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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Thursday, December 19, 1996 - Vol. 35 N° 73

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures six minutes)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous débutons par les affaires courantes.


Déclarations ministérielles

Déclarations ministérielles. M. le vice-premier ministre, ministre d'État de l'Économie et des Finances.

Juste auparavant, M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, vous savez qu'en vertu de notre règlement le gouvernement doit faire parvenir à l'opposition officielle, une heure avant le prononcé d'une déclaration ministérielle, le texte de cette déclaration. Nous l'avons reçu; c'est une déclaration de deux pages que va lire le ministre, mais je ne sais pas si c'est une erreur ou autre chose, mais est annexé à ce document-là un autre document qui fait une quinzaine de pages et qui contient toute une série de mesures totalement différentes de celle dont parle le ministre dans sa déclaration ministérielle.

Je ne sais pas, M. le Président, si c'est une erreur ou si ça rencontre l'esprit de notre règlement de faire un mini-budget à l'occasion d'une déclaration ministérielle. Je vous soumets, M. le Président, qu'un document de 20 pages – c'est ce qu'on nous donne – qui a été résumé dans une... où le ministre ne parle que d'une seule mesure où il y en a une panoplie, je ne crois pas que ça respecte notre règlement, l'esprit de notre règlement, en tout cas, qui fait que l'opposition officielle doit avoir le temps d'étudier chacune des mesures qui sont là, ce qui est impossible à faire, M. le Président, dans un délai d'une heure.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, nous nous sommes conformés à ce que le règlement prévoit quant à la transmission des documents. Maintenant, on me dit que ce n'est pas la première fois que, lors d'une déclaration ministérielle, on procède ainsi. Alors, moi, ce que je vous suggère, M. le Président, qu'on écoute le ministre des Finances. Quant à la déclaration, il est en possession des documents, conformément à notre règlement.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Quant au sujet des déclarations ministérielles, le sujet est très large, la discrétion gouvernementale est également très large. Mais après avoir pris connaissance du document, comme l'a souligné le député de Laporte, ou bien il s'agit d'une erreur de documents du ministère des Finances, qu'ils ont été transmis par erreur, car ils n'ont aucun rapport, les documents en annexe, avec le sujet qui est traité comme tel dans la déclaration ministérielle.

Et, là-dessus, j'ai beau regarder, je ne trouve pas de précédent où on profite d'une déclaration ministérielle pour déposer en annexe des documents qui n'ont aucun rapport avec le contenu de la déclaration ministérielle. C'est peut-être une façon de tenter d'introduire des documents à l'Assemblée nationale sous couvert, et, à ce moment-là, bien qu'on puisse interpréter l'article 55 largement, ça ne couvre pas ce genre de manoeuvre, M. le Président.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, le ministre des Finances me confirme qu'il y a rapport entre les documents fournis et la déclaration ministérielle. Puis c'est la première fois que j'entends l'opposition se plaindre qu'elle a trop d'information.

(10 h 10)

Le Président: Écoutez, je pense qu'à ce moment-ci j'ai, moi aussi, selon les dispositions du règlement, reçu copie de la déclaration ministérielle une heure avant, donc dans le temps réglementaire. Ce que je considère être la déclaration ministérielle, c'est le texte de deux pages que le ministre va lire. Je conçois que finalement l'annexe... il y aura demande de consentement pour dépôt de documents. S'il n'y avait pas consentement pour dépôt de documents, le gouvernement pourrait, à ce moment-là, revenir au dépôt de documents et, à ce moment-là, le déposer à une étape où il n'y aura pas besoin de consentement. Et, dans ce contexte, compte tenu que... et je pense que le leader de l'opposition officielle reconnaissait lui-même que les dispositions du règlement sont suffisamment larges, je pense qu'à ce moment-ci la déclaration elle-même est conforme au règlement.

Alors, je vais reconnaître M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.


Réduction des taxes sur la masse salariale et autres mesures fiscales


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, dans le cadre du Sommet sur l'économie et l'emploi, j'ai annoncé que le gouvernement du Québec entendait mettre en place une réduction des taxes sur la masse salariale afin de favoriser la création d'emplois à temps plein. À cette occasion, j'ai indiqué que les modalités d'application de cette mesure serait annoncées lors du prochain discours sur le budget.

Toutefois, afin de favoriser le plus rapidement possible la création d'emplois, je suis particulièrement fier de rendre publiques, dès aujourd'hui, les modalités d'application de cette mesure.

La réduction des taxes sur la masse salariale qui sera mise en place prendra la forme d'un crédit d'impôt remboursable. De façon générale, un employeur exploitant une entreprise au Québec pourra avoir droit à ce crédit d'impôt s'il crée ne serait-ce qu'un seul emploi admissible au cours d'une année civile. Cependant, afin de se qualifier pour une année, cet employeur devra remplir deux conditions. Il devra avoir vu ses cotisations payables au Fonds des services de santé augmenter en conséquence d'une augmentation de sa masse salariale pour cette année par rapport à l'année précédente, et, s'il a plus de 25 employés, il devra avoir adhéré à un modèle de partage volontaire du temps de travail.

Compte tenu de l'objectif fondamental poursuivi par ce crédit d'impôt, un emploi sera admissible s'il s'agit d'un emploi requérant 30 heures ou plus de travail par semaine occupé par le même titulaire pendant une période de 40 semaines ou plus. Le nombre des emplois admissibles créés au cours d'une année civile sera déterminé en soustrayant du nombre d'emplois admissibles au sein de l'entreprise de l'employeur pour cette année le nombre de tels emplois pour l'année civile qui précède.

Le montant du crédit d'impôt remboursable sera égal à 750 $ par emploi admissible nouvellement créé, ce qui correspond en substance à un congé de cotisation au Fonds des services de santé au taux horaire moyen de rémunération pour l'ensemble des secteurs d'activité économique du Québec et en considérant 1 200 heures de travail par année. Le montant du crédit d'impôt remboursable dont pourra se prévaloir un employeur ne pourra toutefois excéder 22 500 $, ce qui équivaut à la création de 30 emplois admissibles par employeur.

Tout en simplifiant grandement la tâche des employeurs qui ont droit à ce crédit d'impôt, cette approche avantage les petites et moyennes entreprises, compte tenu que le taux horaire de rémunération y est généralement plus faible qu'il ne l'est pour les grandes entreprises. De plus, en limitant l'aide fiscale à 1 200 heures de travail, cette mesure décourage le recours au temps supplémentaire par les employeurs et incitent à créer des emplois à temps plein.

Les employeurs pourront demander ce crédit d'impôt pour la première fois au début de l'année d'imposition 1998 à l'égard des emplois créés dès le 1er janvier prochain.

M. le Président, on trouvera en annexe à la présente déclaration, et qui en fait partie intégrante, les précisions additionnelles concernant les modalités d'application du crédit d'impôt pour la création d'emplois ainsi que d'autres mesures fiscales d'ordre technique, y compris des mesures d'harmonisation à la législation fédérale. Un document faisant état du modèle proposé concernant le partage volontaire du temps de travail est également annexé. Ce modèle a fait l'objet de consultations auprès de divers organismes, dont le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre élargi.

Le Président: Merci, M. le vice-premier ministre. M. le député de Laporte.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. À travers l'orage de nouvelles taxes qui s'abat sur nous par les temps qui courent, y compris les 400 000 000 $ de taxes dont il a été question au cours des dernières heures, au cours de la nuit, une réduction de la taxe sur la masse salariale, si minime soit-elle, fait figure d'un mince rayon de soleil à travers les épais nuages qui recouvrent le firmament fiscal québécois.

Hélas, M. le Président, le gouvernement n'a pas pu résister à la tentation d'assortir cette mesure de conditions qui vont accentuer la paperasserie, accentuer la réglementation. À titre d'exemple j'aimerais vous signaler que les sociétés, les compagnies qui voudront profiter de ce crédit d'impôt devront remplir des formulaires qu'ils enverront au ministère du Revenu, et un deuxième formulaire – il en est question à la page 5 – provenant de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, devra également être joint à la demande. Et là le ministère du Revenu va demander un avis à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre quant à la conformité; elle devra se prononcer. Et il est dit, en page 7 du document: «Aucun crédit d'impôt ne sera accordé à un employeur à l'égard de l'année civile pour laquelle la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre aura constaté le non-respect de ses engagements.» On voit tout le mécanisme qui est mis en place pour finalement accorder ce crédit d'impôt, et c'est à souhaiter que les entrepreneurs ne se décourageront pas.

Quant à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, dont les premiers jugements vont être prononcés, d'après le document, en 1998, étant donné que la ministre nous annonce son abolition pour bientôt, alors on se demande quelle cohérence il y a entre un document qui confie à la SQDM une tâche qu'elle ne sera probablement pas là pour remplir...

Et que dire, en plus, des innombrables mesures fiscales, à très haute technicité, qui sont comprises dans les 15 pages en annexe du document? Seulement pour lire des têtes de chapitre, on peut parler, par exemple, des règles concernant le roulement des entreprises, les règles antiévitement, une cacophonie... On parle de la compagnie Volkswagen Credit – je ne sais pas si ça a affaire avec le roulement ou les évitements – une compagnie privée qui vient se retrouver là, avec une mesure qui concerne uniquement cette compagnie-là. On parle de la législation fédérale, l'amortissement. M. le Président, ce document-là n'a rien à voir avec une déclaration ministérielle, c'est un minibudget, c'est une déclaration omnibus, bref, un fourre-tout.

Je déplore, en terminant, M. le Président, que le gouvernement n'ait pas eu plus de respect pour l'opposition officielle, et probablement les Québécois, et n'ait pas jugé bon d'accorder à l'opposition officielle le temps nécessaire – on aurait pu faire parvenir le document quelques heures avant – pour faire une analyse exhaustive de toutes les mesures qui sont là-dedans. Ça nous aurait permis, peut-être, de faire des critiques encore plus poussées au ministre des Finances. Je vous remercie.

Le Président: M. le ministre des Finances, pour votre réplique.


M. Bernard Landry (réplique)

M. Landry (Verchères): La réponse du député de Laporte me convainc que le délai d'une heure de notre règlement n'est peut-être pas tout à fait assez long, pour lui en tout cas, parce que ses commentaires montrent qu'il n'a vraiment pas compris le sens de la déclaration, sans même faire allusion aux annexes. La déclaration ministérielle choisit la baisse de l'impôt sur la masse salariale comme stimulation d'emploi et découragement des heures supplémentaires, et il le fait de la façon la plus simple possible. Plus simple que ça, on retomberait dans les erreurs de l'opposition quand ils ont créé tous ces problèmes énormes avec les crédits d'impôt à la recherche et au développement avec lesquels ont se débat encore aujourd'hui. Si on pouvait avoir une diminution de la masse salariale sur simple appel à la réceptionniste du ministère des Finances, ce serait très simple en effet, mais ça ressemblerait aux sortes d'administrations qu'on avait avant que le présent gouvernement ne prenne le pouvoir.

Nous sommes très fiers de cette mesure. Elle nous a été suggérée par nos partenaires réunis dans un formidable sommet de solidarité socioéconomique. Nous avions dit que nous allions passer à l'action, et nous passons à l'action.

Je veux dire en terminant, M. le Président, que, s'il trouvait la déclaration trop compliquée et les annexes trop abondantes, pourquoi s'est-il permis d'inventer des choses? Il avait assez de substance pour fournir son analyse. Il a inventé que nous allions faire disparaître la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, ce qui est radicalement faux. Alors, s'il avait consacré l'heure qu'il avait à analyser la vérité, sa déclaration aurait été plus substantielle.

Le Président: À ce moment-ci, comme je l'ai indiqué précédemment, est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt des annexes?

Une voix: Bien oui!


Documents déposés

Le Président: Alors, il y a consentement. Très bien.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi maintenant. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article a de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 92

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre d'État à la Métropole présente le projet de loi n° 92, Loi sur la Commission de développement de la métropole. M. le ministre d'État à la Métropole.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi a pour objet de créer la Commission de développement de la métropole, dont la mission principale est de soutenir le développement de la région de la métropole. À cette fin, le projet de loi prévoit que la Commission soutient, développe et coordonne l'essor économique, culturel et social de la métropole en assurant la concertation et la cohérence des actions des autorités locales et régionales. La Commission favorise aussi l'harmonisation des relations entre les autorités locales, régionales et gouvernementales.

La Commission exerce ses fonctions sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal et des 11 municipalités régionales de comté environnantes indiquées en annexe à la loi.

(10 h 20)

Les affaires de la Commission sont administrées par un conseil composé d'un président, de membres issus, pour les deux tiers, du milieu municipal et, pour l'autre tiers, de membres nommés par le gouvernement pour représenter les groupes socioéconomiques. Le gouvernement désigne parmi les membres du conseil deux vice-présidents, dont au moins un issu du milieu municipal. Ce projet de loi prévoit également la composition d'un comité exécutif, lequel sera formé, en outre du président, des deux vice-présidents ainsi que de cinq autres membres désignés par le conseil, dont trois parmi les membres issus du milieu municipal. Le ministre d'État à la Métropole sera le président du conseil de la Commission et de son comité exécutif.

La Commission a principalement pour fonctions d'élaborer, en collaboration avec les ministres concernés ou l'Agence métropolitaine de transport, des orientations et des priorités d'actions stratégiques en matière de développement économique et d'adopter des règlements relatifs à un cadre d'aménagement métropolitain, à un plan de transport et à un plan de gestion des déchets pour son territoire. Ces règlements sont soumis à l'approbation du gouvernement.

La Commission agit également comme conseil auprès du ministre sur toute question d'intérêt métropolitain. Elle formule aussi au gouvernement, dans des délais fixés par la loi, des recommandations sur les structures administratives de son territoire, sur les infrastructures et équipements récréatifs, touristiques ou culturels ou les événements socioculturels et sportifs d'intérêt métropolitain, sur la gestion de la qualité de l'air et de l'eau et sur l'Agence métropolitaine de transport. Elle peut aussi formuler des recommandations sur d'autres sujets.

La Commission peut exécuter ou faire exécuter tout autre mandat connexe que peut lui confier le gouvernement. Elle peut aussi conclure des ententes ou participer à des projets communs avec toute personne ou organisme.

Enfin, ce projet de loi introduit des mesures relatives au financement de la Commission et contient des dispositions modificatives, notamment en ce qui a trait à l'Agence métropolitaine de transport et à la Commission de protection du territoire agricole, ainsi que des dispositions transitoires et des modifications de concordance.


Mise aux voix

Le Président: J'accepte d'être saisi de ce projet de loi. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: M. le Président, est-ce qu'il va y avoir des consultations publiques, par rapport au dépôt du projet de loi, en janvier ou en février?

Le Président: M. le ministre.

M. Ménard: C'est la période des questions?

Le Président: Non.

M. Ménard: Oui, il va y en avoir. Je vais faire une motion sans préavis à cet effet juste après la période des questions.

Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article...

M. Paradis: ...je voudrais qu'on se comprenne, le leader du gouvernement a suspendu les motions sans préavis dans le cadre du bâillon qu'il a imposé aux membres de l'Assemblée nationale.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article b de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 89

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative. M. le ministre de la Justice.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, ce projet de loi a pour objet d'assurer la mise en oeuvre, dans les lois particulières, des principes établis dans la Loi sur la justice administrative.

Certaines dispositions visent la déjudiciarisation des processus dans l'administration publique menant à la prise de décisions individuelles dans l'exercice d'une fonction administrative et effectuent les modifications pertinentes dans des matières procédurales.

D'autres règles découlent de l'intégration dans le Tribunal administratif du Québec des organismes existants que sont la Commission des affaires sociales, le Bureau de révision en immigration, la Commission d'examen des troubles mentaux, le Bureau de révision de l'évaluation foncière et le Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole et visent à assurer l'harmonisation de leurs règles de procédure.

De plus, certaines dispositions visent à confier au Tribunal administratif du Québec la compétence qui est actuellement confiée à certains organismes gouvernementaux comme la Commission municipale et la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec de même qu'à la Cour du Québec dans des matières administratives et d'évaluation des indemnités à la suite d'une expropriation.

En outre, certaines dispositions visent à introduire dans la Loi sur la Régie du logement, pour les rendre applicables aux régisseurs, les règles sur le recrutement, la sélection et la nomination, le renouvellement et la fin prématurée de mandat et la déontologie prévues dans la Loi sur la justice administrative et applicables aux membres du Tribunal administratif du Québec.

Enfin, le projet de loi pose comme principe de transition l'application immédiate de la loi nouvelle, établit les règles de transition applicables aux membres des organismes intégrés au Tribunal et prévoit également diverses règles liées à la procédure, aux délais, au transfert du personnel et des dossiers, de même qu'au financement. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Très bien, M. le ministre. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article c de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 239

Le Président: À l'article c du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 239, Loi concernant la Ville de Gatineau. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose donc ce rapport. Mme la députée de Chapleau présente le projet de loi d'intérêt privé n° 239, Loi concernant la Ville de Gatineau.


Mise aux voix

Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Très bien.


Dépôt de documents

On arrive au dépôt de documents. M. le vice-premier ministre, ministre d'État de l'Économie et des Finances.


Comptes publics, rapport financier du gouvernement et rapport annuel du ministère des Finances

M. Landry (Verchères): M. le Président, conformément à l'article 72 de la Loi sur l'administration financière, j'ai l'honneur de déposer, en deux copies, les comptes publics du gouvernement pour l'année financière terminée le 31 mars 1996, en trois volumes: volume 1, «États financiers du gouvernement du Québec»; volume 2, «Détail des revenus, crédits et dépenses du gouvernement du Québec»; volume 3, «États financiers des fonds spéciaux du gouvernement du Québec», toujours pour la même année.

Et également, M. le Président, par la même occasion, je dépose aussi, en deux copies, le rapport financier préparé au ministère des Finances pour la même année financière.

Et enfin, M. le Président, je dépose le rapport annuel du ministère des Finances pour l'exercice financier 1995-1996.

Le Président: Alors, tous ces documents sont déposés. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, maintenant.


Rapports annuels et rapports sur la procédure d'examen des plaintes de diverses régies régionales

M. Rochon: M. le Président, je voudrais déposer le rapport annuel 1993-1994 de la régie régionale de la santé et des services sociaux du Conseil régional Kativik, de même que les rapports annuels 1994-1995 des régies régionales de la santé et des services sociaux du Conseil cri de la Baie James et de Nunavik, et, de plus, le rapport d'activité 1995-1996 de la régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre.

Enfin, je voudrais déposer les rapports d'examen des plaintes, pour 1995-1996, des six régies régionales de la santé et des services sociaux suivantes: Abitibi-Témiscamingue, Chaudière-Appalaches, Côte-Nord, l'Outaouais, Mauricie–Bois-Francs et Montréal-Centre.

Le Président: Ces documents sont déposés. M. le ministre des Transports.


Rapport annuel du Conseil de la recherche et du développement en transport

M. Brassard: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1995-1996 du Conseil de la recherche et du développement en transport.

Le Président: Ce document est déposé. M. le ministre de la Sécurité publique.


Entente provisoire entre les Mohawks et le gouvernement concernant le maintien de l'ordre à Kanesatake

M. Perreault: M. le Président, c'est avec fierté et aussi, je dirais, avec beaucoup d'espoir que je dépose ce matin la première entente à jamais intervenir entre les gouvernements du Québec et du Canada et la communauté mohawk de Kanesatake relativement à l'organisation des services policiers pour cette communauté.

Le Président: Ce document est déposé. Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce.


Rapport annuel de la Société Innovatech Québec et Chaudière-Appalaches

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1995-1996 de la Société Innovatech Québec et Chaudière-Appalaches.

Le Président: Alors, ce document est déposé. Au dépôt de documents, M. le ministre délégué aux Relations avec les citoyens et à l'Immigration.


Rapport annuel du Conseil permanent de la jeunesse

M. Boisclair: M. le Président, tout en soulignant le dernier jour de travail d'un journaliste émérite de la Tribune de la presse, M. Philip Authier, du quotidien la Gazette , j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1995-1996 du Conseil permanent de la jeunesse.

Le Président: Alors, nous comprenons que les applaudissements étaient pour le journaliste et non pas pour le dépôt du document.

Des voix: Ha, ha, ha!


Rapports de missions confiées à des membres de l'Assemblée nationale

Le Président: Je dépose le rapport de mission concernant l'atelier sur l'amélioration des relations entre les pouvoirs exécutif et législatif en République d'Haïti, tenu à Mont-Saint-Louis, à Port-au-Prince, du 29 novembre au 2 décembre dernier. Cette mission a été effectuée par M. le député d'Abitibi-Ouest, François Gendron, et Mme Monique Gagnon-Tremblay, députée de Saint-François; tout cela était dans le cadre des nouvelles relations institutionnelles entre les deux Assemblées nationales.

Je dépose également le rapport de mission concernant la réunion du comité mixte entre l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française et le Conseil permanent de la francophonie, tenue à Paris le 12 novembre dernier. Cette mission a été effectuée par M. André Boulerice, député de Sainte-Marie–Saint-Jacques et président délégué de la section québécoise de l'AIPLF.

(10 h 30)

Finalement, je dépose le rapport d'une mission que j'ai effectuée à la réunion du Bureau de l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française, tenue à Beyrouth, au Liban, le 21 novembre dernier. J'ai participé à cette réunion en ma qualité de vice-président international de cette Assemblée.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le Président de la commission du budget et de l'administration et député d'Arthabaska.


Consultations particulières sur le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché

M. Baril (Arthabaska): C'est avec grand plaisir, M. le Président, que je dépose le rapport de la commission du budget et de l'administration, qui a siégé les 24, 25, 26 septembre ainsi que les 9, 16 et 17 octobre 1996, afin de procéder à des consultations particulières sur le rapport quinquennal sur la mise en valeur de la Loi sur les intermédiaires de marché, intitulé: «La distribution de produits financiers aux particuliers: relever résolument le défi du changement». Je tiens à souligner tout particulièrement le travail des députés de Charlevoix et de Viger qui ont travaillé fort afin d'élaborer des recommandations – au nombre de 11 – que les membres de la commission ont bonifiées en séance de travail et ont annexées au rapport.

Le Président: Merci, M. le Président de la commission. Le rapport est déposé. Mme la Présidente de la commission de l'aménagement et des équipements et députée de Mégantic-Compton.


Étude détaillée du projet de loi n° 83

Mme Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 16, 17 et 18 décembre 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Le rapport de la commission est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions. M. le député de Maskinongé.


Revoir la nouvelle mesure de classement par la cote R limitant l'accès à certains programmes universitaires

M. Désilets: Oui. Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 73 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du comté de Saint-Maurice.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu qu'un nouveau mode de classement, appelé cote R, est récemment entré en vigueur dans certaines universités du Québec;

«Attendu que cette cote soulève des questionnements quant à l'éthique et à l'impartialité de notre système d'éducation;

«Attendu que l'application de cette nouvelle mesure conduit à certaines invraisemblances;

«Attendu que l'application de cette méthode de classement sans période transitoire et sans préavis valable lèse les étudiantes aspirantes et les étudiants aspirants à des programmes universitaires contingentés;

«Attendu que la diffusion de la cote R s'est effectuée après les dates limites d'inscription aux universités;

«L'intervention se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès de la ministre de l'Éducation afin qu'elle convoque incessamment les recteurs des universités québécoises à revoir en profondeur la nouvelle mesure de classement appelée cote R et qu'elle s'assure que seront corrigées les iniquités subies par les étudiants et les étudiantes ayant présenté des demandes d'admission à l'université pour la session d'automne 1996.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Merci.

Une voix: Bravo!

Le Président: Alors, très bien. Juste pour les fins de l'enregistrement du Journal des débats , on m'indique que ce n'était pas suffisamment clair. Je reviens à la présentation de projets de loi, sur le projet n° 92, Loi sur la Commission de développement de la métropole. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Alors, c'est adopté. Ce sera inscrit au Journal des débats .

Le dépôt de pétitions étant terminé, il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.


Questions et réponses orales

Et nous en arrivons immédiatement à la période de questions et de réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle.


Bilan des actions du gouvernement et projets pour la prochaine année

M. Johnson: L'année 1996 achève, la première année du mandat du nouveau premier ministre et député de Jonquière. C'est une année qu'on pourrait qualifier sans exagérer d'année où il y a eu des fractures davantage dans la société québécoise; on a vu des ruptures – on a vu, me souffle-t-on, des factures également pour les contribuables – et on a également assisté à la propension du gouvernement, et notamment du premier ministre, à accuser tout le monde et son frère pour les maux qui nous affligent. Le dernier en date, c'est Mgr Couture, qui doit aujourd'hui comprendre comment Mgr Charbonneau se sentait quand Duplessis partait après.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: Mais le premier ministre est responsable de tous les maux qui l'affligent. Le double langage que le gouvernement a pratiqué, et le premier ministre notamment, que seules les machines et l'administration seraient touchées – bien, il faudrait aller demander aux enfants, aux personnes âgées et aux professeurs si ces gens-là sont des machines; que les contribuables payaient trop d'impôts – mais c'est 3 000 000 $ de plus d'impôts qu'on paie par jour, 1 000 000 000 $ sur une base annuelle ont été annoncés par le premier ministre et ses collègues; sur l'emploi – on en a déjà parlé; sur l'option qui revient, qui ne revient pas – ça dépend si on est en Nouvelle-Angleterre ou pas, ça, je comprends ça, de la part du premier ministre; et quant à l'improvisation qui a marqué certains des projets de loi – les comportements, par exemple, de celui en qui le premier ministre a mis sa confiance illimitée, le député de Louis-Hébert et ministre de la Justice; tout cela, c'est une belle illustration de l'improvisation et l'imprévisibilité des gestes du gouvernement.

À l'aube d'une nouvelle année, alors que le premier ministre, sans doute comme tout le monde, va reprendre contact avec la réalité en dehors de la bulle de l'Assemblée nationale, dans son milieu, ici, au Québec, avec ses parents et amis, est-ce que le premier ministre pourrait prendre la résolution, pour 1997, de cesser son double langage, de faire preuve de moins d'improvisation, d'être plus clair dans les orientations qu'il poursuit, de faire en sorte, donc, de pratiquer davantage la franchise et davantage la transparence plutôt que de continuer d'être affligé de ce que certains appellent le syndrome de Pinocchio?

Le Président: Je voudrais simplement rappeler aux membres de l'Assemblée, encore une fois, que je comprends qu'il y ait des figures de style, mais, en même temps, je vous invite à faire attention au langage qu'on utilise, même au sens figuré, parce que c'est ça aussi qui fait que l'article 32 n'est pas respecté. M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'ai l'impression de me retrouver au collège classique, à une fin de session, avec les admonestations et les sermons qui nous étaient faits, à l'époque, avant de partir en vacances. Il y a une chose que je peux dire au chef de l'opposition: nous n'avons pas écrit à Rome pour demander la démission de Mgr Couture. Et je pense que le chef de l'opposition, dont la fonction est de surveiller le gouvernement, de le faire avec vigilance et de le critiquer avec vigueur, dépasse de beaucoup, je crois, l'ampleur de sa tâche lorsqu'il fait de l'inflation verbale et lorsqu'il emploie des expressions qui ne correspondent en aucune façon à la réalité.

Ce que je peux dire, M. le Président, c'est que, dans les résolutions que je vais prendre, et je vais en prendre certainement durant la période des fêtes, c'est que je vais m'astreindre à maintenir mon attitude de patience vis-à-vis des critiques de l'opposition, je vais continuer de me confiner à la modération du langage et je vais essayer de continuer à ne jamais employer de mots que je regretterais après une période de questions. Et je conseillerais au chef de l'opposition de faire pareil et de faire, comme on disait au collège, un examen de conscience.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Tout dépend qui est le directeur spirituel, évidemment, on s'en doute. Mais je dirais au premier ministre et je demande au premier ministre si, au lieu de prendre la résolution de faire preuve, lui, davantage de patience avec ceux qui ont la mission, la vocation et l'obligation de surveiller – parce que c'est ça que ça lui prend, à l'évidence, il faut le surveiller de proche – il ne pourrait pas plutôt souhaiter que ce soit les chômeurs et les contribuables québécois, qui, eux, sont obligés d'être patients avec le gouvernement, avec son indécision, et que les chômeurs... Eux, n'ont plus le temps d'être patients. Il faut que le gouvernement prenne des décisions qui vont dans le sens de la création d'emplois et de la réduction du fardeau qui pèse sur les Québécois.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

(10 h 40)

M. Bouchard: Mauvaise journée pour une pareille critique, M. le Président, puisqu'on vient justement d'annoncer une mesure extrêmement créatrice d'emplois, qui découle d'un consensus du sommet de l'emploi à Montréal, il y a quelques semaines, et qui va permettre d'arriver à un double objectif, de créer de l'emploi par une diminution des taxes sur la masse salariale, de créer de l'emploi aussi par une meilleure répartition du temps de travail.

Et j'inviterais également le chef de l'opposition à réfléchir sur la situation macroéconomique du Québec et du Canada et de réaliser que nous sommes en train, tous ensemble, de poser des gestes qui agissent sur les causes profondes du malaise économique qui affecte le Québec depuis plusieurs années. Et la répercussion est assez pleine de promesses. On voit, par exemple, que les gens, la table des conjoncturistes de la presse, cette semaine, nous annonce pour le Québec un taux de productivité économique de l'ordre de 2 % et plus, entre 2 % et 3 %. Il y a donc quelque chose qui se passe de correct au plan des mesures que le gouvernement prend pour agir sur les conditions propices à l'investissement et à la consommation. Nous savons que les ventes au détail, nous savons que les livraisons manufacturières, que les exportations sont maintenant à des niveaux records. Nous savons que le taux d'intérêt a baissé de 5 % depuis un an et demi. Donc, tout est en place pour que le Québec puisse enfin profiter des sacrifices qu'il fait présentement.

Puisqu'on parle aux Québécois aujourd'hui, M. le Président, qui vont entrer dans la période des fêtes, je pense qu'il est bon de signaler que nous aurons tous l'occasion durant cette période de réfléchir sur l'importance des efforts que nous devons faire pour nous reprendre en main.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre se rend compte que la vantardise, dans le fond, qu'il vient d'exhiber à l'endroit de la déclaration ministérielle est tout à fait non fondée, que même si ça créait, entre guillemets, 500 000 emplois, un demi-million d'emplois, la mesure du ministre des Finances – ce qui est absolument pété de même penser à ça – ça serait encore moins que les impôts qui, cette nuit, ont été décrétés par son gouvernement, qu'il y a des centaines de millions de plus de fardeau fiscal qui ont été augmentés pendant la nuit avec le bâillon et que le premier ministre est tout à fait incohérent lorsqu'il dit que la mesure qu'il vient d'annoncer est le signe annonciateur d'une reprise de l'emploi, alors que les impôts et les taxes, ça tue l'emploi? Et vous avez passé la nuit à faire ça.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le chef de l'opposition doit savoir – et, s'il ne le sait pas, je laisse juger les gens – que, en particulier, on a parlé de 400 000 000 $. Il y a 300 000 000 $ là-dedans qui sont visés en termes de récupération d'impôts impayés. C'est 300 000 000 $ d'impôts qui sont dus. Ce n'est pas des impôts qui ont été imposés récemment, des impôts qui sont dus par des contribuables et qui vont s'effacer par prescription si on n'intervient pas cette nuit.

Alors, nous avons fait en sorte que l'État va se soucier de percevoir l'impôt qui est dû, contrairement au régime qui nous a précédés, qui ne s'en souciait pas, M. le Président, qui laissait l'impôt impayé. De sorte que maintenant, nous, nous faisons le ménage des impôts et nous nous assurons que, par exigence de la première équité fondamentale, les gens qui doivent de l'impôt le paient.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Si l'impôt était dû, pourquoi est-ce que ça prend une loi pour changer la prescription et extensionner la période? Est-ce que ce n'est pas simplement une extension de deux ans d'une période normale à l'endroit de gens de bonne foi et que c'est là pour compenser les deux années de campagne référendaire, puis tout ce que vous voulez, pendant lesquelles vous n'avez rien fait? C'est ça que vous êtes obligés de corriger?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je crois qu'il convient de rectifier les faits. Au gouvernement fédéral, l'impôt est imprescriptible. Il n'y a aucune limite de temps. Le fisc peut reculer aussi longtemps qu'il le veut. Au Québec, ça a été, pendant très, très longtemps 30 ans, et la réforme du Code civil a fixé ça à trois ans. Il se trouve que trois ans, c'est beaucoup trop court, M. le Président. Pour les fins de la perception légitime, équitable et efficace de l'impôt, il faut ramener la prescription à cinq ans. Ce qui est véritablement un délai normal. C'est ce que nous avons fait cette nuit. C'est ce qui va permettre au gouvernement de s'assurer que les impôts vont être payés.

Le Président: En principale, M. le député de Westmount–Saint-Louis.


Financement de départs assistés pour les cols bleus de la ville de Montréal

M. Chagnon: Merci beaucoup, M. le Président. Tous doivent faire des sacrifices, dit le premier ministre. Or, on retrouve un petit chef-d'oeuvre ou un petit trésor d'incohérence à la lecture de la Gazette officielle qui a été publiée hier, le 18 décembre. On y apprend, par exemple, que le gouvernement du Québec va...

Une voix: À quelle page?

M. Chagnon: À la page 6856. On y apprend que le gouvernement du Québec va transférer plusieurs millions de dollars pour financer le départ assisté des employés de la ville de Montréal, les employés cols bleus, qui, eux, grâce à la géniale assistance du ministre du Travail, arrachent la semaine de quatre jours, ont reçu une semaine de quatre jours, recevront 6 % d'augmentation de salaire au 1er janvier, comparativement à la demande, M. le premier ministre, que vous avez faite, dans votre contre-proposition, à vos employés du gouvernement du Québec, de leur accorder effectivement 1 % d'augmentation au 1er janvier, mais aussi d'exiger de nos propres employés 50 % du financement, donc un autofinancement de 50 %, des départs assistés à même la caisse de retraite de nos employés. Évidemment, on sait, M. le Président, que les employés des municipalités sont payés 28 % plus cher que les employés du Québec.

Comment le premier ministre peut-il faire en sorte d'expliquer cette incohérence sinon cette situation qui crée deux poids, deux mesures entre les employés municipaux et les employés du Québec?

Une voix: C'est beau.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: M. le Président, après deux longues années de négociations entre la ville de Montréal et les cols bleus, on en est enfin arrivé à un règlement de ce différend important au Québec. Tous les observateurs ont été unanimes à souligner le travail remarquable du ministre du Travail, qui est intervenu dans cette situation pour faire en sorte que les pourparlers continuent et qu'on en arrive à un règlement négocié qui permet de solutionner la question la plus cruciale dans cette négociation: la baisse du plancher d'emplois quant au nombre d'employés chez les cols bleus, à la ville de Montréal.

Résultat remarquable quand non seulement on en arrive à régler cette question du plancher d'emplois à Montréal, mais également – et on sera surpris – lorsque les syndiqués et lorsque la ville de Montréal ratifieront le projet d'entente sur la formule de partenariat à laquelle nous en sommes arrivés finalement, à la ville de Montréal, pour des résultats extrêmement positifs pour les citoyens et l'ensemble des concernés, contribuables à la ville de Montréal.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: Comment le premier ministre ne peut-il pas comprendre l'incohérence entre la réponse du ministre des Affaires municipales et la réalité de sa contre-proposition, par laquelle il demande à ses employés, aux employés du gouvernement du Québec et des réseaux, par laquelle il exige de ses employés 50 % d'autofinancement des départs assistés pour les mois à venir, les menace d'une loi spéciale s'ils résistent à cette proposition, et aussi lorsqu'on sait que les employés du gouvernement du Québec, pour des emplois comparatifs, selon les données de l'IRIR, gagnent 28 % moins cher que les employés dont parle le ministre des Affaires municipales, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, d'abord je n'ai pas les données exactes, précises, parce que c'est le dossier de la ville de Montréal, le dossier des cols bleus. Mais ce que je sais, ce qui m'a été transmis comme information – puis on pourra le confirmer par des tableaux – c'est que cette négociation a permis d'apporter une solution extrêmement attendue, que tout le monde espérait depuis de très nombreuses années, qui était d'abaisser le niveau du plancher d'emplois de l'ordre de plus de 500 employés, 500 postes, me dit-on, ce qui est une réussite considérable et ce qui montre que le syndicat des cols bleus a agi avec solidarité dans ce dossier, puisque ça va permettre en outre à la ville de Montréal de recommencer à engager de jeunes salariés. Donc, c'est une très bonne nouvelle.

De plus, le règlement va permettre de diminuer la masse salariale de la ville de Montréal, en ce qui concerne les cols bleus, de l'ordre de 20 000 000 $. Donc, on a réussi à baisser la masse salariale, ce qui est l'objectif que nous poursuivons, nous aussi, M. le Président. Ça se fait par des moyens différents, par des moyens négociés. C'est la meilleure façon de le faire. Les gens choisissent ce qui leur paraît le plus adéquat. Mais l'objectif, c'est d'abaisser les coûts de main-d'oeuvre. Et c'est ce que nous réussirons, puisque aujourd'hui on m'informe que nous avons entente de principe sur la proposition du gouvernement avec les six centrales et syndicats et que, normalement, l'entente de principe devrait être paraphée aujourd'hui.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: Le premier ministre comprend-il, M. le Président, que, dans les temps durs que nous vivons, des ententes arrachées, des semaines de quatre jours de travail, arracher des augmentations de 6 % pour dans deux semaines, ça n'a rien à voir, mais rien à voir avec la situation que vivent quotidiennement et que vivront les employés du gouvernement du Québec, avec la contre-proposition du premier ministre?

Le Président: M. le premier ministre.

(10 h 50)

M. Bouchard: M. le Président, il faut faire attention de ne pas déformer la réalité à partir de certains aspects d'un règlement. Dans un règlement négocié, il y a des avantages qui sont tirés par d'autres, des avantages tirés par les vis-à-vis. Ce qui est important, c'est l'effet net, c'est le résultat global de la négociation. Cette négociation a permis de répartir le travail davantage, de diminuer le niveau du plancher d'emplois et de diminuer la masse salariale. Ça veut dire que les contribuables de Montréal vont avoir à supporter 20 000 000 $ de moins de dépenses au titre des cols bleus. Ça, c'est une bonne nouvelle.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, l'autre bonne nouvelle pour les contribuables du Québec... M. le premier ministre... Est-ce que l'autre bonne nouvelle, M. le Président, que le premier ministre nous apprend, c'est que les contribuables du Québec devront dépenser 5 000 000 $ de leur poche pour financer la semaine de quatre jours et les augmentations de 6 % des employés cols bleus de la ville de Montréal?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: M. le Président, les termes de l'entente qui seront dévoilés, dans les jours à venir, par les responsables syndicaux et la ville de Montréal, vont indiquer que c'est à même l'ensemble de la masse salariale qu'on pourra trouver les fonds nécessaires pour assumer la convention qui a été signée. Et le résultat net, c'est 20 000 000 $ de moins que les contribuables montréalais auront à payer pour en arriver à un règlement et faire en sorte qu'on puisse, à Montréal, continuer à développer cette ville au Québec.

Le Président: En principale, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Pouvoirs de la future Commission de développement de la métropole

Mme Frulla: M. le Président, une version antérieure du projet de loi qui date du 29 novembre, le projet de loi créant la Commission de développement de la métropole, contenait deux articles fondamentaux quant à ses réels pouvoirs. Il indiquait – et je résume – que les règlements de la Commission concernant le transport, l'aménagement du territoire et l'environnement lient le gouvernement, ses ministères et organismes ainsi que la Communauté urbaine de Montréal, les municipalités, les régies intermunicipales et les MRC dont le territoire fait partie de la Commission. Ça, M. le Président, c'était avant le Conseil des ministres et avant le Comité de législation.

Est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi, dans le projet de loi déposé ce matin, ces articles fondamentaux qui faisaient en sorte que la Commission de développement de la métropole en menait large... Est-ce qu'il peut nous expliquer pourquoi ils sont disparus?

Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.

M. Ménard: Ce dont la députée de Marguerite-Bourgeoys parle, c'est une ébauche qui avait été probablement faite le 29 novembre, une ébauche que je ne me souviens pas moi-même d'avoir lue. Vous réalisez que le 29 novembre, c'est plus ou moins 15 jours après le forum du 8 novembre. Quinze jours pour faire une première ébauche à partir des instructions qui sont données par le ministre, à partir du forum, c'est quand même assez court.

L'idée fondamentale qui est exprimée ici, c'est que la Commission de développement sera appelée à exercer des pouvoirs importants de planification dans quatre domaines, mais trois principaux: dans le cadre d'aménagement – pas l'aménagement, le cadre d'aménagement – ce qui permettra d'harmoniser les schémas d'aménagement des MRC et de la CUM; dans le plan de transport; et aussi dans un plan de gestion des déchets. Ensuite... Ces plans seront élaborés en collaboration et en partenariat avec les ministères sectoriels. Ensuite, ce plan sera soumis au gouvernement pour qu'il l'approuve avec ou sans modifications, et c'est évident qu'à ce moment-là tout le monde sera lié.

Le Président: Mme la députée.

Mme Frulla: Est-ce que le ministre réalise que l'ébauche du projet de loi et le mémoire au Conseil des ministres, ce n'est pas moi qui l'ai écrit, là; quelque part, il y a quelqu'un qui l'a écrit? Et est-ce qu'il réalise aussi... qu'il le confirme, le ministre, le vieil adage qui dit qu'on ne peut pas donner ce qu'on n'a pas et que sa créature est à son image et à sa ressemblance, c'est-à-dire sans autre pouvoir que celui de recommandation et de persuasion? Et que le président, c'est-à-dire lui, demeure, selon les articles 62, 63, 70 à 76 du nouveau projet de loi, sous l'autorité des ministres sectoriels, comme dans la vraie vie, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Ménard: Je ne reproche pas à la députée de Marguerite-Bourgeoys d'avoir écrit une ébauche qu'elle n'estime pas bonne. Je comprends que, maintenant qu'elle connaît le produit fini, elle l'apprécie beaucoup plus: c'est que j'y ai beaucoup travaillé, n'est-ce pas. Et, justement, l'idée est de créer un lieu de partenariat entre les décideurs métropolitains et le gouvernement du Québec et, justement, de donner aux décideurs métropolitains l'occasion de participer à l'élaboration de règles qu'ils se sont fait imposer dans le passé. Cela est conforme à leur désir depuis plusieurs années et au consensus qui s'est dégagé lors du forum des 7 et 8 novembre.

Le Président: Mme la députée.

Mme Frulla: Est-ce que le ministre réalise que le seul vrai consensus, au niveau forum, là, le seul vrai consensus, c'était de régler la fiscalité de Montréal, de telle sorte que la ville ne serait pas obligée, pour payer ses opérations, de vendre à rabais ses actifs, comme on le lit dans La Presse ce matin, actifs dûment payés par les Montréalais? Donc, M. le Président, oser, pour la métropole, veut d'abord et avant tout dire régler le problème de la fiscalité de la métropole. C'est ça, oser, pour la métropole, et agir en conséquence.

Le Président: M. le ministre.

M. Ménard: Les consensus ont été beaucoup plus larges. Il y en avait un autre qui était encore plus unanime, c'était que c'était le ministre qui devait assumer le leadership métropolitain, n'en déplaise à la députée de Marguerite-Bourgeoys. Mais aussi, le pacte fiscal... Oui, c'est vrai, le consensus était que le pacte fiscal était une question qui devait être réglée entre la ville de Montréal et le gouvernement, et c'est exactement ce que nous avons l'intention de faire au courant de cette année. Quant au reste des consensus, c'est évident qu'ils ne peuvent pas être unanimes dans un endroit où il y a eu tellement d'affrontements. Mais, justement, nous leur offrons un lieu où, au lieu de s'affronter, ils vont pouvoir collaborer ensemble et avec le gouvernement du Québec.

Le Président: M. le député de LaFontaine, en principale.


Effets du transfert à la CSST des coûts d'inspection

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Président, en amendant à la toute dernière minute le projet de loi n° 74, sur le financement de la... tarification de la CSST, et en abrogeant particulièrement l'article 249, qui prévoit l'obligation du gouvernement de financer les coûts d'inspection du travail sur les chantiers, le gouvernement du Québec transfère directement aux entreprises du Québec une taxe additionnelle de 15 000 000 $ sur la masse salariale, et ceci, sans consultation, à la dernière minute, et cette taxe est, bien sûr, dénoncée par l'ensemble des gens qui sont concernés.

M. le Président, est-ce que le ministre du Travail peut nous dire ce qu'il a fait pour défendre les entreprises qui s'opposent à cela, la CSN, la FTQ et la CSD, et ce qu'il entend faire pour rappeler au premier ministre ses engagements lors du Sommet, à l'effet que toute taxe sur le travail tuait l'emploi?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, tout le monde est convié présentement à faire un effort pour le redressement des finances publiques. Le gouvernement du Québec a décidé également qu'il y a 15 000 000 $ qui seraient désormais assumés par la CSST pour les frais d'inspection. Je tiens à préciser une chose, c'est que les cotisations à la CSST sont de l'ordre de 1 800 000 000 $, et il apparaît au gouvernement qu'il n'est pas déraisonnable dans les circonstances de demander à la CSST de faire son effort. Présentement, la cotisation est de 2,52 $ par 100 $. Il n'y a pas de prévisions à l'horizon que la cotisation des employeurs va être augmentée. Il est possible, par ailleurs, que la CSST soit appelée à rationaliser davantage ses opérations.

Mais je pense, M. le Président, qu'il importe aussi de rendre compte à l'Assemblée qu'avec les deux projets de loi qui sont sur la table, 74 sur le financement et 78 sur la déjudiciarisation, les économies pour les employeurs seront de 80 000 000 $. Alors, je pense qu'il n'y a pas panique en la demeure quand il s'agit de faire sa part pour les finances publiques.

Le Président: M. le député.

M. Gobé: M. le Président, est-ce que le ministre pourrait nous expliquer, s'il n'y a pas panique en la demeure, pourquoi il a procédé, en cachette, à toute vapeur, par un bâillon et sans consultation des parties qui sont impliquées, à cette hausse de taxe?

(11 heures)

Le Président: M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, le gouvernement du Québec reste responsable de l'inspection à la CSST. Cependant, il a pris un autre engagement. Il y a un vieux contentieux entre la CSST et le gouvernement, de l'ordre de 75 000 000 $. Le gouvernement du Québec s'est engagé à rembourser la CSST, une promesse qui sera tenue.

Quant à la question que soulève le député, il n'y a rien qui s'est fait en cachette, il y a eu des discussions là-dessus entre les partenaires syndicaux et patronaux, et le gouvernement en est arrivé à prendre cette décision où il interpelle ses partenaires pour leur dire: Il y a un effort à faire et un effort collectif à faire, et vous avez intérêt à collaborer. D'autant plus que, si vous avez les 80 000 000 $ dont j'ai parlé tout à l'heure, bien, il en reste 65 000 000 $ qui vont alléger la masse salariale des employeurs. Voilà, M. le Président.

Le Président: M. le député de Frontenac, en principale.


Conflits entre groupes de motards criminalisés à Québec

M. Lefebvre: M. le Président, le 24 octobre, j'ai questionné le ministre de la Sécurité publique relativement à la guerre des motards dans la ville de Québec. Le ministre nous avait alors répondu qu'il faisait son possible, qu'il y avait 12 enquêteurs à temps plein, que ça suffisait pour régler la situation. On en est tous témoins, cette situation-là n'a pas changé. Au contraire, elle s'est aggravée: c'est l'escalade. On est témoins d'assassinats en pleine rue et en plein jour dans la ville de Québec. Le maire de Québec a lancé à nouveau un cri d'alarme au gouvernement du Québec.

M. le Président, qu'est-ce que le ministre de la Sécurité publique et son gouvernement vont faire à court terme, dans les prochaines heures, pour rassurer et protéger la population, pour répondre à l'appel du maire de la ville de Québec pour faire cesser cette violence inacceptable dans les rues de la ville de Québec?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Perreault: Oui, M. le Président, je pense qu'effectivement nous partageons tous la préoccupation du maire de Québec et des citoyens de Québec, et c'est la raison pour laquelle, hier, avec lui nous avons fait le tour d'un certain nombre de mesures. Je dois dire que j'ai déjà rencontré cette semaine les dirigeants des corps policiers. On sait que l'escouade Cargajou a été réactivée à Québec, et j'ai offert au maire de Québec comme aux dirigeants des services policiers toutes les ressources supplémentaires dont ils peuvent avoir besoin pour faire leur travail. Mais il faut également convenir que dans cette situation où des gens qui, par exemple, sont, à la limite, visés par certains individus refusent, après avoir été visés, de porter plainte, refusent de témoigner, le travail policier est un travail d'enquête qui est laborieux.

M. le Président, j'ai des raisons de croire que ce travail se poursuit et que les enquêtes vont donner des résultats efficaces au cours des prochaines semaines.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre réalise la gravité de la situation? Est-ce qu'il peut garantir que, pas dans les prochaines semaines, dans les prochaines heures des mesures concrètes seront prises, entre autres, augmenter les effectifs à l'escouade Carcajou, ajouter d'autres experts, augmenter les budgets pour que les policiers puissent travailler de façon efficace à régler cette menace constante pour la sécurité des citoyens de la ville de Québec?

M. Perreault: M. le Président, je pense que le député a mal entendu, et on est dans un domaine où, je pense, il ne faut pas faire de démagogie, sur la sécurité et le sentiment de confiance des citoyens. Il n'y a pas de solution instantanée dans un dossier de même. On ne peut pas demander à ce que dans les prochaines heures on règle des questions comme celle-là. J'ai dit ceci: Nous avons offert aux services policiers les ressources supplémentaires qu'ils requerront pour pouvoir faire la lutte avec efficacité. Leur conviction, au moment où on se parle... On a également exploré toutes sortes d'autres choses que je n'évoquerai pas ici, dans cette Chambre, on va comprendre pourquoi, mais ce que je peux dire, c'est ceci: Les services policiers concernés travaillent en étroite collaboration, sont convaincus d'être en mesure d'avoir des résultats probants et, actuellement, ils sont satisfaits des ressources qu'ils ont puis ils savent que, s'ils en ont besoin d'autres, ils vont les avoir, M. le Président.

Le Président: En complémentaire?

M. Paradis: En principale, M. le Président.

Le Président: M. le député de Maskinongé avant, M. le leader de l'opposition officielle. M. le député de Maskinongé.


Sécurité en plongée subaquatique

M. Désilets: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre des Affaires municipales, responsable du loisir, du sport et du plein air, et ça concerne la sécurité en plongée subaquatique. Vous savez, M. le ministre, que le coroner du Québec a produit trois rapports dans lesquels il identifie les causes des accidents mortels, et plus spécifiquement il en identifie trois, dont, un, le manque de rigueur dans la formation, le manque de rigueur dans l'accréditation des instructeurs et le non-respect des règles élémentaires de sécurité pour plusieurs adeptes. Il vous demande également de régler la pratique de la plongée subaquatique au Québec.

Et la question: Quelles sont les mesures que vous entendez prendre pour régler le problème de la plongée au Québec, M. le ministre?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

Des voix: Ah!

M. Trudel: Alors, suivant la formule habituelle, M. le Président, je suis surpris de la question...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: ...du député de Maskinongé qui est lui-même un professionnel de l'éducation physique au Québec. Cependant, la question, effectivement, est très sérieuse, puisque 30 personnes sont malheureusement décédées au cours des six dernières années en pratiquant la plongée sous-marine au Québec. Le coroner en chef du Québec, M. Pierre Morin, a mandaté l'un de ses collègues, le coroner Boudrias, pour enquêter sur les causes de ces décès, et le coroner Boudrias en est arrivé aux conclusions qu'a rappelées le député de Maskinongé et a invité le gouvernement à intervenir en pareille matière. C'est pourquoi, dès le 9 octobre, j'ai été amené à rencontrer la Régie de la sécurité dans les sports et à lui demander de préparer un projet de modification législative visant à faire en sorte que la Régie puisse être mandatée, que nous puissions intervenir dans la loi pour adopter une réglementation pour encadrer la formation des instructeurs et la pratique de ce sport au Québec.

J'ai été appelé également à rencontrer la Fédération québécoise des activités subaquatiques, des pratiquants de ce sport, ainsi que l'association de sécurité dans les sports au Québec, la fédération nationale de sauvetage, et je peux indiquer que, dès le 13 décembre dernier, j'ai déposé un mémoire au Conseil exécutif en vue d'en arriver à des modifications législatives qui nous permettent maintenant de mandater un organisme pour en arriver à encadrer l'accréditation des instructeurs en plongée sous-marine au Québec.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Désilets: En complémentaire, est-ce que le ministre a privilégié une approche spécifique – pas juste des mesures – mais est-ce qu'il a des approches spécifiques pour régler le problème de sécurité dans les sports au Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: M. le Président, l'approche que nous préconisons est une approche souple qui vise à nous associer aux pratiquants de ce sport et aux associations nationales en pareille matière et, dans le cadre des travaux qui ont été faits sur l'économie et l'emploi, à ne pas abuser...

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: ...en vue d'en arriver à ce qu'il n'y ait pas de répétition de ces décès accidentels au Québec, à encadrer la formation des instructeurs et des pratiquants avec le monde associatif, la Fédération des activités subaquatiques du Québec, les pratiquants du sport, et nous pourrons en arriver, avec cette approche plus douce et une approche plus ferme, quand même, au niveau de la réglementation, à ne pas voir se répéter ces malheureux événements au Québec.

Le Président: M. le député de Papineau, en complémentaire.

M. MacMillan: Comment M. le ministre peut expliquer, suite à votre réponse, que vous voulez abolir la sécurité des sports du Québec?

Des voix: Ah!

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: M. le Président, nous n'avons aucune intention d'abolir la sécurité dans les sports au Québec.

Des voix: Ha, ha, ha!

(11 h 10)

M. Trudel: Nous voulons utiliser une approche beaucoup plus douce, une approche qui nous permette de le faire avec le monde associatif, avec les pratiquants de ce sport et de faire en sorte que la loi continue de s'appliquer en mandatant des partenaires pour appliquer la réglementation et arrêter de toujours grossir la bureaucratie en vue d'appliquer les différents règlements. On peut le faire avec les partenaires, les pratiquants de ce sport, on est assuré de leur collaboration. L'association nationale de sauvetage peut apporter également sa collaboration. On peut le faire de manière douce, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.


Gestion des dossiers en matière de justice

M. Paradis: Oui, M. le Président. Un chroniqueur de la capitale écrivait, et je cite au texte: «Même s'il ne savait pas que Richard Therrien était un ancien felquiste quand il l'a nommé juge, tout ce que touche le ministre de la Justice semble mal tourner, aussi bien la réforme de l'aide juridique que celle des tribunaux administratifs. Désespérant.» C'est une opinion qui est largement partagée par tous les observateurs, même certains de l'autre côté de la Chambre.

Le premier ministre, quant à lui, à l'Assemblée nationale, réitérait sa confiance illimitée dans le ministre de la Justice. Le ministre de la Justice, cette semaine, récidive, il annonce une entente entre Québec et le Barreau. «Les avocats mettent fin aux moyens de pression – je cite au texte – Le ministre [...] – de la Justice – a précisé, quant à lui, que le Barreau s'est engagé à suspendre immédiatement les moyens de pression.» Dans un communiqué émis hier, le Barreau s'exprime comme suit: «Contrairement à ce qui a été affirmé par le ministre de la Justice du Québec le 17 décembre, les avocats et avocates de pratique privée vont poursuivre la grève générale illimitée dans tout le Québec.» Cette déclaration malencontreuse du ministre de la Justice faisait suite à une rencontre entre le premier ministre et le bâtonnier du Québec, le vice-président du Barreau, Me Serge Francoeur, le président du Comité de pratique privée, Me Raymond Lavoie, et le ministre de la Justice. «Encore une fois – de préciser Me Lavoie – le ministre de la Justice semble vouloir jeter de l'huile sur le feu.»

M. le Président, ma question au premier ministre: Combien d'autres gaffes le ministre de la Justice devra-t-il commettre avant que le premier ministre ne lui retire sa confiance illimitée?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'ai déjà dit que je suis membre du Barreau. J'ai pratiqué le droit longtemps, j'ai été très actif au sein des instances du Barreau. Je connais le monde de la pratique du droit, je connais les avocats et je sais que l'un des meilleurs, l'un des plus respectés, des plus éminents, c'est l'actuel ministre de la Justice.

Des voix: Bravo!

M. Bouchard: M. le Président, le ministre de la Justice abat un travail extrêmement difficile, un travail qui demande beaucoup de rigueur, beaucoup de courage politique, et il le fait...

Le Président: Je m'excuse, M. le premier ministre.

M. Bouchard: ...il le fait avec grande compétence, M. le Président. Concernant les rapports avec le gouvernement et le Barreau du Québec, nous avons eu cette rencontre avant-hier avec les autorités du Barreau du Québec, à laquelle, bien sûr, assistait le ministre de la Justice. Cette rencontre a été, je crois, très éclairante, elle a permis de faire le tour de toutes les questions litigieuses, d'entendre les plaintes, les appréhensions des membres du Barreau. Nous avons fait un inventaire à peu près complet de ce qui faisait l'objet de ce différend entre le gouvernement et le Barreau. Je ne veux pas révéler l'issue de la rencontre, je crois qu'il appartiendra au bâtonnier, qui, me dit-on, fait une conférence de presse aujourd'hui, d'annoncer quelles sont les décisions que prend le Barreau. Mais je peux dire que la rencontre a été positive, qu'elle a été franche, qu'elle a été respectueuse de part et d'autre et qu'elle devrait produire des fruits.

Le Président: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce qu'on n'a pas raison de s'inquiéter quand le premier ministre dit que le ministre de la Justice est un éminent plaideur et un membre émérite du Barreau, extrêmement brillant avocat, dans la mesure où le premier ministre ne s'aperçoit pas que ce dont il a besoin au poste de ministre de la Justice, ce n'est pas d'un brillant avocat, c'est d'un ministre qui a du jugement?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, on ne peut pas être un brillant avocat sans avoir beaucoup de jugement, d'abord. Je crois que c'est la qualité principale d'un avocat, et ça devrait être la qualité principale, également, d'un politicien. Je suis bien convaincu que, parce que nous sommes tous des politiciens, nous avons tous un excellent jugement. Je crois que l'une des raisons pour lesquelles il y a de moins en moins de gens qui veulent aller en politique, c'est justement de voir le traitement qu'on fait subir présentement à l'actuel ministre de la Justice. Parce qu'il prend des décisions responsables, parce qu'il assume les intérêts de l'État, il fait face, de la part de l'opposition, à des attaques sans fondement, des attaques irrespectueuses qui n'ont pas de lien avec le niveau de ses compétences.

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Verdun. En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Oui, mais je comprends que ça fait du bien au ministre, là, avant la période des fêtes, d'avoir un «standing ovation». Ce que je demande au premier ministre, c'est: Combien de temps ça peut durer, sa confiance illimitée? Combien d'autres fois le Barreau devra-t-il dénoncer ce que le ministre fait? Combien d'autres fois des groupes de pression pourront-ils dénoncer ce qu'il fait? Combien d'autres fois – je ne parle pas de l'opposition – des intervenants, partout au Québec, devront-ils dénoncer ce que le ministre fait, les nominations qu'il fait, la façon dont il se comporte ici, en Chambre, et ailleurs? Pendant combien de temps allez-vous maintenir votre confiance illimitée dans quelqu'un dont ce n'est pas évident qu'il la mérite?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, en ce qui concerne la confiance que doit nourrir un premier ministre envers l'un de ses ministres, le chef de l'opposition me laissera assumer mes responsabilités et juger moi-même, pour ce qui est de la confiance.

Deuxièmement, en ce qui concerne le Barreau, je répète que nous avons eu cette rencontre, que le ministre de la Justice a eu un dialogue très constructif avec ses vis-à-vis et que nous verrons, cet après-midi, au terme de la réflexion et des décisions que le Barreau aura prises, ce qu'il adviendra de cette réunion, mais j'ai bon espoir, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de Verdun.


Aide financière aux étudiants d'établissements privés non subventionnés

M. Gautrin: M. le Président, parce que les frais de scolarité dans les collèges privés non subventionnés sont importants, parfois dépassent 10 000 $, les prêts qui sont consentis à leurs étudiants sont proportionnellement assez importants.

La ministre sait-elle que son contentieux enjoint les directions de ces collèges à verser les certificats de prêt même si les étudiants ont cessé d'être inscrits dans ces collèges? Sait-elle que, par ce mécanisme-là, il y a certains étudiants qui obtiennent des prêts garantis par le gouvernement même s'ils ont cessé complètement d'être étudiants dans ces collèges? Autrement dit, pour avoir un prêt facilement garanti par le gouvernement, de l'ordre de 10 000 $, inscrivez-vous dans un collège privé non subventionné, cessez d'aller aux cours deux semaines après et vous obtenez, à ce moment-là, à cause de la garantie de prêt, un prêt garanti par le gouvernement sans difficulté!

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, M. le Président, nous avons eu, hier soir, et même cette nuit, et ce matin, un certain nombre de discussions sur un projet de loi qui concerne l'aide financière aux étudiants et aux étudiantes. J'ai affirmé déjà à plusieurs reprises qu'il m'apparaissait important que l'on révise l'ensemble des règles qui concernent l'aide financière accordée à un étudiant qui fréquente un établissement privé non subventionné. L'une de ces règles, M. le Président, est, entre autres, que l'on fixe un maximum de prêt auquel l'étudiant pourrait être admissible, de sorte qu'il ne soit pas finalement incité à s'endetter indûment.

En même temps que j'ai regardé ces mesures, j'ai demandé à mon ministère – et cela va répondre plus spécifiquement à la question du député de Verdun – que l'on révise l'ensemble de nos politiques d'aide financière aux étudiants qui fréquentent les institutions privées non subventionnées, M. le Président. Parce qu'on sait que sont apparues un certain nombre d'institutions dont parfois on peut questionner la qualité de l'enseignement qui s'y donne, malgré des exigences que nous pouvons avoir à l'enseignement privé, bien sûr, et au ministère de l'Éducation, de telle sorte que des situations comme celle que soulève le député de Verdun ne puissent être possibles ou puissent être contrôlées, M. le Président, cela va de soi.

Le Président: Alors, la période des questions et des réponses orales est terminée pour aujourd'hui.

Il n'y a pas de réponses différées ni de votes reportés.

(11 h 20)

Nous en arrivons immédiatement aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.


Avis touchant les travaux des commissions

M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude du projet de loi n° 67, Loi instaurant une procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière et modifiant d'autres dispositions législatives, de 11 h 30 jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau; que la commission de l'économie et du travail procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 31, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine; que la commission de l'éducation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 62, Loi modifiant le Code des professions concernant les comités de discipline des ordres professionnels, de 11 h 30 jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, maintenant. M. le leader du gouvernement.


Affaires du jour

Alors, nous allons procéder aux affaires du jour, mais, auparavant, je demanderais aux membres de l'Assemblée qui doivent quitter l'enceinte du salon bleu de le faire immédiatement. Rapidement, mesdames, messieurs. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Conformément à la motion adoptée, je vous demanderais qu'on entreprenne le débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 74.


Projet de loi n° 74


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements du ministre

Le Président: Alors, nous allons prendre en considération le rapport de la commission permanente de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre du Travail en vertu de l'article 252.

M. Paradis: M. le Président.

Le Président: Oui, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: ...quant à la recevabilité des amendements, nous souhaiterions être entendus.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président, je vous demande de reconnaître à ce moment-ci le député de LaFontaine sur la recevabilité d'un des amendements qui a été communiqué en vertu de l'article 252 par le ministre du Travail.

Le Président: Alors, rapidement, M. le député de LaFontaine.


Débat sur la recevabilité d'un amendement


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Mais, rapidement, je pense que ça vaut la peine que nous prenions le temps d'en discuter, car le projet de loi n° 74 est un projet de loi qui, jusqu'à maintenant, a franchi les étapes de l'adoption sur le principe ainsi que l'étude en commission parlementaire. L'opposition ainsi que les députés ont été amenés à voter, pour certains points, en division; pour d'autres, en accord avec le projet de loi. Et les raisons pour lesquelles nous avons fait cela, c'est que le projet de loi est un projet de loi qui amenait certaines modifications à la loi sur la CSST et avec lesquelles nous étions d'accord.

M. le Président, le principe du projet de loi, c'était un principe de tarification, de regroupement d'employeurs pour permettre des tarifs mieux ciblés, mieux formulés, qui correspondaient à des facilités. Aussi, le regroupement d'industries de même nature.

Il y avait aussi, dans ce projet de loi là, un amendement à un article, l'article 49 qui modifiait l'article 249, l'article qui est visé par un des amendements qui vous a été transmis en vertu de l'article 252. Qu'y était-il dit, M. le Président, à cet article 49? C'était dit: «L'article 249 est modifié:

1° par le remplacement des mots «la Législature» par les mots «le gouvernement»;

2° par l'addition de l'alinéa suivant:

«Aux fins de l'application du présent article, la Commission et le gouvernement concluent une entente en vertu de l'article 170.»

À partir de ce moment-là, l'article 249, qui a été adopté en commission parlementaire, se lirait, M. le Président: «Toute somme requise pour l'application de la présente loi et des règlements relativement à l'inspection est prise à même les deniers accordés annuellement à cette fin par le gouvernement.» Et, ensuite, avec le nouvel alinéa, bien sûr: «Aux fins de l'application du présent article, la Commission et le gouvernement concluent une entente en vertu de l'article 170» qui, lui, dit que la CSST peut faire des ententes avec des gouvernements étrangers ou avec des gouvernements provinciaux au Canada.

Or, M. le Président, nous avons reçu au Secrétariat de l'Assemblée nationale et des commissions un amendement qui, maintenant, abroge l'article 249. Et nous considérons que cet amendement est irrecevable. Pourquoi? Parce qu'il faut qu'un amendement, pour qu'il soit recevable, aille dans le sens du projet de loi. Et c'est facile à comprendre, car nous avons là un amendement qui va faire en sorte que le gouvernement va se désengager d'un financement dans lequel il est actuellement et qui est prévu à l'article 249. Mieux que ça, dans le projet de loi, actuellement, on bonifiait l'article 249. Donc, dans le projet qui nous a été soumis, il n'était pas dans l'esprit de ce projet de loi là d'abroger l'article 249 et de transmettre des frais supplémentaires aux entreprises. Ce n'était pas ça, l'objet du projet de loi. Ce n'est pas ça, celui sur lequel que nous avons voté, nous avons travaillé, tous les parlementaires. M. le Président, je ne sais pas si, à ce stade-ci, je peux continuer à plaider. Si vous permettez, j'ai un certain nombre de remarques que j'aimerais faire pour vous...

Le Président: Écoutez, je vous ai indiqué que vous pouviez intervenir, j'aimerais simplement que vous m'indiquiez en quoi, très clairement et très succinctement, les amendements ne sont pas recevables, parce que la pratique qui est en usage dans l'Assemblée depuis un bon moment, c'est que ce type d'amendement est d'abord analysé par nos spécialistes en droit parlementaire, et, selon les indications que j'avais eues, ils étaient recevables. Alors, j'aimerais qu'on m'indique en quoi il faudrait que la présidence prenne un certain temps pour examiner la recevabilité des amendements qui, à première vue, nous apparaissaient recevables.

M. Gobé: M. le Président, rapidement – et je pense que mon collègue le leader aura l'occasion de plaider là-dessus – c'est sur le principe très simple qu'un amendement doit correspondre à l'esprit du projet de loi, ce qui n'est pas le cas actuellement, et nous tenons à en faire la preuve. Et, en plus, nous avons des décisions qui ont déjà été rendues dans ce cas-là, dont une par vous avant-hier, M. le Président, et nous verrons, à ce moment-là, à vous l'expliquer plus en long. Je tenais donc, avant d'entamer la discussion sur le projet, que vous rendiez une décision, à vous en saisir pour que nous puissions en débattre. Et nous considérons que c'est très important, car, si vous n'acceptez pas, vous pourriez rendre des décisions qui feraient en sorte qu'on pourrait amender n'importe quel projet de loi dans n'importe quel esprit avec n'importe quel amendement ou abrogation dans le futur.

Le Président: J'ai indiqué qu'on pouvait, à ce moment-ci, plaider sur la recevabilité. Je voudrais simplement qu'on évite de faire un débat... qu'on prenne un temps inutile. Je voudrais qu'on en arrive rapidement à identifier à la présidence quels seraient, selon l'opposition, les éléments qui pourraient amener à réviser le jugement premier qui avait été porté et qui nous amenait à penser que les amendements étaient, prima facie, recevables. Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. J'espère qu'il n'y a pas eu de jugement de porté avant qu'on puisse se faire entendre comme tel sur la recevabilité.

Le Président: Non, non, ce que j'ai indiqué clairement, pour qu'on se comprenne, c'est que la pratique veut que les amendements soient analysés et qu'à première vue ils nous apparaissaient recevables, sauf que, dans la mesure où il n'y a pas de contestation, ça va. Si, à ce moment-ci, vous soulevez un problème, je voudrais simplement qu'on aille rapidement au fait pour que éventuellement on puisse statuer.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: M. le Président, vous aurez compris que l'intervention se fait en vertu des articles 197 et 198 de notre règlement qui ne donnent pas beaucoup de marge à l'interprétation quand on en tire les conclusions suite aux faits qui sont exposés et aux précédents qui vous seront communiqués par le leader adjoint du gouvernement.

L'article 197...

Une voix: De l'opposition.

(11 h 30)

M. Paradis: ...de l'opposition, excusez. L'article 197 se lit comme suit: «Les amendements doivent concerner le même sujet que la motion et ne peuvent aller à l'encontre de son principe. Ils ne visent qu'à retrancher, à ajouter ou à remplacer des mots.»

«198. Tout amendement doit, au moment où il est proposé, sur motion sans préavis, être transmis au président. Celui-ci décide de sa recevabilité.» C'est à l'étape où nous en sommes.

M. le Président, le projet de loi, tel qu'il a été déposé par le ministre, si vous faites la lecture des notes explicatives, si vous prenez connaissance de chacun des articles, tel qu'il a été discuté en commission parlementaire comme tel par les députés qui y ont travaillé et qui ont proposé un amendement unanime de la commission parlementaire, ne soutenait aucunement et n'allait aucunement dans le sens de faire payer par les employeurs 15 000 000 $, M. le Président. Ce que l'on maintenait, ce que le projet de loi maintenait, c'était une participation gouvernementale comme telle dans le cadre de l'étude de l'article 249. Le gouvernement non seulement retranche son article 249 tel que déposé, non seulement retire ce que unanimement la commission parlementaire a adopté, mais, de plus, introduit un nouveau principe de financement des inspections, M. le Président.

Sur le principe de financement des inspections, vous comprendrez qu'il n'y a pas simplement un nouveau principe qui sous-tend une contribution monétaire, il y a également – parce que vous connaissez le domaine des accidents de travail comme tel – le fait que c'est l'employeur qui désormais paiera pour l'inspection. Quelle garantie d'impartialité peut obtenir le travailleur qui est dans une telle situation? Ces principes-là, M. le Président, de payer par l'employeur et d'impartialité, comme tels, n'ont jamais fait partie de la loi originale de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, ni du projet de loi n° 74 déposé par le ministre du Travail, ni des amendements dont on a unanimement convenu en commission parlementaire. Ce n'est que plus tard, par papillon, suite à une commande qu'on peut présumer qui vient du ministère des Finances ou du Conseil du trésor, qu'on a voulu modifier l'esprit, le principe même qui sous-tend l'inspection et le paiement de l'inspection à la CSST, qu'on a introduit un article qui vise à faire payer le 15 000 000 $ par les employeurs et brimer ainsi l'impartialité à laquelle les travailleurs sont en droit de s'attendre. C'est là, M. le Président, un principe qui était totalement étranger à la Loi sur les accidents du travail du début et au projet de loi déposé par le ministre du Travail.

D'ailleurs, dans ses notes explicatives, on ne retrouve nulle part aucune allusion à cette façon de procéder et, dans le projet de loi original, on ne retrouve aucun article qui visait à procéder de cette façon. Au contraire, le libellé de l'article 249 allait exactement à l'encontre du nouveau principe que tente d'introduire, par l'amendement et par l'article 252 de notre règlement, le ministre du Travail.

Et, M. le Président, je ne sais pas si le leader du gouvernement préfère intervenir immédiatement ou entendre les cas de jurisprudence qu'on a à vous citer sur le sujet, libre à lui. Il y a un principe d'alternance, M. le Président, vous pouvez le respecter ou, de consentement, on pourrait finaliser la plaidoirie.

Le Président: Je pense que le leader du gouvernement souhaite... Oui.

M. Bélanger: Moi, je n'ai pas d'objection à ce que l'opposition finisse son argumentation, mais je pense qu'il y a quand même pas mal de minutes qui ont été portées relativement... À ce moment-là, c'est quelques minutes sur, quand même, ce genre de question là, puis j'aimerais juste qu'on essaie de faire ça succinctement.

Le Président: Alors, M. le leader adjoint de l'opposition.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, je veux, tel que l'a indiqué mon collègue, M. le leader de l'opposition officielle, vous soumettre trois décisions qui essentiellement confirment notre argumentation, à savoir qu'avec l'amendement proposé par le ministre on introduit carrément un nouveau principe, un nouveau sujet. C'est très, très, très différent du projet de loi tel qu'il était écrit avant la proposition d'amendement.

M. le Président, je veux vous citer, dans un premier temps, une décision du 17 juin 1996 de M. le vice-président Pinard: «Je ne peux, à première vue, les rattacher à l'un des quatre principes du projet de loi.» Donc, un amendement qu'on ne peut pas rattacher au principe, c'est nouveau, donc irrecevable parce que ça... C'est un nouveau principe, M. le Président. «Ces amendements sont considérés comme irrecevables, puisqu'ils auraient pour effet d'introduire un nouveau principe au projet de loi n° 24.» C'est exactement ce que mon collègue et également le député de LaFontaine viennent de plaider, M. le Président.

Une autre décision, celle-ci du 17 juin 1996, la même journée mais une autre décision: «Ces deux amendements concernent les rôles d'évaluation foncière de certaines municipalités. Je ne peux, à première vue, les rattacher à l'un des quatre principes du projet de loi n° 24.» Donc, irrecevables.

Troisième décision que vous-même, M. le Président, vous avez rendue à l'encontre d'une suggestion de mon collègue de LaFontaine sur le projet de loi n° 75, puis vous l'avez fait perdre, M. le Président. Alors, voyez-vous, vous l'avez fait perdre puis, aujourd'hui, vous allez le faire gagner, parce que c'est la même situation mais à l'inverse.

Le Président: Ne présumez de rien, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: Moi, je suis convaincu que vous allez être constant, M. le Président, dans votre jurisprudence. «Après analyse de l'amendement qui a été – vous vous souvenez de l'avoir dit, M. le Président, je vous cite – présenté, la présidence considère que cet amendement ne concerne pas le même sujet que l'article 10 du projet de loi n° 75 [...]. En conséquence – je saute deux paragraphes – l'amendement proposé par M. le député de LaFontaine est jugé irrecevable.»

Autrement dit, M. le Président, c'est très, très simple, si on était en situation de débat sur la première étape, on pourrait présenter une motion de scission, puis je suis convaincu que vous diriez: Elle est recevable, parce que c'est deux choses complètement différentes, ça pourrait faire l'objet de deux projets de loi complètement séparés. Alors, trois décisions qui vont dans le sens des arguments de mes deux collègues, M. le député de LaFontaine et M. le leader de l'opposition officielle.

Le Président: Alors, merci, messieurs. Je vais maintenant demander au leader du gouvernement de donner son point de vue.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: M. le Président, je crois qu'au niveau de l'amendement je comprends qu'il y a peut-être... Le député de Frontenac vient de nous citer des décisions qui ont été rendues par vos collègues vice-présidents, qui, je dois l'admettre, et on l'a toujours dit, étaient une jurisprudence, une tendance tout à fait nouvelle, au niveau du restrictif, de la notion d'amendement. C'est du complètement nouveau. Je ne dis pas que les décisions sont mal fondées, mais, comme vous l'avez déjà dit souvent, les décisions doivent être prises dans les circonstances et dans le contexte dans lequel la décision a été rendue.

Alors, si on regarde l'ensemble, la très grande majorité des décisions qui ont été rendues dans le cas d'amendements, ça a toujours été le bénéfice du doute, au niveau de la recevabilité. L'amendement est toujours permis soit pour élargir le débat soit pour permettre un consensus plus grand, pour toutes sortes de raisons qui sont mentionnées dans notre règlement. Mais l'amendement qui est ici en cause n'est pas mineur, puisque, de part et d'autre on l'admet, c'est 15 000 000 $ qui est en jeu relativement à cet amendement-là. Alors, c'est important, donc, que vous écoutiez les propos de l'opposition officielle, mais que vous écoutiez aussi les propos du gouvernement, et, quant à nous, cet amendement est très bien fondé.

L'article 197, tel que l'a mentionné l'opposition officielle, définit le cadre dans lequel on doit finalement juger de la recevabilité ou non d'un amendement: «Les amendements doivent concerner le même sujet – tout amendement doit... c'est ça – que la motion et ne peuvent aller à l'encontre de son principe.» Principe! Là, il ne faut pas confondre, M. le Président, il y a principe et motif. Principe, c'est quoi? Je regardais les notes explicatives du projet de loi. Le principe du projet de loi, ça concerne le financement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, c'est large, M. le Président. Et je regardais, d'ailleurs il était élaboré dans le principe, ce qui était visé. Il y a des choses qui, à la fois, peuvent représenter des économies d'argent pour la CSST, mais des choses aussi qui peuvent représenter des coûts supplémentaires dans ce qui est déjà expliqué dans le principe du projet de loi. Le principe, c'est large, c'est le financement.

Donc, ce n'est pas parce que cet amendement-là, on va dire, vient rajouter une dépense supplémentaire, alors qu'on peut dire que la majorité, ça peut être des économies pour la Commission; ce n'est pas à ce moment-là que ça va à l'encontre du principe. Le principe, ici, du projet de loi, c'est le financement. C'est le financement, M. le Président, c'est ça qui est le principe de ce projet de loi.

Donc, je vous soumets respectueusement que cet amendement est recevable, il est tout à fait conforme à l'immense majorité des décisions qui ont été rendues par vos prédécesseurs en matière d'amendement. Et c'est à juste titre d'ailleurs que vos conseillers vous ont recommandé, prima facie, que c'était recevable. Ce n'est pas pour rien, M. le Président, parce qu'il y a une tradition longuement établie en cette Chambre relativement à la recevabilité des amendements. Donc, c'est pour ça, M. le Président, je pense, qu'il faut regarder c'est quoi, le principe. Le principe, c'est clair. Le principe du projet de loi, c'est le financement de la CSST. Et, vu sous cet angle, la jurisprudence est, comme on pourrait dire, très majoritaire, écrasante, à l'effet que, dans le cas du moindre doute, M. le Président, on doit accorder le bénéfice du doute, à ce moment-là, à l'amendement.

Le Président: Alors, messieurs, sur ces points de vue, je vais suspendre quelques minutes, en fait, le temps nécessaire, et je vais prendre la question en délibéré.

(Suspension de la séance à 11 h 40)

(Reprise à 13 h 4)

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, si vous voulez prendre place, si vous voulez vous asseoir.


Décision du président sur la recevabilité

Alors, je vais maintenant rendre ma décision concernant la recevabilité de l'amendement proposé par M. le ministre du Travail à l'article 49 du projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Cet amendement est libellé comme suit, et je cite: Remplacer l'article 49 par le suivant: L'article 249 de cette loi est abrogé. Fin de la citation.

Selon M. le député de LaFontaine, selon le leader de l'opposition officielle et son collègue le leader adjoint, l'amendement précité serait irrecevable pour le principal motif qu'il irait à l'encontre du principe du projet de loi n° 74. Pour sa part, le leader du gouvernement prétend que l'amendement s'inscrit dans un des principes du projet de loi, soit le financement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

Après une longue analyse, je suis en mesure de dire que le financement de la Commission constitue bel et bien un des principes du projet de loi n° 74. L'amendement à l'article 49 ne va pas à l'encontre de ce principe. Pour en arriver à une telle conclusion, je me suis d'abord référé à l'article 249 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, lequel prévoit ce qui suit, et je cite: «Toute somme requise pour l'application de la présente loi et des règlements relativement à l'inspection est prise à même les deniers accordés annuellement à cette fin par la Législature.» L'article 49 du projet de loi prévoit une modification de cet article 249 selon laquelle les deniers seraient accordés par le gouvernement plutôt que par la Législature et selon laquelle la Commission pourrait conclure une entente à cet effet avec le gouvernement.

Alors, l'amendement de M. le ministre du Travail, même s'il vise à abroger l'article 249 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, concerne toujours le financement. En fait, en abrogeant l'article 249, on se trouve tout simplement à modifier un aspect du financement. C'est pourquoi je déclare recevable l'amendement à l'article 49 du projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail, présenté par M. le ministre du Travail.

À ce moment-ci, nous en revenons donc au début des affaires du jour où on était ce matin lors de l'intervention de M. le député de LaFontaine. Alors, je reprends pour qu'on puisse se situer correctement.


Débat sur la prise en considération du rapport de la commission

À l'article 24 du feuilleton, l'Assemblée prend donc en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre du Travail en vertu de l'article 252 du règlement. Tous les amendements du ministre sont déclarés recevables. Ils concernent les articles 48 et suivants, 48.1, 49 et 58.

Alors, est-ce qu'il y a des interventions sur ce rapport et ces amendements? Je vous rappelle auparavant que, conformément à l'ordre adopté, la durée maximum de ce débat est de 30 minutes: 10 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes pour le groupe parlementaire formant l'opposition officielle, cinq minutes pour les députés indépendants et cinq minutes de réplique pour celui qui présente le projet de loi. À l'expiration de ces délais, je vais mettre aux voix sans appel nominal les amendements ainsi que le rapport de la commission tel qu'amendé. M. le ministre du Travail.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 74 a fait l'objet d'une l'étude détaillée à la commission parlementaire de l'économie et du travail. Et, à ce propos, j'aimerais remercier les membres de la commission et les membres de l'opposition officielle qui, dans l'étude article par article du projet, nous ont considérablement aidés à cheminer vers l'adoption de ce projet de loi.

De cet exercice, M. le Président, il ressort un fait important: les éléments principaux de ce projet de loi rejoignent une préoccupation largement partagée par l'ensemble des membres de cette Assemblée, il s'agit de la santé et de la sécurité des travailleurs et des travailleuses du Québec. Il m'apparaît donc important de faire appel à la solidarité, finalement, de l'Assemblée pour que l'adoption de ce projet de loi se fasse dans les meilleurs délais.

Il m'apparaît donc important aussi de rappeler que ce projet de loi permettra à la CSST de mettre en oeuvre la phase II de la réforme de la tarification des employeurs; la phase I avait été amorcée évidemment par les libéraux. Non seulement répond-il ainsi aux attentes formulées par les employeurs du Québec, mais il est également porteur de la promesse d'effets bénéfiques pour la santé et la sécurité de nos travailleurs et de nos travailleuses.

(13 h 10)

En fait, M. le Président, ce projet de loi consacre le principe d'assurance qui est à la base même du financement du régime de la santé et de la sécurité du travail. Il s'agit là d'un principe fondamental sur lequel tous s'entendent. L'expérience associée au risque assuré détermine la cotisation de l'employeur. C'est sur cette base que le projet de loi n° 74 entend faire coïncider davantage la cotisation de chaque entreprise avec les coûts réels qu'il génère.

Ce projet de loi, faut-il le rappeler, contient des dispositions s'adressant à l'ensemble des entreprises québécoises. Il y a les petites entreprises qui sont cotisées au taux de leur unité de classification. Elles représentent 93 % des employeurs et 27 % de la masse salariale du Québec. Il serait alors désormais possible de se regrouper, de se mutualiser, au fond, pour faire en sorte que les employeurs, surtout les petits, puissent se regrouper pour partager ensemble des expériences en prévention et en santé et sécurité, chose qu'ils auraient de la difficulté à faire s'ils étaient seuls. Je pense à de petits, très petits employeurs dans l'industrie de la construction, je pense aux dépanneurs, je pense aux petits garages, et j'imagine que, avec ce projet de loi, bien, ils pourront se regrouper et travailler ensemble, et ça sera beaucoup plus dynamisant.

D'autre part, il faut aussi que la moyenne entreprise et la grande entreprise s'impliquent. Ce qu'il est important de saisir, plus les entreprises du Québec, plus les entrepreneurs feront de la prévention, moins leur cotisation sera élevée à la CSST. Donc, faire de la prévention, c'est payant. Je pense que, de plus en plus, les employeurs et les travailleurs l'ont compris. C'est dans cette perspective globale, M. le Président, que l'actuel projet de loi confère plus de souplesse dans l'exercice de certains pouvoirs dont dispose la CSST.

Par ailleurs, on entend clarifier ou confirmer certaines règles et pratiques en matière de financement. Les mesures prévues ont pour but d'assurer une flexibilité accrue au processus de cotisation des employeurs, et on compte ainsi offrir aux entreprises et aux entrepreneurs du Québec un régime d'assurance qui favorise leur capacité concurrentielle et qui s'adapte au contexte de mondialisation des marchés et de l'économie.

On notera, M. le Président, que ce projet de loi vient alléger les modalités du processus de cotisation des employeurs et, sous plusieurs aspects, le moderniser, par exemple en ce qui concerne la déclaration des salaires et le paiement de la cotisation. Vous aurez compris que cela va dans le sens de notre volonté, la volonté du gouvernement du Québec de simplifier les échéances entre les entreprises et l'État, favoriser les échanges également, et d'adapter les services gouvernementaux à l'évolution du contexte des affaires et des entreprises en Amérique. Le projet de loi va permettre, entre autres, d'uniformiser et de clarifier les règles sur l'intérêt chargé ou versé par la CSST; il en sera de même pour les pratiques relatives à la modification de la cotisation d'un employeur, et, pour ces questions, on reconnaîtra à la CSST les pouvoirs réglementaires qui lui sont nécessaires.

Enfin, ce projet de loi précise certaines règles touchant l'imputation du coût des lésions professionnelles. De plus, il fixe un délai à l'employeur qui désire soumettre une demande de transfert ou de partage du coût d'une lésion professionnelle et il confère à la CSST des pouvoirs de vérification qui lui sont maintenant devenus nécessaires. Ce projet de loi harmonise enfin les délais de prépublication des règlements de la CSST avec ceux prévus à la Loi sur les règlements. En plus, on simplifie le processus d'adoption des règlements annuelle en matière de cotisation des employeurs, exemptant la CSST des formalités récurrentes d'une approbation du gouvernement, ce qui devient maintenant tout à fait accessoire.

Ce projet de loi adapte le champ d'application de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles aux réalités d'une mobilité grandissante de notre main-d'oeuvre, M. le Président. Autrement dit, on élargit les conditions permettant à un travailleur québécois de bénéficier de la protection de la loi alors qu'il travaille à l'extérieur du Québec pour un employeur québécois. Au même titre, ce projet de loi confère à la CSST un pouvoir élargi pour la conclusion d'ententes avec d'autres ministères, organismes ou gouvernements, et cela en vue de l'application de la loi et les règlements qu'elle administre.

Ce projet législatif prévoit aussi que la CSST et la Régie de l'assurance-maladie du Québec doivent conclure des ententes fixant les règles de remboursement par la CSST à la Régie pour les sommes déboursées dans l'application de la loi pour les frais s'y rapportant. En bout de ligne, M. le Président, on peut s'attendre à une baisse des coûts résultant de la diminution de la fréquence et de la gravité des lésions professionnelles et, par conséquent, on peut anticiper une baisse proportionnelle des revenus des cotisations à la CSST. Cela converge, évidemment, avec notre objectif gouvernemental de réduction des cotisations applicables aux employeurs.

M. le Président, dans le contexte qui est le nôtre, où les finances publiques ont besoin de subir un redressement considérable, vigoureux, il est normal que, sur le plan de l'inspection, on transfère à la CSST une nouvelle obligation, une obligation de s'acquitter des frais d'inspection, ce qui n'empêche pas le gouvernement de conserver sa responsabilité en la matière.

M. le Président, ce projet de loi attendu depuis très longtemps ouvre une nouvelle ère: l'ère de la prévention. On va faire de la prévention un mode de vie à l'intérieur des entreprises, et c'est ainsi qu'on pourra respecter les travailleurs sur les lieux de travail et aussi ceux qui sont accidentés, leur permettre de réintégrer leur emploi dans les meilleurs délais. Voilà, M. le Président, ce que j'appelle une modernisation attendue depuis très longtemps et par les employeurs et par les travailleurs. Merci, M. le Président.

Le Président: Je reconnais maintenant M. le député de LaFontaine.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. À l'écoute du discours du ministre, vous avez pu constater que le ministre se félicitait du travail qui a été fait en commission parlementaire et en cette Chambre sur l'étude du principe en ce qui concerne le projet de loi n° 74. Alors, M. le Président, si tout le monde se félicite du travail qui a été fait, aussi bien le ministre que les députés de l'opposition, en ce qui concerne le travail en commission parlementaire, la question à poser, c'est: Pourquoi alors mettre ce projet de loi dans un bâillon? Pourquoi mettre ce projet de loi là, M. le Président, dans une mesure d'exception? Et ce que le ministre disait, il vient de démontrer, M. le Président, que nous avions raison: le gouvernement, le ministre s'est servi de l'Assemblée nationale pour amener un amendement à saveur financière, une ponction d'argent versé par les entreprises pour les travailleurs pour baisser les dépenses de son ministère.

Une voix: Pas si fort!

M. Gobé: M. le Président, il me semble qu'on a le droit de parler dans cette Chambre, jusqu'à nouvel ordre, n'en déplaise à certains députés d'en face. Et on parle des travailleurs ici, et on mérite d'être écouté.

Une voix: Pas si fort!

Le Président: Il y a un seul député qui a le droit de parole à ce moment-ci, c'est le député de LaFontaine, et je pense qu'il s'exprime d'une façon correcte en vertu des règlements. Alors, je prierais tout le monde de le laisser s'exprimer. M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: M. le Président, est-ce qu'on pourrait demander le quorum en cette Chambre, s'il vous plaît?

Le Président: Ça va.

M. Gobé: M. le Président, s'il y a une règle en cette Chambre, c'est qu'on peut parler de la manière qu'on veut en respectant le règlement, et le ton de la voix qu'on emploie n'a rien à voir à déplaire ou à ne pas déplaire à certaines personnes. Si ce que j'ai à dire déplaît, eh bien, c'est que ça fait mal.

Alors, M. le Président, qu'est-ce qu'on a fait? On s'est servi d'un projet de loi qui a été discuté, qui a été présenté aux associations patronales et syndicales, qui a fait un certain consensus sur lequel les gens n'ont pas demandé à être entendus parce que ce qu'il y avait à l'intérieur correspondait à des discussions qui avaient eu lieu, à des consultations... C'est ça qui a été fait. Et qu'est-ce qu'on a fait par la suite, M. le Président? Quand tout le monde a eu voté dessus en commission parlementaire, on l'a changé. On l'a changé à l'occasion d'un conseil des ministres, le mercredi, où le ministre s'est fait amener ça devant lui, et il n'a pas eu d'autre choix que de l'amener.

(13 h 20)

Mais qu'est-ce qu'il y a dans cet amendement-là, M. le Président? Il y a une ponction de 15 000 000 $ dans la caisse de la CSST parce que maintenant l'inspection des chantiers et des travailleurs sera faite, sera financée, contrairement à auparavant, par la CSST. C'est le seul endroit au Canada où ça se présente, M. le Président. C'est le seul endroit où ça se fait.

Et pourquoi il l'a mis dans le bâillon? Pourquoi il l'amène maintenant? Parce qu'il savait très bien que les gens s'y opposeraient. Et qui s'y opposent? Les travailleurs et les patrons. Consensus, cette fois-ci: CSST-Rioux Matthias dénoncés par le CPQ et la CSN. Il a réussi à faire un consensus dans cette session, pour une fois, entre les travailleurs et les patrons, mais consensus, M. le Président, contre lui et son action sournoise devant ce projet de loi avec lequel tout le monde était d'accord.

M. le Président, je vais lire ce que ces gens disent. M. le Président, la centrale des syndicats nationaux: «Un autre geste du ministre Rioux contre les travailleurs», dit la CSN. Ce n'est pas le député de LaFontaine qui le dit, là, c'est la CSN. La CSD: «Opposition totale, geste hypocrite.» Voilà ce qu'ils disent.

Et les nouveaux amis du ministre, qu'il cite ardemment et couramment, ses nouveaux disciples, le président du Conseil du patronat, M. le Président: «Le pelletage des coûts de l'inspection du gouvernement à la CSST est une nouvelle taxe sur la masse salariale que dénonce le CPQ.» M. le Président, le CPQ dit: «En augmentant ses cotisations, la CSST ajoutera encore des taxes sur la masse salariale.» M. le Président, c'est du pelletage du gouvernement. Voilà ce que les gens disent.

Et c'est pour ça qu'on le passe dans un bâillon, parce qu'on sait très bien que les gens qui sont concernés sont contre. Ils s'y opposent. Ils ont appelé au bureau du ministre, ils ont envoyé des messages, des communiqués, ils ont été cités dans les journaux, ils ont envoyé des lettres. Point réponse ne leur a été faite, parce que c'était important d'aller chercher 15 000 000 $. On se fout des travailleurs, M. le Président. Tout ce qu'on pense, c'est d'aller chercher de l'argent partout où il y en a. On fait la même chose dans la caisse de la Commission des normes du travail, où on va chercher 2 400 000 $.

Un projet de loi qui aurait dû passer et que je ne suis pas sûr, moi, qu'il va passer aujourd'hui. Parce que, M. le Président, on vole l'argent, ou on prend l'argent, pardon, on ponctionne l'argent dans les caisses qui sont faites pour les travailleurs, pour protéger les travailleurs, qui ont été mises en place depuis 30 ans. C'est l'édifice social du travail du Québec qui est en train de s'écrouler, qui sert, d'une manière, M. le Président, sournoise ou détournée, à financer le déficit.

Si le ministre était vraiment sérieux lorsqu'il disait tout à l'heure vouloir baisser le fardeau, la taxation, la cotisation des employeurs à la CSST, il ne commencerait pas par donner une facture de 15 000 000 $ supplémentaires. Voyons donc! Que de paroles! Que de paroles! Mais, quand on voit les actions, sous le bâillon, on comprend ce qu'il y a en dessous de tout ça. Et nous ne pouvons pas l'accepter, M. le Président. Et nous ne l'accepterons pas, parce que les gens nous demandent de ne pas l'accepter. Alors, on nous bâillonne; on le passe, là.

En plus, ce projet de loi là, M. le Président, c'est un projet de loi qui n'a rien à voir avec ça. Et cette partie, là, s'il avait amené son amendement avant, nous aurions demandé à ce qu'il soit scindé, ou du moins nous aurions pu en discuter et inviter les groupes à venir parler et à s'exprimer. Et c'est pour ça qu'on ne l'a pas mis. C'est de la cachotterie.

Alors, M. le Président, un autre argument qui est décevant, c'est que c'est pour l'année financière 1997, pas celle qui est maintenant ici. Il n'y a pas d'urgence à l'adopter aujourd'hui. On aurait pu l'adopter au mois de mars, avril, avant le budget. Il n'y a rien qui empêchait ça. Qu'est-ce qui empêchait ça? Absolument rien du tout. Alors, pourquoi on le met dans un bâillon de projets de loi qui n'ont rien à voir avec ça, avant Noël, à la limite de la session? C'est parce que, M. le Président, on sait que, si on le met en plein jour, sur la place publique, il ne passera pas parce que l'ensemble des gens qui sont intervenants, qui sont concernés, soit les travailleurs, la CSN, la FTQ, la CSD, les groupes de travailleurs représentés dans les organisations non syndicales, mais qui s'occupent de CSST, et aussi le Conseil du patronat, la Chambre de commerce du Québec, s'y opposent et s'objectent à cette décision. Et c'est pour ça qu'on le met actuellement dans le bâillon.

C'est déplorable, M. le Président. C'est désolant. Et ça nous désole, nous, de vouloir collaborer avec le ministre dans l'avenir pour travailler sur les dossiers et les lois pour les travailleurs, parce que nous ne saurons jamais, quand nous donnerons notre appui, notre accord, notre consensus pour bonifier ou modifier un projet de loi, si, par en arrière, il n'amènera pas quelque chose qui ira à l'encontre du consensus que nous avons fait avec lui. La voilà, la raison, M. le Président, pourquoi...

Oui, je parle fort parce que je trouve ça inadmissible. Et je pense que, si les travailleurs étaient ici aujourd'hui, et les patrons, ils parleraient fort aussi. M. le Président, ça devient la marque de ce gouvernement d'agir en catimini, par en dessous, sans respect du dialogue et de la discussion. Le premier ministre disait il n'y a pas longtemps: La taxe sur le travail tue l'emploi. Il disait ça au Sommet, devant les caméras de télévision: Il ne faut pas taxer le travail pour faire marcher l'emploi. Il le taxe par en arrière, par exemple, par en dessous: deux projets de loi en cette Chambre. Celui-ci, qui va taxer pour 15 000 000 $ sur la masse salariale puis qui va faire en sorte aussi que l'inspection des travailleurs... M. le Président, il y aura deux choix: ou les entrepreneurs vont payer plus de cotisation ou alors ils vont baisser l'inspection et au détriment des travailleurs. C'est pour ça que les travailleurs s'y opposent aussi. En plus, il y a le conflit d'intérêt. Le travailleur paie sa propre police pour se surveiller. Puis au nom de quel principe?

M. le Président, le ministre, je suis à peu près assuré, est victime du Conseil du trésor là-dedans. Sûr qu'il ne veut pas le dire, il veut garder sa job. C'est bien, là, aller entre Québec et Matane en limousine. Mais le ministre, qui a un passé syndical, un passé de défense des travailleurs, a renié son serment et son engagement envers les travailleurs. Parce que, s'il ne l'avait pas fait, il les défendrait. Il aurait dit au Conseil du trésor: Non, on n'accepte pas ça. On va le faire sur la place publique, si vous voulez le faire. On va faire un débat avec les intervenants, avec les partenaires puis avec l'opposition. Et nous l'aurions fait. Nous aurions été prêts peut-être à en discuter, à écouter les gens, à les entendre.

Ce n'est pas ça qui a été fait. Ce n'est pas ça, M. le Président, et je pense que ça va marquer le ministre pour longtemps auprès des organisations, tant patronales que syndicales et des travailleurs. C'est un coup bas. C'est un coup bas que les gens ne digèrent pas et n'acceptent pas. Il est fait en dessous de la couverture. Il est fait dans l'obscurité. C'est ça, M. le Président, c'est un bâillon envers les travailleurs et envers les patrons du Québec. Il aurait été plus facile de le faire à la lumière et nous aurions collaboré; pas forcément pour l'adopter, comme il le voulait, mais au moins pour en discuter, pour le bonifier.

Et je suis sûr que les députés qu'il y a ici, même s'ils trouvent peut-être que je parle un peu fort, doivent comprendre de quoi il en retourne, parce que, s'ils étaient de ce côté-là, ils tiendraient les mêmes discours que je tiens: qu'on ne doit pas changer les règles du jeu dans des domaines aussi importants que celui-là sans avoir le consentement et le consensus des gens avec qui on est des partenaires; la première des choses, surtout que ça fonctionne bien. Et, deuxièmement, lorsqu'on s'entend pour déposer un projet de loi, qu'il n'y a pas de consultation, que les partenaires sont d'accord et que l'opposition y concourt, bien, on ne change pas la règle du jeu à la toute fin, sous un bâillon, pour court-circuiter tout le processus qui avait été établi.

M. le Président, je m'en rappellerai, nous nous en rappellerons, et ça fera école pour les prochains projets de loi qui vont venir devant cette Chambre concernant le ministre du Travail. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. Nous allons maintenant céder la parole au ministre du Travail pour son droit de réplique de cinq minutes. Alors, M. le ministre du Travail et député de Matane.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: M. le Président, je pense qu'il faut mettre les choses un petit peu en perspective. J'entendais le député de LaFontaine crier au meurtre, au scandale. Il vociférait, c'est le moins qu'on puisse dire. Mais j'aimerais lui expliquer ou expliquer aux collègues de l'Assemblée deux choses importantes, deux choses importantes.

Au moment où le Québec traverse une crise extrêmement grave de ses finances publiques, au moment où tous les groupes, chaque catégorie de citoyens a été mis à contribution pour faire en sorte que le Québec se libère de ce carcan infernal qu'est le déficit, tout le monde est appelé à contribuer, tout le monde, et, lorsqu'on regarde les perspectives budgétaires pour 1997-1998, force est de constater que tout le monde doit collaborer. Sur un budget total de 2 200 000 000 $, vous pensez, M. le Président, que de demander 15 000 000 $ aux employeurs, pas aux travailleurs, comme le dit le député de LaFontaine... Ne mêlons pas les choses, on ne va pas chercher 15 000 000 $ dans les poches des travailleurs, on demande aux employeurs, qui cotisent à la CSST, sur une cotisation globale de 1 800 000 000 $, 15 000 000 $.

(13 h 30)

Mais, en même temps, je réponds à leur demande qui a été formulée pendant des années; les libéraux n'ont jamais donné suite à ça. Les employeurs du Québec demandaient au ministère du Travail et au gouvernement: Changez le financement. Changez la méthode de travail de la CSST; déjudiciarisez l'organisme; examinez la surindemnisation. On est en train de tout faire ça. Ça va rapporter quoi aux employeurs du Québec, M. le Président? 80 000 000 $. Et, quand on aura déposé le projet de loi sur la surindemnisation, on va doubler ce chiffre, on va se rendre à 160 000 000 $. On demanderait 15 000 000 $ aux employeurs, et ça serait un scandale? Pas du tout. Les employeurs du Québec ont une conscience sociale et ils sont capables de comprendre aussi quelles sont les priorités de l'État et la nécessité de sortir de cette folie budgétaire héritée des libéraux.

Je voudrais, en terminant, souligner que, lorsque le député de LaFontaine accuse le ministre du Travail d'hypocrisie, de ci, de... Pas du tout, M. le Président, pas du tout. Ce n'est pas être hypocrite que de dire à des parties de la société, des pans: Vous allez collaborer à l'effort collectif. Ce n'est pas hypocrite de faire ça. C'est juste assez courageux pour interpeller ces intervenants et leur dire: Le moment est venu de votre côté de faire votre part. C'est normal qu'on agisse ainsi, tout à fait normal.

Je voudrais dire une dernière chose, et ça m'importe beaucoup. Dire que je trahis les travailleurs avec le projet de loi n° 74, je trouve ces propos offensants, inacceptables. Et le député de LaFontaine manque de mémoire en ce qui a trait à ma carrière professionnelle et à ma nouvelle vie politique. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre du Travail et député de Matane. Alors, ceci met fin au débat sur la prise en considération du rapport de la commission de l'économie et du travail et des amendements transmis par M. le ministre du Travail, en vertu de l'article 252 de notre règlement.


Mise aux voix des amendements du ministre

Je mets maintenant aux voix les amendements du ministre aux articles 48, 48.1, 49 et 58 du projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Ces amendements sont-ils adoptés?

Une voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Une voix: Contre.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, adopté sur division. Je mets maintenant aux voix le rapport, tel qu'amendé, de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Alors, le rapport, tel qu'amendé, est adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'adoption du projet de loi n° 74.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Alors, tel que mentionné et selon l'avis que nous avions donné en Chambre, je vous demande d'appeler l'adoption du projet de loi n° 74.


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Article 28 de notre feuilleton. Alors, à l'article 28 de notre feuilleton, M. le ministre du Travail propose l'adoption du projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Je vous rappelle que la durée maximum de ce débat est de 30 minutes: 10 minutes seront accordées pour le groupe parlementaire formant le gouvernement; 10 minutes seront accordées pour le groupe parlementaire formant l'opposition officielle; cinq minutes seront accordées pour l'ensemble des députés indépendants; et enfin cinq minutes de réplique seront accordées à l'auteur du projet de loi, soit M. le ministre du Travail et député de Matane.

Alors, y a-t-il des interventions? M. le ministre du Travail et député de Matane.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: M. le Président, je voudrais rappeler que l'essentiel de ce projet de loi, c'est la prévention sur les lieux de travail, c'est l'implication désormais des employeurs et des travailleurs dans ce qu'on appelle le climat organisationnel des lieux de travail. Je souligne également que c'est en tout respect pour les travailleurs que ce projet de loi a été déposé devant cette Assemblée, «respect du travailleur» signifiant qu'il a le droit ou qu'elle a le droit de travailler en toute sécurité et que jamais les conditions sur les lieux de travail ne viennent entacher sa santé de quelque façon que ce soit, et, si ça devait être le cas, avoir des employeurs et des travailleurs suffisamment responsables pour prendre toutes les mesures qui s'imposent pour assurer que les lieux de travail soient sains.

M. le Président, pour la sauvegarde de cette institution québécoise que nous avons bâtie, et qui est née en 1979, le régime de santé et sécurité, on l'a dit, est caractérisé avant tout par ce concept fondamental de la prévention. Et, si d'aventure il se produit des accidents ou des maladies, il faut faire en sorte que les travailleurs soient indemnisés, qu'ils soient traités afin qu'ils réintègrent leur emploi.

Je tiens à souligner que l'adoption de ce projet de loi à la présente session va permettre la mise en oeuvre de la seconde phase de la réforme de la tarification prévue pour janvier 1998. Ainsi, on donnera suite aux attentes exprimées par les entreprises québécoises et, par-dessus tout, on répondra à la nécessité de mettre en place les conditions les plus propices à la prise en charge de la prévention afin d'améliorer la santé et la sécurité des travailleurs et des travailleuses du Québec. Voilà pourquoi, M. le Président, je suis très fier de pouvoir recommander aux membres de cette Assemblée d'accepter et d'adopter ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre du Travail et député de Matane. Nous allons maintenant céder la parole au député de LaFontaine. Alors, M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Président, j'aimerais, pour terminer ce discours, cette intervention qui est limitée dans le temps à cause du bâillon, lire, faire lecture aux membres de cette Assemblée – et je souhaite qu'ils écoutent – lecture d'une note, d'une lettre qui m'a été envoyée par le conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, CSST. Je rappellerai, pour les gens qui nous écoutent, que ce conseil d'administration est fait de représentants du patronat, des syndicats, des travailleurs, c'est un comité qui représente l'éventail des intervenants qui ont à jouer, ou à travailler, ou à composer avec les accidentés du travail. Je vais prendre le temps d'en faire lecture, M. le Président, parce que ça contredit ce que le ministre vient de nous dire et ce qu'il a dit précédemment, mais ça explique encore mieux l'ignominie de cette loi qu'on nous passe aujourd'hui par bâillon, qu'on enfonce dans la gorge des travailleurs et des patrons du Québec. M. le Président, je vais vous la lire, j'en ferai lecture, et je la déposerai en Chambre par la suite. C'est envoyé au ministre, bien sûr, aussi. Il n'en a pas fait lecture. À moins qu'il ne lise pas son courrier.

«M. Matthias Rioux, ministre du Travail, Assemblée nationale du Québec. Les membres du conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, CSST, réunis ce matin, vous font part de leur profond mécontentement à la suite de la décision unilatérale du gouvernement d'abroger l'article 249 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Le conseil d'administration a toujours réitéré sa position à l'effet que le financement du coût de l'inspection des lieux de travail doit émarger entièrement au budget du gouvernement. Cette volte-face de dernière minute, par un amendement passé en catimini au projet de loi n° 74 sur le financement de la CSST, est dénoncée autant par le patronat que par les représentants syndicaux. Du côté patronat, on déplore le transfert sans préavis d'une facture de 15 000 000 $ aux employeurs qui écopent ainsi d'une augmentation de leur taxe sur la masse salariale. Quant aux représentants des travailleurs, ils craignent que cette décision ait un impact négatif sur la prévention dans les milieux de travail et que la CSST opte pour une diminution du nombre d'inspecteurs, qu'ils trouvent déjà insuffisants.

(13 h 40)

«De façon unanime, les membres du conseil d'administration veulent réagir pour dénoncer cette volte-face du gouvernement, d'autant plus qu'une entente avait été conclue avec la ministre Louise Harel, prédécesseure du ministre actuel, alors ministre de l'Emploi en 1995. Rappelons que le gouvernement, sur avis du Conseil du trésor, a refusé depuis plusieurs années d'assumer sa part du coût de l'inspection des lieux de travail. Le conseil d'administration s'était vu forcé d'engager des procédures judiciaires à deux reprises. Le gouvernement s'était alors engagé à verser annuellement à la CSST, à compter du 1er avril 1995, une subvention de 15 000 000 $ sans compter le remboursement des sommes dues, à savoir un montant de 76 000 000 $. En plus de ne pas avoir respecté cette entente, le gouvernement se permet aujourd'hui de changer la loi, faisant fi de tout débat public sur le bien-fondé de sa décision. On veut rappeler au ministre qu'il est faux de prétendre publiquement que les parties ont été consultées sur cette question. Et, je le répète, on veut rappeler au ministre qu'il est faux de prétendre publiquement que les parties ont été consultées sur cette question.»

M. le Président, voilà la raison pour laquelle nous avons un bâillon. Même s'il y a eu consensus sur l'ensemble du projet par les députés en cette Chambre, tant du côté gouvernemental que de l'opposition, voilà la raison pour laquelle on fait un bâillon où on brime les droits des citoyens, des patrons et des travailleurs de s'exprimer en réduisant le débat, mais aussi de l'opposition, M. le Président. Et nous ne pouvons pas l'accepter.

Et ce que je trouve, moi, scandaleux, M. le Président, c'est que le ministre ne semble pas se rendre compte que, lorsqu'il nous dit qu'il y a consensus social, ce n'est pas vrai dans ce dossier-là parce qu'il n'a pas cherché à l'avoir, le consensus. Tout ce qu'il a cherché à faire, c'est rencontrer la commande du président du Conseil du trésor qui a dit: Matthias, donne-moi 15 000 000 $; qui aurait dit: M. le ministre du Travail, j'ai besoin de 15 000 000 $, je vais le prendre là, puis, toi, arrange-toi avec tes affaires. Tu as un projet de loi devant la Chambre, là, amène donc un amendement, mais ne le dis pas avant aux autres parce que, s'ils le savent, ils ne seront pas d'accord avec toi. Puis, s'ils ne sont pas d'accord, ils vont aller dans le public, puis l'opposition va demander des audiences publiques, et puis va faire le temps nécessaire pour les études, que tout le monde se fasse entendre. Alors, on a dit: On va l'amener à la dernière minute. On va faire en sorte que le monde, là, il ne s'en rende pas compte. Alors on l'a amené jeudi soir, vers 18 h 30, 19 heures. Même pas envoyé à l'opposition, même pas envoyé aux députés du gouvernement, envoyé au Secrétariat des commissions. Et nous en avons pris, M. le Président, connaissance selon la réglementation. Après ça, ils ont voulu appeler le projet de loi rapidement dans un bâillon pour le passer en catimini, comme disent aussi bien les patrons que les gens de la CSST.

M. le Président, j'aimerais ici faire lecture un peu du communiqué, de la déception de la CSN. La CSN, j'ai beaucoup de respect pour eux, des travailleurs de la base, des gens, là, comme on en retrouve à la FAS, la Fédération des affaires sociales, des gens qui travaillent durement, dans des conditions parfois difficiles, qui gagnent durement les petits salaires qu'ils peuvent gagner puis d'autres, dans d'autres secteurs aussi, dans l'hôtellerie en particulier.

M. le Président, le 16 décembre, la CSN s'est élevée aujourd'hui contre l'amendement déposé par le ministre du Travail, M. Rioux, au projet de loi n° 74 sur le financement de la CSST et ayant pour effet d'abroger l'article 249 de la loi. M. le Président, «quand le ministre du Travail va-t-il donc commencer à se préoccuper des travailleurs?», a dit le vice-président de la CSN, M. Marc Laviolette. «Par cet amendement, le gouvernement s'est soustrait à l'obligation de financer les coûts de l'inspection, ce qui représente 15 000 000 $ par année. C'est le moyen qu'il a trouvé de régler définitivement un vieux contentieux pour la CSST.» M. le Président, la CSN estime qu'il crée ainsi «une dangereuse situation de conflit d'intérêts en remettant à la CSST le pouvoir de financer sa propre police». M. le Président, il se faisait déjà trop peu de prévention et il s'en fait certainement moins parce que, pour ne pas augmenter les cotisations, ils auront tendance à couper cela.

Le président du Conseil du patronat, lui, disait – conflit d'intérêts, bien sûr: «En amendant à la toute dernière minute le projet de loi n° 74 sur la CSST pour abolir l'article 249, le ministre du Travail refile aux employeurs une facture de 15 000 000 $, qui écopent ainsi d'une augmentation de leur taxe sur la masse salariale. Québec se décharge ainsi sur le dos de la CSST, donc des employeurs qui assument seuls financement de la CSST, d'une facture dont ils n'ont même pas pu débattre, le gouvernement ayant présenté l'amendement en catimini, évitant ainsi tout débat public sur le bien-fondé de sa décision.»

M. le Président, le Conseil du patronat, et je vais arrêter de le citer parce que j'ai cité la CSST, j'ai cité la CSN et j'ai cité le patronat... M. le Président, j'ai cité précédemment ce que le premier ministre avait dit: La taxe sur le travail tue l'emploi. C'est ce que nous avons dit, c'est ce qu'il nous a dit lors du Sommet sur l'emploi à Montréal. On voit encore une fois qu'il ne respecte pas ce qu'il dit ou, ce qu'il dit d'un côté, il fait le contraire de l'autre côté. Et c'est là une autre image de ce gouvernement.

Et, quant au ministre qui nous faisait part de ses états de service dans le monde syndical, force est de constater que, depuis qu'il est ministre du Travail, l'ensemble du monde syndical dénonce ses actions. Il suffit de lire les nouvelles du journal de la CSN où il est caricaturé dans des images qui représentent des adversaires des travailleurs. Il suffit d'écouter les commentaires des gens de la FTQ, de la CSD, qui ont été obligés de venir en commission parlementaire faire du lobby auprès de l'opposition pour être entendus sur des projets de loi. Le ministre a refusé en cette Chambre de tenir des audiences publiques sur le projet de loi n° 79 sur la CSST et il a le culot de nous parler qu'il veut faire de la prévention et moderniser la CSST. Il avait déclaré ici, dans un discours de 17 minutes, alors qu'il avait le droit de parler pendant un heure, qu'il était pour la rénover. En 17 minutes. Le monde syndical, M. le Président, s'est esclaffé, faute de mieux, mais ils en étaient très malheureux. Alors, lorsqu'il nous parle de ses états de service, force est de constater deux choses: ou alors ils étaient seulement factices ou alors il les a oubliés. Je préférerais croire qu'il les a oubliés, parce que les gens avec qui il a travaillé seraient encore beaucoup plus déçus d'avoir travaillé avec quelqu'un qui donnait une image qui ne correspondait pas à ce qu'il pensait vraiment.

Alors, nous sommes bâillonnés, nous ne pouvons pas faire tellement plus. Nous nous objectons, nous sommes contre, M. le Président, et nous ne pouvons pas accéder à ça. Et je le déplore, parce que, dans le projet de loi, avant cet amendement qui ponctionnait 15 000 000 $, qui attaque les travailleurs et les patrons directement, il y avait des choses intéressantes et nous avions souscrit et nous avions fait preuve de bonne collaboration. Et le ministre, dans son discours du début, il a mentionné lui-même, il a tenu à féliciter le député de LaFontaine pour sa collaboration. Ça, c'est l'ancien projet, avant que son président du Conseil du trésor l'oblige à amener ce 15 000 000 $.

Et lui répond d'une manière servile. Il aurait dû se lever et dire: Moi, je n'accepte pas ça. Je ne suis pas d'accord. Je représente les travailleurs et les patrons, je suis le ministre du Travail, le ministre du monde du travail et je veux les consulter, je veux parler avec eux, je veux voir s'il n'y a pas d'autres solutions, d'autres manières de fonctionner avant de leur faire ça dans le nez puis de leur faire avaler dans la gorge.

Voilà, M. le Président, pourquoi nous sommes contre et voilà pourquoi, malheureusement, nous ne pourrons souscrire à ça. Et, dans les prochains projets de loi du ministre qui vont toucher le monde du travail, nous allons prendre tout le temps nécessaire pour que les travailleurs et les patrons soient entendus. Ce n'est pas une menace, c'est maintenant la nouvelle politique de l'opposition en ce qui concerne les projets de loi du ministre du Travail.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. M. le ministre du Travail, à ce stade-ci, vous avez également droit à un droit de réplique de cinq minutes, si vous voulez l'utiliser. Non? Alors, le projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail, est-il adopté?

M. Paradis: Vote nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, que l'on appelle les députés. Nous suspendons nos travaux quelques instants.

(13 h 49 – 14 heures)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Nous mettrons maintenant aux voix le projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Rivard (Limoilou), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Parent (Sauvé), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Charbonneau (Bourassa), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Laporte (Outremont), Mme Vaive (Chapleau), M. Kelley (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des députés qui s'abstiennent? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je demanderais consentement pour que les votes des députés de Gouin, de Portneuf et de Lac-Saint-Jean soient rajoutés.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, dans tous les cas, M. le Président, peut-être sauf le député de Lac-Saint-Jean, est-ce qu'il veut créer une habitude ou des précédents en cette Chambre?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je considère que vous acceptez. M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:50

Contre:25

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la motion est donc adoptée. Le projet de loi n° 74, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la santé et la sécurité du travail, est donc adopté.

Considérant l'heure et maintenant que la motion de suspension des règles ayant été... M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Compte tenu du fait que la motion de bâillon est terminée et que nous retrouvons enfin notre droit de parole de ce côté-ci de la Chambre...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis: ...et que l'Assemblée nationale a siégé plus de 28 heures en ligne, M. le Président, je vous demanderais de vous prévaloir des dispositions de l'article 2, alinéa 8°, de notre règlement et de faire en sorte qu'on obtienne, compte tenu des circonstances exceptionnelles, de siéger à partir de 16 heures et au salon bleu et dans les commissions parlementaires.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, vous comprendrez que, je pense, il y a eu des choix qui ont été faits de l'autre côté, je les respecte. Vu que notre règlement est clair, à partir du moment que la motion de suspension des règles a été adoptée, on revient à notre calendrier régulier, et c'est à 15 heures qu'on doit recommencer, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Ça peut se faire suite à une décision de la présidence ou à un consentement. Je constate qu'il n'y a pas de consentement, je vous demande quand même de rendre une décision et nous allons tenir compte de l'attitude du leader.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la motion de suspension des règles étant close, nous allons revenir à notre calendrier normal. Je vais vous inviter à aller prendre votre repas et les commissions parlementaires vont débuter à l'heure normale, soit à 15 heures.

(Suspension de la séance à 14 h 7)

(Reprise à 15 h 1)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez vous asseoir. Nous reprenons aux affaires du jour. Je vais céder la parole à M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je pense que de consentement de part et d'autre, afin d'aider la planification et la préparation des travaux de la Chambre, il y aurait consentement pour que nous suspendions les travaux de la Chambre jusqu'à 16 heures et que le travail dans les différentes commissions qui ont été convoquées ne commence qu'à 16 heures. Donc, que les avis des commissions soient modifiés en conséquence pour que ça ne commence qu'à 16 heures, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement de la part de l'opposition. Très bien. Alors, de consentement unanime, nous allons suspendre nos travaux à la fois de l'Assemblée et des commissions jusqu'à cet après-midi, 16 heures.

(Suspension de la séance à 15 h 3)

(Reprise à 16 h 55)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Alors, nous allons poursuivre nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais M. le leader du gouvernement à nous indiquer l'ordre du jour.

M. Bélanger: M. le Président, article 23 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 69


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 23, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit. Y a-t-il des interventions? M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances, je vous cède la parole.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, je dois dire que cette intervention sera brève pour une raison bien simple. La commission parlementaire dont nous considérons le rapport a bien fait son travail, de façon systématique, en y consacrant le temps qu'il fallait, et, en plus, les parties intéressées ont discuté avec l'opposition officielle comme avec le gouvernement, et les parties intéressées dans cette affaire, ce sont toutes des coopératives d'épargne et de crédit mais qui ont diverses caractéristiques, les unes étant plutôt territoriales, les autres étant plutôt de groupe, qu'on appelle la petite fédération, dans le langage des initiés.

Comme il s'agit d'amendements requis de façon tellement évidente par la condition présente, ils ne sont pas particulièrement contentieux. Des fois, ils étaient techniques, oui, mais on était secondé par les techniciens qu'il fallait, et on a pris l'avis des techniciens dans les fédérations aussi, de façon telle que je crois que c'est sans grande difficulté que notre Assemblée va adopter ce projet de loi. Et ne serait-ce que pour le Journal des débats et les citoyens et les citoyennes qui pourraient nous écouter, je vais en rappeler très brièvement les grandes lignes et, ensuite, céder la parole à d'autres intervenants, s'il y a lieu.

On pourrait, si on avait à résumer en quelques paragraphes le sens de ce projet de loi, dire que les caisses d'épargne et de crédit sont nées au Québec très modestement, d'une façon très décentralisée, dans des villages et dans des paroisses. C'est souvent, comme je l'ai rappelé à quelques reprises dans mes interventions, à l'ombre du clocher, comme ça a été le cas dans mon propre village. Donc, des institutions inspirées par la mutualité, l'esprit de coopération et, on doit le dire aussi, largement la pauvreté; des gens qui, pour faire face à leurs obligations agricoles ou leurs obligations domestiques, avaient besoin de crédits modestes et, quand ils avaient des épargnes à placer, c'étaient des épargnes modestes. Alors, tout ça se faisait dans un esprit de convivialité. Cela comportait une commission de crédit. Par exemple, quand on voulait emprunter, on allait à la commission de crédit, et les pairs discutaient des finances de la famille en question ou de l'individu en question.

Il y avait aussi un comité de surveillance parce que, la nature humaine étant ce qu'elle est, il fallait bien qu'on prenne certaines précautions éthiques. Je me souviens – j'en discutais d'ailleurs avec le président de la commission en présence de notre ami le député de Laporte – que mon grand-père qui était membre d'une caisse populaire était très militant de la caisse populaire et aimait bien faire affaire avec une coopérative. Des fois, il allait à la banque parce qu'il ne voulait pas que la commission de crédit se mêle de ses affaires – tous ceux qui ont connu un peu les caisses populaires le savent – parce que la commission de crédit, c'était son troisième voisin, son quatrième voisin, puis le gars d'en face. Il ne voulait pas aller conter son histoire là. Bon. Alors, tout ça pour vous dire, dans le plus grand respect par ailleurs, que les caisses sont nées dans ce contexte.

Puis elles ont grandi d'une façon prodigieuse, de telle sorte qu'on peut dire aujourd'hui, premièrement, que la moitié du commerce bancaire en groupe, la moitié de l'activité bancaire, est faite par des coopératives d'épargne et de crédit. On peut dire aussi qu'il n'y a pas un pays à économie de marché, c'est-à-dire, il n'y a presque plus de pays... puisqu'ils sont tous à l'économie de marché, sauf un ou deux, qui a utilisé à ce point la formule coopérative dans le domaine bancaire. Alors, c'est vraiment une des caractéristiques de notre société.

(17 heures)

Et, quand un mouvement devient plusieurs fois milliardaire, les règles qui s'appliquaient à Saint-Jacques de Montcalm au début du siècle ont tendance, évidemment, à être désuètes. Et il y a eu des trains d'amendements au cours de l'histoire. Et là on arrive, je crois, à l'ultime mise à jour, en tout cas dans le contexte d'aujourd'hui, faisant de ces institutions des institutions plus légères, plus souples. Par exemple, le crédit sera consenti comme dans n'importe quelle institution financière par un spécialiste-analyste de dossiers de crédit et non plus par une commission de crédit.

Ce qu'on appelait commission de surveillance sera chargée maintenant, dans l'optique plus moderne et plus contemporaine, de la déontologie. Enfin, ça ressemble un peu aux principes éthiques de l'ancienne commission de surveillance, mais on parle de déontologie pour faire allusion à un système d'éthique plus vaste parce que, les affaires étant plus compliquées aujourd'hui, on raffine les moyens.

Ceux et celles qui ont suivi l'affaire de près savent que nous avons dû présenter une dizaine d'amendements qui sont intégrés au projet et que nous avons pris l'engagement auprès des parties – et je reviendrai un peu brièvement sur les parties – de ne pas promulguer un certain nombre d'articles.

Pourquoi est-ce qu'on fait une chose comme ça? C'est parce qu'il y a deux types de caisses. Il y a des caisses qui sont les caisses, je dirais, antiques et traditionnelles, qui étaient au début territoriales, et le territoire, en gros, c'était généralement la paroisse. Mais peu à peu, avec l'urbanisation, avec l'industrialisation, la paroisse n'est plus devenue le cadre absolu de l'activité humaine au Québec, et il y a eu des regroupements par intérêts autres que géographiques.

Je vais vous donner un exemple que j'ai vécu, puis raconter un petit fait, aussi, que j'ai raconté à la commission parlementaire. Lors d'une refonte de ses lois vers 1962 ou 1963, le premier ministre Jean Lesage avait présidé lui-même, dans la salle où notre commission a siégé, une commission parlementaire. Dans ce temps-là, le premier ministre descendait en bas, puis écoutait le monde, présidait la commission, puis donnait la parole à celui-ci ou à celui-là. Et il était flamboyant, Jean Lesage, tout le monde se rappelle du personnage. C'était un peu comme le Roi-Soleil qui aurait tenu sa cour. Je ne veux pas dire qu'il était royaliste, c'était un bon démocrate, mais il en avait quelques allures. Et il y avait en face de lui, à la table de ceux qui comparaissent, un jeune homme très intimidé qui voulait dire quelque chose au premier ministre et qui fut invité à le dire. Et ce jeune homme, il voulait expliquer que la caisse populaire qu'il venait de fonder n'était pas une caisse de paroisse, n'était pas liée à un territoire; c'était une caisse de groupe. C'était la caisse populaire des étudiants de l'Université de Montréal, la caisse populaire de l'AGEUM, et le jeune homme, c'était votre humble serviteur, qui a changé de bout de la table, maintenant, mais une bonne trentaine d'années plus tard.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Tout ça pour dire que cette affaire de caisse de groupe, c'est moi-même qui avais suggéré au grand premier ministre Jean Lesage de l'introduire dans la loi. Il l'a fait, puis ces caisses de groupes se sont développées d'une façon extraordinaire: caisses d'économie des travailleurs, il y en a dans mon comté, il y en a probablement dans tous les comtés du Québec. Mais ça a développé en même temps, si je puis dire... Je ne regrette pas ce que j'ai fait il y a 30 ans, mais ça a développé un petit problème qu'on a eu à régler au cours de la semaine, où les caisses territoriales et les caisses de groupes n'ont pas des intérêts totalement convergents – le député de Laporte l'a parfaitement compris et nous l'avons compris – et c'est la raison pour laquelle on a fait une dizaine d'amendements et c'est la raison pour laquelle certains articles ne seront pas promulgués.

Mais, pour le reste, tous les intervenants veulent la loi. Nous avons encore confirmé dans les heures qui précèdent que tous les intervenants veulent cette loi. Ce n'est pas un cadeau de Noël, l'Assemblée nationale n'est pas là pour faire des cadeaux à quiconque, mais ils vont vivre mieux le début de janvier et le début de 1997 si la modernisation contenue dans cette loi est devenue une réalité par les pouvoirs souverains de notre Assemblée. Et c'est la raison pour laquelle, M. le Président, j'espère que non seulement dans l'unanimité, mais dans l'enthousiasme nous allons moderniser la loi des caisses d'épargne et de crédit.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le vice-premier ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laporte. M. le député.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Le ministre des Finances vient de résumer d'une façon succincte l'historique du mouvement Desjardins, en fait, et de signaler l'importance de ce projet de loi là.

Je voudrais dire, M. le Président, que les modifications qui sont proposées dans le projet de loi n° 69 à la charte, en fait, du mouvement Desjardins sont des modifications qui ont été requises par le mouvement Desjardins et qui ont été entérinées lors du seizième congrès du mouvement Desjardins, dont les assises se sont tenues au mois de mars dernier. Ce sont donc des modifications qui ont fait l'objet d'un large débat au sein du Mouvement Desjardins et qui ont pour objet de moderniser la structure du Mouvement Desjardins, de la rendre plus efficace et de permettre, donc, au Mouvement Desjardins de mieux affronter les défis de l'ère dans laquelle nous vivons et de celle dans laquelle nous allons entrer bientôt, le XXIe siècle. Et, comme l'a dit le ministre des Finances, après que le projet de loi eut été déposé, il est apparu qu'une partie du Mouvement Desjardins, soit la Fédération des caisses d'économie, n'était pas parfaitement satisfaite avec un certain nombre d'articles du projet de loi.

Il n'appartient pas à l'opposition officielle de rédiger des projets de loi, M. le Président, mais l'opposition officielle peut quand même tenter de faire en sorte d'améliorer les projets de loi, et c'est son rôle. Elle les bonifie quand elle peut. Et, voyant la difficulté qui surgissait, nous avons demandé, d'emblée, au ministre des Finances de tenir une commission parlementaire pour entendre les doléances de la Fédération des caisses d'économie à l'égard de certains articles dont elle n'était pas parfaitement satisfaite et d'entendre également, bien sûr, le point de vue du Mouvement Desjardins, enfin du reste du Mouvement Desjardins, parce qu'il ne faudrait pas opposer la Fédération des caisses d'économie au Mouvement Desjardins. Elle fait partie intégrante du Mouvement Desjardins. Le Mouvement Desjardins est un tout dont une des parties avait des problèmes avec certains articles. Alors, le ministre des Finances, le gouvernement a accepté de tenir cette commission parlementaire de façon à ce que les parlementaires soient mis au courant de ces difficultés-là et puissent les apprécier.

Entre le moment où a eu lieu le débat ici, en Chambre, sur l'adoption de principe et la commission parlementaire, les parties se sont assises à la même table et ont négocié, et nous ont avisés, au moment où devait débuter cette commission parlementaire, qu'elles avaient convenu d'une entente entre elles, par l'intermédiaire du ministère des Finances, et que, à toutes fins pratiques, elles n'avaient plus de contentieux. Bravo! Bravo! nous sommes-nous dit, M. le Président. Nous avons joué notre rôle qui est de tenter de régler des problèmes, aider à régler des problèmes et non pas en susciter.

Alors, à partir du moment où on nous a avisés qu'une solution pratique et acceptée par les deux parties avait été trouvée et entérinée, ça permettait le déblocage du projet de loi. Et nous avons procédé en commission parlementaire avec l'étude de ce projet de loi là qui, quand même, est un projet important, puisqu'il comporte un peu moins de 200 articles. Nous nous sommes assurés, lors de l'étude de chacun de ces articles-là, que les ententes qui avaient été formulées par les parties soient respectées, soient entérinées dans le projet de loi, que les garanties qui avaient été demandées soient données. Et les parties nous ont assurés, lors de l'étude en commission parlementaire, qu'elles étaient pleinement satisfaites des modifications apportées, des garanties données. Et c'est pourquoi, M. le Président, nous pouvons continuer aujourd'hui l'étude de ce projet de loi là, étant satisfaits que le travail ait permis de débloquer une impasse – c'était vraiment une impasse – qui faisait en sorte que l'une des parties se sentait menacée.

Je suis content de voir que finalement on va pouvoir adopter ce projet de loi là qui va permettre au Mouvement Desjardins d'amorcer cette réforme dont il a tant besoin. Le Mouvement Desjardins, c'est une institution importante, on l'a dit et redit, et le ministre l'a dit tout à l'heure aussi, et chacune de ses parties aussi est importante. Alors, il faut protéger le tout, mais il faut aussi s'assurer que les composantes du Mouvement Desjardins soient satisfaites. Alors, c'est vraiment une histoire qui semble bien se terminer, et, M. le Président, dans ces conditions-là, l'opposition officielle est heureuse d'avoir pu collaborer à améliorer le projet de loi, enfin à le rendre plus acceptable à toutes les composantes du Mouvement Desjardins.

Ceci étant dit, M. le Président, il ne reste plus qu'à procéder, à entendre ceux de mes collègues qui ont également un point de vue à faire entendre sur la question. Je vous remercie.

(17 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laporte. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: M. le Président, lorsque j'étais intervenu au moment où on débattait du principe du projet de loi, j'avais signalé l'importance, pour nous, de protéger ce qui était une valeur importante à l'intérieur du Mouvement Desjardins, qui était la Fédération des caisses d'économie ou ce qu'on appelle les caisses de groupes, qui ont une réalité différente des caisses territoriales.

Il est clair, et le député de Laporte l'a rappelé, que nous étions, de ce côté-ci de la Chambre, résolument prêts à défendre, disons, l'existence et les préoccupations des caisses d'économie. Comme l'a rappelé le député de Laporte, dans la négociation, c'est-à-dire au début de l'étude du projet de loi, on a eu la chance, comme commission, d'entendre et la Confédération des caisses du Mouvement Desjardins et la Fédération des caisses d'économie, qui nous ont fait état d'une piste de solution. Alors, il est important quand même qu'on rappelle, un, quels étaient les problèmes qu'il y avait, deux, quelle est la piste de solution qui a été mise de l'avant. Car – je ne répéterai pas l'importance que le projet de loi a, dans son ensemble, pour moderniser la Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins – dans la grande majorité du projet de loi, il s'agit d'un projet de loi qui est nécessaire, qui modernise le fonctionnement de la Confédération et il nous semble important qu'il puisse passer.

On avait néanmoins des problèmes sur deux types d'articles, les articles 4 et 5 et les articles 14, 16, 17 et 20 du projet de loi. Les articles 4 et 5 portaient sur les noms, c'est-à-dire ce qu'on appelait, dans les articles, l'épuration des noms, c'est-à-dire l'obligation, la possibilité, pour la Confédération, de forcer une caisse à changer de nom, et ce qui faisait craindre énormément aux caisses d'économie ou aux caisses de groupes, que leur particularité, c'est-à-dire qu'elles s'appelaient caisse de Bell Canada ou caisse des pompiers et des policiers de Montréal, aurait pu devoir être abandonnée par une décision de la Confédération. Donc, les articles 4 et 5 leur posaient énormément de problèmes.

L'autre série d'articles qui posaient des problèmes à la Fédération des caisses d'économie étaient les articles 14, 16, 17 et 20. Ces articles avaient essentiellement pour objet de donner à la Confédération un pouvoir de forcer des fusions de caisses. Et la crainte des caisses d'économie était que la Confédération aurait pu forcer la fusion d'une caisse d'économie avec une caisse populaire, lorsqu'elles étaient sur le même territoire.

Si j'ai bien compris, et je crois que le ministre l'a rappelé, ce qui a été le résultat de la négociation entre les parties – et il faut dire que les fonctionnaires et les gens du cabinet du ministre ont été importants dans ce processus – a été la suivante. C'est que nous allons voter la loi telle qu'elle est, nous allons voter la loi telle qu'elle est. Néanmoins, les articles 4 et 6, les articles 14, 16, 17 et 20 – et je crois que le ministre l'a à la fois écrit en lettre et s'en est engagé personnellement – ne seront pas promulgués avant qu'il y ait eu une négociation entre la Confédération des caisses Desjardins et la Fédération des caisses d'économie, de manière à en arriver à une entente ou négocier un pacte ou une entente sur la manière dont on doit, on peut interpréter ces articles, M. le Président.

Alors, ce qu'on a devant nous, lorsqu'on va adopter le rapport de la commission, de notre part, comme parlementaires, c'est que nous allons, bien sûr, adopter le rapport de la commission avec les amendements, mais aussi avec l'engagement du ministre qu'il ne promulguera pas un certain nombre d'articles, à savoir les articles 4 à 6, 14, 16, 17 et 20, avant que les parties au conflit, si conflit il peut y avoir, ne soient arrivées à une entente. Il est clair, M. le Président, que, dans ce cas du Mouvement des caisses Desjardins, ce n'est pas les parlementaires qui ont à régler comment une fédération doit s'entendre avec la Confédération, mais il n'était pas non plus correct que nous donnions des pouvoirs indus à la Confédération qui aurait pu écraser la Fédération.

Donc, l'entente implicite qui est devant nous, qui a été confirmée et par une lettre signée par le ministre des Finances et par l'engagement du ministre des Finances devant la commission et je crois devant cette Chambre, c'est qu'il ne promulguera pas après qu'on ait voté la loi actuellement les articles 4 à 6, 14, 16, 17 et 20, avant qu'il n'y ait eu entente entre les deux parties concernées, à savoir la Confédération des caisses Desjardins et la Fédération des caisses d'économie.

Alors, M. le Président, dans ce cadre-ci, pour l'opposition et pour les parlementaires de l'opposition qui étaient extrêmement concernés par la survie de la fédération des caisses de groupe ou des caisses d'économie, je crois qu'on a devant nous une entente qui est tout à fait acceptable, qui est tout à fait acceptable, et je n'ai aucune gêne à prendre la parole du ministre. Je fais partie de ceux qui croient beaucoup plus à la parole d'un homme qu'au texte écrit. Je vais prendre la parole du ministre là-dessus, c'est-à-dire que les articles qui étaient des articles litigieux ne seront pas promulgués avant que ceux qui doivent, dans le fond, régler le problème entre eux n'aient réglé le problème entre eux.

Compte tenu de ceci, M. le Président, le reste du projet de loi – et je pense que le critique de l'opposition, M. le député de Laporte, l'a clairement rappelé – est un projet de loi extrêmement valable, qui va moderniser actuellement le Mouvement des caisses Desjardins, et il n'y a aucune raison, de notre part, une fois que ceci est entendu, pour qu'on fasse la moindre obstruction à l'adoption de ce projet de loi qui nous paraît important.

Alors, M. le Président, dans ce cadre-là, je crois pouvoir vous affirmer que nous allons voter en faveur et de la prise en considération du rapport et, ensuite, du projet de loi tel qu'il est, compte tenu de l'entente et compte tenu de l'engagement du ministre de ne pas promulguer les articles qui étaient des articles litigieux avant qu'il y ait entente entre les parties. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, merci M. le Président. Je voudrais dire quelques mots sur le projet de loi n° 69, la prise en considération. Le projet de loi n° 69, c'est cette Loi modifiant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit du Québec.

D'entrée de jeu, notre porte-parole ne l'ayant pas fait, son humilité ne lui permettant pas de le faire, je pense qu'il faut reconnaître le rôle important qu'a eu l'opposition dans ce projet de loi. Je ne veux pas pour autant enlever quelque mérite aux fonctionnaires du ministère des Finances ou au ministre, loin de là. Mais je dois avouer que, souvent, en démocratie, quand une partie à une négociation se sent un peu «bulldozée» dans les choses, elle en appelle à l'opposition. Autant le député de Verdun que le député de Westmount–Saint-Louis, que le député de Laporte, que le député d'Orford, nous nous sommes mis à la disposition de ces gens-là, à tour de rôle, et nous avons rencontré ou bien la Confédération ou bien la Fédération, soit en groupe soit individuellement, à plusieurs rencontres. Nous avons essayé de comprendre où se situait la problématique et où étaient les solutions.

Je pense que les fonctionnaires du ministère, le ministre a réalisé qu'effectivement il y avait problème et qu'il fallait écouter ces gens-là, ce qui n'était pas évident, évident lors de la première rencontre que nous avons eue avec la Fédération des caisses d'économie Desjardins du Québec.

(17 h 20)

Ceci dit, M. le Président, les choses font qu'à ce point-ci il y a finalement six articles sur lesquels – les articles 4 et 5, 14, 16, 17 et 20 – les gens de la caisse d'économie questionnaient. Le ministre s'est rendu à leurs demandes. Alors, les articles 4 et 5, ceux où on pouvait forcer le nom, le changement du nom, ne seront pas promulgués par le ministre, il s'en est engagé, ainsi que les articles 14, 16, 17 et 20 où on n'obligera pas, avant une forte et honnête négociation de part et d'autre... Et le ministre, si j'ai bien compris, sera l'intermédiaire et chacune des parties sera représentée à cette négociation-là. Encore une fois, je veux dire comment ces gens-là étaient de bonne volonté, de part et d'autre, autant de la Confédération que de la Fédération, ces gens-là étaient de bonne volonté, avec des points de vue fort différents, pour ne pas dire opposés à plusieurs instants, mais défendaient avec intelligence ces points de vue là, et on a dû, nous, de l'opposition, les écouter et faire valoir ces points de vue là auprès du ministre, qui les a bien entendus.

Alors, la loi va être votée, M. le Président, comme elle est en ce moment, comme nous la connaissons. D'autre part, un certain nombre d'articles ne seront pas promulgués, et je me rallierais au point de vue du très bon député du comté de Verdun qui disait: Entre un document signé et la parole d'un ministre... Bien, je suis un peu comme lui. La parole d'un ministre, pour moi qui viens du milieu des affaires, parole donnée, c'était parole donnée. Et, pour avoir été en affaires 23 ans, où, dans mon métier, on pratiquait ses transactions sur la parole, jour après jour, et on était déchu si on devait ne pas respecter notre parole dans les jours qui suivaient une transaction... Alors, ici, on a la parole du ministre, et j'étais heureux de voir qu'il a déjà collaboré comme un humble serviteur, à l'Université de Montréal, à aider la cause de la Fédération des caisses d'économie. C'est tout à son honneur d'avoir été partie prenante à une grande entreprise.

Alors, je finirai, M. le Président, comme mes deux confrères qui ont parlé avant moi, en vous disant que Desjardins, c'est un des grands fleurons économiques du Québec, on en est très fier. Les problèmes ne sont pas tous réglés pour autant à Desjardins, et je ne dédirai pas ce que j'ai dit dans la première présentation que j'avais faite. Il y a des problèmes, il y a des gens qui sont venus nous voir individuellement, qui nous ont fait part d'autres situations, et je pense qu'à cause de la grandeur de Desjardins on devra porter une attention tout à fait particulière à des simples gens qui sont venus nous voir, qui nous ont illustré des problèmes qu'ils rencontraient sur le terrain. Alors, c'est une grande institution, on doit en être fier, et l'opposition est heureuse de se joindre au gouvernement pour faire passer ce projet de loi non seulement au niveau du rapport de la commission, lequel moment nous sommes en ce moment, mais éventuellement au moment de voter le projet de loi plus tard, j'imagine, ce soir ou demain. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre. Vous avez le droit à une intervention de cinq minutes après chaque intervention.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): Ça ne me prendra pas, M. le Président, cinq minutes pour dire les quelques mots que je veux dire parce que je crois que le mot de ces mots qui s'applique le plus, en terminant nos travaux à cette étape-ci, c'est le mot «coopération», précisément. Nous faisons une loi pour moderniser un des plus beaux fleurons du monde coopératif dans le monde. Je l'ai dit, la coopérative au Québec, en matière d'épargne et de crédit, a atteint un niveau inégalé dans tous les pays dont on peut étudier le système bancaire, la moitié du système bancaire. Donc, c'est une espèce d'hymne continu, depuis le début du siècle, à la coopération, dû évidemment au génie d'Alphonse Desjardins et de ses continuateurs.

Mais ce par quoi je veux terminer, c'est que, s'ils ont coopéré, nous avons coopéré à moderniser leurs lois, l'opposition officielle, les parlementaires du gouvernement et les intervenants qui sont venus nous voir et qui se sont déplacés, qui sont venus dans les murs de notre Assemblée nationale pour nous faire des mises en garde, que nous avons bien entendues et dont nous avons tenu compte. Alors, ce grand monument juridique de la coopération, M. le Président, sera né dans la coopération, et je remercie toutes les personnes, le député de Laporte et ses collègues, le député de Crémazie et ses collègues et l'ensemble des intervenants parlementaires ou non qui ont permis cette modernisation tant attendue.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le vice-premier ministre.


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission du budget et de l'administration portant sur le projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article 29, M. le Président.


Projet de loi n° 3


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y en a plusieurs, comme vous voyez, alors je vais le retrouver. À l'article 29, M. le ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi n° 3, Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire. Alors, M. le vice-premier ministre, je vous cède la parole pour votre intervention.

M. Landry (Verchères): Il s'agit, encore une fois...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez-moi, M. le député de Laporte pose une question. L'adoption du projet de loi et non pas le rapport, oui. C'est l'étape de l'adoption du projet de loi. Alors, M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): Il s'agit, M. le Président, d'un projet de loi qui, lui non plus, n'est pas vraiment contentieux. Il ne l'est pas entre les divers intervenants de cette Assemblée, puisque l'opposition officielle, comme le gouvernement, souhaite que notre État s'en aille, suivant un calendrier qui est précisé dans le projet de loi, vers l'équilibre de ses finances publiques et le véritable équilibre, c'est-à-dire le déficit zéro. Par conséquent, peu de choses nous divisent d'avec nos amis d'en face sur cette question. Mais, en plus, c'est un projet de loi qui n'est pas vraiment contentieux dans notre société non plus parce qu'il a été l'objet, dans son essence, d'une discussion comme on sait au Sommet sur l'économie et l'emploi et d'une discussion dans la société.

Plusieurs articles de journaux, de revues, émissions de télévision ont porté sur cette question de société importante. Ce n'est pas rien qu'une question de gouvernement. C'est une question de société, et l'immense majorité des intervenants et de ce qu'on appelle les corps constitués sont d'accord pour que notre État soit à déficit zéro en l'an 1999-2000, c'est-à-dire que, lorsque des zéros apparaîtront dans le numéro du millénaire, un seul zéro apparaîtra vis-à-vis les mots «déficit du Québec».

Je dis que ce n'est pas contentieux, ce qui ne veut pas dire que c'est totalement consensuel. D'ailleurs, la démocratie ne s'exerce pas dans l'unanimité généralement, elle s'exerce dans la majorité. Je crois honnêtement qu'une vaste majorité des Québécois et des Québécoises sont d'accord pour cette remise en ordre de nos finances publiques. Mais il y en a qui ne sont pas d'accord. On en a vu encore des expressions dans la presse de ce matin. Et c'est intéressant qu'une société aille au fond de ses débats et que les journaux se remplissent d'articles préconisant une position plutôt que l'autre.

Je soumets, en toute amitié, tout respect pour les opinions contraires, qu'il faut aller au déficit zéro et qu'il faut y aller dans le calendrier prescrit, c'est-à-dire 3 200 000 000 $ pour l'année en cours, 2 200 000 000 $ pour celle qui vient, 1 200 000 000 $, zéro. C'est facile à retenir et il y a un aspect pédagogique là-dedans. Il ne serait pas déplaisant que des gens qui ne s'occupent pas à tous les jours de finances publiques et qui n'ont pas l'intention de se battre dans le métro pour ça sachent quand même quelle est la séquence de la mise en ordre de nos finances publiques pour notre collectivité.

Alors, je répète, en milliards de dollars: 3 200 000 000 $, 2 200 000 000 $, 1 200 000 000 $, zéro.

Pourquoi est-ce qu'il est impérieux de faire ça? Il y a quelques raisons faciles à comprendre. Souvent, on dit que les questions de finances publiques sont complexes et on a toujours l'impression qu'il faut être docteur de Harvard pour comprendre ça ou du London School of Economics, comme notre ancien premier ministre l'est. Mais, quand c'est le temps de passer à l'action et qu'on veut que toute la société passe à l'action, ce n'est pas le temps des doubles à... et des tableaux compliqués. C'est le temps d'un certain nombre de réalités simples. La première d'entre elles, c'est que chaque Québécois, chaque Québécoise, hommes, femmes et petits enfants, a plus de 10 000 $ de dettes au seul chapitre du gouvernement du Québec sur les épaules. C'est trop. C'est ce qu'il y a de plus élevé au Canada, si on veut se comparer à des voisins immédiats. Je ne veux pas entrer dans des débats partisans, puisque l'opposition et nous, sur l'objectif en tout cas, sommes d'accord. Ça ne sert à rien de remonter jusqu'à la fin des temps.

(17 h 30)

Disons globalement que notre société a été négligente. Notre société a été négligente en ce qu'elle n'a pas compris complètement le message d'un des plus grands économistes de notre temps, John Maynard Keynes, qui est devenu par la suite Lord Keynes et qui avait dit fort justement que, quand la demande globale fléchit en période de basse conjoncture, il est intéressant pour les gouvernements d'ajouter de l'argent dans le circuit pour augmenter cette fameuse demande globale, même s'il faut s'endetter pour le faire. Jusque-là, c'est très cohérent et c'était facile à comprendre et c'est ce que la plupart du monde a compris; mais on n'a pas compris le deuxième membre de la phrase.

Lord Keynes, qui n'était pas, sans faire injure à sa mémoire, un joyeux drille, c'est le moins qu'on puisse dire – c'était un économiste austère et rigoureux – n'a jamais dit qu'il fallait s'endetter jusqu'à la fin des temps. Il a dit qu'il fallait, en période de haute conjoncture, reponctionner ce qu'on avait injecté pour rembourser ses dettes. Et cette deuxième partie de la phrase n'a pas été comprise par plusieurs gouvernements; par celui qui siège dans la capitale du Canada, en particulier, qui a accumulé, avec cette doctrine, 600 000 000 000 $ de dette, mais par plusieurs autres gouvernements dans le monde. Ça a été un vice occidental que d'endetter sans fin les gouvernements et les États.

Donc, plus de 10 000 $ par tête au Québec; c'est trop, c'est insupportable, il faut faire quelque chose. Deuxièmement, ce 10 000 $, quand on l'agglomère, fait 75 000 000 000 $, 75 fois 1 000 millions de dette accumulée. Ça veut dire, même si les taux d'intérêt sont bas – parce que cette dette est financée, en moyenne, sur des titres de six, sept ou huit ans – 6 000 000 000 $ d'intérêt par année. On stérilise 6 000 000 000 $; c'est comme si, pour prendre une image, on jetait 6 000 000 000 $ dans le fleuve chaque année. Imaginez-vous, M. le Président, ce que n'importe quel gouvernement constitué du Parti libéral, ou du Parti québécois, ou de quiconque suivant ses tendances profondes pourrait faire avec 6 000 000 000 $ par année! Mais, à cause de notre négligence passée, ces sommes astronomiques sont stérilisées.

Et la moitié de cet endettement monstrueux a été faite pour payer les dépenses courantes, pour payer ce qu'on appelle l'épicerie, ce qui est encore plus insupportable à sa face même, mais plus insupportable au second regard que portent les générations futures sur cette question et les jeunes, en particulier, qui seraient dans la triste obligation de payer alors que nous avons consommé. Alors, là, il y a une raison morale pour remettre nos finances publiques à un niveau d'équilibre.

Il y a aussi une raison proprement québécoise liée au statut constitutionnel du Québec et aux relations entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec. On sait que le gouvernement du Canada – je l'ai dit – a 600 000 000 000 $ de dette accumulée. Mais, au yeux de la communauté des créanciers, c'est l'ensemble de l'économie canadienne et des collectivités canadiennes réunies qui doit cette somme. Alors, les Québécois et les Québécoises – je l'ai dit – ont 10 000 $ de dette par tête comme citoyens du Québec, mais ils en ont aussi un montant astronomique comme citoyens du Canada, et cela s'ajoute. Alors, j'ai entendu des critiques très autorisés, des gens que je respecte, dire: C'est quoi? C'est une curieuse idée d'aller à déficit zéro! Mais je leur suggère un second examen. Même à déficit zéro, on ne sera pas à déficit zéro. C'est ça, la triste réalité.

Quand, en 1999-2000, le déficit du Québec sera à zéro, si on veut être réalistes, il faut compter la partie québécoise du déficit fédéral qui repose sur les épaules des mêmes contribuables. Alors, ceux qui me disent: Regardez, en Europe, ils ne sont pas à déficit zéro... Mais non, la France, c'est un pays unitaire qui peut aller à 3 % de son PNB et puis ce serait considéré, d'après les critères de Maastricht, comme une chose acceptable. Oui, mais ce n'est pas comme ça qu'il faut juger le Québec, d'aucune espèce de façon! Même pour arriver aux critères de Maastricht, il faut prendre déficit québécois ou dette québécoise plus déficit canadien ou dette canadienne et là on a une comparaison internationale valable. C'est la raison pour laquelle nous sommes condamnés à aller à zéro. Et c'est ça qu'on veut faire.

Alors, on l'a dit dans cette Assemblée; le Parti libéral l'a dit au cours de la campagne électorale, qu'il fallait une loi antidéficit. Nous y sommes! Alors, pourquoi faut-il précisément que ce qu'on a dit, ce qui est dans le budget soit consacré par une loi? Mais parce que c'est une opération difficile. Et on peut prendre de bonnes résolutions dans l'enthousiasme, là. Il y a plein de gens qui vont le faire, là, aux fêtes du jour de l'An, là, qui vont dire: À partir du 1er janvier ou du 2 janvier, je ne ferai plus ceci, je ne ferai plus cela. Mais on sait que, des fois, on est à peine dépassé les Rois que déjà une partie de ces résolutions se sont envolées, surtout quand il s'agit de la difficile lutte contre le tabac, et puis, rendu au mois de juin, bien souvent, il ne reste pas grand-chose. C'est ce qu'il ne faut pas qu'il nous arrive collectivement. Nous avons dit que nous allions à déficit zéro, et notre Assemblée nationale fait une loi pour que nous y allions.

Et qu'est-ce qu'il y a dans cette loi? Il y a dans cette loi, en plus du calendrier, certaines souplesses que nous avons introduites pour faire en sorte que, si des choses imprévues, accidentelles et exceptionnelles surviennent, on puisse diverger pour une année à condition de récupérer l'année suivante. Si Lord Keynes était toujours vivant et qu'il avait pris connaissance de cette loi, il trouverait qu'enfin il y a une législation qui est conforme à sa doctrine, c'est-à-dire que, dans des périodes où ça va très mal sur le plan conjoncturel, on peut, jusqu'à un certain point, ajouter à la demande globale par le déficit parce qu'on est obligés de le faire, mais le récupérer l'année suivante ou suivant le montant – et, dans le cas de notre loi, c'est plus de 1 000 000 000 $ – sur une période raisonnable de temps, et la période, on l'a mise sur cinq ans. Alors, s'il y a un dépassement de plus de 1 000 000 000 $, il sera récupéré sur une période de cinq ans.

Mais nous avons pris une précaution supplémentaire. Il ne faut pas que l'on repousse vers la quatrième année la résorption de ce déficit. Donc, on ne peut pas, la quatrième année, résorber plus de 25 %. Donc, c'est vraiment un réatterrisage en douceur et qui ne peut être invoqué que dans des circonstances particulières qui obligent le ministre des Finances à revenir devant cette Assemblée s'en expliquer. Ces circonstances particulières, bien, c'est des catastrophes naturelles d'une ampleur exceptionnelle, c'est une catastrophe économique d'une ampleur exceptionnelle. Ça arrive, on le sait.

Là, on est dans, je pense, le 65e mois de croissance positive dans l'économie nord-américaine, ce qui est près du record de tous les temps. Alors, ça veut dire que même une bonne économie, et c'est le propre d'une économie capitaliste, connaît des cycles. Quand on était jeunes, les professeurs nous enseignaient que ces cycles étaient de trois, quatre ou cinq ans; on voit bien que ce n'est plus ça: là, on a eu des cycles de cinq, six, sept ans. Très bien, mais, tôt ou tard, ça va décrocher, hélas! Il faut être capable de faire face à ce décrochage comme gouvernement, et là la loi comporte cette souplesse de permettre un dépassement qui sera récupéré.

Les autres circonstances, c'est les catastrophes naturelles. Je ne pensais pas que l'été dernier nous donnerait tellement d'exemples de ce que ça peut être, mais il y a eu pour 900 000 000 $, on le sait, de dommages dans quelques régions du Québec durement éprouvées par des inondations. C'est d'une extrême gravité et ça veut dire que ce n'est pas théorique de penser que des catastrophes naturelles peuvent avoir des impacts sur les dépenses publiques, et il faut être capable d'y faire face.

Et enfin – et là je ne veux pas que l'opposition me suive sur ce terrain si elle ne le veut pas – il y a d'autres catastrophes naturelles qui s'appellent les humeurs du ministre des Finances du Canada. Ils peuvent évidemment pelleter vers nous, comme ils l'ont fait, à hauteur de 5 000 000 000 $, 6 000 000 000 $. Ils n'ont pas épargné nos amis d'en face quand ils étaient au gouvernement, d'ailleurs. Le député de Laporte s'est fait, lui aussi, pelleter des montagnes de dette fédérale, et ils en ont pelleté des montagnes sur nous aussi.

On pourrait se réconcilier en disant que je ne reproche même pas au ministre des Finances fédéral le fait absolu. Je n'aime pas ça quand ça arrive; le député de Laporte n'a pas aimé ça quand ça lui est arrivé, mais nous devons nous comporter en citoyens juridiques responsables du Canada, nous faisons partie du Canada. Ce Canada, il s'est endetté joyeusement alors que nous en faisons partie. Alors, quand le ministre des Finances repousse vers nous une partie de son énorme déficit – et il ne s'est pas gêné pour le faire – ça fait mal, on n'aime pas ça et on doit quand même admettre qu'il y a un sens des responsabilités qui nous lie à faire notre part pour que le Canada, que nous avons contribué à endetter, se désendette. On n'a pas intérêt à ce que ce pays soit en mauvaise posture financière, mais il faut prévoir aussi que c'est arrivé et que ça peut arriver encore, tout en souhaitant que ça arrive le moins souvent possible.

En terminant, j'ai donné un peu la réplique, encore une fois, en tout respect à ceux qui disent qu'on ne doit pas aller à déficit zéro, mais c'est parce qu'ils analysent mal, quand ils parlent de l'Europe surtout, la comparaison pays unitaire et pays fédéré.

(17 h 40)

Je voudrais aussi dire, à ceux et celles qui prétendent que c'est une attitude néolibérale... Mais, d'abord, pour nos amis d'en face, ça devrait être un compliment; c'est mieux d'être néolibéral que paléolibéral, n'est-ce pas? Mais ce n'est pas une injure, dans un cas comme dans l'autre, parce que, selon moi – j'ai hâte de voir ce que les porte-parole de l'opposition vont dire – c'est être ni libéral, ni conservateur, ni être à gauche, ni à droite que de vouloir avoir des finances publiques saines.

J'irais plus loin: c'est être réactionnaire, injuste et inéquitable que de repousser vers les générations futures les fruits de ses propres excès, et c'est là que les progressistes se rejoignent. Ce n'est pas une idée de droite, ni une idée de gauche de ne pas vouloir se déshonorer vis-à-vis de ses enfants; c'est une idée humaine, c'est une idée éthique, une idée morale. Il y a aussi une forte composante éthique et morale à vouloir rétablir nos finances publiques, et c'est la raison pour laquelle notre Assemblée nationale – je crois ne pas être présomptueux en disant à l'unanimité et dans l'enthousiasme encore une fois – va faire que la collectivité québécoise aura une loi antidéficit, s'y conformera pour le plus grand bien des Québécois et des Québécoises d'aujourd'hui, et pour nos fils, nos filles et nos petits-enfants dans l'avenir.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le vice-premier ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laporte. M. le député.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. M. le Président, je pense qu'il n'y a personne, ici dans cette salle et au Parlement, qui ne convient pas de la nécessité absolue non seulement de réduire le déficit du Québec à zéro, mais même de réduire, le plus tôt possible, la dette du Québec vers ce qui pourrait être éventuellement le point zéro. Et, cette dette-là, elle a été accumulée, essentiellement, depuis 25 ans, depuis le début de la Révolution tranquille, et on doit reconnaître que nous avons tous vécu au-delà de nos moyens.

Et, quand, parfois, certaines personnes dans la société disent: Nous avons beaucoup contribué, nous n'avons pas à porter le fardeau des efforts que l'on doit faire pour réduire les dépenses, M. le Président, il faut bien reconnaître que, si nous avons vécu, au cours des années, avec un standard de vie au-dessus de la moyenne, c'est que justement nous avons profité des largesses de nos gouvernements, de tous les gouvernements, qui donnaient aux citoyens des services qui dépassaient les moyens de ces gouvernements-là. Donc, nous nous sommes endettés, tout le monde. Le Québec, les autres provinces, le fédéral, les États-Unis, en fait, tous les pays occidentaux ont fait la même chose. Ça a été une période faste et, maintenant, on doit réaliser qu'on ne peut plus continuer à faire ça; il faut revenir à des pratiques beaucoup plus rigoureuses.

Et, M. le Président, je partage entièrement les propos du ministre des Finances quant à l'importance de réduire ce déficit-là à zéro dans les meilleurs délais. Et, comme je le disais lors de l'adoption de principe de ce projet de loi là, le plan de réduction du déficit à zéro, il apparaît en premier lieu dans le budget qu'a déposé le gouvernement libéral au printemps 1994. Ce plan-là de réduction du déficit visait à faire en sorte d'atteindre l'équilibre budgétaire, c'est-à-dire le point zéro, en 1999. Essentiellement, c'est le même plan qui est suivi par le gouvernement, et ce n'est certainement pas moi qui vais reprocher au gouvernement de le faire. Au contraire, dans toutes mes interventions, M. le Président, et celles de mes collègues, nous exhortons le gouvernement à continuer dans cette voie de réduire le déficit.

Quant aux moyens qu'il choisit pour le faire, ça, c'est autre chose, M. le Président, et, parfois, il y a des incohérences qui se font jour. Par exemple, on sait que, pour réduire un déficit, il y a deux façons de le faire. On doit le faire de deux façons: en tentant et en réussissant à réduire les dépenses du gouvernement, mais aussi en obtenant, en ayant le bénéfice de revenus additionnels. Il faut à la fois pouvoir jouir de revenus additionnels et comprimer les dépenses. Et, quand je dis «revenus additionnels», je ne parle pas de revenus générés par des impôts ou des taxes, mais des revenus générés par une économie en pleine croissance, qui crée des emplois et qui donc procure au gouvernement des revenus additionnels. Et c'est comme ça qu'on devrait pouvoir y arriver. Il arrive parfois que ça soit plus difficile d'obtenir des revenus additionnels et, M. le Président, c'est là que les problèmes surgissent.

La question de savoir si on doit s'arrêter en cours de route... Est-ce que, par exemple, on pourrait accepter que, plutôt que de viser l'équilibre budgétaire, c'est-à-dire le déficit zéro, totalement zéro, on s'arrête à un palier supérieur qui serait le point où le gouvernement arrête, disons, d'emprunter pour payer l'épicerie, c'est-à-dire les dépenses courantes. Ça veut dire, ça, que, pour toutes les dépenses de nature «capital», on pourrait emprunter. C'est ça que ça veut dire. Et cette ligne-là, elle se situe à peu près à un niveau entre 1 500 000 000 $ et 2 000 000 000 $ de déficit.

En fait, ce que nous dit Jacques Parizeau, pour ne pas le nommer, M. le Président – maintenant, on peut le nommer puisqu'il n'est plus député en cette Chambre – c'est qu'on pourrait continuer à faire des déficits année après année, mais pour couvrir le niveau des dépenses de nature «capital». Bon, de nature «capital», la définition de ça est parfois assez étendue. C'est rendu, M. le Président, que le gouvernement nous a proposé cette année un projet de loi qui fait en sorte que, quand on pose de l'asphalte sur les routes, ce qu'on appelle des couches d'usure... Moi, j'ai toujours pensé que ce n'était pas de nature «capital», M. le Président, que c'était plutôt de l'entretien. Mais non, le gouvernement a choisi de capitaliser ces dépenses-là, donc d'emprunter, littéralement, pour mettre des couches d'usure sur l'asphalte de nos routes et de financer ça, de payer ça sur une période de temps. Bon, ça, à mon avis, c'est une mauvaise décision. On l'a dit, mais le gouvernement a décidé de le faire. Il faut, M. le Président, cesser justement d'emprunter de plus en plus pour des dépenses qui ne sont pas vraiment de nature «capital». On pourrait discuter là-dessus. Certains peuvent ne pas être d'accord avec ça, mais c'est un exemple concret.

Et M. Parizeau nous dit: Pour les dépenses «capital», on peut emprunter. Et, comme argument suprême pour le justifier, il nous dit: C'est comme mettre une hypothèque sur la maison. Personne n'aurait idée d'acheter la maison comptant, enfin, sauf les gens dont les moyens sont au-dessus de la moyenne; il n'y en a pas beaucoup dans cette Chambre, M. le Président, mais il y en a peut-être quelques-uns. À ce moment-là, de nous dire M. Parizeau, on peut hypothéquer la maison. Donc, c'est possible de le faire. La comparaison ne vaut pas, M. le Président, parce que la maison est déjà hypothéquée. C'est ça que M. Parizeau n'a pas compris.

Si la maison n'était pas hypothéquée et qu'on achète une maison nouvelle, bon, parfait, on a un bien de nature «capital». On met une hypothèque. Parfait! On peut en payer une partie comptant et le reste, on le paie sur une période d'années. Fort bien! Mais là ce n'est pas de ça qu'on parle. On nous dit: Il faudrait hypothéquer, comme si c'était une maison qu'on pouvait hypothéquer, alors que le Québec est déjà hypothéqué non seulement avec une hypothèque, M. le Président, mais je dirais, pour faire une comparaison que les gens comprennent, que le Québec a au moins trois hypothèques sur sa maison présentement, et on ne peut plus en ajouter.

Alors, il faut donc cesser justement de faire des déficits non pas seulement des dépenses courantes, des dépenses d'administration, mais des dépenses «capital» aussi. On ne peut plus se permettre des déficits, quels qu'ils soient, même pour des fins «capital». C'est donc dire que c'est la rigueur qui doit s'installer. Et, là-dessus, M. le Président, l'opposition supporte le gouvernement. Elle supporte le gouvernement, mais pas quand le gouvernement s'y prend de la mauvaise façon.

Par exemple, le gouvernement est obligé de faire des coupures importantes par les temps qui courent. On le voit dans la santé, dans l'éducation. Et je disais, tout à l'heure, que le gouvernement, bien sûr, s'il pouvait avoir des revenus additionnels, ne serait pas obligé de couper autant. Là où le problème se pose, c'est que le gouvernement s'est privé de revenus additionnels importants lorsque, quelques mois avant le référendum, il a décidé d'annuler la loi 102 qui récupérait des sommes d'argent à partir de la rémunération de ses employés. Ç'avait été accepté, M. le Président. C'était une loi. Les gens ne descendaient pas dans la rue. Ça avait passé le test social et c'était accepté.

(17 h 50)

Pire que ça, M. le Président, le gouvernement a consenti des augmentations de salaire à ses employés avant le référendum, bien sûr, mais payables après le référendum. Alors, là, après avoir gaspillé, enfin, ces sommes d'argent là qu'il n'avait pas les moyens de payer, il est obligé de revenir aujourd'hui et de couper encore plus. Là-dessus, on ne suit pas le gouvernement. On le suit dans ses principes quand le gouvernement nous dit: Il faut couper dans le déficit, il faut réduire le déficit. Mais, sur la méthode pour y arriver, là, on nous permettra de critiquer le gouvernement, M. le Président. Quand on dit que le gouvernement coupe trop dans la santé, par exemple, c'est parce qu'on sait que, nous, on n'aurait pas eu besoin de faire ça parce qu'on n'aurait pas donné 600 000 000 $ d'augmentations de salaire, ou bien 200 000 000 $ par année cumulatifs trois fois, si on n'avait pas eu les moyens de le faire. Et on l'a prouvé: nous, on avait passé la loi 102. Donc, sur les principes, on est d'accord. Sur les modalités, on ferait autre chose.

Et, pour revenir au point dont parlait le ministre des Finances, la théorie de son bon ami Lord Keynes, là-dessus, M. le Président, aucun problème. Nous aussi, on est d'accord avec ça, c'est-à-dire que, quand la conjoncture est mauvaise, oui, les gouvernements peuvent se permettre d'aller un petit peu en bas de la ligne et de faire quelques déficits, pourvu qu'en période de haute conjoncture on fasse l'inverse. Et d'ailleurs j'avais exactement exposé ça lors de la réplique que j'avais faite au premier budget du gouvernement du Parti québécois, le budget du député de Crémazie. Au mois de mai 1995, j'avais exactement fait un exposé de cette façon qui m'apparaissait la bonne de prévoir l'équilibre des finances publiques en période de haute conjoncture. Ne nous arrêtons même pas à zéro; on devrait faire des surplus en période de haute conjoncture de façon à ce que, quand l'économie se détériore, on puisse utiliser cette marge de manoeuvre pour faire en sorte de relancer l'économie, de sorte que, sur une période d'années, on soit toujours à zéro, parfois en haut, parfois légèrement en bas, mais la moyenne, ça serait toujours l'équilibre budgétaire.

Alors, voilà, M. le Président, ce en quoi nous croyons de ce côté-ci et ça semble, je crois, être aussi le point de vue du gouvernement. Et j'exhorte le gouvernement à ne pas lâcher, à maintenir ce point de vue là. La loi sur le déficit dont on parle, le Parti libéral du Québec est le premier à l'avoir réclamée. Ça faisait partie de nos engagements électoraux en 1994. M. le Président, les aléas de la politique ont voulu que nous ne soyons pas au gouvernement et, après l'élection, le chef de l'opposition officielle, le député de Vaudreuil, à plusieurs reprises en cette Chambre, à la période de questions, a imploré l'ancien premier ministre...

M. Landry (Verchères): M. le Président...

M. Bourbeau: ...pas le premier ministre actuel, le premier premier ministre du Parti québécois, celui dont j'ai parlé tout à l'heure, de déposer une loi antidéficit. C'était non jusqu'à il y a quelques mois. Et, après ça, le gouvernement a compris. Enfin, M. le Président, nous n'avons pas d'objection à ce le gouvernement prenne nos idées si ce sont des idées qui sont bonnes – et elles le sont en général quand elles sont les nôtres – et si ces idées-là ont pour objet de faire avancer la cause de saines finances publiques au Québec.

Alors, le gouvernement a donc décidé de proposer une loi, la loi antidéficit. Nous avons, en commission parlementaire, suggéré des améliorations à la loi; nos demandes n'ont pas été particulièrement entendues, mais quand même le ministre les a considérées et à l'occasion a hésité. Même parfois, à une reprise ou deux, il y a eu des modifications, mais, pour l'essentiel, la loi est telle qu'elle était et elle n'est pas si mauvaise que ça, disons-le. Nous avons un peu aiguillonné le ministre pour être sûrs qu'il ne céderait pas justement aux pressions de ceux, dans ses accointances – enfin, peut-être pas des siennes comme de celles de son parti – qui voudraient que le gouvernement justement n'aille pas aussi loin dans son objectif de déficit, qui voudraient que le gouvernement relaxe ses principes et cesse de comprimer les dépenses et de réduire le déficit comme il s'est engagé à le faire.

Et j'implore le ministre des Finances, comme je l'ai fait il y a quelques semaines, de ne pas céder justement aux pressions de ses alliés naturels que sont, entre autres, le président de la CSN, M. Larose pour ne pas le nommer, et même son ancien chef qui justement réclame des modifications à la politique gouvernementale dans le sens de ne pas couper le déficit suffisamment pour atteindre le point d'équilibre budgétaire. Alors, le ministre des Finances pourra compter sur l'opposition officielle qui va toujours le supporter quand il va vouloir maintenir le cap sur cet objectif de réduire le déficit à zéro, atteindre l'équilibre budgétaire.

M. le Président, je vois que le temps passe et que d'autres collègues veulent prendre la parole. Alors, je vais terminer ici en disant que nous sommes satisfaits, en fait, de ce projet de loi là. Ce n'est pas le projet de loi le plus contraignant parmi ceux qui ont été adoptés au Canada, mais c'est quand même un projet de loi qui devrait, si le gouvernement le respecte – et il devrait respecter la loi – faire en sorte de permettre au Québec non seulement d'atteindre l'équilibre budgétaire, mais de le maintenir dans les années suivantes. Et c'est, je pense, la direction dans laquelle nous devons aller pour le plus grand bien non seulement de nos enfants et de nos petits-enfants, mais de nos arrière-neveux aussi qui nous devront cet ombrage, pour citer, M. le Président, le fabuliste. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laporte. Alors, M. le député de Verdun, je vous cède la parole. Il nous reste quatre minutes avant 18 heures; on verra à 18 heures s'il y a lieu de suspendre ou d'ajourner.

M. Gautrin: Ah! C'est vrai qu'on est revenus à nos règles normales. Est-ce qu'on peut ajourner le débat et recommencer après?

Une voix: Bien sûr, bien sûr.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint.

M. Lefebvre: Il nous reste à peine deux ou trois minutes avant 18 heures; je suggérerais que l'on suspende jusqu'à 20 heures, de sorte que mon collègue puisse faire son intervention tout d'un bloc, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a consentement pour que nous suspendions immédiatement jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 57)

(Reprise à 20 h 3)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Alors, nous poursuivons les affaires du jour. Nous étions à l'article 29 de notre feuilleton. M. le ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi n° 3, Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire. Nous avions terminé...

M. Gautrin: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je m'assure simplement qu'avant de commencer on ait bien le quorum.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous avons quorum, effectivement, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Comme je le mentionnais tout à l'heure, nous avions terminé par l'allocution du ministre d'État de l'Économie et des Finances et vice-premier ministre du Québec. Alors, nous allons maintenant poursuivre en accordant la parole au député de Verdun. M. le député, vous avez un temps de parole de 10 minutes.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Comme l'a affirmé tout à l'heure le député de Laporte et porte-parole officiel de l'opposition en la matière, l'opposition va voter en faveur du projet de loi n° 3. Ça fait pas mal d'années qu'un certain nombre de députés qui étaient ministériels avant, qui sont aujourd'hui des députés de l'opposition, sont préoccupés par les déficits subséquents. Il y a des choses parfois amusantes lorsqu'on regarde les très vieux budgets. Si vous regardez les très vieux budgets, il y a toujours un déficit. Et on projette sur quatre à cinq ans et là on revient à une situation d'équilibre financier. Et, année après année, ceci ne se réalisait pas, M. le Président.

Le projet de loi n° 3, essentiellement, va imposer au gouvernement une politique de réduction, voire d'élimination des déficits. Je ne referai pas ici le cheminement du 3,2 %, 2,2 %, 1,2 %, c'est-à-dire une diminution progressive du déficit pour en arriver à un déficit zéro. Alors, M. le Président, je vais d'abord parler du projet de loi. Après, je m'arrêterai aussi sur l'importance et pourquoi on a besoin à l'heure actuelle, du moins pendant une certaine période de temps, d'en arriver à un déficit zéro. Ou je peux l'aborder tout de suite, si vous voulez.

C'est que le poids relatif de la dette par rapport à ce qu'on appelle, dans notre langage, le produit intérieur brut ou, si vous voulez, l'activité économique, devient absolument préoccupant, ce qui nous amène à devoir ne plus augmenter cette dette, parce qu'il faut bien comprendre que le déficit, c'est l'augmentation année après année de la dette.

Je voudrais aborder dans le peu de temps qui m'est imparti, M. le Président, deux préoccupations que nous continuons d'avoir avec le projet de loi. La première préoccupation, ce sont les conventions comptables. Le gouvernement pourrait changer de convention comptable année après année, ce qui pourrait faire en sorte que les déficits disparaîtraient suite à des changements dans les écritures comptables. On peut penser, comme l'a rappelé d'ailleurs le député de Laporte, à des manières différentes d'amortir les dépenses d'immobilisation, la manière dont on amortira les dépenses d'immobilisation, tout en étant conscient que les conventions comptables vont être rendues publiques. Il n'est pas question de cachettes là-dedans. Mais il devient beaucoup plus difficile, si le gouvernement change les conventions comptables, de pouvoir s'assurer qu'il n'y a pas eu de déficit, en particulier si on compare les processus de récupération.

Alors, M. le Président, nous avons demandé, les parlementaires de l'opposition, à ce qu'on s'entende que, dans la période de résorption du déficit, on maintienne les mêmes conventions comptables. Le gouvernement n'a pas donné suite à notre demande pour plusieurs raisons, pour se garder de la flexibilité. Il a néanmoins introduit un amendement ou, du moins... disant que les conventions comptables vont être explicitées dans les états financiers et que les effets des changements éventuels de convention comptable pourront être analysés.

Je dois encore maintenir que, de notre côté, nous aurions préféré que nous nous en tenions au maintien des mêmes conventions comptables sur la période de résorption du déficit, et il y a eu une amélioration que l'amendement du député de Laporte a apportée au projet de loi. Mais, dans l'ensemble, on votera quand même, malgré ce point-là, en faveur du projet de loi.

Deuxième élément qui peut être inquiétant, ce sont les montants de dépassement. Alors, je vais vous expliquer. Pour vous qui êtes familiers avec le projet de loi, ce n'est pas nouveau, mais, dans le projet de loi, on explicite grossièrement que, si le gouvernement fait un dépassement, c'est-à-dire un déficit sur une année donnée, il doit, dans les années subséquentes, récupérer ce montant. Il y a des critères qui sont fixés en dollars, c'est-à-dire on parle des conditions pour un dépassement de 1 000 000 000 $ et d'autres conditions pour un dépassement pouvant aller jusqu'à 5 000 000 000 $. Nous ne contestons en aucune manière l'ampleur des montants qui sont là, comme l'a expliqué avec justesse d'ailleurs le ministre des Finances. Il est possible qu'en période de ralentissement économique on soit amené à devoir faire des dépassements de manière à pouvoir agir sur la relance.

(20 h 10)

J'aurais personnellement préféré, puisque cette loi est là pour durer, qu'au lieu de mesurer les dépassements ou les conditions dans lesquelles on doit se soumettre à des mesures de récupération, on les établisse en pourcentage du PIB plutôt qu'en montants fixes. Il est clair que, dans dix ans, lorsque la loi continuera à s'appliquer, le 1 000 000 000 $ de 1996 ne sera peut-être pas le 1 000 000 000 $ de 2005 ou de 2010. Donc, là il y a peut-être des contraintes qui seront des contraintes trop rigides ou assez rigides dans lesquelles le gouvernement serait amené à se poser...

Il faut bien rappeler que d'un autre côté nous sommes en faveur de cette mesure pour éviter les déficits, éviter les dépassements budgétaires, pour avoir de la part de nos dirigeants une plus grande rigueur dans la gestion des fonds publics. Il est clair que cette loi n'a pas beaucoup de dents si vous ne l'appliquez pas. Je fais partie des gens qui déjà ont vu des lois comme la Loi sur l'imputabilité, qui n'est pas complètement appliquée par cette Assemblée et sur laquelle, bien des fois, on s'est posé la question quant à la manière dont elle pouvait être appliquée. On me dit: Bien, simplement parce qu'elle existe, elle doit être appliquée. Mais c'était à peu près tout ce qu'on pouvait me répondre.

Donc, dans ce cadre-là, M. le Président, une certaine inquiétude quant à l'absence, si on peut dire, de dents à l'intérieur de la loi, quoique je ne voudrais pas non plus qu'on tombe dans le côté un peu folklorique où on pénaliserait directement sur leurs avoirs les ministres des Finances qui seraient amenés à faire des dépassements comme d'aucuns l'ont proposé. C'est un côté folklorique que nous n'avons en aucune manière voulu suivre, mais il y aurait peut-être eu une manière de prévoir une plus grande rigidité à l'intérieur du projet de loi.

Vous me disiez que mon temps est en train de se terminer, M. le Président. Je voudrais quand même vous rappeler la position de l'opposition envers toute cette question du déficit. Oui, nous sommes en faveur des lois antidéficit, oui, nous sommes en faveur de l'élimination du déficit, mais nous voulions vous rappeler qu'il y a deux manières d'éliminer un déficit: il y a une manière, bien sûr, en diminuant les dépenses de l'État, en faisant les coupures, coupures sauvages d'ailleurs, que le gouvernement est en train de faire; mais il y a une autre manière, laquelle nous pensons éminemment plus importante, qui serait celle de stimuler l'économie, d'augmenter le nombre de personnes qui travaillent de manière à augmenter les rentrées fiscales de l'État. Ça aurait été probablement celle que nous aurions préféré que le gouvernement choisisse; ça aurait certainement été celle que nous aurions choisie si on avait été au pouvoir.

Malheureusement, ce gouvernement s'enlise, si je peux dire. Nous aurions fait, d'ailleurs, ce débat-là au moment du dépôt du budget dans une stratégie de coupures et de diminution des dépenses au lieu d'une stratégie de stimulation de l'économie pour augmenter les rentrées fiscales, M. le Président, ce qui aurait été, de la part des parlementaires de l'opposition, le choix que nous aurions préféré, et de loin, pour en arriver à un équilibre budgétaire.

En conclusion, si vous me permettez, l'opposition va donc voter en faveur du projet de loi n° 3 sur l'élimination du déficit parce que nous croyons qu'il est important d'en arriver le plus rapidement possible à l'équilibre budgétaire, compte tenu du poids énorme de la dette sur l'économie québécoise. Nous avons quelques réserves quant à l'absence, dans ce projet de loi, d'indications quant aux conventions comptables qui vont être utilisées et quant aux chiffres qui sont donnés en dollars de 1996 et que nous aurions préféré voir en pourcentage du PIB.

Pour ces raisons-là, M. le Président, nous avions quelques réserves face au projet de loi n° 3, mais nous allons quand même voter en faveur du projet de loi n° 3 parce que nous sommes absolument commis, de ce côté-ci de la Chambre, à la réduction du déficit. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Verdun. Y a-t-il d'autres interventions? Alors, M. le député de Brome-Missisquoi et leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Nous en sommes rendus à l'étape de l'adoption du projet de loi n° 3, Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire. Comme vous pouvez le soupçonner, lorsque le principe d'un tel projet de loi est soumis à la députation de l'Assemblée nationale du Québec dans le contexte de l'année 1996, dans le contexte où les autres provinces canadiennes ont déjà, pour la majorité des cas, complété ce travail et où les provinces récalcitrantes ont entrepris le virage avant le Québec, lorsque nous sommes le wagon de queue de ceux qui entreprennent ce virage, vous ne serez pas surpris que c'est unanimement que les députés de l'Assemblée nationale ont voté pour l'adoption du principe du projet de loi.

Comme le député de Verdun l'a mentionné, comme son collègue de Laporte quelques minutes avant, ce projet de loi, sur le plan de ses notes explicatives comme telles, suscite encore quelques inquiétudes. Pas quant à son premier paragraphe; tout le monde va être d'accord des deux côtés de la Chambre sur le libellé du premier paragraphe, qui se lit comme suit: «Ce projet de loi donne suite au Discours sur le budget du ministre des Finances du 9 mai 1995. Il prévoit l'élimination du déficit budgétaire du gouvernement dès l'année financière 1999-2000 – il n'y a personne qui va s'inscrire contre cet objectif – et le maintien de l'équilibre budgétaire au cours des années subséquentes – donc, équilibre budgétaire pour les années après l'an 2000. Il prévoit également les montants que le déficit budgétaire du gouvernement ne pourra excéder pour les trois prochaines années financières.» Qu'est-ce qui va arriver d'ici à l'an 2000? L'an 2000: le déficit zéro. Et, par la suite, quelles sont les contraintes? Je pense que, sur ces objectifs, tout le monde concourt.

Là où ça se complique, parce que, si ça ne se compliquait pas, ce serait facile... Mais, lorsqu'on fait face à des ministres des Finances – et on le verra tantôt – du gouvernement du Parti québécois, ça se complique toujours, et les mots ne veulent plus dire dans la réalité ce qu'ils veulent dire dans le projet de loi. D'ailleurs, de façon à ce que les gens ne puissent prétendre être pris par surprise dans l'avenir, déjà l'actuel ministre des Finances se garde des portes de sortie. Ce qu'il nous dit, c'est que ce n'est peut-être pas vrai, le déficit zéro en l'an 2000. Ce qu'il nous dit, c'est que ce n'est probablement pas vrai ce qui va se passer d'ici l'an 2000. Puis ce qu'il nous dit, ou ce qu'on peut percevoir, c'est qu'après l'an 2000 il ne le sait pas, mais il fallait qu'il écrive quelque chose dans le projet de loi.

Le paragraphe qui lui donne son échappatoire, M. le Président, est le suivant, et je le cite au texte: «De plus, le projet de loi prévoit que le gouvernement peut encourir des dépassements – déjà, on dit: Objectif zéro, mais on peut encourir des dépassements – pour une période d'au plus un an si, en raison d'une catastrophe ayant un impact majeur sur le budget, d'une détérioration importante des conditions économiques ou d'une modification dans les programmes de transferts fédéraux au gouvernement, ce dernier prévoit encourir ou constate un dépassement d'au moins 1 000 000 000 $ de dollars. Le gouvernement doit alors résorber ce dépassement sur une période maximale de cinq ans.»

M. le Président, il fallait simplement, là, écouter la conférence de presse qu'a tenue aujourd'hui le premier ministre pour se rendre compte que déjà il donnait prétexte à son ministre des Finances de dépasser les objectifs qu'il s'était fixés. En conférence de presse aujourd'hui, accompagné du leader du gouvernement, faisant le bilan de la session, le premier ministre a décrit la situation que l'on vit présentement au Québec à tous les niveaux comme étant une situation de crise. Le ministre des Finances peut invoquer, le premier ministre l'ayant dit, que, cette crise ayant été invoquée, on n'est plus tenu au déficit zéro, on n'est plus tenu aux contraintes qu'on s'était fixées au cours des trois années qui précèdent l'an 2000. Puis les autres, comme on l'a déjà mentionné, M. le Président, on les met de côté, on les ignore.

Non seulement le projet de loi ne contient pas les balises nécessaires pour rassurer la population, non seulement les échappatoires sont déjà inscrites dans le projet de loi, il y a plus. Il ne se passe pas une période des questions à l'Assemblée nationale du Québec, une semaine dans les grands journaux, sans que d'un côté comme de l'autre de la Chambre on ne soit pas d'accord sur l'interprétation qu'on doit donner aux chiffres. Chacun s'accuse d'avoir le plus important déficit. Moi, j'ai entendu, de l'autre côté, des accusations totalement injustifiées, totalement non fondées, de la part du ministre des Finances à l'endroit de l'ancien ministre des Finances, le député de Laporte, à l'effet que c'est le député de Laporte qui aurait commis, en 1994, le plus important déficit de l'histoire du Québec. De l'autre côté, j'ai entendu le député de Laporte dire que ce n'était pas vrai. Je l'ai même lu dans les journaux, M. le Président. C'était écrit, là, noir sur blanc – on pouvait vérifier les chiffres – que c'était le gouvernement du Parti québécois qui, à l'époque où l'actuel ministre des Finances en faisait partie, avait commis le plus important déficit de l'histoire du Québec.

M. le Président, nous allons tenter, là, dans les quelques minutes qui nous sont accordées, de voir qui dit vrai. Ils ne peuvent pas dire vrai tous les deux. Il y en a un des deux qui joue avec la vérité. On va s'en référer à une source neutre, un analyste financier, un chroniqueur bien connu. Les gens peuvent l'entendre, l'écouter tous les matins sur un réseau de télévision, il est publié régulièrement dans un grand quotidien qui s'appelle La Presse et il a suivi ça attentivement. Il a reçu les lettres, les documents que le député de Laporte lui a envoyés puis il a reçu également les documents que le ministre des Finances lui a envoyés. Lui, il a tenté d'analyser ça avec le plus de transparence, le plus de neutralité, et voici ce qu'il nous disait le mardi 17 décembre dernier, M. le Président. Ce n'est pas tellement compliqué, je le cite au texte.

«La crise des finances publiques n'attise certainement pas les passions autant que le sport ou la politique – il n'est pas question, là, de débat politique ou d'investissement dans le Centre Molson, ce n'est pas aussi caricatural, M. le Président – mais il se déroule présentement un débat intéressant entre le député libéral André Bourbeau – moi, je vais dire le député de Laporte pour qu'on se comprenne bien – qui fut ministre des Finances pendant quelques mois en 1994, le temps de déposer un budget, et l'actuel ministre des Finances...» Il le nomme, je ne le nommerai pas, mais tout le monde le connaît.

(20 h 20)

«La semaine dernière, vous avez peut-être remarqué, dans les pages d'opinion de La Presse , la longue démonstration où l'ex-ministre – le député de Laporte – accuse ni plus ni moins le gouvernement péquiste d'avoir trafiqué les chiffres de son budget de 1994. Il y a trois ou quatre ans de cela, cette lettre aurait tout au plus servi à alimenter une controverse entre spécialistes, laissant le grand public complètement indifférent. C'est beaucoup moins vrai aujourd'hui – je le cite encore – il a reçu plusieurs appels de lecteurs qui veulent en savoir plus.»

Nous aussi, M. le Président, on veut en savoir plus. Et quel meilleur contexte qu'une loi antidéficit pour voir qui, des deux côtés de la Chambre, entre deux personnes qui ont occupé la même fonction, dit la vérité aux Québécois et aux Québécoises. Je continue à citer au texte le journaliste: «Les documents budgétaires...» Excusez, je vais le reprendre un peu plus tôt dans l'article. Je vois le ministre des Finances qui rit. Peut-être qu'il va rire un petit peu moins lorsqu'il va entendre le texte. Pas le texte du député de Laporte, pas le texte du député de Brome-Missisquoi, pas le texte d'un député libéral, le texte d'un analyste financier, M. le Président.

Des voix: Bravo!

M. Paradis: «Revoyons donc quelques faits», nous dit M. Claude Piché. Deux minutes, M. le Président? Je vais être obligé de sauter des paragraphes, compte tenu du temps qui m'est imparti, et d'en arriver au jugement final de Claude Piché. Qui entre les deux disait la vérité? Le long texte du député de Laporte ou le long texte du ministre des Finances? Qui est le plus crédible en matière de finances publiques?» Et je le lis: Après avoir analysé les conditions qui ont prévalu à l'époque où le ministre des Finances faisait partie du gouvernement péquiste et à l'époque où le député de Laporte a été ministre des Finances, après avoir tout analysé, voici comment il conclut, pour savoir qui dit la vérité entre les deux: «Dans ces conditions, le déficit du budget Bourbeau n'est pas, et de loin, le pire de l'histoire. Par rapport au produit intérieur brut, c'est-à-dire la taille de l'économique québécoise, le déficit le plus important revient à Jacques Parizeau.»

Dans quelles proportions y a-t-il différence entre le championnat péquiste et l'humble aspirant champion qui n'a jamais pu déclasser les péquistes dans le domaine? Le budget Bourbeau représente 3,5 % du PIB; le budget Parizeau de 1980-1981 se solde par un déficit représentant 4,6 % du produit intérieur brut. Ça, ce sont des chiffres neutres, ce sont des chiffres officiels, ce sont des chiffres qui tiennent compte du contexte économique, de la conjoncture, de l'inflation. Ça, ce sont les vrais chiffres.

Donc, à l'avenir, en cette Chambre, lorsque les députés péquistes voudront, de l'autre côté, dire la vérité, ils n'auront qu'à s'en référer à ce chroniqueur qui se fera un plaisir de les commenter le lendemain matin à la TV et de les reproduire dans le journal La Presse . Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Brome-Missisquoi et leader de l'opposition. Nous cédons maintenant la parole au député d'Orford. M. le député.

M. Benoit: M. le Président, je voudrais juste ajouter un mot sur le projet de loi n° 3.

Le Vice-Président (M. Pinard): Attendez, M. le député d'Orford, question de règlement. M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Est-ce que, de consentement, le leader pourrait déposer son texte pour que je puisse, dans ma réplique, lire les bouts qu'il n'a pas lus et qui lui donnent la réplique?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président, je m'en excuse, là, mais j'ai pris pour acquis que le ministère des Finances était abonné à La Presse .

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député d'Orford, nous vous écoutons.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, merci, M. le Président. Je voudrais ajouter à ce qu'a dit notre leader, pendant quelques minutes, sur le projet de loi n° 3, Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire, M. le Président.

On oublie trop souvent qu'au-delà du déficit, si ce déficit s'est bâti année après année depuis le milieu de la Révolution tranquille, les citoyens du Québec travaillent jusqu'au 21 juin pour payer des impôts de tout acabit et des taxes de tout acabit au Québec, que ce soit municipal, provincial, fédéral. Alors, jusqu'au 21 juin, les citoyens moyens du Québec paient des taxes et, à partir du 21 juin, les sommes qu'ils gagnent avec ça, ils pourront les garder pour payer leur coût de vie. Et, à cet égard-là, le Québec, en ce moment, est un des États les plus taxés en terre d'Amérique, et on ne peut que souscrire à un projet de loi qui va effectivement essayer de régler un bout du déficit. Parce que nous savons qu'une très grande partie de nos avoirs, année après année, vont à payer ces déficits-là.

Mais, pour aller dans le sens de ce que disait notre leader, on oublie trop souvent que, en 1985, quand M. Bourassa est arrivé au pouvoir, il y avait un différentiel avec l'Ontario de plus de 15 % des impôts des corporations et des individus. En d'autres mots, après neuf ans du règne péquiste, les citoyens du Québec payaient 15 % de plus d'impôts et de taxes de tout acabit que s'ils avaient vécu en Ontario. Et il prendra à M. Bourassa un certain nombre d'années, avec Gérard D. Levesque, M. Johnson, il prendra un certain nombre d'années à ramener cet équilibre entre ce que paient les gens en Ontario et ce que paie le citoyen moyen du Québec.

Et on oublie aussi trop souvent, M. le Président, qu'en l'an 1986 le déficit du Québec est descendu jusqu'à 1 300 000 000 $, de mémoire. Alors, un des plus bas déficits dans l'histoire du Québec a été fait sous le Parti libéral du Québec, M. le Président. Il y a eu un effort très important de fait par l'équipe de M. Bourassa, par l'équipe de Gérard D. Levesque, par l'équipe de Daniel Johnson pour, d'abord, baisser les impôts, donner un peu d'oxygène aux citoyens du Québec et baisser leurs impôts quotidiens.

Et on est après revivre, M. le Président, en ce moment... il faut voir la liste des nouveaux impôts, des nouvelles taxes de tout acabit. Il n'y a pas de limite, hein. Dans la nuit d'hier soir, quand nous avons passé la nuit debout, certains députés ont fait part de cette magnifique machine, qui a une main dans chacune des poches des citoyens, M. le Président, à tous les jours; qui va aller chercher plus de 1 000 000 000 $ d'impôts dans les trois prochaines années: 3 000 000 $ par jour, M. le Président.

Et, vous savez, s'il y a quelque chose sur lequel au sommet socioéconomique les citoyens se sont entendus, ça a été de baisser les taxes, ça a été de baisser les impôts. Parce qu'à perdre 200 emplois par jour comme on perd au Québec, une des façons d'arrêter l'hémorragie, c'est effectivement d'arrêter les déficits, d'arrêter les taxes de tout acabit. Et on les appelle de toutes sortes de façons, quand on parle avec le PQ: que ce soit des entrées, pour rentrer dans les parcs, à 2 $; que ce soit le 4 $ pour les pneus; que ce soit les nouveaux coûts, à chaque fois que la police provinciale va vous arrêter, sur votre ticket; que ce soit sur les pilules, M. le Président. À tous les jours, il n'y a pas de limite à cette magnifique machine qui pige dans vos poches quelque part pour venir chercher une autre piastre, M. le Président.

(20 h 30)

Alors qu'en Ontario qu'est-ce qu'on fait? On est après baisser les impôts des citoyens. Oui, M. le Président, en Ontario, on est après baisser les impôts des citoyens pour leur donner un peu le goût de vivre, un peu le goût de dépenser, un peu le goût de renaître et de faire renaître leur économie. Ce n'est pas ça qu'on connaît ici, au Québec, M. le Président. C'est des impôts et des taxes de tout acabit, accélérés.

Alors, quand le ministre des Finances du Québec se targue des déficits, je lui rappelle que, quand nous avons pris le pouvoir en 1985, il y avait des différentiels extraordinaires entre le Québec et l'Ontario, et ils sont après recréer ces différentiels-là entre le Québec et l'Ontario. Et ne vous demandez pas pourquoi tant de gens, en ce moment, regardent la possibilité d'investir au Nouveau-Brunswick et en Ontario. C'est malheureux, on le déplore de ce côté-ci de la Chambre, mais c'est ce différentiel entre l'Ontario et le Québec qui nous fait et qui nous fera si mal.

Or, j'arrête ici, M. le Président, pour rappeler que, peu importe comment on voudra dire que le règne libéral a été mauvais, ce n'est point vrai. Nous avons baissé les impôts, nous avons baissé le déficit et nous avons connu un des déficits les moins élevés dans l'histoire du Québec contemporain. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Orford. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du projet de loi n° 3? Alors, M. le ministre des Finances, vous avez droit à une réplique de 20 minutes.


M. Bernard Landry (réplique)

M. Landry (Verchères): Si ce n'était de l'intervention du leader, qui peut évoluer avec une certaine aisance dans le code de nos règlements, mais qui visiblement a une connaissance limitée des finances publiques...

Une voix: Ah!

M. Landry (Verchères): ...je ne ferais pas véritablement de réplique et je n'en ferai pas non plus une, puisque sur l'essentiel, comme l'ont exprimé les orateurs plus compétents qui avaient précédé le leader, sur le fond des choses, nous nous entendons. Mais je ne peux pas, par ailleurs, ne pas relever certains propos du leader qui d'ailleurs m'a beaucoup étonné parce qu'il a utilisé un texte qui est supposé, soi-disant, arbitrer entre le député de Laporte et moi. Ça m'étonne que le leader du député de Laporte cherche à arbitrer entre lui et moi alors que, normalement, il devrait être de son côté. Mais ce sont des choses qui arrivent.

Par ailleurs, je comprends pourquoi le leader n'a pas voulu déposer le texte et qu'il ne l'a pas lu non plus en entier. Et ce n'est pas très drôle pour un leader, ce n'est pas dans la nature d'un leader de ne pas dire la vérité. J'en ai connu qui la disent. S'il l'avait lu jusqu'au bout, le même texte qu'il a cité il y a quelques minutes dit: «Le raisonnement du ministre Landry est plus solide.» Il le compare au raisonnement du député de Laporte.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): «Il rappelle qu'il est hautement téméraire, en matière de finances publiques, d'extrapoler les résultats d'un exercice complet à partir des résultats des six premiers mois.» Et, un peu plus loin, toujours parlant du député de Laporte, il dit: «En revanche, il est clair que l'ex-ministre est mal placé pour parler de tripotage; en gonflant artificiellement ses revenus, il a effectivement refilé une patate chaude à son successeur.» Et c'est que qu'on dit depuis des semaines.

C'est dommage que le leader, dans un débat qui était beaucoup plus porté sur le fond et beaucoup plus sérieux, n'ait pas renseigné intégralement l'Assemblée, mais surtout ait mis dans l'embarras notre ami le député de Laporte qui, lui, dans son intervention, avait quand même dit des choses très sensées en matière de finances publiques. Et je les rappelle, ces choses qui font consensus et je pense que c'est à ça que la population s'intéresse, particulièrement en cette fin d'année et à l'aube de l'année nouvelle: il est temps que le Québec, comme société, chemine vers des finances publiques équilibrées.

Il est intéressant de voir que, dans le dernier budget de mon prédécesseur comme dans la campagne électorale menée par l'opposition officielle d'aujourd'hui, une convergence sur la nécessité d'équilibrer les finances publiques se retrouve. C'est rare, dans cette Chambre, que, sur des questions même majeures et fondamentales, nous soyons d'accord. Ce n'est pas absolument exclu; c'est rare, comme je l'ai dit. Nous sommes en face d'une de ces occasions rares de dire à la population du Québec, toutes tendances politiques confondues: Il est temps de marcher vers le déficit zéro.

Et de cela je suis reconnaissant à l'opposition officielle, car, dans ses propos substantiels, la chose était claire: l'objectif est accepté, la séquence est acceptée. Et la séquence, je ne dis pas qu'il faut l'enseigner jusque dans les garderies et les maternelles, mais il faut au moins que tous les enfants qui fréquentent le secondaire, les collèges et les universités la connaissent – non, mais, dans les garderies, ça pourrait faire une comptine: 3,2, 2,2, 1,2, zéro.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Mais on ne va pas commencer ça. On ne va pas commencer à imposer des choses comme ça à nos petits-enfants, surtout quand on sait qu'ils auront déjà l'âge de raison, seront mariés et auront des enfants eux-mêmes et que notre déficit ne sera pas encore payé. C'est ça aussi, la triste réalité, car j'ai bien expliqué, M. le Président, que, même quand le gouvernement du Québec sera à déficit zéro, nous n'aurons pas encore commencé à rembourser la dette cumulative de 75 000 000 000 $. Et la seule façon de rembourser une dette, c'est d'avoir des surplus d'exploitation ou de compter sur l'inflation. Or, fort heureusement, on n'est plus aux périodes d'inflation galopante qui effaçaient les dettes automatiquement et permettaient littéralement au gouvernement de voler les contribuables. Par conséquent, si l'on veut que la dette diminue à un bon rythme, il faudra de temps à autre, suivant l'introduction keynésienne que nous avons faite à notre débat, faire des surplus et les consacrer au repaiement de cette dette.

Alors, en terminant plus, encore une fois, ces conclusions de fin de débat que cette réplique, je voudrais rappeler à ceux et celles – et c'est bien qu'il y ait un débat dans notre société – qui contestent la nécessité du déficit zéro... Il y en a qui la contestent, et des gens très honorables et très compétents. Je voudrais leur rappeler qu'ils forment quand même une infime minorité avec tout ce que cela implique. Ça ne veut pas dire qu'une infime minorité a tort, mais ça veut dire, au moins...

Une voix: Ça part mal.

M. Landry (Verchères): Exactement. Le député dit que ça part mal. C'est vrai. Ça ne veut pas dire qu'une infime minorité a tort, mais, quand le consensus du Parti libéral du Québec et du Parti québécois dans cette Assemblée est tel, il y a au moins, pour ceux qui défendent la thèse inverse, une occasion de réfléchir. Je pense que c'est ce à quoi ils doivent s'engager dans les semaines et dans les mois qui viennent, et réfléchir non pas en termes accessoires, en essayant de compliquer le débat pour que seuls les spécialistes puissent le suivre, mais en termes réalistes et concrets.

La mathématique des finances publiques, on peut la rendre totalement incompréhensible à l'ensemble de la population; on peut aussi, dans les moments dramatiques comme celui que nous vivons ce soir d'une unanimité sur les grandes questions entre l'opposition et le gouvernement, la simplifier à l'extrême et la rendre limpide. Ce qui est limpide, c'est que nous sommes trop endettés, que notre dette cumulative est trop lourde, que la seule façon qu'elle arrête d'augmenter, c'est d'aller vers le déficit zéro en 1999-2000 et que la seule façon de la réduire par la suite sera, de temps à autre et le plus rapidement possible, de faire des surplus.

Alors, j'oublie tout ce qui a pu, de façon superficielle, entacher le sérieux de notre débat de ce soir et je me concentre sur le fond des choses. Je pense que le fond des choses, il est bien compris des deux côtés de la Chambre et, s'il est bien compris des deux côtés de la Chambre, il sera bien compris dans la société québécoise qui vivra suivant les principes exprimés dans ce projet de loi pour son plus grand bien.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Finances. Alors, les interventions sur l'adoption du projet de loi n° 3 étant complétées, le projet de loi n° 3, Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Vote nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, que l'on appelle les députés. Et nous allons suspendre les travaux quelques instants.

(20 h 40 – 20 h 48)

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Nous allons poursuivre les affaires du jour. Nous en étions à l'article 29 de notre feuilleton, soit à l'adoption du projet de loi n° 3, Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire.


Mise aux voix

Que les députés qui sont en faveur de l'adoption du projet de loi n° 3, Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire, veuillent bien se lever.

(20 h 50)

Le Secrétaire adjoint: M. Landry (Verchères), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Garon (Lévis), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Gautrin (Verdun), M. Lefebvre (Frontenac), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Fournier (Châteauguay), M. Charbonneau (Bourassa), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Laporte (Outremont), Mme Vaive (Chapleau), M. Kelley (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des députés qui s'abstiennent? Un instant, M. le secrétaire général. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Est-ce que vous voudriez, avec le consentement du gouvernement, reconnaître le député de Shefford qui vote comme les autres, en faveur?

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, avec le consentement évidemment pour accueillir aussi le vote du député de Drummond.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire général: Pour:75

Contre:0

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je déclare donc adopté le projet de loi n° 3, Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 40 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 60


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 40 de notre feuilleton, M. le ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi n° 60, Loi modifiant la Loi sur les assurances. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi n° 60? M. le ministre des Finances, avant de vous céder la parole, nous allons permettre à nos collègues de quitter cette enceinte pour se rendre à leurs travaux en commission parlementaire. Alors, si vous voulez le faire le plus rapidement possible, s'il vous plaît. Ceux qui ont des travaux en commission parlementaire, si vous désirez quitter immédiatement afin de permettre au ministre des Finances de bien vouloir commencer son allocution. Je vous remercie infiniment.

M. le ministre des Finances.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, le projet de loi n° 60 que nous allons étudier maintenant est un projet d'allégement législatif et un projet de déréglementation, si on peut dire. Ce n'est pas un projet qui réforme le domaine des assurances en profondeur; il enlève certains irritants dans le fonctionnement quotidien des assureurs. Il assouplit donc certaines règles touchant l'administration des assureurs soit dans leur vie corporative, soit dans la gestion de leurs placements. Aussi, en harmonie avec le rôle et les responsabilités de l'Inspecteur général des finances, le projet accorde à certains professionnels, vérificateurs externes et surtout, dans ce cas-ci, les actuaires responsables de l'évaluation des provisions mathématiques, plus de responsabilités et de moyens d'action. La plupart des modifications sont d'ailleurs demandées par les assureurs.

Je vous ferai grâce de l'énumération de toutes les modifications de forme ou d'harmonisation de langage avec le nouveau Code civil; cela va de soi, c'est de routine. Je me permettrai simplement d'énumérer les principales modifications de fond, lesquelles peuvent paraître pour certains anodines, mais, dans le quotidien, vont simplifier considérablement le déroulement des opérations de bien des assureurs.

À l'égard, en particulier, des sociétés mutuelles d'assurance, le projet introduit plusieurs changements qui vont permettre à ces assureurs d'améliorer leur productivité et d'accroître encore davantage l'excellent service qu'ils offrent déjà à leurs membres. On parle ici, M. le Président, de 37 sociétés mutuelles d'assurance, toutes regroupées au sein d'une même fédération Promutuel. Pour les gens qui connaissent bien le monde rural et, en particulier, ceux qui ont mon âge, là, c'était l'assurance de paroisse autrefois; c'était la mutualité, une mutualité bien exercée et qui a fini par se regrouper, de telle sorte qu'une fois regroupées, ce qui était autrefois les assurances de paroisse, les mutuelles d'aujourd'hui constituent le cinquième assureur en importance au Québec en termes de part de marché. Donc, ce n'est pas rien.

Le projet de loi que nous étudions élimine pour ces assureurs l'obligation de détenir une part sociale de qualification pour pouvoir devenir membres et bénéficier des couvertures d'assurance qu'offrent ces sociétés mutuelles. Le projet soumet ces mutuelles aussi aux mêmes règles de placement que les autres assureurs, à l'exception des placements en filiale qui sont réservés à leur fédération.

À l'égard des règles de placement applicables à l'ensemble des assureurs, le projet de loi n° 60 corrige différentes anomalies. Premièrement, le projet de loi précise que les limites établies en matière de placement doivent être prises en compte au moment où le placement est effectué, ce qui évidemment enlève certaines absurdités et rigidités trop grandes de l'ancienne loi.

À l'égard des placements garantis par les gouvernements, le projet prévoit qu'un assureur ne sera plus restreint à une limite de 15 % de la valeur comptable de son actif lorsqu'il investit dans des titres garantis par un gouvernement, mais pourra acquérir de tels titres selon les normes applicables au gouvernement qui les garantit.

À l'égard de la surveillance de la solvabilité des assureurs, le projet de loi introduit de nouvelles dispositions relatives à la nomination, à la démission et à la révocation de l'actuaire d'un assureur. Il impose à l'actuaire la préparation annuelle d'un rapport qui établit et qui présente les provisions et les réserves qu'il estime appropriées.

Ce projet de loi n'a pas pour but de substituer l'Inspecteur général à l'Institut canadien des actuaires. Cet organisme a le mandat de développer des normes professionnelles et il s'en acquitte à notre satisfaction. Les propres actuaires de l'Inspecteur général participent d'ailleurs à l'élaboration des normes avec leurs autres collègues soit à titre de membres de l'Institut canadien des actuaires, soit à titre de représentants de l'Inspecteur général sur différents comités de travail de l'Institut. Donc, ce n'est pas de bouleverser ces règles qu'il s'agit, bien au contraire.

Donc, nous avons devant nous un projet aux apparences techniques et, je le redis encore une fois, aux apparences anodines, mais qui vise un secteur important en volume, important en nombre et important par sa formule aussi qui est la mutualité en assurance et qui fait partie des traditions québécoises. Nous avons étudié un projet sur la coopération ce soir même qui s'inscrivait évidemment dans une grande tradition québécoise. La mutualité en est une autre. Elle a eu un succès moins spectaculaire, moins voyant parce que son champ d'action était un peu limité, mais c'est aussi un des beaux traits caractéristiques de notre peuple que de mettre en commun ses efforts pour ses intérêts économiques, sa sécurité et la protection de son bien-être matériel.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Finances. Nous allons maintenant céder la parole au député de Laporte et critique de l'opposition officielle. M. le député.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Nous voilà donc au stade de l'adoption de la Loi modifiant la Loi sur les assurances. Ce projet de loi modifie principalement trois chapitres de la Loi sur les assurances, soit celui des sociétés mutuelles d'assurance, celui des placements et finalement celui des livres, des comptes et des rapports.

(21 heures)

D'abord, le chapitre sur les sociétés mutuelles d'assurance est modifié par les articles 3 à 20 de ce nouveau projet de loi. La principale modification, c'est-à-dire les articles 6 à 17, touche les conditions pour devenir membre de la société. Dorénavant, une personne n'aura qu'à souscrire un contrat d'assurance auprès de la société pour en devenir membre. Il ne sera plus nécessaire de faire une demande d'admission ou de souscrire et de payer des parts sociales de qualification.

Aussi, ce projet de loi modernise les règles relatives au nom qu'une société mutuelle d'assurance peut utiliser en lui rendant applicables celles qui sont déjà prévues au Code civil du Québec. En d'autres mots, on abroge l'article 93.28 de la Loi sur les assurances qui se lit comme suit: «Une société mutuelle d'assurance ne peut, dans le cours de ses opérations, s'identifier sous un autre nom que sa raison sociale.» Il semble donc que l'abrogation de l'article 93.28 soit principalement un exercice de nettoyage législatif. C'est une mesure de simplification qui permettrait, par exemple, à une société qui aurait comme raison sociale, disons, la Société mutuelle d'assurance promutuelle du Saguenay d'être connue sous le nom de Promutuel Saguenay. Vous comprenez, M. le Président, que c'est beaucoup plus court. Les gains qui, à la limite, pourraient en être retirés sont quand même négligeables. Finalement, l'article 18 du projet de loi prévoit la possibilité pour les membres d'une société d'autoriser la rémunération de ses administrateurs.

Dans le chapitre des placements, l'article 38 de ce projet de loi amende la Loi sur les assurances en retirant aux sociétés mutuelles et aux corporations professionnelles leur exemption aux contraintes de placement que l'on retrouve aux articles 245 et 246. Il précise aussi que les limites établies en matière de placements doivent être prises en compte au moment où le placement est effectué.

Finalement, au chapitre des livres, des comptes et des rapports, avec l'article 58 du projet de loi, on introduit de nouvelles dispositions relatives à la nomination, la démission et la révocation de l'actuaire d'un assureur et aux fonctions qui lui sont conférées. Concernant celles-ci, le projet de loi édicte que l'actuaire voit à la préparation annuelle d'un rapport qui établit et qui présente les provisions et les réserves qu'il estime appropriées et d'une étude sur la situation financière de l'assureur. En cours de mandat, l'actuaire doit rédiger et transmettre à l'assureur un rapport sur tout fait dont il a pris connaissance et qui est susceptible d'avoir un effet défavorable important sur la situation financière de l'assureur. Il transmet éventuellement un tel rapport à l'Inspecteur général lorsqu'une mesure de redressement appropriée n'a pas été apportée. L'Inspecteur général est aussi autorisé à requérir des études particulières sur la situation financière d'un assureur.

Pour ce qui est du reste, le projet de loi propose plusieurs modifications de concordance ou d'ordre plutôt technique, notamment pour préciser les règles applicables aux vérificateurs, celles relatives aux provisions et aux réserves et pour harmoniser les dispositions de la Loi sur les assurances avec celles du Code civil du Québec.

M. le Président, nous avons consulté, entre autres, le Bureau d'assurance du Canada, et les avis du Bureau d'assurance du Canada de même que nos propres analyses nous portent à conclure qu'il n'y a pas de raison de s'opposer à ce projet de loi, que nous approuverons donc, en conséquence. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laporte. Nous céderons maintenant la parole au député de Verdun. Alors, M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Comme l'ont rappelé les deux orateurs précédents, il s'agit d'un projet de loi à caractère relativement technique, qui va baliser le fonctionnement des mutuelles d'assurance, et, sur la majeure partie des articles, dès le départ, nous n'avions pas de problème. Je dois dire, de plus, qu'il introduit l'obligation pour les assureurs non seulement d'avoir recours régulièrement à un vérificateur, mais aussi d'avoir recours à un actuaire.

J'avais personnellement quelques réserves sur deux articles de ce projet de loi. Je vous rappelle lesquels, l'article 298.14 et l'article 298.16, qui sont de nouveaux articles qui sont introduits par l'article 58. Les réticences que j'avais étaient qu'à la lecture de ces articles l'Inspecteur général des institutions financières peut et, je vous dirai, l'Inspecteur général peut en tout temps requérir la préparation – et ça, ça ne posait pas de problème – de la façon et dans les délais qu'il indique, d'une étude portant sur la situation financière de l'assureur. Le point qui m'inquiétait était: «de la façon», c'est-à-dire la manière dont l'Inspecteur général des institutions financières donnait mandat à l'actuaire de l'assureur de faire son étude.

L'article 298.16, si vous me permettez, m'inquiétait aussi, puisqu'il portait encore sur l'actuaire, lorsqu'il disait: «L'actuaire applique les normes actuarielles généralement reconnues.» Cependant, on ajoutait: «Il doit cependant tenir compte des modifications que l'Inspecteur général peut y apporter – donc, on parle bien des normes financières – quant à l'assureur.»

J'avais des réticences et je dois dire que la lecture de ces articles continue à me poser quelques difficultés. Néanmoins, je dois reconnaître que, dans les lois de nature analogue qui sont passées soit dans les autres provinces soit dans les États américains, on trouve des dispositions de ce type-là, où c'est un pouvoir qui est donné à l'Inspecteur général des institutions financières quant aux normes actuarielles que devrait utiliser l'actuaire de l'assureur.

Il faut bien être conscient de ce que c'est que les normes actuarielles: c'est l'entente qui est faite, c'est-à-dire les choix qui sont faits par l'actuaire avant de faire l'analyse actuarielle soit de ce qu'il estime devoir être en projection, l'évolution des taux d'intérêts, l'évolution des croissances démographiques, l'évolution des tables de mortalité, l'évolution des questions touchant la croissance économique.

Alors, M. le Président, tout en ayant toujours des réticences certaines sur la rédaction de ces deux articles – comme je vous l'ai dit, ils sont calqués sur ceux qui existent dans d'autres lois – je ne pense pas qu'il y a matière pour nous à voter contre un projet de loi qui par ailleurs s'en va régler un certain nombre de problèmes dans les mutuelles d'assurance pour ces raisons.

(21 h 10)

Je dois néanmoins dire que je vais suivre, comme parlementaire, la manière dont ceci sera appliqué dans les années qui vont venir et m'assurer qu'il n'y ait pas des modifications importantes, voire abusives, des normes actuarielles sur la demande de l'Inspecteur général des institutions financières faite à l'actuaire des compagnies d'assurances qui sont nommées en fonction de 298.3 et suivants.

Alors, M. le Président, ces remarques étant faites, ça avait été le seul point qui, pour moi, avait causé quelques réticences quant au projet de loi. Le reste du projet de loi, comme l'ont rappelé et le ministre et le député de Laporte, est un projet de loi relativement technique qui s'en va baliser la manière dont les mutuelles doivent faire leurs investissements, qui s'en va baliser aussi la protection que doivent recevoir, à ce moment-là, les mutualistes quant à... et les rapports de vérification et les rapports actuariels.

M. le Président, je pense que nous allons, par ce projet de loi, bonifier et augmenter la protection éventuelle du public et nous devons voter en faveur du projet de loi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Comme il n'y a pas d'autre intervenant sur l'adoption du projet de loi n° 60... À moins que, M. le ministre, vous désiriez vous prévaloir de votre droit de réplique? Non. Alors, j'apprécierais de savoir si c'est le député de Viau ou de Notre-Dame-de-Grâce qui désire se prévaloir... Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. C'est à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de protection du consommateur que j'interviens à ce moment-ci au sujet du projet de loi n° 60, Loi modifiant la Loi sur les assurances. Il est très clair que le projet de loi n° 60 est une loi très technique, qui apporte certains changements également d'ordre technique qui touchent un chapitre de la Loi sur les assurances, principalement et uniquement celui des sociétés mutuelles d'assurance.

Il y a un élément en particulier sur lequel on peut porter certaines interrogations, je pense, et il s'agit de l'article du projet de loi n° 60 qui abroge l'article 93.28 de la Loi sur les assurances. L'article 93.28 de cette loi se lit comme suit: «Une société mutuelle d'assurance ne peut, dans le cours de ses opérations, s'identifier sous un autre nom que sa raison sociale.» Ça, c'est l'état actuel de la loi qui touche la dénomination des raisons sociales des sociétés mutuelles d'assurance.

L'abrogation de l'article 93.28 est présentée comme une mesure de simplification qui permettrait par exemple à une société qui aurait une raison sociale un peu compliquée... Beaucoup de sociétés mutuelles d'assurance, M. le Président, semble-t-il, ont des raisons sociales assez lourdes. L'exemple qui est souvent cité, sans vouloir faire un cas particulier, l'exemple qui m'a été donné est celui de la Société mutuelle d'assurance promutuelle du Saguenay. Ça, c'est le nom légal, la raison légale d'une compagnie, d'une société mutuelle d'assurance. En abrogeant l'article 93.28, on permettra à une telle société mutuelle, par exemple, d'être connue sur un nom comme Promutuel Saguenay qui, pour les fins de marketing, les fins d'annonces, peut être beaucoup plus intéressant pour une société mutuelle. Je pense que tout le monde en convient.

La question, l'interrogation que je pose est au niveau de l'élément protection du consommateur. Je vous soumets, M. le Président, peut-être pour la considération du ministre d'État aux Finances, un cas où une société mutuelle d'assurance achète un bureau de courtiers. Un bureau de courtiers qui peut, encore une fois, pour des fins hypothétiques, être le bureau de courtiers Landry, Copeman et associés, mettons. Chic comme nom, là: on traverse deux communautés linguistiques. On peut peut-être aller chercher énormément de clients avec un tel nom, surtout avec le nom reconnu d'un des deux associés et son expérience.

Admettons, M. le Président, la question hypothétique qu'une société mutuelle d'assurance achète le bureau de courtiers Landry, Copeman et associés. Mon interrogation à moi, M. le Président: Avec l'abrogation de l'article 93.28, est-ce que ça serait possible pour cette entité d'une société mutuelle de continuer à être reconnue comme Landry, Copeman et associés, ce qui laissait entendre à certains de ses clients qu'ils étaient des courtiers en assurance? Mais ils ne sont plus courtiers en assurance. Nous ne sommes plus courtiers en assurance, nous sommes devenus essentiellement des agents d'une société mutuelle d'assurance en particulier.

M. le Président, la raison sociale ou le nom sous lequel des compagnies font affaire est un élément important dans notre système de protection du consommateur. Quand un consommateur veut acheter un produit, quant à moi – et on a un système assez bien développé de protection du consommateur, surtout en ce qui concerne les annonces publicitaires, etc. – il ne faut pas qu'un consommateur soit confus d'aucune façon par une raison sociale ou un nom de compagnie qui ne reflète pas le type d'activité que cette compagnie fait.

Alors, il y a cette légère interrogation, M. le Président: Est-ce que, en abrogeant l'article 93.28, où on élimine essentiellement l'obligation légale d'une société d'assurance d'être connue sous sa raison sociale, ça peut porter à une certaine confusion dans des situations hypothétiques comme celle que j'ai soulevée? Et il y en a peut-être d'autres, M. le Président.

Et je conclus là-dessus, M. le Président. J'exprime essentiellement le voeu que cette Assemblée nationale soit assurée que, en abrogeant cet article dans la Loi sur les assurances, on ne puisse pas créer des situations qui portent à confusion parmi des consommateurs des services soit de courtiers, soit d'agents en matière d'assurance. Je crois très humblement que cette interrogation mérite une certaine clarification.

Si le ministre d'État aux Finances peut me rassurer immédiatement en me disant, par votre biais, M. le Président, que le député de Notre-Dame-de-Grâce se trompe dans cette préoccupation, c'est très clair, je serais rassuré. Ça arrive de temps en temps que votre humble serviteur se trompe dans certaines interprétations des lois techniques, aussi techniques que la loi n° 60. Si mes préoccupations ou mes interrogations ne sont pas bien fondées, je serais d'autant plus rassuré en ce qui concerne la protection des consommateurs québécois, qui va au fondement même de la confiance qu'on peut avoir comme consommateur des produits et des services au Québec. Merci, M. le Président.

(21 h 20)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Nous allons maintenant céder la parole au député de Shefford. M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 60, Loi modifiant la Loi sur les assurances. Je dois dire en partant que le projet de loi n° 60 est un projet de loi très technique et c'est pourquoi je n'ai pas l'intention de prendre tout le temps qui m'est alloué, mais, quand même, ça me fait plaisir d'intervenir à ce sujet, les assurances étant très importantes dans la vie de tous les jours de tous les citoyens et particulièrement dans la vie d'une société mutuelle. On sait que les sociétés mutuelles sont nées souvent de groupes de personnes qui se sont en fin de compte associées pour un besoin commun; souvent des groupes agricoles, comme c'est arrivé souvent dans mon comté.

Donc, le projet de loi n° 60 a pour but tout simplement la simplification de la Loi sur les assurances et de permettre aux sociétés mutuelles qui sont nées au début du siècle, qui sont maintenant des grosses boîtes au même titre que les grosses compagnies d'assurances, d'avoir les mêmes possibilités, les mêmes droits et de pouvoir acquérir les mêmes marchés.

M. le Président, le projet de loi n° 60 permet premièrement aux sociétés mutuelles, en fin de compte, de raccourcir en quelque sorte leur nom pour permettre à celles-ci d'être reconnues au même titre que les grandes compagnies. Et je pense que c'est d'autant plus important... Si on prend un comté comme le comté de Shefford, qui a vu naître des sociétés mutuelles importantes, on pense au Groupe Estrie-Richelieu, qui est présentement, dans mon comté, l'une des plus grandes sociétés d'assurance agricole. Donc, je pense que c'est important de souligner quand même, même si le projet de loi est très technique, l'avènement de ce projet de loi.

J'ai ici une note de notre aile parlementaire, M. le Président, sur laquelle je désire citer quelques mots. En passant, en parlant de notes de notre groupe parlementaire, je dois vous souligner – et je pense que ce n'est pas venu à vos oreilles – que hier on s'est fait subtiliser en commission parlementaire ce genre de notes et on se doit de dénoncer ce genre d'action de la part...

M. Gautrin: De pratique...

M. Brodeur: ...de pratique de la part des gens d'en face. On doit dénoncer, je pense, vivement ces choses. Je pense que ce n'était pas venu à vos oreilles, mais on devrait quand même, là, le soumettre à l'étude du règlement, lorsqu'on profite d'une réforme parlementaire, pour avoir quand même une pénalité contre ce genre d'action de la part – peu importe de quel côté – de parlementaires de cette Chambre.

Donc, M. le Président, je veux revenir au projet de loi n° 60. Je disais que ce projet de loi modifie principalement trois chapitres de la Loi sur les assurances, soit celui des sociétés mutuelles d'assurance, celui des placements et finalement celui des livres, comptes et rapports.

D'abord, le chapitre sur les sociétés mutuelles d'assurance est modifié par les articles 3 à 20 de ce nouveau projet de loi. La principale modification, M. le Président, concerne les articles 16 à 17, qui touchent les conditions pour devenir membre de la société. Dorénavant, une personne n'aura qu'à souscrire un contrat d'assurance auprès de la société pour devenir membre, ce qui n'était pas le cas auparavant. Il ne sera plus nécessaire de faire une demande d'admission ou de souscrire et de payer des parts sociales de qualification, ce qui fait toute une différence, ce qui est apporté dans le projet de loi n° 60, et ce qui est pour nous très recommandable. Il ne sera plus nécessaire de faire une demande d'admission, comme je vous le disais, pour souscrire dorénavant et payer des parts sociales.

Le projet de loi modernise les règles relatives au nom qu'une société mutuelle d'assurance peut utiliser en lui rendant applicables celles qui sont déjà prévues au Code civil. Donc, en clair... Puis on prend l'exemple d'une société, par exemple la Société mutuelle d'assurance promutuelle du Saguenay. Dorénavant, cette même société là, si on la prend comme exemple, pourra s'appeler tout simplement, pour faire sa promotion, faire son marketing, la Promutuel Saguenay, ce qui sera beaucoup plus facile, ce qui n'était pas permis de faire avant par ces sociétés mutuelles là, ce qui n'était pas permis de faire pour les communications pour faire leur marketing. Donc, c'est un plus. On pourra dorénavant faire promouvoir ces sociétés-là au même titre que les grandes compagnies d'assurances.

Donc, M. le Président, je ne veux pas m'étendre spécialement sur le sujet, comme je l'ai dit en début d'intervention. Le projet de loi est excessivement technique. Mes collègues avant moi en ont parlé de façon très éloquente. Le député de Notre-Dame-de-Grâce l'a répété, le député de Verdun aussi. Et c'est pourquoi je voulais tout simplement m'inscrire en faveur du projet de loi et tout simplement vous dire, M. le Président, que, lorsque viendra le temps d'apporter ma voix, mon vote au projet de loi n° 60, Loi modifiant la Loi sur les assurances, nous allons apporter notre accord.

Et c'est sur ce, M. le Président, que je cède la parole à tout autre intervenant qui voudrait intervenir sur le même projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Shefford. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du projet de loi n° 60? Alors, nous cédons maintenant la parole, en réplique, au ministre des Finances. M. le ministre.


M. Bernard Landry (réplique)

M. Landry (Verchères): Encore une fois, M. le Président, notre règlement appelle ça un droit de réplique, mais, puisqu'on est virtuellement d'accord, je n'ai pas grand-chose à répliquer, sauf peut-être à une remarque intéressante, et que je vais prendre en compte, du député de Notre-Dame-de-Grâce. D'abord, il a donné un exemple amusant et théorique d'une association Landry-Bergman. Évidemment, à ce stade-ci de ma carrière, je n'ai pas l'intention de faire des associations professionnelles pour l'avenir avec quiconque, mais ça ne me déplairait pas du tout d'en faire une avec le député de Notre-Dame-de-Grâce si j'avais son âge, disons, et que je croyais que ma formation politique pouvait être quelque peu en danger quant à son sort électoral.

Mais il a fait allusion de façon comique à cette association comme disant que ça pourrait aller chercher des gens de diverses communautés. Il serait peut-être intéressé de savoir que, quand j'ai commencé ma carrière, j'ai pratiqué dans une étude de droit qui, pour les raisons précisément qu'il a invoquées, s'appelait Lapointe, Rosenstein, White. Je lui dirais par ailleurs, avant de venir au point fondamental de sa question, que c'est vrai que ça attirait des clientèles des diverses communautés. C'était il y a 30 ans. J'ai quitté cette étude quand j'ai été élu il y a 20 ans. Et ça attirait vraiment des courants de clientèles à cause des patronymes des associés. J'espère qu'il est d'accord avec moi que, si, théoriquement, on devait s'associer sur le plan professionnel, la société québécoise maintenant a marché suffisamment vers l'intégration et vers l'esprit républicain pour que la raison sociale d'une étude professionnelle ne détermine pas la nature de la clientèle.

J'en viens au point qu'il a soulevé, qui est intéressant, et je ne dis pas qu'il doit être écarté du revers de la main. Cependant, je ne crois pas que ce projet de loi soit vraiment le bon véhicule pour lui donner toute l'assurance qu'il requiert. Le député sait, il a peut-être même participé brièvement à la commission parlementaire, que nous sommes en révision de toute la question des intermédiaires de marché et de l'éthique applicable à ces professionnels. Je crois que c'est au moment de l'adoption de cette loi et de son examen que je pourrais prendre en compte, et je la retiens volontiers, l'objection qu'il nous a si bien éloquemment exprimée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Finances. Comme nous avons maintenant terminé les interventions sur l'adoption du projet de loi n° 60, alors le projet de loi n° 60, Loi modifiant la Loi sur les assurances, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Le vote nominal est demandé.

Mme Caron: M. le Président, conformément à l'article 223 de notre règlement, je vous demande de reporter le vote à la période des affaires courantes de demain.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Pinard): C'est parfait. Alors, le vote est donc reporté à la période des affaires courantes de vendredi 20 décembre. Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.

(21 h 30)

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 28 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 128


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Notre rubrique 28. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 128, Loi modifiant la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal. Alors, est-ce qu'il y a des interventions sur l'adoption du rapport de la commission du budget et de l'administration?

M. Johnson: Absolument.

Une voix: Bravo!

M. Johnson: Une demi-heure?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le chef de l'opposition, vous avez un temps de parole de 30 minutes.


M. Daniel Johnson

M. Johnson: Je vous remercie, M. le Président. Au fur et à mesure que le projet de loi a cheminé ici, depuis le 10 juin, de mémoire, l'adoption du principe a eu lieu. Ç'a été présenté par le président du Conseil du trésor le 10 juin dernier. Un projet de loi qui avait été annoncé, si on se fie aux interventions du président du Conseil du trésor au mois de juin, ni plus ni moins que le 26 septembre 1994 à l'occasion de l'assermentation du gouvernement Parizeau.

Un projet de loi, autrement dit, là, qui traîne dans le portrait depuis deux ans. Ça traîne dans le portrait depuis deux ans et, tout d'un coup, la veille de Noël, en 1996, ça devient important pour le gouvernement d'y donner suite. Pourquoi c'est important, ce projet de loi là, tout d'un coup? Bien, il faut se reporter dans un contexte et des finances publiques du Québec et de dettes électorales et référendaires du Parti québécois. Il y a deux volets importants, là: un volet de finances publiques, qui n'est pas négligeable – ça, j'ai l'intention de vous en entretenir pendant quelques minutes – et il y a, évidemment, le comportement électoraliste du président du Conseil du trésor et du premier ministre, incidemment, et du prédécesseur du premier ministre, là, M. Parizeau, cet homme, comme dit le premier ministre, qui écrit dans les journaux de temps en temps, qui est devenu un tire-au-flanc pour le Parti québécois.

C'est un projet de loi de finances publiques. Un projet de loi de finances publiques parce que, quand on commence à toucher à la rémunération... Le projet de loi n° 128 vise à abolir la loi 102 que j'avais la responsabilité de présenter comme président du Conseil du trésor responsable, à ce moment-là, de négociations dans le secteur public. C'est une loi, donc, qui n'est pas neutre, là. Ce n'est pas neutre quand on se demande quel va être son effet sur les finances publiques et dans quel contexte de finances publiques est-ce que ç'a été amené. Ce n'est pas neutre parce que, quand on touche les finances publiques, on commence à regarder comment il faut se débarrasser de l'endettement accumulé. On est obligé de regarder la rémunération des travailleurs et travailleuses du secteur public. C'est un énorme morceau, là. C'est plus que la moitié des dépenses, quasiment 60 % des dépenses, de mémoire, lorsqu'on exclut le service de dette, parce qu'on regarde les dépenses de programmes, là, tout ce qu'on paye: les subventions, les transferts aux individus, aux municipalités et les salaires.

C'est un chiffre énorme, là, d'une vingtaine de milliards de dollars, qui est en cause, lorsqu'on parle de rémunération dans le secteur public. Mais pourquoi il faut parler de rémunération quand on parle d'endettement public puis de finances publiques? Bien, c'est parce qu'il y a un problème de déficit accumulé. Donc, il y a de l'endettement qui s'est accumulé depuis 1977-1978.

Une voix: Quelle année?

M. Johnson: 1977-1978. Déficit des opérations courantes: emprunter pour payer l'épicerie. Pas comme une famille qui emprunte pour acheter sa maison, qui dit: Je vais rembourser sur 20 ans, avec une hypothèque. Je vais la renouveler, mais j'ai un actif au moins. Non. L'endettement pour fins de payer des dépenses courantes: dépenses de programmes, des salaires, des subventions. 1977-1978: Jacques Parizeau, ministre des Finances; l'actuel député de Verchères et membre du conseil des ministres; l'actuel président du Conseil du trésor, hein, fait partie du gouvernement de cette époque-là, et il préside, année après année, à l'accumulation la plus sensationnelle – avec une exception que je vais mentionner tout à l'heure – de déficits d'opérations courantes de toute l'histoire financière du Québec. Et ça, là, ce n'est pas une sornette comme celle qu'on nous débite de l'autre côté pour dire: Vous avez laissé le plus gros déficit des temps modernes. C'est une «joke», ça. D'abord, c'est arrangé avec le gars des vues, on le sait, et mon collègue a commencé à démontrer comment les chiffres ont été trafiqués pour le budget 1994-1995. Et, deuxièmement, M. le Président...

Mme Caron: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement, sur une question de règlement.

Mme Caron: M. le Président, en vertu de l'article 35.6°, le député qui a la parole ne peut imputer des motifs indignes à un député. Accuser un gouvernement d'avoir trafiqué, c'est un motif indigne.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le chef de l'opposition, je vous demanderais de continuer, de poursuivre votre allocution.

M. Johnson: Oui, M. le Président. Je reprends les titres d'articles qui paraissent dans les journaux. J'aimerais ça que la députée arrête de s'énerver. Respirez un petit peu par le nez.

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le chef de l'opposition, même si les titres de journaux sont brutaux, je vous demanderais quand même de poursuivre votre allocution tout en respectant en tous points notre règlement. M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Le ministère des Finances actuel donne l'impression qu'il joue dans le trafic des finances publiques. Il y a beaucoup de gens qui aimeraient qu'il aille jouer dans le trafic davantage. Si on ne peut pas dire qu'il a trafiqué les chiffres, la réalité c'est qu'il joue dans le trafic des chiffres. Bon, ceci étant dit, ce qui est évident – et les chiffres sont là – c'est qu'à partir de 1997 il faut mesurer ça par rapport à notre capacité d'emprunter, notre capacité de payer un déficit. Quelqu'un qui gagne 10 000 $ par année serait un parfait imbécile d'emprunter 100 000 $, mais quelqu'un qui gagne 100 000 $, c'est assez logique et ce n'est pas tout à fait incohérent d'emprunter 10 000 $. Il faut relier ça à la capacité de s'endetter, à part du fait qu'il faut regarder pourquoi on s'endette, comme je l'ai mentionné.

Évidemment, à partir de 1978, lorsque M. Parizeau – on peut l'appeler par son nom maintenant – était ministre des Finances et que le député de Joliette faisait partie de la majorité ministérielle, le whip actuel, le président du Conseil du trésor, le ministre des Finances, le député d'Arthabaska, enfin plein de monde, j'ai l'impression de voyager dans le temps quand je regarde la majorité ministérielle... La réalité c'est qu'il faut mesurer ça compte tenu du produit intérieur brut du Québec. Quelle est la grosseur de l'économie du Québec qui nous permet d'emprunter pour faire des investissements ou, comme c'était le cas dans leur temps, pour payer des dépenses d'épicerie? C'étaient littéralement, M. le Président, des ordres de grandeur, des endettements incomparables. Ça a doublé entre la première et la deuxième année et ça a redoublé entre la deuxième et la troisième, littéralement. De 1,3 % du produit intérieur brut, l'endettement, le déficit d'une année, l'endettement annuel – pas accumulé; accumulé, c'est encore pire, c'est bien évident – l'année suivante, Jacques Parizeau, ministre des Finances, 2,6 % du PIB du Québec est emprunté, déficitaire au point de vue budgétaire. L'année suivante, 1979: 3,6 %. Ça n'arrête pas. C'est comme les comptines du ministre des Finances: 1,3 %, 2,6 %, 3,6 %. L'année suivante, 1980, préréférendaire, le budget, vous allez dire: Il va prouver qu'il est capable d'administrer. Pantoute. Il va prouver qu'il est capable d'emprunter: 4,8 % du PIB. C'est ça, la proportion que représente le déficit du Québec, les emprunts, les endettements additionnels. Ça n'a pas d'allure. Ça tombe à 3,2 %, 2,9 %, 2,3 %, et M. Duhaime, candidat à la chefferie du Bloc québécois – ça aurait fait une belle bataille pareil avec le député de Joliette, je suis convaincu de ça – 3,8 % du PIB. Infernal. Lorsqu'on est arrivé, nous autres: 3,1 %, 2,4 %, 1,2 %, 1,1 %, 1,9 %. C'est ça, la réalité des choses. Ce que ça donne pour vrai, le solde budgétaire cumulé des années Jacques Parizeau, c'est 5 200 000 000 $ d'emprunts pour payer ses dépenses courantes, d'épicerie, 5 200 000 000 $ par opposition à un surplus des opérations courantes de 8 900 000 000 $ dans les huit ans du gouvernement du Parti libéral du Québec. C'est marqué, là!

(21 h 40)

Une voix: C'est vrai.

M. Johnson: C'est ça, c'est marqué, puis c'est vrai. Alors, il y a un problème de finances publiques réel; encore faut-il en trouver la source.

Quand j'ai dit que c'est le gouvernement du PQ, 1976-1985, qui avait été un champion toutes catégories, j'ai dit qu'il y avait une exception, une exception que le premier ministre actuel connaît très bien, parce que, entre sa pratique du droit et son poste d'ambassadeur à Paris, ça, ça l'a mené au Conseil des ministres du gouvernement conservateur à Ottawa, et là il a fait partie, au fédéral, d'un gouvernement qui était en face du même problème, d'une accumulation de déficits année après année pendant à peu près 10 ans, à peu près les mêmes périodes de temps. Et, qu'il s'agisse de M. Mulroney ou du député de Jonquière actuel, qui était ministre de l'Environnement et secrétaire d'État au fédéral... Le député de Jonquière, le premier ministre du Québec d'aujourd'hui, a été ministre fédéral. Savez-vous ce qu'ils ont fait? Ils ont travaillé très, très fort pour, eux aussi, avoir un surplus des opérations courantes, pour dire: Ouais, bien, là, il n'y a rien de drôle là-dedans. Les dépenses de programmes étaient déficitaires, du temps de leurs prédécesseurs. Ça nous est arrivé exactement. C'était Jacques Parizeau. Il nous a endettés tellement qu'en arrivant il y avait des déficits d'opérations courantes, à part l'intérêt sur la dette. Même chose au fédéral, en 1984, quand les conservateurs sont arrivés, qui ont travaillé très, très fort pour créer un surplus des opérations courantes.

On a réussi, nous autres, là: 8 900 000 000 $ en huit ans de surplus des opérations courantes, puis ça, ça donne un peu de marge de manoeuvre pour payer l'intérêt sur la vieille dette. Même, même chose. Le député de Jonquière, premier ministre, a travaillé très fort avec son ami et collègue de l'université, M. Mulroney, pour régler le problème de la même façon. Alors, il sait ce que c'est.

Alors, moi, là, je suis... Évidement, ça ne serait pas parlementaire d'évoquer les sentiments qui m'animent quand j'écoute le premier ministre blâmer un budget, 1994-1995, pour le problème des finances publiques. Il sait fort bien, parce qu'il a vécu dans un appareil qui était pris avec le même problème... Il était dedans, là, vraiment les deux mains dedans à tous les jours. Même, même chose qui est arrivée. De 1985 à 1994, il y a eu une balloune, je dirais, d'endettement public qui a fait en sorte que la dette totale du Québec augmente de 119 %...

Une voix: Et voilà!

M. Johnson: ...sous la houlette du duo Parizeau-Duhaime...

Une voix: C'est ça.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: ... – beau couple – par opposition à 42 % essentiellement attribuable à l'effet pervers de l'accumulation du service de dette année après année, même si on avait un surplus des opérations courantes, c'est-à-dire que nos revenus étaient non seulement suffisants, mais supérieurs à nos dépenses de programmes: payer le monde, subventions, subventions aux municipalités, l'aide sociale, les hôpitaux, les écoles, prêts et bourses. On avait assez de revenus d'impôts, de péréquation et de tout ce que vous voulez pour payer tout ça. C'était un surplus! On prenait une partie du surplus pour payer la dette sur une affaire énorme, une montagne qu'on nous avait laissée, puis on empruntait un peu parce que ce n'était pas encore assez. C'est ça qui se passait pour vrai, et là le gouvernement est pris avec la suite de ce problème-là, mais, moi, je me permets de dire que, si on laisse une accumulation de 9 000 000 000 $ du solde des opérations courantes, au lieu de laisser un déficit de 5 200 000 000 $ comme nos prédécesseurs avaient fait, disons que vous êtes un petit peu mieux.

Il y a juste un problème, puis ça, je vais y revenir: vous n'êtes pas capables de créer des jobs. Il y a 60 000 Québécois qui ne travaillent pas aujourd'hui et qui travaillaient il y a un an, quand le premier ministre a été assermenté. Tout ça, ça fait mal aux revenus.

Une voix: Oui.

M. Johnson: Ça, ça fait mal aux revenus puis ça condamne à travailler du côté des dépenses.

Une voix: C'est ça. On se revanche sur les petits.

M. Johnson: La logique de travailler sur les dépenses est réelle, et c'est pour ça que, incidemment, il faut regarder la rémunération dans le secteur public. L'Institut de recherche et d'information sur la rémunération, l'IRIR, hein, les gens qui sont dans ce jargon-là parlent de l'IRIR, il n'y a rien de drôle dans l'IRIR. Ce sont des statistiques qui vont mesurer comment évolue la rémunération du secteur public comparée à ce qu'ils appellent «autres salariés québécois», essentiellement des entreprises syndiquées de 200 employés et plus dans l'univers économique québécois. Là, il s'avère que, pendant un bon bout de temps, pas juste en raison du rattrapage notamment des années soixante-dix, mais – appelons les choses par leur nom – des largesses inconsidérées, toujours du même petit couple Parizeau-Bouchard, pardon...

Une voix: Référendum.

M. Johnson: ...Parizeau-Duhaime, les deux ministres des Finances du gouvernement péquiste, 1976 à 1985, où M. Parizeau était d'ailleurs ministre du Revenu, président du Conseil du trésor, président du comité de développement économique et ministre des Finances... Il disait souvent, quand il y avait des difficultés dans ces ministères-là, qu'il se réunissait avec lui-même et il décidait.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: Il avait une influence réelle, là. Et je vois le député d'Abitibi-Ouest qui se souvient de ça. Il se réunissait avec lui-même.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Il se téléphonait.

M. Johnson: Il se réunissait avec lui-même, pour faire quoi? Pour décider et convaincre le premier ministre d'alors, M. Lévesque. Un talent politique réel, René Lévesque, un grand démocrate, mais il prétendait très humblement, on s'en souvient, qu'il ne connaissait pas vraiment ça, les finances publiques; ce n'était pas son «bag». Appelons les choses par leur nom. Il faisait confiance aux gens qui l'entouraient. Mais il avait du gros bon sens. Mais le gros bon sens ne peut rien faire contre un feu d'artifice technologique et technocratique comme celui que Jacques Parizeau faisait briller de tous ses feux au Conseil des ministres et dans les comités ministériels permanents du gouvernement d'alors, pour ne pas dire du Conseil du trésor qu'il présidait également, alors qu'il se réunissait avec lui-même comme ministre des Finances.

Ça, ça a donné quoi? Ça a donné des conventions collectives préréférendaires incroyables. Il y a bien des gens qui ont dit: Le règlement de 1975-1976 d'Hydro, ça n'avait pas de bon sens. Je veux dire, ça, c'est du monde qui n'ont pas de perspective historique pour regarder la succession des largesses inconsidérées empruntées de Jacques Parizeau et de Yves Duhaime, pendant des années, et des années, et des années. À un tel point que, étrange retour des choses, aujourd'hui, même si j'ai encore l'impression de voyager dans le temps, on est devant une perspective de législations spéciales. Peut-être! Tout le monde espère que non, puis qu'ils auront un règlement négocié avec le secteur public. Mais des menaces même pas appréhendées, là, assez claires de lois spéciales, comme on en a eu à l'époque...

Moi, quand je suis arrivé ici avec une quinzaine de collègues, qui sont ici, en avril 1981, quasiment les premières choses à l'ordre du jour qu'on a eu à traiter, c'est de taper sur la tête des fonctionnaires, les menacer d'ouvrir les conventions collectives. Il dit: C'est correct, on ne les ouvrira pas, on va vous donner de l'argent le 31 décembre, à minuit moins une. Ha! Puis, le 1er janvier, à minuit et une – bong! – le bat de baseball.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: Je suis parfaitement au courant de ça. Ça n'a mêlé personne, ça, tu sais. Tu as beau dire que tu n'ouvres pas la convention collective... Je te donne une piastre, puis je te donne un coup de masse, puis tu m'en donnes cinq tout de suite, les trois prochains mois, puis ensuite on verra ce qui arrive. C'est ça qui est arrivé. Ça, c'est à part du fait de désindexer les pensions de 3 %, de désindexer de 3 % les régimes de retraite du secteur public, à partir de 1981-1982. Ça, c'était le fruit d'une gestion débridée des finances publiques à laquelle M. Parizeau nous avait habitués.

Et je pense que personne ici ne va protester du fait que je vais réaffirmer qu'il n'a pas changé. Il écrit encore dans les journaux que ça n'a pas de bon sens, le déficit zéro. On a voté à l'unanimité, ici, après une demi-heure, pour une loi antidéficit qui a été mise d'abord de l'avant dans le programme du Parti libéral du Québec, en 1994, refusée systématiquement, quand ce n'était pas trois fois par jour, 10 fois par semaine par M. Parizeau, lorsqu'il était aux affaires, comme il le dit et comme il le disait alors, comme premier ministre, et que son successeur, à ma suggestion et celle de l'opposition, a adoptée, lui. Et là on vient de voter un projet de loi antidéficit qui a des dents. Pas facile de vivre avec ça, comme gouvernement, c'est évident, surtout s'il y a des dépassements. C'est une vraie claque puis un vrai miracle qu'il faut faire, la première année qu'il y a un dépassement. Il faut aller chercher jusqu'à 1 000 000 000 $, juste d'une «shot», quand tu as des dépassements. C'est très sévère, très sévère. C'est ça qu'on a demandé. Le ministre des Finances s'y astreint. On travaille tous dans la même direction. Mais ce n'est pas facile à cause de la balloune, de 1976 à 1985, qui s'est accumulée.

Une voix: Le référendum.

(21 h 50)

M. Johnson: Mais là il faut régler ça, là. M. le Président, il me reste combien de temps à peu près?

Le Vice-Président (M. Pinard): Il vous reste 6 min 30 s.

M. Johnson: Six minutes. Ça passe donc vite.

Une voix: Tant mieux!

M. Johnson: M. le Président, il faut donc parler de la rémunération. Et, lorsque le gouvernement, de 1985 à 1994, a regardé les finances publiques puis a parlé de rémunération, il a fait deux choses: il a baissé les effectifs dans la fonction publique, dans le secteur public, mais le mieux qu'il pouvait. Sornettes que je dénonce une autre fois, celles du ministre des Finances et de son premier ministre: Alors, disent-ils, que le député de Vaudreuil était membre du gouvernement puis enfin quelques autres, là, c'était épouvantable, ce qui se passait dans les effectifs du secteur public. Où est-ce qu'ils prennent ça?

Moi, je vais prendre le profil financier du Québec, juillet 1996. Le député de Verchères est ministre des Finances, au mois de juillet, là, ça fait cinq mois de ça. Il se promène dans le monde entier puis il dit: Voici, au gouvernement du Québec, comment on gère, nous autres. Puis il prend des séries historiques. Six ans, il remonte en 1991. Il n'était pas là puis le député de Labelle non plus, en 1991. Il était de ce côté-ci; il critiquait en mosus à part ça. Ça n'arrêtait pas une minute. Il disait que les effectifs augmentaient. Qu'est-ce qu'il dit aujourd'hui, le député de Verchères, quand il se promène dans le monde entier?

Évolution des effectifs autorisés des ministères et organismes: 1991-1992, 66 600; 1992-1993, 65 500 – ils ne sont pas encore au pouvoir – 1993-1994, 62 668 – ils ne sont pas encore au pouvoir – 1994-1995 – on est encore là un bon six mois – 59 007. Ça baisse tout le temps. Ça fait six ans que ça baisse: les deux dernières puis les quatre avant ça. Ça, j'ai géré les finances publiques comme du monde, effectivement. Alors, quand j'entends les... Ça, c'est une chose, hein, le nombre de personnes qu'on paye.

Deuxième chose, combien on les paye. Ah! Là, l'IRIR, le fameux Institut de recherche et d'information sur la rémunération, nous dit, depuis quelques années, qu'il y avait encore une avance du secteur public québécois sur d'autres salariés québécois. On a essayé de la régler, là. Moi, je me souviens des indexations pures et simples à l'inflation pendant plusieurs années, plus relativité salariale, des centaines de millions, notamment que les femmes dans le secteur public ont reçus. Ça, c'est quelque chose qu'on a décidé de faire, tout le monde. Tout le monde a décidé de faire ça. Une bonne idée.

Ensuite de ça, gel, report de six mois – tout le monde se souvient de ça – pour s'aligner un petit peu sur les autres salariés québécois, et finalement moins 1 %, la loi 102. Qu'est-ce que ça a donné, la loi 102? Ça a donné pour une fois la vraie incitation à regarder comment on négocie des ententes de productivité. Mais, moi, ça m'a touché – j'exagère, là, tu sais ce que je veux dire – ça m'a frappé de voir comment Fernand Daoust – il était secrétaire général de la FTQ à l'époque; il a été président à un moment donné – est venu nous dire, dans un panel, il y a quelque temps, dans un colloque politique où on avait invité les gens de l'extérieur du parti, qu'il était extrêmement fier d'avoir signé – ça adonnait que c'était avec moi, là, quand j'étais au Trésor, en 1993 – la première entente de productivité réelle dans le secteur public, avec Henri Massé qu'on connaît. Il est secrétaire général maintenant, là, de la FTQ.

Pourquoi? On dit: Là, on a plafonné le 20 000 000 000 $. On enlève 1 % parce qu'on veut s'aligner, mais on va se demander comment aller restaurer dans les poches des employés ce niveau de salaire là de 1 % que la loi 102 leur enlevait. Ce dont on a convenu, c'est qu'on va chercher comment réorganiser le travail. On a signé des affaires là-dessus, là, dans la santé notamment, pour dire comment on va trouver, disons, 2 %. Le premier 2 %, on va se le partager: 1 % pour les contribuables, 1 % qui retourne dans la poche des employés. Donc, le moins 1 %, il est annulé à partir de ce moment-là. Et, après ça, on négocie ce qu'on fait si on en trouve d'autres économies. Ça, c'est la seule vraie affaire concrète, la seule entente concrète de productivité à la grandeur d'une centrale syndicale.

Je ne parle pas des expériences dans certains hôpitaux, là, à Verdun puis des endroits comme ça. Ils ont fait des choses formidables. D'autres syndicats, la CSN, la FIIQ, les infirmières, etc., mais avec la FTQ, là, à la grandeur de la FTQ, pas dans un établissement ou deux, là où la centrale est représentée. Moi, je trouve que, vraiment et de façon responsable, ça a donné une poignée au gouvernement pour dire: Comment allons-nous conclure des ententes de productivité? Et on peut bien parler, parler, parler, là, mais à un moment donné ça prend une poignée, puis la poignée, c'est la loi 102.

Mais là, étrangement, avant le référendum, hein, ça avait été promis même avant l'élection de 1994, le gouvernement du Parti québécois dit: 102, on va scraper ça, comme la 142 d'ailleurs. On va scraper 102. Il ne l'a pas scrapée à peu près! Là, il est en train de dire: Non pas juste scraper 102, mais, en plus, 915 000 000 $ sur trois ans qui ont été consentis.

Une voix: Il n'y a rien de trop beau.

M. Johnson: Il n'y a rien de trop beau; il n'y avait rien de trop beau. Aujourd'hui, on nous dit: Efforts, sacrifices, ça défonce, plus d'argent, endettés, pas d'allure, voici un chèque de 915 000 000 $ puis la 102, oubliez ça. C'est quoi, la cohérence? Moi, je ne comprends pas. Tout à l'heure, on a voté une loi antidéficit, puis là ils sont en train d'abolir la loi 102 par l'adoption de la loi n° 128. C'est impossible! C'est le monde à l'envers! On nage en pleine incohérence du côté gouvernemental.

Une voix: Tout un gouvernement!

M. Johnson: Ça n'a pas d'allure de se priver d'une poignée qui permet justement de conclure les ententes de productivité, comme on avait fait avec la FTQ. À la place... Non, moi, je ne comprends pas, là. On dirait que c'est dans un autre univers, insaisissable pour le commun des mortels et pour le monde qui sait compter, qu'évolue le gouvernement.

On comprend un petit peu ce qui se passe lorsqu'on regarde comment ça s'est déroulé, les négociations ou le simulacre de négociation dans le secteur public depuis quelques semaines, concoctées par les partenaires et petits copains de la souveraineté, Lorraine, Clément, Gérald et les autres. C'est ça qui est arrivé. Et, à un moment donné, la base ne suit pas. La base ne suit pas, il n'y a rien de drôle là-dedans. Les petits copains boycottent les réunions avec le premier ministre. Tu sais, c'est du cinéma. Comme scénario, moi, je n'ai jamais vu quelque chose d'aussi transparent. Sur le dos des syndiqués, les partenaires de la souveraineté – où il ne manque que le député de Rivière-du-Loup – sont en train encore de jouer avec les finances publiques. Le projet de loi n° 128 est central pour régler le problème des finances publiques. Le problème, c'est qu'ils ne les règlent pas, ils les empirent. C'est pour ça que, depuis le début, depuis les interventions du député de Westmount–Saint-Louis, on a dit qu'on serait contre le projet de loi n° 128, parce que la loi 102 avait du bon sens, ça a donné des résultats, puis c'est ça qui règle les finances publiques.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le chef de l'opposition. Nous allons céder maintenant la parole au président du Conseil du trésor. M. le président du Conseil du trésor, vous avez un droit d'intervention de cinq minutes après chacune des interventions de l'opposition. Alors, M. le Président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: Oui, M. le Président. J'ai écouté le chef de l'opposition parler du passé. Je l'ai écouté et il a commencé par nous parler de 1977, en ignorant finalement qu'il y a des citoyens qui ont maintenant le droit de vote qui n'étaient pas nés à l'époque dont il parle. C'est aller loin dans le passé.

Une voix: Ils ne l'ont pas connue.

Une voix: L'article 32.

M. Léonard: Je dirais aussi qu'il a fait quelques raccourcis...

Une voix: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député, s'il vous plaît. Je pense que tout à l'heure on a écouté religieusement les propos qui ont été prononcés par le chef de l'opposition, alors nous allons maintenant écouter religieusement également les propos qui seront prononcés par le président du Conseil du trésor. M. le président.

M. Léonard: M. le Président, il s'en est accumulé malheureusement trop, des déficits, y compris sous la houlette du chef de l'opposition quand il était membre du Conseil des ministres de 1985 à 1994. Les trois dernières années, pour ne citer que celles-là – parce qu'il n'a parlé que de 1994-1995 – il a fait des déficits, ou son gouvernement, lui était président du Conseil du trésor, avec son ministre des Finances, M. Gérard D. Levesque, feu Gérard D. Levesque, de 4 900 000 000 $ en 1992-1993, 4 800 000 000 $ en 1993-1994, 5 700 000 000 $ en 1994-1995. C'est ça, leur gestion.

(22 heures)

Alors, je voudrais simplement dire que sa vision n'est qu'une vision défensive du passé. C'est tout ce dont il nous a parlé.

Quant à la loi 102, ce qu'il a oublié de dire, c'est qu'il y a 4 000 griefs pendants par rapport à cette loi. 4 000. Et ça, c'était une indication très nette que son projet de loi n'était pas accepté, comme il l'a laissé entendre tout à l'heure. Quatre mille griefs qui découlaient de cette loi.

M. le Président, je pense qu'il faut regarder vers l'avenir et s'amener au niveau du déficit zéro. L'objectif, il a été endossé par la Conférence de Québec du mois de mars dernier, endossé par le Sommet à la fin d'octobre, renouvelé par le Sommet à la fin d'octobre. Et nous devons éliminer le déficit. Nous devons l'éliminer. Et tout le monde doit faire des efforts en ce sens-là. On doit le faire aussi le plus possible dans la paix sociale. Je veux dire, il faut respecter la paix sociale.

Et, quand on traite ce qui se passe à l'heure actuelle de simulacre de négociation, je pense que c'est faire bon marché d'efforts faits de la part des deux parties pour arriver à une entente négociée. Tout le monde s'en trouvera mieux. C'est simplement le souhait que nous faisons et nous voulons y arriver. Mais nous voulons aussi être jugés aux résultats, parce que les déficits qui ont été annoncés, puisque tout ne peut pas se faire en un jour, sont respectés. L'objectif des dépenses, comme du déficit de l'an dernier, a été respecté, atteint. Et, cette année, nous allons aussi respecter nos objectifs financiers, réduire ce déficit de 5 700 000 000 $, du temps des libéraux, à 3 900 000 000 $ l'an passé et 3 200 000 000 $ cette année, 2 200 000 000 $ l'an prochain. Ce qu'il faut faire, c'est juger quant aux résultats. Pas autrement. C'est là qu'est la vraie mesure de notre administration.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions le débat.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le débat est ajourné. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 38 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 50


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 38 de notre feuilleton, M. le ministre des Ressources naturelles propose l'adoption du projet de loi n° 50, Loi sur la Régie de l'énergie. Y a-t-il des interventions? M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, il y a quelques semaines, j'avais la fierté de présenter aux membres de cette Assemblée en première lecture le projet de loi ayant pour but de créer la Régie de l'énergie. J'avais alors le sentiment de remplir, tel que je l'exposais à ce moment, une promesse de longue date répondant aux attentes de la population.

Mais je suis encore plus heureux aujourd'hui, alors que le projet de loi a passé l'étape de la deuxième lecture et qu'on lui a apporté des modifications qui nous permettent, je crois, ou qui nous permettent de croire, dis-je, que la Régie québécoise de l'énergie disposera des pouvoirs nécessaires pour relever les défis posés par le nouveau contexte énergétique nord-américain. Ce résultat est le fruit du travail, de la bonne volonté et de la collaboration de bien des gens. Je pense d'abord en particulier à tous les groupes qui se sont présentés devant les membres de la commission parlementaire afin d'exposer leurs vues sur le projet de loi et de proposer des améliorations. Ils ont fait preuve d'un sens des responsabilités qui enrichit notre collectivité, et nous devons leur en être reconnaissants.

Par ailleurs, j'aimerais également souligner le travail des membres de la commission parlementaire, qui étaient conscients de l'importance de cette Régie pour le Québec et qui avaient à coeur de contribuer à la bonification du projet de loi. Je pense à mes collègues de ce côté-ci de la Chambre, mais je voudrais aussi souligner le travail des membres de l'opposition, et plus particulièrement le député de Saint-Laurent, le député d'Argenteuil et le député de Laurier-Dorion.

M. le Président, il ne faut pas oublier... il ne faut pas l'oublier: élaborée à la suite d'un débat public sur l'énergie, la nouvelle politique énergétique rendue publique à la fin de novembre repose sur un large consensus, dont la Régie en est le principal pivot. Pour le gouvernement du Québec, la création d'une telle régie constitue la meilleure façon de garantir dans ce secteur l'équité et la transparence dans la fixation des tarifs et d'atteindre également notre objectif de développement durable.

Je voudrais maintenant attirer votre attention sur les principales modifications qui ont été apportées au projet de loi afin de tenir compte des commentaires qui nous ont été faits. Tout d'abord, un rapport à l'Assemblée nationale. On sait que la création d'une Régie de l'énergie devrait transformer en profondeur le secteur énergétique québécois afin de l'adapter à l'ensemble des règles du jeu, qui ne cessent de se modifier à l'échelle nord-américaine. Les défis à relever sont importants. Nous devons donc nous assurer que l'outil dont nous voulons nous doter corresponde bien à nos besoins. À cette fin, nous avons introduit une disposition prévoyant que le ministre devra faire rapport à l'Assemblée nationale des résultats obtenus et de l'impact de la loi sur l'ensemble du secteur de l'énergie trois ans après l'entrée en vigueur de ladite loi.

Deux choses font consensus également. Québec doit saisir les occasions de développement que lui offre la restructuration du marché nord-américain de l'énergie, mais il doit le faire sans renoncer à ses valeurs et à ses caractéristiques propres. La question de la déréglementation est une question importante et elle est au coeur du projet de loi créant la Régie de l'énergie. Des modifications ont été apportées à la version initiale du projet de loi afin de mieux tenir compte des attentes et des préoccupations, mais surtout pour mieux nous préparer à affronter l'avenir et occuper la place qui nous revient dans le secteur énergétique nord-américain. Les voici donc, M. le Président.

Donc, la déréglementation est rendue possible. Dans les six mois qui suivront l'entrée en vigueur de l'article 164, le projet de loi prévoit maintenant que la Régie devra donner son avis au gouvernement sur les modalités d'établissement et d'implantation des tarifs de fourniture de l'électricité dans le contexte de la déréglementation. Et avant de donner son avis, la Régie devra tenir compte des audiences publiques sur la question. L'avis de la Régie devra ensuite être suivi d'une étude en commission parlementaire. Par ailleurs, à l'intérieur d'un délai qui sera fixé par le gouvernement, la Régie devra également donner un avis plus global sur la pertinence, les conditions et les modalités de la libéralisation des marchés de l'électricité, conformément aux engagements pris par le gouvernement dans sa politique énergétique.

Ce qui a pris énormément de temps en commission et qui en valait la peine, ç'a été la question de la surveillance des prix des produits pétroliers. En ce qui a trait aux produits pétroliers, des amendements ont été apportés aux dispositions initialement prévues afin de tenir compte des nombreuses représentations qui nous ont été faites tant par les consommateurs que par les grandes compagnies et distributeurs indépendants. Rappelons qu'en vertu du nouvel article 45.1 on facilite la preuve qui doit être présentée devant un tribunal pour établir l'existence de pratiques commerciales abusives, contraires aux règles du Code civil. Dorénavant, donc, dans le cadre d'une procédure en injonction ou d'une action en responsabilité civile, s'il est démontré qu'un détaillant vend de l'essence ou du carburant diesel en deça du prix dont les paramètres sont précisés par la loi, le tribunal pourra conclure, en l'absence d'une preuve contraire, que le détaillant a abusé de ses droits et commis une faute.

En vertu des pouvoirs qui lui sont reconnus, le tribunal pourrait alors rendre une injonction pour que cessent les pratiques commerciales jugées excessives ou déraisonnables et ordonner le paiement des dommages-intérêts compensatoires et punitifs. Dès l'entrée en vigueur de la loi, aux fins de présomption de pratiques abusives, un montant de référence établi sur la base du prix à la rampe de chargement, augmenté du coût du transport et du montant des taxes fédérales et provinciales, s'applique.

(22 h 10)

Après la tenue d'audiences publiques, la Régie fixe un montant au titre des coûts d'exploitation, définis comme étant les coûts nécessaires et raisonnables pour faire le commerce au détail d'essence ou de carburant diesel de façon efficace. Ces coûts sont intégrés aux trois composantes de base. Toutefois, par la suite, la Régie pourra apprécier l'opportunité de retirer ou d'inclure à nouveau, pour une zone ou une période donnée, le coût d'exploitation. Par ailleurs, le projet de loi prévoit que la Régie devra, dans l'année suivant la fixation du coût d'exploitation, faire rapport au ministre sur les impacts de ces dispositions sur le marché des produits pétroliers.

Comme la politique énergétique le souligne, la Régie doit assurer un traitement équitable pour tous les distributeurs d'énergie. C'est pourquoi des précisions ont été apportées au projet de loi. D'abord, l'obligation de desservir doit être similaire pour les distributeurs de gaz naturel et les distributeurs d'électricité. Quant aux exportations, en ce qui a trait aux exportations, le projet de loi prévoit maintenant que le contrôle gouvernemental s'exerce avant qu'un projet ne soit soumis à la Régie de l'énergie.

Par ailleurs, des simplifications ont été apportées aux contrôles exercés par la Régie. Les réseaux autonomes. Le projet de loi a été modifié pour autoriser la Régie à contrôler dans les territoires desservis par des réseaux autonomes de distribution d'électricité des programmes commerciaux visant d'autres formes d'énergie. On veut ainsi que les consommateurs de ces territoires bénéficient d'un traitement équitable par rapport à tout autre consommateur desservi par Hydro-Québec pour le chauffage résidentiel et le chauffage de l'eau. Et j'en profite, M. le Président, pour dire que nous avons, au Conseil des ministres d'il y a environ une semaine, passé un décret qui assurera aux gens des Îles-de-la-Madeleine, aux gens de l'île d'Anticosti, comme les gens de La Romaine... les gens qui sont en-deça du 53e parallèle auront un traitement équitable en termes de tarifs d'hydroélectricité, comme tous les autres citoyens du Québec. Mais la Régie pourra prévoir des programmes commerciaux qui assurent ces taux.

Des voix: Bravo!

M. Chevrette: M. le Président, il y en a plusieurs qui seront peut-être déçus de voir que les parlementaires ne se sont pas rendus à la demande de certains groupes qui nous disaient: Mais pourquoi ne réglementez-vous pas l'huile à chauffage? Nous avons évalué qu'avec le pouvoir de surveillance de la Régie, pour l'instant, le contrôle qu'on peut avoir lors de cette surveillance nous permettra de maintenir une saine concurrence. Et si jamais la Régie constatait dans ses rapports qu'il se livre des guerres là aussi de façon aussi brutale qu'il s'en est livré au cours du mois de juin et juillet en ce qui regarde le pétrole, on agira comme on a agi pour le pétrole.

M. le Président, je suis convaincu qu'avec la création de cette Régie qui sera l'instrument privilégié de la réalisation des objectifs de la nouvelle politique énergétique le gouvernement du Québec, je suis convaincu, transforme profondément le secteur énergétique pour le moderniser.


Amendements déposés

Et je voudrais, avant de terminer, M. le Président, déposer quelques amendements très techniques que j'expliquerai très brièvement, que j'ai déposés à l'opposition, M. le Président. Il s'agit de supprimer un paragraphe, parce qu'on a enlevé «par règlement» pour mettre «par décret» dans un autre article. C'est un amendement à l'article 111. Et l'opposition en a eu une série. L'autre, il s'agit, à l'article 138, de mettre «a, b, c», puisqu'on n'avait mis que des tirets, et comme on pourrait promulguer la lettre a, ou ce qui est vis-à-vis de la ligne a ou de la ligne b, il fallait numéroter ou mettre des paragraphes précis pour permettre, précisément, de promulguer l'un après l'autre et non pas les quatre en même temps, alors qu'on pourrait ne pas être capables, les quatre en même temps. C'est d'ordre de la technique législative.

À l'article 64, également, au lieu que ce soit le gouvernement qui dépose, qui fasse le rapport, c'est le ministre, pour que ce soit plus rapide. La Régie fait rapport au ministre, le ministre le dépose. Ensuite, vous avez, à l'article 168, l'entrée en vigueur. Il se lit comme suit, on ajoute à la fin: «...toutefois, entre en vigueur à la date de la sanction de la présente loi l'article 138, à l'exclusion du sous-paragraphe d du paragraphe 1 de l'article 45.1.» Encore là, c'est une technicalité.

Donc, M. le Président, merci à tous ceux et celles qui ont collaboré, depuis la Table de l'énergie jusqu'à la commission parlementaire et présentement dans cette Chambre, M. le Président. Au lieu de gérer le passé, nous sommes en train de préparer l'avenir et de nous assurer, je crois, une prospérité pour le Québec. Et je vous demanderais, M. le Président, par le dépôt de ces amendements, qu'on puisse demander de procéder aux écritures, puisque j'en ai parlé au député d'Argenteuil; et, au lieu de se convertir en assemblée plénière, comme ce sont des amendements techniques, nous serions d'accord pour que l'Assemblée nationale procède aux écritures. Et je vous remercie infiniment.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre d'État des Ressources naturelles. Alors, y a-t-il consentement pour que nous procédions aux écritures? Il y a consentement. Est-ce que la motion de M. le ministre proposant que l'Assemblée se constitue à partir de maintenant en commission plénière est adoptée?

M. Chevrette: Adopté.


Commission plénière


Étude des amendements proposés par le ministre

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le ministre, je m'en vais maintenant mettre aux voix chacun des amendements, que je vais relire, et je m'en vais mettre aux voix. Le premier amendement: Le paragraphe premier de l'article 111 est supprimé. Cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Deuxième amendement: Article 138: Remplacer les quatre tirets du paragraphe premier de l'article 45.1 de la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers par la numérotation suivante: «a, b, c, d». Cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Troisième amendement: Article 164.1: L'article est remplacé par le suivant:

«164.1 Le ministre doit, trois ans après l'entrée en vigueur de la présente loi, faire rapport au gouvernement sur les résultats et l'impact de celle-ci à l'égard du secteur énergétique. Ce rapport est déposé dans les 15 jours suivants à l'Assemblée nationale ou, si elle ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses travaux.»

Cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Quatrième amendement: Article 168: Ajouter à la fin, l'alinéa suivant:

«Toutefois, entre en vigueur à la date de la sanction de la présente loi l'article 138, à l'exclusion du sous-paragraphe d du paragraphe premier de l'article 45.1 de la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers.»

Cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Maintenant, est-ce que le rapport de la commission plénière, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.


Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. En conséquence, nous allons poursuivre le débat sur l'adoption du projet de loi. Le prochain intervenant sera le député d'Argenteuil. M. le député.


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: Merci, M. le Président. Le ministre de l'Énergie nous mentionnait tantôt que ce projet de loi avait été depuis longtemps attendu. Ça a été, de plusieurs années, le dévolu de plusieurs gouvernements qui se sont préparés mais qui jamais ne l'ont amené au point où nous sommes rendus aujourd'hui.

Le projet de loi n° 50, tel que déposé et amendé, M. le Président, va assurer l'indépendance politique de la Régie de l'énergie. On s'est plaint, depuis de nombreuses années, du rôle politique dans la tarification d'Hydro-Québec, dans l'ingérence que le gouvernement aurait pu avoir dans le prix des pétroles et du Gaz métropolitain. Cette Régie, M. le Président, assurera finalement cette liberté et cette autonomie et l'indépendance politique d'un corps bien constitué.

Un élément que nous avons retrouvé, bien que peu fréquemment, lors de la commission parlementaire, M. le Président, c'était la protection du consommateur. Le rôle de la Régie sera, entre autres, de voir à la protection des consommateurs et, tout en voyant à la rentabilité des entreprises soumises à sa juridiction, la Régie devra assurer que les tarifs mis en place seront respectueux de la capacité des citoyens de payer et du besoin des entreprises d'avoir une efficacité et une rentabilité acceptables.

(22 h 20)

L'évaluation des immobilisations, la capitalisation, les coûts d'exploitation et les frais financiers de ces entreprises majeures seront pris en considération par la Régie. Il va sans dire, elle devra toujours garder en mémoire la présence des consommateurs, qui, eux, devront assumer les coûts au bout de la ligne, et c'est toujours le dernier qui finit par payer. La Régie aura aussi cette liberté d'action dans ses pouvoirs. Elle pourra convoquer à sa guise, selon ses besoins, selon les remarques qu'elle voudra bien faire, les différents intervenants et les différents partenaires de l'énergie. La Régie pourra aussi, avec ses moyens, faire les inspections et les enquêtes appropriées. Les régisseurs, qui auront été nommés par un comité formé par le gouvernement, régisseurs qui seront étalés dans le temps afin d'assurer une continuité et une compétence qui permettra de déléguer à la Régie tous les moyens d'évaluation, de nomination et de tarification.

Dans la tarification sur l'électricité et sur le Gaz Métro, on sait très bien qu'il s'agit de monopoles. Bien qu'il y ait des distributeurs privés avec des centrales de moins de 50 MW, celles-ci sont peut nombreuses et seront surtout orientées vers l'exportation pour le moment.

Quant au pétrole, M. le Président, là aussi nous avons dû débattre longuement afin de trouver un terrain d'entente, non pas entre les parlementaires, mais afin de répondre aux besoins et aux demandes des pétroliers indépendants et aussi des majeurs. Connaissant l'importance des lois du marché, nous étions très conscients que nous créons une ouverture dans le libre marché et nous nous ingérons dans le marché de la compétition. Le consensus qui a été atteint par la commission, je pense qu'il assurera aux consommateurs le meilleur prix. Nous avons porté une grande attention afin de ne pas laisser aller toute la tarification aux mains d'une réglementation exagérée, et le consensus atteint verra à protéger le citoyen, le consommateur, parce que, comme je l'ai dit tantôt, en bout de ligne, c'est toujours lui qui paie.

Une des considérations majeures que nous avons envisagées, c'était la possibilité de profits exagérés par les compagnies majeures. Il va sans dire que ces compagnies sont des citoyens, et ce sont des citoyens corporatifs qui devront prendre en considération le bien de la population et, aussi, le bien de leur corporation et d'assurer que les profits que ces compagnies pourront empocher seront respectueux de la capacité de payer du consommateur.

M. le Président, le terrain demeurera toujours ouvert aux citoyens qui, devant souvent l'incapacité d'aller porter plainte, trouveront dans la Régie un organisme accueillant. Un régisseur sera responsable des plaintes et verra à acheminer la plainte qui lui sera faite et à la traiter équitablement pour s'assurer que le citoyen en cause aura réponse à son problème et se verra respecté dans son cheminement.

Le financement de la Régie sera assuré évidemment par les distributeurs. Et tous les intervenants, tous les partenaires de l'énergie étaient d'accord pour participer au financement de la Régie, qui procède d'ailleurs déjà en ce qui a trait à la Régie du gaz. Les pénalités qui seront mises en place par la Régie advenant des défauts de quelqu'intervenant et de quelque partenaire seront suffisantes pour être un élément négatif quant à ce que les entreprises pourraient être coupables d'exagération. La Régie de l'énergie, ce sera une ouverture sur la déréglementation. Nous sommes à l'aube du troisième millénaire; il faut se préparer à l'ouverture des marchés, à la déréglementation globale, à l'ouverture avec nos voisins immédiats et même plus loin. Et cette démarche placera nos compagnies, nos corporations sur un plancher favorable pour être en compétition sur le marché nord-américain.

Comme l'a mentionné le ministre de l'Énergie, les amendements qui ont été apportés sont des amendements techniques, l'ensemble ayant déjà été adopté en commission parlementaire, et ce ne sont que des éléments de concordance pour lesquels nous sommes tombés d'accord très rapidement, M. le Président.

Cette Régie de l'énergie va doter le Québec d'une loi progressive; elle répondra aux besoins non seulement de la population et des consommateurs, mais aussi des partenaires. Et, en répondant à leurs besoins, nous leur ouvrons la porte à tout le marché nord-américain et américain, que ce soit en Amérique du Sud ou en Amérique du Nord, et probablement mondial, étant donné les capacités de chacune de ces entreprises d'aller transporter leur technologie, leur capacité.

Alors, M. le Président, en terminant, j'aimerais remercier tous les groupes qui sont venus nous rencontrer, nous faire part de leurs inquiétudes, de leurs besoins, lesquels nous avons d'ailleurs tenté de prendre en considération au cours de nos débats et d'introduire les amendements appropriés qui favorisaient soit la protection des consommateurs, soit le maintien et le bien-être des entreprises. La Régie assurera une transparence, M. le Président, elle aura une liberté d'action, et les gens qui la dirigeront, soit les sept régisseurs, seront des gens compétents qui seront capables d'évaluer dans leurs moindres détails tous les éléments à peser pour prendre des décisions lorsque les conflits feront surface. M. le Président, je dois vous dire que, à l'aube du troisième millénaire, je suis fier d'avoir participé à la discussion, à l'élaboration et aux modifications de ce projet de loi qui a été piloté par le ministre de l'énergie. La Régie sera un outil important dans le développement et la place que le Québec occupe déjà et occupera dans un avenir très rapproché sur le marché nord-américain et sur le marché mondial.

Alors, M. le Président, je ne peux que supporter la démarche qui a été entreprise et nous féliciter d'avoir travaillé avec acharnement à modifier, à bonifier ce projet de loi avec les différents intervenants et les différents groupes qui sont venus nous rencontrer, et je suis assuré que cette ouverture sur le troisième millénaire ne pourra que profiter aux Québécois et aux Québécoises. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Argenteuil. M. le député de Laurier-Dorion, pour une intervention. Je vous cède la parole.


M. Christos Sirros

M. Sirros: À mon tour, M. le Président, j'aimerais prendre la parole sur ce projet de loi n° 50, la loi qui va instituer une régie de l'électricité, ou de l'énergie plutôt, au Québec. Comme l'a fait un peu le ministre, j'aimerais rappeler un peu le processus qui a finalement mené à terme l'instauration d'une régie, situer un peu le contexte dans lequel on se trouve par rapport à la façon dont nous accueillons, comme vous avez pu le constater, de façon généralement favorable, l'instauration de cette Régie, idée qui avait commencé à faire son chemin, M. le Président, depuis les années 1973, 1974 à peu près.

Il faut dire dès le départ que nous n'innovons pas dans ce domaine, nous sommes en train, finalement, d'en rattraper d'autres qui ont, bien avant nous, institué des mécanismes indépendants de contrôle des prix de l'électricité. Et, d'ailleurs, ça existe, par exemple, en Colombie-Britannique, ça existe ailleurs au Canada, ça existe aux États-Unis, et nous sommes rendus, finalement, au Québec, à décider qu'on va changer la façon dont on gère les opérations puis les activités d'Hydro-Québec, société de la couronne, d'État, en instituant cette Régie et en donnant le mandat à la Régie, finalement, d'approuver les tarifs d'Hydro-Québec.

(22 h 30)

Cette approbation enclenche donc par la suite une série d'obligations, comme l'approbation du plan de ressources d'Hydro-Québec, qui doit aussi être soumis devant la Régie, qui doit l'analyser, l'examiner, et les pouvoirs qui vont avec cette obligation que la Régie va avoir. Il faut dire que, par le passé, et c'est un des points sur lesquels j'avais hésité pendant un certain temps, en réfléchissant à tout ça: Est-ce que, comme législateurs, on devrait abandonner une décision finale quant à la possibilité d'établir les tarifs? Mon collègue d'Argenteuil parlait de l'ingérence politique au niveau de l'établissement des prix. Dans un certain sens, on peut parler d'ingérence politique, mais il faut toujours se rappeler que l'actionnaire unique, principal, j'étais pour dire, finalement, c'est le public. Et celui qui s'exprime au nom du public, M. le Président – ce sont les gens qui se trouvent dans cette Chambre, finalement – c'est le législateur. Donc, est-ce une ingérence politique que de prendre des décisions par rapport à ce que doit être le prix d'électricité tout en tenant compte des rendements, etc?

Ça, c'est une question à laquelle, je pense, on avait tous commencé à réfléchir en se disant: Est-ce qu'on est capable comme législateurs de faire abstraction de la pression politique – donc, l'ingérence politique n'est pas vis-à-vis d'Hydro-Québec, c'est entre le public, en quelque sorte, et le législateur – et est-ce qu'on est capable de retourner dans nos comtés et dire aux gens qui nous élisent, qui nous envoient ici, que nous avons pris la décision qui va faire en sorte que leur tarif d'électricité va être augmenté?

Plus souvent qu'autrement, on a essayé de trouver des façons de s'accrocher, par exemple, à l'inflation, de trouver des mécanismes qui nous mettraient à l'abri des critiques virulentes de nos commettants qui auraient été pour vous dire qu'on n'aurait pas dû accorder tout ce qu'Hydro-Québec aurait voulu en termes d'augmentation de tarifs d'électricité.

Le mécanisme de la Régie, et surtout la décision finale qui a été prise et avec laquelle on se met tous d'accord pour faire en sorte que les décisions de la Régie soient finales et sans appel au niveau de l'établissement des tarifs, tout au moins, je pense, à la longue, est une décision correcte, même si, à court et moyen terme, j'ai comme l'impression qu'étant donné que, par le passé, souvent le taux de rendement de l'entreprise n'a pas toujours été ce qu'elle aurait souhaité, elle pourrait conduire à des augmentations plus rapides du taux résidentiel d'électricité que ce que les consommateurs ont connu jusqu'à date. Ça va dépendre un peu de la façon avec laquelle Hydro-Québec va faire sa gestion interne au niveau de l'élimination des dépenses inutiles, la réduction de toutes ces dépenses qui ont un impact négatif au niveau du taux de rendement. Et la Régie aura donc aussi la possibilité d'examiner cette question, M. le Président, et de s'assurer que, comme le disait mon collègue, les intérêts du consommateur seront pris en compte, dans le sens d'exiger ou de demander à Hydro-Québec de faire plus par rapport à l'élimination des dépenses inutiles afin d'assurer un taux de rendement plus équivalent.

Donc, l'instauration d'une régie ici, au Québec, n'est pas un contexte d'innovation, c'est un contexte de rattrapage. Et je dois dire d'ailleurs à cet effet-là que j'ai été un peu surpris de voir qu'au ministère des Ressources naturelles on n'était pas à la fine pointe de ce qui se faisait dans les autres provinces, dans le sens d'être en liaison constante, en analyse constante avec nos partenaires canadiens qui ont des profils énergétiques similaires; je pense à la Colombie-Britannique, je pense au Manitoba. Ça serait, il me semble, tout à fait normal, étant donné le partage que nous avons avec nos concitoyens canadiens d'un certain nombre de valeurs, par exemple d'intérêt par rapport à l'impact de nos décisions énergétiques sur l'environnement, la notion que nous avons tous de s'assurer que le public qui, plus souvent qu'autrement, dans le reste du pays également, est représenté au niveau des entreprises énergétiques par des monopoles d'État, ce qui n'est pas le cas aux États-Unis, M. le Président. Donc, nous avons un certain nombre de valeurs communes et de caractéristiques communes avec nos partenaires canadiens, qui devraient amener le ministère des Ressources naturelles à être beaucoup plus en liaison avec les autres provinces en cette matière, surtout ceux qui ont déjà une expérience acquise, réelle par rapport au fonctionnement des régies.

Il faudrait éviter de toujours essayer de dire que nous sommes à ce point, en tout cas, différents, que nous n'avons pas beaucoup de choses à apprendre par rapport à ceux qui ont commencé à faire ce travail avant nous. On pourrait mutuellement s'entraider, et ça serait quelque chose qu'on devrait, je crois, poursuivre.

L'objectif de la Régie, le travail, finalement, de la Régie va être de trois ordres, M. le Président: une régie qui va continuer à faire ce que la Régie du gaz actuelle fait, c'est-à-dire réglementer le prix du gaz naturel; vient s'ajouter à ça toute la question, comme je disais tantôt, de la réglementation de l'électricité, et on a ajouté également une surveillance du prix du pétrole. Sur cette dernière question, le prix du pétrole et sa surveillance, c'est un domaine qui n'est pas proprement dit celui d'une régie de l'énergie, c'est beaucoup plus un aspect de contrôle des prix sur le marché, décision que le gouvernement a été amené à prendre étant donné la situation qu'on a connue tout récemment. Et c'est toujours délicat sinon dangereux pour un gouvernement d'agir directement sur les forces du marché, M. le Président.

Vous me dites qu'il me reste deux minutes, ça passe vite effectivement. Mais, ce faisant, le gouvernement a pris une décision, et j'ai manqué les derniers détails, donc je ne sais pas si le ministre a finalement réglé ses inquiétudes quant à la nécessité pour la Régie de regarder aussi du côté des facteurs d'établissement de prix autres que le prix à la rampe et les taxes qui, comme proposition que nous avons reçue, établissaient une base, je pensais, équitable pour l'ensemble des entrepreneurs, de partir avec et se faire de la concurrence par la suite. Parce que ce qu'on cherchait à éviter, c'est qu'il y ait de la concurrence déloyale. Alors, une proposition intéressante qui avait été faite, et ce serait quelque chose peut-être à suivre de plus près, c'était de partir avec une base minimale pour tout le monde qui serait le prix à la rampe, le prix international, si vous voulez, ajoutez à ça les taxes qui sont applicables également à tout le monde, pour laisser par la suite la concurrence jouer au niveau de la capacité de chacun d'être concurrent par rapport à tout ça, et le prix de transport, M. le Président.

Dernière chose, et c'est dommage qu'il ne reste qu'une minute. Le ministre a dit que la déréglementation est au coeur de ce projet. Mais, M. le Président, je vous fais remarquer que c'est une question qui a été ajoutée en quelque sorte à la dernière minute à ce projet de loi, parce que la déréglementation ne faisait pas partie dès le départ de tout le processus de réexamen de la politique énergétique. Alors, si c'est rendu que c'est au coeur de ce projet de loi, il faut faire bien attention à comment ce coeur va battre, M. le Président.

Et je suis heureux de voir que, même si on n'a pas réussi à convaincre le ministre que ça aurait été plus cohérent et logique d'abord de faire une analyse de la pertinence de la déréglementation et de décider par la suite, on a au moins réussi à le convaincre qu'il fallait, d'une part, baliser le processus en s'assurant qu'il y ait des audiences publiques au niveau du processus que la Régie va entreprendre pour arriver à la déréglementation et, en plus, qu'il y ait une commission parlementaire par la suite sur ça. Dans ce sens-là, la question de la pertinence, même si elle n'est pas préalable à la décision, va aussi être examinée, ce qui devrait nous permettre au moins de suivre de plus près les préoccupations que plusieurs personnes ont soulevées à cet égard et nous permettre par la suite de voir si ce coeur devrait continuer à battre dans le sens de nos voisins américains, qui n'ont pas le même contexte, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion. Et, s'il n'y a pas d'autres intervenants, je vais céder la parole à M. le ministre pour son droit de réplique.


M. Guy Chevrette (réplique)

M. Chevrette: Oui, juste répondre à la question que m'a posée le député de Laurier-Dorion. Effectivement, nous avons introduit les autres éléments devant faire partie du coût minimal ou du prix plancher dans le domaine pétrolier. D'autre part, nous avons introduit un mécanisme assez neuf, assez nouveau à la fin de tout, en ce sens que la Régie peut retirer ce prix-là, ces éléments-là, comme elle peut le remettre dans une zone ou dans une autre. S'il y a une guerre atroce dans une zone, elle pourrait le mettre et le retirer après. Donc, c'est un pouvoir discrétionnaire de la Régie suite à la surveillance de l'application des trois premiers items: la rampe, les taxes fédérales et provinciales et le transport. Donc, c'est un élément neuf, c'est nouveau. C'est suite à une discussion à peu près d'une heure, une heure et demie entre les membres de la commission, parce qu'on cherchait la formule la meilleure possible, et c'est sur ce compromis qu'on s'est rabattus unanimement en commission parlementaire.

(22 h 40)

M. le Président, vous me permettrez à nouveau de réitérer mes remerciements aux députés de l'opposition, à mes collègues de l'Assemblée nationale, à tous mes fonctionnaires politiques, également à mes employés et à mes deux avocates qui ont travaillé très fort. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le projet de loi n° 50, Loi sur la Régie de l'énergie, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 26 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 76


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 26, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 76, Loi instituant le Fonds de partenariat touristique. Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce, je vous cède la parole.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, je vous demande de prendre en considération le rapport de la commission qui a étudié le projet de loi n° 76, la Loi instituant le Fonds de partenariat touristique. Ce projet de loi représente un changement majeur pour l'industrie touristique québécoise. En fait, sa raison d'être, c'est la croissance de l'industrie touristique dans toutes les régions du Québec.

Ce projet de loi se distingue particulièrement sous deux aspects, et nous en avons longuement discuté en commission. Il apporte, je pense, une solution durable au problème de sous-financement de l'industrie touristique québécoise. Deuxièmement, et c'est un point important, il accorde une large autonomie décisionnelle aux instances régionales, conformément à l'approche que notre gouvernement a choisie dans ses relations avec les régions. En faisant appel à deux sources nouvelles de financement, le Fonds de partenariat touristique permettra d'accroître de façon importante les budgets consentis pour la promotion et le développement du tourisme.

Ce projet de loi revêt une importance encore plus grande pour la grande région de Montréal, parce que c'est là qu'on retrouve environ 35 % des recettes touristiques de tout le Québec. Et c'est cette région qui d'ailleurs a été le promoteur, le supporteur de ce projet de loi. Toutefois, nous avons voulu l'offrir aux autres régions. Nous avons voulu offrir ce que Montréal a demandé à toutes les régions du Québec, et c'est selon leur intérêt à y participer, et le projet de loi le prévoit, que ce Fonds de partenariat se définira et sera accessible aux régions du Québec.

Le Fonds est composé de deux sources de revenus essentiellement. La première, c'est un revenu qui résulte de l'application purement et simplement de la taxe de vente aux forfaits hôteliers. Cette application repose sur un principe d'équité en matière de fiscalité. À un moment où on demande la contribution de tous les intervenants de la société québécoise, les touristes feront aussi leur part, M. le Président.

L'autre volet de ce projet de loi, l'autre source de revenus s'appuie sur une contribution de 2 $ par chambre par jour chargée aux touristes qui loueront une unité d'hébergement dans les établissements d'hébergement du Québec. C'est cette mesure qui a fait l'objet d'un consensus à Montréal et à Laval et qui est offerte à toutes les autres régions du Québec. Si toutes les régions y souscrivaient, nous aurions une masse critique de 25 000 000 $ à retourner à l'intérieur d'activités de promotion et de développement touristique. Pour Montréal, l'application de cette contribution volontaire représentera des fonds additionnels de plus de 8 000 000 $, et je suis persuadée que l'opposition, qui parle toujours des efforts additionnels pour Montréal, partage notre engagement, et ils nous l'ont dit d'ailleurs en commission parlementaire et lors des discussions sur ce projet de loi.

Il y a eu beaucoup d'étapes qui ont précédé l'étape d'aujourd'hui. Nous avons eu des consultations particulières avec l'industrie les 2 et 3 décembre. Nous avons eu la commission parlementaire qui a étudié article par article le 16 décembre. Nous avons eu d'autres rencontres avec différents intervenants de l'industrie, notamment aussi avec les hôteliers et les associations touristiques régionales. J'ai répondu à leurs questions, à leurs préoccupations. Encore hier soir, je rencontrais un autre groupe pour répondre et clarifier certains éléments. Je pense aujourd'hui, en prenant en considération les rapports de la commission, qu'on peut dire que nous avons couvert les préoccupations de tous ceux qui ont à coeur le développement de l'industrie touristique du Québec, une industrie, je le rappelle, qui contribue 5 000 000 000 $ à l'économie du Québec, qui emploie 100 000 personnes à travers tout le Québec d'aujourd'hui.

Moi aussi, je remercie tous ceux qui ont travaillé à la commission pour leur travail remarquable, puisque le projet de loi n'a connu qu'un petit amendement qui a été fait à l'occasion des discussions de la commission parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le député de Papineau, je vous cède la parole.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de pouvoir, ce soir, vraiment de pouvoir amener, après, comment je dirais ça, plus de 28 ou 32 heures que nous sommes ici, dans cette enceinte de l'Assemblée nationale, le projet de loi n° 76 sur le Fonds de partenariat touristique. À ma grande surprise, beaucoup de monde ont posé plusieurs questions, soit par les consultations, soit par beaucoup de téléphones de beaucoup de gens du monde touristique. Et sûrement que Mme la ministre a eu les mêmes téléphones ou les mêmes inquiétudes, si vous voulez, au sujet du Fonds touristique, surtout par les régions.

M. le Président, je dois vous dire que les régions ont dit régulièrement que le Fonds de partenariat touristique était un fonds qui était louable, un fonds que les gens veulent regarder, un fonds que les gens veulent consulter avec leurs partenaires dans chacune des régions. Et on doit dire aux gens de Montréal et de Laval, qui sont d'accord, on doit dire à ces gens-là: Bonne bataille! Parce que ces gens-là, depuis 1991, ont demandé d'avoir un fonds de partenariat touristique ou un fonds pour pouvoir développer côté promotion, côté touristique.

Une fois que ça a été mis sur la table, M. le Président, et une fois qu'on a eu des discussions, soit en consultations, soit avec des rencontres avec plusieurs personnes de ces gens-là, on a aussi en même temps parlé d'un forum, un forum touristique, un forum que Mme la ministre, pendant un voyage à Costa Rica, a décidé d'organiser, et c'est très louable. Et, de ce côté-ci, on veut l'avoir, le forum. Notre recette magique à nous, M. le Président, c'est... Pourquoi passer une loi immédiatement, très rapidement, que les gens ne se posent pas de questions sur le fond de la loi? Ils se posent des questions: Donnez-nous la chance de pouvoir discuter avec nos partenaires dans chacune de nos régions. À Montréal et à Laval, ils ont pris leur décision sur le Fonds de partenariat touristique. C'est quand même eux, depuis 1990-1991, qu'on me dit, qui ont suggéré, quand, nous, on était au gouvernement, d'avoir ce fonds, le Fonds de partenariat touristique, et l'application de ce Fonds.

Mais, maintenant, suite aux consultations, M. le Président, les gens ne disent pas non au Fonds mais ils disent: Pourquoi ne pas discuter ensemble, les gens du tourisme de chacune de nos régions? Nos régions: l'Outaouais, l'Abitibi, les Cantons-de-l'Est, Chaudière-Appalaches, Gaspésie, Québec, Lévis, Bas-Saint-Laurent, ces gens-là ont vraiment demandé de pouvoir s'asseoir avec les gens du tourisme avant de passer cette loi-là comme ça.

(22 h 50)

C'est sûr, si les gens de l'Association de l'hôtellerie du Québec ou l'association de l'hospitalité du Québec qui nous écoutent présentement... Je ne suis pas sûr si vraiment ces gens-là sont assis en avant de leur télévision puis ils nous écoutent, M. le Président. Ils s'occupent de leur business, dans ce genre de business là. On a demandé de vraiment donner la chance d'avoir des consultations, et, sur les neuf ou dix groupes qui sont venus dans nos consultations, il y en a huit qui ont dit: Très louable, le Fonds de partenariat touristique, mais donnez-nous la chance de discuter ou de consulter les gens du tourisme. Et on doit, nous, comme législateurs, écouter ces gens-là. C'est pour ça qu'on a des consultations. C'est pour ça qu'il y a des consultations qui existent dans tous les projets de loi qui sont présentés ici, à l'Assemblée nationale.

On n'a pas fait ça. On a eu une consultation une journée, une dizaine d'heures; deux, trois heures le lendemain. Ces gens-là ont dit: O.K. Mais on veut absolument, pour les gens de Montréal et de Laval, passer cette loi-là. Il y a des gens de l'autre côté, du gouvernement, qui sont d'accord avec nous – je ne mentionnerai pas de noms, mais je peux les regarder – pour avoir une consultation, pour aller au forum qui est à la fin février, M. le Président, le 24 ou le 25 février. La date n'a pas été mise sur la table encore par Mme la ministre déléguée à l'Industrie, au Commerce et au Tourisme. Ces gens-là veulent absolument demander à ces gens-là du tourisme d'avoir une consultation. Ça ne coûte rien, une consultation. On met les gens... On en a eu, des consultations, et Dieu sait que ce gouvernement-là, il est très fort en consultation: un sommet...

Une voix: Quand ils connaissent les conclusions à l'avance.

M. MacMillan: On a eu beaucoup d'autres choses. On en a inventé d'autres: Montréal métropole. Et les résultats, bien, on attend toujours quand même. Mais les régions. Où sont les régions dans ce projet de loi là, les fonds de partenariat touristique? Les régions, on a eu aujourd'hui, de l'ATRAQ, un communiqué qui nous dit: Oui, on est d'accord avec le projet de loi. Donnez-nous la chance de discuter avec nos gens dans chacune de nos régions avant de passer la loi. C'est ça qu'on veut. On a appelé ça une «recette magique». Mme la ministre, vous vous rappelez, on a passé des motions en commission parlementaire, et pour moi ça a été une première expérience des motions. On était obligé de parler pendant 30 minutes, de discuter et de dire le même discours qu'on a aujourd'hui. Le même, même discours qu'on a aujourd'hui, M. le Président: Donnez la chance aux régions de pouvoir consulter les gens dans chacune de nos régions pour passer cette loi-là.

La loi, ce serait plus facile, quand même, de la passer au mois de mars, M. le Président. Le Fonds, le 2 $ la nuitée, un revenu de 10 000 000 $ pour faire de la promotion internationale pour inviter les gens à venir nous visiter chez nous, au Québec. Compétition directe avec les gens, par exemple – et toujours selon Mme la ministre – de la Colombie-Britannique, qui met beaucoup, beaucoup d'argent pour faire de la promotion internationale. Mais là on veut, ce soir – tout le monde qui est ici, la majeure partie des gens sont debout depuis 30 heures – nous passer ça et ne pas donner la chance aux gens... Et on ne dit pas, là... C'est difficile, quand même, de dire: Est-ce qu'on est pour ou contre? Ce n'est pas ça qu'on veut. On veut la recette magique. On veut que les gens donnent une chance... Et le secret de ça, c'est que l'Association des hôteliers du Québec, ils veulent avoir un règlement. Hein? Bien oui – Mme la ministre me fait signe – ils veulent avoir un règlement depuis deux ans, et Mme la ministre m'a dit en commission parlementaire que ça fait trois, quatre ans qu'on parle de ça. C'est vrai. On a des règlements – je n'ai pas mon dossier avec moi – qui ont été déposés pour aider les gîtes: des maisons de campagne, une chambre. Avoir des règlements et que tout le monde participe à ce Fonds de partenariat touristique. Les gens de l'association d'hospitalité du Québec, qui comprend les agricotours, qui comprend toutes les petites auberges ici, à Québec, et toutes les auberges de Charlevoix... Je vois le député de Charlevoix, ici, qui est sûrement d'accord avec ça. On doit donner la chance à ces gens-là de se regrouper, de discuter puis de mettre un fonds sur la table, ensemble, pour avoir vraiment de la promotion touristique.

La promotion touristique, M. le Président, ce n'est pas seulement de la promotion internationale. Il y a des gens de Thetford Mines, du député de Frontenac, il y a des gens de Châteauguay, et si, nous, ensemble, on faisait la promotion de notre région dans l'Outaouais pour inviter ces gens-là à venir chez nous, tout le monde en profiterait. Est-ce qu'on est obligé de prendre tout ce 10 000 000 $ là et de le mettre sur la table pour inviter les gens de la France, les gens de l'Asie? Chez nous, on a le droit de venir visiter nos régions, on a le droit de connaître nos régions ici, au Québec, de connaître Charlevoix, de connaître Québec, et Dieu sait que les gens en avant de moi, faire connaître le Québec, c'est encore plus important pour eux que pour moi. Moi, je dirais: Faire connaître le Canada et le Québec ensemble. Où ça? Où ça? M. le Président, on me dit: Où ça? J'ai eu la chance durant le référendum d'aller visiter, en Abitibi, des gens très...

M. Garon: C'est loin.

M. MacMillan: Non, ce n'est pas loin. De chez nous, ce n'est pas loin, M. le député de Lévis. Ces gens-là voudraient savoir aussi ce qui se passe chez nous, dans l'Outaouais: le lac de l'Argile, le casino à Hull.

Une voix: ...

M. MacMillan: Ha, ha, ha! Non, c'est plus loin que ça. Ha, ha, ha! Vous ne le savez pas, hein, même? Tous ces gens-là... Mais on pense seulement à l'international, puis c'est important, ce budget-là de 10 000 000 $, mais les gens ne sont pas d'accord. Les hôteliers disent, eux: Pourquoi c'est juste... Il y a rien qu'eux autres qui paient le 2 $, M. le Président. Ce 2 $ là, c'est seulement pour les gens qui ont des chambres. On ne parle pas des auberges, on ne parle pas des petits motels, on parle strictement... Un exemple: dans l'Outaouais, c'est 25 hôtels qui vont en donner, qui vont récupérer 1 000 000 $ par année. C'est beaucoup d'argent pour faire de la promotion. Tant mieux! Mais on ne donne pas la chance à ces gens-là de s'asseoir alentour d'une table du tourisme pour pouvoir vraiment mettre un fonds de partenariat touristique ensemble, où tout le Québec, tous les partenaires seraient ensemble. Charlevoix...

Une voix: Belle région, Charlevoix, très belle.

M. MacMillan: Une région extraordinaire, une région dont un des présidents de l'association de l'hospitalité du Québec, un M. Alain, est venu défendre ça, et le député de Charlevoix était présent.

Pas contre ça, le 2 $, M. le Président. On veut la recette magique, et la recette magique, c'est le forum touristique, un consensus, une concertation, une table; concerter tous ensemble. Ils «sont-u» forts, les gens de l'autre côté, ici, sur des réunions ensemble puis des discussions! C'est un peu comme, on disait hier soir, dans d'autres dossiers. Le Bloc puis le Parti québécois, on se rencontre puis on se rencontre; aucune décision ne se fait.

Mais, nous, les gens du tourisme veulent s'asseoir avec madame de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, ensemble, pour vraiment émettre leurs opinions, avoir le commentaire pour avoir un fonds ensemble avec Tourisme Québec, une agence qui fait de la promotion, 40 000 000 $ et au-delà, le budget total l'an passé. Il y a eu une augmentation d'un pourcentage cette année. Mais est-ce que les gens des petites auberges, des motels... Ils ne le font pas. Ils ne sont pas ensemble, M. le Président.

Les consultations, très important, l'association, l'Office du tourisme du Québec, l'association des offices du tourisme du Québec, les municipalités qui investissent beaucoup d'argent. On a beaucoup d'anciens maires ici qui connaissent les montants d'argent que les municipalités, ou les MRC, ou la CUO, ou les communautés urbaines investissent, et elles voudraient aussi avoir leur part. Ce n'est pas ça qu'il faut faire; c'est de se mettre ensemble, d'avoir une table, un forum, d'instituer le Fonds de partenariat touristique.

(23 heures)

J'entends beaucoup de commentaires dans le fond, M. le Président; peut-être que j'inviterais les gens de l'autre côté à émettre leurs commentaires sur le fonds touristique, à ne pas nous laisser juste l'odieux de faire les commentaires de la consultation, ou du forum, ou du 2 $ par nuitée. Et on ne parle pas de la détaxation. La détaxation, encore, c'est une manière de créer 10 000 000 $ qui va aller dans le fonds consolidé de la province. C'est un autre dossier qui est important et dont on ne parle pas versus le Fonds. Ça, c'est un dossier qui vient du sommet économique de Montréal, du Sommet sur l'économie et... – je n'ai pas eu la chance d'y assister... pardon? – ...

Une voix: Socioéconomique.

M. MacMillan: ...socioéconomique. Et c'est une demande de la table Bérard, du président de la Banque Nationale. C'était une suite à ça. Et les gens de Montréal et de Laval sont d'accord avec ça, et les gens des régions aussi. Mais les gens des régions, M. le Président, veulent avoir un forum, c'est important.

Un autre point, la détaxation. Tantôt, le député d'Argenteuil vous parlera, et Mme la ministre était d'accord avec nous, du fait que la détaxation des forfaits de deux jours et plus qui ont été réservés pour l'année 1997, avec le forfait, la taxe de 13,5 % – TVQ et la taxe du fédéral... Ces gens-là qui ont réservé avant le 1er avril pourront ne pas payer la taxe. C'est important, c'est encore un autre point dont les gens pourront prendre avantage cette année. Et les terrains de golf, dans chacun de nos comtés, dans Charlevoix, dans l'Outaouais, dans Argenteuil-Papineau, dans Lanaudière, dans les Laurentides, ces gens-là pourront en profiter.

M. le Président, la consultation que nous avons eue ici, à l'Assemblée nationale, le message, suite à la consultation: les gens des associations de l'hôtellerie du Québec et beaucoup d'autres gens nous ont demandé de pouvoir retarder, pas de retarder la taxe – c'est encore une taxe, on est contre une taxe – mais de pouvoir demander à ces gens-là de pouvoir s'asseoir à une table... M. le Président, j'ai l'impression que vous n'êtes pas d'accord avec ce que je vous dis. Mais c'est important pour nos régions. C'est imporant, on parle de 2 $ par soir qu'ils vont taxer sur les chambres, puis on n'a pas un mot à dire, les gens du tourisme... C'est nous, le gouvernement, qui allons décider d'appliquer cette taxe-là sans avoir une consultation, comme d'habitude. Hier, on a eu le téléthon de 400 000 000 $...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. MacMillan: ...28 ou 29 heures, encore, ici. On parle encore de taxes, malheureusement. On parle encore de taxes, des millions et des millions d'argent qu'on va chercher aux Québécois, Québécoises. Et c'est la même chose avec le 2 $, c'est les Québécois, Québécoises qui vont le payer. Les gens en dehors du Québec, en dehors du Canada, eux, peuvent réclamer la taxe, avec la TPS, TVQ.

C'est malheureux, M. le Président, aucune concertation. Plus que ça, quand on a eu les consultations, les gens qui étaient d'accord avec le gouvernement, on allait les voir, on leur disait merci, on se penchait en avant, puis, quand ils n'étaient pas d'accord, on ne grouillait pas, personne n'allait les voir. C'étaient les gens de l'opposition qui leur disaient: Merci de votre opinion, merci de vos commentaires. Ce n'est pas comme ça que ça marche.

Une voix: Ils n'ont pas été polis.

M. MacMillan: Bof! Je ne voudrais pas dire ça, parce que Mme la ministre...

Une voix: Elle est gentille.

M. MacMillan: Oui, c'est à peu près ça, elle est gentille, oui, elle est fine, mais elle n'écoute pas toujours. M. le Président, la consultation est importante avec les gens du tourisme. Et les gens vont tantôt... À ma grande surprise, on m'a demandé de laisser la chance aux gens des régions de pouvoir émettre leurs commentaires. Je n'étais pas d'accord avec ça. J'avais dit à Mme la ministre: Vous allez parler, moi, je vais parler, puis on va passer cette loi-là, puis on votera demain, s'il y a un vote. Mais les gens de chacune de nos régions, de notre parti, ici, ont décidé d'émettre leurs commentaires. Alors, la démocratie dit: On écoute les gens de Montréal, les gens de Lanaudière, les gens de l'Outaouais, les gens de Charlevoix. Et j'espère que, de l'autre côté, le gouvernement va parler, je le souhaite, M. le Président. C'est important qu'ils émettent leurs commentaires. Ce n'est pas grand-chose, une petite taxe de 2 $ par soir, ça a l'air... Le député de Lévis, ça fait longtemps qu'on ne l'a pas entendu, malheureusement. Le journal est plus intéressant que mon discours, mais quand même.

M. le Président, il est important que le message, ici, ce soir... Nous, de ce côté-ci, de l'opposition, du Parti libéral du Québec, on ne dit pas que la taxe n'est pas à l'avantage des gens. Ce n'est pas ça qu'on veut. On veut donner la chance aux gens du tourisme de pouvoir s'asseoir alentour d'une table pour trouver les solutions; urbains, les régions, de travailler ensemble et de présenter une loi ici, à l'Assemblée nationale, que tout le monde va avoir décidée, pas les législateurs, les gens qui travaillent dans le tourisme.

Et tantôt l'ancien ministre du Tourisme, le vrai ministre du Tourisme – c'était son titre – va sûrement discuter pendant une dizaine de minutes avec vous pour vous dire que le forum, M. le Président, c'est ça qu'on veut. C'est la recette magique: les règlements pour une chambre, deux chambres, trois chambres pour la sécurité et la qualité des gens qui viennent nous visiter au Québec; ensuite le forum; et ensuite une loi, M. le Président.

Alors, là-dessus, M. le Président, je vous invite et j'invite les gens de l'autre côté à discuter avec nous pour avoir peut-être la meilleure loi qui ait été passée dans cette session-ci. Et la meilleure loi, ça serait pour le tourisme du Québec et ça serait à l'avantage de toutes les régions et de Montréal et de Laval, et ça créerait des emplois au lieu d'avoir seulement 5 000 000 000 $ et 100 000 jobs par année. Des jobs, 300 000 qui sont «part time» – excusez l'expression – à temps partiel. On pourrait l'augmenter. C'est le futur. Et c'est Mme la ministre qui l'a dit, ça, de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, entre parenthèses, que, pour les années 2000, le tourisme au Québec serait probablement l'attrait principal et la création d'emplois qui dépasserait toutes les créations d'emplois qu'il y a aujourd'hui. Alors, j'invite mes collègues à m'appuyer et à demander à Mme la ministre, M. le Président, la recette magique: le règlement, le forum et la loi au mois de mars quand nous allons revenir. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Je vous remercie, M. le député de Papineau. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir dans la discussion du projet de loi n° 76, Loi instituant le Fonds de partenariat touristique. D'entrée de jeu, M. le Président, j'aimerais saluer le travail fait par le porte-parole de l'opposition officielle, le député de Papineau, dans ce dossier. Moi, j'ai toujours pris comme une règle que c'est toujours important de consulter les personnes qui font quelque chose, qui sont impliquées quotidiennement dans un domaine. On a une occasion en or, dans cette Assemblée, parce que le député de Papineau a géré un hôtel. Il connaît ça. Il a géré un petit hôtel dans une région. Alors, il sait fort bien les problèmes, les enjeux des choses. Alors, il faut profiter des connaissances de mon collègue le député de Papineau. Quand mon collègue le député de Papineau est venu me voir pour dire: Ce projet de loi n'est pas mûr, j'ai dit: On a tout intérêt à entendre quelqu'un qui connaît de quoi il parle. Il a fait ça, et c'est quelqu'un...

Alors, j'ai regardé rapidement dans nos coupures de presse et j'ai trouvé écho aux sages conseils de mon collègue de Papineau. Dans un article du Soleil du 8 décembre: «Réimposer la TVQ nuira au tourisme». J'ai trouvé, encore une fois, dans Le Soleil : «Mobilisation des hôteliers contre la taxe de 2 $». Alors, j'ai trouvé des indices troublants que peut-être il y a des questions à regarder, que peut-être l'idée n'est pas encore tout à fait mise ensemble. Alors, on a tout intérêt à peut-être ralentir un petit peu, regarder les enjeux, regarder les problèmes. Alors, je veux, encore une fois, saluer mon collègue de Papineau parce que c'est lui qui m'a dit: Peut-être qu'il y a des problèmes.

(23 h 10)

Alors, j'ai eu l'occasion de participer aux travaux de la commission de l'économie et du travail pour regarder ce projet de loi. Nous avons identifié quatre problèmes qui, je pense, sont assez importants, et il faut prendre le temps pour trouver les réponses, trouver les solutions. Le problème, c'est, encore une fois, autour de cette notion de la taxation. Le premier ministre a dit à maintes reprises, le ministre des Finances de ce gouvernement a dit à maintes reprises: L'impôt tue l'emploi. L'impôt tue l'emploi. Alors, nous avons répété ça: Si on met trop de taxes, si on met trop de tarifs sur les choses, on risque de perdre des emplois. Et c'est dans ce sens, comme j'ai dit, que l'article dans Le Soleil a dit que la détaxe risque de nuire à l'hôtellerie et au tourisme au Québec.

Alors, quand on voit ça, je pense qu'on a tout intérêt à dire: Attendez une minute, on va regarder ça, on va voir si effectivement... Et, comme je dis, cette année a été très bien pour améliorer ma connaissance des autres façons de dire le mot «taxe», parce que ce gouvernement est devenu un expert dans les tarifications, les contributions, la participation, les bonifications. Il y a beaucoup de mots comme ça. Alors, ce n'est pas des taxes. On va chercher davantage d'argent dans les poches des contribuables, mais ce n'est pas des taxes.

Mais je dois avouer que le gagnant dans tout ça doit être la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce, parce que ce qu'on trouve dans ce projet, c'est l'abolition de la détaxation. L'abolition de la détaxation, ça m'a pris du temps un petit peu, M. le Président, pour comprendre c'est quoi, ça, exactement, mais c'est une taxe. Alors, c'est «cut to the chase», comme on dit en anglais.

C'est 10 000 000 $ qu'on veut prendre pour éliminer une mesure que le gouvernement précédent a mise en place pour encourager le tourisme. Alors, c'est un 10 000 000 $ de plus que les contribuables québécois et les touristes des autres provinces et pays devront payer, plus le 25 000 000 $ qui va être collecté à partir de 2 $ la nuit dans nos hôtels. Alors, c'est 35 000 000 $. Alors, je pense qu'il faut être prudent. Est-ce que ça risque de diminuer le nombre de personnes qui couchent dans nos hôtels? Est-ce que ça risque d'avoir un effet pervers: au lieu de faire la promotion, ça va nuire à la progression de notre industrie de l'hôtellerie? Une question qu'il faut poser, et moi, comme je dis, je suis prêt à entendre les experts dans un forum pour voir si, effectivement, l'abolition de la détaxation risque de nuire à l'industrie de l'hôtellerie.

D'entrée de jeu à la commission, il y a eu une lettre qui avait été déposée par des avocats qui représentaient l'Association des hôteliers de la province de Québec, qui questionnait la constitutionnalité de cette taxe. Encore une fois, c'est un avis de trois pages qui est fort compliqué, et je ne prétends pas avoir l'expertise constitutionnelle qu'il faut. Mais nous avons demandé à la ministre et à ses conseillers juridiques s'ils peuvent déposer une analyse de l'avis, parce que je pense qu'on a tout intérêt à éviter les contestations juridiques. C'est un point que nous avons soulevé hier soir à l'égard du projet de loi de la ministre de l'Éducation, qui semblerait se diriger vers une contestation juridique avec les commissions scolaires de la région de Montréal concernant l'école Coronation.

Alors, de notre côté de la Chambre, on dit: On veut sauver l'argent des contribuables, on ne veut pas se diriger vers une autre contestation juridique, avec des frais d'avocats qui risquent de coûter beaucoup aux contribuables du Québec.

Troisièmement, moi, j'ai testé ce fameux consensus à Montréal, et, comme bon député, la chose que j'ai faite, c'est que j'ai parlé aux gérants des hôtels dans mon comté. Et, dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal, où il y a des hôtels importants, autour de l'aéroport de Dorval et les autres endroits, ils disent qu'ils ne sont pas très chauds sur la taxe parce que la promotion va être uniquement gérée par l'Office des congrès et du tourisme du Grand Montréal.

Et, parce que la promotion du tourisme dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal n'est pas parfaitement faite par l'Office des congrès et du tourisme, nous avons créé, dans l'ouest de Montréal, il y a 10 ans, le Bureau touristique du West Island, qui est autofinancé. C'est quelque chose que les hôtels et les autres partenaires de l'Ouest-de-l'Île de Montréal autofinancent, et c'est encourageant, je pense. C'est les personnes qui sont prêtes à mettre leur propre argent pour faire leur propre promotion, qui font la promotion du tourisme, qui font la promotion de nos hôtels dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal.

Quand j'ai dit: Qu'est-ce que vous pensez de cette idée intéressante d'un fonds touristique? Ils disent: C'est une autre taxe et ça va être d'autres frais qu'il faudra imposer aux personnes qui veulent coucher dans nos hôtels. Mais on ne voit aucun avantage pour les hôtels, dans mon comté. Alors, j'ai dit: Wo! Ça, c'est intéressant, et peut-être qu'on peut regarder ça davantage. S'il y a de l'argent perçu dans ces hôtels, peut-être qu'il y a une façon de dévier un montant pour supporter les activités du Bureau touristique de l'Ouest-de-l'Île de Montréal.

Une autre question qu'il faut regarder est finalement quelque chose que ma collègue la députée de Saint-François a regardé avec attention, c'est toute la gestion de l'argent dans ce fonds. Je pense qu'il est très important que, si on le décide et si le consensus est établi avec les partenaires dans les régions à Montréal, dans toutes les régions de Montréal, à Laval, de créer ce fonds afin de faire la promotion, il faut s'assurer que ça va rester dans un fonds qui va contribuer à la promotion touristique. Et qu'est-ce que nous avons trouvé dans le projet de loi? Il n'y a aucune assurance que l'argent perçu va être dédié ou va être alloué à la promotion touristique. Alors, je pense que c'est une autre question qu'il faut trouver...

Quand mon collègue le député de Papineau m'a dit que, vers la fin février, on va rassembler tous les partenaires, on va prendre le temps pour regarder de A à Z ce dossier, j'ai dit: On a tout intérêt, ce soir, à attendre ce consensus, ce regroupement important, cette recette magique des personnes dans l'industrie de l'hôtellerie avant de procéder pour répondre... Moi, j'ai soulevé quatre problèmes. Peut-être y en a-t-il beaucoup d'autres? Mes collègues peut-être vont soulever d'autres questions. Mais je pense qu'on a tout intérêt... On va attendre trois mois, ce n'est pas la fin du monde, juste pour s'assurer que ce fonds va effectivement faire la promotion du tourisme au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jacques-Cartier. Y a-t-il d'autres intervenants? Oui, M. le député des Îles-de-la-Madeleine, je vous cède la parole.


M. Georges Farrah

M. Farrah: Oui, merci, M. le Président. Alors, c'est avec beaucoup de plaisir en ce jeudi soir, 23 h 15, que j'interviens sur le projet de loi n° 76, Loi instituant le Fonds de partenariat touristique.

M. le Président, c'est avec beaucoup de plaisir, compte tenu que c'est un domaine que j'affectionne particulièrement, compte tenu que c'est un domaine qui est très, très important pour l'économie du Québec... Comme vous le savez, M. le Président, l'industrie touristique génère plus de 400 000 emplois au Québec, soit à peu près 100 000 emplois à temps plein et 300 000 à temps partiel. Elle génère des recettes d'à peu près 5 000 000 000 $, et il y a à peu près 25 000 à 30 000 entreprises qui oeuvrent dans ce secteur-là. Alors, M. le Président, vous comprendrez que c'est un secteur qui est très, très important pour l'économie du Québec, et notamment pour les régions du Québec, M. le Président. Alors, ceci étant dit, c'est la raison pour laquelle la promotion touristique est très importante.

Et on ne s'objecte pas, M. le Président, nous, à ce qu'il y ait des enveloppes de promotion touristique, parce que, je pense, ça doit être la priorité, une des grandes priorités du ministère, compte tenu que la promotion touristique, évidemment, génère beaucoup d'activités économiques. Parce que, en fin de compte, c'est ça qui fait en sorte qu'on peut aller chercher de la clientèle touristique et l'accueillir chez nous, M. le Président.

Compte tenu également que, dans le contexte mondial actuel, M. le Président, vous savez, avec l'ouverture des frontières, l'ouverture des marchés et les moyens de communication qui sont excessivement faciles, alors vous comprendrez que le Québec comme destination touristique est en compétition avec l'ensemble des destinations du monde entier. Alors, c'est une raison encore pour laquelle il faut être très, très agressif sur le plan international pour justement faire en sorte qu'on puisse attirer la clientèle touristique chez nous, ici, au Québec, M. le Président.

Évidemment, l'approche de la taxe est discutable, compte tenu que, dans le passé, le ministère, évidemment, avait des programmes de promotion par fins de subventions, souvent en partenariat aussi avec les gens du milieu ou les gens de l'industrie. Mais c'est un gouvernement «taxeux», M. le Président, alors, pour lui, c'est exclusivement le seul moyen qu'il a, comme gouvernement, à sa disposition pour générer de l'argent. Alors, le seul moyen, c'est des taxes, des taxes, des taxes, M. le Président.

Compte tenu également que, depuis l'arrivée de ce gouvernement du Parti québécois, c'est une pluie de taxes qui est tombée sur la tête des Québécois et des Québécoises, au-delà de 2 000 000 000 $, M. le Président. Alors, vous comprendrez que, compte tenu de la situation économique qui prévaut au Québec, ce montant de taxes, cette avalanche de taxes est absolument inacceptable pour les Québécois et les Québécoises.

(23 h 20)

Qu'est-ce qui peut nous préoccuper au niveau de la taxe sur la promotion touristique, le Fonds de partenariat touristique, M. le Président? C'est qu'il faut s'assurer que, si le gouvernement décide de faire ce choix-là – je ne suis pas convaincu que la taxe est le meilleur choix – si le gouvernement décide de s'inscrire dans ce sens, c'est que ça fasse en sorte qu'on conserve les consensus au niveau touristique, compte tenu que c'est plusieurs partenaires qui oeuvrent au niveau touristique: vous avez les hôteliers, vous avez les restaurateurs, vous avez les attractions touristiques, vous avez les terrains de camping. Alors, il y a un nombre extrêmement élevé de partenaires dans ce secteur d'activité là. Et, compte tenu de la fragilité du secteur, il est très important qu'on conserve un consensus pour qu'il se dégage une synergie et qu'on fasse en sorte qu'on ait une force commune au niveau, notamment, de nos actions sur les marchés soit intérieurs ou extérieurs du Québec.

Alors, l'approche de la ministre, qui nous est arrivée avec une taxe, une décision quand même dans un très court laps de temps, de façon même peut-être improvisée en quelque sorte, a fait en sorte de provoquer une levée de boucliers au niveau des clientèles touristiques, qui, en quelque sorte, peut nuire jusqu'à un certain point à ce consensus dont on a besoin dans l'ensemble des régions du Québec.

C'est la raison pour laquelle les hôteliers se sont offusqués de cette taxe, compte tenu qu'ils sont les seuls qui perçoivent, qui vont percevoir cette taxe-là. Alors, ils se disent: Pourquoi, nous, on doit percevoir cette taxe qui va servir à l'ensemble de l'industrie, alors que d'autres partenaires, comme les restaurateurs, comme les terrains de camping, etc., eux, ne feront pas d'efforts pour aller chercher des montants additionnels aux hôteliers pour, justement, générer un fonds intéressant pour faire de la promotion touristique? Alors, c'est la raison, à ce moment-ci, pour laquelle on se trouve avec des hôteliers qui sont contre. Et vous avez des ATR qui sont réticentes, parce que les ATR, elles, elles ont aussi comme membres dans les régions du Québec des hôteliers. Pas uniquement des hôteliers, mais des hôteliers.

Alors, vous comprenez la fragilité de ce domaine-là et on ne peut pas arriver de façon improvisée à imposer une taxe comme celle-là qui peut nuire à ce consensus. C'est la raison pour laquelle, et mon collègue de Papineau l'a dit à maintes reprises et à juste titre, nous, nous aurions préféré que la ministre attende le forum sur l'industrie touristique qui va avoir lieu en février prochain pour faire en sorte qu'on discute avec l'ensemble des intervenants autour de la table, voir comment on pourra appliquer cette mesure et qu'elle satisfasse l'ensemble des intervenants.

Mais non. La ministre a semblé privilégier une approche pratiquement unilatérale et qui provient uniquement de l'Office des congrès et du tourisme du Grand Montréal, qui fait un excellent travail, M. le Président, mais souvent ça fait en sorte, encore, qu'on développe le problème régions versus grands centres.

Compte tenu que cette mesure va être en application à partir d'avril prochain et que le forum va avoir lieu en février prochain, raison de plus pour que cette décision aurait dû être prise ou devra être prise à ce moment-là. Mais la ministre ne l'entend pas ainsi.

L'autre élément, M. le Président, c'est que les ATR, ou les partenaires, ont jusqu'au 31 janvier prochain pour s'inscrire au niveau du Fonds de partenariat touristique. Compte tenu de la complexité du secteur, compte tenu du nombre d'intervenants dans ce secteur-là, je ne suis pas convaincu que les associations touristiques régionales auront suffisamment de temps jusqu'au 31 janvier prochain pour dégager un consensus dans leurs propres régions pour justement, si elles sont d'accord, participer à ce Fonds de partenariat touristique.

Alors, je pense que la date butoir du 31 janvier 1997 aurait dû être repoussée un peu plus loin dans le temps pour justement s'assurer que les ATR et les régions du Québec aient suffisamment de temps pour provoquer des consensus, ce qui est absolument indispensable à une action concertée au niveau touristique.

M. le Président, cette taxe de 2 $ sur les chambres va générer approximativement une somme de 10 000 000 $. Alors, la majorité de la somme va être appliquée au niveau de la promotion internationale. Ce qui m'inquiète, c'est que, dans une perspective à court terme, oui, effectivement, cet argent-là peut être utilisé pour de la promotion internationale, mais, connaissant la faim, la soif de ce ministre des Finances, qui nous dit que, l'an prochain, cet affamé ministre des Finances, il n'ira pas puiser dans ce fonds pour l'amener au fonds consolidé au détriment de l'industrie touristique, M. le Président? On n'a eu aucune garantie durant les consultations en commission parlementaire que ces fonds-là vont être affectés de façon exclusive, et ce, à long terme, pour la promotion touristique. Compte tenu que nous avons un gouvernement qui est anti-économique, qui ne génère aucune activité économique, donc aucun revenu supplémentaire, alors il se sert de ces fonds-là pour boucler le déficit, pour atteindre son objectif budgétaire. On ne peut pas faire confiance à un gouvernement, M. le Président, qui nous a menti au fil des dernières années.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député des Îles-de-la-Madeleine, vous le savez très bien, depuis longtemps, que c'est un propos non parlementaire. Je vous inviterais à l'éviter, s'il vous plaît.

M. Farrah: Je n'ai nommé personne, je dis que c'est le gouvernement qui mentait.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ah non! vous le savez aussi, non, non, ça a été décidé depuis très longtemps. Que le gouvernement est composé de personnes, vous le savez très bien. Ce n'est pas un être abstrait, ce sont des personnes qui forment le gouvernement. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Vous comprendrez, M. le Président, que ce que je veux dire, c'est que, compte tenu de l'improvisation qui prévaut au niveau économique, notamment, au niveau de l'action économique de ce gouvernement, on ne peut pas faire confiance à ces gens-là, à savoir que ces fonds-là vont être utilisés à long terme exclusivement pour la promotion touristique, M. le Président.

L'autre élément également qui m'inquiète, c'est: Qu'est-ce qui va arriver avec le financement des ATR, M. le Président? On sait que la ministre vient de signer un protocole de trois ans pour le financement des ATR, mais, maintenant, compte tenu qu'il y a cette taxe-là, est-ce que, dans trois ans, la ministre va se désengager au niveau du financement des ATR? Puis on va dire: Prenez l'argent, prenez le 2 $ sur les chambres. Si on prend le 2 $ sur les chambres, on ne pourra plus faire de promotion touristique. Puis, encore là, compte tenu de l'incurie de ce gouvernement-là, on peut s'attendre à tout de ce gouvernement, M. le Président. Je vous remercie.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le député de Châteauguay, je vous cède la parole.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. J'interviens à mon tour sur le projet de loi n° 76, dans la suite de mes collègues, qui, je pense, ont quand même démontré des arguments assez clairs, convaincants. Et je m'attendrais, à ce stade-ci, à voir la ministre déléguée au Tourisme se lever et nous faire part de son acceptation de l'argumentation qui a été présentée notamment par notre collègue de Papineau qui a bien démontré un ensemble de faits.

Je vais revenir sur un certain nombre de questions, dont certaines ont été soulevées, mais, au départ, je voudrais peut-être reprendre une expression qui m'a frappé, lorsque la ministre déléguée au Tourisme a parlé tantôt de son projet de loi. Essentiellement, dans la présentation qu'elle fait, l'expression clé que j'ai retenue, c'est «équité en matière de fiscalité». Parce que c'est un projet de loi qui a pour sujet, thème, le tourisme mais qui a pour objet les taxes. Abolition de détaxe, ça veut dire taxes. Taxe de 2 $, ça veut dire taxes. C'est des taxes qu'il est question. Et c'est cette expression qui m'a impressionné, «équité en matière de fiscalité», parce que je me suis dit: Qu'est-ce que la ministre tente de me dire avec cette expression, «équité en matière de fiscalité»?

(23 h 30)

Là, je me souviens du premier ministre qui nous dit: Équité, le maître-mot. Et, en même temps, je ne suis pas sans savoir que, depuis que le premier ministre est là, chaque jour, c'est 3 000 000 $ de nouvelles taxes par jour. Alors, qu'est-ce que ça veut dire, équité maître-mot? 3 000 000 $ de nouvelles taxes par jour. Et aujourd'hui cette expression que la ministre utilise, qui résume le tout: «équité en matière de fiscalité». Je pense que c'est le portrait qui résume assez bien l'action gouvernementale, en fait, le seul projet de ce gouvernement qui, chaque jour... Probablement que dans une chronique future M. Bourgault écrira: Chaque jour, il se lève et se dit: Quel est le champ que je n'ai pas encore taxé? Et, si j'ai tout taxé, quel est celui où j'augmenterai la taxe? C'est ça, M. le Président, l'action de ce gouvernement. Alors, équité en matière de fiscalité. Pour ce gouvernement, l'équité, ça veut dire fouiller dans les poches de tout le monde, amener ça au ministre des Finances, puis se fermer les yeux puis se dire: Il va savoir quoi faire avec ça. Ça, on appelle ça de l'équité, de l'autre bord. Savez-vous pourquoi? Parce que ça veut dire qu'on va chercher de l'argent partout. C'est équitable, on l'enlève à tout le monde, on frappe tout le monde. Et on ne se pose pas la question à savoir quelles sont les conséquences.

Pourtant, dans le discours du gouvernement, il y a eu cette expression à un moment donné que la taxe tuait l'emploi. Alors, nous, on dit: On croit rêver! Quelle contradiction quotidienne perpétuelle! 3 000 000 $ de taxes par jour, 900 000 000 $ de taxes depuis 11 mois. Effarant! Quel est l'effet? Est-ce qu'il faut le rappeler, l'effet? Deux cents emplois par jour de perdus! Pas de créés, de perdus! Alors, on dit: Mais, mon Dieu, est-ce qu'ils peuvent avoir une vision? Ça fait des gros programmes, c'est ça d'épais, puis la seule chose qu'ils savent faire, c'est faire le contraire de l'engagement qu'ils ont pris durant l'élection. C'est la seule chose qu'ils savent faire.

Alors, on regarde ce projet de loi qui arrive. Honnêtement, j'écoutais mes collègues parler du tourisme. Effectivement, le tourisme est un secteur d'activité excessivement important. Mais il faut se poser la question suivante: Est-ce que c'est en augmentant le coût du service, le coût de l'offre, est-ce que c'est en augmentant le coût qu'on va développer le secteur, qu'on va développer le tourisme? Moi personnellement, je serais intéressé par l'étude d'impact, hein, quelles sont les études qu'on a faites sur le 2 $ par nuitée, sur l'abolition de la détaxation. Parce que ça, l'abolition, c'est sur les forfaits. Ça, c'était une idée pour favoriser la consommation. Hein, il s'agissait de dire aux gens: Voilà, on va donner plus d'attrait aux produits touristiques pour les forfaits, on va enlever la taxe. Et là on la ramène: 20 000 000 $, dont 10 000 000 $ s'en vont ailleurs que dans le tourisme.

Là, c'est le petit tour de passe-passe de l'équité, parce que, sous le vocable d'«équité», vous avez 10 000 000 $ que vous ramassez pour un autre objet, mais vous faites un projet de loi sur lequel vous allez dire: Il s'agit d'aller chercher de l'argent des gens volontairement, qui sont très heureux de recevoir une loi qui leur impose... Ça, ça fait toujours partie de l'affaire, hein! Les gens, volontairement, veulent contribuer, alors on va le leur imposer par la loi, au cas où on se serait trompé; mais finalement c'est juste pour faire des beaux discours. Ça, c'est l'équité, l'équité artificielle, l'équité discours. C'est tout le contraire dans la réalité, quand on va sur le terrain, qu'on va voir ce que les gens ont à dire. Alors, c'est quoi, lorsqu'on a à coeur le développement du tourisme?

Et je dois avouer que, pour quiconque suit nos débats depuis qu'on a commencé sur ce sujet-là... J'ai remarqué qu'on se promène de sujet à sujet. Le gouvernement, et c'est son droit, j'admets que le gouvernement peut appeler les sujets qu'il veut. Je fais juste constater que ce n'est pas tellement cohérent, dans la suite des événements, de passer, à saute-mouton, d'un projet à l'autre. On avait un beau débat d'entamé tantôt sur le projet de loi n° 128, où le chef de l'opposition avait servi toute une leçon, M. le Président, au parti d'en face en lui expliquant combien sa gestion amenait des conséquences désastreuses pour le Québec.

On a vu qu'on était un petit peu dans une section difficile de la soirée. Il y a encore des gens qui peuvent écouter. On va garder ça pour 4 heures du matin. Il n'y a pas de problème! Il n'y a pas de problème, 4 heures, 5 heures. Vers cinq heures et demie, on va revenir à un autre sujet, il y a du monde qui se lève.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: La grande noirceur, elle est revenue. On est revenu à cette époque où il s'agissait de passer par en dessous ce qu'on allait chercher dans la poche des Québécois. C'est ça qui se passe.

Alors, mon collègue de Papineau fait donc une suggestion. Il dit: Dans le domaine du tourisme, il y a un forum; pourquoi est-ce qu'on ne respecte pas les gens, les intervenants, ceux qui sont directement concernés? C'est un sujet tellement étonnant. Parce que, bon, notre collègue de Papineau s'occupait de ce sujet-là avec le ministre. On était, aujourd'hui et hier, avec des heures assez incroyables, avec le ministre de la Justice à parler d'un autre projet de loi où on a fait des motions pour entendre les gens. Savez-vous ce qu'ils ont fait, M. le Président? Ils nous ont empêchés d'entendre les gens qui sont impliqués, les gens directement concernés par des projets de loi. Ce gouvernement les bâillonne. Il ne bâillonne pas juste l'opposition, il bâillonne la population. Il nous empêche de les entendre. Et, après ça, ils disent: On fait des consensus. Voyons donc! Ce n'est pas des consensus, ça. On décide d'inviter telle personne, on lui dit: Voici ce que tu vas dire. Au bout de quelques jours, voici la conclusion. On a eu un sommet. Voyons donc! Ce n'est pas comme ça que ça marche.

Il y a mon collègue de Jacques-Cartier, M. le Président, qui a soulevé une autre difficulté qu'il y avait au niveau constitutionnel. Il semble qu'il y ait une possibilité de difficulté. Il y a un bureau d'avocats qui a envoyé une lettre établissant qu'il pouvait y avoir un problème, puisque, dans le projet de loi, on semblait permettre aux ATR de choisir elles-mêmes s'il y avait taxe ou pas. On s'en va donc déléguer à quelqu'un d'autre ce pouvoir. Alors, évidemment tout un débat s'ouvre là, débat qui pourrait être réglé si on s'entendait à aller s'intéresser aux gens directement concernés sur le terrain, voir à ce que tout le monde qui est concerné y trouve une pratique équitable. La véritable équité, pour quiconque y croit vraiment, ce n'est pas de bâillonner, ce n'est pas de s'empêcher d'écouter les gens. La véritable équité, c'est d'abord de considérer tous ceux qui sont concernés par un projet de loi.

Et je ne le dirai jamais assez, M. le Président. On ne peut pas se limiter à faire des taxes comme étant la vision gouvernementale. On s'en va où? Est-ce qu'ils veulent vraiment nous amener au même état de détérioration qu'ils nous ont amené après leurs premiers neuf ans? Est-ce que c'est vraiment ça, leur but? Le Québec n'en a pas besoin. Réveillez-vous. C'est ce que je voulais leur dire ce soir. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Argenteuil. M. le député.


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: M. le Président. Moi aussi, à mon tour, je me lève pour parler sur le projet de loi n° 76, la Loi instituant le Fonds de partenariat touristique. Lorsque nous étions en commission parlementaire, on a essayé de faire spécifier à la ministre et à son contentieux ce qu'on voulait dire par un fonds de partenariat touristique affecté. Parce qu'on a semblé nous dire que c'est un fonds dédié, c'est une taxe dédiée, c'est un fonds affecté, et jamais je n'ai pu obtenir la réponse claire du contentieux, M. le Président. Bien, ce n'est pas tout à fait un fonds dédié, mais c'est pareil comme un fonds dédié, mais ce n'est pas un fonds dédié.

Finalement, M. le Président, en privé, par la suite, on m'a très clairement confirmé qu'un fonds dédié, ce n'est pas un fonds de partenariat affecté, c'est tout à fait différent, ce qui donne d'ailleurs la réponse à l'article 17.9, où on nous dit clairement que «les surplus accumulés sont versés au fonds consolidé du revenu aux dates et dans la mesure que détermine le gouvernement». On a énuméré je ne sais pas combien de taxes. Je ne veux plus le faire, ça va prendre trop de temps. Mais c'en est une de plus, où le ministre des Finances a passé une commande et, à nouveau, il va aller se servir dans une taxe qu'on va asséner sur la tête des auberges, des hôtels.

(23 h 40)

Vous savez, M. le Président, dans mon beau comté d'Argenteuil, où on a un plan de développement récréotouristique, on a des auberges, des hôtels, je recevais récemment, de la part d'un des propriétaires d'un des plus beaux hôtels du nord, l'hôtel Carling Lake ... qui nous disait qu'il ne comprenait pas comment il se fait qu'on s'acharne sur l'hébergement, alors que ça ne constitue que 17,1 % des dépenses touristiques. Alors, quand les touristes viennent au Québec, M. le Président, il n'y a que 17,1 % de leurs dépenses qui vont à l'hébergement, on dépense beaucoup plus dans la restauration. Alors, si on s'est attardé à taxer l'hébergement, c'est parce qu'on y voyait une petite soupape où ça passait un petit peu comme du beurre dans la poêle. M. le Président, je dois dire que je trouve ça effarant qu'encore une fois ce sont les consommateurs qui, au bout de la ligne, vont devoir assumer la charge.

Vous savez que, dans le comté d'Argenteuil, où on est gâtés par la nature, avec des lacs, des pistes cyclables, des pistes de ski de fond, des golfs à satiété... M. le Président, quel meilleur moyen peut-on prendre pour tuer le tourisme que d'y ajouter une taxe de 2 $? Comment favoriser la venue de touristes quand on sait qu'on peut avoir une chambre pour 45 $ ou 50 $ dans une auberge et qu'on lui ajoute une taxe de 2 $? Bien, 2 $ sur 150 $, ça ne fait pas beaucoup, mais 2 $ sur 50 $, ça fait presque 5 %, c'est 4 %. C'est inacceptable d'avoir ajouté une augmentation du genre sur des chambres d'hôtel où, déjà, ces gens-là sont étouffés. Si, au moins, on avait la certitude que cet argent était retourné dans les régions, était retourné au bénéfice de cette même communauté, de ces partenaires – parce qu'on entend ce mot du parti ministériel à tour de bras – les partenaires, le partenariat, on ne les invite pas à la table, M. le Président, ils ne sont même pas invités à la table. Et M. Steenbakkers me disait spécifiquement: En coupant les ponts avec les hôteliers qui n'ont même pas été invités à la rencontre de préparation du forum sur le tourisme prévu en février 1997... C'est ce que me dit M. Steenbakkers: On coupe les ponts et on nous parle de tables de concertation, et de forums, et d'écoute, et de partenaires. M. le Président, on est loin de favoriser le partenariat, on est loin de favoriser l'écoute, on ne les invite même pas, on ne veut plus les entendre. Alors, vous comprendrez, M. le Président, que nous, de l'opposition, on trouve ça inquiétant.

On sait que cette taxe va rapporter 20 000 000 $. 20 000 000 $, c'est bien de l'argent, M. le Président. Peut-être que le gouvernement, c'est banal pour eux, 20 000 000 $, ça passe dans le temps de le dire, puis, si ce n'est pas suffisant, on va mettre une autre taxe. Mais, M. le Président, si les gens du milieu, les gens des régions avaient la certitude de retrouver ces fonds-là pour vraiment favoriser l'éclosion et le développement du tourisme, bien, tout le monde conviendrait que peut-être que la taxe est passée en vitesse, peut-être qu'on charrie, mais on se dirait: Au moins, ça va leur retourner. Mais on n'a même pas cette certitude-là et la ministre n'a pas voulu nous la donner, M. le Président. Elle n'a pas voulu nous la donner, se concertant avec son contentieux pour ne pas nous donner les informations appropriées, à savoir qu'un fonds affecté, ce n'est pas comme un fonds dédié. Et on sait que, même s'il y a un fonds dédié, le gouvernement peut aller piger encore dedans. Vous vous imaginez, si c'est un fonds affecté, il va le vider!

C'est à ça qu'on s'attend, M. le Président, et c'est ce qui nous inquiète. C'est ce qui nous inquiète, de voir l'insistance, la rapidité avec laquelle on veut passer cette loi-là, alors que les gens du milieu n'ont pas eu le temps de se concerter, n'ont pas eu le temps d'être entendus, d'être écoutés. Et pourtant on entend ça à satiété: les tables de concertation et les forums, et emmenez-en, on en a, M. le Président. Alors, moi, je trouve, devant une situation du genre, qu'on ne peut pas, de notre côté, accéder à supporter une autre taxe. Ça fait 400 000 000 $ dans l'espace de quelques heures qu'on donne, qu'on met sur le dos des Québécois et des Québécoises. Ils en ont assez.

Si ce fonds, on peut nous assurer... Si la ministre peut, de son siège – j'espère que ses pattes ne casseront pas – nous assurer qu'elle va dédier cet argent au tourisme et dans la région où il aura été prélevé de préférence, M. le Président, on serait déjà prêts à convenir de cette mesure. Mais ce n'est pas assuré, parce qu'on nous le dit dans le projet de loi, on nous le dit, et je le redis à nouveau: «Les surplus accumulés sont versés au fonds consolidé.» On est tellement en besoin qu'au lieu d'aller chercher des moyens de créer des jobs, de créer des emplois qui vont rapporter des revenus à la province on va chercher des taxes. Y a-t-il un meilleur moyen de tuer l'emploi que d'y mettre des taxes?

Cette semaine, il ne faut pas aller loin, on est l'autre côté de la rue, les gros hôtels sont vides. Les deux gros hôtels, juste de l'autre côté de la rue, ici, il n'y avait pas 25 personnes dans chacun d'eux. Puis on veut leur ajouter des taxes en plus. Si c'est ça qui est productif, j'en conviens. Mais je dois vous dire que, la productivité d'une entreprise, ce n'est pas d'ajouter des taxes qui va la faire profiter et se développer, c'est bien l'inverse, M. le Président.

Et si la ministre pouvait nous assurer – et je la convie à nous le dire, elle peut nous le dire, c'est elle seule qui peut nous le dire – que, oui, l'argent prélevé sera dédié spécifiquement et uniquement aux fins de développement du tourisme, dans les régions où l'argent aura été prélevé, on va supporter la mesure. On sait que c'est une autre taxe, mais on va la supporter parce qu'on croit qu'il y a peut-être quelque chose à faire à essayer de développer le tourisme. On sait que ça crée beaucoup d'emplois au Québec. On sait qu'il y a 100 000 personnes qui travaillent de façon permanente dans le tourisme. On sait que ça crée presque 250 000 à 300 000 emplois à temps partiel. On est conscient de ça, on est conscient de l'importance du tourisme, on est conscient des retombées économiques, mais, si on veut le développer, au moins qu'on nous assure que ce fonds sera clairement et spécifiquement dédié, de sorte que les individus, les partenaires touristiques retrouveront les retombées qui seront générées par cet argent qui sera prélevé encore une fois – encore une fois, je le répète – sur le consommateur, toujours le dernier au bout de la ligne. C'est encore lui qui va payer. Et, chaque fois que le parti ministériel nous ajoute une taxe, c'est toujours le Québécois ou la Québécoise ou l'individu, au bout de la ligne, qui finit par mettre la main dans sa poche pour continuer à supporter l'incapacité de ce gouvernement à bien diriger, à bien gérer les finances publiques et surtout à créer de l'emploi et de la richesse au Québec, au lieu de créer de la pauvreté et le manque d'emplois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Argenteuil. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions le débat.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, la motion est adoptée?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 28 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 128


Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 28, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 128, Loi modifiant la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal. Est-ce qu'il y a des interventions? Alors, M. le député de Laurier-Dorion.


M. Christos Sirros

M. Sirros: M. le Président, la loi n° 128, cette loi qui modifie la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal, nous a permis tantôt d'entendre le chef de l'opposition expliquer les vraies choses au gouvernement, à tel point que le ministre responsable du Conseil du trésor à l'heure actuelle s'est levé tout de suite après, a senti le besoin d'essayer de colmater les brèches que le chef de l'opposition a ouvertes dans l'argumentation qui avait été mise de l'avant jusqu'à maintenant par le gouvernement, en disant que le chef de l'opposition avait une vision défensive du passé. Oui, M. le Président, dans un certain sens, il faut effectivement défendre la vérité. Et c'est ce qu'on essaie de faire, défendre la vérité qui est de rappeler à ce gouvernement et à la population surtout les incohérences incroyables avec lesquelles nous sommes confrontés.

(23 h 50)

La loi n° 128 vise à abolir la loi 102 qui, elle, de façon claire, honnête, franche avec les employés du secteur public et en offrant la possibilité aux municipalités qui voulaient s'en prévaloir pour l'étendre à leurs employés également, établissait un cadre à l'intérieur duquel les négociations auraient permis effectivement de commencer raisonnablement et de façon responsable à réduire les dépenses au niveau de la masse salariale pour justement tenir compte de la réalité des finances publiques. Vision défensive du passé, défense de la vérité. Parce que, depuis que ce gouvernement est ici, il essaie de déformer cette vérité en amenant comme des vérités des illusions, des faussetés parlementaires. Est-ce que je peux dire qu'ils amènent des faussetés?

Une voix: Oui, oui.

M. Sirros: Je suis à la limite, hein? Mais ils amènent des faussetés, ils racontent des ragots par rapport à la réalité. Par exemple, au niveau de l'accroissement du nombre de personnes à l'intérieur de la fonction publique, le chef de l'opposition a démontré clairement comment, depuis 1991 ou 1992, de façon constante, il y avait une réduction faite de façon responsable, sans renier aucune parole, sans faire planer aucune menace sur la tête des gens par rapport à l'imposition possible des lois spéciales, etc. Une réduction constante du nombre de personnes affectées à la fonction publique, engagées par la fonction publique, combinée avec une loi 102 négociée ou amenée avec les syndicats qui prévoyait une extension des conventions collectives, une réduction de 1 % de la masse salariale, ça, dans le cadre d'une gestion responsable des finances publiques.

Qu'est-ce qui arrive en 1994, M. le Président? Ce qui arrive: le Parti québécois au pouvoir, perspective référendaire, négociations avec les syndicats de la fonction publique, les partenaires, comme disait le chef de l'opposition, sans les reprendre par leur petit nom, comme il l'a si bien fait tantôt. On a arrangé une entente qui a fait en sorte que tout d'un coup les dépenses de l'État au niveau des salaires de ses employés ont été augmentées de quelque 900 000 000 $ sur trois ans, et ça, dans le contexte où on disait qu'il fallait essayer de gérer les finances publiques de façon responsable, mais où la ministre des Finances du temps disait que ce n'était rien sur un budget de 20 000 000 000 $ de dépenses, de salaires, etc. Un petit milliard, c'était minime. C'est ce que la ministre des Finances du temps, la députée de Taillon, disait: Il n'y a rien là. Aujourd'hui, c'est tout un drame parce qu'il faut qu'on aille chercher 1 400 000 000 $ pour essayer de rééquilibrer les finances après avoir garroché l'argent par la fenêtre, argent qui, normalement, aurait dû servir à protéger les malades dans les hôpitaux, les élèves dans les écoles, les assistés sociaux. Parce qu'on a aussi rajouté d'autres compressions sur le dos des démunis après avoir garroché l'argent par la fenêtre avec une entente dans le secteur public qui a fait en sorte que les dépenses de salaires ont été augmentées à peu près de 950 000 000 $ sur trois ans.

Alors, ça, ça a été fait dans le cadre de l'application de la loi 102. C'est-à-dire, la loi 102 existait et existe d'ailleurs toujours, où cette réduction de 1 % avait été prévue, mais à côté on a augmenté les dépenses au-delà de ça. Et l'engagement avait été pris d'abolir ce gel et cette réduction, et c'est ce que la loi n° 128 vient faire. La loi n° 128 vient faire une autre chose aussi, M. le Président. En abolissant cette possibilité que les municipalités avaient d'utiliser la loi 102, si elles le voulaient bien, pour essayer, elles aussi, de façon responsable et franche avec des pourparlers avec leurs employés d'arriver à gérer leurs dépenses pour que, au bout de la ligne, le payeur de taxes soit épargné, ça aussi, ça sera aboli, M. le Président.

Et il faut toujours considérer ce qui se passe dans le contexte que nous connaissons depuis un an, depuis l'arrivée au pouvoir du député de Jonquière qui, tout en adoptant le discours de la nécessité de réduire le déficit, discours que l'opposition officielle d'aujourd'hui avait clairement mis sur la place publique, proposant même la nécessité d'adopter une loi antidéficit, chose qui avait été repoussée du revers de la main dans le temps, y compris par l'actuel ministre des Finances qui s'est ravisé il y a à peu près un an pour dire: Mon Dieu! Le chef de l'opposition avait raison. Le Parti libéral avait raison. Ça nous prend une loi antidéficit. Et là ils ont finalement – Bravo! Tant mieux! – accepté notre proposition de doter le Québec d'un instrument qui permettrait qu'on puisse gérer de façon transparente cette nécessité de ne plus avoir de déficit, M. le Président.

Mais, tout en disant ces choses-là, voilà qu'on avait donné la caisse, en quelque sorte, et ayant eu à subir les effets de l'option de toutes sortes d'autres décisions, aussi, qui ont été prises par ce gouvernement, comme d'imposer à un rythme effarant de 3 000 000 $ par jour de nouvelles taxes qui assomment les Québécois depuis un an, des taxes qui tuent l'emploi: 60 000 emplois de perdus depuis un an, M. le Président... Bien, 60 000 emplois de perdus, ça équivaut à combien de revenus qui n'entrent pas? Qu'est-ce qui fait en sorte qu'aujourd'hui le gouvernement est tellement pris dans ses prévisions de revenus, si ce n'est ces 60 000 emplois qui ont été perdus? Et, comble de l'incohérence, là, le gouvernement arrive puis il dit: Abolissons la loi 102 pour qu'on puisse effectivement faire en sorte qu'on «follow through», comme on dit, avec le...

Une voix: Donner suite.

M. Sirros: Donner suite, effectivement. Vous voyez que les heures, des fois, M. le Président, nous amènent à chercher nos mots, mais ce n'est pas difficile de trouver le mot pour caractériser les actions de ce gouvernement. Et, je pense que, en terminant, dans les quelques secondes qu'il me reste, je vous dirais que c'est probablement Pierre Bourgault qui a le mieux caractérisé ces gens qu'il connaît bien: improvisation, sournoiserie, cachotteries et arrogance, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion. Je vais maintenant donner la parole à M. le député de l'Acadie. M. le député.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Oui. Merci, M. le Président. Alors, effectivement, je pense qu'on doit intervenir nécessairement dans le cadre du projet de loi n° 128 et rappeler exactement quel était le contexte qui amène aujourd'hui le projet de loi n° 128.

Essentiellement, si on regarde les notes explicatives du projet, on dit: «Ce projet de loi supprime de la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal les dispositions qui imposaient une réduction de 1 % du montant annuel des dépenses relatives à la rémunération et aux avantages sociaux des employés, membres et dirigeants d'un organisme public ou d'un organisme municipal ainsi que certains professionnels de la santé.»

(minuit)

M. le Président, on se croirait, au fond, aujourd'hui dans un monde imaginaire où la contradiction est la reine. On se retrouve dans une situation assez surprenante, assez aberrante. Le chef de l'opposition a eu l'occasion, plus tôt en soirée, de faire une démonstration éloquente des efforts que le gouvernement libéral avait entrepris pour assainir les finances publiques et il a démontré d'une façon très claire que, quand on compare les années du gouvernement péquiste, on se retrouve avec un déficit au niveau du budget des opérations courantes de 5 200 000 000 $. Et, quand on compare la même durée sous un régime libéral, on se retrouve avec un surplus de 8 900 000 000 $. Un surplus. Alors, il y a un écart de 13 000 000 000 $. Et c'est ce gouvernement-là qui prétend qu'ils sont, eux, à commencer à faire des efforts pour assainir les finances publiques. Alors, je pense que, sur la question des comparaisons des deux gouvernements, le gouvernement libéral a tout à fait raison d'être fier de l'administration et des efforts de rationalisation des finances publiques qui ont été faits à ce moment.

Maintenant, on se retrouve devant un projet de loi, encore une fois, qui découle essentiellement d'un engagement du Parti québécois, engagement qui a été pris autour de l'élection de 1994, où on a dit: On va abolir la loi 102. Dans un contexte électoral, vous savez, M. le Président, on fait beaucoup de promesses. Et, surtout, ce gouvernement a fait la démonstration qu'il a fait une foule de promesses, en 1994 et à la veille du référendum, promesses qu'on renie facilement le lendemain, qu'on oublie parce qu'on n'a pas obtenu les résultats escomptés. De toute façon, ça, c'était pour obtenir l'appui; maintenant que c'est passé, on n'a pas à tenir compte des engagements qu'on a pris.

Alors, on a un gouvernement qui nous parle continuellement de l'assainissement des finances publiques, qui pige dans les poches des concitoyens à coup de millions, 5 000 000 $, 10 000 000 $, qui n'exempte personne, qui frappe partout. Tout à l'heure, mon collègue député de Châteauguay disait que, quand on parlait d'équité au niveau des efforts pour assainir les finances publiques, ça voulait tout simplement dire qu'on piquait dans toutes les poches. Alors, c'était ça, l'équité, peu importent les conséquences sociales que ça pouvait avoir.

Alors, on a ici ce gouvernement qui nous entretient depuis quelques mois de l'assainissement des finances publiques et qui nous présente le projet de loi n° 128, qui abolit la loi 102 qui avait été adoptée par notre gouvernement en 1993. Il faut rappeler l'étendue, la portée qu'avait le projet de loi 102 et l'importance que ce projet de loi avait. En fait, le projet de loi visait à réduire les dépenses des organismes publics. Ça incluait le gouvernement, les ministères, les organismes du gouvernement dont le personnel est nommé et rémunéré selon la Loi sur la fonction publique, les commissions scolaires, les collèges, les établissements, organismes similaires, les régies régionales de la santé et des services sociaux, le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Alors, tous les organismes dont le personnel était rémunéré selon des normes et des barèmes déterminés et approuvés par le gouvernement: les établissements d'enseignement de niveau universitaire, établissements d'enseignement qui bénéficiaient de subventions en fonction de la Loi sur l'enseignement privé. Alors, c'était essentiellement un projet de loi qui reportait les conventions de 1993 à 1995, alors reportait essentiellement les mêmes conditions de travail.

De plus, le projet de loi 102 permettait dans tous ces secteurs de l'activité gouvernementale et paragouvernementale d'aller chercher 1 % des dépenses afférentes à l'application des différentes conventions collectives. Alors, on avait même prévu des moyens: congés sans solde, réduction des jours de congé et de maladie, non-rémunération d'un nombre équivalent de congés fériés, jours de vacances.

Alors, c'était un projet de loi qui s'étendait également aux administrateurs de l'État, il faut le mentionner, qui avaient également à subir une ponction à ce moment-là de 1 % dans la rémunération, les avantages sociaux. Ça s'appliquait aux cabinets ministériels, au personnel des députés.

En fait, on avait même, M. le Président, émis la possibilité que ce projet de loi s'applique aux organismes municipaux. On sait que les organismes municipaux ont certaines difficultés compte tenu que le niveau de salaire dans ces organismes-là est plus élevé que dans la fonction publique, et le projet de loi 102 s'appliquait à tous les organismes municipaux, à moins que ces organismes ne décident eux-mêmes de s'exclure. Et on sait très bien que ce qui s'est passé, c'est que ces organismes-là ont profité de cette loi 102 pour un peu commencer à assainir, à se donner une marge de manoeuvre au niveau de leur budget.

Alors, on avait mis en place un projet de loi, qui avait été admis, qui visait essentiellement à assainir les finances publiques. On se retrouve avec un projet de loi n° 128 qui abolit le projet de loi 102. L'idée de la récupération, on abolit ça et, en plus, on donne 915 000 000 $ d'augmentation au cours des trois prochaines années. Alors, on peut se demander d'où vient cet excès de générosité et pourquoi, du jour au lendemain, alors qu'on crie continuellement qu'on est en train d'assainir les finances publiques, on se sent tout à fait généreux de donner 915 000 000 $ à l'ensemble des gens dans la fonction publique. M. le Président, vous avouerez que c'est assez surprenant.

Évidemment, si on regarde dans le temps où ça se situe, bien on va s'apercevoir que ça se situe à la veille du référendum. Et, si on regarde ce qui s'est passé au début des années quatre-vingt, on a vu une opération semblable, menée d'ailleurs par le premier ministre actuel, où, à la veille du référendum, évidemment on était généreux; le lendemain du référendum, on a annulé ce qui avait été fait, on a coupé à ce moment-là de 20 % les salaires. On se souvient de ça, M. le Président. Et là on fait exactement la même chose. On promet, à la veille du référendum, une augmentation, un montant forfaitaire de 5 % rétroactif – rétroactif – en compensation payable au 1er avril 1996, une majoration de 1 % en 1997, 1 % en 1998. Ça, c'était à la veille du référendum. Le lendemain du référendum, là, on est en train d'aller fouiller dans les caisses de retraite des employés, et là il n'y a plus rien qui tient. Même les caisses de retraite, les surplus accumulés, payés, qui doivent servir à la retraite ou à bonifier même la retraite des employés, on est en train de piger là-dedans et on fait du tordage de bras pour réaliser une opération semblable.

M. le Président, on a eu un bâillon, hier, qui impliquait six projets de loi qui permettaient, essentiellement – c'était ça, le seul objectif – une récupération de 415 000 000 $ dans des clientèles assez fragiles, des gens qui sont sur la sécurité du revenu, des étudiants. On a même mis un bâillon, on a supprimé les règles de fonctionnement de notre Assemblée pour aller récupérer le 415 000 000 $ parce que c'était une nécessité, c'était une urgence et il fallait absolument que ça se réalise. Et là on allait attaquer les petites clientèles, les gens qui sont à la base. Et on était prêt, avant le référendum, à en donner 915 000 000 $ pour faire plaisir aux gens, pour essayer d'acheter leur appui au moment du référendum. On sait que, malheureusement, ça n'a pas été le résultat que le gouvernement escomptait.

M. le Président, on est dans une situation qui est assez loufoque. On a un gouvernement qui, depuis qu'il est arrivé, est allé fouiller dans toutes les poches des contribuables, à tous les niveaux; on est allé chercher 1 000 000 000 $ en supplément de taxes, de tarification, de contribution, appelons ça comme on veut, c'est toujours, au bout de la ligne, le citoyen qui paie. Et on nous demande maintenant d'approuver un projet de loi, le projet de loi n° 128, qui élimine une mesure qui avait été mise en place en 1993 et qui permettait des récupérations sérieuses, et on nous demande d'approuver un projet de loi qui prévoit des versements de montants forfaitaires pour les employés de l'État. C'est à n'y rien comprendre, M. le Président. Alors, c'est évident que nous serons contre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de l'Acadie. M. le député! Il y a des limites, M. le député, là-bas, là! Si ça dépasse votre capacité, allez dans l'antichambre. Mme la députée de La Pinière.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, après le brillant exposé qui a été fait par le chef de l'opposition sur le projet de loi n° 128 et la démonstration qu'il a faite, l'essentiel a été dit. J'ose espérer qu'il aura été aussi entendu. Mais, malgré tout, permettez-moi d'intervenir sur le projet de loi n° 128, Loi modifiant la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal.

(0 h 10)

Le projet de loi n° 128 a pour but d'abroger les dispositions de la loi 102 qui forcent les administrations publiques et municipales à réduire de 1 % la masse salariale de leurs employés. Il faut se rappeler que le gouvernement libéral avait introduit, le 13 mai 1993, le projet de loi 102, qui est entré en vigueur le 17 juin de la même année.

La loi 102, pilotée par le président du Conseil du trésor d'alors et actuel chef de l'opposition, visait à réduire les dépenses dans le secteur public, incluant les ministères et organismes gouvernementaux dont le personnel est nommé ou rémunéré selon la Loi sur la fonction publique, les commissions scolaires, les collèges, les établissements, les organismes similaires, les régies régionales de la santé et des services sociaux et le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Cette même réduction de dépenses s'appliquait aussi à tout organisme dont le personnel est rémunéré selon des normes et barèmes déterminés ou approuvés par le gouvernement: les établissements d'enseignement de niveau universitaire et les établissements d'enseignement agréés aux fins de subventions, suivant la Loi sur l'enseignement privé.

La loi 102 a également eu pour effet de reporter de deux ans la date d'expiration de toutes les conventions collectives en vigueur le 15 septembre 1993, permettant ainsi de maintenir les mêmes conditions de travail durant les deux années suivant la date d'expiration de ces conventions. La loi 102 prévoyait par ailleurs une baisse annuelle de 1 % du montant des dépenses reliées à l'application des conventions collectives. Cet objectif devait être atteint par le biais d'un certain nombre de mesures, notamment les congés sans solde, la réduction des jours de congés de maladie et la non-rémunération d'un nombre équivalent de congés fériés ou de jours de vacances, le tout devant être déterminé par entente mutuelle entre les parties signataires de la convention collective.

La loi 102 avait aussi l'avantage de s'appliquer aussi aux dirigeants d'organismes gouvernementaux et au personnel non visé par une convention collective, dans la mesure où ils étaient assujettis à la même obligation de réduire de 1 % les dépenses afférentes à leur rémunération et leurs avantages sociaux tout en maintenant leurs conditions de travail pour une durée de deux ans, du 1er juillet 1993 au 30 juin 1995. Les mêmes règles s'appliquaient aussi à d'autres catégories de personnel, notamment le personnel politique des cabinets ministériels, les professionnels de la santé, les médecins spécialistes, omnipraticiens et optométristes.

Les organismes municipaux ont été également très touchés par la loi 102. La date d'expiration de leurs conventions collectives a été reportée de deux ans, et leurs dépenses annuelles en matière de rémunération et d'avantages sociaux ont été diminuées de 1 %. La loi 102 permettait toutefois aux organismes municipaux qui le souhaitaient ou qui souhaitaient se soustraire à ses dispositions, de le faire par voie de résolution adoptée avant le 15 septembre 1993.

Voici une loi, la loi 102, qui a donné des résultats positifs et dont même des syndicalistes comme Fernand Daoust ont reconnu la pertinence. Et voici un gouvernement, le gouvernement péquiste, qui a décidé de l'abroger en lui substituant le projet de loi n° 128, qui vient à toutes fins pratiques l'abolir. Tout ça, parce que le gouvernement péquiste a une fois de plus sacrifié la lutte au déficit sur l'autel de la souveraineté.

En effet, durant la période préréférendaire et afin de s'assurer de l'appui des fonctionnaires pour la cause de la séparation, le gouvernement a accepté de négocier les conventions collectives dans le secteur public et parapublic. Le projet de loi n° 128, s'il est adopté, va encore augmenter le fardeau fiscal des contribuables d'un montant supplémentaire de l'ordre de 1 000 000 000 $ sur trois ans.

En effet, cette entente prévoit le versement d'un montant forfaitaire de 0,5 % rétroactif, en compensation payable le 1er avril 1996, une majoration de 1 % en 1997 et de 1 % en 1998, ce qui a fait dire à Gilbert Leduc, dans un article paru dans Le Soleil du 24 juin dernier, que «la ministre des Finances et du Revenu, alors la députée de Taillon, a dû défendre hier la décision du gouvernement du Québec d'accorder des gains de l'ordre de 915 000 000 $ à ses 400 000 salariés au cours des trois prochaines années, alors que l'État cherche par tous les moyens à réduire ses dépenses».

Par ailleurs, M. le Président, l'abrogation de la loi 102 n'est pas accueillie de la même manière par le monde municipal, qui en demande le maintien tant que le rapport de force entre les élus municipaux responsables et tributaires des fonds publics devant le contribuable et les syndicats responsables devant leurs membres n'aura pas fait l'objet d'une révision en profondeur. L'abrogation de la loi 102 soulève l'inquiétude dans le monde municipal, dont 85 % des effectifs sont touchés par la loi 102; 67 % des municipalités de 25 000 habitants et plus se sont prévalues des dispositions de la loi 102. Le gouvernement péquiste, dans sa lutte au déficit, abroge la section II du chapitre II de la loi 102. Cette section permettait précisément la réduction de 1 % du montant des dépenses relatives à la rémunération et aux avantages sociaux.

M. le Président, ce projet de loi démontre à suffisance les contradictions flagrantes de ce gouvernement entre le discours et la réalité. Et c'est pour toutes ces raisons invoquées, M. le Président, que je voterai contre le projet de loi n° 128.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de... Non? Excusez-moi. Je croyais que... M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Mr. Speaker, I almost hate to begin a speech in the National Assembly with the following words, but it's unfortunately very true, and it begins: Here we go again! It is 12:15 in the morning. This Assembly, Mr. Speaker, has been – although it is two different sittings, as we call them in English, because we did break this morning at 9:50... In effect, this Assembly, this Parliament has been sitting, Mr. Speaker... we are now into our 37th straight hour, in effect. The Government gave us a break this morning at 9:50, for 10 minutes, which we very much appreciated, but here we are now into our 37th hour, Mr. Speaker, essentially.

But again, despite the remonstrances of the members of the Government to the contrary, I happened to speak to my wife earlier today and mentioned to her that we were, at that time, into our 33rd hour, and her reaction is kind of the same every time I tell her this, it's... well essentially she says to me, Mr. Speaker: You people must all be crazy! I mean what Parliament in its right mind would be sitting into its 37th hour, unless there was a crisis of major proportion affecting the people of the province? What kind of a system are we caught up in where we're into our 37th hour and 16th minute?

(0 h 20)

Mr. Speaker, I also said: Here we go again! and I said it for another reason, and it relates to the very curious, I would say in French, «cheminement», Mr. Speaker. Sometimes, even at this hour, my English deserts me. I get to substitute French words for the English. But a very curious «cheminement», this particular bill. It was first introduced in the House on the 15th of December. Now, wait, because it's not the 15th of December 1996, it's the 15th of December 1995. So, this bill has been on the Order Paper of this House for a year and three days. I see the chairman of the Treasury Board grimacing. I can understand why he grimaces. To have a piece of legislation on the Order Paper for a year and three days and have to come to the second-to-last step in the legislative process on December 18th, I can understand why he might be a little bit embarrassed, Mr. Speaker.

Une voix: 20th.

M. Copeman: 20th. Right, on the 20th. I've lost the day already, Mr. Speaker. Midnight.

I can understand why he might be a little embarrassed. The principle was adopted on the 11th of June 1996, and we're only about six months late between the principle and the work in commission that was done on the bill. And the bill came out of the commission of budget and administration on the 17th of December, three days ago. So, here we have a law that's been on the Order Paper for a year and three days. And now, we have to discuss it at 12:20, Friday morning, one or two days before this House must statutorily rise for the winter break.

In addition to its curious «cheminement», Mr. Speaker, the content of the bill is equally curious. We are, with this legislation, plunged into a most horrible incoherence. Bill 128 abrogates Bill 102, which the previous Liberal Government has brought in. The object of Bill 102 was to cut the salary globally of all the civil servants under the aegis of the Government of Québec, including the parapublic sector and the public sector, to reduce spending in civil service salaries by 1 %, Mr. Speaker. That was the intent of Bill 102.

We did that because we recognized that Québec is having difficulty with its public finances. We did it because the salary rates, compared in the public sector to the private sector, were somewhat higher in the public sector, and we felt that we could take a 1 % out of public-sector salaries without harming those civil servants who very honorably work for the Government of Québec, diligently work for the Government of Québec. We felt that was an appropriate measure, considering the state of Québec's finances.

What did this Government do, Mr. Speaker? It came along in the fall of 1994 and, within nine months or so, before the referendum, made a commitment that it would abrogate, it would abolish Bill 102, that the impact of the 1 % salary cut would be removed, a little incentive to Québec's public-sector workers to vote yes in the referendum. Not only did the Government abrogate Bill 102, which reduced salary levels by 1 %, it promised public-sector workers a practically billion dollar pay raise over three years, a total of almost $ 950 000 000 over three years.

So, not only did this Government come in and say: You know, that terrible 1 % cut that the Liberals had imposed on you, we're going to get rid of, we're going to give you a raise, over three years, of almost $ 1 000 000 000. Again, very curiously, Mr. Speaker, right before the referendum, in the hopes, I suggest, very clearly, that Québec civil servants could essentially be bought by taxpayers' money into supporting the Government's separatist option...

Well, Mr. Speaker, now the referendum is over. The Government doesn't want to respect the results of it, but it is over. It's a year later, and the Government is coming along and saying, in its negotiations with the public sector: We need some of that money back, the money that not only we didn't take away from you just before the referendum, when we abolished Bill 102, but the money we actually gave you in terms of raises over three years, almost $ 1 000 000 000, we want some of it back.

Now, Mr. Speaker, for those of us who followed public policy in this province for some time, it's remarkably similar to the situation that existed in 1982, of course, where, in the prereferendum period, under the Government of the late Mr. Lévesque, the PQ Government consented to huge increases in public-sector salaries, only to have to take them back two years later. The situation is virtually identical.

Mr. Speaker, this bill is a prime example of the incoherence in which this Government operates: We gave you something, essentially by not taking away the 1 % that the Liberals were going to take away from you, but, now, a year later, we're forced to take it back. And, of course, the interesting little hiccup with the Government's plan is: We're going to take it back with their own money. We're essentially going to buy out preretirement packages with the pension fund of the employees themselves.

Mr. Speaker, incoherence seems to be the modus operandi of this Government. If they wish to proceed in this incoherent manner, we will raise these flagrant and ridiculous situations to the public. We will wish them well in their continued incoherence, because it will very much facilitate a re-election of a Liberal government at the next general election, a situation that will improve the livelihood of all Quebeckers in this province. If they wish to continue with their incoherence, we wish them well. We say thank you to the President of the Treasury Board. We say thank you to the Premier. We say thank you to the Minister of Finance. Continue with these marvelously incoherent policies, because they will catch up with the Government, the people of Québec will not be duped by these measures, and they will assist the Québec Liberal Party in returning to government in this province for the benefit of all Quebeckers. Thank you very much.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de participer au débat de la prise en considération du rapport de la commission concernant le projet de loi n° 128, la Loi modifiant la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal; Bill 128, An Act to amend the Act respecting the conditions of employment in the public sector and the municipal sector.

The question we have before us tonight is a very important one: What mechanisms can governments use to try to keep the cost of manpower down? Because, on all levels – at the federal level, at the provincial level, at the municipal level – the big challenge for government at the end of the 20th century is to find ways to keep costs of manpower under control. The Government agrees to that that we cannot look forward to balancing the situation of public finances if we're unable to rest the question of the cost of manpower. Fifty percent, roughly, of the operating cost of the budget of the province is its salaries. It's 60 % of its operating cost. So, if you take out debt servicing and what's left, 60 % is roughly salaries. So, obviously, if we're going to get the deficit question under control, we looked at antideficit legislation in this House earlier this evening, if we're going to succeed in that quest, we're going to have to be able to do it by coming to grips with the problem of the cost of manpower.

(0 h 30)

In June of 1993, the previous Liberal Government put into place Bill 102. And Bill 102 asked for a 1 %, or roughly a 200 000 000 $ decrease in the cost of manpower across the public and parapublic sector, but it did it in a way of setting a target, so it wasn't a 1 % pay cut. It wasn't just a sort of arbitrary thing, right across the sector, so that your upper-management people would be affected as much as your nurses or people working in secretarial positions and everything else. The 1 % was the challenge to the managers inside the system in the public sector to go out and find ways to reduce their costs by 1 %. Some of them opted for a one-day or two-day unpaid holiday between Christmas and New Year; that was one way that it was done. Other people looked in other costs to be able to bring the costs down. But it was felt that, if between Bill 102, reducing the mass by 1 % added to the natural attrition from the civil service, these two ways could be blended to help bring down the costs of manpower in the civil service.

But, as I say, another interesting element of Bill 102 is that it opened the door for a partner, for municipalities to choose. There would be another tool for municipalities, which are facing even greater challenges in terms of bringing down their costs of manpower, to embark on a system as well. And I think two thirds, roughly, of the municipalities in Québec of over 25 000 people chose to have Bill 102 applied to them. We all remember the statistics cited earlier this evening in this House, Mr. Speaker, that municipal salaries are roughly 27 % higher than the equivalent jobs in the private sector. So, I think another interesting, innovative aspect of Bill 102 was that it allowed our municipal partners, because they're serving the same taxpayers as we are, Mr. Speaker, a mechanism to help curb the growing costs of manpower.

So that's how we did it, but, as I say, it was not just a slash across the board. What we did is we said: Here's the challenge, here's the target. Managers in the system, administrators, go out and find 1 %; be creative, find different ways to do it, try to make it in a way that it doesn't hurt your people. And, if you decide to protect people at the lower income levels and have it applied in a different way to people at higher income levels within your unit of management, well, if you can sell that, if that's something that can be worked within your sector, all the better. So it was a very creative mechanism we put into place with Bill 102.

After the election, the present Government chose to go in a different direction. That's fine, Mr. Speaker, but I find the incoherence of the decision they took on the wage bill very difficult to reconcile. We have heard it at great length, the economic misery that they claim that they inherited from us. And we can look and we can have a long debate, and obviously there was a financial problem that did occur in the early 1990's, due in large measure to a world-wide recession that cut the revenues of the Québec Government and increased the costs in terms of welfare costs and the other Government service costs that come from social distress.

So, yes, that did happen. And, yes, there was an increase in the budgetary deficit in the early 1990's, but they knew that and then they turned around and gave a 915 000 000 $ wage increase. Well, how can that be seen as a coherent measure? They had the books, they looked at the numbers, they said: Oh, what a mess! So, what are we going to do? We are going to add another 915 000 000 $ to the problem. I don't understand, Mr. Speaker.

The previous speaker, my colleague the member for Notre-Dame-de-Grâce, has suggested that it might have had something to do with the referendum campaign. I wasn't privy to this sort of decisions, so I don't know whether there was any link between these people who were sovereignist partners and the decision to go ahead with a 915 000 000 $ wage increase. They had the books, they knew we didn't have the money for. And a lot of the problems we're experiencing today now we are juggling around, trying to come up with winning proposition after winning proposition to find a way to recuperate that money.

It's not 915 000 000 $; some days, it's 1 400 000 000 $; some days, it's 800 000 000 $; some days, it's this; some days, it's that. It's late at night, it's late into the session, Mr. Speaker, so I must tell you quite honestly I'm quite lost as to what kind of money this Government is looking for in its negotiations with the public sector, but ballpark it's probably not far away from 915 000 000 $.

So I think that what this Government has done not only has it created problems at managing its own wage bill, but, by taking Bill 102 away from municipalities, it took away one of the ways that municipalities could use to try to keep their own wage bill under control. As I say, municipalities have a great difficulty with this. Again, the coherence between what the Government does in its own sphere and what it allows municipalities to do has not been always easy to understand either.

I draw your attention back to the creation of Télé-Québec by this House a year ago. One of the first things the minister of Culture said : If I want to save this, if I want to continue to provide public broadcasting in Québec, I have to do something about article 45 of the Labor Code because I cannot afford to save a valuable, public broadcasting system in French in this province with article 45. So, for her, she's exempt from it. She allowed Télé-Québec to move around it.

But the same thing occurs for the valuable municipal services that are provided as well. The Union des municipalités du Québec, the Union des municipalités régionales de comté du Québec, different groups have asked the Government time and time again: Can we sit down and look at article 45? Because municipal governments as well are looking at outsourcing. They're looking for other ways so they can perhaps reduce the number of workers they have working for them, try to reduce in order that they can save on their wage bill because it's an important problem for them as well. And if we don't work with the municipalities, if we don't find ways for them to try to get around this, they'll have to stop providing services as well.

I only draw your attention to something that has made lot of headlines in the Island of Montréal, particularly in the city of Montréal. It's not an essential service, but it's providing outdoor rinks, places for our young people to go after school and play hockey on the evenings and the weekend, to the young and not so young. Occasionally, I get out there myself and get embarrassed by teenagers. We can't afford to do it anymore the way we're doing it. If we want to continue to have outdoor rinks, we have to either work with the private sector, give contracts and stuff because it costs too much right now, Mr. Speaker, and, if we don't allow the municipalities a little bit of freedom, what's going to happen is we will just continue to close them.

We see the same problem with municipal pools in the summer, Mr. Speaker. They close earlier and earlier in August. Often by the 15th of August, the budget is gone. Now, it's not an essential service, it's not the end of the world, but municipal pools are a place where young people can go. They learn how to swim, they meet with their friends, so they provide an essential link for a community. And slowly we're abandoning that because we refuse to look at the basic problem that our municipal partners need help as well in coming to grips with their wage bill. Bill 102 was one of the ways that we provided on that, and we're taking it away tonight, and I think that's regrettable, and for that reason I will vote against Bill 128. Thank you, Mr. Speaker.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jacques-Cartier. Mme la députée de Saint-François.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Le gouvernement, qui se targue de vouloir assainir les finances publiques en modifiant la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal par l'introduction du projet de loi n° 128, se prive d'un outil essentiel pour parvenir à ses fins. Depuis l'arrivée de ce gouvernement au pouvoir, on nous fait l'horreur, devrais-je dire, de couper toutes les clientèles. On coupe à peu près tout ce qui bouge. On coupe les personnes qui sont au niveau de la sécurité du revenu, on coupe des personnes âgées, on coupe les jeunes, on a coupé des étudiants. On coupe à peu près tout ce qui bouge et on taxe également tout ce qui bouge. C'est une pluie de taxes et, entre autres, depuis hier seulement, dans la seule nuit d'hier, c'est presque 450 000 000 $ en nouvelles taxes que le gouvernement a créées avec les quelques projets de loi qui ont été adoptés au cours de la nuit dernière.

M. le Président, on coupe, mais sans véritablement prioriser quoi que ce soit, sans aucune planification, sans se soucier de l'impact que ça peut avoir sur les clientèles. On coupe parce qu'on est incapable de créer la richesse, qu'on est incapable de créer le climat propice à la relance économique, à la création d'emplois, aux investissements. Donc, dans les circonstances, comme on travaille sur une seule colonne, qu'on est incapable de travailler sur la colonne des revenus, bien, à ce moment-là, on a les résultats qu'on connaît, c'est-à-dire 60 000 pertes d'emploi depuis l'assermentation du nouveau premier ministre, c'est-à-dire 200 pertes d'emploi par jour.

(0 h 40)

La même chose au niveau des investissements étrangers, M. le Président. Le Québec, en 1995, n'est allé chercher que de 9 % des investissements étrangers partout ailleurs au Canada. La même chose pour le record des faillites des entreprises. Le Québec, actuellement, possède ce record des faillites des entreprises. C'est 40 % de partout au Canada, M. le Président, quant aux faillites d'entreprises.

Les prévisions du dernier budget, M. le Président, qui devaient être des prévisions très conservatrices, sont revues à la baisse. On constate actuellement que la perception de la taxe de vente est moindre, l'impôt des particuliers est en diminution, bien sûr, et, comme je le mentionnais tout à l'heure, ça, c'est en plus des nombreuses pertes d'emploi que le gouvernement accuse actuellement.

M. le Président, depuis deux ans, on constate l'incohérence, mais aussi l'inaction du gouvernement. On a reporté toutes nos décisions au Sommet qui vient de se tenir, mais on aura à faire le bilan bientôt de ce Sommet, parce que ce n'est pas en créant de nouvelles taxes, avec le projet, entre autres, qui nous est soumis, là, sur le Fonds de partenariat touristique, qu'on va remettre les gens au travail. J'ai bien hâte de voir, M. le Président, des gens, entre autres dans la grande région de Montréal, prendre le métro pour aller travailler.

M. le Président, c'est une pluie de nouvelles taxes. Comme je le mentionnais, depuis hier, c'est 950 000 000 $, entre autres, que le premier ministre est allé chercher dans la poche des contribuables depuis qu'il est aux commandes du gouvernement. Ça représente une imposition supplémentaire de 3 000 000 $ pour chaque jour de son mandat, depuis son assermentation, en plus de perdre 200 emplois par jour.

Le gouvernement veut assainir les finances publiques, M. le Président, mais, en même temps, il modifie la loi 102 par l'adoption du projet de loi n° 108 dont je faisais mention tout à l'heure. On se souviendra que la loi 102, entre autres, visait à réduire les dépenses dans les organismes publics, incluant le gouvernement, ses ministères, les organismes du gouvernement dont le personnel est nommé ou rémunéré selon la Loi sur la fonction publique, les commissions scolaires. Ça comprenait également les collèges, les établissements, les organismes similaires, les régies régionales de la santé et des services sociaux, le Conseil scolaire de l'île de Montréal et tout autre organisme dont le personnel est rémunéré selon des normes et barèmes déterminés ou approuvés par le gouvernement, les établissements d'enseignement de niveau universitaire, les établissements d'enseignement agréés aux fins de subvention suivant la Loi sur l'enseignement privé.

Par le mécanisme de cette loi, la date d'expiration de toutes les conventions collectives en vigueur le 15 septembre 1993 se trouvait à être reportée de deux ans. Les conditions de travail se trouvaient à être maintenues pour les deux années suivant la date d'expiration: gel des conditions de travail. De plus, la loi 102 permettait une réduction annuelle de 1 % du montant des dépenses afférentes à l'application des conventions collectives. La loi prévoyait un certain nombre de moyens pour rencontrer cet objectif de réduction des dépenses relatives à la rémunération et aux avantages sociaux, notamment celui des congés sans solde, de la réduction des jours de congé de maladie et la non-rémunération d'un nombre équivalent de congés fériés ou de jours de vacances. Les parties à une convention collective pouvaient négocier et s'entendre sur les changements aux conditions de travail susceptibles de rencontrer cet objectif de compression de 1 %.

La loi visait aussi le personnel-cadre, les administrateurs d'État, les dirigeants d'organisme et le personnel non visé par une convention collective en maintenant les conditions de travail du 1er juillet 1993 au 30 juin 1995. Et la même obligation de réduire de 1 % les dépenses afférentes à la rémunération et aux avantages sociaux s'appliquait également à ces personnes. La loi prévoyait aussi que la masse salariale globale applicable aux membres du personnel des cabinets ministériels, du personnel des députés en vigueur le 31 mars 1993 était maintenue à compter du 1er avril 1993, sans majoration, jusqu'au 1er avril 1995.

La loi touchait aussi les professionnels de la santé, médecins spécialistes, médecins omnipraticiens, optométristes à compter du 1er décembre 1993 au 1er décembre 1995. Mais aussi, à la demande des municipalités, les organismes municipaux voyaient la date d'expiration de leurs conventions collectives en vigueur le 15 septembre 1993 reportée de deux ans. De plus, la même obligation de réduire de 1 % le montant annuel des dépenses relatives à la rémunération et aux avantages sociaux s'appliquait au secteur municipal. M. le Président, à cette époque, l'Union des municipalités du Québec avait demandé au gouvernement, au nom de ses municipalités membres, d'habiliter ces dernières, après avoir tenté de négocier de gré à gré avec leurs employés, à souscrire aux conditions de gel partiel et du plafond d'augmentation des salaires pour les employés municipaux.

Or, on se souviendra que, lors de la dernière campagne électorale, le Parti québécois s'était engagé à scraper la loi 102 et à scraper également la loi 198. M. le Président, je me rappelais une soirée mémorable – j'étais au Palais Montcalm et j'avais un débat avec la candidate, qui est maintenant députée de La Prairie – à laquelle soirée d'ailleurs assistait à l'époque le député de Charlesbourg qui était également candidat. Alors, je me souviens que la salle était remplie; c'était ce qu'on appelle une salle bien paquetée. Et, comme présidente du Conseil du trésor, j'avais le courage de dire aux fonctionnaires ce qui allait leur arriver, que la loi 102 ne serait pas scrapée et que, malheureusement, on devait aller dans ce sens-là pour assainir les finances publiques: on n'avait pas le choix. Mais la candidate de l'époque, qui est maintenant députée de La Prairie, avait un tout autre discours. Avec des trémolos dans la voix, elle s'excusait, au nom du Parti québécois, d'avoir coupé de 20 % la masse salariale des fonctionnaires en 1981, elle promettait, mais elle promettait que jamais plus, jamais plus ce parti ne ferait la même chose.

Alors, M. le Président, c'est le même scénario qui se produit maintenant. J'espère que les fonctionnaires qui étaient présents à cette soirée se souviendront, se rappelleront qui a dit la vérité. Et, aujourd'hui, on se souviendra que ce gouvernement n'a pas de parole; ce gouvernement donne avant les référendums et va chercher après les référendums. Et c'est dommage parce que, actuellement, on modifie la loi 102, et c'est un outil, comme je le mentionne, essentiel pour assainir les finances publiques, et ce gouvernement se targue justement de vouloir assainir les finances publiques. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Le gouvernement libéral avait laissé un outil extraordinaire dans la main de ceux qui l'ont suivi pour contrôler les augmentations et les coûts de main-d'oeuvre. Cet instrument, c'était la loi 102 qui avait été votée ici et acceptée par les partis, qui amenait à trouver des moyens originaux pour réduire 1 % de la masse salariale pour les employés de l'État, oui, mais aussi pour les employés du secteur parapublic. Et la loi 102 s'étendait d'une manière très large. Elle couvrait même l'ensemble du réseau universitaire, elle allait même jusqu'à couvrir les collèges privés lorsqu'ils étaient subventionnés. Donc, c'était une loi qui était mur à mur pour permettre un contrôle de la croissance de la masse salariale, qui n'avait pas été facile à négocier, mais une loi qui avait été négociée, et c'était un héritage extrêmement positif qu'on laissait à ceux qui nous ont succédé.

La première chose qu'ils ont faite – il faut dire que c'était avant le référendum – ça a été, avec leurs propres employés – donc, on s'entendait – de faire en sorte que la loi 102 ne s'appliquait plus. Ça, ça voulait dire 915 000 000 $ qui ont été redonnés aux fonctionnaires de l'État, c'est-à-dire les employés directs de l'État, avant le référendum.

(0 h 50)

Et je ne voudrais pas essayer de tourner le fer dans la plaie du président du Conseil du trésor, mais aujourd'hui il essaie de peine et de misère, pour récupérer 1 400 000 000 $ ou des sommes de cette teinture-là, de jouer dans les épargnes collectives, à savoir les épargnes qui avaient été faites pour la retraite par les fonctionnaires. Parce qu'ils auraient eu cet instrument qu'ils ont voulu rejeter du revers de la main dès qu'ils sont arrivés au pouvoir, c'est-à-dire la loi 102. Mais, M. le Président, la loi 102 ne s'appliquait pas uniquement aux fonctionnaires; elle s'appliquait aussi, comme on l'a dit, au réseau parapublic, au réseau des universités, aux municipalités qui voulaient bien se mettre sous la protection, entre guillemets, de la loi 102.

Alors, qu'est-ce que l'on fait aujourd'hui avec la loi n° 128? Avec la loi n° 128, on vient d'abolir complètement la loi 102, c'est-à-dire qu'auprès des municipalités qui se sont mises – et j'utilise volontairement, à souhait, le terme «protection» – sous la protection de la loi 102, on vient abolir cette protection pour les deux tiers des municipalités du Québec qui étaient sous cette protection. On vient, dans le réseau des universités et dans le réseau des collèges privés subventionnés, de poser un énorme problème parce que demain les employés, si on vote la loi n° 128, ne seront plus astreints à la loi 102, c'est-à-dire à cette récupération de 1 %, et la première chose qu'ils vont demander – et ça deviendra tout à fait normal – c'est de pouvoir retrouver dans leur rémunération cette augmentation de 1 %.

Or, vous le savez, dans la situation budgétaire où se trouve le réseau des universités, qui fonctionne dans une enveloppe fermée, une enveloppe qui a eu des compressions, et qui s'attend à des compressions – appréhendées – dépassant à nouveau les 120 000 000 $ si les informations qui circulent au ministère de l'Éducation sont exactes – et le président du Conseil du trésor pourrait le confirmer, s'il le voulait – dans cette enveloppe fermée, il n'y a pas de place à l'heure actuelle pour pouvoir aller chercher les fonds nécessaires à ces augmentations de salaire.

Dans le réseau des collèges privés subventionnés qui étaient couverts par la loi 102, qui ne seront plus couverts par la loi 102 si nous votons la loi n° 128, dans ce réseau-là qui est soumis, et vous le savez, M. le Président, à des compressions importantes de transferts budgétaires – et il n'y a qu'à regarder le rapport des états généraux pour savoir que, dans l'année qui va venir, les compressions risquent, je dis bien «risquent» parce que les crédits ne sont pas encore déposés, d'être encore plus importantes – vous n'avez pas dans les revenus actuellement, les sommes nécessaires pour pouvoir faire face aux obligations qui découleraient d'une suppression de la loi 102.

Dans le secteur municipal, et il faut bien en être conscient, il y a à peu près deux tiers – et le ministre des Affaires municipales doit le savoir – des municipalités qui volontairement se sont mises sous ce que j'appellerais la «protection» de la loi 102. Dans le secteur municipal, supprimer, à l'heure actuelle, la loi 102 aurait pour effet de créer une dynamique de relations de travail différente, ce qui peut avoir une pression sur des augmentations de salaire pour les employés dans les municipalités, ce qui se traduira nécessairement par des augmentations de taxes municipales si les municipalités sont obligées de céder à ces pressions, M. le Président.

Alors, en résumé, la loi 102 n'était pas une loi qui était agréable, mais c'était une loi qui avait été votée et passée par le gouvernement du Parti libéral pour tenir compte de la situation des finances publiques, premièrement, et pour établir une certaine justice dans la répartition des compressions. La suppression, à l'heure actuelle, de la loi 102 va mettre les établissements autonomes du réseau, parce que c'est à eux que ça va réellement s'appliquer, puisque les fonctionnaires du secteur public, eux, ont déjà... Et on voit à quel point ça a créé de la difficulté dans le secteur public, M. le Président. Les fonctionnaires du secteur public ont, juste avant le référendum, pu bénéficier d'augmentations de salaire de l'ordre de 915 000 000 $.

Mais la pression va se trouver, M. le Président, dans des institutions qui sont les institutions du secteur parapublic, qui sont financées à même un budget fermé et qui n'ont pas de marge de manoeuvre à l'intérieur de ce budget. La suppression, à l'heure actuelle, de la loi 102 ou l'abrogation, pour être plus correct, de la loi 102 va créer une pression indue qu'ils ne pourront pas assumer dans les relations de travail dans ces établissements.

Voter la loi n° 128 à l'heure actuelle, M. le Président, c'est créer des problèmes importants dans l'ensemble du réseau universitaire. Voter la loi n° 128, M. le Président, c'est créer des problèmes importants dans un bon nombre de municipalités, M. le Président. Voter la loi n° 128, c'est créer des problèmes importants dans nombre des collèges privés subventionnés actuellement et qui n'ont pas la marge de manoeuvre actuellement – et Dieu sait, actuellement, la situation dans laquelle se trouvent les collèges privés – pour pouvoir assumer les augmentations de salaire qui pourraient en découler.

M. le Président, dans ce cadre-ci, nous suggérons à cette Assemblée de maintenir ce que j'appellerai la protection de la loi 102 sur l'ensemble de ces travailleurs, pour et au nom de la paix sociale et au nom de la protection du climat de travail dans ces établissements. Et c'est pour cette raison que nous allons voter contre la loi n° 128, souhaitant le maintien de la loi 102 dans ces différents établissements. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Alors, y a-t-il d'autres intervenants? M. le député de Joliette et ministre d'État des Ressources naturelles, vous avez la parole.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Oui, merci, M. le Président. M. le Président, les fins de session se suivent et se ressemblent. Et je dois vous dire personnellement, M. le Président, que j'aurais cru, à un certain moment, qu'on aurait compris, avec les objectifs que le gouvernement s'était fixés et la volonté de l'opposition de collaborer à l'atteinte des objectifs gouvernementaux, en particulier en ce qui regarde le rééquilibrage des finances publiques, l'arrêt de l'endettement, l'arrêt des déficits, l'arrêt de l'hypothèque des générations futures... Il m'aurait semblé, M. le Président, qu'il y a une série de lois qui auraient été adoptées, en particulier par une collaboration d'une opposition qui disait qu'il fallait respecter nos paroles. On a promis d'abolir la loi 102 dans une négociation; on respecte notre parole. Ils ne veulent pas qu'on la respecte. Ce n'est pas des farces. On ne sait pas où ils s'en vont, M. le Président.

On me dit, moi, que la majorité des lois qui sont à l'étude, autant au niveau de la considération des rapports que de l'adoption, on est pratiquement pour, dans bien des cas. Je veux donner quelques exemples. La loi n° 128, c'est un respect de parole, c'est une suite de convention collective. C'est de tradition, dans le Parlement, qu'on ne parle à peu près pas là-dessus, puis on dit: Bon, bien, c'est le fruit d'une négociation où les parties ont signé. Donc, on entérine ça: un, deux, trois, bonjour. C'est la pratique et la coutume des fins de session. Je ne comprends pas ce qui se passe ce soir. Pourtant, vous suppliez le gouvernement de respecter ses paroles, et c'est ce qu'on fait.

(1 heure)

Je pense à la Loi instituant le Fonds de gestion des départs assistés. On se dégage une marge de manoeuvre pour atteindre le déficit zéro. Sur une base volontaire, on dit à des citoyens travailleurs de consentir à un départ volontaire sans que ça affecte la sécurité des autres. On est contre ça. On parle, on jase. Pourtant, M. le Président, qui ne peut se réjouir dans cette Chambre, de quelque côté de la Chambre qu'on soit, du fait qu'on peut conclure une entente, une convention collective de gré à gré plutôt qu'avoir une confrontation sociale? Ce n'est pas parce qu'on est de l'autre côté de la Chambre qu'on doit se réjouir ou qu'on doit chercher par des moyens quelconques à ce qu'il y ait une confrontation dans notre société. Je ne comprends pas tellement l'objectif de l'opposition là-dessus.

M. le Président, des lois sur les décrets de convention collective, c'est voulu par tout le monde. C'est voulu par tout le monde. C'est vétuste, c'est dépassé, tout le monde le dit. On s'est engagé en Sommet. L'opposition était là et l'a réclamé; sans dire un mot, ne s'est pas objectée durant tout le Sommet. On donne suite au Sommet: on placote, on jase.

M. le Président, la Loi instituant le Fonds de partenariat touristique, c'est voulu par tous les gens du tourisme de Montréal. On jase, on placote, on est même pour. Puis c'est surtout des Montréalais qui s'objectent à ça, de l'autre côté, à part de ça. C'est quoi qu'on vise? C'est quoi qu'on cherche? À arriver à demain soir et puis à ne pas donner des législations que les citoyens attendent, que le monde du tourisme montréalais attend dans ce cas bien précis?

M. le Président, les élus de ville de La Baie, sur quoi on aura à voter, ils ont eu un désastre cet été. Tout le monde comprend ça, il y avait des larmes aux yeux sur plusieurs figures là, des larmes qui coulaient. On leur dit: Il faut leur permettre de s'élire démocratiquement un conseil de ville. On «pourrait-u» passer cette loi-là sans coucher ici encore, comme on l'a fait la nuit passée, en étant tout à fait conscients que ça va de soi? Les sympathies temporaires, là, il faudrait peut-être les prouver dans les faits, sans placoter inutilement.

Et je pourrais continuer, M. le Président. La loi sur le parc marin du Saguenay, c'est le leader du gouvernement lui-même qui, au Château Frontenac, avec l'actuel premier ministre, se gonflait le torse pour dire: Oui, avec le fédéral, on va signer le parc marin du Saguenay. C'est ça qu'on dit. Tout le monde est d'accord, tout le monde veut cette loi: on va placoter des heures et des heures et on va passer une autre nuit? On s'en va où, M. le Président?

Et je pourrais continuer: le Code de la sécurité routière, la Loi sur les véhicules hors route. Le député pas de Rousseau, mais anciennement de Rousseau, le député de Bertrand a dit hier qu'il était pour en cette Chambre. Et je pourrais continuer, il y a une quinzaine de lois qui pourraient être adoptées dans l'espace d'une heure ou deux, M. le Président.

Moi, M. le Président, je pense que, dans l'opposition, à un moment donné, il faut s'arrêter, là. Quand on est à moins 10 ou à moins 15, là, il faut laisser gérer le gouvernement. On peut marquer des points en se laissant imposer un bâillon parce qu'on ne veut pas. On peut marquer des points en votant contre puis en faisant une belle lutte, mais faire du temps dans une fin de session ou à quelques heures d'une fin de session sous prétexte qu'on veut le faire, pour montrer qu'on est bien forts, je ne suis pas sûr qu'on épate l'opinion publique.

M. le Président, moi, dans les circonstances, je propose l'ajournement du débat et je recommanderai au leader de notre gouvernement de prendre ses dispositions et ses responsabilités pour la suite des choses.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion d'ajournement du débat est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions les travaux de l'Assemblée à demain matin, 10 heures.

M. Chevrette: Bravo!

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée. Alors, nous ajournons nos travaux à demain matin – à ce matin, finalement, il est 1 heure – à ce matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 1 h 5)


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