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Version finale

39th Legislature, 1st Session
(January 13, 2009 au February 22, 2011)

Thursday, March 26, 2009 - Vol. 41 N° 4

Consultations particulières sur le projet de loi n° 6 - Loi instituant le fonds de soutien aux proches aidants des aînés


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Table des matières

Auditions (suite)

Intervenants

 
M. Geoffrey Kelley, président
Mme Johanne Gonthier, présidente suppléante
Mme Marguerite Blais
Mme Danielle St-Amand
M. Germain Chevarie
Mme Lisette Lapointe
M. René Gauvreau
Mme Danielle Doyer
M. Gerry Sklavounos
M. Amir Khadir
* Mme Nicole Poirier, Carpe Diem
* M. Bérard Riverin, Baluchon Alzheimer
* Mme Guylaine Martin, idem
* M. Rémi W. Bouchard, idem
* M. Sandro Di Cori, FQSA
* M. Richard Robinson, idem
* Mme Marthe Vaillancourt, AQDR
* Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Dix heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Kelley): Alors, je constate quorum des membres de la Commission des affaires sociales.

Donc, je déclare la séance ouverte, en rappelant le mandat de la commission: l'objet de cette séance est de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 6, Loi instituant le fonds de soutien aux proches aidants des aînés.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Doyer (Matapédia) remplace Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve) et M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière) remplace M. Caire (La Peltrie).

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. On a deux témoins cet avant-midi: le premier, c'est Carpe Diem, représenté par Mme Nicole Poirier; après ça, Baluchon Alzheimer.

Auditions (suite)

Alors, sans plus tarder, on va céder la parole à Mme Nicole Poirier, de Carpe Diem. Vous avez un droit de parole d'une dizaine de minutes suivi par un échange avec les membres de la commission. Mme Poirier.

Carpe Diem

Mme Poirier (Nicole): Parfait. Merci beaucoup. Bonjour, tout le monde. Merci infiniment de l'opportunité que vous nous donnez de venir échanger avec vous sur nos expériences des 20 dernières années.

Moi, quand j'ai commencé à m'impliquer auprès des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, ça fait bientôt 25 ans, on ne parlait même pas d'Alzheimer; on parlait de démence, d'artériosclérose. Le mot «Alzheimer» était très peu connu. Aujourd'hui, oui, tout le monde connaît le mot «Alzheimer», tout le monde sait que c'est une problématique, un enjeu social et enjeu de santé publique important. Mais encore aujourd'hui on remarque qu'il y a encore de la méconnaissance quant à la nature de la maladie, ce que vit la personne et ce que vivent aussi les proches. Et cette méconnaissance-là de la maladie a des impacts sur l'organisation des services, sur l'organisation des soins. Et le projet de loi actuel, en tout cas on l'espère, va permettre, lorsqu'il sera en action, d'améliorer cette connaissance-là sur la maladie et sur les enjeux et les besoins des personnes qui en prennent soin ou qui les accompagnent.

Alors, moi, je représente la Société Alzheimer de la Mauricie, qui est l'organisme communautaire qui est basé à Trois-Rivières mais qui oeuvre un peu partout dans la région 04, la région de la Mauricie. Cet organisme-là a mis sur pied, il y a 10 ans, la Maison Carpe Diem, qui est une maison qui accueille des gens qui souffrent de la maladie d'Alzheimer. Et cette maison-là a été mise sur pied un peu contre vents et marées, parce qu'on nous disait que c'était irréaliste, c'était de la délinquance que d'accueillir des gens qui souffrent d'Alzheimer dans une vraie maison, dans un lieu où il y a un vrai poêle, une vraie cuisine, des escaliers, puis où les sorties sont contrôlées mais ne donnent pas l'impression à la personne d'être emprisonnée, et on nous disait: Ça ne marchera pas.

Alors, on s'est dit: On va le faire quand même, mais, pour que vraiment ça fonctionne, il va falloir qu'on s'associe aux familles, puis qu'on se colle à leurs besoins, et qu'on se colle à leurs attentes. C'est le seul moyen pour que ce projet-là puisse fonctionner. Donc, ça fait déjà près de 14 ans que la Maison Carpe Diem a vu le jour, et à ses services d'hébergement ? alors, je vous en parlerai un petit peu plus tard, au niveau de l'approche qu'on a développée ? mais à ses services d'hébergement s'est ajoutée une série de services de maintien à domicile, parce qu'on s'est rendu compte que souvent les gens venaient par résignation en hébergement et non pas parce qu'ils étaient prêts, et, s'ils avaient eu de l'aide pour rester dans leur maison, ils y seraient restés beaucoup plus longtemps.

Alors, on a développé une série de... une gamme assez complète d'aide à domicile, de répit, d'accompagnement dans les maisons, de répit aussi à la Maison Carpe Diem, qui permet aux gens de retourner vivre chez eux, de venir faire des courts séjours ou bien, s'ils préfèrent rester dans leur maison, on va dans leur maison. Et, bon, cette gamme de services là est assez populaire, tellement populaire que finalement le gouvernement nous a reconnus, quelques années plus tard, pour nos services d'hébergement mais aussi pour tous les services qu'on offre à domicile. Alors, l'approche qu'on a développée est aussi une référence au Québec mais à l'extérieur, en Europe, où on s'intéresse à la fois à l'approche d'hébergement qu'aux services, aux ponts qu'on crée sur le maintien à domicile.

Alors, souvent, on nous dit: Qu'est-ce qu'elle a, cette approche-là, qu'est-ce qu'elle a de spécial? Bien, je vous dirais, c'est à la fois simple et complexe. C'est simple parce que simplement on se colle aux besoins des gens. On demande aux familles, et c'est ce qu'on leur a demandé dès le départ, on a dit: Dites-nous ce que vous avez besoin, allez-y, rêvez. On fera ensuite la part avec la réalité puis on va essayer de vous suivre dans vos besoins. Alors, elles nous l'ont dit, ce qu'elles avaient besoin, et on se colle à ces besoins-là. Je vous en parlerai un petit peu plus tard, de la collecte de besoins qu'on a faite déjà il y a 15 ans puis ces besoins-là qui se confirment encore aujourd'hui. Donc, elle est simple aussi parce qu'elle est humaine, parce qu'elle est basée sur l'empathie, c'est-à-dire on n'impose pas nos besoins mais on apprend ce que la personne a besoin et on essaie d'y répondre. Et elle est simple parce qu'on se rapproche le plus possible de la vraie vie, parce que ces gens-là sont atteints d'une maladie grave, mais ils veulent continuer à vivre. Ils ne veulent pas être enfermés, ils sont encore capables de plein de choses, et cette approche-là vise à leur permettre de continuer à le faire.

Et elle est complexe aussi, et très complexe, et c'est là que ça commence à être... bien, être intéressant, ça l'est aussi dans le terme qu'elle est simple, mais c'est complexe dans le sens que ça exige un changement de regard. Il faut changer nos façons de voir la maladie d'Alzheimer et l'accompagnement. Il faut changer nos attitudes et nos pratiques; elle est complexe parce qu'elle est viable à la seule condition qu'elle respecte certains principes. Ces principes-là, je vais vous les proposer plus tard, puis je pense qu'ils pourraient peut-être inspirer le fond... le projet de loi que vous êtes en train d'analyser.

Elle est simple parce que... elle est complexe parce qu'il n'y a pas de recette préfabriquée. On s'est dit: On n'imposera pas des services, on n'imposera pas des recettes, on ne présumera de rien, mais on va accueillir les besoins des gens. Donc, pas de recette préfabriquée, pas d'offre de services préconçue qu'on impose à la famille puis qu'on dit: Fittez là-dedans, c'est ça qu'on vous offre, parce que la toute-puissance du soignant professionnel, on considère que c'est une illusion, qu'on ne peut rien faire sans les familles, sans leur contribution, sans leur partenariat. Elle est complexe aussi parce qu'elle exige que tout le monde s'implique, à la fois le monde de la santé mais le monde social. Tous les niveaux de l'organisation doivent s'impliquer, que ce soient les gestionnaires, ou les accompagnateurs, ou effectivement les familles. Et puis complexe aussi parce qu'elle se construit à chaque jour d'expériences, de difficultés, de succès, et que chaque jour nous amène à découvrir de nouvelles choses.

n (10 h 40) n

Alors, cette approche-là a inspiré tous nos services de maintien à domicile aussi. Et ce qui fait que, depuis la dernière année, si je vous dis, juste la dernière année, on a doublé les services qu'on offre à domicile. On l'a doublé parce que les familles choisissent, parmi l'ensemble des services qu'on offre, ce qui leur convient le mieux. Et elle a doublé aussi parce qu'elle est continue sur 52 semaines. Chaque semaine compte 168 heures par semaine. Alors, ce n'est pas des... Il faut que la famille soit capable d'avoir un soutien. On ne dit pas qu'on offre le 168 heures, mais on considère que les huit heures, 12 heures ou les périodes que les personnes peuvent venir à Carpe Diem, à la Maison Carpe Diem, et retourner chez eux, bien oui, c'est une forme d'aide, mais il y a encore beaucoup à offrir, et on va vous faire des propositions là-dessus.

Et bien, effectivement, actuellement, bien on est aussi un milieu de stage: on reçoit des professionnels de la santé, des professionnels du milieu social qui viennent s'imprégner de l'approche vivre avec les gens. Parce que la particularité, c'est qu'on vit avec eux, on est dans leur maison, on est... donc qu'ils soient à domicile ou à Carpe Diem. Ils ne sont pas dans notre milieu de travail à se soumettre à des règles précises. Et on est tout un milieu de stage pour l'Europe et l'extérieur. Juste à titre d'exemple, il y a la Belgique, la France, la Nouvelle-Calédonie qui sont venus faire des stages, la Suisse, qui reste en moyenne 30 à 40 jours par stage.

Alors, quels sont les besoins? Les besoins, bien comme je vous disais, on a réuni des familles, on leur a demandé ce qu'elles avaient besoin, puis on s'est rendu compte que... on peut penser, parce que c'est une maladie, que ça exige des soins, des médecins, des infirmières. Oui, c'est des gens qui vieillissent, qui ont aussi des maladies qui sont associées, le diabète, l'hypertension, oui, ils ont besoin, mais ce n'est pas que du soin.

Alors, une de nos phrases-chocs, c'est: Nous ne soignons pas des malades. Nous accompagnons des personnes, avant tout. Et ce n'est pas la prédominance du soignant mais bien une relation d'équipe qu'on développe avec à la fois le milieu de la santé, mais aussi le monde, l'aspect social.

Donc, quand on a demandé aux familles quels étaient leurs besoins, bien, on s'est rendu compte que 80 %, 85 % des besoins, c'était d'ordre relationnel. Ils veulent continuer à vivre, ils ne veulent pas être traités comme des malades. Ils veulent avoir une maison qui n'a pas l'air d'un hôpital. Ils veulent qu'on aille à domicile puis qu'on s'intègre tranquillement, qu'on n'arrive pas avec nos gros sabots finalement à domicile puis leur dire quoi faire. Donc, pour les familles, on leur demandait: Qu'est-ce que votre parent nous dirait s'il pouvait nous parler puis nous le dire? Bien, ils disaient, par exemple, là, être accepté, être respecté quels que soient les niveaux de difficulté, pas être obligé de rentrer dans un moule, rester en contact avec la nature, la communauté, continuer à être utile aussi et avoir de la stabilité dans l'accompagnement qu'on fait pour eux.

Pour les proches, elles, les familles disaient: Nous, on veut du répit à des heures variées. On ne veut pas être obligées d'aller manger avec nos amis toujours sur l'heure du midi parce que l'offre de service est de jour. On aimerait ça des fois que ce soit le soir, la fin de semaine. On aimerait ça parfois avoir du répit la nuit mais continuer le jour. Et c'est toutes des idées qu'on n'aurait pas eues si on ne leur avait pas demandé finalement de s'exprimer.

Et on s'est rendu compte que les familles ont besoin de services dont l'intensité et la fréquence varient. Ce n'est pas toutes les familles qui ont besoin de répit, par exemple une semaine ou deux semaines, puis qui veulent s'en aller prendre des vacances à l'extérieur. Ils peuvent avoir envie de prendre des vacances chez eux, chez elles, faire des rénovations, profiter de leur maison alors que leur proche est dans un endroit où ils sont en sécurité. C'est sûr que, si on demande à la personne de partir puis de s'en aller dans un centre hospitalier ou dans un CHSLD du jour au lendemain, il ne voudra pas y aller. Mais on va vous proposer de créer des lieux où est-ce que les gens vont partir de chez eux pour donner du répit aux proches, mais un endroit où ils vont se sentir accueillis, chaleureux, et où ils vont pouvoir s'adapter progressivement.

Donc et on nous disait l'importance de continuer de s'impliquer, de continuer d'être informés sur l'état et avoir l'heure juste sur l'état de leurs proches, que ce qu'ils expriment, c'est important, que ce n'est pas des caprices, qu'on tient compte de leurs suggestions. Bref, toutes sortes... Je vous en ai écrit quelques exemples que vous pourrez prendre connaissance, mais ce qu'il faut retenir, c'est que l'ensemble de ces besoins, de ces attentes et de ces demandes ne sont pas considérées comme des privilèges, des caprices ou des attentes irréalistes mais qu'elles sont réelles, il faut en tenir compte.

Alors, tout ça nous amène à des principes, parce qu'on s'est dit: Bon, projet de loi, c'est nouveau, c'est innovateur, il faudrait peut-être que ce soit inspiré de certains principes. Donc, les principes qu'on vous suggère, ce sont ceux ...

Le Président (M. Kelley): Faire les principes, mais en guise de conclusion, parce qu'on déjà 11 minutes. Alors, si vous pouvez aller à l'essentiel du reste de votre présentation. C'est tellement intéressant, je ne veux pas être le gros méchant...

Mme Poirier (Nicole): Je comprends.

Le Président (M. Kelley): ...mais je dois limiter le temps pour permettre les députés de poser des questions.

Mme Poirier (Nicole): Parfait. Alors, je vous suggère de me poser la question tout à l'heure: Quels sont les principes...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Kelley): Excellent.

Mme Poirier (Nicole): Merci. Donc, quelques propositions par rapport au fonds. D'abord, on vous propose de créer une alternative aux services institutionnalisés déjà existants, qui ont une mission et qui sont intéressants. Mais il faudrait, par ce fonds-là, créer, innover, et que ces services-là soient le prolongement de la vie familiale et non pas un avant-goût d'une institution. Concrètement, créer des lieux ouverts, physiquement, qui ont l'air de vraies maisons où les gens pourront, tout en restant à domicile, venir sept jours sur sept, avoir un encadrement souple où ils vont pouvoir rencontrer d'autres familles, aller chercher de l'information, de la formation, où du personnel va pouvoir aussi venir se former et s'informer. Donc, créer des lieux... je vous expliquerai tout à l'heure de quelle façon on pourrait les créer.

J'ai parlé au début du manque de connaissances sur la maladie. Donc, que ce fonds-là permette que toutes les régions du Québec aient accès à des conférences, des formations, qu'on aille, qu'on s'associe avec les organismes qui existent déjà, qui sont probablement venus ici aussi, et qu'on s'associe à eux pour changer ce regard-là invalidant qu'on pose sur les gens qui sont atteints d'Alzheimer et qu'on voit qu'il y a beaucoup de choses qui peuvent être faites et que cette impuissance-là, elle n'est pas tout à fait réelle.

Par conséquent, on vous suggère aussi, parce qu'il y a des recherches... J'imagine que vous allez être sollicité pour des recherches. Moi, je vous dirais que ça fait 25 ans que je demande à des familles de participer à des recherches en leur disant: On va mieux connaître vos besoins; c'est important d'y participer. Maintenant, je vous dirais que l'ère des recherches, là, ça devrait passer à l'ère de l'action, que les familles aient enfin le retour du balancier. Ça fait 20 ans qu'ils contribuent à des recherches; là, c'est le temps qu'on passe... qu'on leur donne des services concrets et que, s'il y a des recherches à faire, ça pourrait être des recherches sur les projets qui vont être issus de ce fonds-là pour qu'on apprenne, puis qu'on les documente, puis qu'on aille plus loin après 10 ans.

Alors, s'il y a des recherches, que ce soient des recherches-actions qui donnent quelque chose aux familles et non pas qui servent à... faire des doctorats. Bon. Ensuite, je vous dirais aussi, il y a peut-être une autre proposition parce que, quand on a parlé de maintien à domicile il y a quelques années, on a dit: Il y a des médicaments qui s'en viennent pour traiter les symptômes de la maladie d'Alzheimer. On a soutenu les familles pour qu'elles soient... qu'elles aient accès au remboursement des médicaments qui sont actuellement sur le marché. On a dit aux familles: Ça va permettre de rester plus longtemps à domicile. On a dit au gouvernement aussi: Vous allez étirer le maintien à domicile, comme ça, vous allez sauver de l'argent.

Aujourd'hui, on en est où? Moi, j'ai vécu l'avant-médicament puis j'ai vécu l'après. J'aimerais ça que, s'il y a des recherches, on regarde à un moment donné: Est-ce que ça a de l'impact, ces médicaments-là? Est-ce que vraiment les effets recherchés, les effets potentiels recherchés ou espérés sont assez importants si on considère aussi tous les effets secondaires et négatifs de ces médicaments-là ainsi que les coûts pour la société? Je pense qu'une recherche indépendante, là, pas une recherche faite par les labos, mais une recherche indépendante qui va venir évaluer les effets de ces médicaments-là, ce serait peut-être important aussi si on tient absolument à faire des recherches.

Donc, dernier point, la gestion du fonds. On espère bien que, s'il faut innover, s'il faut amener des nouvelles pratiques, que l'administration de ce fonds-là soit aussi innovante. Vous pouvez décider d'injecter tout ça dans le réseau de la santé, ça va passer par les régies régionales, ça va aller dans les CSSS, puis on va juste faire plus que ce qu'on fait maintenant déjà. Mais on peut choisir aussi d'innover puis de considérer la personne comme pas juste une personne malade mais une personne qui a encore des droits puis des besoins de vivre et innover aussi dans la gestion.

Alors, je vous remercie beaucoup de m'avoir donné ces quelques minutes pour vous présenter notre proposition.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, madame, je ne voulais pas vous... mais c'est juste, je dois respecter le temps pour s'assurer que tout le monde peut parler, mais c'était tellement intéressant. Sans plus tarder, on va faire les deux blocs. Je vais commencer avec Mme la ministre. La parole est à vous, Mme la ministre.

n (10 h 50) n

Mme Blais: Merci, M. le Président. Mme Poirier, vous êtes une femme de passion, vous aussi. Je vous ai vue lors de la consultation publique sur les conditions de vie des aînés. Je sais que vous avez porté Carpe Diem au bout de vos bras pendant toutes ces années.

Mme Poirier, hier, il y a le Dr Réjean Hébert qui était parmi nous et qui a utilisé le terme «hérésie», en allusion avec la mise sur pied du fonds de soutien aux proches aidants, parce que les projets seraient plutôt issus des communautés, donc des projets de société plutôt que des projets de la santé. Donc, les proches aidants qui seraient soutenus par la communauté.

Et, si on regarde la définition d'hérésie, là, au sens figuratif, dans le Larousse, c'est: Idée, théorie, pratiques qui heurtent les opinions qui sont considérées comme justes et raisonnables. Entre autres, si on mange notre saumon et qu'on l'accompagne d'un verre de vin rouge, ce serait une hérésie.

Or, vous, Mme Poirier, quand vous avez parti Carpe Diem il y a une couple d'années, vous aviez une culture d'approche très différente, parce que vous accompagniez des personnes avant tout et non pas des personnes malades. Est-ce que votre projet était novateur ou si c'était une hérésie?

Mme Poirier (Nicole): Bien, on a eu toutes sortes de qualificatifs: délinquant, hérésie ou un peu déconnecté de la réalité. On a eu toutes sortes de commentaires à ce niveau-là. Mais on se rend compte, puis c'est souvent comme ça malheureusement dans bien des sociétés, quand on essaie d'innover, de changer des pratiques, on appelle ça de la délinquance, on appelle ça de l'hérésie. Puis, quand ça marche, on appelle ça de l'innovation. Bien là, on est peut-être dans la période qui précède l'innovation. Puis je pense que j'aurais le goût de dire: Mais pourquoi ça ne s'est pas fait avant? Ça, ce serait peut-être une hérésie. Pourquoi on considère tant les gens comme des malades qu'il faut soigner puis qu'il faut absolument passer à travers? Puis regardez juste la philosophie de soins...

Et ça, je pense que c'est extraordinaire de pouvoir un petit peu amener l'accompagnement dans un domaine plus social. C'est que le domaine de la santé, on est tous formés pour voir les pertes, pour voir ce que la personne ne fait plus, pour voir sa maladie; alors, tout découle ensuite d'une relation de soins et de contrôle. Moi, je pense que, bien, c'est normal qu'il y ait de la résistance, parce que le pouvoir a toujours été au niveau des soins. Mais, même dans les maisons d'hébergement, on tend... Dans les centres d'hébergement, on veut faire des virages milieu de vie, parce qu'on se rend compte que le soin, c'est important mais ce n'est pas tout, et il y a beaucoup de résistance aussi.

Alors, oui, mais je suis assez fier d'avoir été à l'origine d'un projet qualifié d'hérésie, aujourd'hui.

Mme Blais: Puis vous êtes reconnue à travers le monde?

Mme Poirier (Carole): Oui.

Mme Blais: Alors, peut-être maintenant nous parler de vos principes directeurs qui pourraient guider l'élaboration justement de l'offre de services de nos aidants.

Mme Poirier (Nicole): Merci. Donc, les principes directeurs?

Le Président (M. Kelley): ...au Parlement, ça, c'est une question plantée. La parole est à vous.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Poirier (Nicole): Merci beaucoup. Mais je vais assez quand même précise. Ce sont les mêmes principes qu'on applique à Carpe Diem et qu'on suggère aussi ailleurs dans le monde, que ce soit en Belgique, en France, même aux Antilles. Il y a des principes doivent être respectés et il faut... Un n'est pas plus important que l'autre. Si un n'est pas présent, ça risque de boiter. Alors, je vous les donne.

D'abord, j'imagine, il va avoir un conseil d'administration à ce fonds, il va avoir des gens qui vont faire vivre ce fonds-là; il faut se doter d'une approche, une philosophie. Qu'est-ce qu'on veut? Est-ce qu'on veut être un milieu de soins ou on veut être un milieu de vie? Est-ce qu'on veut contrôler les gens ou est-ce qu'on veut les accompagner? C'est ça, une philosophie. C'est, est-ce qu'on veut voir les forces ou est-ce qu'on veut voir les pertes? Et ça, c'est hyperimportant. Est-ce qu'on veut être uniquement considéré comme une maladie ou on veut être aussi considéré comme une personne avant tout? Alors, se doter d'une approche. Il faut que les... Parce que c'est important parce qu'après il y a des décisions qui se prennent puis on se dit: Quel bord on va? Bien, on va aller en fonction de l'approche qu'on s'est fixée, qu'on s'est donnée.

À titre d'exemple, je vous donne l'exemple, si les décideurs pensent que les gens atteints sont fugueurs, agressifs, déments, agités pathologiques, si je vous induis ça, là, dans votre esprit, évidemment, après, là, ce que ça fait en bout de ligne, ça fait des lieux qui ont l'air d'être des prisons. On ne forme pas des accompagnateurs, on forme des gardiens de sécurité. Nos milieux de vie ont l'air de prisons qu'on décore, finalement. Alors, l'important, c'est quelle est la vision qu'on a, quelle est la philosophie qu'on a? Et ça, c'est un point de départ, il faut que tout le monde y adhère.

Le deuxième point, c'est une philosophie de gestion aussi. On voit des milieux où il y a des philosophies qui sont plaquées sur les murs mais les gestionnaires ne suivent pas. Si je veux que le personnel soit souple, il faut que je leur procure une organisation qui est souple. Si je veux qu'ils soient polyvalents, je n'irai pas les mettre dans des cases. Si je veux qu'ils soient respectueux, il faut qu'ils se sentent respectés. Donc, une philosophie de gestion qui appuie cette approche-là et qui aussi la protège.

Ensuite, des compétences. Il faut que les gens, qu'ils soient... Parce que, nous, là, dans notre domaine, la haute technologie, là, c'est le monde, ce n'est pas... c'est les gens qui sont le service. Alors, c'est de bien former notre monde et de bien les sélectionner. Souvent, on engage du monde parce qu'ils sont disponibles. Ce n'est pas un bon critère, ça, la disponibilité. On sélectionne du monde parce qu'ils ont des profils de personnalité, qu'ils ont des compétences humaines, pas uniquement des diplômes ou tant d'années d'expérience. Si vous avez 20 ans d'expérience à faire une chose puis que vous ne la faites pas tout à fait bien, bien vous allez juste continuer de la faire de la même façon. Donc, oui, l'expérience, mais pas uniquement. Donc, la qualité des ressources humaines.

Un autre critère, un autre principe important, bien, c'est tout le partenariat avec les familles. C'est de... on ne peut pas faire les choses seuls. Il faut collaborer ensemble. C'est les familles qui vont nous le dire, ce qu'ils ont de besoin: une écoute et un non-jugement de leurs besoins. Alors, on ne fait rien sans elles.

Alors, ce seraient quatre principes que je vous décris rapidement, mais qui sont quand même... Si on n'a pas la contribution des familles, c'est aussi important que d'avoir une philosophie. Puis, si on n'a pas le personnel pour faire vivre tout ça, ça ne marchera pas non plus. Alors, ce seraient les principes que... je pense, qui pourraient inspirer les réflexions futures.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Trois-Rivières.

Mme St-Amand: Merci. Mme Poirier, vous avez une expérience d'une quinzaine d'années. Nous, dans notre bureau de comté présentement, moi, je dois vous dire que pratiquement une fois par semaine on reçoit un cas d'Alzheimer, des gens qui ont besoin... soit un problème d'appartement, de logement, problème de régie de rentes. Êtes-vous capable brièvement, là, parce que je ne voudrais pas que ça prenne tout le temps, mais nous dire statistiquement, présentement, ça touche combien de gens?

Puis, moi, j'ai eu la surprise ? puis je ne la trouve pas très agréable ? de voir des gens de 48, 49, 50 ans. Est-ce que vous avez des statistiques qui nous disent: Présentement, ça touche... C'est quoi, la statistique? Et, je ne sais pas s'il y a comme un barème de 65 ans et moins, quelque chose comme ça, puis un pronostic, aussi, qui nous permettrait vraiment de voir l'impact.

Mme Poirier (Nicole): Bien, merci d'apporter le point des gens ? parce que j'en parle aussi dans le document ? qui sont atteints de la forme précoce, donc qui sont atteints en bas de l'âge de 60 ans et qui ont des besoins complètement différents d'une personne de 80, qui ont des... Et il faut qu'on y pense, à eux, parce que c'est une réalité: ils ont des adolescents à la maison, c'est tout à fait différent. Et, là-dessus, la statistique que j'ai, qui vient du Dr Judes Poirier, c'est que une personne sur sept qui souffre d'Alzheimer est âgée de moins de 65 ans. Ça, c'est la statistique par rapport aux gens qui sont atteints jeunes. Par rapport à l'ensemble du Québec, si on... il y a plusieurs statistiques. C'est, si vous prenez la maladie d'Alzheimer et autres pathologies, c'est près de 100 000 personnes qui sont touchées. Quand on prend toutes les formes de maladie d'Alzheimer...

Une voix: ...

Mme Poirier (Nicole): ...au Québec, oui. Et plus on... La prévalence augmente avec l'âge. Donc, plus on vieillit, plus on a de risques d'en être atteint. Alors, une personne sur sept est âgée de moins de 65 ans. Alors, plus vous vieillissez, plus vous arrivez dans le groupe d'âge des 65 et plus, vous passez à 10 %. Quand vous arrivez aux 75 ans et plus, ça peut monter jusqu'à 25, 30 %, et chez les octogénaires, c'est énorme, la proportion de gens qui sont atteints: on parle de près de 35 à 40 %, selon les études.

Mme St-Amand: Quand...

Mme Poirier (Nicole): Alors... et on sait que les octogénaires vont tripler d'ici 30 ans.

Mme St-Amand: Quand vous dites 10 %, c'est 10 % de la population des gens âgés?

Mme Poirier (Nicole): De 65 ans et plus. Donc, vous prenez les 65 ans et plus, il y aurait 10 % des 65 ans et plus. Mais là, vous prenez ceux des 75 ans et plus, là, vous arrivez à une proportion encore plus grande, qui est le double. Peut-être 20 à 25 %.

Mme St-Amand: O.K.

Mme Poirier (Nicole): Et quand vous prenez les 80 ans et plus, parce qu'on vit plus vieux, on va tous peut-être si on a... l'espérance de vie est rendue là, bien là, on arrive à un pourcentage qui est près de la moitié, entre 30 % et 50 %, puis les octogénaires vont tripler.

Alors, c'est sûr qu'il y a beaucoup d'autres maladies, il y a beaucoup d'autres besoins, mais, celui-là, ça fait tellement longtemps qu'il ne se fait pas grand-chose de spécifique sur la maladie d'Alzheimer, je pense qu'en touchant la maladie d'Alzheimer on touche aussi toutes les autres formes de pathologie.

Mme St-Amand: Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Chevarie: Merci, M. le Président. Mme Poirier a une excellente présentation. Je pense qu'on peut vous dire: Merci d'être là.

n (11 heures) n

Vous savez, la Santé et les Services sociaux fait face à des besoins immenses. C'est très diversifié, c'est personnalisé. Ça touche différentes dimensions: la santé physique, le domaine social, familial, communautaire. Et un seul établissement ne peut avoir réponse à toute cette panoplie de besoins là. Et je pense que Carpe Diem s'inscrit bien dans cet objectif de réseau de services intégrés.

Mais est-ce que vous pensez que le fonds de soutien aux proches aidants des aînés peut s'inscrire dans une approche de réseau de services intégrés?

Mme Poirier (Nicole): Je pense qu'il faut innover aujourd'hui. Il faut innover. On a le choix de mettre l'argent dans le réseau, puis ça va s'en aller, ça va se diluer. Puis. je peux vous dire que, pour être praticienne de terrain, on entend souvent des annonces, puis, quand ça passe à l'agence qui se prend un petit 10 %, ça passe dans le CLSC qui se prend des frais de gestion, qu'est-ce qui reste en bout de ligne? Déjà, juste au niveau de la gestion, je le questionne. Au niveau des...

Oui, effectivement, le réseau de la santé a des grands besoins. Mais est-ce qu'on veut simplement faire plus de ce qu'on fait maintenant déjà ou si on veut faire autrement? Alors là, à ce niveau-là, c'est là que je pense qu'il faudrait peut-être créer une espèce d'autonomie pour qu'on innove de ce côté-là. Et on va aider le réseau de la santé, parce qu'on va enlever de la pression sur le réseau de la santé. Ce n'est pas... et on le vit partout.

Demandez à un CSSS, c'est quoi, ses priorités? C'est soulager l'urgence, vider des lits d'hôpitaux. Bien, O.K., oui, c'en est un, grand besoin, mais est-ce que ça va servir à ça si on l'intègre, si on le dilue dans le réseau? Parce qu'un CSSS a des objectifs, a un mandat. Il va répondre à son mandat. Moi, je pense qu'il faut être capable... et là, bien, on a le choix. Dans notre société, il y a des entrepreneurs privés à but lucratif, il y a des entrepreneurs publics qui sont dans les réseaux publics puis qui font... qui créent des programmes puis qui sont dans les structures publiques, et on a besoin de ces gens-là pour innover. Puis on a des entrepreneurs sociaux qui innovent parce qu'ils trouvent des besoins dans la communauté auxquels actuellement on ne répond pas et, avec la communauté, proposent des solutions.

Nous, on dit: Oui, tout le monde est important, mais, si on choisit des entrepreneurs sociaux, entre guillemets, bien, on va leur donner la marge de manoeuvre pour développer. Et les partenariats qu'il pourra y avoir avec le réseau public, le réseau public va s'ajuster à un projet qui est à teneur plus sociale.

Moi, quand je vais dans les CHSLD faire des visites d'appréciation, je n'essaie pas de les transformer en organismes communautaires; je prends le milieu comme il est là, puis j'essaie de l'aider. Mais, si on crée des services comme on vous le propose, ouverts, communautaires, axés sur les besoins des gens, bien, les partenariats avec le réseau public, bien là, le réseau public, ils vont devoir s'ajuster. L'infirmière, elle va enlever son uniforme quand elle va rentrer, puis elle va déposer sa valise puis ses questionnaires. Elle va s'asseoir puis avoir une relation avec la personne. Et là, c'est dans ce sens-là. Moi, je dis: Il y a moyen de faire des liens, mais il va falloir donner une priorité quelque part.

M. Chevarie: Ma question n'allait pas dans le sens d'intégrer ce fonds-là évidemment au réseau de la santé et des services sociaux, mais m'assurer que le fonds puisse être un intervenant, entre guillemets, et être un partenaire dans la réponse d'une partie des besoins qui sont multiples en santé et en services sociaux, mais pas nécessairement l'intégrer.

L'autre question que j'aurais, si vous me permettez, M. le Président, c'est: Quel serait, selon vous, le critère le plus important pour que la société de gestion de ce fonds-là puisse reconnaître et autoriser des projets dans les différents milieux?

Mme Poirier (Nicole): Bien, moi, je pense qu'il faudrait qu'il y ait des projets qui répondent aux quatre principes de gestion que je vous ai mentionnés: la contribution des familles, une philosophie de gestion, la souplesse, parce que c'est ça qui répond aux besoins des gens, la compétence du personnel puis avoir une vision. Moi, je pense que ce sont ces principes-là qui devraient guider la société de gestion. Puis un autre principe au-delà de tout ça, c'est l'autonomie, l'autonomie dans la pensée, l'autonomie dans la créativité. Si on met un projet pour innover puis être créatifs, puis qu'on vient les cadrer dans des vieilles structures administratives, bureaucratiques, on va tout perdre. Bien, ça peut être ça. Mais, quand vous disiez... il y a moyen de créer des ponts. Je ne pense pas que l'idéal, c'est de faire des choses en vase clos.

Mais ce qu'on propose ici, entre autres, par exemple, dans un lieu ouvert souple, il y aurait des liens avec des équipes de psychogériatrie, par exemple, qui pourraient bénéficier de toute l'information qu'on possède dans des milieux comme on a, communautaires. Je vous donne un exemple. Nous, on suit des gens qui ont des problèmes de diabète, d'hypertension, qui n'ont pas encore un diagnostic précis. On possède l'information, une richesse d'information, il n'y a pas de pont entre nous nécessairement et l'équipe médicale, par exemple. Alors, on pourrait créer des ponts comme ça. Moi, je pense que ça peut s'intégrer parfaitement. Mais l'autonomie du fonds, pour moi, je pense que c'est une des clés du succès.

M. Chevarie: Merci.

Le Président (M. Kelley): Mme la ministre.

Mme Blais: Mme Poirier, dans votre mémoire, en page 10, vous mentionnez une petite phrase intéressante, c'est: «Les services devront s'adapter aux aidants et non l'inverse.» Je veux vous entendre là-dessus puis je veux aussi vous entendre sur le fait... Bon, on sait que vous êtes spécialiste beaucoup de l'Alzheimer, mais il y a d'autres proches aidants qui ont aussi besoin d'être accompagnés. Les outils que vous avez développés au fil des ans sont-ils aussi applicables aux autres proches aidants? Et pourriez-vous, avec toute votre expérience, soutenir la société de gestion par vos conseils pour faire en sorte que nous puissions avoir justement des outils souples qui s'adaptent aux aidants et non pas l'inverse.

Mme Poirier (Nicole): Bien, ce qu'on constate avec les années, c'est qu'effectivement c'est une approche puis c'est des principes qui s'appliquent dans tout, peu importe le type de besoin: toute personne qui perd son autonomie, qui a besoin d'aide, Alzheimer ou pas. Puis je me dis: Si on réussit avec la maladie d'Alzheimer, ça va bénéficier à toute la société parce que c'est une problématique. Ce sont des gens qui ne s'expriment pas eux-mêmes, pour lesquels c'est facile de développer des relations de contrôle, puis de pouvoir, puis de décider à leur place: Voici ce qui vous convient. C'est ce dont je parle quand je parle de la toute-puissance du soignant. Moi, je sais, puis voici ce qui est bon pour vous. Et je pense que ça peut s'appliquer partout, à tous les types de problématiques.

Même en France, on est demandés pour des sociétés d'autisme. Les gens disent: Ce que vous faites, là, ce serait bon chez les autistes. Venez nous parler de ce que vous faites. Puis je me rends compte avec étonnement que les familles disent: Bien, c'est la même chose. C'est les mêmes problèmes, les mêmes principes. En déficience intellectuelle aussi. Donc, là-dessus, je pense que ça s'applique.

Puis, pour obtenir cette souplesse-là, bien, je pense que c'est simplement d'accepter l'imprévu, d'accepter de ne pas tout contrôler puis de se dire: Amenez-nous vos besoins, on va essayer de s'y coller. Par exemple, une famille dit: Moi, je veux partir deux semaines en vacances, ou: Je veux avoir deux semaines chez moi, je veux rénover ma cuisine. Bien, ce n'est pas à moi de dire: Ce n'est pas le temps de rénover votre cuisine. C'est de dire: Vous voulez rénover votre cuisine, c'est ça qui vous fait du bien, bien, O.K., on va s'organiser pour que vous soyez en confiance puis que votre parent soit dans un lieu comme... dans un lieu chaleureux où il va pouvoir... il ne vivra pas un choc du déménagement. Vous désirez avoir du répit la nuit, parce que c'est la nuit que vous trouvez ça difficile. La nuit, la personne se lève, elle est désorientée. Ça fait partie de la maladie. Mais la dame, elle dit: Moi, je serais capable, le jour, de continuer, mais, la nuit, c'est trop difficile, je n'arrive pas à récupérer. Bien, qu'on puisse offrir du répit de nuit. Et on le fait déjà, ça. La personne, elle vient; elle arrive le soir, après souper, elle passe la soirée, elle dort, elle peut se lever trois, quatre fois. Mais, nous, la souplesse est prévue pour ça. La personne se lève, se recouche. Le matin, elle retourne à domicile. Elle s'est lavée, rasée... le monsieur retourne à la maison et peut rester encore plus longtemps à domicile par cette façon de faire qui est simplement une réponse...

On ne dit pas à la personne: Bien, là, la nuit, ça ne marche pas, là. Il faudrait qu'il ne dorme pas... il faudrait que ce soit le jour, votre besoin. Et c'est de... c'est à la fois d'accueillir les besoins puis, après ça, d'avoir la gestion, qui a un cadre assez souple pour qu'on puisse accueillir toutes ces formes de besoins là. Mais souvent on entend dire: Bien, ce n'est pas possible. Ou bien: Vous êtes irréalistes. Ou bien: C'est trop exigeant. Mais, dans ce temps-là, bien on laisse la personne avec son problème.

Je ne sais pas si j'ai répondu, mais...

Mme Blais: Oui. Je ne sais pas s'il y a quelqu'un ici, là, mais, hier, il y a Francine Ducharme qui nous a parlé aussi de genres de carrefours où on serait capables à la fois d'accueillir des proches aidants, où il y aurait de la formation, de l'information, où ce serait... dépendamment des régions évidemment, là, adaptés à chacune des régions. Alors, vous, vous proposez aussi un genre de carrefour... ce n'est peut-être pas semblable, mais, j'imagine, ça émane aussi du milieu, là.

n (11 h 10) n

Mme Poirier (Nicole): Oui, oui. C'est cohérent avec ce que Mme Ducharme a proposé. C'est que... la proposition, ce serait que, dans un premier temps, les trois premières années, on ferait trois projets pilotes différents de ce genre de carrefours là. Un dans... oui, dans un grand centre. Prenez Montréal, avec des difficultés différentes de ce qu'on retrouve à Trois-Rivières au niveau de la population ou du nombre, et tout. Donc, dans une ville comme Montréal, une ville... une grande ville, une ville moyenne, de taille moyenne où il y a d'autres réalités, puis au niveau rural aussi, il y a des grands besoins. On arrive difficilement à aller rejoindre les gens dans les milieux ruraux. Donc, on pourrait créer trois projets pilotes comme ceux-là avec les mêmes principes d'accueil, d'information, de soutien et de collaboration avec le réseau, et là peut-être documenter, faire une expérience pilote enrichie d'une recherche, peut-être une recherche-action, qui pourrait venir nous donner des informations sur comment on va faire les sept autres années du projet. Et puis je pense que ce serait bien de commencer dans trois régions différentes avec ce genre de carrefour là.

Mais que les gens n'arrivent pas avec l'impression qu'ils rentrent dans un hôpital ou qu'ils vont dans un centre d'achats, une vraie maison avec tous ces services-là ? oui, ça se rejoint beaucoup ? et à l'intérieur de laquelle c'est décloisonné au niveau des équipes.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Et je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Crémazie.

Mme Lapointe: Merci beaucoup. Merci pour votre présentation. Premièrement, j'aimerais que vous nous disiez si un genre de maison comme la vôtre, s'il y en a plusieurs, à votre sens, à travers le Québec.

Mme Poirier (Nicole): On a été la première maison à se développer sans financement, sans autorisation, ensuite c'est venu par après. Le fait finalement de ne pas avoir eu d'autorisation, ça a été une bénédiction pour nous, parce qu'on l'a fait vraiment à notre façon. On n'a pas été influencés par aucun programme, puis aucune... Ce n'était pas attaché, comme on dit.

Mme Lapointe: C'était financé comment à ce moment-là?

Mme Poirier (Nicole): On avait pris 10 ans pour ramasser 30 000 $ qu'on a pris pour louer un presbytère. On a cohabité avec le curé pendant la première année, parce qu'on n'avait pas d'argent, et là la population s'est mobilisée, les familles nous ont soutenus, et là, avec les années, on a eu une subvention de l'agence et du ministère de... de l'agence et du gouvernement pour le volet hébergement et l'accompagnement à domicile que l'on fait, mais respectueusement de l'approche qu'on a développée.

Alors, dans les autres régions, oui, il y a des maisons qui se sont créées, soit des maisons dans notre mouvement, dans les sociétés Alzheimer, qui se sont inspirées de l'approche de Carpe Diem, mais qui ont quand même signé des ententes avec le réseau public et qui font qu'ils perdent un peu de leur autonomie dans la pratique quotidienne. Certaines maisons n'ont pas le volet à domicile. Alors, oui, il y en a d'autres. Il y en a d'autres, mais qui ont l'ensemble des services qu'on a développés, non, il n'y en a pas d'autres.

Mais, même dans le réseau public, on s'inspire de ce qu'on fait quand on crée des petites unités dans les CHSLD. On va s'inspirer de Carpe Diem. Quand on engage du personnel, on s'inspire de notre processus de sélection. Ça influence de toutes sortes de façons. Puis, notre but, ce n'est pas de créer un empire de maisons Carpe Diem, c'est d'influencer le plus possible les pratiques, peu importe où elles sont.

Mme Lapointe: Est-ce que vous voyez que ce fonds... Ce nouveau fonds, dans votre esprit, est-ce que vous le voyez contribuer à mettre en place, peut-être pas nécessairement mettre en place des maisons partout à travers le Québec, mais est-ce que vous voyez que principalement les 75 % de ce fonds consacrés à la maladie d'Alzheimer reviendraient plutôt dans des projets comme le vôtre? Est-ce que c'est la vision que vous avez eue en voyant ce projet de loi?

Mme Poirier (Nicole): Non, ça n'a pas été de créer nécessairement des maisons, un nouveau style de maisons d'hébergement, c'est plutôt pour tout le volet accompagnement à domicile, soutien des familles dans leurs maisons. C'est surtout ce volet-là de notre approche qui m'a fait penser qu'il y avait un lien à faire avec le fonds.

Pour ce qui est de la création, si on s'enligne vers la création de maisons d'hébergement, on risque de tout mettre l'argent aussi dans les maisons d'hébergement. On pourrait peut-être essayer d'innover. Je pense à... Par exemple, il y a une approche qu'on n'a pas encore beaucoup développée au Québec, c'est les coopératives. On pourrait essayer avec des gens qui décident de se faire une coopérative gérée par des familles et de se donner des services qui pourraient avoir peut-être un financement pilote qui est différent. Ça, on n'a jamais expérimenté ça au Québec. Si c'est pour expérimenter des formules nouvelles, oui, mais pas pour créer un réseau parallèle ou... Ça, ce n'est pas ce que j'avais pensé.

Mme Lapointe: Non. Justement, je reviens à ce que disait la ministre tout à l'heure, parce que, bon, vous dites... vous avez dit... Mme la ministre a dit, M. le Président, que le Dr Réjean Hébert qui, je pense, est une personnalité très respectée dans tout le domaine du vieillissement, qu'il considérait ce projet de loi comme une hérésie. Je ne crois pas que ce soit ce qu'il voulait dire. Ce qu'il voulait dire, c'est que les soins et le soutien à domicile sont terriblement sous-financés et qu'il y a déjà des priorités en termes d'aide aux proches aidants et puis de soins de soutien à domicile, des priorités établies dans les régions par les CSSS et que, là, on arrivait avec quelque chose où les priorités seraient décidées par qui? En fait, on ne le sait pas. Je crois que c'est à ce point de vue là qu'il disait que c'était inquiétant.

Moi, je reviens à ce que vous avez dit. Vous avez dit que... et vous y avez un peu répondu, mais j'aimerais peut-être vous entendre davantage. Vous savez que ce fonds va être géré d'une certaine... il va avoir un conseil d'administration. Des critères, des normes, des balises vont être établis. On va faire appel, j'imagine, à des consultants externes pour dire quels devraient être les critères, les balises, les projets. Ne craignez-vous pas que ça devienne une structure très lourde, très difficile? Et n'oublions pas que ça ne partira plus des priorités définies en région ou par l'État, entre guillemets, mais que ça va partir de priorités qui vont être décidées par un conseil d'administration composé également de membres nommés par une famille qui, disons-le, est un mécène et puis que c'est extrêmement apprécié que des gens contribuent comme ça, mais la moitié du conseil d'administration représenterait un peu la philosophie de la famille et l'autre partie, cinq personnes, représenterait le gouvernement.

Alors, dans le sens de la gestion, qu'est-ce que vous pouvez... Comment voyez-vous ça au quotidien? N'avez-vous crainte que ça devienne une structure très lourde?

Mme Poirier (Nicole): Je crains que ça devienne une structure très lourde si on prend les fonds puis qu'on les envoie dans les agences, puis que c'est géré par les agences et qu'on réponde à des besoins... Effectivement, il a raison, le Dr Hébert: il y a de grands besoins, ça doit être rehaussé. Mais je trouve que l'originalité de ce fonds-là va tout se perdre si on l'envoie... Dans ce cas-là, pourquoi ce n'est pas le gouvernement qui le donne, l'argent, pour aller répondre à des besoins qui sont identifiés dans des régions?

Je pense qu'il va falloir... Un des principes de ce fonds-là devrait être de garder de la souplesse et de constamment innover, pas reproduire et copier ce qui se fait déjà. C'est un risque, et je pense que ça serait risqué de venir le diffuser comme ça dans le réseau public. Je vous dirais aussi qu'on a un projet, nous, de développement d'une autre maison pour continuer à accompagner les gens jusqu'en fin de vie, et on nous a dit: Ça ne fait pas partie des priorités régionales. On a déjà des priorités régionales, puis ça ne fait pas partie de nos priorités. Donc, il n'y aura pas de fonds pour innover parce qu'effectivement ça va toujours être les urgences et les besoins identifiés par les régions qui vont passer avant.

Moi, je pense que tout est vrai dans ce que vous dites, mais là est-ce qu'on veut créer... En France, entre autres, là, on nous dit: C'est merveilleux ce que vous faites au Québec. Wow! Vous innovez, vous êtes en avant de nous. Puis, je me tourne la langue parce que je me dis: Ce n'est pas comme ça, ce n'est pas le Québec qui innove tant que ça, là. Mais je trouve que ce fonds-là pourrait permettre justement d'innover puis de se permettre de sortir un peu des sentiers battus.

Parce que les changements de nos sociétés, là, ça part toujours de marginaux, d'hérétiques ou de gens qui sont un peu délinquants, qui font des petites expériences.

Mme Lapointe: On parle de la famille, là, probablement. Des aînés, oui.

Mme Poirier (Nicole): ...qui font exactement... Mais qui font des petits projets qui tout à coup attirent la curiosité, et là on a de l'intérêt pour ces petits projets là, puis tranquillement les petits projets deviennent des modèles. Et c'est comme ça qu'on change la société. Ce n'est pas en restant dans les sentiers battus. Alors, c'est...

Puis, pour ce qui est du fonds avec, je veux dire, les conflits peut-être de rôles ou les conflits de valeurs, bien, ça reste à voir, les principes que va se donner le conseil d'administration. À la limite, on pourrait peut-être solliciter les compagnies pharmaceutiques qui, il y a quelques années, lorsque les médicaments n'étaient pas encore approuvés par le gouvernement, avaient fait un fonds, fonds de partenariat pour les aidants. On savait bien que les aidants, c'était important de les avoir de notre côté. Quand c'était le temps de faire approuver un médicament, on a fait un fonds qui a duré trois ans. Maintenant, plus un mot. Les compagnies pharmaceutiques sont où? Elles empochent en ce moment. Mais pourquoi qu'elles ne pourraient pas embarquer là-dedans? Puis, moi, je ne leur donnerais même pas un siège au conseil d'administration.

n (11 h 20) n

Mme Lapointe: C'est une remarque très importante. On l'a notée, cette question, là, de recherche sur les effets de ces médicaments.

Quand vous dites que la France trouve que le Québec est innovateur et en avance, je pense qu'ils pensent à vous.

Mme Poirier (Nicole): Quand on leur raconte ce qu'on fait, ils répondent: Le Québec. Je me dis... je ne dis rien, mais ce n'est pas en faisant les choses comme on les fait en ce moment... En injectant dans ce qui se fait déjà, on va juste faire plus de ce qui se fait déjà, on n'innovera pas.

Mme Lapointe: Alors, on est ici justement pour essayer d'améliorer ce projet de loi. Je vous remercie beaucoup et bravo pour ce que vous faites.

Mme Poirier (Nicole): Vous aussi.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Groulx.

M. Gauvreau: Alors, bonjour, Mme Poirier. Premièrement, je veux vous dire que vous avez une délinquance que je souhaite contagieuse. Et deuxièmement vous mettez beaucoup d'emphase sur... que des principes de gestion dont vous faites mention dans votre mémoire soient maintenus, gardés et conservés.

Croyez-vous qu'il serait sage et prudent, pour en assurer la pérennité, de faire en sorte que, dans la loi ou dans le règlement applicable, le conseil d'administration soit lié par force de loi par ces principes-là de gestion afin que personne ne les oublie en cours de route?

Mme Poirier (Nicole): Bien, si ça se fait, oui, je pense que oui, il faut que ce soit écrit noir sur blanc, qu'il y ait des traces de ça, et qu'après ça, ce ne soit pas la volonté de un ou de l'autre, parce qu'on arrive tous biaisés, même si... qu'on soit la famille Chagnon, ou qu'on soit médecin, ou qu'on soit dans le social, on a tous un biais personnel déjà, quand on s'assied autour d'une table. Bien, je pense que de l'écrire, ça permettrait à tout le monde de dire: Bien, moi, si je m'implique dans ce conseil d'administration là, j'adhère à ces principes-là en partant.

M. Gauvreau: Pendant que je vous ai, si vous permettez, M. le Président, pendant que je vous ai, parce que le projet de loi, il pèche un peu par maigreur, est-ce qu'il y a d'autre chose, dans ce projet de loi, qui mériterait d'être fleuri davantage afin que l'on s'assure d'une bonne utilisation de ces fonds?

Mme Poirier (Nicole): Je ne sais pas si ça peut se mettre dans un projet de loi, mais, quand je vous parle d'autonomie, d'autonomie de pensée et d'autonomie dans la créativité, je pense qu'il va falloir qu'au niveau administratif, quand ça va se tricoter, qu'on s'assure que ça ne glisse pas vers de la technocratie ou qu'il y ait un 20 % qui parte en gestion, l'autre en frais connexes, là, mais je pense... Je ne connais pas la mécanique qui va suivre, mais je pense que, si tout le monde autour de la table est d'accord avec un principe de donner de l'autonomie à ce fonds-là pour créer puis innover...

Et ça ne veut pas dire qu'on ne veut pas de reddition de comptes, là. Souvent, on nous dit: Vous ne voulez pas rendre de comptes. Ce n'est pas ça, on veut rendre des comptes, mais c'est qu'on veut utiliser ces fonds-là d'une façon innovante.

M. Gauvreau: Je comprends de votre réponse actuelle que vous avez une certaine inquiétude par rapport au deuxième paragraphe de l'article 9, qui dit que tous les frais assurés à la gestion de fonds, engagement de personnel, etc., vont être assumés par le fonds lui-même. Donc, tout le personnel... on a parlé de carrefours, par exemple, alors il y a des carrefours, ça veut dire qu'il y a des principes de gestion, il y a de l'engagement, il y a ci, il y a ça. Est-ce que vous avez une crainte qu'effectivement, en bout de ligne, 5 %, 10 %, 15 %, 20 % du fonds puisse servir finalement à payer des dépenses de structure?

Mme Poirier (Nicole): Bien, si... ça se pourrait qu'il y ait des dépenses de structure à ce niveau-là, mais j'aime mieux qu'elles soient dépensées dans le fonds que dépensées dans des agences ou dans des CSS. Il va y en avoir, de la gestion, c'est évident, mais tant qu'à moi, si ça reste à l'intérieur du fonds, je trouve que ce n'est pas de l'argent perdu, là. Est-ce que ça...

M. Gauvreau: Bien, c'est parce que j'ai le mot «plafond».

Mme Poirier (Nicole): Plafond?

M. Gauvreau: Plafond. Habituellement, quand on veut que les choses soient gérées d'une certaine façon, on fixe un plafond en pourcentage.

Mme Poirier (Nicole): Ah, ça pourrait, ça pourrait aussi. C'est sûr qu'il y a un risque de se mettre à faire du papier puis de faire des programmes, puis de ne pas... que ça n'aboutisse pas. Peut-être que ça pourrait être une option.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Oui, merci, M. le Président. Bonjour, et je vous félicite de votre action, de votre délinquance, parce qu'effectivement c'est souvent d'aller essayer de répondre à un besoin qui crée quelque chose de nouveau, et je sais que souvent les infirmières de France, entre autres, sont venues dans ma circonscription puis ont trouvé aussi qu'on avait des façons différentes de faire les choses.

Moi, dans votre mémoire, vous nous dites, à la page 13: «Le projet de loi ne précise pas quelle instance aura la responsabilité de gérer les fonds dans les régions.» Et on voit que vous ne voulez pas que ça passe par les agences ou les CSSS, hein, mais comment vous verriez ça? Parce que, moi, mon inquiétude, hein, puis je pense que d'autres vont la partager, c'est que les services ne sont pas organisés de la même façon partout dans toutes les régions du Québec, et vous le dites vous-mêmes, que vous êtes particuliers. Il n'y en a pas beaucoup, hein? Vous dites: On parle du Québec, mais on est quasiment les seuls à agir de cette façon-là avec Carpe Diem.

Alors, comment vous voyez ça, dans le sens que, moi, je voudrais qu'il y ait une certaine équité dans l'utilisation de ce fonds-là? 150 millions sur 10 ans... 50 millions sur 10 ans, et on dit: Les 10 personnes qui vont être là... Moi, un des principes que je voudrais ajouter, c'est le principe d'équité de la distribution des fonds. Et on dit, dans le tableau qui avait été distribué et peut-être que ce serait intéressant que vous en ayez un, il y a deux leviers: l'accompagnement des communautés locales et le soutien financier. Mais on n'est pas organisés de la même façon. Comme moi, chez moi, là, ils sont souvent chez eux, mais ce n'est pas long qu'à un moment donné les personnes qui sont atteintes doivent aller en établissement, puis on a organisé les services pour être comme des milieux de vie. Si je pense à mes établissements, à mes CHSLD, moi, je pense que ce sont aussi des milieux de vie.

Comment faire un meilleur maillage aussi, puis là j'arrête ici parce que je veux que vous répondiez à ça aussi, comment faire un nouveau... Parce que les gens dans le réseau de la santé et des services sociaux essaient aussi d'être innovateurs puis d'avoir une approche plus humaniste. Chez moi, en tout cas. Puis, comment, vous, vous voyez ça? Parce que les sociétés Alzheimer ne sont pas présentes partout nécessairement aussi. Alors, comment vous voyez ça par rapport au principe d'équité qui doit nous baser pour la répartition de ces sommes-là sur le territoire du Québec?

Mme Poirier (Nicole): Ce n'est pas parce qu'on demande ou on pense que ça ne doit pas être sous la responsabilité d'une agence qu'il n'y aura pas de lien avec le réseau public. Donc, d'une part, il va falloir qu'il y en ait, des liens. Mais, comme je vous disais tout à l'heure, ce ne sera pas la... qui va avoir la responsabilité ultime? C'est là que ça va jouer.

Moi, je pense qu'on doit être partenaires. On devra créer puis créer en fonction de chaque région. Parce qu'un des principes c'est l'empathie, puis l'empathie, c'est ne pas penser que ce qui est bon pour une personne est bon pour tout le monde. Ce qui est bon pour une région n'est pas bon nécessairement pour toutes les régions. Ça fait qu'il y a des régions peut-être où les agences vont être peut-être plus partenaires que d'autres, puis il y a des régions, comme la nôtre, où il y a déjà un mouvement puis on innove beaucoup, où il y aura peut-être une collaboration qui va être différente.

Il y a quelqu'un qui m'a dit récemment: Méfiez-vous de l'homme d'un seul livre. Alors, méfiez-vous de l'approche unique, les approches mur à mur. Alors, je pense qu'il va falloir en avoir, des liens, mais ce sera le rôle de s'organiser pour que chaque région ait un lien avec son agence en fonction des besoins. Et effectivement il y a des régions où les sociétés Alzheimer ne sont pas présentes, ou sont moins actives, ou font moins le travail qu'on fait chez nous. Mais la souplesse, c'est un principe. Il faut être souples en fonction de chaque région aussi.

Mme Doyer: Merci, madame.

Le Président (M. Kelley): Il me reste de dire merci beaucoup pour venir ici partager votre expertise. J'ai beaucoup aimé les distinctions que vous avez faites entre l'innovation et la délinquance. Ça m'a fait penser à une citation de l'ancien président John Kennedy, des États-Unis qui a souvent dit que le succès a plusieurs pères, mais un échec est toujours orphelin.

Alors, sur ça, je vais suspendre nos travaux quelques instants. Et j'invite les représentants de Baluchon Alzheimer de prendre place à la table des témoins.

(Suspension de la séance à 11 h 29)

 

(Reprise à 11 h 32)

Le Président (M. Kelley): Alors, la Commission des affaires sociales va continuer. Notre deuxième témoin, ce matin, c'est Baluchon Alzheimer, représenté par M. Bérard Riverin, son président, Mme Guylaine Martin et le Dr Rémi Bouchard. Alors, la parole est à M. Riverin? C'est bien ça? Ou...

Baluchon Alzheimer

M. Riverin (Bérard): Si vous me permettez...

Le Président (M. Kelley): Oui.

M. Riverin (Bérard): ...je vais donner la parole à la seule femme du trio.

Le Président (M. Kelley): O.K. Parfait. Alors, Mme Martin, la parole est à vous.

Mme Martin (Guylaine): Merci beaucoup. Alors, Mme la ministre, bonjour. M. le Président, bonjour. Mmes, MM. les députés et membres de la commission, permettez-nous d'abord de vous remercier très sincèrement de nous avoir invités à intervenir et à donner notre opinion dans le cadre de cette consultation visant à faire adopter la Loi instituant le fonds de soutien aux proches aidants des aînés.

Nous tenons aussi à remercier et à féliciter à la fois le gouvernement du Québec et la famille de M. André Chagnon d'avoir eu la perspicacité, et la générosité, et l'audace d'aligner un autre pas dans la bonne direction, à savoir venir à la rescousse des proches aidants qui maintiennent à domicile des personnes atteintes d'incapacités significatives ou persistantes, dont entre autres la maladie d'Alzheimer.

En s'ajoutant aux 10 millions de dollars accordés spécifiquement en 2007-2008 et intégrés depuis au budget récurrent des établissements publics de santé, la création du nouveau fonds visé par le projet de loi n° 6 constitue, sans l'ombre d'un doute, une source d'espoir immense pour ces milliers de proches aidants des aînés qui, au Québec, s'investissent avec générosité, se dépassent, se découragent et souvent s'épuisent à la tâche sans avoir accès à des ressources de répit adéquates et suffisantes. Nous saluons donc avec la plus vive satisfaction et souscrivons entièrement à ce magnifique partenariat entre l'État et la famille Chagnon.

Notre intervention sera brève et nous n'avons pas l'intention d'y reprendre le vaste argumentaire de la réalité des proches aidants dont de nombreuses sources bien documentées ont fait longuement état à date, argumentaire qui a donné lieu, entre autres choses, au plan d'action gouvernemental 2005-2010 sur la nécessité des services aux aînés en perte d'autonomie. Vous nous permettrez donc de nous limiter à ce que nous connaissons le mieux, à savoir le besoin de répit-accompagnement des proches aidants de personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, vu à travers le prisme de l'expertise de notre organisation.

Quelques notes de présentation de Baluchon Alzheimer. Baluchon Alzheimer est un organisme de bienfaisance créé par Marie Gendron en 1999. Sa clientèle cible est constituée des aidants familiaux qui gardent à domicile un proche atteint de la maladie d'Alzheimer. La personne atteinte doit avoir reçu un diagnostic de cette maladie. Ses objectifs sont de permettre aux aidants de prendre du répit durant quatre à 14 jours sans avoir à transférer leurs proches dans un autre milieu. Durant toute la période de répit, c'est-à-dire durant l'absence des aidants familiaux, la baluchonneuse demeure au domicile de la personne atteinte 24 heures sur 24. Accompagner les aidants en leur proposant des modes d'intervention adaptés à leur propre situation difficile, le fait de vivre plusieurs jours seuls, 24 heures sur 24, en compagnie de la personne atteinte, permet à la baluchonneuse de créer une relation de confiance avec elle, d'observer ses comportements dans les diverses situations de la vie quotidienne, d'utiliser au besoin de nouvelles façons de faire et des stratégies adaptées, puis de noter ses capacités résiduelles. Toutes ses observations sont colligées dans le journal d'accompagnement qui est destiné aux aidants.

Offrir aux proches aidants un enseignement de diverses stratégies permettant de mieux comprendre et d'assumer leur rôle en les déculpabilisant, en limitant les risques de découragement, de détresse et d'épuisement. Supporter les missions des services de santé et services sociaux du gouvernement contribuant au maintien à domicile, le plus longtemps possible, des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Ainsi, en offrant un programme unique de soutien, répit, accompagnement et enseignement à domicile pour les aidants familiaux, Baluchon Alzheimer se situe tout à fait dans le cadre de référence des projets cliniques tels que demandés par le ministère de la Santé... et intégrer maintenant l'exercice de la mission de tous les établissements du réseau de la santé et des services sociaux. Car il s'agit d'un service de première ligne à proximité des familles, qui se déploie au domicile des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, qui s'intègre dans le programme Perte d'autonomie liée au vieillissement du ministère pour un sous-groupe particulier de la population, en offrant un service de grande qualité reconnu et complémentaire aux services déjà existants. Et enfin de donner une équipe de personnes bien formées et expérimentées.

Le service à domicile de Baluchon Alzheimer fait l'objet d'une assistance et d'un suivi rigoureux pour une direction professionnelle et accréditée. Vous pourrez trouver, en annexe A de notre document, l'appréciation des familles.

L'unicité du service. Baluchon Alzheimer offre donc un service unique de répit et d'accompagnement sur une période de quatre à 14 jours. Ce service est complémentaire aux services offerts par le réseau de la santé et des services sociaux, gardiennage de quelques heures, hébergement temporaire en institution, etc., ainsi que par les sociétés Alzheimer qui dispensent de l'information, font de la prévention de base et animent des groupes de soutien des dons familiaux. La majorité des familles qui font appel à Baluchon Alzheimer sont référées par les CSSS et les sociétés Alzheimer.

L'intervention proprement dite s'amorce par une cohabitation de 24 heures avec l'aidant et la personne atteinte que nous appelons journée de transition. Après le départ de l'aidant, la baluchonneuse fournit un encadrement 24 heures sur 24 à la personne atteinte, et ce, pour une durée variable de quatre à 14 jours. Elle rédige quotidiennement un journal d'accompagnement destiné à l'aidant. Après le séjour à domicile, la baluchonneuse complète le journal d'accompagnement, qui est envoyé à l'aidant environ 15 jours après la fin du baluchonnage. Le service est disponible 12 mois par année.

Les services de Baluchon Alzheimer sont actuellement déployés sur la majorité du territoire québécois à partir des trois antennes ou satellites: le siège social de Montréal, qui est aussi l'antenne de Montréal, l'antenne de Québec, par contre, et celle du Saguenay?Lac-Saint-Jean.

C'est à la suite d'un exercice de planification stratégique réalisé en 2007 et grâce à une première subvention récurrente de 500 000 $, accordée par le ministre de la Santé et des Services sociaux avec l'appui de la ministre des Aînés, que Baluchon Alzheimer a pu se structurer et rendre accessibles, en 2008-2009, ses services sur les territoires de 10 agences de la santé et des services sociaux. Nous avons ainsi réussi, grâce à ce financement gouvernemental qui est maintenant à hauteur de 60 % de notre financement total, à faire passer notre coût par jour, le per diem, chargé aux familles de 100 $ par jour à 15 $ par jour. Au terme des 10 années d'existence, Baluchon Alzheimer aura servi près de 450 familles par plus de 630 périodes de service, de sept à 14 jours, pour un total de plus de 3 600 jours et environ 145 000 heures de répit-accompagnement. Le financement gouvernemental lui a permis de passer de 750 jours, en 2007-2008, à plus 1 400 jours de répit en 2008-2009. Nos perspectives pour 2009-2010 sont d'offrir environ 2 300 jours à la grandeur du Québec. Vous pourrez voir nos statistiques en annexe B.

n (11 h 40) n

Depuis un an donc, le nombre de services de baluchonnage a augmenté très significativement. Nous y voyons la preuve évidente que ce service de répit aux proches aidants répond à un immense besoin de la population et rejoint les gens de tous les milieux. Toutefois, diverses constatations s'imposent. Les difficultés persistent de la part des aidants à demander de l'aide. Il y a méconnaissance de nos services, difficultés de communication et parfois résistance de la part d'établissements du réseau public de la santé. La population multiethnique et anglophone est actuellement peu desservie. Les budgets sont insuffisants pour répondre aux demandes. Il y a de la difficulté d'assurer la formation en région éloignée. Les familles souhaitent un soutien prolongé, même après un service. Les distances à parcourir pour rejoindre les aidants et les domiciles sont coûteuses. Tout le travail de présentation, préparation et soutien à distance doit être compensé par un financement adéquat, et il ne l'est pas actuellement. Plusieurs familles, dont les aidants, veulent du répit, n'ont aucun endroit où aller se reposer.

M. Riverin (Bérard): Et Baluchon Alzheimer appuie donc sans réserve l'adoption du projet... de la loi n° 6.

Parce qu'il est convenu par tous que les ressources actuelles en matière de soutien aux proches aidants sont tout à fait insuffisantes.

Parce que le fait est bien connu, les affections touchant les personnes âgées font des ravages importants chez les proches aidants. Vous pourrez questionner le Dr Bouchard longuement à ce sujet prochainement.

Parce qu'en plus d'exercer une vigilance de 24 heures sur 24, les aidants familiaux accomplissent de multiples tâches liées, entre autres, au soutien émotif de leurs proches et à l'assistance dans les activités de la vie quotidienne et domestique. Il en résulte d'énormes conséquences sur leur vie familiale et sociale ainsi que sur leur santé physique et psychologique: isolement social, tensions familiales, stress, anxiété, dépression, problèmes de sommeil et d'épuisement.

Parce que les aidants familiaux qui gardent à domicile un proche aidant... un proche, pardon, atteint de la maladie d'Alzheimer, entre autres, ont des besoins spécifiques de répit et d'accompagnement. Ils désirent être accompagnés à domicile par des intervenants compétents, de telle sorte que l'aide reçue ne représente pas pour eux un nouveau problème à régler. Ils insistent également sur l'importance d'être compris dans leur situation d'aidants par les intervenants et que des liens solides également soient tissés entre les familles et les intervenants.

Parce qu'il est nécessaire et urgent de développer de nouveaux services. La question critique étant plutôt d'examiner la façon d'offrir des services plus flexibles et plus appropriés aux besoins des familles, ce que regarde le nouveau projet de loi.

Parce que demander de l'aide est une décision difficile pour les aidants, mais combien essentielle pour eux et les aidés. Le phénomène observé en regard du recours à des services d'aide à domicile est reconnu comme un problème sérieux. Nombre d'études attestent que les aidants familiaux tardent beaucoup trop à recourir à des services d'aide ou de répit. La Société Alzheimer du Canada établit à environ 3,4 % seulement le pourcentage de ceux qui se prévalent de tels services.

Parce qu'il est impératif qu'on amène les aidants familiaux à réfléchir aux incidences liées à la demande d'aide, qu'ils fassent tomber les barrières qui les emprisonnent trop souvent dans leur solitude, qu'ils décident en connaissance de cause de faire appel malgré les émotions vives que suscite la démarche, et qu'ils puissent ainsi avoir accès aux services de soutien requis.

Parce que prendre soin de soi est une tâche importante, aussi importante que celle de prendre soin de l'autre. Demander de l'aide est une façon... est une force, pardon, non une faiblesse. Demander de l'aide, c'est se donner la chance de continuer, c'est offrir à d'autres l'occasion d'aider, c'est procurer un grand bien au malade en lui permettant d'agrandir son cercle d'amitié, en lui ménageant une halte dans la morosité des jours.

Nos recommandations. Les recommandations générales. Pour toutes ces considérations, nous recommandons à la ministre de la Famille et des Aînés qu'à partir du nouveau fonds créé par l'adoption du projet de loi n° 6:

qu'une fois la loi créant le fonds adoptée, une bonne campagne d'information soit aussitôt mise en place pour permettre et faciliter son accès le plus rapidement possible;

que soit menée en parallèle une campagne de sensibilisation pour convaincre les proches aînés que demander de l'aide est une force, non une faiblesse, afin de provoquer un changement de mentalité qui s'impose de toute urgence, tant chez les proches aidants que les intervenants sociaux, dont le premier réflexe devant le manque de ressources est souvent de proposer l'hébergement;

que les critères d'attribution du financement à partir du nouveau Fonds de soutien aux proches aidants des aînés visent l'originalité, la créativité, le développement et la complémentarité en regard des services donnés par le réseau public de santé et des services sociaux, en évitant les dédoublements;

qu'une accréditation rigoureuse soit effectuée pour tout nouvel organisme qui verra le jour pour exercer une mission dans la foulée de la création de ce nouveau fonds;

que pour favoriser la naissance, la mise en place et la stabilité administrative et opérationnelle d'un projet ou d'activités financées par le nouveau fonds, la société de gestion assure au départ une récurrence de trois à cinq ans, conditionnelle à une reddition de comptes transparente et à une analyse annuelle et rigoureuse des résultats;

que la société de gestion décentralise au maximum l'accès à ces fonds afin de susciter un intérêt et la mise en place de projets dans toutes les régions du Québec;

que, pour éviter une concurrence et une compétition improductives liées essentiellement à l'appétit pour le financement, on pose comme premier critère que le projet ou les activités soient réalisés ou bien en partenariat ou en complémentarité avec les organismes et/ou les établissements d'un même territoire s'il est local ou de plusieurs territoires s'il vient d'une clientèle plus large.

Les recommandations spécifiques pour les proches aidants de personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer:

Que les trois ministres concernés, Famille et Aînés, Santé et Services sociaux, appuient concrètement Baluchon Alzheimer afin que soit davantage facilité l'accès des proches aidants à ces services de répit-accompagnement à travers les établissements du réseau public de santé et services sociaux.

Que Baluchon Alzheimer reçoive le financement structurel approprié afin d'implanter progressivement, dans d'autres territoires stratégiques du Québec, les antennes régionales requises pour garantir une plus large promotion, un meilleur accès, une coordination des services plus efficace, tout en facilitant les interfaces et des relations plus étroites avec les proches aidants, les établissements publics du réseau et les organismes pertinents.

Qu'on ne limite pas à un seul répit-accompagnement annuel la présence des baluchonneuses, de sorte que les familles puissent jouir d'au moins 14 jours de répit par année et dans la séquence qui leur convient.

Que cela soit fait avec la collaboration des établissements partenaires et de leurs intervenants, dans le respect des besoins réels des proches aidants, en tenant compte de leur risque d'épuisement et détresse ainsi que des dangers d'hébergement plutôt que de maintien à domicile.

Que le nouveau fonds puisse permettre également à Baluchon Alzheimer de répondre tout au long de l'année aux demandes de répit-accompagnement urgent sans que les proches aidants aient à subir les aléas d'une machine administrative qui en retarde l'attribution ou à tout le moins le ralentisse.

Que des sommes spéciales puissent supporter Baluchon Alzheimer afin de former davantage et plus rapidement des baluchonneuses, compenser les coûts de déplacement de ces intervenants sur tout le grand territoire du Québec, compenser les coûts de toutes les activités en aval ? réception, écoute, préparation, inscription du dossier ? et en amont des répits-accompagnements accordés, c'est-à-dire le suivi, le soutien de continuité, la communication des stratégies d'intervention aux aidants, l'enseignement et la construction finale des journaux d'accompagnement.

Qu'on permette à Baluchon Alzheimer d'obtenir les ressources nécessaires afin de développer un projet visant à rejoindre, par ses services, les communautés anglophones et multiethniques.

Qu'on prévoie de l'aide aux proches aidants à situation financière précaire pour qu'ils puissent quitter leur domicile afin de se ressourcer pendant la période de baluchonnage de l'aidé.

Et enfin, que Baluchon Alzheimer soit mandaté et supporté financièrement afin de poursuivre les démarches entreprises dernièrement auprès du Centre d'excellence sur le vieillissement de Québec pour créer une école ou un programme de formation visant, premièrement, à augmenter le nombre d'intervenants compétents en matière de répit-accompagnement sur le territoire du Québec selon le modèle simplifié de Baluchon Alzheimer et, deuxièmement, à transmettre, un peu partout au Québec aux proches aidants, les techniques, les habiletés, les stratégies et les connaissances requises pour exercer leur rôle avec plus de compétence.

Qu'il soit permis de conclure en rappelant que Baluchon Alzheimer offre un programme unique de maintien à domicile et une réponse alternative à l'hébergement temporaire, un programme de soins moins coûteux financièrement et socialement que l'hébergement, un programme de soutien, d'accompagnement, d'enseignement et de suivi aux proches d'une personne atteinte d'Alzheimer.

Quant à l'initiative du gouvernement du Québec et de M. André Chagnon et sa famille, encore une fois, nous en sommes très heureux puisqu'elle permettra de pallier les situations très difficiles que vivent les proches aidants d'aînés au Québec.

Pour illustrer ce nouvel effort visant à répondre aux besoins des aidants d'aînés, on pourrait reprendre la phrase d'un joueur de hockey très célèbre, M. Gretzky, qui disait: «Si on veut marquer des buts, il faut patiner là où la rondelle est rendue et non pas là où elle a été.» Merci beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup.

M. Riverin (Bérard): Le Dr Bouchard, encore une fois, est ici avec nous parce que c'est un clinicien chevronné, de renommée plus que provinciale. Alors, si parfois vos interventions, vos questions sont plutôt cliniques en rapport des effets de la maladie, soit sur les patients ou sur les aidés ou sur les aidants, le Dr Bouchard, qui n'avait rien à faire du tout aujourd'hui, nous a assurés de son aide pour la durée de la présentation et la réponse aux questions. Alors, merci beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Riverin. Merci beaucoup, Dr Bouchard, pour votre présence aussi. Sans plus tarder, je vais céder la parole à Mme la ministre.

n(11 h 50)n

Mme Blais: Oui. Merci beaucoup pour votre déplacement, votre belle présentation et, vous aussi, vous avez un projet novateur qui a été mis sur pied par Marie Gendron, il y a plusieurs années. Il faut souligner le travail, parce qu'elle aussi, tout comme Mme Poirier, elle a porté son projet à bout de bras. Il y a des baluchonneuses ici... il y a une baluchonneuse dans la salle, alors je la salue. J'aime bien le terme «baluchonneuse». Je trouve que ça sonne, ça résonne. Et, durant la consultation publique sur les conditions de vie des aînés, évidemment après le plaidoyer de Marie, je suis allée voir le ministre de la Santé, je lui ai dit: Il faut que cet organisme puisse vivre. Et c'était toujours des petits 20 000 $ à droite et à gauche, et puis, bon, le résultat, c'est que vous êtes capables de vous déployer plus.

Ma première question sera pour le Dr Bouchard, puisque vous n'aviez rien à faire, vous, aujourd'hui. Vous, neurologue et à la Clinique de la mémoire et de l'unité de recherche Alzheimer à l'Hôpital de L'Enfant-Jésus, Dr Bouchard, pourquoi cibler Alzheimer? Pourquoi est-il si important, aujourd'hui, de soutenir davantage les proches aidants pas au détriment des autres, pas au détriment des autres?

Et, avant même que vous y pensiez, je voudrais aussi rassurer ma collègue députée de Matapédia, parce que, tout à l'heure, elle mentionnait son inquiétude que les projets soient couverts à l'ensemble de toutes les régions et qu'on respecte les spécificités. Je suis d'accord avec vous. Je trouve que c'est important. On est rendu là, on ne peut plus faire du mur-à-mur. Aujourd'hui, il faut respecter les besoins des territoires qui sont différents, par exemple, dans votre région ou à Montréal.

Donc, Dr Bouchard, je pense qu'il y a des grands besoins chez tous les proches aidants de toutes les maladies, et ce fonds-là doit grandir. Mais pourquoi la maladie d'Alzheimer?

M. Bouchard (Rémi W.): Si vous me permettez, dans un premier temps, je dois vous dire que je suis dans ce domaine, n'est-ce pas, depuis 40 ans. Alors, j'ai vécu à peu près toutes les étapes, n'est-ce pas, dans l'évolution de nos connaissances dans le domaine de la maladie d'Alzheimer. J'ai fait ma vie professionnelle dans ce domaine-là. Je peux vous dire que j'étais du groupe fondateur de la Société Alzheimer de Québec, par exemple, où je suis encore sur le conseil depuis que ça existe. Je suis avec Baluchon Alzheimer. Je suis impliqué tous les jours ou à peu près avec cette population.

Je peux vous dire qu'au cours des années, d'abord, on s'est rendu compte que, l'Alzheimer, c'est une de ces maladies, mais il n'y a pas que l'Alzheimer. On travaille beaucoup plus maintenant avec le terme des démences au sens large du terme et des problèmes cognitifs au sens large du terme. L'Alzheimer est une fraction importante. Jadis, on disait, n'est-ce pas, que c'était peut-être 70 %, 75 % des démences. On sait maintenant que c'est encore un nombre important, mais c'est de plus en plus des maladies qui sont mixtes, c'est-à-dire les gens qui ont des problèmes, par exemple, vasculaires au cerveau, problèmes de circulation au cerveau reliés à l'hypertension, au diabète, etc., ont souvent aussi des problèmes cognitifs, et parfois c'est mélangé avec l'Alzheimer.

La réponse à votre question: on ne cible pas uniquement l'Alzheimer, mais l'Alzheimer est une fraction importante. Et je pense qu'on devrait peut-être utiliser un terme: «l'Alzheimer et les maladies connexes». Et de plus en plus, dans notre investigation et nos traitements, on s'attaque aussi aux autres maladies qui sont connexes, qui ne sont pas nécessairement les Alzheimer. Mais ça représente quand même la maladie, vous savez, la mieux connue du public. Vous savez, les gens nous consultent pour savoir s'ils ont l'Alzheimer et, quand on leur dit qu'ils n'ont pas l'Alzheimer, parfois ils sont contents. Mais ce n'est pas nécessairement une bonne nouvelle, parce qu'ils peuvent avoir une autre sorte, n'est-ce pas, de démence qui n'est pas nécessairement mieux.

Alors, vous avez raison, il faut peut-être élargir un peu, parce qu'il n'y a pas que l'Alzheimer. Et pour ce qui est, n'est-ce pas, des soins à domicile, il est bien évident que le patient qui a eu un ACV et qui est aphasique ou qui est paralysé a besoin également de soins à domicile, de support, tout autant qu'un patient Alzheimer.

Mais le problème, Mme la ministre, des Alzheimer, c'est les aspects que j'appelle un peu comportementaux, madame, qui ajoutent énormément à la détresse des aidants. Vous savez, il y a 70 % de ces patients qui développent de l'agitation et des éléments de psychose. Et, pas plus tard qu'hier, je recevais un téléphone, parce que, je vous l'ai dit au début, je suis sur le terrain tous les jours, alors j'ai vécu les problèmes psychosociaux, familiaux depuis des décades, je suis bien placé pour vous en parler. Alors, quelqu'un m'appelle hier pour me dire, par exemple: Docteur, qu'est-ce que je fais, là, mon mari ne me reconnaît plus et il me prend pour une autre personne puis là, bien, je suis toute énervée, il pense que je suis une étrangère. Qu'est-ce que je fais, hein? Parce que ça, c'est un exemple. Voyez, ce n'est pas rare du tout.

Alors, dans l'Alzheimer plus que peut-être dans d'autres formes, vous savez, de handicap, comme par exemple une paralysie, ces gens-là ont des troubles du comportement, de la personnalité qui sont extrêmement importants sur le plan de la détresse de la personne qui s'en occupe. Vous savez, quand vous avez des éléments psychotiques à domicile, vous avez de l'incontinence puis vous avez de l'agitation ou de l'errance, c'est très difficile pour les donneurs de soins, c'est là qu'ils ont besoin d'aide, n'est-ce pas? Ces gens-là crient au secours, Mme la ministre. Et que de fois, que de fois j'ai été appelé, n'est-ce pas, pour faire le travail du psychologue, du médecin, du travailleur social, presque le conseiller financier en face de quelqu'un de la famille qui est décédé, qui s'occupait d'un Alzheimer.

Ces gens-là ont besoin d'aide à domicile, et ce qui est important, peut-être, c'est l'occasion, peut-être, de l'ajouter à ce moment-ci... Vous savez, les donneurs de soins ou les aidants naturels, ils veulent garder leurs proches à domicile, ils le veulent, et les patients aussi. Dès qu'ils sont au stade un peu modéré, les patients ont peur, n'est-ce pas, d'être mis en institution. Ils le disent ouvertement: Je ne veux pas que tu me places. Puis ils deviennent même un peu paranoïdes, ils interprètent toutes les discussions à l'effet que, entre guillemets, elle veut me placer. Les patients ne veulent pas et les familles non plus, jusqu'au moment où ça déborde. Quand arrivent, n'est-ce pas, les problèmes de comportement à domicile, qu'on vit régulièrement, les psychoses, l'incontinence, l'agitation, l'agressivité, c'est extrêmement difficile à domicile. Ces gens-là ont besoin d'aide. Par ailleurs, nous savons que ceux qui restent à domicile et qui ont les ressources, un, améliorent leur comportement, détériorent moins vite.

Pas plus tard qu'hier, Mme la ministre, j'ai eu un patient qui avait, par exemple, un pointage de 13 sur 30 à une des échelles d'évaluation, depuis qu'il était en institution. Et pour des raisons contextuelles, finalement, la famille l'a repris à domicile, et il va tellement mieux que maintenant son pointage est passé à 18, au point qu'il est venu nous voir à la clinique. On ne le reconnaissait pas, notre monsieur.

L'environnement à domicile, avec un encadrement, permet de retarder les troubles du comportement et permet ce que j'appelle, entre guillemets, d'allonger la «gardabilité» à domicile. Et si les donneurs de soins ont de l'aide, O.K., en plus, ça diminue la comorbidité des donneurs de soins. Les aînés, là, ils souffrent plus d'hypertension, Mme la ministre, ils souffrent plus de stress, ils souffrent d'insomnie, j'ai vécu des suicides et ils souffrent d'une foule de comorbidité, ils n'ont souvent pas le temps de se faire traiter eux-mêmes et ils ajoutent eux-mêmes aux soins de la santé, parce qu'ils sont plus malades. C'est pourquoi je ne peux que supporter toute forme de mesure, n'est-ce pas, qui va aider les aidants à domicile. Il n'y a que des avantages. Voilà un peu comment je vois ça, pour quelqu'un qui est sur le terrain tous les jours. Je pourrai répondre à d'autres questions médicales, s'il y en a, évidemment.

Mme Blais: Un autre passionné. Merci, docteur. Un autre passionné. Écoutez, dans votre exposé, vous parlez, entre autres, dans vos recommandations ? la troisième ? c'est que vous mentionnez que les critères d'attribution du financement, à partir du nouveau fonds de soutien, doivent viser l'originalité, la créativité, le développement et la complémentarité. On ne veut pas dédoubler. Et vous avez raison, Dr Bouchard, ces maladies d'Alzheimer et d'autres maladies apparentées, hein, il faut l'ajouter, ça.

Alors, en regard des services qui sont donnés, puis si on veut éviter les dédoublements, je veux vous entendre.

M. Riverin (Bérard): Moi ou M. Bouchard?

Mme Blais: Non, bien, vous, là, qu'est-ce que vous pensez, quel serait, là, le type de créativité, d'originalité...

n(12 heures)n

M. Riverin (Bérard): Bien, vous avez eu deux exemples avec celle qui nous a précédés, Mme Poirier, je pense. Vous avez Baluchon Alzheimer, qui a été créé grâce à l'audace et à l'hérésie, si vous me prêtez l'expression de Marie Gendron. Et Marie Gendron a osé, comme Mme Poirier a osé, et ça a donné ce qu'on a aujourd'hui. Si on considère qu'on est passé, il y a dix ans, de zéro jour de services à domicile donnés par Baluchon Alzheimer puis qu'on est rendu avec l'aide gouvernementale, entre autres, à 1 600, c'est un bout de chemin incroyable qui a été parcouru. Si on considère aussi que, si jamais le réseau continue de s'associer à nous d'une façon la plus souple et la plus efficace, puis la plus simple possible, parce que ce n'est pas le cas, on serait en mesure, probablement, de donner 2 300 jours de baluchonnage l'an prochain. Pour moi, c'est quelque chose d'extraordinaire.

Et c'est à partir de projets comme ça, qui partent légèrement, sans des grosses structures... Puis là on parle beaucoup de structures, mais les structures, ça en prend, sauf qu'il faut qu'elles soient le plus aplaties possible. Si on part de projets, d'initiatives comme ça... Je me souviens d'un premier ministre qui avait parlé d'oser; Mme Lapointe le connaît bien. Il y a un autre premier ministre qu'elle connaît très bien aussi, qui a mis en place les REA, qui ont été extraordinaires pour le Québec, la société et l'économie québécoise. Il fut un temps... Il faut absolument oser, il faut se donner des structures légères, il faut écouter l'originalité des gens qui sont des créateurs d'entreprises sociales. Il y en a qui créent, il y en a qui créent mal, comme dans toute organisation, dans tout secteur d'activité, mais il faut vraiment laisser la place à la créativité, et il faut que ce soit complémentaire.

Si ce fonds-là est pour dédoubler des services qui sont déjà donnés, bien, bon Dieu, on se trompe. Si ce fonds-là est pour susciter l'intérêt des régions à habiller, avec le costume qui fait, les gens de leur milieu, bien c'est fantastique.

M. Bouchard (Rémi W.): Vous permettez? Est-ce que je peux apporter...

Le Président (M. Kelley): Un complément de réponse, Dr Bouchard?

M. Bouchard (Rémi W.): Je vais aller un peu dans le même sens en vous disant qu'il est presque impossible, Mme la ministre, de dupliquer, parce qu'il faudrait multiplier par 10 ou par 20, n'est-ce pas, les services sociaux.

Laissez-moi vous donner un exemple qui n'est pas rare du tout. Quand un mari me dit, par exemple: Vous savez, on m'offre un bain par semaine ou deux bains par semaine pour mon épouse. Il me dit: Qu'est-ce que vous voulez que je fasse avec ça, docteur? Mon épouse, elle est incontinente, et je change les sous-vêtements, pour ne pas dire les couches, cinq fois par jour. Qu'est-ce que vous voulez que je fasse avec un ou deux bains par semaine? Et je ne veux pas qu'elle aille en institution, je veux m'en occuper, O.K.? Parce que ce monsieur-là, il a ruiné sa santé puis il a fini par partir. Ça, c'est un exemple parmi d'autres.

Alors, c'est impossible, n'est-ce pas, que les services de santé puissent donner tout ce dont ces gens-là ont besoin, c'est impossible. Alors, je ne crois pas qu'on va dupliquer. Toute forme de soins à domicile ne peut qu'être ajouté aux soins de base. Impossible de dupliquer pour moi, il y a trop de besoins.

Le Président (M. Kelley): M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Chevarie: Merci, M. le Président. Merci pour vos commentaires, et surtout bravo pour toute la réflexion et le travail effectué jusqu'à aujourd'hui auprès de cette clientèle-là.

Ce que j'ai compris, vous avez une mission à caractère presque national. Vous vous déployez dans différentes agences de santé, enfin dans les régions, bon, 18 agences. Il y a huit régions actuellement qui ne sont pas desservies, et ma région, Gaspésie?Îles-de-la-Madeleine, n'a pas la chance d'avoir votre collaboration et vos services, et particulièrement mon comté, les Îles-de-la-Madeleine.

Comment le fonds pourrait vous aider à servir les régions éloignées comme les Îles-de-la-Madeleine ou encore la Gaspésie? Et comment ce service-là peut se traduire concrètement? Comment ils peuvent s'actualiser dans une région comme les Îles, ou encore en Gaspésie, ou en Abitibi, ou peu importe, mais en région éloignée? Quel est le genre de modèle que vous pourriez préconiser?

M. Riverin (Bérard): Oui, je peux y aller. D'abord, on fonctionne actuellement, pour éviter justement la création de structures, avec trois antennes qui ont des territoires absolument immenses à couvrir: Montréal, Québec et le Saguenay?Lac-Saint-Jean? Côte-Nord. En tout cas, on les a déterminés, on essaie de couvrir le plus grand territoire possible au Québec. Avant d'avoir l'aide gouvernementale qu'on a obtenue grâce à Mme Blais et M. Couillard, on était beaucoup plus localisés.

Par le biais de ce fonds-là, on est obligés d'étendre nos activités un petit peu plus au niveau du Québec. On a manqué et de ressources humaines et de fonds pour aller plus loin. Je pense que ce fonds-là pourrait nous permettre, comme on le fait dans nos recommandations, de créer d'autres antennes, premièrement. Ce serait peut-être la première chose à faire: de créer d'autres antennes en région un petit peu plus éloignées, un petit peu plus excentriques par rapport à Montréal, Québec et le Saguenay?Lac-Saint-Jean. Puis le Saguenay?Lac-Saint-Jean, c'est historique, c'est parce que Marie Gendron vient de là. Alors, évidemment, il y a eu comme une espèce de génétique qui s'est reproduite dans ce coin-là, même si elle était de Montréal à l'époque.

L'autre affaire, c'est de permettre à Baluchon de créer son école ou son programme de formation qui permettra d'aller donner de la formation sur place pour rendre des ressources, en milieu éloigné ou en région, compétentes pour assurer le service. Et ça, je pense que c'est le projet fondamental que Baluchon peut présenter aujourd'hui. C'est que, si on permet à Baluchon de développer un programme de formation qui va pouvoir s'extensionner, se ramifier et s'étendre aux différentes régions du Québec, je pense qu'on va rendre un service incroyable à nos concitoyens des régions plus éloignées, plus lointaines.

Moi, je viens d'une région qu'on disait éloignée à l'époque, le Saguenay?Lac-Saint-Jean. Fort heureusement, on le dit moins aujourd'hui. C'est encore loin mais de moins en moins. Et je sais que les Îles-de-la-Madeleine, c'est à un petit bout d'ici. La Péninsule également; on vise, cette année, à y aller. On va faire, pour la prochaine année, l'Abitibi-Témiscamingue, on va faire Chibougamau?Chapais pour 156 jours, ce qui est incroyable, on va faire les Hautes-Laurentides, ce qui est quelque chose aussi. Donc, il faut avoir un petit peu plus de ressources.

C'est sûr que c'est, comme on le disait tout à l'heure, de la structure, mais ce n'est pas de la structure inutile. C'est de la structure qui permet de prolonger et d'assurer une génétique plus couvrante, si vous me permettez l'expression, de Baluchon Alzheimer sur le grand territoire du Québec.

M. Chevarie: Un petit commentaire rapide.

Le Président (M. Kelley): Oui.

M. Riverin (Bérard): Je pense que Mme Martin veut...

M. Chevarie: Bon. C'est sûr, que l'objectif, c'est de s'assurer que les services ou le financement ou les fonds s'attachent directement à la clientèle, mais on peut comprendre évidemment que ça prend une certaine structure et, à partir de vous. Mais ce que je voudrais vous dire, c'est que je vous... je dépose la candidature des Îles-de-la-Madeleine immédiatement.

Mme Martin (Guylaine): Si vous me permettez, M. le Président, c'est un petit peu ce que je voulais souligner. C'est qu'effectivement il y a aussi, dans certaines régions, la difficulté de pénétration du marché, entre guillemets, en ce sens où on doit travailler avec les agences. Donc, je me prépare justement à faire une tournée du Québec, et Dieu sait que le Québec est grand. Alors, je me prépare à faire une tournée du Québec où effectivement je veux aller voir les interlocuteurs, leur expliquer qui nous sommes, ce que nous offrons, quelle est la différence de Baluchon Alzheimer et pourquoi nous le faisons et pourquoi l'importance de travailler en partenariat avec le réseau.

M. Riverin (Bérard): Je voudrais compléter, si vous me permettez, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Oui, M. Riverin.

M. Riverin (Bérard): Évidemment, le fait qu'on soit maintenant partenaires du réseau public nous a obligés, selon la loi, de procéder par signature de conventions ou d'ententes avec les antennes... c'est-à-dire, pardon, avec les agences et avec les établissements, ce qui est beaucoup compliqué pour une petite organisation comme la nôtre, ce qui est même très compliqué et très complexe, et ça rallonge beaucoup aussi les processus d'attribution des services. Évidemment, idéalement, ça aurait été que Baluchon Alzheimer obtienne le 500 000 du gouvernement directement dans ses coffres. Ça aurait ajouté beaucoup de flexibilité à notre oeuvre au niveau de la grandeur du Québec. Ça a passé autrement. On en est quand même très contents parce qu'on n'aurait jamais donné ce nombre de services là.

Cependant, la flexibilité probable du fonds qui est créé va permettre d'obtenir une ressource qui va nous... qui va moins être exigeante au niveau de la signature d'ententes et au niveau de la complémentarité au niveau de la structure gouvernementale qui, en soi, est là pour exister. Elle n'est pas là pour rien, elle est là parce qu'elle supporte quand même des activités. Cependant, si on rend ça moins lourd par le biais d'un accès direct à un fonds probablement beaucoup moins structuré en termes de grosseur d'organismes et d'organisations, ça va permettre à Baluchon d'avoir accès plus facilement à des ressources puis de donner accès plus rapidement aussi, à des régions éloignées, aux services.

Le Président (M. Kelley): Dernier court commentaire, M. le député de Laurier-Dorion, il reste une couple de minutes.

M. Sklavounos: Il reste une couple de minutes? Merci, M. le Président. Juste une question très rapide. Parce qu'on a entendu d'autres personnes, des professionnels de la santé qui sont venus témoigner qu'il s'agirait d'ajouter des ressources dans le système de la santé pour corriger la situation. Ce que les gens veulent, les proches aidants, c'est de ne pas avoir à, en quelque sorte, avoir cette... cette lourdeur, d'avoir à s'en occuper de quelqu'un à la maison.

Vous, vous semblez dire que non seulement c'est mieux, dans certains cas, vous avez parlé de votre pointage, que la personne reste chez elle. J'aimerais savoir quel pourcentage des personnes qui s'occupent d'une personne qui est atteinte d'Alzheimer le font parce qu'elles veulent s'en occuper? Quel pourcentage de personnes le font parce qu'elles doivent s'en occuper? Et ce n'est pas, ce que vous avez dit plus tôt, une réplique aux personnes qui disent: Écoutez, là, les proches aidants, là, c'est la dernière chose... qu'on doit s'en occuper. Il faudrait ajouter des ressources pour que ces personnes soient à l'hôpital ou en quelque part; c'est ça qui est important. On a entendu des gens formuler ce type de commentaires, et c'est peut-être une question plus pour le docteur, je crois.

n(12 h 10)n

M. Bouchard (Rémi W.): Vous me demandez si les aidants naturels, si c'est la solution qu'ils demeurent à domicile? Est-ce que c'est bien ça que vous voulez dire?

Moi, si j'ai bien compris, les patients, je répète, et les donneurs de soins ne veulent pas envoyer leurs patients en institution. Ils ne veulent pas au départ, mais ils sont obligés à la fin parce qu'ils sont épuisés, ils sont déprimés, ils ne sont plus capables ou ils deviennent malades. C'est ça qui arrive. Et leur bien-être, pour les patients, s'ils sont à domicile, c'est prouvé que le bien-être est nettement mieux s'ils sont encadrés. C'est pour ça que je disais tout à l'heure que ce que j'appelle, entre guillemets, la gardabilité à domicile, elle est proportionnelle aux ressources disponibles à domicile.

J'ai déjà dit à des patients, moi: Vous pouvez être à domicile jusqu'à votre décès. C'est une question de ressources. Mais on sait bien que c'est impossible, n'est-ce pas? Alors ça, ça demeure vrai, j'en connais qui sont demeurés jusqu'à la mort. O.K. Mais il arrive à un moment, surtout lorsqu'il s'agit des enfants qui s'en occupent, qui souvent vont perdre leur travail, vont avoir des problèmes financiers, vont avoir des problèmes matrimoniaux eux aussi qui se développent, là, ça devient invivable. On n'a pas le choix.

Mais, quant à, si j'ai bien compris, développer des ressources plus importantes dans le service public pour compenser, comme j'ai dit tout à l'heure, c'est presque impossible. Le besoin est trop criant. Et le besoin, si vous me permettez, va être encore plus criant non pas seulement à cause de la démographie qui s'en vient, il y a un autre point bien important, c'est que jadis notre clientèle de personnes âgées ne consultait pas beaucoup, n'est-ce pas, pour des problèmes cognitifs de démence, mais les baby-boomers qui s'en viennent... je le sais, parce que ma clientèle... nous en voyons 1 000 par année à notre clinique. La clientèle rajeunit. Pourquoi? Parce que nous avons affaire à une population qui est scolarisée, qui est au courant, qui connaît la maladie. Et le nombre de patients qui vont consulter va peut-être doubler, ce qui n'était pas le cas avec la génération de nos prédécesseurs. Beaucoup de gens demeuraient, n'est-ce pas, dans leur coin, c'était caché, on n'en parlait pas. Alors, c'est bien important de savoir ça. Et ces gens-là aussi vont vouloir demeurer à domicile.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. C'est fort intéressant. Mme la députée de Crémazie.

Mme Lapointe: Merci. Merci de votre extraordinaire présentation. Et croyez bien qu'«oser», ce n'est pas sorti de notre vocabulaire ni de notre coeur. C'est vraiment formidable, ce que vous faites. Ce n'est pas assez. Vous avez raison, il faudrait que ce soit répandu, il faudrait que ce soit même plus que 14 jours dans certains cas, parce que je me mets à la place des personnes qui vivent avec une personne atteinte d'Alzheimer... D'ailleurs, il y a eu des documentaires sur ces questions. Je pense que la population est quand même assez bien sensibilisée. Et c'est vrai que ça allonge le temps puis la qualité de vie de la personne malade lorsqu'elle est bien encadrée, lorsqu'elle a du soutien à domicile. Vous avez besoin aussi, comme organisme, qu'il y ait plus de soutien à domicile en général. C'est clair. Alors, je pense qu'il va falloir qu'on regarde un petit peu tout ça.

Mais je regarde l'expérience de Carpe Diem, de Baluchon. Dans mon comté, il y a la résidence Desjardins Quenneville, qui est une résidence publique. Ça, c'est du... ce n'est pas privé, c'est public. Mais c'est exactement... c'est une maison, c'est une très belle maison face à un parc où on s'occupe des gens, là, mais comme si c'étaient des membres de la famille. Et effectivement, souvent la médecine ne comprend pas comment il se fait que ces gens-là parfois vont mieux, vont beaucoup mieux, deux ans après leur arrivée, parce qu'ils ont vraiment de très bons soins.

Alors, on a, dans les années... en 1995, lancé une idée pour les jeunes, qui s'appelait les carrefours jeunesse-emploi, qui était un modèle souple, parce qu'on parle ici, là, de souplesse, d'adaptation, de partout au Québec, d'accessible à tout le monde. Je ne sais pas comment... on a parlé de centres, on a parlé de carrefours. Je pense qu'il faut réfléchir beaucoup à tout ça. Mais il est évident, à mon sens, que vous avez besoin de continuer puis de vous multiplier. L'idée d'une école m'apparaît essentielle. Si on peut pousser sur quelque chose comme ça, ça me fera plaisir aussi de vous appuyer, comme le fait Mme Blais.

Écoutez, je n'ai pas de question en particulier. Tout ce que je sens dans votre mémoire, c'est que vraiment, dans la loi, on ait des objectifs très clairs, des objectifs très, très bien ciblés pour qu'ensuite il y ait une certaine souplesse, mais qu'on ne passe pas à côté des objectifs. Est-ce que je vous entends bien en disant ceci?

Une voix: Tout à fait.

M. Riverin (Bérard): Oui. Et, vous savez, je pense que c'est vous, Mme la députée de Crémazie, tantôt, qui posiez une question relativement à pourquoi un fonds privé par rapport à la structure gouvernementale qui est bien installée et rodée, bon. Je vais vous donner un exemple. Moi, j'ai été 20 ans dans un hôpital en région périphérique, mettons. Et, je me souviens, on avait une fondation et on avait toujours accès quand même aux budgets d'immobilisations du gouvernement, du ministère de la Santé, et tout. Et, lorsqu'on faisait une demande et lorsqu'on entamait un processus d'acquisition d'un appareil important, mettons un scan, mettons un appareil de résonance magnétique, c'était excessivement long parce que la machine administrative est très longue, et le corridor administratif est long et ardu.

Or, quand on faisait appel... puis ça prenait parfois deux ans, un an et demi, deux ans avant qu'on ait la structure ou l'infrastructure en question de même que l'équipement, alors que, quand on faisait appel à notre fondation qui était privée, gérée par des gens d'affaires, puis qui était un fonds un petit peu comme celui qu'on veut créer, beaucoup plus souple, ça prenait deux semaines ou deux réunions de conseil, puis on avait le scan qui avait coûté 1 million et quelques, puis il était installé. En même temps que ça supportait le ministère de la Santé, ça accélérait la rapidité d'accès des services aux malades de notre région.

Alors, le fonds, pour moi, il va avoir probablement toute la souplesse évidemment découlant d'une loi. Il y a toujours une série de règlements qui permet d'encadrer ça, mais le fonds va permettre toute la souplesse requise pour avoir accès rapidement, je pense, puis, ces gens-là, ça doit être du monde intelligent, je les connais un petit peu, ça va être... ça va donner un accès rapide et beaucoup plus souple à un fonds de ? je pense que c'est 20 millions par année? 10 millions? ? 20 millions par année, ce qui n'est pas beaucoup quand on considère les besoins, mais ce qui est beaucoup par rapport à hier. Et, 20 millions, si on a un accès souple, rapide et intelligent à ça, bien, maudit, la famille et... le proche aidant et l'aidé vont avoir une ressource ou des ressources incroyables rapidement.

Je pense et j'espère que le fonds va être créé rapidement puis qu'il va être opérationnel aussi rapidement. C'est ce qu'on souhaite, en tout cas, nous, de notre côté. Je suis persuadé que toutes les personnes qui ont passé ici avant nous et qui vont le faire après ont la même volonté ou ont le même objectif, le même souhait.

Mme Lapointe: Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Groulx.

M. Gauvreau: Dans un premier temps, je vais vous remercier. Je regardais les statistiques notamment pour Montréal et j'ai le malheur ou le bonheur d'avoir profité des services de votre organisme pour un de mes proches qui est dans une situation où malheureusement encore vivante physiquement mais mentalement dans un autre monde.

Vous fixez quatre critères où vous parlez d'originalité, de créativité... de créativité, de développement et de complémentarité. Lorsque, moi, je lis le projet de loi n° 6, je ne retrouve pas d'initiative, d'orientation ou autres. Compte tenu de votre expérience, qu'est-ce que vous verriez dans la loi ou dans une réglementation qui vous assurerait d'une utilisation optimale des fonds pour que ça ne disparaisse pas dans des projets qui parfois ne sont pas les meilleurs?

M. Riverin (Bérard): Moi, M. le député, je vais vous dire que, si jamais ce fonds-là ne souscrit pas aux principes de vulnérabilité des clientèles qu'il vise, d'accessibilité, de compassion, d'équité, de solidarité et de transparence, on passe à côté de l'objectif. Il faut absolument que ces valeurs-là soient intégrées au fonds et que les gens qui gèrent ce fonds-là le gèrent avec cette sensibilité-là. Donc, si le... que ce soit le projet de loi comme tel qui deviendra loi, que ce soient les règlements, que ce soit l'application des règlements, mais il va falloir absolument que ces valeurs-là soient le sang qui coule dans les veines de toute action qui va se produire sur le territoire du Québec en fonction des demandes qui seront adressées au fonds.

M. Gauvreau: Là, je comprends bien que vous seriez favorable à ce que ce soit intégré dans la loi ou dans un règlement afin de ne pas laisser aux autres le soin d'interpréter les désirs de la communauté.

M. Riverin (Bérard): Moi, je suis un bonhomme qui fait confiance à l'intelligence des gens, puis à leur coeur, puis à leur vertu. Évidemment, on a plein d'exemples américains notamment qui me disent que c'est le contraire parfois, il faut être prudent. Mais je ne sais pas si ça doit être intégré dans une loi, si ça doit être intégré dans un règlement, mais ça doit au moins être intégré dans l'esprit et ça doit être intégré dans les valeurs des gens... de la société qui va gérer ce fonds-là. Si ce n'est pas intégré là, c'est un fonds qui va être créé comme une espèce de fonds d'accès pour faire de l'argent.

Ce n'est pas ça. Il ne faut pas que ce soit ça. Il faut que les valeurs que je viens d'énoncer, puis il y en aura probablement d'autres, il y a plein de monde qui en ont, qui en ont d'autres, des valeurs qui sont aussi valables que les miennes, mais je pense que c'est absolument requis que ces valeurs-là transcendent à travers toutes les actions qui vont se produire au niveau de la société de gestion.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Matapédia.

n(12 h 20)n

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Mme Martin, M. Riverin, M. Bouchard, bienvenue. Je trouve extrêmement intéressant tout ce que j'entends au niveau de cette commission-là, et, moi, tantôt là, bien, je cogite, hein, parce qu'on parle d'équité, par exemple. Il existe des organisations sur le territoire. Dans ma circonscription, puis je pense que partout, au Québec, on a mis en place des entreprises d'économie sociale. Moi, je vois qu'avec Carpe Diem, je vois qu'avec vous qui êtes des connaisseurs dans ce domaine de problématiques pour notre population, il y aurait moyen d'avoir des choses souples et légères qui se mettraient en place à partir d'organisations qu'on a déjà.

Parce que, chez nous, Aide-Maison Vallée, par exemple, donne des services de maintien à domicile qu'on a voulus souples, qu'on a voulu... Bon. Alors, pourquoi on... Ces organisations ou entreprises d'économie sociale devraient être bonifiées, améliorées, où on aurait peut-être une personne ou deux qui sont plus connaissantes et plus spécialisées.

Puis tantôt on se préoccupait... vous allez trouver ça drôle, M. le Président, mais, moi, j'ai une population anglophone dans ma circonscription, petite mais qui est unilingue anglophone, à Métis et, pour moi, c'est une préoccupation aussi. Mais pourquoi ne pas former une personne bilingue, qui est capable de bien entrer en relation avec ces personnes-là lorsqu'elles ont une problématique d'une personne avec la maladie d'Alzheimer ou des démences? Vous dites différents types de maladie aussi qui sont connexes, maladies connexes que vous avez dit, Dr Bouchard.

Alors, moi, j'ai cette préoccupation-là de ne pas dupliquer, comme vous, de déployer correctement sur le territoire puis, comme mon collègue des Îles, vous n'êtes pas présents du tout dans le Bas-Saint-Laurent, sur la Côte-Nord, et tout, donc de continuer ce déploiement-là.

Et comment vous verriez ça, vous, dans le sens, puis ça a été la préoccupation, puis je termine là-dessus, d'utilisation maximum de cet argent-là qui est là? Puis ça fait des années, hein, qu'on réclame davantage en maintien à domicile pour différentes problématiques. Et j'arrête ici parce que je veux vous laisser répondre. Mais aussi des moyens, vous avez parlé de moyens de retarder ou d'empêcher l'hébergement. C'est la formation, c'est d'habiliter les aidants naturels puis les aidants aussi qui sont là pour aider les aidants naturels par rapport à la médication.

Puis je ne voudrais pas terminer sans poser la question. Ça m'a interrogé, ce que la dame qui est en arrière a dit sur la médication, parce qu'il y en a qui se questionnent, oui ou non, la médication et, comme on a un spécialiste sous la main, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, hein? C'est vrai, il y en a qui ont dit: Les médicaments, oui ou non?

Le Président (M. Kelley): Dr Bouchard.

M. Bouchard (Rémi W.): Je peux vous en parler beaucoup, de la médication, mais vous voulez savoir quoi sur la médication? J'ai vécu, madame, l'époque où on ne savait même pas comment ça fonctionnait, l'Alzheimer au cerveau. J'ai vécu les premières découvertes sur la chimie de l'Alzheimer. J'ai vécu les premiers essais de traitement. Nous avons eu l'occasion ici, à Québec, d'expérimenter jusqu'à maintenant 36 médicaments au cours des dernières décades. De ce nombre, il y en a quatre qui sont sur le marché et il y en a à peu près 10 qui ont bien passé proche d'aller sur le marché parce qu'ils avaient un certain bénéfice.

Alors, ce que je peux vous dire, c'est qu'il n'y a aucun doute dans mon esprit que nous avons donné des bonnes années à nos patients. Le plus bel exemple que je peux vous démontrer, c'est par une courbe, ce que ça donne, en réalité c'est à peu près ceci: au lieu d'avoir un patient qui descend comme ça, vous ajoutez deux, trois, quatre, cinq et j'ai même noté jusqu'à six ans d'une relative stabilité ou d'un déclin moindre, nettement moindre, suivi à la fin évidemment d'un déclin plus rapide. Mais vous avez gagné de nombreuses années d'un meilleur bien-être à domicile. Alors, les patients le disent, les donneurs de soins le disent.

Et, en plus, puisque vous ouvrez cette porte, nous entrons, comme vous vous en doutez bien, dans une ère nouvelle maintenant. Comme nous connaissons de plus en plus les étapes précises, sur le plan biologique, du développement de la maladie, actuellement, à l'échelle de la planète, tous les traitements actuellement visent à bloquer le mécanisme de la maladie, en plus des traitements actuels. Alors, je dirais que le futur est commencé dans ce domaine-là. Alors, c'est une ère nouvelle. Et, si on regarde, madame, ce que nous avons fait depuis maintenant 40 ans, c'est extraordinaire, le chemin que nous avons fait pour des maladies qu'on étiquetait non traitables, pour lesquelles on fait beaucoup de choses maintenant.

Mme Doyer: Peut-être juste une minute ou deux sur le déploiement des services, l'utilisation maximum de l'argent qui est là, sur la table, madame.

Mme Martin (Guylaine): Bien, écoutez, je me permettrai peut-être juste de vous... Nous sommes déjà très sensibles effectivement aux communautés multiethniques et anglophones. Vous, dans votre région, vous avez une communauté unilingue anglophone. Je vous dirais qu'à Montréal ça devient aussi très problématique, ne serait-ce qu'avec les communautés culturelles: ce sont les jeunes bien sûr qui viennent en immigration, mais ça leur permet de pouvoir faire venir ensuite leurs parents.

Et quand on se retrouve avec une dame qui est d'origine chinoise, par exemple, qui bien sûr, comme elle est atteinte de la maladie d'Alzheimer, elle a peut-être déjà français ou anglais, mais c'est sa langue maternelle qui revient maintenant. Alors, ça crée des problèmes de communication assez particuliers. Et ça, on le vit vraiment sur le terrain: Grecs, Italiens, Chinois, Espagnols, Anglais.

Donc, effectivement, on est sensibles à ça, et de là l'importance d'avoir des fonds comme ce qui s'en vient pour la formation et le transfert de connaissances.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Et, comme député de Jacques-Cartier, je souligne l'importance de... et je souligne la sensibilité envers les communautés d'expression anglaise et autres. Et surtout, comme Mme la députée de Matapédia a souligné, les communautés anglophones à l'extérieur de la région Montréal sont très âgées. Alors, je vais agir au niveau du nombre de personnes qu'on va trouver dans Cantons-de-l'Est. Dans les villes où il y avait une très grande présence anglophone dans le passé, on va trouver beaucoup de personnes âgées, donc beaucoup de personnes qui sont les clients potentiels de vos services.

Alors, sur ça, merci infiniment pour votre présentation et le partage de vos expériences, Dr Bouchard aussi pour votre expertise.

Sur ça, je vais suspendre nos travaux jusqu'après la période des affaires courantes, soit vers 15 heures. Malheureusement, on ne peut pas laisser nos affaires ici, parce que la salle va être utilisée pour une autre fin entre-temps. Alors, je suspends nos travaux jusqu'à 15 heures, plus ou moins.

(Suspension de la séance à 12 h 26)

(Reprise à 15 h 27)

La Présidente (Mme Gonthier): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre. Alors, nous reprenons les travaux de la Commission des affaires sociales. Je vous rappelle que l'objet de cette séance est de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 6, Loi instituant le fonds de soutien aux proches aidants des aînés.

Nous avons un retard de 27 minutes. Alors, je demanderais aux membres de la commission la possibilité de poursuivre nos travaux après 5 heures, si c'était possible. Est-ce qu'il y a consentement?

M. Chevarie: Oui. Si je peux me permettre, compte tenu de mon horaire de l'avion... que je dois quitter. Je prends l'avion ce soir, alors...

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, est-ce que vous êtes d'accord pour qu'on répartisse les temps de questionnement différemment? Oui. Ça va? Alors, le secrétariat va s'occuper de calculer ça, puis ils vont nous faire rapport.

Alors, déjà, je voudrais saluer les représentants de la Fédération québécoise des sociétés Alzheimer. Alors, messieurs, sans plus tarder, je vous demanderais de vous présenter. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.

Fédération québécoise des
sociétés Alzheimer (FQSA)

M. Di Cori (Sandro): Merci, Mme la Présidente. Mmes et MM. les députés, mon nom est Sandro Di Cori, directeur général à la Fédération québécoise des sociétés Alzheimer. À ma gauche, notre président, M. Richard Robinson.

Donc, pour commencer... à l'occasion du mois de janvier, qui est le Mois de la sensibilisation à la maladie d'Alzheimer, notre fédération a rapporté des statistiques inquiétantes sur la prévalence de la maladie d'Alzheimer et des maladies apparentées. À la lumière de ces statistiques-là, on voit qu'on doit se préparer immédiatement, être proactifs devant cette augmentation importante du nombre de personnes qui seront atteintes de cette maladie au cours des 25 prochaines années. Il est reconnu que les familles, les proches aidants assument environ 80 % des soins à domicile requis pour les personnes âgées. Et avec la prévalence croissante de la maladie d'Alzheimer, au cours des 25 prochaines années, il est indéniable que de plus en plus de gens vont être aux prises avec cette terrible maladie pour aider un parent malade.

n(15 h 30)n

De plus, il faut tenir compte que plus de 35 % des proches aidants dans la collectivité sont eux-mêmes âgés de plus de 70 ans. Ces chiffres sont frappants parce qu'ils démontrent à quel point les proches, les familles, l'entourage en général sont essentiels pour assurer les soins adéquats et un support constant, souvent 24 heures sur 24, à des personnes qui sont très vulnérables. Il est indéniable que les aidants naturels, les proches aidants ont besoin de soutien externe parce que le simple fait d'avoir un lien de parenté ne donne pas automatiquement la formation, les compétences et l'expertise ni les ressources nécessaires pour s'occuper d'une personne qui souffre d'une pathologie aussi sérieuse que la maladie d'Alzheimer.

Le soutien des proches aidants est justement au coeur des priorités de nos 21 sociétés Alzheimer régionales. Elles possèdent l'expertise, l'expérience, un éventail de programmes et de services reconnus et appréciés dans les communautés pour soutenir les aidants comme les personnes atteintes.

Au-delà de ce que les sociétés Alzheimer sont en mesure d'offrir, les décideurs peuvent agir aujourd'hui pour mieux équiper les familles et les organismes afin de faire face aux besoins actuels et futurs. Le gouvernement du Québec doit prendre les devants et s'assurer de faire de la maladie d'Alzheimer une priorité en matière de santé. Le projet de loi n° 6 est, à notre sens, un premier pas essentiel dans cette direction. Ils se doivent également de nous permettre de mieux nous préparer à la crise qui va toucher les générations futures, et, en ce moment, le Québec a quand même une opportunité de devenir un leader au plan de l'Alzheimer à l'échelle du Canada.

M. Robinson (Richard): Alors, vous savez tous et toutes que la maladie est caractérisée par une dégénérescence graduelle et irréversible des fonctions intellectuelles telles que la mémoire, l'orientation, le jugement, le langage, la capacité à acquérir de nouvelles connaissances et, je dirais en ajout, que personne n'en survit, personne n'en guérit.

Il est important de comprendre que chaque personne réagit différemment dans le processus évolutif de la maladie. Les symptômes et leur ampleur pourront ainsi varier selon la personnalité, le caractère, l'environnement familial et social, l'état de santé physique et psychologique. L'histoire de la personne, ses valeurs, sa culture donc sont atteintes. Chaque personne garde donc, malgré la maladie, son caractère particulier et unique.

Une autre particularité de la maladie qui fait d'elle qu'elle cause un défi plus important que d'autres maladies est sa progression. Celle-ci se fait sur une période pouvant aller de cinq à 15 ans, parfois même plus. Dans les stades les plus avancés de la maladie, les personnes atteintes perdent souvent le peu d'autonomie qui leur restait. Le fardeau dans l'accompagnement d'une personne atteinte va dans le même sens, et le proche aidant risque davantage l'épuisement et les conséquences dérivées au fur et à mesure que la maladie progresse.

Il faut également prendre en considération qu'avec le vieillissement de la personne atteinte d'autres problèmes de santé finissent souvent par se manifester, ce qui complique encore plus la tâche du proche aidant. J'ai, dans un autre... une petite phrase que j'aimerais vous citer: La maladie d'Alzheimer a des conséquences importantes et dévastatrices. Elle touche tant le patient que sa famille, de même que les fournisseurs de soins de santé, le système de santé, le milieu des affaires et la société en général. Tout ça, ça fait un petit peu boule de neige lorsqu'on touche à cette maladie parce qu'il y a de l'absence au travail, plusieurs femmes qui sont obligées de rester à la maison plutôt que... ce pourcentage-là que je parle, et ça fait en sorte que ça touche tout le monde, ça touche beaucoup de monde.

M. Di Cori (Sandro): J'aimerais vous parler un petit peu de la prévalence. Je vous parlais qu'on a publié des statistiques au mois de janvier. Justement, nos études les plus récentes nous suggèrent qu'en 2009, au Québec, c'est près de 120 000 personnes qui sont atteintes de la maladie d'Alzheimer et que, d'ici cinq ans au Québec, on pourrait compter jusqu'à 23 000 nouveaux cas. On prévoit que, d'ici 25 ans, ce chiffre pourrait passer à près de 260 000: c'est un quart de million. C'est donc dire qu'à chaque tranche de cinq ans on regarde une croissance de 20 000 à 25 000 nouveaux cas d'Alzheimer diagnostiqués. C'est énorme. Il est aussi important de savoir que, pour une personne atteinte, 10 personnes de leur entourage sont affectées. C'est un peu comme M. Robinson vous disait, pour une personne atteinte, il y a un effet sur la famille, sur le milieu de travail, sur le système de la santé; c'est un effet de domino en fait qu'on regarde.

Ce sur quoi tous s'entendent, c'est qu'avec le vieillissement accéléré de la population le nombre de personnes atteintes va augmenter de façon alarmante au cours des 25 à 50 prochaines années. D'ici 25 ans, le nombre va avoir plus que doublé. Il est donc à prévoir que le nombre de proches aidants aux prises avec la maladie va augmenter proportionnellement. C'est la simple logique. De plus, on estime à environ à 5,5 milliards de dollars le coût annuel de la maladie d'Alzheimer au Canada. Si on extrapole ces chiffres pour la population du Québec, on parle d'une charge de 20 % à 25 % de ce montant, donc plus de 1 milliard de dollars en coûts directs et indirects. On parle de soins, hospitalisation, absentéisme et tout ce qui peut en découler.

Face à cette crise imminente, il y a urgence d'agir, et on a besoin d'une mobilisation sociale dès aujourd'hui.

M. Robinson (Richard): Alors, quelques mots sur la Fédération québécoise des sociétés Alzheimer. On compte 21 sociétés dans les 16 régions qu'on connaît et un grand nombre de points de service couvrant l'ensemble du territoire québécois. Collectivement, je vous signale que nous injectons plus ou moins 10 millions de dollars dans les soins de santé, et ce, sans beaucoup de subventions et beaucoup de dons, comme on dit.

Le rôle de la Fédération québécoise des sociétés Alzheimer est d'agir un peu comme catalyseur des forces de toutes les sociétés dans toutes les sociétés Alzheimer au Québec. La fédération prend en charge les programmes de formation continue internes et externes ? donc on a des programmes de formation reconnus ? assure une gouvernance saine et prudente, fait appliquer un code de déontologie sévère ? puisqu'on travaille avec des personnes, disons, en perte d'autonomie, donc ça prend un code de déontologie sévère, on le fait appliquer ? dirige des projets de financement et prend en charge les représentations médiatiques et politiques, comme vous voyez. Récemment, la fédération a siégé sur le comité du Dr Howard Bergman. Donc, on attend les conclusions du gouvernement de même que les orientations conséquentes, là, parce que le rapport a été déposé, je pense, en début d'année.

Les sociétés Alzheimer du Québec sont des organismes communautaires et, à ce titre, elles ont été amenées, au fil des années, à développer et proposer des solutions novatrices, adaptées aux besoins des personnes qu'elles représentent dans leurs communautés. Elles sont reconnues pour leurs expertises indéniables et éprouvées en matière d'accompagnement et de soutien des personnes atteintes et de leurs familles.

M. Di Cori (Sandro): Je vais vous parler un petit peu du rôle de ces sociétés Alzheimer. Les sociétés Alzheimer régionales ont pour rôle d'aider les personnes confrontées à la maladie Alzheimer dans leurs communautés locales. Donc, toute l'expertise se déroule au niveau de la communauté; ça ne se déroule pas au niveau du bureau provincial. Cette aide se manifeste de différentes façons: des programmes, des services spécialisés, des ressources de différentes natures, tant pour les personnes atteintes que pour les proches aidants. Les services peuvent varier d'une région à l'autre, car, comme je vous le disais, les sociétés répondent aux besoins propres à leurs communautés. En règle générale, elles offrent des services tels que le soutien téléphonique, des groupes de soutien, du service de répit pour les aidants, de l'aide à domicile, des centres de jour, pour ne nommer que ceux-là. Je vous donnerai quelques détails un petit peu plus tard. Les sociétés Alzheimer québécoises ont également pour mission d'informer et de sensibiliser la population .

Avec le vieillissement de la population, les sociétés Alzheimer régionales sont de plus en plus sollicitées lors de l'annonce d'un diagnostic de cette maladie-là. Les sociétés Alzheimer régionales ont été amenées au fil des années à développer des services efficients et innovateurs pour essayer de faire le plus possible avec les budgets les plus serrés possible. Ceci est rendu possible grâce un réseau de bénévoles qui s'est considérablement développé au cours des années ? on parle de plus de 1 000 bénévoles en 2009 ? grâce à la compétence des différents professionnels avec qui nous faisons affaire, la qualité de notre personnel et grâce à notre réseau impressionnant de partenaires.

Donc, parmi ces services, on propose de façon plus spécifique des programmes d'activités de stimulation à domicile destinés à toute personne vivant avec la maladie d'Alzheimer. Ces services-là visent en fait à maintenir les capacités intellectuelles et favoriser le maintien à domicile, et également ça sert indirectement à prévenir l'épuisement du proche aidant en lui permettant d'avoir quelques heures de répit.

Des groupes de soutien qui accueillent tant les proches aidants que les personnes atteintes de la maladie en phases précoce et intermédiaire. Ici, il s'agit de donner un lieu où ces gens peuvent partager, échanger, discuter de leurs inquiétudes, de leurs expériences. C'est également un espace qui permet de lutter contre l'isolement et de maintenir des contacts sociaux, ce qui est très important dans le contexte de la maladie d'Alzheimer.

On offre également des conférences, des cours, des ateliers de formation destinés tant aux aidants qu'aux personnes malades et qu'aux professionnels de la santé. Ceux-ci sont axés sur la démystification de la maladie, sur l'information spécifique à la maladie et ses conséquences.

Nous avons également six centres d'excellence en matière de d'hébergement qui offrent du répit à plus long terme ainsi que du support pour des personnes en phase plus avancée de la maladie.

Ces services sont basés sur un modèle humaniste. Vous avez sans doute déjà entendu parler du modèle Carpe Diem, qui est un modèle qui appartient à la Fédération des sociétés Alzheimer, qui a été développé en Mauricie. Avec une approche centrée sur la personne, ces centres apportent dans leurs milieux une source d'inspiration pour d'autres maisons d'hébergement au Québec ainsi que dans d'autres juridictions, notamment en France.

La Présidente (Mme Gonthier): Je vous demanderais... Malheureusement, je sais que, 10 minutes, c'est très court pour faire une présentation de tous vos services, mais je vous demanderais de conclure, s'il vous plaît.

M. Di Cori (Sandro): D'accord.

n(15 h 40)n

M. Robinson (Richard): Je vais aller avec les trois points, madame, rapidement. Alors, en conclusion, on voudrait partager avec vous trois positions.

Donc, la première, c'est qu'on est d'avis que la proposition de 75 % des fonds dédiés à la maladie d'Alzheimer et les affections connexes est tout à fait conséquente avec le poids et l'impact de cette maladie sur la société ainsi qu'avec les tendances démographiques et actuelles.

La longévité du fonds, donc proposé pour 10 ans, permettra non seulement d'offrir des services aux personnes qui en ont le plus besoin pendant cette période, mais ça va donner également suffisamment de temps et de moyens aux organismes afin qu'ils développent des mécanismes pour en assurer la pérennisation, trouver d'autres moyens, développer ça lentement, mais ça fait que c'est... ça va nous permettre ça sur les 10 ans.

Puis, troisièmement, il nous semble important que le mécanisme qui sera mis en place pour décider de l'octroi des subventions aux organismes soit rigoureux, mais sans lourdeur, sans lourdeur bureaucratique. Il est essentiel que les sommes versées aux organismes puissent être utilisées rapidement afin d'aider ceux qui en ont le plus besoin dans les meilleurs délais.

Bon, je pourrais laisser le reste, madame...

La Présidente (Mme Gonthier): Bien, je vous remercie beaucoup, messieurs. Alors, sans plus tarder, je passerais la parole à la ministre des Aînés, et vous auriez 17 minutes, Mme la ministre.

Mme Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Écoutez, je vous remercie d'avoir pris le temps de vous déplacer et d'écrire évidemment ce mémoire.

Aujourd'hui, on a entendu énormément parler de maladie d'Alzheimer, de maladies apparentées. Effectivement, Mme Poirier, de Carpe Diem, était avec nous. Quelle femme généreuse, pleine de passion! Belle approche!

Nous avons aussi entendu parler par M. Riverin et d'autres personnes, dont le Dr Bouchard, neurologue, là qui est au centre de la mémoire depuis 40 ans, de la maladie d'Alzheimer, maladies apparentées, de Baluchon Alzheimer, un autre beau projet.

Vous nous parlez de votre projet, vous êtes là depuis longtemps. Il nous apparaît, puis je pense qu'ici ça fait pas mal unanimité, puis vous me corrigerez... Les gens nous ont parlé de flexibilité, on ne veut pas de lourdeur, on ne veut pas de structure lourde, on ne veut pas que ce soient des projets qui... on veut que ce soient des projets complémentaires. Et, quand on parlait, entre autres, au Dr Bouchard, il nous disait qu'il y avait tellement de besoins qu'on ne pourrait même pas faire de duplication tellement que les besoins étaient immenses et que, même le 200 millions, ce n'était pas beaucoup, mais que c'était un pas. Alors, je crois qu'il faut qu'on trouve ces mécanismes-là.

Hier, Francine Ducharme nous parlait de carrefours, genre de carrefours où on peut retrouver beaucoup d'informations, soutenir les aidants, faire de la formation, etc. Comment voyez-vous ça? Comment la société de gestion pourrait-elle mettre à profit, sans lourdeur, et pour l'ensemble de la société québécoise, en respectant la spécificité des régions pour qu'il y ait une équité entre les régions, comment pourrait-elle mettre à profit ce 200 millions de dollars là pour faire bénéficier le plus possible les proches aidants, qui ne sont pas des malades, soit dit en passant, puis on ne les veut pas malades?

M. Di Cori (Sandro): Certainement. Je vais y aller. O.K. Je pense qu'il est important dans un premier temps de regarder attentivement qu'est-ce qui est en place, et qu'est-ce qui existe, et qu'est-ce qui fonctionne bien. Si on veut bien utiliser chaque dollar de ce fonds-là, plutôt que de créer des nouvelles instances, des nouvelles structures, peut-être qu'il y a des structures en place qui offrent déjà des services adéquats qui mériteraient peut-être qu'on mette un peu plus d'essence dans le moteur, si vous voulez.

Je suis d'avis que, je vais prêcher pour ma paroisse, nous offrons, à la Fédération des sociétés Alzheimer un éventail de projets qui est reconnu, qui a démontré son efficacité et, selon moi, le modèle que nous présentons, l'expertise que nous avons donne une belle opportunité d'y investir pour justement venir en soutien aux proches aidants.

On joue déjà un rôle un peu de carrefour au sein de notre regroupement de sociétés Alzheimer. On a des... on devient en fait des petits centres d'excellence au sujet de la maladie d'Alzheimer dans toutes les régions où nous travaillons, avec un organisme coordonnateur efficace, qui est centralisé. Il y a sûrement d'autres modèles qui existent, mais, pour ma part, quand je regarde ce que nous faisons pour la maladie d'Alzheimer, je pense que nous sommes équipés de façon adéquate pour jouer un rôle important dans le développement des services qui vont être offerts aux personnes atteintes et les proches aidants.

Mme Blais: Qu'est-ce que vous donnez comme services aux proches aidants?

M. Di Cori (Sandro): Toutes sortes. On offre de la formation, comme je disais, du répit. Du répit tant à domicile en envoyant des intervenants au domicile d'une personne malade, ce qui permet d'avoir quelques heures de répit pour un proche aidant. On offre du répit également à plus long terme dans certains endroits où nous avons des résidences. Nous en avons six, dont Carpe Diem est l'une d'elles, ce qui permet à un proche aidant de placer un parent malade pendant quelques jours, voire une semaine ou deux. Formation, informations, répit, stimulation également.

Ce qui est important, c'est d'essayer d'étirer la période où le maintien à domicile... Si on veut vraiment économiser de l'argent au système de la santé, il faut que les personnes qui sont atteintes de la maladie puissent rester à domicile le plus longtemps possible, en ayant des services de stimulation, des ateliers qui sont des services, en fait, destinés directement à la personne atteinte mais qui ont des répercussions directes, également, sur le proche aidant. C'est le genre de services que nous offrons.

La Présidente (Mme Gonthier): M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Chevarie: Merci, Mme la Présidente. Merci d'abord pour votre présentation. Ma question va avoir deux volets.

Un premier volet, c'est... si je comprends bien votre mémoire puis votre présentation, la fédération, vous êtes en accord avec le fonds et vous êtes en accord également, je pense, avec l'orientation du fonds, compte tenu de votre mission qui privilégie principalement les clientèles Alzheimer. O.K., ce sera le premier volet.

Le deuxième volet de ma question, c'est que, si vous aviez accès à des fonds, par l'intermédiaire des sociétés d'Alzheimer qui sont dans les régions, quelle serait l'activité la plus prioritaire à mettre en place, à actualiser pour aider vraiment les proches aidants des aînés qui souffrent d'une maladie d'Alzheimer?

M. Robinson (Richard): D'abord, oui, vous avez raison, là, on est d'accord avec le fonds, oui, vous avez raison, aussi, de l'orientation. Notre directeur général parlait de l'accompagnement, je pense que c'est à partir de là, accompagner les personnes atteintes, c'est le but principal, mais accompagner aussi les aidants naturels parce qu'ils sont perdus. Du moment où ils apprennent la nouvelle, puis ça s'en va en s'accélérant toujours.

Donc, dans ça, il y a l'accompagnement, le mot à retenir, moi, d'après moi, c'est «l'accompagnement», et il y a différents moyens pour l'accompagnement qui fait que, oui, le répit est une chose qu'on a une expertise énorme. Puis, quand je parle d'accompagnement, c'est que, des fois, c'est des accompagnements de groupe aussi, là, qui font en sorte que la personne peut... les aidants peuvent emmener la personne chez nous pendant une journée, puis revenir le chercher le soir, puis on l'a accompagnée, la personne, on ne l'a pas gardée. Je veux bien qu'on fasse une distinction, là, on l'a accompagnée toute la journée. Alors, la personne revient un peu reposée, la personne aidante.

Donc, il y a des journées de répit, mais il y a des semaines aussi qui sont à développer davantage. Je pense que, l'essentiel, que je répondrais à votre question, c'est ça. C'est les lieux d'accompagnement qui devraient être d'une semaine ou de trois jours ou de quatre jours, là, parce que c'est juste venir placer la personne le matin, puis la reprendre le soir, là, il faut allonger.

On a des expériences qu'ils font, là, ils ont deux chambres ou, tu sais, mais là, ce n'est pas assez, là. Alors, ce serait ça peut-être... sans qu'il y ait de coûts additionnels énormément, c'est d'ajouter des endroits ou de développer des centres où ils pourraient être logés aussi, là. Ça, ça peut être... cet angle-là qu'on voit.

M. Di Cori (Sandro): J'aimerais peut-être ajouter là-dessus. Oui, du répit, de l'accompagnement. Les proches aidants sont exténués, ils ont peu de soutien. On en offre, mais on a peine à répondre à la demande. On est vraiment extrêmement sollicité. On a de très bons programmes mais qu'on n'est pas encore en mesure d'étendre à l'échelle de la province.

Je vais vous en nommer un, par exemple, qui s'appelle Premier lien, qui est un peu un service de trousse d'informations que les parents aux prises avec cette maladie-là se retrouvent avec un kit, si vous voulez, qui leur donne l'éventail des ressources qui est disponible. En ce moment, ces gens-là n'ont pas ça. Quand il y a un diagnostic d'Alzheimer, bien, tu as la maladie, puis arrange-toi avec ça. Il faut les accompagner de façon étroite dès le moment du diagnostic et cheminer avec eux, les aider après ça à gérer avec cette maladie-là en offrant du répit. Donc, accompagnement et répit.

La Présidente (Mme Gonthier): Mme la ministre responsable des Aînés.

n(15 h 50)n

Mme Blais: Oui. J'aurais une question. On a parlé beaucoup d'Alzheimer toute la journée jusqu'à présent et de maladies apparentées, je dirais, d'Alzheimer, maladies apparentées parce que Dr Bouchard nous disait que bien souvent on parlait Alzheimer, mais c'étaient d'autres formes de démence et qu'on devrait aussi englober.

L'expertise que vous avez développée, parce qu'on a aussi la préoccupation des autres proches aidants de d'autres incapacités, est-ce que cette expertise-là, ces outils-là, votre approche vers les proches aidants, est-ce que ça peut se transposer aussi aux autres proches aidants?

M. Di Cori (Sandro): Absolument. Je veux dire, ce qui est efficace pour un proche aidant est certainement efficace pour un autre proche aidant. La façon dont les proches aidants sont sollicités avec la maladie d'Alzheimer fait en sorte que ce qu'on prévoit pour eux serait certainement adéquat pour d'autres proches aidants aux prises avec d'autres maladies. Évidemment, il faut que ce soit modulé, adapté, mais il y a certainement un transfert d'information, un transfert d'expertise, de connaissances, qui peut s'opérer de la maladie d'Alzheimer et les maladies apparentées vers d'autres maladies, sans aucun doute.

M. Robinson (Richard): Et j'ajouterais, Mme la ministre, que le maillage... il ne faudra pas travailler en silo, là, chacun de notre bord, là, ça, ce serait un grave... puis utiliser l'argent pour des organisations au lieu des aidants.

Alors, je crois qu'avec l'expertise qu'on a on peut partager, on peut faire des maillages, on peut travailler ensemble, on peut transférer nos expertises pour minimiser les coûts puis maximiser l'aide aux aidants. Je pense que ça, on doit faire ça, sinon on va perdre...

Mme Blais: Est-ce que c'est une bonne nouvelle pour vous, 200 millions de dollars pour les proches aidants?

M. Robinson (Richard): Si vous voulez ma... C'est une très bonne nouvelle, sauf que c'est un départ. Pour nous, là, c'est un départ. On va réaliser avec le temps... Il faut... je pense qu'il ne faut pas aller... garrocher des millions. On sait, je pense qu'on ne peut pas demander des millions, là. Moi, je dis que c'est un bon départ, c'est un... Avec les années, on va réaliser, oui, que ça en prend peut-être plus, mais les argents qui seront consacrés plus tard, dans 10 ans ou dans huit ans, ça, je ne sais pas, ils seront mieux utilisés que si on lancerait 300, 400 millions demain matin, là. Puis je pense qu'il faut y aller à petits pas, il faut y aller tranquillement pour ne pas brûler, mais c'est une bonne nouvelle, Mme la ministre.

Mme Blais: Si, comme les autres organismes, vous demandez à ce que la société de gestion ait beaucoup de rigueur... et je crois que nous sommes unanimes ici, ça prend beaucoup de rigueur, de la souplesse, beaucoup de rigueur... vous la voyez comment, cette société de gestion là?

M. Robinson (Richard): On ne s'est pas arrêtés tellement à la société de gestion, nous, qu'aux besoins des personnes aidantes, mais, oui, je pense que, oui, une société de gestion comme il est présenté là, ça aurait un avantage, je dirais, là. Je ne sais pas si je suis fin de dire ça de même, mais ça enlève un peu de bureaucratie, on perd moins de temps. Je ne suis peut-être pas correct, mais il reste que c'est un enlignement qui est bon.

L'autre, en ayant une société de gestion où... là, moi, je ne veux pas m'arrêter sur 5, là, mais c'est à vous de... mais il y a des gens du milieu, il y a des personnes qui vont être probablement près de cette maladie-là, qui vont faire en sorte qu'il va y avoir une analyse, une critique beaucoup plus constructive, là. Moi-même, aller là, je ne serais peut-être pas le meilleur. Mais, quand il y a une société, on trouve des bonnes personnes, peut-être des médecins, des gens qui sont, entre parenthèses, peut-être apolitiques et puis qui font en sorte qu'ils sont centrés plus sur la maladie.

Alors, je pense que ce serait, toute franche, là. ma position.

Mme Blais: Je ne sais pas s'il y a des collègues qui veulent poser des questions parce que, sinon, c'est intéressant aussi de savoir pourquoi... Vous êtes bénévoles, vous, hein, à la société...

M. Robinson (Richard): Oui. Je suis un bénévole, président depuis 10 ans de la fédération. Malheureusement, on a pris ça, c'était un peu en faillite technique, puis on a ramené ça à une structure très rigide et très, très, très productive.

Mme Blais: Avant de céder la parole, je veux vous féliciter parce qu'on ne félicite pas assez souvent nos bénévoles au Québec, puis je crois que les bénévoles font un travail extraordinaire. Puis, s'il y avait une grève des bénévoles au Québec, je pense qu'on aurait de graves problèmes dans notre société. Alors, félicitations à tous les bénévoles.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, je passerais maintenant la parole à Mme la députée de Crémazie. Je vous informe que vous avez 14 minutes, Mme la députée.

Mme Lapointe: Merci, Mme la Présidente. M. Robinson, M. Di Cori, merci beaucoup de votre mémoire et du travail que vous faites. C'est assez incroyable de penser que des personnes se retrouvent encore aujourd'hui avec un diagnostic d'une maladie aussi inquiétante, grave, sans connaître vraiment, là, les organismes, sans soutien en fait. Parce qu'on nous disait précédemment aujourd'hui que très peu, très peu de proches aidants font appel aux ressources parce qu'ils ne les connaissent pas. Et de votre côté, même si toutes les personnes qui devraient bénéficier de vos services ne le font pas, vous n'arrivez pas, hein, vous n'arrivez pas à répondre à la demande.

Alors, c'est certain qu'on a un devoir, là, de s'assurer de plus en plus qu'il y ait du soutien. On l'a dit plusieurs fois depuis le début de cette commission et dans d'autres discussions que nous avons eues, il va falloir mettre un effort exceptionnel au niveau des soins et des services à domicile. On parle, là, principalement de la maladie d'Alzheimer, mais je pense que c'est la base de tout, particulièrement dans le cas qui vous occupe. Les proches aidants, vous dites, sont exténués. Je peux le comprendre très facilement. Il faut donc... Il ne faut pas que notre société délaisse cet objectif. Il ne faut pas que notre État délaisse cet objectif.

Moi, j'ai deux points, là, dans votre mémoire... Il y a plusieurs choses évidemment, mais on a peu de temps. Vous avez siégé sur le comité d'experts du Dr Bergman au sujet, là, d'un plan d'action provincial sur la maladie d'Alzheimer. Est-ce que vous pouvez me parler un peu de ce qui est ressorti de ce plan d'action? Est-ce que ce plan d'action est disponible? Est-ce que...

M. Di Cori (Sandro): Écoutez, le comité a été mis sur pied en décembre 2007, si je ne m'abuse, et on y a siégé pendant tout près de un an. Le Dr Bergman a déposé un rapport en début d'année, à la mi ou fin janvier, si je ne m'abuse. Je crois qu'au ministère de la Santé, on attend toujours les réactions de ce côté-là, donc je veux dire, je ne voudrais pas vraiment commenter avant que ce soit rendu public ou...

Mme Lapointe: Mais, de votre côté, est-ce que ce plan semblait apporter des solutions aux problèmes que vous vivez en ce moment?

M. Di Cori (Sandro): Oui. Bien, en fait, on va avoir besoin d'un plan provincial sur cette problématique-là. C'est quelque chose de tellement important, cette maladie d'Alzheimer, qu'on va faire face à un tsunami, là, d'ici les cinq, 10, 15 prochaines années. Si on ne se dote pas d'une stratégie aujourd'hui, on va avoir de la misère à pédaler pour rattraper le temps perdu, d'ici cinq ou 10 ans.

Donc, écoutez, les démarches ont été entreprises par le gouvernement. On va voir ce que le ministre de la Santé va dire. Ça prend une approche intégrée. Ici, on a un premier élément de ça. Ce fonds-ci va devoir faire partie d'un ensemble plus grand, à notre sens, qui est une stratégie québécoise sur la maladie d'Alzheimer. Mais c'est un premier pas vraiment très positif parce que, je veux dire, on part de peu et on arrive avec quelque chose de, quand même, à nos yeux, très intéressant.

Mme Lapointe: Dans votre conclusion, au point 3, vous mentionnez qu'il vous semble important que le mécanisme qui sera mis en place pour décider de l'octroi des subventions aux organismes soit rigoureux, mais sans lourdeur bureaucratique. Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment, à votre sens, ça pourrait se faire?

M. Di Cori (Sandro): Là, écoutez, j'imagine au fur et à mesure que je parle, là. Quand cette société de gestion là va voir le jour, elle va sans doute se doter d'un comité d'experts pour revoir, étudier les demandes qui vont lui être soumises. Ce comité-là devrait être conçu de façon à opérer rapidement, éviter de tomber dans des périodes de six mois d'étude de dossiers avant de recevoir des subventions.

Les gens ont besoin de soutien, là, là. Dans six mois, ils vont en avoir besoin, mais ils vont en avoir besoin d'encore plus. Donc, il faut que cette société-là puisse être agile, bouger rapidement, prendre des décisions rapidement. Comment ça, ça peut se faire, ça va être à l'équipe qui va être désignée de mettre ces mécanismes-là en place.

Mme Lapointe: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Gonthier): Mme la députée de Matapédia.

n(16 heures)n

Mme Doyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue, messieurs, à cette commission. Moi, j'aimerais vous entendre sur le projet de loi comme tel, qui décrit les mécanismes, un peu la mécanique de comment ça va fonctionner. Moi, je vous ai donné tantôt un petit tableau, hein, parce que c'est très pédagogique, sur le fonctionnement du partenariat. Alors, j'ai mis... À un moment donné, à force d'entendre les gens qui sont venus ici, Carpe Diem, entre autres, qui sont venus, plusieurs ont parlé de principes de base, de valeurs, de critères aussi par rapport à l'allocation... Parce que, là, c'est évident qu'avec le 200 millions il va falloir aller au plus pressé, hein, et tout le monde ont été sensibles au fait ? et je pense que les membres de la commission aussi ? au fait que cet argent-là doit être utilisé au mieux, le plus efficacement possible, avec pas trop de structures lourdes.

Alors, il y a cinq personnes qui vont être nommées par la ministre et il y a cinq personnes qui vont être nommées par la famille... la fiducie. La fiducie, Sojecci II ltée ? c'est-u ça, deux? Bon. Alors, comment vous verriez l'articulation de ça, pour ne pas qu'on perde, parce qu'on ne peut pas les mettre ? moi, je ne sais pas, j'y réfléchis ? mais on ne peut pas mettre des principes, des critères et des valeurs dans un projet de loi, là? Je n'ai pas vu ça souvent. Mais on peut dire ou faire des recommandations, comme commission, puis dire: il faudrait que se retrouvent un certain nombre de principes de base dans la formation de cette société de gestion qui va voir à dépenser cet argent-là à travers les années, puis le plus efficacement possible, puis d'y aller de la meilleure façon.

Alors, pour moi, il y a des organismes qui sont des porteurs de projets. Il y a des organismes qui doivent être des partenaires des projets, hein? Parce que... Puis là, je vois que vous êtes un peu en compétition, vous... J'ose le dire avec... Tu sais, parce que Carpe Diem disent: Nous on pourrait faire des choses, de la formation. Mais, quand je lis ce que vous nous présentez, vous aussi, vous voulez, vous êtes là, vous êtes dans toutes les régions du Québec. Comment faire au mieux avec ce qui est les incontournables ? moi, j'appelle les organismes porteurs, les partenaires, ceux qui sont incontournables et ceux qui sont partenaires ou associés ? pour utiliser au mieux cet argent-là et ne pas perdre en route les principes, les critères, les valeurs qui doivent guider l'utilisation au mieux de cet argent-là?

M. Di Cori (Sandro): J'aimerais juste clarifier une chose.

Mme Doyer: Oui, allez-y.

M. Di Cori (Sandro): Mme Nicole Poirier qui est venue présenter ici, de la Maison Carpe Diem... En fait, la Maison Carpe Diem est une maison d'hébergement qui fait partie d'une de nos sociétés régionales...

Une voix: ...

M. Di Cori (Sandro): ...donc, c'est comme un de nos 21 membres, si vous voulez, qui a une expertise particulière en hébergement. Mme Poirier, dans le fond, représente une de nos 21 sociétés. Donc, on n'est absolument pas en compétition, on travaille ensemble, de concert.

Notre façon de faire, à la Fédération des sociétés Alzheimer, est d'élargir notre réseau de collaborateurs. Je le mentionne un peu dans le document qui est ici, on a un réseau qui est assez large, tant dans le public, dans le privé que dans le communautaire. On est tout à fait conscients que ? pour notre part, bien qu'on aimerait mettre la main sur la part du lion, évidemment tout le monde veut toujours en avoir plus, on ne va pas se leurrer ? mais on est tout à fait conscients que, s'il y a de la compétition, nous, on va tout faire pour se mettre en partenariat avec des entités qui vont soumettre des demandes. Je pense que ça va de soi que chacun doit cibler des projets là où il a une expertise. Et ça va être justement à cette société de gestion ou comité de pertinence ou d'expert de reconnaître l'expertise d'un ou d'un autre organisme dans tel ou tel champ. Il faudrait éviter la compétition, s'il y a un organisme qui est vraiment expert en répit à long terme et un qui ne l'est pas, mais que les deux soumettent des projets dans ce sens-là, il va falloir que le comité qui va étudier les demandes soit suffisamment connaissant dans le domaine pour reconnaître ça facilement.

La Présidente (Mme Gonthier): Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Parce que j'ai aussi une préoccupation d'équité par rapport à l'ensemble des régions. Je sais que les sociétés Alzheimer sont présentes, on le voit ici, dans ce que... un peu partout. Et on sait qu'existent des entreprises d'économie sociale qui sont justement là, sur le terrain, en maintien à domicile, et tout. Et comment vous voyez l'articulation de... comment je dirais ça... des partenariats, là? Parce que les services sont organisés par territoires de CSSS, hein?

Une voix: Oui.

Mme Doyer: Et vous, là on dit, c'est bien dit qu'il ne faut pas aller substituer aux services du réseau. Alors, comment vous voyez que ça atterrisse au mieux? Ça peut-u atterrir dans des entreprises d'aide à domicile, comme chez moi, Aide-Maison Vallée qui sont là autant au niveau de la formation que... Parce que c'est de l'appui pour les aidants naturels, hein, puis on a aussi en même temps la préoccupation d'aider les personnes atteintes, mais de ne pas épuiser, de ne pas perdre toutes ces ressources humaines qui sont occupées dans chacune des MRC, autant en territoire rural que milieu urbain, hein? Moi, j'ai cette préoccupation-là. Comment vous voyez ça pour que ça se fasse au mieux?

M. Di Cori (Sandro): Oui. Par exemple, vous parlez de formation. Je verrais très facilement un partenariat où, par exemple, les sociétés Alzheimer fourniraient leur expertise pour former des formateurs, si vous voulez, ou former une base de personnes qui ensuite vont pouvoir aller donner des services, c'est ça, pour faire de la duplication, pour s'assurer qu'on peut généraliser des projets intéressants au plus faible coût possible. À la Fédération des sociétés Alzheimer, on a une expertise en formation, on forme des gens tant des CLSC que des maisons d'hébergement privées et d'autres formes, là. Donc, c'est une expertise qu'on a. On pourrait très facilement se mettre en partenariat avec différents autres organismes qui pourraient travailler avec nous.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, M. le député de Mercier, vous auriez environ cinq minutes...

M. Khadir: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Gonthier): ...incluant les réponses.

M. Khadir: Très bien. M. Robinson, M. Di Cori, bienvenue. D'abord, votre société m'intéresse beaucoup. Mon grand-père est décédé d'Alzheimer vers 84 ans, après plusieurs années. Et, comme vous le savez, les médecins reconnaissent aujourd'hui que malheureusement ce n'est pas juste un virus, ce n'est pas l'environnement, c'est probablement génétique. Et j'en viens à croire que ce l'est quand je pense au nombre de choses que j'oublie chaque jour.

Ce que j'allais vous demander, c'est que, si vous aviez à attribuer ? parce que, j'imagine, c'est le genre de réflexion que vous faites, là ? 1 $, quelle part de ce dollar vous mettriez sur le service aux aidés, aux patients atteints d'Alzheimer, et quelle portion aux proches aidants, grosso modo?

M. Di Cori (Sandro): Dans notre cas?

M. Khadir: Oui.

M. Di Cori (Sandro): Actuellement?

M. Khadir: Oui. La société d'Alzheimer, là, pour s'occuper... on vous donne 1 $ pour vous occuper de la problématique de l'Alzheimer. Quelle part vous mettriez aux proches aidants, au soutien aux proches aidants, quelle part aux services directs?

M. Di Cori (Sandro): Bien, écoutez...

M. Khadir: On sait que les deux sont liés, hein? Plus les... Hein?

M. Di Cori (Sandro): Oui. Oui, oui, absolument.

M. Khadir: Bon.

M. Di Cori (Sandro): C'est ça. Je vous dirais que, directement, aux personnes atteintes, on investit peut-être 0,60 $, 0,65 $ sur le dollar. Le reste...

M. Khadir: Actuellement?

M. Di Cori (Sandro): Oui. Le reste directement aux proches aidants. Par contre, il ne faut pas oublier, dans cette équation-là, qu'en aidant une personne atteinte, il y a certains programmes qui aident indirectement le proche aidant. Par exemple, des ateliers de stimulation. Ils visent, ils ciblent spécifiquement la personne atteinte, mais ça sert deux objectifs en fait: dans un premier temps, c'est de la stimulation qui va favoriser le maintien à domicile plus longtemps; et, dans un deuxième temps, pendant que la personne atteinte est à son atelier pendant deux, trois heures, bien le proche aidant est libéré. Donc, c'est pour...

M. Khadir: ...la proportion est bonne actuellement, 35-65, ou vous avantageriez dans un sens ou dans l'autre?

M. Di Cori (Sandro): Bien, pour le moment, dans la situation où on est, c'est adéquat, je vous dirais. C'est adéquat, mais, comme j'ai mentionné également, on ne fournit pas à la demande, donc...

M. Khadir: D'accord. Alors, l'autre question que je serais tenté de poser, c'est que, là, il y a une enveloppe de 200 millions sur 10 ans qui est disponible, dont 75 %, donc 150 millions, qui va aller pour l'Alzheimer, grosso modo, hein, si on pense bien aux proches aidants. Est-ce que vous pensez que la société Alzheimer, puisque vous regroupez des bénévoles... hein? Il y a un contrôle démocratique sur vos instances? J'imagine que vous êtes élus par une assemblée de bénévoles puis... voilà.

M. Robinson (Richard): Sans campagne électorale.

M. Khadir: Comment?

M. Robinson (Richard): Sans campagne électorale.

M. Khadir: Sans campagne électorale. Ce n'est pas grave. Mais il y a un contrôle démocratique. C'est des gens qui s'en occupent, qui sont dans le milieu, qui ont une expertise, qui ont des compétences, qui sont surtout impliqués. Donc, il y a un contrôle démocratique.

Est-ce que vous pensez que votre société a aussi les compétences techniques, l'expertise en termes de vision de ce qui est nécessaire, pour s'occuper de ça? Est-ce qu'on a besoin, autrement dit, d'une société de gestion séparée, parce que vous nous avez mis en garde... tout à l'heure, vous avez dit: On n'a peut-être pas besoin de créer de nouvelles structures. On a peut-être besoin juste d'alimenter, de donner du carburant ? du carburant, peut-être de l'électricité, là, pas de l'essence, comme vous l'avez dit ? donc, du carburant à ce qui est déjà là. Est-ce que, dans le fond, la ministre ne serait pas mieux avisée de recommander à tout ce beau monde de mettre ce 150 millions à la disposition des groupes qui sont déjà là pour s'en occuper, ou à la société d'Alzheimer de voir à la gestion de ça?

Je sais que c'est un gros morceau pour vous, 150 millions, mais il n'est pas permis de rêver, là... Il n'est pas permis de... Ah! C'est ça: il est permis de rêver.

n(16 h 10)n

M. Robinson (Richard): Oui, bien, il faut voir ça à petits pas. Moi, je pense que je vais réagir comme je fais toujours. Il faut voir ça à petits pas. Le 200 millions, ce n'est pas 200, c'est 15 millions... c'est 20 millions par année. Et, pour moi, c'est la méthode peut-être de petits pas, là, pour aller vers quelque chose de grand plus tard, qui va être beaucoup plus que 200 millions.

L'autre chose que je vois, c'est que je ne vois pas, en tout cas comme bénévole, je ne vois pas qu'on est ici pour dire: le 15 millions, là, il faut qu'il s'en aille à l'Alzheimer comme tel, là, tu sais, ce n'est pas... on n'est pas en guerre... pas en guerre de chiffres, mais, je veux dire, on n'est pas là pour... Il faut se structurer, qu'on prenne le leadership, ça oui, puis se structurer avec les autres et visant une clientèle, c'est les aidants, O.K. Il y en a aussi d'autres qu'Alzheimer. O.K., moi, je ne fais pas l'Alzheimer, là, mais il y en a d'autres, puis je suis pour les autres aussi.

Alors, il ne faut pas penser qu'on est ici juste pour dire: le 15 millions, là, c'est pour la Fédération québécoise des sociétés, là. Non, c'est pour les aidants. Et à nous de prendre le leadership. Puis on a des modèles, je vous invite à aller voir la Maison Carpe Diem, je vous invite à aller voir l'autre, excusez-moi, Fleur-Ange, à Hull, etc. Et on a l'expertise, ça, je peux l'affirmer, on a l'expertise. Mais l'expertise doit être partagée, là, puis ce n'est pas... puis je le disais au début, ce n'est pas en silo, là. On doit relever le défi que vous allez accorder dans ce montant-là... ces montants-là. On doit relever le défi puis démontrer qu'on est capable de le relever. Je ne sais pas si je réponds à votre question, mais je pense que...

La Présidente (Mme Gonthier): Oui, merci. M. le député de Mercier, malheureusement le temps est écoulé. Alors, M. Robinson, M. Di Cori, les membres de la commission vous remercient.

Je vais suspendre les travaux quelques instants. Et je demanderais aux gens de l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 12)

 

(Reprise à 16 h 15)

La Présidente (Mme Gonthier): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous accueillons maintenant l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées. Alors, bonjour, Mme Vaillancourt. Alors, je vous inviterais à faire votre présentation. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.

Association québécoise de
défense des droits des personnes
retraitées et préretraitées (AQDR)

Mme Vaillancourt (Marthe): D'accord. Je vais essayer de faire ça assez rapidement. Alors, je suis Marthe Asselin-Vaillancourt. Je suis la vice-présidente de l'AQDR nationale. Malheureusement, tous les autres étaient occupés aujourd'hui, dont notre président qui est au soleil de la Floride. Mais nous avons un grand intérêt pour ce projet de loi parce que l'AQDR atteindra cette année sa 30e année d'existence et, tout au long de ses 30 ans, il a toujours été question de soins à donner aux personnes qui ont de grands besoins et de soutien à domicile, etc.

Donc, pour nous, ce projet de loi là est excessivement important. Nous en reconnaissons le bien-fondé, bien sûr, et nous reconnaissons aussi les grands besoins liés à la maladie Alzheimer. Moi, je l'appelle la maladie qui fait peur. Mais les besoins reliés aux autres troubles cognitifs, aux incapacités physiques, aux paralysies et autres demandent aussi une attention spéciale. Et je reconnais la pertinence des gens qui m'ont précédée, qui ont extensionné vers d'autres types d'aidant, dans d'autres types de maladie.

Je cite par la suite quelques situations dont on a pris connaissance à l'AQDR, et ce qui me peine surtout, c'est que parfois des personnes qui quittent un travail pour devenir des aidants auprès de leurs parents deviennent en même temps des personnes appauvries, parce qu'elles ne peuvent plus... n'étant plus au travail, elles ont des difficultés d'ordre monétaire, ne peuvent plus accumuler des REER et donc s'engagent dans la voie d'une grande pauvreté.

Je cite aussi, à la page 4, quelques difficultés qui sont liées aux aidants naturels: les nombreuses déstabilisations dans le cours de leur vie, dans leur environnement, dans leurs priorités, dans leurs propres besoins, et les conséquences que toutes ces déstabilisations ont sur elles: un état anxieux, un envahissement de leur territoire, des tensions avec le membre, les autres membres de la famille qui souvent décrètent que c'est une seule personne qui doit devenir aidante, la cantonnant ainsi dans de nombreuses difficultés.

Le Dr Hébert nous a parlé souvent de réseaux intégrés, d'ensembles de services organisés sur un territoire. Moi, je dis qu'outre les nécessaires besoins de répit et de dépannage pour les aidants il faut consacrer des sommes à leur formation, à leur information et ne pas négliger la prévention. Il est important de présenter une vision du maintien centrée sur les besoins des aînés, sur les besoins des aidants et des dispensateurs de services.

Je voudrais souligner que les aidants ont particulièrement besoin d'information parce qu'ils ne sont pas habitués d'avoir recours aux services et, très souvent, ils hésitent à se confier et ne savent pas à qui s'adresser. Je lisais dernièrement que l'âge moyen des aidants hommes est 76 ans, et, comme les femmes, ils ont besoin de repos, comme les femmes, ils critiquent l'accès aux services, soit la possibilité d'obtenir les services nécessaires en bon nombre d'heures suffisant, au bon moment, sans délais inutiles.

Et je voudrais vous dire quelques mots des aidants qui sont encore au travail, parce que c'est le cas d'une petite nièce dans ma famille, et qui vivent difficilement les doubles et triples tâches. Vous le savez, on les appelle la génération sandwich, celle qui se voit dans l'obligation de soutenir les parents tout en continuant l'éducation des enfants puis tout en demeurant au travail.

n(16 h 20)n

Les personnes susceptibles d'apporter quelques soins ou de rendre des services sont en grande demande dans les familles, hein, à cause du vieillissement de la population, l'augmentation des besoins et la stagnation du financement au niveau des soins à domicile. Il semble qu'une fois engagé il n'y a plus de fin. Hébergement ou pas, le travail invisible continue puis mine les réussites au travail et les moyens financiers. S'occuper d'un... Pour un aidant, ça coûte cher, surtout si on doit payer un remplaçant, parfois quelques heures par semaine. 25 % des aidants estiment que ces nouvelles responsabilités ont diminué leur rendement au travail, puis un autre 25 % ont dû quitter leur emploi ou prendre leur retraite.

Récemment, on a recensé des familles où trois générations sont à la retraite. D'ici 2010, 60 % des gens de 50 ans et plus auront un parent vivant qui sera en retraite en même temps qu'eux. J'avais, à un moment donné, sur mon conseil d'administration d'un CAVAC, deux dames de 70 ans qui étaient des aidantes pour leurs mères de 94, 95 ans. Alors, j'aime autant vous dire que ça ne va pas cesser dans les familles avec l'arrivée de cinq générations. C'est une situation qu'on n'a jamais connue et qui sera présente très bientôt, très couramment dans notre société, et il faut donc se préparer à vivre ces situations-là.

Je ne sais pas qu'est-ce qui va arriver avec la petite taille des familles où, souvent, quand on parle d'une famille, on parle d'une ou deux personnes, et parfois les aidants naturels, dits naturels ? je n'aime pas beaucoup ce terme-là ? mais les aidants, on va les prendre dans quelle sphère de la société, là? Il y a une grosse demande, il y aura moins de personnes disponibles, et ça va créer des situations... Et la Coalition Santé nous faisait observer qu'avec la situation économique difficile, avec l'appauvrissement, les gens vont devoir demeurer plus longtemps au travail, donc seront moins disponibles pour devenir des aidants pour leurs parents.

Alors, il y a toutes sortes de choses avec lesquelles on vit présentement qui vont être très perturbantes, et ça, dans un proche avenir. Moi, je reviens sur la nécessité de la prévention en informant les futurs retraités qu'ils doivent conserver leur santé, en les informant de ce qu'est la perte d'autonomie si on ne prend pas les mesures pour demeurer en santé. Alors, je fais état aussi des services à domicile et de leur manque flagrant dans la société. On dit qu'on aurait 70 000 proches aidants, majoritairement des femmes, qui souffrent d'épuisement et dont la santé est menacée par la dépression. Alors, ces personnes fournissent plus de 30 heures semaine à un proche pour des périodes allant de trois à 10 ans, alors... Aidants naturels, là, ça dure, c'est longtemps, puis...

Moi, je pense qu'il nous faut dès aujourd'hui ? et des fois je me dis qu'on est en retard là-dessus ? développer une politique qui va tenir compte de toutes ces nouvelles situations qui sont présentes dans notre société à l'heure actuelle. Puis je le dis, c'est comme une marotte pour moi, à l'AQDR, je dis toujours: Il faut voir ce qui se fait ailleurs. On a vu ce qui s'est fait en France, où on a essayé que les logements avec des portes permettent de s'isoler, je veux dire, une porte entre deux logements, ça permet à l'aidant de s'isoler quelques minutes. Et on a pensé aussi à des maisons intergénérationnelles; c'est peut-être moins populaire au Québec, mais il faudra que ça le devienne aussi. En Espagne, on a inventé toutes sortes de possibilités. Et, au Japon, là, vraiment, c'est le miroir total, c'est un laboratoire mondial où on a... les maisons sont agencées pour que les personnes qui doivent être mobilisées puissent disposer de chaises roulantes, puissent avoir accès à leurs chambres, à la salle de bain et à la cuisine avec facilité, et on a conçu toutes sortes d'instrumentations pour aider les personnes âgées.

Alors, moi, je dis que sans un plan global qui regarde ce qui est là et ce qui sera dans un très proche avenir, on ne peut plus continuer sans avoir une différente approche de celle qu'on a eue parce que, à mon avis, si je regarde ma propre situation, je ne sais pas comment j'aurais des aidants dits naturels dans mon entourage. Et en même temps ça nous insécurise quand on vieillit. J'ai déjà 77 ans, mon mari, 80, on essaie d'être en forme. On essaie parce qu'on prêche pour notre propre paroisse, on essaie de faire de la prévention pour nous deux, mais il reste que les enfants demeurent à Montréal, donc ils sont à 600 kilomètres, et ce n'est pas facile de penser son vieillissement.

Mais tout ça pour dire qu'il faut faire de la prévention, il faut regarder ce qui se fait ailleurs et il faut développer une nouvelle politique qui va tenir compte des nouveaux changements dans notre société, de tous les bouleversements avec lesquels on vit. Si je regarde, en continuant dans ma propre famille, mes propres enfants, un vit seul, l'autre vit comme conjoint de fait, pas d'enfant. Alors, vous voyez déjà, quand j'extrapole vers ma propre descendance, je questionne l'absence d'aidants naturels, et ça me fait peur.

La Présidente (Mme Gonthier): Bien, merci beaucoup, Mme Vaillancourt, et en terme de prévention, je pense que vous réussissez très bien, vous avez l'air en super forme. Alors, Mme la ministre des Aînés.

Mme Blais: Mme Vaillancourt, vous me touchez énormément. Je dois vous dire que ce que vous avez dit, je souscris totalement à ce que vous dites. Puis l'AQDR, ça fait 30 ans que je l'aime, moi aussi, parce que, quand j'ai commencé dans le métier de communication, dans l'émission Services à la communauté, j'accueillais l'AQDR qui commençait. Alors, je l'ai vue évoluer depuis 30 ans, un organisme qui se voue à la défense des droits des préretraités et des retraités.

Et dans votre mémoire, outre les mots qui sont écrits, c'est ce que vous ressentez et comment vous le dites. Entre autres, vous parlez de pauvreté, puis c'est vrai qu'on s'appauvrit, puis c'est vrai que les aidants puis les aidantes, à un moment donné, doivent faire des choix, puis il y a cet appauvrissement-là. Et après ça, vous parlez de formation, d'information, de prévention, ce sont des mots clés, des mots importants pour être capable d'accompagner dignement et correctement un proche aidant qui ne se reconnaît pas souvent en tant que proche aidant, qui ne veut pas se reconnaître. Ça m'est arrivé souvent, moi, en consultation publique, de rencontrer des proches aidants exténués et qui disaient: Mais non, ma mère ne veut pas se faire aider par personne d'autre que moi. Alors, il faut qu'il y ait cette prise de conscience de l'importance d'obtenir du répit et des services.

Vous parlez des aidants masculins. Vous êtes la deuxième, Mme Ducharme aussi, qui est une chercheuse, qui nous en parlait hier et qui disait: Il faut aussi reconnaître qu'il y a des hommes. Vous parlez de ces hommes en moyenne de 76 ans qui s'occupent de leur femme. Vous parlez de quelque chose qui me touche, de ce travail invisible qui est vraiment, je dirais, aussi le fer de lance de l'AFEAS depuis des années, la reconnaissance de ce travail invisible.

Vous parlez de vieillissement actif, vous êtes la preuve du vieillissement actif. Vous avez dit votre âge, vous n'auriez pas dû, 77 ans, mais, vous savez, il faut que tout le monde, ici, on vise le vieillissement actif. Puis on parle aujourd'hui de ce fonds de soutien aux proches aidants, mais il y a autre chose aussi: toutes ces Municipalités amies des aînés, où on met, au coeur de l'action, les aînés, où les services de santé doivent converger, le bénévolat, les services de répit, où il faut que les élus fassent en sorte que, dans leur ville, ce soit attrayant pour que les aînés puissent vivre activement.

Alors, ma question, parce qu'il faudrait peut-être que j'arrive à une question, parce que là, je suis en train de faire un long monologue, avec ce fonds-là, on a parlé beaucoup de souplesse, hein, on veut que la société de gestion soit souple, vous voyez les services comment pour les proches aidants sur le territoire, hormis ce que vous avez parlé, là, de politique et d'une prise de conscience totale des besoins des proches aidants dans notre société? Parce que je pense qu'on est en train de poser des gestes importants non seulement en créant un fonds, là; on est en train de parler de l'importance des proches aidants et de leur reconnaissance dans notre société. C'est ça aussi dont il est question aujourd'hui. Alors, vous voyez ça comment, les projets qui seraient soutenus?

n(16 h 30)n

M. Vaillancourt (Marthe): Bien, moi, je vois beaucoup de formation. Vous savez, quand on connaît des fois, ça aide beaucoup pour l'avenir, hein? Alors, je pense qu'il faut donner de la formation aux proches aidants et bien sûr du soutien. Ils ne nous parlent que de ça, hein? J'ai besoin d'être aidé, j'ai besoin de répit, j'ai besoin de m'absenter un jour ou deux.

Quand même que je vous définirais une grande philosophie là... Je veux vous dire aujourd'hui, il y a ce besoin qui est primordial, il y a ce besoin-là. Bien sûr, il y a le besoin, comme je dis, là, d'une politique, etc., mais le besoin primordial, c'est d'aider les proches aidants. Quand je dis: Ils font en moyenne de trois à 10 ans, là. L'épuisement, là, il vient très tôt dans leur vie s'il n'y en a pas, d'aide.

Alors, il faut aider, il faut permettre du répit, il faut donner des journées où ils peuvent se reposer, penser à eux-mêmes et, s'ils sont en couple, il faut aussi respecter le couple là-dedans. Une aidante ne peut pas se permettre d'être exclusivement dans l'aide à sa mère et négliger les enfants ? j'y fais allusion aussi pour ceux qui ont des enfants ? et négliger sa vie familiale, son mari... Alors, c'est un immense besoin, le répit et le dépannage, un immense besoin. Bien sûr, il y a toute la formation qu'il faut leur donner. Je reviens au point de départ, mais c'est ça, un immense besoin.

La Présidente (Mme Gonthier): M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Chevarie: Merci, Mme la Présidente. Mme Vaillancourt, merci pour votre présence et du mémoire de l'AQDR. Je regardais... Vous soulignez que vous reconnaissez le bien-fondé du fonds...

Mme Vaillancourt (Marthe): ...bien sûr.

M. Chevarie: ...et vous parlez, à la page 6... à la page 5 plutôt, du réseau de services intégrés, et, moi, ça m'interpelle dans ce sens-là. Est-ce que vous pensez que les organismes qui pourraient bénéficier éventuellement de projets du fonds, selon vous, est-ce qu'ils peuvent s'inscrire dans ce réseau de services intégrés puis s'assurer du continuum? Est-ce que le fonds peut être un obstacle à l'intégration dans ce réseau de services intégrés là? Et, après ça, j'aurai une question supplémentaire.

Mme Vaillancourt (Marthe): Moi, je ne pense pas que le fonds peut être un obstacle. Quand on veut travailler ensemble, il faut regarder les services qui sont déjà là, il faut regarder les services qui sont dispensés par les CLSC, même si on trouve toujours que ce n'est pas beaucoup, c'est là, et il y a les services d'aide familiale. Il y a plein de services, il y a des AQDR qui donnent des services de répit et de dépannage. Un réseau intégré et le fonds feraient que la roue continuerait à tourner et il y aurait intégration de toutes les composantes à l'intérieur de la roue. C'est très, très important. Si le fonds devait servir à briser le cercle, ce ne serait pas à mon avis remplir toutes les fonctions qu'il pourrait remplir, si on se donne la peine d'intégrer les services.

M. Chevarie: Merci. À la page 5 toujours, vous dites: Je voudrais souligner que les aidants hommes ont particulièrement besoin d'information. Est-ce que vous pourriez expliquer davantage? Est-ce que les hommes, comme proches aidants, ont des besoins de services plus particuliers, selon votre perception?

Mme Vaillancourt (Marthe): Au niveau de l'information.

M. Chevarie: Au niveau de l'information.

Mme Vaillancourt (Marthe): Ah, mon Dieu! Je reçois tellement de téléphones et je reçois des téléphones des hommes qui me disent: Ah oui! mais, là, je vais aller à quel endroit pour... Je dis: Commencez par demander à votre CLSC, là, puis ensuite... Mais que ce soit un CLSC...

Vous savez, dans leur vie de travailleurs et dans leur vie de nouveaux retraités, ça n'a pas été quelque chose dont ils ont parlé à tous les jours, le CLSC puis les services d'aide, puis tout ça. Tout à coup, tout à coup... Graduellement, ils se retrouvent avec une mère, un père qu'ils doivent aider et parfois c'est un enfant handicapé, etc. Alors, pour eux, n'ayant pas développé la possibilité de recourir à ces services-là, ils sont doublement démunis, je dirais, et, comme les femmes bien sûr, ils éprouvent l'épuisement très rapidement et...

Vous savez, ils ont... Cette absence d'information, ça crée de l'insécurité. Ils sont très insécures face à ce qu'ils vivent, insécures face à: Qui va m'aider, qu'est-ce que je vais devenir, qu'est-ce que je vais faire, qu'adviendra-t-il de moi, etc.? Alors...

M. Chevarie: J'aurais une dernière question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Gonthier): Oui, M. le député Îles-de-la-Madeleine.

M. Chevarie: À la page 6, vous dites, et vous l'avez mentionné dans vos propos tantôt, que vous n'aimez pas beaucoup, vous n'appréciez pas nécessairement le terme d'«aidant naturel». Est-ce que vous auriez une terminologie plus appropriée à nous proposer?

Mme Vaillancourt (Marthe): Ah! j'ai pensé à toutes sortes de mots. Je vous dirais, mais ça m'est venu du fait que, mon mari et moi, on aide des personnes avec qui on n'a aucun lien de parenté, hein? Et c'est peut-être particulier à la ville d'Arvida, là, l'ancienne ville d'Arvida, où il y avait beaucoup de personnes qui sont arrivées et n'ont pas nécessairement des frères, des soeurs, et les enfants qui ont quitté vers l'extérieur. Alors, je me dis, bien là comment ça se fait que je suis naturelle auprès de cette personne-là? Que c'est ça, l'aidant naturel? Et mes enfants qui n'auront pas la possibilité peut-être de venir m'aider, qui me rendra des services? Sera-t-il plus naturel? En tout cas, là c'est d'une grande sémantique, là, on peut en parler jusqu'à demain matin. Mais je me contente là pour le moment d'aidant. Et je n'associe pas nécessairement «proche» non plus parce que «proche» indique peut-être un lien, alors qu'avec les personnes qu'on aide, on n'a aucun lien. Ce sont des personnes qu'on a rencontrées antérieurement qui sont des amis, plus ou moins.

M. Chevarie: Merci, madame.

La Présidente (Mme Gonthier): Mme la ministre responsable des Aînés.

Mme Blais: C'est la fin?

La Présidente (Mme Gonthier): Bien, c'est... Vous avez du temps.

Mme Blais: Non, mais je pense que ma collègue... puis je parlerai à la fin.

La Présidente (Mme Gonthier): Oh! excusez-moi. Excusez-moi, excusez-moi. Alors, Mme la députée Trois-Rivières, je ne vous avais pas vue.

Mme St-Amand: Pas de problème. Merci, Mme la Présidente. Mme Vaillancourt, c'est vraiment très rafraîchissant de vous recevoir cet après-midi, et je trouve que c'est aussi très encourageant de vous voir, mais en tout cas ça nous donne des beaux pronostics.

Moi, je veux savoir, vous avez une bonne expertise, vous savez qu'il y aura un fonds de gestion, une société de gestion qui sera là pour ce fonds-là. Est-ce que vous avez des conseils à nous donner pour s'assurer que les fonds soient bien utilisés? Dans ce que vous connaissez, vous, dans une façon de faire pour un bon partenariat, comment vous verriez ça?

Mme Vaillancourt (Marthe): Eh! mon Dieu. Là, c'est une question... Mais, moi, je dirais qu'il faut que les personnes qui vont devoir gérer le fonds soient très près de la population et reviennent constamment à des, pas des consultations formelles qui vont prendre trois semaines, mais reviennent constamment auprès de la population pour vérifier si ce qui a été mis en place répond bien et répond correctement aux besoins. Et ça, c'est important, hein? On ne peut pas gérer... On sait que le besoin est là, on connaît les difficultés, etc., mais il faut vérifier par la vérification, je dirais, mensuelle des effets de ce qu'on a instauré. Sinon, on risque parfois de passer à côté, puis ce serait dommage, hein? Ce serait infiniment dommage parce que le fonds est excessivement important, hein, pour tous les aidants.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, Mme la ministre des Aînés.

Mme Blais: Oui, je voulais vous remercier, je voulais vous dire que, moi, je trouve ça extraordinaire. C'est la deuxième fois que je vous le dis, mais, quand je rencontre des personnes comme vous... Vous avez pris le temps d'écrire le mémoire, vous faites du bénévolat avec votre mari, vous avez bien d'autres choses à faire dans la vie, vous vous êtes déplacée. Moi, en tout cas je comprends pourquoi je me suis engagée civiquement à faire de la politique. Et là ça me donne le goût de continuer quand je rencontre des personnes comme vous, puis ça me donne le goût de me battre pour des causes sociales. Parce que c'est avec des gens comme vous qu'on bâtit une société. Vous l'avez bâtie, mais vous continuez de la construire. Alors, merci beaucoup.

Mme Vaillancourt (Marthe): C'est moi qui vous remercie pour vos mots. Vous savez, j'ai cette année 45 ans d'engagement communautaire. Oui, j'ai bâti le CAVAC. Ah! mon Dieu. 45 ans d'engagement communautaire. Ça, on n'encense pas. J'espère me rendre à 50 ans d'engagement.

La Présidente (Mme Gonthier): Mme la députée de Crémazie.

n(16 h 40)n

Mme Lapointe: Mme la Présidente, merci. Mme Vaillancourt, vous êtes inspirante. Vous êtes inspirante. Et effectivement, je pense que, quand on s'engage en politique, c'est pour faire avancer la société, mais on ne peut pas faire ça dans notre petit cocon, il faut être capable d'écouter, d'entendre, de voir puis d'aller dans le milieu.

L'AQDR, effectivement, fait un travail formidable. J'ai rencontré votre directeur général il n'y a pas très longtemps, et je sais que votre président est en Floride. Il est malchanceux.

Mais merci pour le mémoire qui finalement met beaucoup d'humanité autour de tout ce qu'on discute de très technique depuis deux jours. Vous parlez d'intégration des services, vous parlez des services et des soins à domicile. Vous parlez de formation, de sensibilisation de la population, de prévention. Soyez assurée que ce mémoire-là, là, ça ne s'en va pas sur une tablette, hein, ce n'est pas quelque chose, là, qui va tomber dans l'oubli.

Vous savez que le fonds prévoit que 75 % des sommes qui y seront déposées chaque année, sur un 20 millions la première année par exemple, 75 % iront à des organismes, à des groupes, à des carrefours, enfin, qui s'intéressent à des proches aidants ou des aidants ou des aidants effervescents. Vous disiez...

Une voix: Des proches effervescents.

Mme Lapointe: Des proches effervescents qui s'occupent de personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Comment voyez-vous ça avec votre expérience, 45 ans de services, de bénévolat, de services à vos concitoyens et concitoyennes, comment voyez-vous ça, 25 % seulement, ou enfin 25 % déjà qui seraient consacrés à d'autres incapacités, disons, d'autres maladies du vieillissement?

Mme Vaillancourt (Marthe): C'est difficile, vous savez. C'est difficile, quand on a mon âge, de ne pas être très sensible à la maladie d'Alzheimer. C'est pour ça que je disais, au tout début, là, bon, il y a d'autres maladies aussi, d'autres troubles cognitifs et paralysies qui demandent de l'aide. Mais c'est sûr que, je le disais, c'est la maladie qui fait peur et c'est la maladie dont on ne sait pas à quel moment on peut la subir. Alors, quand on entend que des sommes sont données à la maladie d'Alzheimer, on dit: Bien bravo! Si ça m'arrive, ils auront des dispositions pour m'aider. Mais en même temps, les deux situations que je cite dans le mémoire sont justement des personnes qui m'ont dit: Écoute, nous, les personnes qu'on aide, là, ce n'est pas Alzheimer. Mais ce que nous disait, finalement, la madame au foyer, elle me disait: Je suis aussi poignée qu'eux autres. Alors, je me voyais mal ne pas reconnaître ce besoin-là, mais en même temps je me sens, comme cette personne-là, un peu en porte-à-faux vis-à-vis une maladie, alors que je suis très consciente qu'il y en a une infinité d'autres, aidants auprès d'une infinité d'autres, difficultés. Mais, quand il s'agit d'Alzheimer, on est tous un peu sur la branche.

Mme Lapointe: Oui, on se sent tous vulnérables, hein, je pense. On pense à nos parents, on pense à des personnes qui nous entourent. C'est bien sûr qu'on pourrait dire que c'est un fonds de 400 millions qui va s'en aller à la maladie d'Alzheimer, puis il y en aura un autre de 200 millions ou 300 millions qui ira pour d'autres maladies, mais en ce moment ce n'est pas ce qui est sur la table. J'ai l'impression que les besoins sont tellement grands, je ne sais pas comment ça va pouvoir se répartir. Ça va être à mon sens très difficile, il va falloir qu'on regarde ça avec beaucoup d'attention.

Parce que, si on prend un cas, par exemple, on prend la ville d'Arvida, on prend votre région, je suis certaine qu'il y a déjà beaucoup d'espoir face à ces nouvelles sommes d'argent qui vont donner du soutien.

Mme Vaillancourt (Marthe): Oui, effectivement, mais, moi, j'aurais peut-être réparti un peu différemment, là. Mais je reviens toujours à ce que je vous disais: Critiquer ou... les gens d'Alzheimer, c'est bien difficile. Cependant, quand je les entendais, tantôt, qu'ils disaient qu'ils développaient des expertises, je me disais: Peut-être que ce qu'ils développent pourra être utile aussi pour les autres personnes qui ont des besoins, mais ça reste que...

Ensuite, je me suis dit: Bien, il faut commencer quelque part. Cette maladie-là génère de grands besoins. Nous, on aura... Nous, j'entends les personnes qui s'adressaient à moi l'autre jour. Je me disais: Bon, les besoins sont aussi flagrants, peut-être trouverons-nous aussi quelques sous pour aider les autres personnes qui travaillent auprès des personnes atteintes. On verra...

Mme Lapointe: Je vous remercie beaucoup, Mme Vaillancourt.

Mme Vaillancourt (Marthe): De rien.

Mme Lapointe: Soyez assurée qu'on va travailler très, très, très fort pour que ce projet de loi réponde aux besoins, aux attentes le plus possible. Merci.

La Présidente (Mme Gonthier): Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue, Mme Asselin-Vaillancourt, puis bravo! J'espère que j'aurai votre vigueur, votre énergie intérieure et extérieure à votre âge. En tout cas, ça ne me fait pas peur quand je vous regarde.

Et, cela étant dit, moi, je vous invite à vous procurer le mémoire du Dr Réjean Hébert, parce que notre préoccupation, bien sûr, ici, c'est relatif au projet de loi n° 6, aux aidants naturels qui sont, comment je dirais ça, occupés par des proches qui ont la maladie d'Alzheimer ou des maladies connexes. Et on a aussi une préoccupation, vous et moi, de tous les autres aidants naturels. Puis maintenant, on a effectivement, comme vous, votre... une de vos dernières phrases, c'était par rapport à toute cette expertise qui est développée par rapport à une problématique particulière, mais comment on fait pour la diffuser. On a des moyens modernes de communication, maintenant, pour diffuser, partager cette expertise, des sites Web, par exemple, moi, ça, je nous invite à le faire de plus en plus.

Mais quand on regarde le questionnement du Dr Hébert, puis vous avez eu ce même questionnement, Mme Vaillancourt, à la page 6. Vous vous inquiétez de la crise économique et des répercussions que ça va avoir sur les gens. Parce que c'est vrai que les retraités, vous êtes ici pour des retraités, pour représenter des retraités qui viennent de perdre des pas mal gros morceaux de leur fonds de retraite, qui vont... qui sont les parents ou grands-parents, hein, qui ont eu deux enfants. Moi, j'en ai eu deux, bon, bien, tu sais, il y en a eu trois, mais à un moment donné, des fois, on regarde autour de nous, on dit: Woups! Moi, j'ai fait un pacte avec mes soeurs pour dire que, quand une de nous ? on est quatre ? quand une de nous va être atteinte par quoi que ce soit, on va être là pour les aider, les trois autres, là. Alors... mais ce n'est pas comme ça dans toutes les familles, puis ce n'est pas possible dans toutes les familles.

Et vous dites: «La crise économique aura des répercussions importantes sur les populations appauvries. Elle générera, selon la Coalition Santé, une croissance de la pauvreté, une aggravation de celle-ci, qui ne se réduiront pas avec la reprise économique et qui auront des répercussions sociétales à toutes sortes de niveaux. Par exemple, il faudra peut-être travailler plus longtemps, alors on sera moins disponible pour aider, on disposera de moins d'argent pour défrayer un service d'aide en privé. Il faut donc personnellement et collectivement se préparer à ce besoin d'aidant naturel.»

Puis là le monde sont venus nous parler de besoin de répit, ils sont venus nous parler de lieux de répit, puis qu'ils ont de moins en moins d'argent pour en avoir, de ces lieux de répit. Nous autres, on peut s'en aller passer une fin de semaine dans un hôtel, le spa, tu sais, il y en a qui peuvent le faire, mais la majorité de la population ne le pourra pas.

Et le Dr Hébert, il parle aux pages 5 et 6 de... il appelle ça ? attendez que je le retrouve ? le PSA. Le PSA, la prestation de services à l'autonomie. Il dit que: «Nous proposons de créer une prestation de soutien à l'autonomie qui permettrait de rendre le financement de la perte d'autonomie plus simple, plus équitable et plus calquée aux besoins des personnes.» Puis il dit: «La PSA permettrait aux individus et à leur famille de choisir la gamme de services dont ils ont besoin et les types de dispensateur qu'ils préfèrent. Elle donnerait aux aînés un véritable choix quant aux services qu'ils souhaitent, sans introduire d'incitatifs indus à utiliser l'hébergement en CHSLD.»

Qu'est-ce que vous pensez de tout ce soutien fiscal, de dispositions qui pourraient aider les retraités ou les gens qui s'en vont vers la retraite, parce que souvent, c'est à 45, 50, 55 ans qu'on commence à penser à ces choses-là qui peuvent nous atteindre? Comment vous voyez ça, vous, qui êtes une retraitée de quelques années, avec votre grande sagesse?

n(16 h 50)n

Mme Vaillancourt (Marthe): Moi, j'ai infiniment confiance au Dr Hébert et je me dis: La proposition qu'il fait, je ne l'ai pas en ma possession, mais je pense qu'on devrait la regarder à l'AQDR. Toutes les propositions de ce genre-là, il faut les étudier en tant que retraité et les appuyer si on pense que ça peut être bénéfique pour notre société, hein? Il n'y a pas de proposition qui ne mérite pas qu'on s'y attarde, et je pense que ce qu'il propose est tout à fait adéquat. Cependant, il me faudrait lire le document avant d'aller plus loin, là. Je n'ai pas vu vraiment sa proposition.

Mme Doyer: Je vous invite, Mme Vaillancourt, à aller regarder ça puis peut-être, dans d'autres forums, nous donner des avis sur ça.

Mme Vaillancourt (Marthe): Oui. On peut écrire à Mme la ministre, j'imagine, notre réaction sur ce document?

Mme Doyer: C'est vrai, oui. Pourquoi pas? On va demander à ce qu'une copie du mémoire vous soit donnée.

Mme Vaillancourt (Marthe): D'accord.

Mme Doyer: Parce que, vous voyez, il parle de l'ensemble des mesures qui sont parcellaires, inéquitables, insuffisantes, mesures fiscales et financières pour les mesures de soutien au financement à l'autonomie. Il parle de crédits d'impôt pour maintien à domicile que vous connaissez, crédits d'impôt pour aidants naturels, chèques emploi-services, programmes d'exonérations financières pour le soutien à domicile. Il dit: «Ces mesures sont parcellaires, et certaines, comme les crédits d'impôt, ne sont pas basées sur les besoins des aînés en perte d'autonomie et sont modulées en fonction des revenus des individus.»

Il y a 40 % des gens qui ne paient pas d'impôt, au Québec. Il y a beaucoup de gens qui sont démunis, pauvres. Moi, je n'ai pas peur de ça, le mot «pauvreté», je le trouve politiquement correct puisque ça existe.

Mme Vaillancourt (Marthe): Oui.

Mme Doyer: Alors, à un moment donné, bien, il faudrait peut-être s'ajuster à ça.

Mme Vaillancourt (Marthe): Il est certain qu'il faudra de nouvelles mesures, c'est certain, certain, compte tenu de tout ce qu'on a élaboré tantôt, là, et de tout ce que vous avez reçu certainement dans les mémoires antérieurs. C'est très clair qu'il faut avoir autre chose que... Même si le soutien immédiat est primordial, même si c'est une urgence, il faut aller au-delà de ça parce que... compte tenu de ce qui s'en vient dans la société, hein?

Quand on parle de trois générations de retraités, là, s'ils ont des sommes pour s'entraider, bon, bravo, hein, mais c'est pas toujours là, hein? La pauvreté, elle est là aussi.

Mme Doyer: Je vous remercie, madame.

Mme Vaillancourt (Marthe): De rien.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, M. le député de Mercier, en quatre minutes.

M. Khadir: Quatre minutes. D'abord, l'aidante surnaturelle que vous êtes, parce que vous n'êtes pas naturelle...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Khadir: ...doit savoir que, quand Mme la ministre, disons, vous demande votre secret du vieillissement actif, vous devriez lui demander son secret du rajeunissement actif parce que, ministre comme elle l'est, elle continue à être aux études, elle fait un postdoc, puis que sais-je encore? Donc, comme elle est jeune, je me permets de critiquer quand même, avec plus de vigueur encore, un peu les dimensions qu'il y a dans son projet de loi.

En fait, ce n'est pas tant elle que les mesures qui doivent accompagner pour que ce ne soit pas juste un pansement. Parce que c'est sûr qu'il y a des mesures nécessaires, comme à l'urgence d'un hôpital, on a les pansements pour guérir des plaies mais on se pose toujours la question: Comment prévenir le reste ou comment avoir une approche qui évite ça?

Vous avez parlé d'appauvrissement, quoique, là encore... Mettons, si M. Sabia, là, hein, qui vient d'être nommé, avec son 500 000 $, s'il décide, pour sa mère, d'abandonner son poste, de renoncer au bonus puis à son salaire pour s'occuper de sa mère, c'est que lui estime qu'il y a un enrichissement dans ce fait-là. Donc, avec les termes des fois, c'est que le don, le fait de s'occuper de ses parents, ou de ses proches, ou de quelqu'un comme ça, il y a un don là-dedans, il y a un enrichissement aussi. Mais, si on tient compte des conditions de vie des retraités que vous représentez, est-ce qu'une approche plus systémique ne serait pas qu'on augmente les prestations de retraite quand la plupart des retraités...

Autrement dit, l'effet que pourrait avoir sur les proches aidants, s'il y a des revenus disponibles pour la personne atteinte d'une maladie chronique ou pour l'Alzheimer ainsi que les retraités qui s'occupent de leurs parents ou d'un proche, est-ce que ça n'aurait pas un effet plus global?

Mme Vaillancourt (Marthe): Peut-être, peut-être qu'on a le... Moi, je vais regarder le document du Dr Hébert, là, puis ensuite je pourrais vous répondre au sujet de l'approche globale, là, parce que...

M. Khadir: Le PSA, le PSA, c'est comme un supplément pour l'autonomie, n'est-ce pas?

Mme Vaillancourt (Marthe): Oui.

M. Khadir: Soutien à l'autonomie, ce qui pourrait avoir comme effet pervers, peut-être, d'engager dans un espèce de, je dirais, contrôle, à savoir qui est autonome, qui prétend ne plus être autonome, ou tout ça, alors que, si c'est des prestations universelles de nos retraités qui sont majorées pour leur permettre de...

Une voix: Ce n'est pas la même chose.

M. Khadir: Non, ce n'est pas la même chose? D'accord.

Une voix: Non, je vous invite à le lire, puis...

M. Khadir: Je le lirai en temps opportun. Mais ce que je veux dire... Autrement dit, si... Plutôt que d'aider les proches aidants indirectement pour palier à leurs problèmes, s'il y a une disponibilité de revenus qui pourrait permettre aussi... Parce que, quand on a plus de revenus... Moi, j'ai un collègue qui... son épouse... comme c'est un collègue médecin, son épouse qui a la sclérose en plaques, il peut quand même mieux s'en occuper; ça le prive moins de sa liberté parce qu'il a les moyens de suppléer.

Mme Vaillancourt (Marthe): Et M. Sabia ne sera pas non plus privé de beaucoup. S'il a 500 000 $, il pourra payer, à un moment donné, des soins en privé, ce que ne se permettent pas tous les aidants. Puis il y a des contingences dans la société, il y aura toujours des différences, mais il faut...

Je ne sais pas. Vous savez, la personne qui aurait «la» solution, là, je voudrais bien qu'elle vienne s'asseoir ici, là, puis qu'elle nous la donne. «La» solution, comme je dis toujours, ça, c'est universel, ça fait pour tout le monde, ça couvre tous les besoins, etc., mais ça organise des maisons intergénérationnelles puis, bon, bon, bon, tout le monde est correct. Mais ça, on ne l'a pas, hein? Ni le Japon ni l'Espagne, qui travaillent là-dessus depuis des années, n'ont la solution qui va faire que tous les aidants vont être heureux, tous les aînés vont être satisfaits, etc.

Cependant, il faut tendre à plus. Il faut tendre à ce qu'on donne plus, à ce que nos aidants soient préservés de faire des dépressions et des burnouts, et c'est ça, il faut consolider les services qu'on a déjà grâce aux aidants et il faut prévoir, il faut faire de la prévention, il faut penser. Quand je parlais tantôt du rétrécissement des familles, des personnes qui vivent seules, pour qui il faudra choisir les aidants, dans quelle sphère, hein? Où ils seront, les aidants?

Là, les boomers ont eu beaucoup tendance à vivre entre amis, hein? Ils créaient des clans très forts où mes amis, c'est mes amis. Est-ce que ça va se perpétuer quand ils vieilliront, qu'ils auront des besoins? Bien, je leur souhaite, je leur souhaite parce qu'une bonne amitié, c'est aussi précieux dans la vie, hein? Eux, ils seront peut-être... Je ne sais pas comment on va les appeler. Seront-ils naturels ou amicaux? Ce sera des aidants amicaux.

La Présidente (Mme Gonthier): Mme Vaillancourt, je vous remercie énormément d'avoir partagé votre grande sagesse avec les membres de la commission.

Alors, la commission ajourne ses travaux au mardi 31 mars, à 9 h 30, dans cette même salle, afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 6. Alors, bon week-end à tous.

(Fin de la séance à 16 h 59)


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