaillent sur Anticosti, mais pour tous les
investisseurs éventuels au Québec dans le secteur pétrolier.
La Modératrice
: Marco
Bélair-Cirino, Le Devoir.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui. Bonjour, M. Legault. Pouvez-vous nous dire l'impact de ce récit-là, de
cette nouvelle-choc de L'Actualité sur la perception qu'ont les
Québécois de la politique québécoise?
M. Legault
: Bien,
écoutez, ça vient ajouter au cynisme de la population à l'égard de la classe
politique, quand on a un ancien ministre des Transports, qui a été tassé, qui
nous dit qu'il n'a pas eu le temps de finir de faire les changements qu'il
voulait faire. Quand on apprend qu'il y a une comptabilité pour ne pas montrer
d'extras, quand on apprend que ceux qui vérifient en région les dossiers au
ministère des Transports se font chicaner par leur patron pour ne pas se faire
critiquer, ça vient juste ajouter au cynisme de la population.
Puis moi, je ne comprends pas que M.
Couillard n'ait pas eu sa leçon. Il me semble qu'avec la commission Charbonneau
il aurait dû faire preuve de leadership puis de s'assurer qu'on soit plus blanc
que blanc. Or, là, ce qu'on voit, c'est qu'on a un gouvernement qui est très
opaque, et puis c'est possible que les anciennes pratiques soient encore en
place actuellement.
M. Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce
que Robert Poëti avait la responsabilité de témoigner, disons, publiquement de
ce qu'il a observé, de ce qu'il a aussi eu comme information de la part de sa sous-ministre
avant qu'il ne le fasse à L'Actualité?
M. Legault
: Bon, ce
que je comprends de Robert Poëti, c'est qu'il nous dit : Il y avait des
pratiques qui n'étaient pas exemplaires au point de vue gestion, autant au point
de vue de l'organigramme, des responsabilités des vérificateurs que de la
comptabilité.
Maintenant, ce qu'on n'apprend pas dans
l'article, c'est est-ce qu'il y avait une série de dossiers sur lesquels il y a
eu, effectivement, corruption, collusion, dépassements de coûts cachés et
autres. Moi, je pense que c'est là, là, qu'on pourrait peut-être poser des
questions à M. Poëti puis d'essayer de savoir un peu plus. Est-ce qu'il a vu
des choses qui n'étaient pas correctes au ministère des Transports? Et actuellement,
écoutez, ça vient un peu ajouter a ce que Jacques Duchesneau dit depuis
longtemps.
La Modératrice
: Régys
Caron, Journal de Québec.
M. Caron (Régys) : Oui.
Bonjour, M. Legault. Bonjour, M. Bonnardel. Le ministre aurait-il parlé... En
fait, M. Poëti aurait-il parlé s'il était resté ministre? On peut conjecturer,
mais est-ce qu'il...
M. Legault
: Oui, ce
qu'on comprend...
M. Caron (Régys) : S'agit-il
d'une vengeance de quelqu'un qui a perdu son poste de ministre?
M. Legault
: Bien, écoutez,
ce qu'on comprend, c'est qu'il était en train de corriger la procédure, là, les
façons de faire pour éliminer les conflits d'intérêts, pour revoir la
comptabilité. Il était en train de le faire. Donc, on ne sait pas à quel niveau
il était rendu. Est-ce qu'il avait découvert des affaires croches?
Mais moi, ma grande question ce matin, c'est :
Pourquoi M. Couillard a expulsé M. Poëti du Conseil des ministres? Est-ce que
c'est parce que M. Poëti, justement, voulait faire des changements avec
lesquels la haute direction du Parti libéral n'était pas d'accord? C'est très
troublant.
M. Caron (Régys) : La
crédibilité du gouvernement est attaquée par un député libéral.
M. Legault
: Moi, je
pense qu'actuellement, là, la crédibilité de M. Couillard puis du Parti libéral
est attaquée ce matin par deux députés libéraux, un ancien ministre puis un
député, qui nous parlent précisément d'un contrat où il y a un problème.
La Modératrice
:
D'autres questions en français? On va passer aux questions en anglais. Maya Johnson, CTV.
Mme Johnson (Maya) : Good morning, Mr. Legault. What kind of explanations are you hoping
for from the Premier in light of what has been revealed or alleged in the
article?
M. Legault
:So what we can read this morning in the article of Mr. Lacroix is that the Minister of
Transport… they had a creative accounting, they had also an organigram that
didn't make sense. People responsible for the audit were reporting to the ones
taking decisions.
So what we see and what
we read from what Mr. Lacroix said about Mr. Poëti is that Mr. Poëti was trying to correct
these problems. But the real question this morning is : Why Mr. Poëti has
been thrown off of the Minister Cabinet by Mr. Couillard? Was it because Mr.
Poëti was asking too many questions about the ways of doing business at the Ministry of Transport?
I think that Mr. Couillard
has to tell us clearly this morning what are the real reasons why he fired Mr. Poëti.
Mme Johnson (Maya) : So you think it's possible Mr. Poëti was being punished?
M. Legault
:
It's possible because it looks like ways of doing business that were reported
that the Charbonneau commission were still in place while Mr. Poëti was
minister. So he was trying to correct that and, before he was able to do so, he
was fired by Mr. Couillard.
La Modératrice
:
Merci. Ryan Hicks, CBC.
M. Hicks (Ryan) : Good morning. What kinds of questions do you think this story
raises?
M. Legault
:
You know that, about every three of six months, the CAQ is tabling some
examples of extras that are paid by the Ministry of Transport. Today, we learn
that there was a creative accounting at the Ministry of Transport to make sure
that we reduce the extras that are showed publicly. So I worry about this way
of doing business and I think we have to have an audit, maybe and independent
audit from the General Auditor.
M. Hicks (Ryan) : Should Mr. Poëti have told the Premier about his concerns?
M. Legault
:
We don't know at this point, but maybe that's why we has fired. That is the
real question this morning, because those facts are really «troublants». Merci.
(Fin à 8 h 36)