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Version finale

34th Legislature, 1st Session
(November 28, 1989 au March 18, 1992)

Tuesday, April 9, 1991 - Vol. 31 N° 34

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministre délégué à la Francophonie


Journal des débats

 

(Quinze heures quarante et une minutes)

Le Président (M. Dauphin): Le quorum étant constaté, je déclare donc ouverte la séance de la commission des institutions qui a pour mandat, cet après-midi, de procéder à l'étude des crédits budgétaires concernant le ministère des Affaires internationales, c'est-à-dire le programme 1, élément 4, Office franco-québécois pour la jeunesse, pour l'année financière 1991-1992. Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président, un seul remplacement: M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témis- camingue) est remplacé par M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques).

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. Puisqu'il n'y a pas d'entente entre les leaders sur le partage du temps, je vais, comme président, évidemment, agir en équité, en respect et en conformité de notre règlement. Je rappelle qu'effectivement il y a une enveloppe de deux heures de prévue pour cette étude. À ce stade-ci, j'aimerais souhaiter la bienvenue au ministre délégué à la Francophonie et l'inviter à procéder immédiatement à ses remarques préliminaires.

Remarques préliminaires M. Guy Rivard

M. Rivard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord présenter les gens qui m'accompagnent et qui m'assisteront dans cet exercice démocratique. À ma droite, M. René Leduc, qui est directeur de la Francophonie; à ma gauche, M. Gilles Éthier, directeur de mon cabinet; derrière moi, Mmes Trudeau et Bourgeois, qui sont directrices à l'Office franco-québécois pour la jeunesse; et M. Pierre Simard, qui est secrétaire exécutif associé à l'Agence Québec-Wallonie-Bruxelles.

M. le Président, je vous dirai dès le départ que la francophonie, ce vaste ensemble universel de plus de 45 pays et États répartis sur les cinq continents, se présente plus que jamais comme une réalité vivante. On y compte, et il faut le rappeler, une population d'environ 400 000 000 de personnes dont 125 000 000 utilisent le français comme langue de formation et d'administration, langue des affaires et des communications. Ce sont, d'ailleurs, ces caractéristiques qui font de la langue française la deuxième langue vraiment internationale de notre siècle. Dans cet espace international circulent des personnes, des idées, des biens culturels et des biens économiques. Depuis 100 ans, des associations s'y réunissent au sein desquelles bon nombre de Québécois jouent un rôle déterminant. On y retrouve nos universitaires, nos scientifiques, nos parlementaires, nos professeurs, nos gens d'affaires, nos maires des grandes villes, pour ne nommer que ceux-là.

Depuis 21 ans, un 20 mars, au Niger, la francophonie est devenue aussi une alliance, celle d'une quarantaine de gouvernements mettant en commun leurs expertises et leurs ressources au sein de l'Agence de coopération culturelle et technique. Depuis cinq ans, enfin, les chefs d'État, de pays et de gouvernement de la communauté francophone se réunissent et prennent des décisions lors des sommets de la francophonie.

Au sein de cette communauté, le Québec peut s'enorgueillir d'un passé très riche. En s'ouvrant sur le monde pour mieux affirmer son identité, le Québec a joué et continue de jouer un rôle qui ne cesse d'être perçu comme étant empreint de pragmatisme, de rigueur, de générosité, d'humanisme et d'originalité. En effet, nous, du Québec, offrons une culture, une technologie et une façon de faire nord-américaines en français. Nous pouvons être fiers de cette contribution originale qui fait dire à nos partenaires que le Québec est un atout pour la francophonie. Réciproquement, la francophonie constitue une réelle opportunité de développement pour le Québec. Elle lui procure un levier de rayonnement international au plus haut niveau politique. Elle lui offre un espace culturel, scientifique et technique vital pour son épanouissement et son affirmation.

Mais l'attrait de l'espace francophone ne peut plus être seulement politique et culturel; il doit être aussi d'ordre financier, industriel et commercial. Cet espace est un marché vivement convoité de l'intérieur et, par conséquent, un instrument de développement rentable pour les Québécois, sur le plan économique comme sur les autres plans. Cet objectif fondamental doit aussi guider la contribution du Québec en francophonie.

Comme vous le savez sans doute, des réalisations concrètes du Québec en francophonie, il en existe dans tous les secteurs. Regardons les faits saillants de la contribution du Québec à l'espace francophone au cours de l'exercice 1990-1991.

L'Agence de coopération culturelle et technique, créée en 1970, demeure la seule organisation intergouvernementale de la francophonie et elle s'est vu confier le rôle de principal opérateur des décisions des sommets francophones. L'action majeure du Québec a consisté à soutenir toutes les démarches faites par l'Agence dans la réalisation de son mandat.

Sous l'impulsion de M. Jean-Louis Roy, son secrétaire général, la programmation de l'Agence a été redéfinie à l'intérieur d'un plan d'action parfaitement en accord avec les décisions prises lors des sommets. Les défis que devra relever l'Agence au seuil du troisième millénaire ont nécessité aussi une réforme administrative afin d'en faire, selon les mots mêmes de son secrétaire général, "une force d'intervention dont les efforts soient concrets, utiles et visibles; un outil de gestion performant". J'ajouterai que M. Jean-Louis Roy peut se réjouir de l'appui indéfectible de tous les acteurs de la scène francophone. Son savoir-faire allié à un sens pragmatique et une réelle volonté de réalisation forcent l'admiration, et ce fut le cas lors de la réunion du conseil d'administration à Niamey.

Pour la deuxième fois de son histoire, la communauté francophone s'est rassemblée à Liège, en Belgique, en novembre dernier, pour la tenue d'une Conférence des ministres de la Culture. Cette réunion a permis l'adoption d'un plan d'action quinquennal s'échelonnant entre 1991 et 1995 et d'un texte politique dit "Déclaration de Liège". Les éléments majeurs qui en découlent visent une meilleure circulation des biens culturels tels le livre, le cinéma, la radio, la télévision, la chanson et le spectacle vivant. Quant à la sauvegarde du patrimoine culturel et à l'aménagement linguistique au sein de l'espace francophone, voilà aussi des éléments de ce plan qui seront soumis aux décideurs du prochain sommet.

La Conférence a néanmoins, dès novembre, retenu plusieurs projets concrets. Je me permettrai de citer ceux auxquels le Québec est intimement lié: par exemple, l'extension des réseaux de centres de lecture et d'animation culturelle en milieu rural dans les pays du Sud, la mise en place de consortiums d'éditeurs et le développement de radios rurales.

Dans le secteur de l'éducation, de la formation de ces ressources humaines sans lesquelles aucune société ne peut aspirer à se développer sur quelque plan que ce soit, l'originalité et l'importance de la contribution québécoise ne cessent de s'affirmer. En voici quelques preuves.

Au plan des bourses, geste utile et rentable que cet accueil de milliers de boursiers universitaires au Québec. Il s'agit d'une contribution importante que le Québec entend maintenir. Geste moderne aussi que l'exportation de l'expertise de notre savoir-faire pédagogique et technologique en matière de formation à distance. Les efforts de promotion de la Télé-université du Québec ont conduit à la mise en place du Consortium international francophone de formation à distance.

Production de matériel didactique. Suite à l'annonce de notre premier ministre au Sommet de la francophonie à Dakar, le Québec a mis sur pied des structures de production d'un tel matériel adapté aux pays du Sud. Le Québec y favorise énergiquement la création de consortiums entre nos éditeurs et ceux de l'Afrique. Un exemple, HMH-Hurtubise annonçait récemment une participation de 30 % dans l'une des principales maisons d'édition de la Côte-d'lvoire

Autre dossier de l'éducation. À Alexandrie, en Egypte, en novembre dernier, a été inaugurée l'Université Senghor. Il s'agit d'une université internationale de langue française mise au service du développement africain. On y retrouve trois départements, dont un, celui de l'environnement, est sous la responsabilité pleine et entière de l'UQAM qui fut le promoteur du projet.

Toujours dans le secteur de l'éducation, impossible d'évoquer ces dossiers sans parler de l'action majeure de l'Association des universités partiellement ou entièrement de langue française, l'AUPELF. Elle fut créée en 1961 à Montréal et elle mène avec une incessante détermination des actions de coopération dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la science. Elle s'est vu confier le programme de l'université des réseaux d'expression francophone, programme qui regroupe une vingtaine de projets de coopération visant à structurer l'espace scientifique et universitaire francophone. Dans ce dossier, d'ailleurs, plusieurs rencontres avec les recteurs des universités québécoises ont permis au milieu universitaire et au gouvernement du Québec de se définir des objectifs communs. Soulignons aussi que des efforts particuliers ont amené la nomination d'un Québécois comme directeur des programmes de l'université des réseaux.

L'accession de nombreux pays à la démocratie est une tendance majeure à laquelle la francophonie et plus particulièrement le Québec ne peuvent rester indifférents. À cet égard, il convient de souligner, toujours dans les réalisations de la période 1990-1991, le travail remarquable accompli récemment en Haïti et au Bénin par le Directeur général des élections du Québec, M. Pierre-F. Côté, et son équipe. Ce "produit exportable", comme M. Côté qualifie lui-même notre processus électoral, jouit d'une remarquable autorité morale et témoigne éloquemment de la qualité de vie démocratique qui prévaut au Québec.

Autre dimension riche en possibilité pour la francophonie: la jeunesse. Il s'agit d'une clientèle à laquelle le Québec accorde depuis longtemps une importance majeure et je voudrais vous entretenir brièvement, M. le Président, de deux organismes d'échanges bilatéraux, l'Office franco-québécois pour la jeunesse et l'Agence Québec-Wallonie-Bruxelles, exactement.

Depuis 23 ans, l'OFQJ, l'Office franco-québécois pour la jeunesse, a permis à plus de 64 000 jeunes Québécois et Français de connaître, par le biais de stages, les similitudes et les contrastes qui caractérisent chacune de nos sociétés dans des domaines aussi variés que les

sciences, la santé, les arts ou les nouvelles technologies. Tout en maintenant ses programmes d'échanges réguliers, l'OFQJ innovera cet été en réunissant des jeunes Québécois et Français dans le cadre d'une université d'été pour la protection de l'environnement. Ce projet novateur donnera les moyens à ceux et celles qui se soucient de la suivie de la planète d'engager une vaste réflexion d'où découleront les orientations de nos futurs décideurs.

Pour une deuxième année consécutive, l'OFQJ animera la Maison du Québec à Saint-Malo en présentant de jeunes artistes québécois. Dans le même ordre d'idées, l'OFQJ s'associera de nouveau avec les Francofolies de La Rochelle et les Francofolies de Montréal afin de donner la chance aux jeunes artistes de la relève québécoise et française de se faire connaître.

Quant à l'Agence Québec-Wallonie-Bruxelles pour la jeunesse, elle a, pour sa part, concrétisé, après sept ans d'existence, plus de 3000 échanges de jeunes du Québec et de la communauté française de Belgique. En plus de ses programmes réguliers, l'Agence tiendra cette année au Québec la seconde édition du Forum francophone des jeunes, forum qui permettra à 30 jeunes Québécois et 30 jeunes de la communauté française de Belgique de se réunir pour engager une vaste réflexion sur le thème de l'interculturalisme. Ces deux organismes sont à plein droit des lieux importants de formation pour la jeunesse de nos sociétés.

Tous ces exemples de réalisations, M. le Président, le confirment: l'action efficace du Québec se fait sentir dans des secteurs où, sans aucun doute, nous offrons l'excellence.

Qu'en est-il pour l'avenir? Un avenir prometteur, certes, mais semé de grands défis qu'il faudra examiner lors du quatrième Sommet francophone prévu à la fin de novembre 1991 à Paris. Encore une fois, le Québec profitera de ce sommet pour faire valoir son expertise et apporter sa contribution unique dans certains dossiers de coopération multilatérale. En voici quelques exemples.

Au chapitre de l'environnement, il me faut signaler la tenue prochaine, à Tunis, de la première Conférence des ministres francophones de l'Environnement. Au coeur de ces échanges, un objectif fondamental, celui de réaliser la symbiose entre l'environnement et l'économie dans un concept largement accepté de développement durable. D'ailleurs, le Québec a été le proposeur de la Conférence de Tunis et il a soutenu de façon très active la préparation du plan d'action qui, une fois accepté, sera soumis par la suite aux chefs d'État.

Dans le même domaine de l'environnement, le Québec participe à la publication d'une revue bilingue sur l'environnement. Issue d'une proposition des premiers ministres du Canada et du Québec au Sommet de Dakar, en 1989, la revue Écodécision, puisque c'est son titre, traite des problèmes en environnement des pays du Sud et du Nord. Elle sera diffusée dans plus de 80 pays et elle sera d'emblée une tribune privilégiée pour les scientifiques qui voudront faire valoir en français le fruit de leurs recherches et de leurs réflexions. J'aurai, d'ailleurs, le plaisir de participer, avec bien d'autres, au lancement de cette revue le 11 avril prochain, dans deux jours.

Quant à la participation majeure de l'UQAM dans le Département de l'environnement de l'Université d'Alexandrie, tous les efforts seront faits pour que son leadership soit conservé.

TV5 est le maillon le plus visible de l'espace francophone international. Son caractère multilatéral permet à l'ensemble des pays partenaires d'exprimer leurs particularités culturelles et d'apprécier entre eux les capacités de création de chacun. Il est important, pour le Québec, que TV5 réussisse sa mission d'information, d'échange et de partage. C'est pourquoi on ne peut que se réjouir des efforts constamment déployés en vue d'améliorer la qualité des programmes et d'exporter TV5 vers d'autres territoires. Ainsi, on prévoit signer de nouvelles ententes afin de diffuser le signal dans plusieurs métropoles des États-Unis et des travaux d'experts sont déjà entrepris en vue de la création d'une TV5 Afrique. Tous les espoirs sont permis afin que TV5 demeure un outil privilégié de développement d'un espace audiovisuel francophone international.

Radios rurales. Toujours dans le secteur névralgique des communications, le Québec a su mettre en oeuvre des projets tout à fait originaux, dont celui-ci, la radio rurale, dont il peut réclamer la paternité avec fierté. Récemment, au Vietnam et au Burkina-Faso, étaient inaugurées des radios rurales grâce à la participation d'entrepreneurs québécois. L'implantation d'autres stations est prévue pour le Zaïre, le Congo, Haïti et la République centrafricaine.

Un autre projet qui jouit d'un grand impact social dans les pays du Sud, c'est celui des centres de lecture et d'animation culturelle, les CLAC, si vous me permettez ce sigle. Voilà une formule québécoise originale qui répond à la situation difficile des pays en voie de développement et qui donne accès à leurs populations rurales aux livres et moyens audiovisuels de formation et d'information. Un réseau d'une soixantaine de centres est déjà réparti au Bénin, au Sénégal, en Côte-d'lvoire et au Burkina-Faso. Son succès est réel et le Québec en retire une grande visibilité. Nous en réclamons la paternité totale en termes de conception. On prévoit une implantation totale de 600 centres d'ici l'an 2000.

Même s'il a été parfois relégué au second plan par les enjeux politiques et culturels, le volet économique de l'espace francophone est vital car, sans développement économique, la francophonie ne saurait être un instrument de développement rentable pour quelque pays que ce soit. Cet espace doit servir à mettre les Québé-

cois en relation avec les opérateurs économiques des autres pays et à faire mieux connaître les expertises et capacités québécoises. Il n'y a pas de raison pour que le Québec, en francophonie, ne soit pas sur la carte des fournisseurs de biens et services compétents et fiables.

À cet égard, le Forum francophone des affaires est le plus bel exemple de la mutation des institutions francophones amorcée ces dernières années. Organisé une première fois, avec le concours du secteur privé, lors du Sommet francophone de Québec en 1987, le Forum a permis d'établir un nouveau style de dialogue entre les gens d'affaires du Sud et ceux du Nord. Depuis, les retombées ont été considérables car, à partir d'un événement, on a bâti un réseau. Le Forum travaille actuellement, de façon active, à l'implantation d'une banque de données sur une trentaine de pays. Cette banque sera mise à la disposition des entreprises de son réseau à partir du secrétariat général qui fut inauguré à Montréal en 1990. Grâce à cette initiative québécoise de conception et d'exécution, le maillage de l'espace économique francophone devient une réalité: un nouveau réseau d'échanges technologiques et commerciaux gagne en importance et, comme résultat, sans aucun doute, des millions de dollars en chiffre d'affaires et un transfert important de connaissances.

En terminant ce chapitre sur le Sommet de novembre prochain, laissez-moi réaffirmer que le Québec entend y prôner l'évaluation systématique des projets en marche et la consolidation des programmes les plus rentables. Cette approche est, d'ailleurs, conforme avec une saine gestion des fonds publics.

Aucun objectif, si noble soit-il, ne peut être atteint sans orientation politique, sans stratégie. C'est pourquoi j'ai formé, en mai 1990, un comité consultatif présidé par le président-directeur général d'Hydro-Québec International, M. Michel Therrien. Suite aux travaux de ce comité, je suis particulièrement rassuré quant aux priorités que je me suis fixées depuis mon entrée en poste, soit les ressources humaines, le partenariat et la rentabilité.

L'axe prioritaire, ressources humaines, vise essentiellement à concentrer les efforts sur les transferts de connaissances. La personne est la source et la fin de toute stratégie et c'est pourquoi le Québec ne peut se tromper en investissant dans la formation. Il veillera donc à mettre en contact les bonnes personnes et à accorder une nette priorité à tout ce qui concerne la connaissance.

Le deuxième axe repose sur le partenariat, préférablement d'égal à égal. C'est la clef de voûte de l'implication du Québec en francophonie. C'est l'essence et la base même du multilatéralisme. Le Québec a tout intérêt à favoriser grandement le maillage des intérêts, des ressources et des besoins de chacun des participants de la francophonie. Il doit favoriser la circulation d'informations stratégiques entre les intervenants au Québec et créer une habitude d'échange entre les Québécois et leurs vis-à-vis des pays de l'espace francophone. (16 heures)

Le troisième axe, celui de la rentabilité, doit être entendu au sens le plus large possible. La rentabilité en francophonie signifie la recherche active des gestes qui portent et des projets durables. Les institutions francophones, après tout, n'ont pas les moyens de tout faire. Une meilleure utilisation des ressources s'impose; cibler devient important. L'adéquation entre les besoins des uns et les expertises des autres doit être une règle de base. De plus, je le répète, en termes de rentabilité, l'attrait de l'espace francophone n'est pas seulement politique et culturel; il est aussi économique. Et il faut faire de la francophonie un instrument d'affirmation et de développement rentable et durable, pour les Québécois, pour leurs partenaires, sur le plan économique comme sur les autres plans.

Comme on a pu le constater, les actions fructueuses en francophonie ne manquent pas. Elles sont issues de tous les milieux; elles ne sont pas le seul résultat des gestes posés par le gouvernement. Hors de tout doute - et ce fut dit et réaffirmé récemment à l'occasion de la célébration de la Journée de la francophonie, le 20 mars - la francophonie est une réalité vivante pour des institutions, tels Hydro-Québec International, le Forum francophone des affaires, le Mondial de la publicité francophone, l'Institut de développement nord-sud et autres ONG, de même que pour des entreprises comme Cascades en France et Bombardier en Belgique. Il en est de même pour les milieux de la chanson, du théâtre, du cinéma et de l'édition pour qui la francophonie représente un échiquier stratégique.

Mais encore faut-il que l'on sache tout cela et c'est la raison pour laquelle j'ai lancé, comme je le disais tout à l'heure, le 20 mars dernier, la première Journée de la francophonie jamais célébrée au Québec. Je compte faire en sorte que cette journée, célébrée modestement cette année, prenne d'année en année une envergure accrue car il s'agit là d'une occasion privilégiée pour rendre la francophonie populaire et visible à tous ceux qui viendront y puiser une grande fierté en plus d'y voir une opportunité de développement.

En terminant, M. le Président, je dirai que la contribution unique du Québec à l'espace francophone n'est certainement plus à démontrer. Les réussites, quant à elles, sont largement dues à notre spécificité. En effet, en tant que petite puissance du Nord, le Québec offre en français une culture, une technologie et une façon de faire nord-américaines Je le répète, mais c'est important de le faire.

C'est ce caractère distinct qui fait que les propositions du Québec en matière de fran-

cophonie sont originales et régulièrement adoptées dans le cadre des activités multilatérales francophones. C'est également dans cette optique d'originalité que le gouvernement du Québec doit maintenir et renforcer la qualité d'initiateur que les États membres et les gouvernements participants reconnaissent au Québec.

J'ajouterai qu'au moment de la redéfinition des rapports Canada-Québec il est primordial que le Québec maintienne et élargisse ses alliances internationales, dans cet espace comme dans les autres. Les conditions actuelles sont propices et le Québec a tout avantage à en tirer le meilleur parti qui soit.

Je désire rappeler que le premier ministre a confié au ministre délégué à la Francophonie le mandat de travailler à la consolidation de cet espace francophone international. Cette volonté de consolidation constitue l'objectif central de l'action du gouvernement libéral face au monde francophone. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. le ministre délégué à la Francophonie, pour vos remarques préliminaires. Je vais maintenant reconnaître le porte-parole de l'Opposition officielle, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, je vous remercie. Je ne vous cacherai pas le plaisir que j'ai à me retrouver en votre compagnie à cette prestigieuse commission, qui est celle des institutions, à laquelle j'ai appartenu pendant près de quatre ans.

M. le Président, l'impressionnisme a été une période forte en peinture, mais étant plutôt reconnu comme un collectionneur d'oeuvres modernes, type avant-garde et constructiviste, j'irai aux questions immédiatement après quatre brèves réflexions, en espérant que le ministre, dans les réponses, lui, n'aille pas au surréalisme.

Les quatre interventions. La première, c'est que je dois déplorer, M. le Président, le silence du ministre délégué à la Francophonie lors de l'épisode du transfert du quatrième Sommet de la francophonie de Kinshasa à Paris. Je crois que ce n'était pas la plus belle des façons d'assumer des responsabilités que celle de se terrer dans un mutisme jusqu'à ce qu'une décision soit prise, à moins que le ministre n'ait choisi de s'aligner sur Ottawa, le "mon oncle d'Ottawa", comme je me plais à employer la phrase, sans avoir le courage de le dire sur la place publique. Pourtant, le ministre a eu tout le temps de prendre position. En octobre, le sherpa du premier ministre, M. Poupart, évoquait publiquement la possibilité du transfert alors que la décision formelle n'a été prise qu'en janvier.

Je parlerai des odyssées du ministre. Je constate que le ministre se spécialise de plus en plus dans les inaugurations, les célébrations et les assermentations dans ses odyssées outre-mer. Des sept voyages officiels effectués en 1990-1991 à l'extérieur de nos frontières - je parle du Québec, il va de soi - un seul se sera traduit par des retombées concrètes, soit la mission commerciale effectuée en octobre en Roumanie. Le ministre lui a-t-il confié un poste quasi honorifique et s'en contente-t-il? Je crois que la question se pose.

Qui plus est, il est allé, M. le Président, rejoindre en Belgique ses collègues de la Culture et des Communications, à des conférences des ministres de la francophonie chargés des dossiers de la culture et de TV5, et ceci, comme je vous le dis, en Belgique. Je vois qu'il y a là, je disais, un bel, mais triste exemple de dédoublement ministériel inutile et coûteux dans un contexte où les finances publiques sont mal en point.

Pour ce qui est du Forum francophone des affaires créé en 1987 lors du Sommet de Québec, son secrétariat s'est établi à Montréal suite à une décision du Sommet de Dakar, et ceci, pour une période de deux ans. Cette période de deux ans vient à échéance. Une décision quant à l'emplacement permanent du secrétariat doit être prise lors du prochain Sommet de la francophonie, à Paris, en novembre prochain. Le secrétariat du Forum francophone des affaires doit demeurer à Montréal. Le ministre doit tout mettre en ordre pour convaincre ses partenaires de la francophonie du bien-fondé de la présence de ce secrétariat à Montréal.

M. le Président, en terminant, avant d'aller aux questions, comme je vous le disais, je parlerai du ratio dans ce ministère. Je constate que le ministre délégué à la Francophonie est un véritable cas d'espèce au sein de l'administration publique québécoise. Il a sous son autorité 14 fonctionnaires par rapport à 15 employés dans son cabinet: 9 attachés politiques et 6 employés de soutien. Un rapport d'un pour un. En tant qu'ancien administrateur d'une commission scolaire, M. le Président, je crois que nos enseignants seraient heureux d'avoir un rapport équivalent dans leur classe.

Rentabilité des voyages à l'étranger

Voilà pour les brèves remarques préliminaires que je désirais faire, vous rappelant que je préfère aller au questionnement immédiatement. Donc, si vous le voulez bien, nous irons immédiatement au secteur francophonie. Le ministre a parlé de rentabilité au sujet de ses nombreux voyages à l'étranger. Est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi il a fait un détour par la Belgique, en provenance d'Egypte, pour accompagner respectivement la ministre des Affaires culturelles et le ministre des Communications à la Conférence des ministres de la Culture et à celle des ministres responsables de TV5?

Le Président (M. Dauphin): M le ministre.

M. Rivard: M. le Président, j'imagine que le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques voudra toucher par la suite les autres questions qu'il a soulevées dans ses remarques préliminaires concernant le Sommet du Zaïre, concernant le Forum francophone des affaires et concernant aussi la façon dont il perçoit l'organisation du ministère des Affaires internationales eu égard aux responsabilités et activités du ministre délégué à la Francophonie.

Sur ce dernier point, je dirai, avant de répondre à la question spécifique concernant le voyage précité, que, dans le décret qui nomme le ministre délégué à la Francophonie, le premier ministre, le gouvernement n'a pas limité le ministre délégué à une portion, une direction générale spécifique de l'ensemble du ministère des Affaires internationales. Il est évident que je travaille davantage avec un sous-ministre en particulier, avec un directeur général et avec le directeur de la Francophonie qui est assis à ma droite. Il n'en demeure pas moins que le ministre délégué a à sa disposition toutes les autres directions qui peuvent lui servir à bien accomplir son mandat qui, je le répète, est de coordonner et de travailler à consolider l'espace francophone international.

Par exemple, étant donné qu'on retrouve beaucoup de pays du Sud et, en particulier, de l'Afrique noire francophone dans l'espace international et au sein de l'alliance francophone, c'est ainsi que j'ai à travailler assez souvent avec la Direction Afrique et Moyen-Orient. C'est ainsi que, pour les orientations politiques et la mise en place, la définition des priorités, j'ai à travailler avec la Direction des politiques et priorités. C'est ainsi que j'ai à travailler aussi avec la Direction des communications, etc., etc., etc. C'est être simple et un peu injuste que de ramener la fonction, le rôle du ministre délégué à la Francophonie à une simple définition basée sur le nombre de personnes, le nombre d'attachés politiques, puisque le député de Sainte Marie-Saint-Jacques revient constamment sur la question ou encore le nombre de voyages. Il faut dire, M. le Président, que le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques me déçoit sans me surprendre parce que, dans le fond, ce qu'il identifie comme des problèmes et qu'il dépose sur la table aujourd'hui, ce sont des choses sur lesquelles nous nous sommes déjà entretenus en commission parlementaire, lors des crédits l'an dernier. Alors, le discours n'est pas tout à fait neuf; ça ressemble à un ragoût un peu réchauffé de vieilles choses.

Les voyages. Je ne comprends pas que le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques m'accuse de faire mon travail. Dans le domaine des affaires internationales, dans le domaine des relations internationales, voyager, ça fait partie de la mission d'un ministre. C'est un des moyens utilisés par tous les pays pour faire en sorte qu'un pays rayonne, pour faire en sorte qu'un pays fasse des affaires avec d'autres pays, soit d'une façon bilatérale, sort d'une façon multilatérale. Les voyages de nos fonctionnaires québécois à travers la planète, les voyages des ministres responsables de différentes missions sectorielles font partie d'une panoplie, d'un ensemble de moyens utilisés par tous les pays. Exemple: nous accueillons ici des délégations; une partie de mon travail consiste à rencontrer beaucoup d'ambassadeurs, de consuls, de ministres, de toutes sortes de pays de la francophonie et d'en dehors de la francophonie aussi, qui viennent prendre connaissance ici, au Québec, de l'expertise, des capacités québécoises. Quand je voyage en francophonie, je fais l'inverse; je fais prendre connaissance à des partenaires éventuels de cette expertise et de cette compétence québécoises.

Les représentations à l'étranger, les déléga tions, voilà un autre élément, un autre instrument utilisé par les ministères des Affaires étrangères, les ministères des Affaires internationales à travers toute la planète. La participation à des expositions, à des événements internationaux, des foires, des organismes internationaux, des institutions, tout ça fait partie d'une panoplie.

Évidemment, ce n'est pas toujours facile... Je comprends très bien la question du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques lorsqu'il parle de rentabilité parce qu'on a tendance, de nos jours, à juger de la rentabilité des choses préférable-ment en chiffrant les choses. Lorsqu'on fait un voyage - par exemple, le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques parlait du deuxième voyage en Roumanie, en novembre dernier - c'est évident qu'il est possible à ce moment-là, suite à ce voyage, de dresser la liste des entreprises qui accompagnaient le ministre. Il est possible aussi de dresser la liste des contrats sur lesquels on...

M. Boulerice: La Belgique, M. le ministre. La Belgique, là. (16 h 15)

M. Rivard: Oui, mais, M. le Président, comme le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques revient constamment sur cette question des voyages et comme je suis certain qu'il y reviendra aussi - parce que j'en ferai d'autres, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, j'en ferai d'autres, je vous l'annonce, alors vous pourrez me questionner sur les autres - je veux faire l'éducation du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je vais fui replacer...

M. Boulerice: Vaste programme.

M. Rivard: En effet. J'avoue que l'entreprise est audacieuse. Je veux essayer de replacer la question des voyages, parce que ça revient constamment sur le tapis, dans une perspective

qui est plus large. Dans certains cas, il est possible de donner, de quantifier la rentabilité en termes de chiffres et, dans d'autres cas, c'est une question de rayonnement. D'ailleurs, au sein du ministère des Affaires internationales, lorsqu'on fait l'évaluation des différentes activités du ministère des Affaires internationales, on regarde, certes, les retombées économiques, mais on regarde aussi des choses comme le rayonnement, le développement social, les relations intergouvernementales et les relations institutionnelles.

À Liège et à Bruxelles, suite au voyage que j'avais fait à Alexandrie - parce qu'il faut vous raconter comment s'est déroulé ce voyage-là, mais brièvement. J'ai, à la demande du premier ministre, remplacé celui-ci au début de novembre à l'inauguration de l'Université Senghor, à Alexandrie. C'était le but principal du voyage. Je n'ai pas à préciser ici pour quelle raison le premier ministre n'était pas capable de faire ce voyage-là, on se souvient pourquoi. J'ai pu, d'ailleurs, au cours de ce voyage, non seulement le représenter, mais prendre contact, parce qu'on parle de rentabilité des voyages, non seulement avec les universitaires qui travailleront à cette université, mais aussi avec des opérateurs économiques d'Alexandrie. Je dois vous signaler en passant, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, qu'à chacun de mes voyages j'essaie d'ajouter une dimension bilatérale et de transporter dans mes bagages des projets qui sont susceptibles d'intéresser les partenaires économiques des autres pays.

Au retour de ce voyage, seul, dois-je le préciser, je me suis effectivement rendu à Liège et à Bruxelles où mes vis-à-vis, mes homologues, c'est-à-dire M. Decaux, de France, M. Masse, d'Ottawa, et M. Féaux, le ministre-président de la communauté française de Belgique, étaient présents. J'ai déjà expliqué, d'ailleurs, que cette présence de ma part à Bruxelles et à Liège à la Conférence des ministres de la Culture et à la réunion sur TV5 avait été acceptée dans ce décret qui, comme vous le savez, est nécessaire pour autoriser tous les déplacements de ministres à l'extérieur du Québec.

M. Boulerice: Pourquoi deux ministres du même gouvernement? Est-ce que notre force tient au nombre ou à la connaissance des dossiers?

M. Rivard: Pourquoi M. Decaux, de France, était-il là avec M. Jack Lang, le ministre...

M. Boulerice: Jack Lang.

M. Rivard: ...de la Culture? Voilà, je vous retourne la question. L'espace culturel francophone est un espace vital non seulement pour toutes les valeurs culturelles qui y sont véhiculées, mais vital aussi en termes d'intérêt écono- mique. Vous connaissez très bien cette question-là.

M. Boulerice: Et pourquoi d'abord, à ce moment-là, je vais en convenir, vous n'étiez pas à la première rencontre, vous ne faisiez pas partie de la délégation lors de la réunion précédente, celle du 21 mai 1990, qui, elle, a assuré, en définitive, la survie de TV5?

Une voix: Qui a eu lieu à Montréal?

M. Boulerice: Qui a eu lieu à Montréal, à sept minutes et demie de votre circonscription.

M. Rivard: Je n'ai pas assisté à la réunion de contenu au mois de mai, mais j'ai profité de cette réunion pour rencontrer, encore une fois, mes homologues. M. Féaux n'était pas là, mais M. Decaux était là et M. Masse était là, évidemment.

M. Boulerice: Oui, mais, écoutez, vous parliez que vous n'étiez pas membre, vous n'y étiez pas lors de la réunion de contenu. Comment se fait-il que vous n'étiez pas à la réunion de contenu, à Montréal, sur TV5 et que là, soudainement, vous y êtes pour celle de Bruxelles?

M. Rivard: II faut que vous compreniez que, dans un dossier comme le dossier de TV5 - et c'est vrai pour les autres dossiers qui sont sous la responsabilité du ministre délégué à la Francophonie et la même chose s'appliquerait au ministre des Affaires internationales - on a affaire à des dossiers qui sont sectoriels, mais où il y a, comment dirais-je? une responsabilité qui est partagée, même sur le plan financier. Le directeur de la Francophonie pourrait me corriger, mais, de mémoire, la participation financière à TV5 est à peu près moitié-moitié. La contribution budgétaire du Québec à TV5 est à peu près répartie de façon égale entre le ministère des Communications et le ministère des Affaires internationales.

Certains sujets dans le dossier de TV5 sont carrément sectoriels: par exemple, des sujets qui concernent toutes les relations qui peuvent exister entre les producteurs, les diffuseurs québécois à l'intérieur du consortium. D'autres sujets sont davantage, si vous voulez, "francophonie". Par exemple, je parlais, dans mes remarques préliminaires, du dossier extension de TV5 vers l'Afrique. C'est un dossier qui est en marche. Des experts se réunissent actuellement et essaient de définir ce que pourrait bien vouloir signifier cette extension de TV5 vers l'Afrique, cette TV5 Afrique. Voilà une partie du dossier de TV5, si vous voulez, qui fait l'objet d'échanges continuels entre le ministre des Communications et celui qui vous parle.

C'est un dossier à responsabilité partagée et, quel que soit le ministre qui assiste à une

réunion dans ce dossier-là, encore une fois, les mandats sont définis de façon conjointe par le ministre des Communications, le ministre délégué à la Francophonie et, comme il s'agit d'activités internationales, par le ministre des Affaires internationales. C'est comme ça que ça se passe.

Le Président (M. Dauphin): M. le député.

M. Boulerice: Eh bien, écoutez! Si vous voulez faire mon éducation et m'enseigner Descartes, je pense que vous ne serez pas le meilleur professeur. Si je vous comprends bien, c'est partagé, mais il vaut mieux être deux. Comment se fait-il, à ce moment-là, que vous n'ayez pas du tout eu le goût de partager quand on discutait de contenu, qui était l'objet de la réunion de Montréal, tout le plan de restructuration et au moment même où la France menaçait de se retirer?

M. Rivard: II y a différentes façons de faire les choses, mais, en ce qui concerne l'ensemble des réunions de TV5, encore une fois, il y a des concertations, il y a des consultations continuelles entre les fonctionnaires du ministère des Communications et les fonctionnaires de la Direction de la francophonie chez nous, et entre les deux ministres. Ce qui est important, c'est ça, c'est qu'on soit sur la même longueur d'onde, qu'on poursuive les mêmes objectifs. Et vous savez très bien, parce que je vous l'ai entendu dire, que TV5 est un de ces dossiers dans lesquels il faut investir beaucoup d'énergie parce que c'est un dossier de développement de la francophonie qui est majeur.

Le Président (M. Dauphin): M. le député.

Transfert du quatrième Sommet de la francophonie de Kinshasa à Paris

M. Boulerice: Oui. Nous irons dans la rubrique transfert du quatrième Sommet de la francophonie. Dans toutes les péripéties qui ont entouré l'épisode du transfert du quatrième Sommet de la francophonie de Kinshasa à Paris, vous avez été tout à fait silencieux, ce qui vous a valu, d'ailleurs, des critiques cinglantes de Mme Bissonnette dans Le Devoir et de M. Gravel dans La Presse. Pourquoi un tel silence? Pourquoi ne pas avoir pris publiquement position à ce moment?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rivard: Le dossier du transfert du site du prochain Sommet de la francophonie est, à maints égards, un dossier extrêmement délicat. C'est un dossier de politique étrangère et, si vous regardez de façon très précise la façon dont les différents ministres et gouvernements impliqués se sont comportés, c'est un dossier où la discrétion a été de rigueur. Ça ne veut pas dire, parce que je n'ai pas personnellement fait de déclaration publique, que le Québec n'a pas été actif dans ce dossier-là. Il y a eu des consultations continuelles entre mon homologue d'Ottawa et mes homologues de France et de la communauté française de Belgique, et ça, à toutes les étapes du dossier, même au cours de ce voyage à Alexandrie au cours duquel il y avait eu des contacts pris avec les ministres qui représentaient le Zaïre à l'occasion de cette inauguration et qui étaient là avec le président Mobutu. Donc, le Québec était tout à fait au courant et était partie prenante, d'une certaine façon, aux discussions qui avaient lieu entre les différents partenaires pour obtenir principalement une chose, c'est que le prochain Sommet de la francophonie ne soit pas reporté trop loin dans le temps. C'était ça, l'objectif principal de toute l'opération, et je pense que l'ensemble des partenaires francophones a bénéficié énormément d'agir avec une relative discrétion dans ce dossier délicat.

Le Président (M. Dauphin): Je vais maintenant, si vous me permettez, reconnaître M. le député d'Iberville.

M. Lafrance: Oui, M. le Président. J'aimerais questionner la légitimité et la pertinence de cette dernière question de M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je pense que nous sommes ici pour discuter des crédits budgétaires et non pas du degré de participation aux discussions à l'étranger, à moins que je ne me trompe.

M. Boulerice: Méconnaissance, M le Prési dent, à mon point de vue, des règles de ce Parlement et des commissions parlementaires, et vous contredisez, en quelque sorte, les propos de votre propre ministre. Si je vous écoute, vous voulez que l'on ne parte que de chiffres, et lui a dit qu'il fallait également parler de contenu. Alors, écoutez, entendez-vous mutuellement, là. Je sais qu'il y a de profondes divisions dans votre caucus, mais je ne pense pas que ce soit le bon endroit pour les étaler, ici en commission parlementaire.

Le Président (M. Dauphin): Sur cette question, si vous me permettez, c'est que, lors de l'étude des crédits, M. le député d'Iberville, le règlement est d'application assez souple, assez flexible. Souvent, on a tenté d'invoquer la pertinence, mais, effectivement, c'est large, c'est une pertinence assez large et assez souple, si ça peut répondre à votre question.

M. Lafrance: Je vous remercie, M. le Président. Je le constate, mais c'est une remarque que je tenais quand même à faire. Merci.

Le Président (M. Dauphin): Alors, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Ensuite, comme parlementaire, je reconnaîtrai M. le député d'Anjou.

M. Boulerice: Alors, l'objectif du fédéral n'était pas de reporter le Sommet. L'objectif du gouvernement canadien, pays voisin et néanmoins ami, était qu'il n'ait pas lieu à Kinshasa. Quelle était votre position? Si vous ne l'avez pas rendue publique au moment où les débats se sont annoncés, est-ce qu'on pourrait connaître votre position aujourd'hui?

M. Rivard: Nous étions d'accord avec cette position.

M. Boulerice: Ah! Alors, mais pourquoi avoir tant tardé à nous la faire connaître?

M. Rivard: Vous savez, M. le député, M. le Président - je ne devrais pas m'adresser directement au député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, je déroge aux règles, je m'en excuse; mais peut-être que je dérogerai encore dans les minutes qui suivront - dans le domaine des relations internationales, dans le domaine des affaires étrangères, des affaires internationales, il y a un paquet de choses qui se font et qui ne se disent pas; la discrétion est de mise. (16 h 30)

Et, malheureusement, dans ce secteur des affaires internationales, je ne sais pas si je serais capable de citer exactement un article qui a paru il y a quelques mois, mais il paraît qu'il n'y a rien de mieux, pour obtenir une visibilité, que d'avoir une bonne querelle, que de rendre publics des entretiens plus ou moins secrets qui nous amènent à être discrets sur des sujets x, y, z. Il n'y a rien de mieux que de savoir se vanter de certaines victoires, alors qu'on sait très bien qu'en se vantant on risque de faire apparaître en même temps la défaite de partenaires qui pourraient mal réagir. On obtient beaucoup plus en termes de positionnement, on obtient beaucoup plus en termes de possibilité d'action efficace dans un ensemble aussi complexe, politiquement, que celui de la francophonie en étant discrets sur un certain nombre de choses. Dans ce dossier du report du Sommet du Zaïre, je pense qu'il était important d'agir, mais il n'était pas nécessaire de juger publiquement. On ne faisait le procès de personne.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. Sur le même sujet, M. le député d'Anjou?

M. Larouche: Non. J'aurais seulement...

Le Président (M. Dauphin): Aviez-vous terminé, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques là-dessus? O.K. Allez-y.

M. Bouierice: Je n'ai pas terminé.

Le Président (M. Dauphin): M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: Votre attaché de presse, en décembre, déclarait au journal The Gazette que le Québec suivrait toute décision fédérale dans ce dossier. Bref, vous vous êtes aligné en bon gouvernement provincial sur la position d'Ottawa. Mais vous ne trouvez pas que, dans un sujet aussi important que celui-là, il y aurait eu avantage pour le Québec à être une voix claire, non équivoque, et non pas à agir en sous-traitant?

M. Rivard: C'est votre interprétation. M. Boulerice: En sous-main en plus. M. Rivard: Je m'excuse.

M. Boulerice: En sous-main et en sous-traitant.

M. Rivard: C'est votre interprétation, mais, à ce moment-là, il faudrait que vous m'expliquiez parce que, en procédant ainsi, nous avons suivi strictement l'esprit de l'entente que M. Pierre Marc Johnson a signée avec le gouvernement fédéral, avec le gouvernement de M. Mulroney, juste à la veille des élections de 1985, concernant le comportement du Québec en matière de politique étrangère.

Une voix: Pour le Sommet.

M. Rivard: Pour le Sommet, oui. Le dossier dont nous parlons est un dossier relié au Sommet, c'est un dossier de politique étrangère. Nous avons cru comprendre que votre chef de parti et premier ministre du Québec alors et M. Mulroney s'étaient mis d'accord - c'est le sens que nous donnons, en tout cas, et que donnent d'autres personnes à l'entente qui nous régit toujours - pour que, dans ces questions, le premier ministre du Québec et son gouvernement soient discrets. Nous avons suivi la même ligne de conduite. Vous connaissez cette entente, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, j'en suis certain, mieux que moi. Vous savez très bien qu'il y a des niveaux d'intervention qui ont été planifiés, qui ont été définis entre M. Mulroney et M. Johnson à l'époque. À présent, si vous n'êtes pas d'accord avec cette entente-là, je pense que vous pourriez le mentionner ici, on pourrait peut-être en discuter.

M. Boulerice: Je juge un peu injurieux le blâme que vous adressez à votre premier ministre...

M. Rivard: Ce n'est pas un blâme.

M. Boulerice: ...M. Bourassa, puisqu'il a quand même abordé le problème de la dette des pays du tiers monde, qui est de la politique internationale, et qui relève du gouvernement d'Ottawa. Je pense qu'à ce moment-là il aurait pu y avoir un petit peu plus de souplesse. Il n'y a rien qui vous empêchait de le faire.

M. Rivard: Dans le secteur économique, M. le Président - je vais continuer l'éducation de mon collègue de Sainte-Marie-Saint-Jacques, dans ce volet-là comme dans les autres - la marge de manoeuvre telle que définie, encore une fois, par le premier ministre du Québec, Pierre Marc Johnson à l'époque, est beaucoup plus large que dans le domaine des politiques étrangères Je regrette, c'est comme ça qu'ils ont fait l'entente.

Le Président (M. Dauphin): Je vais maintenant reconnaître M. le député...

M. Boulerice: Si je comprends bien, le ministre a mené les discussions en privé.

M. Rivard: Oui

M. Boulerice: Favorisant la position fédérale.

M. Rivard: Le ministre et le gouvernement étaient d'accord avec la position d'Ottawa.

Le Président (M. Dauphin): M le député d'Anjou.

M. Larouche: Merci. M le Président Alors, pour ce que j'en ai entendu ou ce que j'en ai vu. je suis satisfait de la gestion de notre collègue, député de Rosemont et ministre des Affaires internationales. Sans vouloir faire un étalage indu de connaissances, étant diplômé en diplomatie, il y a certaines règles de base en affaires internationales qui ont fait l'objet, de tout temps, de certaines querelles, la première étant celle a'un président américain qui s'appelait Wilson, entre 1915 et 1920, très idéaliste et qui était pour l'ouverture complète des négociations: on ne fait pas de cachette, ce qui nous a menés à différentes guerres et aussi à la création de la Société des Nations, et ainsi de suite. Alors, toute la question du secret et de l'ouverture reste à débattre et je pense que le gouvernement, le ministre, le premier ministre ont certainement eu des raisons valables pour reporter, de Kinshasa à Paris, la tenue de ce Sommet francophone, et je n'ai pas de questions à poser à ce sujet-là. Je suis satisfait, évidemment aussi, étant député indépendant, des excellentes questions, des questions pertinentes de mon autre collègue de Sainte-Marie-Saint-Jacques, très inspirées dans des dossiers qui méritent certains éclaircissements. Je termine en disant, tout simplement, que je suis très heureux que sa vision en affaires internationales fasse qu'il ne juge pas de rentabilité seulement en chiffrant. Je pense que ça c'est fondamental

Avenir de la francophonie

J'aimerais lui poser une question, et sa formation médicale va certainement l'aider. Je vous demanderais, moi, de poser un diagnostic sur le patient qui s'appelle la francophonie. Déjà, il y avait un livre écrit en 1967, je ne sais plus trop par qui, "La francophonie en péril". Alors, j'aimerais, en 1991, qu'on pose un diagnostic sur le patient "francophonie" et que vous nous donniez vos prescriptions ou ce que vous voyez comme développement d'ici cinq ans ou d'ici, mettons... D'ici un an, on le voit dans votre programme, je pense, mais avoir une certaine vision. Vous, comme ministre des relations internationales chargé du dossier francophone, comment vous voyez ça?

M. Boulerice: Jespère qu'il ne dira pas, comme il est pédiatre, que la francophonie est un enfant. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Dauphin): M le ministre.

M. Rivard: Je pense que le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques doit me laisser le choix de mes réponses. Et je vous dirai, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, que, comme j'étais à la fois pédiatre et pneumologue, j'ai le choix entre la première ou la deuxième spécialité. Je vous dirai que, quant à la première, c'est très simple: de toute évidence, la francophonie est en croissance Eh oui, bonne nouvelle, ça va bien; ça se développe et il y a plein d'éléments pour le prouver. Et je dirai, quant à la deuxième spécialité - et, là, je vous en prie, je cesserai de faire là la comparaison - qu'à maints égards on a souvent représenté la francophonie comme étant, pour le Québec, un poumon. Alors, cela me va aussi. La respiration va bien.

Il y a plusieurs façons d'évaluer comment ça se passe. Évidemment, j'aperçois, moi, la francophonie comme étant à la fois un espace, c'est-à-dire un ensemble de pays, et une alliance, c'est-à-dire un espace qui est doté de mécanismes pour que les pays se concertent et réalisent des choses ensemble. Puisque vous êtes un expert, M. le député d'Anjou, en matière de relations internationales, vous connaissez l'existence de l'Agence de coopération culturelle et technique et vous savez que, vraiment, il n'y a pas beaucoup d'organismes semblables autour de cette planète. Voilà qu'une quarantaine de pays, via leurs gouvernements, s'assoient autour d'une même table et planifient des projets que, seuls, ils ne pourraient réaliser, mais qu'ensemble ils peuvent réaliser. Et l'objectif de tout ça, c'est un objectif de développement. Chacun des

partenaires en francophonie, comment dirais-je? recherche son développement au point de vue social, au point de vue politique, au point de vue culturel et, plus récemment, je le disais au cours de mes remarques, au point de vue économique.

L'optimisme est de rigueur. Par exemple, en termes de rayonnement, la francophonie alliance n'est pas en train de diminuer, au contraire, elle augmente. Je pense - M. le directeur de la Francophonie me corrigera si je fais fausse route - que deux pays, se sont joints à l'ACCT lors du dernier conseil d'administration de l'ACCT, Guinée-Bissau et Madagascar. On annonce pour le prochain Sommet une demande de la part de la Roumanie et de la Bulgarie. On retrouve, on le sait très bien, suite à l'évolu-tion-révolution des pays d'Europe centrale et d'Europe de l'Est, des populations de francophones extrêmement intéressantes en termes de nombre et, sans aucun doute, que d'autres pays vont se joindre à nous. Si la francophonie espace et alliance continue d'avoir ce sex-appeal, c'est parce que les pays y trouvent un avantage qui est indéniable.

On pourrait passer en revue les décisions prises par les chefs d'État et de gouvernement lors des sommets, les programmes mis en place par l'ACCT et, pour chacun des programmes, faire une analyse, justement, de ce que ça pourra donner dans l'avenir. Il est indéniable que, dans le dossier de l'environnement, par exemple, dans le dossier de l'énergie, beaucoup de solutions pratiques peuvent venir de la mise en commun des compétences des différents pays et c'est ce qui se fait.

Je vais vous donner un exemple d'optimisme québécois dans ce dossier-là, le dossier de l'énergie. L'énergie, au Québec, c'est une force, c'est un secteur où on trouve de la compétence. Dans un article publié par Michel Lefèvre dans Le Devoir à l'occasion de la Journée de la francophonie, on retrouvait cette déclaration d'un vice-président d'Hydro-Québec International qui disait: 80 % ou 85 % du chiffre d'affaires d'Hydro-Québec International est réalisé dans l'espace francophone. Donc, des experts québécois font des choses réelles, pratiques, à l'intérieur de cet espace et au sein de cette alliance.

Ici, au Québec, vu du point de vue égoïste, si vous voulez, du ministre délégué à la Francophonie, quand on regarde l'évolution des budgets qui sont consacrés à cette mission-là, c'est fort intéressant. Je suis certain que le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques ne posera pas la question, parce qu'il connaît la réponse, mais effectivement, si on regarde le budget qu'on consacrait à la Direction de la francophonie, par exemple, en 1984-1985 - donc, ça, c'est nettement avant nous, 1984-1985, ça se termine au 31 mars 1985 - le budget était à peu près de 1 000 000 $. Pardon?

M. Boulerice: II n'y avait pas de sommet à cette époque-là.

M. Rivard: Bien non, vous n'en avez pas fait de sommet, vous, de votre temps. Vous n'avez pas été capables de réaliser cette conjonction, cette convergence chez les décideurs qui aurait pu faire que les sommets auraient pu exister. Je comprends que vous puissiez être...

M. Boulerice: Me permettez-vous juste une petite question?

M. Rivard: Mais, M. le Président...

M. Boulerice: Avez-vous l'honnêteté de reconnaître que M. Trudeau bloquait tout, toute tentative de sommet francophone?

Le Président (M. Dauphin): Si vous me permettez, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques...

M. Rivard: Je constate le résultat, M. le député de Sainte-Marie...

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulerice: Trudeau est parti, ça va mieux.

M. Rivard: Évidemment, l'intervention du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, je n'ose pas croire, mais quand même, était sur le point de me faire oublier que j'allais vous donner un deuxième chiffre. En 1984-1985, donc sous un précédent gouvernement, 1 000 000 $ et, en 1991-1992, pour l'exercice qui s'en vient, puisqu'on est à la défense des crédits, 5 000 000 $. C'est un rapport de 1 à 5. Que voilà une nouvelle intéressante pour nous et que voilà aussi une façon pour le gouvernement du Québec de démontrer la volonté politique qui a été énoncée par le premier ministre du Québec en novembre ou octobre 1989, par la bouche du lieutenant-gouverneur du Québec, lorsque le gouvernement a dit: Le gouvernement va travailler à la consolidation de l'espace francophone international! (16 h 45)

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. Je vais maintenant, si vous me permettez, reconnaître un député ministériel, M. le député de Hull.

M. LeSage: Merci, M. le Président. Contrairement au député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, moi, je pense que, si on veut continuer à maintenir des liens avec les sociétés francophones de cette planète, ces liens-là, on ne les fait pas par fax, on ne les fait pas par téléphone, il faut les faire en se déplaçant, il faut se rencontrer. Mais je ne veux pas discuter des voyages effectués par le ministère. À mon avis,

et je pense que c'est l'opinion également de tous les membres de cette commission, des déplacements, c'est utile et c'est nécessaire.

Par contre, le ministre a devancé ma question. Je voulais, justement, savoir quelle était révolution du budget du ministère depuis les dernières années. Je me rends compte que ça a quintuplé depuis cinq ou six ans. Je me rends compte également de l'importance qui est accordée par mon gouvernement à son ministère et je m'en réjouis. Alors, la question ayant été devancée, je ne peux que féliciter le ministre. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Dauphin): Merci. Alors, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: Oui, tout en notant que c'est particulièrement blessant envers notre principale partenaire, la France, de ne pas reconnaître que tous les efforts de la France en vue d'un regroupement francophone ont été délibérément et même vicieusement bloqués par l'ancien premier ministre fédéral libéral du Canada, Pierre Elliott Trudeau. Le ministre ne consentant pas à le dire, mes propos et l'absence de réponse seront inévitablement transmis à Paris.

Coopération Québec-Roumanie

J'interrogerai le ministre pour ce qui est de sa mission en Roumanie. En mai 1990, à Bucarest, il a fait un séjour qui s'est limité à des discussions avec certains ministres du gouvernement roumain afin d'évaluer les possibilités de coopération entre le Québec et la Roumanie, qui est notre soeur latine dans un monde slave. Du 16 au 19 octobre 1990, il a piloté une mission commerciale en Roumanie qui a permis la signature de six ententes ou contrats entre des entreprises québécoises et des entreprises roumaines. Parmi les entreprises québécoises, notons Hydro-Québec, Cascades et Pratt & Whitney, l'avionnerie de la Rive-Sud de Montréal. Au terme de ses deux voyages en Roumanie, et c'est la question que je pose au ministre, entend-il formuler des recommandations au Conseil des ministres quant aux moyens et structures nécessaires à l'institutionnalisation des liens entre les gouvernements québécois et roumain, au-delà des ententes conclues entre les entreprises des deux États, tout en notant que cette signature d'ententes est l'exception qui confirme la règle, effectivement, au chapitre des retombées des nombreuses odyssées outre-mer du ministre?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rivard: Je vous dirai qu'en termes de responsabilités ministérielles les deux missions en Roumanie sont différentes en ce sens que la première était vraiment une mission faite dans le cadre de la francophonie et suite à des discussions qui avaient eu lieu avec mon homologue, M. Decaux, en France. C'était une mission exploratoire II faut dire qu'il s'agissait d'une véritable redécouverte, n'est-ce-pas? on le sait tous, de ce pays latin dans un monde slave, comme vous l'avez rappelé, M. le député. Il s'agissait de la première mission d'un ministre québécois, et même d'un ministre de l'ensemble canadien, dans ce pays, alors que la majorité des pays s'y précipitaient. D'ailleurs, comme résultat de cette mission, vu de l'angle de la francophonie, parce qu'à ce moment-là c'était un gouvernement privisoire qui était en place, ça a été, je pense pouvoir le dire très simplement, la présence de la Roumanie à la Conférence des ministres francophones de la Culture à Liège et, comme résultat aussi, la demande formulée récemment par la Roumanie pour faire partie du Sommet.

Quant à la deuxième mission, comme il s'agissait d'une mission strictement bilatérale et que mes responsabilités sont davantage du domaine multilatéral, c'est une mission commerciale que j'ai réalisée à la demande de mon collègue, le ministre des Affaires internationales Quant au suivi du dossier, il faudrait, à ce moment-là, que la question que vous m'avez posée soit posée à mon collègue, le ministre des Affaires internationales. Je vous rappellerai, cependant, et pour l'éclairage des membres de cette commission, que les gestes que nous posons à l'égard des pays d'Europe centrale et d'Europe de l'Est, les gestes les plus récents, s'inscrivent dans toute une série de gestes qui ne sont pas déclenchés par l'aspect francophone de certains de ces pays-là ou l'existence, dans ces pays-là, de populations, de gens qui parlent français, mais, tout simplement, ces gestes s'inscrivent dans une longue série de gestes qui visent à développer des relations bilatérales entre les pays de cette partie du monde et le Québec.

Le Président (M. Dauphin): M. le député

M. Boulerice: Bon. Alors, votre collègue de l'Industrie et du Commerce fera des recommanda tions au Conseil des ministres. Quant à vous, quelles sont les recommandations que vous avez faites à votre collègue de façon à ce qu'il fasse des représentations et des recommandations au Conseil des ministres?

M. Rivard: Je pense qu'il n'est pas de mise, dans une discussion telle que celle-ci, de faire état publiquement des échanges privilégiés qui se déroulent entre deux ministres à l'occasion d'un dossier particulier.

M. Boulerice: Mais l'intention de votre gouvernement est quoi? Est-ce que vous, au moins, vous avez l'intention de développer des mécanismes qui vont faire que la coopération entre le Québec et la Roumanie va se pour-

suivre? Je pourrais vous poser une foule de questions, mais est-ce que vous avez discuté avec les autorités roumaines de la possibilité d'une adhésion de la Roumanie au Sommet de la francophonie? Avez-vous moussé la candidature de la Roumanie auprès de la francophonie et de ses agences?

M. Rivard: Cette présence de la Roumanie au sein de l'alliance francophone est éminemment souhaitable.

M. Boulerice: Quand vous dites "souhaitable", ne croyez-vous pas que l'entrée de la Roumanie dans la francophonie constitue, pour nous, une entrée dans l'Europe de l'Est?

M. Rivard: Oui. Je n'ai pas de problème avec ça.

M. Boulerice: Et avez-vous prévu un budget spécifique en 1991 pour intensifier la coopération entre le Québec et la Roumanie?

M. Rivard: II faut que vous compreniez, et je reviens sur la question, que, dans cet espace francophone, dans cet ensemble d'une quarantaine de pays - et bientôt on sera 47, on sera 50, parce qu'il y a d'autres pays qui sont intéressés à en faire partie; on parlait tout à l'heure d'un pays d'Asie, le Vietnam, par exemple, qui est intéressé à en faire partie - il y a toutes sortes d'activités qui se déroulent entre les pays; il y a des activités strictement bilatérales et il y a des activités qui sont multilatérales. Sans nier le fait que je regarde avec beaucoup d'intérêt ce qui se déroule sur le plan bilatéral entre le Québec et les pays qui sont membres de la francophonie, il n'en demeure pas moins qu'en ce qui concerne l'ensemble des pays d'Europe de l'Est et d'Europe centrale, c'est le ministre des Affaires internationales qui est responsable de ce dossier, et les recommandations que j'ai à lui faire ou les remarques, les commentaires que je peux lui faire, que je dois lui faire suite à des missions dans un pays comme la Roumanie, ont été faits.

Quant à la présence de la Roumanie au sein de l'alliance qui est le Sommet, ou de l'ACCT ou d'autres organismes internationaux francophones, il va sans dire que c'est avec plaisir que nous allons travailler avec la Roumanie, et le fait de travailler avec ce pays va contribuer à l'établissement de liens bilatéraux intéressants et d'échanges entre la Roumanie et le Québec.

M. Boulerice: Comme c'est vous le seul ministre du gouvernement québécois qui êtes allé en Roumanie, que vous y êtes allé à deux reprises, avez-vous fait valoir à votre ministre responsable, le ministre des Affaires internationales, l'importance de relations bilatérales entre le Québec et la Roumanie?

M. Rivard: Je ne reviens pas. Je n'ai pas d'autre réponse à donner que celle que j'ai donnée. Je trouve important que le Québec entretienne des relations qui sont fructueuses avec tous les pays de cette planète et les moyens pour le faire sont multiples. Il y a des moyens qui sont bilatéraux comme il y a des moyens qui sont multilatéraux. C'est l'ensemble de l'utilisation de ces moyens-là qui fait qu'à un moment donné on a des résultats qui sont positifs, on a un dossier d'échanges qui est rentable.

M. Boulerice: Réponse pour le moins timide, à mon point de vue.

Secrétariat du Forum francophone des affaires

M. le Président, nous irons au Forum francophone des affaires. Bon, il y a eu le compromis de Dakar; donc, le secrétariat a été installé à Montréal, mais cela, dans l'état actuel des choses, n'est que temporaire et en principe le prochain Sommet devra, lui, décider de son siège permanent. Est-ce que le ministre peut nous indiquer si ce dossier important est toujours à l'ordre du jour du prochain Sommet?

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

M. Rivard: À l'occasion du Sommet de Paris, puisqu'il faut l'appeler par son nom, de novembre prochain, le président du Forum francophone des affaires m'informe que le forum-événement - puisque quand on parle du Forum francophone des affaires c'est à la fois un événement qui a lieu à chacun des sommets, depuis le Sommet de Québec, et aussi un réseau - donc, l'événement-réunion de gens d'affaires de l'espace francophone aura lieu à Paris au début du mois de novembre. Deuxièmement... Oui?

M. Boulerice: Je ne vous ai pas parlé de la réunion, mais du secrétariat.

M. Rivard: Deuxièmement, c'est le Forum francophone des affaires et non pas le Sommet qui va décider du lieu, du site définitif du secrétariat général du Forum francophone des affaires. Vous savez que ce Forum - vous l'avez rappelé, je pense, tout à l'heure, et j'ose le faire encore - a commencé comme une initiative québéco-africaine et il s'est internationalisé par la suite, si bien qu'il y a maintenant un président international du Forum francophone des affaires. Je dois vous dire franchement que je ne sais même pas si la décision quant au site définitif du secrétariat est à l'ordre du jour du prochain Forum.

Ce que je sais, cependant, c'est que le forum-réseau, donc le Forum francophone des affaires dans sa partie réseau, est en train de

mettre en place des comités nationaux un peu partout, dans un bon nombre de pays. Il y en a déjà au-delà d'une vingtaine qui font partie de ce réseau-là et je sais aussi que les chances qu'a Montréal de retenir, de conserver ce secrétariat général seront d'autant meilleures que le réseau aura été en mesure de bénéficier d'un certain nombre de services. Je mise beaucoup, personnellement, sur la mise en place d'une banque de données par le Forum francophone des affaires à partir du secrétariat général de Montréal, banque de données sur les différents pays membres du réseau du Forum francophone des affaires, afin qu'il puisse y avoir des échanges réels entre les différents maillons de ce réseau-là. Autrement dit, je pense que les chances de conserver le secrétariat sont bonnes. C'est évident que nous allons faire tout notre possible pour que ce secrétariat demeure à Montréal. (17 heures)

Le Président (M. Dauphin): M. le député

M. Boulerice: Est-ce que vous reconnaissez que, pour l'essentiel, c'est nous, actuellement, qui assumons la majeure partie du financement...

M. Rivard: Non. Ça, c'est... M. Boulerice:.. du secrétariat?

M. Rivard:... inexact, c'est-à-dire que le Forum francophone des affaires est une initiative du secteur privé et ce que nous fournissons actuellement, c'est un fonctionnaire...

M. Boulerice: Son nom?

M. Rivard:... M. Vallières, qui est détaché pour agir comme directeur général, et il y a une subvention de 10 000 $.

Une voix: Du Québec et 100 000 $ de l'ACDI.

M. Rivard: On me rappelle que le Forum reçoit une subvention de 100 000 $ de l'ACDI.

M. Boulerice: Le budget global de fonctionnement, c'est quoi?

M. Rivard: 120 000 $.

M. Boulerice: 120 000 $ et 100 000 $ de l'ACDI?

M. Rivard: Oui

M. Boulerice: Nous, nous donnons une subvention..

M. Rivard: 10 000 $

M. Boulerice:... de 10 000 $

M. Rivard:... et les services de M. Vallières comme directeur général.

M. Boulerice: Et le directeur général représente quel montant?

M. Rivard: 65000 $.

M. Boulerice: Je trouve qu'on fait bien notre part.

M. Rivard: Oui, oui.

M. Boulerice: On mérite de le conserver.

M. Rivard: Mais on ne sera pas seul. Soit dit en passant, le Québec ne sera pas seul à souhaiter que le secrétariat reste ici.

M. Boulerice: Mais Napoléon disait qu'il fallait avoir la politique de sa géographie. Nous sommes trois fois plus grand qu'un des pays intéressés et je crois que c'est 27 fois plus grand que le deuxième, si ça peut vous inspirer dans vos démarches J'irai maintenant, M. le Président...

M. Rivard: Je savais que le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques était poète. Je ne savais pas qu'il était aussi mathématicien.

M. Boulerice: Ah oui. Alors, vous allez, à la fin de cette commission, être obligé de reprendre l'offre que vous avez faite en début.

Ponction de 5% des fonds par l'ACCT

Subvention du ministère des Affaires internationales à l'Institut de l'énergie des pays ayant en commun l'usage du français. L'Institut de l'énergie, situé, d'ailleurs, sur la rue Saint-Pierre, a reçu cette année une subvention de 610 000 $ du ministère des Affaires internationales en aide au fonctionnement. Toutefois, le chèque doit transiter obligatoirement par l'ACCT à Paris qui prélève 5 % du montant de la subvention. Le chèque revient à Québec, via Paris, amputé d'une somme de 30 000 S. Vous allez convenir avec moi que c'est une oblitération qui coûte un peu cher. C'est un timbre passablement dispendieux. Je suis en train même de me demander si ce n'est pas la version financière du XXIe siècle du féodal droit de cuissage. Est-ce que le ministre est au courant de cette situation un peu ridicule?

M. Rivard: On me dit que c'est une façon de fonctionner qui est tout à fait normale pour l'ACCT et on m'informe aussi, on me rappelle que la contribution en fonds propres de l'ACCT est égale à la contribution du Québec

M. Boulerice: Vous trouvez ça normal?

M. Rivard: Si vous me permettez, M. le Président...

Le Président (M. Dauphin): Oui, M le ministre.

M. Rivard: ...j'aimerais passer la parole à M. le directeur de la Francophonie, qui pourrait vous expliquer peut-être la mécanique, si cela vous intéresse. M. René Leduc.

M. Boulerice: Ça m'intéresse toujours, M. le ministre.

Le Président (M. Dauphin): Je m'excuse, juste vous identifier, s'il vous plaît, pour le Journal des débats, pour l'enregistrement.

M. Leduc (René): René Leduc, donc, le directeur de la Francophonie au ministère des Affaires internationales.

Le Président (M. Dauphin): Merci.

M. Leduc: Le budget total de l'Institut de l'énergie est d'environ 1 400 000 $ par année. De ces 1 400 000 $, 560 000 $ à peu près passent en frais de fonctionnement directs. Le reste, ce sont des programmes qui sont soutenus par l'Institut. Les 560 000 $ sont financés moitié-moitié par la subvention du ministère des Affaires internationales et l'ACCT elle-même par son budget régulier. Le reste de l'argent vient de subventions des gouvernements belge, français et canadien pour les programmes, et du reste de la subvention québécoise. Donc, bien sûr, comme notre argent pour l'Institut transite par le fonds multilatéral géré par l'ACCT et qu'il y a une règle approuvée par le Comité international de suivi des sommets qui dit que l'Agence ponctionne 5 % de tous les fonds qui lui sont confiés annuellement par l'ensemble des bailleurs de fonds, qu'ils viennent de la France, du Canada, du Québec, enfin peu importe l'origine de l'argent, afin de lui permettre de payer ses téléphones, télex, etc., qui sont nécessaires à la gestion de ces fonds-là, et comme elle contribue par son budget régulier, dans le fond, les 5 % nous reviennent directement dans le budget de l'Institut et même plus, finalement.

M. Boulerice: Si je comprends bien, à la fois nous...

M. Rivard: II faut bien comprendre que l'Institut est une agence de l'Agence. C'est un organe subsidiaire de l'Agence de coopération culturelle et technique. L'Institut est situé à Québec, mais ce n'est pas un institut québécois.

M. Boulerice: Est-ce qu'il y a d'autres organismes qui paient cette TPS de la francophonie?

M. Leduc: Je ne peux que répéter, M. le Président, si vous le permettez, que tous les fonds qui transitent par l'ACCT via le fonds multilatéral créé à la suite du Sommet de Québec sont ponctionnés de cette somme de 5 %. Les fonds qui transitent par ce biais-là, par ce canal, c'est à peu près 125 000 000 FF par année. Donc, l'Agence ponctionne 5 % de ces 125 000 000 FF. L'argent ainsi ponctionné s'ajoute à son budget régulier pour assumer les dépenses de fonctionnement supplémentaires qu'a occasionnées, évidemment, le doublement et plus de ses activités.

Le Président (M. Dauphin): Merci. M. le député.

M. Boulerice: Dans le cas des frais supplémentaires qui sont encourus par l'Agence, est-ce que vous croyez que ces 5 % sont légitimes? Je trouve que c'est effectivement une TPS drôlement importante. Et m'avez-vous bien dit que tous les fonds de toutes les autres créatures - quoique j'hésite à employer ce mot-là si j'ai parlé de droit de cuissage tantôt - de l'ACCT ont une ponction de 5 % via le transit?

M. Leduc: Je répète, M. le Président, avec votre autorisation, que...

Le Président (M. Dauphin): Allez-y.

M. Leduc: ...c'est 5 % sur tous les fonds qui sont versés à un compte, qui s'appelle le fonds multilatéral unique et qui est géré par l'ACCT, par n'importe lequel des bailleurs de fonds, et que ça représente une somme de 125 000 000 FF à peu près. Dans cet argent-là, il y a tous les projets approuvés par les sommets et qui font l'objet de suivi par l'ACCT.

M. Boulerice: Écoutez, là, vous me parlez de projets. Il y a un prélèvement de 5 % pour les projets. Est-ce que l'Institut est la seule organisation qui a cette TPS, puisque nous avons convenu de l'appeler comme cela?

M. Leduc: L'Institut est la seule institution formelle créée par les sommets. Les autres... Radio rurale, par exemple, constitue un programme, mais n'a pas donné naissance à une institution subsidiaire ou non de l'ACCT. Le financement de TV5 se fait en dehors de ce fonds multilatéral là, donc n'est pas assujetti à la ponction de 5 %. Alexandrie est financée en partie seulement par le fonds multilatéral unique, a bénéficié d'un budget à part. Donc, il n'y a pas, à ma connaissance, d'autres institutions, au sens où vous l'entendez, dans les suivis des sommets.

M. Rivard: Mais je peux peut-être m'enga-ger, M. le Président, à faire vérifier cette

information et à vous la donner, à savoir: est-ce que c'est un cas particulier ou est-ce que c'est une façon normale de procéder?

M. Boulerice: D'accord.

Le Président (M. Dauphin): Très bien M le député.

Francophonie multilatérale

M. Boulerice: Oui. Bon, le ministre avait sous son autorité l'an dernier 14 fonctionnaires de la Direction générale des institutions francophones et multilatérales par rapport à 9 attachés politiques - je le répète - 6 employés de soutien et 5 contractuels pour son cabinet, et ceci, pour l'exercice financier 1990-1991. Ma première question: Quelle est la masse salariale totale de son cabinet pour 1991 -1992?

M. Rivard: Alors, ça, c'est 1990-1991. M. Boulerice: 1991 -1992. M. Rivard: 1990-1991, 486 257 $. M. Boulerice: Et 1991-1992?

M. Rivard: II y a une augmentation de 4,9 % qui a été accordée à toutes les masses salariales, qui a été appliquée à toutes les masses salariales des cabinets.

M. Boulerice: Quel est le budget de fonctionnement en 1991-1992 pour la Direction générale des institutions francophones et multilatérales?

M. Rivard: Pour la Direction générale des institutions francophones et multilatérales, vous avez un budget, en 1991-1992, de 9 836 000 $, mais ça, c'est une direction générale dans laquelle on retrouve non seulement la Direction de la francophonie, mais aussi les Événements internationaux et les Organisations internationales qui n'ont rien à voir strictement ou spécifiquement avec la francophonie.

M. Boulerice: Juste la Francophonie, c'est combien, la Direction de la francophonie?

M. Rivard: 4 950 000 $.

M. Boulerice: Est-ce que ça inclut les dépenses de transfert?

M. Rivard: Monsieur, ça, c'est seulement le transfert.

Le Président (M. Dauphin): Oui, M. le ministre, allez-y. (17 h 15)

M. Rivard: C'est seulement les dépenses de transfert, le chiffre que je vous ai donné tout à l'heure, 4 995 000 $; ça ne comprend pas les salaires du personnel de la Direction de la francophonie.

M. Boulerice: Les autres éléments que le transfert, c'est combien pour la Direction?

M. Rivard: Pendant que l'on cherche le chiffre exact, il faut toujours se rappeler un peu cette remarque que j'ai faite au début, à l'effet qu'il n'est pas nécessairement facile de reconstituer sous un vocable aussi précis que celui de la francophonie tout l'argent qui est dépensé par le ministère des Affaires internationales pour l'ensemble des gestes posés dans l'espace et dans l'alliance francophones, parce qu'il y a beaucoup de directions, évidemment, qui sont impliquées dans cet espace-là. Donc, quand on vous donnera le chiffre exact, s'il est disponible, pour la Direction de la francophonie, il faut entendre que c'est une partie seulement de la réalité de l'ensemble des opérations dans l'espace francophone. On va vous fournir le chiffre exact, on l'acheminera.

M. Boulerice: Vous ne l'avez pas de disponible.

Le Président (M. Dauphin): M le député.

M. Boulerice: AJors, le budget de transfert consacré aux affaires multilatérales de la Francophonie, ils n'ont pas le chiffre. Ils vont nous l'envoyer.

Dans le cahier des crédits 1991-1992, au chapitre des dépenses de transfert du ministère des Affaires internationales, on constate une augmentation de 210 000 $ du budget consacré à la Francophonie multilatérale, soit une augmentation de 4,6 %, ce qui est conforme à l'indexation au coût de la vie. C'est 4 498 300 $, donc 4 708 400 $. Est-ce que les 4 700 000 $ inscrits aux crédits pour la Francophonie multilatérale sont l'enveloppe globale prévue pour cette année?

M. Rivard: Est-ce que je pourrais savoir où vous êtes dans le cahier? Dans quel cahier êtes-vous?

M. Boulerice: Dans le cahier des crédits, page 4-3, Affaires internationales, Sommaire des crédits de transfert, Francophonie multilatérale. C'est la cinquième ligne, chiffre à gauche, forcément.

M. Rivard: M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, reposez précisément votre question pour qu'on la comprenne bien.

M. Boulerice: Alors, dans le cahier "Budget

1991-1992, Crédits", qu'on nous a déposé d'ailleurs en Chambre, vous avez: Affaires internationales, Sommaire des crédits de transfert. On voit, sous la rubrique Organismes sans but lucratif, Francophonie multilatérale. Ça vient après Coopération à frais partagés avec la France - pour que vous puissiez le situer - et avant Subventions dans le cadre des affaires bilatérales et multilatérales. Donc, on lit qu'en 1991-1992 le budget prévu est de 4 708 400 $. Alors, la question que je vous pose: Est-ce que ces 4 708 400 $ inscrits aux crédits pour la Francophonie multilatérale sont l'enveloppe globale de transfert prévue pour cette année?

M. Rivard: M. le Président, est-ce qu'on pourrait, pendant qu'on fait cette recherche-là, passer à une autre question?

M. Boulerice: Bien, c'est bien difficile de poser d'autres questions si on n'a pas une réponse à la première. Je pourrais peut-être vous demander quel est le budget - en espérant que vous ayez les chiffres - réellement dépensé en 1990-1991 pour la Francophonie multilatérale. L'an dernier - c'est les crédits, pas les dépenses - on vous avait donné des crédits de 4 498 300 $. Quelles ont été les dépenses réelles en 1990-1991?

M. Rivard: Les livres ne sont pas fermés pour l'année 1990-1991, mais ce qui est prévisible, c'est que ce sera à peu près cette somme-là qui aura été dépensée. Autrement dit...

M. Boulerice: Quand vous dites à peu près... M. Rivard: ...il n'y a pas de périmés.

M. Boulerice: ...a-t-il été entièrement dépensé ou partiellement dépensé?

M. Rivard: On me dit: Moins 40 000 $ peut-être.

M. Boulerice: Moins 40 000 $. D'accord. Vous avez trouvé la réponse à la première question?

M. Rivard: On la cherche encore.

M. Boulerice: Est-ce que c'est possible d'avoir la liste détaillée des engagements ou subventions du gouvernement dans le cadre de ce budget?

Une voix: Budget de 1990-1991. M. Boulerice: 1990-1991, il va de soi.

M. Rivard: On va la fournir, effectivement. On se comprend bien là, pour 1990-1991?

Une voix: Oui, oui.

M. Rivard: Parce que, pour 1991-1992, ce n'est pas passé encore.

M. Boulerice: Pouvez-vous, quand même, nous ventiler les principaux postes de dépenses pour 1990-1991? L'ACCT, à titre d'exemple.

M. Rivard: Pour 1990-1991, l'ACCT, on vous fournira ça. D'accord?

M. Boulerice: Oui, mais ne vous gênez pas pour me donner quelques éléments immédiatement, là, hein?

M. Rivard: 690 000 $.

M. Boulerice: 690 000 $. Ça va.

M. Rivard: Fonds multilatéral commun, par exemple, pour le suivi des sommets, c'est 2 000 000 $.

M. Boulerice: Journée de la francophonie? M. Rivard: Pardon?

M. Boulerice: Ah! Ce n'est pas un transfert, c'est vrai. O.K. Alors, on va attendre les chiffres.

M. Rivard: Si vous voulez avoir d'autres dépenses, d'autres montants qui sont assez substantiels, par exemple, pour l'AUPELF et l'UREF, vous avez 390 000 $; pour TV5, 685 000 $ qui constituent la participation, la quote-part du ministère des Affaires internationales, qui ne comprend pas celle du ministère des Communications.

Journée de la francophonie

M. Boulerice: Un dernier dossier que j'aimerais aborder avec vous, M. le ministre. Je me suis réjoui avec vous que l'on célèbre ici, au Québec, et notamment en notre Parlement, ce qui n'a pas été le cas pour ce pays voisin et néanmoins ami en son Parlement - le Parlement fédéral n'a pas célébré la Journée de la francophonie, quoique ce gouvernement se réclame de la francophonie - cette Journée de la francophonie. Malheureusement, mais n'y voyez pas de reproche de ma part comme tel, ça n'a pas eu auprès de la population l'impact que nous aurions probablement mutuellement souhaité. Est-ce que vous pourriez m'indiquer quelles sont les mesures que vous avez déjà envisagées qui feront en sorte que cette Journée de la francophonie sera certes quelque chose de célébré dans notre enceinte, mais que ce soit vraiment tangible au niveau de la population? Quand je dis "tangible au niveau de la population", je parle de tous les

milieux de vie: la francophonie au travail, la francophonie en éducation, la francophonie en culture. Je pourrais peut-être même aller jusqu'à vous suggérer un exemple. Puisque vous avez fait allusion, le qualifiant d'ami, et je vous remercie, à une initiative du ministre de la Culture et de la Communication de France, M. Jack Lang, où il y a une journée de cinéma gratuit en France à chaque année - quand on regarde les dernières statistiques, j'étais, d'ailleurs, à Pierrefonds où il n'y a qu'un seul cinéma francophone et il vient de fermer - la Journée de la francophonie, ça pourrait être l'accès gratuit aux films francophones dans les cinémas au Québec. Je vous donne une petite suggestion comme ça là.

M. Rivard: Oui. Je pense que...

M. Boulerice: Et je me permettrais même: Téléservice à Radio-Québec, la radiotélédiffusion nationale du Québec, honteusement menacée, d'ailleurs, par les actions ou inactions de votre collègue aux Communications, mais Téléservice à Radio-Québec qui, en cette journée - remarquez que j'ai beaucoup de sympathie pour eux - parlait des Irlandais; ils auraient pu parier des francophones et parler de nos amis irlandais le lendemain. Ils auraient pu le souligner, il me semble que notre radiotélédiffusion nationale aurait pu le faire.

M. Rivard: Eu égard à ce sujet-là, je vous dirais, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, que je vais accepter avec plaisir vos suggestions et même votre collaboration pour faire en sorte que l'année prochaine ce soit une célébration qui soit plus à la mesure de l'événement et qui devrait rejoindre, à mon avis, beaucoup plus de Québécois que ça ne l'a fait cette année. Je ne reçois pas du tout votre intervention comme un reproche. Il fallait bien commencer. J'avais le choix entre commencer, même si c'était modeste, ou encore essayer d'obtenir toutes les bénédictions possibles et imaginables de toutes les autorités possibles et imaginables, ce qui aurait été une entreprise audacieuse et pas nécessairement couronnée de succès.

Nous avons, quand même, je pense que c'est la place pour le raconter, approché une soixantaine d'organismes et nous avons reçu de ces organismes un appui enthousiaste et surtout, à toutes fins pratiques, une promesse de collaboration pour l'an prochain, et ces organismes viennent de toutes sortes de milieux. Je vous apprendrai, peut-être ne le savez-vous pas, que, par exemple, dans le seul réseau universitaire il y avait, quand même, le 20 mars dernier, même en visant modestement cette célébration, des activités à l'Université de Sherbrooke, à l'Université de Montréal, à l'École polytechnique et à l'Université Laval. Dans mon comté, j'ai choisi le collège Jean-Eudes qui, avec le Club 2/3 et mon collègue l'ambassadeur du Sénégal à Ottawa, M. Pierre Diouf, a mis en place une journée pédago-giquement très riche sur la francophonie. Nous avons maintenant à l'intérieur de ce collège secondaire un prototype, nous avons une sorte de projet-pilote et nous pourrons vendre cette idée et ce modèle à des commissions scolaires - vendre au sens financier, évidemment - ou même au réseau de l'éducation.

Vous parliez de Radio-Québec. Radio-Québec, c'était à la fois peu et beaucoup Tout au long de cette journée, Radio-Québec, lors de son indicatif réseau, a mentionné: 20 mars, Journée de la francophonie.

Ce que j'entends faire très, très, très bientôt, c'est mettre sur pied un groupe de travail restreint fait de gens en provenance de tous les milieux qui sont intéressés, y compris les milieux universitaire, culturel. TV5 est intéressée aussi à participer à cette Journée de la francophonie l'an prochain et probablement à préparer un document visuel d'assez longue durée et qui pourrait être projeté à ce moment-là.

Je peux vous dire aussi que j'ai déjà pris contact avec certains acteurs de la francophonie pour peut-être, l'an prochain, faire coïncider la Journée de la francophonie avec la Semaine du français qui commence aujourd'hui, d'ailleurs, au Québec.

M. Boulerice: Sans vouloir vous court-circuiter, j'ai déjà pris contact un peu avant vous... D'ailleurs, j'en ai parlé lorsque je suis intervenu. FR3 a une émission prestigieuse qui est faite par mon ami Dominique Gallet, qui s'appelle Espace francophone, qui était rediffusée et qui avait, d'ailleurs, un contenu extraordinaire, je me permets de vous le rappeler, qui était Québec libre, 20 ans après avec, forcément, la conclusion que l'avenir était radieux. Puisque je vois notre collègue de Berthier, là, qui fait une revue de presse: Une majorité se définit pour la première fois comme des Québécois. N'est-ce pas une heureuse nouvelle en cette enceinte, M. le ministre, que d'entendre une telle chose? Donc, il y avait cette émission qui servait à sensibiliser la population française sur la Journée de la francophonie. Alors, est-ce qu'il serait possible d'envisager avec votre collègue, le ministre des Communications, une émission tout à fait spéciale sur notre réseau d'État? Je pense que le ministre délégué à la Francophonie doit normalement avoir suffisamment de poids au Conseil des ministres pour persuader son collègue, le ministre de l'Éducation, que la journée, dans toutes nos écoles primaires et secondaires, commence le matin par appelons cela un salut à la francophonie, c'est-à-dire un court exposé sur ce qu'est la francophonie, donc notre appartenance à...

M. Rivard: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Ce que vous racontez, d'ailleurs, c'est le

modèle qui a été développé en France par Alain Decaux et son collègue de l'Éducation nationale. La France célébrait cette année, pour la quatrième fois, la Journée de la francophonie. C'est, quand même, une institution, cette Journée de la francophonie, qui vient d'apparaître, à toutes fins pratiques. Je suis très heureux qu'au Québec, le 20 mars dernier, on ait fait une première, même si c'était modeste. Ce n'est pas seulement le gouvernement, évidemment, qui est impliqué dans ça. Il y a plein d'acteurs de la francophonie et dans le secteur privé aussi qui sont intéressés à célébrer avec un certain éclat l'an prochain. Je suis tout à fait d'accord.

M. Boulerice: C'est peut-être rêver, mais il faut toujours rêver dans la vie et, comme vous m'avez dit que j'étais poète, c'est le propre des poètes de rêver et de faire rêver. On a une journée de la fierté d'être un peuple francophone regardant notre identité propre, qui est celle du 24 juin; donc, le 20 avril, je l'espère, un jour, prendra autant d'importance...

M. Rivard: Le 20 mars.

M. Boulerice: Le 20 mars, je m'excuse, oui. Moi, je le célèbre 365 jours par année et, à tous les quatre ans, j'y ajoute une journée. Mais, ceci dit, je vous le répète, c'était une première. Mes commentaires n'étaient pas une critique. On était tous heureux de le saluer comme tel.

M. Rivard: Et j'ajouterais, M. le Président, que j'étais heureux, personnellement, en réunissant une soixantaine d'artisans québécois de la francophonie, de dire avec fierté à l'Assemblée nationale, aux parlementaires, ce que nous, les Québécois, nous apportions à cette francophonie et ce que nous avions réalisé au cours des décennies.

M. Boulerice: Ah, je suis bien d'accord avec vous. J'ai été témoin, d'ailleurs, d'un dîner fort agréable où j'ai pu avoir une conversation intéressante avec votre directeur de cabinet. Vous aviez eu même, dans votre discours, un pronostic, mon Dieu, tellement optimiste et à la fois réaliste quant à un rôle futur que je pourrais peut-être jouer au niveau de la francophonie; donc, je ne me plaindrai pas de vos heureuses initiatives, M. le ministre, en vous disant en guise de conclusion, puisque je crois que nous allons terminer l'adoption des crédits de ce ministère, que, pour ce qui est de la célébration du 20 mars, vous pourrez compter sur notre collaboration active non pas uniquement de participation, mais bien d'alimentation, si vous le souhaitez.

M. Rivard: J'accueille avec plaisir cette offre de service.

M. Boulerice: Je vous remercie. Maintenant, je vous laisse l'occasion de retirer celle que vous avez faite en début de commission, pour ce qui est d'enseigner, et je vous prierais, M. le Président, de bien vouloir considérer les crédits du ministère de la Francophonie comme adoptés.

Le Président (M. Dauphin): Alors, au nom de tous les membres de la commission, M. le ministre, ainsi que vos...

M. Boulerice: L'élément 4, disons, plutôt, du ministère des...

Le Président (M. Dauphin):... collaborateurs et collaboratrices, merci d'avoir participé à cette étude de crédits.

Je déclare donc l'étude de l'élément 4 du programme 1 du ministère des Affaires internationales terminée, tout en vous signalant que le programme 1 sera adopté dans son entier demain, lors de l'étude des crédits du ministère des Affaires internationales.

J'ajourne donc les travaux à demain matin, 9 h 30, ici dans cette même salle. Merci et bon retour.

(Fin de la séance à 17 h 34)

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