(Onze heures cinquante et une minutes)
M. Jolin-Barrette :
Mesdames et messieurs, bonjour. Lors de notre arrivée au pouvoir, nous avons
hérité d'un système d'immigration déficient. Pour assurer une immigration
efficace et réussie, il nous fallait effectuer des changements majeurs, il nous
fallait repenser complètement les façons de faire. Notre objectif, depuis que
je suis en poste au ministère de l'Immigration, est clair : mettre en
place les meilleurs outils possible afin d'assurer une plus grande
régionalisation, une meilleure francisation et une intégration réussie des
personnes immigrantes, notamment sur le marché du travail. Aujourd'hui, nous
poursuivons ce travail.
Nous venons de déposer à l'Assemblée
nationale le plan de l'immigration du Québec pour l'année 2020. Ce plan
s'inscrit dans la continuité des réformes entreprises par le gouvernement du
Québec depuis le 1er octobre 2018. Il fait également écho aux orientations
de la planification pluriannuelle de l'immigration pour la période 2020‑2022,
qui ont été soumises à une consultation publique tenue l'été dernier ici, à l'Assemblée
nationale.
Pour l'année 2019, comme promis lors
de la campagne électorale, nous avons réduit les seuils d'immigration à
40 000 personnes immigrantes admises. Cette réduction était nécessaire
et nous a donné la latitude pour amorcer les réformes qui s'imposaient.
Nous avons respecté nos engagements. Nous
avons investi 70 millions de dollars pour bonifier les allocations et
élargir l'accès à nos cours de francisation à toutes les personnes immigrantes.
Cette somme nous a permis de mettre en oeuvre plusieurs grandes mesures :
un élargissement de l'accès aux cours de francisation et aux aides financières
qui y sont liées aux personnes immigrantes admises au Québec depuis plus cinq
ans, un élargissement de l'accès aux cours de francisation et aux aides
familiales qui y sont liées aux travailleurs et étudiants étrangers temporaires
ainsi qu'à leurs conjoints et à leurs conjointes, la bonification de
l'allocation de participation pour les cours à temps complet de 141 $ à
185 $ par semaine, la création d'une allocation de participation pour les
cours à temps partiel de 15 $ par jour, la bonification du montant de
l'allocation de frais de garde pour les cours à temps partiel de 7 $ à
9 $ par jour, par enfant ou par personne handicapée à charge. Ces
investissements sont majeurs. Cela démontre la volonté du gouvernement de
renforcer l'apprentissage, la maîtrise et le rayonnement de la langue
française.
Nous avons aussi investi 20 millions
de dollars annuellement pour le parcours d'accompagnement personnalisé.
Celui-ci nous permet de soutenir les personnes immigrantes à chaque étape de
leur processus d'intégration dans toutes les régions du Québec, et ce, à partir
du moment où elles sont sélectionnées, dès l'étranger.
Et enfin nous avons procédé à un important
déploiement du ministère de l'Immigration dans les 17 régions
administratives du Québec. Ainsi, nous serons en mesure de mieux répondre aux
besoins des personnes immigrantes.
Nous avons également bonifié les services
dédiés aux entreprises. Le déploiement du réseau nous permettra d'offrir aux
entrepreneurs un accès facile et rapide à des conseillers en immigration
régionale qui connaissent les rouages du système d'immigration mais aussi les
particularités propres de la région où ils sont établis.
En assurant une présence forte du
ministère de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration dans les
régions du Québec, nous faisons en sorte que les personnes immigrantes puissent
contribuer à la hauteur de leurs compétences à l'économie de toutes les régions
du Québec.
Ces mesures fonctionnent. Grâce aux
actions que nous avons posées au cours des derniers mois, le Québec dispose
maintenant de meilleurs outils pour assurer une meilleure intégration à la société
québécoise et au marché du travail, une meilleure francisation ainsi que pour
favoriser la régionalisation des personnes immigrantes.
Nous avons toujours été clairs, la baisse
des seuils était temporaire. C'est pourquoi, au cours de la prochaine année,
nous entamerons une augmentation graduelle du nombre de personnes immigrantes
admises afin de répondre adéquatement aux besoins des entreprises et des
régions du Québec. En 2020, le Québec accueillera entre 43 000 et
44 500 personnes immigrantes, toutes catégories confondues. Nous
rehaussons ainsi le nombre de personnes admises dans la catégorie de
l'immigration économique. Il s'agit d'une première étape vers notre objectif,
qui a été fortement soutenu par les groupes économiques lors des consultations
publiques, de rehausser à terme à 65 %, voire au-delà, la part de notre
immigration économique. Ces orientations tiennent également compte des opinions
exprimées par la population et par les acteurs sociaux qui ont fait entendre
leur voix pendant les consultations publiques. Nous l'avons toujours dit, nous
ferons les choses dans l'ordre et de façon pragmatique et efficace. Cette
hausse s'inscrit dans cet engagement et est cohérente avec la réforme majeure
du système d'immigration que nous avons entamée.
Toujours dans l'objectif de mieux répondre
aux besoins du Québec, nous annonçons aujourd'hui une modernisation du
Programme de l'expérience québécoise. D'abord, nous sélectionnerons désormais
les candidats qui font une demande d'immigration permanente au PEQ en fonction
de leur domaine d'étude et de l'emploi qu'ils occupent. Cette condition
s'applique au volet Diplômés du Québec et au volet Travailleurs étrangers
temporaires. Comme les besoins sont différents d'une région à l'autre, nous
allons nous baser sur une liste regroupant les professions en déficit dans
chaque région du Québec. La liste, créée en collaboration avec le ministère du
Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, compte 162 métiers.
Cette liste sera en vigueur dès le 1er novembre 2019.
Par ailleurs, la réception des demandes
dans le volet Diplômés du Programme de l'expérience québécoise reprendra aussi
le 1er novembre prochain avec plusieurs nouveautés. Les personnes ayant
complété un programme collégial ou une formation professionnelle de 900 heures
ou plus en plus des formations de 1 800 heures actuellement seront
désormais admissibles au programme à condition que leur formation se trouve sur
la liste des professions en demande. Cette approche est cohérente avec les
besoins de main-d'oeuvre du Québec. Ce n'est pas vrai qu'au Québec nous n'avons
seulement besoin que de diplômés universitaires, même si c'est le message qui a
été véhiculé pendant des années. Plusieurs métiers en demande au Québec
nécessitent une formation plus technique. C'est pourquoi nous les rendons
davantage admissibles. En contrepartie, les diplômés nouvellement admissibles
au PEQ et ayant complété une formation de plus de 900 heures, mais de
moins de 1 800 heures, devront avoir acquis une expérience de travail
de six mois dans leur domaine de formation. Ce choix est motivé parce que ces
candidats peuvent répondre à un besoin actuel du marché du travail. De plus,
ces candidats maîtrisent la langue française et ont de l'expérience de la société
québécoise. Ces améliorations seront en vigueur dès le 1er novembre 2019.
Également, puisque la connaissance du français
facilite grandement l'intégration à la collectivité et au marché du travail, le
ou la conjointe du requérant principal devra démontrer, à compter du
1er janvier 2020, un niveau de connaissance du français de niveau 7,
soit le niveau intermédiaire avancé. Les conjoints pourront se prévaloir des
cours de francisation du ministère de l'Immigration, maintenant accessibles
grâce aux nouvelles mesures que nous avons mises en place en juillet dernier.
Lors de la dernière campagne électorale,
le gouvernement s'est engagé à mettre sur pied une évaluation de la
connaissance des valeurs québécoises. Avec l'adoption de la loi n° 9,
nous avons réintroduit le pouvoir permettant de grever des conditions affectant
la résidence permanente telle que la connaissance des valeurs. Nous maintenons
notre intention de lier la connaissance des valeurs québécoises à la résidence
permanente. Nous reprendrons d'ailleurs nos discussions avec le gouvernement
fédéral dès que le nouveau Conseil des ministres sera nommé. Nous avons
confiance d'en arriver à une entente avec le gouvernement fédéral. Entre temps,
nous pouvons déjà agir en ce qui concerne l'immigration que nous sélectionnons.
Ainsi, nous demanderons désormais aux candidats de tous les programmes d'immigration
économique de démontrer qu'ils connaissent et comprennent les valeurs
démocratiques et québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de
la personne, et ce, à partir du 1er janvier 2020.
Les Québécois sont fiers de leurs valeurs
et de leur identité. Tout comme la connaissance du français, la connaissance
des valeurs exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne est
un atout majeur pour réussir son intégration au Québec. Les personnes
immigrantes auront à leur disposition deux façons de démontrer leur
connaissance de ces valeurs : une attestation de participation à la
session Objectif intégration ou une évaluation en ligne de la connaissance
des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne.
Pour les travailleurs en situation
temporaire qui sont physiquement au Québec et qui aspirent au Programme de
l'expérience québécoise, ils peuvent participer à la session Objectif
intégration offerte au Québec et ainsi obtenir leur attestation à la fin de la
session ou bien réussir l'évaluation en ligne. La session Objectif intégration
est une formation de 24 heures, comportant huit modules sur la vie au
Québec, les valeurs démocratiques et québécoises, les codes sociaux et la
réalité du marché du travail.
Les personnes qui sont à l'étranger,
elles, devront d'abord effectuer leur apprentissage et leur évaluation en
ligne. Ce moyen comprend des contenus informatifs et évaluatifs sur les valeurs
démocratiques et québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de
la personne. Les contenus et les questions permettent d'aborder les cinq volets
de la vie au Québec, soit l'égalité entre les femmes et les hommes, la société
francophone, la société laïque, les droits et responsabilités et la société
démocratique. Il est légitime pour le Québec de demander aux personnes qu'il
accueille d'apprendre et de connaître les valeurs québécoises qui sont
exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne. C'est d'ailleurs
une condition exigée par le gouvernement fédéral pour octroyer la citoyenneté
canadienne.
Les modalités de l'évaluation de la connaissance
des valeurs que nous mettons en place sont très similaires à celles du
gouvernement fédéral. Les candidats devront visionner et écouter 90 minutes
de contenu informatif et évaluatif et répondre à 20 questions. En cas
d'échec à l'évaluation, chaque personne aura droit à deux autres essais, avec
un temps minimal de deux semaines entre chaque reprise. Pour les personnes à
l'étranger, après deux échecs à l'évaluation en ligne, nous les inviterons à
reprendre une troisième fois l'évaluation ou bien à se déplacer au Québec pour
participer à la session Objectif intégration. Pour les personnes déjà sur place
à titre de travailleurs temporaires ou d'étudiants étrangers, après deux échecs
à l'évaluation en ligne, ils devront obligatoirement suivre la session Objectif
intégration. Les personnes qui auront échoué l'ensemble des essais auxquels
elles ont droit ou qui n'auront pas participé à la session d'information
verront leur demande d'immigration fermée. Elles pourront toutefois présenter
une nouvelle demande d'immigration, si elles souhaitent toujours immigrer au
Québec, et ainsi reprendre le processus et obtenir leur attestation de la
connaissance des valeurs québécoises.
L'attestation de participation à la
session Objectif intégration de même que la réussite de l'évaluation en ligne
auront une durée de validité de deux ans. Cette nouvelle mesure contribuera à
une intégration plus rapide et de manière durable à la société québécoise.
L'attestation de la connaissance des valeurs démocratiques et des valeurs
québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne dans
les programmes d'immigration économique sera en vigueur à partir du 1er janvier
2020.
Suivant cette logique de réforme et de
modernisation vers un système d'immigration plus efficient, nous annonçons
également avoir entrepris une réforme visant le Programme des immigrants
investisseurs. Nous sommes préoccupés par les nombreuses problématiques
soulevées récemment dans certains reportages. En effet, plusieurs éléments
entourant l'intégrité du programme, les enjeux de fonctionnement du programme
ainsi que le faible taux de rétention des candidats sont problématiques.
Considérant ces questionnements, j'annonce la suspension de la réception de
toute nouvelle demande. Cette décision sera effective à partir du 1er novembre
2019 pour une période de huit mois. Cette suspension des demandes nous permettra
d'effectuer une refonte importante du programme. Nous continuerons cependant
d'honorer nos engagements à traiter les dossiers déjà en processus qui ont été
déposés.
La réussite de l'immigration est un défi
de taille et il relève d'une responsabilité partagée. Le système a été laissé
dans un piètre état durant 15 ans sous l'ancien gouvernement libéral.
Depuis mon arrivée en poste, il y a à peine un an, nous avons amélioré le système
d'immigration. Nous assurons notamment un meilleur maillage entre la sélection
des personnes immigrantes et les besoins du marché du travail. Avec la mise sur
pied du parcours personnalisé et les nouvelles mesures en francisation, les
personnes immigrantes disposent d'un meilleur soutien pour une intégration
beaucoup plus efficace à la société québécoise.
Vous l'avez compris, nous désirons offrir
à l'ensemble des candidats à l'immigration tous les outils nécessaires pour
favoriser leur pleine et entière intégration à la société québécoise. Dans un
contexte où les besoins de main-d'oeuvre sont importants, l'intégration réussie
des personnes immigrantes permet d'augmenter leur contribution au dynamisme
économique du Québec. Aujourd'hui, nous continuons notre travail entamé il y a
un an pour mieux accueillir, mieux franciser, mieux intégrer, mieux
régionaliser, et ce, au bénéfice des personnes immigrantes et au bénéfice du
Québec. Je vous remercie.
Le Modérateur
: Je vous
remercie, M. le ministre. Je vous mentionne que M. Jolin-Barrette est
accompagné du sous-ministre à l'immigration, M. Bernard Matte. Nous
allons commencer la période des questions. Je vous rappelle que le ministre
dispose de 60 minutes. Donc, on va essayer d'y aller rondement avec une
première ronde de questions, ensuite des questions en anglais, et on reviendra,
si on dispose des suffisamment de temps, avec des questions supplémentaires en
français. Donc, j'invite les journalistes qui souhaitent poser une question au
ministre de me faire signe. Nous allons commencer avec Jocelyne Richer de LaPresse
canadienne.
Mme Richer (Jocelyne) : Bonjour.
Au sujet du test des valeurs, j'aimerais savoir dans quelle mesure la maîtrise
du français est une condition préalable à passer le test. Autrement dit, est-ce
qu'un ressortissant étranger peut passer le test dans sa langue, dans sa langue
maternelle, dans la langue de son choix ou il devra le passer en français?
M. Jolin-Barrette : En
fait, ce que nous prévoyons, c'est d'avoir une traduction dynamique en fonction
des différents pays de provenance des personnes. Dans le fond, annuellement
nous accueillons des gens qui ont une langue dans majoritairement, là, cinq,
six langues. La majorité des immigrants parle ces langues-là, que ce soit le
français, l'anglais, le mandarin, l'espagnol. Donc, l'examen... L'évaluation sera
en français, mais il va y avoir une traduction dynamique sur l'évaluation en
ligne.
Donc, à titre d'exemple, sur l'évaluation
en ligne, vous pourriez avoir une traduction qui accompagne la version officielle
puisque l'évaluation est en ligne, une traduction dynamique sur la page Web.
Mme Richer (Jocelyne) :
Sur le contenu comme tel ou la volonté du gouvernement, dans quelle mesure
est-ce que c'est symbolique ou vous le voyez comme un engagement? Par exemple,
il y a la question de l'égalité hommes-femmes. On peut présumer qu'un
ressortissant étranger qui voit une question : Êtes-vous pour ou contre
l'égalité hommes-femmes, va dire oui. Il va comprendre que c'est la réponse
souhaitée, mais qui nous dit qu'il ne rentre pas chez lui le soir puis qu'il
frappe sa femme?
M. Jolin-Barrette :
Bien, vous savez, ce que...
Mme Richer (Jocelyne) :
...l'adhésion, autrement dit, aux valeurs.
M. Jolin-Barrette :
Bien, deux choses, là, ce que vous soulevez, c'est un geste criminel. Alors, il
faut dénoncer ce genre de gestes là. Vous savez, déjà, les personnes
immigrantes actuellement, là, avec les demandes de sélection, signent un
engagement — c'est le Parti libéral qui a mis ça à l'époque de
Mme James — font une déclaration qu'ils adhèrent aux valeurs
québécoises. Nous, ce qu'on souhaite, c'est faire l'évaluation de leur
connaissance de ces valeurs-là. Alors, la façon dont on va le faire, c'est par
du contenu informatif, hein, si vous êtes déjà au Québec, vous pouvez soit
faire l'évaluation en ligne, soit aller suivre la session Objectif intégration,
qui est 24 heures. Si vous êtes à l'étranger, c'est l'évaluation en ligne.
Il y a du contenu informatif de 60 minutes puis il y a un contenu
évaluatif de 30 minutes avec 20 questions. Alors, vous savez, il n'y
a jamais aucune garantie, mais ce qu'on souhaite établir, c'est un message très
clair que les personnes immigrantes connaissent ces valeurs et y adhèrent
aussi, et ça passe notamment par l'évaluation.
Le Modérateur
:Mylène Crête, Le Devoir.
Mme Crête
(Mylène) : Je me demandais, M. Jolin-Barrette, comment
vous allez vous y prendre pour convaincre le gouvernement fédéral d'aller un
pas plus loin et d'associer le test des valeurs à l'obtention de la résidence
permanente?
M. Jolin-Barrette : Bien,
en fait, aujourd'hui, ce qu'on annonce, c'est à l'intérieur de nos compétences.
Avant d'émettre le certificat de sélection du Québec, il va y avoir une
évaluation de connaissance des valeurs québécoises. C'est la première étape.
Notre objectif n'a pas changé. Ce que l'on souhaite faire, c'est grever la
résidence permanente de conditions, notamment une évaluation de connaissance
des valeurs. Dans le projet de loi n° 9, ce que j'ai fait, j'ai
réintroduit une disposition qui permet de faire ça, hein, de grever la résidence
permanente de conditions que le Parti libéral avait abrogée dans le projet de
loi n° 77. Alors, nous, le cadre juridique, il est en place.
L'habilitation législative pour le faire du côté québécois, elle est en place.
Ce que je dois faire maintenant, c'est de
négocier avec le gouvernement fédéral pour qu'il puisse arrimer leur
réglementation avec la nôtre. Alors, ça va demander des discussions. Mais j'ai
bon espoir que le gouvernement fédéral va accepter et va entendre la volonté du
gouvernement du Québec et des Québécois et des Québécoises de grever la
résidence permanente de conditions.
Mme Crête
(Mylène) : D'où ma question : Comment vous allez vous y
prendre pour le convaincre et qu'est-ce qui vous fait croire que vous avez bon
espoir qu'il accepte?
M. Jolin-Barrette :
Bien, vous savez, en matière d'immigration, on a réglé certains dossiers avec
le gouvernement fédéral, notamment le 250 millions avec les demandeurs
d'asile. On a fait des gains avec le gouvernement fédéral. Je pense que le Québec
est une société distincte et que le fédéral est enclin à ça. D'ailleurs, au
débat, M. Trudeau a dit qu'il était d'accord avec une évaluation de
connaissances de valeurs québécoises. Alors, j'attends la formation du prochain
Conseil des ministres pour avoir des discussions avec mon homologue fédéral.
Mais je crois que c'est l'équivalent de l'examen de citoyenneté canadienne et
que le gouvernement fédéral devrait entendre la volonté du gouvernement du
Québec d'établir des pouvoirs dans un champ de compétence qui lui appartient
relativement à l'intégration des personnes immigrantes. Parce qu'il faut
comprendre, hein, depuis... historiquement, là, l'intégration des personnes
immigrantes en vertu de l'Accord Canada-Québec, ça relève du Québec. Alors, que
ce soit au niveau de la francisation, que ce soit au niveau de l'employabilité,
ce sont des pouvoirs qui appartiennent au Québec parce qu'on a la proximité, on
travaille en collaboration avec les différents partenaires locaux, régionaux,
avec les organismes communautaires. Alors, ça fait partie du processus
d'intégration, le fait d'adhérer aux valeurs québécoises.
Le Modérateur
: Louis
Lacroix, Cogeco Nouvelles.
M. Lacroix (Louis) :
Bonjour. Si je comprends bien, là, le test va s'appliquer à l'immigration économique,
donc ça veut dire entre 25 000 et 26 300 personnes, grosso modo,
c'est à peu près, ça, là.
M. Jolin-Barrette : Au
niveau de l'immigration économique, effectivement, parce que, dans le fond,
elle va s'appliquer... l'évaluation va s'appliquer à l'immigration que nous
sélectionnons. Donc, au niveau du regroupement familial, nous ne sélectionnons
pas le regroupement familial actuellement.
M. Lacroix (Louis) :
Est-ce que pouvez nous donner des exemples de questions qui vont être posées?
M. Jolin-Barrette : Je
vous donne un exemple. Au Québec, les femmes et les hommes ont les mêmes droits
et cette égalité est inscrite dans la loi : vrai ou faux? Choisissez
l'illustration ou les illustrations qui représentent les personnes qui ont le droit
de se marier au Québec : une illustration de deux hommes, illustration de
deux femmes, un homme, illustration de deux femmes, illustration d'un homme,
une femme, illustration de deux hommes, une femme. Identifiez la ou les
situations où il y a discrimination : refuser un emploi à une femme
enceinte, à une personne qui n'a pas le diplôme requis, à une personne à cause
de son origine ethnique. Ce sont le genre de... type de questions qui pourraient
se retrouver dans l'évaluation de connaissances de valeurs québécoises.
M. Lacroix (Louis) :
Est-ce que vous ne craignez pas que ça vienne limiter l'accès à l'immigration, c'est-à-dire
qu'il y a des gens qui disent : Bien, je vais aller ailleurs, je vais
aller en Ontario, je vais aller au Nouveau-Brunswick, je vais aller dans
l'Ouest, en Colombie-Britannique parce qu'il n'y a pas ce genre de test là?
Parce que là, si je comprends bien, ils vont, de toute façon, être soumis à ce
test des valeurs là, dans l'état actuel des choses, et éventuellement, pour
avoir la citoyenneté, encore une fois soumis un au test canadien, là, donc ils
vont passer deux tests.
M. Jolin-Barrette : Vous
savez, la société québécoise, elle est distincte, les Québécois sont fiers de
leurs valeurs, et l'immigration, c'est un engagement qui est partagé, hein? La
société d'accueil, le Québec, son rôle, c'est de bien accueillir les personnes
immigrantes, de donner des ressources en matière d'intégration, de francisation
et d'employabilité. La contrepartie pour les personnes immigrantes, c'est
d'adhérer au Québec, de s'intégrer en français à la société québécoise et
d'adhérer aux valeurs québécoises. Je pense que les valeurs québécoises qui
sont dans la Charte des droits et libertés de la personne, c'est la base de
l'organisation de la société québécoise, la non-discrimination, l'égalité entre
les femmes et les hommes. Alors, le fait de demander aux personnes qui
choisissent de venir s'établir au Québec de respecter et de connaître ces
valeurs-là, c'est le minimum.
Le Modérateur : Robert
Dutrisac, Le Devoir.
M. Dutrisac (Robert) :
Oui, bonjour. Vous avez mentionné la conjointe du requérant, là, en matière
d'immigration qu'on choisit, l'immigration économique, la conjointe doit avoir
un niveau 7 de français. Qu'est-ce que vous voulez dire par là? Parce
que... À son arrivée? Éventuellement?
M. Jolin-Barrette :
Bien, ça, c'est dans le cadre du Programme d'expérience québécoise. Parce que
vous avez deux programmes d'immigration économiques au niveau des travailleurs
qualifiés, vous avez le programme régulier des travailleurs qualifiés par le
biais d'Arrima, la façon dont les gens sont sélectionnés, et vous avez les
personnes qui sont déjà sur le territoire québécois. Ça s'appelle le Programme
d'expérience québécoise. Pour ces personnes-là, il y a deux volets à ce programme-là :
le Programme d'expérience québécoise diplômé et le Programme d'expérience
québécoise pour les travailleurs étrangers temporaires. Donc, le ou la
conjointe, dans le cadre de ces deux volets-là du Programme d'expérience
québécoise, devra avoir un niveau 7 de français, comme c'était le cas pour
le requérant principal.
M. Dutrisac (Robert) :
D'accord. Encore là, la conjointe du requérant principal va devoir passer ce
test-là des valeurs?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Dans le fond, en matière de sélection du Québec, en matière économique,
l'ensemble des personnes immigrantes de plus de 18 ans doivent passer
l'évaluation de connaissances des valeurs québécoises, qu'ils soient au Québec
ou qu'ils soient à l'étranger.
M. Dutrisac (Robert) : O.K.
Donc, on présume que finalement la personne ne devra pas être analphabète, par
exemple, hein, elle va devoir savoir lire, elle va devoir savoir... c'est une
condition.
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, c'est une évaluation qui est associée comme... dans les
documents qui sont déposés au niveau de la déclaration. Les gens doivent
pouvoir signer et comprendre ce qu'ils signent.
M. Dutrisac (Robert) :
...Ottawa, donc vous gardez toujours les mêmes objectifs de négociation. Vous
avez une loi qui...
M. Jolin-Barrette : Oui.
Je veux juste apporter une précision, par contre. Au niveau de l'évaluation de
connaissances des valeurs, si, dans la demande, le requérant... dans la demande
du requérant principal, il y a des membres de sa famille qui ont 18 ans et
plus et qui souffrent d'un handicap ou ils ont une maladie quelconque qui les
empêche d'avoir les facultés pour remplir l'évaluation de connaissances, il y a
une exception qui est prévue. Juste pour compléter.
M. Dutrisac (Robert) :
Sur les négociations avec Ottawa, vous maintenez toujours les mêmes objectifs,
qui sont... qui découlent de la loi, là, que vous avez adoptée. Pour ce qui est
des travailleurs temporaires, et là on ne touche pas la résidence permanente,
mais les travailleurs temporaires, est-ce que vous comptez régler ça rapidement?
M. Jolin-Barrette :
Bien, moi, je le souhaite ardemment. Je le souhaite depuis un an. Au niveau du
Programme des travailleurs étrangers temporaires, là, le PTET qu'on appelle,
qui est de juridiction fédérale et provinciale, je souhaite qu'il y ait des
assouplissements. La Commission des partenaires du marché du travail appuie le
gouvernement du Québec dans ses demandes relativement au fait que ça soit uniquement
québécois, qu'on puisse laisser tomber l'étude d'impact du marché du travail du
côté fédéral, qu'on puisse également augmenter le nombre de travailleurs
étrangers temporaires par entreprise aussi puis qu'on allonge aussi la durée du
permis de travail. Nous le souhaitons, nous l'avons réclamé à de multiples
reprises. J'espère que le gouvernement fédéral a entendu le message des
entrepreneurs, des employeurs lors de la dernière campagne aussi.
Vous savez, dans toutes les régions du Québec,
on s'en fait parler, ça prend un assouplissement au niveau des travailleurs
étrangers temporaires. Ça, c'est différent des programmes de mobilité
internationale, où c'est géré uniquement par le fédéral. Mais, nous, où on a
une juridiction, où on expertise avec le ministère du Travail, on devrait
pouvoir le gérer nous-mêmes, au bénéfice du marché du travail québécois.
Le Modérateur
: Merci.
Patrick Bellerose, le Journal de Québec.
M. Bellerose (Patrick) :
Bonjour, M. Jolin-Barrette. En 2016, durant la controverse, là, sur le
burkini, M. Legault avait fait un lien entre le test des valeurs et le
burkini en disant : Imposer un test des valeurs pourrait barrer la route
aux gens qui ont des vues extrémistes comme ça, qui ne croient pas à l'égalité
hommes-femmes. En quoi ce que vous présentez aujourd'hui pourrait barrer la
route aux extrémistes religieux?
M. Jolin-Barrette :
Bien, vous savez, l'évaluation de connaissances des valeurs québécoises va
comporter des questions sur l'égalité entre les hommes et les femmes. Alors,
très certainement, on souhaite que les gens apprennent les valeurs québécoises.
La société dans laquelle on vit fait en sorte que l'égalité entre les hommes et
les femmes, elle est inscrite dans la loi et elle doit être respectée.
Alors, deux choses : ça permet
d'évaluer cet apprentissage-là, cette connaissance-là, mais aussi d'informer
adéquatement, au Québec, quel est le cadre qui s'applique, puis le cadre qui
s'applique, bien, ce sont les valeurs inscrites dans la Charte des droits et
libertés de la personne.
M. Bellerose (Patrick) :
...l'impression que ça va rebuter les extrémistes qui pourraient vouloir venir
s'installer au Québec?
M. Jolin-Barrette : Pour
nous, c'est clair, là, que les personnes qui choisissent le Québec, elles
doivent adhérer aux valeurs québécoises, des valeurs de démocratie, des valeurs
de respect, des valeurs qui garantissent la non-discrimination. Je pense qu'on
a bâti une société basée là-dessus, on doit en être fiers. Les Québécois sont
fiers de ces valeurs-là et ils veulent que leurs valeurs soient respectées.
Alors, aujourd'hui, le gouvernement du
Québec respecte ce à quoi on s'est engagé en campagne électorale, le fait de
mettre en place une évaluation de connaissances des valeurs québécoises.
M. Bellerose (Patrick) :
Pour vous, est-ce que ça va aider à lutter contre le phénomène du burkini, de
la burqa, des signes religieux comme ça, qui sont très ostentatoires, disons?
M. Jolin-Barrette :
Bien, ce que je peux vous dire, c'est que l'égalité entre les femmes et les
hommes est inscrite dans nos lois. C'est une des valeurs les plus fondamentales
au Québec. Je pense qu'on a cheminé, durant le dernier siècle au Québec, et je
pense que l'égalité entre les hommes et les femmes doit être respectée par
quiconque souhaite s'établir de façon durable au Québec.
Le Modérateur
: Martine
Biron, Radio-Canada.
M. Bellerose (Patrick) :
Juste une dernière petite question. Est-ce qu'on va avoir accès à la liste
complète des questions du test des valeurs?
M. Jolin-Barrette : Non,
notamment pour protéger l'intégrité de l'évaluation de connaissances. On
souhaite... Il y a plusieurs centaines de questions, mais vous comprendrez que
c'est une évaluation, et donc on ne peut pas diffuser publiquement la liste de
l'ensemble des questions. C'est pour ça que je vous ai donné un extrait tout à
l'heure.
Le Modérateur
:
Martine.
Mme Biron (Martine) :
Bonjour, messieurs. Je comprends que ce que vous annoncez aujourd'hui, c'est
finalement temporaire jusqu'à ce que vous obteniez une entente qui va permettre
de grever la résidence permanente à des conditions. Donc, à partir du moment où
vous allez avoir cette entente-là, est-ce que je comprends que vous allez... que
c'est caduc, ce que vous annoncez, que le test va être à peu près trois ans
plus tard, là, une fois que la personne sera installée au Québec?
M. Jolin-Barrette :
Bien, nous, notre volonté est toujours la même, comme vous l'avez dit, de faire
en sorte que l'évaluation de connaissances des valeurs québécoises se déroule
après trois ans. Dans les pouvoirs que nous avons, actuellement, je mets en
place une évaluation conformément à l'engagement que nous avions pris. Pour ce
qui est de la suite des choses, j'ai besoin d'une entente avec le gouvernement
fédéral.
Du côté législatif, moi, j'ai fait tout en
mon pouvoir pour avoir la marge de manoeuvre pour négocier avec le gouvernement
fédéral. Mais, vous savez, ce qu'on a rajouté comme pouvoir dans la loi, c'est quelque
chose qui existait préalablement et que le Parti libéral a supprimé. Alors,
comme je vous dis, ça prend des négociations, il faut que le fédéral dise oui, effectivement,
mais nous... toutes les personnes qu'on va sélectionner au Québec vont être
soumises à cette évaluation.
Mme Biron (Martine) : Je
ne voudrais pas brûler ma deuxième question, mais vous n'avez pas tout à fait
répondu. Est-ce qu'à partir du moment où va allez avoir une entente avec le gouvernement
fédéral, ce que vous annoncez aujourd'hui sera éliminé par le fait même, là,
remplacé par cette entente-là et les conditions que vous aurez obtenues?
M. Jolin-Barrette :
Bien, dans un premier temps, il faut négocier avec le gouvernement fédéral, mais
notre intention est toujours la même, soit d'imposer une évaluation après trois
ans ici, au Québec.
Mme Biron (Martine) :
Est-ce qu'on peut présumer que vous n'auriez plus ces mêmes tests de valeurs
dès la sélection?
M. Jolin-Barrette :
Bien, l'objectif, comme je vous dis, était à partir du moment où les gens
étaient ici trois ans, et ensuite il y a une évaluation à l'intérieur des trois
premières années. Donc, nous, ce qu'on fait actuellement dans le cadre
juridique qui est applicable, on devance l'évaluation. Mais, très certainement,
ça va dépendre des négociations que nous aurons avec le gouvernement fédéral.
Et je les appelle à négocier avec nous dès le moment où le prochain ministre de
l'Immigration va être assermenté.
Mme Biron (Martine) :
Dans les négociations que vous allez avoir avec le gouvernement fédéral, est-ce
que... dans les conditions que vous voulez négocier, est-ce que l'expulsion du territoire
d'un immigrant qui n'aurait pas passé à travers les différents tests, c'est
encore dans vos cartons?
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, ça n'a jamais été dans nos cartons. Le statut au Canada relève
du gouvernement fédéral. Dans le fond, la présence sur le sol canadien, c'est
de juridiction fédérale. Ça ne relève pas de la compétence du Québec à ce
niveau-là. Les frontières, ça relève du gouvernement canadien. Alors, nous, on
souhaite agir dans notre champ de compétence, ce que nous ferons lorsque nous
aurons une entente. Pour ce qui est du statut d'une personne présente sur le
territoire canadien, ça relève du gouvernement fédéral.
Mme Biron (Martine) :
Donc, quelqu'un qui ne connaît pas le français, qui ne passe pas le test du
français ne pourrait pas être expulsé du territoire québécois, comme vous
l'avez souhaité en campagne électorale?
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, ce que nous annonçons aujourd'hui, c'est une évaluation de
connaissance des valeurs québécoises. Dans le fond, pour... dans les programmes
d'immigration, là, dans le PEQ, au Québec, vous devez avoir le niveau 7 de
français. Par contre, si vous êtes sélectionné de l'étranger, ce n'est pas
nécessaire d'avoir le niveau 7 de français actuellement. Mais nous, ce
qu'on souhaite, c'est que chaque personne immigrante puisse, à terme, oui,
avoir une évaluation de français sur le territoire québécois, au Québec, et
donc ça va faire partie des négociations avec le gouvernement fédéral.
Le Modérateur
: Olivier
Bossé, Le Soleil.
M. Bossé (Olivier) :
Bonjour. Dans les éléments, dans les cinq éléments du contenu des questions, il
y a «société laïque». Ce matin, M. Legault a dit : Ce serait
important que les gens qui arrivent au Québec sachent que les personnes en
situation de pouvoir ne peuvent pas avoir de signe religieux, donc selon la loi
n° 21. Vous, tantôt, en Chambre, vous avez dit :
Là, il ne faut pas mélanger deux choses. C'est quoi... Est-ce que la loi sur la
laïcité sera une question, peut-être pas précise, mais sera intégrée à ces
questions de valeurs là?
M. Jolin-Barrette : Oui,
ça fait partie du contenu de l'évaluation, le fait que la société québécoise,
elle est laïque. C'est une des cinq orientations de l'évaluation,
effectivement. À la question posée en Chambre par le député de
Laurier-Dorion... il faisait des raccourcis intellectuels, alors j'ai voulu
m'assurer qu'il comprenne bien que la loi sur la laïcité s'applique à tout le
monde au Québec. Elle s'applique aux gens qui sont nés ici, elle s'applique aux
nouveaux arrivants, elle s'applique à toutes les personnes, peu importe leur
confession religieuse. C'est très clair que la Loi sur la laïcité de l'État,
là, ce qu'elle fait, c'est qu'elle sépare l'État des religions, et que, oui,
pour certaines personnes en situation d'autorité, il n'est pas possible de
porter de signes religieux durant la prestation de travail. Mais ce n'est pas
destiné spécifiquement aux personnes immigrantes. Ça s'applique à l'ensemble
des citoyens québécois.
M. Bossé (Olivier) :
Donc, est-ce qu'on peut comprendre que, dans ces 20 questions là, il y a
une question qui va dire : Un professeur ne peut pas porter de croix?
M. Jolin-Barrette : Il pourrait
y avoir des questions. À titre d'exemple : Depuis le 27 mars 2019, en
vertu de la Loi sur la laïcité de l'État, tout nouveau policier ne peut porter
de signe religieux dans l'exercice de ses fonctions.
Le Modérateur
: Hugo
Lavallée, Radio-Canada.
M. Lavallée (Hugo) :
Oui, bonjour. Précision concernant le test de français. Parce que l'engagement
de la CAQ, c'était d'avoir deux tests, un test de connaissances des valeurs,
puis un test de français. Je comprends que vous renforcez les exigences en
matière de connaissances de français pour ce qui est du PEQ, mais, pour le
reste, il n'y a rien en ce qui concerne la connaissance du français, là. Vous
ne mettez pas en place un test qui va permettre de valider la connaissance du
français des immigrants économiques qui sont à l'extérieur du territoire au
moment d'être sélectionné.
M. Jolin-Barrette :
Actuellement, non. Au niveau du Programme de l'expérience québécoise, le ou la
conjointe maintenant va avoir l'exigence d'avoir un niveau 7 de français,
ceux qui sont déjà présents sur le territoire, mais si vous êtes dans le cadre
du Programme régulier des travailleurs qualifiés, non, il n'y a pas de
renforcement au niveau de la connaissance du français. Il n'y a pas d'exigence
d'avoir un niveau 7 de français...
M. Lavallée (Hugo) : ...
tomber ça, ou...
M. Jolin-Barrette : Non,
pas du tout. Ça va faire l'objet des négociations que nous aurons avec le
gouvernement fédéral dans le cadre de la mise en place de conditions grevant la
résidence permanente.
M. Lavallée (Hugo) : Les
conditions...
M. Jolin-Barrette :
Mais, je voudrais juste vous rappeler aussi que notre objectif, là, la façon
dont on structure le tout, c'est de donner tous les outils en matière de
francisation aux personnes immigrantes. La moitié des sommes, là, qu'on a
consacrées sur le 146 millions annuellement, là, 70 millions s'en va
en francisation, en bonification des allocations, mais aussi surtout en élargissant
aussi les cours offerts parce qu'avant, là, les personnes en situation
temporaire au Québec, les diplômés, ceux qui étudient, mais aussi les
travailleurs étrangers temporaires, tous ceux qui sont — tantôt, on
en parlait — Programme des travailleurs étrangers temporaires, PTET,
PMI, n'avaient pas accès au cours de francisation. Depuis le printemps dernier,
on a ouvert les cours de francisation à ces personnes-là aussi. Alors, pour les
gens qui viennent sur le territoire québécois de façon temporaire, on leur
offre toutes les ressources en matière de francisation. Avec les allocations,
on souhaite qu'elles se francisent, ces personnes-là en situation temporaire.
Et, lorsqu'elles migreront vers un statut permanent, bien, justement
l'évaluation de connaissances du français pourrait s'inscrire là, mais, encore
une fois, ça me prend une entente avec le gouvernement fédéral.
M. Lavallée (Hugo) : Et
donc pour ce qui est du fait de grever la résidence permanente, l'entente que
vous voulez arracher avec Ottawa, est-ce que ça viserait toutes les catégories
d'immigration ou uniquement, encore une fois, l'immigration économique? L'objectif,
à terme?
M. Jolin-Barrette :
Bien, dans un premier temps, c'est l'immigration économique. On a toujours dit
qu'on souhaitait également rapatrier la compétence au niveau du regroupement
familial, donc pour sélectionner également le regroupement familial.
M. Lavallée (Hugo) :
Donc, les réfugiés?
M. Jolin-Barrette : Les
réfugiés, c'est distinct.
M. Lavallée (Hugo) :
O.K. Mais en ce qui concerne...
Le Modérateur
: On
va... Le temps court, on va revenir avec des questions supplémentaires après
les questions de nos collègues anglophones. On va terminer en français avec
Hugo Pilon-Larose et Alain Laforest.
M. Jolin-Barrette :
Juste pour ajouter, là, sur les réfugiés, ce sont des gens qui sont des situations
vulnérables, et donc il n'y a pas d'évaluation du français qui serait négociée
pour eux.
Le Modérateur
: Hugo
Pilon-Larose.
M. Pilon-Larose (Hugo) :
Est-ce que le ministère peut... Savez-vous si le ministère a consacré...
combien de fonds publics à l'élaboration du test et du cours, et ça va
nécessiter combien de fonds publics pour administrer le test et le cours?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Pour développer l'évaluation, il y a un contrat qui a été donné, d'environ
140 000 $, à des experts. Et également au ministère de l'Immigration,
ça a nécessité environ 100 000 $ et l'affectation de deux ressources.
M. Pilon-Larose (Hugo) :
Et pour administrer, là, le test et les cours, ça va coûter combien par année?
M. Jolin-Barrette : Ça,
je pourrais vous revenir, là, ça va rentrer dans les processus, la mise en
place, avec le développement de l'outil informatique à l'étranger ou
l'évaluation en ligne ici aussi. Pour les cours Objectif intégration, on
les donnait déjà, ces cours-là, un peu partout au Québec.
M. Pilon-Larose (Hugo) :
Est-ce que le ministère possède une analyse de la proportion de travailleurs
qualifiés étrangers qui ont obtenu ces dernières années un CSQ et qui ne
maîtrisaient pas les valeurs québécoises?
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, c'est difficile de répondre à votre question parce que ce
n'était pas évalué. Donc, maintenant, ce qu'on va faire, c'est que chaque
personne qui va être sélectionnée va devoir avoir préalablement réussi son
évaluation de connaissance des valeurs québécoises.
Dans le fond, ce n'était pas mesuré dans le passé.
Le Modérateur
: Merci.
Alain Laforest, TVA.
M. Laforest (Alain) : Bonjour.
À partir du 1er janvier, combien d'immigrants devront passer le test?
M. Jolin-Barrette : En
fait, toutes les personnes immigrantes qui sont sélectionnées devront passer
cette évaluation. Donc, en termes d'immigration économique, c'est entre
25 500 et 26 300 pour le plan 2020.
M. Laforest (Alain) :
C'est tout?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, on accueille... on prévoit accueillir, pour l'année 2020, entre
43 000 et 44 500. La part de l'immigration que nous sélectionnons,
c'est environ 71 %, donc entre 25 500 et 26 300. Dans les autres
catégories d'immigration, vous avez le regroupement familial, sur lequel on n'a
pas juridiction. Au niveau des réfugiés, nous les sélectionnons, mais ce n'est
pas la même chose que l'immigration économique, c'est sur un aspect
humanitaire.
M. Laforest (Alain) :
Juste pour une question de compréhension, de la façon dont vous avez basé votre
système, quelqu'un qui va suivre le cours de 24 heures qui s'échelonnera
sur trois, quatre jours n'aura pas besoin de passer le test.
M. Jolin-Barrette :
Exactement.
M. Laforest (Alain) :
Une autre personne pourra passer le test avant de demander son certificat de
sélection; ça peut se faire n'importe où, devant un ordinateur, sur la planète.
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, prenons...
M. Laforest (Alain) :
Avant que vous répondiez, c'est ça, là, ça peut se faire devant un ordinateur,
d'importe où?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Pour les candidats qui sont à l'étranger, la personne, à partir du moment où...
Vous vous rappelez du système Arrima, la personne déclare son intérêt à
immigrer au Québec. Elle déclare sa candidature dans le système Arrima. Par la
suite, le gouvernement invite en fonction des besoins du marché du travail. Il
vous invite, vous, M. Laforest, à soumettre votre candidature. Au moment où
vous soumettez votre candidature, vous allez recevoir un code informatique qui
va vous donner accès à cette évaluation en ligne là.
M. Laforest (Alain) :
Mais, ça, c'est de la technique. Je vais arriver avec ma question, là. Donc,
cinq personnes peuvent se placer devant un ordinateur puis répondre à ce
test-là. C'est complètement bidon.
M. Jolin-Barrette :
Bien, vous savez, ça fait partie de l'évaluation en ligne. On fait confiance
notamment aux candidats à l'immigration. Je vous rappellerais que, dans le
cadre de la Loi sur l'immigration au Québec, il y a des pouvoirs de
vérification, des pouvoirs d'enquête, des pouvoirs pour s'assurer de
l'intégrité d'une demande d'immigration qui sont donnés au ministère de
l'Immigration comme pour n'importe quel ministère. Alors, si jamais il y a
fraude, si jamais les critères relativement à la sélection ne sont pas respectés,
la certification de sélection pourrait être annulée.
Le Modérateur
: Merci. Philip Authier, The Gazette.
M. Authier (Philip)
:
I'm interested in these technical questions which are being asked. Did I
understand you right, in which you say: If you... before... if you've gone
through the Arrima and you're heading and you're requiring... you're heading
toward this certificate selection process, if you just take the course, the 24-hour
course, you don't have to do the test? Did I understand you… right?
M. Jolin-Barrette : Partly. First of all, if you're here in Québec, already here, you
have two choices. You can pass the evaluation online first time. You do not
succeed the first time. After that, you do the second test online, and if you
have another...
M. Authier (Philip)
:
Failure.
M. Jolin-Barrette : …another failure, you have to go to the class
Objectif intégration or, at the beginning, if you are already here in
Québec, you can go directly to the class Objectif intégration. If you are
outside Québec, outside Canada, you have to pass the evaluation online two
times. And for the third time, you have the choice, even you go to pass the
evaluation online or you come here in Québec to the class.
M. Authier (Philip)
:
Right. But if you're here already...
M. Jolin-Barrette : (Interruption) Pardon, sorry.
M. Authier (Philip)
:
If you're here already and you take the course, do you still have to take the
test?
M. Jolin-Barrette : No, because you have an attestation that you have followed the 24-hours
class.
M. Authier (Philip)
:
And because there was no briefing, so... these questions are technical. 20 questions on the test?
M. Jolin-Barrette : 20 questions on the test and you need to have...
M. Authier (Philip)
: 75%.
M. Jolin-Barrette : That's it.
M. Authier (Philip)
: And before you mentioned some of the wording of the questions that
you would be… but did I understand that you have a 100 possibilities
of questions? The actual test that people will get is 20, not a 100 questions.
M. Jolin-Barrette : 20 questions but we have several hundred questions in a bank to protect
the integrity of the test.
M. Authier (Philip)
:
Right. So, people will not be answering several hundred questions, just 20.
M. Jolin-Barrette : 20 questions, but it will never be the same evaluation. Like,
if you pass the test, I pass the test, the evaluation… it will not be the same
evaluation.
M. Authier (Philip)
:
Last thing. It's a 90-minute process. You watch the video or the content for
60 minutes and then you do the test?
M. Jolin-Barrette : No. You have some information during that evaluation, by chapters.
So, by chapters, you have some information. After that, you have some questions,
some information, after that, some other questions. It's not 60 minutes of
information and after that you have the evaluation, it's in between.
Le Modérateur
: Merci. Raquel Fletcher. Global.
M. Authier (Philip)
: ...driver's license.
M. Jolin-Barrette : I don't have my boat driver's license.
M. Authier (Philip)
: I do have one, it's exactly the same person, so...
M. Jolin-Barrette : I cannot answer to you.
Le Modérateur
: Merci de cette anecdote, M. Authier. Raquel Fletcher, Global News.
Mme Fletcher
(Raquel) : Did I hear correctly that it cost
$140 million to develop the test?
M. Jolin-Barrette : No, no, no.
Mme Fletcher
(Raquel) : How much... Where did that
$140 million come from?
M. Jolin-Barrette : No, that money, it's the money that I received from the Minister of
Finance to give more services to the immigrants. So, in the last budget, we
received $146 million per year, during five years, so, $730 million
of more money. And with half of that money, we put that in «francisation» to
give more services to the immigrants. And what I was referring to, the cost the
evaluation, it costs...
Une voix
: ...
M. Jolin-Barrette : ...$146,000 — thank you — for the development of the evaluation and it costs $100,000 inside
the Minister for the resources, the employees that... they work on that.
Mme Fletcher
(Raquel) :OK. And there was so many for experts?
M. Jolin-Barrette : The experts, it's about $14,600, the contract that we gave.
Mme Fletcher
(Raquel) : $146,000.
M. Jolin-Barrette : Yes, «146 000 $».
Mme Fletcher
(Raquel) :OK. Thanks for the clarification. You gave an example of questions in French, and one had to do with
secularism or Bill 21. I just want to... if you could give... example in
English.
M. Jolin-Barrette : Yes. So, if I do a translation, since march 27th, 2019, by the
Bill 21, laicity of the State, every new police officer cannot wear
religious symbol during his job. True or false? Maybe I will be able, after the
conference, to give you the correct wording in English.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
C'est ce que vous appelez la traduction dynamique.
M. Jolin-Barrette : C'est
ça.
Des voix
: Ha, ha, ha!
Le Modérateur
: Une
dernière question, Raquel, après on va passer à Cathy.
Mme Fletcher
(Raquel) : Just because you said or the
Premier said that the questions
were going to be based out the charter of rights which, obviously, is
universally accepted in Québec,
but when it comes to secularism and Bill 21, that's still pretty
controversial, there are a lot of Quebeckers that don't agree with Bill 21. So, are you asking new
immigrants... In applying Bill 21 to the test, aren't you asking new
immigrants to take a political
stance in answering questions
about values based off on Bill 21? Because we're not... we don't agree, as
a society, on that one.
M. Jolin-Barrette : Not at all. You know why? Because laicity of the State, it's in the
Charter of Rights and Freedoms of the person here in Québec. When we adopted the Bill 21, it was written, we made a modification to la Charte
des droits et libertés de la personne, and it's written
in the «préambule» and also at the article 9.1. So, right now, it is in
the charter, the laicity of the State, what we are talking about... So, it's
part of the Québec values, and
the National Assembly here, in Québec, adopted validly that bill, and
that's the bill that applies in Québec, and the charter of rights includes laicity of the State.
Mme Fletcher
(Raquel) : But not unanimously.
M. Jolin-Barrette : When the bill was adopted?
Mme Fletcher (Raquel) : Yes.
M. Jolin-Barrette : Of course. QuébecLiberal Party refused to make the laicity of the State. During years
and years, they refused to understand what the Quebeckers want about the
separation of religion and State. So, we make it clear in the Bill 21.
Le Modérateur
:
Merci. Cathy Senay, CBC News.
Mme Senay
(Cathy) : I just would like to clarify a
couple of things, Mr. Jolin-Barrette. Bonjour. Regarding the permanent
residency, like, what you are... you want to negotiate, still, with the federal
Government, you say : Three years after the person lives here, you have to
have your permanent residency to live in Québec or in Canada. You have to...
When it's expired, then you have to renew it. So, what are you trying to do
here with the three-year delay?
M. Jolin-Barrette : Well, first of all, you have three ways to be on Canadian
territory. First of all, you can be as a tourist, with a visa from the federal
Government. After that, you have a work permit, temporary work permit or a
permit to study, OK, and after that, you have permanent residence. So, what we
want to do when we'll have a negotiation with the federal Government is the
fact that we will be able to, when you have the permanentary residence, that
there will be some conditions to follow, to fulfill during the three years so
to have an evaluation about Québec values. So, it will be the residency, the
permanentary residency that will be... «qui va être conditionnelle» to the
succeed of the evaluation during the three years.
Mme Senay
(Cathy) : OK. For the ones that don't have the
permanent residency yet?
M. Jolin-Barrette : No. First of all, what we want to negotiate with the federal
Government... To be here on the land of Canada, you have to get a «statut». What
we want to do is, if you are selected by Québec Government from outside, you
come here to Québec or to Canada... or to Québec, you need to have a visa, a
federal visa to be here. So, that's called «résidence permanente». What we want
to do is that permanentary residence, during the first three years, you will
have to pass an evaluation, and if you don't pass it you cannot have no more your permanentary residence. So, that's what we want to negotiate
with the federal government.
What we are doing today,
it's before to be selected by the QuébecGovernment, you need to fulfill and to
succeed the evaluation on the Québec values if you are outside. If you are here
in Québec, already here with a temporary visa or permit to be able to pass in
the Programme d'expérience québécoise, it's one of the conditions to have that
fast track to succeed the evaluation or to go in class with Objectif
intégration.
Mme Senay
(Cathy) : And we can see illustrations coming
from your values test already. Do you have some fears to not be taken seriously
with this?
M. Jolin-Barrette : Not at all. Because, you know, federal Government have an
evaluation to become a Canadian citizen. Australia has the same. Some European
countries have the same also. Québec values are part of the Québec society, of
the identity. The equality between men and women is something that we have to
say and that immigrants have to respect and to know that. Same thing about
discrimination, you cannot discrimination people about their sexual orientation
or about the color of their skin. So, I think as a society that it is the frame
of our society and it needs to be known and it needs to be respected.
Le Modérateur
:
Merci. Alors, Kelly, CTV.
Mme Greig (Kelly) : Is 20 questions all it takes to understand Québec's values?
M. Jolin-Barrette : Well, it takes 20 questions to become a Canadian citizen. So,
we get inspired by the test of Canadian citizenship.
Mme Greig (Kelly) : But I mean to... we speak so much about Québec as a distinct
society, distinct laws, distinct culture. In your opinion, do you think it
should be more?
M. Jolin-Barrette : Well, we decided to have the same number of questions as the
Canadian citizenship evaluation. So, I think if it's good to become a Canadian
citizen, it's good to be selected for the immigration system in Québec.
Mme Greig (Kelly) : This morning, some of the opposition parties were putting into
question the checks and balances on this. How can you be sure that someone won't just simply lie on the test, if they say
something they don't believe and they cheat?
M. Jolin-Barrette : Well, as I said before at the question of M. Laforest, you
know, we don't have any guarantee, as the... same thing in the Canadian
citizenship evaluation. But, one thing for sure, it's in the law of the
Ministry of Immigration, we have the power to make some verifications about the
integrity of the result that was given to us.
So, we are confident that
people are honest and they want to come to Québec to build the society together. So, that's part of the deal when you
come to Québec, you know the
common language is French. We want to be sure that immigrants are able to work
in French, they are able to live in French, and also to have a job and also to
share the Québec values. As I
said before, no discrimination about your situation, about the fact that man
and woman are equal, I think that's a minimum in our society.
Le Modérateur
: Alors,
nous avons quelques minutes pour faire un deuxième tour de piste. Alors,
j'avais Hugo Lavallée, Patrick Bellerose, Martine Biron et
Philip Authier.
M. Lavallée (Hugo) : Je
voulais vous entendre sur le plan d'immigration 2020, là, dont on n'a pas encore
beaucoup parlé. Par rapport au document de consultation que vous aviez déposé
cet été, il n'y a pas beaucoup de changement, là, seuls les seuils minimums ont
été revus à la hausse légèrement. Pourtant, lors des consultations, les
représentations s'étaient multipliées pour vous demander d'augmenter le nombre
d'immigrants. Notamment, dans le secteur économique, les gens de l'industrie
étaient venus nombreux. Pourquoi avez-vous fait la sourde oreille à toutes ces
demandes, et à quoi aura servi la consultation?
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, je n'ai pas fait la sourde oreille, pas du tout. Ce que j'ai
fait, j'ai augmenté le nombre de personnes immigrantes que nous allons accueillir
pour l'année 2020. On est passés d'un minimum de 41 500 à 43 000 personnes
immigrantes que nous allons accueillir. Donc, c'est 1 500 personnes
immigrantes de plus. Vous savez, on répond à la demande. Les groupes
économiques demandaient d'augmenter substantiellement et de façon importante le
nombre de personnes immigrantes, ils souhaitaient qu'on accueille plus de
65 000 personnes immigrantes pour l'année 2020. Le Québec, en
fonction de sa capacité d'accueil, en fonction de la réforme du système
d'immigration que nous sommes en train de faire, a une capacité d'accueil au
niveau où nous l'indiquons dans le plan annuel d'immigration, et, surtout, on
veut être en mesure d'offrir tous les services nécessaires en matière de
francisation, en matière d'intégration aux personnes immigrantes. Donc, on fait
les choses de façon ordonnée, et, en fin de période, on aura entre 49 000
et 52 000 personnes immigrantes.
M. Lavallée (Hugo) :
Lorsque le gouvernement, dans la... pas le gouvernement, mais la CAQ, dans la
campagne électorale, avait évoqué l'idée d'abaisser les seuils d'immigration,
il avait été beaucoup question de la nécessité, pour Ottawa, d'être d'accord
avec les nouveaux seuils. On comprend que vous avez eu des discussions avez
eux, mais, en tout cas, sauf erreur de ma part, il n'y a pas eu d'annonce
officielle du gouvernement fédéral validant les seuils que vous-même vous avez
mis de l'avant. Est-ce que qu'on comprend qu'en coulisses ils ont consenti non
seulement à ceux de l'année, parce que visiblement c'est les objectifs que vous
aviez déterminés qui vont être atteints... on comprend donc que, tacitement,
ils appuient votre plan mais que ça a été fait en douce?
M. Jolin-Barrette :
Mais, en fait, il n'y a jamais d'annonce officielle d'acceptation, là, de plan
de la part du gouvernement fédéral. La façon que la mécanique, ça fonctionne,
nous, on dépose le plan à l'Assemblée nationale, comme je l'ai fait
aujourd'hui, avant le 1er novembre, et c'est communiqué avec le
gouvernement fédéral, et le fédéral prend en compte le plan annuel
d'immigration et la planification pluriannuelle pour déterminer le nombre de
personnes qui sont à destination du Québec, et historiquement le gouvernement
fédéral respecte les seuils établis par le gouvernement du Québec. Il ne faut
pas oublier que c'est le gouvernement du Québec qui a la responsabilité puis la
juridiction en matière d'intégration puis d'accueil des personnes immigrantes.
Donc, il faut s'assurer pour nous, si on veut avoir une bonne intégration, que
le gouvernement fédéral respecte nos seuils. Et pour l'année 2019, au
niveau du seuil de 40 000, il sera respecté.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais quelle assurance vous avez du gouvernement fédéral qu'il respectera vos
cibles pour le regroupement familial et le programme de réfugiés?
M. Jolin-Barrette : Bien,
en fait, traditionnellement les cibles sont respectées. Ça peut arriver qu'il y
a des variances. Je vous donne un exemple, au niveau des réfugiés, au cours des
dernières années, il y a eu davantage de pression sur cette catégorie-là,
notamment en raison de la crise avec... la crise syrienne. Il y avait eu un
afflux plus important de réfugiés à cette époque-là, donc, c'est sûr qu'il y a
une adaptation à avoir. Mais, règle générale, les cibles du Québec sont
respectées.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Puis, sauf erreur, vous avez élevé un tout petit peu le plancher pour 2020, mais
vous avez maintenu le plafond?
M. Jolin-Barrette : Oui.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Alors, il n'y aura pas plus d'immigrants que ce qui était attendu dans votre
plan trisannuel.
M. Jolin-Barrette :
Mais, en fait, vous savez, le minimum, c'était 41 500. Là, le minimum, ça
va être 43 000.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais le maximum demeure à 44 500?
M. Jolin-Barrette :
Effectivement, le maximum demeure à 44 5000. Mais, par contre, on envoie
un message pour dire qu'on va accueillir entre 43 000 et 44 500.
Donc, au minimum, ça sera 43 500 personnes immigrantes.
Le Modérateur
: Merci.
Patrick Bellerose.
M. Bellerose (Patrick) :
Oui. Question pour M. Matte, si vous permettez. La formulation des
questions est très factuelle. : La langue officielle est français, vrai ou
faux, qui va se marier parmi les exemples suivants, alors que M. Legault,
en campagne électorale, avait formulé des questions qui étaient beaucoup plus
comme des engagements : Reconnaissez-vous que les homosexuels ont les
mêmes droits ici que dans le reste de... que les autres personnes?
Reconnaissez-vous que les hommes et les femmes sont égaux? Est-ce qu'on aurait
pu aller dans le sens de questions formulées comme des engagements, d'un point
de vue légal, et pourquoi avoir choisi la formule plus factuelle que vous avez
retenue?
M. Jolin-Barrette : En
fait, les orientations que j'ai donné, ce sont des orientations pour faire en
sorte que les cinq clés se retrouvent dans l'évaluation, et les propositions
que nous avons reçues du groupe d'experts sont des recommandations qui vont en
ce sens-là, au niveau de la formulation des questions.
M. Bellerose (Patrick) :
Je n'ai pas compris, excusez-moi. En quoi la formulation...
M. Jolin-Barrette : La
formulation nous a été suggérée par le groupe d'experts, qui sont habitués de
travailler dans le domaine des relations interculturelles, et donc ce sont les
suggestions qui nous ont été formulées.
M. Bellerose (Patrick) :
M. Matte, est-ce qu'on aurait pu garder une formulation plus dans le sens
d'un engagement?
M. Jolin-Barrette : Ce
que nous voulons faire...
M. Bellerose (Patrick) :
M. Matte est présent pour répondre à des questions, j'imagine?
M. Jolin-Barrette : Je
suis d'accord, mais c'est moi qui réponds aux questions dans ce cas-ci, et ce
que nous souhaitons faire avec l'évaluation de connaissances, c'est de valider
la connaissance des valeurs québécoises inscrites dans la Charte des droits et
libertés, et donc les questions pourront permettre de vérifier la connaissance
de ces valeurs-là.
M. Bellerose (Patrick) :
Donc, question pour vous : Est-ce que légalement on aurait pu choisir une
formulation qui aurait été un engagement de la part du candidat à l'immigration?
M. Jolin-Barrette :
Bien, c'est une... L'évaluation, elle est là pour valider la connaissance des
valeurs québécoises. Alors, avec le type de libellé que je vous ai lu, on
atteint l'objectif.
M. Bellerose (Patrick) :
...votre chef avait présenté, en campagne électorale, comme types de question.
M. Jolin-Barrette :
Bien, on a aussi dit que ça allait être les gens du ministère de l'Immigration
qui allaient rédiger les questions, les fonctionnaires.
Le Modérateur
:
Martine Biron.
Mme Biron (Martine) : Je
voudrais juste une précision sur les questions que j'ai posées. En fait, avec
votre annonce d'aujourd'hui, vous donnez suite à votre promesse électorale
d'imposer un seuil.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme Biron (Martine) :
Est-ce que ça enlève de la pression à obtenir rapidement une entente avec Ottawa
puisque votre promesse, elle est réalisée?
M. Jolin-Barrette :
Bien, moi, je vous dirais que je suis toujours optimiste de faire avancer les
intérêts du Québec et la volonté de la population québécoise. Alors, je vais
travailler avec mon homologue au fédéral dès le moment où il va être nommé, et
je souhaite qu'on puisse régler ça rapidement puis en arriver à une entente.
Mme Biron (Martine) :
...vous êtes moins dans l'urgence que...
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, vous savez, nous là, comme gouvernement, on respecte les
engagements qu'on a pris. En campagne électorale, on a dit qu'on allait avoir
une évaluation de connaissances des valeurs québécoises, c'est ce que nous
mettons en place dans les paramètres sur lesquels je peux travailler actuellement.
C'est sûr que nous souhaitons... notre plan de match est toujours la même
chose, d'avoir cette évaluation-là après trois ans. Ça demande des
négociations, mais moi, j'ai pris tous les moyens légaux pour...
Mme Biron (Martine) :
...dans le mandat, vous n'y arriviez pas, vous pourriez quand même dire que vous
avez rempli votre promesse?
M. Jolin-Barrette :
Bien, très certainement, aujourd'hui, nous mettons en place l'évaluation de
connaissance des valeurs québécoises et, oui, nous remplissons notre promesse aujourd'hui.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais estimez-vous que vous arrivez aux mêmes fins?
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, ce que nous souhaitons, c'est que... oui, les personnes
sélectionnées devront connaître les valeurs québécoises, mais nous souhaitons
tout de même y aller avec notre idée de base pour faire en sorte que les
personnes puissent venir au Québec, mais qu'après trois ans elles aient à
remplir ces conditions-là.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui, je comprends, ce n'est pas votre scénario initial et idéal, mais est-ce
que vous arrivez aux mêmes fins avec la mesure que vous annoncez aujourd'hui?
M. Jolin-Barrette : Pas tout
à fait parce que nous souhaitons mettre en place également une évaluation de français
après trois ans, donc ça va faire partie aussi des négociations que nous aurons
avec le gouvernement fédéral.
Le Modérateur
:
Jocelyne Richer.
Mme Richer (Jocelyne) :
Oui. Juste une précision au sujet du cours de 24 heures. La personne qui
montre son assiduité, qui a suivi le cours, donc, elle est assurée d'obtenir le
certificat de sélection, à ce moment-là?
M. Jolin-Barrette : Non.
Dans le fond, dans les conditions pour être sélectionné, supposons dans le Programme
de l'expérience québécoise, il y a plusieurs conditions à respecter. Le fait,
supposons, d'avoir travaillé un an, sur une période de 24 mois, dans le
cadre d'un emploi qui est en demande, le fait d'avoir un niveau 7 de
français, puis le fait d'avoir passé l'évaluation en ligne ou le fait d'avoir
suivi le cours Objectif intégration. Donc, si le cours Objectif intégration est
suivi, mais que la personne n'a pas son niveau 7 de français, elle n'a pas
accès au Programme de l'expérience québécoise. Il y a plusieurs conditions
avant de pouvoir accéder à la sélection. Même chose de l'étranger. Supposons
que vous êtes sélectionné parce que vous êtes soudeur, bien, il faut démontrer
votre expérience de travail, vos diplômes, tout ça. Ça fait partie... c'est une
des conditions de sélection.
Mme Richer (Jocelyne) :
Et est-ce qu'on peut suivre le cours sans passer le test?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Dans le fond, là, quelqu'un qui est ici, qui est un diplômé québécois, un
étudiant étranger qui devient diplômé, sa formation est en demande, lui, cette
personne-là, elle a le choix soit de faire l'évaluation en ligne, même si...
supposons qu'elle est à Québec, là, elle fait soit l'évaluation en ligne ou
elle se dirige vers la session Objectif intégration. Elle a le choix. Et
si elle choisit de faire l'évaluation en ligne, elle fait l'évaluation en
ligne. Si elle a un échec, elle peut faire une deuxième évaluation en ligne, et
si elle obtient un deuxième échec, elle est dirigée automatiquement vers
Objectif intégration. Si elle ne suit pas le cours en bout de période,
bien, sa demande, elle est fermée. Et si elle souhaite immigrer de façon
permanente au Québec, elle devra refaire le processus. Même chose de
l'étranger, dans le fond. De l'étranger, c'est l'évaluation en ligne les deux
premières fois. À la troisième... au deuxième échec, la troisième fois, la
personne a le choix de faire une évaluation en ligne de nouveau ou de venir au Québec
suivre la formation Objectif intégration. Si elle ne remplit pas
l'évaluation en ligne à la troisième fois ou qu'elle ne vient pas au Québec
suivre le cours Objectif intégration, sa demande est fermée également et
elle doit recommencer le processus. C'est l'équivalent au gouvernement fédéral.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Une précision. Vous dites que le Québec est une société distincte. Est-ce
qu'une réponse serait bonne dans l'évaluation canadienne mais mauvaise dans
l'évaluation québécoise? Est-ce qu'il y a une idée qui vous vient en tête?
M. Jolin-Barrette : Non,
je n'ai pas d'idée qui me vient en tête.
Le Modérateur
: Très
bien. On va laisser... dernière question. Il reste deux minutes à
Philip Authier et Cathy Senay, en anglais.
M. Authier (Philip)
: You know there is a big industry of immigrant lawyers
and consultants out there. Because you are basing your system on the honor
system, you assume people will do the test correctly. What stops an applicant
from getting their lawyer to do the test if it is on line?
M. Jolin-Barrette : Yes. If you cheat you are making a fraud and your selection is not
valid. And that applies even we don't have an evaluation. Forget the day of
today. You apply, I don't know, as a lawyer. Take that example. As a lawyer, you
say...
M. Authier (Philip)
:
I mean, you are the applicant, you get your lawyer to fill up the...
M. Jolin-Barrette : Suppose I'm in Germany. I'm a lawyer in Germany or I'm a fake
lawyer in Germany and I want to apply to Québec and I say : I am a lawyer,
and that is not true. So, I am selected by Québec Government, based on the
information that I gave. And when we... my verification or if the Ministry knows
that, «bien», there will be some verification, some inquiry. And if what I
declare, it's not true, we can take off the certificat de sélection du Québec
and I make a fraud, so I cannot be selected by the Québec Government, so I lose
the privilege to come here in Québec. So, if I lie, I cannot be selected and it
can be cancelled.
Le Modérateur
: Merci.
Cathy, dernière question.
M. Bellerose (Patrick) :
...ma question, c'est plutôt : Qu'est-ce qui nous dit qu'il n'y a pas un
avocat ou un consultant, un spécialiste qui va répondre aux questions pour le
candidat à l'immigration dans le test en ligne?
M. Jolin-Barrette :
Bien, vous savez, c'est la même chose aussi pour la construction totale du
dossier aussi. Comment est-ce qu'on fait pour s'assurer que les éléments qui
sont déclarés sont des éléments qui sont véridiques aussi relativement à
l'intégrité des tests de français? Parce que, vous savez, quand vous êtes à
l'étranger puis que vous dites : J'ai un niveau 7, 8, 9 de français
aussi, ça prend des documents, ça prend tout ça. S'il y avait fraude, on annule
la demande de sélection du Québec, et la personne perd sa résidence permanente
aussi, même si la personne est déjà arrivée ici parce que ça fait partie du
pouvoir du ministère de l'Immigration. Et ça, ça s'applique dans tous les
programmes gouvernementaux, dans toutes les lois. Les citoyens sont présumés de
bonne foi.
Alors, ce que vous nous dites,
c'est : Est-ce que quelqu'un pourrait répondre à sa place? Dans toutes les
demandes qui sont faites au gouvernement du Québec, ça pourrait arriver, comme
pour tous les gouvernements qui existent dans le monde. Nous, ce qu'on met en
place, c'est qu'on s'assure d'avoir des processus pour assurer l'intégrité du
test. Alors, si on s'aperçoit qu'il y a fraude, très certainement le certificat
va être annulé, et la personne ne pourra pas immigrer au Québec. Et je peux
vous assurer qu'on prend ça très au sérieux et qu'on souhaite s'assurer que les
gens respectent la loi et respectent l'évaluation de connaissance des valeurs
québécoises.
Mme Senay
(Cathy) : I just want to have one question in
English about the threshold for 2020. It's a bit higher than 40,000. Do you
have the impression that you put some water in your wine in saying that it
would be between... well, the new numbers for the number of immigrants, between
43,000 and 44,500 people?
M. Jolin-Barrette : Yes. During the consultation last summer...
Mme Senay
(Cathy) : ...
M. Jolin-Barrette : Well, the economic groups say : We want more and more
immigrants. I heard them and I make a move about the 41,500 to 43,000 minimum
immigrants for the year 2020. So, I heard them and we made an augmentation of
1,500 immigrants for the year.
Mme Senay
(Cathy) : So, you say you've made some
efforts.
M. Jolin-Barrette : I made some efforts. I heard, but we have to be serious about the
capacity of the Québec to make the integration of immigrants because we want to
give them some resources, some services also, and we are now doing a plan about
that. They will have «un agent d'aide à l'intégration» in each region that...
each immigrant will be linked to that person to help that person to be well
integrated by «francisation», by finding a job, by also be well integrated in
his community because when you go in some community, sometimes you can be a
little lost and you need to have physical people to welcome you and that's why
we put the Ministry of Immigration in all the 17 regions of Québec. That's
the first time that happened and 75 % of the new employees are outside the
city, the Island of Montréal. So I think that's a good message to say: In each
region, there are some needs and we want to fulfil these needs for the Québec
work market.
Le Modérateur
:
M. le ministre, M. le sous-ministre, merci de vous être arrêtés à la salle Évelyne-Dumas.
Merci à tous.
M. Jolin-Barrette : Merci à vous, ça me fait plaisir.
(Fin à 13 h 4)