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Version finale

39th Legislature, 1st Session
(January 13, 2009 au February 22, 2011)

Thursday, September 17, 2009 - Vol. 41 N° 3

Consultation générale sur le projet de loi n° 57 - Loi sur l'occupation du territoire forestier


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures vingt et une minutes)

Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît. À l'ordre, s'il vous plaît. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'agriculture, de l'énergie et des ressources naturelles ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Je rappelle le mandat de la commission: il est de tenir des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 57, Loi sur l'occupation du territoire forestier.

Madame la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gaudreault (Jonquière) est remplacé par Mme Doyer (Matapédia).

Le Président (M. Huot): Merci.

Ce matin, nous recevons la Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec ainsi que Tembec.

Auditions (suite)

Voyant que les porte-parole du premier groupe sont déjà installés, je vous rappelle que vous avez 15 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Je demande aux porte-parole de bien vouloir s'identifier et d'identifier les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît. Donc, je vous cède la parole pour 15 minutes.

Fédération des trappeurs
gestionnaires du Québec (FTGQ)

M. Gravel (Lucien): M. le Président, Mme Normandeau, mesdames et messieurs représentants des diverses organisations politiques, mesdames et messieurs, bonjour. Mon nom est Lucien Gravel. Je suis le président de la Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec. Les personnes qui m'accompagnent: M. Philippe Tambourgi, directeur général et biologiste; à ma droite, M. Jean-Claude Racine, ingénieur forestier, conseiller bénévole à la Fédération des trappeurs.

M. le Président, le 23 septembre 2008, la FTGQ a présenté ses préoccupations puis ses attentes devant la Commission de l'économie et du travail, consultations particulières et auditions publiques portant sur le document intitulé L'occupation du territoire forestier et la constitution des sociétés d'aménagement des forêts. Ce mémoire vient compléter la présentation faite l'an dernier puis répond au projet de loi n° 57, Loi sur l'occupation du territoire forestier.

Nous vous présentons un bref portrait de notre organisme ainsi qu'une description du piégeage tel que pratiqué au Québec. Par la suite, nous vous présentons les attentes des trappeurs relatives à l'exploitation des forêts, telles que présentées en commission parlementaire en septembre 2008. Ensuite, nous présentons une analyse et des bonifications de certains points du projet de loi qui permettraient de répondre aux attentes des trappeurs.

Suite à la réflexion faite avec plusieurs partenaires fauniques, un mémoire commun, intitulé Position commune des fédérations fauniques, Zecs Québec, FPQ, FTGQ et FQSA, dans le cadre de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 57 sur l'occupation du territoire forestier, est également déposé. Je tiens à spécifier qu'ont participé également à la rédaction du mémoire la SEPAQ de même que la Fondation de la faune du Québec. Ce dernier mémoire présente une position commune dégagée par nos organismes respectifs, alors que le présent mémoire présente précisément des besoins et attendes des trappeurs. Ces deux mémoires doivent donc être perçus comme complémentaires.

La Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec est un organisme sans but lucratif qui représente l'ensemble des trappeurs québécois. Elle est constituée de 14 associations régionales de trappeurs répartis sur l'ensemble de la province et regroupe plus de 2 600 membres. Sa mission est de promouvoir le piégeage en tant qu'activité économique et professionnelle, d'en assurer la gestion, le développement ainsi que la perpétuation dans le respect de la faune et de ses habitats.

La FTGQ fait partie de la Table nationale de la faune, et ses associations régionales, des tables régionales de la faune de leur région. Ces tables ont pour mandat de conseiller le ministre ou ses représentants régionaux sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Depuis 1988, la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune prévoit que pour pouvoir piéger au Québec on doit avoir le certificat du piégeur. Pour l'obtention, il faut suivre et réussir la formation Piégeage et gestion des animaux à fourrure, le cours PGAF. La FTGQ responsable de cette formation depuis 2003 et elle forme en moyenne 700 nouveaux trappeurs annuellement. À ce jour, on dénombre plus de 26 500 personnes ayant obtenu le certificat de trappeur.

Au niveau des retombées économiques, le piégeage des animaux à fourrure est un métier qui représente un important revenu pour les trappeurs et il permet de fournir la matière première à une industrie très importante au Canada, celle de la fourrure. Le commerce de la fourrure du Canada apporte environ 800 millions au PIB du pays et près de 400 millions en exportation de peaux et de vêtements. La source, dans ça, bien c'est le Conseil canadienne de la faune. En fait, il est reconnu que, sur une période de 100 ans, dans un même territoire donné, la valeur de la production de fourrure est plus élevée que celle de la foresterie. Également la même source pour cet énoncé. En plus des retombées économiques qui découlent de la pratique de leur activité, les trappeurs rendent un service important en aidant les organismes de gestion de la faune à maintenir l'équilibre nécessaire entre les populations d'animaux sauvages, leur habitat et la tolérance sociale.

En effet, les trappeurs effectuent la gestion de plusieurs espèces qui peuvent avoir des répercussions économiques importantes. Depuis quatre ans, les trappeurs interviennent dans des opérations de santé publique. Ils travaillent en collaboration avec le ministère des Ressources naturelles et de la Faune dans des opérations de contrôle de la rage du raton laveur en Montérégie et en Estrie. Les trappeurs font également la gestion des populations de castors, qui, de par leur activité, causent d'importants dommages au réseau routier et ferroviaire. Les pertes forestières et agricoles causées par l'inondation de terres sont importantes, et souvent plusieurs chemins ne peuvent être utilisés lorsque les castors bloquent les ponceaux.

Les trappeurs jouent également un rôle important dans le contrôle de diverses espèces prédatrices. On parle du raton, du coyote, de l'ours, qui affectent diverses industries. Il y a quelques années, aux États-Unis, on pouvait... on évaluait, plutôt, qu'en l'absence de chasse et de piégeage les coûts reliés au contrôle des populations d'animaux sauvages se situeraient à environ 250 $ par citoyen. Ces chiffres, qui devraient s'appliquer également au Québec, appellent à beaucoup de considération pour les attentes des trappeurs et de la part des décideurs.

Au Québec, un piégeur peut faire l'acquisition d'un terrain de piégeage et des droits exclusifs auprès du gouvernement. Il paie alors un bail de location et doit alors atteindre un seuil d'exploitation minimum. Le coût du terrain et le niveau d'exploitation sont établis selon les superficies du terrain. Ces terrains de piégeage se retrouvent dans les réserves fauniques, les zecs ainsi que sur le territoire public et ils ont une moyenne de 50 km² de superficie. On retrouve au Québec quelque 2 000 territoires de piégeage, en dehors des réserves à castors, pour lesquels des trappeurs paient des droits d'exclusivité. Les piégeurs peuvent également pratiquer leur activité en territoire libre, qui est constitué des terres privées et du reste du territoire public, et aucun droit d'exclusivité n'a été accordé.

On retrouve aussi une grande partie du territoire du Québec sous formes de réserves à castors, où actuellement le piégeage est, dans la plupart des cas, réservé aux autochtones. Finalement, dans certains territoires, la pratique de l'activité n'est pas permise, par exemple dans les parcs nationaux, mais des activités de déprédation peuvent tout de même s'y dérouler et sont encadrées de façon spécifique.

Le piégeur doit également acquérir un permis de piégeage professionnel annuellement pour pouvoir pratiquer son activité. De plus, il paie également une redevance au gouvernement du Québec pour chaque fourrure commercialisée.

Je vais céder la parole à mon collègue, M. Tambourgi, pour la suite de la présentation de notre mémoire.

M. Tambourgi (Philippe): O.K. Bonjour. Le projet de loi n° 57, Loi sur l'occupation du territoire forestier. On constate que ce projet de loi touche en particulier la forêt et la régionalisation de la gestion forestière; on n'y trouve rien concernant les autres utilisations du milieu forestier, telles les mines, l'énergie, la faune, la villégiature. Ce titre de loi prête à confusion. Dans le présent mémoire, nous le considérons comme un projet de loi sur les forêts du Québec, volet matière ligneuse, et non ressources du milieu forestier. Au bénéfice de l'ensemble des Québécois, il serait souhaitable que ce titre soit révisé.

Maintenant, je vais vous présenter les attentes des trappeurs, exprimées dans la consultation du document de travail relativement à l'exploitation des forêts. Donc, c'est ce qu'on a présenté en 2008. Les trappeurs ont demandé une réglementation couvrant la configuration et la composition de la forêt résiduelle à un niveau capable de supporter des populations fauniques à l'échelle locale, comme un terrain de piégeage, à un niveau permettant une récolte soutenue d'animaux à fourrure comme la martre. Les trappeurs détenteurs de baux de piégeage ont demandé le maintien de l'article 54 de la Loi sur les forêts et demandent d'y être inclus, comme le sont les pourvoyeurs, les réserves fauniques, les zecs. Les trappeurs vous ont demandé l'obligation d'ententes écrites avec les mandataires de CAAF au niveau des plans généraux d'aménagement forestier, des PQAF et des PAIF, incluant les travaux sylvicoles. Les trappeurs vous ont demandé une procédure pour le règlement des litiges, où le ministre ou son représentant aurait la décision finale. Les trappeurs ont demandé une réglementation appropriée afin de bien encadrer l'aménagement forestier durable, qui devrait prendre en compte le maintien ou l'amélioration de la qualité des habitats, permettant une récolte soutenue des ressources fauniques à l'échelle locale.

n (11 h 30) n

Les trappeurs ont demandé l'arrimage de la Loi sur les forêts avec la Loi de la conservation et mise en valeur de la faune afin que l'aménagement forestier durable puisse prendre en compte les besoins de la faune en matière d'habitat à l'échelle locale. Les trappeurs ont demandé l'application des traitements sylvicoles qui permettent d'obtenir des structures verticales et horizontales des peuplements, produisant ainsi de la forêt et de la faune. Finalement, les trappeurs ont demandé un siège sur le C.A. des sociétés d'aménagement afin d'être en mesure de se désigner un mandataire sur chacun de ces C.A., en vue de participer pleinement à la gestion intégrée des ressources et d'assurer la protection de leurs droits.

Le projet de loi n° 57 répond en partie à certains points de nos attentes. Le premier point, ça concerne la forêt résiduelle. C'est l'attente 1 qu'on a exprimée. Dans la section 7, article 43, le projet de loi prévoit que le gouvernement peut, par voie réglementaire, édicter à l'égard de quiconque exerce une activité d'aménagement forestier dans une forêt du domaine de l'État des normes d'aménagement durable des forêts. Ces normes peuvent porter notamment sur la superficie, la localisation et l'organisation spatiale des interventions forestières et des forêts résiduelles. Sur ce point, dans une correspondance envoyée par Mme la ministre, Nathalie Normandeau, à M. Lucien Gravel, président de la Fédération des trappeurs, concernant les forêts résiduelles, il est mentionné que le règlement sur l'aménagement durable des forêts viendra remplacer, à compter de 2013, le règlement sur les normes d'intervention dans les forêts du domaine de l'État.

Un des thèmes développés dans le RADF est celui de l'organisation spatiale des interventions et des forêts résiduelles, qui examine les enjeux de la composition et du maintien des forêts résiduelles. Cet élément va dans le sens de nos attentes. Nous souhaitons que la faune n'ait plus à se contenter des résidus de forêt laissés par les forestières parce que non rentables et non accessibles. Souhaitons que, demain, le terme «forêt résiduelle» soit banni du vocabulaire forestier et remplacé par le terme «forêt habitat» ou toute autre appellation qui refléterait mieux le rôle de cette forêt.

Les habitats de la faune changent d'un stade d'évolution à un autre et sont par conséquent inextricablement liés à la gestion des forêts. La forêt habitat doit être planifiée en fonction des besoins de la faune exploitée à l'échelle de leur domaine vital. De plus, il nous apparaît absolument nécessaire que cette loi sur la forêt définisse l'aménagement durable des forêts et en fixe les principales balises. Cet élément permettrait d'éliminer beaucoup de confusion sur l'aménagement durable des forêts.

Chacun a sa définition de l'aménagement forestier durable, et beaucoup de forestiers prétendent que la simple application du RNI conduit à l'aménagement durable des forêts. Or, selon les trappeurs, il ne se fait pas d'aménagement durable des forêts au Québec, parce que l'aménagement forestier pratiqué, tout en respectant le RNI, ne prend aucunement en considération les besoins de la faune, animaux à fourrure, exploitée à l'échelle locale, un terrain de piégeage, par exemple. Les précisions en question permettraient au ministre de faire connaître aux Québécois l'arrimage qu'il entend donner à sa Loi sur les forêts avec les autres lois régissant les ressources du milieu forestier.

Comme seconde attente où est-ce que vous... le projet de loi répond à nos besoins, c'est... il y a les tables de gestion intégrée des ressources. Dans l'article 56, on prévoit que la composition des tables et leur fonctionnement relèvent des commissions régionales. Elles ont l'obligation d'inviter à participer aux tables uniquement les comités autochtones concernés représentés par leur conseil de bande. Dans la même correspondance envoyée le 6 juillet 2009 par Mme la ministre, Nathalie Normandeau, à M. Lucien Gravel, président de la Fédération des trappeurs, il est mentionné: De façon plus spécifique, la demande relative à la consultation des membres de la FTGQ dans le cadre du processus de planification devrait être satisfaite. En effet, la refonte prévoit faire participer ceux qui ont des droits et des intérêts directs sur le territoire par l'intermédiaire de tables locales de gestion intégrée des ressources et du territoire. Ces tables locales relèveront des commissions régionales sur les ressources naturelles et le territoire. La mise en place de tables locales de gestion intégrée des ressources et du territoire permettra de convenir de mesures d'harmonisation entre les différents intervenants. Ces mesures seront consignées aux plans et devront être respectées.

Ainsi, nous demandons que l'article de la loi n° 56 ajoute l'obligation d'inviter les trappeurs titulaires de terrains de piégeage par le biais des associations régionales de trappeurs qui les représentent. Cependant, il est fort probable que le travail des tables de gestion intégrée des ressources et du territoire se limitera à fixer des grands objectifs de mise en valeur des ressources. On sera encore très loin des plans quinquennaux d'intervention et des plans annuels d'intervention. À ce sujet, nous réitérons notre demande formulée: Les trappeurs demandent l'obligation d'entente écrite au niveau des PGAF, des PQAF, des PAIF, incluant les travaux sylvicoles, ce qui implique une participation proactive lors de l'élaboration des plans et de la planification des interventions forestières.

De plus, il nous apparaît essentiel que le ministre prévoie un processus de conciliation en cas de litige et que la décision finale soit maintenue à son niveau. Dans un contexte de régionalisation où le MRNF entend produire lui-même la planification forestière jusqu'aux plans de coupe, ce point devient un must. Les fonctionnaires chargés de ces planifications seront dans l'obligation d'appliquer et de s'en tenir aux normes et règlements. Le RADF devient un outil indispensable à l'aménagement forestier, c'est un autre must.

Le Président (M. Huot): M. Tambourgi, je vous informe qu'il reste une minute.

M. Tambourgi (Philippe): Parfait. La participation aux tables de GIRT exige du temps et des connaissances sur les plans faune et forêt que la majorité des trappeurs ne possèdent pas. Il faudra que les associations régionales de trappeurs puissent avoir recours aux services de professionnels dans le domaine. À ce chapitre, les trappeurs demandent une source de financement comme le Programme de participation régionale à l'harmonisation. Les balises pour l'obtention de financement par ce programme devraient être fixées par le ministre afin d'en assurer une utilisation équitable entre tous les intervenants.

Au niveau de la régionalisation, les trappeurs ne sont pas contre la régionalisation. Cependant, il ne faudrait pas que la régionalisation devienne une privatisation régionale des ressources du milieu forestier. Il nous apparaît des plus importants que le ministre garde son entière imputabilité de la gestion des ressources du milieu forestier. La forêt publique appartient, dit-on, à l'ensemble des Québécois, même ceux des grandes villes qui ne font pas partie des régions forestières.

Le Président (M. Huot): Je vous demanderais de conclure, M. Tambourgi.

M. Tambourgi (Philippe): Bien, je vais laisser conclure M. Gravel.

Le Président (M. Huot): En cinq secondes.

M. Gravel (Lucien): O.K. Les trappeurs pratiquent une activité commerciale qui cadre parfaitement avec la philosophie du développement durable, ils ont toujours collaboré avec le MRNF dans des dossiers reliés à la faune et à ses habitats.

Le Président (M. Huot): Merci, M. Gravel.

M. Gravel (Lucien): Merci.

Le Président (M. Huot): Donc, je reconnais maintenant la ministre des Ressources naturelles et de la Faune pour un premier bloc d'échange avec la partie gouvernementale. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Bon matin, ou bon midi à tous. M. Gravel, messieurs, merci d'être là. Alors, écoutez, peut-être dans un premier temps vous répondre sur les attentes que votre association a exprimées. Mais, pour le bénéfice des parlementaires que nous sommes, vous l'avez peut-être dit puis je n'étais pas attentive, mais combien de membres chez vous, à la fédération?

M. Gravel (Lucien): 2 600.

Mme Normandeau: 2 600?

M. Gravel (Lucien): 2 600 membres.

Mme Normandeau: O.K., parfait.

Le Président (M. Huot): M. Gravel.

Mme Normandeau: Merci, cher collègue de la Côte-Nord. Alors, dans vos attentes, pages 6 et 7 de votre mémoire, huit attentes en fait sont exprimées; je suis en mesure de vous répondre positivement ou négativement sur un certain nombre d'entre elles.

Tout d'abord, la première attente, relativement à la configuration de la composition de la forêt résiduelle, peut-être vous dire que ce n'est pas encore réglé, tout ça va se régler à travers la stratégie d'aménagement durable des forêts, qu'on s'emploie actuellement à compléter, qui va être rendue publique en 2010. Alors, là-dessus, je tiens à vous rassurer, mais on aura l'occasion évidemment de vous reparler du contenu de la stratégie qui est en préparation.

La deuxième attente, relativement à l'article 54, vous n'êtes pas le premier groupe qui faites des représentations pour voir le nom de votre fédération apparaître à l'article 54. On a identifié une quarantaine d'intervenants, imaginez, qui souhaiteraient voir leur nom apparaître à l'article 54; c'est quand même toute une opération. Alors là, on s'emploie actuellement à libeller une formulation pour inclure l'ensemble des intervenants.

La troisième attente, pour nous, donc elle est réglée, la troisième et la quatrième, relativement en fait à l'obligation d'entente puis à l'arbitrage ou au processus de règlement des litiges. On a pris l'engagement donc d'avoir dans le projet de loi des amendements qui nous permettent d'atteindre les objectifs ou les attentes que vous formulez.

Pour ce qui est de la cinquième attente, tout ça va apparaître dans la stratégie, aussi, d'aménagement durable des forêts, également la table GIR.

La sixième attente, pour nous, elle est difficile à rencontrer. Là, vous parlez d'arrimage entre deux lois. Enfin, le coefficient de difficulté est tel que je ne suis pas en mesure de vous dire aujourd'hui qu'on vous répond positivement. Alors, pour nous, pour l'instant, là, ça demeure dans l'ordre d'un haut niveau de difficulté.

Également, pour l'attente n° 7, tout ça va se décider à l'étape de l'élaboration du plan régional de développement intégré des ressources du territoire, qui, lui, c'est le PRDIRT. Alors, c'est le fameux plan qui est rédigé par les commissions régionales sur les ressources et le territoire.

Et, 8, finalement, bien les sociétés d'aménagement ont disparu du projet de loi. Alors, votre attente devient dans le fond moins pertinente. On comprend que vous référiez aux fameuses sociétés d'aménagement qui étaient incluses dans le livre vert, je crois. C'est ça? O.K.

n (11 h 40) n

Alors, voilà. En gros, c'est ça. Avant de vous poser une question sur votre participation aux travaux dans les différentes commissions régionales, peut-être, M. Tambourgi, vous avez fait une déclaration, une affirmation qui est venue, ici, nous chercher. Vous avez dit: «Il ne se fait pas d'aménagement durable au Québec.» Je ne sais pas exactement ce que vous voulez dire par une affirmation comme celle-là, mais je tiens peut-être à souligner qu'il se fait de l'aménagement durable au Québec. Il y a toutes sortes d'approches qui ont développées au fil des années. C'est évident qu'on tend à améliorer les approches. Là, on parle beaucoup d'aménagement écosystémique, respect de la biodiversité. Il y a des choses déjà qui se font, qui sont extraordinaires, mais, de là à conclure qu'on ne fait pas d'aménagement durable au Québec, je pense que ça ne correspond pas tout à fait à la réalité. Et c'est un point que je souhaitais porter à votre attention.

Ceci étant, peut-être, M. Gravel, nous dire... Est-ce que les trappeurs et vos membres participent activement aux différents travaux de concertation sur le territoire? Comment vous travaillez avec les instances régionales, entre autres les commissions régionales qui ont été mises sur pied?

Le Président (M. Huot): M. Gravel.

M. Gravel (Lucien): Dans le but d'apporter un éclaircissement, on a quelques cas qui sont récents et puis qui vont imager, je pense, très bien la participation puis la collaboration entre les diverses instances. Précisément en Mauricie, au cours des derniers mois, il y a eu des schémas d'aménagement qui ont été amenés. Les trappeurs de cette région-là n'étaient pas tellement en faveur du schéma, et puis toute discussion, intervention, négociation a été refusée de par les forestières, en disant qu'en vertu de l'article 54 les trappeurs, ou la Fédération des trappeurs, ou leur association n'était pas une personne. Et puis ça a été également entériné par la MRNF, en disant: Bien, écoutez, vous n'êtes pas inclus dans la loi, et puis: On n'a pas à vous entendre. C'est un cas.

Mme la ministre, on a également présentement des litiges en Abitibi qui ne se règlent pas. Puis les trappeurs, de leur propre chef, déposent des plaintes au contentieux, à la cour, pour faire regarder de plus près les coupes. On en est là. C'est pourquoi, Mme la ministre, notre préoccupation d'être inclus en vertu de l'article 54. Puis c'est une préoccupation très importante pour nous autres. Un trappeur ou une association de trappeurs n'est pas reconnu comme étant une personne au sens de la loi. On nous dit: Vous n'avez pas d'affaire là, autant du ministère que des forestières.

Le Président (M. Huot): Mme la ministre.

Mme Normandeau: Oui. M. Gravel, là, vous référez à la façon de faire actuelle. Notre objectif, c'est de changer les choses. Et, le ministère, en devenant responsable de la planification forestière, lui va s'organiser à ce que les arbitrages se fassent et que tous les joueurs qui sont sur le territoire, les détenteurs de droits de gestion, soient à la table et participent aux décisions et à la planification du territoire forestier. Par contre, ce que je vais investiguer, c'est lorsque vous affirmez le cas de la Mauricie. Ce serait intéressant... peut-être, en privé tout à l'heure, vous me donnerez le cas précis où le ministère a validé la position d'industriels. Ça, j'avoue que personnellement, comme ministre, là, je ne connais pas tout le cas, mais on va regarder ça de très près, parce que le rôle du ministère, c'est de s'assurer dans le fond que tous les usagers du territoire, que tous les détenteurs de droits de gestion, là, soient confortables et que tout ça se fasse dans la plus grande harmonie possible. Alors, je vais aller aux infos là-dessus, puis soyez assuré qu'on va vous revenir.

M. Gravel (Lucien): ...fournir l'information disponible...

Mme Normandeau: J'apprécierais. J'apprécierais. Alors donc, on va...

M. Gravel (Lucien): Ça fait partie de nos préoccupations, madame.

Mme Normandeau: Oui. Puis c'est très légitime. Alors... Puis vous êtes ici pour ça, là, hein?

M. Gravel (Lucien): Oui.

Mme Normandeau: Excellent! Puis, si on peut répondre à vos demandes, là ? puis j'ai eu l'occasion de vous rassurer sur un certain nombre d'entre elles ? on va le faire. Pour ce qui est de l'article 54, votre demande n'est pas différente des pourvoyeurs ou de d'autres types d'organisations et de gestionnaires. Alors, on tente vraiment... Parce que notre dilemme, ici, c'est le suivant: Est-ce qu'on inclut dans l'article 54 le nom de 42 organismes ou on trouve un libellé qui nous permettrait d'être plus inclusif sans avoir à nommer... Si vous avez une suggestion à nous faire sur un libellé, gênez-vous pas, parce que j'avoue qu'on... notre créativité est ce qu'elle est, mais... Elle est un petit peu en panne.

M. Gravel (Lucien): ...d'un libellé, Mme Normandeau, je pense que l'appellation idéale, ce serait «les entreprises fauniques ayant des droits». Parce qu'un trappeur...

Mme Normandeau: Simplement.

M. Gravel (Lucien): «Entreprises fauniques ayant des droits». Je ne sais pas si ça vient simplifier votre travail un petit peu, Mme la ministre, mais, pour nous autres, ce serait peut-être la clé.

Mme Normandeau:, Ah bon, c'est ça! Notre bon sous-ministre, ici, à gauche, me dit que c'est peut-être... Parce qu'«entreprises fauniques», c'est peut-être encore trop large, hein, comme libellé, c'est ça?

M. Gravel (Lucien): Pour nous autres, madame, je vais vous dire que, pour un trappeur...

Mme Normandeau: Oui.

M. Gravel (Lucien): ...le type d'activité...

Mme Normandeau: Oui.

M. Gravel (Lucien): ...les préoccupations...

Mme Normandeau: Oui.

M. Gravel (Lucien): ...la vente des fourrures, on peut considérer qu'au niveau du trappage chaque trappeur représente une entreprise faunique qui est représentée par une association régionale.

Mme Normandeau: On prend note. On le prend en délibéré, M. le Président. Et puis...

M. Gravel (Lucien): ...activité commerciale, la trappe.

Mme Normandeau: Absolument. Je vais... On va porter ça à l'attention de l'équipe, c'est bien évident. O.K. Merci.

M. Gravel (Lucien): Cette position-là, Mme Normandeau, fait place également à plusieurs préoccupations des trappeurs. Le maintien de l'article 54, sa bonification. Et également, tantôt, juste peut-être pour renchérir un petit peu sur votre intervention concernant l'aménagement durable, il y a un gros pourcentage peut-être qui correspond à ce que représente l'aménagement durable, mais, pour réellement figurer, imager et rendre la monnaie, je crois qu'à l'intérieur de l'actuel RNI et du futur RADF on devrait tenir compte des habitats, et non pas à une échelle régionale et provinciale, mais à une échelle locale. Le fait de soustraire un règlement à cette condition-là fait que, dans des milieux sensibles, on passe à côté, en tant que société, je pense. Je ne vous dirai pas vous en tant que gouvernement, parce que vous ne pouvez pas voir toutes les phases, mais, en tant que société, il y a des petits bouts, je pense, qu'on perd par rapport à certains habitats. On parle, nous autres, d'habitat, les trappeurs. Ce qui nous préoccupe, ce sont les espèces exploitées et leur maintien à un seuil exploitable. De dire qu'on a vu une martre hier ne vient pas dire que le seuil est exploitable. Ce sont là nos préoccupations.

Mme Normandeau: Et peut-être en terminant vous dire qu'elles sont tout à fait légitimes, et effectivement, dans la nouvelle stratégie que nous allons déposer, écoutez, on va avoir une lecture plus fine et on va, dans le fond, s'assurer que tous les intervenants soient impliqués, respectés, écoutés. Alors, on va tenter de... Pas tenter, mais on va faire un... on va améliorer nos pratiques. C'est ce qu'on cherche, tout étant perfectible, hein? Alors, voilà. Mais vous allez être informés de la suite des choses, c'est bien évident.

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de Roberval, porte-parole de l'opposition officielle en matière de mines et de forêts. M. le député de Roberval, la parole est à vous.

M. Trottier: Oui. Merci, M. le Président. Je vous remercie pour votre mémoire, parce que vous apportez entre autres des éléments qui ne sont peut-être pas assez connus, comme quand vous dites que, sur une période de 100 ans, dans un même territoire donné, la valeur de production de fourrure est plus élevée que celle de la foresterie, ce n'est pas rien. Tu sais, il faut être conscient que, je veux dire, que c'est un apport économique très important puis qu'il faut justement avoir une approche qui tienne compte de ça. Également, aussi, c'est que vous êtes aussi un intervenant qui est extrêmement important dans la régulation, on pourrait dire, de la faune, parce qu'on sait que, bon, la nature ne fait pas toujours bien les choses, comme on dit. Il peut y avoir des aberrations. Puis on le voit, entre autres, là, quand il n'y a pas de... s'il n'y a pas de prédateurs, un certain moment donné, ça conduit à des accidents, ou en tout cas à des problèmes. On le voit avec l'accident qui est arrivé hier dans le secteur de La Tuque, là, une madame qui a été attaquée par un ours. J'ai l'impression qu'il y a comme une surpopulation. Il y a des problèmes. Ça veut dire qu'il faut qu'il y ait des mécanismes de régulation. Puis vous mentionnez même, puis c'est très approprié, une étude quand même assez récente, là, qu'en l'absence de chasse, et de piégeage, et de mécanismes de contrôle, bien ça coûterait au moins 250 $ par citoyen. Ce n'est pas rien. Ça fait que, moi, je pense que je vous remercie.

Mais, à ce sujet-là, je voudrais savoir: Est-ce que vous pensez justement qu'il y a un problème de surpopulation? Puis quelles sont les mesures qu'on pourrait prendre, en tout cas pour certaines espèces? Parce que je regarde, entre autres, là, au niveau des oies blanches, il commence à y avoir une... en tout cas, un moment donné, une surpopulation. Mais c'est quoi, votre avis par rapport à ça, et quelles sont les solutions qu'on devrait mettre de l'avant?

Le Président (M. Huot): M. Gravel.

n (11 h 50) n

M. Gravel (Lucien): Oui. Pour nous autres, la considération qu'on peut avoir par rapport à la surpopulation, les trappeurs sont à pied d'oeuvre, en collaboration avec le ministère, puis il y a une très bonne collaboration entre les deux, et ce, depuis des années. Je vais vous parler des dossiers de rage du raton, qui préoccupent le ministère puis qui nous préoccupent aussi, parce qu'on dit que nos trappeurs vont être en contact souvent, lors de leur activité de piégeage, avec des animaux qui peuvent être infectés. Ça, c'est la première. On va regarder également toutes les considérations que les diverses industries peuvent avoir au niveau de la quantité abondante que ce soit au niveau des castors, que ce soit le raton laveur, que ce soit le rat musqué, également la présence d'ours noirs qui dévastent les cultures. On est grandement préoccupés.

Mais je vais vous dire, il y a des facteurs qui influencent, puis ce n'est pas de la faute du ministère, puis ce n'est pas de la faute non plus des trappeurs, mais il y a des facteurs qui influencent. On a des demandes, on a une bonne écoute, mais je pense que, si on regarde ce qui nous entoure, je pense que les trappeurs sont probablement, dans les années à venir, la solution de bien des maux en termes de santé publique, si on parle de rage, si on parle de maladies transmissibles aux animaux, surtout au niveau des canidés, quand on parle de la gale sarcoptique. Peut-être que plusieurs d'entre vous n'en ont jamais même entendu parler, mais, si on prend dans des régions comme l'Estrie puis la Montérégie, c'est des préoccupations grandissantes. On va regarder, au cours des derniers mois, on a, aux abords des résidences, de plus en plus de présence d'ours noirs, puis je pense qu'on est chanceux qu'il n'arrive quand même pas plus d'accidents que ça qui peuvent toucher l'être humain. Il y en a beaucoup avec des animaux domestiques, il y a des chiens qui ont eu la vie dure au cours des dernières semaines par rapport à certains ours. Il y a de plus en plus d'abattages qui sont faits par les citoyens dans la cour de la résidence, mais, si on se dit, en tant que société, quelles doivent être les préoccupations qu'on a par rapport aux animaux sauvages puis à quel niveau on va abaisser l'ours, est-ce qu'on va l'abattre comme une vermine dans une cour parce qu'ils sont trop proches des maisons? On sait que, cette année, les petits fruits sont très rares en forêt, ça les amène près des résidences.

Je vais vous dire, imaginez le contexte que vous voudrez, les trappeurs sont la solution à ce problème-là. Il suffit qu'on s'assoie, qu'on en discute, qu'on mette ensemble en place des moyens de contrôle, puis qu'on mette en place des moyens pour capturer, déménager puis respecter la faune. Parce que, de plus en plus au cours des dernières années, on ne s'en cachera pas, la chasse, la pêche, puis je vais parler pour mon groupe à moi, le piégeage... est de plus en plus délaissé par les jeunes. On doit travailler très fort pour les attirer puis les motiver. Puis il y a des choses avec lesquelles le ministère puis le gouvernement sont directement reliés, que ce soit au niveau financier, que ce soit au niveau d'accessibilité, et puis on a des discussions, et puis on espère, au cours des mois qui viennent, pouvoir faire partie de la solution.

Le Président (M. Huot): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Oui, bien je vous remercie pour les précisions, parce que je suis d'accord avec vous, là, qu'on est mieux d'avoir un groupe organisé qui connaît bien, on pourrait dire, la situation que de laisser n'importe qui jouer au cow-boy dans sa cour, là, comme on dit; on s'arrange pour avoir des accidents quand on est rendus là.

On sait qu'il y a beaucoup de campagnes, là, antichasse de toutes sortes de choses. C'est quoi, la situation à l'heure actuelle, puis entre autres le prix? Ça doit avoir... parce que, là, il y a même des campagnes de boycottage. Qu'est-ce qui en est au niveau du prix? Moi, on me dit que les prix ne sont pas très bons. Qu'est-ce que vous pensez de ça, puis qu'est-ce qu'on devrait faire par rapport à ça?

M. Gravel (Lucien): Je vais vous dire, il y a certains facteurs qui vont influencer les trappeurs, puis surtout au niveau des jeunes. Un jeune trappeur qui commence va, à l'automne, acheter ses premiers pièges, capturer quelques rats musqués dans le but de payer ses pièges, mais il y a de vieilles habitudes ou de vieilles façons de faire de la part du gouvernement. Je vais vous parler de la royauté sur les fourrures. Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais un jeune qui va prendre huit rats musqués, le ministère le collecte pour un montant x, c'est 5 % du prix de vente des deux années précédentes, on va le chercher dans la poche du jeune trappeur. Parce que, si on parle de susciter l'intérêt puis d'accroître l'accessibilité, je pense que ces montants-là, qui sont minimes, c'est ça qui permet... puis quand le prix de la fourrure est bas puis qu'il a été bon deux ans avant, bien il collecte encore plus, parce que, voilà deux ans, tu as eu 5 $, puis là, aujourd'hui, tu as 1,50 $ pour... mais il y a une part qui va... Là, ce qu'on dit, écoutez: On est prêts à s'asseoir à n'importe quel temps, puis ce n'est pas dans le contexte de la Loi sur les forêts ? je vais terminer avec ça, là, pour le côté pécunier ? on est prêts à s'asseoir pour inciter au trappage, et puis le trappeur, il faut le voir comme étant le gardien des habitats. C'est le gars qui est presque partout en forêt, et puis, là où il y a des gens, là où il y a du monde, là où il y a des activités, ce n'est pas l'endroit où il va... qu'il va préconiser pour ses activités, c'est réellement en forêt, c'est celui qui veille au bien-être des habitats.

Juste pour terminer, tantôt, j'ai parlé de développement durable, je pense que, pour aller à 100 % dans un développement durable, il faut continuer à maintenir les préoccupations pour les habitats, pas juste pour le volume ligneux.

Le Président (M. Huot): M. le député de Roberval.

M. Trottier: C'est un aspect important que vous apportez. Dans le fond, vous êtes un peu ceux qui peuvent allumer la lumière si l'habitat est dégradé. Dans le fond, à partir du moment où vous ne voyez plus d'animaux ou vous voyez moins d'animaux, à ce moment-là, c'est que, là, dans le fond vous faites partie de la job, on pourrait dire, du ministère en étant ceux et celles qui peuvent alerter quand il y a des problèmes, parce qu'on le sait, là, que la présence ou non de certains animaux est un très bon indicateur sur la qualité de l'environnement des milieux, et ça, ce n'est peut-être pas assez reconnu, dans le fond.

Vous avez... dans votre mémoire, vous mentionnez entre autres que le titre du projet de loi est un petit peu ronfleur, comme on pourrait dire; vous n'êtes pas les seuls, là, puis j'ai l'impression que... soit qu'on change le projet de loi en profondeur ou soit qu'on revient à un titre un petit peu plus adapté, je suis d'accord avec vous. Vous mentionnez également, là, que vous avez demandé une procédure de règlement de litige, et qu'il y a des problèmes à ce niveau-là. Est-ce que vous pourriez expliquer davantage qu'est-ce qui cause problème?

Le Président (M. Huot): M. Gravel.

M. Gravel (Lucien): Pour répondre à votre question, le problème à la base va être directement relié au plan d'aménagement. Pour revenir un petit peu sur le dossier dont j'ai cité à Mme Normandeau tout à l'heure, c'est que, quand, à un moment donné, à l'intérieur de l'échelle locale ? je ne vous parle pas régional ? on fait des plans d'aménagement qui vont venir modifier grandement des secteurs de trappe, bien, quand il n'y en a plus, d'habitat, il n'y a plus d'animaux à fourrure, donc il n'y a plus possibilité de trapper, et c'est là qu'on fait face à un abandon des activités de piégeage. Tout ça, rattaché encore à notre demande en vertu de 54, on aimerait pouvoir être considérés, au moins être entendus, que l'association régionale soit entendue par rapport aux doléances du ou des trappeurs des secteurs qui sont touchés par les plans d'aménagement, et qu'on soit reconnus à tout le moins comme étant une personne à l'intérieur de l'actuelle RNI.

M. Trottier: Par rapport à cet aspect-là d'être entendus, bon, vous demandez d'être inclus dans la liste des gens qui devraient être entendus, mais vous soulevez un autre problème qui est peut-être encore plus important, c'est de pouvoir participer. Dans le fond, c'est que vous demandez qu'il y ait des conditions qui vont favoriser votre participation, parce que, quand bien même vous seriez dûment identifiés, si... parce que ça va devenir assez lourd, là, toutes ces tables-là, vous demandez qu'il y ait des solutions au niveau financier qui vont faire en sorte que ça puisse être facile, comme on dit. Il y a un coût à la démocratie, il y a un coût à la participation. Est-ce que vous pourriez nous en dire un petit peu plus par rapport à c'est quoi, vos craintes, par rapport à ça? Parce que, oui, être identifié, c'est bien, mais ne pas être capable de participer, ça ne donne pas grand-chose, même si votre nom est là.

Le Président (M. Huot): M. Gravel.

M. Gravel (Lucien): Je vais vous dire, bon, écoutez, pour nous autres, c'est la pierre angulaire un petit peu, là, la reconnaissance, être capables d'être entendus, pas juste être entendus, être consultés, de même que de pouvoir prendre des ententes, des ententes écrites, puis, en cas de litige, que ce soit le ministre qui tranche. Pour nous autres, c'est la pierre angulaire de tout ça.

Le Président (M. Huot): Merci. Ça complète le premier bloc de l'opposition officielle. Je reconnais maintenant le député de Gaspé. La parole est à vous.

M. Mamelonet: Oui. Bonjour, M. Gravel, bonjour, M. Tambourgi et M. Racine. Merci beaucoup de participer à ces consultations et de nous amener vos préoccupations.

Au niveau de la régionalisation, en tant que député de Gaspé, bien évidemment je suis un député de région et très préoccupé et très concerné par la régionalisation des actions du gouvernement. Vous, vous ne donnez pas contre la régionalisation, mais vous avez des préoccupations au niveau de la régionalisation, et vous savez qu'on a mis sur pied des tables GIR, des tables de gestion intégrée des ressources. Je vous dirais que les nouvelles qu'on a du ministère, c'est que vous allez effectivement faire partie de ces tables de consultation là et que, au niveau aussi de l'exploitation des ressources naturelles sur les territoires et en région, on a les fameuses tables de... les CRRNT, donc les commissions régionales des ressources naturelles et du territoire. J'aimerais connaître un petit peu votre position là-dessus. Est-ce que vous avez été approchés pour pouvoir siéger sur ces tables-là? Est-ce que vous avez de la volonté de siéger sur ces tables-là?

Le Président (M. Huot): M. Gravel.

M. Gravel (Lucien): Au moment où on se parle, on n'a pas été sollicités pour agir, mais il faut dire également, M. le député, que... et M. le Président, que de participer à ce genre de comité là, pour nous autres, ça va requérir des services professionnels importants. On ne peut pas asseoir un trappeur sur la GIR et lui demander de connaître toutes les spécifications de la forêt puis de voir à la planification des coupes, est-ce que c'est le sapin qui est prédominant et... Pour nous autres, on est intéressés de participer aux groupes GIR et d'être représentés de façon adéquate par des professionnels, et puis c'est de là notre demande de financement également dans notre document, dans le mémoire.

Le Président (M. Huot): M. le député de Gaspé.

M. Mamelonet: Oui, merci, M. le Président. Donc, actuellement, actuellement, vos actions et votre travail ou votre implication, je dirais, au niveau régional, qu'est-ce que vous faites actuellement comme fédération? À quel endroit est-ce que vous êtes situés? À quel endroit est-ce que vous êtes présents, je dirais, dans la situation actuelle?

n (12 heures) n

M. Gravel (Lucien): Avec la faune régionale pour discuter avec les partenaires concernant la réglementation, ou quoi que ce soit, mais, comme je l'ai dit un petit peu plus tôt, au niveau forestier, on a certaines informations qui nous viennent concernant... à savoir que tel secteur, tel secteur de tel ou tel territoire de piégeage va être... ? là, je parle des territoires de piégeage enregistrés, les TP ? vont être bûchés dans les mois qui viennent, mais, mis à part ça, très peu d'information.

Une voix: ...

M. Gravel (Lucien): C'est ça, et, au moment où on se parle, on est présents dans toutes les régions du Québec. On a 14 associations régionales qui couvrent le Québec au complet puis qui sont des organismes constitués, avec un conseil d'administration, président, etc., et qui sont en contact avec les gens du MRNF.

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue. La parole est à vous.

M. Bernard: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Juste un commentaire pour les gens qui nous écoutent. Dans l'histoire du Québec, puis je vais prendre l'histoire de l'Abitibi-Témiscamingue, la trappe, ça a été un facteur important de développement des régions du Québec, parce que, la rivière des Outaouais, les gens montaient et ont mis des postes, et c'est les premiers liens et échanges avec les premières nations, qui ont eu lieu avec... par la trappe, et un des premiers commerces entre les peuples autochtones. Donc, la trappe, le piégeage fait partie de notre histoire de développement du Québec. Et c'est important de le rappeler, je pense, pour les gens qui nous écoutent.

Moi, j'ai une question un peu plus technique, et c'est peut-être M. Racine qui va répondre. La biomasse. O.K.? On parle de récolte de biomasse. Pour être allé en forêt les dernières années avec des ingénieurs forestiers et autres, les gens me disaient qu'entre autres la biomasse c'est important pour... c'était un lien... les résidus qui restaient sur les parterres de coupe, entre autres, pour la faune, la petite faune, se cacher et autres, et continuer à prendre son expansion. Alors, quand on parle de récolte de biomasse et autres ou de ces systèmes-là d'aménagement, avez-vous des inquiétudes à cet égard-là, sur les impacts pour le piégeage et la trappe?

Le Président (M. Huot): M. Gravel. Ou M. Racine.

M. Racine (Jean-Claude): Oui. Les trappeurs n'ont pas d'inquiétude concernant la biomasse, la récolte de la biomasse. La récolte de la biomasse, à mon avis, ça n'implique pas récolter tout, c'est une récolte planifiée, qui doit être planifiée. O.K.? Puis, à ce moment-là, planifier, on a parlé, nous autres, de forêt habitat, mais il faut... il y a des forêts habitats qui doivent être conservées. Et, dans la balance, au lieu de le laisser perdre, de le récolter, on voit ça comme un positif.

Le Président (M. Huot): M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.

M. Bernard: Une dernière question. On parle beaucoup de consultation, là, de votre part. Moi, j'aimerais savoir... on a rencontré les groupes, entre autres, qui nous parlent d'aires protégées et de réserves de biodiversité. Vos associations, quand arrive le temps d'implantation de réserves de biodiversité, d'aires protégées et autres, est-ce que vous faites partie du processus de définition des aires, où il y a tout le temps des conflits? Moi, j'ai vu, là, dans la région, il y en a plusieurs d'implantées en Abitibi-Témiscamingue, et il y avait quand même beaucoup d'inquiétudes quand ça arrivait au niveau des trappeurs et des piégeurs.

Le Président (M. Huot): M. Gravel. En une minute, s'il vous plaît.

M. Gravel (Lucien): M. le Président, si vous n'avez pas d'objection, M. Tambourgi répondrait à la question.

Le Président (M. Huot): M. Tambourgi, allez-y.

M. Tambourgi (Philippe): Au niveau... durant les deux dernières années, on a travaillé avec un groupe de travail, Nature Québec, tout ça, dans la mise en place d'aires protégées de catégorie VI. Je pense que le Québec a déjà quand même un bon réseau d'aires protégées en ce moment, puis la catégorie VI, pour augmenter à 12 %, c'est peut-être une des bonnes solutions. Puis, cette catégorie-là permet la chasse, la pêche, le piégeage, de façon encadrée, puis peut-être même un peu de foresterie également.

Donc, à ce niveau-là, on est impliqués au niveau provincial. Au niveau local des associations, bien on n'a pas de professionnels pour siéger à ces tables-là quand il y a une mise en place ou une consultation du BAPE. On n'a pas encore les moyens pour se présenter à ces audiences-là. Mais, au niveau des aires protégées de catégorie VI, on est impliqués puis on voit ça comme positif pour le Québec.

Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Oui.

Le Président (M. Huot): M. le député, la parole est à vous.

M. Dufour: Oui. Merci, M. le Président. Alors, MM. Gravel, Tambourgi et Racine, bienvenue. Merci pour votre contribution à cette commission parlementaire.

Alors, nous, le premier poste de traite était à Tadoussac. Et la plus vieille municipalité de la région Côte-Nord est Escoumins, qui est inscrite dans le schéma de... les schémas. Mais il est important, tout à l'heure, ce que vous avez dit par rapport aux jeunes. Le ministère fait des journées portes ouvertes maintenant pour que le monde aille à la pêche sans avoir de coût, pour essayer d'habituer nos plus jeunes à la passation du savoir, la passation... Probablement, puis vous l'avez dit, c'est la même chose pour la chasse puis c'est la même chose pour le piégeage aussi.

Vous dites, dans votre mémoire, à la page 4, au niveau des retombées économiques, qu'au Canada c'est 800 millions. Quel serait l'ordre de grandeur au Québec par rapport aux retombées économiques? Parce que c'est un élément qui est important, là, tu sais. Si je calcule que le Québec, c'est le quart du Canada, ça peut-u être dans les eaux du 200 millions de dollars en retombées économiques?

M. Gravel (Lucien): Je pense qu'en...

Une voix: ...

M. Gravel (Lucien): Je pense qu'en matière d'industrie de la fourrure le Québec a une place privilégiée au Canada, et je dirais que c'est même une des places privilégiées. Je vais vous dire que, si on parlait de 25 % de l'ensemble, pour moi, ça pourrait peut-être plus rencontrer... Puis je vais vous expliquer un petit peu ce à quoi je veux en venir. Tous les manufacturiers de pièges nord-américains se retrouvent au Québec, les trois plus grandes se retrouvent au Québec, au niveau des manufacturiers. L'ensemble de la commercialisation de la fourrure a un gros pied à terre, si on prend au niveau du Conseil de la fourrure, qui est installé à Montréal, puis qui dépend également... puis qui fait beaucoup de recherche. C'est une industrie très importante au Québec, puis il y a des retombées directes également qui viennent au gouvernement de par les frais directs, la vente de permis, la location des territoires de piégeage, les redevances qui sont payées sur toutes les fourrures au gouvernement et puis toute l'implication qu'on peut retrouver en termes de piégeage.

Dépendamment d'à quel âge on va joindre le milieu des trappeurs, c'est ce qui vient également influencer nos investissements. Il y a un gars que je connais présentement, qui vous parle, qui, lui, a commencé à trapper en 2001 puis que... Je n'ai jamais été un gars de motoneige, je n'ai jamais été un gars de quatre-roues, et puis j'avais deux voitures à la maison. Je dois vous dire que, dans mon cas à moi, ça a été une motoneige exclusive au trappage, ça a été un quatre-roues exclusif au trappage. J'ai acheté une remorque pour traîner tout ça, mais j'ai racheté quand même dans l'année qui suit un camion parce que c'était plus propice à mes activités; j'ai bâti un camp de trappe sur mon territoire de piégeage. Je dois vous dire que, dans mon cas à moi, dans l'espace d'un an et demi, j'ai investi plus de 50 000 $. Si vous voulez compter, au Québec, les retombées économiques, faites l'implication puis la vérification qu'on peut faire quand un gars, rendu à un certain âge, dit: Bon, bien, je prépare ma retraite, ou: Je veux me mettre à piéger de façon plus active, parce que là les enfants ont quitté l'école, ils sont dans le milieu du travail, on a un peu plus de temps. Et puis il y a des facteurs qui influencent l'arrivée d'un piégeur.

Si vous voulez faire le compte, à chaque année, il s'en ajoute environ 700. Ces gens-là investissent dans ce genre de véhicules là, ces gens-là investissent dans la confection puis l'érection d'abris temporaires, et tout ce qui s'ensuit: c'est des plaques, c'est des assurances additionnelles, des... Je vais vous dire que de quantifier ou de chiffrer l'implication des trappeurs sur l'apport économique au Québec, je vais vous dire que facilement, d'après moi, 150, 200, 250 millions. Et puis écoutez, je vais vous dire, prenez juste pour acquis que l'implication du gouvernement du Québec dans le combat de la rage, avec les trappeurs, au cours des dernières années a nécessité, d'après moi...

Une voix: ...

M. Gravel (Lucien): ...5 ou 6 millions par année, puis c'est directement relié à la trappe.

Le Président (M. Huot): M. le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Merci, ça va.

Le Président (M. Huot): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Oui. M. le Président, je comprends que trapper, c'est une question de passion, comme on dit, beaucoup d'investissements. Le retour ne doit pas toujours être évident, mais je pense que... Mais je pense qu'il faut qu'on le soutienne davantage. Puis je vais vous raconter un petit élément qui... Il y a une entreprise très importante, Nature 3M, chez nous qui fait la transformation de la fourrure, puis ils ont demandé des crédits d'impôt, puis finalement c'est qu'on ne peut plus les avoir, parce que la fourrure n'était pas reconnue comme étant une ressource naturelle. C'est la première ressource naturelle qu'on a exploitée au Québec, puis on a oublié ça dans la réglementation, au ministère des Finances. Ça fait que j'ai l'impression qu'on est trop loin, le gouvernement est trop loin, un peu, du monde forestier, trop dans les bureaux puis pas assez dans le bois, comme on dit. J'espère qu'on va revenir à quelque chose de plus équilibré.

Vous demandez l'application de traitements sylvicoles qui permettent des structures verticales et horizontales des peuplements. Vous en avez parlé un peu, mais si vous pourriez donner un peu plus de détails par rapport à ça.

Le Président (M. Huot): M. Gravel.

M. Gravel (Lucien): Pour le trappeur et la pratique de l'activité. Quand on parle des peuplements horizontal et vertical, on parle de la conservation des habitats. On va dire qu'au niveau de la forêt on a besoin, quand les arbres ont atteint une certaine hauteur, ça devient un habitat favorable à la marque qui est notre espèce, parapluie, là, qui est à peu près la plus difficile. Puis on a besoin également de peuplements qui sont plus bas, au niveau de la forêt, dans le but d'assurer la présence du lièvre, dans le but d'assurer la présence également de toutes les autres espèces qui sont les espèces proies, la conservation des habitats puis la prise en cause. L'identification, la localisation de ces types de forêt là devient primordiale pour l'activité de trappe.

M. Trottier: Vous mentionnez...

n (12 h 10) n

M. Gravel (Lucien): En complément, monsieur, je pense que M. Racine, qui, lui, est un spécialiste, pourrait répondre peut-être de façon plus pointue, en complément.

Le Président (M. Huot): M. Racine, je vous informe qu'il reste un peu moins d'une minute.

M. Racine (Jean-Claude): Dans la vie d'un peuplement forestier, mettons, 80 ans avant d'être récolté, il y a environ 25 ans où il est accueillant pour la faune. Dans la balance, là, des beaux cylindres, c'est beau à voir, là, mais ça ne supporte pas de la faune, ça, parce qu'il n'y a pas de nourriture. Il n'y a pas de nourriture au sol, voyez-vous? Puis il n'y a pas de cachette, aussi, pour le lièvre, pour les souris, etc. C'est important, la structure horizontale. La structure verticale, elle est bien importante aussi, mais, sans structure horizontale, bien il n'y a pas de faune. Il y a de la... Ce n'est pas parce qu'il y a un arbre qu'il y a de la faune. On se comprend?

Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Donc, ça complète les échanges. Donc, M. Lucien Gravel, M. Philippe Tambourgi, M. Jean-Claude Racine, de la Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec, merci pour votre contribution aux travaux de cette commission.

J'invite les représentants de Tembec à prendre place et je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 11)

 

(Reprise à 12 h 14)

Le Président (M. Huot): Nous allons reprendre les travaux. Nous recevons maintenant les gens de Tembec. Je vous rappelle que vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire. Donc, je demanderais au porte-parole de bien vouloir s'identifier, de présenter la personne qui l'accompagne. Donc, la parole est à vous pour 15 minutes.

Tembec inc.

M. Lessard (Michel): Merci, M. le Président. Mme la ministre, mesdames, messieurs les députés, membres de la commission, mon nom est Michel Lessard, je suis vice-président, Gestion des ressources forestières, de Tembec pour les opérations au Canada. Je m'excuse pour la voix ce matin, elle est assez enrouée, mais je ne voulais pas manquer l'occasion de venir parler de notre mémoire.

Je suis accompagné, à ma gauche, de Mme Geneviève Labrecque, qui est forestier divisionnaire à Gestion des ressources forestières pour le Québec.

Pour débuter, vous me permettrez d'abord de dire un mot sur Tembec. Tembec, c'est une importante société intégrée de produits forestiers implantée en Amérique du Nord et en France et dont le siège social est à Montréal. Elle compte approximativement 7 000 employés ainsi qu'une quarantaine d'usines et affiche un chiffre d'affaires d'environ 2,4 milliards de dollars. Tembec commercialise ses produits à l'échelle internationale.

Je fais peut-être un petit lien à ce que le monsieur mentionnait tantôt. Il s'en fait, de l'aménagement forestier durable, au Québec, même au Canada, puis d'ailleurs Tembec est reconnu comme des leaders de la gestion durable de la forêt. On gère près de 12 millions d'hectares de terre forestière dans quatre provinces canadiennes, en conformité avec la certification du Forest Stewardship Council, qui est le FSC. Au Québec, Tembec possède six usines de transformation du bois et a une attribution totale d'environ 2 millions de m3, dont quatre usines de sciage de bois résineux, qui se trouvent à Béarn, La Sarre, Taschereau et Senneterre, et deux usines de pâte à haut rendement, dont une à Témiscaming et une à Matane. De plus, Tembec possède une usine de bois à entures multiples, ce qu'on appelle une usine de bois jointé, à La Sarre. On a une usine de cellulose de spécialité qu'on utilise dans la fabrication des aliments à Témiscaming. On a une usine de carton, aussi, de papier de couverture, à Témiscaming ainsi que trois usines de produits chimiques: une à Témiscaming, une Longueuil et une à Trois-Pistoles.

Un fait à noter, jusqu'au 3 septembre dernier, Tembec avait un partenariat avec SGF REXFOR en Gaspésie. Les usines de sciage de bois résineux de Temrex, Nouvelle et Saint-Alphonse sont depuis la propriété à 100 % de la société d'État, donc il y a un petit correctif, là, à apporter par rapport à ce qu'on avait mentionné dans le mémoire.

Maintenant, pourquoi Tembec a déposé un mémoire et est présente ici afin de présenter son point de vue devant Mme la ministre et les députés de l'Assemblée nationale? C'est assez simple. Nous croyons important que les députés prennent connaissance de l'avis d'une importante entreprise québécoise qui est bien implantée dans sa province, qui est leader en aménagement forestier durable, avec près de 4 millions d'hectares de certifiés, selon le FSC, au Québec, et dont les droits sont légalement remis en cause par les éléments du projet de loi n° 57.

En premier lieu et comme l'ont souligné plusieurs organismes déjà entendus ici, nous voulons insister sur l'absence d'études d'impact économique et organisationnel. Déjà en mars 2008, Tembec émettait des réserves sur les modifications proposées alors par le livre vert du ministre Béchard, notamment à cause de l'absence de telles études découlant de la mise en oeuvre des orientations proposées. Le livre vert de février 2008 reconnaissait que tout changement au régime forestier du Québec devrait nécessairement tenir compte de l'importance que revêt pour les usines de transformation du bois une certaine sécurité dans les approvisionnements en matière première, et que les coûts liés à ces intrants ont également une influence majeure sur la compétitivité et la rentabilité des entreprises.

Quatre mois plus tard, soit en juin 2008, dans son document de travail, L'occupation du territoire forestier québécois et la constitution des sociétés d'aménagement des forêts, le ministère a réitéré le message selon lequel le nouveau régime ne doit pas entraîner de hausse globale du coût de la fibre par rapport aux conditions actuelles. Lors du dépôt du projet de loi n° 57, la déception a été grande pour Tembec de constater que le document explicatif du projet de loi n° 57 n'a pas repris ces constats, se limitant à présenter la préoccupation économique d'accroître la compétitivité des entreprises et de contrôler les coûts d'approvisionnement en matières premières comme un élément d'une approche renouvelée de gouvernance des forêts publiques plutôt que d'un objectif principal qui aurait dû guider l'écriture du projet de loi. Compte tenu de l'absence des études d'impact, nous ne pouvons prétendre que les changements proposés vont contribuer à cet objectif et rehausser le niveau de compétitivité de l'industrie, du secteur forestier québécois.

Tout comme le reste de l'industrie forestière, on ne saurait souscrire à une réforme du régime qui entraînerait une augmentation de nos coûts d'approvisionnement ou une réduction de notre efficience, influençant ainsi de façon négative notre niveau concurrentiel dans un marché mondial.

Depuis maintenant plusieurs années, Tembec utilise toutes les mesures à sa disposition afin de réduire ses coûts d'opération, dont notamment ses coûts d'approvisionnement en fibre. Ainsi, tous les éléments sur lesquels nous avons un contrôle direct ont vu leur coût se maintenir ou diminuer, et ce, malgré une inflation qui y était rattachée. Au cours des deux dernières années, le ministère a consenti à certains allégements qui ont contribué à une légère baisse de nos coûts d'approvisionnement en fibre, mais il reste beaucoup de travail à faire afin de réduire de façon significative les coûts d'approvisionnement à tous les niveaux.

n (12 h 20) n

Comme il vous l'a été mentionné aussi à plusieurs reprises, les usines de sciage du Québec détiennent le coût du bois le plus élevé au Canada. Cette situation risque d'être avivée par de nombreux éléments introduits par le projet de loi n° 57 qui pourraient, d'une part, concourir à une augmentation des coûts, comme la réduction du volume en garantie et la mise en place du libre marché, et, d'autre part, les économies mentionnées dans le document explicatif demeurent nettement spéculatives, car elles dépendent d'une nouvelle gouvernance complexe dont les preuves sont encore à venir. Là, je parle des CRE, des CRNT, des tables locales de gestion intégrée, etc.

La vision de Tembec pour sortir de la crise. Je vous ai entendus, par la voie d'Internet, vous questionner à quelques reprises sur la vision de l'industrie forestière. Je commencerais donc par vous mentionner que Tembec s'est bien replacée de sa situation difficile. Nous ne sommes pas encore sortis de la crise, mais nous avons mis en place, et continuons quotidiennement de le faire, plusieurs actions qui nous font voir l'avenir avec optimisme. La recapitalisation effectuée en février 2008 est un exemple d'action proactive. Ceci nous a permis d'augmenter nos liquidités de façon importante, et c'est ce dont toute entreprise recherche aujourd'hui pour traverser la crise.

Mais la crise structurelle et conjoncturelle qui touche le secteur forestier dans toutes ses composantes demeure majeure. Les régions du Québec sont toujours durement frappées depuis plusieurs mois par des pertes d'emploi importantes. La lecture des trois documents produits par le ministère des Ressources naturelles depuis le livre vert publié en février 2008 ne permet pas de cerner clairement la vision du gouvernement sur le développement de nos usines de transformation primaire. Tembec ne ménage aucun effort pour ajouter de la valeur à ses produits, mais un secteur primaire viable et compétitif est la prémisse à des usines de deuxième et troisième transformation. Pour nous, les conditions de base pour sortir de la crise et soutenir des usines viables sur le plan économique sont de trois ordres, bien entendu outre une forte demande pour les produits forestiers ainsi que des revenus du bois d'oeuvre permettant de générer des profits. Donc, nos trois objectifs sont les suivants: Premier, réduire les coûts d'approvisionnement en fibre; deuxièmement, maintenir ou augmenter la qualité et la quantité de nos approvisionnements pour profiter d'économies d'échelle, et, troisièmement, obtenir des bois certifiés selon la norme FSC, permettant la fabrication et la commercialisation de produits certifiés, afin de maintenir, voire accroître, nos parts de marché.

Je me permettrais à ce stade de vous présenter en vrac quelques demandes de Tembec reliées au coût d'approvisionnement en fibre et que vous retrouvez aussi à l'intérieur du mémoire. D'abord, face aux défis additionnels... au coût, excusez-moi, additionnels qui pourraient être engendrés par le régime proposé, il serait important que le ministère présente des scénarios de financement et une évaluation des impacts éventuels dans la mise en place de la nouvelle gouvernance sur les coûts d'approvisionnement. Nous demandons que les volumes mis en vente par enchère soient suffisants, soient répartis équitablement dans l'espace et dans le temps afin de ne pas induire des distorsions et que le bois de la forêt privée se négocie exclusivement sur le marché concurrentiel du libre marché. Tembec demande aussi de retirer du projet de loi n° 57 les notions de prix de départ et de prix minimum pour la mise en vente des baux par enchères; ces notions nous paraissent contraires au libre marché. Comme il est prévu pour les opérations de récolte, nous demandons de conserver l'option de réaliser les plans d'aménagement forestier tactique et opérationnel comprenant la planification de nos opérations. C'est essentiel pour nous d'avoir un important droit de regard sur la planification si nous ovulons contrôler nos coûts, la qualité, les essences, la grosseur, les cédules de livraison, et respecter en bout de ligne aussi les commandes de nos clients.

Finalement, nous demandons que les garanties d'approvisionnement soient accordées aux entreprises et non aux usines et basées sur les territoires historiques des usines, notamment afin de faciliter le maintien de nos certifications FSC qui sont déjà en place.

Concernant la certification forestière, il y a des acquis à conserver, et nous vivrons une période de transition qu'on pense qui est à risque. On se réjouit à l'idée que les certifications des pratiques, et plus particulièrement la certification forestière, occupent éventuellement une place prédominante dans le prochain régime forestier, comme cela était annoncé dans le document de travail de juin 2008. Toutefois, nous avons noté que le projet de loi n° 57 n'est pas très explicite sur les intentions réelles du ministère, notamment quant à la certification des territoires forestiers.

Nous voulons donc avoir l'assurance que nos certifications FSC en place soient maintenues ? donc, je le répète, on parle de 4 millions d'hectares au Québec ? afin de conserver notre avantage concurrentiel et les investissements qui s'y rattachent. Et on demande d'obtenir aussi un droit de premier refus sur les volumes de bois offerts en vente aux enchères qui pourraient provenir de territoires qui étaient initialement certifiés FSC par Tembec.

Maintenant, l'aménagement écosystémique. On a un projet dans le secteur de LaSarre, donc on demande que ce projet-là, qui se trouve dans l'unité d'aménagement 8551, déjà reconnu comme l'un des trois projets pilotes d'aménagement forestier écosystémique au Québec, puisse être complété dès que possible avec l'implication du ministère des Ressources naturelles et de la Faune afin d'en évaluer sa faisabilité économique à grande échelle. C'est que, dans ce projet pilote, Tembec n'est plus à l'étape du concept. Il s'agit d'une réelle mise en oeuvre sur le terrain d'une stratégie d'aménagement forestier écosystémique où des scientifiques, opérateurs de machinerie et forestiers de Tembec se sont approprié l'approche et l'appliquent dans leurs tâches respectives de planification forestière, d'analyse, d'opérations terrain et de suivi. La période 2008-2013 est donc déterminante pour évaluer les impacts de l'aménagement écosystémique sur la possibilité forestière et son applicabilité à l'échelle opérationnelle.

En conclusion, Tembec propose de mettre son expertise à la disposition du MRNF durant la période de transition. On est disposés à contribuer à l'évolution du régime forestier du Québec, notamment dans le cadre de projets pilotes, tout en continuant entre-temps de s'acquitter de nos obligations contractuelles de façon responsable et professionnelle. Nous pensons ici à la vente aux enchères, au projet de forêt de proximité, à la sylviculture intensive et, bien sûr, à la certification des territoires forestiers.

Mme la ministre, Mmes, MM. les parlementaires, il est impératif qu'un nouveau régime forestier contribue à rendre notre industrie forestière plus compétitive, et le projet de réforme du régime forestier présenté par le gouvernement soulève à cet égard plus d'inquiétudes que d'assurances. Je vous remercie de votre attention. Nous sommes disposés à répondre à vos questions.

Le Président (M. Huot): Merci, M. Lessard. Donc, je reconnais maintenant la ministre des Ressources naturelles et de la Faune. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Normandeau: Oui. M. Lessard, Mme Labrecque, bonjour, bienvenue à cette commission. On est très heureux de vous accueillir. C'est vrai que Tembec est un joueur important au Québec, et mon collègue de Rouyn-Noranda peut en témoigner, il vous connaît bien, il connaît bien votre organisation.

Plusieurs commentaires, questions. Dans un premier temps, là il faut nous aider, parce qu'AbitibiBowater et le CIFQ sont venus ici pour nous dire: Écoutez, au Québec, c'est ici que le coût de la fibre est le plus élevé. Pourtant, depuis plusieurs années, le ministère des Ressources naturelles, de concert avec l'industrie, a fait énormément d'efforts pour réduire le coût de la fibre. Nous, on a des chiffres qui vont exactement dans le sens contraire de tout ce que vous soutenez, et là, par essence, si on compare l'Ontario, le Nouveau-Brunswick... Alors, on essaie de comprendre, la vérité, elle est où. Parce que vous vous appuyez sur la fameuse étude de Pricewaterhouse, je crois, c'est ça? Enfin...

M. Lessard (Michel): Entre autres, entre autres...

Mme Normandeau: Entre autres.

M. Lessard (Michel): Bien, je peux vous laisser poursuivre.

Mme Normandeau: Oui, bien, c'est ça. Alors, j'aimerais peut-être que vous puissiez nous éclairer là-dessus dans un premier temps. Alors, voilà, puis je vais revenir avec d'autres questions.

M. Lessard (Michel): Parfait. Concernant l'étude de Pricewaterhouse, oui, on se réfère en partie là-dessus, mais il faut comprendre aussi que Tembec a des opérations à la grandeur du Canada. Donc, on connaît exactement les coûts de fibre pour les usines du Québec, donc d'opérer au Québec, qu'est-ce qui en coûte en Ontario, qu'est-ce qui en coûte au Manitoba et qu'est-ce qui en coûte en Colombie-Britannique. Et, avec les chiffres, donc les chiffres internes qu'on a, cela démontre fortement que les coûts sont plus dispendieux au Québec. C'est pour ça d'ailleurs aussi que les usines sont... si on regarde les usines de sciage, aujourd'hui, nos usines, bien en tout cas la majorité sont fermées, et on va passer encore une année difficile au niveau du sciage. Si on regarde en Ontario et dans les autres provinces, on va opérer pratiquement à pleine capacité, compte tenu justement que le prix de la fibre est plus bas.

Mme Normandeau: Et là-dessus je vais me permettre un... Là, vous parlez juste de coût de la fibre, mais la compétitivité puis les gains de productivité, là, vous en faites quoi? Parce que ça revient comme une marotte, toujours, ça. J'ai demandé à AbitibiBowater, là, la compétitivité ? puis vous l'affirmez vous-même dans votre mémoire ? dans le fond, on souhaite que le nouveau régime forestier fasse en sorte que l'entreprise et l'industrie demeurent compétitives, mais votre responsabilité à vous comme industriel pour améliorer justement votre compétitivité, pour faire des gains de productivité, qu'est-ce que vous faites comme efforts?

n (12 h 30) n

M. Lessard (Michel): Ça, je le mentionnais tantôt dans mon introduction. Tembec a mis en place... puis, je vous dirais, depuis peut-être une vingtaine d'années, on a mis en place des plans de réduction de coûts. Donc, d'année en année, sur tous les coûts contrôlables... donc en usine, par exemple, hein, c'est des coûts pour nous autres qui sont plus faciles à contrôler. En forêt aussi, il y a certains coûts qu'on a le contrôle dessus. Ces coûts-là n'ont pratiquement pas augmenté; même, il y a des coûts qui ont diminué au cours des années.

Ce qui est plus difficile, c'est les coûts incontrôlables. C'est certain qu'il y a eu le... tu sais, il y a les redevances, il y a justement... il y a le carburant, c'est des exemples. C'est sûr qu'il y a le coût de la vie, aussi, rattaché à ça. Ça, c'est des parties incontrôlables, qu'on a de la misère. Il y a aussi toute l'administration du gouvernement. Tu sais, on parle beaucoup aussi de simplification administrative, c'est vrai que dans les dernières années on a travaillé avec le gouvernement pour simplifier, mais, au bout de la ligne, sur le 2 $ qui a été annoncé, ça nous donne, tu sais, je pourrais vous parler de quelques sous de réduction sur le 2 $ qui a été annoncé.

Au niveau des redevances, je vous entendais aussi parler des réductions des redevances. Vous parliez aussi d'une moyenne. Je suis d'accord avec vous qu'en moyenne ça a baissé; par contre, en Abitibi, nous, nos redevances ont augmenté. Donc, dans une moyenne, tu as des plus hauts et des plus bas.

Mme Normandeau: Pourquoi elles ont augmenté, chez vous?

M. Lessard (Michel): Bien, il y a des choses qu'il faut qu'on revérifie. Justement, on en discutait encore hier, Geneviève et moi, là-dessus, mais on doit, on doit regarder exactement qu'est-ce qui explique ces augmentations-là.

Il y a d'autres éléments aussi, quand on parle de compétitivité avec les autres provinces, où on peut se trouver désavantagés. C'est sûr qu'il y a eu un programme d'aide aussi au niveau des chemins forestiers. On a 90 % ici, mais, en Ontario, où je travaille aussi, du côté de la frontière, on reçoit 100 % de crédits pour la construction des chemins et on reçoit 100 % aussi de crédits pour l'entretien des chemins. Ça fait que ça, c'est un élément supplémentaire.

Le Président (M. Huot): Mme la ministre.

Mme Normandeau: Oui. Merci. Ce que vous me dites, là, c'est très, très, très important. Pourtant, Ontario, Québec, on fait bien attention à tous les gestes qu'on pose par rapport aux Américains. Alors, comment se fait-il que l'Ontario puisse offrir 100 % de compensation et pour la construction et pour l'entretien, puis, au Québec, on dit 90 %, parce que enfin... Bref, je me pose pas mal de questions, là, M. le Président. Je vais élucider ça avec l'équipe du ministère. Ceci étant, on va peut-être chercher à obtenir vos chiffres sur le coût de la fibre, parce qu'on a dit, on a pris l'engagement devant le CIFQ de former une petite équipe de travail pour qu'on puisse faire la lumière là-dessus. Parce que, sincèrement, là, depuis que je suis là, puis non seulement comme ministre, mais également depuis comme ministre au sein du gouvernement, là, puis les collègues députés peuvent en témoigner, là, ça revient comme une marotte, cette affaire-là, là. Pourtant, il y a des efforts qui ont été faits, mais enfin...

Ceci étant, je me permettrai peut-être un commentaire... en fait une, comment dire... J'accueille ça avec pas mal de surprise. Comme AbitibiBowater, vous demandez à être compensés s'il y a des pertes de volume dans la transition, évidemment, avec le nouveau régime. Je vais vous poser une question. Dans un contexte où la forêt appartient à tous les Québécois, où c'est un patrimoine forestier dont on a la responsabilité, là, d'assumer la pérennité, comment on pourrait justifier des compensations, alors que sincèrement vous avez eu accès à la forêt de façon privilégiée depuis 25 ans? Oui, il y a des emplois qui ont été créés, mais je me mets à la place du citoyen, là, qui est de son côté, par exemple, et puis qui regarde ça de son salon, qui dit: Coudon, ils ont fait des efforts de rationalisation importants, des pertes d'emploi... qui ont été perdus, des communautés qui ont été affectées, puis en plus ils nous demandent une compensation. Comment on peut justifier ça comme gouvernement ou comme société?

Le Président (M. Huot): M. Lessard.

M. Lessard (Michel): Oui. Là-dessus, puis je comprends justement votre point, et c'est certain que c'est un point qui est assez, je dirais, difficile à discuter, mais, encore là, comme je vous disais, je travaille un peu partout au Canada, et ça s'est fait, ça s'est fait en Colombie-Britannique. Comment le justifier? C'est certain que, quand on a eu des approvisionnements, il y a un contrat qui a été signé avec le gouvernement. À partir de ce contrat-là, on a investi des milliards de dollars soit en usine, soit en forêt, pour les différentes infrastructures. Donc, quand on parle de compensation, il faut comprendre aussi que, quand on a fait des chemins forestiers, qu'on a investi, comme je vous dis, des milliards, on a des camps forestiers, on a un paquet de choses. Après ça, du jour au lendemain, on ne sait plus... Tu sais, tout d'un coup qu'on n'est plus dans les territoires historiques, on a un camp, on a des chemins, des choses comme ça, du jour au lendemain, vous nous placez ailleurs, dans un autre territoire. Bon. Est-ce que c'est les autres qui vont profiter justement de ces chemins-là? En usine, tous les milliards, justement, qu'on a investis aussi durant les années pour accroître notre production, pour être compétitifs, justement, qu'est-ce qu'on fait avec ça, justement, si on se fait encore enlever du volume, qui va être distribué comment? Maintenant, les nouveaux volumes qu'on va recevoir, ils vont être où? Est-ce qu'ils vont être économiquement intéressants, est-ce qu'on va être obligés de fermer une usine, de se rationaliser? Ça fait que, tu sais, il y a tout ça aussi qu'il faut prendre en ligne de compte, là.

Mme Normandeau: Peut-être vous rassurer sur la certification, là, puis on s'est rencontrés avec les gens de la coalition, puis votre commentaire, je l'ai retenu. D'ailleurs, je vous ai cité à quelques reprises. Ça prend effectivement des mesures de transitions pour s'assurer dans le fond, là, qu'il n'y ait pas de vide quant à la certification, parce que j'ai compris que vous avez une crainte que... en fait, qu'il y ait de l'insécurité puis que vous insécurisiez également les marchés sur lesquels vous travaillez. Alors ça, on va s'employer, là... Ce n'est pas le cas actuellement dans le projet de loi, qui est déposé, mais on va s'employer à formuler un libellé pour atteindre l'objectif que vous avez visé.

Également peut-être vous faire part aussi d'une surprise. Vous souhaitez que le bois de la forêt privée se négocie exclusivement sur le marché concurrentiel du libre marché. Hier, on avait la Fédération des producteurs de bois qui sont venus nous dire exactement le contraire, ils ne souhaitent pas qu'on s'attaque au régime de mise en marché collective. Alors, moi, je dois vous dire qu'on a senti énormément de résistance de la part de la Fédération des producteurs de bois. Si, comme parlementaires, comme législateur, on s'attaque à ça, je pense que c'est la guerre, là. Je ne crois pas beaucoup me tromper en disant ça. Alors, enfin, j'essaie de voir, essayer de comprendre le raisonnement derrière votre affirmation ou votre volonté. Je vais le dire comme ça, l'exprimer.

Le Président (M. Huot): M. Lessard.

M. Lessard (Michel): Oui. On parle de marché concurrentiel. Ce qu'on comprend aussi du projet de loi, c'est qu'il va y avoir une partie de bois qui va être mis sur le marché libre. Il faut comprendre aussi... Je reviens au principe de résidualité, parce que tout ça tournait autour du principe de résidualité. Est-ce que, quand justement on se fait enlever un certain pourcentage, que ce soit 25 %, 30 %, de nos approvisionnements pour mettre à l'enchère, est-ce qu'à ce moment-là le principe de résidualité tient tout le temps? Il tient comment? Aujourd'hui, le principe de résidualité, c'est qu'on doit s'approvisionner en premier lieu en forêt privée, on doit s'approvisionner dans les autres provinces, et ensuite de ça le ministère compense donc avec le bois de la forêt publique. Donc, du moment où on a une portion de notre bois qui nous est enlevée et qui est mise en marché, pourquoi justement la forêt privée ne ferait pas partir aussi de ce pool-là de bois? Et on est prêts aussi à acheter ce bois-là sur le marché libre au même titre que le bois de forêt publique.

Mme Normandeau: Évidemment, le principe de la résidualité, ça aussi, c'est une autre vache sacrée. En fait, c'est un principe qui a des... on a eu de la difficulté au fil des années à l'appliquer, mais j'ai affirmé que nous allions donc renforcer le principe de la résidualité. On n'a pas encore tous les détails, là, alors... Mais, là, il faut trouver une façon, comme société, là, des aménagements qui fassent en sorte qu'il y ait une zone de confort entre tous les intervenants. Là-dessus, je dois vous dire que le coefficient de difficulté est un petit peu plus élevé, pour rencontrer votre volonté d'assurer une libéralisation des marchés des bois autant en provenance de la forêt publique que de la forêt privée. Là-dessus, c'est ça. Puis je prends à témoin mes collègues qui étaient là hier avec des représentants de la Fédération des producteurs de bois, monsieur...

Une voix: ...

Mme Normandeau: Gagnon, exactement. C'est ça. Écoutez, je vais peut-être... Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Huot): Il reste cinq minutes.

Mme Normandeau: Oui. C'est important d'échanger avec vous autres sur l'avenir de Tembec, de votre organisation, parce que le régime forestier est beaucoup tourné vers l'avenir. La difficulté que vous avez, votre défi, je dirais, c'est d'essayer de vous projeter dans le temps avec... face à vos difficultés actuelles et un régime qui, lui, vous commande d'essayer de voir dans l'avenir comment, de quelle façon votre organisation va être positionnée. Nous, on est convaincus, comme gouvernement, qu'il y a un avenir pour l'industrie du bois au Québec. Actuellement, là, il y a des discours extrêmement pessimistes, presque apoca... quasi apocalyptiques, là, qui laissent croire que finalement, là, l'industrie du bois, même des pâtes et papiers, c'est des secteurs qui sont morts, moribonds puis dans le fond qui ne sont pas promus à un grand avenir. Moi, personnellement, comme ministre des Ressources naturelles, je ne partage pas un constat comme celui-là.

De votre côté, comment vous envisagez l'avenir, du côté de Tembec? Est-ce qu'il y a des nouveaux produits, des nouvelles niches? Puis, comme spécialistes, là, de la forêt, si j'avais à vous demander quelle direction le Québec devrait prendre sur le plan industriel pour s'assurer que... C'est des questions importantes, hein, ça? Ce n'est pas des questions pièges, mais dans le fond voyez ça comme une opportunité d'échanger avec nous, à partir de tout votre vécu comme forestiers, comme industriels. Faites comme si vous étiez dans votre salon, puis on jase comme ça un peu à bâtons rompus sur l'avenir de votre organisation.

Le Président (M. Huot): À cette grande question, M. Lessard, je vous informe qu'il reste quatre minutes.

M. Lessard (Michel): O.K. Bon. Habituellement, quand je suis dans mon salon, j'essaie de ne pas trop parler de travail! Pour le futur, je vous dirais qu'on voit un grand avenir aussi au niveau du Québec. C'est clair que Tembec veut se développer au Québec. Tantôt, vous avez fait référence à M. Daniel Bernard, qu'on prend plaisir de rencontrer régulièrement puis expliquer justement Tembec en est où, où on s'en va. Je vous ai parlé justement de la recapitalisation qu'on a fait aussi en 2008. Je vous dirais que le... je cherche le terme en français, le timing...

Une voix: ...

n (12 h 40) n

M. Lessard (Michel): ...momentum ? O.K., on passe de l'anglais au latin! ? a été très bien par rapport à ça. Donc, on a été quand même d'être... d'avoir le niveau de liquidités, si vous voulez, pour passer à travers cette crise-là. Depuis... puis, écoute, là, ce que je vous dis, je peux me permettre de vous le dire parce que c'est... ça a été publié par notre président, mais... C'est sûr qu'il faut faire attention, mais, malgré les temps difficiles passés, on a quand même fait quelques actions. Tantôt, je parlais de la vente de Temrex. Bon. C'est un certain élément quand même qui nous aide dans nos liquidités. On regarde aussi... il y a des actifs, pour nous autres, qui ne sont pas stratégiques. Qu'est-ce qu'on va faire avec ces actifs-là? Est-ce qu'on va les garder? Probablement pas. Je vous dirais qu'on remet tout ça en question.

C'est sûr que, Tembec, on a de l'expertise. Tantôt, je vous parlais de la pâte, hein? Il y a des types de pâte qu'on est... la pâte à haut rendement: on détient 20 % du marché mondial dans la pâte à haut rendement. Au niveau de la pâte... la spécialité cellulose, comme je vous disais, la... donc on l'utilise dans les aliments, dans la crème glacée, dans les aspirines, etc. On est les plus gros, aussi, producteurs au monde de ce type de pâte là.

Au niveau du bois d'oeuvre aussi, on a une capacité de 1,7 milliard de chiffre d'affaires, au niveau du bois d'oeuvre, donc on est dans les gros producteurs nord-américains. Ça fait que ce qu'on veut, c'est de continuer aussi dans ces créneaux-là dans lesquels on croit. Premièrement, on a... je pense qu'on a démontré notre expertise, puis, pour le futur, on croit réellement que les marchés vont être là aussi, là.

Mme Normandeau: Vous croyez que les marchés vont être là?

M. Lessard (Michel): Oui. Ça se dit-u bien en français?

Mme Normandeau: Bon, ça fait que... Non, c'est correct. C'est parce que du papier journal, par exemple, bon, le marché est difficile, mais est-ce qu'il y a des niches, là, que vous... sur lesquelles... Vous parliez de bois d'oeuvre tout à l'heure. Évidemment, là, on essaie de tirer une leçon... tous essaient de tirer une leçon du conflit actuel pour peut-être se diriger vers des marchés ou des... en fait tenter de développer des créneaux, là, pour répondre aux nouveaux besoins.

Le défi, c'est d'anticiper, hein, les nouvelles tendances sur le marché, les nouveaux besoins. Alors, est-ce que vous avez une réflexion active, peut-être même carrément un département dans votre organisation qui travaille en R&D justement pour essayer de voir comment améliorer non seulement vos procédés, mais chercher à développer des nouveaux marchés, des nouveaux produits?

Le Président (M. Huot): M. Lessard, en une minute, s'il vous plaît.

M. Lessard (Michel): O.K. Non, ça, c'est clair. On a une équipe de R&D qui est en place depuis plusieurs années et qui fait différentes recherches. On utilise aussi... Vous voyez, le feuillu, il y a une problématique au niveau de l'utilisation du feuillu ? hein, on parle, au Témiscamingue, que M. Bernard connaît bien, on parle aussi, que ce soit dans les autres... dans les autres parties de la province ? nous autres, la pâte à haut rendement, justement, à Matane, comme vous connaissez bien, on utilise cette partie feuillue là. Je pense que ça... L'utilisation justement d'essences ou de parties de bois qui ne sont pas utilisées puis que, nous autres, on peut en faire un produit à valeur ajoutée... Parce qu'à cette heure, tu sais, on parle souvent de produits à valeur ajoutée; moi, je vous dis que la pâte à haut rendement qu'on fait puis qu'on vend aujourd'hui sur les marchés, pour nous, c'est un produit aussi à valeur ajoutée.

Donc, c'est certain qu'on se requestionne à tous les jours. On regarde... On ne veut pas, si vous voulez, adapter la fibre à nos usines, on va plutôt adapter nos usines à la fibre, à ce qu'on a, puis c'est par rapport à ça, je vous dirais, que c'était le discours de M. Dottori, c'est le discours encore que notre président, M. James Lopez, a aujourd'hui et... Mais, chose certaine, c'est qu'on veut poursuivre dans les créneaux dans lesquels on est bons, et on croit réellement justement que l'avenir va être...

Le Président (M. Huot): Merci beaucoup.

M. Lessard (Michel): ...meilleur pour nous.

Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Vous aurez l'occasion peut-être de compléter avec l'échange avec l'opposition officielle. Je reconnais maintenant le député de Roberval, porte-parole de l'opposition officielle en matière de mines et de forêts. M. le député de Roberval, la parole est à vous.

M. Trottier: Oui, merci, M. le Président. M. Lessard, Mme Labrecque, très heureux de vous entendre, d'autant plus que vous avez une vision optimiste de l'avenir, et je pense que c'est important, je pense qu'il faut être conscient que le bois a un avenir. La ministre dit que les discours moribonds nuisent à l'industrie, et je suis bien d'accord, mais, quand le mauvais exemple vient d'en haut, quand le premier ministre lui-même dit aux travailleurs forestiers d'aller travailler dans les mines, ça n'aide pas beaucoup l'industrie. Ce n'est pas très... ce n'est pas un très bon message à lancer à l'industrie.

Vous travaillez dans une situation qui est extrêmement difficile présentement: le prix du bois n'est pas là, bon, on pourrait dire que... on pourrait nommer tous les problèmes, vous les avez à peu près tous, là; bon, certains disent qu'on est dans le fond du baril, d'autres disent qu'on est en dessous du baril présentement; ce n'est vraiment pas évident. Je comprends que vous avez... Vous cherchez à diminuer les coûts, vous avez de nombreuses demandes, là. Bon, vous dites, là, que vous ne voulez pas accepter que les bénéficiaires contribuent directement au fonds sur l'application du territoire forestier, vous voulez baisser les redevances, bon, vous essayez de trouver des moyens de faire en sorte qu'on puisse diminuer les coûts. Je vous comprends, dans la situation actuelle, là, parce qu'il y a plusieurs usines qui ne sont pas capables d'arriver dans... Avec le prix du bois à 240 $, là, c'est bien évident que c'est difficile d'arriver avec ça.

Mais, quand le prix du bois va être bon, est-ce que vous seriez partenaires, si on vous dit: On va vous aider à court terme parce que le prix n'est pas bon, mais, quand le prix du bois va revenir, parce qu'il va revenir, le prix du bois va s'améliorer, est-ce qu'à ce moment-là vous seriez d'accord pour participer, pour... on pourrait dire, avoir une solution gagnant-gagnant?

Le Président (M. Mamelonet): M. Lessard.

M. Lessard (Michel): C'est sûr... puis je reviens à votre point, que vous dites qu'on cherche plusieurs moyens pour réduire les coûts, puis c'est vrai. Hein, sur les éléments qu'on fait référence dans notre mémoire, c'est sur les éléments sur lesquels on n'a pas de contrôle. Ce qu'on vous dit: Les éléments sur lesquels on a un contrôle, que ce soit justement en usine, sur les productivités des équipements ou en forêt aussi, ça, on va... on va faire notre travail puis on va améliorer nos coûts.

Sur les éléments, par contre, qu'on n'a pas de contrôle, comment est-ce qu'on va être capables de payer tous les différents comités de la régionalisation, comment est-ce qu'on va être capables de payer le bureau de mise en marché, tous ces éléments-là, ça, on n'a pas de contrôle. Puis ce qu'on vous dit, c'est qu'aujourd'hui c'est vrai, et puis peut-être encore pour un an, deux ans, trois ans, on va avoir énormément de difficultés parce que, comme on dit, il faut se refaire.

Par contre, c'est certain que, quand les marchés vont être meilleurs, on va être capables... vous allez voir qu'on est une industrie qui revient à la vie, comme je pourrais dire, parce qu'on a parlé beaucoup aussi de soins intensifs dans les dernières semaines, ça fait qu'on va être sortis des soins intensifs puis on va être en pleine santé, bien il n'y a pas de problème, on va être capables aussi de participer. On est une compagnie aussi, là, qu'on a... on a un siège social à Montréal, mais l'exécutif de Tembec sont localisés à Témiscaming.

Je peux vous dire aussi, on est une compagnie qui, au niveau social, on a fait énormément, puis, je pense, M. Bernard peut en témoigner. Je vais vous dire que c'est difficile aussi aujourd'hui, quand on voit les gens venir cogner à notre porte, parce qu'on sait qu'il y a quand même d'autres difficultés, tu sais, au niveau de la santé, puis on est dans les régions éloignées, c'est plus difficile, quand on est obligés de refuser ces éléments-là puis de fermer la porte parce qu'on n'a pas le moyen de donner de l'argent qu'on n'a pas aujourd'hui.

Mais c'est certain que, si on revient dans une économie qui est telle qu'elle devrait l'être, bien là, à ce moment-là, on peut se rasseoir puis de regarder qu'est-ce qu'on peut faire. Mais, encore là, il y a toujours un balancier, hein? Il faut faire attention pour ne pas, du jour au lendemain, retourner peut-être... peut-être comme on l'a déjà été par le passé. Ça fait que c'est... on a appris beaucoup aussi par le passé, on apprend beaucoup avec le présent, ça fait que je vous dirais que le futur, oui, il y a moyen de faire quelque chose, mais, encore là, trouver le juste milieu.

M. Trottier: Je suis très heureux de votre ouverture, parce qu'il faut être conscient que, quand un gouvernement veut aider une entreprise, bien il faut que les citoyens soient d'accord avec ça, et, pour toutes sortes de raisons, peut-être que l'industrie s'est mal vendue dans le passé, peut-être que... puis je ne parle pas nécessairement de Tembec, je parle de l'ensemble de l'industrie forestière, l'image des industries forestières n'est pas très bonne au Québec. Bon, en gros ce qu'on dit, c'est: Vous avez fait des milliards, des millions, et là, finalement vous dites: Donnez-nous de l'argent. C'est un petit peu ça qu'on entend.

C'est bien évident que, si l'entreprise dit: Nous, tout ce qu'on veut, c'est diminuer nos coûts sans participer, ce n'est pas... ce n'est pas très vendant. Si vous dites: Écoutez, nous autres, là, on a besoin à court terme, on est mal pris, puis c'est le rôle de l'État de le faire, mais, quand ça va bien aller, nous, on va être prêts à... comme on dit, à remettre dans la cagnotte, je pense qu'à ce moment-là, ça, c'est pas mal plus vendant, c'est vers ça qu'il faut aller.

Vous dites que vous vous opposez à... au prix de départ... à un prix minimum sur la vente du bois. Bon. Est-ce que vous pourriez expliquer davantage, puis quelles seront les conséquences, s'il y a un prix de départ... Puis finalement c'est que là il peut y avoir... J'aimerais ça que vous puissiez me dire c'est quoi, les avantages et inconvénients d'avoir un prix de départ minimum.

M. Lessard (Michel): Là-dessus, c'est parce qu'on parle d'un réel libre marché. Je peux comprendre qu'il y ait un prix, peut-être, de départ que les gens peuvent se fixer, mais qui ne devrait pas nécessairement être obligatoire. L'industrie, comme elle est aujourd'hui, si on n'a pas le moyen de payer le prix demandé, bien, à ce moment-là, on ne devrait pas être pénalisés de quelque façon que ce soit, que ce soit pour une résidualité éventuelle ou... Tu sais, si on regarde le libre marché ? puis je prends l'exemple aussi en Colombie-Britannique ? aujourd'hui, on achète du bois, ce qu'on appelle du BC Timber... ? excusez, je ne connais pas la traduction française ? mais on comprend que leurs coûts fixes, quand même, sont peut-être de 4 $, 5 $... 6 $, 7 $. Mais, aujourd'hui, justement, pour... ils comprennent la situation de l'industrie forestière et ils vont vendre du bois à 0,25 $ du mètre cube. Donc, ils ne sont pas capables de couvrir leurs frais minimaux avec ça. Mais, d'un autre côté, ça aide aussi l'industrie forestière, ce qui fait en sorte qu'ils ont du bois bien en deçà de ce qu'on peut payer aujourd'hui, aussi.

Mme Normandeau: Bien, vous ne parlez pas des insectes, là? Vous ne parlez pas du bois sain comme le Québec, là. Si on compare les pommes avec des pommes, là...

M. Lessard (Michel): Non. Je compare...

n (12 h 50) n

Le Président (M. Huot): Mme la ministre...

Mme Normandeau: Oui. Pardon. Pardon. Excusez-moi. Excusez-moi. Excusez-moi.

Une voix: Bien, je peux répondre.

Le Président (M. Huot): Je vous mets... Avec le consentement, là, de...

Mme Normandeau: Non, non. Ça va, ça va, ça va.

Le Président (M. Huot): Ça va?

Mme Normandeau: Sans commentaires.

Le Président (M. Huot): M. le député de Roberval. La parole est à vous.

M. Trottier: Disons que, moi, je comprends, là, que, dans la situation actuelle, de dire: On va mettre un prix; peut-être... c'est peut-être difficile. Mais je reviens à la question. Quand le prix va être bon... C'est parce qu'à un certain moment donné, si on accepte que le prix soit bas à un certain moment donné, il faudrait que vous acceptiez que le prix soit plus haut à un certain moment donné, aussi, parce que, sinon, il va y avoir juste un gagnant dans tout ça. C'est dans cet esprit-là que je pense qu'il faut voir la chose. C'est que, si, pendant un certain temps, pour des raisons, on pourrait dire, de situation exceptionnelle, on mettait des mesures exceptionnelles, bien il faudra comprendre qu'à un certain moment donné il va falloir se refaire à quelque part.

M. Lessard (Michel): Ça, je vous rejoins parfaitement. C'est certain que le libre marché doit aller aussi en fonction des marchés. Si notre produit a une bonne valeur, hein... la fibre qu'on récolte, elle a une bonne valeur en bout de piste, bien à ce moment-là c'est certain que les compagnies vont être intéressées à payer un peu plus pour ça.

Il faut faire attention aussi, quand je parle du prix minimum ou prix de départ, ce qu'on veut surtout éviter, c'est que... aujourd'hui, il y a plein de compagnies peut-être qui vont vouloir s'improviser en forêt, hein, dire: Bien, écoutez, moi, je veux partir une compagnie forestière, je veux intervenir en forêt, je veux mettre du bois aux enchères. Bon, bien, est-ce qu'il est efficace, hein? Cette personne-là, si elle veut le bois, par exemple, 6 $ du mètre cube de plus que ce que, nous autres, on serait capable de le faire, on ne veut pas... on ne veux pas être pris avec ça non plus, là. Ça fait qu'il y a l'efficacité aussi qui rentre en ligne de compte là-dedans, là.

M. Trottier: Vous mentionniez tout à l'heure qu'on avait le prix du bois le plus cher au Canada. Ailleurs dans le monde, d'après ce que j'en sais, c'est plus cher. Comment ces entreprises-là font-ils pour avoir des prix plus chers et quand même être rentables?

M. Lessard (Michel): Ailleurs, il faut dire aussi que... Ailleurs, si vous parlez de l'Europe... Premièrement, ils n'ont pas la même qualité de fibre qu'on a, hein? Ici, on va parler de 9, 10 arbres pour faire un mètre cube. Là-bas, vous parlez, là, d'arbres qui ont quand même un bon diamètre. C'est... On ne parle pas non plus d'un rendement d'environ 1 mètre cube par hectare par année, comme on a ici. Tu sais, c'est cinq, six, 10 fois plus, 15 fois plus de qu'est-ce qu'on a ici. C'est du développement aussi qui s'est fait à proximité des usines. Ça fait qu'au niveau du coût de transport je vous dirais qu'ils sont peut-être favorisés aussi. Ça fait que je vous dirais qu'il y a plusieurs éléments aussi qui doivent rentrer en ligne de compte, là, par rapport à ce coût-là, là.

Puis il y a le panier de produits aussi à la fin. Quand tu as un bois de meilleure qualité, ton panier de produits normalement doit te rapporter beaucoup plus. Ici, on est au Québec, on fait avec ce qu'on a aussi. Le panier de produits, c'est sûr qu'on ne ressort pas, qu'on n'a pas les prix que la Colombie-Britannique ou l'Europe ou... peuvent... peuvent en retirer aussi.

M. Trottier: Vous mentionnez que vous demandez la mise en place d'un système d'indicateurs de performance solide et transparent sur... à la base des objectifs d'opération, là, des nouvelles... de la nouvelle gouvernance. Est-ce que vous pourriez nous donner des exemples? Comment ça pourrait fonctionner? Ce serait quoi, là, un modèle qui pourrait être, on pourrait dire, efficace, là?

M. Lessard (Michel): Je vais laisser la parole à Mme Labrecque.

Le Président (M. Huot): Mme Labrecque, allez-y.

Mme Labrecque (Geneviève): Oui. Dans ce cas-là, on parlait, là, qu'on était en faveur de la régionalisation puis de faire travailler, là, régionalement nos... les équipes, là, sur les tables locales de gestion intégrée ou la commission sur les ressources naturelles et territoire. Quand on arrive avec les indicateurs de performance, ce qu'on dit: C'est important qu'il y ait des décisions qui se prennent autour de ces tables-là et que ça avance. Au bout du compte, il va y avoir des permis d'intervention qui devront être livrés pour permettre des activités en forêt. Donc, avoir un système d'indicateurs de performance, par contre, ce serait de se donner des échéanciers fixes, de passer au travers au travers les différentes étapes de consultation, puis de se donner les objectifs puis de les suivre. Tu sais, souvent les gens représentés autour des tables viennent défendre chacun un point de vue de leur organisme, et c'est correct, mais il faut être d'accord qu'il faut arriver à une solution, puis qu'il y aura des opérations des en forêt, puis qu'il faut donner une réponse et choisir des éléments. Donc, il faut se donner des cibles à atteindre, des mesures pour les mesurer et faire un suivi de ces indicateurs-là. C'est ce qu'on veut dire par les indicateurs de performance.

Plus précis comme exemple, je pourrais vous dire: Si on décide que la distance moyenne de transport dans l'UAF devrait être de telle... de 125 km, donc il faudrait que les gens autour de la table vérifient le plan, avec toutes les modalités des autres intervenants, pour voir si ça répond et si c'est viable pour l'industrie, et qu'en même temps les autres critères, que ce soit faunique ou de biodiversité, soient respectés aussi. Alors, on les mesure puis on donne une réponse. Alors, on dit que c'est important, qu'il devrait y avoir un système comme ça de mesure pour atteindre les objectifs au bout du compte avant d'émettre un permis.

Le Président (M. Huot): M. le député de Roberval, je vous informe qu'il reste cinq minutes.

M. Trottier: O.K. Je vais faire une question, je vais céder la parole à ma collègue. Vous dites que vous êtes en faveur des forêts de proximité mais que ça devrait être prioritairement consacré à la sylviculture intensive. Je comprends vos intérêts dans ça, la proximité, etc., mais il y a d'autres gens qui nous disent: Les forêts de proximité, il faut que ça ne serve pas à juste, on pourrait dire, à l'industrie forestière, parce qu'il y a des besoins en matière de faune, de récréation, etc. Comment on va concilier tout ça?

Une voix: ...

M. Trottier: Forêt habitée, c'est ça, hein?

Une voix: ...

M. Lessard (Michel): O.K. Peut-être juste un élément avant de céder la parole à Mme Labrecque. Les forêts de proximité, je pense qu'on s'entend tous, normalement, c'est des forêts qui se trouvent à proximité de notre usine. Ça fait que c'est certain que, pour le futur, hein ? tantôt, on parlait de vision du futur ? si on est capables de développer la fibre, hein, une fibre de meilleure qualité, une fibre aussi à bas coûts parce qu'elle est à proximité de notre usine, donc par une sylviculture intensive dans les forêts de proximité, ce serait vraiment un plus. On comprend par contre qu'il n'y aura pas seulement que ça. On comprend que, pour nous autres, ça peut être une fourniture importante de fibre éventuelle, à bas coût et à bonne qualité, hein, et certifiée FSC, il ne faut jamais l'oublier, mais aussi ça peut servir à bien d'autres usages, là.

Le Président (M. Huot): Mme Labrecque.

Mme Labrecque (Geneviève): C'est ça, ce n'est pas nécessairement incompatible. Et notre demande, dans le mémoire, c'est d'expliquer que, compte tenu que les forêts de proximité, par leur nom, devraient être près des milieux et donc près des usines aussi, ce serait souhaitable que ce soit consacré à la production de matière ligneuse de manière importante. Ça devrait être dans les objectifs. Donc, c'est une suggestion qu'on faisait dans notre mémoire dans ce sens-là. On n'est pas fermés à ce qu'il y ait d'autres usages dans ces forêts-là.

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant la députée d'Iberville. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Bouillé: Merci, M. le Président. Donc, je veux remercier les représentants de Tembec de s'être présentés et de nous faire part de leurs commentaires. Je comprends que les réserves que vous émettez ici ont déjà été transmises antérieurement dans le cadre du livre vert, et tout ça, là, on retrouve des éléments.

Cependant, je vous avoue que je suis surprise un peu par le ton, qui laisse peu de place au compromis. C'est assez tranché dans votre mémoire. Par exemple, sur les redevances annuelles, de la manière que vous le présentez, c'est que vous ne voulez aucune augmentation du coût d'approvisionnement en bois. Donc, c'est, dans le fond, vous nous dites que vous refusez qu'il y ait des coûts parce que vous interprétez que ça va être... que c'est déjà inclus dans les redevances actuelles. Mais, pour vous, dans le temps, vous vous opposez à toute augmentation dans le temps, peu importe ce qui va se passer dans le secteur forestier?

Le Président (M. Huot): M. Lessard, je vous informe qu'il reste deux minutes.

M. Lessard (Michel): Au niveau du coût, pour nous autres, là, c'est notre sérum. Si on n'est pas capables d'être compétitifs avec les autres industries forestières, à ce moment-là il n'y en aura plus, d'industrie au Québec. Ça fait que ce qu'on vise, c'est d'avoir le juste prix, par rapport à la qualité, au panier de produits qu'on a. Ce qu'on cherche, puis on le dit, le ton, peut-être qu'il aurait été... on aurait peut-être pu faire mieux, mais, quand même, il fallait aussi alarmer les gens, d'une certaine façon, au coût qui existe au Québec et aux problématiques qu'on a. Vous voyez, hein? Je pense que toutes les... Je regardais encore ce matin dans le journal Les Affaires, hein: Plus de 60 000 emplois liés à la forêt qui ont disparu. Donc, c'est tous des éléments. Ça fait que, si on veut être compétitifs, on n'a pas le choix aussi de se comparer. Puis, à la fin aussi, avec le panier de produits, comme je mentionnais tantôt, qu'est-ce qu'on est capables de faire puis à quel prix qu'on est capables de le vendre à l'étranger? Si on n'est pas capables de le vendre à un prix compétitif par rapport aux gens des autres provinces ou des autres pays, bien à ce moment-là on ne sera plus là pour en parler.

Si on ne veut pas d'augmentation, encore là, comme je disais, tout y va en fonction d'un balancier. Puis, les droits de coupe sont ajustés en fonction de ça. Les droits de coupe, pourquoi ils ont baissé aujourd'hui? Les droits de coupe ont baissé parce que les marchés ont baissé. Les droits de coupe suivent le marché. Quand le marché va reprendre, les droits de coupe, ils vont augmenter à nouveau. Puis, à ce moment-là, si on est capables de les payer, les droits de coupe, ou si le marché explique cette hausse, on n'a pas de problème à ça. Mais, pour l'instant, ce qu'on dit, c'est que, même si les droits de coupe ont baissé... Le marché, pour vous dire, a peut-être baissé de, quoi? il est peut-être au tiers de ce qu'il était en 2004-2005. Les redevances ne sont certainement au tiers de ce qu'elles étaient en 2004-2005. Elles ont suivi en partie, mais pas au complet. Les autres provinces ont mis aussi d'autres programmes en place. Comme je vous disais. Nous, on n'a pas nécessairement suivi.

Le Président (M. Huot): Alors, M. Michel Lessard, Mme Geneviève Labrecque, de Tembec, merci de votre contribution aux travaux de cette commission. Je suspends les travaux de la commission jusqu'à 15 heures, cet après-midi. Merci.

(Suspension de la séance à 13 heures)

 

(Reprise à 15 h 4)

Le Président (M. Mamelonet): À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Oui. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît, M. le député de Montmagny-L'Islet.

Donc, ayant constaté le quorum, la Commission de l'agriculture, de l'énergie et des ressources naturelles reprend ses travaux. Je demande donc à toutes les personnes dans la salle d'éteindre les sonneries de leurs cellulaires. Sans plus tarder, nous allons poursuivre les auditions publiques sur le projet de loi n° 57, Loi sur l'occupation du territoire forestier. Et nous recevons, cet après-midi, la Fédération québécoise des coopératives forestières, représentée par M. Sylvain Poirier, président ? bonjour, M. Poirier ? et par M. Jocelyn Lessard, directeur général. Bonjour, M. Lessard. Donc, écoutez, on vous... La période d'échange donc est allouée, de 15 minutes, pour l'exposé de votre organisme, oui, et 45 minutes pour les échanges donc avec les membres de la commission.

Donc, M. Poirier, vous allez prendre la parole, vous allez nous présenter votre mémoire. Donc, je vous demanderais de vous identifier avant de prendre la parole, et on vous écoute.

Fédération québécoise des
coopératives forestières (FQCF)

M. Poirier (Sylvain): Mme la ministre Normandeau, M. le président de la commission, MM. Mmes les parlementaires, nous tenons à vous remercier de nous accueillir à cette commission pour l'étude du projet n° 57. Je suis Sylvain Poirier, président de la Fédération québécoise des coopératives forestières, et je suis accompagné, à ma droite, de M. Jocelyn Lessard, directeur général.

Notre réseau est directement concerné par ce projet de loi. Les coopératives forestières sont des coopératives de travailleurs présentes dans le territoire forestier depuis 70 ans. Elles sont présentes en production de plants, en sylviculture, en voirie, récolte et transport, en transformation et en utilisation de la biomasse et les produits forestiers non ligneux. Elles sont 38 coopératives à être membres de la fédération. Elles regroupent 3 000 travailleurs dans toutes les régions forestières du Québec. Puisque le régime forestier a une grande incidence sur notre environnement de travail et sur nos vies, nous souhaitons que notre voix soit entendue.

Notre fédération est en accord avec le gouvernement quant à la nécessité de moderniser le régime forestier. L'actuel régime a rendu de grands services à la société québécoise, mais il a aussi démontré ses limites. Nous sommes donc contre le statu quo. Nous apprécions plusieurs éléments du projet de loi, mais d'autres nous préoccupent. Soulignons aussi que nous sommes partie prenante et que nous appuyons un groupe de partenaires du secteur forestier qui souhaitent obtenir un régime forestier consensuel. La démarche de ce groupe vise l'adhésion d'un plus grand nombre et la cohésion des acteurs pour relever ensemble les défis qui attendent le secteur forestier. Nous remercions d'ailleurs la ministre, Mme Normandeau, qui a accepté jusqu'à maintenant de collaborer avec de groupe. Maintenant, je vais laisser la parole à mon directeur général, M. Jocelyn Lessard.

M. Lessard (Jocelyn): Merci, M. le président. Bonjour, tout le monde. Alors, le point de vue de notre fédération s'appuie sur une longue expérience des opérations forestières et sur le vécu de milliers de travailleurs qui gagnent leur vie quotidiennement en forêt. Notre attitude prudente devant le projet de loi ne doit donc pas être interprétée seulement comme une résistance au changement ou d'une crainte face à l'inconnu.

Nous ne pouvons pas passer sous silence devant cette commission le contexte de la terrible crise qui est en train d'anéantir l'activité industrielle forestière. Notre forêt constitue un fabuleux réservoir de biodiversités et un merveilleux terrain de jeu pour réaliser des activités de récréation, mais elle est aussi, jusqu'à maintenant, un support à une activité industrielle structurante. Cette activité industrielle basée sur le matériau bois ouvre aussi maintenant les perspectives intéressantes pour aider le Québec à lutter contre les changements climatiques.

En révisant le régime forestier pour les décennies à venir, il faut préserver notre capacité à maintenir cette activité en améliorant notre compétitivité. Soulignons aussi notre inquiétude face à la légèreté avec laquelle plusieurs intervenants diabolisent l'industrie forestière québécoise. Cette industrie n'est probablement pas parfaite, mais elle a permis à des dizaines de milliers de personnes, pendant plusieurs décennies, de gagner décemment leur vie et à la collectivité québécois d'occuper son vaste territoire. Nous avons toujours besoin d'une industrie forte et en santé, même si elle doit douloureusement s'adapter à l'évolution des marchés.

Les éléments les plus positifs que nous voyons dans le projet de réforme du régime forestier, c'est que globalement nous espérons que le projet pourra améliorer l'acceptabilité sociale de notre foresterie. La régionalisation permettra à la fois de mieux adapter le cadre d'intervention et d'impliquer les collectivités régionales et les élus tout en maintenant le rôle stratégique et fiduciaire de la ministre. Cela nous plaît.

La révision de la notion de rendement soutenu, un carcan bien québécois, constitue une évolution utile et nécessaire, même s'il faudra l'expliquer avec prudence au grand public. La mise en place du marché libre pour le bois nous inquiète pour l'instabilité qu'il va créer, mais cela nous semble constituer un passage nécessaire pour favoriser l'arrivée de nouveaux acteurs et pour résoudre les conflits commerciaux avec nos voisins du Sud. Même si nous trouvons les moyens envisagés insuffisants, la volonté politique de valoriser les travailleurs forestiers nous sourit.

Maintenant, les éléments qui nous inquiètent, avec les solutions que nous proposons, ça concerne l'amélioration de la compétitivité du secteur, la valorisation des travailleurs forestiers et l'ajout des pièces que nous considérons comme manquantes dans le projet de loi.

n (15 h 10) n

Pour diverses raisons, le coût de la fibre est actuellement très élevé au Québec. Pour assurer notre avenir et attirer ou conserver les investisseurs, il nous faut réunir les conditions pour rendre l'approvisionnement le plus compétitif possible. Dans le projet de loi, ce que nous détectons comme difficultés pour y parvenir, ce sont les éléments suivants: tout d'abord, la synergie entre les différentes activités, parlons de planification, de récolte, de transport et de sylviculture, sera très difficile à atteindre car les responsabilités liées à ces différentes composantes seront fractionnées entre différents acteurs. Il faut à tout prix éviter que les économies des uns se traduisent par les augmentations de coûts des autres.

La notion d'optimisation de la chaîne de valeur risque également d'être menacée, alors qu'il est indispensable que nos industriels se tournent davantage vers les marchés en produisant ce que l'on vend plutôt que de vendre ce que l'on produit, comme nous avions l'habitude de faire. Il est nécessaire, pour cela, que les acteurs de terrain soient en phase intime avec les besoins des transformateurs. L'organisation et la réalisation des opérations sur le terrain sont très complexes et elles nécessitent une expertise très pointue. Il ne faut pas que le transfert d'un régime forestier à l'autre entraîne une perte d'expertise actuellement disponible.

Le point suivant est très délicat, nous l'abordons avec précaution, mais le rôle des uns et des autres est très différent dans la société, et cette répartition est nécessaire pour qu'elle fonctionne harmonieusement. Les employés de l'État ont un rôle très important à jouer dans le système forestier québécois, soit celui d'être les garants de la protection des règles et des lois dont la société se dote et ultimement du bien commun. Si on confie à ces employés le rôle supplémentaire de gérer l'activité économique, il ne faut pas s'attendre à ce que les deux fonctions soient optimales. Il est aussi reconnu qu'il est préférable de disposer d'un incitatif à la productivité, chose que les entreprises, même collectives comme les coopératives forestières, maîtrisent mieux que la fonction publique. Cela tient à des obligations constantes de se référer à la réalité économique.

Il faut aussi s'interroger sur l'imputabilité de ces employés si des erreurs de planification devaient avoir des répercussions négatives pour ceux qui réalisent les travaux. Les responsabilités liées à la planification tactique et opérationnelle nous apparaissent donc comme une dimension fondamentale du projet de réforme. Ces responsabilités nécessitent une très bonne connaissance du territoire, des opérations des autres utilisateurs et du marché du bois. Le projet de loi propose une configuration intéressante pour améliorer la gestion intégrée des ressources, mais elle préoccupe beaucoup ceux qui seront affectés aux opérations forestières. Ils craignent de payer chèrement la phase d'apprentissage et de ne jamais retrouver un niveau d'efficacité opérationnel adéquat.

Afin d'améliorer la compétitivité du secteur, les coopératives proposent plusieurs mesures, dont l'expérimentation du concept d'aménagiste d'un territoire forestier, que nous aimerions approfondir avec vous pendant la période d'échange, mais surtout la clarification du rôle des intendants de territoire au niveau de la planification tactique et opérationnelle. Ils doivent y être directement associés. Idéalement, ces intendants devraient pouvoir déposer leur propre planification et ils devraient participer à l'exercice d'intégration de cette planification avec celle des autres utilisateurs en collaboration étroite avec la DGR.

Les métiers forestiers sont par nature très exigeants, mais ce ne sont pas des métiers de misère. En dépit du contexte et de l'opinion publique qui jugent ces métiers d'une manière défavorable, plusieurs travailleurs, en tout cas ceux des coopératives forestières, sont encore fiers de leur contribution à l'économie québécoise et à la mise en valeur de la forêt de demain. Il faut cependant les valoriser, car la pénurie de main-d'oeuvre qui nous guette si nous ne faisons rien risque de provoquer la prochaine crise du secteur.

Le principal problème des travailleurs forestiers est la précarité de leurs emplois, qui est liée au statut précaire de leurs employeurs. Le régime forestier actuel a conduit à un environnement de travail de sous-traitance et d'absence de droits de ces sous-traitants. La proposition de projet de loi mise sur des processus d'appels d'offres publics conformément à la Loi sur les contrats des organismes publics. Nous sommes très soucieux face à la perspective de se soumettre aux règles de marché pour obtenir ces contrats. Certaines de nos coopératives oeuvrent dans le même territoire depuis plus de 60 ans. Que vont-elle devenir si un entrepreneur provenant d'une autre région casse les prix? Elle va disparaître ou bien elle devra se résoudre à migrer vers un autre territoire?

Il existe une grande différence entre le marché du bois et le marché des travaux sylvicoles. Il possible de valoriser 1 mètre cube de bois de manière très différente en fonction des procédés, des produits ou des marchés. En forêt, un hectare de traitement réalisé n'offre pas toutes ces possibilités. L'efficacité opérationnelle est importante, mais elle atteint vite ses limites lorsque les entreprises sont expérimentées. La compétition conduit indéniablement vers la détérioration des conditions de travail. Afin de valoriser le travail forestier, il faut que le travail forestier situe la réalisation des travaux dans un cadre de rentabilité financière et économique. Les travaux sylvicoles génèrent tous de la richesse, mais il faut choisir, dans chacune des régions, les traitements sur les sites qui sont les plus rentables. Le régime doit aussi offrir un environnement de travail stable en mettant en place un modèle d'attribution de contrats de cinq ans renouvelables.

Pour professionnaliser les entreprises, les travaux confiés ne doivent pas se limiter à l'exécution des travaux, mais aussi contenir des responsabilités techniques. L'attribution de ces contrats doit découler d'un processus d'appel d'offres avec un devis intégrant des critères multiples, dans lequel le gouvernement préciserait ses attentes et ses exigences. La présence et la connaissance du territoire, la qualité de l'organisation et l'obtention d'une certification devraient faire partie des critères. Le ministère devrait maintenir le système actuel d'établissement de la valeur des travaux en fonction des coûts en identifiant les facteurs qui les influencent afin d'atteindre une équité entre les régions. Les entreprises bénéficiaires de contrats devraient procéder à une reddition de comptes rigoureuse à partir des critères d'attribution. Celles qui respecteraient les exigences obtiendraient alors le privilège de renouveler leur contrat.

Considérant que la crise actuelle induit des freins pour la réalisation des travaux sylvicoles, notre fédération souhaite qu'au moins des projets pilotes de transfert des responsabilités des bénéficiaires de CAAF dans les entreprises sylvicoles soient mis en place dès la prochaine saison.

La valorisation des travailleurs forestiers passe aussi parfois par les rapports collectifs du travail. Nous croyons partager des valeurs semblables à celles des centrales syndicales pour défendre les travailleurs. Nous faisons cependant une analyse très différente quant au lien à faire avec le Code du travail. Le nouveau régime forestier doit tourner la page du modèle qui misait uniquement sur la sous-traitance pour faire émerger des nouveaux entrepreneurs détenteurs de droits aptes à offrir beaucoup plus de stabilité aux travailleurs. Ainsi, nous visons plutôt la réintégration des travailleurs forestiers dans le cadre général du code plutôt que d'accentuer le cadre particulier lié à la notion d'employeur présumé, qui est exclusive à notre secteur dans toute l'économie québécoise. Nous croyons que même les centrales syndicales entretiendraient des liens plus naturels avec les travailleurs qui souhaitent recourir à la protection d'un syndicat s'ils étaient en lien avec les employeurs réels de ces travailleurs. Si toutefois la ministre souhaitait emprunter ce tortueux sentier, nous lui demandons de s'assurer que l'exception prévue au Code du travail pour les membres des coopératives forestières soit maintenue et même renforcée.

Sans pouvoir aller en profondeur, notre fédération souligne qu'elle déplore que certains éléments soient absents du projet de loi. Les principales omissions portent sur les éléments suivants.

L'encadrement administratif de l'attribution de la biomasse. Il est nécessaire que la loi prenne le relais du décret, dont l'effet prendra fin en 2011. De plus, il est nécessaire de préciser que les bénéficiaires de l'attribution obtiendront des droits équivalents à ceux qui détiennent des garanties d'approvisionnement, sans quoi les arbitrages entre les utilisateurs des ressources ne pourront pas se faire d'une manière équitable.

L'introduction formelle de la gestion par objectifs et résultats comme concept intégrateur de tous les nouveaux concepts qui émergeront avec ce nouveau régime forestier; un enchâssement dans la loi de la très pertinente politique d'utilisation du bois; et l'encadrement de la certification environnementale des territoires forestiers, qui pourrait bien constituer le premier test de réalité du nouveau régime forestier.

Je vais laisser conclure mon président.

M. Poirier (Sylvain): Merci, M. Lessard. En conclusion, nous espérons vous convaincre d'introduire les modifications que nous proposons dans ce projet de loi. Nous savons qu'il n'est pas facile pour les parlementaires de trancher parmi toutes les opinions qui seront entendues pendant la commission. Toutefois, nous considérons que trop peu d'organisations se sont exprimées sur la dimension économique du projet de réforme, qui est pourtant fondamentale. La teneur de ce projet de loi aura une influence directe sur la vie des membres de nos coopératives forestières. Selon nous, dans sa forme actuelle, ce projet de loi fait courir des risques aux communautés forestières vivant en région, car le moteur économique que représente la forêt pour ces communautés pourrait continuer à s'essouffler. Il est primordial de profiter de la réforme pour améliorer la compétitivité de notre secteur. Il faut aussi utiliser... pour valoriser davantage les travailleurs forestiers, ce qui n'est nullement en opposition avec l'amélioration de la compétitivité.

Les changements que nous demandons ne vont pas contre l'esprit du projet. Par contre, s'ils sont introduits dans la loi, nous serons plus confiants que le prochain régime permettra aux Québécois et aux Québécoises et aux artisans de notre foresterie de renouer avec la confiance et la fierté. Merci de votre attention.

Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, messieurs. Je reconnais maintenant la ministre des Ressources naturelles et de la Faune. Mme la ministre, je vous invite à prendre la parole pour un premier bloc d'échange avec la partie gouvernementale.

Mme Normandeau: Oui. Merci, M. le Président. Alors, Sylvain, Jocelyn, bienvenue à vous deux. C'est important, parce que je déclare mon intérêt, M. le Président. Sylvain Poirier, président de la conférence des coopératives, est aussi président d'une coopérative de mon comté, l'Association coopérative Saint-Elzéar, alors la deuxième plus vieille et ancienne coopérative forestière du Québec. Vous avez, quoi, Sylvain, 63, 64 ans?

M. Poirier (Sylvain): 65 ans cette année.

n (15 h 20) n

Mme Normandeau: 65 ans cette année, c'est ça. C'est extraordinaire, quand même, hein! Une coop qui, malgré les difficultés de l'industrie, là, a repris ses opérations, elle est à l'exportation. Alors, il y a de la créativité dans le village de Saint-Elzéar, et puis là le village s'est carrément remis à vivre, c'est ça qui est extraordinaire, une communauté de 550 personnes à peu près. Alors, c'est important que les gens sachent qu'il y a de l'espoir parfois, des hauts et des bas, l'industrie vit des hauts et des bas, mais, quand ça reprend, c'est intéressant.

Écoutez, moi, je suis très impressionnée par votre mémoire parce qu'il est très, très dense, très, très pointu. Là, on reconnaît toute l'expertise de la conférence des coopératives. On a eu plusieurs mémoires ici, il y a, quoi, 65 groupes, là, qu'on va entendre, on a fait la moitié du boulot jusqu'à maintenant, mais, des mémoires comme le vôtre, là, il y en a eu quelques-uns, mais ce n'est pas la majorité, alors vraiment je tiens à vous féliciter, il y a un travail très consciencieux qui a été fait.

Il y a plusieurs éléments des recommandations qui sont très intéressantes. Mais ce qui me frappe, entre autres, c'est votre préoccupation liée, puis c'était à la conclusion de Sylvain, là, dans votre conclusion, la dimension économique, fondamentale, qui est très importante. En fait, votre préoccupation rejoint celle des industriels, le CIFQ, qu'on a bien sûr reçu. Donc, améliorer la compétitivité du secteur, mais, là-dessus, je tiens à vous dire que ce n'est pas que l'affaire du gouvernement de s'assurer que les usines et que les entreprises et que les coops soient compétitives, c'est une responsabilité partagée. Alors, je pense qu'on a tous à assumer, là, des responsabilités pour atteindre un objectif comme celui-là.

L'amélioration de la situation des travailleurs, j'ai eu l'occasion de dire qu'on va... bien, en fait, nous avons déjà commencé à travailler avec les syndicats et le ministère du Travail sur des dimensions liées aux relations de travail. Nous, ce qui nous intéresse, c'est l'autre dimension. En fait, cette dimension-là est intéressante aussi pour nous, mais celle que nous allons ajouter dans nos préoccupations, c'est celle liée aux conditions de travail. Alors, cet automne, je vais mandater, là, un certain nombre d'intervenants pour qu'on puisse voir concrètement, là, et pour la prochaine saison, comment on pourrait poser des gestes pour améliorer des conditions de travail de nos travailleurs sylvicoles, qui, je le répète, M. le Président, sont pour moi les grands oubliés de la forêt, ont été et sont toujours pour moi les grands oubliés de la forêt.

Alors, avant de vous poser des questions très précises, page 14 de votre mémoire, recommandation sur la stratégie d'utilisation du bois, d'inclure dans les premiers articles... ou même en incluant des chapitres introductifs sur l'importance d'utiliser davantage de bois dans la construction au Québec, je trouve ça personnellement très, très intéressant. On a eu plusieurs suggestions. Là, je pense qu'au rythme où on va on va avoir plusieurs chapitres introductifs, mais je trouve l'idée très, très intéressante et personnellement je la retiens. Ça donnerait, en fait, du punch, si vous me permettez l'expression, à la stratégie qui a été annoncée déjà.

Pour ce qui est de votre demande, c'est la première fois qu'on l'entend, sur la planification opérationnelle et tactique. En fait, de permettre à chaque détenteur de droits de présenter sa propre planification tactique et opérationnelle. Là-dessus, je veux vous rassurer sur le fait que les détenteurs seront tous associés à l'élaboration de la planification tactique et opérationnelle, mais, si on demande à chacun de faire sa propre planification, on ne s'en sortira pas. À moins que vous ayez... en tout cas, c'est comme ça que je la reçois de mon côté, là, votre proposition, à moins que j'en fasse une lecture qui ne correspond pas à votre réalité ou à celle que vous entendez peut-être nous proposer.

Une question concrète relativement aux contrats. Ça, là, vraiment, à la page 25, ça m'intéresse énormément. Dans le document explicatif, on réfère à des contrats pluriannuels, c'est-à-dire des contrats qui seraient accordés aux entreprises sylvicoles clés en main pour une période de cinq ans. Moi, j'ai eu l'occasion de manifester certaines appréhensions. J'ai peur qu'on fasse, avec un procédé comme celui-là, des perdants. Alors, je veux peut-être que vous m'éclairiez, là, sur comment s'assurer de maintenir dans nos régions l'expertise développée par nos entreprises sylvicoles, dans une mécanique qui ferait en sorte qu'on atteigne cet objectif-là. Alors, est-ce que c'est possible pour vous de me... Parce que là vous nous faites plusieurs suggestions, vous donnez la référence de la biomasse forestière, qu'on puisse s'inspirer de l'attribution des contrats de sylviculture comme on l'a fait avec l'attribution de la biomasse, vous apportez un certain nombre de balises à inclure.

Mais est-ce que vos membres vous expriment des appréhensions par rapport à notre volonté d'accorder des contrats pluriannuels? Puis, si oui, quelles sont les appréhensions qu'on vous formule puis quelle serait une façon ou quelles seraient les façons concrètes de contourner les appréhensions qui sont portées à votre attention?

Le Président (M. Huot): Ce sera M. Lessard?

M. Lessard (Jocelyn): En fait, si on vous invitait, Mme Normandeau, à venir rencontrer les représentants des coopératives qui viennent, là, on a une structure interne, qui s'appelle le comité d'aménagement, puis on en discute depuis des années. Les coopératives forestières sont terrorisées devant la perspective de se retrouver sur le libre marché pour établir qui va réaliser les contrats. Vous venez de parler de la coop de Saint-Elzéar, 65 ans. Nos coopératives, là, ils ont en moyenne plus de 40 ans et ils travaillent dans le même territoire. C'est dans notre modèle d'affaires, nous donnons du travail aux gens de la communauté et nous voulons nous dévouer. Et on a même l'impertinence de croire que, là où les coops ont été les plus stables, ce sont les territoires les plus productifs aujourd'hui, parce qu'on doit connaître le territoire, on doit être capables de revenir puis de bien maîtriser tout ce qui se passe, et, pour donner une certaine stabilité aux travailleurs, ils doivent être stables.

On est conscients qu'on ne peut pas vous demander de nous produire l'équivalent des CAAF pour la sylviculture, des contrats de 25 ans où on sera là toujours. Mais on pense que la règle d'attribution, puisque de toute façon il n'y a pas de miracle à faire là... On ne déroulera pas un hectare de forêt pour l'envoyer en Chine, pour la faire traiter moins cher, là. C'est des travailleurs qui vont être sur le terrain qui vont exécuter les travaux, et, s'ils sont dans une entreprise structurée puis qui a une vision de long terme, on va pouvoir investir dans leur formation, dans les équipements, dans les infrastructures de campement, puis tout ça.

Donc, la règle d'attribution, on dit: Faites comme dans la biomasse, établissez un certain nombre de critères, mais, parmi les critères, donnez un poids à la présence dans le territoire, à l'expertise qui est détenue. Et, de toute façon, on ne peut pas dire... si vous voulez attribuer des contrats de cinq ans, on ne pourra pas établir le prix de chacune des interventions qu'on ne connaît même pas à l'avance. On doit confier le mandat à quelqu'un de réaliser les travaux. Donc, il s'agit d'être capables de l'attribuer, et, au terme de cette performance de cinq ans, une bonne reddition de comptes sur les obligations qui étaient fixées, en fonction des critères d'attribution, et, si on a rencontré tous les objectifs, quel est l'objectif de changer d'entrepreneur à ce moment-là? Vaut mieux lui assurer que, s'il rend compte, il va avoir le privilège de renouveler son entente pour cinq ans.

C'est comme ça que nos travailleurs... En ce moment, vous savez, Mme la ministre, on n'a pas tant d'instabilité que ça. On renouvelle à chaque année le contrat, grâce probablement à la grille des taux, là, le décret que le ministre des Ressources établit une fois par année; il n'y a pas d'avantage pour les industriels de changer d'exécutant. Et donc, si nos coops sont aussi stables, comme les entrepreneurs privés le sont, c'est parce que les règles ont fait que l'industrie n'a pas choisi d'aller en appel d'offres. Donc, il faut au moins qu'on ait un niveau de sécurité semblable, là.

Mme Normandeau: Mais ça, j'entends bien ça, parce que, moi-même, là, j'ai des coops chez nous, et puis évidemment ces gens-là m'ont fait part, puis je suis convaincue que... mes collègues acquiescent aussi de leur côté, là, ils sont venus nous voir pour nous livrer leurs appréhensions. Est-ce que vous trouvez que cinq ans, est-ce que c'est trop long, trop court? Donc, puis ce je retiens, vous souhaiteriez qu'il y ait une espèce de clause de renouvellement automatique, mais à certaines conditions, évidemment. Alors, j'aimerais peut-être vous entendre là-dessus, sur le cinq ans.

Le Président (M. Huot): M. Lessard.

M. Lessard (Jocelyn): Cinq ans n'est pas trop long. Ça, c'est sûr. Mais ça nous semble quand même un horizon intéressant, mais pas automatique. Moi, je pense qu'il faut vraiment rendre des comptes. Il faut que l'État ait l'impression d'être en contrôle, de ne pas être embarqué dans quelque chose qu'il ne pourra jamais interrompre, et on doit être performant. Puis, dans la reddition de comptes, là, vous savez, à chaque cinq ans ou six ans, là, on fait une enquête sur les coûts des travaux sylvicoles. Mais, à tous les cinq ans, on devrait déposer, puis, comme ça, ce serait possible de voir qui est performant puis qui mérite de continuer à le faire. Dans un horizon... Dans un environnement comme ça, il y aurait effectivement de la stabilité qu'on recherche pour nos travailleurs.

Mme Normandeau: Oui. J'aime ça, M. le Président, là. On est ici pour ça. Et, comme on dit, le diable se cache dans les détails, là, ça fait qu'il faudra... Je suis en train de réfléchir, si on ne va pas aller consulter votre comité d'aménagement peut-être pour définir une nouvelle grille de taux, pour s'assurer que les contrats... enfin que la mécanique qu'on souhaite engager, là, vous convienne.

Je vais sur un autre élément, si vous permettez, le concept de producteur de ressources. Ce n'est pas dans le mémoire, ça, le concept de producteur de ressources. On trouve l'idée intéressante, mais, vous savez comme moi qu'il y a des partenaires dans le secteur forestier qui sont opposés, enfin qui ont des objections par rapport à un concept comme celui-là. Si vous étiez à ma place, comment on pourrait justifier l'introduction d'un concept comme celui-là, et puis, deuxièmement, quels seraient les avantages? Peut-être, pour le bénéfice de tous les parlementaires, nous décrire ce que c'est pour vous, le concept de producteur de ressources, et quels seraient les avantages... quelle serait la valeur ajoutée, pour tout le secteur forestier, de tendre vers un concept comme celui-là?

Le Président (M. Huot): M. Lessard.

M. Lessard (Jocelyn): Alors, très simplement, en ce moment, sur L'Île-d'Anticosti, il y a une convention d'aménagement. C'est le plus grand territoire de référence, 200 000 hectares, et, ce territoire-là, ce sont les pires conditions forestières au Québec, là. C'est une île, il y a des chevreuils en pagaille, les travaux sont difficiles, il n'y a rien que du sapin, le sapin, il est laid.

n (15 h 30) n

Une voix: ...

M. Lessard (Jocelyn): C'est un paradis de chasse, mais pas pour produire de la matière ligneuse. Mais, malgré ça, ils ont réussi année après année à mettre du bois en marché puis à aider des industriels à leur fournir de la matière ligneuse. Si ce territoire s'était trouvé au coeur de la Mauricie, ça serait une référence extraordinaire pour nous. Le concept d'aménagiste d'un territoire forestier, c'est qu'il y a un interlocuteur, par exemple une coopérative, comme la Coopérative des Hautes-Laurentides ou la Coopérative des Appalaches, si elle intégrait le département de... dans son territoire... ? il faut qu'on fasse la planification, je comprends que le ministère tient à garder un rôle dans la planification, mais il faut être au moins associé très étroitement dans la planification opérationnelle ? et cette entité-là réaliserait toute la gamme des interventions. La synergie dont on parlait, si, moi, je ne fais pas attention quand je fais la récolte puis que ça provoque des travaux de régénération artificielle, là, on ne vient pas de s'améliorer. Mais celui qui fait les travaux, s'il n'a pas de préoccupation, s'il n'a pas d'avantage à le faire, il n'y en aura pas, de synergie, alors que, quand c'est la même entreprise qui réalise tout, ce sera très efficace. Puis, croyez-moi, la sensibilité aux coûts, on les a.

Mme Normandeau: Si je comprends bien, là, donc c'est une espèce de clés en main pour récolte et aménagement. C'est ça?

M. Lessard (Jocelyn): Aménagement forestier, article 3 de la Loi des forêts: tout ce qui se fait dans la forêt, l'aménagiste du territoire le fait. Et ça serait un contrat territorial et non pas une entente sur une partie des volumes. C'est une nuance importante. Ici, là, on gère ça depuis 25 ans puis on va continuer à le faire, c'est des attributions de volumes, ce n'est pas le rôle de mettre en valeur un territoire.

Et, juste un petit historique pour vous rappeler pourquoi que ce n'est pas dans les demandes: la fédération, on propose ça à chaque consultation. Mais on part du régime actuel, tout le monde espérait préserver le statu quo, et là, en défendant le statu quo, finalement on tombe sur cette proposition-là. Nous, avec nos partenaires, on a fait ces discussions-là, et ils ne sont pas opposés, ils demandent qu'il y ait dans le prochain régime des projets pilotes de producteurs de ressources. Il faut au moins qu'on expérimente ce modèle-là.

Mme Normandeau: ...Jocelyn est d'accord avec ça?

M. Lessard (Jocelyn): Bien oui, on est tous des partenaires. On a dit: On est d'accord avec la forêt de proximité, mais il faut compléter les expérimentations de nouvelles tenures par l'expérimentation d'un aménagiste de territoire forestier ou un producteur de ressources.

Le Président (M. Huot): Merci, ça complète le premier bloc d'échange avec la partie gouvernementale. Je reconnais maintenant le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Oui, merci, M. le Président. Alors, M. Poirier, M. Lessard, merci pour votre contribution à cette commission parlementaire. Intéressant de vous entendre. Je regardais votre préambule, j'essaie de voir... j'essaie d'avoir une vision de, bon, la Fédération des coopératives forestières, ça regroupe combien de personnes? Parce que, vous voyez, j'avais les infos du moment tout à l'heure, puis j'ai l'usine de Beaupré qui annonce une fermeture indéterminée, j'ai Clermont qui annonce une fermeture indéterminée. Quelle est la situation au niveau de la foresterie dans votre secteur d'activité, au niveau des coopératives?

M. Lessard (Jocelyn): On est à l'image du secteur forestier, hein!

M. Dufour: À l'image.

M. Lessard (Jocelyn): Moi, quand je suis arrivé en fonction à la fédération, on avait 6 400 travailleurs, on est rendus à 3 000, puis on dit 3 000 vite, parce que c'est peut-être un petit peu en dessous, là. Quand nos clients vont mal, quand l'usine ferme, on perd notre contrat aussi. Dans la sylviculture, ça a été quand même plus stable, mais, dans la récolte et dans la transformation, on a connu de grandes difficultés aussi dans notre réseau, mais on a aussi des coop très résilientes. Vous savez, sur votre Côte-Nord, là, Boisaco, c'est deux coopératives qui sont propriétaires. La coop de Saint-Elzéar qui continue d'opérer. Donc, on n'est pas à l'abri des problèmes, mais on est très résilients quand même.

M. Dufour: O.K. Alors, vous savez que, bon, ça fait quatre, cinq ans qu'on parle... il y a eu une crise structurelle, mélangée avec une crise conjoncturelle, on parle de la foresterie, ça fait trois, quatre ans. Il y a eu le livre vert. Vous parlez, dans votre préambule, justement que vous avez le devoir de préciser que, dans sa formule actuelle, le projet de loi n° 57 n'est pas encore acceptable, mais vous nous envoyez une vision comme de quoi qu'il y a de la critique constructive au niveau du projet de loi, puis vous voulez faire partie de la solution. Dites-moi donc, vous avez parlé d'un concept tout à l'heure qui est l'aménagiste de territoire forestier. J'aimerais que vous élaboriez davantage là-dessus.

M. Lessard (Jocelyn): On était dans ça, là, et, nous, on a la conviction qu'ultimement, là, dans le prochain, prochain régime forestier, on sera rendus là. Parce que, là, on va faire des tentatives, là, on va avoir beaucoup de mal à livrer la marchandise collectivement, puis on va réaliser qu'il va falloir se concentrer dans les territoires puis confier des responsabilités, hein? À la quantité de monde qu'on a au Québec, dans votre ministère, Mme Normandeau, puis en forêt, il va falloir qu'on soit terriblement efficaces pour arriver à nos fins. Donc, ce concept-là, c'est de consacrer la responsabilité. Puis, les gens, l'aménagiste d'un territoire forestier qui serait l'employeur, pas le donneur de contrats, qui serait l'employeur des forestiers qui sont dans ce territoire-là... On a des coopératives forestières qui sont très, très proches de ce modèle-là en ce moment, parce qu'ils assument toutes les fonctions. Et les coops qui ont toutes les fonctions sont ? et j'espère que les autres ne m'écoutent pas ? sont plus performantes que les coops qui ont seulement un contrat d'exécution de récolte ou un contrat de sylviculture.

M. Dufour: Bien, vous pouvez être certain que vous avez été écouté, parce que...

Une voix: ...

M. Dufour: Je peux vous le garantir. Alors, on va passer la parole à ma collègue.

Le Président (M. Huot): Je reconnais maintenant la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci. D'abord, bienvenue, messieurs. Et, moi, j'ai une coop forestière dans ma circonscription, celle de la vallée de la Matapédia, qui performe d'ailleurs, qui a des produits au niveau de la biomasse, et j'ai vu, à la page 13, que vous avez aussi des préoccupations en termes d'approvisionnement au niveau de la biomasse. J'aimerais, dans un premier temps, que vous me parliez de ça. Vous voulez des ajouts à l'article 4, hein? Et il y a... Je ne me trompe pas non plus en disant que depuis des années vous réclamez... les sociétés réclamaient la séparation des activités d'abattage, des activités d'aménagement, alors ça, je pense que vous deviez être contents... Bien, dites-moi-le. Si vous n'êtes pas contents, vous me le direz. Mais...

C'est parce que c'est compliqué, les coops forestières, parce qu'elles ont diversifié leurs activités. C'est vrai, hein? Vous avez quand même réussi à diversifier. Quand on pense à Boisaco, c'est l'espèce, je dirais, de dépendance que vous ne voulez plus par rapport aux donneurs d'ouvrage. Je pense que l'objectif, M. le président... et c'est là-dessus aussi que je voudrais que vous vous prononciez: Comment arriver, dans le projet de loi, à avoir moins de dépendance par rapport aux donneurs d'ouvrage?

Puis, moi, j'ai vu qu'il y avait des... il va y avoir comme des enchères, des appels d'offres ? j'appelle ça des enchères de travaux, des appels d'offres de travaux ? en plus des appels d'offres, des enchères pour le bois. Comment... J'aimerais ça que vous vous exprimiez là-dessus. Comment sécuriser les coops forestières par rapport aux industriels? On ne se le cachera pas, ce sont les industriels qui vous donnent des travaux, et vous avez développé des liens d'affaires étroits, tout en ayant développé aussi une dépendance que vous ne voulez pas.

Le Président (M. Huot): M. Lessard.

M. Lessard (Jocelyn): Je vais répondre rapidement à la première question, qui était plus facile, hein, la biomasse forestière. On avait toujours entendu que le décret qui est paru en juin l'année dernière pour permettre l'attribution, c'était une étape passagère et que ce serait repris dans le projet de loi. Là, il est mention de biomasse quelques fois, mais on n'articule pas comment ça, ça va s'intégrer, et c'est important que ce soit intégré à travers les autres activités, et c'est important, là, c'est les difficultés qu'on perçoit qui arrivent. Là, il y a des coops qui ont réussi à gagner des appels d'offres pour obtenir de la biomasse puis qui ont un rapport de force très défavorable quand c'est le temps de négocier comment ça va se passer sur le terrain. Il faut qu'on soit assis à la même table, il faut qu'on ait des droits équivalents. Ferme le point de la biomasse.

L'insécurité, elle est relative. Les coopératives qui sont performantes en forêt... La coop de la Matapédia, c'est une coop très performante, je crois que c'est une coopérative très appréciée de son client. Ils ont fait du partenariat, ils sont capables de se projeter à long terme. Moi, je pense que c'est possible d'avoir une entente. La seule difficulté, c'est qu'on est effectivement dépendants. Si le contrat n'est pas renouvelé, on ne peut pas appeler la police, là. Le régime forestier, c'est un régime de sous-traitance sans droit. Donc, là, dans la récolte, ça pourrait continuer, c'est ça qui est le projet de loi, l'industrie va conserver son droit de récolter, et les coopératives qui sont très heureuses de ça parce qu'ils vont continuer à travailler avec leurs clients. Il y aura le volume au libre marché, qui est peut-être un volume accessible pour les coopératives. En tout cas, c'est sûr que, nous, on va s'affairer à offrir des propositions d'affaires intéressantes à ceux qui auraient besoin de nos services.

Mme Doyer: M. Lessard, à la page 25, vous dites quelque chose qui est quand même pas pire, la recommandation 10, là: «Afin de valoriser les travailleurs forestiers dans le prochain régime forestier», votre fédération recommande au ministère de «modifier le projet de loi pour y introduire les éléments suivants». Il y en a plusieurs, et vous dites: «Ces contrats devront permettre aux entreprises d'obtenir un statut de bénéficiaire de droit au même titre que les détenteurs de garantie d'approvisionnement ou de gestionnaire faunique», et ça, c'est quand même... je ne me trompe pas en disant que c'est audacieux?

M. Lessard (Jocelyn): Bien, j'espère que vous vous trompez, parce que ça, ça a vraiment... la proposition du groupe de partenaires, ça mise vraiment sur ça, parce que, si on n'a que des contrats puis qu'on n'a jamais voix au chapitre, on ne sera pas des entreprises. Nous autres, on espère qu'on ne soit plus des sans-droits, qu'on ait des droits comme les autres puis qu'on s'assoie autour de la table, participer à la planification puis participer aux décisions d'orientation. On doit être reconnus.

n (15 h 40) n

Mme Doyer: J'aimerais ça que vous développiez davantage.

M. Lessard (Jocelyn): Bien, jusqu'à maintenant...

Mme Doyer: Dans le concret, là, ça n'existe pas, pratiquement.

M. Lessard (Jocelyn): Je vais vous donner le comparable. Chez nous, on a appelé ça, de temps en temps, le triangle des Bermudes. Il y a le ministère, qui est le fiduciaire de la forêt, qui confie un contrat d'aménagement forestier à un industriel, puis l'industriel, lui, confie les travaux à l'exécutant qui est là. L'exécutant a des problèmes, il va voir l'industriel puis il lui dit: J'ai des problèmes à exécuter ça, par exemple avec une norme. Et là on lui répond: Bien, ce n'est pas moi qui fais la norme, c'est le ministère. Alors là, on va voir le ministère, le ministère nous répond: Moi, mon interlocuteur, c'est l'industriel. Alors, dans le fond, c'est toujours nous qui nous retrouvons avec le problème, puis ce n'est pas beaucoup de marge pour les régler. Je ne dis pas qu'on ne les règle jamais, là, on a une très étroite collaboration avec le ministère depuis quelques années pour trouver des solutions, mais, si on était directement associés... D'ailleurs, le projet de loi, c'est ce qu'il propose maintenant, là, des contrats directement entre le ministère puis les exécutants.

Mme Doyer: D'accord. Depuis le début de la commission, la ministre est souvent revenue à dire qu'il faut aller revaloriser le travailleur forestier, que ce soit au niveau des organismes de gestion en commun ou des coops forestières, ça fait des années qu'on entend dire ça. Pour moi, la revalorisation, c'est qualitatif et c'est quantitatif. C'est d'arriver à faire en sorte qu'ils peuvent planifier d'avoir cinq à six, à sept mois de travail par année. On sait qu'il se donne beaucoup de formation aussi. En tout cas, on a même réussi à étirer le nombre de semaines, on va se le dire comme ça, M. le Président. Des fois, on donne de la formation parce qu'on sait qu'ils vont basculer à l'aide sociale. Moi, c'est ma préoccupation constante d'année en année. Je n'ai rien retrouvé dans le projet de loi qui concerne les travailleurs forestiers.

Je sais que vous avez un grand pan de votre mémoire qui touche à ça. Qu'est-ce qu'on devrait retrouver dans le projet de loi pour faire en sorte d'améliorer les conditions de travail de gens des coops? Plus de stabilité, plus de constance d'année en année, être capable de planifier son avenir? Parce que, moi, c'est vraiment une grande récrimination dans ma circonscription, dans le Bas-Saint-Laurent aussi.

M. Lessard (Jocelyn): Je profite de votre question pour faire juste une petite parenthèse. Les travailleurs forestiers, ce ne sont pas des travailleurs de misère. C'est des gens qui sont compétents, d'une débrouillardise extraordinaire. Il y a toutes sortes de programmes qui ont été mis en place pour eux. Grâce à Emploi-Québec, on a 1 million par année pour en former. Cette année, on va en former plus de 300. Le Programme d'apprentissage en milieu de travail, du comité sectoriel, on est rendus à 3 500 travailleurs qui ont été enregistrés, plus de 1 700 qui ont reçu des certificats. Et ces travailleurs-là sont fiers. La ministre, elle a même écrit à une de nos coopératrices pour la féliciter, là. Elle avait planté 3 millions d'arbres depuis le début... Je veux dire, il y a des gens qui sont fiers de ça. Ce qu'il faut, c'est leur donner de la stabilité. Il faut que leur entreprise, elle ait l'assurance de travailler puis qu'elle soit capable d'investir dans la formation de ses gens, puis qu'on soit durable.

Mme Doyer: D'où le cinq ans. Et expliquez-moi un peu: Est-ce que vous êtes capables de vivre avec l'appel d'offres au niveau des travaux? Parce que vous nous avez dit que vous vouliez une stabilité. On veut une stabilité, on veut être capable de planifier qu'on va aller travailler là ou... Bon. Ça ne vous fait pas peur, ça, les appels d'offres pour les travaux?

M. Lessard (Jocelyn): Mais, si on devait des aménagistes de territoire forestier, ce serait englobé, ce serait réglé. Si on est des bénéficiaires de contrats d'exécution de travaux sylvicoles... et, s'il vous plaît, permettez-nous de faire de la technique, là, permettez-nous d'en faire, de la planification opérationnelle. Parce que, sinon, on est des agences de placement. Si vous voulez confier toute la planification à une société d'État puis que vous nous envoyez faire les travaux, moi, je vous prédis, dans 10 ans, là, faites une autre commission parlementaire, nous, on ne sera plus ici, hein, parce qu'il n'y en aura plus, de travailleurs. Donc, il faut qu'on soit des organisations professionnelles puis avec un horizon suffisant.

Mme Doyer: Merci, M. Lessard.

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue. La parole est à vous.

M. Bernard: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Lessard et M. Poirier. Ma question va aller dans la poursuite des propos que vous parliez, justement. Premièrement, je pense qu'on a compris très bien votre message au niveau de la compétitivité du secteur, là, vos pages 17 et après, qui parlent de la synergie, d'optimiser la chaîne des valeurs, puis l'expertise et l'imputabilité. C'est un des volets majeurs sur lesquels il faut travailler. Mais, l'autre point qui est important, puis là vous venez d'aborder, c'est votre place un peu au niveau de la planification opérationnelle. Votre première recommandation que vous faites, entre autres, c'est: «Afin de s'assurer le prochain régime forestier procurera une meilleure gouvernance pour la gestion...», premier point de votre recommandation, c'est de «faire valoir auprès des instances régionales l'importance de préserver l'expertise disponible en région», alors, moi, j'aimerais que vous abordiez ce point-là des tables GIR, des commissions régionales des ressources, peut-être votre rôle là-dessus. Parce que, l'expertise, plusieurs groupes en ont parlé. Certains s'inquiétaient entre autres de la diminution du nombre d'ingénieurs forestiers au ministère, la politique de remplacement, et autres, et également la relève.

Donc, moi, quand je vous écoute, la commission régionale va avoir un rôle majeur à jouer, les décisions vont se prendre là, et j'aimerais vous entendre là-dessus: Pour vraiment s'assurer que le secteur reste compétitif, quels sont les enjeux au niveau des commissions régionales?

Le Président (M. Huot): M. Lessard.

M. Lessard (Jocelyn): Alors, en principe, c'est très intéressant. Je pense qu'à cette échelle-là les communautés sont capables de s'organiser puis sont capables de contribuer d'une façon très intelligente et de mobiliser tous les acteurs pour arriver à une planification concertée. Et ça, ça va permettre des économies, ça va permettre un fonctionnement plus harmonieux puis ça va nous permettre d'éviter d'avoir des arbitrages pour des mesures d'harmonisation improvisées parce qu'on ne l'avait pas vu venir. Donc, tout ça, à cette échelle-là, c'est très intéressant. La seule préoccupation que l'on manifeste pour tout ça, c'est le coût, parce que ce n'est pas parce que ce n'est pas nous qui le payons que ça n'aura pas un effet. Le système forestier, c'est un ensemble, et tous les coûts qui sont dans le système vont nous rattraper à un moment ou l'autre. Quand on va être en compétition contre les hôpitaux puis les écoles, ça va être... ça peut être difficile. Donc, il faut que ce soit vraiment mis dans un cadre de grande efficacité.

Mais, la planification, l'échelle qui nous interpelle, nous, c'est vraiment la réalisation des travaux. Et, quand on dit: On devrait déposer notre propre planification, c'est parce que, sinon... on en a entendu d'autres qui sont passés ici, peut-être qu'on est un peu dissidents de notre groupe de partenaires en allant un petit peu plus loin que la demande, mais c'est tellement déterminant, cette étape-là. Je vous ai entendue, Mme Normandeau, poser des questions à d'autres groupes, s'il y avait des études qui avaient été faites. Nous, on en a fait une, il y a quatre ou cinq ans... Excusez-moi, M. Bernard, si je réponds en même temps à votre collègue, mais on est vraiment dans le sujet.

M. Bernard: ...

M. Lessard (Jocelyn): On avait essayé de déterminer, pour un de nos clients et une coopérative, une de nos coops de plus grande taille, s'il y aurait eu de la synergie s'ils avaient été responsables de la planification à la place de l'industriel lui-même. Puis c'était sur un territoire assez vaste, là, près de un demi-million de mètres cubes. Et on remontait... on a tout comptabilisé les dépenses pour voir quels choix avaient été faits si on l'avait fait autrement. Puis c'est sûr qu'on le mettait au maximum, là, l'industriel nous a posé la question, si on aurait été vraiment meilleur que lui, mais on arrivait à 2,50 $ du mètre cube de dépenses qui auraient pu être évitées.

Alors, si c'est quelqu'un d'autre qui n'est même pas l'industriel ni l'exécutant qui fait la planification, pardonnez-moi, mais, nous, on est très inquiets, là, quelle sorte de coût qu'on va avoir quand on va aller en opération, c'est déterminant, alors que, si on dépose notre planification, qui va être optimisée... puis là on ne tient pas le crayon final, ça, on est d'accord, il ne faut pas que ce soit l'industrie qui continue à tenir le crayon. Mais qui va faire cette planification initiale, c'est nous qui allons devoir la commenter? C'est vraiment très important comme point, là. Et, la planification des opérations forestières, c'est la plus critique des planifications.

Le Président (M. Huot): Ça va? Merci. Donc, je reconnais... M. le député de Montmagny-L'Islet, il vous reste un deux minutes.

M. Morin: Oui. Il devrait avoir le temps de me répondre. À vous entendre, là, comment qu'on concilie ce rôle-là de gestionnaire avec la rentabilité des entreprises, là?

M. Lessard (Jocelyn): Bien, c'est ça, le point. Moi, je peux vous dire que, si vous venez dans les coops, jour et nuit, vous allez rencontrer quelqu'un qui est en train de travailler, parce que c'est ça, la constance. Et, à chaque jour, on se demande ce que l'on va faire, là. Est-ce que ça va nous permettre d'être encore vivants? Est-ce qu'on va réussir à rentabiliser nos opérations? Et ça, ce réflexe-là, c'est normal, c'est notre survie. Celui qui va planifier pour nous, là... Moi, je n'ai rien contre nos collègues de la fonction publique, j'ai des amis puis des gens que j'apprécie beaucoup, mais ce n'est pas les mêmes réflexes.

Alors, si on veut confier cette responsabilité-là à eux puis que, nous, on vit avec les conséquences, je ne sais pas comment on va réussir. En tout cas, ce n'est pas dans notre culture, hein? Excusez-moi de souligner ça, mais, au Québec, depuis 25 ans, il s'est creusé un fossé énorme entre l'industrie et la fonction publique. Puis c'est très difficile de faire des passerelles au-dessus de ce fossé-là, puis il va falloir qu'on réussisse à le traverser, le fossé, mais là on va basculer de culture d'un coup, là. Ne vous étonnez pas que tout le monde résiste quand on passe ici, sur ce point-là très précis.

n (15 h 50) n

M. Morin: C'est que l'idée, M. le Président...

Le Président (M. Huot): Allez-y.

M. Morin: ...c'est que l'idée du projet de loi, c'est qu'on veut planifier avec vous.

M. Lessard (Jocelyn): Oui, mais, si on vous dépose notre planification, puis vous complétez le travail, nous autres, on serait plus à l'aise.

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de René-Lévesque. La parole est à vous.

M. Dufour: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à la page 24 de votre document, vous parlez qu'à cause du contexte particulier du secteur forestier... puis vous parlez du Code du travail. Je sais qu'il y a des spécificités qui sont propres, dans le Code du travail, par rapport au secteur forestier. Bon, plusieurs sont venus nous dire qu'il faut améliorer le Code du travail par rapport aux travailleurs sylvicoles, les conditions de travail exécrables qui existent au moment où on se parle, mais, vous, ce n'est pas de ça que vous parlez.

Vous parlez que... vous insistez pour qu'il y ait «...une exception dont bénéficient les coopératives forestières soit maintenue et clarifiée afin de s'assurer qu'elles n'héritent pas d'une syndicalisation.» Vous voulez dire quoi, là-dedans? Parce que vous êtes des coopératives, ça veut dire que tu ne peux pas... tu peux être coopératif, mais non... tu ne peux pas être coopérant, ou coopératif, puis tu ne peux pas être syndiqué en même temps, c'est un ou c'est l'autre. C'est quoi, la vision que vous avez par rapport à ce paragraphe-là?

Parce que, dites-vous une chose, nous, on est ici pour légiférer, on est ici pour prendre le pouls, mais les syndicats nous disent complètement le contraire, là, c'est... c'est... J'aimerais vous entendre là-dessus pour qu'on soit capables de se faire une thèse là-dessus.

Le Président (M. Huot): M. Lessard.

M. Lessard (Jocelyn): C'est très complexe, mais je vais essayer de vous résumer ça.

M. Dufour: On appelle ça du macramé.

M. Lessard (Jocelyn): Du macramé...

M. Dufour: C'est complexe, comme ça, c'est du macramé!

M. Lessard (Jocelyn): O.K. Vous savez, c'est un héritage du passé, hein, le Code du travail. En forêt, il y avait des conditions, à l'époque des concessions, que... les travailleurs qui voulaient recourir à un syndicat, c'était impossible, puis on a dû trouver des moyens pour rendre ça possible, et effectivement ça a permis aux syndicats d'être présents, et c'est très important que ça arrive.

Mais on est la seule... le seul secteur d'activité qui a à travailler avec ce concept d'employeur présumé. L'employeur présumé, c'est l'industriel qui est là, qui a la responsabilité du territoire, puis, si les travailleurs qui sont là sont syndiqués, le syndicat négocie avec l'industriel les conditions, mais ces travailleurs-là, ils ont un employeur réel, puis l'employeur réel, c'est lui qui prend les risques, puis il ne fait même pas partie de la négociation. C'est quelque chose de très étrange, puis ça a existé parce qu'il fallait que ça existe, puis heureusement que ça a existé, ça a permis de consolider les conditions de travail.

Mais, dans le Code du travail, il y a aussi une exception, la présomption d'employeur ne s'applique pas si ce sont des membres d'une coopérative forestière, parce que c'est une entreprise réelle. En principe, on l'explique en disant: Pas nécessaire d'avoir une présomption, il y a un employeur réel, c'est la coop. Ça ne veut pas dire que les travailleurs d'une coop ne pourraient pas demander une accréditation syndicale, mais face à leur employeur, c'est-à-dire eux-mêmes, les travailleurs de la coopérative qui possèdent la coop.

M. Dufour: Pour bien comprendre la situation, est-ce qu'il est exact... la référence que je vais faire, c'est que... la référence, c'est Boisaco, à Sacré-Coeur. C'étaient les coopérants qui ont déposé une requête en accréditation. Mais il y a une décision du Bureau du Commissaire général du travail au moment où on se parle, là? Est-ce que j'ai raison de penser ça et que c'est pour ça que vous voulez avoir un éclaircissement dans le Code du travail au niveau des coopératives?

M. Lessard (Jocelyn): En fait, non. On pourrait parler de ça aussi, mais ce n'est pas du tout la même situation, parce que ce sont les travailleurs d'une coopérative de travailleurs d'usine, puis là, je ne veux pas entrer dans cette discussion-là, ça n'a rien à voir...

M. Dufour: C'est ça, oui, oui.

M. Lessard (Jocelyn): Ce dont on parle, c'est, dans la loi des forêts et dans le Code du travail, il y existe des parallèles, on réfère au bénéficiaire de CAAF comme étant l'employeur présumé, et là les centrales syndicales souhaitent que cette notion-là soit étendue à tous les travaux: la sylviculture, la récolte. Et je les comprends de demander ça, parce que, quand je les ai entendus décrire le prochain système forestier, c'était une pagaille de sous-traitance partout. Et ce n'est pas ça qu'il faut faire, il faut stabiliser les entreprises. Il faut que les syndicats puissent syndiquer des travailleurs, mais avec leurs employeurs. Si l'entreprise qui est là est là pour les 20 prochaines années, si les travailleurs veulent se syndiquer, ils se syndiqueront.

M. Dufour: Je comprends.

M. Lessard (Jocelyn): Mais il faut éviter de superposer ça à toutes les autres contraintes, là.

M. Dufour: Parfait, merci beaucoup.

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant la députée de Matapédia. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Doyer: Merci. Je vais faire vite parce que j'ai deux questions. Par rapport à la recommandation 2, sur le développement durable, vous parlez de... bon, en lien avec les préoccupations économiques et sociales, vous parlez de superposer des fonctions, hein: «...protection du paysage, milieu riverain, affectation récréative dans un territoire plutôt que de les additionner, car cela conduit à une réduction importante du territoire disponible pour la production forestière.»

Alors, on comprend que vous voulez vous garder des superficies pour faire des travaux, et en même temps comment on fait ça, de superposer les fonctions plutôt que de les... Hein? Comment on...

M. Lessard (Jocelyn): Vous avez vraiment...

Mme Doyer: ...de les superposer plutôt que de les...

M. Lessard (Jocelyn): Vous avez l'art de me poser des questions délicates, vous.

Mme Doyer: Et ça... Je suis reconnue pour ça.

M. Dufour: Danielle est tellement délicate!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Doyer: Bien, ça dépend avec qui. Ça dépend avec qui, M. le député. Alors...

M. Lessard (Jocelyn): Alors, en fait, ce que l'on dit, c'est: Les coops forestières, là, on n'est pas contre un règlement d'aménagement forestier durable. Au contraire, on est là puis on veut que la foresterie dure longtemps. Ce qui nous inquiète, c'est qu'à chaque fois que quelqu'un pense qu'il faut préserver quelque chose on l'isole puis on l'additionne au reste. Jamais on va dire que les contraintes que l'on veut ajouter dans la gestion, ça pourrait être au même endroit, puis on pourrait le comptabiliser comme ayant atteint l'objectif pour deux fonctions différentes. Par exemple, un îlot de vieillissement puis un paysage, bien, s'ils sont ensemble, moi, je trouve que c'est mieux. Mais il y a des gens qui disent: Non. On ne mettra pas les îlots de vieillissement dans le paysage, parce qu'on veut avoir des îlots de vieillissement spécifiques. Bien, il faut que... Quand ça va sortir, le règlement... parce qu'il y a eu une première consultation, c'était très préoccupant, là. Le territoire forestier, il va sincèrement rétrécir.

Mme Doyer: ...dans le fond, c'est de... Avec les préoccupations de développement durable, on doit aussi avoir des préoccupations sociales, de garder nos travailleurs, de garder des superficies. Puis on... vous êtes conscients en disant ça ? est-ce que vous êtes convaincus? Vous avez l'air, là ? de garder les objectifs de développement durable. Autrement dit, est-ce qu'on est capables de garder un équilibre entre ces deux préoccupations-là, que l'humain fait aussi partie des contraintes environnementales? On a aussi besoin de faire travailler notre monde. Est-ce qu'on est capables de rencontrer tous ces objectifs-là en même temps? Dans le fond, vous nous allumez là-dessus. C'est ça, hein?

M. Lessard (Jocelyn): Oui, c'est ça. En fait, on va même un peu plus loin, là. Vous ne le soulevez pas, mais je profite d'être là...

Mme Doyer: J'aimerais mieux que ce soit vous qui le disiez.

M. Lessard (Jocelyn): Nous, on dit que les trois composants du développement durable, là, on entend souvent dire: On oublie le développement économique. Mais, dans le concept du développement durable, le volet économique, c'est pour satisfaire les besoins des humains. Ce n'est pas pour assurer du rendement sur le capital. Donc, nous... Mais ça, c'est important, par contre, si... Il faut qu'on l'occupe, le territoire, il faut qu'on puisse travailler.

Mme Doyer: Puis d'autant plus, M. le Président, d'autant plus que je regarde la ministre et que je lui dis que son projet de loi s'occupe... et a comme titre «occupation du territoire forestier». Alors, moi, dans mes 34 villes et villages, là, mes villages où est-ce qu'il y a des fermetures d'usine, et tout, je veux qu'ils continuent d'être là, le monde, puis d'être capables de payer leurs maisons, puis de continuer de vivre, puis d'avoir des enfants à l'école. Parce que bientôt ça va être des villages fantômes comme à Val-Jalbert. Alors, M. le Président, j'ai une dernière... Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Huot): Je vous informe qu'il vous reste 30 secondes.

Mme Doyer: 30 secondes?

Le Président (M. Huot): Ça inclut la réponse.

Mme Doyer: Ah! 30 secondes pour les forêts de proximité, 30 secondes sur ce que vous avez dit dans la recommandation 2.

M. Lessard (Jocelyn): C'est une très bonne idée, mais on aimerait que le projet de loi fasse de la place aux partenariats, parce que ce n'est pas vrai qu'au Québec le territoire est vierge, puis on va installer une forêt là, puis ça va être nouveau. Il y a tout le temps quelqu'un. Puis, si les projet de forêts de proximité font en sorte que les coops doivent s'expatrier, bien je pense qu'on aura un problème. Au contraire, si on devient des partenaires des communautés pour mettre en oeuvre les projets, on va tout de suite leur faire profiter de notre expertise, puis on va être plus forts ensemble.

Mme Doyer: D'autant plus que vous êtes proches des superficies. Voilà.

Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Donc, M. Sylvain Poirier, M. Jocelyn Lessard, de la Fédération québécoise des coopératives forestières, merci de votre contribution aux travaux de cette commission. J'invite la représentante de Gardons le Nord à prendre place. Je suspends les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 59)

 

(Reprise à 16 h 4)

Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président (M. Huot): S'il vous plaît, je demande de la discipline aux parlementaires. Alors, nous recevons maintenant le groupe Gardons le Nord. Je rappelle au porte-parole que vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire. Donc, je vous demande de vous identifier ainsi qu'identifier la personne qui vous accompagne. La parole est à vous pour 15 minutes.

Gardons le Nord

Mme Breton (Josée): Merci beaucoup. Donc, merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes, MM. les députés. Donc, je me présente, Josée Breton, je suis responsable de la campagne conservation et porte-parole au Québec pour Canopée, et voici ma collègue Édith Cadieux, qui est chargée de projet à la commission Aires protégées chez Nature Québec. Nous avons été déléguées par les membres de la campagne Gardons le Nord afin de vous présenter nos idées et nos positions par rapport au projet de loi qui nous intéresse aujourd'hui.

Donc, pour votre information, Gardons le Nord est une campagne de conservation du Nord québécois qui est menée par cinq groupes environnementaux: donc, tout d'abord, Canards illimités, Greenpeace Canada, Nature Québec, SNAP Québec et Canopée. Donc, de leur part et de la nôtre, je vous remercie de nous avoir invités. L'objectif de la campagne Gardons le Nord est d'assurer la protection d'au moins 50 % du Nord québécois dans un réseau d'aires protégées respectant les critères internationaux. Donc, sur ce, j'en profite pour réitérer notre soutien aux objectifs de conservation du plan Nord, qui sont d'assurer la protection d'au moins 50 % du territoire au nord du 49e parallèle.

Donc, comme je le disais, puisque le plan Nord comprend tout le territoire québécois situé au Nord du 49e parallèle, ce qui inclut plus de la moitié du territoire soumis à l'exploitation commerciale des forêts, Gardons le Nord a étudié le projet de loi afin de voir s'il était conciliable avec les objectifs de conservation du plan Nord. Sur ce, nous aimerions en profiter pour féliciter le gouvernement sur le travail fait dans le projet de loi, notamment le fait qu'on y retrouve le concept d'aménagement durable, qui y prend plus de place, de même que de gestion intégrée des ressources.

Donc, le coeur de la vision de Gardons le Nord est que la conservation soit planifiée et mise en oeuvre avant toute forme de développement industriel. Donc, plus précisément, bien sûr nous cherchons à protéger les forêts à haute valeur de conservation, comme les grands massifs forestiers intacts. Bien sûr, ça inclut les dernières forêts intactes situées au sud de la limite nordique d'attribution. Ça inclut également l'habitat essentiel du caribou forestier, qui, comme vous le savez, est une espèce menacée. Les dernières données scientifiques portant sur le caribou forestier, qui ont été publiées en avril 2009 par Environnement Canada dans un document appelé l'Examen scientifique aux fins de désignation de l'habitat essentiel du caribou forestier, démontrent que les hardes de caribous présentes au Québec ont moins de 50 % de chances d'exister encore dans 100 ans sur notre territoire, en forêt boréale.

Par contre, on y apprend aussi que dans deux provinces, dont le Québec et l'Ontario, si on prend des mesures concrètes, les mesures nécessaires afin de pallier à cette problématique, le caribou forestier a de bonnes chances de survivre. Or, les grands massifs forestiers intacts font partie de leur territoire de prédilection, raison pour laquelle on amène également ce point sur la table aujourd'hui.

Donc, aussi, les forêts à haute valeur de conservation, comme les grands massifs forestiers intacts et les vieilles forêts, rendent des services écologiques de grande valeur. On estime que les écoservices rendus par la forêt boréale, ce qui inclut le stockage de carbone et la filtration de l'eau, équivaut à 13,8 %... 13,8 fois, pardon, la valeur des ressources naturelles extraites chaque année en forêt boréale. D'ailleurs, vous aurez sûrement vu, ou lu, ou entendu parler de la lettre des scientifiques, une lettre qui a été mise sur pied par la campagne Gardons le Nord, dans laquelle les scientifiques ? il y en avait 500, dont 165 du Québec ? supportaient les objectifs de conservation du plan Nord de même que les propres objectifs de la campagne Gardons le Nord.

Bon, bien sûr, le plan Nord, vous le saurez, couvre le plus vaste territoire de carbone terrestre au monde, ce qui inclut la forêt boréale, et sa bonne gestion va s'avérer essentielle en ce qui a trait à l'atténuation et à l'adaptation aux changements climatiques. Et d'ailleurs on touchait un petit peu à la question des changements climatiques dans le document explicatif du projet de loi, mais quand même très peu dans le projet de loi, de là nos commentaires.

Donc, après avoir dit tout ça, quand on lit le projet de loi, on s'est posé la question à savoir comment le gouvernement serait en mesure de protéger les zones à haute valeur de conservation. Parce que, dans le projet de loi, on nous parle de sylviculture intensive, on y parle de limite nordique, mais nulle part est-il question d'aire protégée. Or, une fois que le zonage sera établi, que les garanties d'approvisionnement seront octroyées, comment le gouvernement sera-t-il en mesure a posteriori de protéger les territoires qui auront été identifiés comme étant de haute valeur de conservation, et ce, dans toutes les provinces naturelles présentes en forêt boréale?

Donc, à cet effet, Gardons le Nord suggère que... bon, d'abord, je le disais tout à l'heure, s'assurer que la planification de la conservation soit faite avant la planification de l'exploitation forestière. Bon, de même, bien sûr, le projet de loi devait favoriser une collaboration étroite avec le MDDEP soit pour améliorer le réseau d'aires protégées ou encore pour établir une stratégie claire sur comment on veut atteindre les objectifs de conservation. Bon, hier, j'ai ouï dire que vous aviez parlé d'un chapitre introductif au projet de loi. On trouve que c'est une très bonne idée. On pourrait également inclure la notion d'aire protégée à plusieurs endroits, comme par exemple dans l'article 55, alors que, dans le processus menant à l'élaboration des plans, le ministre pourrait prendre en compte les objectifs de création des aires protégées. Ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres.

Le mandat, nous croyons également, doit être donné au Forestier en chef de donner une marge de manoeuvre dans le calcul de la possibilité forestière. Et puis, les groupes auraient aimé également à tout le moins avoir en main au moins un aperçu de la stratégie d'aménagement durable des forêts afin d'être capables de contribuer de façon optimale, là, aux consultations.

n(16 h 10)n

Mme Cadieux (Édith): Donc, avec le projet de loi n° 57, le gouvernement affirme son intention d'implanter une gestion intégrée des ressources. Ainsi, le projet confie la planification forestière à des tables locales de gestion intégrée des ressources, qui seront mises sur pied par des commissions régionales sur les ressources naturelles et le territoire. Puisque ces commissions ont le mandat d'asseoir aux tables des représentants de différents milieux, nous pensons que cette façon de faire devrait permettre une meilleure intégration des intérêts et des préoccupations des différents utilisateurs du territoire. Gardons le Nord considère cet aspect-là d'ailleurs comme un des aspects très positifs du présent projet de loi.

Toutefois, le projet de loi fait abstraction du fait que plusieurs unités d'aménagement forestier seront touchées par le plan Nord, c'est-à-dire que ces unités-là vont s'étendre au nord du 49e parallèle, et on sait que les objectifs de conservation sont peut-être différents à ce niveau-là que plus au sud. Dans ce contexte, nous nous questionnons sur l'efficacité de la structure proposée à comprendre et intégrer les objectifs de conservation reliés au plan Nord. À cet effet, Josée en a parlé un peu, mais nous désirons rappeler que les engagements du gouvernement sont d'assurer un développement durable du territoire nordique, de soustraire l'exploitation industrielle sur 50 % de ce territoire et d'assurer la collaboration des communautés autochtones.

Dans un contexte plus large que le projet de loi n° 57, Gardons le Nord souhaite que le gouvernement mette en place un processus de planification du territoire relié au plan Nord qui inclura l'ensemble des activités industrielles, donc les mines, l'hydroélectricité et évidemment la forêt, mais également les activités récréotouristiques et bien évidemment la conservation, et ce, dans le but d'assurer un développement cohérent du Nord-du-Québec. Puisqu'une partie de la forêt boréale commerciale est incluse dans le plan Nord, nous considérons que le projet de loi doit assurer une cohérence entre le futur plan Nord et le régime forestier. Donc, il est essentiel que les tables régionales soient au courant des objectifs du plan Nord et qu'ils puissent les prendre en considération au cours de la planification.

Toutefois nous croyons également nécessaire de mettre en place un processus de planification forestière qui serait propre au territoire situé au nord du 49e parallèle. Ce processus devrait avoir le mandat de faire respecter l'objectif de 50 % de conservation associé au plan Nord.

Finalement, puisque le territoire associé au plan Nord constitue également le territoire traditionnel de plusieurs communautés autochtones, il nous apparaît essentiel que ces communautés soient non seulement consultées, mais également qu'elles puissent participer activement à la planification forestière, de façon à assurer le respect de leurs valeurs traditionnelles, mais également leurs objectifs de conservation du territoire. Le gouvernement doit donc s'assurer de les consulter et de voir à ce que leurs préoccupations se retrouvent dans la planification forestière.

Mme Breton (Josée): Donc, je poursuis. Dans le cadre du plan Nord, le gouvernement s'est également engagé a protéger les... à développer les territoires non protégés de façon responsable. Pour cela, Gardons le Nord... que le gouvernement doit s'engager à adhérer aux principes d'aménagement écosystémique. En ce qui a trait au présent projet de loi, on n'a pas trouvé le terme d'«aménagement écosystémique», donc on ne fait pas allusion, si on fait exception du terme «approche écosystémique», pour lequel, moi, je ne connais pas la définition. Donc, Gardons le Nord souhaite donc qu'une définition claire de l'aménagement écosystémique y soit incluse et que la planification forestière se réalise selon ces principes, et ce, dans toute la forêt commerciale.

Notons également que Gardons le Nord croit que le projet de loi ou la loi devrait faciliter et promouvoir les meilleures pratiques d'aménagement forestier, ce qui, selon nous, s'applique à la norme du Forest Stewardship Council, donc du FSC, qui est considérée comme la plus exigeante et la plus rigoureuse des certifications forestières. À noter aussi que c'est celle qui est le plus reconnue sur le plan international et pour laquelle on a de plus en plus de demandes, notamment des pays européens et de la part des Américains, des États-Unis.

Donc, pour terminer, Gardons le Nord réitère son intérêt à collaborer avec le gouvernement. Vous savez, nos membres travaillent avec les intervenants du milieu, nous travaillons avec les premières nations, les communautés autochtones, et puis nous connaissons, bien sûr, bien les principes de la conservation. Donc, nous voulons épauler le gouvernement dans ses engagements.

Le Président (M. Huot): Merci, mesdames. Je reconnais maintenant la ministre des Ressources naturelles et de la Faune pour un premier bloc d'échange avec la partie gouvernementale.

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Mesdames, bienvenue à notre commission parlementaire. Alors, Gardons le Nord, c'est une nouvelle coalition qui a été mise sur pied. On a déjà reçu vos collègues de Greenpeace. Alors, il y a une suggestion, certainement, sur la protection des forêts intactes, là, ou des forêts vierges que vous formulez qui a également été formulée par Greenpeace.

Peut-être, M. le Président, pour le bénéfice de tous les collègues parlementaires, je vais déposer, et pour évidemment transmission à tous les collègues, copie du communiqué que nous avons émis le 15 novembre 2008 relativement aux engagements qu'a pris notre gouvernement pour le plan Nord. Mais je vais peut-être partager avec vous lecture rapide de deux paragraphes, je pense, qui vont... Je pense que ça va permettre de vous sécuriser.

Alors, le premier ministre à ce moment-là a annoncé que... ceci: «D'ici 2015, 12 % du territoire du plan Nord aura le statut d'aires protégées telles qu'elles sont définies par les standards internationaux. C'est soustraire donc de toutes formes de développement 70 000 km², soit l'équivalent de 140 fois la superficie de Montréal.» Et le premier ministre d'ajouter que: «Sur 38 % du territoire couvert par le plan Nord, seul le développement récréotouristique et de mise en valeur de notre patrimoine naturel sera permis. C'est donc dire que 50 % du territoire du plan Nord sera à l'abri du développement industriel, minier ou énergétique.» Et d'ajouter: «C'est donc une superficie égale à la France qui sera vouée à des fins de protection de l'environnement et de développement récréotouristique.»

Alors, M. le Président, je souhaiterais le déposer.

Document déposé

Le Président (M. Huot): J'accepte le dépôt du document, Mme la ministre.

Mme Normandeau: Alors, aujourd'hui, je souhaiterais réitérer ? c'était l'objectif, évidemment, en procédant à la lecture de ces deux paragraphes ? réitérer l'objectif de notre gouvernement qui est celui donc d'assurer une protection à la hauteur de celle qui a été prise en novembre 2008 par le premier ministre. On a cependant un grand défi pour atteindre l'objectif, dans la façon de matérialiser l'objectif, de le concrétiser. Là-dessus, je me permettrai de vous interpeller. Évidemment, ma collègue de l'Environnement, Mme Beauchamp, on travaille en étroite collaboration pour qu'on puisse orchestrer une démarche crédible sur le plan environnemental, sur le plan scientifique, parce qu'au-delà de l'objectif annoncé... Bon, on prend le morceau par quel bout, là? J'ai eu l'occasion de dire que, si vous regardez la carte du Québec, il n'est pas question de délimiter par un grand rectangle un territoire puis le geler, là. La réalité est beaucoup plus complexe que ça.

Donc, la question à votre coalition: Au sein de votre coalition, à partir de l'expertise que vous possédez, est-ce que vous auriez des suggestions concrètes à nous faire pour qu'on puisse donc déterminer... ou quelle méthodologie, en fait, employer pour atteindre l'objectif de protection qui a été annoncé?

Le Président (M. Huot): Ce sera Mme Breton?

Mme Breton (Josée): Merci. Donc, la première des choses... Bon. La priorité, la campagne Gardons le Nord, c'est vraiment de procéder à la planification et la mise en oeuvre de la conservation avant le développement industriel. Donc, pour ce faire, la première étape, selon nous, c'est de procéder à un plan d'aménagement du territoire exhaustif. Le plan Nord, là, qui inclut une partie du territoire qui nous concerne aujourd'hui, est un vaste territoire, immense, pour lequel il nous manque beaucoup d'informations et de données scientifiques pour le moment. Donc, je pense qu'il faut se donner les moyens d'être capables de dresser le portrait de la situation... en fait, parce que présentement on n'a pas toutes les réponses.

Donc, la première des choses, c'est que je crois et ce que nous croyons, c'est que nous ne devons pas procéder par les projets pièce par pièce. Donc, il faut avoir une vue d'ensemble à l'avance pour pouvoir planifier la conservation, pour par la suite procéder au développement industriel. Parce que, si on procède à un certain projet dans un territoire x, il pourrait y avoir un impact sur d'autres écosystèmes qu'on aurait pu a posteriori vouloir protéger. Raison pour laquelle, on ne peut pas passer par petits morceaux. Comme vous le disiez, Mme la ministre, il faut vraiment procéder à une vue d'ensemble.

Je pense qu'on peut également s'inspirer de ce qui s'est fait ailleurs. Je ne sais pas si vous êtes au courant de la forêt du Grand Ours et de toutes les démarches qu'ils ont faites pour entreprendre la conservation? Donc, la forêt du Grand Ours, c'est la plus grande forêt pluviale tempérée au monde, qui est située en Colombie-Britannique et qui, entre 1996 et 2006, a été sous, sous... pour laquelle les groupes environnementaux, les industriels et le gouvernement ont procédé à un processus de négociation et de planification, pour finalement aboutir à la conservation de 33 % du territoire. Comment ils ont procédé? Bon. D'abord et avant tout, à la fois le gouvernement, les groupes environnementaux et les industriels se sont mis ensemble pour fournir des ressources monétaires afin qu'un groupe de scientifiques indépendant puissent procéder à l'identification des besoins des territoires et identifier les aires prioritaires à la conservation. Ça a pris un certain temps. Par la suite, quand le groupe de scientifiques est revenu, bien les groupes environnementaux, les ONG... non, les ONG!, l'industrie et le gouvernement ont procédé ensemble pour voir qu'est-ce qui devait être protégé selon les recommandations du groupe scientifique indépendant.

Donc, je pense que de parler avec les gens de la Colombie-Britannique pour voir comment ils ont procédé, ça pourrait être un bon exemple pour nous. C'est clair également que le projet de loi ontarien dont McGuinty a fait part ces derniers temps... qui est intéressant, parce qu'un des messages clés, c'est qu'il dit aux intervenants: On vous donne six ans pour nous dire ce que vous voulez, et par la suite on va procéder au processus décisionnel. L'élément clé là-dedans, c'est qu'ils prennent le temps de voir quels sont les besoins sur le terrain et quelles sont les priorités de conservation avant de procéder à tout développement. Par contre, une erreur à ne pas répéter, avec ce qui se passe présentement en Ontario, c'est qu'on croit qu'il faudrait inclure les premières nations davantage.

Finalement, on croit... bon, c'est clair qu'il faut impliquer tous les intervenants à tous les niveaux, à toutes les étapes de planification, et, pour cela, Gardons le Nord est présentement en train de réunir les différents intervenants du Nord québécois, que ce soient les groupes environnementaux, que ce soient les industriels, et même les scientifiques, afin d'unir notre voix pour planifier ensemble ce qui va se passer dans le cadre du plan Nord. Donc, les scientifiques ont offert leur collaboration, de même que les groupes environnementaux, sur cette question-ci.

n(16 h 20)n

Le Président (M. Huot): Mme la ministre.

Mme Normandeau: Bien, ce qui est intéressant, c'est que dans le fond vous adhérez à l'objectif. Vous êtes ici pour nous dire: Écoutez, on est d'accord avec le gouvernement quant à l'objectif qui est annoncé. C'est ce qu'on comprend.

Mme Breton (Josée): Oui, on est d'accord avec l'objectif de conservation du gouvernement. Par contre, en lisant le projet de loi, c'est là où on a émis un peu nos craintes. On se demande comment le gouvernement pourra, une fois le zonage établi, les garanties d'approvisionnement octroyées, comment il pourra a posteriori conserver les aires prioritaires à la conservation. Parce qu'il faut... au minimum atteindre 12 % de conservation dans toutes les provinces naturelles. On sait, si on parle des zones prioritaires à la conservation, les grands massifs forestiers intacts, j'en parlais aussi pour le caribou forestier tout à l'heure, sont prioritaires. Il n'en reste que 10 % présentement dans la forêt commerciale. Donc, avant d'attribuer des... bien des garanties d'approvisionnement pour ces secteurs-là, il faudrait avant penser à qu'est-ce qu'on veut planifier... conserver. Raison pour laquelle aussi on parlait tout à l'heure de donner une marge de manoeuvre, de demander au Forestier en chef de... d'avoir une marge de manoeuvre dans le calcul de la possibilité forestière pour être capable, a priori, de pouvoir par la suite conserver ce qu'il est important de conserver. Voilà.

Mme Normandeau: Bien. En fait, je vais terminer là-dessus. Il y a vraiment le défi... Et soyez assurés que notre désir, c'est de travailler avec vous, puis le fait que vous nous proposiez, en fait, vos bons services, votre collaboration, là, pour nous, c'est important. En fait, le défi, c'est la méthodologie. Tu sais, au-delà de l'objectif, là, c'est vraiment comment on arrive à matérialiser tout ça de façon crédible.

Parce que le plan Nord qui est annoncé, on dit, bien, entre autres, le plan Nord va s'appuyer sur une approche exemplaire en matière de développement durable. Moi, je pense que, comme société, il y a là un défi extraordinaire pour nous, de définir un nouveau modèle. Un nouveau modèle d'affaires avec les communautés, un nouveau modèle d'affaires sur la question environnementale, un nouveau modèle, en fait, une nouvelle approche, un nouveau partenariat, et il faut être... je pense qu'on a là une occasion vraiment d'être créatifs comme on ne l'a jamais été auparavant. Parce que, lorsque vous regardez la carte du Québec, là, le territoire du plan Nord, si vous regardez Montréal, versus tout le territoire du plan Nord, Montréal, là, ça représente, en termes de dimension, là, la pièce de un dollar sur la carte, comparé à l'immensité du plan Nord. Les gens ne prennent pas conscience de ça. Si j'avais... si on avait une carte ici, là, c'est incroyable. Je ne pense pas que, sur la planète, je ne pense pas que, sur la planète, parce que vous référez à la Grande Ourse, là, ça n'a pas de commune mesure avec le territoire dont il est question. Je ne crois pas que, sur la planète, il y ait aucun endroit où on a... on est interpellés par un tel défi, sur le plan économique, sur le plan environnemental, sur le plan social, avec le développement d'une approche aussi concertée. Il n'y a pas d'endroit ou territoire à développer d'aussi grand, à protéger d'aussi grand.

Alors, il y a quelque chose, là, il y a une opportunité d'accroître nos connaissances et de faire vraiment... de faire différemment par rapport à tout ce qui a été fait auparavant. Puis, c'est intéressant, parce que, vous-mêmes, vous êtes limités dans vos réponses, tu sais. Quand on parle de méthodologie, j'essaie de pousser certains groupes, j'ai fait la même chose avec Greenpeace, mais, à un moment donné, on vient comme... et on atteint une certaine limite dans la façon de... Enfin bref, personnellement, moi, je suis très, très, là, enthousiasmée par ce défi-là, c'est un beau défi de société qu'on a, mais il faut faire les choses correctement.

Puis, vous avez raison, il faut travailler avec les communautés, les premières nations. Les communautés qui sont touchées, il y a quatre nations touchées par le plan Nord, 32 communautés autochtones... 30 communautés autochtones, ou 32, enfin, dont quatre nations. Alors, tout ce monde-là va être convié autour d'une table qu'on va appeler la Table des partenaires du Nord. Alors, on va inviter, là, évidemment toutes les communautés directement concernées, l'industrie, les groupes environnementaux, enfin bref, on veut la démarche... une démarche extrêmement inclusive, là, et s'assurer, dans le fond, qu'il y ait une convergence dans les objectifs, dans les intérêts de chacun.

Ceci étant, M. le Président, je vais m'arrêter sur ce, parce que les autres objectifs, aménagement écosystémique, évidemment on va introduire ça dans le projet de loi, également introduire certains chapitres introductifs. Là, vous nous interpellez, puis là, avec Richard, on se disait: Bien, oui, ça prendrait une section peut-être plan Nord, une référence, aires protégées. Tous les commentaires sont extrêmement pertinents. Alors, pour lui donner une saveur encore plus forte de conservation et de protection, on va voir comment on peut insérer ça à travers le projet de loi. J'entends bien ce que vous nous dites aujourd'hui.

Le Président (M. Huot): Merci, Mme la ministre. Donc, je reconnais le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Oui. Merci, M. le Président. Alors, Mme Breton, Mme Cadieux, ça fait longtemps que le plan Nord est dans les cartons des gouvernements, assez qu'en 2002 il y avait un fascicule sur le site du gouvernement au niveau des ressources naturelles, puis ça a été annoncé lors de la dernière campagne électorale. Alors, c'est vrai que le Grand Nord, c'est grand. Puis c'est vrai qu'on a du monde à consulter. Moi, je vais vous dire, j'ai fait un voyage la semaine dernière... pas la semaine dernière, mais au mois d'août, et j'étais même avec le collègue président, ici présent, dans le Grand Nord, ce qu'on appelle le voyage Ashini, pour aller voir ce que nos ancêtres autochtones allaient faire en bas de la rivière George, à la rivière... à la rivière George, au lac...

Une voix: ...

M. Dufour: ...Mushuau-nipi. Alors, que veut dire Mushuau-nipi en langue française? C'est un lac sans arbres. Je vous le dis, là, quand j'ai arrivé là, c'est comme si j'atterrissais sur la lune. Alors, c'est vrai qu'il va falloir savoir où est-ce qu'on s'en va avec le Grand Nord. Il y a des places qu'il n'y a pas d'arbres, il y a des places où est-ce qu'il y a des arbres. Alors, il va falloir le délimiter.

Alors, moi, le député qui vous parle, je fais partie du 49e parallèle, parce que ça part de la Haute-Côte-Nord, ça coupe jusqu'en Gaspésie, et j'ai eu l'occasion de rencontrer les deux coprésidents, et il y a de la discussion à faire, puis il n'y aura pas une ligne droite là-dessus, là. Mais effectivement il y a de la richesse, puis effectivement il va falloir consulter. Et ceux qu'il va falloir consulter les premiers, puis ils sont venus nous le dire l'automne dernier, quand on a eu cette commission-là parlementaire, c'est les communautés autochtones, qui ne veulent pas faire partie des écrits, mais ils veulent faire partie, en amont, de vouloir écrire pour faire partie de la solution et non pas juste du problème. Alors, je pense que vous l'avez énuméré un petit peu tout à l'heure, vous l'avez énuméré un peu dans votre mémoire.

Ma première question va être celle-ci: C'est quoi, pour vous... Parce que la ministre a dit qu'elle était prête à mettre des amendements dans le projet de loi et avoir des définitions de ce que c'est, le principe d'aménagement écosystémique. Alors, pour vous, c'est quoi, un aménagement écosystémique?

Le Président (M. Huot): Mme Cadieux.

Mme Cadieux (Édith): Donc, c'est sûr que, si on y va sur un... si on regarde une forêt naturelle, une forêt naturelle, c'est diversifié. Le paysage est très hétérogène, il y a des peuplements qui ont des âges différents, des structures différentes, une composition différente. Si on regarde la forêt boréale, même la pessière, on va sur la Côte-Nord, on a un peu plus de sapin, on va en Abitibi, on a une... c'est plus mélangé. On arrive au Lac-Saint-Jean... au Saguenay, là, c'est la pessière noire qui prend une grande place. Donc, on a une mosaïque naturelle qui est très diversifiée, et, à la base, l'aménagement écosystémique doit s'assurer que la foresterie permette de maintenir cette diversité-là au niveau des peuplements forestiers, ce qui évidemment va permettre le maintien d'une diversité au niveau de la faune, qui dépend des différents habitats. Donc, l'aménagement écosystémique, dans son sens le plus large, c'est une nouvelle façon de faire qui est proche de la nature.

Nous, on n'a pas proposé de définition. Par contre, je sais que les trois groupes que l'on représente et qui ont soumis un mémoire, il y a une définition qui revient souvent, et c'est celle de Mme Sylvie Gauthier et ses collaborateurs, donc qui ont publié un livre, en 2008, sur l'aménagement écosystémique, et la définition qu'ils en faisaient, c'était: «Une approche d'aménagement qui vise à maintenir des écosystèmes sains et résilients ? donc, c'est important que... le «résilient», ça implique que, s'il y a une perturbation, on puisse revenir à un état naturel ? en misant sur une diminution des écarts entre les paysages naturels et ceux qui sont aménagés, afin d'assurer à long terme le maintien des multiples fonctions de l'écosystème et, par conséquent, de conserver les bénéfices sociaux et économiques que l'on en retire.»

Donc, c'est une approche qui est basée d'abord sur une conservation de l'intégrité des écosystèmes forestiers mais en même temps qui vise à prendre en compte les aspects sociaux et économiques qui sont reliés à la forêt et qui sont tout aussi importants également dans le cadre d'un aménagement forestier durable. Est-ce que tu as quelque chose à rajouter, Josée?

n(16 h 30)n

Le Président (M. Huot): Ça va. Donc, M. le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Bien, ça va comme... Vous avez lu la définition de la dame, mais, dans le Nord, comment ça peut s'appliquer, ça? Parce qu'on dit qu'on n'a pas la «cartologie» au moment où on se parle, là, tu sais.

Mme Cadieux (Édith): ...en fait, on n'en a pas au nord de la limite nordique...

M. Dufour: Oui.

Mme Cadieux (Édith): ...par contre, je pense que le gouvernement a des bons inventaires qui donnent déjà une idée du couvert forestier et de certaines espèces animales qui sont présentes. Pour le mettre en application, je pense qu'actuellement il y a trois projets pilotes au Québec qui ont permis d'expérimenter différentes méthodes, parce qu'on... Par exemple, en Mauricie, ils ont appliqué un processus de triade; au niveau de la réserve faunique des Laurentides, c'est une autre forme d'expérimentation. Donc, ces études-là ont permis d'établir certaines règles de base, qui sont d'abord d'identifier un peu l'état initial de la forêt, par exemple c'est quoi, la proportion des vieilles forêts qui est initialement présente dans le paysage. Donc, un aménagement écosystémique, si on veut qu'il soit le plus près possible de ce que la forêt naturelle est, doit s'assurer d'avoir une proportion de vieilles forêts qui va être similaire à un milieu.

Gardons le Nord ne s'est pas avancé davantage à ce niveau-là, parce qu'on a des spécialistes, chacun dans nos groupes, qui ont déposé un mémoire au niveau de la commission parlementaire et qui sont certainement mieux placés, je pense, en... Je pense, Greenpeace a dû en parler; je sais également que Nature Québec, c'est un grand pan de notre mémoire. Donc, je pense que j'aimerais mieux vous référer à ces experts-là plutôt que de m'avancer au nom des membres, alors qu'on n'a pas eu nécessairement de discussion à ce niveau-là.

M. Dufour: Parfait.

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant la députée d'Iberville. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Bouillé: Merci, M. le Président. Merci aussi à Mmes Breton et Cadieux d'avoir pris le temps de venir nous présenter ce mémoire. Et j'ai bien saisi en tout cas une grande partie de vos explications, là, et vous soulignez l'importance d'encadrer, là, de façon assez stricte, ou très stricte, le développement industriel qui pourrait avoir lieu dans des milieux naturels comme vous nous présentez, là.

Moi, pour ma gouverne, là, j'aimerais ça que vous nous expliquiez, par rapport à la recommandation n° 4, là, la conservation avant développement. Vous identifiez là que, dans la planification du développement des ressources et du territoire, les sites à haute valeur pour la conservation soient identifiés en priorité en fonction de leur importance écologique. Est-ce que vous voyez différents niveaux de protection, dans cette identification-là? Est-ce qu'il y a une graduation de protection, ou tous les sites à haute valeur vont avoir la même, pour vous, même protection ou interdiction de toutes sortes d'usages, que ce soient activités humaines, prélèvements? Je pense, entre autres, aux trappeurs, qui font du prélèvement, je ne sais pas, là. Comment vous voyez ça, ce genre de protection là? Est-ce qu'il y a des niveaux de gradation dans votre esprit par rapport à ça ou...

Mme Breton (Josée): Oui. En fait, c'est...

Le Président (M. Huot): Mme Breton.

Mme Breton (Josée): Oui, merci. En fait, oui. C'est que, nous, on se réfère aux catégories d'aires protégées de l'UICN. Donc, vous êtes peut-être familière avec ces catégories-là. Il y en a six, dont la plupart permettent une certaine forme... que ce soit de la mise en valeur récréotouristique ou que ce soit... Par exemple, nos parcs, au Québec, c'est une catégorie n° 2, donc ça permet quand même une certaine mise en valeur du patrimoine naturel, là. Donc, pour nous, protéger, c'est ce que ça veut dire, doit être inclus dans les catégories d'aires protégées de l'UICN.

Le Président (M. Huot): Je reconnais maintenant la députée de Matapédia. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, Mmes Breton et Cadieux, bienvenue en commission. Je trouve ça intéressant, et encore plus de voir des jeunes femmes comme vous. Ayant une fille de 37 ans qui m'a... Je vous dirais, la pédagogie intergénérationnelle existe: elle m'a toujours sensibilisée à tous les enjeux environnementaux; elle m'a ramenée parfois, parce que pour moi c'est extrêmement important, les enjeux économiques, mais c'est aussi important, la conservation de la nature, la biodiversité.

Alors, vous avez, à la page 5 de votre mémoire, parlé que... Vous faites référence aux structures qui sont dans le projet de loi et vous nous dites que ça n'a comme pas de bon sens, dans le fond, on ne peut pas logiquement appliquer ça à la protection du Grand Nord. Pourtant, il y a... Moi, je voudrais que vous nous expliquiez comment est-ce qu'on peut concilier ça avec la présence quand même de régions. Administrativement parlant, il y a des régions, mon collègue est là pour le prouver: il y a la région de la Côte-Nord, il y a l'Abitibi-Témiscamingue, il y a le Saguenay?Lac-Saint-Jean puis l'Ungava, tout ça, et la limite nordique, puis on dit que le 49e parallèle, ça va jusque... Bon, des caribous, il y en a dans la région de la ministre, dans l'Est-du-Québec, hein... comme ça. Alors, comment vous voyez ça? Ce que je comprends, il y a des enjeux nationaux et même internationaux de conservation, des objectifs de biodiversité. Ça, c'est une première question. Et ensuite, sur la diversité biologique et culturelle, j'aimerais que vous élaboriez par rapport à la diversité culturelle.

Le Président (M. Huot): Ce sera Mme Cadieux?

Mme Cadieux (Édith): Oui. Bien, en fait, pour la première partie, en fait, la première question. Je vais voir ensuite si Josée veut voir avec la deuxième question. En fait, ce que, nous, on pense, c'est qu'il y a des enjeux qui sont très régionaux, et c'est pour ça qu'il est important qu'il y ait des tables régionales pour planifier la foresterie, parce que ces problématiques-là peuvent varier d'une région à l'autre, ne serait-ce que parce que la forêt est différente, parce que les usages qu'on en fait autres que la foresterie peuvent être également différents. On sait qu'il y a des régions aussi où l'aspect touristique est très important, donc, pour eux, c'est peut-être important de miser à ce niveau-là plutôt que d'axer vers la foresterie, alors que d'autres régions, ça peut être un aspect important de l'économie de la région. Donc, la structure qui est proposée va permettre la prise en compte de ces intérêts-là régionaux, en espérant qu'ils soient bien encadrés et que les gens qui participent à ces tables-là aient quand même un support soit technique ou encore financier pour s'assurer de leur participation.

Par contre, il y a des enjeux qui vont au-delà de la région, qui sont de niveau provincial et qui peuvent être même au niveau qu'on arrive avec les dernières forêts intactes. C'est des enjeux internationaux, et les yeux des autres pays... Ils nous regardent en ce moment pour voir comment on va arriver à protéger nos dernières forêts intactes en forêt boréale. Donc, il faut qu'il y ait une certaine structure. Nous, on pensait à une structure, au niveau du plan Nord, qui va regarder le plan Nord dans son ensemble, qui peut amorcer un processus de planification, cibler des territoires de conservation, cibler des endroits aussi où ça peut être intéressant même pour le récréotourisme, et ensuite il pourrait y avoir une forme de recommandation ou des objectifs qui peuvent être transmis aux différentes tables régionales pour dire: Bien, dans votre secteur, il y a ces enjeux-là qui sont présents, et vous devez, au-delà des enjeux qui sont plus régionaux, des trappeurs ou des chasseurs, ou de ceux qui font du canot, et toutes les activités qu'ils peuvent y avoir, vous devez également considérer ces enjeux-là et de les intégrer à la planification.

Mme Doyer: Alors, ce que je comprends bien, c'est comme s'il y avait une trame de fond de protection par rapport... qui est comme décidée d'avance. C'est sûr, si c'est national ou international, il va y avoir des enjeux qui dépassent les objectifs régionaux. On se comprend bien?

Mme Cadieux (Édith): Oui.

Mme Doyer: Et dont ils vont devoir tenir compte. Donc, comment je dirais ça? C'est évident qu'ils ne peuvent pas tout faire sur ces territoires-là par rapport à des objectifs qui les dépassent. C'est ça, hein?

Mme Cadieux (Édith): Non. Ils vont avoir besoin effectivement d'encadrement et d'appui, puis certainement d'une transmission de connaissances.

Mme Doyer: Mais vous avez parlé d'argent... Mme Cadieux?

Mme Cadieux (Édith): Oui.

Mme Doyer: Bon. Vous avez parlé d'argent, mais on se comprend que ça va coûter cher de concerter tout ce monde-là sur des territoires immenses. C'est vrai, hein? Et, par rapport à la... Je ne voudrais pas qu'on échappe la question de la diversité culturelle, qui m'apparaît quand même intéressante. Ça fait référence aux humains, j'imagine?

Le Président (M. Huot): Mme Breton.

Mme Breton (Josée): En fait, en termes de diversité culturelle, nous, ce qu'on entend, c'est principalement d'impliquer les intervenants, à la fois toutes les communautés du Québec mais également les communautés autochtones et des premières nations, pour nous, qui est un élément essentiel pour mener... pour être capables de mener à terme nos objectifs de conservation, parce que, sans eux, c'est clair que la diversité culturelle ne serait pas représentée et qu'il y aurait une grande lacune à cet endroit. Donc, c'est tout simplement ce qu'on voulait dire.

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue. M. le député, la parole est à vous.

n(16 h 40)n

M. Bernard: Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Cadieux, bonjour, Mme Breton. Je suis content que vous soyez là aujourd'hui, puis vous avez fait une très belle présentation des enjeux. Puis le fait qu'on ait eu Greenpeace hier aussi, donc on fait le survol de beaucoup d'enjeux du plan Nord. Je vais vous parler un petit peu de mon expérience du Nord-du-Québec, à différents points. Moi, j'ai eu le plaisir de travailler au nord de Chibougamau puis autour de Chibougamau entre 1981 et 1984. J'ai résidé à Chibougamau de 1992 à 1994. J'ai travaillé dans le secteur de la Baie-James en 1996. J'étais député de 2003 à 2007. 2007, après, je suis retourné faire du secteur minier, un petit congé. En 2008, je suis retourné, deux mois, travailler dans le territoire qui, au sud, était le secteur de Nemaska, avec à l'ouest la rivière Eastmain. J'ai travaillé au nord de Chisasibi et jusqu'au nord de LG 3.

Donc, j'ai eu le plaisir de me promener sur un vaste territoire, et, en se promenant en hélicoptère, on a le plaisir de voir beaucoup... d'admirer le paysage et de voir aussi beaucoup d'écosystèmes. Tout ça pour vous dire que j'ai eu le bonheur de voir ce territoire-là. Je partage avec vous votre... certains de vos commentaires, entre autres tout ce qui touche la forêt boréale au nord du 49e jusqu'à la limite nordique.

À l'époque, les premières années, je suis allé, en quatre-vingt-un, quand je suis allé dans le secteur de Chibougamau, j'ai travaillé au... Le territoire, à l'époque, n'était seulement qu'accessible par avion, parce qu'on parle de la zone sud de la forêt boréale, elle n'était pas accessible; les compagnies forestières n'étaient pas rentrées encore dans ces territoires-là. Maintenant, quand j'y ai retourné, dans les dernières années, oui, les compagnies forestières, elles sont entrées sur le territoire. Naturellement, il y a des contraintes, mais le développement forestier s'est fait là.

Le développement forestier aussi s'est fait en partie dans le côté nord de la route, quand on part de Senneterre pour se rendre à Chibougamau, un périmètre. Je vous dis ça pourquoi? Parce qu'au nord la forêt, la limite nord, il faut se rendre compte aussi qu'il y a un aspect commercial. Je comprends très bien votre, vos craintes au niveau de l'exploitation des forêts, comme vous dites, encore intactes et autres, mais, les compagnies forestières, où elles sont localisées actuellement, quand on monte au nord, ça va être trop loin, ce ne sera pas économique. Et les gens nous en parlent tellement, du coût de la fibre, ces temps-ci, que... ils ne seront pas capables d'aller là. Et la preuve de ça, c'est que le gouvernement, à l'époque, a fait la route du nord qui part de Chibougamau, qui passe pas Mistissini et qui monte, et les compagnies forestières ne développeront pas plus. Alors, cette contrainte-là, je pense que c'est important. La limite sud, il faut vraiment lui faire attention, on est d'accord avec ça. Et l'autre, il va y avoir un filtre naturel qui va se faire à cause des coûts d'exploitation au niveau forestier.

Et d'ailleurs mon frère, qui fait des travaux de sylviculture et d'éclaircies pré-commerciaux dans le secteur de Matagami et Amos, et la limite, là, c'est 100 kilomètres au nord de Matagami. En haut de ça, tu es rendu trop loin de Matagami, les arbres sont rendus, on le sait, ils sont beaucoup plus petits... en croissance rapide. Donc, il va y avoir un filtre qui se fait là-dessus, et je pense qu'on peut se rassurer à cet égard-là. Même dans le temps... à moins que les changements climatiques vont faire progresser la forêt. Donc, c'est certain. Toutefois, il y a encore à apprendre sur le territoire. Il y a deux semaines, il y avait des biologistes à Rouyn-Noranda qui sont allés faire une mission pour le gouvernement du Québec dans le secteur des monts Groulx et des monts Otish, je ne suis plus certain, et naturellement ils sont arrivés, ils ont trouvé des espèces, des plantes encore méconnues au Québec.

Alors donc, on voit qu'il y a encore du travail à faire pour s'assurer... Comme on le sait que des fois les écosystèmes sont très petits, et ce n'est pas parce que c'est la forêt boréale qu'il n'y a pas de la «zonation» à l'intérieur de ça. Donc, je partage vos préoccupations à cet égard-là de dire: Oui, puis particulièrement pour qu'est-ce qui se passe entre la limite nord de la forêt boréale. Quand on monte en haut... Puis c'est pour ça que, maintenant, quand je parle, que je regarde votre document, des fois je ne suis pas certain si, quand vous parlez du 50 %, vous parlez d'une protection du 50 % de l'ensemble du plan Nord, qu'on sait qui monte jusqu'en territoire innu, mais votre grande, grande préoccupation est vraiment plus, quand je regarde votre mémoire, au niveau de la forêt boréale, entre le 49 et la limite nord de la forêt boréale. Je pense que c'est vraiment là qu'actuellement, quand je regarde, votre organisme et votre regroupement ont plus de craintes, n'est-ce pas?

Le Président (M. Huot): Mme Breton.

Mme Breton (Josée): Merci. En fait, je dirais que tous les objectifs de conservation du plan Nord nous préoccupent grandement, mais on parle de l'urgence d'agir dans la forêt boréale commerciale parce que c'est là où, si on ouvre les... là, la menace est plus grande. C'est-à-dire que... Vous parliez tout à l'heure de certaines espèces qui n'avaient jamais été découvertes, dont votre collègue vous a fait part. Justement, c'est qu'on croit qu'il faut garder des échantillons représentatifs, intéressants, dans tous les écosystèmes. Or, dans la forêt boréale commerciale, il reste environ 10 % de forêts qui sont toujours intactes. Donc, avant de permettre ou avant que les compagnies puissent exploiter ces forêts-là, il faudrait, avant, planifier et voir quel est l'inventaire des zones prioritaires à conserver, afin de s'assurer que ces derniers échantillons représentatifs là soient protégés avant qu'on puisse y permettre l'exploitation.

On peut y mettre un filtre, par exemple, regarder toutes les forêts, les grands massifs intacts forestiers qui sont d'intérêt pour le caribou forestier également, donc de regarder les forêts au moins 500 km² et plus. Il y a différents filtres qu'on pourrait prendre pour identifier quelles sont ces zones prioritaires, mais on croit que, puisque la coupe, et autre exploitation, est imminente dans ces régions-là, il faut procéder maintenant à la planification de la conservation, alors que, pour le plan Nord, bien pour l'instant du moins, le développement industriel est moins imminent. C'est la raison pour laquelle on met l'emphase sur l'urgence d'agir entre le 49e et le 52e parallèle. D'autant plus que, dans le cadre du présent projet de loi et la loi qui nous préoccupe, bien c'est... la mise en oeuvre est pour 2013. Donc...

Le Président (M. Huot): Oui. Allez-y, M. le député.

M. Bernard: Quand vous dites «la forêt boréale commerciale», O.K., est-ce que vous mettez la limite à la limite nord de la forêt boréale?

Mme Breton (Josée): ...

M. Bernard: O.K. Donc, comme je disais tantôt, éventuellement, on sait qu'il y a des territoires que, peu importe, ils ne seront pas... C'est parce que ma notion de forêt boréale commerciale, pour moi, n'est pas nécessairement à la limite nord, parce que, comme je vous disais, à cause des paramètres économiques, aller chercher du bois de différentes grosseurs, c'est pour ça, pour moi, je la mets un petit peu plus basse que ça. Mais il y a des... toutefois, il y a des zones à protéger entre qu'est-ce que, moi, j'appelle commercial et la limite nord actuelle.

Les gens qui demandent... Entre autres, les études actuellement que le gouvernement fait pour repousser la limite nord de la forêt boréale, est-ce que, pour vous, vous pensez que ça a un impact positif ou non ou... C'est quelque chose qui vous inquiète, ça?

Le Président (M. Huot): Mme Breton.

Mme Breton (Josée): Oui, c'est quelque chose qui nous inquiète, certainement, surtout si c'est fait a posteriori. Comme on disait tout à l'heure, l'essentiel de notre message, c'est planifier avant de développer. Donc, avant de hausser la limite nordique d'attribution, ou quoi que ce soit, je crois qu'il faut d'abord et avant tout, et je le répète, de planifier quelles sont les aires à protéger, quelles sont les zones à haute valeur de conservation et les zones d'intérêt avant de procéder à tout changement.

Le Président (M. Huot): Il vous reste du temps, M. le député.

M. Bernard: Oui. Une dernière question. Bon, moi, je viens du secteur... je suis ingénieur géologue, et, quand je dis que j'ai fait des travaux, j'ai travaillé beaucoup en exploration minière, puis beaucoup de nos partenaires de travaux étaient les communautés cries, entre autres celle de Mistassini et celle d'Oujé-Bougoumou, avec qui qu'on a travaillé plus, et maintenant aussi on regarde beaucoup, quand on monte sur le territoire plus à l'ouest, toutes les communautés aussi s'impliquent beaucoup dans les projets. Pour eux, ils voient beaucoup notre venue puis le développement du plan Nord quand même pour une possibilité d'emploi pour leurs jeunes. Parce que vous savez le certainement, là, eux, le taux de naissance par famille est de l'ordre de six enfants, donc... et je pense que 65 % est en bas de 30 ans actuellement. Donc, ils ont des défis à cet égard-là. Et je suis d'accord avec vous de dire qu'il faut que ce soient les premiers qui soient impliqués, naturellement, dans le développement du plan Nord, parce que c'est eux qui vont le vivre et également le travailler.

Mais, quelque part, pensez-vous que leur objectif, eux, de développement économique, entre autres, pour leurs communautés et vos préoccupations de conservation peuvent arriver à une confrontation à quelques endroits ou autre?

Mme Breton (Josée): Bien, la première réponse à donner, c'est que d'abord on collabore avec les premières nations dans le développement des objectifs de conservation, dans le développement de... en fait dans notre travail de consultation, première des choses. Deuxième des choses, les objectifs du plan Nord incluent 50 % de développement industriel, en fait, sur le 50 % du territoire, et 50 % de conservation, donc on voit les deux comme étant prometteurs.

Vous parliez des emplois tout à l'heure, donc il peut y avoir un développement économique et des emplois qui sont créés dans le 50 % voué au développement industriel. Mais également il faut aussi qu'il y ait de la place à la conservation dans ce projet-là si on veut que le Québec prenne sa place en tant que leader de conservation puis qu'il puisse protéger, comme Mme la ministre le disait tout à l'heure, un des plus vastes territoires encore vierges sur la planète, là.

M. Bernard: Un dernier commentaire. Je peux vous rassurer d'une chose: quand on regarde... Par exemple ? j'ai dit que j'ai fait le territoire amplement ? quand on sort de la limite nordique de la forêt, les seules possibilités de développement industriel dans le Nord demeurent les mines et l'énergie; c'est le seul. Et, les mines, jamais qu'il y aura 50 % du territoire qui va être des mines, parce que géologiquement ce n'est pas possible et ce n'est pas économique. Donc, l'industrie minière que certains redoutent, c'est des superficies des fois de 1 km² sur l'ensemble du territoire, alors c'est très minime, et c'est pour ça qu'on sait pertinemment que le développement va faire qu'il va toujours y avoir plus de 50 % du territoire du Nord-du-Québec qui va être préservé de toute activité économique, parce qu'on ne peut pas l'avoir.

n(16 h 50)n

Le Président (M. Huot): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le député de René-Lévesque. M. le député, la parole est à vous.

M. Dufour: Merci, M. le Président. Alors, dans votre mémoire, en titre, c'est Gardons le Nord, il y a une nomenclature de spécificités par rapport au 49e parallèle puis au plan Nord, mais vous émettez quand même des commentaires par rapport au projet de loi n° 57. Et, dans la septième recommandation que vous avez, au niveau de votre mémoire, vous dites: «Engagement à la certification FSC. Que les forêts du domaine de l'État soient obligatoirement certifiées selon la norme d'aménagement forestier la plus rigoureuse en matière d'exploitation forestière durable, à savoir la norme FSC, actuellement reconnue à ce titre.»

Alors, pourquoi spécifiquement FSC, quand il y en a d'autres, certifications, et qu'il y a à peu près... On parlait de la traçabilité, hier, qui se retrouve dans les autres normes, alors... Mais pourquoi spécifiquement FSC?

Le Président (M. Huot): Mme Breton.

Mme Breton (Josée): Merci. En fait, d'abord, Gardons le Nord veut promouvoir et faciliter les meilleures pratiques d'aménagement forestier. Et, pour nous, la FSC est considérée comme étant la plus rigoureuse des certifications, la plus exigeante également. Et c'est celle qui est le plus reconnue sur le plan international. Donc, qu'on parle en Europe, qu'on parle aux États-Unis, les grands acheteurs de produits forestiers sont de plus en plus en demande des produits certifiés par le FSC, donc il ne faudrait pas que le Québec se trouve dans une position où il y a des entraves à la certification FSC dans sa loi, parce que, juste un aspect concurrentiel, ce ne serait pas intéressant, outre l'aspect écologique également, qui est celui qui nous tient à coeur, pour lequel on croit que la certification FSC est la plus rigoureuse. Donc ça, c'est l'essentiel de la question.

L'autre chose, c'est que, puisque maintenant c'est le gouvernement qui sera responsable d'assurer la certification des territoires exactement, c'est d'autant plus important que dans la loi on y trouve... on puisse faciliter la certification FSC. La certification FSC est très rigoureuse sur le plan écologique. D'ailleurs, sur la sylviculture intensive, on ne permet pas plus que 5 % de sylviculture intensive par territoire. Dans la certification FSC, on inclut également les premières nations dans tout le processus, ce qui est un autre élément important aussi, je crois, pour le Québec.

M. Dufour: C'est ça que je voulais vous entendre dire, parce qu'hier j'ai toujours dit que les commissions parlementaires étaient de l'«instruisance». Alors, Greenpeace est venue nous dire hier qu'effectivement, à l'article 3, ou dans le règlement 3 de la FSC, il y avait une obligation de consultation avec les nations autochtones.

Je ne retrouve pas dans votre mémoire ? puis c'est un élément qui est important ? la régionalisation. On sait qu'il y a des régions qui veulent avoir... je ne dis pas mainmise, là, mais ils veulent avoir au moins une certaine décentralisation de certains pouvoirs par rapport aux régions, il ne faut pas que ce soit du mur-à-mur. Mais on ne sait pas quelle instance ça pourrait être. Vous, quelle est votre vision sur la régionalisation? Et effectivement, si vous n'êtes pas contre, est-ce qu'il faut absolument que le ministère ait un droit de regard ou une ligne directrice par rapport à certains aspects de ce qu'il y a dans le projet de loi au moment où on se parle?

Le Président (M. Huot): Mme Cadieux.

Mme Cadieux (Édith): Bien, en fait, j'en ai parlé un peu tantôt, c'est... Donc, oui, clairement, il y a deux niveaux. Il y a un niveau régional qui est très important, puis je pense que c'est une bonne chose qu'il y ait une concertation au niveau des régions pour établir certaines priorités, certaines actions. C'est eux qui ont quand même aussi souvent une bonne connaissance du terrain, les enjeux sociaux et économiques qui sont reliés à ces régions-là. Et de permettre d'avoir des tables de concertation régionales, mais ça peut permettre également de trouver des solutions qui sont propres à la région et qui permettent de sortir de la crise tout en donnant confiance aux gens qui sont dans cette région-là et dans l'ensemble du Québec.

Par contre, comme je l'ai mentionné précédemment, c'est important qu'il y ait une vision globale de l'aménagement qui se fasse sur l'ensemble du territoire. Et c'est pour ça que nous sommes... nous voulons que le ministère chapeaute tout de même l'ensemble des opérations.

M. Dufour: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Donc, Mme Josée Breton, Mme Édith Cadieux, de la campagne Gardons le Nord, merci de votre contribution aux travaux de cette commission. J'invite maintenant la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs à prendre place et je suspends les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 55)

 

(Reprise à 16 h 57)

Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! Merci.

Donc, nous recevons maintenant la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs. Donc, j'invite le porte-parole à se présenter et présenter les gens qui l'accompagnent. Je vous informe que vous avez 15 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Donc, la parole est à vous.

Fédération québécoise des
chasseurs et pêcheurs

M. Latraverse (Pierre): Je m'appelle Pierre Latraverse, je suis le président de la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs. Je suis accompagné par M. Alain Cossette, qui est notre directeur général, et par M. Michel Baril, qui est notre biologiste en chef. Merci.

Donc, je salue la ministre de même que le président de l'assemblée et les différents représentants de l'opposition. Nous agissons à titre de représentants de la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs. Notre organisme représente ces usagers de la forêt et a pour mission de contribuer, dans le respect de la faune et de ses habitats, à la gestion, au développement et à la perpétuation de la chasse et de la pêche comme activités traditionnelles et sportives. Donc, nous vous remercions de l'invitation de pouvoir s'exprimer à cette commission parlementaire.

Lors de notre dernière audience ici, en commission parlementaire, au sujet du renouvellement de notre régime forestier, nous nous étions montrés plutôt pessimistes en regard de la place qui était accordée à la faune. Pour les 150 000 amateurs que nous représentons et pour tous les chasseurs et pêcheurs du Québec, dont les intérêts nous tiennent à coeur, nous avions un peu caquet bas. Vous serez probablement heureux d'entendre cet après-midi que la dernière version du projet de loi sur l'occupation du territoire forestier nous semble beaucoup plus favorable que la précédente. Nous serons heureux de le voir enfin mis en application et de participer à ses succès, particulièrement si nous y retrouvons certaines modifications profitables au milieu faunique.

L'industrie des activités de prélèvement faunique assure au Québec un moteur économique très important. Sans jamais croire que nos activités doivent prendre toute la place et être le coeur de la gestion de la forêt, nous sommes convaincus qu'elles sont des outils qui doivent absolument servir dans toute stratégie de développement économique régional ou provincial. Et, bien que le projet de loi sur l'occupation du territoire forestier ne soit probablement pas parfait, si vous nous accordez quelques assurances au sujet de reconnaissance de la faune comme ressource naturelle de très grande valeur, nous serons d'accord à vous suivre dans ce propre projet.

En ce qui concerne ces assurances, nous les croyons relativement modestes, et je vous les présente à l'instant. Nous vous invitons aussi à prendre connaissance de notre mémoire pour connaître les commentaires spécifiques que nous avons formulés concernant certains articles du projet de loi.

n(17 heures)n

Notre premier commentaire concerne le nom du projet de loi. Nous constatons que les intentions présentées dans le document vont bien au-delà de la simple occupation du territoire. Selon nous, le titre n'annonce pas les réelles avancées qui pourraient survenir advenant l'adoption de la loi. Nous croyons donc qu'un titre comme «La loi sur la gestion durable des forêts» serait plus approprié. Un tel titre deviendrait le symbole de la volonté de changement de notre gestion de la forêt et, pour nous, un signal de l'importance de la faune et ses habitats.

Notre deuxième commentaire concerne le concept de gestion écosystémique et l'aménagement durable des forêts. Nous sommes très heureux d'entendre au cours de ces audiences, et de la voix même de la ministre, l'importance d'intégrer à notre régime forestier les concepts de gestion écosystémique et d'aménagement durable de nos forêts. Nous avons d'ailleurs proposé dans notre mémoire des modifications d'articles qui aideraient à mieux intégrer au prochain régime forestier. Un des problèmes du régime forestier actuel réside dans le fait que les utilisateurs de la forêt à des fins autres qu'industrielles sont souvent considérés comme des quémandeurs vis-à-vis l'industrie forestière. Même si la Loi sur les forêts oblige les bénéficiaires de contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier, les CAAF, à faire participer les gestionnaires des territoires fauniques à l'élaboration d'un plan général d'aménagement forestier, il reste que le PGAF actuel n'a comme seul but l'aménagement de la matière ligneuse sur une unité d'aménagement.

L'intention du gouvernement de passer du plan général d'aménagement forestier à des plans d'aménagement forestier intégrés nous satisfait particulièrement. Constater que l'élaboration de ces plans relèvera de la collaboration du ministre et des tables locales de gestion intégrée des ressources et du territoire nous semble aussi favorable, puisque nous y voyons la prise de contrôle du gouvernement, des communautés et des utilisateurs de la gestion de la forêt. Il faut qu'il soit finalement reconnu que la forêt publique possède, en plus de la matière ligneuse, une multitude d'autres ressources et que toutes les ressources doivent être gérées conjointement par tous les utilisateurs. Mais il est important de préciser que toutes ces démarches doivent se faire sur des balises nationales clairement établies par la ministre.

Poursuivons avec les zones de sylviculture intensive. Nous croyons que l'objectif d'augmenter le rendement de certaines portions d'aires destinées à la production ligneuse est tout à fait justifiable, mais en fonction de techniques reconnues comme étant respectueuses de la gestion intégrée des ressources et de l'aménagement durable des forêts. En tout temps, il faut considérer le potentiel de l'ensemble des ressources fauniques. La sylviculture ne doit pas se résumer à faire des plantations d'une essence unique d'arbres à croissance rapide dans le but d'approvisionner les usines. On pourrait aussi craindre que ces zones se concentrent dans la forêt du sud du Québec, où se retrouvent la plupart des territoires sur lesquels se pratiquent près de 70 % des activités de prélèvement faunique. Quelle valeur auront ces territoires si on y établit des stratégies forestières faisant abstraction des habitats fauniques?

Par ailleurs, advenant le cas où de telles zones de sylviculture intensive étaient aménagées, est-ce que cela réduira réellement la pression de l'industrie sur le reste du territoire? Et, même si on évite les monocultures, on peut imaginer que certains traitements sylvicoles pratiqués à grande échelle dans une stratégie de sylviculture intensive tiendront peu compte de la ressource faunique ou de l'utilisation de la forêt à d'autres fins. Nous souhaitons donc, en tout temps, que les stratégies forestières adoptées soient en accord avec les objectifs d'aménagement durable des forêts. Il faudra que le gouvernement explique clairement quelle définition il entend donner aux pratiques de sylviculture intensive et quels seront les paramètres qui régiront ces pratiques.

Autre sujet qui nous tient à coeur, les réserves fauniques. Notre fédération travaille depuis quelques années à faire octroyer aux réserves fauniques une protection accrue de leurs territoires. Les réserves fauniques du Québec sont des territoires dont les modalités de gestion sont fixées pas l'État et destinées à la conservation et la mise en valeur de la faune. Ces territoires patrimoniaux où les activités de chasse et de pêche et de villégiature se pratiquent dans un contexte privilégié jouissent d'une grande notoriété, mais, malgré la vocation faunique officielle des réserves, qui assure un contrôle de la récolte de la faune, leur habitat faunique ne bénéficie d'aucune mesure particulière de protection. Elles ne sont reconnues ni dans la Loi sur les forêts actuelle ni dans les plans d'affectation des terres publiques. Pour notre fédération, il est clair qu'un nouveau régime forestier devrait prévoir un statut particulier pour les réserves fauniques, qui, dans le régime actuel, se trouvent souvent partagées entre deux, trois ou plusieurs unités d'aménagement forestier. Cette situation multiplie le travail nécessaire pour assurer la cohabitation entre les utilisateurs. Chaque réserve faunique ne devrait donc faire l'objet que d'un seul plan d'aménagement.

Il y a quelques mois, un important comité de travail regroupant, entre autres, des professionnels du MRNF, du MDDEP, de Nature Québec, des fédérations fauniques et de quelques autres intervenants du monde forestier a étudié la possibilité de doter les territoires structurés d'un statut d'aire protégée de catégorie 6 selon les critères de l'Union internationale pour la conservation de la nature. Selon cette catégorie, des territoires peuvent, selon certains critères, certaines dispositions, être davantage protégés que les territoires environnants tout en étant exploités. Après plusieurs rencontres, ce comité a rédigé un rapport préliminaire qui présente les conclusions du groupe. Ce rapport représente certainement un outil important dans toute discussion concernant l'avenir des réserves fauniques et des territoires fauniques structurés.

La régionalisation des responsabilités de gestion des ressources naturelles. Il est évident que les contextes sociaux, économiques et biologiques varient beaucoup d'une région à l'autre. Il est donc logique que le gouvernement démontre une volonté de déléguer aux régions le pouvoir d'établir leur propre stratégie de gestion des ressources naturelles. Mais la lecture du projet de loi nous informe peu au sujet des processus qui seront mis en place à cette fin. Nous souhaitons donc être rassurés et qu'on nous démontre que les décisions régionales seront dirigées par des orientations nationales précises et claires. Il faut que le gouvernement conserve les commandes de l'exploitation de la forêt et qu'il établisse des balises claires à l'intention des régions. De plus, il faut que les différents processus de travail soient aussi clairement définis afin qu'ils soient indépendants des personnes. Il faut comprendre, dans ces préoccupations, que nous voulons que les tables régionales de la faune et la Table nationale de la faune, qui ont un statut légal, servent d'interlocuteurs au gouvernement provincial et aux autorités régionales afin d'intégrer le secteur faunique à la gestion forestière. Présentement, le secteur faunique trouve difficilement son compte auprès des structures régionales, malgré que de récents progrès soient survenus dans les demandes que nous faisons pour nous arrimer aux organismes de gestion publique régionale. Les tables de la faune se présentent comme des outils à privilégier pour intégrer la faune aux stratégies d'aménagement de nos forêts.

La présence des représentants des tables régionales de la faune aux tables de gestion intégrée des ressources sera aussi incontournable. Les ressources fauniques sont parmi les principales richesses naturelles de nos forêts. Il est primordial que ce secteur soit convenablement représenté au moment de l'élaboration des stratégies de gestion des ressources sur un territoire donné. Il est aussi capital que le gouvernement dirige lui-même les travaux des tables de gestion intégrée des ressources qui seront mises en place. Nous croyons que ces tables devront agir sous la gouverne d'un professionnel à l'emploi du gouvernement, dont le financement sera indépendant des stratégies de gestion et du milieu politique régional. Toute stratégie d'aménagement intégré doit, comme le dicte le bon sens, être impartiale et indépendante d'une industrie ou d'une autre afin d'atteindre ses objectifs.

Dernier sujet, le maintien du réseau des chemins forestiers. Notre fédération demande que l'accès à la forêt publique demeure gratuit pour tous les Québécois. Pour nous, cela constitue un privilège pour les industries d'avoir accès aux forêts, un bien collectif, pour y exploiter la matière ligneuse et en tirer des profits. Nous considérons que les chemins d'accès construits par l'industrie ne sont qu'une contribution à la société pour l'utilisation de cette forêt. Il est tout à fait paradoxal que les citoyens déboursent de quelque façon que ce soit des argents servant à la construction de chemins qui permettent à des entreprises privées de faire des profits; et, par la suite, puisque ces chemins appartiennent à tous les Québécois, il est de la responsabilité du gouvernement d'en assurer la gestion et l'entretien.

En terminant, revoici les élément qui, selon nous, devraient être tenus en compte dans le futur régime forestier afin de faire du secteur faunique un élément clé du développement économique régional:

Modifier le nom du projet de loi pour en faire un symbole d'une réelle volonté de changement. Nous suggérons la «Loi sur la gestion durable des forêts»;

Que le nouveau régime forestier se dirige de façon ferme vers l'aménagement durable des forêts;

Arrimer les intervenants fauniques par l'intermédiaire des tables régionales de la faune aux organismes régionaux de développement économique. La loi devrait tenir compte des modalités de concertation mises en place par le secteur faune et confirmées par leur reconnaissance légale des tables de la faune;

Assurer un fonctionnement performant des tables de gestion intégrée des ressources en mettant en poste des professionnels à l'embauche du gouvernement;

Assurer un statut de protection particulier au réseau des réserves fauniques et aux territoires structurés;

Assurer l'accès gratuit et le maintien d'un réseau de chemins forestiers en bon état;

Y aller de précautions avec les zones de sylviculture intensive et d'éviter les monocultures.

Merci à chacun de vous pour votre écoute attentive. et je vous invite à poser vos questions en regard de ces quelques commentaires ou de tout autre sujet sur lequel vous désirez recevoir nos impressions.

n(17 h 10)n

Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Je reconnais maintenant la ministre des Ressources naturelles et de la Faune pour un premier bloc d'échange avec la partie gouvernementale. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Normandeau: Merci à vous, M. le Président. Messieurs, bienvenue en notre commission. Vous êtes notre dernier groupe du jour. On a eu une bonne journée, sincèrement. On a commencé ce matin. Et puis ça nous fait plaisir de vous accueillir. Votre mémoire n'est pas différent des autres groupes fauniques. Alors, il y a plusieurs éléments qu'on retrouve chez vous qu'on trouve dans d'autres mémoires qu'on a eu l'occasion... évidemment pour lesquels on a eu l'occasion de discuter.

Ceci étant, votre fédération, évidemment, est importante. Je regardais les statistiques, là, c'est quand même toujours assez impressionnant. Je pense qu'il faut user d'énormément de pédagogie pour toujours rappeler à la population jusqu'à quel point les activités de nature faunique sont importantes dans notre économie. Souvent... bien, pour certains territoires, c'est visible; pour d'autres, moins. Mais je pense que vous vous employez à faire un rappel qui est tout à fait pertinent dans les circonstances. Ceci étant, il y a un certain nombre d'affirmations qui ont été faites qui vont mériter certaines questions. Alors, je vais le faire. Je vais peut-être y aller en rafale, d'accord? Et puis par la suite je vais vous laisser le soin de répondre. Vous affirmez, M. le président, qu'actuellement vous ne trouvez pas votre compte dans les structures régionales. Je suis un peu surprise par une affirmation comme celle-là, mon collègue également de Montmagny-L'Islet, parce que je pensais que les membres de votre fédération siégeaient sur les commissions régionales sur les ressources naturelles et du territoire. Enfin bref, éclairez-nous, ou éclairez-moi, s'il vous plaît.

L'autre question porte sur le statut particulier pour les réserves fauniques. J'ai écouté votre argumentaire, M. le président, et là j'essaie de voir quel est le lien entre un statut particulier pour les réserves fauniques versus le fait que vous souhaitez éviter les multiplications, là, de bureaucratie, ou je ne sais pas quoi. Enfin bref, votre argumentaire ne m'a pas tout à fait convaincue. Et là j'ai besoin vraiment que vous puissiez être un petit peu plus explicite là-dessus.

Vous rassurer sur la première recommandation. Vous dites: La sylviculture intensive ne doit pas se résumer à faire des plantations d'une essence unique d'arbres à croissance rapide. On est tout à fait d'accord avec ça. D'ailleurs, dans la stratégie d'aménagement durable des forêts, sur laquelle on planche actuellement, on va apporter des précisions sur la stratégie de sylviculture intensive qu'on souhaite déployer. Mais on a eu l'occasion d'entendre un certain nombre de groupes, et puis tous les parlementaires ont bien vu, là, que ce n'est pas la direction que souhaite prendre le ministère. D'ailleurs, je pense que le régime nous offre l'occasion, là, d'innover en matière d'aménagement sylvicole. Alors, je ne pense pas qu'on va emprunter des sentiers qui ont déjà peut-être été empruntés par d'autres sur la planète et qui se sont révélés n'être pas très, très productifs et efficaces.

La deuxième recommandation, c'est celle qui concerne donc la gestion des ressources intégrées sur le territoire. En fait, vous dire que... vous dites: Il faut que soit finalement reconnu que la forêt publique possède, en plus de la matière ligneuse, une multitude d'autres ressources. Ça, ce serait une pierre d'assise, une des pierres d'assise de la stratégie d'aménagement durable des forêts. Et vous ajoutez que toutes les ressources doivent être gérées conjointement par tous les utilisateurs, ce à quoi on adhère totalement. D'ailleurs, c'est précisément pour ça qu'on introduit le concept de la planification technique et les tables GIR qui vont être donc déployées.

Ça fait que, voilà, c'est mes commentaires, M. le Président, mes questions. Les questions, je reviens, hein? Donc, vous ne trouvez pas votre compte dans les structures régionales de concertation. Et, deuxièmement, pourquoi un statut particulier pour les réserves fauniques? En fait, quelle serait la valeur ajoutée?

Le Président (M. Huot): Ce sera M. Latraverse?

M. Latraverse (Pierre): Pour les structures régionales, la première partie à laquelle je veux répondre, c'est: Chaque région administrative a des prérogatives qui lui sont particulières, et, dans certaines régions administratives, les tables faune régionales ne sont pas considérées comme étant partie prenante des CRRNT et de ces différents organismes. Donc, à partir de là, il devient très, très difficile d'avoir une influence, puisque souvent les CRRNT sont gérées par les conférences régionales des élus, et il y a un jeu politique. Et, dans ce jeu politique, souvent les tables régionales de la faune ne sont pas considérées à leur juste valeur, et l'apport que les gens pourraient donner aux CRRNT pour les ressources naturelles et le territoire n'est pas pris en considération. Là-dessus, je pourrais vous donner des exemples que je connais, mais... En Montérégie, j'ai été comme président, c'est-à-dire, de la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs, section Laval-Montréal-Montérégie, pendant plus de 12 ans et j'ai été obligé d'exiger à l'époque du directeur général de la Montérégie qu'il envoie des lettres aux représentants en Montérégie des CRRNT pour dire que l'on existe, pour qu'on soit consultés. Puis, même à ça, la réponse des CRNNT n'a pas été adéquate, parce qu'on n'a pas été invités à participer en tant que tel. On a été invités sur simplement quelques sujets particuliers, dans quelques domaines très, très particuliers, très, très pointus sur une table de consultation, mais pas sur la table en tant que telle. On était comme mis de côté ou en réserve.

À partir de là, ça devient très difficile d'influencer ou de participer aux tables sur la gestion, les nouvelles tables de gestion sur les forêts. Ça devient, à ce moment-là, de faire valoir le point de vue faunique. Et, là-dessus, comment je pourrais dire, il ne faut pas considérer simplement la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs comme étant les maîtres d'oeuvre des tables régionales de la faune. Si je donne certains exemples, les tables régionales de la faune, dans chacune des régions administratives, ont les représentants des grandes fédérations, et il y a aussi des intervenants particuliers. Et, si je vous donne l'exemple de la Montérégie, que je connais très bien, il y avait l'UPA qui siégeait là-dessus, et l'UPA siégeait aussi au CRRNT. Donc, ils se trouvaient à pouvoir influencer de deux façons différentes, à la fois à la table faune régionale et à la fois comme possédant un siège au CRRNT, ce que la table faune régionale n'avait pas comme choix, ce que les fédérations, les grandes fédérations du Québec n'ont pas aussi comme choix.

Mme Normandeau: M. le Président, est-ce qu'à ce moment-là... parce que M. Savard m'a dit que vous allez siéger aux tables GIR, mais, là, je comprends. C'est parce que, dans certaines régions, quand il n'y a pas d'automatisme, c'est là que ça pose problème. Est-ce que vous iriez même jusqu'à suggérer au ministère ou à la ministre de donner des indications plus formelles soit aux CRRNT...

Une voix: Aux commissions.

Mme Normandeau: ...oui, aux commissions, pardon, et puis aux tables GIR? Parce que vous n'êtes pas le premier groupe ? excusez-moi ? mais à revendiquer des balises nationales, entre guillemets; on fait tous ce lien entre ça et...

M. Latraverse (Pierre): Nous avons déjà envoyé au ministre M. Simard des recommandations spéciales pour faire partie de ces tables faune là, et à partir de là on nous a dit que chaque région administrative était le maître d'oeuvre et que chaque région administrative avait à décider de qui siégerait sur ces tables et de faire des représentations auprès de ces régions administratives. Et ça, nous l'avons comme lettre de référence de M. Serge Simard qui est le ministre délégué à la Faune. Lui, il nous dit de travailler ça de façon très, très régionale, parce qu'ils veulent donner des couleurs régionales. Sauf que chaque région administrative du Québec a des influences politiques qui sont différentes, et on n'a pas un accès... des tables faune régionales, même s'ils sont dans la loi, n'ont pas un accès garanti à ces tables.

Mme Normandeau: Moi, ce que je peux vous donner comme garantie, c'est que vous allez siéger aux tables GIR. Il n'y a pas d'automatisme pour les commissions régionales, mais, aux tables GIR, par contre, il y aura un automatisme, mais on va s'organiser pour préciser ça, pour pas qu'il y ait d'ambiguïté puis d'interprétation possible de la part des gens qui sont sur le terrain.

Le Président (M. Huot): M. Cossette, vous voulez rajouter quelque chose?

M. Cossette (Alain): Juste pour renchérir, je suis très heureux d'entendre que vous allez aller dans cette direction-là. On a travaillé assez fort depuis longtemps dans ce sens-là, puis, si ça se réalise, je peux vous dire que ça va être quelque chose de bien dans le secteur faunique. Puis, juste pour rappeler aux gens, qui ne sont pas tous au courant comment que ça fonctionne dans le secteur de la faune, c'est que les tables nationales de la faune et les tables régionales existent depuis 13 ans; c'était le mode de consultation que chacun des ministres précédents se sont donné pour consulter les gens qui représentaient les gens du milieu, et ça a donné... Ça a bien fonctionné. Et, en ce sens-là, c'est maintenant, même... ça a été officialisé dans la loi par M. Béchard, et on a été très heureux lorsqu'il avait posé ce geste-là, et puis on voit que ça veut aller dans la même continuité. C'est ce qu'on s'est donné, nous autres, comme secteur à l'intérieur de notre ministère, de pouvoir travailler de cette façon-là. Puis, si on continue, on va vers ça. Vous avez notre grande collaboration de notre organisation.

n(17 h 20)n

Mme Normandeau: Peut-être vous préciser que le directeur régional de la section faune du ministère siège aux tables régionales de la faune, hein? C'est ça? Je ne me trompe pas en disant ça?

M. Cossette (Alain): Il siège, c'est ce qu'on entend dire, oui, mais on ne connaît pas les compositions de chacune des tables. Et d'ailleurs dernièrement, à la dernière table faune nationale, on a demandé au ministère de nous dresser un portrait pour qu'on voie vraiment la réalité de chacune de ces tables-là, et le ministère s'est engagé à aller faire ça.

Mme Normandeau: Merci. Est-ce que j'ai une autre question? Oui. Oui, oui, ma question sur les... le statut particulier pour les réserves fauniques. Vous ne pouvez pas...

Le Président (M. Huot): M. Cossette.

M. Cossette (Alain): O.K.

Le Président (M. Huot): Allez-y.

M. Cossette (Alain): Merci. Oui, au niveau des réserves fauniques, c'est que, dans le cadre des réserves fauniques, on a des grandes préoccupations. Il a déjà existé une époque où est-ce que le gouvernement voulait abolir ces réserves-là, et notre fédération s'était battue pour le maintien de ces réserves-là. Et aujourd'hui ça a été pris en main, par la suite, par la SEPAQ, la Société des établissements de plein air du Québec, et on peut vous dire une chose, c'est que ces réserves-là ont pris l'envol, et elles sont importantes pour les régions.

Et puis, pour nous autres, comme organisation, c'est un bien collectif, et le réseau, c'est la composition qui en fait sa force, c'est l'ensemble des réserves. Et puis, pour nous autres, les réserves, on a besoin qu'elles aient un statut particulier. Parce qu'il n'y a pas de statut particulier qui sont attachés à ces réserves-là, et c'est pour ça qu'on essaie... on a travaillé sur des groupes pour que les réserves puissent avoir un statut particulier.

Je vais vous donner un exemple. Dans différentes réserves, exemple dans les Laurentides, ils doivent manoeuvrer avec plusieurs unités d'aménagement, et ce qui fait que ça fait... c'est dur d'avoir une cohésion globale d'une réserve, parce que c'est l'ensemble de cette réserve-là qui est sa force. Et c'est bon, à ce moment-là, qu'il y ait... quand des gestes sont posés, qu'on en voie les répercutions, puis c'est plus facile de travailler un peu plus grand à amener certains aménagements que de travailler spécifiquement dans des unités qui sont un peu plus petites.

Puis, l'autre point qui arrive là-dessus... puis c'est au niveau de la façon que la sylviculture est faite. On a eu des grandes peurs et des grandes craintes, qui étaient fondées. On prend l'exemple où est-ce qu'il y a des plantations qui étaient faites dans des réserves telles qu'à Matane et à Rimouski, et ça a été confirmé par des spécialistes, là, qui... M. Louis Bélanger, et, suite aux interventions qui ont été faites, on a senti qu'il y a eu une volonté gouvernementale de regarder ça puis d'améliorer la façon que ces cultures-là pourraient être faites dans le futur, pour... afin que ça puisse bénéficier au niveau de la biodiversité et de la faune.

Puis il faut se souvenir que, pour les chasseurs, quand on parle de Matane, c'est la réserve cathédrale, c'est le symbole, là, au niveau de l'orignal, c'est la place. Présentement, on a une surpopulation, mais, si on continuait avec la sylviculture de la façon qu'elle était faite, en monoculture dans des endroits, et la façon aussi que ça a été fait, il y avait de l'arrachement des sols, de la façon que ça a été... il y a des photos dans les rapports de M. Bélanger qui prouvent cela, si on continuait vers cela, on se ramasserait avec des problèmes à long terme... à moyen terme, même. Et c'est pour ça que c'est important que les réserves aient un statut et puis qu'elles puissent être aménagées dans le sens d'amener un bon équilibre faunique et forestier. Puis, on l'a vu dans des différents endroits, que c'est... la coupe forestière est bénéfique, là, et, comme pour l'orignal, c'est ça qui a amené nos cheptels d'orignaux à avoir... que l'on a aujourd'hui, mais il faut le faire d'une façon qui va maintenir ces apports-là.

Le Président (M. Huot): Mme la ministre.

Mme Normandeau: ...commentaire là-dessus, je vais prendre connaissance assurément, là, du rapport de M. Bélanger, mais je ne suis pas sûre qu'on partage votre... votre appréhension par rapport aux dangers du cheptel d'orignal sur la réserve Matane, à partir de l'argumentaire que vous formulez. Mais, ceci étant, on pourra... on aura certainement l'occasion de s'en reparler.

Mais je reviens à la question, parce qu'il y a des zecs, des pourvoiries, des territoires libres et des réserves fauniques: Pourquoi un statut particulier uniquement pour les réserves fauniques?

M. Cossette (Alain): Bien, il n'y en a pas uniquement pour les réserves fauniques.

Mme Normandeau: O.K. Vous dites...

M. Cossette (Alain): Dans notre allocution, on mentionne aussi les autres territoires structurés. Mais, au départ, il faut bien comprendre que c'était déjà plus facile de débuter avec les réserves fauniques, parce que les réserves fauniques étaient... sont déjà en place depuis longtemps, les gens pensent qu'elles ont un statut particulier, et on avait déjà une modalité qui pouvait s'appliquer là, parce que le gouvernement a déjà une bonne main mise là-dessus, et ça s'étendait par la suite aux autres. Et là les territoires structurés ont voulu, eux autres aussi, embarquer, et c'est de là que, nous autres aussi, on est d'accord avec ça, d'avoir ces statuts-là pour les territoires tels que les zecs et les pourvoiries à droits exclusifs, et ça...

Le Président (M. Huot): Merci. Merci, je reconnais maintenant le député de René-Lévesque. M. le député, la parole est à vous.

M. Dufour: Oui. Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bienvenue à cette commission parlementaire. Merci beaucoup pour votre mémoire, pour ce que vous apportez comme éclairage. Et je regarde à la fin du document, bien vous avez pris bien soin de faire la nomenclature de certains ajouts à des clauses du projet de loi, bref vous avez fait un très beau travail.

Dans le préambule de votre... pas le préambule, dans la Valeur économique des activités liées, vous savez, on a rencontré les pourvoyeurs ce matin, on a rencontré les trappeurs, on pensait que, bon, la passation du savoir, est-ce qui avait moins de monde qui allait en forêt... Mais, vous, de la manière que je vois ça, c'est qu'il y a plus de monde depuis quelques années; vous le voyez, 1 130 000 Québécois achètent un permis de pêche, 470 000 personnes achètent un permis de chasse. Vous dites que la pêche a gagné une popularité depuis cette époque. Au niveau des permis de chasse, ça a augmenté de 10 %. Bref, ce que je veux vous demander, c'est que, moi, je proviens de la Côte-Nord, sur la Côte-Nord, là, il n'y a pas une cour où il n'y a pas un camion 4x4, plus communément appelé pickup, puis, dans le pickup, il y a un quatre-roues 4x4, il y a un skidoo, bref, au niveau des retombées économiques, ça a une valeur, tout ça. Est-ce que vous avez un estimé des retombées économiques par rapport à la chasse et la pêche?

Le Président (M. Huot): M. Cossette.

M. Cossette (Alain): Au niveau des estimés économiques, non, nous ne l'avons pas, parce que ça coûte trop cher, faire ces genres d'estimés là. Par contre, au niveau économique, c'est facile de pouvoir visualiser. Si on prend, exemple, la région de Mme la ministre, la Gaspésie, enlevez les orignaux, enlevez les saumons, au niveau économique, ça va grincer des dents. C'est une réalité. Ça permet une stabilité au niveau de l'économie qu'il peut y avoir dans ces régions-là. Et, au niveau des activités de prélèvement, soit la chasse, la pêche, c'est sûr qu'il y a une montée. On le voit, nous autres, dans les formations que l'on donne. Il y a eu plusieurs choses, il y a eu beaucoup de modifications réglementaires qui ont été faites en partenariat avec le gouvernement, qui avec... quand on les cumule un avec l'autre, ça a permis aux gens de pouvoir bénéficier et d'aider les gens à venir faire ces activités-là. On a fait de la promotion aussi; c'est rendu in de pratiquer ces activités-là. On a fait une grande campagne de promotion sur les activités de prélèvement, et puis il n'y a personne qui a sorti négativement. Puis ça a été mis principalement... On a sectorisé les grandes zones urbaines, Montréal et Québec, et puis ça a même été pris dans différents médias non conventionnels.

Et, quand on regarde aussi au niveau des adeptes, les utilisateurs, on est dans une belle période, parce qu'il y a du gibier, il y a de la ressource, mais il faut s'assurer qu'on puisse maintenir ces ressources-là, et de qualité, et, pour ça, c'est important de travailler, et c'est pour ça qu'on mentionnait... On parle de travailler en région avec les gens des régions, et puis, pour nous autres, c'est important.

Mais c'est important aussi qu'il y ait des grandes balises nationales. Puis, quand on parle des balises nationales, le plus bel exemple qu'on peut donner, c'est notre organisation. On est une organisation qui est très régionalisée, mais le conseil d'administration est composé de chacune des régions, puis, quand les régions prennent une décision, bien elle est discutée avec les autres membres des autres régions, et ce qui fait qu'ils amènent... et on se donne des balises. C'est le même principe qu'on le voit dans l'application, dans le cadre de l'application de cette loi-là. C'est pour ça que, pour nous autres, c'était important qu'il y ait quelqu'un qui soit nommé pour faire fonctionner pour faire fonctionner ces tables-là, des professionnels du gouvernement.

Le Président (M. Huot): M. le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Oui. Merci, M. le Président. Alors, la fédération compte aujourd'hui plus de 200 associations, regroupant 150 000 membres. Vous y allez par région administrative ou... Dites-moi donc le fonctionnement un petit peu, là.

M. Latraverse (Pierre): Donc, chaque région administrative a différentes associations. Il y a des associations qui sont plus militantes que d'autres. Je vous donne un exemple. L'association de Rouyn-Noranda a au-dessus de 2 500 membres; il y a des régions administratives où les associations sont plus petites. Je vais prendre l'exemple de Sainte-Anne-de-Sorel, ils ont peut-être juste 150 membres, mais ils réalisent des travaux très importants dans tout l'ensemble de l'archipel du lac Saint-Pierre. Il y a des régions où il y a moins d'associations membres, mais qui sont toujours très importantes. Je pense, entre autres, à la Côte-Nord. La Côte-Nord, il y a huit associations, mais ces huit associations-là représentent un territoire qui est très grand, et elles sont très actives et elles sont écoutées. Et, lorsqu'on a des décisions à prendre qui concernent à la fois la Côte-Nord ou la Montérégie, ce n'est pas parce qu'il y a 25 associations en Montérégie que, le gars, il a 25 droits de vote, il a un droit de vote.

Et, nous autres, on est très, très démocratiques pour les régions administratives; on a une région administrative, un vote, et c'est l'ensemble du conseil d'administration qui prend les décisions, et, quand une décision touche plus de trois régions administratives, ça devient un enjeu national. Et ça, on a ça dans nos statuts et règlements de la Fédération. Et, de cette façon-là, on trouve à regrouper tout l'ensemble du territoire québécois pour avoir un portrait juste. Et, lorsqu'on va à la table faune nationale ou encore aux tables faune régionales, on a des portraits et on représente l'ensemble du territoire québécois. Et chaque président, chaque président qui vient au conseil d'administration est élu par les associations qui sont membres de la régionale. Donc, chaque président qui siège est un représentant élu, comme, moi, je suis le représentant élu par l'ensemble de tous les membres de la fédération.

n(17 h 30)n

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant la députée de Matapédia. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, il ne faut pas oublier que vous représentez une multitude de personnes dans toutes les régions du Québec, pêcheurs, chasseurs devant l'éternel. Et il y en a en titi en Gaspésie, dans le Bas-Saint-Laurent, dans mon comté de Matapédia. Et je peux vous dire qu'à chaque fois qu'on modifie les conditions au niveau de la chasse, même de la pêche, mais surtout de la chasse... L'an passé, pendant la campagne électorale, il y avait des grandes discussions, et ça remplissait les salles. Les gens voient à leur affaire puis ils sont très intéressés, ils préparent leur chasse longtemps d'avance.

Cette semaine, je pense que les collègues vont être d'accord, on a reçu un organisme qui était extrêmement intéressant à écouter, et c'est par rapport à Génome Québec, Arborea Génome Québec, le Réseau ligniculture Québec, qui sont venus nous présenter leurs travaux. Et, pour moi, c'est intéressant et ça recoupe ce que vous venez de nous dire, par rapport à un objectif que vous visez, c'est-à-dire: «La sylviculture intensive ne doit pas se résumer à faire des plantations d'une essence unique d'arbres à croissance rapide dans le but d'approvisionner les usines de transformation.» Aussi: «Il faut que soit finalement reconnu que la forêt publique possède, en plus de la matière ligneuse, une multitude d'autres ressources et que toutes les ressources doivent être gérées conjointement par tous les utilisateurs.»

Et, nous, ici, autant qu'on en est, on a des entreprises, des usines, mais on a aussi des chasseurs, pêcheurs, puis tous les autres usages. Alors, comment... Et ça, cette photo-là parle par elle-même, hein, la ligniculture... Et les gens de Génome Québec, ils sont venus nous dire: En foresterie et en agriculture, la génomique sera aussi un pivot pour le progrès par le développement durable des forêts. Alors, j'aimerais ça que vous nous expliquiez ça et que vous nous disiez aussi de quelle façon ça va atterrir sur le terrain. Tant mieux, là, s'ils sont capables d'intégrer, justement, hein, leurs objectifs de développement durable. Alors, allez-y, M. Cossette, que j'ai connu quand je portais le dossier faune.

Le Président (M. Huot): M. Cossette.

M. Cossette (Alain): On a tous les genres de gouvernement depuis... Moi, ça fait 12 ans que je suis dans l'organisation, ça fait que...

Mme Doyer: Alors, je vous ai connu dans...

M. Cossette (Alain): ...on fait affaire avec tous les partis politiques.

Mme Doyer: ...puis j'étais dans l'opposition officielle d'ailleurs quand j'avais ce dossier-là, faune.

M. Cossette (Alain): Quand on parle au niveau de sylviculture intensive... Dans le nouveau régime forestier, on sent que la faune veut prendre sa place puis on sent que ça va être travaillé avec le milieu. C'est pour ça qu'on est en accord avec ça, puis ça, on tient à le souligner. Puis ce qu'on a mentionné aussi, c'est que le nom de la loi, occupation du territoire forestier, pour nous, ce n'est pas ça, mais pas ça pantoute. Pour nous, c'est important que ça s'appelle la «Loi sur la gestion durable des forêts». Pour nous, ce serait déjà un beau signal de lancé. Quand tu as une loi qui te dit ce que ça va être, puis ça annonce plus que l'occupation du territoire forestier, je pense qu'en partant de là ça donne plus.

Au niveau de la foresterie intensive, de la monoculture, on sait qu'il va y en avoir un peu, puis ça, c'est correct, quand les gens du milieu décideront des emplacements puis à quel pourcentage. Mais notre crainte: il ne faut pas que ce soit fait à la grande échelle puis qu'on prenne tous les secteurs du sud du Québec pour fournir les usines. Puis de faire de la foresterie intensive, ça peut être même positif. Si on regarde ce qui est fait à la forêt Montmorency, j'imagine que c'est dans ce sens-là, parce que je connais pas directement ces individus-là, mais, pour notre organisation, la forêt Montmorency, c'est un bel exemple de forêt intensive. Puis, quand on a eu les premières rencontres dans le cadre du nouveau régime forestier, on leur disait, nous autres, aux gens qu'on rencontrait, qu'ils devraient se servir davantage de l'exemple de la forêt Montmorency comme sylviculture intensive que de faire de la monoculture. Parce que la monoculture, là, c'est bon pour, quand vous arrivez à terme, pour vous donner du bois, mais, au niveau faunique, c'est un désert biologique. Au niveau biodiversité, là, c'est le désert, là.

Le Président (M. Huot): Oui, allez-y.

Mme Doyer: M. le Président, il y a des gens qui sont venus nous parler qu'il pourrait être intéressant de commencer ou en tout cas d'intégrer un genre de vision par bassin versant. Et, vous, vous vous intéressez aussi bien sûr à la pêche au saumon, aussi les truites, tout ça, cette faune-là. Et qu'est-ce que vous pensez de leur idée d'avoir un, comment je dirais ça... Je ne sais pas comment je l'articulerais, mais ils nous disaient: On serait-u capables de regarder la gestion, aussi, de la foresterie par bassin versant? Je ne sais pas si je m'exprime bien? Le collègue qui était là... Il y avait quand même quelque chose d'intéressant par rapport à ça, c'était... ça m'apparaissait difficile d'atterrir, parce que, justement, on a plein de découpages d'unités d'aménagement forestier ou autres, là, les régions administratives, les MRC, mais il y avait comme une logique de... Ils nous disaient: Bien, là... les poissons, puis tout ça, ils ne le savent pas, hein? Le bassin versant, la ministre... la rivière, la pointe de la rivière Kedwik est dans mon comté, mais elle s'en va chez eux. Moi, la rivière Matapédia, hein, vous le savez, le lac Matapédia, la rivière, puis elle s'en va aussi de l'autre côté, dans le comté de la ministre.

Alors, est-ce qu'il y a une logique? Vous qui êtes de la faune, là, hein, le gestionnaire, il y a-tu quelque chose d'intéressant de ce côté-là?

Le Président (M. Huot): M. Latraverse.

M. Latraverse (Pierre): Sur cette question-là, il pourrait y avoir quelque chose d'intéressant au point de vue que j'appellerais biogéographique ou encore au point de vue géomorphologique, pour l'ensemble de l'entité géomorphologique distincte qu'est un bassin versant.

Présentement, par contre, ce serait très difficile d'appliquer. Parce qu'un bassin versant représente plusieurs MRC; dans chacune des MRC, il y a des conseils régionaux des élus; dans chacun des conseils régionaux des élus, il y a des CRRNT, puis, dans chacun des CRRNT, il y a des règles administratives qui sont différentes, il y a des intervenants qui sont différents. Il n'y a pas d'homogénéité.

La question du bassin versant serait adéquate si une certaine homogénéité à travers les organismes de bassin versant pourrait exister. Présentement, au Québec, il y a des bassins versants qui ne reconnaissent même pas les utilisateurs de la faune, les associations de chasse et de pêche ou les associations de chasseurs, comme faisant partie des intervenants. Il y a des bassins versants qui ne veulent que des gens qui sont peinturés vert, vert, vert, qui ne font aucun prélèvement faunique.

Par contre, ils veulent que ces gens-là travaillent pour la restauration des bassins versants. Et, là-dessus, nous autres, on va travailler sur la restauration des bassins versants, on va travailler sur la mise en place de la frayère, on va travailler sur l'amélioration des qualités de la biodiversité. Et, à la première occasion, on se fait exclure. Il n'y a plus de pêche à cet endroit-là, il n'y a plus de place.

Là-dessus, l'idée est bonne... dans un avenir politique où il y aura réellement une concertation ou des directives nationales sur la structure des organismes de bassin versant, sur la structure des CRRNT et aussi sur les façons d'intervenir. Là-dessus, présentement, il y a trop de disparités pour que le gouvernement dans son ensemble puisse aller dans cette directive-là.

Et, là-dessus, pour la sylviculture, pour compléter ce que M. Cossette disait, j'ai envie de vous lancer pratiquement... pas une boutade, mais un exemple. On veut pratiquer de la sylviculture intensive dans certaines régions du Québec; tout à fait d'accord. Mais, dans certains territoires privés, dans certaines MRC, on dit qu'il faut préserver la biodiversité en plantant sur les territoires privés différentes espèces d'arbres. Donc, ce qui est bon pour le territoire privé, pour planter différentes espèces d'arbres, n'est peut-être pas bon pour le territoire public, parce que, sur le territoire public, on veut planter certaines monocultures d'arbres qui poussent très vite. Donc, il faudrait regarder, avoir une certaine politique cohérente entre ce qui se passe sur la forêt publique versus ce qui se passe sur la forêt privée.

Le Président (M. Huot): M. Cossette, vous vouliez compléter?

M. Cossette (Alain): Oui, je voulais compléter. Par contre, il y a un niveau... ce que M. Latraverse mentionnait, c'est qu'on a une position, à la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs, au niveau des bassins versants, pour la gestion du saumon, au niveau... à ces niveaux-là. Le bassin versant est très important, parce que les petites rivières qui viennent alimenter, c'est une ressource qui est précaire, et donc, pour nous autres, au niveau des rivières à saumon, c'est très important que la gestion soit faite par bassin versant, puis on a une position en ce sens-là dans notre organisation.

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue. M. le député, la parole est à vous.

n(17 h 40)n

M. Bernard: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Latraverse, M Cossette, M. Baril. Je vais revenir sur... poursuivre sur vos propos un peu, sur les commissions régionales des ressources naturelles. Le 29 et le 30 août dernier, en Abitibi-Témiscamingue, il y avait un colloque sur la faune qui a été organisé par la conférence régionale des élus. Et naturellement la table régionale de la faune était là, les tables régionales de la région, les gens du MRN, le tourisme et autres, etc. Puis ma compréhension, puis, moi, ce que j'ai vu à cet égard-là, c'est que le MRN faisait son rôle et expliquait, puis, moi, ce que j'ai cru comprendre, c'est qu'actuellement le MRN, avec la table régionale de la faune, c'est eux qui travaillaient en collaboration pour tout ce qui était, entre autres, les plans de gestion d'espèces, les plans de rétablissement d'espèces, etc., O.K., puis il y avait la troisième, donc qui étaient très intimement liés pour tout ce qui était la gestion de la faune, entre autres, pour s'assurer qu'il n'y ait pas de surexploitation au niveau de la pêche, dans des lacs, fermer des territoires au niveau de la chasse et de la pêche. Donc, ils étaient très impliqués à cet égard-là.

Et ce que j'ai cru comprendre, c'est que quand même, à l'intérieur de ce fonctionnement-là, c'est que le ministère avait l'expertise et qu'ils travaillaient en commun, c'est-à-dire les biologistes, dans les différents types d'espèces fauniques, etc.

Donc, la ministre, elle vient de dire, elle vous a rassurés en disant que vous auriez votre place sur les tables GIR, les tables de gestion intégrée des ressources. Ma compréhension, moi, je me disais, c'est que normalement, étant donné la structure, maintenant, du ministère, qui a un directeur régional unifié et que le directeur de la faune fait partie de toute la structure, le directeur de la faune serait en partie votre représentant et le représentant du ministère au niveau de la commission régionale des ressources naturelles et du territoire. Ces gens-là, étant donné qu'ils travaillent ? moi, en région, en tout cas, en Abitibi-Témiscamingue ? qu'ils travaillent très intimement avec les tables régionales, je pense que votre voix et les voix des représentants de la faune pourraient être bien transmises par les représentants du ministère avec lesquels les tables régionales collaborent.

Est-ce que vous pensez que ces gens-là peuvent faire le travail pour vraiment s'assurer que les commissions régionales sont capables de défendre vos intérêts?

Le Président (M. Huot): M. Latraverse.

M. Bernard: Est-ce que c'est clair ce que j'ai...

M. Latraverse (Pierre): J'ai assisté à ce colloque. Je me suis déplacé et j'ai assisté, à Rouyn-Noranda, à tout l'ensemble de ce colloque, et j'ai très bien apprécié. Ce que je dois dire, c'est que, dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue, les tables faune régionales sont un exemple. Ces tables faune régionales là, elles sont en place depuis longtemps, c'est une des premières régions qui a mis en place la notion de table faune, c'est une des premières régions où est-ce que les groupes autochtones ont participé de façon adéquate à ces tables faune là, et ils sont un modèle de l'ensemble de la province de Québec. Sauf que, nous, on doit parler au niveau de l'ensemble de la province de Québec, et ce n'est pas parce que ça marche très, très bien en Abitibi-Témiscamingue que ça marche bien partout. Donc, il faut être capables de faire la part des choses là-dessus.

Puis l'autre point, je pense qu'il est important que ce soit... qu'il y ait au moins, sur les CRRNT, une personne qui vient du milieu faunique, qui vienne de la table faune. Ce n'est pas nécessairement juste le directeur régional de la faune de telle région administrative qui doit siéger sur ces tables-là; il est bon que ce soit un représentant qui transmette les doléances du public, parce que souvent il y a des contraintes entre les différents représentants des tables faune.

Les tables faune, là, je vous donne des exemples, là, je m'excuse si j'y vais directement avec des exemples: en Montérégie, entre l'Union des producteurs agricoles et les chasseurs de chevreuil, des fois ce n'est pas le bonheur total, là. Il y a déjà beaucoup de confrontations. Donc, à ce moment-là, il faut être capables d'avoir un consensus de la table faune régionale, qu'il y ait un représentant qui aille expliquer de façon adéquate les contraintes, les orientations de la table faune régionale. Là-dessus, nous, on est tout à fait prêts à participer, mais il ne faudrait pas que ce soit simplement un représentant du ministère, le directeur régional faune, qui aille s'asseoir à cette table-là.

Le Président (M. Huot): M. Cossette, vous vouliez compléter?

M. Cossette (Alain): Oui, je voulais compléter en mentionnant qu'il est important que les processus doivent être indépendants des personnes. Ça, pour nous autres, c'est assez clair à ce niveau-là. Et ce qu'on avait proposé pour les CRRNT, c'étaient deux personnes: une qui représenterait les territoires structurés et une qui représenterait les clientèles. C'est ce qui avait été... c'est ce qu'on avait demandé à ces niveaux-là dans nos demandes.

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de Montmagny-L'Islet. M. le député, la parole est à vous pour un peu plus de deux minutes.

M. Morin: Oui. Je vais faire... habituellement, je fais ça assez vite. Merci, M. le Président. Ce qui m'amène à poser ces questions, c'est mon côté pratico-pratique. J'aimerais que vous élaboriez sur les amendements à l'article 71, 132.5 et 224. 71...

Le Président (M. Huot): Ce sera M. Cossette? M. Latraverse?

M. Cossette (Alain): Si on prend l'article 71, c'est que, nous autres, ce qu'on disait, c'est qu'on ne veut pas créer des... Dernièrement, si vous avez remarqué, le gouvernement s'est doté, au niveau du secteur faunique... des agents de protection peuvent donner des constats d'infraction portatifs. Dans ces constats d'infraction portatifs là, qui est une excellente chose, mais il ne faut pas en créer des surplus. C'est pour ça qu'on parlait de volume au niveau du bois de chauffage, pour que la personne qui puisse ramasser une certaine quantité de bois pourrait le ramasser sans créer des gens en infraction. Parce que c'est ce qui se produit présentement, là, dans la réalité, là. Vous avez du merisier qui est laissé à côté du bord du chemin, quelqu'un arrive, s'en prend une corde puis il s'en va. C'est pour ça qu'on parlait ici, là, nous autres, dans ce qu'on avait écrit, c'est: remplacer le point 1° par «la récolte de bois de chauffage à des fins domestiques, pour plus de quatre cordes de 16 pouces, ou commerciales;».

M. Morin: Comment contrôler ça?

M. Cossette (Alain): Hein?

M. Morin: De quelle façon qu'on contrôle ça?

M. Cossette (Alain): Bien., c'est... O.K. Au niveau contrôle, il y a déjà en place des personnes qui s'occupent d'émettre des infractions, et ça veut dire que, si jamais il y a quelqu'un qui est intercepté, et puis qu'on voit qu'il arrive là avec un trailer plein, lui, il est en problème. Mais quelqu'un qui ramasse une corde puis qui s'en va avec... C'est dans ce sens-là, là. On ne veut pas créer des gens en infraction, là. tu sais. C'était le but de la modification à l'article 71.

M. Morin: Mais 132, 5°?

Le Président (M. Huot): En 20 secondes, s'il vous plaît. Il y a le consentement de l'opposition pour prendre le temps de répondre...

M. Cossette (Alain): Oui. Parce que... Il faut juste le lire. Ah! O.K. Nous autres, c'est qu'on disait que la désignation, c'était au niveau de... La demande de l'association comprend les éléments suivants... dans la constitution et organisation au niveau des agences régionales, puis on disait que la désignation de la personne qui occupera le poste de président du conseil d'administration de l'agence... Pour nos autres, on voudrait que ce soit mis en fonction des capacités de la personne et non nécessairement que la personne soit d'un parti ou d'un autre, qu'elle soit apolitisée, autrement dit, que ce ne soit pas nécessairement quelqu'un du milieu... c'est ça, que la personne soit mise en place en fonction de ses capacités à elle, qu'elle soit choisie par les gens. C'est dans ce sens-là que ça a été...

Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de René-Lévesque. M. le député, la parole est à vous.

M. Dufour: Merci, M. le Président. Est-ce que je me trompe en vous disant que vous êtes beaucoup moins inquiets au moment où on se parle, suite à l'ouverture de la ministre en ce qui a trait au fait que vous soyez intégrés aux tables de gestion des ressources, mais bien entendu... je parle par rapport à la régionalisation, mais que les grandes orientations nationales soient prises, et que ce soit clair, qu'elles soient prises par le ministère? Est-ce que je me trompe, que vous êtes moins inquiets au moment où se parle?

Le Président (M. Huot): M. Latraverse.

M. Latraverse (Pierre): Oui. Nous sommes moins inquiets, avec les engagements que la ministre a pris, et il est tout de même très important, et nous insistons, que les balises soient les mêmes pour tout le monde, pour l'ensemble du Québec, que les balises nationales soient claires et précises, pour ne pas qu'il y ait trop de jeux de coulisses qui pourraient être néfastes pour la forêt québécoise.

Le Président (M. Huot): Oui, allez-y.

M. Dufour: En page 9 de votre document, article 4.5, vous parlez de la voirie forestière, qu'on a communément appelée les chemins de pénétration, pour ne pas qu'on se fasse prendre en porte-à-faux par les Américains versus la crise du bois d'oeuvre, et tout, et vous dites que c'est vrai que les chemins appartiennent à tout le monde. Il y a du monde qui s'en servent, les villégiateurs justement, même quand les coupes sont finies, on s'en sert. Il y en a qui les... je dirais, qui en font des améliorations. Mais vous dites en dernier: «Par ailleurs, des frais sont assumés par les utilisateurs de services des territoires structurés.» Ça veut dire quoi, ça?

Je vous donne un exemple, là, O.K.? Un chemin, chez nous, où est-ce qu'il y a une industrie qui n'ira pas dans ses coupes de bois cet hiver, mais il y a du monde qui se sont construits des chalets tout le long de la route, mais ce ne sera pas ouvert cet hiver, là. Donc, il manque un joueur sur la patinoire, ça vient dans le bureau du député: On peut-u avoir l'aide gouvernementale? Voyez-vous le genre de problème qu'on a, là, avec ça? Alors, vous voulez dire quoi par rapport à: «Par ailleurs, des frais sont assumés par les utilisateurs de services sur des territoires structurés»?

n(17 h 50)n

M. Latraverse (Pierre): Dans des territoires structurés comme des zecs, il y a des frais pour l'utilisation des chemins forestiers, et les zones d'exploitation contrôlée entretiennent leurs chemins, et c'est ce que nous voulons dire. Et, dans d'autres territoires structurés, exemple dans les réserves fauniques, lorsque vous allez dans une réserve faunique, vous avez un droit d'accès, le droit d'accès à la réserve comprend aussi l'entretien des chemins de la réserve. Mais, dans les territoires libres, il n'y a pas de frais donnés à l'utilisateur du chemin en tant que tel, là, c'est juste dans les territoires structurés qu'on demande des frais d'utilisation des chemins publics qui existent présentement. Mais il reste que ces chemins-là, après plusieurs années, appartiennent, disons, tout le temps à l'ensemble des Québécois, mais leur... ? comment je pourrais dire? ? leur entretien... Les chemins de la zec, exemple, la zec Lavigne, appartiennent à la zec Lavigne, et ainsi de suite pour chacune des zecs du Québec.

Le Président (M. Huot): Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Oui. Merci, M. le Président. À la page 10 de votre mémoire, en 4.6, le deuxième paragraphe, vous nous faites part de craintes par rapport au prélèvement de la biomasse forestière. J'aimerais ça que vous m'expliquiez, parce qu'actuellement il y a quand même des travaux forestiers qui se font, il y a une stratégie reliée à la biomasse forestière qui a été annoncée. J'étais là, dans ma région, dans le Témiscouata, lorsque la ministre l'a fait, l'a annoncée pour notre région. Alors, pourquoi vous dites: «Les sols forestiers sont fragiles ? ça, c'est sûr ? et devront être pris en compte dans toute mesure sylvicole»? Alors: «Si toute la matière ligneuse est soutirée de certaines portions de la forêt, les conséquences seront néfastes et en bout de ligne peu profitables pour l'ensemble des utilisateurs.» Expliquez-nous, parce que, moi, des fois, en commission, j'aime ça, être pédagogique, parce que ceux-là qui vont écouter ça, même parmi vos membres chasseurs, pêcheurs, ce ne sont pas tous des spécialistes de biodiversité, de vision intégrée de la gestion de la forêt. Alors, c'est quoi, vos craintes?

Le Président (M. Huot): M. Latraverse.

Mme Doyer: Puis pourquoi... Juste avant, il n'y a rien dans le projet de loi qui peut vous rassurer par rapport à ça?

M. Latraverse (Pierre): Nos craintes sont que, si on enlève toute la biomasse... On a besoin... Le sol forestier a besoin d'apport biologique, que ce soit la décomposition des feuilles, que ce soit la décomposition des arbres morts. Dans la décomposition des arbres morts, il y a beaucoup de biodiversité qui vit. Donc, on a besoin qu'il y ait un peu un matériel résiduel qui reste là pour continuer à engraisser le sol, entre parenthèses. Parce que présentement, dans la forêt laurentienne, si on prend l'exemple en arrière de Québec, les sols sont des sols qui sont très acides, c'est des sols qui datent des anciennes moraines des dernières glaciations, et le couvert arable, il est très mince. Donc, à ce moment-là, si on enlève toute la végétation, si on enlève toute la biomasse, les autres arbres qui vont arriver pour se mettre en terre vont avoir beaucoup de difficultés à prendre racine, puisque la couche d'humus n'existera pas. Il faut qu'il y ait de la matière qui se décompose pour que les racines, les plantes soient capables de pousser de façon adéquate. C'est pour ça que, dans certaines régions, si on enlève toute la biomasse, la repousse sera très, très difficile, et on risque d'y perdre beaucoup au niveau de la biodiversité.

Le Président (M. Huot): M. Cossette, vous vouliez compléter? Je vous informe qu'il reste un peu moins d'une minute.

M. Cossette (Alain): Parfait. C'est juste pour mentionner qu'au niveau de la biodiversité, d'avoir des grands chicots où est-ce qu'il y a des insectes différents qui sont là, et aussi il y a des animaux qui vont se reproduire à l'intérieur des creux de ces arbres-là, c'est important. Et on a même failli perdre des espèces telles que les canards branchus, à l'époque, avant que les gens commencent à mettre des cabanes à branchus, pour vous visualiser ce que je vous mentionnais.

Et, pour terminer la... j'aimerais rappeler pour... Oui, on est rassurés, mais un bon signal serait le changement de nom pour appeler ça la loi sur la gestion durable des forêts. Pour nous autres, ce serait très important.

Mme Normandeau: La loi sur la gestion durable des forêts.

M. Latraverse (Pierre): Hein, vous allez voir, ça... C'est un bon signal, il me semble, qui est lancé dans le milieu. Et puis, au niveau de rassurer, on a quelques petits articles où est-ce qu'on parlait... au lieu de «favoriser l'approche écosystémique», on a rajouté «assurer l'approche écosystémique». Ça fait que c'est des petits aménagements qu'on a mis dans les articles, qui viennent renforcer ces aspects-là. On parle... Oui, merci. C'est beau.

Le Président (M. Huot): Merci, merci beaucoup. Vous pourrez poursuivre peut-être la discussion en dehors de cette commission. Donc, M. Pierre Latraverse, M. Alain Cossette, M. Michel Baril, de la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs, merci de votre contribution au travaux de cette commission.

La commission ajourne ses travaux jusqu'au 22 septembre, à 10 heures, où elle poursuivra ce mandat. Merci à tous.

(Fin de la séance à 17 h 55)


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