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Version finale

38th Legislature, 1st Session
(May 8, 2007 au November 5, 2008)

Tuesday, September 16, 2008 - Vol. 40 N° 46

Consultations particulières sur le projet de loi n° 92 - Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-deux minutes)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté qu'il y a quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 92, Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Domingue (Bellechasse) est remplacé par M. Roy (Montmagny-L'Islet); Mme Leblanc (Deux-Montagnes) est remplacée par M. Deschamps (Saint-Maurice); et M. Deslières (Beauharnois) est remplacé par M. Trottier (Roberval).

Auditions (suite)

Le Président (M. Bergman): Merci. Alors, ce matin, on reçoit trois groupes. On commence avec la Fédération des pourvoiries du Québec inc.

Je vous souhaite la bienvenue. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission pour 45 minutes. Alors, je vous demande de vous identifier et de commencer avec votre présentation de 15 minutes.

Fédération des pourvoiries du Québec (FPQ)

M. Dugré (Dominic): Alors, bonjour. Tout d'abord, je voudrais saluer et remercier les membres de cette commission, Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, M. le président de la commission, de nous avoir invités à présenter la position de la Fédération des pourvoiries du Québec dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 92.

Pour nous présenter: à ma gauche, j'ai Richard Handfield, qui est propriétaire de la pourvoirie Saint-Zénon, dans la région de Lanaudière, qui est président de l'Association des pourvoiries de cette région et qui est donc de facto membre du conseil d'administration de la Fédération des pourvoiries du Québec; à ma droite, Bruno Dumont, qui est technicien de la faune à l'emploi de la Fédération des pourvoiries; et moi-même, Dominic Dugré, qui est conseiller juridique à la FPQ.

Tout d'abord, je voudrais expliquer brièvement ce qu'est la Fédération des pourvoiries du Québec. Donc, nous sommes une organisation, une association d'entrepreneurs privés qui oeuvrent dans le domaine de la chasse et de la pêche. La fédération regroupe environ 375 membres. C'est une industrie au Québec qui génère des retombées économiques directes et indirectes d'environ 210 millions de dollars, qui procure de l'emploi directement à 3 000 personnes. Les pourvoiries sont localisées dans toutes les régions du Québec, de la Gaspésie à l'Outaouais, au Grand Nord. Elles sont vraiment présentes partout. Ce sont des entreprises donc qui sont spécialisées dans la chasse et la pêche et qui offrent aussi l'hébergement caractéristique ici de la pourvoirie par rapport à d'autres acteurs du milieu faunique.

La Fédération des pourvoiries du Québec existe depuis 1948; elle célèbre donc cette année ses 60 ans d'existence. Nous procurons des services divers à nos membres, que ce soit dans le domaine de la commercialisation, de l'aménagement faunique. On a des services très sollicités aussi en matière de foresterie et d'énergie renouvelable.

Dans le cadre du présent projet de loi, nous allons faire quelques commentaires, deux principaux commentaires généraux. Par la suite, je laisserai la parole à M. Handfield pour faire des commentaires particuliers.

Au niveau des commentaires généraux, d'emblée de jeu, la Fédération des pourvoiries reconnaît l'importance de préserver l'environnement et l'eau. Ça se comprend, nos activités se déroulent en majorité sur les terres publiques, dans le milieu naturel. Nous sommes en fait le plus grand réseau d'hébergement en milieu naturel au Québec. Donc, la préservation d'un environnement de qualité et d'une eau de qualité dans les lacs, c'est une préoccupation de tous les jours pour les pourvoyeurs. C'est ce que les gens, c'est ce que la clientèle, les 425 000 personnes qui séjournent, par année, en pourvoirie viennent chercher aussi: la quiétude, la beauté et l'intégralité de l'environnement. Nous sommes donc, de ce fait, d'accord avec la déclaration prévue à l'article 1, selon laquelle l'eau constitue une ressource qui fait partie du patrimoine commun des Québécois.

Le deuxième commentaire général concerne un sous-alinéa de l'article 12 dans lequel on prévoit que la ministre peut procéder au recensement et à la description des bassins et sous-bassins hydrographiques. Nous croyons qu'il s'agit là d'une nécessité. Les différents écosystèmes, les différents lacs sont tous interreliés. Il est évident qu'un impact dans un cours d'eau ou dans un plan d'eau à l'extérieur du territoire d'une pourvoirie peut avoir des impacts à l'intérieur de celle-ci, et vice versa. Donc, de commencer par détailler les bassins et sous-bassins hydrographiques, c'est à notre avis une nécessité pour assurer une saine gestion des eaux de diverses provenances au Québec.

Pour la suite, je laisserai la parole à M. Handfield, qui vous fera part de nos commentaires particuliers dans le cadre du présent projet de loi.

Le Président (M. Bergman): Merci. M. Handfield.

M. Handfield (Richard): Merci. Commentaires particuliers. Les ensemencements en pourvoirie. Dans le cadre du présent projet de loi, la FPQ s'inquiète particulièrement de la gestion des redevances éventuelles qui pourraient être exigées aux pisciculteurs. En effet, une hausse du prix de production de ces poissons se reflétera inévitablement sur les prix de vente aux pourvoiries. Par ailleurs, comme les pisciculteurs l'ont déjà mentionné au cours de la présente commission parlementaire, le projet de loi n° 92 est perçu comme une menace importante qui risque de nuire à la viabilité de leur secteur déjà fragilisé par de fortes contraintes environnementales en ce qui concerne les réductions de rejets de phosphore.

Or, en vue de satisfaire la forte demande pour les activités de pêche, une part de l'industrie de la pourvoirie requiert un accès stable à du poisson d'ensemencement, en quantité et en qualité. Les pourvoyeurs achètent environ 50 % de tout le poisson produit et destiné au marché de l'ensemencement au Québec, soit environ 450 tonnes pour une valeur de 5 millions de dollars. La valeur ajoutée par les activités de pêche offertes par les pourvoyeurs à leurs clients est estimée à plus de 10 fois la valeur du poisson vendu par les pisciculteurs. Ainsi, les 5 millions de dollars de poissons achetés aux pisciculteurs par les pourvoyeurs génèrent 50 millions de dollars en retombées économiques pour les régions du Québec.

En pourvoirie, les ensemencements sont en très grande majorité réalisés non pas pour soutenir une pêche existante, mais pour donner de la pêche où il n'y en a pas sans ensemencement. Pour réaliser ces ensemencements, les pisciculteurs et les pourvoyeurs doivent respecter de nombreuses règles précises édictées par le zonage piscicole et les plans de gestion de pourvoirie.

De plus, via la Table filière de l'aquaculture en eau douce du Québec, les pisciculteurs et les pourvoyeurs travaillent actuellement et conjointement sur des projets visant à mieux planifier et optimiser les ensemencements et à établir un code de bonne pratique touchant la production piscicole, le transport du poisson et les ensemencements.

n (9 h 40) n

Par ailleurs, par l'embauche d'un biologiste de 2001 à 2003, la FPQ s'est également fortement impliquée afin de soutenir et de collaborer avec l'industrie aquacole dans les négociations avec le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs et le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec en ce qui concerne la réduction des rejets de phosphore. Cela a conduit à la signature, en 2004, de la Stratégie de développement durable de l'aquaculture en eau douce au Québec. Cette entente tripartite entre les deux ministères concernés et l'Association des aquaculteurs du Québec a pour but d'assurer la viabilité et le développement de l'industrie piscicole tout en améliorant les performances environnementales. Un programme d'assistance financière du MAPAQ supporte en partie les coûts de mise en oeuvre de la stratégie, laquelle a contribué à stabiliser la production piscicole autour de 1 400 tonnes depuis son entrée en vigueur et à redonner confiance en l'avenir aux pisciculteurs.

Les activités de pourvoirie et de développement durable. La pourvoirie constitue assurément une industrie qui intègre parfaitement le concept de développement durable dans ses opérations. Que ce soit pour la chasse, la pêche ou la villégiature, la pourvoirie requiert que l'environnement soit préservé le plus possible afin de garantir à la clientèle un milieu propice à l'exercice de ses activités. Le principe de précaution est quotidiennement appliqué par les pourvoyeurs. Il s'agit d'une obligation intrinsèque à leurs opérations, eux qui investissent des sommes importantes sur des terres qui ne leur appartiennent même pas. L'objectif de rentabilité les incite en effet à s'assurer que leur environnement immédiat conserve toutes ses qualités année après année.

Par ailleurs, la pourvoirie représente une porte d'accès privilégiée pour des milliers de Québécois qui ne possèdent pas de chalet ou d'équipement leur permettant de séjourner en forêt et de pratiquer la pêche, une activité prisée par plus de 1 million de résidents chaque année. Ces activités de plein air et l'accès au territoire naturel offert par les pourvoiries sont ainsi un impact social positif sur la population québécoise. Par ailleurs, dans une optique de complémentarité des réseaux des territoires fauniques structurés, les pourvoiries qui ensemencent jouent un rôle essentiel, car elles permettent d'absorber une part importante de la pression de pêche exercée par les pêcheurs. Cela contribue à maintenir un équilibre avec l'offre de pêche des réserves fauniques, des zecs et autres pourvoiries, lesquelles exploitent plutôt le potentiel naturel des plans d'eau. Cela permet également de répondre à un objectif de diversité de l'offre des produits de pêche au Québec.

Enfin, l'activité économique qu'engendre le secteur de la pourvoirie est non négligeable pour plusieurs régions du Québec et génère plus de 15 millions de dollars en revenus fiscaux et parafiscaux au gouvernement québécois. Il faut souligner qu'une part importante des pourvoiries qui ensemencent est localisée à proximité des grands centres. Ainsi, les régions de Lanaudière, de la Mauricie, des Laurentides et de Charlevoix regroupent l'essentiel de ces entreprises spécialisées. Elles contribuent fortement à démocratiser et à rendre accessibles la pêche et l'accès à la nature pour de nombreuses personnes, notamment des citadins. De plus, dans le réseau de la pourvoirie, ce sont ces entreprises qui enregistrent les meilleures performances économiques, jusqu'à 13 000 $ de retombées économiques en moyenne par kilomètre carré de territoire public occupé, dans le cas de Lanaudière.

En conclusion, la FPQ est en faveur de plusieurs des principes du projet de loi n° 92. La valeur et la place de l'industrie de la pourvoirie, et plus particulièrement des pourvoiries qui ensemencent, sont démontrées, et cette industrie doit être considérée dans le contexte de la présente commission parlementaire. La forte dépendance de ces entreprises à l'égard des piscicultures est évidente. L'incertitude piscicole risque de se répercuter sur un segment important et performant du secteur de la pourvoirie, entraînant un ralentissement des investissements.

En conséquence, la FPQ souscrit aux demandes formulées par l'Association des aquaculteurs du Québec et demande à la ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs et au gouvernement du Québec de prévoir des modalités d'application de la loi qui ne soient pas préjudiciables à la viabilité, à la vitalité et au développement de l'industrie de l'aquaculture en eau douce du Québec, d'autant plus que cela est clairement possible sans porter atteinte aux grands principes de la loi et de son application dans les règlements qui en découleront. Nous considérons en effet que certains assouplissements économiques raisonnables consentis pourraient certainement se traduire par des investissements judicieux et rentables à long terme pour le gouvernement et pour l'industrie touristique des régions. Merci.

Le Président (M. Bergman): Merci. Alors, Mme la ministre, vous avez maintenant un bloc de 17 minutes.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, à vous trois. Merci beaucoup d'être là. Vous me permettrez, chers invités de cette commission, de tout simplement prendre un instant pour souhaiter la bienvenue au député de Marguerite-D'Youville au sein de cette commission, mais, je pense, au nom de tous les parlementaires, pour lui offrir nos félicitations, puisqu'au mois d'août dernier M. le député, il y en a qui diraient qu'il s'est mis la corde au cou, on va dire plus sagement qu'il a passé la bague au doigt et donc qu'il s'est marié au mois d'août dernier. Et on désire vraiment vous souhaiter toutes nos félicitations, vous offrir nos félicitations, vous dire aussi que le mariage vous va plutôt bien, vous avez l'air en forme. Donc, bienvenue au sein de cette commission.

J'ai pris bonne note, dans votre mémoire, que, du strict fait que votre profession, que votre métier, que votre expertise est intimement liée à la nature, à une connaissance du territoire, à une saine gestion de ce territoire pour permettre de le faire découvrir aux Québécois et aux Québécoises puis à nos visiteurs, du strict fait que votre expertise, votre profession est intimement liée à la nature et au territoire québécois, j'ai compris quand même que dans l'essentiel, dans ses grandes lignes, l'intention du gouvernement puis, je le souhaite, de l'Assemblée nationale, de procéder à un projet de loi qui vise à assurer notamment une meilleure protection des ressources en eau, que bien sûr vous y êtes favorables, à cette intention. Parce que c'est intimement lié à la survie même de vos entreprises qu'on soit capable de se dire qu'il reste des lacs, des rivières en bonne santé au Québec, je pense que c'est dans votre intérêt, et vous l'avez indiqué dans votre mémoire. Vous insistez par ailleurs beaucoup... Donc, j'ai compris qu'il y avait ce grand appui général au projet de loi. Mais vous insistez beaucoup pour finalement, dans votre mémoire, indiquer que vous partagez les inquiétudes, les appréhensions dont sont venus nous faire part les membres de l'Association des aquaculteurs.

J'aimerais peut-être vous entendre, parce que vous parlez donc d'inquiétudes, d'incertitudes. Et une question que j'avais, c'est peut-être que vous preniez quelques instants pour nous décrire votre propre modèle d'affaires à vous, votre propre modèle économique à vous. Parce que, dans votre mémoire aussi, à la page 5, vous terminez la page 5 en disant que le développement durable... vous dites, en parlant de vous: «Il s'agit d'une obligation intrinsèque à leurs opérations ? vous parlez des pourvoyeurs ? eux qui investissent des sommes importantes sur des terres qui ne leur appartiennent même pas.»

Donc, on est dans un modèle économique particulier. Vous-mêmes, vous êtes des passionnés de la nature, mais vous êtes des investisseurs, vous investissez des sommes extrêmement importantes pour des entreprises qui sont sur des territoires, vous précisez, «sur des terres», pour certaines d'entre elles, la majorité d'entre elles, «qui ne leur appartiennent même pas». Je vous avoue que, quand j'ai lu cette phrase puis qu'après ça vous venez aussi nous parler du climat d'incertitude pour les aquaculteurs, je me disais que vous étiez bien placés pour venir nous dire est-ce qu'on a raison ou pas d'avoir ces inquiétudes, puisque ce que viennent dire les aquaculteurs, c'est de dire: Vous créez un certain climat d'incertitude parce que les autorisations qu'on va délivrer en tenant compte d'une priorité dans les usages de l'eau, les autorisations seront sur 10 ans... Il y a une possibilité que ce soit modulé, mais, disons, la règle veut que ce soit sur 10 ans. Puis ils sont venus nous dire: Pour nous, là, on a peur que, d'un point de vue économique, ça crée beaucoup d'incertitude pour notre entreprise. Et on a bien entendu ce message-là, honnêtement.

Mais en même temps je me dis, vous-mêmes, vous êtes des gens d'affaires, en tout cas, sous votre volet de gens d'affaires, vous avez à investir, vous le précisez vous-mêmes, sur, par exemple, des terres qui ne vous appartiennent pas. Donc, je voulais vous entendre parce que, je me dis, si, vous, vous êtes capables d'être en affaires dans un contexte comme ça ? que certains pourraient dire qui est un contexte de grande incertitude, vous avez des baux à signer, ces baux-là sont renouvelables après un certain nombre d'années ? en quoi est-ce que votre situation est à ce point différente de celle qu'auront à vivre les aquaculteurs avec leurs certificats d'autorisation sur 10 ans?

Le Président (M. Bergman): M. Handfield.

n(9 h 50)n

M. Handfield (Richard): Je vais répondre. Premièrement, en pourvoirie, depuis l'année dernière, on a eu un bail qui a été réexaminé puis on a eu des modalités qui s'appliquent maintenant, qui est le renouvellement de neuf... un bail de neuf ans, renouvelable à toutes les années. Ça nous donne toujours neuf années en avant pour prévoir quelque chose. Si, je ne sais pas, la même modalité pourrait s'appliquer aux pisciculteurs, ça pourrait peut-être être une avenue à regarder, là. Mais, pour nous autres, ça nous a sécurisés. Parce que, quand on va voir un financier puis on lui dit qu'on a un bail de huit ans, si on arrive à la fin, admettons à cinq ans de l'échéance, c'est sûr qu'on ne peut pratiquement plus emprunter, ce qui a été réglé avec notre modalité qui a été donnée par le ministère des Ressources naturelles dans la dernière année, qui a été fait.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je suis désolée, puis je pense que c'est pour ça que je voulais vous poser la question, je ne suis pas sûre de bien comprendre. Puis ça va être utile, je pense, pour nous, après, quand on va discuter des appréhensions que sont venus nous confier les aquaculteurs, qu'on s'inspire de ce que, vous, vous avez vécu. Ce que, moi, j'ai compris, c'est que vous signez des baux. Ce que vous me dites, c'est que ces baux-là sont signés pour une période de neuf ans.

M. Handfield (Richard): Actuellement, oui; anciennement, ce qui n'était pas le cas, puis ce qui m'a empêché moi-même d'investir sur mon territoire parce que je n'avais pas la possibilité d'emprunter sur un restant de bail comme ça. Je veux dire, à mon année 1 que je fais sur huit années anciennement, il me restait sept ans, six ans, jusqu'à l'extinction, puis après on renouvelait le bail, alors que maintenant c'est sur un horizon de neuf ans, renouvelable à toutes les années. Ça me laisse toujours neuf ans en avant pour pouvoir planifier...

M. Dugré (Dominic): C'est ce qui a été appelé comme un bail finalement dynamique.

Mme Beauchamp: D'accord. D'accord.

M. Dugré (Dominic): Donc, à chaque année, le bail est renouvelé pour une période de neuf ans.

Mme Beauchamp: O.K.

M. Dugré (Dominic): Ce qui facilite effectivement grandement les investissements, parce que, lorsqu'il restait deux ans au bail, d'aller emprunter 150 000 $ pour la construction d'une auberge, c'était extrêmement difficile. Ça demeure difficile parce qu'effectivement on n'investit pas sur des terres qui nous appartiennent. Donc, c'était une contrainte parmi de nombreuses autres, qui vient d'être allégée un peu au niveau des baux. Est-ce que c'est un modèle qui pourrait être appliqué au niveau des certificats d'autorisation pour les pisciculteurs? Ce serait à examiner, là.

Ce qu'on vous dit... on ne vous dit pas que c'est la solution, là. Nous, c'est quelque chose qui nous a aidés dans notre secteur. On est effectivement un secteur, je dirais, qui a été insécure pour l'investissement. On investit sur des territoires qui ne sont pas à nous. On est sujets aux aléas de la température, un peu comme l'industrie touristique au complet. Là où les gens coupent en cas de crise économique, c'est souvent dans ce secteur-là. Donc, c'est un milieu qui est difficile. Puis, vous l'avez bien mentionné, ça prend des gens qui ont la foi, qui ont la passion pour aller hypothéquer leur maison familiale pour aller investir sur des terres publiques puis penser que les gens vont aller séjourner chez eux.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Bien, merci beaucoup. Là, je comprends mieux le processus qui est instauré depuis un an. Et, bien que les modèles ne soient jamais tout à fait comparables et applicables, on ne peut pas toujours simplement importer un modèle vers une autre situation, je pense que ça peut quand même sûrement nous inspirer pour tenter de voir s'il y a des solutions à apporter à la question des inquiétudes et des incertitudes dans le domaine de l'aquaculture. Je disais que les modèles... Ma réaction: je trouve ça intéressant, on va peut-être pouvoir creuser, lors de nos échanges, si ça nous inspire. Mais par ailleurs, dans le domaine de l'eau, il y a la production par ailleurs d'études, hein, hydrographiques pour démontrer que la coexistence, la présence de différents usages de l'eau ne compromet pas le renouvellement de la ressource. Et là penser qu'on refait ces études-là à chaque année, j'y vois déjà aussi une problématique.

Mais enfin, tout ça pour dire que vos commentaires nous apportent quand même, je suis certaine, une bonne source de réflexion, puisque dans le fond ce que vous venez de nous dire, c'est qu'il y a un an passé vous-mêmes, dans votre secteur, vous viviez cette problématique d'une certaine incertitude qu'entraînait le fait que vous étiez signataires de baux, pas propriétaires des terres, vous deviez y investir. Et vous me dites que dans le fond il y a eu une forme de solution trouvée qui, au moment où on se parle, en tout cas, semble faciliter les choses en tout cas en termes d'investissement.

Vous concluez votre mémoire donc justement en nous disant que... Vous faites allusion, là... Votre dernière phrase, c'est: «Nous considérons [...] que certains assouplissements économiques raisonnables consentis pourraient [...] se traduire par des investissements judicieux.» Je me demandais, derrière cette phrase, «des assouplissements économiques raisonnables», si vous aviez des propositions plus précises à nous faire.

Le Président (M. Bergman): M. Dugré.

M. Dugré (Dominic): Je pense que ce qu'on fait référence quand on s'exprime de cette manière-là, c'est au niveau notamment de la question des redevances. On comprend que des redevances éventuelles pourraient être exigées des pisciculteurs comme à d'autres utilisateurs de l'eau, que ce n'est pas nécessairement un principe qui est nouveau avec le projet de loi n° 92 et que ce sera finalement probablement détaillé dans une réglementation à venir.

Ce à quoi on veut vous sensibiliser aujourd'hui, on vous a donné quelques chiffres, les pourvoiries achètent 50 % du poisson produit pour de l'ensemencement au Québec, donc ça représente des retombées d'environ 50 millions de dollars. Les pourvoiries qui ensemencent sont situées à proximité des centres urbains, donc principalement Lanaudière, Laurentides, Charlevoix et la Mauricie. Je ne sais pas si tout le monde pêche ici ou a déjà pêché, mais c'est un exutoire pour plusieurs. Et, pour les citadins, bien, de pouvoir se rendre à une heure de route et d'être seuls sur le lac pour pouvoir pêcher, c'est un besoin pour plusieurs de ces personnes-là, ça remplit donc un besoin social des Québécois, et on ne voudrait pas que ce soit mis... «mis en danger», c'est peut-être un terme un peu fort, là.

Mais c'est évident que des redevances éventuelles qui pourraient être imposées aux pisciculteurs, ça va se répercuter sur le prix d'achat des poissons. Et les pourvoiries sont dans une situation concurrentielle avec d'autres acteurs du réseau faunique; qu'on pense aux zecs ou à la SEPAQ, Mme la ministre, que vous connaissez bien. Donc, d'augmenter le prix d'achat des poissons, ça nous pose certains problèmes au niveau de la concurrence. On a un concurrent gouvernemental, on n'a pas les mêmes moyens que lui. Donc, c'est une préoccupation aussi qui nous touche. Donc, l'impact d'une hausse des coûts de production pour les pisciculteurs, ça a un impact sur nous, sur la situation concurrentielle et sur la situation générale des quelque 100 pourvoiries qui procèdent à de l'ensemencement, chaque année, dans les lacs du Québec.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

M. Dugré (Dominic): ...préoccupation pour les assouplissements, c'est un peu comme un avertissement des impacts que peut avoir une redevance éventuelle.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je comprends bien. Puis merci de vos commentaires. Moi, je croyais que cette phrase-là était liée plutôt à toute la question des certificats d'autorisation renouvelables après 10 ans, mais je m'aperçois que votre commentaire... Et, si cette phrase-là devait être lue dans le contexte où on sait qu'au cours de l'année 2009 on devra faire ce débat sur la redevance, je comprends bien votre commentaire.

Dans vos commentaires généraux, vous abordez la question de la gestion par bassin versant. Vous nous invitez à bien définir... Vous dites: «...nous croyons que le recensement et la description des bassins et sous-bassins hydrographiques constituent une étape essentielle pour assurer une saine gestion des eaux naturelles.»

La semaine dernière, avec bon nombre des personnes qui se sont présentées devant nous, des représentations qui nous ont été faites, nous avons eu beaucoup d'échanges sur la question, je dirais, de l'organisation de ce qu'on appelle la gouvernance de l'eau. Et j'aimerais ça peut-être... Vous êtes, je pense, des acteurs privilégiés sur le terrain pour nous dire comment vous voyez cette question de la gouvernance de l'eau. Comment voyez-vous le rôle, par exemple, des organismes de bassin versant sur les territoires? Et comment vous voyez cette question de l'organisation, là, d'une gestion par bassin versant sur le territoire québécois?

Le Président (M. Bergman): M. Dugré. Me Dugré.

n(10 heures)n

M. Dugré (Dominic): Bien, écoutez, oui, on juge que c'est important. On l'a dit tantôt, les activités de pourvoirie se déroulent donc dans le milieu naturel, et tout impact dans une région, toute activité humaine, et même parfois des perturbations naturelles, peut avoir un impact donc sur nos plans d'eau sur nos territoires où on pratique la chasse et la pêche. Les sous-bassins et les bassins hydrographiques sont vraiment le sang de notre nature, au Québec. Donc, c'est des veines qui coulent un peu partout sur le territoire, et on en est dépendants.

Les organismes de gestion des bassins versants, pour ce qu'on en sait, parce que, bon, vous l'avez mentionné, ce sont des commentaires généraux, donc on n'a pas élaboré nécessairement beaucoup là-dessus, mais ce sont des organismes qui effectuent un travail essentiel. Jusqu'à présent, à ma connaissance, il n'y a pas eu de pourvoyeurs qui ont été impliqués... ou en tout cas pas énormément de pourvoyeurs qui ont été impliqués, là, si on fait exception de certaines grandes rivières, comme les rivières de la Côte-Nord, la rivière Moisie ou la rivière Bonaventure plus récemment, où on a des pourvoyeurs qui sont présents ou en tout cas qui se font entendre sur ces conseils-là.

Je ne sais pas si on va toujours parler de conseils de bassin versant lorsqu'on traitera des sous-bassins hydrographiques parce que, là, ça va être une multiplication d'organismes, là, qui n'est peut-être pas nécessairement non plus la solution. Mais il est indéniable que les pourvoyeurs devront être appelés à s'intéresser à la gestion par bassin et par sous-bassin. Là-dessus, on offre toute notre disponibilité ? c'est tout ce qu'on peut dire pour le moment, là ? à travailler dans le sens de ces organismes-là, là.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci. Peut-être à titre d'information, au moment où on se parle, suite à la Politique nationale de l'eau, déposée en 2002, il y a eu 33 organismes de bassin versant reconnus sur le territoire québécois puis financés comme tels depuis 2003. Et il y a donc aussi certaines explications. Ce n'est pas l'ensemble du territoire québécois habité, là, du Québec méridional, qui était couvert par des organismes de bassin versant.

Suite au rendez-vous sur le problème des algues bleues, en septembre dernier, et surtout avec les sommes injectées, des sommes supplémentaires injectées dans le dernier budget, il y aura dorénavant un redécoupage, je dirais, du territoire québécois ? c'est en discussion en ce moment ? pour faire en sorte que l'ensemble du Québec méridional soit couvert, je dirais, par des organismes de bassin versant, à partir d'une entente, d'une reconnaissance justement d'un redécoupage puis d'une redéfinition des bassins versants hydrographiques. Puis on prend bonne note du fait que vous êtes des acteurs dans le domaine de l'eau et que votre présence serait sûrement souhaitable autour aussi de la table comme étant une des industries... si on peut employer ce vocable-là, mais une des industries qui pourraient, dans certaines régions, être représentées autour de la table. J'ai peut-être une dernière question pour vous, parce que vous...

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, il reste peu de temps, juste pour votre commentaire, et on donne le micro.

Mme Beauchamp: Ah! Bon, bien, ça va. J'avais une... Je vais plutôt...

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville, et à moi pour aussi vous souhaiter félicitations et bonne chance.

M. Diamond: Bonne chance?

Une voix: Oui, bonne chance!

M. Diamond: Bon. Merci. Merci, M. le Président. Ce sera une intervention excessivement courte, simplement pour saluer les membres de la commission, nos invités. Je vais vous demander de céder la parole au député de Montmagny-L'Islet, qui a fait carrière dans le milieu. Quant à moi, je n'ai jamais pêché de ma vie, je m'en excuse. Mais je tiens à vous dire que mon collègue, ici, fait des pressions à tous les jours pour que je le suive à la pêche. D'ailleurs, on a pris rendez-vous ensemble pour aller à la pêche des couleurs. Il va falloir qu'il m'explique c'est quoi d'abord, là. Mais j'espère qu'on va se voir sous peu. Merci.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, bonjour. Ça me fait toujours plaisir de vous revoir nous présenter un mémoire comme celui-là où on parle directement d'impacts dans votre domaine.

Et une première question que je vais vous poser, c'est: Selon vous, là, si un pourvoyeur n'offrait pas de pêche relativement facile, avec des poissons de belle taille, est-ce qu'on aurait autant de pourvoiries au Québec, à travers le territoire?

Le Président (M. Bergman): M. Handfield.

M. Handfield (Richard): Bien, dans ma région, entre autres, Lanaudière ? je vais prendre un exemple chez moi ? si on enlève les ensemencements, je n'ai pas une semaine d'opération à obtenir avec ma pourvoirie parce que c'est le coeur de la pourvoirie. On est à 1 h 30 min de Montréal, on a des pressions de pêche assez respectables, là, sur nos plans d'eau, ça fait que...

On a eu une crise du vert de malachite voilà deux ans et puis on commence à réensemencer des truites avec un diamètre assez... un poids assez respectable maintenant, mais ça a pris tout de même pratiquement deux ans et demi avant qu'on puisse revenir où est-ce qu'on était à cette date-là dans certaines espèces.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Est-ce que, dans vos... Vous faites énormément de salons au Québec; j'en fais tout autant, je me promène dans les allées, je suis derrière les gens. Et la première question qui est posée à mon avis, la première question et non pas... les villégiateurs, on parle de: Je vais-tu faire mon quota? Puis la truite, elle est-u grosse? Donc, c'est un peu une question... en ce qui me concerne, une grande déception de voir que les pêcheurs québécois sont encore friands de poisson et pensent que la grosseur du poisson, là, c'est... ça va toujours être gros et ça ne pourra jamais rapetisser.

Donc, vous autres, en tant que pourvoyeurs qui êtes directement reliés à l'ensemencement... Parce que, dans Lanaudière, il n'y en a pas beaucoup qui peuvent se vanter d'avoir des lacs encore sans ensemencement. Vous en avez peut-être quelques-uns dans chacune de vos pourvoiries, mais, sur l'ensemble du territoire, on pourrait évaluer ça à combien de lacs... pas combien, je ne parle pas de nombre, mais, sur un ensemble de pourvoiries, un, deux lacs par pourvoyeur qui pourraient avoir encore du poisson naturel?

Le Président (M. Bergman): M. Handfield.

M. Handfield (Richard): C'est une opinion, mais, étant président de mon association, je vous dirais, pratiquement aucun lac qui ne sont pas ensemencés sont exploitables en pourvoirie. Dans le couloir de la 131, si on dit Saint-Zénon, Saint-Michel-des-Saints, plus au nord ? c'est parce que c'est une grande région tout de même, Lanaudière ? dans le nord plus, vous pouvez avoir des plans d'eau qui sont indigènes, là, mais, au sud de Lanaudière, je vous dis, pratiquement aucune pourvoirie ne peut exploiter sans ensemencement.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Toujours dans le même ordre d'idées, quand on parle de poissons, je sais très bien, dans votre pourvoirie et dans plusieurs pourvoiries de Lanaudière, vous avez une qualité de poisson assez remarquable, donc vous êtes obligés de demander aux pisciculteurs de vous donner du poisson de qualité, et là, du poisson de qualité, ça ne se fait pas sur une courte période. Donc, vous exigez du pisciculteur de garder du poisson pour vous autres, parce que vous établissez avec lui une certaine limite, je crois que c'est comme ça que vous devez procéder. Et, à ce moment-là, vous avez eu la problématique du vert malachite, il y a deux ans, et, ça aussi, ça cause énormément de problèmes aux pisciculteurs. J'aimerais ça que vous nous en parliez un peu, de votre façon d'acheter du poisson et de faire l'ensemencement, et la contrainte que les pisciculteurs ont à cet effet-là.

Le Président (M. Bergman): M. Handfield.

M. Handfield (Richard): Bien, dans le cas des pourvoiries de Lanaudière, il faut pratiquement commander notre poisson entre un et trois ans. Dépendamment des grosseurs, dans certains cas, ça va à trois ans, quand on prend la truite arc-en-ciel; si on prend l'omble de fontaine, c'est pratiquement un an d'avance. Ça veut dire que le producteur a à supporter sa production pendant un an avant de nous la livrer. Mais, comme c'est du matériel vivant aussi, on comprend que, quand on transporte ça ou on ensemence ça, c'est assez problématique. On ne connaît pas tout sur l'ensemencement ni le transport de ces poissons-là. On est, à l'heure actuelle, en faisant des études avec nos collègues pisciculteurs, à savoir les meilleures méthodes à faire.

Mais c'est certain que ces gens-là, ils ont assez de contraintes environnementales, à l'heure actuelle, que, moi, je me dis, si on en met de plus en plus, bien c'est certain qu'il y en a certains qui vont se décourager. Puis, si on baisse la production en bas de 1 400 tonnes par année, la rareté va se faire, puis il y a des entreprises qui vont écoper dans les pourvoiries parce que, prenez notre cas, là, dans Lanaudière, au sud, on ne peut pas opérer sans poisson d'ensemencement, c'est vraiment le nerf de la guerre, si on peut dire, là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Donc, ça veut dire que, chez vous, comme dans les Laurentides, comme dans la région de Charlevoix, qui est proche de Québec, sans ensemencement, la pêche n'existe pas et on perd énormément de retombées économiques pour toutes ces régions-là.

Le Président (M. Bergman): M. Handfield.

M. Handfield (Richard): Bien, définitivement, parce que, si on prend toutes les pourvoiries, au sud, qui sont en périphérie des centres urbains, c'est pratiquement impossible à opérer sans ensemencement. Les Québécois sont habitués à une faune abondante et puis de qualité. Si on n'ensemence pas, bien on ne pourra pas poursuivre nos activités à long terme.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Dans certaines régions, on a vu des pourvoyeurs faire des frayères, aménager des frayères naturelles donc pour essayer de redonner à certains plans d'eau la vocation qu'ils avaient dans le temps. Donc, peut-être que je peux demander au biologiste de chez vous d'expliquer un peu.

Est-ce que, premièrement, vous avez un soutien gouvernemental pour l'aménagement de ces frayères-là, qui coûtent énormément cher? Et est-ce que vous avez la possibilité environnementale de le faire? Et est-ce qu'il y a une possibilité biologique aussi de le faire? Au niveau biologie, est-ce qu'on est capable de réaménager des frayères et redonner à ces lacs-là qui étaient ensemencés... redevenir des lacs naturels même avec la pression de pêche qu'on exige aujourd'hui?

Le Président (M. Bergman): M. Handfield.

M. Handfield (Richard): Ça va être M. Dumont qui va répondre.

Le Président (M. Bergman): M. Dumont.

M. Dumont (Bruno): C'est sûr, c'est certain qu'on a la possibilité, avec la Fondation de la faune du Québec, d'avoir une aide financière pour l'aménagement d'habitats de reproduction, notamment pour l'omble de fontaine, mais encore faut-il que les habitats ou les milieux naturels soient propices à ça. Le problème qu'on a dans beaucoup de territoires, c'est que les habitats ne sont pas propices tout simplement à procéder à des travaux d'aménagement de frayères, alors, dans ces conditions-là, on n'a simplement pas le choix de travailler avec une approche de gestion avec des ensemencements de poissons.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

n(10 h 10)n

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci. On l'a vu dans l'étude des crédits, que même les réserves fauniques maintenant procédaient à de l'ensemencement parce que la pression de pêche, même là, était présente. Donc, M. Dugré, peut-être, vous pourrez me répondre à ça: Est-ce que vous êtes au courant que même la SEPAQ fait de l'ensemencement?

M. Dugré (Dominic): Oui, absolument, puis ça...

Le Président (M. Bergman): Me Dugré.

M. Dugré (Dominic): Pardon, M. le Président. Oui, effectivement, puis ça se déroule dans des réserves, je crois, qui sont dans la même situation que les pourvoiries dont on parle depuis le début, donc qui sont les moins loin des centres urbains.

Je reviens un peu à la question précédente aussi, au niveau des ensemencements puis des lacs où il y a encore de la truite indigène. Si on parle des réserves fauniques, bien, écoutez, ils ont des territoires qui sont drôlement plus grands que les territoires de pourvoirie. M. Handfield, lui, possède une pourvoirie avec un territoire de 13 km². Alors, si on compare ça à des réserves fauniques qui ont des milliers de kilomètres carrés, ça devient beaucoup plus facile de faire une gestion par lac, de dire: Bon, bien, sur un lac où il y a une plus forte pression de pêche, oui, je vais faire de l'ensemencement, que ce soit en soutien ou que ce soit, là, l'activité principale, puis, pour permettre aux pêcheurs de pêcher de la truite indigène, donc d'origine, bien je peux faire une rotation de lacs et dire: Bon, bien, après qu'il y ait tant de poissons de pris dans ce lac-là, je le ferme puis je dirige les clients vers un autre lac. C'est une chose qui est plutôt difficile à faire avec des petits territoires de 13 km², où on n'a pas le nombre de lacs et la superficie des plans d'eau suffisante pour pouvoir agir de la même manière.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Simplement pour en faire état aussi, quand on traverse la réserve faunique des Laurentides, à la hauteur de L'Étape, la SEPAQ possède sa propre pisciculture aussi. Donc, à ce moment-là, comment le gouvernement va interpréter la pisciculture d'État, qui est une pisciculture pour la réserve faunique des Laurentides, et celle qui offre du poisson d'élevage aux gens des pourvoiries? Donc, ce serait intéressant de le voir, à ce moment-là. Parce qu'on produit du poisson pour nos propres besoins. On a beau dire qu'on fait des alevins, mais on le fait dans un milieu piscicole... je dis «subventionné», oui, c'est l'État, c'est la SEPAQ, c'est dans les sites d'établissement de la SEPAQ dans la réserve faunique des Laurentides.

On parle beaucoup poisson, les gens, on parle villégiature, puis on dit toujours que, l'économie dans son ensemble, là, autour de tous les sports confondus, on a des retombées. On l'a vu, l'ancien ministre nous avait parlé de 3 milliards de retombées économiques. On a vu dernièrement des statistiques arriver avec des chiffres vraiment effarants concernant la villégiature et l'engouement des Québécois pour la pêche, mais pour la villégiature comme telle.

J'aimerais juste savoir: Vous autres, chez vous, si vous n'aviez pas de poisson, vos lacs... vos chalets, ils seraient loués à comment, en proportion, en pourcentage, s'il y avait rien que de la villégiature, pas de poisson? On ferait quoi avec Lanaudière? On ferait quoi avec Charlevoix? Donc, vous pourrez me répondre pour Lanaudière, on pourrait me répondre pour Charlevoix, on pourrait me répondre pour les Laurentides. Ce serait quoi, la proportion de villégiateurs qui vont se louer un chalet pour regarder un lac sans pêche?

Le Président (M. Bergman): M. Handfield.

M. Handfield (Richard): Ce serait peut-être difficile parce que la pêche, c'est un produit fort au Québec. Quand tu n'as pas de produit, vendre de l'hébergement, c'est beaucoup plus difficile. Ayant un chalet, un lac, c'est assez facile à vendre comme destination, mais enlevez-nous la pêche, on revient au même titre aussi fragiles que plusieurs hébergements, plusieurs établissements d'hébergement au Québec. On se démarque avec le produit de la pêche, mais, si on ne l'a pas, ça va être beaucoup plus difficile. Je n'ai pas fait d'étude qu'est-ce que je pourrais faire, mais on s'entend qu'on aurait à ramer fort...

Des voix: ...

Le Président (M. Bergman): M. le député de...

M. Handfield (Richard): Pour rester dans le milieu.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Monsieur... J'avais demandé...

Le Président (M. Bergman): Me Dugré.

M. Dugré (Dominic): Oui, bien juste pour rajouter quelques mots là-dessus. La demande pour la villégiature, elle est à la hausse, c'est vrai, mais rien qui pourrait remplacer à court ou à moyen terme la cohorte de gens qui viennent pour combiner la villégiature à la pêche. Je vous rappelle que le secteur de la pourvoirie possède collectivement environ 5 000 unités d'hébergement, et la très grande partie, sinon la quasi-totalité de ces unités-là sont occupées par des gens qui viennent, à un moment donné ou à l'autre, pratiquer la chasse ou la pêche, et la pêche demeure au coeur des activités de la pourvoirie. Si on fait exception des pourvoiries, là, du Nord-du-Québec, si on parle des pourvoiries au sud, la pêche est au coeur des activités. Donc, remplacer... penser qu'on pourrait remplacer ne serait-ce qu'en partie la clientèle qui vient pour la pêche par de la clientèle exclusivement de villégiature, même si nos membres sont ouverts à ça et améliorent année après année leurs infrastructures d'hébergement, c'est utopique de penser qu'on pourrait la remplacer, là, à court ou à moyen terme.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Dernière question. On a parlé justement d'aménagement. Tantôt, on a parlé de réaménagement ou de mettre beaucoup plus d'argent à l'intérieur de vos pourvoiries. Est-ce que vous avez noté, M. Handfield, un accroissement de la gent féminine au niveau de la pêche? On parle toujours que vous autres, les pourvoyeurs, vous avez compris le message et vous avez fait, de l'hébergement maintenant et de vos accessibilités, une place pour que les femmes puissent devenir la seule relève qu'on peut avoir au Québec. Est-ce que vous le voyez comme ça?

Le Président (M. Bergman): M. Handfield.

M. Handfield (Richard): Bien, on a déjà des femmes qui sont propriétaires de pourvoiries dans notre région, La Barrière entre autres, mais je vous dirais que c'est une clientèle très intéressante qui augmente année après année. On a des groupes de femmes maintenant qui s'organisent entre elles pour venir à la pêche. On ne perdra pas notre place en tant que pêcheurs, mais je vous dis que, oui, c'est en hausse. Et puis définitivement les accès puis les investissements dans les chalets afin d'être mieux hébergé sont incontournables dans notre milieu.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Bonjour, M. le Président. Bonjour, messieurs. Moi, j'ai déjà pêché, j'aime pêcher. J'ai déjà même pensé d'avoir une pourvoirie; je sais que ce n'est pas nécessairement facile.

Vous mentionnez, dans votre mémoire, à la page 3, que vous avez des inquiétudes concernant la déviation, là, de... Vous demandez d'interdire de manière générale les transferts hors du bassin du fleuve. Est-ce que vous pourriez m'expliquer quels sont les principaux dangers que vous voyez là-dedans? Qu'est-ce qui vous inquiète le plus, là, dans des possibles dérivations?

Le Président (M. Bergman): M. Dumont.

M. Dumont (Bruno): Bien, en fait, qu'est-ce qui se produit dans le cas du fleuve, c'est qu'on a des pourvoyeurs qui sont en opération dans le couloir du fleuve Saint-Laurent, puis c'est évident que toute intervention sur le fleuve Saint-Laurent peut avoir des impacts sur les habitats et sur l'environnement du fleuve Saint-Laurent, puis ça a nécessairement des impacts sur la productivité des habitats et donc sur la rentabilité des exploitations de pourvoirie qui sont situées dans le couloir du fleuve. C'est simplement ça, la motivation première, je dirais, en arrière de notre préoccupation, là, par rapport au fleuve Saint-Laurent.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Avec d'autres intervenants, on a commencé à discuter d'une possibilité de différencier, on pourrait dire, l'utilisation puis la consommation de l'eau. Bon, on sait que les piscicultures, on pourrait dire, utilisent beaucoup d'eau mais n'en consomment pas tant que ça parce qu'il y en a une bonne partie qui est retournée.

Si c'était le cas, à ce moment-là, est-ce que vous pensez que ça causerait encore des problèmes? Parce que, là, vous dites: Bien, ça pourrait causer des problèmes à notre rentabilité. Mais, si c'était une redevance qui était sur l'utilisation plutôt que la... qui était sur la consommation plutôt que sur l'utilisation, est-ce que vous pensez que ça vous occasionnerait encore des problèmes importants?

Le Président (M. Bergman): M. Handfield.

M. Handfield (Richard): Je pense que je vais passer la parole à mon confrère et ami.

Le Président (M. Bergman): M. Dugré.

M. Dugré (Dominic): Bien, écoutez, comme on l'a dit au début, nos préoccupations particulières à l'égard du projet de loi, c'est: ce qui peut nuire à la productivité ou aux opérations de pisciculture, ça a un impact sur l'eau. Si les pisciculteurs s'entendent pour dire que, oui, effectivement, si on module un peu la question des redevances ou la question des certificats d'autorisation puis qu'on parle... on distingue la consommation par rapport à l'utilisation, si ça leur convient, bien ce qui va leur convenir va nous convenir, là, indirectement. Donc, je ne voudrais pas apporter des solutions pour les personnes qui seraient le mieux placées pour en proposer, donc les pisciculteurs eux-mêmes.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Vous avez mentionné que la pêche était au coeur de vos activités. Ce serait quoi, le pourcentage de vos activités qui est relié à la pêche comme telle?

M. Handfield (Richard): Bien, dans...

Le Président (M. Bergman): M. Handfield.

M. Handfield (Richard): Excusez. C'est à peu près 95 % des activités. Il faut comprendre qu'un territoire qui est pour gestion surtout de la pêche en périphérie de Montréal est plutôt restreint, puis un pourvoyeur qui fait plus de chasse demande un territoire beaucoup plus grand. Ça fait que ceux qui vont être touchés le plus, c'est plus ceux qui ensemencent, qui sont en périphérie des grands centres et puis avec de petits territoires. Ça, c'est assuré. Mais, en ce qui concerne... je ne suis pas... Moi, c'est ma... Bruno, si tu veux compléter.

n(10 h 20)n

Le Président (M. Bergman): M. Dumont.

M. Dumont (Bruno): Oui, moi, je peux apporter un complément de réponse à l'échelle du Québec, là. Il est évident que les activités puis les retombées économiques reliées à la pêche sportive, là, c'est 60 % au moins en pourvoirie, entre 60 % et 70 % des activités qui sont produites en pourvoirie, là.

Dans le cas de M. Handfield, il donne l'exemple de son entreprise qui est très spécialisée au niveau de la pêche, lui, il ne fait pas de chasse, c'est sûr que c'est 95 %, dans son cas. Puis il y en a d'autres comme lui, là. Mais en général, là, on parle d'au-delà de 60 % des activités produites en pourvoirie qui sont attribuables à la pêche.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Compte tenu du fait que, on pourrait dire, la majorité, sinon... En tout cas, il y a un consensus au Québec à l'effet qu'il faudrait que, quand on utilise une ressource, on puisse payer, qu'il y ait une redevance donc sur l'eau. Est-ce que vous auriez des suggestions justement pour concilier ça avec votre pratique? Tu sais, dans le fond, dire: Bien oui, on reconnaît le principe que... Parce que dans le fond, vous, vous faites un peu la même chose: le client utilise une ressource, il paie. À ce moment-là, c'est qu'on devrait avoir une redevance sur l'eau. Comment est-ce que vous pouvez concilier les deux, concilier l'idée que l'idée de la redevance est importante et elle est nécessaire et également la survie de vos entreprises? Comment on pourrait concilier ça?

Le Président (M. Bergman): Me Dugré.

M. Dugré (Dominic): Je pense que vous aviez apporté une bonne piste tantôt en distinguant l'eau consommée et l'eau utilisée. Bon, étant juriste, je ne veux pas rentrer dans le jeu des définitions, mais l'utilisation de l'eau, ça peut prendre plusieurs sens, là. Si un pisciculteur utilise l'eau et la remet, je veux dire, à 95 % identique en termes de quantité et de qualité, bon, est-ce qu'il faut absolument imposer une redevance? Si on impose une redevance sur une telle utilisation, est-ce qu'il va falloir penser à ceux qui pratiquent des activités nautiques, dire: Bon, bien ils utilisent l'eau pour leur pratique d'activités aussi, là? Il va falloir évidemment mettre des balises puis se pencher là-dessus: Qu'est-ce que c'est, l'utilisation?

La consommation, ça ne pose pas de problème, on est capables de concevoir ce que c'est, mais l'utilisation selon... Le Code civil nous commande de remettre, à la sortie de notre fond, l'eau en même qualité et quantité qu'elle avait à l'entrée sur notre fond. Je pense qu'il y a un principe là qui se doit d'être respecté. Alors, dans ce sens-là, je pense que les pisciculteurs sont déjà très encadrés au niveau normes environnementales, au niveau des rejets. Le ministère de l'Environnement s'est déjà penché sur les seuils à respecter là-dessus. Alors, on comprend que l'eau qui est remise dans l'état où le ministère le prescrit, donc on peut considérer que c'était la même qualité que lorsqu'elle devait être entrée sur le fond. Est-ce qu'il faut absolument facturer pour cette utilisation-là qui ne fait finalement que passer? Bien, je pense qu'il faut se pencher sérieusement sur cette question-là. Je n'ai pas nécessairement de solution. Je pense qu'il faut vraiment, là, faire le débat là-dessus.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Au niveau de l'utilisation, c'est sûr que les gens qui vont l'utiliser pour des fins strictement personnelles, je pense, ce serait difficile de facturer, puis ce serait compliqué d'ailleurs. Mais je pense qu'à partir du moment où il y a une utilisation commerciale, je pense que, là, on est capable de démêler un certain nombre de choses. Il reste encore des pistes à explorer, bien entendu.

Comme dernière question, je voudrais savoir: Est-ce que vous pensez que, compte tenu de ce qui se passe en matière d'environnement, on va voir de plus en plus l'importance d'avoir un profil vert, on pourrait dire, dans les entreprises comme la vôtre? Est-ce que vous pensez que c'est une tendance lourde ou si c'est quelque chose de passager? Ou est-ce que vous pensez que vraiment on peut penser que cette préoccupation pour l'environnement, c'est quelque chose qui va devenir de plus en plus important pour votre type d'entreprise?

Le Président (M. Bergman): Me Dugré.

M. Dugré (Dominic): Bien, je pense que là-dessus c'est un incontournable. On l'a mentionné dans notre mémoire, c'est au coeur de nos opérations mêmes. On a renforcé la mission de la fédération, il y a quelques années, pour vraiment mentionner que l'industrie se doit d'être développée dans une perspective de développement durable, puis ce n'est pas un concept qui est galvaudé dans notre industrie. On croit fermement, on est convaincus qu'on atteint les trois sphères du développement durable, que ce soit l'économie, l'environnement et le côté plus social.

Donc, l'environnement, on fait des efforts. On travaille sur des plans d'information pour les pourvoyeurs, notamment au niveau des énergies alternatives. On a amené des solutions. On a eu des discussions avec les ministères concernés, notamment au niveau des eaux usées, de la distribution de l'eau potable, de la disposition des déchets en pourvoirie. Donc, c'est vraiment, là... Sans cette qualité-là, sans cette préoccupation environnementale là dans notre secteur, il est évident qu'il y aurait probablement une désertion de la part de plusieurs clients parce que c'est ce qu'ils viennent chercher, un environnement intact. Ils viennent chercher une proximité avec la nature qui ne pourra pas être là si l'environnement n'est pas préservé adéquatement par les principaux exploitants.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Je vais me permettre une vraie dernière: Dans ce sens-là, si vous aviez des suggestions à faire au gouvernement qui pourraient vous aider à faire des pourvoiries, on pourrait dire, plus durables, qu'est-ce que vous feriez comme suggestion d'outils qui pourraient vous aider ou de moyens qui pourraient vous aider, là? Est-ce que vous avez quelque chose, dans vos cartons, qui pourrait dire: Bien, écoutez, si on avait tel élément, ça nous aiderait à développer cette industrie-là d'une façon plus durable?

Le Président (M. Bergman): Me Dugré.

M. Dugré (Dominic): Bien, écoutez, je peux vous donner une réponse facile. Si on avait un soutien financier de la part des ministères concernés pour le développement ou l'utilisation d'énergies alternatives, ne serait-ce que sur ce point-là, je pense que ce serait déjà un grand pas en avant. On est aux prises avec des multiples paramètres au niveau de l'environnement. J'ai mentionné, ne serait-ce que pour un, les eaux usées. L'eau potable a été aussi un sujet très préoccupant. On opère dans les milieux naturels, donc principalement des milieux forestiers. L'impact de la foresterie, évidemment c'est un problème majeur sur nos entreprises. Il y a des améliorations qui ont été apportées. Il y a encore beaucoup, beaucoup de chemin à faire. Je pense qu'il faut s'assurer que notre secteur soit dorénavant plus considéré dans toutes les politiques qui ont un impact sur le territoire.

Tantôt, Mme la ministre, vous aviez accueilli avec un sourire notre disponibilité à participer à des conseils de bassin versant. On veut participer à ces conseils-là, on veut participer aux consultations qu'il y a sur les forêts, on veut participer aux commissions forestières régionales, on veut participer aux groupes faune régionaux. Nos pourvoyeurs travaillent 60, 70, 80, 90 heures en pleine période d'opération. La disponibilité de ces gens-là a quand même certaines limites. Donc, on est interpellés de partout.

Ça va prendre aussi un soutien financier pour participer à ces différentes commissions-là. On veut le faire. Souvent, on n'a pas le temps, on n'a pas les moyens. On tente de faire du mieux qu'on peut, nous, à la fédération, pour outiller ces gens-là, par exemple, au niveau des consultations forestières, de les doter d'outils qui vont rivaliser avec ceux qui sont présentés par les compagnies forestières pour permettre de parler un peu au même niveau. Ça demande énormément de temps. On a des ressources, nous aussi, à la fédération, qui sont limitées. Donc, un soutien financier, que ce soit pour le développement de nouvelles alternatives vertes ou que ce soit pour la participation à différentes commissions et consultations, ce serait une grande amélioration.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon, il vous reste une minute.

M. Bouchard: Merci. Bien, écoutez, je vais être le plus pertinent possible et coller sur la thématique de l'eau. La qualité de l'eau des lacs, au Québec, et donc du soutien du contexte à votre produit, quel est le verdict que vous en faites maintenant?

Et, lorsque vous faites allusion à l'industrie forestière, j'imagine que vous faites allusion directement à toute la question des cyanos, du ruissellement et de l'apport de phosphore dans vos plans d'eau. Est-ce que vous pouvez aller plus loin là-dessus?

Le Président (M. Bergman): M. Dumont.

M. Dumont (Bruno): Bien, il est certain qu'il y a des impacts au niveau de l'eau par rapport aux activités forestières, mais, au-delà de ça, il y a des impacts plus généraux d'abord au niveau des paysages. On l'a mentionné dans le cours des échanges qu'on a eus au cours de la dernière heure, c'est un environnement naturel qui fait en sorte que nos clients sont intéressés à fréquenter nos établissements. Donc, c'est l'ensemble des éléments qu'il faut préserver au niveau de la qualité de l'environnement. Puis évidemment la...

Le Président (M. Bergman): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Dumont (Bruno): Toute la question forestière, comme M. Dugré a mentionné, est un sujet de préoccupation pour nous autres, dans lequel on est actifs, d'ailleurs.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps s'est écoulé. Alors, M. Dumont, Me Dugré, M. Handfield, merci pour votre présentation. On apprécie que vous êtes ici, avec nous, aujourd'hui.

Et je demande aux gens de la Fédération québécoise des municipalités pour prendre leur place à la table. Je suspends nos travaux pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 10 h 30)

 

(Reprise à 10 h 31)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue à la Fédération québécoise des municipalités. M. Généreux, M. Bergeron, bienvenue. Vous êtes des habitués devant notre commission.

Fédération québécoise des
municipalités (FQM)

M. Généreux (Bernard): Alors, on se sent en famille.

Le Président (M. Bergman): Alors, vous avez 15 minutes, comme vous le connaissez, pour votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission pour un autre 45 minutes. Alors, s'il vous plaît, pour nos micros, si vous pouvez vous identifier. Et vous avez les prochaines 15 minutes.

M. Généreux (Bernard): Merci, M. le Président. C'est avec plaisir effectivement qu'on se retrouve pour aborder avec la commission cette importante question de l'eau. Donc, il n'est pas inutile de rappeler ce que l'on représente comme fédération. Et, quand on fait référence à la vaste représentativité qui est celle de la Fédération québécoise des municipalités, bien sûr on ne peut éviter d'aborder du même souffle la question de l'occupation du territoire, qui met en perspective un de ses éléments essentiels, qui est la question de l'eau. D'ailleurs, je vous invite, j'en profite pour vous inviter à notre congrès, dans les prochains jours, les 25, 26, 27 septembre, où effectivement des enjeux comme celui de la question de l'eau seront abordés et qui sont au coeur de nos préoccupations municipales.

Donc, on n'est pas sans savoir que, dans les récentes années, la question de l'eau, qu'elle soit abordée par l'eau potable, l'eau usée, les eaux de cours d'eau, les zones inondables, autant de responsabilités reliées à l'eau qui sont confiées au monde municipal et qui sont au coeur de nos préoccupations... et qui met au premier chef la qualité de vie de nos concitoyens en perspective et qui est un élément essentiel au développement de nos communautés. Donc, on partage, à cet égard-là, l'intention du gouvernement de confirmer la ressource eau, qu'elle soit souterraine ou de surface, comme faisant partie d'un patrimoine commun et qui est un bien collectif.

Le projet de loi introduit également ce principe important qui est celui de l'utilisateur-payeur, étant entendu que, dans le cadre de nos responsabilités, lorsqu'on aborde la question de la tarification de cet élément essentiel à notre quotidien, la question du paiement de la ressource et de sa manière de la tarifer, on considère que ce principe doit prendre en compte que déjà, par nos responsabilités qui ont mobilisé des milliards de dollars, au cours des dernières années, autour de la question de l'eau potable et de l'eau usée notamment... a fait en sorte que la sensibilisation ou la responsabilité qu'on veut induire à travers cette tarification-là est déjà au coeur du débat autour de l'eau par les efforts qu'on exige de nos concitoyens en matière de tarification.

Donc, la taxe d'eau, le compte d'eau, là, est déjà un compte qui a considérablement bougé à la hausse, on en convient, dans ce contexte de mise aux normes. Et, à travers ça, bien sûr, l'abondance de l'eau qui est, je pense, un fait de notre... ou, je dirais, une opportunité, un avantage par rapport à ce que l'enjeu eau représente de plus en plus, ça induit aussi une responsabilité quant à son utilisation. Et déjà, à travers nos démarches de mise aux normes, on induit nécessairement un message de responsabilité quant à son utilisation. Donc, sur la dimension de sa tarification, je pense qu'encore une fois on dit oui au principe, mais on conçoit mal qu'on devrait tarifer au-delà du compte d'eau pour les citoyens utilisateurs.

Cependant, je pense que, dans les usages commerciaux et industriels, il y a définitivement, là comme dans d'autres questions, entre autres sur la question des matières résiduelles, la responsabilité élargie de l'utilisateur. Bien, je pense qu'il faut bien s'assurer que, ce qui contribue au développement de l'industrie et des commerces qui mettent à contribution l'eau comme ingrédient essentiel à leur développement, bien, qu'on puisse, là, en conséquence, ajuster les tarifications qui s'imposent.

Cependant, on souhaite également que, sur cette question de la tarification, on puisse faire en sorte que les sommes ainsi perçues puissent être le plus... davantage ou essentiellement retournées aux municipalités parce qu'on connaît les besoins immenses à cet égard-là. Je rappellerais qu'il y a quelques années, en 2003, le Conference Board établissait à 10 milliards les besoins des municipalités au Québec pour la mise aux normes des eaux usées et l'eau potable. Donc, vous comprendrez que tout ce qui peut contribuer à accompagner cette mise aux normes... Au-delà des initiatives gouvernementales récentes au niveau des infrastructures, qui sont, je pense, un effort immense que le gouvernement a consenti pour corriger ce qui devait l'être, bien il reste que les besoins, là, on en connaît tous l'ampleur et l'urgence à certains égards quant à la correction de ce qui doit l'être.

Maintenant, si vous me permettez, je vais aborder la question sensible de la gestion, de la gouvernance de toute cette question de l'eau par bassin versant à travers, je dirais, un univers de gestion qui est déjà largement défini.

Une des grandes préoccupations qu'on a, à la lecture du projet de loi, c'est celle qui vise encore une fois... En tout cas, peut-être que ce serait important qu'on se clarifie, à cet égard-là, les objectifs du législateur. Mais il reste qu'on a encore une fois l'impression qu'on est en train de créer en dehors, je dirais, d'un corpus, qui est celui de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, en matière de responsabilité d'aménagement et de développement des territoires, et là on va créer des organismes de bassin versant qui... On entend qu'ils vont bien sûr être redécoupés de façon à couvrir l'ensemble du territoire québécois, mais encore une fois dans une relation qui risque carrément d'être en marge ou, voire, conflictuelle avec la responsabilité municipale qui est confiée aux MRC.

Il me semble qu'encore là, quand on... on assiste, là... Puis je pense qu'on l'a vu, au cours des dernières années, combien on a cette espèce de manie de tout le temps créer des organismes qui viennent gérer en silo des responsabilités qui de toute façon vont devoir se rencontrer. Et pourquoi ne pas intégrer à partir des organisations ou des structures qu'on s'est données au Québec pour gérer la question des territoires et leur développement?

Je l'ai déjà signalé, nos responsabilités en matière d'eau sont déjà largement énumérées, largement présentes, et, lorsqu'on va arriver tantôt pour cet enjeu de la gestion de la Politique nationale de l'eau, on s'apprêterait à confier à un autre organisme non seulement un mandat de planification, mais également de mise en oeuvre, et c'est là, je pense, qu'il y a une zone de confrontation à anticiper. Et j'implore en fait le législateur à faire en sorte qu'on intègre plutôt qu'on multiplie et qu'on mette de la cohérence dans nos actions et dans nos planifications. Nos instruments de planification sont, je pense, relativement bien définis. Et je pense qu'il n'est pas inutile de rappeler qu'il n'y a pas si longtemps, il y a quelques années, à l'issue du Forum des générations, on a convenu... on a signé avec le gouvernement des ententes de responsabilité déléguée. Et, encore là, moi, je me dis, soyons cohérents dans nos décisions et faisons en sorte que, plutôt que de multiplier des organisations, bien on les intègre autour de la responsabilité de la MRC. On le fait déjà sur d'autres questions, pourquoi on ne le ferait pas sur la question de l'eau?

n(10 h 40)n

Quand on regarde un petit peu comment les choses se placent au Québec, actuellement, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, il me semble qu'elle confie un corpus de responsabilités qui pourrait être clair et facilitant, alors qu'on a tendance de plus en plus à développer, avec la structure des conférences régionales des élus, avec les organismes de bassin versant qui s'en viennent, où il n'y a pas de responsabilité légale là-dedans, autrement que des mandats un peu sectoriels. On dit: Intégrons les éléments pour que... Au même titre qu'on le fait avec les comités consultatifs d'urbanisme, avec les comités agricoles, les comités consultatifs agricoles, pourquoi on ne le ferait pas pour la question de l'eau dans un environnement où la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme permet d'intégrer tout ça? Et je pense qu'on éviterait beaucoup de détours, et de se faire des surprises inutiles, et de se payer des confrontations quant à des responsabilités qui pourraient être perçues, entendues et comprises par l'un ou l'autre de ces acteurs-là qu'on est en train...

Et d'ailleurs je vous rappellerais qu'on est actuellement en révision de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Et il y a, dans la Loi sur l'aménagement, en vertu de l'article 75.1, une disposition qui permet de créer ce qu'on appelle des commissions conjointes d'aménagement. Donc, c'était prévu à l'époque, puis je pense qu'on peut comprendre que, depuis le temps que ça a été écrit, ça a peut-être besoin d'être actualisé, mais ça prévoyait des ententes entre deux MRC. Pourquoi ne pas l'élargir dans une notion où effectivement on doit embrasser bien souvent un territoire plus large, comme on le fait d'ailleurs dans le secteur forestier, où, lorsqu'on a à apprécier les aires forestières ? comment est-ce qu'on les appelle? ? les UAF, là, bien on déborde bien souvent le territoire immédiat de la MRC puis on réussit quand même à se partager des points de vue là-dessus? Donc, là-dessus, une mise en garde importante sur le souci d'intégrer et de ramener les choses à la bonne place plutôt que de continuer de meubler la pizza de structures qui risquent de faire en sorte qu'on s'y perde plutôt qu'on s'y retrouve.

Enfin, sur la disposition relativement à l'entente sur les eaux du... les bassins versants des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent, préoccupation, là encore, de bien s'assurer... puis c'est une préoccupation qu'on a déjà communiquée au ministère, en regard de toujours s'assurer que les investissements qui ont déjà été faits en matière d'aménagement, tant sur les eaux usées que sur l'eau potable... Bien, la régulation du Saint-Laurent pourrait entraîner des conséquences importantes sur les investissements déjà faits en amont dans la mesure où, s'il s'avérait que cette régulation a pour effet de jouer avec les niveaux d'eau, bien on comprend que, dans un contexte de bassins versants, on pourrait se retrouver avec des aménagements qui sont à découvert, ou à perte, ou avec des rejets au fleuve ou dans des cours d'eau, parce que les bassins, les niveaux d'eau auraient été aménagés en fonction de ces préoccupations de régulation des bassins versants.

On souligne également notre appréciation à l'effet que, dans le suivi du sommet sur les algues bleu-vert, l'automne dernier, je pense, on avait convenu que les amendes perçues par Q-2, r.8 allaient être retournées au monde municipal, et je pense que c'est... On apprécie, là, que le message ait été entendu.

Donc, pour l'essentiel, notre position se résume à ces points-là. Et on est disposés maintenant à échanger avec la commission.

Le Président (M. Bergman): Merci, M. Généreux, pour votre présentation. Mme la ministre, pour un bloc de 17 minutes.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Et, d'entrée de jeu, je suis certaine que je vais manquer de temps, donc je vais aller directement au but. Je tiens à vous saluer, M. Généreux, M. Bergeron. Merci d'être parmi nous. Peut-être aussi, d'entrée de jeu, vous dire que, pour moi, si je veux recamper l'intention du gouvernement et, je le souhaite, de l'Assemblée nationale, avec ce projet de loi, il faut ici se dire et se redire que le projet de loi est beaucoup conçu dans une perspective d'assurer que les municipalités, dont c'est la responsabilité, auront en tout temps, pour les générations à venir, la capacité de fournir de l'eau potable à leur population.

C'est ça, le principe de la loi ici, c'est de penser au futur puis c'est de dire que... Si vous avez remarqué, dans la priorisation des usages puis en cas de conflit dans les usages de l'eau, on dit: Dans le grand contexte de la préservation de la ressource et des écosystèmes, la priorité numéro un, c'est les besoins de la population et notamment, bien sûr, l'approvisionnement en eau potable. Et c'est dans ce contexte-là d'ailleurs que les municipalités, que les ouvrages municipaux ne sont pas assujettis à la loi en termes de certificats d'autorisation, puisque... à part si une municipalité a besoin d'augmenter la capacité de prélèvement. Mais sinon on dit: C'est le principe même de la loi, c'est de fournir de l'eau aux Québécois puis pour les générations à venir.

Je voulais, comme vous, souligner qu'on a tenu notre engagement par rapport au rendez-vous sur les algues bleues. Et j'ai fait ma tournée l'année passée. Le fait de dire que les municipalités devaient être mieux outillées pour être capables d'intenter les poursuites en termes d'application du règlement, entre autres Q-2, r.8, mais surtout que les gains... que les résultats de ces poursuites soient conservés dans les coffres des municipalités et non plus dans le fonds consolidé du gouvernement, vous avez la réalisation de cet engagement par l'article 24.

Puis aussi, d'entrée de jeu, vous dire qu'on partage vos préoccupations, on les a exprimées. Quant aux travaux de la Commission mixte internationale, nous avons aussi souligné, dans le cadre de la consultation menée, que nous trouvions que les propositions sur la table, en ce moment, ne documentaient pas assez les impacts possibles, prévisibles sur le Saint-Laurent et que, dans ce sens-là, on remettait en question les travaux de la CMI.

Mais par ailleurs, je dirais, un peu le coeur de votre présentation, vous le disiez vous-mêmes, vous avez dit: C'est un sujet délicat, mais c'est le thème de la gouvernance de l'eau. M. Généreux, est-ce que, dans votre mémoire, je dois voir ici finalement, je dirais, une remise en compte... certains diraient une dénonciation, mais une remise en compte de la Politique nationale de l'eau de 2002? Parce que dans le fond une orientation sur la base d'organismes de bassin versant devant faire des plans directeurs de l'eau, c'est quelque chose qui déjà était inscrit dans le rapport de la commission Beauchamp sur le BAPE, mais qui était une orientation inscrite en toutes lettres dans la Politique nationale de l'eau. Dans votre mémoire, vous dites, en page 6, là, que vous déplorez que la Politique nationale de l'eau et le cadre de référence proposés par le ministère de l'Environnement confient la responsabilité des PDE à des instances autres que les MRC. Donc, est-ce que, six ans plus tard, je dois comprendre que vous venez dire et redire: On n'est pas d'accord avec la Politique nationale de l'eau?

Le Président (M. Bergman): M. Généreux.

n(10 h 50)n

M. Généreux (Bernard): D'aucune façon, là, je pense qu'il faut prendre notre préoccupation en matière d'intégration des responsabilités comme étant une dénonciation de la Politique nationale de l'eau, au contraire. Moi, je pense qu'il faut s'assurer que les responsabilités sont aux bonnes places en mettant en place ces fameux comités de bassin versant avec qui on doit nécessairement bâtir une relation privilégiée, au même titre qu'encore une fois on bâtit des relations privilégiées avec ceux qui nous accompagnent dans nos responsabilités, que sont, à titre d'exemple, les comités consultatifs, les comités consultatifs agricoles. Pourquoi on n'aurait pas, autour de nous, d'une façon intégrée, des comités de bassin versant qui viennent contribuer d'une façon très claire à cette importante réflexion qui doit faire en sorte que la question de l'eau doit se retrouver au coeur de nos planifications et de nos responsabilités? Parce que non seulement on confie à ces organismes de bassin versant la responsabilité de réaliser les plans, mais de les mettre en oeuvre. Et, quand on parle de mettre en oeuvre, c'est dire: Tu as une responsabilité de...

Bon, tantôt, on va devoir rendre des comptes aussi. Et ça, bien, il me semble qu'on est dans le champ de nos responsabilités propres lorsqu'on aborde une question aussi sensible que celle de l'eau reliée à l'aménagement du territoire. Puis, on le sait, on est déjà en relation par nos responsabilités d'aménagement et de développement, puis on voit tout ce que ça induit comme potentiel de développement, la question de l'eau, au même titre que celle, je dirais, de la forêt, par ailleurs, qui est un espace de développement qui doit être quelque part intégré dans nos planifications. Autrement, on gère en silo et on a malheureusement souvent à se confronter autour d'enjeux qui ne mériteraient pas la confrontation mais plutôt la concertation. Puis c'est pour ça qu'on appelle à l'intégration des opérations plutôt que de se retrouver avec un organisme qui tantôt va non seulement définir, mais mettre en oeuvre autour d'une autre responsabilité qui, elle, est largement et très bien campée, là, en termes de responsabilité politique qui est confiée au monde municipal.

Puis est-ce que ces organismes-là seront imputables? Est-ce qu'ils sont redevables? Est-ce que tantôt... Il y a tout, je dirais, un ensemble de politiques réglementaires à la limite qui devra être adopté. Puis qui va faire ça? Les organismes de bassin versant? Moi, je pense que c'est dans notre responsabilité, puis c'est ce à quoi on appelle, c'est de dire: Faisons en sorte que cette Politique nationale de l'eau, elle ait le maximum de chances de réussite, autant dans ses différentes étapes de planification et de mise en oeuvre.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Bien, je veux plus vous entendre quand vous parlez... Parce que, je vais vous dire la vérité, quand je lisais le fait qu'en page 6 vous dites... vous déplorez que la PNE confie la responsabilité de l'élaboration des plans directeurs de l'eau à des instances ? on comprend les OBV ? en conclusion, votre recommandation, c'est que «la gestion intégrée de l'eau par bassin versant soit orchestrée sous l'égide des MRC», et il est assez peu question, dans votre mémoire, de cet aspect que, vous, vous appelez l'articulation ou l'intégration. Je vois mal le modèle finalement, à la fin, que vous proposez. Parce que, je vais vous le dire honnêtement, en lisant cela, j'étais capable de conclure finalement que les OBV n'étaient pas souhaitables, et là vous me dites que ce n'est pas ça, la conclusion que je dois avoir.

Donc, vous me dites: C'est une articulation. Et là je veux vous entendre un peu plus sur le modèle que vous proposez, parce que certains, les groupes, par exemple, environnementaux qui sont venus nous voir jusqu'à maintenant, certains ont dit que c'était une question sensible, délicate, compliquée. Je pense au Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement. Certains autres vont dire: Bien, les MRC ou le pouvoir municipal est présent autour de la table des organismes de bassin versant. Donc, certains diraient: Elle est là, l'articulation, puisque les municipalités sont autour de la table.

Mais plus que ça, M. Généreux, pour bien essayer de comprendre, là... Parce que déjà la question du redécoupage du Québec méridional étant couvert par des organismes de bassin versant a été discutée autour de la table, lorsque nous avons fait le rendez-vous sur les algues bleues. Puis par la suite, durant l'automne... Vous savez sûrement qu'une des raisons pourquoi on a augmenté de 150 % le budget des organismes de bassin versant, c'est parce qu'on a reçu grand nombre des résolutions provenant de MRC qui nous demandaient de le faire. Et honnêtement, à travers les résolutions reçues, qui proviennent de toutes les régions ? Bas-Saint-Laurent, Capitale-Nationale, Chaudière-Appalaches, Estrie, Laurentides, Montérégie, Outaouais, Lanaudière, Gaspésie ? dans chacune de ces résolutions-là, moi, je croyais lire un appui... vous savez, une reconnaissance, je dirais, explicite de ce qui était prévu, donc du mode de fonctionnement qu'on connaît, puisqu'il y a déjà 33 organismes de bassin versant avec déjà des plans directeurs de l'eau, acceptés dans certains cas.

Juste pour votre bénéfice, je vais vous donner deux exemples de lettres que j'ai reçues, provenant de MRC. La MRC d'Arthabaska, qui plaide pour qu'on augmente les budgets, qui me dit: «Les organismes de bassin versant ont la responsabilité de mettre en oeuvre, dans une perspective de développement durable, la gestion intégrée en élaborant un plan directeur de l'eau.» Donc, moi, j'avais une MRC, je me disais: Il y a une reconnaissance de la responsabilité de la production du plan directeur de l'eau.

Peut-être un autre exemple, la MRC de La Nouvelle-Beauce, qui dit aussi dans sa résolution: «En plus d'agir comme table de concertation et de planification, les organismes de bassin versant agissent comme coordonnateurs d'activités de sensibilisation et d'interventions ponctuelles visant à améliorer la qualité de l'eau.» Ils nous disent aussi: «Les organismes de bassin versant ont la responsabilité de mettre en oeuvre le PDE.»

Et là j'en ai reçu 19 comme ça, vers le mois de décembre, janvier, en préparation du budget. Je suis là, je me dis... Bien, moi, je croyais que le modèle qu'on voyait se dessiner sur le territoire québécois à partir de l'expérience présente des 33 organismes de bassin versant... Certains ont produit un plan directeur de l'eau. Il y en a en ce moment qu'il y a un degré de collaboration exceptionnel. On peut prendre l'exemple de L'Assomption, où il y a un degré de collaboration exceptionnel entre l'OBV et la MRC. En quoi cette expérience-là passée nous amène à dire: Ce n'est pas le bon modèle? Puis, si ce n'est pas le bon modèle, est-ce que vous pouvez être plus explicite sur la place à vos yeux qu'ont les OBV? Parce que j'espère que vous me comprenez, là, je ne sais pas, mais, moi, je pensais que 19 MRC étaient bien à l'aise avec ça puis me demandaient d'augmenter le budget des OBV.

Le Président (M. Bergman): M. Généreux.

M. Généreux (Bernard): Je ne voudrais surtout pas, là, qu'on se mette dans une démonstration de compétition entre les responsabilités. Ce que j'essaie de dire, c'est: Les organismes de bassin versant, au même titre que les conseils régionaux de l'environnement, ce sont des organismes avec qui on est en partenariat, avec qui on travaille, puis qui sont par ailleurs subventionnés par votre ministère largement, et qui influencent ou qui viennent contribuer à nos exercices. Moi, je pense que c'est au niveau de la responsabilité dont il faut se préoccuper, parce qu'on entre dans une opération où, jusqu'à maintenant, c'était très inégal, la planification puis le travail que pouvaient faire souvent les bénévoles des organismes de bassin versant en matière de planification. Mais, avec la Politique nationale de l'eau, sa mise en oeuvre et ses impacts dans l'organisation du territoire et tout ce qui va en découler tantôt, moi, je dis: Faisons en sorte qu'on intègre, non pas parce que...

Je me dis, il faut mettre les choses à la bonne place, là. Ce n'est pas parce qu'on est assis autour d'une table avec les organismes de bassin versant qu'on est ? comment je dirais ça? ? assis à la bonne place. Moi, je pense qu'il faut que notre responsabilité première en matière d'aménagement et de développement de nos territoires, bien elle soit cohérente, dans le sens qu'au même titre qu'on intègre d'autres partenaires autour de notre responsabilité, les organismes de bassin versant, qui ont probablement toute la place qui doit être occupée et tout l'espace qui doit être sous leur responsabilité, que ça puisse se retrouver, en matière de planification et d'aménagement du territoire, autour de l'outil privilégié qu'on s'est donné au Québec lorsqu'on parle de l'aménagement, le schéma, pour éviter encore une fois qu'on se retrouve avec des planifications parallèles qui viennent par leur effet imposer, je dirais, des décisions aux élus, alors que c'est aux élus de prendre des décisions.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: M. le Président. Bien, je pense, M. Généreux, que vous savez comme moi que la loi n'est pas rédigée dans un esprit où en ce moment il y a une imposition au monde municipal. Il y a une notion de prise en compte qui, je pense... Moi, je plaide pour dire: Il faut donner du temps au temps et que notre modèle dans la gouvernance de l'eau soit testé puis puisse évoluer, parce que c'est encore assez jeune. Et, je me dis, il y a des expériences en cours, à partir de plans directeurs de l'eau qui ont été acceptés et approuvés, il y a des expériences en cours, de coordination entre le monde municipal et tous les autres acteurs qui sont autour de la table, des OBV, qui peut-être méritent qu'on les laisse évoluer un peu et qu'on soit capables de répondre plus précisément, dans quelque temps, aux différentes questions que vous soulevez.

Je termine ? parce que j'imagine qu'il reste...

Le Président (M. Bergman): Trois minutes.

Mme Beauchamp: ...trois minutes ? donc avec deux questions rapides. La première question, c'est: Il y a certains élus qui, à travers les CRE, qui ne sont donc pas non plus la structure des MRC, il y a quand même des élus, dans certaines régions, qui plaident aussi pour que la notion de la gouvernance de l'eau, la production du plan directeur de l'eau, sa mise en oeuvre, sa coordination soient plutôt sous l'égide d'une CRE, d'une conférence régionale des élus. Je voulais vous entendre aussi sur ce modèle-là. Vous le savez comme moi, là, il y a des représentations dans ce sens-là qui se font dans différentes régions du Québec pour que ce soit sous plutôt une CRE. Je voudrais vous entendre. Parce que vous voyez qu'on est devant différentes propositions sur la gouvernance de l'eau, puis, nous, on aura à en débattre à l'automne prochain.

Puis je termine, ma dernière question... Donc, je veux vous entendre sur les CRE. Mais ma dernière question, c'est de dire: J'ai l'impression ? puis vous me corrigerez si je me trompe ? que la vraie préoccupation est peut-être l'expression utilisée dans un article de notre loi qui parle de la mise en oeuvre. J'ai l'impression que, là où ça vient chercher, je dirais, des appréhensions, des sensibilités certaines, c'est cette notion que l'organisme en question doit élaborer le plan directeur de l'eau mais doit veiller à sa mise en oeuvre. Et je voudrais peut-être vous entendre là-dessus, pour dire: Est-ce que vous avez... Parce qu'on sait que l'expérience actuelle, c'est une expérience où il y a une notion de veille, l'OBV doit veiller à l'application de son plan directeur de l'eau, mais c'est plutôt une notion d'accompagnement puis de coordination, un peu l'expression utilisée dans la résolution que je vous ai lue plus tôt, là. Donc, je veux vous entendre: Est-ce que je me trompe ou pas? Est-ce que ce que vous nous invitez à revoir, c'est la notion de mise en oeuvre?

n(11 heures)n

Le Président (M. Bergman): M. Généreux.

M. Généreux (Bernard): Effectivement, moi, je pense que les deux questions sont interreliées parce qu'on est carrément dans la notion de la gouvernance et de la responsabilité imputable, puis comment cette politique nationale puis l'organisation des planifications qu'on s'apprête à faire... qui en sera imputable et redevable. Et, à cet égard-là, c'est un grand élément de réflexion puis des fois même de confusion au Québec, au moment où on se parle, entre la responsabilité des conférences régionales des élus et la responsabilité des MRC, où on doit, je pense, dans un contexte de ce qu'on a convenu encore une fois au Forum des générations en matière de régionalisation et de décentralisation, ne pas mêler les genres. Si on est dans une opération...

Le Président (M. Bergman): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Généreux (Bernard): ...de décentralisation sur cette question-là, il faut que... l'instance imputable, ce doit être une instance élue, donc la MRC. La conférence régionale des élus est une organisation d'élus, soit, mais créée par une loi et qui a davantage une responsabilité de concertation, alors que... Bon. Donc, si on est dans l'imputabilité, il faut que ça transite par la MRC. Et, lorsqu'on parle de mise en oeuvre, s'il est question de rendre des comptes, bien, nécessairement on doit s'adresser à l'instance imputable qui est la MRC, à laquelle participeront, de plein droit et avec toute la dimension qu'elle doit avoir, les organismes de bassin versant, qui ont un rôle majeur à jouer dans la définition de ce que ça va être, là, cette... Je pense qu'il n'est pas question de dire: On renie l'organisme de bassin versant. Au contraire, ils ont un rôle à jouer, mais on veut qu'ils le jouent à travers... ou intégrés, ou sous l'égide d'une instance qui tantôt aura à rendre des comptes et qui sera imputable politiquement de ces choix-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Merci, M. le Président. Première des choses, je vous souhaite la bienvenue. Le débat de structures est certainement un enjeu important, j'aurai l'occasion d'y revenir, parce que j'aimerais ça commencer avec un élément. À la page 5 de votre mémoire, sous le chapitre 3, vous faites mention d'une sorte de redevance, d'une part, pour le commercial et l'industriel et, d'autre part, pour le résidentiel. Vous dites que vous n'appuyez pas une redevance pour le résidentiel, pour la raison suivante: que les citoyens sont déjà taxés pour ce service-là. Toutefois, pour le commercial, pour l'industriel, ça passe. Et, excusez-moi si je me trompe, mais il me semble qu'il y a déjà aussi des taxes pour ces entités-là. Pourquoi faire une scission aussi nette et claire quant à la redevance?

Le Président (M. Bergman): M. Généreux.

M. Généreux (Bernard): Écoutez, je pense qu'effectivement l'effort des citoyens, là, on le constate à tous les jours, il est en croissance, et, à travers cette facture-là, nous, on pense que l'effet recherché par une taxation, ou ? comment est-ce qu'on appelle ça, là? ? une redevance, ou une tarification est déjà réalisé, alors que souvent, dans le commerce et l'industrie, qui utilise l'eau comme principal ingrédient de sa production, bien on n'a jamais pris en compte beaucoup cette question-là de tout ce qu'elle génère aussi en termes d'effets secondaires

Pensons, par exemple, aux papetières, qui utilisent des quantités considérables d'eau. Est-ce que, dans la tarification industrielle, qui est celle du compte de taxes, là, qu'on applique à ces secteurs-là, est-ce qu'on a suffisamment pris en compte la question de l'utilisation de l'eau comme moyen de production? Je pense que non. Et c'est là qu'on pense qu'il y a encore de l'espace pour bien faire saisir que l'eau, qui est, pour nous, comme société, là, une espèce de privilège, puis l'abondance de l'eau doit aussi entraîner, je pense, une responsabilité si on veut s'assurer de sa pérennité, parce qu'on a beau en avoir beaucoup, mais on se rend compte que souvent c'est, je dirais, un secteur qui est fragile par ailleurs.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Merci.

M. Généreux (Bernard): ...s'il vous plaît. Vous permettez?

Une voix: ...

M. Bergeron (Denis): Oui. Bien, pour compléter la réponse de mon président, ce qu'il faut considérer, c'est qu'actuellement les municipalités s'identifient comme étant un service public, donc d'où l'argumentaire qu'on développe dans le cadre de notre mémoire, de dire: Les citoyens paient déjà pour les services qui leur sont dispensés via leurs taxes et leurs impôts, considérant que c'est un service public. Alors que, là, lorsqu'on parle d'activités à caractère commercial, bien il y a une notion de profit, de vente, donc les utilisateurs de l'eau potable pour des activités à caractère commercial qui génèrent des profits, c'est là où la redevance pourrait être mieux applicable et appliquée et serait beaucoup plus justifiable, surtout auprès des citoyens.

Le deuxième point qu'il faudrait souligner aussi, c'est que les membres, pour l'essentiel, les membres de la Fédération québécoise des municipalités, c'est des municipalités de 5 000 habitants et moins, principalement en région et en milieu rural, puis, pour une grande majorité de ces citoyens, ce sont eux qui paient déjà pour leurs infrastructures d'eau potable et d'eaux usées, c'est-à-dire soit par un puits artésien ou soit par un système d'assainissement autonome. Donc, on verrait mal une municipalité imposer à des citoyens qui ont déjà payé pour leurs services une tarification pour un service que la municipalité malheureusement ne dispense pas dans certains cas. Alors, c'est la notion de service public, d'activité commerciale puis la particularité chez nos membres qu'individuellement les citoyens paient déjà pour leurs services via leurs taxes et leurs impôts et en plus leur système autonome dans chacune de leurs résidences.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Comme il n'y a pas de notion de profit avec le résidentiel, la marge de manoeuvre se situe sur la conscientisation, sur toutes les campagnes publicitaires, comme je pense à une ville dans ma circonscription, Sainte-Julie, qui, au courant de l'été passé au grand complet, a fait une campagne de publicité pour préserver l'eau: des affiches, des cahiers à domicile, des gens qui faisaient des visites au porte-à-porte. Mais c'est loin d'être toutes les villes au Québec qui ont pris de front ce dossier-là. Pensez-vous que les municipalités en font assez dans la préservation ou pour contrer le gaspillage de l'eau au Québec?

Le Président (M. Bergman): M. Généreux.

M. Généreux (Bernard): Écoutez, moi, je pense qu'en matière de responsabilité, là, la prise de conscience de l'importance que constitue l'eau... On a longtemps géré l'eau comme une ressource illimitée, en se disant: Ce n'est pas grave. Puis je pense qu'autant comme individus que comme corps public on a malheureusement géré, un peu historiquement, là, l'eau comme ça. Maintenant, je pense qu'on voit bien, là, qu'à travers encore une fois toute l'opération de mise aux normes puis d'infrastructures dans laquelle on est engagés collectivement, l'eau est en train de devenir une espèce non pas en perdition, mais une espèce rare. Puis la rareté, ça a un prix. Puis ça, bien, je pense que, la prise de conscience collective, autant dans nos comportements municipaux ou comme citoyens, bien il faut de plus en plus développer cette préoccupation que l'eau, oui, on en a, mais ça induit aussi une responsabilité, puis il faut y faire attention.

Donc, ces campagnes-là, je pense qu'elles devront de plus en plus... Puis je pense qu'on assistera à un déploiement de plus en plus large de campagnes de sensibilisation et de mise en garde quant à l'utilisation de l'eau. Bon. Puis il y a toujours une question de moyens. C'est pourquoi, là, on suggère que la tarification éventuellement soit versée dans un fonds où on pourra peut-être puiser pour faire ces campagnes-là, au même titre qu'on le fait, là, dans l'autre dossier des matières résiduelles. Puis une question de répéter le message puis de sensibiliser nos citoyens là-dessus.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Si je comprends bien ce que vous venez de me dire, les redevances pour le commercial et l'industriel, vous seriez d'accord qu'elles soient dédiées uniquement à des fins pour l'utilisation de l'eau, c'est bien ça, qu'elles soient dédiées, parce que...

M. Généreux (Bernard): C'est-à-dire que la tarification serve à constituer un fonds dédié à toute cette question de l'eau et de sa gestion.

M. Diamond: O.K.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

n(11 h 10)n

M. Diamond: J'ai deux dernières questions, l'une sur l'état des installations qui font la gestion de l'eau et la distribution de l'eau. On entend souvent parler de fuites importantes dans le réseau municipal. On entend souvent parler que c'est quasiment, dans le terme de gaspillage de l'eau au Québec, c'est peut-être le défi numéro un de restaurer nos installations. Est-ce que vous pourriez nous faire un état de la situation actuellement?

Le Président (M. Bergman): M. Généreux.

M. Généreux (Bernard): Bien, on estime actuellement entre 20 % à 40 % la perte d'eau à travers nos réseaux de distribution. Et c'est pourquoi, là, dans les programmes d'infrastructures, la première étape, c'est celle de la connaissance de nos réseaux. Et je pense que ça a permis de révéler qu'effectivement, dans certains cas, nos infrastructures non seulement étaient vieillottes, mais en état de désuétude très avancé, de sorte qu'on a beau étirer le tuyau par là-bas, mais, si, l'eau qui est prélevée, on en perd 40 % avant qu'elle se rende au destinataire, bien on a un problème. Donc, je pense que c'est dans ce genre d'exercice là où on est précisément, là, collectivement et qui entraîne, qu'on le veuille ou pas, une facture aux citoyens. Et ça, ce n'est jamais gratuit, toute cette investigation puis la mise aux normes. Mais effectivement je pense que la première étape, là, dans laquelle on est, c'est de bien s'assurer... ou bien connaître l'état de nos infrastructures pour être capables d'y apporter des corrections pertinentes.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Rapidement, là, parce que j'aimerais parler, avant de céder la parole à un de mes collègues, de la structure. À la page 8, vous proposez une certaine fusion entre les organismes de bassin versant et les MRC, ou du moins c'est ce que j'en ai compris. Et puis évidemment la question des limites territoriales entre les MRC puis les bassins versants pose problème. Pour ce problème-là, vous amenez une réponse qui est la commission conjointe d'aménagement, qui pourrait être présidée par... Ce n'est pas précisé ici exactement qui. Est-ce que c'est quelqu'un des organismes de bassin versant ou c'est quelqu'un du milieu municipal?

Mais, bon, tout ça pour dire que cette commission-là serait à titre consultatif. Et puis la question se pose: Comment vous voyez l'intégration des organismes de bassin versant dans cette nouvelle structure là? Est-ce que vous pensez que, si c'est à titre consultatif, il va y avoir assez d'emprise sur le milieu des MRC, le milieu municipal, pour avoir des résultats fiables?

Le Président (M. Bergman): M. Généreux.

M. Généreux (Bernard): Écoutez, moi, je pense que ce qu'il faut comprendre derrière cette suggestion-là, c'est l'intégration des actions puis des opérations. Le travail que vont réaliser puis que vont accomplir les organismes de bassin versant... Parce qu'écoutez, moi, je pense que ce serait faux de prétendre qu'au moment où on se parle la question de l'eau est intégrée dans nos planifications de schéma d'aménagement, mais il faut maintenant se positionner pour que ça devienne ou que ça fasse partie prenante de ce qui fait maintenant partie de notre responsabilité en matière de planification puis qu'on l'intègre. Et la contribution des organismes de bassin versant m'apparaît être sa principale contribution, d'alimenter cette réflexion-là, mais qu'on puisse, à travers l'outil, l'instrument qui nous sert, faire en sorte que...

Je pense que c'est un peu de pédagogie qu'il faut se faire là-dessus, là. Mais, notre schéma, là, il y a une opération de conformité, de conformité avec les orientations gouvernementales puis de conformité avec la planification puis les instruments de planification locaux. Donc, tout ça, il faut que ça s'intègre. Puis, si on veut que la municipalité locale, le territoire puis les orientations gouvernementales, ce soit intégré autour d'une approche qui est intégrée, là ? excusez le pléonasme ? bien, moi, je pense qu'il faut mettre de l'ordre dans comment on va s'assurer que tout ça, ça va se tenir ensemble. Parce que, si on a une opération qui est parallèle à tout ça...

Puis c'est un peu le risque que, nous, on estime qu'on encourt, c'est qu'on ait une planification qui soit en marge de la responsabilité qui est déjà confiée à l'élu à travers cet instrument de planification qui est le schéma. Donc, qu'on le réaménage en fonction de cette importante question de l'intégration de la planification eau dans nos outils municipaux, moi, je pense qu'on se donne le maximum de chance de la cohérence des choses plutôt que de se faire encore... essayer de se comprendre puis de deviner c'est quoi, ton mandat puis c'est quoi, ton pouvoir.

M. Diamond: ...à avoir sur ce dossier-là.

M. Généreux (Bernard): Oui.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Saint-Maurice, il vous reste trois minutes.

M. Deschamps: Moi, j'ai une... M. le Président, Mme la ministre, je préférerais, et de loin, que la gérance, la responsabilité de l'utilisation de l'eau soit confiée aux bassins versants. Je vais vous donner un cas précis comment les villes sont en conflit d'intérêts au niveau de leurs taxes foncières là-dessus, M. Généreux. Je connais une place qui s'appelle le lac des Piles, par exemple, qui est une réserve d'eau potable. Ça va? Il y a une marge à respecter de 10 m à 15 m pour les bâtiments, où les terrains valent maintenant 150 000 $. La ville a intérêt, par des dérogations mineures qui ne sont pas encadrées, à permettre des permis dans cette zone de protection là. Donc, les villes, à ce moment-là, ont intérêt à faire bâtir des maisons de 500 000 $, 600 000 $ le long de la rivière Saint-Maurice ou le long des lacs environnants de Shawinigan parce que c'est très, très payant pour les municipalités. Tandis qu'un bassin versant pourrait être plus neutre dans ses décisions puis dire: Écoutez, là, respectez au moins la marge de 10 m à 15 m.

On a gâché des lacs d'eau potable, dans ma région, avec des maisons même superposées où on emplit dans le lac, etc., parce que la ville avait intérêt à retirer les taxes. Parce que la marge de manoeuvre dont on se servait, on disait: Bien, c'est une dérogation mineure. Ah oui! c'est une dérogation mineure, mais la dérogation mineure dans les villes n'est pas encadrée. Alors, on pouvait dire: On te donne 1 m, mais bâtis près du lac. Ça fait que, tout le tour, on était quatre, cinq résidents à l'époque qui étaient bâtis environ à 30 m, on est rendus à 300 résidents permanents, en dedans de 15 ans, qui sont bâtis dans la zone réservée aux 10 m à 15 m parce que la ville permettait des dérogations mineures. Ils sont après gâcher un lac d'eau potable, un des meilleurs d'eau potable au Québec. C'est ça, la méfiance que j'ai envers la gérance des villes vis-à-vis l'utilisation de l'eau et la protection de l'eau de nos lacs qui servent d'eau potable. Merci.

Le Président (M. Bergman): M. Généreux, il vous reste une minute pour la réponse.

M. Généreux (Bernard): Je pense que vous illustrez, là, tout à fait ce que j'essaie de dire depuis le début, là. Si on n'intègre pas nos façons de faire ? tu sais, quand je disais la cohérence de nos actions, là ? puis si on s'engage dans une opération nouvelle avec les organismes de bassin versant, puis les orientations gouvernementales, puis les décisions municipales, il faut que ça se tienne, ça. Puis ce n'est pas un organisme de bassin versant, qui va être un OBNL, qui va être capable d'influencer puis d'imposer tantôt, parce qu'on va jouer effectivement dans la tarification, dans l'obligation qu'on va se faire comme territoire de dire: Ça, c'est comme ça, puis on s'impose ces limites-là. Donc, c'est de la réglementation, là, qu'on va gérer tantôt, puis ça, bien, il faut que ça revienne au municipal d'une façon incontournable.

Le Président (M. Bergman): Merci. M. le député de Roberval.

M. Trottier: Oui, M. le Président. C'est sûr qu'on a encore des choses à éclaircir, puis on est là pour ça. Tout d'abord, à la page 5 de votre mémoire, vous dites qu'il ne faudrait pas que l'application aveugle du principe de l'utilisateur-payeur puisse venir pénaliser les municipalités ou les citoyens. Est-ce qu'il y aurait des exemples que vous pourriez illustrer de ça? Vous avez mentionné quelques éléments tantôt, mais est-ce qu'il y aurait des exemples encore plus précis que vous pourriez nous donner, des choses qu'on devrait éviter? Parce qu'on part d'un bon principe, utilisateur-payeur, mais est-ce que vous avez des exemples de dommages collatéraux qu'on devra éviter?

M. Généreux (Bernard): Écoutez, moi, je pense que celui qu'on défend ou celui pour lequel on plaide, c'est de faire en sorte qu'on n'élargisse pas ce principe, là, de la tarification aux citoyens utilisateurs d'eau potable, que ce soit par son puits ou par son réseau municipal, étant entendu qu'on a déjà fait ou présenté aux citoyens une facture de plus en plus salée. Donc, on dit, là... Je pense que ce qu'on cherche à faire par cette mesure-là, on le fait déjà par l'opération qui est en cours.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: C'est votre principale préoccupation. En dehors de ça, il n'y a pas d'autres éléments que vous ciblez?

M. Généreux (Bernard): Je pense que c'est celle qu'on veut illustrer le plus clairement possible...

M. Trottier: Sur la question de ce qu'on devrait faire avec les redevances, là, vous nous dites: Il faudrait que ça retournerait aux municipalités. Là, le problème qu'on va avoir, c'est que présentement il n'y a pas beaucoup de monde qui nous ont dit qu'ils voulaient payer des redevances, mais il y en a beaucoup qui veulent avoir les redevances. Il y en a de toutes sortes, là. Il y en a que c'est pour des questions d'environnement, ou etc. Ça fait qu'il va falloir que vous nous aidiez à gonfler les recettes parce qu'il n'y aura pas grand-chose à partager si ça continue comme ça.

Sur la question de bassin versant versus, on pourrait dire, l'autorité de la MRC, je comprends très bien vos préoccupations. Bon, je me rappelle que, quand on avait fait le schéma d'aménagement du temps que j'étais préfet, on a vu qu'on n'avait pas beaucoup de pouvoir, puis c'était un peu frustrant. Mais, pour essayer de trouver une solution, est-ce que vous pourriez nous donner... peut-être pas aujourd'hui, mais peut-être nous fournir peut-être un complément d'information, ce serait quoi, les modalités que vous verriez pour essayer d'ajuster tout ça, là? Parce que je comprends que vous dites: Ça prend une gestion de bassin versant. Ça, vous êtes d'accord sur ce principe-là.

n(11 h 20)n

M. Généreux (Bernard): ...

M. Trottier: Bon. Vous dites: C'est sûr que c'est peut-être difficile parce que les MRC ne coïncident pas avec les bassins versants. Mais c'est possible de le faire; on a des exemples. Mais comment on pourrait concilier tout ça? Est-ce que vous pourriez nous dire, par exemple, en dehors du président de la commission qui pourrait gérer ça, qui pourraient être les autres membres du comité de bassin versant, qui les nommerait? Ça pourrait nous aider à voir s'il n'y a pas une solution qui pourrait faire qu'on pourrait gérer par bassin versant, ce qui apparaît pas mal à tout le monde la meilleure façon de gérer l'eau, puis qu'en même temps on ne crée pas des structures qui seraient désincarnées, qui tiendraient peut-être toute seules dans les airs, puis qu'on irait plus loin que de dire aux organismes de bassin versant: Vous allez proposer un plan, puis les MRC vont devoir en tenir compte.

Tu sais, dans le fond, ce que vous cherchez, c'est de faire en sorte que ça donne quelque chose. C'est ça que je comprends. Mais est-ce que vous seriez capables de nous aider à élaborer le modèle qui pourrait concilier ça, la gestion par bassins versants puis votre préoccupation de dire: Nous, il ne faut pas juste qu'on soit membres du comité... Tu sais, dans le fond, ce que vous dites: On ne veut pas juste siéger sur le comité de bassin versant, on voudrait que les bassins versants soient sous l'autorité de la MRC. Ça fait que comment on pourrait concilier tout ça, là? Qui nommerait qui? Qui pourrait faire partie de? Puis est-ce que vous pouvez nous garantir que, oui, vous êtes d'accord avec le principe qui est le principe fondamental, là, du projet de loi?

Le Président (M. Bergman): M. Généreux.

M. Généreux (Bernard): Bien, écoutez, je pense qu'un des éléments qui est peut-être inconnu au moment où on se parle, c'est celui du découpage des territoires inclus dans ces bassins versants. Bon. Je pense qu'on s'en va vers une trentaine, si je ne... Combien de...

Une voix: ...déjà 33.

M. Généreux (Bernard): On en a déjà 33. Donc, on voudrait les réduire ou en tout cas... Écoutez, je ne sais pas qu'est-ce qu'on va retenir comme espace ou comme territoire autour de ces bassins versants, mais je pense que c'est les bassins versants eux-mêmes qui vont nous en indiquer la composition. Parce que les réalités des bassins versants, j'imagine et je présume qu'elles vont varier en fonction aussi des réalités territoriales qu'elles vont couvrir. Donc, moi, je pense qu'il faut s'assurer qu'on a, autour de ces organismes-là, la représentation la plus exacte possible de la réalité des bassins versants de façon à ce qu'on puisse trouver écho de cette planification-là dans celle du schéma. Et ça, bien, moi, je pense qu'il faut que ces responsabilités-là encore une fois soient intégrées dans le sens de la... qu'on intègre bien dans nos planifications territoriales autour de nos schémas la réalité des bassins versants.

Et puis nécessairement qu'on devra jouer dans des espaces de territoire généralement plus larges ou différents du découpage de la MRC elle-même. Et c'est pourquoi, là, on doit réfléchir ensemble sur, à travers la révision en cours de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, cette préoccupation des bassins versants, qui est une préoccupation relativement nouvelle et qui n'était même pas dans l'idée du législateur lorsqu'il a mis en place les schémas d'aménagement de l'époque. Donc, il faut actualiser ça autour de cette importante question, puis on a, je pense, l'opportunité de le faire. Et ça, on pourra sûrement contribuer à l'ajustement nécessaire et requis pour qu'on fasse le travail correctement.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Est-ce qu'à partir du redécoupage que la ministre a sur la table, là, actuel, qui, entre autres au Saguenay?Lac-Saint-Jean, ferait qu'il y aurait deux bassins versants, est-ce que vous pourriez, à partir de ça, nous donner un exemple de que ça pourrait être, la formule que vous proposez, avec qui nommerait quoi, pour qu'on puisse voir si on pourrait trouver une solution qui pourrait concilier les différents intérêts là-dedans?

Le Président (M. Bergman): M. Généreux.

M. Généreux (Bernard): Bien, écoutez, moi, je pense que, là où les territoires se rejoignent, bien il faut s'assurer que ces territoires-là, au plan politique, se parlent. Donc, c'est, encore là, par la formule des comités conjoints qu'on va y arriver. Et il se pourrait que... Ça va être à géométrie variable, nécessairement. Donc, ça se pourrait que ce soient deux territoires, trois territoires de MRC qui se rejoignent autour d'un enjeu commun qui est celui des bassins versants. On le voit un petit peu, là, dans la relation qu'on a avec Hydro-Québec sur la proximité des ouvrages. Souvent, les territoires touchent deux, trois territoires puis qui se parlent entre eux sur le partage des redevances des aménagements hydroélectriques puis qu'il y a un territoire qui est complètement exclu, mais il y en a deux autres qui contribuent ou qui sont redevables de ces questions-là. Donc, moi, je me dis, c'est... Je pense, qu'on n'est pas loin de notre capacité de trouver une solution qui intègre déjà ce qui est en place, de façon à s'éviter des surprises au plan de la gestion après.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Les comités conjoints, ils auraient quels pouvoirs? Puis comment est-ce qu'on articule ça? Parce que dans le fond c'est comme de la concertation à ce niveau-là, là. Est-ce qu'ils auraient un pouvoir réel, ces comités conjoints là?

M. Généreux (Bernard): Dans la mesure où c'est ramené dans les planifications des schémas, ça devient, je dirais, une obligation qu'on se crée comme territoire sur la portion qui concerne ce bassin versant là dans l'un ou l'autre des territoires, mais ça suit sa filiation avec les autres planifications qui en découlent au plan local. Moi, je me dis, c'est là qu'on... Il faut s'assurer de la chaîne de responsabilités. Pour que tantôt, quand on voudra faire en sorte que ces planifications-là, ce ne soit pas juste de la vertu mais que ça trouve écho dans nos règlements locaux et municipaux, bien je pense qu'il y a un canal qui me semble incontournable.

Autrement, on va dire à un OBNL: Gère pour moi puis envoie-moi des commandes. Mais il n'aura pas de responsabilités légales, lui, puis il n'a pas de capacité de faire appliquer. Ça va revenir au monde municipal, ça, soyons-en très conscients. Puis, je me dis, c'est là qu'il faut se resserrer, là, pour éviter que... qu'on sorte du laxisme de la planification, parce qu'on s'en rend compte, là, avec les algues bleu-vert, que c'est notre laxisme à tout le monde qui nous a peut-être conduit là. Alors, il faut resserrer... se rappeler à l'ordre. Puis je pense qu'il y a une belle opportunité qui nous est offerte par l'adoption puis la mise en oeuvre de la Politique nationale de l'eau qui tantôt va nous contraindre à des changements de comportement. Puis ça, bien, ça passe souvent malheureusement par la réglementation, puis il faut déjà le prévoir.

Ce n'est pas un organisme de bassin versant qui va venir réglementer, là, entendons-nous. Ce n'est pas un OBNL qui... En tout cas, dans notre façon de gérer le territoire, actuellement, là, on ne confie jamais à un OBNL une responsabilité de règlement. Je pense que c'est par le monde municipal qu'on va y arriver. Mais je comprends qu'il y a des révisions de comportements à faire à travers ça, puis c'est une belle occasion qu'on a de le faire.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Sur la question du Bureau des connaissances de l'eau, vous demandez qu'il y ait une représentation formelle du monde municipal. Est-ce qu'il y a d'autres instances que vous pensez qui devraient obligatoirement y être?

M. Généreux (Bernard): Bien, écoutez, là comme, je pense, dans les organismes de bassin versant, il faut s'assurer que ceux qui sont concernés par la question de la gestion de l'eau, ils trouvent une place, là. Je pense que ce bureau-là, il est un peu, là, un chien de garde de la politique, puis, s'il faut, comme on le souhaite, s'inscrire dans un changement de comportements ou changement de nos rapports à l'eau, bien le bureau a un rôle à jouer, puis il faut que les principaux joueurs se retrouvent là. Maintenant, je ne suis pas en mesure de vous faire la liste exhaustive, là, mais je pense que, quand on sera rendus là, on pourra sûrement se partager des points de vue plus pointus sur cette représentation ou composition du bureau.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Sur la question des mécanismes de consultation, vous dites, là, que le gouvernement devra préciser ces mécanismes-là. Est-ce qu'à ce moment-ci... je comprends que vous n'êtes peut-être pas rendus là, mais est-ce que vous auriez des suggestions présentement?

M. Généreux (Bernard): Dans le fond, on veut juste s'assurer que cette étape qui est prévue au projet de loi, où on annonce, je dirais, une opération de... je ne sais pas si c'est le mot «consultation» formellement qu'on utilise dans le projet, mais on ne précise pas la manière par laquelle cette consultation, où on invitera les citoyens à se manifester sur cette action-là, cette opération-là... Bon, est-ce que c'est par Internet, c'est par, bon, des consultations formelles, etc.?

Puis on veut juste éviter aussi de revivre ce qu'on vit par ailleurs dans un autre dossier qui est celui de la consultation obligatoire en matière d'implantation de l'industrie porcine, où la consultation est en fait davantage une opération d'information que de consultation. Parce que souvent la consultation, ça induit qu'on va prendre acte de ton point de vue pour l'intégrer dans une décision, alors que, dans ce modèle-là, la décision vient souvent en amont de la consultation. Donc, on veut que la consultation, si c'est le cas, prenne tout son sens puis qu'on puisse l'intégrer dans la prise de décision à venir.

Le Président (M. Bergman): Merci. Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. Généreux, M. Bergeron, merci pour votre présentation, merci d'être avec nous aujourd'hui.

Je demande aux gens de l'Union des producteurs agricoles de prendre place à la table. Je suspends nos travaux pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 30)

 

(Reprise à 11 h 35)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue à l'Union des producteurs agricoles, M. Lacasse, M. Bernier. Bienvenue d'être avec nous. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Si vous pouvez vous identifier. Et vous avez les prochaines 15 minutes.

Union des producteurs agricoles (UPA)

M. Lacasse (Christian): Merci. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Christian Lacasse, je suis président de l'Union des producteurs agricoles depuis décembre dernier. Et Daniel Bernier, qui m'accompagne, est agronome et aussi permanent responsable sur les dossiers de l'environnement depuis de nombreuses années.

Alors, M. le Président, Mme la ministre du Développement durable et de l'Environnement, Mmes et MM. les membres de la commission, on est très heureux de pouvoir participer à la réflexion sur l'avenir de la ressource eau et surtout aux discussions amenant aussi à une meilleure protection de cette ressource-là dans l'avenir.

Alors, avec beaucoup d'intérêt, on a pris connaissance du projet de loi et, je dirais, d'emblée, on appuie la démarche gouvernementale de faire en sorte qu'on puisse mieux protéger cette ressource-là et de faire en sorte qu'on puisse... Tenant compte que l'eau est essentielle à la vie, que l'eau est essentielle aussi en agriculture, bien on considère, là, que, malgré sa relative abondance au Québec, on croit qu'il est quand même nécessaire... parce qu'il faut considérer que c'est toujours fragile, une ressource, selon les différents usages, les nombreux usages qu'on peut en faire, de l'eau, c'est toujours fragile, et qu'il faut faire davantage pour la sauvegarder. Alors, dans ce cadre-là, bien l'adoption d'un cadre législatif et la mise en oeuvre d'une gouvernance destinée à en assurer la saine gestion s'avèrent des plus pertinentes.

Le projet de loi soulève aussi un certain nombre d'interrogations et de préoccupations de notre part relativement, je dirais, au principe utilisateur-payeur, au principe pollueur-payeur, ainsi que le nouveau régime d'autorisation pour les prélèvements d'eau souterraine. Puis on fera un dernier commentaire sur notre vision de la gestion de l'eau par bassin versant.

En ce qui concerne l'aspect collectif de l'eau, vous dire que, pour nous, l'UPA s'est déjà positionnée à deux reprises avant aujourd'hui. Elle l'a fait en 1996, lors de la politique de protection, un projet de politique de protection et de conservation des eaux souterraines, en 1996, comme je le mentionnais. et on avait renouvelé ce positionnement-là en 1999, lors des audiences du BAPE sur la gestion de l'eau au Québec. Et ce qu'on avait émis, puis on le répète aujourd'hui, ce qu'on affirmait, c'est que «le caractère fondamental de cette ressource nous amène en effet à conclure qu'elle doit être gérée au bénéfice [de la société ou] de la collectivité. De plus, avec la concurrence grandissante pour la ressource, des fermes pourraient se retrouver dans une situation précaire si la disponibilité en eau venait qu'à faire défaut suite à sa surexploitation. Les producteurs veulent ainsi s'assurer que le statut juridique de l'eau ne mettra pas en péril la pratique et le développement de l'agriculture.» Alors, c'était une affirmation, je pense, qui était pertinente à l'époque, mais auquel on est tout à fait à l'aise aussi, aujourd'hui, de renouveler.

En ce qui concerne le principe utilisateur-payeur, bien ça fait partie des préoccupations qu'on veut soulever auprès de la commission. Or, si l'intention du gouvernement est de tarifer... En ce qui concerne la tarification de l'eau pour l'usage, pour l'agriculture, ça nous semble, pour nous, inacceptable, en fait pour quelques raisons, mais je vais en mentionner deux, raisons.

n(11 h 40)n

La première, c'est que l'utilisation qui est faite de l'eau en agriculture, c'est pour produire des aliments. Or, essentiellement, l'agriculture, les producteurs, les agriculteurs utilisent... Bon, la consommation qu'ils font de l'eau, c'est pour produire des aliments, bon, faire l'élevage des animaux, faire pousser les plantes. Or, une taxe sur l'eau, pour nous, équivaudrait à une taxe sur la nourriture. On pense que l'utilisation de l'eau en agriculture est essentielle et que, comme première raison, elle ne devrait pas être tarifée.

L'autre raison, c'est vraiment un enjeu de compétitivité pour les fermes québécoises. Il faut savoir qu'en Ontario, l'an passé, en 2007, ils ont adopté une nouvelle politique de gouvernance de l'eau et ils ont exclu, ils ont exempté l'agriculture de la tarification. Si on regarde plus loin, nos voisins du Sud, pour produire des fruits et des légumes qui se retrouvent sur nos tablettes d'épicerie ici, au Québec aussi, les fermes en Californie sont subventionnées, sont subventionnées pour irriguer leurs champs pour faire pousser ces cultures-là. Alors, vous comprenez que, si, nous, on se retrouve avec une tarification, alors qu'eux sont subventionnés, on va venir encore plus agrandir l'écart de compétitivité entre nous et nos voisins du Sud, qui n'est déjà pas facile en termes de concurrence, là, de la part des producteurs maraîchers ici, au Québec.

Il faut savoir aussi qu'un secteur comme les maraîchers, ou le secteur horticole au Québec, est déjà contraint à des frais qu'on considère importants pour obtenir l'autorisation d'eau de captage, de structures d'eau de captage. Alors, on parle des frais de 4 000 $ pour au-delà de 300 m³ d'eau-jour, et, pour ces producteurs-là, c'est déjà une dépense importante, et à ça s'ajoutent des études hydrogéologiques que le producteur doit faire en vertu des obligations à l'égard du ministère de l'Environnement. Alors, quand on considère le 4 000 $ plus quelques dizaines de mille dollars pour les études hydro, bien il faut considérer que l'eau, la disponibilité de l'eau pour certains agriculteurs, n'est donc déjà pas gratuite, là. Alors, si, en théorie, la mise en oeuvre du principe utilisateur-payeur peut contribuer à une plus grande responsabilisation des usagers, en ce qui concerne l'agriculture, nous, on considère que, même marginale, s'il y avait une tarification marginale, ça viendrait nuire à la compétitivité de nos entreprises agricoles et s'additionner à un certain nombre de dépenses inhérentes au respect de la réglementation environnementale auxquelles les producteurs sont contraints de respecter. Alors, il y a déjà des frais, il y a un certain nombre de coûts qui s'ajoutent à nos frais de production actuellement pour répondre aux normes élevées environnementales. Alors, il ne faut pas, en plus de ça, appliquer une tarification.

Sur le principe pollueur-payeur, la façon qu'on voit ça, nous, c'est la seule éventualité possible pour nous de... ou dans quelle considération on pourrait... ça peut s'appliquer, c'est pour éviter des comportements qu'on considère délinquants. En ce qui concerne... Ah oui, ce qu'il faut absolument éviter, c'est que ça devienne... qu'on en fasse une application qui amènerait, je pense, une utilisation déraisonnable de ce principe-là.

Puis je pense que ce qui est important... un autre élément qui est important pour nous, c'est de prendre en considération ce qui s'applique déjà en agriculture. Je faisais mention tantôt qu'on est contraints de respecter des normes, des règles environnementales qui sont relativement élevées si on se compare au reste du Canada et si on se compare ailleurs dans le monde et que, si des producteurs ne respectent pas cette réglementation-là, on sait qu'il y a des infractions et des sanctions qui sont appliquées. En plus, il y a le principe d'écoconditionnalité qui s'applique depuis quelques années et qui s'applique à tous les programmes gouvernementaux de protection du revenu et de financement agricole et aussi à l'égard du Programme de remboursement des taxes... ou de crédits de taxes, comme on... avec les dernières modifications, il y a une couple d'années.

Alors, il y a présentement, déjà, il y a des sanctions qui s'appliquent. Si un producteur n'est pas en mesure de fournir son bilan en phosphore ou il n'est pas conforme avec son statut d'équilibre, son objectif d'équilibre phosphore à la ferme, il y a déjà des sanctions, il y a déjà des coupures dans les programmes de sécurité du revenu qui s'appliquent. Alors, nous, pour ces raisons-là, on croit qu'il n'est absolument pas pertinent, en ce qui concerne le secteur agricole, d'imposer des pénalités supplémentaires. Je vous dirais que, tenant compte déjà des sanctions qui sont prévues et appliquées dans le secteur agricole, les producteurs, ce qu'ils font, c'est qu'ils se rendent conformes et ils respectent l'environnement depuis les dernières années.

Quelques commentaires sur le régime d'autorisation des prélèvements d'eau souterraine. Alors, premier commentaire sur le 75 m³ d'eau, vous dire que, même si la très grande majorité des agriculteurs n'ont pas un tel besoin de consommation d'eau par jour, il n'en demeure pas moins que, pour certains secteurs, comme les maraîchers, c'est une majorité de producteurs qui sont touchés par cette mesure-là. On parle d'environ 1 000 producteurs maraîchers à travers le Québec qui sont contraints par le 75 m³ d'eau. Puis il ne faut pas penser que c'est des grandes entreprises, là. On a fait un petit calcul. Or, pour un producteur maraîcher, c'est l'équivalent de 2,1 ha. Alors, s'il cultive au-delà de 2,1 ha, ce qui est vraiment... quand même ce n'est pas des grandes superficies, on croit, là, qu'il est déjà au-delà du 75 m³. Alors, il faut être conscient de cette réalité-là, être conscient que déjà ces producteurs-là sont contraints, comme je le mentionnais, à des droits d'autorisation et des frais qui sont reliés à ça.

Un commentaire concernant la révocation ou le non-renouvellement, parce qu'on parle, là, d'un délai de 10 ans, je vous dirais que l'inconvénient que ça crée en agriculture, c'est qu'une entreprise qui est assujettie à ça, bien ça lui donne un statut précaire vis-à-vis ses institutions bancaires. Alors, évidemment, si l'institution réalise qu'il pourrait y avoir un problème pour cette entreprise-là de s'approvisionner en eau éventuellement, ça peut créer des sérieux problèmes de crédit pour ces entreprises-là.

Je vais aller immédiatement à la gestion de l'eau par bassin. Je vous dirais, parce que... Nous, on l'aborde de façon très positive, on y croit depuis un certain nombre d'années. On fait partie, là... Avec le ministère de l'Environnement, le ministère de l'Agriculture, on a développé ensemble un plan d'action concerté. Un des volets importants de ce plan-là, c'est justement de réaliser des projets pilotes concrets de protection de rives de façon à ce qu'on puisse mieux protéger la qualité de l'eau dans le futur, et, selon nous, c'est la bonne méthode. Ces projets-là devraient nous permettre d'élaborer éventuellement une stratégie plus globale qui couvrirait l'ensemble des bassins à travers le Québec pour faire en sorte qu'on améliore et que ça donne vraiment des résultats concrets d'amélioration de la qualité de l'eau dans nos bassins.

Il faut considérer, dans ces projets-là, l'effet mobilisateur parce que déjà il y a au-delà de 1 000 producteurs qui participent, qui posent des gestes aux abords des cours d'eau pour faire des aménagements, éviter l'érosion, faire en sorte qu'il y ait des distances séparatrices et qui... même au-delà des distances minimales dans certaines zones, de façon à ce qu'on s'assure que la qualité... que l'impact est réduit à son minimum. Or, les 1 000 producteurs, ça va être un effet mobilisateur, un effet de rayonnement, je dirais, pour les prochaines années.

Un dernier commentaire. Alors, l'UPA s'est engagée pour la protection de l'environnement et le développement durable de l'agriculture depuis le milieu des années quatre-vingt-dix. Je veux profiter de l'occasion, aujourd'hui, pour renouveler cet engagement-là de l'UPA. On fait beaucoup de sensibilisation, on accompagne les producteurs, on fournit des services techniques aux agriculteurs pour être en mesure de... que les producteurs puissent poser des gestes.

n(11 h 50)n

Le Président (M. Bergman): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Lacasse (Christian): Alors, c'est ça. Merci.

Le Président (M. Bergman): Merci, M. Lacasse. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Lacasse, bonjour, M. Bernier, merci de votre contribution à cette commission.

J'ai bien compris, d'autant plus qu'on avait eu l'occasion d'échanger un peu avant la présentation du projet de loi, que, tout comme vous l'avez fait par le passé, lors de la commission Beauchamp ou de la Politique nationale de l'eau, vous donnez, je dirais, un appui général au principe qu'il faut avoir les bons mécanismes pour être capable de dire qu'on est capable, au Québec, pour les générations futures, de préserver la ressource.

Maintenant, vous avez fait part, je dirais, de certaines appréhensions au niveau du projet de loi. Il y a peut-être un premier point, très rapidement, sur lequel je veux plus vous entendre parce que... Votre premier bloc, c'est sur la question du statut juridique de l'eau. Quand on vous lit, vous semblez dire: On donne notre appui à cet éclaircissement sur le statut juridique de l'eau. Mais, dans votre mémoire, vous dites donc que vous êtes «favorable aux dispositions de la loi confirmant que les ressources en eau constituent un patrimoine commun...» Mais la phrase se termine ainsi: «...pourvu que les usagers actuels conservent entièrement leur droit d'usage.» Donc, vous semblez comme introduire, là, une condition, puis très sincèrement j'ai de la difficulté à comprendre à la lumière ensuite de tout le reste du mémoire.

Quelle est vraiment cette condition que vous introduisez par cette phrase, puisque, comme vous le savez... Vous avez émis des commentaires sur comment ça fonctionne, mais je ne pense pas avoir lu d'opposition nette, claire et précise, par exemple, au principe du certificat d'autorisation renouvelable aux 10 ans. Vous avez mentionné des appréhensions. Mais là, quand je lis la phrase, on dirait que j'ai de la misère à bien comprendre quelle est cette condition que vous introduisez entre la notion de définir l'eau, qu'elle soit souterraine ou de surface, comme étant un bien commun selon le Code civil et donc faisant partie du patrimoine des Québécois, mais le fait que vous disiez «pourvu que les usagers actuels conservent entièrement leur droit d'usage».

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Oui. Bien évidemment, quand je parle des... Les usagers actuels, c'est nos agriculteurs et nos agricultrices, qui sont quand même... L'exemple que je vous donnerais, c'est... Tout en ne remettant pas en cause le caractère collectif, moi, je pense qu'il faut l'atteindre, cet objectif-là, il faut faire en sorte, là, que... La juridiction fait en sorte, là, que l'eau est... bon, il y a des règles, il y a des normes qui doivent s'appliquer pour... dans le bien commun de la société en ce qui concerne l'utilisation de l'eau.

En contrepartie, il y a des agriculteurs, bon, qui ont des entreprises, vous le savez, agricoles, qui ont aussi à définir, je dirais, ou assurer une pérennité de leur entreprise agricole. Alors, ce qu'on dit simplement, la condition qu'on pose, c'est que, dans les règles, dans les normes que le gouvernement va devoir mettre en place éventuellement... Il y en a déjà, des normes, des règles. Ce qu'on dit, c'est que, s'il y a d'autres normes et d'autres règles, d'autres considérations, on devra s'assurer de la pérennité de nos entreprises agricoles aussi. Parce que le gestionnaire de son entreprise, lui... Je vous l'ai dit, l'eau est essentielle à l'agriculture. On ne peut pas dire à l'agriculteur: Bien... Je dirais, moi, je suis un producteur de lait: Bien là, tu sais, c'est telle consommation, puis, au-delà de ça, bien ce n'est pas possible. Tu sais, on le sait, que ce serait... tu ne peux pas faire fonctionner une entreprise de cette façon-là. La même chose pour les cultures. Alors, c'est, je ne sais pas... je pense, avec des exemples comme ceux-là, ça vous démontre, là, ça explique un peu cette condition-là qu'on pose, c'est qu'il faut s'assurer que, dans cet objectif de patrimoine collectif, l'utilisateur, bon, l'utilisateur actuel est en mesure aussi d'assurer la pérennité de son entreprise.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: On se comprend bien, la loi, elle vient ajouter, elle ne soustrait pas, ça, j'en conviens avec vous, elle vient ajouter des outils pour qu'on soit en mesure ? puis vous partagez cette préoccupation-là ? de préserver la ressource pour les générations futures. Quand je lis votre phrase, j'ai... Je vais la résumer en mes mots. Puis à escient je vous avertis en disant... Je suis sûre que vous allez me dire: Vous exagérez. Mais c'est un peu pour les fins de la discussion puis du débat, là. Mais c'est comme si un peu je lisais la phrase qui dit: Pour le futur, on est d'accord pour dire que l'eau est une chose commune en vertu du Code civil, faisant partie du patrimoine collectif des Québécois, mais jusqu'à maintenant certains de nos membres pensaient qu'elle était à eux autres si elle était sur leur terrain puis qu'ils pouvaient en user comme ils voulaient, puis ça, il ne faudrait pas que ça change, alors qu'on se dit: Une fois qu'elle est rendue une... qu'on a clarifié qu'elle est une chose commune et que le gouvernement en est un gardien, on comprend que... puis que les choses peuvent être changées dans le futur, on le sait, avec les changements climatiques, puis il y a eu des conflits d'usage sur certains territoires québécois, donc... Je vous ai vu sourire puis je vous l'ai dit à escient que j'allais être un peu... provoquer les choses, et tout ça, que j'exagérais, mais ça va plutôt vous permettre de clarifier. Ce n'est pas ça que vous voulez dire...

M. Lacasse (Christian): Absolument pas.

Mme Beauchamp: ...en disant que les usagers actuels, eux autres, ils seraient propriétaires de leur eau, puis c'est les autres... On s'entend sur le fait que l'eau est une chose commune en vertu du Code civil, là.

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Puis je pense qu'on le répète à quelques reprises, là. Alors, d'aucune façon, cette condition-là ne vient remettre en cause le principe, là, d'utilisation... de patrimoine collectif de l'utilisation de l'eau. Je fais juste répéter que... Vous l'avez dit, je reprends vos mots, vous avez dit: Le projet de loi va ajouter, il ne soustraira pas. Dans ce que vous allez ajouter, ce qui pourrait être ajouté possiblement, ce qu'on vous dit, c'est: Attention! Attention, parce que, dans certains cas, si on va trop loin, si le gouvernement va trop loin, ça risque de mettre en péril certaines entreprises agricoles ? c'est peut-être exagéré, ça, ce que je dis ? sinon, c'est que ça peut nuire de façon importante à la compétitivité de nos fermes, pour qui c'est déjà un défi de placer des fruits et des légumes dans nos épiceries parce que les produits d'ailleurs qui sont subventionnés pour l'utilisation de leur eau... C'est ça qu'on vous dit. C'est juste ça.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: C'est parfait. Je pense que, moi, la confusion arrivait parce que vous l'avez mis dans vos remarques sur la définition, là, tu sais, le... alors que vous dites juste: On est d'accord, mais c'est un commentaire général, ce commentaire, sur le reste des outils de gouvernance que la loi donne au gouvernement. On se comprend bien, donc l'eau...

M. Lacasse (Christian): De là les chapitres suivants.

Mme Beauchamp: L'eau est une chose commune en vertu du Code civil, qu'elle soit souterraine ou de surface. Je voudrais vous entendre parce que je pense que l'impact du projet de loi sur la compétitivité des entreprises, il est sous deux angles. Encore là, je vais résumer sûrement... pas de façon correcte, là, mais je vais tenter de résumer votre loi. Il y a deux angles. Il y a l'angle où on dit qu'il y aura ce débat sur la redevance, et vous nous exposez que le monde agricole dans d'autres juridictions a été exclus du principe de la redevance, et je prends bonne note de ces commentaires-là. Mais après ça la loi vient amener d'autres considérations, dont, entre autres... Et je voudrais vous entendre plus longuement là-dessus.

Effectivement, la loi vient apporter, je dirais, là, un outil supplémentaire sous le principe du pollueur-payeur, qui est un principe qu'on peut intenter des recours au civil pour obtenir réparation s'il y a eu dommage de la ressource. Puis là vous semblez nous dire: Nous, on a déjà un certain nombre de dispositifs réglementaires qu'on doit respecter. Puis là je ne voudrais pas vous mettre... Je vais plutôt vous laisser commenter. Moi, quand je vous ai écouté, c'est comme si vous disiez: Bien, cette notion qu'on pourrait... que le gouvernement pourrait intenter des recours pour obtenir une réparation d'une ressource endommagée, c'est comme si vous disiez: Bien là, c'est de trop parce que, nous, on est déjà soumis à un ensemble de dispositifs.

Alors que vous comprenez que ma vision à moi des choses est de dire: Bien, on peut avoir un ensemble de dispositifs réglementaires, mais, quand, à la fin, l'histoire veut qu'une ressource a été atteinte, bien il faut qu'on se donne ce pouvoir-là supplémentaire qu'on n'a pas actuellement, au nom des Québécois, avec l'objectif ultime qui est d'obtenir réparation de la ressource qui aurait été atteinte ou, disons, contaminée. Mais je veux plus vous entendre... Ça, ça semble vraiment vous préoccuper, puis je veux plus vous entendre sur cette notion-là. Parce que c'est évident qu'on introduit un nouveau recours pour obtenir réparation. Et je veux plus vous entendre sur toutes les préoccupations que ça semble susciter pour votre association.

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

n(12 heures)n

M. Lacasse (Christian): Oui. Je vais reprendre les principaux éléments, bon, que j'ai mentionnés tantôt, peut-être en y allant de façon un petit peu plus explicite, mais, bon, on sait que la réglementation, au Québec, environnementale, en ce qui concerne l'agriculture, est à un niveau très élevé. Moi, j'ai eu l'occasion d'aller à l'extérieur, je suis allé ailleurs au Canada, je suis allé aux États-Unis, en Europe, et on a une réglementation qui est très élevée en ce qui concerne l'agriculture. Ça fait en sorte que le producteur, pour y répondre... Puis je pense que, dans la très, très grande majorité des producteurs, ils y répondent. S'ils n'y répondent pas, il y a des sanctions déjà qui s'appliquent. Ça, c'est le premier élément.

Il y a quatre à cinq ans, il y a des discussions qui ont été enclenchées avec, je dirais... au niveau de la société mais principalement à partir du gouvernement, à l'effet d'imposer le principe d'écoconditionnalité sur les programmes de subvention qui s'appliquent aux agriculteurs. Aujourd'hui, ce principe-là, il s'applique. Je voudrais juste vous dire qu'on l'a vécu difficilement, ce principe-là, hein? Il fallait définir comment ça s'appliquerait, il fallait aussi s'assurer que les producteurs aient le temps nécessaire puis la capacité, là, de rejoindre la réglementation. Mais, aujourd'hui, il s'applique, ce qui fait qu'à chaque année on peut penser qu'il y a des entreprises agricoles qui ont des pénalités, puis il y en a, il y en a. La Financière agricole administre les programmes, ces programmes-là, puis il y a des entreprises déjà, si elles n'ont pas respecté la réglementation, si elles ont eu un impact négatif par rapport à l'environnement parce qu'elles ne répondaient pas à la réglementation, elles ont des sanctions qui sont déjà prévues. Ce qu'on vous dit, là, c'est qu'il me semble que c'est déjà suffisant pour les agriculteurs. Il y a déjà des sanctions qui s'appliquent si les producteurs ne respectent pas... et s'ils ont un impact négatif sur l'environnement. On croit que ce n'est pas pertinent, ce n'est vraiment pas nécessaire d'imposer des mesures supplémentaires auprès des agriculteurs. C'est ça, le message qu'on veut vous laisser ce matin.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Là, on m'avertit qu'il me reste juste cinq minutes, puis ça ne se peut pas, je veux vous entendre sur bien trop d'autres sujets. Très rapidement, je vais donc essayer de vous... Je veux juste vous inviter... Je vous entends, en même temps je vous invite, pendant quelques secondes, à vous mettre dans la chaise des législateurs qui auront à adopter une loi sur la protection de l'eau. Il peut y avoir actuellement des pénalités. Comment on fait pour obtenir la notion de la réparation? Il peut y avoir des pénalités. Mais ici ce qu'amène cette notion de recours, c'est une notion de réparation. Et, moi, ça me laisse un peu en plan sur: Oui, mais, au nom des Québécois, dont l'eau fait partie du patrimoine commun, est-ce qu'on est, en 2008, capable de dire qu'on peut exiger réparation? Je pense qu'il est là, le débat, même s'il existe tout ce régime que vous appelez de pénalité, là, mais qu'on va appeler d'écoconditionnalité.

Mais je veux vous entendre, très rapidement, mais je veux vous entendre sur deux derniers points. Vous avez des commentaires sur les articles de loi qui prévoient une hiérarchisation des usages de l'eau, et je voudrais que vous développiez un peu. On a rencontré l'Association des maraîchers. Eux-mêmes reconnaissaient, à des questions posées, si je ne me trompe pas, par le député de Roberval, qu'il était difficile d'en venir à bien définir, par exemple, un établissement agricole qu'on dirait une ferme familiale par rapport à d'autres, et tout ça. Mais je veux vous entendre un peu plus explicitement sur vos commentaires sur la hiérarchisation que prévoit le projet de loi.

Puis finalement je voudrais aussi vraiment vous donner l'opportunité de nous parler un peu plus des projets qui sont en cours de collaboration avec notamment les organismes de bassin versant. Moi, j'ai fait une tournée. Très souvent, dans ma tournée, l'année passée, très souvent ? puis vous le savez, il y avait des membres chez vous présents autour des lacs où j'étais ? très souvent vos membres sont pointés du doigt lorsqu'il est question des problématiques d'eau, les algues bleues. Moi, je suis souvent intervenue pour dire que, si vous faisiez partie du problème, il fallait que vous fassiez partie de la solution mais que ça ne voulait pas dire que partout vous faisiez partie du problème. Indéniablement, ce n'est peut-être pas le cas dans certaines régions, c'était déjà existant, mais ça a enclenché une série de projets. Puis je voudrais... parce qu'il a été question aussi de gouvernance ici des OBV, des MRC, j'aimerais que vous nous racontiez un peu plus le type de projet mené sur le terrain par le Plan d'action concerté puis par les sommes supplémentaires du rendez-vous sur les algues bleues.

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse, vous avez deux minutes pour répondre à ces questions.

M. Lacasse (Christian): Hé! Bon, juste un petit... Sur le principe de réparation que vous évoquez, moi, la façon que j'ai vu évoluer la réglementation puis, je dirais, la réflexion autour de la réglementation qui s'est développée autour de l'agriculture depuis les 10, 15 dernières années, pour moi, c'était de l'ordre de la prévention: comment on peut prévenir, on peut minimiser l'impact de l'agriculture sur l'environnement. C'était ça, selon moi, la logique, là, de ce qui a fait que, bon, la réglementation est devenue de plus en plus sévère et qu'il y a un principe d'écoconditionnalité qui s'applique. Selon moi, aujourd'hui, c'est encore la meilleure façon, il faut prévenir les risques. Alors, avant de passer à une autre étape, là, qui est la réparation, selon moi, avec ce principe-là de prévenir les risques, ça fait son travail, ça fait son oeuvre. Il n'y a pas besoin d'ajouter un principe de réparation.

Sur la priorité des usages, écoutez, selon nous, si on a à mettre un ordre de priorité dans les usages, évidemment, là, les besoins de la population pour la consommation humaine de l'eau, c'est le premier en tête de liste, on ne remet pas ça en cause. Sauf, ce qu'on vous dit, c'est que l'utilisation de l'eau pour l'agriculture et produire des aliments, elle doit être en tête de liste. Or, si, dans une priorisation d'usages, on doit mettre un par rapport à l'autre, ce qu'on vous dit, c'est que l'agriculture doit être considérée à sa juste valeur dans cet ordre de priorités là.

En ce qui concerne les projets, écoutez, moi, j'ai vu des agriculteurs très engagés, là, puis il y en a de plus en plus au Québec qui sont conscients qu'il faut mieux protéger les cours d'eau au Québec. Et, moi, je crois beaucoup à cette mobilisation des producteurs. Tantôt, je vous disais...

Le Président (M. Bergman): Conclusion, s'il vous plaît.

M. Lacasse (Christian): Pardon?

Le Président (M. Bergman): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Lacasse (Christian): En conclusion, alors, il faut... Mais la façon qu'on va mobiliser les producteurs dans ce mouvement-là, c'est qu'il y ait une place sur les comités de bassin, hein, une place, parce qu'ils veulent faire partie des décisions à l'échelle de leurs bassins. Et il faut s'assurer aussi, là, que les agriculteurs vont disposer des outils nécessaires, puis je pense qu'essentiellement le Plan d'action concerté, il vise à supporter les producteurs dans ce mouvement-là. Moi, j'y crois beaucoup, mais c'est des expériences pilotes, et la prochaine étape, c'est qu'il faut viser l'ensemble des bassins versants au Québec.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Merci, M. le Président. M. Lacasse, bonjour. M. Bernier. On s'était rencontrés l'année passée, je ne sais pas si vous vous souvenez. D'ailleurs, je vais même répéter une question que je vous avais adressée l'année passée pour voir s'il y a eu évolution.

Première des choses, j'aimerais revenir sur une discussion que vous aviez avec Mme la ministre de l'Environnement, tout à l'heure, là, sur la question de la réparation. Parce que, de la manière que je comprends le projet de loi, la manière dont il m'a été présenté jusqu'à maintenant, c'est qu'on enlève une notion de faute dans un procédé, ce qui nous permet, en tant qu'État, de pouvoir réparer un inconvénient. C'est très, très simple à comprendre, lorsqu'on parle d'un déversement d'un produit toxique, mettons, par exemple, dans un port, même si tous les éléments du problème ont été faits dans les règles de l'art, puis qu'il n'y a pas eu nécessairement de négligence, puis que c'est dû à des accidents, on exige quand même une réparation dans l'intérêt des Québécois. Et vous faites mention vous-mêmes aux cyanobactéries, dans votre mémoire, où on pourrait identifier un agriculteur qui, pas parce qu'il y a eu négligence, là, mais parce que c'est... même en respectant la réglementation, est responsable de la détérioration d'un lac. Dans cette situation-là, vous ne pensez pas que ce serait pertinent d'exiger une certaine réparation?

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

n(12 h 10)n

M. Lacasse (Christian): Bien, moi, ça me pose des questions, là. Parce que je prendrais l'exemple de bien des producteurs, là, tu sais, qui, dans leurs pratiques sur la ferme, respectent la réglementation puis font... je dirais, il n'y a pas d'écoulement, ils ont une structure d'entreposage, ils respectent les distances séparatrices, ils respectent le plan de fertilisation, mais il y a du phosphore dans le cours d'eau. Il vient d'où, le phosphore, là? Puis en quoi le producteur peut être tenu responsable, là, du phosphore qui est dans le cours d'eau?

Moi, en termes d'application, là, si c'est ça, le principe de réparation, on va en discuter longtemps, là, parce que je ne vois pas comment on va arriver à demander réparation à des producteurs dans ces conditions-là. Je dirais, le producteur au départ va faire valoir que, s'il compare les normes auxquelles il a à répondre ici, c'est beaucoup plus élevé que partout ailleurs dans le monde puis qu'en plus, là, on lui demande réparation qui... on n'est même pas capable de faire la démonstration que c'est lui qui... que c'est le phosphore qui vient de sur sa ferme. On va faire ça comment?

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Dans le cas où on serait capable de dire que c'est le phosphore qui vient de sa ferme... Je comprends que des fois il y a des situations, tu sais, qui sont très complexes, plusieurs intervenants dans le dossier, puis il n'est pas possible de dire qui est le responsable. Mais, dans l'éventualité où ce serait un agriculteur qui le serait, responsable, et qui malgré tout, en toute bonne foi, il ne peut pas empêcher l'apport sinon par d'autre chose, mettons un avaloir, un bassin de rétention, des choses qui ne sont pas nécessairement exigées non plus par la réglementation, à ce moment-là, est-ce que vous seriez d'accord si c'est clairement défini que c'est lui, le responsable?

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Puis il va être responsable à quel niveau? Comment on va déterminer le niveau? Parce que ce n'est pas une science exacte, hein? Ça peut arriver que... La pollution diffuse, vous savez c'est quoi. Ce n'est pas comme une pollution directe, là. Alors, il peut y en avoir une partie, mais le niveau va déterminer que ce producteur-là est plus responsable que ses voisins? Je vous avoue, là, que, pour un producteur qui est sur sa ferme, là, ça ne tient pas la route. Je ne vois pas comment on peut arriver à mettre... à appliquer un principe comme celui-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: À la page 10 de votre mémoire, vous faites référence aux organismes de bassin versant. Vous suggérez qu'évidemment le producteur agricole se devrait d'être excessivement présent sur ces organismes-là, d'être une partie prenante. Actuellement, est-ce que vos membres sont impliqués fortement dans les organismes de bassin versant ou c'est encore très marginal?

M. Lacasse (Christian): Non, je vous dirais que, selon moi, là, dans la majorité des comités de rivière ou de bassin, les agriculteurs sont présents. Soit c'est des représentants de syndicats de base ou des fédérations régionales ou des producteurs qui ont été délégués, là, par ces instances-là. Et ils sont actifs, je vous dirais, là. Puis, je vous dirais, c'est aussi suite à une réflexion qu'on a faite, je pense, puis on a coordonné une certaine présence, on voulait s'assurer que les agriculteurs soient présents autour de ces tables-là. Les agriculteurs... l'agriculture est riveraine dans presque tous les bassins. Alors, c'est important, là, que, si on veut améliorer la qualité de l'eau, si on veut développer des mesures, des projets, bien, que les producteurs puissent y adhérer. C'est une bonne façon.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Merci, M. le Président. Mis à part les quelques représentants de vos membres qui sont présents dans les organismes de bassin versant, un producteur, tu sais, un producteur X, là, commun, est-ce qu'il a fréquemment des liens avec des organismes de bassin versant? Est-ce que c'est omniprésent ou on pourrait passer, tu sais, une carrière complète dans le milieu de l'agriculture sans être pris à part avec les organismes de bassin versant? À quel moment... pas à quel moment, mais quelle importance jouent les organismes de bassin versant dans la vie de tous les jours d'un agriculteur?

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Bien, moi, les expériences que j'ai vues, là, d'organismes de bassin, l'organisme de bassin se donnait des objectifs, je dirais, sur une base volontaire à l'effet que l'ensemble des producteurs riverains puissent améliorer, je dirais, ses pratiques pour faire en sorte qu'il y aurait un impact positif sur la qualité de l'eau. Je pense qu'en général, de façon volontaire, les producteurs, là, collaborent et participent à ces projets-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Mais est-ce qu'un organisme de bassin versant va rencontrer vos membres, faire de la promotion, les consulter ou généralement ils font ça en vase clos, c'est simplement les représentants de vos membres qui y travaillent pour ensuite arriver avec des objectifs?

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Bien, encore une fois, ce que j'ai vu, c'est que l'organisme de bassin va tenir des assemblées de producteurs, va rencontrer, va regrouper les producteurs pour leur transmettre c'est quoi, les objectifs que le comité de bassin poursuit puis de voir quelle peut être la contribution des agriculteurs, là, à cet objectif-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Une dernière question avant de passer la parole à mon collègue de Montmagny-L'Islet. C'est d'ailleurs la question que je vous avais posée l'année passée, M. Bernier, concernant l'épandage. Plusieurs personnes m'ont parlé de la granulation, d'épandre des granules. Est-ce que ce serait une solution à la pollution de l'eau qu'on pourrait vivre parfois avec l'épandage? Qu'est-ce que vous en pensez?

Le Président (M. Bergman): M. Bernier.

M. Bernier (Daniel): En fait, bien, le traitement des lisiers est envisageable dans certaines situations, mais il faut savoir que c'est coûteux par contre, là. Mais par ailleurs l'épandage des lisiers, lorsque c'est fait selon les règles de l'art, ce que les experts nous disent, c'est que ce n'est pas plus dommageable pour l'environnement que la gestion solide. Ça devient plus à risque lorsque c'est mal géré. Mais, si c'est bien géré, et c'est le cas de façon générale depuis les plans de fertilisation, les doses qui ont été passablement réduites, donc ce n'est pas plus à risque. Même, à la limite, ça peut procurer certains avantages, la gestion liquide, parce que c'est un fertilisant qui est très efficace immédiatement pour la plante. Donc, lorsque bien géré, ce n'est pas le fait d'être liquide, là, qui est problématique.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux. Parfois, il y a une grande différence entre vivre dans une ville et voir les agriculteurs ou encore vivre dans un milieu d'agriculteurs. Je l'ai bien mentionné à maintes reprises, on vous a pointés du doigt depuis longtemps, mais tous les citadins se plaisent à aller s'installer dans des endroits où ils peuvent avoir des grands espaces, donc dans des milieux ruraux où il va y avoir des cultivateurs à proximité. Et on devient avec un conflit d'usage où justement le rural... la personne, le citoyen de la ville, elle dit: Bien là, je me suis établi pour avoir la paix et j'ai la paix, mais j'ai les odeurs ou j'ai les inconvénients qui vont avec. Donc, je pense qu'on a commencé, on a développé le Québec avec le milieu agricole et, aujourd'hui, on voudrait le mettre à l'index, puis, moi, ça me frustre un peu parce que...

Je voudrais juste que... Vous parliez justement tantôt des différents permis d'exploitation, des différentes demandes que vous avez. Et je discutais dernièrement... C'est bizarre qu'on parle de l'eau au moment où les agriculteurs vont avoir tant de misère, cette année, avec l'eau parce qu'il y en a eu tellement qu'on n'est même pas rendu, pour certains agriculteurs, à la fin de la première coupe parce qu'ils ont eu trop de dégâts. Donc, c'est vraiment une année où on se demande comment ça se fait qu'on parle de l'eau, là, parce que, cette année, les agriculteurs, vous y avez goûté, même trop.

Donc, parlez-moi donc justement des permis que... où vous êtes rendus en agriculture, là, pour être capables d'opérer. Parce que dans le fond on est rendus là, là. Cette année va être catastrophique, les gens sont au bord d'un gouffre financier parce qu'ils ont de la difficulté, puis en plus ils ont toutes les obligations, et toutes les demandes, et tous les permis à respecter. Parce que vous avez parlé de prévenir les risques. Donc, il y a une différence entre avoir des contraintes et prévenir les risques.

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

n(12 h 20)n

M. Lacasse (Christian): Bien, je dirais, la préoccupation des producteurs est à deux niveaux vis-à-vis la réglementation. Je vous dirais, je l'ai répété, là, les producteurs la considèrent quand même de très haut niveau. Or, le producteur, pour réaliser son projet, là, soit de démarrage d'entreprise ou d'expansion d'entreprise agricole, doit passer par plusieurs étapes d'autorisation, de certificat d'autorisation ou d'avis de projet, démontrer qu'il est en tous points conforme à la réglementation, qui est quand même relativement élevée. Et évidemment, là, c'est un défi important parce que la norme a évolué, a changé beaucoup depuis les 10 dernières années, ce qui fait que le producteur, lorsqu'il avait atteint un certain niveau, il devait encore se reprendre pour atteindre un autre niveau, et ainsi de suite, là, ce qui fait que le producteur, depuis les 10, 15 dernières années, a fait beaucoup d'efforts.

Ce qui a souvent été sous-évalué dans tout ça, c'est l'autre préoccupation des agriculteurs, c'est que ça sollicite beaucoup de temps pour l'agriculteur à remplir ces demandes, ces autorisations-là et à suivre aussi par la suite, là, le plan de fertilisation, faire un suivi, je dirais, journalier de ses pratiques agricoles. Or, un jour ou l'autre, il faudra prendre en considération que l'agriculteur, si on veut qu'il fasse bien son travail, il faut qu'il ait du temps pour soigner ses animaux puis faire ses cultures, pas juste pour remplir du papier. Mais, je vous dis, je suis agriculteur moi-même, puis mon épouse, là, ça lui prend quand même une bonne partie de son temps pour remplir tout ça. Et il faut considérer que les entreprises agricoles, elles ne peuvent pas engager une personne juste pour faire ça, là. Alors, ils font ça en plus de leur temps. Les entreprises agricoles sont familiales, au Québec. On ne dispose pas des ressources humaines, là, comme ça pour remplir ces papiers-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet, il vous reste deux minutes.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Simplement, les fermes délinquantes, parce qu'il peut y avoir encore certaines fermes délinquantes, comment vous faites, vous autres, l'UPA, pour vraiment dire: Bien... J'en ai vu sur le bord du lac Memphrémagog, entre autres, là. La pente est tellement forte, puis tout le bétail est dans la pente, puis le ruisseau est en bas. Il n'y en a pas, de barrière, tout tombe directement à l'entrée du lac Memphrémagog. Comment on fait avec un agriculteur, vous autres, l'UPA, pour dire: Bien là, tu ne peux pas mettre ton bétail là, ça n'a pas de bon sens? Là, il faut le contrer, le problème. On en a un, problème, là.

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Bien, je dirais, l'UPA, je dirais, bon, une fois que la réglementation est définie puis qu'elle doit s'appliquer, l'UPA encourage les producteurs à respecter la réglementation puis elle les encourage fortement. On fait beaucoup de sensibilisation. Puis, comme je vous disais, on va plus que sensibiliser les producteurs, on dit... Bien, on regarde c'est quoi, les contraintes pour l'agriculteur de respecter cette réglementation-là puis on détermine quel est l'appui technique, l'appui financier pour lui permettre, là, de respecter l'environnement.

Mais, moi, là, quand je regarde le portrait de l'agriculture aujourd'hui puis si je le compare avec l'agriculture d'il y a 10 ou 15 ans, le portrait a beaucoup changé, l'agriculture a évolué énormément. Je pourrais vous parler d'un paquet de pratiques que personnellement on a dû modifier, là, sur notre ferme pour faire en sorte qu'aujourd'hui... Puis, moi, vous savez, ce n'est pas de vivre dans le passé, je dis: Aujourd'hui, là, je pense que c'est des gestes qui sont positifs, on est fiers de poser ces gestes-là.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Simplement une dernière question, M. Lacasse: Est-ce que les fermes québécoises sont encore compétitrices? Peuvent-elles espérer rester compétitrices avec l'extérieur, qui n'ont pas les normes qu'on leur impose?

Le Président (M. Bergman): Il vous reste une demi-minute, M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Mais la question est vraiment pertinente parce qu'effectivement l'os est là, comme on dit. C'est qu'une fois qu'on s'est imposé ces normes-là, pour moi, là, c'est une question de cohérence vis-à-vis les produits qui viennent de l'extérieur. Moi, si les produits, là, aux États-Unis, continuent de rentrer puis qu'ils ne répondent pas aux mêmes normes qu'ici...

Le Président (M. Bergman): En conclusion.

M. Lacasse (Christian): ...ça devient tout à fait injuste et donc incompétitif pour nous autres.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, M. Lacasse, bonjour, M. Bernier. À la page 6 de votre mémoire, moi, je trouve que vous soulevez une question vraiment centrale, fondamentale, quasiment sur le mode éthique, là, lorsque vous dites, lorsque vous exprimez votre opposition à l'application d'une redevance de l'eau en milieu agricole à l'effet que la nourriture est tout aussi essentielle à la vie que l'eau elle-même et qu'imposer donc une redevance, ce serait imposer une taxe sur cet élément-là qui est vital. Moi, ça m'interpelle beaucoup, je vous le dis, là, d'autant plus que vous nous dites, vous nous mentionnez, puis j'avais eu l'occasion de le lire dans un document ontarien, là, que les fermes ontariennes ou les exploitations agricoles sont exemptées de la redevance.

J'ai deux questions. La première, c'est: Est-ce que vous avez eu l'occasion de suivre le développement et l'adoption de la loi ontarienne et donc de vous inspirer de l'argumentaire ontarien, des exploitations agricoles ontariennes de telle sorte à ce qu'elles soient exclues? Autrement dit, est-ce que leur argumentaire avait quelque chose de plus que ce que vous nous avancez aujourd'hui?

Deuxièmement, quelle est la différence entre le monde agricole ontarien et le nôtre, qui pourrait permettre au gouvernement ontarien d'exempter les fermes et le nôtre de ne pas les exempter? Autrement dit, est-ce que, dans la configuration ou la structure même des exploitations, il y a quelque chose qui est très différent? Moi, ça m'apparaît important de voir s'il n'y a pas là un objet d'étude important. Ce seront les deux premières questions.

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): O.K. Je vais laisser Daniel répondre sur la question de comment on a suivi la politique ontarienne.

Le Président (M. Bergman): M. Bernier.

M. Bernier (Daniel): Oui. Alors, bien, pour répondre à votre question, l'argumentaire ontarien justifiant le retrait de l'agriculture, je ne le connais pas. J'ai présumé qu'ils allaient un peu dans le sens du nôtre, là, mais je ne suis pas allé fouiller sur ce qui les amenés là.

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Sur: Quelle serait la différence entre le Québec puis l'Ontario pour qu'on exempte le producteur ontarien?, je veux dire, il n'y en a aucune, là. Pour moi, il n'y a aucune raison que, si on exempte le producteur ontarien, on n'exempte pas le producteur québécois. On est en compétition, si je reprends l'élément de la compétition, on est en compétition avec l'Ontario comme on l'est avec les États-Unis, et, dans ce contexte-là, on ne voit pas comment on pourrait imposer une tarification aux agriculteurs du Québec.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Est-ce qu'à votre connaissance il y aurait des réglementations plus contraignantes du côté de l'Ontario, par exemple sur toute la question de l'utilisation de l'eau en matière d'irrigation ou en matière d'alimentation des animaux? Est-ce qu'il y a eu, par exemple, ce qu'on pourrait appeler à Paris un «tradeoff», là? Autrement dit, les agriculteurs acceptent une réglementation plus contraignante quant aux systèmes, par exemple, d'irrigation en contrepartie d'une exclusion de la redevance.

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Moi, je ne suis pas au courant. Les techniques d'irrigation ou les besoins d'irrigation au Québec sont importants aussi. On ne connaît pas non plus l'avenir au niveau des changements climatiques. Alors, ça, c'est difficile de prévoir ça. Nous, on croit qu'il va toujours y avoir besoin d'irrigation pour ces cultures-là, nos cultures maraîchères. Et, tenant compte de ce qui se passe, de ce qui est présent, là, au niveau de nos compétiteurs producteurs maraîchers, nous, on croit, là, qu'on devrait être exemptés de la même façon.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon... M. le député de Roberval.

M. Trottier: Merci, M. le Président. M. Lacasse, pour aller dans ce sens-là, c'est que vous mentionnez que, pour économiser l'eau en agriculture, il serait possible de le faire sans compromettre la compétitivité des entreprises. On sait qu'il y a eu des nouvelles pratiques, là. Comme, moi, je me rappelle, il n'y a pas si longtemps, il y avait des jets d'eau qui se promenaient un peu partout, là, c'était presque, on pourrait dire, une attraction plus que, on peut dire, une irrigation. Vous mentionnez qu'il y aurait d'autres pays qui auraient proposé des mesures, là, des programmes d'aide. Est-ce que vous auriez des exemples à nous donner qui pourraient nous permettre justement d'inciter les agriculteurs à faire encore une économie plus grande tout en n'ayant pas de coûts exagérés? Est-ce que vous auriez des exemples par rapport à ça?

M. Lacasse (Christian): Bien, je dirais, il y en a même chez les producteurs en production animale. Au niveau de la production porcine, il y a des bols économiseurs d'eau. Ça, c'est déjà en usage, là, chez la très grande majorité des producteurs de porc, je pense, là. Et, au niveau des cultures, bien on sait qu'aujourd'hui ils vont pour beaucoup dans le goutte-à-goutte, là, pour faire en sorte que la goutte d'eau est utilisée de façon optimum pour le besoin de la plante, là, au lieu d'être des arrosages, je dirais, à grand volume. Puis, moi, je pense que la technologie va continuer de se développer, là, puis qu'éventuellement il va y avoir des nouveaux équipements qui vont faire qu'on va minimiser le besoin d'eau, mais on va surtout optimiser cette eau-là pour les cultures. Ce qui va être important, c'est que ces nouvelles technologies là puissent être utilisées rapidement. Puis, si on pouvait les développer au Québec, on a un institut de recherche ici, à l'IRDA, qui pourrait initier puis développer des projets dans ce sens-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Sur la question des permis, des autorisations qui pourraient être enlevées, vous dites que ça peut mettre en péril l'entreprise, est-ce que vous auriez des solutions par rapport à ça? Comment vous voyez ça? Est-ce qu'on enlève les questions des autorisations? Est-ce qu'on trouve une formule un peu, par exemple, comme les pourvoiries nous ont mentionné ce matin, qu'ils avaient un permis de 10 ans mais qui est renouvelable à chaque année pour neuf autres années? Est-ce que vous auriez des pistes par rapport à ça?

n(12 h 30)n

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Regardez, on n'a pas de piste, là. Ce qu'on veut faire valoir, c'est que ça crée un problème, ça peut créer un problème pour certaines entreprises vis-à-vis l'institution bancaire, je pense. C'est l'exemple qu'on prenait parce que c'est l'exemple le plus patent. Si on annonce que ce permis-là est renouvelable puis que cette annonce-là fait en sorte qu'il y a des gens qui sont frileux et qui veulent être surrassurés, bien l'entreprise, elle, dans ce contexte-là, elle peut avoir beaucoup de difficultés à obtenir du financement. C'est ça qu'on fait valoir. Nous, je pense qu'on souhaiterait que les certificats d'autorisation puissent être, je dirais, permanents mais dans la mesure où le producteur respecte de façon complète, là, la réglementation.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Autrement dit, c'est que le ministre pourrait le lui enlever mais uniquement s'il avait fait une faute grave ou des choses comme ça, là. O.K. Dans ce sens-là, je trouve que c'est intéressant, ce que vous mentionnez au niveau des indemnités, que si, pour un besoin particulier d'une municipalité en eau potable, on enlève, on pourrait dire, un privilège ou en tout cas une possibilité à un agriculteur, je pense qu'il faudrait qu'il y aurait compensation. Je pense que ça devrait être regardé, je pense que ça m'apparaît assez fondamental.

Vous mentionnez, en terminant, que «nous réitérons notre souhait de voir l'État se doter d'une vision à long terme du développement durable de l'agriculture». Qu'est-ce qui vous apparaîtrait comme étant les principales priorités qu'on devrait se donner par rapport à cet objectif?

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Bien, les priorités, vous les avez à la page 10. Essentiellement, c'est les premiers éléments qui découlent, là, du Plan d'action concerté, et l'amélioration de la qualité de l'eau vient en tête de liste. Pour nous, c'est clair, là, que la protection de l'eau, c'est le premier élément, une cohabitation harmonieuse, la biodiversité, les changements climatiques et la réduction, rationalisation de l'usage des pesticides.

Si je rajoute sur, je dirais, ce qui nous concerne aujourd'hui, ce qui vous concerne particulièrement comme commission sur l'eau, c'est la protection des cours d'eau, moi, je réitère encore une fois que présentement il y a 20 projets pilotes qui s'appliquent. Pour moi, c'est essentiel qu'on ne s'arrête pas à ces projets-là. Il faut absolument qu'à partir de ces expériences-là on développe une véritable stratégie à l'ensemble des bassins versants au Québec. Et, moi, je pense que ça, ça va donner de grands résultats pour l'amélioration de la qualité de l'eau dans le futur.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Mais, dans ce sens-là, est-ce que vous croyez que c'est par la réglementation, ou par le biais de l'incitation, ou par le biais, on pourrait dire, du soutien que ça va se faire, ces objectifs-là?

Le Président (M. Bergman): M. Lacasse.

M. Lacasse (Christian): Selon moi, la réglementation est suffisante. Elle est déjà, je dirais, très élevée, au Québec. Il faut mettre plus d'emphase sur la recherche, le développement technologique pour, je dirais, développer les connaissances, développer aussi, là, les technologies qui vont faire qu'on va mieux... puis dans une approche de mobilisation. C'est toujours plus facile, je dirais, là, d'amener une vache à l'abreuvoir que de la pousser à l'abreuvoir, là. Ça fait que, moi, je pense que, de cette façon-là, on va s'assurer que les producteurs vont aborder l'environnement de façon positive. Puis je pense que, si je regarde, depuis les dernières années, c'est plus comme ça qu'on doit travailler puis c'est comme ça qu'on va se donner plus de chances d'atteindre les meilleurs résultats.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: C'est très bien.

Le Président (M. Bergman): Alors, M. Lacasse, M. Bernier, merci pour votre présentation, merci d'être avec nous aujourd'hui. Collègues, vous pouvez laisser vos documents ici pendant l'heure du lunch.

Et la commission suspend ses travaux jusqu'à 14 heures cet après-midi. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 h 35)

 

(Reprise à 14 h 1)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 92, Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection.

Maintenant, j'ai l'honneur de souhaiter la bienvenue à M. Alain Rousseau, accompagné de M. Yves Bégin. Vous avez, messieurs, 15 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission d'environ 45 minutes. Je vous demande pour vous identifier et pour faire votre présentation de 15 minutes.

M. Alain Rousseau, professeur-chercheur
à l'INRS-Eau, Terre et
Environnement (INRS-ETE)

M. Rousseau (Alain): Alors, je me présente: Alain Rousseau, professeur au centre Eau, Terre et Environnement de l'INRS. Mon domaine de spécialité, c'est l'hydrologie et la gestion intégrée de l'eau par bassin versant. À ma gauche... Vas-y, Yves.

M. Bégin (Yves): Yves Bégin. Je suis directeur du centre Eau, Terre et Environnement de l'INRS.

Le Président (M. Bergman): Bienvenue.

M. Rousseau (Alain): Merci. Tout d'abord, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, les commissaires de la Commission des transports et de l'environnement, nous vous remercions de nous recevoir.

Selon nous, ce projet de loi interpelle trois des cinq orientations initiales de la Politique nationale de l'eau du Québec de 2002: la mise en place de la gestion intégrée de l'eau par bassin versant ? à laquelle je vais référer le sigle GIEBV ? afin de réformer la gouvernance de l'eau; l'implantation de cette forme de gestion au Saint-Laurent en reconnaissant par ailleurs un statut particulier à ce cours d'eau d'importance; et la protection de la qualité de l'eau ainsi que des écosystèmes aquatiques.

Plus précisément, le projet s'articule autour de considérations de la gestion intégrée de l'eau par bassin versant et du développement durable et de dispositions modificatives de la Loi sur la qualité de l'environnement en ce qui a trait aux prélèvements en eau et à l'intégration explicite du territoire québécois du bassin versant des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent.

Ce mémoire ? dont vous avez une copie papier devant vous ? discute du fond de ce projet de loi sur la base de notre expérience en enseignement, recherche et développement dans le domaine de l'hydrologie et de la gestion intégrée de l'eau par bassin versant acquise et développée à l'INRS. Nous ne nous attarderons pas trop sur les tenants et aboutissants de ce projet de loi du point de vue juridique, car cela déborde de nos compétences, surtout de notre familiarité avec le style de rédaction, le langage de textes de loi, par opposition à des articles scientifiques, surtout dans notre domaine.

Nous n'avons pas la prétention d'avoir toutes les compétences requises pour analyser toutes les visées de ce projet de loi. En effet, nous n'avons pas une connaissance intime du Code civil, de la Loi sur la qualité de l'environnement, de la Loi sur le développement durable et de tous les règlements qui touchent indirectement et directement la ressource eau. Malgré cela, nous sommes confiants que la participation de tous les intervenants à cette commission permettra de soulever plusieurs points qui seront parfois convergents, tantôt divergents, mais qui auront tous pour but d'alimenter la discussion et, qui sait, d'améliorer ce projet de loi dans l'esprit d'assurer une saine gestion de l'eau au Québec.

Questionnements. Au cours des questionnements, je vais reprendre les libellés qui sont dans le projet de loi n° 92. Il va y avoir des mots de soulignés, et c'est sur ces mots ou sur ces expressions que je vais revenir.

Tout d'abord, au niveau de la section Notes explicatives ? et vraiment, au niveau de ma présentation, je vais m'en tenir au niveau de ces notes explicatives là pour ne pas perdre trop de temps non plus, étant donné le temps prescrit pour faire ma présentation ? donc: «Ce projet de loi a d'abord pour objet de confirmer le statut juridique de l'eau: l'eau, de surface ou souterraine, constitue une ressource collective, qui fait partie du patrimoine commun de la nation québécoise. Il énonce certains principes qui prennent appui sur ce statut, portant notamment sur l'accessibilité à l'eau potable ainsi que sur le devoir de prévenir les atteintes aux ressources en eau et de réparer les dommages qui peuvent leur être causés. Il institue un recours de nature civile permettant au Procureur général d'exiger la réparation de tout préjudice écologique subi par les ressources en eau, entre autres par une remise en état ou par le versement d'une indemnité financière.»

Je reviens sur les termes «remise en état». Premier point. Dans le projet de loi, le gouvernement n'a pas apporté de définition de l'état à atteindre. Ceci représente une lacune à notre avis si l'on se fie aux autres réglementations des pays occidentaux, qui sont explicites à ce sujet. On pense ici, entre autres, au concept d'allocation des charges maximales journalières découlant du Clean Water Act des États-Unis d'Amérique et à l'énoncé d'un bon état écologique des cours d'eau de la directive-cadre européenne sur l'eau, qui définissent un état selon les usages visés d'un cours d'eau.

Deuxième point. Nous imaginons qu'une réglementation va suivre pour fixer les modalités de l'état à atteindre et les conditions d'application de la loi.

Troisième point. Nous recommandons l'utilisation du terme «réhabiliter» à la place de «réparer», car celui-ci implique de se limiter à la restauration de certains usages, ce qui ne va pas nécessairement jusqu'à l'état écologique dit naturel.

Deuxième paragraphe de la note explicative: «Le projet de loi définit par ailleurs des règles de gouvernance de l'eau fondée sur une gestion intégrée et concertée, à l'échelle du bassin versant, ainsi que sur la prise en compte des principes du développement durable. Il prévoit les conditions dans lesquelles seront élaborés et mis en oeuvre les plans directeurs de l'eau.»

Donc, on revient, dans un premier temps, sur «gestion intégrée et concertée, à l'échelle du bassin versant». Et, pour les deux expressions soulignées ici, on va rapporter des définitions, car il n'y a pas consensus justement sur les définitions tant de la gestion intégrée de l'eau par bassin versant que du développement durable.

Alors, au fil des ans, dans l'enseignement et dans la recherche, nous avons apporté une définition. La gestion intégrée et concertée à l'échelle du bassin versant, c'est: «La quantité et la qualité de l'eau en un point donné de l'espace intègrent les impacts des usages de l'eau, des utilisations du territoire, et les contextes sociopolitique et législatif en amont. La gestion des activités humaines liées à l'eau à l'échelle du bassin versant et en fonction des objectifs de tous les intervenants constitue donc la seule approche durable de la protection de la ressource [en] eau.»

Développement durable. Pour nous, c'est une dynamique sociale nécessaire entre le développement économique et les impératifs écologiques qui permet de répondre aux besoins présents sans compromettre celui des générations futures. Ici, la dynamique sociale porte sur l'arrimage de ces deux pôles selon le contexte politique en place. Premièrement, la logique économique doit également passer par la modalité d'internalisation des coûts environnementaux, c'est-à-dire l'évaluation économique de la dégradation des biens et services environnementaux encourus par le développement ou encore l'évaluation des bénéfices économiques découlant des biens et services environnementaux récupérés dans un contexte de mise en place de mesures de mitigation. Quant aux règles de la gouvernance, elles devraient, selon nous, assurer la mise en oeuvre démocratique, donc participative, de la gestion intégrée de l'eau par bassin versant, c'est-à-dire basées sur la transparence et la mise en commun de l'information en privilégiant la participation de tous les usagers et dans l'intérêt de la population.

Plans directeur de l'eau. Ceci étant dit, jusqu'à ce que ce projet de loi soit rédigé, force est d'admettre que le statut juridique des plans directeurs de l'eau et des organismes de bassin qui en sont les maîtres d'oeuvre était absent. D'autre part, nous remarquons que le projet de loi ne précise pas davantage leur statut ni ne leur octroie les droits et les pouvoirs, incluant le financement nécessaire à leur plein déploiement, d'autant plus que nous ne savons pas encore si le PDE est un outil essentiel pour la mise en oeuvre de la gestion intégrée de l'eau par bassin versant.

n(14 h 10)n

De plus, il n'existe à notre connaissance aucune documentation sur les facteurs de succès ou d'échec des OBV et de la contribution du PDE à leur mission. Afin d'optimiser la gestion de l'eau, il est en effet primordial d'identifier les éléments qui contribuent au bon fonctionnement des OBV. C'est dans ce contexte que nous avons entrepris une étude portant sur la réalisation d'un portrait exhaustif des OBV prioritaires, le développement d'un cadre d'évaluation de l'utilité du PDE et des indicateurs de performance pour les OBV, l'établissement d'un bilan de la mise en oeuvre de la gestion intégrée de l'eau par bassin versant et la validation du modèle du ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs pour la gestion intégrée de l'eau par bassin versant.

D'autre part, tel que prévu dans la Politique nationale de l'eau, une évaluation de la politique est présentement en cours dans les différents ministères responsables des engagements. Nous considérons qu'il serait pertinent d'attendre les conclusions de cette évaluation avant d'affirmer, dans le projet de loi, des éléments concernant la gouvernance de l'eau qui pourraient être mis en doute par les conclusions de cette évaluation.

La centralisation de l'information sous l'égide d'une nouvelle structure institutionnelle appelée Bureau des connaissances de l'eau demande attention. En effet, dans la mesure où les OBV ont dressé le portrait de leurs bassins versants, nous pensons qu'il serait plutôt de leur ressort de faire état au ministre des ressources en eau et des écosystèmes de leurs bassins. Cela permettrait de valoriser le rôle des régions dans la gestion de l'eau. On peut comprendre l'économie d'échelle dans la mesure où le ministère possède les ressources humaines, l'expertise et l'accès à plusieurs sources de données, voire les autres ministères, difficilement accessibles aux OBV pour une multitude de raisons. Ce que l'on souhaite, c'est davantage d'accès aux données ministérielles et de prise en charge locale afin que les OBV soient redevables du dépôt de cet état des ressources.

Troisième paragraphe des notes explicatives: «Le projet de loi établit en outre un nouveau régime d'autorisation pour les prélèvements d'eau qui renforce la protection des ressources en eau. Ce nouveau régime reconnaît la nécessité de satisfaire en priorité les besoins de la population et de concilier ensuite les besoins des écosystèmes et des activités à caractère économique. Le projet de loi limite la période de validité des prélèvements d'eau à 10 ans, sauf exceptions. Il accorde au ministre et au gouvernement le pouvoir de restreindre ou de faire cesser tout prélèvement d'eau qui présente un risque sérieux pour la santé publique ou pour les écosystèmes aquatiques, sans indemnité de la part de l'État.»

Alors, en ce qui a trait aux mots soulignés, selon nous, la hiérarchisation des besoins ne correspond pas aux principes de la gestion intégrée de l'eau par bassin versant et du développement durable qui prônent davantage une conciliation harmonieuse de trois besoins: population, écosystèmes et activités économiques. Activités économiques et population vont de pair, c'est pourquoi on peut difficilement justifier la hiérarchisation proposée, à moins, bien entendu, qu'une agglomération sans activité économique n'existe et qu'elle ne fasse partie intégrante d'un schéma d'aménagement. Mais, bon, nous ne saisissons peut-être pas toutes les subtilités du projet de loi.

Conclusion. Nous accueillons favorablement l'initiative d'un tel projet de loi, mais recommandons sa refonte sous la forme de deux projets de loi distincts: un sur la gestion intégrée de l'eau par bassin versant, qui peut à la fois se construire sur les bases du projet de loi n° 92 ainsi que sur les recommandations émises dans ce mémoire; et un autre sur les prélèvements en eau tel que stipulé par les dispositions modificatives de la Loi sur la qualité de l'environnement.

Pour conclure, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, les commissaires, nous remercions la Commission des transports et de l'environnement d'avoir pris connaissance de ce mémoire et de nous avoir écoutés. Enfin, nous profitons de ces dernières lignes pour réitérer notre intérêt à collaborer à la discussion de ce projet de loi dans l'esprit d'assurer une saine gestion de l'eau pour tous les Québécois et leurs générations futures.

Le Président (M. Bergman): Merci, M. Rousseau.

M. Rousseau (Alain): Enfin, à la dernière diapositive, j'aimerais rappeler que l'eau est une ressource renouvelable de par le cycle hydrologique, peu importe qui en est l'utilisateur ou le propriétaire. Merci.

Le Président (M. Bergman): Merci encore, M. Rousseau. Mme la ministre, pour un bloc de 17 minutes.

Mme Beauchamp: Oui, merci beaucoup. Je veux aussi à mon tour vous souhaiter la bienvenue puis vous remercier pour votre contribution aux travaux de cette commission.

Parce que vous provenez du centre Eau, Terre et Environnement de l'INRS, ma première question sera pour peut-être approfondir un peu vos commentaires concernant le Bureau des connaissances sur l'eau. Comme vous l'avez remarqué, c'est donc une... nous avons choisi d'intégrer dans la loi, ce qui est quand même encore assez exceptionnel... Je pourrais vous donner d'autres lois où il y a un tel positionnement, là, mais ça reste quand même plutôt exceptionnel. Mais je vous confie à l'avance que c'était important à mes yeux. Nous avons donc donné une reconnaissance légale à une structure qui est avant tout une structure organisationnelle au sein du ministère, donc ce Bureau des connaissances sur l'eau. Pourquoi? Parce que j'estimais que, si nous voulions nous assurer à long terme de la crédibilité de la démarche qui est proposée ici, d'une démarche, une nouvelle démarche de gouvernance de l'eau, il était important qu'on assure la pérennité de certaines de nos structures organisationnelles, notamment sur les questions de l'eau.

Autrement dit, pour faire une histoire très simple, une fois qu'un gouvernement dit: L'eau est une chose commune, le gouvernement en est un fiduciaire. Le gouvernement, auprès de ce qu'on pourra qualifier de grands préleveurs, se donne le droit d'octroyer des certificats d'autorisation sur 10 ans. Si on veut le faire dans un contexte réel et sur des bases scientifiques, encore faut-il être capable de s'assurer qu'en tout temps il y aura, au sein du ministère, et une expertise et un degré de connaissance sur la situation de l'eau au Québec, c'est-à-dire on en a combien, elle se renouvelle comment, quel est son état en termes de qualité. Donc, on a donc reconnu dans la loi, par des articles de loi, là, l'existence et donc la pérennité du Bureau des connaissances sur l'eau.

Vous dites, dans votre mémoire, que vous... je ne sais pas si je le comprends bien, mais c'est un peu comme si vous disiez: Bien, ce n'est pas... ça ne devrait pas être une structure du haut vers le bas, c'est-à-dire un bureau des connaissances sur l'eau nommément intégré à un ministère de l'Environnement. Vous dites: Ça devrait plutôt être les OBV qui contribuent à cette notion de connaissances sur l'eau.

Moi, j'ai envie de vous dire: À mes yeux à moi, puis tel qu'on l'a annoncé il y a quelques jours à peine, il n'y a pas de contradiction. Ce qu'on dit, puis ça répondait à une demande écrite, je dirais, à des conseils écrits dans le rapport de la commission Beauchamp puis aussi donc des articles de la Politique nationale de l'eau, il y avait cette notion que les connaissances sur l'eau devaient être largement... premièrement, devaient être, je dirais, rapatriées, hein, facilement accessibles, puis, deuxièmement, qu'elles devaient être largement partagées, entre autres sous la forme d'un portail Internet, etc. Vous avez sûrement pris connaissance. Donc, une fois que l'on se donne les pouvoirs de pouvoir donner des certificats d'autorisation puis renouvelables après 10 ans, il faut qu'on ait un degré, je dirais, de confort avec les données scientifiques qu'on a à notre disposition pour prendre des décisions qui pourraient être lourdes de conséquences.

Le Bureau des connaissances sur l'eau, on l'a donc, je dirais, proposé, discuté puis on l'a donc annoncé avec le fait de dire que les sommes, parce que c'est 13,5 millions sur cinq ans, les sommes disponibles pour aller chercher des nouvelles connaissances sur l'eau le sont essentiellement, là, sont rendues disponibles essentiellement vers le monde universitaire... qui doivent ? c'est une obligation pour le principal programme annoncé ? qui doivent avoir une collaboration avec soit un organisme de bassin versant soit une municipalité, une MRC, une CRE, un conseil régional de l'environnement, mais il doit y avoir un lien avec, hein, ce qu'on pourrait appeler le terrain puis une région, une entité représentative d'une région donnée.

C'est que peut-être qu'au moment où vous avez écrit votre mémoire, peut-être que les détails du Bureau des connaissances sur l'eau ne vous étaient pas accessibles, on a fait l'annonce il y a quelques jours. Mais je voudrais un peu plus vous entendre. Parce que, moi, je suis, vous l'avez compris, comme très confortable, j'ai cette vision-là de dire: Le gouvernement devient fiduciaire de l'eau, il doit avoir entre les mains, mais avec la collaboration de tous, mais il doit développer un bon niveau de connaissance sur la question de l'eau au Québec, particulièrement de l'eau souterraine, où, je pense, on a un déficit de connaissance. Et par contre, dans votre mémoire, vous semblez dire: Bien, ce n'est pas comme ça qu'on le souhaitait, puis ça aurait dû être les... C'est un peu comme si je lisais, là ? je vais dire l'expression ? «dans la vraie vie», c'est un peu comme si je vous entendais dire: Bien, l'argent, au niveau des connaissances, aurait dû aller vers les OBV, qui par ailleurs avaient déjà reçu 15 millions de dollars de nouvel argent, là, 150 % d'augmentation de budget dans le dernier budget. Ça fait que je veux vous réentendre, parce que vous êtes un partenaire de ce Bureau des connaissances sur l'eau, je voudrais vous réentendre, voir si j'interprète bien ou pas le contenu de votre mémoire.

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

n(14 h 20)n

M. Rousseau (Alain): Oui. Bien, en fait, je profite justement de ma présence pour en savoir davantage sur le Bureau des connaissances de l'eau. Je vais m'expliquer.

Personnellement, lorsque j'ai vu la mention de Bureau des connaissances de l'eau, j'étais un peu confus, à savoir que, pour moi, ça représentait une espèce de base de données sur les bassins versants prioritaires. Donc, je ne possédais pas la connaissance intime effectivement, là, du Bureau des connaissances de l'eau.

Ceci étant dit, il est évident que les OBV ne peuvent pas fonctionner sans information de crédibilité, et, nous, on l'a enregistré sur le terrain, en 2004-2005, lorsqu'on a interviewé tous les OBV. Vincent Luyet, un étudiant suisse qui travaillait avec moi à l'époque, on avait justement rencontré tous les organismes de bassin versant existants à l'époque, et tous se mettaient d'accord pour dire qu'il y avait un manque d'accessibilité à la donnée. On semblait mal connaître la ressource. On connaissait mal la qualité, par exemple, ou la quantité d'eau des aquifères, etc.

Alors, moi, au niveau de la rédaction du mémoire, ce que j'ai voulu provoquer d'une certaine manière, c'est un peu, de manière peut-être un peu insouciante, votre réaction, aujourd'hui, en ce sens que maintenant j'en sais plus que j'en savais au départ.

Je ne suis pas opposé au Bureau des connaissances de l'eau. Des connaissances, on en a besoin parce qu'on ne peut pas gérer ce qu'on ne connaît pas, c'est impossible. Dans la mesure où est-ce que la donnée circule librement, je n'ai aucun problème avec le Bureau des connaissances sur l'eau. Je ne suis pas contre l'idée, je suis pour l'idée d'un accès à toutes les données sur l'eau de façon à donner le plein pouvoir aux organismes de bassin versant d'exercer leur rôle de concertation. Ils ne peuvent pas concerter les gens s'ils ne connaissent pas la qualité de l'eau ou les quantités d'eau qui sont présentes dans leurs bassins versants.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Moi, je pense... à moins... M. Bégin, vous vouliez peut-être...

M. Bégin (Yves): Oui, si je peux me permettre d'ajouter. J'ai suivi peut-être d'un petit peu plus près le développement de ce Bureau des connaissances sur l'eau, et c'est probablement la plus belle occasion qu'on a de centraliser de l'information, mais l'information arrive de toutes parts. Elle arrive par les gens du milieu. Les organismes de bassin versant sont particulièrement bien placés à cet effet, c'est ceux qui voient de plus près l'usage de l'eau, et tout ça. Elle vient aussi des gens qui étudient l'eau; nous sommes de ceux-là. Et le fait de centraliser l'information est bougrement important. On a accueilli de façon très favorable l'annonce de la ministre à cet effet, il y a à peine deux semaines.

Et enfin j'aimerais simplement souligner que, quand on consacre autant d'importance... Et, moi, le mot «connaissance» est très important là-dedans. La connaissance appelle des échelles extrêmement variées, des intervenants variés, vous l'avez très bien souligné. Les chercheurs font partie de ça. Et notre métier à nous, c'est de développer les connaissances dans toutes ces échelles, d'être à l'écoute des jauges qu'on installe un peu partout. Et l'essentiel, dans tout ça, c'est que, quand le gouvernement investit en matière de connaissance et qu'il fait confiance au milieu universitaire pour la développer, la valeur ajoutée est énorme.

Vous avez parlé, tout à l'heure, d'un manque de connaissances, en particulier sur les eaux souterraines, mais, quand on parle de connaissances, ça prend aussi des experts, et il n'y a pas beaucoup d'experts au Québec. Donc, en investissant 7 millions déjà en matière de recherche universitaire, notre métier à nous, c'est de former des gens. Ça, ça veut dire que la masse critique dans laquelle on investit va faire en sorte qu'à l'avenir, quand on a un projet de loi comme ça, elle sera durable, c'est-à-dire que la gestion de l'eau sera durable, on aura une connaissance suffisante et on aura des gens pour continuer de la développer.

Alors, deux idées là-dedans: notion de centralisation de la connaissance mais en prenant en compte les multiéchelles, c'est-à-dire que les organismes de bassin versant doivent jouer un rôle important là-dedans; et la deuxième dimension, c'est la connaissance et sa valeur ajoutée par la masse critique qu'elle crée.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Bien, je vous remercie, M. Rousseau, M. Bégin. Comme je vous disais, parmi tous les intervenants que nous aurons le plaisir d'accueillir autour de la table, là, vous êtes des représentants de ce monde universitaire directement interpellé par la mise en place du Bureau des connaissances sur l'eau, et, dans ce sens-là, je pense que c'était important un peu de faire le point sur votre opinion. Et je pense en fait qu'on s'aperçoit, au cours de cet échange, que nos objectifs se rejoignent: plus de connaissances, des connaissances crédibles, des connaissances largement partagées par ce portail. On a bien compris.

Donc, à la fois, il y aura de nouvelles connaissances grâce aux nouveaux argents injectés qui vont servir d'effet de levier pour être capable d'aller chercher aussi d'autres fonds de recherche ailleurs, mais bien sûr les connaissances déjà en place. Parfois, il y a des associations de lac qui ont fait beaucoup de recherches, il y a bien sûr les OBV, etc. On va tenter de jouer notre rôle de rassembler cela, comme le souhaitait le rapport de la commission Beauchamp et comme le prévoyait la Politique nationale de l'eau.

Maintenant, je pense vraiment que... En tout cas, moi, vous m'avez fait un peu sursauter, je vous l'avoue, vous avez réussi une deuxième fois, M. Rousseau, à me faire sursauter avec votre passage lorsque vous commentez la question de la hiérarchisation des usages de l'eau. Donc, cette hiérarchisation, elle est inscrite dans la loi parce qu'il y en a une. On priorise un usage puis ensuite on fait appel à la conciliation de d'autres usages. Elle est inscrite parce que bien sûr la loi, elle est conçue dans un esprit où on se dit que, bien que le Québec ait de l'eau à sa disposition en ce moment, il faut prévoir, il faut prévoir des conflits d'usage potentiels dans certains coins du Québec. Ça a déjà existé par le passé. Et, pour moi, la loi, elle est beaucoup, beaucoup basée ? d'ailleurs, d'autres intervenants l'ont dit ? sur des principes déjà détaillés dans la Loi sur le développement durable. Vous reconnaissez là-dedans les principes de précaution, les principes d'utilisateur-payeur, de pollueur-payeur, et j'en passe, là.

Mais, vous, quand vous avez regardé la question de la priorisation des usages de l'eau, vous sembliez dire: Bien, je vais calquer là-dessus les trois grands... je les ai souvent appelées les trois grandes pattes, là, du développement durable. Et là, après cela, je ne suis pas sûre de bien comprendre votre propos, parce que, quand je regarde votre mémoire à la page 10, vous semblez dire... Parce que donc la priorité très clairement est sur les besoins de la population, notamment en eau potable, pour assurer la sécurité, donc les services incendie, etc. Mais, vous, vous dites: «Activités économiques et population vont de pair.» Donc, on dit: «On peut difficilement justifier la hiérarchisation proposée.» Et là je veux bien savoir si je vous comprends bien. Moi, quand je lis ça, ce que je comprends, c'est comme si vous disiez: Bien, on devrait inscrire les activités économiques comme étant la priorité.

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

Mme Beauchamp: Oui, bien, donc je...

M. Rousseau (Alain): C'est une question de les mettre sur le même niveau. Donc, on ne peut pas avoir... Bien, en tout cas, ma compréhension, et, comme je disais, peut-être que je ne saisis pas toute la subtilité, mais, pour moi, s'il y a une population qui existe, c'est parce qu'il y a une activité économique. Si j'enlève toutes les régions de villégiature, même dans les régions de villégiature il y a une certaine activité économique.

Alors, ce que je dis, c'est: Oui, il faut assurer de l'eau potable en bonne quantité et de qualité pour les populations, et je pense que ça doit se faire dans un respect de toutes les activités possibles sur un territoire. Donc, il y a des activités à caractère récréotouristique, il y a des activités à caractère plus industriel et il y a des activités humaines au niveau villages et villes. Alors, tout ce que je dis, moi, c'est que je les considère égaux. Je regarde et je prends une décision.

C'est entendu que, d'un point de vue de l'État, vous devez assurer la sécurité au niveau de la santé aux populations. Alors, c'est juste une question de voir le terme «hiérarchisation» de la manière que je l'ai posé, en ce sens que, dans le projet de loi, on dit qu'on doit prioriser l'accès à l'eau potable et concilier. Moi, quand je regarde ça, je me dis: Oui, mais, d'après moi, on doit regarder les trois, tout simplement. Je ne pense pas qu'on soit fondamentalement en désaccord.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Bien, c'est parce que la façon dont c'est rédigé, honnêtement vous écrivez carrément que la hiérarchie proposée, vous dites carrément qu'elle ne correspond pas aux principes du développement durable. Tu sais, votre mémoire est quand même rédigé dans des termes très clairs, et c'est pour ça que je vous disais que ça me faisait sursauter.

Et je vais vous soumettre le cas, qu'on a connu au Québec, d'une municipalité où la nappe d'eau souterraine a vu l'arrivée d'un embouteilleur d'eau, et la présence de l'activité économique de l'embouteilleur d'eau compromettait l'approvisionnement en eau potable de la population. Ce que cherche à faire le projet de loi ici, c'est clarifier pour tous, s'il y a un conflit d'usage, c'est de clarifier pour tous quel est l'usage qui doit primer. Et là honnêtement, dans une situation comme ça, qui est un cas bien connu par bien des gens qui ont étudié la question de la gestion de l'eau au Québec, c'est comme si la loi venait finalement et, je dirais même, enfin dire: Bien, écoutez, dans une situation où la ressource, elle est compromise, bien il faut se dire que c'est l'approvisionnement en eau de la population qui doit l'emporter, elle devient prioritaire.

M. Rousseau (Alain): Mais, moi, ce que j'ai...

Mme Beauchamp: Et là je n'ai pas compris ça encore dans votre intervention. Vous dites: Ça devrait être sur un même pied puis, bien, décider après lequel l'emporte. Mais, non, on vient dire dans la loi plus clairement lequel l'emporte. On dit: C'est l'approvisionnement en eau potable de la population.

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

n(14 h 30)n

M. Rousseau (Alain): Oui. J'ai le droit aussi d'émettre mon opinion et de dire que fondamentalement, avant de grimper dans une situation, étudions la situation. Ça prend de la connaissance sur l'aquifère pour dire que le fait qu'un embouteilleur vient va nuire à la population. Je comprends que, d'un point de vue législatif, on doit mettre la population en premier. Et je profite de la commission pour discuter. Je ne veux pas aller à l'encontre du rôle de l'État, qui est de protéger la population, mais je dis tout simplement, d'un point de vue... ma tour d'ivoire à moi, entre guillemets, je regarde ça, j'ai une population, il y a un embouteilleur qui veut venir, si des études hydrogéologiques démontrent que le prélèvement en eau qui va être fait pour l'embouteilleur en aucun temps ne va périmer la population...

Mme Beauchamp: Bien ça, c'est sûr...

M. Rousseau (Alain): ...pourquoi il n'aurait pas le droit d'y avoir un embouteilleur?

Mme Beauchamp: Bien non, mais...

M. Rousseau (Alain): C'est tout simplement... C'est ce que je dis.

Mme Beauchamp: Ah bon! Non, c'est parce que...

M. Rousseau (Alain): C'est ce que je dis. Quand je dis: Il ne doit pas y avoir de hiérarchisation, je dis: Il faut regarder les deux.

Mme Beauchamp: Je veux juste vous rassurer, M. Rousseau. C'est évident que, si rien n'est compromis, on va étudier la capacité d'émettre les autorisations. La loi, elle prévoit le processus de gouvernance en cas de conflit d'usage et non pas quand tout va bien. Quand tout va bien, là, honnêtement, tout va bien. Mais le principe de pourquoi on est venus se donner une loi, c'est pour prévoir les conflits d'usage et là les décisions vraiment difficiles qui sont devant nous puis clarifier la situation. La loi ne vient pas dire qu'on ne donnera plus jamais d'autorisation pour des activités économiques, elle vient dire c'est quoi, comment on va se gouverner en cas de conflit d'usage.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. le député de Marguerite-D'Youville.

Une voix: ...

Le Président (M. Bergman): Excusez. Je m'excuse. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Merci, M. le Président. D'abord, je tiens à vous saluer et à vous remercier pour la qualité de votre mémoire très bien documenté. Je vais commencer mes questions avec un concept qui m'a beaucoup intéressé, en page 3. Ce matin, on avait une discussion, c'était l'UPA qui était présente, et puis la discussion était sur la restauration. Vous, vous suggérez «réhabiliter», «réhabilitation», donc je vais utiliser votre terme.

Bref, dans le cas où il y a un accident écologique, un déversement de produit chimique, la question est assez simple, hein, il suffit d'extraire ce qui n'est pas souhaitable dans le cours d'eau. Mais, dans le cas où c'est plus complexe, où ça se fait sur une longue série d'années, dans le cas, par exemple, des cyanobactéries, où on peut identifier clairement le pollueur, parfois ça peut être une entreprise, d'autres fois l'activité humaine, d'autres fois l'agriculteur, lorsqu'on peut facilement l'identifier comme étant le responsable de l'apport en phosphore, comment on peut réussir à réhabiliter un lac? C'est quoi, la charge maximale? On sait très bien que le phosphore est quelque chose de naturel, même nécessaire à la vie d'un lac. Il y a un seuil qu'il ne faut pas dépasser. Et puis la réponse à cette question-là de l'UPA était des plus floues, puis je pense qu'on est effectivement dans un flou. Donc, si vous pouviez nous éclairer là-dedans sur: Que veut dire restaurer, ou plutôt réhabiliter un lac? Comment on peut le faire? Est-ce que c'est possible de le faire lorsque c'est un agriculteur dans ce cas-là? Tu sais, ça apparaissait un concept assez difficile. Et je pense que vous tentez, en page 3, du moins, de définir c'est quoi, réhabiliter un lac.

M. Rousseau (Alain): Donc, en ce qui a trait à la réhabilitation, la position est la suivante, à savoir qu'il y a des activités économiques dans une certaine région donnée, il y a une dégradation de la qualité des eaux, et là les intervenants locaux doivent se donner des objectifs de réhabilitation. Ces objectifs de réhabilitation là peuvent être très utopiques, à savoir essayer de recréer des conditions dites naturelles d'avant la présence de l'homme même sur le territoire, ou tout simplement viser des objectifs qui tiennent justement compte du fait que le territoire est habité par des gens, qu'il y a des activités économiques.

Alors, en ce qui a trait à la réhabilitation, on peut se donner différents types d'objectif. Et c'est là que j'essayais de faire une nuance, c'est que peut-être pas qu'on a besoin de retourner à un état dit naturel, qu'on pourrait même employer un anglicisme dit «pristine», mais ce que je dis, c'est qu'il faut regarder les usages qui sont potentiellement atteignables étant donné ce qui se passe sur le territoire. On ne peut pas penser, d'après moi, recréer les conditions de précohabitation avec l'homme au milieu de l'écosystème. Ceci étant dit, on peut peut-être s'accommoder d'un pas entre les deux, entre la position qu'on ne veut pas atteindre, donc l'eutrophisation totale du lac et, d'un autre côté, la marge supérieure qui serait d'avoir un état naturel parfait.

Je pense que, du moment qu'on accepte une condition qu'il y a des humains dans le territoire, bien on va essayer de minimiser les dégâts, hein ? parce qu'on doit utiliser parfois ce mot-là ? mais on doit les utiliser de manière... de façon à concilier tout ce qui se passe à l'échelle du bassin versant. Ça devient une décision de société.

Si on veut vraiment avoir une qualité de l'eau impeccable, bien il faut tout de suite se donner les moyens pour l'atteindre. Et se donner les moyens pour l'atteindre, ça veut pouvoir dire soit tout racheter le territoire agricole ou tout racheter les territoires de villégiature pour qu'il n'y ait absolument pas tout simplement d'agriculture ou autres.

Moi, ce que je dis, c'est que ça doit être une décision de société à savoir: Quels moyens doit-on prendre pour récupérer ou réhabiliter la qualité de l'eau? Et c'est pour ça que j'utilise le mot «réhabiliter», pour ne pas tomber dans un utopisme de ravoir des qualités préconditions humaines.

Et, pour ceux qui ont suivi autant la rédaction du Clean Water Act que la directive-cadre sur l'eau, je pense que la directive-cadre sur l'eau est justement un peu faible à ce niveau-là, c'est qu'on se donne des objectifs d'atteindre un bon état écologique sans jamais essayer de définir ce bon état écologique là. Et il y a des travaux de recherche auxquels je participe, qui sont en cours présentement, qui essaient justement de voir: Quel genre de qualité de l'eau pourrait-on anticiper si on applique des pratiques de gestion bénéfique locale tout en maintenant un certain niveau d'activité économique?

Le Président (M. Bergman): M. Bégin.

M. Bégin (Yves): Très simplement, juste pour ajouter, il y a un principe scientifique, dans le domaine de l'écologie, qui parle des propriétés émergentes d'un système. Quand le système fonctionne d'une telle façon qu'il garde ses propriétés, qu'il ne bascule pas dans un autre état, il constitue un état de référence. Donc, au plan scientifique, quand on parle de réhabiliter un milieu, c'est de le ramener dans cet état, dans cet état qui est jugé acceptable pour qu'il maintienne ses propriétés.

On pourrait même transposer le concept au domaine de la sécurité, c'est-à-dire sécurité même de l'eau en tant que telle. Au moment où Mme la ministre présentait... faisait l'annonce du Bureau de la connaissance sur l'eau, au même moment on avait une soutenance de thèse qui montrait, en tirant exemple de la petite ville de Valcourt: Comment devrait-on sécuriser un réseau d'aqueduc s'il devait être contaminé et comment peut-on concilier, dans une petite municipalité comme ça, l'utilisation au même moment de l'eau, par exemple, si on avait à éteindre un incendie? Donc, dans un cas comme ça, même si on avait un cadre réglementaire extrêmement rigide, on aurait, pour un même moment, un conflit d'usage qui techniquement présenterait des états extrêmement difficiles. Donc, dans quelle mesure peut-on à la fois concilier, dans une situation d'urgence, une réhabilitation des conditions minimales pour s'assurer que l'eau qui est approvisionnée est sécuritaire, et sécuritaire dans tous les sens?, ça deviendra toujours des défis techniques assez importants.

Donc, restaurer un lac, ça se présente de la même manière. Quel état on veut atteindre? C'est-à-dire un état dans lequel le lac en question arrêtera... c'est-à-dire à l'intérieur duquel on n'aura pas de prolifération d'algues qui pourra affecter la santé humaine et la santé de l'écosystème. Donc, le cas échéant, à partir du moment où il y a basculement dans un nouvel état, le ramener dans l'état initial, c'est un défi scientifique à chaque fois. C'est pourquoi on a des sites expérimentaux où on installe des dispositifs puis on essaie de comprendre comment fonctionnent ces systèmes. Je peux vous dire, le cas des cyanobactéries, ce n'est pas le cas le plus simple, c'est assez complexe.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Si je comprends bien, réhabiliter un lac, évidemment ce n'est pas le ramener à sa perfection initiale, chose impossible, ce serait de s'assurer qu'il n'y ait pas un changement totalement d'ordre, comme dans le cas des cyanobactéries, un certain seuil acceptable.

M. Rousseau, vous avez parlé d'une certaine différence entre... ou du moins vous avez comparé les choses. Dites-moi si je me trompe, si j'ai mal compris ce que vous m'avez dit. Dans l'éventualité où le lac serait entouré d'entreprises de production et un autre lac serait entouré de résidents, la réhabilitation ne serait pas la même. Le seuil, l'objectif à atteindre serait différent. Est-ce que je vous ai bien compris?

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

M. Rousseau (Alain): Ça pourrait être effectivement le cas, donc étudié du cas-par-cas. C'est ce que je dis, que les objectifs de réhabilitation doivent être faits de manière concertée, avec les gens qui occupent le territoire, sous l'oeil de l'État, gardien de la ressource, aussi.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Pour le législateur, ce serait important de créer une grille claire d'analyse, sinon on va se retrouver du jour au lendemain dans un flou juridique.

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

n(14 h 40)n

M. Rousseau (Alain): Je ne pourrais pas vous le dire, je ne rédige pas des textes de loi. Mais, d'un point de vue technique, ce que je redis, c'est qu'on se donne des objectifs de réhabilitation selon les usages visés. Il y a certains usages visés essentiels pour les activités humaines. Si on veut ravoir ce lac-là comme source d'eau potable, peut-être que ce n'est pas envisageable. Si on veut ravoir le lac pour des questions récréotouristiques, peut-être que c'est possible. Donc, il faut user des bonnes connaissances disponibles pour se fixer des objectifs à atteindre.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: C'est une restauration pragmatique, c'est ça que je comprends. Je vais poser une dernière question avant de céder la parole à mon collègue de Montmagny-L'Islet. C'est concernant le schéma qu'on a ici, à l'écran, qui... Je ne sais pas si c'est vous qui l'avez fait? Non?

M. Rousseau (Alain): Non, c'est mon fils... Non, je l'ai pris sur Internet.

M. Diamond: C'est bon. Vous dites que c'est une ressource renouvelable. Je pense que c'est le cas. Comment on peut expliquer, dans ce cas-là, la baisse des cours d'eau importante, comme les Grands Lacs, par exemple, ou... Il n'y a pas si longtemps, j'étais en Israël, c'était la mer Morte qui perdait des mètres et des mètres à toutes les années. Et puis c'est un problème qui peut être très important, sachant que, nous, on peut faire du développement hydroélectrique et qu'on est déjà très engagés là-dedans. En remarques préliminaires, mon collègue faisait référence au barrage de Hoover Dam, au Nevada ou du moins sur les limites du Nevada, où son barrage avait diminué de 48 % la quantité d'eau. Ça devient problématique pour un État qui veut faire du développement hydroélectrique.

M. Rousseau (Alain): Donc...

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

M. Rousseau (Alain): Je m'excuse encore une fois. À l'échelle planétaire, l'eau est renouvelable. Ce qui va varier, par exemple, il va y avoir des variations spatiotemporelles. Donc, à une certaine période, certains endroits sur la terre auront plus d'eau qu'ils en ont présentement et, à l'inverse, d'autres endroits où est-ce qu'ils en ont trop, ils en auront moins tout simplement. Donc, à l'échelle planétaire, l'eau est une ressource renouvelable. Localement, elle va subir des variabilités temporelles qui sont dues à une surutilisation possible, à des changements climatiques.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Moi, ce qui me fascine, c'est de voir, à la fin, en bibliographie, le nombre impressionnant... ? puis je suis persuadé qu'on n'en a pas 10 % de ce qui est fait à l'échelle planétaire ? sur la connaissance qu'on peut avoir de l'eau et les recherches qui sont faites dans ce domaine-là. On dit qu'on va avoir un bureau sur les connaissances de l'eau, et c'est comme si on connaissait très peu de choses sur l'eau. Est-ce qu'en effet, au moment où on se parle, on ne connaît que très peu de choses sur l'eau?

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

M. Rousseau (Alain): Au niveau scientifique, à l'échelle planétaire, on a une bonne connaissance de la molécule eau, de la manière dont on l'utilise, etc. Ceci étant dit, l'eau est... Comme j'aime à le dire dans mon cours d'hydrologie, l'hydrologie demeure une science appliquée, dans le sens qu'on étudie l'eau localement. On peut avoir des intérêts globaux, des intérêts planétaires, mais localement on semble ? et c'est un peu le cas ? toujours en manque de connaissances. Si on veut gérer l'eau, il faut en connaître tout.

Donc, localement, on veut savoir combien il y a d'eau dans les aquifères, on veut savoir combien il y a d'eau qui circule sur une base annuelle en un point donné d'une rivière, on veut savoir l'état de cette eau-là au niveau de sa qualité et effectivement on a un manque de connaissances. On a un manque de connaissances, par exemple, s'il y a une contamination locale d'un aquifère dépendamment du contaminant. Quel pourrait être, par exemple, le panache de contamination? Donc, ça, c'est la connaissance locale qu'on n'a pas.

La caractérisation des aquifères. Encore une fois, si j'avais à exploiter un aquifère, je me devrais, dans un premier temps, de connaître le taux de recharge, je voudrais avoir un taux d'exploitation inférieur à ce taux de recharge là. Et, dans le calcul de ce taux de recharge là, je devrais tenir compte non seulement de la quantité d'eau qu'on pourrait avoir besoin pour produire un bien ou un service, mais aussi la quantité d'eau nécessaire pour maintenir les écosystèmes.

Donc, effectivement, localement, on aura toujours un besoin de la connaissance, et le besoin de la connaissance, tant au niveau local que planétaire, il demeure criant aussi.

Le Président (M. Bergman): M. Bégin.

M. Bégin (Yves): On a fait référence à l'utilisation de l'eau pour la production hydroélectrique. Si on regarde les données d'Hydro-Québec sur les 40 dernières années, c'est-à-dire le jaugeage des bassins du Nord, ça représente, là, environ 50 % de la production énergétique du Québec, tous les bassins de la Basse-Côte-Nord, la tête des rivières et le complexe de la Grande-Rivière, dans le Nord. Ça représente un peu moins de 150 TWh. La moyenne estimée, si on fait un écart type autour de la moyenne, ça représente... un écart type vaut 750 millions de dollars par année, ça veut dire 1,5 milliard d'écart, ça, autour de la moyenne. O.K.?

Alors, on parle de connaissances sur l'eau maintenant. Durant les années 1960, 1970, on avait énormément d'eau. Durant les années 1980, 1990, on parle de faible hydraulicité. On a une seule oscillation sur 40 ans. Qu'est-ce qui nous dit maintenant que cette faible hydraulicité récente n'est pas une incursion négative dans une tendance à la hausse? Est-ce que ça fait partie de la variabilité naturelle? On ne le sait pas. Et pourtant tout notre développement, tout notre développement, hein, ce qui fait la richesse du Québec, est basé là-dessus. Maintenant, si on transpose ça à d'autres échelles, on se met à une échelle locale, l'approvisionnement en eau est aussi extrêmement critique.

Le Président (M. Bergman): Je m'excuse. M. le député de Montmagny-L'Islet, vous avez 1 min 30 s.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): D'ailleurs, au niveau des barrages hydroélectriques, dans le Grand Nord, c'est la recherche ? une journée de recherche que j'avais faite avec Mme Garneau ? sur les tourbières. Donc, on ne connaissait pas l'importance des tourbières. Et on a vu que la rétention d'eau, on n'est même pas capable d'établir encore ça affecte quoi, c'est... d'ailleurs le détournement de Sarcelle et la création des dérivations pour en arriver là. Simplement, quand on parle de réhabilitation, est-ce qu'on peut parler du même cas dans l'histoire de Shannon, au niveau de la contamination de sa nappe? Puis, aujourd'hui, on cherche encore les coupables, puis on n'a pas trouvé de solution pour la ville de Shannon, près de Québec.

Le Président (M. Bergman): Il y a temps pour une très, très courte réponse, une demi-minute. M. Rousseau.

M. Rousseau (Alain): Je suis familier avec le cas de Shannon. Je ne suis pas sûr d'avoir compris votre question, mais je vais m'essayer, en ce sens que vous voulez savoir quel taux de réhabilitation on peut obtenir?

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Non. Bien, on n'a pas déterminé qui était la cause, donc aujourd'hui on est encore devant le même problème à Shannon.

M. Rousseau (Alain): Besoin de connaissances.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Oui. Merci, M. le Président. Merci, messieurs. Vous posez beaucoup de questions qui sont très pertinentes, qui vont nous aider à améliorer le projet de loi. Je voudrais avoir des précisions sur un certain nombre de choses. Vous dites qu'avant de lancer, là, les PDE, il faudrait qu'on se questionne sur leur utilité, sur aussi, on pourrait dire, le succès des organismes de bassin versant. Puis vous dites que vous avez commencé à travailler là-dessus. Est-ce que vous pourriez nous dire où vous en êtes rendus puis qu'est-ce que ça donne? Est-ce que vous avez des indications, à ce moment-ci, là, par rapport aux travaux que vous faites là-dessus?

M. Rousseau (Alain): Au niveau des plans directeurs de l'eau...

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

M. Rousseau (Alain): Au niveau des plans directeurs de l'eau, nous, en tant que chercheurs, on aime bien quand le gouvernement va de l'avant avec des initiatives qui touchent de près ou de loin la gestion de l'eau par bassin versant. Donc, depuis l'existence des organismes de bassin versant et de leur devoir de produire un plan directeur de l'eau, on s'est interrogés en tant que chercheurs si effectivement ces plans directeurs de l'eau là permettraient aux organismes de bassin versant d'atteindre leur mission et à savoir si, les organismes de bassin versant, si on peut les regarder comme un organisme quelconque, quels sont les facteurs ou les éléments qui en assurent le succès ou les échecs. On a une étudiante à la maîtrise, Mme Brigitte Laberge, qui termine en ce moment son mémoire. Je ne peux malheureusement pas vous divulguer les résultats préliminaires. Son dépôt initial est prévu pour la fin du mois de septembre. J'imagine que, vers décembre, on pourra divulguer toutes les informations en ce qui a trait à cette étude-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Compte tenu qu'on va étudier le projet de loi cet automne, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de trouver un compromis qui pourrait nous aider? Si on veut que la recherche serve à quelque chose, elle serait plus pertinente en octobre qu'en décembre.

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

M. Rousseau (Alain): Je suis très content de vous entendre à ce niveau-là. Oui, son employeur pourrait la relâcher pour un mois en lui donnant son plein salaire, et je suis certain qu'elle aurait terminé. Elle travaille pour le ministère de l'Environnement.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: On peut souhaiter que ça puisse se faire dans ce sens-là. Vous mentionnez qu'au niveau des redevances il faut éviter que les agents économiques ne soient, à court ou à moyen terme, désavantagés sur les marchés nationaux ou internationaux. Est-ce que vous avez des exemples de pays qui ont bien réussi cette étape-là, dans le sens qu'ils ont proposé des redevances qui vous semblent, on pourrait dire, équitables? Est-ce que vous pourriez nous alimenter par rapport à ça?

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

n(14 h 50)n

M. Rousseau (Alain): Évidemment, ça se termine maintenant que je suis bien habitué à la procédure. Malheureusement, je n'ai pas d'exemple à vous proposer. Ceci étant dit, lorsque j'ai fait cet écrit-là, je l'ai fait tout simplement dans un souci de développement durable, tout simplement en appliquant le principe qui dit que, si j'ai un embouteilleur quelconque qui est actif économiquement, qui fait vivre des gens, qui génère de l'activité économique, eh bien, au niveau de ses redevances, c'est bien entendu qu'il doit probablement compétitionner sur un marché national ou international, il y a peut-être moyen justement, à ce niveau-là, de regarder ce qui a été fait et, au niveau des redevances, avoir une certaine gradation dans le temps qui fait que l'entreprise va avoir le temps de se préparer. À l'inverse, il est prouvé que, lorsqu'on a une réglementation, c'est les meilleures industries qui finissent par performer. Donc, c'est tout simplement sur, si vous voulez, des principes acceptés que j'ai émis ce commentaire-là dans mon mémoire.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Sur la question de la hiérarchisation, bon, Mme la ministre avait des interrogations, j'en ai aussi parce que ça me préoccupe. Bon. Vous semblez dire qu'il faut concilier. On est tous d'accord avec ça, qu'il faut concilier, là. Mais, dans le cas où ce n'est pas possible de concilier, qu'est-ce que vous mettriez en priorité?

M. Rousseau (Alain): Je pense que l'État fait son rôle, et puis l'État effectivement, il prioriserait la population locale, ça, c'est évident. Je me rends compte maintenant que j'ai mal peut-être articulé mon mémoire à ce niveau-là. Je pense que mes échanges avec Mme la ministre ont été assez clairs. Nous sommes d'accord avec ce qui est écrit, mais ce que l'on dit, c'est: Il faut, avant de prendre une décision, regarder les trois pôles, c'est-à-dire le pôle économique, le pôle humain et aussi le pôle récréotouristique.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Vous avez l'occasion probablement de rencontrer d'autres chercheurs ou d'avoir accès à toute une série de documentations. Est-ce qu'il y a des pays qui devraient nous inspirer en matière de gestion de l'eau? Est-ce que vous auriez des indications à ce sujet-là?

Le Président (M. Bergman): M. Rousseau.

M. Rousseau (Alain): Il y a deux pays qui me viennent... En fait, on peut dire qu'il y a quatre pôles géographiques qui nous interpellent. Il y a un pôle comme l'Australie, qui est dans une certaine sécheresse depuis plusieurs années. C'est un pays qui s'est doté d'organismes de bassin versant assez importants au niveau communautaire, et ils ont un rôle actif au niveau de la gestion de l'eau. Il y a le Brésil qui a institué dans ses chartes et reconnu la gestion intégrée de l'eau par bassin versant. Et il y a notre voisin du Sud, les Américains, et aussi l'Europe qui ont mis de l'avant des lois sur l'eau.

Aux États-Unis, ça s'appelle le Clean Water Act. Mais, aux États-Unis, on a une autre articulation de la démocratie. Donc, souvent, c'est les concitoyens, c'est les groupes de pression qui finissent par brasser la cage du gouvernement fédéral ou des États pour les forcer à faire des plans directeurs de l'eau, si vous voulez, à l'échelle de bassins versants problématiques.

Et évidemment, au niveau européen, on s'est donné une directive-cadre sur l'eau qui est intéressante, qui, quand on la regarde dans ses fondements, rejoint très bien le Clean Water Act des États-Unis, qui se donne un calendrier pour mettre en place des plans directeurs de l'eau, et tout ça va dans la bonne direction, qui demande une gouvernance participative au niveau de la gestion de l'eau.

Donc, je dirais d'emblée qu'au niveau de comment c'est articulé en ce moment, l'Australie, les États-Unis, l'Europe et ? peut-être plus au niveau institutionnel, voir comment ils ont inscrit dans leur loi ? le Brésil peut-être sont des exemples intéressants.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: J'aurais envie de vous dire que parfois, même si on a une très bonne réglementation, on n'a pas nécessairement de bons résultats. Je ne suis pas certain que les règles... Quand je regarde les Américains, qui ont de plus en plus de problèmes d'eau, j'ai comme l'impression qu'il y a peut-être des petits écueils à l'intérieur de tout ça.

En dernière question, je voudrais savoir, en matière d'eau, qu'est-ce qui vous inquiète le plus pour l'avenir? Si vous aviez à lancer deux, trois priorités, en disant: Écoutez, si vous voulez qu'on se préoccupe de l'eau d'une manière durable... Qu'est-ce qu'on devrait faire? Qu'est-ce qui vous inquiète le plus en matière d'eau pour le Québec?

Le Président (M. Bergman): M. Bégin a demandé la parole. M. Bégin.

M. Bégin (Yves): Je vais laisser M. Rousseau répondre à cette question d'abord, je reviendrai ensuite, si vous me permettez.

M. Rousseau (Alain): Bon. Personnellement, comme je disais un peu plus tôt dans la présentation ici, on ne peut pas gérer ce que l'on ne connaît pas. A priori, les eaux de surface, on peut en faire un suivi relativement étroit, au sens qu'on peut jauger les débits, on peut aussi... et on pourrait faire aussi un meilleur suivi temporel de la qualité de l'eau à l'intérieur des bassins versants.

Ce qui nous interpelle plus en ce moment, au Québec ? je vais vous parler de la problématique québécoise ? c'est plus la problématique justement des eaux souterraines, en ce sens qu'on n'en connaît pas les quantités, on n'en connaît pas la qualité. Il y a aussi une grande partie de la population qui s'alimente à même des puits individuels, des puits individuels qui sont soit influencés par les eaux de surface, de par le fait que ces gens-là s'abreuvent à même la nappe phréatique ? et j'en suis un consommateur, je demeure en région rurale ? et il y a aussi les gens qui ont des puits artésiens, qui doivent s'abreuver à même des aquifères. Donc, je vous dirais, dans une préoccupation à très court terme, la qualité des eaux souterraines. Dans les cas où est-ce qu'on a des eaux souterraines qui alimentent de grandes agglomérations, on pourrait s'interroger justement à essayer de calculer la recharge au niveau des aquifères qui alimentent ces villes et villages. Donc ça, ce serait une des premières préoccupations.

Une deuxième préoccupation serait en égard du fait qu'on va avoir de grandes métamorphoses au niveau de notre eau dans le nord du Québec. Et, personnellement, je suis impliqué justement... M. le député de L'Islet a fait référence plus tôt à des milieux humides, des tourbières. Nous, on travaille en ce moment dans le Nord du Québec pour essayer justement de mieux comprendre le temps de séjour justement dans ces tourbières-là, qu'elles soient de type ? je vais vous lancer deux mots techniques ? ombrotrophe, minérotrophe. Mais tout ça pour dire qu'on s'intéresse à savoir, l'eau, une fois qu'elle a pénétré, quel est son temps de séjour. Et, dépendamment du niveau d'eau dans cette tourbière-là, est-ce que l'apport au barrage hydroélectrique, par exemple, provient plus de l'eau en surface que de l'eau dite souterraine au niveau des tourbières? On a une connaissance fragmentaire à ce niveau-là, et c'est pour ça qu'on poursuit des études dans ce sens-là.

La troisième chose au niveau de l'eau serait évidemment dans un contexte de changements climatiques. La plupart des modèles régionaux de climat nous indiquent des changements au niveau des précipitations. Si les précipitations s'en vont soit à la hausse soit à la baisse, bien il va falloir s'interpeller sur nos modes de gestion dans un contexte de changements climatiques. Donc, pour le milieu urbain, ça veut dire, par exemple, peut-être avoir des systèmes d'évacuation des eaux pluviales peut-être plus performants par rapport à... On a encore vécu un épisode en fin de semaine dernière. Et, pour le monde rural ou le monde industriel, là, à ce moment-là, peut-être essayer de savoir, si on a des réservoirs, est-ce que les réservoirs vont avoir plus d'eau ou moins d'eau. Comme M. Bégin le disait précédemment, l'écart type se traduit par de grandes sommes d'argent. Donc, ce qui peut paraître moins de 1 % de variation pour quelqu'un, ce 1 % de variation là peut être économiquement extrêmement rentable pour un État.

Le Président (M. Bergman): M. Bégin.

M. Bégin (Yves): Réflexion générale sur votre question précédente. On cherche souvent des modèles de réussite ailleurs, mais le modèle de réussite, il est peut-être chez nous, dans le sens que, quand on regarde un peu ailleurs dans le monde, la façon dont on gère l'eau, imaginez qu'il y a énormément de pays dans le monde où le réseau d'épuration des eaux, c'est-à-dire des eaux usées, n'est pas confiné par rapport au réseau d'aqueduc. Je prends l'exemple du Maroc, de la Tunisie, de l'Algérie, des pays du Nord de l'Afrique.

Alors, on peut fournir, nous, énormément de beaux exemples de réussite chez nous, si on se dote d'une loi de qualité et surtout des moyens de la mettre en opération. C'est pour ça que le Bureau de la connaissance sur l'eau, pour nous, est tout à fait fondamental. Et on fera office de leaders dans le domaine pour donner de beaux exemples au reste du monde, qui en auront besoin. Ça fait qu'un jour on dira... La question sera peut-être posée ailleurs: Avez-vous des beaux exemples dans le monde? On dira: Bien, regardez, on en a un au Québec.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval, il vous reste une minute.

M. Trottier: C'est très bien. Merci.

Le Président (M. Bergman): Merci. Alors, M. Rousseau, M. Bégin, merci pour votre présentation. Je demande les gens de la MRC Haute-Yamaska pour prendre leur place à la table.

Je suspends pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 14 h 59)

 

(Reprise à 15 h 1)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue à la MRC Haute-Yamaska. M. Sarrazin et M. Desmet, vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Alors, s'il vous plaît, faites votre identification, et vous avez les prochaines 15 minutes pour faire votre présentation.

Municipalité régionale de
comté de La Haute-Yamaska

M. Sarrazin (Paul): Merci, M. le Président. Mme la ministre, élus de l'Assemblée nationale, membres de la commission, on est heureux d'avoir la chance de pouvoir venir commenter en personne notre mémoire. On ne va pas vous en faire une lecture intégrale, vous comprendrez, je pense que vous en avez pris tous connaissance. Nous sommes convaincus de l'importance de ce projet de loi et que la ressource eau mérite toute notre attention, aujourd'hui et pour les générations à venir, ce qui est à la base même du développement durable. Nous voulons porter à votre attention, avec ce mémoire, la gouvernance de l'eau et la responsabilité de l'élaboration d'un PDE et de son plan d'action.

En 2005, le gouvernement québécois a adopté la Loi sur les compétences municipales. Cette loi octroie et confirme aux municipalités et aux municipalités régionales de comté, les MRC, des pouvoirs en des termes généraux afin de leur permettre d'agir pleinement dans leur domaine de compétence. Cette loi est ainsi venue confirmer la compétence des MRC en matière de gestion des cours d'eau.

En accordant cette compétence aux MRC, le gouvernement a jugé que l'échelle la plus appropriée pour gérer l'écoulement de l'eau au Québec est celle d'une MRC. Par cette compétence, les MRC gèrent tous les travaux d'aménagement, d'entretien et de nettoyage des cours d'eau. D'ailleurs, ce type d'intervention, comme toute autre, fait partie des actions que nous retrouvons au sein d'un plan directeur de l'eau tel que présenté par la Politique nationale de l'eau, en 2002.

Si l'échelle régionale de la MRC a été choisie par le gouvernement du Québec afin d'assurer le bon écoulement des cours d'eau, nous considérons que cette même échelle serait la meilleure pour l'élaboration et la mise en oeuvre d'un plan directeur de l'eau. Nous tenterons donc d'en faire la démonstration en nous concentrant sur la section traitant de la gouvernance de l'eau ainsi que celle concernant le bureau national de l'eau. Pour ce qui est du Bureau de la connaissance de l'eau, nous sommes totalement en accord avec celui-ci. Mais, pour les autres niveaux, tels qu'OBV ou comités hydriques, on se questionne, car on croit que les MRC sont à même de prendre ces responsabilités. Il en va de l'efficacité tant au niveau des ressources humaines que financières.

Je veux ici vous faire part de mon expérience et partager avec vous ce qui se passe présentement sur le terrain. Ça fait quatre ans que je suis maire d'une localité, une municipalité, Sainte-Cécile-de-Milton, avec un cours d'eau important, la rivière Noire, préfet de la MRC Haute-Yamaska depuis trois ans, qui est à la tête de la rivière Yamaska, sans vous rappeler que c'est la rivière la plus polluée au Québec ? nous n'en sommes pas très fiers, mais nous mettons les efforts pour corriger la situation. Je fais partie du conseil exécutif de la CRE Montérégie-Est, président de la commission, de la CRRNT Montérégie-Est, président de la commission permanente de la FQM sur l'aménagement, l'environnement, l'agriculture et le territoire. Et, pour terminer, je suis désigné par notre MRC pour siéger au conseil d'administration de l'organisme de bassin versant de la rivière Yamaska, dit le COGEBY. Je prends la peine de vous mettre ça en reflet parce qu'au niveau de ces quatre, cinq instances là l'eau est partie prenante de nos discussions présentement.

Vous comprendrez que j'ai la chance d'être un acteur privilégié et de faire partie des débats: À qui reviendrait la gouvernance de l'eau, de toutes ces instances? Présentement, la question se pose. Pour en avoir discuté avec plusieurs de mes collègues, la gestion eau par l'approche de la MRC fait sens. Plusieurs vous diront que les territoires de MRC ne sont pas en lien avec ceux des bassins versants. Effectivement, dans bien des cas, les frontières ne sont pas les mêmes. Mais sur ce point les bureaux de délégués de comté sont un bel exemple du travail que les MRC font les unes avec les autres pour administrer les problèmes d'écoulement des eaux, qui touchent plus d'un territoire.

Le monde municipal connaît l'importance de l'eau et déjà en assume la responsabilité à plusieurs égards, tel que mentionné dans notre mémoire. Pour ce qui est du Conseil régional des élus, déjà, à ce stade-ci, beaucoup de mandats nous sont confiés et par des ententes spécifiques, et force est d'admettre que présentement de nombreux élus se questionnent sur le nombre de responsabilités qui leur sont confiées. Je fais un lien ici avec les CRRNT, qui ont à mettre sur pied un plan directeur des ressources du territoire.

Chez nous, en Montérégie-Est, après les trois priorités dites obligatoires, la quatrième, qui était à notre choix, fut l'eau, et cette ressource fut mise de l'avant par les aménagistes des MRC, et ceci, de façon unanime.

Pour ce qui est de la FQM, les membres de la commission partagent le principe de la gestion eau par les MRC, et je crois que M. le président, M. Bernard Généreux, en a fait mention ce matin. Enfin, où se retrouvent les OBV présentement, car partout tous veulent être à la table de la gouvernance de l'eau? Un de mes premiers mandats à la MRC fut mon rôle de représenter celle-ci au conseil d'administration de l'OBV.

Je ne veux pas être si négatif face aux OBV, car somme toute il y a des actions de sensibilisation qui ont porté fruit, mais, dans un monde où on ne peut plus attendre et qu'il faut agir car la gestion de l'eau est plus que prioritaire, ce n'est pas avec uniquement l'aspect sensibilisation et sur la base du volontariat que nous allons atteindre nos objectifs, il faut se tourner vers ceux qui ont le pouvoir d'agir sur le terrain. Et, dans ce mémoire, nous vous démontrons que la MRC de La Haute-Yamaska a décidé de prendre les devants en adoptant une stratégie PDE avec une approche micro dans laquelle tous les acteurs du milieu s'y retrouvent et collaborent, tel que le veut la stratégie participative d'un PDE.

Je voudrais vous amener l'aspect finances de ces quatre instances que je vous ai mentionnées et sur lesquelles j'ai l'occasion de siéger. Effectivement, quand on est sur un conseil d'administration d'une organisation de bassin versant, avec les difficultés financières qu'ils ont connues dernièrement, bien ils sont appelés à cogner à diverses places. Qu'on pense au monde municipal, au monde régional avec les MRC ou les conseils régionaux des élus. Effectivement, de plus en plus, ces organismes se retournent vers ces instances pour aller chercher un financement qui présentement est inadéquat.

Nous sommes en parfait accord avec l'approche utilisateur-payeur où est-ce qu'il faut mettre en place un système de perception pour encourager les actions qui soient mises sur le terrain, et encore, à ce niveau, beaucoup de questions se posent avec l'approche d'un tel fonds qui serait mis à la disposition: Qui pourrait bénéficier et qui seraient les mieux placés pour être capables de gérer un plan d'action en découlement d'un PDE?

Le bilan des actions de la MRC le démontre bien avec son plan de vidange des fosses septiques des résidences isolées qui nous a permis d'avoir un diagnostic des plus précis au Québec. On dénombre à peine 0,5 % des résidences non conformes sur notre territoire, qui, pour la plupart de ce 0,5 %, sont en processus de conformité.

En ce qui a trait aux cours d'eau eux-mêmes, cet été plus de 50 % du territoire des cours d'eau et milieux fragiles ont été inspectés par des étudiants de niveau universitaire qui ont procédé à un inventaire, en répertoriant les endroits fragiles ou problématiques à l'aide d'outils de géomatique, qui aurait pour but de mieux cibler nos actions. L'opération sera d'ailleurs reprise en 2009 pour faire la totalité de notre territoire. Notre règlement de contrôle intérimaire sur la protection des bandes riveraines en est un autre bel exemple. Le tout s'est fait sur une volonté du milieu de se prendre en main, et tous les acteurs du territoire sont partie prenante de ces actions.

On parle beaucoup de décentralisation. Il y aurait une belle ouverture d'une décentralisation ministère-MRC en évitant des paliers d'intervention entre les deux. Le modèle que nous proposons existe déjà dans d'autres secteurs d'activité. Il repose essentiellement sur une interaction entre le gouvernement du Québec et les MRC. Que ce soient les processus menant à l'élaboration des schémas d'aménagement, des schémas de couverture de risques ou des plans de gestion des matières résiduelles, ceux-ci permettent de procéder à une planification régionale de façon concertée, tout en impliquant le citoyen dans le cadre de consultations. Ainsi, le gouvernement du Québec élabore des orientations gouvernementales qui guident les MRC dans l'élaboration de leur planification. Le tout se fait dans des délais prescrits et sur des points précis, en collaboration avec d'autres MRC.

Pourquoi l'élaboration d'un PDE ne pourrait-il pas utiliser cette recette qui a fait ses preuves par le passé? Certains répondront que de cette façon nous ne pourrions pas avoir une vision intégrée du bassin versant. Nous croyons que cet argument peut être contourné en donnant un rôle élargi au Bureau des connaissances de l'eau. Tel un RECYC-QUÉBEC, pour le plan de gestion des matières résiduelles, ou bien la Direction de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme du MAMR, pour les schémas d'aménagement, ce bureau aurait les mandats suivants ? et je pourrais rajouter l'exemple aussi des gravières-sablières, où la responsabilité est donnée au monde municipal et qu'on doit travailler sur des politiques présentement à ce sujet: déterminer les orientations gouvernementales en matière de gestion de l'eau; s'assurer du respect des échéanciers de travail; évaluer la conformité des plans directeurs de l'eau et de ces orientations; mettre à jour ces orientations dans le cadre d'un processus flexible, selon l'évolution de la connaissance, des interactions des MRC limitrophes et des priorités; intégrer ces informations pour l'ensemble d'un bassin versant.

n(15 h 10)n

Ce modèle est basé sur le principe de représentativité décisionnelle des élus et de leur imputabilité. Ceci contribue à obtenir des PDE interactifs et adaptés aux bassins versants, aux réalités locales et aux acteurs de l'eau. Ceux-ci seraient d'ailleurs plus concernés par un PDE à l'échelle réduite, donc plus près de leurs réalités.

En conclusion, nous sommes convaincus que les organismes les mieux placés pour la réalisation et la mise en oeuvre des PDE au Québec sont les MRC. D'ailleurs, la structure en place actuellement est à revoir complètement. Nous considérons que les OBV sont aux prises avec des déficits de fonctionnement dus à un manque de ressources et à une absence de légitimité. Pour sa part, le manque de ressources se répercute directement sur leur niveau de compétence. Le haut taux de rotation du personnel dans ces organismes est la cause d'un perpétuel recommencement qui élimine toutes les chances de développer une expertise et des compétences. D'autre part, l'absence de légitimité d'intervention a une incidence directe sur la capacité de mettre en oeuvre un PDE. Actuellement, le seul pouvoir que détiennent les OBV est celui d'influence, pouvoir que détiennent les MRC, en plus de celui de réglementation, tout en demeurant imputables.

En regard de tout ce qui précède et dans une perspective d'optimisation des ressources en place, la conclusion la plus logique, selon nous, consiste à confier la réalisation des PDE aux MRC. Nous sommes d'autant plus convaincus que notre position propose la bonne façon de faire que nous avons décidé d'être conséquents en embauchant une ressource qui a pour mandat d'élaborer un plan directeur de l'eau pour notre territoire. Ainsi, nous avons décidé de prendre les devants en mettant en oeuvre l'un des axes de développement que nous avons ciblé prioritaire, soit la protection de l'environnement de la Haute-Yamaska, et ainsi rendre la MRC de La Haute-Yamaska prospère de nature.

Je suis heureux d'avoir partagé ces quelques éléments à l'intérieur de... des choses qu'on retrouve dans notre mémoire. Et, si le moment est venu, nous sommes à l'aise à répondre à vos questions et aller un peu plus loin au niveau de notre document.

Le Président (M. Bergman): Merci, M. Sarrazin. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, M. Sarrazin, bonjour, M. Charest, bienvenue à cette commission parlementaire.

D'entrée de jeu, M. le préfet, je vais vous dire que c'est avec beaucoup d'intérêt qu'on prend bonne note, qu'on prend connaissance ? puis vous avez raison de nous le rappeler ? des actions menées particulièrement sur le territoire de votre MRC en matière de gestion de l'eau. Je voulais le souligner. Je ne veux pas reprendre l'ensemble des éléments que vous avez portés à notre attention, mais vous faites bien de le dire et qu'on puisse apprécier à sa juste valeur des efforts faits comme ça sur le territoire québécois.

Maintenant, je ne sais pas si vous avez eu le temps de prendre connaissance d'échanges que nous avons eus, la semaine dernière, avec d'autres intervenants sur cette grande question de la gouvernance de l'eau. C'est une question qui, à elle seule, constitue un chapitre, là, de notre projet de loi. Nous avons eu des échanges avec, par exemple, des groupements environnementaux. Je pense au regroupement des organismes de bassin versant, je pense à Nature Québec, je pense aussi au Regroupement national des...

Une voix: Conseils régionaux.

Mme Beauchamp: ... ? merci ? des conseils régionaux en environnement, le... voyons, RNCREQ ? bon, on va s'en sortir. Et, je dois vous dire, je pense que ce qui ressort de la consultation que nous menons actuellement, c'est qu'honnêtement personne ne remet en question le fait qu'il y a une instance à la fin qui doit être décisionnelle puis qui doit être représentative et imputable, qui est appelée à appliquer des décisions, je dirais, là, des réglementations, des décisions sur un territoire donné. Et je pense honnêtement, il faut se le dire ici, si vous allez voir les propos du regroupement des organismes de bassin versant ou même encore du Regroupement des conseils régionaux en environnement puis des autres intervenants, je crois qu'on est tous conscients, là, qu'à la fin il y a une imputabilité puis il y a une instance décisionnelle qui est appelée à appliquer sur un territoire donné un plan directeur de l'eau. Ce qu'on cherche ici, c'est la bonne... M. Généreux, qui est passé devant nous, ce matin, parlait, lui, tu sais, de la bonne articulation, de la bonne articulation des efforts de chacun puis du travail de chacun.

Je veux peut-être vous réentendre. Parce que votre positionnement est clair, en fait. Donc, vous, vous privilégiez le fait que la gouvernance de l'eau soit confiée nommément à la MRC, qu'elle ait la responsabilité de la production du plan directeur de l'eau et de sa mise en oeuvre ? je vais résumer ainsi votre position. Mais par ailleurs, dans votre mémoire, vous dites quand même qu'il y a un argumentaire qui dit: Bien, comment est-ce qu'on fait, à partir d'un territoire administratif comme une MRC, comment on fait pour réussir à avoir une vision d'ensemble nécessaire puis qui procède de la logique hydrographique, là, qui est la vision bassin versant? Et, vous, vous dites: Bien, on a une réponse à ça: Donnons-nous une structure supérieure... que ce soit le Bureau des connaissances sur l'eau ou pas, là, mais vous dites: Donnons-nous une structure à partir de Québec, qui, elle, va voir à l'articulation de tout ça à l'échelle d'un bassin versant, puisque... Dans le fond, ce que vous proposez, ce n'est pas à l'échelle d'un bassin versant, c'est à l'échelle d'une MRC. Puis vous dites: Bien, on va se donner, à partir de Québec, une vision de tout cela.

Mon commentaire, puis je veux avoir votre réaction, parce que, je me dis, dans le fond, on cherche quelle est la bonne unité qui va nous donner la bonne vision à l'échelle d'un bassin versant. Vous, vous dites: Bien, c'est à partir de Québec, qu'on se donne un mandat, quelque chose, à Québec, qui va tout mettre ça en parallèle, puis, vous dites, ça va être un processus dynamique. Moi, j'ai le goût de vous relancer en disant: Bien, est-ce qu'avec les organismes de bassin versant, ce n'est pas exactement le genre de processus dynamique que l'on souhaite, mais, plutôt que de dire que ça va être à partir de Québec, bien, que, là, c'est plus collé encore à la réalité des différentes régions, puis c'est à l'échelle donc d'un bassin versant?

Quand je regarde votre notion de... ce que vous voulez confier à une structure, là, élargie à partir de Québec, vous dites: S'assurer du respect des échéanciers; évaluer la conformité des plans directeurs de l'eau aux orientations; mettre à jour les orientations selon l'évolution des connaissances; intégrer les informations à l'échelle d'un bassin versant. Est-ce que ce n'est pas ce qui, en ce moment, tombe beaucoup dans la cour de l'organisme de bassin versant?

Ça fait qu'autrement dit, je vous relance un peu la question en disant: Moi, je comprends bien votre propos, là, de dire: Écoutez, à la fin, moi, je suis un élu puis c'est moi qui suis imputable de la gestion de l'eau sur mon territoire, là. Je comprends parfaitement ce message-là. C'est la notion de l'articulation d'une vision à l'échelle d'un bassin versant qu'on cherche. Et votre mémoire, puis pardonnez-moi d'avance, je suis un peu trop longue, mais votre mémoire, on dirait qu'à partir de l'expérience que, moi, je qualifie d'une courte expérience, dans l'histoire du Québec en tout cas, de l'existence d'organismes de bassin versant, vous dites: Ce modèle-là ? selon vous ? il ne marche pas, puis vous dites: Ça devrait plutôt être vu à partir de Québec.

Je veux savoir pourquoi vous pensez que ça va être mieux fait, mieux vu, que ça va fonctionner mieux avec une structure qui va être à partir de Québec plutôt que cette structure où on parle d'articulation, là, des efforts de chacun à l'échelle d'un bassin versant? Pourquoi ça va être mieux, un grand bureau à Québec? J'ai de la difficulté à comprendre ça, tout en respectant puis en cherchant avec vous, là, la bonne piste de solution sur la gouvernance de l'eau.

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): J'avais hâte de vous répondre, Mme la ministre. Non, écoutez, je pense que j'ai une clarification à faire, d'entrée de jeu. On n'est pas contre l'approche bassin versant, tout au contraire. La preuve même, c'est que, là, on a fait un mémoire, mais on aurait pu élaborer des cartes à ce sujet-là. On a divisé notre territoire MRC en 53 sous-bassins de première, deuxième, troisième et quatrième ligne, et 66 % de ces sous-bassins font partie de notre territoire intégralement. On comprend très bien qu'il y a des petits sous-bassins qui vont être limitrophes à d'autres MRC.

On a deux visions à avoir avec l'approche bassin versant: Est-ce qu'on la prend très macro, en partant d'un bassin comme la rivière Yamaska, qui part de Sorel-Tracy, qui s'en va tout près des frontières américaines, qui traverse 12 MRC, nombre de municipalités, ainsi de suite, avec tous les intervenants du milieu, ou on considère l'approche bassin versant mais de plus petits, avec des problématiques très ciblées, où est-ce qu'on peut intervenir rapidement parce qu'on connaît déjà les enjeux?

Pour siéger sur l'organisme de bassin versant qui est sur mon territoire, l'élaboration d'un PDE présentement va se faire de façon très, très, mais très macro ? puis je m'explique là-dessus ? de peur, à un certain niveau, étant donné qu'on travaille très près avec le milieu, avec le monde municipal, ceux qui sont imputables, de ne pas vexer ou de ne pas mettre en mauvaise position certains acteurs du milieu par rapport à des recommandations qui pourraient découler d'un PDE. Ça fait qu'au niveau de l'élaboration d'un PDE avec les organismes qui sont là, non pas qu'ils n'ont pas la conscience de vraiment voir où sont les problématiques avec les ententes de sous-contrats par des plus petits organismes du milieu, ils font ce travail-là, puis on ne veut pas non plus créer un élément de chicane avec les organismes qui travaillent présentement, mais force est d'admettre qu'éventuellement on va devoir arriver dans un mode d'application, dans un mode où est-ce qu'on va devoir être en action concrète.

Et, quand on est assis en conseil d'administration, on se pose la question: Qu'est-ce qui va nous arriver? Je me mets avec le chapeau du membre ou du C.A. d'un organisme de bassin versant, on se questionne beaucoup présentement. On n'a pas les moyens, on n'a pas les outils, on ne peut légiférer, il faut s'assurer d'avoir la représentativité imputable assis alentour de la table. Pour ne pas avoir manqué souvent de conseils d'administration, je suis obligé d'admettre que, quand on est un, deux, des fois trois élus qui sont assis alentour de la table, la représentativité n'est pas toujours là, et puis souvent, quand on interpelle le monde municipal, il est à une certaine distance de qu'est-ce qui se fait par rapport... de qu'est-ce que font les organismes de bassin versant présentement.

n(15 h 20)n

Vous allez comprendre qu'à ce niveau-là, nous, on a tout simplement dit... On a été un des premiers, au niveau de la MRC Haute-Yamaska, à financer et à appuyer l'organisme de bassin versant. Quand j'ai fait mon entrée au niveau de cet organisme-là, on connaissait des problèmes. 80 % du temps, les gens qui étaient assis étaient pour sauver leur propre peau. Vous allez comprendre que l'élaboration d'un PDE ne se fait pas dans les meilleurs éléments. Et, quand on a des activités qui se font sur un territoire donné pour essayer de sensibiliser et approcher les gens, ceux qu'on retrouve ne sont pas ceux qu'on aurait à convaincre, mais sont convaincus déjà. Ça fait que l'approche se fait d'une manière très... base de volontariat, comme je vous l'ai expliqué tantôt.

Mais éventuellement, nous, ce qu'on considère, c'est que l'approche MRC se fait toujours en tenant compte de l'espace bassin versant, selon moi, qui est un incontournable. Mais, encore là, au niveau bassin versant, on pourrait se rendre... Un bassin versant, il y en a toujours un plus gros que l'autre puis il peut toujours y avoir un plus petit que l'autre. On commence où? Est-ce qu'on commence très gros en pensant rapetisser puis impliquer tout le monde ou on se donne la chance d'aller avec les acteurs du milieu, commençant très petit, avec ceux qui connaissent très bien les milieux, qui ont les outils à l'intérieur de leurs organisations, pour être capable de mettre en mode application pratiquement immédiatement, là, si on veut?

L'exemple, on l'a démontré. L'année passée, quand je suis arrivé en séance avec le conseil des maires, on a voulu mettre de l'avant un plan vert pour aller de l'avant justement avec l'embauche d'une personne-ressource. On a regardé notre capacité financière, on s'est dit: On va se donner 0,5 d'évaluation sur un fonds de 135 000 $ qui va être dédié uniquement à l'approche qu'on vous présente aujourd'hui. On n'a pas eu à se questionner outre mesure, la volonté était là, les élus ont dit: Go! il faut y aller, on reconnaît les problématiques, il faut agir maintenant. Mais tout ça se fait, au moment où est-ce qu'on se parle, en collaboration avec l'organisme de bassin versant qui est sur notre territoire, là. Ils savent très bien la position qu'on a. Je ne vous dis pas qu'il n'y a pas un inconfort présentement, mais ils comprennent très bien notre situation puis ils comprennent aussi que les outils qu'on a puis les moyens qu'on a sont très différents de ce qu'ils ont.

Puis, pour peut-être compléter, je fais un peu allusion au niveau des conseils régionaux des élus ou des municipalités. La MRC devient un joueur inévitable à un outil de discussion qui doit être assis à la table à tous ces lieux d'intervention là où est-ce qu'on parle de l'eau. J'ai fait allusion à la commission sur la richesse, les ressources naturelles du territoire. Encore une fois, si les aménagistes ont défendu l'eau, ce n'est pas pour rien, c'est qu'ils savent que ça fait partie de leur travail quotidien. Ils veulent être assis à ce niveau-là. Ils n'ont pas demandé à avoir nécessairement la gouvernance de l'eau, mais de s'assurer qu'il y ait une bonne gouvernance de l'eau.

Puis qui est le meilleur présentement? Force est d'admettre... je siège pratiquement sur tous les comités dits de terrain et puis je suis obligé d'admettre qu'inévitablement on finit toujours par se retourner vers la MRC. Je pense que vous l'avez bien exprimé, d'un côté pratique, tout ce qui va découler va devoir se retrouver sur nos bureaux, puis on va être en mode application. Nous, on se dit: Tant qu'à être là-dessus, prenons les ressources qui sont déjà à la disposition, donnons un mandat clair et précis, puis on va vous livrer le résultat auquel vous vous attendez.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Comme je vous le disais, le fait que la MRC ait un rôle à jouer, là, vraiment, je n'ai pas entendu personne venir dire que ce n'était pas le cas. Et c'est pour ça que je répète un peu ma question, honnêtement, M. Sarrazin, parce que vous avez plaidé de nouveau comme quoi... Puis vous êtes un exemple, j'allais dire un exemple vivant, là, de quelqu'un qui siège autour de plusieurs tables. Puis vous venez dire finalement, à la fin, là, l'exemple que vous avez donné avec votre décision de prendre un pourcentage de votre budget pour le consacrer à un fonds vert, vous avez dit: C'est moi qui étais le mieux placé pour encourager mes collègues à prendre cette décision. Puis je pense que ça, c'est une dynamique, honnêtement, que... je n'ai pas entendu personne la remettre en question.

Je pense que ce qu'on cherche, c'est le bon mécanisme par lequel on va être capable de développer une vision cohérente et efficace par rapport à un bassin versant. Puis là vous me dites: Bien oui, mais, là, les bassins versants dans le fond, ça peut être tout le Québec, ça peut être... Vous me dites: Ça dépend. Mais dans le fond on est là pour essayer de répondre à la question: C'est quoi, la meilleure lunette, là, que je dois prendre pour regarder cette dynamique-là?

Je disais à M. Généreux, ce matin, puis je veux juste partager avec vous parce que... pendant quelques secondes, vous dire que, pour moi, je vous écoute avec beaucoup d'attention, j'espère que vous le sentez, je suis préoccupée à trouver une réponse à ça, mais je veux juste vous illustrer cela en disant qu'au cours des derniers mois j'ai reçu nombre de résolutions de la part de MRC... C'est en préparation au budget, on est plus un peu avant Noël, donc en novembre, décembre 2007. Plusieurs MRC, tout près d'une vingtaine m'ont écrit pour me dire: Il faut que vous augmentiez le budget des organismes de bassin versant, avec plein de belles résolutions disant l'importance des organismes de bassin versant. En cohérence avec l'action qui s'en venait avec le projet de loi, on a augmenté de 150 % le budget des organismes de bassin versant. Et, moi, j'y lisais, bien honnêtement, je lisais, à travers ces résolutions reçues à mon bureau, le fait qu'il y avait cette vision de la part de plusieurs MRC et je pensais même, à un moment donné, que c'était une action concertée, là, très large, qu'on souhaitait donner un appui aux organismes de bassin versant puis avec un meilleur financement, là, chose que vous dites: Bien, par le passé, ils n'ont pas eu un financement suffisant.

Puis par ailleurs il y a aussi certains élus sur le territoire québécois qui prônent que la responsabilité de la production d'un plan directeur de l'eau soit plutôt à l'échelle d'une CRE. Il y a des régions où ils demandent que ce soit à la CRE que ça se fasse. Puis là, vous, vous dites: À l'échelle de la MRC. Et j'espère que vous comprenez que, nous, on est là pour essayer de dire quelle est la bonne échelle.

Je répète ma question: À votre proposition que ce soit une structure à partir de Québec qui assure la coordination des plans qui seraient faits à l'échelle de chaque MRC, donc on parle de près d'une centaine de plans à l'échelle du Québec, pourquoi ça devrait être à partir de Québec et non pas se garder ces structures à l'échelle de bassins, qui sont peut-être un peu plus raisonnables, que sont les OBV, qui assurent un processus dans le fond de veille ? j'appelle ça comme ça ? à l'application d'un plan directeur de l'eau?

M. Sarrazin (Paul): Si je reviens...

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): Excusez. Si je reviens au niveau des organismes de bassin versant, j'en ai fait mention, c'est s'assurer... Le problème, où est-ce qu'on a peut-être peur un peu, nous, du monde municipal, c'est: Quels pouvoirs on pourrait donner à ces organismes pour être capables de livrer le PDE auquel on s'attend? Il y a tout un élément, on se questionne beaucoup.

Je comprends que vous avez reçu des MRC qui étaient à... qui voulaient qu'on augmente le support aux organismes de bassin versant. Pour siéger à la FQM, c'est un sujet, je vous dirais, à toutes les commissions qu'on assiste, on en parle, puis effectivement on se dit: Étant donné que c'est une réalisation ou une créature qui vient de Québec, c'est à Québec de reconnaître le financement et le bon fonctionnement adéquat avec les outils pour amener la réalisation d'un PDE. Parce que présentement les OBV, comme je l'ai dit tantôt, frappent aux portes des instances municipales pour avoir un appui financier, et puis, ça, c'est vrai qu'il y a un malaise à ce niveau-là.

Encore une fois, l'organisme de bassin versant, quels pouvoirs il a présentement et quels pouvoirs il pourrait y avoir pour finalement revenir encore au niveau des MRC qui vont devoir appliquer... Le principe de bassin versant, là, au niveau du monde municipal, on l'endosse totalement. Puis on est capables, je crois, de faire la démonstration qu'on peut travailler les uns avec les autres. En réalité, quand on retrouve un certain nombre d'élus qui siègent au niveau des OBV, c'est effectivement pour qu'il y ait cette représentativité-là pour être capable de ramener ça au milieu municipal. Mais présentement force est d'admettre que ce n'est pas l'ensemble des OBV où est-ce que l'action des élus est à son maximum. Ça fait qu'il y a toujours un risque quand tu as les deux présentement, là.

Mme Beauchamp: Est-ce qu'à travers la lecture des articles de la Loi sur la gouvernance, est-ce que vous n'y voyez pas une reconnaissance explicite, dans le fond, du fait que c'est aux structures municipales que revient la reconnaissance donc du pouvoir d'appliquer le plan directeur sur son territoire, puisqu'on dit que... par un article de loi, on dit que les instances appropriées, les instances municipales sont invitées à prendre en considération le plan directeur de l'eau. Donc, il y a une reconnaissance explicite que ce n'est pas à l'OBV d'appliquer...

Le Président (M. Bergman): En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Beauchamp: Parce que je sens que c'est toute la question de la mise en oeuvre et des pouvoirs, hein? Mais est-ce qu'on n'est pas capable d'y lire plutôt une reconnaissance explicite du législateur à la fin que c'est aux instances municipales à poser les gestes?

Le Président (M. Bergman): Il est temps pour une très, très courte réponse.

M. Sarrazin (Paul): ...laisse intervenir, mais rapidement...

Une voix: ...

Le Président (M. Bergman): Parfait. Parfait. Prenez le temps que vous avez besoin, M. Desmet.

M. Sarrazin (Paul): O.K. Tout ce que je voudrais dire là-dessus, c'est que...

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): Excusez. Ce n'est pas pour rien qu'on a décidé, entre guillemets, de s'approprier présentement un PDE dit de façon MRC pour démontrer avec le temps qu'on est capables d'assumer cette responsabilité-là. Et d'office elle est déjà inscrite dans une façon de faire qui pourrait redevenir la nôtre de gérer un PDE qui serait élaboré par un OBV. Le contexte, je voudrais bien l'exprimer, c'est qu'en mettant des instances en place, en leur donnant du financement, finalement le travail qui se fait déjà présentement, avec la connaissance qu'on a au niveau des MRC, si on les accompagnerait peut-être avec l'argent qui existe déjà ? la question est à se poser ? est-ce qu'on arriverait mieux et plus vite qu'on le fait présentement? Moi... en tout cas, je vous dirais, pas moi, mais la MRC a voulu présenter par ce mémoire-là que la réalité du mémoire, c'est de prouver qu'on est capables de faire différent avec les mêmes sommes d'argent investies, mais probablement avec un échéancier beaucoup plus court puis avec des résultats quantifiables.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

n(15 h 30)n

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup pour votre réponse. Je vais tenter de creuser un peu plus, si vous me permettez. Ce matin, on est arrivés avec une question en disant... Au niveau des MRC, bien sûr il y a les municipalités. Les municipalités ont des intérêts pécuniaires comme n'importe qui, donc on se doit d'avoir un apport de taxes pour aider un peu les structures municipales. Donc, je passe à travers le même processus présentement, donc un village qui se dit: Bien, je vais avoir plus de taxes parce qu'il y a un lac qu'on va pouvoir ouvrir, donc amenons l'électricité, aménageons des chemins, ouvrons ce lac-là à la villégiature, on va vendre des terrains, on va faire plus d'argent. Donc, moi, je calcule qu'on a commencé à l'envers. C'est qu'avec les études qu'on a présentement, où on dit bien, on parle de connaissance de l'eau... Et j'ai posé la question à la mairesse en particulier, en disant: Est-ce que vous avez pensé à garder un accès à l'eau pour les gens qui ne seront pas propriétaires de terrain là-bas? Et la réponse a été non.

Donc, quand vous dites, aux MRC: C'est nous qui allons gérer, tout de suite avant, on a quelqu'un qui vient nous dire: On ne peut pas gérer ce qu'on ne connaît pas, ce qu'on connaît mal, ce qu'on connaît peu. Donc, quand on a des personnes qui sont en place, comme les OBV ou des gens qui connaissent leur domaine, dans l'eau... On en a vu, des gens qui sont venus nous rencontrer, qui semblaient avoir de très, très bonnes connaissances dans leur domaine. Et, vous, vous venez nous dire que vous avez engagé quelqu'un pour s'occuper de ça. Donc, est-ce qu'on n'aurait pas pu marier cet argent-là pour vous offrir une connaissance sur l'eau?

Vous devez connaître ça beaucoup, chez vous, là. Mais ce n'est pas tout le monde qui a peut-être vos compétences. Mais je vous dis: En général, au niveau du Québec, est-ce qu'on ne peut pas prendre un peu de ces gens-là, de ces compétences-là, vous aider au niveau de la MRC, en même temps trouver un moyen pour prendre une décision, tout le monde ensemble, pour que ça fasse l'affaire? Parce qu'on comprend que les MRC veulent garder leurs pouvoirs, c'est des élus, ça prend quelqu'un de responsable. Donc, on essaie juste de démêler tout ça. Parce que tout le monde qui vient nous voir a sa petite idée. Donc, peut-être qu'en ayant la vôtre on va avoir maintenant les deux sons de cloche, là.

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): Un élément, puis après ça je voudrais laisser la parole un instant à M. Desmet pour répondre. Mais, si on a décidé de prendre, embaucher une ressource chez nous, c'est qu'on voulait avoir un portrait qui était beaucoup plus micro, par rapport à notre territoire, par rapport à nos petits bassins versants qu'on a sur notre territoire, qu'un portrait macro qui va être livré par un OBNL... un organisme de bassin versant. Vous comprendrez encore, je veux le répéter, là, notre organisme de bassin versant, là, c'est 250 000 de population, c'est 11 000 km², si je ne me trompe pas, de territoire. Je veux faire attention, là.

Une voix: 4 500.

M. Sarrazin (Paul): 4 500 km² de territoire. Donc, je veux dire, on part de la frontière américaine aller jusqu'à l'embouchure du fleuve, avec Sorel-Tracy. Vous allez comprendre qu'on ne peut jamais pointer des interventions directes à ce niveau-là. Nous, ce qu'on s'est dit, c'est que les actions qu'on met présentement, ou d'autres MRC, mais chez nous... avec la nôtre, c'est que c'est des actions directes qui vont découler d'un PDE.

Présentement, je suis d'accord avec vous, votre commentaire, on est après mettre un peu la charrue en avant des boeufs: on est dans l'action directe de ce qui va découler d'un PDE, on n'a pas le PDE. Qui a le mandat d'un PDE? C'est l'OBV. L'OBV n'est pas capable de le faire à notre hauteur. Nous, on s'est dit: On ne veut plus embarquer dans ? excusez l'expression ? cette chamaille-là, on va se doter d'outils propres à nous, par rapport à nos besoins sur notre territoire. Mais on le fait présentement en complémentarité avec nos voisins puis avec l'OBV qui est là présentement. Mais ils comprennent très bien qu'ils ne sont pas capables de nous fournir l'outil à la hauteur, qui va être représentatif de notre territoire.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Vous nous donnez la grandeur de votre territoire, mais on connaît... Ah, excusez-moi, vous vouliez répondre, je vais vous laisser répondre avant.

Le Président (M. Bergman): M. Desmet.

M. Desmet (Dominique): Juste un petit commentaire. C'est juste pour dire que ce n'est pas uniquement une question d'argent, ça, c'est bien important de le comprendre, c'est une question, comme M. Sarrazin a dit, de niveau d'intervention. Donc, si on regarde le PDE que la MRC est en train de faire ? parce qu'il ne faut pas se le cacher le travail est commencé ? c'est un niveau d'intervention beaucoup plus fouillé, détaillé que ce que l'organisme de bassin versant est en train de faire actuellement. Ce n'est pas un reproche aux organismes de bassin versant, ils doivent gérer 4 500 km², ils ne peuvent pas avoir une connaissance pointue du territoire comme une MRC qui embaucherait sa propre ressource pour faire un PDE à son échelle à elle.

Je fais un parallèle avec l'aménagement du territoire. Les MRC font des schémas d'aménagement, mais elles ne font pas des plans d'urbanisme puis des règlements de zonage jusqu'à dire, là, quelle est la hauteur des piquets de clôture, puis à quelle place les cabanons sont installés, puis à quelle place on met les piscines. Ça, ça relève des municipalités locales. Mais on travaille en interrelation. Là, actuellement, on parle de faire des PDE sur des immenses superficies, mais le constat qu'on fait, c'est qu'on n'a pas la connaissance justement pour aller dans le détail. Ce qu'on peut craindre, c'est une approche mur à mur. Ce qu'on peut craindre aussi, c'est que les MRC se fassent ni plus ni moins parachuter des normes qu'on va leur demander d'appliquer, auxquelles elles n'auront pas contribué. Alors, les MRC, qu'est-ce qu'elles ont comme réflexe? C'est de se dire: Bien, si on est pour se faire mettre des normes ou se faire imposer des normes, nous allons nous-mêmes poser le diagnostic de la situation puis nous allons nous-mêmes faire une boîte à outils des interventions qu'il serait pertinent de faire. Alors, c'est un peu dans cette optique-là que la MRC Haute-Yamaska a voulu se munir d'un plan directeur de l'eau.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Vous avez été très courageux, dans un premier temps, de reconnaître que la rivière Yamaska était dans un piteux état quoique quand même poissonneuse, hein, pour les gens qui y habitent. On ne le mangerait peut-être pas, mais il y a des gens qui le mangent, il n'y a aucun problème. Mais quand même on connaît l'état de cette rivière-là. Et vous nous disiez qu'il y avait 0,5 % maintenant qui était non conforme. Mais, avec les nouvelles connaissances qu'on a, on est loin des puits absorbants, on est loin des fosses septiques qui ne sont plus conformes. Comment vous avez traité ce dossier-là avec tous vos riverains à travers le territoire?

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): Le premier exercice était de valider, installation ou non. On a fait une première tournée sur deux ans pour faire le constat. Présentement, on est après faire notre deuxième boucle, où est-ce qu'on va travailler dans un élément beaucoup plus pointu. On veut en arriver exactement à ce que vous venez de mentionner, d'être capables d'intervenir sur des installations qui seraient douteuses.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Je reviens avec ça parce que, quand on est construit en abord d'un cours d'eau et qu'on a des puits absorbants, il vient un moment donné où le puits n'absorbe plus, et on se ramasse avec le problème que l'eau s'en va au niveau de la rivière.

Vous avez une concentration agricole qui est incroyable, qui est importante, dans votre région, de toute sorte. Donc, avec les années, on voit aujourd'hui la dégradation. Et, ce matin, on parlait toujours de qui va soigner le bobo. Donc, on a une plaie qui s'envenime et aujourd'hui on dit: O.K., on veut mettre un pansement. Puis après ça on voudrait que ça guérisse. Donc là, il y a un gros, gros, il y a un gros travail, il y a un travail qui va s'échelonner sur des années. Et est-ce qu'on va être capable de revenir en arrière? C'est la grande question qu'on doit se poser. Mais est-ce que vos démarches vont être entreprises d'une façon très catégorique, très stricte et très contraignante pour les gens? Parce que vous avez énormément... Vous êtes dans le territoire de mon confrère, donc il en sait encore un peu plus que moi. Mais il va falloir prendre des mesures qui vont être draconiennes dans votre région.

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): Je vous dirais, c'est déjà commencé. Puis je partage tout à fait vos commentaires. Quand on a élaboré notre stratégie de vidange des fosses septiques puis qu'on a mis ça en place, et je ne vous dirais pas les... Disons que j'ai un peu de nervosité à être ici, ce soir, mais, quand j'avais 300 personnes en face de nous, que, disons, ils n'étaient pas vraiment favorables à notre politique, ce n'était pas facile à gérer. Mais finalement la municipalité a dit qu'on mettrait nos culottes, on irait de l'avant, puis aujourd'hui tout le monde reconnaît que c'était un exercice qui était louable, puis ceux qui étaient réfractaires à cet exercice-là, bien ils ont été les premiers à se doter d'installations conformes.

On parle de règlement sur les bandes riveraines, le RCI qu'on a mis en place, c'est encore un élément qui n'est pas facile. Même, je vous dirais, au niveau même du ministère, de l'appareil gouvernemental, on a dû se battre pour vraiment arrimer ça, où est-ce que tout le monde soit capable de trouver son lieu de confort. Mais ça s'est fait en discussion avec le monde agricole, ça s'est fait en discussion avec le monde municipal, avec le monde du tourisme, ainsi de suite, tous les intervenants du milieu, pour être certain que ces gens-là vont être collaborateurs. Mais on n'a jamais dit...

Souvent, je le dis à la blague. Dans un autre reportage, je disais: La problématique de la rivière Yamaska, du territoire de La Haute-Yamaska, ce n'est pas: deux aspirines, on va se coucher, ça va passer, là; j'ai dit: C'est un cancer généralisé en phase terminale où est-ce que l'intervention immédiate doit être mise en place. Nous, tout ce qu'on veut démontrer, c'est qu'envers nos commettants bien on prend le taureau par les cornes. La petite action qu'on ne fait pas aujourd'hui va avoir encore plus de conséquences demain. On s'est dit: Si on fait une petite action, on prend le taureau par les cornes aujourd'hui, on ne se fera toujours pas reprocher, nous, de ne pas avoir agi maintenant.

Après ça, le processus pour élaborer... On dit souvent: 40 ans de dégradation va prendre 40 ans d'amélioration pour arriver à un statut peut-être neutre. Puis c'est encore très théorique. Ça fait que c'est sûr que ce qu'on veut faire aujourd'hui, ça va être probablement les générations à venir... Mais au moins ceux qui vont nous précéder vont pouvoir dire: Bien, il y a peut-être, en 2008, des gens qui avaient une vision, qui ont mis des choses en place. Puis on dit: Si ce modèle-là peut être répété à diverses instances, bien, tranquillement, ça fera peut-être une belle hémorragie intéressante.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. On l'aura probablement dit à maintes reprises, puis je vais continuer de le faire pendant cette commission, mais, aujourd'hui, si je comprends bien, on est à l'an 1, on oublie ce qui s'est passé, on est à l'an 1 puis on recommence. Mais là il va falloir vraiment, il va falloir se servir des organismes de bassin versant. Il va falloir que vous ayez, que tout le monde au Québec ait une conscience où on va devoir se servir des connaissances des uns puis des autres. On n'a pas le droit de gérer ce qu'on ne connaît pas. S'il y a des gens qui connaissent quelque chose, il faut s'informer pour être sûrs qu'on va les avoir de notre bord, autant le milieu municipal que dans le milieu... Peu importe, hein, tout le milieu faunique peut continuer à vous aider dans ce domaine-là. Je suis persuadé que vous vous en servez, et j'espère que vous vous en servez.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Combien de temps j'ai?

Le Président (M. Bergman): Trois minutes.

M. Diamond: Trois minutes. Écoutez, première des choses, et surtout, rapidement, félicitations, ce n'est pas la première fois que vous êtes impliqués dans des dossiers comme celui-là.

J'ai deux questions, l'une excessivement courte, simplement savoir si ça fait consensus parmi les MRC, ce changement de structure là avec les organismes de bassin versant? Ce matin, on a entendu la FQM qui embrassait cette position-là; vous, aujourd'hui. D'un autre côté, on a eu des demandes de financement des MRC ? c'est ce qu'on apprenait à l'instant ? pour augmenter le financement des OBV. Donc, est-ce qu'il y a consensus ou c'est divisé, comme dossier, là?

n(15 h 40)n

M. Sarrazin (Paul): Moi, ce que...

Une voix: ...

M. Sarrazin (Paul): Excusez. Oui? Moi, ce que je peux répondre là-dessus, écoutez, aux instances où est-ce que j'ai la chance d'assister, que ce soit... parler du conseil... de la conférence régionale des élus ou à la FQM, en commission permanente, ça fait partie prenante de nos échanges. Et puis, si je serais mal à l'aise de vouloir vous dire que ça ne fait pas consensus ou que ça ne fait pas sens présentement, je ne serais pas assis ici. Ça fait que je viens ici avec une certaine aisance à être capable de dire: Oui, ça a du sens. Puis effectivement je pense que, des MRC, j'ai des confrères, des collègues qui endossent cette approche-là. Même, il y en a qui sont en attente où ça va nous mener, ce mémoire-là, par rapport à la réelle gouvernance de l'eau. Mais vous dire qu'on est à côté de la track, ce serait mentir, parce que je pense que je serais capable de faire rouler une résolution dans ce sens-là, là, puis je serais surpris des appuis qu'on aurait.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville, il vous reste deux minutes.

M. Diamond: Vous avez identifié manque de financement, manque de légitimité comme étant l'une des raisons pourquoi les OBV ont parfois de la difficulté de mettre en application ce qu'ils préconisent. Ce matin, la FQM nous disait qu'ils voulaient rapatrier évidemment une partie de ces pouvoirs, de ces compétences-là, travailler de pair, mais ça amenait le problème de la territorialité, à savoir qu'une MRC évidemment a un territoire beaucoup plus petit qu'un organisme de bassin versant. À cette problématique-là, la FQM proposait de créer une commission spéciale, avec un président indépendant, qui pouvait siéger à titre consultatif seulement pour faire le lien entre les différentes MRC. Et puis là ça revient au même problème: Est-ce qu'une commission qui siège à titre consultatif, qui n'a pas de pouvoir décisionnel va être capable d'en faire plus qu'un organisme de bassin versant?

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): Vous allez comprendre que je ne peux pas être en contrariété avec notre président, M. Généreux, ça fait que je vais endosser ses propos. Mais j'ai fait allusion au bureau de la gouvernance de l'eau...

M. Diamond: ...vous en pensez, là.

Une voix: Vous n'êtes pas obligé.

M. Diamond: On n'ira pas leur dire...

M. Sarrazin (Paul): Mais je veux revenir au Bureau de la gouvernance de l'eau... de la connaissance de l'eau, qui pourrait être l'instance... Comme j'ai fait allusion à RECYQ-QUÉBEC qui avait à chapeauter à ce que chaque MRC établisse un plan de gestion des matières résiduelles sur son territoire, puis somme toute ça a quand même bien fonctionné. Il y a encore des choses à revoir, mais c'est mis en place. Des exemples, on pourrait en nommer plusieurs comme celui-là. Qu'il y ait un bureau, qu'on lui donne le nom, qu'il y ait une instance, qu'on lui donne le nom, mais qu'on aurait à...

M. Diamond: ...

M. Sarrazin (Paul): Oui, allez-y.

Le Président (M. Bergman): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Diamond: Mais qu'arrive-t-il lorsque trois MRC qui sont dans un bassin versant ont une vision contradictoire de l'avenir quant à la gestion de l'eau?

M. Sarrazin (Paul): ...bureaux de délégation de l'eau.

Une voix: ...

M. Sarrazin (Paul): Bureaux de délégation de l'eau. Quand on a des problèmes au niveau des obstructions, des écoulements des eaux, les bureaux délégués que forment les MRC pour régler les problèmes sont un bel exemple que la réussite est possible au niveau des instances MRC.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. le député de Roberval.

M. Trottier: Oui. M. le Président. M. Sarrazin, moi, je trouve ça très intéressant que vous veniez à ce moment-ci parce qu'entre autres, tout à l'heure, on avait les gens de l'INRS qui nous ont rappelé que dans le fond, si tout le monde est d'accord que les organismes de bassin versant... de gérer par bassin versant, c'est la meilleure façon ? puis ça, je pense que vous êtes d'accord avec ça, je pense que tout le monde est d'accord avec ça au Québec ? il n'en demeure pas moins qu'on n'a pas d'évaluation de la performance des organismes de bassin versant puis on n'a pas d'évaluation aussi de: Est-ce que c'est la seule ou la meilleure façon de pouvoir le faire?

Puis ce que vous nous dites, dans le fond, c'est: On est d'accord de gérer par bassin versant, mais il y a des problèmes présentement. Puis un des problèmes que vous soulevez, puis, moi, je l'ai remarqué, entre autres, chez nous, c'est la non-permanence des gens qui sont sur ces organisations-là parce qu'il y a un manque de financement. C'est des projets, les gens vont aller là un an, ils changent, etc., mais il n'y a pas toujours de suivi, alors que, si c'était géré par la MRC puis qu'il y avait quelqu'un en permanence qui s'occupait de ça, j'ai l'impression qu'il y aurait plus de suivi.

Ça reste un élément important dans notre projet de loi, parce que, même si on demeure persuadé qu'il faut gérer par bassin versant, il faut se demander quelle est la meilleure façon pour arriver à cette gestion par bassin versant là. Et vous amenez un point de vue, à mon avis, qui est très pertinent puis qu'il faut qu'on examine.

Par rapport à votre mémoire, vous dites, entre autres, vous dites: On devrait gérer par plus petite unité, parce que dans le fond c'est bien de vouloir gérer un grand bassin versant, mais, avec les sommes d'argent qu'on va avoir, qu'est-ce qui va en arriver? Je vous comprends très bien de croire que ça ne résoudra pas tous les problèmes. Parce que théoriquement, sur le papier, les bassins versants, c'est très bien, on a évalué qu'il y avait un certain nombre de bassins versants, comme, au Saguenay?Lac-Saint-Jean, il y aurait deux bassins versants, un pour le Lac-Saint-Jean puis un pour le Saguenay, mais ça reste de très grands bassins versants, ça reste très complexe à gérer. Et j'ai l'impression qu'il faut qu'on fasse entrer un peu d'oxygène dans la gestion des bassins versants, ce que vous me semblez suggérer.

Puis, au niveau de... Là, vous dites que vous allez vous-mêmes engager quelqu'un. Je voudrais savoir plus précisément: Vous, vous aviez un organisme de bassin versant. Est-ce que vous le tassez? Est-ce que vous prenez la place? Est-ce qu'il va y avoir deux PDE? Est-ce que vous pourriez m'expliquer un petit peu plus la situation?

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): Oui, rapidement, puis je veux laisser un élément de réponse à mon collègue M. Desmet. Je l'ai dit tantôt, on ne veut pas tasser présentement l'organisme de bassin versant qui est en place, mais une chose est sûre, c'est que le portrait qu'ils vont faire va être très, très, mais très macro et ne correspondra pas à notre territoire. Nous, ce qu'on s'est dit: La ressource est déjà engagée, elle travaille présentement, elle a été présentée, ça va être un élément d'information supérieur à ce que l'organisme peut faire présentement. Mais, nous, on veut avoir un portrait micro de notre territoire, ce que l'organisme présentement ne peut pas faire.

Prenons l'exemple qu'il y aurait 87 MRC présentement, au Québec ? je fais part des villes, mais je parle... MRC ? qui auraient chacun un PDE à faire, qui se parleraient les uns avec les autres. On aurait 87 agents engagés à l'élaboration d'un plan d'eau, d'un PDE présentement, versus 33 qui sont là présentement, avec toutes les complexités que vous avez énumérées. Je vous laisse l'équation, ça va être facile à voir, là. M. Desmet.

Le Président (M. Bergman): M. Desmet.

M. Desmet (Dominique): Oui. Bien, je renchéris sur ce que vous dites, monsieur. Effectivement, c'est un des constats que, nous, on a faits. C'est que je prends, par exemple, un problème qui est archiconnu, c'est la pollution agricole, qu'on qualifie de pollution diffuse. Pollution diffuse, donc, c'est des berges qui sont en mauvais état, bon, il y a de la sédimentation dans les cours d'eau. D'ailleurs, ça nous coûte une fortune en travail d'entretien de cours d'eau. Bien, je ne suis pas sûr du tout qu'avec la structure en place puis avec l'étendue du territoire qu'ils doivent couvrir ces gens-là peuvent faire un diagnostic. Je le répète encore une fois, ce n'est pas un reproche qu'on leur fait, c'est un constat à partir des moyens qu'ils ont.

Ce n'est pas non plus, je pense, la fin du monde de dire: Bien, on va prendre l'approche par bassin versant, puis tout va être réglé. Vous êtes toujours, veux veux pas, le sous-bassin versant d'un bassin plus large, ça, on ne peut pas s'en sortir, c'est toujours comme ça. Donc, vous allez devoir travailler en concertation de toute façon. Le parallèle que, nous, on fait, c'est que les MRC travaillent déjà en concertation avec des MRC voisines pour la gestion des cours d'eau. On n'a pas le choix. Si j'ai un cours d'eau qui part de mon territoire, puis qui coule vers l'autre, puis qu'il y a des obstructions tout le long de ce cours d'eau là, je n'ai pas le choix de convoquer un bureau de délégués puis de travailler avec la MRC qui est concernée. Alors, pourquoi ne pas adopter la même recette dans la question des plans directeurs de l'eau?

Et je pense que, quand on doit, à ce moment-là, je ne sais pas, moi, tenter de régler un problème, bien, par exemple, de pollution diffuse, que ce soient des riverains qui ont des fosses sceptiques trop proches des lacs et cours d'eau, qu'il y ait trop de bandes riveraines qui ont été artificialisées, bien, à ce moment-là, oui, M. Sarrazin l'a dit, on doit mettre en place des mesures qui sont par définition impopulaires. Puis par définition le fait que ces mesures-là soient mises de l'avant et défendues par une instance publique qui est redevable, qui est constituée d'élus, il me semble que c'est plus facile à faire accepter que lorsque ça vient d'un organisme parallèle. C'est dans ce sens-là qu'est notre intervention.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Est-ce que vous nous dites que l'approche macro, elle n'est pas nécessaire ou est-ce qu'elle est moins prioritaire? Autrement dit, est-ce que dans le fond il faut faire les deux: il faut avoir une approche macro qui pourrait être faite par les organismes de bassin versant, puis ça prend également une approche micro qui va s'occuper d'un bassin qui est plus petit puis qui va être pas mal plus concret? Au lieu d'être dans des généralités, là, on va avoir des solutions plus précises. Est-ce qu'à ce moment-là... Quelle approche vous privilégiez, d'avoir les deux ou de dire: Bien, écoutez, à choisir entre les deux, on choisit l'approche micro?

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

n(15 h 50)n

M. Sarrazin (Paul): Avec la gravité de la situation présentement, vous allez comprendre que je vais privilégier l'approche micro. Mais, en travaillant en concertation, comme M. Desmet vient d'expliquer, les MRC, il n'y aurait rien qui empêcherait que deux, trois, quatre MRC qui sont touchées par un bassin versant commun, qu'elles mettent une action macro pour régler un problème plus grave qui touche plus qu'un territoire. Ça fait que les deux sont très viables mais encore avec des acteurs du milieu qui sont capables de mettre en place des actions concrètes immédiatement.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval... M. Desmet.

M. Desmet (Dominique): Si vous me permettez, je donne un exemple concret. Cet été, nous avons fait un inventaire micro, c'est le cas de le dire, de tous les cours d'eau de notre territoire. On a près de 1 000 km de rive, donc 500 km de cours d'eau. Il y en a la moitié qui ont été faits. Donc, c'est impensable, je pense, de faire cet exercice-là, avec ce même niveau d'investigation là, sur l'ensemble d'un bassin versant de 4 700 km². Donc, je pense qu'il y a de la place pour du macro, mais je pense qu'il y a surtout de la place pour du micro, et en particulier dans l'état de situation que M. Sarrazin évoque, là, les problèmes que l'on connaît.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Bien, je vais laisser M. Sarrazin, il avait un complément, là.

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): Bien, peut-être un élément. On est après aussi répéter un certain nombre d'outils qu'on retrouve déjà au niveau des MRC. Je regarde les organismes de bassin versant, ils sont après se doter de plus en plus de géomatique, d'appareils spécialisés, d'essayer d'aller chercher du personnel de plus en plus professionnel. Mais souvent ? tout à l'heure, je pense que c'est le député de l'ADQ qui y faisait allusion ? il n'y aurait pas lieu d'arrimer certaines façons de faire qui sont déjà dans le milieu présentement? Nous, on est après réinventer la roue à chaque organisme qu'on met en place quand déjà ces connaissances-là, en tout cas une grande partie de connaissances du territoire... C'est la priorité d'une MRC de connaître son territoire. Comment une MRC est interpellée à tout vent pour des enjeux sur des décisions par rapport aux municipalités, des projets d'immobilier, dans le récréotouristique, parce qu'on est le centre d'information névralgique d'un territoire, on possède les outils et les connaissances. Je ne comprends pas pourquoi l'eau nous échapperait, là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Est-ce que vous craignez que le travail que vont faire les OBV va rester des grandes généralités qui dans le fond vont être à peu près semblables d'un bassin versant à l'autre, sauf la page titre?

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): On est après préparer le PDE au niveau de l'organisme COGEBY. Tout ce que je peux vous dire, c'est que présentement le travail qui se fait pour arriver à l'élaboration du PDE, c'est prendre le maximum d'informations qui existent déjà et puis les inclure dans une reliure qui va faire office du portrait du territoire. Mais c'est des informations qui sont au MAPAQ, des informations qui sont au MDDEP, des informations au niveau des MRC. Mais ce travail-là, ce qu'on va retrouver à l'intérieur d'un PDE très macro de l'organisme, moi, je vais vous dire, quand il vont nous le déposer ici, à la MRC, je vais déjà en connaître le contenu puis je vais déjà être rendu plus loin que qu'est-ce qu'ils vont déjà nous déposer, mais avec comment d'efforts financiers et humains pour en arriver à un exercice dans lequel... déjà on connaît. On peut se poser la question. C'est pour ça qu'on remet un peu en doute la procédure. Il faudrait qu'il y ait une régularisation complète, comme on le suggère. Mais, si on est pour réinventer la roue quand il y a une roue qui fonctionne bien, si quelqu'un est capable de nous dire le contraire, que... Bien, je pense que vous l'avez très bien démontré, personne ne met en doute la responsabilité, la valeur du travail qui se fait au niveau des MRC. On pourrait se poser la question à d'autres niveaux.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Est-ce que ce que vous nous demandez, c'est de remettre en question le modèle basé sur les OBV ou de permettre des expérimentations différentes à l'intérieur d'un modèle qui demeurerait axé sur les OBV?

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): On n'est pas... Tout ce que je veux montrer, c'est que, s'il y a des milieux qui sont plus problématiques que d'autres ? tel est le cas chez nous avec la rivière la plus polluée et on est à la tête, en plus, de cette rivière-là ? on ne peut pas avoir, en tant qu'élus... de se fermer les yeux puis de cacher cette réalité-là. Nous, ce qu'on veut montrer à nos gens, c'est qu'on est capables de se prendre en main tout de suite.

S'il y aurait d'autres niveaux qui pourraient intervenir pour aider de d'autres façons, vous allez comprendre qu'on n'est pas fermés à ça, on n'est pas réfractaires. Mais tout ça doit se faire dans une phase... Si on investit tant d'argent dans une organisation ? vous l'avez mentionné ? est-ce que, cette organisation, son livrable est intéressant ou est peu intéressant? Est-ce qu'il va servir ou il ne servira pas? Nous, on va faire la démonstration d'ici peut-être trois, quatre ans que, le PDE et le plan d'action qui va suivre, par rapport à ce qu'on va amener à la MRC Haute-Yamaska, il va y avoir des gains.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Ce que je comprends dans le fond, c'est que vous offrez d'en faire plus, comme on dit, avec des résultats plus probants. C'est ça, votre objectif, dans le fond?

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): Je prends encore les trois exemples, je veux peut-être les répéter en conclusion. Ce qu'on a fait au niveau des vidanges de fosses septiques ? ce n'est peut-être pas un sujet qui est nécessairement intéressant à parler, mais c'est un exemple ? il y a peu de territoires au Québec qui est aussi... je veux dire, aussi pointu dans l'exercice des vidanges des fosses septiques qu'on l'a fait.

Notre règlement de contrôle intérimaire sur les bandes riveraines, il fait encore foi d'un très bel exemple de ce qui peut être fait. Je l'ai dit tantôt, on est en avant de ce qui va ressortir d'un PDE des OBV. Ce que l'OBV, chez nous, va sortir, il va être exactement ce qu'on va avoir déjà fait. Probablement qu'on va être rendus à une étape plus loin. Vous allez comprendre que c'est là qu'il y a comme une incohérence à ce que le travail se fait, d'un OBV, de façon très large, par contre à l'action que, nous, on fait déjà sur le terrain par rapport aux problématiques qu'on connaît. Vous allez comprendre que l'OBV présentement en place ne peut qu'être en accord avec qu'est-ce qu'on fait, puis, nous, on n'est pas en désaccord avec qu'est-ce qu'ils font. Tout ce qu'on dit, c'est: Ce que vous faites, on le sait déjà, on va aller plus loin.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval, il vous reste une minute.

M. Trottier: Autrement dit, ce que vous nous dites, c'est: Faites-nous confiance, on veut se responsabiliser puis on est capables d'aller plus loin qu'une autre structure?

Le Président (M. Bergman): M. Sarrazin.

M. Sarrazin (Paul): Oui. Puis là je rejoindrais les commentaires que Mme la ministre a dit. C'est qu'on est prêts à ce qu'il y ait un bureau de gouvernance ou une connaissance en haut lieu qui s'assure que ce qui est fait en place soit en concordance avec les grandes orientations que devrait être un PDE. Après ça, qu'il soit fait au niveau local par rapport à chaque problématique territoriale, ça va appartenir aux instances en place. Mais qu'il y ait un enjeu commun où est-ce que tout le monde va pouvoir amener ses réflexions, son bilan et son imputabilité.

Le Président (M. Bergman): En conclusion, s'il vous plaît. En conclusion.

M. Sarrazin (Paul): C'est fini. C'était juste pour...

Le Président (M. Bergman): Merci. M. Sarrazin, M. Desmet, merci pour votre présentation. Merci d'être ici, avec nous, aujourd'hui.

Je demande les gens de Québec solidaire pour prendre place à la table. Je suspends pour quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 15 h 57)

 

(Reprise à 15 h 58)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la bienvenue à Québec solidaire. Mme David, M. Roy, M. Huard, bienvenue. Vous avez 15 minutes pour votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. S'il vous plaît, faites votre identification, et vous avez le prochain 15 minutes pour faire votre présentation.

Québec solidaire (QS)

Mme David (Françoise): Oui. Alors, bonjour. Bon après-midi. D'abord, premièrement, vous présenter les personnes qui m'accompagnent. Moi, je suis Françoise David, l'une des porte-parole de Québec solidaire; à ma droite, M. Serge Roy, qui est porte-parole régional de la région de la Capitale-Nationale pour Québec solidaire mais aussi, et c'est ce qui à nos yeux justifie sa présence ici avec moi, ex-président de la section québécoise de l'association pour un contrat mondial de l'eau; et Olivier Huard, qui est porte-parole de notre commission nationale sur l'environnement.

La première chose que je voudrais vous dire, c'est qu'une fois n'est pas coutume. On a l'habitude d'envoyer nos mémoires aux commissions parlementaires suffisamment à l'avance pour que vous en ayez pris connaissance. Malheureusement, dans ce cas-ci, ça n'a pas été possible. Vous venez donc de recevoir notre très court mémoire. J'en suis désolée, mais on va quand même faire au mieux. Il est court de toute façon, et je pense que ce ne sera quand même pas compliqué d'en discuter. Donc, on va, à tour de rôle, vous présenter le mémoire, en commençant avec Olivier.

n(16 heures)n

M. Huard (Olivier): Alors, bonjour. Je vous amènerais à la page 3 pour aller directement aux positions de Québec solidaire sur la question de l'eau. Donc, dans notre plateforme électorale, il est question de la notion, la définition juridique de l'eau. Il est dit que Québec solidaire donnera à l'État québécois les moyens légaux d'assurer la protection de l'eau sous toutes ses formes, en l'inscrivant comme chose publique dans le Code civil. Ce que, nous, on veut faire, c'est de s'assurer aussi que les eaux souterraines soient incluses dans la chose publique. La notion de chose publique doit être assimilée ici à la notion juridique de res communis.

De plus, il est proposé de faire en sorte que l'eau souterraine obtienne le même statut ? ce que je disais ? à savoir qu'il s'agit d'un bien collectif. En effet, il importe de clarifier une ambiguïté apportée par l'article 951 du Code civil, qui affirme que «la propriété du sol emporte celle du dessus et du dessous», faisant ainsi potentiellement des eaux souterraines un objet d'appropriation, comme le sont les ressources minières, par exemple.

Donc ça, c'est ce qu'il y a dans notre plate-forme pour l'instant. Dans l'élaboration générale de nos politiques, bien, de notre projet de société, Québec solidaire s'appuie sur les principes défendus par le mouvement mondial alternatif de l'eau. Il y a plusieurs organismes, à travers le monde, qui défendent ces principes-là, donc on n'a pas inventé ça hier matin.

Donc, en premier lieu, l'eau est un bien commun, ce n'est pas une marchandise. Ça, c'est dans le but d'exclure l'eau de tout ce qui est du contexte de mondialisation des marchés et donc de la marchandisation en tant que telle.

Deuxième principe, il y a: l'accès à l'eau potable est un droit humain fondamental. Donc, nous, on suggère que... on pense que, comme tous droits fondamentaux à travers le monde, c'est l'État qui doit en être le défenseur.

La gestion de l'eau doit être démocratique. Donc, nous, on suggère toujours qu'étant un droit fondamental et collectif ce soient les gens, et de la manière la plus proche possible et la manière la plus conviviale, qui gèrent leurs ressources en eau sur leur territoire. Ainsi donc, nous privilégions beaucoup l'approche de gestion par bassin versant et aussi les organismes de regroupement de riverains et les conseils de bassin versant.

Comme quatrième principe, nous croyons que le financement de la gestion de l'eau doit être public. Ce principe est aussi lié en grande partie au cinquième.

Les infrastructures liées à l'eau doivent être publiques et non privatisables. On exclut ici, à notre opinion, toute forme de PPP et toute forme de privatisation qui pourrait avoir lieu, comme il y a déjà été projet dans des villes, dans les années antérieures.

M. Roy (Serge): Merci. Alors, évidemment, ces principes-là, on a examiné la loi à partir de ces principes-là. On n'intervient pas sur l'ensemble des articles de la loi. On a choisi un certain nombre d'articles sur lesquels on pense qu'il y a une réflexion majeure à faire. Sans répéter ce que mon collègue vient de dire, c'est pour ça que l'article 1, pour nous, fait problème, au sens où il maintient, selon nous, la confusion qui existe, à l'heure actuelle, dans l'interprétation. Je pense que vous connaissez bien les interrogations à cet égard-là. J'étais ici, la semaine passée, et ça a été savamment expliqué par d'autres personnes. Alors, on partage ce point de vue que la loi devrait être beaucoup plus claire pour enlever toute ambiguïté sur le statut juridique de l'eau, autant de l'eau souterraine que de l'eau de surface.

Un autre élément que, nous, on souligne, c'est la recommandation de la commission Beauchamp. Vous vous rappelez que la commission avait recommandé que le gouvernement adopte une charte de l'eau. Il avait même donné des exemples de ce que ça pourrait être, cette charte de l'eau, et nous pensons qu'il faudrait revenir sur cette question-là et effectivement avoir une loi qui a une portée plus forte qu'une loi d'application générale, c'est-à-dire une charte qui aurait préséance donc et qui permettrait de faire en sorte que l'ensemble des lois du Québec soient soumises à l'application de cette charte de l'eau là.

Autre élément, à l'article 2, où on reconnaît le droit d'accès à l'eau potable et que ce droit-là est fondamental, c'est très clair que, pour nous, cette reconnaissance-là est effectivement positive. Cependant, il faut, selon nous, relier cette reconnaissance-là à la reconnaissance du droit à la vie, le droit à la vie, qui fait partie de la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations unies et qui a donc une portée générale très forte dans ce sens-là.

Un autre élément sur lequel nous intervenons, c'est dans la section II, quand il est question de l'utilisateur-payeur et pollueur-payeur. Nous pensons qu'il faut nous assurer, dans la rédaction de cet article, qu'on exclue... et peut-être que c'est le cas, mais on souhaite que ce soit bien clair que ça exclut la tarification des usages domestiques. Parce qu'à l'heure actuelle, oui, il y a des compteurs d'eau, ça existe, la tarification, on est bien conscients de ça, mais de façon générale les services d'eau sont financés par une taxation générale, au niveau municipal particulièrement, et, nous, on pense que les usages domestiques ne doivent pas être soumis à une tarification particulière.

Je reviens aussi sur la question de pollueur-payeur, qui, selon nous, est un mauvais principe en soi. Vous connaissez aussi l'argumentation autour de cette question-là: beaucoup de groupes écologistes s'opposent au principe de pollueur-payeur parce qu'il représente, d'une certaine façon, une approbation, entre guillemets, à la pollution, pourvu qu'ensuite on paie. Bon, c'est plus complexe que ça, là, mais je résume rapidement de cette manière-là.

Il y a le débat sur les redevances qui est présent dans le projet de loi n° 92. Québec solidaire est en accord avec l'idée d'imposer une redevance. On ne propose pas de niveau de redevance comme tel. Cependant, il faut arriver à ce que ça se mette en place de façon définitive parce que ça fait plusieurs années qu'il est question de redevance, et, particulièrement lorsqu'il s'agit d'utiliser les eaux à des fins commerciales, à des fins industrielles, il nous semble que là on est rendus à une époque où il faut vraiment regarder cette possibilité-là. On sait que ça ne fait pas l'unanimité, les gens qui sont dans le domaine de la production industrielle, agricole, ainsi de suite, ont des réticences à cet égard-là, mais il nous semble qu'encore là la commission Beauchamp avait illustré un certain nombre de choses intéressantes à cet égard-là, il faudrait aller de l'avant.

Je passe ensuite à la question des poursuites que le Procureur général peut prendre en vertu de l'article 7. On voudrait s'assurer que, les poursuites qui pourraient être intentées parce que des citoyennes et des citoyens ont été victimes de pollution ou de contamination de leur eau et que ça fait en sorte qu'ils ne peuvent pas utiliser l'eau potable qui est dans leur secteur, que ces personnes-là aussi soient dédommagées. Ce qu'on voit, c'est qu'en vertu de l'article 9 les indemnités qui seraient perçues par le gouvernement seraient versées dans le Fonds vert. Est-ce que c'est bien entendu que... Est-ce qu'on doit comprendre que les citoyens auraient des recours et que l'État serait obligé de poursuivre un pollueur éventuellement et qu'on serait assurés que les citoyennes et les citoyens soient indemnisés? Parce qu'il y a des cas qui sont connus, il y en a un dans la région de Québec qui est bien connu, qui fait couler beaucoup d'encre, le cas de Shannon, et on sait que c'est toujours très pénible pour les gens qui sont aux prises avec des cas semblables.

Le point suivant, concernant le Bureau des connaissances sur l'eau, on est bien d'accord avec ça. On est au courant de l'annonce de 13,5 millions, on souhaiterait que ce soit pas mal plus que ça cependant qui soit mis sur la table pour pouvoir faire un travail qui s'impose de toute évidence.

Je passerai parce que je sais que le temps file beaucoup. Bon. On pourra revenir sur la question de la période d'émission des permis ou des autorisations de 10 ans. Nous, ça nous apparaît court.

Et finalement toute la question de l'exportation de l'eau en contenants de 20 litres, ça nous est toujours apparu comme étant une ouverture à l'exportation éventuellement et qu'à l'heure actuelle la seule chose qui empêche que ça augmente de façon significative, c'est peut-être plus les règles du marché que des règles écologiques en soi.

Mme David (Françoise): Alors, en conclusion, évidemment, on est contents que le législateur veuille reconnaître le caractère collectif des ressources en eau et visant leur protection, mais on croit que ça aurait été mieux servi par une charte de l'eau qui aurait préséance sur les autres lois. On recommande donc que le gouvernement du Québec adopte une loi-cadre pour protéger adéquatement l'eau du Québec et que le législateur empêche toute forme de privatisation des infrastructures de traitement et de distribution de l'eau.

Vous avez ensuite nos recommandations. Je ne les répéterai pas toutes, puisque Serge, dans le fond, vient de les expliquer. Je veux peut-être simplement en rappeler trois, puisque ce seraient probablement les trois qui sont les plus importantes à nos yeux et, s'il y a un message qu'on aimerait que vous entendiez, c'est celui-là.

Le premier, c'est qu'il faut absolument que, dans la loi, il soit clair que l'eau souterraine est protégée tout autant que l'eau de surface. Donc, une modification à l'article 1, en supprimant la partie suivante, là, «sauf dans les conditions définies dans la loi, dont le Code civil», parce qu'à ce moment-là on n'a pas la même protection pour les eaux souterraines.

Deuxièmement, on a comme objectif, à Québec solidaire, la limitation des exportations de contenants de 20 litres et moins, d'accord avec le fait que ce soit 20 litres et moins, le limiter autant que possible et valoriser la consommation de l'eau du robinet ? il serait temps qu'on y revienne ? plutôt que la valorisation de l'eau en bouteille.

Et finalement s'organiser, par voie législative, pour que la privatisation des infrastructures relatives à l'eau... ne puissent être privatisées.

Outre les autres questions qui ont été mentionnées, je dirais que ce sont les trois, à nos yeux, qui sont les plus importantes pour le moment. Merci.

n(16 h 10)n

Le Président (M. Bergman): Merci. Merci pour votre présentation. Mme la ministre, pour un bloc de 17 minutes.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Bonjour, bienvenue à vous trois et merci d'être présents dans le cadre de cette consultation.

J'aimerais prendre quelques instants pour échanger avec vous sur la première, votre... ? vous-même, là, vous disiez: Il y a trois choses importantes à nos yeux ? bien, cette première... ça ne se dit pas, «première priorité», mais ce premier élément qui semble prioritaire à vos yeux qui est la question de la définition, donc le statut juridique de l'eau, parce qu'honnêtement ce que vous recherchez, là, à savoir que clairement la loi en vienne à dire que l'eau, qu'elle soit de surface ou souterraine, est une chose commune en vertu de notre Code civil, c'est vraiment ça qu'on recherche.

Et, la semaine dernière, quelqu'un qui est avec vous, c'est M. Roy, si je ne me trompe pas, qui était présent lorsqu'on a eu des échanges avec l'association pour le contrat mondial de l'eau, dont il a donc déjà été un artisan important, nous a fait une proposition pour revoir la définition que, nous, on a proposée dans notre cadre de loi. Puis vraiment, pour vrai, nous, on est très ouverts, là, à essayer de voir: Est-ce qu'il y a une façon d'améliorer la rédaction de l'article pour en venir à ce que ce soit clair aux yeux de tous?

M. Roy était présent quand les deux représentantes de l'association pour un contrat mondial de l'eau sont venues proposer une définition. Je ne sais pas si vous avez eu le temps d'en prendre connaissance, mais je veux juste la répéter aux fins de la discussion, là. Ça disait: «Étant d'intérêt vital, l'eau de surface et l'eau souterraine dans leur état naturel sont des choses communes non appropriables, dont le statut est défini à l'article 913 du Code civil du Québec. Elles font partie du patrimoine commun de la nation québécoise.»

Je voulais juste voir si... M. Roy, vous étiez présent, je ne sais pas si vous avez eu le temps d'y réfléchir. Puis est-ce que, juste pour les fins ensuite que, nous, comme législateurs, on aura ensuite à travailler cela article par article, est-ce que vous avez des commentaires supplémentaires à nous faire, par exemple, par rapport à cette proposition? Est-ce qu'elle vous satisfait mieux que celle qui est présente actuellement dans la loi?

Le Président (M. Bergman): M. Roy.

M. Roy (Serge): Merci. Écoutez, je pense qu'effectivement ce que vous avez lu va plus loin que ce qu'il y a dans le projet de loi, clarifie, d'une certaine façon, en référant essentiellement à l'article 913, parce que l'ambiguïté vient du fait de la confrontation entre 913 et 951.

Maintenant, moi, je ne suis pas juriste. La seule chose que, nous, on veut être certains, c'est que, compte tenu que le projet de loi n° 92 n'aura pas nécessairement une portée... n'aura pas... est-ce que cette loi-là pourrait avoir préséance sur le Code civil ou un caractère d'interprétation du Code civil à ce moment-là. Est-ce que juridiquement c'est ça, la portée d'une rédaction de cette façon-là? Parce qu'il y a une autre manière de le faire aussi: en biffant la référence, entre autres, à la possibilité que le principe soit applicable sauf dans les cas où c'est prévu par une loi. Donc, ça peut être une loi future aussi, dans le cas actuel, là, dans la rédaction actuelle de l'article 1 de la loi n° 92 et du Code civil.

Si on enlève ça, c'est bien évident qu'on reste quand même avec l'espèce de confusion qui existe au niveau du Code civil. C'est pour ça que, Québec solidaire, même si on ne l'a pas reprise telle quelle dans notre formulation dans le mémoire, la position de Québec solidaire est à l'effet de dire: Peut-être que ce ne serait pas une méchante idée aussi de modifier le Code civil à cet égard-là pour s'assurer qu'il n'y a pas le maintien de cette ambiguïté-là.

Pourquoi? Parce que, s'il y a des litiges, éventuellement on sait qu'il y a possibilité d'invoquer 951 autant que 913 et qu'il y a eu des cas, semble-t-il, dans le passé, où il y a eu des problèmes dans des cas de poursuites ? que je ne pourrais pas vous citer aujourd'hui mais qu'on pourrait mettre en lumière éventuellement. Mais la formulation proposée par l'AQCME certainement va dans le bon sens, je dirais.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: D'accord. On va, nous, continuer à creuser cette question, parce que, comme je voulais vous l'assurer, là, la volonté que vous exprimez, on la comprend bien, on la partage, on va essayer de trouver la meilleure rédaction possible pour y arriver à la satisfaction de tous.

C'est peut-être un brin de curiosité, je voulais savoir, dans votre mémoire, vous parlez de la notion de chose publique quand il est question du statut de l'eau, puis vous dites, là, en page 3: «La notion de "chose publique" doit être assimilée ici à la notion juridique de "res communis"», jusqu'à maintenant, ici, dans les travaux de cette commission, qu'on a plutôt utilisée comme étant chose commune. Vous semblez vous-même faire une petite distinction puisque vous dites: Nous, on utilise l'expression «chose publique» qu'on vous demande... vous dites, «qui doit être assimilée [...] à la notion de "res communis"».

Mais enfin, je voulais vous entendre si vraiment ça vous est indifférent, la... si, pour vous, il y a une distinction ou pas, si de façon interchangeable vous utilisez l'expression «chose publique» et «chose commune». Moi, j'y vois une légère différence, parce que la notion publique est presque une notion d'appropriation par l'État, hein: une chose publique. Chose commune est une notion vraiment de dire que c'est inappropriable, c'est une chose en commun. Donc, je voulais juste vous entendre: Est-ce que vraiment il y avait une volonté de distinguer les choses, chez vous, entre chose publique, chose commune ou si vraiment vous me dites: Non, chez nous, c'est sur un pied d'égalité, ou on pourrait lire dans votre mémoire «chose commune» plutôt que «chose publique», ça reviendrait au même?

Le Président (M. Bergman): M. Roy.

M. Roy (Serge): Oui. Dans notre esprit à nous, c'est simplement une référence à cette expression «res communis» qui... En tout cas, comme j'ai dit tantôt, moi, je ne suis pas un juriste, mais les juristes avec qui on a travaillé, avec qui on a travaillé autant récemment que quand j'étais avec l'AQCME... C'est une vieille notion juridique qui remonte à des siècles en arrière et qui a donc toujours été considérée comme étant quelque chose effectivement d'inappropriable. Mais, pour nous, c'était pour illustrer notre pensée davantage qu'une précision ou une différenciation de la notion de chose commune.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui, très bien. Est-ce que vous vouliez ajouter quelque chose?

Le Président (M. Bergman): Mme David.

Mme David (Françoise): Oui, s'il vous plaît, seulement un mot. On a pris soin, dans notre mémoire, de justement expliquer qu'on ne veut pas que l'État, et on aurait pu ajouter, par exemple, «par voie de nationalisation», devienne propriétaire de l'eau. Donc, je pense qu'on s'entend et on se comprend, parce qu'au contraire on voudrait que ce soit vraiment chose commune, on voudrait vraiment que la population sente qu'elle est la dépositaire de l'eau. L'État en devient son gardien, son défenseur, on pourrait dire, son fiduciaire, mais l'eau n'appartient pas à l'État.

Mme Beauchamp: On se comprend très bien. Je pourrais répéter exactement ce que vous venez de dire. C'était juste à des fins de précision, parce que je n'avais pas encore vu vraiment la notion de chose publique, là, et je voulais juste faire cette précision.

Vous insistez sur le fait que le financement des organismes qui auraient à veiller à la gouvernance de l'eau au Québec, ce soit un financement public. Mais ça m'amène à vouloir vous entendre sur un débat qui a cours, là, pas mal, à notre commission, durant cette consultation, autour des notions de gouvernance de l'eau. Peut-être que vous avez entendu ceux qui vous ont précédés, qui étaient d'une MRC, de la Haute-Yamaska. Il y a eu les gens de la Fédération québécoise des municipalités. Mais, la semaine passée, on a entendu aussi Nature Québec, le Regroupement national des conseils régionaux en environnement ou encore le regroupement national des organismes de bassin versant.

Il y a, dans la Politique nationale de l'eau, une reconnaissance, et on l'a voulue dans la loi, de la gestion intégrée par bassin versant. Mais, en termes de gouvernance et d'imputabilité, il y a plusieurs commentaires, certains disant: Bien, le modèle d'organismes de bassin versant est un modèle jeune encore au Québec, il faut le dire, on vient d'augmenter leur financement, il faut peut-être donner une chance à ce modèle-là. D'autres disent: On veut tout de suite aller vers un modèle où ce serait plutôt la MRC. D'autres viennent même dire: C'est plutôt à l'échelle d'une CRE qu'on devrait donner le mandat de rédiger un plan directeur de l'eau.

Donc, c'est un débat honnêtement qui va sûrement... où on va devoir, à un moment donné, trancher. Et, lorsque j'ai lu le fait que vous recommandiez que le financement des organismes soit public, je ne sais pas si la conclusion est trop hâtive ou pas, mais je me demandais si derrière ça je devais y lire plutôt le fait que vous endossiez, je dirais, complètement ce qui est plutôt prévu en ce moment, je veux dire, dans le cadre de la Politique nationale de l'eau, qui est donc un fonctionnement sur la base d'organismes de bassin versant financés par l'État ou par des pouvoirs publics. Ça fait que je veux vous entendre un petit peu plus là-dessus, sur le modèle de gouvernance puis le rôle de ces organismes.

n(16 h 20)n

Le Président (M. Bergman): M. Huard.

M. Huard (Olivier): Bien, en fait, il y a deux choses dans votre question, là. Toute la question du financement, c'était pour exclure la question des PPP, là, essentiellement. Et, pour la question des bassins versants, c'est juste que, pour nous, en fait, on trouve que... En fait, la chicane est un petit peu inutile à ce point de vue là, parce qu'on pense que tout se complète à ce point de vue là.

Tantôt, j'entendais le monsieur qui disait: Bien, il y a déjà de la géomatique qui se fait dans les MRC, les organismes de bassin versant veulent aussi s'équiper en géomatique, mais les conseils de bassin versant sont là justement pour échanger toutes les ressources qui sont présentes sur le bassin versant.

Alors, nous, on ne voit pas nécessairement d'opposition entre les MRC et les bassins versants, on voit juste que c'est une structure qui va permettre d'intégrer beaucoup plus de citoyens. Parce que, dans les conseils de bassin versant, il y a tous les riverains, il y a les industries, il y a les simples citoyens carrément qui peuvent être sur ce conseil-là, au même titre que les préfets de MRC, les élus. Et donc, c'est tous ces gens-là qui mettent en commun leurs ressources pour régler les problèmes qui sont sur le bassin versant. Et, si les organismes de bassin versant sont mieux financés, ça fait juste augmenter ce dynamisme-là, ça fait juste augmenter leur champ d'action et ça n'ôte rien du tout aux MRC, qui, eux autres aussi, avec leur propre financement, peuvent contribuer à ce projet-là.

Le Président (M. Bergman): M. Roy, voulez-vous compléter? M. Roy?

M. Roy (Serge): Oui. Brièvement, je pense effectivement que, pour nous, la question des organismes de bassin versant, on le prend aussi sous l'angle de la gestion démocratique. C'est-à-dire que c'est un cadre dans lequel il est possible pour la population locale de s'impliquer d'une manière ou d'une autre dans la gestion. Évidemment, il y a place à amélioration sans doute.

Le financement, vous dites qu'il a été augmenté, mais on sait que les besoins des organismes de bassin versant sont énormes. Mais je pense qu'on doit continuer d'expérimenter cette voie-là, il me semble que c'est préférable plutôt que des organismes auprès desquels les citoyens auront peu de capacité d'intervention éventuellement s'il y a des problèmes. Et c'est sûr qu'une formule ou une autre comportera toujours des inconvénients ou certaines faiblesses, mais, dans le cas des organismes de bassin versant, pour l'instant, quant à nous, ça nous apparaît être une voie à maintenir et même à renforcer.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je veux être sûre, parce que c'est M. Huard... que vous disiez: Dans le fond, il n'y a pas de contradiction. Et je comprends bien. Tantôt, je disais: On est tous conscients qu'à la fin, là, si on veut qu'il y ait des règlements adoptés sur des territoires, et tout ça, que ça va quand même passer par l'instance des élus, des MRC, par exemple. Mais c'est quand même un peu la question de trouver le bon... j'ai envie de prendre l'expression de «la bonne lunette», pour ensuite dire... Parce qu'on sait que, par exemple, dans un bassin versant donné, il y a plusieurs MRC concernées. Donc, une peut être exemplaire dans la production d'un plan directeur de l'eau, et tout ça, mais, si son voisin en amont ne l'est pas... C'est de la recherche, là, de comment on instaure la bonne concertation ou enfin... entre ces instances-là.

Et, en ce moment, au Québec, on dit: C'est plutôt à l'échelle de bassins versants qui... En ce moment, il y a un redécoupage, donc on a augmenté le financement. Je dis des chiffres de mémoire. Il était à 2,1 millions pour 33 organismes de bassin versant, on vient d'ajouter d'un coup 3 millions de dollars par année, c'est donc 5,1 millions de dollars pour un certain nombre de bassins versants mais qui devront couvrir le Québec méridional.

Mais je veux terminer en disant: Ce que je veux savoir... Donc, ce que je crois comprendre des propos particulièrement de M. Roy, c'est, dans le fond, notre chapitre, en ce moment, dans la loi, qui traite de la gouvernance et qui reconnaît dans la loi, d'un point de vue légal, la gestion intégrée par bassin versant, qui reconnaît d'un point de vue légal qu'il doit y avoir un organisme mis en place qui aura le mandat de produire un plan directeur de l'eau et qui prévoit que les instances appropriées, les instances municipales sont invitées à prendre en considération le plan directeur de l'eau, est-ce qu'au moment où on se parle, même si les choses, vous le disiez vous-même... La semaine passée, je plaidais pour donner du temps au temps. Mais, à la lumière de l'expérience, dans le fond, en cours, qui est encore assez récente, de ce mode de gestion au Québec, est-ce que ce chapitre-là dans la loi vous convient au moment où on se parle? Est-ce que c'est ça que je dois comprendre de vos propos?

Le Président (M. Bergman): M. Roy.

M. Roy (Serge): Au moment où on se parle, je pense que vous pouvez considérer que Québec solidaire estime que ce chapitre-là, pour nous, ne fait pas problème.

Mme Beauchamp: Maintenant, je voudrais revenir sur vos commentaires sur la question de la durée des certificats d'autorisation prévue dans la loi. On les a fixés à 10 ans. C'est, entre autres, je le reconnais, en regardant ce qui se fait ailleurs puis en s'inspirant notamment du modèle de notre voisin, l'Ontario, qui a pris une telle démarche. Donc, ça existe en ce moment en Ontario pour l'eau de surface, l'eau souterraine. Vous, vous arrivez en disant: Pour nous, c'est trop court... pardon, c'est trop long. C'est trop long.

Et, encore là, je ne sais pas si vous avez pu prendre connaissance de plusieurs propos que, nous, nous avons entendus depuis le début de cette consultation, mais il y a de nombreux acteurs de l'eau, en tout cas, de nombreux utilisateurs de l'eau ? je pense au secteur agricole, je pense aux maraîchers, aux aquaculteurs ? qui sont venus nous dire que, pour eux, c'était à ce point court et ça intégrait ? comment je dirais ça? ? un tel climat d'incertitude qu'ils sont venus dire que, pour eux, ça compromettait la viabilité économique de leurs entreprises, jusqu'à un certain point.

Donc, je voudrais vous entendre parce que c'est quand même des propos qu'on a eus, là. Je suis en train de me dire: Raccourcir le certificat d'autorisation, eux sont venus dire que, dans la vraie vie, ça voulait dire... Puis on a les pourvoyeurs, ce matin, qui sont aussi venus donner l'exemple en disant: Dans le fond, je dois investir à partir de ressources... Que ce soient les pourvoyeurs, ils donnaient l'exemple de territoires qui ne leur appartiennent pas, ou, quelqu'un qui est un utilisateur de l'eau comme un aquaculteur, ils disent: Je dois investir des sommes importantes dans une entreprise, et vous me créez un climat d'incertitude tel que je vais avoir de la difficulté à convaincre des investisseurs, notamment le secteur financier, de m'accompagner dans ce projet d'entreprise. Mes collègues autour de la table pourront commenter si je résume bien ou pas bien les propos qu'on nous a tenus. Et, vous, vous nous invitez à raccourcir ce délai, alors que, très nettement, jusqu'à en ce moment, on s'est plutôt plaint du délai qu'on instaurait, qui était nouveau...

Le Président (M. Bergman): Il reste très, très peu de temps pour répondre, une demi-minute.

Mme David (Françoise): Oui. Eh bien, nous allons persister et signer dans notre position, et ce n'est pas parce qu'on ne comprend pas les arguments que vous venez d'énoncer, mais, écoutez, dans la section V du projet de loi, vous instituez un bureau des connaissances sur l'eau. Très intéressant, on est complètement d'accord. On sait qu'on n'a pas vraiment fait, là, de façon approfondie...

Le Président (M. Bergman): S'il vous plaît.

Mme David (Françoise): Mais vous m'avez donné deux minutes, là.

Le Président (M. Bergman): Une demi-minute.

Mme David (Françoise): Pardon?

Le Président (M. Bergman): Une demi-minute, demi.

Mme David (Françoise): Ah, ah, ah!

Des voix: ...

Le Président (M. Bergman): O.K., sur votre temps. Continuez.

Mme David (Françoise): Ça va?

Le Président (M. Bergman): Oui.

Mme David (Françoise): O.K. Je n'avais pas saisi. Donc, on convient, je pense, qu'au Québec, on n'a pas actuellement une connaissance approfondie et suffisante de notre situation en eau, particulièrement en ce qui a trait à l'eau souterraine, puisqu'on dit: Il va nous falloir un bureau sur la connaissance de l'eau.

Donc, on ne peut pas dire ça, d'un côté, et savoir qu'on a beaucoup de travail de recherche et d'évaluation à faire et, d'un autre côté, accorder des autorisations de prélèvements d'eau pour plus de 10 ans, ce qui est, si j'en crois vos propos, la demande de plusieurs personnes ou plusieurs organismes qui sont venus ici. Il me semble que ce n'est pas très conséquent.

Donc, déjà, 10 ans, nous, nous paraît long, s'il fallait qu'on donne des autorisations pour plus de 10 ans, bien il me semble que, sur le plan de l'environnement, sur le plan d'une vision écologiste, on n'appliquerait pas le principe de précaution. Alors, dire 10 ans, ça ne veut pas dire qu'au bout de 10 ans on retire l'autorisation. S'il y a de l'eau, si tout se passe bien, s'il n'y a pas de problème, on peut continuer. Mais il peut y avoir des problèmes. Alors, c'est pour ça qu'on dit: Mais, attention, là, il faut être un petit peu précautionneux.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Merci, M. le Président. Merci pour votre intervention, notamment celle sur la protection des eaux souterraines qui faisait l'objet d'un débat, là, de définition juridique. Vous pouvez être sûrs qu'on va prendre le relais pour s'assurer que, dans l'étude détaillée du projet de loi, on puisse protéger les eaux souterraines adéquatement.

J'aimerais commencer mon intervention en vous questionnant sur la tarification domestique, la redevance, bref, domestique. Vous avez mentionné que, bon, pour des raisons de taxes puis que les gens paient déjà par rapport à la municipalité, il n'est pas nécessaire d'instaurer une redevance domestique, ce qui n'est probablement pas le cas pour le commercial et l'industriel. Mais on sait toutefois qu'au Québec on a une surconsommation d'eau incroyable, probablement le... Après l'Arabie Saoudite, ce que j'avais lu, c'est que c'était le Québec qui venait en tête de liste en tant que consommateur d'eau. Qu'est-ce que vous proposez pour réduire la consommation d'eau de la part des Québécois?

n(16 h 30)n

Le Président (M. Bergman): Mme David.

Mme David (Françoise): Oui. Ce que j'aimerais d'abord dire, et ça, je l'ai vu à la télévision d'ailleurs le jour où vous avez débuté vos travaux, c'est qu'en fait la consommation domestique au Québec serait de l'ordre de 10 % de l'ensemble de la consommation d'eau, le reste étant essentiellement l'agriculture et l'industrie. Si ces chiffres sont exacts, il me semble qu'on revient souvent et beaucoup trop sur cette idée que l'humble citoyen ou l'humble citoyenne franchement, là, contribue à une sorte de surgaspillage de l'eau au Québec. En tout cas, ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas de surconsommation d'eau, là, comprenez-moi bien, chez les particuliers, mais ça veut peut-être dire que les principaux problèmes ne sont pas là.

Maintenant, comme on convient tout de même que bien sûr il peut y avoir gaspillage et surconsommation d'eau de notre part à tous et à toutes, on pense que l'éducation est le premier geste à poser. Nos enfants d'ailleurs nous rappellent assez souvent qu'il faut faire attention, fermer l'eau du robinet quand on se brosse les dents, etc. Moi, je pense qu'il y a quand même des messages qui commencent à passer beaucoup plus que quand, moi, j'étais enfant. Ça, c'est assez clair. Je pense qu'il va falloir, dans nos municipalités, décourager des formes d'utilisation d'eau totalement inappropriées, et là je pense à l'arrosage des entrées de garage. Ce sont des choses que l'on pourrait parfaitement interdire, point à la ligne.

Mais, si je comprends ? et détrompez-moi si je me trompe ? comme idée sous-jacente à votre question: Est-ce qu'au fond l'idée d'installer des compteurs d'eau individuels, ce ne serait pas une façon d'éduquer les gens?, on pense que ça ne... Premièrement, ce ne sera pas rentable. Il va y avoir toutes sortes de frais d'administration, de frais d'installation. Ça, ça a été démontré. Mais, deuxièmement, ce n'est pas simple de décider combien d'eau exactement doit dépenser une personne, deux personnes, une famille de deux, de trois ou de quatre. Le compteur d'eau n'est pas assez intelligent pour savoir si on a affaire à des gaspilleurs, mettons, d'une classe moyenne très aisée, bon, qui sont deux personnes dans une immense maison et qui gaspillent beaucoup d'eau ou si, dans une maison de taille plus modeste, on utilise le même niveau d'eau mais parce qu'il y a cinq personnes. Ce n'est pas évident, là, faire tout ça, et on a l'impression qu'on ne résoudrait rien, en fait.

C'est vraiment par l'éducation d'abord et avant tout qu'il faut combattre le gaspillage d'eau. Mais, deuxièmement, il peut y avoir, oui, à certains moments, sur certains sujets ? là, j'ai donné l'exemple des entrées de garage ? il peut carrément y avoir des interdictions faites par, par exemple, voie municipale.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Merci, M. le Président. Certains intervenants sont venus nous parler, dans l'application de la redevance sur l'eau à des fins industrielles, d'avoir certaines exclusions, notamment par les agriculteurs, qui se disent: On n'est pas pour payer pour de l'eau qui sert à nous nourrir. C'est quoi, votre point de vue là-dessus?

Mme David (Françoise): Vous aurez remarqué que notre mémoire ne fait pas mention des agriculteurs. On parle uniquement de la production industrielle.

Une voix: Et commerciale.

Mme David (Françoise): Et commerciale.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Et puis, pour continuer dans le domaine des redevances ? puis après ça je changerai de sujet ? quant aux modalités d'application de cette redevance-là dans le temps, dans les exclusions, dans le coût, est-ce que vous avez défini quelque chose?

Le Président (M. Bergman): Mme David.

Mme David (Françoise): Excusez-moi, mais je pense que je ne saisis pas tout à fait la question.

M. Diamond: Bien, du jour au lendemain, on ne peut pas arriver en disant: Maintenant, c'est dans la méthode, dans le temps, première des choses, dans le coût. Et qui va commencer? Est-ce que c'est tout le tertiaire, tout l'industriel d'un coup ou on y va en étapes pour certains secteurs d'activité économique en difficulté?

Le Président (M. Bergman): M. Roy.

M. Roy (Serge): Bien, nous, on n'a pas détaillé ça. On est sur le principe. Vous parlez de la redevance, là, de quelle façon elle devrait être introduite, etc. Je pense qu'on s'attendrait davantage à ce que le gouvernement fasse, élabore des projets.

Vous savez que la question de la redevance a été mise de l'avant, entre autres, dans une loi, la loi n° 1 pour le budget de je ne me souviens... vous m'excuserez, je ne me rappelle pas exactement de l'année, mais c'était au moment de la création du Fonds des générations, où il était question d'une redevance sur l'eau. Et, bon, il y a peut-être des précisions qui pourront être apportées là-dessus. Et, depuis ce temps-là, à ma connaissance, en tout cas, on n'a pas vu de définition de ce que ce serait, des modalités qui pourraient être applicables.

Mais, chose certaine, nous, notre préoccupation, c'est davantage du côté de dire: Bien, il ne doit pas y avoir de redevance sur l'eau qui est destinée à la consommation domestique. Oui, bien sûr, il peut y avoir des mesures pour contrer le gaspillage, pour sensibiliser les gens. D'ailleurs, il y a beaucoup de villes, de municipalités, dans le monde, de très grandes villes, dont New York, qui ont adopté des mesures pour amener les gens... et, sans avoir recours à la taxation ou à la tarification, ont adopté des mesures qui ont permis des économies d'eau assez importantes, de telle sorte qu'ils ont réglé une partie de leurs problèmes. Alors, c'est plus de cette façon-là. Sur la technique d'application de la redevance, Québec solidaire pour l'instant n'a pas de proposition précise à faire, sauf qu'il serait peut-être souhaitable qu'on aboutisse à quelque chose parce que ça fait quand même pas mal de temps qu'on parle, et plusieurs gouvernements sont passés depuis la première fois qu'on a parlé d'une redevance au Québec.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Dernière question. C'est au sujet du concept pollueur-payeur, auquel vous vous êtes opposés, dans votre présentation, sur la base que ça donne en quelque sorte un droit de polluer pour les gens qui peuvent se le permettre. Et je pense que l'objectif du présent projet de loi, c'est surtout la réparation des plans d'eau qui auraient pu être pollués mais pas toujours de mauvaise foi, parfois par des accidents qui peuvent avoir cours dans toutes sortes de domaines soit par un citoyen soit par un corporatif. Évidemment, à ce moment-là, j'imagine que vous acquiescez au concept de pollueur-payeur ou c'est la même ligne de pensée, là, vous vous opposez toujours?

Le Président (M. Bergman): M. Roy.

M. Roy (Serge): Nous, on s'oppose au principe de pollueur-payeur pour les raisons que vous avez mentionnées, là, et qu'on a exprimées tout à l'heure, qu'on a exposées tout à l'heure, parce que ça ne nous apparaît pas être la bonne voie pour empêcher la... si l'objectif, c'est de réduire la pollution, de réduire la contamination et de mettre un terme à ces pratiques-là.

Ça n'empêche pas, j'en conviens avec vous, qu'éventuellement il peut y avoir des accidents. Il peut y avoir des choses qui se produisent de façon involontaire. Mais je pense qu'en 2008 on doit être très clair que les conséquences d'une pollution ou d'une contamination de l'eau, qu'elle soit de surface ou souterraine, bien les conséquences doivent être extrêmement grandes, parce qu'en 2008 je ne pense pas qu'on puisse prétendre qu'on ne sait pas ce qu'il faut faire pour empêcher la pollution. Et c'est pour ça que le principe pollueur-payeur à notre avis permet à un promoteur, une entreprise de dire: Bien, oui, il y aura des dégâts, oui, je paierai pour restaurer les lieux, pour réhabiliter les lieux, pour corriger le tir, mais je vais pouvoir continuer mes opérations. Je pense que c'est ça qu'il faut éviter à tout prix, qu'il faut changer dans la philosophie, dans la façon de voir les pratiques au regard de l'eau.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): Merci beaucoup, M. le Président. Dans le même ordre d'idées, on a entendu parler et on entend parler toujours des bateaux de croisière, des bateaux de plaisance, des bateaux-mouches qui jettent leurs déchets au fleuve, où on va chercher notre eau pour la traiter par la suite. Donc, ces gens-là sont des pollueurs. S'il était imposé, outre la loi, on leur interdit ? parce qu'on dit qu'on ne le fera pas avant plusieurs années, je ne comprends pas pourquoi que ce n'est pas demain matin: Fini, tu prends ton bateau, tu le serres, on le répare puis tu le remettras à l'eau, je pense que ce serait la solution la plus simple. D'étirer ça aussi longtemps que ça, je n'ai pas compris le principe encore. Mais pourquoi ces gens-là ne paieraient pas? Ils sont pollueurs-payeurs.

Le Président (M. Bergman): M. Roy.

M. Roy (Serge): Bien, moi, je reste sur le principe que je vous ai exposé tout à l'heure. Là, vous évoquez une situation où éventuellement ça peut même être des particuliers, si je comprends bien votre question, des gens qui se promènent en yacht sur le fleuve, qui peuvent faire des dégâts. Je pense que, oui, il doit y avoir des conséquences, bien entendu. Jusqu'où on doit aller? Est-ce qu'on doit saisir le bateau puis: Bon, voilà, c'est fini? C'est peut-être un peu draconien d'y aller de cette façon-là. Je pense que, dans ce type d'activité là, on peut faire place davantage à l'éducation et à la sensibilisation que dans le cas des activités industrielles. S'il s'agit d'un navire d'importance, et on sait que ça se produit, particulièrement dans le fleuve Saint-Laurent, comme un peu partout sur les océans, je pense que, là, il y a des pratiques effectivement qui doivent être arrêtées de façon systématique. Si j'ai bien compris votre question.

Le Président (M. Bergman): M. le député de...

Mme David (Françoise): Bien, je pense qu'en...

Le Président (M. Bergman): Mme David.

n(16 h 40)n

Mme David (Françoise): Excusez-moi. Bien sûr qu'ils doivent payer, mais je pense que le plus important, c'est l'interdiction de polluer. Je suis certaine que ce à quoi vous faites référence existe parce que vous avez l'air tellement convaincu que c'est probablement une pratique déjà en cours. Bien, c'est scandaleux, il ne faut pas avoir peur de le dire, et ça doit être interdit.

Je pense que, comme disait Serge Roy, on est en 2008, presque en 2009, on connaît maintenant, ce qui n'était peut-être pas le cas il y a 20 ou 30 ans, les conséquences des gestes qu'on pose, toutes sortes de gestes, là, qui, par exemple, concourent aux changements climatiques, polluent l'air, polluent l'eau, etc. On le sait, on ne peut plus plaider l'ignorance.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet, il vous reste deux minutes.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): C'est exactement ce que je me préparais à vous dire. Parce qu'on ne peut pas dire qu'on ne le savait pas, on en parle depuis très longtemps. Et, moi, je ne suis plus aux délais. Là, on dit: Bien là, on va les laisser finir. Dans trois ans, on va leur donner trois ans. Regarde, ça ne prend pas trois ans. Il faut que tu le sortes, cet hiver, ton bateau, pour le remiser. Fais les modifications, puis on n'en parle plus. Puis ceux qui viennent dans le fleuve, qui sont pris doivent payer. Donc, pollueur-payeur. Et on a beau dire: Ils ont des règlements, mais, s'il n'y a pas une sentence, les gens ne comprennent pas. C'est beau, l'éducation, je comprends qu'on peut commencer à faire une forme d'éducation ou continuer de faire de l'éducation, mais on n'en est pas là.

Le fameux contrat de 10 ans, ce matin, on a eu une proposition de la part... pas une proposition, mais un état de fait de la part des pourvoyeurs, qui disaient: Nous, notre contrat de 10 ans est renouvelable à tous les ans. Si, à tous les ans, on renouvelait le contrat et qu'on proposait de renouveler le contrat moyennant bien sûr le fait que vous avez été de bons citoyens corporatifs, vous avez répondu à nos normes, est-ce que vous opteriez pour ce genre de contrat là qui serait sur une période de 10 ans mais qui recommencerait régulièrement à tous les ans?

Le Président (M. Bergman): Mme David.

Mme David (Françoise): Écoutez, c'est une proposition dont on n'a pas pris connaissance. Je pense qu'on va en discuter. On pourra vous revenir plus tard là-dessus.

M. Roy (Montmagny-L'Islet): C'est tout, M. le Président.

Le Président (M. Bergman): Merci. M. le député de Roberval.

M. Trottier: Bonjour, M. le Président. Bonjour, messieurs, mesdames. J'aurais un certain nombre d'explications à demander. Vous dites, à la page 6, que le principe de... «Dans le cadre de la loi, chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d'accéder à l'eau potable.» Vous dites que ce principe-là doit avoir «une application concrète et indiscutable». Est-ce que vous pourriez m'indiquer un peu plus en quoi ça... ça pourrait amener jusqu'où, là?

Le Président (M. Bergman): M. Roy.

M. Trottier: Ça pourrait se traduire par quoi, ça, on pourrait dire, «une application concrète et indiscutable»?

M. Roy (Serge): Oui. C'est parce que le principe de la reconnaissance d'accès du droit à l'eau, c'est un principe qui est fondamental, et on doit le reconnaître. Tout ce qu'on a voulu faire, c'est un commentaire à l'effet que d'aucune façon l'État ne peut se soustraire ? et l'État au sens large du terme, on inclut, à cet égard-là, les responsables publics ? de fournir l'accès à l'eau potable. Il n'y a aucune situation qui justifie qu'une personne n'ait pas accès à l'eau potable. Et donc c'est l'inscription d'un droit fondamental ? ce que je disais tout à l'heure ? qui est relié au droit, à la reconnaissance du droit à la vie, parce que la reconnaissance du droit d'accès à l'eau potable, au fond c'est la reconnaissance que l'eau est indispensable pour la vie puisque, vous et moi, on ne pourrait pas s'en passer bien, bien longtemps. C'est dans ce sens-là, là. Je ne sais pas si...

M. Trottier: Je suis d'accord avec vous. Mais, par exemple, est-ce que ça voudrait dire que l'État serait obligé d'amener l'aqueduc, par exemple, mettons, dans un secteur qui est extrêmement éloigné d'un village parce qu'il y a une personne qui a décidé d'aller s'établir là?

Le Président (M. Bergman): M. Roy.

M. Roy (Serge): Non, ça ne va pas dans ce sens-là, mais ça va certainement dans le sens de faire en sorte que les gens puissent avoir accès à l'eau potable. C'est sûr qu'une maison isolée, on sait qu'il y a des moyens d'accès à l'eau potable. Une personne qui serait dans une situation fragilisée où il y aurait des difficultés d'accès à l'eau potable pour des raisons qui sont indépendantes de sa volonté, c'est beaucoup plus dans cet ordre d'idées là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Vous indiquez aussi, un petit peu plus loin dans la même page, que vous craignez qu'il puisse y avoir un encouragement aux municipalités d'instaurer la tarification de l'eau potable. Bon, il y a déjà une tarification qui existe, là. Par exemple, comme chacune des municipalités, on paie une taxe d'eau, qu'on pourrait appeler, qui varie de 100 $ à 600 $ peut-être. Ce que je comprends de ça, c'est plus par rapport aux compteurs d'eau comme tels. C'est à ce niveau-là? O.K.

Puis, sur le principe que l'eau coûte une somme très différente ? je vous disais tantôt, là ? de 100 $ à 600 $, est-ce que vous pensez qu'un jour on devrait avoir une tarification plus équitable, un peu comme l'électricité, à la grandeur du Québec? Est-ce que vous pensez que c'est un principe qu'on devrait mettre de l'avant ou si ça doit rester en fonction des coûts dans chacune des municipalités?

Le Président (M. Bergman): Mme David.

Mme David (Françoise): Oui. Savez-vous, je pense que ce serait une excellente idée, parce que, si l'eau ? et je pense qu'on est tous d'accord ? c'est un élément absolument essentiel et fondamental à la vie, pourquoi au fond est-ce que des gens pourraient s'en procurer facilement et à moindre coût, alors que pour d'autres ça coûterait beaucoup plus cher? Et c'est vrai que, dans un objectif d'équité à travers le Québec, oui, ce serait intéressant de réfléchir dans ce sens-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: À la page 7, vous parlez de l'article 9. Vous dites: «L'article 9 prévoit [des] indemnités exigées à un pollueur [...] versées au Fonds vert. Comment sera indemnisée la population ayant subi les dommages?» Est-ce que vous auriez des suggestions sur des modalités qu'on pourrait mettre de l'avant éventuellement?

Le Président (M. Bergman): Mme David.

Mme David (Françoise): M. Roy.

Le Président (M. Bergman): M. Roy.

M. Roy (Serge): Oui. Bien, écoutez, des suggestions, je pense qu'encore là bien sûr il y a peut-être des formules à élaborer, à prévoir. Le principe qui est très important cependant, c'est... C'est parce que les articles 7 à 9 au fond prévoient qu'il y aura des indemnités qui seront perçues et qu'on va les verser dans le Fonds vert. Que je sache... c'est possible que je me trompe, remarquez, là, moi, je n'ai pas eu le temps de vérifier ça, mais, que je sache, ces argents-là ne servent pas à dédommager des individus qui peuvent subir des dommages du fait que l'eau dont ils se servaient n'est plus accessible, par exemple, pour x temps.

On sait qu'il y a des cas où ça s'est produit, en Estrie, entre autres, à la suite de la pollution d'une nappe d'eau souterraine par des activités d'une entreprise qui fabriquait de la peinture, là, de façon bien précise. Et, les gens, il a fallu... je pense que ça a pris des démarches juridiques de plus de 10 ans avant qu'ils puissent obtenir des dédommagements ou un soutien quelconque. Alors, c'est pour ça que je pense qu'il est très important... Et je ne pense pas que la loi n° 92, à l'heure actuelle, prévoie quelque chose pour ça. À moins qu'on m'indique, là, que ces argents-là peuvent servir à d'autre chose.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Vous voudriez qu'on indique, là, qu'il y ait un fonds spécial qui pourrait être mis en place pour l'indemnisation potentielle des gens qui auraient été affectés, là, par une entreprise ou autrement. Mais, à ce moment-là, est-ce que ce n'est pas le principe du pollueur-payeur, ça?

Le Président (M. Bergman): M. Roy.

M. Roy (Serge): Bien, c'est peut-être le principe à l'envers, parce que c'est la personne qui est victime qui nous intéresse. Et la constitution du fonds, oui, c'est vrai qu'il y a des indemnités. Et, à partir du moment où ce principe-là est applicable, nous, la question qu'on pose, c'est: Où on va chercher l'argent pour indemniser les individus? Parce qu'on ne le retrouve pas dans le projet de loi. Ça n'enlève pas le fait qu'à la base on est opposés au principe de pollueur-payeur.

M. Trottier: Non, mais je vous comprends. Puis je pense qu'on doit mettre des règles qui vont faire que... Il faudrait qu'on interdise un paquet de choses, mais vous savez comme moi que, même quand c'est interdit, il y a des gens qui le font pareil, et c'est à ce moment-là qu'il faut qu'il y ait des pénalités qui vont servir soit à indemniser ou soit à réparer, au moins en partie.

Vous êtes opposés à l'exportation de l'eau, puis je pense que collectivement, au Québec, on l'est. Mais je ne penserais pas, s'il y avait des crises humanitaires ou des choses comme ça, je ne penserais pas que vous voyiez un problème à ce niveau-là.

Le Président (M. Bergman): M. Roy? Mme David.

Mme David (Françoise): On s'est effectivement posé la question. Et, regardez, là, dans le cas de crises humanitaires majeures, je pense qu'on a des devoirs de citoyen à remplir, de la même façon que, par exemple, j'espère qu'on sera solidaires ou qu'on est déjà solidaires du peuple haïtien, en ce moment, et qu'on va devoir aider ce peuple, qui passe à travers une crise épouvantable, à en sortir. Si, à un moment particulier, il y a un besoin qui est un besoin en eau, oui, effectivement, on peut imaginer un navire partir avec des citernes d'eau qu'on distribuera gratuitement. Là, on n'est pas dans la marchandisation de l'eau, on n'est pas dans la vente d'eau, on n'est pas dans l'exportation d'eau, on est complètement ailleurs, de la même façon qu'on peut distribuer des couvertures ou... Je pense qu'on se comprend très, très bien là-dessus.

Mais, pour nous, en fait, le premier devoir humanitaire, si on veut parler de l'eau et si on veut parler de catastrophes naturelles, c'est que nos pays apportent un soutien aux pays en voie de développement pour, par exemple, construire des puits dans les villages. C'est de cette façon-là que les gens vont pouvoir avoir de l'eau, et pas en s'imaginant qu'on va aller leur vendre de l'eau, ce qui va être de toute façon inaccessible à la majorité de ces populations-là.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

n(16 h 50)n

M. Trottier: Oui, je suis parfaitement d'accord avec vous. Probablement que notre plus grande aide, ce serait de les aider à avoir de l'eau chez eux. Je pense que ça, c'est probablement plus fondamental. Et ce que je comprends, c'est que, si jamais il y avait de l'exportation, ce serait dans le cadre non commercial.

Mme David (Françoise): Totalement, et de façon extrêmement exceptionnelle.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Qu'est-ce qui vous inquiète le plus en ce qui regarde l'avenir de l'eau au Québec?

Le Président (M. Bergman): Mme David.

Mme David (Françoise): Certainement le gaspillage, certainement les tentations de privatisation. J'ai eu l'occasion de voir M. Boyer, qui est à l'Institut économique de Montréal, nous proposer que nous nous servions de notre or bleu justement pour l'exporter. Ça, c'est quelque chose qu'on craint parce que, ces temps-ci, non seulement au Québec, mais dans le monde, tout se privatise, on peut vendre tout et n'importe quoi. Et, nous, nous disons non à cette idéologie, à cette façon de voir les choses. Nous savons que le danger est réel. Nous savons que les États-Unis d'Amérique comptent sur l'eau canadienne pour continuer de pouvoir faire de l'agriculture dans le désert, alors que c'est aberrant à sa face même. Ça, c'est probablement la plus grande crainte que nous avons.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Puis, si vous aviez un seul élément sur lequel vous devriez mettre une priorité, ce serait lequel? Si vous étiez au gouvernement, quelle serait votre première mesure concernant une gestion durable et équitable de l'eau?

Le Président (M. Bergman): Mme David.

Mme David (Françoise): Je pense qu'on l'a apporté, en tout cas j'ai tenté de l'apporter tout à l'heure, en conclusion: je pense que la première chose à faire, c'est d'avoir une loi-cadre sur la protection de l'eau donc qui a priorité sur l'ensemble des autres lois. Et il me semble qu'à partir de là on peut travailler. Oui, il y a tout ce questionnement que nous avons entendu tout à l'heure, et nous savons qu'il existe, là, sur toute la façon de gérer l'eau par organismes de bassin versant où certains diront autrement. Il y a encore place à la discussion là-dessus.

Notre principe à nous, c'est qu'il faut que ce soit le plus près possible des citoyennes et des citoyens, et, Olivier le disait tout à l'heure, ils ont une place sur les conseils de bassin versant. Donc, on trouve que c'est une formule à peaufiner mais qui demeure intéressante. Mais il faut que tout ça, ce soit chapeauté par une loi-cadre; ça, ça nous apparaît important. Et on espère aussi que le projet de loi n° 92 va résoudre cette question de nous assurer que l'eau souterraine devient chose commune au même titre que les eaux de surface.

Le Président (M. Bergman): Mme David, M. Roy, M. Huard, merci pour votre présentation. On apprécie beaucoup.

Je demande aux gens de la Chaire de recherche du Canada en droit de l'environnement pour prendre leur place à la table. Je suspends pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 53)

 

(Reprise à 16 h 58)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue à la Chaire de recherche du Canada en droit de l'environnement.

Vous avez 15 minutes pour votre présentation, suivie d'un échange avec les membres de la commission. Alors, je demande de vous identifier et pour faire votre présentation pour les prochaines 15 minutes.

Chaire de recherche du Canada
en droit de l'environnement

Mme Halley (Paule): Alors, je me présente, Paule Halley, professeure à la Faculté de droit, à l'Université Laval, et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit de l'environnement. Je suis accompagnée de Christine Gagnon, doctorante à la Faculté de droit, Université Laval. Elle s'intéresse à l'eau.

À titre de titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit de l'environnement, je souhaite d'abord remercier les membres de cette commission de nous donner l'occasion de participer à l'élaboration du projet de loi n° 92.

Cette Chaire de recherche du Canada en droit de l'environnement a notamment pour objectif de participer au développement des connaissances juridiques en matière d'environnement et de développement durable et d'encourager le renforcement des lois et réglementations efficaces. Le projet de loi n° 92 a donc soulevé l'intérêt des membres de la chaire, et notamment de ses étudiants gradués inscrits en droit de l'environnement, et je vais donc vous livrer, cet après-midi, le fruit des travaux de recherche de Christine Gagnon et Marie-Hélène Bérard ? qui m'accompagne aussi mais qui s'est assise derrière ? qui est doctorante également à la Faculté de droit de l'Université Laval. Je les remercie donc, là, pour leurs réflexions et leurs travaux de recherche que je vous livre aujourd'hui.

n(17 heures)n

Donc, ce projet de loi, nous l'avons entendu tout à l'heure, est riche en propositions nouvelles relatives à la gestion, à la gouvernance de l'eau. Ce projet de loi tente aussi de résoudre des ambiguïtés entourant la qualification juridique des eaux souterraines et formule des réponses aux incertitudes contemporaines se rapportant à l'eau. Pour les juristes, les enjeux entourant le fait de légiférer dans le domaine de l'eau sont majeurs. L'élément qui retient davantage l'attention des juristes réside dans l'affirmation que l'eau fait partie du patrimoine commun de la nation québécoise et de son corollaire d'État gardien des intérêts de la nation.

Notre intervention va se concentrer principalement sur ces notions, et nous plaiderons pour un libellé très clair afin de répondre aux incertitudes et interrogations, voire craintes que suscitent la nouveauté de la notion mais aussi le dispositif législatif proposé. Je résume, dans le document, dans le mémoire présenté, les interrogations que soulève cette introduction de concept nouveau. Nous les résumons sous la forme de trois questions qui apparaissent à la page 5 du mémoire. Donc, je vais aborder chacune de ces interrogations juridiques que soulèvent ces introductions.

Tout d'abord, on pourrait plaider que l'appartenance de l'eau au patrimoine commun lui ferait perdre son statut juridique de chose commune. C'est à la lecture du titre et de l'article premier, qui affirment quelque chose de nouveau, le caractère collectif des ressources en eau, conjuguée à la lecture de la première phrase des notes explicatives, qui souligne que «ce projet de loi a [...] pour objet de confirmer le statut juridique de l'eau» qui serait maintenant une ressource collective. Donc, mis ensemble, on pourrait faire dire à la loi qu'elle modifie le statut juridique de l'eau qui, comme on vous l'a dit plusieurs fois, est une chose commune reconnue de tout temps au Québec. Donc, il est possible d'éviter, là, ces incertitudes par un libellé très clair.

La deuxième question que soulève le dispositif proposé vise la question de savoir si l'introduction du concept de patrimoine commun de la nation va avoir pour effet de faire entrer l'eau dans le patrimoine public de l'État et d'ainsi rendre l'État maître de l'eau. La question se pose principalement avec l'usage du mot «patrimoine». Le mot «patrimoine» est dans le langage courant des juristes depuis, disons, très, très, très longtemps, mais le sens du mot «patrimoine», qui est dans l'usage courant, vient du droit privé et il signifie «l'ensemble des biens et obligations d'une personne», donc des objets dans le commerce, des objets appropriables, alors qu'au contraire les choses communes comme l'eau sont non susceptibles d'appropriation, c'est-à-dire hors commerce, en plus d'être à l'usage commun de tous. Donc, on pourrait plaider que le terme «patrimoine» pose la question de savoir si l'eau devient un bien, compte tenu de cette conception classique du droit privé du mot «patrimoine».

La troisième question que soulève l'introduction de ce concept neuf est la suivante: de savoir si l'introduction du concept de patrimoine commun de la nation aura plutôt pour effet d'introduire une nouvelle catégorie de patrimoine, le patrimoine commun, en marge du domaine public de l'État et de la propriété privée. À notre avis, le nouveau concept de patrimoine commun de la nation emprunte ou devrait emprunter cette dernière logique.

En effet, on observe que le concept de patrimoine tend à étendre sa portée en droit en dehors de la conception classique du droit privé. Les recherches que nous avons réalisées nous ont permis de constater qu'il existe une utilisation croissante du concept de patrimoine commun duquel on peut dégager l'idée... qui tente de dégager l'idée d'un héritage reçu des générations précédentes qui doit être préservé afin d'être transmis aux générations futures.

Par exemple, on observe cette évolution dans le domaine de la protection des monuments historiques, où on va préférer maintenant parler de patrimoine culturel. Le même phénomène est observable relativement à l'environnement naturel, avec la loi québécoise sur les réserves écologiques, qui fut remplacée en 2002 par la Loi sur la conservation du patrimoine naturel. Donc, on voit qu'il y a des exceptions qui ne sont pas purement de droit privé.

Les recherches réalisées montrent également que l'exploitation du patrimoine commun, c'est-à-dire de cet héritage à transmettre, doit prendre en compte sa transmission aux générations futures. Cela suppose une exploitation rationnelle et durable. Nous comprenons aussi que l'attribution du patrimoine commun à la nation québécoise souligne la dimension collective de ce patrimoine, de ce nouveau patrimoine créé et permet de ne pas y nommer... de ne pas utiliser le terme «État» accolé à «patrimoine commun» et ainsi d'éviter de faire entrer l'eau dans le domaine public. Si c'est cette conception qui est véhiculée par le projet de loi, il convient de l'encourager. À notre avis, cette conception de patrimoine commun de la nation regroupe les différents éléments de l'environnement, notamment l'eau, et n'a pas pour effet de transformer le statut juridique des éléments qui sont contenus dans ce patrimoine. C'est de cette façon qu'on devrait voir la notion de patrimoine commun, selon nous, et c'est elle qui devrait être intégrée dans ce projet.

Dans notre mémoire, nous résumons la recherche réalisée essentiellement en droit français qui utilise cette expression de «patrimoine commun de la nation» depuis 1983. Je vous renvoie à notre mémoire à ce sujet. Alors, selon nous, cette idée d'introduire la catégorie juridique de patrimoine commun en marge du domaine public et privé de l'État mérite d'être retenue, mais encore faut-il que l'initiative soit claire. Alors, comme on a tenté de le souligner, il est possible de faire différentes lectures du dispositif proposé à l'heure actuelle, et ces lectures sont susceptibles de produire des ambiguïtés terminologiques qui sont propres à renouveler les débats et les incertitudes relatives à l'eau. Il est possible d'éviter cela par un dispositif très, très clair.

Il nous apparaît également que le projet de loi est silencieux en ce qui concerne les relations à établir avec les titulaires du patrimoine, à savoir le public québécois; également silencieux sur les obligations de l'État gardien des intérêts de la nation. Nous recommandons, à la page 10 de notre mémoire, un libellé reformulé de l'article 1. Nos modifications ont essentiellement pour but que la disposition confirme le statut juridique de l'eau à titre de chose commune et affirme qu'elle fait partie du patrimoine commun de la nation, afin de s'assurer qu'il s'agit de deux notions distinctes, une notion fonctionnelle et une notion substantive, qui ne s'excluent pas mutuellement.

Pour ce qui est de l'introduction de l'expression «État gardien des intérêts de la nation en eau», nous remarquons que les tenants et aboutissants du régime juridique de gestion spécifique que l'on tient à accorder au patrimoine commun ne sont pas très exprimés dans le projet de loi. Aussi, nous faisons différentes propositions afin de préciser cette gestion dans notre mémoire, notamment de reformuler l'article 3, qui pourrait être mis en lien avec les obligations de gardien des intérêts de la nation. Nous soulignons également que l'article 3 devrait prévoir que la gestion est faite dans le respect des équilibres naturels.

À notre avis, d'autres objectifs précis devraient être également inscrits dans ce projet de loi n° 92. C'est notamment le cas dans la section II consacrée aux principes directeurs de la loi, qui, selon nous, est silencieuse sous certains aspects importants de l'architecture de la gouvernance et de la gestion de l'eau au Québec. En effet, la section consacrée aux principes directeurs de la loi ne prévoit aucun principe pour encadrer le mandat de l'État gardien des intérêts de la nation, et, dans cette section, le plus grand absent parmi les principes demeure sans doute le principe de participation publique, compte tenu de la nature du projet de loi.

Nous proposons très humblement une ébauche, une simple ébauche de proposition en ce qui a trait à la participation publique. Nous savons que les légistes du ministère peuvent faire beaucoup mieux. Nous avons tenté d'adapter le principe 10 de la Déclaration de Rio, car nous sommes d'avis que les principes contenus dans la Loi sur le développement durable, en matière de participation publique, ne reflètent pas ce qu'on entend généralement par le principe de participation publique sur la scène internationale.

n(17 h 10)n

D'autres principes sont également absents, et ils auraient un effet structurant dans ce projet de loi. Nous pensons notamment aux principes d'équité et de solidarité sociales. Et, comme d'autres groupes, nous soulignons également qu'il serait intéressant... et nous recommandons qu'une hiérarchie des usages de l'eau apparaisse également dans la section consacrée aux principes de l'eau à titre de principe directeur de la gestion de l'État gardien des intérêts de la nation.

Des observations semblables peuvent être faites à la section IV du projet de loi, qui est consacrée à la gouvernance de l'eau. Alors, le projet de loi retient que la gestion de l'eau doit se faire de manière intégrée et concertée au sein d'unités hydrographiques précises. Nous saluons cette initiative qui s'inscrit dans la Politique nationale de l'eau. Toutefois, le projet de loi n'est pas très concret en ce qui a trait à cette gouvernance.

Le projet de loi fait reposer essentiellement sur la discrétion du ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs toute l'architecture du régime juridique applicable aux organismes de bassin versant, à leur mission et à l'élaboration des plans directeurs de l'eau. Nous soumettons que les modalités fondamentales de la gestion intégrée de l'eau gagneraient à être introduites dans le projet de loi et soumises à l'opinion publique ainsi qu'aux débats du Parlement.

Enfin ? je termine ? nous souhaitons aussi saluer d'autres initiatives importantes apportées avec ce projet de loi, notamment l'introduction d'un nouveau droit d'accès à l'eau potable, notamment le renouvellement du régime d'autorisation préalable pour la ressource en eau ainsi que la mise en oeuvre de l'Entente sur les ressources en eaux durables du bassin des Grands Lacs. Nous soulignons néanmoins dans cette section que la participation publique, là aussi, gagnerait à être présente dans ces autres initiatives.

Enfin, comme d'autres groupes l'ont souligné avant, nous questionnons l'à-propos d'exclure les barrages du nouveau régime administratif de gestion de l'eau. Il s'agit d'un projet ambitieux et un projet important pour le Québec et la protection de ses eaux.

Aussi, nous vous encourageons à préciser ce qu'on doit comprendre par «patrimoine commun de la nation québécoise», ce que nous devons comprendre par «l'État gardien des intérêts de la nation».

Compte tenu du caractère collectif du nouveau patrimoine créé et du projet déclaré de développement durable, nous vous recommandons également d'introduire des mécanismes de participation publique, de transparence et de reddition de comptes.

La Chaire de recherche du Canada en droit de l'environnement et ses membres vous remercient pour votre attention et de nous avoir permis de participer à des débats importants sur une loi de l'eau au Québec. Merci.

Le Président (M. Bergman): Mme Halley, merci pour votre présentation. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup. Merci beaucoup, Mme Halley, de votre présentation, et bienvenue aux personnes qui vous accompagnent, et merci beaucoup pour une contribution qui est d'une grande qualité, bien sûr avec un très haut degré d'expertise. Vous avez peut-être remarqué, depuis le début des travaux de cette commission, que, moi, je ne suis pas légiste, je ne suis pas avocate, et je vous ai donc écoutée très attentivement en ayant en mémoire toutes les questions, tous les débats que j'ai eus avec les personnes qui m'accompagnent, dont Me Denis, ici, qui a principalement tenu la plume dans la rédaction de ce projet de loi.

Vous prenez un certain nombre de pages pour poser bon nombre de questions sur la notion de patrimoine commun de la nation québécoise. Et je veux savoir si je vous ai bien suivies et je vous ai bien comprises lorsque... Moi, ce que je retiens, et j'espère que je ne me méprends pas, ce que je retiens, c'est le fait que vous dites: Bien, finalement, après analyse de tout ça puis en tenant compte de l'évolution de l'utilisation de ces termes à travers le monde... Vous endossez, je dirais, vous êtes en accord avec l'utilisation de ces termes tels qu'utilisés, en tout cas, à ce moment-ci, dans le projet de loi proposé. Enfin, je veux que vous me confirmiez ça.

Vous avez sûrement vu comme moi qu'il y a d'autres universitaires émérites qui ont aussi fait part, dans différentes entrevues mais sur un ton, je dirais, plus négatif, de l'utilisation de cette notion de patrimoine commun de la nation québécoise, je dirais, critiquant cette utilisation. Vous l'avez questionnée. Et, moi, en fait, quand je lis particulièrement la page 7 de votre mémoire puis les différentes conclusions et analyses que vous en faites, et un peu plus loin vous dites dans le fond que vous nous suggérez de retenir cette terminologie, je veux savoir si je vous ai bien suivies puis si je résume bien la portée de votre mémoire.

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Merci. Tout à fait. Il est évident par ailleurs que nous avons dû faire une recherche importante pour s'en assurer et voir la richesse du nouveau concept introduit. Mais nous comprenons aussi les réticences, les craintes, parce que, lorsqu'on touche au statut juridique de l'eau, on aborde, on touche des éléments majeurs pour les juristes. Et puis on pourrait avoir des débats très importants pendant de très, très, très nombreuses années et puis ne pas s'en sortir, ne pas gagner beaucoup, même si on a des bonnes intentions. Donc, c'est un peu pour ça, d'avoir amené les différentes questions qui sont soulevées par les juristes et qui pourraient être plaidées dans l'état actuel du libellé. Nous avons donc voulu montrer que c'était plaidable.

Mais par ailleurs nous endossons la création d'un patrimoine commun de la nation qui serait en marge du domaine public et dans lequel nous pourrions, comme le droit français, reconnaître que l'ensemble de l'environnement en fait partie et ses éléments constituants mais notamment l'eau certainement.

Donc, si c'est comme ça qu'on doit comprendre la notion, nous sommes en faveur, nous l'appuyons et nous comprenons que c'est une notion fonctionnelle, notion qui est destinée plus à l'État et à son devoir de gardien des intérêts de la nation, plus qu'à vouloir modifier le statut juridique de l'eau ou des autres éléments qui pourraient se trouver dans ce patrimoine. Alors, vu comme cela, nous, on trouve que c'est un enrichissement du droit québécois, que nous souhaiterions évidemment connaître plus les tenants et aboutissants. On comprend que c'est un projet ambitieux, que ça demande beaucoup de tricot fin, là. Mais on vous encourage à aller de l'avant parce que vous allez poser des balises d'un domaine du droit qui va être nouveau, qui va être très important, et c'est bien, pour que les juristes et les magistrats n'aient pas à faire la démarche que, nous, nous avons faite pour nous en convaincre.

Alors, nous croyons que, si le libellé est très clair, dans l'article 1, qu'il fait bien la distinction entre ces deux notions donc de reconfirmer, de confirmer de nouveau la nature juridique de l'eau comme res communes et d'affirmer un patrimoine, la création d'un nouveau concept juridique, le «patrimoine commun de la nation», de manière distincte, je crois que ça éviterait des débats juridiques. Et plusieurs juristes qui ont des craintes de voir entrer l'eau dans le patrimoine public, ou de voir l'eau être, d'une façon ou d'une autre, privatisée, ou que les individus perdent leur droit particulier en matière d'eau parce qu'elle deviendrait juste collective, ils perdraient leur droit d'accès à la justice sous ces aspects-là, donc ça peut être facilement rassurés, ces aspects-là, par un excès de clarté, hein, je dirais, pour que ce projet-là chemine en ayant cet objectif principal là à l'esprit et non pas de crainte qu'on marchandise l'eau ou qu'on la nationalise, par exemple.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

n(17 h 20)n

Mme Beauchamp: Je vous écoute, et ça m'a rappelé que, lorsque, comme gouvernement, notamment sous le leadership du premier ministre, lorsqu'on a décidé qu'il fallait absolument aller de l'avant avec cette loi et que j'ai commencé moi-même à un peu plus approfondir la question... Je veux juste qu'on se rappelle ici que ce à quoi on touche, c'est une dimension qui est discutée, analysée, souhaitée ? je vais dire ça ainsi ? depuis 1970 par la commission Legendre. Et, quand j'ai commencé à explorer la question, je me suis dit avec un sourire, je me suis dit, vous savez, des fois, il ne faut pas chercher très loin l'explication, hein, pourquoi il y a eu bon nombre de gouvernements puis bon nombre de ministres de l'Environnement, après la création du ministère, qui se sont fait dire qu'il faudrait bien essayer de clarifier cette question et que personne n'a décidé, depuis 1970, je dirais, de s'y attaquer.

Je pense que votre mémoire souligne... Vous disiez tantôt, si j'ai bien compris, que c'était presque un travail de dentelle, hein? C'est réussir à inscrire la notion de l'eau chose commune tout en définissant un rôle pour l'État mais tout en évitant, dans cette définition, la notion d'appropriation par l'État. C'est ça qu'on cherche à établir, je vais résumer ça ainsi. Il faut éviter qu'il y ait toute notion d'appropriation par l'État. Mais en même temps, si on était complètement muet sur le rôle de l'État, ce ne serait pas plus rassurant à la fin. Ce n'est pas le régime juridique qu'on souhaite, ce n'est pas la gouvernance qu'on souhaite de l'eau.

Et un peu comme on l'a fait pour d'autres qui sont venus aussi nous demander de préciser certains éléments, je dois vous dire avec beaucoup d'ouverture que votre proposition, parce que vous terminez avec une proposition pour qu'on réussisse à très bien inscrire la volonté du législateur ? comme je viens de la définir ? vous arrivez avec une proposition qui additionne un élément à l'article en question, je veux juste vous dire avec beaucoup d'ouverture qu'on va l'examiner avec vraiment beaucoup de soin parce que, ce que vous avez exprimé, ce que vous définissez dans le mémoire, je tiens juste à le dire, c'est ça qu'on recherche. Il n'y a pas ici de volonté d'une notion d'appropriation de l'eau par l'État, et on veut l'éviter même. J'irais même à dire: Il faut l'éviter, cette notion d'appropriation par l'État. Et, mon Dieu!, si votre proposition fait en sorte qu'on peut encore plus faire un meilleur travail de dentelle dans ces notions juridiques à travers lesquelles il faut naviguer, bien on va la regarder avec beaucoup d'ouverture puis avec beaucoup d'attention, je tiens à vous le dire.

Mais je tiens surtout à vous dire que votre mémoire, à mes yeux, c'est une contribution extrêmement importante parce qu'il vient vraiment camper, pas juste les solutions, il vient bien identifier les écueils que l'on doit éviter sans pour autant que la conclusion, ce soit: Bien, il faut tout recommencer. Je pense que vous avez bien compris qu'on avait cette intention-là, puis vous nous conseillez, puis c'est vraiment très apprécié.

Je veux revenir avec vous sur votre notion dans tout le grand thème de la gouvernance de l'eau puis du nouveau régime juridique qu'on instaure et que vous qualifiez d'ambitieux. Vous voulez qu'on... Je dirais que vous plaidez sur une accentuation par rapport à la participation citoyenne. Je voudrais vous entendre un peu plus parce que ça m'intéresse, mais aussi pour vous dire que dans le fond le principe qui est devant nous, au moment où on se parle, à la fin, là, dans la vie de tous les jours, pour un citoyen, ça va beaucoup ressembler à ce qui existe actuellement à travers la loi de la protection de l'environnement, où, par exemple, quand une direction régionale peut signer un certificat d'autorisation suite à une demande déposée, bien, c'est inscrit, c'est inscrit dans le processus sur le site Internet du ministère. Si un citoyen veut faire un commentaire, il peut le faire. Il y a donc ce processus-là qui existe en ce moment à travers notre loi sur la protection de l'environnement, puis c'est un peu dans le fond une reprise de ces éléments dans le contexte, là, qui nous occupe avec la gouvernance de l'eau.

Donc, je vais peut-être vous entendre, je sais que certains vont plaider pour justement qu'on revoie la loi sur la protection de l'environnement, mais je veux vous entendre un peu plus sur ces notions de participation citoyenne. Et je termine. Excusez-moi, je suis longue, puis il est tard. Mais, compte tenu que le Bureau des connaissances sur l'eau va rendre public... va exercer son rôle d'être un portail, et qu'on collige l'information sur l'eau, et que les processus donc de demande d'autorisation sont rendus publics, qu'est-ce qu'il manque au modèle devant nous ou en quoi il est perfectible?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Merci. Je vous remercie pour vos bons mots. En matière de... La question de la participation publique nous est venue compte tenu de l'objet même de cette loi qui affirme un caractère collectif à une ressource qui appartient... dont chacun peut faire usage, donc son objet même d'être une chose collective. On peut penser que, dans ce nouveau patrimoine collectif que l'État va gérer, il va y avoir une nouvelle approche de gestion qui va être différente de l'approche de gestion, par exemple, du domaine public, et, compte tenu que ce sont des choses collectives, on pourrait s'attendre à ce que le titulaire de ce patrimoine, qui est le public, soit informé... soit plus intégré dans la gestion de l'État gardien des intérêts de la nation, qu'il soit plus présent.

Donc, on l'avait déjà vu comme principe directeur en s'assurant que la participation publique soit un élément important de cette loi. Alors, on y soulignait le droit d'être informé, le droit donc de participer, c'est-à-dire d'être consulté. On comprend bien que l'information et la consultation peuvent avoir différentes intensités, hein? Entre un C.A. d'un 22 de la Loi sur la qualité de l'environnement ou un 31.5 d'un décret du gouvernement, ce n'est pas le... il y a des intensités qui varient suivant les régimes, suivant les conséquences appréhendées des projets, ça, on le comprend bien. Mais, comme principe directeur, que le rôle du titulaire du patrimoine soit présent, ça nous apparaissait aller de soi dans cette architecture nouvelle d'un patrimoine commun. Le rôle donc du gardien, avec le titulaire du patrimoine, devait être présent donc dès les principes directeurs, dans la section III.

Évidemment, le public, comme je le soulignais, peut intervenir à différentes intensités dans les régimes. Le nouveau régime d'autorisation de l'eau qui est prévu à l'article 17, mais 31.75 et suivants... on pourrait voir, donc, vu qu'on ne réforme pas la Loi sur la qualité de l'environnement, mais on réforme un petit peu la façon dont on va administrer dorénavant certaines autorisations, on pourrait croire qu'à cette occasion aussi, parce que c'est l'eau aussi, parce que ça fait partie du patrimoine collectif, qu'il pourrait y avoir ? surtout que, maintenant avec l'Internet, il y a plus de facilité à informer le public ? un avis des projets, donc des demandes d'avis et également possibilité pour les personnes, donc ces titulaires du patrimoine commun qui peuvent... aussi local, qui peuvent être aussi un peu des gardiens de sécurité de l'eau, donc que le citoyen ordinaire puisse participer à ce processus-là, à tout le moins, en faisant valoir des moyens.

Et également on aurait souhaité qu'il y ait certaines formes de reddition de comptes de la part de l'État sous une certaine forme périodique, ce qui donnerait de la transparence à la gestion du gardien des intérêts de la nation, une reddition de comptes périodique. Et ça pourrait être intéressant. Parce que j'ai sous les yeux juste quelques lois qui touchent l'eau au Québec, elles sont déjà nombreuses. Ça pourrait être une façon d'avoir une approche intégrée aussi de la façon dont nous gérons l'eau, qu'il s'agisse de Loi sur le régime des eaux, Loi visant la préservation des ressources en eau, la LQE, le Règlement sur le captage des eaux souterraines, Loi sur la sécurité des barrages. Il y a beaucoup de législations qui touchent l'eau au Québec, ça pourrait être une façon aussi d'avoir une vision plus panoramique sur la chose.

Comme d'autres, si vous nous proposez de modifier la Loi sur la qualité de l'environnement, je vais appuyer la proposition. Mais certainement qu'ici c'est de promouvoir des nouvelles notions modernes en matière environnementale dans ce projet de loi, puis peut-être que les bouchées sont assez grosses avec juste cette loi-là pour l'instant. Mais on serait heureux aussi de rénover, renouveler, réformer certains régimes qui sont un peu anciens, la Loi sur la qualité de l'environnement.

Parenthèse. Pour le Bureau des connaissances sur l'eau, je n'ai pas de commentaire particulier à faire. Je ne sais pas si c'est un organisme qui devrait faire le rôle de gardien ou d'intermédiaire entre les différents acteurs de l'eau. Il y a peut-être un rôle à jouer dans cette gestion de l'eau au Québec, mais je n'ai pas de commentaire particulier à cet égard.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Il reste combien de temps?

Le Président (M. Bergman): Une minute.

Mme Beauchamp: Oh là là! O.K. Bien, je vais plutôt conclure en vous disant ceci. Je sais que c'est sûrement imparfait, je l'admets. Vous disiez tout de même que c'était déjà une assez grosse bouchée à prendre. Mais je veux juste dire que, tout en admettant que les choses sont perfectibles, je soulignais le Bureau des connaissances sur l'eau plus pour dire qu'il y avait une volonté de rendre accessibles directement aux citoyens les connaissances à la disposition de l'État sur l'eau. Donc, il y a comme un engagement à créer ce qui était souhaité par le rapport du BAPE, la commission Beauchamp, puis aussi dans le cadre de la Politique nationale de l'eau, qui était de créer donc vraiment le fameux guichet unique qui prend la forme d'un portail où sera colligé l'ensemble de l'information.

n(17 h 30)n

Le Président (M. Bergman): En conclusion, s'il vous plaît, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Et vous dire aussi que, pour nous, il y avait une participation citoyenne à travers la reconnaissance d'une gestion intégrée par bassin versant, la reconnaissance d'organismes où très souvent on retrouve assise à côté d'élus une participation citoyenne. Je disais: Sûrement que c'est imparfait, mais il y avait ces éléments que je voulais juste souligner, qui étaient quand même une volonté d'accessibilité à l'information et de participation à la prise de décision, notamment en gestion intégrée de l'eau par bassin versant. D'accord. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps s'est écoulé. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Merci, M. le Président. Mme Halley, bonjour. Votre mémoire amène un éclairage particulièrement intéressant dans la mesure où, aujourd'hui, ce projet de loi là va amener une nouvelle notion. Et puis, moi, je ne l'avais pas vu de cette manière-là, je pensais que c'était évidemment beaucoup plus simple, mais c'est vrai que ça amène des incidences importantes. Et puis, si on laisse un vide juridique, bien ce sera comblé par la jurisprudence et peut-être pas nécessairement comme on l'entend.

Donc, ce qui va porter surtout... l'objet de mes interrogations, c'est évidemment son équivalent français, parce que bien souvent dans l'interprétation du droit civil, bien on va se référer à notre voisin français. Et puis ma première des questions, c'est que, dans vos annexes que vous avez eu la gentillesse de nous démontrer, il y a une référence au code de l'environnement, dans lequel on peut y lire un article qui nous mentionne toutes sortes d'éléments, comme, exemple, la qualité de l'air, les espèces animales, végétales, la diversité, le territoire, qui a été, je pense, la base du concept de patrimoine commun. Nous, au Québec, on fait le contraire. Tu sais, avant de définir ce qui est le patrimoine commun dans un ensemble, on y va spécifiquement avec l'eau, et c'est ce qui va définir notre patrimoine commun. Pensez-vous qu'on s'y prend à l'inverse?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Ah! C'est sûr, en toute logique, on pourrait faire une grande loi-cadre sur l'environnement qui pourrait commencer comme cela. Par ailleurs, même les Français, qui sont très rationnels, ne l'ont pas fait de cette façon. Ils ont reconnu l'eau en 1992 et en 1995 l'environnement comme étant patrimoines de la nation française... de la nation, et puis, en 2004, ils ont reconnu que l'environnement était patrimoine de l'humanité dans leur Constitution. Donc, ils l'ont fait probablement à l'endroit, parce que c'est des valeurs qui changent aussi. Alors, l'eau est tellement vitale que c'est peut-être le premier devoir... Bien, l'air aussi. Il va sûrement venir, avec les changements climatiques. Mais l'eau est tellement vitale, puis il y a des problématiques régionales, nationales qui font que nous sommes rendus là. Et il faut commencer par quelque part, et c'est certainement avec l'eau qu'il convient de commencer.

M. Diamond: Mais est-ce que ça a amené des inconvénients dans la jurisprudence puis dans l'application de ce concept-là, dans la mesure où on a commencé... Je pense que les Français, dans ce que j'ai lu, ont commencé avec le territoire d'abord, c'est la première chose qui a été déclarée commun, puis par la suite les autres éléments. Nous, ce serait l'eau d'abord et par la suite, peut-être, par exemple, la qualité de l'air, si vient le jour où ça devient insupportable, la qualité de l'air dans les régions métropoles. Est-ce que, dans la transition du même concept mais pour des éléments différents, il y a des problèmes d'application?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Merci. Les auteurs français se sont beaucoup penchés sur les effets de ces dispositions de nature déclaratoire somme toute et ils sont encore partagés dans les effets. Mais certainement qu'il y a un effet certain de ces dispositions, c'est de conditionner le développement des actions politiques futures, donc ça nous éclaire sur les orientations, et aussi l'interprétation judiciaire. Donc, ça va nourrir donc le choix entre diverses interprétations judiciaires. Le fait d'avoir un patrimoine commun, bien, va nourrir le sens à donner à des dispositions qui ont besoin d'être interprétées vers un sens pour respecter ces nouvelles valeurs qui traversent notre société.

Je n'ai pas vu que... nous n'avons pas vu que, dans l'expérience française, cela ait posé des questions, sinon de soulever des questions dans la littérature, là, pour répondre, essayer de trouver les effets. Donc, d'où la plaidoirie d'un grand, grand souci de clarté à ce stade-ci de l'introduction pour éviter peut-être des années, des frais puis des inconvénients à des citoyens, d'avoir à dire: Bon, est-ce que c'est un bien? Est-ce que c'est le domaine public? Peut-être que ça va être plus rapide et puis ça va nous permettre de gagner des années comme cela.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Merci, M. le Président. Vous faites référence, en page 8, à justement cette division de la doctrine sur ce que veut dire le concept du patrimoine commun. D'un côté, il semble que c'est simplement une volonté politique, mais qu'il n'y a pas nécessairement de conséquence contraignante. Pour d'autres, c'est un devoir pour l'administration publique ou le gouvernement puis son État de veiller à la protection de ce patrimoine-là. Et, nous, dans l'état actuel du projet de loi, ça pencherait de quel bord, la doctrine?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Merci. Compte tenu du dispositif actuel, donc le titre, les notes explicatives puis ce que je soulignais, là, qu'il est possible de plaider, il est possible qu'on puisse plaider différentes options... Et il pourrait y avoir des décisions judiciaires qui seraient non concordantes. Peut-être, une décision de première instance dirait: Ah! l'eau est devenue un bien. Puis on en aurait une autre, dans un autre district, qui dirait: Ah! l'eau est maintenant dans le domaine public. Donc, ça pourrait générer... Le fait qu'on va plaider, les ambiguïtés vont être plaidées aussi.

Moi, je ne les plaiderais peut-être pas parce que, comme il a été souligné antérieurement, j'appuie l'introduction d'une notion structurante de cette nature-là. On a des problèmes environnementaux, je crois que nos lois, nos réglementations peuvent encore nous aider à résoudre des problèmes, et ce type d'initiative doit être salué. Bon, évidemment, la nouveauté peut créer des incertitudes, la nouveauté peut créer certains inconvénients, mais je crois que ça va quand même dans le bon sens si c'est pour reconnaître un patrimoine distinct du domaine public et une gestion de l'eau pour laquelle on souhaiterait avoir des tenants et aboutissants quant aux devoirs de l'État gardien.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Et puis j'essaie de joindre les deux bouts avec l'histoire... bon, la participation citoyenne, et puis d'autre part le devoir qu'on se doit d'être gardien de notre... Parce que le pire qui pourrait nous arriver, c'est d'adopter cette loi-là pour que finalement ce soit simplement un coup politique sans conséquence réelle. Il existe des lois, pas utilisées nécessairement au Québec mais qui permettent aux citoyens d'enquérir l'État pour pouvoir poursuivre dans le cas de pollution de l'eau. Nous, le projet de loi, en ce moment, ce serait le gouvernement, avec son procureur, qui déciderait de poursuivre pour demander réparation des dégâts. Pensez-vous que ce serait une idée intéressante de pouvoir permettre au citoyen de faire une demande à son gouvernement de s'enquérir d'un dossier?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Il y a beaucoup de choses à examiner, à regarder. J'ai encore beaucoup de curiosité intellectuelle avec ce projet. Je n'avais pas fait cette démarche. Vous évoquez la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, l'article 20, qui malheureusement n'a pas encore donné de fruit quant aux effets juridiques aussi, là; on attend. Il semblerait qu'il y a quand même des actions qui sont en cours au Canada. Certainement que ça peut être une façon d'assurer l'application, je veux dire, des lois et d'assurer une forme de transparence dans l'application. Ça peut être un gain d'accordé aux citoyens.

Donc, dans cette Loi canadienne sur la protection de l'environnement, tout citoyen âgé de plus de 18 ans peut, sous déclaration assermentée, demander qu'une enquête soit faite sur une allégation de violation de la loi. L'État doit donc rendre compte de son enquête périodiquement. Et, dans certaines circonstances, le citoyen pourrait se substituer à l'État qui ne prendrait pas les recours. Il pourrait donc se présenter devant un tribunal ? donc, c'est intéressant ? mais pour une décision déclaratoire, il ne pourrait pas s'enrichir, donc ça ne pourrait pas se substituer à l'article 7.

L'article 7, évidemment, il y a des choses dans ça, la responsabilité sans faute, on peut... ? vous pensez à l'article 7, là ? des choses que beaucoup de juristes vont débattre, là, c'est une disposition intéressante, mais je ne pense pas que ça va nécessairement limiter les recours actuels des citoyens, par ailleurs, si on conserve le statut juridique de l'eau, de chose commune. Mais c'est intéressant, votre suggestion.

M. Diamond: ...ça comblerait votre intention d'y aller avec la participation citoyenne ou vous aviez en tête des citoyens dans une structure ou dans un organisme de bassin versant, par exemple?

n(17 h 40)n

Mme Halley (Paule): Mais, moi, je n'allais pas aussi loin que vous, je dois dire. L'idée de participation publique fondamentale, qui est internationalement reconnue dans la déclaration de Rio, c'est d'assurer l'information, donc l'accès à la qualité de l'eau, à son état, à ce qu'on en fait, vu que l'État n'en est pas propriétaire. De participer, ça veut dire d'être capable de faire valoir ses moyens. Si c'est des audiences publiques devant le BAPE, bien on va pouvoir présenter un mémoire. Mais les actions en justice, c'est pour s'assurer de faire respecter ses droits à l'accès à l'information, son droit de participation.

Alors, ce que vous proposez, c'est un gain supplémentaire, c'est le citoyen actif qui peut prendre... qui peut se substituer à l'État dans la mesure où celui-ci n'interviendrait pas dans un cas d'infraction alléguée. Donc, ce serait un régime supplémentaire qui pourrait donner confiance au fait que le titulaire du patrimoine est encore actif face à ce patrimoine collectif.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Non, c'est beau, en ce qui me concerne. Je vais céder la parole à...

Le Président (M. Bergman): M. le député de Saint-Maurice.

M. Deschamps: Oui. Tantôt, l'Institut de recherche scientifique nous mentionnait que nous travaillions sur une boîte noire scientifique, puis là, vous, vous venez nous mentionner qu'on travaillait sur une ambiguïté des termes juridiques. C'est à peu près ça, là, hein? Il faudrait définir... Ça veut dire qu'il faudrait penser très fortement à revoir le texte de loi.

Il y a une question qui m'inquiète, c'est sur: exclure les barrages du nouveau régime administratif de gestion de l'eau. Quelles sont vos raisons pour vous questionner sur l'exclusion des barrages sur l'utilisation de l'eau? Est-ce que ce serait pour soustraire la société d'État à la loi ou quoi?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Merci. Dans la perspective où nous voyons dans cette loi, là, une loi qui va mettre en place un nouveau régime de gestion des choses collectives, il nous apparaît que c'est l'ensemble de l'eau. Et, si vous remarquez, dans les propositions que nous faisons sur l'article 1, nous soulignons que... Pardon, excusez-moi, à la page 10: «Étant d'intérêt vital, l'eau...» Alors, on a enlevé, nous, les «souterraine» et «de surface», parce que, moi, je considérais que c'était trop réduit, parce que l'eau, le cycle de l'eau, c'est lorsqu'elle tombe en pluie, lorsqu'elle ruisselle, lorsqu'elle est en neige, donc pourquoi on se priverait, là, à cet endroit-là? Et donc, pourquoi, lorsqu'on... Si on veut avoir un regard, si on veut avoir une gestion globale, une gestion complète, une gestion intégrée de l'eau, il conviendrait que l'ensemble des usages soient soumis. Et les usages qui peuvent être faits, de retenue d'eau, sont fondamentaux dans la façon dont on peut gérer l'eau, et il serait bien donc, dans une loi, qu'on ait tous les morceaux qui concernent, qui touchent l'eau.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Saint-Maurice.

M. Deschamps: ...les réservoirs constituent une réserve importante d'eau. Je pense qu'on devrait inclure les barrages dans la loi. Merci, madame.

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Alors, je réitère simplement qu'on aurait souhaité que l'ensemble de l'eau du Québec soit visé par cette loi.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Oui. Bonjour, je vous remercie pour vos précisions, vos suggestions qui sont très pertinentes. En ce qui regarde la hiérarchie des usages de l'eau, est-ce que vous avez des problèmes avec ce concept-là puis est-ce que vous avez des suggestions à nous faire dans ce cadre-là?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Je prône, je prêche... Je prône... Quand on fait du droit de l'environnement, des fois on ne le sait pas, là.

Donc, je trouve que c'est une approche intéressante que d'assurer, de prévoir des hiérarchies d'usage. Je fréquente les hiérarchies d'usage pour travailler sur la Convention de la Baie James, notamment dans la région de Nunavik, en ce qui a trait aux usages des ressources halieutiques, des ressources fauniques, avec les Inuits. Et ça donne un sens à une gestion. Ça assure de mettre en évidence des choses qui sont fondamentales, comme la subsistance, des activités traditionnelles, des gens qui vivent dans des milieux éloignés, etc. Et je crois que, sur l'eau aussi, l'eau est suffisamment vitale...

Et, à cet égard, je vous rappelle, on a déjà dû vous le rappeler, que la loi sur les eaux limitrophes entre les États-Unis et le Canada, qui a été adoptée en 1909 pour assurer la gestion des eaux canado-américaines, a introduit une hiérarchie d'usage de l'eau. Donc, lorsqu'on a à arbitrer et que l'eau peut s'épuiser, c'est important de le dire clairement, quels sont ces usages. Et, dans le projet de loi, on en fait mention à l'article... 17 (31.76)? C'est l'article 17. Il y a déjà là une disposition qui prévoit une hiérarchie, donc on sent qu'elle est déjà admise, cette hiérarchie. Elle devrait se retrouver très, très élevée dans l'architecture de cette loi, c'est-à-dire dans les énoncés des principes. C'est un peu là où on voyait aussi les principes directeurs de la gestion de l'État gardien des intérêts de la nation.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Sur la question de la reddition des comptes, est-ce que vous auriez des suggestions à nous faire en dehors de ce que vous avez déjà mentionné?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): L'idée était de souligner qu'une certaine périodicité de... que ça revienne d'une manière récurrente. Je sais que, dans des réglementations récentes ou des lois récentes, on a prévu que le ministère ferait rapport, un bilan; par exemple, la Loi sur le développement durable, ou le nouveau règlement sur l'eau potable. Bon. C'est des secteurs, c'est des segments de l'eau, là, qui sont visés là, mais peut-être que ça pourrait être ramené à ce niveau-là, de l'État gardien des intérêts de la nation qui, en étant gardien, rend compte de ce qu'il a fait de la chose collective. Et, comme je le soulignais, ça pourrait ramasser aussi toutes ces divisions de l'eau, que ce soit la division des barrages ou la division de l'eau potable, et qui administrent des règlements ou des lois différentes. Ça nous donnerait une vision beaucoup plus claire et complète de l'eau au Québec. Et, dans une perspective d'avoir des relations avec le titulaire... les titulaires du patrimoine, je crois que ce serait bien d'avoir une formule de reddition de comptes.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Est-ce que vous avez eu l'occasion d'examiner le projet de loi ontarien sur la question de l'eau et des redevances? Puis, si c'est le cas, est-ce qu'il y a des erreurs qu'on devrait éviter puis des éléments qu'on devrait intégrer, qui vous apparaissent importants?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Malheureusement, je n'ai pas pris connaissance du projet de règlement ontarien.

M. Trottier: Puis est-ce qu'au niveau français vous avez vu des problèmes dans l'application de la Loi sur l'eau, en France?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): De ce que nous avons analysé, ce concept de patrimoine commun, outre cette dualité doctrinale à l'effet que c'est peut-être un concept qui est un peu mou ou c'est un concept qui est un peu interprétatif, là, c'est à peu près... la division, elle se trouve là. Les auteurs plaident des effets ou certains plaident le peu d'effets. Donc, il y a une espèce de division doctrinale qui est là, en France, c'est ce qu'on peut voir.

Il y a peut-être les municipalités, ça a été évoqué dans le procès... dans l'affaire Erika, qui est un pétrolier qui a laissé échapper des hydrocarbures sur les plages françaises, de la Total. Et il s'est posé la question si les municipalités, ou les MRC, ou d'autres regroupements locaux qui investissent dans leur milieu, dans leurs eaux, tout ça, s'il y a un problème, est-ce qu'elles vont pouvoir, elles, se revendiquer de l'article 7 puis à quel niveau? Est-ce que ça va être... Parce que c'est un patrimoine collectif, mais un patrimoine collectif aussi, c'est un niveau intermédiaire, hein, le collectif, entre l'intérêt général puis l'intérêt particulier. Donc, évidemment, il y a encore des choses à réfléchir, mais c'est ce que j'ai perçu, là, cette question-là du collectif, du rôle des municipalités ou de ce niveau de gouvernement.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Roberval.

M. Trottier: Certains intervenants nous ont suggéré, nous ont demandé de donner un statut particulier au fleuve Saint-Laurent, de par son importance, de le déclarer patrimoine national, par exemple. Est-ce que vous voyez un problème à cet effet-là, juridiquement, là?

Le Président (M. Bergman): Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Je n'ai pas d'opinion à ce stade-ci, mais par ailleurs je n'ai pas d'objection... de réaction d'objection, à ce stade-ci, sur ces représentations.

M. Trottier: C'est tout.

Le Président (M. Bergman): Merci. Mme Halley, Mme Gagnon, merci pour votre présentation. On apprécie que vous êtes ici, avec nous, aujourd'hui.

Et j'ajourne les travaux jusqu'au 23 septembre, 9 h 30, où la commission va se réunir à la salle du Conseil législatif afin de pouvoir poursuivre le mandat. Merci beaucoup. Bonne soirée.

(Fin de la séance à 17 h 50)


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