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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Tuesday, September 9, 2003 - Vol. 38 N° 8

Consultation générale sur le projet de loi n° 9 - Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-deux minutes)

Le Président (M. Ouimet): À l'ordre, s'il vous plaît! Il est passé légèrement 9 h 30. Je constate que nous avons quorum. Je déclare la séance de la commission de l'aménagement du territoire ouverte et je demanderais à toutes les personnes de bien vouloir fermer leurs cellulaires.

Le mandat de la commission de l'aménagement du territoire est de tenir des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard du projet de loi n° 9, Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités.

Organisation des travaux

Puisque nos travaux vont s'échelonner sur une douzaine de séances au cours des mois de septembre et d'octobre, je vais prendre quelques instants avant l'annonce des remplacements pour établir un certain nombre de lignes directrices quant à l'organisation de nos travaux.

Je serai vigilant quant au maintien du décorum et je ferai appliquer et respecter notre règlement. Il est possible que la salle soit à l'occasion occupée à pleine capacité. Je demanderai alors la collaboration de toutes les personnes dans l'assistance pour favoriser le bon déroulement de nos travaux. Au besoin, nous ferons installer des téléviseurs à l'extérieur de la salle pour vous permettre de suivre nos travaux.

Je vous informe également que j'ai l'intention de répartir les temps de parole de la manière suivante. Suite à la présentation de chaque mémoire, je donnerai d'abord la parole au ministre puis à la porte-parole de l'opposition officielle, pour une période n'excédant pas 10 minutes consécutives. Je poursuivrai ensuite par alternance entre les députés de la majorité et ceux de l'opposition en accordant la parole au premier député à s'être manifesté, et ça, pour une période n'excédant pas 10 minutes consécutives. Chaque député peut bien entendu prendre la parole à plus d'une reprise.

Je termine en insistant sur le fait que les membres de la commission travaillent depuis plusieurs semaines à prendre connaissance des mémoires et à organiser le déroulement de ces auditions. Je tiens spécialement à souligner l'unanimité qui a régné au sein de la commission lors de nos réunions de travail, et ça, malgré les divergences de vues qui se posent à l'égard du projet de loi n° 9. J'en profite donc pour remercier de leur précieuse implication le vice-président de la commission et député de Blainville, l'adjoint parlementaire du ministre, le député de Frontenac, la porte-parole de l'opposition officielle, la députée de Bourget, ainsi que le député indépendant de Beauce-Nord.

Alors, voilà pour les lignes directrices. Maintenant, M. le secrétaire, avons-nous des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Deslières (Beauharnois) est remplacé par Mme Lemieux (Bourget) pour la durée du mandat.

Le Président (M. Ouimet): Très bien. Merci. Alors, nous allons maintenant poursuivre avec les remarques préliminaires. M. le ministre, la parole est à vous pour une durée de 15 minutes.

Remarques préliminaires

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. À l'ouverture de cette première séance des auditions publiques sur le projet de loi n° 9, j'aimerais d'abord remercier tous les participants et souligner la qualité de leur collaboration. Je salue notamment les représentants du monde municipal, les gens du milieu des affaires et de la sphère syndicale, et particulièrement les nombreuses associations de citoyens et les particuliers qui ont saisi cette occasion d'exercer leur citoyenneté en participant au débat public sur l'avenir de leurs communautés.

Dans les années et les mois qui ont précédé l'élection de notre gouvernement, le Québec a été secoué par une restructuration municipale qui a mis beaucoup de sensibilités à vif. Les nombreux regroupements municipaux, aussi souhaitables qu'ils puissent être, ont été imposés sans consultation des principaux intéressés. C'est cette façon de faire qui a d'abord donné lieu à un engagement politique. Puis l'attention importante portée à cet engagement tout au long de la campagne électorale a transformé cet engagement en un enjeu électoral. Finalement, le résultat de l'élection a fait de cet enjeu un mandat de gouvernement.

Nous sommes convaincus que le déficit démocratique qui résulte des regroupements forcés fissure la fondation même des nouvelles communautés locales que l'on a voulu édifier. Le projet de loi n° 9 vise à combler ce déficit qui nuit à l'essor des nouvelles villes.

L'objectif premier est de permettre aux citoyens des municipalités ayant fait l'objet d'un regroupement non volontaire de se prononcer une fois pour toutes sur l'avenir de leur secteur. Il propose un processus qui assure que leur décision soit prise en toute connaissance de cause, en considérant les solutions de réaménagement proposées par les nouvelles villes, les coûts d'une scission ainsi que la fiscalité d'agglomération et la péréquation prévues dans le projet de loi. Le projet de loi est ainsi axé sur la nécessité de l'adhésion des citoyens au projet touchant l'avenir de leurs communautés. Je le répète, on ne bâtira pas une grande ville démocratique par la force, car le succès d'une ville repose sur un sentiment d'appartenance qui ne s'impose pas mais qui se cultive.

C'est pourquoi, conjointement à la mise en place du processus de consultation publique, notre gouvernement soutient la démarche des nouvelles villes qui élaborent des propositions de réaménagement administratif afin d'améliorer leur fonctionnement. Notre but est de susciter l'adhésion des citoyens à leur ville nouvelle, notamment en appuyant une démarche axée sur la recherche de la bonification des services de proximité. Si une ville se doit d'être porteuse d'une vision de développement économique et social, elle est d'abord une institution publique née de la volonté des individus de se donner en commun des services publics qui répondent aux besoins de base et qui garantissent la qualité de vie.

Les regroupements forcés ont eu pour effet de fragiliser ce contrat social entre les citoyens et la communauté et l'institution juridique et politique qu'est la municipalité. C'est ce lien que nous souhaitons ardemment retisser en étroite collaboration avec les élus des villes nouvelles. La réussite des nouvelles villes comme celle de toutes les municipalités passe par la recherche de l'adhésion volontaire du plus grand nombre de citoyens et de citoyennes.

Ce constat m'amène à discuter du processus de consultation qui doit nous assurer de faire naître la légitimité nécessaire au fonctionnement optimal des municipalités. J'ai déjà dit qu'en vue de nous assurer d'un résultat significatif il fallait compter sur une participation significative de la population à la consultation. Le projet de loi dans son état actuel ne précise pas ce que représente une participation significative. Serait-il alors opportun d'ajouter un taux minimal de participation et, si oui, quel taux retenir comme seuil en deçà duquel un résultat d'au moins 50 % plus un des votes valides ne serait plus considéré affirmatif?

J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer le problème de légitimité que peut poser potentiellement une telle règle. Si nous ne l'avons pas retenue, c'est qu'elle peut inciter les partisans des nouvelles villes à ne pas participer au scrutin référendaire dans l'espoir que le taux minimal ne soit pas atteint. Par ailleurs, ne pas exiger un taux minimal comporte deux contraintes importantes. D'abord, si plus de la moitié de la population ne participait pas à la consultation, ne devrait-on pas conclure que l'opération de démantèlement ne mobilise pas une majorité et, alors, comment justifier de la leur imposer? Comment prétendre que l'illégitimité de la fusion pourrait être corrigée par l'illégitimité de la défusion? Ensuite, qu'en est-il de ces conflits de légitimité si la participation à la consultation référendaire était inférieure à la participation électorale qui a offert la légitimité de représentation aux élus des nouvelles grandes villes?

n (9 h 40) n

Si l'adhésion est importante pour le succès des nouvelles villes, elle le sera tout autant pour le succès d'une ancienne municipalité qui serait reconstituée dans un contexte nouveau. Il est donc primordial que le résultat du scrutin et son interprétation reflètent bien la volonté réelle des citoyens, qu'ils cristallisent en quelque sorte leur solidarité. Il nous faut trouver la meilleure approche pour nous en assurer. Il y a des pour et des contre quelle que soit la règle retenue, et j'aimerais entendre les participants à cette commission parlementaire s'exprimer sur ce conflit de légitimité et sur la meilleure solution à y apporter.

Bien entendu, le projet de loi ne se limite pas qu'aux règles de consultation mais introduit aussi différents enjeux relatifs aux règles d'agglomération. Nous désirons ainsi introduire des mécanismes qui visent un partage juste et équitable des coûts liés aux services et responsabilités régionales. Il est donc déjà clair qu'il n'est pas question par le biais du projet de loi n° 9 de recréer le statu quo ante des municipalités fusionnées. On comprendra que le projet de loi n° 9 ne peut pas contenir tous les éléments concernant l'agglomération, étant donné la multitude de situations possibles à la suite de la tenue des référendums. Je veux cependant énoncer ici quelques grands principes que j'entends appliquer dans la grande majorité des cas, étant bien entendu que des circonstances exceptionnelles peuvent dicter d'autres choix.

D'abord, en ce qui concerne les règles permanentes de gestion des compétences d'agglomération, la situation se présente différemment selon que le mouvement de scission dans une agglomération est important ou non. Si, à l'issue des référendums, une agglomération ne comporte que deux ou trois municipalités, il va de soi que la solution devra passer par une entente intermunicipale selon laquelle la municipalité la plus populeuse continuera d'offrir les services à sa ou ses voisines contre un financement approprié. Si, par contre, l'agglomération compte un nombre significatif de municipalités, il y aura sans doute nécessité de créer un organisme supramunicipal le plus léger possible. Dans une telle éventualité, je ne crois pas que la ville-centre devrait avoir moins de pouvoirs et exercer moins d'influence que dans la situation antérieure à la fusion. En fait, dans bien des cas, son influence sur l'organisme supramunicipal sera nettement accrue du fait de son poids démographique qui sera le principal critère dans l'établissement des règles de gestion de l'organisme.

Par ailleurs, les délais que j'envisage de fixer aux municipalités pour la conclusion éventuelle des ententes se situe entre trois et six mois, selon la complexité des situations. En effet, si l'on ne réussit pas à conclure des ententes dans ces délais, il est peu probable que l'on y parvienne plus tard. Il n'est donc pas souhaitable de faire perdurer indéfiniment une situation transitoire.

Concernant justement cette situation transitoire, j'entends adopter les règles suivantes, sauf dans les cas exceptionnels. En attendant la conclusion d'une entente ou l'imposition de règles permanentes par le gouvernement, la ville-centre continuera d'offrir les services d'agglomération à sa ou ses voisines qui les financeront à la même hauteur qu'elles le faisaient dans la municipalité regroupée. Ces règles transitoires seront inscrites dans les actes constituant les municipalités reconstituées ainsi que dans les actes modifiant le territoire de la ville-centre.

Par ailleurs, certains intervenants voudraient que l'on fasse du développement économique une compétence d'agglomération au même titre que les autres compétences énumérées à l'article 48. Étant donné les liens qui existent entre le développement économique et l'aménagement du territoire, cette position me semble digne d'intérêt. En effet, l'article 66 du projet de loi n° 9 désigne l'aménagement du territoire comme une compétence d'agglomération, sauf dans le cas où la ville regroupée fait partie d'une MRC ou d'une communauté métropolitaine. Dans ces cas, en effet, soit que la MRC exerce déjà la compétence ou soit que la communauté métropolitaine l'exercera à partir de 2006 pour Montréal et 2007 pour Québec.

Il me semble effectivement que certaines fonctions stratégiques liées au développement économique pourraient fort bien relever de l'agglomération, comme la planification du développement, la promotion internationale ? sauf pour les agglomérations dans les communautés métropolitaines qui ont déjà ce mandat ? la promotion nationale et la promotion touristique.

Toutefois, il m'apparaît que d'autres fonctions, comme la gestion des infrastructures d'accueil d'entreprises, ont avantage à s'exercer à une échelle plus locale. Personne ne cherche évidemment à favoriser la concurrence indue entre municipalités d'une même agglomération. On pourrait donc penser à interdire toute forme de subvention locale ou de baisse de taxes privilégiant une entreprise ou une industrie particulière. On ne permettra alors de telles subventions qu'à l'échelle d'un organisme d'agglomération dans lequel la ville-centre jouerait un rôle prépondérant. On pourrait envisager d'y associer aussi des représentants du secteur privé, comme c'est de plus en plus souvent le cas dans les corporations de développement économique, et peut-être aussi des représentants du gouvernement afin d'assurer une meilleure coordination entre les efforts de développement municipaux et gouvernementaux. On pourrait instaurer parallèlement des mécanismes inspirés d'une formule de partage d'une portion de croissance de l'assiette foncière industrielle et commerciale pour s'assurer que le développement économique bénéficie à tous les secteurs de l'agglomération. Ce ne sont là que quelques pistes possibles, et je suis très intéressé à connaître les suggestions des participants en matière de développement économique.

Le projet de loi, M. le Président, est perfectible, sinon pourquoi tenir une consultation? Et je suis désireux qu'il soit amélioré dans le sens des principes qui nous ont guidés pour en proposer le dépôt. Les élus municipaux ont demandé que les études les plus complètes possible sur les coûts et les conséquences des projets soumis à la consultation soient disponibles avant l'ouverture des registres. J'ai déjà accepté cette suggestion, étant entendu que ces études pourront être complétées par des études plus fouillées une fois connu le résultat de la tenue des registres, lorsque la tenue d'un scrutin référendaire en découlera. Je prendrai en considération l'ensemble des propositions soumises et je resterai pour l'instant en mode d'écoute, car je tiens à ce que l'apport des participants à la consultation en cours se traduise par une bonification importante du projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet): Alors, merci, M. le ministre, pour vos remarques préliminaires.

On me signale un autre remplacement. Mme Vien, députée de Bellechasse, est remplacée par Mme Houda-Pepin, députée de La Pinière.

Alors, Mme la porte-parole de l'opposition officielle et députée de Bourget, je vous cède la parole.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je salue les membres de cette commission ainsi que les gens qui vont y participer à titre de représentants de différentes composantes de la société québécoise.

D'abord, M. le Président, j'ai écouté avec attention les propos du ministre responsable des Affaires municipales et j'avoue que je suis un peu étonnée, puisque le ministre nous présente dans ses remarques préliminaires la discussion qu'il espère avoir ici à l'occasion de cette commission parlementaire et il prend pour acquis que ce projet de loi a toute la légitimité, que la pertinence en est démontrée, que les objectifs, les résultats attendus collectivement sont consensuels et que ce que nous allons faire au cours de cette commission parlementaire, c'est de discuter, d'améliorer les modalités.

M. le Président, je voudrais signaler d'entrée de jeu, d'abord, que j'ai pris connaissance de tous les mémoires et, s'il y a une première chose qui me frappe, c'est autant le ministre cherchait et prétendait l'adhésion aux nouvelles villes, autant il n'y a pas d'adhésion à son propre projet de loi. Et le premier groupe d'interlocuteurs qui m'apparaît les plus importants, c'est évidemment les élus municipaux, qui ont été démocratiquement élus.

D'ailleurs, c'est frappant de constater que tous, à l'occasion des dernières élections municipales, ont plaidé l'organisation, l'unification de ces nouvelles villes. Ces élus municipaux demandent de toutes sortes de manières soit que le projet de loi soit retiré, soit qu'ils ne soient pas assujettis pour différents motifs à ce projet de loi.

Alors, il n'y a pas d'adhésion à la pertinence de ce projet de loi, et c'est un premier test qui est raté, d'autant plus que, lorsqu'on dépose un projet de loi, il me semble, et pour avoir occupé et avoir posé ces gestes dans le passé, il me semble qu'au moment d'un dépôt on se doit de recueillir des appuis minimaux de différents groupes d'intérêts, et ce n'est pas le cas.

Deuxième élément que je voudrais souligner: le fait que le simple geste de déposer ce projet de loi n° 9 a attisé les tensions, a fait en sorte que ce qui ne nous apparaissait pas pensable il y a quelques mois pourrait se réaliser. En d'autres mots, je présume et je fais le pari que le gouvernement du Parti libéral, en faisant cet engagement et cette promesse électorale de défusion, que le ministre des Affaires municipales, en déposant ce projet de loi, se sont dit: Somme toute, ce sera des décisions de manière marginale. Or, nous avons des indices aujourd'hui clairs ? je peux faire allusion au sondage de Léger & Léger de la semaine dernière ? en plus du fait qu'il y a d'autres indices objectifs que le processus de défusion est déjà enclenché et que ça a été le dépôt du projet de loi qui a fait en sorte que ce processus soit déjà engagé.

n (9 h 50) n

Autre élément que je voudrais souligner au ministre, c'est le fait que les élus municipaux sont dans une position insoutenable. Insoutenable. Ils ont été élus démocratiquement, on leur a... chacun des maires, comme je le disais, a proposé de s'engager au succès et à la réussite de ces villes unifiées. Nous faisons porter le poids... le gouvernement fait porter le poids sur les élus municipaux de sa promesse électorale. C'est aux municipalités qui auront à vivre avec ces résultats à gérer ce processus, à gérer les multiples ententes à négocier entre les uns et les autres. Donc, le gouvernement libéral fait preuve, tant qu'à moi, de grande irresponsabilité en faisant porter le poids de cette promesse de défusion municipale.

Par ailleurs, se pose la question des coûts. Combien coûteront ces processus de référendums multiples? Parce qu'ils risquent d'être nombreux. Combien sommes-nous prêts à payer pour nous nuire? Combien cela coûtera-t-il à ceux et celles qui restent, à ceux et celles qui partent? Ces informations ne seront connues qu'après les processus de référendums. Les mécanismes proposés, par exemple la péréquation, est-ce une prime à la défusion? On voit bien que ce mécanisme ne fait pas du tout consensus auprès des principaux intervenants. Quels seront les coûts pour les services aux citoyens, pour les citoyens? Nous ne connaissons pas cette information au moment où nous étudions ce projet de loi et surtout au moment où ces référendums pourraient avoir lieu.

Combien d'investissements perdus ? parce que les interlocuteurs au coeur de cette tourmente sont des dirigeants municipaux, des élus municipaux et qu'ils sont préoccupés par bien d'autres choses ? combien d'investissements perdus devant cette paralysie provoquée par ce projet de loi? Combien d'emplois perdus? Qu'en est-il des relations de travail? Et ça, c'est assez fascinant de voir que le projet de loi est quasi silencieux sur cette dimension.

Et ce n'est pas banal, je ne crois pas me tromper, M. le Président, en disant que la fonction publique municipale québécoise s'est mobilisée pour le succès des nouvelles villes. Peu importent leurs fonctions, qu'ils soient cols bleus, cols blancs, professionnels, travailleurs terrains, cadres, ils se sont mobilisés. Et, dans plusieurs cas, l'opération est complétée; pour d'autres villes, l'opération va bon train. Ces gens, ces hommes et les femmes qui gagnent leur vie dans les municipalités ont contribué au succès de ces nouvelles villes. Or, silence sur cet aspect dans le projet de loi, silence sur le sort des conventions collectives conclues ces dernières semaines ou qui pourraient l'être au cours des prochaines semaines, silence sur le fait que ces hommes et ces femmes qui travaillent dans les villes n'ont aucune idée de ce qui se passera pour eux pour la prochaine ou les deux prochaines années. Bref, comme l'a dit si judicieusement un maire, faire, défaire et refaire, ça coûte cher. Et je crois que le gouvernement agit là encore de manière irresponsable en faisant croire aux gens que ces choses seront négociées après coup et qu'il n'y aura pas de coûts supplémentaires.

M. le Président, ce matin, alors que nous allons amorcer cette étude du projet de loi n° 9, des villes de taille similaire aux villes qui seront présentes au cours de cette commission parlementaire se sont organisées. Des villes, des municipalités se sont renforcées ces dernières années. On n'a qu'à penser à nos principales concurrentes au Canada, aux États-Unis: Toronto, Ottawa, Boston. Nos villes ont le devoir d'être fortes et d'être capables de se doter de stratégies cohérentes pour faire face à l'avenir. N'y aura-t-il que la ville de Laval qui aura une structure moderne, une organisation qui lui permet de faire face aux nouvelles réalités? Pendant ce temps donc, des villes en compétition avec les nôtres sont organisées, et, nous, le gouvernement du Québec invite nos municipalités à s'empêtrer dans des concurrences régionales et locales stériles. Pendant ce temps, les grandes villes du monde entier s'organisent.

Alors, M. le Président, il m'apparaît évident que, d'abord, le ministre a une responsabilité à court terme, puisque le dépôt de son propre projet de loi a provoqué le retour de tensions. Peu importent les motifs, qu'ils soient linguistiques, économiques ou sociaux, il se doit de reconnaître ce qu'il a provoqué. Et finalement, ce projet de loi, tant qu'à moi, n'a qu'une seule issue, celle d'être retiré. C'est un projet de loi qui prête à confusion, qui prétend une chose et son contraire: l'appui aux villes et paver la voie à leur démantèlement. Ce projet de loi confond les libertés et l'expression des libertés individuelles et la démocratie. Ce projet de loi doit être retiré parce que ce projet de loi est une imposture. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet): Alors, merci, Mme la porte-parole de l'opposition officielle, pour vos remarques préliminaires. Je cède maintenant la parole au député de Beauce-Nord. La parole est à vous.

M. Janvier Grondin

M. Grondin: Alors, bonjour, M. le Président, bonjour, mes collègues. Nous sommes réunis aujourd'hui dans le but d'entendre des représentants des villes, municipalités, des regroupements de citoyens, d'experts et de divers autres intervenants qui ont été interpellés par cet important projet de loi, important parce qu'il nous interpelle tous sur l'avenir de certaines villes et municipalités qui ont été fusionnées sous le gouvernement péquiste, morcelées et... Attendez un peu, là. Je voudrais donc vous souhaiter la bienvenue... Excusez-moi si je suis mêlé un peu dans mes papiers, là, mais ça va revenir.

L'ADQ a bien hâte d'entendre des intervenants à cette commission parlementaire nous expliquer si les nouvelles villes ont, selon eux, eu le temps de démontrer leur bon fonctionnement. Les libéraux s'apprêtent-ils à morceler, à séparer des villes avant même qu'on ait obtenu des bénéfices de ces nouvelles entités? Il ne faut pas oublier que le coeur des préoccupations doit demeurer le citoyen et non la structure. La structure est au service des citoyens et non l'inverse. Nous, à l'ADQ, on ne souhaite pas entrer dans des chicanes que le gouvernement libéral a tenté de créer. Nous croyons qu'il y a possibilité de rassembler et faire en sorte que chacun y trouve son intérêt. L'objectif doit être de s'assurer d'avoir des administrations municipales efficientes et efficaces au service du citoyen contribuable.

L'ADQ se préoccupe d'abord et avant tout du citoyen qui, ultimement, paiera la note et devra vivre avec les décisions du gouvernement. Nous allons demander aux intervenants de cette commission parlementaire de nous dire si, oui ou non, les contribuables des villes touchées devront payer deux fois pour les changements de structure sans jamais recevoir de services en plus. Est-ce que les contribuables québécois devront payer une facture salée pour respecter un engagement électoraliste? Et, si oui, à combien estimez-vous cette facture dans votre coin du Québec?

Je ne peux passer sous silence notre vive inquiétude face à ce projet de loi et la position que l'ADQ a toujours eue à l'égard de ce dossier de fusions et de défusions municipales. Tout d'abord, je voudrais rappeler que nous nous sommes opposés aux fusions forcées du gouvernement précédent, opposés parce que, oui, ces fusions se sont faites de façon antidémocratique et sans tenir compte de la volonté de plusieurs citoyens. Nous croyons que le Parti québécois a sauté plusieurs étapes dans ce dossier, notamment sur la preuve que ces fusions seront profitables aux citoyens.

Ceci étant dit, aujourd'hui, nous croyons que nous ne devons pas revenir en arrière. Il faut regarder en avant parce que, à ce jour, des gens ont travaillé à faire en sorte que ces fusions fonctionnent. Je pense aux maires qui ont été élus dans des élections où l'ensemble des gens ont participé. Il faut poursuivre le travail et chercher à améliorer ces villes. Il ne faut pas envoyer un message négatif comme le fait le projet de loi; il faut mettre nos énergies à bâtir et non à détruire. Ce projet de loi ferme la porte à ce que les villes fonctionnent. L'esprit de la loi ne respecte pas les paroles de notre premier ministre lors de la dernière campagne électorale, où il a dit: Je vais être là pour faire fonctionner les nouvelles villes.

Alors, pour conclure, je voudrais rappeler que le citoyen doit demeurer au centre de nos préoccupations et que, nous, à l'ADQ, on entend défendre leurs intérêts tout au long de cette commission. Merci.

Auditions

Ville de Montréal

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député de Beauce-Nord. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui souhaitent formuler des remarques préliminaires? Alors, sinon, j'invite les représentants de la ville de Montréal et le maire de Montréal à venir prendre place à la table, tout en vous rappelant que vous disposez d'un temps de parole de 20 minutes pour exposer votre mémoire, et puis, par la suite, il y aura des échanges entre vous, les gens qui vous accompagnent et les membres de la commission parlementaire pour une quarantaine de minutes.

n (10 heures) n

Auriez-vous, M. le maire, la gentillesse de nous présenter les gens qui vous accompagnent, bien qu'ils soient bien connus?

M. Tremblay (Gérald): Oui. Alors, M. le Président, M. le ministre, Mme la critique de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales, mes anciens collègues de l'Assemblée nationale, les membres de la commission, mesdames et messieurs, bon matin. Je suis accompagné du président du comité exécutif et président de l'arrondissement Saint-Léonard, M. Frank Zampino, ainsi que du directeur général de la ville de Montréal, M. Robert Abdallah.

En déposant le projet de loi n° 9, le gouvernement du Québec a donné suite à son engagement électoral. Nous respectons cet engagement électoral, mais nous avons toutefois des interrogations au sujet de ce projet de loi. Notre questionnement cherche à enchérir la réflexion de façon à s'assurer que la démarche entreprise soit basée sur des principes solides et éprouvés. Nous invitons d'ailleurs les membres de cette commission à prendre connaissance de ce qui a cours dans d'autres pays pour des situations similaires, cela ne pourra que nous éclairer tous sur la complexité d'une telle démarche. Ce n'est pas notre intention aujourd'hui de passer au travers de toutes ces interrogations, notre mémoire en fait grandement état.

Il y a cependant un autre engagement que le gouvernement a pris, celui d'encourager l'adhésion des citoyens et des citoyennes à la nouvelle ville. Cet engagement s'est concrétisé par le projet de loi n° 1 et la déclaration ministérielle du 20 juin dernier. Nous présumons que, pour le gouvernement, cet engagement a la même valeur que le précédent et qu'il est tout aussi prioritaire.

Le 15 août dernier, nous déposions notre plan de réorganisation Montréal, une ville à réussir ensemble. Le 5 septembre, il a obtenu l'assentiment du conseil de ville. Ce projet sur lequel d'ailleurs nous travaillons depuis les premiers jours de notre mandat a pour but de mettre en place le type de ville que tous les citoyens veulent avoir: une ville humaine, efficace et respectueuse des différences. Ce plan représente notre ferme volonté de promouvoir et de bâtir concrètement une métropole au service premier de ses citoyens. Il propose une organisation décentralisée dans laquelle les arrondissements auront maintenant tous les outils nécessaires pour répondre aux besoins de leurs citoyens et développer leurs milieux.

We believe in the identity and specificity of all boroughs on the Island of Montreal and will continue to promote these advantages of our city.

Ce n'est pas la taille de la nouvelle ville de Montréal qui fera sa réussite. C'est l'unité de celles et de ceux qui y vivent, la cohérence de son développement, la qualité de sa vie démocratique et la mise en commun des efforts de tous pour la rendre plus prospère.

Notre réorganisation rapproche les gens de leur administration locale; elle préconise la solidarité et l'inclusion. Elle repose sur des principes de démocratie active et d'équité. Elle clarifie les rôles et les responsabilités de chacun. Elle garantie l'autonomie des arrondissements, assure la cohésion d'une grande métropole et installe une plus grande imputabilité. Elle s'inscrit dans un courant mondial dans lequel les grandes villes sont appelées à jouer un rôle prépondérant sur tous les plans à l'intérieur de leur État respectif. Le premier ministre et le ministre des Affaires municipales ont d'ailleurs salué ce modèle de réorganisation. Malheureusement, d'un autre côté, nous avons aussi entendu, et je cite: «On veut se débarrasser du dossier des défusions le plus rapidement possible.»

Mais de quoi, au juste, veut-on se débarrasser? D'une question parmi les plus importantes non seulement pour la vie de milliers de citoyens montréalais, mais aussi pour tout le Québec. Parce que c'est de cela dont on parle, de la métropole du Québec. Une métropole qui fait face à de nombreux problèmes qui ont été plus d'une fois pelletés en avant, des problèmes qui sont beaucoup plus aigus et complexes que pour toute autre ville. Aujourd'hui, ces problèmes, nous devons y faire face, et, si on ne les règle pas, ce sera encore pire demain.

Que lors des fusions forcées les citoyens se soient sentis bousculés, menacés, nous le comprenons; qu'ils se soient sentis lésés de ne pas avoir été consultés, nous le comprenons; qu'ils aient eu peur de perdre leur identité, la qualité de leurs services et leur qualité de vie, nous le comprenons aussi. Mais, si le processus de cette fusion n'a pas été apprécié par les citoyens, ce n'est pas une raison pour mettre en place un autre processus qui sera difficile et parsemé d'embûches, apportant plus que son lot de turbulences, de frustrations et de retards pour la ville. Cet autre processus n'est pas davantage une garantie que tout va aller mieux par la suite. Les problèmes de l'agglomération montréalaise n'auront pas pour autant disparus. En voulant régler un problème, on risque d'en créer un bien plus grand encore. Évitons de tomber dans une incertitude qui ne pourra que nous retarder encore plus.

La nouvelle ville de Montréal a maintenant pris son élan; il ne faut pas freiner cet élan. Depuis que j'ai été élu maire de Montréal, je travaille avec mon équipe, sans répit, afin d'éviter un clivage entre anciennes villes et banlieues, entre arrondissements riches et moins nantis, entre francophones et non-francophones. En tant qu'élus nous avons tous la responsabilité et le devoir de faire que cela ne se produise pas. Je sais que les Montréalais ne le souhaitent pas et le gouvernement non plus. Les citoyens de Montréal méritent mieux que cela.

Mais il y a une autre chose que nous entendons, et je cite: «Ça marchait bien avant les fusions. Ça va marcher encore bien après les défusions.» Si ça allait si bien que ça, comment expliquer que Montréal, malgré tous les efforts qui ont été faits, se retrouve en queue du peloton des villes nord-américaines en termes de produit intérieur brut per capita: 26e sur 26? Il n'y a pas de quoi être fiers, en tant que Québécois.

Comment expliquer ce retard? Si ça allait si bien que ça avant, comment expliquer que Montréal souffre d'une dégradation chronique de ses infrastructures, que l'on n'ait pas suffisamment investi en transport en commun, que le réseau routier soit en piètre état, qu'il manque autant de logements pour les plus démunis, que les problèmes sociaux y soient si criants et que l'essor économique n'ait pas toujours été au rendez-vous, sans oublier les problèmes de gestion de l'eau ainsi que celui des matières résiduelles?

Pourquoi une telle situation que l'on ne peut que déplorer? Parce que, vous le savez autant que nous, désunies, les anciennes municipalités de l'île de Montréal ne réussissaient pas toujours à s'entendre sur les plans d'action à mettre en oeuvre. Nous savons que bien des choses ont été réalisées et beaucoup de projets furent menés à termes, mais beaucoup de problèmes demeurent tout entiers. C'est quand on est unis et qu'on travaille ensemble à trouver des solutions qu'on peut accomplir de grandes choses.

Je salue d'ailleurs l'engagement du gouvernement d'aller de l'avant avec le contrat de ville. Cela nous a permis de régler efficacement le problème chronique du déficit actuariel en le refinançant adéquatement, épargnant ainsi des millions de dollars aux contribuables montréalais. C'est parce que Montréal est devenue cette grande ville que nous avons pu réussir ce tour de force et que, comme résultat, l'agence Moody's a revu à la hausse la perspective associée à la cote de crédit de la ville. Or, depuis le dépôt de la loi, la firme de notation a mis la ville de Montréal sous surveillance. Le ministre des Finances du Québec peut comprendre facilement les conséquences de cette situation.

Nous devons faire plus que régler les problèmes du passé dont nous avons hérité. Comme collectivité québécoise, nous devons investir dans le développement de notre métropole et lui donner les moyens nécessaires pour prendre son envol. Ce n'est pas seulement les Montréalais qui en profiteront mais tous les citoyens et citoyennes du Québec. Montréal est le coeur du Québec, son moteur économique, social et culturel. Un Montréal fort veut dire un Québec fort.

Le gouvernement plaide qu'il n'a pas d'argent, raison de plus pour mettre en marche le plan d'affaires que nous proposons, raison de plus pour créer ensemble une nouvelle richesse que nous pourrons ensemble par la suite mieux partager.

n(10 h 10)n

In the context where the citizens are overtaxed, we cannot continue to address the problems like we used to do in the past. We must put in place a new paradigm that I could summarize as follows: we must strive for innovation, for wealth creation and distribution, and we must stimulate change. Without major investments, we will continue to delay problems that are affecting the competitive advantages of our metropolis.

M. le ministre, mesdames et messieurs de la commission, donnez-nous ce dont nous avons absolument besoin pour réussir Montréal. Donnez-nous, dès la session d'automne, les modifications à la charte de la ville dont nous avons besoin pour mettre en application notre plan de réorganisation tel que vous l'avez souhaité, M. le ministre. Et, comme vous l'avez déclaré aux assises annuelles de l'Union des municipalités du Québec en mai dernier, devenons des partenaires et non de simples créatures du gouvernement. Donnez-nous un mode de financement stable qui permettra aux Montréalais de bénéficier de la richesse économique qu'ils contribuent à créer ainsi que le premier ministre s'y est engagé lors de la campagne électorale. Montréal en a un urgent besoin pour faire face aux importants défis de son développement. Et finalement, si le gouvernement souhaite réellement la réussite de Montréal, tel que l'a dit le premier ministre notamment lors du débat des chefs, donnez-nous deux ans pour mettre en oeuvre d'une façon optimale le projet de réorganisation que nous avons proposé.

Le gouvernement doit être conséquent avec ses engagements et laisser le temps nécessaire pour qu'une ville de l'importance et de la taille de Montréal puisse se réorganiser. Qu'est-ce que 24 mois dans la vie d'un si grand projet? Qu'est-ce que 24 mois dans une période aussi critique que la naissance d'une grande ville? Le nouveau gouvernement qui s'est attaqué à la réingénierie de l'État réalise lui-même que des entreprises de cette envergure exigent du temps. Ne pas nous donner de temps, c'est refuser que Montréal, notre métropole, la métropole de tout les Québécois, ait une réelle chance, viable, de réussir.

Montréal représente une situation bien différente des autres villes, notre plan de réorganisation en témoigne. Nous respectons les démarches des autres villes; leurs défis et leurs demandes peuvent être tout autres. Nous sommes de l'avis du premier ministre: les solutions mur à mur ne sont pas souhaitables. Le gouvernement peut et doit faire une mesure d'exception pour sa métropole. Il peut respecter du même coup ses deux engagements: donner à Montréal la possibilité de réussir et, dans 24 mois, remplir son engagement de permettre aux citoyens de se prononcer sur l'avenir de leur collectivité. Ils auront eu le temps de réaliser tous les avantages de la nouvelle ville et pourront alors prendre une décision en toute connaissance de cause.

Il y a eu des milliers de pages, des milliers d'études et de rapports qui se sont écrits sur la nécessité d'une réorganisation municipale sur l'île de Montréal, des études et des rapports qui ont été produits par des experts parmi les plus compétents que nous ayons au Québec. Allons-nous revivre encore une fois tous ces processus, toutes ces études, tous ces rapports pour en arriver en fin de compte à la même conclusion? Combien d'autres pages devront être encore écrites pour nous convaincre tous de l'urgence d'agir?

Les énergies des élus doivent être utilisées à d'autres fins. Il est temps de passer à l'action. Le temps est venu pour Montréal d'avoir enfin les outils indispensables à son développement durable et au rayonnement du Québec tout entier.

Nous cherchons tous une solution ? vous et nous. Celle que nous vous proposons est la meilleure. Après plus de 20 mois à administrer cette nouvelle ville, nous savons que notre plan peut régler les problèmes auxquels nous faisons face et que l'immobilisme préconisé par certains ou le désir d'autres de s'en débarrasser rapidement ne sont pas de vraies solutions.

Depuis notre entrée à l'hôtel de ville, nous avons travaillé avec acharnement à mettre en place cette nouvelle structure. Il fallait régler ces centaines de problèmes que tout nouveau projet de cette envergure rencontre à ses débuts, et nous l'avons fait. Tout n'est pas encore parfait, mais tout n'a pas encore été fait, et ça va de mieux en mieux. Il reste encore beaucoup à accomplir. Le Sommet de Montréal nous a permis de mobiliser toutes les forces vives de la société civile ainsi que les employés de la ville autour de notre projet. Tous et toutes en souhaitent la réussite.

Aujourd'hui, M. le ministre, forts de ces appuis, forts de cette expérience et de cette connaissance, nous nous présentons à vous confiants dans notre démarche parce que c'est la seule qui est positive, mobilisatrice et porteuse d'avenir. Laissons vivre Montréal. Tous les Québécois et toutes les Québécoises en retireront les bénéfices. Nous sommes venus vous dire que nous sommes prêts. Notre plan, nous y croyons. Il est solide et réfléchi et surtout rassembleur.

En terminant, M. le ministre, permettez-moi de vous rappeler ceci: vous avez le choix. En politique, on a toujours le choix. À la face de la population, votre décision sur le projet de loi n° 9 sera le reflet de votre réelle volonté. Ou vous mettez en péril une métropole forte ou, tout en respectant vos engagements, vous permettez à Montréal de grandir et de s'épanouir à l'image du Québec que vous voulez bâtir dans l'harmonie avec vos partenaires. Merci de prendre le temps de nous entendre mais surtout de nous comprendre.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le maire de Montréal, pour votre présentation. J'ouvre maintenant la période d'échanges. Je vous cède la parole, M. le ministre.

M. Fournier: Merci, M. le Président. M. le maire, M. Zampino, M. Abdallah, ça me fait plaisir de vous revoir. J'ai écouté avec attention et pris connaissance du mémoire, écouté avec attention les points sur lesquels vous avez insisté dans votre mémoire. Je vais certainement m'arrêter sur... en tout cas, en premier lieu, sur ce point-là, celui du délai de deux ans que vous demandez, en prenant bien soin de refaire publiquement ce que j'ai dit à l'occasion d'un point de presse à l'effet que la proposition que vous avez mise sur la table effectivement me semble aller dans le sens d'une adhésion, une recherche d'adhésion des citoyens.

Vous dites que, en politique, nous avons toujours le choix. Et effectivement, vous avez fait le choix de cette recherche d'une adhésion, je tiens à vous en féliciter, c'est aussi le choix que nous avons fait ? pas le choix que tout le monde a fait ici, autour de cette table. Mais, si nous avons quelque chose en commun, c'est certainement que Montréal et le gouvernement actuel du Québec cherchent par tous les moyens que les citoyens peuvent se sentir impliqués, reconnus, compris. Comme la municipalité le demande à l'égard de Québec, je pense bien que les citoyens le demandent aussi à l'égard de leur municipalité et aussi de leur gouvernement: compris, pris en considération.

C'est l'ensemble de l'oeuvre que nous avons tentée effectivement. Certains disent qu'il faudrait l'oublier parce que l'oeuvre est délicate, qu'on devrait juste comprendre que les gens étaient frustrés, puis l'oublier. Bien, faire des choix, c'est... une fois qu'on a compris quelque chose, c'est essayer de le régler, essayer d'améliorer les choses, et c'est ce que nous tentons de faire. C'est certain que l'opération n'est pas des plus faciles. Devons-nous oublier que, avec courage, on peut régler les choses qui sont aussi difficiles? C'est le choix qu'on fait pour l'instant.

Vous nous parlez du plan de réorganisation pour lequel je réitère encore que je crois que vous allez dans le bon sens, et vous impliquez qu'il est nécessaire d'y donner le temps de sa mise en place et du temps pour que les citoyens vivent cette nouvelle réalité. Je vais vous donner... Vous le savez déjà, je vais quand même vous donner la problématique dans laquelle ce contexte se présente. D'ailleurs, notre collègue de l'opposition tantôt nous y a fait référence en disant que le projet de loi n° 9 ou qu'un débat sur l'éventuel consultation des citoyens laissait une période d'incertitude qui causait des difficultés aux administrateurs actuels dans toutes les municipalités concernées. Et je disais, dès le début de mon mandat, que je comprenais cela, que je le savais qu'il y avait cette incertitude que ça laissait flotter, que je comptais que ce soit le plus court possible comme incertitude, qu'il fallait faire les choses vite mais bien pour éviter justement qu'on ait ce débat-là jusqu'à la fin des temps. Et je dois vous dire que, lorsque vous indiquez votre souhait que pendant deux ans encore il y ait cette consultation à venir, je la mets en opposition à ce que notre collègue de Bourget nous dit, que ça met de l'incertitude, ça laisse un flottement, que les décisions sont impossibles à prendre.

n(10 h 20)n

Vous me diriez peut-être que c'est moi qui l'avais proposé, que les agences de cotation pourraient préjudicier à la ville si c'est moi qui l'avais proposé. C'est sans doute ce qu'on m'aurait dit. Mais, puisque c'est vous qui le proposez, expliquez-moi comment je dois comprendre que de donner un délai plus long évitera une période d'incertitude liée à une consultation qui de toute façon viendra parce que vous la souhaitez aussi au terme de cette période de deux ans. Donc, expliquez-moi comment je pourrais me faire une tête à l'effet que prolonger le délai de deux ans n'est pas accroître l'incertitude pour Montréal.

Le Président (M. Ouimet): M. le maire de Montréal.

M. Tremblay (Gérald): Oui. Alors, M. le ministre, vous dites que notre projet semble aller dans la direction d'une recherche d'adhésion. Notre projet va directement dans la direction que vous souhaitez dans votre déclaration ministérielle du 20 juin. Vous nous avez demandé de soumettre un projet de réorganisation au plus tard le 1er octobre. Alors, nous l'avons soumis le 15 août dernier, et ce projet a reçu ? on vous en remercie ? un accueil très favorable de votre part ainsi que du premier ministre.

Alors, lorsque vous dites que vous avez souhaité cet engagement, ce que je veux vous rappeler, c'est que vous avez plusieurs engagements dont celui-là et c'est celui-là que nous avons retenu. Et c'est vrai qu'il faut respecter ses engagements en politique ? nous en sommes entièrement d'accord ? et c'est surtout dans les situations difficiles qu'on reconnaît la valeur des personnes.

Alors, la problématique... Il y a une problématique, nous vous donnons la solution. Nous donnons la solution de nous donner deux ans. L'incertitude n'est pas créée par la déclaration ministérielle du 20 juin dernier. L'incertitude est créée par le dépôt du projet de loi n° 9, et, tant que ce projet de loi ne reflétera pas, ne permettra pas un reflet de la volonté clairement exprimée des citoyens, on sera toujours dans un climat d'incertitude.

Mais nous allons continuer à travailler en fonction des engagements que nous avons pris, et c'est la raison pour laquelle nous vous demandons essentiellement trois choses que j'ai clairement exprimées, c'est-à-dire de nous donner des amendements à la loi n° 170 et à la charte de la ville de Montréal avant la fin de la session de l'automne, de nous donner nos deux années pour permettre justement aux citoyens d'apprécier davantage la nouvelle ville, et finalement de nous donner une source de revenus de croissance pour qu'on puisse créer plus de richesse pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises et des Montréalais évidemment.

Le Président (M. Ouimet): M. le ministre.

M. Fournier: M. le maire, si vous me permettez de reprendre un peu mon interrogation. Vous dites... et là c'est un débat qu'on pourrait avoir: est-ce que c'est le projet de loi n° 9 qui crée l'incertitude ou c'était il y a deux ans lorsqu'on a créé les fusions forcées? Enfin, on peut avoir un débat long là-dessus.

Sauf que, lorsque vous l'amenez, ce projet de loi n° 9, je comprends que ce que vous voulez dire, c'est que le projet de loi n° 9, emmenant une consultation à un moment donné, crée une incertitude. Vous me demandez de reporter cette consultation de deux ans. Que vous la mentionniez, cette incertitude ne découlant pas de la déclaration ministérielle mais du projet de loi n° 9, ne change pas grand-chose à mon interrogation, à savoir que votre demande m'amène à reporter la consultation et donc à prolonger la période d'incertitude parce qu'on ne sait pas ce que cette consultation va donner.

Alors, expliquez-moi en quoi le délai de deux ans ne va pas prolonger l'incertitude dans laquelle Montréal est, semble-t-il, selon certains, plongée. Donnez-moi un outil qui me permet de comprendre que le deux ans va plutôt permettre de solidifier la position de Montréal actuellement, peu importe qu'il y ait une consultation à terme au bout de deux ans.

Le Président (M. Ouimet): M. le maire.

M. Tremblay (Gérald): M. le ministre, la démocratie s'articule autour du fait d'accorder aux citoyens le droit de s'exprimer sur une question, nous en convenons. Par contre, le corollaire de cette affirmation, c'est que le citoyen doit se prononcer en toute connaissance de cause, qu'il doit être bien informé et conscient du geste qu'il va poser. Tout ce que nous souhaitons, c'est que toute balise fixée pour la consultation reflète la volonté réelle des citoyens. Et ce que nous disons de façon très claire, c'est: pour que cette volonté réelle des citoyens et des citoyennes s'exprime clairement, ils doivent prendre connaissance des tendances de la nouvelle ville, des tendances positives qui vont favoriser leur adhésion à la nouvelle ville.

Ça prend du temps, on ne peut pas bâtir la ville de Montréal dans quelques mois. À titre d'exemple, je vais vous citer Gilles Vaillancourt. Il vous dirait que, s'il y avait eu un référendum deux ans après la fusion sur l'île... à Laval, il n'y aurait pas eu de ville à Laval.

Le Président (M. Ouimet): Il reste deux minutes à l'échange, M. le ministre.

M. Fournier: Je vous entends. Je voudrais bien pouvoir répondre à votre souhait de vous comprendre. Mais, sur l'incertitude, je dois avouer que, si je prolonge cette période, l'incertitude due à la consultation éventuelle qui risque d'amener des aménagements différents risque de se poursuivre. Enfin, c'est une considération qui est là.

Vous amenez ? c'est la dernière question, puisque c'est ce qu'on m'indique ? vous amenez sur les balises qui permettent aux gens de faire leur choix, aux citoyens de faire leur choix, et vous dites, entre autres, celle d'avoir pleine connaissance de l'information. Moi, je ne peux pas nier que d'avoir une connaissance pratique est parfois plus utile, mais on pourrait plaider qu'ils ont des connaissances pratiques d'autres décisions ou d'autres aménagements qui sont déjà en cours actuellement.

Vous savez... vous n'êtes pas sans savoir ? d'ailleurs, je l'ai soulevé dans les notes préliminaires ? qu'il y a une grande question sur les balises, je dirais, de la consultation référendaire elle-même, à savoir: doit-il y avoir des seuils minimaux? comment on doit évaluer ce qui est une participation significative?

Vous avez fait référence en début d'intervention sur ce qu'il y a dans d'autres pays. J'imagine que ces tests-là que vous faisiez référence... Pouvez-vous me dire plus précisément pour nous guider ? puisque c'est une des interrogations qui va se poser durant la consultation, et très présente d'ailleurs depuis que le projet de loi a été déposé, je l'ai moi-même souligné lorsque j'ai déposé le projet de loi ? comment vous voyez justement cette balise pour bien définir la légitimité des choix que les... du choix que les citoyens feront à l'égard, vous dites, d'autres pays? Guidez-moi sur ce que vous vouliez dire par cette référence.

M. Tremblay (Gérald): Oui. Alors, nous avons fait le choix de poser des questions au gouvernement. C'est le projet de loi du gouvernement. Plusieurs mémoires vont vous expliquer en détail quels sont ces... ce balisage qui a été fait à travers le monde parce que j'ai pris connaissance des mêmes mémoires que vous avez pris connaissance. Alors, je vais laisser à ces personnes de vous expliquer en détail ce balisage.

En ce qui nous concerne, nous, ce qui est important, c'est, à la suite des réactions positives que nous avons eues à notre plan de réorganisation, votre réaction positive, celle du premier ministre et également celle de la population, nous avons fait le choix de consacrer toutes nos énergies à bâtir une grande métropole dans le meilleur intérêt de l'ensemble des Québécois et des Québécoises. C'est notre engagement, et on espère que le gouvernement va nous donner le temps nécessaire pour réaliser ce grand défi qui est dans l'intérêt des Montréalais et des Montréalaises.

En ce qui concerne le projet de loi, nous voulons que vous preniez en considération le questionnement que nous nous sommes posé. Ça va sûrement vous aider dans votre réflexion pour en arriver à un projet de loi qui va refléter la possibilité de bien consulter les citoyens et exprimer une réelle démocratie municipale.

Le Président (M. Ouimet): Je reviendrai, M. le ministre. Je cède la parole à la porte-parole de l'opposition officielle.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je dois le dire et je sais que je vivrai ce même... j'aurai cette même impression que j'ai, un inconfort à l'exercice qui est fait. Vous êtes le maire de la plus grande ville du Québec. Je sais que je vivrai cet inconfort envers le maire de Québec, de Sherbrooke, de Gatineau, puisqu'on voit bien ce matin à quel point d'abord le dépôt de ce projet de loi a créé d'incertitude et à quel point les élus municipaux sont pris en otages. Et, par mes questions, je ne veux pas vous mettre dans une situation de malaise, mais nous sommes dans ce malaise.

Alors, ma première question, M. le maire, est assez simple. Vous dites: Nous aurions besoin d'au moins deux ans. Nous avons des exemples dans l'histoire, et le député de Mille-Îles d'ailleurs nous l'a rapporté au mois de juin et nous l'a raconté longuement, nous avons l'exemple de Laval qui... où le maire actuel, et on retrace très, très bien ça dans les livres d'histoire ? moi, j'ai relu sur la fusion de Laval ? dit: Deux ans plus tard, cette fusion de Laval, s'il y avait eu un test auprès de la population, ça aurait cassé.

Montréal a un degré de complexité, sans faire de comparaison, mais assez élevé. Est-ce que deux ans est vraiment suffisant et est-ce que, surtout, la vraie solution, la vraie solution, M. le maire, je m'excuse de vous poser la question, mais n'est-elle pas de retirer le projet de loi?

n(10 h 30)n

M. Tremblay (Gérald): Nous croyons profondément dans la consultation des citoyens. Il y avait un déficit démocratique de la consultation des citoyens lorsque nous sommes arrivés à Montréal, et c'est la raison pour laquelle on a mis en place un office de consultation publique que le gouvernement, l'ancien gouvernement, a reconnu dans la charte de la ville de Montréal, c'est la raison pour laquelle on a mis en place cette commission du conseil pour consulter les citoyens et c'est également la raison pour laquelle nous allons procéder à la nomination bientôt d'une personne qui va devenir le protecteur du citoyen.

Alors, pour moi, lorsqu'on me pose la question de la démocratie, je suis d'accord avec le gouvernement lorsqu'il veut consulter les citoyens et les citoyennes. Par contre, je veux m'assurer de mettre toutes les chances du côté des citoyens et des citoyennes. Je voudrais que ces mêmes personnes puissent voter en connaissance de cause. Ça ne prend pas... Au moins deux ans. Ce que je veux, c'est deux ans. L'engagement qu'on a pris, ce n'est pas au moins deux ans pour retarder par la suite, c'est deux ans. Pourquoi deux ans? Parce que deux ans, nous sommes convaincus qu'avec le modèle organisationnel que nous avons mis en place, la complicité de nos élus ainsi que de notre administration, nous allons générer des économies, améliorer la qualité des services sans augmenter le fardeau fiscal des contribuables tout en maintenant la personnalité et l'identité des différents arrondissements, ce que nous avons pris comme engagement pendant la campagne électorale. Alors, si nous pouvons retourner après une période de deux ans, à la suite d'une consultation du gouvernement, et faire face aux citoyens, ils comprendront le bien-fondé de cette nouvelle ville, parce que nous aurons contribué, oui, à maintenir des arrondissements le plus autonomes possible mais surtout à bâtir une grande ville qui va devenir la fierté des Québécois et des Québécoises.

Le Président (M. Ouimet): Mme la députée de Bourget.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Dans les conditions actuelles proposées par le projet de loi, vous avez compris que c'est un projet de loi qui donne une voix prépondérante à ceux qui sont contre la ville unifiée.

Une voix: Oui.

Mme Lemieux: Alors, dans les conditions actuelles, est-ce que ce projet de loi favorise la défusion ou l'adhésion?

M. Tremblay (Gérald): Nous préférons nous référer au projet de loi n° 1 et à la déclaration ministérielle. Pour nous, on veut susciter l'adhésion à la nouvelle ville, et nous avons déjà commencé en rencontrant les citoyens sur l'île de Montréal, et nous allons continuer à bien informer les citoyens et les citoyennes pendant tout ce processus pour s'assurer qu'ils adhèrent à la nouvelle ville.

Le Président (M. Ouimet): Mme la députée.

Mme Lemieux: M. le Président, M. le maire, vous parlez des suites. En fait, je crois comprendre que la ville de Montréal, les élus municipaux s'étaient déjà engagés dans un processus qui s'apparentait à ce qui a été proposé par le projet de loi n° 1 et surtout la déclaration ministérielle. Je me permettrai de reprendre ma question: est-ce que, dans les conditions actuelles, par exemple, le fait que le projet de loi va donner un accès privilégié, notamment par toute la mécanique qui est proposée par l'ouverture des registres, à ceux qui sont contre les nouvelles villes, est-ce que les citoyens auront ? où vous parlez de consultation des citoyens ? auront véritablement toute l'information?

Dans le processus qui est proposé, il y a un tas de questions pour lequel il sera impossible d'avoir des réponses. Par exemple, sur cette question des ententes intermunicipales, on sait très bien que ça ne va pas se négocier sur le bord d'une table de cuisine en deux temps, trois mouvements, là. On connaît tous l'histoire, on sait que les villes actuelles sont le résultat de multiples, de centaines, de dizaines d'ententes municipales. Donc, dans les conditions actuelles, votre désir de consulter les citoyens peut-il être rencontré?

M. Tremblay (Gérald): Dans sa forme actuelle, le projet de loi doit être bonifié. Nous sommes convaincus que le ministre, à la suite des représentations qui vont lui être faites pendant la commission parlementaire, va bonifier son projet de loi, va mettre en place toutes les balises nécessaires pour que la consultation reflète la volonté réelle des citoyens et des citoyennes.

Mme Lemieux: M. le maire, quelles modifications vous apparaissent indispensables pour que cela devienne un projet de loi sur l'adhésion, puisque c'est ce que vous souhaitez?

M. Tremblay (Gérald): Bon. La modification la plus importante, c'est que le gouvernement nous donne deux ans pour nous permettre de mettre en place la nouvelle ville de Montréal. Et les deux autres modifications qu'on aimerait, c'est que le gouvernement donne suite, à la session d'automne, avec la collaboration de l'opposition évidemment, aux modifications à la loi n° 170 et à la charte de Montréal pour qu'on puisse bouger le plus rapidement possible, et également que le gouvernement donne suite à son autre engagement de nous donner une source de revenus de croissance pour nous permettre d'accélérer le développement de la métropole.

Le Président (M. Ouimet): Mme la députée.

Mme Lemieux: M. le maire, peut-être une question... Enfin, je ne veux pas entrer dans les questions personnelles et intimes, mais vous êtes quand même le maire de Montréal. C'est une grande ville, Montréal. C'est une ville que nous sommes nombreux à aimer, parce que c'est une ville française, parce que c'est une ville qui est le... qui représente le pont entre la langue anglaise et la langue française, parce que c'est une ville qui maintenant vit sous le son de bien des langues. Est-ce que... Et vous avez donné cet exemple tout à l'heure, et j'avoue que j'ai été un peu surprise, vous nous avez dit que l'agence de cotation Moody's avait mis la ville de Montréal sous surveillance. D'abord, ça, c'est vrai? C'est clairement vrai?

M. Tremblay (Gérald): Si je l'ai dit, c'est parce que c'est vrai.

Mme Lemieux: Je vous crois.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Lemieux: Parce que je m'en rappelais, M. le maire ? non, je vous crois ? je me rappelais du fait qu'il y avait eu un premier élément très positif dans la cotation de Moody's, dans la capacité d'emprunt de la ville de Montréal, puis je me rends compte, là, que, quelques semaines plus tard, il y a un message contradictoire, et je trouve ça un peu triste.

Ceci étant dit, M. le maire, qu'est-ce que... Je prétends, moi, que les projecteurs vont être tellement tournés vers cette question de fusion, défusion, adhésion ? enfin, on ne saura plus quel vocabulaire utiliser ? je prétends qu'il y aura un gaspillage d'énergie, les élus municipaux auront moins le focus sur les questions claires d'organisation des services, sur la relance de certains projets, la mise en route de certains projets intéressants. Avez-vous cette même impression que les projecteurs sont ailleurs et que vos énergies, de vous, de tous les élus de Montréal, peu importe le parti politique, ces énergies soient détournées par le processus qui nous est proposé?

M. Tremblay (Gérald): Mme Lemieux, juste un petit commentaire pour l'autre question que vous m'avez posée. Vous savez, en politique, j'ai appris qu'il fallait toujours dire la vérité, parce que ça nous en fait moins à se rappeler. Alors...

Puis, en ce qui concerne la détermination de mon équipe, nous allons réussir la nouvelle ville de Montréal, et nous allons le faire avec les citoyens et les citoyennes. Lorsque j'ai été élu, c'est pour devenir la voix des citoyens. Alors, pour moi, consulter des citoyens, c'est important. S'il y a eu un déficit démocratique et les citoyens se sont sentis bousculés, je l'ai mentionné tout à l'heure, j'en conviens, j'en conviens. La décision que le gouvernement a prise, et je l'ai déjà dit publiquement, ça a été une décision courageuse. Après des décennies d'études et d'analyses, nous allons tout faire pour réussir cette nouvelle ville, et je fais appel encore une fois au ministre qui va prendre en considération toutes les représentations qui vont être faites pendant cette commission parlementaire pour s'assurer que le projet de loi, au moment opportun, va permettre le reflet d'une véritable démocratie municipale. Pour moi, ça, c'est important. Je ne peux pas renier un engagement que j'ai pris pendant la campagne électorale, que, si jamais un nouveau gouvernement était élu de façon démocratique et s'il voulait consulter les citoyens, à partir de ce moment-là, je respecterais la décision d'un gouvernement démocratiquement élu, de la même façon que j'ai respecté la décision d'un gouvernement qui a choisi de forcer les fusions.

Ceci dit, M. le Président, je veux par contre que le gouvernement donne suite non pas uniquement à cet engagement, mais également aux deux autres engagements qu'il a pris, c'est essentiel pour la métropole, et nous sommes convaincus, après tous les efforts que nous avons faits et que nous allons faire au cours des deux prochaines années, que nous allons bâtir cette métropole à l'image de ce que nous voulons comme société.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le maire. Alors, je cède la parole maintenant au ministre des Affaires municipales et de la Métropole.

M. Fournier: Oui, une courte remarque, d'abord, à ma collègue de l'opposition. On va revenir souvent, durant cette commission, sur les détails de connaissance qu'auront les citoyens lors de la consultation. Il s'en trouvera toujours pour se plaindre que ce niveau complet de connaissance n'est pas atteint, qu'il y a encore des éléments qui ne sont pas répondus. Je tiens simplement à dire que, venant de ceux qui n'ont pas fait de consultation, ni donné aucune étude, ni aucun détail, disons qu'on est un peu plus mal placés pour commenter qu'il puisse y avoir à un moment donné certaines informations qui ne sont pas complètes.

Ceci étant, l'engagement que nous avons pris est de pouvoir informer au maximum de nos capacités les citoyens sur les situations qui sont devant eux, les scénarios qui se présentent lors de la consultation, sur les impacts que cela représente pour eux, et nous allons donner suite à cet engagement de la façon la plus complète qu'on le peut.

n(10 h 40)n

Votre proposition, M. le maire, et j'y reviens, parce que je vais vous dire, et je vais même d'avance vous dire comment va se terminer pour moi notre rencontre d'aujourd'hui si d'aventure mon niveau... ma soif de plus d'informations n'était pas complétée et j'avais encore un peu besoin de détails... Je crois avoir entendu à quelques reprises des représentations, peut-être pas de la ville de Montréal ? donc, corrigez-moi si ça ne vient pas de chez vous, ça vient peut-être d'ailleurs ? à l'effet que le mandat que nous avions de consulter la population comportait des conséquences, certains diront d'instabilité, d'autres d'incertitude, en tout cas certainement des... et, je le reconnais certainement, un focus qui n'est pas concentré simplement sur une continuation mais aussi sur un choix que les citoyens ont à faire. C'est tout à fait normal qu'il y ait un regard porté vers cette consultation-là, et qu'elle nous enlève un peu d'énergie vers la suite des choses telles qu'elles allaient avant. C'est tout à fait normal, je le reconnais. D'ailleurs, c'est pourquoi je me disais, bien, puisque c'est un mandat, puisqu'on a été élus pour ça, faisons-le, faisons-le bien, mais ne faisons pas traîner les choses. Ne faisons pas exprès pour qu'il y ait toujours cette... certains disaient l'épée de Damoclès, je reprends leur expression, sur la tête.

Si d'aventure je ne suis pas complètement satisfait de notre rencontre d'aujourd'hui, je vous encourage à me fournir d'autres informations plus tard pour me convaincre, et avec moi beaucoup de monde autour de la table, sur le fait que deux ans de plus n'allaient pas faire perpétuer un peu ce climat d'incertitude, d'instabilité. Si on pouvait en être convaincus, déjà on aurait un cadre de réflexion bien différent. Mais, bien sûr que les engagements qu'on a pris, on va les tenir. Mais on sait aussi qu'ils ont des complications. On ne veut pas juste vivre dans les complications, on veut faire... régler nos engagements au mieux des citoyens. Si les gens veulent nous convaincre... Et, après vous, je vais vous dire, j'ai lu pas mal de mémoires, la plupart des gens qui vont venir nous voir, en tout cas aujourd'hui, vont nous dire que ça crée de l'incertitude. Il ne faut pas faire perdurer tout ça.

Alors, essayez de me convaincre là-dessus, dites-moi qu'il n'y a pas d'incertitude, dites-moi que, pour la ville de Montréal, selon vous, dans le contexte actuel, il n'y a pas d'incertitude par le fait qu'il y aura une consultation qui va venir là. Je sais que c'est le coeur de votre présentation que vous faites ici, et je vous entends, et je veux vous comprendre, et je demande à être convaincu. C'est ce que je vais faire durant toute la commission, écouter les gens, essayer de... et de tous les côtés, soit dit en passant. Demain, on aura des gens qui sont d'opinion un peu différente de ceux qui viennent nous voir aujourd'hui, je vais les écouter aussi bien.

Alors, mais en même temps, je vais chercher à être convaincu, parce que c'est mon travail de faire des choix quand j'en suis convaincu. Vous me le reprochiez certainement de faire des choix sans en être convaincu. Donc, je vous offre l'opportunité aujourd'hui, et peut-être dans les jours à venir, de continuer de tenter de me convaincre sur la pertinence de faire prolonger un délai via... vers la consultation.

Le Président (M. Ouimet): M. le maire.

M. Tremblay (Gérald): Merci de me donner cette opportunité, M. le ministre. Vous savez, je vis dans les complications depuis 20 mois. Donc, le travail, l'excellent travail que fait le comité de transition dans une période de 11 mois n'a pas permis au comité de transition de donner suite à tous les engagements de l'ancien gouvernement pour mettre en place les structures nécessaires pour bâtir une grande métropole. Donc, pendant cette période de 20 mois, nous avons travaillé très fort. Vous savez, décentraliser une ville comme Montréal ? on parle de l'ancienne ville de Montréal qui était une ville centralisée ? et défusionner, parce que c'est ça qui est arrivé, on a défusionné l'ancienne ville de Montréal pour faire neuf arrondissements qui veulent le même statut que les arrondissements des anciennes villes de Montréal, ça n'a pas été facile. On parle de changements profonds de mentalité, d'attitude et de comportement. On parle de changement de culture.

Quand on discute avec nos syndicats qui ont toujours été habitués d'avoir des conventions collectives de trois ans et, pour la première fois, quand, en politique municipale, on réussit à avoir une convention collective de cinq ans avec un cadre de financement de 11,7 %, ce que je vous souhaite avec beaucoup d'enthousiasme lorsque vous discuterez avec vos syndiqués, vous allez voir que ce n'est pas toujours facile. Donc, pendant que nous avons géré cette ville, on a réglé des conventions collectives de longue durée.

On a tenu le Sommet de Montréal: on a regroupé 3 000 personnes qui ont démontré leur adhésion à la ville de Montréal, qui sont arrivées à des consensus très, très, très importants. On a fait des budgets équilibrés, alors, c'est important. On a signé un contrat de ville qui était, en fait, un changement fondamental d'autonomie d'une municipalité face au gouvernement du Québec. Le jour où le gouvernement du Québec arrête de fonctionner en silo puis veut traiter sa métropole, ce que vous souhaitez, M. le ministre, de nous traiter comme un partenaire, alors, nous, ce qu'on vous dit de façon très claire: On s'est entendus sur des objectifs communs, des obligations de résultats, des rapports d'étape, et jugez-nous selon les résultats, a posteriori. On l'a réglé.

On a réglé également le déficit actuariel. On a retardé collectivement, à l'Assemblée nationale, et j'étais présent... Pendant des décennies, on a pelleté les problèmes en avant, notamment du déficit actuariel. À toutes les fois qu'une municipalité avait un problème, on l'aggravait en délestant des responsabilités, notamment au transport en commun, et je fais référence à la réforme Ryan ? donc je ne parlerai pas des autres réformes, j'étais là à ce moment-là: 175 millions à la ville de Montréal. En retour, on a permis des congés de cotisation qui ont fait qu'aujourd'hui on a 1,8 milliard de déficit actuariel, qui est une hypothèque énorme du passé pour la ville. Mais on l'a réglé. Pour la première fois, encore une fois, au niveau municipal canadien, on a réussi à emprunter 500 millions de dollars, remboursables dans 40 ans à 6,07 %, avec des institutions canadiennes, 32 institutions.

Donc, ce n'est pas comme si on n'avait rien fait. Pendant 20 mois, on a travaillé, on a mis toute notre énergie. Tout à l'heure, Mme Lemieux, vous me posiez la question de... je ne veux pas rentrer dans les choses intimes et personnelles. Oui, j'ai encore une excellente relation avec mon épouse qui m'encourage à tous les jours à continuer. Mais on ne se voit pas souvent, on ne se voit pas souvent. Par contre, on est en train de bâtir l'avenir d'une société. Alors, comment vous pouvez me demander, à moi, comme maire de Montréal, de faire ça dans 20 mois?

Si on n'avait rien fait, si on n'avait pas réglé de problèmes... Quand vous nous avez demandé de déposer un mémoire, de déposer une réorganisation de la ville, vous avez dit: Le 1er octobre. On l'a livré le 15. On s'est engagés à faire des économies de 400 millions de dollars. Les gens nous disent: Quel indicateur de performance vous mettez en place pour nous assurer que, si jamais on vous donne deux ans, ça va réussir? Vous allez voir que ça va réussir, parce que, dans le contrat de ville, on s'est engagés avec le gouvernement du Québec de générer des économies de 175 millions de dollars sur une période de cinq ans; on en a déjà fait... 75 millions de dollars, donc on s'est engagés à 225 millions de dollars additionnels. Alors, le président du comité exécutif, le directeur général de la ville sont engagés dans cette démarche.

Alors, tout ce qu'on vous dit, là: Le passé est garant de l'avenir. Dans notre cas à nous, comme administration municipale, le passé est garant de l'avenir. Donc, deux ans, donnez-nous deux ans. Pas au moins deux ans. Donnez-nous deux ans puis, après ça, allez voir les citoyens et les citoyennes. Puis, nous, on va faire notre travail entre-temps, on va les informer, on va les sensibiliser puis on va leur dire une chose: On est bien mieux d'être unis. Parce qu'il y a beaucoup de personnes aujourd'hui qui veulent peut-être se séparer, mais ils réalisent que Montréal doit être une ville de retour.

Là, je vais être très pointu. Il y a beaucoup de jeunes et beaucoup d'adultes qui ont quitté le Québec parce qu'ils n'avaient pas de défis puis parce qu'ils avaient peut-être certains problèmes qu'ils ne pouvaient pas régler. Nous sommes dans une orientation de régler des problèmes. Nous allons régler les problèmes un par un, on ne les pellettera pas par en avant. On règle un problème, on tourne la page; on en règle un autre, on tourne la page. Et c'est la raison pour laquelle j'ai besoin de deux ans. Si on n'a pas deux ans, à ce moment-là, ce sera le reflet de votre réelle volonté, et, je vous répète, en politique, on a le choix. Vous avez le choix. Je vais respecter votre décision, je vais continuer à travailler sans répit pour bâtir cette métropole, et j'espère honnêtement que vous allez respecter tous vos engagements sans exception, M. le ministre.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le maire. M. le ministre, il ne reste plus de temps à votre enveloppe. Je sais que M. Zampino veut intervenir; ça va être sur l'enveloppe de l'opposition. Il ne reste plus de temps de ce côté-ci.

M. Zampino (Frank): Si vous permettez...

Le Président (M. Ouimet): Allez-y, M. Zampino.

M. Zampino (Frank): M. le Président, petit complément d'information sur la question du ministre. On a fait référence un peu plus tôt au sondage Léger & Léger qui a été publié la semaine passée, et je crois que ça illustre très bien l'incompréhension ou la confusion qui peut exister actuellement dans l'île de Montréal, dans tout ce dossier. Comment, à la fois, on peut dire que 68 % des citoyens et citoyennes peuvent être satisfaits des services ? ils ont vu même, dans certains cas, des améliorations ? mais en même temps on a tout près de 50 % de la population qui se disent en accord avec la défusion? Alors, vous voyez que c'est une situation assez complexe.

n(10 h 50)n

Notre demande de deux ans, finalement, c'est de faire connaître davantage aussi cette ville de Montréal, qui est mal connue, et on le voit dans les résultats des sondages: 68 % des gens disent qu'ils sont satisfaits des services, 50 % des gens disent qu'ils veulent défusionner. Alors, l'implantation, le deux ans qu'on a besoin pour implanter notre modèle organisationnel va aller chercher ou susciter cette adhésion. Et on aimerait bien amener le 68 % au même niveau qu'une adhésion à 68 % pour la nouvelle ville. Et on croit, le défi ou le pari qu'on fait, c'est qu'avec notre modèle organisationnel, un modèle décentralisé, un modèle sur lequel on s'est fait élire en campagne électorale, on peut satisfaire l'ensemble des citoyens à adhérer à cette nouvelle ville et continuer à la bâtir et à la réussir.

Et le délai de deux ans, M. le ministre, je termine sur ce commentaire, trouve sa justification aussi dans la concrétisation des engagements, des engagements qui sont les vôtres et qui sont du gouvernement du Québec, soit la réussite des nouvelles villes. Alors, un deux ans pour nous permettre de continuer à bâtir cette ville mais principalement à la réussir, et aussi à consulter les citoyens après cette période de 24 mois.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Il reste un bloc de 10 minutes. On va déborder légèrement l'heure avec le consentement de tout le monde, mais je vais vous laisser votre 10 minutes, à l'opposition. Mme la députée.

Mme Lemieux: Ça va. J'aurais deux questions. Je sais que ma collègue de Rosemont voudrait aussi échanger avec vous. Je veux revenir sur cette question de deux ans. M. Zampino, le président du conseil exécutif, M. le maire aussi, tout à l'heure, vous avez fait une longue intervention réclamant ce deux ans. Est-ce que je comprends que, si ce deux ans ne vous était pas accordé, vous considéreriez que le choix aura été la défusion, le choix du gouvernement? Et à défaut de ce deux ans, que se passera-t-il?

Terribles, mes questions, M. le maire, je suis désolée, mais c'est ça. C'est ça.

M. Tremblay (Gérald): Ah! Mais c'est une excellente question, mais vous devriez la poser au ministre.

Mme Lemieux: Ha, ha, ha!

M. Tremblay (Gérald): Moi, j'ai... Non, non, mais vous devriez la poser au ministre. Nous, on... Écoutez, c'est le processus démocratique. Les maires, et là je me fais le porte-parole de l'ensemble des personnes qui sont présentes ici, là, on ne peut pas revenir quêter à Québec tout le temps, tout le temps, tout le temps, tout le temps, là.

Je pense que le ministre a fait une affirmation lors de l'union... le congrès de l'Union des municipalités à l'effet qu'on veut être des partenaires. Donc, être des partenaires, je prends pour acquis que le ministre est très attentif aux propos que nous tenons. Il a dit qu'il nous entendait tout à l'heure, et il répète de plus en plus que j'ai ajouté le mot «comprendre». On peut entendre, il faut également comprendre. Il y a une limite à ce qu'on peut faire. On reconnaît entièrement la légitimité du gouvernement de prendre des décisions qui sont importantes, des décisions qui peuvent affecter, affecter la qualité de vie des citoyens et des citoyennes, mais ce que nous disons au ministre, c'est que ça prend du temps. Alors, si nous n'avons pas de temps, à partir de ce moment-là, ça va être le reflet de la réelle volonté gouvernementale qui va s'exprimer, et le gouvernement va vivre avec sa décision.

Mme Lemieux: M. le maire, dernière intervention. Vous avez repris à plusieurs reprises l'expression «consulter les citoyens». En fait, je suis d'accord avec vous aussi qu'être partenaire ce n'est pas mettre l'autre en tutelle. Enfin, ceci est une remarque personnelle.

Bon. Vous avez utilisé donc cette expression «consulter les citoyens». Est-ce que vous vous rendez compte que ça, ça fait partie un peu ? c'est un langage que je m'attribue à moi-même, je ne vous l'attribue pas ? mais, tant qu'à moi, ça fait partie un peu de l'imposture, parce que ce n'est pas une consultation des citoyens. Nous organisons la possibilité, nous offrons la possibilité à des gens qui sont contre d'engager le processus de démantèlement?

Vous savez que, techniquement, dans les dispositions actuelles de la loi, les ex-Montréalais de l'ex-Montréal n'ont pas d'intérêt à aller signer le registre. C'est ceux qui sont contre. Or, ce n'est pas une consultation; c'est l'organisation de ceux qui sont contre. Et, vous, vous nous parlez, noblement d'ailleurs, de consultation des citoyens. Il n'y a pas là... Il y a une contradiction entre ce que vous espérez et ce qui est proposé par le projet de loi actuel.

Le Président (M. Ouimet): M. le maire.

M. Tremblay (Gérald): C'est vrai que c'est difficile de demander à des personnes qui sont pour de se déplacer pour aller voter. Habituellement, ce sont les personnes qui sont contre qui s'expriment. Et même, dans tout référendum ou signature de registre, on le vit historiquement, c'est ce qui arrive.

Alors, notre responsabilité, dépendamment de la décision du gouvernement, sera de convaincre le plus grand nombre de personnes de l'importance des enjeux. Ce n'est pas un projet dérogatoire en matière d'urbanisme dans un arrondissement dont on parle, on parle de l'avenir de la métropole du Québec. C'est fondamental. Si nous ne sommes pas capables de mobiliser les personnes qui sont pour, les personnes qui vont aller s'exprimer au nom de la démocratie, à partir de ce moment-là, on n'aura peut-être pas fait tout ce qui pouvait être fait pour convaincre les citoyens de l'importance de s'exprimer sur l'avenir de leur ville, sur l'avenir de leur métropole. Donc, c'est la raison pour laquelle ça prend un peu de temps.

S'il fallait que, demain, je sois obligé d'aller rencontrer des citoyens, parce qu'il y a des signatures de registres dans quelques mois et par la suite un référendum, le temps... Il y a un célèbre dramaturge qui disait: «J'ai gaspillé le temps, et maintenant c'est le temps qui me consume.» Autant, je ne veux pas l'appliquer à moi, là, je devrais me l'appliquer dans ce cas-là, parce que c'est exactement ce qui va arriver: on va manquer de temps. Et je pense qu'au nom d'une véritable démocratie municipale, il faut avoir plus de temps pour convaincre les citoyens de l'importance de cette nouvelle ville.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le maire. Je cède la parole à la porte-parole officielle pour le dossier de la métropole et députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, M. le maire, merci d'être là. Je pense que, comme Montréalaise et montréaliste, nous sommes très fières de votre position. Et c'est vrai qu'en politique on a des choix à faire, et ils sont souvent difficiles. Mais vous auriez eu aussi la possibilité de faire le choix de demander le retrait de ce projet de loi, comme le CRDIM l'a fait, vous ne l'avez pas fait, et je respecte ça. Vous avez préféré faire des propositions qui sont constructives. Dans ces propositions-là et dans votre mémoire, je vois que vous avez proposé une structure pour faciliter la prise de décision à la ville. Et, dans cette structure-là de poids et contrepoids, vous parlez de l'harmonisation entre une vision locale et une vision panmontréalaise.

Sur la question linguistique, puisque vous abordez aussi cette question-là dans votre rapport... Je l'ai dit, je suis Montréalaise et montréaliste, mais je suis aussi francophone, et Montréal est une ville de langue française, et, dans la charte de la ville, nous avons valorisé ce fait-là. Dans votre mémoire, vous demandez les orientations de la commission parlementaire. On sait que, localement, dans certains arrondissements, ils ont déjà fait valoir qu'ils voulaient que la ville de Montréal devienne bilingue davantage, disons. Nous n'avons pas entendu de réponse. Ils ont transmis ces résolutions-là à tous les députés, donc ce n'est pas une nouvelle, là. Et donc, ce que je vous demande aujourd'hui, c'est: quelle est votre proposition ou quelle est votre position sur cette question-là? Comment allez-vous faire, même avec deux ans, pour réconcilier cette vision locale à votre vision panmontréalaise, et dont nous sommes tous fiers, que Montréal est une ville de langue française mais en Amérique?

Le Président (M. Ouimet): M. le maire.

M. Tremblay (Gérald): D'ailleurs, c'est l'article 1 de la loi n° 170, qui reconnaît que Montréal est une ville de langue française. Vous savez, je vais tout faire pour éviter le clivage entre francophones et non-francophones, entre des arrondissements riches et d'autres qui sont moins nantis, et entre l'ancienne ville de Montréal et les anciennes villes de banlieue.

Sur la question que vous posez, nous avons posé cette interrogation au gouvernement, parce que c'est important. Il s'agit d'une question qui est légitime, à laquelle le gouvernement devrait donner une réponse. Et vous comprendrez que je ne peux pas répondre à des questions qui s'adresseraient à des municipalités qui ne feraient plus partie de Montréal.

Le Président (M. Ouimet): Mme la députée de Rosemont, il vous reste du temps. Ça va?

Mme Dionne-Marsolais: Non, ça va.

Le Président (M. Ouimet): Ça va. M. le député de Beauce-Nord, la parole est à vous. Il reste quelques minutes.

M. Grondin: O.K. Alors, moi, suite au regroupement de toutes les villes, est-ce que la structure... est-ce qu'on peut dire que la structure de... Si on prenait tous les employés de toutes les villes et présentement la ville de Montréal fusionnée, est-ce que le nombre d'employés, est-ce que la structure est plus grosse? est moins grosse? Ou, en bon canadien, le «payroll» est-u plus élevé? moins élevé? Puis dans combien de temps, vous parlez de deux ans souvent, là, mais dans combien de temps le citoyen va pouvoir avoir une réelle... sentir une diminution de taxes ou une augmentation de services?

Le Président (M. Ouimet): M. le maire.

M. Tremblay (Gérald): Présentement, nous avons réussi à harmoniser les conventions collectives. Nous avons, à la ville de Montréal, 29 000 employés, dont 23 500 qui sont des employés permanents. Nous avons réussi à négocier les conventions collectives et faire l'harmonisation. Il nous reste des petits détails à négocier, détails importants, avec nos cols bleus, qui représentent 7 000 employés, mais on en a déjà 22 000 de faits, là. Alors, c'est déjà un bon départ.

n(11 heures)n

Et on a convenu qu'au niveau des arrondissements ? c'est dans notre document ? ce qu'on appelle une dotation... Ce qui irrite plusieurs présidents et conseils d'arrondissement, et présidentes, là, c'est qu'on ait une dotation. Une dotation, le terme anglais est plus fort, là, c'est «allowance». C'est comme si on allait voir, mettons, ses parents puis leur dire: Donnez-moi votre dotation, donnez-moi «my allowance». Alors, nous, ce qu'on veut faire, c'est de revenir au concept de budget. On veut que les arrondissements se fassent leur propre budget.

Donc, on doit... Avant même de penser à réduire le fardeau fiscal, ce que nous souhaitons tout comme vous, c'est de s'assurer qu'on puisse remettre à niveau... il faut remettre à niveau tous les arrondissements. Il faut s'assurer, là, avant de donner... avant de réduire le fardeau fiscal, que l'ensemble des arrondissements sur l'île de Montréal aient une qualité de service comparable avec des équipements comparables. Ça, ça fait partie du fondement même de la loi n° 170 et de la charte de la ville de Montréal. C'est l'équité. C'est l'équité entre l'ensemble des résidents et des résidentes de l'île de Montréal, et les gens sont prêts à l'accepter. Je n'ai jamais entendu, même pour des personnes qui veulent défusionner aujourd'hui, que ces personnes ne sont pas généreuses et ne veulent pas participer à mettre à niveau l'ensemble des équipements et des services partout sur l'île de Montréal.

C'est la raison pour laquelle on va... Les premières économies de 75 millions de dollars, incluant des dotations en personnel, ça va être pour doter davantage notamment les nouveaux arrondissements de l'ancienne ville de Montréal et 25 millions pour mettre à niveau tous les arrondissements. Et, à partir de ce moment-là, on peut générer des économies substantielles, pas nécessairement par des mises à pied. On peut le faire par attrition, mais on peut le faire surtout par le nouveau climat que nous avons créé à la ville de Montréal. Ce n'est plus un climat de confrontation, c'est un climat, là, de partenariat, où les employés réalisent de plus en plus l'importance d'améliorer les services à la clientèle et de générer des gains de productivité.

Et, bien plus ? et je vais terminer là-dessus, M. le Président ? je sais que c'est une petite allusion que nous avons faite dans notre document, mais le plan d'affaires que nous avons soumis, c'est fondamental, parce qu'on ne peut plus retarder des investissements importants. On en a pour 325 millions de dollars l'année prochaine dans nos infrastructures souterraines, la gestion de l'eau, les matières résiduelles ? vous le savez, c'est une préoccupation de plus en plus présente ? ainsi que le transport en commun.

Alors, pour nous, si nous n'accélérons pas le développement de la métropole avec notre partenaire privilégié, le gouvernement du Québec, ainsi que le gouvernement fédéral qui a accepté d'investir des sommes importantes dans les investissements stratégiques, on n'aura pas respecté nos engagements. C'est la raison pour laquelle, oui, c'est important, le citoyen, il est au coeur même de notre démarche, mais ce qui est beaucoup plus important pour le citoyen à, tous les jours dans sa communauté... Et on le sent, ce n'est pas pour rien qu'il y a 66 % des citoyens qui disent: On n'a pas vu de changement, et incluant un 14 % qui disent: Ça s'est amélioré. Alors, ce n'est pas... 66 %, c'est déjà bien. Alors, nous, si on a un peu plus de temps, on va augmenter cette satisfaction. Et, lorsque le gouvernement respectera son engagement et consultera les citoyens, à partir de ce moment-là, ça peut devenir un tout autre, tout autre débat. C'est ce que nous souhaitons, c'est ce que nous vous réitérons encore, M. le ministre, ainsi qu'aux membres de la commission. Puis aidez-nous, aidez-nous puis à bâtir cette grande métropole, c'est fondamental. On va continuer, nous, à assumer nos responsabilités, à travailler très, très, très fort, mais à l'impossible nul n'est tenu, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet): Alors, M. le maire de Montréal, sur ces propos, je mets un terme à notre échange. Merci de votre participation, M. Zampino et M. Abdallah. Et j'invite maintenant les représentants de l'Union des municipalités du Québec à s'approcher pour prendre place.

Union des municipalités
du Québec (UMQ)

À l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais aux représentants des médias, si vous voulez faire des entrevues, peut-être de le faire à l'extérieur de la salle. Et je demande aux représentants de l'Union municipale du Québec... Alors, c'est le moment des grandes retrouvailles, monsieur...

Alors, nous allons reprendre nos travaux. Alors, je souhaite la bienvenue aux représentantes et représentants de l'Union des municipalités du Québec. Mme Ruest-Jutras, auriez-vous la gentillesse de nous présenter les gens qui vous accompagnent?

Mme Ruest-Jutras (Francine): Alors, bonjour, M. le Président. Oui, je vous présente avec plaisir les gens qui m'accompagnent: tout d'abord, M. Marc Gascon, qui est le maire de Saint-Jérôme; M. Jean-Paul L'Allier, qui est le maire de la ville de Québec; M. Jacques Olivier, qui est le maire de la ville de Longueuil; M. Michel Tremblay, le maire de la ville de Rimouski; et M. Pilon, M. Pierre Pilon, qui est le maire de Mont-Tremblant.

Le Président (M. Ouimet): ...minutes pour votre présentation. Bonjour.

Mme Ruest-Jutras (Francine): Bonjour, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, membres de la commission. Alors, forte de l'appui unanime de son conseil d'administration qui s'est prononcé en juin dernier en faveur du respect de l'intégrité territoriale des municipalités visées par le projet de loi n° 9, l'UMQ se retrouve devant vous pour vous présenter l'essentiel de son mémoire.

n(11 h 10)n

D'entrée de jeu, nous trouvons assez aberrant de constater que tout le poids de la défense des nouvelles villes soit mis sur le dos des élus municipaux et qu'ils se retrouvent ainsi en commission parlementaire afin de défendre la viabilité des nouvelles villes.

Rappelons-nous qu'au moment du dépôt de ce projet de loi, quelques jours seulement après une déclaration ministérielle demandant aux villes de proposer des propositions de réorganisation administrative, l'UMQ avait manifesté son mécontentement de voir arriver un tel projet de loi sur la table. Nous le trouvions et nous le trouvons encore difficilement conciliable avec la volonté du ministre et du premier ministre de faire un succès des nouvelles villes. Nous trouvons d'autant plus injuste de demander de porter un jugement sur ces nouvelles villes alors qu'elles n'ont pas donné leur pleine mesure. Rappelons-nous également que la quasi-totalité de celles-ci ont été constituées il y a 10 mois et que certaines n'ont que six mois d'existence. Aujourd'hui, ces nouvelles villes font les frais de ce qu'un nouveau gouvernement a reproché à un ancien gouvernement.

Le projet de loi n° 9 est la conséquence de l'engagement du Parti libéral du Québec de consulter l'électeur sur son adhésion à la constitution des nouvelles municipalités. Il est d'abord le projet du gouvernement pour satisfaire son engagement électoral. L'échafaudage des dispositions contenues dans ce projet de loi permettra ? c'est notre point de vue ? de liquider beaucoup trop aisément les nouvelles entités municipales alors que leurs élus se consacrent entièrement et quotidiennement à remplir le mandat qui leur a été donné. Cette situation vient directement contredire le mandat de nos élus municipaux qui est de bâtir leur municipalité. Pour se sortir de cet embarras, on les enjoint à brusquer l'échéancier que tous se sont donné de réaliser les nouvelles villes pour le mieux-être de leurs citoyens en faisant de nouvelles propositions.

Nous croyons que la gestion du passé telle que proposée dans le projet de loi n° 9 ne pourra qu'entraîner des pertes de temps, d'énergie, d'efficacité, de mobilisation et viendra plutôt semer la confusion, l'inaction, l'incertitude et l'insécurité. Et je me réfère à un élément que vous retrouvez dans notre rapport et qui émane du vérificateur général de la ville de Gatineau qui écrivait dans son rapport: «Si nous avons perçu une authentique volonté d'intégration et de bonne gestion à tous les niveaux, nous devons par ailleurs prendre en compte l'incertitude créée par le projet de loi n° 9... il est indiscutable que l'incertitude peut être dommageable dans la recherche d'une performance optimale d'une gestion municipale et de la conservation d'une forte compétitivité au plan régional.» L'UMQ propose donc, à défaut de retirer le projet de loi, d'en revoir le contenu afin de permettre à ces nouvelles villes de faire face au défi des gouvernements locaux du XXIe siècle.

Depuis 1965, plusieurs études et projets de réforme ont porté sur les structures politiques municipales. En général, on y dénotait que les structures municipales ne correspondaient plus aux besoins soit de l'État soit des municipalités. L'étude de l'histoire municipale au Québec nous apprend donc que le renforcement des structures municipales n'est pas une question nouvelle et qu'elle a pour objectif constant le mieux-être du citoyen au meilleur coût possible.

Alors que l'ensemble de ces réformes a bien servi l'État, la dernière réorganisation territoriale, quant à elle, a été initiée par des municipalités soucieuses de voir se corriger les iniquités fiscales, et aussi de pallier au manque de concertation des efforts de développement économique local et régional, et de répondre à un besoin criant d'une meilleure gestion de l'aménagement territorial québécois. Le ministre des Affaires municipales, dans sa mission de soutenir les institutions municipales, doit voir à les renforcer afin d'avantager le mieux possible le citoyen et le contribuable.

L'analyse des initiatives gouvernementales de réorganisation territoriale municipale dans le courant des 50 dernières années démontre qu'invariablement, entre l'option de regroupements ou d'ententes de services intermunicipaux, le discours politique reste le même. Une organisation municipale mieux structurée suscitera un plus grand développement économique et social dans le cadre de la réalisation d'une meilleure planification et intégration des différents enjeux. Au contraire, le morcellement entraîne une concurrence stérile.

La décision du gouvernement sortant d'imposer le regroupement sans consultation décisionnelle de la population fut son choix. Bien que contesté, son pouvoir d'agir de la sorte n'a jamais été véritablement mis en cause. Toutes les décisions judiciaires relatives à la création des nouvelles municipalités, dont celles touchant les regroupements de Mont-Tremblant, Magog et Montréal, ont clairement souligné cet état de droit de la compétence des législatures provinciales sur des institutions municipales, incluant celle de les créer, de les regrouper, de les réorganiser ou de les abolir.

Par ailleurs, la faculté de tenir un référendum, prévue à la Loi sur l'organisation territoriale municipale, selon le tribunal, constitue une tribune supplémentaire pour le citoyen d'émettre son opinion. Toujours selon le tribunal, le principe de démocratie a été respecté même si le législateur ou l'exécutif gouvernemental a décidé de ne pas tenir de consultation référendaire. Voilà en résumé un historique des enjeux qui ont conduit à la situation actuelle.

Les villes nouvelles touchées par le projet de loi n° 9 n'ont pas eu le temps de consolider leur existence et, dans certains cas, de satisfaire pleinement leurs habitants. En marge des lois, des décrets, des études, des rapports et des manifestations qui ont largement fait état d'avantages et d'inconvénients autour des projets de regroupement, nous croyons, bien que l'UMQ et ses membres soient respectueux du droit du citoyen de s'exprimer, qu'il est maintenant temps de regarder vers le futur et de permettre à ces nouvelles villes de grandir avec le défi et le mandat de servir le citoyen contribuable qui y réside.

Devant la volonté ferme du gouvernement d'aller de l'avant, l'UMQ ose croire que le projet de loi n° 9 sera modifié afin d'assurer que cette consultation soit vraiment significative et qu'elle prenne le pouls réel de la population. La décentralisation annoncée par le premier ministre devra pouvoir compter sur une masse critique des villes partout au Québec. Par ses actions et considérations envers nos demandes, le gouvernement signalerait clairement sa volonté de réussite des nouvelles villes, souhait maintes fois évoqué.

Les conseils municipaux des nouvelles villes se sont constitués sur la base d'un suffrage exprimé par la population de ces nouvelles villes, ils ont une légitimité. Ces nouveaux élus, dès la constitution de leur ville, se sont affairés à l'organisation et au fonctionnement de la nouvelle entité afin qu'elle devienne le plus rapidement possible le milieu de vie et d'expression de la population qui la compose. Tout est en place pour que ce premier mandat s'exécute et... pour que ce mandat premier s'exécute, et c'est précisément ce qui se passe partout au Québec actuellement.

Comment le gouvernement peut-il, un jour, souhaiter la réussite des nouvelles villes et, le lendemain, proposer un projet de loi qui se révèle être rien de moins qu'un mode d'emploi à la défusion, et ce, sans même mettre de l'avant les aménagements permettant aux nouvelles villes de se construire? En effet, il annonce à la population que, dans un avenir très proche, un référendum lui permettra de pouvoir mettre un terme prématurément à l'existence de ces nouvelles entités, entraînant par le fait même, je l'ai dit tout à l'heure, un climat d'incertitude qui paralyse la consolidation des nouvelles villes. Le gouvernement se doit d'être clair dans ses positions. Il faut que les membres de l'Assemblée nationale soient plus convaincus et plus convaincants à l'égard de l'avenir de ces nouvelles villes.

L'agenda gouvernemental des prochains mois est passablement chargé de rendez-vous avec les partenaires municipaux. La révision des rôles et des compétences des municipalités sur les plans de la décentralisation, de l'autonomie locale, de la négociation d'une nouvelle fiscalité nous exhorte à raffermir les rapports constructifs entre gouvernements et municipalités afin que ces dernières respectent positivement l'échéancier électoral de novembre 2005.

L'UMQ réitère que le projet de loi n° 9 n'est pas le projet de ses membres. Puisqu'elle en aurait souhaité le retrait, l'UMQ estime que le gouvernement devra en assumer l'entière responsabilité. Compte tenu de la détermination du gouvernement d'aller de l'avant, elle tient cependant à formuler quelques recommandations sur certains éléments présents dans le texte législatif, permettant de la sorte de prendre le véritable pouls d'une population bien informée.

D'entrée de jeu, l'assujettissement de plusieurs municipalités regroupées de façon volontaire avant le projet de loi n° 9 est tout à fait injustifié. Pour celles-ci, les affinités communes ont permis aux conseils municipaux de définir une vision cohérente avec la volonté de leurs citoyens et citoyennes. L'UMQ croit fermement que les municipalités nouvelles qui sont issues d'un regroupement volontaire devraient donc être soustraites du champ d'application du projet de loi à l'étude. Comment peut-on justifier que la volonté exprimée par la majorité des élus concernés dûment mandatés par leurs électeurs, ayant suivi les étapes de regroupement prévues aux lois en vigueur, soit contestée et remise en question dans le cadre de ce projet de loi? L'inclusion de ces municipalités au projet de loi, mettant en doute leur pérennité, vient freiner à coup sûr le développement de ces collectivités.

Qu'est-ce qu'il en est maintenant du processus menant au scrutin et du scrutin lui-même? L'ampleur de la décision, surtout les conséquences importantes que pourrait engendrer un résultat menant à un démembrement partiel ou total des municipalités nouvellement constituées, nous amène à proposer des modifications aux articles touchant le scrutin ainsi que le processus menant à celui-ci. Nous croyons que ces modifications permettront au législateur d'évaluer judicieusement les intentions des citoyens concernés.

n(11 h 20)n

Qu'en est-il du registre? Ce projet de loi encadrant les défusions recevra au cours des prochains mois une médiatisation comme peu de dossiers. Le premier volet de cette consultation, qui est la signature des registres, sera autrement plus connu que la demande d'approbation par les citoyens d'un simple règlement d'emprunt, principe de consultation référendaire exigeant habituellement l'ouverture de registres sur une ou deux journées. Si nous pouvons élire nos maires et conseillers, députés provinciaux et fédéraux en une journée, comment peut-on justifier l'ouverture d'un registre sur une période de cinq jours? Nous proposons donc que la durée d'ouverture soit ramenée à un jour au lieu de cinq comme le prévoit le projet de loi. Le projet de loi prévoit également que la signature de 10 % des personnes habiles à voter enclenche le processus de consultation référendaire. Dans le but de dénoter une véritable volonté d'aller de l'avant et de procéder avec l'étape référendaire, nous croyons qu'un pourcentage de 25 % serait beaucoup plus indicatif de cette volonté.

Le scrutin. Nous sommes devant un projet de loi d'exception dont les tenants et aboutissants sont grands, qui vont au-delà des frontières artificielles des anciennes municipalités. Le projet de loi sous étude s'éloigne de la loi encadrant le processus de consultation référendaire habituel auquel les municipalités sont assujetties. Pour ces raisons, nous croyons qu'il y a lieu de proposer des modalités particulières pour ce projet de loi exceptionnel. Agir autrement pourrait favoriser la volonté d'une minorité aux dépens d'une majorité, exprimée ou non, en faveur de la nouvelle ville. Les conséquences d'une défusion enclenchée par une minorité ne pourraient être suffisantes pour donner raison à l'érosion des pouvoirs de développement économique et d'épanouissement social bien engagés.

Le ministre a déclaré qu'un nombre significatif de votants serait requis pour amorcer la défusion. Cependant, il n'a toutefois jamais défini ce qu'est un nombre significatif. D'ailleurs, lorsque questionné, la réponse demeure floue, comme en témoigne cette citation tirée du journal Le Devoir le 18 juin, et je cite: «Le résultat sera significatif s'il s'appuie sur une participation significative.» On ne précise pas non plus quels sont les seuils de participation nécessaires. L'adjectif «significatif» prend tout son sens et tout son poids lors de l'analyse du résultat du scrutin référendaire. Le caractère permanent que porte la consultation justifie que le ministre requière un vote exprimé significatif.

Des mesures instaurées ailleurs au Canada et dans le monde montrent que des majorités qualifiées sont exigées selon l'importance de la décision. C'est le cas en Pologne, en France, en Saskatchewan, au Nouveau-Brunswick. Dans le monde municipal québécois, la règle de la double majorité est appliquée au conseil de la MRC lorsque des territoires municipaux doivent prendre des décisions sur un même objet. Cette règle assure qu'un vote affirmatif sera représentatif d'une majorité de la population concernée. Plus encore, les règles de défusion de certaines régies intermunicipales exigent l'unanimité des voix pour les règlements d'emprunt. Au surplus, en droit corporatif, un vote des deux tiers des actionnaires est demandé pour dissoudre une corporation à capital-actions. C'est ce qu'on s'apprête à faire ici, dissoudre une corporation.

L'aboutissement de la réorganisation municipale du gouvernement sortant est, comme nous le mentionnions précédemment, le résultat de près d'un demi-siècle de réflexion et de consultation. La révision structurelle des organisations municipales, tant dans ses limites territoriales que dans ses compétences, n'est pas une procédure récurrente qui revient aux quatre ans. Sur ce, le gouvernement doit assumer sa responsabilité et affirmer de façon claire ce qu'il considérera comme un vote significatif. À cette question, le contexte spécial et exceptionnel du projet de loi nous amène à proposer qu'un seuil de 50 % plus un des personnes inscrites habiles à voter en faveur de la décision soit nécessaire pour que le ministre la considère comme significative.

Soulignons que les référendums qui auront cours ne seront que consultatifs et indicatifs sans être décisionnels, parce qu'il pourrait y avoir autre chose ensuite qui viendrait se greffer à la décision. Cette marque du 50 % plus un serait le critère principal indicatif du pouls de la population. De plus, en acquiesçant à notre demande, le gouvernement poserait un geste concret et une conséquence logique de ses voeux de réussite des nouvelles villes dans un contexte législatif d'exception.

Aussi, suite à un scrutin favorable à la défusion par un ou des secteurs donc des anciennes municipalités, le ministre devra reconnaître et donner suite à la décision de la municipalité quant à son avenir sans les secteurs défusionnés. Les maires et conseillers seront possiblement confrontés à gérer des municipalités gruyère ou carrément dépouillées de secteurs indispensables à la mise en place d'entités municipales viables.

Les études. Les études d'impact devront présenter autant les aspects qualitatifs que quantitatifs relativement à l'adhésion et à la défusion. Le gouvernement nous signale que sa détermination de procéder aux consultations résulte d'un engagement inclus dans une résolution adoptée par les membres du Parti libéral du Québec alors que cette formation composait l'opposition officielle. Nous pouvions y lire: «En garantissant le droit des citoyens de chaque municipalité de choisir, par référendum, s'ils acceptent ou non de fusionner leurs municipalités» et «en assurant qu'ils auront toute l'information nécessaire pour analyser l'ensemble des effets de la restructuration proposée, en évaluant notamment ? et ce n'est pas peu de choses ? les impacts économiques ? mais aussi ? sociaux [...] sur les services de celle-ci pour les citoyens de chacune des régions et des municipalités» locales. Donc, l'impact régional et l'impact local. Nous osons croire que la partie de la résolution assurant que les citoyens auront toute l'information sera bien comprise.

En conséquence, nous demandons que ces études prennent en considération tous les coûts d'une défusion, du financement des services centralisés en vertu de l'article 48, de l'identification et du financement des équipements, activités et infrastructures supralocales et évidemment des coûts afférents à la gestion des ressources humaines.

La période de temps de 60 jours qui est prévue par la loi nous apparaît un délai trop court pour la lourdeur du dossier. Les conseils des nouvelles villes doivent par ailleurs avoir le droit de consulter et discuter du contenu de ces études avant la diffusion au public. Il est bien entendu que la nouvelle ville n'aura pas à assumer le coût de ces études qui devra être imputé au gouvernement. Nous pensons aussi que les conseils des nouvelles villes doivent avoir le droit de consulter et de discuter du contenu de ces études avant la diffusion au public.

Pour ce qui est de l'article 48, qui traite des services centralisés, bon, cet article énumère les différentes compétences qui demeurent centralisées, pour lesquelles devront être signées des ententes. La liste nous semble incomplète, car l'article ne prévoit pas d'entente pour la gestion de l'eau. De plus, l'évolution des responsabilités municipales au fil des ans a fait en sorte que de plus en plus d'allocations pour les interventions et des investissements dans les domaines du développement économique et du développement culturel sont inclus dans les budgets municipaux. Alors, il y aurait donc lieu d'inclure ces deux responsabilités dans la liste des compétences qui sont présentées à cet article.

Pour ce qui est des équipements, infrastructures et activités à caractère supralocal, en plus d'informer les citoyens sur la désignation et le financement des équipements, infrastructures et activités à caractère supralocal à l'intérieur des études sur la défusion, nous croyons que cette désignation et le mode de partage du financement devront être intégrés dans le décret de reconstitution des anciennes municipalités. Il faut avoir vécu cette période où nous avions à négocier quels étaient les équipements à caractère supralocal et de quelle façon on devait les financer pour comprendre la nécessité d'intégrer ça dans le décret de reconstitution.

La péréquation. La loi prévoit un mécanisme de péréquation entre les villes reconstituées après les référendums et la ville qui y est liée. La formule présentée, selon nous, pose de graves problèmes d'équité fiscale qui affectent particulièrement les villes-centres. En fait, cette péréquation devient pour certains...

Le Président (M. Ouimet): ...conclure, Mme Ruest-Jutras.

Mme Ruest-Jutras (Francine): Oui. Je voudrais peut-être parler de l'impact sur les ressources humaines, parce que plusieurs interrogations surgissent quant aux conséquences qu'auront les décisions sur les coûts et la gestion des ressources humaines. Nous pensons qu'une priorité peut être accordée... doit être accordée à la mise en place de mesures visant à encadrer toute la question lors d'une éventuelle réorganisation territoriale de certaines municipalités.

n(11 h 30)n

Le projet de loi sous étude reste muet à propos des répercussions de ces nouvelles réorganisations territoriales sur les conditions de travail des employés municipaux. Le démantèlement des nouvelles municipalités amènera-t-il des modifications sur les unités d'accréditation des employés? Quelles centrales syndicales on présentera à ces employés? Y aura-t-il des périodes de maraudage? Lors de la création des nouvelles entités, les employés qui oeuvraient antérieurement dans les municipalités nouvellement reconstituées seront-ils automatiquement retournés dans leur municipalité d'appartenance, y compris les cadres?

Alors, on avait d'autres recommandations, mais j'imagine qu'on pourra y revenir à la période de questions.

Le Président (M. Ouimet): C'est dans le mémoire.

Mme Ruest-Jutras (Francine): Alors, on considère que le gouvernement doit d'abord agir en assumant pleinement sa responsabilité d'optimiser la carte municipale dans ses structures, ses compétences et ses limites territoriales et on souhaite que vous donniez suite aux recommandations qui vous sont faites. Et on aura l'occasion donc d'élaborer davantage lors de la période de questions. Merci de votre attention.

Le Président (M. Ouimet): Alors merci. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Fournier: Merci, M. le Président. Mme la présidente, messieurs les maires, merci de votre participation à nos consultations qui, comme je le disais durant les remarques préliminaires, nous permettent d'entendre différents points de vue, aujourd'hui plutôt concentrés dans une même direction, demain dans une autre, et, pour les autres journées, des horaires un peu plus variés et mixtes. Mais, comme je le disais un peu plus tôt, nous participons à cette commission les oreilles ouvertes et avons l'intention d'en tirer le meilleur profit.

Ce que nous cherchons à faire, bien que vous l'avez mentionné, que le gouvernement du Québec a compétence pour passer les lois à l'égard des municipalités, ce que nous cherchons à faire, c'est de nous assurer que les citoyens puissent y prendre la meilleure partie possible dans l'adoption ou la réflexion sur les différents projets de loi.

Et, certainement dans le domaine municipal, suite à ce que nous avons vécu dans les dernières années, cela nous semble tout à fait approprié d'opposer le pouvoir du gouvernement du Québec à considérer les municipalités comme des créatures avec l'autre de dire que le gouvernement du Québec abdique à ses capacités, qu'il ne fera plus rien, il y a, je dirais, une certaine marge. Et c'est ce que je pense que les citoyens souhaitent, c'est que, dans tout état de cause, lorsque les lois sont passées, qu'elles prennent en considération ce que sont aussi le désir des citoyens. Et c'est ce que nous allons faire en tenant compte non seulement de ce qu'ils diront dans une consultation, mais ce qu'ils ont déjà dit lors d'une autre consultation qui vous a amenés, vous tous, à être présents devant nous parce que, de cette consultation, est issue la légitimité que vous avez de les représenter.

Donc, nous vous écoutons comme partenaires privilégiés que nous avons à l'égard de la population parce que vous avez cette légitimité de votre élection, ce qui ne nous empêche pas de créer un pont vers les citoyens, puisque nous-mêmes sommes issus d'une élection qui nous a amenés ici avec ce qui était un engagement, devenu un enjeu électoral et ensuite un mandat de gouvernement.

Si vous me permettez, Mme la présidente, j'aimerais peut-être, rapidement... parce que l'intervention qui vous a précédée, de la ville de Montréal, était concentrée de façon très, très importante ? je ne dirais pas que c'était juste ça, mais concentrée de façon très, très importante ? sur un délai accru que la nouvelle ville de Montréal pouvait bénéficier ou devait pouvoir bénéficier pour démontrer toutes les possibilités qu'elle avait.

Vous avez pris soin de nous rappeler que la période à laquelle nous vivions, avec un peu d'insistance, qu'elle était incertitude, insécurité, inaction. Si Montréal le propose, j'aimerais que vous nous disiez, vous qui représentez aussi Montréal, bien sûr, comment vous voyez cette hypothèse soumise par Montréal, pour Montréal, mais pour l'Union. Est-ce que vous considérez que cela serait bénéfique que nous donnerions, que nous donnions ce délai? Et, auquel cas, pouvez-vous m'expliquer comment on pourrait éviter qu'il y ait incertitude, inaction et instabilité si d'aventure il fallait accéder à une telle demande?

Mme Ruest-Jutras (Francine): Je pense que le maire de Montréal ? j'étais là lorsqu'il a fait l'essentiel de sa présentation ? vous a demandé d'acquiescer à cette demande. Et il vous l'a fait de façon pressante en vous disant ce qui la justifiait, ce qui la motivait. Donc, c'est vous, et non pas nous, qui aurez à trancher quant à cette demande qui vous est faite. La métropole, c'est la métropole. La métropole a un statut peut-être différent de ce qu'une autre ville peut avoir, et je ne crois pas que ça poserait, de la part des membres de l'UMQ, un problème important si vous la considériez de façon particulière.

M. Fournier: Évidemment, vous avez tout à fait raison, j'abonde dans votre sens que c'est nous qui allons trancher. Mais, puisque nous tenons une consultation, nous n'allons pas éviter la possibilité qui nous est offerte de pouvoir bénéficier de vos lumières. C'est pourquoi je pose la question. J'imagine que vous êtes venus dans ce sens-là.

M. Olivier (Jacques): On est toujours disponibles à vous éclairer, hein, tout le temps, tout le temps.

M. Fournier: J'en suis fort aise et j'espère que nous pourrons le faire encore dans les jours et les semaines à venir. Mais je comprends donc de votre réponse que vous considérez que la demande de Montréal pourrait être considérée sous l'angle d'un statut particulier pour Montréal, considérant ce qu'elle est, mais que, pour l'UMQ, ce n'est pas une considération que vous souhaitez voir. Vous souhaiteriez que la période de la consultation arrive le plus tôt possible.

Mme Ruest-Jutras (Francine): Pour nous, que Montréal soit un cas particulier, ça peut aller, mais pour l'essentiel des autres amendes, on dit: Le processus est amorcé, allons-y, hein!

M. Fournier: J'ai noté.

Mme Ruest-Jutras (Francine): Même si nous aurions souhaité le retrait du projet de loi.

M. Fournier: Tout à fait. Je l'ai noté. Vous avez parlé tantôt des dates ou des jours, des journées pour la signature du registre, mentionnant que d'habitude c'était une ou deux journées et que là il y avait cinq jours. Évidemment, on sait tous qu'il y a certaines grandes municipalités pour lesquelles c'est cinq jours, mais, de façon générale, dans toutes celles qui sont visées, ce serait autour d'une ou deux journées si on appliquait la loi telle qu'elle est actuellement. Vous notez que, pour l'élection, la nôtre, je dirais, il n'y a qu'une journée. On sait bien qu'il y a aussi deux journées de vote anticipé, donc au moins trois journées. Est-ce que je crois comprendre que votre proposition serait de dire, puisqu'il faut faire une corrélation entre les registres et, c'est vous qui le soumettez, l'élection notamment des députés, comme je vois qu'il y a trois jours pour l'élection des députés, est-ce que vous suggérez... Je comprends que vous suggérez un jour, mais comme, à mon avis, il y a des votes anticipés dont vous n'avez pas tenu compte, qui sont des journées de votation, est-ce que vous considéreriez que, trois jours, ça correspond à ce qui est correct?

Mme Ruest-Jutras (Francine): Je pense qu'il y a M. le maire de Québec qui voulait...

Le Président (M. Ouimet): Oui. M. le maire de Québec.

M. L'Allier (Jean-Paul): Un vote anticipé doit être justifié, ce n'est pas quelqu'un qui décide de voter par anticipation pour quelque raison. Il faut avoir un motif pour voter par anticipation, il faut être... que ce vote soit qualifié de cette façon. Alors, si vous dites... quand vous dites qu'il y a trois jours, il n'y a pas vraiment trois jours. Moi, si je ne suis pas malade, si je ne voyage pas, j'ai un jour pour voter, et c'est le cas de la majorité des citoyens. Alors, si vous voulez étendre le principe de la démocratie à un vote anticipé pour ceux qui seront en Floride, pour ceux qui seront absents, pour ceux qui sont malades... Mais il faudrait que ce soit aussi restrictif que pour le vote anticipé au niveau des gouvernements.

M. Fournier: Merci pour votre réponse. Vous avez fait mention des...

M. Olivier (Jacques): ...juste un complément. Si on essayait de voir, dans votre projet de loi, disons, cinq jours, puis qu'on disait: Oui, on étend encore plus longtemps la démocratie, il faudrait aussi essayer de voir les raisons qui motivaient le législateur antérieur, et longtemps avant que vous soyez au monde, et moi aussi j'espère, dans le sens qu'on n'avait pas de moyens de communication qui existaient comme ils existent aujourd'hui. Nous n'avions pas la capacité d'informer nos citoyens et citoyennes aussi rapidement qu'on avait. Si vous vous souvenez, si vous lisez l'histoire un peu, vous allez voir, vous allez vous rendre compte que vous faisiez un discours, en politique, et il était bon durant toute la campagne électorale. Aujourd'hui, vous en faites un, M. le ministre, et, 30 secondes après, il est diffusé partout et, le lendemain déjà, vous avez besoin de vous renouveler dans un nouveau discours parce que déjà votre discours est vieux.

n(11 h 40)n

Alors, ce qu'il faut dire dans ça: si on veut aider à la participation, essayons de comprendre le raisonnement du ministre des Affaires municipales et le raisonnement dans ce qu'il y a dans la loi n° 9. Il y a une incohérence, M. le ministre, quand on essaie de comprendre ce que vous voulez dire, dans le sens... c'est-à-dire qu'on va... on n'est pas plus favorables aux défusions. J'écoutais votre déclaration à matin; personnellement, je dirais qu'elle est favorable aux défusions. Alors donc, ce sera une question d'interprétation, entre vous et moi, un jour, mais ce que je veux dire... Et le signal que vous devez lancer est un signal à savoir: Oui, vous voulez que les villes réussissent, mais est-ce que vous en voulez, des villes? Parce que, si... Pour réussir, M. le ministre, il faut que vous en vouliez, des villes. Et c'est...

Dans notre mémoire, ici, que je présente, on ne nie pas le droit au législateur de dire... de faire les règles, et de mettre les règles, et de mettre la table, si je peux... Ce qu'on nie, quand même, c'est de penser que le législateur, un coup qu'il a fait les règles et qu'il a voté les règles, devienne notre patron. Pourquoi? Parce que nous avons été élus au même titre que vous avez été élus. Et c'est dans ce sens-là qu'on dit, quand vous émettez des règles, qu'on dit: M. le législateur, faites donc attention, vous allez heurter la démocratie plutôt que de l'aider. Vous allez aider une minorité à vouloir défaire ce qu'un gouvernement démocratement élu a fait, et que vous disiez qu'il manquait un élément de démocratie. Mais on ne l'a pas... Ce n'est pas nous qui a fait cette promesse-là, c'est vous.

On ne nie pas... aussi, on ne nie pas que vous êtes un gouvernement légitimement élu. Au contraire. On n'a jamais nié ça, nous. Alors, ne venez pas nier qu'on soit aussi illégitimes que vous. Ce que je veux juste vous dire, c'est que, quand on cherche la démocratie, on peut l'interpréter à la façon qu'on veut, avec des chiffres qu'on veut. Et, dans votre question du cinq jours, vous n'aidez pas la démocratie. Parce que, pourquoi pas d'abord 365 jours? Pourquoi cinq jours? Et on a fait des recherches nous aussi. Vous pourriez aller jusqu'à 45 jours, si vous voulez. Et jusqu'où vous allez aller, M. le ministre? On ne le sait pas, nous. C'est votre décision et c'est votre pouvoir. Donc, c'est selon votre décision et, je suis sûr, vous allez vivre avec.

Pour nous, la démocratie, c'est une journée, tel qu'exprimé par le gouvernement du Canada, par le gouvernement du Québec, par les municipalités, tel que vous, les législateurs, avez décidé qu'il y aurait des élections. Ce n'est pas nous qui avons décidé. C'est vous qui imposez les règles, et puis, qu'elles soient bonnes ou mauvaises, c'est question d'interprétation, après ça. Alors, c'est dans ce sens-là qu'on veut dire, M. le ministre...

Le Président (M. Ouimet): ...parce que le temps est écoulé, M. le maire de Longueuil. On aura l'occasion d'y revenir. Malheureusement, je dois vous arrêter là. Je vais céder...

M. Olivier (Jacques): ...M. le Président, puis je ne veux absolument pas prendre de votre temps à vous.

Le Président (M. Ouimet): Avec la permission de l'opposition, allez-y.

M. Olivier (Jacques): C'est que je n'ai jamais vu, au municipal, un vote par anticipation, ce serait tout simplement de créer encore un nouveau droit.

M. Fournier: Je ne veux pas vous... J'ai fait la corrélation avec ce que Mme la présidente disait à propos de l'élection des députés, puisque c'est... La corrélation nous venait de l'UMQ. Je n'ai pris que cet exemple. Évidemment, je partage avec vous qu'on pourrait faire beaucoup d'autres exemples, on aura sûrement le temps, dans les jours, les semaines à venir, de parler d'autres exemples.

Mme Ruest-Jutras (Francine): Absolument. Le message que nous voulions vous envoyer, M. le ministre, c'est que cinq jours de registre, ça nous apparaît beaucoup trop, et ça nous apparaît de nature à favoriser les défusionnistes, et notre rôle n'est pas dans ce sens-là.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Alors, Mme la députée de Bourget, je vous cède la parole.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je vous salue, Mme la mairesse, messieurs les maires. Merci de votre présentation. D'abord, je dois le dire, je crois que l'UMQ a fait un travail formidable, et ça se voit aux résultats. Je sais que votre organisation a subi une cure de jeunesse, il y a quelques mois, qui témoigne davantage de la complexité, de la réalité différente auxquelles les villes font face. Vous avez une organisation très modernisée, là, et dont on voit les résultats. Donc, je veux vous en remercier, puisque... et surtout vous dire à quel point je suis assez... non pas étonnée, mais admirative du fait que vous avez un mémoire qui justement fait ces nuances. Les municipalités ne sont pas toutes pareilles, elles n'ont pas toutes les mêmes tailles, il y a des enjeux différents, il y a des réalités différentes.

Et j'avoue que je trouve un peu dommage le fait que le ministre tienne absolument à vous mettre en opposition les uns avec les autres, parce que, visiblement, dans ce mémoire, vous avez essayé... puis on le voit aussi, et on le verra cet après-midi, comme le mémoire du caucus des grandes villes, le mémoire du caucus des villes d'agglomération, il y a un effort à décrire une réalité qui est complexe. Et la simplification à outrance, ce n'est pas toujours une bénédiction dans le débat démocratique.

Je voudrais aborder un certain nombre de questions et exprimer mon étonnement. Bon, il vient d'y avoir... On vient d'assister à un échange sur le nombre de jours disponibles pour l'ouverture des registres. Je disais à l'occasion des remarques préliminaires que, pour moi, la pertinence... je pense que, dans les échanges qu'on a eus jusqu'à maintenant, la pertinence du projet de loi n'est pas encore démontrée. On peut bien faire des grandes discussions sur les modalités, mais, le point de départ d'un projet de loi en général comporte une certaine base consensuelle à partir duquel on peut bâtir. Et je vois à vos propos, le nombre de pages que vous prenez à décrire le nouvel environnement dans lequel les municipalités doivent évaluer, je vois bien que cette base consensuelle n'est pas présente et rend très difficiles les discussions sur les modalités.

Je voudrais revenir sur deux, trois éléments que vous abordez. Notamment à la page 27 , vous dites: «L'UMQ s'oppose à tout incitatif financier ou fiscal à la défusion.» Alors, je répète votre propos, là: «L'UMQ s'oppose à tout incitatif financier ou fiscal à» des défusions. J'aimerais vous entendre là-dessus. Il y a des éléments dans le projet de loi qui concernent ces questions financières et/ou fiscales. Visiblement, les moyens identifiés dans le projet de loi provoquent énormément de questions, voire énormément de distorsions dans le choix de ces moyens. J'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus, à savoir de quelle manière... en fait, ce qu'il faut... ce qui justement incite à la défusion, sachant que l'organisation des villes, des nouvelles villes, les villes unifiées, avait comme objectif de remettre de l'équité graduellement, pas d'un seul coup dans certains cas, mais de remettre les pendules à l'heure. Alors, je voudrais vous entendre un peu sur cette question.

Mme Ruest-Jutras (Francine): Alors, ce qu'on remarque avec le principe et la façon dont les choses se font au niveau de la péréquation, qui sera basée essentiellement sur la richesse foncière uniformisée, hein, c'est qu'on va avoir des villes qui vont avoir vraiment des incitatifs fiscaux à s'en aller, des villes qui, par exemple, recevront 5 millions de péréquation si elles défusionnent; d'autres, 2 millions et demi; d'autres, 900 000. Alors, écoutez, en partant, on vient dire à ces gens-là: Vous avez un incitatif important, financier, pécuniaire à vous en aller. Et, souvent, cette péréquation-là va se faire au détriment de la ville-centre, qui, on le sait, est celle qui a toujours à fournir des services additionnels, compte tenu de sa position particulière. Alors, c'est pour ça qu'on dit: Il faut vraiment revoir tout ça. Parce que, dans l'état actuel du projet de loi, il y a des gens pour qui ça va être payant en plus de défusionner. Donc, on vient d'ajouter un élément de plus à ceux qui souhaiteraient le faire. On a fait certaines hypothèses, là, dans la région de l'Outaouais, dans la région de Montréal, dans la région de Québec. Alors... C'est ça, on a toute une liste ici de ce que ça donne comme résultats.

Mme Lemieux: ...si je comprends bien, Mme la mairesse, vous avez calculé, à partir de l'hypothèse et des indications que comporte le projet de loi, les effets que ça pourrait avoir?

Mme Ruest-Jutras (Francine): Exactement. Et, en prenant la base qui est celle retenue dans le projet de loi, qui est celle de la RFU.

Mme Lemieux: Mme la présidente, j'aimerais aborder la question des relations de travail. En fait, c'est un aspect qui est complètement négligé dans le propos du gouvernement et dans ce qui est présenté dans ce projet de loi. Je ne sais pas combien y a-t-il de travailleurs, d'hommes et de femmes qui travaillent dans la fonction publique municipale québécoise, mais c'est beaucoup de gens. Et peut-être que, Mme la présidente, vos collègues pourront aussi certainement en parler. Je ne crois pas me tromper en disant que, somme toute, la fonction publique municipale québécoise a gagné le pari de l'unification des villes. Des hommes et des femmes, des cadres, je le disais dans mes remarques préliminaires, des hommes, des femmes qui occupent toutes sortes de fonctions vous ont suivis là-dedans, l'ont fait avec coeur. Et, somme toute, ça n'a pas tellement... Et même de nouvelles conventions collectives ont été conclues, d'autres sont en train de se négocier.

Mais, visiblement, là, comme citoyenne, moi, je lis les journaux tous les jours et je n'ai pas vu beaucoup d'articles ces dernières années qui disaient: Ça n'a pas de bon sens, cette fusion, puis on n'y arrive pas, puis on n'est pas capables, etc. Les gens se sont vraiment mobilisés autour de ça. Or, cette question-là est complètement sous silence. Est-ce que vous avez des indications sur le degré, par exemple, le degré d'avancement de ces questions de relations de travail? Est-ce que, en gros, les conventions collectives sont signées? Est-ce que, en gros, l'intégration du personnel est pas mal complétée? Parce que ça a impliqué des mouvements de personnel. Comment vous qualifieriez l'état de situation en termes de relations de travail?

n(11 h 50)n

Mme Ruest-Jutras (Francine): Je vais laisser certains collègues, dont les conventions sont signées, vous dire comment ça s'est passé chez eux. On évalue à 55 000 employés à peu près, là, le nombre d'employés qui seraient touchés. Peut-être laisser M. Pilon pour commencer, et puis, ensuite, M. Olivier.

Le Président (M. Ouimet): M. Pilon.

M. Pilon (Pierre): Moi, je peux vous dire qu'à Mont-Tremblant à date toutes nos conventions collectives sont signées et de façon unanime. C'est-à-dire les policiers, les cols bleus, les cols blancs, toutes les conventions collectives sont signées. Nous avons même réalisé l'équité. L'équité salariale est réalisée chez nous. Nous avons également signé tous nos... Et je pense qu'à date il y a réellement un enthousiasme pour travailler pour la nouvelle ville actuellement et ça s'est reflété dans la signature de nos conventions collectives qui sont toutes réglées et à des conditions avantageuses pour les deux parties. Alors, c'est réglé pour nous, la ville fonctionne actuellement comme une seule ville.

Le Président (M. Ouimet): M. Olivier.

M. Olivier (Jacques): M. le Président, merci. Je m'excuse d'avoir pris un peu de temps tantôt.

Le Président (M. Ouimet): Non, il n'y a pas de problème.

M. Olivier (Jacques): Dans la discussion, je pense, des employés, vous touchez une chose extrêmement sensible. J'ai déjà été président d'un syndicat, j'ai été vice-président à la CSN, j'ai été... c'est la plus belle référence, et, en même temps, j'ai eu le privilège de siéger dans une autre chambre qu'ici, c'est-à-dire à Ottawa. Je dois vous dire que, les employés, c'est le coeur d'une réussite ou d'une défaite, de réussir à bâtir ou construire des choses. Et je dois vous dire que nous avons, à l'heure où je vous parle, une convention de 600 employés qui a été signée et qui a même... avec une déclaration du président de la Fraternité qui, lui, souhaitait que la ville demeure. Pourquoi? Parce que ça offre un plan de carrière à ces gens-là qui avaient... Au niveau des policiers, dans certaines villes, ils étaient 29, dans d'autres ils étaient 15. Il y en a d'autres où ils étaient 300. Alors, mis ensemble, on a pu bâtir quelque chose et motiver nos employés.

Dans la loi n° 9, oui, M. le ministre, elle crée de l'incertitude, surtout au niveau de nos employés aussi. Cette incertitude, parce que ces gens-là ne savent pas... au lendemain de votre décision de l'Assemblée nationale de faire de la loi n° 9 ce qu'elle deviendra, ils ne savent pas dans quelle municipalité ils vont retourner. Et, dans ce sens-là, sur un plan de carrière, je vous invite à y réfléchir, vous allez voir que ça donne un méchant problème.

Et on ne peut pas construire sans nos employés. Vos employés de l'État, vous en avez besoin. Vous avez besoin de vos sous-ministres et sous-ministres adjoints et des autres. Impossible! Nos conventions collectives sont en marche. La discussion va bien, madame, et je dois vous dire que, quand la ville de Longueuil, aux alentours du 30 septembre, sera appelée ici, je crois que toutes les conventions seront signées.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Le temps est écoulé. Alors, M. le ministre.

M. Fournier: De combien de temps que... dont je bénéficie? Je vois deux questions...

Le Président (M. Ouimet): Vous avez 10 minutes. Je sais que la députée de La Pinière voulait s'inscrire également.

M. Fournier: Je vais aller rapidement puis je vais permettre à ma collègue de poser une question.

Deux, brièvement. Vous avez parlé tantôt ? et c'est très concret ? vous avez parlé tantôt du souhait que vous formulez que les villes puissent ? attendez que je retrouve, là, la façon ? puissent avoir connaissance des études et puissent en discuter avant qu'elles soient connues, publiques... publiquement. Pouvez-vous nous dire ce que vous envisagez comme mécanique pour, avant que les études ne soient rendues publiques, que la ville puisse...

Mme Ruest-Jutras (Francine): ...que les élus soient quand même au fait de ce qu'on retrouvera dans ces études. Parce que ça va être fait par des gens, des consultants, des gens qui seront extérieurs à... Bon, j'imagine qu'ils seront arrimés quand même avec les gens de la fonction publique municipale pour aller chercher ces données-là. Mais, avant que ce soit rendu public, il serait, à notre avis, normal que les élus puissent en prendre connaissance.

M. Fournier: C'est une prise de connaissance dont vous parlez. Vous ne parlez pas d'une intervention de la municipalité au sein même de l'étude.

M. Olivier (Jacques): Mais, nous, M. le ministre, nous avons déjà entrepris des études. Si vous vous souvenez, dans une de vos déclarations et qui, à juste titre... D'ailleurs, on nous a demandé, en vertu d'une déclaration ministérielle, d'essayer d'assainir et de ? le terme anglais ? faire un «fine-tuning» pour... comment améliorer notre municipalité. Ça inclut de faire des études pour dire si... des hypothèses s'il arrive telle chose ou s'il n'arrive pas telle chose. Nous avons l'intention, au mois d'octobre, de vous les présenter dans ce sens-là, ce qui permettra peut-être d'avoir une excellente discussion avec vos fonctionnaires et nos fonctionnaires pour voir si ça se justifie. Et, par après, il faut absolument qu'on informe la population de ce qu'on a fait. Et, dans ce sens-là, comme Mme la présidente vous a mentionné très clairement dans le texte, on dit: Donnez-nous un peu de temps pour qu'on puisse expliquer à cette population.

Et d'ailleurs, vous-même, vous êtes un des artisans qui disent continuellement qu'il faut protéger le citoyen. Eh bien, on est d'accord avec vous à protéger le citoyen et on est d'accord aussi à le faire parler, le citoyen, s'il faut. Mais, dans ce sens-là, il faut que nos études qu'on est en train de faire soient, oui, juxtaposées avec vos études, mais que ça ne devienne pas une bataille de chiffres et qui... Je ne voudrais pas, en tout cas, élaborer plus longtemps, mais...

M. Fournier: Je voulais juste m'assurer... laisser ma collègue... S'il y a du temps, je reviendrai. Je veux juste m'assurer que ce que vous me dites finalement, c'est que, une fois que les études ? on parlait d'études finales ? seront faites, que vous puissiez en prendre une connaissance préalable avant de les rendre publiques et non pas une intervention de la municipalité au sein de l'étude par des addenda ou des chapitres additionnels.

Mme Ruest-Jutras (Francine): Oui, bien, c'est ça. C'est parce qu'on veut que... Comme disait M. Olivier, les municipalités vont aussi avoir fait leur propre évaluation de la situation. Ce qu'on veut, c'est que le citoyen ait les deux côtés de la médaille, si jamais les choses n'étaient pas... n'arrivaient pas à la même conclusion. Mais c'est normal que les élus municipaux soient au courant avant, par exemple, que ce soit rendu public, de ce qu'on retrouvera dans les études qui auront été faites. M. L'Allier.

M. L'Allier (Jean-Paul): À titre d'exemple, par exemple, si dans vos études vous confirmez que la RFU est la base de la péréquation et que vous ne tenez absolument pas compte des 31 millions de charge supplémentaire que j'ai comme ville-centre, et Montréal probablement multiplié par cinq, à ce moment-là, on va vous demander de compléter l'étude pour dire aux gens que, s'ils reçoivent une péréquation, ils devront aussi payer à la ville-centre leur part du 31 millions des frais de centralité. On ne peut pas à la fois tout donner d'un côté puis continuer à porter le fardeau tout seul. Alors, vos études, en les voyant d'avance, si on voit qu'il y a un trou là, on va vous demander de le boucher. Je donne ça à titre d'exemple.

Le Président (M. Ouimet): M. le ministre.

M. Fournier: Merci. Ma collègue.

Le Président (M. Ouimet): Mme la députée de La Pinière...

M. Olivier (Jacques): Vous avez tout le mécanisme, M. le ministre, d'expliquer c'est quoi, la péréquation, c'est quoi, une agglomération. On est, en vertu de la loi n° 9, dans un nouveau droit quand on regarde ça: la péréquation, la taxation, ces choses-là. Il faut qu'on... Et puis vous êtes pour le citoyen, comme nous sommes, le plus beau forum ? c'est l'Assemblée nationale ? pour expliquer qu'est-ce que sera la péréquation, qu'est-ce que sera la taxation, d'où viendra... Est-ce qu'il vient du gouvernement en place ou si c'est des conséquences que déjà ils avaient antérieurement, et c'est ça qu'il va falloir faire. C'est ça que vous voulez. C'est ça, la démocratie, en fin de compte, c'est d'expliquer aux citoyens.

M. Fournier: M. Olivier, nous sommes sur la même longueur d'onde.

M. Olivier (Jacques): J'espère qu'on va s'y rendre jusqu'au bout.

M. Fournier: Je le souhaite aussi. Mais il est bien entendu que, lorsqu'on prend comme fondement la meilleure information possible qu'on peut donner aux citoyens, je pense qu'on ne se trompe pas. Et, si nous sommes dans cette opération-là, c'est peut-être qu'à un moment donné il n'y en a pas eu, d'information. On peut toujours été décrié sur l'information qu'on donne, hein! On peut toujours dire: Il pourrait y en avoir plus, mais on part d'un système qu'on tente de corriger, où il y avait une information zéro puis une consultation zéro. Mais on s'entend tout à fait pour qu'il y ait une consultation. Il faut que l'information soit optimum, maximale. Et je comprends que vous considérez que le salon bleu est un bon endroit pour faire cette information, j'en prends bonne note.

M. Olivier (Jacques): ...rouge, ici, hein!

Le Président (M. Ouimet): Oui. Merci. Mme la députée de La Pinière, il reste moins de trois minutes.

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, je vais être brève. Mme la présidente de l'UMQ, MM. les maires représentant l'UMQ, le maire de Montréal qui vous a précédés nous a dit que, même si le projet de loi n° 9 ne faisait pas son bonheur, il reconnaissait la valeur importante de la consultation de la population. Sachant que le projet de loi a pour objet non pas de faire la défusion mais de donner un choix à la population pour qu'elle puisse soit maintenir les nouvelles villes telles qu'elles sont ou opter pour une autre solution, je voudrais savoir qu'est-ce qui vous fait tant peur que ça que les citoyens soient consultés pour se prononcer sur l'avenir de leur communauté. Ça, c'est le premier volet.

Le deuxième volet concernant le seuil de... le vote significatif ? à la page 22 de votre mémoire ? que vous fixez à 50 % plus un des personnes habiles à voter et inscrites. Si on appliquait cette règle-là aux élections municipales, il y aurait très peu de maires et de conseillers municipaux qui seraient élus et même au niveau de l'Assemblée nationale. Pourquoi aller si haut quand l'objectif du projet de loi, c'est l'exercice de la démocratie?

n(12 heures)n

Le Président (M. Ouimet): Mme Ruest-Jutras.

Mme Ruest-Jutras (Francine): Alors, je pense que de nous imputer... de dire de nous que nous avons peur de la consultation...

Mme Houda-Pepin: ...question.

Mme Ruest-Jutras (Francine): ...c'est de poser un jugement de valeur qui ne tient pas. D'ailleurs, nous aurions très bien pu dire: On demande le retrait du projet de loi, et c'est fini. Et nous avons au contraire préféré nous présenter devant vous avec des accommodements qui, d'après nous, feraient en sorte qu'on aurait véritablement le pouls de la population.

Vous dites: Le seuil qu'on demande est très élevé, vous mettez la barre très haute. C'est vrai. Nous représentons l'Union des municipalités du Québec, les conseils municipaux qui ont obtenu le mandat des mêmes citoyens qui vous ont élus de mettre en marche des nouvelles villes et d'en faire des réussites. Et on sait très bien que l'objectif de ce projet de loi, il répond à la demande de certaines personnes qui veulent se séparer des villes dans lesquelles ils se retrouvent. Donc, ne pas prononcer le mot «défusion» lorsqu'on parle du projet de loi n° 9, je pense que c'est jouer un petit peu à l'autruche. Tout le monde appelle ça, la loi sur les défusions. Je pense que finalement... c'est parce que, inconsciemment, les gens savent très bien ce vers quoi tout ça se destine.

Alors, pourquoi est-ce qu'on met la marche si haute? Bien, c'est d'abord parce que c'est un projet de loi d'exception. Ce n'est pas votre élection, ce n'est pas mon élection, ce n'est pas notre élection, hein? C'est un projet de loi où les répercussions, on le disait, vont largement déborder le territoire des municipalités mêmes où on va tenir ces consultations. Ça risque de conduire à une fragmentation du territoire où on se retrouverait avec quelques villes qui auraient sauté, d'autres qui décideraient de rester. Qu'advient-il de celles qui restent? Souhaitent-elles demeurer ensemble? Que fait-on avec celles qui sont parties? Est-ce qu'on refait une autre MRC? Est-ce qu'on repart une autre structure alors que vous avez dit que vous étiez contre la création de nouvelles structures? Bref, on ne sait pas comment tout ça peut se terminer.

Projet d'exception donc dont les répercussions peuvent être importantes, projet pour lequel on n'a pas demandé que la nouvelle ville se prononce ? c'est exclu du projet de loi ? et discours ambigu aussi de la part du gouvernement qui parle, je l'ai dit dans la présentation, qui parle de vote significatif, mais qui ne le définit pas. Donc...

Le Président (M. Ouimet): Moi, je dois vous arrêter à ce moment-ci malheureusement parce qu'il ne reste plus de temps pour...

M. Olivier (Jacques): M. le Président, c'est parce que Mme la députée de La Pinière...

Le Président (M. Ouimet): ...parce qu'on va empiéter sur le temps de l'opposition avec votre permission... Ça va? Allez.

M. Olivier (Jacques): Ça va me faire plaisir d'aider quelqu'un dans la compréhension parce qu'on parle ici au niveau des citoyens et des citoyennes. Pour aider la députée de La Pinière qui représente l'ex-ville de Brossard qui est son comté, 84 % des gens sont d'accord avec la formule. Et je vous invite à lire, dans le mémoire que la ville de Longueuil a déposé, pourquoi vos citoyens, que, vous, vous représentez à l'Assemblée nationale, ont décidé que la meilleure formule, ce serait 50 % plus un. Alors, vous allez pouvoir retrouver ça. Et c'est les mêmes électeurs, madame, qui m'ont élu et qui vous ont élue. Et, eux, ils sont d'accord avec ça. Il faut mettre la barre haute parce que, quand on veut détruire des choses, ça prend plus que quand on veut construire.

Le Président (M. Ouimet): Alors, merci. Mme la députée de Bourget et porte-parole de l'opposition.

Mme Lemieux: Oui. Vous dites dans votre mémoire à la page 14 ? je suis désolée de citer ça, je ne veux pas vous mettre dans une situation embarrassante, mais je crois que je ne peux pas laisser passer une remarque du ministre tout à l'heure: «Une organisation municipale ne doit pas faire les frais de ce qu'un gouvernement peut reprocher à un autre gouvernement.» Et, moi, c'est d'où mon malaise profond. Je comprends bien que le gouvernement libéral déteste ce que le gouvernement péquiste a fait, voudrait rayer de la carte les réalisations passées, sauf qu'au passage il prend des gens en otages et, en l'occurrence, les municipalités. Je ne vous demande pas de commenter cette affirmation, mais vous comprendrez que je ne pouvais pas laisser aller ces impressions qui sont véhiculées par le ministre.

Ceci étant dit, il nous reste quelques minutes. Et je reviens à mon point de départ. L'UMQ a fait un boulot substantiel sur ces questions-là. Je ne porte pas de jugement à savoir si j'aime ou je n'aime pas, mais, visiblement, il y a eu un vrai travail derrière ça. Vous étiez unanimes, unanimes ? ça, on doit le souligner. Vous êtes des interlocuteurs majeurs, notamment parce que vous êtes des élus, et je crois que nous nous sommes tous rappelés au cours de cette matinée que la plupart des élus des plus récentes élections municipales s'étaient prononcés en faveur des... Les gens savaient pour qui ils votaient, ils votaient pour des gens qui étaient favorables aux villes unifiées.

Alors, moi, je vous dirais en ces quelques minutes, pour ces quelques minutes qu'il nous reste: est-ce qu'il y a d'autres remarques? Parce que vous êtes quand même le deuxième intervenant ce matin. En tout cas, c'est important, cette espèce de vue d'ensemble que vous représentez pour l'ensemble du territoire québécois. Vous représentez des municipalités de plus petite taille, de moyenne taille, milieu urbain, milieu régional, etc. Alors, je vous dirais simplement: si d'autres d'entre vous voudraient nous souligner, pendant les quelques minutes qu'il nous reste, un certain nombre d'éléments pour lesquels nous devrions être attentifs et qui nous permettront peut-être de sauver le Québec, ça me fera plaisir de vous entendre.

M. Pilon (Pierre): J'aimerais parler aussi de démocratie. Il faut bien comprendre que la règle actuelle, par exemple, du registre de 10 %... À Mont-Tremblant, il y a 1 270 résidents inscrits dans l'ancienne municipalité de Mont-Tremblant. Ça veut dire que 130 électeurs pourraient décider de détruire la ville de Mont-Tremblant telle qu'elle est, donc décider de l'avenir économique de 30 000 personnes. Parce que le mont Tremblant, la montagne, est le moteur économique de toute la MRC. Alors, au registre, s'il y a 130 personnes qui signent le registre, puis, après ça, il y a un vote qui se tient, la ville de Mont-Tremblant est défaite uniquement parce que quelques citoyens, une minorité de citoyens ont décidé de tout rapatrier, de tout garder pour eux-mêmes, le développement économique de la région, de s'asseoir sur une évaluation d'un milliard et demi, alors que la ville de Saint-Jovite qui est à côté, qui compte 5 000 habitants, n'a aucune ressource, parce que le mont Tremblant, qui est dans l'ancienne municipalité de Mont-Tremblant, ne serait contrôlé que par l'ancienne municipalité de Mont-Tremblant. Alors, c'est un déficit démocratique, ça. Alors, c'est ça que je voulais souligner.

Mme Lemieux: Si vous me le permettez, M. le maire, je pense qu'on en a un peu discuté, mais, effectivement, la mécanique qui est proposée n'est pas une mécanique de consultation. C'est une mécanique de mise en action de gens qui s'opposent. C'est ce que vous constatez.

Le Président (M. Ouimet): M. le maire de Saint-Jérôme, vous voulez ajouter quelque chose?

M. Gascon (Marc): ...si on veut reparler au niveau du travail et des conventions collectives qui sont déjà maintenant signées avec nos nouveaux employés de la nouvelle ville, un élément particulier où on a repris aussi différents syndicats. Comme, par exemple, chez nous, il y avait quatre syndicats de pompiers autrefois; maintenant, il y a eu aussi un regroupement de ces syndicats-là en un seul. On a fait ça avec les blancs aussi, cinq syndicats, et tout. Alors, une fois que cet élément-là est pris en compte, qu'une convention collective est signée pour les cinq, six prochaines années en un seul syndicat, le jour où on commence à défaire ou à redécouper la nouvelle ville, comment allons-nous redéfaire l'unification de ces syndicats-là? Et comment on va faire en sorte de prendre tel individu puis tel individu: Toi, tu retournes dans ton ancienne ville? Ce sera impossible. Et vous savez très bien, au niveau du Code du travail, comment ça se passe et particulièrement dans le monde municipal comment c'est complexe. Alors, comment, aujourd'hui, on sera en mesure, avec ces nouvelles conventions et ces nouvelles alliances syndicales où on a su non pas, bien sûr, regrouper les villes, mais aussi regrouper les alliances syndicales en une seule alliance, comment allons-nous faire ensuite pour rediviser ces éléments-là? On a de beaux problèmes en vue.

Le Président (M. Ouimet): M. le maire de Rimouski.

M. Tremblay (Michel): Très brièvement, pour ajouter ma voix à ce rapport. Nous, à la ville de Rimouski, nous sommes une ville regroupée. Nous avons réussi ce regroupement depuis 18 mois, nous en sommes très heureux et nous avons besoin de ce regroupement pour développer notre région. Nous sommes un moteur de développement économique, et il faut se regrouper pour faire du développement économique. C'est très important qu'on demeure unis.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Mme la députée de Bourget...

M. Olivier (Jacques): ...M. le ministre, est extrêmement importante, mais il se développe actuellement à l'intérieur de nos communautés des affinités excessivement dangereuses, dangereuses. Et je voudrais avoir votre aide là-dessus, et je vous le demande ce matin, il faudrait que cette discussion-là se fasse d'une façon civilisée. Il faudrait que, de plus en plus, et vous savez que nous représentons ce que le gouvernement du Parti québécois a fait, c'est-à-dire les fusions... Venant de moi, j'espère que vous comprendrez que certains se mettent à sourire. Je veux juste vous dire que je suis l'homme maintenant à abattre, non pas que j'ai peur, mais il y a aussi des conseillères, des conseillers qui se font harceler maintenant par rapport à ce qu'on ne comprend pas assez clairement les messages que vous envoyez.

n(12 h 10)n

J'aimerais que ce débat-là descende un peu et qu'on puisse s'harmoniser, et je pense qu'on doit compter sur le gouvernement et le ministre dans ce sens-là. Et, sinon, je vous invite à venir faire un tour, et, vous et moi, on ira à des endroits. Vous savez que la loi n° 170 ne permet même pas au maire de la ville de Longueuil d'aller siéger dans l'arrondissement Boucherville. C'est un euphémisme. Je suis maire, je suis élu, mais je n'ai pas le droit d'aller... Alors, il va falloir... on va vous proposer des modifications.

Mais le danger maintenant, il y a un ton qui est élevé à l'intérieur de nos arrondissements pour ceux qui sont contre. On parle: On ne paiera pas pour les pauvres. C'est irrationnel de nos jours, M. le ministre, d'entendre ça. Nous, la formule qu'on a, c'est pareil comme si vous auriez promis, et vous ne l'avez pas fait, mais c'est pareil comme si vous auriez promis qu'ils vont revenir tels qu'ils étaient, antérieurs, et ça devient des fois loufoque et dangereux. Et je vous fais appel à vous pour envoyer un signal clair à ces gens-là que chacun...

Moi, je suis là pour représenter ceux qui veulent bâtir. Ceux qui veulent se défusionner, ils en ont le droit, M. le ministre, je le reconnais, mais ils n'ont pas le droit de harceler les élus tels qu'ils le font de cette façon, et je ne pense pas que, connaissant vos principes démocratiques, vous soyez favorable à ces genres de gestes que vous êtes au courant.

Le Président (M. Ouimet): Il reste une minute, et elle appartient à l'opposition.

M. Fournier: Si vous me permettez de réagir peut-être après l'opposition, M. le Président...

Mme Lemieux: Après.

M. Fournier: ...à l'appel du maire de Longueuil, je pense que ce serait normal que je puisse répondre à son appel.

Mme Lemieux: Allez-y, répondez.

M. Fournier: Merci. M. le maire, d'abord, je comprends que, et vous le savez, parce que j'ai répété, je l'ai encore fait dans les remarques préliminaires, mais j'ai dit à plusieurs moments et à plusieurs endroits qu'il n'était pas question à un retour au statu quo ante, ce qui m'amène à mettre en doute un peu votre allégation à l'effet que, maintenant, avec les nouvelles techniques de communication, lorsqu'on l'a dit une fois, tout le monde le sait, puis c'est bien compris. Je comprends qu'il faut faire encore beaucoup de pédagogie et le redire, ce que je fais en ce moment et que je compte refaire encore à l'avenir.

Ceci étant, l'appel que vous me lancez, je saisis la perche, parce que je vais répéter quelque chose que j'ai aussi dit, et je l'ai dit à l'UMQ et je l'ai dit au congrès: bien que, pour vous, peut-être que notre partenariat n'est pas à la hauteur de vos espérances, mais, que voulez-vous, dans une société démocratique, parfois, on a nos opinions, mais je considère que vous avez un mandat, vous, les maires, les conseillers, les gens qui ont été élus, vous avez un mandat de la population, vous avez une légitimité que je reconnais, et je vous considère comme des partenaires privilégiés du gouvernement du Québec. Je l'ai dit, je le redis, nous sommes dans une période de consultation, nous allons la compléter, nous en tirerons les leçons.

Aujourd'hui, il y a une certaine ligne de pensée qui se fait aujourd'hui; demain, il y en aura une autre. Nous les entendrons avec, je l'espère, le plus grand respect. J'espère qu'on saura donner le ton d'ailleurs à ce qui devrait être un débat sur le terrain du plus grand respect, notamment pour ceux qui ont été élus.

Je sais qu'à une certaine époque, au sein même de l'UMQ, il n'y avait pas l'unanimité dont on dit aujourd'hui, et les débats étaient parfois assez virils. Nous avons vu ici, à l'Assemblée nationale, des maires qui ont pratiquement été expulsés. Alors là on ne parle pas des citoyens versus les maires, on parle d'élus qui, entre eux, avaient des positions divergentes, qui, j'espère, ont réussi à garder un bon ton, on parle d'élus qui sont venus à l'Assemblée nationale, et, pour un, entre autres, le président a signifié la porte.

Le Président (M. Ouimet): M. le ministre.

M. Fournier: Alors, vous savez, je pense que ce qu'il faut comprendre, et je termine, M. le Président...

Le Président (M. Ouimet): M. le ministre.

M. Fournier: ...c'est qu'il faut garder le meilleur climat possible pour que la démocratie s'exprime le mieux possible.

Le Président (M. Ouimet): J'ai des questions de règlement. Lorsqu'on demande 30 secondes, j'aimerais qu'on s'en tienne à 30 secondes à peu près. J'aurai à clarifier par la suite les débordements au niveau des droits de parole; on a eu des petits problèmes ce matin. J'invite tout le monde à la discipline, nos témoins y compris. Je vais permettre deux autres minutes à la porte-parole de l'opposition officielle. On aura débordé largement... Là, on aura débordé quelque peu, mais on corrigera pour la suite des choses.

Mme Lemieux: Alors, je dirais simplement merci de cette présentation, merci des travaux que vous avez engagés, merci d'avoir documenté les grands enjeux, ceux à quoi... ce à quoi les municipalités du Québec, peu importe leur taille, peu importe leur lieu, sont confrontées, les défis auxquels elles sont confrontées. Je ne ferai pas d'autres remarques sur les choses incroyables que le ministre s'est permis d'exprimer tout à l'heure, j'aurai d'autres forums pour le faire.

Le Président (M. Ouimet): Alors, merci. Voilà qui termine nos travaux. Merci aux représentants de l'UMQ. J'ajourne... je suspends nos travaux jusqu'à 14 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 15)

 

(Reprise à 14 h 2)

Le Président (M. Ouimet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Je demanderais à nouveau à toutes les personnes qui ont des cellulaires de bien vouloir les éteindre.

Et je vous rappelle que le mandat de la commission est de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard du projet de loi n° 9, Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités.

Présider une commission parlementaire requiert toujours une certaine dose de souplesse; il arrive que la souplesse occasionne des débordements au niveau du temps. Alors, je vais vous donner les lignes de conduite que j'ai l'intention de m'imposer lorsqu'il y aura des dépassements de temps. S'il y a un dépassement de temps à la suite du premier bloc du côté ministériel, soit à la suite d'une intervention d'un membre du parti ministériel ou du ministre ou des témoins, ce sera amputé sur le deuxième bloc du côté ministériel. La même chose s'appliquera au niveau de l'opposition: s'il y a un dépassement, soit de la porte-parole ou d'un autre membre, ce sera amputé sur le deuxième bloc.

Quant au deuxième bloc, je devrai imposer une certaine fermeté et interrompre les travaux à ce moment-là pour rappeler que le temps est écoulé, à moins d'un consentement unanime des parlementaires. Est-ce que cela vous convient?

Fédération québécoise
des municipalités (FQM)

Si ça vous convient, nous allons maintenant accueillir la Fédération québécoise des municipalités, et je demanderais à M. Belzil, voilà, le président, de nous présenter les gens qui l'accompagnent.

M. Belzil (Michel): Alors, il me fait plaisir, M. le Président, de vous présenter le vice-président de la Fédération québécoise des municipalités, M. Michel Giroux...

M. Giroux (Michel): Bonjour.

M. Belzil (Michel): ...maire de Lac-Beauport. Également qui m'accompagne Me Isabelle Chouinard, directrice des affaires juridiques et gouvernementales à la FQM. Et moi-même, Michel Belzil, maire de la municipalité de Barnston-Ouest et président de la FQM.

Alors, M. le Président...

Le Président (M. Ouimet): Je vous cède la parole pour une période de 20 minutes.

M. Belzil (Michel): Bien sûr, nous vous remercions de la possibilité que vous nous donnez de vous rendre compte de notre réflexion sur le projet de loi n° 9.

Alors, rapidement, en mai 2000, cette même commission entendait la vive opposition de la FQM à l'égard du projet de loi n° 124 qui conférait au gouvernement le pouvoir d'obliger les regroupements municipaux. En toute cohérence, la FQM appuie aujourd'hui la volonté du gouvernement de ne plus permettre pour l'avenir les fusions forcées. Mais le conseil d'administration de la FQM ne cautionne pas nécessairement la démarche vers les fusions. Les élus qui gouvernent les nouvelles villes ont investi quantité d'énergie dans leur mise en place et ils croient en leur avenir. Cela étant dit, si le gouvernement maintenait cette démarche, la FQM souhaite proposer des modifications quant à certaines modalités; c'est l'objet du présent mémoire.

D'abord, nous aborderons les mesures ayant des incidences fiscales entre les municipalités. Nous proposerons d'élargir les possibilités quant aux modalités des ententes qui devront suivre les défusions. Nous aborderons la question du partage des coûts de certains équipements, infrastructures et activités, puis nous commenterons l'introduction d'une péréquation intermunicipale. Cette dernière comporte un nouveau principe en matière de fiscalité municipale qui, à notre avis, pave la voie à une réforme qui va au-delà de la question des défusions. Nous insisterons sur cet aspect. Nous aborderons finalement la question du coût du scrutin.

Les mesures ayant des incidences fiscales. La FQM est d'avis que les mesures fiscales contenues dans le projet de loi ne doivent viser qu'à établir l'équité entre les municipalités et non à préserver indirectement les effets de la fusion.

Quatre mesures comportent des impacts fiscaux. Les trois premières établissent ce que nous qualifierions de fiscalité d'agglomération. Elles concernent l'obligation d'établir un partage par le biais d'ententes pour l'exercice de certaines compétences, la désignation de certains équipements, infrastructures ou activités dont les coûts doivent être partagés et la contribution au financement des dépenses en matière de logement social et du centre local de développement. La quatrième mesure, entièrement nouvelle, vise un partage de la richesse par l'établissement d'une péréquation.

Voici donc nos commentaires. L'obligation de conclure des ententes pour certaines compétences. Les articles 48 et suivants du projet de loi obligent la municipalité reconstituée et la ville à s'entendre dans de nombreux domaines: l'évaluation foncière, la gestion des cours d'eau, la protection contre l'incendie, la police, la sécurité civile, la Cour municipale, le transport collectif, l'élimination et le recyclage des matières résiduelles, la gestion des rues et des routes du réseau artériel et tout autre domaine lorsque la ville a succédé à une MRC ou à une communauté urbaine.

Le projet de loi précise que, dans le cas de compétences exercées par une MRC à l'égard de la ville, l'entente devra plutôt être conclue entre la municipalité reconstituée et la MRC. De plus, lorsqu'une MRC se sera vu accorder une compétence en exclusivité par une disposition législative, celle-ci conservera sa compétence à l'égard de la municipalité reconstituée. C'est le cas en matière d'évaluation foncière, de gestion des cours d'eau et de transport collectif des personnes.

En matière de défusion, nous nous retrouvons devant deux situations potentielles: celle des villes qui englobent entièrement l'ancienne MRC et l'ont remplacée, et les autres qui ont continué à bénéficier d'un palier MRC. Nous concevons que les premières soient tenues de s'entendre pour les matières qui relevaient autrefois du palier supralocal, puisqu'il est devenu inexistant. Nous suggérons toutefois que la loi leur permette expressément de recréer une MRC, surtout si plus d'une collectivité choisit de retrouver un statut autonome. L'exercice de certaines compétences telles que la confection des schémas d'aménagement, la couverture des risques et de sécurité civile, pour ne mentionner que celles-là, requiert à notre avis l'existence d'un palier supérieur distinct des municipalités qui le composent.

Donc, première recommandation: permettre expressément aux municipalités reconstituées et aux villes de recréer leur MRC pour celles dont la fusion avait occasionné le remplacement de la MRC par la nouvelle ville.

D'autre part, pour les autres, celles qui font toujours partie d'une MRC et qui souhaitent se défusionner, nous suggérons que la loi prévoie expressément qu'elles puissent, dans tous les cas, déléguer ces compétences à leur MRC plutôt que de procéder par des ententes.

Alors, recommandation: permettre expressément aux municipalités reconstituées et aux villes de déléguer les compétences énumérées à l'article 48 à leur MRC plutôt que de procéder par entente intermunicipale.

Enfin, le projet de loi indique qu'à défaut d'entente le gouvernement établira les règles et qu'il est tenu de répartir les contributions financières des municipalités en fonction de leur richesse foncière uniformisée ? RFU. Bien que ce critère soit utilisé dans beaucoup d'ententes intermunicipales, l'équité ne commande pas toujours que la répartition soit établie en fonction de la RFU. La répartition est aussi établie selon d'autres critères, par exemple, en fonction du bénéfice reçu lorsqu'une municipalité utilise un service dans une moindre mesure que d'autres.

n(14 h 10)n

La FQM recommande donc que le gouvernement jouisse de toute la latitude nécessaire pour établir les critères de répartition en cas de mésentente. Autrement, une municipalité à qui un partage selon la RFU serait profitable aurait tout intérêt à ne pas conclure d'entente pour laisser jouer ce critère.

Recommandation: modifier l'article 51 pour prévoir que, dans le cas où aucune entente n'a été conclue, le gouvernement peut établir la répartition des contributions financières en fonction de la richesse foncière uniformisée et de tout autre critère qu'il détermine.

Maintenant, la désignation de certains équipements, infrastructures ou activités et la contribution au financement de certaines dépenses. Les municipalités devront également conclure une entente pour le financement et possiblement la gestion conjointe de certains équipements, infrastructures ou activités. Cette mesure, combinée à la précédente, s'apparente à celle que nous retrouvons aux articles 24.5 et suivants de la Loi sur la Commission municipale en matière de partage des coûts des équipements, infrastructures, activités et services à caractère supralocal.

Les critères du projet de loi n° 9 pour déterminer un tel équipement sont toutefois plus précis et mieux balisés que ceux de la Loi sur la Commission municipale. En effet, l'article 54 du projet de loi n° 9 précise que, pour être soumis à l'obligation de partage, l'équipement doit avoir une certaine notoriété publique, posséder un caractère unique à l'échelle des territoires des municipalités liées et être utilisé de façon importante par les citoyens de la municipalité sur le territoire de laquelle il n'est pas situé.

La FQM estime que ces critères devraient être étendus à la Loi sur la Commission municipale si le législateur décide de maintenir les pouvoirs de la Commission à cet égard. La FQM privilégie en effet l'abrogation de ces dispositions qui furent introduites par le projet de loi n° 124 en mai 2000. Le travail d'identification de ces équipements a été réalisé dans la plupart des cas, et la Commission municipale a été dépêchée là où les MRC n'ont pu établir de consensus préalable.

Le passage de la Commission municipale a créé un climat de confrontation dans plusieurs MRC, et il faut s'affairer à rétablir la concertation. Ce pouvoir d'intervention de la Commission municipale est devenu non nécessaire depuis que les MRC ont reçu, en décembre 2002, le pouvoir de déterminer les modalités de gestion et de financement des équipements, infrastructures, services et activités à caractère supralocal. En outre, dans tous les cas, de l'avis de la FQM, il devrait être établi que l'implantation d'un nouvel équipement supralocal nécessite un consensus préalable des municipalités concernées ou une décision de la MRC de l'établir.

Alors, recommandation: abroger les articles 24.5 à 24.17 de la Loi sur la Commission municipale; subsidiairement, y introduire les mêmes critères que ceux prévus à l'article 54 du projet de loi n° 9 quant à la notoriété, à l'unicité et à l'importance de l'équipement; et établir que l'implantation d'un nouvel équipement supralocal nécessite un consensus préalable des municipalités concernées ou une décision de la MRC de l'établir.

Maintenant, arrivons à l'item péréquation. Les réserves les plus importantes de la FQM par rapport au projet de loi n° 9 concernent l'établissement d'une nouvelle forme de péréquation qui va au-delà des principes reconnus en matière d'équité intermunicipale et de fiscalité d'agglomération. Non seulement les citoyens de la banlieue devront payer leur juste part des coûts relatifs aux équipements et services qu'ils consomment et qui sont dispensés par la ville-centre et vice versa, mais il y aura également un partage des revenus de taxation basé sur la richesse entre les municipalités d'un territoire donné.

Or, la conception admise jusqu'ici en matière d'équité intermunicipale implique simplement qu'une municipalité paie sa juste part des services consommés et des équipements utilisés dans une autre municipalité, ce qui rejoint le précepte du pacte fiscal de 1980 selon lequel la taxation va tendre à être en lien avec le bénéfice reçu. Les mesures de partage des coûts de services et équipements que nous avons précédemment commentées répondent à ce principe. Elles feront en sorte qu'une partie importante des budgets municipaux sera mise en commun ? près de 50 % ? et que les citoyens de la municipalité reconstituée auront payé 100 % des coûts de ce qu'ils consomment dans la ville, même davantage.

En transférant, au surplus, des revenus de taxation d'une municipalité à l'autre, on maintient indirectement certains effets du regroupement. De plus, on porte atteinte au principe du «no taxation without representation», selon lequel les citoyens doivent disposer d'un pouvoir électif sur ceux qui les taxent. Il faut rappeler également que l'impôt foncier est régressif et perçu sur de l'argent net. Le pacte fiscal de 1980 avait d'ailleurs établi que l'impôt foncier ne permettait pas une redistribution équitable de la richesse et qu'il ne devait pas être utilisé à cette fin. Seul l'impôt sur le revenu devait être utilisé à des fins progressives.

L'objectif de la présente n'est pas de formuler dès à présent une objection de principe sur le partage intermunicipal d'une certaine forme de richesse. Nous sommes toutefois d'avis que l'introduction d'un tel principe ne doit pas être liée à la question des défusions. La FQM demande donc le retrait des articles 69 à 76 du projet de loi n° 9.

Une telle mesure doit faire l'objet d'un débat élargi, d'une réflexion plus approfondie sur la notion d'équité fiscale, sur les formes que pourrait prendre un tel partage sur les territoires où il devrait s'appliquer et sur ce qu'il devrait servir à financer. En effet, pourquoi choisir des territoires défusionnés et ne pas étendre une telle mesure ailleurs au Québec? Est-ce que ce ne serait pas une façon adéquate de financer le palier supralocal? Un tel partage ne devrait-il pas viser uniquement la croissance de la richesse foncière, «tax base sharing»? La FQM d'ailleurs s'est déjà dite favorable au «tax base sharing» s'il s'agit d'un pouvoir facultatif dévolu aux MRC.

La FQM ne souhaite pas aujourd'hui formuler la réponse à ces questions, mais elle estime a priori que l'introduction d'un tel précédent sera porteur d'injustices sociales à long terme, surtout si son application est limitée aux territoires défusionnés. La démonstration du caractère équitable d'une telle péréquation reste à faire. Et, si cette démonstration était faite, la FQM s'empresserait de réclamer une mesure équivalente à l'ensemble de l'échelle du Québec tout entier, d'autant que notre régime de péréquation actuel est déficient.

Il existe déjà en effet au Québec un régime de péréquation municipal financé à même le fonds consolidé du gouvernement du Québec et non de l'impôt foncier. Ce programme vise à aider financièrement les municipalités les plus démunies au plan de la richesse foncière afin qu'elles puissent offrir des services de base sans imposer un niveau de taxation excessif. Depuis plusieurs années, le programme de péréquation est une enveloppe fermée qui n'est plus basée sur les besoins réels des collectivités. Cette enveloppe, théoriquement de 36 millions de dollars par année, n'atteint pas 1/2 de 1 % de l'ensemble des budgets municipaux. Dans les faits, l'enveloppe servant réellement à soutenir les municipalités démunies est encore moindre: 23,1 millions, les mesures de neutralité aux regroupements municipaux étant partiellement financées à même cette enveloppe.

La FQM estime qu'il faut largement bonifier ce programme et que le gouvernement doit solutionner cette problématique prioritairement à toute autre forme de péréquation. La répartition de la richesse doit d'abord se faire adéquatement entre l'ensemble des municipalités du Québec afin que toutes aient la possibilité, à la base, de s'acquitter convenablement de leurs responsabilités.

Ainsi donc, recommandation: retirer les articles 69 à 76 du projet de loi qui imposent un mécanisme de péréquation intermunicipal; établir la démonstration du caractère équitable d'une telle mesure pour l'ensemble du Québec, et, le cas échéant, prévoir des discussions sur l'introduction d'un tel principe entre les partenaires du pacte fiscal; privilégier en priorité une bonification substantielle du programme actuel de péréquation aux municipalités.

Maintenant, comme dernier élément, quant au coût du scrutin, le projet de loi prévoit que le gouvernement rembourse à la ville les dépenses qu'elle a engagées pour l'organisation et la tenue du processus d'enregistrement, mais la municipalité reconstituée doit rembourser les dépenses encourues pour la tenue du scrutin. Or, le gouvernement du Québec, en tant qu'entité juridique, a fait le choix de fusionner sans consulter. En proposant le projet de loi n° 9, le gouvernement reconnaît que ce choix était inapproprié. À notre avis, ce n'est pas aux collectivités locales à faire les frais du rétablissement de ce droit qui leur a été retiré.

Alors, recommandation: que le gouvernement du Québec rembourse à la ville les dépenses engagées non seulement pour le processus d'enregistrement, mais aussi pour la tenue du scrutin référendaire.

n(14 h 20)n

En guise de conclusion, la FQM est satisfaite de l'abrogation des articles de la Loi sur l'organisation territoriale municipale qui permettent au gouvernement, depuis juin 2000, de forcer les regroupements municipaux par décret, mais la FQM ne cautionne pas la démarche vers les défusions. Si elles devaient se réaliser, la FQM est néanmoins soucieuse que les modalités applicables soient respectueuses des principes d'équité fiscale jusqu'ici admis par les partenaires du pacte fiscal.

En imposant un partage fiscal qui va au-delà du remboursement de la totalité des coûts occasionnés par les collectivités voisines, le gouvernement propose d'aller au-delà des concepts admis jusqu'ici en matière de fiscalité d'agglomération et il introduit un principe qui sera revendiqué ailleurs au Québec, c'est inévitable. Si le législateur ne devait retenir qu'une seule recommandation de ce mémoire, c'est celle de retirer cette mesure de péréquation du projet de loi.

Alors, ceci met un terme à la présentation de notre mémoire.

Le Président (M. Ouimet): Alors, merci, M. Belzil. Nous amorçons maintenant la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Fournier: Merci, M. le Président. M. Belzil, M. Giroux, Mme Chouinard, bien, bienvenue. Merci d'être avec nous. Je vais m'intéresser particulièrement à ce qui a été la conclusion de votre mémoire et parler de la péréquation.

Juste avant, peut-être un commentaire sur les coûts du scrutin qui ont précédé. Toutes les... Dans toutes les démarches, le gouvernement décide qu'il y a ouverture de registre. Donc, c'est son choix, donc il paye. Il fait les études, il les paie. Mais, à partir du moment où il y a un choix qui est fait par des citoyens d'un secteur concerné de se donner l'outil d'un référendum, ils ont à assumer cette... les conséquences de ce choix.

À partir du moment où nous voulons permettre aux citoyens de s'exprimer, il nous semble approprié qu'ils aient à supporter les coûts de cette consultation qu'ils se donnent. Si, d'aventure, il y avait eu une consultation au départ, lors de la première étape de la fusion, s'il y avait eu une consultation, ils l'auraient supportée et ils auraient assumé le coût de ce référendum-là. Donc, on les remet dans la situation antérieure.

Est-ce que vous ne trouvez pas... Je sais bien que vous n'allez pas me dire le... vous ne direz pas le contraire parce que vous l'avez écrit, là. Mais comment peut-on justifier que, là, le gouvernement paierait dans la mesure où, à l'époque, s'ils avaient été consultés et qu'ils avaient tenu un référendum chez eux, ils l'auraient payé?

M. Belzil (Michel): Écoutez, notre position dans le fond, c'est de prendre le gouvernement du Québec comme entité, hein, comme je l'ai dit tantôt, le gouvernement du Québec, indépendamment du parti politique au pouvoir. Alors, il y a eu une réorganisation municipale. Il y a des regroupements qui ont été forcés, hein? Alors, il y a des communautés qui ne voulaient pas s'enligner non plus dans toute cette question, dans ce genre de décision. Les regroupements se sont faits. Maintenant, aujourd'hui, il y a une décision du gouvernement à Québec, la même chose, qui dit: Je vous donne maintenant, par une nouvelle loi, la possibilité de revenir en arrière de quelque chose que vous n'aviez pas voulu nécessairement.

Alors, dans un contexte un peu plus... que de cette façon, bien, je pense que ce sont toutes des décisions gouvernementales en succession qui font en sorte que, s'il n'y avait rien eu, il n'y aurait pas eu de dépense au départ, et, finalement, ce sont des lois gouvernementales qui font en sorte qu'on en est rendus là et qu'on poursuit encore une forme de retour en arrière pour les quelques municipalités qui le voudront.

M. Fournier: Je veux revenir sur la péréquation. Simplement terminer là-dessus pour vous dire que vos collègues qui vous ont précédés ce matin ou qui vous suivront cet après-midi nous diraient que cette proposition-là constitue un bonus à la défusion parce que les gens qui vont donc se donner cet outil n'assumeront pas la conséquence économique de cet outil. Alors, je mets ça aussi dans les colonnes des pour et des contre qu'on va entendre au cours des prochaines semaines.

Parlant de la péréquation, évidemment ? et ça, c'est un autre sujet, la péréquation, qui est mentionné comme étant un bonus à la défusion, évidemment ? ça dépend toujours qui on regarde: pour certains, ça ne l'est pas, pour certains, ça peut l'être. Revenons à l'idée générale de base.

Puis je tiens à vous remercier pour votre mémoire sur cet aspect-là. Je pense qu'il y a des éléments que vous mentionnez qui sont importants quand vous dites: Si ça justifie pour un, ça peut justifier pour d'autres. Peut-être qu'il y un point là que vous... qui est important.

On parle d'intermunicipal, mais il faudrait aussi parler d'intra-agglomérations, et, l'idée, elle est là dans le fond, c'est de s'assurer... Puis, quand on parle de fiscalité d'agglomération ? c'est toujours ce dont nous parlions ? c'est de nous assurer que, à l'égard des services de proximité, quand il y a un démembrement, que néanmoins, vu qu'il y a une agglomération, donc il y a une mise en commun pour un certain nombre de choses, pourquoi n'y a-t-il pas une mise en commun aussi ? malgré des entités juridiques différentes, une mise en commun ? de ressources à l'égard des services de proximité qui relèvent de l'entité juridique différente? Mais, néanmoins, quand on met en commun un bon nombre de choses ? vous l'évaluez à 50 % ? quand on met en commun un bon nombre de choses, on vient donc à développer un sentiment d'agglomération, lequel peut prendre encore plus de force si les parties les plus démunies de cette agglomération-là y trouvent un compte, et le compte, c'est à l'égard de ce qui les concerne personnellement... des services de proximité.

Avant que vous me disiez que ce n'est pas la bonne place puis on pourrait en parler ailleurs puis... qu'est-ce que vous avez à dire sur le concept même d'une agglomération constituée de plusieurs unités différentes ? à la limite, on pourrait parler de l'agglomération de la CMM qui est constituée de plusieurs unités ? d'une agglomération, peu importe laquelle, constituée de plusieurs unités municipales mais qui mettent en commun un bon nombre de choses et qui donc auraient-elles, oui ou non, à partager, à s'appuyer au niveau de leurs services de proximité en fonction de peut-être celles qui sont plus riches ou moins riches? Comment vous réagissez à ce concept-là intra-agglomérations intermunicipales?

M. Belzil (Michel): Écoutez, peut-être que je ne répondrai pas directement dans un premier temps. Mais, nous, notre mémoire est conçu en fonction de dire: Écoutez, ce qui est introduit par le projet de loi n° 9, c'est des ententes, hein? C'est un paiement des équipements supralocaux, donc une recherche d'équité partout: paie le logement social... Alors, on considère que vraiment, l'équité réelle, en matière d'affaires municipales, pour les objets qu'on traite dans le municipal, elle est atteinte avec ces trois mesures, incluant le CLD, et tout ça.

Maintenant, pour ce qui est de dire, écoutez, un partage de la richesse entre les citoyens de certaines municipalités, bien, je pourrais introduire ma réflexion en disant: N'oubliez pas que ? et vous l'avez dit vous-même, vous en êtes bien conscient ? on ne parle que des agglomérations qui sont ciblées à ce moment-ci. Alors, tout de suite, à la base même, là, il y a un écart, une incohérence pour l'ensemble d'une réflexion nationale. Mais je ne pense pas, comme on l'a dit, que c'est nécessairement une péréquation de la sorte qui va éliminer... que c'est la péréquation basée sur la taxe foncière qui doit éliminer ces disparités-là. Nous, on n'a pas eu la preuve de tout ça, et c'est la preuve qu'on recherche. Michel.

M. Giroux (Michel): Si vous me permettez, M. le ministre... M. le Président, j'aimerais ajouter.

Le Président (M. Ouimet): Oui.

M. Giroux (Michel): Le concept d'agglomération évidemment est la base et la réflexion depuis de nombreuses années. Et pourquoi qu'il y a eu des fusions, c'est justement pour essayer d'éliminer ces différences ou cette... comment je pourrais dire, cette fiscalité qui parfois était déficiente, mais aussi la richesse qu'on voulait partager. Alors, la fusion a été un moyen pour essayer d'atteindre, et là, quand on arrive dans le fait de défaire et puis d'amener les gens donc à remettre en commun, là, c'est le problème de l'instrument choisi pour essayer d'en arriver au même résultat du concept d'agglomération puis de pouvoir partager tout ça ensemble.

Nous, ce qu'on vous dit, c'est que le concept choisi de ce nouveau moyen de péréquation n'est pas le bon dans ces circonstances-là, à moins qu'on ne l'applique à travers tout le Québec puis qu'on en comprenne toutes les conséquences à travers tout le Québec. C'est que c'est un moyen qui... On utilise la taxe foncière à l'extérieur du fait qu'on soit dans la même ville; là, on est dans une agglomération puis on demande à tout le monde comme, dans le fond, de ne pas avoir été défusionné. Alors, on continue de partager, mais ça crée une situation extrêmement difficile pour ce qui se passe ailleurs.

Qu'est-ce qu'on va faire avec le reste du Québec? Est-ce qu'il faut partager partout? Alors, c'est le moyen choisi qui est en cause, parce que, l'objectif, je pense que tout le monde l'avait.

M. Fournier: Parce que... Je n'ai pas de misère à vous suivre sur l'argumentation, là, qu'il faut voir qu'est-ce qu'on cible: les villes d'ici ou l'ensemble du Québec. Ce n'est pas là-dessus que je porte mon questionnement.

Vous dites: Le foncier n'est pas la base pour faire cette péréquation-là à l'égard de la proximité. Pourtant, le foncier, par le biais de la fusion, donc par le biais de l'abolition de l'intermunicipal, pour ne garder que de l'agglomération à une seule entité, le foncier devient le moyen. Et pourquoi faut-il dire que, parce qu'il y aurait plus qu'une entité juridique à l'égard d'autres matières, que l'outil qui a été utilisé dans le regroupement par la fusion devient inutilisable parce que, là, il y a plusieurs entités juridiques, alors que, pour la simple fonction de partage d'argent pour des services de proximité qui étaient utilisés dans la fusion, là, le foncier était utile? Autrement dit, pourquoi, dans le cadre d'une fusion, le foncier permet de le faire et, parce qu'on a deux entités ou trois entités juridiques dans une même agglomération, ce n'est plus possible?

n(14 h 30)n

Le Président (M. Ouimet): M. Giroux.

M. Giroux (Michel): Moi, ce que... C'est parce que vous n'avez pas les mêmes conseils municipaux puis que, dans notre système actuellement, c'est que les élus sont responsables pour ce qu'ils taxent, hein? Ils nous envoient des taxes puis ils sont responsables à la fois de leur gérance puis à la fois de leur reddition de comptes. Là, vous demandez à des élus de taxer et d'envoyer l'argent à d'autres élus qui sont élus par d'autres personnes, et là de rendre des comptes à ces autres personnes sur de l'argent qui a été taxé par d'autres élus. Alors, c'est un nouveau système, là.

M. Fournier: Le concept...

M. Giroux (Michel): Est-ce que... J'espère que j'ai été clair.

M. Fournier: Ah, tout à fait clair, tout à fait clair. Maintenant, vous choisissez une méthode où l'argent passe directement d'un élu à l'autre, alors qu'on peut trouver d'autres méthodes que celle-là. Mais, jusqu'à preuve du contraire, votre conception est donc liée simplement à la question d'imputabilité sur la question des services de proximité. Et, à partir de là, vous dites: Puisque je ne vote pas pour les autres, l'argent n'a pas à suivre là-dessus.

M. Giroux (Michel): En tout cas, ça remet en cause tout le système au niveau de la taxation et de la représentation. C'est ce qu'on vous dit, c'est que le moyen utilisé remet les choses en cause. Et il n'y a pas beaucoup d'exemples au Québec où les élus ne rendent pas compte de l'argent qu'ils dépensent et qu'ils ont taxé à leurs citoyens, là, alors il ne s'agit pas d'étendre... S'il y en a d'autres, exemples, il ne s'agit pas de les étendre, surtout pas d'envoyer cet argent-là à d'autres élus par quelqu'un d'autre.

Le Président (M. Ouimet): Je vais devoir céder la parole maintenant à la porte-parole de l'opposition. Je reviendrai. Alors, Mme la députée de Bourget, à vous la parole.

Mme Lemieux: Merci. Merci, M. le Président. Je salue les représentants de la Fédération québécoise des municipalités et je vous remercie d'être présents.

D'abord, je vous poserai une première question assez courte. J'imagine que vous avez dû prendre connaissance de d'autres mémoires. Je vais vous poser une question terriblement difficile: avez-vous pris connaissance du mémoire du caucus des villes d'agglomération? Et, si oui, qu'en pensez-vous? C'est terrible, hein?

M. Belzil (Michel): La réponse est très brève, comme vous l'aviez pressenti, on n'a pas pris connaissance de ce mémoire.

Mme Lemieux: Ah! O.K. Vous n'en avez pas pris connaissance.

J'ai lu votre mémoire, j'ai écouté votre présentation, une première chose qui me frappe, c'est ? à moins que je me trompe, mais je ne crois pas ? la Fédération québécoise des municipalités regroupe, bon, un certain nombre de municipalités de plus petite taille ? ce n'est pas péjoratif quand je dis ça, on se comprend, là, mais notamment. Et j'ai ce souvenir d'opérations de regroupement, d'unification ? appelez ça comme vous voulez ? de villages-paroisses, hein? Il y a eu une première phase. On ne refera pas l'historique ensemble, là, mais il y a eu quelques années un premier travail pour resserrer un peu ce type d'organisation municipale. Or, ce type de municipalité là de petite taille est moins au coeur du projet de loi n° 9.

Une voix: ...

Mme Lemieux: Non. En fait, disons-le clairement, là, normalement, ça ne s'applique pas à ces regroupements qui ont été faits il y a un certain nombre d'années, sauf qu'on parle de la même chose. Même si quelquefois ces regroupements plus récents concernaient les villes de plus grande taille, il reste qu'on parle de la même chose, hein? On parle de mettre ensemble, de mettre en commun, de réunir ce qui, à l'évidence, devrait être plus cohérent, plus solide, plus accueillant pour les gens, pour les investisseurs, pour les développeurs, etc.

Vous ne parlez pas de cette époque-là qui n'est pas si lointaine finalement, mais qui est présente dans les changements qu'on a vécus dans le monde municipal. Quelle évaluation vous faites de cette première vague de modernisation de l'organisation municipale? Est-ce que votre silence doit nous indiquer qu'il y avait un bien-fondé même si des fois ça a pu grincher des dents un peu, là, mais qu'il y avait un bien-fondé à cette étape-là? Et comment vous faites le lien entre ce qui s'est vécu dans ces villages-paroisses par rapport à ce qu'on vit maintenant?

M. Belzil (Michel): Pour justement vous répondre avec votre dernière phrase un peu, je pense qu'il n'y a pas nécessairement de lien, il n'y a pas beaucoup de comparaisons entre les fusions qui se sont produites autour des agglomérations, hein, à la deuxième phase et la première phase qui était les regroupements villages-paroisses.

Mais, nous ? et vous le remarquez dans notre mémoire ? deux paragraphes pour parler de l'histoire, et des fusions, et de tout ça. Mais, nous, on a toujours maintenu un principe et on s'y est toujours attardé, on a toujours cru que les regroupements étaient intéressants, bons pour les communautés dans la mesure où ils n'étaient pas forcés. Alors, il y a eu des regroupements au Québec qui ont été très intéressants, très intelligents, et, comme Fédération, là, on applaudit à ces succès.

Mais, dans la mesure où autant les regroupements villages-paroisses, autant les regroupements autour des agglomérations... Parce qu'il ne faut pas oublier que les regroupements dont on parle un peu particulièrement, 42 municipalités, il y en a 12, une douzaine qui sont membres chez nous aujourd'hui. Il ne faut pas oublier que ça comprenait, la deuxième vague, à moins que je ne me trompe, 292 municipalités, et il y en a sûrement une centaine qui étaient membres chez nous à l'époque. Alors, on ne revient pas en arrière sur tout ça, mais notre position, si on veut parler un peu d'histoire, c'est qu'on s'est toujours opposé aux fusions forcées comme Fédération, et, à toutes les époques et constamment, notre conseil d'administration a émis cette opinion de base et de principe. Je réponds dans ce sens-là, c'est la position de la FQM sur les regroupements.

Mme Lemieux: Et, quand vous faites le bilan de ça, de quoi ont l'air vos communautés maintenant que vous représentez si vous comparez à il y a trois ans, quatre ans, cinq ans?

M. Belzil (Michel): Je ne sais pas quoi vous dire. De quoi elles ont l'air? Dans bien des cas, ce sont des municipalités villages-paroisses qui étaient peut-être deux collectivités de 500 ou 1 000 de population, 2 000 regroupées ensemble. Je pense que, quand c'était fait sous la volonté de l'ensemble des collectivités... J'imagine ? écoutez, je ne me promène pas par tout le Québec ? j'imagine que ça va comme ça allait. Ce n'étaient pas des impacts aussi majeurs comme des regroupements autour de Montréal, alors ce n'est pas... Si vous me posez la question des villages-paroisses, tous les regroupements qui ont eu lieu, à l'exception de ceux qui se sont faits dans le déchirement, j'imagine qu'encore aujourd'hui il y a des gens qui ont la bouche amère et qui ne sont pas... qui n'ont pas accepté encore les regroupements quand c'est fait d'une façon forcée.

Mme Lemieux: Dans votre mémoire, dès le troisième paragraphe, vous dites: «En toute cohérence, la FQM appuie aujourd'hui la volonté du gouvernement de ne plus permettre, pour l'avenir, les fusions forcées. Mais le conseil d'administration [...] ne cautionne pas la démarche vers les défusions.» Expliquez-moi.

Une voix: ...

Mme Lemieux: Expliquez-moi qu'est-ce que vous voulez dire. Comment on peut à la fois avoir des organisations municipales modernes puis, des fois, par des incitatifs financiers, par des décrets... On n'est pas... On ne distingue pas, hein? Le Québec ne se distingue pas de ce qui s'est passé ailleurs. Vous dites: D'un côté, on ne devrait plus en avoir, mais, en même temps, on ne peut pas cautionner une défusion, donc un retour en arrière. Comment je devrais réconcilier ces deux points de vue?

M. Belzil (Michel): Je vais tenter une réponse en vous disant de nous situer à des époques différentes, hein, avec des circonstances différentes. Alors, il y a deux ans, pour moi, c'est une époque différente, et notre position est encore... Vous le voyez dans notre mémoire, on applaudit à l'abrogation de la loi sur les fusions forcées. Il y a deux ans, c'est la même chose.

Mais, aujourd'hui, les membres de notre conseil d'administration, comme ailleurs, ont fait l'expérience des fusions, hein, et ils nous disent: Écoutez, on a mis tellement d'efforts, tellement de travail là-dedans, on s'est investi, les fonctionnaires, les gens, avec tout ce que ça peut comporter, alors on nous dit: Écoutez, on ne peut pas cautionner la démarche à ce moment-ci, O.K.?

Alors, il n'y a pas d'incohérence d'avoir une vision dans un contexte particulier il y a deux ans, il y a trois ans. Et, aujourd'hui, je représente un conseil d'administration de 40 personnes qui représentent les 14 régions du Québec, alors ces gens-là nous informent que, oui, à une époque, opposés, mais maintenant on ne cautionne pas nécessairement l'action gouvernementale. Mais, dans la mesure où on va plus loin, nous, on veut participer, là, à la discussion puis rechercher ce qu'on a toujours recherché comme organisation municipale, l'équité, et c'est l'essentiel de nos propositions.

Mme Lemieux: Est-ce que... Je ne voudrais pas vous prêter des intentions, c'est pour ça que je veux faire une tentative de reformulation. Dans le fond, ce que vous nous dites, c'est: Ça se peut qu'il y ait des gens qui n'aient pas aimé ça. Ça se peut qu'il y ait des gens qui aient été heurtés. Ça se peut qu'à des moments ça ait été plus difficile. Mais, maintenant, c'est fait, on a des élus, des maires, des conseillers, du personnel, etc., qui ont travaillé à faire évoluer ces nouvelles municipalités, on ne retourne pas en arrière. C'est ce que je comprends?

n(14 h 40)n

M. Belzil (Michel): D'une façon... D'un point de vue majoritaire.

Mme Lemieux: O.K. D'accord.

Le Président (M. Ouimet): Merci.

Mme Lemieux: Ça va.

Le Président (M. Ouimet): Je reviens au ministre maintenant.

M. Fournier: Peut-être une... J'ai une courte question pour continuer sur le sujet. Si d'aventure vous voulez aborder d'autres questions sur la procédure référendaire dont on discute beaucoup, le taux de participation, je vous encouragerai à le faire, mais je ne veux pas vous... Si vous ne l'avez pas fait dans le mémoire, peut-être que vous n'envisagiez pas d'en traiter.

M. Belzil (Michel): On n'a pas voulu traiter de cette question-là.

M. Fournier: Mais je voudrais revenir sur... Oui.

M. Belzil (Michel): Michel, M. Giroux voudrait aborder le sujet.

M. Giroux (Michel): Vous avez... Le gouvernement a choisi d'aller dans une voie de consulter les citoyens. Nous, ce qu'on appuie, c'est que ça se fasse de façon la plus transparente possible avec les possibilités les plus larges pour que la population puisse être informée et voter le plus largement possible, avec le plus d'ouverture possible. Alors, si vous vous engagez dans cette voie-là, je pense qu'il faut que ce soit bien fait. C'est ce qu'on s'est dit. Mais on pense que c'est tellement évident que ça ne nous apparaissait pas nécessaire de le dire dans notre mémoire.

M. Fournier: O.K. Je reviens avec ma dernière question. Donc, je reviens sur la question de péréquation. Vous dites: Ce qui m'embête, c'est «no taxation without representation», là, l'imputabilité, je ne... pas mon argent pour la proximité de l'autre. Dans le mémoire de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, qui va nous... je pense qu'il va être présenté jeudi, on propose que les services, la gestion de l'agglomération, en cas de démembrement, soient assumés par la ville-centre, et, à sa face même, les élus des villes environnantes de l'agglomération, disons, de Montréal, selon leur proposition, n'auraient pas rien à dire, puisque c'est la ville-centre, Montréal, qui gérerait l'agglomération. Est-ce que vous trouvez que c'est un concept que l'on devrait suivre à l'égard des services d'agglomération, mais ne pas suivre à l'égard de la péréquation de proximité?

M. Belzil (Michel): Si je comprends bien le sens, là, du questionnement ? c'est une question que vous nous posez à brûle-pourpoint ? si on se met dans les agglomérations, là, hors Montréal, bien sûr que, s'il y a un démembrement, notre position a toujours été la même, hein? On a une instance qui a été créée par le gouvernement en 1979, les MRC, et je pense qu'il est temps de faire évoluer cette structure-là et de ne pas faire en sorte qu'on en rajoute en disant qu'une des composantes, aussi majeure soit-elle, prenne la responsabilité d'éléments aussi importants. Je pense que les gens, dans la périphérie, n'ont pas voté ? comment dire? ? pour élire les gens de cette ville d'importance. Alors, je ne vois pas pourquoi, moi, on déléguerait des pouvoirs ? en tout cas, je parle en général, là ? à une composante quand on s'adresse à un territoire donné. Je pense que ça prend absolument une structure qui existe déjà, hein, et qui est la MRC. Alors, c'est cette structure-là qui doit gérer les choses d'intérêt commun.

M. Fournier: Merci. Je n'ai pas d'autre question, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Du côté ministériel? Alors, je vais aller du côté de l'opposition. Mme la députée de Bourget.

Mme Lemieux: Merci. Est-ce que ça va?

Le Président (M. Ouimet): Oui, allez-y.

Mme Lemieux: Dans cette... appelons ça cette première vague, même si je conviens qu'il y a des éléments qui se sont passés en simultané de regroupements, là, à la fin des années quatre-vingt-dix, il y a eu plusieurs incitatifs, notamment financiers, qui ont été mis sur la table pour provoquer une réorganisation de certaines municipalités et le regroupement de certaines municipalités. Est-ce que vous considérez que ces incitatifs financiers de l'époque, qui courent encore dans certains cas, je crois, sont dans la cagnotte? Est-ce qu'ils devraient être remboursés, par exemple?

M. Belzil (Michel): Je ne comprends pas bien le... Remboursés par qui?

Mme Lemieux: Bien, écoutez, il y a eu des regroupements ? prenons des exemples de villages-paroisses ? il y a eu des incitatifs financiers. Moi, je me rappelle très bien, ma collègue qui est ici, députée d'Hochelaga, et à l'époque notre collègue député de Rouyn-Noranda avaient mis une série de mesures pour faire en sorte que les gens soient invités à se regrouper. Il y a des incitatifs financiers qui ont été développés, qui existent encore, là, qui sont peut-être en fin de course, mais qui sont encore présents, dans le cas où des municipalités seraient touchées par des défusions, alors que donc certaines portions de municipalités quitteraient suite à un référendum alors qu'elles ont reçu, quelques années auparavant, des éléments financiers intéressants les incitant à se fusionner. Qu'est-ce qu'on devra faire de ces incitatifs financiers qui ont été versés à une certaine époque?

M. Belzil (Michel): Et ces incitatifs financiers là, si je ne m'abuse, sont versés sur une période de huit années, hein, des mesures de neutralité financière. Alors, j'imagine que, dans le cas d'une défusion d'une de ces... de deux de ces municipalités, bien on arrête tout simplement le paiement des mesures de neutralité, hein? Et je reviens un peu à une partie de notre mémoire qui n'est peut-être pas d'actualité, mais, quand on parle de vraie péréquation pour au-delà de 300 petites municipalités qui ont de la difficulté à donner des services adéquats à leurs citoyens, on parlait de mesures de péréquation de 36 millions de dollars.

Je vous ai dit tantôt dans mon mémoire: Ces montants d'argent de mesures de neutralité ont été pris dans ce montant global de péréquation qu'on estime déjà très petit pour soutenir les municipalités. Alors, je reviens là-dessus, hein, ça me donne l'occasion de vous dire que je pense que ça devrait cesser. Et, autant on a mis des sous très importants dans des grandes villes au Québec pour ces fusions-là, autant on devrait retirer ça de cet endroit, puis qu'on paie ça avec un autre moyen, et qu'on rétablisse la péréquation, là, à quelque chose qui a un peu d'allure.

Et, pour revenir à la question des incitatifs, il y a aussi eu des incitatifs, je pense que c'était 100 $ par personne, mais, dans le fond, c'était pour refaire toute la cartographie, toutes ces choses-là, qui ont tous été dépensés finalement pour la fusion. Alors, je ne pense pas qu'on doit demander un remboursement de ces éléments-là, ce n'était pas des montants d'argent pour s'enrichir.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Je vais céder la parole au député de Beauce-Nord et puis, par la suite, à la députée de Taschereau.

M. Grondin: Alors, moi, je voudrais comprendre, là. Dans le projet de loi, on dit que, admettons qu'il y a une défusion, il va y avoir des municipalités qui vont... Ou les villes qui vont se défusionner, ils vont avoir quand même des ententes à prendre sur l'évaluation foncière, les cours d'eau, protection incendie, la police, sécurité civile, les cours... En tout cas, il y a un paquet d'ententes qu'ils doivent prendre, mais qu'est-ce qu'il va rester à la nouvelle ville défusionnée à gérer?

M. Belzil (Michel): Écoutez...

M. Grondin: Il va y avoir juste les mariages, quoi?

M. Belzil (Michel): C'est vous qui le dites, là, alors... Mais c'est le projet de loi qui est écrit comme ça, et c'est des éléments, écoutez, qui, à bien des égards, aujourd'hui, là, actuellement, débordent du cadre de la petite municipalité très locale, hein? La police, matières résiduelles, là, je ne les ai pas tous par coeur, là, mais tout ça, je pense que ça prend des ententes. Des grandes voies artérielles qui traversent plusieurs villes, à un moment donné, ce n'est pas rien qu'à une de payer, je ne sais pas. Alors, ça prend des ententes sur ces éléments-là qui transbordent la simple municipalité. Alors, je ne suis pas surpris, moi, de voir une dizaine d'éléments comme ça, hein, dans le projet de loi, je pense que c'est la voie vers laquelle on s'en va. Que ce soit dans les MRC ou ailleurs, je pense que ce qui est de nature supralocale, ça prend des ententes, ça prend des compétences aux MRC ou autres véhicules.

M. Grondin: C'est la question que je me posais: est-ce que ça va valoir le coût de dire qu'on va réélire un maire, des conseillers pour gérer qu'est-ce qu'il reste à gérer? La portion ne sera pas grosse.

M. Giroux (Michel): Il reste, d'après ce que... J'essaie de voir, là, mais il reste loisirs, culture, peut-être l'environnement, les services de proximité pour les citoyens, mais évidemment ce n'est pas énorme. Par rapport aux responsabilités des conseils municipaux actuels, c'est minimal, mais c'est important pour les citoyens aussi.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: M. le président, M. le vice-président, madame, bonjour. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt votre mémoire, et vos commentaires surtout, et j'aimerais vous parler de votre réalité, de votre Fédération. J'ai juste un commentaire et je poserais une question toute simple. À ce que je comprends, vous êtes des municipalités qui ont... Vous représentez beaucoup de municipalités qui ont été regroupées et qui, aujourd'hui, s'en trouvent, je pense, assez heureuses pour dire: Le conseil d'administration de la FQM ne cautionne pas la démarche vers les défusions. On comprend bien, il y a eu des regroupements ? et je ne parle pas du passé, peu importe la manière, ce qui est fait est fait ? et vous dites aujourd'hui: «Nous ne cautionnons pas la démarche vers les défusions.» Donc, vous ne cautionnez pas la loi n° 9, puisque c'est ça, la démarche qui a été enclenchée par le ministre.

L'argent qui vous a aidés à traverser cette période est versé sur plusieurs années, donc il y a des enjeux financiers, il y a des enjeux qui peuvent avoir des impacts sur d'autres municipalités que les vôtres, vous le soulevez bien. Mais, vous, votre réalité, c'est que vous ne voulez pas être inclus dans ce processus de défusion. Est-ce que ça correspond à l'idée qu'en ont d'autres personnes qui vont venir présenter des mémoires ici à l'effet, finalement, que la FQM demande ? est-ce que je peux traduire ça comme ça? ? à être exclue du projet de loi?

n(14 h 50)n

M. Belzil (Michel): Écoutez, vous avez utilisé les mots «nos membres sont assez heureux», je ne sais pas s'ils ont toujours été heureux, là...

Mme Maltais: Je ne parle pas du passé, je parle d'aujourd'hui.

M. Belzil (Michel): ...sur toute la période, là, mais, nous, en tout cas, les consultations qu'on a menées, je vous ai dit tantôt que, d'une façon majoritaire, hein, les membres de notre conseil d'administration ne cautionnaient pas le projet de loi. Alors, je me tiens à cette parole qui, je pense, veut tout dire implicitement.

Le Président (M. Ouimet): Très bien.

M. Giroux (Michel): C'est les élus de la FQM, si vous me permettez...

Le Président (M. Ouimet): Oui, M. Giroux.

M. Giroux (Michel): C'est les élus de la FQM, mais on rend compte toujours des décisions du gros bon sens. Et, pour beaucoup de gens de la FQM, ce qui est en place est fait, c'est parti, il y a des énergies humaines qui sont là-dedans, il y a des personnes, des fonctionnaires, des gens qui sont dans un processus, et les gens constatent que le gros bon sens ne devrait pas nous amener à détruire ça. Maintenant, le gouvernement pense que le gros bon sens, la décision du gros bon sens doit être donnée à la population par des référendums. Alors, nous, on est ici pour dire qu'on ne cautionne pas, mais, en même temps, le gouvernement doit prendre ses responsabilités.

Le Président (M. Ouimet): Très bien. Je retourne du côté ministériel. Il restera deux minutes à l'opposition. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais, juste pour le bénéfice, en tout cas, de la discussion que nous avons, rappeler que le projet de loi n° 9, c'est un projet de loi qui redonne aux citoyens le droit de se prononcer sur l'avenir de leur communauté. L'article 1 du projet de loi ne dit pas qu'on invite les citoyens à défusionner; il se lit comme suit: Le projet de «loi a pour objet d'accorder aux citoyens de certaines municipalités le droit de se prononcer sur les changements imposés depuis 2000 en matière d'organisation territoriale municipale.

«Ce droit leur permet de choisir, soit le maintien des municipalités et de leurs territoires, soit la reconstitution de municipalités dotées des territoires qu'elles avaient avant de cesser d'exister», etc.

Donc, ça, c'est pour la correction, pour qu'on sache exactement de quoi on se parle.

M. Belzil, madame et monsieur de la Fédération québécoise des municipalités, merci pour votre mémoire, il est extrêmement éclairant, en tout cas. Et je vous remercie aussi pour le ton que vous avez adopté dans la présentation de votre argumentation.

Vous avez aussi soulevé un point fort intéressant qui est la question de la péréquation. Je pense que ça mérite une réflexion en profondeur et je suis persuadée que mon collègue le ministre des Affaires municipales va certainement faire ses devoirs à cet effet. Et, au nombre des recommandations que vous nous présentez, vous dites de «permettre expressément aux municipalités reconstituées et aux villes de déléguer les compétences énumérées à l'article 48 à leur MRC plutôt que de procéder par entente intermunicipale». C'est quoi, le problème que vous voulez régler par cette recommandation? Est-ce que vous avez peut-être des appréhensions que, si on retourne dans les signatures des ententes, ça pourrait amener peut-être des incompréhensions ou des conflits? Pourquoi est-ce que vous voulez que ces pouvoirs soient délégués automatiquement aux MRC au lieu de procéder par entente intermunicipale?

M. Belzil (Michel): Écoutez, je pense que ce n'est pas une question que ce soit obligatoirement les compétences à la MRC, c'est juste d'ouvrir la porte à cette possibilité. Alors, c'est-à-dire que, dans certains cas où il y aura des défusions, s'il y a lieu... Alors, on parle, dans une des mesures fiscales, qu'il faut faire des ententes, comme vous dites bien. Alors, on se dit: Peut-être que la voie des ententes, c'est la bonne voie, mais ne fermons pas la porte aussi à des compétences déléguées aux MRC, parce que ça se vit sur l'ensemble du territoire du Québec depuis l'introduction de certains projets de loi dont j'oublie les numéros. Alors, c'est quelque chose d'intéressant. Alors, nous, notre proposition, c'est que cette avenue-là aussi peut être intéressante.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Merci.

Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme la députée. Je reviens maintenant du côté de l'opposition. Ça va aller? Du côté ministériel?

Alors, je remercie, dans ce cas-là, les représentants de la Fédération québécoise des municipalités de leur participation à nos travaux et j'invite maintenant le caucus des six grandes villes du Québec et leurs représentants à s'approcher vers la table.

Caucus des six grandes villes
du Québec

Alors, je demanderais au maire de Sherbrooke et président du caucus des six grandes villes du Québec de bien vouloir prendre place, et les gens qui l'accompagnent. Je demanderais un peu de silence dans la salle, s'il vous plaît. Merci.

Alors, M. Perrault, je vous cède la parole pour que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent.

M. Perrault (Jean): M. le Président, M. le ministre, madame de l'opposition officielle, Mmes et MM. les parlementaires, il me fait plaisir de vous présenter les gens qui m'accompagnent, mes collègues: M. Jean-Paul L'Allier, de la ville de Québec; M. Jean Tremblay, de la ville du Saguenay; M. Yves Lévesque, de la ville de Trois-Rivières, maire de Trois-Rivières; M. Jean Garon, maire de Lévis; et Mme Jocelyne Houle, maire suppléante pour la ville de Gatineau. Et on doit excuser M. Ducharme qui actuellement est en fonction comme président de la Fédération canadienne des municipalités.

Le Président (M. Ouimet): ...pour présenter votre mémoire.

M. Perrault (Jean): Merci. Alors, d'entrée de jeu, je voulais vous dire qu'on représente plus de 1,2 million de personnes, ces gens qui sont ici, devant vous. Le caucus des six grandes villes du Québec remercie la commission de l'aménagement du territoire de lui permettre de prendre part aux consultations publiques touchant le projet de la loi n° 9. C'est donc dans un esprit de collaboration que nous acceptons de participer positivement au débat qui entoure la préparation de ce projet de loi.

D'entrée de jeu, il nous apparaît important de vous présenter notre caucus, officiellement reconnu à l'intérieur même du cadre de l'Union des municipalités du Québec. Il est formé des six grandes villes unifiées des régions du Québec, soit la ville de Gatineau, Lévis, Québec, Saguenay, Sherbrooke et Trois-Rivières.

Un statu quo inacceptable pour les six villes-centres. Notre intervention dans le cadre de cette commission ne pourra cependant être constructive sans le rappel historique de cette longue bataille qu'ont menée les six grandes villes-centres pour convaincre les gouvernements depuis 10 ans qu'il fallait agir et que le statu quo en matière d'organisation municipale était devenu inacceptable.

n(15 heures)n

Dès 1993, un premier document était déposé auprès du ministre Claude Ryan par les villes-centres des six agglomérations de plus de 100 000 personnes alors formées des villes de Montréal, Québec, Chicoutimi, Sherbrooke, Hull et Trois-Rivières. Intitulé Pour la relance des grandes villes-centres et de leur région, ce document décrivait les difficultés de fonctionnement de ces agglomérations. Il exposait clairement la problématique structurelle demeurée encore sans réponse et expliquait très clairement pourquoi les villes-centres arrivaient de moins en moins à assurer la complémentarité avec la périphérie. Il décrivait comment les relations intermunicipales étaient devenues tendues et improductives et, par voie de conséquence, ralentissaient le développement des régions métropolitaines. Déjà, en 1993, le constat de la situation confirmait que les problèmes étaient généralisés d'une grande ville-centre à l'autre et qu'ils ne pouvaient être résolus à la pièce mais plutôt par l'implantation d'une véritable politique urbaine pour le Québec.

L'arrivée au pouvoir du Parti québécois en 1994 n'a pas ralenti l'ardeur des maires des villes-centres, au contraire. Lors d'une importante rencontre à Sherbrooke au printemps de 1995, les six maires des villes-centres de l'époque ont décidé d'orienter leurs interventions vers les plus hautes instances gouvernementales pour les convaincre d'agir. Ils ont convenu de soutenir leurs efforts pour la réalisation d'études, d'analyses, de témoignages de situations anecdotiques et par la démonstration indiscutable du mauvais fonctionnement des agglomérations.

En mars 1997, les grandes villes-centres déposaient au premier ministre Lucien Bouchard un important mémoire portant le titre Les six grandes villes-centres, partenaires du développement du Québec. Cet important document expliquait au premier ministre que les régions urbaines à travers le monde constituaient de plus en plus le pivot de l'accroissement de la richesse des nations en raison de leur rayonnement économique et de la diversité des échanges qui les caractérise. Il démontrait que les grandes agglomérations urbaines étaient confrontées au problème de la fragmentation du territoire, où l'inexistence de mécanismes efficaces de planification entraînait des dédoublements de services, des coûts additionnels et une concurrence faisant en sorte que les besoins de l'ensemble demeuraient souvent sans réponse et qu'une somme importante d'énergie était gaspillée.

Toujours aussi vrai aujourd'hui, ce mémoire expliquait que le Québec éprouve un urgent besoin de rassembler ses efforts de développement au sein d'entités dotées de pouvoirs, de moyens adéquats et constituant des masses critiques susceptibles d'accueillir la réorganisation amorcée en matière de prestation de services publics.

En septembre 1998, les six grandes villes-centres du Québec, toujours aussi convaincues de la justesse de leur combat, déposaient un très important mémoire à la Commission nationale sur la fiscalité et les finances locales. Le mémoire brossait un tableau particulièrement précis des carences du système fiscal municipal... des municipalités. Bien que beaucoup d'autres améliorations à la fiscalité municipale soient toujours nécessaires aujourd'hui, le regroupement des municipalités aura contribué à lui seul à régler plusieurs problèmes, et ce, sans contribution gouvernementale. Le partage équitable de l'effort fiscal est en voie de se réaliser, la concurrence déloyale est disparue, l'élimination graduelle des dédoublements de services et des équipements va bon train, l'étalement urbain est maintenant sous contrôle, et la notion des deux classes de citoyens n'existe plus.

En plus de déposer ces documents structurés, les grandes villes-centres ont participé à toutes les tables de discussion concernant la réforme municipale. Tant avec le ministère des Affaires municipales que lors des différents débats soulevés par l'Union des municipalités, nous avons choisi de défendre notre position qui, croyons-nous toujours, était une réalité incontournable.

Par la suite, le mouvement a pris de l'ampleur, et c'est ainsi que, en mars 2000, 25 villes d'agglomération unissaient leurs voix à celles des six grandes villes-centres pour réclamer du gouvernement du Québec qu'il passe rapidement à l'action dans le dossier de la réforme municipale.

Dans une lettre conjointe adressée à la ministre des Affaires municipales, Mme Harel, les 31 villes centrales du Québec rappelaient l'urgence pour le gouvernement du Québec de se doter d'une véritable politique urbaine. Elles demandaient au gouvernement de procéder dans les meilleurs délais à ce qui suit:

1° mener à terme sa réforme de la fiscalité et de l'organisation municipale;

2° entreprendre immédiatement sa démarche de consolidation par l'annonce de ses orientations en matière de réforme des règles du jeu qu'il entend suivre, de l'accompagnement qu'il entend donner aux municipalités qui seraient engagées dans la démarche, des agglomérations à consolider en priorité et des échéances à respecter pour prendre des décisions;

3° inclure dans son projet de réforme l'obligation pour les municipalités d'examiner le regroupement municipal comme un moyen durable d'assurer l'équité fiscale et la croissance économique des agglomérations.

Les fusions, le fruit d'une volonté politique. Deux gouvernements, quatre premiers ministres, quatre ministres des Affaires municipales ont été tour à tour rencontrés, sensibilisés, informés et bien sûr, après plusieurs années d'efforts, convaincus qu'il fallait changer les choses. Les fusions municipales ne sont donc pas le résultat d'une décision partisane ou d'un engagement gouvernemental antidémocratique, mais plutôt le résultat provoqué par la démonstration sans équivoque, faite par les villes-centres et les villes d'agglomération, que le statu quo n'était plus possible, que le temps des demi-mesures était révolu et que les fusions constituaient le meilleur outil pour mettre véritablement un terme aux chicanes stériles et rétablir l'équité. Le gouvernement devait reconnaître l'urgence des besoins et l'existence d'une véritable problématique urbaine partout au Québec. Il n'avait pas le choix d'agir.

Cette mise au point nous apparaît importante parce qu'elle permet de comprendre que le regroupement des municipalités n'a pas été dicté par une décision gouvernementale illégitime, mais par une volonté politique et responsable d'améliorer le fonctionnement des agglomérations et ainsi doter le Québec d'une véritable politique susceptible de renforcer les pôles urbains à la base de notre développement social et économique.

Nous souhaitons donc que les projets de loi déposés par l'actuel gouvernement respectent les conclusions de cette réflexion entreprise depuis plus de 10 ans en matière d'organisation municipale, qu'ils maintiennent ce cap et qu'ils servent à réaffirmer la volonté déclarée du gouvernement d'assurer le succès des nouvelles villes. Aussi tenons-nous à rassurer le gouvernement sur les principes qui ont guidé notre action au cours des 10 dernières années et qui demeurent la recherche d'un véritable partenariat avec le gouvernement et notre désir d'apporter des solutions durables au développement du Québec.

Dans ce contexte, nous insistons pour vous rappeler les cinq points sur lesquels sont appuyés nos efforts depuis 1993 jusqu'à la mise en place des villes unifiées:

1° doter le Québec de régions urbaines fortes et dynamiques;

2° doter les régions métropolitaines de masses critiques suffisantes, à la fois pour faire face à la globalisation des échanges économiques et pour assurer la prestation efficace des services publics;

3° assurer l'unité d'actions nécessaires à la convergence et à la cohérence des initiatives de développement et en mettant fin à la concurrence stérile;

4° mettre fin au gaspillage inhérent aux duplications de services et d'équipements et permettre un meilleur contrôle de l'étalement urbain et;

5° réduire les inéquités fiscales en assurant un meilleur partage des coûts et des bénéfices.

Alors, la mise en place des villes unifiées donne des résultats positifs indéniables dans toutes les régions du Québec. Les villes nouvelles doivent être maintenues, et les efforts pour réussir une intégration harmonieuse et composante de ces villes doivent se poursuivre. D'ailleurs, les villes unifiées, dans l'ensemble, sont à bâtir de véritables moteurs économiques pour leurs régions. Nos villes sont déjà sur la voie du succès. Entraver le processus de leur développement à ce stade-ci serait catastrophique pour l'avenir du Québec.

C'est donc dans ce sens que nous voulons travailler en partenariat avec le gouvernement afin de l'aider à construire le Québec de demain. L'expérience acquise au cours des 10 dernières années pourra certainement contribuer à éviter le retour vers un passé pas si lointain qui ne ferait qu'affaiblir le Québec. Nous demandons donc au gouvernement, tel qu'il en a prévu la possibilité dans la déclaration ministérielle qui a remplacé le projet de loi n° 1, d'approuver les projets d'organisation municipale améliorée qui lui seront proposés par les villes qui le souhaitent, en invitant la population à y adhérer et à ne pas s'engager sur la voie des défusions. Le gouvernement doit faire preuve de leadership en la matière et prendre position plutôt que d'utiliser la méthode du laisser-aller en donnant toute la place à des groupes particuliers qui cherchent davantage à sauvegarder leurs intérêts que de participer à l'action collective.

n(15 h 10)n

Le projet de loi n° 9, c'est un recul pour le Québec, un mode d'organisation dépassé, proposant le retour aux chicanes. En ce qui concerne le projet de loi n° 9, nous tenons à affirmer que le mode d'organisation municipale qu'il mettrait en place s'avérerait complètement inadéquat pour relever les défis actuels et futurs. En effet, l'obligation prévue par le projet de loi de conclure de multiples ententes relatives à certains services, équipements, infrastructures ou compétences nous inquiète au plus haut point. Le recours aux ententes intermunicipales nous ferait reculer de 30 ans. C'est le retour aux chicanes municipales. Ces ententes, on le sait, ont toujours été à l'origine de chicanes historiques qui ont marqué le monde municipal au cours des 30 dernières années. Est-il besoin de se rappeler qu'«entente» signifie négociation, confrontation et inéquité entre ceux qui peuvent négocier et ceux qui n'ont pas le choix? Entente est aussi synonyme de mode de gestion, de mécanisme de fonctionnement, de structure et de lourdeur administrative.

Quels sont les mécanismes de gestion que prévoit mettre en place le gouvernement pour assurer la gestion de ces nombreuses ententes? Le retour des MRC, des communautés urbaines, des régies, des sociétés paramunicipales? Ces organismes seraient-ils nécessaires si, par exemple, seulement deux anciennes villes sur 10 procédaient à la défusion de leurs secteurs? On le sait, la création d'une superstructure assurant la gestion des 17 champs d'intervention prévus dans le projet de loi ferait en sorte de transférer la responsabilité de 50 % à 70 % des budgets actuellement administrés par les villes unifiées à un organisme tiers. Le projet de loi, ayant pour objectif principal de redonner aux citoyens un sens démocratique dans leur adhésion à la nouvelle ville, créerait exactement l'effet contraire en soustrayant les administrateurs de cette superstructure de l'imputabilité habituellement imposée aux élus municipaux. Les citoyens eux-mêmes n'auraient aucun droit, aucun pouvoir de manifester leur approbation ou leur désapprobation quant à la performance de cette superstructure.

La section concernant la désignation de certains équipements, infrastructures ou activités à caractère supralocal nous rappelle que le projet de réorganisation municipale, déposé par le précédent gouvernement en avril 2000, avait prévu ce type d'exercice qui s'est avéré impossible à réaliser. Les mandataires nommés par le ministre ont essayé par tous les moyens de trouver un consensus dans la définition d'un équipement supralocal, ce qui n'a pu être réalisé. Nous croyons qu'il sera tout aussi difficile, voire impossible, dans le contexte actuel, d'arriver à des ententes négociées sur ce même sujet. Nous sommes persuadés que ce mode d'organisation municipale est dépassé et générateur de chicanes et de concurrence stériles. Peut-on croire que le gouvernement lui-même, qui veut recréer ce modèle qui place les villes dans un processus perpétuel de négociation en raison de la multitude d'ententes à durée variable... veut-il vraiment remettre en place un mode de gestion inefficace et irréaliste dans la mesure où les intérêts locaux domineront les intérêts collectifs? Nous sommes persuadés qu'au contraire il faut s'assurer qu'un tel retour en arrière ne soit pas possible.

Des mesures fiscales qui encouragent la défusion et qui sont inadaptées et insuffisantes pour établir l'équité. En matière de fiscalité, le projet de loi n° 9 nous apparaît encore une fois comme un incitatif aux défusions et inadapté à la fiscalité qui doit prévaloir entre les citoyens. Les propositions mises de l'avant n'atteignent pas l'objectif principal qui est de rétablir une équité réelle entre tous les citoyens d'une agglomération, puisqu'il ne tient pas compte des coûts réels de la centralité et qu'au contraire il aura pour effet de maintenir les écarts fiscaux entre les municipalités d'une même agglomération.

Par exemple, le projet de loi n° 9 oblige les municipalités défusionnées à assumer leur part de frais reliés au CLD et au logement social. Mais qu'en est-il des autres frais de centralité tels que la protection du patrimoine, les relations internationales ou les grands événements à fortes retombées économiques? Plusieurs études ont été réalisées relativement à ces surcoûts assumés par la ville-centre, ils ont été reconnus par tous, et la recherche d'une véritable solution ne permet pas de demi-mesures. De plus, le mécanisme de péréquation prévu par le projet de loi a pour effet de récompenser les secteurs qui prendraient la décision de faire cavalier seul. Par exemple, une ancienne ville-dortoir sans richesse foncière, représentant 3 % de la population de l'agglomération, pourrait se retirer de la ville unifiée et déclencher ainsi tout un processus de renégociation d'ententes intermunicipales, la création d'une multitude de nouveaux organismes de gestion et recevoir une prime à la défusion de ceux qui ont choisi de rester ensemble pour construire une région plus forte économiquement. On voit bien que cette proposition n'a aucun sens et qu'elle s'avère injuste, inéquitable et même quelque peu farfelue.

Nous demandons au gouvernement de retirer le mécanisme de péréquation tel que présenté au projet de loi. Mieux encore, nous croyons que l'autonomie est un privilège qui doit être assumé par ceux qui font ce choix. Le gouvernement doit, à notre avis, être du côté de ceux qui acceptent de rester ensemble pour continuer de construire des villes susceptibles d'assumer de nouvelles responsabilités, devenir des moteurs économique et social pour leur région et ainsi agir comme de véritables partenaires du gouvernement.

La transparence sur les coûts des services et les coûts de gestion du mode de gestion municipale découlant du projet de loi devra être assurée afin que les citoyens peuvent mieux comparer la formule actuelle de la ville unifiée et celle découlant du projet de loi n° 9. En d'autres termes, en matière de transparence, ce qui est demandé au gouvernement par les six grandes villes consiste à donner et à diffuser auprès de chacun des ménages, et ce, avant l'ouverture des registres, toute l'information requise pour poser un geste éclairé.

À notre point de vue, les études doivent fournir des indications claires sur les impacts des défusions à l'égard de la gestion des services à la population, sur les coûts associés à cette opération et donner les comptes de taxes résultant de cette opération de démembrement, la mise en commun des services et le partage obligatoire de tous les frais de centralité.

De plus, en ce qui a trait à la fiscalité et pour donner suite aux propos énoncés plus avant, nous demandons à ce que le projet de loi ajoute le partage obligatoire de tous les frais de centralité, notamment ceux reliés à la protection du patrimoine, à la promotion économique et touristique, aux relations internationales et au développement culturel. Ces frais devront être identifiés et être inclus dans les études à soumettre à la population.

Et en ce qui concerne les équipements supralocaux, nous demandons au gouvernement de préciser, dans son projet de loi, la définition d'un équipement supralocal et de déterminer clairement, dès le départ, le mode de gestion, de financement et la répartition équitable des coûts de fonctionnement et d'immobilisation rattachés à l'équipement et à l'activité de l'infrastructure.

Vous nous demandez, M. le Président, d'écourter. Vous avez le reste du mémoire où les six grandes villes appuient également l'UMQ dans ses propositions beaucoup plus techniques, et vous pourrez en prendre connaissance dans le document qu'on vous a déposé.

Le Président (M. Ouimet): Alors, M. le maire de Sherbrooke, je vous remercie pour votre mémoire et votre présentation. Nous amorçons maintenant la période d'échange, et je cède la parole au ministre. M. le ministre.

M. Fournier: Merci, M. le Président. M. le maire, messieurs, madame, merci d'être avec nous aujourd'hui, merci de nous avoir fait part de votre mémoire qui fait une longue plaidorie, je dirais, dans le sens du retrait du projet de loi n° 9. Alors, je ne m'y attarderai pas nécessairement, puisque nous sommes à étudier le projet de loi n° 9 et non pas son retrait, mais je suis bien content que vous ayez fait la démonstration. Je sais qu'elle vous tient à coeur et qu'elle est importante à faire pour vous. Nous l'avons écoutée avec beaucoup d'attention.

Je prends bonne note, dans les dernières paroles, avant que vous deviez arrêter faute de temps, sur l'information à donner avant l'ouverture des registres. Je pense qu'il est peut-être utile de rappeler ici que nous avions eu une discussion antérieure, en juin dernier, que j'ai d'ailleurs réitérée ce matin, M. le Président, lors des remarques préliminaires, à l'effet que toute l'information qu'il est possible d'obtenir et de pouvoir diffuser avant la signature des registres, cela sera chose faite. Et déjà nous sommes à la cueillette de ces informations pour nous assurer qu'il y ait le plus d'information possible qui soit donnée. Évidemment, comme nous l'avions dit à ce moment-là, considérant le nombre de cas exponentiels qui peuvent se produire suite à la signature des registres, il est possible qu'il y ait lieu à des études plus pointues suite aux registres et avant le référendum, mais il est bien entendu que ce que nous voulons ? et je pense que là-dessus nous étions en communauté d'esprit ? ce que nous voulons, c'est que l'information la plus complète puisse être donnée lorsque les gens ont à s'exprimer. Là-dessus, je pense qu'il n'y a pas de difficultés.

n(15 h 20)n

Je note volontiers les remarques que vous faites à l'égard de la péréquation et sur l'autonomie que vous considérez comme étant un privilège qui doit être assumé par ceux qui font ce choix. Je mets un peu d'emphase sur ce passage et, je ne vous ferai pas de cachette, il y a plusieurs groupes qui vont vous suivre, qui vont aussi discuter de cet élément sur la péréquation qui se voulait essentiellement un élément de justice sociale, qui, à l'examen, semble avoir des effets pervers.

Et, comme je l'ai dit ce matin lors des remarques préliminaires, nous sommes ici en mode d'écoute pour bonifier le projet de loi, pour ne pas nécessairement le rempirer, même si, pour certains qui vont défiler ici, ils vont considérer... Et je vous l'annonce à l'avance, il y aura deux camps qui viendront devant nous, et lorsque, pour un camp, ce sera une bonification, pour l'autre, ce sera d'empirer. Alors, de toute façon, il y aura toujours un des deux camps qui considérera quelque chose. Mais nous souhaitons pouvoir bonifier le projet de loi. Et, si d'aventure une disposition qui servait une plus grande justice sociale n'atteindait pas son but, elle ne s'y retrouverait pas. Ça, c'est une évidence.

Vous parlez des frais de centralité et vous ajoutez un certain nombre d'éléments. Mais ce qui m'intéresse le plus... Et je sais que peut-être, vous, ce n'est pas ce qui vous intéresse le plus parce que vous aimeriez mieux qu'il n'y ait pas de projet de loi, mais, puisqu'il y en a un et puisqu'il y aura une consultation et que ni vous ni moi ne savons combien, dans une municipalité donnée, il y aura de villes reconstituées, comment vous considérez qu'elle serait optimale, la formule de gestion des services d'agglomération, des services qui ont à être donnés? Quelle est votre proposition sur la façon dont ça devrait fonctionner?

Je comprends bien que vous ne voulez pas le retour en arrière. Donc, la méthode du statu quo ante est, pour vous, rejetée. Pour ceux qui, parmi vous, n'étaient pas là ce matin, je l'ai encore répété que le statu quo ante n'est pas non plus une option que nous envisageons. Nous cherchons à permettre aux citoyens de s'exprimer ? je pense que ça, c'est un engagement qui est assez clair ? et nous cherchons en même temps à protéger les acquis positifs qui ont découlé des regroupements.

Alors, si d'aventure il y avait un quelconque démembrement ? et là vous pouvez faire plusieurs scénarios; c'est bien ce que je me fais dans ma tête aussi ? comment vous verriez la gestion de ces services d'agglomération?

M. Tremblay (Jean): Moi, je vais vous dire que ce n'est certainement pas de la façon dont c'est décrit dans la loi parce que ça n'a jamais fonctionné, ces ententes-là. On s'est toujours pliés. On savait que ce n'était pas la solution qu'il fallait. Puis on oublie la gestion de ces organismes-là parce qu'on vient tellement tannés de se chicaner avec les voisins.

Moi, je vais vous dire que, oui, on peut déplorer qu'il n'y ait pas eu de référendum avant les fusions. Je le déplore aussi. On peut le déplorer aujourd'hui. Mais là ce n'est pas un référendum là-dessus qu'on fait, là. On fait un jugement de valeur sur ces villes-là quelques mois après qu'elles soient créées; on fait un jugement de valeur sur elles. Puis, en plus, quand on dit dans la loi: On donne le droit aux citoyens de se prononcer sur leur avenir, je trouve que ce n'est pas correct, dire ça, parce qu'en fait les citoyens se prononcent sur quoi? Il se prononce sur une ville qui va rester, mais il ne la connaît pas. Donc, il va se marier avec qui? Il ne le sait pas.

Deuxièmement, celui qui veut se détacher, bien, ce n'est pas comme la ville d'avant. Pas du tout, pas du tout. Alors, moi, j'ai une petite municipalité très belle à côté de chez nous qui s'appelle Saint-Honoré, qui fonctionne très bien, mais elle a tous les services d'une municipalité ordinaire. Pourquoi la ville de Saint-Honoré va avoir beaucoup plus de droits que la ville qui s'est détachée? On va les punir parce que ces villes-là ont été forcées à se fusionner.

Puis les ententes, je vous le dis, M. le ministre, ça ne marche pas. C'est pour ça qu'on voulait les fusions. Ça ne marche pas, ces ententes-là avec les autres villes. Moi, je pense: on fait des villes ou bien on n'en fait pas. On se fusionne ou bien on ne se fusionne pas. Là, c'est entre les deux. On va se défusionner, mais celui qui va se défusionner va rester fusionné.

C'est sûr que, quand je vais lui présenter la facture, elle va être trop chère. Je ferais pareil. Puis, moi, je vais dire qu'elle n'est pas assez chère, puis là la chicane va prendre, puis on ne se parlera plus. Je vous le dis, on n'a jamais eu un climat d'entente comme ça chez nous. C'était le royaume de la chicane. C'est terminé, on ne se chicane plus. Ça va bien, le monde est de bonne humeur. Je trouve ça déplorable. Je trouve ça déplorable qu'on en vienne à se... Là, ça va être la chicane qui va reprendre, c'est certain.

Alors, je vous dis que les ententes qu'on peut faire après, je ne vois pas comment ça peut se faire. Ou bien il n'y a pas d'entente ou bien ce sont des villes. Puis, à l'heure actuelle, chez nous, ça ne se plaint pas tant que ça. C'était 30 %, par exemple, à La Baie pour la grande ville, puis on est rendu à 65 %. On fait du chemin, on fait du chemin. Là, on vous demande, après quelques mois: Portez un jugement de valeur. Sauf qu'on est exigeants pour nous après quelques mois.

Mais, malgré tout ça, je pense qu'on va l'avoir puis je pense que les gens ont compris. Mais je trouve ça dur d'avoir à perdre ce temps-là. C'est un temps très précieux qu'on va perdre dans les prochaines années. Alors, les ententes, demandez-nous pas comment ça va se passer après, on ne le sait pas, mais on sait que ça va aller mal. On s'en parle tout le temps. Ça va être la chicane.

M. Perrault (Jean): Alors, les MRC, c'est la même chose. Moi, ça fait 21 ans, 22 ans que je suis dans ce métier-là. J'ai travaillé avec toutes les structures que vous proposez: MRC, ententes intermunicipales. On en avait 52 au moins. Alors, imaginez-vous, avec les 17 responsabilités, s'il y a une, deux ou trois villes qui se démantent dans le secteur chez moi, on est huit villes ensemble, et là, s'il faut faire 17 protocoles d'entente multipliés par le nombre de trois villes ou deux, trois villes qui se détachent, alors, imaginez-vous, nos gestionnaires, ils vont faire que... Et ça se faisait comme ça, c'était de rédiger des protocoles. Les villes attendaient. On leur donnait un plan de match. Ils regardaient ça, ils étaient contre. On recommençait, et on ne faisait que ça, des ententes intermunicipales. Les MRC, la même chose.

Aujourd'hui, je suis maire et préfet. Il y a un point à l'ordre du jour de la table du conseil municipal de la ville de Sherbrooke qui est marqué «Activités dans le cadre de la MRC». Ça fait deux ans qu'on gère ça. On a eu peut-être quatre, cinq points par rapport au schéma d'aménagement et, avant, on avait une MRC avec huit... neuf maires, parce qu'on était neuf, avec une structure administrative qui faisait la gestion de la MRC pour à peu près ça, trois, quatre points qu'on a eus, puis on n'a pas pu s'entendre sur un schéma d'aménagement sur l'étalement urbain, on n'a pas été capables de s'entendre sur un schéma d'aménagement. C'est ça, la vraie vie, M. le ministre.

Moi, ça fait 22 ans que je suis dans ce métier-là. M. L'Allier, tous les gens qui sont ici, là, on peut vous parler d'expériences. C'est bien beau, ça, des ententes, c'est bien beau, des MRC, c'est bien beau, des régies, c'est... Des régies de police, c'est la même chose. Le citoyen...

Je vais vous donner un exemple, la Société de transport de Sherbrooke ? avant, ça s'appelait la CMTS. Quand le conseil d'administration, qui étaient des élus de la ville de Sherbrooke qui siégeaient sur ce conseil d'administration là, qui décidaient... Nous autres, on leur demandait: Voulez-vous faire des efforts de rationalisation au niveau financier? C'est un conseil d'administration autonome, ils disaient: Ah! Bien, écoute, nous autres, on a à gérer ça puis on décide comme ça. Ils ont décidé de fermer les toilettes au centre-ville de Sherbrooke. Moi, j'ai porté le fardeau de fermeture de toilettes pendant des mois de la part des citoyens. Moi, je leur disais: Bien, ne venez pas brailler à moi. Allez à la... à transport en commun, là, les élus qui sont là, qui vont décider s'ils vont l'ouvrir ou vont la fermer. Moi, je n'ai pas de pouvoir. C'est délégué à une autre responsabilité.

Alors, M. le ministre, votre question, je crois sincèrement, très... J'essaie d'être objectif, j'essaie de vous dire que ça ne marche pas. Aujourd'hui, moi, j'ai quatre maires, quatre anciens maires dans ma ville, puis je vais venir ici avec eux lors de la présentation du mémoire de la ville de Sherbrooke, puis il y en avait, des gens qui étaient contre les regroupements. Ils vont venir avec moi, puis je vais leur dire, je vais leur... Vous leur demanderez. Ça fonctionne, notre affaire, puis les citoyens sont contents.

Alors, votre réponse, M. le ministre, trouvez une autre solution que ça parce que ça marche.

Le Président (M. Ouimet): Je vais devoir céder la parole à l'opposition. Je reviendrai à vous, M. le ministre. Alors, Mme la députée de Bourget.

Mme Lemieux: Merci. Écoutez, je... d'abord, je dois vous le dire, j'ai le sentiment de vivre un grand privilège d'avoir ces six représentants de six grandes villes au Québec. Je pense que c'est un privilège comme élus au Parlement de Québec d'avoir accès à ce que vous avez fait et à ce que vous avez vécu ces dernières années, et je dirais qu'un des mérites de votre mémoire, c'est de refaire l'histoire.

L'intérêt... Je l'avais déjà lu, mais là de vous entendre me permet de dire la chose suivante. On a souvent dit, dans ce dossier de réorganisation municipale: C'est le gouvernement qui a imposé. Mais, quand on entend votre histoire, on se rend compte que c'est vous, des leaders dans des lieux stratégiques de développement pour le Québec qui avez réclamé, et ça m'apparaît tellement clair, et je ne pense pas que vous ayez fait de distorsion de l'histoire, je me fie à votre honnêteté, mais ça m'apparaît clair à quel point c'est un mouvement qui, bien sûr, a été sanctionné, accéléré, facilité par le gouvernement du Québec dans l'expression de ses responsabilités, mais c'est un mouvement qui est venu de la base, de la base de l'organisation de vie municipale au Québec, et je crois que, ça, c'est un mérite extraordinaire de votre mémoire.

Je voudrais également vous dire, et ça, je suis désolée, vous savez, on ne veut pas prendre les gens à partie, mais, des fois, on est un peu coincés... Le ministre, tout à l'heure, a commencé en disant: Vous avez fait un plaidoyer; c'était important pour vous. Je dirais, et je suis un peu choquée de la manière dont le ministre aborde le plaidoyer que vous avez fait; vous l'avez fait avec beaucoup de conviction, c'est important pour l'ensemble du Québec. Ce n'est pas juste important pour les maires que vous êtes. C'est important aussi pour le gouvernement, qui a la responsabilité du bien commun. Et ça me dérange énormément, la dichotomie qu'on est en train d'installer entre les élus, dûment élus démocratiquement, élus que vous êtes, et le gouvernement, comme si c'étaient deux choses complètement... qui devaient être en rupture.

n(15 h 30)n

Ce plaidoyer, que vous faites avec beaucoup de vigueur et beaucoup de conviction, il concerne tous les Québécois et il concerne le gouvernement aussi. Et, moi, ce que je comprends, c'est que vous n'êtes pas juste en train de défendre votre affaire, vous êtes en train de défendre le développement des communautés que vous représentez. Et cette dichotomie, cette rupture que le gouvernement est en train de faire: Bien, c'est des villes qui font leur plaidoyer, les citoyens se prononceront, un instant! un instant! je ne veux pas vous prendre à partie, mais j'ai une petite réaction allergique à ce genre de propos.

Dans un des éléments, je pense que vous aviez très bien illustré le cul-de-sac autour des ententes intermunicipales. Moi, j'ai lu beaucoup de choses là-dessus, quelquefois qui sont presque rigolotes: du nombre d'ententes, de régies, etc. M. le maire de Sherbrooke, vous en avez témoigné tout à l'heure. Vous dites d'ailleurs dans votre mémoire: Il y a beaucoup de choses qu'on a réussi à résoudre, sans plaider la perfection. Mais vous avez des outils pour résoudre mieux, plus efficacement un certain nombre de problèmes.

J'aimerais vous entendre... je l'ai abordée ce matin, la question des relations de travail. Ça a l'air banal, mais, comme je le disais ce matin, c'est un gros morceau. D'abord, il y a du monde qui travaille dans vos municipalités, hein? Il y a des vrais hommes, des vraies femmes, des gens qui gagnent leur vie, qui ont toutes sortes de responsabilités. Dans plusieurs de vos villes, je le sais que ça a impliqué des mouvements de personnel, la relocalisation, replanifier ses ressources humaines, replacer du monde, etc., et le projet de loi n° 9 est silencieux sur cette question.

Je ne crois pas me tromper... enfin, vous me donnerez des indications. L'information que j'ai à ce moment-ci, plusieurs de vos municipalités ont conclu ou sont dans un processus de conclusion d'ententes collectives où ça va relativement bien. Ça ne veut pas dire que vous ne vous parlez pas dans le blanc des yeux de temps en temps, là, on se comprend, je ne suis pas dans une vision angélique. Mais tout ce qui est relations de travail est relativement géré.

Alors, je ne sais pas comment vous voyez cette question-là. C'est un autre aspect, hein? Il y a bien des aspects dont on peut parler. C'est un autre aspect, mais j'aimerais ça vous entendre là-dessus. Je sais que vous aviez plusieurs unités d'accréditation qui se chevauchaient. Bon. Ça a impliqué toutes sortes de travail, des négos, du déplacement de personnel. Je ne sais pas si c'est un aspect sur lequel vous pourriez nous éclairer.

M. Perrault (Jean): C'est certain qu'actuellement nous sommes en train de négocier. C'est la première fois que les villes doivent négocier toutes les conventions collectives dans la même année, ce qu'on n'avait pas à vivre dans le passé: alors, police, incendies, cols bleus, cols blancs. Pour chez nous, il y a Hydro-Sherbrooke aussi.

Et, oui, on est en processus de négociation; il y a des gens qui ont signé des ententes, il y a des villes, c'est-à-dire, qui ont signé des ententes avec certains corps d'emploi. Et on est en train d'harmoniser. On a une activité syndicale: un bleu, un col bleu... Avant, il y avait.. Disons, chez nous, il y avait neuf villes... huit villes, alors huit villes d'accréditation cols bleus. Alors, il y en a une seulement aujourd'hui, et on est en train d'harmoniser tout ça. Ce n'est pas simple, mais on est en train de le faire, on est très avancés.

Et, en parlant des employés, nos employés, pour réaliser une fusion municipale, ont dû faire partie des équipes de travail pour être capables de continuer d'offrir le pourquoi qu'on existe comme ville, c'est de répondre aux besoins du citoyen. Et, moi, je peux vous dire que j'ai vécu une inondation la première année de la fusion. Je vais dire, on en avait pour notre rhume. Et, grâce à nos employés dédiés qui ont été capables de relever ces défis-là... Et je suis certain que je donnerais la parole à chacun de mes collègues, le «work force», le groupe d'employés dans nos villes sont un élément moteur.

Alors, comment est-ce que ça va être réalisé d'ici trois mois, six mois ou huit mois par rapport à une défusion, par exemple? Vous savez, nos employés actuellement trouvent ça... malgré que c'était difficile au début, plusieurs d'entre eux trouvent maintenant la possibilité d'avancement dans l'emploi. Alors, une secrétaire peut augmenter sa compétence et prendre des responsabilités additionnelles dans une ville qui offre plusieurs avantages. Alors, il me semble de voir le directeur général adjoint de la ville de Sherbrooke qui retournerait directeur général de la ville de Fleurimont demain matin, je pense que ce serait quand même compliqué, parce que, si je ne peux pas... Madame?

Mme Houle (Jocelyne): M. le Président...

Le Président (M. Ouimet): Mme Houle.

Mme Houle (Jocelyne): ...c'est un aspect qui nous préoccupe énormément. Nous n'avons pas de conseils d'arrondissement, nous n'avons pas d'arrondissements. Alors, les employés ont été beaucoup... il y a eu beaucoup de promotions, il y a eu beaucoup d'optimisation des ressources. Alors, chaque ex-municipalité est dotée d'un centre de services où des services de base sont donnés, mais il y a quand même une certaine centralité au niveau des services. Alors... D'ailleurs, même le vérificateur général de la ville de Gatineau a cru bon de lancer un cri d'alarme dans son rapport, disant bien, là, qu'«un sentiment d'incertitude généralisé au sein de la structure municipale ralentisse l'optimisation de la performance et risque d'hypothéquer la compétitivité attendue de la nouvelle ville». Alors, c'est une préoccupation majeure chez nous.

Une voix: Merci.

M. Perrault (Jean): Madame, c'est l'ancienne mairesse de la ville de Buckingham qui vient de parler, qui est vice-présidente du comité exécutif.

Le Président (M. Ouimet): Très bien.

M. Perrault (Jean): M. Tremblay.

M. Tremblay (Jean): Alors, j'aimerais peut-être vous dire là-dessus: C'est vrai que c'est énormément de travail puis ça va être une situation, là, très compliquée, mais, pour moi, c'est secondaire, quand même. Si on a fusionné une ville, ce n'était pas pour faire plaisir aux employés. Pour moi, c'est secondaire, puis je pense qu'on va leur trouver une place, s'il y avait des défusions, pour qu'ils soient relativement heureux; c'est possible.

Si on a fusionné des villes, c'est parce que nos villes étaient étouffées, ne se développaient plus puis que les autres provinces avaient pris de l'avance sur nous, puis on s'est dit: Il faut fusionner les villes pour avoir une vision de notre développement qui soit uniforme sur des territoires urbains. C'est ça qui va être brisé, c'est ça qui me fait de la peine.

Le reste, moi, je pense qu'on peut s'arranger avec. Mais ça va tellement bien, cette vision-là chez nous. C'est tout à fait différent, c'est un vent nouveau. On a une société de promotion qui s'appelle Promotion Saguenay, qui réunit tout le Saguenay; c'est unanime autour de la table. On a une belle table, c'est plaisant. On a un seul objectif: développer la ville.

Avant ça, c'était de détruire notre voisin puis c'était de s'assurer que, si une industrie allait chez le voisin plutôt qu'elle vienne chez nous... c'est terminé ça. Le développement touristique, c'est pareil.

Donc, ce que je voulais vous dire, c'est que tous ces détails-là, là, ça peut s'arranger, les relations de travail, puis tout ça, mais notre développement, on va le détruire avec ça.

Une voix: M. Garon.

Le Président (M. Ouimet): Brièvement, M. le maire de Lévis.

M. Garon (Jean): Nous autres, on avait des policiers-pompiers, à Lévis. Le comité de transition nous a fait un cadeau en nous laissant entendre que c'était obligation légale ? alors que ce ne l'était pas ? de défaire ça. C'était la formule la moins coûteuse, les policiers-pompiers. On s'est retrouvés avec des policiers puis des pompiers et avec des casernes dans trois arrondissements. Comme les ponts étaient bloqués l'an dernier, on n'avait pas le choix de mettre des gens permanents parce qu'ils n'auraient pas été capables de se rendre au feu, ils auraient été pris dans le trafic eux autres aussi. Alors, actuellement, on a un système complètement changé qui est complètement différent des systèmes de pompiers volontaires qu'il y avait antérieurement, parce qu'on a été forcés par les circonstances. Alors, défaire ça, là, bonne chance.

Une voix: Merci beaucoup.

Le Président (M. Ouimet): Alors... Oui, M. le maire de Trois-Rivières, vous vouliez ajouter?

M. Lévesque (Yves): Je pense qu'il y a beaucoup de choses néfastes dans le projet. Vous savez que, les maires des grandes villes qui ont fusionné, on a été élus, dûment élus démocratiquement par la population pour construire ces nouvelles grandes villes là. Je peux dire que chez nous on a mis les bouchées doubles. On est tellement rendus loin dans le processus qu'on a au-delà de 13 % des effectifs qui sont partis par attrition, on a des hôtels de ville de vendus, on a des garages municipaux de vendus, les règlements sont harmonisés. Je pense qu'on est rendus vraiment loin dans le processus. Retourner en arrière, ce serait une erreur monumentale.

Ce que je veux dire aussi, c'est que je trouve ça un peu déplorable de... L'exemple que je peux vous donner: Chez nous, on a six villes qui sont une à côté de l'autre. S'il y en a une, exemple... Parce que le projet de loi va passer ? vous l'avez dit depuis le départ ? et on va vivre avec, mais il y a le lendemain du référendum, de la défusion. Une fois qu'une ville va avoir défusionné, exemple, une ville qui est en plein centre, est-ce que les villes restantes vont avoir un intérêt à conserver les deux autres villes à l'extrémité est ou ouest? Qu'est-ce qu'on va faire avec cette zone grise là?

Il y a une zone dans le projet de loi qui n'est pas prévue. Alors, on permet aux gens de défusionner, mais le restant... Moi, si, exemple, Cap-de-la-Madeleine se défusionne, j'ai Saint-Louis-de-France, Sainte-Marthe à l'extrémité est. Moi, personnellement, peut-être que je ne les voudrai plus, ces extrémités-là. Je n'ai aucun intérêt monétaire à les prendre. Je vais avoir des coûts astronomiques de passer à travers d'une ville qui ne fait pas partie de mon territoire pour aller desservir deux anciennes municipalités. Est-ce qu'on va pouvoir reconsulter les gens restants sur la définition de la nouvelle grande ville qui va rester? Ça, c'est une zone grise dans le projet de loi qu'il faut vraiment regarder.

Les conséquences, c'est bien beau de mettre un projet de loi en place, mais, le lendemain, il y a l'harmonisation, retourner en arrière avec les employés et les garages municipaux. Mais il y a aussi le territoire existant, il ne sera plus pareil.

Alors, encore une fois, s'il y a une extrémité qui décide de se défusionner, alors qu'est-ce qu'on va faire avec le reste? Est-ce que les gens vont avoir droit de parole? Je pense qu'il faut prévoir ça dans le projet de loi.

Le Président (M. Ouimet): M. le maire de Lévis.

M. Garon (Jean): Je pense que le gros problème fondamental, là, qui n'est pas dit, il faut le dire franchement: On a tous été élus majoritairement, mais la plupart l'étaient avec 60 % des voix ? même plus, 66 % même ? pour faire marcher une ville. Comment pouvez-vous demain matin changer le mandat? On a été élus par l'ensemble de la population pour faire marcher une ville. Après ça, on va dire: On fait des référendums pour les démancher, les villes. Moi, j'aimerais mieux que vous trouviez de nouveaux acteurs à ce moment-là pour faire ça. Parce que, moi, je vais vous dire, si on m'avait dit: Le choix, c'était de démancher les villes, je n'aurais pas été candidat seulement, ça ne m'intéressait pas.

n(15 h 40)n

Faire marcher une ville, un ensemble qui a de la cohérence, ça, ça m'intéressait. Moi, je trouve à ce moment-là que, si on veut les démancher, les villes, de quelque façon que ce soit, qu'on se trouve des acteurs pour le faire.

Le Président (M. Ouimet): Très bien. Alors, je retourne à la partie ministérielle. On a empiété un peu sur le deuxième bloc de l'opposition, mais il va vous rester du temps. Et j'aurais le député de Beauce-Nord plus tard qui voulait... qui s'est déjà inscrit. M. le ministre.

M. Fournier: Bien, écoutez, d'abord, M. Tremblay, je veux faire mon petit laïus, mais j'aimerais ça que vous interveniez quand même par la suite.

Tantôt, vous avez comme laissé entendre, dès le départ de votre intervention, que vous trouviez ça un peu injuste si une ville quittant se trouvait défavorisée par une ville qui n'était pas dans l'agglomération, et donc, qu'il y aurait comme une asymétrie. Et, donc, ce que vous favorisez ni plus ni moins... bon, je comprends, là, vous favorisez qu'il n'y ait pas de projet de loi, là. Mais, s'il y en a un puis s'il y a un départ, vous favoriseriez le retour au statu quo ante. Si je comprends bien, en tout cas, vous ne voulez pas de demi-mesure, vous ne voulez pas d'une situation où il y aurait un départ, reprise d'une entité juridique mais continuation d'une ville d'agglomération, peut-être pas au niveau que vous le souhaitez, mais, tout au moins, c'est l'esprit du projet de loi. L'esprit du projet de loi...

M. Tremblay (Jean): Bien, moi, là, je n'ai pas consulté mon caucus là-dessus, mais je me dis, s'il y a défusion, effectivement, on défusionne ou on ne défusionne pas. Parce que, moi, forcer ces ententes-là, je le sais que ça me marchera pas. Ça fait que j'aime autant que... Saint-Honoré, je n'ai aucun conflit avec. C'est une ville qui existe, qui est à côté de chez nous, mais ils ont leurs affaires.

Puis, si on veut s'entendre, c'est parce qu'on désire le faire sur quelque chose de particulier. Mais là, être forcés de s'entendre là-dessus, là, je le sais, que ça ne marchera pas puis je le sais, que ça va être de la chicane tout le temps. Donc, moi, je dis oui.

Maintenant, je me dis: Ceux qui vont vouloir se détacher, eux autres, ils disent: Moi, je vote, je me détache. C'est bien, mais ceux qui restent, eux autres, ils restent attachés, mais ils ne savent pas avec qui. Donc, on ne leur donne pas le choix de leur avenir. Parce qu'il y en a qui me l'ont dit chez nous, ils ont dit: Nous autres, on est intéressés à la fusion, mais, écoute, si lui se détache, là, nous autres, on se détache aussi. Mais là on ne pourra pas donner toutes ces options-là, là, le jour du vote. Donc, ça, ça... Je trouve que tu décides de ton avenir ou tu ne décides pas. Je ne sais pas comment vous pouvez imaginer ça, mais je me dis...

Moi, je le déplore, qu'il n'y ait pas eu de référendum, je vous le dis, là. Je ne parle pas au nom du groupe, là, parce que ce n'était pas unanime. Mais, moi, je le déplore, c'est-à-dire, il aurait dû y avoir un référendum. Sauf que, un référendum, tu fais ça avant. Tu te maries, tu demandes à ta femme avant.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Tremblay (Jean): Après, là, c'est trop tard, hein? Tout défaire ça, là, t'as fait une omelette, là, puis tu vas dire: Je vais aller chercher l'oeuf qu'il y a dedans puis je le sors. Ça devient extrêmement compliqué. Des fois, on mange ensemble puis on se raconte des situations qui peuvent se produire s'il arrive des scénarios, là, puis on se dit: Aïe! ça n'a pas de bon sens. Il y a des scénarios absolument fous qui peuvent se produire.

M. Fournier: Si je prends votre...

M. Garon (Jean): C'est difficile de remettre la pâte à dents dans le tube une fois qu'elle est sortie.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: C'est vrai, c'est vrai. Tout à fait raison. Je l'ai d'ailleurs déjà dit. Mais, pour reprendre votre analogie du mariage postérieur à la vie commune, et à vous entendre et à entendre M. Perrault tantôt dans un témoignage éloquent sur la réussite actuelle de ce que ça a donné, peut-être que ça devrait encourager justement ce mariage. Ce référendum a posteriori est peut-être plus encourageant, puisque vous en plaidez les réussites. Vous-même, M. Tremblay, dites... je vous ai entendu, là, citer de nombreux accomplissements qui font en sorte, j'imagine, qu'une part excessivement importante de la population vous appuie dans cette démarche-là. En fait, à vous écouter, et je vous écoute ? d'ailleurs, le maire de Montréal demandait que je le comprenne aussi, je vous comprends aussi ? à l'effet que ce que vous nous dépeignez, c'est un portrait où les citoyens sont favorables à la situation dans laquelle vous êtes présentement.

Je sais que M. L'Allier veut intervenir. Peut-être juste donner un angle de questionnement, revenir là-dessus, peut-être que ça amènerait... Parce que, après ça, je sais que le président m'enlève le droit de parole. Ça fait que j'aime autant le prendre tout de suite.

Dans votre mémoire, ce n'est pas...

Le Président (M. Ouimet): M. le ministre, je respecte les temps de parole, je n'enlève pas les temps de parole.

M. Fournier: Excusez-moi. Merci.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: Et ce n'est pas éloigné du sujet dont je parle quand je parle de l'appui des citoyens que vous voyez dans vos réussites.

Vous abordez la question du pourcentage ou du seuil minimal qu'il doit y avoir pour le scrutin. J'y ai déjà vu des effets pervers parce que ça encourage que les gens n'y aillent pas. J'aimerais ça que vous me commentiez sur cet élément-là qui n'est pas tellement éloigné du premier dont nous parlons jusqu'ici. Parce que, s'il est vrai que les citoyens vous appuient, la question qui reste, c'est de savoir dans quelle mesure, et de là la mécanique référendaire qui m'intéresse particulièrement de savoir ce que vous en pensez et de voir les effets pervers que, moi, j'y vois, comment vous les commentez.

Le Président (M. Ouimet): M. L'Allier.

M. L'Allier (Jean-Paul): Brièvement, M. le Président, une des hypothèses en réalité, puisqu'on parle des villes nouvelles qui existent, elles sont dans la loi, donc sont une réalité, on aurait pu choisir... vous auriez pu choisir de consulter toute la population de la ville nouvelle, comme ça aurait pu se faire avant, toute la population de la ville nouvelle ou du territoire projeté pour savoir si cette ville veut exister telle qu'elle est là ou avec des modifications. Vous avez choisi de ne pas faire ça. Vous avez choisi de consulter les anciens territoires des villes fusionnées, donc de revenir en arrière à une situation légale et géographique qui n'existe plus dans la loi d'aujourd'hui.

Pourquoi est-ce qu'il y a unanimité à l'UMQ, aux grandes villes et dans le mémoire que je vais vous présenter et dans les autres pour augmenter le seuil de signatures à 25 % par exemple? On l'a dit tout à l'heure: situation d'exception. C'est plus que de changer le zonage pour une cabine téléphonique, ce dont on parle, là, c'est de changer la structure même d'une entité nouvelle, légalement existante. Donc, 25 % de signatures.

Pourquoi un vote de 50 % des électeurs habilités à voter plus un? Parce que vous réservez ce droit de mettre en danger l'ensemble de la ville à un secteur, celui d'une des anciennes villes et non pas à l'ensemble. Si vous disiez: On change tout, on permet le vote sur le territoire de l'ensemble de la ville nouvelle pour savoir si elle doit exister et on va tenir compte du résultat, on pourrait revenir à un mode électoral habituel.

Une des demandes qui vous a été faite par la ville de Montréal, c'est de reporter le tout de deux ans. On peut vivre avec ça. Ça veut dire que l'élection... De toute façon, vous avez deux ans, puis ça va être plein, les deux prochaines années. Ça veut dire que l'élection sera référendaire. Il n'y a pas plus belle consultation, en démocratie, qu'une élection, c'est la meilleure des consultations, au bout du compte, et là, les gens décident. Et ceux qui ont les guts de demander la défusion se présenteront avec des programmes défusionnistes, diront ce qu'ils veulent, les gens voteront, et, à ce moment-là, ce sera réglé. Si ces gens-là passent, vous leur donnez tout ce qu'ils veulent pour casser les régions; s'ils ne passent pas, on fermera le dossier pour toujours. C'est une des hypothèses envisageables, ça.

Comme vous l'avez verbalement, je pense, exclu à un moment donné, en disant: On ne fera pas d'élection référendaire, on se replie sur l'autre projet de loi et on dit: Puisqu'il reste à restreindre les secteurs, il faut monter les marches. Parce que, à ce moment-là, vous donnez à une minorité le droit de mettre en danger le reste.

Et je terminerai, M. le Président, brièvement. La question qui a été posée par la plupart des autres est bonne. À supposer qu'il y ait des villes, dans tout ce processus, quel que soit le mode que vous arrêtiez de consultation ou de référendum, qui décident et qui choisissent et que vous leur dites: Bon voyage, vous partez, il va falloir non seulement que vous leur ayez dit d'avance qu'est-ce que ça veut dire, mais il va falloir que les citoyens qui restent aient le même droit d'être consultés sur la ville résiduelle dont ils n'ont jamais vu les contours. Personne ne sait qu'est-ce qui va rester, puis il va falloir que les gens qui restent soient consultés pour savoir s'ils ont envie de vivre ensemble.

Si, par exemple, dans Québec, vous avez trois villes qui partent et que les villes qui restent, c'est la ville de Québec, qui n'a pas demandé ça, Beauport, Charlesbourg, le résultat de votre action, ça va être que la ville va avoir été balkanisée. L'ancienne ville de Québec n'existera plus, elle va être cassée en quatre arrondissements, et on va se retrouver avec des minivilles déguisées en arrondissements qui veulent faire de la ville nouvelle une espèce de grosse communauté urbaine. Moi, je vais vous demander de reprendre ma ville de Québec telle qu'elle était, à 175 000 habitants, avec son droit de veto, pas d'arrondissement, puis ça va être la guerre puis on va la faire. On voulait mettre fin à ça. Mais, si c'est ça que vous permettez et ça se passe de même, ça sera ça.

M. Fournier: Je reprends l'exemple que vous envisagiez, celui de l'élection référendaire. En quoi est-ce que ça règle les problèmes, l'élection référendaire, par rapport aux cas qui ont été soulevés tantôt?

Le Président (M. Ouimet): Il reste deux, trois minutes.

M. L'Allier (Jean-Paul): Quand vous avez été élus, ça a réglé le problème du référendum du Québec pour un bout de temps.

Le Président (M. Ouimet): Il reste 6 min 58 s.

M. L'Allier (Jean-Paul): En quoi ça règle le problème, c'est ça. Ça ne veut pas dire que les gens ont changé d'idée.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: Bien, c'est parce que, s'il y a une élection...

M. L'Allier (Jean-Paul): ...on n'en entendra plus parler.

M. Fournier: M. L'Allier, je pense que... Quoique l'image peut faire sourire, l'élection référendaire, vous dites: Il y aura des élus, s'ils ont été élus pour partir, là, ce coin-là partira. Alors, là, je ne suis pas dans la comparaison avec le référendum.

M. L'Allier (Jean-Paul): Les gens qui se déguisent en conseillers voulant sauver la nouvelle ville, tout en la démolissant par en dessous sans jamais, etc., à l'élection, devront... M. Shoiry, le successeur de madame ici, devra décider si, oui ou non, il est en faveur d'une ville nouvelle puis laquelle. S'il est en faveur d'une balkanisation au point qu'il ne reste pas de ville nouvelle et qu'on a changé le nom de la communauté urbaine en ville de Québec qui est vide de sens, alors que les présidents d'arrondissements sont élus au suffrage universel, ont le pouvoir de taxation et paient une redevance à la ville centrale, il le dira au monde. Si c'est ça que les gens veulent, il sera élu, ce sera ça. Mais, s'il se fait battre là-dessus, ce sera tant pis.

Moi, je me suis présenté aux élections avec essentiellement mon programme d'une ville nouvelle. J'ai été élu. Vous pouvez me dire: Il y a d'autres facteurs qui ont joué. J'ai été élu. C'est ça, l'élection, hein? Il y a une majorité de mes conseillers qui n'a pas été élu, donc j'ai une petite minorité. Il m'en manque quatre pour faire le vote. Des fois, il ne m'en manque pas, ça dépend comment ça marche. Et, à ce moment-là...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. L'Allier (Jean-Paul): Parce que, dans l'opposition, ce n'est pas toujours monolithique. C'est correct, c'est la game et c'est ça, l'expérience. Bon. Alors, qu'est-ce qu'on fait, là? S'il y a une élection, il va y avoir un groupe pour...

Le Président (M. Ouimet): 30 secondes.

M. L'Allier (Jean-Paul): Peut-être que tous les groupes vont être pour, puis ce sera réglé. La dernière fois, il n'y a pas un candidat à l'élection de Québec, pas un, d'aucun parti, qui s'est présenté en prônant la défusion. Ils ont tous promis de construire la ville nouvelle, y compris M. Shoiry. Alors, je le singularise parce qu'il siège à la fois avec les défusionnistes puis au conseil municipal.

n(15 h 50)n

M. Fournier: Je...

Le Président (M. Ouimet): Je dois vous arrêter là-dessus, M. le ministre. Et, désolé, mais je dois aller du côté de l'opposition. Il ne reste plus de temps du côté ministériel. Alors, j'avais M. le député de Beauce-Nord, et il reste collectivement à l'opposition 7 min 50 s. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Alors, moi, je vais être bref. On a entendu la ville de Montréal qui demandait deux ans de fonctionnement pour voir si... pour leur donner la chance de prouver la viabilité de la grande ville.

De votre côté, on ne voit pas la même réaction. Ce ne serait pas bon qu'il y aurait deux ans de fonctionnement, puis, après ça, s'il y a des choses qui accrochent, on peut essayer de les régler ou... Vous n'avez pas regardé ça sous cet angle?

M. Perrault (Jean): Les élections ont lieu en novembre 2005.

M. L'Allier (Jean-Paul): ...

M. Perrault (Jean): La date est fixée, premier dimanche de novembre 2005.

M. L'Allier (Jean-Paul): Ça fait deux ans.

M. Perrault (Jean): Ça fait deux ans.

M. Grondin: Alors, ce serait un référendum qui ne coûterait rien à personne.

M. Garon (Jean): C'est l'élection.

M. L'Allier (Jean-Paul): C'est une élection.

M. Garon (Jean): C'est le programme qui va avec puis les acteurs qui vont avec le programme.

M. L'Allier (Jean-Paul): Les candidats vont être obligés de mettre leur pantalon, leur jupe, n'importe quoi, mais de se tenir puis de montrer qui ils sont puis qu'est-ce qu'ils veulent.

M. Grondin: C'est bien, ça. Ça répond à ma question.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Mme la députée de Bourget.

Mme Lemieux: Bien, quand j'entends les interventions du ministre, je me dis qu'il est en train de vous dire: Vous êtes tellement bons, prenez votre petit bâton de pèlerin puis allez convaincre vos gens une deuxième fois. Est-ce que vous interprétez de la même manière? C'est ça qu'il dit. Il vous abandonne un peu, en disant... Je m'excuse, je ne veux pas vous prendre à parti.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Lemieux: Mais là on n'y peut rien. Mais c'est ça que le gouvernement fait. Il dit: Nous, on a fait une promesse, on va la réaliser. On met ça dans la cour des maires, prenez votre bâton de pèlerin, vous êtes bons, c'est incroyable; vous donnez des exemples, vous avez des réalisations, vous êtes bons. Allez, allez... allez ficeler cette dernière magie au sujet de votre ville unifiée, mais c'est votre problème. C'est ça que le gouvernement vous dit. Est-ce que c'est comme ça que vous l'interprétez?

M. Garon (Jean): Bien...

M. Perrault (Jean): Écoutez...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Ouimet): Est-ce qu'il y a des volontaires pour répondre à la question?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Perrault (Jean): Écoutez, le gouvernement a pris une décision. Ce qu'on veut vous dire, c'est qu'on souhaite... Je ne sais pas, je vais détourner la question, je vais...

Mme Lemieux: ...

M. Perrault (Jean): Vu que je contrôle la réponse, je vais vous dire qu'on souhaite que le gouvernement ne mette pas de mur-à-mur, on souhaite qu'il n'y ait pas de pouvoir de taxation directe dans les arrondissements ? je n'ai pas eu la chance de le dire tantôt ? puis on souhaite qu'il n'y ait pas de présidence élue au suffrage universel dans les arrondissements si jamais vous continuez à faire votre démarche de défusionner les villes.

Mme Lemieux: Êtes-vous clairs sur la question du pouvoir de taxation dans les arrondissements? Est-ce que c'est une position qui est forte de votre part, sur la question du pouvoir de taxation dévolu aux arrondissements?

M. L'Allier (Jean-Paul): C'est une position qui est forte parce qu'il y a déjà dans la loi actuelle le pouvoir de tarification dans les arrondissements. Il faut qu'il y ait une fiscalité, qu'elle soit dans la ville, et il faut que ce soit la ville, par son conseil municipal, qui convienne avec les mêmes élus de répartition des ressources.

Le problème que vous avez, c'est que Montréal est un autre modèle. Vous avez à Montréal ? et c'est le seul endroit ? des élus d'arrondissement et des élus de la ville. Chaque arrondissement à Montréal est la copie d'une ancienne ville, ce qui n'est pas le cas ailleurs où il y a des arrondissements. Et donc, si vous recréez le pouvoir de taxation dans les arrondissements qui sont des amalgames d'anciennes villes, vous recréez des villes, surtout si vous en faites des présidents élus au suffrage universel.

Ça veut dire quoi? Ça veut dire des programmes électoraux différents, ça veut dire des engagements différents, ça veut dire le moins de taxes possible pour le plus de services possible, et c'est ça qu'on appelle les nids à chicane.

M. Garon (Jean): Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'en même temps que la ville est faite ça fait un an et demi, là, les gens voient: on est dans une nouvelle ville, on devrait avoir les mêmes services. Sauf que l'harmonisation des taxes va se faire d'ici 2011. Chaque municipalité se payait un kit avec les taxes qu'ils payaient, qui étaient des kits différents. Maintenant, dans la même ville, les gens veulent l'harmonisation des services. Puis l'harmonisation des taxes, les faire, là, rapidement, là, ce serait l'enfer, ce ne serait pas possible alors jusqu'en 2011.

Alors, imaginez-vous, si vous rajoutez d'autres variables là-dedans, ça va être le fouillis, ça va prendre des formules compliquées avec... à multiples variables; ce ne sera pas administrable. Ce ne sera surtout pas explicable.

M. Perrault (Jean): Étant donné qu'on est... Madame... On est sur votre temps, moi, je trouve qu'il serait important de vous dire qu'on a des besoins. On peut bien dire qu'on est bons, on fait des bonnes choses, il y a encore beaucoup d'irritants dans nos villes, il faut y travailler, c'est pour ça qu'on est là.

Cependant, M. le maire de Montréal invoquait ce matin des besoins pour réaliser le succès de sa ville, et, nous, c'est la même chose, les grandes villes et toutes les villes du Québec. Ils ont besoin, par exemple ? on vous le dit dans notre mémoire ? que l'harmonisation de la fiscalité de façon globale, on souhaite que l'harmonisation soit sur une plus grande période. On voudrait aussi qu'on... recevoir de nouvelles sources de revenus. Le Parti libéral a annoncé, dans sa campagne électorale, des ressources financières de la TVQ. J'espère que le gouvernement va être aussi acharné à nous offrir la TVQ qu'il l'est à vouloir offrir une loi n° 9.

Et j'espère aussi que le gouvernement va nous permettre de reporter tous les dossiers qui ont été un transfert de responsabilités par l'ancien gouvernement à nos villes, qui s'appellent la sécurité publique, la police, la gestion de l'eau. Vous savez, la gestion de l'eau, là, c'est des millions que ça va coûter, et vous nous demandez de faire ça dans des échéanciers très courts, M. le ministre; on en a déjà parlé ensemble, avec vous.

Et vous devez nous aider dans le transport en commun. On se doit d'avoir des ressources financières en transport en commun. Si on veut regarder en avant, notre dynamique, c'est d'avoir une ville, des villes urbaines capables et avec une politique urbaine du gouvernement du Québec. Où le gouvernement du Québec s'en va pour les villes urbaines sur son territoire, ça, on a hâte d'en parler, de ces choses-là, du futur... que de parler du passé.

On aimerait ça que des mesures de contrôle qui sont exercées par le gouvernement à l'égard des grandes villes, on puisse les alléger, et on voudrait qu'on privilégie les grandes villes comme lieux d'accueil de la décentralisation. Vous nous invitez à travailler dans la décentralisation, M. le ministre et le gouvernement du Québec, on est prêts à travailler dans la décentralisation. Mais, pendant qu'on travaille sur sauver nos villes, s'ils vont rester ensemble, c'est difficile pour nous autres de travailler dans un objectif de décentralisation... que vous avez comme engagement politique de décentraliser vers les régions et de les rendre, les élus municipaux, en tous les cas, de ce qu'on a entendu, imputables.

Alors... ça, c'est travailler vers l'avenir et c'est là-dessus qu'on veut travailler en partenariat avec le gouvernement. Vous nous avez invités, M. le ministre, à l'Union des municipalités du Québec. J'ai écouté très bien votre conférence, on l'a tous fait. On veut travailler... Comme on a fait avec l'ancien gouvernement, nous voulons travailler au succès de ces grandes villes là. Et on espère d'être capables de mettre toutes nos énergies, toutes nos énergies ? financières, humaines et aussi au niveau des citoyens ? vers l'avenir pour s'assurer que nos citoyens et nos citoyennes ont un bon service.

Le Président (M. Ouimet): Alors, ceci met un terme à nos échanges. C'est terminé. Alors, madame et messieurs du caucus des grandes villes du Québec, je vous remercie de votre participation.

Je propose une suspension d'une dizaine de minutes, et nous revenons vers les 16 h 8. Alors, nous sommes suspendus.

(Suspension de la séance à 15 h 58)

 

(Reprise à 16 h 7)

Le Président (M. Ouimet): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission va reprendre ses travaux. Je demanderais aux représentants de la ville de Québec, les gens qui accompagnent le maire L'Allier, qui, lui, a repris place, de s'avancer. Je demanderais un peu de silence dans la salle, s'il vous plaît. Ce n'est pas facile, c'est le danger des pauses à un moment donné, c'est difficile de revenir.

Une voix: Est-ce que ce serait possible que...

Le Président (M. Ouimet): Oui, avec le consentement, il n'y a pas de problème, Margaret.

Ville de Québec

Alors, je désire souhaiter la bienvenue au maire de Québec, qui porte son chapeau maintenant de maire de la grande ville de Québec. Auriez-vous la gentillesse, M. le maire, de nous présenter les gens qui vous accompagnent?

M. L'Allier (Jean-Paul): Oui, M. le Président. D'abord, merci de nous accueillir. À ma gauche, vous avez M. Claude Larose, qui est membre du comité exécutif et vice-président du comité exécutif; à ma droite, M. Jacques Jobin, qui a les mêmes fonctions de membre du comité exécutif et de vice-président du comité exécutif; M. Denis de Belleval, directeur général de la ville de Québec; et M. Alain Marcoux, directeur général adjoint de la ville de Québec, ex-directeur général de la ville de Sainte-Foy. Les sièges vacants ne le sont pas par manque d'intérêt, mais c'est parce qu'on pense qu'ensemble on est capables de répondre à vos questions.

Le Président (M. Ouimet): C'est sûr. Alors, je vous cède la parole pour votre présentation de mémoire.

M. L'Allier (Jean-Paul): On a 20 minutes, M. le Président, pour...

Le Président (M. Ouimet): 20 minutes.

M. L'Allier (Jean-Paul): M. le Président, en remerciant les membres de cette commission de nous recevoir, je voudrais essayer de présenter les choses à la fois simplement. Et on a fait un résumé de notre mémoire qu'on a communiqué à tout le monde, je vais lire l'essentiel de ce résumé, mais peut-être que je vais en sauter des paragraphes pour rester dans les temps impartis.

En 1966, il y a eu élections dans la province, les libéraux qui avaient décrété la fusion de ville de Laval et qui l'avaient décidé sans consultation ont été défaits. L'opposant s'appelait Daniel Johnson père. Il avait promis durant la campagne de revoir cette décision et de favoriser la défusion de ville de Laval. Il en avait fait un engagement de campagne. Élu, il a trouvé d'autres priorités à son agenda, et ville de Laval s'est construite parce que c'était la volonté des gens qui étaient légitimement élus à ville de Laval de construire ville de Laval. Je ne veux pas dire ici que le gouvernement pourrait changer d'idée, mais il le pourrait.

n(16 h 10)n

Si cette commission parlementaire a un sens, M. le Président, il faudrait que, si, au terme de ces travaux, les élus en arrivent à la conclusion que l'essentiel des opinions exprimées vont dans le sens de laisser se construire les villes nouvelles, quitte à gérer d'une façon plus minutieuse certaines modifications dont plusieurs sont demandées par nous, qui ne nous ont pas été accordées à ce jour, pour les rendre efficaces, quitte à ce que des modifications soient apportées pour les rendre plus performantes dans leurs services à la population, dans leurs économies, dans leur gestion et dans leur promotion extérieure, qu'on leur donne ces moyens-là.

Le premier mandat de tous les élus, qu'ils soient du Parti québécois ou du Parti libéral ou qu'ils soient au municipal, le premier engagement politique que l'on prend, le premier de tous les engagements, c'est, même si on ne le dit pas sur les tribunes à haute voix, de travailler avec toute notre énergie, notre compétence, notre volonté au développement du Québec, à son développement et à son épanouissement. Cet engagement de tous les partis va au-delà de tous les engagements spécifiques qui peuvent être pris. On vient vous dire aujourd'hui que l'engagement des élus est de faire en sorte que ces villes nouvelles, résultat de 20 ans de discussions sans fin à travers le Québec, d'autant de commissions de travail, de propositions de toutes sortes, que ces villes nouvelles demandent une chance d'exister, mais que, si, tout de suite, on enlève des pièces, que ce soit dans la traction, dans le moteur, etc., et qu'on leur dise: Maintenant, continuez, elles ne pourront pas le faire.

Vous avez entendu ici des maires qui ont des années d'expérience et vous en entendrez d'autres. Personne ne leur fera l'injure de croire qu'ils défendent ici un patrimoine personnel, un poste personnel. Ce n'est pas parce qu'on gère une ville de 500 000 habitants après avoir géré une ville de 175 000 habitants qu'on a plus de vacances, qu'on a plus d'espace, qu'on a plus de plaisir, on n'a même pas plus de salaire.

C'est par conviction dans la volonté de nos citoyens de se développer, la réforme que nous avons faite. Parce que le gouvernement du Parti québécois ? je peux vous le dire sans dévoiler de secret ? nous a demandé à quelques reprises s'il était possible que ce calice s'éloigne d'eux, parce qu'on a poussé dessus, cette réforme. Les villes-centres, la ville de Québec, la ville de Montréal, on a poussé pour que la réforme enfin aboutisse. Pourquoi? Parce que le pattern traditionnel, c'était d'user le ministre des Affaires municipales jusqu'à ce qu'un prochain arrive et que, ensuite, on recommence le processus depuis 20 ans.

Et finalement, on a réussi à ancrer une ministre des Affaires municipales parce que son premier ministre lui a dit: Tu y vas. Il l'a appuyée. Elle était coincée entre les six grandes villes-centres et le premier ministre et elle avait la volonté de réussir. Donc, tout en lui donnant tout le crédit d'avoir piloté la démarche, je veux aussi prendre le crédit d'avoir été, avec les six, pas mal collé autour pour ne pas qu'elle vire de bord. La tentation était présente. Cette réforme n'est donc pas une réforme partisane. On peut citer des réformes libérales, péquistes dans ce domaine-là, mais ce n'est pas une réforme partisane.

Le milieu municipal est aujourd'hui un milieu où les défis et les réponses sont nombreuses, et il y a plus de défis qu'il y a de réponses. J'ai parlé de la fondation de la ville de Laval, j'ai parlé des villes telles qu'on les a connues avec nos communautés urbaines devenues, disons-le franchement, inefficaces par rapport aux objectifs premiers, parce que le premier but des communautés urbaines, c'était de mettre en commun le développement économique.

En 1976, celle de Québec a été déclarée cliniquement morte par mon ancien... un ancien prédécesseur, Gilles Lamontagne, qui a dit: Il faut changer la communauté urbaine, ça ne fonctionne pas. Son successeur a retiré le développement économique de la communauté urbaine en disant: Moi, je n'y trouve pas mon compte comme ville de Québec. Et chacun a repris son parc industriel, sa concurrence, son argent, son cinéma. Il fallait sortir de ça.

La ville de Québec a fait des propositions, une quinzaine de propositions concrètes, écrites, aux collègues de la Communauté urbaine pour la modifier, pour en ajuster les contours, toujours, toujours, toujours, dans nos caucus comme autrement. On s'est entendus finalement, parce que, nous, on était minoritaires, on s'est entendus à 12 contre un, on s'est entendus pour que la seule chose que nous pouvions gérer, c'était le statu quo. Le temps est venu d'agir, était venu d'agir, et l'action des six ensemble, Montréal de l'époque et les cinq autres, nous a menés auprès du premier ministre et de la ministre des Affaires municipales pour avancer. On avait connu la réforme Ryan, on avait connu la réforme Trudel, on était maintenant avec des gens qui étaient prêts à regarder en avant et non pas uniquement à corriger les problèmes du passé.

Vous allez entendre ici des gens qui vont nous suivre et qui vont vous proposer des solutions aux problèmes du passé. Ce que nous vous proposons, c'est de regarder en avant. Le passé est passé. On ne refera pas les communautés urbaines, on ne refera pas des villes tripotées, réagencées, etc., avec comme objectif de casser la ville de Québec en trois, quatre morceaux pour ne plus jamais l'avoir dans les jambes avec son droit de veto. On veut regarder en avant. C'est ce qu'on vous invite à faire, M. le ministre.

Les progrès accomplis valident la réforme. On l'a écrit dans le mémoire, et c'est important de le noter parce que j'ai entendu ce matin quelqu'un qui a posé la question: Mais, votre personnel, en avez-vous autant? On a 5 % de moins de personnel dans la ville nouvelle qu'il n'y en avait au total des 13 villes de la Communauté urbaine, 5 % de moins de personnel dont 10 % de cols blancs. C'est ça que ça veut dire, intégrer des villes. Ça, c'était un résultat net qu'on peut constater.

Le budget? Le budget de la ville nouvelle a augmenté de 1,7 % sur deux ans, alors que l'inflation a augmenté de 4,7 %. La différence est l'économie qu'on a faite dans la gestion: ressources humaines, intégration, etc., et on peut continuer à le faire. Il y a effectivement des économies. Il y a des charges supplémentaires qu'on doit assumer. La plupart des économies sont réinvesties dans cette ville et elles vont continuer de se faire parce que certaines se font sur plusieurs années.

On vient d'apprendre de la ministre de la Culture d'aujourd'hui qu'elle ne respectera pas l'entente conclue avec nous et sa prédécesseure, Mme Lemieux, à l'effet de rembourser Québec pour les taxes des grandes institutions muséales à Québec et que la loi ne sera pas modifiée pour l'avenir, nonobstant l'engagement qui avait été pris par le gouvernement. On continue à discuter avec le gouvernement. Mais, si cette décision est maintenue, c'est 8 millions de moins que nous avons dans notre budget qui vient, alors que, dans les années antérieures, avec Mme Hébert, avec Mme Robillard, avec Mme Maltais, avec Mme Lemieux, on avait obtenu la situation qui est dénoncée maintenant. C'est facile de baisser les taxes des citoyens si vous les augmentez au niveau municipal. 8 millions chez nous, c'est 2 % du compte de taxes. Calculez combien vaut 2 % du compte de taxes provincial et vous allez voir à l'échelle ce que ça représente, 8 millions, pour nous.

Des progrès ont été faits. La ville dispose de ressources humaines précieuses provenant de toutes les anciennes villes qui agissent de concert, constituent un formidable actif, dépassant de loin leur simple addition. Ce serait un véritable désastre tant sur le plan individuel que sur le plan collectif de disperser à nouveau toutes ces ressources.

Je suis convaincu, compte tenu du chemin déjà parcouru, qu'il est impossible de revenir en arrière sans inconvénients graves pour les citoyennes et les citoyens autant que pour les employées et les employés de la ville. Des difficultés inextricables de toutes sortes nous attendent si on suit pas à pas le cauchemar des processus de liquidation de la ville unique que définit potentiellement le projet de loi n° 9.

Ce qui frappe au premier lieu quand on lit le projet de loi, l'impression qui s'en dégage ? et vous le savez mieux que moi, en politique, on gère des impressions; c'est l'impression qui s'en dégage ? c'est l'absence d'une vision globale, de stratégie et de politique quant à la place que doivent occuper les villes comme moteurs de développement du Québec: développement économique, développement social, culturel, international, environnemental.

Le ministère et le ministre semblent particulièrement au fait des services à la population, mais les villes nouvelles ont deux volets majeurs: les services à la population et le support au développement de l'ensemble du Québec. Cet aspect-là semble négligé et en tout cas mis en danger d'une façon extrêmement frivole par le projet de loi, alors que c'est fondamental. C'était un des grands objectifs que nous avions.

Sur le plan pratique, plusieurs questions restent entières. Par exemple, comment assurer l'équité fiscale par le truchement d'une hypothétique fiscalité d'agglomération, concept généreux mais nébuleux, qui est censé accomplir d'une façon compliquée et partielle ce que la ville unifiée réussira tout naturellement au fil des ans?

La formule de péréquation qui est proposée ? on l'a dit ce matin, je ne veux pas le répéter ? est contre-productive. Telle que présentée, elle ne tient compte que de la richesse foncière uniformisée par rapport au nombre de population. Une ville comme Sillery, Sainte-Foy, a sur son territoire de grands espaces commerciaux, l'Université Laval. La ville de Québec a des églises, des musées, le parlement, etc. Des villes comme Charlesbourg, Beauport n'ont pas ce genre de grands équipements qui pourtant ont une valeur aux livres assez importante. Le résultat, c'est que les autres vont se cotiser pour donner une prime de départ à certaines villes, comme Charlesbourg et Beauport, par exemple, alors que ces villes, aujourd'hui, sont autant ou plus taxées que la ville de Québec.

n(16 h 20)n

Ce qu'on a voulu corriger, vous le savez, vous êtes des élus, c'est plus que des chinoiseries d'administration. Une maison qui est évaluée à 100 000 $ dans ville Vanier, qui n'a aucune charge de centralité, qui est une ville de banlieue nord-ouest de la ville de Québec...

Une voix: Val-Bélair.

M. L'Allier (Jean-Paul): Val-Bélair, c'est-à-dire. Qu'est-ce que j'ai dit?

Une voix: Ville Vanier.

M. L'Allier (Jean-Paul): Ville Vanier? Non, Val-Bélair. Val-Bélair, la même maison de 100 000 $ située à Sillery, le compte de taxes de Val-Bélair est le double. Si c'est 1 000 $ à Sillery, c'est 2 000 $ à Val-Bélair. Pensez-vous que ça peut durer longtemps? Et on peut vous donner à échelle toutes les disparités. Ce qu'on convient, c'est d'en arriver sur une période de 10 ans ? et, si vous voulez la porter à 15 ans, ça va ? c'est d'harmoniser la fiscalité.

M. le ministre, vous le savez, vous l'avez dit, votre premier ministre l'a dit souvent, les premiers ministres le disent toujours: Gouverner, c'est prévoir. M. le ministre devrait au moins indiquer, avant l'ouverture des registres, les institutions qui seront mises en place pour gérer les compétences communes advenant une dynamique importante de défusion. Il devrait définir et présenter les modalités selon lesquelles elles fonctionneraient et seraient financées. Sur ce dernier plan, celui du financement, il aura aussi des problèmes inattendus et considérables, pour dire le moins, à surmonter.

Or, le gouvernement a promis d'évaluer précisément les coûts prévisibles que chaque partenaire devra assumer ? préparez-vous à prendre la relève, je ne pourrai pas toffer longtemps ? que chaque partenaire devra assumer. Mais cela lui sera très difficile, sinon impossible. Comment entend-il alors...

M. Larose (Claude): Alors, on dit: Comment entend-il...

M. L'Allier (Jean-Paul): Je ne vais pas mourir, vous savez.

M. Larose (Claude): ...remplir correctement son engagement...

Le Président (M. Ouimet): J'en suis convaincu.

M. Larose (Claude): ...à l'effet que les signataires des registres et les participants aux référendums pourront choisir leur option en toute connaissance de cause? N'y a-t-il pas là matière à réviser de fond en comble sa position?

Le maire de Québec voulait insister aussi sur le fait que le projet du gouvernement actuellement est sans précédent dans le monde. Dans toutes les hypothèses, cet enchevêtrement de contrepoids, de dispositions complexes en vue d'ententes multiples, de prêts de services, de coûts partagés, de versements compensatoires ne peut qu'aboutir à l'absence d'imputabilité, au retour de l'âpreté dans les débats... dans les rapports et à la paralysie dans l'action. En ce sens, toute la démarche du gouvernement semble donner raison au romancier Peter MacOrlan quand il dit «qu'il est très difficile d'imaginer quelque chose de simple». Ce que le gouvernement a imaginé n'existe nulle part ailleurs au monde. Il ne peut référer à aucun précédent de cette envergure pour appuyer son projet. À la certitude de l'efficacité des villes unifiées dont il peut trouver des exemples partout au Canada et à l'étranger, il substitue des formules entortillées dont les avatars sont prévisibles sans le moindre doute. Veux-tu continuer?

M. Jobin (Jacques): D'autres dispositions du projet de loi mettent en cause les principes démocratiques à la base même de nos institutions, puisqu'elles sont conçues pour faire obstacle aux intérêts légitimes de la majorité. C'est ainsi que les défusionnistes pourront se faire entendre jusqu'au bout s'ils obtiennent suffisamment de signatures, lors de la première étape du processus de défusion, celle de la signature des registres. Avec seulement 10 % des inscrits, on pourra en effet mettre en branle tout le processus déstabilisateur qui est au coeur du projet de loi. Les habitants des autres secteurs de la ville où les registres n'obtiendront pas le niveau requis de signatures seront mis ensuite hors jeu. Même s'ils sont majoritaires et vitalement affectés par les résultats des référendums subséquents, il ne seront plus consultés.

Il est illégitime de fragmenter ainsi le corps électoral en refusant à tous et à toutes de se prononcer en même temps sur le sort de leur ville. Le gouvernement a décidé de mettre en route une démarche de consultation avant de procéder à la restructuration aléatoire qu'il a imprudemment promise et sans se donner vraiment le temps d'en peser et d'en analyser toutes les conséquences. S'il persiste, il doit s'engager à consulter non seulement les îlots de résistance, mais toute la population de la ville nouvelle de la même manière, jusqu'au bout et en même temps.

Par ailleurs, une fois le registre signé par un nombre relativement minime de requérants, ce pourrait être un jeu d'enfant d'obtenir une majorité simple des votants aux référendums qui suivront. En toutes choses, il est en effet toujours plus facile de mobiliser les mécontents que les satisfaits. Si le gouvernement désirait vraiment l'expression de la volonté populaire, il exigerait de ceux et de celles qui sont si mécontents du sort dans lequel les a placés la nouvelle ville qu'ils obtiennent la majorité des inscrits et non des votants. Après tout, on ne décidera pas là d'une chose mineure ni même de l'élection régulière d'un représentant mais du sort de milliers de personnes et de toute une ville. En Ontario et en Saskatchewan, par exemple, la majorité des inscrits est obligatoire pour valider le résultat. En Californie, c'est la double majorité qui est nécessaire, c'est-à-dire dans les secteurs sécessionnistes, d'une part, et dans le reste de la ville, d'autre part.

M. L'Allier (Jean-Paul): Alors, pour attirer... parce que vous m'avez indiqué qu'il restait trois ou quatre minutes, cinq minutes?

Le Président (M. Ouimet): Cinq minutes.

M. L'Allier (Jean-Paul): Alors, on vous a demandé comme d'autres, et on est solidaires là-dessus de tous les points exprimés jusqu'ici, que l'ouverture des registres se fasse sur une journée, pour les mêmes motifs. Il n'y a pas de raison d'étaler ça sur cinq jours. Et, comme on l'a dit ce matin à l'UMQ, on pourrait à la limite dire: Il va y avoir... il pourra y avoir une expression anticipée de signature de registres. Mais, à ce moment-là, je vous suggère de mettre ça dans la loi générale des élections pour que, au niveau municipal, on puisse aussi voter par anticipation.

Le vote municipal est bon, M. le ministre, alors il est valable aussi. Alors, si vous voulez créer, à l'occasion des registres et du référendum, un droit municipal au vote par anticipation, mettez-le aussi pour les élections. Là, on aura réglé un problème qui traîne depuis longtemps. Parce que, à ce moment-ci, au niveau d'une élection municipale, on n'a pas droit au vote par anticipation. Si vous le mettez dans l'ensemble, on va fonctionner avec ça, sinon, un jour, comme c'est la loi au niveau municipal.

Le 50 plus un, on l'a expliqué tout à l'heure, je ne vais pas revenir là-dessus.

Et je terminerai en parlant de l'engagement du premier ministre. Moi, j'ai été très attentif à ce qu'a dit le premier ministre au fil de ses engagements au sujet municipal. Il a réitéré à plusieurs reprises son engagement à consulter la population, et je pense que vous avez discarté trop vite la possibilité de consulter l'ensemble de la ville nouvelle. On pense que c'est une erreur, là aussi, que de ne pas consulter l'ensemble de la ville nouvelle, et les gens qui sont représentés par les maires et les élus en faveur de la ville nouvelle pourront et devront pouvoir avoir le même droit de se prononcer sur la ville résiduelle s'il y avait eu une ville résiduelle. Sinon, vous leur imposez une structure dont on ne leur a jamais parlé et qui sera le résultat de la volonté de quelques-uns que vous aurez appuyés et que vous aurez bénis dans vos engagements.

Mais l'engagement du premier ministre a été des plus nets sur un autre point quand il a dit: Il ne faudra pas que les gens se fassent d'illusions, il n'y aura pas de retour aux paradis fiscaux ou de retour aux situations fiscales antérieures. L'équité fiscale semble être un objectif que le premier ministre a mis de l'avant avec autant de fermeté que son engagement à consulter. Il va falloir que ça se traduise dans l'information préalable, il va falloir que les gens qui rêvent, parce qu'on leur fait ce discours localement, de retrouver la situation fiscale qu'ils ont connue auparavant, quelle que soit la ville, sachent que c'est fini, ça, et qu'on devra payer à un moment donné tous ensemble, faire un effort équivalent si on veut partager dans les bénéfices, et ça, ça ne devrait pas être escamoté. Parce que, actuellement, beaucoup de gens qui pensent à défusionner pensent à retrouver la situation fiscale antérieure, pas payer cher puis en profiter beaucoup. C'est fini, ce temps-là, quelle que soit l'organisation.

Je termine, M. le Président, en vous disant que c'est le devoir des gouvernements d'écouter les membres. On vous a dit ici, et tous les élus vous le diront, nous avons été élus au suffrage universel, pour les maires. Et, moi, mon programme de campagne était clair, la population s'est prononcée ? j'en ai parlé à tous les jours ? pour la ville nouvelle, nos slogans étaient là-dessus, etc. Et ça s'est traduit par une absence à peu près totale d'élus dans l'ouest de la ville, sauf un ex-maire, Normand Chatigny, et, pour le reste, on a été élus... Moi, j'ai été élu avec une majorité, y compris dans ces secteurs-là, le plus souvent, avec suffisamment de voix pour avoir une bonne majorité.

Mon mandat, c'est celui de construire cette ville nouvelle. Ce mandat se termine le 5 novembre prochain, et, jusque-là, je vais donner toutes mes énergies à plaider cette ville nouvelle tant auprès de vous qu'auprès du gouvernement, qu'auprès de la population, parce que, en mon âme et conscience, je pense que c'est dans l'intérêt de toute la population que 500 000 habitants se mettent ensemble pour avancer, quitte à ce qu'on ajuste ici et là la façon de leur fournir des services de proximité. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. le maire de Québec. J'amorce maintenant la période d'échange en cédant la parole au ministre des Affaires municipales et de la Métropole.

M. Fournier: Merci, M. le Président. M. le maire, bonjour à nouveau, et salutations à ceux qui vous accompagnent. Je tiens à féliciter le travail de la commission dans sa confection de son horaire, ça nous permet beaucoup d'efficacité; M. le maire se déplace une seule fois pour venir nous voir cet après-midi comme d'autres ont pu le faire. Alors, je pense que ça nous permet sûrement d'être plus efficaces, mais, évidemment, ça nous amène aussi à faire la suite de la discussion qu'on avait déjà eue tantôt et, à certains égards, il y a certains sujets évidemment qui ont déjà été touchés.

n(16 h 30)n

Et donc, parmi les sujets qui ont déjà été touchés, vous rappelez, pour que nous soulignions à nouveau, et je vais le faire à nouveau, l'engagement du premier ministre sur l'équité et sur le fait qu'il n'y aurait pas de retour à la situation telle que vécue avant. On a discuté de ça tantôt avec le groupe dont vous étiez membre, bien qu'on a pu en discuter avec le maire de Saguenay, mais je crois, moi aussi, qu'il n'y a pas lieu à un retour au statu quo ante. Et, puisqu'on en a déjà discuté alors que les portes étaient closes, mais que nous l'avons quand même dit publiquement, je tiens à le réitérer, lors de cette rencontre que nous avons eue, que le souhait que nous formulons, qui est un engagement plus qu'un souhait que nous formulons, à ce qu'il y ait le plus d'informations possible, toute l'information pertinente qu'il est possible de donner, le soit le plus rapidement possible. Cette information confirmera ce que nous disons depuis déjà bien longtemps à l'effet qu'il n'y aura pas, lors de cette consultation, l'option du retour en arrière. L'option du retour à la situation d'avant n'est pas une option qui sera considérée lors de cette consultation. Évidemment, l'évaluation... Et nous y sommes déjà.

D'ailleurs, je tiens à saluer les dirigeants qui nous permettent déjà de commencer à faire des cueillettes d'information. Pour pouvoir rencontrer nos échéances, on est déjà à faire de la cueillette d'information qui va nous permettre de dresser le portrait le plus complet possible. À cet égard-là, je pense qu'on tient... on est dans une démarche, en tout cas, qui vous confirme que nous tenons l'engagement que nous avions pris de nous assurer que toute l'information serait donnée et qu'il n'y aurait pas d'oubli de l'importante question de l'équité.

Je vous ai entendu sur certains sujets. Vous notez que le projet de loi ne contient pas la politique globale à laquelle vous souhaiteriez que nous nous adonnions tout de suite. Ce n'était pas le but du projet de loi n° 9. Il y aura d'autres moments et d'autres moyens pour l'exprimer. Je m'arrête, parce que nous avons déjà eu une discussion là-dessus tous les deux, lors de cette rencontre-là, sur ce qu'est une... les nouvelles villes, en tout cas, pour parler des nouvelles villes, dont la vôtre. Et vous plaidez abondamment la dimension... cette dimension, je dirais, presque d'extraterritorialité ou de compétitivité avec les autres, cette importance d'avoir une force d'agglomération qui permet d'envisager sur une base d'égalité ? c'est rarement possible, mais, en tout cas, qui s'y rapproche ? la compétition avec les autres, et je vous avais dit que je n'en disconviendrais pas, et je pense qu'effectivement il y a une utilité à ce que les forces soient réunies.

Je notais, et aujourd'hui j'ai noté que vous l'avez aussi dit, l'importance pour les villes de se rappeler qu'elles sont aussi des villes, et les villes ont toujours eu des services de proximité à rendre. Et, lorsque nous parlons de recherche d'adhésion, j'ai l'impression que ce n'est jamais la première dimension dont j'ai traité dont il est question mais bien la seconde. C'est toujours celle du service de proximité. Et je souhaite que, dans les jours, les semaines, les mois qui viendront, les citoyens trouveront leur compte dans les exposés qui leur seront faits, autant dans les coûts que dans les prévisions pour l'avenir, à l'égard de toutes les dimensions que représentent les nouvelles villes, non seulement celles qui sont... qui les amènent dans une extraterritorialité, mais celles de leur territoire de proximité. Et je pense que, là, il y a un défi pour tout le monde.

Et l'opposition cherche toujours à savoir pourquoi le gouvernement n'accompagne pas... ou, enfin, pourquoi le gouvernement laisse à d'autres le soin de faire ces présentations-là, et, moi, je pense que, jusqu'à un certain point, le gouvernement met la table pour que les citoyens puissent participer à ce débat-là, puissent avoir de l'information. Et, en ce sens, on est déjà en train de faire un certain niveau d'accompagnement, mais nous ne prendrons pas la place des municipalités à l'égard de la confection de leurs services de proximité, de la façon dont ils doivent répondre à leurs citoyens. À cet égard-là, on ne prendra pas leur place.

Oui, le projet de loi, une fois la consultation terminée, devra être plus précis dans certaines dimensions, et, jusqu'à un certain point, ce sera là une autre façon d'accompagner les villes nouvelles dans leur recherche, mais l'objectif étant toujours d'avoir, au bout de la ligne, des citoyens qui ont l'occasion, étant informés de tout cela, de pouvoir participer. Ça, c'est clair que ça va arriver au bout de la ligne.

Ce qui m'amène à ma question sur la participation. Il y a les registres qui ont été abordés et il y a la question du 50 %. Je vais d'abord commencer par les registres. Est-ce que je comprends de votre présentation que ce que vous souhaitez, c'est que tout simplement nous appliquions la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, la règle usuelle telle qu'elle se connaît, puisque ce que nous avons fait, c'est d'utiliser la règle maximale, c'est-à-dire d'avoir une règle uniforme pour tout le monde, étant entendu qu'on ne pouvait pas imposer, je ne sais pas, aux 100 000 personnes de Montréal d'aller signer en une journée? Là, il y a une petite difficulté là-dessus. La loi prévoit donc cinq jours dans ces cas-là. Mais la loi prévoit donc des registres... des journées de registres différents, selon la population.

Alors, ma question sur les registres, c'est: est-ce que vous souhaitez donc, si je comprends bien, que nous appliquions la loi telle qu'elle était antérieurement, sans avoir une précision, là, universelle pour toutes les villes aux cinq jours?

M. L'Allier (Jean-Paul): Cinq jours, M. le ministre, M. le Président, cinq jours, c'est cinq jours de cabale. Ça ressemble aux élections de 1830.

M. Fournier: ...ça existe, hein? C'est la loi.

M. L'Allier (Jean-Paul): Ça existe, mais on élit nos députés en une journée, les élus municipaux en une journée. Et, cinq jours de cabale: Aïe! il y en a eu tant qui sont allés, il faut y aller, il en manque 15 là, allez-y, etc. Ça va être la foire d'empoigne. Si c'est l'image que vous voulez absolument projeter de votre façon de promouvoir les villes nouvelles en donnant l'autoroute de la défusion à des gens et en refusant, comme vous le faites dans le projet de loi, à la ville résiduelle de se prononcer, vous êtes libre de faire ça. Nous, on ne changera pas ce que vous voulez faire.

Tout ce qu'on vous dit, c'est que, si on peut aujourd'hui élire du monde en une journée au niveau canadien, au niveau provincial, au niveau municipal, il ne faudrait pas, pour défaire les villes, dire: Bien, écoutez là, on va ouvrir les registres jusqu'à temps qu'il y ait la majorité requise. Ça se passait comme ça, les élections, en 1937. Puis quand il n'y avait plus suffisamment d'électeurs, pendant quatre heures, on fermait le scrutin. Donc, il ne faut pas revenir à ça, là. Une journée, si les gens qui sont motivés, qui sont intéressés, le savent quand, et ça va être précédé d'une longue campagne, ça suffit pour aller s'exprimer.

M. Fournier: Donc, je comprends de votre intervention que la loi actuelle ne satisfait pas.

M. L'Allier (Jean-Paul): Pour la durée.

M. Fournier: Oui, oui, la loi actuelle sur la durée, c'est bien ce dont je parle, elle ne satisfait pas vos exigences, et même qu'on devrait la modifier pour l'avenir.

M. L'Allier (Jean-Paul): Bien, c'est-à-dire que, dans ma ville, c'est une journée, jusqu'à Sainte-Foy aussi. Ailleurs aussi sur le territoire, à ma connaissance, c'était une journée, les registres.

M. Fournier: Et il y a certains endroits où ce serait une journée, d'autres, ce serait deux, d'autres, ce serait trois, d'autres, ce serait cinq.

M. L'Allier (Jean-Paul): Bien, en milieu rural où les gens sont obligés de venir de loin... mais ce n'est pas de ça dont il s'agit là, on est en milieu urbain.

M. Fournier: Ce que je vous pose comme question, j'ai eu ma réponse, je clos là-dessus: est-ce qu'on devrait appliquer la loi actuelle sur la durée? Je comprends que non parce que vous la trouvez trop... vous trouvez les délais trop grands même si, dans certains cas, c'est la loi actuelle qui le fait, là.

M. L'Allier (Jean-Paul): Ce que je ne souhaite pas, c'est que vous preniez le plus long délai, vous l'appliquiez à tout le monde. Pourquoi pas faire l'inverse, prendre le plus court délai puis l'appliquer à tout le monde?

M. Fournier: Bien, parce que, si ce n'est pas faisable, le plus court délai, dans certains cas, si c'est 100 000 personnes pour les registres en une journée.

M. L'Allier (Jean-Paul): Il y a plusieurs lieux de vote, là. Parce que souvent, dans les municipalités, il y a juste un lieu de vote pour minimiser les coûts. Donc, ils ne peuvent pas recevoir 50 000 personnes dans un hôtel de ville. Bon. Alors, multipliez les lieux de votation à ce moment-là, qu'il y ait plusieurs registres. On a 13 anciens hôtels de ville, là, à Québec, bien utilisez-les.

M. Fournier: Parlons maintenant du 50 %.

Le Président (M. Ouimet): Il reste à peine une minute, souhaitez-vous la garder pour le deuxième bloc, M. le ministre?

M. Fournier: Je vais la faire. On discutera là-dessus et prenez-la sur mon temps du deuxième bloc, tout simplement.

Le Président (M. Ouimet): Très bien.

M. Fournier: Sur le 50 %, est-ce que, si j'ai compris votre position, c'est la majorité absolue. Ce n'est pas 50 %... Ce n'est pas le double du 50 %. Ce n'est pas 50 % de participation et, après ça, 50 % de...

M. L'Allier (Jean-Paul): C'est à dire que, pour avoir 50 % plus un des gens habiles à voter qui votent pour la défusion, il faut qu'il y ait eu 50 %...

M. Fournier: Non, tout à fait, tout à fait. Mais c'est deux règles différentes. Il aurait pu y avoir une règle... D'ailleurs, elle a été soulevée dans le groupe précédemment. Le groupe dans lequel vous étiez tantôt ne plaide pas pour la majorité absolue.

M. L'Allier (Jean-Paul): Ce que je veux dire...

M. Fournier: Il plaide pour une participation de 50 %, de laquelle, évidemment, il doit y avoir un 50 % qu'on voit. Alors, c'est différent de la majorité absolue à laquelle vous tenez.

M. L'Allier (Jean-Paul): On a la même position. Supposez, par exemple, que vous avez 65 % des gens habiles à voter qui s'inscrivent.

M. Fournier: Qui participent.

M. L'Allier (Jean-Paul): Qui participent. Mais qu'il n'y en a pas 50 % qui votent pour la défusion, ça ne passe pas. Ce n'est pas la double majorité, là. Il faut que 50 % des gens habiles à voter disent: On veut partir. Pourquoi? Parce que c'est un droit que vous donnez à une minorité dans l'ensemble et que l'ensemble ne se prononce pas.

Si vous donniez ce droit-là, le droit, si vous disiez: Le vote qu'on va considérer, c'est le vote de la ville nouvelle dans son ensemble, de la nouvelle réalité, à ce moment-là ça pourrait être différent. On n'est pas obligés d'avoir ça aussi haut. On prendrait le vote comme il se prend aux élections, etc. Mais, comme vous donnez un pouvoir exorbitant à un petit groupe de personnes, relativement petit, on dit: pour que ces gens-là puissent faire sauter toute la baraque, il faudrait peut-être qu'ils soient au moins la moitié des gens capables de voter.

M. Fournier: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le ministre. Alors, je vais du côté de l'opposition maintenant. Mme la députée de Bourget.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. M. le maire, je salue également vos collaborateurs. Je voudrais d'abord vous dire que, lorsque j'ai lu votre mémoire, il y a quelques semaines déjà, j'ai apprécié ? vous allez peut-être trouver ma remarque un peu... enfin, je crois que vous la trouverez sympathique ? mais j'ai apprécié le geste de solidarité envers Montréal. Vous avez une allusion dans votre mémoire, comme responsable de la ville de Québec, envers Montréal, et j'ai trouvé que c'était un grand geste de votre part.

n(16 h 40)n

Deuxièmement, en fait, il y a deux questions que je veux aborder avec vous. La première, c'est la question de la démocratie. Je crois que, cet élément-là, il est en toile de fond depuis longtemps, et vous l'abordez de différentes manières, assez directement dans votre mémoire, sous différents angles. Vous dites, par exemple, à un moment: «Il faut [...] rejeter le sophisme selon lequel cette réforme ne fut pas démocratique. C'est à vous [...] seuls qu'il incombe ? vous, étant les députés de l'Assemblée nationale ? [...]le bien commun de l'ensemble des Québécois et des Québécoises.»

Vous dites, à d'autres moments: «D'autres dispositions du projet de loi mettent en cause les principes démocratiques à la base même de nos institutions, puisqu'elles sont conçues pour faire obstacle aux intérêts légitimes de la majorité.» Vous dites un peu plus loin: «Le projet de loi n° 9 est antidémocratique parce qu'il remet en question [...] le résultat des dernières élections municipales dans toutes les villes fusionnées.» Bref, abordons cette question de la démocratie.

Il y a une confusion, c'est clair, là, depuis un bon moment, dans le dossier des fusions municipales, entre ce que j'appellerais l'expression des libertés individuelles et le bien commun, hein, les éléments qui font partie du bien commun. Il y a une confusion entre la démocratie et les libertés individuelles. Et ce n'est pas parce qu'on exprime des voeux, des souhaits, des besoins, etc., qu'on doit toujours considérer que ça fait partie de cette grande famille que représente la démocratie.

Il y a aussi une tendance, et j'avoue que, si j'étais un élu municipal, je serais un peu heurté de ça, à accorder la même valeur, à donner la même importance, à mettre sur le même pied tous les points de vue, y compris des points de vue très minoritaires. Et je ne ferai pas de... je n'ai absolument pas, durant cette commission, l'intention de faire une charge contre les gens qui voudraient un retour en arrière, qu'on appelle les défusionnistes. Je crois que c'est le gouvernement qui leur a donné l'autorisation de réouvrir cette discussion-là. On ne peut pas les blâmer d'exprimer qu'il y a des choses qu'ils préfèrent autrement. Mais vous êtes dûment élu. Or, on accorde la même importance au point de vue qui est exprimé par des gens qui sont démocratiquement élus, qui ont passé le test de tout ce que ça veut dire, une élection, et des gens qui expriment des points de vue différents, qui sont sous le chapeau d'une association ou d'une organisation quelconque.

J'aimerais ça vous entendre là-dessus, parce que je crois qu'on est très embourbés, au Québec, sur cette question-là de la démocratie. Il y a vraiment des confusions. Alors, je voudrais vous entendre, puisque vous l'avez abordée assez directement dans votre mémoire.

M. L'Allier (Jean-Paul): Très brièvement, madame. Vous avez aujourd'hui, et c'est peut-être spectaculaire d'une certaine façon... sont passés à cette tribune des gens qui représentent à peu près 80 % de la population du Québec: l'Union des municipalités, les villes-centres, la ville de Montréal, la ville de Québec, etc. Ces gens-là ont parlé avec une grande unanimité sur les points essentiels de la loi. Le gouvernement, dans son processus, et je le respecte, a le droit d'écouter qui il veut. Il peut arriver que quelqu'un seul dans la société ait raison contre tout le monde, il peut arriver que ce soit un ministre ou un gouvernement. Mais, dans le processus que nous connaissons, tous les gens qui se sont exprimés ici sont des élus. La plupart de ces gens-là se sont fait élire en promettant de faire évoluer les villes nouvelles et de les construire.

Ce mandat-là est tout à fait légitime, tout à fait bon. De le remettre en question en disant, et comme le ministre, je l'ai entendu ce matin: On peut faire un pont par-dessus vous autres puis aller consulter directement, puis c'est tout à fait son droit, le gouvernement fédéral fait ça toutes les semaines, il passe par-dessus vous autres, puis par-dessus nous autres, puis s'en va direct en bas. Bon. On vit dans un système où on est habitué à plier le dos, semble-t-il. Je ferme la parenthèse, ce n'est pas mon propos d'aujourd'hui.

La démocratie, qu'est-ce que c'est, la démocratie? Dans notre société, là, la démocratie ne peut exister que si on a des règles de droit pour l'encadrer. La règle de droit, en démocratie, c'est que les paliers d'autorité élus ont des responsabilités définies. Celle de déterminer le contour des villes, l'existence des villes, la disparition des villes, l'évolution des villes, c'est une responsabilité du gouvernement du Québec, comme de chacune des provinces. Ce gouvernement peut décider que, lui, il se désiste de ça temporairement, qu'il se place en arbitre et qu'il laisse la population se bagarrer sur le profil de sa ville. Et il choisira, au bout du compte, ce qu'il veut, c'est son droit. Mais c'est aussi sa responsabilité, quelle que soit l'opinion émise par le public, dans des référendums ou pas, c'est son obligation de venir produire ça dans une loi. Personne d'autre ne le fera à sa place. Et il sera imputable de cette loi qu'il aura votée même s'il dit: C'est les référendums qui m'ont dit de faire ci ou de faire ça. C'est ça, la règle de droit.

On a voulu déguiser, chez les défusionnistes, le droit des citoyens à se prononcer définitivement sur l'existence de leur ville. Ce droit n'existe pas. Il pourrait exister, il faudrait l'inclure dans la Charte canadienne des droits et dans la charte canadienne... dans la Constitution canadienne. Mais il n'existe pas. On ne peut pas faire du «wishful thinking» en droit et en parler tellement souvent qu'on en arrive à se convaincre que ça existe, ça n'existe pas. Les tribunaux l'ont reconnu, ça a été cité par l'Union des municipalités ce matin. Tous les tribunaux se sont prononcés sur le caractère démocratique. On peut ne pas aimer ça, mais c'est ça, aujourd'hui, la démocratie, la règle de droit qui nous guide.

Mme Lemieux: Je vais vous donner une petite pause, j'ai peur que votre voix s'épuise.

M. L'Allier (Jean-Paul): Claude Larose, veux-tu ajouter un petit mot, s'il vous plaît.

Mme Lemieux: Oui.

M. Larose (Claude): Sur ce sujet de la démocratie, moi, je pense qu'il y a quelque chose qui est complètement flou dans le projet de loi. Et, même si on n'est pas d'accord, vous l'avez vu dans le mémoire, pour le maintien de ce projet de loi là, il reste que, sur la question de la démocratie, il y a quelque chose qui est complètement flou. Le gouvernement nous dit: Je veux consulter la population pour prendre le pouls des gens, pour savoir si les structures municipales doivent être revues, et je veux prendre le pouls seulement de ceux qui sont contre. Moi, je pense que, si le gouvernement veut être éclairé, et ça devrait être une des réflexions majeures de cette commission parlementaire, si le gouvernement veut être éclairé, il devrait demander de prendre le pouls de ceux qui veulent la défusion dans certaines petites municipalités si c'est le cas, mais aussi demander à l'ensemble de la population de la région si elle veut continuer à vivre avec cet outil qui est la nouvelle ville. Et là le gouvernement aurait les deux opinions et pourrait prendre une décision plus éclairée.

Pourquoi, dans le projet de loi, on n'envisage pas, si on veut aller de l'avant avec le projet de loi absolument, qu'on demande l'avis aussi à toute la population régionale, si elle veut que certaines parties s'en aillent, que la ville soit émiettée et que la ville ait moins d'avenir?

Moi, je pense que ce qui est en cause dans ce projet de loi là, et l'Assemblée nationale devrait y réfléchir sérieusement, ce n'est pas uniquement la question de la délimitation des territoires des municipalités dans certaines régions, c'est l'avenir du Québec qui est en cause. Est-ce qu'on va affaiblir Montréal par rapport à Toronto? Est-ce qu'on va affaiblir la capitale du Québec, qui est Québec, comme ville qui voudrait s'affirmer au plan local, national et international? C'est de ça dont on parle. Et c'est curieux, on ne va pas consulter la majorité de la population pour savoir ce qu'elle en pense, on va seulement demander à quelques petits groupes s'ils veulent briser tout ça.

Mme Lemieux: Je vous ferai remarquer, vous utilisez l'expression «l'Assemblée nationale», je peux vous dire que, du côté de l'opposition, cette réflexion-là est assez claire, et c'est davantage, dans ce cas-ci, le gouvernement qui campe ce dossier-là de cette manière-là.

Vous dites... Vous allez même jusqu'à dire, dans le résumé, vous dites: «Il existe pour les défusionnistes une façon loyale de combattre pour leur cause: qu'ils forment des partis politiques municipaux [...] qu'ils se présentent aux élections de novembre 2005.» S'ils gagnent, ils gagneront, et s'ils perdent, ils perdront. Bon, je vous fais un petit résumé. En fait, on revient toujours à cette question de règles. La démocratie peut s'exercer dans la mesure où tout le monde accepte de respecter les règles. Ici, vous allez donc jusqu'à proposer que ça se joue davantage au niveau de la prochaine élection municipale.

M. L'Allier (Jean-Paul): C'est-à-dire... Oui, c'est exactement... ça peut être ça. Le ministre peut décider que non, il continue son processus, mais, de toute façon, quand vous collez les morceaux l'un sur l'autre, vous arrivez quasiment dans la période préélectorale municipale et à quelques mois de votre propre élection. Donc, ça risque de geler pas mal de choses, cette histoire-là.

Au niveau municipal, ce serait clair. Maintenant que les visières sont un peu plus levées, les gens qui sont à la fois pour la ville et pour la fusion devraient se brancher. S'ils sont pour la ville nouvelle, quitte à l'améliorer, qu'ils le disent, s'il n'y a pas de partie pour la défusion ou si... rien du tout, bien, à ce moment-là, ce sera tranché, et on travaillera définitivement à la construction de nos villes.

Parce que le processus qui s'engage aujourd'hui légitimise, rend légitime le fait qu'un prochain gouvernement ? là, je ne sais pas combien de temps, 20 ans, 30 ans, 10 ans, quatre ans, je ne sais pas ? dit: Bien, moi aussi, moi, je vais remettre ça en question. Mme Harel, première ministre à l'époque pourrait dire: Moi, j'ai fait cette réforme, j'y crois puis je la ramène sur la table, puis on recommence tout. Pourquoi ce ne serait pas bon pour eux autres? On ne peut pas vivre dans ça indéfiniment. On ne peut pas vivre... Le Québec ne peut pas se construire comme ça. Montréal est devenue la deuxième ville après avoir été la première, puis, dans 10 ans, si rien ne change, elle sera la troisième après Vancouver et Toronto. C'est dans toutes les statistiques, c'est indiqué partout. C'est-u ça qu'on veut? affaiblir le Québec au point qu'on devienne un territoire?

Le Président (M. Ouimet): Je retourne maintenant du côté ministériel et je cède la parole à la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Je ne suis pas membre de la commission, alors je demanderais l'approbation des...

Le Président (M. Ouimet): Le consentement, bien sûr, vous faites bien de me le rappeler.

Mme Delisle: ...pour quelques questions. Ça va?

Le Président (M. Ouimet): Ça va, consentement, allez-y.

n(16 h 50)n

Mme Delisle: Merci. J'aimerais, si vous le permettez, qu'on poursuive la discussion sur la question de la démocratie. On pourrait en parler très longtemps. Vous disiez tout à l'heure que la démocratie, ce n'était pas un droit... c'est un droit finalement qui n'existe pas dans les chartes. On est en...

Une voix: ...

Mme Delisle: Oui, oui, vous... c'est-à-dire la consultation.

M. L'Allier (Jean-Paul): ...sur la règle du droit.

Mme Delisle: Excusez-moi, là, sur la consultation. Mais est-ce qu'on ne pourrait pas accepter le fait que, en 2003 ? on n'est pas en 1803, on est en 2003 ici ? que les citoyens ont également leurs mots à dire sur le milieu de vie, sur le genre de ville ou de structure dans laquelle ils veulent vivre? Et, moi, je fais partie d'un parti politique qui a vertement, et avec beaucoup de vigueur, dénoncé la façon dont s'est faite ces fusions. Je sais qu'il ne faut pas revenir en arrière, il faut... J'ai bien entendu, M. le maire, ce que vous avez dit, ce que vos collègues aussi ont dit.

On a eu le privilège aujourd'hui d'entendre dans une seule journée... J'ouvre une parenthèse, mais, pour quelqu'un qui vient du monde municipal, ça a été une journée, à mon avis, assez extraordinaire pour ça. Ça a permis, je pense, d'éclairer les lanternes de beaucoup de gens. Le retour en arrière, l'historique, bon, c'est une chose. Mais les citoyens s'attendent aujourd'hui à être consultés sur le milieu de vie dans lequel ils vont vivre.

Moi, j'ai le goût de vous demander aujourd'hui, même si vous me dites, M. le maire, que je vous renvoie la balle puis que je vous renvoie le fardeau sur vos épaules... Vous nous avez dit tout à l'heure qu'il y a deux missions à la nouvelle ville: celle des services de proximité, s'assurer que les gens vraiment bénéficient des services auxquels ils ont droit puis qu'ils souhaitent avoir, et aussi tout le volet du développement économique. Et, moi, je pense, à quelque part, que, si notre formation politique a dit, par la voix du premier ministre, et par la voix du ministre, et par la voix de d'autres aussi, qu'on souhaitait la réussite des nouvelles villes, ça nous prend des partenaires pour ça.

Et, je vous dis bien honnêtement, j'aimerais savoir de la bouche du maire de Québec qu'est-ce qu'il entend faire pour convaincre ceux qui font partie de cette majorité silencieuse de ces objectifs qui sont majeurs aujourd'hui, quand on parle à la fois des services de proximité mais du développement économique à la fois de la région mais aussi du Québec tout entier. Ça ne peut pas être juste d'un bord, cette affaire-là. On ne peut pas juste expliquer aux gens que, bon, on a mal déneigé, on a mal fait ça, on a mal fait ça. Ça, c'est peut-être le côté négatif, là, ça s'arrange. Mais il y a d'autres éléments aussi qui entrent en ligne de compte. Moi, j'aimerais savoir, quand on parle de l'avenir ? donc que ça se fasse dans un an, que ça se fasse par élection référendaire ou pas, que ça se fasse dans 24 mois, la mécanique peut être ajustée ? qu'est-ce que les villes ont l'intention de faire ? dont la vôtre ? pour convaincre les gens de sortir et de se prononcer?

Parce que, nous, on ne fera pas marche arrière, là. Le projet de loi est sur la table, il faut donc bonifier notre projet de loi. Il faut donc s'assurer que les citoyens... Moi, je viens du monde municipal, c'est de là que je viens, et, moi, je peux vous dire que, quand on parlait de consultations publiques, ce n'était pas de la frime, puis quand les gens venaient s'exprimer dans un... devaient se déplacer pour signer un registre, ça comptait. Bon. Alors, vous ne pouvez pas nous enlever ça, et c'est là-dessus qu'on a fait campagne et qu'on a dénoncé ce qui s'est passé en l'an 2000 avec la réforme de Mme Harel. Bon.

Alors, aujourd'hui, on est rendus à consulter, c'est-à-dire à consulter ceux qui sont sur la ligne de front, sur la première ligne en ce qui a trait à ce processus, mais il y a des devoirs pour tout le monde. Je comprends que les villes ont fait beaucoup de devoirs puis beaucoup de réflexions, mais, vous avez dit vous-même, il faut penser à l'avenir. Le maire de Montréal a dit: Est-ce qu'on peut penser à l'avenir? Les citoyens aussi pensent à l'avenir.

M. L'Allier (Jean-Paul): J'ai 30 secondes pour répondre à la question de Mme la députée. La tradition, puisque vous venez du monde municipal, ce n'est pas à vous que je vais l'expliquer, un registre, c'est un outil pour s'opposer; ce n'est pas un outil pour construire. Alors, n'essayez pas de convaincre les gens qui sont pour la ville nouvelle d'aller signer un registre, parce qu'ils vont avoir l'impression qu'ils s'en vont voter contre la ville nouvelle. Ça a toujours été utilisé pour s'opposer à quelque chose, pas pour changer des choses, pour s'opposer. Et là vous pensez que, parce que le registre porte sur la défusion, les gens vont s'imaginer que, si on va voter, ça va être pour la fusion? C'est ça qu'il ne faut pas faire accroire aux gens comme député puis comme ancien maire ou mairesse. Il ne faut pas faire accroire aux gens que: Essayez puis, si vous n'êtes pas allés voter, c'est parce que ça ne vous intéresse pas.

Les gens qui sont pour la ville nouvelle ne sont pas consultés et ne se perçoivent pas consultés dans ce processus-là. Ils se perçoivent représentés partout et, nous, on ne se sent pas consultés.

Par contre, on se sent mauditement élus, par exemple, pour faire ça. Ça, on a été élus et là ils ont été consultés puis ils n'ont pas voté pour Mme Boucher, ils ont voté pour moi, parce que je proposais la ville nouvelle, entre autres choses. Puis là vous me dites: Ça ne compte pas, ton élection, il faut recommencer à plaider, il faut recommencer à t'expliquer. Je le ferai peut-être après 2005, après le 4 novembre 2005 ou le 5 novembre, mais, d'ici là, mon mandat est bon. De sorte que votre registre, si vous ne le gardez ouvert qu'aux oppositions, c'est une caricature de démocratie.

Dites-moi aujourd'hui que vous allez plaider auprès du ministre des Affaires municipales pour que, comme ancienne mairesse, vous souhaitez que toute la population de la ville nouvelle soit associée à la définition de son avenir, on va vous applaudir puis on va baisser la garde. Ça va être beaucoup plus bas que 50 %. Les gens iront s'exprimer puis ceux... la majorité passera, point.

Le Président (M. Ouimet): M. Jobin, vous vouliez ajouter?

M. Jobin (Jacques): Bien, c'est un peu pour reprendre ce que le maire vient de dire. C'est que, finalement, on nous parle de démocratie, mais ce qu'on constate dans les faits, c'est une démocratie à géométrie variable qui est réservée éventuellement à ceux qui s'opposent, à une minorité. Mais tous ceux qui y croient, à cette ville-là, et je peux vous dire, pour le vivre tous les jours, qu'ils sont fortement majoritaires à mon point de vue, ils n'auront pas le droit de s'exprimer sur leur devenir. On va leur remettre... On va remettre entre les mains de quelques personnes une arme véritablement qui va éventuellement faire en sorte que la ville nouvelle va exploser. Les résidus vont être ramassés à gauche et à droite, tant au niveau financier qu'au niveau de l'organisation, par ceux qui vont rester. Ces gens-là n'auront pas été impliqués d'aucune façon. Ce n'est pas ma conception de la démocratie. Ce n'est pas ça, une saine démocratie. S'il y a une consultation, qu'on le fasse pour tout le monde.

M. L'Allier (Jean-Paul): Et j'ajouterais... Il y a un élément... Si vous me permettez, M. le Président, pendant quelques secondes.

Le Président (M. Ouimet): Oui, M. le maire.

M. L'Allier (Jean-Paul): S'il y a un élément de réponse que vous n'aviez pas donné à votre question: 1u'est-ce que vous faites pour les convaincre? On a déposé au conseil municipal, en juin, le 27...

Une voix: Le 19 juin.

M. L'Allier (Jean-Paul): ...le 19 juin, un document qui ajoutait des outils aux arrondissements pour leur permettre de mieux gérer la proximité. On a mis sur pied, il y a plusieurs mois, un comité de réingénierie, présidé par Jacques Jobin ? il peut vous en dire un mot. On a déposé ça, on n'a pas eu de réponse, là, du côté de notre opposition, qui n'est pas venue à la commission Lapointe pendant un an. C'étaient tous des élus, là. Pendant un an, on leur a demandé s'ils avaient des propositions à faire pour faire évoluer la région. Le choix qu'ils ont fait, démocratiquement élus, ça a été de dire: Niet, on n'y va pas. Moi, j'ai plaidé tout seul pendant un an.

M. Jobin (Jacques): Ce que je veux peut-être rajouter là-dessus, on oublie une chose qui est fondamentale, la ville nouvelle de Québec, comme les autres, ont a peine 18 mois, 18 mois dans une vie d'une ville nouvelle. On a hérité, nous, les élus, d'un projet... en fait, d'un plan d'organisation préparé par les comités de transition qui ont fait leur possible dans le temps qu'ils avaient pour proposer une nouvelle structure d'organisation.

Dans notre cas, ça a été... ça s'est traduit par 216 départs chez les cols blancs seulement. Ce n'est pas nous qui avons décidé de la mesure de départ, ce sont les gens du comité. Je respecte ça. 216 sur environ 1 400, ça a été à peu près 15 à 16 % de nos cols blancs qui ont quitté du jour au lendemain, alors qu'on est arrivé dans une période de construction comme on n'en a jamais vue à Québec, et il a fallu faire avec. Finalement, d'une main, payer le 18 millions que ça a coûté pour les faire partir puis gérer ça au niveau financier puis, de l'autre main, être privés de 216 personnes qui avaient l'expertise et les compétences pour, entre autres, émettre les permis, ouvrir les rues, c'est ça, notre réalité de tous les jours. C'est ça qu'on est obligés de faire.

Et, aujourd'hui, après environ 12 à 15 mois d'organisation, on a proposé au mois de juin... le maire a déposé un document extrêmement porteur de décentralisation vers les arrondissements, par exemple, au niveau des travaux publics, la gestion des immeubles, ce qui touche la population. Mais il faut prendre le temps de le vivre. On ne peut pas à la fois demander à nos employés qui font un travail exceptionnel ? puis là là-dessus je reprends ce qui a été dit ? de construire cette ville-là puis, en même temps, la démolir.

Ce matin, je le disais à Mme Delisle tout à l'heure, j'ai pris l'ascenseur en montant à mon bureau. Il y avait cinq, six personnes, des employés dans l'ascenseur, une dame, que je ne connais pas, qui travaille au cinquième, me dit: M. Jobin, c'est aujourd'hui que la ville va en commission parlementaire? Je dis: Oui. Elle dit: Ils vont finir par nous tuer, hein? Ça a été ça, son commentaire. Les gens sont épuisés, parce que, quand on a un projet porteur, on est enthousiastes, on n'a pas peur de travailler 70 heures par semaine. Mais, quand on nous demande de nous... pratiquement de nous détruire, c'est pas mal moins plaisant. Donnez-nous la chance de la construire, cette ville-là, d'amener les modifications qu'on doit amener nécessairement. Elle est perfectible, la ville, parce qu'on a hérité d'un modèle qui était au départ imparfait. C'est normal. Mais donnez-nous la chance de l'améliorer.

Le Président (M. Ouimet): Je dois vous interrompre là-dessus. Alors, le temps du coté ministériel est écoulé. Je vais maintenant du côté de l'opposition, la députée de Bourget, par la suite la députée de Taschereau, s'il reste du temps, le député de Beauce-Nord. Mme la députée de Bourget.

n(17 heures)n

Mme Lemieux: Juste pour conclure sur cette discussion sur la démocratie. D'abord, je pense que ça paraît assez clair que ? et je crois que l'intervention précédente en témoigne, quoique je ne la juge pas, mais je la constate, et les interventions du ministre également ? dans le fond, ce que le gouvernement vous dit, c'est: Vous êtes bons... D'ailleurs, vous avez signifié un certain nombre de dossiers résolus de manière adéquate; évidemment, la perfection n'est pas de ce monde, mais vous faites une liste quand même d'acquis suite à ces fusions. Alors, dans le fond, ce que le gouvernement vous dit, c'est: Allez vendre ça, soyez bons, ça va être bien de valeur si vous ratez votre coup. Le poids est vraiment sur les élus municipaux. Et, devant ce bilan, on pourrait se dire: Bien non, ayons confiance, le bilan est positif, les gens sont enthousiastes.

S'il y a quelque chose qui me frappe aujourd'hui, c'est l'enthousiasme avec lequel les élus municipaux parlent de leur ville, de leurs succès, de leur monde, de leurs personnels, cet enthousiasme. Mais, comme ce projet de loi donne le feu vert et une prépondérance à la voix de ceux qui veulent revenir en arrière, évidemment ce que je comprends de votre propos, c'est que vous ne pourrez pas nécessairement... on ne peut pas garantir de gagner cette bataille-là.

Est-ce que vous iriez... et pour conclure là-dessus, lorsqu'on dit... D'abord, vous témoignez clairement du fait que le registre est un mode connu dans le monde municipal qui a pour objet de s'objecter, et c'est correct de s'objecter à quelque chose. Mais là on travestit un peu ce mode qui est connu. Iriez-vous jusqu'à dire que le fait qu'il soit réservé exclusivement à des gens qui s'opposent, on va même jusqu'à accorder plus d'importance à un vote qu'à un autre? Il y a un principe important en démocratie, hein: chaque vote... un vote un citoyen, un citoyen un vote, chaque vote doit être égal, et là on accorde plus d'importance à un vote qu'à un autre. C'est ce qu'on fait étant donné qu'on n'ira pas tester la volonté des gens de certains territoires ou des gens qui seraient confortables avec cette nouvelle ville.

M. L'Allier (Jean-Paul): Ce n'est pas inscrit dans la loi que le registre est uniquement pour s'opposer.

Mme Lemieux: Non, mais c'est dans...

M. L'Allier (Jean-Paul): C'est dans la nature de l'outil.

Mme Lemieux: C'est ça.

M. L'Allier (Jean-Paul): Et, la plupart du temps, le registre est demandé par des gens qui s'opposent. Pour une salle de spectacle à Rimouski, par exemple, il y a un registre, il y a un référendum, etc. Donc, il faut qu'il y ait une campagne.

Mme Lemieux: C'est correct.

M. L'Allier (Jean-Paul): Quand il y a une campagne, c'est à l'ensemble de la population que ça s'adresse. Quand on réserve ça à une parcelle de la population de la ville nouvelle, fusse-t-elle une ancienne municipalité, à ce moment-là, on s'adresse aux opposants. C'est un outil qu'on donne aux opposants, et les autres sont laissés sur le carreau.

Et donc, ce qu'on demande au gouvernement, c'est que... On lui ouvre des hypothèses. Il nous a demandé de faire des recommandations. S'il maintient son processus, 25 % d'inscriptions pour le registre, 50 plus un des gens habilités à voter... S'il dit: Je ne veux pas aller jusque-là parce que, dans le fond, ce serait quasiment accréditer le droit à la partition dans un autre système... S'il ne veut pas aller jusque-là, il peut dire: Je reviens à un référendum pour l'ensemble de la ville nouvelle qui va avoir lieu avant les élections. Et, à ce moment-là, tout le monde va s'exprimer. Il va y avoir un camp du pour, un camp du contre, puis il va y avoir une expression démocratique. Ou alors il dit: Ça, c'est bien dispendieux, on n'a pas le temps de faire ça. Qu'il laisse le dossier porter, qu'il dise: On suspend le dossier, plaidez votre ville nouvelle, que les opposants plaident, qu'ils se forment des partis politiques, la population tranchera. En même temps qu'elle élira des gens, elle choisira ceux qui correspondent à la ville qu'elle veut. Donc, il y a trois hypothèses, trois choix. C'est rare qu'on a des choix multiples comme ça.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Merci, M. le Président. M. le maire, MM. les vice-présidents de l'exécutif, il y a deux choses qui, pour moi, sont assez intéressantes dans votre mémoire, elles soulèvent... Deux choses. D'abord, il y a un engagement qui était là, qui disait: Je souhaite la réussite des nouvelles villes. C'était l'engagement du premier ministre qui était alors candidat dans un débat électoral. Mais ce que vous nous faites valoir, c'est que, à côté de cela, on ne respecte pas la légitimité de leurs élus, de ces nouvelles villes. Alors, ça montre bien, là, l'incohérence dans l'attitude face à ce projet de loi, l'incohérence qui est mise en évidence dans le débat sur la légitimité.

L'autre chose. Moi, j'ai lu aussi les mémoires qui s'en viennent. On va écouter plusieurs personnes. On est revenus aux chicanes sur la responsabilité du poids d'un centre-ville plutôt qu'à l'entente sur le développement d'une ville-centre. Le message que vous envoyez, c'est: Adieu, les solutions, bonjour, les problèmes. On revient dans le passé.

M. le maire, vous avez une grande expérience comme maire. Vous avez vécu la CUQ. Vous avez été maire de la ville-centre. Et je n'ai pas à faire de portrait sur la CUQ, quelle que soit la bonne volonté des personnes qui étaient présentes à l'intérieur de ce type d'organisation, ça menait à la chicane. Pourquoi? Parce qu'un maire est responsable des personnes qui l'ont élu. Alors, il y avait un peu une bataille sur les mandats des maires. Vous avez vécu les ententes intermunicipales ? on a entendu des maires nous dire que c'était absolument invivable ? et vous avez vécu la grande ville. Et vous êtes assez enthousiaste devant cette grande ville.

J'aimerais vous entendre sur deux choses. D'abord, la différence. Est-ce que la cohérence agit? Qu'est-ce qu'un maire... Vous êtes, je pense, reconnu comme un leader, un visionnaire. Comme maire, cette cohérence, est-ce qu'elle a de l'importance pour un maire d'une grande ville, d'une grande ville comme Québec?

Deuxièmement, vous avez eu l'expérience de la gouverne de la ville de Québec sous ces trois modèles. Vous avez donc vécu vraiment une diversité de modèles de gouvernance. Vous nous avez parlé de la ville gruyère tout à l'heure et vous avez dit: Je vais peut-être me retrouver maire d'une ville gruyère. C'est à ça que ça nous mène, ce projet de loi. Vous avez réagi tellement fortement que vous avez dit: Moi, je n'en veux pas, de votre ville gruyère; peut-être que je serais mieux de revenir à mon ancienne ville qu'à cette ville gruyère. J'aimerais ça que vous nous parliez de la difficulté, de l'incohérence de cette ville gruyère qui, tout à coup, se profile devant vous.

Le Président (M. Ouimet): M. le maire.

M. L'Allier (Jean-Paul): Deux minutes?

Le Président (M. Ouimet): Je pense que c'est un peu plus que ça. Commencez, et je vous ferai des signaux. Mais vous avez plus que ça.

M. L'Allier (Jean-Paul): À la Communauté urbaine, je ne veux pas dire que ça a été un nid à chicanes permanent à la Communauté urbaine. Elle a évolué tout doucement, mais, je peux le dire comme je le perçois, il n'y avait pas de chicane quand on s'entendait sur le statu quo. Dès qu'on voulait faire avancer quelque chose un peu substantiel, à ce moment-là ça gelait, ça buckait. Ça nous a pris 12 ans avant d'amender un schéma d'aménagement de l'ensemble du territoire parce qu'on n'arrivait pas à s'entendre. C'était le lieu finalement...

Les séances publiques duraient une demi-heure à peu près. On avait un caucus avant où on varlopait tout ce qui pouvait l'être, mais, en gros, on gérait l'incinérateur, on ne gérait même pas le transport en commun qui avait sa Société, on gérait l'évaluation foncière, puis, après ça... c'est à peu près tout. À un moment donné, les pistes cyclables sont arrivées. Ça a été non pour commencer tant que c'était sur le territoire de Québec, mais, quand ça s'est profilé sur le territoire vers le nord, ça a été oui, on a accepté. On a aidé la ville de Saint-Augustin à recycler l'orientation du campus, alors que j'ai été assez pesant en sa faveur de ce côté-là.

Donc, la Communauté urbaine n'était pas l'outil qui avait été pensé en 1969 par le gouvernement, c'est-à-dire un outil puissant qui amenait la cohésion. Pourquoi ça? Parce que le fond du fond du problème, que ce soit à Montréal, Québec, à Sainte-Enclume, ou n'importe où, c'est toujours le même fond du problème. C'est celui qu'on a discuté avec M. Ryan, votre prédécesseur, avec vous, c'est celui de la fiscalité.

Les villes, pour vivre, tirent 80 % ou plus de leurs revenus de la taxe foncière. On nous a enlevé avec le temps toute forme de taxe qui récompensait la vigueur du développement. Or, la taxe foncière nous met en concurrence féroce avec nos voisins immédiats. Ma taxe foncière, moi, n'est pas en concurrence avec Drummondville. Elle est en concurrence avec la ville d'à côté. C'est la ville qui poigne le gros cinéma qui poigne la taxe du gros cinéma, et ainsi de suite, et ainsi de suite. Et donc, par définition, les maires à la CUQ ne pouvaient gérer que les consensus, et donc on n'avançait plus. C'est Gilles Lamontagne qui, le premier, en 1976, a fait une page complète dans Le Soleil pour décrire ça.

Les ententes intermunicipales, il y en a qui ont très bien marché. Il y en a qui n'ont pas fonctionné parce qu'on ne les a pas signées. On ne pouvait pas les signer parce qu'on ne s'entendait pas. Mais celles qu'on a signées ont bien marché. Pourquoi? Parce que la ville de Québec, d'une façon générale, acceptait les comités paritaires. On a signé des ententes pour la police avec la ville de Beauport, par exemple, mais l'entente est paritaire. On avait le même nombre de personnes, même si la ville était trois fois plus grosse à Québec, sur le comité de gestion, etc. C'était une façon paritaire de faire les choses. Ça, ça a fonctionné. Mais on n'est pas allés jusqu'au bout: police à Beauport; Charlesbourg, police mais pas pompiers. Ensuite, je ne me souviens pas là... Oui?

Des voix: ...

M. L'Allier (Jean-Paul): ...Mais la Régie de la Haute-Saint-Charles, non; la ville de Sillery, non; la ville de Sainte-Foy, non; Val-Bélair, non. Chacun sa police. Vous allez avoir des mémoires qui recommandent de revenir à chacun sa police, parce que c'est le fun d'avoir sa police, puis il peut y avoir des avantages. Moi, je ne vois que des inconvénients à ça. Ce n'est pas notre rôle de gérer la police dans une ville. On donne des budgets, on leur donne des programmes de fonctionnement, puis ils marchent.

n(17 h 10)n

La cohérence, c'est la motivation de la gestion dans une ville. De sentir que toutes les composantes de sa ville sont orientées vers un même objectif, même si les moyens proposés sont différents puis qu'on bagarre au sujet des moyens, c'est formidable. Rêver qu'une agglomération d'un demi-million d'habitants qui constitue, au niveau des instances internationales comme l'UNESCO et l'OCDE, la taille optimale de ville pour le développement, qu'on ait ça dans la région... Moi, je peux vous dire une chose: un des gros thèmes de ma campagne, de la dernière, c'était le suivant: Êtes-vous tannés des chicanes? C'est ça qui a été applaudi le plus fort. Puis on s'est fait élire parce qu'on était tannés des chicanes puis qu'on a dit qu'on y mettrait fin. Or, quand quelqu'un me propose de frotter une allumette sur un bâton de dynamite en disant: Ça ne prendra pas, mais que, si jamais ça saute, c'est la chicane qui revient, j'ai peur. Merci.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le maire. Ceci met un terme à notre échange. Je vous remercie de votre participation à nos travaux.

J'invite maintenant les représentants du caucus des villes d'agglomération du Québec à s'avancer.

Caucus des villes d'agglomération
du Québec (CVAQ)

Alors, la commission va reprendre ses travaux. J'aimerais vous signaler qu'il est 17 h 15. On est censé terminer à 18 heures. Pour dépasser l'heure, ça va prendre un consentement, et pour respecter le 60 minutes qui a été accordé au caucus des villes d'agglomération du Québec. Alors, à 18 heures moins deux, je demanderai le consentement, et vous me l'indiquerez. Alors, M. Carette, je vous souhaite la bienvenue et je vous demanderais de nous présenter les gens qui vous accompagnent.

M. Carette (Roger): Bonjour, M. le Président. À la table, je suis accompagné de Marc Gascon, maire de Saint-Jérôme et vice-président de notre groupe, et de Jean-Claude Beauchemin, qui est maire de Rouyn-Noranda et puis qui est secrétaire de notre groupe. Vous me permettrez de saluer également les collègues d'une dizaine de villes impliquées par la loi, qui sont présents dans la salle et qui sont anxieux de connaître les réactions des membres de la législature aux interventions et recommandations, demandes et avis que nous vous formulons.

Le Président (M. Ouimet): Vous aviez demandé, je pense, aussi de pouvoir déposer un document.

M. Carette (Roger): Nous sollicitons l'autorisation, que vous pourriez sans doute nous accorder, de déposer un document statistique en appui à certaines de nos demandes et avis, à certains avis, de même qu'un document annexe que la ville de Magog demande de déposer.

Document déposé

Le Président (M. Ouimet): Alors, j'accepte les dépôts et je vous cède la parole pour votre présentation de 20 minutes.

M. Carette (Roger): M. le Président, M. le ministre, Mme la critique de l'opposition, Mmes et MM. les membres de la législature du Québec, je vous prie de recevoir les choses que nous avons à vous dire de la même manière que nous vous les présentons, c'est-à-dire une contribution la plus sincère et la plus honnête que nous voulons apporter au développement, à la croissance et, dans certains cas, à la survie du Québec. C'est le seul motif profond qui nous anime de se présenter à nous.

Nous nous excusons que, dans la première édition ? on n'a pas changé d'édition ? qui vous fut livrée le 22 août, il y ait quelques coquilles qui ont sans doute horripilé le grand Robert, le petit Maurice, puis le moyen Larousse. Maintenant, on a une version revue et corrigée, mais sans changement de texte.

Je n'ai pas l'intention de lire tout ça. On se paie le plaisir et l'honneur de croire que vous l'avez lu. Et je vais vous faire un survol en quatre, cinq points maximum de l'essentiel de nos demandes et de nos avis pour laisser plus de temps à la période de questions et des échanges qu'on souhaite les plus productifs possible.

Notre groupe, notre ville, le caucus des villes d'agglomération regroupe 26 villes au Québec qui correspondent à la définition fédérale agréée par le provincial de qu'est-ce qu'une ville d'agglomération au Canada. Nous regroupons présentement 850 000 personnes, citoyens contribuables. C'est la population des villes qui ont été regroupées sous l'empire, si vous voulez, de la loi n° 124. Si nos agglomérations étaient complètement regroupées, nous représenterions 1 316 000 personnes. Il y a 75 anciennes municipalités qui ont été regroupées et qui forment présentement 15 municipalités, 15 villes nouvelles, qui sont visées par le projet de loi n° 9 qui ne porte pas pour le moment le nom de ses auteurs, mais on sent que ça va venir.

Nous sommes membres de l'UMQ du Québec, l'Union des municipalités du Québec. Nous existons comme caucus depuis beaucoup plus longtemps que la restructuration de l'Union. Dès 1994, nous avons été impliqués dans les études de la commission Martin sur les villes-centres du Québec et, depuis, nous sommes extrêmement cohésifs comme groupe.

Ce qu'on voudrait d'abord vous dire, puis c'est l'essentiel de notre présentation: premier point, notre opinion, les 26 maires, sur l'ensemble de la loi; deuxièmement, notre opinion sur la pertinence de celle-ci en autant que nos villes nouvelles sont concernées; puis, dans un troisième temps, on voudrait vous faire des observations au cas où, nonobstant les choses pertinentes, croyons-nous, qu'on va vous dire, le législateur québécois continuerait son intention d'adopter une loi de regroupement de cette inspiration-là.

Première considération, les objectifs de la réorganisation municipale. À notre analyse à nous, tous les gouvernements qui se sont succédé au Québec depuis 1960, de la même manière que tous les ministres des Affaires municipales ou chargés d'une partie de celles-ci qui se sont succédé et qui étaient dédiés au progrès de la communauté québécoise et d'une façon particulière à la survie des régions ? puis j'en profite pour saluer les députés des régions qui sont ici; vous n'êtes pas nombreux; vous êtes suffisamment nombreux pour faire valoir vos idées aux caucus ou à l'Assemblée nationale...

Je reviens: Tous les gouvernements et tous les ministres des Affaires municipales ont promu quatre objectifs fondamentaux. Nous prenons la peine de vous les rappeler: Tout le monde est favorable à une meilleure équité fiscale, puis ça ne peut pas signifier 25 choses, ça en signifie une. Deuxièmement, tous les gens qui se sont succédé à la gouvernance du Québec ont promu une accessibilité à des services municipaux modernes. Tout le monde a également promu que les municipalités, les villes et, d'une façon plus particulière, les villes moteurs de développement aient la capacité de générer ce développement économique là. Et, finalement, tous les ministres puis tous les gouvernements ont prôné la démocratie municipale.

Nous devons vous dire que, à la lecture que nous pouvons faire du projet de loi n° 9 dans sa version actuelle, nous ne trouvons aucun élément adéquat à l'un quelconque des objectifs permanents promus par ceux qui voulaient et veulent encore développer le Québec. C'est l'élément le plus fondamental des choses que nous voulons vous dire. Nous estimons qu'en tant que législateurs, puisque c'est à l'Assemblée nationale que vous allez disposer de la question, vous devez mesurer la qualité de la loi en fonction des objectifs que nous venons de mentionner.

n(17 h 20)n

L'autre élément sur lequel nous voulons attirer votre attention, il nous est inspiré par l'article premier de la loi, qui, généralement, campe l'intention des auteurs. Nous estimons que les regroupements dans nos territoires n'ont pas été imposés, et c'est l'exhortation principale qu'on vous demande de comprendre. Les conseils municipaux qui étaient en place en 2000, 2001, 2002 ? il n'y en a pas eu en 2003 à notre connaissance ? qui ont accepté, qui ont demandé ou qui ont convenu entre eux de faire des regroupements, étaient des conseils légitimes. Ils avaient été élus, ils étaient en place et ils ont volontairement demandé au législateur ou au ministre, selon le cas, de faire les regroupements.

J'attire votre attention sur le fait que l'article 1 de la loi parle des changements imposés. Nous ne comprenons pas pourquoi, en annexe à celle-ci, les 15 villes qui ont été regroupées sous l'empire de la loi n° 124 fassent partie du champ d'application de cette loi-là. C'est à cette considération fondamentale...

Puis on a entendu ici beaucoup de choses ce matin, avec énormément de plaisir, des gens des deux côtés de la salle parler de légitimité. Les gens qui ont demandé et obtenu les regroupements intervenus dans les villes d'agglomération étaient des conseils municipaux légitimes, légaux, de la même manière que nous le sommes puis de la même manière que vous êtes. C'est le fondement de notre demande première, nous vous demandons d'exclure la quinzaine de villes que nous représentons du champ d'application de cette loi, ne serait-ce que pour ce motif.

Troisième chose. Nous avons cru que, nonobstant que nous ne retrouvons pas des objectifs fondamentaux dans la loi, des conseils municipaux légitimes et légalement élus ont demandé et obtenu les regroupements. Nous prenons la précaution, sur les grands principes de la loi, pas sur la petite plomberie, qui est quand même importante, parce que, souvent, c'est la petite plomberie qui gâte la sauce, de vous faire quelques observations. En certains cas, ça va être des reprises qu'on a entendues avec grande satisfaction cet après-midi.

Nous avons entendu, ce qui est devenu une déclaration majeure dans le monde municipal, M. Charest, le 5 avril ? on appelle ça, la déclaration du 5 avril ? où il s'est engagé, au nom de la formation politique qu'il représentait puis qui forme maintenant le gouvernement... l'engagement qu'il y aurait fiscalité d'agglomération réelle. On a examiné le projet de loi qui nous est déposé dans la version qu'il y a là et nous ne retrouvons pas les principes élémentaires d'une fiscalité d'agglomération. Si vous analysez avec un peu d'attention les articles 54 à 60, vous allez constater que ce qui s'appelle fiscalité d'agglomération à prévaloir au cas où des réfractaires deviendraient sécessionnistes, il n'y a que des équipements qui sont reconnus comme devant être partagés. Quand il s'agit de programmes et d'activités dédiés à l'attraction des business, des entreprises chez nous, ce n'est pas reconnu comme ouvert dans le champ des supramunicipaux. Quand ce sont des contributions que les municipalités des anciennes villes-centres, qui sont le coeur des villes d'agglomération, des contributions qu'ils apportent à des organismes non municipaux mais qui constituent aussi des facteurs d'attraction puis de rétention des entreprises puis des jeunes cerveaux qu'il nous faut garder en région si on ne veut pas crever, ce n'est pas admissible au champ de la fiscalité d'agglomération qui est là. Nous le déplorons dans les deux cas. Nous interprétons le texte 54-60 comme disant: Ce ne sont que des équipements, et nous interprétons aussi l'ensemble de l'économie de ça comme étant de propriété exclusivement municipale.

À cet égard-là, nous voulons ouvrir une parenthèse sur le contexte actuel puis sur des choses que nous interprétons dans la loi. Beaucoup de pouvoirs sont réclamés, je ne dirai pas par le ministre, mais pour le ministre. Il me semble qu'à plusieurs égards vous devriez référer des situations de non-entente à la Commission municipale qui devrait être investie ou réinvestie de pouvoirs d'arbitre après avoir rempli un rôle médiateur-conciliateur-facilitateur. Je pense que le gouvernement, quelle que soit la qualité du ministre actuel, ne peut se faire arbitre des litiges ou des conflits qu'il crée.

L'observation suivante qu'on veut vous faire, ça vous a été fait également ce matin, puis on a apprécié que les gens se... plusieurs personnes, notamment la FQM, s'inscrivent en faux contre ça, les articles 69 à 76. Nous nous demandons encore qui a pu inventer cette patente-là. On ne comprend pas.

Nous vous avons remis une annexe, O.K., qui, non seulement dans la première page fait la démonstration que nos regroupements sont volontaires par 75 % et plus des populations représentées, dans le deuxième... dans le document suivant, dans le dernier de ces trois documents, vous allez constater que des villes liées ? c'est un terme inventé dans la loi, dans le texte actuel de la loi; je suis convaincu que ça ne restera pas comme ça ? que les villes liées devraient payer un tribut aux villes qui seraient défusionnistes dans les cas où l'évaluation municipale dans le coeur de la ville per capita serait plus élevée que l'évaluation per capita dans la banlieue sécessionniste.

Il y a des gens qui ont déjà fait de la politique municipale ici, puis il y a des gens qui en ont connu beaucoup. Nommez-moi une ville qui désormais va essayer d'aller chercher une business de 10 000 225 emplois puis dire: Je vais planter ça dans ma ville, ça aura pour effet d'élever mon évaluation per capita, et je paierai un plus grand tribut à ma banlieue sécessionniste. Ça ne se peut pas. Je ne sais pas... Je ne sais pas, je suis convaincu que ce n'est pas M. le ministre qui a signé ça, là, mais quelqu'un vous a présenté ça. Il n'y a pas une personne qui a fait du développement municipal qui peut croire que ça a de l'allure. C'est le contresens d'une fiscalité d'agglomération.

Déjà que les banlieues, avant d'être regroupées, ne contribuaient aucunement ou très peu au développement de l'emploi dans la ville-centre. Là, tu vas être ville-centre d'une agglomération, tu vas forcer pour te développer, aller chercher les jeunes, des business, des entreprises, puis, parce que ton évaluation per capita monte, tu vas payer un tribut à ton voisin. Mais déjà la moitié des travailleurs que tu avais dans ta ville d'agglomération restaient chez tes voisins qui tiraient, eux, avantage de la taxe foncière de leur résidence.

Ceux qui ont fait de l'administration municipale, vous savez très bien qu'en industriel les services que tu rends coûtent plus cher que les taxes que tu perçois. En institutionnel, bien, vous êtes placés pour savoir que le gouvernement du Québec ne paie pas encore ses en-lieu de taxes au complet; il en manque encore pas mal. Sur une ville de 25 millions de budget, il en manque encore un demi-million à percevoir en taxes. Ça va arriver parce que le gouvernement a ramassé nos TGE puis, de temps en temps, il nous remet un petit peu de ça. En tout cas. Sur cinq ans, il va nous remettre ce qu'il nous a enlevé.

Ce qu'on veut vous dire, c'est que les choses qui vous ont été dites pour ce qui est de la péréquation locale, nous vous exhortons, si jamais il y a une loi puis si jamais la loi continue de nous impliquer, nous demandons de mettre le chapitre à la poubelle avec la même conviction que les gens de la FQM vous le demandaient ce matin ? ce qui nous a étonnés d'ailleurs, on a félicité M. Belzil en sortant. Nouvel organisme, nouvelle position d'organisme, progressiste désormais, absolument extraordinaire.

Je vais vous faire parler... Mon collègue Marc Gascon va vous présenter rapidement, pour ne pas brûler le temps qui nous reste ? oui, il en reste un petit peu ? des trois dernières sections... les rétrocessions. Allez-y, M. Gascon.

M. Gascon (Marc): Bon, allons-y. Alors, sur la question des rétrocessions, nous estimons que la loi, si elle était adoptée et selon ce que le projet propose, devrait impérativement définir le cadre de rétrocessions auxquelles les villes regroupées sont confrontées. Parce qu'il y a un trou. On essaie de comprendre comment on pourrait s'acquitter d'une tâche pareille si, à tout le moins, les gens qui y sont, qui doivent y travailler ne sont pas imputables en plus. Alors, la tâche requise des rétrocessions est inévitable mais ne peut être... ne peuvent être confiées, à notre avis, à un comité de transition. Quelle que soit la qualité de ces gens, je pense qu'il est impératif que ce soient des gens imputables aux citoyens, puisqu'on parle d'actifs municipaux.

n(17 h 30)n

Mais nous considérons aussi que ces informations sont préalables à l'exercice que l'on dit vouloir démocratique de signature des registres et de vote référendaire. Le cadre des rétrocessions devrait définir à notre avis, selon nous, le mode relatif selon les questions suivantes: Les actifs matériels mis en commun au moment du regroupement, qu'en fera-t-on? Qu'est-ce qu'on va en faire? Qu'est-ce qu'on va faire avec ceux qui ont été conservés, ceux qui ont été vendus parce que en surplus, et ceux qui ont été détruits pour vétusté ou non-conformité, d'une part? Qu'allons-nous faire concernant la question des actifs financiers réservés par les villes, après le regroupement, à des secteurs éventuellement sécessionnistes? Les surplus également, accumulés de la nouvelle ville mais également des anciennes villes? Les dettes communes encourues après le regroupement? Et Dieu sait que ces nouvelles villes là qui ont été mises en place dans les...

Je pense que vous avez vu aujourd'hui avec quel enthousiasme les gens ont pris en main la question des nouvelles villes et de faire en sorte que leur réussite en soit un état le plus rapidement possible. Bien, il y a eu des engagements majeurs, à coups de millions, dans ces municipalités-là. Et, bon, quelle sera notre réalité concernant les dettes encourues après le regroupement?

Les coûts également encourus par la mise à la retraite pour la réorganisation d'effectifs. Vous savez, il y a des gens qui ont été mis à la retraite avec une prime de séparation, avec tout ce que ça comportait, et demain on va se poser des questions sur... Bon, il faut rétrocéder, ces gens-là qui faisaient partie de l'ancienne ville sont disparus, sont partis, il y a eu des coûts à ça. Est-ce que l'ancienne ville va payer pour cette rétrocession-là, en fait, pour cette répartie-là? C'est à questionner.

Les passifs comptables notamment rattachés à des contrats à moyen et long terme. La ville, c'est une réalité, la nouvelle ville, elle est légalement constituée, elle agit au quotidien, il y a encore pour des millions de contrats qui ont été donnés pour les cinq ans, 10 ans à venir. Comment allons-nous séparer ces contrats-là? Les subventions PAFREM; les informations sur les tarifs révisés; le retour du personnel transféré et les conditions de travail applicables ? j'en ai parlé un peu ce matin, je vais y revenir; le plan de desserte policière. Et, en plus, on ajoute actuellement la question des schémas de risques chez les pompiers. Le partage des effectifs embauchés suite à l'uniformisation des services. Nouvelle ville, uniformisation des services, nouvelles embauches, en plus, dans certains cas. Comment allons-nous répartir ces nouvelles questions là?

J'en ai parlé ce matin, les conventions collectives, le regroupement de quatre, cinq, six syndicats dont on en a fait un seul, et puis on resigne une nouvelle convention collective. Est-ce qu'on devra retoucher au sacro-saint article 45 du Code du travail? La question, elle est là, elle est bien là. Et je peux vous dire que, connaissant cette question-là, le monde municipal y fait face régulièrement. C'est une question qui ne sera pas simple à résoudre.

Alors, au cas où le projet de loi serait adopté et qu'il s'appliquerait au regroupement de nos villes, nous demandons donc qu'il prévoie le cadre légal. On sait bien qu'une loi ne peut pas s'appliquer à tous les aspects, parce que chaque ville est particulière et on ne peut pas couvrir tous les angles, on le comprend bien. Mais qu'il prévoie le cadre légal concernant les rétrocessions.

Les informations préalables, bien, enfin, aussi, on en a parlé beaucoup, mais on réitère également, M. le ministre, qu'il faut rendre publiques, avant l'ouverture des registres, les informations, et le maximum d'informations, que tous les estimateurs estiment prérequis au respect du principe élémentaire de la démocratie. De la même façon qu'un conseil municipal se veut transparent et doit publier régulièrement dans les journaux chaque geste qu'il pose, que ce soit lors d'un règlement d'emprunt ou d'un changement sur le plan de zonage, c'est un processus transparent, il faut impérativement que l'ensemble des coûts d'une éventuelle défusion doive être annoncé préalablement à la population des civils.

Et enfin, je vous dirais, sur la question du climat, la démarche vers l'équité, je vous dirais, fiscale a été entreprise. Les formations des services et leur modernisation allaient bon train. En plusieurs milieux, les efforts de concertation pour le développement donnaient déjà des résultats encourageants. Voici que le dépôt du projet de loi vient malheureusement brouiller les cartes en certains endroits et en paralyser bien d'autres. Beaucoup de questions se posent, nos gens sont inquiets.

Le Président (M. Ouimet): M. Carette, il vous reste 20 secondes.

M. Carette (Roger): Si vous me permettez, en 20 secondes, vous avez un maître à penser, et nous avons un maître à penser en matière politique au Québec, qui signifiait à ses collègues que la valeur fondamentale d'une membre de la législature, c'était le respect. Parce que nous vous demandons de respecter la légitimité des conseils qui ont demandé et obtenu des regroupements, nous vous demandons de nous exclure du champ d'application de la loi n° 9. Je sais que vous n'avez pas aimé, tout le monde, c'est peut-être vrai des deux côtés, que nous employions le terme «révisionniste». Mais, quand le législateur, vous êtes membre, vous êtes à la législature, quand il s'arroge le pouvoir de réviser des décisions d'une instance qui lui est inférieure, ce serait une piste dangereuse de vous embarquer dans une attitude, comme Assemblée nationale, de révisionniste, dont l'étape suivante vous est connue, mais qu'il serait malséant de parler ici.

Le Président (M. Ouimet): Alors, merci, M. Carette, pour cette présentation de... le résumé de votre mémoire. Je cède maintenant la parole au ministre des Affaires municipales.

M. Fournier: Merci, M. le Président. M. Carette, messieurs, merci d'être avec nous pour clore cette journée municipale. J'ai quelques points sur lesquels je veux revenir avant d'aborder la question que je veux vous poser. Puisque certains sujets ont déjà été mentionnés aujourd'hui, là, je vais aller... je vais couper un peu court.

Je vous dis d'entrée de jeu que, pour ce qui est des équipements à propriété municipale, l'aspect de la propriété, nous allons regarder cet élément-là, je vous le dis d'avance. Mais, pour ce qui est de la fiscalité d'agglomération, je trouve que vous y allez un peu court lorsque vous dites finalement qu'il n'y a rien de prévu, dans la loi, sur la fiscalité d'agglomération, alors qu'on nous a fait la démonstration aujourd'hui qu'il y avait de 50 % à 70 % de l'ensemble des fonds qui doivent y être attribués. Donc, entre les deux présentations...

Et on n'a vu aujourd'hui que des représentations d'un seul côté. Vous savez que le débat sur le projet de loi n° 9 envisage deux côtés: il y a ceux qui sont favorables aux nouvelles villes, ceux qui sont défavorables à une partie, en tout cas, de ces nouvelles villes. Aujourd'hui, on n'a entendu qu'un seul côté, et, malgré cela, il y avait une divergence sur l'ampleur ou l'envergure de ce qui est prévu dans le projet de loi à l'égard de la fiscalité d'agglomération. Mais, quoi qu'il en soit, on y verra un peu plus près, parce que, pour nous, c'est une dimension excessivement importante. Vous y avez fait référence brièvement par la déclaration, vous avez dit, du 5 avril, je ne sais pas si j'ai la bonne date. Alors, pour nous, c'est une dimension excessivement importante. Et, comme j'ai dit à trois ou quatre reprises aujourd'hui, il n'y a pas de retour vers le statu quo ante. Et, dans ce sens-là, bien que votre position soit différente de celles de d'autres aujourd'hui, nous allons quand même la regarder d'un peu plus près.

Je prends bonne note des exigences sur la clarté des informations concernant les règles de transition. Nous y travaillons déjà. Ça a déjà été demandé. Nous avons l'intention d'être le plus clairs possible. Je répète encore une fois que nous acceptons tout à fait ce fardeau. Nous avons fait le choix de la consultation, nous devons remplir ce fardeau. Si nous n'avions ? comme d'autres gouvernements ? pas choisi la consultation, nous n'aurions pas eu à remplir ce fardeau et personne n'aurait été informé. On peut nous reprocher, peut-être qu'on nous reprochera, de ne pas avoir donné encore plus d'informations même si on s'engage à donner le maximum. Mais, dans tous les cas, puisqu'on a fait le choix de la consultation, on va aussi relever le fardeau de l'information, ce que d'autres n'ont peut-être pas fait avant. Et ils ne s'empêcheront quand même pas de nous critiquer à cet égard-là.

Je prends bonne note de votre proposition sur le rôle de la Commission municipale. Pour ce qui est de la péréquation, je vous renvoie à ce que la Fédération québécoise des municipalités nous a dit aujourd'hui et à ce que je leur ai dit lors de leur présentation, à ce que je vous ai déjà dit antérieurement. Et je pense qu'on va regarder les effets ou les buts qui étaient visés par la péréquation, on va essayer de trouver une mécanique qui n'en fait pas des effets contre-productifs. Enfin, c'est ce que nous analysons déjà.

Sur les regroupements volontaires dont vous plaidez, peut-être que j'aurais eu deux questions. La première sera finalement un commentaire que je vous fais, qui va sûrement susciter chez vous une réaction, donc je la prendrai. Et, ensuite, je veux poser une question sur un autre sujet.

Vous plaidez aujourd'hui la légitimité du choix, que vous appelez un regroupement volontaire, comme s'il n'y avait pas une démarche, je dirais, qui vous amenait à vous forcer à avoir un regroupement volontaire, une légitimité un peu forcée dans la mesure où on plaidait à l'époque... peut-être pas vous, mais certaines personnes dans certaines localités de ces villes à regroupement volontaire plaidaient à l'effet qu'il y avait comme une épée de Damoclès au-dessus de leur tête et qu'ils étaient ni plus ni moins amenés dans cette direction-là, ce qui a amené l'engagement que nous avons pris à l'égard des citoyens de ces villes-là.

Alors, démocratie, légitimité, dans tout état de cause, on nous demande de ne pas respecter notre engagement, ce qui me met un peu mal à l'aise, je vais vous le dire, par rapport à la démocratie. Ça me met toujours mal à l'aise quand on nous dit que la meilleure chose qu'on pourrait faire pour la démocratie, c'est de ne pas respecter nos engagements que nous avons pris dans le cadre démocratique d'une campagne électorale. Honnêtement, je me sens mal à l'aise. Ce serait très facile, soit dit en passant, ce serait très facile. Je ne suis pas sûr que ce serait très courageux, mais très facile de dire: On me conseille, comme plus grande mesure démocratique, d'abandonner tous les engagements que j'ai pris dans une campagne électorale. Moi, personnellement, je suis mal à l'aise. Et on l'a pris, cet engagement-là, face à des citoyens qui sont là.

n(17 h 40)n

Soit dit en passant ? et je termine là-dessus pour vous laisser réagir à ça, parce que c'est votre point majeur dans votre mémoire ? si d'aventure c'est un regroupement volontaire, comme vous le dites, quelle sera la... Et, comme je sais que vous êtes représentants de votre population en lien direct, peut-on imaginer qu'il y aura même des registres de signés? Je n'envisage même pas de référendum ici, puisque c'est volontaire. Puisque tout cela a été fait dans un cadre d'acceptation d'ouvrir la voie, ça en porte quelles conséquences si c'est volontaire? Évidemment, si c'est forcé, si, dans certains cas, c'est forcé, c'est parce que les gens ne voulaient pas, ils ne voulaient pas parce que...les citoyens ne voulaient pas. Et là ils venaient ouvrir des registres à un certain risque. Mais, si c'est volontaire, les citoyens le voulaient, est-ce que c'est parce qu'il y a eu des nouveaux citoyens qui se sont ajoutés? Qu'est-ce qui fait en sorte qu'il y a péril en la demeure si tant est que c'est si volontaire?

Le Président (M. Ouimet): M. Carette.

M. Carette (Roger): Sur cette question-là, M. le Président, Jean-Claude Beauchemin, qui est maire de Rouyn-Noranda, notre secrétaire, sur la base du document qu'il vous a déposé ? je pense qu'on l'a fait circuler ? va commenter sur l'intervention de M. le ministre, avec votre permission.

Le Président (M. Ouimet): Oui, oui, bien sûr. Allez-y, M. Beauchemin.

M. Beauchemin (Jean-Claude): Alors, merci. Il faut bien faire, là... bien poser la question. Puis j'aimerais qu'on... Je ne peux pas m'empêcher de réagir à l'expression que vous dites: «si d'aventure». Alors, je pense que les chiffres qu'on vous dépose là, il peut peut-être s'être glissé des imprécisions dedans, parce que je comprends que même quand les documents nous arrivent du ministère des Affaires municipales, des fois on trouve dans les statistiques des affaires difficiles, mais, grosso modo, vous voyez, les chiffres qui sont là sont impressionnants. Et c'est en travaillant et en discutant entre nous que ça nous est quasiment arrivé comme une surprise de constater à quelle point cette démarche de regroupement, en ce qui concerne les villes d'agglomération, a été une démarche largement volontaire.

J'ai déjà eu l'occasion d'en discuter. Et, encore, dans ma ville: Ah! volontaires, là, on était obligés, tu sais. On a parlé de carottes et de bâtons.

Mais de quoi s'agissait-il? C'est vrai qu'il y a eu des adhésions qui se sont faites, qui n'étaient pas là spontanément au départ. C'est vrai. Tout le monde va reconnaître ça. Je pense que Mme Harel, la première, va le reconnaître. Mais de quoi s'agissait-il? De façon tout à fait correcte, je pense, et ça, ça a commencé déjà ? mon ami Carette a cité M. Ryan... moi, dans l'époque que je connais le mieux des affaires municipales, là... commencé avec M. Ryan. Il y a eu ? c'était avant aussi mais, de façon systématique, depuis que M. Ryan est passé aux Affaires municipales ? il y a eu une volonté affirmée du gouvernement du Québec de dire: On change la donne en ce qui concerne les responsabilités, les transferts de responsabilités puis le poids financier de certains services.

Alors, quand on dit... Et c'est pour ça que je dis: Faisons attention à ce qu'on invoque, là. Quand on dit: Les municipalités sont devenues volontaires parce qu'il y avait des pressions, des menaces ? appelons ça comme on voudra, là; ça devient un langage politique, ça fait qu'on peut choisir les mots qu'on veut ? la réalité, c'est que le gouvernement du Québec... Je vous pose la question, vous êtes ministre du gouvernement du Québec: Est-ce que le gouvernement du Québec a le droit de prévenir une municipalité, de dire: Écoute, tu veux rester dans ton coin, là, mais la péréquation puis la subvention pour ceci, puis la subvention pour cela, parce que tu es petit puis tu n'es pas assez riche, tu te le paieras toi-même, ton service? Parce que c'était ça, les pressions. Je ne sais pas, pas à ma connaissance, il n'y a pas eu de violence physique, il n'y a pas de menace de prison. C'était désormais le gouvernement du Québec. Et ça, ça n'a pas commencé avec le gouvernement précédent. Je dis que... Moi, je suis dans les affaires municipales depuis 1983 et, vraiment, le grand changement, le grand vent de changement a été initié par M. Ryan. Et ça, ça a été constant par tous les ministres, tous les gouvernements depuis ce temps-là.

Alors, oui, il y a eu évolution des esprits. Oui, certaines municipalités qui étaient contre au départ ont fini par dire: Oui, on adhère, on est aussi bien d'adhérer. Puis là, si j'avais six heures devant moi, je pourrais vous donner une série de cas d'espèce. C'est assez remarquable d'avoir toutes ces démarches-là, mais on n'a pas le temps de faire ça. Donc, oui, mais de façon, je crois, tout à fait légitime pour le gouvernement, pour les gouvernements qui se sont succédé, qui ont amené progressivement des municipalités à dire: Oui, on est mieux d'aller dans le regroupement.

Moi, au départ, j'étais maire d'une petite ville limitrophe à Rouyn-Noranda puis, en 1995, j'ai décidé qu'il valait mieux entreprendre une démarche de regroupement municipal, entre autres, à cause de ça. Parce que, à partir du moment où M. Ryan avait commencé à nous déverser chez nous une série de responsabilités qui pesaient financièrement, j'ai dit: On va constater...

Alors, est-ce que c'était volontaire, ma conversion? Au début, non, je peux vous le dire. Je me suis bien battu contre la réforme Ryan, ce n'était pas volontaire, mais, à la fin, je l'étais. Alors donc, je pense que, là, la pression dont on parle, on parle dans un système très démocratique.

L'autre affaire sur laquelle... Je pourrais insister sur bien des points. Un deuxième...

Le Président (M. Ouimet): M. Beauchemin, brièvement. Il vous reste moins d'une minute.

M. Beauchemin (Jean-Claude): O.K. Brièvement, c'est qu'il y a au moins une chose qu'on doit reconnaître. Actuellement, il y a des municipalités chez nous où les conseils municipaux étaient tout à fait volontaires pour le regroupement. Et, dans la loi telle qu'elle est prévue, ces municipalités-là qui ont vraiment, en conformité à toutes les règles démocratiques du moment, dit oui au regroupement, il pourrait arriver une minorité de 10 % de citoyens qui diraient: Vous autres, là, que le diable emporte le conseil municipal d'il y a trois ans. Je reviens en arrière.

Alors, à la limite, à la limite, si une ville qui est dans le 14 %, par exemple, à La Tuque, qui ne voulait pas... qui voudrait revenir en arrière, mais pas les autres, où là la démarche a été: le conseil municipal a adopté une résolution, il l'a transmise au ministre, le ministre a donné... Alors, je conclus là-dessus parce qu'on me le demande.

Le Président (M. Ouimet): Il ne reste plus de temps. Je vais aller du côté de l'opposition maintenant. Mme la députée de Bourget.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. M. le maire de Rouyn-Noranda, vous représentez 41 000 concitoyens. C'est ce que je comprends. M. le maire de Saint-Jérôme, 60 000; M. le maire de Saint-Georges, 28 000. Quand le ministre dit: Demain et à l'occasion de d'autres moments de cette commission, nous entendrons l'autre côté, l'autre côté, c'est des gens qui sont dans des associations de résidents, des associations de fusionnistes, je les respecte, moi, je ne leur en veux pas du tout, mais, quand le ministre met dans la même balance et accorde la même valeur à vous qui représentez 41 000 personnes, vous qui représentez 28 000 personnes et vous, M. le maire de Saint-Jérôme, qui représentez 60 000 personnes, moi, je serais bien insultée. Ces deux côtés ne sont pas égaux. Ce sont des points de vue qui ont de la valeur par ailleurs. C'est correct qu'il y ait des gens qui disent: Ah, moi, je n'ai pas aimé telle affaire puis je trouve qu'on devrait... sur tel élément, ça devrait être mieux, puis c'était mieux avant, etc., mais qu'ils se présentent aux élections municipales.

Vous avez été élus démocratiquement, et je crois, M. le maire de Saint-Georges, que vous avez raison de le dire, et ça s'est dit, vous avez passé une partie de la journée ici, je vous ai vu, je pense qu'on l'a dit de différentes manières. Si on veut que la démocratie marche, il faut qu'il y ait des règles et il faut que tout le monde respecte les règles. Et, une des règles, c'est de respecter les résultats. Et là, dans ce cas-là, il y a eu des élections municipales.

M. Beauchemin, tout à l'heure, vous avez raconté votre propre rapport à la création et à certaines fusions dans votre ville, dans votre région. Mais je comprends qu'il y a eu un travail des conseils municipaux. Si les gens n'avaient pas été d'accord, ils vous auraient mis dehors. Bon. Alors, ça, je pense que c'est un biais, et je reviens à ce que je disais en départ de journée, ça fait partie de l'imposture de ce projet de loi de présenter les points de vue comme étant tous égaux. Ça ne veut pas dire qu'ils n'ont pas de valeur, là. On peut s'exprimer sur ce qu'on veut dans la vie, mais, je m'excuse, des maires élus au suffrage universel, ce sont des points de vue qui, à mon avis... et c'est des gens qui ont passé le test de la démocratie. Alors, le ministre présente ça comme si c'était égal. Alors, ça, je tenais à exprimer cette réserve et me distancier des propos du ministre à ce sujet-là.

Moi, je pense que votre mémoire est important, d'abord parce qu'il vient du caucus des villes d'agglomération du Québec, et vous avez assisté à peu près à la même journée que moi. Je pense que c'est assez fascinant, ce qu'on a vécu. On a fait un grand tour du Québec et, même si vous êtes dans des villes de petite taille, moi, je suis originaire d'un milieu de plus petite taille, je sais très bien ? parce que, comme bien de mes collègues, je connais bien le Québec ? à quel point vous jouez un rôle stratégique fondamental.

C'est sûr qu'on a eu, ce matin, Montréal; on a eu tout à l'heure Québec et le caucus des grandes villes, mais tout ça est un tout. Et mon collègue de Blainville aura certainement l'occasion de vous relancer là-dessus.

n(17 h 50)n

Je trouve que l'intérêt de votre propos et de votre mémoire, c'est aussi de nous parler du développement du Québec dans son entier, dans ses moindres petits coins, qu'ils soient éloignés ou près des grandes agglomérations. Et, en ce sens, ce projet de loi, à mon avis, vous met dans une position assez vulnérable. Vous êtes des villes phares dans vos régions respectives. De plus petite taille, mais vous faites la même... le même... vous avez besoin de faire le même effort de cohérence, de rayonnement, de développement, puis je dirais même que, dans certains cas, ça peut être difficile à cause de l'éloignement, mais vous avez le même boulot à faire que Montréal et Québec, des villes de plus grande taille.

Alors, votre point de vue, pour moi, il est extrêmement précieux et il met en cause le développement du Québec en entier. Vous l'avez dit dans des mots différents, d'autres l'ont dit aujourd'hui: Le développement économique et le développement social du Québec passent par un renforcement des municipalités et, en ce sens, vous en êtes un exemple.

Je voudrais revenir. Ma question serait sur la question de la péréquation. Vous l'expliquez dans votre mémoire. Vous avez quand même dit, M. Carette, une phrase que j'ai notée: Si jamais, si jamais, si jamais, si jamais ce projet de loi est adopté, s'il vous plaît, le chapitre de la péréquation, mettez-le à la poubelle. Disons que c'est un verdict sans nuance, ça. Vous l'avez expliqué, mais j'aimerais ça vous entendre là-dessus, parce que le gouvernement actuellement prétend avoir, maintenir une équité entre les citoyens, entre les composantes d'une municipalité. Et ce que je comprends aux réactions des experts, là ? vous êtes des élus municipaux, vous êtes là-dedans tous les jours ? c'est que les moyens proposés sont tout à fait inadéquats; ou bien ils ont été déjà vécus dans le passé et les gens sont épuisés et en connaissent déjà les limites, ou bien on nous met sur des pistes qui sont tout à fait inadéquates.

Bon, par exemple, certains ont évoqué: Est-ce qu'on redonne des pouvoirs différents aux MRC, les villes résiduelles qui sortiront d'une fusion, enfin... J'aimerais ça vous entendre sur cette question-là de l'équité de la péréquation.

Le Président (M. Ouimet): M. Carette.

M. Carette (Roger): Si vous permettez, je vais introduire mon commentaire sur votre question à partir d'un des documents qu'on vous a remis tout à l'heure en début de séance, la feuille bleue. Ça, c'est juste pour les personnes parmi vous qui seraient moins familières avec la situation des villes-centres au Québec. C'est un document qui n'a jamais été questionné par qui que ce soit. Il date de 1994, les chiffres ont peut-être évolué un petit peu, mais c'est la fameuse commission Martin qui a posé pour la première fois, je pense, en termes articulés, la question des villes-centres. Je vais juste vous le commenter rapidement puis ensuite je vais répondre de façon précise.

Les six villes-centres de 100 000 et plus, là ? ils sont passés ici avant nous ? on ne parle pas en leur nom. Nous, dans les villes, les 25 villes ? il s'en est ajouté une après 1994 ? il y a neuf villes-centres où le taux de navettage pour fin d'emploi est de 70 %. Ça veut dire que, dans les banlieues anciennes qui sont maintenant regroupées, il y a 70 % des personnes qui demeuraient en banlieue, payaient leurs taxes foncières en banlieue et venaient tenir leur travail en ville. Il y en avait huit où c'étaient 80 % puis il y en avait huit autres où c'étaient 85 %. Vous allez comprendre très rapidement que la ville qui se donne un parc industriel, un motel industriel, qui va chercher un CNE, qui emprunte pour faire son parc pour amener des services d'eau et d'aqueduc, etc., si les contribuables de cette ville-là paient très cher pour aller chercher des emplois dont les détenteurs demeurent ailleurs, quand on parle de fiscalité d'agglomération, c'est pour établir une équité là-dedans.

Il n'y a pas plus grand consommateur de services municipaux qu'une école polyvalente dans une ville. Mon ancien collègue le sait ici, en termes d'eau potable, en termes d'eaux usées, en termes d'eau de surface qu'il nous faut drainer, en termes de police, en termes d'enquêteurs, en termes de protection incendie, le protectionniste, le type qui s'occupe de prévention, le préventionniste, doit aller faire des tours, etc., c'est le plus gros consommateur de services municipaux. Vous savez que le gouvernement ne paie pas encore toutes ses taxes là-dessus. Il nous a fait comprendre un jour qu'il n'était pas capable, mais qu'un jour il le sera. Il a ramassé nos TGE, puis il nous en remet un petit peu là-dessus, mais il en manque encore beaucoup.

Dans la plupart des polyvalentes de nos villes qui sont les moteurs de développement, puis dans des circonstances de survie, plus de la moitié des jeunes qui fréquentent l'école polyvalente de la ville ou du village ? on s'appelle des villes, nous, c'est correct ? plus de la moitié viennent de l'extérieur, et les gens ne contribuent point. Fiscalité d'agglomération, ça veut dire que tu devrais un petit peu payer pour ça.

Je ne passerai pas à travers les églises. Je vais donner... Les églises catholiques... On a 12 confessions religieuses dans ma ville. Ils ont tous des églises, des maisons, des exemptions de taxes, etc., les maisons de pasteur avec. Mais les fréquentants de ces confessions religieuses là, ils restent tous partout. Les services municipaux, c'est moi qui les fournis. Puis, comme il y a une exemption donnée par la Commission municipale, je ne reçois rien que 0,50 $, un service minimum là-dessus. Quand on parle de fiscalité d'agglomération, c'est ça.

Ce qu'on dénonçait ce matin, c'est l'annexe III, madame. Je ne pourrai pas vous la lire au complet. Ne la lisez que demain matin parce que vous allez faire un cauchemar. Dans cette annexe-là, prenez la ville que vous voulez, on vous fournit... On savait que c'était aux Affaires municipales, mais on dit: Peut-être qu'ils ne l'auront pas eu à temps, etc. C'est comme la feuille bleue, peut-être qu'ils l'avaient perdue. On vous fournit le montant que les villes-centres d'agglomération devraient payer en tribut s'il y avait démolition complète de la ville d'agglomération à chacune des municipalités sécessionnistes. Je ne vais pas tout vous lire, je vais prendre le cas de mon ami Beauchemin.

Mme Lemieux: ...sont faits. Alors, est-ce que c'est vous qui avez fait... peut-être pas vous personnellement, mais votre équipe qui avait fait ça ou si ça vient du ministère?

M. Carette (Roger): Non. C'est l'UMQ qui a fait ça puis elle a obtenu ces données-là de la part de très bons collaborateurs au ministère des Affaires municipales. Ça va très bien entre fonctionnaires. C'est juste de temps en temps... Mais c'est des chiffres qui sont officiels. Ils ont été obtenus de là.

Je vais vous donner un exemple. Rouyn-Noranda devrait payer en tribut 362 000 $ à ses sécessionnistes année après année. Moi, je vais vous garantir que, si une patente comme ça arrive ? c'est comme avec la défusion dans Rouyn-Noranda ? vous aurez une Gaspésie de plus au Québec, puis Dieu sait comment on est sensible au problème de la Gaspésie. Faites crever les villes-centres, vous allez faire crever les régions. Je vous le répète, il y a des députés de région ici, on vous exhorte quasiment à genoux ? on n'a pas le droit de se mettre à genoux ici, mais, en tout cas ? de vous tenir debout. Pas besoin de faire des grandes déclarations. Allez à votre caucus puis faites comprendre qu'on doit être exclus de cette loi-là si vous voulez que la province de Québec survive, non seulement avec Québec, Montréal, mais ses régions aussi.

Le Président (M. Ouimet): Alors, je dois maintenant retourner du côté ministériel, et tantôt je reviens avec le député de Blainville et vice-président de la commission. M. le ministre.

M. Fournier: Oui, une courte question. Parlant de respect pour les deux groupes, permettez-moi un petit aparté, ne serait-ce que pour les groupes qui viendront demain, de dire qu'effectivement j'ai du respect pour tous ceux qui viennent devant nous et un respect égal pour les citoyens qui sont là. Je suis capable de valoriser, ou quantifier, ou évaluer chacune des opinions, je me fais une idée. Mais je n'ai pas beaucoup de leçons à recevoir dans le respect de la part de... lorsque je pense au respect qui a été attribué à ces maires élus, légitimes, qui sont venus dans nos gradins au salon bleu, cette époque où tout brassait pas mal. On n'a pas inventé le brassage puis les chicanes, il y en avait d'autres avant nous qui l'avaient inventé. Puis, en termes de respect, on peut toujours se souvenir de ça. On peut jouer la petite guéguerre, là, entre nous, là, mais le respect, là, on peut se faire chacun la morale, j'ai l'impression, là-dessus. Mais, puisque nous sommes avec des invités, restons avec nos invités, et on gardera nos respects pour les périodes de questions.

M. le maire de Saint-Jérôme, je vais vous amener sur un autre sujet, parce que vous allez prendre l'article 45. Et le rapport qui, soi-disant, était à la base de ces regroupements disait finalement que le pire des deux mondes, ce serait de faire les fusions puis de ne pas changer l'article 45, qu'il fallait d'abord faire 45 et ensuite les fusions. Je crois comprendre que les fusions ont été faites et l'article 45 n'a pas été touché. Mais comment vous voyez ça, vous, l'article 45? Est-ce que vous considérez que le rapport, dans le temps, devrait être réanimé et qu'on devrait adapter l'article 45, ou vous considérez que, dans le fond, le rapport se trompait et que les fusions ont été bien faites et que le 45, vous n'en avez pas besoin?

Le Président (M. Ouimet): Juste avant de répondre... Avant de répondre, M. le maire de Saint-Jérôme, j'ai besoin d'un consentement pour aller au-delà de 18 heures, il est rendu 18 heures, pour aller jusqu'à 18 h 15. Consentement unanime. Ça va, allez-y.

n(18 heures)n

M. Gascon (Marc): Écoutez, on est en réflexion actuellement là-dessus justement, M. le ministre, concernant la question de l'article 45. Vous savez fort bien comme moi que ça a été une embûche majeure dans différents dossiers du monde municipal et ailleurs, mais restons dans le monde municipal, et c'est un élément qui nous amène toujours à réguler ? je ne sais pas si c'est un bon terme français ? mais à tout le moins réguler nos relations avec les employés syndiqués versus le monde privé lorsque vient le temps de donner des contrats ou de gérer la municipalité. Alors, il n'a pas été changé effectivement. L'article n'a pas été touché avant les regroupements, c'est un fait.

Cependant, aujourd'hui, dans la mesure où on a mis en place justement ces nouvelles villes et où on a travaillé à faire en sorte qu'il y ait une harmonie, au niveau des travailleurs de nos villes, dans les négociations qui ont été entreprises, bien, écoutez, on a fait des regroupements de ces syndicats-là en un seul. Par exemple, prenons Saint-Jérôme, quatre syndicats de pompiers en un seul, une convention collective de six années; cols blancs, cinq syndicats de cols blancs, un seul maintenant, et on s'entend, tout le monde, sur une nouvelle convention collective d'une durée de cinq ans, six ans.

Bien entendu, pour arriver à régler une convention collective, il a fallu faire, dans l'esprit de cette nouvelle ville-là, les travaux, et les échanges, et les négociations utiles pour faire en sorte que tout le monde soit heureux. On a, je pense, réussi des conventions collectives à venir jusqu'à date... de signer des conventions collectives, à venir jusqu'à date, qui justement orientent les travaux et la puissance de cette nouvelle ville-là vers le futur, et nos employés sont bien satisfaits, au sortir de ces négociations-là pour cette nouvelle ville-là, à donner des services aux citoyens.

Demain matin, pour une raison x, on doit retrancher vers une ancienne municipalité un certain nombre de fonctionnaires municipaux, la question est: Comment allons-nous faire? Parce que nous faisons face à ce moment-là à un seul syndicat par quart de... je dirais, quart de travail si je peux m'exprimer ainsi, et cette question-là ne sera pas facilement résoluble.

M. Fournier: Si vous me permettez, M. le Président...

Le Président (M. Ouimet): Oui.

M. Fournier: ...je ne sais pas si... Je ferais une petite dernière question. Alors, vous l'avez analysé sous l'angle de... Quand la fusion est arrivée, vous n'aviez pas 45, donc vous vous êtes débrouillés. Faisons l'hypothèse qu'il n'y ait pas de défusion ? chez vous, en tout cas ? et je vous pose la question: Est-ce que vous trouvez que le rapport avait raison, que 45 serait utile pour vous ou pour le monde municipal?

Je sais que l'UMQ, pour ne citer qu'elle, a abondamment, dans le passé, demandé la modification à 45. Est-ce que vous considérez que c'est encore une piste qui doit être envisagée? Parce que... Profitons du fait que c'est ma dernière question pour envisager l'avenir, là, puis pas juste envisager de régler le passé, là, de façon ferme, et claire, et précise, là.

M. Gascon (Marc): Indépendamment du regroupement, je pense que l'article 45 a toujours été une question reconnue comme étant épineuse et à laquelle il faudrait travailler et régler cette question-là. Alors, je pense que, nonobstant le reste, ça demeure quelque chose à travailler, effectivement.

M. Fournier: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet): Il vous reste encore du temps, M. le ministre.

M. Fournier: Ça va.

M. Carette (Roger): Me permettez-vous juste un rappel d'information à ce sujet-là?

Le Président (M. Ouimet): M. Carette.

M. Carette (Roger): Commandé par le gouvernement précédent puis assumé par votre gouvernement, puis je pense que c'est à votre demande, il y a un groupe de travail où nous siégeons là-dessus en collaboration avec... en préparation d'un avis sur l'ensemble de la question. On a deux villes, ils ont deux directeurs généraux, se font porte-parole de notre groupe puis ils travaillent avec votre groupe là-dessus.

M. Fournier: Je sais bien qu'il y a une réflexion, je voulais savoir publiquement ce que vous en pensiez. J'ai compris votre réponse. Merci.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Alors, je cède la parole au vice-président de la commission, qui est également porte-parole pour l'opposition officielle pour les dossiers de la région et député de Blainville.

M. Legendre: Merci, M. le Président. Alors, merci, MM. les maires, pour votre présentation et votre témoignage bien senti, comme tous les témoignages qu'on a eus d'ailleurs aujourd'hui. Ma collègue la députée de Bourget y a fait référence tout à l'heure, évidemment, vous représentez, vous trois, des villes importantes, comme toutes les autres villes également que vous représentez, mais vous représentez aussi des régions, des villes importantes pour des régions importantes. Et vous y avez fait un petit peu référence tout à l'heure, mais j'aimerais vous entendre un petit peu plus sur le développement régional, et le développement régional au cours, là, des prochains mois et des prochaines années. Parce qu'on arrivait évidemment à un point tournant du côté du développement régional.

D'ailleurs, vous le savez évidemment, le nouveau gouvernement propose une nouvelle structure, conférence régionale des élus, pour le développement régional, pour la décentralisation, donc des responsabilités additionnelles pour les élus. Alors, pour vous, ça signifie quoi, le projet de loi n° 9, d'un point de vue du développement régional? M. le maire Gascon, vous avez parlé de paralysie. Est-ce que, le projet de loi n° 9, ça ne fera pas en sorte finalement que ça va paralyser aussi le développement régional au cours des prochaines années, en attente du résultat des défusions?

M. Gascon (Marc): Il faut bien comprendre que les villes d'agglomération, au Québec, sont des moteurs économiques régionaux. Mais pas seulement des moteurs économiques régionaux, mais sont aussi des moteurs sociorégionaux. C'est dans nos villes que sont logées l'ensemble, bien sûr, des ressources industrielles, commerciales d'un milieu de vie, mais également les ressources gouvernementales: palais de justice, hôpital, bureaux de toute nature, d'aspect gouvernemental, tant provincial que fédéral.

Alors, bien entendu, le fait de se regrouper a donné une nouvelle synergie, une nouvelle dynamique à notre milieu de vie. Si je peux parler de Saint-Jérôme comme étant un moteur économique important, je vous dirais que, dans la MRC même où loge Saint-Jérôme, qui est la MRC de La Rivière-du-Nord, 80 % des emplois ? une MRC de 100 000 habitants, Saint-Jérôme se retrouve autour de 62 000 habitants ? 80 % des emplois se situent dans la ville même maintenant, la ville de Saint-Jérôme.

Mais, au-delà de la ville, au-delà de la MRC, le CRD, la région des Laurentides compte maintenant et de plus en plus sur cette ville-là qui, justement, a développé et est en train de développer de nouveaux aspects particuliers en ce qui a trait justement au développement de la région.

Tout le monde sait, je pense, notre vision de développement en matière de transport avancé. Bon, on a eu, je pense, de la part du gouvernement un go, si je peux m'exprimer ainsi. Écoutez, c'est un élément important pour la région, mais ces éléments-là de transport avancé, c'est issu d'une idée même du coeur de la ville de Saint-Jérôme à ce moment-là en ce qui à trait aux véhicules électriques, et autres. Je vous donne un exemple ? il y en a plusieurs autres de ce côté-là: l'appui du milieu, du CRD Laurentides. Bon. Et on parle de changements à venir de ce côté-là.

Mais, peu importe, depuis 18 mois, 19 mois, 20 mois de l'arrivée de la nouvelle ville et de la nouvelle dynamique, l'orientation... Et la région compte sur nous pour être des leaders sur le plan de la région et, en plus, justement interrégional, parce qu'on ne vit pas en vase clos au Québec, on vit avec des collègues, on vit avec des régions, et c'est de cette façon-là, je pense, qu'on va réussir à créer après... Après la métropole, Québec et les six grandes villes, je pense qu'il ne faut pas nier et freiner cet élan qui se veut fort positif dans le développement du Québec que sont les villes d'agglomération regroupées.

Le Président (M. Ouimet): M. Beauchemin, vous voulez rajouter quelque chose?

M. Beauchemin (Jean-Claude): Très rapidement. Cette question-là est très importante, et j'en profite pour aborder un sujet que, M. le ministre, vous avez abordé tantôt quand vous disiez: Oui, mais, si c'est de même, il n'y aura pas beaucoup de villes qui vont vouloir défusionner. Et vous avez raison, et c'est pour ça que notre revendication, il faut bien la prendre, c'est la revendication du caucus des villes d'agglomération. Et puis on a besoin d'un traitement spécial parce que, effectivement, on couvre l'ensemble du territoire québécois et on joue, sur l'ensemble du territoire québécois, alentour de la métropole, de la capitale aussi bien que dans les régions ressources, etc., partout, un rôle moteur dans le développement socioéconomique, culturel.

Il n'y aura pas beaucoup ? c'est certain, parce que l'adhésion était volontaire ? il n'y aura pas beaucoup de gens qui vont demander des référendums puis qui vont demander la défusion, vous avez raison. Mais, encore une fois, ça suscite un climat d'insécurité, d'instabilité dont on n'a vraiment pas besoin maintenant.

Et, je vous invite, M. le ministre, avec vos collaborateurs, à faire l'exercice, si vous permettez dans une municipalité comme la mienne ou celle de Saint-Jérôme, les autres, où vous auriez tout à coup, là, deux, trois petites municipalités qui ne veulent pas jouer le jeu, qui ne voulaient pas le jouer en 1980, ni en 1992, ni en 1988, ni en 2000 et qui ne voudront pas non plus en 2004, puis en 2005, puis en 2006. Et là vous allez être aux prises avec un problème.

Je ne vous invite pas, moi, à manquer à votre parole, mais je vous invite à constater que dans... Parce que c'est important, ce que vous avez dit, je suis pour ça, l'honnêteté en politique, mais à constater que vouloir à tout prix vous accrocher à cet engagement chez nous, ça devient une espèce d'impossibilité sans nuire à l'ensemble, sans nuire au bien commun.

Alors, c'est pour ça que cette question-là est très importante. C'est une question, là, de bien commun, de bien supérieur, parce que c'est des petites minorités qui vont introduire une instabilité, puis vos collaborateurs vont vous dire: Quand on commence à jouer avec ça, on ne sait plus où ça finit. Alors, on vous demande de nous retirer, nous autres, du champ d'application de cette loi-là si vous décidez d'aller jusqu'au bout, parce que ça n'a aucun sens pour nos villes d'agglomération et ça ne correspond pas aux chiffres quand on parle d'une large adhésion démocratique.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. Beauchemin. M. Carette, voulez-vous ajouter quelque chose? Ça va?

M. Carette (Roger): Bien, quand ce sera le mot de la fin, en autant qu'on est concerné, vous me faites signe, et je vais vous le dire.

Le Président (M. Ouimet): Non, je ne suis pas rendu au mot de la fin encore, là.

M. Carette (Roger): Je suis déjà prêt.

Le Président (M. Ouimet): Il reste quelques minutes des deux côtés, mais si tout a été dit...

Mme Lemieux: Une petite question. Je ne sais pas si vous aviez entendu l'intervention de la Fédération, de la FMQ... de la FQM, pardon, excusez les acronymes, à l'effet que... Je n'ai pas le mémoire sous les yeux, là, mais à l'effet que, dans le cas où une ville, certains éléments de cette ville se sépareraient, se défusionneraient, se retireraient d'une ville unifiée et que des compétences seraient en cause, hein, l'administration de certaines questions qui concernent une plus large communauté serait mise en cause, que les MRC... on pourrait transférer un certain nombre de responsabilités aux MRC. Je ne sais pas si vous avez entendu cette recommandation-là. Je sais que, dans certaines villes de votre taille, il y a des fois où la MRC et la municipalité, ce sont des structures ? et je crois que c'est le cas de Rouyn-Noranda ? des structures qui se confondent. Comment vous réagissez à une proposition comme celle-là?

Le Président (M. Ouimet): En moins d'une minute, M. Carette.

n(18 h 10)n

M. Carette (Roger): Très rapidement, puis en complément, M. Gascon. D'abord, en autant que les responsabilités impliquées par l'article 48... Si tant est qu'il y avait un jour défusion dans l'une de nos villes, je pense que le lieu d'atterrissage tel qu'il est défini par l'article 48, ce serait à peu près le seul opérant présentement. O.K.? Ce qui est marqué dans l'article 48.

Sur le lieu d'atterrissage des ententes requises par les autres sujets comme fiscalité d'agglomération puis péréquation locale, les gens de la FQM nous ont dit: Mettez-nous en territoire neutre, on discutera des deux côtés. C'est peut-être une approche qui a de l'allure, mais c'est parce qu'on n'a pas mené la réflexion très longue là-dessus. On estime... Sans contexte guerrier, puis sans manquer de respect à qui que ce soit, puis sans donner de leçon à qui que ce soit non plus, on estime qu'on ne devrait pas faire partie de cette loi-là. On n'est pas embarqué dans la mécanique du référendum x %, x %. Notre croyance fondamentale, on vous l'a exprimée. M. Gascon, sur la même question.

M. Gascon (Marc): Oui. Il y a, depuis plusieurs mois, voire années, dans nos réflexions sur les villes d'agglomération... Nous croyons qu'éventuellement ces villes-là devraient être des villes MRC également. Dans la mesure où on pense que... Comme on est des moteurs économiques, des moteurs socioéconomiques et culturels, nous devrions aussi avoir, en ce qui nous concerne, les leviers utiles que possède la MRC pour continuer justement l'ensemble du développement de notre territoire pour faire en sorte qu'on ait tous les outils nécessaires à faire en sorte que ces moteurs économiques nationaux... régionaux, mais qui se veulent nationaux par la même occasion puissent appartenir aux villes d'agglomération. Alors, dans le contexte, je vous dirais que, en contrario à la FQM, je crois que les pouvoirs utiles et nécessaires doivent appartenir aux villes d'agglomération d'abord.

Le Président (M. Ouimet): Bon. Alors, M. Carette et les représentants des villes d'agglomération du Québec, on vous remercie pour votre participation aux travaux.

Demain, nous entendrons, à 14 heures, Mme Karin Marks, présidente de l'arrondissement de Westmount, Vision Montréal, l'Association municipale de Westmount, l'Association des cadres municipaux de Montréal. Et nous terminerons avec les citoyens de Pointe-Claire pour la défusion. J'ajourne donc nos travaux à demain, 14 heures, alors que la commission poursuivra l'étude du projet de loi n° 9. Merci.

(Fin de la séance à 18 h 14)


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