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Point de presse de Mme Manon Massé, députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques

Version finale

Tuesday, November 15, 2016, 10 h

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Dix heures quatre minutes)

Mme Massé : Alors, bonjour, tout le monde. Malgré le bruit incessant, je pense qu'on va arriver à faire ce point de presse là. D'une part, vous voyez, je suis bien accompagnée aujourd'hui. Sachez que ce sont des citoyens et citoyennes de différents villages de la vallée du Saint-Laurent, des citoyens et citoyennes extrêmement préoccupés par la situation des puits de gaz qui fuient.

J'ai avec moi M. Serge Fortier qui prendra la parole. Sachez qu'il est le coordonnateur des équipes d'inspection citoyennes qui ont eu une entente avec le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles il y a plus d'un an de ça et que lui-même a participé à l'étude ainsi que différents inspecteurs derrière moi. M. Fortier est aussi coordonnateur du collectif C'est ma vie, qui travaille sur le dossier du moratoire de l'exploitation des gaz de schiste depuis un certain nombre de temps, et il a siégé sur le groupe de travail sur les puits de forage inactifs lors des rencontres avec le ministère.

Alors, voyez-vous, je suis entourée aujourd'hui de gens pour qui la fuite de méthane, ça les préoccupe, et je vais laisser M. Fortier vous en parler.

M. Fortier (Serge) : Bien, merci beaucoup, Mme Massé, d'ailleurs, pour nous avoir donné la chance, là, de faire la lumière sur ce dossier-là aujourd'hui. Mesdames et messieurs des médias, les citoyens du Québec sont inquiets. Ils sont inquiets pour leur sécurité, ils sont inquiets pour leur santé et inquiets aussi de l'héritage qu'ils légueront à leurs enfants, particulièrement concernant la hausse des GES, des gaz à effet de serre, qui entraînentm de toute évidence, des perturbations majeures sur notre qualité de vie.

Au Québec, comme partout ailleurs dans le monde, des puits d'hydrocarbures fuient. Des puits datant de plus de 50 ans fuient, des puits datant de plus de 20 ans fuient et même des puits plus fraîchement forés fuient et nuisent à la réduction significative des GES au Québec. Alors, nous, citoyens vivant sur le terrain, ça, on le sait, on le voit puis on en a la preuve. En est-il de même pour le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles?

M. le ministre, si vos hauts fonctionnaires le savent et le voient comme nous le voyons, que vous ont-ils rapporté à ce sujet? Vous savez, pour vous dire, la population, elle a le choix. Elle a le choix de croire le ministre puis le ministère sur parole ou de croire les citoyens comme nous sur des faits. Alors, des faits, ça, on en a. La plupart, vous savez, vous avez vu le puits de Sainte-Françoise, le puits A190, là, qui est un puits de la SOQUIP, qui a été foré dans les années 80 et puis qui... On a démontré qu'il fuyait. Bien, vous savez, voilà 20 ans, moi, mes enfants, ils allaient jouer sur ce puits-là. Ils allaient allumer ce puits-là, voilà 20 ans, O.K., parce qu'ils restaient dans ce coin-là avec leur mère. Et puis c'est eux qui m'ont dit : Écoute, papa, le puits, là, il ne fait pas rien que fuir du tuyau où est-ce qu'on a mis le feu au bout, ça fuit du sol aussi. On mettait le feu au sol aussi. Alors, ce n'est pas d'hier. Et le ministère s'en est-il déjà occupé? Non. Il a fallu qu'en 2014 on dénonce ça, à l'automne 2014, pour que le ministère aille mettre une clôture autour, refaire la clôture autour, qui était abîmée, qui ne résistait plus.

Alors, on est en 2016, et le puits fuit encore. Ils ont remis une clôture, je crois, à la suite du reportage de la semaine passée. Alors, est-ce que c'est ça que le ministère considère, que le ministre considère comme de sécuriser un puits, simplement mettre une clôture autour, en le laissant fuir, pour ne pas que les enfants aillent jouer autour? Nous, on se pose ces questions-là. D'ailleurs, vous savez, ce puits-là, juste pour vous donner un exemple, là, il émet, juste à l'évent, non pas les fuites... sans considérer les fuites qu'il y a au sol, le puits de Sainte-Françoise émet 71 tonnes de gaz à effet de serre par année. C'est l'équivalent, si on veut, de 4 965 litres de mazout qui s'échappe de ce puits-là en équivalent énergie par année. On pourrait faire fonctionner 50 cuisinières au gaz à l'année avec les pertes qu'il y a là. Ça équivaut à 124 pleins d'essence de 40 litres chacun, ce qui s'échappe comme énergie de ce puits-là tout à fait gratuitement et qui s'en va dans l'atmosphère pour augmenter les gaz à effet de serre. C'est juste pour vous dire.

Alors, votre plan d'action... Je m'adresse au ministre. Votre Plan d'action pour l'inspection des puits inactifs stipule que, de 2011 à 2017, la documentation et l'inspection de 700 puits inactifs ainsi que la prise en charge des puits problématiques serait complétée. Nous sommes à la fin de 2016. Cinq années sur six sont déjà passées, et aucun renseignement sur ces 700 puits n'est rendu public, pas même la centaine de puits que votre ministère affirme, dans ce plan d'action là, affirme avoir inspectés depuis 2011, non plus l'autre centaine de puits trouvée en quelques mois de travail acharné et consciencieux par les équipes citoyennes d'inspection du C'est ma vie.

Nous avons fait la preuve qu'un bon pourcentage des puits trouvés posent problème. Où sont les rapports? Où sont les informations sur la page Web du ministère, M. le ministre? En groupe de travail, quand le ministère reste surpris que nous creusions pour repérer les puits, pour la plupart disparus sous terre, c'est à se demander si la supposée règle de l'art d'inspection du ministère consiste à laisser sous terre ce qui est sous terre, sans se poser de question. Écoute, il faut creuser, si on veut trouver un puits qu'on ne voit plus, là. Alors, ça, le ministère était curieux, ils ont été réticents qu'on creuse. Voyons! In est là pour les trouver, les puits. Il faut faire du creusage.

Alors, dans un reportage de M. Alain Laforest de TVA, le 7 novembre dernier, vous disiez, M. le ministre, ne pas savoir où se trouvaient les puits. Ça a l'air compliqué, ce dossier-là, comme ça ne se peut pas. Bien, nous, on le sait où est-ce qu'ils sont. Nous, on les trouvait, les puits, mais le MERN a mis fin à notre collaboration sous prétexte qu'on ne faisait pas notre travail. Dans ce même reportage, vous disiez ne pas avoir mis fin prématurément à cette collaboration, alors que le 17 novembre 2014, vous posiez votre signature sur cette entente de principe qui disait clairement que nous avions à trouver, au minimum, 600 puits inactifs jusqu'en 2017. Votre ministère ne nous a pas permis d'en repérer plus de 100.

Alors, toujours dans ce même reportage, vous sollicitez la collaboration des citoyens du Québec pour vous aider à localiser ces puits. Vous l'aviez dans l'entente de partenariat, et ça fonctionnait. On les trouvait, ces fameux puits, mais le ministère y a mis fin. Pourquoi? Aucune raison qui aurait fait foi d'une réelle transparence du ministère ne nous a été donnée. Pire encore, Mme Luce Asselin, sous-ministre adjointe, dénigre notre travail en commission parlementaire sur l'étude du projet de loi n° 106, lors de la séance, entre autres, du 7 novembre, à la 22e minute, si vous voulez aller vérifier.

À la lumière des faits, il semble que votre gouvernement est plus pressé de permettre le forage de d'autres puits que de faire la lumière sur l'héritage que ces puits nous laissent après fermeture. En tant qu'élus par les citoyens, vous leur êtes redevables, vous nous êtes redevables. Nous attendons donc des réponses claires et franches à nos questions, M. le ministre. Merci.

Mme Massé : Alors, voyez-vous, vous avez là des citoyens très connaissants de la question des gaz de schiste, de la question de l'émanation fugitive. Et, dans ce sens-là, le premier ministre, qui est aujourd'hui à Marrakech, qui est aujourd'hui en train, dans le cadre de la COP22, de dire comment le Québec est à l'avant-plan et comment le Québec va pouvoir se positionner comme un leader puisque, cette fois-ci, on a un gouvernement des États-Unis qui, lui, ne croit pas beaucoup aux changements climatiques, bien, je ne sais pas s'il est conscient que, comme ces citoyens-là viennent de nous le dire, qu'ici, au Québec, présentement, il y a en masse de fuites de méthane pour se rougir et se couvrir de honte à Marrakech. Et, dans ce sens-là, les questions qui sont posées sont très légitimes, et, vous allez voir, je les déposerai moi-même au feuilleton ce matin pour forcer le ministre à y répondre.

Ceci étant dit, faisons quelques liens, et je termine là-dessus, sur le projet de loi n° 106 et les révélations et les demandes claires que font nos concitoyens de la vallée du Saint-Laurent. En quoi le projet de loi n° 106 vient nous inquiéter? Particulièrement lorsqu'on entend qu'après à peine avoir trouvé 100 puits sur 600 dont exigeait l'entente avec ce comité de citoyens le gouvernement a arrêté les recherches des citoyens, alors qu'ils en trouvaient, des puits fugitifs. Comment pouvons-nous faire le lien? Bien, très simplement. D'une part, dans le projet de loi n° 106, on confirme que les claims qui existent dans la vallée du Saint-Laurent existent encore. Il y a une confirmation de cette méthode archaïque où on donne aux entreprises privées le droit de posséder le dessous de la terre de nos concitoyens.

Deuxième élément, il y a un droit prépondérant qui est donné aux gazières et aux pétrolières sous le dessous de la terre et pouvant aller jusqu'à l'expropriation. Troisièmement, je dirais, on consacre la fracturation hydraulique, la complétion, l'utilisation de gaz pour faire sortir la ressource, et ça, on le consacre dans le projet de loi n° 106. Et finalement on dit à l'article 6 et 7 : On n'a plus de projet, on n'a plus besoin de ces gens-là parce que maintenant, quand vous êtes propriétaire d'une terre et qu'il y a soit un puits fuyant ou une source de gaz naturel ou de gaz de schiste sur cette terre-là, vous êtes tenu maintenant de le dire au gouvernement.

Mais une fois, je me souviens, je parlais avec Serge, et il m'a expliqué qu'est-ce que ça pouvait vouloir dire, par exemple, pour un agriculteur d'avoir un puits inconnu sur sa terre. Il peut décider de creuser un fossé pour l'irrigation de sa terre, ce qui est bien légitime, il peut rentrer sa pépine là-dedans, tirer ça et exploser. N'est-ce pas?

M. Fortier (Serge) : Bien, aux dires du ministère, c'est supposé être dangereux, ces puits-là, puis il nous tient à l'écart de ça, puis nous, on était là qu'on creusait avec une petite pelle à la main. Alors, une pépine, hein, c'est autre chose.

Mme Massé : Alors, j'implore le ministre des Ressources naturelles de répondre aux questions des citoyens et j'implore le gouvernement, le premier ministre, d'arrêter de se pavaner à Marrakech tant et aussi longtemps qu'il n'est pas capable d'assumer ses responsabilités face à ces puits-là. Merci.

Le Modérateur : On va prendre des questions sur le sujet de la conférence de presse, s'il vous plaît. M. Foisy.

M. Foisy (Philippe-Vincent) : M. Fortier, deux petites questions techniques pour commencer. D'abord, il y a combien de puits que vous avez vu qui étaient problématiques sur les 700? Puis pourquoi ce matin, la conférence de presse, pas hier, ou vendredi, ou...

M. Fortier (Serge) : Bien, il y a une question d'organisation, il y a une question aussi de cohérence dans nos gestes, aussi dans nos actions. Nous, on a laissé le temps au ministère de faire sortir les rapports de ces puits-là. Ça fait au-dessus d'un an que le contrat est terminé, qu'il nous a été retiré. Alors, il me semble que ces rapports-là qu'on a, on pourrait très bien les sortir, mais on est toujours un peu sous réserve parce qu'on ne sait pas, à cause de l'entente de confidentialité du contrat, là, on ne sait pas si légalement on a le droit. Mais on serait bien contents de tous les donner au public, évidemment, de vous les donner ces rapports-là. Donc, le délai, c'est un petit peu ça.

Mais, pour ce qui est du nombre de puits qu'on a trouvé problématiques, on parle d'à peu près du tiers des puits qui révèlent une problématique quelconque, dont la plupart sont des fuites de méthane. Mais, dans certains cas, ça peut être aussi des fuites d'hydrocarbures liquides, ça peut être une contamination abandonnée là au moment de la fermeture du puits, c'est-à-dire qu'il y avait des vieux déchets, du diesel, n'importe quoi qui est resté autour du puits. Donc, en creusant, on se trouve à repoigner ces couches de terre contaminée là.

Il y a des problématiques aussi, comme disait Mme Massé, de tuyaux qui dépassent, qui sont à peine à fleur de terre et qui peuvent être accrochés par la machinerie agricole. Il y a encore des tuyaux, certains tuyaux qui dépassent, et les agriculteurs sont obligés de contourner ces tuyaux-là pour la culture, ce qui est bien emmerdant.

On constate aussi des pertes de rendements aux endroits où est-ce qu'il y a un puits sous la terre, donc que le cultivateur ne le sait pas, mais ce qu'il se rend compte, c'est que ce bout-là, ça pousse moins bien. Il n'a jamais su trop pourquoi. Bien là, en découvrant le puits, là, maintenant, il a une raison de savoir pourquoi qu'il a une perte de rendement, parce qu'il y a une contamination qui se fait là.

Ça, on a tout constaté ça, nous. Ce sont des faits. Comme je vous disais tantôt, nous, on parle avec des faits, on n'envoie pas des paroles en l'air qui n'ont pas de fondement. Ce sont des faits. Ça fait qu'on demande au ministère de nous donner des faits, on demande au ministre de nous donner des faits. Ça fait depuis 2011 qu'il se vante qu'il s'occupe des puits inactifs. Il me semble qu'il devrait avoir des faits depuis ce temps-là, surtout à un an de la limite, là, du deadline, là, de l'étude de ces puits-là.

M. Foisy (Philippe-Vincent) : Donc, juste pour comprendre, votre demande, ce matin, elle est comme double. C'est de gérer ces puits orphelins là, mais aussi vous parliez tantôt de... pas de racheter, mais de racheter, ou d'éliminer, ou de faire disparaître les claims qui ont déjà été achetés pour vous assurer qu'il n'y ait pas de forage même s'il y a une loi qui n'est pas appelée moratoire, mais qui fait en sorte qu'il y a un moratoire en ce moment.

Mme Massé : Bien, c'est, vous l'avez bien dit, une sorte de moratoire. C'en n'est pas un, on s'entend là-dessus, c'est-à-dire que nous, à Québec solidaire, ce qu'on fait, c'est le pont, le lien entre ce que ces citoyens-là demandent et exigent, transparence, de pouvoir voir les rapports dont ils ont été les découvreurs. C'est eux autres qui ont découvert les... ils savent que ces données-là existent. Alors, nous, on appuie ça complètement et on fait le lien avec le projet de loi n° 106 parce qu'à partir du moment où le projet de loi n° 106 va être adopté, le projet de loi n° 106 va permettre de décloisonner beaucoup de choses, dont notamment la possibilité, parce que la fracturation va être encadrée, la possibilité d'aller fracturer le gaz de schiste. Et il y a même, si vous faites des liens avec d'autres projets de loi, la possibilité d'avoir des projets pilotes, etc. Alors, c'est ce lien-là qu'on veut faire, qu'on profite de la sortie…

Mais retenez une chose… Et ce matin, j'ai mis au feuilleton les questions qui sont soulevées ici. Il faut que le gouvernement nous dévoile la situation de la centaine de puits dont on sait qu'ils ont été étudiés. Il faut que, sur la trentaine de puits qui sont problématiques, qui ont été étudiés… on veut savoir combien ont été pris en charge, parce que je tiens à réitérer ici que, désormais, l'ensemble de ces puits-là sont sous la charge publique. C'est notre responsabilité.

Alors, qu'est-ce que le ministère des Ressources naturelles a fait avec les 30 puits identifiés et, bien sûr, comment le ministre entend respecter son engagement d'inspecter les 700 puits inactifs d'ici 2017? Et ce n'est pas seulement de les inspecter, mais de rectifier les situations problématiques.

Le Modérateur : M. Laforest.

M. Laforest (Alain) : M. Fortier, est-ce que le ministère de l'Environnement vous a retiré le contrat parce que vous faisiez mal votre travail?

M. Fortier (Serge) : Bien, nous, on n'a pas… Nous, on travaillait consciencieusement et on mettait beaucoup plus d'heures que ce pour quoi on était payés, pour arriver à un résultat. On le faisait de façon très consciencieuse et, plus on le faisait de façon consciencieuse, plus on trouvait des puits, plus on perfectionnait notre approche, et moins le ministère trouvait ça intéressant. C'est drôle à dire, hein, mais comment ça se fait…

Je reviens au niveau du creusage parce que, là, ça a été un moment vraiment fondamental dans le changement d'attitude du ministère, c'est-à-dire que nous, comme le ministère, on ne le savait pas, où est-ce quils étaient les puits, au départ. O.K.? On avait des données géodésiques qui, pour la plupart, se sont avérées inexactes. Alors, on arrivait à un endroit avec les coordonnées géodésiques… mes inspecteurs, entre autres, peuvent témoigner là-dessus…

Mme Massé : Restez ici, oui…

M. Fortier (Serge) : Oh! O.K., excusez. C'est comme si je suis à côté d'un puits, là. O.K. Alors, on détectait puis là on se rendait compte qu'aux coordonnées géodésiques, avec le détecteur de métal, bien, de un, on ne voyait rien d'apparent, pas de pancarte, pas de tuyau d'évent, rien pantoute, pas de clôture. Alors, perdu dans la nature. Le détecteur de métal ne nous dévoilait rien non plus.

Alors, il est où, le fameux puits? Il fallait revenir chez nous. Les inspecteurs ont fouillé dans de la documentation, aller chercher des rapports de forage, les rapports d'inspection, de fermeture de puits, etc. Il a fallu vraiment se documenter beaucoup plus pour finalement s'apercevoir que le puits était à 200 mètres de là, selon le rapport…

M. Laforest (Alain) : Ça, je comprends ça, là. Mais qu'est-ce qui vous fâche dans l'attitude du gouvernement actuellement?

M. Fortier (Serge) : Bien, actuellement, ce qui nous fâche, c'est que tout ce travail-là est dénigré, tout ce travail-là n'a servi à rien, puisque quelque part, il n'a pas servi à la population québécoise. Tout ce travail-là ne nous permet pas de savoir c'est quoi vraiment de forer un puits. C'est quoi, les conséquences qu'on hérite, l'État, de faire forer des puits? Et c'est là, le lien avec le p.l. n° 106, le projet de loi n° 106, parce que, là, le gouvernement se dirige carrément, visiblement, vers une exploitation pétrolière et gazière, donc le forage de nouveaux puits, alors que le passé nous indique, puis même le présent nous indique, puis pas rien que nous ici, au Québec, partout dans le monde, ça nous indique que les puits...

M. Laforest (Alain) : Je ne sais pas, là, je ne veux pas vous reprendre, là, mais le discours du premier ministre, il n'est pas vers l'exploitation du pétrole au Québec, actuellement, là.

M. Fortier (Serge) : Bien, voyons.

M. Laforest (Alain) : Qu'est-ce qui vous indique ça?

M. Fortier (Serge) : Le projet de loi n° 106, si on le lit adéquatement, on se rend compte que la partie sur les hydrocarbures ouvre la porte à l'industrie. L'industrie ne viendra pas forer un seul trou juste pour faire de l'exploration pour le fun, sans faire de la fracturation hydraulique puis tout ça. Voyons donc!

Vous savez que Talisman Energy a été vendue à la compagnie Repsoil, qui est espagnole, qui est beaucoup plus grosse que Talisman. Quand ils vont venir se planter ici, là, parce qu'ils en ont des claims dans notre région... moi, chez nous, pour la plupart des gens qui sont ici, on est visés par cette compagnie-là. Il y a déjà des puits de forés, fracturés sur le territoire, et c'est sûr que, quand ils vont venir, ils vont en faire un méchant paquet. Ils ne viendront pas ici rien que pour le fun, pour dire : Regardez, on va vous en faire juste un, tranquillement pas vite, pour ne pas trop vous stresser, ne pas trop abîmer votre environnement, puis la nature, puis le tourisme, puis l'agriculture. Ils vont nous rentrer dedans avec une loi comme actuellement est en train de se préparer. Il faut prévenir ça. Et on ne sait même pas les conséquences. On fore des puits, on ne sait pas ce qu'on hérite après. C'est ça qui est dangereux pour nous.

M. Croteau (Martin) : Bonjour. Le premier ministre, le 29 septembre, a déclaré devant la Fédération québécoise des municipalités : «Vous savez qu'il n'y a pas eu de fracturation dans les basses-terres du Saint-Laurent, il n'y en aura pas. On va continuer avec la même attitude.» Le projet de loi n° 106 reconduit l'espèce de moratoire, là, j'utilise ce mot-là entre guillemets parce que ce n'est pas ça.

Donc, qu'est-ce qui vous porte à croire que le premier ministre ne dit pas vrai, finalement?

M. Fortier (Serge) : Mais où vous avez lu ça?

M. Croteau (Martin) : Il l'a dit, je l'enregistrais, mes collègues étaient tous là.

M. Fortier (Serge) : C'est sur les paroles du ministre que vous vous fiez?

M. Croteau (Martin) : Du premier ministre.

M. Fortier (Serge) : Du premier ministre que vous vous fiez? C'est ça, comme je vous disais tantôt, vous pouvez vous fier sur parole, mais les faits ne sont pas là.

M. Croteau (Martin) : Quels faits? Quels faits, dans le projet de loi...

M. Fortier (Serge) : C'est vrai qu'il n'y a pas eu de fracturation depuis...

M. Croteau (Martin) : Qu'est-ce qu'il y a dans le projet de loi qui vous donne à penser que le premier ministre ne dit pas vrai?

M. Fortier (Serge) : Pourquoi il encadrerait le développement des hydrocarbures alors qu'il ne voudrait pas faire d'exploitation? Posez-vous cette question-là. On ne fait pas un projet de loi juste pour le fun, on le fait parce qu'on veut encadrer quelque chose. Encadrer les hydrocarbures, c'est de leur dire : Vous exploitez, mais vous exploitez entre ça et ça. Mais actuellement, entre ça et ça, là, le projet de loi n° 106, on ne le sait pas où est-ce qu'elles sont, les limites, actuellement, parce que les règlements ne sont pas sortis là-dessus. O.K.?

Alors, nous, c'est dangereux d'ouvrir la porte toute grande à l'exploitation pétrolière et gazière sans savoir les conséquences lorsque les compagnies abandonnent les puits, et on a l'exemple des puits abandonnés, justement. Et vous savez qu'on a même des vidéos de puits forés en 2010 par Talisman Energy qui fuient, que ce soit Talisman ou d'autres compagnies, des puits de gaz de schiste qui fuient. O.K.? Alors, ce n'est pas que des vieux puits qui fuient, même les nouveaux fuient aussi.

Alors, il faut s'inquiéter, et le projet de loi n° 106 est là pour permettre. Il ne peut pas y avoir d'exploration sans avoir d'exploitation. Une compagnie ne viendra pas forer un puits juste pour l'explorer puis, après ça, dire : On ne l'exploite pas. Et, pour l'exploitation, on est obligés d'avoir de la fracturation, point final.

M. Croteau (Martin) : Donc, vous pensez que le texte, l'intention du législateur n'est pas celle qui est exprimée de manière quand même assez claire par le premier ministre le 29 septembre dernier?

M. Fortier (Serge) : Définitivement.

M. Croteau (Martin) : Vous doutez de la parole de M. Couillard?

Mme Massé : M. Croteau, je vais vous répondre quelque chose là-dessus, moi. Ce que j'ai envie de vous dire, puis ça n'engage pas les citoyens, là, c'est moi qui parle, ce que j'ai envie de vous dire, c'est que, si le premier ministre et l'ensemble de ses ministres voulaient réellement mettre fin aux hydrocarbures, ce n'est pas comme ça qu'ils s'y prendraient. Il émettrait clairement une directive, il ferait clairement un projet de loi qui dit : Les hydrocarbures, pour répondre aux impératifs de la COP21, pour répondre aux impératifs de l'Accord de Paris, il faut que les hydrocarbures restent dans le sol, et nous, le Québec, nous sommes fiers d'annoncer à la planète entière qu'il n'y aura pas une once de gaz ou de pétrole qui va sortir d'ici, de notre sol.

Ce n'est pas ça qu'il fait. Ce qu'il fait, bien sûr, de sa parole, il nous dit : On ne le fera pas, on ne le fera pas, on ne le fera pas. Regardez Anticosti, on ne le fera pas, on ne le fera pas, on ne le fera pas, hein?

M. Fortier (Serge) : Mais ce n'est pas dans le projet de loi, hein? Ce n'est pas écrit dans le projet de loi, ça.

Mme Massé : Alors, écoutez, ce que moi, je veux vous dire, c'est que, si le premier ministre veut réellement qu'on le croie, qu'il enlève la portion du projet de loi n° 106 et qu'il émette clairement soit une nouvelle loi, une nouvelle directive qui dit : Nous ne forerons pas du gaz et de pétrole ici, au Québec, point barre.

Le Modérateur : M. Lecavalier.

M. Lecavalier (Charles) : Bonjour, Mme Massé. Vous avez lu le projet de loi du ministre Arcand, et je me demandais, dans le projet de loi du ministre Arcand, qu'est-ce qui... Vous avez vraiment l'impression, en lisant ce projet de loi, là qu'il va autoriser des puits de gaz dans les basses-terres du Saint-Laurent? C'est ce que vous comprenez, à la lecture...

Mme Massé : Ce que je comprends, à la lecture de ce projet de loi là, c'est que, un, le mot «règlement» vient... et je ne parle que de la portion... le chapitre IV, là, sur les hydrocarbures, le mot «règlement» revient dans une multitude de moments. Ce que ça veut dire, c'est que moi, comme législateur, je n'ai pas toutes les coudées franches pour m'assurer que ce projet de loi là ne sera pas une valve ouverte aux pétrolières et aux gazières, premièrement.

Deuxièmement, disons que le passé est garant de l'avenir. Qu'est-ce que le passé nous enseigne des gouvernements successifs — d'ailleurs, on va se le rappeler, là, ce n'est pas propre au gouvernement libéral — des gouvernements successifs en matière de pétrole et de gaz? Ce qu'il nous dit, c'est que, par en arrière, pendant que les citoyens font autre chose, il se passe comme des signatures pour Anticosti, il se passe comme des signatures pour permettre l'entreposage à Sorel de plus de pétrole de l'Ouest, il se passe des choses comme l'écriture d'un projet de loi n° 106 qui ne va pas du tout dans le sens de ce que, un, la population demande...

Et là je pense que le ministre a fait le choix de garder sa portion hydrocarbures dans son projet de transition énergétique. Pourquoi? Bien, pour donner une priorité au gaz naturel. C'est la politique qui le dit elle-même. Et, soyons honnêtes, là, au Québec, le gaz et le pétrole, c'est du gaz de schiste, c'est du gaz et du pétrole extrêmes, qui coûtent cher à notre planète totale, parce que ce qu'on émet en gaz à effet de serre, c'est toute la planète qui le paie.

M. Lecavalier (Charles) : Donc, vous croyez que le gouvernement, par règlement, pourrait autoriser l'exploitation gazière dans les basses-terres du Saint-Laurent?

Mme Massé : Plus que ça, voire même dans la baie de Gaspé, voire même dans la baie des Chaleurs. Il y a des claims. Le gouvernement n'a pas voulu retirer ces claims-là. Alors, s'il ne les a pas retirés, et c'est là que moi, je rejoins les citoyens, s'il ne les a pas retirés, les claims, et s'il donne un projet de loi pour encadrer, ce n'est certainement pas pour les empêcher.

M. Foisy (Philippe-Vincent) : Juste une question par rapport aux claims. Vous voulez qu'il rachète les claims puis que ça se finisse là?

Mme Massé : Nous, là, ce qu'on dit, c'est que le pétrole et le gaz, là, puisque ça fait des millénaires qu'il est là, il va rester là. Actuellement, pour atteindre nos objectifs de l'Accord de Paris, il faut que ça reste dans le sol. O.K.?

Alors, le gouvernement Charest a déjà racheté des claims, O.K., quand ils ont mis les moratoires dans le golfe... dans le fleuve Saint-Laurent. O.K.? C'est quelque chose qui est possible. Nous, ce qu'on dit, c'est : Il faut qu'on soit clairs par rapport à la question des hydrocarbures et il faut que ce soit un non radical. Si, dans 50 ans, dans 100 ans, parce qu'il n'y en a plus en nulle part sur la planète, et on en a besoin pour faire des valves cardiaques, bien, le Québec, on sera toujours là, hein?

M. Foisy (Philippe-Vincent) : Mais vous ne répondez pas à ma question. Voulez-vous que le gouvernement du Québec rachète tous les claims en ce moment?

Mme Massé : Moi, ce que je veux, c'est que le gouvernement... Ma réponse, à cette étape-ci, c'est : Je ne sais pas si c'est la meilleure façon. La meilleure façon, c'est de s'assurer que son demi-moratoire en soit un vrai et que ce moratoire-là ne permette pas, par exemple, dans le coin de Bécancour, des projets pilotes pendant qu'on attend quelque chose.

M. Foisy (Philippe-Vincent) : Qu'est-ce que ça va prendre pour que, pour vous, ce soit un moratoire complet, alors que, pour le premier ministre, ça a l'air d'en être un? C'est juste ça que je ne suis pas capable de réconcilier, là, votre position par rapport à ce que le premier ministre dit.

Mme Massé : Oui, oui, oui. Bien, vas-y, Serge.

M. Fortier (Serge) : Si, dans le projet de loi n° 106, c'était écrit non à la fracturation, oui aux gazières, aux pétrolières, mais ne faites pas de fracturation hydraulique parce que c'est dangereux pour la santé, et la sécurité, puis l'environnement au Québec, c'est ça, notre loi, ça, ça serait clair. Mais, si c'est une loi comme ça qui dit non à la fracturation, tu peux être sûr qu'il n'y a pas une gazière puis une pétrolière qui va venir exploiter ici parce qu'ils sont obligés de faire ça pour exploiter. Comprenez-vous? Alors, ça, ça serait vraiment un projet de loi clair.

Là, actuellement, là, ce n'est rien, là. On va suivre les gazières, puis, en plus, on leur donne l'autorégulation sur le territoire, puis on dit verbalement : Il n'y aura pas de fracturation. «Bullshit», excusez le mot, mais regarde, nous, pour nous, c'est de la «bullshit». Pourquoi? Parce que, si les gazières viennent puis les pétrolières viennent, ils sont obligés de faire ça s'ils veulent exploiter. Ce n'est pas plus compliqué que ça. Il me semble que c'est clair et net. Tous les citoyens sont capables de comprendre ça.

Mme Massé : Puis, quand on essaie de le faire clarifier au ministre en commission parlementaire, il ne souhaite pas... il nous rappelle que, par règlement, parce que les technologies s'améliorent, parce que ci, parce que ça... Bien là, ce qu'il faut, c'est tirer la ligne.

M. Laforest (Alain) : Mme Massé, juste une petite dernière, juste être clair, là. Est-ce que vous dites aujourd'hui que, selon le discours du premier ministre, il ment à la population?

Mme Massé : Ce que je dis aujourd'hui, c'est que le premier ministre, s'il est conscient de ce rapport-là qui a été déposé il y a un an à la demande du MERN, ce rapport-là dit clairement que les émissions fugitives au Québec sont un problème majeur sur 30 % des puits.

M. Laforest (Alain) : Puis c'est reconnu par le ministre, il a demandé l'aide de la population la semaine passée. Le ministère de l'Environnement a envoyé un inspecteur. Ce que je vous dis, il dit qu'il n'y en aura pas d'autre exploitation par fracturation. C'est ce que le ministre dit, c'est ce que le premier ministre dit dans son discours, et vous dites aujourd'hui que ce n'est pas vrai. Donc, vous dites qu'il ment à la population.

Mme Massé : En fait, ce que j'ai besoin, c'est qu'il me prouve sur quoi il s'appuie pour rassurer ces citoyens-là et bien d'autres pour leur dire : Voyez, vous pouvez me croire. Parce qu'en ce moment, et vous venez de le dire, si le premier ministre dit ça, et que les citoyens disent : Oui, mais comment ça se fait que les données ne sont pas sorties, la transparence ne semble pas être le propre de ce gouvernement-là? Bien, ces citoyens-là ne sont pas rassurés, là. Alors, si effectivement il dit la vérité, bien, qu'il nous dise sur quoi il s'appuie pour ça.

Le Modérateur : Dernière question, M. Croteau.

M. Croteau (Martin) : Oui. Juste une question qui se répond par un oui ou un non. Est-ce que les paroles du premier ministre, c'est de la «bullshit»?

Mme Massé : C'est les mots qu'a employés...

M. Croteau (Martin) : Selon vous, oui ou non? C'est de la «bullshit» ou ça n'en est pas?

Mme Massé : Je viens de vous dire, M. Croteau, que si le premier ministre... Vous voulez me faire dire qu'il ment, là. O.K.? Moi, ce que je vous, c'est que si...

M. Croteau (Martin) : ...clairement ce que vous pensez, là.

Mme Massé : Si le premier ministre peut assurer à ces gens-là qu'il n'y aura jamais, avec ça, de la fracturation, je veux savoir sur quoi il s'appuie.

M. Croteau (Martin) : Monsieur pense que c'est de la «bullshit». Pensez-vous que c'est de la «bullshit»?

Mme Massé : Je vous dirais quelque chose, M. Croteau : Vous savez que, quand je pense profondément quelque chose, je suis capable de le dire. On s'entend? Actuellement, ce que je ne sais pas et ce que je veux que le premier ministre me dise, c'est comment, sur quoi s'appuie-t-il pour dire que ce qu'il a dit est vrai. S'il me répond à ça et que je suis satisfaite, je serai satisfaite, mais je ne serai pas seule, on va être une gang. S'il me répond, et je ne suis pas satisfaite, bien, on va être une gang à penser que c'est de la «bullshit».

Le Modérateur : Merci beaucoup. Au revoir.

M. Laforest (Alain) : Mais, M. Fortier, pour vous, c'est de la «bullshit», là.

M. Fortier (Serge) : Bien, actuellement, avec les faits, oui, parce que rien ne nous prouve le contraire. Nous, on est prêts à croire le ministre si, à quelque part, il s'appuie sur des faits. On a toujours montré de la collaboration, nous, les citoyens. O.K.? Ça, c'est sûr.

Alors, pourquoi qu'aujourd'hui, en quelque part, on est tant opposés à ce que le ministre dit, c'est parce que ça ne tient pas debout, ce qu'il dit, par rapport aux faits, par rapport aux gestes. Puis vous le voyez. Allez chercher sur le site du ministère, pour le fun. Vous le savez qu'il n'y a rien là, vous le savez qu'il n'y a aucun rapport depuis cinq ans.

Alors, comment voulez-vous qualifier ça autrement? Je suis peut-être allé avec un gros mot, mais regarde, moi, je suis un gars qui est franc. Vous pouvez prendre le mot que vous voulez, vous pouvez gratter là-dessus en masse, mais il reste qu'actuellement le gouvernement ne nous dit pas la vérité. Et, s'il nous disait la vérité, s'il était convaincu de ses dires, ça ferait partie du projet de loi n° 106 sur les hydrocarbures, ça serait inscrit clairement qu'il n'y en aura pas de fracturation dans le projet de loi n° 106. Ce n'est pas le cas. Alors, les écrits restent, mais les paroles s'envolent, hein?

Mme Massé : Puis les premiers ministres changent.

M. Fortier (Serge) : Aussi.

Des voix : Merci.

(Fin à 10 h 35)

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