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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Tuesday, March 30, 1982 - Vol. 26 N° 68

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition du président-directeur de la Société québécoise de développement des industries culturelles sur le projet de loi no 54 - Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise de développement des industries culturelles


Journal des débats

 

(Dix heures dix-huit minutes)

Le Président (M. Boucher): La commission des affaires culturelles est réunie pour entendre le président-directeur général de la Société québécoise de développement des industries culturelles relativement au projet de loi no 54, Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise de développement des industries culturelles.

Les membres de la commission sont: MM. Champagne (Mille-Îles), Charbonneau (Verchères), Cusano (Viau), Dupré (Saint-Hyacinthe), Hains (Saint-Henri), Guay (Taschereau) qui remplace Mme Juneau (Johnson), Mme Lachapelle (Dorion), MM. Proulx (Saint-Jean), Richard (Montmorency), Rivest (Jean-Talon), Saintonge (Laprairie).

Les intervenants sont: MM. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Blouin (Rousseau), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Lavigne (Beauharnois), Leduc (Fabre), Bissonnet (Jeanne-Mance) qui remplace M. Sirros (Laurier), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie) qui remplace M. Vallières (Richmond).

Est-ce qu'il y a un rapporteur?

M. Lalonde: Moi, j'aimerais suggérer la députée de Dorion. Est-ce qu'on peut parler vingt minutes là-dessus, M. le Président?

Le Président (M. Boucher): Alors, Mme Lachapelle (Dorion).

Mme Lavoie-Roux: Si vous voulez qu'on fasse un débat, on va le faire. En tout cas, je sais que même si je suis contre, si vous prenez le vote, cela ne changera rien, mais je ne suis pas contre Mme Lachapelle, remarquez bien.

M. Lalonde: Qu'est-ce que cela vaut de donner des "jobbines".

Mme Lavoie-Roux: C'est que, chaque fois qu'il y a une femme à la commission, c'est elle qui a la petite "jobbine" de faire le rapport à l'Assemblée nationale. J'aimerais que vous leur trouviez un autre boulot que cela.

Une voix: C'est fait pour cela.

M. Lalonde: Moi, je suggérerais qu'elle remplace le ministre.

M. Guay: Je ferai remarquer à la députée de L'Acadie que la députée de Dorion fait plus que cela, et la raison est...

M. Lalonde: C'est l'apparence.

M. Guay: ... simple, c'est le seul - pour l'instant - membre de la commission qui est actuellement de ce côté-ci, hormis le ministre; même avec quelqu'un de l'Opposition, si vous voulez, moi, je m'en fous, mais c'est simplement tout autant par défaut, si vous le voulez, ce n'est pas parce que Mme la députée de Dorion est...

M. Lalonde: ...

M. Richard: C'est son assiduité ce matin.

Le Président (M. Boucher): À l'ordre!

Est-ce que le président-directeur général de la Société québécoise de développement des industries culturelles est dans la salle? Si vous voulez vous approcher et prendre place. M. le ministre, vous avez des commentaires?

Remarques préliminaires M. Clément Richard

M. Richard: Oui, M. le Président.

En 1978, l'Assemblée nationale avait créé cette nouvelle société, qui est la Société québécoise de développement des industries culturelles, dont le mandat était à double volet, c'est-à-dire, d'une part, de servir de banquier pour les industries culturelles qui pouvaient difficilement emprunter auprès des institutions financières traditionnelles et, d'autre part, d'avoir un rôle d'initiatrice dans le développement des industries culturelles au Québec. Depuis 1978, je pense que la société a fort bien rempli le double mandat qui lui avait été assigné, sauf qu'il est apparu avec le temps que le capital-actions dont elle disposait s'avérait insuffisant pour lui permettre de remplir comme on le souhaitait son rôle d'initiative. C'est pourquoi, le 16 mars dernier, j'ai déposé à l'Assemblée nationale un projet de modification à la loi qui avait créé la Société québécoise de développement des

industries culturelles. Ces modifications visent essentiellement deux objectifs: d'une part, accroître la capacité d'intervention de la Société québécoise de développement des industries culturelles en augmentant son capital-actions, c'est-à-dire en le doublant, capital-actions qui passerait maintenant de 10 000 000 $ à 20 000 000 $, et en augmentant aussi sa capacité d'emprunter pour reprêter, en somme, à ses propres clients. Ce pouvoir d'emprunt autorisé par le gouvernement serait désormais de 20 000 000 $, ce qui donnerait à la Société québécoise de développement des industries culturelles une capacité d'intervention de l'ordre de 40 000 000 $, lui permettant de mieux jouer son rôle d'initiative.

En même temps - c'est là le second objectif des modifications - il s'agissait d'élargir le mandat de la société pour lui permettre de couvrir un champ que jusqu'à maintenant elle ne couvrait pas, qui est le champ des communications. C'est un champ extrêmement important à l'époque où on parle de télévision payante. À l'époque de la télématique, du Télidon, il est extrêmement important que la société ait un pouvoir d'intervention dans ce domaine qui constitue un secteur de pointe pour le développement des industries culturelles. C'est pourquoi nous avons proposé une modification d'ailleurs au nom même de la société qui deviendrait la Société de développement des industries de la culture et des communications. Nous avons également ajouté un pendant qui pourrait être éventuellement très utile pour régler certains problèmes du parc immobilier du ministère des Affaires culturelles, le patrimoine. Cela pourrait nous permettre aussi d'intervenir dans le secteur du patrimoine bâti.

À la suite du dépôt en première lecture du projet de loi, l'Opposition a demandé de pouvoir entendre, entre la première et la deuxième lecture, le président-directeur général de la Société de développement des industries culturelles, ce à quoi le gouvernement a acquiescé et voilà pourquoi nous nous retrouvons ce matin à la commission parlementaire en présence du président de la société et de son vice-président. Voilà ce que j'avais à dire, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Laprairie.

M. Jean-Pierre Saintonge

M. Saintonge: Merci, M. le Président. Je serai également bref dans mes commentaires du départ. Tout d'abord, je voudrais simplement souligner que l'Opposition apprécie grandement le fait que le ministre ou le leader, que le gouvernement a compris le bien-fondé de notre demande de convoquer la présente commission parlementaire avant la deuxième lecture. Nous remercions également M. Morin d'avoir bien répondu à notre invitation et d'être présent ce matin à la commission parlementaire.

Pourquoi une telle commission parlementaire nous apparaissait-elle souhaitable et nécessaire à ce stade-ci de la discussion du projet de loi 54? Il nous apparaissait primordial, avant de voter les modifications importantes que le projet de loi 54 apporte, de faire le bilan de l'utilité réelle et de l'efficacité administrative de la Société québécoise de développement des industries culturelles, d'examiner sa gestion au cours de ses trois premières années d'existence, de scruter le plan de développement, le style de gestion, les réalisations, en quelque sorte la performance de cet instrument créé par le pouvoir politique et mis au service de la culture.

Cette société et, par extension, le gouvernement, est responsable des fonds publics qui sont mis à la disposition des industries culturelles et doit rendre compte de la manière que cet argent est dépensé. On ne dira jamais assez qu'une structure paragouvernementale comme la Société québécoise de développement des industries culturelles doive se soumettre occasionnellement à un contrôle parlementaire plus rigoureux que la seule obligation qui est faite au ministre des Affaires culturelles de déposer annuellement un rapport de cette société à l'Assemblée nationale. Un examen sérieux du bien-fondé d'une dépense des deniers publics, des objectifs suivis et des projets qui s'y rattachent devrait toujours précéder l'adoption par les députés de cette Assemblée d'une loi qui commande une augmentation appréciable du budget d'une société d'État ou encore un changement d'orientation ou de vocation majeure.

En effet, le projet de loi, tel que le soulignait le ministre et tel qu'on le voit dans les notes explicatives qui y sont incorporées, a pour principaux objets d'augmenter de 10 000 000 $ le fonds social de la Société québécoise de développement des industries culturelles et de permettre au gouvernement de garantir les emprunts de la société.

De cette façon, le fonds social va donc doubler de 10 000 000 $ à 20 000 000 $ et le gouvernement garantira jusqu'à 20 000 000 $ la capacité d'emprunter de la société.

Ce projet de loi élargit également les objets de la société afin de lui permettre de favoriser la création et le développement des entreprises oeuvrant dans les domaines des services de la communication et du patrimoine immobilier.

Nous avons donc élaboré certains points

ou certains thèmes de discussion sur lesquels nous souhaitons dès à présent être en mesure de pouvoir discuter avec le président-directeur général de la Société québécoise de développement des industries culturelles et également avec le ministre des Affaires culturelles sur certains éléments. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Merci.

M. Saintonge: En fait, je voudrais aussi souligner au tout départ que nous avions fait parvenir une liste de certains éléments et de certains documents que nous souhaiterions recevoir. Nous en avons reçu certains assez tard hier soir. Je comprends que, dans le court délai ou le court laps de temps - il faut dire que la commission a été convoquée jeudi dernier - ça ne donnait pas tellement de temps non plus à la société pour préparer la documentation en question. J'oserais espérer que nous pourrions avoir éventuellement le reste de la documentation que nous avons demandée.

M. Richard: M. le Président, nous avons fait l'impossible pour produire tous les documents qui avaient été demandés dans ce court délai. Je pense qu'il reste certains documents qui n'avaient par été produits encore, mais le président-directeur général a en main ces documents, ce matin, je crois.

Le Président (M. Boucher): M. le leader. (10 h 30)

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: M. le Président, 30 secondes seulement pour dire que je voudrais remercier le ministre des Affaires culturelles et le président de l'ex-SODIC d'avoir coopéré avec le ministère des Communications pour faire en sorte que la nouvelle SODICC -avec deux "c" - puisse être créée et qu'ainsi elle puisse donner satisfaction à plusieurs industries de services en communication qui cherchent des moyens de donner suite à des projets qu'elles ont. Je crois que le nouveau mandat de la SODICC, sur lequel nous pourrons probablement discourir au cours de la journée mais sur lequel, déjà, ce matin, nous pouvons commencer à obtenir des éléments de réponse en préparation de notre débat en deuxième lecture, sera certainement de nature à réjouir tous les gens, comme le député de Jeanne-Mance, qui est mon interlocuteur du côté de l'Opposition officielle, en ce qui a trait à l'avenir des industries de services en communication.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. Morin avez-vous des commentaires préliminaires?

M. Guy Morin

M. Morin (Guy): Je voudrais dire bonjour au président et aux membres de la commission. Vous m'excuserez du retard apporté à livrer les documents; je n'ai eu la demande que vendredi. Nous avons fait parvenir les documents dès hier. Il y a quelques autres documents que j'ai en ma possession ici. Je me ferai un plaisir de vous les transmettre en temps venu alors que sur d'autres questions, je crois qu'il y aura des réponses verbales puisque certaines questions ne justifiaient pas de documents.

Les propos de MM. Richard et Bertrand sont assez clairs et évidents. Je me passerai de commentaires additionnels pour ne pas prendre trop de votre temps. Bien sûr, j'aurai l'occasion de commenter au fur et à mesure que les questions viendront.

Le Président (M. Boucher): Merci. Est-ce qu'il y a des questions à adresser à M. Morin?

Rapport des activités

M. Saintonge: Au tout début, si je me rappelle, à l'article 26 de la présente loi, il est spécifié que "la société doit, au plus tard le 30 juin de chaque année, faire au ministre des Affaires culturelles un rapport de ses activités pour son exercice financier précédent". Le dernier rapport financier qui a été déposé en Chambre est celui du 31 mars 1980; je ne crois pas qu'il existe de rapports subséquents. J'aimerais savoir si le ministre peut nous informer de ce qui arrive du rapport financier. Cela fait presque deux ans que nous n'en avons pas obtenu.

M. Richard: Vous avez raison de poser la question, M. le député de Laprairie, je l'ai posée à plusieurs reprises et je crois avoir eu finalement la réponse ce matin. C'est le vérificateur qui tardait à faire les vérifications et à produire le rapport. Je laisserai M. Morin répondre à cela. Apparemment, si j'ai bien compris ce matin, c'est fait maintenant.

M. Morin (Guy): J'ai fait parvenir au ministre des Affaires culturelles, ainsi qu'au ministre des Finances le rapport annuel vérifié que nous avons reçu du vérificateur le 15 mars 1982, après maintes pressions. Il faut dire au crédit du bureau du Vérificateur général, m'a-t-on dit, que souvent de petites sociétés, par rapport aux plus grosses, passent dans le calendrier du vérificateur selon certains critères.

De toute façon, nous n'avons reçu ces états financiers du Vérificateur général que le 15 mars. Je les ai ici, mais je ne crois pas que le ministre les ait transmis à qui de droit. Est-ce que je dois les déposer ou pas?

M. Richard: Je n'en ai pas pris connaissance encore. C'est aussi bien d'attendre, parce que ça doit être déposé à l'Assemblée nationale, normalement.

M. Lalonde: M. le Président, est-ce que ces rapports financiers présentent des caractéristiques spéciales, est-ce qu'il y a des questions extraordinaires de soulevées?

M. Morin (Guy): Est-ce que vous avez terminé?

M. Lalonde: Oui, je m'excuse.

M. Morin (Guy): II n'y a pas de postes spéciaux, de questions extraordinaires ou de notes spéciales. Je ne me permets qu'un petit commentaire à cet effet: dans la deuxième année d'une société de crédit, il est évident que déjà on commence à voir le résultat d'avoir consenti du crédit. Bien qu'il y ait des pertes de montrées - elles justifient une explication, parce que ça viendra ultérieurement - ce ne sont pas des pertes de l'exercice 1981-1982 effectivement. Mais, compte tenu que le vérificateur a pris onze mois et demi à la vérification, il a cru bon de passer aux livres des pertes subies au cours de l'exercice en cours, se terminant dans deux jours. Or, ces pertes qui sont des provisions pour mauvaises créances totalisent environ 741 000 $ dont la moitié a déjà été récupérée. C'est une opération comptable où on verra une perte de 741 000 $ au cours de l'exercice en cours à ce poste. La récupération est déjà de plus de 50% de ce montant et ça s'ajustera avec l'année qui s'en vient. Je me permets de faire le commentaire parce que c'est un extrait des opérations et des états financiers de l'exercice se terminant au 31 mars 1981. Je ne crois pas qu'il y ait autre chose.

M. Lalonde: Est-ce que le ministre peut nous assurer qu'il va déposer le rapport annuel bientôt, parce qu'on va étudier les crédits de son ministère dans quelques jours?

M. Richard: Oui, je peux vous donner cette assurance que le rapport annuel sera déposé dès que j'en aurai pris connaissance.

M. Lalonde: J'aurais une autre question, si vous me permettez. Vous nous avez remis un certain nombre de renseignements. Vous avez soulevé la question des provisions pour mauvaises créances dans le rapport financier du 31 mars 1981. Vous mentionnez le chiffre de 741 000 $. Or, nous avons ici, dans le dossier que vous nous avez remis, une information à savoir qu'au 28 février 1982, la provision serait de 961 000 $. Est-ce qu'il y a moyen de concilier ces chiffres ou est-ce qu'on parle de deux réalités différentes?

M. Morin (Guy): Est-ce que vous vous référez au document où on voit les prêts déboursés et les prêts remboursés?

M. Lalonde: C'est cela, les prêts déboursés et, en bas de la page, en fait, moi, j'ai le chiffre 17 sur la mienne, je ne sais pas si c'est vous qui les avez numérotées, il y a, en deuxième partie de la page: provisions pour mauvaises créances au 28 février 1982, il y a donc un mois. Vous avez six postes qui totalisent 961 976 $ et vous avez mentionné 741 000 $, dont une partie serait déjà récupérée. Alors comment peut-on s'y comprendre?

M. Morin (Guy): C'est qu'à la fin de l'exercice, au 31 mars 1981, vous aviez un montant de 741 000 $, mais, au 28 février 1982, ce montant-là est de 961 000 $, c'est-à-dire environ 220 000 $ de plus en provisions pour mauvaises créances. Il s'agit, bien sûr, de provisions pour mauvaises créances et vous en avez d'ailleurs le détail dans le même document au bas de la page. Ces explications, c'est que, effectivement, onze mois plus tard, le chiffre de 741 000 $ est maintenant passé à 961 000 $ de provisions pour mauvaises créances.

M. Lalonde: J'ai de la difficulté à saisir, j'ai mal compris peut-être votre première explication, M. Morin. Vous avez dit que le vérificateur a tenu compte -même s'il a fermé les livres au 31 mars 1981, étant donné qu'il a fait la vérification dans les derniers mois de l'exercice suivant -de l'expérience des créances pour les analyser, pour voir leur valeur, ce qui les situe autour de 741 000 $, et vous avez parlé de 741 000 $, dont une partie aurait déjà été récupérée. Mais cette partie récupérée est-elle reflétée dans le chiffre de 961 000 $?

M. Morin (Guy): Non, elle n'est pas encore reflétée.

M. Lalonde: Est-ce que...

M. Morin (Guy): Ce sera peut-être une écriture de fin d'exercice, l'exercice se terminant dans quelques jours. C'est que le vérificateur n'a pas souhaité - c'est une pratique comptable qui nous apparaît acceptable - passer les récupérations en même temps que les provisions pour mauvaises créances. Nous avons plaidé, bien sûr, que les provisions pouvaient être passées aussi bien que les récupérations sur ces mauvaises créances potentielles. Le vérificateur a souhaité ne passer que les mauvaises créances; les récupérations seraient passées à la fin d'un exercice au moment des écritures de fin d'année. Il est fort possible qu'avec la fin du mois de mars

et la fin de l'exercice, sur les 961 000 $, nous passions les récupérations déjà faites à même ces 961 000 $.

M. Lalonde: Elles seraient de quel ordre?

M. Morin (Guy): D'environ 350 000 $.

M. Lalonde: Auxquels des six dossiers s'appliqueraient-elles?

M. Morin (Guy): Vous avez la liste dans le bas, monsieur. Vous avez Civicom, où il y a une récupération importante, l'ACDL où il y aura une récupération presque totale, et la compagnie de la Vieille Fonderie où il y aura aussi une récupération presque totale. Pour les deux autres dossiers: Argile Vivante et la Maison d'édition et de publication Univers, les récupérations seront à peu près nulles.

Est-ce que cela répond à votre question, monsieur?

M. Lalonde: Oui, pour l'instant. Merci beaucoup.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Laprairie.

Plan de développement

M. Saintonge: Si je prends le plan de développement de la société, l'article 29 de la loi nous spécifie que "la société doit faire approuver chaque année par le gouvernement son plan de développement... Le gouvernement détermine la forme et la teneur du plan de développement ainsi que l'époque à laquelle celui-ci doit être présenté." Le dernier plan de développement dont nous disposons date du 1er septembre 1980. Je voudrais savoir si ce plan original a été modifié jusqu'à aujourd'hui et s'il y a eu certains éléments de raccordement de faits suivant l'évolution de la situation?

M. Morin (Guy): Nous avons eu une requête du gouvernement pour déposer un deuxième plan - puisque nous devons en déposer annuellement - avant le 1er mai 1982. On entend déposer le deuxième plan de développement pour cette date. Il va de soi que l'articulation d'une stratégie ou d'un plan de développement est très évolutive. À l'intérieur même du plan de développement pour la première année, il y a déjà des priorités d'établies, certains projets de réalisés; le deuxième plan reflétera ce qui est déjà réalisé et ce qui a été modifié quelque peu, en plus de l'ajout de certains projets. Il ne s'agira pas d'un nouveau plan et d'une nouvelle stratégie. C'est strictement un plan évolutif, un plan de développement évolutif.

M. Saintonge: Est-ce qu'au niveau des directives concernant les objectifs et l'orientation de la société qui peuvent être émises par le ministre, vous avez reçu du ministre certaines directives? Si le ministre veut répondre...

M. Richard: Non, depuis que je suis titulaire du ministère des Affaires culturelles, je n'ai pas envoyé de directives à la société au sens de la loi. La seule directive que j'aurais pu adresser à la société, tel que je conçois la directive dont fait état la loi, concerne son mandat. Au lieu d'envoyer une directive, j'ai proposé une modification à la loi. C'est une modification au projet de loi plutôt qu'en élargissant son mandat pour couvrir le champ des communications et le patrimoine. On aurait pu, par exemple, cela été envisagé, le faire par règlement; on a plutôt proposé de le faire par modification à la loi; alors, je n'ai jamais eu à envoyer de directive à la société.

M. Saintonge: Est-ce qu'il y avait un motif particulier?

M. Richard: La meilleure directive que je puisse adresser à la société, c'est de déposer un projet de loi qui élargit son mandat.

M. Saintonge: Est-ce que, parmi vos prédécesseurs, il y a eu certaines directives qui auraient été envoyées? Si le président-directeur général peut me répondre...

M. Richard: Pas à ma connaissance, au sens de la loi.

M. Morin (Guy): Est-ce que je peux savoir, M. le député, ce que vous entendez par directive? Peut-être que je comprends mal le jargon.

M. Saintonge: Disons que c'est suivant l'article 24 de la loi. Il est prévu que le ministre peut, dans le cadre des responsabilités et pouvoirs qui lui sont confiés et des ententes auxquelles il est partie, émettre des directives portant sur les objectifs et l'orientation de la société dans l'exécution des fonctions qui lui sont confiées par la loi. Ce sont des directives de cette nature. On voudrait savoir si vous en avez reçu à quelque époque que ce soit depuis le début du fonctionnement de la SODIC.

M. Morin (Guy): Outre le projet de loi présentement en discussion, je ne crois pas qu'il y ait eu d'autre directive à l'époque du ministre précédent aussi bien que présentement.

M. Lalonde: Dans cette optique-là, M.

le Président, j'aimerais demander au président ou au ministre - étant donné que ça fait déjà deux ans, trois ans; on est dans notre troisième année; vous terminez en fait le troisième exercice demain - quelle est l'utilité de cet article 24 qui permet au gouvernement... Parce qu'on parle du ministre des Affaires culturelles, mais il faut que ce soit soumis au gouvernement. Ce sont effectivement des décrets du Conseil exécutif qui doivent être d'ailleurs déposés à l'Assemblée nationale dans les quinze jours de leur approbation. Quelle est l'utilité de cet article-là après trois ans d'existence? La mise sur pied d'un organisme, c'est toujours plus difficile. Est-ce que vous croyez que c'est utile d'avoir cet article puisque, à la première occasion que nous avons d'examiner la situation, le gouvernement décide de procéder par loi plutôt que par directive? (10 h 45)

M. Morin (Guy): Je ne saurais répondre dans l'affirmative puisque, effectivement, le gouvernement, par la voie de son ministre, ne nous a fait parvenir aucune autre directive qu'une modification à la loi.

M. Lalonde: Vous n'avez jamais senti le besoin d'avoir une directive sur les orientations de la société ou les critères?

M. Morin (Guy): Par voie de directive, je n'en ai pas senti le besoin, mais je m'empresse d'ajouter que nous avons visé autant de complémentarité que possible avec le ministère des Affaires culturelles ou d'autres ministères avec qui nous sommes appelés à communiquer sur une base régulière. Mais notamment avec le ministère des Affaires culturelles, nous avons certainement tenu en cours de route deux ou trois rencontres par année pour évaluer nos différents programmes l'un et l'autre et essayer, dans la mesure du possible, d'être complémentaires pour ne pas partir l'un dans une direction et l'autre dans l'autre direction. Mais les directives comme telles, je n'en ai pas senti le besoin.

M. Lalonde: Ma question peut être hypothétique - vous n'êtes pas obligé de répondre - mais, compte tenu de l'expérience acquise depuis deux ou trois ans, dans quelle situation trouveriez-vous utile d'avoir une directive? Je ne sais pas si vous pouvez évaluer ce que je veux dire.

M. Morin (Guy): Je pourrais essayer de répondre.

M. Lalonde: Oui.

M. Morin (Guy): II y aurait certainement une précision à faire au niveau de la rentabilité et de la définition du terme "rentabilité". Vous savez, rentabilité économique, rentabilité financière, rentabilité culturelle peuvent jouer à des niveaux différents selon les époques et selon la nature des interventions que nous avons à faire. Or, ce n'est pas facile de trouver dans un gouvernement ce que veut dire l'un et ce que veut dire l'autre et comment se marient l'un et l'autre. Dans ce sens, des directives, je ne souhaite peut-être pas en avoir nécessairement, parce que le degré d'autonomie dont nous avons joui a certainement contribué à la réalisation du mandat que nous avons essayé de réaliser le mieux possible. Il n'en demeure pas moins que cette question de définition de rentabilité à des époques données et pour des raisons données pourrait être utile. C'est un exemple de directive.

Il pourrait y avoir également des directives - cela vient lorsqu'on discute avec les hauts fonctionnaires du ministère et avec le ministre - par rapport aux points chauds ou aux secteurs auxquels on doit donner davantage d'importance. Pour des raisons qui nous dépassent, soit pour des raisons politiques ou d'intérêt national, le gouvernement pourrait dire à un moment donné: Privilégiez davantage le secteur de l'audiovisuel par rapport au secteur du livre ou vice versa.

M. Lalonde: À ce moment, vous seriez plus à l'aise d'avoir une directive qui vous le demande?

M. Morin (Guy): On en tiendrait compte.

M. Lalonde: En ce qui concerne la rentabilité, c'est nécessairement très dangereux de suivre les suggestions de l'Opposition, mais si on vous offre une définition de rentabilité, demandez au ministre de la suivre dans son ministère ou au gouvernement de la suivre et vous serez très tranquilles.

M. Richard: M. le Président, je vais répondre à cela. Supposons, pour répondre à une question hypothétique, que l'accent est trop mis par la société sur les métiers d'art par rapport aux livres, ce qui n'est pas le cas présentement, je pense, parce que, comme on le verra tout à l'heure, il y a un équilibre entre les champs d'activité, je pense que le sens de l'article 24, c'est cela, c'est une directive qui dit: Écoutez, ne pourriez-vous pas mettre davantage l'accent sur le livre ou sur le disque et ne pas oublier certains champs d'activité qui sont extrêmement importants?

M. Lalonde: Merci, M. le ministre. Jusqu'à maintenant - cela ouvre la porte à la question suivante - est-ce que vous avez distribué votre aide suivant la demande

surtout ou suivant un équilibre que vous avez essayé d'atteindre entre les divers secteurs? Est-ce que vous pourriez nous raconter comment cela s'est passé jusqu'à maintenant?

M. Morin (Guy): Je suis content que vous m'offriez cette occasion, parce que c'est l'un des grands dilemmes auxquels nous avons à faire face. Au début de la société, il va de soi qu'il y avait une clientèle qui était en attente. Nous avons eu à répondre à un grand nombre d'entreprises que j'appelle les forces vives qui sont venues nous voir. Plusieurs d'entre elles étaient en difficulté financière. Or, le rôle de la société est d'agir en tant que banquier culturel d'une part. Nous avons essayé d'y répondre. La majorité des demandes n'avaient pas été sollicitées, mais elles venaient à nous, alors qu'en réalité, cette démarche est parfois artificielle parce que nous y répondons au mieux de notre connaissance et de nos disponibilités, mais, souvent, cela ne change pas certaines règles du jeu qui doivent nécessairement être changées. La première année et demie, nous avons commencé nos activités effectivement en novembre 1979. Cela fait à peine un peu plus de deux ans. On sent le besoin de poser des gestes reliés à un plan de développement; on en sent le besoin, parce que cela répond à des besoins de poser des gestes. Il faut dire aussi que c'est une jeune société et nous devons faire nos premiers pas. Nous n'avions pas toute l'expertise nécessaire au départ ni même encore aujourd'hui. Je suis prêt à être critique de la société et je suis heureux qu'il y ait des critiques de la société, parce qu'il n'y a pas de modèle semblable ailleurs. On ne pouvait pas s'inspirer du modèle de la Saskatchewan, du modèle américain ou du modèle européen, cela n'existe pas, ce genre de modèle. En réponse directe à votre question, au départ, cela a surtout été des cas où nous étions le banquier culturel. Nos cas d'initiative comme telle, l'initiative de la société, après avoir vérifié avec le milieu et les différentes instances, n'ont pas été suffisamment nombreux. L'accent doit être mis, avec le temps, justement sur l'initiative. C'est donc cela la situation, parce que, entre les années d'abondance que nous avons connues depuis 25 ans où le gouvernement pouvait répondre à peu près à toutes les demandes et la situation économique actuelle, les règles du jeu ont bien changé. Nous ne pouvons pas répondre à toutes les demandes, c'est impossible. On doit être sélectif, on doit surtout viser à réaliser des projets qui changeront les structures pour permettre aux entreprises de mieux se développer.

M. Lalonde: Merci.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Laprairie.

Demandes d'aide financière

M. Saintonge: M. le Président, dans le cas des demandes financières qui ont pu vous être présentées, suivant la demande dans le fond qui vous était présentée, l'équilibre dans les secteurs n'était peut-être pas le point de départ des demandes ou des interventions de la société, mais, dans le cas des demandes financières qui vous ont été présentées, y a-t-il certaines demandes qui ont été refusées? Quel est le nombre de demandes qui peuvent être refusées et le motif de refus des demandes qui peuvent vous être présentées, au niveau de chacun des secteurs évidemment?

M. Morin (Guy): Si vous me permettez, M. le député, je pense que j'ai mal répondu, partiellement en tout cas, à la question posée par celui qui vous a précédé. Les demandes sont venues à peu près de tous les secteurs également, mais je m'empresse d'ajouter que, bien sûr, nous avons répondu négativement à un nombre de demandes. Le critère de refus ou les critères de refus étaient composés de deux possibilités. La première, c'est que, lorsque ce n'était pas recevable, plusieurs cas, au départ, ne sachant pas exactement le territoire de chasse de la société ou les secteurs d'activité, nous ont été présentés, ont été déposés qui étaient nettement irrecevables. Par exemple, l'imprimeur qui s'associe au secteur du livre, pour nous, c'était irrecevable, puisque la SDI pouvait le recevoir. Un grand nombre de cas ont été refusés parce qu'ils n'étaient pas recevables. Il y a une deuxième catégorie de cas qui ont été refusés parce qu'ils ne répondaient pas aux critères financiers ou aux prérequis financiers de la société. Nous visons dans chaque cas une rentabilité financière pour l'entreprise, à court, moyen ou long terme. Mais lorsqu'on ne peut pas percevoir de rentabilité, nous refusons l'aide sollicitée. Malheureusement, dans bien des cas, nous courons des risques beaucoup plus élevés que le banquier traditionnel. On se situe aux deux pôles, à des pôles extrêmes. D'une part, on est un banquier de dernier recours. Cela veut dire que, quand la banque n'y va pas ou n'intervient pas, nous pouvons potentiellement intervenir; on agit comme banquier de dernier recours. Entre les deux se situe la banque et, à l'autre pôle, on intervient en matière d'initiative, mais, là, il s'agit du capital de risque. C'est dans des pôles extrêmes, mais, effectivement, dans un pôle comme dans l'autre, il est arrivé que nous en ayons refusé. Le pourcentage de refus n'est pas si élevé que nous l'aurions cru au départ. Je dirais que c'est à peu près à un ratio de un pour un, une demande autorisée

pour une demande refusée.

M. Saintonge: Est-ce que ça s'équilibre au niveau des secteurs ou si c'est à peu près la même chose que ce que vous avez mentionné tantôt? Est-ce qu'il y a des secteurs plus particuliers où des demandes sont présentées et que vous devez refuser plus souvent?

M. Morin (Guy): Non, je ne crois pas. Il y a un équilibre.

M. Saintonge: Vous avez parlé de rentabilité économique, un des critères qui font que la demande pouvait être refusée, c'est la rentabilité financière de l'entreprise. Vous avez aussi parlé tantôt de rentabilité au niveau culturel. À ce niveau-là, de quelle façon faites-vous le partage entre les deux, l'importance entre les deux, au point de vue de la rentabilité financière et de la rentabilité culturelle? Est-ce que, dans certains cas, c'est plus important au niveau financier ou culturel? De quelle façon jugez-vous ça?

M. Morin (Guy): D'une part, on ne peut pas passer à côté des critères financiers. Nous sommes des banquiers. On agit, en tant que banquier, avec plus de latitude et de flexibilité que le banquier d'une banque à charte ou d'une banque traditionnelle. On ne peut pas passer à côté. Tel que je le mentionnais tout à l'heure, ça peut être rentable ou non. C'est une évaluation d'homme, bien sûr, mais on s'appuie sur à peu près les mêmes critères que ceux du banquier traditionnel; encore une fois, peut-être sommes-nous différents de par notre flexibilité et nos modes de remboursement. Quant au plan culturel, on ne s'approprie ni le privilège ni le droit de poser des évaluations en matière culturelle. Nous ne sommes pas des gens de contenu. Je pense bien que le ministère des Affaires culturelles est habilité de ce côté-là.

Alors, dans chaque cas, on dépose au ministère des Affaires culturelles une demande d'avis sectoriel pour évaluer, sur le plan culturel, quelle est l'importance du dossier, quel est son "back-ground", quelles sont ses possibilités, etc. Il est arrivé au départ, surtout dans la première année, que le ministère n'était pas toujours en position de répondre à toutes ces demandes d'avis sectoriels. C'est normal, parce que la clientèle pouvait être différente entre celle de la société et celle du ministère. Mais le tout s'est rétabli avec le temps et, maintenant, depuis peut-être un an, on a des avis sectoriels dans chaque cas pour répondre sur le plan culturel. Bien sûr, on a une opinion sur le contenant, sur les possibilités et le potentiel, sur les ressources humaines de l'entreprise. Mais, strictement en matière culturelle, on ne veut pas s'approprier ce champ d'activité et on laisse au ministère des Affaires culturelles le soin de donner des avis sectoriels, tout comme on entend le faire, si la loi passait dans le domaine des communications, en s'adressant au ministère des Communications pour des avis sectoriels.

M. Lalonde: Si vous me le permettez, au-delà des demandes d'avis sectoriels, est-ce que vous communiquez ou avez reçu des communications du ministère, du cabinet du ministre, concernant l'à-propos d'accepter ou de refuser telle demande spécifique?

M. Morin (Guy): Je m'en réjouis, M. le député, en deux ans et demi, et je suis le président-fondateur, en aucun temps, un ministre n'est intervenu dans un dossier, excepté une fois, par l'extérieur. Ce n'était pas une intervention, je pense que c'était strictement une question d'intérêt de la part de M. Vaugeois dans un dossier, sur le domaine du livre, où il avait parlé à des journalistes. C'est tout. Jamais ni le ministre qui fut là au départ de la société, M. Vaugeois, ni M. Richard ne sont intervenus dans un dossier. D'ailleurs, M. le député, je l'accepterais très mal.

M. Lalonde: C'est justement, je voulais vous donner l'occasion de le dire.

M. Richard: Maintenant, M. le Président, avec votre permission, j'oserais, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, non pas nuancer, mais apporter un complément d'information aux propos.

M. Lalonde: ...

M. Richard: Oui. Dans certains cas, la loi nous oblige à le faire, quand ça outrepasse le mandat de la société. Donc, dans au moins un cas, j'ai dû intervenir pour présenter le dossier au Conseil des ministres. C'est le seul dossier, à ma connaissance, avec un autre, où j'ai émis un refus. Mais, quand ça outrepasse le mandat de la société, ça doit être approuvé par le Conseil des ministres. Dans un cas, je n'ai pas voulu le soumettre au Conseil des ministres et, dans l'autre cas, je l'ai soumis au Conseil des ministres.

M. Lalonde: Mais quand vous rendez-vous compte que ça outrepasse les pouvoirs du...

M. Richard: 250 000 $, M. le député. (11 heures)

M. Lalonde: C'est pour les montants. À ce moment-là, au-delà de 250 000 $, vous acheminez ça directement au bureau du ministre.

M. Morin (Guy): Premièrement, on le fait autoriser par notre bureau de conseil. Deuxièmement, c'est le ministre qui envoie ça au Conseil du trésor et ça suit le cheminement normal jusqu'au Conseil des ministres.

M. Lalonde: Est-ce que vous avez plusieurs cas au delà de 250 000 $? J'en vois, Civicom par exemple.

M. Morin (Guy): II y en a de plus en plus.

M. Lalonde: II y en a de plus en plus.

M. Morin (Guy): Au départ de la société, la moyenne des demandes était d'environ 5000 $. Est-ce que c'est l'inflation ou le dynamisme de nos entreprises? Je m'en réjouirais. Mais, l'an dernier, la moyenne des demandes était à peu près de 102 000 $ et je dirais que, présentement, ça augmente sans cesse.

M. Lalonde: Votre compte le plus important, quel est-il?

M. Morin (Guy): C'est le groupe Kébec Disc, où nous avons 1 000 000 $ et également le groupe Kébec Spec, où nous avons 980 000 $.

M. Saintonge: M. Morin, suivant un certain document que vous nous avez remis concernant la répartition des demandes d'aide financière autorisées par la société, selon les trois types de cas qu'on peut identifier comme étant en difficulté financière, deuxième cas, développement, et troisième cas, l'initiative, on remarque que votre action a surtout porté dans le domaine des difficultés financières. Elle a surtout agi en tant que banquier culturel, comme vous le mentionniez. Peut-on prévoir que la société a l'intention d'axer peut-être davantage son rôle vers les projets d'initiative ou de développement?

M. Morin (Guy): M. le député, c'est vraiment notre intention. Je mentionnais tout à l'heure d'aller du côté de l'initiative mais on ne peut pas laisser en plan tous les intervenants qui sont dans le milieu à ce moment-ci. Nous pourrions penser à avoir deux sociétés: une qui agirait comme banquier et l'autre qui agirait dans l'initiative ou comme syndicat d'initiative, appelez-le comme vous voulez, mais je ne crois pas que nous puissions arrêter notre action par rapport aux entreprises existantes qui connaissent certaines difficultés. Cela serait une erreur stratégique et il y a trop de forces vives, encore une fois. Notre intention ferme est d'aller le plus rapidement possible vers l'initiative, vers des cas de véritable développement.

M. Saintonge: Au niveau du plan de développement, n'y aurait-il pas lieu au lieu d'avoir deux sociétés, d'en avoir une seule mais qu'une partie des sommes disponibles puisse être affectée directement plutôt vers des projets d'initiative.

M. Morin (Guy): C'est une question d'affectation comptable et l'esprit du projet de loi qui est présentement à l'étude en arrive à cela justement. Le Conseil du trésor recommande que le capital qui sera ajouté serve premièrement à des initiatives, à répondre à nos besoins en développement tandis que le pouvoir d'emprunt serait utilisé davantage pour répondre aux besoins des entreprises en place et qui, à un moment donné, connaissent des difficultés financières ou ont des problèmes de croissance. Mais, de là à scinder la société, il n'en est pas question à ce moment-ci. D'autre part, avoir deux systèmes comptables serait anormal parce que souvent ça chevauche. Vous pouvez consacrer de l'argent à des initiatives et, d'autre part, il y a une partie de ces fonds qui servira à régler un problème de fonds de roulement. Est-ce que c'est un cas d'initiative ou un cas de dépannage financier? Cela peut être l'un et ça peut être l'autre également; alors, on ne peut pas tenir deux systèmes comptables, ça ne serait pas pratique.

M. Saintonge: Ma question n'était pas dans le sens de tenir deux systèmes comptables, c'était plutôt d'orienter peut-être d'une certaine façon l'utilisation des fonds disponibles et d'en réserver plutôt aux chapitres du développement et de l'initiative, par rapport au dépannage afin de peut-être faire état d'une certaine créativité dans le milieu.

M. Morin (Guy): Je rejoins votre propos, M. le député. Non seulement c'est ce qu'on souhetarait faire, mais c'est ce qu'on entend faire avec le prochain plan de développement. Le premier plan de développement n'était pas, faut-il l'avouer, très articulé. C'était le premier plan et il ne pouvait pas être chiffré de façon précise; le deuxième le sera davantage et le troisième aussi et, au fur et à mesure que le plan sera chiffré, ça nous permettra non pas de bloquer des crédits mais de mesurer quelles sommes vont à l'initiative et quelles sommes vont au soutien bancaire.

M, Saintonge: Vous parliez du plan de développement; si on revient à cela, au niveau du plan de développement, si vous aviez à faire le bilan ou à évaluer si les objectifs que vous vous étiez fixés par le plan de développement au niveau de chacun

des secteurs ont été atteints, quelle serait votre conclusion là-dessus?

M. Morin (Guy): C'est peut-être une boutade que je vais faire, M. le député, mais je ne les atteindrai jamais.

M. Saintonge: Sans dire que vous avez atteint complètement, je le comprends, cela peut être utopique, à un moment donné, les objectifs que vous vous étiez fixés au départ pour votre premier plan de développement, si vous aviez à nous faire le partage à ce sujet, la satisfaction que vous avez d'avoir réalisé en partie vos objectifs serait de quelle nature? Est-ce que vous pouvez dire, par exemple: On a atteint nos objectifs dans tel secteur jusqu'à tel point? Ce serait quoi votre évaluation ou votre bilan des réalisations?

M. Morin (Guy): Pour bien y répondre je vais être obligé de prendre quelques minutes. Premièrement, il faut mentionner qu'il y a une absence de statistiques absolument aberrante, pour ne pas dire totale, au Québec, en matière d'industries culturelles. Je défie qui que ce soit de me donner des statistiques précises sur les industries culturelles au Québec; c'est un premier problème. Alors, comment voulez-vous quantifier des objectifs? Ni Statistique Canada d'ailleurs. Prenez l'industrie du disque par exemple. Au cours des dix dernières années, à un certain moment, il y a eu progression et par la suite il y a eu régression du volume de disques québécois, dans le marché québécois, dans son propre marché intérieur. Je pourrais prétendre que le disque québécois dans son marché intérieur, la vente du disque québécois au Québec représente 12% des ventes totales. Je suis persuadé qu'un confrère pourrait dire que c'est 14%, un autre, 13%, et personne ne pourrait contredire l'autre. On n'a que des indications partielles et nous ne sommes pas en mesure d'avoir des statistiques précises. C'est le premier élément en réponse à ceci.

Deuxièmement, on voudrait quantifier... Si l'industrie du disque, pour ne prendre qu'un exemple, la vente de disques québécois sur le territoire québécois était de 12% l'an dernier, on souhaiterait voir une amélioration d'un point par année pendant les cinq prochaines années. Un point par année pendant les cinq prochaines années, en termes de dollars, ça serait plusieurs millions de dollars, pour ne pas dire quelques dizaines de millions de dollars de ventes additionnelles. On peut difficilement quantifier les objectifs d'un plan de développement à cause de cette absence de statistiques; on n'est pas alimenté en statistiques. On ne peut pas avoir ces objectifs.

D'autre part, comment peut-on mesurer notre plan de développement? Bien, on peut le mesurer par, premièrement, une bonne définition de la problématique de chaque secteur, et, deuxièmement, en trouvant des éléments de solution à chaque élément de la problématique et en réalisant des projets reliés à cette problématique, à ces éléments de solution.

Jusqu'ici, notre méthodologie a été la suivante: quand il s'agit d'un élément du plan de développement, il s'agit toujours d'un projet qui aura une influence ou une incidence sur le secteur dans sa totalité. C'est un point majeur lorsqu'on parle du plan de développement. Dès que c'est un point majeur, conscients de nos responsabilités, on pense qu'il est nécessaire, dans la plupart des cas, de faire une étude en profondeur avant de passer à la réalisation d'un projet. Je voudrais l'illustrer par un exemple. Dans le secteur du livre, il est évident, aussi bien au niveau de l'édition qu'au niveau de la distribution, à un degré moindre et certainement au niveau de la librairie, que la rentabilité est devenue pénible, pour ne pas dire très difficile à réaliser. En conséquence, au niveau de la librairie, il nous apparaît nécessaire d'envisager la possibilité d'offrir un service de traitement des données pour les librairies québécoises, parce qu'il y a un problème d'inventaire. Les éditeurs, année après année, augmentent leur nombre de parutions, et le canal ou la passoire normale et logique c'est le libraire chez qui les livres se ramassent et finalement les inventaires gonflent au niveau de la librairie. La gestion de ces stocks devient pénible et parfois plus ou moins efficace, sans tenir compte de la dimension financière du support de ces mêmes stocks. Si vous passez d'un inventaire de 100 000 $ à 150 000 $ parce que c'est gonflé par le flot de livres qui vous est envoyé ou diffusé par votre distributeur ou votre maison d'édition, le libraire a un problème de gestion des stocks.

En conséquence, il nous apparaîtrait logique d'avoir un système de traitement des données, lequel permettrait d'avoir un inventaire beaucoup moins important, tout en gardant un ou quelques livres de chaque titre devant faire partie du choix de livres qu'offre le libraire. On a un projet de traitement des données. Les études préliminaires sont déjà terminées; cela a pris quand même cinq ou six mois pour faire des études de traitement des données au niveau d'une industrie, mais c'est majeur. C'est un projet, dans sa totalité, de 10 000 000 $ pour informatiser la librairie au Québec. Or, notre méthodologie, comme je l'ai mentionné il y a quelques instants, c'est de faire des études avec des informaticiens, des gens de logiciel, des gens de librairie, des gens du ministère des Affaires culturelles et notre société. Dans chaque projet de

développement, c'est notre façon de procéder. Maintenant, on a cinq ou six études en marche au niveau du plan de développement et on a également quelques projets en voie de réalisation.

Le Président (M. Boucher): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vois, dans les documents que vous avez remis, celui qui est numéroté 10 sur les prêts.

M. Lalonde: Ce sont nos numéros.

Mme Lavoie-Roux: Ce sont nos numéros à nous?

M. Lalonde: ... c'est dix sur dix.

Mme Lavoie-Roux: Je vois, comme le signalait mon collègue de Laprairie, qu'un montant important est allé à des prêts pour essayer de résoudre des difficultés financières; dans le deuxième cas, il s'agissait de prêts pour le développement.

Dans le cas des prêts que vous avez effectués pour difficultés financières, pour essayer d'apporter un appui pour résoudre des difficultés financières, pouvez-vous nous dire dans quelle mesure ceci a permis à ces industries de surnager et de repartir d'un bon point ou quel est le pourcentage qui, finalement, a dû fermer ses portes? Pour donner un exemple concret, je vois qu'à la Centrale d'artisanat, vous avez prêté 135 000 $. Je ne voudrais pas m'éloigner sur ce cas particulier, j'y reviendrai après. Mais, sur la question générale, est-ce que cela s'avère fructueux comme méthode d'intervention par la société?

M. Morin (Guy): Dans le cas d'intervention de dernier recours, il est encore prématuré d'établir de façon définitive si on a vraiment été utile. On peut tout au moins dire une chose, c'est que le pourcentage d'échecs m'apparaît infiniment faible. Vous avez d'ailleurs la liste qui a été soumise où nous avions au 28 février 1982 cinq cas inscrits pour fins de mauvaises créances. Sur 70 cas ou quelque chose comme cela, ou pour un l'ordre de grandeur de 70 cas, cela m'apparaît relativement faible quand même. Le pourcentage d'échecs aurait pu être élevé. Vous savez, depuis mon enfance, on a toujours entendu dire que, dans le domaine culturel, ce n'était pas rentable; c'est ce que nous disions. Or, la rentabilité financière des entreprises culturelles, à toutes fins utiles est aussi bonne que la rentabilité financière d'autres secteurs d'activité, et cela le démontre déjà.

C'est une évaluation globale, mais une évaluation un peu plus raffinée permet de dire que, dans bien des cas de difficultés financières, et c'est du dernier recours, nous maintenons certaines entreprises en vie artificiellement. On a vu, dans cinq ou six cas, que nous avons été appelés à intervenir une deuxième et parfois une troisième fois. C'est la règle du jeu des petites entreprises très souvent. Donc, cela nous apparaît nécessaire et cela a été utile jusqu'ici d'intervenir dans le cas des difficulés financières. Mais cela a été davantage utile, je pense, dans les cas, vous le voyez à votre liste, de développement. Lorsqu'on parle de développement, c'est une nouvelle entreprise ou de nouveaux produits ou un projet d'expansion, et cela nous est apparu davantage utile. Mais on n'a pas d'instrument de mesure capable de nous dire si véritablement notre action, dans le cas de difficultés financières, a été, de façon absolue, valable ou pas.

Mme Lavoie-Roux: Dans le sens du nombre de ces entreprises-là, par exemple, qui seraient maintenant fermées, vous pouvez quand même mesurer certaines choses.

M. Morin (Guy): Je crois qu'il y aurait au moins la moitié de celles où nous sommes intervenus à cause de difficultés financières, qui seraient fermées, au moins la moitié.

Mme Lavoie-Roux: Au moins la moitié.

M. Richard: Si Mme la députée de L'Acadie me le permet. M. Morin, peut-être auriez-vous intérêt à parler d'un cas qui est public de toute manière; c'est allé même jusqu'au Conseil des ministres. Kébec Disc, c'est intéressant comme cas de développement.

M. Morin (Guy): Ce n'est pas un cas de dernier recours, c'est un cas d'initiative et, si vous...

M. Richard: C'est cela, par rapport à...

Mme Lavoie-Roux: C'est pour cela que je faisais la comparaison entre les deux. (11 h 15)

M. Morin (Guy): Vous pouvez parler de la Centrale d'artisanat dans un cas de dernier recours ou de Kébec Disc dans un cas d'initiative, pour bien illustrer le cas. Est-ce que ce serait utile de commenter ces deux cas l'un d'initiative et l'autre de dernier recours?

Mme Lavoie-Roux: Je voulais savoir, dans le cas de la Centrale d'artisanat, ce qui vous a incités à prêter alors que, depuis un bon moment, la centrale avait des difficultés financières? Je ne sais pas à quel moment vous avez prêté à la Centrale d'artisanat, en

1979, 1980 ou 1981, l'année n'est pas indiquée - du moins je ne le vois pas -qu'est-ce qui vous a incités à le faire dans ce cas?

M. Morin (Guy): II y a, premièrement, une motivation profonde d'aider une entreprise existant depuis 25 ou 30 ans, d'une part; d'autre part, la Centrale d'artisanat avait son siège social, rue Saint-Denis à Montréal, plus un emplacement à Place Desjardins et un troisième emplacement au Centre commercial Laurier, à Québec. Elle a dû relocaliser ce commerce à la demande du centre. Or, la relocalisation nécessitait des frais d'amélioration locative de l'ordre de 75 000 $ ou 80 000 $. C'est à ce moment que nous sommes intervenus pour permettre la relocalisation, à défaut de quoi on n'avait pas la liquidité nécessaire pour procéder à la relocalisation. D'autre part, au moment où nous sommes intervenus, la centrale, sans avoir un niveau de rentabilité, n'était pas très loin d'un niveau de rentabilité opérationnelle, il y a maintenant environ un an, mais la situation s'est dégradée depuis un an à un point tel que c'était irrécupérable. Les ventes ont chuté de façon terrible et la rentabilité était complètement inexistante; les ventes ont chuté d'au-delà de 35% dans les six derniers mois de l'exercice 1981. À ce moment, la centrale est venue nous voir pour une deuxième et plus importante intervention. On a cherché avec elle toutes les formules pour sauver la centrale. Lorsqu'on ne voit plus de possibilité - cela revient à ce que je disais au début de la matinée - lorsqu'on ne peut pas percevoir une rentabilité financière, on n'intervient plus. À partir de ce moment, nous ne sommes donc plus intervenus.

Mme Lavoie-Roux: Vos premiers 135 000 $ avaient été prêtés il y a au-delà d'un an?

M. Morin (Guy): Oui, environ un an. C'est 100 000 $ en fait.

Mme Lavoie-Roux: Dans le cas des prêts que vous avez faits pour du développement, est-ce que toutes ces entreprises sont encore en affaires?

M. Morin (Guy): II faudrait que je regarde la liste. Vous avez le cas du développement de l'ACDL, elle n'est plus là. Si c'était à refaire, je financerais encore une deuxième ACDL. Je n'hésiterais même pas. Il y a eu un accident de parcours, c'est tout. Si une entreprise est vouée à un échec à cause de considérations organisationnelles ou techniques, cela ne veut pas dire que le concept est mauvais. Or, le concept de l'ACDL était formé de 26 libraires qui y mettaient de l'argent personnellement dans le but de se regouper et de se doter de services. Cette formule ou ce concept nous apparaissait souhaitable et valable.

Malheureusement, ils n'ont pas réussi à se rentabiliser. C'est un échec pour eux et un échec pour nous à la fois. C'est malheureux, mais cela ne veut pas dire pour autant que le concept de se regrouper, pour des individus ou des entreprises, pour se doter de services, soit mauvais. C'était un cas de développement.

Civicom était un cas de développement aussi. Civicom était - je dis bien était parce que c'est au passé - une jeune entreprise qui avait deux fonctions: louer de l'équipement pour fins de cinématographie et de l'équipement pour fins de production de télévision, d'une part; deuxièmement, elle faisait de la production vidéo et de la production audio, deux types de production. Ces gens avaient le vent dans les voiles et justifiaient notre présence dans le dossier. Deux choses se sont produites: le loyer de l'argent au cours des deux derniers exercices a été tel que, n'ayant pas une très grosse capitalisation, l'entreprise a été étouffée par le loyer de l'argent. Lorsqu'on loue de l'équipement, cela veut dire que nous en disposons, il y avait pour environ 2 500 000 $ ou 3 000 000 $ d'équipement dans cette entreprise. D'autre part, elle a été victime du temps. C'est une entreprise qui, si elle était vivante quand la télévision payante arrivera et quand la production augmentera pour les fins de vidéodisques et de vidéocassettes, répondrait de façon éloquente à ces besoins-là. Elle précédait ce marché d'environ deux ans; c'est malheureux quand même qu'elle n'ait pu passer à travers ces deux ans, mais c'était un excellent cas de développement.

Mme Lavoie-Roux: Mais pour les autres, vous n'avez pas de données à savoir si ces gens-là sont encore en affaires?

M. Morin (Guy): Les autres sont en affaires.

Mme Lavoie-Roux: Les autres sont tous en affaires.

M. Morin (Guy): Je crois que oui. M. Lalonde: ... Argile vivante.

M. Morin (Guy): Ce n'est pas vraiment... Est-ce que c'est un cas de développement, Argile vivante?

Argile, oui, Argile vivante également. Alors, vous avez trois cas, les autres sont... Ceux qui ont connu des échecs, vous les avez dans la liste pour provisions de mauvaises créances, les autres étant encore en place.

Mme Lavoie-Roux: Évidemment, l'objectif de la Société de développement des industries culturelles est d'apporter un appui à l'industrie culturelle. Est-ce que, par contre, comme il y a des montants assez importants qui sont prêtés, vous avez pu analyser si ceci avait un impact quelconque, par exemple, sur la création d'emplois? Dans quelle mesure?

M. Morin (Guy): C'est le secteur le plus difficile qui existe pour évaluer le nombre d'emplois parce que la plupart des emplois, la partie importante des emplois créés, ce sont des emplois dérivés. Vous allez dans l'industrie du spectacle, vous financez un producteur de spectacles; il a deux secrétaires, un bureau, etc., mais lorsque la production est faite, il peut avoir 60 ou 50 artistes qui travaillent pour lui pendant une période de trois mois ou de quatre mois, on n'est donc pas en mesure d'évaluer pour chaque production le nombre d'emplois créés.

C'est également vrai dans l'industrie du disque, c'est vrai dans l'industrie du livre; alors, on a de la difficulté à évaluer le nombre d'emplois. Il y a quand même un nombre d'emplois d'évalués au départ en fonction... Le ministère des Affaires culturelles a procédé à une évaluation des emplois directs et au nombre d'emplois indirects créés, mais je dois admettre que c'est quand même très difficile d'évaluer le nombre d'emplois créés de façon permanente. Ce qu'il faut ajouter, madame, c'est qu'il n'y a pas de secteurs d'activité que je sache où le dollar investi permet de créer autant d'emplois parce que la matière première dans le domaine culturel, c'est l'homme et la femme, c'est la personne humaine. Alors que, dans d'autres industries - si je peux me permettre de faire une comparaison avec le nucléaire ou avec les hautes technologies -des sommes importantes sont investies pour créer quelques emplois à peine, le ratio dans le secteur culturel, n'est pas de un à un, un dollar qui s'en va en totalité pour la création d'emplois, mais le plus fort pourcentage s'en va à la création d'emplois, d'autant plus - et je ne devrais pas le dire publiquement - que, dans le secteur des industries culturelles, n'allez pas croire que ce sont tous des Yvon Deschamps et des Jean Lapointe et des auteurs qui font des revenus extraordinaires. Le revenu provenant de l'emploi dans le secteur culturel est relativement faible, malheureusement.

Mme Lavoie-Roux: Juste une dernière question pour le moment. Dans les cas de prêts à des théâtres ou enfin des spectacles, vous avez des gros montants comme à la Comédie nationale, 887 000 $. Dans quelle mesure cet argent-là peut-il être récupéré, parce qu'on sait que c'est presque chronique les difficultés financières des compagnies théâtrales, des compagnies de théâtre? Dans le fond est-ce que vous ne venez pas ici d'une certaine façon dépanner des subventions qu'elles auraient autrement par le truchement du ministère des Affaires culturelles?

M. Richard: Oui, il faut faire une distinction, Mme la députée de L'Acadie, entre les compagnies théâtrales et les propriétaires de salles; il y a une distinction très importante à faire. Il y a des compagnies théâtrales qui se portent fort bien financièrement; d'autres, en tout cas, sont en plus sérieuse difficulté pour toutes sortes de raisons, mais il y a des compagnies théâtrales qui se portent bien, sauf que les propriétaires de salles, cela est autre chose et c'est plus compliqué. Je dirais...

Mme Lavoie-Roux: Est-ce le cas de la Comédie nationale?

M. Richard: Elle est en très sérieuse difficulté.

Mme Lavoie-Roux: Alors, ce sont des prêts plus périlleux, je dirais que, par exemple, lorsque vous prêtez, comment s'appelle-t-il celui à qui vous aviez prêté, Beaudin qui a... c'est la céramique...

M. Morin (Guy): Gaétan Beaudin.

Mme Lavoie-Roux: Pardon?

M. Morin (Guy): Gaétan Beaudin.

Mme Lavoie-Roux: Oui, qu'est-ce que c'est le nom de sa...

M. Morin (Guy): Il était avec Sial.

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est cela. Là il y a peut-être moins de risque. Cela a pris des proportions industrielles, ou du moins je le pense, tandis que, quand vous prêtez à un groupe de théâtre, comme à la Comédie nationale, quelles sont les chances? Je comprends que le ministère des Affaires culturelles peut accorder des subventions pas nécessairement à fonds perdus, mais pour un soutien direct au théâtre, tandis qu'ici c'est de l'argent qui doit être un soutien au développement, à quelque chose de viable. Ce n'est pas une subvention d'appui, si je peux dire.

M. Richard: Ce sont des projets d'immobilisation.

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est cela.

M. Morin (Guy): Madame, je vais répondre par un exemple. Il y a un théâtre à Baie-Saint-Paul, qui est la Vieille Fonderie,

que nous avons présentement dans les mauvaises créances, 40 000 $. Nous avons financé un théâtre. Dans les cas de théâtre aussi bien que dans d'autres cas, nos critères de base, nos prérequis sont les mêmes. Nous visons une rentabilité financière. Si l'entreprise justifie une subvention, elle s'adresse au ministère des Affaires culturelles. Nous ne sommes pas habilités de par la loi à subventionner. On regarde le dossier en fonction d'une rentabilité financière. Nous prenons les garanties qui s'imposent. Dans le cas de la Vieille Fonderie, par exemple, on a pris une hypothèque de premier rang. L'entreprise n'a pas pu faire ses frais et l'entreprise a fermé. On va se porter acquéreur de la bâtisse au cours des prochaines semaines. Nous allons la revendre ou la louer. Nous avons pris une première hypothèque sur la bâtisse effectivement. Dans les cas de théâtre et d'immeuble, ce sont les cas qui me préoccupent le moins, parce qu'on prend, dans la presque totalité des cas, des créances de premier rang et des créances hypothécaires.

Mme Lavoie-Roux: Pas dans le cas de la Comédie nationale.

M. Morin (Guy): Absolument. On a une créance hypothécaire de deuxième rang.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Vous avez commencé à parler tantôt, sur la question du ministre, de Kébec Disc, un projet de développement. J'aimerais vous entendre parler un peu de votre façon de procéder dans ce dossier.

M. Morin (Guy): Kébec Disc est une entreprise que la plupart connaissent et qui a malheureusement perdu son président fondateur il y a quelques semaines dans un accident d'avion. L'entreprise s'appelait à ses débuts Kébec Disc et ne faisait que de la production de disques depuis déjà un bon nombre d'années. L'entreprise est venue nous voir il y a deux ans pour permettre une consolidation de ses opérations de production, pour la soutenir, pour augmenter le nombre de disques d'artistes québécois à être produits, ce qui fut fait effectivement. Je crois que ce sont deux prêts qui ont été faits au niveau de la production. Par la suite, l'entreprise a convenu de se lancer dans un projet de maison de distribution, principalement de disques québécois. Or, il y a un peu plus d'un an, elle a lancé une deuxième maison de distribution de disques qui a, à ce jour, un succès assez étonnant, qui a fait ses frais financiers dès la première année et qui n'a pas connu de perte d'ailleurs au niveau de la distribution de disques québécois, parce qu'on n'est jamais mieux servi que par soi-même. Troisièmement, la même entreprise a continué son intégration en se dotant d'un réseau de détail. Elle s'est portée acquéreur de 19 petits disquaires dans l'Est du Québec, ce qui a permis non pas de compléter la boucle, mais de continuer cette intégration verticale.

C'est la démarche qu'a suivie le groupe Talbot depuis deux ans et ce en collaboration avec nous. Cela nous paraît un projet d'initiative fort intéressant et qui est un modèle québécois en soi. Je me permets d'ajouter tout de suite que ce n'est pas le seul modèle qui devrait être développé dans cette même industrie; qu'il y ait un modèle qui corresponde à un plan de développement ou à une stratégie de la société, j'en conviens, mais cela n'exclut pas d'autres modèles dans la même industrie. Cela n'exclut pas, d'autre part, d'autres groupes ou entreprises qui suivront le même chemin. Il est arrivé que Kébec Disc était en position de le faire. Les résultats sont déjà assez probants. Effectivement, l'entreprise qui, il y a deux ans, faisait moins de 2 000 000 $ comme chiffre d'affaires, aura un revenu individuel, si on prend les trois entreprises, production, distribution et détail, qui, avec l'exercice qui se termine en juillet, atteindra un chiffre d'affaires de près de 9 000 000 $. C'est en moins de deux ans. Cela me paraît intéressant ocmme démarche. (11 h 30)

M. Saintonge: Vous avez parlé de Kébec Disc, de Diskade et de la Maison intégrée. Est-ce que ce sont les trois projets? Vous avez fait allusion à la disparition de M. Talbot. Je remarque qu'au plan de développement, dans un cas, c'est 400 000 $ pour Kébec Disc; 250 000 $, pour Diskade comme initiative, 1 000 000 $ pour la Maison intégrée. Certaines inquiétudes se sont manifestées à la suite de la disparition de M. Talbot. Je ne sais pas si vous en avez eu des échos. Pensez-vous que cela peut affecter ces compagnies actuellement?

M. Morin (Guy): Justement, votre question me permet de commenter la situation. La société travaille en général avec les petites entreprises, mais elle essaie d'être aussi rigoureuse que possible dans son approche. Or, dans ce cas, je me rappelle très bien que cela a coûté 7000 $ de frais d'avocat à M. Talbot pour nous assurer que les livres des minutes étaient en parfaite condition, étaient à jour, pour nous assurer que des assurances couvraient une partie des risques, pour nous assurer que toutes les transactions étaient faites selon les formes. On a été assez rigoureux, assez sévères dans notre approche. Or, il arrive un malheureux

accident et on perd un de nos meilleurs artisans dans l'industrie du disque québécois. Mais sachez, premièrement, qu'il y a une assurance de 400 000 $ ou de 395 000 $ payable à la société et qui va diminuer le prêt d'autant, aussitôt que les assurances seront payées, que tous les livres sont à jour, qu'il y a des assurances de "partnership" et que l'entreprise n'est aucunement en difficulté. Naturellement, on ne perd pas un artisan, on ne perd pas une valeur aussi solide que M. Talbot sans que cela cause un certain préjudice à l'entreprise, mais, grâce à une bonne collaboration de l'entreprise Talbot avec la société et vice versa, et grâce à une certaine rigueur, peut-être que notre attitude a rendu finalement service. Nous n'avons donc pas eu d'inquiétude.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, j'aimerais poser un certain nombre de questions sur les chiffres. Quel a été le développement de votre effectif depuis le dernier rapport financier du 31 mars 1980? Cela fait deux ans; on arrive demain au 31 mars 1982.

M. Morin (Guy): Voulez-vous dire l'effectif humain?

M. Lalonde: Humain.

M. Morin (Guy): Humain. Je suis presque gêné de le dire, M. le député, il y a treize personnes à la société présentement. C'est très peu.

M. Lalonde: Malheureusement, on doit s'en rapporter à des chiffres qui sont vieux de deux ans. J'ai un peu de difficulté à concilier vos chiffres de prêts à 851 000 $. À votre bilan du 31 mars 1980, vous aviez 442 000 $ de dépôts à terme et en caisse. Cela n'était pas encore prêté. Je retrouve des chiffres différents dans vos documents. J'y reviendrai tout à l'heure.

Pour l'effectif, c'est donc treize personnes. Prévoyez-vous la nécessité d'augmenter votre effectif en fonction de l'augmentation du capital?

M. Morin (Guy): Quelque peu, mais une croissance absolument normale. On prévoit, pour l'exercice 1982-1983, d'ajouter trois personnes, effectivement. Notre entrée dans le domaine des communications va nécessiter tout au moins que nous ayons un analyste compétent dans le domaine des communications et des nouvelles technologies. Il y a également l'entrée, je pense - cela m'apparaît opportun à ce moment-ci - d'un spécialiste de l'exportation ainsi qu'une ou deux personnes de soutien, mais c'est tout.

M. Lalonde: Pour revenir aux prêts ou placements que vous avez faits, vous avez trois catégories: les difficultés financières, le développement et l'initiative. En fait, vous nous avez donné les chiffres, je pense, de février. J'ai vu une date il y a quelques minutes là-dessus. Le document Société québécoise etc. Les prêts. Répartition des demandes d'aide financière autorisées par la SODIC selon les trois types de cas suivants: Ces chiffres sont à quelle date?

M. Morin (Guy): C'est au 28 février, je crois.

M. Lalonde: Alors, c'est très récent. M. Morin (Guy): Oui, c'est récent.

M. Lalonde: Vous aviez, à ce moment-là, presque 9 000 000 $ d'engagés. En passant, j'imagine que c'est à cause du fait que votre capital est presque tout engagé que vous avez demandé au gouvernement de l'augmenter? Non?

M. Morin (Guy): Non.

M. Lalonde: Ce n'est pas vous qui avez demandé d'augmenter votre capital?

M. Morin (Guy): Bien oui, c'est nous. Si vous me le permettez, M. le député, c'est nous qui avons demandé d'augmenter le capital. Mais, à la première partie de votre question: Est-ce que tout le capital est engagé, bien sûr qu'on conserve toujours un pourcentage de liquidité.

M. Lalonde: Je voyais 8 700 000 $ à peu près 9 000 000 $, bon. Est-ce que les garanties sont incluses, sont comprises là-dedans?

M. Morin (Guy): Non.

M. Lalonde: Non. Maintenant, je vois que, pour la catégorie difficultés financières, il y a quelques jours, vous aviez près de 4 000 000 $...

M. Morin (Guy): C'est ça.

M. Lalonde: ... 3 975 098 $. Pour la catégorie développement: 3 300 000 $; initiative: 1 300 000 $. Je vois, d'autre part, que, pour les provisions pour mauvaises créances que vous nous avez révélées, il y a cinq cas précis et un montant de 220 000 $ qui est assez général du 1er avril 1981 au 28 février 1982. On retrouve les cas de mauvaises créances dans la catégorie développement surtout, sauf peut-être un que j'ai de la difficulté à trouver, c'est la compagnie Vieille Fonderie, qui est peut-être sous la rubrique Théâtre Baie-Saint-Paul.

M. Morin (Guy): C'est Théâtre Baie-Saint-Paul. Cela a changé de nom.

M. Lalonde: Cela va. C'était aussi dans la catégorie développement. Il n'y a qu'un cas, si je l'ai bien retrouvé, c'est celui de la Maison d'éditions et de publications Univers Inc., qui est peut-être sous la rubrique Univers, 125 000 $, dans la catégorie difficultés financières, qui se retrouve aux mauvaises créances. Est-ce que vous pouvez expliquer de quelle façon vous établissez le caractère mauvais d'une créance? En vertu de quels critères, premièrement, et est-ce que les critères diffèrent suivant que c'est un cas de développement ou de difficultés financières?

M. Morin (Guy): Oui, il y a une politique financière de la société. J'en ai même apporté une copie ici. Ce n'est pas l'endroit pour la déposer, mais ça nous fait plaisir de vous la transmettre. Il y a une politique financière que nous essayons de suivre, bien sûr, qui n'est pas toujours facile à suivre, mais qui est la suivante: c'est que moins il y a de rentabilité financière, plus nous sommes non pas exigeants, mais plus nous prenons les garanties qui existent, parce qu'elles se font rares lorsqu'il s'agit d'un cas de dernier recours. Donc, nous prenons ce que nous pouvons prendre au niveau des garanties. Nous étalons les remboursements, à ce moment-là, de façon non pas à nuire à l'entreprise, mais à lui être utile. Il s'agit d'un cas de dernier recours. Très souvent, dans ces cas de dernier recours, il faut donner la chance à l'entreprise de souffler dans les premiers mois suivant le prêt ou même dans le premier semestre ou la première année suivant le prêt. D'autre part, à l'autre bout de la gamme, lorsqu'il s'agit d'un cas d'initiative, d'un cas qui apportera quelque chose à l'ensemble de ce secteur-là, que ce soit le livre ou les métiers d'art, etc., ce qu'on appelle, nous, le degré de générosité augmente, dans le sens que nous prenons moins de garanties parce qu'il s'agit d'un cas ayant plus d'incidence sur l'ensemble du secteur et, très souvent, qui comporte en soi de meilleures garanties financières. Alors, on peut se permettre d'être moins exigeants dans ces cas-là.

M. Lalonde: Est-ce que vous considérez ça un peu comme un capital de risque?

M. Morin (Guy): C'est du capital de risque.

M. Lalonde: Bon, pour revenir aux cas de difficultés financières, prenons le premier chapitre, les prêts. Vous avez Décormag, 130 000 $ et Librairie Dussault, 800 000 $; c'est un de vos plus importants dossiers. Encore 125 000 $ à Décormag. Comment établissez-vous quand un tel dossier commence à devenir une mauvaise créance? Si vous calculez le caractère de la créance ou la qualité de la créance en fonction des échéances et que l'échéance, parce qu'il s'agit d'un cas de dépannage, est portée au départ, d'ailleurs, assez loin, comment pouvez-vous évaluer, dans votre bilan... Au fond, ce qu'on veut dire quand on parle de mauvaise créance, c'est pour bien évaluer dans votre bilan la créance en particulier, donner une valeur juste à la créance. Il y a toutes sortes de critères que les compagnies financières ont développés au cours des années à savoir le défaut de payer les intérêts à l'échéance, sur une période de 30 jours, 60 jours, 80 jours, etc., et il y a des tables. Je ne sais pas si c'est ça que vous employez mais, lorsque la première échéance, dans un cas de dépannage, est à six mois ou à un an, vous saurez seulement dans un an si vous ne serez pas remboursé ou si vous serez remboursé seulement en partie. À ce moment-là, est-ce que vous ne serez pas dans une situation où il sera trop tard pour intervenir? Aussi longtemps qu'elle n'est pas en défaut, vous ne pouvez pas intervenir envers l'entreprise elle-même.

M. Morin (Guy): On ne peut pas la mettre en défaut si elle ne l'est pas effectivement. Mais, chez nous, ce que nous exigeons de chaque demandeur lorsque nous effectuons un prêt ou une garantie de prêt, c'est de déposer mensuellement des états financiers, non vérifiés bien sûr, vérifiés une fois par année, et nos analystes scrutent mensuellement les états financiers de chaque entreprise.

C'est peut-être là la différence par rapport à une subvention. Une fois la subvention accordée, j'imagine que le suivi de l'entreprise ne s'effectue pas avec la même rigueur alors que, lorsque vous accordez un prêt, notre action commence à ce moment-là; chaque mois, les différents dossiers, à partir de leurs états financiers, sont regardés. Dès qu'il y a une faiblesse par rapport aux prévisions ou dès que la liquidité a diminué, dès ce moment-là, on peut déceler si l'entreprise connaîtra des difficultés et irait jusqu'à un problème qui constituerait un défaut. Naturellement, lorsqu'arrive le défaut, on le signifie. Tel que vous le dites, bien sûr, dans certains cas, lorsqu'on demande le premier versement en capital dans six mois ou dans un an, il est très rare que le défaut pourrait être signifié avant cette date-là. On demande toujours les intérêts mensuels à partir du départ; les intérêts sont payables dès le départ pour tout le monde.

M. Lalonde: S'il y a défaut pour le paiement d'intérêts, comment évaluez-vous la créance à ce moment-là? Est-ce qu'il y a

une sonnette d'alarme qui...

M. Morin (Guy): Un défaut est un défaut. Ce n'est pas une sonnette d'alarme, c'est plus que ça; effectivement, on annonce immédiatement le défaut à l'entreprise.

M. Lalonde: Je ne sais pas si vous avez terminé. En fonction de ce que vous venez de nous décrire, le suivi mensuel des états financiers, le paiement ou le non-paiement des intérêts qui doit être fait mensuellement, pouvez-vous nous donner une évaluation de vos actifs que vous portez à 3 975 098 $ dans la rubrique des difficultés financières? Est-ce que vous croyez que ça vaut 3 975 098 $ aujourd'hui?

M. Morin (Guy): Cela dépend où on se situe. Si c'est en valeur de liquidation, je dirais non, parce qu'en liquidation une entreprise a rarement sa valeur à ses actifs.

M. Lalonde: Je m'excuse, je pense que je me suis mal exprimé. Je pense que tout le monde comprend que je ne demande pas la valeur de liquidation de votre bilan. Je ne pense pas que ce soit dans cette perspective-là qu'on est ici pour étudier ce que vous faites. Je vous demande comment vous évaluez; est-ce que c'est la véritable valeur comptable qu'on doit inscrire à votre bilan du 28 février 1982 pour les dossiers de difficultés financières, 3 975 098 $? Je ne vois qu'un dossier là-dedans, qu'un compte -le compte Univers - de 125 000 $ qui soit dans les mauvaises créances. Je n'en vois aucun autre. Je ne vois aucun iota d'aucun autre dossier qui est enlevé du montant de votre placement. Par exemple, la Librairie Dussault, c'est 799 998 $. Vous n'avez pas enlevé un seul cent; alors, quand ça m'est présenté officiellement ici, je dois présumer que c'est une bonne créance, qu'il n'y a aucun danger, qu'il n'y a aucun défaut, que tout va bien.

M. Morin (Guy): La provision est prise sur un ensemble d'opérations, elle n'est pas uniquement prise sur des cas spécifiques. Au début de l'année, lorsqu'on fait des prévisions, on prend un pourcentage des activités et, comme vous voyez, de 741 000 $, on l'a majoré à 961 000 $, au 28 février, c'est de l'ordre de 220 000 $. (11 h 45)

M. Lalonde: 220 000 $ pour provisions générales?

M. Morin (Guy): Ce montant de 220 000 $ pourrait s'appliquer à des personnes qui ont des difficultés financières, ou à des cas de difficultés financières, qu'on peut retrouver à l'intérieur du chapitre où on retrouve les entreprises en difficultés financières, les cas de développement ou même les cas d'initiative. Outre cette provision pour mauvaises créances, je pense que les chiffres qui sont là sont assez réels.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Si on en reste à la question des difficultés financières, si on prend un cas particulier, je voudrais parler du cas de Aurore Univers, on sait que, l'automne dernier, il y a eu des critiques. La SODIC a été critiquée ouvertement, je pense, par les milieux et non pas par n'importe qui, par l'Association des éditeurs canadiens et par l'Union des écrivains québécois, qui ont traité la société d'incompétente, d'inefficace, de nuisible. On soulignait entre autres qu'"elle nous nuit en s'intégrant dans nos affaires et en prenant en tutelle les entreprises qu'elle doit aider". C'est l'illustration d'un cas de difficulté. Considérez-vous que le prêt que vous avez accordé dans ce cas, si c'était à refaire, vous le referiez. Votre décision, la maintiendriez-vous aujourd'hui? Quelles seraient les réponses aux critiques que vous avez eues à ce moment?

M. Morin (Guy): Effectivement, c'est un cas malheureux qui s'est soldé par un échec, mais c'était au début de la société. C'est un cas que nous avions hérité de la SDI. La demande avait été déposée à la SDI. À l'époque, il y avait la loi 46, je crois, qui permettait de garantir des prêts. Lorsque la SODIC est née, cette loi a été transférée à toutes fins utiles dans la loi de la SODIC; ce dossier venait donc de la SDI. Les demandes de prêts à cette époque étaient beaucoup plus considérables que les montants impliqués. Malgré tout, nous avions demandé à l'entreprise de voir à radier une partie de "ses payables" parce que la situation financière était définitivement mauvaise, au moment où nous l'avons regardée.

La recommandation positive de la SDI de prêter a été contestée à notre conseil d'administration, qui a refusé la décision de la SDI initialement. On a émis de nouveaux critères. Malgré ces nouveaux critères, qui étaient beaucoup plus sévères que ceux de la SDI, cela s'est soldé par un échec. Est-ce qu'on recommencerait l'exercice, s'il y avaitlieu? Avec l'expérience de deux ans et demi, je dis d'une façon non équivoque que c'est un dossier qu'on ne devrait pas prendre; un dossier de même nature, on ne devrait pas le prendre, cela dépassait le dernier recours.

M. Lalonde: Un enterrement! Des frais funéraires!

M. Saintonge: Ce qui m'intéresse grandement, de quelle façon répondez-vous...

M. Morin (Guy): À la critique?

M. Saintonge: ... aux critiques justement où on accusait la SODIC de s'ingérer dans les affaires entre autres de Aurore Univers?

M. Morin (Guy): Je n'ai presque aucune réponse, M. le député, si ce n'est que ce serait commencer de petite polémique. Je vais apporter seulement un élément, si vous me le permettez. Lors de cette conférence de presse, il était question de deux dossiers: Aurore Univers et l'ACDL. Or, ni dans un cas ni dans l'autre, le président de l'ACDL et le propriétaire de Aurore Univers n'étaient présents à la conférence de presse. Et qui plus est, le président de l'ACDL avait été consulté et avait refusé de participer à cette conférence de presse. Je ne voudrais pas commenter davantage ce cas. Les gens qui font de la critique en ont le droit. C'est très sain qu'il y ait de la critique à un moment donné. Je ne veux pas refuter leurs arguments. Il y a sans doute une part de vérité dans cela, mais je n'ai pas d'autres commentaires sur ce sujet, à moins que vous y teniez.

M. Saintonge: Non, c'est parce que je m'interrogeais en fin de compte...

M. Morin (Guy): Si vous y tenez, je vais vous en parler pendant une demi-heure et on va s'en parler sérieusement.

M. Saintonge: La seule chose, M. Morin, c'est qu'on disait quand même que vous vous ingériez, que c'était une sorte de mise en tutuelle, je ne sais pas s'il y a une explication plausible.

M. Morin (Guy): Mais la preuve que la mise en tutelle n'était pas suffisante, c'est que cela s'est soldé par un échec.

M. Lalonde: J'aimerais simplement poser une question générale. Dans tous ces dossiers, actuellement, je sais que vous avez vos problèmes quotidiens. Je présume que vous faites votre boulot, votre équipe aussi. Est-ce qu'il y aurait des cas de dossiers que vous pensez devoir traiter ici? Si, par exemple, dans quelques jours ou quelques semaines, il devait arriver des développements qui intéressent la population, étant donné qu'il s'agit de fonds publics, est-ce qu'il y a des cas où vous pourriez regretter de ne pas nous en avoir avisés? C'est une espèce de confession générale.

M. Morin (Guy): Votre question est délicate, M. le député. Il y a toujours des dossiers chauds, il y en a quelques-uns à la société comme il doit y en avoir à la BFD ou à la Banque Royale. Effectivement, il y a quelques dossiers chauds chez nous présentement. Vous savez, dans un dossier chaud, il faut faire attention, il y a un ensemble de facteurs et un ensemble d'intervenants et les équilibres m'apparaissent nécessaires si on veut essayer de mener à bon port certains projets ou certains prêts que nous avons faits ou certaines garanties de prêt que nous avons consenties. Naturellement, on n'a pas toujours le contrôle entier sur les entreprises, parce qu'elles doivent se débrouiller, voir à leur développement et voir à leur rentabilité, mais le sens que je donne à votre question, qui est très délicate, M. le député, c'est que je pourrais bien commenter quelques cas, mais j'aurais peur d'énerver les gens.

M. Lalonde: Je constate que, comme banquier, vous ne pouvez pas faire affaires sur la place publique. Je reconnais que discuter ici autour de la table de un, deux ou trois dossiers particuliers peut nuire plutôt que d'aider. Je respecte fondamentalement cette attitude, mais il reste que vous administrez des fonds publics et c'est notre devoir de surveiller l'administration que vous en faites, comme le gouvernement doit, lui aussi, s'autosurveiller. Le but de ma question est dans la perspective qu'il y aurait des cas qu'on devrait connaître, mais cela exclut nécessairement ceux que vous pourriez croire devoir protéger par une certaine confidentialité, jusqu'à ce que les choses se règlent. La frontière est assez grise entre les deux, je me fie à votre jugement. Ce n'est pas la question qui est délicate, c'est la réponse.

M. Morin (Guy): II y a un dossier que tout le monde connaît, je peux me permettre un commentaire aussi bref que possible pour ne pas nuire à l'évolution du dossier. Nous sommes intervenus dans le cas des librairies Dussault & Garneau, il y a un an et demi. C'est un dossier chaud, parce que les ventes d'une entreprise de détail ont été mauvaises sur la fin du dernier exercice du calendrier, c'est-à-dire les mois d'octobre, novembre et décembre. Je mentionnais à un journaliste de Radio-Canada, il y a trois semaines - et je rapporte à peu près les mêmes propos, on m'interrogeait sur Dussault & Garneau - que les ventes au détail avaient chuté de 25% à 30% durant cette période-là. Or, dans la librairie, c'est comme dans la plupart des commerces de détail, le dernier trimestre de l'année est le plus important, parce qu'on frappe à la fois la rentrée scolaire et la période des fêtes. Cela représente un fort pourcentage des ventes annuelles. Alors, il y a eu un manque à gagner, s'appuyant sur une pénurie de ventes, de l'ordre de 1 400 000 $ durant ces quatre mois. Cela a été assez général, mais cela

fait davantage mal à une entreprise qui a un problème de liquidité qu'à une entreprise qui n'a pas ce problème.

Deuxièmement, la même entreprise a été obligée d'endosser des stocks au cours de l'année, comme toute autre entreprise dans le même domaine, à un loyer moyen de 21,7%. Cela ne se peut pas; à 21,7%, tout le monde est enclin à prendre des certificats de dépôt, parce que 21,7%, pour endosser des stocks, c'est phénoménal. Alors, il y a une crise dans tout commerce au détail, dans tout le tertiaire, ceux qui manquent de liquidité sont davantage affectés. Nous sommes à chercher des solutions. Quand je dis que nous sommes à chercher des solutions, bien sûr, les gens à l'intérieur de l'entreprise cherchent aussi des solutions. Et l'on collabore avec eux dans le but de trouver des solutions dans ce dossier. Ce n'est pas facile, mais cela revêt pour nous beaucoup d'importance à cause de la nature du dossier et non seulement à cause des montants. Il y a des réseaux de librairies dans une vingtaine de centres commerciaux au Québec, mais il n'y en a pas beaucoup qui appartiennent à des Québécois, je pense que c'est le seul. Alors, on a des ajustements majeurs à faire à court terme dans ce dossier.

Si vous me pemettez, monsieur le député assis à ma gauche, de parler du dossier, vous n'avez pas d'objection?

M. Blais: Pas du tout.

M. Morin (Guy): On a un problème assez sérieux dans le cas de la Comédie nationale. Quand on dit qu'on a un problème assez sérieux à la Comédie nationale, nous n'avons pas de problème à la société. La Comédie nationale a un problème, la société n'en a pas. On a une créance de deuxième rang là-dedans qui, à mes yeux, est sécurisée à 100%. On est drôlement impliqué et on cherche de part et d'autre à trouver des solutions pour qu'il y ait continuité dans une entreprise semblable et que le milieu puisse bénéficier d'une salle polyvalente, comme c'est si important dans Montréal. Je parle sur le plan culturel. Sur le plan financier, la Comédie nationale n'est pas un problème pour la société. Sur le plan culturel, il y a un drôle de problème s'il y a arrêt des opérations. Les artisans de cette salle - je dois leur rendre crédit non pas parce que M. Blais est présentement ici - lorsqu'ils ont construit cette salle, lui avaient donné une vocation et le ministère des Affaires culturelles était d'accord avec cette vocation. Cela répondait à un besoin spécifique à Montréal: une salle polyvalente, pas seulement à des fins de théâtre institutionnel, qui servait aux variétés, aux spectacles de tous genres. Il y avait un besoin. Les coûts des travaux ont été non pas exorbitants, mais ont dépasssé nettement les prévisions; les coûts des travaux ont augmenté partout au cours des dernières années. C'est la principale raison du problème de la Comédie nationale. L'entreprise se retrouve véritablement en difficulté financière à cause des coûts de ces travaux.

Étant donné qu'on a une dimension culturelle, au même titre que le ministère des Affaires culturelles, on ne veut pas laisser tomber la salle puisqu'elle répond à un besoin. C'est là notre dimension culturelle et non pas la dimension financière.

M. Lalonde: J'aurais deux sous-questions. Vous avez dit que le coût des travaux a augmenté; quel a été le taux d'augmentation du coût sur les prévisions?

M. Morin (Guy): C'est compliqué, parce que c'est une salle qui, initialement, était un bureau de poste. Il y a eu un achat d'immeuble et sa restauration. Dans un projet de restauration, de recyclage de matériaux et d'amélioration locative, etc., cela ne se présente pas aussi facilement que si on construit un édifice. Les travaux ont dépassé certainement de 200 000 $ ou 300 000 $ les prévisions initiales. Cela ne m'apparaît pas anormal par rapport à d'autres entreprises qui ont eu à faire face à des coûts de construction à cette même époque.

M. Lalonde: Deuxième sous-question. Croyez-vous, comme président de la société, que votre garantie est bonne, suffisante, dans l'hypothèse la moins favorable, que personne ne souhaite ici, pour que la société puisse récupérer son prêt entièrement?

M. Morin (Guy): M. le député, ma réponse sera technique. On va récupérer 100% ou zéro. Nous sommes au deuxième rang là-dedans avec la Caisse populaire Desjardins, située à Place Desjardins.

M. Lalonde: De combien est la première hypothèque?

M. Morin (Guy): 575 000 $.

M. Lalonde: Vous avez 595 000 $ à aller voir - comme on dit dans le milieu -s'il y a un défaut et si vous ne voulez pas perdre votre garantie.

M. Morin (Guy): On aura peut-être un problème technique dans le sens qu'en étant au deuxième rang, nous serions appelés à racheter la première hypothèque. Selon la machine gouvernementale, il faut aller jusqu'au Conseil des ministres, parce qu'elle dépasse 250 000 $. Cela prend au moins un mois pour aller au Conseil des ministres.

(12 heures)

M. Lalonde: On va vous souhaiter bonne chance avec le Conseil des ministres. Dernière question là-dessus. Au mois de février, il y a donc, quelques jours, vous aviez environ 4 000 000 $ dans des dossiers de difficultés financières sur environ 8 700 000 $ d'engagés. C'est près de 50%. Est-ce que vous avez l'intention de continuer dans cette orientation? Est-ce que, compte tenu des objectifs que vous décriviez dans un document que je cherche... Bon, il est ici, voilà. C'est un document qui est au 31 mars 1980 et il semble que ce soit votre rapport annuel: "Objectifs de la société tels que définis par sa loi constitutive." Je lis: "La société a pour objet principal de favoriser la création et le développement des entreprises culturelles." Les chiffres que l'on voit font état plutôt de la partie dépannage que de la vocation développement ou initiative. Est-ce que vous avez l'intention de poursuivre dans cette voie ou qu'est-ce que vous pouvez faire pour équilibrer davantage et peut-être atteindre... J'enchaîne un peu sur la question du député de Laprairie tout à l'heure. Vous avez eu cette réponse inattaquable, à savoir que vous n'atteindrez jamais votre objectif. Je le comprends, on le poursuit toujours comme un idéal. Qu'est-ce que vous avez l'intention de faire pour imprimer des changements à cette tendance que l'on voit après deux ans et quelques mois de fonctionnement?

M. Morin (Guy): C'est d'accélérer la réalisation de notre plan de développement et d'ouvrir la porte davantage aux initiatives majeures. Notre entrée, si le projet de loi est voté en troisième lecture, dans le domaine des nouvelles technologies, dans le domaine des entreprises de services en communications, va, entre autres, permettre d'accélérer les choses de ce côté-là. Les quautums dans ce domaine-là vont certainement être plus élevés que dans les autres secteurs d'activité; par exemple, en touchant la télévision payante ou des projets de vidéotextes ou de bureautique, des choses semblables, il est pensable que les projets seront importants en soi en termes de dollars et d'impact économique. Alors, notre entrée dans ces secteurs-là va ajouter à notre plan de développement et cela devrait permettre de créer un nouveau rapport entre l'argent mis dans des cas de difficultés financières et dans le cas de développement.

Présentement, c'est environ 50%-50%. On pourrait penser que, sur une base quinquennale, par exemple, 75% iront vers l'initiative et 25% vers des cas de dépannage, mais cela va se faire graduellement, parce qu'on ne peut pas laisser tomber les autres cas.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Terrebonne, avec la permission des membres de la commission, étant donné qu'il n'est pas inscrit.

M. Lalonde: Ah oui, sûrement. On est toujours heureux de l'entendre...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Terrebonne.

M. Lalonde: ... sans partager nécessairement ses opinions.

M. Blais: Je vous remercie beaucoup, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. J'aurais une question à poser. Vu que maintenant la SODICC va faire un ajout qui est la communication, n'y aurait-il pas danger, dans l'évolution des prêts et des entreprises à subventionner ou à aider, que la majeure partie de l'argent aille aux communications, mais que le secteur directement "culturel", en souffre? En effet, du côté communications, vu l'évolution des vidéocassettes, etc., vu que ce qui est cinématographique et que tout ce qui est visionnel est plus rentable que le domaine dit "strictement culturel", n'y aurait-il pas un danger que les entreprises strictement culturelles souffrent d'une nouvelle orientation possible de la SODICC dans ses investissements et ses prêts?

M. Morin (Guy): II y a effectivement un danger, M. le député. Il s'agit de maintenir un équilibre aussi solide que possible des montants utilisés dans un secteur par rapport à l'autre secteur. Mais tel que je viens de le mentionner, il est certain que les nouvelles technologies et les services en communications vont drainer une bonne partie des montants. Moi, mon postulat est le suivant: c'est que, dans le secteur culturel, on a la démonstration à faire que c'est rentable économiquement. Si on est capable de démontrer avec le temps une rentabilité économique du secteur culturel, on aura fait au Québec un pas extraordinaire parce que le secteur culturel est capital ici de par le fait français, de par notre culture, etc. Si on est capable de relever ce défi en démontrant une rentabilité économique du secteur culturel, moi, je fais confiance au gouvernement que, si on manque de fonds, nous reviendrons alors au gouvernement, qui se fera un plaisir de trouver des moyens pour ajouter aux capitaux nécessaires. Pour ce faire, il faudra qu'on fasse la démonstration de notre rentabilité en tant que société et de la rentabilité des entreprises avec lesquelles on fera affaires. Jusqu'ici, je n'ai pas à m'inscrire en faux contre l'action du gouvernement, ni du ministre de tutelle, parce qu'effectivement je n'ai pas eu de blocage sur le plan financier puisqu'à ce jour nous avons eu les fonds

nécessaires. Si on vient devant le législateur pour avoir des fonds additionnels, c'est parce qu'on voit des besoins additionnels et qu'on veut accélérer la machine. On peut accélérer la machine mais, si on fait mal, on ne reviendra pas vers le gouvernement pour des fonds additionnels. Si on revenait en ayant mal fait, nous n'en aurions pas. Si on démontre une rentabilité économique, je ne vois pas pourquoi le gouvernement ne mettrait pas des cents additionnels dans une société d'État qui défend à la fois le secteur culturel et le secteur des industries culturelles dans son ensemble.

M. Blais: Est-ce que je peux faire une suggestion, s'il vous plaît? Je ne vous blâmerai pas, en tant que président-directeur général de SODICC, de mettre beaucoup plus d'argent dans le secteur des communications directes, parce que vous voulez prouver que votre société est rentable, viable, etc. Cependant, la crainte que la très grosse majorité aille vers les entreprises de communications et que le secteur culturel en souffre, cela reste en plan pour moi dans votre réponse.

M. Morin (Guy): Je ne peux pas vous donner une réponse. Je n'ai pas véritablement la réponse à votre question, M. le député. Je dis qu'on devrait essayer de maintenir un équilibre. Si vous me permettez, juste une petite nuance. J'identifie les nouvelles technologies dans le secteur des entreprises de services en communications comme étant aussi des entreprises faisant partie des industries culturelles. Je ne les vois pas hors des industries culturelles. On n'entre pas dans un autre univers quand même. Lorsque vous allez véhiculer par satellite des éléments culturels, vous allez recevoir par satellite des éléments à caractère culturel. Je pense que c'est un contenu qui s'identifie justement à une culture. Je ne dissocie pas, mais j'associe au contraire les entreprises de services en communications comme étant des entreprises faisant partie des industries culturelles, mais qui ne sont pas les industries traditionnelles.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Richard: M. le Président, je voudrais apporter un complément de réponse au député de Terrebonne. Une des raisons pour lesquelles j'ai demandé au Conseil des ministres un accroissement de la capacité d'intervention de la société, qui passe de 10 000 000 $ à 40 000 000 $, c'est précisément parce qu'en même temps je demandais que la société soit appelée à couvrir le champ des communications. D'autre part, ce qui m'apparaissait important, c'est que nous soyons présents au niveau du software. Au niveau du hardware, en matière de communications, il est presque déjà trop tard. Au niveau du software, nous avons toutes les ressources disponibles pour être présents; en plus, non seulement nous avons les ressources, mais nous avons une compétence assez remarquable. Donc, il faut être présents. Cela veut dire l'aide directe à des créateurs pour être présents au niveau du software. C'est essentiellement culturel. S'il s'agit de monter une émission ou une série d'émissions pour la télévision payante et qu'on aide une entreprise qui le fait, on aide directement les créateurs, on aide directement des comédiens, par exemple. Cela reste essentiellement culturel. Cela vise à assurer notre présence au niveau du software, à tout le moins.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Changement de nom

M. Lalonde: M. le Président, pour enchaîner avec les deux dernières réponses -je m'excuse auprès du député de Laprairie, parce que je sais qu'il a d'autres questions -si, comme le président de la société le dit -c'est confirmé par les propos du ministre -c'est plutôt le caractère culturel des entreprises de communications qui va faire l'objet de l'attention et de l'aide de la société, pourquoi avons-nous changé le nom? Pourquoi ajouter au nom de la société le mot "communications" si c'est en fait le contenu culturel qu'on veut aider. Deuxièmement, combien va coûter ce changement de nom?

M. Morin (Guy): Pour la première partie de la question, cela va coûter 1100 $.

M. Lalonde: 1100 $. Vous n'avez pas de papeterie, tout cela, etc., et des sigles un peu partout?

M. Morin (Guy): Cela va coûter 1100 $ M. Lalonde: Vous l'avez évalué?

M. Richard: M. le Président, la question du député de Marguerite-Bourgeoys est fort pertinente, parce que j'avais commencé par opposer une fin de non-recevoir à la demande de changement de nom sous prétexte qu'il y aurait des coûts extrêmement importants. J'ai fait communiquer avec le président-directeur général de la SODIC. Il m'a dit qu'il n'y avait pas de coûts importants, 1100 $. Vous avez raison, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, peut-être que ce ne serait pas absolument nécessaire, mais cela permet quand même aux entreprises de

communications de savoir que, maintenant, la Société québécoise de développement des industries culturelles peut leur rendre service, parce qu'autrefois - et encore aujourd'hui, tant que la loi ne sera pas modifiée - la société ne couvrait pas ce champ, elle n'était pas mandatée pour couvrir le champ des communications. Cela permet de faire connaître, en quelque sorte, le fait que nous nous apprêtons à élargir le mandat de la société.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Laprairie.

Intérêts dans des entreprises culturelles

M. Saintonge: Dans le dernier rapport du vérificateur, il y avait certains commentaires concernant l'article 15 de la loi où il est stipulé, entre autres, que tout membre du conseil d'administration doit, sous peine de déchéance de sa charge, "communiquer au ministre des Affaires culturelles et au conseil d'administration une liste des intérêts que lui ou son conjoint détient dans toute entreprise culturelle, avec un relevé des opérations ayant modifié cette liste au cours de l'année." Le vérificateur disait: "Notre vérification nous a permis de constater que certains membres du conseil d'administration ne se sont pas conformés à cet article." Évidemment, dans le commentaire de la société, on reconnaît que deux administrateurs n'avaient pas fait parvenir encore la liste de leurs intérêts dans des entreprises culturelles, bien qu'ils aient été requis de le faire par courrier recommandé. Est-ce qu'aujourd'hui ces gens se sont conformés à cela?

M. Morin (Guy): Ils s'y sont conformés.

M. Saintonge: Je ne suis pas sans ignorer que, dans les documents que vous nous avez fait parvenir hier, c'était indiqué effectivement que les gens s'y étaient conformés en date du 22 mars 1982. C'est même après le dépôt du futur projet de loi 54. Qu'est-ce qui explique ce délai, d'une part? La deuxième partie de ma question, c'est ceci. Dans les réponses que nous avons eues, on indique que tous les administrateurs se sont conformés, mais l'obligation de l'article 15 s'applique également au conjoint d'un administrateur. Pouvez-vous nous dire si les conjoints des administrateurs ont fait la déclaration ou si les administrateurs ont fait la déclaration relativement aux intérêts de leur conjoint?

M. Morin (Guy): Premièrement...

M. Richard: Je m'excuse, M. le Président, l'article 15, M. le député de

Laprairie, ne dit pas cela; ce qu'il dit, c'est que c'est le membre du conseil d'administration qui doit déclarer que lui ou son conjoint...

M. Lalonde: C'est cela.

M. Saintonge: C'est ce que j'ai mentionné.

M. Richard: Mais l'obligation ne s'applique pas, comme vous l'avez formulé, au conjoint.

M. Saintonge: Non, mais j'ai corrigé en chemin. J'ai dit que j'avais dit "au conjoint," mais j'ai spécifié que c'était la déclaration de l'administrateur sur les intérêts de son conjoint.

M. Richard: D'accord, je m'excuse.

M. Saintonge: Je comprends qu'il n'y a pas d'obligation pour le conjoint de déclarer, il n'est pas partie à la corporation.

M. Morin (Guy): En réponse à la première partie de la question, l'an passé, effectivement, deux administrateurs n'avaient pas remis leur déclaration d'intérêts à la suite de deux lettres recommandées leur demandant de déposer leur déclaration d'intérêts. Il ne faudrait quand même pas remercier des gens qui travaillent presque bénévolement, les remercier de leurs bons services parce qu'ils ont déposé leur déclaration d'intérêts en retard. Cela s'est corrigé l'année suivante, effectivement. Mais, il faut revenir à la charge chaque année, une, deux, trois et quatre fois, pour obtenir les déclarations d'intérêts. Ce sont toujours les mêmes, sans méchanceté pour ces gens-là, qui sont en retard pour faire des déclarations d'intérêts et ce sont toujours ceux qui n'en ont pas d'intérêts, justement. Mais, de toute façon, on a... Tout le monde a fait sa déclaration et, effectivement, nous les avons en main et nous les avons données au ministre.

M. Saintonge: Leurs intérêts personnels ainsi que ceux de leur conjoint.

M. Morin (Guy): Oui.

(12 h 15)

M. Saintonge: Maintenant, dans les documents que nous vous avons requis de fournir, la liste d'intérêts que les membres du conseil d'administration ou leur conjoint détiennent, on aimerait que vous puissiez déposer copie de cette liste-là. Vous engagez-vous à nous fournir cette liste-là?

M. Morin (Guy): Je pose la question naïvement, M. le député, est-ce que... La confidentialité des intérêts des

administrateurs, je voudrais essayer de la maintenir presque à tout prix. Si c'est normal, logique et souhaitable que ce soit déposé, je vais le faire, mais je voudrais éviter de...

M. Lalonde: Je pense, M. le Président, qu'on comprend, moi, personnellement, je comprends votre hésitation. D'ailleurs, selon la loi - et je pense bien que le député de Laprairie l'a reconnu - l'obligation est faite aux membres de communiquer les listes au conseil d'administration et au ministre des Affaires culturelles. En ce qui nous concerne, notre devoir de surveillance, on le fera porter plutôt sur le ministre que sur le président de la société. On peut poser la question au député de Laprairie ou au ministre, maintenant.

M. Richard: M. le Président, je n'ai pas d'objection à déposer ça puisque je les ai eues ce matin, elles m'ont été remises. Je voudrais simplement faire état de la réserve qu'il y a, à l'article 15, qui dit: "Les renseignements fournis en vertu du présent article sont confidentiels et il est interdit de les communiquer ou de permettre qu'ils soient communiqués à une personne qui n'y a pas légalement droit." Alors, j'estime que "légalement droit," ça doit s'appliquer aux parlementaires, au premier chef, j'en suis bien conscient, sauf que je voudrais tout simplement que vous soyez conscient de l'impact que cela peut avoir, dans l'avenir, sur la nomination des gens. Il va devenir difficile de nommer des administrateurs au conseil d'administration parce qu'il faut une certaine confidentialité. Je n'ai pas d'objection, si vous insistez, je n'ai pas la moindre objection à vous faire prendre connaissance de cela.

M. Lalonde: L'idée n'est pas d'insister pour insister, ce n'est pas une question de curiosité, simplement, de la part de l'Opposition, je pense qu'on a...

M. Richard: Je pourrais vous les montrer confidentiellement et, si vous voulez intervenir dans un cas ou l'autre, vous jugerez.

M. Lalonde: M. le Président, en ce qui me concerne, un député de l'Opposition ne peut pas accepter de surveiller confidentiellement le gouvernement et les organismes qui en dépendent. Je pense que ce n'est pas une question de curiosité de notre part, on essaie de faire notre devoir de surveillance le mieux possible. Je comprends les réserves que le ministre peut nourrir en s'appuyant, d'ailleurs, sur le troisième alinéa de l'article 15.

M. Richard: En somme, c'est que le législateur a voulu être très prudent en la matière pour protéger un peu la confidentialité de ces renseignements.

M. Lalonde: II y a un certain illogisme dans ce système-là, si les députés qui sont mandatés par la population pour surveiller l'administration n'ont pas accès à ce que, d'autre part, la loi prescrit aux gens de faire. Je suggérerais au ministre de surveiller, avec ses conseillers juridiques, si les députés de l'Opposition sont des personnes qui y ont légalement droit, premièrement. Si oui, ils feront comme les ministres, les ministres sont obligés de publier ça dans les journaux.

M. Richard: Je reconnais volontiers que je ne sais pas ce que ça veut dire "ceux qui y ont légalement droit". Je comprends que le ministre y a légalement droit, ça m'apparaît évident, mais les autres, je ne le sais vraiment pas.

M. Lalonde: Si vous vérifiez ça, M. le ministre, ou qu'on se revoit bientôt aux crédits, vous me donnerez la réponse.

M. Richard: Oui, je n'ai pas la moindre objection.

M. Saintonge: M. Morin, j'aurais une autre question suivant l'article 14. Ce n'est pas une question de s'attaquer à un cas particulier ou pas, mais c'est une constatation de fait. Le vérificateur mentionnait toujours dans son rapport: "II est prévu à l'article 14 que tout membre du conseil d'administration n'exerçant pas ses fonctions à plein temps et ayant un intérêt dans une entreprise doit, sous peine de déchéance de sa charge, s'abstenir de participer à toute délibération portant sur l'entreprise dans laquelle il a un intérêt." Le vérificateur concluait en disant: "Afin d'éviter la possibilité de conflit d'intérêts personnels des membres avec les intérêts de la société, il y aurait lieu, à notre avis, que la société édicte une politique concernant le sujet." Ce qui est intéressant, ce sont les commentaires de la société ultérieurement à ces remarques du vérificateur. Je cite: "En rapport avec la remarque concernant l'application de l'article 14 de la loi, la société a maintes fois constaté les difficultés d'application de cet article." Ce que je voudrais savoir, c'est ce que vous entendez par "a maintes fois constaté les difficultés d'application de cet article". Quelle était la nature de ces difficultés, dans un premier temps?

M. Morin (Guy): C'est par souci de prudence en fonction de cet article de la loi que, lorsque nous délibérons au conseil d'administration de la société, on se méfie

que des interventions soient faites par des personnes qui pourraient être en conflit d'intérêts. La loi prévoyait, et les règlements le prévoient également, que les membres du conseil d'administration émanent du milieu, justement, avec lequel nous transigeons sur une base quotidienne. Alors, il faut toujours faire attention dans ce sens-là à ce que les personnes qui pourraient être en conflit d'intérêts n'assistent pas ou ne participent pas aux délibérations au moment où un dossier est discuté, lorsqu'elles pourraient être en conflit d'intérêts. Cela arrive presque à chaque séance du conseil d'administration qu'un administrateur doit quitter la séance pour ne pas être en conflit d'intérêts pour ne pas porter de jugement ou s'exprimer sur des dossiers de cette nature. Effectivement, il y a des difficultés.

D'autre part, faut-il dire que ces mêmes personnes étaient absolument nécessaires et sont encore nécessaires à la bonne marche de la société, à son orientation et à ses modes de fonctionnement parce qu'elles ont de leur propre secteur une expertise que nous ne pouvons avoir? On ne peut pas avoir cette polyvalence et cette science dans chaque secteur. Lorsque le législateur a implanté cette société, il a prévu à sa loi qu'il puisse y avoir des gens du milieu qui fassent partie du conseil. J'ajoute qu'il y a déjà eu d'autres nominations au conseil, qui ont eu lieu il y a quatre ou cinq mois à peine. Graduellement, on crée un nouvel équilibre. Le ministre crée un nouvel équilibre dans le conseil, qui n'est pas entièrement composé de gens du milieu. À titre d'exemple, lors des dernières nominations, on a pris deux personnes: un spécialiste de l'exportation et un spécialiste à la fois de la fiscalité et de la finance. Ces deux personnes n'étaient pas des spécialistes des secteurs comme tels. Il y a alors un nouvel équilibre qui se crée et ces personnes ne seront en conflit d'intérêts en aucun temps. C'est absolument nécessaire, d'autre part, d'avoir des personnes du milieu aussi pour créer cet équilibre à l'intérieur du conseil et nous apporter une certaine expertise que nous n'aurions pas autrement. Cela nous sert et en même temps ça nous crée des problèmes.

M. Saintonge: En tout cas, vous avez mentionné maintes fois qu'on s'était écarté de l'application de l'article; l'un des points qui est sûr, c'est le problème de Décormag. Je comprends que Décormag a bénéficié de deux prêts de 125 000 $ alors qu'un des membres du conseil d'administration est président-directeur général de Décormag. Il y a question d'intérêt public, il y a conflit potentiel d'intérêts. Je pense que c'est un exemple concret d'un difficulté d'application de l'article que vous pouvez mentionner. Ce qui est difficile à concilier à ce niveau, ce sont vos conclusions aux remarques du rapport du vérificateur de la société dans ses commentaires, qu'il terminait en disant: "Un projet d'amendement à la loi sur la société doit être déposé à la Législature et demandera une refonte complète des dispositions de cet article 14. Dorénavant, toute aide financière serait interdite à un administrateur de la société, à un de ses employés ou à tout membre de l'Assemblée nationale ainsi qu'à toute personne ou entreprise liée à l'une de ces personnes".

M. Morin (Guy): C'est exact. Cela a été refusé.

M. Saintonge: C'est ça. C'est une recommandation.

M. Morin (Guy): Peut-être que mon commentaire, M. le député, je vous l'ai mal expliqué. Effectivement, dans le premier projet que nous avions rédigé pour cette modification à la loi, nous en étions arrivés à un jeu de réserves et de restrictions tel que c'était inacceptable. Le comité de législation a refusé notre projet et il s'en est tenu au texte qui est présentement celui contenu dans la loi, il a maintenu le même texte de loi. Ce n'est pas notre manque de volonté ni de bonne foi, puisque notre projet initial mettait ces paramètres.

M. Saintonge: Donc, de votre côté, on pourrait conclure que la nécessité d'une modification de la loi était importante. Vous ne niez pas, disons, les commentaires, vous êtes en accord avec les commentaires que vous avez énoncés antérieurement. Du côté du ministère, on devrait peut-être adresser la question...

M. Morin (Guy): Non, ce n'est pas du ministère...

M. Saintonge: ... au ministre.

M. Morin (Guy): Au comité de législation.

M. Saintonge: Au comité de législation. Est-ce que le ministre peut donner des explications à cet effet-là?

M. Richard: M. le Président, quand le projet de loi créant la SODIC a été adopté, on a beaucoup discuté de la composition du conseil d'administration, et il était entendu de façon assez explicite par les trois formations politiques à l'époque - Mme la députée de L'Acadie, par exemple, était intervenue là-dessus, le Dr Goldbloom aussi, le ministre de l'époque, le député de Trois-Rivières et le député de Gaspé, qui était le chef de l'Union Nationale, je pense, à ce moment-là - qu'il fallait absolument que ce

soient des gens du milieu qui siègent au conseil d'administration. Mme la députée de L'Acadie, par exemple, avait même proposé un amendement pour que chaque industrie soit représentée au sein du conseil d'administration. Je pense qu'on s'était dès lors rendu compte qu'il y avait un risque de placer des personnes en situation de conflit d'intérêts. C'est pourquoi on avait rédigé l'article 14 et surtout le deuxième paragraphe de l'article 14 qui dit: Révélation d'intérêt. On dit ceci: "Tout autre membre du conseil d'administration ayant un intérêt dans une entreprise doit, sous peine de déchéance de sa charge, le révéler par écrit au président et s'abstenir de participer à toute délibération et à toute décision portant sur l'entreprise dans laquelle il a un intérêt." C'est donc qu'on avait prévu, parce qu'on ferait appel à des gens du milieu, que, forcément, un jour viendrait où il y aurait des situations conflictuelles. Le législateur, à bon droit, je pense, avait dit: Pour échapper à la difficulté, on va prévoir le deuxième paragraphe de l'article 14. C'est ce qui a été suivi jusqu'à maintenant. Évidemment, le danger d'une modification, on y a songé, ce serait intéressant, c'est que tous les gens disent, quand on va leur offrir de siéger au conseil d'administration: Si, tout à coup, un jour, j'ai besoin de la société ou si je veux faire des affaires avec la société, je ne pourrai pas le faire. Donc, on aurait de la difficulté à recruter des gens du milieu, ne serait-ce que des gens qui n'ont pas l'intention, au moment où on veut les recruter, de faire partie du conseil d'administration, mais qui ne voudraient pas se couper indéfiniment de ce recours possible. C'est pourquoi on pense que l'article 14 est préférable. Je reste très ouvert à la discussion sur le sujet.

M. Lalonde: M. le Président, je comprends les difficultés d'application d'un tel texte. On veut atteindre deux objectifs: celui de puiser dans l'expérience, le "know-how" du milieu et, l'autre, d'éviter des situations de conflit d'intérêts. C'est acceptable, en pratique, pourvu que cela reste exceptionnel. Ce n'est pas nouveau, ces dispositions de déclarations d'intérêts, et surtout l'abstention de participer à la décision lorsqu'on fait partie d'un groupe décisionnel, un conseil d'administration de n'importe quelle société, c'est la règle.

Le président vient de nous dire que, presque à chaque assemblée, quelqu'un est obligé de sortir. Si cela devient une habitude de devoir s'abstenir, le danger est que, même si on n'est pas là, on sait qu'au prochain conseil d'administration ce sera notre voisin de gauche ou celui de droite qui devra s'abstenir. Ce qu'il y a, ce n'est pas un climat, et là je commence à comprendre davantage les remarques du président en réponse aux observations du vérificateur, cela doit créer un climat un peu difficile, un peu lourd. (12 h 30)

M. Morin (Guy): On a eu le choix.

M. Richard: Je poserais avec votre permission une question qui nous éclairerait, M. le député, j'arrive difficilement à comprendre la réponse du président, parce que je peux vous révéler immédiatement, en attendant la défense des crédits pour voir à qui s'applique le mot "légalement", que l'immense majorité des membres du conseil d'administration n'a aucun intérêt dans les entreprises culturelles. Cela, je peux vous le dire tout de suite, l'immense majorité, et je pèse bien mes mots quand je dis que c'est l'immense majorité.

M. Morin (Guy): La réponse à cela, M. le ministre, c'est que, lorsque je dis que des administrateurs sortent de l'assemblée, ce n'est pas toujours à la demande du président de l'assemblée, c'est que les gens sont suffisamment délicats, sont suffisamment professionnels que, dès qu'ils voient la moindre... pas le moindre conflit d'intérêts, moins que cela, dès qu'ils peuvent apporter un point de vue qui pourrait être biaisé parce qu'ils sont au courant de choses sur le plan confidentiel ou autre, les gens d'eux-mêmes vont le faire. En même temps, je réponds à M. le député que le choix est toujours le même et, semble-t-il, on voit cela dans bien des sociétés d'État où on n'a aucun administrateur du milieu ou bien où, si on a des administrateurs du milieu, il faut vivre avec les règles du jeu. Entre deux maux, on choisit le moindre. Je préfère avoir des administrateurs du milieu qui, à l'occasion, sortent des assemblées que de ne pas avoir d'administrateurs du milieu, parce qu'on se priverait dans une société d'État de talents et d'expériences qui nous sont absolument nécessaires, mais c'est un problème.

M. Lalonde: Mais l'argument du ministre plaide à l'encontre du maintien de la situation actuelle. Si l'immense majorité des membres du conseil d'administration... ils sont combien? Huit, neuf?

M. Morin (Guy): Neuf.

M. Lalonde: Neuf, on peut présumer que l'immense majorité, c'est au moins cinq, c'est peut-être six ou sept, à ce moment-là, cela prouve que l'on peut constituer un conseil d'administration...

M. Richard: Attention, il ne faudrait pas mal interpréter, M. le Président, ce sont des gens très impliqués dans le développement des industries culturelles, mais

qui n'y ont pas d'intérêt financier; cela est différent.

M. Lalonde: On pourrait donc constituer un conseil d'administration de gens qui n'ont pas d'intérêt, et on pourrait donc rejoindre le désir du président dans sa proposition que si... je ne sais pas, je ne veux pas traduire injustement vos propos en réaction au Vérificateur général, mais il me semble que peut-être on pourrait relire ces propos de la société et je les cite: Dorénavant, toute aide financière serait interdite à un administrateur de la société, etc., lié à l'une de ces personnes... Est-ce qu'on pourrait aller chercher les gens du milieu qui n'ont pas d'intérêt financier dans l'industrie culturelle?

M. Morin (Guy): Ce n'est pas le sens, M. le député.

M. Richard: Les deux...

M. Lalonde: Ce n'est pas ce que vous dites. Ce que vous dites, c'est d'interdire toute aide à quelqu'un qui est relié d'une certaine façon à un membre du conseil d'administration, qui a des intérêts ou non. Mais, si on apportait une qualification à cela, c'est qu'on pourrait nommer au conseil d'administration des gens, pourvu qu'ils déclarent n'avoir aucun intérêt financier dans les industries culturelles. Ce serait déjà le cas de l'immense majorité des membres du conseil d'administration actuel.

M. Saintonge: Peut-être que l'autre solution, c'est que même quelqu'un a un intérêt et a besoin de profiter d'une aide, à un moment donné, sous forme de prêt, comme c'est arrivé dans un cas pour 250 000 $, il devrait démissionner de sa fonction de membre du conseil d'administration pour se conformer à l'exigence que la loi pourrait imposer.

M. Lalonde: Enfin, le problème reste entier.

M. Saintonge: C'est un problème réel qui a été soulevé par la société elle-même. Oui.

M. Morin (Guy): M. le député, M. Harvey, qui est le vice-président, me donne des exemples. Très souvent, l'administrateur n'aura pas d'intérêt dans l'entreprise demanderesse à la société, mais l'administrateur est un homme d'affaires qui peut consentir du crédit à cette entreprise ou qui a une relation d'affaires avec cette entreprise. C'est à ce moment que très souvent l'administrateur va sortir de l'assemblée, mais il n'est pas tenu de le faire.

M. Richard: Cela explique...

M. Morin (Guy): Je vais prendre l'exemple de M. Chagnon, qui est président de Vidéotron. On va entrer dans le domaine des communications électroniques. M. André Chagnon, président de Vidéotron, fait affaires avec un grand nombre de producteurs. Est-ce que, chaque fois qu'un producteur va faire une demande, il sera tenu de sortir? Il n'est pas tenu de le faire. C'est très délicat. Ma réponse à cela, c'est que vous êtes presque obligé de faire confiance au président et au vice-président des sociétés d'État. C'est une question de jugement, je pense bien, et de discernement, mais ce n'est pas facile à régler, parce qu'aller dans un pôle ou l'autre, c'est-à-dire des administrateurs qui ne font pas partie du milieu, ce serait néfaste, et aller dans l'autre pôle serait aussi néfaste.

M. Lalonde: Quelqu'un a dit: Qui veut faire l'ange fait la bête souvent. Il faut éviter justement l'angélisme dans ce coin. Quand on nous demande, de la part d'un ministre, de leur faire confiance, on hésite beaucoup. On serait plus prêt à donner cette confiance au président d'une société d'État.

M. Richard: M. le Président, je voudrais d'abord expliquer que, dans le domaine culturel, il est vrai qu'il y a beaucoup de possibilités de conflit d'intérêts, mais en même temps, je dirais que le danger est moins grand, parce que c'est tellement fermé comme milieu que les intérêts sont presque toujours de notoriété publique. En ce sens, cela me paraît beaucoup moins dangereux parce que c'est à peu près chaque fois de notoriété publique. On connaît cela. Quand même, le milieu des industries culturelles est relativement fermé. D'autre part, pour vous apporter un élément de réponse aux problèmes que vous avez soulevés, j'ai eu moi-même à proposer deux membres du conseil d'administration. J'ai essayé d'éviter les conflits d'intérêts. Dans un cas, j'ai proposé M. Jacques Girard; il n'y a pas de conflit d'intérêts possible. Il est à l'Office québécois du commerce extérieur. C'est pour permettre l'exportation du produit culturel québécois. Dans l'autre cas, vous voyez quelqu'un qui est directement impliqué, mais qui n'a pas d'intérêts financiers dans les entreprises culturelles, c'est M. Jules Bellegarde, qui est vice-président à l'administration financière à Télé-Capitale.

M. Saintonge: II reste que le problème est entier d'une certaine façon. Si on regarde l'article 14, il reste qu'il y a le président et le vice-président qui sont à temps plein. On dit formellement "ne peut, sous peine de déchéance de sa charge, avoir un intérêt direct ou indirect..." à tel point que si un intérêt lui échoit, par succession,

par donation, il doit renoncer ou se départir de son intérêt avec la plus grande diligence possible. La remarque que la société faisait... La question que je me pose, c'est la suivante: À la suite des commentaires, des difficultés réelles d'application qu'il y avait au niveau du conseil d'administration vis-à-vis des personnes qui pouvaient détenir un intérêt éventuel, il m'apparaissait que, suivant la recommandation, qui était possible au niveau d'amendements à la loi, éventuellement, tout administrateur qui aurait un intérêt et voudrait bénéficier d'un prêt d'une quelconque façon avec la société devrait démissionner.

M. Richard: M. le Président, j'attire l'attention du député de Laprairie sur le fait que ce n'est pas si facile que cela dans ce domaine. Par exemple, à la Place des Arts et au Grand Théâtre, on aime bien que ce soient des gens qui ont une certaine expertise dans le milieu, qui s'y connaissent un peu, s'intéressent au développement des arts. Pour l'opéra, c'est évident que les gens du milieu vont demander avec insistance de siéger au conseil d'administration. On est toujours très près, dans ce domaine - je le reconnais volontiers - du conflit d'intérêts, mais c'est moins périlleux qu'ailleurs, parce que c'est de notoriété publique. Il y a l'obligation de dénoncer son intérêt. Quelqu'un qui ne dénoncerait pas son intérêt dans le milieu, ce serait su tellement rapidement que vous imaginez qu'il y a moins de danger dans ce secteur qu'ailleurs. Autrement, il faut faire bien attention, il faudrait exclure par exemple, tous les chanteurs du conseil d'administration de l'opéra. Au conseil d'administration de l'Orchestre symphonique de Montréal, c'est la même chose; au conseil d'administration du Musée des Beaux-Arts, c'est la même chose. Il faudrait, à la rigueur, oui, si on pousse le raisonnement plus loin, exclure les hommes d'affaires du conseil d'administration de la Société de développement industriel, la SDI. C'est le choix qu'il faut faire. Est-ce qu'on aime mieux avoir des gens du milieu qui apportent leur expertise, avec les risques que cela comporte, parce que je reconnais volontiers que ça comporte certains risques, qui sont minimisés par le fait que c'est toujours de notoriété publique?

M. Saintonge: Je voudrais juste conclure sans faire un débat interminable. Il y a une question de risque, il y a la question aussi de se conformer à une espèce de souhait ou de désir exprimé par un conseil d'administration sur ce point de vue-là. C'est dans ce sens que ma question s'est située.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Jeanne-Mance.

Communications et patrimoine immobilier

M. Bissonnet: M. le Président, depuis la fondation de la société, par la loi actuelle, il y avait des possibilités de faire une demande au gouvernement pour que la société puisse agir dans tout autre domaine en vertu de l'article 4 de la loi actuelle. Aujourd'hui, dans un nouveau projet de loi, on ajoute que la société aura compétence dans les services de communications, notamment la télévision» la radio, la câblodistribution, les journaux et, également, dans le domaine du patrimoine immobilier, et, à l'intérieur du nouveau projet de loi, on indique toujours qu'il pourrait y avoir d'autres domaines où la société pourrait, à la suite d'un règlement du gouvernement, avoir des champs d'action. Est-ce que votre conseil d'administration, depuis sa formation, a étudié la possibilité, bien avant ce projet de loi, d'entrer dans le champ des communications et du patrimoine immobilier?

M. Morin (Guy): La réponse...

M. Bissonnet: Oui, j'ai quelques questions très brèves à vous poser.

M. Morin (Guy): M. le député, dès le départ de la société, nous nous sommes interrogés sur les secteurs complémentaires aux secteurs déjà dévolus à la société. Nous les avons étudiés avec le plus de profondeur et en y mettant le plus de temps possible. Il est évident que notre plus grande préoccupation, parmi les secteurs que nous n'avions pas, était vis-à-vis des entreprises des services en communication, ou le software, parce que c'est une course effrénée de ce côté-là. Au cours des deux ou trois prochaines années, va se jouer cette carte de l'entrée dans les différents pays de ces nouvelles technologies. Il n'y a pas que le divertissement; on le prend sur le plan éducationnel, sur le plan formation, les contenus de Vidéotex, les contenus de Télidon, les contenus de toutes les sources seront à la fois diffusés à l'échelle mondiale et dans les différentes langues. Si nous, au Québec, on ne se dépêche pas, on verra le train passer rapidement de ce côté-là. On est déjà en retard. Le hardware, il n'en est plus question alors que le logiciel, le software, au moins, on a encore des chances de faire des pistes de ce côté-là. Depuis le début de la société, bien sûr, nous avions souhaité entrer dans le domaine des entreprises des services en communication. Quant au patrimoine, nous l'avions identifié lors d'un genre de colloque ou de séminaire que nous avions tenu avec les administrateurs. On l'avait identifié davantage au tourisme culturel qui, en soi, pourrait ou ne pourrait pas être, selon la définition et le mandat qu'on lui donne, une

industrie culturelle, effectivement. On avait ajouté même un autre secteur qui n'est pas dans le projet de loi. Juste à titre d'information, nous pensions que la publicité comme telle, la publicité dite commerciale, nous apparaissait importante aussi. Mais on ne l'a pas retenue à ce moment-ci. Vous savez, lorsque vous avez la possibilité de 16 minutes par heure de diffusion, de commerciaux à la télévision, à la radio am ou à la radio fm et que ces mêmes commerciaux influent sur les attitudes des gens, si ce n'est pas une industrie culturelle, je me demande ce que c'est, effectivement. Donc, en réponse à votre question, oui, nous avions envisagé ça dès le départ, ainsi que la publicité, que nous n'avons pas retenue. (12 h 45)

M. Bissonnet: Le député de Marguerite-Bourgeoys a mentionné tantôt, le sujet du caractère culturel des entreprises en communications qui seraient préférées par ce projet de loi. À titre d'exemple, de quelle façon allez-vous faire certaines dichotomies? Ce n'est pas facile à faire, c'est très difficile à faire. Quand on parle des journaux... Quand on parle de la télévision, évidemment, on peut parler de la télévision communautaire et de la télévision commerciale qui ont des aspects à caractère culturel. Dans la stratégie que vous allez utiliser, à la suite de ce changement du projet de loi, de quelle façon allez-vous planifier la stratégie pour informer les organismes en communication, bien en déterminer les lignes de conduite que la société envisage à l'intérieur de ce projet de loi pour que les partenaires dans les communications puissent très bien savoir qu'ils sont dans leur champ de caractère culturel prévu par le projet de loi, parce que le projet de loi n'est pas spécifique là-dessus? Quelle est la stratégie que vous allez utiliser dans tout cet aspect de la fonction de la communication a l'intérieur du projet de loi 54?

M. Morin (Guy): M. le député, d'une part, lorsque le projet de loi sera adopté -en souhaitant qu'il soit adopté rapidement -on entrera certainement en communication avec les gens des industries pour les informer de notre mandat dans ces secteurs-là. On prendra tous les moyens pour communiquer directement avec l'industrie. Mais, si on se fie aux expériences passées, le message passe très rapidement. Dans les autres secteurs d'activité, cela s'est su très rapidement et on n'a pas eu à dépenser beaucoup d'argent en relations publiques pour faire savoir que nous étions dans ces domaines-là.

Je me permets d'enchaîner tout de suite sur la deuxième partie de votre question. Quel credo allons-nous utiliser? C'est là le grand défi, parce qu'avec un potentiel de 40 000 000 $, 20 000 000 $ en capital, 20 000 000 $ en pouvoir d'emprunt, les secteurs que nous avons, plus les deux secteurs que nous ajoutons, il est évident que, dans les secteurs que nous ajoutons, nous ne pourrons pas tout faire. Nous n'avons pas les ressources financières que vous voterez peut-être bientôt pour jouer le rôle partout, dans toutes les activités de tous les types d'entreprises à l'intérieur des entreprises de services en communications. Il y a aura des choix à faire, mais cela ne sera qu'heureux d'avoir des choix à faire.

M. Harvey et moi, il y a un an, nous avons rencontré le vice-président à la qualification de Warner Brothers et on lui posait la question: Vous qui êtes dans les nouvelles technologies, vous qui êtes dans les services de communications de toutes sortes à la Warner aux États-Unis, si vous étiez au Québec, que feriez-vous? La réponse a été aussi bête que celle-ci: Faites ce que vous voulez, mais ne faites pas la même chose que nous parce que vous partez perdants. Effectivement, c'est vrai. Comment voulez-vous que nous entrions en concurrence avec les plus grandes multinationales sur tous les plans?

Alors, on aura des choix à faire à l'intérieur de tout ceci. D'ailleurs, je ne pense pas que toutes les formules soient gagnantes. Il est peu probable que le vidéodisque, la vidéocassette, la télévision payante, la fibre optique, le télidon et les autres applications de Vidéotex, c'est impossible que toutes les formules soient gagnantes. Il y aura des gagnants ou des perdants à des degrés différents et on aura certainement besoin d'une bonne boule de cristal pour faire des choix à travers tout ceci. Mais essayer de tout faire serait une erreur stratégique de notre part parce que nous n'avons pas les ressources financières ni toutes les compétences pour faire face à tout en même temps, et très rapidement.

On procédera par étapes. On a déjà une étape de franchie de ce côté-là. On a réuni des gens de hardware, il y a trois mois; on en a réuni à peu près 30 autour d'une table qui avait été préparée plusieurs semaines auparavant pour voir quelles étaient les possibilités de ce côté-là. À la suite de ça, on entend rencontrer bientôt les gens de logiciel, les gens de software pour justement savoir comment la société devrait se comporter et ce qu'elle devrait privilégier.

Il est prématuré de vous dire ce que nous allons faire de ce côté-là, mais il est certain qu'on aura à faire des choix à l'intérieur des entreprises de services en communications et je pense bien que ça devrait déjà se refléter quelque peu dans le prochain plan de développement.

M. Bissonnet: Juste une question additionnelle. Sur le plan de développement,

tantôt le député de Terrebonne nous disait qu'il avait certaines appréhensions dans tout le domaine de la culture, vu que, dans le nouveau projet de loi, il y aura évidemment le patrimoine immobilier également. On sait que les télécommunications, d'ici les trente prochaines années, créeront le plus d'emplois dans toute province ou dans tout pays; tout se dirige vers les communications. Est-ce que, dans un plan de développement, considérant un montant additionnel en prêts garantis qui vous serait accordé par ce projet, de 10 000 000 $ à 20 000 000 $, votre conseil d'administration a quand même prévu certaines enveloppes dans chaque champ d'activité?

M. Morin (Guy): Non.

M. Bissonnet: Pas encore.

M. Richard: M. le Président, juste un correction, c'est de 0 à 20 000 000 $.

M. Lalonde: D'accord, de 0 à 20.

M. Richard: Je veux ajouter une information en réponse à la question de M. le député de Terrebonne, tout à l'heure et peut-être à la vôtre, M. le député de Jeanne-Mance. Le secteur des communications représente, grosso modo, 1 000 000 000 $ de notre produit intérieur brut, de même, le secteur des industries culturelles proprement dites représente aussi grosso modo 1 000 000 000 $. Cela veut dire des dizaines de milliers d'emplois.

M. Bissonnet: C'est 50/50.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: J'ai seulement une dernière question en ce qui me concerne. Je vous remercie d'être venus et d'avoir répondu à notre invitation. Comme cette invitation était faite dans la perspective de l'étude du projet de loi, j'aimerais vous demander si vous avez en fait d'autres recommandations, vous en avez fait une en ce qui concerne l'article 14, cela a été refusé. Est-ce qu'il y a d'autres demandes, d'autres suggestions que vous souhaiteriez voir dans le projet de loi, par voie d'amendements? On sera invité à l'étudier en deuxième lecture bientôt. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle on voulait vous voir, vous parler; c'était, en plus, afin de connaître votre expérience et votre action depuis deux ans. Nous voulions aussi avoir un éclairage sur ce projet de loi en particulier. Est-ce qu'il y aurait d'autres amendements, d'autres propositions que vous souhaiteriez voir dans ce projet de loi?

M. Morin (Guy): II y en a une effectivement. Nous avions réfléchi et proposé finalement de faire de la prise en charge d'intérêts, uniquement. Mais cela s'associe à la subvention et c'était l'entrée de notre société dans le champ de la subvention, ce qui était contraire à l'esprit du législateur lorsque la loi a été adoptée. D'autre part, notre motivation à cet égard était surtout par rapport à l'exportation. Lorsqu'on parle de prise en charge d'intérêts, ça veut dire que certaines entreprises, à partir de programmes ou à partir de leur propre développement, si on les aidait en matière d'exportation, pourraient doubler, tripler, quadrupler, ou quintupler leur volume d'exportation et cela très rapidement. Au lieu de prêter de l'argent, nous aurions pris en charge une partie de l'intérêt basée sur les succès de l'exportation, sur les chiffres d'affaires de l'exportation. La société, au lieu de prêter 1 000 000 $ ou 2 000 000 $ à une entreprise, n'aurait fait que la prise en charge de l'intérêt sur l'exportation au lieu de geler 1 000 000 $ ou 2 000 000 $ dans l'entreprise. Finalement, c'est ce qu'on va être obligé de faire; pour arriver aux mêmes fins, on va être obligé de geler 1 000 000 $. Je prends l'exemple de 1 000 000 $ parce que ce sont des chiffres importants lorsqu'on parle d'exportation. Alors que s'il y avait eu la prise en charge d'intérêts uniquement, on n'aurait pas eu à faire le gel de crédits, ou le gel d'argent en faisant un prêt; on n'aurait fait que le prise en charge d'intérêts. Maintenant, c'est parce que c'était entrer dans le domaine de la subvention que le projet n'a pas été retenu; effectivement. Mais ça se fait ou ça se faisait dans d'autres sociétés d'État, et je pense qu'il s'agit d'applications qui ont été très pratico-pratiques dans ce sens. Lorsqu'un projet tel que celui-ci est présenté, il faut en arriver à un certain nombre de compromis et le projet qui est déposé et qui a passé la première lecture, finalement, me satisfait ainsi que les administrateurs de la société; s'il est voté, nous n'en serons pas malheureux. Il aurait également été souhaitable qu'au lieu d'avoir 10 000 000 $ en capital et 20 000 000 $ de pouvoir d'emprunt ajoutés aux 10 000 000 $ déjà existants, nous ayons eu 40 000 000 $ en capital. Parce que vous savez que c'est une société d'État qui doit vivre et être rentable à partir de son capital-actions. Toutes les dépenses de fonctionnement, les pertes sur crédit, enfin toutes les dépenses sont imputées directement à la société. Elle n'est pas remboursée annuellement par le gouvernement de ses dépenses de fonctionnement.

Alors, il va de soi que le capital que nous avons est aussi important pour être capable de rentabiliser la société. Dans le contexte économique actuel, on se réjouit déjà que ce soit comme cela et c'est déjà

un tour de force que le gouvernement puisse considérer une telle initiative. Ce sont mes seuls commentaires.

M. Lalonde: Merci beaucoup.

Le Président (M. Boucher): Comme il ne reste que cinq minutes avant l'ajournement, si le ministre et le député de Laprairie veulent conclure.

Conclusion

M. Saintonge: D'accord. En conclusion, je veux simplement remercier M. Morin et M. Harvey d'être venus ce matin et d'avoir fourni certains documents dans une période très brève. Peut-être que la seule autre remarque, en parlant au ministre, ce serait que nous souhaitons de la même façon, si c'est possible dans ce domaine-là, nous attendons d'autres documents qui pourront sûrement nous être utiles, éventuellement, même pour l'étude des crédits. On peut aussi tenter d'obtenir du ministre un certain engagement, c'est qu'il pourra nous transmettre de la même façon ses documents pour l'étude des crédits, dans un délai plus rapide que la veille de la séance des crédits. Je vous remercie beaucoup.

M. Morin (Guy): Je vous remercie.

M. Richard: M. le Président, un mot pour remercier à mon tour M. Morin de s'être prêté de bonne grâce aux questions que nous avions à formuler. Je pense que nous venons de nous livrer à un exercice démocratique extrêmement valable. Je pense que tous les membres de la commission parlementaire se sont rendu compte de l'importance de la Société de développement des industries culturelles et qu'il faut absolument permettre son développement, parce qu'en permettant le développement de cette société, ce sont des milliers d'emplois qu'on aide à maintenir au Québec et des milliers d'autres qu'on va aider à créer grâce à cet instrument privilégié. Je me félicite qu'on soit en mesure, à très brève échéance, par l'intermédiaire de l'Assemblée nationale, de quadrupler la capacité d'intervention de cette société. Je remercie l'Opposition de la bonne foi qu'elle a manifestée dans l'exercice démocratique de ce matin. Merci à vous, M. le Président, pour le talent que vous avez mis à présider cette séance.

M. Lalonde: Merci à tous les députés ministériels qui sont intervenus en grand nombre.

Le Président (M. Boucher): Au nom de tous les membres de la commission, je remercie M. Morin. La commission des affaires culturelles ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 59)

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