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Version finale

28th Legislature, 3rd Session
(February 20, 1968 au December 18, 1968)

Saturday, December 14, 1968 - Vol. 7 N° 104

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Onze heures neuf minutes)

M. LEBEL (président): Qu'on ouvrelespor-tes. A l'ordre, messieursl

Présentation de pétitions. Lecture et réception de pétitions. Présentation de rapports de comités élus.

Comité spécial du bill 290

M. CROISETIERE: M. le Président, votre comité a l'honneur de soumettre à votre honorable Chambre son premier rapport. Votre comité a décidé de rapporter avec des amendements le bill suivant: bill 290, Loi des relations du travail dans l'industrie de la construction.

Respectueusement soumis.

M. LE PRESIDENT: Présentation de motions non annoncées.

M. BELLEMARE: M. le Président, si vous me le permettez, au sujet du rapport qui vient d'être fait à la Chambre, nous nous excusons de ne pas avoir été capables de nous rendreàî la demande de tous ceux qui auraient voulu avoir des bills réimprimés ce matin.

Nous avons fait faire, durant la nuit, des copies au Xerox. M. Senécal, le greffier de l'Assemblée, les a en main et, surtout, il y a la copie authentique signée par lui. Je demanderais, si nous devons l'étudier aujourd'hui —je me suis entendu avec l'honorable député d'Ahuntsic — qu'on nous permette de nous servir de ces copies que nous avons présentement en main et qui sont devenues officielles parce que le greffier de l'Assemblée législative les a signées.

M. LEFEBVRE: M. le Président, puisque le ministre réfère à une entente qu'il aurait faite avec le député d'Ahuntsic, je tiens à préciser la nature de cette entente. Ce dont j'ai convenu avec le ministre, c'est que, tout d'abord, pour ma part, je voulais dire quelques mots en deuxième lecture. Je n'ai pas consulté mes collègues; il est possible que quelques-uns désirent dire quelques mots aussi. Cependant, je ne prévoyais pas, lui ai-je dit, un long débat en deuxième lecture, à moins de ...

Maintenant, nous avons convenu, hier, au comité, que et le gouvernement et l'Opposition recevraient, dans le plus court délai possible, les commentaires des parties intéressées que nous avons entendues au comité, lorsque nous avons siégé toute la journée hier.

Evidemment, selon les commentaires, les remarques ou les critiques qui peuvent provenir de ces groupes, l'entente qui a été faite — et on pourra s'en rendre compte en se référant simplement au journal des Débats — c'est que et le gouvernement et l'Opposition considéreraient leur position définitive sur tel ou tel article du bill, selon la valeur des représentations qui seraient faites. Quant à moi, M. le Président, il y a un dernier point que je veux préciser. Si le ministre a eu l'impression... Je ne l'accuse pas du tout d'avoir cherché à fausser ce qu'il m'a dit ou ce que je lui ai dit, mais je tiens à préciser que, quant à moi, je ne vols pas très bien comment on pourrait étudier le bill en comité avant d'avoir des copies convenables pour tous les membres qui désirent participer à la discussion. Ce n'est pas une question d'obstruction, mais je pense qu'il faut, au moins que les membres du comité aient des copies en main.

M. BELLEMARE: D'ici quelques minutes, nous aurons une vingtaine de copies pour ceux qui en voudront. Ce que vient de dire l'honorable député d'Ahuntsic est exact. Nous avons convenu hier que les parties en cause qui ont étudié le bill avec nous ont eu, ce matin, à deux heures, je les leur ai fait parvenir, ces textes que nous avons remis à toutes les parties. Si elles ont des remarques à faire quant à la concordance ou autre chose qui pourrait attirer notre attention, elles doivent nous les faire parvenir par écrit selon la suggestion du député d'Ahuntsic. Lors de l'étude en comité plênier, après que la deuxième lecture sera reçue, nous pourrons les étudier et vérifier, s'il y a lieu.

M. LEFEBVRE: D'accord. M. LE PRESIDENT:

Présentation de motions non annoncées. Présentation de bills privés. Présentation de bills publics. Affaires du jour.

Questions et réponses

Régionale de Lignery

M. LESAGE: M. le Président, le ministre d'Etat à l'Education est-il en mesure de répondre à la question que je lui ai posée jeudi, au sujet de la commission scolaire régionale de Lignery?

M. MORIN: M. le Président, je ne suis pas encore en mesure de répondre à cette question, n'ayant pas été capable, ce matin, de rejoindre

la personne à laquelle j'avais demandé de me fournir tous les renseignements nécessaires.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances.

Budget supplémentaire

M. DOZOIS: M. le Président, un message de l'honorable lieutenant-gouverneur, signé de sa main.

M. LE PRESIDENT; Message de son Honneur le lieutenant-gouverneur de la province. «L'honorable lieutenant-gouverneur de la province de Québec transmet à l'Assemblée législative le budget supplémentaire de dépenses no 2, pour l'année financière se terminant le 31 mars 1969, conformément aux dispositions de l'article 54 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique 1867, et recommande ce budget à la considération de la Chambre. « Hugues Lapointe, « Hôtel du gouvernement Québec. »

M. DOZOIS: M. le Président, je propose que le message de son Honneur le lieutenant-gouverneur ainsi que le budget supplémentaire no 2 qui l'accompagne, soit référé au comité des subsides.

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. BELLEMARE: M. le Président, article 1. M. LE PRESIDENT: L'honorable...

M. BELLEMARE: Si vous me le permettez, M. le Président... Nous avons causé, avant l'ouverture de la séance, ce matin, avec l'honorable chef de l'Opposition, quant à la motion des députés à l'article 10.

Si la Chambre voulait accepter le rapport du comité de l'éducation, tel qu'il est là, je pourrais demander, faire motion pour la radiation des deux bills 56 et 61 et ensuite de l'ordre du jour et après ça faire une motion de première lecture immédiatement quant à la réintroduction du bill 56, et on serait prêt à donner les explications puis à déposer entre les mains des députés les bills que nous avons.

M. LESAGE: D'accord.

M. BELLEMARE: D'accord.

M. LESAGE: Pas les bills, le bill.

Bills 56 et 61 radiés

M. LE PRESIDENT: Est-ce que la motion pour la révocation et la radiation des deux bills qui apparaissent à l'article 10 sera adoptée?

M. BELLEMARE: Première lecture révoquée.

M. LE PRESIDENT: Parler de révocation implique qu'il y a révocation des deux bills qui sont devant la Chambre et qui ne seront plus devant la Chambre.

Bill 56

M. LE PRESIDENT: De consentement unanime, l'honorable ministre du Travail propose la première lecture du bill 56, cette motion sera-t-elle adoptée?

M. LESAGE: Est-ce que ce n'est pas le ministre de l'Education?

M. LE PRESIDENT: Excusez-moi, l'honorable ministre de l'Education.

M. MORIN: M. le Président, je voudrais ce matin donner quelques notes explicatives concernant le nouveau bill, le bill 56, Loi de l'enseignement privé. En juin dernier, le gouvernement présentait en première lecture une loi de l'enseignement privé, de formation générale, et de l'enseignement privé pour l'enfance inadaptée ainsi qu'une loi de l'enseignement privé professionnelle par correspondance ou de culture personnelle.

Référées au comité de l'éducation, ces deux lois furent l'objet d'une étude particulièrement attentive tant de la part des membres du comité que de nombreux organismes intéressés à l'enseignement privé. A l'occasion de leur comparution devant le comité et dans leur mémoire respectif, ces organismes firent un certain nombre d'observations et de recommandations fort pertinentes dont plusieurs parmi les plus importantes semblaient rallier la quasi-unanimité des organismes concernés et des membres du comité de l'éducation.

Aussi conscient du rôle de ce comité, et de la valeur de la consultation des intéressés le gouvernement présente aujourd'hui sous le titre Loi de l'enseignement privé, un nouveau projet qui résulte de la fusion des deux projets antérieurs, ce qui avait été fortement recommandé. Ce projet retient en outre les principales recommanda-

tions faites devant le comité de l'éducation et qui ont été jugées opportunes et compatibles avec les objectifs de cette loi et les exigences du bien commun.

Je signale en particulier les dispositions suivantes: premièrement l'extension aux écoles de formation professionnelle de la déclaration d'intérêt public qui était réservée aux écoles de formation générale et aux écoles pour l'enfance inadaptée.

Deuxièmement, l'extension aux écoles maternelles, élémentaires et professionnelles de la reconnaissance pour fin de subventions, qui était réservée aux écoles secondaires et aux écoles déclarées d'intérêt public.

Troisièmement, le remplacement, dans le cas des écoles déclarées d'intérêt public, de la subvention basée sur le traitement du personnel par une subvention per capita représentant 80% du coût moyen par élève des écoles publiques du mêms niveau.

Enfin, quatrièmement, le remplacement, dans le cas des écoles reconnues pour fin de subventions, du per capita fixe prévu par un per capita représentant 60% du coût moyen par élève des écoles publiques de même niveau. Nous avons la conviction que toutes ces modifications et d'autres de moindre importance ont amélioré sensiblement le projet initial et que cette loi de l'enseignement privé telle qu'elle est présentée permettra vraiment l'exercice du droit à la liberté de l'enseignement en même temps qu'une réglementation juste et efficace de l'exercice de ce droit.

La liberté de l'enseignement n'a jamais été contestée au Québec, et les institutions privées...

M. GERIN-LAJOIE: C'est du plaidoyer ça, ce n'est pas une explication du bill.

M. BELLEMARE: L'honorable député de Vaudreuil-Soulanges ne devrait pas se plaindre. Nous avons entendu...

M. COURCY: Il y a un président, là.

M. BELLEMARE: Un point d'ordre est soulevé. Ce n'est pas vous qui êtes le maître de cérémonie ce matin.

M. COURCY: Il y a un président.

M. BELLEMARE: Vous avez cassé votre pipe ailleurs.

M. LEFEBVRE: La vôtre a été endommagée.

M. BELLEMARE: Cours-ci, cours-là. M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

M. COURCY: Laissez faire Bagot, vous en entendrez parler un jour.

M. HOUDE: Nous ne vendons pas de bulldozers, nous!

M. LE PRESIDENT: Je comprends que l'honorable ministre du Travail prenait la parole sur un point d'ordre.

M. BELLEMARE: L'honorable député de Vaudreuil-Soulanges devrait comprendre la situation. C'est un bill qui est fort important et sur lequel l'honorable député donne des précisions. Puisqu'il a été refait, il faut que la Chambre en soit avisée. Lorsque nous avons eu l'occasion d'entendre l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges en cette Chambre, alors qu'il était ministre de l'Education, sur les prémisses qu'il nous avait données sur le bill 60, je me souviens que cela avait duré quelques minutes...

M. GABIAS: Cinq heures.

M. GER1N-LAJOIE: En deuxième lecture, pas en première.

M. BELLEMARE: Ah non!

M. COURCY: M. le Président, rappelez les ministres à l'ordre.

M. LESAGE: L'explication qu'un ministre peut donner lors de la première lecture d'un bill doit être dénuée de quelque argumentation que ce soit. Or, le ministre d'Etat à l'Education, au lieu de donner l'objet du bill et de s'en tenir à l'objet du bill, fait un plaidoyer en faveur du projet de loi. C'est le genre d'intervention que l'on doit faire, en vertu de notre règlement, en deuxième lecture. Il pourrait fort bien réserver son argumentation pour la deuxième lecture du bill, d'autant plus que nous sommes disposés à donner notre consentement à ce que nous procédions, dès aujourd'hui, à la deuxième lecture du bill.

M. LE PRESIDENT: Je suis convaincu que nous épargnerions un temps considérable à la Chambre si l'honorable ministre d'Etat à l'Education voulait accepter la suggestion de garder ses remarques pour la deuxième lecture.

M. BELLEMARE: Il a terminé, il lui reste trois lignes à peu près.

M. LESAGE: Comment se fait-il que vous le savez?

M. BELLEMARE: Mon radar.

M. MORIN: Je continue donc à donner certaines notes explicatives concernant ce bill. En vertu de la loi...

M. LE PRESIDENT: J'ai demandé à l'honorable ministre d'Etat à l'Education d'être assez bref dans ses remarques sur la première lecture, parce que, suivant ma très courte expérience dans cette Chambre, j'ai toujours constaté que les remarques sur la première lecture étaient fort brèves. Vu surtout que la deuxième lecture pourrait avoir lieu aujourd'hui même, je ne vois pas très bien ce que pourrait changer l'intervention a quelques minutes de différence.

M. MORIN: Je serai donc très bref.

M. BELLEMARE: Il achève. D'ailleurs, il y a consentement unanime.

M. MORIN: En vertu de cette loi, le ministre peut, après avoir obtenu l'avis de la commission, déclarer d'Intérêt public une institution qui, selon les critères déterminés par règlement, assure des services de qualité et contribue au développement de l'enseignement au Québec, en raison des caractéristiques de l'enseignement qu'elle donne, de la compétence de son personnel et des méthodes pédagogiques qu'elle utilise. Une institution déclarée d'intérêt public reçoit, pour chaque année scolaire et pour chaque élève qui est inscrit à temps plein le 30 septembre de cette année scolaire, une subvention égale 3. 80% du coût moyen par élève, tel que calculé pour l'année scolaire précédente pour les établissements publics de même catégorie, selon les normes en vigueur pour l'approbation des budgets de ces établissements.

Une telle institution, pour être admissible à cette subvention, ne doit pas exiger de ses élèves des frais de scolarité et autres frais afférents supérieurs à la différence à combler pour atteindre le coût moyen mentionné à cette loi, plus 10% dudit coût moyen.

Evidemment, je pourrais donner beaucoup d'autres explications mais il semble qu'à ce moment-là, cela ne serait pas conforme aux règlements de cette Chambre. Je crois en avoir dit suffisamment quand même, pour rassurer les institutions privées du Québec qui, depuis quelques années, étaient très inquiètes quant à leur avenir.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Richmond.

M. LAFRANCE: On me permettra sans doute, comme c'est la coutume, de demander une simple explication au ministre. Est-ce que le coût moyen mentionné aux articles 14 et 17 inclut le service des investissements et de la dette?

DES VOE: A l'ordre! A l'ordre!

M. LAFRANCE: C'est toute l'orientation de la discussion.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. MORIN: J'aurais dit tout cela si on m'avait laissé la parole.

M. LAFRANCE: Si le ministre avait dit seulement cela, on aurait été satisfait.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LAFRANCE: S'il avait seulement expliqué ce point-là; c'est tout le noeud de la législation.

M. GRENIER: Entendez-vous donc avec votre chef.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LAFRANCE: Je ne vois pas pourquoi on manifeste cet esprit-là.

M. GRENIER: Si vous êtes encore capable de parler à M. Lesage...

M. COURCY: Ils ont mal dormi, c'est certain.

M. LE PRESIDENT: La motion de première lecture sera-t-elle adoptée?

M. LESAGE: Oui, adopté.

M. LAFRANCE: M. le Président, je tiens à avoir cette explication.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

C'est une question qui devra être posée en comité plénier de la Chambre. Je pense que l'honorable député de Sherbrooke, mon collègue, vous permettra sûrement cette question en comité. On a référé à deux articles précis, on conviendra qu'il s'agit du travail du comité, à ce moment-là.

La motion de première lecture sera-t-elle adoptée?

M. BELLEMARE: Oui, adopté.

M. LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading of this bill.

M. BELLEMARE: Un.

M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la même séance ou à une séance subséquente.

M. BELLEMARE: Un.

Motion de M. Bellemare

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail propose...

M. LESAGE: M. le Président, sur la référence que vous venez de faire au sujet de la deuxième lecture du projet de loi, bill 56, dois-je comprendre que la deuxième lecture sera appelée sans délai? En effet, nous avons reçu copie de représentations, d'une représentation au moins, qui a été faite au ministre de l'Education, par le président de l'Association des parents catholiques, M. Louis Bouchard, datée d'aujourd'hui, j'interviens en vertu de l'article 114, deuxièmement.

M. BELLEMARE: M. le Président, à l'ordre!

M. LESAGE: C'est l'article relatif à l'ordre des travaux de la Chambre: article 114, deuxièmement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESAGE: Nous allons nous en tenir au règlement.

M. BELLEMARE: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Les remarques actuellement faites en vertu de l'article 114 peuvent se faire à ce moment-ci. J'espère qu'on me permettra d'entendre l'honorable chef de l'Opposition, afin de décider s'il y a irrégularité ou non.

L'honorable chef de l'Opposition.

M. LESAGE: M. le Président, il n'est pas question d'irrégularité ou de régularité. Il est question de l'ordre des travaux de la Chambre, qui est prescrit par l'article 114. Alors, je dis que le ministre de l'Education a reçu des re- présentations d'au moins une source que je connais, puisqu'on m'a remis copie de la lettre datée du 14 décembre et adressée au ministre de l'Education. La lettre est signée par M. Louis Bouchard, président de l'Association des parents catholiques, et déclare ceci au ministre de l'Education: « Après avoir pris connaissance du texte du bill 56 et avoir consulté les représentants des intéressés, nous vous demandons que ce projet de loi soit adopté dès la présente session de l'Assemblée nationale. »

Est-ce que, dans les circonstances, il n'y aurait pas lieu d'obtenir Passurance du ministre de l'Education, qui est vice-premier ministre, ou du leader du gouvernement en Chambre, que ce projet de loi sera étudié en deuxième lecture, en comité et en troisième lecture, à la présente session?

M. BELLEMARE: En vertu de l'article 126, il est bien entendu... L'honorable chef de l'Opposition a cité l'article 114, mais il appartient toujours au gouvernement de décider de l'heure et de l'opportunité des travaux de la Chambre. Sur ça, je dis que le bill vient d'être lu en première lecture et suivra le cours normal de la procédure.

M. GERIN-LAJOIE: M. le Président, sur la question de l'ordre des travaux de la Chambre, j'ai bien entendu ce que le leader de la Chambre vient d'expliquer.

C'est précisément parce que c'est la responsabilité du gouvernement de proposer Por-dre des travaux de la Chambre que le chef de l'Opposition a demandé au leader de la Chambre quels étaient ses projets. Nous en sommes vraisemblablement ou probablement à la dernière journée de la session, et je pense qu'il est dans l'intérêt public...

M. BELLEMARE: Est-ce une affirmation dont les membres de l'Opposition sont solidaires, la dernière journée de la session?

M. COURCY: Non.

M. GERIN-LAJOIE: M. le Président, j'ai dit que nous en sommes, vraisemblablement ou probablement, j'ajoute: mais pas certainement, à la dernière journée de la session.

M. BELLEMARE: Certainement pas.

M. DOZOIS: Ne vous en faites pas, nous verrons à ça.

M. GERIN-LAJOIE: Alors, M. le Président,

je prends note de l'observation du leader de la Chambre que ce n'est certainement pas la dernière journée.

M. BELLEMARE: Je dis à l'honorable député qu'il a parfaitement raison.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: II y a plusieurs autres jours.

M. PINARD: On ne parle pas d'une autre session, on parle de la session en cours.

M. BELLEMARE: C'est ça. M. LE PRESIDENT: A l'ordrel

M. GERIN-LAJOIE: Alors, M. le Président, c'est la question de l'ordre des travaux de la Chambre. Je pense qu'il est dans l'intérêt public que le leader du gouvernement nous dise, à ce moment-ci, si c'est l'intention du gouvernement d'appeler la deuxième lecture du bill 56 à la présente session, soit aujourd'hui, soit une autre journée, étant donné la grande urgence de ce bill, et non seulement à cause des représentations qu'a signalées le chef de l'Opposition, mais à cause de l'intérêt public et du développement de l'éducation dans cette province. Il y a un grand nombre d'institutions en cause, un grand nombre de parents, un grand nombre de jeunes. Je pense donc qu'il est évidemment dans l'intérêt public que le leader nous donne ces renseignements.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education.

M. CARDINAL: M. le Président, il est exact que j'ai des représentations d'une association qui demande que le bill 56 soit adopté au plus tôt. Ce sont des représentations d'une association, alors que près d'une quarantaine d'associations se sont présentées devant le comité. Il avait alors été mentionné, devant ce comité, qu'un nouveau projet serait rédigé et que le temps de le revoir serait donné aux gens qui étaient devant ce comité. J'ajouterai que le bill 56 qui est déposé devant nous, est certainement fort intéressant pour les institutions privées. Il est plus qu'intéressant, du simple fait qu'il soit déposé. Il leur indique quelle est la politique que le gouvernement entend suivre dans ce domaine. D'autre part, il est à noter que Pannée scolaire est commencée et que ce bill ne pourrait pas s'appliquer, de toute façon, avant septembre 1969. D'autre part, et ceci est fort important, environ une vingtaine d'associations qui étaient présentes au comité et qui ont déposé des mémoires, ont demandé qu'en autant qu'il était possible de le faire, avant l'adoption du bill, les règlements qui le complètent soient également apportés devant l'assemblée pour être considérés en même temps que le bill.

M. MALTAIS (Saguenay): Alors, s'il faut comprendre le premier ministre intérimaire, ça deviendrait, à ce moment-ci, un bill pour jeter de la poudre aux yeux?

M. CARDINAL: II y en a toujours qui ne comprennent rien.

M. LAFRANCE: M. le Président, ai-je bien compris...

M. LE PRESIDENT: A l'ordrel

M. GABIAS: Quand nous ne déposons pas de bill, ça jase, et quand un bill est déposé, ça jase.

M. LE PRESIDENT: A Pordre! L'honorable député de Richmond.

M. LAFRANCE: M. le Président, ai-je bien compris l'intention du ministre? A-t-il l'intention de le soumettre en deuxième lecture, à la présente session, ou à un comité de la Chambre, à la présente session? Je voudrais que cette situation soit bien claire.

M. CARDINAL: Je vous le laisse deviner, selon votre perspicacité.

DES VOIX: Ah Seigneur!

M. LAFRANCE: II ne se grandit pas,

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: Cela a dû prendre bien des « bulldozers » pour faire élire ça dans Bagot.

UNE VOIX: II y a un candidat.

M. BELLEMARE: Cela vous fait mal. Vous avez de la misère à l'avaler.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je comprends que c'est samedi, mais notre convention collective ne nous a pas permis un congé. Alors, je voudrais que l'on revienne aux travaux de la Chambre.

M. PINARD: M. le Président, je pense qu'il est d'intérêt public d'obtenir du ministre de l'Education les précisions qui sont demandées, à ce moment-ci, par les députés de l'Opposition. Je connais de nombreux parents qui, à l'heure actuelle, ne savent pas du tout...

M. BELLEMARE: A l'ordre! M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: C'est un débat. A l'ordre, à l'ordre, M. le Président!

DES VOIX: A l'ordre!

M. BELLEMARE: Ce n'est pas sur la motion.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'intervention, qui a été faite par l'honorable chef de l'Opposition et par l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges en vertu de l'article 114, était naturellement bien fondée. Il y a eu une réponse de la part du ministre et ceci doit clore cette discussion.

M. BIENVENUE: M. le Président, est-ce que j'ai bien saisi lorsque vous dites qu'il y a eu une réponse de la part du ministre?

M. BELLEMARE: Oui.

M. DOZOIS: Que vous en soyez satisfait, cela est une autre affaire.

M. BELLEMARE: Un, M. le Président. UNE VOIX: Il a dit: Devinez. M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. BELLEMARE: Un.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail propose...

M. LESAGE: M. le Président, le député de Matane a demandé la parole. Le député de Drummond avait la parole.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je comprends que l'honorable député de Matane a demandé la parole, mais j'ai cru, par la question qu'il m'a posée, qu'il intervenait sur les travaux de la Chambre.

M. BIENVENUE: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: J'avais déjà rendu une décision sur ce point, à l'effet qu'il y avait eu une réponse de la part du ministre. Je n'ai pas, ici, à juger des réponses données d'un côté ou de l'autre de la Chambre, mais je dis que, lorsqu'une réponse est donnée par un ministre... Tout le monde le sait, en vertu de nos règlements, le ministre pourrait même dire simplement: Je ne réponds pas. Et, à ce moment-là, je ne permettrais pas à un opinant quel qu'il soit de poser une question. Alors, cette question, quant à moi, est close et j'espère qu'on se rendra à ma directive.

M. CLICHE: M. le Président, selon mon privilège de député, je veux discuter de l'ordre des travaux de la Chambre. Présentement, ce dont je veux vous entretenir, c'est du bill 56.

M. BELLEMARE: M. le Président, je soulève un point d'ordre.

DES VOIX: A l'ordre!

M. CLICHE: M. le Président, j'allais dire que...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: M. le Président, je soulève un point d'ordre!

M. DOZOIS: Un ancien président devrait savoir cela!

M. BELLEMARE: M. le Président, l'honorable député vient de commencer son intervention en posant une question de privilège en vertu de l'article 192 de notre règlement.

M. CLICHE: Article 114.

M. BELLEMARE: L'article 193.

UNE VOIX: Ce n'est pas une question de privilège.

M. BELLEMARE : Question de privilège, dit-il, et, tout de suite après, prenant la formule détournée, il dit: Je voudrais vous demander si Je peux m'adresser à vous pour critiquer votre décision. Vous avez rendu une décision quant au débat sur le bill 56.

DES VOIX: A l'ordre!

M. BELLEMARE: Là, M. le Président, l'honorable député prend un moyen détourné...

M. MALTAIS (Saguenay): A l'ordre!

M. BELLEMARE: ... pour essayer de revenir sur la décision que vous avez rendue.

DES VOIX: A l'ordre!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: La décision étant rendue, M. le Président, le débat est clos. Qu'on l'accepte ou qu'on ne l'accepte pas, qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime pas.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député d'Abitibi-Est a invoqué son privilège. Je ne sais vraiment pas le privilège qu'il va soulever, car on ne lui a pas donné l'opportunité de compléter. Il pourrait arriver que l'honorable député nous fasse une surprise et que ce ne soit vraiment pas une tentative de revenir sur ma décision. Je m'en rendrai sûrement compte, mais, pour cela, il faut que Je l'entende et, s'il y a lieu, je me chargerai d'intervenir.

L'honorable député d'Abitibi-Est.

M. GABIAS: Sur autre chose.

M. CLICHE: M. le Président, je voulais parler de la deuxième lecture du bill 56 que j'aimerais entendre aujourd'hui. Je sais que ce n'est pas votre décision, à vous...

M. BELLEMARE: A l'ordre!

M. CLICHE: ... que la deuxième lecture n'ait pas lieu aujourd'hui, puisque cette décision a été annoncée indirectement par le ministre de l'Education. Je dis que ça n'a pas été annoncé directement, parce qu'il n'a pas voulu dire...

M. BELLEMARE: A l'ordre!

M. CLICHE: ... si cette loi serait présentée au cours de la présente session. Or, il est clair, pour toute la population du Québec, sinon pour tous les membres de cette Chambre...

DES VOIX: A l'ordre!

M. CLICHE: ... que la session va se terminer aujourd'hui.

DES VOIX: A l'ordre!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. GABIAS: Cela ce n'est pas du « taponnage »?

M. LE PRESIDENT: J'ai déjà eu l'occasion de dire, dans ma décision antérieure, qu'il s'agissait là d'une question posée en vertu de l'article 114, question qui a déjà été formulée par l'honorable chef de l'Opposition et l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges. A ce moment-là une réponse a été donnée par l'honorable ministre de l'Education. Je pense bien que si l'on posait d'autres questions sur le même sujet, nous en serions à un contre-interrogatoire. Nous risquerions de nous engager sur un débat et je ne pense pas que même l'article 114 nous permette un débat.

M. CLICHE: Ma question était aussi simple que celle-ci: Est-ce que la deuxième lecture aura lieu aujourd'hui...

DES VOIX: A l'ordre! A l'ordre!

M. CLICHE: ... vu l'importance de cette loi pour les institutions d'enseignement privé dans la province?

DES VOIX: A l'ordre! A l'ordre!

M. LAFRANCE: Que le gouvernement ait donc le courage de prendre ses responsabilités; qu'il les prenne donc franchement et honnêtement.

DES VOIX: A l'ordre! A l'ordre!

M. GABIAS: Un docteur est demandé.

M. BELLEMARE: Article 1.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable ministre du travail propose: « Entendu l'intérêt public... » Suis-je dispensé de la lecture de la motion?

M. LESAGE: Oui.

M. GERIN-LAJOIE: Adopté.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail.

M. BELLEMARE: Adopté?

M. LESAGE: M. le Président, avant que le ministre du Travail n'intervienne, je désire invoquer le règlement.

M. BELLEMARE: Vous désirez invoquer le règlement?

M. LESAGE: Oui.

M. BELLEMARE: M. le Président, en vertu du règlement...

DES VOIX: A l'ordre! A l'ordre!

M. BELLEMARE: ... vous m'avez donné la parole, M. le Président. C'est bien malheureux.

Motion pour division de la motion principale

M. LESAGE: J'invoque le règlement parce que je veux attirer l'attention de la présidence sur un article du règlement.

M. BELLEMARE: II le fera tout à l'heure. Il en aura toutes les possibilités.

M. LESAGE: C'est un point de règlement que j'ai le droit de soulever à ce moment-ci.

M. BLLEMARE: Je n'ai pas encore parlé. Je n'ai pas encore dit un mot. Attendez, la parole m'a été donnée.

M. GERIN-LAJOIE: Le règlement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je pense que tout le monde conviendra que s'il y avait un manquement au règlement et que le président ne s'en rend pas compte pour quelque raison, il appartient à un député de cette Chambre d'invoquer le règlement dès qu'il s'aperçoit qu'il y a un manquement au règlement. C'estpour cela que je sens le besoin d'entendre l'honorable chef de l'Opposition.

M. LESAGE: M. le Président, ce n'est pas qu'il y ait eu manquement au règlement, mais c'est que le règlement, par certains de ses articles, donne des droits au député. J'ai l'intention d'invoquer le droit qui est donné aux députés de cette Chambre, par l'article 235 du règlement qui se lit comme suit: « Quand il est proposé une série de résolutions, chaque résolution doit être mise en délibération séparément si un député en fait la demande. » J'en fais la demande. La motion qui est devant nous comporte un attendu et deux résolutions. Je demande donc que nous procédions d'abord à délibérer sur la résolution A. D'ailleurs, il s'agit de deux choses tellement distinctes.

La résolution A c'est la suspension de la rè- gle 536 et la résolution B, c'est la référence d'un projet de loi au comité. J'ai l'intention, dans ma première intervention, de m'en tenir strictement à un débat sur l'opportunité de suspendre l'application de l'article536. Je pense que c'est un droit indéniable qui est reconnu aux députés de cette Chambre par l'article 235. Je fais cette demande conformément à l'article 235.

M. BELLEMARE: M. le Président, vous devriez entendre le proposeur de la motion. Lorsque j'aurai exposé mon point de vue sur ce que contient la motion, vous serez probablement en lieu de décider si l'intervention de l'honorable député est recevable ou non.

M. LESAGE: Non.

M. BELLEMARE: Mais, vous devriez au moins m'entendre...

M. LESAGE: Non, non.

M. BELLEMARE: ... sur les arguments que je vais apporter pour justifier la motion qui est au feuilleton. C'est mon privilège, M. le Président, puisque je suis le parrain de la motion et c'est une motion de fond. Alors j'ai, à part de mon droit de parole, un droit de réplique et je pense que c'est aussi mon privilège, comme député puisque je suis parrain de la motion de me faire entendre à ce moment-ci.

Après que j'aurai fait mon intervention, si on veut véritablement invoquer le règlement sur la forme, M. le Président, libre à vous de décider si c'est opportun ou non. Mais pour le moment, je crois que c'est dans la coutume parlementaire que le proposeur d'une motion soit celui qui donne les raisons qui ont motivé ou qui peuvent motiver l'adoption par la Chambre de cette motion. Alors, M. le Président...

M. GERIN-LAJOIE: M. le Président, sur le point de règlement, s'il vous plaît.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Vaudreuil-Soulanges.

M. GERIN-LAJOIE: Sur le point de règlement invoqué par le chef de l'Opposition se référant à l'article 235 de notre règlement, je pense que cet article est très clair et j'ai l'impression qu'il ne devrait laisser aucun doute dans votre esprit, M. le Président...

M. LESAGE: ... C'est une demande.

M. GERIN-LAJOIE: ... puisqu'il se lit comme suit: « Quant il est proposé une série de résolution — eh bien, c'est le cas de ce qui apparaît au feuilleton — chaque résolution doit être mise en délibération séparément »... j'Insiste sur le mot délibération, et non pas mise au vote. La délibération, c'est donc à partir de maintenant. Le leader de la Chambre et ministre du Travail s'est levé pour intervenir. Son intervention est une participation à la délibération sur la motion qui apparaît au feuilleton de ce Jour.

Je reprends la citation: « ... chaque résolution doit être mise en délibération séparément, si un député en fait la demande ». Un seul député, M. le Président. Il ne s'agit pas d'un vote de la Chambre. Il ne s'agit pas d'obtenir l'opinion de tous les membres qui désirent s'exprimer sur le sujet. Si un seul député en fait la demande. Eh bien, je soumets respectueusement, M. le Président, qu'il vous appartient, comme député chargé de la haute responsabilité de présider à nos délibérations, de décider, très clairement, que la motion qui est actuellement devant nous comprend deux parties distinctes et d'inviter les députés à délibérer d'abord sur la partie A de cette motion. Par la suite, lorsque nous en aurions disposé, il vous appartiendrait, en vertu de 235 toujours, d'inviter les députés à délibérer sur la deuxième partie de la motion, qui est sur un sujet complètement distinct et complètement autonome, c'est-à-dire le paragraphe B.

M. le Président, je ne vois pas comment un membre de cette Chambre ou vous-même, je le dis tout respectueusement, pourrait avoir le moindre doute sur l'interprétation à donner à cet article. Je pense bien qu'on n'a pas à se référer au dictionnaire pour savoir ce que signifie le mot délibération. Je pense que tous les débats que nous avons, tout ce « parlementage » dans un sens non péjoratif que nous poursuivons S l'année longue, eh bien, c'est ça la délibération.

Dans les circonstances, M. le Président, je soumets qu'il vous appartient d'établir clairement que nous devons d'abord délibérer sur le paragraphe A de la motion à l'étude, et que le débat tel qu'il s'engagera avec le ministre du Travail devra d'abord porter exclusivement sur ce paragraphe.

M. DOZOIS: M. le Président, je vous demanderais, si c'est possible, de vous prononcer sur la demande du député ministre du Travail t l'effet qu'il devrait pouvoir exposer les raisons de la motion qu'il présente, et que ce point du règlement soit invoqué après qu'il aura fait son exposé.

Je vous demanderais de vous prononcer sur cette question soulevée par le ministre du Travail, à savoir si vous jugez à propos qu'il doit faire son intervention pour présenter sa motion. Si vous décidez du contraire, nous pourrons alors débattre au fond le point de règlement soulevé par le chef de l'Opposition.

M. LEFEBVRE: M. le Président, sur le point de règlement. Je crois que la suggestion...

UNE VOIX: A l'ordre!

M. LEFEBVRE: Qu'est-ce que vous avez, messieurs? Cela ne va pas bien!

M. GABIAS: Non, non, ça va bien.

M. LEFEBVRE: Je crois, M. le Président...

M. GABIAS: Cela va être complexe.

M. LEFEBVRE: Je crois, M. le Président, que la suggestion qui a été faite par le ministre du Travail et que vient de seconder le ministre des Finances est certainement contraire à nos règlements parce qu'elle est contraire au sens commun.

J'attire votre attention sur le fait qu'il serait absolument contraire à l'équité, quels que soient les sourires du ministre de l'Education, qu'il serait absolument contraire à l'équité la plus élémentaire qu'un opinant...

M. GABIAS: Quel opinant?

M. LEFEBVRE: En l'occurrence, l'honorable ministre du Travail, ait le droit de se prononcer sur une certaine question, et que ceux qui veulent lui donner la réplique soient limités dans leur droit de réplique par rapport à la base même de l'argumentation du proposeur. Il m'apparaît évident qu'en vertu de l'article qui a été cité par le chef de l'Opposition, et en vertu de l'argumentation qui a été faite par mes collègues, votre décision, M. le Président, devra lier le ministre du Travail, comme tous les autres honorables membres de cette Chambre.

DES VOIX: Très bien.

M. MALTAIS (Limoilou): Si vous le voulez, nous allons revenir au début de tout ce qui a soulevé la question. Vous avez, à un moment donné, si ma mémoire est bonne et si j'ai bien enregistré les faits, permis, à la demande du ministre du Travail, leader parlementaire du gouvernement, qu'il prenne la parole. Je sou-

mets que, vous ayant fait cette demande et qu'ayant reçu cette permission, il en avait le droit. Je soumets que, sur une question comme celle-là, on ne pouvait enlever ce droit au préopinant, celui qui venait de recevoir du président de la Chambre le droit de parole. On ne pouvait intervenir et ceci, je le soumets, en vertu de l'article 231. Je vous réfère à la note 3: « On ne peut interrompre un opinant, ni profiter de l'interruption d'un opinant pour proposer la division. » C'est exactement le cas qui nous intéresse. Il fallait, je crois, conformément au règlement... Je crois qu'il est normal que le ministre du Travail, leader parlementaire, parle.

DES VOIX: C'est ça.

M. LESAGE: La division, c'est 234, ce n'est pas 235.

M. BELLEMARE: Il a déjà parlé. C'est 231.

M. LESAGE: C'est 234.

M. BELLEMARE: II a déjà parlé.

M. LESAGE: Elle est prévue à 234. 235, c'est un droit indéniable d'un député.

M. BELLEMARE: A 231, c'est l'opinant. J'étais l'opinant.

DESVOIX: Vote!

M. LE PRESIDENT: A l'ordrel

M. PINARD: J'avais demandé la parole.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Drummond.

M. PINARD: Il s'agit d'une motion du gouvernement, faite par le ministre du Travail.

UNE VOIX: On va chercher ça.

M. PINARD: Nous avons la motion au feuilleton. La Chambre vous a dispensé d'en faire lecture.

M. BELLEMARE: Pour tuer le temps.

M. PINARD: Tous les députés de cette Chambre savent le contenu de cette motion du gouvernement, que devait proposer le ministre du Travail. Le ministre du Travail s'est levé pour demander la parole mais aussitôt, en vertu des dispositions de l'article 235, le chef de l'Opposition avait le droit de demander la parole, précisément pour demander que chaque résolution contenue dans la motion du gouvernement soit mise en délibération séparément. Ce droit inaliénable est donné à un député en vertu des dispositions de l'article 235. Il est fort juste de prétendre...

M. ALLARD: Une décision finale.

M. PINARD: ... que si vous aviez laissé parler plus longuement le ministre du Travail, celui-ci voulait précisément expliquer le contenu de la motion qui apparaît au feuilleton. Il s'agit d'une motion globale, comprenant des attendus et comprenant les sous-paragraphes a) et b), dont la teneur est complètement différente. C'est précisément pourquoi le chef de l'Opposition s'est levé pour invoquer le droit qu'il a, en vertu des dispositions de l'article 235, de demander que chaque résolution soit mise en délibération séparément. Il va de soi que, si vous aviez laissé le ministre du Travail se lever et prendre la parole, tout le monde aurait compris qu'il s'agissait, pour le ministre du Travail, de nous expliquer le contenu global de la motion gouvernementale qui apparaît maintenant au feuilleton. Je dis que, pour ces raisons, les dispositions invoquées tantôt par le député de Limoilou, à l'article 231, ne s'appliquent pas, parce qu'il s'agit d'une motion inscrite au feuilleton et non d'une motion non annoncée, comme c'est le cas dans l'article 231. Il s'agit d'une motion qui apparaît au feuilleton et dont vous avez été dispensé de la lecture, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Westmount.

M. HYDE: Seulement deux mots pour vous indiquer, premièrement, que j'estime que ce qui est devant la Chambre actuellement, ce n'est pas une question de règlement; c'est une simple demande faite par le chef de l'Opposition, avant que la délibération commence sur une motion, pour attirer votre attention sur l'article 235 du règlement et sa demande, comme député, que les deux résolutions contenues dans la motion du ministre du Travail soient mises en délibération séparément. Ce n'est pas, comme voudrait le prétendre le ministre de la Justice, une motion pour diviser la motion principale. Nous avons tous étudié la question d'une motion pour diviser une affaire complexe quand nous avons délibéré sur le bill 25, l'année dernière.

II y avait, devant la Chambre, une motion par écrit demandant la division d'une affaire complexe. Ce qu'on a devant la Chambre actuellement, ce n'est pas une demande de diviser une affaire complexe. C'est une simple demande d'un député, le chef de l'Opposition, qui attire votre attention sur le fait qu'on a une motion qui comprend une série de résolutions qu'il vous demande, comme c'est son droit, d'étudier séparément. Il n'y a personne qui pourrait contourner les termes de l'article 235. Comme disait le député d'Ahuntsic, c'est le simple bon sens.

Si une motion contient quelques résolutions, surtout quand ces résolutions ne sont pas intimement liées, c'est le droit de n'importe quel député de demander non pas au président, mais à la Chambre tout entière que les résolutions soient mises en délibération séparément. Ce n'est pas une question de règlement. Vous n'avez rien à décider, M. le Président; vous n'avez qu'à constater qu'il y a deux résolutions. La décision que vous avez à rendre, c'est que vous mettez en délibération la première, après, la deuxième, et s'il y en avait d'autres, la troisième, la quatrième et la cinquième.

M. LEVESQUE (Laurier): Sur cette question, est-ce que l'article 235, avec les références, selon les cas, s'éclaire en fonction du reste de ce qui s'appelle le chapitre 14? Autrement dit, est-ce que cela forme un tout logique? Je demande cela pour une très simple raison. C'est qu'on dit: Chaque résolution doit être mise en délibération séparément, si un député le demande. Mais, à l'article 232, on dit ceci: « Une question ne peut pas être divisée à moins que chacune de ses parties ne constitue par elle-même une proposition distincte, tant dans les mots que dans le fond. »

Alors, peu importe, à mon humble avis, si l'article 232 éclaire l'article 235; peu importe que les mots disent a et b. Si on regarde ce qu'ils disent, on propose d'interrompre une deuxième lecture. Donc il faut suspendre l'application du règlement. Si cela reste tout seul, non seulement cela n'a pas de fond, mais cela n'a ni queue ni tête. La raison pour laquelle on veut suspendre me semble être dans b. Autrement, cela n'a pas de bon sens. Il me semble que c'est un tout logique et qu'il n'y a qu'un fond, non pas deux. Autrement, de quoi va-t-on parler?

M. PAUL: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: L'honorable Secrétaire de la province.

M. PAUL: Je voudrais bien spécifier que je me lève sur le rappel au règlement soulevé par l'honorable chef de l'Opposition.

Je vous inviterais à regarder tout le chapitre 14 de notre règlement. Il est intitulé « Les motions portant division d'une question complexe ». L'article 231 est très intéressant, parce qu'on y lit: « Sur la motion non annoncée de tout député, la Chambre peut ordonner qu'un question complexe en délibération soit divisée ».

Or, nous sommes saisis d'une motion annoncée. C'est le point de départ. C'est une motion inscrite au feuilleton au nom de l'honorable ministre du Travail, leader parlementaire. Par conséquent, il est très intéressant de noter la subtilité et le texte de l'article 231, et j'insiste sur le mot « sur la motion non annoncée ». Je voudrais vous référer, M. le Président, à un précédent qui s'est passé dans cette Chambre, sur l'étude du bill 25...

M. LESAGE: Ce n'est pas une question de division d'un bill.

M. PAUL: ... alors que l'honorable député de Chambly était tout à fait en droit de présenter sa motion non annoncée de divisibilité de la question complexe. Il était tellement en droit de le faire à l'époque, que je me réfère à la note 2 de l'article 231 où il est dit que la division ne peut être proposée que par celui qui a le droit de parler sur la motion complexe.

Or, l'honorable chef de l'Opposition n'avait pas obtenu le droit de parole sur la question qu'il prétend complexe. En conséquence, il ne peut, à cette période-ci, soulever ce rappel au règlement, parce qu'il aurait été dans l'obligation de le faire alors qu'il aurait eu le droit de parole en réponse à la motion principale soulevée par l'honorable ministre du Travail.

L'article 232 du même chapitre, qui constitue un tout, dit qu'une question ne peut être divisée, à moins que chacune de ses parties ne constitue par elle-même une proposition distincte, et j'insiste sur les derniers mots de cet article, « tant dans les mots que dans le fond ».

Or, si nous nous référons à la motion de l'honorable ministre du Travail, nous verrons que le tout se tient et que le fond ne peut pas se diviser de la forme. Autrement, nous n'aurions pas l'application du paragraphe A de la motion qui n'aurait aucune justification d'être ou de présentation devant cette Chambre.

La deuxième partie de la motion est le pourquoi, la raison sine qua non, de la mise de côté de l'article 536. C'est le but, la fin. Par conséquent, il n'y a pas de distinction dans le fond entre les paragraphes A et B. Et c'est tellement vrai, M. le Président, que, de vous-mêmes, vous

pouvez remplacer le mot B par les mots « afin que ». A ce moment-là, vous trouverez la détermination, la justification de la demande présentée par la motion de suspendre l'article 536. Car autrement, je vous le soumets respectueusement si vous voulez diviser cette motion, vous divisez les mots, mais vous ne divisez pas le fond.

Pour qu'une motion soit divisible, il faut qu'elle le soit tant au fond que sur la forme, suivant l'article 232. De plus, l'article 233 est une procédure de présentation d'une motion de division.

Peut-on se lever en cette Chambre et dire: Je présente une motion, je fais un appel au règlement, j'invoque tel article? Il y a une procédure parlementaire pour faire une motion. Quand on veut faire une motion, on doit suivre la procédure classique pour la présentation d'une motion.

Quand l'honorable chef de l'Opposition se réfère à l'article 234, il ne devrait pas mettre de côté les dispositions de l'article 232—2, qui suspend l'application de 234. Parce que c'est à vous, M. le Président, qu'incombe la décision de statuer s'il s'agit d'une question divisible ou non. L'honorable chef de l'Opposition tient pour acquis que vous avez déjà décidé de la question, parce qu'il se réfère à l'article 234. L'article 234 ne pourra trouver champ d'application que pour autant que vous aurez rendu jugement sur 232—2 pour savoir si la motion est divisible quant au fond ou ne l'est pas.

Si, après avoir décidé que 232—2 vous justifie de rendre une décision de divisibilité et que vous voyez une question complexe en vertu de l'article 232, sur la motion présentée, vous devrez alors statuer. Si vous en venez à la conclusion que l'article 232—2 s'applique, à ce moment-là, les dispositions de l'article 234, c'est-à-dire le mécanisme qui y est prévu va entrer en ligne de compte.

Lorsque l'article 234 trouvera un champ d'application, c'est par ordre chronologique, selon l'article 235, que vous appellerez les questions complexes ou divisibles, les résolutions que vous aurez jugées comme divisibles ou complexes.

Je crois, M. le Président, que vous ne pouvez pas accepter le rappel au règlement de l'honorable chef de l'Opposition. Premièrement, parce qu'il est prématuré qu'en vertu de la note 2 de l'article 231, il n'était pas opinant. Deuxièmement, parce que nous étudions un principe dans une motion non annoncée alors que nous sommes à l'étude d'une motion annoncée. Et troisièmement, parce que les règles de fond détaillées aux article 231 à 235 de notre règlement ne peuvent s'appliquer dans les circonstances.

Je soumets que l'honorable ministre du Travail est le seul qui, à cette période de nos travaux, a le droit de parole, et j'ai voulu en même temps disposer des arguments de fond non justifiés soulevés par l'honorable chef de l'Opposition.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gatineau.

M. FOURNIER: M. le Président, j'ai... DES VOIX: Obstruction systématique! M. MALTAIS (Saguenay): A l'ordre! DES VOIX: Baîllon! M. LE PRESIDENT: A l'ordre! DES VOIX: Baîllon! Obstruction.

M. BELLEMARE: Baîllon! Nous connaissons la stratégie. Nous en discuterons de nouveau. Nous ne sommes pas pressés.

M. COURCY: Vous n'avez rien compris.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gatineau.

M. FOURNIER: M. le Président, j'ai écouté avec attention les remarques du député de Maskinongé.

UNE VOIX: Vous n'avez pas compris.

M. FOURNIER: Je ne peux laisser passer sous silence les explications qu'il a données du chapitre 14, parce que ces explications ne sont pas tout à fait conformes à la situation qui se présente aujourd'hui.

M. ROY: Pas conformes... chloroforme.

M. FOURNIER: Il existe dans ce chapitre M. le Président, deux principes distincts. Le premier qui existe dans les articles 231 à 234 et le second qui est spécifié dans l'article 235.

Dans les premiers articles, il s'agit de questions complexes qui ne sont pas divisées par leur auteur. Il s'agit de questions qui apparaîtraient dans un unique paragraphe, mais qui pourraient être divisées à cause de leur complexité. A ce moment-là, si nous relisons tous les articles 231 à 234, nous voyons la logique de ces articles et nous y voyons qu'étant donné que la proposition a été faite comme proposition unique, ilfaut

alors le consentement de la Chambre ou un vote de la Chambre pour dire que le proposeur a proposé deux questions plutôt qu'une.

Mais, dans le cas présent, on doit lire l'article 235 individuellement, dans le cas présent il s'agit d'un droit absolu d'un seul député d'exiger, l'auteur lui-même de la motion l'a scindée en deux, l'a divisée en deux, d'exiger son droit que la discussion ou la délibération se fasse individuellement suivant les paragraphes décidés par l'honorable leader de la Chambre. Et c'est la façon dont il l'a fait.

A ce stade-ci, étant donné que l'honorable leader a fait son lit lui-même...

M. BIENVENUE: Un lit double.

M. FOURNIER: ... qu'il a divisé la question, la résolution en deux, lui-même, il ne s'agit plus maintenant de décider si la question est complexe ou non. C'est lui-même, le proposeur qui dit: la résolution est complexe parce qu'elle est en deux.

DES VOIX: Vote!

M. FOURNIER: M. le Président, je désire souligner qu'il faut lire l'article...

M. BLANK: II n'y a pas de vote là-dedans. M. FOURNIER: ... qu'il faut lire l'article... UNE VOIX: Du taponnage. M. ROY: Obstruction!

M. FOURNIER: ... en anglais aussi pour voir s'il y a plus de précision dans les termes.

M. ROY: Obstruction.

M. FOURNIER: Et si nous lisons l'article 235...

M. GRENIER: Taponnage.

M. FOURNIER: ... nous y lisons ceci en anglais...

M. GRENIER: Taponnage. M. FOURNIER: Cela fait mal?

M. ALLARD: Cela ne fait pas mal, c'est ennuyant.

M. GRENIER: Cela ne fait pas mal, c'est la province qui attend.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'entends certains députés qui demandent le vote. Je tiens à dire qu'avant qu'il y ait un vote, il faudrait que je rende une décision. Et pour rendre une décision, je n'ai pas besoin de vous dire que j'ai besoin de la lumière de tous les honorables opinants de cette Chambre.

L'honorable député de Gatineau.

M. FOURNIER: M. le Président, j'en étais...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je pense que je vais obtenir la permission, le privilège que je sollicite humblement de cette Chambre de pouvoir entendre les députés qui demandent la parole.

L'honorable député de Gatineau.

M. FOURNIER: M. le Président, j'en étais rendu à vous lire le texte anglais du règlement qui dit ceci, article 235: « When a série of resolutions is moved, each resolution shall, upon the demand of any member, be separately proposed from the chair. »

Le texte anglais précise encore le droit individuel d'un député de demander cette division. Si nous examinons le règlement, M. le Président, nous y voyons à plusieurs endroits le droit du député, comme individu dans cette Chambre, qui est un droit absolu dans certains articles, comme par exemple à l'article 291, où on dit: Le député peut demander la lecture de la résolution, le député peut faire ceci, le député peut agir individuellement. Dans certains cas, il n'est pas obligé d'agir avec une majorité de la Chambre. Et l'article 235 me semble catégorique à cet effet. Il s'agit du privilège d'un député seul de faire valoir son droit, de faire diviser une résolution pour qu'il puisse, si lui-même veut s'objecter à la fin, voter contre cette résolution qui a été divisée.

M. le Président, il s'agit en l'occurence de deux résolutions proposées par le leader de la Chambre. Qu'il s'en tienne à ce qu'il a fait. Les articles précédents ne s'appliquent pas à la présente procédure, malgré ce qu'a mentionné le député de Maskinongé.

Toutes les remarques du député de Maskinongé mentionnaient le cas d'une question complexe qui n'étaient pas divisée par le proposeur. Dans le cas présent, elle est divisée par le proposeur lui-même. En conséquence, le droit absolu du chef de l'Opposition devrait être respecté et la résolution discutée séparément.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Louis.

MR. BLANK: I have listened to the Member

for Gatineau and I have studied the English text closely. As the Member for Gatineau says, the English text is very explicit. We are talking about resolutions in paragraph 235, where, as in this case, there has been a motion made by the Leader of the Government, containing two resolutions. Now, the law, or our regulations are very, very clear. The Speaker of the House has absolutely no choice. The moment any Member of the House wants to study these resolutions separately, and he has the right to, because, as the Member for Gatineau said, he may want to vote for, or against one or the other. He may not have the same opinion as against one or the other.

Therefore, he has that right and you must give it to him, in virtue of our regulations. The question of 231 is an entirely different matter. The complexed question may be within a resolution. In other words, you must first divide the resolutions, if, in one of the resolutions, there may be a complicated question, then, it is not up to you to decide. It is up to the House to decide, upon a formal motion is made two procedures completely different. Actually, you cannot have resolutions in a question, but you may have questions in a resolution, which is exactly what section 14 of our regulations discusses. We are talking about two different things. We first have to divide the resolutions, if a simple demand is made by a deputy, if, in one of the resolutions, there is a complexed question which may or may not be divided. Then, it is not up to you to decide that, it is up to the House to decide it And, because it is the House that has to decide it, a formal motion must be made and a seconder to the motion.

It is completely different from 235. As I say, 235, the English version goes even further. It explains it very clearly. It must be you, the Speaker of the House, that separate the resolutions upon a simple demand of the Member of the House. It talks about that it must be separately proposed from the Chair; it does not talk of when you have to do it or how you have to do it. It says on simple demand. It is only logical. Again, I go back to the argument of the Member for Gatineau.

What happens if I want to vote for section A or resolution A and against resolution B. I am in a dilemma. I cannot do it. Therefore, that is why we have that article, I have the right to stand up and say: Mr. Speaker, divide these two so I can vote honestly for A or B.

M. ROY: Ils sont après prouver que Pierre Laporte n'est pas utile.

M. CHOQUETTE: M. le Président, simplement quelques observations sur les questions de règlement qui ont été soulevés sur la motion du leader du gouvernement. La raison d'être, de l'article 535 est manifeste, je pense, à sa face même, c'est-à-dire que le règlement — l'article 535 en particulier — ne permet de référer un bill à un comité qu'après avoir étudié le principe du bill et ceci me paraît élémentaire au point de vue du bon sens, puisque la Chambre ne peut être suffisamment informée pour décider de référer un bill à un comité de la Chambre ou à un comité spécial, qu'après qu'elle a discuté du principe du bill. Or actuellement, la tactique adoptée par le leader du gouvernement est de court-circuiter en quelque sorte cet impératif du règlement du droit pour la Chambre d'étudier le principe du bill avant de l'envoyer devant un comité.

Maintenant, sur la question du règlement proprement dit, à partir du moment où le chef de l'Opposition a soulevé une objection à procéder à l'étude de la résolution dans l'ensemble parce que il refuse son consentement en vertu de l'article 235, Je soumets que le préopinant, le proposeur de la motion, ne peut pas procéder avec sa motion, parce que le chef de l'Opposition, en tant que député, a alors soulevé une irrégularité dans la motion qui l'obligerait à procéder à l'étude du bill. Et s'il y a irrégularité, suivant l'article 201, elle doit être vidée dès ce moment-là et le leader parlementaire ou le leader du gouvernement n'a pas le droit de procéder à ce moment-là à son discours et vous, comme président, vous devez vider l'objection du chef de l'Opposition à procéder sur la motion.

Ce serait contraire au bon sens, me semble-t-il, de laisser le leader du gouvernement faire son exposé sur sa motion, malgré les objections du chef de l'Opposition et pour vous de trancher ex post facto l'irrégularité dans la procédure adoptée par la Chambre. Cela n'a pas de bon sens, M. le Président. En somme, je pense que vue l'objection, manifestée par un des députés de cette Chambre qui a été appuyée par d'autres évidemment, à procéder à l'étude de cette question complexe qui soulève la suspension d'un règlement qui court-circuite l'obligation par la Chambre d'étudier le principe du bill avant de le référer en comité, nous ne pouvons pas entendre le leader du gouvernement et il vous faut trancher l'objection dans le sens qui a été soumis par mes collègues.

M. GRENIER: Un autre. Comment est-ce que vous en avez qui vont prendre la parole?

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Baldwin.

M. GRENIER: Une heure et demie qu'on tue encore. La province attend.

M. COURCY; Levez-vous donc debout et dites donc ce que vous pensez là-dessus.

M. GRENIER: Alcide le cidre, gardez donc vos références pour Bagot.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. COURCY: Quand on ne connaît pas notre affaire on ne...

M. GRENIER: Quand on pense tracteur, on pense à Laporte.

M.LEFEBVRE: Nous, nous pensons à Bagot.

M. GRENIER: Tuez le temps, la province aime ça. $18,000 pour payer des tueurs de temps.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de Baldwin.

M. GRENIER: Cela va être bon.

M. SEGUIN: Malheureusement, je ne pourrai pas faire une aussi savante interprétation, que mes collègues...

M. GRENIER: Assoyez-vous donc, dans ce cas.

M. SEGUIN: ... puisque, n'étant pas avocat, je n'ai pas l'habitude, peut-être, de la loi. Tout de même, j'étais un peu surpris d'entendre le plaidoyer du député de Maskinongé, le Secrétaire de la province, qui semblait se servir de l'article 232 pour fonder son argumentation. Il disait, tout en lisant l'article: « Une question ne peut être divisée, à moins que chacune de ses parties ne constitue par elle-même une proposition distincte, tant dans les mots que dans le fond. »

Je maintiens que la motion que nous avons devant nous et qui est présentée par le ministre du Travail est justement une motion qui contient deux sections absolument distinctes l'une de l'autre. En effet, la première partie, par exemple, se lit comme suit: « Que le paragraphe 1 de l'article 536 du règlement, qui exige que tout bill public soit lu deux fois avant d'être amendé ou renvoyé à un comité, soit suspendu. »

Si nous nous arrêtions là, nous aurions une motion qui serait complète à mon avis. Ce qui suit pourrait être non seulement la matière que nous avons ici, mais n'importe quelle autre suggestion. On n'aurait même pas à donner de raison pour la suspension. On pourrait arrêter après cet article et demander que la Chambre, d'un commun accord, suspende l'application de l'article 536. Alors, de cette façon, je vois qu'il s'agit bien ici d'une motion qui est divisible, parce que ses deux parties sont absolument distinctes l'une de l'autre et que la deuxième ne découle d'aucune façon, ni directe ou indirecte, de la première. Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'ai écouté avec énormément d'intérêt tous les honorables opinants sur ce point qui, je ne vous le cache pas, avait quelque chose d'un peu inattendu, même si j'avais fortement étudié la motion. Il est exact que l'article 235 donne un droit aux députés de cette Chambre. Si on me permet, comme cela m'arrive assez souvent, ayant plus d'expérience en droit civil qu'en droit parlementaire, de faire un peu de droit comparé, je dirai qu'il y a des droits de citoyens qui se sont parfois perdus pour de bien petites erreurs de procédure ou de temps. Il est arrivé, par exemple, qu'une action très bien fondée soit tombée sur le coup d'une exception à la forme qui, àpremière vue, paraissait peut-être bien simple. L'honorable Solliciteur général a souligné à la présidence la note 3 de l'article 231. L'honorable député de Laurier m'a ensuite fourni une deuxième lumière, lorsqu'il a porté à mon attention, comme l'a fait par la suite l'honorable Secrétaire de la province, que le chapitre 14 ne formait une sorte de tout.

Il est sûr qu'on discute du même problème ou des accessoires dans ce chapitre 14. Or, je suis humblement d'avis que les notes 2 et 3 de l'article 231 s'appliquent également à l'article 235 du même chapitre. Ma décision ne serait sûrement pas la même si l'honorable chef de l'Opposition avait formulé sa motion avant que je donne le droit de parole à l'honorable ministre du Travail...

M. LESAGE: Question de privilège. J'étais deboutl

DES VOIX: A l'ordre!

M. GRENIER: Vous en avez assez dit maintenant.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je pense que le journal des Débats pourra nous l'indiquer. J'avais accordé la parole à l'honorable ministre du Travail. Si la motion était refor-

mulée, il est fort possible que ma décision ne serait pas la même, car je tiens à souligner ici que je ne rends pas une décision à savoir s'il doit ou s'il ne doit pas y avoir divisibilité, si les deux articles doivent être étudiés parce qu'ils font un tout. Je ne rends pas de décision là-dessus. Je rends une décision purement et simplement sur le temps de la procédure qui m'apparaît fatal.

En effet, je me base sur les deux notes de l'article 231, que je trouve applicables à l'article 235. La note 2 dit: « La division ne peut être proposée que par celui qui a le droit de parler sur la motion complexe. » Or, l'honorable ministre du Travail avait obtenu le droit de parole et commençait son intervention, ou était sur le point de le faire. La note 3 dit: « On ne peut interrompre un opinant, ni profiter de l'interruption d'un opinant, pour proposer la division ». Dans les circonstances, je dois permettre maintenant à l'honorable ministre du Travail de faire son intervention. Je me permets de souligner que je sais que cette intervention peut créer une certaine anomalie parce qu'ayant opiné sur la motion telle qu'elle se présente maintenant, si la motion était formulée de nouveau par la suite, on devrait ensuite discuter sur deux points séparément.

M. LESAGE : M. le Président, je demande une clarification, je pense que c'est normal en vertu de notre règlement. Votre décision est à l'effet que l'intervention que fera à l'instant le ministre du Travail sur la motion qu'il a présentée ne préjudiciera en rien le droit, qui est le mien en vertu de l'article 235 lorsque je prendrai la parole tout de suite après lui, de demander que les résolutions A et B soient étudiées successivement, c'est-à-dire l'une après l'autre.

M. LE PRESIDENT: Exactement. Je ne dis pas que ma décision est rendue sur ce point. J'ai réservé ma décision. A ce moment-là, si la demande est formulée de nouveau, je l'étudierai sous cet autre aspect. Pour le moment, je dis qu'il ne s'agit que d'un point de procédure dans le temps.

M. LESAGE : Je comprends, M. le Président. J'étais moi-même debout, mais les hasards sont tels que le président de la Chambre a d'abord vu le ministre. Si c'est seulement cet incident-là qui motive la décision du président, dans les circonstances, nous allons l'accepter quitte à refaire la demande en vertu de l'article 235 aussitôt après que le ministre du Travail aura terminé son intervention.

M. BELLEMARE: M. le Président, c'est une question de procédure. Je respecte bien votre décision, mais vous me permettrez, peut-être, de différer un peu, pour le moment, d'ailleurs...

M. LESAGE: Elle est rendue. M. PINARD: Appelez-en.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je pense que j'ai été vraiment mal interprété. J'ai rendu une décision qui permet à l'honorable ministre du Travail de faire son intervention, tel qu'il l'avait prévue. Je dis que je réserve ma décision sur l'autre point. Je n'ai pas, à ce moment-ci, étudié cet autre point de l'article 235. Si la demande m'est faite, je dis simplement que je l'étudierai, à ce moment-là, sous un autre aspect et que je rendrai une décision.

M. BELLEMARE: Me permettriez-vous de vous demander une directive, M. le Président, tel que le veut notre règlement? A-t-on le droit, en vertu de l'article 285, septièmement, de revenir sur un débat qui a été complètement fait dans la même session?

M. LE PRESIDENT: C'est un argument qui devra être soulevé, s'il se présente une autre motion ou une autre demande. A ce moment-ci, je ne sache pas qu'il doive se soulever.

M. BELLEMARE: M. le Président, vous remarquerez qu'il est midi trente-deux minutes. La Chambre a voulu que la motion qui est présentement en discussion et qui sera maintenant débattue nous fasse perdre un temps considérable.

M. LESAGE: Vous n'aviez qu'à procéder à la deuxième lecture du bill.

M. BELLEMARE: Le gouvernement aie droit de faire sa propre stratégie.

M. GERIN-LAJOIE: Nous aussi.

M. BELLEMARE: L'Opposition a le droit de l'aimer ou de ne pas l'aimer, comme nous, nous avons...

M. LESAGE: Même chose pour nous.

M. BELLEMARE: Je n'ai pas besoin de vous dire que toutes les motions d'ajournement qu'ils ont faites depuis le début, cela a été de la stratégie pure et simple que nous avons dû accepter. Nous l'avons subie dans son entier.

M. PINARD: Ce n'est pas nous qui avons retiré le bill.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: C'est mon tour de parole et vous allez m'endurer. Ils se pensent encore au pouvoir.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: Ils n'ont pas eu assez de ce qui leur est arrivé encore dernièrement pour comprendre que le peuple n'en veut pas.

M. LEFEBVRE: On ne se pense pas au pouvoir, mais on se pense en démocratie.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEFEBVRE: Le gouvernement ne nous imposera pas une règle unique.

UNE VOIX: Au pouvoir, en faisant rien.

M. BELLEMARE: M. le Président, la motion qui est en discussion est très simple. Nous l'avons dit et répété, elle ne peut être ni divisée, ni séparée.

M. LESAGE: Elle l'est.

M. BELLEMARE: M. le Président, si l'honorable chef de l'Opposition ne peut pas m'entendre, à cause de mon ton ou à cause de mes arguments, qu'il sorte!

Il n'y a rien de plus désagréable et je lui promets qu'il ne dira pas deux mots tout à l'heure sans que j'intervienne.

M. LESAGE: Correct, très bien, ça va être beau!

M. BELLEMARE: Nous allons en faire de la procédure.

M. le Président, cette question ne peut pas être divisée parce que chacune de ses parties font un tout et dans ses mots et surtout dans le fond même.

M. BLANK: Il y a un jugement sur ça. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: Alors, M. le Président, il est sûr que, dans la forme, nous avons sûrement bien réfléchi et nous avons consulté tous nos règlements avant de l'introduire telle qu'el- le est parce que je n'ai pas besoin de vous dire que ce n'est que dans des cas particuliers que l'on invoque cette formule. Nous l'avons fait justement parce que nous ne voulons pas que ce bill 85 devienne un élément nouveau de discussion et entraîne des prises de positions irréconciliables par certaines personnes.

Nous voulons, dans un bon climat serein, répondre aux voeux unanimes faits par de grands éditorialistes qui ont écrit des choses fort intéressantes au sujet du bill 85. Nous voulons aussi prendre pour acquis que la presse en général a fait écho aux déclarations qui ont été faites concernant ce bill. La télévision, la radio, et tous les autres moyens d'information ont demandé au gouvernement d'être prudent, de prendre des précautions pour que ne se continue pas sur la place publique un débat qui ne serait sûrement pas à l'avantage des parties en cause et qui laisserait sûrement dans le coeur, dans l'âme de notre population, des marques qu'il serait difficile de réparer.

M. le Président, dans le passé, — Dieu sait combien, depuis quelques années particulièrement — le gouvernement qui nous a précédés et le notre avons référé les bills de l'éducation aux comités permanents de la Chambre. Je crois que ç'a été un excellent moyen, premièrement pour que les parties qui sont intéressées au débat puissent faire valoir leurs arguments et apporter au législateur le fruit de leur expérience et aussi l'avantage de connaître ce qui peut se produire dans chacune des régions de la province.

Deuxièmement, ces comités ont l'avantage d'avoir des experts en la matière qui viennent donner à la barre le point de vue de différents organismes.

Donc, M. le Président, différentes régions, avec des mentalités différentes et différents experts qui ont sur le sujet des opinions différentes. Troisièmement, facilité de faire des compromis honorables, sans pour ça abandonner les principes généraux, et facilité de connaître plus à fond les véritables mobiles qui ont incité le gouvernement à présenter une législation ou une autre.

Malgré les stratégies qui peuvent s'établir d'un côté comme de l'autre de la Chambre, je crois très sincèrement que tous les législateurs de cette Assemblée législative recherchent avant tout la protection de l'intérêt public, du bien commun, dans un Québec plus uni, plus fort et plus progressif.

M. LEFEBVRE: Nous, nous cherchons un gouvernement, M. le Président; c'est ça que nous ne trouvons pas.

M. BELLEMARE: M. le Président, il y a eu Diogène qui a cherché avec une lampe; on a maintenant le député d'Ahuntsic qui, lui, cherche avec une chandelle.

M. le Président, pourquoi avons-nous demandé, dans notre motion, que l'article 536 soit suspendu? Premièrement, parce qu'on est à faire une enquête publique qui va beaucoup plus loin que ce qui est contenu dans notre bill.

M. LESAGE: Sur un point de règlement. Le ministre, à ce moment, peut-il parler de ce qui est contenu dans le bill?

M. BELLEMARE: Non, il n'y a pas de danger, M. le Président. Non, parce qu'en vertu...

M. LESAGE: Non, mais il parle d'une enquête qui va plus loin que ce qui est contenu dans le bill. Comment peut-on parler du contenu du bill...

M. BELLEMARE: Non, M. le Président.

M. LESAGE: ... le comparer au mandat d'une commission d'enquête, sans référer au contenu du bill?

M. BELLEMARE: M. le Président...

M. LESAGE: Si le ministre a le droit de ce faire, je me prévaudrai certainement du même droit.

M. BELLEMARE: Non, M. le Président, je ne veux pas aller au fond...

M. LESAGE: C'est un point de règlement que j'ai soulevé.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: ... parce qu'en vertu de Particle 280...

M. PINARD: A l'ordre!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'ai entendu les dernières remarques et je tiens à signaler immédiatement que je me servirai de la même mesure, il va sans dire, pour les opinants des deux côtés de cette Chambre. Au sujet de ce bill, qu'on sache bien, à ce moment-ci, qu'on peut donner les raisons pour ou contre la suspension de Particle 536 du règlement et la référence à un comité, mais qu'on ne devra pas outrepasser ça. Autrement, plusieurs opinants seraient peut-être tentés de nous faire passer immédiatement à un débat de deuxième lecture.

Je mets donc les honorables membres de cette Chambre en garde sur ce point et je me servirai de cette directive au cours du débat toute la journée.

M. BELLEMARE: Toute la soirée aussi, M. le Président.

M. LESAGE: Nous sommes prêts à procéder à la deuxième lecture, s'il veut parler du fond de la question.

M. BELLEMARE: Non, M. le Président, c'est justement l'à-propos de la motion qui est discutée ce matin. Je veux dire tout de suite que nous sommes respectueux de nos règlements et que vous avez parfaitement raison.

L'incident qui vient de se produire était simplement pour dire qu'une enquête était... Non, pas pour aller au fond, parce que je connais assez le règlement. Je ne suis pas un expert, mais je le lis régulièrement et je sais qu'il y a l'article 280 qui est spécifique. C'est clair. En vertu de l'article 280, on ne peut pas y toucher. Je suis sûr, M. le Président, que vous l'avez lu plusieurs fois parce que c'est un article important dans la discussion qui va suivre. En vertu de l'article 280, je comprends que « quand une motion portant suspension d'une règle — comme ma motion - est faite, la discussion ne peut porter sur le fond de l'affaire en vue de laquelle la suspension est proposée ». Je sais que vous saviez cela depuis longtemps, mais l'ayant lu quelquefois, j'ai pensé que cela pourrait rendre service à ceux qui seraient peut-être portés, comme moi tout à l'heure, je m'en accuse... Ce n'était... mais je vais revenir à la motion.

M. CHOQUETTE: Est-ce que je pourrais poser une question au leader du gouvernement?

M. BELLEMARE : Vous pouvez être assuré que personne d'autre...

M. CHOQUETTE: Le leader du gouvernement me permettrait-il une question?

M. BELLEMARE: Non.

M. CHOQUETTE: Mais elle est bonne.

M. BELLEMARE: Cela ne fait rien. Allez la raconter à la presse.

M. LE PRESIDENT: A l'ordrel

M. BELLEMARE: Je dis donc que la motion qui est devant nous est une motion importante.

D'abord, c'est une motion de référence à la suspension d'une règle de notre procédure parlementaire, de notre règlement; c'est aussi une motion très importante quant à la référence à un comité de la Chambre, celui de l'éducation.

Dans le passé, il y a eu des sujets beaucoup moins contentieux, des sujets où il s'agissait purement et simplement de décider d'un principe d'application d'une règle administrative, comme c'est arrivé pour certaines lois qui ont été proposées en cette Chambre. Nous les avons référées à un comité pour entendre les témoins et en faire la discussion.

Aujourd'hui, il y a un problème sur la place publique, qui est fort contesté, un sujet qui fait l'objet de prises de position assez catégoriques dans certains groupes de la population. Il faudrait être sourd et aveugle pour ne pas prévoir les conséquences dramatiques qui pourraient en découler si nous n'avions pas toutes les informations qu'un comité tel que le comité permanent de l'éducation peut nous fournir.

C'est justifié, et par les circonstances et par l'état de fait. Nous sommes à deux semaines de la fin de la session. Nous aurons d'autres débats...

M. GERIN-LAJOIE: Comment cela?

M. BELLEMARE: ... sur d'autres sujets. Je suis assuré que nous saurions merveilleusement mieux protéger tout le Parlement, en adoptant cette motion, M. le Président, et surtout en entendant les différentes opinions des différents spécialistes des différentes régions qui viendront fournir aux parlementaires la substance nécessaire, afin de ne pas produire un geste administratif qui, d'un côté comme de l'autre, pourrait avoir des conséquences désastreuses pour notre population.

Je dis donc, M. le Président, que la demande de suspension de l'article 536 est parfaitement justifiée, quant à la forme et quant au fond. Elle l'est quant à la forme, M. le Président, parce qu'il existe dans notre règlement une foule d'articles qui coordonnent la position que nous avons prise, en insérant cette motion au feuilleton. Elle l'est quant au fond, justement, M. le Président, pour réussir à trouver une unanimité plus parfaite, pour tâcher d'obtenir des informations plus réelles, plus nombreuses, plus complètes et, M. le Président, afin que, je l'espère, un climat de bonne entente puisse régner partout.

J'ai, je le pense, M. le Président, exposé très brièvement les raisons qui ont motivé la demande contenue dans cette motion. Je suis sûr, M. le Président, que les honorables députés de l'Opposition seront nombreux à prendre la parole sur cette motion, parce qu'il faut que ça dure la journée. Il sera agréable de les entendre tous les uns après les autres, et nous sommes très heureux de cette magnifique coordination des forces qui se fait depuis quelques jours. Nous sommes heureux de voir qu'enfin, quelques députés se lèvent pour apporter leur coopération dans ce débat. Nous sommes prêts, M. le Président, à les entendre. J'aurai, en vertu de 266, M. le Président, l'insigne honneur d'exercer un droit de réplique qui m'est donné, en vertu de ma motion, qui peut être considérée comme une motion de fond, parce que c'est une motion principale.

M. PINARD: Etes-vous premier ministre? M. BELLEMARE: Est-ce que j'ai dit nous? M. PINARD: J'aurai l'insigne honneur. M. BELLEMARE: J'aurai. J'ai. UNE VOIX: Je, me, moi.

M. BELLEMARE: Je n'ai pas besoin de vous dire, M. le Président, que je ne me prends pas pour un autre...

UNE VOIX: II s'est trompé de bord.

M. BELLEMARE: ... jamais, parce que je me connais, plus que j'en connais, des fois, je suis porté à me faire des reproches de ne pas être plus vigoureux, plus...

M. BIENVENUE: Dynamique.

M. BELLEMARE: ... plus dynamique. C'est vous qui méritiez la place.

M. PINARD: C'est vous qui méritiez la place.

UNE VOIX: Vous n'êtes pas le plus sévère pour les autres.

M. BELLEMARE: Je dirai à l'honorable député de Drummond qu'il fait mieux de me faire des beaux yeux de ce temps-ci. Parce que...

UNE VOIX: Vous êtes bon!

M. BELLEMARE: ... s'il veut pouvoir, l'honorable député de Drummond, prendre son envol...

M. LEFEBVRE: Champlain n'est pas loin de Drummond. Le ministre ne devrait pas faire de menace.

M. GABIAS: A vol d'oiseau.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'ai l'Impression que nous sommes...

M. BIENVENUE: Il est bon.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail.

M. BELLEMARE: M. le Président, je vous remercie d'avoir attiré l'attention à l'effet que j'avais encore le droit de parole et je dis que cette motion va sûrement répondre à un désir de l'Opposition. Je sais qu'elle admet le principe. Elle le veut. Elle le désire à cause de la tradition qu'elle a établie dans cette Chambre de faire siéger les comités, comme nous d'ailleurs. Elle le veut mais il faut absolument — non pas une obstruction — mais prendre des méthodes pour que l'opinion publique soit sensibilisée à cette procédure parlementaire, et pour cause. J'ai bien vite le plaisir de vous dire que l'Opposition sera unanime à accepter notre motion et nous la remercions d'avance de vouloir coopérer si gentiment, au point de vue parlementaire pour le plus grand bien de la population qui attend cette motion qui rendra d'immenses services à toute notre population.

M.PAUL: M. l'Orateur...

M. LE PRESIDENT: J'ai une décision qu'on prend assez rarement. Il est assez rare qu'autant d'opinants veuillent opiner en même temps, mais je dois dire que, quant à moi, j'ai accepté et j'ai même proposé à la Chambre qu'on me fasse connaître l'intention d'intervenir. Or, l'honorable chef de l'Opposition a manifesté son intention d'intervenir le premier. Je comprends que le règlement formel nous dit qu'il faut donner la parole à celui que l'on aperçoit le premier. Alors, j'ai aperçu les deux, le ministre d'une part et l'honorable chef de l'Opposition d'autre part, qui ont été très prompts à se lever. Je dirais qu'on a gagné comme aux courses, presque par un nez et, S ce moment-là...

DES VOIX: Wow! Wow!

M. LE PRESIDENT: ... j'entendais quelqu'un qui disait: M. l'Orateur et je lui signale que, depuis hier, je suis M. le Président.

M. DOZOIS: Ce n'est pas sanctionné. M. LE PRESIDENT: D'accord.

M. DOZOIS: Est-ce qu'on doit considérer que c'est une décision ou si on peut soulever un point d'ordre sur celui qui aurait droit de prendre la parole, à ce moment-ci?

DES VOIX: Ah! Ah! M. LESAGE: J'avais...

M. BELLEMARE: C'est exactement ce qui m'est arrivé.

M. LESAGE: Vous m'avez donné le droit de parole. J'ai l'intention d'en user. Plus que cela, j'avais signifié à la présidence mon intention d'adresser la parole immédiatement après que le ministre du Travail aurait terminé son intervention. De cela, il y a bien une heure...

M. BELLEMARE: Je soulève un point d'ordre, M. le Président. C'est exactement ce qui m'est arrivé, étant le parrain de la motion. Je vous rappelle l'article 244 qui est bien spécifique. Elle n'est plus discutable; Je vous laisse sûrement le soin d'apporter votre décision sur un sujet comme celui-là. L'article 245 ajoute: « Quand deux ou plusieurs députés ont demandé la parole en même temps et qu'ils insistent, l'orateur met évidemment les noms de ces députés aux voix, sans permettre de débats ». Ce sont les articles du règlement qui nous régit. Tout à l'heure, lorsque j'ai voulu intervenir, j'avais justement un droit de parole consacré en vertu de nos règlements et doublement parce que c'était ma motion. Vous avez rendu une décision de droit de parole, après une perte d'une heure vingt du temps de la Chambre.,

M. HYDE: M. le Président, le leader parlementaire vous a cité l'article 245; j'attire votre attention sur l'article 244: « Quand plus d'un député demande la parole, l'orateur invite à parler celui qui a demandé la parole le premier ».

M. PAUL: Sur ce point...

M. HYDE: Est-ce que je pourrais terminer, M. le Président?

M. PAUL: Très bien.

UNE VOIX: Vous êtes mal orienté; vous devriez vous asseoir.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. HYDE: Vous avez dit vous-même, M. le

Président, que vous avez vu les deux députés se lever en même temps, mais que vous aviez auparavant, durant la discussion, remarqué que le chef de l'Opposition avait déclaré son intention d'intervenir immédiatement après que le ministre aurait terminé son exposé. Puisque vous aviez vu les deux se lever en même temps, vous avez accordé le droit de parole au chef de l'Opposition. Si le gouvernement n'est pas satisfait de cette décision, il a le même droit que l'Opposition, celui d'en appeler...

M. BELLEMARE: A l'ordre!

M. HYDE: ... mais la décision est rendue, et je crois que ça devrait finir là.

M. DOZOIS: M. le Président, je me suis levé pas pour parler sur ce point d'ordre que soulève le député de Westmount, mais pour vous poser une question. Puisqu'on argumente là-dessus, je dois vous signaler qu'en vertu de l'article 242, il y a toute une procédure d'établie dans notre règlement pour le député qui veut parler en cette Chambre.

C'est formel, la note 242 — 1 dit: « Il ne suffit pas de se lever, il faut dire M. l'Orateur...

M. BELLEMARE: C'est ça.

M. DOZOIS: Or, M. le Président, j'ai observé parce que je savais que l'Opposition ferait de la stratégie - nous aussi on en fait —...

M. LESAGE: Le ministre serait bien mieux de dire le bâillon.

DES VOIX: A l'ordre!

M. BELLEMARE: Vous allez y goûter, certainement, à la procédure. Vous allez voir que...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEFEBVRE: Le président est debout.

M. PAUL: Dans un geste tout à fait de coopération...

M. LESAGE: Vous ne me bâillonnerez pas, vous pouvez être sûr.

M. PAUL: Malgré les dispositions des articles 242, 244, 245 et pour vous faciliter la tâche et pour éviter à la Chambre une perte de temps, de se prononcer en vertu de l'article 245, il me fait grandement plaisir de céder la parole à l'honorable chef de l'Opposition.

M. LESAGE: M. le Président, au tout début de mes remarques, j'invoque mon droit comme député de cette Chambre, en vertu de l'article 235, de demander la délibération de chacune des deux résolutions séparément. J'ai l'intention de m'en tenir au sujet traité par le paragraphe A, c'est-à-dire la première résolution.

L'importance de cette motion de ma part...

M. PAUL: Sur une question de règlement.

M. LESAGE: ... et je prendrai deux secondes avant une heure pour vous l'expliquer.

DES VOIX: A l'ordre!

M. PAUL: Sur une question de règlement...

M. LESAGE: C'est le bâillon. On veut m'empêcher de vous parler avant une heure. J'irai à votre bureau, M. le Président.

M. BELLEMARE: A l'ordre!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESAGE: J'irai au bureau du président.

M. BELLEMARE: Prenez votre patience à deux mains. Vous n'avez pas fini. Vous allez y goûter.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESAGE: Vous ne savez pas ce qui vous attend, vous!

M. BELLEMARE: Ah oui!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable Secrétaire de la province, sur un point de règlement.

M. PAUL: M. le Président, je sais que vous connaissez parfaitement l'article 285, septièmement. L'honorable chef de l'Opposition a eu l'avantage d'exposer en détails certains points de règlement, spécialement ceux qui sont prévus à l'article 235 et vous avez rendu une décision...

M. LESAGE: II est une heure.

M. PAUL: ... en vertu de l'article 232.

M. LESAGE: Vous continuerez à trois heures.

M. PAUL: M. le Président, je soumets respectueusement...

M. LESAGE: II est une heure. A trois heures.

M. PAUL: M. le Président, je demande la suspension des travaux, sur le point de règlement, à trois heures.

M. BELLEMARE: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: La Chambre ajourne ses travaux à trois heures cet après-midi.

Reprise de la séance à 15 h 5

M. LEBEL (président): A l'ordre, messieurs! L'honorable Secrétaire de la province.

M. PAUL: M. le Président, quelques minutes avant la suspension de nos travaux pour l'heure du lunch, j'avais formulé un rappel au règlement sur cette partie des remarques que l'honorable chef de l'Opposition était à prononcer et qui se référaient à une partie de l'argumentation qu'il avait soulevée ce matin.

En toute conscience, M. le Président, j'ai eu l'avantage de relire les Débats. Je crois que c'est vous-même qui, sans vous prononcer sur le bien-fondé de la motion de l'honorable chef de l'Opposition, l'avez, en quelque sorte, momentanément suspendue. Je me demande, dans les circonstances, si on ne pourrait pas invoquer l'article 285, septièmement, mais je ne voudrais pas être désagréable au chef de l'Opposition. Peut-être l'honorable chef de l'Opposition pourrait-il continuer son argumentation, tout en permettant à celui qui vous parle, ou à d'autres, de répondre aux arguments nouveaux que pourrait soulever l'honorable chef de l'Opposition. Ainsi, le droit de parole de tous les honorables députés serait sauvegardé.

M. BELLEMARE: Très bien.

M. LESAGE: M. le Président, ça m'est parfaitement égal, si le Secrétaire de la province veut argumenter dès maintenant...

M. PAUL: Non, non!

M. BELLEMARE: Non, nonr

M. LESAGE: Un instant.

M. GERIN-LAJOIE: On va rivaliser de politesse.

M. BELLEMARE: On veut, on veut, on veut!

M. LESAGE: Si le Secrétaire de la province veut argumenter dès maintenant à l'encontre de la prise de position qui a été la mienne, au début de mon intervention, libre à lui.

M. BELLEMARE: On va vous entendre.

M. LESAGE: Comment dit-on ça? Après vous, mon cher Alphonse?

M. BELLEMARE: On va vous entendre.

M. LESAGE: Mais si...

M. PAUL: Je vous cède le pas.

M. LESAGE: ... le leader du gouvernement et l'ancien président de la Chambre, votre prédécesseur, insistent pour que je procède, M. le Président, je ne puis que me rendre à des prières faites avec autant d'instance.

M. le Président, à une heure moins quelques minutes, lorsque le Secrétaire de la province a invoqué le règlement, particulièrement l'article 285 — il vient de retirer, n'est-ce pas, son objection — j'ai dit que j'avais des choses à dire à l'appui de la prise de position qui était la mienne en vertu de l'article 235.

J'ai ajouté que j'irais à votre bureau après la suspension de la séance pour vous exposer mon point de vue. Si je l'ai fait — et je l'ai fait — c'était clairement pour que la présidence ait le temps de peser les arguments que j'invoquais. Je me suis rendu à votre bureau. Vous étiez accompagné du vice-président de la Chambre, président des comités et député de Sherbrooke, et j'ai eu l'occasion, à ce moment-là, de faire une chose que je n'ai pas faite depuis de nombreuses années, de plaider en Chambre.

L'article 536 est celui dont on demande la suspension par la résolution A, qui se lit comme suit: « Que le paragraphe premier de l'article 536 du règlement, qui exige que tout bill public soit lu deux fois avant d'être amendé ou renvoyé à un comité, soit suspendu ». La résolution B dit: « Que ce susdit bill soit référé au comité de l'éducation, et que ce comité soit autorisé à siéger pendant que la Chambre est en séance, etc. » L'article 536, premier paragraphe, se lit comme suit: « Tout bill doit être lu deux fois avant d'être amendé ou renvoyé à un comité ». Ce qui nous intéresse, c'est ceci: « Tout bill doit être lu deux fois avant d'être renvoyé à un comité ».

La résolution A s'en tient à ça. Elle récite la partie opératoire de l'article 536. Il y a dans la motion du leader du gouvernement en Chambre, deux résolutions, qui sont successives et qui constituent deux étapes bien distinctes de la procédure. On dira qu'on ne peut procéder à B, sans la suspension de l'article 536. Je dis, M. le Président, qu'on pourrait procéder à l'étude de la résolution B sans la suspension de l'article 536, si elle était présentée après la deuxième lecture.

C'est donc dire que la résolution B est une résolution complète par elle-même et qui est exactement de la nature des motions faites pour référer un bill à un comité. Ce que nous déciderons, ce que nous discuterons lors de nos délibérations sur le paragraphe A, c'est de savoir s'il y a lieu de procéder dès maintenant avant toute autre procédure ou de ne pas procéder dès maintenant à la deuxième lecture du bill. On sait que c'est au cours du débat de deuxième lecture que les députés de cette Chambre peuvent se prononcer sur le principe d'un bill.

La décision qui sera prise suivant le vote que nous donnerons sur la résolution A, elle est entière et elle est complète. Est-ce que les députés seront appelés, oui ou non, dès maintenant ou à une séance subséquente de la présente session, à se prononcer sur le principe du bill 85? C'est ça qui est la réponse que nous donnerons par notre vote à la résolution A.

Si la Chambre décide de suspendre l'application de l'article 536, alors et alors seulement, comme deuxième étape, le gouverne ment pourra présenter dès maintenant b) qui est une motion de référence purement et simplement. On y dit, en effet, que le bill est référé à tel comité, à telle et telle condition. On ajoute que l'on suivra telle et telle procédure devant ce comité et l'on donne un mandat au comité. Cela est la motion classique de référence à un comité de la Chambre. C'est une procédure complète, qui ne dépend en aucune façon de la suspension de l'article 536. La suspension de 536 permettant tout simplement aux membres du gouvernement d'éviter d'avoir à se prononcer sur le principe du bill en deuxième lecture.

C'est tellement vrai, ce que je vous dis, que l'article 221 de notre règlement se lit comme suit: « Une motion portant suspension d'une règle particulière ou des règlements en général ne peut être amendée qu'avec le consentement unanime de la Chambre. » C'est donc dire que, s'il nous était impossible d'étudier les deux résolutions séparément, nous serions conduits à cette situation absurde où les députés de cette Chambre n'auraient pas la possibilité de proposer des modifications à la procédure à suivre par le comité ou encore au mandat que nous donnerons au comité. Si on ne considère pas ces résolutions séparément, la première partie de cette motion, que l'on nous obligera à considérer comme partie d'un tout, nous empêchera, en vertu des prescriptions de l'article 221, de proposer des modifications au mandat du comité et à la procédure à suivre par le comité. Cela pourra même nous empêcher d'exprimer une préférence pour un comité ad hoc au lieu du comité de l'éducation.

Nous serons alors conduits à l'absurde. Je crois, premièrement, avoir donné des arguments positifs précis à l'appui de la position que j'ai prise en vertu de 235; deuxièmement, je crois avoir prouvé par l'absurde que nous serions placés dans une situation où les députés

de cette Chambre perdraient un de leurs droits fondamentaux, celui d'apporter des amendements au mandat que l'on veut donner à un comité de cette Chambre.

M. PAUL: J'ai écouté les arguments invoqués par l'honorable chef de l'Opposition qui me fait penser à celui qui emplirait sa cave d'essence sans jamais s'occuper de véhicule automobile pour s'en servir. Je vais vous dire comment.

M. BLANK: C'est de l'essence bleue ou rouge?

M. PAUL: Pardon?

M. PINARD: Nous aurons une surtaxe avant que vous ayez terminé votre exemple.

M. PAUL: Nous gardons cela pour l'aéroport. J'ai donc suivi avec beaucoup d'attention l'argumentation de mon honorable ami, le chef de l'Opposition. J'ai été saisi, à un moment donné, à la pensée que l'honorable chef de l'Opposition pouvait oublier un article aussi important de notre règlement que l'article 217-2. Nous allons le relire tranquillement, pas vite, et ensuite nous reviendrons à A et à B.

D'abord, nous aurions pu procéder de deux façons. Nous aurions pu procéder en vertu de l'article 144 du règlement qui prévoit un avis de 24 heures au feuilleton. Pourquoi? Je vais vous le dire dans un instant. L'honorable leader parlementaire ce matin, ou l'honorable ministre de l'Education dans le cours de son argumentation de la deuxième lecture du bill, aurait pu également, en vertu de l'article 217, faire une motion incidente. Nous n'avons pas voulu prendre l'Opposition par surprise.

M. LACROIX: Cela ne prend pas.

M. PAUL: Nous n'avons... Ah! surtout prendre le député des Iles-de-la-Madeleine par surprise, c'est impossible.

M. LACROIX: Au moins, le député des Iles-de-la-Madeleine est moins naïf que certains avocats le croient.

M. PAUL: Je continue...

M. LACROIX: S'il y avait plus de députés comme le député de Maskinongé, cela irait mieux en Chambre aussi.

M. PROULX: Maurice Sauvé.

M. GRENIER: Pauvre Basile, il fait pitié. M. LE PRESIDENT: A l'ordrel M. ROY: Cela paraît mal... M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: Prenez donc votre siège vous, au lieu de...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre!

M. LACROIX: Allez vous asseoir à votre siège.

M. BELLEMARE: Vous prenez du poids, vous.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Il faut dire que ces parenthèses se placent assez mal dans une argumentation juridique ou légale. Je demanderais à l'honorable député Secrétaire de la province de continuer son exposé.

M. PAUL: Je disais donc que nous n'avons pas voulu prendre l'Opposition par surprise. Nous avons annoncé notre motion, et en vertu de l'article 217, nous aurions pu procéder par motion incidente. Là, le législateur fait une distinction, en vertu de l'article 140, entre une motion principale et une motion incidente. Si nos honorables amis discutaient sur une motion Incidente, l'honorable chef de l'Opposition serait justifié d'invoquer l'article 231, comme l'avait fait l'honorable député de Chambly, sur le bill 25.

Mais non, et c'est là qu'il faut lire le deuxièmement de l'article 217, où il est dit: « Toute motion — je suis sûr que l'honorable député des Iles-de-la-Madeleine me suit —...

M. LACROK: C'est difficile, parce que vous ne savez pas trop où vous allez.

M. PAUL: « Toute motion portant suspension d'une règle — et là j'attire l'attention de l'honorable chef de l'Opposition...

UNE VOIX: II ne comprend pas. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. PAUL: ... doit indiquer l'objet en vue duquel la suspension est proposée. »

M. LESAGE: Cela ne change pas grand-chose.

M. PAUL: Oui, ça change.

M. LESAGE: C'est dans le préambule.

M. PAUL: Voici en quoi ça change. Si nous ne présentons que le A, sans donner le pourquoi, qui est le B, nous aurions une motion irrégulière dans la forme. Je dis que ce n'est certainement pas divisible, mais le B est nécessaire, en vertu de Particle 217, deuxièmement. Nous avons prévu les objections possibles de l'honorable chef de l'Opposition et de ses conseillers. Et, justement parce que nous voulions leur donner la chance de revivre et de revoir tout le code, nous avons pensé que jamais ils ne se prévaudraient, dans les circonstances, de l'article 31, parce qu'il s'agissait d'une motion annoncée et d'un texte qui, en vertu de l'article 217, deuxièmement, est nécessaire. C'est aussi parce que, si vous prenez le A et le B pour suivre l'argumentation de l'honorable chef de l'Opposition, nous sommes placés dans la situation suivante: L'honorable chef de l'Opposition dit: Votons le B. Cela va donner quoi? Cela va donner que nous serons placés dans une situation juridique qui peut découler de ce que quelqu'un reçoit un jugement inexécutable ou inexécutoire.

Si nous adoptons le B, nous ne pourrons jamais faire siéger le comité de l'éducation, parce qu'il y aura l'impératif de l'article 536 qui demeurera. Par conséquent, nous ne pouvons pas adopter le B sans adopter le A. Si nous adoptons...

M. BLANK: Est-ce qu'on va pouvoir avoir la deuxième lecture?

M. PAUL: La deuxième lecture, au fond, on vous donnera des raisons, ce n'est pas grave.

Si nous adoptons le A, c'est là que le B devient la raison d'être, la justification, suivant l'article 217, deuxièmement, du texte que vous avez devant vous. Si nous avions fait une motion sans mettre le B, nos honorables amis se seraient levés et auraient dit: M. le Président, suivant l'article 217, vous devez mettre la motion de côté, parce qu'il n'y a aucune justification, aucune raison pour demander la suspension de l'article. Ils auraient eu raison, suivant l'article 217.

Voilà pourquoi je vous dis: C'est non seulement indivisible, mais le b) est nécessaire: c'est la justification de a). Quand l'honorable chef de l'Opposition dit: On va adopter le b), je soumets respectueusement qu'il nous invite à commettre un crime de lèse-droit parlementaire.

M. LESAGE: Je sais que le Secrétaire de la province veut être juste. Je n'ai jamais dit:Nous allons adopter le b).

M. PAUL: La motion, pardon. Je dis, moi, que si...

M. LESAGE: Je n'ai jamais dit que nous voterions pour la motion.

M. PAUL: Cela, nous ne le savons pas. Nous le verrons.

M. LESAGE: J'ai fait des hypothèses.

M. PAUL: Moi aussi, mais au lieu de faire des hypothèses, je tombe dans la réalité vivante.

M. LESAGE: Allez-y!

M. PAUL: Non, non.

M. LESAGE: Vous planez.

M. PAUL: Je ne plane pas, M. le Président, j'ai les deux pieds sur terre.

M. LESAGE: Cela ne paraît pas.

M. PAUL: J'invite le chef de l'Opposition à contredire ce que je lui dis actuellement.

M. LESAGE: Je ne le puis pas; j'ai usé de mon droit de parole.

M. PAUL: Vous auriez dû prévoir l'argumentation. Un bon avocat prévoit les objections de ses adversaires.

M. LESAGE: Je ne pouvais prévoir jusqu'à quel point l'esprit naturellement détourné du Secrétaire de la province pouvait aller. Il nous avait habitués, lorsqu'il était président de la Chambre, à autre chose qu'aux sophismes qu'il nous expose actuellement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je compte que tous les membres de cette Chambre feront le même effort de recyclage que je fais moi-même.

M. LESAGE: Très bien, M. le Président, nous attendons les acrostiches du Secrétaire de la province.

M. PAUL: M. le Président, je ne suis pas surpris de l'argumentation de l'honorable chef de l'Opposition. J'ai déjà été appelé en droit criminel à plaider devant les jurés. A ce moment-là, quand ma cause était faible, j'invoquais n'importe quel argument.

M. LESAGE: M. le Président, le Secrétaire de la province n'a pas évolué; il est toujours le même. N'importe quel argument!

M. PAUL: M. le Président, il me semble entendre des voix.

M. LE PRESIDENT: J'ai l'impression que nous avons un jury très vivant.

M. LACROIX: Faible pour faible.

M. PAUL: Etant tous deux gémeaux, je crois que le chef de l'Opposition et moi, nous pouvons finir par nous entendre.

M. LESAGE: Ce sera difficile là-dessus.

M. GERIN-LAJOIE: C'est mal parti, du moins.

M. PAUL: Que l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges patiente; j'ai une excellente citation qu'il a faite un jour. Je la lirai quand nous serons au fond de la question.

Je disais donc, M. le Président, en m'adressant avec beaucoup de bonhomie à tous mes honorables amis d'en face — quand je vols le sourire de l'honorable député de Laval, ça m'encourage — que si nous acceptons le b), sans accepter le a), nos honorables amis d'en face conviendront-Ils que l'article 536 va demeurer?

M. LESAGE: Nous ne convenons de rien.

M. PAUL: Il n'y a rien de pire, M. le Président, qu'un sourd qui ne veut pas entendre.

M. LACROIX: Il n'y a rien de pire qu'un aveugle qui ne veut pas voir, non plus.

M. PAUL: De toute façon, je continue, M. le Président. Si nous acceptons le B et si nous restons avec le A, comment rendre effective la résolution...

M. COURCY: Un grand A ou un petit a?

M. PAUL: ... pour que l'appel de l'honorable chef de l'Opposition, la partie B de la mo- tion? On ne peut pas, parce qu'on sera toujours pris par les restrictions impératives de l'article 536. Pour disposer avec logique de la motion, il nous faut donc d'abord adopter le A et oublions le B pour le moment.

M. LESAGE: C'est exactement ce que j'ai dit tout au long...

M. COURCY: Bien oui.

M. LESAGE: ... discutons du A, oublions le B pour le moment.

M. BELLEMARE: Oui, mais vous n'êtes pas obligé...

M. PAUL: Mais avec le chef de l'Opposition, A+B n'égale pas C.

M. LESAGE: En algèbre non plus, M. le Président.

M. PAUL: Non, non, parce qu'il y a trop d'inconnus.

M. LESAGE: Parce que A+B, en algèbre, ça fait A + B.

M. PAUL: II y a trop d'inconnus.

M. LESAGE: II n'y a pas d'inconnu dans A et B.

UNE VOIX: On commence à vous connaître.

M. LESAGE: Je pense que vous avez besoin d'un recyclage en algèbre.

M. PAUL: J'aime mieux être dans le droit qu'en algèbre.

M. CADIEUX: Ah oui, ça paraît.

M. PAUL: Ayant entendu l'écho, M. le Président, je dis donc que si nous n'adoptons que le A, on va voir ce que ça donne: « Attendu l'intérêt public et général qu'éveille dans la province le bill 85, Loi modifiant la loi du ministère de l'Education, la Loi du conseil supérieur de l'éducation et la Loi de l'instruction publique: A) Que le paragraphe 1 de l'article 536 du règlement qui exige que tout bill public soit lu deux fois avant d'être amendé ou renvoyé à un comité soit suspendu ».

Alors, si on ne va pas plus loin, qu'est-ce qui arrive? On va suspendre, pourquoi? Pourquoi?

DES VOIX: Pourquoi?

M. PAUL: C'est donc dire qu'il nous faut adopter B pour que A s'applique. Et le B, c'est l'article 217, deuxièmement, c'est la justification impérative, c'est l'obligation que nous impose le règlement d'imposer ou d'inscrire le B dans la motion. Et, parce que nous avons procédé par motion annoncée plutôt que par motion incidente, je dis que les règles de l'article 231 ne peuvent pas s'appliquer. Et il est impossible...

M. HYDE: M. le Président, est-ce que le ministre me permettrait une question sur son argumentation?

M. PAUL: Certainement, oui.

M. HYDE: Est-ce que le ministre, si on acceptait son argumentation, et si on était prêt à accepter, est-ce que le ministre serait prêt a dire en même temps que ce n'était aucunement avec l'intention d'empêcher l'Opposition d'apporter peut-être des amendements à la partie B?

Alors, je me permets de faire une suggestion. On a passé toute la journée à discuter de la procédure. Est-ce que le gouvernement serait prêt à suspendre l'article 221 afin que si on avait des amendements à apporter à la partie que le ministre décrit comme étant le motif de la motion de suspension du règlement, est-ce que le gouvernement serait prêt à nous accorder le droit d'amender le paragraphe B durant la discussion?

M. PAUL: M. le Président, je remarque avec beaucoup de plaisir d'abord que l'honorable député de Westmount est presque convaincu de mon argumentation.

M. HYDE: Avez-vous compris la mienne?

M. PAUL: Oui, oui, j'y viens, M. le Président. Et pour répondre à la curiosité de certains journalistes et à nos honorables amis d'en face, je crois qu'en vertu de la solidarité ministérielle qui me lie au gouvernement, soyez sans inquiétude, le comité de l'éducation va siéger sur cette question.

M. LESAGE: M. le Président, ce n'est pas là du tout la suggestion du député de Westmount.

M. PAUL: Je vais maintenant répondre au troisième point...

M. BELLEMARE: Vous commencez à comprendre les amendements.

M. LESAGE: Voulez-vous suspendre l'article 221, autrement dit?

M. PAUL: Je n'ai pas choisi le même ordre de réponse qu'aurait choisi le chef de l'Opposition, mais j'arrive au troisièmement. L'honorable député de Westmount nous parle d'un comité ad hoc plutôt que du comité de l'éducation.

M. LESAGE: Non, non!

M. HYDE : Non, je n'ai parlé d'aucun comité. Etes-vous prêts à suspendre l'article 221 en même temps que l'article 536? Oui ou non?

M. PAUL: S'il y a le consentement unanime de la Chambre...

M. LESAGE: C'est ce que nous vous demandons.

M. PAUL: ... nous pouvons suspendre l'article 221.

M. HYDE: Adopté.

M. BELLEMARE: Non, un instant.

M. PAUL: Et si nous suspendons l'article 221, je crois prévoir, avec le peu d'expérience que j'ai de là procédure, que nos honorables amis auraient une motion d'amendemant...

M. HYDE: Certainement. M. PAUL: ... à présenter.

M. GERIN-LAJOIE: Ce n'est pas de la devinette.

M. PAUL: Mais il n'est pas nécessaire de mettre l'article 221 de côté pour présenter une motion d'amendement.

M. GERIN-LAJOIE: Mais voyons!

M. LESAGE: Voyons! lisez l'article 221.

M. PAUL: Vous n'avez qu'à obtenir le consentement unanime. Nous sommes dans la procédure depuis le matin; nous faisons de la procédure. C'est cela que dit l'article 221.

M. BELLEMARE: C'est ce que dit l'article 221.

M. PAUL: Nous faisons de la procédure. M. BELLEMARE: Lisez-le!

M. PAUL: Si on a peur, du côté de l'Opposition, d'envoyer le bill 85 au comité de l'éducation, qu'on continue à faire de la procédure.

M. LESAGE: Je ne puis admettre les dernières paroles du Secrétaire de la province...

UNS VOIX: Ce n'est pas un point d'ordre.

M. LESAGE: ... qui constituent une imputation de motifs. Oui, c'est un point de règlement.

M. MALTAIS (Limoilou): Je qualifierais cela de motifs conditionnels.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable chef de l'Opposition sur un point de règlement.

M. LESAGE: M. le Président, le Secrétaire de la province a voulu nous imputer des motifs. Je dois dire que la suggestion faite par le député de Westmount était bien simple. Depuis ce matin, depuis onze heures et demie ou midi moins quart, nous discutons de procédure. J'ai dit tout à l'heure pourquoi nous étions placés dans une situation impossible parce que nous ne pouvions pas proposer les modifications que nous avions l'intention de proposer au mandat du comité et à la procédure. J'ajoute que nous pouvons cesser dès maintenant toute discussion de procédure si nous avons le consentement unanime de la Chambre à la non-application de l'article 221.

M. PAUL: M. le Président, j'ai fait précéder ma phrase du mot « si », et l'honorable chef de l'Opposition prétend que j'ai voulu imputer des motifs à l'Opposition. Je dis — là je peux m'attribuer les motifs que je voudrai — que si j'étais dans l'Opposition, j'aurais peur que le bill 85 soit référé au comité de l'éducation.

M. LACROIX: Ce ne sera pas long, vous allez y être.

M. LESAGE: Nous aurions peur d'envoyer le bill...

M. PAUL: Je dis donc...

M. LESAGE: Vous, vous avez peur de vous compromettre en deuxième lecture, ce n'est pas mieux.

M. LACROIX: Vous n'êtes pas capables de respecter la parole de votre chef intérimaire qui a dit que le bill 85 serait étudié au cours de la présente session.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable Secrétaire de la province.

M. PAUL: Quand je parle d'Opposition, je ne voudrais pas qu'il y ait de confusion dans votre esprit Je parle de l'Opposition libérale.

UNE VOIX: Pour quelle raison?

M. PAUL: Je résume donc en disant que l'article 217-2 était non seulement la justification, mais l'obligation d'insérer à notre motion le mot « que », deuxièmement, ou B, si vous voulez, et ça complète l'argumentation que je signalais ce matin, lorsque je disais que le mot « que », dans le B, signifie « afin que », et c'est ce qui rend tout à fait indivisible la motion telle que présentée par l'honorable ministre du Travail.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Westmount.

M. HYDE: M. le Président, vous avez devant vous ce que l'on appelle encore une question de règlement. Je prétends, encore une fois, M. le Président, qu'il n'y a pas de question de règlement sur laquelle vous ayez à décider. Ce qui est arrivé, M. le Président, c'est que le chef de l'Opposition a pris la parole sur la motion proposée par le ministre du Travail. Il a dit tout simplement, au début: Je demande, comme c'est le droit de n'importe quel député en Chambre, je réclame mon droit, en vertu de l'article 235 du règlement, pour que la motion qui se compose de deux résolutions, de deux parties, pour que ces deux parties soient mises aux voix l'une après l'autre.

Il n'y a pas de débat là-dessus, M. le Président, il n'y a pas de question de règlement. Je prétends que tout ce que vous avez à faire là-dessus, M. le Président, c'est de constater un fait et d'accorder au chef de l'Opposition le droit de discuter de cette question en deux parties. C'est aussi simple que ça. Tout le chapitre de la division est là: on ne demande pas la division de la motion, on demande que deux choses distinctes soient traitées séparément devant la Chambre. On demande qu'il se prenne deux décisions pour décider de deux choses. Je ne suis pas pour reprendre toute l'argumentation de l'honorable Secrétaire de la province en...

UNE VOIX: II n'est pas capable.

M. HYDE: ... référant à d'autres articles, M. le Président. Je prétends que ça n'a absolument rien à faire avec ce qui est devant la

Chambre. Tout ce que vous avez à constater, c'est qu'un demande a été faite par un député en Chambre, pour que la motion soit traitée comme deux propositions.

M. LE PRESIDENT: L'honorable...

M. BLANK: May I say one word? Just one word. The Secretary of the Province...

DES VOIX: Encore des stratégies.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! The honourable Member for Saint-Louis.

M. BLANK: The Secretary of the Province, in his argument, was trying to get you to believe, Mr. President, that it is not really two resolutions, but only one, A and B are together, they are really one and it is only because of the way it was drafted that you have two resolutions, A and B.

Well, unfortunately for the Government, that is the way they drafted it. They drafted two separate resolutions. If they have a vice de forme, it is their headache. This morning, in your decision, which you rendered against the Leader of the Opposition, the only reason you rendered that judgment, you said: c'est une question de vice de forme. C'est la raison pour laquelle vous avez rendu le jugement de ce matin. On a exactement les mêmes choses maintenant. C'est un vice de forme dans la motion du gouvernement. Ils ont fait leur lit, ils doivent maintenant se coucher dedans.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Vaudreuil-Soulanges.

M. GERIN-LAJOIE: M. le Président, je vais parler très brièvement. Si je me lève, à ce moment-ci, c'est parce que, personnellement, j'ai le sentiment très profond qu'aux yeux de l'opinion publique, à travers les média d'information qui sont représentés ici, à la tribune de la presse, nous risquons très fort de donner l'impression de nous acharner, d'un côté et l'autre de la Chambre, sur des questions strictement de procédure et, j'irais plus loin, sur des questions pointilleuses de procédure. Quant à nous, M. le Président, f aimerais à dire ceci: II est sûr que vous, vous avez à juger suivant le texte du règlement, mais je voudrais bien que les objectifs que nous poursuivons, les raisons qui motivent notre recours au règlement et, en particulier, à l'article 225, c'est ceci:

Nous ne tenons pas pour acquis que, des deux côtés de la Chambre, nous pouvons être très souvent du même avis. Mais ce qui est très important dans un Parlement, et dans un Parlement qui se veut démocratique, c'est que toutes les opinions qu'entretiennent les membres de cette Chambre puissent être exprimées aussi clairement et aussi succintement que possible. De notre côté, sur le projet du gouvernement , tel que formulé dans la motion du député de Champlain, ministre du Travail, nous voulons exprimer notre opinion. Or, tel que le projet est exprimé, nous ne pouvons pas le faire, parce qu'en vertu de certains articles du règlement, nous sommes empêchés de présenter un amendement qui formulerait, en quelques lignes, notre façon de voir le déroulement des travaux de cette Chambre, en ce qui concerne l'étude du bill 85.

Ce que nous voulons, ce ne sont pas des chicanes de procédure, ce que nous voulons, ce ne sont pas des débats de chats et de souris. Ce que nous voulons tout simplement, c'est que l'Opposition libérale en cette Chambre puisse avoir l'occasion de présenter un amendement, un amendement avec lequel nos amis d'en face pourront, c'est leur privilège, et nous le respectons, bien sur, ne pas être d'accord, un amendement avec lequel ils pourront être en complet désaccord. Ce que nous demandons, c'est simplement l'occasion de présenter notre amendement et de permettre aux membres de cette Chambre, d'un côté et de l'autre, d'exprimer leur opinion soit par des paroles, soit par un vote. Quant à nous, nous serions très disposés à présenter notre amendement assez rapidement, à faire une explication très courte sur le sens de notre amendement, pour que, d'un côté et de l'autre de cette Chambre, nous exprimions éventuellement et finalement par un vote, notre opinion sur la façon dont devraient se dérouler les travaux de la Chambre en ce qui concerne le bill 85. Tout ce que nous demandons, par le point de procédure qui a été soulevé par le chef de l'Opposition, c'est tout simplement que la question de procédure soit réglée de façon que l'Opposition ne soit ni bâillonnée ni empêchée de présenter un amendement, pour faire valoir son point de vue.

M. LE PRESIDENT: Je veux d'abord signaler, au début de mes remarques, que j'ai peut-être été un peu mal interprété, ce matin, ou que je me suis mal exprimé, lorsque j'ai parlé d'une question de procédure qui pouvait priver un justiciable d'un droit acquis. Je pense qu'il y a suffisamment d'avocats dans cette

enceinte pour comprendre ce que je voulais dire d'une façon précise. Par exemple, un point de prescription qui pouvait faire perdre un droit, disons au bout de quinze jours, au bout de six mois, et caetera, C'est sur ce point que je sentais le besoin de clarifier mon expression d'opinion de ce matin.

L'honorable député de Westmount, un de mes brillants prédécesseurs, disait très justement, que si je m'en reportais au texte français de l'article 235, je devrais peut-être constater simplement une situation de fait. Mais si je ne rendais une décision, comme il me propose de le faire, je me demande jusqu'à quel point nous pourrions créer de la confusion. En effet il y a des gens qui continueraient à parler sur deux résolutions, alors que d'autres parleraient sur une résolution seulment. Je sens donc le besoin de rendre une décision.

En m'inspirant de l'article 235, et plus spécialement de la version anglaise, je suppose pour un moment que j'appelle, vu le pouvoir qui m'est donné par cet article, la résolution b) au lieu de la résolution a): je commettrais là un acte complètement irrégulier puisque je mettrais de côté, d'un revers de la main, toutes les procédures de 2e lecture et de comité plénier, sans l'autorisation de la Chambre.

C'est ce qui me fait dire que les deux paragraphes, en fait, auraient dû n'en faire qu'un. Là-dessus, l'article 217 — j'invite les honorables députés à le lire — ne me laisse pas de latitude et je suis lié d'une façon très manifeste. Le paragraphe 2: « Toute motion portant suspension d'une règle doit indiquer l'objet en vue duquel la suspension est proposée ». Un honorable député a dit — malheureusement, en prenant mes notes, je n'ai pu l'identifier — que le préambule de la motion servait de détermination de l'objet.

Or, j'essaie d'une façon logique, de lire le paragraphe en y ajoutant le préambule. Je dois ainsi venir à la conclusion très nette que ce préambule n'indique pas l'objet tel que le requiert l'article 217 au paragraphe 2. Dans ces circonstances, j'aurais été obligé, si je ne considérais pas ce texte là comme faisant un et faisant un article qui doit être discuté ensemble, par ailleurs je serais obligé de rejeter cette motion en la déclarant tout à fait irrégulière si je ne considérais pas que les paragraphes a) et b) ne formaient qu'une seule et même déclaration. Dans ces conditions, je déclare que les deux articles ne peuvent être discutés séparément et qu'ils feront l'objet d'un seul débat.

M. LESAGE: Je regrette infiniment, mais vous comprendrez que nous ne puissions admettre, de ce côté-ci de la Chambre, qu'il suffit d'une rédaction boiteuse pour nous enlever nos droits fondamentaux de présenter des amendements à une motion. En conséquence, nous devons en appeler respectueusement de votre décision.

M. BELLEMARE: L'honorable député de Louis-Hébert n'a pas le droit de discuter, ni d'interpréter votre décision.

M. LESAGE: J'en ai appelé de la décision.

M. BELLEMARE: Oui, il fallait l'appeler sans commentaire.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: Cours-ci, cours-là.

M. HYDE: On commente le gouvernement.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Qu'on appelle les députés.

M. LE PRESIDENT: Que les honorables députés qui sont pour le maintien de la décision du président veuillent bien se lever.

M. LE GREFFIER ADJOINT: MM.Bellema-re, Fréchette, Johnston, Vincent, Dozois, Lizotte, Gosselin, Gabias, Tremblay (Chicoutimi), Masse, Allard, Russell, Lafontaine, Paul, Maltais (Limoilou), Cloutier, Cardinal, Boivin, Lussier, Beaudry, Charbonneau, Mathieu, Morin, Lavoie (Wolfe), Bernatchez, Flamand, Gauthier (Roberval), Sauvage au, Gauthier (Berthier), D'Anjou, Léveillé, Desmeules, Grenier, Martel, Roy, Leduc (Laviolette), Deniers, Picard (Dorchester), Martellani, Bousquet, Slmard, Proulx, Croisetière, Plamondon, Théorêt, Bergeron, Shooner, Hamel, Gardner, Tremblay (Montmorency).

M. LE PRESIDENT: Que les honorables députés qui sont contre le maintien de la décision du président veuillent bien se lever.

M. LE GREFFIER ADJOINT: MM. Gérin-Lajoie, Séguin, Pinard, Courcy, Levesque (Bonaventure), Lafrance, Lacroix, Brown, Brisson, Hyde, Cliche, Mme Kirkland-Casgrain, MM. Binette, LeChasseur, Harvey, Lavoie (Laval), Blank, Bourassa, Baillargeon, Cadieux, Fournier, Vaillancourt, Kennedy, Mailloux, Lefebvre, Bienvenue, Choquette, Fraser, Goldbloom, Houde, Pearson, Picard (Olier), Saint-Germain, Tetley.

M. LE GREFFIER: Pour: 50 Contre: 34 Yeas: 50 Nays : 34

M. LE PRESIDENT: La décision du président est maintenue.

M. GABIAS: Le ton bruyant dans la défaite.

M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.

M. LESAGE: M. le Président, en l'absence du premier ministre, je n'ai pas voté. Si j'avais voté, j'aurais voté à l'encontre de votre décision.

M. GABIAS: C'est un geste gentil.

M. LESAGE: M. le Président, je comprends assez difficilement les observations du ministre des Institutions financières. Il me semble que j'ai démontré beaucoup de respect, toutes les...

M. GABIAS: C'est ce que j'ai dit.

M. LESAGE: ... fois que, depuis deux ans et demi, le premier ministre a été absent de cette Chambre.

M. GABIAS: J'ai dit que c'était un geste gentil.

M. LESAGE: Cela pouvait s'interpréter de deux façons, à cause du ton. Cela pouvait être considéré comme un geste qui n'était pas gentil à l'égard du président de la Chambre, à cause du ton sur lequel les paroles ont été prononcées.

M. GABIAS: Ce sont des intentions qui ne sont pas exactes. Si j'ai dit que c'était gentil, c'était parce que c'était gentil.

M. LESAGE: Je tire ma révérence au député de Trois-Rivières. Je regrette d'avoir été tenté de mal interpréter ses paroles, qui voulaient être aimables et agréables à mon égard.

M. le Président, je voudrais, sur la motion qui est devant nous, faire quelques remarques, étant donné la décision que vous avez rendue, décision qui a été confirmée par la Chambre dans sa majoritéo Je ferai porter mes remarques sur l'ensemble de la motion présentée par le député de Champlain. A la fin de mes remarques, j'ai l'intention de faire une motion d'amendement, dans l'espoir que les membres du gouvernement et les députés ministériels accepteront unanimement, non pas peut-être le principe des modifications que je proposerai, mais le droit fondamental qui est celui des députés de cette Cham- bre de présenter des amendements, droit qui pourrait nous être enlevé, en vertu de l'article 221, à cause d'une interprétation que nous n'avons pas admise de la structure de la motion qui est devant nous.

M. le Président, il nous apparaît clairement que le ministre de l'Education, qui est le vice-premier ministre, plutôt que de prendre ses responsabilités en proposant la deuxième lecture du bill 85, a préféré demander à un de ses collègues d'expérience d'inscrire la motion de référence du bill 85 à un comité - au comité de l'éducation, de fait - avant que les députés de cette Chambre aient eu l'occasion de faire connaître leur point de vue sur le principe du projet de loi.

J'admets que cette procédure a été suivie dans le passé, mais, lorsqu'il s'agit d'un principe aussi important — je n'ai pas l'intention d'en discuter; je ne fais que le qualifier, M. le Président - que celui qui est contenu au bill 85, je considère que les députés de cette Chambre doivent être appelés à se prononcer sur ce principe et sur la suffisance ou sur l'insuffisance du contenu du bill. Ils doivent pouvoir s'exprimer clairement et sans contrainte, avant de demander l'opinion des tiers. Si l'opinion des tiers peut être importante, l'opinion des députés de cette Chambre, elle, doit s'exprimer, et c'est un droit souverain pour chacun de nous.

Ai-je à rappeler, M. le Président, que, le 25 novembre dernier, le ministre de l'Education accompagnait le premier ministre, à Montréal, lorsque M. Bertrand recevait - pendant près d'une heure, nous ont rapporté les journaux — un groupe de citoyens, représentant diverses associations, qui étaient venus lui demander de ne pas présenter le projet de loi. Il faut bien se rappeler qu'à ce moment-là ni le bill 85 ni aucun bill de même nature n'étaient déposés devant la Législature. Il n'était pas question du tout, ni pour le premier ministre, ni, je le crois bien, pour le ministre de l'Education - qui, clairement, était solidaire du premier ministre - de référer le problème à un comité. Il n'en a pas été question, à ce moment-là.

Le premier ministre, qui avait à ses côtés, je le répète, celui qui est aujourd'hui vice-premier ministre, s'appuyant sur les principes qui avaient été énoncés par son prédécesseur, de regrettée mémoire, l'honorable Daniel Johnson, a déclaré ce qui suit - et je cite ce que nous ont rapporté les journaux, c'est très bref -« Une loi viendra régler le problème de Saint-Léonard. »

D'ailleurs, au cours d'une émission radiopho-nique, le vendredi précédent, soit le 22 novem-

bre, le premier ministre avait répondu à des questions au téléphone. C'était ce genre d'émission radiophonique qu'on appelle en anglais une « hot line », où l'interviewé répond à des questions au téléphone ou encore fait ses commentaires sur des déclarations que des personnes lui font au téléphone. C'était au poste CFCF à partir de neuf heures du soir et au début de l'émission, puisque ce que je vais citer, je le retrouve à la page 4 du feuillet de la transcription des conversations qui se sont déroulées à l'occasion de cette émission.

Au téléphone, un homme demande: « Action speaks louder than words and my question is: What tangible proof can you give us that your policies to bring an early solution to this problem will be acted upon and when? « L'honorable Jean-Jacques Bertrand; May I reply? You said that action speaks louder than words. I agree with you. That is why, as I mentioned a moment ago, a law will be submitted next week to the Quebec Parliament, whereby I think linguistic rights of the minority will be protected, « not would be » but « will be protected in this province. You mentioned when, so I said next week ». C'était le 22 novembre.

Je reviens à l'entrevue du 25 novembre à laquelle je référais il y a un instant alors que le premier ministre, à Montréal, était accompagné du ministre de l'Education. M. Bertrand avait alors ajouté que ce projet de loi serait déposé pour une première lecture le lendemain 26. Ce jour-là, rien ne s'est produit. On se souvient de cette journée, alors que tous, nous attendions ce qui allait se produire.

Mais le lendemain, le mercredi 27 novembre, le premier ministre a fait une déclaration en Chambre. Je cite un extrait de ce qu'a dit le premier ministre, la page 4326 du journal des Débats: « Je me proposais de déposer cette semaine un projet de loi concernant les droits linguistiques dans l'enseignement. Tout comme mon prédécesseur, l'honorable Daniel Johnson, l'avait fait à plusieurs reprises, notamment à cette conférence de presse qu'on a appelée à juste titre son testament politique, j'avais moi-même déclaré que nous ferions diligence pour présenter une telle mesure dès que nous aurions l'occasion de prendre connaissance du rapport du comité de restructuration scolaire de l'île de Montréal. En fait, nous avons le rapport depuis quelques semaines. Nous l'avons étudié. Nous avons pris connaissance, également, des réactions et opinions exprimées en divers milieux. Nous avons dégagé de tout cela les éléments d'une solution qui était d'autant plus urgente qu'il y avait un cas bien spécifique à résoudre ».

C'est le premier ministre qui parle: « C'est à cause de cette urgence que j'avais moi-même annoncé que le projet de loi serait sinon discuté et adopté, du moins déposé cette semaine». Oui. Certainement. Il a été déposé, mais il est clair, d'après les paroles du premier ministre, que la question devait être réglée sans délai. C'était un problème qu'il fallait régler d'urgence. Je pense que les jeunes Turcs qui interrompent de l'autre côté devraient avoir un peu de respect pour leur chef, le premier ministre.

M. BERGERON: Le chef de l'Opposition devrait commencer par...

M. ROY: Vous avez du respect pour nos chefs quand ils sont à l'hôpital ou enterrés.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: Vous l'avez enterré avant, vous autres.

M. ROY: Basile, parle donc pour ta grandeur.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: Imbéciles que vous êtes.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Lorsque plusieurs députés parlent ensemble, nous perdons plusieurs opinions fort enrichissantes. C'est pourquoi nos règlements ont prévu qu'un seul opinant devait parler à la fois.

L'honorable chef de l'Opposition.

M. LESAGE: Je reprends la dernière phrase de la déclaration du premier ministre telle qu'elle est consignée au journal des Débats, c'est-à-dire la dernière phrase que j'ai citée: « C'est à cause de cette urgence que j'avais moi-même annoncé que le projet de loi serait sinon discuté et adopté, du moins déposé cette semaine. Or, voici qu'à cause des élections complémentaires qui auront lieu le 4 décembre, certains nous prêtent l'intention de faire de ce problème un enjeu électoral. « En fait, M. le Président, il n'y a jamais eu de lien dans notre esprit entre les deux échéances, mais j'admets que, pour ceux qui n'ont pas suivi d'aussi près que nous le fil des événements, la coincidence peut paraître troublante. Je dirai que non seulement nous n'avons pas le droit de faire de l'électoralisme avec une question comme celle-là, mais que nous n'avons même pas le droit d'être soupçonnés d'en faire. « C'est pourquoi, conscients de nos responsabilités devant le Parlement et devant l'opi-

nion publique, nous avons décidé de ne pas présenter le projet de loi cette semaine. Nous le déposerons sûrement avant la fin de la présente session, car, il n'y a pas à se le cacher, il s'agit d'un problème délicat et difficile : d'un problème qui touche à ce que les hommes ont de plus cher: leur langue et leur culture; d'un problème où les réactions émotives peuvent parfois prendre le pas sur la froide raison. « Déjà, des rumeurs se multiplient et on va jusqu'à nous prêter, avant même que nous ayons déposé un texte et que nous en ayons montré la véritable portée, toutes sortes d'intentions que nous n'avons jamais eues. « J'espère qu'après le 4 décembre on saura, de part et d'autre, retrouver son sang-froid et que nous n'assisterons pas à une escalade de peurs irrationnelles ou à un affrontement d'ex-trémismes, qui ne pourrait que rendre difficile une solution juste et compromettre peut-être, sans bénéfice pour personne, la paix et l'harmonie qui doivent exister au sein de la communauté québécoise. »

Je dois vous souligner, M. le Président, qu'à la suite de cette déclaration du premier ministre, nous de ce côté-ci de la Chambre, nous étions perplexes, je l'avoue. Nous nous demandions ce qui allait se produire car c'était un secret de polichinelle que le caucus de l'Union Nationale était divisé sur la question. Je dois vous dire, M. le Président, que nous avions fait erreur en ce qui concerne le degré de courage que pouvait démontrer, même à l'encontre de... m: BELLEMARE: A l'ordre!

M. LE PRESIDENT: Je n'ai pas encore eu l'occasion de donner une directive quant à cette motion-là. L'honorable chef de l'Opposition a tous les droits et privilèges de citer des déclarations qui auraient été faites par des ministres ou par des députés, concernant le temps où ce projet de loi pouvait être étudié. Cependant, je crois qu'il conviendra avec moi que nous sommes non seulement sur le chemin, mais presque rendus à destination d'un débat au fond.

M. BELLEMARE: C'est ça.

M. LESAGE: M. le Président, je ne discute aucunement le fond de la question. J'ai certainement le droit, cependant de décrire la situation. Je prends l'engagement de ne pas toucher au fond de la question. Quant à la réaction des hommes devant le problème, cependant, j'ai le droit d'en parler.

Oui, je dis que nous nous étions trompés,

M. le Président. Le premier ministre a fait preuve d'un grand courage, parce que, lui, il a été fidèle à sa parole. Le lundi 9 décembre, il déposait le projet de loi 85, en même temps qu'il annonçait une commission d'enquête sur les problèmes linguistiques et cela — il l'a dit lui-même — après de nombreuses séances du conseil des ministres et du caucus des députés de l'Union Nationale.

Comme l'avait demandé le premier ministre dans sa déclaration du mercredi 27 novembre, nous de ce côté-ci de la Chambre, nous étions prêts à éviter ce que le premier ministre appelait « une escalade de peurs irrationnelles et cet affrontement d'extrémismes, qui ne pourraient que rendre plus difficile une solution juste et compromettre peut-être, sans bénéfice pour personne, la paix et l'harmonie qui doivent exister au sein de la communauté québécoise. » Mais, il semble que les adversaires du premier ministre, à ce moment-ci, ne sont pas, M. le Président, les personnes qui siègent à votre gauche, mais bien plutôt un groupe de celles qui siègent à votre droite.

M. BELLEMARE: Je ne pense pas que cette intervention du chef de l'Opposition puisse apporter rien de constructif dans le débat qui est présentement devant la Chambre. S'il veut attaquer tout un groupe, je ne pense pas que ce soit son genre à lui. Il est plus courtois que ça et Je pense qu'il peut rester fidèle au parlementarisme qu'il a acquis ici et ailleurs afin de faire un débat plus serein et rester dans la limite de la gentllhommerie que je lui reconnais. Si le chef de l'Opposition prend une autre attitude, il l'aura voulu. Nous le suivrons exactement sur le même terrain.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESAGE: Je n'ai attaqué personne en particulier, mon intention, d'ailleurs, c'est de dissocier dans quelques instants le député de Champlain du groupe dont je viens de parler.

M. BELLEMARE: Malgré que ce serait peut-être un geste courtois à mon endroit...

M. LESAGE: Et mérité, d'ailleurs.

M. BELLEMARE: Je dis que je suis solidaire d'une équipe et que je le demeure.

M. LESAGE: C'est pour cela que, tantôt, je serai obligé de montrer tellement de compassion pour le leader du gouvernement de la Chambre. Nous étions prêts, nous, à entreprendre

dans la sérénité, dans la plus entière sérénité, la discussion en deuxième lecture du bill 85. Hélas!, un événement extrêmement malheureux est survenu, événement qui a surpris tout le monde, c'est la maladie qui a obligé le député de Missisquoi à prendre un repos de quelques semaines à la suite de ce surmenage que lui avaient occasionné au cours des dernières semaines, ses fonctions de premier ministre et de chef de parti, la deuxième étant beaucoup plus troublante que la première.

M. LAFONTAINE: C'est votre expérience?

M. LESAGE: Que se passe-t-il donc? Je pense que le ministre de la Voirie est un fidèle du premier ministre, lui aussi, et je lui rends ce témoignage.

M. LAFONTAINE: Certainement. M. BIENVENUE: Très bien.

M. LESAGE: Que se passe-t-il du côté ministériel? On a l'impression que durant l'absence du chef, la pagaille règne et que le caucus de l'Union Nationale est devenu la tour de Babel...

M. BELLEMARE: La motion.

M. LESAGE: ... et que les hommes sérieux de l'Union Nationale ne peuvent plus faire entendre la voix de la raison; et ça, ce sont les gens de l'Union Nationale.

M. LE PRESIDENT: Je pense que l'honorable chef de l'Opposition conviendra que nous risquerions très fort de nous engager dans un débat sur le fond par une porte d'à coté et je comprends que cette façon d'agir est très habile mais qu'elle risquerait de nous engager dans un débat au fond de la question par le moyen des personnes.

M. LESAGE: Je ne ferai plus de personnalité, sauf pour faire du vice-premier ministre un ami. Et je voudrais me faire son ami. Il est arrivé en Chambre cette semaine. Il vient d'assumer les fonctions de vice-premier ministre et il a une très grande responsabilité. Je pourrais faire des jeux de mots, étant donné son nom, disant que un cardinal est un prince de l'Eglise.

C'est un peu ce qui m'a fait penser au Prince Florentin. Et voici ce que Machiavel donnait comme conseil. C'était Florentin qui parlait: « ...et tu verras toujours que celui qui n'est pas ton ami te priera de demeurer neutre, et celui qui t'est ami te sollicitera à te découvrir par les armes. Les princes mal résolus pour éviter les présents dangers suivent le plus souvent la neutralité et, le plus souvent aussi, sont ruinés. »

Je viens de me montrer un ami du ministre de l'Education, en lui donnant un conseil de véritable ami. J'espère qu'indépendamment du mot Machiavel, du mot Prince et du mot Florentin, il se souviendra toujours du plus grand danger qui guette un homme qui a la responsabilité de la direction et celui qui a la responsabilité des décisions, c'est celui de l'atermoiement et de la neutralité.

Mais pourquoi — je pense bien que vous serez peut-être plus à l'aise M. le Président — pourquoi référer le bill 85, avant même que les députés aient pu faire connaître en cette Chambre, au cours du débat de deuxième lecture, leur point de vue sur cet important sujet? On sait que tous les députés ne font pas partie des comités. On sait aussi combien il est facile, pour l'Union Nationale, de reporter les discussions aux calendes grecques en référant les questions importantes à des comités. Exemple, le comité de la constitution, qui a attendu deux ans et demi, avant de siéger sous le gouvernement de l'Union Nationale. Vous savez, M. le Président, c'est un bien curieux de gouvernement. Vous, vous êtes indépendant, je peux vous en parler, c'est un bien curieux de gouvernement que nous avons.

M. BELLEMARE: Ce n'est pas cela qui est dans la motion...

M. LESAGE: C'est le gouvernement qui présente la motion.

M. BELLEMARE: Ce n'est pas une preuve. Ce n'est pas le sujet en discussion, même si l'honorable chef de l'Opposition...

M. LESAGE: Le gouvernement est sujet à discussion.

M. BELLEMARE: Même s'il semble avoir beaucoup de plaisir à le faire, je lui demande, si possible, de parler de la motion en discussion.

M. LESAGE: C'est ce que je fais.

M. BELLEMARE: Oui, par toutes sortes d'autres moyens qui ne sont pas permis.

M. LESAGE: Oui.

M. BELLEMARE: Je pense que l'honorable chef de l'Opposition ferait moins perdre de

temps à la Chambre, si on parlait de la motion. C'est simple. On a mis de côté l'article 536, et on veut faire un comité. Ce n'est pas le procès du gouvernement.

M. LESAGE: Oui, c'est un bien curieux de gouvernement. C'est un gouvernement qui a peur d'agir et qui invente...

M. ALLARD: Nous pouvons disséquer l'Opposition libérale, nous aussi.

M. LESAGE: ... toutes sortes de stratagèmes pour cacher son incapacité...

M. BELLEMARE: M. le Président, quand on parlera de l'Opposition, tout à l'heure, vous nous laisserez faire. On va disséquer l'Opposition, nous aussi.

M. LAVOIE (Laval): Oui, oui, oui!

M. BELLEMARE: ...pour savoir combien il y a de chefs et comment il y a d'ailes.

M. LAVOIE (Laval): D'accord.

M. BELLEMARE: ... comment cela suit.

Il y en a même qui sont obligés de s'en aller en voyage.

M. LESAGE: Je m'en tiens strictement à la motion. Je dis que nous avons un gouvernement qui...

UNE VOIX: ... qui c'est le sous-chef? Et la pagaille...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESAGE: ... invente des stratagèmes pour cacher son incapacité et sa profonde division. Je n'invente rien. Le Devoir de ce matin dit: « C'est le dernier coup de théâtre d'une série d'événements spectaculaires qui, depuis quelques jours, ont transformé le Parlement en véritable capharnaüm et en un immense « lobby » par le truchement duquel les députés les plus nationalistes de l'Union Nationale ont réussi à faire retraiter le gouvernement et à ajourner une mesure législative à laquelle M. Bertrand avait accroché son nom.

M. GABIAS: C'est brillant ça.

M. LESAGE: Puis devant cette division intérieure...

M. COURCY: L'ami du prince.

M. LESAGE: Que le député de Champlain m'écoute bien — même les hommes les plus lucides, les plus expérimentés — je m'adresse au député de Beauce...

M. ALLARD: Qu'est-ce que cela a à faire avec la motion?

M. LESAGE: ... parmi ceux qui occupent les sièges à votre droite, sont pris de panique. Nous en avons la preuve par la motion.

M. BELLEMARE: Nous vous avons montré ça ce matin que nous étions pris de panique.

M. LESAGE: Nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous pensons que, sur le plan linguistique, il y a des choses importantes à dire et tous les députés représentant les comtés du Québec ont non seulement le droit mais le devoir de faire entendre leur voix, de se prononcer.

C'est pourquoi nous croyons que le bill 85, avant d'être référé à un comité, devrait être discuté en deuxième lecture en cette Chambre pour que chacun puisse s'exprimer sur le principe.

Connaissant la loyauté du leader du gouvernement en cette Chambre pour ses chefs...

M. BELLEMARE: J'ai peur de vous, lorsque vous commencez ainsi.

M. LESAGE: Non, il n'y a pas de peur à y avoir. Je suis sûr que c'est à reculons que le député de Champlain a accepté d'être le parrain de la motion à l'étude.

M. BELLEMARE: M. le Président, pourquoi ce manquement flagrant aux règlements, pourquoi me prêter des motifs comme celui-là? C'est défendu, ça.

Il n'a pas le droit de dire que je recule. Il sait bien que je ne recule pas.

UNE VOIX: II constate.

M. LESAGE: Comment le député de Champlain peut-il me reprocher de lui attribuer un motif de loyauté et de fidélité à ses chefs?

M. BELLEMARE: Oui, mais... Cela, c'est la présentation et après ça il dit: II recule. N'est-ce pas un motif, ça?

M. LESAGE: C'est un compliment que je veux vous faire.

M. BELLEMARE: Oui, oui. Ne m'en faites pas trop.

M. LESAGE: La raison pour laquelle, sans cloute, il a accepté que cette motion soit en son nom, c'est son souci de préserver le parti. Il se sent une très grande responsabilité durant la maladie de son chef et il va même jusqu'à tenter de réunir à l'équateur le pôle nord et le pôle sud dans son parti. Ce n'est pas à lui qu'il faut s'en prendre...

M. GABIAS: ... s'en vont au pôle nord et au pôle sud.

M. LESAGE: Ce n'est pas au député de Trois-Rivières non plus. C'est un certain nombre de leurs collègues...

M. LAFRANCE: Cela chauffe.

M. LESAGE: II y a des attitudes prises par certains de nos amis d'en face qui sentent la trahison à plein nez.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: Cela, M. le Président, si vous le permettez, nous allons l'employer le mot trahison et nous allons nommer qui, nous, qui a trahi le chef de l'Opposition...

M. LESAGE: M. le Président, je vais retirer mes paroles...

M. BELLEMARE: ... dans son dos cette année. Nous allons le dire, nous.

M. LESAGE: Je vais dire que les Brutus ne se comptent plus parmi nos amis d'en face.

M. BELLEMARE: Si vous permettez ça, M. le Président, je vais employer le mot trahison et je vais mettre des noms.

UNE VOIX: Mettez-les.

M. LE PRESIDENT: Même sans menace, je vais inviter l'honorable chef de l'Opposition à retirer ses paroles...

M. BELLEMARE: II y a une limite.

M. LE PRESIDENT: ... y compris trahison et Brutus.

M. LESAGE: M. le Président, nous sommes prêts.

M. BELLEMARE: Retirez, s'il vous plaît. M. le Président, vous lui avez dit de retirer ses paroles.

M. LESAGE: J'avais retiré le mot trahison, mais qu'y a-t-il de mal à dire Brutus?

M. BELLEMARE: C'est surtout pour ceux qui ne le connaissent pas.

J'ai pensé que c'était un libéral...

M. LESAGE : M. le Président, une fois de plus, vous serez à l'aise. Nous sommes prêts à passer dès maintenant, quant à nous, à la deuxième lecture du bill 85.

Nous croyons qu'il n'y a pas lieu d'accepter la motion présentée par le leader de la Chambre. Nous voulons que tous les députés puissent avoir le droit de faire connaître leur point de vue, et je ne comprends pas pourquoi le ministre de l'Education et le leader parlementaire priveraient tous les représentants du peuple de ce droit strict que leur confère le règlement. Si la motion est adoptée, ce sera le résultat qu'on aura obtenu. Qu'on soit pour ou qu'on soit contre le principe du bill 85, ce n'est pas la question. Ce que nous demandons, nous, de ce côté-ci de la Chambre, c'est que les députés puissent avoir le droit et l'occasion de le dire. C'est ce droit que nous réclamons, et nous n'avons pas l'intention de nous le laisser ravir parce qu'à l'intérieur du parti ministériel, il y en a qui se sentiraient plus à l'aise dans le MIS qu'ici.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nommez-les. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESAGE: M. le Président, nous pourrons peut-être voir qui ils sont. J'ose espérer que tous les députés de cette Chambre consentiront à considérer comme régulier l'amendement que j'ai l'intention de proposer...

M. BELLEMARE: Il n'a pas le droit, M. le Président, en vertu de l'article 221...

M. LESAGE: ... et qui se lit comme suit:...

M. BELLEMARE: M. le Président, je soulève un point d'ordre. Nous ne pouvons pas le permettre, à ce stade-ci de notre discussion, et particulièrement à cause de la limpidité de l'article 221, qui est clair, qui ne se discute pas et qui revêt une forme impérative: « Une motion portant suspension d'une règle particulière ou des règlements en général ne peut être amendée — c'est impératif — qu'avec le consentement

unanime de la Chambre ». Il n'y a pas consentement unanime.

M. LESAGE: M. le Président, le député de Champlain ne veut pas. Il suffit d'une...

M. DOZOIS: Nous voulons suivre le règlement.

M. COURCY: Vous l'avez dit tantôt.

M. LESAGE : M. le Président, il est clair que des banquettes ministérielles viennent les expressions de ceux qui craignent la vérité.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESAGE: M. le Président, je continue...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! C'est que l'honorable chef de l'Opposition conviendra...

M. BELLEMARE: Craignent...

M. LE PRESIDENT: ... que l'article 221 existe toujours et qu'on ne peut dire que les gens s'en servent pour telle ou telle raison. Le règlement existe, et je pense que le chef de l'Opposition doit convenir qu'à moins qu'il y ait consentement unanime, il ne peut présenter, à ce moment-ci, une motion d'amendement.

M. LESAGE : C'est ce que je viens de constater, M. le Président...

M. BELLEMARE: Oui, mais vous n'avez pas le droit de dire que vous nous prêtez des motifs.

M. LESAGE: ... qu'on ne me permettait pas de présenter un amendement qui aurait eu pour but - j'ai le droit de dire ça.

Un amendement qui aurait eu pour but — étant donné le refus de procéder immédiatement à la deuxième lecture — de faire réunir le comité de l'éducation tout de suite, avant la prorogation de la session et de reporter la prorogation de la session après que nous aurions disposé du bill 85.

Nous ferons ia même chose pour le bill 56, car nous considérons que, dans ces deux domaines, nous, les représentants du peuple, nous avons des responsabilités très graves dont nous devons nous acquitter avec un sentiment de très grande urgence. Nous n'avons pas le droit de proroger la session tant qu'il reste des questions aussi graves à trancher.

Elles sont aussi graves, ces questions, que le bill 290 que le député de Champlain veut absolument faire adopter.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: Le chef de l'Opposition vient de me mettre directement en cause au sujet d'une autre loi qui est devant la Chambre, M. le Président. Je ne pense pas que l'interprétation qu'il a donnée soit la plus juste et la plus vraie.

M. LESAGE: C'est aussi important de discuter ces deux projets de loi et d'en disposer d'une façon définitive que c'est important de disposer d'un budget supplémentaire.

M. BELLEMARE: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! Il y a toujours des limites, M. le Président!

M. LE PRESIDENT: Al'ordre! Al'ordre! Les remarques que fait actuellement l'honorable chef de l'Opposition peuvent se faire en vertu de l'article 114, mais à un autre moment, parce qu'actuellement nous sommes à discuter d'une motion précise.

M. BELLEMARE: C'est ça.

M. LESAGE: N'importe quand, M. le Président.

M. BELLEMARE: Non.

M. LESAGE: Y a-t-il lieu ou n'y a-t-il pas lieu d'accepter cette motion qui aura pour effet de reporter aux calendes grecques une question que nous devons régler et que j'ai le droit comme Québécois et comme...

M. BELLEMARE: C'est faux. M. LESAGE: ... Canadien... M. DOZOIS: C'est faux.

M. LESAGE: J'ai certainement le droit d'exprimer une opinion quant à l'urgence et à l'importance de la question comparée à d'autres que le gouvernement veut nous voir régler d'ici ce soir...

M. BELLEMARE: Non, non, non! Vous verrez...

M. LESAGE: ... d'après les opinions exprimées.

M. BELLEMARE: M. le Président, l'honorable chef de l'Opposition verra tout à l'heure que la prorogation de la Chambre n'est pas pour ce soir.

M. LESAGE: D'abord, ça ne serait pas possible.

M. BELLEMARE: Non, d'accord.

M. ALLARD: D'ici au 23, on a du temps.

M. LESAGE: Quant I nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous sommes prêts à siéger régulièrement...

DES VOIX: C'est ça.

M. LESAGE: ... et aussi longtemps qu'il le faudra pour apporter une solution...

M. ALLARD: C'est faux.

M. LESAGE: ... au problème fondamental mis en cause par le bill 85.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education.

M. Jean-Guy Cardinal

M. CARDINAL: M. le Président, le gouvernement apris ses responsabilités, contrairement aux affirmations que l'on vient de faire.

Cette responsabilité, c'est celle de se faire aviser, celle d'entendre les voix de la population sur un sujet aussi important, aussi fondamental que celui qui est devant nous. Les députés ne sont pas, pour autant, empêchés de se faire entendre. Ils pourront, comme toute autre personne, s'exprimer au comité, comme ceci a toujours été fait dans le passé. Dans les circonstances, on peut difficilement, surtout pour des raisons de partisanerie, s'opposer à ce que les différents mouvements, les associations, les groupes intéressés par le problème, fassent entendre leur voix.

Il ne peut être question, dans un domaine semblable, en fin de session, alors que, souvent, tout se passe à la vapeur, d'empêcher la population...

M. BIENVENUE: Pourquoi la vapeur?

M. CARDINAL: ... de s'exprimer. Il est vrai que j'ai accompagné le premier ministre, l'honorable Jean-Jacques Bertrand, lorsqu'il a rencontré un groupe de citoyens, à Montréal. Comme l'a indiqué clairement l'honorable chef de l'Opposition, j'étais solidaire et je demeure solidaire de notre premier ministre.

UNE VOIX: Prouvez-le.

M. CARDINAL: Je désirerais rappeler au chef de l'Opposition les paroles que j'ai prononcées, le 4 décembre dernier, date dont il doit se souvenir, alors qu'après l'élection de Bagot, je rappelais cette loyauté envers le chef et ce désir de servir le comté de Bagot, le Québec, et le chef, M. Jean-Jacques Bertrand.

Le chef de l'Opposition affirme qu'il n'a pas été question de référence à un comité, lors de cette réunion. Pour le faire, il s'en rapporte, sans les citer, aux journaux. J'étais présent à cette réunion, lui-même l'a affirmé et reconnu. Je puis vous assurer qu'il a été discuté de cette question de référer à un comité un projet de loi en cette matière. Le premier ministre n'a alors fait de déclaration ni contre ni pour un tel projet. Les déclarations de l'honorable Bertrand, vous les utilisez. Mais vous les utilisez à quelles fins? Je ne ferai pas de procès d'intention. Mais, je puis les reprendre, ces déclarations, dans l'ordre et dans leur contexte. Le mercredi 27 novembre 1968, à la même page que vous avez citée, 4326, dans une déclaration ministérielle, je cite M. Bertrand. Celui-ci disait: « Je me proposais de déposer cette semaine un projet de loi concernant les droits linguistiques dans l'enseignement. »

Dans le paragraphe suivant, M. Bertrand ajoutait; « Nous avons pris connaissance également des réactions et opinions exprimées en divers milieux. » Il parlait du rapport du comité de restructuration scolaire. « Nous avons dégagé de tout cela les éléments d'une solution qui était d'autant plus urgente qu'il y avait un cas spécifique à résoudre. C'est à cause de cette urgence que j'avais moi-même annoncé que le projet de loi serait, sinon discuté et adopté, du moins déposé cette semaine. » A la même page, M. Bertrand, après quelques interventions, ajoutait: « C'est pourquoi, conscients de nos responsabilités devant le Parlement et devant l'opinion publique, nous avons décidé de ne pas présenter le projet de loi cette semaine. Nous le déposerons sûrement avant la fin de la présente session, car, il n'y a pas à se le cacher, il s'agit d'un problème délicat et difficile; d'un problème qui touche à ce que tous les hommes ont de plus cher, leur langue et leur culture, et un problème où les réactions émotives peuvent parfois prendre le pas sur la froide raison. »

Dans une déclaration aux journaux, le 29 novembre 1968, à une question de M. Sydney Mar-golese, du poste CJAD, lui demandant ce qu'il avait l'intention de faire au sujet du problème des langues avant la fin de la session, M. Bertrand avait répondu: « The bill I have mentioned will be presented to the House after those two by-elections and I also hope, because that I am

one Member of the Parliament, that we will have the cooperation of all the Members of Parliament, so that it will be adopted through the usual channel or through a study of the same bill in one of those committees that we have in the House, either through the Parliamentary committee on Education or the Parliamentary committee on the Constitution. »

M. LESAGE: C'est exactement l'amendement que j'ai proposé: qu'il soit adopté à cette session en passant par le comité.

M. CARDINAL: M. le Président, est-ce que l'honorable chef de l'Opposition...

M. BELLEMARE: Tenez-vous donc tranquille.

M. LESAGE: Il vient de confirmer ma demande.

M. BELLEMARE: Tenez-vous donc tranquille. Pourquoi cet énervement pour rien, ce manque de patience?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. CARDINAL: ... En aucun moment, je ne crois avoir interrompu le chef de l'Opposition, malgré le ton de ses paroles à certains endroits.

M. BELLEMARE: Ce n'est pas gentil ça. Laissez-le donc tranquille.

M. LESAGE: Bien oui, mais il vient d'admettre qu'on avait raison.

M. BELLEMARE: Reprenez donc votre calme.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. CARDINAL: M. le Président, dans le journal des Débats de l'Assemblée du lundi 9 décembre 1968, à la page 4647, dans une autre déclaration ministérielle où il était question de l'enquête sur les problèmes linguistiques, l'honorable premier ministre s'exprimait ainsi: « Ce sera l'objet d'un projet de loi dont l'avis apparaît au feuilleton de la Chambre et dont le texte, avec la permission du chef de l'Opposition et de mes collègues de la Chambre, pourrait être appelé immédiatement en première lecture pour qu'il soit porté à la connaissance de tous les députés de cette Chambre, de la presse et du public. »

M. le Président, je pense que ces citations précises des paroles du premier ministre indiquent, d'une part, que le gouvernement a rempli sa promesse de déposer un projet de loi en matière linguistique, le bill 85 et, d'autre part, que l'on ne peut pas attacher quelque importance que ce soit aux interprétations que l'on peut donner du fait qu'aujourd'hui cette motion ait été présentée par le leader de cette Chambre.

J'ai, d'ailleurs, vu, ce matin même encore, l'honorable premier ministre et vous pouvez être assurés qu'il accepte cette référence au comité de l'éducation. D'ailleurs, on le sait — le chef de l'Opposition l'a mentionné lui-même — M. Bertrand, alors même qu'il était ministre de l'Education, avait lui-même, à certaines occasions, tout particulièrement lors de l'adoption du bill 21 créant les collèges d'enseignement général et professionnel, référé des projets de loi au comité permanent de l'éducation. L'on sait que, tout récemment encore, le gouvernement a référé des projets de loi urgents, mais peut-être moins importants que le bill 85, au même comité. Je souligne, en passant, que ce comité a tenu ses réunions durant une période où le ministre de l'Education avait d'autres occupations. Je remercie, en passant, l'Opposition de l'aide qu'elle m'a apportée lors de l'élection du 4 décembre 1968.

M. COURCY: II serait mieux de remercier les « bulls » les « scrapers », puis les vaches et les bulldozers. Un éducateur devrait dire la vérité.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M» ROY: Les transmissions pour Boisvert.

M. COURCY: Informe-toi à ton voisin: 40 travaux dans dix paroisses, 40 projets en marche, l'asphalte sur la neige...

M. BELLEMARE: Acceptez-la donc, votre défaite.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable ministre de l'Education.

M. CARDINAL: Je comprends les réactions vives du député d'Abitibi-Ouest, et je pense que toute la Chambre les comprend.

M. COURCY: Il y a du hockey ce soir. J'ai un billet.

M. CARDINAL: Je reviens donc au sujet.

M. KENNEDY: Cela va être une bonne partie ce soir.

M. CARDINAL: Un bill a donc été déposé, tel qu'il avait été promis. La promesse est remplie; le gouvernement n'a en rien reculé. On a mentionné que des gens s'étaient fait entendre avant que le projet de loi ne soit déposé. Oui. Des groupes ont fait entendre leurs voix de façon plus ou moins bruyante avant que le projet de loi ne soit déposé, avant même, peut-être qu'il n'existe un projet de loi. Je pense qu'il y a une différence entre des voix qui se font entendre sur des nouvelles qui peuvent paraître dans les journaux, sur des rumeurs ou sur des projets, et des voix qui peuvent se faire entendre à la suite de l'étude d'un projet de loi. Je reviens d'ailleurs sur ce terme étude. Qu'on prenne les déclarations de l'honorable Jean-Jacques Bertrand ou qu'on prenne les déclarations que j'ai moi-même faites - et qu'on retrouve dans les journaux, d'ailleurs — on verra que c'est le mot « déposer » et le mot « étudier » qui ont toujours été employés. Faire de la partisanerie avec une question semblable alors que le premier ministre est malade, après avoir utilisé la procédure pendant près d'une journée tout en laissant croire à de la sympathie et en alléguant l'urgence, je ne pense pas que ceci échappe à personne. Affirmer que le caucus est divisé, c'est une affirmation facile, et je ne me permettrai pas en cette Chambre d'utiliser les mêmes procédés.

DES VOIX: Oh! Oh! Son Eminence!

M. MAILLOUX: Pas de permission à donner.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable ministre de l'Education.

M. CARDINAL: Le premier ministre, M. Bertrand - le chef de l'Opposition l'a indiqué — a fait preuve de courage. Le gouvernement démontre aujourd'hui le même courage dans les circonstances. Je veux bien être ami de M. Le-sage, mais je choisis mes amis après les avoir bien connus. Je remercie l'honorable chef de l'Opposition de son conseil, tout en soulignant que c'est un Conseil machiavélique. Le conseil. Moi, je ne lis pas Machiavel, je lis l'histoire de mon pays.

M. COURCY: Parlez-nous donc du ballet aussi. L'histoire du ballet russe.

M. CARDINAL: II n'est pas question, comme on l'affirme, de référer aux calendes grecques le projet de loi 85 mais, comme l'indique le motion, à la prochaine session. M. Lesage aurait-il peur des comités?

M. LESAGE: Non, ni du ministre de l'Education.

M. CARDINAL: Particulièrement de celui de l'Education?

DES VOIX: Ce soir.

M. LESAGE: Ce soir. Nous sommes prêts.

M. CARDINAL: Le comité de l'éducation, à qui ce projet de loi sera référé, comité qui siège présentement, a pris plusieurs jours uniquement pour étudier les projets de loi 56 et 61.

Je pense que ce n'est pas possible, dans les circonstances, et c'est une des raisons de la motion de hâter l'étude d'un tel document. Comment voulez-vous qu'en réunissant sans délai ce comité, vous puissiez croire que tous les groupes intéressés, que toutes les personnes qui peuvent se faire entendre puissent le faire à si brève échéance? La vraie question est de permettre à tous, députation et population, de s'exprimer sur un sujet aussi fondamental. L'Opposition veut-elle empêcher que les gens aient la possibilité et le temps de la réflexion, le temps de s'exprimer d'une façon exhaustive sur un sujet aussi important?

UNE VOIX: Vous auriez peut-être avantage à écouter.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. CARDINAL: Pour respecter le droit des gens qui ont demandé à se faire entendre, tout en respectant le droit des députés de se faire entendre, à cause de la nécessité d'étudier ce projet, à la suite de plusieurs suggestions qui ont été faites depuis le dépôt du projet, soit dans les journaux, soit par des associations, soit par la radio ou la télévision, il est de l'intérêt public que ce bill soit référé au comité de l'éducation et que la motion proposée soit adoptée. Le gouvernement prend et prendra toujours sa responsabilité, face à une situation qui doit être corrigée...

M. COURCY: Il se trouve à être coincé.

M. CARDINAL: ... et ce n'est pas en hâtant l'adoption du projet de loi que ces responsabilités seront le mieux assumées. Bien des gens ont manifesté l'intention que ce bill soit étudié, qu'il soit amendé. Il faut que cette étude puisse se faire dans la paix, dans un délai raisonnable. Il faut que cette étude puisse se faire pour que le pro-

jet de loi, en cette matière, soit un projet qui représente vraiment les aspirations du Québec et qui résolve vraiment les problèmes qui se sont posés ou qui pourraient à l'avenir se poser.

Je pense donc que les deux côtés de la Chambre...

M. COURCY: Il est contre le bill!

M. CARDINAL: ... tant le côté ministériel que l'Opposition, devraient comprendre l'intérêt qu'il y a d'approuver la motion du leader de cette Chambre. Je pense qu'il faudrait éviter que des procédures ou que des interventions, justement devant l'urgence de la question, viennent retarder l'adoption de cette motion.

UNE VOIX: L'urgence? DES VOIX: L'urgence?

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Vaudreuil- Soulanges.

M. Paul Gérin-Lajoie

M. GERIN-LAJOIE: La motion qui est actuellement devant nous touche à un sujet de la plus grande importance. Je pense que je n'ai pas besoin d'insister. On l'a assez souligné depuis le début de la journée. Le bill 85, que l'on propose de référer au comité de l'éducation, après la prorogation de la présente session, est un projet de loi qui touche à un sujet qui va, bien sûr, jusqu'aux entrailles les plus profondes de tout citoyen.

Il faut ajouter que non seulement la question est très importante en soi mais qu'elle se présente dans un contexte particulier, un contexte que l'on peut, je pense, sans exagération, qualifier d'agitation sociale. Je pense que tous les membres de cette Chambre, sans exception, doivent être fort préoccupés de voir s'apaiser cette agitation qui se propage à travers le Québec, non seulement depuis quelques mois, mais depuis maintenant quelques années. Si j'invoque cette agitation sociale, c'est précisément en rapport avec la motion qui veut soumettre à notre approbation un délai supplémentaire pour l'adoption d'un projet de loi qui était destiné -c'est du moins ce que nous avions compris, de ce côté-ci de la Chambre - à faire disparaître ou, à tout le moins, diminuer grandement l'agitation sociale actuelle.

M. LE PRESIDENT: Malheureusement, je dois interrompre l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges car il s'achemine très rapidement vers le principe du bill.

M. GERIN-LAJOIE: M. le Président, je veux bien tenir compte de la préoccupation qui anime votre appel à la prudence de ma part. Vous comprenez sans doute, comme les membres de cette Chambre, que si j'ai invoqué les faits, ou la situation que j'ai mentionnés depuis quelques instants, c'est précisément parce que je suis profondément convaincu que tout délai dans l'étude et dans la disposition du bill 85 est une source de prolongation de cette situation troublante dans laquelle se trouve actuellement la population de la province de Québec.

Je ne dois pas cacher que l'intervention que vient de faire le ministre de l'Education, premier ministre intérimaire, m'a profondément déçu parce que j'ai le sentiment très net que, dans cette intervention, le ministre n'a pas le moindrement répliqué à l'intervention qu'a faite tout à l'heure le chef de l'Opposition.

Le ministre de l'Education a parlé tout à l'heure uniquement comme si nous de l'Opposition avions objection à référer le bill 85 pour étude approfondie par le comité de l'Education, un comité qui pourrait entendre toutes les parties intéressées.

M. GRENIER: M. Lesage avait justement argumenté qu'on voulait parler... et M. Cardinal a répondu à ce moment-là que la députation pourrait se faire entendre au comité.

M. COURCY: Qu'est-ce qui se passe? Envoyez-le au hockey.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. GRENIER: Des tueurs de temps à $18,000.

M. COURCY: Envoyez-le au grenier.

M. GRENIER: Ce n'est pas votre meilleure.

M. LE PRESIDENT: Je veux signaler aux honorables députés que nos règlements ne permettent pas premièrement, deux interventions en même temps, et, deuxièmement, un détail qui s'est produit quelquefois aujourd'hui, c'est que les honorables députés doivent être désignés comme député de la circonscription qu'ils représentent.

L'honorable député de Vaudreuil-Soulanges.

M. GERIN-LAJOIE: M. le Président, j'ai écouté très attentivement le ministre de l'Education et il s'en est pris à l'Opposition comme si nous avions objection à la référence du bill à un comité, plus précisément au comité de l'éducation. Il n'en est rien.

La position du parti libéral, de l'Opposition

officielle en cette Chambre, au sujet de la motion qui est actuellement devant nous et au sujet de la procédure à suivre pour le bill 85, c'est ceci: Notre position peut s'exprimer en deux points très simples et très brefs.

Premièrement, nous insistons pour que cette Chambre procède d'abord à l'étude en deuxième lecture avant d'aller en comité. Deuxièmement, nous insistons pour que l'étude en comité — et que ce soit à ce moment-là le comité plénier de la Chambre ou le comité de l'éducation, peu importe — se fasse le plus tot possible avant la prorogation de la session de façon à ce que le comité puisse, après avoir entendu les intéressés, après avoir délibéré, faire sans délai rapport à cette Chambre pour qu'à ce moment-là nous puissions disposer du bill 85 en troisième lecture, sans aucun délai supplémentaire.

Ceci est donc aux antipodes de l'attitude qu'a semblé nous imputer le ministre de l'Education. Bien loin de nous opposer à la référence du bill 85 à un comité, nous croyons que cette référence doit se faire le plus tôt possible.

Le parti libéral et ses membres, à partir de son chef et en passant par chacun des collègues du chef de l'Opposition, a toujours eu comme attitude qu'il fallait le plus possible permettre aux membres de cette Chambre, premièrement, d'étudier dans le détail les projets de loi en les référant à des comités particuliers et, deuxièmement, de permettre à tous les corps intéressés dans notre société de s'exprimer sur le projet de loi. Cette attitude, qui a été une attitude constante des membres de cette Chambre qui siègent à votre gauche depuis au moins 1960 — je ne puis remonter plus loin dans l'histoire parlementaire du Québec pour l'instant — cette attitude que nous avons eue de façon constante, nous la maintenons aujourd'hui et nous croyons qu'encore aujourd'hui, il est non seulement utile, mais nécessaire pour le bon fonctionnement de nos institutions et nécessaire pour la paix sociale que, sur un projet comme celui-ci, on entende tous les corps, tous les groupes intéressés et toutes les personnes qui représentent un groupe. Mais que cela se fasse, cependant, dans l'ordre et suivant la procédure qui favorise le plus possible le bon fonctionnement de la démocratie.

J'ai bien dit que notre première demande, c'était qu'on procède d'abord à l'étude en deuxième lecture. Ce n'est pas par caprice, M. le Président. D'abord, il y a un règlement. Un règlement qui régit cette Chambre. De part et d'autre, qu'il s'agisse du ministre du Travail, qu'il s'agisse du chef de l'Opposition ou de qui que ce soit de leurs collègues, nous invoquons ce règlement constamment. Bien sûr, à l'occasion, des propositions sont faites pour mettre de côté un article du règlement. C'est ce qu'a fait le ministre du Travail aujourd'hui, au nom de tous ses collègues, proposant qu'on mette de côté un article du règlement, ce qui a finalement été fait par le voeu d'une majorité des membres de cette Chambre.

M. le Président, je pense que ce règlement, nous devrions comprendre dans quel but il est fait. Quand le ministre de l'Education nous disait tout à l'heure que les députés pourront s'exprimer en comité, eh bien, le ministre de l'Education sait sûrement que s'exprimer en comité ou s'exprimer en cette Chambre à l'occasion de l'étude en deuxième lecture, ce n'est pas la même chose. L'étude en deuxième lecture a précisément pour but de permettre aux membres de cette Chambre de s'exprimer sur le principe de ce bill. Qu'en comité, nous entendions les intéressés pour discuter de toutes les modalités pour atteindre un objectif proposé par le gouvernement, nous sommes d'accord, mais qu'on discute d'abord de l'objectif; qu'on discute d'abord du principe qui nous est proposé par le gouvernement. Cette idée, qui est à la base même de notre règlement, est d'autant plus importante dans les circonstances actuelles que nous sommes dans une situation où le gouvernement a proposé et fait adopter en première lecture un projet de loi qui est, normalement, l'expression de l'orientation de la politique du gouvernement.

Or, voilà que les événements qui se sont déroulés depuis que ce projet de loi a été rendu public sont de nature à faire naître et entretenir dans la population des doutes les plus sérieux sur les intentions du gouvernement. Le gouvernement parraine-t-il vraiment encore ce projet de loi, ou le gouvernement serait-il tout disposé à le mettre complètement de côté après la présente session, à la suite d'études en comité? Nous n'en savons rien.

Depuis les tristes événements au sujet du premier ministre du Québec, son absence de cette Chambre, son hospitalisation, la prise en main des rênes du gouvernement par le premier ministre intérimaire actuel, tous ces événements sont de nature à entretenir dans la population des doutes sérieux sur la politique vé-ribable, sur les buts poursuivis, sur les objectifs entretenus par le gouvernement actuel.

Le ministre de l'Education ne nous a pas dit — d'ailleurs, les règlements ne lui permettaient pas de nous dire à ce stade-ci de nos délibérations — si ce projet de loi représente sa pensée, et la pensée du gouvernement dont il est le premier ministre intérimaire. Ce n'est qu'à l'occasion d'un débat de deuxième lecture que nous aurions pu entendre le premier ministre intérimaire et ses collègues nous dire si ce

projet de loi représente, au moins dans ses objectifs, sinon dans ses modalités, les buts, la politique poursuivis par le gouvernement actuel. Qu'on réfère ce projet de loi, à l'heure actuelle, avant deuxième lecture, à un comité pour entendre tous les intéressés, eh bien, cela est l'équivalent, de la part du gouvernement, d'une démission devant le projet de loi, dans le sens suivant: Le gouvernement donne très nettement l'impression qu'il se dissocie du projet de loi, qu'il s'agit dans ce cas-ci, bill 85, d'un projet de loi hérité comme d'un autre gouvernement et que le nouveau gouvernement veut le référer à un comité pour entendre tout le monde s'exprimer et, au besoin, rejeter le projet de loi présenté à cette Chambre par un ancien gouvernement, par un ancien premier ministre.

UNE VOIX: Très bien.

M. GERIN-LAJOIE: Ce que je dis actuellement, M. le Président, peut paraître assez dur. Je vous avoue que, lorsque je pense au premier ministre actuel, qui est hospitalisé, qui est incapable de s'exprimer, il est fort possible que la façon dont je m'exprime, cet après-midi, soit pour lui une cause de tristesse et de désappointement profond sur le plan humain. Mais, M. le Président, malheureusement le premier ministre n'est pas avec nous et a dû céder temporairement les rênes du gouvernement à l'un de ses collègues.

C'est ce collègue, qui, aujourd'hui, nous propose, avec le député de Champlain...

M. GABIAS: Le député de Champlain.

M. GERIN-LAJOIE: Le député de Champlain, de référer ce bill au comité de l'éducation avant deuxième lecture. Encore une fois, étant donné les événements qui se sont passés, depuis l'hospitalisation du premier ministre, les commentaires qui ont été exprimés dans les journaux, les nouvelles qu'on a lues et les silences aussi qui ont entouré la situation, du côté ministériel, toutes ces nouvelles, toute cette manifestation seraient de nature à augmenter encore cette inquiétude, et à augmenter encore le sérieux des questions qu'on se pose.

Et voilà, M. le Président, que le gouvernement nous propose de prolonger cette inquiétude, de prolonger cette période pendant laquelle la situation ne peut pas faire autrement que s'envenimer. Pensons, M. le Président, que les événements, qui ont donné lieu à ce projet de loi et qui entourent ce projet de loi, peuvent avoir, bien sûr, une origine assez lointaine. Mais ils ont en fait, une origine bien définie et identifiée, qui remonte aux mois de mai et de juin derniers. Il y a donc de cela au-delà de six mois, six mois que la situation est grave, pour un groupe de parents dans une commission scolaire, six mois que la situation est grave dans toute la province.

En effet, des mouvements analogues à celui de Saint-Léonard sont en train de fermenter et l'on assiste à des manifestations de groupes qui vont jusqu'à mettre en cause les enfants de nos écoles, comme on l'a vu, il y a une semaine ou deux.

M. GABIAS: A l'ordre!

M. GERIN-LAJOIE: Devant une situation comme celle-là, quand on songe aux délais qui se sont écoulés depuis le début des événements concrets qui auraient dû mettre en marche la machine gouvernementale pour apporter un remède à cette situation, je crois qu'il faut s'objecter, de façon aussi claire, aussi véhémente et aussi forte que possible, à ce que de nouveaux délais soient imposés avant d'en arriver à une solution.

Je voudrais bien qu'on me comprenne. Je suis très conscient que des problèmes comme celui que touche le bill 85 ne peuvent pas se régler d'un trait de plume, du soir au lendemain. Des problèmes aussi graves que celui-là demandent — avant règlement par un projet de loi et des décisions administratives qui suivront sans doute — des études, des consultations et de la réflexion. Tout cela, je le comprends et je suis sûr que tous, de ce côté-ci de la Chambre, nous le comprenons. Mais, quand une situation comporte les éléments d'urgence qu'on est à même de constater aujourd'hui et quand on constate comment, dans d'autres pays des situations se sont envenimées au point d'entraîner, au moins, des commencements de révolutions violentes — on n'a même pas besoin d'aller jusqu'en France; on peut regarder du côté de nos amis les Américains — je pense que c'est la responsabilité des hommes publics de manifester la plus grande célérité à apporter, au moins, des éléments de solution.

C'est dans cet esprit que le chef de l'Opposition a dit tout à l'heure — c'est aussi l'opinion de tous les députés de ce côté-ci de la Chambre — que nous sommes prêts à consacrer tout le temps nécessaire, à partir de maintenant, à l'étude de ce problème. Bien sûr, le ministre de l'Education a raison de dire qu'il faut rencontrer les groupements intéressés à se faire entendre. Bien sûr, le ministre de l'Education a raison de dire que nous devons étu-

dier ce probjet de loi en comité pour nous permettre, à nous les législateurs, d'entendre tous les points de vue. Mais, cette étude en comité, elle doit se faire, non pas dans un mois, non pas dans deux mois, non pas dans trois mois, mais tout de suite. Si on veut que je précise ce que j'entends par tout de suite, cela veut dire exactement ceci...

UNE VOIX: II faut être présent en Chambre.

M. GERIN-LAJOIE: ... que, dès ce soir, après le souper, nous entreprenions la discussion en deuxième lecture et entendions les exposés du gouvernement sur les objectifs poursuivis par ce projet de loi.

De ce côté-ci de la Chambre — M. le Président, je voudrais que ceci soit bien clair — nous sommes tous et chacun de nous en partant de l'Opposition et en passant par chacun et chacune de ses collègues...

M. GABIAS: Ah! une délicatesse!

M. GERIN-LAJOIE: ... en état de prendre nos responsabilités et de nous exprimer ici publiquement en ce Parlement sur les objectifs que nous devons poursuivre par un projet de loi, pour assurer la paix sociale au Québec, en ce qui concerne les droits linguistiques.

M. GABIAS: Faites revenir le député de Chambly. C'est important. Le député de Gouin.

M. GERIN-LAJOIE: M. le Président, nous croyons...

M. LEFEBVRE: Que le député mâche sa gomme et qu'il nous laisse écouter tranquilles.

M. GERIN-LAJOIE: ... que la population du Québec est en droit d'attendre des membres du gouvernement une même franchise, une même disponibilité à exprimer une opinion. Nous croyons que l'opinion publique du Québec est en droit d'attendre de la part du gouvernement, de la part des membres qui sont ici en Chambre, une expression, non seulement d'opinion, mais une expression de politique gouvernementale sur les objectifs qui doivent être poursuivis pour assurer cette paix sociale en matière de droits linguistiques.

Et quand nous insistons, pour que le débat de deuxième lecture ait lieu sans délai, c'est parce que justement nous voulons que le gouvernement et également les membres de l'Opposition puissent ainsi faire connaître clairement leur opinion. A la suite des expressions d'opinion que nous aurons pu entendre ainsi en deuxième lecture, soit le comité plênier, soit le comité de l'éducation, pourra siéger et entendre tous les intéressés, tenir compte des opinions exprimées, et ensuite sans délai, avant le tournant de l'année, avant la fin de 1968, disposer de cette question ici à l'Assemblée législative en troisième lecture de la façon que le Québec puisse entreprendre l'année 1969, dans une atmosphère de paix sociale plus grande que celle que nous connaissons à l'heure actuelle.

Alors, M. le Président, je pense bien avoir dit clairement ce qu'est ma position et ce qu'est la position de l'Opposition, surtout à la suite de l'intervention du ministre de l'Education qui nous attribuait une attitude qui n'est pas la nôtre.

Je pense avoir dit clairement ce qu'est notre attitude. Premièrement, débat de deuxième lecture ce soir ou lundi matin. Deuxièmement, tout de suite, lundi ou mardi, séance du comité plênier ou du comité de l'éducation pour entendre tous les intéressés et — j'ajoute un détail— que tout de suite ce soir, le gouvernement ou l'Assemblée législative donne avis publiquement que, dès lundi ou dès mardi, notre comité siégera de la sorte, de façon que tous les intéressés puissent être ici pour faire valoir leur point de vue, pour nous exprimer leur opinion, pour nous apporter leurs éclaircissements et que en cette semaine prochaine précédent Noël, nous puissions compléter notre travail parlementaire de l'année en beauté en ayant vraiment posé un nouveau jalon dans l'édification d'un Québec à la mesure de nos aspirations à tous.

M. LE PRESIDENT: L'honorable Secrétaire de la province.

M. Rémi Paul

M. PAUL: Nos honorables amis d'en face semblent quelque peu surpris de la motion présentement à l'étude. Très brièvement, j'ai l'intention de vous rappeler quelques règles qui motivent et expliquent la présentation de cette motion et de signaler également quelques faits justifiant sa présentation.

Tout d'abord, il est intéressant de noter que l'Assemblée législative est régie dans ses délibérations, dans ses travaux, en partie par des lois. Deuxièmement, en partie par le présent règlement qui survit à la Chambre qui l'a voté et qui reste applicable tel quel aussi longtemps qu'il n'a pas été abrogé ou modifié sur une motion annoncée. Troisièmement, en partie par des ordres spéciaux que la Chambre peut voter sur

des motions annoncées, mais dont l'effet est limité aux matières en vue desquelles ils sont votés. Je ne voudrais pas vous les rappeler, parce que je sais que vous connaissez fort bien les notes 1 et 2 que l'on trouve en marge de l'article 1 de notre règlement, où il est dit que « la Chambre peut abroger, modifier ou suspendre une règle établie par le règlement, à moins que cette règle ne soit la reproduction d'une disposition législative. »

Nous avons l'article 216 de notre règlement qui nous donne l'occasion, en certains cas, de mettre de côté certaines règles établies pour mieux atteindre parfois l'efficacité de nos travaux parlementaires. L'article 216 dit que « toute règle écrite ou non écrite de la Chambre peut être suspendue, à moins qu'elle ne soit établie par une loi ou par un ordre spécial, ou qu'elle ne soit fondée sur un principe reconnu de droit parlementaire. » Par conséquent, nous sommes tout à fait dans la légalité en présentant une telle motion. D'ailleurs, il y a un auteur de droit que je voudrais vous citer très brièvement, c'est Beauchesne, qui, dans la quatrième édition, à la page 11, dit que le règlement peut être suspendu dans un cas d'espèce sans que cela porte atteinte à sa validité, car la Chambre a le pouvoir de supprimer les barrières et les entraves qu'elle s'impose à elle-même par son propre règlement. Elle peut même adopter une motion prescrivant une ligne de conduite incompatible avec le règlement.

A prime abord, la motion, telle que présentée, semble incompatible avec les impératifs absolus de l'article 536. Si nous nous référons aux travaux antérieurs de cette Chambre, nous verrons que le fait de mettre de côté l'article 536 ne constitue pas un précédent. On a souvent référé des lois à des comités permanents ou spéciaux de la Chambre. Durant cette session, la Loi du notariat a été référée à un comité ad hoc avant sa deuxième lecture en Chambre. Nous avons le bill 290, dont nous avons terminé, hier, l'étude en comité ad hoc en bas, et qui fera probablement l'objet de nos prochaines délibérations en cette Chambre.

Nous avons eu les bills 56 et 61 qui ont été étudiés au comité de l'éducation avant d'être adoptés en deuxième lecture. Je vous prie de noter que ce travail préliminaire à la deuxième lecture des bills 56 et 61 a été tellement efficace que les principes qui avaient présidé à la présentation des susdits bills 56 et 61 ont été carrément mis de côté; d'où, une nouvelle formulation et un nouveau texte de loi qui nous a été présenté aujourd'hui par l'honorable ministre d'Etat à l'Education.

C'est donc dire que le travail en comité, préalable à la deuxième lecture d'un bill, s'avère, dans certaines circonstances, d'une efficacité remarquable. Il tend à aérer des projets de loi et à apporter des modifications qui répondent mieux aux besoins de la collectivité. Ces besoins sont exprimés par l'entremise des représentations qui sont faites aux membres de ce comité par des corps publics dûment convoqués et appelés à paraître devant ces comités soit volontairement, soit par des mesures appropriées.

Nous avons également un autre comité ad hoc qui a été créé durant cette session pour étudier le bill 29, Loi de la copropriété et nous aurons probablement une motion qui sera présentée pour que le bill 89, Loi des heures d'affaires des établissements commerciaux, soit étudié après l'ajournement de la Chambre en vue d'un rapport lors de la prochaine session.

C'est donc dire que le précédent n'est pas nouveau. Ce qui est nouveau, c'est peut-être la mémoire qui caractérise nos honorables amis.

Si nous nous référons au feuilleton du 13 décembre 1968, nous voyons, à la page 2, une motion présentée par l'honorable député de Chambly pour que l'application de l'article 538 du règlement soit suspendue, quant au bill 99, intitulé Loi abolissant le Conseil législatif. Il s'agissait de discuter d'une prérogative royale et l'honorable député de Chambly a jugé qu'il était peut-être nécessaire de mettre de côté les dispositions de l'article 538. Et nous, en face d'un problème excessivement sérieux et qui peut avoir des répercussions sur nos relations, entre citoyens du Québec, je me demande pourquoi nous n'oserions pas poser un geste de prudence qui puisse nous permettre à nous, législateurs, de nous orienter dans cette législation avec prudence, avec le souci d'accorder à tous et chacun les droits qui leur reviennent, tant par l'histoire que par la constitution elle-même!

Nous aurions pu appeler la deuxième lecture du bill, et faire une motion en vertu de l'article 558, pour demander, même avant son adoption, que ce bill soit référé au comité de l'éducation. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les remarques de l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges. Il peut être assuré que nous sommes tous heureux de le voir revenu dans cette Chambre, car nous aurons besoin de son expérience au comité de l'éducation, pour que le bill 85 puisse être amendé, puisse peut-être apporter des principes nouveaux, comme la chose s'est faite lors de l'étude des bills 56 et 61.

Qu'arriverait-il, si nous passions aujourd'hui à la deuxième lecture du bill 85, et si ce bill était référé par la suite au comité d'édu-

cation ou à un comité ad hoc et que, là, nous soyons placés dans la même position que les membres du comité de l'éducation l'ont été à l'occasion des bills 56 et 61? Il deviendrait beaucoup plus compliqué d'apporter des amendements à la loi, parce qu'il nous faudrait, à ce moment-là, présenter une motion pour fins d'abrogation, lors d'une deuxième lecture que nous adopterions sur le bill 85.

L'honorable chef de l'Opposition et l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges sont inquiets, quant à la liberté de parole ou d'expression qui peut exister au comité. Avec toute l'expérience que possèdent ces honorables messieurs et tous les députés de cette Chambre, est-il arrivé, à un seul moment, qu'un député n'ait pas eu la liberté, qu'il fût membre ou non d'un comité?

M. LESAGE: Oui.

M. BLANK: Oui, à cette session, le député de Gouin.

M. BELLEMARE: C'est faux.

M. LESAGE: C'est vrai, et nous allons relever les notes sténographiées.

M. MALTAIS (Limoilou): C'est faux. M. LESAGE: C'est absolument vrai. M. BELLEMARE: ... du règlement.

M. LESAGE: Absolument pas, on a refusé le droit de parole à un député de cette Chambre qui n'était pas membre du comité.

M. BELLEMARE: C'est faux. Un comité qui siégeait n'avait pas de mandat et c'était là la confrontation...

M. BLANK: Vous jouez avec les mots.

M. LESAGE: Vous jouez avec les mots. Vous refusez le droit de parole à un député à un comité.

M. MALTAIS (Limoilou): C'est faux.

M. BELLEMARE: On verra ça dans ma réplique, tout à l'heure.

M. LESAGE: C'est au député de Gouin.

M. GERIN-LAJOIE: Au comité de l'éducation.

M. LESAGE: Au comité de l'éducation.

M. GABIAS: C'est le chef de l'Opposition qui l'a empêché de parler.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. LESAGE: Non. M. GABIAS: Oui.

M. LESAGE: M. le Président, c'est le président du comité.

M. GABIAS: C'est le chef de l'Opposition qui l'a empêché de parler, il l'a envoyé en Europe pour...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LESAGE: Je vous le dirai, ce sont ses affaires; Astérix.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. BELLEMARE: Obélix.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable Secrétaire de la province.

M. GABIAS: Le chef de l'Opposition a dit: Tais toi, et il s'est tu.

M. PAUL: Je n'ai pas le droit de mettre en doute la parole de l'honorable chef de l'Opposition suivant l'article...

M. LESAGE: Tout le monde est au courant.

M. PAUL: ... je n'avais pas l'avantage, M. le Président, à ce moment-là, j'avais plutôt l'immense responsabilité qui est vôtre aujourd'hui, de présider aux délibérations de la Chambre et, en occupant cette fonction...

M. LESAGE: C'est plus récent que ça.

M. PAUL: ... je n'avais pas, M. le Président, l'avantage de participer aux délibérations comme aujourd'hui. D'ailleurs, si ça s'est produit une fois, on dit toujours que l'exception confirme la règle. Mais, de toute façon, le principe du bill 85 reviendra I l'étude devant cette Chambre, lorsque nous recevrons un rapport du comité de l'éducation. Mais quelle presse y a-t-il de nous lancer dans la four-

naise alors qu'Ottawa, par la voix de son premier ministre, vient de suspendre l'étude du bill des langues? C'est permis à Ottawa.

M. LESAGE: C'est permis à Ottawa, ce sera encore la faute d'Ottawa!

M. PAUL: Non, c'est tout simplement...

M. GERIN-LAJOIE: Le Secrétaire de la province a-t-il la nostalgie d'Ottawa?

M. PAUL: Non, parce que j'ai défendu à

Ottawa les mêmes principes que ceux que je défends ici à Québec.

Et, en certaines circonstances, j'ai été obligé d'être fidèle à mes principes et à me dissocier de certains chefs politiques et je ne le regrette pas parce que je voulais être fidèle à ma conscience et aux principes que je défendais là-bas...

M. GERIN-LAJOIE: Le bill 85.

M. PAUL: ... et que je vais continuer à défendre ici. M. le Président...

UNE VOIX: Un autre candidat!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable Secrétaire de la province.

M. PAUL: M. le Président, l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges nous dit: Dès ce soir, passons à l'adoption de la deuxième lecture du bill. Je vous dis, M. le Président, que dans un projet de loi aussi important, nous n'avons pas le droit d'agir à la légère et l'exemple nous vient, dans une question semblable, identique, du gouvernement d'Ottawa...

M. GERIN-LAJOIE: Vous prenez l'exemple d'Ottawa maintenant?

M. PAUL: ... alors que la question est en blanc, est en suspens depuis près de deux ou trois mois...

M. GERIN-LAJOIE : Vous ne prenez pas vos exemples à Ottawa toujours.

UNE VOIX: Vous les prenez bien où ça fait votre affaire, vous.

M. ALLARD: Vous en avez pris pas mal quand ça faisait votre affaire.

M. BELLEMARE: Ce n'est pas parce qu'ils manquent d'information, eux...

M. GERIN-LAJOIE: Revenez donc dans Québec.

M. PAUL: Oui, nous allons revenir dans le Québec, mais le problème, qu'il soit à Ottawa ou qu'il soit à Québec, lorsqu'il s'agit du problème des langues, lorsqu'il s'agit des droits des minorités ou des majorités, nous n'avons pas le droit de les sacrifier, que ce soient ceux de l'un ou de l'autre des groupes. Et nous avons le devoir...

M. LESAGE: D'accord. M. PAUL: Pardon? M. LESAGE: D'accord.

M. PAUL: Bon, alors c'est justement dans le but de présenter une législation complète que nous donnons l'occasion...

M. LESAGE: Bon. Vous reniez le bill 85 alors?

M. PAUL: Non, M. le Président, ne me prêtez pas...

M. LESAGE: Il est incomplet.

M. PAUL: ... que le chef de l'Opposition ne me prête pas des intentions que je n'ai pas parce que je n'ai jamais renié aucun des principes que j'ai défendus dans ma vie politique.

M. LESAGE: Ce n'est pas un principe, c'est un bill.

M. PAUL: ... Au lieu de demander que ce soit au juge de la cour Supérieure ou des juges de la cour d'Appel qui pourraient légifères sur cette question, c'est nous, les élus du peuple avec le peuple, qui allons écouter leurs revendications... Et les principes...

M. LESAGE: Qu'est-ce que les juges viennent faire dans le bill?

M. PAUL: Ah! Je comprends.

M. BELLEMARE: Demandez cela à M. Pierre Elliott.

M. PAUL: Je le comprends. Mais moi, j'aime le jugement des honorables collègues de cette Chambre, et je n'ai...

M. LESAGE: C'est ce que nous voulons avoir. M. PAUL: ... aucune hésitation à proclamer... M. LEFEBVRE: Nous avons hâte de l'avoir.

M. PAUL: ... qu'ils s'acquitteront de leurs devoirs et de leurs responsabilités en entendant tous les corps publics qui voudront se faire entendre ou faire des représentations. Peut-être aurons-nous raison, à ce moment-là, de changer certains des principes du bill 85 et nous n'aurons pas à faire marche arrière, à annuler des procédures, une étape que nous pourrions adopter aujourd'hui, alors que nous nous appliquerons à sauvegarder les droits de tous et chacun.

M. le Président, puis-je vous signaler qu'il est six heures et vous demander la suspension des travaux jusqu'à huit heures quinze?

M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à huit heures quinze ce soir.

Reprise de la séance à 20 h 16

M. LEBEL (président): A l'ordre, messieurs!

L'honorable Secrétaire de la province.

M. PAUL: Lorsque la Chambre a suspendu ses travaux, à six heures, j'étais à commenter les suggestions qui nous furent faites par l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges et à répliquer en quelque sorte à certaines allégations qu'il nous a communiquées au cours de la séance de l'après-midi. Je n'ai pas, M. le Président, à vous rappeler qu'en aucune façon le droit de parole des députés ne sera brimé si nous chargeons le comité de l'éducation de l'étude du bill 85, parce qu'au comité tous et chacun des honorables députés de cette Chambre pourront se faire entendre. Sur le principe du bill, disons que c'est un droit retenu et que tous pourront en discuter lorsque cette Chambre sera saisie à nouveau de l'étude du bill 85 avec ses principes actuels ou avec tout autre principe que le comité, dans son rapport, pourra nous suggérer d'adopter ou d'inscrire dans le projet de loi.

L'honorable député de Vaudreuil-Soulanges a certainement, par erreur, mentionné que ce bill pourrait être étudié au comité de l'éducation ou en comité plénier. Il serait, en effet, impossible, en comité plénier, d'inviter des témoins ou des corps intermédiaires à nous présenter des mémoires ou à faire des suggestions de nature à nous faire connaître la véritable opinion du peuple québécois avec qui nous avons l'intention de communier dans la réalisation de ce projet. C'est parce qu'il y va de l'avenir des droits linguistiques de tous les citoyens québécois que nous n'avons pas l'intention de procéder à la vapeur, comme nous le suggérait, cet après-midi, l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges.

L'honorable député de Vaudreuil-Soulanges disait: M. le Président, adoptons le bill en deuxième lecture, convoquons le comité de l'éducation et adoptons la loi. Je trouve que c'est un zèle outré, dangereux, si l'on considère que, sur des droits fondamentaux comme ceux de l'éducation, une certaine commission a mis près trois ans avant de produire un rapport à cette Chambre.

Pourtant, l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges occupait à cette époque le poste de ministre de l'Education.

M. le Président, je vous ai mentionné, cet après-midi, le fait que le gouvernement fédéral, justement parce qu'il s'agit d'une question délicate, a décidé, pour le moment, de suspendre. Quelle sera la procédure qu'il adoptera? Quelle sera l'étape nouvelle ou future que franchira le bill des langues à Ottawa? Cependant, ce bill est

introduit à la Chambre des communes après la production d'un rapport de la commission Dun-ton-Laurendeau.

Comment, M. le Président, en procédant à toute vapeur, comme le suggère l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges, les classes intermédiaires auraient-elles le temps d'ici quelques jours de préparer un mémoire bien charpenté, d'apporter des éléments constructifs qui pourraient nous permettre d'entendre toutes les opinions, de quelque milieu que ce soit? Je soumets respectueusement qu'il est impossible et illogique de vouloir procéder avec une telle rapidité. Je n'ai pas à rappeler que tous les députés qui siègent à votre droite sont unanimes quant à la procédure adoptée pour une étude sérieuse, efficace et constructive du bill 85.

Certains ont parlé de trahison. On ne doit jamais parler de corde dans la maison d'un pendu. Cet après-midi, l'honorable chef de l'Opposition, à la suite de ses commentaires sur certaines déclarations faites ici même en cette Chambre par l'honorable premier ministre, a voulu donner l'impression... ou du moins interpréter les textes de manière à laisser croire que nous, députés de l'Union Nationale, de votre droite, M. le Président, nous posions un acte de trahison à l'endroit de notre premier ministre.

L'honorable ministre de l'Education s'est levé. Il a réfuté ces arguments et veuillez croire, M. le Président, que, dans le parti de l'Union Nationale, il y a de la collégialité, il y a des échanges de vues. Personne n'est obligé de prendre un corridor. Au contraire, l'occasion est donnée à tous et chacun d'exprimer des vues, pour connaître le moyen efficace pour aller de l'avant dans l'harmonie la plus complète, non pas seulement à l'intérieur de notre parti, parce qu'elle existe, mais pour essayer de créer et de maintenir cette harmonie chez tous les citoyens québécois.

Nous avons vu certaines contestations, certaines protestations ici même, devant le Parlement, à la suite de la présentation, en première lecture, du projet de loi que l'on connaît comme bill 85, en résumé. Il n'y a pas seulement que les Canadiens français qui ont des représentations à nous faire. Il y a également de nos amis anglophones qui trouvent que le bill 85 ne va pas assez loin. Qu'il me soit permis de vous donner lecture d'une lettre adressée à l'honorable ministre de l'Education et qui se lit comme ceci: « Dear Sir: « I have been informed that the English catholic parents, teachers and principals of the Island of Montreal are not satisfied with Bill 85. They have stated that the education rights should be strenghtened and the legislation of

Bill 85 does not contain a positive statement of the rights for Quebec Province... »

M. LESAGE: M. le Président, j'invoque le règlement. Vous avez bien établi, cet après-midi, que nous ne pouvions, ni directement ni indirectement, entrer dans l'étude du mérite des principes du bill 85. On ne peut pas, sous prétexte de lire une lettre, entrer par la porte de côté dans la discussion du principe du bill. Je n'ai certainement pas d'objection, personnellement, à ce que le Secrétaire de la province dise qu'une lettre a été reçue par le ministre de l'Education, à l'effet que les signataires, ceux qu'il a mentionnés, trouvent que le bill ne va pas assez loin.

Mais il ne peut certainement pas lui-même aller plus loin même dans la lecture d'une lettre parce qu'alors ce serait non seulement violer le rlglement mais passer outre aux Indications précises que vous nous avez données cet après-midi.

M. LE PRESIDENT: Effectivement, au moment même oft l'honorable chef de l'Opposition se levait, j'allais intervenir pour signaler qu'il y aurait lieu d'arrêter la lecture de la lettre au stade où l'honorable ministre était rendu.

M. PAUL: Dieu me garde, M. le Président, de commettre un viol, même à l'endroit de nos règlements. Je dirai cependant que cette lettre, dont je n'ai pas le droit de donner lecture, mais qui est fort intéressante dans son contenu, suggère la formation d'un comité pour étudier les représentations de nos amis anglophones.

M. HYDE: Quand?

M. PAUL: Le plus tôt possible, mon cher collègue.

M. LESAGE: C'est ça, avant lafin de la session.

M. PAUL: Mais pas à la vapeur, pas un comité qui va tout simplement siéger pour bousculer tout le monde, pour essayer d'arriver î une échéance qui est la fin de la session, jamais! Parce que le droit à l'éducation, le droit des langues est trop sacré pour que nous ne prenions pas le temps de communier avec le peuple, de connaître ses besoins, ses aspirations et lui donner une législation qui peut sauvegarder ses droits non pas seulement dans l'immédiat mais pour des générations à venir.

Je voudrais vous rappeler les paroles que prononçait l'honorable député de Vaudreuil-

Soulanges dans la nuit du 17 juillet 1967. Au théâtre, on connaît la nuit du 13 janvier mais en procédure, et dans la vie parlementaire, nous connaissons la nuit du 17 juillet. Je voudrais faire mienne cette excellente déclaration de l'honorable député de Vaudreuil-Soulanges, qui est d'une actualité vivante, prenante et qui ne peut nous laisser indifférents devant un texte aussi symbolique, aussi vivant — si je peux finir par le retrouver — et que l'on retrouve à la page 4840 du journal des Débats et qui se lit comme ceci: « M. le Président, c'est dans le cours normal de la démocratie que des éditorialistes, que des écrivains, que des commentateurs politiques, puissent s'exprimer sur les questions qui font l'objet de discussions en cette Chambre. M. le Président, c'est de l'essence même de la démocratie.

C'est de l'essence même de notre régime politique que des corps intermédiaires, dont nos amis d'en face aiment à parler à tort ou à raison, aient le droit dans un régime comme le nôtre, de s'exprimer sur des questions qui font l'objet d'un débat en cette Chambre. M. le Président, nous ne voulons que ça, mais c'est ça que nous voulons.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances.

M. Paul Dozois

M. DOZOIS: M. le Président, j'aurais pu laisser passer cette occasion de faire des commentaires sur cette motion, puisque le Secrétaire de la province vient de prononcer un magistral discours et d'exposer une foule de raisons justifiant l'adoption de cette motion. De même, le ministre de l'Education et le ministre du Travail ont présenté d'excellentes raisons.

Je voudrais tout simplement ajouter quelques remarques. Je voudrais surtout dire que certains journaux ont conclu beaucoup trop rapidement, à mon avis, certaines choses, et je voudrais dire à ces gens qu'ils se trompent grandement s'ils croient que cette procédure a pour but de tuer le bill.

J'ai relevé, dans le Montreal Star du 13 décembre, deux phrases en particulier qui laissent croire que c'est notre intention de laisser mourir le bill. Dans un article intitulé « Right's bill may be shelved, » on dit ceci: « The Government adjourned the answer today and paved the way for possible shelving of the legislation ». Un peu plus loin, on dit: « Sparkling speculation, the bill will be re- ferred to a committee and left to die. »

M. le Président, loin de nous la pensée de faire subir un tel sort au bill 85. C'est plutôt les raisons qu'ont mentionnées mes prédécesseurs de ce côté-ci de la Chambre qui nous justifient de présenter cette motion.

D'ailleurs, nous avons l'expérience de tout le travail bénéfique que peuvent nous apporter les délibérations de ces comités.

Le Secrétaire de la province a mentionné plusieurs cas où des bills ont été référés à des comités et nous sont revenus améliorés, donnant satisfaction à tout le monde. Je pense que nous venons de vivre, ces jours derniers, une expérience fort heureuse, celle des bills présentés par le ministre du Travail, qui ont été adoptés ces jours derniers.

L'on sait que, lors de leur présentation, ici, en première lecture, ces bills ont suscité passablement de discussions. Cependant, avant la deuxième lecture, le bill 290, qui soulevait particulièrement des réactions assez vives chez les syndiqués, a été référé à un comité. Ces gens ont été entendus et ils en sont venus à une entente; le monde est d'accord maintenant et nous pourrons adopter cette législation susceptible d'aider à la solution des conflits ouvriers.

Je trouve, cependant, M. le Président, que l'Opposition a la mémoire plutôt courte. J'ai consulté les procès-verbaux de cette Chambre. Si l'on retourne à l'année 1963, l'on constate que, le 26 juin 1963, le gouvernement du temps a présenté le bill 60 en première lecture à cette Chambre. Ce bill avait pour objet de créer le ministère de l'Education. C'était, évidemment, un changement majeur, puisque ce bill remplaçait le département de l'Instruction publique par un système complètement nouveau.

Or, le gouvernement du temps a présenté ce bill à la Chambre dans les derniers jours de la session, le 26 juin. Or, la session s'ajournait la semaine suivante. Le premier ministre du temps a dit: Je dépose ce bill en Chambre; nous en faisons la première lecture, mais nous ne l'adoptons pas.

M. LESAGE: Cela avait toujours été entendu comme ça. On n'a jamais fait de promesses qui n'ont pas été tenues.

M. DOZOIS: Remarquez, M. le Président, que ce bill n'a pas été référé à un comité pour recevoir des commentaires ou des avis de ceux qui pouvaient s'intéresser à cette importante question. Le gouvernement du temps a dit tout simplement: Nous rendons publiques les intentions du gouvernement et, à la prochaine ses-

sion, tenant compte des observations qui seront faites au gouvernement, nous amenderons, s'il y a lieu, ce projet de loi et nous l'adopterons.

D'accord, l'Opposition du temps a trouvé que c'était une excellente façon de procéder. Nous avons adopté la première lecture. Le document est devenu public et ce n'est qu'à la fin de janvier 1964 — soit après une période couvrant six mois de l'année — que le gouvernement a procédé à une autre première lecture du bill 60. Ensuite, ce bill a suivi les trois lectures prévues par le règlement et a été adopté au cours de cette session.

Le gouvernement du temps, précisément parce que c'était une loi importante qui chambardait tout notre système d'éducation, n'a pas voulu procéder à la vapeur. Il a fourni l'occasion, non seulement aux députés, mais à tout le public de pouvoir réagir sur cette proposition et de présenter, s'il y avait lieu, des commentaires ou des suggestions pour améliorer ce bill.

Le chef de l'Opposition a mentionné, cet après-midi, un article qui a paru dans le journal Le Devoir d'aujourd'hui.

Peut-être qu'il a mentionné de qui était cet article, mais il ne l'a pas mentionné précisément...

M. LESAGE: Non, j'ai oublié. J'aurais pu le faire.

M. DOZOIS: Alors, j'ai lu à mon tour le journal Le Devoir. Dans cet article, et c'est une opinion que je respecte, qui a été envoyé d'ici, Québec, par le correspondant du Devoir, il y avait également une autre opinion. Je ne dis pas que cette opinion a plus de valeur que celle du correspondant, qui est ici à la tribune de la presse, mais si l'on s'en tenait uniquement à ce qu'a cité le chef de l'Opposition, l'on pourrait croire que c'était l'opinion de ce journal. Or, dans cet éditorial...

M. LESAGE: J'ai bien mentionné que c'était un article, non pas un éditorial.

M. DOZOIS: Oui, oui, d'accord. M. LESAGE: C'est un reportage.

M. DOZOIS: J'ai dit que, moi, j'ai eu l'impression, cet après-midi, en écoutant le chef de l'Opposition, que c'était un article de fond qui avait paru dans le Devoir, et que cela pouvait être l'opinion du journal. Or, dans la page éditoriale de ce matin de ce journal, on lit un article portant la signature de M. Vincent Prince. Je ne citerai pas tout cet article, il est long, ceux qui veulent en prendre connaissance pourront le lire au complet. J'ai extrait de cet article des passages qui, à mon avis, sont pertinents au débat que nous avons. Entre autres choses, M. Prince dit: « A bien y penser sans esprit partisan et sans émotion, il est probablement mieux qu'il en soit ainsi », c'est-à-dire que l'étude soit remise à plus tard. Un peu plus loin, il dit: « Dans les circonstances, on peut difficilement s'opposer à ce que les différents mouvements et associations intéressés au problème soient invités à se faire entendre devant le comité de la Chambre. Un bill de cette importance, adopté à la vapeur dans les derniers jours de la session, risquait de laisser chez plusieurs un goût très amer ».

M. Prince continue. Un peu plus loin, il dit: « Le comité, également, n'agira pas comme un tribunal qui est lié par la preuve faite devant lui. Il pourra, de lui-même, inviter des experts à témoigner. Il pourra même préférer l'opinion de ses propres membres à celles qui auront été exprimées devant lui. « Et c'est finalement la Chambre, malgré tout, qui aura à trancher le débat. Ce sera à elle, même après ce délai, à assurer pleinement ses responsabilités. Nous osons croire qu'elle en aura le courage, même si l'on continue à mobiliser des enfants pour lancer des boules de neige dans les vitres du parlement. « Le délai, en d'autres termes, pourra être profitable à bien des égards. Il permettra I toutes les personnes ou associations qui le désirent de participer, en quelque sorte, à la rédaction finale de cette loi. Il obligerait surtout bon nombre de citoyens à réfléchir plus profondément et à se mieux définir par rapport à ce grave problème de la langue d'éducation au Québec ».

Voici, M. le Président, une note assez juste et une interprétation valable, je pense, du geste que pose aujourd'hui le gouvernement. Je terminerai en faisant seulement une remarque sur les propos que nous avons entendus aujourd'hui en cette Chambre, et surtout sur les propos tenus par les membres de l'Opposition.

Je me suis demandé, M. le Président, dans les circonstances, s'il était plus important d'agir pour qu'un parti politique retire une petite gloriole de la solution de ce problème. Il me semble qu'il y a assez de questions qui nous divisent actuellement dans la province de Québec sans faire en sorte, juste pour des fins politiques, de passer une loi qui, nous le savons, suscite à l'heure actuelle un remous dans la province. Ne vaut-il pas mieux patienter encore quelques semaines et donner l'occasion à tous ceux qui s'intéressent à ce problème de venir

exposer leurs vues sur cette question et ensemble, entre hommes de bonne volonté, trouver la formule, non pas la formule qui va désunir les citoyens de différentes origines ethniques de la province, mais les unir? Il me semble qu'il est possible, si tout le monde se donne la main, non pas de créer un autre instrument de division, mais plutôt un instrument d'union.

J'ai confiance, M. le Président, que d'ici quelques semaines... et ceux qui croient que c'est un mouvement pour renvoyer aux calendes grecques ce projet de loi se trompent. Nous sommes aussi intéressés que qui que ce soit à trouver une solution à un problème aussi crucial, car c'en est un. Je pense que nous avons tous à coeur que la paix règne dans ce coin du pays, et que cessent ces démonstrations qui sont en train de semer l'anarchie dans notre milieu.

M. BELLEMARE: C'est ça.

UNE VOIX: Même dans votre camp de l'autre bord.

M. DOZOIS: Vous pourriez parler du votre avant de tenter de savoir ce qui passe à l'intérieur du nôtre, et si vous le saviez vous pourriez vous en réjouir...

M. BELLEMARE: Nous allons les nommer, nous autres.

M. DOZOIS: ... et souhaiter qu'il y ait autant d'unité ou autant de paix chez vous qu'il y en a ici.

M. BELLEMARE: Attendez, nous allons les nommer.

M. DOZOIS: M. le Président, c'est vrai que cette motion a de l'importance. Entre les deux sessions, d'ici quelques mois, je suis convaincu qu'en quelques séances, alors que le calme sera peut-être revenu, et non pas à cette période de l'année où tous les députés sont fatigués d'une longue session, les gens seront invités à venir exposer leurs idées sur un sujet de cette sorte et je suis convaincu — je le répète — que tous ensemble nous nous élèverons au-dessus des considérations partisanes, et trouverons la formule qui sera un instrument de paix et, partant, de prospérité pour notre province.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Laurier.

M. René Lévesque

M. LEVESQUE (Laurier): M. le Président, je vais tâcher, le plus rapidement possible, d'expliquer et, forcément, de motiver le vote que j'aurai à donner sur cette motion.

Nous vivons, depuis quelques jours, dans une espèce de corridor absurde qui fait penser à un roman surréaliste dont cette motion et le climat dans lequel elle est présentée, est à la fois le point culminant et — nous pouvons l'espérer, du moins — la porte de sortie. J'espère qu'elle ne sera pas une porte de sortie provisoire. En tout cas, c'est une porte de sortie qui était devenue absolument indispensable. Nous avons tellement baigné, ici dans cette Chambre, ces derniers jours, dans cette atmosphère de tension et d'absurdité que nous sommes tous surpris, lorsque nous finissons par sortir, de retrouver au dehors, une foule de gens qui continuent, quand même, à vivre normalement. Nous avons l'impression que ça n'existe quasiment plus. Ces gens-là ne sentent pas, comme nous, l'ampleur et l'intensité de la crise qui a, évidemment, secoué le gouvernement et dont le gouvernement est loin d'être remis.

D'autre part, nous sommes également estomaqués du nombre de gens au dehors de la Chambre, qui, même s'ils n'ont pas vu certaines des convulsions auxquelles nous avons assisté ou, du moins, que nous avons devinées, sont inquiets ou mécontents de ce qui s'est passé ou ne s'est pas passé autour de ce bill 85 qui fait l'objet de cette motion. Nous percevons qu'il y a là, en puissance, une explosion dont ce bill, s'il allait plus loin qu'il n'est rendu en ce moment, pourrait être le détonateur. Ces remarques s'expliquent par le fait — je ne veux pas insister; d'autres ont abordé le sujet — qu'on s'est senti obligé de dire, dans la motion dont ça fait partie intégrante, qu'elle est présentée dans l'intérêt public et, très évidemment, général, c'est-à-dire dans l'intérêt de l'ensemble de la population qui n'est pas ici dans cette Chambre, mais à laquelle nous sommes censés nous adresser.

Je dis que cela aurait pu être un détonateur, si c'était allé plus loin dans le climat actuel. En effet, entre ces milieux inquiets qui guettent le Parlement avec des sentiments déjà très forts — même chez ceux dont l'émotion est encore sourde — et ce Parlement qui se sait guetté avec une acuité peu ordinaire, on a bien failli creuser totalement, ces derniers temps, un fossé catastrophique: celui qui isole, sinon un peuple, du moins sa majorité, de ses mandataires politiques. Il est loin d'être prouvé que ce fossé ne s'est pas approfondi bien plus qu'on ne le soupçonne.

En tout cas, cette motion, quels que soient les changements de modalités que nous pourrions, moi comme d'autres, aimer à y introduire, me semble démontrer que le gouverne-

ment s'est rendu compte in extremis de la gravité possible de la situation et de la fragilité du lien — nous pouvons presque dire du fil — tendu à craquer qui demeurait entre lui et trop de Québécois. Je trouve donc, pour ma part, que cette motion est plus qu'indiquée.

Je suis sûr qu'au fond l'Opposition officielle est du même avis. Elle aussi se rend compte, tardivement, que cette motion est dans son intérêt. Si je tiens compte, en effet — et nous ne pouvons tout de même pas les oublier plus les uns que les autres — des réactions initiales du chef de l'Opposition vis-à-vis des engagements et des commentaires du premier ministre, il me semble indiscutable que, de part et d'autre, on était sur le point de compléter un geste qui serait aussitôt devenu irrémédiable.

C'est pourquoi, en me démêlant aussi péniblement que tout le monde dans les enroulements fantasmagoriques des astuces de procédure — que nous avons vus se dérouler pendant quelques heures au début de la journée — j'ai cru, pour ma part — à tort ou à raison; il y a de vieux routiers qui savent ça mieux que moi — découvrir une sorte de fil directeur dans la stratégie de l'Opposition. A travers tous les enroulements de la procédure, celle-ci, en effet, a semblé marcher avec une prudence infinie, comme sur des oeufs, jusqu'au moment où il a été acquis d'abord que la motion ne serait pas divisée à la suite de votre décision, M. le Président, puisque des amendements ne seraient pas acceptés conformément à l'article 221.

Sauf erreur, toujours, parce que j'ai pu me tromper, c'est alors seulement qu'est devenue absolument catégorique et claironnante, dans la bouche du député de Vaudreuil-Soulanges, la proclamation d'un désir fou d'aller tout de suite en deuxième lecture et pas seulement, cela, mais, sans débrider, en comité, tel que prévu, et même en troisième lecture, jusqu'à consommation finale avant Noël.

Je veux bien le croire, si on le dit, et surtout, je vois bien que c'est de bonne guerre interpartisane, mais on me permettra d'avoir des doutes sérieux. Je peux me tromper. Mais j'ai l'impression qu'une fois passées les premières réactions faciles, il n'y avait pas, seulement chez les ministériels, quelque chose qui ressemblait à un pôle nord et un pôle sud qui se cherchaient laborieusement un équateur. Dans l'Opposition, toujours moins perceptible, parce que l'on est moins exposé aux projecteurs dans l'Opposition que dans le gouvernement, j'ai l'impression que là aussi, il y a des pôles au moins potentiels. S'ils ne sont pas au nord et au sud, eh bien! c'est comme dans la science-fiction, ils sont peut-être à l'est et à l'ouest, ou peut-être même des pôles parisiens...

M. PROULX: De grands déserts.

M. LEVESQUE (Laurier): De plus, et je crois que c'est plus valable, et je veux bien croire cela tout de même sérieusement, derrière une stratégie de combats de fin de session, je suis sûr que règne aussi, dans l'Opposition, d'une façon croissante, le sentiment que cette motion répond à une nécessité qui est devenue absolue. Comme d'autres, en fait, plus facilement que d'autres, pour des raisons évidentes, j'aurais aimé, moi aussi, pouvoir dire ici, sur le parquet, ce que je pensais des principes et du contenu du bill 85. Je l'ai dit ailleurs de mon mieux, et je peux le répéter, Je me sens donc moins privé que d'autres qui n'en n'ont pas eu l'occasion.

Je crois profondément qu'il était et qu'il est dans l'intérêt public et général d'interrompre au plus vite le processus qui, dès la présentation en première lecture et même bien avant la présentation, avait déjà commencé à faire des ravages ici et là dans le Québec. Au point où nous en sommes, tout débat de deuxième lecture — et la séance d'aujourd'hui, il me semble, en a donné singulièrement la preuve — n'aurait pu être qu'à la fois hautement passionnel et hautement partisan. Cela aurait été la meilleure de toutes les recettes pour amener définitivement ou en tout cas très probablement, une conflagration générale sur un sujet qui, dans toutes les sociétés a toujours été parmi les plus incendiaires qui soient. De plus, et cela, c'est vrai depuis quelques semaines, c'était déjà vrai, bien avant la première annonce du bill, et avant la première lecture, comment aurait-il été possible de tenir ce débat crucial en si peu de jours? Comment le mener à bien, convenablement, c'est-à-dire d'une façon éclairée, réfléchie et équitable, autant pour la majorité, qui est en éveil et en marche comme jamais dans le Québec, que pour la minorité, qui est tendue et même, on peut le dire, hypertendue, dans plusieurs milieux. Cela aurait été rêver en couleur. Et ce serait un délire de croire que cela est possible, après tout ce qui s'est passé en dehors de cette Chambre et à cause de tout ce qui s'annonçait encore dans le va-vite et la bousculade où nous sommes maintenant des tout derniers jours de la session. A part cela, comment croire pouvoir réussir un tel tour de force sur un projet de loi lui-même trop évidemment rédigé à la vapeur, et dans une pagaille assez dangeureuse du cabinet et du caucus ministériel?

Ce qui est plus, est infiniment plus grave, à mon avis, c'est qu'il y avait maintenant, et qu'il y aura tout autant, lundi prochain comme mardi, une impossibilité absolue d'obtenir à temps des

réactions suffisamment précises et nuancées, com-ne l'a dit d'ailleurs le ministre des Finances après d'autres, de l'opinion publique et surtout, dans l'opinion publique, des milieux de plus en plus nombreux qui s'échauffent et qui n'ont pas eu encore la chance de trouver un équilibre, quelle que soit la fermeté d'ailleurs des attitudes.

D'ailleurs, c'est là le principal reproche — et je crois qu'il est d'une gravité extrême — qu'on peut faire au gouvernement et que doivent partager les hommes présents autant que les hommes absents parce qu'il s'agit d'hommes qui sont tous dans ce gouvernement et qui en partagent la responsabilité.

Le reproche principal que je leur ferais, c'est d'avoir voulu ou du moins d'avoir nettement donné l'impression qu'on voulait comme ça, juste avant les fêtes, littéralement imposer quelque chose d'aussi important, à la va-vite. Cela seul, je crois — je peux me tromper, chacun son opinion — c'est-à-dire cette seule hâte extrême et suspecte après tant de délais, une hâte rendue encore plus inquiétante par une évidente confusion ministérielle, pouvait justifier amplement les démonstrations ou les manifestations qui ont eu lieu et d'autres qui se préparaient, ce qui ne change pas l'opinion qu'on peut avoir sur certaines des méthodes employées — la mienne peut être aussi sévère que celle de n'importe qui — mais, comme l'a dit le député de Champlain, il faudrait être sourd et aveugle pour ne pas se rendre compte que le climat, sauf vraiment pour des sourds et des aveugles, n'aurait pas permis de mener à bien ni une deuxième lecture ni encore moins dans le va-vite et la vapeur les comités que prétend déclencher la motion et la troisième lecture tout de suite après.

Donc, à toutes fins pratiques, en retirant le bill 85 en ce moment, le gouvernement prend, à mon avis, la seule décision qu'il pouvait décemment se permettre vis-à-vis la population du Québec. On peut espérer qu'il le fait parce qu'il s'est rendu compte clairement, même si c'est tard, qu'il était sur le point d'attacher son nom à ce qui aurait pu être une catastrophe. Même si c'est tard, je crois que, là-dessus, il faut rendre à ceux qui sont en face ce témoignage d'avoir pu admettre une erreur — et c'est toujours terriblement dur pour un gouvernement — je le sais puisque j'ai passé quelques années dans ce contexte-là — et je crois cela méritoire mais ça me surprend toujours par exemple qu'on a tant de misère à la dire à admettre qu'on a fait une erreur.

On a dit très sincèrement chez certains commentateurs en particulier au moment de la première lecture, que cette motion était un acte de courage et c'est vrai. Mais c'était aussi une immense erreur d'appréciation à mon humble avis, aussi bien une erreur d'appréciation externe, c'est-à-dire de la température qui règne dans le Québec en particulier depuis six ou huit mois sur ce sujet-là, aussi bien externe qu'interne, c'est-à-dire de la température réelle d'un parti.

On a dit que c'était un acte de courage parce que ça prétendait rapidement par des mesures administratives incorporées dans un texte de loi, rétablir la paix et l'harmonie menacées dans le Québec. Or, ça nous menait — je crois qu'on doit le voir maintenant — exactement à l'extrême opposé, c'est-à-dire au retour impossible à une paix et à une harmonie dont les conditions étaient devenues artificielles, sans qu'on s'en aperçoive.

Sans entrer du tout, avant de terminer, parce que j'achève, dans ce débat que nous n'aurons pas, je voudrais simplement relever à ce propos une phrase du secrétaire d'Etat qui proclamait cet après-midi qu'il faut, pour nos deux groupes linguistiques, la majorité francophone comme la minorité anglophone, une législation complète qui ne sacrifie les droits — on a parlé de privilège — ni de l'un ni de l'autre groupe.

Tout ce que je puis dire — et je crois devoir le redire aussi simplement que ça — c'est que je suis du même avis, et dans mon coin et parfois difficilement j'essaye de combattre moi aussi pour que soient respectés ou restaurés, le cas échéant, ces droits. Mais même si tout le monde n'est pas d'accord tout de suite — sûrement pas tout de suite — j'espère qu'on prendra garde que la paix et l'harmonie dont a parlé le premier ministre ne pourrontplus jamais revenir vraiment pour signifier, si on veut, comme l'a dit le ministre des Finances, l'union et non des divisions déchirantes.

Que la paix et l'harmonie ne pourront plus plus jamais, à mon avis, revenir pour signifier devenue si habituelle et incontestée qu'elle pouvait s'Ignorer elle-même, cette domination tranquille d'une majorité patiente et peu compétente par une minorité trop puissante dans le Québec.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEVESQUE (Laurier): J'ai fini, M. le Président. Cela s'applique au domaine vital que touche le bill 85, comme à tous les autres secteurs de la vie québécoise. J'ajouterai que c'est là pourquoi je cloute fort que tels qu'ils sont constitués, l'un ou l'autre de nos deux partis qui sont en cette Chambre traditionnellement puissent vraiment amener, après les étapes que prévoit cette motion, avec la vo-

lonté extraordinairement lucide qu'il faudrait, ce changement fondamental qui est requis pour le statu quo québécois.

Sur ce, M. le Président, je termine en disant sans ambages ce que je laissais entendre au ministre des Finances tout à l'heure, que pour ma part j'espère de cette motion, d'abord, que sous son pudique costume réglementaire elle devienne, pour le bill 85, son habit de funérailles et lui permette de retourner au néant d'où, à mon humble avis, il n'aurait pas dû sortir.

Puisque les amendements sont impossibles, on me permettra de regretter simplement en terminant qu'on n'ait pas remis, par la motion, cette question cruciale, comme le reste de l'ensemble du problème, à la commission d'enquête que le bill 85 en soi dégradait déjà passablement dès sa naissance.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Matane.

M. Jean Bienvenue

M. BIENVENUE: M. le Président, j'écoutais, avant de me lever, le député de Laurier dire qu'il croyait qu'aucun des deux partis traditionnels, qu'aucun des vieux partis dans cette province ne réglerait le problème qui fait l'objet du bill dont on nous demande aujourd'hui la remise à plus tard.

Je ne partage pas l'opinion du député de Laurier parce que ce problème ne pourra être réglé que par un parti politique exerçant le pouvoir et formant le gouvernement dans cette province. Jamais, je ne pense, le parti du député de Laurier ou tout autre que ceux qui forment l'opposition officielle et le gouvernement en cette Chambre ne seront en mesure de régler ce problème.

Cette motion est une motion de renvoi 2 plus tard, je dis bien de renvoi à plus tard, à plus loin de ce que le ministre de l'Education a appelé, avant de s'asseoir, une question extrêmement urgente. Je cherche la logique là-dedans. On veut remettre à plus tard ce qu'on considère comme urgent. Le ministre, évidemment, qui n'est pas en Chambre depuis longtemps, a vite pris, cependant, les plis du parti sur les banquettes duquel il siège.

L'historique de ce qui nous a amenés à débattre aujourd'hui non pas le bill proprement dit, mais la motion de renvoi, d'autres l'ont fait avant moi. Le premier ministre de cette province à deux, trois ou même quatre reprises — d'autres l'ont dit avant moi — a annoncé ce bill. Il l'a annoncé notamment par- ce qu'il a participé à l'élection complémentaire dans Notre-Dame-de-Grâce. Il l'a annoncé et il en avait fait sa chose.

Le premier ministre, à l'époque où il a annoncé ce bill et après l'avoir annoncé, et parce qu'il l'avait annoncé, a été traité de traître, sur la place publique, dans les journaux et ici même, devant le parlement, parce qu'il avait proposé ce bill.

Il a été accusé de trahison par le MIS et les enfants de tout âge qui le supportaient, il a été accusé de trahison par d'autres.

Je ne verserai pas dans l'émotivité, M. le Président, dans l'émotion, dans le sentimentalisme, je constate et je déplore comme d'autres que le premier ministre n'est plus avec nous. Nous avons tous, en cette Chambre, entendu les paroles qu'il a eues, paroles extrêmement douloureuses, que n'importe quel homme public est en mesure d'apprécier mieux que quiconque, lorsqu'au moment où cette « gang » de jeunes fous - le mot est banal, mais il exprime bien ce que je pense - au moment où cette « gang » de jeunes fous et leurs promoteurs ont mis en cause son intégrité et l'intégrité de tous les membres de cette Chambre. Et on a applaudi, dans cette Chambre, on a applaudi d'une façon spontanée, des deux côtés de la Chambre, aux remarques tant du premier ministre que du chef de l'Opposition sur cette attaque, sur ces procédés extrêmement répugnants.

Cela n'a pas aidé à l'état de santé du premier ministre. Cela n'aide jamais un homme public. Et je dis, M. le Président, que le premier ministre n'a pas trahi, mais que, si trahison il y a eu, il a été non pas le traître, mais le trahi. Voilà ce que je pense, face à la motion qui est devant nous.

Le leader du gouvernement, je lui rends hommage, comme l'a fait le chef de l'Opposition. Il a fait montre d'abnégation, il a fait montre d'esprit de discipline, aujourd'hui. Le leader du gouvernement constitue un exemple pour ceux-là même de son parti à cause de qui il a été obligé d'avoir l'attitude qu'il a eue.

Parlant d'ailleurs de la motion, le leader a employé une expression que j'ai retenue. Le leader, voulant nous faire accepter la motion, a dit qu'elle constituait un compromis honorable. Je dis, M. le Président, et je reprends une expression du leader, je dis, mutatis mutandis, j'y verrais plutôt un compromis entre les honorables.

M. GOSSELIN: Entre quoi?

M. BELLEMARE: Entre les honorables.

M. BIENVENUE: M. le Président, les motifs qui ont été invoqués par différents membres de cette Chambre, pour que l'on mette de côté cette règle fondamentale, la règle générale, qui est la règle de la première et de la deuxième lectures avant la référence à quelque comité que ce soit, ces motifs, dis-je, ne m'ont pas paru très sérieux.

J'ai retenu parmi ceux-là le motif dit de la consultation. Je dis, M. le Président, que de la consultation, et on l'a admis d'ailleurs, il y en a eu déjà au moment où nous nous parlons, au moment où nous étudions cette motion. Il y en a eu, de la consultation, il y en eu ici, la semaine dernière, il y en a eu, à coups de boules de neige, à coups de pancartes et à coups de panneaux, et c'est extrêmement agréable pour des parlementaires d'entrer au Parlement en devant s'identifier et en devant passer devant un cordon de policiers.

Je ne veux pas être prophète de malheur, M. le Président, mais je dis qu'il y en aura d'autres de ces consultations, et nous n'avons peut-être rien vu encore. Il aurait pu y en avoir après, des consultations, avec ce que nous réclamons, consultations au comité plénier, consultations devant le comité de l'éducation, mais après que nous aurions eu la chance de nous faire entendre. Et il y en aura une autre consultation, qui va coûter des milliers de dollars à la province, avec cette commission d'enquête que le premier ministre a créée. J'arrête là.

M. BELLEMARE: Vous avez demandé de ne pas en parler, ce matin, M. le Président.

M. BIENVENUE: Je n'en parle pas.

M. BELLEMARE: Non, non, mais on m'a énormément dérangé ce matin.

M. BIENVENUE: On a donné comme autre motif, à l'appui de cette motion, qu'elle portait sur une question extrêmement délicate, sur une question controversée. Le leader a parlé d'une matière contentieuse. Je dis — je parle comme député libéral — qu'il n'y a pas de question délicate, qu'il n'y a pas de question trop controversée pour empêcher les députés de cette Chambre ou pour m'empêcher, moi à tout le moins, d'émettre librement et franchement mon opinion, d'émettre mes principes à l'occasion de la deuxième lecture de n'importe quel bill. C'est mon opinion!

Là-dessus, le Secrétaire de la province nous dit: Rassurez-vous, honorables amis d'en face, devant le comité, tous les députés pourront se faire entendre, qu'ils en soient membres ou pas. Je dis qu'il y a lieu de s'inquiéter, qu'il y a lieu de craindre, devant cette promesse ou cette assurance du Secrétaire de la province à savoir si nous pourrons ou non nous faire entendre devant le comité, membres ou pas, parce qu'ici même en Chambre, où tous les députés sont membres de la Chambre, on nous empêche de nous faire entendre sur la deuxième lecture, on nous bâillonne sur la deuxième lecture. Il y a lieu de s'inquiéter.

M. GABIAS: Le député n'est pas sérieux quand il dit cela?

M. BIENVENUE: Très sérieux.

M. BELLEMARE: Nous allons lui rappeler des souvenirs, tout à l'heure...

M. GABIAS: II n'est pas sérieux, le député. M. HARVEY: Pourtant, il a l'air sérieux.

M. BELLEMARE: ... des souvenirs douloureux...

M. GABIAS: II a l'habitude d'être plus sérieux que cela, le député de Matane.

M. BIENVENUE: M. le Président, le principe sur lequel nous ne pouvons pas nous prononcer, nous qui sommes membres de la Chambre, c'est celui, au sujet duquel nous aurions eu à dire si oui ou non, en 1968, nous sommes pour que les parents élèvent leurs enfants dans la langue de leur choix. J'ai fini. C'est là-dessus que nous ne pouvons pas nous prononcer.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! On vient de plonger directement au fond...

M. GABIAS: II s'est même frappé au fond.

M. LESAGE: II est allé faire une pêche miraculeuse.

M. BIENVENUE: Je ne vais pas au fond, M. le Président. J'ai simplement rappelé à cette Chambre quel est ce fond auquel nous n'avons pas le droit de toucher.

Nous ne sommes pas opposés à ce que des groupes, des mouvements, des organismes soient entendus, mais nous sommes opposés à ce qu'ils le soient avant nous. C'est à cela que je m'oppose. Je ne suis pas opposé à des consultations, mais je suis opposé à des consultations dans des semaines et dans des mois, et je suis opposé aux

funérailles aussi. Quand on l'a maintenant, on ne s'inquiète pas si on l'aura le lendemain ou pas.

Ce n'est pas là la vraie raison. Les motifs qu'on a invoqués pour nous faire voter sur cette remise ne sont pas les vrais motifs. Je pense qu'on se leurre en cette Chambre. Je pense qu'on se moque les uns des autres. Je pense qu'on joue une comédie. Je pense qu'on se ment et qu'on le sait, tout le monde sauf, peut-être, un peu moins ceux qui sont dans les galeries. Le ministre des Finances disait, il y a un instant qu'il ne fallait pas faire de cette question une question de gloriole pour un parti. Ce n'est pas là le problème. Ce n'est pas une question de gloriole pour un parti, c'est une question de survie pour un parti qui forme le gouvernement.

La voilà la vraie raison qui est derrière la motion.

Le ministre de l'Education nous a dit que le premier ministre n'avait jamais affirmé que cette loi serait adoptée avant la fin de la session. C'est exact que le premier ministre n'a jamais affirmé que la loi serait adoptée avant la fin de la session, et il a vu loin, le premier ministre.

Elle ne pouvait pas l'êttre; c'était impossible, M. le Président, parce que le gouvernement ne serait plus majoritaire dans cette Chambre. On sait fort bien de quoi je parle de l'autre côté de la Chambre; il n'en faut pas plus que quatre ou cinq pour rendre le gouvernement minoritaire en cette Chambre.

M. GABIAS: Il faudrait qu'il y en ait moins en Europe, chez vous.

M. BIENVENUE: Le vrai motif, M. le Président, pour lequel nous sommes à délibérer, à faire des discours, à neuf heures et quart ce soir; le vrai motif derrière cette procédure de recul, cette procédure de renvoi, je le dis carrément — et tout le monde le sait, mais on ne veut pas le dire tout haut - c'est pour sauver le gouvernement de l'Union Nationale. Le voilà, le motif!

Ah, je ne suis pas contre le fait de sauver un parti. Je ne suis pas contre ça. Mais, le sauver en engourdissant, en endormant la population, en endormant la presse...

M. GOSSELIN: Vous êtes en train de nous endormir, nous aussi.

M. BIENVENUE: ... le faire sur le compte et sur le dos de ce sujet qui est l'objet du bill et dont vous ne voulez pas que je parle, je dis cela n'est pas correct, en 1968. Il y a d'autres façons de sauver un parti que de mettre en cause les droits sacrés des minorités. Et ça, c'est de la bouche même du premier ministre de cette province, qui, malheureusement, n'est pas avec nous ce soir.

D'ailleurs, le ministre de l'Education est tellement conscient lui-même de ce que je viens de dire qu'il n'a pas tenu les engagements qu'il avait pris publiquement relativement au bill 85. Au cours d'une conférence de presse - et le public l'a lu, c'est à la première page de la Presse du 12 décembre — M. Cardinal annonce que le bill 85 sera étudié dès cette session.

M. LEFEBVRE: Ils ne lisent pas, eux.

M. BIENVENUE: Pas sera déposé, mais sera étudié. A quel moment? Après la première lecture ou après la deuxième lecture? Voyons ce qu'il a dit: « Quant à savoir si le projet de loi sera adopté en troisième lecture et sanctionné d'ici la fin de la session, je ne puis rien dire. C'était la première fois qu'il ne pouvait rien dire.

Et, allant au texte de façon plus précise, alors que les journalistes — et avec raison - lui demandaient: Mais, mon ami, pourquoi faites-vous tant de mystère avec le projet de loi? On a eu la réponse suivante : « Je peux dire, cependant, qu'il n'y a rien de changé au sujet de la poursuite des travaux de la Chambre et que le bill sera étudié — pas que le bill sera soumis devant des mouvements et des groupements dans quinze jours, trois semaines ou un mois-. Est-ce que l'on sait ce qui va se produire entre la deuxième et la troisième lecture? » M. le Président, si, lui, ne sait pas ce qui va se produire entre les deux, mettez-vous à la place de l'Opposition. « On vient d'entendre le député de Laurier — je cite toujours au texte le ministre de l'Education, après avoir dit! « Est-ce que l'on sait ce qui va se produire? » Le ministre dit: « Peut-être y aura-t-il d'autres propositions, la contreproposition de M. René Lévesque jouera peut-être quant à l'avenir de ce bill. »

M. le Président, l'engagement qui a été pris n'a pas été respecté. Il y a des gens dans cette province qui n'ont que faire de ces engagements dans les journaux, parce qu'il y a des problèmes aigus en 1968. D'ailleurs, c'est un curieux personnage, le ministre de l'Education, Depuis un an, il était en dehors de cette Chambre...

M. BELLEMARE: A l'ordre, à l'ordre, M. le Présidentl

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: M. le Président, je soulève

un point d'ordre. Vous avez assez joué avec le règlement depuis vingt minutes.

M. BIENVENUE: M. le Président, je ne joue pas.

M. BELLEMARE: M. le Président, c'est un jeu qui... Il prend ça en badinant, mais c'est très sérieux. L'honorable député de Matane veut faire le procès de la vie privée, ou de la vie en dehors de cette Chambre du ministre de l'Education. Il vient de dire que depuis un an, il était en dehors de la Chambre, ce qui n'est pas conforme au règlement. Actuellement, nous sommes devant une motion...

M. PINARD: II était dans l'autre Chambre.

M. BELLEMARE: ... et nous devons nous en tenir strictement à la motion. Je suis bien prêt à entendre le discours de l'honorable député de Matane, mais il y a des limites pour jouer avec le règlement!

UNE VOIX: Cela fait mal.

M. GRENIER: Cela ne fait pas mal, c'est « dull »...

M. BIENVENUE: M. le Président, sur la question soulevée par le leader, tout d'abord celui-ci fait offense à votre impartialité et à votre compétence parce que vous ne m'auriez sûrement pas permis d'être hors d'ordre pendant vingt minutes. Deuxièmement, M. le Président, je n'attaque pas la vie privée du ministre que je respecte. C'est une question de Chambre tout simplement. Nous étions dans cette Chambre-ci, lui, il était dans l'autre...

M. LACROIX: II faisait chambre à part.

M. BIENVENUE: ... ce sont les chambres publiques. Mais j'arrive à la motion. Cette motion veut nous faire renvoyer le bill 85 devant le comité de l'éducation. Depuis un an, le ministre n'était pas ici. Vous l'avez vécu, M. le Président. Quand on voulait traiter le problème de l'éducation avec lui, il fallait le faire via deux ou trois collègues. Au moment où il arrive ici, depuis quelques jours à peine, et où on a une chance de parler d'éducation avec lui, il veut sortir le problème de l'éducation de la Chambre et le renvoyer en comité.

M. COURCY: II est allé au hockey avec des gars de Bagot.

M. BIENVENUE: M. le Président, le leader du gouvernement sait toute l'affection, presque filiale, que le lui porte...

M. BELLEMARE: Ne me prenez pas ainsi!

M. BIENVENUE: L'affection et l'admiration, toutes sortes de mots qui finissent en « ion », M. le Président.

M. LACROIX: Si ça venait d'un de vos collègues, ce serait dangereux.

M. BIENVENUE: II a dit ce matin que grâce à ce compromis honorable, il voulait ainsi d'un Québec fort, d'un Québec uni. Nous voulons tous cela en cette Chambre. Nous voulons tous un Québec fort, un Québec uni. Mais un Québec fort, un Québec uni ne sera possible qu'avec du leadership; avec de l'avance, pas avec du recul. Ne soyez pas inquiet, M. le Président, j'arrive, en parlant de recul, au mot «remise », c'est le parti des « re », le gouvernement, remise, recul, retrait...

UNE VOIX: Requin.

M. BELLEMARE: Réforme. Je comprends que le député a bien saisi le club, là.

UNE VOIX: Rémy.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BIENVENUE: Nous n'aurons un Québec fort et uni qu'avec du leadership, qu'avec de l'avance et non du recul, non avec des remises.

On ne règle pas les problèmes en les remettant. On recule, à ce moment-là. Je dis qu'il n'y a absolument rien qui nous a empêchés, depuis cette période de mois qui est celle écoulée depuis la crise de Saint-Léonard, rien qui nous empêchait d'avoir devant nous ce projet de loi, de l'étudier et non de le remettre. C'est un recul dans le temps, c'est un recul devant d'autres forces aussi.

Je dis que je suis contre cette motion, parce que j'aurais voulu m'exprimer comme député. Nous sommes payés par nos électeurs, nous sommes payés par le peuple $18,000 par année. Je veux bien le rappeler, pour ceux qui sont dans cette enceinte mais non députés. Nous sommes payés $18,000 par année pour émettre des opinions, pour dire ce que nous pensons, et pas pour consulter les corps intermédiaires.

M. PROULX: Vous n'êtes jamais ici. Oui, oui, vous n'êtes jamais ici.

M. BIENVENUE: Debout, debout! M. PROULX: Vous n'êtes jamais ici. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: En voilà un séparatiste ...sous de fausses représentations.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable député de Matane.

M. BIENVENUE: Quand je suis ici et que je me lève, c'est agréable d'être libéral, parce que cela me permet de dire ce que je pense et, sur cette question-là, j'aurais tellement voulu pouvoir dire ce que je pensais sur le fond. Mais le député qui m'a fait une remarque, le député de Saint-Jean, est peut-être de ceux qui ont forcé — et je l'admire — le ministre du Travail à faire la motion qu'il a faite ce matin.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Mégantic.

M. Marc Bergeron

M. BERGERON: Depuis le début de la journée, vous avez entendu dans cette Chambre, et des deux côtés, de nos collègues se lever pour exprimer leur opinion sur la motion dont il est question. Quelques-uns s'annonçaient comme voulant voter pour la motion, et d'autres contre la motion.

Depuis quelques jours, à travers le Québec, certaines personnes se sont plu à nous prêter des motifs qui expliqueraient pourquoi le gouvernement de l'Union Nationale a décidé de référer le bill 85 à un comité.

Nos amis de l'Opposition peuvent, et ceci est leur privilège, essayer de dire à leurs amis, à leurs électeurs pourquoi, selon eux, le gouvernement a décidé de référer à un comité ce bill d'une extrême importance.

Moi, pour un, je représente un comté où il y a des gens de la Société Saint-Jean-Baptiste et où il y a une population anglophone, et où il y a évidemment une population francophone. Depuis que le bill 85 a été déposé devant cette Chambre...

Je vous avouerai bien humblement que je n'ai pas eu l'occasion de rencontrer, comme je crois qu'il serait de mon devoir de le faire, les gens de mon comté. J'ai bien pris connaissance de certaines déclarations des éditorialistes, j'ai bien pris connaissance également des télégrammes qui sont parvenus à mon bureau comme au bureau de tous les députés de cette

Chambre, j'ai bien pris connaissance aussi des déclarations du président de la société Saint-Jean-Baptiste, j'ai pris connaissance comme tous mes collègues de cette Chambre de toutes ces déclarations qui ont été faites à travers la province depuis que le bill a été déposé.

Cependant, nous sommes en Chambre depuis le mois d'octobre. Nous sommes à la veille des fêtes, nous avons tous et chacun, depuis plusieurs mois, accompli, je pense, un boulot sérieux dans cette Chambre. Nous en sommes rendus à la veille des fêtes et je crois bien sincèrement que la population que je représente dans le comté de Mégantic serait fière, serait heureuse, si je pouvais la contacter d'une façon plus immédiate pour savoir ce que les gens du comté de Mégantic eux, pensent, concernant le bill 85.

Aucun député aujourd'hui n'a soulevé cet aspect qui, à mon sens, est très important puisque tous tant que nous sommes, nous représentons une population bien déterminée, dans chacun de nos comtés. Je pense que si ce bill est référé au comité, ceci nous donnera l'occasion de nous rendre auprès de nos gens et de nous renseigner, de savoir ce qu'eux pensent réellement du bill dont ils ont pu prendre connaissance, puisque le bill est maintenant rendu public,

La motion qu'a bien voulu nous présenter le ministre du Travail, je pense que c'est une motion lucide et logique. Si je me réfère, ainsi que plusieurs de mes collègues ont fait à un article paru ce matin dans un journal, je lis: « Me Yvon Groulx et le bill 85. » Je pense que tous et chacun admettront que M. Groulx, s'il n'a pas le monopole de la vérité, est un homme sérieux qui représente, je crois, un groupe extrêmement important. Je serais curieux de savoir combien de députés de cette Chambre n'ont pas leur carte de la société Saint-Jean-Baptiste.

Or, Me Yvon Groulx déclare: « Le gouvernement a fait preuve de logique et de lucidité. Nous ne pouvons que nous réjouir de constater que la suggestion de la Fédération des sociétés Saint-Jean-Baptiste du Québec appuyée par quelque quarante associations francophones ait été retenue et appliquée. Il nous sera désormais possible de faire valoir notre point de vue et de présenter nos recommandations dans un climat plus serein sans la contrainte d'une précipitation des travaux parlementaires pour adopter rapidement un projet de loi aussi important. »

Je pense que, lorsque vous avez entendu le discours prononcé dans cette Chambre par le chef de l'Opposition, lorsque vous avez vu la teinte partisane qu'il voulait donner à son argu-

mentation, imaginez-vous dans quel poulailler nous aurions été si nous avions suivi la recommandation du chef de l'Opposition.

Ici, chose assez curieuse, je suis député dans cette Chambre depuis 1966 et j'ai essayé en toute objectivité de comprendre l'attitude que prenait le chef de l'Opposition et lorsque dans mon for intérieur je trouvais que le chef de l'Opposition amenait des arguments sérieux, je me faisais un devoir d'essayer d'assimiler ses idées pour les faire valoir en temps et lieu.

Mais, M. le Président, ce soir, je me pose réellement des questions lorsque je me reporte, par exemple, au journal des Débats de l'Assemblée législative du mardi 4 avril, page 1936. A ce moment-là, cette Chambre, était...

M. BELLEMARE: En quelle année?

M. BERGERON: C'était en 1967... à étudier le bill...

M. GRENIER: Ce n'est pas vieux ça.

M. BERGERON: ... 45, dit Loi de l'assurance-récolte. A ce moment-là, l'honorable ministre de l'Agriculture avait proposé, lors de la déposition de cette loi, qu'elle soit référée au comité de l'agriculture de la Chambre, afin de permettre aux divers groupements ou associations agricoles de soumettre leurs suggestions.

Or, disait M. Vincent, le gouvernement a décidé que le comité de la Chambre pour l'étude des questions agricoles se réunirait le mardi 18 avril prochain, à dix heures du matin, pour analyser le bill 45 et pour entendre les représentations qu'avaient à faire à ce sujet les corps intermédiaires,

M. BELLEMARE : Avant la deuxième lecture. M. LESAGE: Au cours de la même session.

M. BERGERON: A ce moment-là, M. le Président, le chef de l'Opposition, même si ça ne fait pas son affaire, il va me laisser terminer. Je vais tout simplement lui répéter ses paroles.

Il ne devrait pas se fâcher de s'entendre répéter ce qu'il a dit.

M. LESAGE: Je m'en souviens très bien.

M. BERGERON: A ce moment-là, M. le Président, M. Lesage répondait...

M. BELLEMARE: Un instant. M. COURCY: C'est épouvantable.

M. BERGERON: M. Lesage était le chef de l'Opposition, c'est l'homme qui est assis dans le fauteuil du comté de Louis-Hébert.

M. LESAGE: Il s'agit de la même session.

M. BERGERON: A ce moment-là, M. Lesage disait, au sujet de cette annonce du ministre de l'Agriculture, qu'elle était fort bienvenue.

M. LESAGE: Certainement.

M. BELLEMARE: Avant la deuxième lecture.

M. BERGERON: Nous serons prêts le 18 avril, à dix heures du matin. Mais je crains bien qu'il ne suffise pas d'une matinée.

Alors, à ce moment-là, pour la Loi de l'assurance-récolte, devant les arguments qu'amenait le ministre de l'Agriculture, le chef de l'Opposition se disait d'accord.

M. LESAGE: Nous l'avons fait la semaine dernière.

M. BERGERON: Une minute, papillon.

M. BELLEMARE: Nous allons en trouver d'autres.

M. LESAGE: C'était pendant la même session.

M. BERGERON: Le chef de l'Opposition me signalait tout à l'heure qu'il ne se rappelait pas ce qui s'était passé en 1967. Je vais lui rappeler une chose beaucoup plus près. Le 2 juillet 1968.

M. BELLEMARE: C'est cette année.

M. BERGERON: A ce moment-là, c'est toujours le même chef de l'Opposition, qui occupe le même poste, les mêmes responsabilités. Nous étions à étudier la Loi modifiant la loi des marchés agricoles. Il s'agit du bill 47, M. le Président.

M. LESAGE: Cela a été adopté durant la même session.

M. BERGERON: Un instant. A ce moment-là... M. LESAGE: Celane change absolument rien. M. GRENIER: Lequel? M. BERGERON: ... sans doute y avait-il

dans les galeries beaucoup de personnes qui avaient fait parvenir de nombreux télégrammes au chef de l'Opposition. Vous voyez le scénario, M. le Président, il se levait de son siège pour dire ceci à la Chambre:

M. BELLEMARE: Ecoutez ça.

M. BERGERON: De plus, il y a eu des protestations énergiques de la part des coopéra-teurs, Je l'ai mentionné ce matin, lorsque j'ai demandé au premier ministre — écoutez bien, M. le Président, c'est extraordinairement intelligent, ce qu'il a dit —

M. LACROIX: On voit que ça sort de...

M. BERGERON: ... de remettre la deuxième lecture après l'étude en comité.

M. GRENIER: Ah bient C'est le même chef de l'Opposition. La même année.

M. BERGERON: Alors, M. le Président, je reprends.

M. COURCY: M. le Président, le « cave » envoyez-le donc dans le grenier.

M. BELLEMARE: Ah!

M. BERGERON: Puis-je continueer à faire plaisir au chef de l'Opposition, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de...

M. LACROIX: Est-ce que ça a été préparé par le député de Champlain?

M. BELLEMARE: II y en a une autre. M. LACROIX: Pancrace, ta boîte. UNE VOIX: Voyons, Basile. M. LACROIX: Innocent d'imbécile.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Il serait désagréable...

M. BELLEMARE: M. le Président, je soulève un point d'ordre sur le privilège de la Chambre. Le député des Iles-de-la-Madeleine vient de prononcer à haute et intelligible voix, en s'adressant à un député de la Chambre...

UNE VOIX: Lequel?

M. BELLEMARE: ... et le tutoyant, par dessus le marché, il a ajouté une épithète qui n'est pas parlementaire.

Il a dit le mot « imbécile ».

M. LACROIX: Et ça ne lui convient pas?

M. BELLEMARE: M. le Président, même si ça lui convenait autant qu'à vous, je pense...

M. LACROIX: A ce moment-ci, ça vous convient aussi.

M. BELLEMARE: Mais, M. le Président, si j'ai offensé l'honorable député en le traitant d'imbécile, je retire ce mot et j'espère que l'honorable député sera assez courtois et assez gentilhomme pour ne pas prononcer des mots comme celui-là à l'endroit de ses collègues et je le prie de bien vouloir retirer cette expression.

M. LACROIX: M. le Président, je suis bien prêt à retirer le mot, mais j'espère que le leader parlementaire demandera également à ses députés d'être assez courtois et polis pour ne pas utiliser des mots, des noms comme ils en emploient continuellement.

M. BELLEMARE: Oui, mais...

M. LACROIX: Quand le député de Joliette agira en gentilhomme dans cette Chambre...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: ... j'agirai de la même façon à son endroit, comme le député de Frontenac le faisait autrefois...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LACROIX: ... quand il a cessé ses folies, j'ai cessé de l'interpeller.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. ROY: C'est donc beau d'avoir du courage comme ça.

M. LE PRESIDENT: II serait malheureux de gâter par quelques mauvaises interventions un si beau samedi soir.

L'honorable député de Mégantic.

M. BERGERON: Alors, M. le Président, jovialement et calmement...

UNE VOIX: Cela vaut le hockey.

M. BERGERON: ... je me permets de continuer mes réminiscences à l'endroit du chef de l'Opposition. « J'ai demandé — disait le chef de l'Opposition — au premier ministre de remettre la deuxième lecture après l'étude en comité, étant donné qu'il y a plusieurs principes en jeu dans ce projet de loi... »

M. BELLEMARE: Il a dit ça?

M. BERGERON: « ... étant donné également ce que j'ai dit tout l'heure et qui était une répétition de ce que j'ai dit ce matin. »

M. le Président, j'avais cru, à un moment donné, en voulant me familiariser le plus possible et le plus tôt possible avec la difficile procédure parlementaire, que je pouvais me fier un peu à ce que pouvait énoncer l'honorable chef de l'Opposition, mais je vous avouerai bien candidement qu'à partir de ce soir, je vais changer de professeur.

M. le Président, non, si nous voulons être sérieux, si nous voulons tenir compte de toute l'essence que contient ce bill 85, si nous voulons penser en hommes responsables aux réactions vives et diverses, il ne faut pas nous le cacher, qu'a occasionnées le dépôt du bill 85, je pense qu'il est d'intérêt public et général que le gouvernement, que les députés de cette Chambre puissent entendre les corps intermédiaires, les groupements, les organismes sociaux qui seraient intéressés à venir faire, à ce comité, des recommandations, des suggestions, à venir nous émettre leurs opinions.

Je pense qu'à ce moment-là, nous les députés de cette Chambre, de quelque côté que nous soyons, nous aurons en main un éventail des idées qui peuvent exister dans la province. Nous aurons eu, alors, dans chacun de nos comtés respectifs, le temps d'aller tâter le pouls des gens que nous représentons et dont nous devons, si nous voulons être réellement fidèles à notre mandat, être les interprètes dans cette Chambre.

Je comprends que nos collègues de l'Opposition veuillent laisser planer des doutes au sujet de l'unité du gouvernement de l'Union Nationale. Je pense qu'à ce moment-là les blessures qu'ils ont eux-mêmes subies sont loin d'être cicatrisées. Si le gouvernement de l'Union Nationale prend une telle attitude, c'est parce que nous avons conscience de l'ampleur du problème et de ses répercussions sur l'avenir du Québec. Lorsque nous aurons pris connaissance de toutes les discussions du comité qui siégera entre les deux sessions, tel que le veut la motion, à ce moment-là, il sera du devoir des élus du peuple de prendre une décision. Je pense que, devant un tel problème, il n'y a aucun scrupule pour un gouvernement à vouloir entendre les personnes qui s'y connaissent dans un domaine particulier, à vouloir entendre les chambres de commerce, par exemple, pour que, mieux renseignés, nous puissions amener la meilleure législation possible, dans les circonstances.

Lorsque je constate qu'un samedi soir, nous sommes à siéger à 9 h 35...

M. LESAGE: A 9 h 50...

M. BERGERON: ... lorsque je pense que, l'an dernier, à peu près à la même date, un député de cette Chambre disait au président d'alors — ce député, incidemment, n'est pas dans cette Chambre pour des raisons que j'ignore; c'est son affaire — qu'après tant de mois de labeur, les députés avaient le droit de retourner dans leur foyer, je me demande si mes distingués collègues de l'Opposition ne pourraient pas reviser leur position et comprendre que, si l'on veut la revalorisation du rôle du député, il serait temps que l'on cesse de parler et que l'on agisse.

Plusieurs personnes, les éditoriaux, la Société Saint-Jean-Baptiste sont d'accord pour admettre que l'attitude du gouvernement est sage, mais parce que ça ne fait pas l'affaire de ces messieurs de l'opposition, on va faire traf-ner les débats pendant des jours et des jours.

M. le Président, je pense que si nous voulons retourner chez nous, avant que nos propres enfants changent de langue, il serait temps que l'on se décide, que l'on accepte de siéger en comité. Je pense que lorsque le président de la Société Saint-Jean-Baptiste disait que le gouvernement avait fait preuve de logique et de lucidité il avait raison. C'est pourquoi je pense que cette motion devrait être adoptée.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. William Tetley

M. TETLEY: M. le Président, ayant d'aborder la question du renvoi du bill, puis-je vous rendre hommage? Je voudrais aussi souhaiter que l'honorable premier ministre qui est malade soit rétabli bientôt en pleine santé. Et puis-je rendre hommage en même temps à mon chef, l'honorable chef de l'Opposition?

Mr. President, I will be very brief and will certainly terminate before the end, before ten o'clock. It is my belief that the motion should be defeated and the bill should be studied by this House and I make that statement very respect-

fully as a very very new member of this House.

But I have one slight advantage. I have immerged from an election which was very exciting, very tiring but where this issue was studied in depth and discussed in depth by both candidates. And if one studies the results of the election, poll by poll, one will notice that French-speaking electors as well as English-speaking electors were in favour of a linguistic bill and immediately and not only that, Mr. President, if one studies the election carefully one will see that my opponent a very fine and fair opponent - I must make that remark - also supported this linguistic bill, or a linguistic bill and immediately. He did not want delay.

That is the first reason why I respectfully submit that this bill be studied carefully by us now or next week. There is a second reason, Mr. President; the commercial world is waiting for this House to make a decision on which way it is going. The honourable Minister of Finance, gave a very fair and brillant exposé yesterday of the finances of the Province and the difficulties of the city of Montreal.

My constituency is totally in the City of Montreal and we are very concerned with the finances of the City and of the Province. The commercial world is concerned with the finances of the City and of the Province. The commercial world is waiting for this House to decide on this very important linguistic matter. I have no doubt in my mind, after a very serious campaign where I have visited many hundreds and it was reported thousands of persons, I am not sure how many I saw, but I discussed with French and English people and merchants and businessmen so that I have no doubt, do I say that the population, certainly of Montreal and of Notre-Dame-de-Grâce, and I think it is a very representative population, is waiting for this House to immediately decide this issue.

The delay, Mr. President, is hurting our economy. The most recent bond issue of our Government, if my memory serves me right, was $50 millions at 7 3/4%, half of which was taken up by the pension fund and the rest, the next day, dropped in value, so it really came out at a discount. It is worrysome, that 6 year term in effect short term obligations should come out at such a high interest rate. This is, as the Minister of Finance, I think, said, an urgent matter. It should not be delayed and that is my second reason, Mr. President.

Lastly, by delaying, and I am being extremely brief, we continue an injustice in St. Léonard. As an Engligh speaking Quebecker, I appreciate this right to speak to you in English. I appreciate the rights that have been given to the English speak- ing population for 101 years or even more, and we have unfortunately, for the first time in our history in this wonderful Province, which I consider mine. — Je me considère comme un Québécois, 100%, de naissance et de choix. — for the first time in this wonderful Province, we have a stain on our escutcheon, a stain on our reputation. It should be removed immediately.

M. le Président, puis-je réitérer mes trois raisons? D'abord, je crois, suivant mes recherches dans mon comté, que les Canadiens de langue française et les Canadiens de langue anglaise favorisent dès aujourd'hui ce bill. On ne peut pas mettre le bill de côté, on ne peut pas étudier le bill pendant longtemps. II faut que notre Parlement, ici, agisse aujourd'hui.

Deuxièmement, le monde commercial attend une décision aujourd'hui. En dernier lieu, il faut mettre fin à une injustice à Saint-Léonard.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de D'Arcy-McGee.

M. GOLDBLOOM: M. le Président, il est presque dix heures et j'ai l'honneur de proposer l'ajournement du débat.

M. BELLEMARE : Ah non! Ah non! DES VOIX: Non, non, non!

UNE VOIX: La procédure dit que c'est jusqu'à dix heures.

DES VOIX: Vote, vote!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BELLEMARE: Je pense que vous faites de la stratégie, parce qu'il vous manque 50% de vos députés.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Malheureusement, si je n'ai pas le consentement unanime de la Chambre, je suis obligé de demander au député de D'Arcy-McGee de commencer son intervention.

DES VOIX: Obstruction, obstruction, obstruction, obstruction!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je présume que la dernière partie des applaudissements m'était réservée, parce que je suis debout depuis une minute. Il est maintenant 10 heures.

M. GABIAS: L'Opposition est à engueuler son député. C'est extraordinaire! Elle bâillonne son député.

M. GOLDBLOOM: Est-ce que je peux comprendre que j'ai demandé l'ajournement du débat?

M. BELLEMARE: Non.

M. LE PRESIDENT; A l'ordre! Je comprends que l'honorable député de D'Arcy-McGee le demande.

M. LESAGE: Puis-je demander au leader de la Chambre s'il ne considérerait pas raisonnable de ne siéger qu'à 3 heures, au lieu de dix heures?

DES VOIX: Dix heures.

M. LESAGE: M. le Président, est-ce que je pourrais finir ma phrase? A trois heures au lieu de dix heures trente afin que les députés de la région de Montréal en particulier, au moins en ce dimanche à la veille des Fêtes, puissent passer la journée de demain avec leur famille? Ils pourraient quitter Montréal par train lundi matin et être ici, certains vers midi et quart et d'autres vers deux heures. Il me semble qu'un ajournement à trois heures serait raisonnable dans les circonstances.

Quelle que soit la réponse que le leader du gouvernement donnera à cette demande que je crois raisonnable et qui serait peut-être susceptible de sauver beaucoup du temps de cette Chambre, je voudrais bien lui demander de nous donner l'ordre des travaux lundi à la reprise.

M. BELLEMARE: M. le Président, lundi nous finirons la motion, nous prendrons le bill 290 et s'il nous reste du temps, nous étudierons le bill de l'aéroport de Montréal.

M. LESAGE: Celui de la ville de Montréal, je comprends qu'il est... M. Saulnier était ici aujourd'hui et il a insisté, je suis sûr, auprès du ministre des Finances...

M. BELLEMARE: M. le Président, c'est l'ordre des travaux, et j'ai l'honneur de demander l'ajournement de la Chambre à dix heures trente lundi matin.

M. LE PRESIDENT: La Chambre s'ajourne à lundi, à dix heures trente.

(22 h 1)

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