(Onze heures quarante-deux minutes)
Mme Massé : Alors, bonjour, tout
le monde. Vous venez de voir le premier ministre accepter de se laisser dicter
un ordre par l'Assemblée nationale. Et je vous lis le dernier paragraphe, qui
est le plus important de la motion que je viens de déposer, et qui vient d'être
acceptée par l'ensemble des parlementaires, c'est à l'effet que l'Assemblée
nationale demande au premier ministre du Québec de s'entendre, dans les
meilleurs délais possibles, avec les autorités autochtones sur les
différentes... sur les définitions, pardon, des dispositions et des principes
de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones afin
d'élaborer et d'adopter des modifications législatives nécessaires.
Ça peut vous apparaître, peut-être, un peu
du charabia. Sachez que la Déclaration des Nations unies sur les droits des
peuples autochtones, cette déclaration-là, c'est un peu le fondement de ce que
devraient être des relations entre les Premières Nations et les gouvernements,
peu importe où à travers la planète. Malheureusement, le Québec n'a pas encore mis
en oeuvre la loi qui va donner effet à cette déclaration. Il a dit, en 2019,
sous une autre motion que j'ai déposée... pas 2019, pardon, 2020... non, non,
2019, excusez-moi, une autre motion que j'ai déposée le 8 octobre dernier… il a
dit qu'il s'engageait à faire ce travail-là, ce qu'il n'a pas fait.
Et c'est pourquoi, un an plus tard, je
pousse un peu plus loin et je me fais l'écho de ce que demandent les Premières
Nations, c'est-à-dire que le premier ministre du Québec s'assoit avec les autorités
autochtones, pas qu'il décide lesquelles, qu'il s'assoie avec les autorités
autochtones, pour commencer à dire qu'est-ce qu'on... est-ce qu'on est capables
de s'entendre sur les mots, parce que, pour le moment, ils ne s'entendent pas
sur les mots. La déclaration parle de consentement libre et éclairé. Le premier
ministre parle de droit de veto. Ce n'est pas s'entendre sur les mots, ça. Il
ne faut pas... Il faut absolument...
Et donc, pour moi, aujourd'hui, c'est un
premier pas. Et d'ailleurs j'étais surprise, mais le premier ministre, dans son
discours, nous a appris qu'il allait rencontrer M. Ghislain Picard. Alors,
j'espère qu'une fois de plus une motion qu'on aura fait adopter fera en sorte
d'installer les bases nécessaires pour faire... Et là je vais faire un lien
avec ce qu'on a... le Québec vit présentement, c'est-à-dire l'indignation
profonde de ce qu'a vécu Joyce Echaquan cette semaine. Et je m'excuse, Joyce,
je prononce mal ton nom en plus. Je ne parle pas ta langue. C'est fou parce que
je ne connais pas la langue atikamekw. C'est fou.
Mais, ceci étant dit, à la base, si on veut
déconstruire des décennies, voire des siècles d'impact du colonialisme, chez
les Premières Nations, mais dans nos têtes aussi, à nous, les allochtones,
bien, il va falloir commencer par s'asseoir, définir les mots, et c'est ce que
mon premier ministre vient de dire aujourd'hui, le premier ministre du Québec.
Il est prêt à aller s'asseoir pour le faire, puis je suis contente.
La Modératrice
: Est-ce
qu'il y a des questions?
Mme Lévesque (Fanny) :
Pensez-vous que c'est… de s'asseoir avec M. Picard pour négocier la
déclaration…
Mme Massé : Écoutez, moi,
ce que je conviens, aujourd'hui, là, et depuis longtemps d'ailleurs, c'est que,
quand il est question des Premières Nations, c'est avec le chef de l'État
québécois que les deals doivent se faire. Qu'il y ait du monde qui travaille en
amont de ça, c'est normal. Je veux dire, tous les chefs d'État fonctionnent...
Mais l'enlignement, c'est clair que c'est le chef de l'État qui doit le donner.
Ça fait que c'est pour ça qu'aujourd'hui c'est important que la motion nous
rappelle que c'est le premier ministre qui doit s'asseoir avec les Premières
Nations.
Mme Lévesque (Fanny) :
Est-ce que vous êtes du même avis que le Parti libéral, qu'elle doit être
démise de ses fonctions, Mme D'Amours?
Mme Massé : Écoutez, moi,
ce que je suis surtout d'avis, c'est l'importance que le premier ministre du
Québec s'assoie avec les Premières Nations parce que c'est lui qui donne
l'orientation. Vous savez, Mme D'Amours, elle est ministre du Secrétariat
aux affaires autochtones. Le chef du Québec, le chef de l'État québécois, le
premier ministre du Québec, lui, est responsable de tous les dossiers et c'est
lui qui peut envoyer l'enlignement que ce soit à son ministre responsable des
Ressources naturelles, de la Faune et Parcs, de tout… de l'Économie, de...
Alors, c'est pour ça que, pour nous, l'important, c'est... Bon,
Mme D'Amours ou un autre, ce n'est pas ça, l'enjeu. L'enjeu, c'est le
premier ministre du Québec. Puis je pense qu'on l'a amené à faire un pas de
plus aujourd'hui.
M. Larin (Vincent) : Mais
M. Legault dit qu'il n'a pas le temps de s'asseoir avec les
54 nations, là. Le chiffre, là, je ne le connaissais pas, mais, selon
vous, c'est pourtant ça qu'il devrait faire?
Mme Massé : C'est-à-dire
que, quand on connaît un petit peu le dossier des relations avec les Premières
Nations, on sait, premièrement, que, comment ils se gouvernent actuellement, c'est
un petit peu de la faute d'Ottawa, hein? C'est Ottawa qui a déterminé comment
allaient, avec la Loi sur les Indiens… devaient se gouverner les Premières
Nations.
Alors, il y a effectivement, au Québec,
plusieurs communautés dont chaque chef est élu par des règles, disons,
coloniales. On va dire ça de même. Mais ils se sont aussi donné, avec grande
autonomie, des façons de fonctionner, avec, notamment, l'association des
premières nations du Québec et du Labrador, l'APNQL. C'est une structure que
s'est donné l'ensemble de ces communautés-là pour avoir une résonance justement
auprès du gouvernement du Québec et/ou du gouvernement canadien.
Alors, tu sais, je veux dire, quand le gouvernement
veut négocier avec les municipalités, là, il s'assoit-u avec les 1 000
municipalités du Québec? Non. Il discute avec les associations qui les
représentent et, après ça, bien sûr qu'il fait des deals avec chacun. Puis là
je ne veux pas comparer les autochtones aux municipalités. Je ne veux pas que
vous reteniez ça. Je veux juste dire que, quand on veut faire en sorte que ça
fonctionne, on se donne les moyens. Et moi, je pense que les Premières Nations
se sont donné des représentants politiques. Ça vaut le coup de s'asseoir puis
de discuter avec eux autres, surtout quand on veut discuter d'un cadre
législatif. Et, quand les fondations seront mises, là, ça va être facile de
discuter avec l'ensemble des chefs et des Premières Nations.
Je vous donne un exemple. C'est un peu
comme la Baie-James, hein? Avant d'aller vers les ententes qui sont plus
récentes, l'infrastructure de base de la négociation avec les Inuits et les
Cris, c'est l'entente sur la Baie-James, hein, qui agit comme traité, voire,
même. Mais, après ça, il peut y avoir la «Paix des Braves», il peut y avoir la
Grande Alliance. C'est beaucoup plus facile de discuter parce que les
fondations sont là. Maintenant, ça prend une fondation pour toutes les
Premières Nations et pas seulement ces trois-là.
Mme
Sioui (Marie-Michèle) : Est-ce que vous avez pris connaissance des
propos du maire de Joliette?
Mme Massé : Du maire de
Joliette?
Mme
Sioui (Marie-Michèle) : Oui.
Mme Massé : Non, pas du tout.
Mme
Sioui (Marie-Michèle) : Bien, lui, il a affirmé qu'il ne voyait pas de
racisme dans sa ville… peut-être pas nécessairement qu'il n'y en a pas, mais
moi, je n'en ai jamais vu. En fait, qu'est-ce que vous en pensez, de ce
commentaire?
Mme Massé : Écoutez, ça, c'est
une confusion qu'entretient le premier ministre, là. C'est comme si la question
du racisme systémique... Puis moi, je comprends le maire qui dit : Bien
là, ce n'est pas tous mes citoyens, là, qui sont des... Le racisme systémique,
là, ce n'est pas ça que ça veut dire, hein? Et donc cette confusion
qu'entretient le premier ministre, notre premier ministre, bien, ça n'aide pas,
ça, les gens des Premières Nations. Puis allez voir le rapport qu'ils ont
déposé. Notamment, il y a toute une section qui s'adresse aux municipalités
parce que c'est des territoires de proximité.
Et, dans ce sens-là, moi, je suis
convaincue, quand j'entends ce que mes frères et soeurs autochtones vivent
comme préjugés, comme attaques... Tu sais, oui, il y a des propos extrêmes et
inacceptables comme ceux qu'on a entendus dans le cas de l'infirmière qui
invectivait Joyce, mais il y a, au quotidien, chez mes amis autochtones, ces
propos, ces regards : On sait bien, toi… Et ça, Joliette, Montréal, peu
importe, je suis convaincu qu'il y en a partout. L'enjeu, c'est que,
maintenant, on est appelés à se serrer les coudes parce qu'on est voués à
copartager ce territoire-là. Ça fait 400 ans qu'on le partage. Alors, vaut
mieux relever nos manches, reconnaître que le passé ne doit pas être garant de
l'avenir, puis faisons le travail.
Mme Greig
(Kelly) : Can I ask you in English quickly… Is
the relationship between the First Nations and the province of Québec…
Mme Massé :
Are good?
Mme Greig (Kelly) : Is it broken?
Mme Massé :
Is it broken? You know what, I know it's not my responsibility to say that. You
have to ask the First Nations. But, for me, when you have to ask multiple times
to the Prime Minister that you want to sit with him because he's the leader of
his community, of Québec, and they are the leaders of their community, and the
Premier does not get into this kind of meeting, I don't know if it's broken. This
is their... what they have to say. They have to tell it. But, for me, it's not
a kind of respect, you know? When you know the First Nations, and I don't want
to say that I know everyone, but I know a bunch of them, when you know them,
you know that it's very important to listen, to be there and to make your part
of the contract. And this part, it's what the words in the «déclaration des
Nations unies» means. So I think this is the part... it's not there. But I'm
still confident because the Prime Minister, today, said yes to my motion, and
this motion is very clear to ask to the Premier, Mr. Legault, to sit down and try
to get the right definitions on the declaration.
Mme Greig (Kelly) : And, quickly, do you think Mme D'Amours should step down as
Minister?
Mme Massé : I think it's not a good question, you know, because Mme D'Amours,
she's responsible for the Secrétariat aux affaires
autochtones, and, of course, she's a Minister who has
to get in contact with every nation. But, for me, the most important, and this is
what the leaders of the First Nations wait for, is to see the leader of Québec, so Mr. Legault, to get down his
vision to explain how he sees what is contained in that declaration, and this
is the responsibility of the leader of the «gouvernement
du Québec». So, for me, the most important is to be
sure that Mr. Legault is the one who calls the shots.
Thank you very
much.
(Fin à 11 h 55)