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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Thursday, November 9, 2000 - Vol. 36 N° 47

Étude détaillée du projet de loi n° 143 - Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans des organismes publics et modifiant la Charte des droits et libertés de la personne


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Table des matières

Journal des débats

e heures neuf minutes)

Le Président (M. Rioux): Alors, MM. et Mmes les députés. J'aimerais saluer M. le président de la Commission des droits de la personne. Nous poursuivons aujourd'hui l'audition en commission, et tout ça, c'est dans le cadre de la consultation générale que nous avions faite sur le projet de loi n° 143 sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics, puis ça modifiait également la Charte des droits et libertés.

Alors, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements? Je constate que oui.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Côté (Dubuc) remplace M. Bergeron (Iberville); M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce) remplace Mme Beauchamps (Sauvé); et M. Gauvin (Montmagny-L'Islet) remplace M. Laporte (Outremont).

Auditions

Le Président (M. Rioux): C'est des remplacements dignes de mention. Vous remplacez des députés très importants, surtout dans le débat que nous avons à faire aujourd'hui. Vous vous souviendrez, messieurs et mesdames, que, lors de la venue de la Commission des droits et libertés devant la commission, il y avait eu unanimité à l'effet que les parlementaires aimeraient revoir le président de la Commission des droits et libertés afin de lui poser un certain nombre de questions. Le ministre de l'époque avait vu ça d'un bon oeil aussi. Et il semblerait que l'actuel également; donc, on part sur un bon pied.

n(16 h 10)n

Et on sait que le projet de loi n° 143, de par certaines de ses dispositions, a pour effet de demander à la Commission de jouer un rôle encore plus important que celui qu'elle joue présentement. Donc, le président avait été très clair et très direct avec nous, il était allé sans détour: Pour assumer les mandats et les nouvelles responsabilités qui nous seront confiés, il semblerait que la Commission risque de manquer de sous.

Alors, moi, je termine là mon préambule, et, M. le président, il n'y a pas d'exposé particulier de la part du président, parce que vous l'aviez fait lorsque vous vous êtes présenté devant nous, mais ce qu'on a, par exemple, besoin de faire ensemble aujourd'hui, c'est de continuer la période de questions. Alors, M. le ministre, M. le représentant de l'opposition, on va fonctionner de la même manière que nous l'avions fait lorsque nous avons reçu les groupes: on va se partager le temps à 50-50 entre les députés ministériels et les députés de l'opposition. Alors, voilà.

M. le président, peut-être des petites remarques, mais je vous donne 30 secondes à peu près, d'abord nous présenter les gens qui vous accompagnent.

Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse (CDPDJ)

M. Filion (Claude): C'est ce que je voulais faire, M. le Président, je vous remercie. Je voulais vous présenter, à ma gauche, Mme Louise Caron-Hardy, qui est directrice des programmes d'accès à l'égalité à la Commission; et, à ma droite, Me Daniel Carpentier, conseiller juridique à la Direction de la recherche et de la planification à la Commission. Alors, nous espérons ensemble être en mesure de pouvoir répondre à vos interrogations.

Le Président (M. Rioux): J'aimerais porter à l'attention des parlementaires la lettre que j'ai reçue de Ghislain Picard des premières nations. «L'Assemblée des premières nations du Québec et du Labrador prend acte du dépôt du projet de loi portant sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics. Il est évident que, de par son contenu, l'Assemblée des chefs doit être interpellée.

«Par la présente, je vous avise donc que nous allons retourner à nos instances décisionnelles afin de connaître l'orientation de notre organisme et les décisions qu'elle prendra dans ce dossier.

«J'aimerais en terminant vous préciser que, si nos instances décisionnelles le déterminent, nous pourrions apporter notre contribution dans le cadre de la mise en oeuvre du projet de loi qui est à l'étude.»

Alors, vous vous souviendrez qu'on avait regretté, tout le monde, que les premières nations ne se soient pas présentées devant nous lors des séances où on recevait les groupes. Alors, on a la réponse. Peut-être que, dans une phase ultérieure, les premières nations seront avec nous.

Alors, on va procéder à 10 minutes par bloc pour chacun des groupes parlementaires. Et on en a pour quand même 45 à 50 minutes ensemble. Alors, M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): ...inviter le président à présenter les gens qui l'accompagnent et à nous...

Le Président (M. Rioux): C'est fait.

M. Simard (Richelieu): C'est déjà fait?

Le Président (M. Rioux): C'est fait.

M. Simard (Richelieu): Excusez-moi. D'abord, je suis très heureux, M. le Président, que nous nous voyions dans le cadre de cette commission. Je voudrais saluer les membres de cette commission. Nous allons être appelés évidemment à travailler ensemble régulièrement. Je pense évidemment à mes collègues de la majorité ministérielle, mais également au porte-parole de l'opposition officielle, le député d'Anjou, et d'autres de ses collègues qui, comme aujourd'hui celui de Notre-Dame-de-Grâce, se joindront à nous pour étudier ces questions.

M. le Président, je vous sais depuis très longtemps sensible aux questions qui touchent mon ministère, et nulle doute que nous allons faire du bon travail, tenter avec les parlementaires de mieux connaître et approfondir les projets de loi et nous assurer que ce secteur très important de la vie d'une société soit bien traité. Je parle de l'immigration, je parle évidemment de la protection des droits, je parle de la protection des consommateurs. Mon ministère a beaucoup de secteurs de défense en fait des citoyens. Je sais que vous y êtes particulièrement sensible et je pense qu'on va devoir faire un travail en commun, qui devrait être très fructueux là-dessus.

J'ai avec moi, je vais vous présenter ceux qui m'accompagneront pour travailler: la sous-ministre responsable des relations avec les citoyens, Mme Ginette Galarneau, que plusieurs connaissent, qui m'accompagne, qui est à droite; ainsi qu'un attaché politique, M. Claudel Toussaint, qui est déjà familier de cette commission; derrière, des juristes, des fonctionnaires professionnels très qualifiés qui nous viendront en aide si besoin est. Je pense que tout ça facilitera nos travaux.

M. le président de la Commission, je n'étais pas là lors de votre première prestation, et, au risque d'ennuyer un petit peu nos collègues qui y ont participé, de façon très succincte, accepteriez-vous de résumer en quelques minutes ce qui avait été vos commentaires à l'époque, les points concrets sur lesquels le projet de loi vous semblait aller dans la bonne direction ou les points sur lesquels vous auriez aimé des précisions ou des modifications, nous résumer brièvement votre point de vue?

Le Président (M. Rioux): Alors, M. le président, peut-être rappeler aussi à notre nouveau ministre et à notre nouveau porte-parole du côté de l'opposition que la commission de la culture avait pris une position très claire là-dessus, c'est que la Commission soit reconvoquée afin que l'on puisse, avant l'étude détaillée du projet de loi, poursuivre nos réflexions. Il y avait même une autre recommandation qui était très claire, M. le ministre, c'est que le gouvernement du Québec dote la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse des ressources nécessaires à l'exécution du mandat qui lui a été conféré, que lui confère ou que lui conférera le projet de loi n° 143. Alors, M. le président.

M. Filion (Claude): Écoutez, en quelques minutes... D'abord, de façon générale la Commission évidemment saluait positivement la volonté du législateur quant aux objectifs poursuivis dans le projet de loi n° 143. Nous, à la Commission, on avait déposé en janvier 1999 un bilan, parce qu'on avait fait à la Commission un travail qui consistait à faire le tour des PAE au Québec, qui sont un instrument privilégié, c'était une des conclusions de notre bilan, pour lutter contre la discrimination au Québec. Alors, notre bilan avait maintenu ce constat-là, et le projet de loi n° 143 l'endosse en faisant en sorte d'étendre au secteur public cette obligation de mettre en place un PAE dans l'ensemble des réseaux, dans l'ensemble des organismes publics, les municipalités, etc.

Bref, au tout début, au tout départ, d'entrée de jeu, il faut saluer très positivement la volonté du législateur et le consensus qui a été créé à l'Assemblée nationale autour du projet de loi n° 143. Bon, maintenant, ceci étant dit, bien sûr c'est un projet de loi qui contient, à notre point de vue, certains aspects qui méritent d'être améliorés. Un, en ce qui concerne... Et je résume à brûle-pourpoint. Je vous réfère évidemment au mémoire que nous avons déposé; il n'a pas changé, ce mémoire-là, parce que nous ne sommes pas au courant d'amendements qui auraient été déposés. Alors, je crois savoir que vous n'avez pas fait l'étude article par article, l'étude détaillée du projet de loi, donc les papillons volent toujours, ils ne se sont pas déposés en ce qui nous concerne. Donc, notre position est celle qui était explicitée dans le mémoire que nous avions déposé, M. le Président, à cette même commission au mois d'août, si ma mémoire est bonne, dernier, fin août dernier. Bon.

Je résume, il faut se référer à notre mémoire quand même, et je résume. En ce qui concerne la définition des groupes cibles, quels sont les groupes de personnes qui devraient être favorisés par l'implantation des PAE dans le secteur public? Outre ce que contient déjà le projet de loi n° 143, la Commission mettait de l'avant des propositions fermes en ce qui concernait l'inclusion des personnes provenant des minorités ethniques ainsi que les personnes handicapées.

n(16 h 20)n

Je n'élabore pas, je fais juste résumer. Si, dans la période d'échange, vous voulez que je revienne sur l'un ou l'autre, je le ferai. Également, la Commission ? et le président évidemment de cette Commission l'a salué, salué, si on veut, cette demande de la Commission ? pour mettre en oeuvre le projet de loi n° 143, a besoin essentiellement de deux choses. Premièrement, a besoin de pouvoirs d'intervention appropriés. Et je m'explique: les pouvoirs que nous confère le projet de loi actuel, le projet de loi n° 143, nous permettent d'effectuer des vérifications, nous permettent d'effectuer les analyses appropriées, nous permettent de formuler des exigences à l'étape de l'élaboration des PAE.

Mais il y a trois étapes à un PAE. D'abord, une analyse des effectifs.

Le Président (M. Rioux): Rapidement.

M. Filion (Claude): Oui. D'abord une analyse des effectifs, c'est la base très importante. Et là-dessus la Commission n'a pas les pouvoirs d'intervention suffisants. Au niveau de l'élaboration des PAE, le projet de loi les contient, mais au niveau de l'implantation des PAE, la Commission n'a pas les pouvoirs requis pour faire en sorte que les PAE puissent être implantés adéquatement.

Deuxième volet, les ressources nécessaires en termes humains et financiers. Je suis convaincu que tout le monde comprend ça rapidement. Également, nous suggérions un rapport quinquennal, c'est une modalité administrative. Nous suggérions aux parlementaires de faire en sorte que le mécanisme soit similaire à celui qui existe pour la Commission d'accès à l'information, à savoir que le rapport quinquennal soit déposé par la Commission au ministre responsable, qui, lui-même, le dépose au gouvernement et, par la suite, à l'Assemblée nationale.

Également, nous, notre mémoire mettait l'accent sur un encadrement réglementaire nécessaire, c'est-à-dire que, à notre point de vue, pour que cette loi ait l'efficacité administrative que le législateur veut lui donner, il faut un minimum d'encadrement au niveau d'un règlement d'application, notamment sur l'analyse des effectifs et l'auto-identification. Merci.

Le Président (M. Rioux): Très bien. M. Fillion, je vous remercie.

M. Filion (Claude): D'accord.

Le Président (M. Rioux): Alors, j'invite maintenant le ministre, le porte-parole de l'opposition officielle et les membres de la commission à adresser leurs questions au président.

M. Simard (Richelieu): M. le président, plusieurs groupes de femmes sont venus dire devant cette commission que le projet de loi devrait inclure des objectifs spécifiques, notamment à l'intention des femmes autochtones, des femmes des minorités visibles. C'est d'ailleurs l'une des recommandations de cette commission.

Votre Commission a déjà indiqué qu'il serait assez complexe de donner suite à une telle recommandation. Est-ce que vous pourriez... En pratique, là, est-ce que ça serait possible de donner suite à une telle recommandation? Puis quels seraient selon vous les problèmes liés à l'inclusion d'objectifs spécifiques dans le projet de loi?

Le Président (M. Rioux): M. Fillion.

M. Filion (Claude): Effectivement, vous résumez bien notre position. Et l'idée, là... Vous savez, si vous dites, par exemple: On fait un objectif précis pour les femmes autochtones, qu'est-ce qui arrive avec les hommes autochtones? Si on va du côté des femmes des minorités visibles, qu'est-ce qui arrive du côté des hommes des minorités visibles? En deux mots, à vouloir décrire des sous-objectifs trop précis, on risque un petit peu d'alourdir ? ça, c'est sûr ? le processus. Mais je demanderais, avec votre permission, M. le ministre, à Mme Louise Caron-Hardy, qui est directrice des programmes d'accès à l'égalité chez nous, d'élaborer sur cette réponse.

Le Président (M. Rioux): Mme Caron-Hardy.

Mme Caron-Hardy (Louise): M. le Président, d'entrée de jeu, c'est une proposition qui est très intéressante, mais elle peut avoir des effets non désirés sur l'élaboration des objectifs quantitatifs et l'élaboration des mesures de redressement, qui sont prévus dans le projet de loi. Je vous donne un exemple. Dans un emploi très spécifique ? que j'ai inventé de toute pièce mais qu'on va reconnaître ? le taux de disponibilité totale pour les minorités visibles ? hommes, femmes ? dans un emploi, par exemple un agent de gestion financière, on retrouve ces postes-là dans les réseaux et dans les municipalités, sans inclure la variable sexe, le taux de disponibilité pour cet emploi chez les minorités visibles est de 10 %. Si on le décortique hommes?femmes, on s'aperçoit que le taux de disponibilité pour les hommes est de 8 % et le taux de disponibilité pour les femmes est de 2 %. Il pourrait donc arriver qu'il n'y ait qu'un objectif quantitatif pour les hommes des minorités visibles et qu'on soit incapable d'en mettre en place pour les femmes des minorités visibles.

Alors, malgré son intérêt, je ne suis pas sûre que cette mesure va aider à rencontrer les objectifs visés par la proposition. Il y a des risques qu'il n'y ait jamais d'objectifs pour les femmes, mais strictement pour les hommes des minorités visibles, alors que, si on les met ensemble, l'organisme pourra aussi bien employer une femme d'une minorité visible ou autochtone qu'un homme d'une minorité visible ou un homme autochtone.

Le Président (M. Rioux): Très bien. M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Oui, je comprends, c'est assez clair, et je pense que ça répond très bien à la question que j'avais posée. J'ai encore quelques minutes, M. le Président?

Le Président (M. Rioux): Oui.

M. Simard (Richelieu): Un des thèmes de votre présentation également avait été à l'époque la question des groupes ethnoculturels d'un côté et les anglophones de l'autre. Mettons de côté la question des groupes ethnoculturels, j'aurai l'occasion d'y revenir un peu plus tard, notamment en début de présentation du projet de loi.

Mais, pour ce qui est des anglophones, la Commission recommandait dans son mémoire d'inclure les groupes ethnoculturels. Cependant, elle disait que la sous-représentation des anglophones, les PAE n'étaient pas une façon de faire face à cette question. Alors, à la lumière de ce qui précède, pouvez-vous nous indiquer, nous expliciter vos deux recommandations concernant ces deux groupes, communautés ethnoculturelles et anglophones, bien nous faire comprendre la différence de traitement qui vient de la différente réalité?

Le Président (M. Rioux): M. le président Filion.

M. Filion (Claude): D'accord. D'abord, en ce qui concerne peut-être la question des anglophones, notre bilan recommandait, un, que le gouvernement du Québec reconnaisse la sous-représentation importante des anglophones dans la fonction publique et, deuxièmement, prenne des mesures nécessaires pour corriger cette situation de sous-représentation là.

Ça veut dire quoi, prendre des mesures nécessaires? Les PAE, je l'ai dit tantôt, c'est un outil pour lutter en général contre la discrimination et pour redresser des situations de sous-représentation. Ce n'est pas le seul outil. Deuxièmement, lorsqu'on parle de francophones et anglophones, on parle ici des deux groupes majoritaires au Canada. Alors, en général, historiquement, les deux groupes majoritaires au Canada n'ont pas réglé les problèmes relatifs, par exemple, à la composition des mains-d'oeuvre dans la fonction publique fédérale ou dans les fonctions publiques provinciales par le biais des PAE.

L'outil qui est les PAE, c'est un outil précieux, avec des objectifs de redressement, et, historiquement, encore une fois, la sous-représentation, supposons, des anglophones dans la fonction publique, ce qui est un fait, peut se corriger autrement, par exemple en prenant des mesures appropriées. C'est ce que le gouvernement fédéral a fait pour corriger la sous-représentation de l'élément francophone dans la fonction publique fédérale. Ils n'ont pas adopté un PAE; ils ont pris des politiques administratives, ils ont adopté certaines mesures pour faire en sorte de corriger cette sous-représentation là.

Le gouvernement du Québec l'a fait également ? juste en terminant ma réponse, M. le Président ? en envisageant différentes mesures à l'intention des anglophones, notamment le programme de stages de l'an dernier. Alors donc, la recommandation de la Commission va dans le sens de prendre... Je suis obligé juste de compléter, M. le Président, parce que je pense que c'est important. Puis ça, ça va dans les politiques de recrutement, par exemple. Il existe dans les tests de sélection, dans les politiques de recrutement... Il faut aller voir du côté des cégeps anglophones. On peut utiliser un tas de moyens autres que le PAE pour faire en sorte de corriger une sous-représentation.

Il faut aussi noter ceci, qui est très important en terminant ? pour le vrai, cette fois-là, M. le Président, mais c'est une question complexe, et j'aimerais être capable de dire tout ça en 30 secondes, mais honnêtement, malgré mes efforts de synthèse...

Le Président (M. Rioux): J'en serais ravi, monsieur.

M. Filion (Claude): Il ne faut pas oublier que la communauté anglophone québécoise est quand même présente dans ses propres institutions au Québec, l'institution de santé, l'institution d'éducation, dans ses municipalités. Alors donc, en général, encore une fois, le PAE n'est pas selon nous l'outil approprié pour traiter de ce fait-là, qui est cependant, quant à nous, un fait: il existe une sous-représentation de la communauté anglophone dans le secteur public québécois.

Le Président (M. Rioux): Très bien. M. le député d'Anjou.

M. Lamoureux: Oui. Merci beaucoup, M. le Président, M. Filion, Mme Caron-Hardy, M. Carpentier, bienvenue. J'ai lu avec attention évidemment votre mémoire, les présentations qui ont été faites la dernière fois.

n(16 h 30)n

Je dois vous dire d'emblée que, du côté de l'opposition, on a manifesté, lors de la présentation du projet de loi, toute notre ouverture, notre intention d'appuyer également la mesure qui est devant nous. Je partage entièrement votre avis à l'effet que le projet de loi réussit à faire faire des pas très importants au niveau de la législation. Les objectifs qui sont poursuivis, nous les partageons. Nous avons également mentionné, puis ça va exactement dans le sens de vos représentations, que nous souhaitons ? on va le voir au niveau des amendements ? que le projet de loi soit élargi. Je pense que la mesure est importante, puisqu'on a devant nous un projet de loi qui vise justement à élargir ça. Profitons-en pour le rendre complet.

Vous me permettrez, M. Filion, de revenir sur deux notions. Moi, j'ai lu les différents rapports. Quand on parle de sous-représentation et de discrimination, il y a sous-représentation, mais pas nécessairement discrimination. J'aimerais ça si vous pouviez m'éclairer là-dessus, et pour les gens qui suivent ces débats-là, parce que ça peut paraître ? comment je pourrais dire? ? difficile à comprendre que certains groupes soient sous-représentés à l'intérieur de certains organismes, mais qu'il n'y ait pas nécessairement de discrimination, alors que, dans certains cas, ça se vérifie.

Le Président (M. Rioux): M. Filion.

M. Filion (Claude): Oui, c'est important. D'abord, une sous-représentation, c'est comme un fait. Mais la sous-représentation n'est pas toujours la conséquence de politiques discriminatoires ou d'actes discriminatoires. Il peut y avoir une sous-représentation... Je vais donner un exemple complètement farfelu peut-être, qui m'était venu à l'esprit immédiatement, par exemple des personnes des communautés asiatiques dans les sports de contact. Parce que, physiquement, ils sont un petit peu plus petits peut-être, et, historiquement, un peu plus petits que les... pour jouer au football ou au hockey, ou je ne sais pas. Mais je vous donne un exemple. Mais, peu importe, ce que je veux dire par là, c'est qu'il peut... Pardon?

Le Président (M. Rioux): Les Asiatiques sont assez bons au judo, quand même.

M. Filion (Claude): Vous avez raison. Bon, vous voyez, même mon exemple... Alors, sous-représentation ne veut pas nécessairement dire discrimination. Il faut enquêter pour ça, il faut fouiller, parfois il faut fouiller dans les couloirs de l'histoire pour faire une relation entre les deux.

Prenons le cas, la dernière question du ministre ? on est ici pour se parler très directement cet après-midi, on est là pour vous livrer peut-être l'essence de ce qu'on pense être, nous, à la Commission, le mieux: Les anglophones sont sous-représentés dans la fonction publique québécoise. Est-ce que nous sommes en mesure, est-ce que quelqu'un est en mesure de dire que, historiquement, il y a eu des politiques discriminatoires, carrément, à l'égard de la... Puis ce n'est pas impossible, là. Mais, je veux dire, il faut fouiller pour ça, il faut enquêter, il faut créer un lien, il faut créer un lien de cause à effet et dans une intention discriminatoire. Ce n'est pas évident. Alors donc, je ne sais pas si je me suis bien expliqué, mais je demanderais à Me Carpentier de compléter brièvement, avec votre permission.

Le Président (M. Rioux): Avant, M. le député d'Anjou, est-ce que ça commence à répondre à votre question, ce qui a été dit là?

M. Lamoureux: Je vais en avoir d'autres.

Le Président (M. Rioux): O.K. Mais vous voulez que votre collègue...

M. Filion (Claude): Oui, que Me Carpentier complète. C'est important, on en avait discuté à la dernière...

M. Carpentier (Daniel): Peut-être, par analogie, si on regarde les autres groupes qui sont visés et les groupes qu'on recommande qu'ils soient visés, il y a des constats de discrimination qui ont été faits. Et je dis bien de discrimination. On a aussi constaté qu'il y a sous-représentation de ces personnes dans les organismes qui sont visés par le projet de loi. Alors, c'est pour ça qu'on fait une distinction dans le cas, je dirais, du critère langue anglophone par rapport à francophone, dans le sens où, oui, il y a eu un constat de sous-représentation, et là, dans la fonction publique ? il n'est pas fait dans l'univers visé par le projet de loi ? mais il n'y a pas, on n'a pas d'indices pour le moment qu'on a un constat de discrimination sur la base de la langue à l'égard des anglophones dans l'emploi.

Le Président (M. Rioux): Merci, M. Carpentier. M. le député d'Anjou.

M. Lamoureux: Oui. Je comprends votre réponse. Je vous avoue que ma question était plus large. Je ne visais pas nécessairement les anglophones. Je prends, par exemple, le mémoire qui avait été déposé au Conseil des ministres par le ministre Perreault à l'époque. On nous mentionnait, au niveau des groupes visés, femmes, minorités visibles et autochtones, on nous indiquait que ces trois groupes avaient fait l'objet de discrimination en emploi, et de un.

Lorsque venait le temps de soulever la possibilité d'inclure dans le projet de loi les membres des communautés culturelles, à ce moment-là, l'argument qui était invoqué pour ne pas les inclure à l'époque, c'était qu'aucun constat de discrimination en emploi n'a été posé pour ces groupes. Tant de notre côté de la Chambre, j'ai cru comprendre également que vous souhaitiez et que vous continuez de souhaiter que ces gens-là, que ces communautés-là soient visées par le projet de loi. C'est pour ça, je voudrais vous entendre un peu là-dessus.

Le Président (M. Rioux): M. Filion.

M. Filion (Claude): Nous, à la Commission, on est arrivés à la conclusion, en ce qui concerne les minorités ethniques, que les indices étaient suffisamment convergents en ce qui concerne les minorités ethniques pour nous permettre de croire qu'il y avait, dans leur cas, évidemment, discrimination et que nous recommandions que les minorités ethniques soient identifiées comme un groupe cible dans les PAE. Un, on a fait des études à la Sûreté du Québec, qui est le corps policier à travers le territoire du Québec qui est le plus gros employeur; deux, à la ville de Montréal, qui est la municipalité la plus populeuse en termes de main-d'oeuvre puis de population desservie. Et nous avions fait un constat, un indice également en ce qui concerne ? et vous me corrigerez, Louise, c'était chez...

Une voix: ...

M. Filion (Claude): Dans la fonction publique québécoise, un petit peu, en ce qui concerne les minorités ethniques. La sous-représentation était... Et ces éléments, quant à nous, ces éléments de sous-représentation convergeaient, en l'absence d'autres facteurs d'explication, pour nous amener à la conclusion que les minorités ethniques devaient être considérées comme un groupe cible dans le cadre d'un PAE.

Le Président (M. Rioux): Très bien. Alors, M. le député, ça va?

M. Lamoureux: Oui.

Le Président (M. Rioux): Oui. Alors, M. le ministre, je vais céder la parole à M. le député de Vachon, votre collègue.

M. Payne: Merci. Il me fait plaisir, M. le président Filion, de vous accueillir, comme d'habitude. Vous savez, la problématique des personnes handicapées ? sur les questions que je voudrais soulever ? qui sont en emploi, est d'une nature différente, je pense, de celle des femmes et des autochtones et des minorités visibles. La raison que vous évoquez dans votre mémoire concernant l'intégration et la présence des personnes handicapées dans la loi me semble un peu surprenante. C'est un argument qui peut se tenir. N'empêche que c'était quand même un projet de loi qui était perçu à ce moment-là comme très progressiste, la loi ? comment elle s'appelle? ? assurant le droit des personnes handicapées au Québec. Le fédéral d'ailleurs n'en a pas, alors c'est compréhensible qu'elles puissent être visées par la loi en question, la Loi de l'accès à l'égalité.

Mais je pense que, comme la problématique est fort différente et comme aussi je pense que, si je ne me trompe, il n'y a pas une révision qui est en cours en ce qui concerne la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées et si cela, c'est notre principal pièce de législation, ne serait-il pas plus intéressant de bonifier ce projet de loi? Et pouvez-vous m'indiquer si vous êtes d'accord avec moi en disant que la problématique est fort différente des catégories que j'ai mentionnées?

Le Président (M. Rioux): M. Filion.

M. Filion (Claude): Oui. Juste pour comprendre la question, vous dites: Bonifier le projet de loi, voulez-vous dire bonifier...

M. Payne: Je dis: Pourquoi vous ne travaillez pas sur la loi qui assure l'exercice des droits des personnes handicapées...

M. Filion (Claude): La loi 9?

M. Payne: ...plutôt que suggérer que le projet de loi devrait encadrer également les personnes handicapées?

Le Président (M. Rioux): M. Filion.

M. Filion (Claude): D'abord, je suis content de voir... À mon avis, il existe à peu près un consensus pour dire ceci: Un, les personnes handicapées au Québec, au niveau de l'emploi, sont nettement défavorisées. On est en train de prendre, au Québec, un retard important par rapport à ce qui existe au niveau fédéral. Si Air Canada et puis BCE et autres entreprises soumises à la loi fédérale sont capables d'embaucher des personnes, sont capables de vivre avec des obligations de résultat puis des objectifs de redressement en ce qui concerne les personnes handicapées, je ne vois pas pourquoi les compagnies québécoises ne le feraient pas. Et puis, même, curieusement, avec ce qui se passe aux États-Unis, on est en train de prendre un recul important au Québec en ce qui concerne les personnes handicapées. Bon.

n(16 h 40)n

Ceci étant dit, quel est le meilleur moyen pour faire en sorte de procéder mais urgemment à intégrer la main-d'oeuvre qui ? à cause de différents facteurs qui souvent ne relèvent pas d'eux ? a un handicap et rendre ces personnes-là actives dans la société québécoise, entre autres, les sortir des listes des prestataires d'aide sociale ou des programmes qui sont fort coûteux pour l'ensemble de la société et faire en sorte qu'elles puissent devenir des actifs dans la société québécoise? Quel est le meilleur moyen?

Nous, ce qu'on suggère, à la Commission, c'est d'utiliser le projet de loi n° 143, d'en faire un groupe cible et de dire aux entreprises parapubliques du réseau, parce qu'elles ont une responsabilité à cet égard-là: Parmi les personnes handicapées... Puis là je voudrais qu'on se comprenne, mais clairement, M. le Président, il est très important...

Le Président (M. Rioux): M. le président...

M. Filion (Claude): Oui.

Le Président (M. Rioux): ...je constate qu'il y a d'heureux cheminements qui se font. Vous nous dites aujourd'hui clairement que les personnes handicapées devraient être intégrées au projet de loi n° 143.

M. Filion (Claude): Oui.

Le Président (M. Rioux): O.K.

M. Filion (Claude): Parce que c'est concret, c'est là...

Le Président (M. Rioux): C'est un fait nouveau pour moi, là, venant de votre bouche.

M. Filion (Claude): Oui, c'est prêt, c'est concret, c'est là. Et puis, encore une fois, ça va vouloir dire ceci, hein. Ça ne voudrait pas dire qu'on engagerait des personnes handicapées incompétentes. Je pense que tout le monde autour de la table le sait fort bien maintenant, le PAE consiste à choisir, dans un bassin de personnes compétentes, des personnes qui font partie de groupes cibles et à favoriser leur emploi. Alors donc, il ne s'agirait pas de favoriser des personnes handicapées incompétentes à faire un travail.

Le Président (M. Rioux): Je vais permettre au député de Vachon une très rapide question.

M. Payne: Oui, je voudrais juste passer la parole à mon collègue...

Le Président (M. Rioux): Oui.

M. Payne: ...si vous n'êtes pas en désaccord, parce que, lui, il a des éléments aussi à ajouter. Mais je vais être très bref. La loi, actuellement, sur les personnes handicapées a des dispositions qui favorisent toutes sortes de campagnes d'information auprès des employeurs. Les CTA, les centres de travail adapté ? j'en ai deux dans mon propre comté ? ce sont des centres de travail très spécialisés qui visent l'employabilité. C'est-à-dire que ce n'est pas la même problématique pour un anglophone ou une minorité visible, c'est toutes sortes de problèmes fort différents.

Moi, je pense que l'approche du législateur, actuellement, est la meilleure. Toute la question des subventions aux employeurs, par exemple, c'est très spécifique. Ces CTA, c'est vraiment des programmes qui visent l'employabilité. La personne n'est pas au point de départ, à ce moment-là.

Le Président (M. Rioux): Très bien. Alors, merci pour le commentaire. M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Rapidement, dans le même sens ? et j'entends la réaction du président ? on a une loi ici ? il n'y en a pas au gouvernement fédéral ? concernant les personnes handicapées. Donc, c'est plus normal qu'ils aient utilisé les PAE que nous, ils n'ont pas cette loi 9 que nous avons, l'équivalent, pour intégrer les personnes handicapées.

L'intégration des personnes handicapées n'est pas uniquement un problème de choix et de discrimination, c'est aussi un problème d'adaptation des postes de travail, tout en étant parfaitement d'accord sur la nécessité d'une révision et d'une amélioration concernant notamment l'emploi. Il y a un retard qui se prend, vous avez raison. La ministre a annoncé que cette révision, nous la verrions bientôt. Il est vrai que la loi 9 mérite d'être améliorée, et tout le monde est conscient de ça. Mais passer par les PAE, qui n'ont pas, eux, par exemple, de provisions concernant l'adaptation des milieux de travail, ne peuvent pas influer sur tous les facteurs qui concernent les personnes handicapées, nous semblerait, à nous, un recul par rapport aux possibilités de la loi 9.

Le Président (M. Rioux): Bien. Alors, nous allons maintenant céder la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce. Je sais que vous aviez un commentaire, c'est clair, mais...

M. Filion (Claude): ...répondre.

M. Simard (Richelieu): ...un ancien membre de cette assemblée, hein.

M. Filion (Claude): Bon, d'accord.

Le Président (M. Rioux): Mais, M. Filion, vous n'avez pas été privé depuis votre arrivée. Alors, on va céder la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, M. le Président. Comme ancien porte-parole de l'opposition officielle pendant quatre ans pour les sujets qui touchent les personnes handicapées, je recueille très favorablement vos commentaires, M. Filion. Les centres de travail adaptés sont un processus vers l'intégration ultime des personnes handicapées dans le marché du travail. Il y a les centres de travail adaptés, il y a les contrats d'intégration au travail, et le tout vise justement l'intégration de la personne handicapée dans le marché du travail général. Et, si la commission est prête à recommander que les PAE soient utilisés à ces fins-là, je pense que nous sommes dans le devoir de les écouter très attentivement, M. le Président. Mais ceci ne fait pas l'objet de ma question.

Le Président (M. Rioux): Alors, allez.

M. Copeman: Merci.

Le Président (M. Rioux): C'était votre préambule.

M. Copeman: C'est exact.

Le Président (M. Rioux): Très bien.

M. Copeman: Mais, sur un autre sujet, je vais revenir sur la question des anglophones du Québec. J'ai lu attentivement votre mémoire, j'ai lu l'échange que vous avez eu au mois d'août avec le député de Marquette, le député de Jacques-Cartier à cet égard, puis j'aimerais poursuivre. Dans un premier temps, il y a des possibilités de difficultés d'application, dans certaines de vos recommandations, pour les minorités ethniques, qui, vous suggérez, soient incluses dans les PAE, n'est-ce pas? Et vous définissez «minorités ethniques» comme des personnes avec une origine autre que britannique et française. C'est ça, votre propre définition.

M. Filion (Claude): C'est celle avec laquelle on serait capable de vivre.

M. Copeman: C'est ça. En tout cas, c'est ça que vous avez dit au mois d'août.

M. Filion (Claude): Oui.

M. Copeman: Aussi intéressant et paradoxal que ça peut apparaître, M. le Président, ça donnerait des situations intéressantes comme la suivante, comme la mienne. Je ne serais pas inclus dans cette définition parce que je suis d'origine britannique; ma femme le serait parce qu'elle est d'origine polonaise. Alors, ma femme, qui est anglophone, dont le nom est Beverly Akerman, qui a étudié à McGill, qui est une personne de race blanche, sera incluse dans votre définition de «minorité ethnique» par le fait que ses origines étaient polonaises. Alors, est-ce que vous trouvez normal que, deux anglophones mis côte à côte, un, moi-même, né ici, comme ma femme née ici, qui ont fréquenté la même institution académique, je ne serais pas éligible au Programme d'accès à l'égalité, à vos yeux, parce que mes ancêtres viennent de l'Angleterre ? il faut remonter loin, par contre, hein, mon père est né ici, mon grand-père est né ici, il faut remonter à mon arrière-grand-père pour m'exclure de votre recommandation ? mais mon épouse, née ici, et son père né ici, serait admise en vertu du fait que son arrière-grand-père est né en Pologne?

Le Président (M. Rioux): Bien. Alors, M. Filion, vous avez entendu...

M. Filion (Claude): Oui. Quitte à demander à Me Carpentier de compléter, oui, effectivement, la situation que vous suggérez, elle pourrait arriver. Mais elle existe déjà, là. Une minorité non visible peut épouser une minorité visible, et l'une ou l'autre peut être anglophone. Alors, ça existe. Les autochtones, la même chose. Écoutez, heureusement d'ailleurs, au Québec, on vit dans une société qui est ouverte, et il y a toutes sortes de mariages. Alors, la situation que vous décrivez est une réalité. Mais elle existe déjà pour les groupes cibles qui sont déjà identifiés. Alors, ce n'est pas...

Le Président (M. Rioux): Oui, allez.

M. Filion (Claude): Alors, bien, voilà.

Le Président (M. Rioux): Est-ce que, M. Carpentier, vous vouliez ajouter? Parce qu'il y a sûrement des cas dans la société québécoise plus simples que celui soulevé par le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Carpentier (Daniel): Oui, mais c'est que la notion, le concept de minorité ethnique, bon, écoutez, il nous vient tout simplement du concept qui est utilisé par le recensement canadien. Et pourquoi on a utilisé «origine française ou britannique, ou autres qu'origine...» parce que, bien, je pense que ce sont les deux peuples qui ont constitué ce pays. Et, je veux dire, si on a voulu qualifier qu'est-ce qu'une minorité ethnique, bien, c'est ceux qui ne sont pas de ces peuples fondateurs, excusez l'expression...

Le Président (M. Rioux): Alors, monsieur...

M. Carpentier (Daniel): ...et ça exclut également les minorités visibles. Donc, oui, ça donne ce résultat-là, mais ça ne vise pas les ménages, ça vise les personnes.

Le Président (M. Rioux): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Ça, je comprends très bien. Et c'est une réponse techniquement correcte sur le point de vue sociologique et anthropologique.

Le Président (M. Rioux): Mais ça ne règle pas...

n(16 h 50)n

M. Copeman: Mais ça ne règle pas le problème que, pour une partie de la communauté anglophone, vous êtes capable, semble-t-il, d'identifier une discrimination, parce que vous suggérez que ce groupe-là soit inclus dans les programmes d'accès à l'égalité, et votre critère pour les inclure dans les programmes d'accès à l'égalité par le biais des minorités ethniques, c'est qu'il y a une discrimination; et, pour une autre partie de la communauté anglophone, pour la partie dont je suis issu, vous n'êtes pas capable d'identifier la discrimination, alors je serais, et tous les anglophones d'origine britannique seraient exclus. Moi, je trouve que c'est une situation un peu farfelue. Je comprends l'explication sociologique et anthropologique, mais je vous dis: Si, dans un cas, vous êtes capable de constater la discrimination qui mène... dont la solution devrait être un programme d'accès à l'égalité pour une partie de la communauté anglophone issue des origines non britanniques, mais que, pour la partie de la communauté issue des origines britanniques, on ne devrait pas les inclure, ça pose un sérieux problème pour moi.

Le Président (M. Rioux): On ne peut pas remonter à trois générations. Alors, est-ce que vous adressez la question à M. Filion?

M. Copeman: Absolument, M. le Président.

Le Président (M. Rioux): Alors, M. Filion.

M. Filion (Claude): Je pense que je vais demander à Daniel, peut-être... Mais il y a des femmes aussi qui sont anglophones qui vont être favorisées par les PAE, je veux dire, il y a des recoupements là-dedans. Je ne sais pas si je saisis bien votre question. Je le sais qu'il y a une partie de la communauté anglophone qui, par le biais des minorités ethniques, va trouver favorablement de faire partie de groupes cibles. Je ne sais pas, Daniel...

M. Copeman: Parce que, à un moment donné, M. le Président, ça a l'air d'un «checkerboard», là: si vous jouez avec les morceaux blancs, que vous êtes capable de sauter sur vos morceaux, vous avez accès, mais, si vous jouez sur les carreaux autres que blancs, en vertu de vos origines, vous n'avez pas accès. C'est tellement morcelé à mon égard que je trouve la situation difficile à accepter.

Le Président (M. Rioux): M. Carpentier, une petite explication rapide, s'il vous plaît.

M. Carpentier (Daniel): D'accord. Écoutez, c'est possible, ce que vous me dites. C'est parce que vous partez du concept de communauté anglophone. Nous, ce qu'on vous explique, c'est qu'on part des concepts de minorité visible ? puis il y a une définition dans Recensement Canada ? de minorité ethnique. Et l'élément de discrimination qu'on peut aller chercher, et peut-être que vous en conviendrez également, on pense que, dans le passé, il y a eu de la discrimination à l'égard des immigrants. Ça s'est produit. Il y avait des règles différentes pour les immigrants. La société réagissait différemment à l'immigration. Et il y a eu de la discrimination dans le passé, et c'est pour ça qu'on aborde le concept de minorité ethnique. On n'aborde pas le concept de communauté linguistique.

Le Président (M. Rioux): Le ministre aurait juste une petite remarque rapide à faire, je vais lui laisser la parole sur ce sujet-là.

M. Simard (Richelieu): La remarque serait très rapide, mais j'aimerais quand même avoir l'occasion de poser une question beaucoup plus technique. Est-ce qu'on aura le temps? Il ne nous reste que quelques secondes. Sur ce sujet-là, on voit très bien qu'il y a un problème de définition.

Le Président (M. Rioux): Oui.

M. Simard (Richelieu): Vous voyez très bien qu'on arrive à des incongruités quand on base une réglementation, une loi qui tente de répondre à des problèmes réels sur la base des origines britanniques ou françaises. Ce n'est pas une façon très, très claire d'arriver au résultat. Peut-être que je vous soumets que les causes de discrimination... On parle bien de discrimination. Notre ami le député de Notre-Dame-de-Grâce ? que je connais bien ? et son épouse ne sont pas des victimes de discrimination, en tout cas pas apparemment. Il y a des gens, par contre, qui sont arrivés il y a quelques mois, il y a quelques années, ici, qui ne parlent pas français ni anglais, enfin qui viennent juste d'apprendre le français et l'anglais, et on sait qu'eux ils ont beaucoup plus de difficultés à s'intégrer. Donc, c'est probablement que le filon de langue maternelle serait plus utilisable que celui de l'origine non britannique ou non française comme élément pour établir une discrimination. Mais, en tout cas, on va revenir longuement, on aura l'occasion... Bon, on n'a pas le temps de poser mes questions, on ne les posera pas.

Le Président (M. Rioux): J'ai encore quelques secondes pour l'opposition.

M. Copeman: M. le Président, merci. J'ai lu attentivement l'échange avec Mme Muriel Garon, quand vous étiez devant la commission au mois d'août, et la distinction entre discrimination et sous-représentation m'apparaît très intéressante, c'est un enjeu important d'ailleurs. Selon le témoignage de Mme Garon et vous-même, M. Filion, un des éléments à discerner s'il y a de la discrimination, c'est la sous-représentation. C'est un des éléments. Et d'ailleurs Mme Garon semblait dire que c'est un facteur important. On convient qu'il y a sous-représentation importante avec la communauté anglophone dans le secteur public. À 0,8 % de la fonction publique issue de la population dite anglophone, c'est-à-dire d'expression anglaise, il y a sous-représentation importante. Vous suggérez une autre façon de faire; ça je respecte, ça. Mais ce que j'aimerais savoir: C'est quoi, les autres critères qui vous amènent à constater qu'il y a ou qu'il n'y a pas de discrimination? Et est-ce que la Commission a vraiment mené une étude pour savoir si de telles discriminations existent envers les anglophones du Québec ou est-ce que c'est une supposition basée sur ce qui se passe ailleurs au fédéral, ou ainsi de suite? Mais quels sont les facteurs? Vous avez parlé des indices suffisamment convergents.

Le Président (M. Rioux): Très bien. Alors, M. Filion.

M. Filion (Claude): Je vais vous donner un exemple très facile, la disponibilité, la localisation géographique. Exemple, la fonction publique québécoise, une partie malheureusement ? c'est en train de se décentraliser tranquillement ? de son appareillage est surtout dans la région de Québec. C'est un fait, je n'ai pas besoin d'aller très loin. Ce sont plus des réflexions dans ce sens-là ? pour répondre maintenant à votre deuxième question ? que des études. Oui, nous pourrions ? on l'avait dit d'ailleurs ? si on nous en donne les ressources, fouiller dans les couloirs de l'histoire. Mais, encore une fois, là, je me rabattrais sur le premier élément que je vous disais. Les personnes d'origine française ou britannique au Canada font partie de groupes majoritaires qui ont réglé leur problème ? qui ont réglé, qui règlent, je devrais dire, le mettre au présent également ? mais...

Le Président (M. Rioux): Les mots sont importants, là.

M. Filion (Claude): ...qui ont réglé et règlent leur problème, le problème de coexistence. Par exemple, la fonction publique, je ne sais pas, moi, les francophones au Manitoba ou les francophones dans la fonction publique fédérale ou les anglophones dans le secteur public québécois ont ce type de problème là, mais ils l'ont réglé autrement que par les PAE, qui ne sont pas un instrument souhaitable dans ce sens-là. Mais je pense avoir quand même répondu à votre question. Il y a des facteurs de disponibilité, de localisation géographique aussi. Il ne suffit pas de... Il faut quand même appliquer sur l'emploi...

Il y a peut-être des politiques de recrutement aussi. Puis c'est dans ce sens-là que je suggérais tantôt... Il y a beaucoup de façons d'agir pour corriger la situation. Des politiques de recrutement. En préparant un petit peu, depuis déjà plusieurs mois... Une petite anecdote que je vous raconte peut-être, en terminant. C'est un anglophone qui dépose sa candidature pour un poste. Il s'est fait dire, en terminant ? et malheureusement, c'est un refus: Votre français n'est pas comprenable. Tu sais, ça fait partie des politiques de recrutement. Peut-être qu'il faut changer un peu... Vous me suivez, M. le Président? Il faut peut-être aller là où sont aussi les anglophones, aller voir les cégeps, les institutions scolaires anglophones ? M. le député de Vachon est sûrement sensible à ça ? être dans le milieu, près du milieu anglophone, faire nos concours là. Il y a beaucoup de choses à changer, puis dans nos tests aussi.

Le Président (M. Rioux): Merci. Alors, d'un commun accord, on a convenu de déborder un petit peu 17 heures.

M. Simard (Richelieu): Dernière question, M. le Président.

Le Président (M. Rioux): Mais je dois, en toute équité, demander au député de Marguerite-D'Youville s'il a toujours l'intention de poser sa question.

M. Beaulne: Oui, et c'est une question très brève.

Le Président (M. Rioux): Elle sera brève, comme d'habitude, et très claire?

M. Beaulne: Oui.

Le Président (M. Rioux): Très bien.

M. Beaulne: Oui, M. Filion, on demande de plus en plus d'études, d'avis à la Commission des droits de la personne. Le projet de loi qu'on va étudier incessamment place l'application de cette loi sous la surveillance de votre organisme. Ma question est très brève: Disposez-vous de suffisamment de budget et de personnel pour répondre à toutes ces responsabilités qu'on confère de plus en plus à la Commission?

Le Président (M. Rioux): M. Filion.

M. Filion (Claude): Oui. Merci, M. le député. La réponse est non. La réponse, c'est non. La Commission des droits de la personne, actuellement ? puis je suis très à l'aise pour en parler, puis je vous remercie ? honnêtement, on déborde dans toutes nos directions, au niveau des enquêtes, au niveau de la recherche, parce que bon... et au niveau...

Il ne faut pas oublier que nous avons deux mandats, en jeunesse et en droits de la personne. Et là s'ajoute ce mandat. Nous sommes en pourparlers avec le nouveau ministre, on doit le dire honnêtement, et la nouvelle sous-ministre également, que nous croyons sensibles à nos besoins. La Commission des droits de la personne est extrêmement en demande par les organismes publics, que ce soit les ministères, les gouvernements, les associations, etc. Et là, dans le projet de loi n° 143, on est en contact avec le ministère.

n(17 heures)n

C'est évident que le projet de loi n° 143 ? puis il faut se le dire clairement, parce qu'il y a des lois qui ont été adoptées dans le passé puis qui ont eu de la difficulté à marcher quatre saisons dans l'année, hein ? pour qu'il fonctionne, ça prend des instruments. Puis c'est un bel objectif, tout le monde est d'accord, mais ça prend des instruments. Il faut que nous soyons capables d'intervenir, il faut que nous ayons les ressources minimales pour le faire. Et, là-dessus, nous croyons que le gouvernement sera sensible à nos demandes.

Le Président (M. Rioux): Merci, M. Filion. À un moment donné, j'ai eu peur, M. le ministre, que le président de la Commission des droits et libertés arrive ici avec un budget supplémentaire, mais il ne l'a pas fait. Donc, il va nous laisser d'abord étudier le projet de loi article par article. Ha, ha, ha! M. le ministre, rapidement.

M. Simard (Richelieu): Oui, très techniquement. C'est à propos des fameuses classifications nationales des professions, là ? on a parlé tout à l'heure de Recensement Canada. Plusieurs organismes craignent que la référence à la CNP alourdisse la tâche de l'employeur et contraigne à un regroupement d'emplois qui ne correspondrait pas à des catégories réelles. D'autres groupes s'inquiètent à l'effet que votre Commission n'utilise que les données de la CNP pour réaliser les analyses de disponibilité.

Alors, pouvez-vous nous expliquer brièvement, mais techniquement c'est très important, l'utilisation de la CNP qui serait faite par l'employeur lorsqu'il réalisera son étude d'effectifs?

Le Président (M. Rioux): M. Filion.

M. Filion (Claude): M. le Président, la meilleure personne au Québec qui connaît à fond cette question-là est assise à ma gauche, c'est Mme Louise Caron-Hardy. Puis, avec votre permission...

M. Simard (Richelieu): Il y a d'autres ressources aussi que la CNP.

M. Filion (Claude): D'accord. Et, avec votre permission, je donnerais vraiment la parole probablement à la personne qui connaît ça le mieux au Québec. Alors, Mme Caron-Hardy.

Le Président (M. Rioux): Alors, madame.

Mme Caron-Hardy (Louise): Je vous remercie, M. le président, de me vanter à ce point. Ha, ha, ha! J'espère que je vais répondre à vos attentes. Vous avez deux questions, M. le ministre. La première, c'est: Est-ce que la CNP doit être le seul outil que les organismes devraient avoir pour faire leur analyse d'effectifs? Ma réponse c'est oui. Je vais vous expliquer pourquoi. La Classification nationale de professions est le seul outil qui permet de codifier les résultats du recensement.

Dans le questionnaire du recensement, aux questions 39 et 40, il y a des questions très spécifiques qui sont posées à tous les citoyens sur leur emploi, la nature de leur emploi, l'expérience requise et le niveau de formation. Et c'est à partir des résultats à cette question que Statistique Canada codifie les réponses concernant les emplois.

Comprenons que la loi n° 143 s'applique à l'accès à l'égalité dans l'emploi. Donc, ça nous prend des bases de comparaison entre les analyses d'effectifs codifiées selon la Classification nationale de professions pour pouvoir dire aux organismes: Voici quelle est, dans votre secteur, dans votre zone de recrutement, la disponibilité des membres des groupes cibles. C'est le seul outil qui existe.

Mais je vais ajouter à votre deuxième question: Est-ce que c'est le seul outil dont la Commission se sert? La réponse, c'est non. Nous avons des banques de données annualisées concernant la formation, le degré universitaire, cégep, secondaire professionnel, permis de conduire, membres des corporations professionnelles. Et, annuellement, nous complétons nos données du recensement avec des banques annualisées. Et donc la réponse, c'est oui, il faut absolument que les organismes codifient chacun de leurs emplois par la Classification nationale de professions et par zone de recrutement, et nous complétons ces banques avec des banques annualisées.

Le Président (M. Rioux): Merci. M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Non, non, je suis très heureux de la réponse, elle est complète. Et vous avez raison, M. Filion, c'est elle qui connaît mieux ça.

Le Président (M. Rioux): Alors, merci. M. le député d'Anjou, dernière question.

M. Lamoureux: Oui. Merci, M. le Président. Je veux revenir au niveau des personnes handicapées. Je pense que, tout à l'heure, vous aviez encore des éléments à nous apporter. Dans le mémoire qui a été déposé au niveau du Conseil des ministres, il y a trois inconvénients qui sont soulevés pour faire en sorte que les personnes handicapées ne seraient pas visées.

Je vous les lis rapidement: Un. «La problématique des personnes handicapées est d'un autre ordre que celle relative aux femmes, aux autochtones et aux minorités visibles sur le marché du travail. Des mesures d'adaptation sont nécessaires à l'atteinte des objectifs pour les personnes handicapées. Ces mesures concernent l'adaptation physique des lieux de travail et la mise en place de moyens pour pallier à l'incapacité de la personne handicapée et vont au-delà de la gestion des ressources humaines.»

Deuxième inconvénient qu'on soulève, c'est: «L'embauche préférentiel d'un groupe visé dans le cadre d'un PAE se fait lorsque celui-ci a démontré avoir une compétence égale ou supérieure à un autre candidat. Le principe de la compétence égale, élément central d'un PAE, ne peut s'appliquer à toutes les personnes handicapées.»

Finalement, on nous dit que le Québec dispose d'une loi particulière, soit la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, qui est une loi, je pense, dont vous avez dit vous-même qu'elle avait eu des résultats mitigés.

M. Filion (Claude): C'est le moins qu'on puisse dire, on peut presque parler de faillite...

M. Lamoureux: Bon.

M. Filion (Claude): ...en ce qui concerne les plans d'embauche, là.

M. Lamoureux: Oui.

M. Filion (Claude): Même l'Office des personnes handicapées a mis fin à ses opérations administratives en ce qui concerne les plans d'embauche. Alors, je pense que, carrément, le problème, c'est que la loi 9, sur ce plan-là, est un échec, honnêtement, là. Et je pense bien que l'Office des personnes handicapées est venu témoigner devant vous...

M. Lamoureux: Absolument.

M. Filion (Claude): ...et je pense que c'est ce que l'Office disait. Écoutez, il y a un constat de discrimination évident dans le cas des personnes handicapées. Historiquement, là, les employeurs, une personne handicapée, des fois, ça demande des accommodements raisonnables, bon, etc. Les mesures qu'on a, que le législateur a adoptées il y a 20 ans n'ont pas donné de résultats concrets.

Et, à ce stade-ci, c'est vraiment un appel, M. le Président, extrêmement sérieux que nous faisons aux membres de cette commission parlementaire pour reconsidérer à fond cette possibilité-là d'inscrire les personnes handicapées comme groupe cible. Autrement, la Commission craint que le retard accumulé ne devienne irrécupérable.

La Commission est sceptique quant à d'autres façons de procéder, mais est évidemment ouverte, c'est le gouvernement, le législateur qui en dispose. Mais je pense bien qu'à ce stade-ci, en leur nom, nous vous faisons un appel pressant d'aller au fond des choses en ce que concerne cette possibilité-là. Et un consensus aussi...

Le Président (M. Rioux): Merci beaucoup.

M. Filion (Claude): Juste en terminant, M. le Président. Sauf erreur, on a examiné tous les mémoires, même les mémoires des employeurs, et, selon notre survol de l'ensemble des positions qui ont été défendues à cette commission parlementaire, il y a unanimité quant à l'inclusion des personnes handicapées dans le projet de loi n° 143. Alors, nous faisons un dernier appel à votre considération.

Le Président (M. Rioux): Merci beaucoup. M. Filion, je vous remercie. Je vous remercie très sincèrement parce que je pense qu'on avait besoin de ce petit moment ensemble pour finaliser ce qu'on avait commencé ensemble il y a quelque temps. Je voudrais remercier Mme Caron-Hardy également et M. Daniel Carpentier, que j'ai eu l'occasion de connaître dans une autre vie, et ça nous a fait plaisir de vous accueillir. Merci infiniment.

Je vais demander maintenant, pour conclure nos travaux, à M. le ministre, pendant deux, trois minutes, de faire un petit topo de clôture. Et je vais demander également au représentant de l'opposition officielle de faire de même.

M. Simard (Richelieu): Très brièvement, d'abord, pour remercier la Commission qui, comme d'habitude, est présente au rendez-vous lorsqu'il s'agit de choix majeurs pour notre société.

J'étais ce matin, M. le Président, dans une école, en train de dévoiler, à l'occasion du 25e anniversaire, la Charte des droits et libertés auprès de jeunes enfants merveilleux de nos écoles. Et c'est avec beaucoup d'intelligence qu'ils ont su comprendre l'extraordinaire richesse que représente pour notre citoyenneté cette Charte des droits dont vous êtes chargés non seulement de veiller à l'application, mais que vous êtes chargés également d'enrichir constamment.

C'est une charte constamment en évolution, c'est une charte qui est en avance sur la plupart des chartes des sociétés occidentales parce qu'elle inclut les droits sociaux. Donc, le travail que vous avez fait ici aujourd'hui et que vous aviez fait lors de votre présentation démontre que la Commission continue à très bien jouer son rôle.

Il n'en demeure pas moins qu'il y a certaines divergences d'opinion. Lorsque le député de Nelligan, l'autre jour, en Chambre, rappelait que, depuis deux ans, il demandait à la ministre de la Santé d'améliorer la loi 9 pour les questions d'emploi, c'est donc que lui aussi estimait que c'était le lieu pour améliorer, pour les personnes handicapées... pour faire en sorte que ces personnes aient les meilleures chances de ne pas être discriminées en emploi. Nous sommes tous d'accord au moins sur un point: il y a des problèmes d'accessibilité à l'emploi pour les personnes handicapées. On peut varier sur les moyens, mais il est certain que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut mettre en oeuvre les moyens nécessaires.

Pour ce qui est du reste, nous allons, pendant les prochaines heures en cette commission, aborder tous les points en détail dont nous avons parlés brièvement aujourd'hui. Enfin, je veux vous remercier, remercier toute votre équipe, et je suis certain que vous suivrez attentivement nos débats au cours des prochaines heures.

n(17 h 10)n

Le Président (M. Rioux): Merci, M. le ministre. M. le député d'Anjou.

M. Lamoureux: Merci beaucoup, M. le Président. Je tiens personnellement à vous remercier pour l'éclairage que vous nous avez apporté aujourd'hui. Effectivement, on vous remercie d'avoir accepté l'invitation de revenir. Je pense que vous avez su répondre avec le professionnalisme qu'on vous connaît aux questions qui sont parfois très complexes pour les députés qui devons...

On doit, dans le cadre de notre travail, se pencher sur des choses, puis les décisions qui seront prises ici vont avoir des répercussions excessivement importantes dans l'avenir. Et je vous remercie de l'éclairage que vous nous avez apporté. On va certainement se revoir dans d'autres forums. Par le biais de ce projet de loi là, on s'apprête à vous confier des responsabilités importantes. Souhaitons que le financement suivra. Merci.

Le Président (M. Rioux): Merci beaucoup, M. le député d'Anjou. J'aimerais maintenant souligner aux membres de notre commission que nous allons procéder maintenant à l'étude détaillée du projet de loi n° 143 sur l'accès à l'égalité en emploi dans des organismes publics et modifiant la Charte des droits et libertés de la personne.

M. Simard (Richelieu): Vous me permettez de saluer nos invités avant qu'ils ne quittent.

Une voix: On peut suspendre une minute ou deux?

Le Président (M. Rioux): Une minute, oui.

(Suspension de la séance à 17 h 11)

 

(Reprise à 17 h 12)

Étude détaillée

Le Président (M. Rioux): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous sommes réunis aujourd'hui pour entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 143 ? petite répète ? loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics, et ce projet de loi modifie la Charte des droits et libertés de la personne.

Remarques préliminaires

Je vais inviter M. le ministre à faire ses remarques préliminaires et, ensuite, j'inviterai le représentant de l'opposition officielle, le critique de l'opposition officielle, à faire de même. Et j'espère qu'à l'intérieur du peu de temps qu'il nous reste on aura le temps, peut-être, si d'autres députés veulent faire des remarques préliminaires, de se prévaloir de leur droit de parole. Alors, M. le ministre.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. D'abord, le 16 juin dernier, mon prédécesseur au ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, que j'aimerais saluer à ce moment-ci, déposait à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 143 sur l'accès à l'égalité en emploi dans des organismes publics et modifiant la Charte des droits et libertés de la personne.

Il y a deux semaines, je présentais le projet de loi n° 143 pour adoption de principe devant l'Assemblée nationale. Le député d'Anjou et nouveau critique officiel de l'opposition en matière de relations avec les citoyens et de l'immigration a alors fait connaître l'intention de son parti d'appuyer le projet de loi en rappelant le consensus dégagé lors des consultations publiques de la commission de la culture à l'effet qu'il y a urgence d'agir en matière d'accès à l'égalité en emploi et que le projet de loi est un pas dans la bonne direction.

Ce projet de loi répond effectivement à plusieurs attentes. Il s'inscrit dans le contexte où nous reconnaissons que la sous-représentation des Québécois et Québécoises d'origines diverses dans le secteur public québécois est tout simplement inacceptable. Nous reconnaissons aussi que la sous-représentation des femmes dans les postes d'encadrement ainsi que dans certains métiers non traditionnels où des barrières persistent doit être corrigée.

D'ailleurs, dans son discours inaugural en mars 1999, le premier ministre donnait au ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration ainsi qu'au président du Conseil du trésor le mandat de proposer des mesures pour faire une place équitable à la diversité québécoise dans les emplois du secteur public.

Les modifications récentes apportées à la Loi sur la fonction publique ainsi que l'adoption de la Loi sur l'administration publique sont de nature à permettre des progrès appréciables quant à la diversification des effectifs de la fonction publique. Elles ont permis de réviser le processus de recrutement de la fonction publique afin de faciliter l'accès des groupes ciblés aux postes disponibles.

Le gouvernement a également fixé un objectif de recrutement de 25 % d'anglophones, d'autochtones et de membres des communautés culturelles dans l'ensemble des postes de la fonction publique. L'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes a été renforcée à cet égard. Je tiens à vous rappeler, M. le Président, que seuls les ministères et organismes de la fonction publique sont actuellement tenus d'élaborer des programmes d'accès à l'égalité d'emploi. Toutefois, des indices nous laissent croire que certains groupes sont sous-représentés dans plusieurs types d'emplois en raison de leur sexe, de leur origine ethnique, de leur appartenance à une minorité visible. Le premier effet du projet de loi n° 143 sera donc d'amener les organismes publics à réaliser le portrait de leurs effectifs.

Par ailleurs, de façon généralisée, on constate au Québec des difficultés d'insertion et de progression en emploi pour quelques groupes en raison de pratiques qui, sans viser volontairement cet objectif, peuvent néanmoins avoir des effets d'exclusion. Le projet de loi n° 143 permettrait d'élargir, de façon très importante, la portée des programmes d'accès à l'égalité, la portée que ces programmes ont eu jusqu'ici dans le secteur public en visant les organismes publics qui n'ont jamais été soumis à l'obligation de prendre des mesures d'accès à l'égalité. Les organismes touchés par ce projet représentent à eux seuls plus de 700 organismes totalisant quelque 500 000 emplois. En comparaison, la fonction publique québécoise, vous le savez, représente environ 67 000 personnes.

Je tiens également à souligner, M. le Président, que ce projet de loi arrive à un moment opportun, soit celui ? et il ne faut pas le négliger, puisque souvent on s'est donné des projets généreux à des époques où il n'y avait pas d'emploi, puisqu'on diminuait l'importance de la fonction publique ? du renouvellement important des effectifs prévu dans les réseaux de l'éducation, de la santé et de certaines grandes sociétés d'État, ce qui devrait permettre d'atteindre plus rapidement les objectifs qui seront fixés quant à la représentation des groupes ciblés.

Lors des travaux préparatoires en vue du dépôt du projet de loi n° 143, plusieurs consultations menées auprès des ministères concernés, mais également auprès des organismes visés dont certains avaient expérimenté l'implantation du programme d'accès à l'égalité volontaire, nous ont amenés à apporter des modifications au processus d'élaboration et d'implantation de tels programmes afin de simplifier et d'assouplir la démarche d'ensemble.

Toutefois, tout en laissant une marge de manoeuvre appréciable aux employeurs, M. le Président, le projet de loi n° 143 vise également à assurer l'atteinte de résultats tangibles quant à la représentation des groupes visés. C'est pourquoi la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse aura pour rôle de vérifier la teneur des programmes d'accès à l'égalité qui seront élaborés par les organismes et de juger si lesdits programmes permettent de corriger la sous-représentation constatée.

Une étape très importante vers l'adoption du projet de loi n° 143 fut sans contredit les audiences publiques, que vous avez tenues les 29, 30 et 31 août et le 5 septembre dernier, auxquelles près de 30 organismes se sont faits entendre. Comme le soulignait mon collègue et critique officiel de l'opposition, les organismes entendus lors de ces audiences ont unanimement appuyé le projet de loi, certains soulignant également l'importance de l'adopter le plus rapidement possible. Au cours de ces audiences, des recommandations ont été faites sur différents aspects du projet de loi.

n(17 h 20)n

Je profite d'ailleurs de l'occasion pour remercier tous ceux qui ont amené des propositions pour bonifier le projet de loi, notamment les organismes communautaires, les syndicats, les associations d'employeurs et, bien sûr, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Je remercie également les membres de la commission de la culture, d'abord son président ainsi que les députés de l'opposition et du gouvernement qui, par leur intervention, ont permis d'éclairer le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration et son équipe sur certains points très importants du projet de loi. Pour nous, le travail des dernières semaines, voire des derniers mois, a consisté à analyser l'ensemble de ces recommandations. Au cours de ce travail, nous avons gardé à l'esprit l'intérêt des groupes victimes de discrimination, mais aussi la réalité des organismes visés par le projet de loi.

Aujourd'hui, nous débutons l'étude détaillée du projet de loi n° 143, étape cruciale et tant attendue. Dans les jours qui suivent, j'aurai l'occasion de proposer des améliorations importantes au projet de loi. Ces améliorations permettront, je le crois, d'atteindre l'objectif ultime du projet de loi, soit d'assurer une représentation équitable des groupes victimes de discrimination dans les organismes publics. Des modifications d'ordre plus technique seront également proposées, lors de cette étude article par article, afin que la loi puisse être appliquée de la meilleure façon possible par et pour tous les acteurs visés.

En conclusion, M. le Président, il faut être conscient que le projet de loi ne peut, malheureusement, régler à lui tout seul toutes les difficultés vécues par les groupes victimes de discrimination. Il va de soi que d'autres mesures devront être mises en place. Mais le projet de loi n° 143 constitue, je cite le député d'Anjou, «un pas important dans la bonne direction qui, conjugué aux efforts réalisés dernièrement dans la fonction publique, pourra susciter un effet d'entraînement dans d'autres secteurs d'activité au Québec».

Je souhaite, M. le Président, que nous travaillerons ensemble dans les prochains jours, en ayant en tête la vision dans laquelle s'inscrit le projet de loi n° 143, et je suis persuadé d'ailleurs que c'est ce que nous atteindrons: nous arriverons à nous entendre sur les éléments majeurs de ce projet. Je vous remercie et je nous souhaite bon travail.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Alors, M. le député d'Anjou, vous avez la parole pour les remarques préliminaires.

M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: Merci beaucoup, M. le Président. Dans un premier temps, vous me permettrez de saluer M. le ministre, tous les gens de son équipe. On va passer certainement quelques heures à débattre de ce projet de loi là. Ça sera, j'en suis persuadé, quelque chose d'intéressant. Avec les amendements qui s'en viennent, on pourra certainement travailler tout le monde ensemble, je pense, pour faire avancer un dossier qui est excessivement important, qui touche des citoyennes et des citoyens de partout au Québec. Et je pense que c'est un geste qui est important qui est posé par le gouvernement et l'Assemblée nationale, et c'est important, dans cette optique-là, d'envoyer justement un message à l'ensemble des intervenants et à la société que l'on doit, de façon vigoureuse, poser des gestes concrets pour s'assurer qu'aucun de nos concitoyens ou aucune de nos concitoyennes ne soit laissé en arrière dans quelque chose qui est fondamental et qui touche la dignité des gens, et c'est certainement celui de pouvoir travailler.

Vous savez, M. le Président, le but recherché de ça, c'est de faire en sorte que tous nos concitoyens et concitoyennes se reconnaissent dans la fonction publique, se reconnaissent dans les organismes publics et puissent de la sorte réaliser qu'ils font partie de la société québécoise et que leur apport est très certainement important à notre société.

On l'a mentionné, M. le Président, et je le réitère, il n'y a pas de doute là-dessus, le projet de loi constitue un pas important, un pas dans la bonne direction, et nous avons l'intention, du côté de l'opposition officielle, de travailler en collaboration avec le ministère et tous les intervenants pour nous assurer que le tout se fasse rapidement mais correctement également.

Je l'ai mentionné lors des remarques préliminaires, il y a des organismes qui sont venus nous soulever... La commission a réitéré certains de ses engagements. Nous croyons, du côté de l'opposition officielle ? nous le verrons à la lumière des amendements qui seront proposés ? qu'il y a des améliorations certainement qui peuvent être apportées. Et je l'ai mentionné en Chambre avec le ministre, c'est un projet de loi qu'on ne retouchera pas à chaque année. Donc, tant qu'à poser un geste, aussi bien poser le bon geste.

On l'a mentionné, nous, du côté de l'opposition officielle, on a certains amendements ou, en tout cas, certaines idées que nous souhaitons pouvoir retrouver dans le projet de loi tel qu'il sera adopté par l'Assemblée nationale au cours des prochaines semaines. On l'a mentionné, les minorités ethnoculturelles, d'après nous, devraient se retrouver... La commission est venue, d'ailleurs, appuyer cette revendication, comme bon nombre d'organismes.

Certainement, aussi, les personnes handicapées, quant à nous, devraient être visées par ce projet de loi là. Je sais pertinemment bien qu'il existe une autre loi qui vise également à apporter des solutions aux personnes handicapées. Seulement, quand la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse vient nous dire que c'est presque une faillite au niveau de cette loi-là, je crois, M. le Président, qu'il serait de mise, et c'est, à tout le moins, notre prétention ? et on pourra en débattre au cours de prochains jours ? qu'on devrait prendre l'occasion qui est devant nous, ici, en cette commission, au niveau du projet de loi n° 143, pour inclure ces gens dont on sait qu'ils sont victimes de discrimination.

Je l'ai mentionné, on souhaiterait voir le projet de loi élargi, pas seulement limité aux entreprises de 100 employés, mais viser les entreprises peut-être même de 50 employés et plus. C'est également une recommandation de la commission de la culture. On va voir si le gouvernement a décidé de bouger à ce niveau-là. Mais, d'ores et déjà, si des amendements en ce sens-là allaient être proposés, vous pouvez compter sur notre collaboration, M. le ministre. Sinon, nous pourrons nous-mêmes faire des propositions à ce sujet-là.

On l'a mentionné, le ministre a posé des questions au niveau de la double discrimination dont seraient victimes les femmes. Je pense que c'est un sujet qui avait été abordé par plusieurs groupes. C'était une des recommandations, d'ailleurs, de notre commission, au niveau de la commission de la culture. On pourra y revenir à ce niveau-là pour en débattre.

Il y a un point également que l'on souhaite ? je pense que c'était une des recommandations également qu'on avait faite ici, au niveau de la commission ? c'est de viser également les emplois à statut précaire et les emplois à temps partiel. Je pense que c'était d'ailleurs dans le mémoire de la Commission des droits de la personne; l'exemple était donné. Dans bon nombre d'organismes, la réalité fait en sorte que les employés permanents, ce sont des employés qui proviennent du bassin d'employés à temps partiel. Donc, s'il n'y a pas de mesures prises à la source des employés à temps plein ou permanents, c'est évident qu'en bout de ligne on risque de manquer l'objectif qui est celui, dans le fond, d'ouvrir l'accès aux clientèles qui seront visées par le projet de loi.

Un autre élément, M. le Président, peut-être là-dessus: on va souhaiter intégrer de façon un peu plus formelle les différentes associations syndicales et les représentants des employés. Vous savez ? et je pense que ce n'est une surprise pour personne ? que les organismes que l'on veut viser par le projet de loi sont évidemment fortement syndiqués pour ne pas dire tous syndiqués. Il serait, à mon avis, périlleux de tenter d'implanter les mesures qui sont prévues dans le projet de loi sans la participation des syndicats et des représentants des employés, puisqu'il est évident qu'il y a certaines mesures qui devront être prises au niveau des conventions collectives.

Ce sont donc là, M. le Président, les différents points que je tenais à soulever ici, au niveau des remarques préliminaires. On va voir, à la lumière des amendements... Le ministre a mentionné qu'il y en aurait. On va les étudier avec attention. On a l'intention de travailler, de faire en sorte que ce projet de loi là soit adopté rapidement, mais on tient à assurer évidemment, M. le Président, qu'on va faire notre travail pour s'assurer que ce projet de loi là soit le meilleur possible lorsqu'il sera adopté au niveau de l'Assemblée nationale.

Je ne sais pas si certains de mes collègues veulent peut-être ajouter un mot ou deux au niveau de remarques préliminaires, mais, pour moi, ça serait tout pour le moment. Merci.

Le Président (M. Rioux): Alors, est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui veulent intervenir au chapitre des remarques préliminaires? M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. À mon tour de faire quelques remarques préliminaires à l'étape de l'étude détaillée du projet de loi n° 143, Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans des organismes publics et modifiant la Charte des droits et libertés de la personne.

M. le Président, comme je l'ai indiqué plus tôt cet après-midi, j'ai suivi avec intérêt les travaux de la commission sur le projet de loi et j'ai relu certains échanges avec la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse à l'égard de l'inclusion ou pas de certains groupes qui ne sont pas ciblés par le projet de loi. J'ai pris connaissance également d'autres mémoires qui ont été déposés et entendus devant la commission.

n(17 h 30)n

M. le Président, mes remarques seront de deux ordres, essentiellement. En ce qui concerne les personnes handicapées, d'abord, un groupe qui est exclu des mesures, un groupe que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse suggère qu'il soit inclus dans les programmes d'accès à l'égalité pour les organismes publics. J'ai suivi un peu l'échange, fort intéressant d'ailleurs, du ministre des Relations avec les citoyens et du député de Vachon concernant le sujet des personnes handicapées. L'attitude gouvernementale, à date, semble être: Mais, vous savez, il y a la loi 9, la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées au Québec. Et l'existence de cette loi-là explique en partie, semble-t-il, la réticence du gouvernement à vouloir inclure les personnes handicapées dans les programmes d'accès à l'égalité.

Quelques observations simplement, M. le Président. La loi 9 a été adoptée il y a 22 ans, en 1978. C'est une loi qui a besoin d'être retravaillée, et tout le monde le dit M. le Président. Comme je vous ai indiqué tantôt, j'ai été pendant quatre ans porte-parole de l'opposition officielle en matière des services aux personnes handicapées, et, à ce moment-là, le ministre de la Santé d'alors m'avait dit ? ça date d'il y a plus de deux ans, n'est-ce pas ? qu'il travaillait sur une refonte de la loi 9, la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées. L'Office des personnes handicapées du Québec travaille sur des amendements, une refonte de ce projet de loi. On y travaille, semble-t-il, depuis maintenant plus de trois ans. Mais nous n'avons toujours pas d'indications quand est-ce que le gouvernement va procéder à une refonte. Le ministre de la Santé d'alors m'avait dit, sous peu, qu'il attendait certains... Il y a trois ans de cela, M. le Président.

Alors, je pense qu'il faut reconnaître que la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées n'est pas, dans sa forme actuelle, le véhicule approprié pour pallier à une discrimination systémique dans l'embauche des personnes handicapées dans les organismes publics à l'intérieur de la fonction publique québécoise. Eh oui, c'est un peu compliqué, parce que ça prend des postes de travail adaptés. Il y a probablement la question des coûts, n'est-ce pas, hein, et c'est toujours un problème. Il faut adapter des postes de travail. Oui, ça va coûter cher. Mais, si on se met à évaluer uniquement les coûts de l'intégration des personnes handicapées au Québec, on ne leur fait pas justice, on ne fait pas justice à la société québécoise.

Alors, je crois, comme la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, comme mes collègues d'ailleurs, que la loi 9 n'est pas la mesure appropriée pour pallier à cette sous-représentation énorme des personnes handicapées dans la fonction publique québécoise et dans les organismes publics québécois, qu'il faudrait, en effet, qu'elles soient incluses à l'intérieur du projet de loi n° 143 par le biais des programmes d'accès à l'égalité. Eh oui, ça serait une autre mesure. Il y a des CTA, des centres de travail adaptés, il y a des CIT, des contrats d'intégration du travail, mais ce n'est qu'un continuum de mesures qui visent l'intégration ultime des personnes handicapées. Eh oui, il y avait même des plans d'embauche pour les personnes handicapées qui n'ont jamais fonctionné dans la loi 9. C'est à ça que je fais référence. Et je supplie le ministre de consulter sa collègue la ministre de la Santé et son prédécesseur. Les plans d'embauche qui sont dans la loi 9 ? le gouvernement a le pouvoir d'implanter des plans d'embauche, d'imposer des plans d'embauche pour les personnes handicapées ? on sait que ça ne fonctionne pas, M. le Président. C'est le constat de l'Office des personnes handicapées du Québec, c'est le constat du ministère, ce n'est pas un outil adapté.

Alors, M. le Président, je prétends, avec respect, que la loi 9 n'est pas adaptée, n'est pas à la hauteur de la tâche, n'est pas un remède approprié. Le ministre va peut-être me dire: Oui, oui, mais, comme gouvernement, nous allons faire des amendements, on va peut-être donner plus de dents à la loi 9 pour intégrer les personnes handicapées et dans le secteur privé et dans le secteur public. Mais, faute d'avoir un engagement ferme, je dirais même plus loin, parce que je suis sceptique de nature, faute d'avoir un projet de loi amendé devant nous, c'est-à-dire le projet de loi 9 amendé devant nous, je dirais que ce n'est pas suffisant simplement de dire: Nous travaillons sur des amendements à la loi 9, parce que je l'ai déjà entendu pendant de nombreuses années ici, à cette Assemblée, M. le Président, et ça ne suffit pas.

M. le Président, l'autre question évidemment, qui est complexe, je l'admets, est l'intégration ou la question de la sous-représentation, toute la question de la discrimination potentielle des personnes d'expression anglaise au Québec. Et, je comprends, c'est complexe. Et même on a tendance à dire, même nous, même moi, M. le Président, «la communauté anglophone». D'ailleurs, je pense que c'est une très mauvaise formulation. Il n'y a pas une communauté anglophone au Québec, il y a des anglophones d'expression anglaise, il y a des regroupements d'anglophones dans différents lieux géographiques au Québec, qui n'ont pas les mêmes problèmes, qui n'ont pas les mêmes besoins, qui n'ont pas la même situation. Ça varie énormément. Les anglophones de Port-Daniel, dans Gaspé, ne sont pas dans la même situation que les anglophones à Notre-Dame-de-Grâce, j'en suis très conscient. Mais on a tendance à utiliser ce genre de «shortcut, shorthand», on dit «la communauté anglophone» comme si c'était une communauté homogène qui parle d'une seule voix sur bien des sujets, et on sait que ce n'est pas vrai.

Il y a, par contre, M. le Président, des résidents, des Québécois d'expression anglaise qui varient. Ils sont présents dans toutes les régions du Québec. Ils sont de couleur différente, n'est-ce pas, ils sont d'origine différente, mais il y a un élément qui les rassemble, c'est l'utilisation de l'anglais comme langue d'usage, pas exclusive évidemment. Parce que je suis, comme vous le savez, un Québécois d'expression anglaise, anglais, mais évidemment... Et nous parlons anglais à la maison, quoique ma fille, qui a récemment quitté la garderie, le centre de la petite enfance, est allée au centre de la petite enfance communautaire à Notre-Dame-de-Grâce, qui est un centre de la petite enfance francophone ? un centre ne peut pas être francophone, n'est-ce pas ? un centre où les enfants sont francophones et elle parle couramment le français. D'ailleurs, elle fait des fautes en anglais, hein. C'est absolument curieux de la voir aller. Elle dit en anglais: «The car blue», ce qui est une faute didactique absolument, l'inversion, l'auto bleue, n'est-ce pas, tandis qu'en anglais on devrait dire: «The blue car». Alors, je dis ça simplement pour dire que, oui, nous sommes une famille d'expression anglaise, mais moi-même je fais des efforts pour parler la langue française au Québec, ma fille le fait, mes enfants le font.

Il y a une problématique, M. le Président. Il y a une sous-représentation grave, 0,8 %. J'ai écouté attentivement le président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, qui indique qu'il y a d'autres facteurs. Il y a le facteur en ce qui concerne la participation des Québécois d'expression anglaise dans la fonction publique qui est relié peut-être à des obstacles d'embauche, à la disponibilité de postes, au fait que les postes sont majoritairement situés à Québec. Oui, c'est vrai.

Mais la fonction publique québécoise est également très présente à Montréal. Je ne me rappelle pas du pourcentage, il me semble que c'est à peu près le tiers. Je peux peut-être faire erreur. Mais c'est clair que les emplois dans la fonction publique québécoise et dans les organismes publics, il y a une présence importante dans la grande région de Montréal où est située la vaste majorité des Québécois d'expression anglaise. Alors, dire simplement que le fait que 65 % ou à peu près ? peu importe ? que la majorité des postes se trouve à Québec ou en région explique en partie la sous-représentation, c'est ne pas rendre justice, je pense, à la problématique.

C'est une problématique qui existe depuis fort longtemps, ce n'est pas nouveau. On ne fait pas de partisanerie ici. C'est un problème qui existait dans le temps de l'administration libérale. Oui.

Une voix: ...

n(17 h 40)n

M. Copeman: Non. C'est inexact. C'est inexact. M. Daniel Johnson, président du Conseil du trésor, a développé des plans d'embauche. Il y a une différence entre dire, M. le ministre: On n'a rien fait, et les résultats étaient décevants. Mais dire que nous n'avons rien fait est strictement inexact. C'est strictement inexact. Ça n'a pas donné les résultats escomptés. Mais il y a une différence. Si le ministre veut commencer la partisanerie, on va la commencer, M. le Président, mais ce n'était pas mon objectif. Je dis: C'est un problème qui perdure depuis fort longtemps. Je l'admets. Alors, eh oui, M. Johnson fils, quand il était président du Conseil du trésor, a tenté de se pencher sur la question et, oui, d'autres avant et d'autres après. Eh oui, il y a des gestes qui ont été posés, comme le programme de stages, qui a donné des résultats fort intéressants, je ne le nie pas. Est-ce que ça va être assez pour corriger cette sous-représentation? Bien, le noeud de la question est là. On ne peut pas l'évaluer à ce moment-ci. Mais ce que je dis, M. le Président, c'est qu'il faut, quant à moi, examiner très attentivement la possibilité d'inclure les personnes d'expression anglaise à l'intérieur des programmes d'accès à l'égalité.

Et j'ai écouté, j'ai examiné attentivement... Parce que ça ne fait pas l'unanimité nécessairement à l'intérieur de ladite communauté anglophone, il y a des avis partagés, et c'est normal. Il y a longtemps, M. le Président, quand j'étais associé avec un organisme bien connu, on ne voulait pas être inclus dans les programmes d'accès à l'égalité. Mais ça évolue. Ça évolue. Et il faut regarder cette question, je pense, très, très, très sérieusement. Et, quand j'ai entendu le président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse dire: Vous savez, c'est une question de relation entre deux majorités... Oui, en effet, comme anglophone, je suis majoritaire au Canada, mais, comme anglophone québécois, je suis minoritaire. Le problème fut d'ailleurs là-dedans: Est-ce que c'est une dynamique de deux majorités ou de deux minorités? N'est-ce pas? Parce que les francophones sont minoritaires au Canada mais majoritaires au Québec.

Le Président (M. Rioux): Je vous invite à conclure.

M. Copeman: Mais, M. le Président, le fait que je sois, comme Québécois d'expression anglaise, majoritaire au Canada, comment est-ce que ça règle le problème de la sous-représentation de mes concitoyens québécois ici, au Québec? Je n'obtiens pas de services municipaux en Ontario, j'obtiens des services municipaux ici, au Québec. C'est vrai que je peux écouter NBC, CBS, ABC, M. le Président. D'ailleurs, nous les avons écoutés ensemble, CNN, au consul général des Amériques, le soir de l'élection fédérale aux États-Unis. Mais CNN, ABC, NBC ne me donnent pas des services gouvernementaux dans ma langue ici, au Québec. Ça amène un élément culturel qui est fort intéressant. Mais ça ne me donne pas des services quand j'appelle à l'hôtel de ville, le fait que CNN, ABC, NBC existent. Ça ne donne pas des possibilités d'avoir accès à des postes à la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Alors, c'est là la problématique, M. le Président. Alors, dire simplement: Vous savez, c'est une question de double majorité ou double minorité, c'est un débat fort intéressant, mais ça ne règle pas la problématique.

Le Président (M. Rioux): Mais, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, on va avoir quand même assez de temps devant nous pour en débattre, étant donné qu'on étudie le projet article par article. Je vous invite, cette fois-ci, à conclure.

M. Copeman: Je comprends, M. le Président, et suis très respectueux, mais il me semblait qu'on avait un certain temps à notre disponibilité. Et je vais conclure au sujet des municipalités, parce que, également, j'ai entendu le président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, pour lequel j'ai beaucoup de respect, M. le Président, dire que... Entre autres, il dit: La communauté anglophone a ses propres institutions, ses municipalités. Ça m'a fait sourire un peu, M. le Président, à ce moment-là, parce que, comme vous le savez, la semaine prochaine, nous allons avoir devant l'Assemblée nationale un projet de loi de fusions forcées qui fait disparaître les municipalités sur l'Île de Montréal pour créer une seule municipalité. Alors, l'entité légale qui est la municipalité va disparaître, sauf pour la grande ville de Montréal. Oui, il va y avoir des arrondissements, semble-t-il, mais l'entité légale qui est la municipalité va disparaître. La municipalité de Montréal-Ouest va disparaître. La municipalité de Hamstead va disparaître. La municipalité de Côte-Saint-Luc va disparaître. La municipalité de Westmount va disparaître. Elles vont être transformées en arrondissements.

Et ce qu'on a présentement pour protéger le statut bilingue de ces municipalités qui sont enchâssées dans la loi présentement, c'est un engagement du premier ministre que le même statut va s'appliquer à des arrondissements. Mais, M. le Président, un engagement du premier ministre n'est pas équivalent à une entité légale enchâssée dans la loi. Et, M. le Président, je vous dis très respectueusement qu'il y a beaucoup de membres, beaucoup de Québécois d'expression anglaise qui se méfient de temps en temps de la parole du premier ministre du Québec actuel. Alors, ça pose problème...

Le Président (M. Rioux): J'ai deux autres collègues qui veulent intervenir à l'étape remarques préliminaires, et il sera 18 heures dans 15 minutes.

M. Copeman: Je conclus en disant, M. le Président: Pour toutes ces raisons-là, nous allons examiner attentivement le projet de loi. On va voir si le ministre a une certaine volonté de répondre à nos amendements. Et ça va beaucoup, je pense, influencer la conduite des travaux la commission de la culture. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Rioux): Merci. M. le député de Vachon.

M. David Payne

M. Payne: Je vais être très bref, M. le Président. Je pourrais avoir beaucoup de compréhension pour le député de Notre-Dame-de-Grâce, qui doit composer avec deux langues au foyer. Chez nous, on en a trois. Je parle à ma femme en français, et elle parle à notre fille en chinois, puis ma femme me parle en chinois, et la petite, elle nous parle dans je ne sais pas quelle langue parce qu'on ne comprend pas trop.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Copeman: Ça va venir! Ça va venir, ne vous inquiétez pas.

M. Payne: Ça s'en vient.

Le Président (M. Rioux): M. le député de Vachon, vous avez toujours la parole.

M. Payne: Il y a quelque chose à souligner au député de Notre-Dame-de-Grâce. Parce que j'écoute les échos dans les médias anglophones régulièrement, il n'y a pas de constat de discrimination envers les anglophones dans le secteur public. Je pense qu'il faut le dire, il faut le répéter. C'est très important qu'on puisse dire ce qu'on croit ici, à l'Assemblée nationale, parce que je pense qu'il y a un consensus, en toute honnêteté, à cet égard-là. Et, si ce n'est pas le cas, qu'on fasse, M. le Président... ? mais j'adresse mes préoccupations au député de Notre-Dame-de-Grâce ? qu'il fasse la démonstration ici. C'est très grave parce qu'il y a des insinuations, des innuendos qui sont propagés régulièrement. Et c'est sans animosité que je soulève la préoccupation, mais c'est très important.

Je peux vous dire que, par exemple, vous pouvez regarder les anomalies, qui me frappent toujours. Chez les cégeps anglophones, il y a si peu de programmes de sensibilisation sur les opportunités dans la fonction publique, la façon de faire, comment on fait et quelles sont les opportunités. Ce sont les mêmes personnes qui souvent disent: Ça n'a pas de bon sens qu'on ne puisse pas avoir accès à la fonction publique. C'est les mêmes personnes qui reçoivent régulièrement la documentation de tout partout puis les services à la pédagogie, le service à l'aide au recrutement, et tout. Souvent, ils passent à côté des opportunités qu'ils ont à portée de la main. C'est la première chose que je veux dire.

La deuxième chose, je voudrais dire très simplement que, moi, je me souviens très bien des efforts du gouvernement du Parti québécois, entre 1980 et puis 1985 notamment. On avait une disposition qu'on a fait accepter par le Conseil des ministres, avec négociation avec ce qu'on appelait à ce moment-là la Commission de la fonction publique pour éviter le problème, ce qu'on appelle une espèce de «catch-22» selon quoi quelqu'un qui n'avait pas d'expérience pouvait croire qu'il n'avait pas une compétence suffisante de la langue française et ne pouvait pas avoir accès à la fonction publique. N'ayant pas d'accès à la fonction publique ou un poste dans la fonction publique, il ne pouvait pas avoir un apprentissage suffisant de cette langue-là. On avait une entente spécifique avec l'Office de la langue française comme quoi il pouvait par la suite prouver sa compétence linguistique. Mais ? savez-vous quelque chose? ? ça a été suspendu par le Parti libéral. C'est ça qu'il faut dire. Lorsqu'on laisse entendre, pas nécessairement dans cette Chambre mais surtout à l'extérieur, dans le milieu anglophone, qu'il y a discrimination, je pense qu'il faut répéter que la démonstration doit être faite et, d'autre part, qu'il y avait des démarches qui étaient entreprises notamment par notre gouvernement souverainiste du Parti québécois qui n'ont pas été suivies par votre propre gouvernement lorsque vous avez pris la relève. Je pourrais continuer à faire toute une démonstration, mais, lorsqu'on regarde...

n(17 h 50)n

Je peux vous citer un rapport sur la Basse-Côte-Nord, je le connais un peu parce que je l'ai écrit. Ça date depuis 20 ans, sous le gouvernement Lévesque. On avait fait une analyse socioéconomique sur toute la Basse-Côte-Nord en ce qui concerne leur employabilité. On a constaté... Puis c'est un rapport qui avait comme bénéfice d'avoir l'OPDQ qui était responsable de la mise en application. Plusieurs d'entre nous connaissent le rapport dans quelques détails. Ça a donné une série de mesures pour faciliter l'intégration des anglophones dans la fonction publique. Mais il y avait un constat incontournable, c'est-à-dire que la Basse-Côte-Nord, ce n'est pas Québec. Il n'y a pas une concentration de services publics entre Chevery et Blanc-Sablon ou Baie-des-Moutons ou même Natashquan. Il y a une réalité socioéconomique, sociogéographique.

Alors, si on veut faire la démonstration, on va être scientifique puis on va regarder comme il faut les données sociodémographiques pour faire l'illustration comme quoi ce n'est pas facile. Dans ce temps-là, par exemple, il y avait même le transfert des élèves de la Basse-Côte-Nord jusqu'à Sherbrooke, pour avoir leur propre éducation. Donc, c'est fort complexe. Je laisserai là, avec un point d'interrogation puis un point d'exclamation, quelques préoccupations que j'ai. Mais pense que ce n'est pas la place pour faire trop de démographie... de démagogie, de...

Le Président (M. Rioux): Démagogie.

M. Payne: Démagogie. Merci.

Le Président (M. Rioux): Alors, M. le député de Vachon, je vous remercie. M. le député de Montmagny-L'Islet, quelques remarques rapides.

M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Juste quelques mots, M. le Président, je vous remercie. Ma présence ici, à cette commission aujourd'hui, en fait, mon intérêt a été suscité par le critique officiel, le député d'Anjou, à notre caucus, qui a démontré à notre caucus l'importance de supporter ce projet de loi, de le suivre et de s'y intéresser peu importe où nous vivons. J'ai compris cette partie-là et j'ai écouté tous mes collègues de ce coté-ci comme de l'autre côté, et je pense que c'est vrai. Trop longtemps, on a eu des voeux pieux pour essayer de supporter...

On parlait tantôt de minorités. Mais, moi, je reviens sur la place des personnes qui ont des handicaps de toutes sortes, des handicaps surtout physiques, et la difficulté qu'elles ont dans les entreprises. Moi, je connais plutôt, dans ma région, les problèmes que vivent ces gens-là dans les entreprises privées, capables de faire leur part pour essayer de s'intégrer, mais la culture n'étant pas là, l'effort de la communauté n'étant pas là, le suivi jour après jour dans le développement de responsabilités de chacun d'entre nous. Je pense qu'il s'agit d'avoir constamment à l'esprit cette obligation-là, cette volonté-là. Et on va devoir, chacun d'entre nous, je pense, la propager, la véhiculer.

Je vois que le nouveau ministre... Ce n'est pas un nouveau ministre, mais le député ministre est nouveau dans cette responsabilité-là qu'on connaît tous assez bien. Je prends quelques secondes pour le féliciter de ce nouveau poste là. Et je sais très bien, de par son passé, sa culture, qu'il est capable d'avoir cette sensibilité-là, M. le Président. Je sais que vous comprenez de quoi je parle, parce qu'on ne pourrait pas imaginer que le député de Montmagny-L'Islet, au nom d'un certain nombre de ses citoyens, sente le besoin d'intervenir à cette commission-là ici aujourd'hui. Mais, oui, vous représentez un comté qui, sur le plan, je pense, de la situation économique, géographique et de par les mentalités, M. le Président, ressemble passablement à celui du comté de Montmagny-L'Islet, bien qu'on n'ait pas à se plaindre de la situation économique et de l'emploi dans les dernières années. Mais ça peut se ressembler à certains égards.

La loi, comme je vous le mentionnais, va imposer un changement de culture pour tout le monde, pour tout le monde, mais pour les cadres à l'intérieur de nos services gouvernementaux. Parce que c'est ça que la loi vise. Ces gens-là sont probablement préparés, mais ça ne leur a pas été imposé de façon ferme, jour après jour, dans le cadre de leurs responsabilités. Et c'est un point que je voulais faire.

Juste avant de terminer, M. le Président, je voulais justement ajouter, on a fait allusion à ça tantôt... Puis on serait tous très déçus si, après avoir tous mis en commun une bonne volonté des deux côtés de cette commission-là pour essayer de faire de cette loi-là, une loi qui pourrait corriger des inéquités et des inégalités, à cause des coûts qu'elle pourrait engendrer, le gouvernement actuel retardait l'application de cette loi, comme on a vu dans le passé. On a mis des heures et des heures. Et je pourrais en citer une où vous avez mis des heures dans un autre poste de responsabilité, où j'ai mis aussi du temps et des heures, et l'application a été, je pourrais peut-être ajouter, vraiment perturbée, pour ne pas dire nécessairement retardée par des astuces. Donc, ça serait décevant, M. le ministre, si le gouvernement actuel, à cause de certaines raisons que je viens d'exprimer, soit les coûts, n'avait pas de budget pour la mettre en application après avoir débattu un projet de loi et l'avoir adopté, qui répondait justement aux besoins et qui corrigeait des situations au Québec. Merci.

Le Président (M. Rioux): Merci beaucoup, M. le député de Montmagny-L'Islet. J'aimerais avoir le plein emploi à Matane, ce qui est le cas de notre merveilleux représentant de Montmagny-L'Islet.

M. Simard (Richelieu): ...ainsi, M. le Président.

Le Président (M. Rioux): C'est un beau problème. Alors, je cède la parole à M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Je partage les préoccupations de mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, pour être natif de la frontière ontarienne et pour avoir la moitié de ma famille franco-ontarienne. Cependant, je pense qu'il faut y aller avec une certaine précaution quand on se met, dans un projet de loi, à cibler des groupes dont la définition n'est pas précisée, parce que ça pose toutes sortes de problèmes d'interprétation par la suite devant les tribunaux, et, au fond, ça nie l'objectif du projet, les définitions étant si imprécises que personne à toutes fins pratiques ne peut recourir aux tribunaux pour avoir gain de cause en fonction du projet de loi.

C'est la raison pour laquelle j'ai bien apprécié la réponse qu'ont donnée les représentants de la Commission des droits de la personne sur toute la question de la définition de «communauté anglophone» ou non à partir de la définition qui est donnée par Recensement Canada. Elle est peut-être imparfaite, j'en conviens, mais au moins elle a l'avantage et la convenance d'être claire et d'être assez précise pour qu'à l'intérieur d'un projet de loi elle puisse signifier ce qu'on veut lui faire signifier et qu'elle serve de barème d'interprétation.

Il y a une autre chose également que je voudrais dire concernant l'évolution de la communauté anglophone et toute la question de la participation à la fonction publique. Je me suis posé la question comment il se faisait, par exemple, que, proportionnellement à ce qu'elle représente par rapport à la population totale de l'Ontario, la communauté franco-ontarienne était plus représentée et plus présente dans le secteur public ontarien que ne l'est la communauté anglophone au Québec. J'ai eu partiellement la réponse à deux reprises, au référendum en 1995 et puis par la suite aux dernières élections, lorsque je suis allé au cégep anglophone Dawson, à Montréal, faire la campagne électorale. La première fois, j'étais en compagnie de mon collègue de Chomedey, Tom Mulcair, la deuxième fois, j'étais seul. Et évidemment la question qui est revenue sur le tapis, c'est bien sûr la représentation de la communauté anglophone.

n(18 heures)n

Alors, moi, j'ai posé aux jeunes anglophones la question tout à fait directe, j'ai dit: Vous, vous sentez-vous attirés vers la fonction publique d'une part et vous sentez-vous adéquatement préparés pour travailler à l'intérieur d'une fonction publique dont la langue de fonctionnement est le français? Alors, on m'a répondu non, aux deux plans. Pourquoi? Parce que, et ça explique ce comportement différent entre les franco-ontariens par rapport à la fonction publique ontarienne et la fonction publique québécoise par rapport à la communauté anglophone ? et vous me corrigerez, chers collègues, si je me trompe ? j'ai comme l'impression que d'abord nos jeunes anglophones sont beaucoup plus sollicités par le secteur privé dans leurs universités, dans leurs collèges que ne l'est la minorité franco-ontarienne dans ses institutions d'éducation.

Deuxièmement, pour beaucoup de jeunes anglophones qui se destinent à la fonction publique, l'objectif, c'est d'atteindre la fonction publique fédérale et non pas la fonction publique provinciale, qui, dans leur esprit, n'est pas le summum de l'accomplissement professionnel, alors que, pour les francophones, c'est l'inverse.

Il y a, troisièmement, le fait aussi, d'après ce qu'on me dit, que le système ne prépare pas suffisamment les jeunes anglophones à travailler dans un milieu francophone où les critères d'évaluation sont ceux qui s'appliquent aux francophones et la manière dont on peut fonctionner dans cette langue-là.

Alors, ce ne sont que des pistes que je mets sur la table pour indiquer qu'il faut y aller prudemment et que bien sûr il faut regarder quelle est la véritable problématique des anglophones, de la présence anglophone au sein de la fonction publique québécoise. Mais encore faut-il bien faire le diagnostic pour trouver le remède adéquat.

Le Président (M. Rioux): Très bien. Je voudrais demander, avant qu'on se quitte, s'il y a des dépôts de documents.

Amendements déposés

M. Simard (Richelieu): Oui, M. le Président. Je vais faire quelque chose qui n'est peut-être pas usuel en commission, mais je pense qu'il y a ici une telle volonté de progresser ensemble que j'aimerais vous déposer immédiatement les projets d'amendements, de façon à ce qu'on puisse bien travailler, également les cahiers, préparés par le ministère, d'analyse des différents articles.

Je sais que vous serez studieux toute la fin de semaine, messieurs, et que vous nous aiderez à mieux travailler. Mais je pense que, puisqu'il y a cette volonté d'avancer, vous y verrez des modifications importantes. Notamment, nous doublons le public visé par le projet de loi en acceptant que soient incluses dans le projet de loi les personnes dont la langue maternelle est autre que le français et l'anglais, une définition sur laquelle nous reviendrons sûrement. Et voilà, ce dépôt de documents, je pense, va rendre service aux membres de la commission.

Le Président (M. Rioux): M. le ministre, je peux vous dire que c'est une pratique que je vous invite à développer davantage encore. Mais c'est excellent, et je vous en félicite.

Alors, nous allons nous retrouver mardi prochain, le 14 novembre, à 9 h 30, une séance où on étudiera le projet de loi article par article jusqu'à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif, là où nous sommes présentement. Alors, j'ajourne les travaux à mardi prochain.

(Fin de la séance à 18 h 2)



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