(Onze heures dix minutes)
M. Jolin-Barrette : Alors,
bonjour, tout le monde. Je souhaite revenir sur la question, en Chambre, que
j'ai posée à la ministre de la Justice relativement à l'abolition du délai de
prescription pour les victimes d'agression sexuelle.
C'est inacceptable que… Maintenant, on
parle de dénoncer la culture du viol, on dit aux victimes de ne pas hésiter à
dénoncer leur agresseur. De dire aux victimes d'agression sexuelle qu'on
maintient une législation qui fait en sorte qu'une personne qui a été agressée
en 2009, qui avait eu connaissance de son agression, n'a plus de recours civil
contre son agresseur pour obtenir réparation, ce n'est pas acceptable.
Il faut moderniser nos lois. Il y a déjà
un bout de chemin qui avait été fait en 2013, mais c'est pour le futur. Nous,
on veut rendre ça rétroactif. On ne veut plus que les victimes se fassent dire
non à la cour. Ce n'est pas le procès de la victime. Au niveau du temps, au
niveau de l'écoulement du temps, au niveau du délai, ce qu'on veut, c'est
donner tous les outils, toutes les prises possibles aux victimes pour qu'elles
puissent obtenir réparation, obtenir justice. Puis manifestement, encore une
fois, le gouvernement libéral ne comprend pas la réalité des victimes à la
cour. Ce n'est pas normal qu'on mette des bâtons dans les roues des victimes en
matière criminelle et en matière de violence sexuelle.
Et je voudrais vous entretenir d'un second
sujet également, celui du droit de la famille. Ce matin, j'ai présenté un
mandat d'initiative en droit de la famille pour qu'on puisse étudier le rapport
du Comité consultatif en droit de la famille. Il faut comprendre que j'ai fait
la demande le 7 juin dernier, environ la date anniversaire à laquelle le dépôt
du rapport en droit de la famille a été déposé.
Ce n'est pas normal que, dans notre
société, les enfants n'aient pas les mêmes droits s'ils sont nés en mariage ou
hors mariage. Prenons la protection de la résidence familiale. Prenons le cas
de la situation où un parent conjoint élève l'enfant de sa conjointe durant de
nombreuses années; ça ne sera pas les mêmes droits. Prenons le cas également si
vous avez un enfant — il y a eu un cas récemment au
printemps — et que vous n'êtes pas marié, et que le conjoint décède;
à ce moment-là, on ne pourra pas lui donner le nom de l'ancien conjoint parce
qu'ils n'étaient pas mariés. La présomption de paternité ne s'applique pas.
Donc, on crée deux catégories d'enfants, et c'est inacceptable.
Il y a plusieurs éléments intéressants dans
le rapport. On doit l'étudier. On a proposé de l'étudier tous ensemble, de
façon non partisane, et je pense que les libéraux se ferment encore une fois. La
ministre de la Justice, à la question de ma collègue de Joliette tantôt, a dit quelque
chose qui démontre son insensibilité à la question et qui démontre aussi une
certaine méconnaissance du dossier, parce qu'elle a dit : Écoutez, nous,
on veut y aller par petits bouts, hein, et le projet de loi n° 113 sur
l'adoption, ça démontre qu'on y va par petits bouts. Cependant, le rapport du Comité
consultatif en droit de la famille, les travaux ont été lancés après 2013, et
le dossier de l'adoption est plus vieux que cela, ça a commencé en 2007.
Donc, oui, c'est une réalité de droit
familial, mais ce que je veux dire, ce qu'il y a dans le rapport du comité
consultatif de la famille, c'est beaucoup plus large qu'uniquement l'adoption.
Puis je pense que, notamment sur les enjeux de mères porteuses, sur les enjeux
de filiation, c'est vraiment extrêmement important de régler la situation le
plus rapidement possible parce que ça crée des questions éthiques et ça crée
des questions aussi philosophiques à l'effet : Est-ce qu'on utilise le
corps de la femme en matière de procréation assistée? Et il faut aussi que les
enfants qui naissent de ce projet parental là, bien, aient des règles de
filiation claires. Présentement, les tribunaux, la Cour d'appel le dit, il n'y
a pas de guide de conduite, il n'y a pas de ligne directrice. C'est le rôle du
législateur. Donc, vivement, il faut que le gouvernement s'en occupe.
M. Croteau (Martin) : M.
Jolin-Barrette, qu'est-ce que vous pensez du fait que les pages supposément
sécurisées du Conseil de la magistrature sont accessibles et surtout dans un
contexte où l'ordinateur d'un journaliste a été saisi pour avoir consulté ces
pages-là?
M. Jolin-Barrette : Bien,
écoutez, nous, on a présenté une motion pour protéger le travail
journalistique. On a émis de sérieuses réserves aux perquisitions qui avaient
été effectuées, là, pour le journaliste du Journal de Montréal. Mais ça
soulève également des questions... À partir du moment où les pages du Conseil
de la magistrature ne sont pas sécurisées, ça soulève des questions aussi, puis
je crois avoir lu ce matin que, juste par des recherches sur Google, c'était
possible d'accéder à certains documents. Donc, c'est préoccupant que le Conseil
de la magistrature n'ait pas un système informatique sécurisé.
M. Croteau (Martin) : Est-ce
que ça soulève des questions sur les motifs derrière la perquisition au Journal
de Montréal?
M. Jolin-Barrette : Écoutez,
ça, je ne peux pas vous répondre, là, parce que, pour ce qui a motivé
l'obtention du mandat de perquisition, là, je n'ai pas lu le mandat, je ne l'ai
pas vu. D'ailleurs, il doit être sous scellé probablement. Non, il n'est pas
sous scellé? Bien, j'en prendrai connaissance puis je pourrai vous répondre par
la suite.
Des voix
: Merci.
(Fin à 11 h 15)