(Dix-huit heures dix-huit)
Mme
Hivon
:
Bonjour. Alors, une décision aux conséquences très graves est tombée en toute
fin de journée. Nous venons d'apprendre que, des suites de l'arrêt Jordan, un
présumé meurtrier vient d'être libéré. Un présumé meurtrier de sa conjointe
vient d'être libéré non pas parce qu'il a été innocenté, mais bien parce que
les délais de la justice ont été trop longs, parce que la procédure n'a pas pu
suivre son cours comme on s'attendrait que, dans un système de justice qui
fonctionne correctement, la justice puisse suivre son cours.
Alors, en ce moment, il y a des milliers
de Québécois qui sont profondément en colère, qui sont indignés, et je veux
leur dire que je partage cette colère, que je partage cette indignation. Depuis
que l'arrêt Jordan a été rendu, on a vu des dizaines et des dizaines de causes
tomber, des fraudeurs, des gens accusés de gangstérisme, des Hell's Angels, des
gens qui avaient commis ou qui étaient présumés avoir commis des crimes très
graves qui ont été libérés parce que les délais de la justice étaient trop
longs et qu'un arrêt de la Cour suprême, l'arrêt Jordan, est venu dire qu'on
devait maintenant calculer en termes mathématiques les délais, 18 mois
dans certains cas, 30 mois dans d'autres, et qu'après ces délais-là les causes
tombaient tout simplement.
Mais aujourd'hui je pense que notre niveau
d'indignation atteint des sommets, notre niveau d'indignation atteint
littéralement des sommets quand on voit qu'on en est rendus à ce que les délais
fassent en sorte qu'un présumé meurtrier de son ex-conjointe soit libéré.
Je veux dire à la famille de la victime
qu'elle a toute notre empathie, notre compassion. C'est excessivement grave, ce
que l'on vit en ce moment. Et vous vous imaginez le drame que cette famille,
que ces proches de cette victime-là vivent en ce moment. Ils sont victimisés à
nouveau parce que le système n'est pas capable de répondre à ses fonctions de
base, c'est-à-dire de rendre justice dans des délais raisonnables.
Alors, qu'est-ce qu'on fait devant une
situation qui est aussi grave, qui suscite autant de colère, d'incompréhension
aussi dans la population, qui mine la confiance des Québécois dans leur système
de justice? Et ça, c'est au coeur même de ce qu'est une démocratie, de
s'assurer que justice puisse être rendue. Alors, on en est rendus dans un système
où on se retrouve à libérer des présumés meurtriers pour cause de délais indus.
Alors, aujourd'hui, on demande à la ministre
de la Justice, Procureur général du Québec, de prendre ses responsabilités pour
que ce lien-là de confiance entre la population, et son système de justice, et
ses institutions démocratiques ne soient pas encore plus mis à mal qu'il l'est
déjà depuis un bon moment avec tous ces arrêts de procédure qui se multiplient.
On lui avait déjà demandé d'examiner, dans les circonstances exceptionnelles
que l'on connaît et qui se confirment encore plus aujourd'hui, la possibilité
d'utiliser la clause dérogatoire pour faire en sorte que justice puisse être
rendue au-delà des délais qui sont prescrits par l'arrêt Jordan. Nous n'avons
jamais eu de réponse à cette demande. La ministre Vallée a dit qu'elle
examinait cette question-là, ça fait maintenant des mois. Ça fait maintenant
plus de cinq mois que cette question-là est au jeu. Aujourd'hui, nous lui
demandons des réponses, nous lui demandons d'avoir recours à cette clause
dérogatoire, de discuter avec son homologue fédéral s'il est nécessaire que les
deux ordres de gouvernement se coordonnent pour pouvoir avoir, donc, une action
complète en matière d'administration de la justice, bien sûr, et de droit
criminel, mais on lui demande que cette avenue-là soit examinée, soit empruntée
de toute urgence parce qu'il est question, carrément, de confiance dans notre
système de justice. L'heure est très grave. Et ce n'est pas vrai que des
victimes, comme celle aujourd'hui, qui a perdu sa vie, et toute sa famille,
doivent être abandonnées par notre système de justice à cause de délais
déraisonnables.
Donc, nous demandons à la ministre de la
Justice de prendre ses responsabilités, de nous dire ce qu'elle va faire très
concrètement pour éviter une multiplication de ces cas-là. Parce que ce qui se
passe aujourd'hui, c'est le premier cas d'accusation de meurtre qui tombe. Ça,
ça veut dire que ça crée un précédent. Alors, après tous les autres précédents
qu'on a connus dans les derniers mois, ça en est un excessivement grave,
excessivement troublant pour l'ensemble de la population. Donc, on demande à la
ministre d'agir de toute urgence. Merci.
(Fin à 18 h 24)