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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Wednesday, January 28, 2015 - Vol. 44 N° 10

Special consultations and public hearings on the draft revised Government Sustainable Development Strategy 2015–2020


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Table des matières

Auditions (suite)

Mobilité électrique du Canada (MEC)

Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec (TCFJRQ)

Conseil patronal de l'environnement du Québec (CPEQ)

Écotech Québec

Institut Hydro-Québec en environnement, développement et
société de l'Université Laval (IHQEDS)

Autres intervenants

M. Pierre Reid, président

M. David Heurtel

M. Sylvain Gaudreault

M. Claude Surprenant

M. Guy Bourgeois

M. Ghislain Bolduc

M. Serge Simard

Mme Marie-Claude Nichols

M. Sylvain Roy

*          Mme Chantal Guimont, MEC

*          Mme Élise-Ariane Cabirol, TCFJRQ

*          M. François Talbot, idem

*          Mme Hélène Lauzon, CPEQ

*          M. Mustapha Ouyed, idem

*          M. Denis Leclerc, Écotech Québec

*          M. François Anctil, IHQEDS

*          Mme Paule Halley, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-six minutes)

Le Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires. Ce que je vais faire immédiatement pour moi-même, bien oui.

La commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de Stratégie gouvernementale de développement durable révisée 2015-2020.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Soucy (Saint-Hyacinthe) sera remplacée par M. Surprenant (Groulx).

Le Président (M. Reid) : Merci. Nous avons un retard de cinq minutes. Est-ce que je peux avoir le consentement des membres de la commission pour prolonger de cinq minutes la période de consultation aujourd'hui?

Des voix : Consentement.

Auditions (suite)

Le Président (M. Reid) : Merci. Alors, voici l'ordre du jour de ce matin. Nous entendrons les groupes suivants : Mobilité électrique Canada, la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec et le Conseil patronal de l'environnement du Québec.

Alors, je souhaite la bienvenue à notre invité, le premier groupe. Vous avez 10 minutes pour votre exposé. Quand il restera une minute, je vous ferai un signe, un signal pour essayer de respecter l'horaire. Je vous demanderais de vous présenter. Et par la suite, à la suite de votre exposé, nous allons avoir 35 minutes d'échange avec les membres de la commission.

Mobilité électrique du Canada (MEC)

Mme Guimont (Chantal) : Bonjour, M. le ministre Heurtel, M. le Président, Mesdames messieurs, membres de la commission. Merci de cette opportunité. Je suis Chantal Guimont, P.D.G. de Mobilité électrique Canada. On est très heureux d'être là ce matin pour non seulement appuyer l'électrification des transports, mais l'accélérer parce que c'est au coeur de notre mission à Mobilité électrique Canada.

Peut-être une courte introduction de notre association. Nous sommes la seule association canadienne entièrement dédiée à l'accélération des modes de transport électriques. Nous regroupons un bassin de 140 membres de diverses expertises, autant les fournisseurs de produits d'électricité et de différentes composantes, et des utilisateurs de véhicules électriques potentiels et existants comme les gestionnaires de parcs des municipalités, des universités et des représentants du transport public. Nous sommes un forum d'échange, nous avons une importante conférence annuelle. Nous offrons également des positions aux gouvernements fédéral et provinciaux sur des enjeux qui touchent directement l'électrification des transports et, bien sûr, compte tenu du leadership du Québec en la matière, nous avons une importante représentation des membres québécois, qui sont très, très, très actifs.

Alors, les différents dossiers en jeu que l'on couvre à l'heure actuelle, bien sûr tout le monde se pose les mêmes questions : Quelles sont les meilleures pratiques pour accélérer l'électrification des transports? Alors, on travaille avec tous les gouvernements provinciaux. Nous avons agi auprès du gouvernement de la Colombie-Britannique, de la Nouvelle-Écosse, de l'Ontario également, et, bien sûr, aujourd'hui, là. Nous allons travailler, dans la prochaine année, sur la mise à jour d'une feuille de route, un mandat fédéral que Ressources naturelles Canada nous a donné, pour voir qu'est-ce qu'il faut faire au cours des cinq prochaines années pour atteindre certains objectifs. On est à revoir, évidemment, les grands chiffres qui étaient publiés déjà en 2010, alors qu'on ne connaissait pas le marché, et nous allons nous attaquer aux véhicules électriques, à tous les aspects, à l'autopartage également parce que c'est un domaine qui a un énorme potentiel pour l'électrification des transports, mais il s'agit de trouver le bon modèle d'affaires. Également, les transports publics parce qu'il y a eu une série d'études qui ont été faites. Mais on pense qu'il y a beaucoup de choses à mettre en commun pour voir quelles sont les barrières et surtout, là, les technologies. Donc, ça sera une vraie feuille de route technologique.

• (9 h 40) •

On sent également qu'il y a un intérêt pour un plan d'action commun. De plus en plus, on se pose des questions, on essaie de voir comment on peut transposer les meilleures pratiques pour pouvoir agir de façon plus efficace et rapide.

Alors, je vous fais part de quelques chiffres, que vous avez peut-être déjà vus. On a atteint au Canada le nombre de 10 000 véhicules qui ont été vendus et qui sont sur nos routes au mois de novembre, et il y a plus de 4 800 de ces véhicules-là qui sont au Québec. Donc, compte tenu de notre parc automobile, de la population, et tout, c'est énorme, on fait des envieux. Quand on se compare avec également l'Ontario et la Colombie-Britannique, il y a des questions qui se posent, et c'est ce dont je voudrais vous parler ce matin.

Dans les tendances également, on observe depuis plus d'un an une forte tendance, une accélération, qui est très visible au Québec, du nombre de véhicules électriques, la même tendance un peu moins grande en Ontario. Mais, en Colombie-Britannique, on voit vraiment une stagnation des ventes. Ils font plein de choses là-bas, mais ils ont retiré les aides financières au mois de mars dernier, et c'est évident et reconnu que le fait de ne plus offrir d'aide financière à l'achat de véhicules électriques cause des impacts non négligeables sur les niveaux de ventes.

Alors, évidemment, quand on regarde tout ça, on se demande quelles sont les conditions gagnantes, qu'est-ce qu'il faut faire pour accélérer tout ça. Malheureusement, il ne semble pas, à ce stade-ci du marché, avoir de formule magique. Je pense que, si ça existait, on l'aurait, puis tout le monde ferait pareil. Ce n'est pas le cas du tout, il y a des choix qui sont propres à chaque juridiction. Et c'est habituellement le panier de mesures qu'on regarde, qu'on voit qu'est-ce qui fonctionne. Mais il y a une unanimité sur trois mesures qui sont importantes. Mis à part, bien sûr, la communication de base et la sensibilisation, il semble, dans toutes les juridictions, avoir trois, vraiment, leviers importants.

C'est, évidemment, les subventions directes dans un premier temps, et viennent ensuite les voies réservées. On se rend compte que les utilisateurs de véhicules électriques sont, bien sûr, des navetteurs. Puis le temps, c'est de l'argent. Alors, une fois qu'ils ont leurs véhicules, bien, s'ils ont accès à une voie réservée, ça conditionne beaucoup leur comportement et même leurs conditions d'achat. Et bien sûr la recharge publique parce qu'une fois qu'on s'est rechargé à la maison — vous savez que la recharge à la maison, c'est notre premier endroit où on retrouve notre électricité — on part tous les matins avec un plein d'énergie propre, mais, quand on se promène, la recharge publique vient rassurer beaucoup les utilisateurs, et c'est carrément démontré. Mais, malgré tout ça, il y a d'énormes variations d'une province à l'autre ou d'un État à l'autre sur ce qui fonctionne au-delà de ces trois mesures-là de base.

Alors, qu'est-ce qu'on peut faire au Québec, compte tenu de la longueur d'avance qu'on a par rapport à d'autres, mais où il y a d'autres juridictions qui sont encore plus en avance? Alors, je vous parle ici d'une stratégie de conditions gagnantes. C'est un peu un guide, et non pas des mesures prescriptives pour dire quoi faire, mais voici qu'est-ce qui, selon Mobilité électrique Canada, devrait guider la réflexion. À ce stade-ci du marché, nous pensons qu'il y a lieu encore de poursuivre la stimulation et la création de la demande. Vous savez, quand on parle de 5 000 véhicules par rapport à 4,8 millions de véhicules sur nos routes au Québec, là, on est au tout, tout, tout début d'un marché, puis normalement, dans un marché comme ça, on stimule la demande par toutes sortes de moyens. On va parler, bien sûr, de communications. Je vais y revenir tantôt parce qu'on pense qu'il y a des choses à faire de ce côté-là. La sensibilisation, bien sûr, et les conduites d'essai. Dans le fond, une fois qu'on connaît le produit, on sait ce qu'il fait, on l'essaie. L'essayer, c'est l'adopter, puis ensuite, bien, on considère l'achat. C'est de base.

L'exemplarité. Je sais qu'il y a beaucoup d'actions qui sont entreprises pour faire en sorte que des flottes, dont celles du gouvernement, dont celles de grandes compagnies, conduisent, adoptent des véhicules électriques et les mettent sur les routes pour contaminer un peu tout le monde à cet esprit-là.

Bien sûr, il y a l'aide financière. J'en ai parlé longuement tantôt comme étant la première mesure qui est à reconduire, à maintenir jusqu'à un certain minimum de nombre de véhicules électriques sur nos routes. On en a 5 000, on a déjà parlé de divers plans qui nous amenaient à 300 000 VE sur les routes. Alors, quel est ce minimum-là? Est-ce que c'est d'avoir 50 000 véhicules sur nos routes, 100 000? C'est à juger, mais il faut qu'il y ait un minimum pour que le marché, comme on dit, décolle, et ces conditions-là sont celles de base pour y arriver.

Ensuite viennent les conditions pour rassurer les conducteurs de véhicules électriques parce que, bien qu'on sait qu'on peut se recharger à la maison, il y a toujours la peur de la panne. Et là il y a beaucoup d'actions déjà entreprises de la part du gouvernement, les subventions à l'achat et l'installation de bornes à la maison, bien sûr le premier niveau. Le deuxième, qui est d'une importance majeure au Québec. Avec l'accès à la recharge publique, on ne peut que reconnaître tous les résultats et les efforts encore des réseaux de recharge publique comme le Circuit électrique, comme celles du Réseau vert, comme d'autres privées également qui cherchent à avoir encore plus de recharge publique et également des corridors de recharge rapide. La recharge rapide rassure beaucoup par le fait qu'elle est disponible sur un trajet qui est moins habituel que notre trajet de tous les jours, mais qui rassure parce que ça se rapproche du temps de recharge de l'essence et qui est nécessaire, et ces plans-là sont en déploiement avec l'annonce du Circuit électrique toute récente d'avoir au moins 50 bornes de recharge rapide.

Vient ensuite, en dernier lieu, l'aide financière pour l'achat et l'installation de bornes au travail, qui est très complémentaire. Si requis, il y a du support à pouvoir se recharger au travail pour retourner à la maison.

Et d'autres mesures moins coûteuses... Bien, ça dépend pour qui, là, mais qui peuvent être moins coûteuses. Pour, là aussi, attirer l'attention, les voies réservées, les stationnements dédiés gratuits et même les modifications au Code du bâtiment pour faire en sorte que, lorsqu'on construit un immeuble, on ait déjà les installations électriques pour recevoir des stations de recharge à moindre coût lorsque requis. Alors, ça aussi, c'est envisagé dans différentes juridictions. On a également des préoccupations pour les condos, où c'est compliqué, pour un condo, de définir ce qu'il en est.

Une voix : ...

Mme Guimont (Chantal) : Oui. L'enjeu le plus important pour nous, malgré tout ça, c'est de poursuivre la collaboration avec tous les partenaires pour accroître la communication. Il y a aujourd'hui des enjeux de communication qui existent encore au Québec. Vous avez tous un beau-frère, un voisin, même, qui vous dit encore : C'est-u bon, ces véhicules-là? Puis ça marche-tu vraiment? Alors, des choses simples qui peuvent être faites en communication. Il n'y a pas eu de campagne comme telle en communication au Québec. On parle de recharge, et tout ça, mais il y a lieu de le faire. Et la promotion et les essais, on pense que c'est la clé. Pour ce qui est de l'offre, nous considérons que la croissance de la demande, qui est là puis qui est encore à ses tout débuts, va permettre d'accroître la disponibilité de l'offre, et réduire les délais de livraison, et de s'ajuster rapidement à l'offre. Alors, voilà mes messages essentiels.

Je me permettrais de vous rappeler qu'en juin 2016 nous accueillerons à Montréal le Symposium international sur les véhicules électriques. Et c'est en collaboration avec notre association soeur aux États-Unis, Mobilité électrique Canada est là. Et on remercie le gouvernement pour le support qui a déjà été accordé, et on a 18 mois pour encore plus accélérer l'électrification des transports.

Le Président (M. Reid) : Merci, Mme Guimont. Je passe maintenant, pour commencer la période d'échange, la parole au ministre.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Guimont. Merci pour votre présentation très intéressante. On a eu le plaisir d'échanger davantage à Vancouver l'automne dernier.

Première question. Bien que vous ne l'ayez pas mentionné spécifiquement, je soupçonne quand même que la... Je voudrais vous entendre d'abord sur l'importance de bien intégrer — parce qu'on parle quand même de la stratégie de développement durable du gouvernement pour les cinq prochaines années — l'importance de bien intégrer la question de la lutte contre les changements climatiques à cette stratégie. Alors, de votre point de vue, évidemment, spécifique, mais pour une vision globale du gouvernement, pas seulement du point de vue du ministère de l'Environnement, mais de l'ensemble du gouvernement, de votre point de vue, l'importance de bien intégrer à la stratégie les principes de lutte contre les changements climatiques.

• (9 h 50) •

Mme Guimont (Chantal) : Bien, c'est certain que c'est au coeur de cette stratégie-là. J'ai comme escamoté ça en me disant que c'était comme évident parce qu'il y a plein de mesures qui peuvent être faites pour réduire les gaz à effet de serre dans le transport. On connaît tous les objectifs de réduction des gaz à effet de serre de l'ensemble des manufacturiers, mais, nous, l'approche de l'électrification à l'intérieur de ça demeure au coeur de ce qu'on pense qui doit être poursuivi comme tel.

Il y aura d'autres technologies dans le futur. On va parler de véhicules à hydrogène, et tout, c'est tout en ligne... c'est tous des véhicules électriques pour accélérer l'électrification. Pour les cinq prochaines années, je pense que l'important, c'est vraiment d'assurer une croissance plus importante que ce qu'on voit ici, au Québec. On a tous les attributs pour le faire. On a l'écart de prix. On a le fait qu'évidemment notre production est 98 % hydro. On a ce qu'il faut pour convaincre les clients qui sont beaucoup plus réceptifs à ça, mais les barrières demeurent, et je pense que c'est celles-là qu'il faut adresser. Mais oui, il y a lieu, bien sûr, de rappeler l'importance de sa contribution au transport, qui est le plus grand émetteur de gaz à effet de serre.

M. Heurtel : Merci. Bien, c'est parce que vous parlez... on parlait de communication, vous parliez beaucoup de communication. Je suppose, c'est encore important de rétablir même ce qui, pour des initiés comme vous, semble être des évidences. Je crois qu'il reste un travail important de sensibilisation, comme vous le dites. Donc, c'est important de bien établir la fondation sur laquelle se base cette nouvelle stratégie de développement durable. Donc, l'importance de bien intégrer la lutte contre les changements climatiques.

Et, comme vous le dites, 44 % des émissions de gaz à effet de serre au Québec proviennent du secteur des transports. Alors, quand on parle de communication dans un contexte de stratégie de développement durable, on parle d'une communication intégrée parce que, quand on parle d'électrification des transports... Puis, évidemment, bon, notre temps est limité, mais ça touche plusieurs secteurs, il ne s'agit pas juste... donc, on parle d'aménagement, on parle de planification du territoire, on parle certainement de politique d'investissement puis, quand on parle... si on peut prendre le premier point que vous avez soulevé, la communication, l'importance d'avoir une communication intégrée de façon horizontale sur l'ensemble des activités du gouvernement.

Mme Guimont (Chantal) : Tout à fait. Tout à fait, c'est... Je comprends que, dans l'ensemble de votre stratégie, c'est un axe de communication qui doit être plus large, dont une fois qu'on fait le... la section électrification peut être très bien déclinée en lien avec l'ensemble de la stratégie puis...

M. Heurtel : ...donc, c'est important de voir une approche intégrée, donc que ça soit en transport, en municipal, parce qu'évidemment le monde municipal a un angle très important, un rôle très important quand on parle de stationnement, quand on parle... Le Code du bâtiment, évidemment, ça, c'est un autre domaine. Quand on parle d'investissement, de planification financière, les choix stratégiques d'investissement du gouvernement, évidemment la stratégie de développement durable doit être capable d'intégrer, sur l'ensemble de l'action gouvernementale, tous ces différents pans. Alors, il faut véritablement une intégration de l'action à travers l'ensemble de l'action gouvernementale. Est-ce que je vous comprends bien?

Mme Guimont (Chantal) : Tout à fait. Les municipalités, vous le dites très bien, ont un rôle important à jouer pour faciliter tout ça. On n'a qu'à penser à l'autopartage, où on va s'attaquer à des questions fondamentales de support de la part des municipalités pour faciliter l'accès au stationnement, les permis, de même pouvoir donner l'accès pour installer des bornes facilement, faire de la promotion de ça aussi. Le client qui se rend à un véhicule d'autopartage puis qui voit un véhicule électrique puis un autre ordinaire, il y a énormément à faire pour convaincre que c'est bien. Mais, en amont, vous avez raison que cette stratégie-là de communication doit être complète et intégrée pour que le client ultime se retrouve, le consommateur et le citoyen se retrouvent, et c'est des choses, nous pensons, qui sont beaucoup moins coûteuses qu'avant, beaucoup plus faciles à accéder et trouver les leviers qui font que les gens écoutent.

Un véhicule, c'est très émotif encore, là. On est encore de la génération qui n'a pas encore à l'idée qu'on n'a pas besoin de véhicule nécessairement. On a toutes les options, mais il y a des expériences qui sont évidentes sur des communications efficaces à peu de frais, également des essais qui peuvent être encore plus amplifiés. On le fait. À chaque fois, on se rend compte comment c'est bénéfique et que ça ne prend pas grand-chose pour convaincre.

Il faut penser également que, si on veut se rendre à 50 000, 100 000, ce ne sont pas les précurseurs, les acheteurs précurseurs qu'on va devoir convaincre, là, c'est l'autre palier de personnes qui, elles, si on ne va pas chercher ce qui les anime du côté environnemental, du côté économique, du côté du plaisir de conduire, bien, elles vont rester un peu sur leur appétit.

M. Heurtel : Ensuite, bon, au niveau des communications, le gouvernement s'est clairement engagé dans cette voie-là. On a annoncé, le 2 décembre dernier, 6,7 millions de dollars spécifiquement pour des activités de sensibilisation, de communication liées au Fonds vert, liées à la lutte contre les changements climatiques. Donc, ça va être intéressant de voir comment on travaille avec des organismes comme le vôtre et d'autres, la société civile pour voir comment on peut faire la meilleure promotion possible de ces objectifs-là.

Vous suggérez également... Quand on parle d'une approche intégrée à travers le gouvernement, donc, j'imagine, ça inclut également les politiques d'achat du gouvernement, les critères d'appel d'offres, les politiques d'achat. La flotte gouvernementale doit s'adapter à la nouvelle réalité du véhicule électrique.

Mme Guimont (Chantal) : Oui, mais vous êtes des précurseurs là aussi parce que, dans la flotte du CGER, il y a plus de 300 véhicules qui sont déjà électriques, donc c'est énorme. Il faut poursuivre, mais il y a aussi là une façon de rendre visibles ces actions-là pour M. et Mme Tout-le-monde. On a plein d'atouts, il faut les montrer puis aller un cran plus loin pour voir où sont les comblements ou les endroits où on peut accélérer.

M. Heurtel : Une des mesures qui est discutée régulièrement, on parle beaucoup de ce qu'on appelle la norme ZEV. Alors, c'est un anglicisme, là, mais de véhicules à émission zéro, finalement. J'aimerais vous entendre là-dessus. Peut-être, vous pourriez prendre quelque temps juste pour expliquer c'est quoi, la norme ZEV, et comment votre organisation voit ce genre de mesure là.

Mme Guimont (Chantal) : D'accord. Bien, il y a 10 États, actuellement, américains, dont la Californie, qui est le plus évident puis, dans le fond, l'Oregon et tous les États de la Côte Est, du Nord-Est, là, qui ont adopté cette façon de faire là qui oblige un quota de vente de véhicules électriques dans l'ensemble de la flotte des manufacturiers. Je vous fais fi de tous les détails parce que, d'une juridiction à l'autre, c'est très variable et c'est très compliqué. Je sais qu'entre autres la Californie cherche à simplifier le tout. Et, dans ça, il y a des manufacturiers qui vendent plus de véhicules électriques que d'autres qui sont gagnants parce qu'ils ont des crédits à vendre à d'autres manufacturiers qui en vendent moins.

Par exemple, en Californie, les grands gagnants sont Nissan et Tesla qui recueillent des dizaines de millions de dollars de crédits par rapport à d'autres qui n'atteignent pas des quotas de vente. Soit qu'ils n'ont pas de véhicules électriques dans leur flotte, par exemple, comme Mazda, au Québec, qui pourrait être un enjeu plus important, ou Honda, qui sont des marchés importants au Québec. Vous savez qu'on est très spécialisés dans les petites sous-compactes puis que c'est économique jusqu'à un certain sens. Mais c'est un échange de crédits pour accélérer le fait qu'il y ait, en principe, plus de disponibilité de véhicules qui génère plus de ventes. Le principe, je pense, ce n'est pas d'avoir des véhicules en stock, mais c'est bien sûr que ça contribue à l'augmentation des ventes et qu'on n'ait pas de manque d'inventaire pour suppléer à la demande.

Dans un marché qui est très, très débutant comme ce qu'on voit ici, il y a d'autres exemples de juridictions comme la Géorgie qui sont... comme la Norvège, dont on entend beaucoup parler, où c'est la demande qui a fait en sorte que l'offre s'est ajustée de façon évidente à la demande sans imposer ces quotas-là. Nous, ce qu'on pense, c'est que, pour le moment — je dis bien pour le moment — que ce n'est pas nécessaire. On pense qu'il y a encore de la place pour qu'il y ait une adaptation de la demande et de l'inventaire et, surtout, de la communication de l'offre — excusez l'anglicisme — dans le showroom, chez le concessionnaire automobile...

M. Heurtel : Dans la salle de montre.

Mme Guimont (Chantal) : Hein?

M. Heurtel : Dans la salle de montre.

Mme Guimont (Chantal) : Dans la salle de montre, voilà. Excusez mon... Je travaille plus en anglais de ce temps-ci, dans la salle de montre.

Moi, j'ai été longtemps impliquée dans les programmes d'efficacité énergétique dans mon ancienne vie à Hydro-Québec, puis je ne sais pas si vous vous rappelez les promotions des produits économiseurs d'énergie. Quand on se rendait chez RONA, chez Réno, et tout, il y avait un programme simple de support à la promotion sur le site de vente des distributeurs qui ont embarqué, qui ont pris la relève par après, qui... On n'en parle plus aujourd'hui, c'est comme évident, on retrouve ça partout, mais jadis, quand on partait ces affaires-là, c'était comme : Comment on fait pour en faire plus et embarquer tout le monde?

Et là c'est l'histoire de dire : Qu'est-ce qu'on fait pour les embarquer? S'ils embarquent, tant mieux. Sinon, qu'est-ce qu'on fait? Mais on pense qu'on n'est pas rendus à cette étape-là parce qu'on parle de 4 000 véhicules, 4 800 véhicules aujourd'hui et qu'il y a encore beaucoup à faire pour faire connaître le produit. Si le produit n'est pas connu, même s'il y a des voitures dans la salle de montre, il faut, on pense, taper sur le bon clou pour faire en sorte que la demande soit là, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de place pour ça à l'heure actuelle. Je ne vous dis pas, dans un an, qu'est-ce qui arrivera ou dans...

Et également le fait qu'on peut voir, ailleurs, qu'est-ce qui se passe. La Géorgie fonctionne bien. Vous allez me parler du Vermont, je suis certaine, parce que c'est nos voisins à côté qui ont adopté le mandat ZEV et qui ont des résultats surprenants par rapport au niveau d'incitatif et d'offre qui est là. Alors, quand je vous disais qu'il y a des cas qui sont hors normes, là, le Vermont en est un. Alors, je leur parle, moi, ils disent que oui, tout va bien, et tout, mais on parle de 800 véhicules. Alors, on ne parle pas non plus de milliers. Il y a une progression, mais on est tellement dans les petits chiffres que est-ce que ça va se poursuivre? Est-ce qu'il y a d'autres facteurs qui vont pouvoir influencer? Est-ce que le prix de l'essence qui baisse va venir jouer dans tout ça? Il faut regarder à plus long terme, je pense, pour voir où sont les leviers qui sont à notre portée alors qu'on a déjà des conditions gagnantes au Québec, et qu'on en vend déjà beaucoup plus qu'ailleurs au Canada, et qu'on peut faire mieux par rapport aux États-Unis.

• (10 heures) •

M. Heurtel : C'est intéressant, ce que vous dites, vous n'excluez pas la norme ZEV, mais, en même temps, pas immédiatement. C'est ça? C'est ça que je comprends bien?

Mme Guimont (Chantal) : Bien, c'est une mesure comme une autre. Je pense que tout le monde, là-dedans, reconnaît que ça peut peut-être faire une différence, mais pas au détriment de la communication, des essais, de l'aide financière.

M. Heurtel : Évidemment, dans un contexte où on parle d'un bouquet de mesures pour favoriser, justement, le développement du véhicule électrique, nous, on a signé une entente, justement, à la COP 20, à Lima. On a signé une entende avec la Californie, justement, pour développer davantage et harmoniser le travail qu'on fait déjà ensemble au niveau du marché du carbone, mais pour harmoniser davantage nos politiques en matière de véhicules électriques. Et évidemment, comme vous l'avez dit, les politiques, les mesures californiennes ont inspiré à peu près toutes les mesures qui sont utilisées dans les autres États américains, dont celles du Vermont, dont celles de la Géorgie. Alors, il y a certainement quelque chose à explorer là.

L'avantage de la norme ZEV, c'est que présentement on se retrouve dans des situations... Puis là je n'ai pas de données scientifiques, mais j'ai beaucoup d'anecdotes, beaucoup de cas qui me sont rapportés, que, justement, il y a des gens qui arrivent au concessionnaire, arrivent avec l'idée d'acheter un véhicule électrique et sont soit dissuadés ou bien l'inventaire n'est tout simplement pas là. Il y a des véhicules électriques qui sont disponibles en Ontario qui ne le sont pas au Québec pour des raisons qui ne sont pas toujours faciles à comprendre. Alors, la norme ZEV, évidemment, comme telle ne va pas solutionner... ce n'est pas nécessairement la panacée que ça va garantir, mais, en même temps, est-ce qu'on ne peut pas... justement, avec un programme d'incitatifs financiers, avec une promotion, une sensibilisation accrue, est-ce que la norme ZEV peut faire partie, justement, d'une stratégie pour, justement, s'assurer que le développement du véhicule électrique se poursuive au Québec?

Mme Guimont (Chantal) : Bien, je pense que c'est la bonne question de dire : Est-ce que le mandat ZEV a la marge de conditions réunies pour accélérer, faire en sorte que la demande soit là? Est-ce que c'est la solution globalement pour que ce soit avantageux? La question reste ouverte. Moi, j'ai fouillé, là, il n'y a pas d'études, il n'y a rien qui dit nulle part ou qui peut démontrer que c'est très prolifique ou très bénéfique pour le moment. Tout le monde dit : Il n'y a pas assez d'informations pour qu'on le sache. Je pense que vous avez raison de dire qu'il y a des anecdotes, moi, j'en entends de toutes les sortes. Mais je parle également à des concessionnaires, oui, il y a des manufacturiers... Puis on prend ce qu'ils nous disent aussi avec parcimonie des fois, mais ils sont en train de s'ajuster à la demande et ils sont capables de le faire.

Alors, est-ce qu'il n'y a pas des ratés où une fois... Parce que c'est un marché qui est en croissance, n'est-ce pas, puis c'est souvent plus difficile de prévoir les ventes. Alors, ça va être aussi difficile de prévoir comment on ajuste un mandat ZEV, mais ça, ça se fait. C'est des questions qui doivent être regardées, mais on considère que, pour le moment, c'est prématuré, compte tenu de ce qu'on voit dans le marché. C'est ce qu'on trouve qui est particulier d'un marché qui est naissant et qui, de toute façon, fait en sorte qu'au Québec on en vend, là, c'est important, ce qu'on a. Il y a des cas, sûrement, mais on ne pense pas que c'est la majorité puis qu'ils font exprès pour ne pas en vendre. Pas du tout

Le Président (M. Reid) : Merci, Mme Guimont. Nous allons maintenant passer au porte-parole de l'opposition officielle, M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Guimont. Ça me fait plaisir de vous voir aujourd'hui, surtout de vous entendre sur la question de la mobilité électrique. Je vous écoutais puis je regardais vos diapos, je lisais votre document, je me disais la chose suivante. Dans le fond, c'est assez simple. Je veux dire, il faut le faire, mais les mesures sont assez simples. Quand je regarde votre document à la page 6, là, quelles sont les conditions gagnantes, mis à part la communication et la sensibilisation, il semble y avoir quelques mesures avec plus d'impact, les subventions directes, les voies réservées, les recherches publiques. Je veux dire, on ne réinvente pas la roue, là, c'est quelque chose, somme toute, d'assez simple, mais ça prend une volonté politique, ça prend une volonté aussi du monde des affaires, du monde, justement, de l'automobile.

Puis là, bon, je vous écoutais puis je me disais : C'est quand même fou parce que nous sommes présentement dans une période de baisse de prix de l'essence, mais, on le sait, qui sera momentanée, puis, bien, sur une question de temps long, là, de long terme, ce sera quand même... on estime assez momentanée, puis là, tout d'un coup, on voit une recrudescence d'achat de F-150 et de «monster cars» dans les salons d'automobiles. C'était la saison, là, des salons de l'auto à Detroit, à Montréal, puis c'est encore les grosses voitures qui sont en avant, puis on voit une recrudescence de la hausse des ventes de ces véhicules-là parce qu'il y a des gens qui profitent de l'occasion que le prix de l'essence est bas. Alors, on a un signal de prix sur la question de l'essence qui est tellement puissant et qui vient contrer des efforts que je dirais, quand même, somme toute, assez simples pour soutenir la mobilité électrique. Alors, on fait face constamment à cette espèce de contradiction, là, entre le prix de l'essence et les mesures qu'il faut mettre en place avec une certaine volonté politique.

Mais je voudrais vous entendre un petit peu plus sur votre tableau, que je trouve très intéressant. Je ne sais pas qui gère le piton de la diapo, là, mais, à la page 5, là... Ah! c'est vous?

Une voix : Oui, c'est moi.

M. Gaudreault : O.K. C'est vous, le gestionnaire du piton. Alors, le graphique à la page 5, où là il y a... Ouais, je comprends que... Bon, je vais me mettre de ce côté-là. Ouais, c'est ça, la première courbe, c'est celle du Québec, puis là il y a vraiment un pic à partir de janvier 2014. Bon, il y a de la fluctuation assez conforme à l'Ontario, Colombie-Britannique, mais là vraiment, en janvier 2014, pouf! ça part en hausse du côté du Québec. J'aimerais ça, vous entendre un petit peu plus sur comment vous expliquez ça.

Mme Guimont (Chantal) : Bien, c'est un effet mensuel qui est normal d'une année à l'autre. Il y a des fluctuations de vente. Les gens achètent plus des véhicules au printemps, puis moins à l'hiver, moins à l'automne. Puis janvier, février, c'est les pires mois, ça fait qu'on ne peut pas voir... Même, quand on va avoir les résultats de janvier, février, avec le froid qu'il y a eu, et tout, là, les gens attendent au printemps, concluent des ventes, puis ça se fait surtout au printemps et à l'été. Ce n'est pas inquiétant.

M. Gaudreault : Mais c'est quand même beaucoup plus que la Colombie-Britannique puis l'Ontario, c'est beaucoup plus que les autres... Bon, je vois, là, janvier 2013, là, l'année d'avant, là, je comprends que les gens achètent plus de véhicules au printemps puis à l'hiver, mais il n'y a quand même pas ce pic-là, là, tout d'un coup, là. Vous n'avez pas d'autres explications que ça?

• (10 h 10) •

Mme Guimont (Chantal) : Non. On n'a pas fouillé spécifiquement ça. C'est plutôt la tendance, je pense, puis la progression globale. J'aurais dû vous présenter un autre graphique — mais il n'était pas à jour avec les données récentes — qu'on fait une moyenne de trois mois, puis on voit les tendances, et ça, ça démontre que ce n'est pas inquiétant.

Maintenant, vous avez raison de dire que la baisse des prix du pétrole, c'est à surveiller. Ce qu'on pense, c'est que des acheteurs de véhicules électriques, ceux, aujourd'hui, qui achètent des véhicules électriques, là, ils ne font pas ça uniquement pour des questions plus économiques, hein, ils font ça parce qu'ils croient à l'environnement. Et ici, au Québec, l'écart de prix entre l'électricité puis le pétrole, bien qu'il y a une baisse des prix du pétrole à court terme, ce n'est pas aussi significatif que c'est dans d'autres juridictions. Alors, on pense qu'on est sûrement mieux placés. C'est à surveiller.

Mais c'est là que la communication devient encore plus importante, même s'il y a une baisse des prix du pétrole, pour dire : Écoutez, vous contribuez à l'environnement, vous mettez quand même beaucoup d'argent dans vos poches par rapport au prix de l'essence, entre l'électricité et l'essence, et vous avez de plus en plus un choix de modèles. Tu sais, vous regardez ce que vous avez maintenant comme choix par rapport à il y a 18 mois, puis tout ce qui est annoncé, il n'y a aucun manufacturier qui annonce qu'il se retire des véhicules. Vous avez peut-être entendu parler de la Bolt — je dis toujours Volt, mais c'est la Bolt — de GM, où on annonce un véhicule de 200 milles d'autonomie, là — on fait la conversion en kilomètres — à moins de 30 000 $ avec aide financière qui est annoncée, pour concurrencer des gens comme Tesla et autres qui annoncent ces véhicules milieu de gamme en termes de prix avec des autonomies incroyables. Donc, il n'y a personne qui semble penser que la fluctuation des prix va être, à long terme, comme vous dites, un enjeu qui va ralentir l'offre.

Maintenant, comment nous, on fait pour créer la demande? Et c'est là que les communications — vous le disiez, M. le ministre Heurtel — il y en a encore beaucoup de place pour ça, même si c'est émotif, une auto, puis qu'on regarde, on l'aime-tu, est-ce que c'est le fun à conduire, est-ce qu'elle est performante. Dans l'ordre, j'y vais, là. Ça, c'est des attributs qu'on connaît, là. Oui, elle est sans bruit, puis oui, elle contribue à l'environnement. Bien, il faut faire cette démonstration-là. Il y a plein de choses, de témoignages... Moi, je rêvais d'avoir, quand j'étais à Hydro, là, des campagnes avec des témoignages simples de gens qui adorent leur véhicule. C'est plein de cas comme ça. Sur Internet, une vedette, une pas vedette... Bâtir quelque chose d'efficace et de ce qui va chercher les gens pour tous les attributs dont on parle, c'est à notre portée avec plein de choses, là, sur le Web, sur les réseaux sociaux, avec les concessionnaires sur les lieux de vente, avec les associations de consommateurs ou de véhicules électriques, qui sont maintenant beaucoup plus impliquées avec nous qu'avant. Il y a plein d'idées qui peuvent être mises sur la table. Mais il ne faut pas lâcher ça parce que c'est ça, la clé qui va faire qu'on va être en avance.

M. Gaudreault : Je comprends ce que vous voulez dire, il y a quelque chose d'irrationnel là-dedans, là, parce que moi, j'aime les voitures rouges. Alors, c'est un peu choquant pour moi, là, mais c'est comme ça.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Gaudreault : Alors, c'est ainsi. Donc, il faut, justement, aller chercher là où la demande et là où le besoin s'expriment, aller parler aux consommateurs. D'ailleurs, ça m'étonne. Peut-être, ça m'a échappé, mais je ne vous ai pas entendu parler du bonus-malus. Est-ce que, pour vous, c'est une mesure qu'on devrait ajouter dans le panier de mesures, pour reprendre l'expression du ministre, là? Parce qu'on n'a pas le bonus-malus au Québec, en France ça a donné des très bons résultats. J'aimerais ça, vous entendre là-dessus.

Mme Guimont (Chantal) : On n'a pas beaucoup d'expérience de ça au Canada, donc on ne s'est pas positionnés là-dessus. Mais c'est sûrement quelque chose qui est à regarder également.

M. Gaudreault : O.K. Est-ce qu'il me reste du temps encore?

Le Président (M. Reid) : Encore deux minutes.

M. Gaudreault : Oui. L'aménagement du territoire, je veux vous entendre là-dessus. On a reçu Vivre en ville vendredi dernier, bon, qui plaide beaucoup, évidemment, pour une réforme de Loi sur l'aménagement et l'urbanisme qui tient compte, évidemment, de toute la dimension des transports. Les municipalités ont un rôle important à jouer. Il y a toute la dimension des régions aussi. Quelqu'un qui habite à Dolbeau, par exemple, Mistassini puis qui a besoin d'un camion pour son travail, il va être inquiet, veut savoir est-ce qu'il va avoir assez d'autonomie s'il va dans le bois, etc. Alors, j'aimerais ça, vous entendre un petit peu plus sur l'aménagement du territoire, avec peut-être un angle spécifique sur la dimension occupation du territoire, surtout dans les régions dites éloignées.

Mme Guimont (Chantal) : Bien, c'est certain que l'autonomie a certaines limites par rapport à certains véhicules. Des camions qui ont une autonomie importante pour desservir des besoins qui sont plus de lourdeur de marchandise, et tout ça, il n'y en a pas encore. Il y a du développement avec des pick-ups, avec Via Motors, et tout ça, mais, avant tout, je pense que tout ce qui s'en vient comme hybrides branchables va être à regarder pour ces besoins-là.

Pour ce qui est de l'aménagement du territoire comme tel, il y a des mesures simples, je pense, qui peuvent favoriser l'accès à la recharge et que les municipalités elles-mêmes adoptent des véhicules lorsqu'ils seront disponibles. Ça, c'est certain, certain. Les régions ont leur place. Ce n'est pas un simple véhicule urbain. Quand on regarde les navetteurs qui vont régler l'ensemble des besoins, je pense qu'il faut avoir une préoccupation beaucoup plus importante, peut-être, que ce qui a été à date pour le territoire lui-même. Et, les municipalités, moi, ce que j'ai eu comme expérience, c'est que les municipalités sont très sensibles à offrir des services à leurs citoyens. Encore là, comme dans la clientèle, il y a des précurseurs puis il y en a d'autres qui le sont moins. Alors, comment on fait pour encadrer ça, les stimuler à le faire de plus en plus? Avec des témoignages aussi de leaders qui sont déjà présents, qui sont déjà présents au Québec, il y en a plein d'exemples.

Le Président (M. Reid) : Merci. Nous allons passer maintenant au deuxième groupe d'opposition. M. le député de Groulx.

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Mme Guimont, je vous remercie d'être ici aujourd'hui. D'abord, j'ai pris bonne note de votre commentaire au niveau du gouvernement, de peut-être plus publiciser l'utilisation des véhicules électriques qu'il fait pour stimuler l'intérêt auprès des gens. Je note également qu'on a 300 véhicules actuellement en inventaire, ce que vous avez mentionné tantôt, et qu'il y a donc un effort également de ce côté-là aussi à faire pour augmenter le nombre de véhicules pour montrer l'exemple.

Maintenant, au niveau du particulier, l'acquisition d'un véhicule électrique, un élément très important, évidemment, entre autres, est le prix. Alors, les subventions ont donc demeuré importantes. Dans votre exposé tantôt, vous avez mentionné que la Colombie-Britannique a cessé, en mars 2004, de subventionner les véhicules électriques. Alors, j'aimerais voir est-ce qu'en contrepartie ils ont exploré d'autres mesures pour favoriser l'utilisation des véhicules électriques électriques et, peut-être, qu'on pourrait reproduire ici si c'était le cas.

Mme Guimont (Chantal) : Bien, vous avez raison de dire que ça, ça a été un dur coup. Puis je sais que le budget provincial de la Colombie-Britannique sort le 10 février, on va regarder ce qui se passe parce qu'on pense qu'ils ont réfléchi peut-être. En Colombie-Britannique, ils ont énormément de communication fédérée, je dirais, avec un paquet d'organismes. Vous irez voir la campagne Emotive, simple, simple, simple. Ils en parlent beaucoup, c'est structuré, c'est un bel exemple. Ils ont également débuté avant Québec l'installation de bornes de recharge rapide sur les grands corridors. Mais il y en avait 11, on va être bien en avance sur eux, ce ne sera pas long. Mais ils poursuivent cette réflexion-là. Ils ont beaucoup plus de bornes de recharge publiques, mais, avec ce qui se fait ici, on va rattraper ça. Leur point faible, c'est vraiment les aides financières, sur lesquelles je sais qu'ils sont en train de réfléchir.

Alors, la Colombie-Britannique, per capita ou par nombre de véhicules, est en avance sur l'Ontario. C'est l'Ontario qui nous regarde avec des grands yeux. Puis je peux vous dire que j'ai plein de contacts avec Mobilité électrique Canada et des membres du Parlement là-bas pour dire : Qu'est-ce c'est qu'ils vont faire? Qu'est-ce qu'ils vont faire? Ils ont de la recharge, ils ont des subventions équivalentes aux nôtres, qui sont moins importantes que nous, pour l'infrastructure de recharge au travail ou dans les commerces, mais il n'y a pas un organisme comme Hydro-Québec ou comme d'autres qui regroupe et qui stimule le marché. Vous connaissez la situation des «load-serving entities», des municipalités qui servent de distributeur d'électricité, où il y a beaucoup, beaucoup de monde qui parle à beaucoup de monde. Ça semble être moins organisé, évidemment, que ce qu'on fait, mais ils se posent des questions parce qu'ils veulent accélérer, eux aussi, l'électrification des transports. Ça fait qu'on a beaucoup d'atouts ici, il ne nous manque pas grand-chose, je pense, pour passer à une autre vitesse.

M. Surprenant : Merci. Maintenant, selon les statistiques de la SAAQ, le nombre de camions légers dans le parc automobile du Québec a augmenté de 33 % entre 2008 et 2013, tandis que le nombre d'automobiles n'a augmenté que de 0,8 % sur la même période de temps et enregistrait également une baisse entre 2012 et 2013. Alors, un portrait encore plus révélateur, le nombre de véhicules de 1 000 kilogrammes à 1 250 kilogrammes a diminué de 9 % entre 2008 et 2013, tandis que le nombre de véhicules de 2 000 à 3 000 kilogrammes et de 3 000 à 4 000 kilogrammes a respectivement augmenté de 66 % et de 566 %.

Alors, je suis d'accord qu'il faille changer les habitudes de consommation, mais les produits offerts doivent rejoindre la demande aussi. Alors, qu'est-ce que vous avez à dire là-dessus? Ne croyez-vous pas que l'offre, d'abord, devrait rejoindre plus la demande de produits?

Mme Guimont (Chantal) : Sûrement. Il faudrait poser la question aux manufacturiers, je pense, pourquoi le développement d'une offre de véhicules plus efficaces électrifiés tarde. Il est question de technologie, et de coûts, et d'adaptation poids et la configuration elle-même. Je sais qu'il y a beaucoup d'efforts de faits pour optimiser l'efficacité des véhicules à essence d'abord, mais pourquoi il y a un retard technologique à faire une offre de véhicules plus importants... de camions dits moins légers. La question devrait leur être adressée parce qu'on n'est pas tout seuls, c'est partout dans le monde qu'il y a un certain retard de ce côté-là. Mais il faudrait leur poser la question, je n'ai pas cette connaissance fine là de leur stratégie de développement technologique pour ces véhicules-là.

• (10 h 20) •

M. Surprenant : Au niveau stratégique, auriez-vous des commentaires à formuler ou des suggestions à faire au niveau du gouvernement? Ne pourrait-on pas envisager, donc, une stratégie industrielle au niveau de la production de voitures électriques?

Mme Guimont (Chantal) : Bien, ça, c'est une grande question ouverte parce qu'on n'a pas de véhicules électriques qui sont manufacturés au Québec, mais on a beaucoup de compagnies qui font des composantes, des moteurs, des matériaux de batterie, de l'électronique. Quand on regarde l'ensemble des compagnies québécoises et canadiennes qui contribuent à la chaîne complète de production, il y en a beaucoup. Je connais les efforts de tous les organismes pour, une fois qu'ils ont une idée, encore mieux la commercialiser et la rendre. C'est là qu'il y a beaucoup, beaucoup d'étapes à franchir avant d'avoir une idée puis de commercialiser quelque chose, et c'est là que je sais que les entreprises comme Inno-V, comme le Centre national du transport avancé travaillent pour arriver à faire en sorte qu'il y ait plus de produits qui sortent sur le marché, mais c'est une compétition qui est féroce. Mais je pense que c'est un créneau.

Évidemment, la recherche et le développement, dans ce qu'on va faire cette année comme analyse, on essaie de faire un «mapping» de qu'est-ce qui est fait ici, qu'est-ce qui entre dans la production de véhicules en Amérique du Nord puis tenter de voir où sont, justement, les créneaux ou les façons de faire qu'il faut augmenter aussi pour accroître nos parts de marché, mais c'est une question qui est assez compliquée. Mais c'est un créneau important.

Le Président (M. Reid) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, Mme Guimont, pour votre présentation et votre contribution.

Je suspends les travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de venir s'asseoir à la table.

(Suspension de la séance à 10 h 22)

(Reprise à 10 h 23)

Le Président (M. Reid) : À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la bienvenue à nos invités de la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec. Je vous demanderais de vous présenter et de présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez 10 minutes pour faire votre exposé. Je vous donnerai une petite indication quand il restera une minute, et ensuite nous procéderons à 35 minutes d'échange avec les membres de la commission. Alors, à vous la parole.

Table de concertation des forums jeunesse
régionaux du Québec (TCFJRQ)

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : Parfait. Merci, M. le Président. M. le ministre, membres de la commission, bonjour. Merci de votre invitation. Donc, moi, je m'appelle Élise-Ariane Cabirol. Je suis présidente de la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec. Et je suis accompagnée de M. François Talbot, qui est directeur général de la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec.

C'est un plaisir pour nous d'être ici ce matin malgré l'heure, aux aurores, que ça m'a demandé de me déplacer de l'Abitibi-Témiscamingue pour être avec vous ce matin. Mais c'est tout de même un plaisir, là, d'avoir la chance de contribuer à vos travaux.

Donc, vous le savez peut-être, les forums jeunesse sont un réseau d'organismes qui sont présents sur l'ensemble du territoire québécois et qui travaillent à faire des jeunes de moins de 35 ans de réels acteurs du développement local et régional et à susciter leur participation citoyenne. L'action des forums jeunesse se distingue notamment par son ancrage dans le territoire, par la force de la concertation qu'ils réussissent à créer avec les partenaires du milieu et également par une valeur qui nous est chère depuis nos tout débuts, soit celle du par et pour les jeunes qui est au coeur de notre intervention. En effet, en plus d'oeuvrer pour les jeunes, leur créer de meilleurs milieux de vie, les forums jeunesse sont gérés par des jeunes et cherchent à placer dans toutes leurs interventions, tous leurs projets les jeunes au coeur de leurs actions.

Ce qui nous amène à venir vous rencontrer aujourd'hui, c'est, en fait, un intérêt marqué de la part des forums jeunesse pour la question du développement durable. En fait, concrètement, cet intérêt-là se manifeste par le fait que le développement durable est une priorité d'investissement pour 13 des 19 forums jeunesse régionaux depuis 2009, ce qui en fait la cinquième priorité parmi les priorités d'investissement des forums jeunesse sur 16 thématiques, donc cinquième sur 16. Les forums jeunesse, vous le voyez dans les documents qu'on vous a remis, ont fait, entre 2009 et 2014, une centaine de projets qui touchent spécifiquement à la question de l'environnement et du développement durable. Vous verrez même qu'on s'est limités, justement, à ces projets-là, qui étaient davantage à caractère environnemental, qu'on n'est pas allés dans les projets qu'on vous soumet aujourd'hui, dans l'inclusion sociale, les saines habitudes de vie, etc., tout ce qu'on retrouve dans la stratégie, parce que ça, c'est une tout autre discussion qu'on pourra peut-être avoir à un autre moment. On a essayé de se focusser sur déjà cette centaine de projets là aujourd'hui. Donc, une centaine de projets, 9,4 millions d'investissements au total, dont 3 millions qui proviennent des fonds régionaux d'investissement jeunesse, 400 partenaires qui se sont réunis autour de cette question-là. Les forums jeunesse, également, se dotent, pour certains, de grilles d'analyse de projets qui sont basées sur les critères du développement durable.

Bref, c'est une question qui nous intéresse. On n'est pas ici pour se positionner en experts de la question, mais bien pour vous dire que c'est quelque chose qu'on identifie comme étant une priorité pour le développement de nos régions, de nos milieux, puis qu'on fait partie d'une toile, d'une panoplie de partenaires qui sont en action sur cette question-là dans les régions du Québec. Pour nous, globalement, ce qui est essentiel pour l'action, la réponse qu'on donnera aux enjeux de développement durable, c'est l'engagement de tous les milieux dans le respect de leur diversité, la participation de tous et toutes et la valorisation de l'intelligence et de la créativité des jeunes, des citoyens.

Plus concrètement, on s'attarde... on souhaite, en fait, que la stratégie soit mise en action de façon à respecter l'initiative des milieux, que le choix des moyens d'action, que le choix de la solution qu'on y apporte, elle doit se faire le plus près possible de ceux qui connaissent le problème puis de ceux qui vont vivre avec les résultats. Il faut donc laisser l'initiative aux communautés, aux citoyens, faire place à leur créativité.

Ça paraît attrayant parfois, quand on voit une solution qui marche bien à un endroit, de se dire : Tiens, ça serait simple, on la diffuse à la grandeur du territoire, ça a bien fonctionné là. C'est un réflexe qui est un peu naturel, qui peut aussi... On peut se dire : Quand on crée un outil, si on le diffuse à la grandeur du Québec, on va peut-être faire des économies. Nous, on plaide plutôt pour l'inverse, pour une réponse qui est adaptée au milieu, donc qui est un petit peu... C'est un petit peu une façon de faire qui est contre-intuitive, mais qui, généralement, va être payante, va être payante par ses effets sur les gens qui sont impliqués. Quand on fait participer les gens au processus, on obtient non seulement le résultat à la fin qui était souhaité, mais, en plus, le processus aura créé des résultats, des gens qui sont davantage engagés, qui se sentent davantage concernés par la mise en oeuvre de la solution. On obtient également les effets positifs de la concertation. Si on redonne aux milieux la possibilité de décider de leur solution, on oblige les gens à se concerter, à s'en parler. Les forums jeunesse en ont fait l'expérience, ça donne des partenaires qui, peut-être, au départ, étaient un peu réticents à se pencher sur la question du développement durable, mais qui, avec le temps, deviennent eux-mêmes des ambassadeurs de la question tellement ils sont pris au jeu de s'en préoccuper. Puis finalement, bien, on obtient une réponse qui est clairement plus adaptée aux besoins du milieu.

On a un projet qui est cité dans notre document, qui est le projet PAJE, qui a été repris... qui est né au Centre-du-Québec, qui est un projet de situation d'apprentissage à l'école, qui amène les jeunes sur le terrain à vivre des... On les met vraiment en situation réelle. Ce projet-là, c'est un exemple que j'aime bien. Les jeunes, au Centre-du-Québec, se sont retrouvés dans un boisé à faire une activité d'apprentissage et ont découvert une nouvelle sorte de tortue qu'ils ne savaient pas qu'elle était dans les sous-bois du Centre-du-Québec. Ça serait facile de dire : Tiens, on va créer une situation d'apprentissage qu'on va diffuser dans l'ensemble des écoles du Québec pour inciter les jeunes à trouver des tortues dans les sous-bois. Mais peut-être que ça ne s'applique pas vraiment aux jeunes de la Côte-Nord, cette situation-là. Donc, plutôt que de leur créer un guide tout près, tout monté d'avance, qui ne respecte pas la réalité de l'ensemble des territoires, il faut avoir une approche sous forme de guide. On accompagne, on a une bonne idée, mais cette idée-là, elle doit être modulée pour que partout les milieux puissent la mettre à leur couleur.

• (10 h 30) •

Je vous parlais un peu plus tôt du «par et pour les jeunes», qui est vraiment quelque chose auquel les forums jeunesse tiennent beaucoup. On se dit que ce n'est pas tout de travailler au développement durable dans l'optique intergénérationnelle puis des générations futures, il faut que les générations futures qui sont déjà là, donc les jeunes, prennent part au processus, c'est eux qui vont vivre avec ça. En fait, ce qu'il faut se dire, c'est qu'il faut changer notre optique. Les jeunes ne sont pas seulement une clientèle visée par les programmes qu'on va mettre en place en question de développement durable, pas seulement une clientèle visée de programmes qui ont été conçus par des experts, les jeunes sont également des experts de leur propre réalité, de leur milieu. Il faut les faire participer, il faut les mettre à contribution dans la mise en oeuvre de tout ça.

C'est sûr que le fait qu'on soit ici aujourd'hui, on le souligne, pour nous c'est une belle nouvelle en ce sens. On constate que vous avez un intérêt pour faire participer la jeunesse à cette stratégie-là. Maintenant, on se demande comment on pourrait travailler davantage à poursuivre le dialogue, la concertation avec nous, avec les autres groupes jeunes pour s'assurer que les jeunes du Québec soient partie intégrante de la gouvernance de cette stratégie-là. Notamment, on lance la question, on sait qu'il existe une clause d'impact jeunesse qui permet d'analyser l'impact des politiques gouvernementales sur la jeunesse. Pourrait-on penser à une clause d'impact jeunesse élargie qui inclut les principes de développement durable dans une perspective d'équité intergénérationnelle et qui, bien sûr, serait accessible au public? C'est une des réflexions qu'on lance. Pour la suite, je pense que je céderais la parole à M. Talbot, on n'a pas encore eu de signe...

Une voix : ...

M. Talbot (François) : Ah! deux minutes. Quand même. Non, c'est ça, tu sais, marteler peut-être sur deux éléments à nouveau, là. On a été invités en 2013 par le ministère dans le cadre des consultations qui sont nommées dans la stratégie, et, depuis ce temps-là, moi, je veux vous dire que ça a eu... je pense que ça a eu un impact sur notre regard qu'on porte sur le développement durable, l'environnement, ça nous a obligés à davantage revoir ce qu'on fait, solliciter les forums des différentes régions. Donc, je pense que l'État peut jouer un rôle de leader, et, en interpellant les groupes des différents milieux, ça nous amène à faire remonter ça dans la liste de nos priorités et également... Non, je vais m'arrêter là, je vais profiter des questions que vous aurez à nous poser, là.

Le Président (M. Reid) : Oui. Vous avez terminé? Bon. Alors, merci beaucoup de votre exposé. Nous allons passer, dans un premier temps, au bloc du côté gouvernemental, et je vais poser la question à M. le ministre, même si je sais que le député d'Abitibi-Est a sûrement des questions parce qu'il est aussi impressionné que nous par le fait que vous soyez partis ce matin de chez vous. M. le ministre.

M. Heurtel : Merci. Bien, je tenais à vous remercier, un, de vous être déplacés comme ça, puis pour le travail impressionnant, là, que vous nous présentez aujourd'hui, puis pour le travail que vous faites en général aussi. Je veux dire, on le voit d'ailleurs, là, en annexe à votre mémoire, là, toutes les activités, tout ce qui se fait à l'échelle du Québec, des activités auxquelles le gouvernement participe des fois. Pas toujours, évidemment. On n'a pas les ressources nécessaires pour toujours être là, mais on est quand même présents, puis on est en partenariat avec vous, puis c'est clair qu'on veut continuer ça. Alors, je salue votre travail puis votre engagement. Et vous jouez un rôle essentiel non seulement par rapport au développement durable au Québec, mais je crois aussi à la nécessaire implication de notre jeunesse à l'effort, justement, qu'on a à faire en matière de développement durable.

Un point sur lequel j'aimerais vous entendre davantage, c'est la lutte contre les changements climatiques. Évidemment, il y a une série de mesures, et je trouve ça très intéressant, l'approche que vous décrivez, d'avoir... Oui, c'est sûr qu'il faut qu'il y ait des normes générales, des normes parapluies pour le Québec, puis c'est ça qu'un gouvernement doit faire, mais il faut aussi avoir la flexibilité pour être capable d'avoir des solutions adaptées qui viennent du terrain puis être capable d'avoir dans les mesures et dans la stratégie, encore une fois, la flexibilité pour pouvoir intégrer ce qui vient du terrain et ce qui vient de clientèles spécifiques, notamment la jeunesse. Alors, par rapport à la lutte contre les changements climatiques, je ne vous ai pas entendus là-dessus, mais j'aimerais voir, un, comment vous voyez ce geste fondamental parce que c'est la jeunesse, ce sont les générations futures qui vont être impactées par nos actions et les décisions qu'on prend maintenant en matière de changements climatiques.

Le GIEC a été très clair, si on n'agit pas d'ici 2050, toute notre façon de vivre est en jeu, notre existence même est en jeu. Un enfant né aujourd'hui va voir le XXIIe siècle, il faut qu'on soit prêts. Alors, en termes d'actions concrètes, puis encore comment on relie ça à la stratégie, sachant que... Je crois qu'on est d'accord avec les principes que vous avez mis de l'avant, mais, en matière plus de lutte contre les changements climatiques, voir comment on peut encore faire plus et comment la stratégie peut travailler encore mieux avec la jeunesse pour mettre en oeuvre maintenant des mesures qui vont nous aider à avancer en matière de lutte contre les changements climatiques.

Le Président (M. Reid) : M. Talbot.

M. Talbot (François) : Oui. Je vous dirais, je suis content que vous renommiez ces éléments-là. On a écouté le passage de nos collègues du réseau national des conseils régionaux de l'environnement, puis vous parliez un peu... justement, de dire : On n'a pas de deuxième chance, il n'y a pas de deuxième planète. Je pense, vous ouvriez la commission avec ça. Donc, je pense qu'il y a deux pans à cette question. Je vous dirais, du côté national, du côté du gouvernement du Québec, il y a tout un pan qui est de l'ordre du législatif, qui vous appartient. Je pense, vous le nommiez... Notamment, on entendait qui sont passés avant nous, sur les voitures électriques, à un moment donné il y aura peut-être... Puis ça ne fait pas partie de notre mémoire, mais il y a des éléments sur lesquels il faudra que le gouvernement prenne un rôle, qu'il vienne, à quelque part, à avoir des changements structurels.

Mais, je vous dirais, il y a aussi un rôle du gouvernement qui est à l'effet — vous me permettrez l'anglicisme — de «caller la shot», là. C'est-à-dire que l'ajout de la lutte aux changements climatiques au nom du ministère est un signal qui a été envoyé, puis on se passait la remarque en cumulant nos projets, que nous, à date, on recensait des projets des forums en environnement et développement durable. Là, avec la commission, en regardant ça, on a dit : Bon, bien, nous, il faudrait rajouter «lutte aux changements climatiques». Et donc, en faisant ça, en allant chercher les projets qu'on fait en lutte aux changements climatiques, vous faites descendre un vocabulaire qui nous oblige à voir un peu plus ce qu'on fait, et je pense qu'ensuite... et ça, c'est très intéressant quand vous faites ça. Donc, ensuite, il faut laisser aux milieux régionaux l'initiative. Nous, on a eu différents commentaires quand qu'on rédigeait le mémoire de certains milieux qui disaient : Des fois, quand je lis des documents comme ça puis je vois : Il faut valoriser le transport collectif et actif, puis que je reste à Alma, que je reste à Rouyn-Noranda... Puis même Rouyn, c'est tel que tel, là, c'est une ville, mais il y a des milieux encore plus ruraux. Là, j'ai nommé deux villes, mais où ils nous disaient : Tu sais, je ne me sens pas rejoint, j'ai l'impression d'être devant une politique, une stratégie rédigée à Québec, à Montréal, qui s'adresse à des gens de milieux très urbains.

Donc, je pense qu'ensuite il faut solliciter ces milieux-là et il faut les solliciter de manière — puis on vous l'écrit — non consolidée. Déjà, aujourd'hui, qu'on soit devant vous, oui, on est bien contents, mais c'est aussi un peu un échec, on aurait aimé ça, qu'il y en ait 19, régions, devant vous qui auraient pu vous dire exactement : Pour ma région, voici ce que ça veut dire. Et, je pense, sur la lutte aux changements climatiques, ça va être important afin d'éviter une forme de braquage dans certains milieux où les gens voient ce qu'on leur demande de faire puis ils disent : Mais ce n'est pas adapté. On me dit de prendre le transport en commun, il n'y a pas de bus. Ce n'est pas il y a 1 000 ans qu'on a vu les enjeux en Gaspésie avec l'arrêt des transports d'Orléans, mais je ne vais pas plus loin là-dessus. Mais je pense qu'impliquer des milieux va être très important dans les prochaines étapes, là.

Le Président (M. Reid) : Merci. Je passe maintenant la parole au député d'Abitibi-Est.

M. Bourgeois : Bien, ça me fait plaisir de vous accueillir ici aujourd'hui chez vous, dans votre parlement. Vous connaissez maintenant ma réalité hebdomadaire lorsque la session est en pleine opération. Donc, de voir le soleil se lever quand on est dans l'avion, c'est un beau paysage, mais, quand même, ça demande un peu d'engagement.

Aussi, vous me permettrez de vous reféliciter pour le prix Phénix que vous avez obtenu lors de la dernière année. Je pense que ça démontre clairement l'engagement du forum jeunesse envers les actions dans le domaine environnemental. On voit aujourd'hui votre engagement, votre passion dans ce sujet-là, votre préoccupation, et c'est tout à votre honneur.

Justement, dans cette optique-là, comment on peut mieux faire pour que cette politique-là reflète les attentes des jeunes sur l'ensemble du territoire? Je pense, vous aviez commencé à le préciser, mais j'aimerais vraiment regarder comment le gouvernement, dans sa stratégie, peut mieux intégrer cette préoccupation-là qui, dans le fond, est là pour votre avenir. Vous allez vivre beaucoup plus les situations environnementales qui se dressent devant nous que nous qui avons un âge un peu plus avancé.

• (10 h 40) •

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : Bien, tout à fait. C'est, effectivement, pour ça qu'on plaide pour une place des jeunes, puis on est tout à fait d'accord avec ce que vous dites parce que les jeunes auront à vivre avec les conséquences, bon, de cette situation-là.

Un peu plus concrètement, dans le fond, ce qu'on propose ou ce qu'on amène comme idée, c'est de favoriser le dialogue avec les jeunes. Donc, ça passe par nous, ça passe par d'autres groupes jeunes. Ça peut passer par les jeunes sur les territoires, mais surtout ça passe par une meilleure connaissance, peut-être, ou davantage d'échange sur même ce que l'État finance parce que les projets qu'on vous soumet actuellement — bon, il faut savoir, les forums jeunesse sont financés par la Stratégie d'action jeunesse, qui, elle, est financée par le Secrétariat à la jeunesse — c'est des projets gouvernementaux en partie avec l'apport du milieu. Donc, le Secrétariat à la jeunesse possède ces données-là, mais, après ça, qu'est-ce qu'en fait le reste de la machine gouvernementale, si on veut? Donc, il y a peut-être un enjeu de communication davantage entre les ministères, entre les différents paliers pour partager davantage déjà ce qui se fait parce qu'à nos yeux, à notre sens, ce que les forums jeunesse... les projets qui se font parlent déjà beaucoup sur les préoccupations des jeunes.

Quand on regarde les thématiques des projets, quand on voit que, par exemple, ça passe beaucoup par le milieu scolaire, la sensibilisation aux jeunes, d'amener les jeunes sur le terrain, on retrouve les préoccupations d'achat local, on les voit, les thématiques qui sont préoccupantes pour les jeunes par les projets qui sont faits. Donc, déjà, cette connaissance-là des projets, c'est déjà une première étape importante pour aller chercher le pouls de la jeunesse.

M. Talbot (François) : Bien, tu sais, trois mesures précises que vous pourriez mettre de l'avant. Consulter directement les jeunes, ça a été le cas de votre collègue, sur la question de l'intimidation, récemment, qui a demandé qu'on consulte les jeunes. Les forums jeunesse ont fait des batteries de consultations, ça a... On a fait une journée ensuite d'échange où la ministre a participé et on vous a donné le fruit de ce que les jeunes dans les différents territoires avaient dit. Deux, annuellement, comme ça a été fait en 2013, comme vous le faites aujourd'hui, demandez-nous de vous dire ce qui se passe sur les territoires. Demandez-nous d'analyser... Demandez à vos fonctionnaires de demander au Secrétariat à la jeunesse c'est quoi, les projets qui ont été faits. Et, trois, un comité-conseil, vous en avez. J'entendais le RNCREQ parler d'un comité-conseil. Nous, on n'est pas interpellés. Peut-être que d'autres groupes jeunes liés plus à l'environnement y sont, mais rien ne vous empêche... Et, dans un contexte comme celui qu'on connaît, ça ne coûte pas cher de juste nous demander, une fois par année, de se réunir autour de vous puis de vous dire où on en est, puis de vous donner un avis. Ensuite, vous en faites ce que bon vous semble, mais, une fois par année, au moins on sent qu'on nous demande notre expertise.

Le Président (M. Reid) : Merci. Je passe la parole maintenant au député de Mégantic.

M. Bolduc (Mégantic) : Merci, M. le Président. J'aimerais vous entendre. Dans la nouvelle stratégie qu'on est en train d'élaborer sur le développement durable, on parle des gaz à effet de serre, mais jusqu'où vous pensez... ou comment vous voyez qu'on pourrait l'appliquer? Parce qu'essentiellement cette stratégie s'applique aux ministères et organismes. Vous avez parlé, entre autres, des MRC, là, de la CRE, etc., là, mais jusqu'où vous croyez que le gouvernement, à l'intérieur des cinq prochaines années... jusqu'où on devrait s'étendre dans la société? À la limite, on pourrait forcer le consommateur à faire du compostage, comme vous le mentionnez, là. Mais je voudrais juste vous entendre, comment vous voyez la stratégie de développement durable s'appliquer et s'étendre, puis quels seraient les secteurs qu'on devrait prioriser selon votre point de vue à vous autres?

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : Je ne vous cacherai pas que pour... Bon, on ne peut pas dire : Les jeunes pensent, là... Je vais déjà mettre ça au clair, là, les jeunes, c'est comme n'importe quel autre groupe d'âge, là, il y a de toutes les opinions qui s'y retrouvent. Par contre, je pense qu'on observe quand même dans la jeunesse une certaine inquiétude par rapport à toutes ces questions-là de développement durable, de changements climatiques, et cette inquiétude-là, elle est aussi accompagnée par le fait que c'est des valeurs qui sont intégrées, en général, par la jeunesse qui les porte et qui, parfois, se surprend de voir la lenteur de la mise en oeuvre des changements. On aimerait voir le tout aller plus vite.

Par contre, avant d'imposer à l'ensemble de la société civile des façons de faire, on pense que, d'abord, la vision doit émaner du gouvernement. Ça, c'est clair, évidemment. Mais ensuite, au-delà de la vision, le gouvernement doit agir. Avant, tu sais... Bon, le traditionnel «il faut que les bottines suivent les babines», ça nous parle beaucoup, puis je pense que ça parle beaucoup aux jeunes en général. Avant de me demander de faire quelque chose, peux-tu mettre toi-même en oeuvre ce que tu me demandes? Ça fait que ça serait une des pistes de réponse que je vous donnerais. Puis, bon, style compostage, on peut parler des consignes des bouteilles, ou etc. C'est des débats qu'on a depuis longtemps, puis que, parfois, on peut se questionner sur les raisons qui font que ça tarde tant à être mis en oeuvre.

M. Talbot (François) : Tu sais, je vous dirais, je rajouterais, avec les jeunes, il y a une forme de... certains jeunes sont un peu sans pitié, dans le sens où on se présente l'autre jour au Secrétariat à la jeunesse, et il y a des gobelets en styromousse. Et on a beau faire ce qu'on voudra après, tu sais, on est foutus. Et ils disent : Bien là, qu'est-ce que vous faites? Il y a des gobelets en styromousse, il y a des bouteilles d'eau. On n'en a pas ici, c'est bien. Donc, tu sais, je vous dirais, il y a un rôle... Mais je suis content de voir qu'elle est adressée au ministère. Je pense qu'il faut continuer à travailler pour que vous soyez un exemple parce qu'ensuite, nous autres, c'est pas mal plus facile de demander aux gens de changer leurs pratiques quand celui qui le demande l'a fait. C'est très questionnant de se demander combien de temps il faut que vous passiez à forcer le réseau de la santé, le réseau municipal et le réseau scolaire à adopter des bonnes pratiques. Je ne sais pas combien de temps le gouvernement prendrait, je pense que c'est un chantier.

Mais ce qu'on vous dit, c'est que nous, le Secrétariat à la jeunesse, avec qui on travaille, ne nous force pas à avoir des pratiques de développement durable, il devrait le faire, tu sais. Je ne dis pas qu'il devrait nous forcer, mais il devrait nous inciter et il devrait souligner le fait qu'on le fasse. Il faut donc travailler là où il peut y avoir des résistances — je ne dis pas qu'il y a des résistances dans les trois réseaux majeurs de l'État — mais il faut travailler aussi avec les volontaires et souligner ça pour qu'eux autres, ensuite, créent un effet boule de neige. Et, lorsque, dans les pratiques des forums, on voit qu'il y a de l'investissement qui suit les pratiques du DD, bien, je pense que je m'attendrais à ce que l'État me sollicite, dise : Bien, on va se servir de vous pour en convaincre d'autres.

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : Parce que, si je peux, tout simplement, compléter, quand on vous parle des grilles d'analyse des projets financés par le Fonds régional d'investissement jeunesse qui sont basés sur le développement durable, ça veut dire que les critères que les forums jeunesse utilisent et imposent à leurs promoteurs pour les financer, c'est qu'ils répondent à des critères de développement durable. Ça fait que ça, déjà, ça force un peu le mouvement plus rapidement autour.

Le Président (M. Reid) : Oui, merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions du côté du bloc gouvernemental? M. le député de Dubuc.

M. Simard : Oui. Merci, M. le Président. D'abord, merci pour vos interventions. Je pense qu'elles sont très, très intéressantes. On est tous préoccupés par notre jeunesse, par l'idée que notre jeunesse a... et puis vous êtes un exemple là-dessus.

Maintenant, je vous entendais tout à l'heure, même à la lecture de votre mémoire, vous dites à l'intérieur de votre mémoire — dans mes mots, là — que le gouvernement, oui, par rapport à sa stratégie, il est important, mais... c'est un leader, mais ce n'est pas là que ça doit arrêter. Vous dites... Oui, vous donnez des exemples, mais vous avez parlé tout à l'heure que, nécessairement, il ne faut pas penser strictement aux grandes villes, il faut penser aussi aux régions, et là où nécessairement... Vous parliez du transport en commun, on peut bien prendre l'autobus, mais, quand il n'y en a pas, on ne peut pas la prendre. Ça fait que...

Maintenant, vous dites également dans votre mémoire que les moyens doivent appartenir au milieu. J'aimerais vous entendre là-dessus, quel genre de... Vous avez parlé tout à l'heure que, même au niveau du forum jeunesse, que vous n'avez pas nécessairement le réflexe, lorsque vous avez des réunions, d'avoir ce qu'il faut au niveau environnemental. J'aimerais comprendre mieux quel genre de moyens vous proposez pour qu'on soit nécessairement à l'écoute. Des moyens qui sont peut-être novateurs ou encore des moyens qui sont à inventer, je ne le sais pas, mais j'aimerais vous entendre là-dessus, quel genre de moyens vous proposez pour qu'on soit à l'écoute de ce qui va se passer dans les différentes régions du Québec.

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : D'abord, une petite correction.

Le Président (M. Reid) : Une minute.

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : Une petite correction rapide. Ce n'est pas au forum jeunesse qu'on avait des verres en styromousse, c'était au Secrétariat à la jeunesse. Il y a une nuance importante. Mais, pour le reste, François, je te laisserais aller, tu avais l'air d'être prêt.

M. Talbot (François) : Bien, tu sais...

Une voix : ...

M. Talbot (François) : Appelez-les pas cet après-midi, là, on va recevoir un coup de fil. Non, mais, quand on dit de laisser les moyens aux milieux, c'est vraiment... Tu sais, si je vous donne l'exemple du Fonds régional d'investissement jeunesse, qu'on gère — comment je vous dirais? — c'est qu'il faut que les milieux, dans ce cas-ci, les régions administratives puissent avoir un levier financier et dire : Si nous, on décide que la priorité... Puis on le voyait en recensant les projets, c'est la protection des cours d'eau, la sensibilisation à la protection des cours d'eau. Notamment, sur la Côte-Nord, on voit ça souvent, et donc eux peuvent investir là-dessus, même si le gouvernement dit : Nous, présentement, ce qui est la majeure, c'est... ça peut être le transport actif et collectif. Donc, en donnant cette initiative-là au milieu, ça lui permet d'adapter sa réponse, de ne pas avoir l'impression, des fois, que les décisions gouvernementales le concernent moins.

Et ce qu'on disait aussi, c'est que, quand le milieu fait cet investissement-là, quand il crée le projet, on disait : Les gens qui... Et, on l'a vu encore une fois, les gens qui s'assoient autour de la table, qui conçoivent le projet ensemble, ils deviennent des convaincus. Puis, on nous disait, même, des fois il y a des directions générales de ministère qui se sont jointes à des concertations, qui, au début, disaient : Bien, je vais y aller parce que... mais, au fur et à mesure, à un moment donné, ça devient des convaincus, ça devient des gens qui portent ça. Donc, vous créez des ambassadeurs en permettant au milieu...

Le Président (M. Reid) : Merci.

M. Talbot (François) : Puis ça ne coûte pas très cher, fondamentalement, là.

Le Président (M. Reid) : Merci, M. Talbot. Je passe maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle, M. le député de Jonquière.

• (10 h 50) •

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme Cabirol, M. Talbot. Merci d'être ici. Moi aussi, je veux joindre ma voix aux collègues qui ont souligné votre travail. Vous me permettrez d'être un peu chauvin, là, quand je vais dans la compilation des projets locaux et régionaux, à la page 20, il y en a deux que je connais personnellement, là, La patrouille Eurêko! et Ma Ville en cocktail transport, du centre alternatif et de développement des transports, là, le CADUS, à Saguenay. Particulièrement, la patrouille Eurêko! Ils sont même venus chez moi pour caractériser les algues bleu-vert, le risque d'algues bleu-vert. Alors, je témoigne... Il va falloir qu'on soit vigilants, M. le ministre. Je vais vous en reparler, je ne veux pas faire de cas de comté ici, là. C'est dans le comté de Dubuc, d'ailleurs. Alors, je vais parler à mon député. Et donc, voilà, c'est... Ce que je veux dire, c'est que je veux témoigner des résultats très concrets, là, de votre travail, de vos interventions.

Maintenant, je veux vous amener tout de suite sur un point, en tout cas, que moi, j'ai trouvé quand même assez fort de votre mémoire, qui se dégage un peu plus, à mon sens, qui amène votre caractère particulier, là, dans les présentations qu'on a eues jusqu'à maintenant, c'est sur la question de la participation citoyenne, la question de l'information également. À la page 9, vous détaillez cela un peu plus, entre autres sur l'adoption d'approches de participation publique lors de l'établissement et la mise en oeuvre de politiques et de mesures gouvernementales. Moi, d'ailleurs, je pense que, dans les principes de développement durable, la question de l'accès à l'information est carrément un des principes de développement durable. On ne peut pas faire du développement durable si on n'est pas informé. Et là vous faites une liste de six éléments qui vous tiennent particulièrement à coeur, dont le 3 et le 5, là. «L'information nécessaire à une contribution significative doit être accessible facilement et dans des délais raisonnables.» Et le point 5 : «La participation publique doit se faire dans un climat propice à l'échange et à la compréhension.»

Êtes-vous capables de nous exprimer un peu plus ce que vous entendez par là, surtout d'un point de vue d'accès à l'information? Est-ce que vous êtes en mesure de constater des retards ou des problèmes sur l'accès à l'information sur un certain nombre de dossiers ou de projets en lien avec l'environnement? Et est-ce que vous trouvez que, dans le fond, la stratégie de développement durable que nous avons devant nous pourrait aller plus loin à cet égard?

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : L'accès à l'information... Puis, encore là, on ne généralisera pas, mais, pour les jeunes, c'est aussi quelque chose qui semble pratiquement acquis, comme un droit. On est nés dans une aire de droit à l'accès à l'information puis on travaille avec les nouvelles technologies de façon à... on s'attend à accéder à toute l'information qu'on cherche en quelques clics. Donc, effectivement, c'est quelque chose qu'on considère important, puis qui est important dans cet enjeu-là. D'ailleurs, les forums jeunesse, quand ils en ont l'occasion, plaident pour un gouvernement ouvert, des données ouvertes en général. Eux-mêmes, les forums jeunesse, dans l'optique de donner l'exemple, travaillent à dévoiler leurs données autant que possible, les géolocaliser pour que les gens puissent s'en servir.

Il y a tout l'enjeu face à l'information de, oui, en divulguer, mais ne pas ensevelir l'information parce que c'est une autre façon de ne pas donner accès à l'information, c'est d'en donner trop ou de la donner de façon désorganisée, ce qui fait qu'une personne ordinaire ne peut pas se l'approprier. Donc, il y a tout l'enjeu de la formation ou de l'accompagnement qui demande du temps. Dans des exercices de participation publique, on ne peut pas simplement dire : Voici une pile de documents, et vous viendrez nous voir vendredi soir à tel endroit devant un micro, et vous nous donnerez votre avis. Ce n'est pas comme ça qu'on va permettre aux citoyens d'avoir une réelle emprise sur ce qui se passe autour d'eux, donc de faire de la participation publique selon les termes qu'on entend.

Donc, avec les éléments qu'on mentionne là, le délai, le climat propice, c'est des clés. Les clés pour assurer une participation publique, c'est aussi, en fait, de souhaiter réellement entendre les gens qui sont là, et souhaiter leur donner du pouvoir sur les résultats, et leur transmettre par la suite les résultats sur lesquels ils ont une influence. Donc, tout ça est un paquet qui est important pour en arriver à un résultat qui soit mobilisant puis qui permette aux citoyens d'avoir une réelle emprise sur ce qui se passe autour d'eux.

M. Talbot (François) : En deux mots, tu sais, je pense que le Québec a une opportunité... Puis c'est moins le coeur de la stratégie de dd, mais le Québec a une opportunité de devenir un leader dans la question de la consultation des citoyens. Ça va être un des enjeux du XXIe siècle avec l'accessibilité des données. Ça vient d'un guide qu'on a produit sur la participation citoyenne, qu'on a remis au MDDEP. Encore une fois — à l'époque là — encore une fois, des fois, l'État, qui est aveugle à lui-même. On a remis un guide qui avait été financé par des fonds publics, mais, tu sais, qui n'était jamais retourné vers l'État. Donc, ça vient un peu de notre théorie... Moi, je vous dirais... Vous me demandez un exemple, là, le principe — et tous partis confondus — chers parlementaires, des commissions parlementaires, là, ce n'est pas facile. On était en train d'écrire trois mémoires simultanément la semaine dernière, d'absorber 200, 300 pages de briques, de documents, puis d'essayer d'aller consulter nos membres en région pour qu'eux consultent les jeunes qui sont membres de leurs C.A.

Donc, tu sais, collectivement, un jour, si vous nous invitez, là, on pourrait s'asseoir puis en parler, mais il faut conjuguer vos nécessités législatives de parlementaires d'avoir l'avis des groupes puis les nécessités, nous autres, où... On n'y arrive simplement pas, là. Puis ce n'est pas pour mal faire, là, je suis certain.

Une voix : ...

M. Talbot (François) : Genre...

M. Gaudreault : J'aimerais...

M. Talbot (François) : Comme le comité sur les comités, là?

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : Bien, allons plus loin que ça, on pourrait éventuellement voir le gouvernement se doter d'un bureau de consultation publique, par exemple, un peu comme... C'est ça, la page 10, on en vient, on sait qu'il y a eu plusieurs démarches de consultation publique qui ont été entreprises par le gouvernement dans les dernières années avec différentes formules, Web, tournées du Québec ou peu importe, consultation des groupes souvent sous-traitée à l'externe, puis on pense que l'expertise, elle est déjà là. Elle peut encore être bonifiée davantage, mais surtout davantage utilisée pour se donner le temps de se consulter pour la peine.

M. Gaudreault : Oui. Bien, justement, c'est là que je voulais vous amener, là, parce qu'à la page 10 vous parlez d'un organe indépendant chargé d'effectuer des démarches de consultation pour les différents ministères et organismes, un peu sur le modèle du bureau de consultation publique de Montréal ou du BAPE. Mais le BAPE est spécifiquement sur des dossiers environnementaux, évidemment. Donc là, vous faites cette proposition-là, est-ce que vous allez jusqu'à dire qu'il faudrait que cette proposition-là se retrouve nommément dans la stratégie?

Parce que je vous réfère à la stratégie de développement durable, à la page 31, l'objectif 1.3, qui est libellé comme étant : «Favoriser l'adoption d'approches de participation publique lors de l'établissement et de la mise en oeuvre de politiques et de mesures gouvernementales.» Et là, de façon un peu large, le gouvernement dit : «Plus particulièrement, on vise à accroître l'utilisation de moyens qui encouragent et facilitent la consultation et la participation des citoyens et des parties prenantes.» Bon, est-ce que vous trouvez que la stratégie de développement durable proposée par le gouvernement pourrait, carrément, se positionner sur une démarche de consultation un peu sur le modèle du bureau de consultation publique de Montréal?

M. Talbot (François) : Je pense que ça serait intéressant. Ça dépend de la volonté du gouvernement de pousser ça comme un enjeu à ce moment-ci à travers le reste, mais, tu sais, si vous me permettez le parallèle, qui, peut-être, sera douteux, là, mais on a récemment centralisé les équipes de com de différents ministères en disant : La com se fait, des fois, dans différents sens, puis il faut que tout ce monde-là travaille ensemble pour aller dans le même sens. La consultation se fait dans différents ministères, puis, à chaque fois, on se doit de réinventer la roue sur comment on va consulter, qui on va consulter. Le ministère, en 2013, quand on a été consultés, super belle pratique. Les gens qui étaient là ont formé des sous-groupes, on a tenté de susciter des avis divergents. Je vais dans un autre ministère des fois, ce n'est pas du tout la même chose, on consulte en grands groupes, en posant une question avec un micro ouvert. Si c'est un choix que le gouvernement fait, est-ce que c'est le bon lieu pour le mettre? Mais ça fait un bout de temps qu'on en parle, et ça placerait le Québec à l'avant-garde, c'est sûr et certain, si on va vers là, c'est la démocratie participative, qu'on voit martelée depuis des années, là.

M. Gaudreault : O.K. En tout cas, j'entends que, pour vous aussi, l'accès à l'information... Je comprends que vous n'êtes pas nécessairement un groupe qui faites des demandes d'accès à l'information, par exemple, au ministère de l'Environnement, parce que vous n'êtes pas un groupe spécifiquement dédié à l'environnement. Mais, sur le principe de l'accès à l'information, je veux dire, accessible facilement, dans des délais raisonnables, si je prends votre expression à la page 9, pour vous, ça, c'est des principes qui doivent nécessairement se retrouver dans la stratégie. O.K.

Est-ce qu'il me reste un peu de temps encore?

Le Président (M. Reid) : 30 secondes.

M. Gaudreault : Bon, bien, écoutez, 30 secondes pour vous remercier. Continuez de faire votre excellent travail. Votre présence dans les régions est, évidemment, extrêmement importante.

Le Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous passons maintenant au bloc du deuxième groupe d'opposition. M. le député de Groulx.

• (11 heures) •

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Alors, je me joins à mes collègues pour vous féliciter de vos succès. Alors, je constate que les jeunes, donc, évidemment, tout le monde en convient, veulent être entendus. Alors, dans votre mémoire, à la page 8, vous faites état d'une étude menée auprès d'élèves au collégial qui a démontré que les gestes d'engagement les plus populaires sont ceux concernant l'environnement, et loin devant le bénévolat ou l'engagement politique. C'est dommage. À titre d'exemple.

Alors, vous dites plus bas également que vous verriez bien que soit inclus au réseau des officiers et officières du développement durable des leaders régionaux. Évidemment, vous faites donc allusion à des jeunes qui pourraient appuyer et conseiller le gouvernement. Alors, le réseau des officiers et officières du développement durable, à la page 71 de la stratégie, alors, ce sont des représentants de différents organismes du gouvernement et puis, donc, des fonctionnaires qui vont collaborer et échanger pour améliorer la démarche gouvernementale au niveau du développement durable. Alors, ma question, je comprends que la stratégie du gouvernement... Et on ne parle pas d'une clause d'impact des jeunes, mais comment vous verriez l'inclusion de jeunes dans un organisme qui, actuellement, ne concerne que des employés du gouvernement?

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : C'est certain que... Je n'ai pas en tête, là, les données du nombre de jeunes dans la fonction publique, mais...

M. Talbot (François) : Précisément, sur ce thème-là, il y a dans la fonction publique actuellement... vous avez des répondants jeunesse dans les différents ministères puis vous avez le Forum des jeunes de la fonction publique qui existe. Donc, vous avez déjà différents outils qui vous permettent d'aller chercher des jeunes même à travers... lorsqu'on s'adresse à la fonction publique elle-même.

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : Moi, j'allais simplement vous mentionner qu'il y a, effectivement, des jeunes dans la fonction publique, puis leur permettre de prendre part... même si leur pourcentage n'est pas très élevé, là, leur permettre de prendre part à ces réflexions-là, c'est à la fois créer de la compétence pour l'avenir auprès de ces jeunes-là qui deviennent de plus en plus compétents à s'exprimer sur les questions et qui deviennent des leaders dans leur milieu, mais c'est aussi utiliser la compétence que les jeunes possèdent déjà sur ces questions-là, puisque, comme je vous disais, ils baignent dedans depuis très longtemps, puis on pourrait être surpris de tout ce qu'ils ont à apporter à ces questions-là.

Notamment, ils baignent dedans parce qu'ils s'impliquent en environnement. Comme vous le souligniez puis qui est mentionné dans notre mémoire, l'environnement est un pôle d'attraction de la participation citoyenne chez les jeunes, c'est souvent un des premiers gestes citoyens qui peut être posé, c'en est un envers l'environnement. Notre cadre de participation citoyenne nous dit que généralement, quand on met le pied dans l'engrenage de la participation citoyenne, éventuellement on arrive à en faire de plus en plus et, éventuellement, à s'intéresser à la politique. Donc, on partage votre souci que ça mène à éventuellement davantage de participation citoyenne et politique. Mais, effectivement, l'environnement, c'est un souci que les jeunes partagent. Et ils ont une compétence, il faut aller la chercher dans les mécanismes précis. Bon, François en a nommé. On a ciblé cet élément-là parce que c'est un élément qui ciblait des gens, des leaders dans les communautés, mais il y a moyen de poursuivre le dialogue sur cette question-là, puis notamment avec les gens de la fonction publique également qui pourraient probablement vous donner quelques pistes de réflexion sur le sujet.

M. Surprenant : Est-ce qu'on pourrait penser que vous pourriez même suggérer que, dans ce réseau des officiers, qu'il y ait des clauses d'inclusion de jeunes, que ce soit formellement inscrit que des jeunes soient bien représentés?

Mme Cabirol (Élise-Ariane) : On touche à une question délicate qui est celle des quotas. Parce qu'on se la fait poser parfois sur la plupart des lieux. On plaide pour une plus grande place des jeunes dans les lieux décisionnels et consultatifs, on se fait poser la question : Doit-il y avoir des sièges réservés, des quotas de jeunes? Il n'y a pas de réponse facile à cette question-là. Certains vont dire que c'est une façon de faire bouger les choses plus rapidement, d'autres qu'il faut plutôt changer les façons de faire puis avoir une sensibilité pour aller recruter des jeunes.

M. Talbot (François) : C'est ça. De la même façon, qu'on se demande si ce comité-là aura à la fois des hommes et des femmes pour présenter les deux côtés, c'est d'assurer une certaine forme de... Puis, de l'autre côté, ils sont en train de parler d'immigration et de diversité, c'est de s'assurer que notre comité, il représente les diverses réalités qui sont présentes au sein de la fonction publique.

M. Surprenant : On pourrait peut-être inclure, finalement, que le comité soit représentatif, finalement, des différents...

M. Talbot (François) : Oui, ce serait bien.

M. Surprenant : D'accord. Alors, une autre petite question, au niveau de la scolarité. Alors, dans la stratégie 2008-2013, accroître la scolarité, et le taux de diplomation, et la qualification de la population constituait le 27e et dernier objectif. Alors, dans la stratégie révisée, il n'y figure pas. Alors, que pensez-vous de cela, la scolarité?

M. Talbot (François) : Le fait d'accroître la scolarité dans les questions d'environnement et de développement durable?

M. Surprenant : Effectivement, oui.

M. Talbot (François) : C'est une fort bonne question, on n'avait pas vu cet élément-là particulièrement. Je vous dirais, c'est une question qui est importante en quelque part. La stratégie, en même temps, il faudrait voir du côté gouvernemental pourquoi ça n'a pas été mis parce qu'on voit qu'elle ratisse très large. La présidente le disait d'entrée de jeu, on va toucher à la fois à des questions de culture, de lutte aux inégalités. C'est sûr que la question de la persévérance scolaire est une question importante. Est-ce que cette stratégie-là est le véhicule pour la promouvoir? Là, là-dessus, ma compétence s'arrête un peu plus. Mais ce qu'on sait, par exemple, c'est que les jeunes qui vont dans les milieux d'enseignement, nous, quand on regarde les projets, ce sont des milieux extrêmement riches pour la capacité d'intervenir sur la culture du développement durable chez les jeunes.

Donc, à quelque part, par ricochet, il faut que les jeunes aient accès à ce milieu-là, il faut que les jeunes profitent de leur parcours scolaire pour qu'on puisse les teinter aussi de ça. Et, à quelque part, on se doute que les comportements qu'ils vont adopter par la suite vont être plus collés sur le développement durable en fonction, là, je dirais, du parcours de scolarisation qu'ils auront eu, là.

Le Président (M. Reid) : Ça va? Alors, je vous remercie pour votre intervention. Et, en fait, si je peux ajouter quelque chose, je voudrais vous féliciter pour cette intervention. Je pense que la qualité de votre présentation et la qualité de vos interventions, qui nous donnent une bonne image de ce que les jeunes Québécois et les jeunes Québécoises pensent et ce qu'ils veulent, c'est très rassurant pour nous, pour tout le monde, pour l'avenir du Québec. Merci beaucoup pour votre présentation.

Je suspends les travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 11 h 6)

(Reprise à 11 h 7)

Le Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants du Conseil patronal de l'environnement du Québec, des gens qui sont habitués, je pense, à la commission. Et, vous savez, je vous le rappelle, vous avez 10 minutes pour faire la présentation. Je vais vous donner un signal quand il restera une minute. Vous présentez la personne qui vous accompagne et vous vous présentez, bien sûr, et nous allons procéder après ces 10 minutes à une période d'échange de 35 minutes avec les membres de la commission. Alors, à vous la parole.

Conseil patronal de l'environnement du Québec (CPEQ)

Mme Lauzon (Hélène) : Merci, M. le Président. Bonjour, M. le ministre. Bonjour, Mme et MM. les parlementaires. Je vous remercie de cette invitation pour nous permettre de formuler nos commentaires aujourd'hui. Je suis accompagnée de M. Mustapha Ouyed, qui est ingénieur. Il est directeur du développement des affaires chez Golder et associés.

Alors donc, d'entrée de jeu, je voudrais... Bien sûr, le conseil patronal, pour les parlementaires qui ne le connaissent pas, rapidement, c'est une organisation qui existe depuis 1992, qui représente le secteur d'affaires du Québec pour toutes les questions d'environnement et de développement durable. Ça combine 280 000 emplois et des revenus affichés de 45 milliards. C'est un organisme qu'on peut dire est le fer de lance du développement durable au sein de l'industrie. Nous avons préconisé beaucoup de pratiques en développement durable au fil des années. Nous avons même publié des guides pour accompagner nos entreprises en développement durable.

Donc, bien sûr, nous pouvons saluer cette initiative d'aujourd'hui. Là où on a encore des questionnements, où on doit encore comprendre la réalité, c'est la dimension sociale du développement durable pour les entreprises, et, en ce sens-là, aujourd'hui, on aura des commentaires sur la nécessité d'un vocabulaire commun, tous, dans la société, qu'on puisse s'entendre sur ce que c'est, entre autres, la dimension sociale, qu'est-ce qu'elle contient. Mais pas seulement la dimension sociale, mais il y a des termes qu'on retrouve dans la stratégie, que ce soit l'économie circulaire, que ce soit l'écologie industrielle, auxquels on réfère dans notre mémoire, il serait important qu'on ait tous la même compréhension au sein de la société.

Donc, oui, c'est un nouveau cadre pour l'administration publique, mais on comprend qu'avec ce cadre vous souhaitez enclencher un virage au sein de la société aussi, un virage avec des actions importantes en développement durable, et, bien sûr, on va soutenir le gouvernement sur cette question. Ce qui est important, c'est que c'est une stratégie 2015-2020. C'est très court lorsqu'on y pense. Il y aura donc des priorités à formuler, et ces priorités devront être celles de citoyens responsables, entreprises responsables, développement responsable, et j'y reviendrai aussi.

• (11 h 10) •

Nous voulons attirer votre attention sur le fait qu'il s'agit d'une stratégie parmi plusieurs autres politiques gouvernementales sur lesquelles le gouvernement doit travailler ou a déjà commencé à travailler, et il nous importe que cette stratégie s'inscrive dans la cohérence de l'ensemble de ces politiques. Et, entre autres, nous pouvons penser à la politique énergétique, qui, comme vous le savez, doit être rendue publique avant la fin de l'année, et il y a plusieurs éléments que l'on retrouve dans votre stratégie qui, éventuellement, devront s'arrimer avec votre politique énergétique, ce qui est un défi pour vous puisque, votre stratégie, j'imagine que vous allez vouloir la publier au printemps, alors que la politique énergétique sera connue à la fin de l'année. Donc, un souci de cohérence que nous avons.

Je voulais attirer votre attention sur la notion de vision que l'on retrouve dans la stratégie. Lorsqu'on regarde la loi, la Loi sur le développement durable préconise des activités de développement en prenant en compte les trois dimensions de développement durable. Lorsqu'on regarde la stratégie, la vision de la stratégie, on ne parle plus de développement, mais de dynamisme économique, comme s'il y avait une frilosité à utiliser le terme «développement». Or, le ministère du Développement durable, dans son nom, on le sait, est un ministère de développement aussi, et non pas seulement de conservation et de protection de l'environnement. Alors, comme je vous disais d'emblée, il est important qu'on ait tous la même compréhension du vocabulaire. Si on parle de développement dans la loi, pourquoi ne pas reprendre «développement» aussi dans la vision de la stratégie? Et je vous dirais que ce terme, «développement», il semble qu'il y ait cette frilosité un peu partout dans le document, où on aurait peut-être pu utiliser à certains endroits le terme «développement» — et j'y reviendrai — et on utilise d'autres termes.

Le renforcement de la gouvernance, nous y croyons pour qu'il permette à l'ensemble de l'État d'intégrer les trois dimensions de développement durable. Et cette façon de faire permettra aux citoyens, à l'ensemble de la population de comprendre ce virage et aussi d'éventuellement permettre l'acceptabilité sociale des projets, puisque, si l'ensemble de l'État intègre ces trois dimensions, il sera plus facile par la suite de faire de la sensibilisation, de la formation dans l'ensemble de la société et d'arriver, espérons-le, à l'acceptabilité sociale des projets qui sont nécessaires pour le développement de notre économie, comme vous le savez.

Je voulais aussi attirer votre attention sur les indicateurs, puisqu'une fois la mise en oeuvre de cette stratégie réalisée il y aura des indicateurs que nous devrons mettre en place. Et, ces indicateurs, il serait pertinent de les adopter le plus rapidement possible, bien sûr, mais qu'ils s'alignent sur les indicateurs que l'on retrouve aussi dans l'industrie, que l'on retrouve ailleurs, pour permettre au gouvernement de se comparer avec ce qui se fait ailleurs, mais également au sein de l'industrie. L'industrie est un exemple, je dirais, remarquable dans l'intégration des mesures de reddition de comptes et d'indicateurs de développement durable. Donc, il pourrait être intéressant de collaborer avec nous, et nous vous offrons notre collaboration pour y participer.

Un des enjeux que nous avons notés, c'est l'intégration de la culture. Et l'intégration de la culture, ça nous apparaît un peu confus. On passe de la question de l'identité à la question du développement économique dans la culture, à l'utilisation des ressources naturelles de façon responsable. Bravo, développement économique! Nous en sommes, mais qu'est-ce que ça veut dire exactement, la culture? Est-ce que c'est la culture des individus? La culture de la société? La culture des entreprises? Comment cette notion de culture percolera-t-elle dans l'industrie, puisque cette stratégie, comme vous le savez, est une stratégie qui s'appliquera à l'appareil gouvernemental, mais nécessairement les industries devront s'adapter, puisque le gouvernement aura de nombreuses nouvelles exigences? Et, si une de ces exigences est d'intégrer la culture, bien, il va falloir préciser ce que ça veut dire pour une entreprise, par exemple, puisque, pour l'instant, pour nous, cette notion nous apparaît embrasser beaucoup trop large.

Dans les orientations, on peut féliciter, bien sûr, les orientations, quant à nous... celles qui nous touchent de plus près, les orientations 2, 3 et 8, c'est-à-dire prospérité de façon durable, assurer une prospérité durable, ensuite gérer les ressources de façon responsable en respectant la biodiversité. Voilà un autre endroit où on a peur d'utiliser «développement des ressources», gérer les ressources. Et pourquoi ne pas développer les ressources en protégeant la biodiversité? Alors, voilà un autre commentaire que je vous soumettrais.

Dans ce contexte de l'économie, de revoir les modèles d'affaires, nous vous félicitons, nous sommes d'accord avec ce que vous préconisez. Nous souhaitons y participer. Nous avons, avec la contribution du Fonds vert, réalisé une tournée à travers le Québec sur l'écologie industrielle, qui est un nouveau modèle d'affaires. Et vous le réaffirmez, qu'il s'agit de favoriser au sein de votre stratégie le développement de modèles d'affaires de l'écologie industrielle, et bravo! puisque nous pensons que c'est une nouvelle façon de travailler. Pour ceux d'entre vous qui connaissez moins l'écologie industrielle, c'est la possibilité de réutiliser des matières résiduelles des uns pour les matières premières des autres ou l'énergie. Donc, c'est une façon de mettre moins de pression, entre autres, sur les ressources, bien entendu, mais aussi de diminuer les émissions de gaz à effet de serre, d'éviter les enfouissements, et autres.

Et je terminerais ma présentation avec la partie qui concerne l'objectif gouvernemental de s'assurer que 30 % des entreprises du Québec aient implanté une démarche de développement durable d'ici 2020. Dans la précédente — ou encore celle qui est toujours en vigueur — stratégie, le pourcentage qui était prévu, c'était 20 %. Par contre, la façon que le gouvernement a d'évaluer si une entreprise s'est dotée d'une stratégie de développement durable reste encore un peu confuse et plutôt limitative. Parfois, on se demande si un seul critère est atteint pour savoir si une entreprise s'est dotée d'une démarche de développement durable.

Nous souhaiterions qu'il y ait des critères beaucoup plus exhaustifs pour déterminer ce qu'est une démarche de développement durable, et, dans la prise en compte par le gouvernement des critères de développement durable, il y ait la notion de prise en compte, et est-ce que vous voulez vraiment maintenir la prise en compte ou si vous voulez aller un pas plus loin avec l'intégration des critères de développement durable. C'est une différence. Avec la prise en compte, on peut prendre en compte sans vraiment intégrer. Avec intégrer, on peut aller plus loin. Par contre, je sais que vous pourrez me répondre : La loi prévoit la prise en compte. Nous sommes un peu liés avec la loi, nous pouvons... Mais je pense que vous pourriez aussi aller plus loin avec l'intégration des principes de développement durable par l'administration publique, et non seulement la prise en compte. J'ai terminé, je vous remercie.

Le Président (M. Reid) : Merci beaucoup. Je passe maintenant la parole au ministre.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, Me Lauzon, monsieur. Merci pour votre mémoire très intéressant. D'abord, je voudrais commencer par vous remercier, Me Lauzon, de un, souligner quand même votre travail à la coprésidence du Comité-conseil sur les changements climatiques. Très apprécié, d'ailleurs, que vous soyez là et que la voix, justement, du CPEQ soit entendue dans cette démarche très importante du gouvernement. Et j'étais intéressé de vous entendre parler de cohérence et de définition de termes. Vous n'êtes pas sans savoir que la lutte contre les changements climatiques est la pierre angulaire de l'action gouvernementale, particulièrement en matière environnementale, mais également à travers toutes les actions du gouvernement.

Et ma première question, ça serait de voir... Parce que le CPEQ fait énormément de travail sur la question des changements climatiques, ce serait de vous entendre sur l'importance que le développement durable et la lutte contre les changements climatiques soient complètement intégrés et qu'il y ait véritablement... Si on parle de cohérence d'action, si on parle de cohérence en matière de définitions, évidemment je n'ai pas l'ambition de redéfinir le terme «développement durable». Ça prendrait, je crois, les Nations unies et des années de travail. Mais est-ce que ça ne serait pas important, pour avoir une stratégie de développement durable cohérente, que la notion de développement durable soit clairement intégrée et que les actions, notamment quand on parle du pacte 2013-2020, le Fonds vert, soient clairement intégrées dans la stratégie?

Mme Lauzon (Hélène) : Vous avez tout à fait raison, M. le ministre, cette notion, si on souhaite qu'elle soit comprise à travers la population, encore faut-il qu'elle soit intégrée dans la totalité de l'Administration, et ce n'est pas ce que l'on sent en ce moment, et ce n'est pas ce que l'on entend, et ce n'est pas ce que l'on voit. Ce que l'on voit, c'est que votre ministère est un ministère très engagé, très proactif... excusez-moi l'expression, l'anglicisme, mais c'est un ministère qui croit à sa mission, qui croit à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et qui fait le nécessaire pour avancer le dossier. Maintenant, il va falloir que cette réalité soit comprise à travers l'appareil gouvernemental. Et je suis d'accord qu'il faut absolument qu'il y ait une compréhension horizontale, mais une intégration de la stratégie par tous les ministères de façon très claire pour envoyer un signal clair.

• (11 h 20) •

M. Heurtel : Donc, je fais le lien entre ce que vous venez de dire et la recommandation n° 5, quand vous parlez de... Bon, je vais la citer, là : «Le CPEQ recommande au gouvernement d'élaborer l'ensemble de ses politiques et de ses stratégies dans un contexte de transversalité...» Alors donc, si je vous comprends bien, c'est que, bon, un, on doit clairement intégrer les actions du gouvernement en matière de lutte contre les changements climatiques à la stratégie de développement durable, mais également, quand on parle de transversalité... et j'aimerais qu'on aille plus en profondeur là-dessus, vous donner plus de temps pour élaborer plus longuement, mais ce que j'entends, c'est que, la stratégie, on doit être capable de la répercuter et s'assurer qu'il y ait une cohérence aussi en matière d'action gouvernementale. Par exemple... Je vais vous donner un exemple. Vous pouvez m'en donner d'autres si vous en voyez, mais, par exemple — et ça, ça a un lien direct avec vos membres — les politiques, par exemple, d'investissement, de subvention, de partenariat du gouvernement avec le secteur privé devraient être imprégnées, en quelque sorte, d'une espèce de cohérence et s'assurer qu'on n'investit pas dans, par exemple, le développement d'énergies fossiles, alors que, de l'autre côté, on fait tout ce qu'on peut pour limiter notre consommation d'énergies fossiles.

Mme Lauzon (Hélène) : Alors, c'est le dernier bout de votre intervention sur lequel je devrai apporter des nuances, bien entendu, mais je suis d'accord qu'il y a des exemples où des ministères ne semblent pas avoir intégré... Le ministère des Transports, pour ne nommer que celui-ci pour l'instant, est un ministère qui ne semble pas avoir intégré la notion de développement durable dans toute son intégralité et la notion d'émission de gaz à effet de serre. Nous avons des exemples de politiques publiques où nous ne pensons pas que la réalité a été bien comprise.

Maintenant, quand vous dites : On ne devrait pas favoriser le développement d'énergies fossiles, on devrait essayer de réduire, oui, on s'entend tous, hein, on s'entend tous qu'il faut tenter de réduire, de faire une transition vers une économie à faible teneur en carbone, mais j'aime à répéter que les énergies fossiles, les hydrocarbures, pour les nommer, ce n'est pas que l'essence et le gaz, c'est aussi ce que nous portons, c'est aussi les contenants dans lesquels nous buvons, c'est aussi tous les objets que nous utilisons. Donc, il faudra continuer à utiliser les énergies fossiles. Mais, si nous continuons à les exploiter, ce sera, bien sûr, de façon responsable, avec toutes les dimensions du développement durable intégrées et avec la consultation des communautés.

M. Heurtel : Mon point, je comprends ce que vous dites au niveau de l'énergie fossile, puis c'est pour ça, notamment, qu'un des chantiers du Comité-conseil sur les changements climatiques, c'est de développer un plan de transition, comment l'économie québécoise peut passer d'une économie qui, à l'heure actuelle, dépend énormément dans plusieurs aspects — vous en avez décrit quelques-uns — dépend énormément des énergies fossiles à une économie qui, évidemment, est beaucoup plus sobre.

Mon point, c'était plus, quand on parle de cohérence, évidemment l'État, à plusieurs niveaux, que ce soit par le biais d'investissements, de prêts, de subventions, est un partenaire financier important du développement économique dans le secteur privé. Ma question, c'est que, quand on parle, justement, de cohérence d'action, vous parlez du ministère des Transports, il y a une foule d'actions gouvernementales, mais est-ce qu'on comprend également qu'il va falloir aussi, lorsque l'État québécois décide d'investir, décide de prêter, décide de subventionner, il va falloir aussi intégrer dans les critères d'analyse les principes de développement durable et les principes de lutte contre les changements climatiques?

Mme Lauzon (Hélène) : Oui, c'est ma compréhension de la stratégie, M. le ministre. C'est-à-dire que, si nous parlons d'une stratégie gouvernementale, c'est donc dire qu'à partir de maintenant toutes les décisions de l'administration publique seront teintées de ces principes de développement durable. Et, comme vous le dites, cet exemple, que ce soient les critères d'écoconditionnalité, que ce soient les mesures de financement, oui, toutes ces questions devront être intégrées dans la totalité de l'appareil gouvernemental, et nous nous attendons, bien entendu, comme entreprise à ce qu'il y ait des modifications dans ces façons de faire.

Une voix : ...

M. Ouyed (Mustapha) : Oui, si je peux ajouter un petit point, c'est de mentionner que... C'est correct?

Le Président (M. Reid) : Oui, allez-y.

M. Ouyed (Mustapha) : C'est de mentionner que la démarche dont M. le ministre a fait mention est déjà appliquée au niveau des entreprises elles-mêmes. Donc, dans leur processus de décision, de plus en plus on le voit, de nombreuses grosses entreprises industrielles ont des processus décisionnels qui utilisent des grilles d'analyse, et ces grilles d'analyse intègrent les aspects économiques, bien sûr, mais aussi environnementaux et sociaux, de sorte que la prise de décision soit teintée par des considérations de développement durable. Donc, l'industrie est déjà dans ce processus. Donc, je pense qu'elle va définitivement supporter cette approche gouvernementale aussi.

M. Heurtel : Je vais laisser mon temps aux collègues, mais juste avant, sur la question des indicateurs de performance puis la mesure, c'est un point qui a été soulevé régulièrement. Bon, vous l'avez soulevé, d'autres groupes l'ont soulevé, et j'ai l'impression que ça va être soulevé sur une base régulière durant l'ensemble de la consultation. Il y a eu un choix qui a été fait, spécifique d'attendre, justement, le résultat de la consultation avant de présenter des indicateurs de performance pour, justement, intégrer... Parce qu'on sait que le document, c'est un départ, ce n'est pas une fin en soi, on veut vraiment se donner l'espace pour, justement, intégrer le travail de la commission, ce que la société civile a à nous dire sur le document et pour véritablement arriver avec une série d'indicateurs de performance et de mesures qui soient, oui, le reflet de ce qui se fait dans les meilleures pratiques déjà dans la société, mais également qui puisse être véritablement adapté au résultat final. Alors, c'est la raison pour laquelle on n'est pas allé jusqu'à définir en détail des indicateurs de performance.

Le Président (M. Reid) : Vous voulez commenter?

Mme Lauzon (Hélène) : Non, ça va. Merci de la précision.

Le Président (M. Reid) : Alors, nous allons passer la parole maintenant au député de Dubuc.

M. Simard : Merci, M. le Président. Mme Lauzon, M. Ouyed, merci de votre présence. Je trouve ça bien intéressant. Vos propos, de toute façon, m'intéressent grandement. Mais, à la lecture de votre mémoire, vous parlez beaucoup de lexique, de définitions, de cohésion. Maintenant, quelque chose qui m'a fait sursauter un peu, étant donné que je viens du monde municipal, vous indiquez également : Organiser des séances de formation à l'intention des fonctionnaires municipaux afin qu'ils soient sensibilisés aux enjeux du développement durable. J'aimerais que vous expliquiez un petit peu c'est quoi, le fond de votre pensée, pour les gens qui nous écoutent parce que tout le monde reste à quelque part, dans une municipalité. Donc, ça pourrait être intéressant, j'aimerais vous entendre à ce sujet-là.

Mme Lauzon (Hélène) : Oui, je vous remercie. Comme vous le savez, les organismes municipaux, les organismes scolaires ainsi que les organismes du réseau de la santé ne sont pas encore assujettis obligatoirement à la loi, hein, c'est par décret éventuellement que le gouvernement choisira de le faire. Donc, ce que nous avons noté, c'est qu'au sein du monde municipal il y a encore une méconnaissance. Il y a un début, un embryon de sensibilisation, mais nous pensons que, justement, ce niveau de gouvernement est celui qui travaille le plus près des citoyens, et donc il faudrait que ces notions de développement durable soient intégrées là aussi de façon transversale pour qu'on puisse sensibiliser davantage les citoyens lorsqu'ils feront des demandes d'aide à la municipalité. Mais on ne le voit pas encore au niveau municipal abondamment, hein? Je vous dirais que c'est au début, mais il y a encore beaucoup à faire.

M. Simard : Merci beaucoup, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Reid) : Merci. M. le député de Mégantic.

M. Bolduc (Mégantic) : Merci, M. le Président. Bonjour, madame, monsieur. Moi aussi, j'apprécie beaucoup votre mémoire avec des recommandations claires et bien intéressantes. Je voudrais amener votre attention sur les recommandations 6 et 7 qui amènent un peu une nouvelle dimension dans le développement durable, soit celle de l'utilisation plus efficace des solutions de télécommunications et de centres de données responsables. On n'a pas parlé vraiment de tout ça, ça nous amène deux points vraiment intéressants, la réduction des transports et des économies d'énergie qui deviennent de plus en plus substantielles. J'aimerais vous entendre comment vous en arrivez à ça, et quel serait le type d'actions qu'il faudrait intégrer dans le développement durable et les nouvelles stratégies pour utiliser pleinement, je dirais, ces nouveaux outils là.

• (11 h 30) •

Mme Lauzon (Hélène) : Puis je demanderai éventuellement à mon collègue de compléter, mais ce serait peut-être dans la dimension sociale du développement durable. Est-ce que l'appareil gouvernemental, l'administration publique a une pensée sur le télétravail? Il y a une partie de cela dans les télécommunications ou dans la mobilité durable. Donc, il y a cette dimension à laquelle on devrait réfléchir puis aussi, sur toute la question d'énergie, qu'est-ce que l'on fait avec l'ensemble des données. Le gouvernement est un organisme qui génère énormément d'énergie dans sa façon de faire. Donc, il y a des modèles à repenser.

Mais je vais laisser mon collègue, qui a beaucoup d'expérience en énergie aussi, compléter sur cette question.

M. Ouyed (Mustapha) : Exact. Merci beaucoup. Ce que j'ajouterai, c'est revenir à la notion que vous avez parlé tout à l'heure, par rapport aux hydrocarbures, de savoir où est-ce qu'ils sont utilisés. Toutes les formes d'énergie nous permettent une meilleure facilité dans notre travail de tous les jours, pour autant, dans une démarche responsable, qu'on puisse prendre en considération d'où vient cette énergie et comment elle est utilisée. Donc, dans le cadre de la réduction des transports, la prise en compte des nouvelles technologies pour la visioconférence, qui est de plus en plus étendue, permet d'allier aussi bien la réduction des transports, mais aussi le besoin humain, social de se voir, de se parler, d'échanger.

De l'autre aussi, c'est de voir, par rapport à l'utilisation de masse des données, pour peu que ces données, bien sûr, répondent à des critères de sécurisation de certaines d'entre elles qui doivent être peut-être plus placées dans des endroits précis... Mais il y a aussi la notion de nuages qui sont de plus en plus utilisés, où ça permet d'avoir des centres plus concentrés dans des endroits où la consommation de l'énergie va être plus optimale, voire même être verte, comme c'est le cas au Québec actuellement avec des centres de données qui s'installent qui utilisent l'hydroélectricité, qui n'est pas émettrice de gaz à effet de serre, et cela, donc, devient cohérent avec la stratégie globale d'être plus efficace dans un sens de développement durable.

Le Président (M. Reid) : Merci. Maintenant, la députée de Vaudreuil pour 1 min 30 s, à peu près.

Mme Nichols : Je comprends que vous travaillez depuis plusieurs années avec des entreprises qui adoptent, justement, des pratiques écoresponsables puis qui ont des modèles d'affaires aussi écoresponsables. Puis j'écoutais vos réponses un petit peu plus tôt, dans le fond, est-ce qu'on peut en déduire qu'ils ont une longueur d'avance au niveau du développement durable? Puis, si oui, justement, comment on pourrait contribuer à apporter des changements, nous, au point de vue gouvernemental pour créer un environnement propice pour ces changements-là?

Mme Lauzon (Hélène) : Changements au sein... Bon, pour répondre à votre première question, oui, les entreprises avec lesquelles nous travaillons ont une longueur d'avance, elles ont implanté des démarches de développement durable. La grande entreprise est rendue très, très loin, même dans ce qui est de l'intégration de ses méthodes de reddition de comptes, par exemple. Et, comme je le mentionnais, nous sommes prêts à collaborer si jamais on pouvait vous aider. Dans la moyenne entreprise, ça va très bien. Petite entreprise, ouf! il y a beaucoup de travail à faire encore. Et donc qu'est-ce que l'on peut faire, c'est de vous dire : Nous avons identifié et préconisé de bonnes pratiques. Nous pouvons faire du partage d'informations aussi pour éventuellement même faire de la formation, le cas échéant, dans l'Administration, si l'Administration en avait besoin, sur les pratiques que nous préconisons auprès des entreprises pour qu'éventuellement l'Administration puisse aussi les refiler ou les réutiliser.

M. Ouyed (Mustapha) : Si je peux ajouter, il y a un exemple concret avec la norme de développement durable BNQ 21000, qui, dans son implantation, est passée par une période pilote, donc de tests, et l'industrie, les entreprises dont Mme Lauzon faisait référence ont grandement contribué à cette phase pilote en offrant leurs installations pour tester la norme, pour intégrer les notions. Et aujourd'hui plusieurs d'entre elles contribuent encore dans cette démarche-là, et BNQ 21000 est un très bon exemple de collaboration, à mon sens.

Le Président (M. Reid) : Merci. Nous allons passer maintenant au porte-parole de l'opposition officielle. M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, M. Ouyed, Mme Lauzon, en cette commission. Justement, je veux faire un peu de pouce sur ce que vous venez de parler de façon plus large, là, sur la question de faire passer les entreprises à l'application d'une démarche de développement durable. Dans la stratégie, le gouvernement vise l'objectif de 30 % des entreprises privées québécoises pour 2020. Un petit peu plus loin, à la page 36, on dit qu'à la suite de la stratégie actuelle, là, c'est près de 22 % des entreprises québécoises qui ont affirmé avoir adopté des pratiques pour répondre aux enjeux de développement durable. Bon, là, on pourrait lancer une longue discussion sur, justement, les indicateurs. Une entreprise peut se dire : Oui, moi, j'ai appliqué une politique de développement durable. L'autre va dire non, mais, dans le fond, ils ont peut-être les mêmes pratiques, bon, etc.

Moi, j'aimerais vous entendre un petit peu plus sur cet objectif. Au fond, si on prend pour acquis, là, qu'on s'entend sur le développement durable, passer de 22 % à 30 %, donc ça fait une étape de 8 % pour 2020. Est-ce que vous trouvez que c'est réaliste? Et comment on peut davantage, là, préciser les règles? Parce que, tout à l'heure, vous-même, vous avez dit que... Je reprends votre expression, là, vous avez parlé de confus et limitatif, là, dans... il y avait de la confusion, et c'était limitatif dans la façon d'y arriver. Alors, est-ce réaliste? Et je veux vous entendre davantage sur les moyens pour y arriver.

Mme Lauzon (Hélène) : Oui, c'est réaliste. Si on avait vu dans la stratégie qu'on n'y était pas encore arrivé, si nous étions à 15 %, je vous dirais que 30 %, ce n'est pas réaliste, puisqu'on n'aurait pas atteint notre 20 % en date d'aujourd'hui. Maintenant, nous avons dépassé le 20 %, il m'apparaît que 8 % additionnels, ce n'est pas déraisonnable, ce n'est pas excessif. Et 30 %, ce n'est quand même pas important à ce point quand on y pense sur l'ensemble du 100 % des entreprises. Donc, je pense qu'il faut être ambitieux, puisque, en étant ambitieux, même à 30 %, ça nous permet de lancer un message très clair pour que les entreprises prennent le virage aussi. Alors, si on veut, à travers cette stratégie, avoir un impact important sur l'ensemble de la société, y compris les entreprises, bien, il faut être ambitieux pour inciter les entreprises à adopter une démarche de développement durable.

Bon, maintenant, pour répondre à votre question, en ce moment qu'est-ce qui fait qu'une entreprise a adopté une démarche de développement durable, effectivement c'est assez limitatif. Nous pensons, il existe des principes, des façons de faire sur l'établissement d'objectifs, l'établissement de cibles, qu'est-ce qu'est une démarche de développement durable. La norme BNQ 21000 du gouvernement dit qu'est-ce que c'est, une démarche de développement durable. Nous avons un guide que nous avons élaboré qui préconise qu'est-ce que c'est, le développement durable, avec des étapes très précises. Alors, pourquoi ne pas exiger que l'ensemble de ces étapes soient respectées pour déterminer si une entreprise a intégré une démarche de développement durable?

Cela dit, je suis consciente qu'en disant une telle chose on ne peut pas la transposer aussi facilement à la petite entreprise. C'est-à-dire que d'appliquer la BNQ 21000 ou un guide comme le nôtre au sein de la grande, de la moyenne entreprise, ça va. Nous travaillons en ce moment à simplifier même notre guide pour essayer d'aller rejoindre ces plus petites entreprises qui pourraient... Une démarche de développement durable, ça reste compliqué lorsqu'il y a une personne à bord puis qu'il a de la difficulté à arriver avec juste les opérations quotidiennes dans une très petite entreprise. Comment demander à une personne comme celle-là de s'assurer que son entreprise intègre une démarche de développement durable? Donc, il faut penser à des solutions innovatrices, simples d'intégration de ces principes dans une petite entreprise.

Je ne sais pas si M. Ouyed, vous voulez compléter.

M. Ouyed (Mustapha) : Oui, rapidement, pour mentionner que ce qu'on a vu sur la réalité du terrain, c'est que, par exemple, lorsque la grande entreprise adopte des principes de développement durable, elle commence à imposer à son milieu une façon de faire qui, à ce moment-là, a un effet domino sur les moyennes et petites entreprises, notamment en pensant à... Le besoin d'efficacité énergétique, ça génère toute une activité dans les moyennes et petites entreprises pour servir ce besoin-là ou encore les bâtiments verts, qui sont aussi un incitatif important, un engagement des entreprises à acheter des immeubles qui répondent à des normes de bâtiment vert. Ça génère toute une activité dans les PME, ça les sensibilise, et eux-mêmes intègrent... et là le gouvernement, bien sûr, a un rôle important dans ce sens.

M. Gaudreault : Je veux poursuivre plus loin. Vous dites dans votre recommandation n° 9 d'établir un tronc commun d'indicateurs de développement durable applicables à tous les ministères et organismes, et là on a l'objectif que 30 % des entreprises se dotent de politique de développement durable... pas de politique, mais de démarche de développement durable. Et, en même temps, j'entends la préoccupation du ministre, que je partage, d'intégrer la lutte aux changements climatiques de façon beaucoup plus cohérente dans la stratégie de développement durable. Est-ce que ces indicateurs-là ne devraient-ils pas, justement, tenir compte d'objectifs de réduction de gaz à effet de serre, de lutte aux changements climatiques et, ainsi, s'appliquer aux entreprises? Donc, il y aurait une espèce de fil conducteur. Est-ce que ce n'est pas justement par cette voie-là des indicateurs qu'on peut arriver à intégrer comme nous le souhaiterions, autant que nous le souhaiterions, la lutte aux changements climatiques dans la stratégie de développement durable?

Et je sais que je n'ai pas beaucoup de temps, donc j'y vais tout de suite avec mon autre question. Pour y arriver... Parce qu'à un moment donné, au nombre d'entreprises que vous avez qui ont des relations d'affaires avec le gouvernement, vous avez aussi des relations d'affaires avec les municipalités, avec les commissions scolaires. Donc, si on veut, à un moment donné, continuer la courbe pour augmenter les entreprises qui ont une démarche de développement durable, il faut intégrer davantage ou faire en sorte que la stratégie s'applique davantage aux municipalités et aux commissions scolaires. Donc, ça aussi, il va falloir y arriver, là, pour que la stratégie s'applique à elles.

• (11 h 40) •

Mme Lauzon (Hélène) : Je vais juste répondre à dernière partie puis je vais laisser M. Ouyed compléter rapidement.

Le Président (M. Reid) : Vous allez avoir trois minutes en tout, là, à gérer.

Mme Lauzon (Hélène) : Ah! ça va être plus rapide. Donc, pour répondre à votre dernière question ou dernier segment de la question, nous préconisons dans notre mémoire que le décret qui devrait être adopté pour assujettir les organismes municipaux, scolaires et de la santé à la Loi sur le développement durable et, par la bande, à la stratégie soit adopté. En ce moment, ces organismes ne sont pas assujettis à la loi. Dans l'administration publique, ce sont les seuls qui ne le sont pas. Et oui, si on parle de transversalité, il serait important qu'ils soient assujettis rapidement. Et, pour le reste de votre question, je laisse M. Ouyed vous répondre.

M. Ouyed (Mustapha) : Rapidement, faire référence à... Un des exemples concrets, c'est l'initiative de définir la notion d'empreinte carbone des produits et des services. C'est un des indicateurs, probablement, qui pourrait être mis de l'avant et qui aurait un impact assez significatif sur le choix des produits, le choix des services et qui induirait, effectivement, une réduction des émissions de gaz à effet de serre, donc un lien direct avec la stratégie de changements climatiques.

Le Président (M. Reid) : M. le député, il vous reste encore 1 min 30 s pour poser une dernière question.

M. Gaudreault : Mon Dieu! O.K. Donc, vous dites : Un des indicateurs qui pourrait, justement, être ce ciment, je dirais, entre l'objectif de faire en sorte que les entreprises aient une démarche de politique de développement durable et faire en sorte aussi d'intégrer davantage les changements climatiques, ça, ça pourrait être un indicateur. Est-ce que vous êtes capable de nous en nommer d'autres qui pourraient être un peu dans ce sens-là?

M. Ouyed (Mustapha) : Oui, absolument. Dans le cadre des changements climatiques, comme tout le monde le sait, il y a la dimension de devoir réduire nos émissions de gaz à effet de serre. L'empreinte carbone en est une, mais il y a aussi le volume tout aussi important, voire même plus important, de l'adaptation des installations des municipalités aux effets des changements climatiques qui sont déjà là. Alors, parmi les indicateurs, ça va être, par exemple, de pouvoir évaluer la vulnérabilité de nos infrastructures. Mettons x % des infrastructures sensibles, on adopte une démarche pour évaluer le potentiel de leur vulnérabilité face aux changements climatiques. Et, si ce potentiel est avéré, bien là d'établir un plan d'adaptation de ces installations. Donc, je dirais deux segments : réduction des gaz à effet de serre, mais aussi adaptation aux changements climatiques, surtout en région, comme vous le savez très bien.

Le Président (M. Reid) : Merci. Nous allons maintenant passer au deuxième groupe d'opposition, la parole est au député de Groulx.

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Bienvenue. Alors, au niveau de vos commentaires spécifiques de la page 7 quant à l'orientation 2 de l'objectif 2.1 de la stratégie, l'objectif 2.1, qui est d'appuyer le développement de pratiques et de modèles d'affaires verts et responsables, alors vous mentionnez que vous vous interrogez sur les critères permettant de conclure qu'une entreprise a, effectivement, amorcé une démarche de développement durable. Alors donc, dès qu'une entreprise met en oeuvre un seul des critères, un seul, donc de ceux prévus au Plan d'accompagnement-conseil des entreprises du secteur privé, alors vous aimeriez que le gouvernement précise les règles qui sont utilisées. Je vous demanderais de commenter là-dessus puis de suggérer peut-être des précisions, là.

Mme Lauzon (Hélène) : Oui. Comme je le mentionnais, ce sont des règles que l'on retrouve, par exemple, dans la démarche gouvernementale de développement durable qui porte le nom de BNQ 21000dans notre jargon. Mais c'est une démarche qui a été élaborée par le Bureau de normalisation avec l'ensemble des parties prenantes, comme on les appelle, et ça prévoit une démarche spécifique à intégrer comme d'autres guides comme le nôtre. Au CPEQ, nous avons précisé une démarche qui doit être respectée. Je ne sais pas si vous voulez ajouter sur des critères spécifiques, M. Ouyed.

M. Ouyed (Mustapha) : Exact. Effectivement, il y a plusieurs exemples de démarches, surtout au niveau de l'industrie ou des organismes comme le CPEQ et d'autres imposent ou... des fois imposent, des fois offrent à leurs membres une démarche. Alors, BNQ en est une, celle du CPEQ aussi et, à ce moment-là, peut-être d'utiliser l'une de ces démarches comme une référence et dire... Si une entreprise, par exemple, est déjà rendue à l'étape 2 sur 5, mettons, par exemple, donc définir une politique, ensuite évaluer ses impacts, bien là on considère qu'elle a adopté une démarche puis on considère dans notre indicateur que c'est fait. Si elle est rendue à l'étape 1, c'est non. Si elle n'a même pas élaboré l'étape 1, bien c'est non encore.

Alors, c'est ce genre de niveau de précision qui serait souhaitable pour qu'il y ait cette cohérence qui... En fin de compte, la cohérence, son objectif, c'est d'avoir une mobilisation de toute la société vers cet idéal de développement durable. Et, pour mobiliser les gens, la société, on a besoin de définir clairement ce qu'on dit par les choses. Une fois que tout le monde a bien compris, à ce moment-là on s'en va tous dans la même direction. Donc, c'est ça, le souci du CPEQ de la cohérence aussi bien dans les définitions que dans les indicateurs. C'est parce que la cohérence permet la mobilisation.

M. Surprenant : Dans ces précisions, est-ce qu'il y aurait certaines démarches qui devraient être prioritaires, voire même obligatoires pour pouvoir édicter qu'une entreprise a, effectivement, fait une démarche dans le sens de...

Mme Lauzon (Hélène) : Moi, ce que je pense, ce serait d'abord d'adopter une politique de développement durable, puisqu'en adoptant une politique de développement durable ça mobilise la haute direction d'une entreprise. Parce que, si la haute direction n'est pas mobilisée, on n'y arrive pas aussi facilement. Donc, la politique de développement durable nécessite un engagement de la haute direction à intégrer les trois dimensions du développement durable dans toutes les questions, dans tous les secteurs de l'entreprise, que ce soit le secteur d'approvisionnement, la comptabilité, le marketing, les relations avec la clientèle. Alors, c'est la première étape, là, qui est incontournable.

M. Surprenant : Je vous remercie.

Le Président (M. Reid) : Merci beaucoup. Alors, je vous remercie pour votre présentation et votre présence.

Je suspends les travaux de la commission jusqu'à 2 h, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 11 h 47)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous reprenons nos travaux. Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de Stratégie gouvernementale de développement durable révisée 2015-2020. Alors, cet après-midi, nous recevons d'abord Écotech, suivi de l'Institut Hydro-Québec en environnement, développement et société de l'Université Laval.

Alors, M. Leclerc, pardon, je vais vous donner la parole pour une dizaine de minutes. Je vais vous avertir quand il restera une minute pour vous aider, et ensuite nous aurons un échange avec les membres de la commission pendant 35 minutes. Alors, à vous la parole.

Écotech Québec

M. Leclerc (Denis) : Merci. Merci beaucoup de l'invitation. Alors, Denis Leclerc, d'Écotech Québec, Écotech Québec, en deux mots, organisme à but non lucratif. On est une grappe industrielle, on vise deux choses. Lorsqu'on parle de technologies propres, définition très simple, c'est de l'innovation en environnement et énergie, l'innovation dans ce qu'on appelle l'économie verte. Alors, ce qu'on vise à accroître, c'est le développement, le financement et la commercialisation des innovations d'ici, provenant du Québec.

Alors, d'abord, on salue le gouvernement, bien sûr. Et je vous salue aussi, mais je salue aussi le gouvernement dans sa volonté de donner une impulsion beaucoup plus forte dans le développement d'une économie verte par l'entremise des ministères et des organismes, alors les MO.

Tout d'abord — puis je vais y aller très rapidement sur les recommandations — ma première surprise, c'était quand je lisais que le gouvernement invitait les MO. Moi, là, quand on m'invite, après ça j'ai le choix d'y aller ou de ne pas y aller. Alors, «inviter», pour moi, ce n'était pas un mot très, très, très contraignant. Alors, habituellement, on demande, on incite, on recueille une requête, mais «inviter», pour moi, ça faisait un peu trop facile de refuser une invitation. Alors, tout simplement, cet aspect-là du document, alors...

Alors, un autre élément aussi qu'on voulait vous mentionner — d'ailleurs, je suis seul, je m'excuse, je devais être accompagné par des membres de mon comité exécutif, mais je pense qu'ils ont trouvé que seul, j'allais être capable de vous affronter — un élément qui nous a aussi interpellés, le deuxième, c'était à l'effet qu'on ne trouvait pas d'indicateurs, d'indicateurs quantitatifs. J'imagine qu'il doit y avoir une très bonne réponse à cela. Nous, on regarde toujours les indicateurs pour, après ça, de s'assurer que la stratégie va être en ligne avec les indicateurs. Alors, pour nous, on se questionnait qu'elle était la justification du fait qu'il n'y avait pas d'indicateurs.

Un autre élément qu'on voulait vous soumettre, c'était qu'aujourd'hui on parle de la politique de développement durable du gouvernement, demain on va parler de la politique énergétique, après-demain on va parler d'autres stratégies ou de programmes, alors on invite le gouvernement à regarder tout l'aspect d'une cohérence, d'une cohésion, j'allais dire même des synergies entre les différentes politiques et programmes que vous allez étudier au cours des prochaines semaines et des prochains mois.

Un des éléments qu'on trouve très important et qui s'inscrit très bien dans le projet de stratégie est l'exemplarité de l'État. L'État peut être un très bon véhicule pour inciter les entreprises à prendre un virage, ou à accélérer le virage, ou à adopter des innovations. Mais la meilleure façon d'inciter quelqu'un d'autre, c'est de le faire soi-même. Alors, l'exemplarité de l'État est clé au niveau d'adoption des technologies propres, et c'est pour ça que, nous, ce qu'on... On ne va pas jusqu'à l'adoption, on vous demande juste une étape très préalable, c'est-à-dire que les ministères et organismes pourraient devenir des bancs d'essai, des vitrines technologiques des innovations du Québec qui permettent, entre autres, de réduire nos émissions de gaz à effet de serre et qui peuvent également nous amener à avoir une meilleure utilisation de nos ressources. Vous avez une panoplie d'organismes. Je lisais, là, les organismes, et je voyais des liens avec nos entrepreneurs qui cherchent des vitrines technologiques pour pouvoir accroître leurs ventes, pour pouvoir attirer des clients du privé à utiliser également leurs technologies. Alors, cet aspect-là de banc d'essai, de vitrine technologique, on trouve que c'est extrêmement important parce que ça peut apporter des avantages aux entreprises, aux PME innovantes du Québec.

Et c'est pour ça que notre suggestion est d'inscrire un autre critère dans la stratégie pour non pas inviter cette fois-ci, mais pour inciter les ministères et organismes à devenir un banc d'essai pour une innovation du Québec. Puis je dis un banc d'essai, là. On s'entend, là, sur cinq ans, là, qu'ils deviennent le banc d'essai d'une technologie, juste ça, là, je pense qu'on ferait un très, très grand pas dans l'aspect de vitrine technologique pour nos innovateurs du Québec.

Bien sûr, à ce moment-là, même nous, là, on discute avec des organismes du gouvernement, et ces gens-là nous disent toujours : C'est une bonne idée, mais comment je peux savoir quelles sont les innovations qui sont disponibles? Alors, il faut aussi travailler ensemble pour faire le maillage entre les innovateurs, entre les innovations qui sont peu connues et les ministères et organismes. À ce moment-là, ça ferait un maillage beaucoup plus productif, et je pense qu'on verrait des résultats probants non seulement au niveau commercial, mais également environnemental pour les organismes et ministères.

Maintenant, on parle que, bien sûr, la meilleure façon d'inciter les autres, c'est de prêcher par l'exemple. C'est la même chose au niveau des pratiques d'acquisitions écoresponsables. C'est un aspect qui est complexe, surtout lorsqu'on commence à parler d'appels d'offres, mais les pratiques écoresponsables s'inscrivent dans le développement durable. Trois piliers dans le développement durable. Vrai qu'il y a l'environnement, mais il y a aussi l'économique et le social. Et, quand je lis qu'à la page 39 qu'il y a maintenant 37 programmes de soutien financier qui ont été révisés pour inclure des critères d'écoresponsabilité, puis 14 programmes aussi... c'est-à-dire 49 programmes, et aujourd'hui il en reste seulement 43 d'actifs, la question que je me posais, c'était : Oui, mais sur combien de programmes? 43, si c'est sur 50, on est pas mal bons. Mais 43 sur 4 300, on n'est pas très bons. Je veux juste savoir il y a combien de programmes au gouvernement, et comment ça se fait que ça prend du temps à avoir des pratiques écoresponsables.

• (14 h 10) •

C'est pour ça qu'on se dit : Comment ça se fait qu'on n'est pas capable de mettre en place pour 2016-2017... On va vous laisser respirer 2015-2016, mais 2016-2017, toutes les acquisitions devraient être écoresponsables en prenant en considération, encore là, l'aspect économique et social. Parce qu'aujourd'hui il y a des aberrations au niveau des achats, et ces aberrations-là font qu'à un moment donné on se pose des questions sur la rigueur qu'on utilise pour pouvoir identifier des fournisseurs et des produits.

Et, nous, ce qu'on croit fermement, c'est que la stratégie... Oui, vrai que les technologies propres peuvent contribuer à aider les ministères et organismes à atteindre leurs résultats, les objectifs, oui, on peut les aider, mais la stratégie peut également aider ce secteur, ce nouveau secteur d'activité qui est... qui sont les technologies propres. Je pense qu'il y a une synergie incroyable, surtout que le secteur des technologies propres est voué à un très bel avenir. Mais l'avenir, il faut qu'il commence le plus tôt possible parce qu'on en a besoin, surtout lorsqu'on regarde que les trois projets prioritaires du gouvernement du Québec... Lorsqu'on lit le discours du premier ministre, trois projets prioritaires : stratégie maritime, Plan Nord, lutte aux changements climatiques. Savez-vous quoi? Les technologies propres, on est au coeur de ces trois projets prioritaires. Alors, c'est pour ça qu'il y a un élan qui doit être donné. Et la stratégie de développement durable, c'est un excellent exemple pour pouvoir donner cet élan-là à ce nouveau secteur d'activité. Merci.

Le Président (M. Reid) : Merci beaucoup, M. Leclerc. Nous allons passer maintenant à la période d'échange. M. le ministre.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Leclerc. Merci pour votre présentation et votre contribution écrite à nos travaux. D'emblée, je voudrais d'abord vous remercier pour votre travail au sein du Comité-conseil sur les changements climatiques, très apprécié. Également, vous féliciter pour votre récente nomination à titre de président du conseil d'administration de l'International Cleantech Network, qui est basé à Copenhague, je crois. Donc, ça montre, justement, non seulement votre talent à vous personnellement, mais également l'importance qu'Écotech a prise non seulement en termes de développement des technologies propres, mais le rayonnement que ce secteur-là accorde au Québec à travers le monde. Alors, félicitations.

Bon, sur la question — j'en ai parlé un peu ce matin avec un autre groupe — concernant les indicateurs de performance, juste vous dire, on est tout à fait d'accord. La raison pour laquelle on n'a pas précisé les indicateurs de performance, c'est que, justement, on veut se donner la latitude nécessaire d'avoir des indicateurs qui seront adaptés avec le produit final. Alors, il est pleinement notre intention qu'il y ait des indicateurs de performance, des façons de mesurer concrètement les résultats et qu'il y ait des objectifs, là, concrets à atteindre lorsqu'on aura un produit final parce qu'il est clairement notre intention d'utiliser ces travaux pour bonifier la stratégie.

Et sur ce que vous avez dit... Bon, première question, on le voit dans votre mémoire, j'aimerais ça, faire ressortir la notion, encore une fois, qui ressort de plus en plus dans nos travaux, l'importance d'intégrer la notion de la lutte contre les changements climatiques dans la stratégie de développement durable. Alors, dans certaines de vos recommandations, ça ressort clairement, mais je voudrais vous entendre davantage sur le fait que, si on parle de cohérence, comme vous le faites, c'est nécessaire que, justement, les démarches qu'on fait, que ce soit à travers le plan d'action sur les changements climatiques, les efforts qu'on fait avec le Fonds vert, évidemment, marché du carbone, que ces démarches-là soient pleinement intégrées à la stratégie de développement durable.

M. Leclerc (Denis) : Merci, M. le ministre. Lutte aux changements climatiques, c'est que ça va au-delà de l'environnement. Ça a des impacts et ça peut avoir des impacts encore plus importants, vrais au niveau économique, mais vrais au niveau social puis au niveau de la santé. Alors, si vous prenez en considération toutes les conséquences que peuvent avoir les changements climatiques sur la vie que l'on a en ce moment, sur la vie de nos voisins, je pense que tous et chacun, on est interpellé par cela et on sait fort bien qu'un environnement plus sain, ça va avoir des conséquences également sur... Je parlais de l'aspect de santé, vous êtes très conscient, j'en suis sûr, que le ministère de la Santé, c'est un très gros budget également. Alors, vous voyez, il y a des impacts également au niveau de la gouvernance de tout territoire, et quoi d'autre que le gouvernement pour montrer l'exemple? Comme parents, nous, on essaie de montrer l'exemple à nos enfants. Je ne dis pas que vous êtes les parents de la société, mais ce que je veux dire, c'est que les modèles de la société sont extrêmement importants comme outils, et c'est pour cela qu'il faut aussi démystifier qu'est-ce que c'est, la lutte aux changements climatiques.

Il y a des impacts sociaux, il y a des impacts économiques, mais chacun de nous, on doit y contribuer, et je pense que les ministères peuvent être un exemple flagrant de comment on peut y contribuer. Puis, des fois, y contribuer ne coûte pas plus cher. C'est dans la façon de faire, et c'est pour ça qu'il est vrai que... Puis je suis très content lorsque j'entends le premier ministre parler de la lutte aux changements climatiques comme étant une priorité de l'État parce que je pense que c'est inévitablement un aspect que tous et chacun, on va en subir les conséquences. Mais l'important, c'est d'en subir le moins possible pour pouvoir s'y adapter et d'en réduire les impacts néfastes au cours des prochaines années.

M. Heurtel : Merci. Donc, non seulement, bon, c'est une priorité, évidemment, au niveau environnemental puis au niveau de sauver la planète, mais également c'est un pilier du plan de relance économique du gouvernement. Et dans cet esprit-là, étant donné que vous représentez le secteur industriel, là, de l'économie propre, de l'économie verte, lorsqu'on parle d'être cohérent, est-ce qu'on va jusqu'à dire : Bon, il faut des critères contraignants en termes de politique d'achat, en termes d'appels d'offres, en termes de politique d'investissement, de choix au niveau, là, de financement de secteurs stratégiques? Est-ce que ça doit être clairement non seulement un pilier de la lutte contre les changements climatiques, mais également d'une stratégie de développement durable, de s'assurer qu'en tant que gouvernement, de façon horizontale, on ait des critères qui tiennent compte... ce n'est pas des critères, là, comme vous dites, d'invités, mais des critères contraignants?

M. Leclerc (Denis) : Oui.

M. Heurtel : À ce niveau-là?

• (14 h 20) •

M. Leclerc (Denis) : Oui. Puis c'est une autre section que, malheureusement, on a enlevée parce qu'on n'a pas eu le temps de la terminer, cette section.

Vous parliez des investissements. Nous, ce qu'on pense, c'est qu'on veut attirer ici, au Québec, des entreprises. Pas n'importe lesquelles, celles qui vont contribuer, bien sûr, à l'essor économique, à la richesse, mais également selon les valeurs qu'on se donne. On a des outils d'investissement, et la question, nous, ou l'élément sur lequel on réfléchit à l'heure actuelle, c'est comment... Par exemple, un Investissement Québec de ce monde, comment on peut faire non seulement pour attirer une entreprise pour venir s'établir au Québec, mais comment on peut la contraindre ou l'inciter fortement... il faudrait trouver le bon terme, mais à venir regarder les innovations du Québec qui peuvent les aider à diminuer leur impact sur l'environnement.

Je vous donne un exemple très concret, IFFCO, l'usine d'engrais, Bécancour. Bien, IFFCO s'en venait ici avec un certain design, et nous, on les a convaincus qu'il y avait des innovateurs au Québec qui pouvaient les aider à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. On a organisé une session de maillage entre 10 entreprises innovatrices qui avaient des avenues de solution pour IFFCO, très grande entreprise indienne... avec les gens d'IFFCO, qui sont même venus de l'Inde pour rencontrer nos entreprises, ils en ont rencontré 10. Par la suite, quelques mois plus tard, ils ont passé au niveau du BAPE, du bureau d'audiences publiques. À une question que je leur ai posée : Avec ces 10 là, avez-vous continué les discussions avec ces 10 là, en avez-vous trouvé des intéressantes?, la réponse : Quatre sur 10 poursuivaient leurs discussions avec quatre entreprises du Québec qui avaient des innovations qu'eux autres trouvaient extrêmement intéressantes pour les insérer dans leur plan. Alors, vous voyez comment on pourrait faire pour que les entreprises étrangères qui viennent s'établir ici puissent profiter de notre matière grise pour une économie verte.

M. Heurtel : Merci. Hier, on était, tous les deux, au même événement, l'événement à Montréal organisé par la Commission sur l'écofiscalité du Canada et organisé également par l'alliance Switch, dont Écotech est un membre. Au niveau de l'écofiscalité, j'aimerais vous entendre sur... Bon, évidemment, il y a une mesure majeure que le gouvernement a déjà mise en oeuvre en matière d'écofiscalité, c'est le marché du carbone, qui est la pierre angulaire de notre stratégie de lutte contre les changements climatiques, qui permet le Fonds vert, qui permet, justement, de financer les mesures de notre plan d'action sur les changements climatiques. Sauf qu'il y a d'autres mesures, il y a toute une philosophie, il y a tout un bouquet de mesures qui peuvent accompagner au niveau de la façon dont on approche la fiscalité. Alors, là-dessus, avez-vous un point de vue?

M. Leclerc (Denis) : Oui. Bien, on a différentes avenues, bien sûr, parce que l'écofiscalité, ça peut être très large. Mais c'est un des outils qui est utilisé de plus en plus non pas comme bâton, mais comme carotte également, hein, parce que ça prend un juste milieu, et l'écofiscalité est de plus en plus regardée dans des pays, entre autres, scandinaves qui ont mis en application différents aspects qui pourraient être considérés ici, au Québec. Parce qu'à prime abord on peut peut-être s'apercevoir que ça peut avoir des impacts négatifs, mais qu'au contraire, finalement, dans leur mise en application, ça a été extrêmement positif, économiquement parlant, pour, entre autres, les entreprises ou pour la population.

Alors, disons qu'on pourrait se reparler de différentes mesures plus spécifiques, mais l'écofiscalité est un des outils privilégiés de plus en plus dans différents pays. D'ailleurs, il y a des commissions qui sont en place pour essayer d'identifier quels sont les meilleurs moyens d'y arriver, mais sans l'ombre d'un doute que cet aspect-là est à prendre en considération et comment on peut, en termes d'État, encore là, se donner les outils, se donner les outils pour démontrer que l'écofiscalité, oui, c'est un des aspects qui pourraient être le plus incitatatifs positivement pour un changement de comportement.

Le Président (M. Reid) : Merci. Maintenant, je passe la parole au député d'Abitibi-Est.

M. Bourgeois : Merci, M. le Président. J'ai bien aimé l'exemple que vous nous donniez tantôt dans le cadre d'un projet, la contribution potentielle d'entreprises québécoises. Et vous en faites mention dans votre mémoire, de la possibilité de mettre en place un répertoire des entreprises, et moi, j'aimerais beaucoup que vous élaboriez un petit peu plus de ce côté-là en termes de qui, comment faire cette reconnaissance-là.

M. Leclerc (Denis) : Oui. Bien, c'est notre engagement. Nous autres, on se dit : Si le gouvernement s'engage, on est prêts à s'engager aussi parce que, si on veut que nos ministères et organismes deviennent des vitrines, il faut savoir quel type de vitrine, il faut savoir quel type d'innovation qu'il y a. Alors, au Québec, on retrouve... vous seriez surpris de voir l'innovation au Québec au niveau de l'environnement dans différents secteurs. Que ça soit matières résiduelles, dans l'énergie, traitement de l'eau, traitement de l'air, le lien électronique, les hydroliennes de petites rivières, on foisonne d'innovation.

Maintenant, comment on fait ce maillage-là? Nous, on a déjà commencé à faire un maillage. On s'est dit : Quelles sont les entreprises du Québec qui pourraient bénéficier d'une vitrine technologique avec des organismes publics, parapublics? Je vous donne juste un exemple, Idénergie, entreprise du Québec, petite entreprise, des jeunes dynamiques qui sont en train de développer l'hydrolienne de Petite-Rivière, qui peut permettre, à ce moment-là, l'électrification d'une maison. Très bien. Qui pourrait en profiter? Moi, je lève tout de suite la main, puis je dis : La SEPAQ, ils ont combien de chalets? Ils sont tous sur le bord de l'eau. Qu'est-ce qu'ils font, eux autres, pour chauffer, ils utilisent quoi? Des fois, des panneaux, mais on s'entend-u que, des fois, il y a aussi des génératrices? Ça pourrait être un excellent endroit comme banc d'essai des hydroliennes des rivières. C'est la seule au monde qui est développée de cette façon-là en ce moment, puis là les gens d'Idénergie me disent : Je pense que notre vitrine technologique, là, elle va être en Inde. Parce que, là, en Inde, ils ont trouvé qu'à cause de la mousson... Puis là ils se disent que, si on en met deux, trois ensemble, ça va être en mesure d'électrifier un dispensaire, une clinique. Ah! je me disais, mais tu n'as pas trouvé preneur ici, au Québec? Alors, la SEPAQ pourrait être un excellent endroit pour mettre en application, entre autres, l'innovation d'Idénergie.

J'en donne un autre, Effenco, une entreprise qui prend des camions de vidanges puis ils transforment ça en Prius, ou à peu près, en hybride. Conception hybride, conception hybride avec coupe-moteur. Un camion de vidanges, qu'est-ce que ça fait? Ça avance, ça arrête. Ça avance, ça arrête. Ça avance, ça arrête. Alors, tu as toute une capture d'énergie là-dedans. Merveilleux! Le moteur, au lieu de rouler neuf heures par jour, roule quatre heures par jour. Imaginez-vous l'économie d'énergie. Imaginez-vous les émissions de gaz à effet de serre. Imaginez-vous juste la voisine qui ne l'entend pas, le camion de vidanges aussi, parce qu'il ne roule pas... Le moteur ne roule pas, pardon. Mais cette entreprise-là, elle vient de signer un contrat à New York, avec la ville de New York. Il y a-tu une ville qui pourrait lever la main pour qu'on puisse utiliser ces camions-là ici, au Québec? Il me semble que oui. Des exemples, comme ça... Alors, c'est pour ça qu'Écotech, on prend l'engagement de développer ce type de répertoire pour donner le goût aux ministères et organismes d'essayer — bancs d'essai, vitrines technologiques — nos innovations du Québec.

M. Bourgeois : Merci.

Le Président (M. Reid) : Merci. Une autre question? Commentaires? Oui, M. le député de Mégantic.

M. Bolduc (Mégantic) : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Leclerc. Écoutez, vous faites du travail international dans d'autres pays, et tout. Comment vous voyez la perception du Québec dans le contexte de développement durable? Puis comment ça évolue selon votre...

M. Leclerc (Denis) : Le Québec a une très bonne réputation. Je disais ça à quelqu'un la semaine dernière, je lui disais : Wow! on a une très bonne réputation. Puis ils m'ont dit : Est-elle surfaite? Oh! ça, c'est une bonne question. C'est-à-dire est-ce qu'on est capables de maintenir notre réputation avec l'action que l'on a en termes d'innovation? Je peux vous dire que, là, on a besoin d'un souffle, l'innovation a besoin d'un souffle au Québec, là, parce que, depuis quelques années, les entreprises ont de la difficulté à pouvoir se propulser. Ça, on pourrait regarder ça au niveau de la commission sur la fiscalité, c'est une autre chose. Mais, pour revenir en termes de réputation, on a une très bonne réputation. On a une réputation d'État ou de territoire qui fait ce qu'il dit. Et ça, c'est important. Puis on a des éléments très clairs. Alors, c'est pour ça qu'entre autres International Cleantech Network vient... Je les ai invités, ils viennent en mars au salon Americana. Il va venir mieux découvrir ce que l'on fait au Québec. L'important, c'est de faire ce maillage-là entre autres grappes au bénéfice de nos entreprises du Québec.

M. Bolduc (Mégantic) : Est-ce qu'on a encore du temps?

Le Président (M. Reid) : Nous allons passer maintenant à l'opposition officielle et au porte-parole, M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Merci beaucoup de votre présence, M. Leclerc.

M. Leclerc (Denis) : Ça me fait plaisir.

M. Gaudreault : Toujours des propos très intéressants. Un des points forts de votre mémoire, c'est celui sur l'exemplarité de l'État. Je suis entièrement d'accord avec vous, si on veut que les pratiques en développement durable s'étendent, il faut, d'abord et avant tout, que l'État soit exemplaire. Vous parlez de cohérence, c'est tout un chantier que l'État aura à faire parce qu'effectivement des politiques ou des programmes, il y en a un et deux, hein? Alors, il y en a beaucoup, beaucoup. En soi, il y a même des ministères qui peuvent avoir des pratiques contradictoires dans leur vision du développement. Je pense aux Transports, je pense aux Affaires municipales. En soi, il y a un chantier là.

Mais, là où je veux vous amener, c'est vraiment plus sur des... j'aimerais ça, qu'on parle un peu plus de mesures concrètes. Vous avez dans votre mémoire la recommandation n° 6 à la page 5... vous avez deux recommandations n° 6, en fait. En tout cas, dans la version que j'ai, là, à la page 5 et 6. La première recommandation n° 6, je dirais, à la page 5 : «Promouvoir davantage, auprès des acheteurs des secteurs public et parapublic, l'utilisation des appels d'offres axés sur la performance plutôt que de se baser sur la règle du plus bas soumissionnaire.» Là, vous ouvrez une boîte de Pandore, un panier de crabes, pour ne pas dire autre chose, surtout dans un contexte, évidemment, d'atteinte de l'équilibre budgétaire, surtout dans un contexte aussi de commission d'enquête sur l'industrie de la corruption, de mesures de lutte contre la corruption et la collusion.

Une voix : ...

M. Gaudreault : Bien, c'est vrai.

M. Leclerc (Denis) : C'est parce que vous avez dit «l'industrie de la corruption».

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Gaudreault : ...

Une voix : C'est un beau lapsus, quand même.

M. Gaudreault : Excusez. Je suis content de voir que les gens m'écoutent, là.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Gaudreault : J'ai vraiment dit «l'industrie de la corruption»?

Une voix : Oui.

M. Gaudreault : Industrie de la construction. J'ai été retenu dans les «bloopers» de Radio-Canada pour avoir dit «la lutte contre l'intégrité». Alors, ça pourra faire partie de ça. Oui, c'est ça. Alors, vous avez compris ce que je veux dire, là. Donc, dans tout ce contexte de corruption, de lutte contre la corruption dans l'industrie de la construction, d'équilibre budgétaire, bon, la règle du plus bas soumissionnaire, c'est un peu une vache sacrée. Donc, j'aimerais ça, vous entendre davantage là-dessus, sur cette question des appels d'offres. Comment vous voyez ça? Comment vous pensez que la stratégie... Soit que son libellé actuel ne va pas assez loin... Et, si oui, comment — nous, là, comme parlementaires, quand on va arriver à la fin de ce travail-là, là, on va avoir des recommandations à faire au ministère — comment vous voulez qu'on articule ça?

M. Leclerc (Denis) : Je vais prendre la moins difficile. Je ne vous parlerai pas des appels d'offres comme tels, je vais vous parler du type d'appels d'offres. Et non pas du plus bas soumissionnaire, je veux dire, mais du type d'appels d'offres. Les entreprises, là, innovantes, puis on est pas mal innovants au Québec... Moi, me faire dire : O.K. Voici un appel d'offres, je cherche des verres pour droitiers, mettons, O.K., au lieu de dire : Je cherche une façon de boire avec ma main droite... C'est deux choses très différentes. Je donne un exemple qu'on me répète souvent. Le gouvernement a fait une annonce : 650 millions pour la biométhanisation. Oupelaïe! Réaction du milieu : Pourquoi la biométhanisation? Bien, pourquoi nous dire le moyen? Dites-nous qu'est-ce que vous voulez atteindre, réduire l'enfouissement, bon, un paquet de choses. Dites-nous les résultats que vous voulez atteindre, on va vous arriver avec des innovations qui ne sont peut-être pas comme biométhanisation. Laissez aux gens l'opportunité de vous arriver avec une innovation.

Et d'ailleurs tout le monde attend le résultat de la biométhanisation, mais le point, c'est au moins de changer... Ne parlons pas de moyens, parlons performance. On cherche tel objectif à atteindre. Dites-moi pas le moyen, on va vous arriver, nous autres, avec le moyen. Juste changer ce paradigme-là serait énorme en termes d'innovation, de permettre aux gens de contribuer à apporter des solutions qu'on n'aurait pas pensées à... Prenez IFFCO, là. IFFCO, il y a des innovations là-dedans qu'ils ne pensaient pas. Ils auraient pu demander d'avoir un bidule bleu marin, là. Mais non, ils ont dit : Aidez-nous, et c'est pour ça qu'on est arrivés avec des innovations qu'eux autres n'avaient jamais pensées. C'est ça. C'est ça, l'aspect.

M. Gaudreault : Je comprends de votre propos et de votre première recommandation 6 que, quand vous dites «des appels d'offres axés sur la performance plutôt que [...] sur la règle du plus bas soumissionnaire», vous ne remettez pas nécessairement en question la règle du plus bas soumissionnaire, mais vous dites : Est-ce qu'on ne peut pas changer de paradigme pour plutôt — et là vous le dites dans la phrase qui suit — «[identifier] les objectifs à atteindre pour les fournisseurs en mettant l'accent sur la finalité et non sur les moyens»? Là, j'imagine... Puis j'essaie d'avancer un petit peu parce qu'on n'a pas beaucoup de temps, mais dans...

M. Leclerc (Denis) : Je veux juste...

M. Gaudreault : Oui...

M. Leclerc (Denis) : Si j'avais à réécrire, là, je bifferais «du plus bas soumissionnaire», ce n'est pas ça qu'on voulait dire ici. C'est la finalité, et non pas l'outil. Plus bas soumissionnaire, ça ne devrait pas être dans cette recommandation-là, écrite comme telle. C'est une autre...

M. Gaudreault : Et basé sur la finalité, si vous aviez à implanter ça au gouvernement, vous commenceriez par quel ministère, par exemple, ou par quel... Parce que est-ce que vous voulez faire ça tout d'une shot, comme on dit, ou progressivement? Là, on a une stratégie 2015-2020, est-ce qu'on pourrait y aller progressivement? Si oui, on est mieux de commencer par quel donneur d'ouvrage?

M. Leclerc (Denis) : Bon, d'abord, j'aime bien par étapes, hein, il faut déjà démontrer que ce qu'on avance, ça fonctionne. Alors, j'aime mieux par étapes. À savoir maintenant quel ministère ou organisme, j'aime bien les organismes parce qu'il y a des ministères où c'est moins... Tu sais, le ministère du Revenu avec des cleantech, là, j'ai de la misère à voir ça, mais il y a des organismes où il y a de plus grandes possibilités. On n'a pas de préférence, nous autres. Dans le fond, on aimerait pouvoir contribuer à la mise en application concrète, puis, je vous dirais, à très court terme. C'est les petits succès qui vont faire que ça va engendrer d'autres choses, alors...

M. Gaudreault : Il faudrait peut-être voir... Oui.

M. Leclerc (Denis) : Mais je peux vous dire, là — puis c'est des champs que vous connaissez très bien — le transport et les municipalités, c'est deux endroits extraordinaires pour pouvoir implanter...

M. Gaudreault : C'est ce que je pensais aussi. Peut-être du côté aussi de l'énergie, ressources naturelles...

M. Leclerc (Denis) : Pour moi, c'est... Oui, pour moi, oui...

M. Gaudreault : Il me reste du temps, M. le Président? Oui. Tronc commun des indicateurs — là, je vous ramène à la page 4 de votre mémoire — recommandation 1 : «Identifier et déterminer des cibles, des indicateurs quantitatifs...» Le groupe qui vous a précédé, que vous devez connaître — je sais que vous étiez dans la salle quand ils sont venus tout à l'heure — ils nous ont donné des exemples sur des indicateurs. J'aimerais ça vous entendre un petit peu là-dessus aussi. Êtes-vous d'accord avec ce qu'ils nous ont proposé sur, entre autres, l'empreinte carbone? Est-ce que vous pensez également que, par les indicateurs, c'est une belle piste pour intégrer dans la stratégie la question de la lutte aux changements climatiques?

M. Leclerc (Denis) : Totalement d'accord. Je n'ai pas entendu leur suggestion, je m'excuse. Mais l'empreinte carbone, aujourd'hui, elle est incontournable. Dans mon ancienne vie, j'étais chez Abitibi-Bowater, papier journal... bien, du papier...

M. Gaudreault : Vous avez connu l'usine de Kénogami.

M. Leclerc (Denis) : Oui, vous avez connu. Mais il y a des grandes chaînes qui commencent par W, là, des grandes chaînes de détaillants qui, eux autres, veulent réduire leur empreinte carbone. Ils vont jusqu'à demander à leurs producteurs de papier de réduire leur empreinte carbone eux-mêmes pour que le produit ait une plus faible empreinte carbone. Alors, pouvez-vous vous imaginer que cet aspect-là... On parle de papier pour des circulaires. Alors, essayez de vendre, là, à Walmart si vous êtes un fournisseur, ils vont vous poser la question : Quelle est votre empreinte carbone de votre produit?

Certainement, c'est un aspect fort important, et heureusement, au Québec, on est dans une position extrêmement enviable. Moi, les gens, là, à l'international, quand je leur dis... Parce que j'ai lu dans... Hydro-Québec, c'est maintenant 99 % que notre électricité est verte et renouvelable, ce n'est plus 98 %. Je ne sais pas ce qui s'est passé, mais en tout cas. Alors, c'est extraordinaire pour eux autres, et ça devrait être un avantage concurrentiel pour nous, pour tous nos manufacturiers.

Le Président (M. Reid) : C'est terminé. Alors, nous allons passer maintenant au bloc du deuxième groupe d'opposition. M. le député de Groulx.

• (14 h 40) •

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Alors, je vous félicite pour votre mémoire. Vous êtes un organisme qui est important, en fait, pour faire avancer le Québec, là, au niveau du développement durable et au niveau de l'innovation aussi. C'est important de promouvoir des entreprises d'ici qui sont créatrices de richesse et d'emplois chez nous. Alors, votre idée, là, de banc d'essai — vous faites allusion à différents sujets tantôt — je pense que c'est important que le gouvernement prenne acte de ça, tu sais, établir des mesures pour supporter, là, les entreprises ici au niveau de l'innovation.

Alors, d'ailleurs, pour supporter ces entreprises-là, le ministre, tantôt, a mentionné que c'est un pilier du plan de relance économique, le développement durable, de la part du gouvernement. Par contre, j'ai vite pris connaissance de votre livre blanc que vous avez déposé en octobre 2004 pour une économie verte... 2014, pardon, pour les économies vertes par les technologies propres, et vous faites état dans ça de financement, là, au niveau d'outils fiscaux pour l'innovation. Vous avez été affectés, ce que je comprends, par l'approche paramétrique de couper tout le monde de 20 %. Alors, est-ce que vous verriez... J'imagine que vous le verrez dans ce sens-là, favorable que le gouvernement — on dit souvent que nos bottines suivent les babines — établisse peut-être des... mette un peu plus de cohérence au niveau du support aux entreprises qui font de l'innovation, particulièrement lorsque ça touche au développement durable. Alors, qu'est-ce que vous pensez de ça? Est-ce que...

M. Leclerc (Denis) : Bien, d'ailleurs, on rencontrait le ministère des Finances hier en consultation prébudgétaire. Une des choses, c'est qu'on disait : Bien, si la lutte aux changements climatiques, Plan Nord, stratégie maritime, ce sont les trois projets prioritaires de l'État, peut-on voir à ce moment-là dans le crédit d'impôt en recherche et développement un retour à ce que c'était avant pour les innovations qui militent... qui s'inscrivent dans cette phase-là? Si c'est prioritaire, il faut le démontrer. Ça, le premier point.

Le deuxième point, c'est : commercialiser, des fois, ça coûte pas mal plus cher qu'inventer. Alors, un des enjeux... Quand je parle de vitrine technologique, je parle aussi de commercialisation. Alors, aussi, les entreprises ont besoin d'un coup de pouce pour commercialiser. Alors, nous, tout ce qu'on suggère, c'est que, dans le crédit d'impôt à la recherche et développement, qu'on y inscrive également la commercialisation pour l'aspect uniquement salarial, c'est-à-dire pour avoir des experts, des ingénieurs technico-commerciaux qui vont pouvoir vendre mieux nos innovations du Québec. Ce sont deux mesures qu'on a présentées.

M. Surprenant : Merci. À votre recommandation 6 — d'autres en ont parlé tantôt, là — au niveau de l'utilisation des appels d'offres axés sur la performance, alors, à cet égard, là, il est question de réglementation sur les contrats, mettre un 10 % qui pourrait peut-être ou pas être appliqué. Alors, est-ce que... Voyons! Excusez-moi, je vais trouver le bon endroit. Vous suggérez que le gouvernement accorde une prime supplémentaire. Vous ne faites pas état, à votre constat, d'une marge préférentielle d'au plus 10 %, mais vous demandez une prime supplémentaire. Est-ce que vous allez donc plus loin que le 10 %?

M. Leclerc (Denis) : L'idée de base, c'est celle-ci où, il y a... les achats écoresponsables, il y a des primes de 10 % qui peuvent être octroyées dans des achats écoresponsables. Mais la question que nous, on se pose, c'est : Quels sont les critères qui sont utilisés? Il y a des critères environnementaux, certes, mais quels sont les critères économiques, quels sont les critères sociaux qui sont pris en considération? Nous, on a posé la question au Conseil du trésor, puis on n'a pas la réponse. On aimerait ça, savoir, parce que, pour nous, on voit certaines aberrations. D'abord, la première question qu'on se pose, c'est : Quelle est la valeur des achats écoresponsables du Québec par rapport à l'ensemble de ses achats de biens et services annuellement? Moi, j'aimerais, ça avoir la réponse, quel est pourcentage. On entend parler des chiffres, et je pense que ça serait intéressant d'avoir... C'est beau de dire : On a 37 programmes, là, ça a été combien, les achats de biens et services qui ont utilisé la pratique écoresponsable en 2013? Puis j'aimerais ça, savoir si c'est plus que 1 % parce qu'on entend parler de 1 %. Premier point.

Deuxième, il y a comme des aberrations... non, il y a comme des moments où on se pose des questions, puis, des fois, ça peut être aberrant. Si vous me permettez, M. le Président, j'ai deux pièces à conviction que j'aimerais déposer. Ça, ça vient d'ici, d'en bas, l'hôtel...

Une voix : ...

M. Leclerc (Denis) : Oui, vous connaissez, vous avez déjà vu, c'est une... Le papier hygiénique que vous utilisez tous les jours provient d'une entreprise scandinave qui s'appelle Svenska Cellulosa Aktiebolaget, quatre usines aux États-Unis, zéro au Québec. Comment ça se fait qu'on a ça au parlement? Quels sont les critères environnementaux, économiques et sociaux qui ont été utilisés pour justifier cet achat? Comment on peut expliquer ça à des Cascades de ce monde et à d'autres entreprises de papier hygiénique au Québec? On est pour le respect de toute entente internationale sur le commerce, oui, mais il y a des fois on se pose des questions sur les critères utilisés.

Le Président (M. Reid) : Merci, c'est tout le temps que nous avons. Merci pour votre présentation.

Je suspends la séance pour laisser le temps aux prochains invités de s'installer.

(Suspension de la séance à 14 h 46)

(Reprise à 14 h 47)

Le Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous recevons maintenant les représentants de l'Institut Hydro-Québec en environnement, développement et société de l'Université Laval. Alors, je vous demanderais de vous présenter et de présenter la personne qui vous accompagne, et on aura 10 minutes pour vous entendre et 35 minutes par la suite pour avoir un échange avec les membres de la commission. Je vous ferai un signe quand il restera une minute pour vous permettre de terminer rapidement.

Institut Hydro-Québec en environnement, développement
et société de l'Université Laval (IHQEDS)

M. Anctil (François) : Parfait.

Le Président (M. Reid) : Alors, à vous la parole.

M. Anctil (François) : Merci beaucoup. Je suis François Anctil, professeur au Département de génie civil et de génie des eaux de l'Université Laval et directeur de l'Institut Hydro-Québec en environnement, développement et société, que l'on nomme communément Institut EDS. Je suis accompagné de Mme Paule Halley, qui est professeure à la Faculté de droit, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit de l'environnement, membre du Barreau du Québec et membre du conseil de l'Institut EDS.

Je vais d'abord prendre quelques minutes pour présenter l'action de l'Institut EDS avant de vous faire part de nos observations concernant le projet de Stratégie gouvernemental de développement durable révisée 2015-2020 qui est à l'étude aujourd'hui.

L'Institut EDS rassemble quelque 80 collègues professeurs de l'Université Laval et, via eux, quelque 400 étudiants inscrits à la maîtrise et au doctorat dans le domaine large de l'environnement et du développement durable. L'institut regroupe aussi des chaires et des groupes de recherche. La force de l'Institut EDS réside dans la qualité de ses membres et dans leur diversité disciplinaire : sociologie, chimie, comptabilité, droit, science politique, éducation, architecture, médecine, génie, philosophie, foresterie et bien d'autres. Cette richesse disciplinaire favorise la recherche, le dialogue et les collaborations entre les nombreux acteurs impliqués sur les rapports entre les systèmes naturel, économique et social et sur l'effet de leurs dynamiques respectives sur la définition et la poursuite du bien commun. Ensemble, il nous est possible d'aborder des thèmes porteurs tels que gestion de l'eau, la biodiversité, les changements climatiques, la gouvernance du développement durable ainsi que les villes et territoires.

L'Institut EDS revendique une plus grande place pour les universitaires sur l'échiquier du développement durable au Québec et dans le monde, notamment en donnant écho aux grands rendez-vous internationaux tels que la Conférence des Nations unies sur le développement durable, Rio+20, les objectifs du développement durable actuellement en négociation, ainsi que Paris Climat 2015 ou encore en discutant des neuf limites biogéochimiques de la terre et d'éthique de l'environnement. À titre d'exemple, l'Université Laval a mandaté l'Institut EDS pour créer son premier cours en ligne ouvert à tous, une formation communément nommée MOOC dont la thématique est le développement durable. C'est dans cette perspective que l'Institut EDS a pris connaissance du projet de Stratégie gouvernementale de développement durable révisée 2015-2020 et désire vous faire part de ses observations.

• (14 h 50) •

Dans l'ensemble, le projet de stratégie 2015-2020 s'inscrit dans la continuité de la précédente stratégie gouvernementale ayant jeté les bases de la démarche de l'administration publique québécoise destinée à instaurer le nouveau cadre de gestion publique requis par les objectifs de la Loi sur le développement durable. Le projet de stratégie prend également acte de certains constats et observations faits au sujet de la démarche de développement durable entreprise jusqu'à maintenant.

Au chapitre des améliorations, il convient de souligner la recherche d'une meilleure coordination de l'action gouvernementale à travers une structure interministérielle de haut niveau hiérarchique et d'un encadrement plus précis de la démarche de l'administration publique en regard notamment de la détermination des enjeux prioritaires et de la quantification des objectifs et des résultats à atteindre.

Nous nous réjouissons particulièrement que le développement de la connaissance et l'innovation ait été identifié comme un des six enjeux fondamentaux à la stratégie 2015-2020, mais nous constatons que le reste du projet donne peu écho à cet enjeu. La stratégie 2015-2020 aurait pu ouvrir la voie à une plus grande collaboration avec le milieu universitaire, d'abord parce que de nombreuses universités dans le monde et au Québec expérimentent la mise en oeuvre du développement durable au sein de leurs organisations, mais surtout parce qu'il y a lieu d'accélérer l'adhésion des universitaires à la réflexion et à l'action sur cette question.

Dans sa présente mouture, le projet de stratégie reconnaît explicitement les besoins en recherche que pour les orientations 7 et 8, qui sont moins bien maîtrisées d'un point de vue technique. D'après nous, la recherche universitaire devrait largement déborder ces seuls thèmes. Par exemple, les travaux de recherche québécois sur la gouvernance du développement durable pourraient épauler toute l'action gouvernementale.

Dans la même veine, nous jugeons opportun de maintenir actif le groupe de partage et de veille sur la recherche en développement durable, une des structures existantes qui favorise la collaboration et la concertation interministérielle. Mais, à nos yeux, ce groupe devrait dépasser le rôle passif de veille et identifier les besoins de l'État en termes de connaissances, pratiques et innovation, ce qui ouvrirait la porte à une plus grande implication d'universitaires à la démarche de développement durable.

Nous comprenons également que la stratégie 2015-2020 doit identifier un nombre limité d'orientations afin d'augmenter les chances de toucher les cibles de manière pérenne et qu'elle vise spécifiquement l'action de l'État. Ainsi, et avec raison, la stratégie fait une place large à la lutte aux changements climatiques, aménagement du territoire, adaptation, mobilité durable, transition énergétique, pour ne nommer que ces actions. Il s'agit d'une limite biogéochimique terrestre que nous avons collectivement dépassée. Il y a urgence d'agir si l'on veut respecter l'objectif général de maintenir la hausse moyenne des températures sous les 2° C par rapport au niveau préindustriel, tel que convenu en vertu d'une entente non contraignante lors de la 16e session de la conférence des parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques à Cancùn en 2010.

Nous jugeons que d'autres limites biogéochimiques de la terre devraient également attirer l'attention de la stratégie 2015-2020. Nous pensons notamment à la perte de biodiversité, à la capacité d'autoépuration de l'hydrosphère et à la pollution atmosphérique de basse altitude, trois sphères naturelles pour lesquelles l'action de l'État doit contribuer au maintien de l'intégrité sur son territoire et pour l'ensemble de notre planète.

Prenons uniquement la qualité de l'air. Le problème est substantiel, puisque l'Organisation mondiale de la santé estime qu'uniquement en 2012 7 millions de personnes sont décédées prématurément des suites de l'exposition à de l'air pollué par diverses activités industrielles, domestiques, dont la combustion de carburants fossiles par les véhicules. Même si la situation au Québec est sûrement moins dramatique, nous ne pouvons nier que des problèmes de cet ordre existent ici aussi.

En terminant, l'Institut EDS salue l'importance accordée à la prise en compte des principes du développement durable, l'action incontournable n° 2. Toutefois, compte tenu qu'il s'agit d'une obligation faite par la Loi sur le développement durable, le projet de stratégie devrait envoyer un message clair et respectueux de la légalité en soulignant que la prise en compte des principes de développement durable est obligatoire pour l'ensemble de l'administration publique québécoise. Il nous semble clair que l'administration publique québécoise devra faire preuve de beaucoup d'ambition dans ses interventions et ses plans d'action pour relever les importants défis que soulèvent l'application et le respect des objectifs de la Loi sur le développement durable. Voilà.

Le Président (M. Reid) : Merci beaucoup. Nous allons passer maintenant à la période d'échange, et je donne la parole au ministre.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, professeurs, au pluriel. Merci pour votre travail. Merci pour votre contribution à nos travaux. Si je vous comprends bien, si on parle de lutte contre les changements climatiques, est-ce que vous êtes d'accord avec la proposition qui dit qu'il y a un travail, justement, d'intégration qui doit être fait entre les actions, déjà, gouvernementales qui ont été mises en place en matière de lutte contre les changements climatiques et le projet de stratégie de développement durable?

M. Anctil (François) : Oui, je suis d'accord que c'est important de traiter la question des changements climatiques, d'abord parce que c'est un problème majeur qui concerne tout le monde, c'est-à-dire pas juste les Québécois, les Canadiens, les Nord-Américains, tout le monde. J'ai tendance à parler de ça en termes de limites biogéochimiques de la terre, c'est des limites du fonctionnement de la planète. Et, si on veut maintenir le fonctionnement de la planète tel qu'on est habitués dans l'ère actuelle, il faut respecter certains seuils. Puis les changements climatiques sont un de ces problèmes que l'on a créés à partir de nos activités, donc c'est important d'adresser cette question-là. Et, si on lie ça au développement durable, bien, en fait, c'est qu'on a d'abord posé des actions, nos actions quotidiennes, qui ont un impact collectivement sur les changements climatiques, ça devient une justification pour le développement durable. Donc, le fait qu'on s'adresse à ce problème-là, le développement durable fait partie, en fait, des solutions.

Si on n'avait pas de problème avec les limites terrestres, si le changement climatique était seulement d'un dixième de degré, on ne serait peut-être même pas en train de parler de cette question-là, puis probablement qu'on tiendrait d'autres discours sur d'autres préoccupations. C'est maintenant une préoccupation qui nous interpelle collectivement, comme société, et donc oui, il faut adresser cette question.

M. Heurtel : Parfait. Le plan d'action sur les changements climatiques prévoit déjà des investissements importants en recherche scientifique. On a d'ailleurs annoncé en novembre dernier une contribution de 4,1 millions de dollars au consortium Ouranos justement, spécifiquement, là, en matière de recherche scientifique. Il y a d'autres mandats qui sont donnés. Évidemment, il y a un corpus scientifique important en matière de changements climatiques, notamment, et en développement durable. On pense notamment aux travaux du GIEC au niveau international. Il y a plusieurs différentes activités de recherche scientifique qui sont faites. Je crois qu'on peut être d'accord avec le principe, en effet, qu'il faut s'assurer — et la stratégie de développement durable devant nous le précise, et vous l'avez souligné, d'ailleurs — qu'il y a une place importante qui doit être faite pour la pour la poursuite de recherche scientifique.

Moi, ce que j'aimerais approfondir avec vous, c'est dans quel domaine plus spécifique, qu'est-ce qui distinguerait... en quoi devrait-on, justement... quel domaine, quelle question plus particulière devrait-on approfondir pour éviter des dédoublements. Parce qu'il y a déjà énormément de recherche qui se fait tant au niveau international que déjà ce qui se fait au Québec, qui se fait au Canada, qui se fait en Amérique du Nord, bref, des... c'est quoi, la spécificité québécoise de la recherche qui est à approfondir ou qui est encore à faire?

M. Anctil (François) : J'aurais deux volets de réponse. Le premier volet, c'est l'interdisciplinarité. Un des problèmes de la recherche universitaire, c'est que son mode de financement standard est disciplinaire. Par exemple, on a des programmes pour les sciences humaines, des programmes pour les sciences et le génie, des programmes pour la santé. C'est très difficile de monter des programmes ou de monter des projets qui couvrent ces trois domaines. Si on applique, par exemple, du côté des sciences et du génie, s'il y a trop de volet social, là on va rejeter le projet. Donc, si la stratégie de développement durable avait à favoriser la recherche, ça serait dans cette perspective de multidisciplinarité. Et c'est, par exemple, c'est une des forces que... L'institut EDS, depuis 10 ans, travaille à valoriser cette recherche interdisciplinaire, et c'est très difficile parce qu'il faut amener des collègues de spécialités différentes. Par exemple, je suis accompagné ici d'une spécialiste en droit, moi, je suis spécialiste en gestion des eaux. Bien, on a des discussions, on a des... pour monter des choses de manière commune, mais c'est peu supporté par les organismes ou par les programmes actuels, et c'est des barrières qu'il faut franchir et qui sont extrêmement difficiles à franchir. Donc, ça, c'est le premier volet de réponse, et je pense que ça, ça devrait être adressé.

Maintenant, pour des spécificités québécoises de développement durable, bien, on peut jouer sur deux niveaux. Premièrement, le développement durable, ce n'est pas juste une question du Québec, hein, il y a une discussion internationale. L'idée même relève d'abord d'un cheminement qui s'est fait au niveau de l'ensemble des États. Mais on entend de plus en plus des discours comme quoi que le développement durable doit être actualisé à des spécificités locales, ça ne devrait peut-être pas être appliqué mur à mur de la même façon. Par exemple, nous, on est beaucoup en contact avec des groupes brésiliens, puis toute la question de l'Amazonie fait appel à des réflexions où les systèmes de protection, par exemple, des parcs à l'américaine ne s'appliquent pas en Amazonie, où il y a des populations qui habitent sur ces territoires-là depuis très, très longtemps. Donc, il faut monter des systèmes différemment.

Nous, on a un territoire qui est également assez spécifique, c'est le Nord-du-Québec. Quand on parlait de Plan Nord, bien, sur toutes ses moutures et versions, il y a toujours une question qu'on rattache ça à faire un développement qui soit durable. Bien, il faudra le définir, qu'est-ce qu'on entend pour un développement durable dans le Nord-du-Québec avec nos spécificités sociales, économiques, environnementales, politiques qui sont là, et ça, c'est quelque chose qui devrait être adressé éventuellement...

• (15 heures) •

Le Président (M. Reid) : Merci. M. le député de Mégantic.

M. Bolduc (Mégantic) : Merci, M. le Président. Écoutez, moi, j'ai une question. Vous avez parlé des limites biochimiques de la terre. Comme vous le savez très bien, vous avez parlé de la Convention-cadre des Nations unies, qui nous demande de limiter à un trillion de tonnes d'ici 2050, on est à mi-chemin. On se fixe des objectifs au Québec de 20 % d'ici 2020, puis est-ce qu'on est réaliste dans l'atteinte des objectifs globaux quand on considère qu'il y a beaucoup de pays du monde qui sont encore en pleine croissance, etc.? Puis comment vous voyez l'ensemble de notre développement? Ou est-ce qu'on devrait changer notre façon d'approcher le problème? Comment vous voyez l'image globale de ça?

M. Anctil (François) : Il va falloir qu'on soit plus radical. Je ne le sais pas quand, je ne le sais pas comment parce que c'est un cheminement de société. Je veux dire, ce n'est pas quelque chose qu'on peut imposer puis dire, du jour au lendemain, par un petit coup de baguette magique, que la société va fonctionner de manière différente.

Un des enjeux importants, c'est la transition énergétique. C'est bien adressé dans la stratégie, on parle de mobilité, on parle de toutes sortes de bases d'énergie, mais cette transition énergétique là n'est pas si simple à faire. On ne va pas arrêter de chauffer nos maisons, par exemple. Donc, comment on peut faire pour faire évoluer nos infrastructures de manière à faire référence à ça? Et ça va nécessiter des investissements, ça va nécessiter de la créativité, ça va nécessiter des visions pour être capable de tendre vers une société qui serait carboneutre. On n'a pas le choix, puis, donc, on est appelés, nous, à le faire, les Européens à le faire, les Chinois. Tout le monde est obligé d'aller dans ce sens-là. Ça ne va pas très vite actuellement, il faut espérer que les choses vont débloquer. Plus on tarde, plus on va être pénalisés.

M. Bolduc (Mégantic) : Est-ce que vous pouvez nous parler un peu plus d'être plus radical? Pouvez-vous me donner une intensité ou une mesure de qu'est-ce que vous voulez dire par «plus radical»? Parce que nous, on essaie d'être dynamiques, là, mais...

M. Anctil (François) : Si on se fie au GIEC, aux projections du GIEC, il faudrait qu'on commence à réduire substantiellement nos émissions idéalement maintenant ou pas beaucoup plus tard que 2020, puis il faudrait qu'il n'y en ait pratiquement plus autour de 2050. Puis ça, c'est les scénarios très optimistes, ils sont bien publicisés. Bon, il y a peu de gens qui croient qu'on va y arriver pour les raisons politiques actuelles, de complexité aussi de cet enjeu.

Je veux dire, le climat, au départ, est un phénomène extrêmement complexe, mais notre société ne l'est pas moins. Donc, on parle vraiment de faire une évolution, qu'il va falloir faire un cheminement, il faut se donner un certain temps par rapport à ça. Mais le gouvernement est nécessairement ici un exemple. Il faudrait donner des exemples, mais il faudrait peut-être éventuellement aller au-delà de ça aussi puis chercher à poser des gestes.

M. Bolduc (Mégantic) : Combien de temps?

Le Président (M. Reid) : Il reste encore huit minutes si vous voulez... Vous avez une deuxième question? Ou M. le député de Dubuc?

M. Bolduc (Mégantic) : Je reviendrai.

M. Simard : Merci, M. le Président. D'abord, je vous remercie de votre mémoire. Bien sûr, à la lecture de votre mémoire, j'ai une question qui... bien sûr, des questionnements de mes collègues également. Mais les institutions universitaires comme l'Université Laval, bien sûr, sont autonomes, mais aussi font partie d'une grande organisation qui s'appelle le gouvernement, il faut bien se le dire, et j'aimerais entendre de votre part est-ce que vous considérez, de façon générale, que l'enseignement et la recherche, dans les disciplines associées au développement durable, sont assez développés ou sont suffisamment développés dans les institutions que vous représentez, bien sûr. Ça, c'est ma première question.

M. Anctil (François) : La difficulté, ce n'est pas en recherche, les gens sont très créatifs. Dans le mémoire, on a cherché à encourager que la stratégie mette en place des moyens pour identifier des pistes pour orienter, piloter. Les chercheurs universitaires ne sont pas tous isolés dans leur bureau, déconnectés de ce qui se passe autour d'eux, là. Ça, c'est le professeur Tournesol dans Tintin. On est contents lorsqu'on est capables de concevoir que nos travaux peuvent avoir des impacts. On est intéressés à faire avancer notre société, d'être des contributeurs. Donc, ça, c'est quelque chose qui nous est utile.

Une des difficultés, c'est la formation parce que, nécessairement, oeuvrer en développement durable, ça fait appel à une multidisciplinarité. Donc, on ne parle pas d'hommes ou femmes-orchestres qui savent nécessairement tout faire, mais il faut être capable d'éduquer maintenant les gens à une ouverture aux autres disciplines. On ne peut plus travailler, par exemple, le droit de manière seule, sans travailler avec d'autres, ou le génie de manière isolée, sans travailler avec les autres. Cette formation-là doit se transmettre, et donc la formation universitaire doit évoluer dans ce sens-là. Et, bien, on a le même syndrome que j'ai évoqué un peu plus tôt pour la recherche, c'est des silos, chaque faculté a son autonomie. Donc, ça demande une créativité dans un contexte qui n'est pas simple présentement, là, en termes financiers. Mais il faut encourager cette créativité-là, de tisser des passerelles entre les facultés, entre les départements, mettre en place davantage de programmes qui sont transdisciplinaires, d'encourager cette ouverture-là. Ça, c'est très important.

M. Simard : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Reid) : Oui, M. le député de Mégantic.

M. Bolduc (Mégantic) : Merci, M. le Président. J'aurais une petite question technique. Elle est peut-être facile, peut-être très compliquée, mais vous parlez d'objectifs de développement durable de Paris Climat 2015 ou en discutant les neuf limites biochimiques de la terre. Pourriez-vous nous élaborer là-dedans parce que je ne suis pas sûr que j'en connais beaucoup?

M. Anctil (François) : Oui. Bien, en fait, là vous me demandez un exercice de mémoire, mais je vais essayer d'identifier ces neuf limites. Il y en a trois qui touchent plus l'atmosphère, donc il y a la pollution de basse altitude, il y a l'amincissement de la couche d'ozone et les changements climatiques. Ensuite, il y en a trois qui touchent plus l'hydrosphère. C'est la qualité des eaux, notre exploitation, donc, en termes de volume, la surexploitation de l'eau, puis il y a toute la question des cycles biogéochimiques de phosphore et d'azote. Donc, par exemple, avec les engrais, on en met beaucoup trop, et ça crée toutes sortes de problèmes. Puis ensuite, au niveau de plus de la biosphère, la perte de biodiversité, l'acidification des océans, puis la dernière, c'est l'expansion des terres agricoles, donc la diminution des forêts, essentiellement.

Donc, à l'intérieur de ces neuf limites-là, on a identifié dans notre mémoire d'autres limites qui, je crois, mériteraient l'attention du Québec. Donc, je pensais notamment à la question de la pollution de basse altitude, qui est un problème qui nous touche. Il y a la question de la qualité de l'eau, bien sûr, qui est aussi un problème qui nous touche, puis, bien, la perte de biodiversité. On fait partie, là, des joueurs qui causent aussi ces problèmes-là. Donc, moi, je dirais qu'en plus des changements climatiques ce seraient ces quatre-là qui me semblent une préoccupation plus grande pour notre territoire. Ce n'est pas que, les autres, on devrait nécessairement les éliminer ou ne pas les considérer, mais il y a moins d'impact sur notre territoire.

M. Bolduc (Mégantic) : Quand on parle de notre structure, des ministères et organismes, je vais vous en donner un, entre autres, on a le ROBVQ, le Regroupement des organisations de bassin versant du Québec, vous savez, qui a été créé il y a quelques années, qui est en train de s'évoluer. Comment vous le voyez s'intégrer, si on veut, dans l'environnement du Québec, là? Parce qu'on a 42 bassins versants au Québec, puis qu'est-ce qu'on devrait faire avec ces organismes-là pour s'assurer qu'on va protéger l'eau, qui est une des grandes richesses du Québec? Comment vous voyez ça?

M. Anctil (François) : Bien, ce qui est intéressant avec le ROBVQ, c'est qu'ils sont en train de se créer un réseau. Ils ne sont pas beaucoup financés, ils n'ont pas beaucoup de moyens, hein? Puis ça, vous l'avez entendu, vous le savez, mais ils se créent un réseau, ils se parlent puis ils s'échangent de l'information. C'est que, tranquillement, ça commence à être un groupe qui a de plus en plus certains potentiels d'amener des idées et de faire circuler de l'information. Donc, malgré les limites, je dirais, financières qui touchent leur fonctionnement, mais aussi des limites, je dirais, à caractère légal... Je veux dire, ils n'ont pas beaucoup d'autorité. Donc, c'est plus une force morale sur la gestion, mais ils font un travail exemplaire à ce niveau-là. Donc, c'est vraiment intéressant de suivre leur évolution, puis je suis convaincu que cette évolution va continuer. On a besoin d'avoir ces systèmes-là en place puis, bien, on a besoin d'une panoplie, en fait, d'interventions.

Donc, par exemple, le ROBVQ fait des choses au niveau du terrain. On a encore besoin... Je vais vous parler des universitaires, mais on a besoin du suivi gouvernemental, on a besoin de tous ces éléments-là pour être capables de faire progresser la gestion de l'eau sur notre territoire. Mais ce qui nous manque curieusement dans notre cas, c'est de l'information un peu factuelle. Maintenant, on a une loi récente qui force la déclaration de l'usage de l'eau. Donc, si j'extrais de l'eau au-delà d'un certain volume, je dois déclarer ces quantités-là, mais on pourrait aller plus loin aussi dans la recherche d'informations. Par exemple, la plupart des usines vont retourner l'essentiel de l'eau qu'elles utilisent, mais on n'a pas cette information-là. Donc, on sait combien d'eau est prise, mais on ne sait pas combien d'eau est retournée alors que c'est une information qu'ils doivent avoir aussi, mais c'est une information qu'on ne collige pas présentement avec la loi.

• (15 h 10) •

M. Bolduc (Mégantic) : Un des problèmes que...

Le Président (M. Reid) : Une petite minute.

M. Bolduc (Mégantic) : Est-ce qu'on a terminé?

Le Président (M. Reid) : Une petite minute, maximum.

M. Bolduc (Mégantic) : Une minute? O.K. Je vais faire ça vite. Un des problèmes qu'on retrouve avec les organismes de bassin versant, c'est que les limites géographiques et les limites politiques, les régions, les territoires, les MRC, etc., ne coïncident pas. Comment vous voyez cet arrimage-là? Parce que ça, c'est un des problèmes physiques qu'on retrouve dans le milieu.

M. Anctil (François) : O.K. Je vais laisser Paule...

Le Président (M. Reid) : Mme Halley.

Mme Halley (Paule): Donc, s'il est question d'intégration des aspects géophysiques du sol sur les dimensions politiques, alors il y avait beaucoup de questions relatives à... Le fait d'avoir intégré la lutte aux changements climatiques dans la stratégie, de la même façon on doit intégrer ces questions de contrôle du terrain, des espèces actuelles qui doivent être prises en compte. Et je pense que donc la stratégie est un très bon moyen parce qu'elle vient de la loi, le gouvernement a beaucoup plus de capacité d'assurer une coordination de ses interventions. Il est évident que c'est des informations stratégiques très importantes qu'on peut tirer de l'eau, beaucoup plus que des divisions politiques. Aussi, elles devraient être prises en compte par les municipalités, par les MRC dans les schémas d'aménagement.

En Europe, on est déjà beaucoup plus avancé sur ces questions-là, où on tient compte des zones noires, des zones où il y a des risques pour la santé, la sécurité des personnes. On dézone, on recule, on fait des changements, on enlève des droits acquis lorsqu'il faut reconstruire des objets ou des biens qui sont détruits par des phénomènes naturels causés par la nature ou par les activités anthropiques.

Donc, je crois que ce sont des partenaires de premier ordre pour toute la question de l'adaptation. Et, malgré qu'elle ne fait qu'une seule page, cette question, dans la stratégie, elle est fondamentale. Et c'est une longue stratégie de cinq ans, et j'espère qu'il n'arrivera pas d'événements qui vont nous faire nous mordre les doigts parce qu'il y aura eu des événements prévisibles si on mettait ces informations factuelles, qui ne sont pas des opinions, c'est des faits qui doivent être pris en compte malgré le fait qu'elles doivent être partagées entre plusieurs acteurs...

Le Président (M. Reid) : Merci.

Mme Halley (Paule) : Je crois que c'est important en matière d'adaptation.

Le Président (M. Reid) : Merci, Mme Halley.

Mme Halley (Paule) : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Reid) : Nous allons passer maintenant à l'opposition officielle, et je donne la parole au porte-parole de l'opposition officielle, le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Merci, M. Anctil, Mme Halley, de l'institut en environnement, développement et société. Vous êtes les premiers, je dirais, plus académiques, en tout respect pour tous ceux qui sont venus avant, mais qui étaient plus des praticiens ou des représentants d'organismes, d'associations, des militants dans certains cas. On va recevoir d'autres chercheurs universitaires avant la fin des travaux. Votre contribution est intéressante, elle met le doigt sur un aspect important qui est — comment je pourrais dire? — un peu de travailler en amont, hein? Quand on pense à la recherche, au développement qui se fait dans les universités, c'est le travail en amont pour être capable de prévenir ou de faire un peu de prospective, au fond, sur les prochains enjeux en matière de développement durable.

Et ce que je comprends de votre mémoire, vous l'exprimez, dans le fond, à la fin de l'avant-dernier paragraphe, là, de la page 2 : «...les travaux de recherche québécois sur la gouvernance du développement durable pourraient épauler toute l'action gouvernementale.» Un petit peu plus loin, à la page 3, en parlant du groupe interministériel, vous dites : «...ce groupe pourrait dépasser le rôle passif de veille et identifier des besoins de l'État en termes de connaissances, pratiques et innovation, ce qui ouvrirait la porte à une plus grande implication d'universitaires à la démarche du développement durable.» Alors, je pense que vous ciblez bien le travail qui doit se faire en amont du côté de la recherche. Et c'est toujours le défi, hein — c'est vrai dans votre secteur, mais c'est vrai dans d'autres secteurs — de faire le pont, autrement dit, entre la recherche et l'action gouvernementale.

Évidemment, en développement durable, on pense beaucoup, par exemple, à des questions plus scientifiques au sens sciences de la nature, là, comme la géologie, l'hydrogéologie, l'hydrographie, les changements climatiques d'un point de vue physique. Mais il y a aussi tout le domaine social ou le domaine juridique, même. Alors, est-ce que vous voyez aussi qu'en termes de développement durable les projets, par exemple, qui se pointent en termes de développement au Québec soulèvent aussi d'autres questions sur, par exemple, les compétences du Québec en matière d'environnement, ultimement, d'un point de vue juridique, qui interpellent le gouvernement fédéral versus le gouvernement du Québec? Est-ce que ça aussi, c'est des domaines — par exemple, sur l'avancée du droit en matière d'environnement — sur lesquels vous pourriez aussi ajouter votre contribution et qu'on pourrait inclure ou envisager dans une stratégie de développement durable de cette nature?

Donc, oui, d'une part, je comprends qu'il y a la recherche scientifique au sens sciences naturelles, mais il y a aussi tout l'aspect plus sciences sociales, sciences juridiques, et comment vous voyez votre contribution de ce côté-là aussi?

Mme Halley (Paule) : Il est évident que c'est très structurant, la question du développement durable, pour l'État. Donc, les gens qui travaillent en sciences sociales, en droit sont intéressés par la démarche fédérale, provinciale, qui pourrait être fédérée également comme démarche, et on écrit, donc, depuis l'avant-projet de loi de 2004 sur cette aventure.

Et je crois que les travaux des universitaires alimentent, ont alimenté la stratégie, alimentent le Commissaire au développement durable, alimentent les constats qui ont été faits et la bonification qu'on tente de faire avec ce projet de stratégie. Et, si on est ici, c'est aussi pour faire cela, pour partager... vous appuyer, vous influencer, les parlementaires, parce que vous avez adopté cet important projet pour la société québécoise, et on est heureux, donc, de répondre à vos questions.

Puis moi, j'ai écrit beaucoup, beaucoup sur cette loi, sur les principes, et, en fait, ce qu'on voit, c'est que l'ensemble du gouvernement du Québec va avoir de plus en plus à rendre compte de ses décisions, de l'ensemble de ses décisions eu égard à la matrice de la Loi sur le développement durable. On voit que ces législations, en Ontario, au fédéral, ça commence au Québec... on a des décisions qui viennent dire que, cette décision, on aurait dû prendre compte de tel principe, puis ça n'a pas été fait.

Donc, c'est des grandes transformations qui ont lieu en ce moment, et je crois donc que le gouvernement du Québec doit être ambitieux, peut-être plus ambitieux que ce qu'il présente présentement, parce que ça va le rattraper. Et les universitaires sont là pour vous rappeler les générations futures aussi. Donc, c'est des personnes qui sont en veille, qui veillent et qui vous surveillent. Et donc il doit y avoir une grande collaboration qui s'établit parce qu'évidemment tout ça, c'est pour aller à la même place, là, c'est pour aller plus loin. Parce que la main qui nous nourrit, c'est les générations futures, c'est la qualité environnementale. Et donc on est toujours très heureux, les universitaires, de pouvoir servir le plus grand nombre, et il ne reste qu'à formaliser ces canaux de collaboration par des conseils, des comités-conseils des autres institutions de cet ordre ou des gens qui viennent de l'extérieur, mais qui ont de l'expertise valable puissent en faire profiter la société très directement.

Le Président (M. Reid) : Merci.

• (15 h 20) •

M. Anctil (François) : J'aimerais ajouter, si vous permettez, que la question sociale touche aussi la question de l'éthique de l'environnement, c'est quoi, notre relation que l'on a comme société ou comme individus avec l'environnement. Puis c'est une question sociale importante parce qu'il y a toute la question juridique, qui est notre cadre de fonctionnement juridique, mais, en fait, on prend plein de décisions basées sur nos échelles de valeurs morales. Puis donc, dans nos gestes quotidiens, c'est bien plus ces échelles-là qui comptent, puis donc toute la recherche et le développement durable nous appellent à modifier notre éthique, modifier notre relation à l'environnement.

Le Président (M. Reid) : Merci. Maintenant, je vais passer la parole au député de Bonaventure, qui a traversé une rude tempête de neige pour réussir à nous rejoindre ici cet après-midi.

Une voix : Changements climatiques.

Le Président (M. Reid) : Changements climatiques obligent.

M. Roy : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Anctil, Mme Halley. Et qui n'avait pas été prévue, soit dit en passant, la fameuse tempête. En tout cas, dans mon cas. Et là je me posais des questions sur la prévisibilité. Fin de la parenthèse.

Vous dites à la page 3 de votre document, et je cite : «Même si les faits scientifiques n'ont pas pour objet de dicter la conduite des [hommes et des femmes] ni de se substituer à la démocratie, ils raffinent notre compréhension du monde...» Comment évaluez-vous votre capacité, en tant que spécialistes de l'environnement, à influencer la classe politique actuellement?

M. Anctil (François) : Je pense qu'il faut percevoir qu'il y a plusieurs joueurs. Puis, par exemple, les scientifiques, par exemple, qui travaillent à des modèles de changements climatiques sont capables de faire des projections sur, par exemple, le climat 2050, puis on peut mettre ensuite en place... Ouranos le fait très bien, met en place toutes sortes de réflexions sur l'adaptation, par exemple, ou sur l'impact des changements. Donc, ça, c'est une première partie.

Maintenant, ces modèles-là, au départ, ne sont pas parfaits et ne le seront jamais parce que le climat est trop complexe, et il y a une part d'imprévisibilité ou d'indétermination dans le climat qui va toujours rester. Ce serait probablement au-delà, là, de ma période de temps pour commencer à rentrer dans les détails qui expliqueraient cette chose-là.

Maintenant, donc, il va toujours rester une part de décision qui ne pourra pas être résolue entièrement par des modèles ou des faits scientifiques, il faut recourir à d'autres outils pour compléter. Ces autres outils là, par exemple, c'est l'éthique, c'est des modes juridiques, c'est nos façons sociales, nos institutions. Puis, bien, vous, comme politiques, vous faites partie de ces décideurs qui avez à prendre les décisions, qui avez à poser des jalons. En contrepartie, ce que je m'attends du politique, c'est qu'il écoute ce qui se passe du côté des scientifiques puis qu'il prenne le temps de l'interpréter, qu'il prenne le temps de s'informer.

Il y a beaucoup de frustrations du côté des scientifiques, qui ont l'impression que beaucoup des résultats ne sont pas mis à profit. Bon, je pense que les scientifiques ne comprennent pas toujours non plus suffisamment bien leur rôle puis aimeraient que... parce que, si on a un résultat, qu'ils voudraient que ça soit mis en place immédiatement. La société est plus complexe. La société a aussi à être prise en compte, et il y a d'autres facteurs, donc, que le climat, par exemple, dans la société, la lutte à la pauvreté, il y a toutes sortes de choses qui sont incluses, les injustices sociales qui sont incluses dans la démarche de développement durable.

Donc, si je résume, il faut avoir tous les joueurs autour de la table et il faut qu'il y ait un respect entre ces joueurs pour être capable d'avancer. Si le politique ne tient pas compte des avancées scientifiques ou des avancées sociales sur la gouvernance, bien, à ce moment-là, tous ces travaux-là ne donnent rien, et toutes ces réflexions ne seront pas utilisées.

Le Président (M. Reid) : Merci. Si vous avez un court commentaire, il reste quelques secondes.

M. Roy : Bien, la question, c'était : Quel est le climat actuellement? Vous nous parlez de respect, mais, sur le plancher des vaches, comment ça se passe? Est-ce que vous sentez que... Vous nous dites : Il y a de l'imprévisibilité, il y a des chercheurs qui sont...

M. Anctil (François) : Bien, dans notre mémoire, ce qu'on souhaiterait, ce qu'on a manifesté, c'est un intérêt qu'il y ait une plus grande place qui soit offerte au monde universitaire dans un esprit de collaboration. Pas dans l'esprit que le monde universitaire doit dicter, mais dans un esprit de collaboration.

M. Roy : Merci beaucoup.

Le Président (M. Reid) : Merci. Nous allons maintenant passer au bloc pour le deuxième groupe d'opposition, et je donne la parole au député de Groulx.

M. Surprenant : Merci, M. le Président. M. Anctil, Mme Halley, bonjour. On parle beaucoup, là, de GES et puis devoir acheter des crédits compensatoires au niveau, donc, de production de ces crédits-là. J'entends des gens, par exemple, qui veulent planter des arbres, qui essaient de travailler avec le ministère des Transports pour pouvoir planter des arbres près des autoroutes pour pouvoir capter, finalement, les crédits carbone et les revendre. Donc, on demande aux entreprises du Québec de compenser par l'achat de ces crédits carbone là, mais de supporter des entreprises du Québec à produire, à capter ces crédits carbone là pour les mettre sur le marché. Il semble y avoir une dichotomie, un peu, là.

La question est vos observations au niveau du support, et l'aide, et puis, donc, les perspectives au niveau de production de droits compensatoires.

M. Anctil (François) : O.K. Ce n'est ni ma spécialité ni celle de ma collègue, mais on va quand même tenter une réponse. Face à la nécessité de réduire notre empreinte de carbone, je crois qu'il faut multiplier les moyens. Et ce genre de moyen où on cherche à mettre en place des mécanismes pour faire une séquestration de carbone, je pense que ça fait partie des moyens qui sont positifs. Il me semble qu'il faut aussi agir à la source, il faut éviter d'abord qu'il y ait des émissions. Donc, si on est capable de modifier nos modes de fonctionnement dans une transition énergétique, c'est aussi une solution. Donc, il faut multiplier ces outils-là. Je pense que ce genre d'outil là peut être intéressant pour des entreprises, mais on n'est pas les mieux placés pour vous conseiller, là.

M. Surprenant : Aviez-vous quelque chose à... Vous voulez rajouter, je pense?

Mme Halley (Paule) : Non, je n'ai rien à ajouter ici.

M. Surprenant : Très bien. Et j'aimerais ça, que vous élaboriez, d'autre part, au niveau de la capacité d'autoépuration de l'hydrosphère. Vous en avez fait état. Si vous voulez élaborer un peu là-dessus, quel est le constat actuel, et puis...

M. Anctil (François) : Bien, le constat, c'est que les écosystèmes dans les rivières ont les mécanismes pour éliminer leurs propres déchets. Donc, c'est aussi simple que ça, si une rivière coule de manière naturelle, en fait il y a différents organismes qui vont éliminer les déchets des autres puis qui vont maintenir une qualité de vie du milieu qui fait que l'écosystème va pouvoir continuer à y vivre. Nous, quand on rejette des déchets, on vient modifier cette dynamique-là puis, donc, on met en péril, si on veut, cette capacité-là, on la dépasse, puis là, bien, on se ramasse avec des problèmes de qualité de l'eau dans nos rivières, qui, soit dit en passant, sont nos principales sources d'approvisionnement en eau au Québec. Mais on peut aussi finir par polluer nos nappes souterraines également.

Donc, c'est juste de concevoir que notre environnement est quand même actif sur la question de la qualité de l'eau. Il y a des systèmes d'autogénération ou d'autorégulation, si vous voulez, qui sont dépassés dès que nos rivières ont des problèmes. Je dirais quand même qu'au Québec il y a eu beaucoup d'améliorations sur la qualité. Maintenant, on traite davantage les eaux urbaines, etc. Il y a eu beaucoup de progrès depuis les années 50, 60, mais ce n'est pas un travail qui est terminé.

M. Surprenant : Donc, vous considérez l'effort suffisant de la part du gouvernement pour...

M. Anctil (François) : De la part du gouvernement, sur la qualité de l'eau, non, il y a encore du travail à faire. Il y a du travail à faire au niveau des normes. Le principal problème est le secteur agricole, hein? C'est que cette pollution-là est beaucoup plus diffuse, elle n'est pas aussi... ce n'est pas un tuyau qui rejette une eau qui n'est pas de qualité, comme pour une industrie ou une municipalité, où c'est plus facile d'agir. Mais le travail n'est pas terminé même au niveau des municipalités et des industries.

M. Surprenant : Merci. Pas d'autre question.

Le Président (M. Reid) : Merci. Alors, merci beaucoup pour votre contribution aux travaux de la commission.

M. Anctil (François) : Merci de l'invitation.

Le Président (M. Reid) : Nous avons terminé notre ordre du jour, et j'ajourne les travaux au jeudi — demain matin — le 29 janvier, donc, à 9 h 30.

(Fin de la séance à 15 h 28)

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