(Onze heures quarante-cinq minutes)
M. Coiteux : Alors, bonjour tout
le monde. Ce matin, comme vous savez, j'ai déposé à l'Assemblée nationale le projet
de loi n° 110, Loi concernant le régime de négociation des conventions
collectives et de règlement des différends dans le secteur municipal. Comme
vous le savez, dans l'Accord de partenariat avec les municipalités 2016‑2019,
le gouvernement s'était engagé à revoir le cadre de négociation des relations
de travail dans le secteur municipal afin de refléter un équilibre entre, d'une
part, évidemment, la juste négociation et, d'autre part, l'intérêt des
l'ensemble des citoyens des villes. Et le projet de loi d'aujourd'hui, déposé
aujourd'hui, constitue une réponse très ferme à cet engagement que nous avons
pris.
Le présent projet de loi prévoit de
nouvelles règles spécifiques au processus de négociation et de détermination
des conditions de travail et de règlement des différends dans le secteur
municipal. Et le premier article de ce projet de loi est très important, il
jette les bases du principe d'équilibre entre les attentes des salariés et les
impératifs d'une gestion efficace et efficiente des ressources financières
publiques. Il dit nommément qu'une municipalité, c'est une institution
démocratique redevable, imputable devant ses citoyens, devant tenir compte,
donc, de l'ensemble de ses citoyens et des contribuables. En fait, il introduit
des principes directeurs qui devront guider les partis impliqués ainsi que
toute personne concernée dans la négociation ou dans la détermination des
conditions de travail des salariés du milieu municipal.
Le projet de loi prévoit des règles
propres aux policiers et pompiers et d'autres règles pour les autres salariés
syndiqués. Évidemment, le premier groupe n'ayant pas droit de grève, il est important
de s'assurer qu'il y ait accès à une procédure de règlement des différends.
Quant au deuxième groupe, les syndiqués membres du deuxième groupe, donc,
peuvent exercer leur droit de grève, ce qui assure un équilibre sur le plan
juridique entre les parties négociantes.
Le projet de loi propose qu'un délai minimal
de 120 jours de négociation s'écoule avant de recourir à l'intervention
d'un tiers. Il s'agit là d'un gage de démonstration de bonne foi. Après cette
première période, si les parties n'arrivent pas à une entente, il deviendrait
obligatoire de s'inscrire à une étape de médiation. L'implication d'un tiers
neutre pourrait être une opportunité permettant aux partis concernés des
rapprochements. À la fin de cette période, le médiateur remettrait son rapport
aux parties. Le projet de loi propose également de prolonger la durée minimale
des conventions collectives dans le secteur municipal de trois à cinq ans.
En ce qui concerne les policiers et les
pompiers, en cas d'impasse, le projet de loi propose de recourir à un conseil
de règlement des différends qui serait constitué de trois experts nommés par le
gouvernement parmi des personnes reconnues comme compétentes en relations de
travail, dans le domaine municipal et en économie. Les expertises que les
membres du conseil détiennent sont importantes pour la crédibilité de la
décision, puisqu'une fois la décision rendue, elle lie les parties et constitue
la convention collective.
Des critères guideraient également la
décision : la situation financière et fiscale de la municipalité et
l'impact de la décision à l'égard des contribuables, des principes de saine
gestion des fonds publics et de la situation économique locale, les conditions
de travail en vigueur des salariés visés et celle des autres salariés de
l'employeur ou d'un employeur semblable, la politique de rémunération et des
dernières majorations consenties par le gouvernement aux employés des secteurs
publics et parapublics et de la situation et des perspectives économiques du
Québec.
Le
projet de loi suggère que, si la médiation ne portait pas fruit, les parties
auraient la possibilité de poursuivre la négociation jusqu'à l'obtention d'une
entente ou de demander conjointement que leur différend soit soumis à un
arbitre unique qui devrait tenir compte des mêmes critères de décision que ceux
établis par le conseil de règlement des différends.
Cependant,
devant une situation exceptionnelle qui risquerait de compromettre sérieusement
la prestation de services publics, l'une ou l'autre des parties aurait la
possibilité de demander au ministre des Affaires municipales et de l'Occupation
du territoire la nomination d'un mandataire spécial. C'est un geste majeur. À
l'occasion d'une telle possible situation exceptionnelle, le projet de loi
prévoit une procédure exceptionnelle, à savoir que la partie demanderesse doit
motiver par un argumentaire écrit les circonstances exceptionnelles qui la
justifient. Et, après avoir consulté le ministre responsable de l'application
du Code du travail, le ministre des Affaires municipales nommerait un
mandataire spécial s'il estime que tous les moyens en vue de régler le
différend ont été épuisés et qu'à la lumière de ces circonstances
exceptionnelles il existerait un risque sérieux au regard des services à rendre
aux citoyens.
Ce
mandataire spécial devrait jouir d'une expérience reconnue dans l'un ou l'autre
des mêmes domaines que ceux que j'ai mentionnés précédemment, c'est-à-dire les
relations de travail, une expérience du secteur municipal ou une expertise
économique. Les recommandations du mandataire spécial devraient prendre en
compte les mêmes critères établis pour les décisions du conseil de règlement
des différends pour les pompiers et les policiers. Son rapport serait
confidentiel.
Enfin,
il faut souligner que l'Assemblée nationale pourra légiférer sur les conditions
de travail. Ainsi, le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du
territoire pourra proposer aux parlementaires, dans certaines situations, sur
la base du rapport du mandataire spécial, un projet de loi spécial qui
déterminerait les conditions de travail. Pour la première fois de l'histoire du
Québec, un projet de loi viendrait reconnaître qu'une municipalité a ses
caractéristiques et qu'ainsi elle ne doit pas être vue comme une entreprise
privée. Ainsi, les processus doivent tenir compte de ces caractéristiques dans
un contexte où les élus sont redevables devant leurs contribuables et ceux-ci
doivent respecter la capacité de payer des citoyens. Merci.
M. Lacroix (Louis) :
Pourquoi, M. Coiteux, vous avez décidé, ultimement, là, dans la situation
ultime, que l'Assemblée nationale va passer... en fait, pourrait passer une loi
spéciale pour décréter les conditions de travail? Pourquoi ne pas avoir donné
ça, finalement, aux municipalités? Pourquoi est-ce que les municipalités n'ont
pas ce privilège-là elles-mêmes de le faire et s'en remettent à l'Assemblée
nationale?
M. Coiteux : Bien, c'est parce
que la capacité de légiférer en la matière, elle appartient à l'Assemblée
nationale du Québec. Les villes n'ont pas cette capacité législative, donc il
faut… dans ces circonstances exceptionnelles, c'est balisé, là, par ce
caractère exceptionnel… il faut faire cette proposition, si elle a lieu d'être faite,
à l'Assemblée nationale. C'est parce que c'est là que réside le pouvoir
législatif là-dessus.
Mme Porter (Isabelle) : Mais
en même temps, M. Coiteux, vous venez de donner des nouveaux pouvoirs aux
municipalités. On aurait pu faire d'une pierre deux coups, non, donner
davantage de pouvoirs comme on l'a fait pour Québec, par exemple?
M. Coiteux : Écoutez, il y a
des pouvoirs constitutionnels qui sont conférés à l'Assemblée nationale du
Québec, et ces mêmes pouvoirs ne sont pas les mêmes pour les villes. Alors, on
travaille sur la base du droit, et notamment des dispositions de la
Constitution, ça, c'est certain. Ce qu'on fait ici, par contre, c'est qu'on
reconnaît — le principe est important, l'article 1 du projet de loi
est important — que la municipalité n'est pas une entité comme une
entreprise privée, c'est une entité démocratique, redevable, imputable devant
ses citoyens, qui doit se gouverner dans l'intérêt collectif de ses citoyens et
dans le respect de la capacité de payer des contribuables, mais en même temps
elle doit aussi s'assurer d'avoir une main-d'oeuvre qui a des conditions de
travail tout à fait justes, et c'est cet équilibre-là qui est recherché dans la
loi, et on se donne des mécanismes qui sont différents.
M. Lacroix (Louis) : Mais
est-ce qu'on comprend que ça n'aurait pas passé le test des tribunaux que de
donner ce pouvoir-là aux municipalités?
M. Coiteux : C'est certain que
le projet de loi qu'on dépose, pour nous, c'est un projet de loi qui s'inscrit
totalement dans le droit, et notamment dans le droit constitutionnel. Il
s'inscrit là-dedans, mais il change beaucoup la nature des négociations dans le
secteur des relations de travail municipales parce qu'il reconnaît pleinement
que la municipalité n'est pas une entreprise privée et qu'on ne peut pas appliquer
le même type de mécanismes que ceux qu'on aurait appliqués lorsque c'est un
conflit entre parties privées.
M. Gagnon (Marc-André) : Mais
est-ce qu'il aurait été inconstitutionnel de donner le pouvoir de décréter aux
municipalités? C'est ça, la question.
M. Coiteux : Le pouvoir de
légiférer en la matière, il réside à l'Assemblée nationale du Québec, il ne
réside pas à l'intérieur des municipalités. Donc…
M. Gagnon (Marc-André) :
Donc, il aurait été inconstitutionnel d'essayer de le… aux municipalités? Vous
ne pouvez pas le faire?
M. Lacroix (Louis) : Vous ne
pouviez pas le faire?
M. Coiteux : Bien, on fait un
projet de loi qui permet de rétablir un équilibre entre, d'une part,
l'importance de gérer les finances publiques municipales de façon conforme à
l'intérêt des citoyens puis, en même temps, de s'assurer le respect du droit à
une juste négociation du côté de la partie syndicale.
M. Gagnon (Marc-André) : Oui,
mais c'est quand même paradoxal de dire : D'une main, on veut redonner des
pouvoirs aux municipalités, leur conférer davantage d'autonomie et, de l'autre,
ultimement, se retrouver dans une situation où c'est l'Assemblée nationale qui
décrète les conditions de travail.
M. Coiteux : Non, regardez, ce
qu'on fait ici, c'est qu'on reconnaît pleinement un droit qui n'était pas
présent, qui n'était pas explicite dans les lois actuelles. Alors, on modifie
le cadre de négociation. C'est une loi spécifique pour le secteur municipal.
Elle rétablit un équilibre qui ne pouvait pas exister à partir du moment où on
niait même l'existence de cette institution démocratique qu'est une
municipalité, qui est au service des citoyens et qui doit respecter les
contribuables.
M. Vigneault (Nicolas) :
Mais, M. Coiteux, dans le cas des policiers et des pompiers, quelle est la
différence entre votre conseil de règlement et… auparavant, c'était devant un
arbitre? Il y a trois membres au lieu d'un seul? Parce que ça semble être la
même instance.
M. Coiteux : Ah! bien, c'est
que… Deux choses. De un, d'abord, ce conseil de règlement des différends est
nommé selon des principes qui sont différents des arbitres traditionnels, là,
en matière de relations de travail. C'est basé sur une expertise reconnue dans
le domaine économique, dans le domaine du secteur municipal, dans le domaine
des relations de travail. C'est vraiment de l'expertise, on cherche de
l'expertise très, très pointue, d'une part. Et, d'autre part, les principes sur
lesquels ils vont analyser la situation sont beaucoup plus clairement alignés
sur les principes mêmes de l'article 1 de la loi, qui dit qu'on cherche un
équilibre.
M. Lessard (Denis) : Mais,
comme, pour les cols bleus et cols blancs, là, qu'est-ce qui arrive avec le
droit de grève? À quel moment il intervient? Ou est-ce qu'ils ont encore un
droit de grève dans tout ça? Parce que c'est un mécanisme…
M. Coiteux : C'est les mêmes
dispositions que… C'est selon les mêmes dispositions a priori, sauf que,
d'abord, avant de pouvoir s'en remettre à un tiers, il faut avoir franchi une
première étape, qui est d'avoir négocié de bonne foi pendant au moins 120 jours.
Donc, ça, c'est une étape importante.
Et, s'il arrive qu'après une médiation les
parties n'arrivent pas à s'entendre, et qu'on est devant une situation où il
n'y a apparemment pas d'issue, et que les services publics peuvent être remis
en cause, bien, l'une des deux parties peut solliciter le ministre des Affaires
municipales, qui, lui, nommerait un mandataire spécial, et qui va regarder la
situation, et faire des recommandations au ministre. Les recommandations qu'il
va faire, il va les baser sur les mêmes critères que ceux qui s'appliquent au
conseil de règlement des différends. Et le ministre, bien sûr, sur la base de ce
rapport, pourrait présenter un projet de loi à l'Assemblée nationale. Il
pourrait le faire si le rapport lui donne, finalement, des indications que c'est
la voie à suivre.
M. Lessard (Denis) : Mais il
y a un enchaînement d'étapes, là, qui font qu'il n'y a pas de grève, les
syndiqués ne peuvent pas aller en grève.
M. Coiteux : Non, non, ils ont
pleinement leur droit de grève, respecté par le cadre... On ne change pas
toutes les dispositions du droit du travail applicables au secteur municipal. Il
y a certaines dispositions qui sont modifiées, mais tout le reste reste, par
ailleurs, tout à fait selon les lois actuelles.
M. Boivin (Simon) : Au niveau
de la grève, dans l'enchaînement des étapes, à quel moment un groupe de
représentants de travailleurs...
M. Coiteux : Bien, écoutez, c'est
les principes actuels, puis on ne modifie pas les principes qui donnent un
droit de grève aux employés du secteur municipal du côté cols bleus, cols blancs.
Il n'y a rien qui est changé de ce côté-là. Ce qui change...
M. Boivin (Simon) :
...pendant la négociation...
M. Coiteux : Oui, oui, c'est
la même législation qui continue de s'appliquer. Donc, le droit de grève qu'ils
ont actuellement, il continue de la même façon.
Mme Porter (Isabelle) : Bien,
ça veut dire qu'il faut qu'ils négocient pendant 120 jours avant de
pouvoir faire la grève?
M. Coiteux : Non. C'est parce
qu'on ne peut pas faire appel au gouvernement pour qu'il nomme un mandataire
spécial si on n'a pas d'abord et avant tout fait preuve de bonne foi en négociation,
et c'est là qu'il y a le critère de 120 jours, qui est crucial.
M. Boivin (Simon) : Justement,
sur la négociation du mandataire ou des experts membres, là, du conseil de règlement
des différends, ces gens-là vont avoir un pouvoir assez grand. Vous ne craignez
pas que leur nomination prête flanc à des critiques de favoritisme envers des
groupes patronaux, syndicaux?
M. Coiteux : Non, ce n'est pas
l'objectif. L'objectif, c'est justement de sortir de ce cadre-là.
M. Boivin (Simon) : Je
comprends que ce n'est pas l'objectif, mais est-ce que vous ne craignez pas que
ça prête flanc à de la contestation étant donné que cette personne-là a
tendance à être propatrons ou...
M. Coiteux : Non, je ne
croirais pas. Je ne croirais pas parce que les principes mêmes de la loi
viennent clairement dire que ce n'est pas une question de favoriser un côté ou
un autre. Ce n'est pas une question qui doit être vue de cette façon-là. C'est
de l'expertise qui est basée sur la capacité de juger des conditions, et notamment
les critères qu'on a mis de l'avant. Ces critères-là, ils existent, hein, mais
ils sont beaucoup plus explicites, ici.
M. Lacroix (Louis) : Mais
est-ce que le rapport de force... parce que les maires des grandes municipalités
disaient, entre autres choses : Le droit de grève, ça fait en sorte que
les syndiqués ont un rapport de force trop grand et ça fait en sorte de faire
augmenter les salaires, ultimement. Mais, en leur maintenant ce droit de grève
là intégral, est-ce que ça ne vient pas, justement, perpétuer, si on veut, ce
rapport de force là du côté des syndiqués?
M. Coiteux : Bien, il faut
maintenir un équilibre, il faut maintenir un équilibre. Donc, il y a le droit
de grève, d'une part, mais il y a la possibilité d'en appeler au ministre,
d'autre part, qui n'existait pas, là, à l'heure actuelle. Ça, c'est quelque
chose de majeur. Donc, le ministre peut nommer un mandataire, le mandataire va
juger de la situation en fonction des mêmes critères et selon les principes
mêmes de cette loi spécifique pour le secteur municipal et faire des
recommandations au ministre. Et le ministre, lui, peut toujours saisir
l'Assemblée nationale s'il juge que c'est nécessaire de le faire et de proposer
une loi.
M. Vigneault (Nicolas) :
Sinon, on retourne à la table ou comment ça se passe, là, par exemple? Une fois
que vous avez le rapport, qu'est-ce que...
M. Coiteux : Bien,
dépendamment du rapport du mandataire... Si le mandataire dit : Je crois
qu'il y a encore une possibilité, c'est une chose; si le mandataire devait dire :
Écoutez, je pense que, là, on a épuisé toutes les possibilités... Mais
rappelez-vous une chose, avant même de demander au gouvernement de nommer ce
mandataire, au ministre, bien, il faut avoir démontré qu'on fait une négociation.
Vous savez, ce n'est pas une question, ici, de faire deux, trois tours de piste
pendant une semaine ou deux puis de lever la main. Ça ne sera ni ça pour les
policiers, pompiers, ça ne sera pas ça non plus pour les cols bleus, cols
blancs. Il faut faire la preuve de sa bonne foi. Mais il arrive des
circonstances dans lesquelles il n'y a pas d'issue, et là l'une ou l'autre des
parties, dont la ville, bien entendu, pourra faire appel au gouvernement.
M. Gagnon (Marc-André) : Pour
les cols bleus, cols blancs, quand vous dites que, si la médiation ne portait
pas fruit, que les parties auraient d'abord la possibilité de poursuivre la
négociation jusqu'à l'obtention d'une entente, pendant combien de temps, quoi,
jusqu'à ce que le ministre décide de nommer un mandataire ou…
M. Coiteux : Non, pour les
cols bleus et les cols blancs, pour autant que les conditions aient été
remplies, c'est-à-dire les 120 jours minimum, une médiation obligatoire...
Avant même d'invoquer cette possibilité-là, il faut qu'il y ait une médiation.
Et puis, si, au terme de ça, l'une des deux parties juge qu'il n'y a vraiment
aucune possibilité d'y arriver et que les services publics sont en cause, elle
doit motiver par écrit, là, pourquoi elle considère qu'elle est devant une
circonstance exceptionnelle. Et, si c'est jugé, effectivement, exceptionnel,
dans ce contexte-là le ministre va nommer un mandataire.
M. Gagnon (Marc-André) :
Mais, si ce n'est pas exceptionnel, combien de temps ils ont pour poursuivre la
négociation? Un coup qu'on a fait la médiation et que ça ne fonctionne pas, là,
combien de temps ils ont pour poursuivre la négociation? Ce n'est pas défini.
M. Coiteux : Bien, c'est un
peu théorique, hein? Parce qu'il arrive un stade où l'une des parties, si elle
pense qu'il n'y a pas d'issue, elle va pouvoir utiliser le mécanisme qui est
prévu dans la loi. Alors, combien de jours? Écoutez, l'une ou l'autre des deux
parties pourra lever la main, si elle croit qu'elle est capable de justifier
les circonstances exceptionnelles, à tout moment après la médiation, puis la
médiation a lieu au moins après 120 jours de négociation.
M. Gagnon (Marc-André) :
O.K., donc l'accumulation des délais, du nombre de jours pourrait rendre la
situation exceptionnelle. C'est un peu ce qu'on comprend, là.
M. Coiteux : Oui, mais il y a
un changement fondamental par rapport à la situation actuelle. Parce que, dans
la situation actuelle, il n'y a pas d'autre issue que : On continue, puis
éventuellement il y a une des deux parties qui va céder. Ici, il y a un
mécanisme qui est prévu pour dire : Écoutez, on a là une impasse, on a là
une impasse qui remet en question les services publics et on peut en appeler au
ministre des Affaires municipales. Mais ce n'est pas dans n'importe quelles
circonstances, il faut avoir négocié de bonne foi, il faut avoir cherché
activement une solution négociée, notamment par le biais d'une médiation, et il
faut justifier le caractère exceptionnel de la démarche.
M. Gagnon (Marc-André) : Ça
risque d'être mal accueilli par les syndicats, M. Coiteux.
M. Coiteux : Écoutez, ce qu'on
veut faire ici, c'est de travailler dans l'intérêt supérieur des citoyens tout
en respectant pleinement les droits des travailleurs du secteur municipal. On
considère que les mécanismes actuels ne traitent pas le secteur municipal, les
citoyens qui vivent dans les villes, de façon adéquate. Les mécanismes actuels
traitent la situation des citoyens et des villes comme s'ils étaient des
actionnaires d'une entreprise privée. Ça n'a aucun sens, et c'est ce qu'on
vient modifier avec le projet de loi.
M. Gagnon (Marc-André) : Vous
avez présenté ça aux maires hier. Comment ils ont accueilli votre proposition?
M. Coiteux : Bien, ils
prennent connaissance du projet de loi. En même... pas en même temps, là, après
les députés de l'Assemblée nationale.
Mme Porter (Isabelle) : Vous
avez répété le mot «exceptionnel». Est-ce à dire que vous ne vous attendez pas
à ce qu'on utilise cette procédure-là souvent?
M. Coiteux : Écoutez, le but,
c'est toujours que les parties en arrivent à une entente négociée, c'est toujours
préférable que les parties en arrivent à une entente négociée. Vous savez, j'ai
piloté une négociation avec les employés du secteur public, négociation qui a
duré environ une année avant d'en arriver à une entente de principe. Soit dit
en passant, en général, ça prenait plus qu'une année. On l'a fait en une année.
Et on a toujours dit qu'on préférait une solution négociée. C'est la même chose
dans le secteur municipal, mais il arrive parfois qu'on n'y arrive pas. Il
arrive parfois qu'il y a des circonstances qui justifient de trouver une autre
voie. Les municipalités vont pouvoir trouver une autre voie ou les syndicats,
par ailleurs, pourront aussi lever la main, vont pouvoir trouver une autre voie
si on n'y arrive pas, en ayant démontré sa bonne foi.
Journaliste
: M. Coiteux,
le maire de Québec allait plus loin que tous les autres en vous demandant le
droit de lock-out. Est-ce que vous aviez sérieusement envisagé cette
possibilité-là?
M. Coiteux : Ça existe déjà,
hein? Je me suis posé cette question-là au tout début, ça existe déjà, le droit
de lock-out, ça existe déjà. Dans les faits, c'est très peu utilisé par des
villes qui ont même cette possibilité de le faire. Alors, ce n'était pas ça qui
était la nature du déséquilibre. La nature du déséquilibre, notamment du côté
des policiers, pompiers... pas seulement du côté des policiers, pompiers, mais
particulièrement du côté des policiers et des pompiers, c'est que les
mécanismes d'arbitrage qui existent, là, dans les lois actuelles, ne sont pas
adaptés à la condition d'un gouvernement de proximité, finalement, qu'il y ait
des municipalités, ce n'est pas adapté à ça. Et il faut être capables, de temps
à autre, de le reconnaître puis de moderniser, et c'est ce qu'on fait avec ce
projet de loi.
La proposition, qui est faite ici, c'est
une proposition de modernisation qui reconnaît pleinement qu'une municipalité,
c'est une institution démocratique redevable devant l'ensemble de ses citoyens,
qui doit veiller à l'intérêt public en même temps qu'elle doit s'assurer
d'offrir à ses employés, parce qu'elle a besoin d'avoir des employés de
qualité, elle doit offrir, en même temps, des conditions de travail qui sont
acceptables, décentes, et puis tout le monde a droit à une solution négociée.
Alors, on essaie la négociation d'abord. Il
y a un mécanisme de sortie si on n'est pas capables d'y arriver dans le cas des
policiers, pompiers, qui est le conseil de règlement des différends, puis il y
a un mécanisme possible de sortie dans le cas des cols bleus, cols blancs, qui
est le mandataire spécial, et une décision ensuite du ministre pour la suite
des choses. Merci.
(Fin à 12 h 6)