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Version finale

30th Legislature, 2nd Session
(March 14, 1974 au December 28, 1974)

Tuesday, July 16, 1974 - Vol. 15 N° 133

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 22 — Loi sur la langue officielle


Journal des débats

 

Commission permanente de l'éducation,

des affaires culturelles et des communications

Etude du projet de loi no 22

Loi sur la langue officielle

Séance du mardi 16 juillet 1974

(Onze heures vingt et une minute)

M. GRATTON (président de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre, messieurs!

La commission de l'éducation, des affaires culturelles et des communications commence ce matin l'étude, article par article, du projet de loi 22, Loi sur la langue officielle.

J'aimerais aviser la commission des députés qui la composent ce matin, soit: M. Séguin (Pointe-Claire); M. Charron (Saint-Jacques); M. Déom (Laporte); M. Cloutier (L'Acadie); M. Hardy (Terrebonne); M. Lapointe (Laurentides-Labelle); M. Brown (Brome-Missisquoi); M. Morin (Sauvé); M. Caron (Verdun); M. Phaneuf (Vaudreuil-Soulanges); M. Saint-Germain (Jacques-Cartier); M. Samson (Rouyn-Noranda); M. Veilleux (Saint-Jean).

Avant de procéder à l'étude, il y aurait lieu que la commission nomme un rapporteur. Est-ce qu'il y a des suggestions? L'honorable ministre de l'Education.

M. CLOUTIER: M. le Président, je suggérerais le député de Laporte, comme rapporteur.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. MORIN: Adopté.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Adopté. L'honorable ministre de l'Education.

M. CLOUTIER: M. le Président...

Droit de parole

M. BURNS: Sur une question de règlement, si vous me permettez. Au début de l'étude du projet de loi 22, il y a eu une motion qui a été faite par le député de Saint-Jacques qu'on retrouve à la page 2 du rapport des travaux de la commission — à la suite d'une suggestion du député de Verdun, je tiens à le mentionner — on retrouve ce débat à la page B-3216 des rapports de la commission du journal des Débats et j'aimerais, au départ, M. le Président, bien clarifier cette situation pour le reste des discussions de la commission.

Je cite du rapport les paroles pertinentes: "M. Caron (Verdun) souligne à l'attention de la commission qu'aucun membre de ladite com- mission n'est d'origine anglophone et qu'à tout le moins deux membres de la commission devraient être anglophones". "M. Charron (Saint-Jacques) propose que la règle habituellement en usage au cours des commissions parlementaires, à savoir que les membres de l'Assemblée nationale, même s'ils ne sont pas membres d'une commission, puissent intervenir, soit respectée et ce, au cours de tout le débat sur le projet de loi 22". "M. Roy (Beauce-Sud) appuie la proposition du député de Saint-Jacques. La proposition est adoptée".

LE PRESIDENT (M. Gratton): Si le député de Maisonneuve me le permet, j'aimerais peut-être tout de suite demander à la commission si elle accorde la permission prévue par le règlement au député de Maisonneuve.

M. BURNS: C'est justement ce que je ne veux pas que vous fassiez, M. le Président. Non, je ne le veux pas...

M. CHARRON: Non, parce que la commission...

M. BURNS: ... parce que je prétends — et c'est pour cela que j'ai soulevé une question de règlement — que la commission a déjà disposé de cette affaire. Entre autres, je vous réfère au journal des Débats à la page B-3216. Puis-je la citer, M. le Président? "M. Charron: M. le Président, comme membre de l'Opposition et membre du même parti que le député de Maisonneuve, je peux faire..." Il parle du député de Maisonneuve, parce que j'avais fait la suggestion avant, mais n'étant pas membre de la commission, je ne pouvais pas faire la motion". Je continue: "... la motion pour que s'applique la règle habituelle des séances de la commission parlementaire, qui accepte habituellement d'entendre tous les membres de l'Assemblée nationale qui veulent se faire entendre sur un projet de loi, même s'ils ne sont pas membres à titre permanent de la commission, donc que cette règle de nos traditions parlementaires soit respectée intégralement dans l'étude de la loi 22. "M. Roy: M. le Président, est-ce qu'il m'est permis, en tant que membre de la commission également, d'appuyer la motion présentée par le député de Saint-Jacques? "Le Président (M. Lamontagne): II faut que ce soit bien clair dans mon esprit, est-ce que le député de Saint-Jacques fait motion pour la séance actuelle ou pour toutes les séances? "

Je pense que c'est important qu'on prenne connaissance de cette question posée par le député de Roberval. "M. Charron: Pour toutes les séances." "M. Roy: J'appuie la motion pour toutes les séances. "Le Président (M. Lamontagne): Adopté? "M. Hardy: Adopté.

"Le Président (M. Lamontagne): Adopté pour toutes les séances concernant l'étude du projet de loi 22."

M. le Président, c'est cela qui est mon point de règlement. Je pense que la commission s'est déjà prononcée sur cela, non pas comme on serait peut-être... Je ne veux pas présumer des arguments du côté gouvernemental, mais on serait peut-être tenté de croire que c'était uniquement pour l'étude du projet de loi, après la première lecture, mais cela me semble bien clair du rapport de la commission, de l'extrait que je viens de lire du journal des Débats et de par la motion du député de Saint-Jacques elle-même, à ce moment, que la commission s'est prononcée pour toutes les séances concernant l'étude du projet de loi 22 à l'effet que n'importe quel député de l'Assemblée nationale, membre ou non de la commission parlementaire de l'éducation, ait le droit de prendre la parole à cette commission. C'est la question de règlement que je soulevais, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre de l'Education sur la question de règlement.

M. CLOUTIER: M. le Président, tout d'abord, je crois que le député de Maisonneuve n'est pas membre de la commission. Cependant, j'ai préféré ne pas le souligner pour lui permettre de présenter son point de vue.

Je ne suis pas sûr qu'il ait raison, lorsqu'il tente de prolonger l'effet de cette motion à l'étape que nous franchissons actuellement.

Je ne veux pas entamer un débat de procédure là-dessus, mais je tenais tout de même à le souligner. La décision qui a été prise concernait l'audition de témoins après la première lecture alors que, maintenant, il s'agit d'une nouvelle convocation de la commission élue qui doit entamer la discussion, article par article, après la deuxième lecture. Quoi qu'il en soit — j'écouterai avec plaisir les éclaircissements qu'on voudra bien m'apporter — le problème n'est véritablement pas là. Je ne le situe pas, pour ma part, dans une discussion de procédure. Je le situe dans cette disponibilité que le gouvernement a voulu montrer depuis le début de l'étude de ce projet de loi. Si le gouvernement a accepté la motion après la première lecture, c'est précisément parce qu'il voulait que le débat se fasse dans un climat serein et que tout le monde puisse s'exprimer. Même s'il y a des opinions divergentes qui se sont fait entendre de la part de l'Opposition à ce point de vue, c'est bel et bien l'attitude que le gouvernement a voulu prendre dès le début. Cette disponibilité reste entière. Je ne vous cache pas que la première réaction du gouvernement, c'est d'accepter, mais c'est là que je suis obligé de vous faire part d'une de mes réserves. Il faut quand même admettre, à moins de tomber dans la naiveté la plus grande, que le Parti québécois a carrément dit à plusieurs reprises qu'il avait l'intention de faire du "filibuster" en commis- sion élue lors de la discussion article par article...

M. BURNS: Pardon, on n'a pas dit qu'on avait l'intention, on a dit qu'on envisageait la possibilité de le faire.

M. CLOUTIER: C'est exact.

M. BOURASSA: Cela a été rajouté au caucus?

M. BURNS: Non, on n'a pas d'affaire à vous dévoiler des secrets de notre caucus, nous non plus.

M. MORIN: D'ailleurs, si nous avions voulu faire un "filibuster", nous nous serions opposés à la nomination du rapporteur, comme nous l'avions fait pour la Loi sur les salaires des juges.

M. CLOUTIER: C'est un très bon signe dont je vais tenir compte.

M. LEGER: C'est un indice important.

M. CLOUTIER: C'est un indice très important. Je crois, cependant, qu'il est nécessaire que le gouvernement s'explique. Disponibilité totale, d'emblée, nous sommes portés à accepter. Cependant, nous sommes obligés de tenir compte qu'il y a eu mention de "filibuster" et je note la nuance très importante qu'apporte le député de Maisonneuve.

M. BOURASSA: Significative.

M. CLOUTIER: Importante et significative, ajoute le premier ministre. Je pense que...

M. BURNS: Est-ce que le premier ministre a fait installer des micros dans nos salles de réunion? Il semble être tout au courant de toutes sortes d'histoires. Remarquez que ce n'est pas exact, mais...

M. BOURASSA: Le député sait que je suis bien informé...

M. MORIN: M. le Président, il s'est même enquis le jour du vote pour...

M. LEGER: C'est un grand...

M. MORIN: ... savoir si chacun des députés du Parti québécois avait voté dans sa circonscription.

M. BOURASSA: J'ai su que l'un de vos députés avait refusé de suivre la consigne de son chef.

M. LEGER: C'est un grand esprit, un grand inquisiteur.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: Nous avons là un petit inquisiteur.

M. CLOUTIER: Je vais continuer mes explications.

Il est bien évident que pour n'importe quel esprit raisonnable, si le gouvernement se trouvait en présence d'une intention de "filibustering" — je note avec plaisir qu'il n'en est pas question —

M. BURNS: Je n'ai pas dit cela.

M. CLOUTIER: Ah bon! Alors, les intentions se précisent donc déjà. Vous remarquez que j'arrive à obtenir certaines indications.

M. LEGER: La décision du ministre n'a pas...

M. CLOUTIER: Est-ce que je pourrais terminer mes explications, messieurs?

LE PRESIDENT (M. Gratton): S'il vous plaît !

M. CLOUTIER: Je tente de vous donner satisfaction.

M. LEGER: Oui, après dîner...

M. CLOUTIER: Je n'ai pas la naiveté de le faire sans essayer de bien clarifier les règles du jeu. Il est bien certain que si le gouvernement acceptait et se trouvait ensuite en présence de "filibustering", je ne crois pas qu'il aurait pris ses responsabilités.

Le gouvernement a dit qu'il avait l'intention, comme le souhaitent la majorité des Québécois, de voter ce projet de loi. Il souhaite une discussion honnête et approfondie. Il souhaite que les partis d'Opposition — je devrais dire le parti d'Opposition, puisqu'il y en a qu'un seul qui est présent — l'aide à bonifier, s'il est possible, ce projet de loi. Mais ce faisant, il ne veut quand même pas ouvrir la porte à un "filibustering" qui irait à l'encontre des objectifs qu'il poursuit. Je pense que ceci est clair.

Maintenant, je dois aussi faire remarquer que, même si le gouvernement n'acceptait pas cette motion, ceci ne signifierait pas du tout que l'Opposition s'en trouverait bâillonnée. Il suffit de lire l'article 148 qui dit: "Tous les députés ont accès aux commissions. Mais ceux qui ne sont pas membres et les autres personnes doivent obtenir la permission de la commission pour s'y faire entendre." Cela signifie que même si le gouvernement n'acceptait pas la motion de l'Opposition ou la thèse de l'Opposition, à n'importe quel moment, la commission pourrait donner la parole à un député qui n'est pas membre. De plus, je désire faire remarquer qu'au début de chaque séance, c'est-à-dire trois fois par jour, il y a des changements qui sont annoncés dans la composition de la commis- sion. Cela signifie que n'importe quel député du parti de l'Opposition pourrait très bien se faire entendre en se faisant remplacer au début de chaque séance, c'est-à-dire trois fois par jour. Je veux qu'il soit clairement compris que même si le gouvernement, en se basant sur le règlement, n'acceptait pas la motion ou la thèse de l'Opposition, il ne bâillonnerait pas qui que ce soit. La liberté de parole resterait tout aussi protégée.

Ceci dit, après avoir, je crois, tenté de dire ce qu'étaient vraiment les règles du jeu, étant donné l'esprit de collaboration qui semble se manifester, je serais d'accord pour que l'on accepte, pour aujourd'hui, de laisser parler tout le monde, mais je ne crois pas qu'il soit sage de se compromettre et d'accepter pour toute la durée des travaux de la commission, à cause des doutes qui planent précisément, et que la dernière remarque du député de Maisonneuve n'a pas réussi à dissiper entièrement, pour la suite des travaux.

Il est bien certain que si nous n'abusons pas de cette permission extrêmement large et qui, encore une fois, n'est pas essentielle pour que les députés s'expriment, si nous n'en abusons pas, il n'y aura pas de problème. Mais, le gouvernement devrait pouvoir se réserver la possibilité de revenir à l'esprit des règlements — lequel, je le répète pour la troisième ou la quatrième fois est extrêmement large — si cela devenait nécessaire.

Voici, M. le Président, l'analyse que je fais de la situation à ce stade-ci.

M. BOURASSA: M. le Président, je voudrais ajouter un mot. Tout ce qu'on dit... d'abord c'est une nouvelle étape, donc la motion dont parlait tantôt le député de Maisonneuve ne s'applique pas, à notre sens. Deuxièmement, nous sommes prêts à accepter la suggestion du député de Maisonneuve, mais on dit que s'il y a abus de la part de l'Opposition, nous appliquerons le règlement d'une façon normale. On est prêt à écarter le règlement, étant donné l'importance que nous accordons à cette commission et, étant donné la volonté que nous voulons en faire l'étape la plus fructueuse de toute cette discussion du bill 22. Mais si l'Opposition n'a pas encore clairement établi quelle sera son attitude, si l'Opposition, au lieu d'essayer de bonifier la loi veut en retarder purement et simplement l'adoption, nous allons normalement appliquer le règlement.

M. BURNS: C'est-à-dire que vous vous gardez un pouvoir discrétionnaire. C'est ce que vous êtes en train de nous dire.

M. BOURASSA: Non. Nous sommes prêts pour le dialogue le plus positif. Cela vaut pour nous comme pour l'Opposition. Moi-même, je ne fais pas partie de la commission. Alors, je voudrais y participer lorsqu'il me sera possible de le faire. Mais s'il y a un débat marathon

purement et simplement pour des fins de stratégie partisane plutôt que pour des fins d'améliorer le texte de loi, je ne vois pas pourquoi on suspendrait l'application du règlement pour permettre à l'Opposition de faire son obstruction. Il me semble que notre position est raisonnable.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition officielle sur la question de règlement.

M. MORIN: Le ministre nous a parlé tout à l'heure de la "disponibilité" du gouvernement. J'ai cru comprendre qu'il voulait dire par là, la bonne volonté du gouvernement à l'ouverture de ces séances. Mais ce n'est pas cela qu'il nous propose dans ces conclusions. C'est plutôt le libre choix du gouvernement, l'entière discrétion du gouvernement quant au droit de parole des députés qui ne sont pas membres de cette commission.

M. le Président, qu'est-ce que c'est que de "l'obstruction systématique"? Qu'est-ce c'est qu'un "filibuster". C'est une question bien subjective. J'ai l'impression que le gouvernement pourrait être tenté de dire: Est un "filibuster", constitue de l'obstruction, tout amendement, tout discours qui ne fait pas l'affaire du gouvernement.

M. BOURASSA: Oh non!

M. MORIN: Ah! En tout cas, c'est bien ce qui pourrait se produire. C'est pour cela que le député de Maisonneuve a entièrement raison de parler du caractère discrétionnaire de l'attitude que vous venez d'adopter.

M. BOURASSA: Non, mais que le député de Maisonneuve se souvienne du débat marathon sur la carte électorale.

Je n'ai pas l'impression que c'est ce que vous avez l'intention de faire à l'occasion de ce débat. Il n'y aura pas de problème.

M. MORIN: M. le Président, l'Opposition, comme le gouvernement, doit être libre de présenter tous les amendements qu'elle souhaite apporter à ce projet de loi. Il y en a qui ne feront pas l'affaire du gouvernement, c'est bien clair.

M. BOURASSA: On ne sait pas.

M. MORIN: A ce moment, si le gouvernement nous dit: Vous faites de l'obstruction, dès que nous insistons pour qu'un amendement passe, dès que nous y mettons de la pression, il est clair que notre droit de parole sera entièrement entre les mains du gouvernement. Nous ne voulons pas d'une situation ambiguë comme celle-là, dès le point de départ.

M. CLOUTIER: Justement. Alors, essayons d'éclaircir la situation. M. le chef de l'Opposition, n'avez-vous pas dit clairement, à quelques reprises, que vous aviez l'intention de prolonger les débats jusqu'au mois d'août, et même jusqu'à l'automne?

M. MORIN: Nous avons dit que nous envisagions cette possibilité.

M. CLOUTIER: Mettez-vous à la place d'un gouvernement qui a franchi toutes les étapes d'un projet de loi, qui est prêt à manifester sa bonne volonté et, après avoir clairement établi que le règlement donne le droit de parole à tout le monde, est prêt à aller plus loin que le règlement, mettez-vous à sa place et essayez de comprendre qu'il serait pour le moins mal inspiré de donner un blanc-seing de cette importance. Je crois que nous avons travaillé dans un climat suffisamment serein pour qu'il ne soit pas question de bâillonner l'Opposition, mais en revanche, nous pourrions — si nous nous apercevons que nous sommes en présence de discussions qui risquent de se prolonger d'une façon indue et, par conséquent, d'aller à l'encontre de l'objectif déclaré du gouvernement — revenir tout simplement à l'application des règlements, avec la très grande souplesse que ces règlements permettent.

M. MORIN: M. le Président, nous souhaitons aussi que la plus grande sérénité marque ces débats en commission élue, mais si le ministre, dès ce matin, commence par déclarer que notre droit de parole, ou celui des députés de la majorité tout aussi bien, sera remis discrétion-nairement entre les mains du ministre ou de la commission, nous nous y opposons péremptoirement.

M. CLOUTIER: M. le chef de l'Opposition...

M. MORIN: Un instant, M. le ministre, je n'ai pas terminé.

M. CLOUTIER: ...j'ai une autre suggestion.

M. MORIN: Nous sommes devant l'un des projets de loi les plus importants qui aient jamais été soumis à cette Assemblée, tant par l'acharnement que le gouvernement met à le faire voter que par l'acharnement que l'Opposition entend mettre pour empêcher qu'il ne soit voté. C'est donc, pour l'avenir du Québec, un projet de loi de la plus extrême importance et je connais beaucoup d'autres projets de loi de moindre importance qui ont fait l'objet d'études approfondies, en y mettant tout le temps nécessaire en commission élue.

M. le Président, sur le point de règlement, de façon plus précise, je soutiens que, d'après le texte des débats du mardi 11 juin 1974, il a été décidé que le droit de parole des députés non membres de cette commission valait pour l'ensemble des débats de cette commission sur le

bill 22. Le président, M. Lamontagne, a bien dit, je cite textuellement ses paroles qui se trouvent aux pages B-3216 et B-3217 des débats du 11 juin 1974: "Le Président (M Lamontagne): Adopté pour toutes les séances concernant l'étude du projet de loi 22".

Il n'a pas dit pour les séances de la commission qui précèdent la seconde lecture, il a dit pour toutes les séances concernant l'étude du projet de loi no 22 et c'était le sens de la motion du député de Saint-Jacques; c'était également le sens de l'appui que lui a apporté le député de Beauce-Sud.

M. le Président, toujours sur le point d'un règlement, je soutiens que si l'on veut modifier cette règle, la commission devra adopter une nouvelle résolution et j'attends que le gouvernement fasse une motion dans le sens du pouvoir discrétionnaire qu'il prétend s'accorder.

M. CHARRON: M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: C'est à vous, beaucoup plus qu'aux représentants du gouvernement que je m'adresserai parce que, à notre avis, nous sommes devant une situation de fait et non pas devant une situation blanche où la commission devrait parvenir à une entente.

Cette situation de fait est relatée dans le journal des Débats comme vous l'ont souligné le député de Maisonneuve et le chef de l'Opposition, elle est également dans le rapport que la commission, je ne sais trop comment, a produit à l'Assemblée nationale sur demande de la motion de clôture par l'entremise du député de Gouin.

M. le Président, la commission a déjà statué sur cette question. C'est ce que je veux vous signaler à vous et vous aurez donc tout à l'heure une décision à rendre quant à l'applicabilité de cette motion. Dans le cas où vous reconnaîtriez, avec nous, que la motion était on ne peut plus claire, et si l'intention du gouvernement est, comme il vient de l'indiquer, de restreindre cette liberté de parole qu'il avait auparavant reconnue à la première étape de l'étude du projet de loi no 22, le ministre de l'Education ou un de ses acolytes n'aura qu'à présenter une nouvelle motion sur laquelle devra à nouveau statuer la commission, car la commission devra d'abord revenir sur la décision que je l'avais moi-même invitée à prendre.

Je vous signale à nouveau, M. le Président, la page 2 du rapport qui a été soumis à la commission et qui dit bien ceci: "M. Charron (Saint-Jacques) propose que la règle habituellement en usage au cours des commissions parlementaires, à savoir que tous les membres de l'Assemblée nationale, même s'ils ne sont pas membres d'une commission, puissent intervenir soit respectée et ce au cours de tout le débat sur le projet de loi no 22."

C'est à ma demande même, et c'était dans mon intention, au moment où le député de Roberval qui était à votre siège, M. le Président, m'a invité à préciser cette motion, qu'il a lui-même signalé "adopté pour toutes les séances concernant l'étude du projet de loi no 22". Qui, à cette table, niera qu'il s'agit ce matin et qu'il s'agira demain d'une séance concernant l'étude du projet de loi no 22? Qui niera le rapport qui dit que M. Roy a appuyé cette proposition et que la proposition qui a été adoptée par la commission mentionnait "au cours de tout le débat sur le projet de loi 22"? Tout le monde en conviendra aujourd'hui, c'est encore une séance au cours de tout le débat sur le projet de loi 22.

Je vous signale même, M. le Président, le mot que j'avais intentionnellement porté à l'attention de la commission et qu'en tous temps les membres de la commission auraient pu amender avant de se prononcer en faveur de cette motion. J'ai signalé moi-même "débat" autour de la loi 22. Je n'ai pas dit "audition" sur la loi 22 ou "comparution de Québécois" au sujet de la loi 22; j'ai dit "débat" autour de la loi 22. Il faisait partie de ma motion. S'il est un endroit où le débat va exister, c'est au cour de cette étape que nous allons...

M. BOURASSA: ... commission plénière, vous ne saviez pas, si on avait choisi d'aller en commission plénière.

M. CHARRON: Voyons donc! La tradition parlementaire, depuis le nouveau règlement de 1972, veut que l'ensemble des projets de loi soient déférés aux commissions élues.

M. CLOUTIER: Cela prouve que ce n'est pas une procédure d'exception de se retrouver ici, de votre propre aveu...

M. CHARRON: Aux commissions élues. Bien sûr, c'est l'attitude...

M. BOURASSA: ... en commission plénière.

M. CHARRON: C'est l'attitude que vous avez toujours prise. Comme l'attitude qui a toujours été prise, de même — je le signale au député de L'Acadie qui savoure sa dernière intervention — autant il est exact que la tradition veut maintenant que ce soit déféré aux commission élues, autant la même tradition veut que tous les membres de l'Assemblée nationale aient l'occasion de s'exprimer, nonobstant l'article 148. C'est tellement vrai que j'ai invoqué cela dès le début du débat sur la loi 22 et que la commission, dans son ensemble, l'a retenu.

Non seulement nous ne sommes pas surpris que, plutôt que la commission plénière, ce soit la commission élue qui soit chargée de faire l'étude article par article...

M. BOURASSA: Vous l'avez demandé.

M. CHARRON: ... mais encore plus, la commission elle-même reconnaissait que, sur ce point, tous les membres de l'Assemblée nationale, même si on est en commission élue, devraient garder ce droit de parole. D'ailleurs, M. le Président, puisque...

M. BOURASSA: Mais pourquoi avez-vous demandé que ce soit en commission plénière?

M. CHARRON: ... le député de L'Acadie m'invite à souligner cet aspect nouveau de la tradition parlementaire, aussi bien y revenir. Pourquoi procédons-nous maintenant, à l'Assemblée nationale, beaucoup plus en déférant les projets de loi à la commission élue plutôt qu'à la Chambre, en commission plénière. Pour une seule et unique raison fort remarquable et appréciable et qui a été retenue.

M. HARDY: Fort valable.

M. CHARRON: C'est que, lorsqu'un projet de loi est soumis à l'attention de l'Assemblée, article par article, ce n'est pas une raison pour paralyser l'Assemblée nationale pendant ce temps, alors que d'autres projets de loi peuvent être soumis. C'est exact, M. le Président, que, dans l'ancien temps, la commission plénière — et surtout lorsque nous avions affaire à une loi contestée où il y avait peut-être un grand nombre d'articles — rien d'autre ne pouvait apparaître sur la table de l'Assemblée nationale. Tout le monde a compris qu'une commission élue pouvait aussi bien être chargée de faire ce projet de loi dans le Salon rouge, pendant que d'autres projets de loi... C'est pour accélérer les travaux...

M. BOURASSA: Vous avez demandé, dans ce cas-là, vous avez demandé que...

M. CHARRON: Ce n'est aucunement...

M. BOURASSA: Est-ce que le député me permet une question?

M. CHARRON: Si le premier ministre veut me laisser terminer, je vais lui répondre. Je connais son argument. S'il veut me laisser terminer mon intervention, je vais tout de suite le lui soumettre.

Ce n'est aucunement pour restreindre le droit de parole des députés. C'est pour permettre que deux ou trois projets de loi soient soumis à l'attention, plutôt qu'un seul, pour accélérer les travaux de la Chambre. En ce sens-là, tout le monde est d'accord pour que ce soit une commission élue, mais personne ne serait d'accord si cette concession â l'accélération des travaux de la Chambre équivalait à une restriction des droits de parole de l'assemblée.

En ce sens, quand l'Opposition a demandé que ce soit étudié en commission plénière, c'était pour s'assurer que le fait de le déférer à la commission élue, s'il est justifiable sur le plan de l'accélération des travaux de la Chambre, ne constitue pas un prétexte pour restreindre le droit de parole que la commission plénière, de toute façon, nous avait reconnu.

M. BOURASSA: C'est votre interprétation.

M. CHARRON: C'est tellement vrai. Ce danger est tellement vrai, M. le Président, que les interventions du chef du gouvernement et du ministre de l'Education, ce matin, remettent la puce à l'oreille à ceux qui voient un danger d'avoir concédé, relativement à l'accélération des travaux de la Chambre, sur le plan des droits de Darole.

C'est tellement vrai également, M. le Président, ce danger latent au fait que le projet de loi soit remis à la commission élue que les membres de cette commission ont eux-mêmes statué, dès le début des travaux de la commission sur le projet de loi 22, que ce n'est pas parce qu'une commission élue plutôt qu'une commission plénière, permet un droit de parole, que le droit de parole des tous les membres qu'ils auraient en commission plénière se trouve disparu ici. Si nous nous retrouvons ici, c'est pour permettre à la Chambre d'adopter d'autres lois, ce n'est pas pour réduire le débat entre treize députés. La preuve, M. le Président, c'est l'adoption à l'unanimité de la motion que j'ai présentée à l'ouverture de cette commission, qui disait qu'au cours de tous les débats sur le projet de loi 22, tous les membres de l'Assemblée nationale auraient le droit de parler, nonobstant le fait que nous étudions ce projet de loi en commission élue plutôt qu'en commission plénière, puisque nous concédons qu'une commission plénière aurait paralysé l'Assemblée nationale et retardé l'adoption d'autres lois.

Nous avons donc fait ce compromis qui permet, ce matin, au gouvernement d'amener d'autres projets de loi et à d'autres de nos collègues de les débattre à l'Assemblée nationale, mais cela ne veut pas dire, lorsque, dans le règlement, nous avons accepté cette arrivée de la commission élue pour remplacer la commission plénière, que nous y faisions fi de nos droits de parole; non seulement l'Opposition, M. le Président, mais les membres de la commission eux-mêmes et les membres ministériels qui ont voté avec moi la motion que j'ai présentée, qui disait qu'au cours de tout le débat sur le projet de loi 22 — qui niera ce matin qu'on n'est pas dans le cours du débat sur le projet de loi 22 — tout le monde, même en commission élue, garderait le droit de parole et le droit d'intervention.

Je soutiens donc, en conclusion, que si ce n'est plus l'entendement du gouvernement, il ne doit pas soulever avec vous une discussion quant au sens de la motion très claire que j'ai présentée qui a été adoptée à l'unanimité, qu'il

aurait pu tout aussi bien amender. Si vous lisez le journal des Débats, c'est le ministre des Affaires culturelles, le député de Terrebonne qui, au nom du gouvernement, je crois, puisque c'est le seul porte-parole du gouvernement que je retrouve dans ce débat, a mentionné "adopté".

Le député de Terrebonne, ancien vice-président de la Chambre connaît le règlement et aurait très bien pu, avant de se prononcer sur la motion, présenter l'amendement voulant que ma motion, au cours de tout le débat sur le projet de loi 22, soit retirée. Il ne l'a pas fait. Je dis donc, que...

M. HARDY: Cette motion...

M. CHARRON: ... M. le Président, que nous attendons de vous que vous vous prononciez sur la question, à savoir que, si le gouvernement n'a plus le même entendement de la motion qu'au moment où il l'a adoptée en juin 1974, lors de notre toute première séance du débat sur le projet de loi 22, il doit présenter ce matin une nouvelle motion qui annule celle que la commission a déjà votée. Si c'est son intention, s'il se dit apeuré de faire face à du "filibustering" de six membres qui représentent 45 p.c. de la population, c'est son choix politique, mais il a à présenter une motion en bonne et due forme puisque la commission s'est déjà clairement prononcée là-dessus. Moi-même, le parrain, à l'invitation même du président de l'époque, j'ai clarifié tout le sens et toute la portée de cette motion sur laquelle l'unanimité de la commission s'est faite.

M. BOURASSA: M. le Président, seulement un mot pour répondre au propos du député de Saint-Jacques. Cela va être très court.

M. LEGER: Parlez, M. le Président, malgré que j'avais déjà la parole.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: C'est parce que le député de Saint-Jacques donne sa propre interprétation, avec son habileté de jeune politicien, de la motion alors qu'il dit que les députés ont demandé que l'on siège en commission plénière, tout simplement, afin de permettre, à l'une ou l'autre des étapes, à tous les députés de parler. Nous pouvons prendre une tout autre interprétation que celle qu'a donnée le député de Saint-Jacques pour les fins de son argumentation, à savoir si c'est l'Opposition qui a demandé que la commission siège.

M. MORIN: On ne peut pas honnêtement faire cela.

M. BOURASSA: Si vous avez demandé que la commission plénière siège...

M. CHARRON: Le texte du rapport est très clair.

M. BOURASSA: ...c'est que vous considériez que c'était une autre étape. Le fait qu'on ait voté ce matin pour venir en commission élue, je pense que c'est un autre geste législatif qui démontre que c'est une autre étape.

M. CLOUTIER: Vous avez voté contre.

M. BOURASSA: Vous avez voté contre. M. le Président, nous voulons permettre à l'Opposition, il ne faudrait pas que ce soit interprété, d'exprimer son point de vue pleinement. Ce que l'Opposition demande ce matin, c'est de suspendre indéfiniment et inconditionnellement le règlement qui a été adopté par l'Assemblée nationale.

M. CHARRON: Ce que l'Opposition réclame, c'est le respect de la motion votée par la commission le 11 juin 1974. C'est cela que nous demandons.

M. BOURASSA: C'est une suspension.

M. CHARRON: L'application de ce que la commission a déjà décidé, et passons plus loin.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre des Affaires culturelles sur une question de règlement.

M. LEGER: M. le Président, j'avais la parole.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Bien oui, cela va venir.

M. HARDY: M. le Président, est-ce que les membres de la commission...

M. LEGER: Non, non pas cela va venir, j'avais la parole immédiatement après le député de Saint-Jacques. Par déférence, j'ai laissé le ministre prendre la parole.

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'ai reconnu le ministre des Affaires culturelles, parce qu'il m'avait demandé de le reconnaître avant que vous le fassiez. Oui.

M. LEGER: Quand allez-vous me reconnaf-tre, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est parce qu'il m'avait demandé de le reconnaître avant que vous le fassiez.

M. LEGER: Si c'est comme cela que vous interprétez le règlement, M. le Président. Vous m'aviez fait signe que j'avais la parole.

M. HARDY: II me semble que la logique la plus élémentaire...

M. LEGER: Est-ce que vous me reconnaissez après, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je vous reconnaîtrai, s'il y a lieu.

M. LEGER: S'il y a lieu, non, M. le Président. C'est la façon discrétionnaire de régler cela. J'ai demandé la parole tantôt, je demande que vous me reconnaissiez après le député de Terrebonne.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Je serais même prêt, si vous voulez, à faire une suggestion à la commission, avant même d'entendre l'argumentation. Je peux peut-être faire la suggestion. On jugera si elle est recevable ou non. J'aimerais suggérer que nous réservions, que je réserve ma décision au début de la séance de cet après-midi, quitte à accorder le droit de parole à tous les députés au cours de la séance de ce matin pour que nous commencions l'étude du projet de loi 22.

M. HARDY: Quant à votre décision, M. le Président, je voudrais quand même faire une brève intervention, parce que si vous rendez votre décision sans qu'on ait l'occasion de revenir, je pense qu'il y a eu des choses qui ont été dites ce matin et qui méritent d'être relevées.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que vous pouvez le faire assez brièvement?

M. HARDY: Je vais le faire très brièvement. Non seulement je n'aurais pas pu faire l'amendement suggéré par le député de Saint-Jacques, cet amendement aurait été totalement inutile, parce que la motion qui a été adoptée à ce moment, quels que soient les amendements qu'on ait pu lui apporter, est actuellement caduque. Elle n'existe plus.

M. MORIN: C'était sur le projet de loi 22.

M. HARDY: M. le Président, pourriez-vous de nouveau demander... Je vais de nouveau prier notre bon ami le député de Sauvé, comme je l'ai fait dernièrement, d'oublier le règlement, mais d'être poli. Laissez vos collègues s'exprimer sur la question de règlement.

M. MORIN: Mais je n'ai pas utilisé de jurons ou d'épithètes comme le député de Laurier?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: M. le Président, la motion qui a été adoptée à l'unanimité est devenue caduque, parce que nous sommes actuellement à une toute autre étape du processus législatif quant à l'adoption du projet de loi 22. La motion qui a été adoptée à une autre étape était faite en vertu de l'article 118. Nous sommes à deux étapes à la fois quant aux faits et à la fois sur le plan juridique. Quant aux faits, il me semble que c'est clair pour tout le monde. Quand la commission siège pour entendre des témoins, c'est une chose radicalement différente que lorsqu'elle siège pour adopter une loi article par article. Quant aux faits, c'est clair, ce n'est pas la même chose. Quant au droit, c'est la même chose. Nous siégions en vertu de l'article 118, alors que nous siégons maintenant en vertu de l'article 122: deux étapes totalement différentes. Donc, la motion qui a été adoptée lorsque nous siégions en vertu de l'article 118 ne peut plus être valable quand nous siégons en vertu de l'article 122. D'ailleurs, c'est là que je trouve un peu malhonnête de parler de discrétion du gouvernement, ce que nous voulons, c'est tout simplement l'application du règlement, l'application de l'article 148. Nous ne voulons pas de discrétion, nous voulons que l'article 148 s'applique. L'article 148 dit que seuls les membres ont droit de parole et que la commission peut décider que d'autres députés ou d'autres personnes se fassent entendre. Ce n'est pas une question de discrétion, c'est l'application du règlement. D'ailleurs, comme l'a souligné tantôt le premier ministre, c'est tellement vrai que nous sommes à deux étapes que nous pourrions très bien actuellement être en commission plénière, en Chambre. Donc, quand nous avons adopté la motion quand nous siégions en vertu de l'article 118, on ne pouvait pas prévoir à ce moment de quelle façon en siégerait pour étudier le projet de loi 22 article par article. Cela pouvait être aussi bien en commission plénière qu'ici. Donc, je soutiens que, même si on voulait, on ne pourrait pas donner effet à la motion déjà adoptée. Ce serait irrégulier, ce serait contre le règlement.

M. le Président, je vous demande simplement de considérer à chaque séance — et j'irais plus loin — je pense que si on applique le règlement rigoureusement, ce n'est non seulement à chaque séance qu'on pourrait prendre une décision, mais c'est à chaque fois où un député qui est non membre veut intervenir. Mais la tradition veut qu'au début de chaque séance on décide si on laissera parler tout le monde. Encore une fois, c'est un débat de procédure strictement stérile que l'on fait, parce que le ministre de l'Education a indiqué très clairement la volonté du gouvernement de ne pas brimer qui que ce soit, de laisser tout le monde parler. Mais, M. le Président, la bonne volonté du gouvernement, la bonne foi du gouvernement ne veut pas dire de la naiveté pour se laisser entre les mains de gens qui veulent tout simplement faire des débats stériles, soit de procédure, soit sur le fond. C'est la seule différence qui existe.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, messieurs, puis-je reformuler ma suggestion...

M. LEGER: Question de règlement. M. le Président, sur la question de règlement, je pense que j'ai le droit de parole.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui, mais le député de Lafontaine, je le reconnaîtrai en temps et lieu.

M. LEGER: Pas en temps et lieu, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Mais d'ailleurs la suggestion que j'ai faite...

M. LEGER: M. le Président, j'ai un mot à dire sur le point de règlement...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Voulez-vous me laisser finir, s'il vous plaît !

M. LEGER: ... vous ne m'avez pas reconnu et j'exige d'être reconnu, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est ce que je fais en suggérant que la commission, ce matin, au cours de la séance, donne le droit de parole à tous les membres, à tous les députés de cette assemblée, quitte à réserver ma décision à cet après-midi. Je pense bien que je ne vous prive pas du droit de parole. Vous serez le premier que je reconnaîtrai sur la question.

M. LEGER: M. le Président, sur ce que vous venez de dire, juste avant. Vous avez accordé au député de Terrebonne le droit de s'exprimer avant que vous rendiez votre décision cet après-midi. Vous devez me donner le même traitement, sinon ce ne serait pas équitable. Alors, M. le Président, je ne veux pas parler une demi-heure. J'en ai à peine pour quelques minutes.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Bien, j'aimerais...

M. LEGER: Je veux avoir la parole...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Oui.

M. LEGER: ... comme vous l'avez donnée au député de Terrebonne.

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'aimerais, premièrement, vous dire qu'à n'importe quel temps, vous le savez, d'après l'article 43, je peux me déclarer assez bien informé pour rendre une décision.

M. LEGER: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Mais avant de rendre une décision, je fais la suggestion. Si vous n'êtes pas d'accord sur la suggestion, le parti de l'Opposition ou les ministériels n'ont qu'à le dire...

M. LEGER: Je vous le dis.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... à ce moment, on procèdera autrement.

M. HARDY: Nous sommes d'accord.

M. LEGER: Ce que je veux, M. le Président, c'est m'exprimer...

M. HARDY: ... sage...

M. LEGER: ... de façon à vous éclairer davantage, comme le député de Terrebonne l'a fait, et vous lui avez accordé avant même que je puisse m'exprimer.

LE PRESIDENT (M. Gratton): D'une façon ou d'une autre...

M. LEGER: Je vous demande simplement quelques minutes pour m'exprimer sur ce point. Je pense que vous avez tout intérêt, pour garder cette sérénité à la commission parlementaire actuelle, de m'accorder le droit de parole, parce que je l'ai demandé bien avant que le député de Terrebonne le demande. Je vous demande de me reconnaître pour que je puisse m'exprimer. Ce ne sera pas long, M. le Président.

M. BOURASSA: Question de règlement, M. le Président. Le président...

M. LEGER: M. le Président, je suis sur une question de règlement et je n'ai pas encore eu l'occasion de le dire...

M. BOURASSA: ... pose une question...

UNE VOIX: ... en train d'appliquer une autre motion...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Laissez donc la chance à un député de l'Opposition. C'est cela, l'exemple qu'on va avoir durant tout le temps de la commission parlementaire?

M. BOURASSA: Ne vous énervez pas! Est-ce que c'est...

M. LEGER: Laissez-moi donc parler, M. le Président. Je vous ai laissé parler avant moi, M. le Président, tantôt. Le président...

M. BOURASSA: Est-ce que c'est sur la suggestion du président?

M. LEGER: ... m'avait reconnu pendant que le député de Saint-Jacques avait la parole.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Par déférence, je lui ai laissé la parole.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Par la suite, j'ai perdu mon droit de parole au profit du député de Terrebonne.

M. HARDY: Vous n'êtes pas membre.

M. LEGER: Je ne le céderai pas une troisième fois.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que vous voulez vous adresser...

M. LEGER: Me donnez-vous quelques minutes, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que je peux vous poser une question?

M. LEGER: Ah bien, oui!

UNE VOIX: ... la chance au député de Lafontaine...

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'aimerais vous demander si vous avez l'intention de parler sur la suggestion que je viens de faire.

M. LEGER: Laissez-moi donc m'exprimer avant, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Non, mais... M. LEGER: Vous ferez une suggestion après.

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'ai fait une suggestion. Est-ce que la commission la retient ou non?

M. HARDY: M. le Président, rendez donc votre décision.

M. LEGER: Je demande le droit de parole. Ce n'est pas à la commission de déterminer si j'ai le droit de parole pour le moment.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui.

M. LEGER: On n'a pas encore statué là-dessus. On parle justement d'une décision de la commission qui a été rendue.

Alors, M. le Président, rapidement, ce que je veux dire, c'est ceci: Nous avons déjà statué sur cette question. Les règles du jeu ne peuvent pas changer au désir d'un des partis en cause. Le président de l'Assemblée nationale a dit plusieurs fois, et je cite: "Nous sommes dans l'arène parlementaire où les élus du peuple sont élus pour venir ici parlementer". Ce sont les termes exacts du président de l'Assemblée nationale.

M. le Président, quand c'est une rencontre où on doit avoir des adversaires qui s'affrontent sur un projet de loi ou dans n'importe quelle autre circonstance, il faut que les règles du jeu soient établies au départ.

Alors, M. le Président, on ne peut pas se permettre — comme l'a présenté tantôt le député de L'Acadie, ministre de l'Education — de déterminer, à chaque séance, s'ils vont le permettre ou non. Je donne un exemple un peu loufoque. C'est comme à une partie de hockey où, à la première période, tel règlement fonctionne, mais quand une équipe va mal, on va changer le règlement à la deuxième période.

M. HARDY: Non, non! L'article 148...

M. LEGER: Cela ne marche pas! Les règlements sont les mêmes pour les trois périodes.

M. HARDY: Pourquoi avez-vous adopté l'article 148?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: M. le Président, ce que je dis, c'est pour éviter cette naiveté que vous voulez nous prêter. Nous ne sommes pas naifs, M. le Président. Nous savons qu'il y a une joute dure à jouer sur un projet...

M. HARDY: Vous voulez qu'on le soit.

M. LEGER: ... qui est difficilement acceptable, même à ce stade. Nous avons des choses à dire et il est important que, même s'il y a un déséquilibre dans le nombre des intervenants de chacune des deux équipes en présence, il y a quand même des règles de jeu qui doivent permettre à chacun des membres des deux équipes qui s'affrontent de savoir quelles sont les règles du jeu et non pas avoir une équipe ayant un bras attaché en arrière du dos, avec l'arbitre de son côté, si cela va mal, malgré qu'il a un bras attaché.

Actuellement, nous sommes en train de discuter non pas de l'article 148, comme le dit le député de Terrebonne, mais nous sommes en train de discuter d'une décision de la commission qui a été prise à l'unanimité. Si on veut défaire cette décision permettant à tous les députés, non pas seulement pour nous de l'Opposition, qui représente 65 p.c. des francophones et l'autre parti, qui représente 35 p.c. des francophones, plus 20 p.c. des anglophones, je dirais peut-être 100 p.c. ou 98.2 p.c, comme pour le savon Ivory, "il flotte", nous ne sommes pas égaux dans le nombre des personnes.

M. BOSSE: "Filibuster".

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: C'est la raison pour laquelle je pense que nous devons, au départ, statuer immédiatement, et non pas cet après-midi. C'est pour cela que je voulais parler avant que le président ne s'exprime. C'est au départ qu'on doit statuer les règles du jeu pour le reste de la commission parlementaire, de façon que, quel-

les que soient les humeurs des ministres que nous affrontons, quels que soient les arguments que les députés de l'Opposition présentent, on ne change pas les règles du jeu comme une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête d'un des intervenants.

M. BOURASSA: D'accord.

M. LEGER: M. le Président, si le gouvernement veut changer la décision qui a été votée â cette commission parlementaire, pour la durée du débat sur le projet de loi 22, il doit le faire en présentant une motion pour révoquer ce droit de parole, mais il en portera lui-même les conséquences. Qu'il ne se cache pas derrière un règlement, alors qu'une décision a été prise. Il faut qu'il révoque cette décision et non pas faire le puritain derrière un règlement, pour dire qu'il va bâillonner l'Opposition.

M. BOURASSA: M. le Président, d'accord.

M. LEGER: Nous sommes ici pour faire un travail. Nous voulons le faire avec toutes les forces que nous avons, c'est-à-dire les six députés.

M. BOURASSA: C'est parfait. D'accord.

M. LEGER: Jamais nous n'accepterons, au départ, qu'on dise, selon les journées, si vous voulez faire du "filibustering" ou si vous avez des amendements qui nous plaisent ou pas: Nous allons changer les règles du jeu. En aucun cas nous ne pouvons accepter cela et cela doit être déterminé au début de cette commission parlementaire, pour que nous sachions, par la suite, avec quelle règle ou dans quel corridor nous allons agir, pour être efficaces et jouer réellement notre rôle d'Opposition, tel que la population s'y attend.

M. BOURASSA: Je vous ai compris, comme nous disons !

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je pense que le chef de l'Opposition voudrait s'exprimer sur la suggestion que j'ai faite.

M. MORIN: Oui. M. le Président, je ne crois pas que vous ayez à prendre une décision. Elle a déjà été prise par la commission et le président ne peut pas, unilatéralement, modifier la résolution qui a été acceptée par la commission.

M. BOURASSA: II y a divergence d'interprétation.

M. MORIN: Vous ne pouvez pas interpréter cette motion comme bon vous semble.

M. BOURASSA: Vous non plus, vous ne pouvez l'interpréter comme bon vous semble.

M. MORIN: Ce n'est pas par hasard que le député de Saint-Jacques a choisi ses mots, au moment où il a présenté cette motion. Ce n'est pas par hasard !

M. BOURASSA: Pourquoi avez-vous voté ce matin?

M. MORIN: M. le Président, si le premier ministre veut bien me laisser parler, je vais lui expliquer la portée exacte de la motion qui a été adoptée par cette commission. Ce que nous craignions, et ce que nous craignons encore aujourd'hui, c'est une application discrétionnaire de l'article 148, paragraphe 1) du règlement.

M. BOURASSA: Pourquoi avez-vous voté contre ce matin? J'ai une question à poser au chef de l'Opposition. Pourquoi avez-vous voté contre la motion pour que nous venions en commission ce matin?

M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement. Le député de Terrebonne a dit tantôt, parce que le député de Sauvé lui posait une question, qu'il n'était pas poli. Est-ce la même chose quand le premier ministre interrompt le chef de l'Opposition?

M. BOURASSA: Je pose une question.

M. LEGER: Vous a-t-il permis de poser la question? Attendez votre tour.

M. BOURASSA: Je demande la permission de vous demander.

M. MORIN: M. le premier ministre, avec votre brio habituel, vous interviendrez immédiatement après moi.

M. BOURASSA: Pourquoi avez-vous voté contre, ce matin?

M. MORIN: Contre quoi?

M. BOURASSA: Pourquoi avez-vous voté contre la motion pour que nous venions en commission élue? Il y a une contradiction flagrante.

M. LEGER: M. le Président, le député de Sauvé a la parole.

M. MORIN: Allons donc! M. le Président, que nous ayons voté pour ou contre la commission élue, cela ne change rien au fait que cette commission siège. C'est ce qui compte.

M. CLOUTIER: Donc, votre vote ne compte pas!

M. MORIN: M. le Président, j'attendrais du ministre de l'Education des interventions d'un ton un peu plus élevé que cela.

M. CLOUTIER: II y a tellement de contradictions qu'on ne s'y retrouve plus.

M. CHARRON: Ah! Cela, vous êtes mal placé...

M. CLOUTIER: Oh! Pardon!

M. CHARRON: Vous êtes mal placé pour parler de contradictions.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: S'il y a une machine à contradictions, c'est bien le ministre de l'Education!

M. CLOUTIER: Vous avez vu le petit débat de procédure que vous avez fait hier et le débat de procédure que vous faites maintenant? Le Parti québécois est en train de se mettre la corde au cou avec ses contradictions.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: Ce ne sont pas des contradictions parce que...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. MORIN: Avais-je la parole?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition.

M. MORIN: Si nous avons fait adopter cette motion au début de la commission, c'est parce que nous craignions que l'application arbitraire de l'article 148 permette à la majorité gouvernementale de faire parler ses propres députés tout en lui permettant de nier systématiquement à l'Opposition le droit de faire entendre les siens. C'est dans la crainte d'une application arbitraire de l'article 148, paragraphe premier, que nous avons présenté cette résolution du député de Saint-Jacques au tout début. Je ferai remarquer au premier ministre que nous n'avons pas parlé de l'audition des comparants sur le bill 22, nous avons parlé de tout le débat. Est-ce assez clair? Je continue. Je relis pour terminer...

M. BOURASSA: D'accord!

M. MORIN: ... la proposition du député de Saint-Jacques: Que la règle actuellement en usage au cours des commissions parlementaires, à savoir que tous les membres de l'Assemblée nationale, même s'ils ne sont pas membres d'une commission puissent intervenir, soit respectée et ce au cours de tout le débat sur le projet de loi no 22. La proposition est adoptée. M. le Président, je soutiens et je vais soutenir mordicus que...

M. HARDY: Attention à vous.

M. MORIN: ... de renverser cette décision de votre part...

M. BOURASSA: Oui.

M. MORIN: ... serait illégal.

M. BOURASSA: Avez-vous lu l'article 161?

M. MORIN: Nous avons lu tous les articles.

M. HARDY: Vous le plaiderez?

M. BOURASSA: Vous le plaiderez?

M. MORIN: M. le Président, vous ne pouvez pas — et je m'adresse à vous qui venez de nous faire une suggestion — légalement renverser une décision de cette commission et si les gouvernementaux tiennent absolument à pouvoir tenir entre leurs mains le droit de parole des membres de l'Opposition, ils n'ont qu'à renverser cette décision antérieure, ils n'ont qu'à mettre cartes sur table, à montrer leurs véritables intentions et à faire une nouvelle motion qui renverserait la décision antérieure. Celle-ci veut qu'au cours des débats qui viennent, de tout le débat sur le projet de loi no 22, désormais ce soit l'article 148, paragraphe premier qui s'applique. Alors, le jeu serait clair. Nous voulons qu'il soit clair avant même de procéder.

M. BOURASSA: Je crois que c'est l'Opposition actuellement... Juste un mot, M. le Président. C'est l'Opposition qui est en train de montrer ses véritables intentions alors que le gouvernement est prêt à suspendre le règlement pour permettre à tous les députés de prendre la parole.

Je voudrais suggérer au chef de l'Opposition de lire l'article 161 qui dit: Dès qu'une commission élue a terminé l'examen de l'affaire qui lui a été référée, elle doit par l'entremise d'un rapporteur qu'elle a désigné parmi ses membres — le député de Gouin — déposer à l'Assemblée un rapport suffisamment détaillé et contenant les amendements adoptés. Donc, comment, à tout le moins, je demande au chef de l'Opposition, avec des articles comme ceux-là, avec le vote qui a été pris ce matin, ne pas admettre qu'il y a au moins un problème d'interprétation de la motion dont parlait le député de Saint-Jacques?

M. MORIN: Vous en créez un pour d'autres fins, ce n'est pas la même chose.

M. BOURASSA: Non. On crée un problème sur des articles.

M. MORIN: La résolution est là.

M. BOURASSA: M. le Président, je crois que vous êtes en train de vous démasquer vous même avec l'obstruction que vous faites là-dessus. Je dis, M. le Président, qu'à la lumière de l'article 161, à la lumière des propos de l'Opposition, sur sa préférence pour la commission plénière, à la lumière du vote qui a été pris ce

matin, à la lumière de ces trois faits, tout ce qu'on dit c'est qu'il y a au moins un problème d'interprétation et l'Opposition ne veut même pas vous permettre, pendant deux heures, de pouvoir réfléchir à cette question. Ce n'est pas la preuve qu'ils ont pris une décision d'obstruction dès le départ?

M. CHARRON: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Messieurs, j'aimerais simplement poser une question au chef de l'Opposition officielle, à savoir, à la suite de son intervention, s'il rejette la suggestion que j'ai faite de suspendre ma décision jusqu'à cet après-midi?

M. CHARRON: M. le Président, à votre suggestion de tout à l'heure, puisque vous nous invitez à y participer, la position de l'Opposition, sur cette question, est la suivante : Nous ne contestons aucunement le besoin que vous ayez peut-être de consulter le président de l'Assemblée nationale parce qu'effectivement la décision que vous allez rendre est d'une importance capitale.

En ce sens, nous ne l'avons jamais refusé, dans des travaux de la commission, nous l'avons même suggéré nous-mêmes à certains présidents qui semblaient déchirés dans l'entendement qu'ils devaient donner à un article du règlement ou à une motion précédemment adoptée par une commission afin de suspendre la séance et de revenir par la suite. Mais nous refusons absolument...

M. BOURASSA: Vous ne voulez pas adopter l'article 1, vous avez peur de voter l'article 1?

M. CHARRON: Vous avez peur de présenter une motion? Vous voudriez bien que le président fasse la "job" à votre place?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: Vous vous êtes fait passer cette motion et vous n'aimeriez pas être obligés d'y revenir.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président...

M. CHARRON: M. le Président, je vous le dis, nous acceptons votre suggestion à la condition que la commission ne procède pas tant que nous n'aurons pas cette décision. Si vous voulez suspendre la séance immédiatement jusqu'à 3 heures, nous sommes d'accord.

M. HARDY: M. le Président...

M. BEDARD: M. le Président...

M. CHARRON: Nous ne devons entamer aucun article tant que nous n'aurons pas d'éclaircissement sur cette question.

M. HARDY: M. le Président, personne ne perd quoi que ce soit. Si, pendant la présente séance... D'abord, le président n'a pas à vous demander la permission s'il veut prendre la motion en délibéré ou non. Le règlement lui permet de prendre toute question en délibéré.

M. CHARRON: Le président nous a consultés, il nous a demandé ce que nous en pensions et j'ai répondu à l'invitation. Il est plus poli que vous.

M. HARDY: Parce que c'est un président... Oui, très poli et surtout très objectif, plus objectif que moi.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: M. le Président, le président a parfaitement le droit de prendre la chose en délibéré. Il va même plus loin, le président, et nous sommes d'accord. Pour la séance d'aujourd'hui, de ce matin, personne ne perd de droit. Nous acceptons que tous les députés non-membres parlent. A moins, M. le Président, de vouloir absolument, d'une façon catégorique et claire, retarder inutilement les travaux, pourquoi ne pourrions-nous pas continuer notre séance...

M. BOURASSA: Vous avez le droit.

M. HARDY: ... jusqu'à sa fin normale, à 1 heure? Personne ne va perdre quoi que ce soit. Qu'est-ce que vous allez perdre? Tout le monde parle...

M. CHARRON: Nous ne négocierons pas nos droits jour après jour.

M. HARDY: ... et, à 3 heures, le président rendra sa décision. M. le Président, c'est le président qui va rendre sa décision.

M. CHARRON: Oui?

M. HARDY: Ce n'est pas vous, parce que vous n'êtes pas encore président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: C'est la commission qui a décidé et le président ne peut pas aller à l'encontre d'une résolution de la commission.

M. HARDY: M. le Président, si le député de Sauvé continue à agir comme il agit, il va perdre totalement les restants de sa réputation de juriste.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, une seule intervention. Tel que l'a dit le premier

ministre, tel qu'il l'a constaté —je pense que c'est facile à constater — il y a divergence concernant l'interprétation des règlements. Dans son intervention, le ministre des Affaires culturelles s'est basé sur les articles 118 et 122 en disant bien, d'une façon très précise, que c'étaient ces articles qui régissaient les étapes du débat que nous sommes en train de continuer parce que le débat comme tel, M. le Président, a commencé depuis le mois de juin et continue tout simplement. Ce sont des règles qui régissent les étapes du débat.

M. le Président, au point de vue de l'interprétation, les règlements d'un débat général, les règlements qu'on se donne pour un débat général doivent primer sur les règlements des différentes étapes de ce débat. Quel est le règlement général que s'est donné cette commission concernant l'ensemble du débat, quel est l'esprit qu'on a voulu donner à ce débat? C'est, d'une façon très claire, M. le Président, exprimé dans la motion qui a été présentée au début de cette commission par le député de Saint-Jacques selon laquelle, pendant tout ce débat, on puisse permettre à tous les députés de pouvoir s'exprimer. C'est la règle générale du débat. Les articles auxquels a fait allusion ou auxquels s'est référé le ministre de l'Education, pour employer sa propre expression, sont des règlements qui régissent les différentes étapes. Je considère donc qu'étant donné que c'est une étape du débat qui se continue, il faut revenir et appliquer l'esprit qui avait été donné...

M. HARDY: Les articles 122 et 163.

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, on les a lus, ne vous inquiétez pas.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): ... l'esprit qui devait régir ce débat qui est très clairement exprimé et qui a été voté à l'unanimité par la motion présentée par le député de Saint-Jacques lors de l'ouverture de la commission.

M. HARDY: Article 1.

M. BOURASSA: M. le Président, comme tous les députés ont un droit illimité de parole jusqu'à la suspension de la séance, je propose l'adoption, que nous commencions immédiatement. Personne n'est brimé. Je ne crois pas que l'Opposition puisse dire qu'elle est brimée d'ici 1 heure.

M. BEDARD (Chicoutimi): II faut des règles de débat d'une façon très claire pour l'ensemble du débat. On ne peut pas commencer dans la confusion, M. le Président.

M. BOURASSA: A 3 heures, le président pourra rendre sa décision. D'ici 1 heure, on pourrait adopter l'article 1, à moins que vous ne vouliez pas l'adopter.

M. BEDARD (Chicoutimi): Arrêtez donc!

M. LEGER: M. le Président, il y a un point supplémentaire qu'il faut constater, c'est que la motion faite par le député de Saint-Jacques fait partie du rapport. Ce rapport a été adopté à l'Assemblée nationale, donc à l'intérieur de ce rapport...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... qui a été adopté à l'Assemblée nationale, on dit que pour la durée du débat...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LEGER: ... sur le bill 22.

M. HARDY: C'est effrayant, ne rien comprendre ainsi.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... tous les députés ont droit de parole. Donc, l'Assemblée nationale a même adopté le rapport qui disait cela.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est votre ghetto...

M. LEGER: M. le Président, vous ne pouvez pas changer cela. L'Assemblée nationale a accepté le fonctionnement de la commission parlementaire...

M. HARDY: Voyons donc!

M. LEGER: ... et pendant toute la durée du débat; ce rapport a été adopté, M. le Président. Peut-être que le député de Terrebonne regrette...

M. HARDY: II n'a pas été adopté, il n'a été que déposé.

M. LEGER: ... parce que c'est lui qui l'a adopté. M. le Président, est-ce que je peux...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... dire au député de Terrebonne qu'il n'est pas tellement poli actuellement?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: C'est vrai, je ne suis pas poli. Je m'en excuse.

M. LEGER: Je continue. Le député de Terrebonne est peut-être gêné, je le sais, d'avoir adopté cela. Et il veut le retirer parce que...

M. HARDY: J'invoque... Question de privilège, M. le Président...

M. LEGER: Je m'excuse, je retire mes paroles.

M. HARDY: M. le Président, j'invoque une question de privilège.

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable ministre...

M. HARDY: Nous n'avons jamais adopté ce rapport-là...

M. LEGER: M. le Président, je retire mes paroles.

M. HARDY: Nous n'avons que déposé. M. LEGER: Pardon?

M. HARDY: Le rapport n'a pas été adopté à l'Assemblée nationale, il a été déposé.

M. LEGER: II a été déposé à l'Assemblée nationale.

M. HARDY: II n'a pas été adopté. M. LEGER: Alors...

M. HARDY: Parce qu'il n'y a pas de procédure d'adoption...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Comme conforme...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Comme conforme à la décision de la commission.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: C'est pour cela, M. le Président, qu'on ne peut pas faire autrement que d'accepter cette décision ou de la révoquer.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Nous sommes devant cela, M. le Président, et c'est là, dans votre jugement, que vous aurez l'occasion de vous exprimer sur cela. On ne peut pas aller plus loin, M. le Président, et commencer à étudier le projet de loi, tant que vous n'aurez pas statué là-dessus. Ou vous êtes suffisamment éclairé, et vous pouvez vous exprimer immédiatement, ou si vous voulez avoir une heure, une demi-heure, vingt minutes, ou jusqu'à trois heures, pour terminer vos réflexions, et alors, nous commencerons quand vous aurez terminé vos réflexions et que vous aurez statué.

M. le Président, je pense que c'est à vous maintenant de décider.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, est-ce qu'il serait du désir de la commission...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... gouvernement de clôture.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ...que je suspende ma décision jusqu'à trois heures?

M. HARDY: Non, non.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ...et que nous...

M. HARDY: Non.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Laissez-moi finir! ... et que nous procédions à l'étude du projet de loi, article par article?

M. BOURASSA: M. le Président, je crois qu'il n'y a aucune raison, et je le répète, étant donné que l'Opposition n'est brimée d'aucune espèce de façon, on suspend le règlement jusqu'à ce que vous donniez votre propre interprétation. Je pense que j'ai donné des faits précis...

M. MORIN: Ce n'est pas cela que vous défendez, c'est la motion.

M. BOURASSA: ... qui justifient quand même que vous examiniez l'interprétation de la motion, à moins que l'Opposition ne veuille absolument pas voter l'article 1.

M. BEDARD (Chicoutimi): On commence un débat dans la confusion concernant les règles de procédure.

M. BOURASSA: Non. M. le Président... LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): Juste en même temps que vous notez une affaire comme cela.

M. BOURASSA: M. le Président, à moins que l'Opposition veuille absolument ne pas voter l'article 1, et cela, la population va s'en rendre compte.

M. BEDARD (Chicoutimi): Que le président rende sa décision et on va commencer tout de suite sur l'article 1. Qu'il la rende sa décision.

M. BOURASSA: La population va s'en rendre compte.

M. BEDARD (Chicoutimi): II demande le temps de réflexion, donnez-lui.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: Donc, les députés de l'Opposition ont la liberté d'expression illimitée quant au temps et quant au nombre.

M. LEGER: Vous la limitez jusqu'à trois heures.

M. BOURASSA: Quant au temps et quant au nombre et, à trois heures, vous rendrez votre décision.

M. MORIN: J'ai hâte de voir si le premier ministre va vraiment voter pour le français "seule" langue officielle...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: ... comme il l'a dit dans son discours.

M. BOURASSA: On va en parler. Je suis prêt à en parler et à examiner les sous-amendements. Mais commençons. C'est cela qui est important.

M. CHARRON: M. le Président, puis-je conclure les arguments de l'Opposition?

UNE VOIX: La même chose dans la conclusion.

M. CHARRON: ... en vous disant que nous avons absolument besoin de savoir votre entendement de cet article avant de procéder à quoi que ce soit.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Parfait, je décide. Ça va?

M. MORIN: Cela va.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je me prévaux des dispositions de l'article 43 qui dit que le président se prononce sur les questions de règlement au moment où il le juge à propos, et il peut demander des directives à l'assemblée ou la laisser se prononcer.

J'ai l'intention de demander à la commission de se prononcer quant à l'application de la motion du député de Saint-Jacques adoptée le 11 juin dernier, je crois, à savoir que chaque député ait droit de parole. Alors...

M. MORIN: Vous voulez dire par là qu'il y aurait une nouvelle motion?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Non. Je demande strictement... il y a une question de règlement qui a été soulevée au tout début par le député de Maisonneuve et sur laquelle nous débattons depuis environ une heure. Je pense que la commission doit sûrement se sentir assez éclairée pour décider de cette question de règlement et, en vertu de l'article 43, je demande à la commission de trancher la question de règlement soulevée par le député de Maisonneuve.

M. MORIN: M. le Président, puis-je intervenir?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Nous sommes prêts au vote.

M. MORIN: ... sur un point de règlement. Nous sommes devant une motion de cette même commission. Vous ne pouvez pas demander à la commission de l'interpréter. Vous pouvez demander à la commission de la renverser, de la revoir, de l'abroger, mais vous ne pouvez pas lui demander de l'interpréter.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sans refaire l'argumentation faite par le côté ministériel, je pense qu'il y a eu des arguments qui démontrent que, dans leur opinion, la motion du député de Saint-Jacques, adoptée au moment de l'étude du projet de loi après la première lecture, ne s'applique plus. Tout ce que je fais est de demander à l'Assemblée de se prononcer.

M. HARDY: M. le Président, c'est important que votre question soit très claire. Je pense que c'est tout à fait légal, encore une fois, ce que vous faites. L'Opposition prétend que la motion adoptée à l'autre étape est encore en vigueur.

M. MORIN: Oui.

M. HARDY: Nous, nous prétendons qu'elle n'est plus en vigueur.

M. BOURASSA: A cause de l'article 161.

M. HARDY: C'est cela. M. le Président, vous demandez à la commission actuellement de décider si, oui ou non, la motion est encore en vigueur légalement?

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est cela. M. CHARRON: M. le Président...

M. BOURASSA: On est prêt à se prononcer sur l'application de l'article 161.

M. CHARRON: M. le Président, puis-je vous faire remarquer simplement ceci? La décision que vous venez de prendre, si elle est légale, si elle vous est permise par le règlement, elle n'est quand même à employer que de façon très rarissime. Le président de l'Assemblée nationale se rabat sur cette possibilité pour trancher une question par l'Assemblée elle-même que dans les circonstances les plus difficiles.

J'imagine qu'un président de commission — qui utilise cet article qui remet aux mains de la majorité ministérielle une décision à prendre quant à l'interprétation d'une commission — ne doit la prendre, à mon avis —et je vous le soumets pour la dernière fois probablement, très respectueusement — qu'après avoir consulté le président de l'Assemblée nationale.

Le président de l'Assemblée nationale n'a

pas d'autre recours plus haut que lui. Il ne la soumet donc, à ce temps, qu'à l'Assemblée nationale. Vous, vous en avez un, avant d'employer cette méthode exceptionnelle, qui est d'aller voir le président de notre Assemblée lui-même et lui demander de le consulter. Faites attention à l'utilisation facile que vous êtes en train de faire d'un pouvoir extrêmement...

M. BOURASSA: M. le Président, je dois dire au député de Saint-Jacques qu'on n'a pas objection à ce que le président consulte le président de l'Assemblée nationale.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: C'est ce que nous avons suggéré en suspendant la séance.

M. BOURASSA: Mais nous sommes d'accord.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. BOURASSA: Mais on peut commencer...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs ! A l'ordre !

M. BEDARD (Chicoutimi): Bien non, n'entrez pas dans la confusion.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs ! D'abord la décision est rendue selon les...

M. BEDARD (Chicoutimi): II faut que les règles du jeu soient établies.

M. LEGER: J'invoque le règlement sur la décision. J'invoque le règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Un instant! Je suis en train de statuer sur le règlement.

M. LEGER: M. le Président, justement, vous avez décidé...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Allez-y. Voulez-vous le décider?

M. LEGER: Vous avez décidé et il n'y a pas de précédent sur cette décision que vous venez de prendre. Nommez-moi un précédent...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... où le président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... d'une commission...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... a demandé...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... plutôt que d'aller voir le président de l'Assemblée nationale...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... il a demandé...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... à la commission...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... de décider des règles de procédure.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. CHARRON: Cela ne s'est jamais fait. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LEGER: II n'y a pas de précédent.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Est-ce que je pourrais m'exprimer moi aussi?

M. CHARRON : Vous en porterez la responsabilité, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que je pourrais m'exprimer moi aussi?

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président... la commission sur chacune des décisions?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Messieurs, vous allez me forcer à suspendre les travaux. Est-ce que c'est ce que vous voulez?

M. BEDARD (Chicoutimi): II y a des divergences...

M. CHARRON: Si cela vous donne envie d'aller voir le président, certainement qu'on devrait insister.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): II y a des divergences de vues.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. CHARRON: Vous prenez une décision très grave, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): II y a des interprétations différentes...

M. CHARRON: Vous faites la "job" du gouvernement, M. le Président.

M. BEDARD (Chicoutimi): La majorité a décidé sur l'interprétation, c'est épouvantable, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs ! J'ai moi-même suggéré de suspendre ma décision jusqu'à la séance de cet après midi, 3 heures, quitte à commencer seulement le débat sur le projet de loi. Elle a été refusée. Je m'en remets maintenant à la commission pour trancher la question. Si vous voulez que je revienne à ma suggestion originelle de suspendre et de donner le droit de parole à tous les députés jusqu'à la séance de cet après-midi, j'y reviendrai volontiers, mais je ne...

M. CHARRON: Mais, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... peux quand même pas laisser tout cela dans les limbes.

M. BOURASSA: Ils ne veulent rien accepter, cela paraît trop.

M. LEGER: On veut que vous statuiez sur les règles du jeu, au départ.

M. MORIN: Sur un point de règlement, M. le Président, c'est vous qui revenez sur une décision fondamentale de cette commission.

M. BOURASSA: L'article 161.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre!

M. MORIN: M. le Président, sur un point de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Cette argumentation a déjà été faite.

M. MORIN: Non. Sur un point de règlement. Je soutiens que vous ne pouvez demander à la commission d'interpréter une décision antérieu- re. Ce que vous pouvez faire est, d'abord, de déclarer quelle est votre interprétation et, ensuite, d'en référer à la commission...

M. CHARRON: C'est ça!

M. MORIN: ... ou encore de demander à la commission de faire une nouvelle motion abrogeant l'ancienne. Il est bien clair que c'était le but dans lequel nous avions proposé cette résolution à l'époque, c'était le but visé par le député de Saint-Jacques...

M. BOURASSA: L'article 161.

M. MORIN: ... que tous les débats autour du bill 22 soient sujets à cette règle de la liberté d'intervention de tous les députés.

M. HARDY: Votre motion aurait été irrégulière à ce moment-là.

M. MORIN: M. le Président, votre décision, votre suggestion — puisque je pense que c'est encore une suggestion — d'en référer à la commission pour faire interpréter la décision du 11 juin 1974 me paraît être illégale. Nous partons sur un mauvais pied si nous commençons, dès le départ, par poser des gestes illégaux.

Le président lui-même donne cet exemple. Comment voulez-vous que par la suite on puisse discipliner les députés !

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que ma première suggestion vous plaît mieux?

M. CHARRON: M. le Président, je vous répète...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Messieurs, la commission suspend ses travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures, alors que je rendrai ma décision.

M. HARDY: Ils ont gagné, encore une fois. (Suspension de la séance à 12 h 25)

Reprise de la séance à 15 h 9

M. CHARRON (président de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre, messieurs !

Décision du président

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, messieurs, je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la question de règlement soulevée par le député de Maisonneuve ce matin, et sur laquelle plusieurs députés des deux côtés de cette table ont présenté des arguments que j'ai écoutés très attentivement.

En substance, il s'agit pour moi de décider si la motion faite par le député de Saint-Jacques, lors de la première séance de cette commission, après la première lecture du projet de loi 22, c'est-à-dire le 11 juin dernier, s'applique toujours aux travaux de la commission après la deuxième lecture, c'est-à-dire aujourd'hui.

Si oui, tous les députés de cette assemblée, qu'ils soient membres ou non de la commission, auraient le droit de parole. Sinon, seuls les députés membres de la commission, ou tout au moins ceux qui sont inscrits comme tels au début de chaque séance de la commission, auraient droit d'intervenir. Dans ce dernier cas, il est clair qu'en vertu de l'article 148, même les députés qui ne sont pas membres de la commission pourraient intervenir en obtenant la permission de la commission.

Ce matin, dans le but de tâcher de faire avancer les travaux, j'ai fait à la commission deux suggestions; elles ont toutes deux été rejetées. La première visait à suspendre ma décision sur la question de règlement jusqu'à la séance de cet après-midi, tout en accordant le droit de parole à tous les députés, membres ou pas, de la commission.

La deuxième visait à demander à la commission de se prononcer sur la question de règlement comme l'article 43 de nos règlements me permet de le faire.

Devant le refus de la commission de retenir l'une ou l'autre de ces suggestions, je me rends volontiers à l'invitation de la commission de rendre ma décision sans la consulter.

Cette décision se fonde sur l'article 161 de nos règlements qui dit et je cite: "Dès qu'une commission élue a terminé l'examen de l'affaire qui lui a été référée, elle doit, par l'entremise d'un rapporteur qu'elle a désigné parmi ses membres, déposer à l'Assemblée un rapport suffisamment détaillé et contenant les amendements adoptés."

Je conclus donc que lorsque le rapporteur de la commission fait rapport à l'Assemblée, c'est que, comme le dit l'article 163, la commission élue a terminé l'examen de l'affaire qui lui a été référée.

Que la commission se réunisse à nouveau, comme elle l'a fait ce matin pour étudier le même projet de loi, il s'agit là, à mon avis, d'un mandat complètement nouveau. A toutes fins pratiques, cette commission a reçu de l'Assemblée deux mandats distincts. Le premier était de recevoir les mémoires et d'entendre les organismes sur le bill 22. Ce mandat s'est terminé avec le dépôt du rapport de la commission à l'Assemblée par le rapporteur de la commission d'alors, le député de Gouin.

Aujourd'hui, la commission a un deuxième mandat tout à fait distinct, celui d'étudier le projet de loi 22, article par article. La commission n'est donc pas liée par la motion... D'ailleurs, je devrais ajouter que la commission a désigné, en matinée, un nouveau rapporteur en la personne du député de Laporte.

Je considère donc que la commission n'est pas liée par la motion du député de Saint-Jacques, même si celle-ci se référait à l'étude générale du projet de loi 22, sans spécifier qu'il s'agissait strictement de l'étape de l'audition des organismes.

A mon avis, la motion du député de Saint-Jacques était pour le moins ambiguë quant à la durée de son application et en l'adoptant, la commmission a elle-même outrepassé ses pouvoirs puisqu'elle ne pouvait s'engager vis-à-vis de deux étapes distinctes de l'étude de ce projet de loi. Je répète donc que je considère que la commission, à ce stade-ci de ses travaux, n'est pas liée par la motion du député de Saint-Jacques.

Si, par contre, la commission désire accorder le droit de parole à tous les députés, elle peut le faire de deux façons: soit au fur et à mesure qu'un député, non membre de la commission, demande la parole et ce, en vertu de l'article 148 ou elle peut en décider immédiatement en adoptant une nouvelle motion, semblable à celle qui a été adoptée le 11 juin dernier, et qui s'appliquerait pour la durée des travaux de la commission, c'est-à-dire jusqu'à ce que celle-ci fasse rapport à l'Assemblée sur son présent mandat d'étudier le projet de loi 22, article par article. Une telle motion serait tout à fait recevable, si elle était faite par un membre de la commission. Alors...

M. MORIN: Avez-vous terminé, M. le Président? Puis-je intervenir? L'Opposition s'incline devant votre décision bien qu'elle ne puisse en partager les raisons.

Je pourrais la contester, mais telle n'est pas mon intention. Vous n'avez certainement pas accordé suffisamment d'attention au fait qu'il s'agit de la même commission et qu'il s'agit du même projet de loi, mais passons. Puisque vous en avez décidé ainsi, nous n'avons jamais eu d'autre intention que de jouer pleinement le jeu démocratique qui nous est offert par cette commission.

Vous avez, dans vos conclusions, déclaré qu'il existe deux moyens de reconnaître le droit de parole des membres de l'Assemblée nationale

à cette commission — j'entends le droit de parole des députés qui ne sont pas membres à titre permanent de la commission. Vous avez indiqué tout d'abord que cela peut se faire au fur et à mesure, en vertu de l'article 148. M. le Président, j'attire votre attention sur le risque d'arbitraire que comporte cette procédure. Lorsqu'un député membre de l'Opposition voudra intervenir, surtout si le débat est tendu, surtout si, à ce moment, le gouvernement tient pour acquis, à tort ou à raison, que les membres de l'Opposition veulent faire de l'obstruction, il y aura le risque que puissent paraître constituer de l'obstruction toutes les interventions qui ne sont pas favorables au point de vue du gouvernement. Donc, il y aura le risque que l'on refuse systématiquement aux députés de l'Opposition qui veulent se faire entendre, surtout dans les situations tendues, comme je le disais il y a un instant, qu'on leur oppose une fin de non-rece-voir. Il y a en tout cas le risque qu'une fois sur deux, cela se produise, ce qui est déjà, à notre avis, un motif pour écarter cette façon de procéder.

L'autre façon que vous avez indiquée est celle qui consiste à adopter une motion de principe semblable à celle que le député de Saint-Jacques nous a proposée au début des auditions de la commission de l'éducation. M. le Président, je crois que cette procédure, cette façon de procéder est infiniment plus démocratique, infiniment plus conforme aux traditions de cette Assemblée ainsi que de cette commission d'ailleurs. Je pourrais m'étendre longtemps sur le fait que la motion que nous avons adoptée la dernière fois et dont nous n'avons pas abusé — je tiens à le dire en passant et le ministre le reconnaîtra —

M. CLOUTIER: C'est un bon point, on va en tenir compte.

M. BOURASSA: Vous commencez à être convaincants.

Motion de M. Morin

M. MORIN: Je pourrais souligner le fait que cette motion constitue un précédent. Je pourrais d'ailleurs aller chercher dans d'autres commissions des précédents semblables.

C'est pourquoi, M. le Président, puisque vous nous avez indiqué que cela était l'une des façons de procéder, je propose que la commission parlementaire sur l'éducation entende tous les membres de l'Assemblée nationale qui veulent intervenir sur le projet de loi no 22, même s'ils ne sont pas membres à titre permanent de la commission, et ce, jusqu'à ce que la commission ait terminé son mandat.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le texte de la motion serait donc, si vous voulez bien le répéter, s'il vous plaît.

M. MORIN: Je le veux bien. "Que la commission parlementaire sur l'éducation entende tous les membres de l'Assemblée nationale qui désirent intervenir sur le projet de loi no 22".

M. BOURASSA: Est-ce que je comprends que le chef de l'Opposition laisse entendre qu'il n'y aura pas d'obstruction systématique ou frivole?

M. MORIN: On m'a posé la question tout à l'heure, dans le particulier. Je puis dire publiquement que le travail que nous nous apprêtons à faire va être accompli sérieusement. Nous avons l'intention de proposer des amendements très sérieux, très réfléchis; mais je tiens à faire remarquer au premier ministre, M. le Président, que les tensions qui peuvent naître dans cette commission ne sont pas toujours engendrées par les attitudes de l'Opposition, et qu'il est des attitudes, en particulier du premier ministre, lorsqu'il vient nous rendre visite aux commissions, qui jettent facilement la pagaille. Si le premier ministre vient dans la commission avec des dispositions semblables, il ne faudra pas qu'il s'étonne, par la suite, qu'il y ait de l'obstruction.

M. BOURASSA: M. le Président, si je peux répondre brièvement, je crois que c'est une mauvaise journée pour le chef de l'Opposition de faire une telle remarque, parce que, ce matin, j'ai signalé l'article 161 du règlement, c'est l'une de mes premières incursions dans la procédure depuis que je suis en politique, et le président de la commission m'a donné raison cet après-midi en disant que mon argument...

M. MORIN: Je n'insisterais pas trop là-dessus si j'étais vous, M. le premier ministre.

M. CHARRON: Votre avantage aurait été de ne pas le rappeler à la commission.

M. CLOUTIER: Est-ce que je peux poser une question au chef de l'Opposition?

M. MORIN: Volontiers.

M. CLOUTIER: II ne s'agit pas là d'une intervention sur la motion. Il a dit quelque chose qui m'a frappé. Il a dit qu'en tant qu'Opposition, il n'avait pas abusé de la latitude qui avait été offerte spontanément lors des sessions de la commission après la première lecture.

C'est tout à fait exact. Malheureusement, il a également dit, à ce moment-là, qu'il n'avait pas l'intention d'apporter d'obstruction à ce stade-là, mais qu'il se réservait de le faire lorsqu'on arriverait à la discussion article par article. Je crains bien que ce ne soit là une citation à peu près exacte. Dois-je comprendre qu'il a changé d'avis?

M. MORIN: M. le Président, je tiens à dire que, dans le déroulement d'un débat de ce genre, tout peut survenir, surtout si, comme le fait si souvent le premier ministre, il vient dans la commission pour nous apporter sa confiture habituelle. Je veux le souligner au passage.

M. CLOUTIER: Ce n'est pas une réponse.

M. MORIN: Parce qu'il est arrivé à de nombreuses reprises, dans les commissions, que les débats aient tourné en queue de poisson ou soient trouvés complètement chamboulés parce que le premier ministre venait et intervenait inopinément et intempestivement dans le débat. Nous ne sommes pas maîtres de cela. Si le gouvernement, de son côté, se comporte de façon responsable, je ne vois pas pourquoi l'Opposition n'en ferait pas autant.

M. BOURASSA: Mais, M. le Président, j'ai insisté hier, dans mon exposé...

M. CLOUTIER: C'est cela.

M. BOURASSA: ... très longuement sur l'importance, dans ce débat sur le bill 22, et sur la question linguistique en général, de cette étape de la commission plénière. Pour moi, c'est la plus importante, parce que j'ai toujours souhaité que le débat se fasse sur des textes précis plutôt que sur des généralités ou de la rhétorique. Or, c'est l'étape idéale pour que le débat se fasse sur des textes précis. Hier, j'ai signalé au chef de l'Opposition que j'avais hâte de connaître ses amendements, on va essayer d'en donner le plus possible à l'avance; je souhaiterais que ce soit la même chose de la part de l'Opposition, dans le cas de l'affichage public, par exemple.

M. MORIN: M. le Président...

M. BOURASSA: II y a eu des remarques qui ont été faites par des éditorialistes...

M. CHARRON: Le chef de l'Opposition a présenté une motion.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, si vous voulez bien...

M. BOURASSA: Nous sommes d'accord.

M. MORIN: II y a un lapsus très intéressant de la part du premier ministre. Il vient de dire en "commission plénière". Nous ne sommes pas en commission plénière...

M. BOURASSA: En commission élue, je m'excuse.

M. MORIN: Si nous étions en commission plénière, tous les députés pourraient intervenir sans restriction. Donc, comme nous sommes dans une commission qui est l'équivalent de la commission plénière...

M. BOURASSA: D'accord.

M. MORIN: ... je crois qu'il vient, sans le vouloir peut-être, d'apporter un argument de poids en faveur de la résolution que je viens de soumettre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, la motion se lit comme suit et est faite par l'honorable chef de l'Opposition: Que la commission parlementaire de l'éducation entende tous les membres de l'Assemblée nationale qui désirent intervenir sur le projet de loi 22, même s'ils ne sont pas membres à titre permanent, de la commission.

M. VEILLEUX: M. le Président, sur la proposition... '

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur la motion.

M. VEILLEUX: Sur la motion...

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable député de Saint-Jean.

M. VEILLEUX: J'aurais une directive à vous demander. Est-ce qu'il y a possibilité d'apporter des amendements à une motion de cette nature?

Compte tenu des propos que vient de tenir le chef de l'Opposition, je relis les coupures de journaux, les déclarations faites depuis le début du projet de loi par la loyale Opposition de Sa Majesté Elisabeth II — et soyez persuadé que les propos que vient de tenir le député de Sauvé ne m'ont pas convaincu que les représentants du Parti québécois sont décidés à discuter de façon rationnelle le projet de loi 22, article par article — je me demande s'il y aurait moyen de faire une proposition pour la mettre à l'essai, au moins une semaine, mais je ne prendrais pas le risque, M. le Président, pour toute la durée de la commission parlementaire, compte tenu de l'attitude qu'ont pu prendre à certains moments les représentants du Parti québécois.

M. CHARRON: On va vous confier cela à vous.

M. MORIN: Cela est arbitraire.

M. VEILLEUX: M. le Président, si on ne peut pas faire d'amendement, je tiens à vous dire que, personnellement — comme on est libre dans le Parti libéral — je vais voter contre une proposition de cette nature pour la durée de tous les travaux. Je ne prends pas ce risque.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A votre demande de directives, je dois vous informer

que cette motion, recevable du chef de l'Opposition, est susceptible d'amendement.

Le ministre de l'Education sur la motion.

M. CLOUTIER: Avant de parler sur la motion, j'aimerais peut-être demander un éclaircissement au chef de l'Opposition, étant donné qu'une suggestion vient d'être faite et qu'elle est claire. Est-ce que, étant donné le fait qu'il y a tout de même des inquiétudes qui subsistent pour des raisons assez évidentes — il y a eu des déclarations de la part de l'Opposition — il paraîtrait possible d'accepter un amendement de la nature de celui que propose le député de Saint-Jean, à savoir que, pour une période d'une semaine, nous pourrions fonctionner et qu'ensuite un nouveau débat pourrait avoir lieu?

M. MORIN: Que le député de Saint-Jean prenne ses responsabilités, cela sent l'arbitraire et cela sent le maître d'école!

M. VEILLEUX: En tout cas, que ce soit maître d'école ou non, M. le Président, quant à l'amendement, je propose qu'on essaie pendant une semaine la proposition du député de Sauvé, quitte à la réévaluer dans une semaine.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je m'excuse auprès du député de Saint-Jean, mais j'avais accordé la parole au ministre de l'Education sur la motion. Le député de Saint-Jean pourra intervenir à son tour.

M. VEILLEUX: C'est le bâillon, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pardon? M. VEILLEUX: C'est le bâillon?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Non, j'avais déjà reconnu le ministre de l'Education.

M. CLOUTIER: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur la motion du chef de l'Opposition.

M. CLOUTIER: ... le gouvernement... Est-ce qu'il y a un vote? A moins que ce soit le quorum. C'est un vote. Messieurs, ce vote arrive à un bon moment, puisqu'il va me permettre d'y réfléchir.

LE PRESIDENT (M. Gratton): La commission suspend ses travaux jusqu'après le vote à l'Assemblée.

(Suspension de la séance à 15 h 27)

Reprise de la séance à 15 h 40

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre de l'Education sur la motion du chef de l'Opposition.

M. CLOUTIER: M. le Président, le gouvernement a toujours manifesté, depuis le début du débat sur le projet de loi 22, la plus grande ouverture d'esprit possible. Il a favorisé les discussions, il a favorisé le dialogue. Ai-je besoin de rappeler qu'après le dépôt du projet de loi, lorsque la commission parlementaire a commencé ses auditions, c'est le gouvernement lui-même qui a proposé une motion pour que tous les députés présents puissent prendre la parole, s'ils le souhaitaient? Le gouvernement n'aurait pas hésité un instant à procéder de la même façon au début des travaux de la commission après la deuxième lecture. S'il ne l'a pas fait d'emblée, c'est pour toute une série de raisons auxquelles j'ai eu l'occasion de faire allusion, raisons qui découlent du fait qu'à partir de certaines déclarations, le gouvernement pouvait croire qu'une certaine obstruction se manifesterait, et il lui paraissait parfaitement légitime de bien définir les règles du jeu au départ.

Je crois que l'Opposition, en présentant sa motion, l'a fait d'une façon peut-être beaucoup plus mesurée que certaines déclarations antérieures pouvaient le laisser croire, et que l'approche est différente de ce qu'elle était. Je n'ose parler de volte-face, mais de toute façon je crois déceler chez les membres de l'Opposition une volonté nette de discuter objectivement article par article de ce projet de loi. Remarquez que ceci me parait une attitude parfaitement démocratique et parfaitement légitime, même si le Parti québécois a choisi de voter contre ce projet de loi en deuxième lecture. Je crois qu'un parti responsable se doit de franchir toutes les étapes d'un projet de loi. Peut-être aurai-je l'occasion un jour de dire ce que je pense de ce vote négatif en deuxième lecture; je ne le crois pas justifié, mais je dois souligner la volonté du Parti québécois de respecter le processus démocratique. Dans les circonstances, le gouvernement s'en tient à son attitude initiale, à savoir qu'il permettra que les députés présents prennent la parole et qu'il est d'accord pour voter en faveur de la motion présentée par le chef de l'Opposition. Tenant compte des sentiments exprimés par l'Opposition, et faisant le pari que l'Opposition voudra jouer son rôle, mais le jouer dans les limites d'un parlementarisme bien compris, le gouvernement a décidé de prendre cette décision. Merci.

M. BOURASSA: M. le Président, ce qui a été déterminant dans notre décision, c'est l'affirmation du chef de l'Opposition selon laquelle il abordait cette discussion d'une façon très sérieuse. Alors, je crois que nous parions sur sa bonne foi.

M. MORIN: M. le Président, je ne voudrais pas laisser passer certaines remarques, ni la façon dont le premier ministre présente les choses. Cette façon très paternaliste de dire: Si les petits écoliers sont gentils aujourd'hui, ils auront une collation à quatre heures. Je n'admets pas cela. J'estime que cette motion, en fait, est conforme aux traditions de cette Chambre, et j'ose croire que c'est pour cette raison fondamentale que vous l'adoptez et non pas pour je ne sais trop quelle raison paternaliste.

M. CHARRON: M. le Président...

M. BOURASSA: M. le Président, il faudrait se rendre compte quand même... On nous a accusés d'apporter la guillotine. Je ne sais pas si on va faire les mêmes manchettes en mettant en relief notre libéralisme aujourd'hui, mais il faut qu'on se rencontre... Ce qu'on rencontre quand même, c'est qu'on suspend l'application normale du règlement. On prend une mesure extraordinaire pour permettre à tous les députés de l'Opposition de faire valoir leur point de vue. Alors, on suspend le règlement normal pour accorder le maximum de liberté de parole à l'Opposition. Comment peut-on nous accuser d'être autocratiques en faisant une démonstration aussi évidente du respect de l'opinion des autres?

M. CHARRON: M. le Président, sur cette motion... Oui.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que je pourrais la relire pour que ce soit bien clair ce qu'est la motion de l'honorable chef de l'Opposition?

M. CHARRON: Bien sûr.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Soit que la commission parlementaire de l'éducation entende tous les membres de l'Assemblée nationale qui désirent intervenir sur le projet de loi 22, même s'ils ne sont pas membres à titre permanent de la commission, et ce, jusqu'à la fin de son mandat.

M. CLOUTIER: Attendez. Ce n'est pas la motion qu'on m'avait lue ce matin.

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est pourquoi j'ai tenu à la répéter...

M. CLOUTIER: II y a quelque chose d'irrégulier...

LE PRESIDENT (M. Gratton): ...c'est que dans la formulation originale, le chef de l'Opposition avait ajouté cette dernière phrase.

M. CLOUTIER: Mais il y a quelque chose d'irrégulier, M. le Président. On nous a présenté une motion... Oui, mais enfin écoutez, il faut quand même que l'on sache ce que l'on fait dans une commission.

On nous a présenté une motion ce matin, c'est bien cela, avant le vote plus exactement. On m'a tendu le texte que j'ai lu et ce texte ne comportait pas le dernier... les quatre ou cinq mots de plus. Je veux quand même prendre la peine de le lire.

M. CHARRON: M. le Président...

M. CLOUTIER: Je ne crois pas qu'il soit normal qu'on modifie les motions en cours de route.

M. MORIN: Je pense que le ministre peut en prendre connaissance. C'est la motion originale. On pourra se référer à la transcription. C'est la motion originale que j'ai faite. J'avais ajouté oralement cette partie...

M. CLOUTIER: Ah!

M. MORIN: ... et le Président, lorsqu'il a transcrit la motion, évidemment, n'a pu le faire, parce que je ne l'avais pas encore rédigée.

M. CLOUTIER: Alors, je me rends à ces raisons, M. le Président. Je maintiens les déclarations que j'ai faites. Il n'y a pas de problème.

M. CHARRON: M. le Président, sur la motion du chef de l'Opposition...

M. BOURASSA: On ne suspend qu'un article. On ne suspend pas tous les articles du règlement.

M. CHARRON: M. le Président, sur... Oui. Vous n'avez...

M. LEGER: On n'est pas le gouvernement pour suspendre tout cela d'un coup.

M. CHARRON: ... déjà...

M. BOURASSA: Je ne voudrais pas qu'on accepte...

M. CLOUTIER: D'accord, on n'est pas pour commencer un débat si on est d'accord.

M. BOURASSA: ... la motion...

M. CHARRON: M. le Président, à l'article... Sur la motion du chef de l'Opposition, je veux d'abord rectifier une position que vient d'affirmer ce grand procédurier qui nous sert de premier ministre...

M. BOURASSA: Une autre qualité. M. CHARRON: Oui. Parce que...

M. BOURASSA: Avant-hier, c'était le grand politicien, là c'est le grand procédurier.

M. CHARRON: ...après avoir brillamment suggéré l'article 161 au président pour rendre sa décision, là, vous venez de faire un peu moins de brio.

M. BOURASSA: Pourquoi?

M. CHARRON: Effectivement, si nous adoptons ce que suggère le député de Sauvé, chef de l'Opposition, ce n'est pas la suppression de l'article 148.

M. BOURASSA: La suspension.

M. CHARRON: II veut simplement dire que la commission prend engagement que l'application de l'article 148 sera intégralement respectée, en ce sens que la commission reconnaît que les autres membres et les autres personnes, pour parler, devront obtenir permission de la commission et que la commission ne la refusera pas.

M. BOURASSA: Oui, mais c'est...

M. CHARRON: Cela ne suspend pas l'article 148.

M. CLOUTIER: M. le Président, sur un point de règlement.

M. CHARRON: C'est l'engagement...

M. CLOUTIER: On discute quand on n'est pas d'accord et on discute autant quand on est d'accord.

M. CHARRON: Cest parce qu'on veut être très clair, également.

M. BOURASSA: On a adopté votre motion. Pourquoi vous inquiéter?

M. CHARRON: Non, mais je veux vous dire...

M. BOURASSA: On veut adopter le français comme langue officielle le plus tôt possible? Pourquoi...

M. CHARRON: M. le Président, voulez-vous rappeler à l'ordre le député de Mercier?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BOURASSA: On a adopté la motion.

M. MORIN: Aritlce 26... Vous avez dit que le reste du règlement s'applique encore, M. le premier ministre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: Adopté?

M. CHARRON: Je veux que le premier ministre ait une compréhension très claire de la motion qu'il est en train de voter. Je comprends très bien pourquoi le premier ministre a hâte de disposer de cette motion. Premièrement, parce qu'il sait très bien l'image odieuse que son gouvernement a eue à la suite des diverses mesures de boycottage des droits de l'Opposition.

M. BOURASSA: Vous voyez que cela ne nous donne absolument rien.

M. CLOUTIER: Cela ne donne rien d'être gentils.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: Les Québécois aiment être gouvernés.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

Pourrais-je demander au député de Saint-Jacques de se limiter à l'argumentation sur la motion, s'il vous plaît?

M. CHARRON: A quelle heure le député d'Anjou part-il en vacances? Ce soir, à huit heures?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. TARDIF: A peu près. M. BOURASSA: II a annulé son voyage. M. CHARRON: Il a annulé son voyage? M. TARDIF: Justement pour être ici.

M. CHARRON: C'est très beau. Le premier ministre voudrait disposer rapidement de cette motion pour pouvoir se permettre, par la suite, de redorer son blason qui en a mangé un certain coup depuis quelque temps suite aux motions précises employées. Mais je ne voudrais pas que le premier ministre adopte cette motion pour ensuite aller clamer qu'il a rétabli tous les droits de l'Opposition qui ont été particulièrement bousculés. Et c'est surtout pourquoi j'interviens. Je ne voudrais pas que le premier ministre dise avoir accepté cette motion sur un faux entendement de ce que l'Opposition proposait exactement. Je tiens donc à employer mon droit de parole sur cette motion pour dire exactement de quelle façon nous entrevoyons les travaux de cette commission et pour que, par la suite, le premier ministre ne se véhicule pas sur toutes les tribunes, à sa façon coutumière, en tournant les coins en rond, et dise que nous avions pris des engagements que nous ne

respectons pas. Au contraire, aussi bien employer les 20 minutes que me permet ce règlement pour vous expliquer exactement ce que nous entendons par le sens...

M. BOURASSA: M. le Président, question de règlement. On adopte la motion. J'ai mentionné tantôt qu'il pourrait y avoir des manchettes sur le libéralisme du gouvernement. Je ne sais pas si c'est cela qui fait peur au député de Saint-Jacques. Je ne crois pas qu'il y en ait de toute façon.

M. LEGER: M. le Président, sur un point de règlement. Même quand les partis de l'Opposition, à l'Assemblée nationale, sont d'accord pour voter pour en deuxième lecture ou en troisième lecture sur un projet de loi, ils ont quand même le droit de s'exprimer pour dire pourquoi ils sont d'accord sur une motion. Et sur la motion du député de Sauvé et du chef de l'Opposition, le député de Saint-Jacques a le droit de dire pourquoi, quelle est la clarté de la motion et quelles sont les raisons pour lesquelles on voulait avoir telle motion. Et je ne pense pas qu'on peut empêcher un député de s'exprimer...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... sur la motion pour que cela soit bien clair ce sur quoi nous votons.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Pourrais-je rappeler au député de Lafontaine que, jusqu'à ce que cette motion soit adoptée, il n'a pas droit de parole.

M. LEGER: Pour quelle raison? A moins que quelqu'un ne soulève un point de règlement?

M. HARDY: M. le Président, sur la question de règlement. Le député de Lafontaine, même s'il parlait d'une façon irrégulière, n'en avait pas le droit, a raison sur le fond, sauf qu'il faut bien faire remarquer d'une façon évidente que le député de Saint-Jacques aime mieux parler sur une motion totalement de procédure que de parler sur l'article 1 de la loi 22 qui fait du français la langue officielle.

M. LEGER: Je vais le laisser se défendre tout seul, je pense qu'il est capable.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Saint-Jacques sur la motion.

M. CHARRON: M. le Président, je profite de ce débat ouvert sur la motion du chef de l'Opposition pour bien expliquer au chef du gouvernement, à ceux qui, temporairement, l'appuient sur cette loi, de savoir exactement ce à quoi nous nous engageons.

M. BOURASSA: Vous êtes tellement unis dans votre participation.

M. CHARRON: Nous avons proposé que tous les droits de l'Opposition et de tous les membres de l'Assemblée soient intégralement respectés à cette commission élue parce que cette commission élue a pour unique tâche de remplir ce que, traditionnellement, la commission plénière avait comme fonction, celle d'étudier une loi article par article. Ce n'est que dans ce sens pour que la commission élue soit intégralement la copie conforme de la commission plénière, tout en permettant à la Chambre de procéder à autre chose, que nous le faisons.

M. BOURASSA: Une question.

M. CHARRON: Je veux simplement signaler au chef du gouvernement...

M. BOURASSA: D'accord.

M. CHARRON: ... et je voudrais qu'il m'écoute très attentivement pour qu'il ne véhicule pas, à tout bout de champ et sur tous les coins de rues, en engagement que nous n'aurons pas pris. Le fait d'accepter cette motion par le gouvernement ne change en rien, ne change en rien, ne change en rien la stratégie que l'Opposition voudrait elle-même développer.

M. BOURASSA: Vous avez donc peur du chef du gouvernement !

M. CHARRON: Nous allons présenter tous les amendements que nous jugeons essentiel d'apporter à cette loi, et il y en a beaucoup, et il y en a plusieurs parce que, comme la plupart des Québécois qui sont venus à cette table de la commission, nous avons rejeté le principe de ce projet de loi et nous viserons à en faire une loi conforme aux aspirations des Québécois. Je signale même, pour l'intérêt du ministre des Affaires culturelles qui a hâte de se pavaner sur l'article 1 qu'avant même d'entreprendre l'article 1, j'ai trois autres motions préliminaires que j'ai l'intention de suggérer à la commission. Nous allons faire tout le travail que nous entendons faire et tous les députés auront l'occasion d'y participer et ce n'est pas parce que le ministre de l'Education montera dans les rideaux ou que le ministre des Affaires culturelles se fâchera...

M. CLOUTIER: M. le Président, il va nous faire regretter d'essayer de mener la discussion sur un ton serein.

M. CHARRON: Ce n'est pas parce que le ministre...

M. HARDY: II veut absolument qu'on vote contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. CHARRON: Ce n'est pas parce que le ministre de l'Education fait semblant de ne pas comprendre, ce n'est pas parce que le "foreman" des Affaires culturelles s'offusquera inutilement que nous changerons quoi que ce soit à notre stratégie.

M. BOURASSA: C'est encore nous qui allons être accusés de manquer de sérieux !

M. CHARRON: Lorsque nous proposerons un amendement que nous jugeons fondamental quant à l'avenir culturel des Québécois, nous profiterons de tous les droits de parole que nous avons pour le défendre, quelles que soient les objections de l'autre côté, quel que soit le chantage au "filibustering", au manquement d'honneur que nous aurions pris, nous le ferons. Nous sommes venus à cette commission pour étudier un projet de loi...

M. BOURASSA: Vous contredisez votre chef!

M. CHARRON: ... que nous considérons comme absolument irrégulier dans l'histoire politique du Québec et cela ne changera rien. Si le chef de l'Opposition a proposé cette motion au nom de l'Opposition, c'est pour que tous les membres de l'Assemblée nationale, ceux qui ont voté pour comme ceux qui ont voté contre le projet de loi, aient l'occasion de parler selon la tradition même de toutes les commissions parlementaires et selon la tradition de la commission plénière que nous remplaçons ici. Or, que ceci soit, sur la motion du député de Sauvé, un avertissement très clair et très net !

Inutile d'utiliser les députés qui siègent autour de cette commission comme étant des interrupteurs lorsque les députés de l'Opposition auront un amendement à présenter, nous utiliserons tout le temps et toute la mesure possible de nos droits que nous jugerons essentiels à la défense des amendements que nous allons présenter. Cela ne constitue en rien un engagement de la part de l'Opposition à se limiter elle-même à ses droits de parole lorsqu'elle jugera fondamental la défense d'un projet de loi. Que ceci soit clair...

M. BOURASSA: Je peux répondre.

M. CHARRON: ... et que le premier ministre — qui se targue de libéralisme soudain après avoir bousculé la population à la table de cette commission et bousculé l'adoption du projet de loi à l'Assemblée nationale — ne se compte pas sorti du bois.

M. BOURASSA: M. le Président, moi, je continue à parier sur la bonne foi du chef de l'Opposition. Il a dit qu'il voulait une approche sérieuse et j'ai de la difficulté à réconcilier le député de Saint-Jacques avec le député de Sauvé. Je comprends que le député de Saint-Jacques... non, non...

M. MORIN: Je comprends très bien le député de Saint-Jacques.

M. BOURASSA: Je comprends que le député de Saint-Jacques, je ne sais pas s'il était parmi les trois qui l'avaient appuyé lors du caucus pour le choix, mais je veux dire... Je ne sais pas s'il y a...

M. LEGER: Là, vous êtes mal informé, vous êtes réellement mal informé. Contrairement à l'habitude, vous êtes mal informé.

M. BOURASSA: C'est ce que je voulais savoir.

M. LEGER: C'est une façon de s'en sortir.

M. BOURASSA: M. le Président, ce que je veux dire, c'est que l'article 148 —quand le député de Saint-Jacques dit que nous ne suspendons pas le règlement— dit: "Tous les députés ont accès aux commissions, mais ceux qui n'en sont pas membres et les autres personnes doivent obtenir la permission de la commission pour s'y faire entendre". Je ne sais pas si le député de Saint-Jacques pourrait m'écouter. L'article 148 dit que tous les autres députés qui ne sont pas membres doivent obtenir la permission. Or, la motion du chef de l'Opposition a pour effet d'abolir cette prescription de l'article 148.

M. LEGER: Jusqu'à la fin du débat.

M. CHARRON: Et de donner la permission.

M. BOURASSA: D'abolir. Donc, ça veut dire qu'il n'y a pas de restriction à la liberté de parole.

M. LEGER: Jusqu'à la fin du débat.

M. BOURASSA: Je ne vois pas pourquoi le député de Saint-Jacques voudrait — nous donnons de notre côté une liberté de parole illimitée — m'empêcher de dire ce que je veux bien dire à la population, d'interpréter les faits et de dire la vérité telle qu'elle est à la population. Il ne voudrait pas que je dise que nous avons parié sur la bonne foi du chef de l'Opposition pour un débat sérieux en commission plénière. Est-ce que c'est cela qu'il ne voudrait pas que je dise publiquement?

M. MORIN: Ce que le député de Saint-Jacques craint — et là-dessus, je partage ses craintes, à la suite de certaines interventions du premier ministre et du ministre de l'Education — c'est qu'on vienne nous dire par la suite,

dès que nous proposons quelque chose qui ne fait pas l'affaire du gouvernement: Vous aviez promis d'être sérieux, vous n'êtes pas sérieux, etc. Je vois le premier ministre qui sourit dans sa barbe absente. Mais c'est exactement ça qu'il se prépare à nous servir chaque fois que nous ferons un amendement qui lui déplaît. Je tiens à le prévenir que nous n'accepterons pas ces procédés.

M. CLOUTIER: Bien sûr, bien sûr.

M. BOURASSA: J'appuie la motion du chef de l'Opposition, M. le Président.

M. LEGER: En tenant compte de l'intervention où on disait que ce n'est pas le gouvernement qui va déterminer l'interprétation, que l'approche de l'Opposition est sérieuse, la perception, que ce soit sérieux ou pas et qu'il a à la mémoire ce qu'on vient de voter, contrairement à la mémoire du premier ministre qui a fait défaut quand il essayait de nommer le député de Gatineau, il ne se rappelait pas son nom, si le premier ministre se souvient.

M. BOURASSA: Oui, je me souvenais très bien de son nom. C'est à l'Ecole polytechnique, on m'avait demandé dix députés, j'ai donné les noms des dix députés sur les 102.

M. LEGER: Sauf celui de Gatineau.

M. BOURASSA: J'ai donné son nom, c'est faux. D'abord, ce n'est pas pertinent aux débats.

LE PRESIDENT (M. Gratton): De toute façon, il le sait maintenant.

M. LEGER: II va s'en rappeler maintenant qu'il est président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! Est-ce que cette motion de l'honorable chef de l'Opposition est adoptée?

M. HARDY: Adopté.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Adopté.

M. HARDY: Article 1.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Article 1. Le ministre de l'Education.

M. MORIN: M. le Président, le député de Saint-Jacques vient de vous dire qu'il avait trois autres motions préliminaires et je ne voudrais pas qu'on escamote ses motions de la sorte.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je pense qu'il pourra les faire. En fait, je laisse à la commission le soin de décider.

M. MORIN: C'est bien.

LE PRESIDENT (M. Gratton): II est normal, après la deuxième lecture, que la commission commence ses travaux par une discussion générale amorcée par le ministre.

M. MORIN: Nous n'avons même pas les instruments de travail, M. le Président.

M. BOURASSA: Là-dessus, je voudrais dire au chef de l'Opposition — pour rassurer le député de Saint-Jacques — que le point de comparaison pourrait être le débat marathon sur la carte électorale. Il est fort possible qu'on prenne plusieurs jours, peut-être quelques semaines pour discuter.

M. MORIN: Ce n'est pas le même règlement, vous le savez fort bien.

M. CHARRON: Ce n'est pas la même loi, non plus.

M. MORIN: Dans ce temps-là, on pouvait lire la Bible. Aujourd'hui, il faut être pertinent, ce ne sont pas du tout les mêmes circonstances.

M. BOURASSA: On verra!

M. HARDY: M. le Président, le député de Sauvé, comme d'habitude, est totalement mal informé. L'étude de la carte électorale a été faite en vertu du règlement actuel.

Vous êtes dans les pommes.

M. MORIN: Est-ce qu'on peut entendre le député de Saint-Jacques?

M. CHARRON: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: ... j'ai une motion à présenter.

M. HARDY: II est toujours dans les pommes.

M. CHARRON: M. le Président, la plupart des organismes qui sont venus à la table de cette commission au moment où nous les avions convoqués — enfin, ceux qui ont eu le privilège de se faire entendre avant que le gouvernement ne les renvoie chez eux — avaient plusieurs points communs dans leur mémoire, que l'on retrouvait aussi bien chez les anglophones que chez les francophones à l'occasion.

Plusieurs dénonçaient le caractère insuffisant de certaines mesures — nous aurons l'occasion de les reprendre lorsque nous arriverons à ces articles — dont le monde de l'éducation, vous vous en rappelez, M. le Président, qui a fait l'unanimité contre le chapitre de la langue

d'enseignement. Mais ce n'est pas immédiatement ce à quoi nous devrons en venir et ce n'est pas immédiatement là-dessus que nous devrons parler.

Je dirais qu'un des aspects les plus dénoncés du projet de loi, et ce, par des gens qui, quant au fond, quant à la sécurité culturelle des Québécois ou quant à la promotion du français, avaient des positions qui pouvaient être tout à fait divergentes, visait uniquement l'ampleur des pouvoirs réglementaires que se réserve le ministre de l'Education dans ce projet de loi.

Tout le monde, les anglophones comme les francophones — j'entendais encore hier soir le député de Mont-Royal, avant de se prononcer contre le projet de loi, reprendre cet argument que plusieurs de ses commettants lui avaient sans doute signalé et que plusieurs du groupe ethnique auquel il appartient ont eux-mêmes répété à cette table — admet qu'il est inconcevable qu'un projet de loi qui touche les droits fondamentaux des citoyens, tant de la collectivité que des individus qui forment la minorité, puisse laisser autant de portes ouvertes à la discrétion, à l'abus de pouvoir, et aux privilèges en certaines occasions.

M. CLOUTIER: M. le Président, un point de règlement, s'il vous plaît. Je voudrais simplement un éclaircissement. Je ne comprends pas très bien sur quoi parle le député de Saint-Jacques. Est-ce qu'il parle sur l'article 1? Est-ce qu'il fait des commentaires généraux avant de commencer? Ou est-ce qu'il présente une motion comme il l'a laissé entendre? S'il présente une motion comme il l'a laissé entendre, il me semble que la stricte logique lui imposerait de la déposer et ensuite de parler sur sa motion. Mais ce qu'il fait actuellement est un discours. Loin de moi l'idée de l'empêcher de parler, mais je voudrais au moins savoir dans quel cadre il parle; cela me parait essentiel.

M. CHARRON: Vous l'avez entre les mains maintenant.

M. CLOUTIER: Nous ne l'avions pas. Alors mon point de règlement était tout à fait justifié. On présente donc, M. le Président, une motion et le député doit parler sur sa motion. C'est bien cela.

M. CHARRON: C'est ce que je suis en train de faire, M. le Président.

UNE VOIX: Est-ce que le député...

M. CLOUTIER: Est-ce qu'on pourrait lire la motion avant tout, pour que l'on sache à quoi s'en tenir?

Motion de M. Charron

M. CHARRON: La motion dit qu'avant de procéder à l'étude du projet de loi 22, article par article, la commission prenne connaissance de tous les projets de règlements prévus pour la mise en application de la loi. Cette motion vient donc d'une première justification, M. le Président...

M. CLOUTIER: Est-ce qu'elle est recevable?

M. CHARRON: ... qui repose dans les remarques que nous ont faites les citoyens que nous avons entendus. Anglophones comme francophones se sont dits incapables de se prononcer sur la portée réelle de certains articles parce que certains craignaient que toutes les phrases de "néanmoins", "toutefois", "quoique" et surtout de "sauf dans la mesure prévue au règlement," qu'on retrouve à une dizaine de reprises dans le projet de loi, pouvaient signifier exactement le contraire.

Il est arrivé, M. le Président, que certains organismes disaient avoir l'assurance que les règlements que soumettrait le ministre de l'Education en vertu des pouvoirs que lui conférait la loi, iraient absolument à l'encontre du sens de l'article et constitueraient des amoindrissements et des restrictions à la portée réelle de l'article voté par le législateur. D'autres, à cause du "sauf dans la mesure prévue par le règlement" pouvaient pleinement soutenir la thèse contraire.

Le député de Sainte-Anne et moi-même, M. le Président, opposés tous deux que nous sommes au projet de loi, avons participé à l'occasion, à une émission radiophonique au réseau anglais de Radio-Canada où, tous les deux, très honnêtement et de façon très justifiée, nous pouvions prendre un article qui laissait beaucoup de place au pouvoir réglementaire du ministre et craindre tous les deux le pire, pour les deux groupes que nous représentions, et tout aussi justifiés que nous étions.

Les citoyens qui sont venus à cette table de la commission ont souvent signalé et se sont souvent interrogés sur la portée réelle d'un article. Je vous donne un exemple, M. le Président, sans entrer dans les détails.

Prenons simplement l'exemple de l'affichage. L'article 42, je crois, du projet de loi nous dit que toutes les affiches pourront être françaises, ou à la fois en anglais et en français, sauf dans la mesure prévue aux règlements. Lorsque nous arriverons à cet article...

M. BOURASSA: Cest la même chose dans l'autre projet.

M. CHARRON: ... que nous aurons à le mesurer, à en mesurer la portée réelle pour nous prononcer ou, même si c'est le désir de l'Opposition — je crois bien que ce le sera — d'apporter des amendements en faveur du français, sur quoi nous prononcerons-nous? Quelle porte ouverte s'est réservée le ministre? Qu'a-t-il l'intention de faire, avant que nous lui permettions, à partir de cet article, d'émettre des règlements?

M. le Président, c'est un exemple que vous jugerez marginal, celui de l'affichage. Mais je vous rappelle simplement que, dans le domaine archicontesté du projet de loi, celui de la langue d'enseignement, on fait aussi appel au pouvoir réglementaire. C'est encore, à plusieurs endroits, la discrétion du ministre. A l'article 51 on dit: ... sauf dans la mesure prévue ;aux règlements, les tests pédagogiques, et patati, patata. Tests pédagogiques qui ont été condamnés par le Conseil supérieur de l'éducation, M. le Président.

M. SEGUIN: M. le Président, je ne voudrais pas interrompre le député de Saint-Jacques, mais je demanderais qu'on s'en tienne surtout à une règle de procédure, ici. Il fait référence à certains articles. Il doit parler sur sa motion, strictement sur sa motion, à ce moment-ci et non pas sur des articles, car nous reviendrons sur ces articles.

M. CHARRON: M. le Président...

M. SEGUIN: Je ne voudrais pas qu'il y ait des répétitions. Je veux le signaler en toute gentillesse.

M. CHARRON: ... j'admets que...

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement sur la recevabilité de la motion du député de Saint-Jacques. Je fonde mon rappel au règlement sur l'article 154 de notre règlement, non pas l'ancien règlement, pour le député de Sauvé, l'actuel.

L'article 154 du règlement, qui régie présen-sentement nos travaux, dit: "En commission plénière ou élus après la deuxième lecture, on ne peut discuter que les détails d'un projet de loi et il ne peut y avoir audition publique que devant une commission..." Ce qui est important, c'est qu'on ne peut discuter que des détails d'un projet de loi.

M. MORIN: Les règlements, ce ne sont pas détails?

M. HARDY: M. le Président, franchement, avec le député de Sauvé, on n'est pas au bout de la surprise.

Le député de Sauvé assimile les règlements, c'est-à-dire les arrêtés en conseil adoptés par le cabinet, à une loi adoptée par l'Assemblée nationale, deux pouvoirs totalement distincts, l'exécutif et le législatif. Une loi est le produit du législatif et les règlements des arrêtés en conseil sont le produit d'une autre autorité qui s'appelle le conseil exécutif et le lieutenant-gouverneur en conseil, deux choses totalement différentes, aussi dissemblables que le jour et la nuit.

M. MORIN: Et qui ne se complètent pas?

M. HARDY: Qui se complètent, mais qui sont totalement différentes au point de départ.

M. MORIN: Qui n'ont rien à avoir l'une avec l'autre?

M. HARDY: M. le Président, si on interprète l'article 154 de notre règlement en fonction de la Loi de la Législature, en fonction de la Loi de l'exécutif et en fonction de l'ensemble de nos institutions parlementaires, il est bien clair que, quand le législateur a dit "d'un projet de loi" il n'a pas parlé des règlements. Si le législateur avait voulu parler des règlements en même temps que de la loi, il l'aurait dit. L'article 154 est d'une clarté évidente que seul le député de Sauvé ne voit pas pour le moment et je vous demanderais de déclarer irrecevable la motion du député de Saint-Jacques.

M. BOURASSA: M. le Président, il y a une raison de procédure, une raison de fond. Je ne crois pas qu'on puisse s'attendre à ce que aujourd'hui, le ministre de l'Education puisse avoir tous les règlements.

M. CHARRON: Est-ce que vous parlez sur la recevabilité de la motion en vertu de notre règlement ou sur le fond?

M. BOURASSA: Mais disons que...

M. CHARRON: Si vous parlez sur le fond, je vous prierai d'intervenir par la suite, lorsque nous aurons débattu ensemble la recevabilité de cette motion.

M.BOURASSA: ... la motion paraft irrecevable à sa face même. Je pense que sur le fond également, car je ne crois pas qu'on puisse exiger du ministre de l'Education de déposer à la première journée de la commission... De toute manière, le ministre de l'Education a tout simplement dit qu'à l'occasion de certains articles, il pourrait faire connaître le contenu ou la teneur des règlements, mais certainement pas de déposer tous les règlements alors même qu'on commence la discussion en commission plénière.

Elle est irrecevable quant à sa forme et, quant au fond, elle est irréaliste.

M. LEGER: M. le Président, sur le point de règlement. Si on interprète l'article 154, d'une clarté éblouissante pour le député de Terrebonne...

M. HARDY: Pas pour vous sûrement.

M. LEGER: ... pas de la même façon, parce qu'on n'a pas le même filtre pour l'examiner. En commission, après la deuxième lecture, on ne peut étudier que les détails d'un projet de loi.

Les détails d'un projet de loi, cela veut dire les articles. La plupart des articles du projet de loi qu'on est en train de commencer à étudier parlent de règlements. Comment voulez-vous qu'on puisse étudier d'une façon normale des articles d'un projet de loi si, à chaque fois qu'on y fait référence, on ne les connaît pas? M. le Président, on n'est pas habitué de voter d'une façon aveugle, sans connaître sur quoi on vote comme le font la plupart des députés du Parti ministériel qui ne savent pas sur quoi ils votent, sauf les ministres qui ont fait le projet de loi.

Nous voulons discuter en connaissance de cause. Je pense que c'est tout à fait et recevable et logique pour un parti d'Opposition, qui a à discuter de tous les articles qui font référence à des règlements pour compléter les articles au point de vue de la clarté, que nous les ayons avant de commencer un projet de loi. M. le Président, c'est absolument et logique et recevable selon l'article 154.

M. BOURASSA: Mais la procédure habituelle, lorsque nous parviendrons à ces articles, c'est de faire un sous-amendement ou un amendement pour répondre.

M. LEGER: Est-ce que le premier ministre veut dire par là que, quand on arrivera à l'article X, qui fait mention d'un règlement, on pourra demander au ministre de déposer le règlement qui concerne cet article?

M. BOURASSA: Non.

M. HARDY: Vous pouvez le demander.

M. BOURASSA: Je suggère la procédure...

M. LEGER: Voyons donc! On veut travailler sérieusement — et ce n'est pas sérieux — on veut avoir les règlements pour savoir à quoi s'en tenir — laissez-moi finir, M. le Président — de façon que, quand on discutera de tous les articles, nous sachions d'avance ce sur quoi on se sent impliqué par chacun des articles parce que les règlements, quant à la plupart des articles, nous touchent réellement. L'article 154 le dit bien: Les détails d'un projet de loi. Qu'est-ce qu'il y a de plus de détails que les règlements qui sont mentionnés dans les articles du projet de loi?

M. BOURASSA: M. le Président,...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs ! Sur la question de la recevabilité de la motion.

M. SAINT-JACQUES: Une petite minute, M. le Président, juste pour signaler avant de référer le ministre des Affaires culturelles à l'article 151, qu'il aurait pu également citer: "Les commissions élues prennent en considération les matières qui sont de leur compétence. Elles étudient spécialement: A) les crédits; B) les projets de loi et les règlements qu'ils prévoient; C) tout autre matière que l'Assemblée peut, en tout temps, leur référer".

Quant à son deuxième argument, à savoir que nous ne devrions nous en tenir qu'à l'étude de détails d'un projet de loi et qu'à cette fin, toutes les motions préliminaires, qui visent aux conditions de travail dans lesquelles nous étudierons les détails d'un projet de loi, sont irrecevables, font que la précédente motion, celle qui visait à savoir dans quelles conditions de droit de parole nous allions étudier les détails du projet de loi, était également irrecevable, et qu'en ce sens le ministre des Affaires culturelles ne l'a pas soulevé. Des motions préliminaires, qui visent simplement à doter les membres de l'Opposition et du gouvernement, de tous les documents et de tous les renseignements dont ils ont besoin pour ensuite s'attaquer, comme le dit l'article 154, aux détails d'un projet de loi, sont parfaitement justifiés dans ce genre de débat.

M. HARDY: M. le Président, en vertu de l'article 97, le député de Saint-Jacques, je ne lui en veux pas, mais il m'a totalement mal interprété. Je n'ai pas dit qu'en vertu de l'article 154 une commission élue ne pouvait pas étudier des règlements, au contraire, très fréquemment — il y a même des lois qui le prévoient — à la suite de l'adoption d'arrêtés en conseil par le cabinet, lesdits règlements peuvent être déférés à une commission élue. A ce moment, c'est un mandat bien précis qu'une commission élue a d'étudier des règlements.

Actuellement, nous siégeons en vertu de l'article 154. L'article que vous venez de citer, c'est l'article général qui décrit tous les pouvoirs d'une commission. C'est sûr qu'une commission élue a le pouvoir d'étudier des règlements, mais actuellement, nous avons un mandat bien précis, c'est un mandat en vertu de l'article 154, qui est celui d'étudier une loi après la deuxième lecture. Nous pouvons avoir d'autres mandats en commission élue, mais nous sommes à l'article 154. Je continue à soutenir que la motion du député de Saint-Jacques est irrégulière à cause de l'article 154.

Plus tard, quand la présente loi sera adoptée et que le conseil des ministres, le lieutenant-gouverneur en conseil adoptera des règlements, ces règlements pourront être déposés à la commission de l'éducation, des affaires culturelles, et des communications. Ces règlements pourront être étudiés en leur temps, mais pas actuellement, jamais! Je défie le spécialiste en droit constitutionnel, qui est le député de Sauvé, de me souligner un seul cas, dans le système parlementaire britannique, où une commission parlementaire a étudié simultanément une loi et des règlements. D'ailleurs, ce sera tout simplement à titre d'éclairage que nous pourrions avoir des règlements, parce qu'aucun règlement ne peut être adopté valablement tant que la loi n'est pas adoptée.

C'est la loi qui est la source des règlements. M. CHARRON: Cest un éclairage...

M. HARDY: Tant que la loi n'est pas adoptée, on ne peut pas avoir de règlement.

M. CHARRON: C'est cet éclairage qu'on veut...

M. HARDY: Ce serait tout simplement une espèce d'éclairage que l'on pourrait avoir, pas plus.

M. CHARRON: C'est cela qu'on veut. C'est ce qu'on demande.

M. MORIN: Cest exactement ce que nous voulons, M. le Président.

M. CHARRON: On ne veut pas se prononcer sur les règlements. On veut les avoir pour savoir la portée réelle des articles.

M. MORIN: Je voudrais...

M. CHARRON: On a le droit de le demander.

M. MORIN: Je voudrais, très brièvement — parce que je pense que nous allons nous en remettre à la présidence— je voudrais, très brièvement, dire que le sens de l'article 154, ce n'est pas d'exclure les "détails" des lois que constituent les règlements qui sont faits en vertu de chaque article. Le sens de l'article 154, c'est d'exclure, en commission élue, des débats sur les principes, parce que cela, hypothétiquement, a été réglé en seconde lecture. C'est cela, le sens de l'article 154. M. le Président, je pense que nous en avons assez dit. Nous allons nous en remettre à votre sagesse.

M. CLOUTIER: J'ai quand même le droit de dire quelques mots...

M. CHARRON: Certainement.

M. CLOUTIER: ... sur cette motion, non pour prolonger le débat...

M. HARDY: Sur la recevabilité. M. CLOUTIER: Sur la recevabilité...

M. HARDY: Ce n'est pas décidé encore. La recevabilité n'est pas décidée.

M. CLOUTIER: Ah! Ce n'est pas encore décidé? Alors, dans ce cas, le député de...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Ma décision...

M. LEGER: ... pas d'objection.

M. CLOUTIER: Non, non. Moi, je ne cherche pas à prolonger le débat. Bien au contraire, j'ai hâte d'arriver au fond. J'ai eu l'impression que c'était la raison pour laquelle on se réunissait.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Messieurs, je considère que la motion du député de Saint-Jacques est recevable et que, si le ministre de l'Education désire ne pas s'y prêter, il pourra expliquer pour quelle raison dans son intervention sur la motion et pourra demander le vote à cet effet. J'invite donc le député de Saint-Jacques à terminer son intervention sur sa motion.

M. CHARRON: Merci, M. le Président. Vous savez que je n'aurais jamais présenté cette motion si j'avais eu le moindre doute qu'elle eût été irrecevable.

M. BOURASSA: Un à un. Ce matin, vous avez perdu. Là, vous gagnez. Un à un.

M. CHARRON: Je me suis donc plié, M. le Président, à l'intervention du ministre des Affaires culturelles, et je voudrais reprendre l'argumentation.

La première, M. le Président, venait de l'expérience que tous les membres de cette commission élue et permanente ont connue pendant quatre semaines: Cest le nombre de rappels, les rappels incessants que nous ont faits tous les témoins que nous avions invités nous-mêmes, selon lesquels ils avaient de la difficulté, eux-mêmes, comme citoyens, à peser la portée réelle de cette loi, parce qu'il y a trop de discrétion et trop d'appels laissés à la ' réglementation. A ce point que je vous signalais, M. le Président, que le député de Sainte-Anne et moi-même, même adversaires du projet de loi, mais d'un point de vue différent, avons très légitimement soutenu des propos différents sur le même article, parce que tout allait se remettre au pouvoir réglementaire. Le député de Sainte-Anne soutenait que les bureaucrates allaient créer tel et tel aspect de réglementation qui allaient élargir la portée réelle de l'article en faveur du français, alors que, de mon côté, je soutenais qu'une réglementation par un gouvernement semblable allait seulement restreindre la portée de l'affirmation de l'article.

C'est notre travail, maintenant, en cette commission élue. C'est article par article que nous étudierons le projet de loi. Puisqu'il est vrai, non seulement soutenu par des membres de l'Assemblée qui auront à se prononcer sur ces articles, mais par des citoyens eux-mêmes qui sont venus à la table de la commission, qu'un même article avec une porte ouverte à la réglementation pouvait donner lieu à des interprétations contradictoires, il faut absolument, avant que vous ne nous disiez et appeliez le vote sur chacun des articles et, en particulier, sur ceux qui comportent ces appels à la réglementation, que nous en connaissions la portée réelle. Est-ce que le député d'Outre-

mont, par exemple, lorsqu'il sera... Il n'est pas membre en règle de la commission. Même s'il a beaucoup participé au projet de loi 22, il n'est pas membre en règle de la commission. Mais lorsque le ministre des Affaires culturelles, membre en règle de la commission, aura à se prononcer sur un article, M. le Président, il faut que, comme législateur, il ait entre les mains toutes les justifications de son vote. Il faut qu'il sache exactement quelle écluse il se trouve à ouvrir en faveur du français, ou en faveur du bilinguisme que l'on retrouve dans les autres articles du projet de loi, en faveur d'une amélioration et d'une étendue de la portée réelle de la loi, ou si la réglementation finira par dire: Excepté à tel endroit, sauf dans tel cas, cela ne vise pas telles entreprises, cela ne s'adressera pas à telle clientèle, cela ne concernera pas telle municipalité. Si nous savons, M. le Président, que la réglementation va en ce sens, alors nous allons prendre une position différente quant à l'article sur le projet de loi.

Cest pour le respect du législateur à se prononcer, de façon tout informée qu'il soit, et parce qu'aucun gouvernement ne doit refuser au législateur de se prononcer en toute connaissance de cause sur la portée réelle de chaque article que j'en suis venu à présenter cette motion.

Vous me direz: Ce n'est pas la première fois où on fait appel à la réglementation. Mais je soutiendrai qu'il y a eu très peu de lois qui y ont fait appel d'une façon aussi démesurée et, plus que cela, il y a très peu de lois aussi importantes qui aient fait appel à autant de pouvoirs réglementaires.

M. BOURASSA: Vous ne connaissez rien au droit français.

M. CHARRON: Vous me le prouverez. Vous me ferez la démonstration du droit français, tout à l'heure. Je suis ici en train de faire la démonstration des trous de votre loi et, pour le moment, c'est ce que j'ai à faire. Si vous voulez me donner un cours de droit français, vous le ferez.

M. BOURASSA: C'est assez subjectif comme point de départ.

M. LEGER: Tous les trous se rejoignent.

M. CHARRON: Ce qu'il est très important de savoir, c'est que ce gouvernement, manifestement, n'a pas eu la confiance qu'il espérait avoir sur ce projet de loi. Il a l'occasion de la rétablir s'il nous dit la portée réelle de la réglementation, mais je pense que, dès les dix premiers articles, nous aurons déjà l'occasion d'avoir entre les mains un article qui fait appel à la réglementation et qui nous incitera à nous poser des questions quant à la portée réelle de ces articles. C'est donc parce que je soutiens cela que je transporte ici à la table de la commission une remarque qui a été faite, de façon presque unanime par tous les groupes. C'est même à partir de ces pouvoirs réglementaires qu'une opposition anglophone s'est trouvée justifiée de se présenter à la table de la commission. C'est cette discrétion qu'ils ont dénoncée, à grand renfort de tambours et que certains de leurs députés ont transmise jusqu'à l'époque du vote hier soir, c'est cet aspect discrétionnaire qui leur apparaissait l'aspect le plus odieux du projet de loi, que nous devons éliminer, si nous ne l'avons pas fait en deuxième lecture, au moment où nous entreprenons, article par article, l'étude du projet de loi. C'est pourquoi je crois que la commission devrait, en adoptant ma proposition, exiger du ministre de l'Education qu'il dépose sur la table de la commission la réglementation afférente et innombrable qui se trouve liée au texte du projet de loi actuel.

La deuxième argumentation ou le deuxième argument, je le tiendrai du ministre de l'Education lui-même. Vous-même, M. le Président, vous me mettrez en garde d'utiliser trop souvent des engagements pris par le ministre de l'Education. C'est vrai. Cet homme a eu l'habitude de la contradiction facile, mais nous devons prendre comme responsabilité, tant que le premier ministre lui fera confiance, que ses engagements sont ceux du gouvernement. En ce sens, à combien de reprises, M. le Président, vous qui avez présidé aux travaux de cette commission, lorsque nous en étions à la première étape des auditions, avez-vous vu le ministre de l'Education engager une conversation avec des témoins pour, finalement, se rebiffer, refuser de poursuivre plus loin, sous prétexte, à l'époque — c'était la justification qu'il soutenait — que, de toute façon, tout cela serait éclairé et que tout cela serait beaucoup plus clair lorsque nous en viendrions à étudier le projet de loi article par article? A des témoins qui soutenaient une interprétation...

M. BOURASSA: Si on peut commencer!

M. CHARRON: ... de l'article et qui disaient aux membres de cette commission: Nous craignons la portée réelle de cet article lorsque ce même gouvernement qui a rédigé ce projet de loi utilisera le pouvoir réglementaire, le ministre de l'Education répondait: Tout cela disparaîtra lorsque nous entreprendrons l'étude du projet de loi article par article. C'est donc, s'il est possible d'en recevoir de ce ministre, un engagement que nous croyons avoir vu déposer sur la table de la commission au moment de l'étude avec les citoyens du Québec de la portée de ce projet de loi et que nous lui demandons simplement de respecter par cette motion aujourd'hui.

Nous jugeons essentiel que le ministre de l'Education réponde à cet engagement qu'il a pris ou, s'il ne l'a pas pris de façon ferme comme il s'apprêtera, probablement, à nous le

dire tout à l'heure, il l'a pris, probablement, de façon suffisamment sous-entendue pour que des citoyens rebroussent chemin, à notre invitation d'ailleurs, et se contentent d'attendre cette étape que nous entreprenons aujourd'hui de l'étude, article par article, du projet de loi, pour avoir une vue de la portée réelle de ce projet de loi.

Finalement, puis-je soutenir que le dépôt de cette réglementation pourrait sensiblement alléger la tâche énorme de travail que tous les législateurs et que tous les membres de cette commission, à cette table, sentent déjà, dès la première journée de la séance de cette commission?

LE PRESIDENT (M.. Gratton): Le ministre de l'Education sur la motion.

M. CLOUTIER: M. le Président, le député de Saint-Jacques m'a prêté certains propos qu'il a interprétés à sa façon, selon son habitude. H est exact que j'ai, à maintes reprises, dit qu'au cours de la discussion article par article, j'apporterais tous les éclaircissements nécessaires en ce qui concernait la réglementation. J'ai également toujours ajouté — et je suggère qu'on se réfère au journal des Débats — que je n'allais pas, à ce moment-là, déposer le texte final des règlements, mais que je ferais état de leur contenu et que, si j'en arrivais à déposer quelque chose, je déposerais ce que j'ai appelé les principes directeurs. Ceci est clair et c'est exactement ce que j'ai l'intention de faire. Je n'ai pas l'intention de le faire maintenant. Je le ferai lorsque nous arriverons aux articles pertinents parce que les principes directeurs dont je ferai état exigeront, à ce moment, des explications. Rien n'impose au parrain d'un projet de loi de déposer en même temps ses règlements. En fait, les lois sont en général votées et les règlements viennent ensuite déterminer les procédures administratives qui permettent de les appliquer. C'est ainsi que les choses se passent et c'est ainsi que les choses se passeront pour ce projet de loi, comme pour les autres projets de loi.

Il n'est pas question de créer de précédent et il n'est pas question non plus de tomber dans le piège que tend actuellement l'Opposition, parce que je commence à m'interroger sérieusement. Nous voulons passer au fond du débat depuis le début et voici que nous en sommes à la deuxième motion et j'ai l'impression qu'il doit y en avoir encore une ou deux. En revanche, s'il y a, dans la réserve du député de Saint-Jacques, une motion qui concerne les amendements, je peux lui dire tout de suite que j'ai l'intention, comme je m'y suis engagé, de déposer, aujourd'hui même, les projets d'amendement. Je dis bien qu'il s'agit de projets d'amendements parce que c'est au moment où nous discuterons article par article que les amendements seront proposés à la commission. Mais, de manière à informer les membres de la commission, dès que nous aurons commencé la discussion de l'article 1, j'avais l'intention, et je l'ai toujours, de proposer le dépôt de ces projets d'amendement, en précisant d'ailleurs qu'il peut y avoir en cours de route d'autres amendements. Ce sont les amendements dont j'ai fait état dans mon discours de deuxième lecture.

Je cherche, par tous les moyens, à éclairer les membres de la commission et l'opinion publique en ce qui concerne la portée de certains articles. Mais encore faut-il le faire en tenant compte de nos traditions juridiques et également faut-il le faire en tenant compte de l'économie de ce projet de loi.

Il y a deux catégories de règlements. Une catégorie de règlements qui apporte certaines précisions; je pense à la réglementation afférente à l'affichage et à l'étiquetage, et une autre catégorie de règlement qui définit des procédures. Je pense à la réglementation sur les programmes de francisation qui sont en rapport avec les articles 32, 33 et 34, ainsi que la réglementation qui touche au chapitre d'enseignement. C'est au moment où nous arriverons à ces articles et à ce chapitre que nous pourrons faire état des procédures que nous avons l'intention d'utiliser. Cependant, qu'il soit bien compris — et ceci est valable pour tous les projets de loi — que les règlements viendront plus tard dans leur forme définitive. A ce moment, ils seront publiés dans la Gazette officielle et les citoyens pourront proposer leurs recommandations ou leurs critiques, comme il se doit. Mais nous allons très certainement suivre les procédures habituelles.

Par conséquent, qu'on ne fasse pas dire au gouvernement que le gouvernement ne cherche pas à apporter l'information adéquate; au contraire, il ne souhaite qu'à le faire et c'est la raison pour laquelle j'engage l'Opposition à commencer enfin la discussion de l'article 1. Je répète qu'il est absolument inutile d'en arriver avec une nouvelle motion dilatoire —il n'y a pas d'autre expression — en ce qui concerne les amendements parce que les amendements, je suis prêt à les déposer aussitôt que nous aurons commencé. Ceci a toujours été mon intention. Merci, M. le Président.

M. MORIN: M. le Président, nous prenons acte quant au dépôt des amendements, mais, à nos yeux, il est encore plus important d'avoir la réglementation.

M. BOURASSA: Mais pour le code des professions — le chef de l'Opposition n'était pas présent, mais le député de Lafontaine y était — il y a eu une réglementation très importante et, à ma connaissance, cela n'avait pas été exigé par l'Opposition. La réglementation, comme cela se fait normalement, a suivi l'adoption de la loi.

M. MORIN: Cette fois-ci, ce n'est pas seulement l'Opposition qui réclame les règlements, ce sont tous ceux qui ont comparu devant cette commission lors des séances des

semaines passées qui ont réclamé le contenu de la réglementation.

M. CLOUTIER: Mais oui, c'est ça. Mais c'est pour ça que nous sommes ici, pour en discuter mais en discuter d'une certaine façon. Et c'est la façon que nous allons adopter.

M. MORIN: Nous sommes là pour en discuter. Que ne les déposez-vous?

M. CLOUTIER: Parce que je n'ai pas l'intention de déposer les règlements tels quels. Ce serait un précédent et ce serait d'ailleurs une erreur administrative. Je ferai état des principes directeurs de ces réglementations, les réglementations qui touchent les programmes de francisation, comme la réglementation qui touche le chapitre de l'enseignement vont prendre plusieurs mois avant d'être élaborés. Ceci est parfaitement normal. Une loi est passée, ensuite, l'application de la loi est liée aux procédures qui sont définies par des réglementations. C'est ainsi... est-ce que je peux terminer mes explications?

M. MORIN: Certainement, allez-y.

M. CLOUTIER: C'est ainsi qu'il faudra procéder. En revanche, je n'ai pas d'objection, si ceci peut satisfaire l'Opposition, plus tard, même avant qu'on en arrive — mais une fois que nous aurons fait démarrer l'étude de ce projet de loi— aux articles afférents, d'ici peut-être une journée ou deux, je n'ai pas d'objection à déposer des documents faisant état des principes directeurs. Mais certainement pas des textes de règlements.

M. MORIN: M. le Président, dois-je comprendre que le ministre a déposé ce projet de loi dans lequel il est constamment fait renvoi à des règlements sans connaître d'avance le contenu de la réglementation?

M. CLOUTIER: C'est toujours ainsi que les choses se passent et là encore...

M. MORIN: Ce n'est pas toujours ainsi.

M. CLOUTIER: ... le député de Sauvé ne cessera pas d'étonner ses collègues juristes et légistes par ce que je n'ose qualifier. Nous étions...

M. MORIN: Je ferai remarquer que le président m'a donné raison tout à l'heure sur le dernier point de droit que le ministre des Affaires culturelles avait disputé avec beaucoup de talent.

M. CLOUTIER: Grosse victoire par rapport aux nombreux écueils.

M. BOURASSA: J'ai eu la même victoire ce matin et je ne me prétends pas un juriste.

M. CLOUTIER: M. le Président, je ne sais pas si les juristes parmi nous...

M. MORIN: Est-ce que le ministre de la Justice l'est, lui?

M. CHOQUETTE: Depuis longtemps.

M. MORIN: En général, c'est un peu une histoire entre copains, cette nomination, n'est-ce pas?

M. CHOQUETTE: Ah non! Les plus brillants...

UNE VOIX: Est-ce que le chef de l'Opposition l'est?

M. MORIN: Je voudrais...

M. BOURASSA: II faudrait... le chef de l'Opposition à l'occasion de son anniversaire.

M. CLOUTIER: II aura besoin de montrer une connaissance un peu plus précise...

M. MORIN: Je voudrais rassurer le premier ministre...

M. CLOUTIER: ... de la juridiction.

M. MORIN: ... comme j'ai quitté le Barreau depuis quinze ans, je ne suis pas éligible, donc, il ne pourra me faire...

M. CHOQUETTE: C'était inutile de nous dire ça, ça paraît.

M. MORIN: Je ne suis pas éligible et l'on ne pourra point me gratifier d'un titre espérant sans doute quelque chose en retour.

M. CLOUTIER: Je pense que les juristes parmi nous pourront peut-être expliquer ce que c'est qu'un règlement et ce que ça vient ajouter à un article de la loi. Mais je crois que si on se rapporte aux explications que j'ai données, les choses sont claires, il est bien évident que nous avons depuis longtemps des principes directeurs qui nous permettent d'appliquer certains articles mais que le texte définitif des règlements n'est pas, dans sa totalité, absolument arrêté et le serait-il que je ne le déposerais pas tel quel. Parce que je ne voudrais justement pas créer de précédent. Ce que nous devons voter, c'est une loi, article par article, et ce ne sont pas des règlements, je n'ai pas l'intention de me prêter à ce genre de discussion.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Lafontaine, sur la motion du député de Saint-Jacques.

M. LEGER: M. le Président, si je me rappelle bien, le ministre nous avait dit au cours de l'étude des mémoires, qu'il serait intraitable sur

le principe mais très souple sur les modalités. Le principe du projet de loi est passé, d'une façon intraitable, par la guillotine et maintenant, nous sommes rendus à l'étude article par article, sous une certaine forme de modalité. Nous espérons, par cette motion, que le ministre nous démontrera la souplesse qu'il a devant les modalités. Pour lui rafraîchir la mémoire, si le ministre a condescendu à accepter d'entendre les groupes intermédiaires, les personnes, les organismes qui désiraient présenter leur appréciation de ce projet de loi, il avait certainement l'intention, du moins je l'espère, d'en tenir compte.

Une des raisons majeures pour lesquelles le député de Saint-Jacques demande le dépôt de ces règlements, c'est justement parce qu'il y a deux aspects qui sont ressortis des mémoires qui nous ont été présentés. Cela concerne l'évaluation de la clarté de ce projet de loi d'abord. Sur l'évaluation de la clarté et de la rigueur du projet de loi, nous avons eu des mémoires qui en ont indiqué les défaillances.

Nous avons jusqu'ici, dans les mémoires qui nous ont été présentés, 13 p.c. des mémoires, autant anglophones que francophones, qui ont exprimé l'avis que ce projet de loi était imprécis et prêtait à diverses interprétations à certains endroits.

Il y avait, parmi ceux-ci, six mémoires francophones et trois mémoires anglophones. C'est donc dire que, déjà, sur diverses interprétations à certains articles de la loi, 8 p.c. des mémoires francophones s'étaient prononcés sur le manque de clarté à certains endroits et 18 p.c. des mémoires anglophones faisaient de même. Ce qui fait, M. le Président, que, déjà, dans l'ensemble des mémoires, 13 p.c. des groupes qui se sont présentés devant nous ont exprimé l'avis que le projet de loi était imprécis et prêtait à diverses interprétations à certains endroits.

Plus que cela, M. le Président, d'autres mémoires sont allés plus loin. Ils trouvaient que ce projet de loi était imprécis et prêtait à diverses interprétations de façon générale. Là-dessus, M. le Président, 66 mémoires francophones ont déclaré, à l'intérieur de leurs mémoires, que cela prêtait à des interprétations diverses sur l'ensemble du projet de loi; 13 mémoires anglophones sont arrivés à la même conclusion, pour un total de 82 mémoires.

Cela veut donc dire que la clarté, la rigueur du projet de loi souffraient énormément et que les 87 p.c. des mémoires francophones qui ont exprimé cet avis et les 76 p.c. des mémoires anglophones du même avis démontrent jusqu'à quel point la motion du député de Saint-Jacques était à point en demandant au ministre de déposer, à ce stade-ci de nos délibérations, les règlements pour apporter la clarté nécessaire afin de pouvoir évaluer ce que veut dire ce projet de loi.

C'est donc dire, M. le Président, que 81 p.c. des mémoires dictaient, nous faisaient montre qu'il était impossible, à la lecture de ce projet de loi, d'en arriver à connaître toutes les subtilités que seul le ministre de l'Education, jusqu'ici semble avoir voulu nous montrer.

D'un autre côté, M. le Président, les mémoires ont aussi présenté un deuxième aspect. C'est l'évaluation des pouvoirs discrétionnaires des personnes responsables. Je pense que vous ne serez pas surpris d'entendre que, dans ces mémoires, près de 46 mémoires ont conclu que le projet de loi laissait trop de place à l'arbitraire. C'est donc dire que, du côté des mémoires francophones, il y en avait 28 qui ont déclaré que le projet de loi, à cause de sa réglementation, laissait trop de place à l'arbitraire. Et 14 mémoires anglophones concluaient la même chose, M. le Président. Ce qui veut dire que 54 p.c. des mémoires francophones et 78 p.c. des mémoires anglophones arrivaient à la même conclusion pour des motifs certainement différents.

Du côté des mémoires francophones, certains autres en sont arrivés à la conclusion que le projet de loi ouvrait la porte au favoritisme. C'est donc dire que seule la réglementation qui nous serait déposée aujourd'hui pourrait faire mentir cette affirmation que nous a apportée l'étude des mémoires qui nous ont été présentés à cette commission parlementaire.

Il y a cinq mémoires francophones qui sont arrivés à cette conclusion et deux mémoires anglophones. Il y a également deux mémoires bilingues — on ne peut pas statuer s'ils étaient francophones ou anglophones — ce qui fait un total de neuf mémoires qui ont dit qu'on ouvrait la porte au favoritisme. Ce qui équivaut à dire que 10 p.c. des mémoires francophones et 11 p.c. des mémoires anglophones, soit 12 p.c. du total, trouvaient qu'on ouvrait la porte au favoritisme.

Finalement, M. le Président, il y avait un autre groupe de mémoires qui sont arrivés à la conclusion suivante: II y avait trop de règlements. Dix-neuf mémoires francophones ont conclu qu'il y avait trop de règlements et que l'évaluation des pouvoirs discrétionnaires des personnes responsables était inacceptable; deux mémoires anglophones en sont arrivés à la même conclusion, pour un total de vingt et un mémoires.

Ce qui veut dire, M. le Président, que 36 p.c. des mémoires francophones et 11 p.c. des mémoires anglophones, pour un total de 28 p.c. de tous les mémoires, arrivaient à cette conclusion.

Si on constate qu'un total de 52 mémoires francophones et 18 mémoires anglophones arrivaient à la conclusion qu'il y avait trop de pouvoirs discrétionnaires, d'un côté, et que, d'un autre côté, la clarté de ce projet de loi était tellement peu accessible au commun des mortels et même aux spécialistes, puisque 95 p.c. des mémoires touchaient l'imprécision des articles de loi et que 94 p.c. des mémoires anglophones arrivaient avec la même conclu-

sion, nous pouvons conclure immédiatement que si les cadres intermédiaires, ceux qui sont appelés à étudier avec la plupart du temps des moyens supérieurs aux moyens que le commun des mortels peut avoir devant des projets de loi concluent avec les moyens qu'ils avaient que le projet de loi manquait de clarté et de rigueur et que, d'un autre côté, il y avait trop de pouvoirs discrétionnaires, on ne peut que conclure que la motion du député de Saint-Jacques qui demande le dépôt de la réglementation doit être prise sérieusement en considération par le ministre et, à ce stade-ci de la discussion. En effet, ce n'est pas quand le ministre sera prêt à la déposer que nous allons, nous de l'Opposition, qui voulons et qui avons accepté de discuter sérieusement de ce projet de loi, ce n'est pas à un autre stade que le stade actuel que nous pouvons réellement discuter sérieusement sans les règlements. C'est à ce stade-ci seulement que nous pouvons réellement discuter de l'implication de chacun des articles de ce projet de loi, que nous pouvons réellement déterminer si nous allons voter pour ou contre tel article de la loi et c'est seulement avec l'éclairage des règlements que nous pouvons savoir sur quoi nous votons.

Que le ministre se rappelle et que le premier ministre se rappelle aussi la réunion que nous avons eue quand...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Lafontaine a terminé?

M. LEGER: Non, M. le Président, j'étais en train de chercher un mot qui m'a échappé. Le Barreau et la Chambre de commerce sont venus présenter leur interprétation sur la façon dont le gouvernement de plus en plus se dirige dans son rôle de législateur. Il laisse de plus en plus à l'exécutif plutôt qu'au législatif la responsabilité, le soin d'établir la loi et le fonctionnement de la loi au Québec.

On ne peut pas dire que la Chambre de commerce et le Barreau ne sont pas des organismes sérieux. Eux-mêmes en sont venus à la conclusion qu'il était impossible de continuer dans cette direction, qu'il fallait nécessairement qu'il y ait un joyeux coup de barre de la part du gouvernement pour minimiser, diminuer rapidement les pouvoirs discrétionnaires donnés à l'exécutif et faire davantage pour redorer l'image du pouvoir législatif et du rôle des parlementaires en leur donnant l'occasion d'être ceux qui déterminent le contenu des lois. Quand nous voyons que le contenu des lois peut être totalement changé par le pouvoir discrétionnaire et le manque de clarté de ce projet de loi, les arguments présentés par tous ces organismes, le ministre ne peut pas les dédaigner du revers de la main.

Il doit tenir compte de ces organismes qui sont venus s'exprimer ici à la demande même des partis de l'Opposition et du gouvernement lui-même, parce qu'il est impensable que le gouvernement s'imagine adopter des projets de loi durant la période des vacances pendant que les Québécois sont absents, car ces groupes et ces intermédiaires ont pris le temps, même en période de vacances, de venir durant la période d'été présenter leur version...

M. BOURASSA: Ils travaillent...

M. LEGER: ... leur façon de percevoir cette loi. Ceux qu'on appelle les corps intermédiaires, ceux qu'on appelle les faiseurs d'opinions, ceux qui sont là pour interpréter les actions législatives auprès de la population, qui éclairent la population, sont même des groupes que le premier ministre avait qualifiés, au lendemain de l'élection du 29 octobre 1973, comme étant des groupes dont il devait tenir compte, parce que la sous-représentation de l'Opposition était un obstacle à un rôle parlementaire bien précis, bien défini, revalorisé. Il devait tenir compte de ces groupes intermédiaires. Ils sont venus s'exprimer pour la moitié d'entre eux. J'espère que le ministre a pris la peine de lire l'autre moitié des mémoires qui ont été déposés, mais dont on n'a pas pu obtenir de ces personnes l'éclairage, les explications, les directions qu'on voulait donner par ces mémoires. Nous n'avons pas pu les avoir. J'espère que le ministre a eu l'occasion de lire ces autres mémoires et s'il n'a pas voulu les écouter en ce qui concerne le principe — parce qu'il s'était engagé à être intraitable au niveau de la deuxième lecture qui discutait du principe — au niveau de la modalité, il avait dit qu'il était pour être souple.

Nous sommes maintenant rendus au niveau de la modalité, c'est-à-dire des différents articles qui feront que le principe doit être respecté ou non. C'est à ce stade que nous devons avoir la réglementation. Justement parce que ce projet de loi est complètement différent dans son ampleur, dans ses conséquences et dans les objectifs qu'un gouvernement doit atteindre dans sa politique de souveraineté culturelle, c'est à ce stade que le premier ministre devrait déposer ces règlements. Comme de raison, il se peut fort bien —et c'est cela qui me surprend énormément — que les règlements ne soient pas prêts.

Comment voulez-vous, M. le Président, que nous puissions juger et qualifier un projet de loi, lui donner les qualificatifs voulus de notre acceptation même de certains articles, si, à ce stade, le ministre a eu l'audace de présenter un projet de loi qui laisse tellement de place à la réglementation et dont les règlements ne sont pas prêts? Nous doutons du sérieux du projet de loi du ministre, et même du ministre lui-même de nous présenter un projet de loi sans avoir les règlements. Si les règlements sont prêts, le ministre n'a pas le droit, à ce stade, de ne pas les présenter à l'Opposition, de façon que nous puissions discuter d'une façon sérieuse et d'une façon approfondie ce projet de loi.

Même si nous étions opposés au principe du projet de loi, nous avons accepté de venir en commission parlementaire et nous voulons avoir, nous, de l'Opposition les outils nécessaires essentiels à un travail sérieux que nous cdmmande la population du Québec à ce stade de nos délibérations.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre de la Justice sur la motion du député de Saint-Jacques.

M. CHOQUETTE: M. le Président, je dois diverger d'opinion avec le député de Lafontaine sur les représentations qui ont été faites ici à l'Assemblée nationale par deux organismes éminents, le Barreau et la Chambre de commerce. Lorsque le député de Lafontaine affirme que le Barreau et la Chambre de commerce ont, ni plus ni moins, demandé l'abolition du pouvoir réglementaire ou du pouvoir d'adopter de la législation déléguée...

M. LEGER: Je voudrais quand même me permettre une petite parenthèse. Je n'ai pas dit l'abolition. J'ai dit la diminution de plus en plus marquée du pouvoir exécutif.

M. CHOQUETTE: Bon, en tout cas. M. LEGER: Ce n'est pas la même chose.

M. CHOQUETTE: L'abolition ou la réduca-tion du pouvoir réglementaire, tel qu'on le trouve...

M. MORIN: M. le Président, si je dis que je vais "abolir" le ministère de la Justice, ce n'est pas la même chose...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Laissez le ministre...

M. MORIN: ... que de dire que je vais le "réduire".

M. CHOQUETTE: Je ne vous interromps pas quand vous faites de longs discours ennuyeux.

M. MORIN: Soyez précis. Faites honneur à votre formation McGillienne.

M. CHOQUETTE: Quand le Barreau et la Chambre de commerce se sont présentés devant nous et que nous les avons reçus avec beaucoup d'amabilité, n'est-ce pas — j'ai remarqué que les séances n'ont pas été trop longues, lorsque nous avons reçu ces organismes — le Barreau et la Chambre de commerce ne sont pas venu nous faire des représentations sur l'existence du pouvoir réglementaire comme tel. Parce que tout le monde admet que, pour gouverner d'une façon adéquate dans le monde moderne, il est absolument nécessaire de déléguer à l'exécutif un certain pouvoir réglementaire.

Ce que le Barreau et la Chambre de commerce nous ont demandé, c'est que l'étude de la réglementation, avant son adoption par le lieutenant-gouverneur en conseil ou par un ministre —si le pouvoir est délégué à un ministre — que cette étude se fasse en particulier par un comité de légistes et non pas par l'Opposition, contrairement à ce qu'affirment le député de Lafontaine et nos collègues d'en face. Ils n'ont pas demandé, M. le Président, que le lieutenant-gouverneur en conseil ou le ministre soient obligés de marcher sous les fourches caudines de l'Opposition, parce que ces organismes ont encore un minimum de bon sens...

M. LEGER: ... enfourcher le mauvais cheval.

M. CHOQUETTE: ... et savent placer où se trouve le gouvernement et où se trouve le pouvoir législatif. Ils ont demandé, par contre, qu'après l'adoption de la réglementation ou du pouvoir législatif délégué, il y ait possiblement l'institution d'une commission de la Chambre pour examiner ce que le lieutenant-gouverneur en conseil avait pu faire de son pouvoir réglementaire. A ce point de vue, je ne mets pas en doute l'opportunité, pour l'Assemblée nationale, d'étudier en temps et lieu l'institution d'une commission ou de diverses commissions pour étudier l'utilisation du pouvoir réglementaire.

Par conséquent, quand on demande... La production...

M. MORIN: Seulement...

M. CHOQUETTE: M. le Président, j'invoque le règlement. J'en ai assez de me faire interrompre par ce professeur qui n'a jamais plaidé une cause devant les tribunaux.

M. MORIN: Ce n'est pas vrai. J'ai plaidé plus de causes que le ministre.

M. HARDY: Depuis 15 ans.

M. CHOQUETTE: M. le Président, quand l'Opposition demande au ministre de l'Education de produire sa réglementation avant d'aborder l'étude du projet de loi, elle fait comme d'habitude. Elle met la charrue devant les boeufs, et ceci traduit comme d'habitude son envie d'être sur les banquettes ministérielles plutôt que dans l'Opposition, où elle restera pendant peut-être un siècle. Avec le genre de stratégie négative...

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est très particulier au débat...

M. CHOQUETTE: ... et qui empêche le progrès du Québec et que réprouve l'immense majorité de la population, le Parti québécois risque de disparaître complètement à la prochaine élection.

M. LEGER: Voulez-vous parier?

M. MORIN: Ne faites pas mentir le Barreau. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHOQUETTE: Je dis donc, M. le Président...

M. MORIN: Vous ne prenez que certaines recommandations du Barreau...

M. CHOQUETTE: Je faisais une analogie, M. le Président, entre le fait que l'Opposition voudrait gouverner à la place du gouvernement, et ce n'est pas sa place. D'autre part, M. le Président, si on trouve que le pouvoir réglementaire réservé au lieutenant-gouverneur en conseil, ou encore au ministre de l'Education, est trop considérable dans le projet de loi, dans certains articles, parce qu'on ne peut pas dire que tous les articles comportent une délégation de pouvoirs au lieutenant-gouverneur en conseil ou au ministre, mais si on trouve que la part laissée à la discrétion ministérielle est trop grande, on pourra critiquer chacun des articles en question, et on pourra même, du côté de l'Opposition, ce qui serait une opposition constructive, proposer des amendements de façon à resserrer les textes et de façon à éviter des éléments imprévus qui pourraient résulter de l'adoption ultérieure de règlements. Rien n'empêche, à ce point de vue, l'Opposition de remplir pleinement son rôle.

J'ai écouté avec intérêt l'intervention du ministre de l'Education tout à l'heure, il ne s'est pas défilé pour dire que lorsqu'on arriverait à des articles qui lui laissaient discrétion ou qui confiaient un pouvoir réglementaire au lieutenant-gouverneur en conseil, il n'indiquerait pas la direction qu'il entend adopter. Le ministre de l'Education l'a dit bien clairement. Il a dit que, lorsqu'on arriverait à ces articles, il donnerait les grands principes ou, du moins, sa philosophie ou ses principes en matière de réglementation pour chaque cas en particulier. Je pense que l'Opposition devrait se trouver suffisamment rassurée sur les intentions du ministre et du gouvernement.

M. le Président, je termine en disant qu'il n'y a pas de raison que la motion "de l'Opposition retarde les travaux de cette commission parlementaire, parce que, comme le dit avec beaucoup d'à-propos le ministre des Affaires culturelles, cela n'est pas un mandat qui a été confié à la commission que d'étudier la réglementation. Le mandat reçu par la commission élue de l'éducation, c'est d'étudier les articles du projet de loi. Alors, le ministre des Affaires culturelles avait tout à fait raison de soulever la question de recevabilité comme étant fatale à la motion de l'Opposition.

M. MORIN: Vous plaidiez sur la recevabilité?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: Non, c'est réglé. Il concluait.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que cette motion du député de Saint-Jacques est adoptée?

M. LESSARD: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saguenay.

M. LESSARD: D'abord, sans avoir fait une recherche exhaustive sur différents projets de loi qui ont pu être adoptés au cours des années antérieures, je dois quand même répondre à l'argumentation du ministre de l'Education qui affirmait que jamais, au cours de l'étude d'un projet de loi, on avait déposé les règlements en même temps que nous avions fait l'étude de ce projet de loi.

Je voudrais rappeler au ministre de l'Education un précédent qui a existé pendant l'administration du gouvernement libéral en 1960. Le 15 décembre 1960, l'Assemblée nationale avait à se prononcer sur la loi instituant l'assurance-hospitalisation. Quand nous allons aux Statuts refondus de 1960-61, au chapitre 78, nous constatons, justement, en annexe de ce projet de loi, soit le projet de loi instituant l'assurance-hospitalisation, qu'on y avait inclus les règlements.

Or, ce n'est certes pas la première fois que l'Opposition demande qu'on dépose les règlements avant d'étudier un projet de loi. Je dois dire que, la semaine dernière, nous avons eu l'occasion d'étudier un autre projet de loi, en commission plénière, à l'Assemblée nationale, soit le projet de loi 31. Or, un certain nombre de députés libéraux se sont élevés, dont le whip du parti et le député de Rimouski, M. Saint-Hilaire, contre le ministre de l'Agriculture parce que ces députés, à l'instar de l'Opposition, affirmaient tout simplement qu'il était extrêmement difficile de pouvoir étudier dans son principe même, un projet de loi, alors que ce projet de loi faisait référence dans quantité de ses articles, à des règlements.

Comment voulez-vous que nous, de l'Opposition, puissions accepter des projets de loi importants, quand les règlements sont aussi extrêmement importants et que ces règlements nous permettront de juger si ce projet de loi peut être efficacement appliqué ou non efficacement appliqué?

Je comprends l'argumentation du ministre de la Justice lorsqu'il dit qu'il faut établir un certain équilibre, équilibre dont parlait le ministre, par exemple, dans son discours de deuxième lecture, entre les droits individuels et les droits collectifs.

Il y a aussi un équilibre entre l'initiative de l'exécutif, en ce qui concerne les lois, et l'initiative de l'exécutif en ce qui concerne les règlements, mais nous sommes rendus à un

point où nous ne sommes plus capables d'étudier un projet de loi sans que cela fasse référence à quantité de règlements.

Or, pour l'Opposition, c'est justement signer tout simplement un chèque en blanc et c'est dans ce sens que les membres du Barreau protestaient contre l'érosion du pouvoir législatif.

Il faut quand même avoir un certain équilibre. Actuellement, nous votons quantité de lois-cadres et, par la suite, nous cédons nos responsabilités, en ce qui concerne la réglementation, au pouvoir exécutif.

Je comprends qu'il importe, comme le ministre de l'Agriculture nous l'a promis, par exemple, dans sa loi 31, que ces règlements puissent être étudiés en commission parlementaire. Je dis que déjà c'est un avantage que nous avons par rapport aux années antérieures. Mais lorsqu'il s'agit d'un projet de loi de l'importance du projet de loi 22, qui, comme je le disais, fait référence, dans de nombreux articles que je citerai tout à l'heure, aux règlements qui devront tout simplement être concrétisés ou élaborés par le ministre de l'Education, il importe, à ce stade-ci, d'avoir la déposition de ces règlements.

Ou bien ces règlements sont prêts actuellement, et si ces règlements sont prêts, pourquoi le ministre de l'Education ne les déposerait-il pas aujourd'hui?

Cela permettrait d'avoir une discussion beaucoup plus saine, d'avoir une discussion beaucoup plus rationnelle et peut-être enlever à l'Opposition certaines réticences concernant ce projet de loi 22 ou concernant, en particulier, certains articles de ce projet de loi. Nous ne sommes pas les premiers à demander la déposition de ces règlements. J'ai écouté, en deuxième lecture, certains discours de députés libéraux, en particulier certains discours de députés anglophones qui affirmaient qu'ils ne pouvaient pas être d'accord sur ce projet de loi tant et aussi longtemps qu'ils ne pourraient être informés des règlements. C'est donc dire, M. le Président, l'importance d'obtenir les règlements pour pouvoir juger de ce projet de loi.

D'ailleurs, même les organismes qui sont venus présenter des mémoires en commission parlementaire ont fait référence à ces règlements et ont affirmé qu'il était difficile de pouvoir discuter de ce projet de loi ou de pouvoir appuyer ce projet de loi ou de pouvoir réfuter ce projet de loi tant et aussi longtemps qu'on ne connaîtrait pas les règlements. Il s'agit de voir le nombre d'articles du projet de loi qui font référence à ces règlements pour comprendre pourquoi il est juste et important pour l'Opposition d'obtenir la déposition de ces règlements. Si ces règlements ne sont pas prêts, je pense que ce serait assez étrange de la part du ministre de l'Education de nous présenter un projet de loi dans lequel on fait référence à des règlements alors que ces règlements ne sont même pas actuellement préparés. Je pense que cela démontrerait une certaine irresponsabilité et je doute que le ministre de l'Education soit aussi responsable. Je le dis, j'en doute.

Je pense que les règlements qui vont avec cette loi 22 s'intègrent à cette loi et il est absolument impossible, à mon sens, de proposer une loi comme celle-là si les règlements ne sont pas prêts, si les règlements ne sont pas préparés. Par exemple, je voudrais vous citer l'article 14 où on dit que nul ne peut être admis ou promu à une fonction administrative dans l'administration publique s'il n'a de la langue officielle une connaissance appropriée à l'emploi qu'il postule. On dit: Cette connaissance doit être prouvée suivant les normes fixées par les règlements adoptés à cet égard par le lieutenant-gouverneur en conseil. Comment, M. le Président, pouvons-nous, de l'Opposition, accepter cet article alors que cet article est basé sur l'importance, sur la valeur de la réglementation qui va être faite? Cette réglementation, M. le Président, peut très bien être discriminatoire vis-à-vis de certaines personnes et ce serait signer un chèque en blanc au ministre de l'Education que d'accepter cet article sans que nous soyons au courant des règlements auxquels on fait référence en vertu de cet article. Même, M. le Président, on ajoute: Les fonctions susdites sont déterminées par les règlements visés au deuxième alinéa. Encore là, toute l'application de cette loi est fonction des règlements qui seront préparés par le ministre de l'Education. Pourquoi veut-on cacher à l'Opposition officielle ces règlements? Pourquoi veut-on, non seulement à l'Opposition officielle, mais à l'ensemble des députés libéraux, cacher ces règlements? Je suis assuré que, si on avait un vote libre autour de cette table, quantité de députés libéraux, comme certains l'on fait lors de l'étude du bill 31, accepteraient la proposition du député de Saint-Jacques, comme le député de Rimouski l'a fait lors de la discussion du bill 31 alors que le député de Rimouski a exigé le dépôt des règlements avant de pouvoir se prononcer sur ce projet de loi. Le "whip" du Parti libéral, le député des Iles-de-la-Madeleine, avait lui-même exigé la déposition des règlements.

Pourtant, pour ceux qui connaissent le projet de loi 31, il n'est certainement pas de l'importance de celui du projet de loi 22, les conséquences justement de la réglementation du projet de loi 31 ne sont pas aussi importantes que les conséquences de la réglementation du projet de loi 22. Si on continue, M. le Président, l'article 21 concerne les corps professionnels, on y lit: "Les corps professionnels ne peuvent délivrer de permis en vertu du code des professions à moins que les intéressés n'aient de la langue officielle une connaissance appropriée à l'exercice de la profession envisagée.

Cette connaissance doit être prouvée suivant les normes fixées par les règlements adoptés à cet égard par le lieutenant-gouverneur en conseil". Encore là, toute la valeur de l'article 21 est basé sur la valeur des règlements.

On a déjà cité — je pense que c'est le député

de Lafontaine — un exemple d'un examen qu'on faisait passer aux conducteurs de taxi, examen qui, en fait, était de l'enfantillage à un moment donné, qui était vraiment ridicule, où il s'agissait de dire yes ou de dire oui ou de dire non. Bien, cet article 21 est encore basé sur la valeur de la réglementation qu'on va appliquer. Si la réglementation est très faible, si les exigences sont très minimes, si on demande des choses aussi simples que: Quel est votre nom? Ce n'est certainement pas l'objectif, je l'espère, du projet de loi 22. A peu près n'importe qui va pouvoir obtenir un permis pour pratiquer une profession.

Comment voulez-vous que nous puissions voter sur ce projet de loi, voter sur cet article en particulier, quand nous ne savons même pas quel sera l'examen qui sera exigé, quelle sera la réglementation qu'on élaborera en relation avec l'article 22? Encore là, c'est un chèque en blanc qu'on doit signer au ministre de l'Education, on doit lui faire confiance et on doit dire: Le ministre de l'Education, semble-t-il, doit être assez responsable pour faire une réglementation qui permette de savoir si la personne en question a une véritable connaissance de l'usage de la langue française.

Comme parlementaire, je dis que c'est notre responsabilité de voir à ce que cette réglementation permette véritablement de faire du français la langue officielle au Québec, permette véritablement d'exiger que des personnes, qui demandent un permis de pratique auprès de corps professionnels, aient une connaissance d'usage de la langue française. Nous ne pouvons pas laisser, au ministre seul, le soin de décider quel sera cet examen. Quant à nous, à ce stade-ci, je pense que nous ne pouvons pas ou qu'il nous est difficile de juger de ce projet de loi, de juger de certains articles de ce projet de loi si nous n'avons pas le dépôt de la réglementation.

Maintenant, si on continue à l'article 32, article fort important, où on lit: "Le lieutenant-gouverneur en conseil pourvoit, par règlement, à l'émission de certificats en faveur des entreprises attestant qu'elles ont adopté, qu'elles appliquent un programme de francisation conformément aux articles 35 et 47". Voici le certificat honoraire, M. le Président. La société de bon parler français, à savoir la Régie de la langue française va émettre des certificats honoraires de bon parler aux grosses compagnies multinationales, comme Rayonier Que-bec. Encore là, comment pouvons-nous juger de cet article? Non, M. le Président, on ne peut pas accepter de laisser au ministre seul le soin de décider quels seront les règlements. On ne peut pas signer un chèque en blanc au ministre de l'Education lorsqu'il s'agit d'une loi aussi importante et je pense qu'au cours des discours de deuxième lecture de plusieurs députés libéraux, en particulier les députés anglophones, eh bien, on a exigé à maintes reprises le dépôt de ces règlements ou du moins, a-t-on précisé qu'on ne pouvait pas voter pour ce projet de loi tant et aussi longtemps qu'on n'aurait pas la connaissance de ces règlements.

Ceci a été le cas je pense du député de Sainte-Anne, M. Springate. Cela a été le cas aussi du député de Mont-Royal, M. Ciaccia. D'où l'importance de cette réglementation, M. le Président. Encore-là, l'article 32 où on fait référence à certaines réglementations, ne nous permet pas de dire que cette loi est bonne ou que cet article est bon, étant donné que nous ne connaissons pas les règlements.

Si on se réfère à l'article 33, le lieutenant-gouverneur en conseil peut, par règlement, exiger que les entreprises possèdent le certificat visé à l'article 32. A l'article 32, on parle d'un certificat honoraire. De quelle façon décernera-t-on ce certificat? Quels critères déterminera-t-on pour décerner ces certificats? Je sais que, dans la loi, il y a un certain nombre de critères qui seront déterminés, mais il y en a certes d'autres, puisqu'on parle d'une réglementation.

On peut, en vertu de l'article 33, aller jusqu'à exiger par réglementation, encore une fois, que ces compagnies multinationales aient un certificat tel que visé à l'article 32. Je ne veux pas aller sur le fond, M. le Président, mais nous voici à quémander auprès des compagnies multinationales la reconnaissance de la langue française en leur décernant un beau petit certificat annuel venant probablement de la Régie de la langue française.

L'article 34: "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut aussi, par règlement, décréter que soient préférées à leurs concurrents les entreprises titulaires du certificat prévu à l'article 32 à l'occasion de l'attribution, par l'administration publique, de contrats d'achat, de service, de location ou de travaux publics. "Les règlements déterminent dans quels cas et dans quelle mesure cette préférence peut être accordée". C'est un article fort important, M. le Président, qui peut aller jusqu'à la discrimination de certaines compagnies.

Je pense qu'il est juste et normal que les compagnies québécoises ou qui font affaires à l'intérieur du territoire québécois, connaissent au moins quelles seront les exigences pour être favorisées, soit dans les contrats, soit dans l'attribution, par l'administration publique, de contrats d'achat, de service, de location ou de travaux publics. Mais, encore là, comment évaluer l'efficacité de l'article 34? Comment, nous de l'Opposition, pouvons-nous dire que cet article peut être efficace ou non? Je pense que même le ministre des Communications a parlé de l'importance de la réglementation pour rendre efficace ce projet de loi ou, comme on l'a laissé entendre, le laisser tel qu'il est actuellement, inefficace.

Comment, nous de l'Opposition, pouvons-nous nous engager dans l'étude d'un projet de loi d'une telle importance lorsque, à plusieurs reprises — et je n'ai pas complètement cité tous

les articles — dans les articles de ce projet de loi, on fait référence à une réglementation.

Je suis bien d'accord qu'il faille établir un juste équilibre entre le pouvoir exécutif et le pouvoir parlementaire. Mais de là à céder toutes nos responsabilités, nous ne marchons plus. Lorsqu'il s'agit d'un projet de loi d'une telle importance...

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est fini...

M. LESSARD: ... à délaisser complètement nos responsabilités au profit du ministre de l'Education, nous ne marchons plus, M. le Président. Je suis assuré que beaucoup de députés libéraux, en particulier les députés anglophones se posent aussi des questions et s'interrogent sur cette réglementation.

Je termine M. le Président, en disant que je suis assuré que, si le ministre acceptait la motion du député de Saint-Jacques, quantité de discussions au cours de cette commission parlementaire pourraient probablement être diminuées, en tout cas, cette discussion pourra certainement être plus rationnelle. C'est l'esprit de la motion du député de Saint-Jacques.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que la commission est maintenant prête à se prononcer sur la motion?

M. MORIN: Je vous demande la parole, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition officielle.

M. MORIN: M. le Président...

M. HARDY: Ils veulent retarder la commission.

M. CLOUTIER: C'est cela, ils ne veulent pas discuter de la loi.

M. MORIN: M. le Président, je voudrais qu'il soit bien clair que les interventions que nous faisons ont pour but d'obtenir le dépôt de la réglementation. Si le ministre la dépose immédiatement, il n'y a plus de problème, mais tant qu'il ne l'aura pas déposée, nous allons insister pour qu'il le fasse.

M. CLOUTIER: C'est une question ou non? M. MORIN: Je voudrais...

M. CLOUTIER: Ce n'est pas une question que vous me posez?

M. MORIN: Je voulais vous demander si vous allez la déposer.

M. CLOUTIER: Mais je me suis expliqué clairement et je vous conseille de relire mon intervention, qui est consignée au journal des Débats. C'est exactement dans ce cadre que j'ai l'intention de déposer les principes directeurs au moment opportun, de même que j'ai l'intention de déposer les amendements que j'ai sous les yeux. Je n'ai pas besoin de motion pour cela, lorsque nous aurons commencé l'étude de l'article 1. Si vous voulez multiplier les motions dilatoires, vous serez jugés en temps et lieu.

M. BEDARD (Chicoutimi): Quel est le moment opportun pour vous? C'est là qu'on ne s'entend pas.

M. CLOUTIER: Comme je l'ai expliqué, M. le Président — et je ne voudrais pas prendre le temps de cette commission — le moment opportun, c'est lorsque nous arriverons à la discussion des articles pertinents, pour une raison très simple. C'est qu'il serait extrêmement grave de créer un précédent sur le plan juridique en déposant les textes finaux des règlements qui peuvent être changés. Nous allons déposer les principes directeurs et c'est ce à quoi je me suis engagé — et rien de plus — au cours de la commission. Dites-vous que lorsque je dis quelque chose, je pèse mes mots. C'est en pesant mes mots que j'ai répondu aux organismes qui se sont présentés ici que je m'arrangerais pour donner toutes les explications pertinentes, lorsque nous arriverons aux articles, et que je ferais état des principes directeurs et du cheminement. Mais ce serait la négation des droits et de la responsabilité de l'exécutif si je procédais autrement. Nous n'allons certainement pas tomber dans le piège que cherche maladroitement à nous faire l'Opposition.

M. BEDARD (Chicoutimi): Si vous me permettez, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! J'ai reconnu le chef de l'Opposition officielle.

M. MORIN: M. le Président, le 28 juin dernier, le ministre de l'Education déclarait dans cette même commission à des comparants ce qui suit et je cite textuellement: "J'ai déjà indiqué que la réglementation, si elle n'est pas déposée dans tous ses détails, sera très certainement discutée à fond, lors de l'étude du projet de loi article par article en commission élue. H ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté une fois que la loi sera acceptée".

M. CLOUTIER: C'est ce que j'ai dit et je le maintiens.

M. MORIN: Alors...

M. BEDARD (Chicoutimi): Déposez-la.

M. CLOUTIER: Non, au moment que j'ai dit, parce que, déposer maintenant une régie-

mentation, alors que ce n'est pas la raison d'être de cette commission, créerait un précédent qui n'est pas souhaitable. En revance, l'exécutif...

M. MORIN: M. le Président...

M. CLOUTIER: ... qui a la responsabilité de faire des règlements qui ont pour but d'apporter des précisions ou d'indiquer des procédures afférentes à un projet de loi doit conserver cette prérogative.

M. MORIN: M. le ministre...

M. BEDARD (Chicoutimi): Mais, M. le ministre, la discussion qu'on a présentement n'est pas futile parce que, justement, on discute sur les critères que vous nous apportez pour déterminer...

M. CLOUTIER: Soyez sérieux ! Vous n'avez pas besoin de la réglementation avant que l'on recommence l'étude article par article. Vous ne cherchez qu'à perdre du temps.

M. BEDARD (Chicoutimi): Si vous me permettez une question.

M. HARDY: II n'y a pas de règlement sur l'article 1.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est sur les critères sur lesquels vous vous basez pour arriver à déterminer que le moment opportun est celui...

M. CLOUTIER: Commençons. J'ai ici tous les amendements.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce que je n'admets pas, c'est que vous semblez dire que le moment opportun est celui décidé par le ministre de l'Education.

M. CLOUTIER: Le moment opportun, c'est celui décidé par le ministre, c'est exact.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est faux à la base.

M. LEGER: C'est de la dictature.

M. CLOUTIER: Le ministre a la responsabilité du projet de loi.

M. LESSARD: Question de règlement.

UNE VOIX: Est-ce qu'on va l'étudier ensemble?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs ! A l'ordre !

M. BEDARD (Chicoutimi): II a peut-être la responsabilité du projet mais non pas de la discussion...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît ! A l'ordre !

M. BEDARD (Chicoutimi): ... du projet de loi, par exemple. Cela est une autre affaire.

UNE VOIX: Cela est de la dictature. UNE VOIX: Pas du tout.

M. CLOUTIER: De la dictature! Messieurs les journalistes, soyons sérieux!

M. LEGER: ... discutez ensemble et c'est le ministre qui décidera quand il va la déposer.

M. CLOUTIER: Si c'était de la dictature, est-ce qu'on vous aurait permis de faire l'obstruction que vous êtes en train de faire?

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, mais...

M. CLOUTIER: ... sachant très bien que nous ne pouvions avoir qu'une confiance limitée...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. CLOUTIER: ... dans les engagements qu'a pris le chef de l'Opposition ainsi que le député de Saint-Jacques.

M. VEILLEUX: M. le Président, question de règlement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jean sur une question de règlement.

M. VEILLEUX: Je me suis absenté quelques instants de la commission parlementaire, mais il y en a un qui parlait au début. Cela était le député de Lafontaine. Il a épuisé son temps sur la motion. Je vous demanderais de rappeler le député de Lafontaine à l'ordre.

M. LESSARD: J'ai une question de règlement.

M. LEGER: J'ai une question de règlement.

M. VEILLEUX: II est en train de discuter de la motion, devant nous, avec le ministre. Il n'a pas d'affaire à parler. Il a déjà parlé...

M. LESSARD: M. le Président, question de règlement.

M. VEILLEUX: Qu'on l'applique le règlement.

M. LEGER: Est-ce que le député de Terrebonne pourrait donner une leçon de politesse au député de Saint-Jean?

M. VEILLEUX: Hs veulent qu'on applique le règlement, mais, M. le Président, appliquez-le autant pour eux que pour nous.

M. LESSARD: M. le Président, sur la question de règlement soulevée par le député de Saint-Jean, je pense que le député de Lafontaine, malgré le fait qu'il ait dépassé ses 20 minutes — il n'y a pas de chronomètre — sur la motion du député de Saint-Jacques, peut, lorsqu'il y a des accrocs au règlement, soulever une question de règlement et sur toute question de règlement, nous avons la possibilité de nous exprimer tant et aussi longtemps que vous n'appliquez pas l'article 43.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Encore faut-il que je reconnaisse quelque député que ce soit...

M. LESSARD: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... sur une question de règlement. Jusqu'à maintenant, je n'ai reconnu que le chef de l'Opposition officielle qui doit parler sur la motion du député de Saint-Jacques.

M. LESSARD: M. le Président, je regrette. Le député de Chicoutimi a soulevé une question de règlement et, en vertu des articles 39 et suivants, vous avez...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je n'ai pas entendu.

M. LESSARD: ... la responsabilité de donner la parole au député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est une question de privilège dans le sens suivant: Si on a suivi l'argumentation du ministre de l'Education tout à l'heure, concernant le dépôt de cette réglementation, il a dit très carrément: J'en informerai les journalistes en temps et lieu. Je comprends qu'il doive informer les journalistes — attendez, laissez-moi finir ma question de privilège, si vous permettez — en temps et lieu, mais je crois que c'est un privilège, surtout pour les membres de la commission qui agissent ici en tant que législateurs d'être informés préalablement des règlements que le ministre veut déposer ou veut faire reconnaître et qui peuvent les aider dans l'élaboration, dans l'analyse et dans la manière de juger le projet de loi 22. On sait une chose: Les règlements peuvent...

M. TARDIF: Y a-t-il une question de privilège là-dedans?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Quant à la partie question de privilège, les faits ont été rétablis, je pense bien qu'une question de privilège ne doit pas soulever de débat. J'invite immédiatement le chef de l'Opposition officielle à faire son intervention sur la motion.

M. MORIN: M. le Président, il se produit ce que je craignais. Dès que nous insistons pour gagner un point, et ce point nous paraît capital — c'est pour cela que nous le soulevons au début de ces débats— cela devient de l'obstruction. M. le ministre, le plus simple, ce serait que vous déposiez les règlements. Vous nous avez dit, le 28 juin, que les règlements seraient très certainement discutés à fond lors de l'étude du projet de loi. Or, pour qu'ils soient discutés à fond, nous insistons pour les avoir au départ, parce que — si M. le ministre me le permet — une loi fait un tout avec ses règlements. J'imagine qu'avec l'esprit cartésien qui le caractérise, le ministre n'ira pas nous dire que les règlements n'ont rien à voir ou peu à voir avec la loi. Cela forme un tout synthétique.

M. CLOUTIER: Ce que j'irai vous dire, c'est que l'exécutif a une responsabilité. Des règlements ne doivent pas déborder une loi, ils doivent venir la préciser en indiquant les cheminements nécessaires, les procédures nécessaires. Il a toujours été de la prérogative de l'exécutif — c'est d'ailleurs essentiel pour pouvoir gouverner — que les règlements relèvent de sa compétence. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas l'intention et de je ne le ferai pas, vous aurez beau faire tous les discours que vous voudrez, je n'ai absolument pas l'intention de déposer devant cette commission, dont ce n'est pas le mandat, le texte final des règlements quels qu'ils soient. En revanche, de manière à informer l'opinion publique, informer la commission, comme je l'ai toujours dit, j'ai l'intention d'en discuter à fond, d'apporter tous les éclaircissements nécessaires et même de déposer ce que j'appelle les principes directeurs de chacune des réglementations les plus importantes. C'est clair, précis. Maintenant, continuez.

M. LEGER: Regrettable.

M. MORIN: M. le ministre, je regrette que vous preniez cette attitude, parce que je me vois...

M. LEGER: C'est la modalité du ministre.

M. MORIN: ... dans l'obligation de vous dire que le procédé n'est pas très démocratique. Je ne pensais pas avoir l'occasion, si tôt, de soulever cette importante question de principe devant la commission. Elle a d'ailleurs été soulevée déjà, à plusieurs reprises, récemment, notamment par le Barreau et la Chambre de commerce. Tout à l'heure, le ministre de la Justice a fait allusion justement au mémoire du Barreau, mais il n'en a extrait que les passages qui faisaient son affaire.

Je voudrais peut-être commencer par citer le verdict que le Barreau porte sur le pouvoir réglementaire au Québec, dont le bill 22, je crois, est la plus éclatante illustration que nous ayons eue jusqu'à maintenant.

Le Barreau nous dit ceci, à propos du pouvoir réglementaire québécois: "D y a très souvent une abdication du pouvoir de l'Assemblée nationale en faveur du pouvoir exécutif, par un transport du contenu même qui devrait figurer dans la loi au sein des règlements qui, eux, ne sont pas soumis au contrôle des députés et au contrôle de l'Assemblée nationale en tant qu'organes législatifs". Et le Barreau continue: "II s'agit donc d'un accroc important à la conception usuelle du système démocratique".

Vous voyez, M. le ministre, que ce n'est pas un mince principe qui est en cause. Je vous prierais de me laisser terminer...

M. CLOUTIER: C'est que vous me prenez à parti. Adressez-vous au président. Parce que si vous me posez des questions, je vais répondre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: Je ne vous pose pas de question pour l'instant, M. le ministre. Pour l'instant, j'explique les objections que nous avons aux procédés et à la manière — je vous avoue qu'elle n'est pas sans m'étonner — très cavalière avec laquelle vous nous dites: Vous ne les aurez pas!

M. CLOUTIER: La manière cavalière! Cela fait 20 fois que je répète la même chose. Vous les aurez, mais au moment opportun et sous la forme qui convient à notre dialectique législative et également au fait que nous voulons discuter sérieusement de ce projet de loi.

UNE VOIX: Il est bien doux!

M. CLOUTIER: Qu'est-ce qui vous empêche de commencer à discuter de l'article 1? Soyons sérieux. Il n'y a pas de réglementation avant une vingtaine d'articles. Vous les aurez...

M. MORIN: L'article 14.

M. CLOUTIER: Vous les aurez avant l'article 14.

M. BEDARD (Chicoutimi): On n'est pas d'accord sur le sens du mot "opportun". Vous devriez plutôt dire: Au moment où, moi, le ministre de l'Education, je le déciderai.

M. CLOUTIER: Très certainement, parce que j'en ai la responsabilité.

M. BEDARD (Chicoutimi): Cela ne veut pas dire que c'est le moment opportun. C'est le moment décidé par le ministre de l'Education.

M. CLOUTIER: C'est vous qui voudriez faire le travail législatif que je suis amené à faire?

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, ce que je veux vous dire...

M. CLOUTIER: Je pense que le ministre de la Justice...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. CLOUTIER: ... avait parfaitement raison.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce que je veux vous dire, M. le ministre, c'est que cette discussion n'est pas si inutile que cela. Parce que, comme fondement, on est en train de discuter sur un mot que vous avez défini, et on n'est pas d'accord sur votre définition.

M. CLOUTIER: ... que vous n'êtes pas d'accord, en effet, messieurs.

M. BEDARD (Chicoutimi): Le moment opportun n'est pas le moment...

M. CLOUTIER: Continuez à exprimer votre désaccord, et retardez d'autant la discussion sur l'article 1.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... que décide le ministre de l'Education. C'est le moment que décident les gens qui font de la législation.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre!

M. LESSARD: Bien oui!

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition.

M. MORIN: M. le Président...

M. HARDY: Vous coupez la parole à votre chef.

M. LESSARD: ... auprès de mon chef...

M. LEGER: ... interrompre le chef, voyons donc!

M. MORIN: Je voudrais...

M. LEGER: Quand il ne lit pas son journal, il nous interrompt.

UNE VOIX: II n'y a pas de pénurie...

M. MORIN: M. le Président, le ministre vient ird'avort une phrase bien caractéristique. Il a dit: "La législation que je suis amené à faire". La législation, M. le Président, nous la faisons ensemble, à l'étape actuelle du processus législatif. Ce n'est pas le ministre qui la fait seule. Il propose...

M. HARDY: S'il fallait se fier à vous.

M. MORIN: ... et c'est tous ensemble que nous allons la faire, l'améliorer...

M. PHANEUF: Ne faites pas votre petit Jean-Noël Tremblay !

M. MORIN: Pour cette raison, nous soutenons que pour avoir une vue d'ensemble de la législation, pour pouvoir parler intelligemment de la loi dans son entier, il nous faut connaître les règlements. Nous ne les voulons pas au dernier moment, à la sauvette, alors que le ministre décidera de bien vouloir nous informer du contenu des règlements. Nous les voulons maintenant, pour en prendre connaissance au départ, avec l'ensemble du projet de loi. Parce que nous voulons avoir une idée claire et nette de l'ensemble de ce que nous propose, avant de commencer. Le ministre de la Justice a une question à me poser? Volontiers, mais à condition, M. le Président, que, étant donné que je veux citer un certain nombre de passages extrêmement importants...

M. CHOQUETTE: Mais juridiquement...

M. MORIN: ... du mémoire du Barreau, ce ne soit pas enlevé sur le temps qui m'est alloué.

M. CHOQUETTE: Mais juridiquement, étant donné que les règlements ne sont pas adoptés, puisque la loi n'est pas adoptée, comment le ministre de l'Education pourrait-il vous déposer des règlements dans leur forme définitive alors que le lieutenant-gouverneur en conseil, s'il a un pouvoir de législation délégué, ne les a pas encore adoptés.

M. MORIN: Est-ce que la loi est définitive?

M. CHOQUETTE: Vous parlez de choses qui n'existent pas.

M. MORIN: Est-ce que la loi existe?

M. CHOQUETTE: Le Parti québécois se complaît dans le néant.

M. LEGER: Ce n'est pas d'une façon définitive qu'on demande, ce sont les règlements actuels.

M. CHOQUETTE: C'est habituel, mais personne ne l'avait souligné...

M. MORIN: Le raisonnement du ministre de la Justice est extraordinaire.

Il nous dit: Comment voulez-vous que nous déposions les règlements puisqu'ils ne sont pas encore entièrement rédigés ou qu'ils ne sont pas adoptés? Est-ce que le projet de loi est adopté?

M. CHOQUETTE: Bien non! C'est pour cela qu'on ne peut pas adopter les règlements, justement. C'est comme le...

M. MORIN: Le projet de loi n'est pas adopté encore et pourtant nous l'avons devant nous.

M. CHOQUETTE: Nous l'étudions.

M. MORIN: De plus, le ministre de l'Education lui-même nous a dit, à moins que le ministre de la Justice ne traite son collègue d'ignorant...

M. CHOQUETTE: Ah non! Jamais, je ne dirais cela. Pas du tout.

M. MORIN: Le ministre de la Justice...

M. CHOQUETTE: Tout le monde connaît la science du ministre de l'Education.

M. MORIN: Vous ne le feriez pas, même si vous le pensiez, pour la même raison que le ministre l'Allier n'a pas dit le fond de sa pensée l'autre jour.

M. CHOQUETTE: J'invoque le règlement parce que le député de Sauvé me prête des pensées que je n'ai pas. Il ne peut pas entrer dans mon cerveau.

M. CLOUTIER: Et ne confondez pas le ministre de la Justice et le ministre des Communications.

M. CHOQUETTE: J'ai dit justement...

M. MORIN: Je ne voudrais pas pénétrer dans les circonvolutions de votre cerveau.

M. CLOUTIER: Ne confondez pas le ministre de la Justice et le ministre des Communications.

M. CHOQUETTE: Je trouve que le ministre de l'Education est un modèle de patience.

M. MORIN: Si j'ai bien compris, les propos du ministre de la Justice ne me seront pas imputés et je n'ai pas perdu le temps dont j'ai besoin pour débattre cette question fort importante de la législation déléguée. Le ministre lui-même nous a dit qu'il les déposerait. Il l'a déclaré, le 28 juin, parce qu'il fallait rassurer les comparants ici.

M. CLOUTIER: Non. C'est faux. Relisez. M. MORIN: Non?

M. CLOUTIER: J'ai dit qu'on en discuterait, qu'on parlerait des principes directeurs. J'ai répété à 20 reprises au moins...

M.MORIN: Attention! Je relis. "J'ai déjà indiqué que la réglementation, si elle n'est pas déposée dans tous ses détails...", cela veut tout de même dire que vous allez nous donner une idée de ce qu'il y a dedans...

M. CLOUTIER: C'est exactement ce que je m'acharne à dire.

M. MORIN: Oui. Alors, déposez-la.

M. CLOUTIER: C'est évident. C'est mon intention de déposer lorsque le moment sera venu.

M. MORIN: Ah voilà!

M. CLOUTIER: Cessez de retarder les travaux parce que, lorsque je déposerai des principes directeurs, je devrai les accompagner d'explications et je n'ai pas l'intention de créer des précédents qui nuiront aux travaux des autres commissions lorsque cette question de réglementation se posera. C'est sérieux ce que nous faisons là.

M. MORIN: Oui.

M. CLOUTIER: Vous pouvez peut-être vous amuser mais, nous, nous avons des responsabilités.

M. MORIN: C'est très sérieux, en effet, ce que nous faisons.

M. CLOUTIER: Alors, si c'est sérieux, voulez-vous que nous procédions? Laissez-moi vous offrir les amendements sans que vous ne soyez obligés de faire de motion. C'est totalement inutile. Commençons les articles...

M. MORIN: Ah, bien sûr!

M. CLOUTIER: ... et aussitôt que nous arriverons au premier article où il est question de règlement, à ce moment, je pourrai vous donner tous les éléments utiles et nécessaires.

M. MORIN: Puisque le ministre veut bien déposer les amendements, nous serions très heureux si l'on procédait à la distribution immédiate.

M. CLOUTIER: Je le ferai lorsque nous aurons commencé l'article 1, parce que je commence à vous soupçonner de vouloir retarder la discussion de l'article 1.

M. MORIN: Nous sommes de retour encore à ce chantage.

M. HARDY: Ce n'est pas du chantage.

M. MORIN: ... pour nous empêcher de faire notre métier d'Opposition...

M. HARDY: Vous le faites mal.

M. MORIN: ... On va nous dire ensuite constamment que nous faisons de l'obstruction ou quelque chose comme cela.

M. CLOUTIER: Discuter l'article 1, c'est cela votre métier.

M. MORIN: Non. Nous ne pouvons pas... M. HARDY: ... un Parlement-école.

M. MORIN: ... l'aborder sérieusement puisque le ministre nous invite à travailler sérieusement. Nous ne pouvons pas le faire...

M. CHOQUETTE: Un Parlement de maternelle.

M. MORIN: ... avant d'avoir tous les éléments devant nous.

M. CLOUTIER: Ecoutez, M. le Président, puisqu'on me prend à parti, rien ne m'oblige à déposer même les amendements. Cela n'est pas nécessaire. Normalement, savez-vous ce que je devrais faire? C'est d'arriver article par article et de présenter mes amendements.

M. MORIN: Bien.

M. CLOUTIER: Ce n'est pas coutumier...

M. HARDY: Juridiquement, c'est cela.

M. CLOUTIER: ... d'arriver, comme je l'ai fait, avec un texte de loi, avec tous les amendements. Je le fais uniquement pour informer l'Opposition et lui permettre de travailler, mais rien, je le répète, ne m'y oblige. Il est quand même temps que le député de Sauvé apprenne quelque chose en procédure parlementaire.

M. MORIN: C'est cela que le Barreau appelle le "nouveau despotisme". Exactement. L'abus...

M. LESSARD: François 1er...

M. MORIN: ... voilà! Et c'est ce que le Barreau a dénoncé dans son mémoire et c'est ce que la Chambre de commerce a dénoncé également.

M. CLOUTIER: Bien, voyagez un peu et vous verrez ce qu'est le despotisme. S'il y avait du despotisme, nous ne serions pas actuellement en commission en train de discuter. Nous ne serions pas allés en première lecture pour entendre des dizaines et des dizaines de groupes.

M. MORIN: II n'y aurait pas eu de clôture.

M. CLOUTIER: Soyons sérieux. Vous êtes un homme trop valable pour reprendre ce vocabulaire marqué d'inflation verbale de certains groupements qui actuellement reçoivent une audience trop importante au Québec. Cessons de raconter des billevesées! Nous ne sommes pas dans une dictature et il ne s'agit pas de despotisme. Nous sommes dans un pays démocratique et un des plus démocratiques au monde.

UNE VOIX: L'antithèse de ce que vous avez dit.

M. MORIN: Le despotisme se cache quelquefois derrière des majorités parlementaires.

M. CHOQUETTE: Ce n'est pas de notre faute si les électeurs vous ont rejetés.

M. MORIN: Le ministre de la Justice oublie...

M. CHOQUETTE: Les électeurs ont plus de jugement que vous.

M. MORIN: ... une chose. Les électeurs ont donné 45 p.c. de votes à l'Opposition. Il oublie cela. Il passe cela très volontiers sous silence et c'est justement cela, la mentalité despotique de votre majorité. C'est d'oublier qu'il y a 45 p.c. de Québécois dans l'Opposition.

M. HARDY: Vous représentez...

M. CHOQUETTE: Dans les années récentes, il n'y a pas eu de gouvernement ailleurs qui a eu 55 p.c. des voix. Cela, c'est simple. C'est un chiffre clair. Il n'y a pas eu de gouvernement qui a été élu avec 55 p.c. des voix...

M. MORIN: C'est cela.

M. CHOQUETTE: ... dans aucun pays dans les dernières dix années.

M. MORIN: Alors, se prévalant de cela... M. CHOQUETTE: Bon.

M. MORIN: ... vous allez nier maintenant les droits des 45 p.c. autres. C'est cela.

M. CHOQUETTE: On ne nie pas vos droits, d'ailleurs ne vous appropriez pas les 45 p.c, vous avez tout juste un modeste 30 p.c. parce que nos collègues du Parti créditiste en ont aussi et ils sont absents.

M. MORIN: Ici à cette table, M. le Président, nous représentons l'Opposition et...

M. HARDY: Vous avez reçu mandat?

M. MORIN: ... je vous ferai remarquer qu'au sein même de votre parti il y a des opposants qui se taisent et c'est notre tâche à nous de parler pour eux.

M. CHOQUETTE: Non, vous les empêchez de parler. C'est vous les nouveaux dictateurs. Vous les empêchez de parler, vous ne voulez pas qu'on aborde le projet de loi.

M. BEDARD (Chicoutimi): Nixon a eu plus de 55 p.c. des votes.

M. CHOQUETTE: Non.

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui.

M. MORIN: Oui, effectivement.

M. CLOUTIER: Ce n'est pas un Parlement.

M. HARDY: Ce n'est pas un Parlement, Nixon.

M. CLOUTIER: C'est un mode d'élection tout à fait différent.

M. CHOQUETTE: En tout cas la prochaine fois vous allez être réduits à peu près à 15 p.c.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: Je me souviens des prédictions du ministre de la Justice en 1970!

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. CHOQUETTE: Je pense qu'il n'y en aura pas beaucoup ici présents. Peut-être le député de Saint...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: Le ministre est venu dans mon comté...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. CHOQUETTE: C'était le plus gentil de la bande.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Avant que cette commission décide de destituer le président Nixon, pourrais-je inviter le chef de l'Opposition officielle à continuer son intervention sur la motion du député de Saint-Jacques?

M. MORIN: Je vais commencer à croire qu'il y a de l'obstruction, M. le Président, parce que je n'arrive pas à parler deux minutes sans que le ministre de la Justice ne m'interrompe.

UNE VOIX: Vous êtes bien placé pour parler.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pourrais-je suggérer au chef de l'Opposition de s'abstenir de poser des questions directement au ministre? Peut-être que cela aura le résultat désiré.

M. MORIN: M. le Président, dans un livre récent sur le pouvoir réglementaire, on a parlé de ce "nouveau despotisme". C'est une image, mais elle frappe juste. Le nouveau despotisme des parlements, parce que les Parlements peu-

vent se montrer autoritaires, autocratiques par le pouvoir réglementaire. C'est ce que le Barreau est venu dire l'autre jour. Le ministre de la Justice était là et il n'en a pas disconvenu.

M. CHOQUETTE: Mais non!

M. MORIN: Je continue la citation extraite du mémoire du Barreau: "Il s'agit donc d'un accroc important à la conception usuelle du système démocratique en usage au Canada et au Québec, lequel système donne ou devrait donner au pouvoir législatif le pouvoir final et décisionnel d'édicter les normes de portée générale et impersonnelle, normes qui constituent l'ensemble même de la loi en vue de réglementer la vie des citoyens". M. le Président, on nous dit: Ce qui s'est fait jusqu'ici, c'est que le ministre peut déposer les règlements quand cela fait son affaire. Nous disons nous que dans ce projet-ci, les règlements font partie intégrante du projet de loi. On ne peut pas juger des articles de ce projet de loi — et je pourrais énumérer le nombre considérable d'articles, qui se réfèrent, qui renvoient à la réglementation. Les articles 14, 21, 32, 33, 34, 40, 43, 51, 63 et 64. Et encore, dans les articles 34 et 51, il est renvoyé deux fois aux règlements.

M. CHOQUETTE: Cest très peu sur 130 articles.

M. MORIN: Oui, mais c'est sur des points capitaux...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: ... sur des points absolument fondamentaux et c'est pourquoi nous estimons que nous ne pouvons pas remplir notre tâche d'Opposition, tâche essentielle en ce moment. Etant donné que plusieurs députés et ministres, qui s'opposent du côté gouvernemental à ce projet de loi, ne sont pas là pour faire leur travail. Il est essentiel que nous le fassions. Car non seulement...

M. HARDY: Quelle prétention.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHOQUETTE: Moi, je trouve qu'il y en a un qui manque dans votre parti, c'est votre chef.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHOQUETTE: Parce qu'il ne tolérerait pas vos folies actuelles.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. MORIN: M. le Président...

M. BEDARD (Chicoutimi): Quand cela fait votre affaire vous le connaissez notre chef.

M. CHOQUETTE: ... puisqu'il a dit...

M. CLOUTIER: Sur la langue en tout cas, et il a eu des vues modérées.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : A l'ordre ! M. MORIN: M. le Président...

UNE VOIX: On sait que notre chef est un modéré.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le chef de l'Opposition.

M. MORIN: Merci, M. le Président. Il y aurait bien d'autres exemples du comportement que je pourrais faire valoir, la clôture inopinée du 11 juillet, les 19 séances d'audition, la moitié en plein été, qui vont dans le même sens.

Mais, je voudrais dire que, sur la question du pouvoir réglementaire, le premier ministre lui-même a déclaré à la Ligue des droits de l'homme que les règlements seraient déposés. Il l'a déclaré d'ailleurs, à ce que je sache, à une ou deux reprises, bien clairement. De plus, il y a eu cette déclaration du ministre lui-même le 28 juin. En ce qui nous concerne, nous avons interprété ces déclarations comme signifiant qu'on nous saisirait de l'ensemble des règlements dès le début pour que nous puissions juger l'ensemble de ce qu'on nous propose, pour que nous puissions nous faire une idée synthétique de ce qui nous est proposé. Nous ne voulons pas commencer à débattre les articles 1 à 13 sans savoir quels seront les règlements pertinents lorsque l'article 14 y fera renvoi. Nous voulons les connaître d'avance. Parce qu'il peut être pertinent, en discutant les articles 11, 12, 13, de savoir quels seront les règlements auxquels renverra l'article 14. C'est l'esprit dans lequel nous faisons cette motion.

Si je n'avais été appuyé aussi fortement que nous l'avons été sur ce plan par le Barreau et la Chambre de commerce récemment, je n'en ferais pas une question de principe. C'est une question fondamentale. Le premier ministre, ce matin, nous a dit: Allez donc voir en droit français comment cela se passe! C'est effectivement le cas qu'en droit français, la réglementation est fort importante, mais eux ont un moyen de contrôle que nous n'avons pas. Ils ont un conseil d'Etat qui doit approuver non seulement...

M. CHOQUETTE: La légalité, pas le contenu. Vous devriez savoir ça.

M. MORIN: La légalité.

M. CHOQUETTE: Cest fantastique, un professeur de droit qui vient affirmer une chose comme ça.

M. MORIN: M. le Président, je vois...

M. CHOQUETTE: M. le Président, où s'en vont nos universités si on a des professeurs pareils!

UNE VOIX: Qui est-ce qui a la parole?

M. LESSARD: Où s'en va notre justice avec un ministre de la Justice comme ça?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!

M. HARDY: Vous pouvez bien être membre du Barreau!

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! J'invite le chef de l'Opposition à terminer, il lui reste environ trois minutes. A l'ordre !

M. LESSARD: II fait du petit Jean-Noël Tremblay!

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que la commission souhaiterait une période libre d'échanges pour maintenant? Allez-y.

M. CHOQUETTE: Une période, oui, de taquinerie.

M. CLOUTIER: Que le chef de l'Opposition termine, j'imagine qu'on va voter là-dessus et qu'on va passer à l'article 1.

M. MORIN: Ces taquineries constituent tout de même un retard...

M. CLOUTIER: A moins qu'il y ait une demi-douzaine...

M. MORIN: ... dans nos débats. Je le ferai observer en passant.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. MORIN: En droit français, M. le Président, il existe un organisme d'ordre administratif qui exerce un contrôle de la légalité sur l'ensemble...

M. CHOQUETTE: Ah!

M. CLOUTIER: Le ministre de la Justice est utile.

M. MORIN: Oui. Mais je pense que le ministre de la Justice est intervenu avant même que j'aie pu finir ma phrase.

M. BEDARD (Chicoutimi): II est utile au niveau des amendements, le ministre de la Justice.

M. CLOUTIER: C'est évident, comme tous les membres du cabinet. C'est ça, un cabinet.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. MORIN: Comme nous n'avons pas...

M. CLOUTIER: Quand on accepte de travailler à l'intérieur...

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est très utile. Il faut admettre qu'on peut se tromper au départ. Le ministre de la Justice, avec ses amendements, vous l'a montré.

M. MORIN: Je constate que votre proposition d'une période de discussion libre serait peut-être opportune, M. le Président.

M. CHOQUETTE: Continuez, continuez, nous sommes suspendus... Nous sommes tout oreilles.

M. MORIN: Le ministre de la Justice a certainement une bonne connaissance du droit français puisqu'il a fait son doctorat autrefois; doctorat d'université, je crois?

M. CHOQUETTE: D'Etat. Je regrette, je suis docteur d'Etat.

M.MORIN: Je félicite le ministre de la Justice, mais je ne sache pas que sa thèse ait porté sur ce point en particulier.

M. CHOQUETTE: Non, c'était plutôt en sciences économiques.

M. MORIN: Oui. Et je vois qu'elle ne portait pas sur le conseil d'Etat...

M. CHOQUETTE: Non.

M. MORIN: ... parce qu'il aurait compris le rôle essentiel de cet organisme dans le droit français. Cet organisme d'ordre administratif n'existe pas ici. Si bien que la comparaison que le premier ministre prétendait établir ce matin entre le droit français et le droit québécois, qui est d'origine britannique et d'inspiration britannique ne tient pas. C'est une analogie impossible.

En fait, c'était une chausse-trappe. Et je tiens à dire qu'en l'absence de conseils...

M. CHOQUETTE: Le principe de la loi, c'est d'établir le français langue officielle. C'est donc pour nous rapprocher du droit français.

M. MORIN: Quelle intervention lumineuse, M. le Président ! Est-ce que j'ai la parole?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous l'avez depuis une demi-heure...

M. MORIN: Je n'ai pas commencé il y a une demi-heure, j'ai été interrompu...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous avez commencé à 5 h 15 et, à moins que vous ne vouliez m'acheter un chronomètre...

M. LEGER: II reste au moins cinq minutes...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je lui ai indiqué tantôt qu'il restait trois minutes. S'il veut prendre cinq minutes...

M. BEDARD (Chicoutimi): II a été interrompu continuellement, M. le Président.

M. HARDY: On est prêt à voter.

M. BEDARD (Chicoutimi): II a été interrompu...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Combien de minutes voudriez-vous?

M. MORIN : Trois minutes au moins.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition va prendre trois minutes.

M. LESSARD: Le ministre de la Justice, comme...

M. HARDY: Laissez-lui ses trois minutes.

M. LESSARD: Le ministre de la Justice, comme le ministre des Affaires culturelles, est intervenu, tout comme le ministre de l'Education, à maintes reprises...

M. HARDY: Quelques secondes.

M. LESSARD: ... pour interrompre le chef parlementaire du Parti québécois. Je pense que j'avais terminé vers 5 h 20 et il reste certainement cinq minutes au chef parlementaire de l'Opposition.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition, pour les trois minutes qu'il a demandées.

M. CLOUTIER: Vous pouvez intervenir. M. PHANEUF: Moi, je tiens le temps.

M. MORIN: Tout à l'heure, le ministre de la Justice a fait allusion à un certain contrôle sur la législation déléguée, ou le pouvoir réglementaire, peu importe. Mais il n'a pas dit tout ce que le Barreau nous avait recommandé. Il s'est référé, si je l'ai bien compris, à ce que le Barreau appelait le "contrôle postnatal". C'est une expression un peu imagée. Il a oublié de mentionner que le Barreau nous a également recommandé un contrôle prénatal.

M. CHOQUETTE: Oui, mais pas entre les mains de l'Opposition.

M. MORIN: Ce n'est pas entre les mains de l'Opposition, ici, mais entre les mains d'une commission élue où le gouvernement est majoritaire.

M. CHOQUETTE: Le Barreau ne nous a jamais recommandé un contrôle prénatal au niveau d'une commission parlementaire.

UNE VOIX: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. LESSARD: Comment voulez-vous que le député...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHOQUETTE: Le Barreau a plutôt recommandé un comité prénatal de juristes dont certains de l'extérieur et probablement qu'il nous a recommandé que certains professeurs d'université soient engagés pour ce faire, mais quand je vois le député de Sauvé, chef de l'Opposition, ceci m'enlève confiance dans la suggestion du Barreau.

M. LESSARD: Trois minutes ont été prises par le ministre de la Justice, M. le Président.

M. MORIN: Le ministre de la Justice est en train de faire le rigolo et cela m'attriste un peu.

M. CHOQUETTE: II est préférable de rire que de pleurer.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: Le Barreau a recommandé deux solutions que je retiens parmi d'autres. Que soit adoptée au Québec une loi sur les règlements qui portent sur l'adoption et la publication des règlements; loi qui n'existe pas à l'heure actuelle. Il semble inconcevable que le Québec ne soit pas encore doté d'une telle législation, laquelle existe, je le ferai remarquer aux membres de cette commission, au Parlement fédéral, en Nouvelle-Ecosse, en Ontario, au Manitoba et, pour tout dire, dans la plupart des Etats modernes.

Il a également recommandé que soit créé ce comité prénatal composé d'experts auxquels le ministre de la Justice s'est référé, de manière un peu blagueuse, il y a un instant.

Ce comité prénatal étudierait dans les détails toute la réglementation. Or, nous n'avons, à l'heure actuelle, au Québec, ni la loi générale sur les règlements, ni de comité prénatal officiel sur la réglementation.

De plus, en l'occurrence, dans le cas du projet de loi qui nous est soumis maintenant, devant cette commission, on a fait observer à plusieurs reprises que le pouvoir réglementaire y jouait un rôle particulièrement important, un

rôle qui abuse du pouvoir réglementaire qui est reconnu au gouvernement, dans la plupart des Etats modernes. C'est pourquoi, compte tenu du fait qu'il n'y a eu jusqu'ici aucun contrôle sérieux des députés sur la législation déléguée qui va accompagner ce projet de loi, nous pensons que c'est devant cette commission que cela devrait être débattu, en long et en large, et c'est pourquoi nous avons exigé qu'elle soit déposée au moment où nous allons commencer les travaux.

LE PRESIDENT (M. Gratton): La commission est-elle prête à se prononcer?

M. CLOUTIER: Oui.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi.

M. CLOUTIER: Cela ne ressemble pas du tout à notre entente tacite. Il avait bel et bien...

M. MORIN: Quelle entente tacite!

M. LEGER: Est-ce qu'il y a eu une entente tacite?

M. CLOUTIER: Nous avons cru comprendre, du moins c'est ce que le chef de l'Opposition m'avait dit, lorsque nous avons consenti à laisser parler tout le monde, le chef de l'Opposition m'a bel et bien dit...

M. LEGER: C'est le cas, le député de Chicoutimi n'a pas encore parlé.

M. CLOUTIER: ... est-ce que je peux terminer? Le chef de l'Opposition m'a bel et bien dit: Nous allons faire parler les deux membres réguliers, le député de Saint-Jacques et moi-même...

M. LEGER: Non, non. Il n'a jamais dit cela.

M. CLOUTIER: ... et sur certains chapitres, par exemple, le député de Maisonneuve s'intéresse au travail, il pourra parler sur le travail, un autre s'intéresse à tel autre secteur, mais je crois que nous sommes tout de même en présence d'un mouvement concerté. Il suffit de le noter.

M. MORIN: Sur mon privilège, lorsque nous aborderons des articles spécifiques, il est évident que les députés qui sont plus spécialement ferrés dans les domaines que nous discuterons interviendront à tour de rôle.

En l'occurrence, nous sommes dans les motions préliminaires et j'estime que tous les députés, tant du côté de l'Opposition que du côté du gouvernement d'ailleurs, peuvent intervenir sur ces motions préliminaires. Il s'agit de nous donner les instruments de travail avant de commencer.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi sur la motion.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, tout d'abord, disons que je m'inscris en faux sur l'interprétation du sens du temps opportun tel que semble le comprendre le ministre de l'Education. D'ailleurs, c'est la base de la discussion que nous avons, à savoir quel est le temps opportun pour déposer la réglementation dans le but de nous aider à étudier ce projet de loi. Dans l'esprit du ministre, le temps opportun, c'est celui qu'il aura décidé en sa sagesse et selon son appréciation. C'est sur ce point que nous différons. Le temps opportun n'est pas celui déterminé par le ministre. Le temps opportun, tenant compte du travail de législation que nous avons à faire ici, est le temps que nous jugeons, nous, pour avoir une bonne idée de l'esprit de l'ensemble de votre projet de loi, opportun pour déposer dès maintenant la réglementation concernant ce projet de loi.

D'ailleurs, je me pose la question: Est-ce que ces règlements sont prêts? Est-ce que le ministre a affirmé qu'ils étaient prêts, ces règlements?

M. HARDY: Cela a été dit très clairement tantôt.

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, mais s'ils sont prêts, vous l'avez dit qu'ils étaient prêts?

M. CLOUTIER: M. le Président, il n'est plus question de se prêter à ce petit manège qui devient évident. Voudriez-vous demander aux membres de la commission de s'adresser à vous-mêmes, comme il se doit, et de ne pas poser de questions directes, parce qu'ils auront les mêmes réponses.

M. BEDARD (Chicoutimi): S'ils sont prêts, ces règlements, je ne comprends pas et je ne vois pas en quoi le ministre peut justifier sa position de ne pas les déposer dès maintenant, parce qu'effectivement les règlements sont, en quelque sorte, une sorte de prolongement de la loi. Ils doivent s'inscrire dans le même esprit que le cadre général de la loi. Pourquoi ne pas les déposer dès maintenant? Est-ce qu'ils sont si incendiaires, ces règlements? On commence à en douter. Jusqu'à quel point, en fait, sont-ils le prolongement normal du cadre général de la loi? Les déposer, est-ce que c'est si incendiaire? On pourrait peut-être, à la lumière de la lecture des règlements s'apercevoir que ces règlements, que cette réglementation, justement, n'est pas dans le sens du cadre général de la loi.

S'ils sont dans le même sens que le cadre général de la loi, il n'y a pas d'argument pour ne pas les déposer dès maintenant. Sinon, l'argument de l'omnipuissance ou encore celui de se retrancher derrière ce pouvoir de décision, de

ne les déposer que lorsque la volonté du ministre voudra bien y souscrire. Il n'y en a pas d'autres. C'est le seul argument, jusqu'à maintenant, que vous avez apporté concernant la demande que fait l'Opposition. J'étais surpris tout à l'heure de voir — parce que j'ai beaucoup d'estime pour le ministre de la Justice — son raisonnement, concernant la demande que nous faisions.

Je pense qu'il n'a pas ou qu'il a peut-être mal saisi le sens de notre demande, à savoir que nous ne demandons pas d'entrer dans la discussion des règlements. Nous ne demandons pas que ces règlements soient déposés pour entrer dans la discussion de ces règlements. Nous ne demandons pas qu'ils soient déposés pour entrer de quelque manière que ce soit dans l'adoption de ces règlements. Le sens de la proposition qui a été faite par le député de Saint-Jacques, c'est tout simplement de les déposer, pour nous permettre de les étudier, de voir jusqu'à quel point ils sont conformes au cadre général de la loi.

Pour nous permettre de voir, si ces règlements, encore une fois —il faut peut-être répéter, mais c'est nécessaire, parce qu'on ne semble pas comprendre de l'autre côté de la table — pour voir si ces règlements ne changent pas l'application générale de la loi. Ces règlements, s'ils sont selon le sens de la loi, ne sont pas incendiaires, cela ne fait pas une Nouvelle fantastique au point que le ministre semble prioritairement préférer les faire connaître aux journalistes plutôt que les faire connaître aux membres de cette commission. Nous sommes ici pour légiférer. Pourquoi ne pas metrre entre les mains de ceux qui doivent légiférer — c'est tout de même assez sérieux — pourquoi ne pas mettre entre leurs mains tous les moyens qu'ils réclament?

M. le Président, le ministre de la Justice disait: L'Opposition ne fera pas la réglementation. C'est évident qu'on ne fera pas la réglementation, comme on ne fait pas les lois à l'Opposition. On essaie tout simplement d'apporter une contribution, la plus positive possible, à l'étude des lois. C'est clair que, quand vient le temps de les adopter, c'est la majorité qui les adopte ou les rejette. Mais, justement, dans le sens d'une intervention positive de l'Opposition, face à l'étude de ce projet de loi, c'est dans ce sens, en ce qui me regarde personnellement... Je suis convaincu que c'est également dans ce sens que le député de Saint-Jacques a fait sa motion et que tous les autres membres de l'Opposition sont intervenus, dans le sens, tout simplement, d'avoir un moyen de plus à notre disposition pour pouvoir apporter une contribution positive à l'étude que nous faisons du projet de loi en commission.

Tout à l'heure, le ministre disait qu'il y avait eu des ententes préliminaires avec le chef de l'Opposition, voulant qu'il y aurait plus ou moins d'interventions au niveau de la commission de la part de tous les membres de l'Opposition.

D'abord, je doute de cette entente, au départ, parce qu'il n'est pas de règle dans l'Opposition que le chef décide de limiter de lui-même le droit de parole de chacun des membres de l'Opposition.

M. CLOUTIER: Vous êtes mieux de vous expliquer avec lui et rapidement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, non. Pas besoin d'explication. Au départ, je pense et je suis convaincu que le chef de l'Opposition n'a pas posé un geste dans ce sens.

M. MORIN: Nous avons dit: Travaillons sérieusement. C'est ce que nous faisons.

M. CLOUTIER: Ecoutez, je ne voudrais pas être à l'origine d'une scission dans le Parti québécois. Elle se produira bien sans moi. Mais je sais très bien ce que le chef de l'Opposition m'a dit, par exemple.

M. LEGER: A vous écouter parler, vous allez nous unir davantage.

M. BEDARD (Chicoutimi): D'ailleurs, vos règlements, dans le fond...

M. CLOUTIER: Je vais vous unir dans la défaite.

M. VEILLEUX: II est six heures. M. le Président.

M. BEDARD (Chicoutimi): D'ailleurs, vos règlements, M. le ministre de l'Education, je ne crois pas qu'ils soient prêts autant que vous nous le dites.

M. CLOUTIER: Commençons l'article 1 et vous verrez.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je ne crois pas qu'ils soient prêts autant que vous le dites. Regardez seulement l'article 128, vous vous rendez compte qu'il y a des articles qui vont être en vigueur seulement en 1976. Vous ne me ferez pas croire que la réglementation est déjà prête concernant ces articles en particulier. Il y en a d'autres pour lesquels nous avons besoin de connaître la réglementation dès maintenant, parce qu'ils vont entrer en vigueur le 1er septembre 1974. Cela veut dire, dans un ou deux mois. Donc, il y a une nécessité de connaître la réglementation justement d'une façon toute particulière parce que ces articles vont entrer en vigueur dès maintenant.

Il est six heures. Je propose la suspension.

LE PRESIDENT (M. Gratton): La commission suspend ses travaux à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

Reprise de la séance à 20 h 11

M. GRATTON (président de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre, messieurs!

Au moment de la suspension des travaux, le député de Chicoutimi avait la parole et il lui restait dix minutes à son intervention sur la motion du député de Saint-Jacques. Le député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais que le ministre de l'Education essaie de faire un petit temps d'arrêt et nous écoute un peu au sujet de la motion et les arguments que nous voulons apporter à l'appui de cette motion. Elle est faite sérieusement.

M. CLOUTIER: Arguments nouveaux ou les mêmes?

M. BEDARD (Chicoutimi): Ils ne sont pas nouveaux. On essaie simplement de les formuler de nouveau peut-être d'une façon plus convaincante pour qu'ils puissent au moins attirer l'attention du ministre et l'empêcher, pendant que nous parlons, de pirouetter continuellement sur sa chaise et je pense que ce serait peut-être le moment de marquer un temps d'arrêt. Le ministre prend l'attitude de nous répondre, comme il l'a fait à un moment donné, il ne demandait pas à l'Opposition de juger, mais seulement d'attendre. Il sait très bien que le rôle de l'Opposition, face à une loi qui est présentée, n'est pas d'attendre, mais également de juger du bien-fondé de cette loi, d'essayer de jouer un rôle positif pour l'amélioration de cette loi.

Je crois que si le ministre était moins intransigeant dans sa manière d'exprimer jusqu'à quel point le temps opportun de présenter, de donner droit à notre demande doit être décidé par son seul désir et non pas par l'opportunité de déposer la réglementation que nous demandons, à ce moment-là, peut-être que le ministre de l'Education pourrait raccourcir ce débat, ce temps qu'il prétend que nous perdons, tout simplement en accédant à la demande de l'Opposition. Qu'est-ce que l'Opposition dit à l'appui de la demande que les règlements soient déposés immédiatement? Tout simplement ceci. D'une part, c'est que vous avez le cadre général de la loi 22, d'autre part, il a été annoncé par le ministre qu'il y aurait de la réglementation.

Nous savons que, d'une part, la réglementation est le prolongement d'une loi dans le sens que celle-ci peut tout simplement confirmer l'esprit de la loi générale ou peut même bifurquer l'esprit de la loi générale, selon son contenu. D'autre part, si le ministre voulait comprendre que la réglementation, face à une loi, c'est également la concrétisation pratique de chacun des articles. Lorsqu'on est en face d'un article général et qu'il y a une réglementation, le but de cette réglementation est sûrement de concrétiser la portée de l'article en question. Ce que nous demandons au ministre, c'est tout simplement la possibilité, je dirais le droit de l'Opposition de ne pas légiférer les deux yeux fermés. D'une part, on a le projet de loi 22. Pourquoi ne pas légiférer les deux yeux ouverts, dans le sens que la réglementation soit fournie également à l'Opposition de manière à lui permettre d'avoir une vue générale de l'ensemble de la loi.

Les seuls articles du projet de loi 22, tels que rédigés et tels que nous les avons devant nous, ne donnent pas l'ensemble de l'esprit général. C'est tellement vrai qu'il y a nécessité de concrétiser chacun de ces articles ou une grande partie de ces articles dans une réglementation.

Je sais que le ministre semble pressé de passer à l'étude de l'article 1. Remarquez que nous aussi, nous sommes pressés de passer à l'étude de l'article 1, mais nous sommes présentement à un stade extrêmement important, soit au début des travaux que nous avons à entreprendre, peut-être pour les quelques semaines à venir. Il est important de déterminer d'avance les règles du jeu. On en a déterminé une cet après-midi en faisant une motion pour permettre à chacun des membres de l'Opposition de pouvoir s'exprimer. C'était une règle de jeu qui était importante. Il fallait qu'elle se règle immédiatement de manière que les travaux de cette commission ne soient pas soumis au chantage ou encore à la menace du ministre de l'Education ou à la volonté du parti au pouvoir de clouer le bec ou d'empêcher de parler quelques membres de l'Opposition au moment où ils le voudraient.

C'était une règle importante du jeu qu'il fallait déterminer. Celle-ci est tout aussi importante parce que encore une fois, nous croyons que la réglementation est tellement importante que le ministre a cru bon déjà d'assurer la commission qu'il verrait à la présenter aux membres qui la composent. Nous croyons que c'est le temps de la présenter, sinon, on va commencer à se poser des questions, encore une fois, comme je le disais avant la suspension de la séance. Normalement, si les règlements ne sont que le prolongement de la loi, je ne vois pas quelles objections le ministre pourrait avoir à ne pas nous les donner dès maintenant, à moins que cette réglementation ne soit pas prête. C'est possible. On commence à penser que c'est très possible.

Ou encore, dans cette réglementation, il y a un esprit qui y est contenu qui pourrait, à la longue, peut-être avoir un caractère incendiaire encore une fois, dans le sens qu'elle aurait peut-être tendance à bifurquer sur l'esprit général de la loi.

D'ailleurs, il est essentiel de connaître cette réglementation, nous ne sommes pas les seuls à le croire. Remarquez que tous les organismes qui sont passés devant la commission ont quand

même émis certaines opinions concernant le projet de loi et concernant également la réglementation qui devait, dans un avenir rapproché, y être rattachée.

A la lecture même du projet de loi, plusieurs des organismes ont senti le besoin d'exprimer que chacun des articles ou que plusieurs articles étaient imprécis, prêtaient à diverses interprétations à certains endroits, d'où l'importance de la réglementation pour, justement, dissiper les diverses interprétations possibles.

Ces organismes ont également laissé entendre que le projet de loi ou certains de ses articles laissaient trop de place à l'arbitraire du point de vue de l'interprétation. Ce qui veut dire qu'à partir du moment où ce projet de loi peut paraître arbitraire, ou à partir du moment où des articles peuvent permettre différentes interprétations, j'imagine que la réglementation va servir justement à préciser une fois pour toutes chacun des articles. D'ailleurs, s'il fallait que la règle pour décider quel est le temps opportun pour déposer quelque document que ce soit au niveau de la commission soit soumise à la bonne volonté ou au bon plaisir du ministre, il n'y a rien qui empêcherait un prolongement de ce droit qui pourrait permettre à la longue au ministre de nous dire: Sur certains articles, il n'y a pas de réglementation, sur d'autres articles il y a une réglementation; mais je juge opportun qu'on ne doive pas la soumettre aux membres de cette commission. Ce serait alors fonctionner d'une façon arbitraire. C'est pour cela que c'est aussi important de déterminer dès maintenant les règles du jeu.

Peut-être que les quelques minutes que nous perdons maintenant, nous les regagnerons facilement si le ministre accède à notre demande et peut-être laisse de côté cet aspect intransigeant ou cette attitude, à mon sens, assez intransigeante qui ne fait que provoquer l'agressivité de l'Opposition, une agressivité dont nous ne voulons en aucune façon faire preuve. Au contraire, on veut la discuter, on croit ce projet...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! C'est terminé.

M. BEDARD (Chicoutimi): Une seconde. Permettez-moi quelques phrases.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Très brièvement.

Motion d'amendement de M. Bédard

M. BEDARD (Chicoutimi): Je suis convaincu, M. le Président, que si cette attitude changeait, elle nous permettrait d'avoir un débat très sérieux, tel que le désire le ministre de l'Education. Mais, malheureusement, comme j'ai deviné, parce que vous nous avez donné la réponse que vous n'accéderiez pas à cette demande normale que nous faisons, je me vois dans l'obligation — et on va peut-être perdre encore du temps — de faire une motion, un amendement à la motion qui est présentée dans le sens suivant. Donc l'amendement se lirait comme suit: à savoir que la motion en discussion soit amendée en remplaçant les mots "du projet" par les mots "des principes directeurs". Je fais cet amendement, M. le Président, d'une part, parce que c'est malheureux que le ministre de l'Education nous ait d'avance annoncé qu'il refuserait la demande faite par notre motion, et, d'autre part, parce que le ministre de l'Education a annoncé plusieurs fois au cours de l'après-midi qu'il verrait à faire connaître à cette commission et le plus rapidement possible les principes directeurs du projet de loi 22. C'est dans ce sens, d'une façon très positive, que je fais l'amendement à la motion.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pourriez-vous me répéter exactement...

M. CLOUTIER: Est-ce qu'on peut avoir un texte parce que cela devient un peu plus sérieux?

M. BEDARD (Chicoutimi): Cela a toujours été sérieux.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CLOUTIER: C'est-à-dire que je ne savais pas que vous étiez avocat, mais j'en doutais fort à vous entendre.

M. BEDARD (Chicoutimi): II y a bien des choses dont vous doutez. Ne commencez pas à prendre cette attitude inacceptable.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Alors la motion d'amendement du député de Chicoutimi...

M. LESSARD: On comprend qu'on n'est pas tous psychiatres.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... qui se lit comme suit: Que la motion en discussion soit amendée en remplaçant les mots "du projet" par les mots "des principes directeurs". Il y a sûrement un problème à cela, c'est que le texte de la motion du député de Saint-Jacques que j'ai devant moi, ne dit pas "du projet", mais dit "de tous les projets".

M. BURNS: M. le Président, on l'a modifié, on vous a donné un texte non modifié.

UNE VOIX: C'est parce qu'on voulait tout simplement donner une certaine tension...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, je répète la motion d'amendement du député de Chicoutimi.

M. BURNS: C'était juste pour garder un certain suspense.

M. HARDY: Travail mal fait.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Que la motion en discussion soit amendée en remplaçant le mot "projets" par les mots "principes directeurs".

M. CLOUTIER: Est-ce que je peux voir?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Ce qui voudrait dire que la motion se lirait, si l'amendement était accepté, comme suit: Qu'avant de procéder à l'étude du projet de loi 22, article par article, la commission prenne connaissance des principes directeurs, des règlements prévus par la mise en application de la loi. C'est exact?

M. SEGUIN: Sur un point d'ordre, M. le Président.

LE PRESIDENT M. Gratton): Le député de Pointe-Claire, sur un point de règlement.

M. SEGUIN: Maintenant que vous m'avez reconnu, je vais parler.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Allez-y!

M. SEGUIN: Nous avions devant l'Assemblée une motion présentée par le député de Saint-Jacques. Il me semble qu'il faut disposer de cette motion tout d'abord avant d'en recevoir une deuxième. Si c'est un sous-amendement, cela n'a pas été présenté de cette façon. Cela a été présenté comme un amendement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas un sous-amendement. C'est un amendement.

M. SEGUIN: Cela a été présenté... UNE VOIX: C'est un amendement.

M. SEGUIN: Alors, est-ce que vous voulez dire sous-amendement?

M. CHARRON: Non, non. Ma motion, M. le Président... Puis-je rappeler à mon excellent ami et collègue, le député de Pointe-Claire, que ma motion n'était pas un amendement en soi? Elle était, en soi, une motion parfaitement régulière.

M. SEGUIN: C'est cela.

M. CHARRON: Ce que le député de Chicoutimi vient d'apporter comme première modification à une motion régulière, cela s'appelle un amendement.

M. SEGUIN: Si le Président...

M. CHARRON: Si un de mes collègues juge bon d'apporter une deuxième modification, là, cela s'appellera un sous-amendement.

M. SEGUIN: Bien, vous ne me ferez pas de remontrance au point de vue de la procédure. Mais je vais vous dire ceci...

M. CHARRON: Ah! je le sais bien! J'ai trop de respect pour mon collègue de Pointe-Claire.

M. SEGUIN: Cest que, si le Président reconnaît ce sous-amendement comme une modification au premier, nous serons prêts à le discuter.

UNE VOIX: Le Président ne peut reconnaf-tre qu'un amendement...

M. LESSARD: Est-ce que le député de Pointe-Claire pourrait me permettre...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. BOSSE: ... c'est uniquement dans la façon...

M. SEGUIN: M. le Président, il y a un amendement maintenant. Il y a un sous-amendement à l'amendement du député de Saint-Jacques.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je m'excuse auprès du député de Pointe-Claire, mais la motion originale...

M. SEGUIN: Est-ce que le député de Saguenay peut se mêler de ses affaires pour le moment? On va essayer d'en discuter avec le Président.

M. LESSARD: Non, mais écoutez. On était là, à la discussion au cours de cet après-midi...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. VEILLEUX: M. le Président, question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jean, sur une question de règlement.

M. SEGUIN: Sur un point de règlement, rappelez-moi à l'ordre, M. le Président, mais au moins, rendez votre décision.

M. VEILLEUX: Pourriez-vous demander au député de Saguenay de vous demander la permission...

M. LESSARD: Je vous demande la permission, M. le Président.

M. VEILLEUX: Un instant! ... de parler, parce que moi, je vais m'en occuper.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!

UNE VOIX: Des menaces, M. le Président.

M. LESSARD: C'est du chantage, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. LESSARD: Question de privilège, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs ! A l'ordre !

M. LESSARD: Question de privilège, M. le Président. J'aimerais bien que le député de Saint-Jean...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Ce n'est pas une question de privilège.

M. LESSARD: Question de privilège, M. le Président. Il s'agit de menaces...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je devine d'avance que ce n'est pas une question de privilège.

M. LESSARD: M. le Président, il s'agit de menaces à l'intérieur de cette commission parlementaire. J'aimerais bien, M. le Président, que le député de Saint-Jean me précise ses menaces lorsqu'il dit qu'il va s'occuper de moi. J'aimerais bien, M. le Président...

M. VEILLEUX: J'ai voulu dire...

M. LESSARD: ...explicite ses menaces.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que le député de Saint-Jean désirerait expliciter ses menaces?

M. VEILLEUX: J'ai voulu dire, M. le Président, que je m'en occuperais verbalement.

M. LESSARD: Là, il n'y a aucun problème.

M. VEILLEUX: S'occuper verbalement, c'est s'occuper...

M. LESSARD: J'ai déjà réglé le problème du député de Saint-Jean, M. le Président, à la Centrale de l'enseignement du Québec. Cela n'avait pas été long.

M. VEILLEUX: M. le Président, si c'est s'occuper, si c'est faire une menace...

M. MORIN: Ce n'est plus du tout une menace.

UNE VOIX: ... le député va retirer sa...

M. BOSSE: Le député de Saguenay s'énerve.

M. VEILLEUX: M. le Président...

M. BOSSE: II cherche des arguments.

M. MORIN: C'est sans conséquence.

M. VEILLEUX: M. le Président...

M. BURNS: Ah! là, ce n'est pas grave.

M. VEILLEUX: Si c'est menacer que de s'occuper verbalement...

M. LESSARD: Non, M. le Président, il n'y a aucune menace.

M. VEILLEUX: ... le ministre de la Justice avait raison de dire que les membres du Parti québécois...

M. CHARRON: Certainement...

M. VEILLEUX: ... sont des enfants de maternelle !

M. BOSSE: Oui, et le jeune et mince député de Saint-Jean n'est quand même pas si menaçant!

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. LESSARD: Non. Cela ne nous inquiète pas.

M. BOSSE: Arrêtons de charrier!

M. LESSARD: Surtout, verbalement, il n'a pas...

M. BOSSE: Pour un gars qui est habitué en forêt comme le député de Saguenay, arrête, il faut pas charrier !

M. CHARRON: Cela ne sera pas le premier...

M. BOSSE: Le député de Saint-Jacques est habitué à se promener dans le bas de la ville et dans le "pot". Il connaît cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. BOSSE: Continue de "poter".

M. CHARRON: Certainement, ce n'est pas la première fois que je vois un ivrogne.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. LESSARD: J'ai déjà rencontré des animaux avant aujourd'hui.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. BOSSE: Je comprends. Dans la forêt où vous vivez.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. TARDIF: C'est parce qu'il braconnait.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! On va se replacer dans le contexte de cette discussion. Il y a une motion qui a été faite par le député de Saint-Jacques et une motion d'amendement à cette motion faite par le député de Chicoutimi visant à changer le mot "projet" par les mots...

M. CHARRON: "... principes directeurs".

LE PRESIDENT (M. Gratton): "... principes directeurs". Est-ce que je me tromperais si je pensais que quelqu'un veut s'exprimer sur la motion d'amendement?

M. LEGER: Vous auriez parfaitement raison.

M. CLOUTIER: Tout le monde veut parler là-dessus, j'imagine?

M. LEGER: Je ne sais pas.

M. CLOUTIER: Ah bon! Alors, vous en voyez le sérieux.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que quelqu'un demande la parole?

M. LEGER: Oui.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Lafontaine sur la motion d'amendement.

M. BURNS: A moins que le député de Lafontaine ne dise vraiment toute la substance...

M. LEGER: Ce dont je doute.

M. CLOUTIER: Je crois que vous pouvez vraiment lui faire confiance pour ne pas tout dire.

M. LEGER: Connaissant la qualité des autres intervenants du parti, je suis convaincu qu'il m'est impossible de donner toutes les explications voulues au ministre.

M. CLOUTIER: Mais si j'accède immédiatement à votre demande, vous allez faire le débat quand même?

M. LEGER: On se demande toujours jusqu'à quel point le ministre a compris parce qu'il a souvent le dos tourné. Il n'écoute pas, il lit, il nous interrompt. Alors, je vais seulement...

M. CLOUTIER: Je ne suis pas obligé d'être suspendu aux lèvres du député de Lafontaine. Il est assez soporifique.

M. LEGER: J'espère que non. Vous m'avez reconnu, M. le Président? Je voudrais simplement...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Lafontaine sur la motion d'amendement. Il commence, et je lui demande de le noter, à...

M. LEGER: ... 8 h 32.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... à 8 h 31.

M. LEGER: ... et demie.

M. LESSARD: Est-ce que vous avez un chronomètre?

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... à 8 h 31.

M. LEGER: Parfait, M. le Président. A 8 h 31.

M. LESSARD: Est-ce que vous avez un chronomètre? Est-ce que vous calculez les interventions?

M. LEGER: La motion d'amendement arrive justement à point parce que la motion principale présentée par le député de Saint-Jacques, malgré tout le brio des cinq intervenants du côté de l'Opposition, en vue de convaincre un ministre de plus en plus irascible, qui ne semblait pas du tout accepter le principe qui était sous-jacent à cette motion, nous a permis de réaliser jusqu'à quel point nous étions loin des préoccupations du ministre, jusqu'à quel point le ministre ne saisissait pas les intentions que nous voulions atteindre par cette motion.

Cependant, tout au long des interventions de mes savants confrères, on s'est aperçu que le ministre serait peut-être prêt à reconnaître le bien-fondé de l'intention derrière cette motion principale qu'il ne voulait pas accepter dans son entier et, à plusieurs occasions, nous lui avons répété qu'il s'était aventuré déjà, lors d'une commission parlementaire, le 28 juin, à nous garantir qu'il nous présenterait, à l'occasion de l'étude article par article de ce projet de loi, cette réglementation, mais avec certaines nuances. Il a justement précisé, avec sa subtilité habituelle, cette nuance avec laquelle il accorderait peut-être, à notre juste revendication, une réponse favorable. Je lis ce que le ministre, du haut de sa gloire, nous avait dit le 28 juin: "J'ai déjà indiqué que la réglementation, si elle n'est pas déposée dans tous ses détails, serait très certainement discutée à fond lors de l'étude du

projet de loi article par article en commission élue. Il ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté une fois que la loi sera acceptée".

M. le Président, nous sommes rendus en commission élue pour étudier article par article ce projet de loi. Le ministre nous a affirmé qu'il ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté. La motion du député de Saint-Jacques avait pour but de demander le dépôt des règlements et le ministre nous a affirmé tantôt — non pas d'une façon verbale, mais par un geste de la tête — qu'ils étaient prêts. Il n'a pas osé le dire dans le micro, mais j'ai senti tantôt qu'il voulait affirmer qu'ils étaient prêts ou presque prêts. A ce moment-là, il a pris souvent sur lui l'initiative de nous interrompre pour nous dire que ce n'était pas la réglementation dans son entier qu'il voulait déposer, que ce n'était pas une réglementation finale qu'il pouvait nous présenter. D'ailleurs, le ministre de la Justice nous a dit jusqu'à quel point c'était illogique de demander une réglementation finale. Nous sommes d'accord avec lui, c'était un euphémisme. On ne peut pas demander le dépôt d'un règlement qui serait considéré comme final parce que nous n'avons même pas adopté les articles du projet de loi.

Cependant, l'objectif que nous voulons atteindre — je m'en viens bien — par la motion principale va être le même par la motion d'amendement et, à ce moment-là, le ministre ne pourra jamais dire que nous ne voulons pas collaborer puisque nous nous rapprochons des intentions mêmes du ministre qui nous a affirmé, au début des travaux de cette commission parlementaire, qu'il serait prêt à nous donner les principes directeurs. Peut-être que cela ne pourra pas satisfaire complètement le député de Saint-Jacques, qui, lui voulait la règlementation complète, mais peut-être que, du fait qu'on aurait au moins les principes directeurs, nous serions à même d'avoir un éclairage un peu plus complet, un peu plus direct que simplement en étudiant les articles de ce projet de loi qui nous réfèrent régulièrement à des réglementations dont nous ne verrions même pas les principes directeurs et encore moins les articles précis de cette réglementation.

M. le Président, si nous voulions avoir un meilleur débat et si nous voulions garder le caractère serein que nous nous sommes engagés à conserver durant cette commission, il fallait, de notre côté, faire un pas en avant vers ce monarque qui, devant nous, s'apprêtait à descendre lui-même d'un palier.

Nous avons fait un pas en avant et nous espérons que le ministre, quand il aura entendu les arguments que nous allons lui présenter, nous permettra peut-être d'accéder à ces principes directeurs. Mais je ne voudrais pas qu'il écrive sur une même page les principes directeurs, parce que nous voulons un éclairage beaucoup plus complet, et qu'il nous retranscrive un résume de ce qu'il a certainement sur papier, quelque part, dans son ministère, un résumé de ces principes directeurs qui l'ont guidé dans la rédaction de cette lumineuse loi 22 qui a éclairé tellement peu de personnes que près de 148 groupes organisés sont venus demander un éclaircissement encore plus précis. Nous sommes, comme le disait si bien un des ministres tantôt, en train de faire de la législation à la française, c'est-à-dire des principes généraux qui sont expliqués dans un projet de loi initial, qui se concrétisent par une réglementation abondante, soutenue, volumineuse, complète, et qui pourraient nous amener à un projet de loi réellement étoffé, pas nécessairement selon les besoins de la population, mais étoffé. Si nous passons par ce qu'on appelle une loi-décret, il faut, au moment où les députés â cette commission auront à discuter de la raison — comme le disait si bien mon éminent confrère qui aura certainement quelque chose à dire tantôt — de la quintessence de cette présentation, il faut nécessairement que nous...

M. BOSSE: II dit n'importe quoi. M. LEGER: Vous avez d'autres...

M. BOSSE: II dit n'importe quoi, pour autant qu'il parle, ce n'est pas grave.

M. LEGER: On me suggère même la moelle substantielle.

M. BOSSE: La moelle, pour vous autres, c'est... n'importe quoi, pour autant que vous dites quelque chose et que ça tue le temps, c'est bon.

M. LEGER: La moelle substantielle. M. le Président, pour revenir au sérieux du débat, nous allons au-devant du ministre et nous présentons un amendement de compromis. Si la réglementation n'est pas prête, au moins les principes directeurs pourraient nous être soumis ce soir. Je pense que ça va satisfaire non pas uniquement les députés de l'Opposition mais même certains députés du gouvernement.

M. BOSSE: Parlez en votre nom, ça va suffire.

M. LEGER: Hier, j'ai écouté avec attention les déclarations d'un député du côté ministériel qui a voté contre le projet de loi et une des raisons pour laquelle il a voté contre, entre autres, c'est qu'il n'était pas au courant de la réglementation ainsi que des amendements qui seraient présentés avec cette loi et il disait que tant qu'il ne pouvait pas être au courant de cette réglementation, ni des amendements, il ne pouvait pas, en conscience, voter pour ce projet de loi.

M. le Président, c'est une raison supplémentaire, c'est donc dire que la présentation des principes directeurs de ce projet de réglementation va éclairer non seulement les députés de

l'Opposition mais même des députés ministériels. Cela va permettre justement de répondre aux appréhensions de ces groupes qui sont venus se présenter devant la commission parlementaire.

J'expliquais, lors de la présentation de la motion principale, certaines préoccupations de ces groupes intermédiaires. Il y a d'autres préoccupations, M. le Président, qui pourraient peut-être être résolues, ou peut-être pourrait-il y avoir des réponses à ces préoccupations si nous avions les principes directeurs qui ont guidé la réglementation.

Entre autres, si on regarde l'ensemble des mémoires francophones qui ont été présentés à la commission parlementaire, ils provenaient de milieux très diversifiés. Nous avions des mémoires qui venaient du monde de l'enseignement, du monde du syndicalisme, du monde des affaires, des sociétés nationales de Québécois, tandis que les mémoires anglophones provenaient en très forte majorité d'une seule source, soit le monde de l'enseignement.

Nous avons aussi remarqué que les mémoires qui demandaient un éclaircissement touchaient surtout le retrait du projet de loi. D'ailleurs, le ministre n'a pas été sans remarquer que 54 mémoires réclament le retrait du projet de loi, et que 43 mémoires expriment que leurs auteurs sont entièrement en désaccord. Ainsi, 66 p.c. n'acceptent pas le projet de loi 22.

M. le Président si, par hasard, nous avions eu ce que le ministre pourrait nous donner ce soir, c'est-à-dire les principes directeurs qui guident cette réglementation, peut-être que plusieurs de ces auteurs de mémoires pourraient avoir un plus grand éclaircissement et accepter peut-être certaines corrections à certains articles.

Ce qui m'a frappé dans l'ensemble de ces mémoires, c'est que dans 34 p.c. des autres mémoires, 28 p.c. se disent partiellement en accord ou en désaccord sur l'ensemble du projet. A ce moment-là, ces gens, qui ont exprimé un désaccord partiel, peut-être deviendraient-ils d'accord sur le projet de loi du ministre, si on connaissait les principes directeurs qui dirigent ces règlements.

Or, 87 mémoires ont précisé que l'ensemble de la loi devait être modifié; 38 mémoires ont précisé que le chapitre sur la langue d'enseignement doit être refait. Ceux qui demandent une telle modification s'ajoutent à ceux qui ont précisé que l'ensemble de la loi doit être modifié. 74 p.c. des mémoires francophones rejettent le projet de loi; c'est grave, M. le Président. 52 p.c. des mémoires anglophones font de même.

Quand on regarde cela, ça peut nous frapper. Il n'y avait aucun mémoire francophone ou anglophone qui était entièrement d'accord ou presque sur le projet de loi 22. Cela commence à être grave, soit, devant cette constatation, qu'aucun mémoire ni francophone ni anglophone était entièrement d'accord ou presque.

C'est donc dire, M. le Président, que le ministre ne peut pas refuser de présenter au moins les principes directeurs de cette réglementation. 21 mémoires francophones et 13 mémoires anglophones étaient partiellement en accord ou en désaccord. Donc, nous y gagnerions tous si nous étions capables de présenter à ces personnes l'éclaircissement provenant de ces principes directeurs. 35 mémoires francophones étaient complètement en désaccord et 7 mémoires anglophones l'étaient également, ce qui fait 43 mémoires. 47 mémoires francophones demandent le retrait complet et 7 mémoires anglophones, pour un total de 54, demandent le retrait complet.

Je pense que le ministre ne doit pas sous-estimer la valeur de ces statistiques provenant des intentions, des travaux, des recherches, des conclusions présentés par un groupe nombreux de citoyens de toutes les couches et de toutes les sources imaginables qui sont venus, soit présenter eux-mêmes le mémoire, soit déposer leur mémoire. Le ministre ne peut pas, en toute déférence pour la collectivité québécoise, qu'elle soit francophone ou anglophone, refuser, et accepter de nous faire passer l'étude d'un projet de loi, si controversé par cette couche de la population que j'ai appelée tantôt "les faiseurs d'opinion", les personnes qui représentent des groupes énormes, qui touchent une couche de la population grandement affectée par les conséquences néfastes d'un projet de loi qui pourrait être présenté dans sa forme actuelle.

Il est donc essentiel, M. le Président, que le ministre réalise l'importance de ne pas se draper dans son milieu en disant: Je ne puis absolument pas présenter mes principes directeurs, parce que j'ai décidé de le faire en temps opportun.

M. le Président, j'espère que les arguments que j'ai présentés devant le ministre vont lui faire réaliser que le temps opportun pour une commission qui se veut éclairée, qui se veut capable de discuter en connaissance de cause de chacun des articles de ce projet de loi, une commission dont le rôle ou le mandat lui a été donné par l'Assemblée nationale de légiférer sur un projet de loi qui peut être le projet de loi du siècle aussi bien à cause de ses conséquences néfastes qu'à cause de ses conséquences heureuses, selon...

M. BOSSE: Qui?

M. LEGER: ... les corrections que nous pourrions y apporter...

C'est la raison pour laquelle je pense que le ministre va réaliser jusqu'à quel point il est important que nous étudions dans la sérénité, dans l'éclaircissement que nous apporterait sa contribution, le projet de loi 22 et que nous ayons l'occasion d'avoir une discussion franche, énergique, valable, conséquente avec nous-mêmes, pour pouvoir discuter en connaissant les implications de chacun des articles qui vont

venir devant nous sur cette table, parce que nous aurons devant nous, au départ, avant même d'avoir touché à l'article 1 de ce projet de loi, la logique, la constante que nous découvrirons devant ces principes directeurs. Des principes directeurs, qu'est-ce que cela veut dire? Je sais que le député de Dorion se pose des questions sur les principes directeurs.

M. BOSSE: Non pas sur les principes directeurs, c'est sur le vocabulaire et les répétitions que vous faites continuellement. Quand ce n'est pas un, c'est l'autre, évidemment, c'est le jeu du "filibustering", comme dirait le chef de l'Opposition...

M. MORIN: M. le Président, on nous prête des intentions.

M. BOSSE: C'est là-dessus que je me pose des questions.

M. MORIN: C'est vous qui interrompez le député.

M. BOSSE: Avant d'arriver à l'article 1, M. le Président, pour répondre au député de Lafontaine, je me demande combien de temps cela peut prendre, si ce ne serait pas plus logique qu'on y passât le plus rapidement.

M. LEGER: J'essaie de passer les idées et j'ai pensé ne pas toujours répéter.

M. BOSSE: Cela fait cinquante fois que vous vous répétez.

M. LEGER: II y en a peut-être qu'il faut répéter.

M. BOSSE: On commence à les connaître.

M. LEGER: "Vingt fois sur le métier, remettes! votre ouvrage...

M. BOSSE: Ne vous inquiétez point pour le courant.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. LEGER: ... polissez-le et le repolissez sans cesse, ajoutez quelquefois et souvent retranchez". M. le Président, je pense que c'était un fabuliste qui, lui, était le contraire du député actuel, on l'appelait Boileau.

M. BOSSE: Oui, il y a eu aussi le fabuliste Lafontaine et il y a eu aussi le Tartuffe de Molière, que vous êtes, parce que vous êtes un beau ramasseux d'enveloppes comme Tartuffe.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LEGER: Tout ce que j'espère, c'est que dans les enveloppes j'ai ramassé d'autres choses que les arguments du député Bossé.

M. LESSARD: II y a eu aussi les Précieuses ridicules.

M. BOSSE: Lâchez, défoulez-vous les "boys"! Défoulez-vous!

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: M. le Président, quand un député est obligé d'apporter...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Une minute!

M. LEGER: ... des arguments de cette envergure pour arrêter l'Opposition d'exprimer sa façon de concevoir le fonctionnement de tout cela...

M. BOSSE: Je ne veux surtout pas vous arrêter.

M. LEGER: ... pardon?

M. BEDARD (Chicoutimi): Soyez conséquent, si vous ne voulez pas nous arrêter, fermez-vous !

M. BOSSE: Je ne veux surtout pas vous arrêter, mais quand le député de Lafontaine fait mention de mon nom, M. le Président, je crois, avec tout le respect que je vous dois, évidemment...

M. LEGER: Avez-vous demandé la parole? M. BOSSE: Non, vous m'avez interrompu.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce une question de règlement?

M. BOSSE: C'est-à-dire que vous m'avez mentionné dans votre monologue.

M. LEGER: C'est parce que je vous ai devant moi, je ne peux pas vous éviter.

M. BOSSE: A partir de là...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. BOSSE: Evidemment que je suis intéressant, je suis là. Vous m'avez assez fait de reproches de ne pas être là, quand j'y suis, vous me trouvez intéressant.

M. LEGER: Mais oui, justement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: II n'est pas souvent là, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Lafontaine pourrait-il conclure? H lui reste une minute.

M. LEGER: J'avais pris la parole. Vous avez compté le temps que le député de Dorion m'a enlevé?

LE PRESIDENT (M. Gratton): On peut dire deux minutes.

M. LEGER: Deux minutes, M. le Président. C'est suffisant, je. pense bien, M. le Président, pour, de mon côté, apporter l'éclairage qui, dans mon humble opinion, pourrait être suffisant pour convaincre le ministre de l'Education, mais je ne suis pas assuré, parce que la motion principale qu'a présentée le député de Saint-Jacques était claire, normale, acceptable.

Le député et le ministre de l'Education n'ont pas jugé bon, et il a fallu que nous intervenions chacun notre tour et qu'il y en ait cinq qui reviennent avec des arguments supplémentaires. Il fallait même en répéter quelques-uns, parce que le ministre avait échappé certains de ces arguments, il était en train de lire son journal. Alors, il a fallu en répéter quelques-uns. Je l'admets, malheureusement, mais comme on n'a pas pu le convaincre une première fois, on a décidé d'apporter un amendement qui fait moitié chemin. Je pense que le ministre aurait tout intérêt à accepter de déposer les principes directeurs, mais, comme de raison, les principes directeurs devraient être l'ensemble de cette réglementation; autrement dit, s'il y a plusieurs règlements, il n'est pas nécessaire d'avoir la rédaction complète de chacun de ces règlements, mais les principes directeurs de chacun de ces règlements. Je veux être certain que le ministre comprend bien que ce n'est pas une feuille avec quelques lignes qu'on veut avoir dans les principes directeurs, c'est s'il y a tant de règlements... Je me rappelle fort bien que nous avons adopté un autre projet de loi, qui s'appelle le bill 34, sur la qualité de l'environnement, où le ministre de l'environnement — il était là cet après-midi, mais il n'est pas là — nous avait promis une quantité de 200 règlements. Nous en avons eu deux après 18 mois. Alors, vous comprenez qu'on est un peu réticent quand le ministre nous dit qu'il les déposera en temps opportun. Pour le ministre des Affaires municipales et de l'environnement, le temps opportun était 18 mois après, et nous en avons eu deux sur 200. C'est la raison pour laquelle nous avons fait une motion. Est-ce que mon temps achève?

LE PRESIDENT (M. Gratton): II est écoulé.

M. LEGER: Alors, je conclus que c'est la raison...

M. SAINT-GERMAIN: Question de règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Jacques-Cartier sur une question de règlement.

M. SAINT-GERMAIN: Extrêmement positif, extrêmement constructif, cela m'intéresse énormément. Je crois qu'on devrait en toute sincérité lui donner un 20 minutes de plus pour qu'il puisse vider la question.

M. LEGER: Je n'ai pas d'objection. Si vous avez le consentement unanime, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que c'est là le voeu...

M. SAINT-GERMAIN: Non, en démocratie, le droit de parole appartient au député. Je crois que limiter un député si brillant à 20 minutes, c'est absolument contre nos règles.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, est-ce que la commission désire unanimement...

M. CLOUTIER: J'aime mieux donner 20 minutes supplémentaires au député de Maisonneuve, qui est quand même moins endormant que le député de Lafontaine.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Comme il n'y a pas consentement unanime...

M. LEGER: M. le Président, vous savez que la meilleure façon de dormir souvent, c'est quand on se penche sur son nombril, ce qu'on appelle du narcissime. C'est ce que fait souvent le ministre de l'Education. C'est la raison pour laquelle il s'endort, parce qu'il se regarde continuellement.

M. CLOUTIER: Hélas! je n'arrive pas à dormir ici. Ce serait la seule solution.

M. LEGER: Alors, M. le Président, je conclus...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que le député de Lafontaine a terminé?

M. LEGER: ... dans ma dernière phrase; j'espère que j'ai réussi non pas à endormir le ministre, mais à éveiller le ministre à une plus grande démocratie à l'intérieur de cette commission parlementaire par les arguments que j'ai apportés.

M. TARDIF: C'est assez convaincant.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jacques sur la motion d'amendement.

M. CHARRON: M. le Président, je voudrais

d'abord remercier le député de Chicoutimi qui m'a prévenu à l'heure du dfner qu'il avait l'intention d'apporter cet amendement sur la motion que j'ai moi-même présentée.

M. HARDY: C'est cela qui forme l'Opposition.

M. CHARRON: Oui. Je dois dire que la décision que j'avais à prendre n'était quand même pas légère. Je crois même que vous reconnaîtrez qu'en tant que parrain de la motion, si j'avais jugé que la motion présentée par le député de Chicoumimi modifiait en un sens profond la motion que j'avais présentée, j'aurais pu m'opposer à ce qu'elle soit présentée, et ainsi inciter le député de Chicoutimi à en faire une motion à part entière. Pour éviter de faire perdre du temps à la commission, j'ai accepté que le député de Chicoutimi...

M. BELLEMARE: Rigolo!

M. CHARRON: ... inclue dans ma motion cet amendement, qui, je dois le dire, restreint la portée de mon amendement. J'ai soutenu à son appui, lorsque je l'ai présentée et qu'elle a été soutenue par mes collègues, que nous avions besoin, avant de nous prononcer sur l'adoption et la portée réelle de chacun des articles, de connaître la réglementation afférente et qui y est annoncée dans le texte même de l'article. Je vous ai fait mention de ces innombrables appels que l'on retrouve dans le projet de loi et qui disent: Sauf dans la mesure prévue aux règlements. J'ai soutenu à cette occasion que ce pouvoir discrétionnaire que j'essayais d'éliminer du mieux que je pouvais dans l'étude du projet de loi était également dénoncé par les députés anglophones...

M. BOSSE: Ainsi que dans vos directives aux électeurs lors des élections.

M. CHARRON: ... qui ont dénoncé le projet de loi de la même façon que moi.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BOSSE: Oui.

M. CHARRON: Mais j'ai surtout expliqué à mon collègue de Chicoutimi que le député de Dorion ne comprendrait rien en cela, et qu'il faudrait perdre plusieurs minutes à lui expliquer qu'une motion du député de Chicoutimi...

M. BOSSE: Ah! Si vous avez parlé du député de Dorion, M. le Président...

M. CHARRON: ... ne modifiait en rien le... réel.

M. BOSSE: ... le député de Dorion quand même...

M. CHARRON: Je lui ai expliqué la faible portée intellectuelle du député de Dorion, et je lui ai dit...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: ... que le député de Dorion...

M. BOSSE: Parce que le député de Dorion pourrait quand même dire au député de Saint-Jacques qu'il y a une chose qu'il est capable de comprendre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOSSE: Comment cela se fait, des élections honnêtes dans le comté de Dorion? Un chef spirituel du PQ, cela ne lui fait pas peur, non plus.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOSSE: J'invite le député de Saint-Jacques, à part cela, à la prochaine occasion, de changer de comté, à venir s'essayer...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOSSE: Lui qui connaît le peuple, qui aime parler au monde...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BOSSE: ... avec son beau langage fouetté. M. CHARRON: Voyez-vous... M. BURNS: M. le Président...

UNE VOIX: ... parler contre le ministre de l'Education, vous.

M. BURNS: M. le Président, je vais être obligé de demander l'ajournement de la commission si cela continue.

M. BOSSE: ... très certainement au député de Saint-Jacques.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... à l'ordre! M. TARDIF: J'ai mon voyage.

M. BURNS: M. le Président, il se peut qu'on soit obligé de demander l'ajournement de la commission s'il continue à y avoir du désordre là-dessus. Cela ne me surprendrait pas du tout.

M. CHARRON: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Saguenay sur une question de règlement.

M. LESSARD: Est-ce que le député de Dorion voudrait dire comment cela se vole, des élections?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. BOSSE: J'aurai peut-être l'occasion d'apprendre cela ultérieurement, lors des poursuites, s'il y a lieu.

M. LESSARD: C'est cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOSSE: Cela est une façon, mais ce ne sera peut-être pas la façon dont vous pensez. Ce ne sera peut-être pas du côté que vous pensez.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. BOSSE: Vous le savez "sacrement" bien à part cela ... les procédures entreprises. Vous le savez...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: M. le Président...

M. BOSSE: Sub judice.

M. LESSARD: ... bien mal placé pour parler.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, vous voyez, c'est exactement ce que j'ai essayé d'éviter. J'ai dit au député de Chicoutimi, ce soir: Si vous présentez cet amendement sur ma motion, le député de Dorion va se mettre les deux pieds dans les plats, il va embarquer dans la motion, il ne comprendra rien, il va gesticuler, il va apporter toutes sortes d'arguments qui sont hors d'ordre...

M. BOSSE: Comment avez-vous présumé que je serais ici?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: C'est vrai que vous n'y êtes pas tellement souvent.

M. BOSSE: ... j'y suis, cela vous fait de la peine.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOSSE: Est-ce que vous en avez tenu compte durant l'heure du repas, avec votre collègue de Chicoutimi.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! Est-ce que je pourrais demander la collaboration de tous les députés...

M. TARDIF: C'est ce qu'on fait.

LE PRESIDENT (M. Gratton): S'il vous plait, sinon, je devrai suspendre...

M. CHARRON: Je vous comprends, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... ce qui aura sûrement eu l'heur de déplaire à tous les membres de la commission.

M. CHARRON: II est exact, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'invite...

M. BOSSE: ... nous conter ses histoires de l'homme...

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'invite le député de Saint-Jacques à revenir à la motion d'amendement. Qu'il parle sur la motion...

M. BURNS: Peut-être devriez-vous suspendre, M. le Président, pour quelques minutes.

M. CHARRON: Non...

M. BURNS: Afin de donner le temps au député de Dorion de se reprendre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: J'exagérais, M. le Président. Je me soumets à votre rappel à l'ordre. J'exagérais. Evidemment, je ne pouvais pas prévoir, vu son taux moyen de présence à l'Assemblée nationale, que le député de Dorion serait ici.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: Mais je me disais: Le député de Rosemont ne manquera certainement pas l'occasion d'intervenir avec son élégance coutumière, dans le débat.

LE PRESIDENT (M.Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON:... et de dire à mon collègue de Chicoutimi, qu'il n'avait pas intérêt à présenter une motion sur mon amendement.

M. BELLEMARE: M. le Président, parce qu'on vient de me nommer, si vous me permettez, avec l'assentiment de la commission, ce n'est pas une question de règlement, c'est une question de privilège.

M. BURNS: Ah!

M. BELLEMARE: Permettez-moi de dire au député de Saint-Jacques...

M. BURNS: M. le Président, il n'y a pas de question de privilège...

M. BELLEMARE: ... que je ne sombrerai pas dans toutes ces balivernes et ces stupidités.

M. BURNS: II n'y en a pas?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: Parlant de stupidités, M. le Président...

M. BELLEMARE: Parlant de stupidités, M. le Président, regardez le "poodle" de Saint-Jacques.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. CHARRON: Parlant de stupidités, M. le Président, c'est à partir d'une intervention du ministre de l'Education que mon collègue de Chicoutimi...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: ... s'est senti justifié d'amener cet amendement.

UNE VOIX: ... pas d'objection.

M. CHARRON: En effet, M. le Président, le ministre de l'Education, en intervenant sur ma motion, a soutenu, et ce, au prix de toutes les contradictions imaginables...

M. BOSSE: Je me demande s'il est permis de traiter quelqu'un de stupide... Si je me rappelle les expressions à cet effet... Si j'ai bien compris le sens...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: M. le Président, sur la question de règlement...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Si le député de Dorion insiste, ma décision sera la suspension des travaux. S'il insiste à me faire prononcer sur la question de règlement...

M. BURNS: Sur la question de règlement, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Gratton): II n'y en a pas de question de règlement, encore.

M. BOSSE: Oui, c'est-à-dire que j'ai soulevé le point à l'effet que...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Si vous voulez insister là-dessus?

M. BOSSE: Le député de Saint-Jacques...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Parce que je vous avertis tout de suite que je suspens les travaux.

M. BOSSE: Je ne voudrais pas qu'il traite tout le monde de stupide, y compris le ministre de l'Education.

M. BURNS: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous n'insistez pas?

M. BOSSE: Je n'insiste pas...

M. BURNS: M. le Président, sur la question de règlement.

M. BOSSE: Je trouve cela pour le moins malappris.

M. CLOUTIER: II n'y a pas de problème en ce qui me concerne. Les injures abaissent ceux qui les profèrent beaucoup plus que ceux qui les reçoivent.

M. BEDARD: Vous en avez pas mal proféré.

M. CHARRON: II y avait une autre phrase célèbre comme celle-là...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: ... qui disait: La boule de vos injures roule dans le dalot de mon indifférence.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CLOUTIER: Cela veut dire la même chose en style un peu plus populaire.

M. CHARRON: Un peu moins bill 22.

M. CLOUTIER: Je ne trouve pas. Il y a une langue qui s'appelle le français. C'est celle-là que nous voulons protéger.

M. CHARRON: Le député de Rosemont m'invitait à réfléchir sur les stupidités et c'est à partir de cette intervention irrégulière que...

M. BELLEMARE: Cela me fait plaisir parce que j'imagine qu'il va réfléchir sur lui-même.

M. CHARRON: J'étais en train d'expliquer ce pourquoi je crois que le député de Chicoutimi s'est senti justifié d'amener cet amendement. C'est une déclaration du ministre de l'Education. Vous me direz: II faut prendre les déclarations du ministre de l'Education avec tout ce qu'elles valent. On ne sait jamais quand la contradiction sortira dans les minutes qui suivent. C'est vrai. J'ai appris moi-même à m'y soumettre. Mais peu importe. Tant qu'il est le ministre responsable, je suis obligé de prendre

chacune de ses déclarations comme étant celles du gouvernement. Je vous l'ai dit cet après-midi. En attendant donc la prochaine contradiction, je suis obligé de dire que le ministre de l'Education a dit cet après-midi que, nous référant même au journal des Débats — lors de l'étude du projet de loi avec le public que nous avions nous-mêmes invité, que nous avons entendu à moitié — le ministre de l'Education ne s'était pas engagé à déposer l'ensemble des règlements afférents au projet de loi comme ma motion originale viserait à le voir obligé à se rendre à cet engagement aujourd'hui.

Il a soutenu et il nous a défiés de retourner aux débats originaux et à la transcription que le journal des Débats nous rapporte tant bien que mal, qu'il ne s'était engagé, face aux témoins comme face aux membres de la commission parlementaire, à ne déposer qu'à l'ouverture des travaux de la commission plénière, de la commission élue qui remplit le rôle de la commission plénière, les principes directeurs qui le mèneront à rédiger, par la suite, avec l'aide de ses bureaucrates et de ses fonctionnaires, les règlements qui doivent accompagner la loi 22.

Puisque nous devons nous en rabattre sur cette seule hypothèse et sur cette seule possibilité et puisque effectivement c'est le seul engagement qu'a pris le ministre de l'Education face aux membres de la commission, soit, je m'y rends! Mais j'exige, maintenant, comme le député de Chicoutimi, que cet engagement qu'a pris le ministre de l'Education, il s'y soumette aujourd'hui parce que cela serait trop facile de lui permettre de s'en sortir, actuellement.

Combien des fois des gens sont venus à cette table de la commission, ont soutenu des arguments éclairés, très fondés sur une logique qu'ils défendaient à partir de leur expérience quotidienne de la situation du français dans le Québec! Au fur et à mesure qu'ils engageaient un débat que vous avez vous-même, M. le Président, contrôlé à certaines occasions, et un échange quant à leur conception et à celle du ministre de l'Education, le ministre quittait soudainement le sentier de la discussion pour se rabattre dans je ne sais quelle forêt de contradictions et pour nous dire, par la suite: De toute façon, j'éclairerai la commission en temps et lieu. Ce n'est pas l'endroit pour avoir un débat. Lorsque le temps sera venu, je déposerai tout ce qu'il faut, y compris les principes directeurs qui devront accompagner la réglementation.

Nous prenons ce soir et le député de Chicoutimi m'a prié de prendre ce soir à la lettre la parole du ministre de l'Education. J'ai essayé de convaincre mon collègue de Chicoutimi qu'il ne faut jamais prendre à la lettre le ministre de l'Education. Mon expérience quotidienne de critique de l'éducation pour l'Opposition officielle me l'a appris combien de fois!

Combien de fois je l'ai vu annoncer des choses et les rétracter par la suite, se contredire devant un public anglophone ou devant un public francophone? Mais mon collègue de Chicoutimi m'a dit que nous avions, en toute justice et en toute participation légitime à ce jeu démocratique de la commission parlementaire, l'obligation de nous fier à une parole de ministre. J'en conviens.

J'accepte que l'amendement présenté par le député de Chicoutimi ne change en rien ma motion, mais elle n'en est que plus légitime et que plus fondée puisqu'elle repose même sur un engagement du ministre de l'Education. Le député de Lafontaine, dans son intervention à l'appui du député de Chicoutimi, s'est habilement entretenu avec la commission de ce qu'est la portée réelle de principes directeurs. En fait, c'est une notion qu'il reste encore à éclaircir entre nous parce que cela fait partie du vocabulaire et des expressions que multiplie le ministre de l'Education devant chacun des phénomènes. Il se disait hier incapable de définir le concept de langue maternelle, alors qu'on apprend qu'un amendement du ministre de l'Education s'apprête à inclure ce concept dans la loi. Je comprends donc très bien que nous devons essayer de scruter exactement la portée réelle de cette expression.

A mon avis, un principe directeur d'une réglementation — c'est ce que le ministre a semblé soutenir — veut dire que les bornes et les limites de cette réglementation sont déjà clairement établies dans l'esprit du ministre législateur — c'est-à-dire le terrain exact où l'article de la loi que nous sommes appelés à voter devra s'établir sans exception, avec rigueur, avec portée réelle, sinon l'article ou la loi ne voudra rien dire — sont déjà, dans l'esprit du ministre de l'Education, parrain de cette loi à la place du premier ministre, très bien définies dans son esprit. Autrement dit, il n'y a pas un article dans le projet de loi qui n'est pas déjà, dans sa conception — le terrain sur lequel il va s'étendre et s'appliquer — parfaitement défini.

Cela, M. le Président, l'Opposition est parfaitement légitimée, ce soir, d'exiger que ce terrain soit défini avant que l'on entreprenne, article par article, l'étude du projet de loi. Que l'on ne nous soumette pas la rédaction précise de chacun des règlements — le ministre nous a dit que c'était à cette époque impossible, puisqu'il y a certains des règlements qui ne s'appliqueront que dans quelques mois, d'autres, par contre, s'appliqueront dès septembre 1974 — j'en conviens. Mais nous sommes en mesure de savoir ce soir et d'exiger du ministre de l'Education, à la demande du député de Chicoutimi, avant même que nous abordions l'étude du préambule du projet de loi et de son article premier, quelle est la portée réelle et quel est le terrain sur lequel portera chacun des amendements. Lorsque nous saurons quelles seront les personnes visées par la réglementation et de quelle façon ces personnes seront visées par la réglementation, soit, ma motion deviendra caduque et ces renseignements suffiront très certainement, sans que nous ayons le texte très

précis des règlements, à pouvoir permettre aux membres de l'Opposition d'en apprécier la portée réelle. Mais nous ne pouvons pas entreprendre l'étude d'un projet de loi qui fait aussi souvent référence à une réglementation ultérieure, encore à venir dans ce domaine, sans que nous en connaissions les principes directeurs.

Là-dessus, M. le Président, je n'ai plus fidèle appui et plus fidèle secondeur à cette motion et le député de Chicoutimi n'a pas meilleur secondeur à sa motion d'amendement que le ministre de l'Education lui-même qui, par cinq, dix ou quinze fois, devant la soixantaine d'organismes que nous avons entendus sur les 150 qui avaient demandé â être entendus, a donné la promesse formelle et l'engagement formel, lorsqu'il se "défilait" d'un débat, que toutes ces choses seraient déposées à la table de la commission parlementaire lorsque le temps viendrait.

C'est donc pourquoi, M. le Président, même si le député de Dorion n'y comprend rien, même si le député de Rosemont est dépassé par la discussion que nous sommes en train d'avoir...

M. BELLEMARE: M. le Président, question de privilèges. Je veux féliciter le député de Saint-Jacques de me citer. C'est donc dire qu'il me craint...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BELLEMARE: ... et je l'en remercie.

M. CHARRON: M. le Président, dans cette crainte terrible que l'intelligence du député de Rosemont se mette soudainement à l'oeuvre...

M. BELLEMARE: Cela fait longtemps qu'on l'a, le peuple l'a dit.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: Et qu'elle contribue, encore une fois, à embrouiller notre débat...

M. BELLEMARE: Continue sur...

M. CHARRON: J'exige donc immédiatement, à l'appui de la motion présentée par le député de Chicoutimi, que ces principes directeurs qu'encore une fois et très sérieusement s'est engagé à déposer le ministre de l'Education devant plus d'un organisme québécois que nous avions nous-mêmes convoqués à cette table, que ces principes directeurs, tels qu'ils ont conduit ou conduiront le ministre à rédiger sa réglementation, soient immédiatement déposés sur la table de la commission parlementaire. Ceci parce que ça facilitera notre travail de législateurs et notre appréciation de la portée réelle de chacun des articles du projet de loi, mais aussi parce que cela aura le don de raccourcir de façon étonnante nos débats. Nous n'aurons pas besoin de réclamer à chacun des articles, de revenir au sens et au pouvoir discrétionnaire et à la portée réelle des pouvoirs discrétionnaires que se réserve le ministre de l'Education. Avant même que nous entamions l'étude du projet de loi, article par article, il se sera soumis à la demande de la commission qui, en épaulant la demande du député de Chicoutimi, l'aura en-quis à soumettre à cette commission les principes directeurs de la réglementation incroyable et injustifiable lorsqu'on considère le terrain sur lequel elle s'appliquera. Le ministre de l'Education et ses fonctionnaires se gardent le droit d'émettre dans un domaine qui touche les droits fondamentaux de la collectivité québécoise et les droits individuels — pour reprendre son vocabulaire — des minorités, qui, chez nous, ne partagent pas notre culture et notre langue. Je crois donc que cette motion du député de Chicoutimi n'altère en rien, au contraire, la portée de la motion que j'avais présentée et je voterai donc en faveur de l'amendement présenté par le député de Chicoutimi.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saguenay, sur la motion d'amendement.

M. LESSARD: M. le Président, j'appuierai la motion d'amendement du député de Chicoutimi, quoique, j'avoue bien honnêtement aussi, à l'instar des députés de Dorion et de Rosemont, je n'y comprends plus rien.

M. BOSSE: De toute façon, il écoeurait le monde...

M. BELLEMARE: M. le Président, je crois que le député de Chicoutimi présuppose. Lui, il ne comprend rien, nous autres, ça fait longtemps qu'on a compris.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: Foi de braconnier, M. le Président, j'en perds mon latin.

UNE VOIX: II l'avoue, il l'avoue.

M. LESSARD: II est vrai que, comme je l'ai indiqué en deuxième lecture de ce projet de loi, je n'ai malheureusement pas la prétention pompeuse du ministre de l'Education de pouvoir m'exprimer dans un langage châtié. Je n'ai pas eu l'avantage, moi, parti des forêts de la Côte-Nord, de faire mon bachot. J'ai fait simplement mon baccalauréat ès arts. Je vous avoue que, lorsque le député de Chicoutimi est arrivé avec cette motion d'amendement, j'avais besoin d'explications, parce que le député de Saint-Jacques avait proposé, avant la suspension des séances de la commission parlementaire cet après-midi, une motion qui m'apparaissait assez claire, à savoir le dépôt de la réglementation. Cette motion allait justement dans les intentions du ministre de l'Education lorsque, le 28 juin...

M. TARDIF: II est intelligent.

M. LESSARD: ... 1974, il avait indiqué en commission parlementaire son intention de déposer la réglementation. "J'ai déjà indiqué, disait le ministre, que la réglementation, si elle n'est pas déposée dans tous ses détails, sera très certainement discutée à fond lors de l'étude du projet de loi, article par article, en commission élue. Il ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté une fois que la loi sera acceptée." Pour moi, le dépôt de la réglementation, tel que le demandait le député de Saint-Jacques, m'apparaissait très clair et je comprenais un peu de quoi le ministre voulait parler.

Mais il semble, d'après les explications que le député de Chicoutimi m'a données au cours du déjeuner, que le ministre, à la fin de la séance de la commission parlementaire cet après-midi, ait laissé entendre que, s'il n'avait pas l'intention de déposer toute la réglementation, il avait au moins l'intention de déposer les principes directeurs.

C'est donc à partir de cette bonne intention que nous avons modifié ou que nous avons accepté de modifier la motion du député de Saint-Jacques afin d'accepter, dans ces termes mêmes, la motion du député de Chicoutimi, mais qui, semble-t-il, avait presque été acceptée par le ministre de l'Education...

UNE VOIX: Ah!

M. LESSARD: ... puisque le ministre de l'Education avait, semble-t-il, laissé entendre qu'il était prêt à accepter le dépôt des principes directeurs. M. le Président, au cours de la discussion que nous avons entreprise, avant la suspension des travaux pour le déjeuner, j'avais eu l'occasion de faire remarquer au ministre la nécessité de déposer sa réglementation, étant donné qu'une quantité d'articles de ce projet de loi faisaient mention de cette réglementation.

Le ministre, semble-t-il, ne veut pas accepter notre argumentation selon laquelle — si nous voulons véritablement être capables de juger du principe même de ce projet de loi, de l'efficacité même de ce projet de loi ou de son inefficacité — il était nécessaire pour nous, de l'Opposition, d'obtenir cette réglementation.

Mais, je comprends que le ministre de l'Education puisse tenter de tromper un homme du nord, comme le député de Saguenay, qui est beaucoup plus habitué à vivre en forêt que dans la jungle de l'Assemblée nationale. C'est pourquoi je me suis rattaché...

M. TARDIF: C'est du braconnage. Parlez du braconnage.

M. LESSARD: Et je pourrais vous en parler du braconnage puisque, justement, ce gouvernement a imposé aux Québécois de devenir des braconniers...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: ... parce que le ministre lui-même...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: ... du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche sait faire, personnellement...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: ... à l'intérieur du territoire du Québec, pour se créer de propres territoires...

M. TARDIF: Est-ce que c'était une "22"?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. LESSARD: ... et avoir sa propre rivière à saumon.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pertinence. M. LESSARD: Mais, M. le Président... LE PRESIDENT (M. Gratton): Pertinence. M. LESSARD: ... le député de... M. TARDIF: De Saint-Jean.

M. LESSARD: Ne me mêle pas. Pas le député de Saint-Jean. Le député d'Anjou m'invite à parler d'une chose que je connais.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : II ne faut pas l'écouter.

M. LESSARD: Et d'une chose que j'aime, M. le Président. Je l'aime d'autant plus...

M. BOSSE: II aime tout.

M. TARDIF: As-tu été arrêté?

M. LESSARD: ... que je suis obligé de le pratiquer, étant donné que le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche me l'impose. Malheureusement, cela ne mord plus de ce temps-ci, je suis pris. Mais le ministre de l'Education mord assez bien.

Nous allons revenir à la discussion sérieuse de ce projet de loi et parler de la nécessité d'obtenir les principes directeurs, tel que semble l'avoir accepté le ministre de l'Education actuel, suite à la proposition de la motion du député de Chicoutimi.

Je disais donc, M. le Président, que dans ce projet de loi...

UNE VOIX: La pêche aux vers.

M. LESSARD: Non, au saumon, nous pêchons à la mouche. J'ai l'impression que le

depute de Rosemont, ce soir, est comme un saumon, il est entre deux eaux.

M. BELLEMARE: Pardon, monsieur. M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BELLEMARE: Question de privilège! LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BELLEMARE: Question de privilège, ce n'est pas moi du tout.

M. LESSARD: Je m'excuse, c'est le député de Jacques-Cartier. Je retire mes paroles.

M. BELLEMARE: Et je demande au député de Saguenay de retirer ses paroles.

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est déjà fait.

M. LESSARD: Je retire mes paroles, sur le champ.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que le député de Saguenay me premettrait une question?

M. LESSARD: Oui, allez-y.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Tantôt, vous m'avez demandé si j'avais besoin d'un chronomètre. Au début de votre intervention, je me suis demandé si c'est réellement d'un chronomètre qu'on a besoin ou d'un calendrier.

M. LESSARD: Pourquoi, M. le Président? Bien d'accord, c'est commencé, M. le Président. De toute façon, jusqu'au temps où la chasse à l'orignal va commencer, je suis prêt à être ici à la commission parlementaire. Malheureusement, quand la chasse à l'orignal va commencer, cela va être difficile de me retenir.

UNE VOIX: II va aller au "spotlight"!

M. LESSARD: D'ailleurs, j'ai un problème depuis un certain temps. Quantité de libéraux me demandent du saumon.

M. HARDY: Nommez-les.

M. LESSARD: Qu'on me permette au moins d'avoir la possibilité d'aller pêcher! D'accord, M. le Président. Revenons. Si ce n'étaient des interventions inopportunes des députés libéraux, je suis assuré que j'en serais resté aux principes directeurs. J'y reviens. Je disais, avant la suspension du déjeuner, que j'avais eu l'occasion de démontrer au ministre combien il était nécessaire d'obtenir cette réglementation afin de pouvoir juger de l'application de chacun des articles de ce projet de loi et, en particulier, des articles où on constate une référence à la réglementation.

Mais le ministre de l'Education a décidé, au lieu de parler de réglementation, de parler de principes directeurs. J'en conviens et je ne veux pas ici discuter de sémantique. Je sais que le ministre de l'Education s'y connaît beaucoup mieux que moi dans ce domaine. Je voudrais parler des principes directeurs et. démontrer ce soir, à cette commission parlementaire, combien il est nécessaire, pour le ministre de déposer ces principes directeurs, combien il est absolument nécessaire pour l'Opposition officielle d'obtenir ces principes directeurs afin de pouvoir juger de ce projet de loi et des articles de ce projet de loi.

Lorsque le député de Saint-Jacques a présenté sa motion, à la défense de cette motion, nous avons affirmé que la réglementation faisait corps avec ce projet de loi, que, sans cette réglementation ou sans la connaissance de cette réglementation, il nous était extrêmement difficile de juger de ce projet de loi.

D'ailleurs, nous avons affirmé, justement à la suite d'autres députés et d'autres organismes qui sont venus ici présenter des mémoires à la commission parlementaire, qu'il était absolument nécessaire de connaître cette réglementation.

Hier, j'ai écouté, lors de la discussion en deuxième lecture de ce projet de loi, certains députés libéraux qui affirmaient qu'en deuxième lecture, ils ne pouvaient voter pour ce projet de loi tant et aussi longtemps que la réglementation n'était pas connue. Or, cette réglementation est maintenant devenue les principes directeurs et je pense que, si nous pouvons obtenir le dépôt de ces principes directeurs, il y aura certainement une discussion plus rationnelle à cette commission parlementaire et il y aura sûrement quantité de questions auxquelles nous recevrons des réponses par le dépôt de ces principes directeurs, en particulier lorsque nous discuterons de l'article 34 de ce projet de loi.

Nous constatons, à l'article 34, que "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut aussi, par règlement" et, selon les termes du ministre, en relation avec les principes directeurs, si vous voulez, "décréter que soient préférées à leurs concurrents les entreprises titulaires du certificat prévu à l'article 32 à l'occasion de l'attribution, par l'administration publique, de contrats d'achat, de service, de location ou de travaux publics".

On sait que l'article 32 de ce projet de loi prévoit que le ministre pourra décerner un certificat honorifique, maintenant, aux compagnies multinationales qui accepteront de parler le langage de l'indigène, c'est-à-dire la langue française.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saguenay me permettra de lui rappeler qu'il doit parler sur la motion d'amendement.

M. LESSARD: Je parle de la motion, M. le Président, parce que...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Cela ressemble énormément à la façon dont, cet après-midi...

M. LESSARD: ... comme le dit le député de Saint-Jacques, avant la suspension... Je n'ai pas parlé de l'article 34, ni de l'article 40, ni de l'article 43, ni de l'article 51, ni de l'article 63, ni de l'article 64. Ce dont j'ai parlé, c'est de l'article 14, de l'article 21 et de l'article 32. Vous me permettrez, tel que l'a exprimé le député de Saint-Jacques, de dire qu'en ce qui nous concerne...

Sinon, si on délaisse les termes pompeux du ministre de l'Education en ce qui nous concerne, — d'ailleurs c'est sa façon de s'exprimer — la motion ou l'amendement qui est présenté par le député de Chicoutimi nous apparaît réfléter en tout cas les demandes que nous avions faites lorsque le député de Saint-Jacques avait fait sa motion concernant le dépôt de la réglementation. Mais comme, depuis, le ministre a accepté de modifier en fait ses termes et de parler plutôt de principes directeurs que de réglementation, nous acceptons d'aller sur le terrain du ministre et nous acceptons les termes mêmes de principes directeurs plutôt que de réglementation.

Or, en quoi, M. le Président, les principes directeurs du ministre de l'Education peuvent-ils modifier l'interprétation de l'article 34, selon lequel il est possible pour autant qu'une compagnie du Québec aura obtenu un certificat honorifique du bon parler français, en quoi les principes directeurs permettront-ils à cette compagnie d'obtenir soit des contrats d'achat, de services de location ou des travaux publics? Nous avons aussi un excellent article à 40, où on parle d'étiquetage. Je ne veux pas parler de ce qui est actuellement devant les tribunaux, suite à certaines procédures intentées par des citoyens québécois concernant la Loi de l'étiquetage, mais nous avons à l'article 40 du projet de loi 22 un article concernant l'étiquetage. Nous doutons encore une fois que le ministre pourra faire appliquer cet article, étant donné qu'actuellement la Loi de l'étiquetage à Québec est contestée devant la cour d'Appel, je crois, par une grande chaîne de magasins, la compagnie Dominion.

Quoiqu'il en soit, nous reconnaissons les bonnes intentions et les bons voeux du ministre actuel de l'Education. Il est dit à l'article 40: L'étiquetage des produits doit se faire en français, sauf dans la mesure prévue par les règlements. Je comprends, étant donné que, pour nous, l'amendement que nous présentons nous apparaît être à peu près celui que nous avions présenté ou qu'avait présenté le député de Saint-Jacques, que le ministre veut dire à l'article 40, "sauf dans la mesure prévue par les principes directeurs". Il est donc important, avant de s'engager dans l'étude de l'article 40, de pouvoir juger en quoi les principes directeurs pourront permettre aux Québécois d'intenter même des procédures ou aux Québécois de pouvoir faire respecter cet article 40. On dit: Il en est de même des certificats de garantie et des notices qui accompagnent les produits, ainsi que des menus et cartes de vins. Encore là, nous aimerions savoir en quoi les principes directeurs vont pouvoir influencer les restaurants à émettre une carte de vins qui soit avec des instructions en français.

M. le Président, si nous continuons, nous constatons qu'à l'article 43 on parle de l'affichage public. Nous avons déjà eu l'occasion à l'Assemblée nationale de parler d'une loi de l'affichage public, et on sait que cette loi fut retirée, suite à un amendement du Parti québécois selon lequel il était important que, dans l'affichage public, on puisse au moins énoncer la priorité de la langue française. L'article 43 de ce projet de loi 22 revient avec une politique d'affichage public qui, selon cet article, doit se faire en français ou à la fois en français ou dans une autre langue, sauf dans la mesure prévue par les règlements. Encore là, si je comprends bien l'interprétation du député de Saint-Jacques, lorsqu'il parlait tout à l'heure des principes directeurs qui équivalaient, en fait, aux règlements, je devrais donc lire l'article comme suit: Sauf dans la mesure prévue par les principes directeurs que le ministre a l'intention de nous déposer.

Encore là, M. le Président, comment voulez-vous que nous, de l'Opposition, nous puissions accepter un tel article, alors que nous ne connaissons pas ces principes directeurs, alors que nous ne connaissons pas ces règlements? Il importe, je pense, à l'Opposition de pouvoir savoir si l'objectif qui est visé à l'article 1 se maintient dans les 129 articles qui suivent dans le projet de loi 22.

Encore à l'article 51, lorsqu'on parle des fameux tests pour s'assurer que les élèves ont une connaissance suffisante de la langue d'enseignement pour recevoir l'enseignement dans cette langue... On dit à l'article 51: "Le ministre de l'Education peut cependant, conformément aux règlements, imposer des tests pour s'assurer que les élèves ont une connaissance suffisante de la langue d'enseignement pour recevoir l'enseignement dans cette langue". M. le Président, encore selon l'interprétation du député de Saint-Jacques, je devrais lire: Le ministre de l'Education peut cependant, conformément aux principes directeurs, imposer des tests pour s'assurer que les élèves ont une connaissance suffisante de la langue d'enseignement pour recevoir l'enseignement dans cette langue.

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. LESSARD: M. le Président, cet article est fort important. Je termine...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre des Affaires culturelles sur une question de règlement.

M. LESSARD: Oui, M. le Président.

M. HARDY: Evidemment, M. le Président, je ne vous demanderai pas de rappeler à l'ordre le député de Saguenay, ce serait inutile. Mais je voudrais bien, par exemple, que l'on constate que ce que fait actuellement le député de Saguenay est totalement irrégulier, antiréglementaire, il ne parle pas de la motion. Son parti ne veut pas étudier l'article 1, mais il est rendu à étudier toutes sortes d'autres articles...

M. LESSARD: Non, M. le Président.

M. HARDY: ... postérieurs. M. le Président, encore une fois, je veux simplement...

M. LESSARD: Le Jean-Noël Tremblay, M. le Président.

M. HARDY: Oui, oui. Jean-Noël Tremblay. Il vous fatigue bien. Avez-vous... Est-ce qu'il hante vos rêves?

M. LESSARD: Cela porte à la tête d'être ministre des Affaires culturelles.

M. HARDY: M. le Président, tout ce que je voulais souligner, et je pense que c'est important qu'on le souligne, au moins pour que les gens d'en face se rendent compte qu'on s'aperçoit de leur jeu...

M. LESSARD: Vous commencez à vous en apercevoir? Vous êtes donc naifs !

M. HARDY: Ce que fait actuellement le député de Saguenay est totalement irrégulier, illégal...

M. LESSARD: A quoi? Expliquez-moi cela.

M. HARDY: Vous...

M. LESSARD: Vous savez, moi, je sors de la forêt. Ecoutez...

M. HARDY: Oui, cela paraît.

M. LESSARD: ... la jungle législative, la jungle de...

M. HARDY: M. le Président, le député de Saguenay n'est pas obligé d'accentuer certains caractères.

M. LESSARD: Non, j'aimerais avoir des explications, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Si vous voulez conclure.

M. LESSARD: Je n'ai pas compris.

M. HARDY: ... que vous ne refusez aucun moyen pour atteindre vos fins partisanes, même l'illégalité, l'illégalisme...

M. BEDARD (Chicoutimi): Est-ce qu'il y a un moyen illégal?

M. HARDY: Oui, c'est illégal.

M. BEDARD (Chicoutimi): Soulevez un point de règlement, après cela, si c'est illégal, le président va l'accepter.

M. LESSARD: Je pense, M. le Président...

M. HARDY: M. le Président, je n'ai pas besoin du pseudo-avocat de Chicoutimi pour savoir ce qui est légal ou illégal.

M. BEDARD (Chicoutimi): Cela ne m'inquiète pas.

M. LESSARD: Regardez! Vous savez...

M. HARDY: Je vous ai souligné, M. le Président...

M. LESSARD: ... qu'il prend les habitudes du ministre de l'Education.

M. BEDARD (Chicoutimi): Laissez faire vos invectives et soyez conséquent avec ce que vous avancez.

LE PRESIDENT (M.Gratton): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, le ministre des Affaires culturelles prétend qu'on est dans l'illégalité.

M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Qu'il soulève un point de droit et vous en déciderez, M. le Président, sinon, je ne vois pas ce qu'il a à faire dans le débat.

M. HARDY: Non, M. le Président, j'ai bien précisé. Vous n'écoutez pas. J'ai souligné...

M. BURNS: J'invoque le règlement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Si vous voulez dire à tout le monde qu'on prend des moyens dilatoires, vous êtes le dernier à vous en apercevoir.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre d'Etat aux Transports, sur une question de règlement.

M. BERTHIAUME: Est-ce que je peux terminer ma question?

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce ne sont pas des moyens dilatoires, donnez-nous ce que nous demandons.

M. BETHIAUME: M. le Président, une directive. Puis-je vous demander à qui est la parole actuellement?

M.LESSARD: La parole est au député de Saguenay.

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est une bonne question! J'ai reconnu le ministre des Affaires culturelles, sur une question de règlement.

M. LESSARD: II avait terminé, M. le Président.

M. BERTHIAUME: Merci, M. le Président.

M. HARDY: M. le Président, j'ai bien fait remarquer qu'il était inutile de demander au président de se prononcer, parce qu'à partir du moment où il aura reconnu que les propos du député de Saguenay sont irréguliers, lui-même ou un autre député du Parti québécois, de nouveau, prononcera des propos irréguliers, parce que vous n'avez même pas le talent nécessaire pour faire véritablement du "filibustering". Vous n'êtes même pas capables d'en faire dans les cadres du règlement. Vous êtes obligés d'aller au-delà du règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!

M. MORIN: Accédez à nos demandes. Accédez à nos demandes et tout sera réglé.

M. HARDY: On n'accédera pas.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Maisonneuve, sur la question de règlement.

M. MORIN: Vous en subirez les conséquences.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous n'avez rien sorti de génial, vous! Vous êtes bien mieux de vous cantonner dans votre...

M. HARDY: M. le Président, quand on a le député de Chicoutimi en face de soi, c'est joliment difficile d'être génial!

M. BEDARD (Chicoutimi): Votre remarque n'a rien de très brillant, encore une fois! Essayez d'en sortir une autre qui soit plus brillante un peu.

M. LESSARD: Allez au programme de Lise Payette. Cela vous va mieux chez Lise Payet-te! ...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve, sur la question de règlement.

M. LESSARD: ... ce que vous voulez faire, comme ministre des Affaires culturelles.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: Oui, oui. A l'ordre! D'accord, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve, sur la question de règlement.

M. BURNS: M. le Président, à deux octaves plus bas, je voudrais tout simplement souligner, je vous le dis tout de suite, que je ne partage pas l'avis donné par le ministre des Affaires culturelles sur sa question de règlement, pour une raison bien simple. A ce stade-ci, nous avons une motion qui est faite par, d'une part, le député de Saint-Jacques et ensuite, un amendement qui rectifie ou qui précise cette motion.

La vision globale — je suis très sérieux parce que j'ai l'intention d'intervenir dans ce débat de sorte que je veux protéger mes droits aussi — de ce que nous tentons de faire est que le pouvoir réglementaire que le gouvernement veut se donner, en particulier, donner à un ministre qui aura fort probablement l'initiative de l'application de la loi, est très large.

Je ne vois pas comment un député qui veut simplement que le gouvernement se plie à une demande de l'Opposition —soit de savoir à l'avance, ou tout au moins d'avoir une bonne idée de ce que seront ces règlements — est en dehors du règlement, agit illégalement, s'il mentionne l'importance du pouvoir réglementaire, s'il cite même au long des articles qui donnent un pouvoir réglementaire. C'est là-dessus que je ne comprends pas l'intervention abracadabrante, hybride du ministre des Affaires culturelles. C'est ce que je ne comprends pas et, franchement, je répète une chose que j'ai dite l'autre jour, je suis bien content de le voir comme ministre des Affaires culturelles que...

M. CHARRON: Pas moi.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Non. J'aime mieux le voir là qu'à l'endroit où il était avant, c'est-à-dire comme vice-président de l'Assemblée nationale...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: ... où il nous imposait régulièrement des décisions aussi "hybrides"...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. HARDY: Maintenant, vous citez...

M. BURNS: ... aussi abracadabrantes, aussi intenables, aussi insupportables...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Est-ce que j'ai dit quelque chose d'antiparlementaire?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Non. Loin de là.

M. BURNS: Voulez-vous que je sorte ma liste?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Non. Absolument pas, mais il me semble que la question de règlement a été vidée...

M. BURNS: Ecoutez, M. le Président, je voudrais simplement que vous établissiez qu'il n'y a rien de mal, législativement parlant, réglementairement parlant, que sur une telle motion, on puisse parler des pouvoirs qui se trouvent dans la loi au point de vue... Non, pas lire la loi. Je ne pense pas que le député de Saguenay ait lu la loi...

M. BERTHIAUME: Oui.

M. BURNS: Non, il n'a pas lu la loi. Il en a cité des extraits. S'il avait lu la loi, il serait rendu à l'article 4. Il a même cité quelques rares articles.

M. LESSARD: M. le Président, sur un point de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je suis suffisamment éclairé...

M. BOSSE: II n'a même pas lu la loi.

M. LESSARD: Etes-vous suffisamment éclairé pour convaincre...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui.

M. LESSARD: ... le député de Terrebonne qu'il était hors d'ordre lorsqu'il a invoqué le règlement?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je pense bien que je ne vous demanderais pas de statuer. Je vous demanderais simplement...

M. LESSARD: Je termine, M. le Président... LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui.

M. LESSARD: ... et si je peux avoir l'unanimité des membres de cette commission parlementaire, j'aurais d'autres articles du projet de loi à souligner dans lesquels je constate qu'on aurait besoin du dépôt de la réglementation.

Mais je termine en citant... Lorsque je vois le député de Rimouski, je constate que lui-même, lorsque nous avons étudié le bill 31 a demandé le dépôt des règlements concernant le projet de loi 31.

Je termine. Je dis que si nous avons utilisé — le ministre des Affaires culturelles ne rit pas — ce ton badin, c'est que cette demande et que cette motion nous apparaissent quand même être fort sérieuses. Nous avons fait une première motion, à savoir le dépôt de la réglementation. Celle-ci nous apparaissait absolument importante pour pouvoir discuter de l'ensemble de ce projet de loi.

Or, le ministre des Affaires culturelles, dans ses termes pompeux, ne parle plus maintenant de la réglementation. Il parle des principes directeurs. Nous lui demandons tout simplement, avec cette motion, de faire le dépôt des principes directeurs puisque tel que le disait le député de Saint-Jacques, cela équivaut, selon les termes pompeux du ministre de l'Education, à la réglementation qui touche ce projet de loi.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que les membres de la commission sont prêts à se prononcer sur la motion d'amendement?

M. BURNS: J'aimerais intervenir dans ce débat pour une raison bien simple. J'arrive vierge dans ce débat-ci.

M. HARDY: On n'a plus les vierges qu'on avait.

M. BURNS: Je suis né en septembre. Soyez certain que je ne mens pas à la commission. J'arrive vierge le 5 septembre. C'est une vierge de je ne sais pas quel décan.

M. CHOQUETTE: Vierge en pensée.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve, sur la motion d'amendement.

M. BURNS: M. le Président, quand je disais que j'arrivais vierge dans le débat, ce n'était pas tellement quant à ma date de naissance comme quant au débat lui-même... Oui.

M. MORIN: M. le Président, est-ce qu'on pourrait cesser d'interrompre le député, cela ne fait pas avancer le débat, toutes ces interruptions?

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'inviterais tous les membres de la commission à ne pas interrompre leur collègue qui a la parole.

M. CLOUTIER: Ce qu'il est sérieux.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: Je disais donc, M. le Président, de façon peut-être imagée, qui a provoqué

certaines remarques, que c'est peut-être la première fois depuis que vous siégez que j'ai l'occasion d'intervenir dans le débat relativement au projet de loi no 22.

M. CHOQUETTE: Ce n'est pas la dernière.

M. BURNS: J'espère que ce ne sera pas la dernière. Il y a peut-être des choses qui ont été dites par certains de mes collègues et que je devrai répéter parce que je n'y étais pas, m'occupant de ce qui se passait à l'Assemblée nationale pendant que nous siégions, c'est-à-dire jusqu'à 6 heures. Cependant, je tiens à souligner que, pour moi, du point de vue de technique législative, le pouvoir réglementaire... Ce n'est pas la première fois que j'en parle, je ne suis pas le seul d'ailleurs à en avoir parlé à cette Assemblée nationale depuis les quatre ans que j'y siège. Je me souviens, entre autres, qu'une personne, aussi généralement respectée que feu M. Jean-Jacques Bertrand, avait fait, ce que l'on appelle, une sainte colère à propos d'un projet de loi en particulier. C'était le projet de loi concernant la commercialisation du pétrole, si je ne me trompe pas, je n'ai peut-être pas le terme exact. Comme député néophyte à ce moment-là — la Loi sur les produits pétroliers que me souffle le député de Saguenay — j'avais été frappé par cette sainte colère qu'avait faite M. Jean-Jacques Bertrand et c'était surtout son expérience de la législation qui, dans son intervention, m'avait frappé. Cette sainte colère était basée sur un fait, qu'il est absolument intolérable qu'un projet de loi, qui a la moindre importance... A mes yeux n'importe quel projet de loi, si cela vaut la peine qu'on s'y penche à l'Assemblée nationale, si cela vaut la peine qu'on s'assoie et qu'on en discute, nous les élus du peuple, je dis, à ce moment-là, que c'est un projet de loi d'importance, à moins que le gouvernement nous dise qu'à l'occasion il légifère pour rien, qu'il légifère en l'air, qu'il légifère inutilement. Or, je ne pense pas que ce soit un principe de base quand on discute d'une certaine législation.

M. Bertrand, à ce moment-là, avait dit: Comment voulez-vous que... Je parle du pouvoir réglementaire en général, je pense que je suis tout à fait dans l'ordre, M. le Président, si c'est...

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est que je me demande si vous êtes en train d'intervenir sur la motion principale, qui est le dépôt de la réglementation, ou sur l'amendement.

M. BURNS: Non. Je suis sur l'amendement. Je vais tout ramener cela, M. le Président.

M. Bertrand avait dit, à ce moment-là: Comment voulez-vous que moi, je me prononce sur une législation sans savoir ce que j'accorde comme pouvoir réglementaire lorsque je vote pour ou même lorsque je vote contre. Le principe est le même.

M. HARDY: Comment avez-vous fait pour le code des professions?

M. BURNS: Comment on a fait pour le code des professions? Cela a été un problème qu'on a également soulevé. On a dit que cela n'avait pas de bon sens d'avoir une loi aussi importante, aussi vaste et aussi large... Je me souviens, entre autres — je pense que je peux le prendre à témoin — que le Dr Camille Laurin, qui était un de nos représentants à cette commission, avait fait de nombreuses critiques à cet effet, peut-être pas au moment de l'étude des projets de loi eux-mêmes, mais je me souviens également que le Barreau avait fait lui-même certaines...

M. CHOQUETTE: Si le député me permet une interruption. Regardez ce qui lui est arrivé à l'élection suivante aussi avec ses critiques.

M. MORIN: Ce n'est pas digne du ministre de la Justice.

M. CHOQUETTE: Non, mais c'est un fait. M. MORIN: Ce n'est pas pertinent au débat.

M. CHOQUETTE: Quand on soulève des objections futiles comme ça, qu'on fait perdre le temps de l'Assemblée nationale et de ses collègues, les électeurs finiront par vous punir.

M. BURNS: C'est à plusieurs crans plus bas que votre discours d'il y a quelques jours, ça. C'est à plusieurs crans plus bas.

M. CHOQUETTE: Non, mais c'est un fait. Pensez-y ! Pensez-y !

M. BURNS: C'est à plusieurs crans plus bas du ministre de la Justice ou du futur ministre de l'Education ou de qui que ce soit.

M. CHOQUETTE: Oh, oh, oh, oh!

M. MORIN: Je voudrais dire au ministre de la Justice que nous ne sommes pas là pour nous accrocher à des postes de députés ou au pouvoir, nous sommes là pour défendre les intérêts de ceux qui nous ont élus.

M. BERTHIAUME: C'est-y beau!

M. BURNS: Quoi qu'il en soit, je vous le dis, je vais être très bref sur cette allusion qui avait été faite par le député de Missisquoi du temps... est-ce que j'ai la parole, M. le Président, toujours?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui, allez-y.

M. BURNS: Je pense en tout cas... M. le Président, est-ce que j'ai toujours la parole?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: Je ne pense pas que j'aie engueulé qui que ce soit jusqu'à maintenant.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Moi, je ne me sens pas visé, en tout cas.

M. BURNS: Je ne vois pas pourquoi on m'interrompt.

M. BOURASSA: Cela a déjà été pire.

M. BURNS: Cela a déjà été pire et ça peut-être pire aussi si ça continue, j'ai bien le goût que ce soit pire si ça continue de même.

M. BOURASSA: C'est parce qu'il y a beaucoup de gens qui attendent qu'on commence une discussion sérieuse.

M. BURNS: On va y venir en temps et lieu.

M. BOURASSA: II y a des journalistes qui ont dit que c'était une perte de temps.

M. BURNS: On attend les instruments sérieux pour travailler.

M. BOURASSA: Les journalistes commencent à trouver...

M. BURNS: Ne nous demandez pas de manger avec nos doigts, c'est ça le problème. Vous nous demandez de manger avec nos doigts. Vous nous dites que vous nous préparez un très bon repas. Vous nous mettez ça sur la table et vous nous dites: Mangez avec vos doigts. C'est ce que vous nous faites.

M. BOURASSA: II se réfère à Mao Tsé Toung.

M. BURNS: C'est aussi simple que ça, donnez-nous des ustensiles, donnez-nous des instruments, ne nous demandez pas de visser des vis avec nos doigts. C'est exactement ça qu'on vous demande.

UNE VOIX: Ah, c'est grave-!

M. BURNS: On vous dit: D'accord, on est d'accord. On va examiner ce que vous avez à nous dire, mais je veux savoir exactement ce qu'il y a dans ce projet de loi. Là-dessus, je présume que certains de mes collègues l'ont peut-être souligné, c'est, entre autres, ce à quoi je me référais tout à l'heure quand je disais que j'arrivais vierge dans le débat et qu'il y a peut-être des choses qui ont été discutées, je m'excuse d'avance d'y revenir, mais ce qui me frappe, c'est quand je lis le journal des Débats du 28 juin 1974...

M. LEGER: Le ministre aime ça qu'on parle de lui.

M. BURNS: Le ministre aime ça qu'on parle de lui, alors, on va parler de lui encore.

M. LESSARD: Le ministre aime ça...

M. LEGER: C'est une jouissance qu'il ne peut pas éviter.

M. BURNS: Cela vous fait plaisir, M. le ministre?

M. HARDY: C'est épouvantable.

M. BURNS: M. le Président, ce qui m'a frappé, c'est que même le ministre...

M. BOURASSA: Vous êtes enfantins.

M. BURNS: Est-ce que le premier ministre veut vraiment changer le ton des débats ou si...

M. BOURASSA: Je dis que vous êtes enfantins ce soir.

M. BURNS: Pourquoi voulez-vous changer le ton des débats qui, je pense, en ce qui nous concerne, s'est tenu à un niveau... M. le Président, sur une question de règlement, je vous invite à demander au premier ministre de ne pas provoquer un changement de ton dans le débat. Moi, personnellement, je suis de ceux qui ne veulent pas changer le ton du débat, en ce qui nous concerne et je pense que je parle pour mes cinq autres collègues d'ailleurs. Je disais donc que, le 28 juin 1974, je lis au journal des Débats, au ruban 966, à la page 1, le ministre qui s'exprime ainsi et il n'y a vraiment aucune ambiguïté. Pour une fois, le ministre est très clair. On sait exactement ce qu'il veut dire, on y lit ceci: "J'ai déjà indiqué que la réglementation si elle n'est pas déposée dans tous ses détails", vous allez voir que la motion d'amendement n'est pas loin, M. le Président, "sera très certainement discutée à fond lors de l'étude du projet de loi article par article en commission élue. Il ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté une fois que la loi sera appliquée". C'est ça qu'on pense, M. le Président, et c'est justement pour ça que le député de Saint-Jacques a demandé que la réglementation, tout au moins un vague projet, vague dans le sens qu'il ne cernera pas tous les aspects, mais que ces fameux principes directeurs dont parle le ministre, on puisse en être conscient, on sache exactement en quoi consiste ce futur projet de loi délégué qu'on appelle la réglementation.

M. le Président, est-ce qu'on exagère quand on demande cela? Est-ce que c'est trop demander? Quand on se rend compte... Très rapidement et très brièvement, en écoutant mes collègues tout à l'heure, j'ai tout simplement dressé une rapide liste des articles où les pouvoirs de réglementation sont accordés, d'une façon ou de l'autre. J'en ai sans doute

échappé, M. le Président. Mais sur un projet de loi qui comporte 130 articles, on en retrouve exactement — et je suis certain d'en avoir oublié quelques-uns; je n'ai pas fait sous cet angle-là une étude exhaustive du projet de loi— 18 articles. Le chef de l'Opposition me dit que lui est rendu à 19 dans son calcul; moi, je me suis rendu à 18.

M. MORIN: C'est parce qu'il y a un article qui mentionne deux fois les règlements.

M. BURNS: De toute façon, il y a au moins —je peux le dire sans risque de me tromper — 18 articles — dans la substance même du projet de loi qu'on nous demande d'adopter, qu'on nous demande de discuter article par article — qui réfèrent à une éventuelle réglementation. Nous, de l'Opposition, on vous dit: Dites-nous donc par où vous vous en allez avec votre réglementation? Est-ce qu'il va y avoir un virage en "U" dans le tunnel? C'est cela qu'on vous demande. Est-ce qu'on est en train d'adopter un projet de loi qui, à l'occasion de l'exercice d'un de ces pouvoirs réglementaires —quand je dis un, j'en ai mentionné un minimum de 18 — sera changé?

Je ne discuterai pas de cela parce que le député de Terrebonne aurait raison de dire qu'à ce stade-ci je ne serais pas tout à fait dans l'ordre de discuter du fond des articles. Ce n'est pas du tout mon intention de discuter du fond des articles. Mais, sans en discuter, on peut dire globalement qu'il y a certains de ces articles où le pouvoir réglementaire est tellement vaste qu'on peut même, sans risque de se tromper, dire que le projet de loi peut être détourné de ses fins, et carrément détourné de ses fins, par le simple exercice du pouvoir de réglementation, qui ne nous appartient plus, qui ne nous est pas remis entre les mains, qu'en aucune occasion on nous a promis de ramener devant l'Assemblée nationale avant de le mettre en vigueur.

C'est pour cela, M. le Président, que cela a une certaine importance. Quand je dis "certaine", j'espère que vous comprenez ce que je veux dire. Je ne parle pas du mot "certaine" dans le sens de "très peu important". Je veux dire que cela a une certaine importance dans le sens que cela a une grande importance. C'est pour cela, M. le Président, et ce n'est pas plus que cela. On se demande pourquoi on nous demanderait un chèque en blanc. Au fond, c'est cela que le gouvernement nous demande de faire, non seulement sans même nous donner les règlements eux-mêmes, mais sans même nous donner les grandes lignes de ces règlements. Est-ce que c'est si compliqué, M. le ministre? Est-ce que vous êtes incapable de remplir la promesse que vous faisiez le 28 juin 1974? Est-ce que c'est cela qu'on doit comprendre?

M. CLOUTIER: Bien sûr que non. Mais vous avez tellement envie de parler que je vous laisse parler. Je parlerai à la fin.

M. BURNS: Si vous vous refusez de nous les donner, ces principes directeurs, je serai obligé de dire et de conclure avec mes collègues que vous nous avez tout simplement fait une promesse — et je ne dirai pas l'expression que, sans doute, on jugera antiparlementaire —...

M. CLOUTIER: Vous pouvez y aller, cela ne me gêne pas du tout venant de vous.

M. BURNS: ... mais que vous avez fait une promesse que vous n'avez pas tenue. Ce n'est pas moi, le 28 juin dernier, qui ai dit: "J'ai indiqué que la réglementation, si elle n'est pas déposée dans tous ses détails, sera très certainement discutée à fond". Comment voulez-vous qu'on la discute à fond si non seulement on ne nous donne pas copie de la réglementation, mais on ne nous donne même pas les grandes lignes de la réglementation?

M. le Président, simplement pour vous donner quelques exemples. Là-dessus, je pourrais parler longuement simplement sur l'évaluation du pouvoir réglementaire qu'on retrouve dans la loi. Cest sûr que, dans un Etat moderne, il est normal qu'on n'ait pas à amender la loi à tout bout de champ.

C'est sûr que cet Etat moderne, s'il se veut efficace, est obligé d'avoir un pouvoir réglementaire pour les aspects mobiles de la loi, pour les aspects qui changent et qui sont sujets à changer assez souvent. Mais ce qu'on fait, M. le Président, habituellement, dans l'utilisation de ces pouvoirs réglementaires, on ne les cache pas dans le projet de loi.

Je dis, littéralement, dans le cas du projet de loi 22, on a caché un peu partout le pouvoir réglementaire que le gouvernement veut se réserver. D'habitude la technique de législation — et ceux qui ont quelques années d'expérience, je pense, vont m'endosser là-dessus, du côté gouvernemental, comme du côté de l'Opposition — le pouvoir réglementaire que le gouvernement se réserve dans un projet de loi, il l'inscrit à un projet de loi. Je pourrais vous citer, peut-être pas un millier, mais des centaines de projets de loi — le ministre de la Justice va sûrement être de mon avis là-dessus — où, d'habitude, on réserve, sinon à un chapitre, du moins à un article le pouvoir de réglementation.

Oui, d'habitude, on a un article au moins, sinon un chapitre qui s'intitule " Réglementation". D'habitude, il commence comme suit: Le lieutenant-gouverneur en conseil peut, par règlement: a), b), c)... Je peux vous citer simplement une des lois les plus importantes que nous avons adoptées à la session qui s'est terminée en décembre, c'est-à-dire la Loi modifiant le régime de retraite des fonctionnaires. La loi amendant le régime de rentes en est une autre où on avait quelque 22 ou 23 paragraphes de pouvoirs réglementaires, mais au moins, ils étaient énumérés et on savait à quelle place les trouver dans le projet de loi. Là, je vous dis qu'il y a au moins 18 places dans le projet de loi où il faut

aller scruter, gratter ou déterrer le pouvoir de réglementation. Je veux tout simplement vous faire une brève nomenclature, sans commenter les articles.

M. BOURASSA: On a hâte de commencer.

M. BURNS: L'article 9 où on parle des textes publics des organismes scolaires et municipaux; l'article 14 concernant les fonctions administratives dans l'administration publique; l'article 21 concernant les permis des corporations professionnelles; l'article 22, toujours concernant les permis à être décernés par les corporations professionnelles et non pas pour n'importe quelle raison, soit dit en passant. Les articles 21 et 22, c'est un petit détail, surtout que le ministre de la Justice a parlé du code des professions tout à l'heure. On peut, sans discuter de la valeur de l'article, dire que le pouvoir réglementaire qu'on donne ici, il n'est pas tout à fait certain que ce soit le même pouvoir réglementaire que celui qui apparaît dans le code des professions. Lorsqu'on dit que les corps professionnels ne peuvent délivrer de permis en vertu du code des professions, à moins que les intéressés n'aient de la langue officielle une connaissance appropriée à l'exercice de la profession, cette connaissance doit être prouvée suivant les normes fixées par les règlements adoptés à cet égard par le lieutenant-gouverneur en conseil.

C'est un des éléments, M. le Président, qui avaient fait l'objet de nombreuses discussions lors de l'adoption du code des professions. On pourrait continuer. L'article 22, c'est pareil. A l'article 22, on dit dans quel cas on peut passer à côté de la réglementation, encore par voie de réglementation.

Mon collègue de Saguenay a cité l'article 40 sur l'étiquetage, l'article 43 concernant l'affichage. Ce ne sont pas des détails dans le projet de loi, ce sont des éléments du projet de loi où le premier ministre, le ministre des Affaires culturelles, le ministre de l'Education et tous les ministres qui ont parlé se sont "pété les bretelles" en disant: On va le régler le problème, on le règle le problème. Moi, je dis: Comment? Qu'est-ce que c'est? Quel est l'instrument que vous allez nous mettre dans les mains pour comprendre votre projet de loi? Vous nous dites, depuis le début: Vous êtes une bande de gars qui ne veulent pas comprendre. Vous ne voulez pas comprendre. Donnez-nous au moins les instruments pour comprendre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le temps est écoulé.

M. BURNS: Oui, je permets une question.

M. HARDY: Etant donné l'essence même, la nature même de la réglementation, du pouvoir réglementaire, on pourrait très bien vous donner des règlements actuellement, mais cela ne veut pas nécessairement dire que c'est cela finalement que le lieutenant-gouverneur en conseil va adopter. Vous savez très bien que, d'une semaine à l'autre...

M. BURNS: Je suis d'accord.

M. HARDY: ... ces règlements...

M. BURNS: D'accord.

M. HARDY: ... peuvent être changés.

M. BURNS: Je suis d'accord.

M. HARDY: S'il fallait, chaque fois, attendre d'avoir des règlements pour adopter une loi, on n'adopterait jamais de loi.

M. BURNS: D'accord, mais d'habitude, au moins, on a le corridor fixé par la loi. Là, on n'a pas le corridor.

M. HARDY: Où avez-vous vu ça? Donnez donc deux exemples.

M. BURNS: Je vous ai donné deux exemples tout à l'heure.

M. HARDY: Est-ce que cela a été déposé?

M. BURNS: En voulez-vous un exemple où cela a été déposé? Je vais remonter pas tellement loin, mais je vais remonter à un gouvernement libéral. Chapitre 78 sanctionné le 15 décembre 1960. Voulez-vous, je vais vous donner un petit exemple? Savez-vous quelle était la loi? Ce n'est pas une loi importante, c'est la Loi sur l'assurance-hospitalisation. Sa-viez-vous que la Loi sur l'assurance-hospitalisation dans les statuts, dans les lois de 1960 et 1960/61... Je vous réfère aux documents, à la page 395 de nos lois, 1960 et 1960/61. La loi elle-même, savez-vous combien de pages elle comporte? Elle comporte de la page 395 à la page 399 inclusivement. D'accord? La réglementation, voulez-vous la voir, elle est ici, elle est dans le livre.

M. HARDY: Vous avez un exemple.

M. BURNS: Services sociaux 1965. Mon collègue de Saguenay me rappelle ce cas aussi. C'est un autre cas qu'on a discuté en commission ici.

M. HARDY: Pas en même temps que la loi?

M. BURNS: Oui.

M. HARDY: Oui?

M. BURNS: Oui.

M. LESSARD: En annexe de la loi.

M. BURNS: En annexe de la loi. Juste pour vous donner un petit exemple. Comment le gouvernement de M. Lesage — je ne suis pas particulièrement en amour avec M. Lesage, je ne l'ai jamais été non plus— mais juste pour montrer comment le gouvernement de M. Lesage était conscient de l'importance de ce que je suis en train de vous dire. La loi, je vous ai dit qu'elle allait de la page 395 à 399 inclusivement, cela fait quatre... cinq pages. Je ne suis pas fort en maths. Les règlements sont dans un texte beaucoup plus serré d'ailleurs. Je vous montre, je vous exhibe le volume, vous vérifierez. Les règlements commencent à la page 400 et ils se rendent, y compris l'annexe, une seule annexe, à la page 411, c'est-à-dire douze pages. C'est cela, la conscience d'un gouvernement. C'est de même qu'un gouvernement dit à un certain moment: Vous voulez savoir ma loi; ma loi, j'aimerais bien qu'elle soit flexible. J'aimerais bien pouvoir manier ma loi en cours de route; j'aimerais bien pouvoir lui faire des ajustements pour que, parfois, on entre de côté dans une porte, si nécessaire. C'est cela qu'un gouvernement décent doit faire. S'il fait cela, il va l'avouer ouvertement et va dire: Voici ma façon de me pencher pour entrer dans la porte quand il faudra.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Votre temps est écoulé.

M. BURNS: En tout cas, c'est ce pourquoi, fondamentalement, on ne voit pas comment vous êtes en mesure de refuser la motion du député de Saint-Jacques ou tout au moins de la façon qu'elle est amendée. M. le Président, vous m'indiquez que mon temps est expiré. Je comprends...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition officielle sur l'amendement du député de Chicoutimi.

M. BOURASSA: Ils aiment cela parler. Des machines à paroles !

M. LESSARD: Je suis prêt à donner mon consentement pour que le député...

M. HARDY: Si le député de Sauvé veut donner ses 20 minutes au député de Maisonneuve, je serais bien d'accord.

M. BURNS: Même s'il est chef de l'Opposition, il a des droits comme député. Je pense qu'on va les respecter.

M. HARDY: C'est pas mal plus intéressant que le député de Sauvé.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition officielle.

M. BOURASSA: II n'y a plus de rivalité maintenant.

M. BURNS: D n'y en a jamais eu d'ailleurs pour votre information.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition officielle sur la motion d'amendement.

M. MORIN: M. le Président...

M. HARDY: Le député de Maisonneuve est un bon juriste.

M. MORIN: ... nous aussi, nous avons hâte d'aborder l'article premier et de démasquer le premier ministre.

M. BOURASSA: C'est là qu'on va vous démasquer.

M. MORIN: Et de montrer que, même si, dans plusieurs discours, il a dit que la langue française serait la seule langue officielle du Québec, cet article et les suivants ne mettent nullement en oeuvre ce principe. Nous avons hâte de le faire...

M. BOURASSA: Commençons...

M. MORIN: ... je dis au premier ministre. Nous avons aussi hâte que lui d'arriver à l'article premier; peut-être même plus que lui.

M. BOURASSA: Commençons, je vous en prie, commençons la discussion sérieuse, article par article.

M. MORIN: Non, parce que nous ne pouvons même pas aborder l'article premier sans savoir ce qui s'en vient. Je vais vous expliquer pourquoi.

M. BOURASSA: Je sais que le point de vue du chef de l'Opposition n'a pas prévalu au caucus, mais il reste qu'on peut quand même souhaiter...

M. MORIN: Qu'est-ce que vous racontez là?

M. BOURASSA: Le point de vue de pouvoir...

M. LESSARD: ... Est-ce que vous avez des micros?

M. MORIN: Ecoutez, je ne sais pas à quoi vous faites allusion, je ne sais pas si vous avez des micros dans nos bureaux, des tables d'écoute branchées sur nos téléphones, mais, en tout cas, ils n'ont pas l'air de fonctionner correctement.

M. LEGER: Mais ils les interprètent toujours comme des sondages.

M. MORIN: M. le premier ministre, je vous cède volontiers la parole si vous voulez vous expliquer.

M. BOURASSA: Non.

M. MORIN: Je ne sais pas pourquoi vous dites des bêtises comme cela.

M. BOURASSA: Je ne dis pas une bêtise. Je constate que le chef de l'Opposition a dit cet après-midi qu'il souhaitait aborder très sérieusement la question.

M. MORIN: Oui, parfaitement.

M. BOURASSA: A la suite, j'ai entendu les exposés des autres députés qui ne paraissent pas avoir le même point de vue de la façon dont ils discutent.

M. MORIN: Non.

M. BOURASSA: Alors, j'en conclus que le point de vue du chef de l'Opposition n'a pas prévalu au caucus.

M. MORIN: M. le Président...

M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement. Est-ce que le Président peut remarquer que le chef de l'Opposition n'a pas encore commencé à s'exprimer, et que le temps que le premier ministre a pris, ne doit pas être enlevé de la période qui lui est allouée. Le président remarque l'heure qu'il est, quand le chef de l'Opposition commence à parler.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui, aussitôt qu'il commencera, je vais noter l'heure.

M. LESSARD: Vous avez un bon chronomètre, M. le Président?

M. LEGER: Vous avez un bon calendrier?

M. MORIN: Je disais que nous serons heureux d'aborder les dispositions de la loi. Mais, nous ne pouvons même pas adopter le premier article, puisque les règlements ou, à tout le moins, les principes directeurs qui sont réclamés par l'amendement du député de Chicoutimi, viendront étendre ou viendront limiter le principe posé par l'article premier, c'est-à-dire, le caractère officiel de la langue française.

C'est en voyant les règlements, aussi bien que les articles qui suivent le premier, que nous saurons exactement ce que le premier ministre a voulu dire, quand il nous a dit que la langue française serait la seule langue officielle. Et nous ne pouvons pas évaluer l'article premier, nous ne pouvons pas en juger la portée, sans avoir tous les instruments de travail. Il y avait une façon bien simple de régler le problème ce soir. C'était de déposer sur la table de cette commission, dès que nous les avons demandés, soit les règlements, soit à tout le moins, les principes directeurs.

M. le Président, je prends à témoin mes collègues. Je leur ai dit: Si le ministre n'est pas en mesure de nous donner les règlements, parce que, peut-être, ils ne sont pas prêts, ils ne sont pas fin prêts, contentons-nous au moins, des principes directeurs. De là vient la motion du député de Chicoutimi. Nous aurions été prêts à accepter les principes directeurs, afin de savoir au moins ce qu'il y a dans les grandes lignes de cette réglementation. La motion modifiée du député de Chicoutimi et du député de Saint-Jacques se lirait donc comme ceci: "Qu'avant de procéder à l'étude du projet de loi 22 article par article, la commission prenne connaissance de tous les principes directeurs des règlements prévus pour la mise en oeuvre de la loi". On a écrit: La "mise en application" mais cela devrait être la "mise en oeuvre" de la loi.

Cet amendement, cette motion amendée me permet de revenir sur la question de principe dont j'ai déjà traité cet après-midi, mais que je n'ai pu qu'esquisser en raison du peu de temps qui nous est donné.

Le pouvoir réglementaire est certainement un outil essentiel de gestion gouvernementale moderne. Je ne connais pas d'Etats modernes qui puissent se passer du pouvoir réglementaire. Nous ne le contestons pas. Nous n'en avons pas — du moins dans la mesure où l'on se tient dans des limites raisonnables, avec cette législation déléguée — au principe même de la législation déléguée. Nous nous rendons compte qu'il est impossible de régler le problème de la langue au Québec dans tous ses multiples aspects avec les 130 articles du projet de loi.

Soit! Mais, bien que nous assistions à ce phénomène universel de la croissance de la législation réglementaire...

M. BOURASSA: C'est vrai.

M. MORIN: N'est-ce pas? Nous pensons qu'il y a lieu de circonscrire les effets de ce phénomène. C'est d'ailleurs, comme je le dirai à l'instant, ce qu'est venu vous dire le Barreau, et ce qu'est venue vous dire la Chambre de commerce au cours des toutes dernières semaines. La Chambre de commerce dans un mémoire, fort éloquemment intitulé: "L'érosion du pouvoir législatif".

M. BOURASSA: C'est partout le cas. Le chef de l'Opposition vient de le dire.

M. MORIN: Oui. Alors, commençons, si vous le voulez bien, par poser le problème de fond. Encore une fois, ce n'est pas le phénomène lui-même que nous avons quelque difficulté à accepter. C'est quand la législation déléguée, quand le pouvoir réglementaire devient tellement considérable, par rapport à la loi-cadre, parce que je pense qu'on peut qualifier ce projet de "loi-cadre" et guère davantage... Je vois que le premier ministre acquiesce. J'en suis fort heureux.

M. BOURASSA: Non.

M. MORIN: Vous n'acquiescez pas?

M. BOURASSA: Non. Pas tout à fait, quand même. Je dis qu'il est normal que, dans une telle loi, et le chef de l'Opposition vient de le dire lui-même, il y ait un pouvoir réglementaire important et je me réfère au contreprojet du Parti québécois...

M. MORIN: Bon. Très bien.

M. BOURASSA: ... qui lui aussi exige un pouvoir réglementaire encore plus important que celui que nous pouvons avoir dans notre loi.

M. MORIN: Cela est discutable, mais enfin je suis heureux de voir que, pour une fois, nous pouvons peut-être avoir un débat sérieux sur la question. Nous ne contestons pas que la réglementation doive intervenir. Ce n'est pas là le problème. Le problème survient lorsque la réglementation se substitue en quelque sorte à la législation. Le problème surgit lorsqu'en lisant la législation on n'arrive pas à comprendre les véritables intentions du gouvernement. C'est cela le problème, et en particulier, à l'égard du bill 22. Je me permets de...

M. BOURASSA: On verra cela article par article.

M. MORIN: Non. Justement je vais vous dire pourquoi on ne peut pas attendre qu'à l'article 9 vous nous sortiez la réglementation pertinente à l'article 9, et que, quand nous arriverons à l'article 14, vous vouliez bien nous donner les grandes lignes ou la réglementation se raccrochant à l'article 14. Nous voulons avoir une image d'ensemble de vos intentions. Si le premier ministre n'a pas encore compris cela à la suite de toutes les interventions que nous avons faites, vraiment nous parlons dans le vide.

M. BOURASSA: J'attendais celle du chef de l'Opposition comme d'habitude.

M. MORIN: Fort bien. L'autre jour, je ne crois pas que le premier ministre était présent lorsque le Barreau est venu — non c'était le ministre de la Justice je pense, et le président de l'Assemblée dirigeait la séance — nous dire ceci: "La fonction législative est devenue de nos jours une des principales activités de l'administration". Cela commence par un lieu commun mais il faut bien commencer d'une manière ou d'une autre. "A vrai dire, il y a quantitativement plus de législation qui provient de l'administration que du Parlement. Ainsi, le rapport MacGuigan — c'est notre collègue MacGuigan des communes — a révélé qu'à Ottawa, du 1er janvier 1956 au 31 décembre 1968, 6,892 règlements, représentant 19,972 pages, ont été publiés dans la Gazette du Canada". Au Québec maintenant — on verra par les chiffres que c'est peut-être une petite administration régionale en comparaison de cette énorme prolifération du pouvoir réglementaire fédéral — je reviens au texte du mémoire du Barreau. "On dénombrait en 1972, 1,400 pages de lois et 3,000 pages de règlements". Je ne serai pas étonné...

M. BOURASSA: Cela comprend la législation fiscale. Le chef de l'Opposition est au courant de la réglementation considérable...

M. MORIN: Oui.

M. BOURASSA: ... et dans le domaine fiscal, c'est encore plus important. Le chef de l'Opposition est au courant des grands principes...

M. MORIN: Cela comprend également toute la réglementation qui accompagne le bill 65 dont nous parlions à l'instant. Cela comprend toute la réglementation.

M. BOURASSA: La preuve qu'il faille de plus en plus recourir aux pouvoirs réglementaires, c'est que, même dans le domaine fiscal, contrairement au principe qui dit: No taxation without representation, même dans le domaine fiscal, de plus en plus, il y a une réglementation très poussée...

M. MORIN: Oui.

M. BOURASSA: ... qui fait que, dans plusieurs cas, les contribuables, même s'ils n'ont pas été directement représentés dans les décisions qui ont été prises, sont affectés par les décisions.

M. MORIN: Oui.

M. BOURASSA: C'est donc une tendance inévitable...

M. MORIN: Oui, mais attention!

M. BOURASSA: ... qui se répercute encore dans le domaine linguistique.

M. MORIN: II ne faudrait pas que le premier ministre m'amène sur le terrain de la fiscalité parce que c'est quand même un domaine législatif qui est tout à fait éloigné de ce que nous discutons actuellement. Je veux bien soutenir la comparaison, mais je trouve qu'elle est un peu boiteuse.

M. BOURASSA: Non. Ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que je veux illustrer la nécessité du pouvoir réglementaire. Plus l'administration devient complexe...

M. MORIN: Nous ne le contestons pas.

M. BOURASSA: Alors, si cela se fait dans le domaine fiscal, où, par définition, cela devrait être le secteur où il y en a le moins, étant donné le grand principe que je viens de citer, si cela se fait dans le domaine fiscal, cela doit se faire a fortiori dans des domaines aussi complexes d'application que celui de la politique linguistique.

M. MORIN: Non. C'est là que je ne puis suivre le premier ministre. D'ailleurs, le ministre de l'Education lui-même ne le suit pas puisqu'il nous a promis, le 28 juin, que nous aurions au moins les grandes lignes de la réglementation. C'est qu'il en percevait la nécessité à ce moment. Je voudrais bien pouvoir vous citer les chiffres. Je dois les avoir quelque part. Les voilà. Il y a eu 46 mémoires qui ont soutenu que le projet laisse trop de place à l'arbitraire en raison de la législation déléguée et il y a eu, en plus de cela...

M. BOURASSA: Les arguments tiennent sur le nombre.

M. MORIN: Un instant, M. le premier ministre. Je suis très heureux de ce dialogue, mais à condition que vous ne m'interrompiez pas à toutes les demi-phrases. Il y a eu 21 mémoires qui ajoutent qu'il y a trop d'articles qui font appel à la délégation de pouvoirs. C'est-à-dire que si vous faites le total des mémoires qui nous ont été soumis, cela représente une proportion importante de 67 mémoires.

M. BOURASSA: Des arguments quantitatifs.

M. MORIN: Oui. Eh bien maintenant, voyons les arguments qualitatifs.

M. BOURASSA: Allez-y, j'écoute.

M. MORIN: Ces comparants, qui sont venus devant nous durant ces semaines, les uns après les autres, cela ressemblait à une litanie au point que le ministre n'avait peut-être pas tort de dire qu'on commençait à se répéter... sur ce point, en effet, on s'est répété amplement. Entendons-nous bien. On ne s'est pas répété sur tous les points...

M. CLOUTIER: Ah bien! Nous étions amplement informés.

M. MORIN: ... il y a eu des répétitions. Oui, et le ministre avouera que sur ce point il y a eu plus de répétitions parce que les gens étaient plus inquiets. Les anglophones comme les francophones ont invoqué cet argument comme étant l'un des principaux qui leur faisaient craindre le projet de loi. Le ministre était moins insensible à ce moment-là. Il tenait à rassurer les comparants et en particulier les comparants anglophones, je l'ai noté. Il n'avait pas tort. Mais pour les rassurer il leur disait qu'on allait avoir à notre disposition toute cette législation déléguée. Pourquoi ne pas tenir parole au moment où nous commençons les débats?

M. le ministre, si vous aviez déposé cela sur la table tout à l'heure, au moins les principes directeurs, on vous aurait dit: Bien, procédons.

M. CLOUTIER: Pas du tout. Vous savez fort bien que j'ai voulu prendre la parole à ce moment-là pour vous dire justement ce que j'étais disposé à faire. Comme vos députés avaient très envie de parler dans le but évident que vous poursuivez, je n'ai pas réussi à les interrompre. Finissez votre intervention et j'aurai des choses sérieuses à dire parce que je crois que le spectacle est assez triste, compte tenu du sujet que nous devrions discuter.

M. MORIN: M. le ministre, compte tenu du fait que plusieurs de vos collègues n'ont pas hésité une seconde à nous interrompre et ceci fréquemment, compte tenu que le premier ministre lui-même depuis tout à l'heure entretient un dialogue avec moi, il y a longtemps que j'aurais été heureux de vous entendre si vous aviez voulu déposer sur le champ les principes que nous avons demandés.

Je reviens au mémoire du Barreau parce qu'au fond, ce n'est peut-être pas une mauvaise occasion d'aller au fond d'un problème. Je voudrais bien que le premier ministre continue avec moi le dialogue que nous avions tout à l'heure.

M. CLOUTIER: Tiens, après lui avoir reproché de vous interrompre.

M. MORIN: Non, je ne lui ai pas reproché de m'avoir interrompu, je lui ai dit qu'il n'avait pas hésité à lier le dialogue avec moi. Vous auriez pu faire la même chose.

Revenons au mémoire du Barreau. On dit...

M. BOURASSA: ... dans le système d'auditeurs.

M. CHARRON: "Bourassa dialogue".

M. BOURASSA: Vous n'aimez pas trop cela, cette émission.

M. BURNS: "Bourassa dialogue" et "Un homme vous écoute", tous les deux ensemble.

M. CLOUTIER: Je dois dire que dans mon cas le titre est amplement justifié depuis un certain temps.

M. MORIN: Bien. Le ministre avait eu un entraînement extrêmement utile avant d'entrer à la Chambre; mais cette fois-ci, j'ose croire que les problèmes que nous soulevons lui paraissent sérieux, parce qu'ils le sont.

Son projet soulève des questions fondamentales dans l'ordre du pouvoir législatif et du

pouvoir réglementaire. Savez-vous qu'il y a 19 mentions du pouvoir réglementaire dans le bill 22? Si je fais une moyenne, maintenant, du nombre de pages de réglementation par rapport au nombre de pages de la loi...

M. BOURASSA: Dans le code des professions il y en a beaucoup.

M. MORIN: Oui. La moyenne est deux pages de réglementation par page de loi. Il y a 1,400 pages de législation et il y a 3,000 pages de réglementation.

M. BOURASSA: Si le chef de l'Opposition me permet, pour poursuivre le dialogue tant souhaité...

M. MORIN: Voulez-vous, je vais terminer et vous pourrez...

M. BOURASSA: Pour poursuivre le dialogue, juste une petite question.

M. MORIN: D'accord.

M. BOURASSA: Le Parti québécois a voulu dans le cas du budget comme dans plusieurs autres cas — et je ne le blâme pas, parce que cela permet de comparer les deux attitudes de part et d'autre — dans son contre-projet linguistique, dans l'affichage public —j'en ai parlé hier, parce que cela m'a frappé — employer une formulation qui a été notée par plusieurs éditorialistes. A première vue, cela allait très loin, soit empêcher tout individu d'avoir un affichage public qui ne soit pas en langue française. Cela pouvait entraver l'exercice de la liberté individuelle. Le chef de l'Opposition, je suis convaincu, va me répondre: Dans le pouvoir réglementaire, il y avait toutes les distinctions et toutes les explications nécessaires.

Cela veut dire que, dans le propre projet du Parti québécois, il y aura un pouvoir réglementaire considérable. Je prends un exemple parmi plusieurs. La même chose pour la question de la langue de l'enseignement, qu'on lise la conférence de presse...

M. MORIN: Oui, d'accord.

M. BOURASSA: ... du député de Saint-Jacques et de M. René Lévesque, quand il dit que ça va soulever un paquet de problème techniques, la formule du PQ, je suis d'accord. Cela veut dire que le pouvoir réglementaire, là également, serait considérable. On vient à la conclusion que les deux partis sont d'accord, que, dans des questions comme celles-là, le...

M. MORIN: Ah, doucement!

M. BOURASSA: ... pouvoir réglementaire est nécessairement considérable si on veut avoir une application pratique, si on veut avoir une approche concrète et pratique comme le souhaite le député de Saint-Jacques dans son discours sur la motion d'ajournement. Il n'y a pas tellement de distinction entre nous, à moins de vouloir simplement retarder le débat sur l'essentiel et je n'accuse pas le chef de l'Opposition là-dessus. Peut-être un peu moins ses collègues, mais je n'accuse pas le chef de l'Opposition. Mais on doit souhaiter d'aborder le plus vite possible le débat sur l'essentiel.

M. MORIN: Bien sûr. Seulement, on vous dit que nous avons besoin des instruments de travail. Le premier ministre a fait une excellente intervention, je ne le cacherai pas, et il est allé pas mal au fond du problème. C'est un fait que notre projet... D'ailleurs ce n'est pas un projet de loi que nous avons soumis, mais une simple esquisse. Je voudrais que ce soit clair. Vous, vous êtes le gouvernement. Nous ne le sommes pas.

M. BOURASSA: Cela aurait été trop difficile de faire un projet de loi.

M. MORIN: Vous avez fait un projet de loi, nous avons donné les grandes lignes de ce que nous ferons le jour où nous ferons un projet de loi. Voici, où nous ferons un projet de loi, bien sûr, nous devrons faire une réglementation. Mais là où je suis en désaccord avec le premier ministre: Lorsque nous présenterons à cette Chambre, un jour, un projet de loi sur la question, la réglementation sera en appendice et on saura à quoi s'en tenir.

M. BOURASSA: Quand?

M. MORIN: Ah! ça, c'est une autre affaire. La réponse n'appartient ni au premier ministre, ni au chef de l'Opposition, elle appartient au peuple québécois. C'est une autre affaire.

M. BOURASSA: J'ai confiance dans le peuple québécois.

M. MORIN: Et moi aussi.

M. CHARRON: On ne le dirait pas.

M. BOURASSA: Disons que jusqu'à maintenant, j'ai raison d'avoir plus confiance que lui.

M. MORIN: Cela reste à voir. Voulez-vous, nous allons quitter ce terrain glissant et revenir au problème soulevé par la législation déléguée. Il y a donc, en moyenne, je pense qu'on n'en disconviendra pas, deux pages de réglementation pour une page de loi. Dans le bill 22, il y a 25 pages de loi. Cela ne m'étonnerait pas qu'il y ait au moins 50 pages, sinon davantage — la proportion serait peut-être d'un peu plus — de réglementation.

M. BOURASSA: Cela dépend du caractère.

M. MORIN: Le permier ministre me décourage avec ses interventions.

M. BOURASSA: C'est le chef de l'Opposition qui me décourage.

M. MORIN: II avait fait une intervention tout à fait raisonnable tout à l'heure qui nous changeait de ses habitudes. Pourquoi ne s'en tient-il pas à ce niveau?

M. BOURASSA: C'est vous qui m'y conduisez, vous parlez en termes quantitatifs de pages et de lignes.

M. MORIN: Parce que, quand on calcule pour une page de réglementation ou de loi, ça veut dire facilement sept ou huit articles, en moyenne. Cela veut dire des centaines d'articles de réglementation. Je ne vais pas demander au ministre de me démentir mais je ne serais pas surpris que dans sa réglementation éventuelle il y aurait entre 300 et 400 articles. Je ne serais pas surpris de la chose.

M. BOURASSA: Cela veut dire quoi comme...

M. MORIN: Cela veut dire ceci: avec une loi...

M. CLOUTIER: Votre droit de parole est épuisé.

M. MORIN: Non, j'ai été interrompu à plusieurs reprises. J'ai accepté très volontiers d'ailleurs, dans le cas du premier ministre. Je pense que j'ai droit encore à quelques minutes.

LE PRESIDENT (M. Brisson): Deux minutes.

M. MORIN: Huit minutes?

LE PRESIDENT (M. Brisson): Deux minutes.

M. MORIN: Deux minutes.

M. CHARRON: Entendons-nous pour six minutes, M. le Président, je propose six minutes.

M. MORIN: Pour des problèmes...

M. BURNS: Est-ce qu'on règle pour seize minutes?

M. CLOUTIER: M. le Président, comme l'Opposition en est à la seconde et à la minute pour le petit manège qu'elle poursuit, je suis tout à fait d'accord.

M.MORIN: Allons, allons! Je suis navré quand j'entends le ministre parler de manège. Il y a une façon très simple de régler le problème, déposer la réglementation, déposer les principes directeurs à tout le moins et la question sera réglée sur le champ. Mais on ne nous en voudra pas et personne ne peut nous en vouloir d'insister et de revenir à la charge tant que nous ne les aurons pas, ces règlements. Parce que, s'il y a 130 articles dans la loi et 300 ou 400 articles dans la réglementation, on ne peut vraiment comprendre la loi qu'en lisant la réglementation. On ne peut saisir la portée de cette loi qu'avec la réglementation en main. C'est pourquoi j'avais appuyé la motion du député de Saint-Jacques qui parlait au nom de l'Opposition.

Mais je me rends compte, en faisant le calcul, qu'avec 300 ou 400 articles de réglementation — qui ne sont d'ailleurs probablement pas prêts, pas entièrement prêts, peut-être même man-que-t-il des pans entiers, des chapitres entiers de réglementation qui ne sont pas au point — c'est peut-être trop exiger. C'est pourquoi, à l'heure du dîner, nous nous sommes finalement mis d'accord, avec le député de Chicoutimi, pour accepter les "principes directeurs". J'imagine que cela peut tenir, peut-être, dans 50 ou 60 pages. Ce serait déjà fort utile pour la commission.

On va nous dire: Pourquoi insistez-vous tellement et pourquoi y mettez-vous tout ce temps? C'est parce que, devant ce pouvoir discrétionnaire, devant cette législation déléguée, l'Opposition ne peut qu'être très sensible à ce problème. Si les règlements ont plus d'importance que la loi, le rôle de l'Opposition est diminué. Je ne sais pas si le ministre avait saisi ce point essentiel.

Si nous sommes réduits, nous de l'Opposition, à discuter de ce bill, alors que les vraies solutions se trouvent d'ailleurs, dans d'autres textes dont nous n'avons pas pu prendre connaissance, notre rôle est diminué, notre fonction est réduite dans sa portée.

M. SEGUIN: Deux minutes. A l'ordre, s'il vous plaît !

M. MORIN: Et le contrôle —je pense que le ministre ne pourra pas me contredire là-dessus, M. le Président — de l'Opposition sur la législation sera de plus en plus épisodique, de plus en plus aléatoire. Je vous remercie. Je n'avais pas tout à fait terminé, mais je vois que mon temps est écoulé.

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable ministre de l'Education sur la motion d'amendement.

M. CLOUTIER: M. le Président, j'ai l'intention de dire un certain nombre de choses. Nous venons d'assister à un assez triste spectacle. Quelles que soient les interruptions, j'irai jusqu'au bout de ma pensée. Je pense que c'est assez édifiant parce que, pour moi, le sujet que nous devrions discuter est un sujet grave.

Malgré les assurances que le Parti québécois nous a données ce matin au moment de la première motion, je n'hésite pas à dire qu'on se trouve devant une certaine obstruction. Ce serait de bonne guerre, dans d'autres circonstances, mais je suis en train de me demander si le Parti québécois se rend véritablement compte de sa responsabilité, à moins qu'il ne s'agisse carrément d'inconscience.

Je ne doute pas de la bonne foi du chef de l'Opposition, mais, dans son cas, j'ai l'impression qu'il ne se rend absolument pas compte de ce qui se passe actuellement.

M. BURNS: M. le Président, question de règlement.

M. CLOUTIER: II est normal...

M. BURNS: Question de règlement. J'aimerais que vous m'indiquiez, M. le Président, la pertinence des propos que tient actuellement...

M. CLOUTIER: Est-ce que vous avez entendu vos députés?

M. BURNS: Pardon?

M. CLOUTIER: On était drôlement loin de la pertinence lorsqu'on était rendu dans les rivières à saumon du député de Saguenay.

M. BURNS: Ah non!

M. CLOUTIER: Je ne vois pas pourquoi on ne me permettrait pas de faire des incursions...

M. BURNS: M. le Président...

M. CLOUTIER: ... moi aussi, un peu.

M. BURNS: C'est à titre d'exemple qu'à un moment donné, le député de...

M. HARDY: Mais on n'a pas droit aux exemples.

M. BURNS: Même, je peux dire que j'ai écouté l'intervention du député de Saguenay et, s'il a bifurqué dans ses rivières à saumon, c'est parce qu'il y a été poussé par d'autres députés à la commission, dont le député de Dorion, entre autres.

M. BOSSE: Quand le député de Saint-Jacques est venu se promener dans Dorion là...

M. BURNS: Non, je veux tout simplement dire, sur la question de règlement...

M. CLOUTIER: Je suis prêt à me ranger.

M. BURNS: Je n'ai pas fini ma question de règlement. Je veux simplement indiquer au ministre le sens de ma question. Je ne pense pas que le ministre, à ce stade-ci — il pourrait le faire sans doute à d'autres endroits — je ne pense pas qu'il soit très pertinent au débat de critiquer l'attitude que l'Opposition tient face au projet de loi. Il aura sûrement l'occasion de le faire. Actuellement, on discute un amendement, à savoir si on modifie les mots "réglementation" ou "règlement" par les mots "principes directeurs". C'est ce qu'on discute.

M. CLOUTIER: M. le Président, je n'ai absolument pas l'intention d'entamer un nouveau débat de procédure. Tout ce que j'ai fait, c'est un certain nombre de remarques que j'ai rattachées aux propos des députés de l'Opposition, ce qui me paraissait logique. Mais si vous jugez à propos qu'il me faut revenir au point strict de la motion, je le ferai avec plaisir.

Il est exact que j'aurai l'occasion de continuer un peu ce que j'avais commencé à dire et d'indiquer que ce n'est pas de cette façon que le Parti québécois pourra manifester l'intérêt qu'il a pour la langue.

Je ne sais pas si on se rend compte de la difficulté pour un gouvernement d'arriver avec une loi de cet ordre, du nombre d'obstacles qu'il a fallu franchir, des conflits qu'il a fallu résoudre et ceci, dans l'intérêt général. Le Parti québécois aurait dû voter, en deuxième lecture, pour le principe de ce projet de loi, parce que le principe de ce projet de loi...

M. CHARRON: J'invoque le règlement! M. le Président, j'invoque le règlement! Encore une fois, le ministre de l'Education essaie de livrer un message à la nation. Les membres des media d'information ont été d'une présence continuelle. Il dit: Ils le sauront, lorsque nous mettrons un terme aux séances de cette commission. Le ministre pourra alors lancer toutes les épithètes qu'il voudra sur l'attitude des membres de la commission et nul doute que, comme il leur demande souvent de noter chacune des interventions qu'il fait lui-même et qu'il est le seul à savourer, il aura l'occasion de les répéter aux membres des media d'information qu'il considère comme des purs scribes de ses messages à la nation.

Mais, pour le moment, il est soumis, tout aussi digne et noble qu'il soit, au même règlement que chacun des membres de cette commission et doit traiter de la pertinence de ce débat.

J'invoque le règlement, également, M. le Président, pour rappeler que dans son intervention irrégulière que faisait le ministre de l'Education, il en était à commenter le vote que les membres de l'Assemblée nationale ont pris en deuxième lecture. Cette allusion et ce retour à une décision prise à la deuxième lecture, autant elle nous est interdite à nous, elle l'est également au ministre de l'Education.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur la question de règlement, je comprends très bien l'argumentation du député de Saint-Jacques.

Par contre, je pense qu'il comprendra lui aussi que je me dois d'accorder au ministre de l'Education la même latitude que j'ai accordée à tous les membres qui sont intervenus dans le débat d'aujourd'hui. Je m'en réfère aux allusions ou aux références que certains membres de l'Opposition ont faites en regard des décisions de cette commission d'ajourner ses travaux avant d'avoir entendu tous les organismes. Je pense que le précédent, si précédent il y a, a été créé à ce moment. J'invite le ministre de l'Education à revenir à la motion de l'amendement, mais je lui permettrai sûrement la même latitude, comme je l'ai dit tantôt, que j'ai eue à l'égard des députés de l'Opposition et des autres membres de la commission. Le ministre de l'Education.

M. CLOUTIER: Je vous remercie, M. le Président. Je n'abuserai certainement pas de votre permission. Je n'ai, en effet, fait que ce que les autres ont fait, mais je n'ai pas l'intention de soulever un nouveau débat inutile sur la procédure. Je m'arrête donc là.

Ce matin, nous avons accepté une motion pour que tous les députés prennent la parole. Nous l'avons fait avec quelques hésitations dont j'ai fait part aux membres de la commission à ce moment. Je crois que mes hésitations étaient parfaitement fondées. Cependant, je n'hésite pas et je ne regrette pas cette décision, parce qu'elle illustre de façon claire que nous avons voulu donner à l'Opposition toutes les chances de s'exprimer de la façon qu'elle choisissait de s'exprimer. L'opinion publique sera juge de cette façon qu'elle choisit.

Il y a eu une nouvelle discussion qui a commencé sur une motion me demandant de déposer les règlements, avant même le début de la discussion du premier article. Cette discussion a commencé autour de onze heures et demie et ne s'est terminée qu'à six heures. Ceci vous donne un peu une idée du temps qu'on y a consacré.

J'ai clairement expliqué qu'il ne pouvait pas être question pour moi de déposer des règlements. J'ai également expliqué quelles étaient les limites du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. J'ai parlé du risque de précédents que ceci allait créer. En fait, le député de Maisonneuve s'est trouvé à me donner raison indirectement. Le Parti québécois, en revenant avec un amendement, m'a également donné raison. Ceci signifie qu'au cours de cette discussion assez stérile, j'avais très certainement apporté des arguments qui ont dû toucher le Parti québécois.

On m'a cité abondamment. Je reconnais entièrement la citation que l'on a faite de moi et je la maintiens. Il a toujours été de mon intention d'apporter tous les éclaircissements nécessaires, lorsque nous arriverions aux articles pertinents et même de déposer ce que j'ai appelé les principes directeurs, parce que, on l'a admis: II est impensable à ce stade-ci de déposer des règlements.

Parlons-en de ces règlements, M. le Président, parce que là encore on a commis un certain nombre d'abus de langage. On donne l'impression que ce projet de loi est pétri de règlements. Moi, je n'en compte pas 20 ou 25, je vais vous dire exactement ce que je retrouve et je vais vous dire exactement ce que j'entends faire de manière à éclairer les membres de la commission et à permettre le type de discussion sérieuse et approfondie que je souhaite et que j'appelle de tous mes voeux depuis que nous avons commencé à siéger ici.

Il y a exactement huit mentions de règlements d'importance inégale et je vais les dissocier en catégories. J'élimine immédiatement les règlements afférents à l'article 21 qui relèvent du code des professions, dont j'aurai l'occasion de parler, et qui ont été faits dans le cadre du code des professions. L'article 21 reprend textuellement l'article du code des professions. Il y a trois règlements qui sont des règlements que j'appellerais relativement mineurs et que je n'ai pas l'intention de déposer, mais j'apporterai tous les éclaircissements nécessaires en cours de route.

Je m'excuse, j'ai l'intention d'aller jusqu'au bout de ce que j'ai entrepris de dire. Ce n'est pas pour être désagréable envers le chef de l'Opposition, mais ce n'est pas le moment du dialogue.

M. MORIN: Par la suite, me permettrez-vous des questions?

M. CLOUTIER: Vous vous adresserez au président.

Il y a, à l'article 57, la création de commissions de terminologie; il s'agit là tout simplement d'un règlement relativement simple, il n'y a pas lieu de l'apporter en commission parlementaire. L'exécutif a une responsabilité. Tant que je serai membre de cet exécutif, j'entends l'assumer. Il y a également l'article 64 qui comprend des règlements, mais il s'agit de règlements donnant des instructions aux différents ministères, aux différents organismes para-publics pour fournir une coopération à la régie et aux commissions de terminologie. C'est ce type de règlements dont il n'y a pas lieu de discuter en commission parlementaire.

Il y a les règlements afférents à l'article 14 qui relève de la fonction publique. J'aurai à dire ce que la fonction publique, qui est une loi spécifique, a déjà fait de ce point de vue.

En fait, il y a véritablement deux règlements majeurs dans cette loi qui en compte 130 et deux règlements qui apportent des précisions et qui supposent une explication sur les procédures. Les règlements majeurs sont les suivants : Ce sont ceux qui sont afférents au programme de francisation des entreprises, les articles 32 et 33. Ce sont ceux qui sont afférents à la langue d'enseignement, les articles 48 à 51. J'ai toujours dit que j'avais l'intention de faire disparaître toute ambiguïté possible et je serai

disposé à déposer en temps et lieu — je vous expliquerai de quelle façon je suggère de procéder — les principes directeurs qui expliqueront le cheminement que nous entendons suivre. Il y a également deux autres règlements qui sont importants, mais qui n'ont quand même pas la même importance que les deux précédents que je viens de vous citer. Ce sont les règlements afférents à l'article 40 qui porte sur l'étiquetage et les règlements afférents à l'article 43 qui porte sur l'affichage. J'ai également l'intention d'en déposer les principes directeurs, c'est-à-dire qu'aussitôt que nous aurons commencé la discussion, je pourrai déposer ces quatre documents faisant état de principes directeurs et j'apporterai tous les éclaircissements nécessaires.

M. le Président, il y a quand même quelque chose d'assez paradoxal dans la démarche de l'Opposition. Je ne veux pas revenir sur ce que je vous disais au début, pour ne pas susciter de réactions quand je parlais d'obstruction. En stricte logique, ce que l'Opposition aurait dû réclamer, ce ne seront pas les projets de règlements, ce qui était anormal au départ, ni même les principes directeurs. Ce sont d'abord les amendements à la loi. Il va de soi que les amendements influent sur les règlements. Comme les amendements portent justement, je l'ai indiqué dans mon discours de deuxième lecture, sur ces deux points, les règlements les plus importants, c'est-à-dire les programmes de francisation et de la langue d'enseignement, il est absolument évident qu'il est aberrant de demander des règlements avant même d'avoir obtenu les amendements. J'ai déjà dit que rien ne m'imposait de déposer au début des travaux de la commission parlementaire les amendements qui normalement, dans le processus législatif habituel, sont proposés au fur et à mesure, lorsqu'on arrive à la discussion de l'article pertinent.

Cependant, j'ai offert dès ce matin, à 11 h 30, à la commission de déposer, aussitôt que nous aurions commencé les débats, ces amendements qui sont là et qui attendent depuis ce temps. Ils nous auraient permis d'emblée une discussion utile. C'est seulement après, que les principes directeurs des réglementations peuvent véritablement avoir un sens. Je vous laisse à juger, M. le Président, si dans cet étrange manque de logique, on ne voit pas justement une stratégie, parce que tout ce que l'on cherchait, c'était justement de gagner du temps et de faire piétiner un débat à des fins que je préfère ne pas qualifier pour l'instant.

Dans un autre contexte, je suis convaincu que je serais arrivé et que j'aurais dit: Ecoutez, messieurs, commençons la discussion. Je vous offre, pour éclairer la commission, de présenter immédiatement les amendements, en cours de route, les principes directeurs des articles qui y réfèrent. Je suis à peu près convaincu qu'on aurait accepté. Les choses ne se sont pas passées de cette façon.

On a commencé toute une série de motions et je ne serais pas étonné, d'ailleurs, M. le Président, qu'il y en ait encore quelques-unes en réserve, ce qui viendra confirmer la thèse que j'ai énoncée au début.

Sur le plan pratique, ce que, moi, je propose de faire, précisément pour avoir le type de débat que le gouvernement souhaite, c'est qu'aussitôt que nous aurons commencé le débat de l'article 1, je dépose les amendements. C'est ce qu'il faut déposer d'abord, et non les principes directeurs. Ensuite, contrairement à ce que j'avais d'abord prévu, c'est-à-dire déposer les principes directeurs au fur et à mesure des articles, de manière à apporter les explications pertinentes qui s'imposent, je suis disposé à déposer aussi les principes directeurs dans les quatre grands secteurs que j'ai énumérés. Cependant, étant donné que j'avais prévu que ce dépôt se ferait plus tard, au moment de la discussion des articles qui s'y réfèrent, je ne pourrai pas le faire immédiatement. Si, par hasard, nous acceptons d'entrer dans le débat, je dépose immédiatement les amendements, et, demain après-midi — j'ai donné les instructions nécessaires à cet effet, pour que tout soit prêt — je dépose, sous forme de quatre documents, les projets de règlements, plus exactement, les principes de ces projets de règlements.

J'ai toujours dit qu'il n'était pas question de déposer des projets de règlements pour ne pas créer de précédents. Or, je pense, M. le Président, qu'on pourra dire ce que l'on voudra, mais qu'il s'agit là d'un exposé assez réaliste, et d'une offre extrêmement claire. Et si l'Opposition la refuse, je pense que l'Opposition aura, elle, à s'expliquer, et non le gouvernement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Messieurs, je demanderai maintenant à la commission de se prononcer, tout d'abord sur l'amendement du député de Chicoutimi, à l'effet de remplacer le mot "projets" par les mots "principes directeurs" dans la motion du député de Saint-Jacques.

Est-ce que cette motion d'amendement est adoptée?

M. MORIN: Adopté. DES VOIX: Adopté.

Vote sur la motion d'amendement

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce qu'on demande le vote enregistré sur la motion d'amendement?

M. CLOUTIER: Nous nous opposons à cet amendement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Mais, est-ce qu'on demande...

M. HARDY: Bien non! On demande le vote.

M. BURNS: Mais non. C'est adopté.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le vote est demandé.

M. HARDY: M. le Président, la malhonnêteté du député de Maisonneuve...

M. MORIN: Soyez attentifs, soyez attentifs!

M. HARDY: Oui, on est attentif à tout...

M. CLOUTIER: Ce n'est pas parce que deux ou trois députés de l'Opposition ont crié ou chuchoté adopté que ceci est adopté. Soyons sérieux.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur la...

M. CLOUTIER: Après tout ce que je viens de dire! Nous n'avons pas l'intention d'appuyer cette motion pour les raisons que j'ai exprimées.

M. MORIN: C'est d'accord. Nous sommes d'accord pour un vote.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur la motion d'amendement, M. Séguin.

M. SEGUIN: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Charron.

M. CHARRON: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Déom.

M. DEOM: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Cloutier.

M. CLOUTIER: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Hardy.

M. HARDY: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Lapointe.

M. LAPOINTE: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Brown.

M. BROWN: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Morin.

M. MORIN: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Caron. M. Phaneuf.

M. PHANEUF: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Saint-Germain. M. Samson. M. Veilleux.

M. VEILLEUX: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pour: 2

Contre: 8 L amendement est rejeté.

M. BOURASSA: Article 1.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur la motion principale du député de Saint-Jacques. La commission est-elle prête à se prononcer?

M. HARDY: Oui.

M. BURNS: Non. Je ne pense pas. Je n'ai pas parlé.

M. CLOUTIER: Un autre amendement?

M. MORIN: II n'a pas exercé son droit de parole sur la motion principale.

M. CLOUTIER: Ah! Son droit de parole...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve, sur la motion du député de Saint-Jacques.

M. BURNS: M. le Président, pourrais-je savoir l'heure?

LE PRESIDENT (M. Gratton): II est dix heures quarante-cinq.

M. BURNS: Je suis content de voir que le ministre de l'Education me fait ce sourire de satisfaction lorsqu'il...

M. CLOUTIER: Ce n'est pas tout à fait un sourire de satisfaction, M. le Président. Cela s'inscrit dans mes remarques précédentes. Vous paierez le prix de votre stratégie, parce que je crois qu'il y a des gens sérieux qui auraient bien envie qu'on essaie "haute trahison". Doucement, vous ne vous rendez pas compte de ce que vous faites.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: ... le prix de votre trahison, M. le ministre...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!

Le député de Maisonneuve, sur la motion.

M. LESSARD: ... le sens des mots.

M. BURNS: M. le Président, je tiens, au début, à clarifier une chose, à rendre un point bien clair. Il est évident — j'y ai touché en passant tout à l'heure, sans préciser, pour la simple raison...

M. LEGER: M. le Président, je pense que le micro du député de Maisonneuve ne fonctionne pas. On pourrait peut-être attendre que le micro soit remplacé.

M. BURNS: Cela va?

M. LEGER: II n'a pas peur de ses paroles.

M. CHARRON: Même le mien? On, two, testing.

M. HARDY: Même les micros sont scandalisés.

M. BURNS: One, two, three. Hello! Merci, M. le Président. Je disais qu'il est, à mon sens, important, au départ de mon intervention, de placer une chose bien claire, même si le ministre semble en douter.

Nous ne sommes pas à ce point non avertis de la façon de légiférer pour tenter de vous dire que nous n'acceptons pas qu'il y ait un pouvoir réglementaire dans une loi. Et même si le premier ministre, à quelques reprises, a tenté d'intervenir dans les discussions, dans ce que le chef de l'Opposition a d'ailleurs très gentiment qualifié de dialogue, même si le premier ministre a tenté de mettre le chef de l'Opposition en contradiction, je pense qu'il a été clair, de l'intervention et du chef de l'Opposition et de mes autres collègues — en tout cas, ceux que j'ai entendus depuis que je suis à la commission — que le Parti québécois ne prétend pas convaincre le gouvernement qu'il n'y aura pas de pouvoir réglementaire dans sa loi.

Je l'ai dit tantôt et cela vaut peut-être la peine de le répéter pour qu'on le sache bien, un Etat moderne, un Etat qui légifère dans un but de ne pas être constamment obligé de ramener devant son Assemblée délibérante le projet de loi une fois adopté, doit — et c'est normal — se réserver un pouvoir qui serait exercé non pas par le gros appareil qu'on appelle l'Assemblée nationale, là où les lois sont adoptées et par la suite amendées, mais doit se réserver un moyen, un instrument de travail plus flexible, et cet instrument de travail plus flexible est sans aucun doute le droit d'édicter des règlements.

Or, une fois admise cette position, il s'agit de se demander jusqu'à quel point, quand vient le temps de légiférer, un membre de cette Assemblée qui légifère est en mesure de se faire une opinion sur le projet de loi qu'il est en train d'adopter.

Nous sommes en train d'adopter ce que le premier ministre lui-même a qualifié d'un projet de loi historique, quelque chose qui aura des conséquences, et soyez certains de cela, nous en sommes convaincus, bon ou mauvais, ce projet de loi aura des conséquences importantes sur les droits des Québécois. Nous ne l'avons jamais nié. C'est à ce point qu'on considère l'importance de ce projet de loi.

Si, à ce moment-ci, au stade où on en est de l'étude de cet important projet de loi, si, également, après la promesse faite le 28 juin à cette commission parlementaire par le ministre qui parraine le projet de loi, si, après tout cela, on nous refuse, aujourd'hui et je dis bien aujourd'hui, avant l'étude du projet de loi, article par article, tout au moins un projet de loi de réglementation au moins dans ses grandes lignes, je n'ai qu'une seule conclusion à tirer, c'est que la politique linguistique du gouvernement en définitive n'est pas prête. Je ne peux pas tirer d'autre conclusion. On n'est pas ici pour jouer à la cachette. On n'est pas ici non plus pour se faire dire, aux nombreux articles où le pouvoir réglementaire se présente, on n'est pas ici pour se faire dire: Adoptez le projet de loi dans cette forme et vous verrez bien ce que cela va donner quand on exercera notre pouvoir réglementaire. Je mentionnais 18 articles tantôt dans lesquels, au moins, le pouvoir réglementaire se trouve.

Est-ce que, chaque fois qu'on va arriver à l'un de ces articles, chaque fois qu'on va poser des questions, soit au premier ministre ou au ministre responsable du projet de loi, on devra s'attendre à se faire dire: Cela sera déterminé par règlement. Je vous dis tout de suite ce qui peut arriver à n'importe quel article que j'ai mentionné ou que mes collègues ont mentionné tout à l'heure. Je prends, par exemple, l'article 9. Qu'est-ce qui pourrait fort bien arriver à l'article 9 qui nous dit que les organismes municipaux et scolaires qui ont au moins 10 p.c, etc? "Au cas de fusion, dit le troisième alinéa, réduisant à moins de 10 p.c. le pourcentage prévu au premier alinéa, le présent article continue à régir l'organisme issu de la fusion, si l'acte constatant la fusion y pourvoit, pour la période fixée par le lieutenant-gouverneur en conseil". Ce qui peut arriver, M. le Président, c'est que cet article 9 — je ne vous fais pas de menace, je ne vous dis pas que c'est cela qui va arriver, mais je vous dis qu'on peut, si on maintient l'attitude actuelle du côté gouvernemental, se retrouver dans une situation aussi stupide qui pourrait être la suivante.

Je verrais très bien le député de Saint-Jacques dire: Je propose un amendement à cet article et que les mots "période fixée par le lieutenant-gouverneur" soient changés par les suivants: Pour la période de trois mois suivant la fusion. Là, on aurait un grand débat, M. le Président, dès cet article 9, sur ce délai de trois mois. Est-ce que c'est suffisant, est-ce que c'est insuffisant? On aurait, sans doute, de très longues discussions et du côté ministériel et du côté de l'Opposition à savoir si c'est assez trois mois. Le ministre nous dirait: Non, c'est la réglementation. Laissez faire votre amendement, on est contre. On va dire: Oui, mais cela va être de quel ordre votre délai? Le ministre dirait: Cela, c'est le règlement qui va nous le dire. A moins que, déjà, il sache quelle est cette période fixée, à moins qu'il ait à l'esprit la réponse et qu'il nous dise: Pour une période

d'un an. A ce moment-là, le député de Saint-Jacques ou bien dira: Je retire ma motion, d'accord, mais on va enlever cela, on va enlever "pour la période fixée par le lieutenant-gouverneur en conseil" et on va mettre ce que le ministre nous dit. On va préciser sa loi. Cela va être de deux choses l'une. Ou bien on va se faire dire: Là-dessus, on n'est pas encore branché. C'est cela qui me permet de faire l'affirmation qu'on est en train d'adopter un projet de loi qui, même dans l'esprit du gouvernement, n'est pas définitif. Ses politiques ne sont pas déterminées.

Cet exemple que je viens de donner pourrait être donné à l'égard de tous et chacun des articles et, à tous et chacun des articles, on devra juger le gouvernement qui nous dira: Là-dessus, cela va être la réglementation. Ou bien: Ne vous inquiétez pas, dans la réglementation, cela va être telle chose. Si c'est la deuxième partie de l'alternative, à ce moment-là, il n'y a pas de problème, c'est ce qu'on vous demande. S'il n'y a pas de problème, on vous dit: Dites-nous donc ce que vous voulez dire, à l'article 9, par la période fixée par le lieutenant-gouverneur dans le cas de fusion qui change cette proportion de 10 p.c. dans le cas des organismes scolaires et municipaux! Ce n'est pas plus compliqué que cela ce qu'on vous demande.

Dans cette option, cette partie de l'alternative, si c'est celle-là qui se réalisait — je ne peux pas le savoir avant qu'on arrive à ces articles — on serait placé dans cette position bête — je dois la qualifier comme telle — de vous arracher vos règlements, morceau par morceau; on serait obligé, M. le Président, de vous tirer les vers du nez. C'est cela qu'on se refuse de faire et c'est sur cette logique que repose la motion du député de Saint-Jacques. Une logique qui dit tout simplement: II est absolument inutile, lorsqu'on discute de ce vaste projet, de cette charte... Je ne sais pas si le mot est français, dans ce cas-là, c'est dans le cas d'une compagnie que cela ne l'est pas, c'est un acte constitutif qu'on dit. J'ai appris cela de l'ex-député de Chicoutimi qui reprenait ses collègues quand on parlait de la charte de la ville de Montréal. Je ferme la parenthèse. Dans cette charte. Pardon? Dracula Tremblay, oui.

M. BOURASSA: C'est le surnom que lui a donné le député de Maisonneuve.

M. BURNS: Oui. Vous m'avez fait perdre le fil de mon idée. Dans cette grande charte de la langue française — c'est là où j'en étais — est-ce que vous allez demander, M. le ministre, aux députés de l'Opposition de s'abaisser et de vous abaisser, n'oubliez pas ça, à vous tirer les vers du nez les uns après les autres? Est-ce que c'est ça que vous allez...

M. CLOUTIER: M. le Président, on me pose une question. Qu'est-ce que je viens de dire, M. le député de Maisonneuve, que les amendements sont là, que je les dépose aussitôt que vous le voudrez, que les principes directeurs, je vous l'ai expliqué, seront prêts demain si vous voulez? Je suis prêt à modifier. Qu'est-ce qu'il vous faut de plus?

M. BURNS: Vous êtes prêt à les déposer ce soir?

M. CLOUTIER: Evidemment.

M. BURNS: Ce n'est pas ce que j'ai compris, moi.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: J'ai compris que vous nous fixiez des étapes...

M. CLOUTIER: Pas du tout.

M. BURNS: J'ai compris que vous disiez...

M. CLOUTIER: Ah! bien là, je me suis exprimé...

M. BURNS: Non, écoutez, j'ai compris...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que je pourrais inviter le député de Maisonneuve à s'adresser au président, parce que je me sens négligé.

M. BURNS: Oui, M. le Président, vous avez bien raison et vous n'êtes pas négligeable. Je m'adresse à vous. Je parle au ministre...

M. CLOUTIER: Est-ce que je pourrais apporter cette précision...

M. BURNS: Je parle par votre entremise, je parle au ministre à travers vous.

M. CLOUTIER: Est-ce que je peux apporter cette précision, elle sera sans doute utile au député de Maisonneuve.

M. BURNS: Est-ce que le ministre veut parler à travers le président?

M. CLOUTIER: Ah, bien sûr! Je ne sais pas si ce sont mes remarques préliminaires qui ont frappé le député de Maisonneuve et qui l'ont empêché de comprendre la suite de mes propos, mais ce que je m'acharne à dire depuis, cinq, huit... grands dieux! ce n'est pas possible, ça fait neuf heures qu'on se chicane inutilement, alors qu'il y a des choses sérieuses à discuter, j'ai dit que je suis prêt à déposer instantanément les amendements, ils sont là, commençons l'article 1, c'était mon intention, je voulais l'offrir à l'Opposition alors que rien ne m'y oblige. Pour ce qui est des principes directeurs, j'ai dit que j'avais d'abord l'idée, ce qui est

parfaitement normal, de les présenter au fur et à mesure des articles pertinents, mais qu'à la lumière de la demande qu'on m'a faite, j'ai donné cet après-midi même des instructions pour qu'on les prépare de façon définitive pour dépôt demain dans la journée.

M. BURNS: M. le Président...

M. CLOUTIER: J'ai également souligné l'aberration de demander le pouvoir réglementaire avant les amendements parce que les amendements portent justement sur deux des secteurs très importants. Qu'on ne vienne pas dire que ce n'est pas ce que j'ai dit tout à l'heure.

M. BURNS: M. le Président...

M. CLOUTIER: Référez-vous au journal des Débats.

M. BURNS: ... j'ai très bien compris ce que le ministre a dit, M. le Président. J'ai très bien compris ce qu'il a dit. Je vous réfère simplement à la question que le député de Saint-Jacques, ce matin a posée au leader du gouvernement en Chambre, et à la question additionnelle que j'ai posée également au leader, et, par le biais du leader du gouvernement, au ministre de l'Education. Nous vous avons demandé ce matin, non hier — les journées sont tellement longues que je confonds les jours — vous avez raison de parler de calendrier, M. le Président.

M. BOURASSA: Par votre faute.

M. BURNS: Non, non pas par notre faute. Qui est-ce qui nous impose le règlement de fin de session qui nous fait siéger de dix heures le matin à minuit le soir?

M. BOURASSA: Cela existe depuis quarante ans.

M. BURNS: Cela existe depuis quarante ans, oui, mais...

M. MORIN: Est-ce qu'on ne pourrait pas acquiescer à notre demande au lieu de nous faire perdre notre temps?

M. CLOUTIER: C'est ce que j'ai dit depuis le début. Ne tentez pas de sauver la situation et de justifier l'obstruction que vous avez faite, depuis le début, je dis ça.

M. BURNS: M. le Président, pas du tout, M. le ministre. M. le Président, j'ai encore la parole à ce que je sache.

M. CLOUTIER: Oui, mais vous m'avez posé une question.

M. BURNS: Est-ce que j'ai encore la parole? Non, je l'ai posée au président.

M. CLOUTIER: Oui, mais je répondais au président aussi.

M. BURNS: Allez, je vous écoute.

M. CLOUTIER: Ecoutez, soyons sérieux. J'ai dit ce matin que j'étais prêt à déposer les amendements. Je répète ce soir que les amendements doivent être déposés avant...

M. MORIN: Les règlements.

M. CLOUTIER: Oui, mais je vous ai expliqué, vous vous êtes rendu à mes raisons, qu'il ne pouvait pas être question de déposer des amendements ou des projets d'amendements mais aussitôt que vous avez compris, à la suite de mes explications, qu'on pouvait envisager le dépôt de principes directeurs, j'ai dit oui. Mais vous avez voulu continuer de discuter. Je répète mon offre, j'avais l'intention ce matin d'arriver aussitôt à l'article 1, les amendements sont là.

M. BURNS: M. le Président, je répète que j'ai très bien compris ce que le ministre de l'Education a dit. Il nous pose la question. Il nous dit: Rendons-nous à l'article 1 et ensuite, on va vous déposer tout ce que vous voulez.

M. CLOUTIER: Je croyais que c'était la raison...

M. BURNS: Nous vous disons...

M. CLOUTIER: ... pour laquelle nous nous réunissions.

M. BURNS: On vous dit ceci: C'est la raison pour laquelle on a posé une question préalable à la discussion de l'article 1. On dit: Avant de discuter du projet de loi, mettez-les sur la table vos petits papiers. Nous ne sommes pas capables de juger véritablement ce qu'il est de ce projet de loi.

M. CLOUTIER: Vous n'auriez pas une petite motion.

M. BURNS: D'abord les amendements, je suis bien d'accord. Nous examinerons d'abord le poids des amendements que vous vous proposez de faire au projet de loi, c'est certain. Mais également, on aimerait bien aussi, avant l'étude du projet de loi, examiner quelles vont être les modifications ou les précisions que vous avez l'intention d'apporter à ce projet de loi, par l'entremise des règlements. Ce n'est que normal. Si je vous ai référé à un exemple tout à l'heure, si vous ne nous dites pas cela, à tous les articles, nous serons obligés de vous demander

bêtement — bêtement, je le dis encore — ce qu'est la période que le lieutenant-gouverneur en conseil va fixer pour permettre à une municipalité, dans la situation du troisième alinéa de l'article 9, de s'ajuster. C'est ce que nous serons obligés de faire.

Je ne crois pas, M. le Président, que le ministre trouve que c'est une façon d'étudier un projet de loi aussi important que celui-ci. Personnellement, je ne comprends pas comment vous pouvez vous attendre à ce que les députés de l'Opposition, à qui vous allez vouloir faire avaler d'un coup... c'est pour cela qu'on a demandé hier les amendements pour pouvoir les examiner et voir ce que cela change véritablement dans le projet de loi, c'est pour cela que ce soir, on demande les règlements, à savoir ce que cela va changer dans le projet de loi. Je pense que vous ne pouvez pas vous attendre que les députés de l'Opposition assimilent un certain nombre, au moins 18 modifications par le simple point de vue réglementaire, au moins 18... je ne parle pas des amendements, M. le ministre, je parle des modifications réglementaires...

M. CLOUTIER: Je sais.

M. BURNS: Je veux dire que ce sont des précisions au projet de loi, mais cela modifie quand même le projet de loi. Je ne pense pas que vous soyez en droit de vous attendre qu'on assimile en quelques minutes et au fur et à mesure à la petite cuillère, quand on nous les donnera, les modifications au projet de loi, tant par vos amendements que vous avez l'intention d'apporter avant la fin de nos travaux ici que par le pouvoir réglementaire que vous voulez exercer.

M. le Président, je vous le dis tout de suite, je ne me sens pas capable de m'abaisser à discuter un projet de loi de cette façon-là. Si c'était un projet de loi, comme je le disais tout à l'heure, où le pouvoir réglementaire est parfaitement cerné dans le projet de loi, si on avait — comme je l'ai mentionné au ministre de la Justice, et je ne l'ai pas entendu me contredire là-dessus, je pense que le ministre de la Justice est assez familier avec les techniques législatives qu'il m'aurait contredit si j'avais eu tort — utilisé la technique législative habituelle de dire, à l'article 124 ou l'article 31, peu importe le numéro: Voici les pouvoirs réglementaires que nous avons l'intention de donner au lieutenant-gouverneur en conseil. Si on avait tout au moins fait cela, si on les avait circonscrits ces pouvoirs réglementaires, on serait peut-être un peu moins inquiets, peut-être un peu moins, cela dépend de l'extension qu'on leur donnerait et de la volonté du gouvernement de les définir ces pouvoirs de réglementation.

Mais actuellement, les seuls endroits où j'en vois, où je vois un semblant de cela, c'est dans les articles 32 à 34 inclusivement, où on semble dire: Dans ces cas-là, ce sont des pouvoirs réservés. C'est typiquement la technique législative. Alors que l'on retrouve à trois articles seulement ce qui ressemble à une description du pouvoir réglementaire habituel d'une loi, on retrouve des références aux pouvoirs réglementaires, à 15 autres endroits dans le projet de loi. C'est ce qu'on trouve étonnant et c'est cela que je ne peux pas personnellement accepter. C'est ce que mes collègues ne peuvent pas accepter. Cette méthode nous laisse croire —et je le répète, M. le Président— de deux choses l'une: ou bien vous voulez nous faire de petites cachettes et nous les apporter, juste au moment où on discutera du projet de loi, de l'article — j'espère que ce n'est pas l'intention du gouvernement parce que ce serait une technique trop basse — ou bien c'est cela, ou bien votre projet n'est pas fini.

C'est un clou à finir, votre projet. C'est un projet qui a encore une patte en l'air et qui n'a pas de tête. C'est cela le problème. On est obligé de le croire tant et aussi longtemps...

M. HARDY: ... péquiste.

M. BURNS: Pardon?

M. HARDY: Ce n'est pas un péquiste.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Vous avez le droit de penser ce que vous voudrez des péquistes.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Vous ne me ferez pas grimper dans les rideaux là-dessus, c'est-à-dire que ce n'est pas moi qui vais convaincre le ministre qu'un péquiste...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Puis-je rappeler au député de Maisonneuve que son temps est écoulé?

M. BURNS: ... est plus intelligent qu'un libéral, pas plus que je suis convaincu que le ministre va me faire comprendre qu'un libéral est plus fin qu'un péquiste. S'il vous plaît, pas de discussion stérile là-dessus! Est-ce que mon...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Votre temps est écoulé.

M. BURNS: Je veux seulement... En tout cas, en résumé, M. le Président, j'aurais pu peut-être résumer. Je vous dis que j'ai été interrompu à plusieurs reprises, mais, en tout cas, je me plie à votre...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous avez eu des réponses à vos questions.

M. BURNS: ... indication. Je vous dis tout

simplement qu'à ce stade-ci, avec la réaction du ministre, avec cette réaction qui nous dit: Attendez à demain pour les amendements, attendez à...

M. CLOUTIER: ... les amendements tout de suite.

M. BURNS: Sinon les amendements, les règlements. Vous avez dit...

M. CLOUTIER: A moins que vous ayez quelques autres motions.

M. BURNS: Non, vous nous avez dit...

M. BOURASSA: Est-ce que vous avez d'autres motions?

M. BURNS: ... demain pour les règlements, alors?

M. CLOUTIER: Ah oui! j'ai dit demain, parce que ce n'était pas mon intention première. Je me suis rendu à certaines de vos raisons. Une fois que vous avez compris qu'il n'était pas question de déposer des règlements mais des principes de règlements.

M. BOURASSA: Non, mais le député de Saint-Jacques dit qu'il a soixante motions encore?

M. CHARRON: J'ai 67 motions encore.

M. BOURASSA: ... qu'il a 67 motions encore.

M. CLOUTIER: Si vous avez d'autres motions, cela change évidemment un peu...

M. BURNS: On va peut-être les réduire à 63.

M. HARDY: ... pour la défunte Union Nationale.

M. BURNS: A cause du chiffre magique, peut-être.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que c'est terminé?

M. BURNS: M. le Président, je dis qu'on est obligé... Est-ce que j'ai bien compris le ministre quand il a dit: L'aspect réglementaire, ce n'est que demain qu'il va nous en parler?

M. CLOUTIER: Oui.

M. BURNS: Et au fur et à mesure?

M. CLOUTIER: Non, pas du tout, non pas au fur et à mesure. J'ai bel et bien expliqué qu'il n'y a pas 25 ou 15 règlements à déposer et j'en ai fait le bilan. Je ne sais pas où était le député de Maisonneuve. J'ai distingué les règlements que j'appelle majeurs et les règlements qui sont davantage des règlements de précision et j'ai dit que j'étais prêt à déposer demain quatre règlements, les plus importants, les deux qui portent sur la francisation...

M. BURNS: Entre autres, vous n'avez pas parlé de l'article 34? Ce sont des pouvoirs...

M. CLOUTIER: Bien sûr.

M. MORIN: Non, vous ne l'avez pas mentionné. J'ai bien suivi l'exposé du ministre...

M. BURNS: Moi, je n'ai pas entendu cela. M. MORIN: ... ni l'article 34, ni l'article 63...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre ! A l'ordre ! Dans le moment, le député de Maisonneuve a la parole. Il devrait conclure, j'imagine, dans trente secondes.

M. BURNS: Je conclus, M. le Président, en moins que cela. Vous êtes bien gentil de m'accorder trente secondes. Je vous dis tout simplement qu'à ce stade-ci et à la façon dont le ministre nous répond, je suis obligé de conclure que son projet de loi n'est pas prêt; il est conçu, mais il n'est pas prêt à voir le jour. Il n'est pas prêt à être engendré. La délivrance du projet de loi n'est pas encore pour ce soir. L'accouchement n'est pas prêt. C'est cela qu'on est obligé de conclure.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Si la commission est prête à se prononcer sur la motion du député de Saint-Jacques...

M. CLOUTIER: Oui.

M. MORIN: D'abord, est-ce que je peux poser une question au ministre?

LE PRESIDENT (M. Gratton): S'il accepte d'y répondre.

M. MORIN: Quand même, il nous a tout à l'heure annoncé quatre blocs de règlements sur les articles 32 et 33 d'abord, ensuite sur l'article 40, ensuite sur l'article 43, ensuite sur les articles 48 à 51, mais qu'arrive-t-il des articles 34, 63, 69,107, 121 et 129?

M. CLOUTIER: M. le Président, il faudrait que je reprenne le projet de loi. J'ai l'intention d'apporter tous les éclaircissements nécessaires, mais je ne déposerai pas — et encore une fois il ne s'agit pas de règlements, il s'agira toujours de principes directeurs— tous les principes directeurs de toutes les références qu'il y a aux règlements.

M. MORIN: Non.

M. CLOUTIER: D'abord, dans plusieurs de ces articles, il s'agit de règlements qui dépendent de la régie et qui ne dépendent pas — et qui devront être faits une fois que la régie sera constituée — du lieutenant-gouverneur en conseil. Je propose de déposer, avant même que j'aie l'intention de le faire, c'est-à-dire au moment de la discussion article par article, très certainement dans la journée de demain, les quatre blocs de règlements qui me paraissent les plus importants. Ce sont surtout les programmes de francisation et l'enseignement.

Je propose, si nous sommes prêts à cesser cette démarche dilatoire, à déposer immédiatement les amendements. C'est par là qu'il faut commencer de toute façon, par les amendements, parce que les règlements tiennent compte des amendements qui portent justement sur ces points.

M. MORIN: ... jamais contester cela.

M. CHARRON: M. le Président, invoquant le règlement, si nous avions eu cette précision dès que le député de Chicoutimi a présenté cette motion et si le ministre s'était prévalu de son droit immédiatement, peut-être que la discussion que nous avons eue, qui a finalement eu raison de la résistance du ministre, n'aurait pas eu lieu immédiatement. Je suis prêt à admettre de retirer ma motion.

M. CLOUTIER: Changement de stratégie, parce qu'on s'aperçoit bien sûr que cela donne les résultats dont je vous avais parlé.

M. LESSARD: Est-ce que le ministre...

M. CLOUTIER: Alors, commençons et je dépose immédiatement les amendements, ce que je voulais faire à 11 heures.

M. LESSARD: ... déposer la réglementation.

M. CLOUTIER: Ecoutez, je ne recommence pas. Je vous ai tout dit cela à maintes reprises. Lisez le journal des Débats.

M. LESSARD: Ne venez pas nous dire qu'on a changé de stratégie.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. CLOUTIER: Pas du tout, c'est que la première motion parlait de règlements. J'ai bel et bien expliqué, pendant plusieurs heures, qu'il ne pouvait pas être question et je reprends avec une patience qui ne se démentira pas, croyez-moi...

M. LESSARD: Louis XIV est descendu des cieux.

M. CLOUTIER: ... parce que l'enjeu en vaut la peine dans l'intérêt de la collectivité québécoise.

M. LESSARD: Le roi soleil est descendu des cieux.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Vous avez battu la motion des principes directeurs.

LE PRESIDENT (M. Gratton). Le député de Saint-Jacques, ayant retiré sa motion...

M. CHARRON: Oui.

M. CLOUTIER: Article 1?

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... la commission peut maintenant entreprendre l'étude, article par article.

M. LESSARD: Dépôt des amendements. M. CHARRON: Non, M. le Président.

M. CLOUTIER: Vous avez d'autres motions?

M. CHARRON: M. le Président, me prévalant de l'article 77 du règlement, j'ai l'intention de vous proposer un ajournement.

M. BOURASSA: Vous ne vous rendez pas compte du tort que vous vous faites?

M. CHARRON: Oh! Laissez faire...

M. BURNS: On est assez vieux pour se rendre compte de cela. On est capable de prendre nos responsabilités.

M. BOURASSA: Non, mais vous donnez l'impression...

M. BURNS: Prenez les vôtres, on va prendre les nôtres. D'accord?

M. BEDARD (Chicoutimi): On se rend compte plus tard de ce que vous faites, par exemple...

M. BOURASSA: Non, mais vous avez l'air d'une poignée de machines à paroles qui veulent retarder l'adoption d'un projet de loi important.

M. MORIN: Et vous, qu'est-ce que vous faites en ce moment?

M. CHARRON: Savez-vous d'une poignée de quoi vous avez l'air quand vous présentez le projet de loi 22? Vous avez l'air d'une poignée de marionnettes.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. TARDIF: Tu en es un bouffon.

M. CHARRON: Vous êtes ici...

M. TARDIF: Tu est un bouffon, Charron.

M. BURNS: On est assez vieux pour choisir nos amis.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît! Dois-je comprendre que le député de Saint-Jacques propose l'ajournement du débat?

M. CHARRON: Oui, M. le Président, j'ai l'intention de vous expliquer pourquoi.

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'ai bien compris: l'ajournement du débat.

M. CHARRON: Oui, en vertu de l'article 77 de notre règlement qui se lit comme suit: "Une motion non annoncée d'ajournement du débat peut être faite en tout temps; une telle motion, sauf si elle est faite par un ministre, ne peut être faite qu'une seule fois au cours d'une séance. Elle est mise aux voix sans amendement — je préviens tout de suite le député de Saint-Jean qu'il ne pourra pas l'amender — à la suite d'un débat restreint au cours duquel un représentant de chaque parti reconnu peut prononcer un discours de dix minutes, le proposeur pouvant exercer un droit de réplique de même durée".

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que vous pourriez me formuler textuellement votre motion, de façon...

M. CHARRON: Je propose l'ajournement du débat, M. le Président.

M. MORIN: Je vais vous dire pourquoi...

M. BURNS: C'est une motion du type de celle qui ne varie pas.

M. BOURASSA: Comme celle d'hier pour retarder...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je me demande si le député de Saint-Jacques a l'intention d'y greffer une heure ou une date?

M. CHARRON: Non.

LE PRESIDENT (M. Gratton): D'accord, allez-y.

M. HARDY: Je voulais dire que j'étais d'accord avec nos amis d'en face. Ce n'est pas nécessaire que ce soit écrit.

M. BURNS: Surtout qu'en commission aucune ne doit être écrite.

M. CLOUTIER: C'est essentiel qu'elle soit parlée, par exemple.

M. HARDY: Cest discutable.

M. BURNS: C'est discutable! Il y a un article dans le règlement.

M. HARDY: Je retire tout.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Bien non, encore une fois. Mon Dieu, que je suis content qu'il ne soit plus vice-président de la Chambre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! On a eu ce débat.

M. BURNS: II y a eu assez de fois qu'on s'est fait organiser dans le temps qu'il l'était, là, on peut le critiquer à présent.

M. HARDY: Vous ne vous en aperceviez même pas.

M. BURNS : Oui, je m'en apercevais. Il y a combien de fois qu'on a gueulé là-dessus.

M. BOURASSA: Voulez-vous qu'on le renomme?

M. BURNS: Je vous avoue que parfois j'ai peur que vous le renommiez.

M. CHARRON: Pour les Affaires culturelles, ce serait nettement mieux.

M. BURNS: Oui, sous cet angle, peut-être. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: A ce moment, on serait peut-être prêt à le souffrir.

M. BOURASSA: Alors, l'article 1, M. le Président, est-ce qu'on peut commencer l'article 1, c'est parce que...

M. BURNS: II y a une motion sur la table. Ne changez pas de sujet.

M. BOURASSA: ... de manière que le ministre puisse déposer les amendements pour que l'opinion publique puisse en prendre connaissance demain matin?

M. CHARRON: J'allais expliquer au chef du gouvernement que l'ajournement pourrait peut-être vous aider là-dessus.

M. BOURASSA: Avec l'article 1?

M. CHARRON: Avec tous les articles que

vous voudrez. Avec l'article 48 aussi. Peut-être que le ministre de la Justice aura le temps de finir de rédiger cet amendement qui nous est annoncé depuis tellement de temps, qui est imposé au ministre de l'Education au conseil des ministres...

M. BOURASSA: II est prêt. M. CHARRON: ... sur lequel... M. BOURASSA: C'est faux.

M. CHARRON: ... il serait battu. Il connaissait très peu, il connaissait si mal...

M. BOURASSA: C'est un mensonge.

M. CHARRON: ... qu'il ne put que l'annoncer dans son discours de deuxième lecture.

M. BOURASSA: C'est un pur mensonge que vient de dire le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: Cest le ministre de la Justice, croyez-le ou non, qui a annoncé dans son discours de deuxième lecture un amendement à la langue d'enseignement. L'ajournement du débat permettrait à la solidarité ministérielle, si fortement ébranlée depuis quelque temps, de se resouder autour d'un projet d'amendement. Les rumeurs courent un peu partout...

M. BOURASSA: Ne parlez pas de divergence quand vous avez des députés comme le député de Lafontaine qui refuse de suivre la consigne...

M. CHARRON: ... et lorsque le premier ministre exercera son droit de dissidence, je serai d'accord.

M. BOURASSA: ... de son chef, au scandale du député de Saint-Jacques, qui refuse de voter.

M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président. Le premier ministre ne peut absolument pas parler de problèmes fédéraux, alors qu'on est en train de parler de problèmes provinciaux avec l'article 77 du règlement. Je sais qu'il a des problèmes avec M. Trudeau actuellement. On va le voir bientôt.

M. BOURASSA: Je parle du plus fédéraliste des députés séparatistes.

M. LEGER: On ne parle pas des problèmes avec le fédéral. Vous allez les avoir bientôt. Le grand frère fédéral va peut-être vous bloquer...

M. BOURASSA: Je parle au député de Lafontaine, le plus fédéraliste des députés séparatistes, lui qui parlait du fédéralisme à deux. Je comprends qu'il ait refusé d'annuler son vote...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: M. le Président...

M. LEGER: M. le Président, vous venez de rappeler le premier ministre à l'ordre.

M. BOURASSA: II a refusé d'annuler son vote, M. le Président. Le député de Saint-Jacques qui parle de divergences dans le Parti...

M. MORIN: Le premier ministre fait de l'obstruction. Je suis obligé de le constater. Le premier ministre fait perdre le temps de cette commission.

M. BOURASSA: J'écoute le député de Saint-Jacques.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: La raison principale pour laquelle je propose cet ajournement, c'est que, bien sûr, la nervosité commence à gagner les rangs ministériels, M. le Président, et qu'une bonne nuit de sommeil pour notre ministre de l'Education ne ferait sans doute pas de tort, parce que demain, il aura aussi à, probablement, entamer...

M. BOURASSA: Ça n'atteint pas le millième de sa patience.

M. CHARRON: ... l'étude du préambule de la loi, et que, à ce moment, nous risquons d'entrer dans le vif du sujet, comme il aime l'appeler lui-même.

Mais c'est surtout, M. le Président, parce que depuis tout à l'heure, il nous fait une annonce de dépôt d'amendements. Je veux bien qu'il dépose les siens demain. Je sais qu'il y en a quelques-uns d'annoncés. D'ailleurs, le retrait de l'article 31, tout le monde en conviendra, c'est un minimum de dignité, que même la Chambre de commerce — croyez-le ou non, M. le Président — a reproché au gouvernement de ne pas avoir. Quand on est rendu là, vraiment, cela dépasse les bornes.

Alors, ces amendements étant annoncés, M. le Président, peut-être le ministre de l'Education pourrait-il les déposer, mais ce sont aussi les amendements du ministre de la Justice que nous aimerions avoir au projet de loi. J'aimerais avoir l'assurance que tous les amendements provenant de tous les ministres seront déposés en même temps. Ceux que vous avez vous-mêmes acceptés, M. le ministre de l'Education, ceux qui vous ont été imposés au caucus. Ceux-là nous apparaissent aussi importants que ceux que vous nous amenez à l'article 31.

L'article 31, nous en convenons tout le monde, nous avons besoin de ces amendements. Tout le monde les a réclamés. Mais quel est donc cet amendement mystérieux, annoncé au sujet de l'article 48, qui introduirait la notion de langue maternelle, si vertement dénoncée par le premier ministre comme étant irréaliste...

M. BOURASSA: Mais commencez. Commencez et on va vous proposer...

M. CHARRON: ... et insoutenable. Prenez cet ajournement que je vous offre. Parce que je sais que cet article n'est pas encore rédigé.

M. BOURASSA: Cest vous, l'apôtre de l'amour infini.

M. CHARRON: Mais oui, je suis l'apôtre de l'amour infini pour ce soir, M. le Président. Je le propose.

M. CLOUTIER: Des copies pour les journalistes.

M. CHARRON: Je sais que sa rédaction est difficile. Je sais que le ministre de la Justice a une conception que le ministre de l'Education ne partage pas. Je sais que certains membres du parti ministériel tirent de leur côté chacun de leur bord. Je sais qu'il y a certains députés qui ont été frustrés de se faire couper le droit de parole hier soir. Peut-être que l'ajournement que nous vous proposons, à ce moment-ci, vous permettrait de vraiment préparer tous ces amendements qu'avec fanfare et tambour vient de nous annoncer le ministre de l'Education. Parce qu'on ne peut pas se fier à une seule annonce d'un ministre, pour croire que demain ce sera réalité.

Le 28 juin, il nous avait annoncé le dépôt des principes directeurs, et il n'a pas tenu sa promesse. Ce n'est pas parce que ce soir il nous promet le dépôt des amendements pour demain, que nous devons les attendre. Est-ce que le ministre de l'Education aura fini de rédiger cet amendement qu'il a imposé au ministre de l'Education? Est-ce que tout le personnel du bureau du premier ministre, qui travaille à rédiger cet amendement clé, qui introduit la notion de langue maternelle qu'a si souvent dénoncée le premier ministre, et qui l'introduit pourtant dans le projet de loi, nous dit-on, est-ce que le premier ministre a fini de le rédiger? Ne peut-il pas prendre la nuit pour le rédiger et le déposer demain en même temps que tous les petits amendements mineurs déjà annoncés?

M. BOURASSA: Est-ce que le député de Saint-Jacques me permet une question?

M. CHARRON: Si l'ajournement...

M. BOURASSA: Juste une petite question au député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: Vous répondrez au nom de votre parti, si vous en avez un.

M. BOURASSA: Juste une petite question. Je dois m'absenter. C'est parce que je dis au député de Saint-Jacques que si... Je comprends qu'il veut faire preuve...

M. CHARRON: Vous devez rencontrer un investisseur...

M. BOURASSA: Non, non. Je comprends qu'il veut...

M. LEGER: La ligne rouge à Ottawa.

M. BOURASSA: Le député de Saint-Jacques montre son brio. C'est un peu le petit René Simard de la politique.

M. CLOUTIER: Cela, c'est excellent!

M. BOURASSA: Mais je dis au député de Saint-Jacques que s'il veut nous permettre...

M. MORIN: On n'est pas tous des...

M. BOURASSA: ...de soumettre des amendements, on va le faire immédiatement, avant d'aborder l'article 1. On va commencer avec l'article 1 et on va les soumettre.

M. LEGER: On demande une toune!

M. CHARRON: Sérieusement, je pense que les amendements si importants qui nous sont annoncés perdraient de leur crédit et de leur brio s'ils devaient être présentés dans les circonstances actuelles d'une fin de journée où le ministre de l'Education est visiblement épuisé. S'il fallait que la commission ait autant d'éclaircissements sur les amendements qu'il en a fournis aux media d'information hier en s'embrouillant dans les notions de langue maternelle, de contingentement, de mesures. Le ministre de la Justice prétend que c'est un gel du secteur anglophone. Le ministre de l'Education dit: Non, c'est la liberté de choix. Faites une unité quelque part, et puissiez-vous le faire cette nuit pour que demain, effectivement, la promesse faite à la commission par le ministre de l'Education ne soit pas que des projets d'amendement...

M. BOURASSA: On est prêt à discuter.

M. CHARRON: ... mais soit de véritables amendements. Je fais cette motion d'ajournement dans ce sens parce que je crois que le débat, aujourd'hui, n'aurait rien à gagner à le prolonger inutilement. De toute façon, M. le Président, puis-je vous rappeler encore ce que j'ai courtoisement déposé sur la table de la commission, comme information, c'est qu'avant même de nous rendre à l'article 48, il nous reste beaucoup de chemin à parcourir et qu'avant même d'entreprendre l'article 1, j'ai l'intention de soumettre à l'attention de la commission, au moins, une autre motion qui me semble...

M. HARDY: Après la motion d'ajournement.

M. CHARRON: Non. Demain matin... abso-

lument essentielle pour fixer les conditions d'étude de ce projet de loi qu'ont rejeté la majorité des Québécois.

Avec cette argumentation et en espérant que le ministre de la Justice — qui doit être actuellement à rédiger les amendements qu'il impose au ministre de l'Education — m'entendra et qu'il fera diligence pour que, demain matin, en même temps que son collègue de l'Education, il dépose les siens pour que nous puissions avoir, véritablement, les deux sons de cloche où s'est divisé le caucus ministériel et que nous puissions avoir une idée vague, mais quand même un peu plus précise que ce soir, de ce qu'est la politique linguistique de ce gouvernement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre de l'Education.

M. CLOUTIER: Nous sommes disposés à voter.

M. BURNS: M. le Président, j'ai...

M. BOURASSA: II est devenu imprésario.

M. BURNS: Je ne sais pas si c'est flatteur ou si cela ne l'est pas. Vraiment, je vous avoue... C'est un métier très respectable.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Est-ce que vous voulez exercer votre droit de réplique?

M. HARDY: II n'y a pas de droit de réplique.

M. BURNS: Non, je voudrais parler sur la motion.

M. HARDY: La seule chose qu'il pourrait faire est de parler au nom du Parti créditiste, en vertu de l'article 77.

M. BURNS: Non, non. Est-ce que...

M. CLOUTIER: Le Parti québécois a parlé. Nous avons parlé. Comme nous ne voulons pas faire perdre de temps, nous nous sommes contentés de dire...

M. CHARRON: J'ai parlé comme parrain, mais il n'y a pas personne qui a parlé au nom de l'Opposition officielle. Je vous rappelle simplement que la règle que nous avons vécue hier à l'Assemblée nationale, sur la motion d'ajournement du député de Chicoutimi, j'ai eu le droit d'intervenir au nom de l'Opposition officielle — règle qui a été rappelée au leader du gouvernement, la soirée précédente — s'applique mutatis mutandis à la commission et que le député de Maisonneuve a le droit d'intervenir.

M. BURNS: Je vais aller plus loin que cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Un instant. Je m'excuse, mais...

M. BURNS: Oui.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... je voudrais bien qu'on se comprenne. Dans le cas d'hier, il s'agissait d'une motion que le député de Chicoutimi a faite à la suite de son intervention sur une autre motion qui était en débat à ce moment. Donc, personne n'avait exercé le droit de parole de l'Opposition officielle avant que le député de Saint-Jacques ne prenne la parole lui-même. Dans le cas de ce soir, le député de Saint-Jacques a bel et bien exercé le droit de parole du parti de l'Opposition officielle.

M. HARDY: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui.

M. HARDY: ... selon le règlement, c'est exact. Le député de Maisonneuve a le droit de parler et je vous préviens immédiatement qu'il va probablement dire qu'il n'est pas tout à fait d'accord sur la proposition du député de Saint-Jacques pour que le député de Saint-Jacques exerce son droit de réplique. C'est vrai. Il a le droit de parler au nom de son parti, mais pour exercer le droit de réplique, il faut qu'il dise qu'il n'est pas tout à fait d'accord avec le député de Saint-Jacques. Et c'est ce qu'il va faire, écoutez-le bien.

M. LESSARD: On ne peut rien cacher au ministre des Affaires culturelles.

M. BURNS: Vous non plus, vous n'avez pas d'affaire à m'interpréter, M. le député de Saguenay.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Lui, il a le droit parce qu'il a toutes sortes d'idées croches...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs ! J'inviterais le député de Saguenay et le député de Maisonneuve à respecter...

M. BURNS: On va en parler au caucus.

M. LESSARD: Une question de privilège, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. LESSARD: Une question de privilège, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: Je pense que j'ai été brimé dans mes droits et que le député de Maisonneuve...

M. BOURASSA: II n'y a pas de question de privilège.

M. LESSARD: ... a très mal interprété ce que j'ai pu dire au ministre des Affaires culturelles.

M. BOURASSA: II n'y a pas de question de privilège.

M. LESSARD: Je n'ai pas l'intention du tout d'interpréter...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: ... le député de Maisonneuve. Je sais que le député de Maisonneuve est capable de s'exprimer et je suis assuré qu'il va me convaincre d'accepter la motion du député de Saint-Jacques.

M. BURNS: M. le Président, sur la question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Laquelle?

M. BURNS: II y a une question de règlement que je veux soulever immédiatement et je remercie le député de Saguenay de me faire comprendre que je l'avais mal interprété mais que lui m'avait bien interprété. Sur la question de règlement, je tiens à vous souligner le fait suivant. Il semble y avoir une question à savoir si j'interviens au nom de l'Opposition. Je vais aller plus loin que cela. Je vais vous dire que même tous les députés ici ont le droit d'intervenir sur la motion du député de Saint-Jacques.

M. LESSARD: 163.

M. BURNS: La motion a été faite en vertu de l'article 77. Je suis très sérieux là-dessus, M. le Président, vous allez voir que mon argumentation, je pense, se tient. La motion a été faite en vertu de 77, je vous fais grâce de la lecture de ce texte; je pense que vous le connaissez autant que moi et le député de Saint-Jacques l'a lu tout à l'heure. Je pense que vous allez vous attacher aux derniers mots de l'article 77. Les derniers mots qui se lisent, ou si vous voulez la dernière phrase pour que ce soit plus compréhensible: "Elle — c'est-à-dire la motion — est mise aux voix sans amendement à la suite d'un débat restreint au cours duquel un représentant de chaque parti reconnu peut prononcer un discours de dix minutes, le proposeur pouvant exercer un droit de réplique de même durée". Je vous réfère, M. le Président, maintenant à l'article 163 de notre règlement, qui est l'article directeur de nos travaux ou de nos règles en commission. Il dit: "A moins de dispositions contraires — j'insiste beaucoup sur ces mots — les règles relatives à l'Assemblée s'appliquent aux commissions". Il est évident, M. le Président, que la règle édictée à 77 est une règle qui s'applique à l'Assemblée nationale, qui s'applique à une motion faite à l'Assemblée nationale puisque les règles sont d'abord édictées pour l'Assemblée nationale et ensuite transférées aux commissions par l'entremise de l'article 163. Est-ce qu'on se comprend là-dessus jusqu'à maintenant? Or, je prétends qu'en commission il y a des dispositions contraires.

LE PRESIDENT (M. Gratton): D'ailleurs, c'est pourquoi j'ai demandé au député de Saint-Jacques de me spécifier s'il demandait réellement l'ajournement du débat...

M. BURNS: Oui.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... ou s'il voulait se prévaloir de l'article 157.

M. BURNS: Oui. Il aurait pu faire cela aussi. LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui...

M. BURNS: M. le Président, je veux tout simplement dire que, si vous lisez maintenant l'article 160, cet article nous dit: "Lorsqu'une commission étudie un projet de loi après la deuxième lecture ou des crédits — je pense que cela nous vise, on est après la deuxième lecture — un député peut prendre la parole sur le même point aussi souvent qu'il lui plait, à condition de ne parler plus de 20 minutes en tout sur un même article, un même paragraphe, une même motion — une motion qui vient d'être faite — ou une même question d'ordre ou de règlement". Mon raisonnement est globalement le suivant. Peu importe la fin de l'article 77, à mon avis, l'article 163 nous dit qu'à moins qu'il y ait des dispositions contraires, les règles de l'Assemblée nationale s'appliquent, c'est-à-dire 77 s'appliquerait, s'il n'y avait pas l'article 160. L'article 160 ne dit pas, M. le Président, qu'on a le droit à 20 minutes en tout sur un même article, un même paragraphe ou même motion excepté celle prévue â l'article 77, il a dit: Une même motion, n'importe quelle motion. Je vous soumets bien respectueusement que, quelle que soit la motion faite ici, tous les députés ont le droit de parole à ce sujet. Je vais même plus loin que cela. On passe tellement à côté des règles de l'Assemblée nationale en commission par l'article 160, qu'on permettrait même au député de Saint-Jacques, s'il veut revenir, parce qu'il n'a pas utilisé ses 20 minutes, de revenir sur sa motion. En Chambre, la règle est stricte, vous ne parlez qu'une seule fois et même si vous n'utilisez pas votre temps au complet, si le chef de l'Opposition, par exemple, ne parle qu'une demi-heure sur un projet de loi, n'utilise pas son heure complète, c'est sûr qu'il ne peut pas revenir.

En commission, il peut revenir n'importe quand, aussi souvent qu'il le voudra, pour autant que ça ne dépasse pas 20 minutes. Cela, sur quoi, M. le Président? Sur n'importe quel — le texte est tellement clair — sur un même article, un même paragraphe, une même motion, peu importe l'origine de la motion, peu

importe ce que contient cette motion. Je prétends que la motion qui a été faite par le député de Saint-Jacques... Vous avez beau rire, vous savez, le député de Terrebonne. Moi, j'ai ri souvent de certaines de vos décisions quand vous étiez président.

M. HARDY: Vous ne les avez jamais contestées juridiquement.

M. BURNS: Je n'avais pas le droit, le droit d'appel n'existe même pas.

M. HARDY: Bien oui, mais vous auriez pu faire une motion.

M. BURNS: Non, parce que je trouve que vous étiez...

M. HARDY: Pas mal bon.

M. BURNS: Non, non. Je ne pouvais pas prouver votre mauvaise foi. Vos décisions n'étaient pas bonnes, mais qu'est-ce que vous voulez? Devant certains gestes, parfois, moins brillants que d'autres, on avoue, devant la candeur et la bonne foi de celui qui les pose, qu'il n'est pas attaquable, même en vertu de l'article 68. C'est dans ce sens. Je n'ai jamais pensé que vous étiez assez méchant pour faire délibérément ce que vous faisiez. Je vous dis, sur ce point —j'insiste pour qu'on ait une décision sur ça — que c'est une motion au même titre que n'importe quelle autre motion en commission. Il y a des dispositions contraires, comme le dit l'article 163, qui s'appliquent aux commissions et, dans ce cas, à mon avis, la motion du député de Saint-Jacques est débattable par qui que ce soit. Je veux intervenir là-dessus, mais tout simplement comme une des personnes qui a le droit de parole à cette commission-ci, pas plus.

M. HARDY: M. le Président, sur la question de règlement...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre des Affaires culturelles, sur une question de règlement.

M. HARDY: M. le Président, il est évident que, si le député de Maisonneuve a des craintes que je redevienne vice-président... Je ne sais pas, s'il fallait que lui préside les travaux de la Chambre.

M. BURNS: Cela irait bien en bonguenne parce que je laisserais la chance à tout le monde de s'exprimer. En tout cas, je ne veux pas critiquer certaines décisions, mais...

M. HARDY: II est bien clair, selon l'économie générale de notre règlement, que l'article 160 ne peut pas s'appliquer aux motions d'ajournement. Il est évident, si on lit l'ensem- ble de notre règlement, que des motions d'ajournement, que ce soit à l'Assemblée ou en commission, ce sont des motions exceptionnelles. Tellement exceptionnelles que l'article 77 prend la peine de préciser qu'elles ne peuvent être faites qu'une seule fois. Si on admettait le raisonnement du député de Maisonneuve, savez-vous ce que cela voudrait dire, M. le Président? Si l'article 160 devait s'appliquer à des motions d'ajournement en commission, ça voudrait dire qu'à tous les cinq minutes, n'importe...

M. LEGER: Une fois par jour, par séance.

M. HARDY: En vertu de l'article 77, oui. Mais avez-vous écouté votre collègue?

M. LEGER: Très bien, très bien.

M. HARDY: II a dit en vertu de l'article 160...

M. LEGER: II m'a même convaincu.

M. BURNS: C'est sur le temps de parole et sur le droit de parole que j'ai dit qu'il y avait des dispositions différentes. Non, non, non.

M. HARDY: Si je comprends bien...

M. BURNS: II n'y a pas d'article concernant les commissions qui dit que, contrairement à l'article 77...

M. HARDY: Je vous ai écouté.

M. BURNS: Laissez-moi finir, parce que vous m'interprétez mal, je trouve. Il n'y a pas d'article...

M. HARDY: C'est évident que je vous interprète mal.

M. BURNS: ... — je veux juste vous remettre sur la "track", d'accord? — contrairement à ce qui arrive concernant le temps de parole, qui dit que l'article 77 ne s'applique pas, c'est-à-dire que cette motion, vous pouvez la faire aussi souvent que vous voulez. Donc, la partie qui dit qu'on ne peut pas la faire plus souvent qu'une fois par séance, à mon avis, s'applique en commission.

M. HARDY: Ah bon! c'est ça. M. BURNS: Oui.

M. HARDY: C'est ça que je prévoyais. Le député de Maisonneuve...

M. BURNS: Cette partie s'applique.

M. HARDY: ... pour les fins qu'il poursuit...

M. BURNS: Non, écoutez une minute.

M. HARDY: ... va chercher un petit morceau de l'article 160 et un petit morceau de l'article 77...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. BURNS: Je dis ceci...

M. HARDY: ... et là, il essaie de coller ça ensemble. M. le Président, ce n'est pas sérieux. Je n'ai pas l'intention de m'étendre dans une grande dissertation parce qu'en réponse à des propos aussi fragiles et aussi peu sérieux, je pense que ce serait faire trop d'honneur aux propos du député de Maisonneuve que de se forcer pour faire une grande dissertation juridique. Je dis simplement qu'il est évident qu'une motion d'ajournement du débat ne peut pas se faire en vertu de l'article 160. Parce qu'une motion d'ajournement du débat est une motion exceptionnelle, tel que le prévoit l'article 77, qui peut être faite une fois au cours d'une séance, sauf si elle est faite par un ministre, motion totalement exceptionnelle. On ne peut pas prendre juste ce qui fait notre affaire dans l'article 160 et dans l'article 77, pour essayer de fabriquer une espèce de monstre juridique. Si on prend l'article 77... D'ailleurs, le député de Saint-Jacques...

M. BURNS: ... votre monstre linguistique que vous êtes en train de nous faire!

M. HARDY: M. le Président, le député de Saint-Jacques, je le regrette infiniment, l'a dit textuellement. On n'a qu'à se référer au journal des Débats. Cela a été ses premiers mots : Je fais une motion en vertu de l'article 77.

Il était justifié de le faire, parce que cette motion d'ajournement du débat en Chambre ou en commission ne peut être faite qu'en vertu de l'article 77.

Mais, M. le Président, il s'agit encore une fois du député de Maisonneuve et je le regrette, parce que, contrairement à ce que je pense du député de Sauvé, j'ai toujours eu beaucoup d'estime pour les talents de juriste du député de Maisonneuve. Mais devant la nécessité de faire un "filibustering" le député de Maisonneuve a jeté par-dessus bord tout critère juridique...

M. BOURASSA: Hélas!

M. HARDY: II a laissé de côté toute sa formation juridique, toute sa culture juridique.

M. BURNS: Dois-je me mettre à pleurer maintenant ou plus tard?

M. HARDY: ... pour dire n'importe quoi. Il en est rendu à formuler des hérésies juridiques infiniment plus grandes que celles que le député de Lafontaine nous sert quotidiennement.

M. LEGER: Est-ce que j'ai fait des hérésies juridiques? Est-ce que c'est possible pour quelqu'un qui n'est pas avocat?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! L'honorable député de Pointe-Claire, sur la question de règlement.

M. SEGUIN: Je ne voudrais pas m'éterniser là-dessus. Je constate quand même dans notre règlement, section V, page 26, article 76, qu'il s'agit de motion d'ajournement de l'assemblée, et section VI, de motion d'ajournement de débat. Je me réfère ensuite au chapitre XIV, page 50, de notre règlement qui nous donne, à partir de l'article 133, la réglementation qui doit s'adapter à la procédure des commissions. A la suite de l'article 133, et je suis d'accord avec le député de Saint-Jacques, qui a basé sa motion d'ajournement sur l'article 157, premier paragraphe, on dit bien clairement: En commission élue... Article 157, page 58, puisque nous sommes vis-à-vis des commissions à ce moment-là et non pas à l'Assemblée nationale, je vois, à la dernière phrase du premier alinéa de l'article 157: En commission élue, un député peut proposer que la commission ajourne ses travaux.

Je pense, M. le Président, que nous devons nous en tenir strictement à cet article. Je continue: Ces motions sont mises aux voix sans amendement. Donc, il n'est pas question d'amender la proposition du député de Saint-Jacques et elles ne peuvent être faites qu'une fois au cours d'une séance, c'est-à-dire, aujourd'hui, puisque la séance se terminera, je pense bientôt, sauf par un ministre. Le ministre aura la prérogative, à ce moment-là, de faire la modification voulue, s'il le veut, soit de continuer nos travaux, nos délibérations. Elles ne peuvent être débattues, sauf qu'un représentant de chaque parti reconnu peut prononcer un discours de dix minutes chacun à son sujet. Je prétends que c'est sur l'article 157 que nous devons débattre, je rejoins le ministre des Affaires culturelles sur ses commentaires, je vais moins loin que lui, mais je prétends que le député de Saint-Jacques, d'après l'article 157, a le droit de faire sa proposition, avec les restrictions contenues à l'article 157, puisque là il s'agit de commission et non pas de l'Assemblée nationale.

M. CHARRON: M. le Président, je vous signale seulement que le témoignage que nous venons d'entendre est celui d'un président de commission.

M. LESSARD: Alors, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le dernier que je reconnaîtrai sur la question de règlement est l'honorable député de Saguenay. Je suis déjà prêt à rendre ma décision.

M. BOURASSA: II est prêt à rendre sa décision.

M. LESSARD: M. le Président, sur le point du règlement...

M. HARDY: 43.

M. LESSARD: C'est que le député de Saint-Jacques n'a pas fait sa motion en vertu de l'article 157. Le député de Saint-Jacques a fait sa motion en vertu de l'article 77 des règlements.

M. HARDY: Oui, c'est ce qu'il a dit.

M. LESSARD: ... soit l'ajournement du débat, et le député de Saint-Jacques a très bien précisé sur quel article il se basait pour proposer l'ajournement du débat. En effet, M. le Président, le député de Saint-Jacques n'a pas voulu proposer de rapporter à l'assemblée que la commission n'a pas fini de délibérer, parce que je ne pense pas qu'il faille, à ce stade-ci, présenter une motion de rapporter à l'assemblée que la commission n'a pas fini de délibérer. Nous avons reçu un ordre de la Chambre pour étudier en commission élue, article par article, le projet de loi 22.

C'est donc en relation avec l'article 77, que le député de Saint-Jacques a fait sa motion d'ajournement du débat.

Or, M. le Président, le député de Maisonneuve a bien précisé qu'il faisait une distinction en ce qui concerne le droit de parole en commission parlementaire et le droit de parole à l'Assemblée nationale.

Il ne s'agit pas, tel que l'interprète le député de Terrebonne, de faire en sorte que cette motion puisse être proposée à plusieurs reprises au cours de la même séance. Au contraire, nous sommes liés par l'article 77 qui est très clair. Cependant par exemple, je voudrais vous informer qu'on fait une distinction en commission parlementaire entre le droit de parole en commission parlementaire et le droit de parole à l'Assemblée nationale.

En effet, l'article 94 des règlements du code Lavoie précise très bien le droit de parole à l'Assemblée nationale. Je vous le cite: "Sauf dispositions contraires du règlement, un député peut parler sur une motion de fond pendant vingt minutes; mais peuvent parler pendant une heure le premier ministre... etc". Le député de Maisonneuve a très bien précisé qu'à l'Assemblée nationale, il était impossible de revenir à plusieurs reprises sur le sujet. En effet, par exemple, si le député de Sauvé faisait un discours de dix minutes et qu'il n'utilisait pas ses vingt minutes, s'il ne parle pas comme chef parlementaire de l'Opposition, le député de Sauvé ne peut pas revenir, comme c'est le cas, comme c'est permis en commission parlementaire.

Donc, il y a une distinction très nette entre le droit de parole en commission parlementaire et le droit de parole à l'Assemblée nationale. En ce qui concerne le droit de parole en commission parlementaire, c'est l'article 160 qui prévaut. Avant, je voudrais justement revenir à l'article 163. Je pense que l'article 163 est très clair. En effet, à l'article 163, il est précisé qu'à moins de dispositions contraires les règles relatives à l'Assemblée s'appliquent aux commissions.

Je dis qu'il est vrai que normalement les règles relatives à l'Assemblée s'appliquent aux commissions, mais "à moins de dispositions contraires". Or, où sont-elles justement ces dispositions contraires? L'une des dispositions contraires concerne le droit de parole, parce que le droit de parole est précisé explicitement à l'article 160 des règlements en ce qui concerne la commission parlementaire.

En effet, l'article 160 est très précis: "Lorsqu'une commission étudie un projet de loi après la deuxième lecture ou des crédits — je pense qu'il s'agit ici d'une commission élue et nous sommes à la suite de la deuxième lecture — un député peut prendre la parole sur le même point aussi souvent qu'il lui plaît, à condition de ne parler plus de vingt minutes en tout sur un même article, un même paragraphe, une même motion ou une même question d'ordre ou de règlement".

M. le Président, nous sommes actuellement à discuter d'une motion du député de Saint-Jacques qui a été proposée en vertu de l'article 77 des règlements, soit la motion d'ajournement du débat. Mais des motions qui sont proposées en commission parlementaire et des motions qui sont proposées à l'Assemblée nationale ne nous donnent pas exactement les mêmes modalités en ce qui concerne le droit de parole. Comme je vous le disais, l'article 94 des règlements précise exactement quelles sont les modalités du droit de parole des députés en Assemblée nationale. Cependant, si on a placé cet article en ce qui concerne les commissions parlementaires, c'est qu'il est fort important.

En ce qui concerne les commissions parlementaires, on a très bien précisé les règles du jeu.

En ce qui concerne les commissions parlementaires, nos vingt minutes ne doivent pas se faire de façon consécutive. Nous pouvons prendre nos vingt minutes selon les modalités que nous choisissons et nous pouvons parler deux ou cinq minutes et revenir par la suite. C'est là qu'il est très important, avant de juger, que vous en compreniez la distinction. L'article 160 précise le droit de parole en commission parlementaire et nous estimons, justement, que sur la motion du député de Saint-Jacques, l'article 160 doit prévaloir, et non pas l'article 77, tel que précisé, en ce qui concerne le droit de parole.

Je pense que l'article 77 propose l'ajournement du débat, mais en ce qui concerne notre droit de parole, c'est toujours l'article 160 qui

prévaut, puisque nous sommes encore en commission parlementaire, que je sache. C'est cela et je voudrais vous indiquer, justement encore une fois, que c'est très précis, à l'article 163, puisqu'on dit qu'à moins de dispositions contraires... Or, M. le Président, la disposition contraire est très précise, c'est l'article 160.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Messieurs, sur la question de règlement soulevée par...

M. LEGER: Le Président est-il suffisamment éclairé?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui.

M. LEGER: Je me réserve mon droit de parole.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur la question de règlement soulevée par le député de Maisonneuve, je pense que, premièrement, il faut se rappeler le fait que le député de Saint-Jacques, en faisant sa motion, a dit, textuellement: En vertu de l'article 77. Même s'il ne l'avait pas fait, j'ai la ferme conviction qu'il faut se pencher sur l'esprit de la loi, l'économie du règlement. J'ai la certitude que l'article 160 s'applique au débat qui entoure l'étude d'un projet de loi, article par article. Je base cette interprétation sur le fait qu'il y a deux paragraphes qui suivent les dispositions que nous avons eues tantôt, qui spécifient bien ce que le mot "article" veut dire et qui disent que la restriction ne s'applique pas au parrain du projet de loi. Si ceux qui ont préparé notre règlement avaient voulu que le droit de parole soit différent, en commission, de ce qu'il est à l'Assemblée nationale, sur une motion d'ajournement, soit du débat ou des travaux de la commission, ils n'auraient pas formulé l'article 157, qui rejoint tout à fait l'article 77, au point de vue du droit de parole de chacun des partis.

Je pense que l'article 160 ne s'applique absolument pas à une motion d'ajournement, ni du débat, ni des travaux, et que l'article 157, qui est là, et la disposition spéciale en cas de commission, rejoint, et dans l'esprit et même dans la lettre, l'article 77 duquel s'est inspiré le député de Saint-Jacques. La réaction du député de Maisonneuve me convainc immédiatement que j'ai raison dans ma décision.

M. BURNS: M. le Président, je me plie à votre décision. C'est cela que j'ai fait comme signe.

M. HARDY: Il est près de 11 h 50.

M. BURNS: Maintenant, j'aimerais parler en tant que représentant de l'Opposition.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que vous n'acceptez pas également la décision que j'ai prise il y a quelques minutes, je l'avoue — d'ailleurs, elle va à l'encontre de l'opinion du ministre des Affaires culturelles — voulant que le député de Saint-Jacques, en faisant sa motion, a déjà exercé le droit de parole de l'Opposition officielle?

M. BURNS: C'est un individu, M. le Président. C'est un membre de la commission. Je pense que si vous regardez là-dessus, on a plusieurs...

M. BOURASSA: ... Il est minuit moins dix.

M. CLOUTIER: On va ajourner la séance avant la motion.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Non, mais on a plusieurs précédents, M. le Président, en Chambre.

M. CLOUTIER:A force de discuter, l'ajournement va tomber automatiquement. Vous pourrez y revenir à une autre occasion.

M. BURNS: J'aimerais bien l'argumenter, M. le Président, si vous me permettez.

M.LESSARD: C'est pour rappeler, M. le Président...

M. BURNS: Si vous me permettez de l'argumenter, je vais vous dire...

M. HARDY: ... non plus. Pas discuté l'article 1...

M. BURNS: Je vais vous dire une chose. Je n'utiliserai même pas mes dix minutes. C'est d'accord? Puis-je m'engager à cela?

M. CLOUTIER: ... pas du tout!

M. BOURASSA: Si j'étais à la place de l'Opposition, je serais très inquiet de refuser de débattre la langue officielle.

M. LESSARD: M. le Président, si le député de Maisonneuve me le permet...

M. BOURASSA: Un conseil amical.

M. LESSARD: Je pense que c'est vendredi soir, le président de l'Assemblée nationale a pris une décision concernant une motion d'ajournement du débat.

M. HARDY: II a le droit.

M. LESSARD: C'est qu'un député peut, un député libéral pourrait proposer une motion d'ajournement du débat, et ses collègues, en particulier les ministres, pourraient ne pas être d'accord. M. le Président, sur cette motion. Personnellement, je me pose des questions...

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... complètement d'accord. Vous avez raison.

M. LESSARD: ... sur la motion du député de Saint-Jacques. Je voudrais que mon leader parlementaire m'explique s'il est d'accord ou pas.

M. CLOUTIER: ... en faire une motion d'ajournement. Elle est prioritaire.

M. BURNS: M. le Président, je vais même aller plus loin.

M. CLOUTIER: Je crois que la motion du parrain a priorité. N'est-ce pas, M. le Président? Je veux bien faire une motion d'ajournement maintenant.

M. CHARRON: Ce serait faire de la procédure.

M. BURNS: Pui-je vous dire ceci simplement? Je vais aller bien plus loin que cela. Je vais m'engager à ne pas utiliser mes dix minutes, et je vais vous dire pourquoi je ne veux pas utiliser mes dix minutes.

M. CLOUTIER: Dites-nous cela en dix minutes!

M. BURNS: M. le Président, je ne veux pas utiliser dix minutes pour vous dire pourquoi je n'utiliserai pas mes dix minutes. Je vais prendre...

M. BOURASSA: A cause d'un caucus du Parti québécois...

M. BURNS: Je vais même prendre...

M. BOURASSA: ... de manière que demain, la discussion soit plus positive.

M. LEGER: Le ministre... M. BURNS: Non, non, non.

M. BOURASSA: J'espère que le chef de l'Opposition sera...

M. BURNS: Laissez-moi donc vous dire pourquoi je pense et pourquoi, en tant que représentant de mon parti, je suis favorable à cette motion. C'est pour vous, M. le ministre.

M. CLOUTIER: Ah! C'est gentil. Je savais bien qu'il y aurait un bon mot à la fin.

M. BURNS: Ecoutez. Je vais vous dire pourquoi c'est pour vous. C'est pour deux raisons: D'une part, c'est évident, M. le Président, que le ministre a eu une dure journée, même de dures semaines, et cela, on y pense. Maintenant — vous allez voir que cela va vous surprendre; je vais arrêter après ces quelques phrases qui viennent — je relie la motion du député de Saint-Jacques aux discussions que nous avons eues en vue de vous faire déposer, de vous faire déposer vos amendements et votre projet de réglementation; en tout cas, les grandes lignes de votre projet de réglementation.

Le député de Saint-Jacques aurait très bien pu faire une motion d'ajournement qui, en soi, aurait pu paraître comme une motion dilatoire. Il n'a pas utilisé ce moyen. Il a fait un ajournement du débat. Si cette motion est adoptée, la commission continue à siéger, ne l'oubliez pas. C'est cela qui est la différence entre une motion d'ajournement du débat et une motion d'ajournement de l'Assemblée ou, si vous voulez, de la commission en ce qui nous concerne. On ne veut pas ajourner la commission bêtement comme cela et s'en aller, chacun de notre côté, sans les papiers dont on pense avoir besoin pour faire une discussion à fond, article par article. Bon! On vous demande simplement que le débat sur le projet de loi, on l'arrête immédiatement.

M. CLOUTIER: Mais on n'a pas encore débattu le projet de loi.

M. BURNS: On a commencé à parler des cas préliminaires au projet de loi.

M. CLOUTIER: On n'a pas commencé. On est absolument...

M. BURNS: On vous demande tout simplement de mettre de côté tout ce qu'on peut discuter et qu'immédiatement après, la commission n'étant pas ajournée...

M. HARDY: Vous êtes dans l'illégalité depuis ce matin.

M. BURNS: ... vous nous donniez... M. BOURASSA: L'article 1...

M. BURNS: ... simplement vos projets et qu'on ait le temps, même s'il est tard, de les examiner pour demain.

M. CLOUTIER: Je ne peux pas parce que nous n'avons strictement aucun support juridique. Commençons l'article 2 et je dépose immédiatement mes amendements et, demain, aussitôt que la chose sera possible.

M. LEGER: Qu'est-ce que le ministre veut dire par support juridique?

M. CLOUTIER: ... les principes de la réglementation dans les secteurs que je vous ai décrits.

M. LEGER: C'est une question que je pose au ministre.

M. CLOUTIER: Mais jusqu'ici, nous n'avons eu que des motions et je vous ai dis ce que j'en pensais.

M. BURNS: C'est parfaitement dans l'ordre et cela se fait régulièrement, toujours, souvent...

M. BOURASSA: L'article 1.

M. BURNS: M. le Président, cela se fait...

M. CLOUTIER: Donnez-nous une bonne raison pour laquelle vous voulez éviter le débat sur l'article 1.

M. BOURASSA: Pourquoi? Qu'est-ce qui vous fait peur?

M. BURNS: Ce n'est pas cela. On n'a pas peur à l'article 1.

M. BOURASSA: C'est dans votre programme.

M. BURNS: Pensez-vous...

M. BOURASSA: Pourquoi ne voulez-vous pas l'adopter?

M. BURNS: ... que décemment vous aurez la possibilité, à 11 h 55, de discuter...

M. BOURASSA: Mais pourquoi depuis...

M. BEDARD (Chicoutimi): Ils sont traumatisés par...

M. BURNS: ... le fond de l'article 1?

M. CLOUTIER: On a commencé à 11 heures.

M. BOURASSA: Huit heures de débat.

M. CLOUTIER: ... jusqu'à six heures plus trois heures, cela fait neuf heures.

M. BOURASSA: Huit heures, en tout.

M. CLOUTIER: Non. Cela fait dix heures de débat.

M. BOURASSA: Quatre, trois...

M. CLOUTIER: Non. C'est vrai. J'oubliais...

M. BOURASSA: Huit heures de débat. M. CLOUTIER: Cela m'a paru dix heures.

M. BOURASSA: Pourquoi ne voulez-vous pas discuter de l'article 1?

M. BURNS: On veut en discuter. On veut avoir tous les éléments dans les mains.

M. BOURASSA: C'est dans votre programme, l'article 1, le français, la langue officielle au Québec.

M. BURNS: C'est parce que je ne jouerai pas aux cartes avec vous, M. le premier ministre, si vous me dites: C'est le pique qui est atout et que vous gardez tout le pique pour vous.

M. BOURASSA: Non. Vous avez mis toutes vos cartes sur la table en dévoilant votre contreprojet linguistique.

M. BEDARD (Chicoutimi): Mettez vos cartes sur la table.

M. BURNS: Mettez vos cartes sur la table, vous autres aussi.

M. BOURASSA: Oui, mais on va commencer à discuter, et on va suivre la procédure normale.

M. BURNS: Non. On veut discuter du projet de loi, mais on veut avoir tous les éléments dans les mains.

M. BOURASSA: Vous ne voulez pas en discuter. Vous avez fait la démonstration ce soir que vous ne voulez pas discuter du projet de loi. Vous ne voulez pas discuter du projet de loi et la population s'en rendra compte. Ce que vous voulez est de forcer le gouvernement à imposer la clôture parce que vous n'avez pas le courage...

M. HARDY: Cest cela.

M. BOURASSA: ... de discuter des amendements et des articles du projet de loi.

M. MORIN: Nous allons y venir au projet de loi. Nous allons y venir en temps et lieu.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas cela le règlement.

M. BURNS: Comme dit le député de Chicoutimi, on veut forcer le gouvernement à réfléchir.

M. BOURASSA: Vous voulez forcer le gouvernement à imposer la clôture...

M. BURNS: ... à bien penser à ce qu'il est en train de faire...

M. HARDY: Vous voulez vous laver les mains.

M. BURNS: ... à savourer, comme le ministre semble savourer chacune des étapes...

M. BOURASSA: Vous voulez vous laver les mains.

M. BURNS: ... de l'adoption de son projet de loi.

M. HARDY: Manque de courage!

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est mieux que de les avoir sales.

M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement. On vient juste de me traiter de quelque chose d'antiparlementaire.

M. HARDY: Je n'ai dit cela à personne.

M. BURNS: Vous me regardiez droit dans les yeux, le député de Terrebonne.

M. CLOUTIER: Cela devient inquiétant.

M. HARDY: Qui vous dit que je louchais pas?

M. CLOUTIER: II commence à interpréter. Il faudrait demander à l'ancien...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CLOUTIER: ... député de Bourget, qui est parti trop vite, d'avoir un petit caucus avec son parti.

M. HARDY: M. le Président, j'ai dit manque de courage, mais je n'ai désigné personne. Si le député de Maisonneuve s'est senti visé, ce n'est pas ma faute.

M. BURNS: Vous me regardiez et c'était moi qui avais la parole. Manque de courage, à qui vous l'adressiez?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. HARDY: Je lançais cela comme cela.

M. BURNS: Ah, vous dites cela en l'air! Des paroles en l'air!

M. HARDY: Vous, vous l'avez attrapé. Vous avez trouvé que le chapeau vous faisait bien.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous vous vantez de parler sérieusement, vous lancez cela en l'air comme cela!

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Cela, c'est un beau ministre des Affaires culturelles.

M. HARDY: C'est cela.

M. BURNS: Des paroles en l'air, dans la brume.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Puis-je proférer une menace à l'endroit de l'Opposition officielle? Des menaces de suspendre les travaux de la commission, si on...

M. BURNS: On ne veut pas, M. le Président. On veut que le ministre ait le temps de nous remettre ses documents.

M. MORIN: Nous pouvons passer minuit, M. le Président, si c'est nécessaire.

M. BOURASSA: L'entracte de l'Opposition a assez duré.

M. CHARRON: Déjà.

M. BURNS: M. le Président, je dis...

M. HARDY: Et c'est du très mauvais théâtre.

M. BURNS: Vous proposez l'ajournement?

M. HARDY: Pas de subvention cette année pour la troupe péquiste.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... la Société Saint-Jean-Baptiste de Québec.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, messieurs, la commission ajourne ses travaux à demain, après la période des questions, ou jusqu'à nouvel ordre de l'Assemblée.

M. BOURASSA: Demain, on va faire un autre effort, je continue à parier sur la bonne foi du chef de l'Opposition, même s'il est en minorité pour l'instant.

(Fin de la séance à 23 h 56)

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