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Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Tuesday, January 10, 1989 - Vol. 30 N° 15

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 100 - Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole


Étude détaillée du projet de loi 100 - Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole


Journal des débats

 

(Neuf heures quatorze minutes)

Le Président (M. Richard): Messieurs, je sens que vous êtes passionnés. Donc, nous allons commencer nos travaux, si vous le permettez. Je déclare la séance ouverte et je rappelle à nouveau le mandat de notre commission qui est de procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi 100, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole.

M. le secrétaire, il y a un remplacement ce matin.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata) est remplacée par M. Forget (Prévost).

Consultations particulières

Le Président (M. Richard): Bienvenue, M. Forget. Nous recevons ce matin l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec, qu'on appelle l'UMRCQ. Je vous rappelle que l'entente qui est intervenue concernant le partage du temps entre les deux formations politiques est celle-ci: La présentation doit prendre environ 20 minutes et il y aura 35 minutes pour la partie ministérielle et 35 minutes par la suite pour l'Opposition officielle.

Sans plus tarder, je demande à M. Roger Nicolet, président de l'UMRCQ, et à ses collègues de prendre place, s'il vous plaît. M. Nicolet, puisque vous êtes un vétéran des commissions parlementaires, vous en connaissez bien la mécanique. Alors, vous avez la présentation et je vous demanderais aussi de nous présenter les gens qui vous accompagnent.

UMRCQ

M. Nicolet (Roger): M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, j'aimerais, comme vous le suggérez, vous présenter mes deux collègues. À ma gauche, quelqu'un que, je crois, plusieurs d'entre vous connaissent déjà, M. Léo Roy, maire de Barnston-Ouest, préfet de la MRC de Coaticook et, bien sûr, un agriculteur bien connu en Estrie et dans l'ensemble du Québec qui, depuis de nombreuses années, exerce sa profession. À ma droite, Me Michel Poirier, qui est a été conseiller juridique de l'UMRCQ dans le dossier de l'analyse du projet de loi 100.

Le Président (M. Richard): Vous avez la parole.

M. Nicolet: M. le Président, tout d'abord, au nom de l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec, qui représente quelque 1250 municipalités locales et régionales, j'aimerais vous remercier, vous et les membres de la commission, d'avoir bien voulu nous accueillir ce matin et de nous donner l'occasion de vous présenter ces quelques remarques concernant un projet de loi fort important pour l'ensemble du monde municipal et, nous le croyons, pour l'ensemble des Québécois.

Notre exposé, ce matin, se fera en deux temps. Je vous adresserai quelques remarques d'ordre général qui se veulent peut-être davantage politiques et, après ça, je demanderai à Michel Poirier d'élaborer davantage sur certaines considérations plus techniques quant au libellé du texte.

Avec votre permission, je lirai mon commentaire, parce que je pense que chaque mot est important et qu'il est peut-être opportun que les remarques que nous avons à vous adresser soient consignées au procès-verbal des délibérations de la commission d'aujourd'hui.

De longue date, l'UMRCQ demande l'harmonisation de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et de la Loi sur la protection du territoire agricole. Comment, en effet, faire des schémas d'aménagement le principal instrument d'une vision régionale de l'aménagement du territoire quand une des composantes essentielles d'une telle planification, en l'occurrence l'activité agricole, échappe, à toutes fins utiles, aux interventions des acteurs régionaux? Comment allier une conception essentiellement évolutive de la planification des besoins d'une société que sous-tend la confection des schémas d'aménagement à la perception immuable d'un zonage agricole figé dans le temps?

Malheureusement, il faut bien le constater, le projet de loi 100 ne touche pas cette problématique. Bien au contraire, par la création de "secteurs exclusifs" et surtout par les dispositions y afférentes, il vient consacrer la constitution de parties du territoire québécois qui ne seront pas fonctionnellement intégrées et dont les populations ne seront pas impliquées dans une démarche collective de développement. L'interprétation des effets du projet de loi est confirmée du reste par M. Pagé lui-même qui, le 20 novembre dernier, déclarait dans le cadre d'une émission de télévision - il se référait présumé-ment aux élus municipaux: "...ils pourront développer et aménager leur zone blanche et nos producteurs pourront développer et surtout avoir la paix en zone verte." Vision d'un Québec bipolaire qu'aucun porte-parole municipal ne pourra jamais accepter.

Dans cette même perspective, concrètement, comment le gouvernement peut-il véritablement

prétendre enfermer la société dans le carcan de l'article 69.08, deuxième alinéa, du projet de lof? Les terres de plus haut potentiel agricole, c'est-à-dire les secteurs exclusifs projetés, se situent dans les plaines du Saint-Laurent, principalement à proximité des grands centres urbains du Québec. D'autre part, personne ne peut prétendre aujourd'hui prévoir les besoins futurs de cette société en constante évolution. Quelle que soit l'importance qu'on accorde à l'objectif "national* de protection du territoire agricole, il est inconcevable que l'on subordonne la réalisation d'équipements publics encore à définir à une configuration inaltérable d'une zone agricole décrétée unilatéralement par une commission, en l'occurrence la CPTA. Pour l'UMRCQ, une meilleure protection des terres à haut potentiel agricole qui, faut-! le rappeler, est un objectif qu'elle poursuit n'implique certainement pas une remise en question des principes mêmes d'une planification polyvalente du territoire québécois que la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme est venue concrétiser. Seuls les schémas des MRC, par leur définition même, peuvent harmoniser les différents usages du territoire.

La définition des secteurs exclusifs par la procédure esquissée par le projet de loi 100 vient confirmer l'incompréhension profonde du MAPAQ face aux mécanismes de participation populaire à la gestion du territoire que la loi 125 a instaurés. À l'heure où le gouvernement du Québec approuve les derniers schémas d'aménagement et les confirme comme base d'évaluation de toute nouvelle intervention, tant publique que privée, il est difficile de comprendre que le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation puisse proposer que la délimitation des secteurs exclusifs soit confiée à une commission dont le caractère est essentiellement celui d'un tribunal administratif et dont les termes de référence ne comprennent aucune corrélation des secteurs exclusifs proposés avec les schémas d'aménagement ni aucune consultation des instances municipales pourtant directement impliquées.

Sur un tout autre plan, le projet de loi 100 vient consacrer un statut particulier aux agriculteurs qui exploitent des terres situées en zones protégées. Un train de mesures qui incorpore la réciprocité, la nomination d'un commissaire aux plaintes contre les règlements d'urbanisme municipaux, l'immunité et l'institution d'un fonds de défense des activités agricoles est évidemment lourd de conséquences tant sur le plan de la gestion des affaires municipales que directement sur l'équilibre et l'équité à préserver dans la société. Le MRCQ ne peut qu'exprimer ses appréhensions face à de telles propositions.

Le gouvernement municipal a été voulu par le législateur comme le palier administratif le plus proche du citoyen, de tous les citoyens. Pour l'élu municipal, M est primordial de pouvoir s'acquitter équitablement face à tous ses électeurs du mandat qu'ils lui ont confié. La notion même qu'un groupe particulier de la société devrait jouir de privilèges spéciaux et mérite un régime de protection distinctif face aux gestionnaires municipaux est à la fois offensante et antidémocratique. Offensante, parce que par l'adoption éventuelle de telles dispositions le législateur viendrait formellement tancer les quelque 10 000 élus municipaux du Québec. En fait, les dispositions en question, et particulièrement la nomination d'un commissaire aux plaintes, constitueraient une consécration des prétendues insuffisances des élus municipaux face à leurs commettants agriculteurs ou inversement, si vous préférez, parce qu'ils ont tellement bien fait leur travail que finalement les agriculteurs ont besoin d'une protection spéciale face à l'ensemble de la société. Cela, finalement, vient alimenter mon deuxième point, à savoir antidémocratique parce que, pour une première fois, une classe de la société et, dans ce cas particulier, définie par son activité professionnelle et son lieu d'exercice pourrait se prévaloir d'un cadre juridique distinct qui serait refusé à d'autres groupes de la société.

Je passerais, si vous me le permettez, ta parole à mon collègue ici présent, Me Poirier, qui vous parlera davantage sur certains aspects techniques du texte.

Le Président (M. Richard): Me Poirier.

M. Poirier (Michel): M. le Président, M le ministre, MM. les membres de la commission, je n'ai pas l'intention de reprendre devant vous ta lecture du mémoire, compte tenu du fait qu'il s'agirait d'un exercice fastidieux, particulièrement pour vous. Je vais simplement reprendre les points principaux du mémoire quitte, par la suite, à discuter sur les points sur lesquels vous avez besoin d'information supplémentaire.

Tout d'abord, le début du projet de loi traite des changements quant aux structures et au processus décisionnel; ce sont à peu près les articles 1 à 20 du projet de loi. L'UMRCQ tient à faire savoir son appui à la plupart de ces dispositions, notamment la mise sur pied d'un tribunal d'appel indépendant qui est, à notre avis, une mesure de nature à assurer une meilleure justice pour les justiciables québécois qui auront à se présenter devant les instances dans ce domaine. Un seul point nous apparaît, de notre point de vue, moins acceptable, c'est celui des critères de décision de la commission. Vous savez qu'en vertu du projet de loi, tel que rédigé, i y a des critères qui sont obligatoires. Je réfère à l'article 62 de la loi, modifié par l'article 17 du projet de loi. Il y a des critères obligatoires, des critères facultatifs et des critères que la commission ne doit pas prendre en considération. À cet égard, l'UMRCQ voudrait que les trois critères qui sont facultatifs actuellement dans la version du projet de loi deviennent des critères obligatoires et, deuxièmement, que le projet de loi ne soit pas rédigé dune façon telle qu'il semble y avoir une hérarchie

dans la définition des critères obligatoires, que des critères obligatoires soient plus obligatoires que d'autres critères obligatoires.

La question des secteurs exclusifs. La Loi sur la protection du territoire agricole est la loi sur la protection des terres agricoles la plus draconienne sur le continent. On a souvent référé à d'autres lois similaires, particulièrement dans les provinces de l'Ouest, mais il reste, à notre avis, que rien ne s'approche du caractère draconien de la Loi sur la protection du territoire agricole. On peut se demander, compte tenu de la rigueur des termes actuels de la loi, s'il y avait lieu de rendre encore plus rigoureuses les dispositions par l'instauration de secteurs exclusifs. Malgré ses doutes, l'UMRCQ donne son aval au principe de la création de secteurs exclusifs, sujet toutefois à deux remarques.

La première remarque, c'est la question de la délimitation des périmètres des secteurs exclusifs. Vous savez qu'en vertu de la loi originale la définition des zones agricoles se faisait à la suite d'un processus de négociation entre la Commission de protection du territoire agricole et les institutions municipales. La réforme, de 1985, qui permet la révision des zones agricoles à la suite de l'adoption, par les MRC, des schémas d'aménagement - je réfère en particulier aux articles 69.01 et suivants de la loi actuelle - prévoit également un cadre formel de négociation entre les intervenants du milieu et les autorités gouvernementales pour en arriver à la définition des périmètres des zones agricoles et leur révision. L'UMRCQ demande que la définition des périmètres des secteurs exclusifs fasse également l'objet d'une négociation entre les intervenants intéressés et que la loi prévoie un cadre formel à cet effet.

Deuxièmement, comme vous l'a déjà mentionné M. Nicolet, l'UMRCQ demande que l'implantation de certaines infrastructures publiques dans les secteurs exclusifs ne soit pas assujettie aux critères plus rigoureux qu'implique l'implantation de certains usages autres qu'agricoles dans les secteurs exclusifs. Nous pensons notamment aux réseaux d'aqueduc et d'égout, les systèmes d'épuration des eaux, les dépotoirs, les lieux de dépôt des neiges usées de même que les infrastructures du système routier. Il faut se rendre compte que l'assujettissement aux critères très rigoureux prévus dans les secteurs exclusifs de ces infrastructures impliquerait des coûts additionnels très importants. Que l'on songe uniquement aux équipements d'épuration des eaux. L'UMRCQ demande que ces infrastructures, dont la mention est faite aux pages 11 et 12 du mémoire, soient assujetties aux critères habituels en zone agricole.

Il faut bien comprendre que l'UMRCQ ne demande pas que l'implantation de ces infrastructures se fasse n'importe comment, n'importe où et qu'elle ne requière pas l'autorisation de la Commission de protection du territoire agricole. Ce que l'UMRCQ demande, c'est que, lorsque ces demandes d'autorisation sont soumises à la commission, la commission applique à l'étude de l'opportunité ou non d'implanter ces infrastructures les critères qui sont utilisés en zone agricole, et non pas dans les secteurs exclusifs. (9 h 30)

La section du projet de loi sur les activités agricoles. La question de la responsabilité restreinte, l'UMRCQ s'y oppose parce que nous estimons que la preuve n'a pas été faite que les agriculteurs québécois font l'objet de poursuites abusives devant les tribunaux. Cela ne s'est pas fait et, compte tenu de cela, nous estimons qu'on ne devrait pas introduire dans la loi des dispositions très larges. On ne sait pas trop où on s'en va avec de telles dispositions. Je vous donne un exemple. L'article 79.13 du projet de loi tel que rédigé, combiné avec l'article 79.1 qui élargit considérablement fa définition d'activités agricoles pour inclure, par exemple, toutes les questions d'usines d'empaquetage sur certaines fermes maraîchères, à notre avis, tel que rédigé, empêcherait un travailleur de ces usines d'empaquetage d'invoquer certains droits en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, notamment l'article 12. Cela empêcherait un travailleur de dire: Moi, je refuse de travailler parce que j'estime que ma santé est actuellement mise en danger compte tenu de la poussière ou du bruit qui est émis dans l'usine d'empaquetage située sur la ferme maraîchère. Ce n'est qu'un exemple qui vous permet de voir que, compte tenu de sa largesse, les conséquences de cette disposition sont relativement imprévisibles. Nous avons d'ailleurs fait part aux fonctionnaires du ministère de l'Agriculture de ces problèmes d'interprétation.

La création du fonds d'activités agricoles. Nous vous faisons remarquer que, tel que rédigé actuellement, la loi permettrait au gouvernement de financer un agriculteur poursuivi par le même gouvernement en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement, puisque la section sur le fonds de défense ne réfère pas à la Loi sur la protection du territoire agricole, contrairement à la section sur la responsabilité restreinte où nommément on exclut la question des recours fondés sur la Loi sur la qualité de l'environnement. Cela voudrait donc dire, d'une part, que, si le gouvernement décidait qu'un agriculteur pollue et enfreint les dispositions de la Loi sur la qualité de l'environnement et que le gouvernement décide de poursuivre cet agriculteur, ce même gouvernement financerait la défense de ce producteur agricole. D'autre part, le projet de loi n'assure aucune balise quant à l'accessibilité au fonds en fonction de la situation financière du producteur agricole. Quelle que soit la richesse ou la pauvreté de celui-ci, la loi ne prévoit aucune balise.

Enfin, la loi ne prévoit pas, par exemple, qu'un producteur agricole qui est poursuivi, qui est condamné en dépit d'une défense financée par le gouvernement remette au gouvernement les

sommes dont il a bénéficié pour sa défense compte tenu de sa culpabilité. Nous estimons que, compte tenu des maigres ressources que le gouvernement a à sa disposition et de l'ampleur des problèmes environnementaux, ce ne soit pas nécessairement une priorité de financer les gens, notamment ceux qui sont poursuivis par le ministère de l'Environnement pour des présumées infractions.

Quant à la section sur les plaintes, je n'y reviendrai pas compte tenu du fait que M. Nicolet a suffisamment insisté sur le caractère inacceptable de ces dispositions. La réciprocité est une mesure dont on a invoqué la nécessité du côté du ministère de l'Agriculture à de nombreuses reprises. Tel que rédigé, le projet de loi va générer une complexification des processus d'émission des permis de construction et des coûts additionnels. Vous êtes tout aussi sensibles que moi au fait que nous parions de petites communautés municipales avec des moyens restreints, et que les inspecteurs municipaux ne sont pas toujours à temps plein ni n'ont pas toujours toute la formation qui leur serait nécessaire. Nonobstant ces difficultés, dans un contexte de reconsidération de la section sur les activités agricoles, l'UMRCQ est prête à accepter le principe des dispositions relatives à la réciprocité.

Ce sont dans l'ensemble les principaux commentaires qu'on avait à faire sur le plan technique concernant le projet de loi. Je vous remercie.

Le Président (M. Richard): Merci. Me Poirier. Merci, M. Nicolet. M. le ministre.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier et souhaiter la bienvenue à l'Assemblée nationale à M. Nicolet, M. Roy, de la MRC de Coaticook, à Me Poirier, et leur dire que c'est avec beaucoup d'intérêt qu'on prend connaissance de leur mémoire ce matin, même si le contenu et les prises de position ou encore les demandes formulées ne nous sont pas étrangères en ce que de telles prises de position ou de telles requêtes ont été portées à mon attention il y a déjà un certain temps.

Vous vous Inscrivez contre le projet de loi. Vous exprimez une opposition qui se veut assez vive si je me réfère, entre autres, au libellé du préambule formulé par M. le président de l'UMRCQ. Vous dites que c'est une attitude offensante et antidémocratique.

Je voudrais revenir sur un élément qui doit être formulé pour situer dans son juste contexte la pertinence du projet de loi qui est déposé aujourd'hui. La loi 90 a été adoptée en 1978. La loi 125 a été adoptée en 1979. Cette dualité législative marquée par une manque de précision, tout au moins en ce qui concerne le partage ou la primauté des lois, a eu comme résultat des aspirations exprimées par le monde municipal qui voudrait bien avoir Juridiction sur l'aménagement du territoire à l'intérieur de la zone agricole. Pour bien comprendre la portée de la loi, la nécessité non seulement de la maintenir mais d'en renforcer plusieurs dispositions, I faut aussi avoir à l'esprit le fait que, si les municipalités du Québec et particulièrement les municipalités rurales que vous représentez, M. le président, avaient été solidaires de l'agriculture au Québec, si ces mêmes municipalités avaient eu une vision de développement qui aurait tenu compte de l'agriculture et de son devenir, probablement ou possiblement tout au moins que le législateur n'aurait pas eu besoin d'adopter la Loi sur la protection du territoire agricole, en 1978. Personnellement, je demeure convaincu que la loi que nous présentons ici pour étude en commission parlementaire, lorsqu'elle sera en application, permettra d'établir des règles du jeu beaucoup plus claires et précises, susceptibles d'éliminer de nombreux affrontements.

Je m'explique. Des affrontements. par exemple, quand on voit une MRC ou des municipalités qui voudraient réglementer les activités agricoles en zone agricole et qui demandent de régir la production et les activités agricoles, la manière dont ces activités devront être conduites, etc. Cela donne place à des affrontements, à des dualités et à des interprétations différentes. Vous considérez comme antidémocratiques les dispositions portant sur le droit de produire et sur le rôle, le mandat qui sera dévolu au commissaire aviseur. D'abord, dans notre esprit, le commissaire aviseur est une personne qui sera nommée par le ministre de ta Justice et assistée de deux personnes nommées par le ministre des Affaires municipales et de deux personnes nommées par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, avec comme mandat de rapprocher les parties et seulement de formuler un avis. En fait, c'est un peu un comité ou une structure susceptible de refroidir le débat lorsqu'il y a un affrontement dans une municipalité pour donner un avis qui, nous l'espérons et nous le croyons, permettra d'en arriver à une solution.

C'est la même chose pour la question de la réciprocité qu'en fin de compte vous convenez d'appuyer. Quel est l'objectif? C'est d'éviter des conflits entre des producteurs agricoles et des citoyens. Vous indiquez que c'est offensant et antidémocratique. Si tel était le cas, nous ne sommes pas les seuls à l'être. Plusieurs provinces canadiennes se sont dotées de lois analogues à celle que je présente aujourd'hui. Plusieurs dizaines d'États américains ont la même prise de conscience que nous ici, à savoir que les sols agricoles constituent une ressource non renouvelable. C'est une ressource sol qui, dans la très grande majorité des cas, lorsqu'elle est affectée à d'autres fins que l'agriculture, est perdue de façon irrévocable. On doit protéger ces sols qui sont agressés par d'autres éléments, que ce soit la nature, les produits chimiques, l'érosion éolienne, les problèmes d'érosion près des cours

d'eau, etc.

Cela dit, je comprends la position que vous adoptez parce que, par le projet de loi 100 et aussi par les autres mesures qui ont été adoptées par notre gouvernement depuis un certain temps, il est devenu très clair dans notre esprit que les municipalités du Québec ont des juridictions, des pouvoirs qui sont importants. C'est vrai que vous êtes le palier de gouvernement très près des citoyens, etc., et cette fonction doit s'exercer via les schémas d'aménagement que vous êtes à rédiger actuellement. Quand j'ai indiqué, en novembre dernier, que les municipalités allaient pouvoir développer, agir en zones blanches, que les agriculteurs allaient pouvoir développer leurs entreprises en zones vertes et que tout le monde aurait la paix, je ne voulais pas vous insulter. Loin de moi l'intention de vouloir insulter quiconque, mais c'était une image qui, je pense, est assez fidèle de nos intentions, c'est-à-dire faire en sorte que les municipalités puissent développer, aménager, améliorer la qualité de vie de leurs citoyens par un aménagement à l'intérieur de ces zones blanches qui sont nombreuses, ces zones blanches qui, à la suite de la négociation des zones agricoles et urbaines entre la Commission de protection du territoire agricole et chacune des MRC, doivent vous donner les superficies de terrain requises pour répondre à vos besoins de développement. Mais une fois que la ligne va être tirée, cependant, vous comprendrez qu'en zone agricole et en agriculture les investissements, les engagements financiers des producteurs ne sont pas faits seulement pour quelques années. On doit investir à long terme. On doit sécuriser l'affectation de ces sols et sécuriser l'activité qui s'y tient. C'est mon commentaire préliminaire.

Je vais répondre à quelques-unes des interrogations que vous formulez aujourd'hui. Vous dites: La délimitation des territoires exclusifs, l'article 21 de la loi, ça va se faire au-dessus de notre tête, etc. À la suite de l'échange que nous avons eu à la table Québec-municipalités et à la suite du comité technique qui a siégé, je me suis engagé à faire en sorte de prévoir un amendement pour être certain que les municipalités puissent être consultées dans le cadre de ce processus d'établissement de la délimitation des territoires exclusifs. De plus, toujours en rapport avec l'article 21, pour ce qui est des infrastructures, vous voudriez que le deuxième alinéa de l'article 69.08 concernant les conditions particulières en matière d'utilité publique ne s'applique pas dans les cas suivants: réseaux d'aqueduc et d'égout, y compris les usines de traitement et d'épuration, les lieux d'élimination des déchets domestiques, et vous ajoutez les sites d'entreposage de la neige qui a été recueillie sur le réseau routier. Je me suis engagé à apporter certaines modifications qui seront quand même limitées et, lorsque l'étude du projet de loi article par article reprendra, nous vous démontrerons que nous sommes d'accord sur certains éléments des demandes que vous formulez. (9 h 45)

Vous avez porté à mon attention le fait que l'immunité, telle que vous l'interprétez, pouvait déborder, pouvait bénéficier à des entreprises autres que des entreprises agricoles. Vous vous inquiétez qu'une entreprise, par exemple, de transformation de produits bioalimentaires pourrait alléguer cette disposition. L'intention du législateur et du gouvernement, c'est de protéger les entreprises agricoles. C'est définitif, notre objectif n'est pas de protéger une grande entreprise qui ferait la transformation d'un légume quelconque en zone agricole. À cet égard, des modifications seront apportées pour vraiment circonscrire l'application de la notion d'immunité, pour l'identifier exactement selon notre intention, c'est-à-dire protéger le producteur agricole. Par exemple, un producteur qui fait de l'emballage ou qui fait du conditionnement de produits sur sa ferme, pour autant que la principale activité du propriétaire soit l'agriculture, comme producteur ou comme productrice agricole, il pourra bénéficier de cette immunité.

Cependant, je vous donne un exemple, supposons qu'une entreprise, comme Catelli, Campbell ou une autre, a une entreprise de transformation; l'immunité ne pourra servir à des entreprises comme celles-là. Cela aussi est susceptible, encore une fois, je pense, de vous satisfaire parce que c'est vous qui l'avez demandé.

Concernant le fonds de défense, Me Poirier, vous utilisez des termes qui manifestent votre inquiétude. Vous dites: On ne fait pas de distinction des riches ou des pauvres; l'agriculteur qui a le moyen, qui n'a pas le moyen, etc. Mais vous devez certainement savoir, vous aussi, comme avocat, que dans le cadre du recours collectif on ne fait pas de distinction, lorsqu'une demande est formulée pour obtenir le droit de recourir collectivement, à savoir s'il y a un requérant dans le groupe qui est plus riche que son voisin, etc.

Vous vous inquiétez des critères sur lesquels nous nous appuierons au gouvernement et au ministère pour valider le recours à ce fonds de défense professionnelle. Je vous indique tout de suite un des éléments importants. Pour pouvoir bénéficier de ce fonds, le producteur ou la productrice agricole devra agir selon les règles de l'art, devra respecter les règlements. Hier, j'ai dit aux représentants de l'Union des municipalités, qui manifestaient un peu d'inquiétude sur le même sujet, que le fonds de défense et la notion d'immunité, ça ne doit pas être interprété comme étant un passeport ou une caution de l'illégalité et de la pollution. C'est d'établir des règles du jeu, encore une fois, qui seront plus claires, plus précises et qui ne pourront bénéficier qu'à l'ensemble de la collectivité.

Il y aura aussi un règlement qui sera établi, qui mettra un peu de chair sur cette ossature qui

est dans la loi et qui viendra préciser les conditions auxquelles devra répondre une personne désireuse de recourir à ce fonds de défense. J'apprécie beaucoup la solidarité que vous démontrez à l'égard du gouvernement dans une perspective de gestion saine et rigoureuse des fonds publics. Ne soyez pas inquiets, on s'en occupe. D'ailleurs, souventefois, les municipalités que vous représentez - il y en a 28 dans mon comté - sont les premières à s'en plaindre.

Cela dit, J'apprécie beaucoup votre témoignage ce matin. Je note vos commentaires. Certains des éléments contenus dans votre mémoire recevront une réponse positive, en ce qu'on se prépare à présenter des modifications. Cependant, je voudrais, encore une fois, être bien honnête, bien ouvert et aussi bien direct avec le monde municipal. La loi 90 a eu cours pendant plusieurs années et le présent projet de loi vise à apporter des précisions, à l'actualiser. C'est très important pour le milieu agricole de pouvoir produire sur les terres, dans une perspective à long terme, avec des règles du jeu qui ne seront pas modifiées par une municipalité comparativement à une autre; d'ailleurs, on s'y réfère indirectement dans votre mémoire. Hier, l'Union des municipalités nous a dit: Vous savez, les plaintes c'est quand même très limité; il ne faut pas adopter une loi provinciale pour les cas de Pintendre et de Sabrevois, etc. Vous avez très certainement fait la même analyse que moi et, si vous ne partagez pas mon opinion, je vous invite à me le dire. Mais vous devez convenir que, dans plusieurs schémas d'aménagement proposés pour adoption par les MRC, il y avait des dispositions particulières, différentes d'une MRC à l'autre, qui s'appliquaient pour régir l'agriculture. C'est une question fondamentale. L'agriculture ne peut pas être régie par des normes différentes d'une MRC à l'autre et, par surcroît, d'une municipalité à l'autre. C'est pourquoi le principe de zonage de production et d'établissement de zones tampons a été complètement exclu par le gouvernement du Québec, dans sa déclaration, par cinq ministres, en novembre 1987.

De notre côté, nous croyons que ce projet de loi viendra établir une situation où chacun pourra agir dans le cadre de ses juridictions sur son territoire. Les règles du jeu qui vont éliminer les conflits entre municipalités et producteurs agricoles et entre propriétaires à l'intérieur de la zone agricole, cela veut dire quoi? Cela veut dire plus d'harmonie, de meilleures relations. J'apprécie ce matin la réponse que vous me donnez en disant: Nous sommes prêtes, les municipalités, via notre personnel, à participer à la mise en oeuvre du projet de loi en regard des responsabilités qui nous sont imparties en ce qui concerne, entre autres, les permis de construction et la validation des normes de réciprocité.

J'apprécie beaucoup ça et je vous remercie. Si vous avez des questions ou des commentaires, n'hésitez pas.

Le Président (M. Richard): M. Nicolet.

M. Nicolet: M. le Président, j'aimerais remercier M. le ministre de ce long exposé. Comme M. le ministre l'a souligné lui-même, le mérite, c'est de mettre l'accent sur la franchise des échanges. Par contre, vous me permettrez, M. le ministre, de m'inscrire en faux contre un certain nombre d'allégations que vous avez faites sur le contexte dans lequel vous situez le rôle ou l'intervention du gouvernement en cette matière.

Dans un premier temps - et je vais commencer à rebours de la ligne de votre exposé puisque c'est ce qui est peut-être encore le plus frais à mon esprit vous faites allusion à Sabrevois et vous mettez, dans un même contexte, Sabrevois, Pintendre et un certain nombre d'autres dossiers célèbres qui ont fait ta manchette depuis deux ans. Vous enchaînez là-dessus, si je comprends bien, avec un raisonnement, à savoir que le producteur agricole ne peut pas être assujetti à des conditions ou des contraintes différentes suivant la municipalité ou la municipalité régionale de comté dans laquelle il exerce sa profession. Là-dessus, bien sûr, il est bien simple de répondre pourquoi. Tous les autres intervenants de la société civile oeuvrent en fonction de contraintes qui leur sont bien particulières. Tout agriculteur qui commence à labourer un champ axe son intervention en fonction des particularités topographiques du sol, du climat, dont il doit tenir compte pour cultiver une matière ou un produit particulier. Pourquoi vouloir, à un moment donné, faire fi de cette divergence qui est justement la richesse et qui est de l'essence même de la société et de l'activité de l'agriculteur? Même pour un agriculteur, au sein de sa propre exploitation, chaque champ est propice à une culture distincte, à une façon d'aborder et d'en retirer le meilleur. Pourquoi, tout d'un coup, voudrait-on superposer à un niveau absolument artificiel une espèce d'uniformisation qui est contraire à la réalité même du monde dans lequel on vit? Nous nous inscrivons en faux contre cela. La société dans laquelle ce producteur agricole doit s'intégrer par la force des choses, quant à nous, doit se refléter dans cette harmonie qui est à créer avec le citoyen, qu'il soit agriculteur ou autre, qui vient faire partie d'une entité sociale distincte.

Tout cela parce que je crois, et c'est là que ceci m'amène, que nous partons d'une conception fondamentalement différente du rôle du municipal dans l'organisation sociale québécoise. Vous parlez du municipal comme étant une structure qui s'applique et dont la légitimité n'est finalement acquise que pour certains éléments de cette société, tandis que d'autres, en l'occurrence les agriculteurs, ont droit à un régime d'exception. Pour nous, la délégation que le législateur nous a faite est globale, totale, et elle couvre l'ensemble des citoyens et des territoires. Il n'a jamais été question, quant à nous, d'accepter qu'on nous compartimente ou

qu'on nous oblige à fonctionner selon différents schèmes pour un groupe par rapport à un autre ou selon certains secteurs d'un territoire par rapport à d'autres. Notre délégation de responsabilités est globale, totale, et elle couvre l'ensemble du territoire. Dans la mesure où on réussira à s'entendre sur ces prémisses, je pense qu'on pourra resituer les besoins de la société agricole par rapport à l'ensemble de la société québécoise.

Vous avez fait allusion brièvement, lors de votre introduction, à l'historique de l'adoption des lois 90 et 125 et j'y souscris bien volontiers. Mais il faut bien reconnaître à la décharge du monde municipal qu'avant l'adoption de la loi 90 c'était l'ensemble de la société qui n'avait pas identifié le besoin de protection des terres agricoles comme une priorité collective. De jeter aujourd'hui, rétroactivement, la pierre et dire: On a légiféré parce que vous ne faisiez pas votre job... On ne faisait pas notre job tout simplement parce que l'ensemble des Québécois n'avait pas perçu la nécessité de protéger les terres agricoles comme étant une priorité collective. Dans le contexte nouveau, dans une plus grande sensibilité du... Finalement, nous sommes l'émanation d'une société et, dans la mesure où nous sommes élus par des gens comme vous et moi, comme tous les citoyens qui nous élisent aux fonctions que nous occupons, dans la mesure où nous reflétons des valeurs sociales, nous agissons. Que le législateur ait pris l'initiative de protéger les terres agricoles, nous y souscrivons et nous sommes bien d'accord parce que, à ce moment-là, cela correspondait à un besoin éclairé d'un impératif national.

Concernant deux points plus précis dans vos remarques, M. le ministre, j'aimerais revenir sur la question des zones vert foncé où vous parlez d'une consultation. Je vous remercie d'avoir ouvert ou entrouvert la porte à une consultation, mais je crois - j'aimerais le rappeler - que, pour nous, ce n'est pas seulement une consultation, mais c'est véritablement une négociation que nous demandons. Nous voulons être partie entière aux échanges qui mèneront à la définition d'une zone, d'un périmètre agricole ou d'un secteur exclusif.

Il y a aussi la question du fonds de défense. Vous avez apporté certains éclaircissements que nous apprécions. J'aimerais vous demander si vous seriez disposé, dès à présent, à dire que tous les recours pris en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement seraient exclus de la protection du fonds de défense, et ce dans la loi. Ce serait, pour nous, un éclaircissement qui nous permettrait d'avancer notre réflexion sur toutes les dispositions qui touchent le fonds de défense.

Vous parlez également, toujours concernant le même fonds de défense, de la possibilité, par le biais de règlements, de le baliser. Notre remarque là-dessus est très simple. Si, dans votre esprit, il est bien clair qu'il y aura certaines limites qui seront fixées, pourquoi ne pas les établir ou les définir dans la loi? Je pense que tout le monde serait sécurisé si, effectivement, le texte législatif, dès à présent, balisait les recours et les interventions du fonds de défense. Quant à nous, cela semblerait essentiel.

C'est un premier tour d'horizon, M. le ministre, en réponse à vos commentaires.

M. Pagé: Pour répondre à votre question, j'apprécierais bien que vous précisiez le sens de la question, la teneur ou le contenu de la question ou du sujet de l'environnement par rapport à la norme d'immunité.

M. Poirier: Ce que nous aimerions, c'est que la loi précise qu'en aucun moment un agriculteur ne peut avoir recours au fonds de défense lorsqu'il est poursuivi en vertu d'une disposition de la Loi sur la qualité de l'environnement ou des règlements adoptés sous son empire. (10 heures)

M. Pagé: Bien, cela ne peut pas s'appliquer. Vous connaissez comme moi, Me Poirier, l'article 20 de la Loi sur la qualité de l'environnement. L'article dit: Toute personne qui se sent affectée dans son confort peut demander la cessation de l'activité. C'est un article très général, universel. Je vous donne un exemple concret. Ce matin, à Donnacona, dans le comté de Portneuf, une personne pourrait se lever et dire: La compagnie Domtar, qui a quelques émanations, m'affecte dans mon confort; je demande donc au gouvernement et au ministre de l'Environnement de fermer Domtar; Domtar m'affecte. Quelle serait la réaction à une telle demande, non seulement dans mon comté, mais dans toutes ces petites villes mono-industrielles? Très probablement que la première réaction viendrait du conseil municipal qui dirait: Bien, voyons donc, c'est farfelu; la compagnie travaille à améliorer la qualité de son environnement, à répondre à des normes qui sont en révision, etc.; c'est le principal donneur d'emplois dans la municipalité; il faut vivre en société, il faut accepter certaines contraintes. Par surcroît, une entreprise comme Domtar, qui recevrait un tel avis d'une requête à être présentée au ministre de l'Environnement pour faire cesser ses activités, dirait: On va prendre ça en considération; on va envoyer ça à notre contentieux; on va se défendre devant les tribunaux; on va plaider et on verra. Sauf que le recours en vertu de l'article 20 est utilisé, a déjà été utilisé et est parfois allégué par des citoyens qui viennent s'installer en zone verte, qui viennent se construire une résidence en zone verte, près d'une entreprise agricole qui, bien souvent, est là depuis quelques générations. C'est l'entreprise, c'est le gagne-pain.

Aujourd'hui, la valeur moyenne d'une ferme, par exemple, d'une entreprise laitière, c'est quoi? C'est 400 000 $. Ce sont de véritables entreprises économiques, sauf que, dans le cas d'un recours exercé contre un producteur agricole, ce dernier n'a pas le privilège de dire: II n'y a pas de

problèmes, je vais envoyer ça à mon siège social. Non. C'est lui qui doit se défendre, c'est lui qui doit aller se bagarrer devant les tribunaux, c'est lui qui doit embaucher des avocats et c'est lui qui doit faire l'objet de plaintes... Vous le savez comme moi, on a eu des cas où des producteurs, produisant en toute légalité, conformément aux normes et aux directives, ont fait l'objet d'au-delà de vingt plaintes de la part des voisins. C'est ça qu'on veut régler. On veut établir des règles du jeu plus claires, plus précises.

Cependant, ce que je vous dis, c'est que nous sommes disposés - on va en discuter Ici autour de la table et on va prendre la décision la plus éclairée, parlementaires que nous sommes - à faire en sorte que l'accès au fonds ne serve pas à cautionner des gens qui seraient dans l'illégalité par rapport à des normes. Mais nous demander de subordonner l'application de ce concept d'immunité et de le limiter ou le soustraire en vertu de toutes les dispositions de chacune des lois de l'environnement, ce serait annuler purement et simplement cette disposition.

Un commentaire et une question. M. Nicolet, vous dites: Vous créez deux classes; vous créez une zone verte et vous nous conférez une juridiction en zone blanche. Il faut quand même bien avoir ceci à l'esprit. Les municipalités du Québec, malgré le projet de loi 90, malgré la loi 100, conservent des juridictions en zone agricole. Les règlements de construction adoptés par une municipalité continuent à s'appliquer. Les règles régissant la superficie des terrains - par exemple, pour être conforme, pour obtenir un permis d'autorisation de construire, de rénover, etc. - ou les règles de conformité s'appliquant à la gestion de l'environnement - par exemple, les fosses septiques - c'est le règlement de contrôle intérimaire, c'est la MRC, ce sont les municipalités qui ont juridiction. Ce n'est pas le gouvernement du Québec qui a juridiction.

En ce qui concerne les aqueducs et les égouts, vous avez toujours juridiction dans la zone agricole. En ce qui concerne l'acquisition des terrains, vous êtes, les municipalités rurales du Québec, partenaires du gouvernement du Québec dans la rénovation du réseau routier. On demande aux municipalités de procéder à l'acquisition des terrains, de conclure des actes notariés. On donne 7000 $ ou 8000 $ le kilomètre. Vous procédez à l'acquisition des terrains; vous voyez à la réfection des clôtures; vous payez les actes notariés. Ce sont les municipalités qui ont juridiction.

Vous gardez votre pouvoir d'expropriation en zone agricole. Les cours d'eau que vous nettoyez en zone agricole en collaboration avec le ministère, le maître d'oeuvre, c'est la municipalité. Nous sommes heureux, comme ministère, de vous avoir comme partenaires. Mais là où le projet de loi 100 vient limiter le pouvoir des municipalités, c'est en ce qui concerne la possibilité pour une municipalité de gérer les activités. Est-ce que, selon vous, M. le préfet, la municipalité de Cap-de-la-Madeleine devrait avoir Juridiction pour statuer que la compagnie Consol ne devrait pas ou ne pourrait pas se doter, par exemple, d'un équipement à pâte thermomécanique pour fabriquer sa pâte? Est-ce que vous croyez que la ville de Donnacona, dans mon comté, devrait avoir le pouvoir de dire à Domtar: Votre procédé à pâte thermomécanique, vous ne l'installerez pas parce qu'on ne veut pas? Vous allez me dire: Non. Croyez-vous que la ville de East-Angus devrait avoir juridiction pour dire à la compagnie Domtar: Vous n'opérerez pas de nuit; vous allez opérer le jour seulement; vous n'opérerez pas les fins de semaine? Vous allez me répondre: Non. La vilIe de Donnacona, la ville de Shawinigan, la ville de Cap-de-la-Madeleine et la ville de East-Angus n'ont pas cette juridiction. Mais ce que les municipalités ont demandé, entre autres, lors de représentations concernant la régie des activités agricoles, c'est de limiter le producteur dans sa production, qu'il n'ait pas le droit d'augmenter sa production, par exemple, dans le domaine du porc, du veau de lait, du veau de grain. Mais pourquoi? Ce que vous demandez et ce qui a été demandé par plusieurs MRC, c'est le droit pour la municipalité de dire: Dans notre municipalité, les séchoirs à foin ne fonctionneront pas les samedis et les dimanches. C'est la même chose, M. Nicolet. Alors, ce ne sont pas des règles du jeu différentes. Cela sous-tend une perception, et c'est cela qui m'Inquiète, selon laquelle le milieu municipal pourrait faire ce que bon lui semble en zone agricole alors que ce sont des entreprises tout aussi importantes que les compagnies de pâtes et papiers qui sont dans la ville ou dans le village.

M. Poirier: M. le ministre, avant que M. Nicolet réponde aux questions que vous avez posées, j'aimerais répliquer à ce que vous avez dit antérieurement au sujet des recours pris en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement La demande qui vous a été formulée est la suivante: Êtes-vous disposé à préciser dans la loi que le fonds ne pourra pas servir à la défense d'un producteur agricole poursuivi en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement et ses règlements? Vous avez répondu: On ne peut pas faire cela, parce que ce serait exposer, notamment, les producteurs agricoles, à des poursuites farfelues et générant des coûts importants pour eux. Je suis convaincu que vous savez aussi bien que moi que tous les Québécois et les Québécoises savent que prendre un recours en injonction et embaucher des avocats, c'est coûteux, et qu'on n'assiste pas à des multiplications à la folie de poursuites frivoles devant les tribunaux contre les producteurs agricoles. Quand des citoyens décident d'aller devant les tribunaux et d'investir les sommes importantes que des poursuites de cette nature impliquent, c'est parce qu'il y a a priori un problème sérieux.

Deuxièmement, le droit auquel vous avez fait référence à l'article 20 de la Loi sur la

qualité de l'environnement, c'est le droit, qu'a reconnu l'Assemblée nationale, de tout Québécois à la qualité de son environnement. C'est l'un des droits fondamentaux. Est-il acceptable que le gouvernement du Québec finance les opposants à des Québécois qui invoquent un droit fondamental comme celui-là devant les tribunaux? Vous me rétorquez que vous allez, avant de décider si une personne est admissible au fonds, vérifier si le gars ou la femme est coupable ou pas. Je ne pense pas que ce soit le rôle du gouvernement du Québec a priori de porter un jugement sur la culpabilité ou la vraisemblance de culpabilité d'un individu poursuivi avant de vérifier si on va financer ou non sa défense. Je pense que cette personne-là est présumée innocente si elle est poursuivie au pénal ou si c'est un recours en injonction, elle a une défense, elle a le droit de poursuivre son activité en principe, à moins qu'on fasse la preuve que tel n'est pas le cas. Partant de là, pourquoi des citoyens québécois qui invoquent un droit fondamental, le droit à la qualité de l'environnement, se retrouveraient en face d'autres Québécois qui, au nom d'un droit qui est difficile à préciser, qui est certainement, en termes de hiérarchie, moins important que le droit à la qualité de l'environnement, seraient financés par des deniers publics?

M. Nicolet: M. le Président, si vous me permettez, sur l'autre volet de la question ou de la réponse - c'est une réponse à une réponse - de M. le ministre, j'aimerais revenir sur une distinction fondamentale. Vous avez énuméré, M. le ministre, un certain nombre de droits ou de pouvoirs d'intervention des instances municipales en zone verte, et c'est justement là que j'en ai. La longue énumération que vous avez faite ne comprend qu'un pouvoir sur des usages non agricoles. En d'autres termes, implicitement, vous venez confirmer notre allégation à savoir que, dans votre optique et dans la perspective que vous désirez impartir par le biais de ce projet de loi, vous retirez au monde municipal tout pouvoir ou tout droit d'intervenir dans des domaines qui touchent l'activité agricole. Du reste, c'est toute la difficulté que nous avons vécue au cours des derniers mois quant à l'approbation des schémas d'aménagement. Vous vous rappellerez que les longs débats entre les MRC qui se sont retrouvés sur la table du COMPADR, qui, finalement, ont bloqué un processus pendant de longs mois sont fondamentalement dus au fait que votre ministère prétendait appliquer en zone verte d'autres normes que celles qui s'appliquaient de l'autre côté de cette ligne parfaitement artificielle qui a été tracée sur une carte entre les zones protégées et les zones non protégées. On ne planifiait plus en fonction d'une réalité physique du territoire ou en fonction de besoins d'une société, on planifiait en fonction d'une limite arbitraire tracée. Épargnez-moi de devoir expliciter ici dans quel contexte et comment ça avait été fait.

La distinction - là-dessus, je vous suis bien volontiers - nous n'avons pas compétence pour légiférer sur l'activité agricole. Par contre, pour reprendre votre exemple, nous avons le pouvoir, et nous le préservons jalousement, de dire à Domtar: Tu ne feras pas telle activité à tel endroit; par contre, tu pourras le faire à tel autre endroit. C'est tout ce que nous réclamons. Nous voulons maintenir notre entière compétence de légiférer en matière d'usage, en matière de nuisance; par contre, nous ne prétendons pas - tel n'est pas notre objectif - dire aux agriculteurs comment cultiver.

Le Président (M. Richard): M. le porte-parole de l'Opposition.

M. Brassard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord, moi aussi, remercier M. Nicolet et ses collègues d'avoir bien voulu accepter de venir témoigner devant cette commission parlementaire. Je sais que c'est ce qu'ils réclamaient depuis des semaines, sinon des mois. Finalement, c'est chose faite. Je vous remercie également pour le mémoire que vous avez déposé et que vous nous avez transmis.

Le premier sujet que j'aborderais, c'est celui, évidemment, que vous venez d'aborder avec le ministre. Je commencerais en vous disant un peu ce que j'ai dit hier à l'Union des municipalités du Québec, des remarques sur l'ampleur du problème. Avant de prévoir dans une loi des dispositions nouvelles, des dispositions qui introduisent du droit nouveau dans notre législation, il me semble important au préalable de mesurer avec le plus d'exactitude possible l'ampleur du problème des relations entre les municipalités, d'une part, et les producteurs agricoles, d'autre part, l'ampleur du problème, également, entre les producteurs agricoles, d'une part, et des citoyens du Québec qui se plaignent des retombées des activités agricoles. Cela me semble important de savoir cela, parce que, comme le signalait hier votre collègue président de l'UMQ, avant de sortir le bazooka ou le canon, il faut peut-être d'abord connaître comme il faut la cible. Est-ce un maringouin qu'on a à abattre ou un monstre extraterrestre? C'est important de le savoir. Cela nous indique quoi choisir dans l'arsenal. (10 h 15)

II y a toute une série de questions: Quel est le bilan des relations producteurs agricoles-municipalités? On cite toujours Sabrevois et Pintendre, mais en vous demandant aussi, parce que j'imagine que vous n'avez pas plus de réponse que M. Desrosiers, hier... Par conséquent, je me tourne vers le ministre, c'est lui qui a parrainé le projet de loi et qui l'a présenté à l'Assemblée nationale. Comme parlementaire, j'exige un bilan, une évaluation exacte des problèmes vécus entre les municipalités et les producteurs agricoles. Ils doivent le savoir au ministère de l'Agriculture et au ministère de

l'Environnement. Combien y a-t-il de municipalités au Québec, sur les 1500, qui sont en conflit avec des producteurs agricoles relativement à des réglementations municipales? Combien y a-t-il de plaintes portées au ministère de l'Environnement par des citoyens du Québec contre des producteurs agricoles qui exercent des activités agricoles Jugées, selon les citoyens qui portent plainte, néfastes ou nuisibles à l'environnement? Combien y en a-t-il au Québec? Jusqu'à maintenant, ce qu'on sait relativement aux municipalités, c'est qu'il y en a 2 qui ont causé des problèmes, 2 sur 1500; ce n'est pas beaucoup cela, hein? Combien de citoyens ont porté plainte effectivement au ministère de l'Environnement? Ce serait important de le savoir. Nous, en tout cas, on va exiger de le savoir comme parlementaires avant d'aborder l'étude de ces articles.

J'espère que le ministre a des réponses à cela. S'il n'en a pas, je me demande comment il légifère. il introduit dans un projet de loi des dispositions sur des problèmes dont il ne connaît pas l'ampleur et dont il est Incapable d'évaluer et de mesurer l'importance. Cela m'apparaît essentiel et je pense que les questions qu'on se pose à ce sujet sont tout à fait légitimes et pertinentes. Si le problème n'est pas si grave que cela, s'il n'a pas autant d'ampleur, à ce moment-là, peut-être que les moyens proposés ne sont pas pertinents.

Tout à l'heure, le ministre disait: Oui, mais, via les schémas d'aménagement, les MRC peuvent introduire des contraintes à l'activité agricole, à la production agricole. Je vous signale qu'en vertu de la loi 125 le schéma d'aménagement doit être adopté par décret du Conseil des ministres. Vous savez cela? Vous le savez sûrement, vous qui êtes président de l'UMRCQ. C'est comme cela que c'est prévu dans la loi. Donc, il y a là un pouvoir énorme du gouvernement, du Conseil des ministres pour épurer les schémas d'aménagement si le gouvernement juge qu'il y a des dispositions ou des éléments dans les schémas d'aménagement qui vont à rencontre de la production agricole ou qui comportent des contraintes exagérées ou abusives à l'égard de la production agricole. Vous avez un moyen de le faire. On n'a pas besoin de nouvelles dispositions à ce moment-là. Le schéma d'aménagement est adopté par décret du Conseil des ministres. Vous le savez? Bon, à ce moment-là, si le problème n'est pas si énorme que cela, il y a déjà, à mon avis, des moyens pour arriver à aplanir les difficultés et à éliminer les contraintes jugées exagérées ou abusives par le gouvernement qu'on veut ou qu'on entend imposer aux producteurs agricoles.

Quant au fonds spécial, iI me semble que vous apportez des éléments importants. Avant de créer un fonds de cette nature, cela mérite d'être examiné sérieusement, parce que, vous avez raison, à ce moment-là, vous créez une catégorie de citoyens privilégiés par rapport aux autres. Les producteurs agricoles poursuivis, contre qui on porte plainte, pourront recourir à un fonds spécial qui va financer les coûts découlant de cette plainte. Par exemple, si cela va devant les tribunaux, ce sera assumé par ce fonds. Le ministre répond: Oui, mais les producteurs agricoles, écoutez, ce n'est pas comme la Domtar, comme la Consol, iIs n'ont pas de contentieux, ni une armée d'avocats et de conseillers juridiques, ni la fortune pour les aider et soutenir leur démarche devant les tribunaux. J'en conviens. Je suis convaincu que la compagnie Abitibi-Price, chez nous, n'a pas besoin de fonds spécial. Si y a des plaintes portées contre elle, elle n'a pas besoin de fonds spécial. Elle a ses avocats et elle est capable de financer ses démarches devant le système judiciaire; je suis sûr de cela.

Mais prenons le cas des PME, par exemple. Les petites entreprises n'ont pas de contentieux. Les PME ne sont pas capables de se payer des avocats à temps plein en permanence. Et Dieu sait qu'il y a des centaines et des milliers de PME au Québec. En vertu du raisonnement du ministre, à partir du moment où le projet de loi 100 est adopté, pourquoi les PME du Québec ne réclameraient-elles pas un fonds spécial pour les aider contre les citoyens qui portent plainte contre elles en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement? Même exemple que tantôt du citoyen de Donnacona qui porte plainte et qui dit: La compagnie papetière nuit à la qualité de mon environnement. Il porte plainte. La compagnie dont il est question est capable de se défendre. Mais les PME, au Québec Pourquoi les PME et les organismes représentant les PME, une fois qu'on aura adopté le projet de loi 100, n'iraient-ils pas voir le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie pour lui dire: Écoutez, on est sans moyens, on n'a pas les ressources pour se défendre lorsque des plaintes sont portées contre nous par des citoyens du Québec, en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement? On veut être aidés. Quand on est pris dans une telle situation, auriez-vous l'obligeance de créer un fonds d'aide pour nous soutenir et pour financer nos démarches quand il y a des plaintes portées contre nous? Etc., etc., etc.

J'ai cru entendre à travers les branches que les groupes écologiques aimeraient bien, eux aussi, avoir un fonds d'aide pour leur permettre - pour eux, c'est l'inverse - de porter des plaintes. Où va-t-on de cette façon? Vous avez raison de dire que la loi n'est pas claire. L'article de la loi sur le fonds spécial est le suivant: Un fonds est institué pour assurer la défense des producteurs contre qui une action, une procédure, une ordonnance est intentée ou émise en raison des poussières, des odeurs ou des bruits qui résultent d'activités agricoles en zone agricole. C'est seulement cela que ça dit Cela veut dire que le producteur agricole qui viole la Loi sur la qualité de l'environnement pourra aussi y avoir recours. À moins qu'on amende la loi, il pourra aussi y avoir recours. Vous avez

raison, ce fonds pourrait servir à la défense d'un producteur agricole poursuivi par le ministère de l'Environnement en raison d'une infraction à la Loi sur la qualité de l'environnement. C'est évident, d'après la loi, cela pourrait arriver que le ministère de l'Environnement poursuive un producteur agricole et que ce dernier fasse appel au fonds pour financer ses démarches judiciaires. Remarquez que c'est peut-être en train de devenir une coutume chez ce gouvernement. On sait que ce gouvernement a déjà financé les avocats d'Alliance Québec qui contestaient la loi 101 défendue par le même gouvernement en Cour suprême. Alors, peut-être qu'on assiste à la naissance d'une tradition chez ce gouvernement-là d'être présent des deux côtés...

Une voix: Des deux côtés de la bouche.

M. Brassard: ...quand il y a conflit ou quand il y a plainte devant un tribunal; on aide le plaignant et on est à la fois le défenseur de la loi. C'est peut-être ça. C'est peut-être une innovation. Parce que, si on fait référence à Alliance Québec, c'est exactement ça qui s'est passé et c'est exactement ça qui va se passer aussi avec le fonds. Et vous avez raison de dire que la loi ne prévoit même pas, pour le producteur, le remboursement des sommes avancées par le fonds dans l'hypothèse où ce dernier est reconnu responsable. Au moins, il pourrait y avoir cette balise-là. Vous avez raison de le mentionner. Si un producteur qui a eu recours au fonds ou a obtenu de l'aide du fonds, est reconnu coupable de violation de la Loi sur la qualité de l'environnement, il devrait au moins être tenu de rembourser. Ce serait le minimum qu'on puisse demander.

Donc, je pense que vous apportez des éléments pertinents et nous, de notre côté, nous nous interrogeons, premièrement, sur l'ampleur. Si, comme président des MRC et des petites municipalités rurales, vous avez des commentaires à faire sur l'ampleur du problème, je pense qu'il serait important de nous le signaler. D'après ce qu'on en sait, il n'est pas si grave, il n'atteint pas un tel niveau de gravité qu'on puisse justifier des dispositions comme celle-là.

Deuxièmement, est-ce que vous ne pensez pas que, compte tenu de l'ampleur du problème, il y a actuellement des dispositions dans la loi 125, par exemple l'adoption du processus, l'adoption du schéma d'aménagement, qui peuvent être utilisées pour régler des problèmes de cette nature-là qui peuvent surgir entre municipalités et producteurs agricoles? Est-ce que ces dispositions-là vous apparaissent suffisantes? Une fois que vous aurez commenté ces questions-là, j'aurai peut-être une autre question.

M. Nicolet: M. le Président, j'aimerais peut-être répondre en trois temps à l'exposé de M. Brassard. J'aimerais tout d'abord demander à mon collègue, M. Léo Roy, de revenir un petit peu sur cette relation agriculteurs - entre parenthèses, UPA - et le monde municipal parce que je pense que ça permet de situer la problématique telle qu'elle se vit sur le terrain. Après ça, je demanderai à M. Poirier de parier de l'ampleur de la problématique quant aux poursuites judiciaires et je conclurai avec votre permission.

Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. Roy.

M. Roy (Léo): M. le Président, M. le ministre, messieurs, c'est sûr qu'il me fait plaisir d'être ici aujourd'hui. Avant de répondre à votre question, j'aimerais quand même revenir dans le temps parce que ça fait au-delà de douze ans que je suis maire d'une municipalité. Disons que, dans les premiers temps où j'étais maire, nous avions les conseils de comté. On se réunissait tous les trois mois. Quand l'assemblée avait duré une demi-heure, il y en avait beaucoup qui bâillaient et qui disaient que cela avait assez duré. Je pense qu'on ne réglait pas grand-chose au niveau régional au conseil de comté.

Là, la loi 125 est arrivée. La loi 90 est arrivée avant mais, quand même, la loi 125 est arrivée et nous a obligés réellement à nous regrouper. Et, à ce moment-là, on nous a obligés aussi à regarder ce qu'on pouvait faire dans la région. J'étais peut-être un de ceux qui n'étaient pas d'accord sur le regroupement avec les villes parce que c'est toujours un problème de se regrouper et pour les villes et les campagnes de parler ensemble. Disons qu'on l'a fait, mais seulement on nous a obligés à faire nos devoirs. On nous a obligés à engager du personnel pour établir un schéma d'aménagement. On nous a, autrement dit, donné la piqûre de regarder de plus près à nos affaires. C'est sûr qu'avant ça, protéger le territoire agricole... Nous étions agriculteurs. Nous faisions partie des conseils municipaux. Nous le faisions sans nous en rendre compte. Peut-être qu'il y avait certaines municipalités qui avaient des problèmes avec ça, mais au niveau agricole on n'en avait pas parce qu'on était dedans. (10 h 30)

C'est sûr qu'on ne pensait pas à interdire de construire partout comme la loi a fait, mais quand même. Quand on a fait les schémas d'aménagement, on a mis sur pied des comités. On avait cinq comités. Il y en avait un pour l'agriculture, li y avait des représentants de toutes les municipalités aux comités. À ce moment, le schéma d'aménagement a été fait selon ce que tout le monde voulait dans les MRC. On n'a pas créé ça dans le bureau. On ne l'a pas fait de toutes pièces, pour le présenter par la suite. Ce n'est pas ça qu'on a fait. On a fait de la consultation. On a consulté pendant trois ou quatre ans, je ne me rappelle pas. C'est de là que le schéma d'aménagement est sorti. On a fait deux colloques en plus de ça. Cela donne quoi de faire ça si, en 1988 ou 1989, après que

les schémas sont en vigueur - nous autres, ça fait deux ans qu'il est en vigueur - on dit: II y a 90 % de ton territoire sur lequel tu n'as pas grand-chose à faire? En tout cas, concernant ma municipalité, je pense qu'il y a 2 % en zone blanche. Si j'aménage la zone blanche, ça ne coûtera pas cher. On va pouvoir faire ça par téléphone probablement.

Donc, c'est là que je me pose la question. Quand on a fait la préparation du schéma d'aménagement, les producteurs agricoles ont été impliqués, tout le monde a été impliqué, on n'a eu aucun problème. Pour répondre à votre question, je pense que la plupart des municipalités, la grande majorité des municipalités n'ont pas eu de problème avec les agriculteurs. Les agriculteurs n'en ont pas eu non plus avec les autres résidents. Peut-être que là où le problème s'est créé, c'est quand les zones ont été renégociées. À ce moment, les municipalités pour la plupart, les MRC pour la plupart ont établi des critères de sélection pour dire que tel et tel territoire ne seront pas négociés. Il y a peut-être certaines exceptions. Je suis d'accord. Mais va-t-on établir une ligne de conduite sur quelques exceptions? C'est la question qu'on peut se poser.

En tout cas, je trouve ça un peu difficile à accepter comme administrateur de municipalité et aussi comme administrateur agricole. Je me pose la question: Est-ce que nous autres, producteurs agricoles, on n'est pas assez matures pour être capables d'administrer une municipalité sans se faire dire par le gouvernement: On va vous mettre des lois et vous allez marcher dedans? Ce sont des réflexions personnelles. Je pense que M. Poirier et M. Nicolet ont pris plus le temps d'étudier. Ce sont des réflexions que j'ai en tant que producteur agricole et en tant qu'administrateur de municipalité. Il y en a même qui me disent: Tu as deux sièges. Non. Moi, j'ai juste un siège et je me sens bien assis sur ma chaise. Je suis capable d'être administrateur de municipalité et je suis capable d'être producteur agricole en même temps et ça ne me gêne pas du tout.

Des problèmes, je n'ai pas eu connaissance, à part les deux cas qui ont été cités, qu'il y en ait eu réellement entre les municipalités. Tous les schémas d'aménagement ont été soumis à tous ceux qui voulaient bien les regarder et, s'ils avaient des commentaires à faire, ils pouvaient les faire. Vous savez, les conseils de comté anciennement, c'est sûr qu'ils étaient là juste pour la forme, ou peut-être pour régler certaines choses. Les MRC ont essayé de prendre leurs choses en main. Mais on se pose la question: Est-ce qu'on a dépensé de l'argent pour rien à ce moment-ci? En tout cas, pour tout de suite, je pense que j'ai fait un bout.

Le Président (M. Richard): Merci, M. Roy. Me Poirier.

M. Poirier: Sur la question de l'ampleur de la problématique, il faut distinguer deux choses: les recours devant les tribunaux et les plaintes au ministère de l'Environnement. Pour ce qui est des recours devant les tribunaux, je suis convaincu qu'il n'y a pas actuellement 20 causes pendantes devant l'ensemble des tribunaux québécois de citoyens qui poursuivent les producteurs agricoles pour des matières visées au projet de loi. D'ailleurs, lorsque nous avons rencontré les autorités du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, mis à part quelques cas qui peuvent être pénibles, mais dans tous les cas 'i y a des cas pénibles, on n'a pas réussi à nous établir un dossier factuel de statistiques qui nous permette de voir qu'il y a un problème important de poursuites de producteurs agricoles par des citoyens devant les tribunaux.

Pour ce qui est des plaintes devant le ministère de l'Environnement, on nous a parié de 1000 plaintes. Je n'ai pas vérifié. Je prends la parole des fonctionnaires du ministère de l'Agriculture, mais je ne comprends pas tellement le raisonnement. S'il y a 1000 plaintes devant l'Office de la langue française, va-t-on adopter une loi pour protéger les gens contre qui on porte des plaintes? Si, devant l'ombudsman, le nombre de plaintes croît, va-t-on adopter des lois pour protéger les gens contre qui on porte des plaintes devant l'ombudsman? En d'autres termes, s'il y a 1000 plaintes devant le ministère de l'Environnement, c'est peut-être parce qu'il y a des problèmes. Il n'y a rien de mal à ce qu'un citoyen québécois porte plainte au ministère de l'Environnement si un producteur agricole - il n'y en a pas beaucoup, mais il y en a peut-être - fout son purin dans la rivière. Il ne faut pas déduire que, s'il y a des plaintes au ministère de l'Environnement, il faut tout de suite adopter des lois pour protéger les gens contre qui on porte des plaintes. Il y a des fonctionnaires qui sont payés pour étudier le bien-fondé des plaintes et qui rejetteront les plaintes farfelues et qui agiront pour les plaintes bien fondées. Mais ce sont des citoyens québécois qui exercent leur droit et je ne comprends pas pourquoi on adopterait une loi pour protéger les gens contre qui on porte des plaintes.

Le Président (M. Richard): M. Nicolet

M. Nicolet: Très brièvement, M. le Président, pour revenir à la question de cohabitation entre le monde agricole et le monde municipal, nous avons reconnu qu'effectivement iI y avait des irritants. II y a des cas-problèmes. Nous avons eu l'occasion de rencontrer l'UPA directement, les dirigeants des deux unions, l'automne dernier et, par des échanges à ce niveau, nous pourrions au moins nous donner le temps de dégager certaines avenues de solutions sans nécessairement devoir avoir recours à certaines dispositions législatives comme celles qui nous sont proposées actuellement.

Le processus de concertation entre l'UPA et l'UMRCQ a été pour le moment mis en veilleuse puisqu'un des sujets principaux de ces échanges devait justement être l'ensemble des problématiques que ce projet de loi tente de régler et, tant que le projet de loi est en suspens, définir matière à dialogue entre les deux unions est peut-être mal fondé. Mais je crois que fondamentalement un certain nombre d'irritants pourraient être réglés par les mécanismes dont on dispose actuellement. Ce que nous avons toujours dit par contre, c'est qu'il y a matière à légiférer. J'aimerais revenir à ce thème central à toutes nos représentations depuis de nombreux mois déjà, à savoir que la situation conflictuelle entre la loi 90 et la loi 125 doit être tranchée. Il faudra que le législateur, à un moment donné, harmonise les dispositions des deux textes de loi. Cela, on n'y échappera pas à brève échéance. Là aussi il faut avoir le courage de le dire, il faut regarder à nouveau ce qui a été fait dans les zones agricoles protégées: 6 800 000 hectares protégés quand, de l'aveu même du ministre de l'Agriculture, on sait que sont propices à l'agriculture au plus 5 000 000. Que fait-on avec tout ce territoire qu'on a zone peut-être allègrement dans l'enthousiasme initial? Il faut reconnaître que 25 % du territoire qui est actuellement protégé, à toutes fins utiles, est exproprié. C'est du territoire dont des dizaines de milliers de Québécois qui sont propriétaires de ces terres actuellement zonées n'ont aucun usage commercial: territoire que les municipalités ne peuvent même pas penser à bonifier, à développer, puisqu'il est assujetti à une législation aveugle. C'est toute cette réalité qu'il faudrait avoir le courage... Je sais que politiquement ce n'est pas rentable, mais il faut, en tant que responsables pour la société québécoise, regarder cela et en parler. C'est ça, quant à nous, les priorités.

Le Président (M. Richard): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, relativement aux secteurs exclusifs, vous en acceptez le principe, contrairement à nous qui sommes en divergence sur cette question. Vous acceptez le principe des secteurs exclusifs et nous pas, c'est connu. Cependant, à ce sujet-là, vous réclamez deux choses. D'abord que, en matière de protection du territoire agricole, les critères économiques prévus à l'article 17 qui amende l'article 62 de la loi actuelle deviennent obligatoires. Actuellement, l'article 62 énumère un certain nombre de critères pour permettre à la commission de prendre une décision. Il y a des critères qui sont inquiétants, d'ailleurs, à ce sujet. Il y a huit critères obligatoires et il y a trois critères facultatifs. Elle peut prendre en considération l'effet sur le développement économique de la région, les conditions socio-économiques et les conséquences d'un refus pour le demandeur. De même que l'UMQ, vous avez réclamé que ces trois critères à caractère économique deviennent obligatoires comme les huit autres et que ce soit non pas elle "peut" mais elle "doit* prendre en considération. Vous l'avez réclamé évidemment au sein du comité technique. Est-ce que vous avez eu une bonne oreille de la part du ministre à ce sujet? Et, d'autre part, qu'est-ce que vous visez? Quel est votre objectif en voulant rendre obligatoires ces trois critères et quel est le motif qui vous incite à exiger cela? J'ai l'impression que, si on les rend obligatoires, cela va avoir pour effet d'affaiblir, à mon avis, la protection et la rigueur de la protection du territoire agricole. Du moins, c'est comme cela que je le vois, si cela devient obligatoire. Est-ce cela, l'objectif? Est-ce que vous voulez assouplir? Est-ce que votre objectif visé en les rendant obligatoires, c'est d'en arriver à un assouplissement de la loi en matière de protection du territoire agricole?

M. Nicolet: M. le Président, sans vouloir me faire le porte-parole du gouvernement, il faut comprendre, je crois, les dispositions de l'article 62. dans le contexte, bien sûr, de la constitution et de la création des secteurs exclusifs. Dans la mesure où le gouvernement procède à la création de ces secteurs exclusifs, on peut, à ce moment-là, regarder le reste, et j'y faisais allusion tout à l'heure, l'ensemble du territoire québécois. On peut regarder toute cette immensité, 6 800 000 hectares, toute la problématique des régions périphériques. Je n'ai pas besoin de les énumérer. Cela commence en Estrie et je pourrais vous amener dans ma municipalité et vous montrer ce type de territoire. Cela inclut La Mauricie, le Bas-Saint-Laurent, la Côte-Nord, la Gaspésie, l'Abitibi et tous ces territoires où on a initialement zone sans préoccupation valable du véritable potentiel agricole de ces régions périphériques. Je reviens et je répète que, de l'aveu même du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, il y a un million et demi d'hectares au Québec qui sont zones vert actuellement sans qu'aucun chrétien vivant ou à naître ne pense jamais y pratiquer une forme quelconque d'agriculture. Qu'est-ce que cela signifie comme hypothèque sur les régions éloignées et sous-développées du Québec et toutes les régions qui ont besoin de maximiser le potentiel dont elles disposent? Pourquoi leur imposer cette contrainte? Alors, dans la perspective d'une véritable protection du potentiel agricole, comment peut-on justifier de ne pas tenir compte de ces critères facultatifs quand on regarde le zonage ou la protection à accorder aux régions périphériques? (10 h 45)

Les critères, c'est un débat qui est pertinent, à l'heure où on se parle, entre les droits collectifs et les droits privés. Comment peut-on ne pas tenir compte des conséquences d'un refus pour le demandeur? Comment peut-on l'ignorer et en faire abstraction? Je ne veux pas me faire le défenseur aveugle des droits individuels. Mais,

dans une circonstance comme celle-là, comment peut-on Ignorer et ne pas en faire un critère de référence? Je pense que c'est dans cette perspective que, pour nous, iI y a lieu de regarder tous ces critères comme étant un moyen, progressivement, de regarder à nouveau ce qu'on a fait en 1979,1980,1981 et 1982.

M. Brassard: Qu'est-ce que le ministre vous avait laissé entendre relativement à cette revendication?

M. Nicolet: Je n'ai eu aucune communication personnelle avec le ministre au sujet du comité technique. Nous avons eu un commentaire sur un document qui émane du MAPAQ qui dit: Nous prenons bonne note de votre demande et nous sommes à compléter nos consultations à ce sujet.

M. Brassard: Une dernière question, M. Nicolet, relativement à ces secteurs exclusifs. Tantôt, vous avez revendiqué non pas simplement une consultation lorsque viendra le temps de les délimiter, mais également une négociation. À ce sujet, est-ce que le mécanisme déjà prévu dans la loi actuelle en vue d'en arriver à la révision des zones agricoles dans les MRC, en vue de réviser la zone agricole totale vous agréerait, vous conviendrait quant à la délimitation des secteurs exclusifs?

M. Nicolet: Sous toutes réserves de vérification avec nos instances, à première vue, ma réponse serait oui.

M. Brassard: Merci. Mon collègue de Jonquière...

M. Nicolet: Si vous me permettez, M. le Président, en complément de réponse à M. Brassard tout à l'heure, nous avons également reçu un projet de papillon qui nous a été transmis concernant l'article 62 et c'est un texte d'une demi-page qui se lit comme suit: L'article 62 introduit par l'article 17 du projet de loi est de nouveau modifié par le remplacement du troisième alinéa par les suivants: 'Après avoir tenu compte des dispositions du deuxième alinéa, la commission doit prendre en considération..." Donc, il y a cette notion de subordination qui est dans cette lecture "Après avoir tenu compte des dispositions du deuxième alinéa." Là, on reprend: "1° l'effet sur le développement économique de la région; 2° les conditions socio-économiques." Mais on escamote le troisième, c'est-à-dire les références aux conséquences d'un refus pour le demandeur et le papillon se termine par: "Elle peut prendre en considération les conséquences d'un refus pour le demandeur".

M. Brassard: Mais ce papillon, M. Nicolet, vient du ministère de l'Agriculture?

M. Nicolet: À ma connaissance, oui.

Le Président (M. Richard): M. le député de Jonquière, vous avez la parole.

M. Brassard: Donc, est-ce que vous l'avez considéré comme étant une proposition d'amendement venant du ministère de l'Agriculture? Vous l'avez perçue comme ça?

M. Nicolet: Dans les événements qui se sont précipités dans les derniers jours qui ont précédé les fêtes, nous avons eu une réunion, un comité technique, réunion qui s'était soldée, je crois, par une certaine ouverture qui a été confirmée par le texte auquel je faisais référence. Mais, par la suite, je crois qu'on m'a rapporté que M. Pagé avait retiré les commentaires qui avaient été faits par ses porte-parole.

Le Président (M. Richard): M. le député de Jonquière, vous avez la parole.

M. Dufour: Merci, M. le Président, juste un court commentaire, peut-être une question en plus. Vous savez qu'hier on a eu l'occasion de discuter avec plusieurs municipalités du Québec et le ministre a avoué durant la discussion que le projet de loi 100 découlait en partie de la loi 82 où vous devez vous rappeler qu'on parlait de mettre en place une commission d'urbanisme composée d'agriculteurs. À ce moment-là, les unions et aussi l'Opposition avaient fait une opposition très forte pour empêcher ça. On voit bien que le projet de loi est un peu beaucoup le pendant de ce qui avait été refusé ou retiré dans ce projet de loi, de ce qui avait été laissé inopérant, dans le sens qu'il y avait une coquille vide dans le fond. On disait: Oui, il peut y avoir une commission d'urbanisme, mais il faudrait qu'on adopte un projet de loi ou un décret pour permettre de la rendre opérante. Donc, à ce moment-ci, on se rend compte que la loi 100 est en train de remplacer cette commission et cela donne des pouvoirs supplémentaires ou des irritants supplémentaires aux municipalités.

On n'a pas parlé beaucoup, et malheureusement on ne pourra pas le faire tellement, mais j'aimerais que vous puissez parler un peu plus sur la question du commissaire. Selon votre expérience municipale et selon l'expérience des différents intervenants, on ne connaît pas beaucoup cela des ombudsman qui se promènent sur le terrain et qui viennent dire si cela marche ou non, qui viennent porter des... Normalement, le vécu des municipalités se passe en cour. S'il y a des plaintes, on passe par des mesures que les gens connaissent. Actuellement, la venue d'un commissaire, comment pensez-vous que cela va se produire ou quelles actions ou quels phénomènes aurez-vous à vivre par rapport à cela? Pouvez-vous détailler un peu plus par rapport à ce qui y a dans votre mémoire?

M. Nicolet: Je pense que, fondamentalement, le réflexe de toute communauté est de tâcher de

s'efforcer de régler ses problèmes au sein môme de la communauté. Déjà, l'élargissement du débat sur tout l'aménagement du territoire, du local au régional, région MRC, a fait l'objet d'un long cheminement et a dû faire l'objet de beaucoup de compréhension et de modification des mentalités. Nos Québécois des régions aiment régler les problèmes entre eux, en fonction de leur vision particulière et de la connaissance de leur milieu. Est-il nécessaire, à ce titre, de se référer à tous les problèmes que vivent les communautés qui doivent absorber un certain nombre de villégia-teurs et qui doivent faire place dans leur structure décisionnelle, administrative et politique à une présence extérieure à la vie des résidents à temps plein du milieu? Dans cette perspective, le commissaire est une conception tellement étrange et étrangère à nos façons de fonctionner que cela semble une abstraction qui ne reflète aucune des réalités profondes de nos milieux. C'est pour cela que nous avons beaucoup d'appréhension quant à la constitution de ce commissaire et du rôle qu'il pourrait être appelé à jouer. Je crois que Me Poirier...

Le Président (M. Richard): Me Poirier, je vous demanderais d'être bref, s'il vous plaît.

M. Poirier: A l'égard de cette disposition, ce que je craindrais, c'est que les agriculteurs l'interprètent comme signifiant qu'ils n'ont pas à aller à l'Hôtel de ville. Cette disposition dit: Si vous vous sentez lésés par la municipalité, allez voir le commissaire. Il me semble que ce qu'il y aurait de plus dangereux dans les petites communautés rurales, c'est le jour où les agriculteurs n'iront plus à l'hôtel de ville, le jour où ils auront la possibilité d'un autre forum, parce que cela voudra dire qu'ils ne seront plus intégrés à ia communauté. Cela voudra dire que les institutions municipales et le milieu agricole vont s'appauvrir. Tant et aussi longtemps que les élus municipaux et les producteurs agricoles auront des discussions, fussent-t-elles très vigoureuses, à l'intérieur d'un hôtel de ville, ce sera la santé; le jour où ils ne se parleront plus et qu'on va institutionnaliser les mécaniques qui vont permettre de ne plus se parler, c'est là qu'on va aller vers un appauvrissement de nos institutions.

Le Président (M. Richard): Merci. M. le député de Jonquière.

M. Dufour: J'aurais une autre question pour vous qui avez la chance, M. le président, d'assister et de travailler à la table Québec-municipalités, présidée par le ministre des Affaires municipales. Il a certainement eu connaissance de ces échanges. Je vous l'ai dit, je l'ai même demandé à l'Assemblée nationale, à savoir ce que le ministre des Affaires municipales faisait par rapport à cela. Je ne l'ai pas entendu parler.

Avez-vous des éléments qui pourraient nous permettre... N'êtes-vous pas laissés pour compte un peu dans ce dossier-là? Je comprends que la question est très politique, vous n'êtes pas obligé de répondre, mais je vous la pose.

M. Nicolet: M. le ministre des Affaires municipales, à la demande des deux unions municipales, a favorisé la tenue d'une rencontre avec son collègue, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, rencontre qui a eu lieu le 9 décembre...

Une voix: ...le vendredi 9 décembre.

M. Nicolet: ...au début de décembre en tout cas, et qui a permis d'avoir un premier échange en présence du ministre des Affaires municipales sur toutes les dispositions du projet de loi 100.

Le Président (M. Richard): Merci. Sur ce, le temps qui vous était alloué...

M. Brassard: M. le Président, pour conclure, étant donné que le ministre a évoqué à plusieurs reprises des amendements qu'il compte apporter au projet de loi 100, étant donné qu'on a terminé l'audience particulière, je souhaiterais, pour une analyse et une étude plus approfondies du projet de loi, que le ministre dépose maintenant les amendements qu'il entend apporter au projet de loi 100.

Le Président (M. Richard): M. le ministre.

M. Pagé: M. le Président, pour répondre à la question du député et pour reprendre certains éléments du calendrier des discussions que nous avons eues avec l'UMRCQ, comme on l'indiquait tout à l'heure, j'ai rencontré la table Québec-municipalités le 9 décembre et, à compter du lundi 12 décembre, si ma mémoire est fidèle, le comité technique a siégé, formé de représentants de l'Union des municipalités et de représentants de mon ministère...

M. Brassard: Où l'UPA était absente.

M. Pagé: Oui. Cependant, vous devez comprendre que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation est en communication constante avec ces producteurs, par le biais de l'Union des producteurs agricoles.

M. Brassard: L'UPA n'était pas partie prenante du comité technique.

M. Pagé: L'Union des producteurs agricoles n'a pas jugé pertinent de s'asseoir à cette table, confiante d'une défense pleine et entière des intérêts des agriculteurs par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec.

Deuxièmement, des documents ont été

échangés, des projets de textes ont été échangés. Vous nous demandez ce matin quelle sera la teneur des amendements. Nous en sommes à l'article 4, on a commencé à étudier le projet de loi. Je présume qu'à compter de la reprise de nos travaux, après les auditions particulières que nous sommes à compléter, on reprendra à l'article 4 ou l'article 5. Je pourrais peut-être, d'ici le début de l'après-midi, vous déposer les amendements qui viendront, pour nous donner le temps de les étudier.

M. Brassard: Je ne pense pas que ce soit une demande frivole.

M. Pagé: Ce n'est pas une demande frivole, je vous te dis.

M. Brassard: Je compte que les amendements seront déposés, et pas uniquement à la pièce et un à la suite de l'autre, mais l'ensemble des amendements. Ce n'est pas une règle formelle qu'on retrouve dans nos règlements d'agir ainsi, mais la plupart des ministres qui veulent que le travail d'étude et d'analyse d'un projet de loi se fasse sérieusement et en profondeur le font. Je pense au ministre de l'Éducation qui a déposé je ne sais combien d'amendements dans le cadre de l'étude du projet de loi 107...

Une voix: 106.

M. Brassard: 106 et 107. J'imagine que les amendements sont déjà prêts. Donc, vous pourriez les déposer dès maintenant, pour permettre aussi aux Intervenants d'en prendre connaissance, non seulement nous, non seulement les parlementaires, mais les intervenants, en particulier ceux qui ont témoigné devant cette commission depuis hier.

M. Pagé: Ils vont en prendre connaissance lorsqu'ils seront déposés en début d'après-midi.

M. Brassard: À 15 heures?

M. Pagé: Je vous l'ai indiqué tout à l'heure, M. le député. On reprend à 14 heures.

M. Brassard: 14 heures? Cela veut dire qu'on suspend maintenant?

M. Pagé: Si vous le souhaitez, M. le député. On est bien ouverts.

Le Président (M. Richard): Si vous permettez, pour des raisons techniques, on pourrait...

M. Pagé: On va reprendre à 14 heures, M. le Président, les amendements seront déposés, on légifère en toute transparence.

M. Brassard: Nous aussi.

Le Président (M. Richard): Si vous permettez, nous allons terminer l'audition des gens que nous avons convoqués, qui ont daigné se déplacer pour venir ici à notre demande. Je vous demanderai, M. le ministre, si vous avez une conclusion pour...

M. Pagé: Je veux seulement remercier l'Union des municipalités régionales de comté de leur témoignage de ce matin. Merci.

Le Président (M, Richard): M. le député de Lac-Saint-Jean, représentant de l'Opposition officielle.

M. Brassard: Moi de même, évidemment, je vous remercie d'avoir accepté cette invitation. Je pense que le mémoire que vous nous avez transmis comporte des éléments plus qu'intéressants qui vont aider cette commission, je pense, à faire un travail législatif sérieux et responsable.

Le Président (M. Richard): Merci, M. Nicolet.

M. Nicolet: M. le Président, je me permets d'ajouter ma voix à ces remerciements. Votre patience et votre attention sont gratifiantes. Merci, messieurs.

Le Président (M. Richard): Merci d'avoir été là.

Maintenant, nous étions à l'article 4 et nous avions un amendement J'ai cru comprendre qu'il pouvait y avoir suspension jusqu'à 14 heures cet après-midi?

M. Brassard: 14 heures. On se retrouve avec les amendements, à 14 heures.

M. Pagé: C'est bien ça.

Le Président (M. Richard): Nous suspendons les travaux de ta commission pour revenir ici, dans la même salle, à 14 heures cet après-midi. Bon appétit à tous.

(Suspension de la séance à 11 heures)

(Reprise à 14 h 23)

Étude détaillée

Le Président (M. Richard): Mesdames, messieurs, si vous me le permettez, je déclare ouverte la séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries -et de l'alimentation. Notre mandat, je vous le rappelle, est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 100, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole du Québec. Nous en étions à l'étude article par article.

CPTA

Je vous rappelle que nous étions à l'article 4 et que nous avions, sous discussion, une modification, un amendement qui avait été présenté par M. Brassard, député de Lac-Saint-Jean, sur lequel, M. Brassard vous aviez parlé huit minutes. Vous aviez droit à 20. Vous n'étiez pas obligé, évidemment, de les utiliser mais vous en aviez utilisé huit. L'amendement était le suivant: À l'article 4 du projet de loi, remplacer les mots "de l'intérêt général de protéger" par les mots "en priorité de l'intérêt de protéger l'agriculture."

M. Brassard: M. le Président, si le ministre exige que je prenne mes 12 minutes, je veux bien essayer.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Mais avant, M. le Président, qu'advient-il des amendements que nous avions demandés?

Le Président (M. Richard): Voici les amendements devraient nous arriver...

M. Brassard: Est-ce qu'ils sont bientôt prêts?

Le Président (M. Richard): ...dans les minutes qui suivent.

M. Pagé: Ils sont faits. Ils sont nombreux, mais la très grande majorité, ce sont des amendements de concordance. Il y a seulement quelques dispositions qui se réfèrent, entre autres, au concept d'immunité pour que le concept d'immunité, tel que je l'indiquais plus tôt en commission et au début des travaux, s'applique uniquement dans les cas où un producteur respecte les règles de l'art, la réglementation, les ordonnances de l'environnement pour les poussières, les odeurs et le bruit. Il y a aussi une modification qui se réfère à la possibilité, pour une municipalité, d'installer des infrastructures d'aqueduc, d'égout et d'usine d'épuration dans le secteur dit "exclusif, mais non les sites d'enfouissement et il ne faut pas non plus que ce soit pour les...

M. Brassard: Les neiges usées.

M. Pagé: ...neiges usées.

M. Brassard: Alors, ça vient dans les prochaines minutes.

M. Pagé: II n'y a aucun amendement sur les critères. Je ne proposerai aucun amendement sur les critères par rapport à la loi.

M. Brassard: Cela va, à condition qu'ils nous arrivent dans quelques minutes.

M. Pagé: Sauf un amendement technique à l'article 62, 2° qui va dans le sens de ce qui était demandé par l'Union des producteurs agricoles. Même les municipalités l'avaient demandé aussi. Mais, pour le reste, il n'y a pas de passage d'un groupe à l'autre.

M. Brassard: Pour la délimitation des secteurs exclusifs, est-ce qu'il y a quelque chose, un mécanisme de...

M. Pagé: De consultation? Oui. M. Brassard: ...consultation?

M. Pagé: Oui, il y a un mécanisme de consultation pour l'Union des producteurs agricoles, pour les municipalités et les MRC.

M. Brassard: On en prendra connaissance.

M. Pagé: D'ici quelques minutes. Ils sont terminés, ils sont à la reprographie.

Le Président (M. Richard): Cela vous convient, M. le député de Lac-Saint-Jean?

M. Brassard: D'accord. Je pense avoir expliqué le sens de mon amendement. On peut en disposer par un vote par appel nominal.

Le Président (M. Richard): L'amendement que j'ai lu il y a quelques instants. Un vote par appel nominal. M. Comeau, vous vous mettez au travail.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Pour ou contre l'amendement de M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Beaudin (Gaspé)?

M. Beaudin: Contre.

Le Secrétaire: M. Forget (Prévost)?

M. Forget: Contre.

Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?

M. Dubois: Contre.

Le Secrétaire: M. Houde (Berthier)?

M. Houde: Contre.

Le Secrétaire: M. Pagé (Portneuf)?

M. Pagé: Contre.

Le Secrétaire: M. Brassard (Lac-Saint-Jean)?

M. Brassard: Pour.

La Secrétaire: M. Dufour (Jonquière)?

M. Dufour: Pour.

Le Secrétaire: 5 contre, 2 pour, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Cela ne va pas bien. L'amendement est donc rejeté. Est-ce qu'on est prêt à disposer de l'article 4 dans son ensemble?

M. Brassard: Le ministre n'a pas d'amendement à cet article-là?

Le Président (M. Richard): Non, je pense qu'il y a un nouvel article 4.1

M. Pagé: Après l'article 4, il y aura un nouvel article 4.1.

Le Président (M. Richard): Est-ce qu'on considère que l'article 4 comme tel est adopté?

M. Brassard: Sur division, parce qu'on continue de maintenir de notre côté qu'on devrait conserver l'article 12 tel qu'on le retrouve dans la loi actuelle. Donc, sur division.

Le Président (M. Richard): L'article 4 est donc adopté sur division.

Est-ce que nous avons le papillon pour le nouvel article, M. le ministre?

M. Pagé: Pour le libellé de l'article 4.1

Abrogation de l'ancien mécanisme de révision

Le Président (M. Richard): Merci. Donc, si tout le monde était d'accord, on insérerait le nouvel article 4.1 qui se lit comme suit: "L'article 15 de cette loi est modifié par le retranchement, à la première ligne du deuxième alinéa, des mots "demandes de révision"."

M. Pagé: M. le Président, il s'agit d'une modification de concordance parce qu'il n'est plus opportun de garder dans la loi le libellé "demandes de révision* adressées à la Commission de protection du territoire agricole puisque, comme on le sait, le projet de loi prévoit la mise en place d'un tribunal d'appel en matière de protection agricole.

M. Brassard: Vous enlevez ça parce qu'il y aura...

M. Pagé: Antérieurement, la commission, à l'article 15...

M. Brassard: Cela veut dire que le tribunal d'appel aura son propre greffe...

M. Pagé: Oui.

M. Brassard: ...où les demandes de révision seront déposées

M. Pagé: ...adressées.

M. Brassard: C'est une concordance.

Le Président (M. Richard): Le nouvel article 4.1 est donc adopté?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): Adopté Nous appelons donc l'article 5.

M. Pagé: En fait, les articles 18 à 18.4 de la loi sont abrogés. Les articles 18 à 184 se référaient au mécanisme de révision d'une décision de la Commission de protection du territoire agricole. Il n'y aura plus de révision des décisions à la commission par d'autres membres de cet organisme, car cette procédure est remplacée, comme on le sait, par un appel au tribunal d'appel qui est institué en vertu des articles 21.01 à 21.011.

La loi actuelle dit, comme on le sait: La commission peut, sur demande de toute partie intéressée, réviser une décision ou une ordonnance: 1° lorsqu'est découvert un fait nouveau (...); 2° lorsque, partie ou litige, le demandeur n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre, etc.' Tous ces éléments, de l'article 18 à 18.4, sont abrogés purement et simplement et seront remplacés par des dispositions qui viendront aux nouveaux articles 2101 à 21.011.

M. Brassard: M. le Président, nous l'avons déjà exprimé à maintes reprises avant les fêtes, à l'occasion du débat de deuxième lecture et aussi ici, en commission, à plusieurs reprises nous ne sommes pas d'accord avec la mise en place d'un tribunal d'appel, d'un tribunal administratif autonome, indépendant pour juger des demandes de révision. Notre préférence très nette et très marquée va pour le maintien du mécanisme de révision qui se retrouve à l'intérieur même de la commission et qui a été prévu par des amendements à la loi en 1985. Par conséquent - évidemment, on reparlera de tout cela lorsqu'on abordera les dispositions concernant le tribunal d'appel - il est évident que, pour être cohérents, nous nous devons de nous opposer à l'abrogation de ces articles puisque nous étions favorables au maintien du mécanisme de révision déjà prévu dans la loi actuelle. Alors, nous ne pouvons pas consentir à cette abrogation. Nous sommes contre. Nous voterons contre l'abrogation.

Le Président (M. Richard): Est-ce que je constate que l'article 5 est adopté sur division? M. le député de Lévis.

M. Garon: J'aimerais poser une question sur le plan technique. Il y avait un organisme de révision à la Commission de protection du territoire agricole qui établissait la jurisprudence. Cet organisme disparaissant et en instituant un nouvel organisme appelé tribunal d'appel qui sera extérieur à la Commission de protection du territoire agricole, est-ce que sur le plan technique ça veut dire que toute la jurisprudence sera à refaire et qu'à toutes fins utiles avec le nouveau tribunal ce sera l'insécurité juridique à peu prés complète? En effet la jurisprudence étant celle de la commission de protection qui deviendra uniquement un tribunal de première instance, maintenant, il y aura un tribunal d'appel qui se trouvera à refaire la jurisprudence en fonction de ce qu'il établira. À toutes fins utiles, la jurisprudence de deuxième instance de la Commission de protection du territoire agricole, je comprends bien qu'on peut s'y référer, qu'on peut la regarder, qu'on peut la lire, mais que maintenant on donne la vocation, le rôle de l'établissement de la jurisprudence à un nouvel organisme. Je n'ai pas vu ça souvent. C'est pour ça que je demande ce que ça veut dire techniquement en droit.

M. Pagé: Là-dessus, M. le Président, je voudrais indiquer au député de Lévis que la Commission de protection du territoire agricole a pris des milliers de décisions en fonction de dispositions d'une loi qui s'applique depuis 1978 et dont les principaux critères demeurent les mêmes, sauf que certains deviennent obligatoires, d'autres deviennent facultatifs et d'autres ne peuvent pas être pris en considération.

D'après la lecture que j'en fais, parce qu'on parle de l'avenir, il est certain que la jurisprudence qui s'est dégagée en référence aux dispositions qui ne sont pas modifiées par le projet de loi, et je me réfère, entre autres, au secteur exclusif, va continuer à s'appliquer. Par contre, de la jurisprudence au secteur exclusif, il n'y en a pas. C'est là qu'il va s'en dégager. Vous savez, on ne met pas la loi de côté. On la renforce, cette loi.

M. Garon: Ce ne sont pas des opinions. Moi, des opinions sur la gueule, je n'en ai pas besoin. Ce que je veux savoir, c'est sur le plan technique. L'article 12, à toutes fins utiles, il n'y en a plus. L'article 12 établissait, quand même, une orientation. Ce n'était pas une notion vague, générale, du genre: "Pour exercer sa juridiction, la commission tient compte de l'intérêt général de protéger le territoire et les activités agricoles. Elle prend en considération tous les faits qui sont à sa connaissance." Il n'y en aurait pas eu et ça aurait été pareil, au fond, à toutes fins utiles. L'article 12 vient de tomber. Les facteurs à considérer viennent de disparaître. L'article 12 était quand même l'article...

M. Pagé: Allez à l'article 62.

M. Garon: L'article 62, c'est une autre affaire.

M. Pagé: Ce n'est pas une autre affaire, c'est ça.

M. Garon: Non. L'article 62, c'est une autre affaire. Il faut lire les articles tels qu'ils sont. Alors, à l'article 62, on dit: "La commission peut autoriser, aux conditions qu'elle détermine, l'utilisation à des fins autres que l'agriculture, le lotissement, l'aliénation..." C'est un cas, c'est une affaire. Mais l'orientation de la commission demeure maintenant l'intérêt général. Ici, on dit: "Pour exercer sa juridiction, la commission tient compte de l'intérêt général de protéger le territoire et les activités agricoles." C'est pour ça que le député de Lac-Saint-Jean était intervenu, à plusieurs reprises. Il faut dire que la commission va devenir autant une commission d'aménagement que de protection des terres agricoles. Son objectif, ça devient de tenir compte de l'intérêt général. Alors, "de protéger les terres et les activités agricoles. Elle prend en considération tous les faits qui sont à sa connaissance", entre vous et moi, cela ne serait pas marqué et ça ferait pareil.

Je ne comprends pas, même, qu'on soit obligé de dire à un tribunal de prendre en considération les faits qui sont à sa connaissance. Normalement, elle prend connaissance de ce dont elle peut prendre connaissance.

Maintenant, on change ça et on a l'article 62. Cela, c'est pour des utilisations à des fins autres que l'agriculture. Maintenant, on va fonctionner avec un cadre nouveau, avec un territoire prétendument exclusif et un autre qui ne l'est pas, avec des cas d'exclusion, d'autres cas d'utilisation à des fins autres que l'agriculture, avec d'autres critères qui devront être pris à considération.

Cela veut dire, aujourd'hui, que toute la jurisprudence, c'est gentil, on va la lire, c'est évident. Mais peut-on dire que ça vaut quelque chose, la jurisprudence qui est établie jusqu'à maintenant par la Commission de la protection du territoire agricole, non pas comme une vue de l'esprit ou une opinion en passant, mais sur le pian technique? Est-ce que maintenant le tribunal d'appel va se sentir lié techniquement, légalement et juridiquement par ce qui était la jurisprudence de la commission qui devient maintenant un tribunal de première Instance? Est-ce qu'il va prendre connaissance, mais comme il prendrait connaissance d'une décision de première instance ou si maintenant on devra interpréter la loi à la lumière des nouveaux facteurs en établissant maintenant une nouvelle jurisprudence à partir de la mise en vigueur de

la loi?

M. Pagé: M. le Président, je comprends que le député de Lévis peut apprécier les commentaires que je fais ou les réponses que je lui donne, c'est son droit le plus strict. Cependant, le député de Lévis doit convenir que les critères sur lesquels la Commission de protection du territoire agricole devait s'appuyer dans la loi actuelle sont contenus aux articles 12. 62 et 65 Ces trois articles sont regroupés maintenant sous l'article 62. Il s'est dégagé une jurisprudence à la Commission de protection du territoire agricole, tout comme il se dégagera à l'avenir une jurisprudence qui sera adaptée aux dispositions de la nouvelle loi. Cela, le député ne peut pas le nier.

Autre élément, en aucun cas dans ce Parlement comme dans d'autres Parlements, je présume, parce qu'ils ne siègent pas, on ne peut établir dans une loi qu'un tribunal d'appel qui est créé devra s'appuyer sur telle ou telle chose En fait, il devra s'appuyer sur ta loi La jurisprudence qui s'est dégagée à la Commission de protection du territoire agricole va définitivement être portée à l'attention du tribunal d'appel lorsque des requérants s'y adresseront. C'est ainsi que la jurisprudence sera actualisée en fonction de deux Instances de décision et en fonction d'une loi qui est modifiée, qui prévoit d'autres dispositions ou des dispositions qui sont actualisées.

Le Président (M. Richard): Est-ce que l'article 5 est adopté comme tel?

M. Garon: Cela veut dire, au fond, M . le Président, quand on regarde ça, que tout ce qui a été fait, à toutes fins utiles, depuis 1978 jusqu'à la mise en vigueur de la nouvelle loi ne sera pas totalement caduc, mais va être revu par les nouvelles personnes que le ministre va nommer et qui vont évaluer ça à la faveur de leur conception des nouveaux critères que le ministre met en application.

M. Pagé: M. le Président, je ne partage pas le propos, encore moins l'opinion du député de Lévis Une analyse rigoureuse du texte actuel et du projet de loi démontre très clairement que les articles 12, 62 et 65 sont maintenant refondus. Dans la loi actuelle, dans la loi de 1978 telle que modifiée par la suite, mais non modifiée aux articles 12, 62 et 65, la Commission de protection du territoire agricole pouvait aussi bien se référer au troisième alinéa de l'article 65 actuel qu'à tout autre article. "À l'examen de la demande, la commission peut considérer l'effet du projet sur le développement économique de la région et la disponibilité d'emplacements autres que ceux qui font l'objet de la demande, en tenant compte des critères prévus à l'article 12."

Le nouveau projet de loi prévoit que la commission et vous allez voir tout ça à l'article 62 lorsqu'il va venir tout à l'heure - doit premièrement, deuxièmement... jusqu'à huitièmement. C'est, donc, une obligation qui lui est impartie et elle pourra - elle ne devra pas. mais elle pourra - en plus tenir compte d'autres facteurs. L'Interprétation qu'on lui donne, que tout le bureau des légistes lui a donnée et c'est ce que nous, on recherchait, c'est d'établir un cadre beaucoup mieux défini des critères sur lesquels la commission peut s'appuyer.

Quand vous dites: Ils vont pouvoir en prendre ou non, je m'excuse, I y a une tradition à la commission, il y a une interprétation, I y a des orientations et ce pro|et de loi constitue un engagement très clair du gouvernement pour l'agriculture au Québec Je ne vous oblige pas à partager mon opinion, mais ne m'obligez pas à partager la vôtre, parce que la vôtre m'apparaît non fondée si vous procéder à une analyse et à une étude rigoureuse et exhaustive du projet de loi qu'on présente aujourd'hui.

M. Garon: Je vais vous donner un exemple. M. le Président, l'article 12 qui vient d'être modifié disait: "La commission prend en considération notamment les conditions biophysiques du sol et du milieu." Dans les nouveaux critères de l'article 62, toujours sur la question de l'utilisation à des fins autres que l'agriculture, on dit: "La commission doit se baser sur I'utilisation actuelle du lot, plus particulièrement le type et l'intensité d'agriculture qui s'y pratique ..."

M. Pagé: M. le Président, Je pense qu'il y a un amendement là-dessus. Vous parlez de l'article 62, deuxième alinéa?

M. Garon: Deuxième alinéa.

M. Pagé: II y a un amendement qui s'en vient.

M. Garon: On ne les a pas eus, les amendements.

Des voix: Oui.

Le Président (M. Richard): Oui. il y a quelques minutes.

M. Garon: Ah, oui, qu'une terre soit en friche ou ne soit pas en friche. C'est évident que si on dit qu'il faut tenir compte du fait qu'elle est en friche. C'est évident que le potentiel de la terre, qu'elle sort en friche ou qu'elle ne soit pas en friche, cela n'a pas d'importance La terre peut être bonne et être en friche. Deuxièmement, il y a bien des terres qui n'étaient pas utilisables II y a quelques années pour des productions céréaIières parce qu'on n'avait pas des variétés en fonction des unités thermiques qu'on avait à certains endroits;

maintenant on les a. Alors, on ne peut pas regarder ça d'une façon statique. Au contraire, il faut regarder ça en fonction d'un potentiel, beaucoup plus que de l'utilisation actuelle qui n'est pas importante. Sur l'île de Laval, il y a quelques années, on ne faisait pas de cantaloup et maintenant on en fait, on ne faisait pas de brocoli et maintenant on en fait. C'est une notion qui évolue. (14 h 45)

Par exemple, les gens me disaient que, sur le territoire de la Gaspésie, on a des sols de première qualité, mais avec des restrictions sur le plan climatique. C'est peut-être moins un caractère de plaine, mais ils peuvent être classés 5 parce qu'il y a des côtes et des vallons. Cela n'enlève pas au sol sa qualité parce qu'il y a des vallons, sauf que ça monte et ça descend quand on se promène avec son tracteur sur le terrain. Cela n'enlève pas au sol sa qualité.

Alors, l'Inventaire des terres du Canada qu'on introduit là-dedans, tous reconnaissent que c'est un concept un peu dépassé qui date déjà d'au moins une vingtaine d'années. Ce sont toutes des notions qui sont introduites dans cette nouvelle loi et que les tribunaux ne pourront pas Ignorer. Les notions sont là et tout ça sera plaidé. Les concepts nouveaux qui sont introduits vont être plaidés et les faits vont être interprétés à la faveur de critères nouveaux qui ont été ajoutés non pas aux mêmes endroits, non pas dans le concept général, mais pour des utilisations à des fins autres que l'agriculture. À toutes fins utiles, cela veut dire que la dynamique est nouvelle.

En Colombie britannique, quand le gouvernement a changé et qu'on a décidé d'un coup sec - parce que personne n'est contre la vertu - de cesser de protéger les terres, mais sans le dire, la commission a commencé à reconnaître qu'une terre décapée n'était plus une terre bonne pour l'agriculture. Alors, les gens ont trouvé un moyen. Ils ont commencé par décaper la terre. Si elle n'était pas décapée, on refusait, on disait: C'est une terre propice à l'agriculture. Alors, on prenait un "bull", on enlevait la terre arable et on l'envoyait à la fin du lot et, après ça, on disait: Maintenant, on voudrait demander le dézonage, cette terre n'est plus bonne pour l'agriculture. La commission disait: Maintenant que cette terre n'a plus de matières organiques sur le dessus, qu'elle n'est plus bonne pour l'agriculture, accordé, dézonée.

Tout ce qu'on avait fait au fond, c'est changer les commissaires, on n'a pas changé grand-chose dans la loi, pour en arriver à un résultat de dézonage général. À toutes fins utiles maintenant, il n'y a plus vraiment de protection des terres agricoles en Colombie britannique et j'ai le sentiment qu'on prend le même mécanisme au Québec pour arriver aux mêmes fins. Mais comme c'est bien difficile d'être contre la vertu - ce n'est pas de la condamnation de Joli-Corps qu'on parle - comme tout le monde est pour la vertu, alors habituellement on met des concepts qui paraissent bien à première vue, mais qui, actuellement, établissent un mécanisme d'ensemble qui va permettre, à mon avis, de dézoner tout ce qu'on voudra, à toutes fins utiles.

Et c'est pour ça que je demande: Techniquement, en quoi le nouveau tribunal d'appel se sentira-t-il lié par ce qui a été fait jusqu'à maintenant, sauf pour s'en servir un peu comme des documents historiques qui ont prévalu dans le temps...

M. Pagé: M. le Président, j'ai répondu au député de Lévis...

M. Garon: ...mais qui sont, comme le disent les Anglais - on est à l'intérieur, on peut le dire - "obsolete"?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Richard): Est-ce que l'article 5 est adopté? Oui, M. le député de Lévis.

M. Garon: J'ai posé une question, M. le Président. Si le ministre... Je peux demander au président de la commission ce qu'il en pense.

M. Pagé: Au président de la commission?

Pas de problème. M. le président, j'ai déjà répondu au député de Lévis, si vous voulez ajouter...

M. Blain (Pierre-Luc): Sur un premier point, pour toutes les dispositions de la loi qui ne seront pas modifiées, bien, c'est la même loi, c'est la même jurisprudence. Il faut croire que les gens qui vont appliquer la loi vont le faire exactement comme avant. Pour les dispositions de droit nouveau, ça va être du droit nouveau. J'ajouterais que, pour toute décision rendue avant qui avait de l'allure et qui était intelligente, ça devrait faire une jurisprudence que le tribunal d'appel va reconnaître. Mais quand c'étaient des décisions qui n'avaient pas de bon sens, bien, j'espère qu'il ne les reconnaîtra pas. C'est tout ce que je peux dire. Mais ils vont faire leur ouvrage en appliquant la loi comme elle va être au moment où ils vont travailler. Mais pour toutes les régies ou commissions qui ont un tribunal d'appel, c'est le même phénomène partout.

M. Garon: Mais, sur le plan technique, il ne se sentira pas lié par vos décisions. Il va les prendre en considération. S'il les trouve bonnes, il va dire: D'accord. S'il ne les trouve pas bonnes, il ne s'en occupera pas.

M. Blain: Mais, M. le Président, il n'y a personne de lié par la décision de personne

quand I y en a une à rendre en matière quasi judiciaire. Mais si, sur une question précise, I y a eu 22 décisions Intelligentes rendues dans le même sens et qu'il y a trois nouveaux commissaires qui veulent inventer du droit un matin et être dans les patates, c'est leur affaire. Mais c'est ça, le métier. Et l'inverse va arriver aussi: s'il y a une décision ou deux qui ont été rendues avant et qu'il y a trois nouveaux commissaires qui disent: On va appliquer la loi correctement et qu'ils rendent une bonne décision, il faut juger la décision et examiner celle qu'ils rendront à ce moment-là C'est chaque jour qu'il faut faire ce métier-là de cette manière-là. Bien oui. Dans la mesure où les critères essentiels de la loi, les objectifs de la loi, le fond de la loi ne sont pas profondément modifiés et qu'ils sont renforcés, bien, ce qui était valable avant devrait être encore valable aujourd'hui et continuer à l'être dans huit ans. Il s'agit de demander aux gens de faire leur travail comme il faut, d'être compétents et de défendre les décisions qu'ils rendront. C'est tout ce qu'il y a à dire. Que ce soient eux, que ce soit le tribunal d'appel ou que ce soit la Cour supérieure ou la Cour suprême en interprétant la loi pour faire la jurisprudence qui va à rebours s'appliquer à la commission, comme dans l'affaire de Gauthier et de Winzine Land Corporation, et tout ça, c'est le réseau connu de droit. Mais oui.

M. Garon: Ne pensez-vous pas que ça va dépendre un peu des gens qui seront nommés là par le ministre et de leur conception de la chose?

M. Blain: Non, M. le Président. Mais non. M. Garon: Sur l'appréciation des faits?

M. Blain: Oui et de la loi qu'on a à appliquer.

M. Garon: Je voudrais demander au ministre si, au tribunal d'appel. Il a l'intention de nommer des juristes ou des gens d'autres formations.

M. Pagé: Évidemment, je vais formuler des recommandations au Conseil des ministres dans le sens d'y nommer des gens qui ont de l'expérience et une très bonne connaissance de l'agriculture. Il faudra aussi des gens qui ont une connaissance de la protection du territoire agricole, de la loi telle qu'elle est actuellement et de la nouvelle loi.

M. Garon: Vous savez que le Barreau a fait des recommandations là-dessus. Puisque les faits seront évalués au niveau de la première instance et que le tribunal d'appel se prononcera surtout sur des questions de droit, est-ce que ça veut dire que les gens qui seront nommés au tribunal d'appel auront une formation juridique puisqu'il sera question principalement d'interpréter le droit au niveau du tribunal d'appel?

M. Pagé: II y aura très certainement des gens avec une expérience juridique.

M. Garon: Mais pas exclusivement.

M. Pagé: Mais pas nécessairement exclusivement Dans presque tous les cas d'organismes qu'on appelle les tribunaux administratifs ou qui ont à rendre des décisions quasi judiciaires, le Barreau demande toujours que ces fonctions soient attribuées à des avocats. C'est courant, vous savez. Je vous dis qu'il y aura très certainement des gens qui auront une expérience juridique qui vont agir au niveau du tribunal d'appel, ça va de soi.

M. Garon: Mais ce ne seront pas nécessairement uniquement des gens avec une formation juridique.

M. Pagé: Pardon?

M. Garon: Vous voulez dire qu'au niveau du tribunal d'appel, ce ne seront pas nécessairement des gens qui auront une formation juridique?

M. Pagé: J'attends que la loi soit adoptée et, par la suite, on regardera ça. Je vais faire des recommandations au Conseil des ministres et on tentera de nommer les gens qui sont les plus aptes à remplir les fonctions qui leur seront dévolues en vertu de la loi. Je vous dis qu'il y aura des gens, ça va de soi, qui auront une expérience juridique.

M. Garon: Quand même, par la loi, vous abolissez des postes à la Commission de protection du territoire agricole dont le nombre va passer de seize à dix.

M. Pagé: Oui.

M. Garon: Et, alors que vous formez un autre organisme, il y aura neuf personnes qui vont juger en appel.

M. Pagé: Oui II y a des gens à la Commission de protection du territoire agricole que je vais inviter, je ne sais pas s'ils vont accepter, à aller au tribunal d'appel. On va commencer par adopter le projet de loi avant de les nommer et, ensuite, on va les nommer.

M. Garon: On est dans le cadre de l'adoption du projet de loi. Le Barreau vous a déjà fait des recommandations.

M. Pagé: Bien oui.

M. Garon: ...vous disant que, comme en matière d'appel on traitera de droit Immobilier

essentiellement, que ce sera sur des questions de droit puisque l'appel se fera principalement sur des questions de droit, l'interprétation des faits aura surtout lieu en première Instance et que les jugements qui seront rendus en appel vont tous avoir des connotations juridiques et établir une jurisprudence.

M. Pagé: Pour le bénéfice du député de Lévis, l'appel n'est pas seulement sur une question de droit, mais sur des questions de fait aussi. Le député de Lévis, que je sache, quand M a eu à recommander au Conseil des ministres, en 1978, des membres pour agir à la Commission de protection du territoire agricole, ce n'étaient pas seulement des gens d'expérience juridique.

M. Garon: Pardon?

M. Pagé: Ce n'étaient pas seulement des gens d'expérience juridique.

M. Garon: Non, mais ils agissaient en groupe. Ce n'était pas le même fonctionnement dans les faits que maintenant. Il y avait un seul organisme qui référait au...

M. Pagé: En appel, ils ne siègent pas tout seuls, non plus, Ils siègent à trois. En appel, ils vont siéger à trois. Ne vous inquiétez pas.

M. Garon: Non, mais je pose des questions qui se posent.

M. Pagé: Oui, oui, et je vous donne des réponses.

M. Garon: Le Barreau lui-même a fait des recommandations. Je veux savoir tout simplement quel est le... Je ne m'inquiète pas, je pose des questions pour avoir des réponses.

M. Pagé: Les représentations du Barreau ont été nécessairement, ça va de soi, prises en considération.

Le Président (M. Richard): Alors, l'article 5 est adopté sur division?

Une voix: Sur division.

Le Président (M. Richard): J'appelle donc l'article 6.

Appel au tribunal d'appel

M. Pagé: À l'article 6, on Indique qu'on modifie la section II. 1.

M. Brassard: On va prendre ça alinéa par alinéa, paragraphe par paragraphe.

M. Pagé: Oui, oui. Alors, on crée en fait, l'appei au tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole. C'est un organisme Indépendant, séparé de la commission, chargé d'entendre les appels des décisions de celle-ci. On y prévoit la procédure de nomination de ses membres, qui s'inspire de celle des membres de la commission, en référence à l'article 4 de la loi.

Le tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole est constitué, est formé de neuf membres, tel qu'on l'Indiquait, dont un président et un vice-président. Le gouvernement fixe le traitement. Les membres demeurent en fonction à l'expiration de leur mandat pour finir les causes pendantes devant lui. Le président et le vice-président du tribunal d'appel exercent leurs fonctions à plein temps. C'est l'article 21.01. À l'article 21.02, il s'agit d'un article... Oui?

Le Président (M. Richard): Je m'excuse, M. le ministre. Je pense que M. Brassard voulait qu'on l'étudié paragraphe par paragraphe.

M. Brassard: Oui, paragraphe par paragraphe.

Le Président (M. Richard): Alors, si on parle de l'article 21.01...

M. Pagé: Le premier paragraphe.

Le Président (M. Richard): Le premier paragraphe. M. le ministre a fait son commentaire. Est-ce qu'H y a une discussion?

M. Brassard: D'abord, neuf membres. Pourquoi neuf membres? Trois possibilités de trois prises de décision ou d'examens.

M. Pagé: Trois bancs de front: un à Montréal, un en région, un à Québec.

M. Brassard: Mais sur la nomination et la durée du mandat, on l'a rappelé à plusieurs occasions, on sait qu'un groupe de travail nommé par le gouvernement avait examiné l'ensemble des tribunaux administratifs et en était arrivé à la conclusion qu'il fallait, d'une part, modifier le mode de nomination des membres de façon à faire en sorte que le danger de nominations politiques, en quelque sorte, soit écarté. Alors, on proposait un processus de sélection et un jury de sélection. C'est ce que proposait le rapport Ouellet Également, il proposait un mandat d'au moins sept ans plutôt que de cinq ans pour assurer davantage l'indépendance des membres des tribunaux administratifs. (15 heures)

La question qu'on se pose, c'est: Pourquoi, à partir du moment où le gouvernement décide de créer un nouveau tribunal administratif, un Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole, n'avez-vous pas profité de

cette circonstance pour innover et appliquer les recommandations extrêmement positives et judicieuses contenues dans un rapport remis au gouvernement du Québec et qui concernait précisément tes tribunaux administratifs? À tout le moins pourquoi n'avaz-vous pas commencé par l'application de la recommandation concernant la nomination et de celle concernant la durée du mandat? Vous aviez là une occasion en or, la mise en place d'un nouveau tribunal administratif et non pas des amendements concernant un ancien, une occasion rêvée pour innover en matière de nomination et en matière de durée. Vous ne l'avez pas fait. Vous êtes restés dans le sillon, comme on dit, vous êtes restés dans la tradition des nominations par le Conseil des ministres, durée du mandat, cinq ans, comme c'est le cas pour tous les autres tribunaux administratifs.

Je trouve regrettable et déplorable que vous n'ayez pas saisi cette occasion d'innover positivement en matière de mise en place de tribunaux administratifs au Québec. J'aimerais savoir du ministre pourquoi il s'en est tenu à la routine.

M. Pagé: La question du député de Lac-Saint-Jean est tout à fait pertinente. C'est le cas que le gouvernement étudie actuellement les recommandations qui ont été formulées dont certaines vont dans le sens de celles évoquées par le député. J'ai eu l'occasion de discuter de cette question au Comité de législation lorsqu'on a préparé la loi. Il en ressort que, lorsque le gouvernement aura pris une décision concernant les tribunaux administratifs, cette décision s'appliquera, je présume, par voie législative à l'ensemble des tribunaux administratifs. Chacun des organismes sera traité de la même façon et selon les mêmes dispositions dans une loi générale et non pas dans chacune des lois. C'est ce qu'on entrevoit jusqu'à maintenant. C'est ce qui semble se dessiner.

Je n'ai pas à parler pour et au nom du ministre de la Justice, mais ma perception est que, si un geste doit être posé allant dans le sens des recommandations du rapport, ça devra prévoir une disposition d'ordre général et universel s'appliquant à chacun des organismes visés par la loi.

Le Président (M. Richard): M. le député de Jonquière.

M. Brassard: J'aurais un amendement à suggérer, à proposer au ministre concernant le président du tribunal, à tout le moins; on voudrait que ce soit un juge de la Cour du Québec qui soit président du tribunal d'appel. J'ai un amendement dans ce sens, M. le Président.

M. le Président, je n'ai pas l'Intention de parler là-dessus pendant des heures. il me semble qu'il est nécessaire qu'à la tête d'un tribunal de cette nature, de cette Importance, on retrouve un juriste. J'admets avec le ministre que, pour ce qui est des autres membres, ce ne soit pas obligatoire ou requis que ce soient tous des juristes, des hommes ou des femmes ayant une formation juridique. Quant à moi, il me semble qu'il faut s'assurer que les décisions sur le plan juridique soient les plus solides possible et les mieux appuyées, les mieux assises possible. Dans ces conditions, compte tenu de cet objectif, je pense que la meilleure façon, c'est de faire en sorte que le chef, en d'autres termes, du tribunal d'appel, le président du tribunal d'appel sort un juge de la Cour du Québec.

Je pense que, de cette façon, on a au moins la quasi-certitude - toute erreur est possible -que les décisions prises vont être correctes, je dirais, sur le plan légal et vont avoir des assises juridiques solides, fermes. Je pense que c'est un moyen d'arriver à cet objectif que tout le monde souhaite et que tout le monde recherche. C'est pour cette raison, M. le Président, que je propose cet amendement qui me semble raisonnable et acceptable.

M. Pagé: M. le Président, l'amendement du député de Lac-Saint-Jean est très intéressant. Je dois vous dire que, personnellement, je n'ai aucune objection de principe à ce qu'éventuellement le président du tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole soit un juge de la Cour du Québec et qu'il soit nommé pour une période, comme on l'indiquait tout à I heure, de plus de cinq ans. Cependant, l'amendement du député est prématuré. Tel que je l'indiquais tout à l'heure au député de Lévis, il va de soi que des juristes, des gens d'expérience juridique auront à assumer des fonctions et je ne vois pas comment un tribunal comme celui-là pourrait être présidé par une personne qui n'a pas d'expérience juridique.

Par contre, je m'en remets à ce que je disais au député de Lac-Saint-Jean tout à l'heure, il ne paraît pas opportun de légiférer en semblable matière tant et aussi longtemps que le gouvernement n'aura pas pris une décision et cette décision sera d'application universelle et générale en fonction d'une politique visant l'ensemble des tribunaux administratifs au Québec. Éventuellement, que le président du Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole soit une personne qui a non seulement une expérience juridique, mais art le statut d'un juge de la Cour du Québec, moi, je n'y verrais aucune objection, au contraire, je serais très sympathique à une proposition comme celle-là pour véritablement lui conférer l'indépendance qu'il faut et s'assurer qu'un organisme quasi judiciaire comme celui-là prenne des décisions, se développe une jurisprudence, etc., parce que c'est un tribunal, en fait.

Sauf que vous comprendrez qu'à la lumière de la réponse que je vous ai donnée tout à l'heure on ne pourra pas adopter cet amendement, non pas parce qu'il n'est pas intéressant,

non pas parce que nous sommes contre, non pas que moi comme ministre responsable de l'application de cette toi, je sois contre le fait que le président du tribunal ait le statut de juge. Cependant, cet amendement m'apparaît prématuré pour le moment. Deuxièmement, je vous ai donné l'assurance que de nombreuses personnes auront une expérience juridique. Évidemment, avec trois bancs, je peux présumer qu'il y en aura certainement trois et plus. Autre élément, le président du tribunal aura une expérience juridique en matière de protection du territoire agricole, cela va de soi.

Le Président (M. Richard): Sur ce, M le député de Jonquière.

M. Dufour: J'aurais peut-être autre chose. Je ne sais pas si je suis hors du sujet par rapport à l'amendement qui est là. Je voulais poser des questions concernant l'article 21.01, quatrième alinéa, où on dit: "Le président et le vice-président du tribunal d'appel exercent leurs fonctions à plein temps". Si vous marquez que c'est à plein temps, cela veut dire que les neuf ou huit autres personnes pourraient ne pas être à plein temps.

M. Pagé: Elles pourraient ne pas être à plein temps et le gouvernement pourrait faire en sorte qu'elles le soient aussi.

M. Dufour: Mais si vous faites cela, ça va faire une drôle d'application de la justice. Ces gens vont faire cela par mandat, quand cela va faire leur affaire; ils ne seront jamais en conflit d'intérêts. Que va-t-il arriver?

M. Pagé: C'est une clause standard et, d'ailleurs, à la commission, tel qu'elle fonctionne actuellement, il y a des gens qui travaillent à temps partiel. Actuellement, nous avons trois commissaires à temps partiel à la Commission de protection du territoire agricole.

Une voix: Lesquels?

M. Pagé: II y a M. Cliche qui vient de quitter, M. Philibert et M. Guérard.

M. Dufour: Mais vous en aviez seize avant. Vous ne donnez pas beaucoup de marge de manoeuvre. Cela veut dire que, si vous voulez en nommer un dixième, vous êtes obligé de faire rouvrir la loi. Actuellement, vous dites qu'il y a neuf membres.

M. Pagé: C'est un tribunal d'appel.

M. Dufour: Oui, c'est cela. Vous pariez du tribunal d'appel. Vous parlez de neuf.

M. Pagé: On en a deux à plein temps. Le président et le vice-président doivent être à plein temps.

M. Dufour: Je vous al bien écouté. Vous avez dit tout à l'heure que ça siège trois par trois - trois fois trois font neuf - sauf qu'il y a peut-être un point qui a été oublié, c'est que le président, qui est à plein temps, n'aura peut-être pas toujours le temps ou le goût de siéger. Il va probablement faire beaucoup d'administration, de temps en temps, parce qu'il y a une partie administrative là-dedans. Trois fois trois font neuf, mais ça ne fait pas dix. Je pense que je peux peut-être rejoindre l'amendement de mon collègue en disant...

M. Pagé: Écoutez, c'est une clause, M. le député, qu'on retrouve avec le même libellé dans d'autres organismes de même nature. Le président et le vice-président doivent être à plein temps au tribunal d'appel, dans le cas qui nous occupe. C'est très probable, pour ne pas dire très certain, que d'autres membres seront à plein temps, mais cela ne veut pas dire qu'ils le seront tous. C'est cela que ça veut dire.

M. Garon: Oui, mais il y a quelque chose de différent, quand même. Quand on parle de MM. Philibert et Cliche, ce sont plutôt des commissaires régionaux qui siègent pour des causes régionales et il n'y a pas assez de causes pour siéger à plein temps. Ils sont nommés pour cinq ans, mais ils siègent une, deux ou trois journées, au besoin, par semaine. Quand on parle de tribunal d'appel - toutes les causes viendront en appel - il aura un caractère, forcément, moins régional. Au fond, c'est l'équivalent de la commission de révision, de la commission qui siégeait en révision. Cela va maintenant s'appeler tribunal d'appel, mais c'est la commission qui siégeait en révision, à toutes fins utiles. C'est cela que ça veut dire.

M. Pagé: M. le Président, on m'indique que c'est le même libellé que dans la loi actuelle. Il est probable que des membres auront à agir à plein temps, tout comme il est possible que des membres aient à agir à temps partiel. Alors, on dit ici ce qu'on dit dans toute autre loi. Le président et le vice-président sont à plein temps et les autres seront prévus au décret qui procédera à leur nomination, comme cela a toujours été. Écoutez, on ne bâtit pas le monde ce matin dans cet article. On crée un tribunal d'appel et on se réfère aux autres dispositions.

M. Dufour: À l'exception, M. le Président...

M. Pagé: M. le Président, avant que le député de Jonquière ne poursuive, je voudrais, au nom de mes collègues, membres de la commission, saluer la présence parmi nous du chef de l'Opposition officielle à l'Assemblée nationale et lui souhaiter nos meilleurs voeux non seulement de bonne année, mais particulièrement aujourd'hui,

parce que c'est son anniversaire de naissance, un joyeux anniversaire et beaucoup de grandes satisfactions. Pour le bénéfice du Journal des débats, M. le Président, on doit dire à ceux qui nous liront que l'ensemble des membres présents dans la salle ont joint leurs applaudissements aux miens pour saluer M. Chevrette Vous pouvez continuer, M. le député.

M. Dufour: En parlant d'un tribunal - avant, on pariait d'une Commission de protection du territoire agricole - à mon point de vue, à moins que les mots ne veuillent rien dire, il me semble que le mot tribunal a un caractère beaucoup plus légaliste.

M. Pagé: La Commission des transports est devenue le Tribunal des transports.

M. Dufour: Ils n'appellent pas cela un tribunal, la Commission des transports.

M. Pagé: La commission décide en matière quasi judiciaire. (15 h 15)

M. Dufour: Regardons les faits. On va arrêter de mêler tout le monde. SI on parie d'un tribunal, normalement, tout de suite cela fait image. Je pense que cela fait partie de notre responsabilité que les gens comprennent les termes et que ceux-ci disent la même chose partout. Partout où l'on parie d'un tribunal, normalement, ce sont des gens qui sont nommés de façon permanente. Il y a un seul endroit, et ce sont les cours municipales, où il s'agit d'un tribunal où I n'y a pas de permanence qui est accordée. Mais, partout ailleurs, tout le monde s'entend pour dire qu'à un tribunal ce sont des gens qui sont nommés à temps plein pour faire leur job, parce qu'il pourrait y avoir des conflits d'intérêts; toutes sortes de choses pourraient arriver. Avant, ils étalent seize, là, ils sont neuf. Donc, vous baissez de sept d'un coup sec. Avant, il y avait seize membres à la Commission de protection du territoire agricole.

M. Pagé: Dix. Au tribunal d'appel, ils vont être neuf. Alors, au lieu de seize, dix et neuf, dix-neuf.

M. Dufour: Dans l'ancienne loi, ils étaient combien?

M. Pagé: Ils étaient seize. Dans la nouvelle loi, iIs sont dix à la commission et neuf au tribunal d'appel. Dix-neuf moins sei2e, cela fait trois de plus.

M. Dufour: Vous n'avez plus de "chums" à nommer.

M. Pagé: Alors, l'article est-il adopté?

M. Dufour: Tout de même, par rapport au projet de loi qu'on a devant nous, c'est évident qu'avant iI y avait une disposition semblable, mais cela ne portait pas le nom de tribunal On parie dans l'amendement de nommer un juge de la Cour du Québec, parce qu'on parie d'un tribunal. Avant, on n'en parlait pas. Un tribunal pas de juge, cela fait drôle.

M. Pagé: C'est mieux qu'un juge pas de tribunal.

M. Dufour: Est-ce que c'est le terme qui est mal choisi? Moi, |e me pose des questions.

Le Président (M. Richard): M. le députe de Lévis.

M. Garon: Essentiellement, un président qui est un Juge de la Cour du Québec donne un caractère de permanence. Cela permet aussi de ne pas Influencer le tribunal, le fait que quelqu'un qui préside un tribunal d'appel sort un juge de la Cour du Québec, soit quelqu'un qui est nommé Indéfiniment, qui n'est pas nommé uniquement pour cinq ans, car, même s'il est nommé pour cinq ans comme président du tribunal, s'il cesse d'être président du tribunal. il retourne à la Cour du Québec. C'est quelqu' un qui a une sécurité d'emploi totale et qui n'est donc pas sujet aux pressions qui pourraient survenir. On a vu, même si le ministre le nie, qu'en septembre 1986 M a donné des directives J'ai le sentiment très net que, si ce caractère de permanence avait été établi par un juge de la Cour du Québec comme président, il n'est pas impossible que le juge se serait senti beaucoup plus à l'aise pour dire que le ministre n'avait pas à lui donner de directives, il n'en a pas le droit en vertu de la loi, d'aucune façon Ne nous racontons pas d'histoires. Un ministre, en aucune façon, ne peut donner de directives à un tribunal ou à un organisme quasi judiciaire, si la loi ne le prévoit pas de façon expresse En septembre 1986, le ministre a donne formellement des directives dans une conférence de presse à la Commission de protection du territoire agricole.

M. Pagé: M. le Président, ce que M. le député de Lévis dit n'est pas exact. J'ai eu l'occasion d'y référer en deuxième lecture.

M. Garon: Pourquoi un juge? Parce que, même s'il est nommé pour cinq ans à la Commission de protection du territoire agricole ou au tribunal d'appel qui est l'équivalent du comité de révision, cela aura un caractère de permanence car même si au bout de cinq ans, il n'est pas affecté là, il retournera sur le banc de la Cour du Québec et le juge en chef l'affectera aux tâches normales auxquelles sont affectes les juges. C'est pourquoi cet amendement vient donner un caractère beaucoup plus stable et plus de crédibilité à la fonction de président du tribunal C'est pourquoi ta proposition est faite.

Je pense que c'est une bonne proposition qui va donner plus de latitude et plus de liberté pour interpréter les lois. Quand on a un organisme comme celui-là auquel on semble vouloir donner un caractère plus juridique, il faut aussi le faire dans les formes. La proposition de nomination d'un juge comme président du tribunal d'appel va dans ce sens.

Le Président (M. Richard): Puisque l'amendement est apporté et que chacun a émis ses arguments en fonction de cela, est-ce que nous considérons que l'amendement est recevable?

M. Pagé: II est recevable et le débat a eu lieu. S'il n'y a pas d'autres interventions, à moins que mon collègue ne veuille...

Le Président (M. Richard): Est-ce que vous demandez le vote par appel nominal sur l'amendement?

M. Brassard: Sur mon amendement? Oui.

Le Président (M. Richard): M. Comeau, s'il vous plaît. M. le secrétaire.

Le Secrétaire: Sur l'amendement de M. Brassard (Lac-Saint-Jean), les pour et les contre. M. Beaudin (Gaspé)?

M. Beaudin: Contre.

Le Secrétaire: M. Forget (Prévost)?

M. Forget: Contre.

Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?

M. Dubois: Contre.

Le Secrétaire: M. Houde (Berthier)?

M. Houde: Contre.

Le Secrétaire: M. Pagé (Portneuf)?

M. Pagé: Contre.

Le Secrétaire: M. Brassard (Lac-Saint-Jean)?

M. Brassard: Pour.

Le Secrétaire: M. Garon (Lévis)?

M. Garon: Pour.

Le Secrétaire: M. Dufour (Jonquière)?

M. Dufour: Pour.

Le Secrétaire: M. Desbiens (Dubuc)?

M. Desbiens: Pour.

Le Secrétaire: Quatre pour, cinq contre, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Donc, l'amendement à l'article 21.01 est rejeté. Je reviens donc à l'article 21.01.

M. Brassard: Sur division.

Le Président (M. Richard): L'article est donc adopté sur division. J'appelle maintenant l'article 21.02, toujours à l'intérieur de l'article 6, globalement.

M. Pagé: C'est un article général et classique qui vise à assurer la présidence et à fixer le quorum lors d'une séance de travail. Il est indiqué que le quorum est de trois membres.

Le Président (M. Richard): Avez-vous des commentaires là-dessus, M. le député de Lac-Saint-Jean?

M. Brassard: Je pense que ce sont des articles qu'on retrouve à peu près dans...

Le Président (M. Richard): Alors, l'article 21.02 est donc adopté?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): J'appelle donc l'article 21.03.

M. Pagé: À l'article 21.03, on prévoit que "les articles 5, 8 à 13 et 15 à 21 de la loi s'appliquent, en les adaptant, au tribunal d'appel." Cela se réfère à des dispositions actuelles de la loi qui concernent la commission, qui s'appliqueront à l'avenir au tribunal, et qui portent sur le siège social, les conflits d'intérêts, le personnel, l'engagement d'experts et les règles de fonctionnement prévues aux articles 11 et suivants.

M. Brassard: Cela veut dire que ce sont des articles qui concernent les commissaires, actuellement.

M. Pagé: Ils concernent la commission, rétablissement de son siège social et le personnel qu'elle embauche. En fait, le tout est transposé au tribunal d'appel, selon les mêmes règles. Le tribunal d'appel devra procéder à la nomination de son personnel suivant les mêmes règles établies à l'article 9 de la loi, par exemple.

M. Brassard: À l'article 5, c'est le siège social.

M. Pagé: Le siège social. À l'article 8, ce sont les conflits d'intérêts, à l'article 9, le personnel, à l'article 10, l'engagement d'experts

et, aux articles 11 et suivants, les règles de fonctionnement.

Le Président (M. Richard): Est-ce que l'article 21.03 est adopté?

M. Brassard: Attendez un peu, s'il vous plaît. De 15 à 21, ce n'est pas tout à fait exact,

M. le Président. Oui, c'est vrai - on en a abrogé - en tenant compte des articles abrogés.

M. Pagé: Ils ne sont pas là. M. Brassard: Oui, d'accord.

Le Président (M. Richard): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: À l'article 21, est-ce inclusivement? Cela veut dire que le tribunal doit de plus fournir au ministre tout renseignement ou rapport qu'il requiert sur ses activités". Oui?

M. Pagé: Oui.

M. Brassard: Aussi.

M. Pagé: Comme cela l'est ailleurs. Le rapport annuel, ces choses-là.

M. Brassard: Et le rapport du tribunal d'appel sera également déposé à l'Assemblée nationale?

M. Pagé: Oui.

Le Président (M. Richard): L'article 21.03 est adopté?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): M. le député de Lévis.

M. Garon: J'aimerais savoir si le tribunal d'appel va siéger au môme lieu où siège la Commission de protection du territoire agricole en première instance, c'est-à-dire à Québec, dans les mômes bureaux, ou à Montréal, à Longueuii, dans les mômes bureaux.

M. Pagé: En fait, ce qui est important, c'est que le gouvernement assure aux requérants l'accès au tribunal. Dans mon esprit, on devra prévoir, dans les règles de fonctionnement, que le tribunal pourra siéger ailleurs qu'à Québec et à Montréal. Le tribunal pourra siéger en région. C'est Indiqué à l'article 5. L'article 5 s'applique. Alors, on pourra y lire que te tribunal a son siège social à l'endroit déterminé par le gouvernement; un avis de l'établissement ou de tout changement du siège social devra être publié dans la Gazette officielle du Québec. Le tribunal peut avoir des bureaux et tenir ses séances à tout endroit au Québec."

M. Garon: C'est ça que je vous demande au fond.

M. Pagé: Je ne crois pas que ça sera dans les mômes bureaux nécessairement.

M. Garon: Ce sera dans d'autres bâtisses, d'autres lieux.

M. Pagé: Pas nécessairement non plus. Cela dépend. On va voir.

M. Garon: On va voir.

M. Pagé: On va commencer par adopter la loi.

M. Garon: Je comprends, mais...

M. Pagé: On va nommer les membres...

M. Garon: ...habituellement, les...

M. Pagé: ...et, après ça, on va les loger.

M. Garon: ...règlements sont souvent disponibles en même temps que la loi quand le travail a été bien fait, planifié un peu.

M. Pagé: M. le Président...

M. Garon: M. le Président, d'autant plus que ]e suis bien placé pour le dire, parce que les règlements, dans mon cas, ont souvent été disponibles en même temps que la loi. Tout simplement, le ministre fait une loi actuellement qui dit maintenant - ce n'est pas à la commission - que l'article 5 doit s'appliquer mutatis mutandis au Tribunal. C'est ça qu'on voit à l'article 21.03. "Les articles 5, 8 à 13 et 15 à 21 s'appliquent, en les adaptant, au tribunal d'appel." Que dit l'article 5? "La commission a son siège social à l'endroit déterminé par le gouvernement."

M. Pagé: Par décret. M. Garon: Oui.

M. Pagé: Donc, ça ne sera pas dans les règlements. Cela sera dans le décret.

M. Garon: Alors, les intentions du ministre ou du gouvernement sont-elles de mettre le tribunal dans des lieux différents ou dans les mômes lieux que la Commission de protection du territoire agricole qui siège, à Québec, au 200, Chemin Sainte-Foy, ou à Longueuil, dans des bureaux qui sont un lieu physique, ou si on a l'intention de louer d'autres bureaux, de fixer un deuxième endroit de vote que les gens, qui sont allés en première instance à la commission, iront

en appel dans un autre lieu, dans un autre endroit, à Une autre adresse? C'est simplement ce que je demande. Il me semble que ce n'est pas le secret de la bombe atomique.

M. Pagé: Alors, en réponse, M. le Président...

M. Garon: S'il n'y a pas de gène... M. Pagé: II n'y a pas de plaisir. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: À moins qu'on n'ait des amis à qui on veut louer des bureaux. Où seront les bureaux? Ce n'est pas une grosse question, je pense bien.

M. Pagé: Le siège social du tribunal et les endroits où le tribunal pourra siéger seront prévus dans le décret, pas dans les règlements, mais dans le décret qui sera adopté par le Conseil des ministres lorsque la loi sera adoptée, cela va de soi. Et je vais répéter ce que l'indiquais au député tout à l'heure: Le tribunal aura à siéger très certainement à Québec, à Montréal et aussi en région. On verra s'il est possible - vous parliez du 200, Chemin Sainte-Foy - que le tribunal soit logé au 200, Chemin Sainte-Foy. Si c'est possible physiquement, peut-être. Si c'est possible qu'il soit à Longueuil, peut-être aussi. Écoutez, ne me demandez pas aujourd'hui de vous donner l'adresse; on est en train d'étudier la loi.

M. Garon: Est-ce que ça sera...

M. Pagé: Je vais terminer là-dessus. Dans les meilleurs délais après l'adoption de la loi on va voir à remplir toutes ces obligations qui seront imparties en vertu de la loi, premièrement. Deuxièmement, ce qui m'a fait sursauter, ce n'est pas l'objet de la question du député de Lévis, mais c'est quand le député de Lévis nous a dit: il est de coutume que les règlements soient déposés en même temps que la loi. Voyons donc! Personne, je pense, à l'Assemblée, ne pourrait le soutenir. Que le député de Lac-Saint-Jean le soutienne pour la période où il a été au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, je le comprendrais, mais pas le député de Lévis! Vous avez adopté de nombreuses lois et les règlements sont venus un an, deux ans et, dans certains cas, au-delà de deux ans après. Alors, ne venez pas me dire, surtout vous, que c'est la coutume de déposer les règlements en même temps que la loi. Voyons donc! (15 h 30)

M. Garon: M. le Président, dès 1977, dans une loi qui amendait la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments, il y avait une réglementation sur les petits abattoirs qui était beaucoup plus volumineuse que la loi.

Les règlements ont été déposés à l'Assemblée nationale bien avant l'étude du projet de loi. Évidemment, à ce moment-là, votre conseiller juridique n'était pas là. Il n'est pas au courant. SI vous le demandez aux gens, ils vous diront que le projet de loi a été débattu, que les règlements étaient disponibles, même pas au moment de la commission, mais avant, à l'Assemblée nationale, pour que les gens puissent en disposer parce qu'on était fiers d'avoir fait des règlements qui étaient utiles, bien pensés, bien conçus.

Le ministre se donne l'avantage actuellement de faire un siège social pour le tribunal d'appel qui sera situé à un autre endroit.

M. Pagé: Dois-je comprendre que le député de Lévis voudrait l'avoir à Lévis?

M. Garon: II dit que ça pourrait être à un autre endroit. Dans cette perspective où les gens parlent davantage de guichet unique... Ou encore, est-ce parce que le ministre ne veut pas nous le dire? Parce qu'on sait qu'actuellement les ministres du Parti libéral de la région de Québec ne sont pas très forts; les organismes s'en vont plutôt à Montréal, les fonctionnaires déménagent, il y a de moins en moins de réunions à Québec d'à peu près tous les organismes gouvernementaux et Québec devient de moins en moins une capitale. Est-ce parce que le ministre ne veut pas nous dire que son siège social sera dans la région de Montréal?

M. Pagé: M. le Président, le député de

Lévis veut m'imputer des intentions que je n'ai pas J'ai pris la commission des courses et j'ai amené le siège social de Montréal à Québec.

M. Garon: Ouf, oui, une boîte à lettres.

M. Pagé: Je ne l'ai pas amené à Lévis, par exemple, je l'ai amené à Québec. Je peux vous donner l'assurance que le siège social ne sera pas dans Portneuf.

Le Président (M. Richard): Je suggérerais au centre du Québec, M. le ministre, dans le comté de Nicolet.

M. Pagé: À Nicolet? Bon, le président fait motion pour que ce soit chez lui. Vous voyez comment ça peut devenir subjectif lorsqu'on discute de siège social.

M. Garon: Vous avez des chances d'être dézoné, vous allez être dans du sol 4. Il y a beaucoup de sols 4 dans votre coin.

M. Pagé: Non, pas nécessairement. Je prends note de la demande du député de Lévis pour que le siège social soit à Québec, pour qu'il soit leplus près possible du 200, Chemin Sainte-Foy ou encore à l'intérieur de l'immeuble au 200, Chemin

Sainte-Foy et je le remercie de ses commentaires.

Le Président (M. Richard): L'article..

M. Garon: M. le Président, il faudra poser plus de questions si on n'a pas les règlements ni les réponses. Il faudra poser plusieurs questions pour avoir les réponses. C'est l'article 5, au fond, qui va s'appliquer au tribunal d'appel. La commission a son siège social à l'endroit déterminé par le gouvernement; un avis de l'établissement ou de tout changement du siège social est publié dans la Gazette officielle du Québec* Est-ce que le gouvernement a été saisi de l'endroit où doit être situé le siège social du tribunal d'appel?

M. Pagé: Non. Le gouvernement en sera saisi après que le projet de loi aura été adopté.

M. Garon: Dans un projet de loi, il y a souvent une analyse des coûts Impliqués pour le gouvernement et pour les contribuables et un plan d'organisation administrative supérieure. Combien de membres du personnel seront affectés au siège social prévu à l'article 5? Est-ce qu'on a fait un projet de loi sans avoir analysé d'aucune façon les coûts administratifs qu'il y aura à le faire?

M. Pagé: Depuis le dépôt du projet de loi, j'ai demandé au ministère de prévoir ou de m'établir les coûts dans la perspective du prochain budget qui devra être déposé à l'Assemblée nationale, un budget de dépenses tout au moins, avant le 31 mars prochain. On prévoit donc un président et un vice-président à temps plein, sept membres du tribunal dont certains seront à temps plein et certains possiblement à temps partiel, on prévoit le personnel de soutien requis, on prévoit aussi des coûts de fonctionnement, de logement, de déplacement, d'équipement, etc. Le tout est en train d'être préparé actuellement. On ne sera certainement pas en retard parce que le projet de loi n'est pas encore adopté.

M. Garon: Non, mais comme le ministre s'attendait qu'il soit adopté pour Noël, j'imagine qu'il était prêt. Dans sa planification, combien de membres du personnel seront affectés au tribunal d'appel et combien à la Commission de protection du territoire agricole qui agira en première instance? Est-ce que le personnel technique sera le même et sera-t-il sous l'autorité du tribunal d'appel ou sous l'autorité de la Commission de protection du territoire agricole? Ou est-ce que chacun aura son personnel technique à tous les niveaux, autant au niveau de première instance qu'au niveau de deuxième instance, des personnels complètement séparés les uns des autres?

M. Pagé: Chacun va avoir son personnel.

L'adoption de la loi va Impliquer une réévaluation des besoins d'effectifs de la commission et une évaluation des besoins d'effectifs du tribunal, et c'est cela qui est en train de se faire. Cela sera fait pour le moment où la loi entrera en vigueur, M. le député.

M. Garon: Alors, combien de personnel additionnel prévoit-on par l'adoption de la loi et comment va se faire la répartition?

M. Pagé: Je suis...

M. Garon: Est-ce que, dans un cas, il y aura tant de personnel additionnel au tribunal d'appel, qui grugera les effectifs de la commission de protection qui agit en première Instance ou s'agira-t-il de personnel additionnel qui sera affecté au tribunal d'appel?

M. Pagé: J'hésite à donner des chiffres parce que je n'ai reçu qu'un rapport très préliminaire. On m'indiquait que cela serait peut-être entre dix et quinze personnes qui devraient être affectées au tribunal d'appel, mais j'attends le rapport, j'attends des choses plus concrètes, des documents, etc., à partir d'une évaluation plus exacte des besoins et cela va venir. Au moment de l'étude des crédits du ministère, vous pourrez me poser ces questions, ce sera le temps.

M. Garon: À la faveur de ces nominations... Il y a seize postes à la Commission de protection du territoire agricole. Il y en aura maintenant dix et il y en aura neuf au tribunal d'appel, cela veut dire qu'il y en aura six qui devront sauter, à toutes fins utiles.

M. Pagé: Pas nécessairement.

M. Garon: Un Instant, il y en aura dix. Il ne peut pas y en avoir plus. Il y en aura dix.

M. Pagé: Mais non. 10 plus 9, cela fait 19, moins 16, cela fait 3. SI on les garde tous, il en manque 3.

M. Garon: À la Commission de protection du territoire agricole - première instance - il va y avoir dix personnes, d'après la loi. Au tribunal d'appel, il va y en avoir neuf. Donc, tant de nominations en première instance qui ne pourront pas durer, puisqu'il y aura seulement dix postes prévus après la mise en vigueur de la loi. Est-ce qu'à la faveur de ces remaniements de nominations, tant en première instance qu'au tribunal d'appel, le ministre a l'intention d'en profiter pour faire sauter des commissaires ou a-t-il l'intention de nommer au tribunal d'appel des gens qui sont commissaires en première instance pour compléter ses cadres?

M. Pagé: M. le Président, il n'est pas dans les habitudes du ministre de l'Agriculture d'éli-

miner des commissaires. Mon prédécesseur a procédé à la nomination de deux commissaires, le 4 décembre 1985, c'est-à-dire deux jours après la défaite de son gouvernement, et j'ai endossé entièrement et pleinement ces nominations, môme si elles avaient été faites deux jours après l'élection et dix jours avant le changement de gouvernement, alors que le premier ministre de l'époque, M. Johnson, s'était engagé auprès du premier ministre à ne procéder à aucune nomination.

Cela étant dit, il est très probable, pour ne pas dire certain, que des gens qui sont actuellement à la commission auront à agir au niveau du tribunal, mais ne me demandez pas aujourd'hui de vous dire qui va être nommé. D'abord, II faut que le Conseil des ministres accepte ces recommandations et, à ce moment-là, cela sera connu.

M. Garon: Ce n'est pas cela que je demande. Je dis qu'avec la nouvelle loi il y a un tribunal d'appel où il y a neuf postes qui ne sont pas occupés; ils n'existent pas à l'heure actuelle. Il y en a dix qui vont exister à la Commission de protection du territoire agricole qui, actuellement, prévoit seize postes. Donc, il y en a six qui vont disparaître. Je demande au ministre s'il va en profiter - parce qu'il a fait sa loi d'une certaine façon; elle aurait pu être faite différemment, mais elle est faite comme cela - pour faire en sorte que des gens ne siègent plus en première instance et qu'ils ne soient pas, non plus, nommés au tribunal d'appel. C'est ça que je lui demande. Est-ce qu'il va profiter de la mise en vigueur de la loi pour faire sauter les commissaires qui sont actuellement à la Commission de protection du territoire agricole et dont le mandat n'est pas terminé?

M. Pagé: J'ai indiqué au député que je me propose des personnes qui sont actuellement... Je vais attendre que le député m'écoute...

M. Garon: Ah non! J'écoute.

M. Pagé: ...puisque c'est pour son bénéfice que je réponds.

Je me propose d'inviter des personnes, qui sont actuellement à la commission, à siéger au tribunal d'appel. Si ma mémoire est fidèle, le mandat de certains commissaires qui siègent actuellement est échu. Je crois que le mandat de certains autres commissaires devrait être échu à l'été, en septembre... Une voix: Au printemps.

M. Pagé: ...au printemps et d'autres à l'été. Il faudra voir si, premièrement, ils sont intéressés à poursuivre leur mandat à la commission ou ailleurs, au tribunal d'appel, et, deuxièmement, si le gouvernement, par le décret du Conseil des ministres, est prêt à les renouveler, s'ils sont intéressés. Écoutez, ne me demandez pas de faire le tour aujourd'hui et de dire: Lui, iI va rester; lui, I ne restera pas; lui, il va aller au tribunal. Voyons donc, la loi n'est pas encore adoptée. Ma responsabilité et le respect que J'ai envers des fonctionnaires de l'État qui ont donné des services à l'État me commandent de voir avec eux s'ils sont intéressés à s'associer à une démarche où Us auraient à travailler à un autre palier qu'à celui de la commission. Ce n'est pas autour de la table de la commission parlementaire que ça se fait.

M. Garon: Je n'ai pas demandé si les gens étaient intéressés, j'ai demandé les intentions du ministre. Je n'ai pas demandé les intentions des commissaires...

M. Pagé: Je vous les donne, les Intentions du ministre.

M. Garon: ...parce que c'est évident que je ne peux pas demander les intentions des commissaires à la commission parlementaire. C'est clair. J'ai demandé les intentions du ministre; c'est ça que j'ai demandé.

M. Pagé: Alors, je vous les ai données, mes intentions.

Le Président (M. Richard): Est-ce que l'article 21.03 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Richard): J'appelle donc l'article 21.04, toujours à l'intérieur de l'article global 6.

M. Pagé: Alors, à l'article 21.04, il est indiqué: "Une partie intéressée peut interjeter appel d'une décision ou d'une ordonnance de la commission devant le tribunal d'appel." Il s'agit d'un droit d'appel général sur toute question de droit ou de fait et non plus d'une révision lorsqu'on découvre des faits nouveaux ou, encore, lorsqu'une partie, comme c'était le cas dans le temps de la révision, n'a pu se faire entendre, tel que prévu à l'article 18 de la loi actuelle.

M. Brassard: M. le Président...

Le Président (M. Richard): Oui.

M. Brassard: ...sur cette question importante, quand on réfère au mécanisme de révision prévu dans la loi actuelle, on constate qu'une demande de révision, c'était très bien balisé, dans le sens qu'on pouvait demander une révision sous certaines conditions, lorsqu'il y avait un fait nouveau qui n'avait pas été connu en temps utile, lorsque le demandeur n'avait pas pu se faire entendre pour des raisons jugées suffisantes ou lorsqu'un vice de fond ou de procédure, de

nature à invalider cette décision, cette ordonnance, pouvait être exposé, de sorte que ça limitait, effectivement, le droit de demander une révision.

Dans le projet de loi actuel, II n'y a plus de balises. Toute personne qui n'est pas satisfaite d'une décision de la commission peut en appeler, a le droit d'en appeler. Je vous dis que ça m'inquiète un peu parce que j'ai l'appréhension suivante. Actuellement, la pratique veut que ceux qui demandent une révision le font parce qu'ils se sont vu refuser par la commission une demande de dézonage. Généralement, c'est ça. Ils ont demandé qu'on dézone telle ou telle partie de leur propriété et ça a été refusé, alors ils demandent une révision. C'est ça, actuellement. Quand le dézonage est accordé, généralement, Ils ne vont pas en révision. (15 h 45)

On limitait les demandes de révision pour qu'on ne se retrouve pas, de façon quasiment générale, avec une contestation des décisions de la commission n'accordant pas le dézonage, refusant le dézonage. C'est pour ça qu'il y avait des balises, des paramètres délimités. Ce n'est pas n'importe qui qui pouvait demander une révision; on ne pouvait pas le faire, non plus, n'importe quand et dans n'importe quelles conditions.

Là, si le droit d'appel est accordé sans aucune balise, sans aucune limite, moi, je crains qu'à ce moment toute personne qui s'est vu refuser sa demande de dézonage par la commission, automatiquement, ne se retourne de bord et n'allie devant le tribunal d'appel. Je crains qu'à ce moment le tribunal d'appel ne devienne une espèce de machine à dézonage, une espèce de répondeur automatique; si vous n'êtes pas satisfait de la commission, vous pouvez faire appel, pas de problème. Il n'y a pas de condition, il n'y a pas de paramètre, il n'y a pas de balise. N'importe qui peut faire appel. Si vous n'êtes pas satisfait, vous pouvez faire appel.

Ma crainte, c'est que le tribunal ne se retrouve avec une avalanche de demandes d'appels qu'il ne pourra pas refuser. Il va être obligé de les considérer. À ce moment-là, ou II va confirmer les décisions de la commission ou il va commencer à les remettre en cause. Là, la machine est en marche. Cela m'apparait dangereux. Je me demande pourquoi le ministre n'a pas jugé utile de maintenir les balises actuellement prévues dans la loi en ce qui concerne l'appel, en ce qui concerne la révision. J'aimerais le savoir.

M. Pagé: Là-dessus, M. le Président, il y a plusieurs choses. D'abord, le tribunal d'appel sera formé de trois membres. Il siégera à trois membres comparativement à un membre qui siégera au niveau de la commission. Il est certain que va se dégager une jurisprudence. Par surcroît, ces gens auront une expérience juridique et une expérience agricole. Certains auront assurément une expérience de longue durée, s'ils sont depuis longtemps à la Commission de protection du territoire agricole. Ce type d'appel de novo, si je peux utiliser ce terme, est de même nature, ni plus ni moins, que ce qui était prévu dans le texte de loi adopté en juin 1985, qui prévoit ou qui prévoyait un appel de novo ou une révision de novo.

Pour ajouter à cet aspect de la question, je vais demander à M. le président de la Commission de protection du territoire agricole de compléter les renseignements à donner à cette commission sur ce sujet.

M. Blain: M. le Président, ce serait pour nous la quatrième forme de droit de révision. C'est un problème difficile, en droit comme en pratique, que nous avons depuis le début de la commission. Cela découle, d'abord, de la nature du recours. C'est un recours hybride de droit anglo-saxon. La révision, ce n'est pas un appel, c'est le droit, pour un organisme, de changer sa décision pour cause avec les mômes membres. Il y a des règles assez restreintes à ça, c'était du droit Incertain en 1975, 1978. Dans la première version, on pouvait aller en révision, mais pour cause seulement. Les gens ne savaient pas ce que ça voulait dire pour cause. Alors, pendant des années, ils venaient en rappel à la commission, ils venaient en révision. En tout cas, ils voulaient s'essayer une deuxième fois et on leur disait: Monsieur, vous vous êtes trompé, on n'a juridiction que pour cause. Vous n'avez pas de cause, alors retournez chez vous.

Il faut comprendre une affaire essentielle chez nous, c'est que, quand on donne un recours à quelqu'un pour aller en révision ou pour s'essayer une deuxième fois, M pense qu'il peut aller en convaincre d'autres et les faire changer d'idée pour obtenir ce qu'il voulait avoir. Si on lui dit qu'il n'y a pas de cause, la semaine suivante, il fait une nouvelle demande et cela lui coûte 20 $, parce qu'on n'est pas un tribunal où, comme en matière judiciaire, la décision est finale et ses droits sont déterminés jusqu'à la fin de ses |ours. Alors, il s'essaie trois mois après.

Il faut examiner la situation bien attentivement. Est-ce qu'on veut qu'il aille en Cour supérieure pendant trois ans pour nous forcer à revoir notre décision si on a mal fait notre travail ou est-ce qu'on veut dire aux citoyens: On peut s'enfarger, sur 6000 décisions par année, et là, vous viendrez en révision? Le problème de la révision est un problème légal et constitutionnel; légal en ce sens que la révision ne peut viser que les cas de révision administrative connus en jurisprudence. Si on se déguise en tribunal d'appel, on est ultra vires parce qu'on va en appel de nous-mêmes. Alors, toutes les fois que, dans l'exercice de notre pouvoir de révision, on a l'air de quelqu'un qui va en appel de lui-même - parce qu'on peut siéger full bench", si on veut - on est ultra vires et n'importe quel tribunal supérieur pourrait nous dire: Votre

décision est nulle. Il faudrait un "board" séparé, une commission ou un organisme totalement séparé pour aller en appel, mais le même organisme ne peut aller en appel de lui-même.

En 1985, cela faisait déjà au moins deux ou trois ans que les gens disaient: Votre affaire de révision pour cause, on perd notre temps avec ça. On leur disait: Bien oui, mais c'est juste ça, le recours en révision. On ne peut l'étirer jusqu'à ce que ça devienne un appel. Le Tribunal des transports a pété en Cour suprême à cause de ça, entre autres. Alors, ou c'est un "board" séparé ou, si on va en révision de nous-mêmes, c'est une révision pour cause seulement, pour les faits existant au moment de la première demande et, si vous n'avez pas de cause, bien vous recommencerez avec un nouveau 20 $. C'était pas mal frustrant pour le monde et pour la commission parce que, neuf fois sur dix, on disait: Écoutez, il n'y a absolument rien de neuf. Vous nous demandez de rendre une décision différente des deux autres et on n'a aucun fait différent. Alors, pas de cause: rejeté. Là, il avait fait un tour en révision et il recommençait avec un autre 20 $, avec une autre demande. Cela en faisait, des papiers.

Le ministre du temps a amendé la loi à la suite des recommandations du Barreau et de toutes sortes de gens pour dire: II faudrait que ce soit une révision "at large" de piano, sans cause. Cela, c'était en 1985. Le danger que nous avions - tout le monde le connaissait - c'est que c'était un peu à la limite du droit constitutionnel: on se déguisait en appel de nous-mêmes. Dans un "bill" omnibus de la Justice, du 16 février 1987, ils ont dit: Là, on va régler le problème. Il y a plusieurs organismes, comme la commission, qui ont à faire de la révision. Il y a à peu près huit sortes de révision administrative au Québec. Il y en a qui sont légales, d'autres qui sont illégales, d'autres qui sont ultra vires. On va faire une loi omnibus qui détermine bien le champ du recours en révision, en droit administratif ou quasi judiciaire. Ce champ-là va être le même pour tous les organismes et on va amender la loi de toutes ces régies et commissions pour que le recours en révision soit le même partout et soit limité de la même manière partout, pour passer le test de la Cour suprême et de la Cour d'appel.

Alors, dans une loi du ministère de la Justice qui faisait le ménage...

M. Brassard: Quand?

M. Blain: Le 16 février 1987... l'article 18 est à nouveau amendé pour nous ramener à la révision pour cause, selon les critères que vous avez là. C'est le champ clos de juridiction. On dit: À partir de cette date, ce n'est plus la révision de piano. De 1985 à 1987, c'était sans cause. Ils venaient en appel pour n'importe quoi et ils appelaient ça de la révision. De 1987 à maintenant, c'est pour cause et, encore là, neuf fois sur dix, on dit aux gens: Écoutez, on n'est peut-être pas d'accord avec la première décision qui a été rendue, mais I n'y a aucun fait nouveau, I n'y a aucune cause de révision. Recommencez donc avec une nouvelle demande, parce qu'en révision on ne peut rien changer. Alors, dans la mesure où les gens disent: On s'essaie une première fois, huit fois sur dix, c'est une décision ex parte. On a le rapport d'analyse, on fait nos représentations écrites. Cela prend deux mois, deux mois et demi. On reçoit notre décision. On n'est pas contents. Est-ce qu'on peut aller en appel ailleurs qu'en Cour supérieure; parce que cela coûte cher, ça?

S'il faut créer un recours en révision aussi large que sur le fond, le mérite et le droit, pour excéder le champ clos de la révision, il faut un appel et, pour faire un appel, il faut un tribunal séparé. Alors, c'est ça qui est dans le projet de loi actuel. S'il n'y a pas d'appel, on ne peut faire que la révision prévue maintenant, qui ne donne pas grand-chose, et si la révision ne donne pas grand-chose, cela provoque des nouvelles demandes. Alors, on recommence ou bien le débat va se faire devant les tribunaux, ce qui est bien plus cher et plus long pour les citoyens. Il faut qu'on donne une deuxième chance aux gens parce que ça tourne sur deux mois à deux mois et demi. Ce sont des formulaires, des documents qui sont transmis par courrier, un rapport d'analyse résumé, 6000 décisions par année et les gens disent: On va commencer par voir la première décision avant de savoir si on va plus loin. Cela, c'est constant et il faut que cela tourne régulièrement vite. Il y a à peu près 800 à 1000 demandes de révision par année sur 6000 décisions. Évidemment, I y en a qui sont accordées...

M. Brassard: Vous allez en avoir bien plus.

M. Blain: Pourquoi?

M. Brassard: Pourquoi?

M. Blain: II n'y en avait pas plus que ça en appel. Écoutez, aussi étonnamment...

M. Brassard: Parce que si le droit d'appel...

M. Blain: ...que cela puisse se présenter, M. le Président, les gens pensent que cela veut dire que, lorsqu'on n'est pas content, on va en révision. Laissez faire 'pour cause" etc. On leur explique ça, ils ne lisent pas l'article 18, eux. Il y en a peut-être un sur dix qui a un conseiller juridique. Cela donne quoi? De toute façon, I y en a qui ne font pas de demande en révision, mais qui font une nouvelle demande. Il y en a qui font six demandes, qui sont rendus à huit demandes pour le même dossier en huit ans à la commission, une par année, et ils recommencent chaque année, parce que la décision n'est jamais finale. L'année suivante, 1s s'essaient à nouveau.

Alors, soyons réalistes On se dit: S'iI n'est pas content, est-ce qu'on peut aller en appel de nous-mêmes? On répond: Non. Si c'est un appel, c'est un autre "board". Est-ce qu'on peut continuer la révision comme ça? On dit qu'on peut, sauf que les gens pensent tous qu'en révision iIs ont une chance d'avoir un oui, quand ils se sont fait dire non. Mais, neuf fois sur dix, iIs n'ont pas de cause, iIs perdent leur temps, iIs sortent de là frustrés et nous aussi. Cela, on le savait, en 1965. lors de l'adoption de l'amendement, mais iI y a eu un recul à cause du ministère de la Justice qui, à bon droit, à notre avis, a dit: Écoutez, ta révision, si on veut respecter la constitutionnalité, c'est juste ça, ce n'est pas un appel; sans ça, cela va péter en Cour d'appel. Là, on va en appel de nous-mêmes, à l'Intérieur d'un môme 'board', et ce n'est pas correct.

C'est ça, le fond du problème. il n'est pas fade, mais I faut le régler quelque part. Cela va être notre quatrième façon de fonctionner. C'est toujours le môme problème; les gens disent: Je ne suis pas satisfait, est-ce que Je peux aller en révision? Mate le voisin vient en révision des fois ou l'opposant vient en révision. Lui. il ne s'oppose pas. Il attend la décision et. quand il n'est pas content, I va en révision. Alors, c'est tout ça. C'est pour ça qu'on dit: 'Une partie intéressée". Quelqu'un qui a un Intérêt peut aller en révision. C'est assez ouvert comme ça. J'ai assez parlé.

M. Brassard: Le problème, M. le Président, c'est que, les gens voyant qu'il y a un seul commissaire qui décide de leur cause, il est évident que toutes les décisions qui ne satisferont pas les demandeurs vont aller en appel. Cela va être quasiment automatique, parce que vous avez juste un commissaire. Le ministre vient de le dire: Pourquoi fait-on un tribunal sans cause, un droit d'appel sans cause? C'est parce qu'il y a juste un commissaire qui décide. On était contre, on l'a dit quand on a adopté ces articles. A partir du moment où. il y a juste un commissaire qui décide, les demandeurs, quand iIs ne seront pas satisfaits de la décision prise par un seul commissaire, vont aller en appel.

Je comprends un peu le président de la commission quand iI dit que le mécanisme de révision interne est soumis à des contraintes d'ordre constitutionnel en particulier; c'est le cas pour tous les tribunaux administratifs. Mais voici la question que je me pose: Pour ce qui est du droit d'appel, comme tel, à une autre instance, c'est ce que. dans les autres cas. ce droit d'appel est accordé *at large', sans restriction. sans contrainte, ailleurs?

M. Pagé: Lorsqu,il y a un tribunal d'appel? M. Brassard: Oui. M. Pagé: Oui.

M. Brassard: S'il y a des droits d'appel, par exemple, à la Commission des affaires sociales où à la Régie du logement...

M. Pagé: Sur des questions de droit et des questions de fait.

M. Brassard: est-ce que ce sont des droits d'appel qui sont sans balise?

M. Pagé: Ce sont des droits d'appel autant sur des questions de fait que sur des questions de droit.

M. Brassard: Sans restriction ni contrainte?

M. Pagé: Oui.

M. Brassard: C'est comme ça?

M. Pagé: Comme cela a été le cas de 1985 à 1987

M. Brassard: A la CSST, par exemple, si vous n'êtes pas satisfait d'une décision de la CSST...

M. Pagé: De piano.

M. Brassard: le droit d'appel...

M. Pagé: À la Commission des affaires sociales?

M. Brassard: ...*at large*? M. Pagé: Oui.

M. Brassard: A la Régie du logement, 'at large"?

M. Pagé: Oui.

M. Blain: L'appel, c'est l'appel, point.

M. Brassard: Le droit d'appel qu'on retrouve au niveau de tous les tribunaux administratifs actuellement existants est libellé de cette façon? Enfin, iI n'est pas...

M. Pagé: Sauf pour les cas de révision.

M. Brassard: Je ne parle pas de révision, je parle du droit d'appel. Je fais la distinction...

M. Pagé: Le Tribunal des professions, c'est la même chose. On pourrait faire l'inventaire, mais...

M. Brassard: ...fine, subtile et nécessaire que le président Blain vient de faire entre la révision à l'Interne...

M. Pagé: D'accord.

M. Brassard: ...et le droit d'appel comme tel. Ce n'est pas la môme chose.

M. Pagé: Le tribunal d'appel...

M. Brassard: Le droit d'appel. il faut que cela se fasse à une autre instance.

M. Pagé: Distincte et cela réfère...

M. Brassard: Non? Vous avez l'air de faire la moue? Non? Un droit d'appel, il ne faut pas que cela se fasse à une autre instance?

M. Blain: Non, c'est qu'à cause de la jurisprudence traditionnelle l'appel, de par sa nature, doit être entendu par un tribunal distinct de celui qui a rendu la première décision.

M. Pagé: C'est cela, donc par une autre Instance. (16 heures)

M. Blain: II faut absolument que ce soit un "board" séparé, une commission totalement séparée.

M. Brassard: Une Instance distincte, autre; c'est ça que je dis.

M. Blain: Oui, tout le temps. Et, par définition, l'appel porte toujours sur une chose, soit sur la première demande qui a été faite et sur toute la première demande qui a été faite, en disant: En appel, cela a été refusé, mais vous pouvez l'accorder.

M. Brassard: Mais il n'y a pas de contrainte...

M. Blain: Non. En appel...

M. Brassard: ...dans les droits d'appel, comme on en retrouve à l'article 18 de la loi actuelle?

M. Blain: Non. La nature même de l'appel, c'est de demander à un tribunal de plus haute instance, distinct du premier...

M. Brassard: De réviser une décision dont on n'est pas satisfait.

M. Blain: Non, c'est de demander la même chose qu'on demandait en première instance, autant sur le fond que sur le droit.

M. Brassard: II y a des juristes qui vous entourent, alors pouvez-vous me confirmer que ce droit d'appel, en ce qui concerne d'autres tribunaux administratifs, est de même nature, qu'il n'est pas balisé?

M. Pagé: La Commission des affaires sociales est habilitée à recevoir une demande de modification, non seulement pour des questions de droit, mais aussi pour des questions de fait. C'est une audition tout à fait nouvelle, par exemple, pour le versement des prestations d'aide sociale ou l'admissibilité à une rente en vertu de la Loi sur le régime de rentes du Québec et de celle de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

M. Brassard: Dans le cas de l'aide sociale, avant d'aller en appel, il y a d'abord un mécanisme de révision?

M. Blain: Oui, ils ont les deux. M. Brassard: Ils ont les deux.

M. Blain: Le Tribunal du travail et les commissaires.

M. Brassard: Pardon?

M. Pagé: Le Tribunal du travail peut modifier une décision rendue par le commissaire du travail. On ne prévoit pas plus de demandes que celles qu'on a reçues entre 1985 et 1987.

M. Brassard: Je suis convaincu que vous allez en avoir plus.

M. Garon: M. le Président, je vais vous poser une question. En première instance, dans certaines demandes, même si on est en matière de protection du territoire agricole, iI peut y avoir des questions juridiques complexes importantes, alors que dans d'autres iI s'agit de l'appréciation de questions plus agricoles. Celui qui va affecter quelqu'un à ce rôle, comment sera-t-il capable de déterminer que celui qui va siéger seul, en première Instance, sera un commissaire de formation juridique ou non? SI on est en première Instance et qu'il s'agit de trancher sur des questions de droit et que vous avez un commissaire qui n'a pas de formation juridique... Auparavant, on essayait d'avoir deux commissaires: un de formation juridique et un autre qui n'en avait pas nécessairement, mais qui avait une connaissance agricole plus approfondie, afin de taire un mélange des deux, pour que tout soit bien évalué par la commission. Mais, quand on aura un seul commissaire, comment pourra-ton faire pour faire bien remplir ce rôle? Il y a des commissaires qui ont une formation juridique, d'autres, une formation agricole ou...

Une voix: D'incendie.

M. Garon: Non, dans le développement régional, il y a différents types de commissaires. Alors, pour former une commission qui sera capable de saisir différents aspects, bien qu'on veuille changer la commission en disant: Maintenant, ce sera seulement un commissaire...

Comment le commissaire dont les connaissances sont plus limitées sur tel ou tel aspect va-til pouvoir se prononcer aussi adéquatement que lorsqu'il devait y avoir au moins deux commissaires pour entendre la question, l'un de formation agricole et l'autre de formation juridique?

M. Pagé: M. le Président, l'ensemble de cette question a déjà été traité lors de l'étude de l'article 3 qui a été adopté par cette commission. Mais, quand môme, malgré que la question, en principe, est hors de sujet, par déférence...

M. Garon: Non, non.

M. Pagé: ...pour le député, je peux lui indiquer que cet article a été longuement discuté. On a fait valoir les nombreux motifs à l'appui de la position du gouvernement, à savoir qu'à l'avenir la commission aura seulement un commissaire qui siégera en première Instance. Mais, pour le bénéfice de mon collègue, le député de Lévis, Je vais demander au président de la commission d'ajouter à la réponse que je lui formule.

M. Blain: M. le Président, je pense que j'ai eu antérieurement l'occasion d'exprimer à votre commission comment fonctionne l'affectation des commissaires et comment peut se présenter ce changement à la loi, à l'occasion de cet article-ci et de l'article 3, qui ferait qu'en première instance iI y aurait un seul commissaire qui siégerait plutôt que deux.

Examinons le statut actuel des commissaires. Ils siègent à deux. De deux choses l'une: ou ce sont deux commissaires compétents et vaillants et, effectivement, depuis toujours ils se partagent le travail, l'un étudiant davantage certains dossiers ou la moitié des dossiers à l'étude ce jour-là et l'autre, l'autre moitié, pour se réunir ensuite et faire un consensus sur la décision à rendre. Mais, si, à l'inverse iI y en a seulement un des deux qui est compétent ou vaillant, ou les deux, iI travaille pour deux et l'autre est payé à ne rien faire. Cela s'appelle comme ça.

Dans le cas actuel, comme dans l'avenir et de tout temps à la commission, tous les commissaires, quels qu'ils soient, n'ont pas des compétences professionnelles Identiques. Mais ils ont tous recours et accès à un analyste professionnel pour ce qui est des questions de fait, des questions agronomiques, des questions de sols ou des questions de foresterie; ils ont tous les services professionnels d'analystes, comme support ou assesseurs. Ils ont tous aussi un parrain juridique qui est un juriste de la commission - il y en a seize comme ça - pour leur mâcher la gomme en droit s'iIs ne connaissent rien en droit. Bon.

Malgré ça. il y en a qui n'écoutent ni l'analyste, ni le juriste et qui sont dans tes patates. Ils ne comprennent rien. Mais il y en a d'autres qui n'en ont pas besoin parce qu'ils sont aussi compétents que les professionnels. On ne peut pas changer ça; qu'ils soient un ou deux, cela ne change rien. Alors iI y en a que ça ne dérange pas du tout d'être un ou deux et d'autres que ça dérange beaucoup parce que tout seul, là, ils vont avoir l'air fou, parce qu'avant ils étaient deux et c'est l'autre qui leur couvrait les fesses. Mais ça. c'est la réalité concrète qu'il faut expliquer à tout le monde. C'est juste ça.

Quand le ministre m'a demandé si ça siégeait aussi bien à un qu'à deux, j'ai dit: Oui, il n'y a aucun doute. C'est moi qui lui ai dit. C'est aussi bien à un, dans le fond, sinon, iI y en a un des deux qui travaille et l'autre ne connaît rien ou ne travaille pas. Ou bien, s'ils sont deux bons. iIs partagent le travail en deux et, à midi, ils ont fini. Alors, mettons-en juste un. S'iI a des problèmes techniques ou professionnels, iI a un juriste pour mâcher sa gomme et iI y a un analyste pour traîner ses papiers et lui faire toutes les études qui veut. Alors là, qu'il soit juriste, agronome ou cultivateur, I est capable de siéger pareil. Il s'agit qu'il ait une tête sur les épaules, qu'il prenne une décision, qu'il décide. Mais, là, il ne pourra pas dire que c'est l'autre. Cela va être lui qui va prendre la décision. Alors, je ne peux pas être plus clair que ça.

M. Garon: Vous ne pouvez pas être plus clair que ça. mais je commence à comprendre pourquoi les gens vous trouvaient parfois arrogant quand iIs allaient devant la commission.

M. Pagé: M. le Président.

M. Blain: II faut administrer...

M. Pagé: M. le Président, excusez-moi. Le président a répondu en mon nom et je ne pense pas que quiconque soit légitimé...

Une voix: Mais iI n'est pas obligé de se comporter comme le ministre.

M. Pagé: Tout parlementaire peut avoir son appréciation à l'égard d'un président d'organisme, d'un membre d'organisme ou d'un fonctionnaire de mon ministère, mais Je ne peux accepter - vous comprendrez - qu'un parlementaire puisse s'attaquer ou profite de son statut pour s'attaquer au.

M. Garon: Je laisse les gens évaluer.

M. Pagé: Laissez les gens évaluer et passons à l'article suivant.

M. Garon: J'ai fait un commentaire. J'ai le droit de faire les commentaires que je voudrai. Mais je dois vous dire que je suis surpris des commentaires du président de la commission parce qu'à ce moment-là, comprenez-vous, ça revient à dire: On dépense de l'argent, au fond,

on devrait en nommer seulement un. Une seule personne pourrait s'organiser avec tous les services techniques. Alors que ce n'est pas ça. Les services techniques sont là pour apporter un éclairage...

Une voix: Un support.

M. Garon: Vous me faites penser, M. le ministre, que vous devez être dans une curieuse de situation quand vos fonctionnaires vous conseillent quelque chose et que vous décidez autre chose. Je suppose que c'est parce qu'Us ne vous ont pas assez bien mâché la gomme.

M. Pagé: Pardon?

M. Garon: Ils ne vous ont peut-être pas assez bien mâché la gomme. Quand vous décidez différemment de vos fonctionnaires, c'est peut-être que vous...

M. Pagé: C'est moi qui en prends la responsabilité, c'est moi qui porte la décision et c'est moi qui va être jugé en fin de compte.

M. Garon: C'est ça que je pense aussi. Je pense que, finalement, ceux qui décident ce sont les commissaires, ceux qui sont en fonction. Mais ceux qui leur donnent des avis techniques ou tout ça, parce qu'il y a toutes sortes d'avis dont il faut tenir compte avant de rendre une décision... Quand on rend une décision il faut tenir compte de l'ensemble de l'éclairage qu'on a, avec son jugement. La connaissance technique, c'est une affaire. On peut avoir beaucoup de connaissances techniques et ne pas avoir de jugement. Habituellement, la principale qualité que doivent avoir les juges et ceux qui rendent des jugements - on dit bien "jugements" - c'est d'avoir un bon jugement. Des fois, les diplômes n'en donnent pas. On peut avoir beaucoup de connaissances techniques, mais manquer de jugement. Je pense qu'au niveau d'un organisme les gens qui peuvent avoir un meilleur éclairage-Toute cette question n'est pas si simple. Dans le passé, les agriculteurs ont souvent demandé d'avoir des tribunaux agricoles - pourquoi l'ont-ils demandé? - ou avoir des tribunaux spécialisés en agriculture. Cela a été une grande demande de l'UPA pendant des années. C'était pour avoir des gens qui comprenaient leurs problèmes, ce qui se passait sur une terre. Ce n'est pas facile à imaginer pour quelqu'un qui ne connaît pas ça. Pourquoi? Parce qu'il y avait des jugements qu'ils trouvaient aberrants parce que, malgré tout, la personne n'avait pas pu se faire une idée, selon l'opinion des agriculteurs, de ce qu'ils avaient à trancher. Ils ont souhaité avoir des tribunaux agricoles.

La commission avait réussi à devenir un genre de tribunal agricole, qu'on soit d'accord ou non avec ça. Aujourd'hui, on parle de la question du nombre des appels et le député de Lac-Saint-Jean a dit avec beaucoup de justesse, à mon avis, que même si on dit qu'il n'y a pas d'appréhension le fait qu'on ait changé la nature de la première instance va susciter un grand nombre d'appels. Pensez-vous que l'avocat qui Ira plaider devant le commissaire ne sera pas conscient que celui-ci n'aura qu'à initialer ou signer une opinion qui aura été écrite par d'autres? Il va le sentir, iI sera là, il va plaider. Ceux qui iront plaider devant le commissaire se rendront compte qu'ils ont plaidé telle ou telle chose, mais que dans la décision qui a été rendue iI y a un manque parce que l'éclairage ne sera sans doute pas aussi bon. Il y aura alors une multiplication des appels pour dire: Je pense qu'en première instance la gomme n'a pas été suffisamment mâchée. Surtout si c'est de la gomme balloune, les gens vont dire: II serait mieux de la mâcher un peu plus longtemps parce que le goût est moins prononcé. Il y en a peut-être qui voudront justement revenir à d'autres mâcheurs de gomme en espérant qu'Us la mâchent eux-mêmes, par exemple, celui qui va présider le banc ou qui va être sur le banc.

Remarquez que je n'ai pas posé des questions inutiles. J'ai demandé, et le ministre n'a même pas été capable de me répondre: Qu'est-ce qu'il y aura comme groupe en arrière de tout ça? Comment va se répartir le personnel technique? Comment tout cela va-t-il se répartir pour avoir deux tribunaux, un de première instance et un de deuxième instance? Le président de la commission vient de nous dire, au fond, que le commissaire est assis sur la chaise et qu'iI regarde les gens qui sont là, mais ce sont d'autres qui écrivent tout ça. Il mâche de la gomme. Si on était au temps des Français qu'il y a quelques siècles, on aurait pu apposer le sceau avec une gomme mais, apparemment, ce sont eux qui signeront une décision. Comment cela aura-t-il été mâché si ceux qui mâchent et ceux qui signent ne sont pas les mêmes? (16 h 15)

Quand vous irez en appel, vous voudrez peut-être que celui qui signe soit celui qui mâche. Cela va certainement susciter un certain nombre de problèmes parce qu'il ne faut pas prendre le monde pour des fous. Quand ils iront devant la commission, ils sentiront ou ne sentiront pas que celui qui avait à prendre la décision de commissaire était capable de mâcher. Si on sent qu'il n'a pas mâché la gomme du tout, qu'il n'y a même pas goûté et qu'il a signé une décision, cela va susciter, à mon avis, un accroissement du nombre des appels. C'est pour cela qu'on dit que la jurisprudence va en revenir à être faite sur une base différente et les gens voudront s'essayer davantage. D'autant plus qu'on dit que ce ne seront pas des causes de révision pour cause et qu'à ce moment-là la décision en appel va avoir un caractère plus final. C'est pour cela que je pense que ce qu'a dit le député de Lac-Saint-Jean...

M. le Président, j'aimerais demander au ministre s'iI y a des études qui ont été fartes sur les prévisions du nombre de causes qu'il y aura en appel et du nombre d'affaires qu'il y aura en première instance. Je parle des causes devant les commissaires. Je ne parle pas d'Interjeter appel, de faire un avis ou d'envoyer une déclaration à la commission. Dans une étude des coûts-bénéfices qui a dû être faite - cela a été fait sous le nouveau gouvernement... Sous l'ancien gouvernement, I fallait établir combien on prévoyait que coûterait une loi tant au gouvernement qu'aux contribuables. Alors, le ministre a dû faire une étude, une analyse pour savoir combien il y aurait de causes en première instance et de causes en appel pour évaluer les coûts administratifs du tribunal d'appel et de la commission en première Instance, en plus de prévoir le personnel requis pour les services techniques et tous les services qui sont nécessaires. Est-ce qu'il y a moyen d'avoir une copie des prévisions qui ont été faites par le ministre, par son personnel ou par le personnel de la commission?

M. Pagé: M. le Président, j'ai répondu à la môme question, ou tout au moins à une question analogue, iI y a quelques minutes, posée par le député de Lévis.

M. Garon: ...sur le nombre de causes.

M. Pagé: Je lui al indiqué à ce moment-là que nous travaillons présentement sur le plan d'organisation du tribunal, à savoir combien de personnes exactement devront être embauchées comme personnel de soutien et combien de professionnels, le tout en fonction d'une adoption de la loi qui devrait intervenir d'ici la fin mars tout au moins. Nous prévoyons sensiblement le môme nombre d'appels que lorsqu'un recours en révision pouvait être déposé autant pour des questions de droit que des questions de fait et, entre 1965 et le début de 1967, c'est environ 1000 causes qui ont été déposées en révision. On peut prétendre, à juste titre ou non, compte tenu de l'instauration d'un tribunal d'appel, d'une nouvelle loi, qu'il y ait pendant un certain temps un nombre un peu plus élevé que 1000 causes en appel, et peut-être qu'on peut se tromper aussi La référence, parce que c'étaient des révisions sur des questions de droit et de fait, c'est la situation qui a prévalu entre 1985 et le début de 1987, c'est-à-dire environ 18 mois, sur une base de 1000 causes annuellement.

M. Garon: Quels sont les délais d'appel actuellement? Quels délais prévoit-on pour les appels? Quels sont aussi les délais en première instance et les délais qui sont prévus?

M. Pagé: Je peux vous Indiquer que nous prévoyons une procédure qui, sans être bâclée, sera sous l'égide de l'efficacité, c'est-à-dire moins longue, évidemment, que devant la Cour supérieure et, comme c'était le cas à la commission, quelques mois. A la commission, c'est environ trois mois, douze ou treize semaines au maximum entre le moment où une requête est adressée à la commission et celui où la décision est rendue. C'est pourquoi je vous indiquais tout à l'heure qu'il est très probable qu'un nombre de commissaires seront affectés à temps plein et d'autres à temps partiel. S'il était nécessaire que davantage de membres du tribunal d'appel soient affectés à temps plein, davantage le seront.

M. Garon: Je ne demandais pas à partir du moment de la requête, parce que ce n'est pas cela le principal critère .À partir du moment où le dossier est complet, quel est à l'heure actuelle le délai pour rendre une décision et quel est le délai anticipé autant au niveau de la première instance que de l'appel?

M. Pagé: M. le président de la commission.

M. Blain: En première Instance, je pense que j'ai eu l'occasion de le dire antérieurement aussi, c'est deux mois, deux mois et une semaine. Et même, depuis quatre ou cinq mois, c'est moins de deux mois en première instance, parce qu'on est à jour depuis plus d'un an, pas loin de deux ans maintenant.

En révision, pour toute la région de Québec, c'est-à-dire la moitié du Québec du coté est, c'est deux mois et, demi et dans la région de Montréal, c'est trois mois environ. Ce sont les délais.

M. Garon: Et quel est le délai anticipé?

M. Pagé: On aspire à la même performance.

Le Président (M. Richard): Votre utilisation du temps serait terminée, M. le député de Lévis. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires ou d'autres interrogations sur l'article 21.04? Sinon, est-ce qu'il est adopté?

M. Brassard: Adopté sur division, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Adopté sur division. J'appelle donc l'article 21.05

M. Pagé: A l'article 21.05. il s'agit de procédures d'inscription en appel qui s'inspirent des articles 18 2 et 21.5 de la loi actuelle. 'L'appel doit être déposé au greffe du tribunal d'appel dans les 60 jours de la date de la décision ou de l'ordonnance qui en est l'objet. 'Le tribunal d'appel peut, pour cause, prolonger ce délai pourvu qu'il ne se soit pas écoulé plus de six mois depuis la date de la décision ou de l'ordonnance."

L'article 21.06: "Sur demande du tribunal d'appel, la commission transmet au greffe du tribunal la décision ou l'ordonnance attaquée

ainsi que toute autre pièce pertinente."

À l'article 21.07, j'aurai une modification.

M. Brassard: Qu'est-ce que ça veut dire "pour cause"? Le tribunal d'appel peut, "pour cause". Qu'est-ce que ça signifie?

M. Pagé: C'est une reproduction presque In extenso de ce qui doit normalement être lu dans une loi ou un appel, c'est-à-dire que, si le tribunal d'appel ou la commission d'appel veut accorder un délai additionnel au délai de 60 jours, il doit y avoir un motif à l'appui d'une telle requête et, par conséquent, un motif jugé valable a l'appui de la décision du tribunal ou de la commission d'appel d'autoriser la prolongation du délai de 60 jours. C'est la jurisprudence de la Cour d'appel qui prévaut en semblable matière.

À l'article 18.2 de la loi actuelle, c'est la même chose, le même libellé. On dit: "La commission peut, pour cause, prolonger ce délai pourvu qu'il ne se soit pas écoulé plus de six mois depuis la date de la décision ou de l'ordonnance qui fait l'objet d'une révision."

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): L'article 21.05 est adopté. J'appelle l'article 21.06.

M. Pagé: "Sur demande du tribunal d'appel, la commission transmet au greffe du tribunal la décision ou l'ordonnance attaquée ainsi que toute autre pièce pertinente."

M. Brassard: J'imagine que ça va de soi.

Le Président (M. Richard): L'article 21.06 est adopté. J'appelle l'article 21.07 et nous avons un papillon.

M. Pagé: "L'article 21.07, introduit par l'article 6 du projet de loi. est remplacé par le suivant: "L'appel suspend l'exécution de la décision, sauf dans le cas où le tribunal d'appel permet l'exécution provisoire. "L'appel ne suspend pas l'exécution d'une ordonnance sauf quant aux conclusions de celle-ci qui ordonnent la remise en état. "L'appel d'une ordonnance doit être entendu d'urgence par le tribunal d'appel."

En principe, l'appel suspend l'exécution de la décision de la commission, mais pas l'exécution d'une ordonnance puisque, dans ce dernier cas, la situation serait irréversible. Par exemple, s'il y a eu une ordonnance de cesser de couper du bols dans une érablière, si l'appel suspendait l'ordonnance, la personne pourrait continuer à couper du bois. Le but de cet amendement, c'est strictement pour être conséquent avec nous-mêmes, être plus clair et plus précis.

M. Brassard: C'est-à-dire que l'appel sus- pend l'exécution de la décision.

M. Pagé: Oui. L'appel suspend l'exécution de la décision de la commission, sauf dans le cas où le tribunal d'appel permet l'exécution provisoire. Il peut le permettre.

M. Brassard: Donc, dans le cas d'une ordonnance, cela a des effets concrets.

M. Pagé: C'est ça.

M. Brassard: Des effets concrets, et il serait difficile, à ce moment-là, de revenir en arrière.

M. Pagé: Ce serait irréversible.

M. Brassard: C'est pour ça que, dans le cas d'une ordonnance, l'ordonnance est maintenue.

M. Pagé: Supposons que la commission rend une ordonnance dans le cas d'un propriétaire d'une terre qui est en train de décaper ou d'enlever le soi, la couche végétale. Il y a une ordonnance de la commission et si l'appel suspendait l'ordonnance la personne pourrait continuer...

M. Brassard: La personne pourrait accélérer les travaux et enlever toute la terre végétale.

M. Pagé: C'est ça. C'est pour être plus clair encore une fois.

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): L'amendement à l'article 21.07 est adopté. Est-ce que l'article, tel qu'amendé, est adopté? C'est donc adopté. J'appelle donc l'acticle 21.08.

M. Pagé: À l'article 21.08, c'est un autre libellé qu'on retrouve généralement dans une loi lorsqu'un organisme a à décider, c'est-à-dire qui assure l'application de la règle audi alteram partem reconnue par la charte des droits. Donc, on y lit: "Avant de statuer sur un appel, le tribunal d'appel doit donner aux parties intéressées et à la commission l'occasion de se faire entendre."

M. Brassard: Est-ce que les parties intéressées peuvent être accompagnées ou représentées par des...

M. Pagé: Tout le temps. M. Brassard:... conseillers juridiques? M. Pagé: Oui. C'est dans la charte.

M. Brassard: C'est dans la charte.

Le Président (M. Richard): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Est-ce que ça peut donner aux parties Intéressées suffisamment de temps? C'est parce qu'on peut bien dire que le tribunal peut leur donner l'occasion de le faire, mais si, pour une raison ou une autre, l'une des parties demande un délai pour représenter n'Importe quoi...

M. Pagé: C'était à un article précédent, 60 jours, sauf que, pour cause, le tribunal pourra autoriser une prolongation de délai.

M. Dufour: Cela va.

M. Brassard: Cela va.

Le Président (M. Richard): L'article 21.08 est-il adopté? J'appelle l'article 21.09 et nous avons un papillon.

M. Pagé: On dit, à l'article 21.09: "L'appel doit porter, en tout ou en partie, sur ce qui fait l'objet de la demande initiale, mais ne peut viser ce qui n'était pas alors demandé' On ne peut pas...

M. Brassard: ...ajouter une nouvelle demande à l'appel.

M. Pagé: C'est ça. Il s'agit d'une modification qui veut apporter plus de clarté au texte, à la situation visée au deuxième alinéa de l'article Dans le projet de loi, on lit: 'II est loisible en appel de faire la preuve de tout fait survenu avant la décision ou l'ordonnance dont il est fait appel, qu'il ait ou non été mis en preuve précédemment.' Ici, on précise le deuxième alinéa et on dit: 'La preuve en appel ne peut porter que sur tout fait survenu avant la décision ou l'ordonnance dont il est fait appel, qu'il ait ou non été mis en preuve précédemment* En fait, ce qu'on veut éliminer, c'est toute possibilité qu'on porte à la connaissance du tribunal en appel des faits qui seraient survenus après la décision. C'est une inversion plus directe.

Le Président (M. Richard): L'amendement à l'article 21.09 est-il adopté?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): L'article 21.09, tel qu'amendé, est-il adopté? J'appelle donc l'article 21.010 et nous avons à nouveau un papillon.

M. Pagé: L'objet de l'article 21.010, c'est que le tribunal peut donner raison à la commission ou encore se substituer à celle-ci pour rendre une autre décision. Cette modification a pour but de préciser que le tribunal d'appel, pour rendre une décision, doit se fonder sur les mêmes critères que la commission parce que, comme I y a une distinction.. Comme vous voyez qu'aux articles 62 à 62.2, ce sont des critères en matière d'autorisation, d'exclusion ou d'Inclusion et qu'à l'article 69.07 on fait référence à l'interdiction d'autoriser des exclusions dans un secteur exclusif, c'est pour donner au tribunal d'appel la même juridiction que la commission, les mômes critères et les mômes guides.

M. Brassard: Cela me semble Introduire, je dirais, une cohérence.

M. Pagé: C'est ça, et c'est demandé par l'Union des producteurs agricoles. Trop fort casse pas, dans ce cas.

M. Brassard: Autrement dit, le tribunal d'appel doit s'appuyer sur les mômes assises juridiques dans sa décision que la commission.

M. Pagé: C'est ça.

Le Président (M. Richard): C'est donc adopté?

M. Brassard: C'est ça que cela veut dire.

M. Pagé: C'est plus clair, c'est ça. Cela veut dire que le tribunal d'appel devra s'appuyer sur la môme assise juridique que la commission pour décider en appel. Un exemple concret: La commission n'aura pas à appliquer, n'a pas ta môme Juridiction.. Pour le secteur exclusif, la Commission de protection du territoire agricole ne traitera pas ce territoire de la même façon qu'elle traitera le reste du territoire.

M. Brassard: Le tribunal aussi?

M. Pagé: Le tribunal aussi. C'est ce qu'on vient préciser ici.

Le Président (M. Richard): L'amendement est-il adopté?

M. Brassard: Adopté. (16 h 30)

Le Président (M. Richard): L'article 21.010, tel qu'amendé, est donc adopté. J'appelle l'article 21 .011.

M. Pagé: A l'article 21.011, la décision du tribunal est communiquée à ceux qui peuvent être affectés par celle-ci. Cette disposition s'Inspire de l'article 64 actuel applicable à la communication des décisions de la commission. En fait, on dit qu'une fois que le projet de loi entrera en vigueur le tribunal devra se comporter de la môme façon que la commission pour ceux qui font l'objet d'une décision.

M. Brassard: C'est-à-dire la transmettre aux parties.

M. Pagé: Informer les parties. C'est l'article 64 actuel.

Le Président (M. Richard): Est-ce que c'est adopté?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): Adopté. Est-ce que l'article 6, globalement, tel qu'amendé, est adopté?

M. Brassard: Sur division.

Le Président (M. Richard): Donc, l'article 6 est adopté globalement sur division. J'appelle maintenant l'article 7.

Appel à la Cour du Québec

M. Pagé: L'article 7, M. le Président, fait référence à l'article 21.1. Il s'agit d'une modification de concordance qui tient compte de la création du tribunal d'appel. Ce sont désormais les décisions du tribunal d'appel qui seront elles-même sujettes à un appel devant la Cour provinciale sur des questions de droit ou de compétence. Selon la loi actuelle, "une personne intéressée peut interjeter appel d'une décision finale de la commission devant trois juges de la Cour provinciale sur toute question de droit ou de compétence. L'appel ne peut être interjeté qu'avec la permission d'un juge de la Cour provinciale. Le juge accorde la permission s'il est d'avis qu'il s'agit d'une question qui devrait être examinée en appel.* Donc, ce n'est pas de facto, ce n'est pas de piano. C'est un appel sur des questions de droit ou de compétence. En vertu du droit qui était accordé à une personne qui est Insatisfaite, pour une question de droit ou de compétence, de la décision de la commission, on veut qu'elle puisse faire de môme dans le cas de la décision du tribunal.

M. Brassard: Concordance?

M. Pagé: Tout simplement.

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): L'article 7 est donc adopté. J'appelle l'article 8.

M. Pagé: L'article 8 fait référence à l'article 21.3. C'est la môme chose, une modification de concordance. Celui qui désire en appeler d'une décision du tribunal d'appel devra en donner également un avis au tribunal d'appel en plus d'en donner avis aux parties et à la commission.

M. Brassard: L'article 21.3?

M. Pagé: Oui, l'article 8 qui fait référence à l'article 21.3 de la loi actuelle.

M. Brassard: Apres "avis aux parties et à la commission*, donc au tribunal d'appel.

M. Pagé: C'est cela.

M. Brassard: D'accord.

M. Pagé: Concordance seulement.

M. Brassard: Adopté.

M. Pagé: C'est la même chose à l'article 9 qui fait référence à l'article 21.4. Encore une fois, c'est une modification de concordance qui tient compte de la création du tribunal d'appel. Il s'agit dorénavant d'un appel à la Cour provinciale d'une décision du tribunal d'appel. Alors, on donne au tribunal d'appel les mêmes dispositions qui s'appliquaient antérieurement à la commission.

Le Président (M. Richard): Est-ce que l'article 8 est adopté?

M. Pagé: M. le Président, je constate que le député de Lac-Saint-Jean s'interroge sur le contenu de l'article. Je tiens à lui rappeler que c'est une modification de concordance uniquement qui tient compte de la création du tribunal d'appel comme dans les articles précédents.

Le Président (M. Richard): L'article 8 est donc adopté.

M. Brassard: Cela va.

M. Pagé: C'est l'article 9, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Merci. J'aimerais, c'est une question d'ordre technique, que l'on adopte les 'introduits* qu'on appelle, c'est un beau mot...

Une voix: Les Intitulés.

Le Président (M. Richard): Les intitulés. Par exemple, à l'article 6, Appel au tribunal d'appel, et, juste avant l'article 7, Appel à la Cour du Québec. Ce sont les titres, en fait.

M. Pagé: C'est davantage les titres que les 'introduits*. Ce sont les titres introductifs.

Le Président (M. Richard): Les titres introduits. D'accord.

M. Brassard: D'accord. Cela ne va pas de soi? Non?

Le Président (M. Richard): Non. mais au cas. Apparemment, la force double est toujours préférable. Est-ce que c'est adopté?

M. Brassard: Oui, bien sûr.

Le Président (M. Richard): Merci J'appelle donc l'article 9, qu'on a fait.

M. Pagé: Nous étions à l'article 9, mais l'article 9, M. le Président, je crois, n'est pas adopté, parce que vous avez demandé: Est-ce que l'article 8 est adopté?

Le Président (M. Richard): C'est cela. L'article 8 est adopté.

M. Pagé: Oui, il l'était.

Le Président (M. Richard): J'appelle donc l'article 9, et vous en avez discuté: est-ce qu'il est adopté?

M. Brassard: C'est aussi de la concordance C'est adopté.

M. Pagé: C'est ça, tout simplement.

Le Président (M. Richard): Adopté. J'appelle l'article 10.

M. Pagé: À l'article 10, c'est encore de la concordance, tel que je l'Indiquais. II s'agit d'une modification de concordance qui tient compte du fait qu'il y a appel d'une décision du tribunal d'appel. On remplace les mots 'La commission" par les mots 'Le tribunal d'appel*.

Le Président (M. Richard): Est-ce que c'est adopté?

M. Pagé: À la première ligne du deuxième alinéa, on remplace le mot 'Elle', mis pour "La commission en révision", par le mot "II*.

M. Brassard: Par "II".

Le Président (M. Richard): Cela va?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): Adopté. J'appelle l'article 11. Je tiens à vous féliciter en ce qui concerne le rythme de nos travaux.

M. Pagé: Quand ce sont seulement des amendements de concordance qui ne touchent pas au fond, I n'y a pas de problèmes. L'article 11 fait référence à l'article 21.7 de la loi où on ajoute, après le premier alinéa, le suivant... Comme on le sait, l'article 21.7 de la loi dit que. si elle accueille l'appel, la Cour provinciale ordonne, le cas échéant, à la commission de statuer sur le mérite de l'affaire dont elle est saisie. En rétrospective, une décision de la commission peut faire l'objet d'un appel devant la Cour provinciale où trois juges siègent. C'est décidé par un juge de la Cour provinciale qui autorise un dit appel s'II est bel et bien pour cause. Actuellement, si elle accueille l'appel, la Cour provinciale retourne le dossier à la commission pour que celle-ci rende la décision qui aurait dû être rendue. Essentiellement, dans le régime de droit actuel, lorsque la Cour d'appel est saisie d'une requête, elle décide, elle retourne le dossier à la commission et elle oblige, par sa décision, la commission à rendre la décision quelle-même, la Cour provinciale, croit qui aurait dû être rendue. Dans ce cas-ci, on ajoute, après l'article 21.7: "Dans le cas d'un appel d'une décision du tribunal d'appel relative à une ordonnance de la commission, la Cour du Québec peut confirmer ou annuler cette ordonnance" Elle décide. Dans le cas d'une ordonnance de la commission Intimant l'ordre à quelqu'un de faire ou de ne pas faire quelque chose, la Cour provinciale devrait pouvoir confirmer ou infirmer cette ordonnance sans avoir à retourner le dossier à la commission. Pour une décision qui ne réfère pas à une ordonnance, la cour oblige le tribunal d'appel à rendre telle décision alors que. dans le cas d'une ordonnance, elle l'accepte ou elle la casse, un ou l'autre.

M. Brassard: Reprenez cela.

M. Pagé: II peut y avoir appel d'une décision...

M. Brassard: Du tribunal. M. Pagé: ...du tribunal, d'une décision... M. Brassard: A la Cour du Québec? M. Pagé: Oui, cela, tout le temps.

M. Brassard: C'est réglé, cela. Cela existait déjà.

M. Pagé: Oui. et cet appel peut porter, soit sur...

M. Brassard: Une décision..

M. Pagé:... une décision...

M. Brassard: ..soit sur une ordonnance.

M. Pagé: ...soit sur une ordonnance. Dans le cas d'une décision, lorsque la Cour du Québec en appel du tribunal d'appel siège, dans sa décision, elle avise le tribunal d'appel de décider dans ce sens D'accord? Sauf que, dans le cas d'une ordonnance...

M. Brassard: C'est-à-dire qu'elle infirme ou elle confirme la décision du tribunal d'appel.

M. Pagé: C'est cela, oui. Plus que cela, elle ordonne de statuer sur le mérite de l'affaire dont elle est saisie, à l'article 21.7.

M. Brassard: Oui. c'est cela, l'article 21.7; c'est la loi actuelle.

M. Pagé: Cela n'est pas changé, on ajoute un alinéa.

M. Brassard: Cela n'est pas changé.

M. Pagé: C'est dans le cas d'une ordonnance, dans le cas d'un appel d'une décision...

M. Brassard: D'accord, c'est un alinéa qui s'ajoute.

M. Pagé: C'est cela.

Une voix: II n'y avait rien là-dessus.

M. Pagé: II n'y avait rien là-dessus. Il y avait un trou concernant les ordonnances. Quel peut être le contenu de la décision de la Cour provinciale dans le cas d'une ordonnance? Dans le cas d'une ordonnance, à l'avenir la Cour provinciale devrait pouvoir confirmer ou Infirmer cette ordonnance sans avoir à retourner le dossier à la commission. Alors, elle casse l'ordonnance ou elle la confirme.

M. Brassard: Si vous n'aviez pas cet amendement dans la loi, qu'est-ce qui se produirait?

M. Pagé: Très bonne question que je pose au président de la Commission de protection du territoire agricole et, en même temps, je lui demande: Dans les cas d'ordonnance où, par exemple, la Commission de protection du territoire agricole ordonnait... Généralement, les ordonnances viennent pour des Infractions: une personne enlève la couche végétale ou est en train de couper une érablière. Dans les cas où il y a eu un recours en appel d'une décision de la commission et que ce recours a été inscrit à la Cour provinciale, quelle était la teneur de la décision de la Cour provinciale?

M. Blain: II y en a eu en Cour supérieure. Cela, c'est clair, en Cour supérieure...

M. Pagé: C'est un bref d'évocation?

M. Blain: Oui. Le tribunal peut nous dire si la commission a eu raison ou tort, casse ou maintient, c'est une question de droit. Mais il faut retenir une chose: Comme l'appel en Cour provinciale ne porte que sur les questions de droit - il ne peut pas porter sur le mérite - les trois juges de la Cour provinciale ne décident pas s'ils dézonent ou non à notre place, iIs retournent le dossier pour qu'on recommence la décision. En matière d'ordonnance, I y a quelques procédures en Cour provinciale actuellement. Il y a un trou juridique là. Rien n'est prévu pour donner un pouvoir à la Cour provinciale en matière d'ordonnance, pour lui dire: Est-ce que vous allez constater que la commission a bien ou mal fait son travail en droit? et, en conséquence, lui retourner le dossier pour qu'elle refasse l'ordonnance ou annule elle-même son ordonnance. Imaginons qu'on émet une ordonnance et que trois juges de la Cour provinciale disent: Vous êtes dans les patates, en droit 1 n'y a pas d'infraction là et ce gars a parfaitement raison de faire ce qu'il fait, il a des droits acquis, etc. Est-ce que la Cour provinciale va nous retourner le dossier pour qu'on annule nous-mêmes notre ordonnance? Cela n'a pas de bon sens, c'est nous qui l'avons émise. Alors, il faut prévoir - c'est plus clair - le pouvoir de la cour de disposer de l'ordonnance de façon définitive, parce que c'est sur des questions de droit, de dire: L'ordonnance est bien fondée en droit, donc on la confirme ou elle est mal fondée et on l'annule, mais ne pas retourner le dossier à la commission pour qu'on adjuge de nouveau nous-mêmes sur le même dossier. Mais il n'y a rien de prévu et iI n'y a encore aucune décision de la Cour provinciale siégeant en appel rendue sur une ordonnance. Il y a un ou deux recours, me dit-on, qui sont pendants.

M. Brassard: La disposition de la loi actuelle couvre les décisions...

M. Pagé: Oui. Elle ne couvre pas les ordonnances.

M. Brassard: ...mais ne couvre pas les ordonnances. Est-ce que c'est ça?

Une voix: Oui.

M. Brassard: La disposition de la loi actuelle couvre les décisions.

M. Blain: Actuellement, l'appel en Cour provinciale couvre toute forme de décision de la commission, donc, elle couvre les ordonnances.

M. Brassard: Elle couvre les ordonnances, sauf que, telle qu'elle est libellée, cela veut dire que si elle accueille l'appel la Cour provinciale ordonne, le cas échéant, à la commission de statuer sur le mérite de l'affaire dont elle est saisie.

M. Blain: Pour des juristes habitués à la loi, le texte actuel pourrait être suffisant. Pour bien des gens, même des juristes et, disons-le, même des juges de la Cour provinciale qui sont pour la première fois devant cette loi, I faut qu'ils comprennent que les mots "te cas échéant" couvrent le cas où I n'est pas nécessaire de

retourner le dossier à la commission parce qu'il s'agit d'une ordonnance que le juge, etc Alors, c'est sorcier. C'est encore le genre trop fort casse pas. Il s'agit que ce sort clair, Tout le monde, au deuxième paragraphe, a le doigt dessus et dit: Voici les pouvoirs clairs de la Cour provinciale en matière d'ordonnance. C'est surtout plus clair pour les praticiens qui souvent ne sont pas toujours des juristes et pour les citoyens afin qu'Us puissent lire la loi et savoir ce qu'il y a dedans. Il faut qu'ils comprennent que, dans cet article, la cour... En tout cas, c'est juste ça. Ce n'est pas sorcier, mais c'est plus clair comme ça et c'est mieux. Les mots "1e cas échéant", cela veut dire "si nécessaire", au fond Si c'est une ordonnance, le juge l'annule et bonjour. Mais ce n'est pas clair, ni pour lui, ni pour les citoyens, ni pour les juristes. C'est juste ça. Ce n'est pas un gros problème. C'est plus clair comme ça pour administrer la loi.

Le Président (M. Richard): Est ce que cela va?

M. Brassard: Cela va.

Le Président (M. Richard): L'article 11 est donc adopté. Nous amenons maintenant un nouvel article, l'article 11.1.

M. Pagé: A l'article 11.1, on recommande purement et simplement l'abrogation de l'article 29.1. Cet article n'a jamais été mis en vigueur parce qu'il est difficile, sinon impossible de l'appliquer. On se rappellera que. selon cet article, l'acte d'aliénation devrait contenir une déclaration énonçant l'effet des dispositions pertinentes de la loi. Or, la plupart des articles de la loi ont des effets sur une aliénation. La Chambre des notaires est d'accord pour dire qu'il est à peu près Impossible de prévoir dans l'acte tous les effets de la loi. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien que l'article n'est jamais entré en vigueur.

M. Brassard: ...premièrement.

M. Pagé: Oui. À l'article 29.1, on dit: Tout acte d'aliénation...

M. Brassard: Tout acte d'aliénation d'un lot...

M. Pagé: ...d'un lot...

M. Brassard: ...auquel s'applique...

M. Pagé: ...auquel s'applique la présente loi dans une région agricole désignée doit contenir une déclaration énonçant l'effet des dispositions pertinentes de la présente loi sur l'alinéation et le lotissement de ce lot, sur son utilisation à des fins autres que l'agriculture ainsi que sur l'enlèvement du sol arable, l'utilisation d'une érablière à une autre fin et la coupe des érables" Écoutez, je n'étais pas là en 1978 pour ajouter. On m'Indique que cet article aurait été demandé par la Chambre des notaires en 1985 et que. finalement, M n'est jamais entré en vigueur parce que non applicable. Et là c'est la Chambre des notaires qui nous demande de le retirer en disant. Comment prévoir dans un acte toutes les conséquences possibles de l'application de la loi? Imaginez-vous les écritures dans un acte, pour un lot. si obligation est faite à celui qui authentifie l'acte d'écrire dans l'acte tous les effets prévisibles possibles de l'application de la loi? (16 h 45)

M. Brassant: Mais avant. . Revenons à 1985. M. Blain était là.

M. Pagé: Oui. Pas moi.

M. Brassard: Même l'ancien ministre est Ici aussi. Quels étaient les motifs invoqués par... Vous dites que c'est la Chambre des notaires?

M. Blain: Oui

M. Brassard: Quels étalent les motifs Invoqués pour une disposition comme celle-là? Pourquoi réclamaient-Ils ça? Étaient-Us les seuls à réclamer ça?

M. Blain: Oui. M. le Président...

M. Brassard: Est-ce que d'autres organisations rédamaient ça et pourquoi réclamaient-elles ça?

M. Blain: Comme c'est la coutume, le mandataire, juriste du ministre du temps, avait dans sa serviette les représentations d'à peu près tout le monde, y compris le mémoire de la Chambre des notaires que j'avais consulté avec lui. Le savant représentant de la Chambre des notaires Invoquait quelque chose de positif et d'intéressant. Il disait: En matière de zonage agricole, vos affaires sont compliquées. Si, dans les contrats, les notaires étaient obligés d'écrire toutes les dispositions relativement à la loi, quand nous faisons nos examens de titres, ce serait bien mieux. Et là ce serait Inclus dans chaque contrat. On aurait une espèce de garantie et de sécurité juridique en étudiant les titres. Alors, bizarrement...

M. Brassard: Prenons un exemple, M. Blain.

M. Blain: Une vente. Jos Bleau vend à Arthur Latrémouille un bout de sa terre et il ferait une disposition Intitulée 'déclaration relative à la Loi sur la protection du territoire agricole" Alors, au premier paragraphe, I dirait: Le morceau que je vends est en zone agricole. Deuxièmement, j'ai eu l'autorisation de la

commission. Et, troisièmement, voici tous les effets. Je vais prendre le texte: Tous les effets de la présente aliénation*, etc., et là ça part. Il faudrait qu'il écrive tout ça. Moi, j'appelle ça du folklore juridique parce que le ministre et représentant du ministre, Juriste dans le temps, a dit: La Chambre des notaires demande ça. Ils disent que ça va être une bien bonne affaire pour tous les notaires qui vont faire l'examen des titres. Ils vont le savoir tout de suite en lisant le contrat. Et les notaires ont l'air d'accord pour faire ça. On a pris le texte de la Chambre des notaires. Je le lis comme vous. Je le lis depuis que la loi a été adoptée en 1985. Je ne sais pas trop ce qu'il veut dire. Et, le lendemain de l'adoption de la loi, la même Chambre des notaires a dit: Wo! wo! ne mettez pas ça en vigueur tout de suite. Cela va être compliqué de demander à tous les notaires de faire ça dans leurs contrats. Et cela n'est jamais entré en vigueur.

Aujourd'hui, la Chambre des notaires dit. Cet article-là, c'est assez sorcier, enlevez ça de là. Cela ne doit pas être le même conseiller qui conseille la Chambre des notaires.

M. Brassard: Mais d'un autre côté...

M. Blain: Et nous, nous n'en avons pas besoin.

M. Brassard: ...vous ne trouvez pas...

M. Blain: La commission n'en a pas besoin. On n'ira pas lire tous les contrats au bureau d'enregistrement. Cela n'a aucun bon sens.

M. Brassard: Mais d'un autre côté, ne trouvez-vous pas que ce serait pertinent de retrouver dans un acte enregistré que telle partie de terrain qui est vendue fait partie d'un territoire agricole protégé et que, par conséquent, ça implique des contraintes et des obligations?

M. Pagé: Le problème qu'il y a, c'est le suivant: cela serait peut-être bien intéressant mais ce serait assez exhaustif, merci. La Chambre des notaires elle-même, dans une missive qu'elle me faisait parvenir, évaluait à 118 les mentions de la loi pouvant être contenues dans un texte faisant l'objet de l'article 29.1. Alors en fait, ce que l'article prévoyait - mais il n'a jamais été en vigueur - c'est qu'un notaire devait décrire de façon exhaustive et complète tous les effets de la loi sur le sol, sur la partie de terrain ou de terre qui fait l'objet de la transaction. En fait, c'est en quelque sorte de reprendre la loi et de l'écrire dans le contrat. Alors Imaginez-vous! Je présume que les notaires - je m'appuie seulement sur des présomptions - lorsqu'ils ont pris connaissance de la disposition introduite dans la loi de 1985 et qui pouvait leur être applicable, ont certainement fait valoir le fait que c'était exhaustif, comme on dit chez nous, sur un temps riche. C'était compliqué. C'était long. C'était fastidieux, exorbitant parce que la loi s'applique, de toute façon. Alors, cela n'a jamais été mis en application.

M. Brassard: J'imagine que la Chambre des notaires qui l'a réclamé en 1985 dans un mémoire s'est manifestée d'une certaine façon pour réclamer son abrogation... Est-ce qu'il y a une lettre? Est-ce qu'ils ont écrit?

M. Pagé: M. Cavanagh.

M. Cavanagh (Robert): C'est la dernière position de la Chambre des notaires pour demander l'abolition... Le 13 décembre 1988, ils adressaient à M. Michel Pagé certaines demandes d'amendement. On en a accordé une précédemment et il y en a une autre. La Chambre des notaires vous a soumis, dans une lettre datée de juin 1986, ses inquiétudes concernant cette disposition. C'est une reprise. Elle estime que si cet article était mis en vigueur 1 affecterait grandement la validité des transactions et la transparence des titres de propriété. En effet, I est Impossible d'imaginer une déclaration énonçant l'effet des dispositions pertinentes de la loi sur l'aliénation et le lotissement de ce lot, sur son utilisation à des fins autres que l'agriculture ainsi que sur l'enlèvement du sol arable, l'utilisation d'une érablière à une autre fin et la coupe des érables. Pour qu'une telle déclaration soit conforme, faudra-t-il que le notaire reproduise les 118 dispositions de la loi, fasse état des restrictions non applicables au lot vendu, par exemple, droits acquis, construction d'une résidence, ou encore explique dans l'acte d'aliénation la notion de lotissement, de morcellement, d'enlèvement du soi arable, la coupe des érables et l'utilisation du soi à une fin autre que l'agriculture? Le contenu de cette déclaration est beaucoup trop incertain pour qu'on puisse penser à mettre en vigueur cet article. La Chambre des notaires recommande donc que l'on profite de l'adoption du projet de loi 100 pour abroger purement et simplement l'article. Il sera barbouillé, c'est ma copie.

M. Brassard: Ils ont de bonnes explications pour l'abroger. Je trouve curieux...

M. Pagé: M. le président de la commission pourra vous donner de bons arguments à savoir pourquoi ils le demandaient.

M. Blain: Je me souviens, M. le Président, qu'en 1985 la Chambre des notaires disait qu'un notaire, en faisant une transaction immobilière et en examinant les titres antérieurs, ne pouvait pas, par l'examen des titres antérieurs, assurer à ses clients que toutes les transactions étaient conformes à la Loi sur la protection du territoire

agricole. Alors, I fallait une technique pour régler cette difficulté de recherche de titres. Peut-on forcer maintenant un notaire à faire tout ce ménage-là en faisant un contrat et nous dire noir sur blanc en quoi tout ça est conforme à toute la loi. pour mettre ça clair dans le contrat, et l'autre notaire qui fera l'examen de titres s'assoira là-dessus et I sera assis sur un steak solide? C'était ça, l'objectif, en gros. Ils ne sont pas capables de faire la première job, ce n'est jamais entré en vigueur. Là, ils nous demandent de l'abroger.

Le Président (M. Richard): Qu'en pensez-vous, M. le député de Lac-Saint-Jean?

M. Brassard: J'en pense que je cherche les motifs de leur demande en 1985. Je ne sais pas si c'était pour augmenter leurs tarifs peut-être.

M. Blain: En tout cas, mettre du stock dans le contrat. J'ai encore les documents...

M. Pagé: Chose certaine, ça aurait bien paru mais ça aurait été épais.

M. Brassard: Mais oui.

Le Président (M. Richard): Le nouvel article...

M. Brassard: La lettre date de quand?

M. Cavanagh: Le 13 décembre 1988. C'est une réaction au projet de loi tel que publié.

M. Brassard: C'est après le dépôt.

M. Cavanagh: Ils reprennent une chose de 1986. Paraît-il qu'ils auraient demandé la même chose en 1986.

M. Pagé: ...la même chose en 1986 et on a dit: On va attendre.

M. Brassard: Comment se fait-il que vous ne l'avez pas mis tout de suite dans le projet de loi initial? Est-ce un oubli?

M. Pagé: Non, non. J'hésitais à modifier ce qui n'était pas encore entré en vigueur. On cherchait. Je dois vous confesser que je le lisais mais je ne comprenais pas pourquoi c'était là par le caractère qui m'apparaissait exorbitant de reproduire dans chacun des contrats du Québec toutes les possibilités d'application de la Loi sur la protection du territoire agricole pour un lot qui pouvait représenter une superficie très limitée. Tu vends le bout d'une terre et tu écris pendant quinze pages. Lorsqu'on a travaillé ensemble pour la révision. Me Cavanagh, qui est au contentieux du ministère de l'Agriculture, a actualisé... D'ailleurs, iIs sont Intervenus le 13 décembre pour dire: M. le ministre, n'oubliez pas qu'on avait déjà porté ça à votre attention et on vous demande de radier cet article purement et simplement, de le révoquer.

M. Brassard: À partir du moment où le ministre nous dit que, compte tenu des difficultés d'application. I n'avait en aucune façon l'Intention de le mettre en vigueur, c'est évident qu'iI vaut mieux l'abroger, tel que le demande la Chambre des notaires. Adopté.

Le Président (M. Richard): Le nouvel article 11.1 est adopté. J'appelle donc l'article 12. Nous avons une surprise, un petit papillon.

Région agricole désignée

M. Pagé: A l'article 12, M. le Président, on réfère au droit pour une personne d'aliéner une superficie de 100 hectares ou plus pourvu que la superficie restante soit d'au moins 100 hectares. Cet article, essentiellement, permet la constitution de propriétés foncières d'au moins 100 hectares. 100 hectares, cela représente 240 ou 245 acres. C'est plus que la moyenne des fermes du Québec. La moyenne des fermes du Québec, selon les données qu'on m'indique, serait autour de 190 acres.

Pour nous, cet article vise à simplifier les procédures et faire en sorte que. dès qu'une personne a une superficie de 100 hectares, elle puisse se construire une résidence et, peut-être pas l'extraire de la superficie, mais délimiter une superficie d'un demi-hectare pour s'y construire une résidence. Cet article va donc permettre la constitution de propriétés foncières d'au moins 100 hectares dont la superficie est suffisante pour y pratiquer l'agriculture, selon nous, au sens du paragraphe 8 de l'article 62 qu'on retrouve dans ta loi actuelle.

La loi actuelle dit: 'Une personne ne peut, sans l'autorisation de la commission, effectuer un lotissement dans une région agricole désignée. Toutefois une personne peut, sans l'autorisation de la commission, identifier comme lot distinct par le dépôt d'un plan", etc. En fait, c'est une modification à l'article par l'insertion de l'article 29.1 Le papillon qu'on présente a pour objet d'introduire la notion de contiguïté fictive prévue aux articles 28 et 29 actuels de la loi. à savoir que des terrains peuvent être considérés comme contigus même s'iIs sont séparés par un chemin public, tel que c'est prévu aux articles 28 et 29 de la loi. Une personne pourrait avoir 70 hectares d'un côté de la rue et 30 hectares de l'autre, cela sera considéré comme contigu.

M. Brassard: Est-ce que vous vous appuyez sur des demandes, des revendications?

M. Pagé: C'est une recommandation de la commission.

M. Dufour: Si je comprends bien, avant, les

gens qui pouvaient se bâtir, il fallait qu'ils gardent une espèce de droit qui se perpétuait. Quand venait le temps de se bâtir sur un lot...

M. Pagé: Cela ne change pas ça.

M. Dufour: Cela ne change pas?

M. Pagé: Ce sont des droits acquis.

M. Dufour: Mais vous avez prolongé ce délai.

M. Pagé: C'est fini. Le privilège s'est éteint le 1er juillet 1988.

M. Dufour: Vous ne l'avez pas prolongé.

M. Pagé: C'est-à-dire qu'on l'a prolongé en 1986, si ma mémoire est fidèle...

M. Dufour: Oui.

M. Pagé: ...jusqu'en 1988.

M. Dufour: Cela n'a pas de...

M. Pagé: Cela n'a pas rapport à ça.

M. Dufour: Cela n'a pas d'affaire non plus avec la question du lien de parenté?

M. Pagé: Non.

M. Dufour: C'est complètement en dehors.

M. Pagé: Oui. Lorsqu'on a préparé le projet de loi, on a étudié cette question, on l'a regardée sous différentes coutures, si je puis utiliser le terme. Il n'existait aucune norme de référence pour du lotissement d'une ferme. Il n'existait pas de référence pour la superficie jugée nécessaire pour une entreprise agricole et la notion à laquelle nous référons Ici, qui est de 100 hectares... 100 hectares, c'est une superficie assez grande; c'est au-delà de la moyenne des fermes du Québec. Cependant, exemple concret, il se pourrait qu'une personne soit propriétaire d'une terre de 200 hectares et pourrait y construire deux résidences, sur deux lots de 100... (17 heures)

M. Brassard: En vertu de la loi actuelle?

M. Pagé: L'aliénation. Il faut que l'aliénation soit lue avec ce qui s'en vient.

Une voix: Oui, ça va avec l'autre.

M. Brassard: Mais, l'aliénation, ça veut dire la vente ou la location.

M. Pagé: Oui. L'aliénation constitue un transfert de propriété.

M. Brassard: La vente.

M. Blain: Le morcellement d'une ferme, oui.

M. Brassard: Mais il est évident que ça ne change pas la vocation de la terre, n'est-ce pas?

M. Pagé: Non, non. Du tout.

M. Brassard: Cela demeure toujours voué à des fins d'agriculture.

M. Pagé: Toujours en zone verte. M. le président peut ajouter, avec la permission de la commission.

M. Brassard: Cent hectares en acres, ça fait...?

M. Pagé: Cela fait 245 acres. M. Brassard: Cela fait 245 acres.

M. Pagé: La moyenne des fermes au Québec est de 190 acres.

M. Brassard: Elle est de 190 acres. M. Pagé: J'ai reçu...

M. Brassard: J'aimerais entendre le président. Vous me dites que c'est la commission qui vous a surtout recommandé ça. Quels étaient les motifs?

M. Blain: À plusieurs reprises, pour deux motifs, en fait. On a dû rendre des décisions, tristement, avec des collègues, pas souvent mais de temps à autre, où on devait demander à (a commission l'autorisation de morceler une ferme pour en vendre une partie à un des fils et l'autre partie à l'autre fils. Mais c'est une ferme de 850 acres, 400 acres à l'un et 450 acres à l'autre, avec les terrains, bâtisses, tout. Là, on se dit: On a une loi, qui est la première au Québec dans le fond, qui réglemente la superficie des fermes; c'est une norme de lotissement, c'est une réglementation de lotissement. En cela, le gouvernement avait suivi les recommandations de la commission de la Colombie britannique, des gens de l'Ontario, un peu partout, qui disaient: Contrôlez le lotissement sinon, si vous ne contrôlez pas la grandeur des fermes, vous pourrez arriver avec toutes sortes de petits morceaux, trop petits pour faire de l'agriculture, d'où les articles 28 et 29.

Mais toutes les lois sur le lotissement comprennent une norme minimale autorisée par la loi. Par exemple, depuis 100 ans, dans tout l'Ouest, c'est un quart de section; une section a un mille sur un mille, un quart de section a 160 arpents carrés ou acres, 160 acres. Dans l'Ouest américain, 200 acres; dans plusieurs États américains, 100 acres; dans tout l'Ontario, 100

acres. Alors, quand on parle de normes de lotissement en zone rurale dans le reste de l'Amérique du Nord, iI y a des normes qui disent: Le lotissement minimal est 100 acres. On avait une loi où, pour n'Importe quelle forme de lotissement ou de grandeur de terrain, I (allait venir voir la commission. Ma recommandation a toujours été de dire au ministre: Pourquoi n'écrivons-nous pas de façon positive quelle serait la grandeur minimale d'une ferme raisonnable dans la zone agricole, laquelle ne nécessiterait pas d'autorisation de la commission? Quelqu'un qui aurait actuellement 300 hectares, il peut vendre 125 hectares à un et garder le reste sans venir voir la commission. À l'oeil, comme grandeur de terrain, c'est quand môme assez pour être une entreprise agricole en campagne.

Mais, en cela, nous sommes au-delà des normes en matière de contrôle de terrain rural en Amérique du Nord. En Ontario, la norme est de 100 acres, dans l'Ouest, 160 acres, aux États-Unis, entre 100 et 200 acres. C'est le minimum de propriété. Cela a un effet très positif en Ontario et ailleurs parce qu'ils vont plus loin que nous. Ils se servent de la norme de lotissement, depuis longtemps d'ailleurs, parce qu'ils ne vendent pas de terrains par morceaux par contrat de notaire, eux. Il faut faire modifier son cadastre et obtenir deux certificats cadastraux.

Alors, Ils émettent un permis sur un certificat cadastral. Donc, ça prend 100 acres pour mettre une maison et ils n'ont pas beaucoup de maisons empilées à côté des porcheries parce qu'ils ont de grands terrains. C'est leur façon de contrôler la zone rurale. Ils disent: Ça prend un lot pour avoir une maison. Dans l'Ouest, si vous n'avez pas 160 acres dans la zone rurale, vous n'avez pas de permis de construction et ils n'approuveront pas de subdivision. Mais nous, 80 % des subdivisions, malgré le cadastre officiel, sont faites par des ventes par tenants et aboutissants. Il faut absolument mettre une norme minimale de lotissement dans une loi.

M. Brassard: Cette norme minimale de 100 hectares, est-ce que ça fait l'affaire de l'UPA, de l'organisme qui représente les producteurs agricoles? Considèrent-ils que c'est une superficie viable?

M. Pagé: Oui. D'ailleurs, je pensais ou l'aurais pu avoir des représentations pour diminuer un peu la superficie parce qu'on est bien au-delà de... Exemple, on aurait pu faire référence à la superficie moyenne, à 190 acres. On a préféré faire référence à 100 hectares.

M. Brassard: Concrètement, cela veut dire que quelqu'un qui a une propriété, disons, de 160 acres et qu'il veut en aliéner 60, il lui faut l'autorisation de la commission.

M. Pagé: Oui, comme avant.

M. Brassard: Même s'il veut en aliéner 100, iI lui faut.. Parce qu'il va en rester 60 La partie résiduelle est inférieure à 100, ça lui prend l'autorisation aussi.

M. Pagé: Oui.

M. Brassard: Finalement, tu joues au-delà de 200 hectares.

M. Pagé: 500 acres.

M. Brassard: 500 acres ou 200 hectares. II faut que tu joues au-dessus de ça.

M. Pagé: C'est beaucoup.

Le Président (M. Richard): L'amendement à l'article 12 est-il adopté? L'article 12, tel qu'amendé, est-il adopté? J'appelle donc l'article 13. Nous avons un amendement à l'article 13.

M. Brassard: C'est un amendement de concordance tout simplement, M. le Président. Cela fait référence à l'article 31 qui, introduit par l'article 13 du projet, est modifié. On remplace dans la troisième ligne, les mots "peut être" par le mot "est" L'expression "est éteint" ne laisse plus de place à la discrétion dans l'application de cet article. On se rappellera que l'article 31, c'était le privilège. L'article 31 a permis à des personnes situées en région agricole désignée de construire, avant le 1er Juillet 1988, une résidence sur un lot vacant dont elles étaient propriétaires. L'article 31 ne prévoyait pas, cependant, que ce droit d'usage résidentiel pouvait être éteint si la personne, à la suite de la destruction de la résidence, laissait le terrain sous couverture végétale pendant plus d'une année. Le nouvel alinéa 6 vient assurer une concordance avec les articles 101 et 102 actuels qui concernent les résidences construites avant l'entrée en vigueur de la Loi sur la protection du territoire agricole L'article 102 prévoit que les droits acquis sont éteints par le fait de laisser sous couverture végétale la superficie sur laquelle ils portent. Je m'explique.

Assez curieusement, tel que rédigé, ça voulait dire qu'une personne qui s'était prévalue de son privilège voyait son droit étendu, avait plus de droits qu'une personne qui s'était prévalue d'un droit acquis. En vertu des articles 101 et 102, une personne qui, après la destruction de la maison, par exemple par un Incendie, remettait une couche végétale, après un an, elle perdait son droit acquis, alors que, dans le cas d'une construction en vertu de 31, par un privilège, tel que libellé, si la maison était détruite et que la superficie était laissée sous couverture végétale pendant un an, on pouvait toujours reconstruire. C'est strictement de concordance afin qu'on soit conséquent et qu'on atteigne le véritable objectif qui était recherché. Cela avait été oublié et en 1985 et en 1966.

M. Brassard: En 1986, vous avez apporté des amendements à la loi.

M. Pagé: Oui. On a étendu le privilège jusqu'en 1988. C'est-à-dire que l'avis devait être donné avant le 1er juillet 1987 et la construction devait se faire avant le 1er juillet 1988. Donc, le droit de construire en vertu du privilège contenu à l'article 31 est devenu éteint à partir du 1er juillet 1988.

M. Brassard: Combien se sont prévalus de cette disposition?

M. Pagé: Combien, M. Cardinal?

M. Blain: Un paquet. 1500 au 1er juillet 1985.

M. Brassard: 1500 qui ont donné l'avis prévu, qui ont dit: Nous, on a l'intention d'exercer notre droit. Il y en a 1500?

M. Blain: II y en a eu à peu près 1500, et qui avaient une année supplémentaire pour construire, effectivement. Là, on ne l'a pas, le bilan. Combien y en a-t-il qui se sont construits là-dessus...

M. Brassard: Cela prenait fin au 1er juillet 1989.

M. Blain: Au 1er juillet 1988. M. Brassard: En 1988.

M. Blain: Et ceux-là devaient faire une autre déclaration ensuite, mais une déclaration en vertu de l'article 32 pour se bâtir, cette fois-là, un permis de construction. Là, on recevait un deuxième papier attestant et confirmant leur déclaration d'Intention qu'ils bâtissaient.

M. Brassard: II y en a combien?

M. Blain: Me Cardinal m'a dit une couple de 100 sur les 1500.

M. Brassard: Deux à trois cents qui ont confirmé.

M. Blain: ...qui ont construit.

M. Pagé: ...qui ont effectivement construit.

M. Brassard: Ils ont effectivement construit. Cela veut dire que les 1200 qui restent perdent leur droit.

M. Pagé: Le privilège a été éteint.

M. Brassard: Le privilège est éteint.

M. Cardinal (Serge): Parmi ces 1200 là, certains n'avaient pas le droit auquel ils prétendaient. C'est ce qui explique en partie la différence entre les 1500 et les 200 à 300 déclarations d'exercice.

M. Dufour: Avez-vous eu des représentations de prolongation?

M. Pagé: Pour rouvrir? M. Dufour: Oui.

M. Pagé: J'en al eu quelques-unes de la part de collègues mais la réponse a été négative.

M. Dufour: Mais pas de pression de groupes.

M. Pagé: Non, quelques demandes derrière le fauteuil du président et de la part de députés des deux côtés de la Chambre.

M. Dufour: Je comprends aussi que le fait même vous ayez dit non, cela a pu faire l'affaire de certaines personnes.

Une voix: Incluant le député de Berthier.

M. Houde: Mes commettants me l'ont demandé.

M. Pagé: Et il y a eu la même réponse que les autres.

M. Houde: C'est cela. Mes commettants m'ont demandé de faire mon travail, je l'ai fait et j'ai eu la réponse que je leur al transmise.

M. Dufour: Vous auriez pu faire votre travail en disant non tout de suite plutôt que de faire la commission.

M. Houde: Cela arrive de temps en temps. On dit: Demandez et vous recevrez. Là, j'ai eu un refus.

Le Président (M. Richard): Est-ce que l'amendement à l'article 13 est adopté?

M. Dufour: Un instant. Quelqu'un qui aurait des droits acquis, si quelqu'un s'était bâti et que sa maison est détruite pour une raison ou une autre, est-ce qu'il conserve ses droits même si, pendant un an, il a été sous couverture?

M. Pagé: En vertu des articles 101 et 102, après un an, son droit était perdu alors qu'en vertu de l'article 31 ce n'était pas un droit, c'était un privilège, et il n'était pas perdu, à cause du libellé; ce n'était pas une Intention du législateur.

M. Brassard: C'est un peu ce qu'on prétendait au moment où on a adopté la loi en décem-

bre 1986, si je me souviens bien. En tout cas, on dit: 'Lorsqu'une résidence a été construite conformément aux dispositions du présent article - II s'agit de l'article 31 - le droit d'usage résidentiel conféré est conservé après les délais d'exercice mentionnés précédemment, et n'est pas éteint par la destruction partielle ou totale de la résidence.' Cela fait que, comme le mentionnait le président, si ma mémoire est exacte, c'est un peu ce qu'on prétendait aussi à l'époque, celui qui voit sa résidence détruite acquiert, à cause du libellé de l'article, plus de droits que celui qui n'a pas encore exercé son droit.

M. Pagé: Qui avait un droit.

M. Brassard: C'est presque cela. En y mettant le feu, il avait quasiment un droit perpétuel.

M. Pagé: Avant une ordonnance de démolition.

M. Brassard: Donc, on revient finalement à la règle qui existait avant, c'est-à-dire que tu as une date limite et, au-delà de cette date, le droit est éteint. (17 h 15)

M. Blain: Parce qu'il y avait deux problèmes à couvrir. On en a couvert un et on a oublié l'autre. C'est nous, à la commission, et on ne l'a pas vu. Les municipalités à bon droit nous disaient: Si quelqu'un construit ou a déjà construit en vertu de l'article 31 et passe au feu. * faut qu'il fasse une nouvelle déclaration, avec copie à ta commission, pour qu'on émette un nouveau permis de construction. Comment va-t-il faire cela s'il n'a plus le privilège de l'article 31? C'était dans les semaines qui suivaient l'incendie. Il n'était pas question du problème de prescription. Une fois voté et adopté. il s'est posé quelques cas où on s'est dit: On n'a pas vu cela. Si effectivement cela lui prend quatorze ans pour rebâtir, il n'y a pas de prescription. Cela, c'est éteint mais sur un plus long terme par l'effet de la prescription, mais ce n'est pas cela qu'on voulait couvrir. Plusieurs municipalités nous disaient: Écoutez, iI faut prévoir cela, parce que, nous, on n'a pas les moyens de lui redonner un nouveau permis, il n'y a plus d'article 31, le délai va être expiré. C'est cela qui était couvert. Mais le bout de prescription qui a fait qu'un détenteur de privilèges finissait avec plus de droits que celui qui avait des droits acquis, cela, on ne l'avait pas vu.

M. Brassard: Ce que je me demande aussi, c'est pourquoi, dans le libellé de l'article 13, dans le projet de loi - il y a un amendement - il est Indiqué "peut être éteint"? Pourquoi cette espèce d'aspect discrétionnaire?

M. Pagé: Là, on m'a dit que c'était du purisme en lettres majuscules.

M. Dufour:Le mot "peut" veut dire "doit".

M. Brassard: "Peut être éteint", qui va décider qui peut?

M. Pagé: Qui va l'éteindre? M. Brassard: Bien oui, qui va l'éteindre? M. Pagé: Là, on dit qu'il est éteint.

M. Blain: Oui, c'est mieux.

M. Brassard: Avec l'amendement, cela va être ça?

M. Pagé: Oui

M. Brassard: II est éteint.

M. Pagé: II est éteint.

M. Blain: C'est mieux parce que ce sont les mêmes mots qu'à l'article 102; il n'y a pas de confusion.

M. Brassard: Après un an, il est éteint.

M. Pagé: Le feu aussi, le privilège aussi.

M. Blain: L'article 102 est écrit de même. Si on l'écrit autrement, le monde va penser que cela veut dire autre chose.

M. Brassard: SI on gardait cela comme ça, 'peut être éteint', cela serait la commission qui aurait le pouvoir d'éteindre ou pas? Non?

M. Blain: Non, M. peut s'éteindre tout seul. Il n'est pas nécessairement éteint, mais il pourrait être éteint si on le laisse sous couverture pendant plus d'un an. C'est cela que ça veut dire.

M. Brassard: C'est de l'auto-extinction.

M. Blain: Mais comme ça s'adonne que ce n'est pas écrit comme à l'article 102, quelqu'un va dire: Le législateur a écrit cela autrement qu'à l'article 102 où c'est écrit "est éteint". Donc, cela doit vouloir dire autre chose. La guerre va reprendre devant les tribunaux.

M. Pagé: Donc, cela va prendre une requête.

M. Blain: C'est cela.

M. Pagé: Une personne qui lirait l'article 102, tel que l'article 31 est actuellement rédigé dans le projet de loi. dirait: SI le législateur a choisi deux libellés différents, c'est parce qu'il y a une différence. Donc, pour être éteint, I faut

une requête. Comme il n'y a pas eu de requête, il pourrait glisser encore.

Le Président (M. Richard): Est-ce que l'amendement est adopté, M. le député de Lac-Saint-Jean?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): Est-ce que l'article 13, tel qu'amendé, est adopté?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): J'appelle donc l'article 14. Nous avons un amendement.

M. Pagé: Cela réfère au droit pour une personne de construire une résidence sur un lot ou un ensemble de lots qui totalise au moins 100 hectares. Alors, on modifie l'article 31.1 et on pourra lire l'article ensemble. Cela réfère au droit pour une personne de construire une résidence sur un bloc de 100 hectares. Le calcul de cette superficie peut tenir compte de la notion de continuité effective des articles 28 et 29, mais, en vertu de ces derniers articles, cette personne ne pourra lotir cette superficie de 100 hectares en parcelles ni aliéner ce lot. On y dit: Malgré l'article 26, une personne peut, sans l'autorisation de la commission, construire une seule résidence sur un ou plusieurs lots contlgus ou qui seraient contigus selon les cas prévus aux articles 28 et 29 et qui sont des lots vacants ou sur lesquels des droits ne sont pas reconnus en vertu de la section IX, et dont elle est propriétaire, si la superficie de celle-ci ou de ces lots est ou forme un ensemble d'au moins cent hectares. Elle peut utiliser à cette fin une superficie n'excédant pas un demi-hectare pour la construction de la résidence. "Pour ce faire, elle doit déposer préalablement au greffe de la commission une déclaration accompagnée de son titre de propriété et d'un plan décrivant la superficie sur laquelle la résidence sera construite. "La construction d'une résidence, en vertu du présent article, n'a pas pour effet de soustraire le lot ou la partie de lot sur laquelle elle est construite à l'application des articles 28 à 30. Les articles 28 à 30 réfèrent au lotissement; ils réfèrent aussi à un acte qui peut être annulé, l'aliénation. On sait qu'en vertu de l'article 30 un lotissement ou une aliénation fait en contravention des articles 28 ou 29 est annulable, à moins que ce lotissement ou cette aliénation n'ait été subséquemment autorisé par la commission. Le papillon se limite à introduire la notion de continuité fictive telle qu'elle apparaissait aux articles 28 et 29. À la fin, quand on dit, au troisième paragraphe: "La construction d'une résidence en vertu du présent article n'a pas pour effet de soustraire le lot ou la partie de lot sur laquelle elle est construite à l'application des articles 28 à 30", c'est trop fort casse pas, encore une fois.

M. Brassard: Qu'est-ce qui vous incite à proposer cette disposition? Est-ce qu'il y a une relation avec...

Une voix: L'article 29.1, ouf.

M. Brassard: ...oui, l'article 29.1?

M. Pagé: À l'article 29.1, on permettait le lotissement à 100 hectares, et là...

M. Brassard: 100 hectares.

M. Pagé: ...on permet de construire sur les 100 hectares. On reste en zone agricole. Le demi-hectare n'est pas distrait, il est seulement identifié. Ce sont les mêmes dispositions, sauf qu'on y ajoute. Si, pour le gouvernement, le fait d'avoir 100 hectares de terre, c'est un lot suffisamment grand pour pratiquer l'agriculture au Québec, on doit accompagner à cette reconnaissance par le droit de s'y construire.

M. Brassard: C'est pour cela que je dis que c'est en relation avec l'article 29.1. C'est-à-dire qu'à partir du moment où vous permettez l'aliénation, la vente, sans même l'autorisation de la commission, d'au moins 100 hectares à la condition que ce qui reste excède aussi 100 hectares, la personne qui acquiert 100 hectares ou peut-être plus, si elle a l'intention de pratiquer l'agriculture sur cette terre - c'est sûrement le cas parce qu'on est en zone agricole - s'il n'y a pas de résidence sur sa propriété, a le droit de se construire. L'article 31.1, en quelque sorte, vient compléter l'article 29.1. Mais il faut qu'elle en avise la commission.

M. Pagé: Lorsqu'elle se construit.

M. Brassard: Oui. J'imagine qu'il faut qu'elle obtienne aussi le permis de construction de la municipalité.

M. Pagé: Oui.

M. Dufour: Normalement, un lot, c'est toujours 100 acres. Pourquoi, dans la phraséologie de l'article, jamais vous ne vous référez au lot comme tel? Vous parlez d'un propriétaire de 100 hectares; donc, c'est 245 ou 250 acres, deux lots et demi. À un moment donné, on parle des lots et, ensuite, on tombe aux hectares. Je trouve qu'il y a de quoi se poser des questions. Anciennement, quelqu'un disait: J'ai une terre, j'ai un lot. On se disait: II a 100 acres. Quelqu'un qui avait deux lots, c'était quelqu'un qui avait un peu plus les moyens, il avait une plus grande terre.

M. Pagé: Là, c'est deux et demi.

M. Brassard: On a adopté le système métrique depuis.

M. Dufour: On parle des lots...

M. Pagé: L'agriculture s'est développée. On est passé du ministère de la Colonisation au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. On parle maintenant...

M. Brassard: On est surtout passé du système anglais au système métrique.

M. Dufour: Dans la phraséologie de I' article, on dit 'construire une seule résidence sur un ou plusieurs lots contigus*. Donc, un lot, cela voudrait dire 100 acres. Mais, tout de suite après, on parle de 100 hectares. C'est juste cela. Peut-être qu'un |our on trouvera une façon pour que les mots correspondent à ce qu'on veut dire juste dans un jet. Quelqu'un pourrait dire: J'ai un lot. Non, il faut qu'il lise l'article. Ce n'est pas un lot, c'est 100 hectares.

M. Pagé: C'est expliqué un peu plus loin. Auparavant, dans le temps de l'autosuffisance à la ferme, on pouvait vivre très convenablement sur 100 acres, mais aujourd'hui on vit sur 240 acres.

M. Dufour: Cela dépend de la culture qu'on peut faire. On pourrait, sur 100 acres..

M. Pagé: On vit sur 190 acres C'est dans la moyenne.

M. Brassard: Qu'est-ce qui se passe actuellement?

M. Pagé: Rien de grave.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: Pour l'aliénation, on doit avoir l'autorisation de la commission. Cela n'empêche pas quelqu'un de se construire une résidence, sauf qu'il faut avoir l'autorisation de la commission. Est-ce que c'est cela?

M. Dufour: II faut qu'il ait le O.K., c'est important.

M. Blain: Actuellement, tous les cas d'aliénation qui Impliquent un morcellement, le démembrement d'une ferme contlguô quelle que soit la grandeur - c'était l'autre amendement avant - doivent être devant la commission. Des fois, ils le sont Inutilement, mais ils sont tous devant nous. Cela fait du *red tape'. Mais, en plus, tous les cas de construction de résidence par une personne dont ta principale occupation n'est pas l'agriculture doivent faire l'objet d'une autre demande à la commission. On a eu des demandes, vous savez, où on doit décider si on autorise une maison, avec comme preuve qu'ils vont acheter des boeufs et 50 affaires. Mais iI y a 500 acres de terre ensemble. Et, dans le fond, la réponse traditionnelle depuis sept ou huit ans de la commission, c'est que, s'il y a une maison sur 400 à 500 arpents, cela ne fait pas partie Intégrante d'une entité assez grande pour faire une ferme, parce que ce n'est pas sur la tête du gars que ta décision doit être rendue. SI est docteur aujourd'hui, demain un autre gars peut être dans la maison et cultiver la terre. Et si, à l'Inverse, il est cultivateur, il peut vendre sa maison au docteur. Alors, ce qu'il faut, c'est autoriser la maison comme partie intégrante d'une entité, d'une propriété assez grande pour être zonée agricole. On dit Oui, une maison sur 400 acres, il n'y a rien là. SI ce n'est pas lui qui cultive, c'est un autre et elle fera partie des 400 acres. Mais il fallait autoriser cela parce qu'il n'y avait rien dans la loi là-dessus. À tout coup, quelqu'un qui achetait 500 acres de bonne terre n'avait pas le droit de bâtir.

M. Brassard: Bien, ce n'était pas automatique

M. Blain: Ah, non.

M. Brassard: II pouvait l'obtenir de la commission.

M. Blain: Le seul qui avait le droit, c'est à l'article 40. La personne dont la principale occupation est l'agriculture peut construire une maison sur la terre où elle exerce sa principale occupation. C'est tout II n'y a personne qui pouvait acheter 200 acres et bâtir une maison sauf un cultivateur et un cultivateur qui aurait gagné sa vie là comme cultivateur.

M. Brassard: Vous dites qu'actuellement quelqu'un qui achète avec l'autorisation de la commission 300 hectares, c'est une superficie considérable, en territoire agricole.

M. Blain: Oui, oui, mais il n'a pas le droit de vivre là.

M. Brassard: Mais l'agriculture n'est pas son activité principale.

M. Blain: C'est ça II n'a pas le droit de bâtir et il n'a pas le droit de rester là.

M. Brassard: II n'a pas le droit de se construire.

M. Blain: Non.

M. Cavanagh: Je n'ai pas le droit de me construire en Gaspésie et j'ai trois terres.

M. Dufour: Vous avez des conflits d'Inté-

rêts.

M. Cavanagh: Je ne suis pas en conflit d'intérêts, ma principale activité n'est pas l'agriculture. Justement, c'est la preuve.

M. Dufour: iI y a presque conflit d'intérêts; il est intéressé à ce qu'on adopte cela.

Une voix: Il va avoir plus avec "peut" qu'avec "doit".

M. Cavanagh: Mais je ne l'aurai pas, non plus, parce que je ne fais pas 100 hectares.

M. Brassard: Vous, M. Blain, vous avez combien d'hectares?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blain: Pas du tout. J'ai vendu en décembre 1979, avant le décret des Cantons de l'Est, je pense. Et dans le plan provisoire du ministre, le coin que j'avais dans la montagne à Sutton était dans la zone non agricole. Mais je n'ai pas de terres. Je n'en ai pas du tout.

M. Brassard: Le problème que je vois avez l'article 31.1 et 29.1 aussi, c'est que, au fond, on laisse les personnes juges. Ce sont les personnes impliquées dans la transaction ou dans la volonté de construire qui sont juges, qui ont à se dire: Est-ce que je suis obligée d'aller à la commission ou pas? Et qui répondent elles-mêmes: Non, je n'ai pas...

M. Pagé: Les notaires vont être avisés de ça.

M. Brassard: Ce sont les notaires qui vont les mettre dans le droit chemin?

M. Pagé: D'ailleurs, on prévoit des séances d'information, évidemment, pour les corporations professionnelles qui auront a agir avec ces lois-là. Cela va de soi. Et 100 hectares, ça commence à être une superficie très appréciable.

M. Brassard: Non, mais, en d'autres termes, si quelqu'un, par exemple, veut aliéner 60 hectares...

M. Pagé: il faut qu'il présente une demande.

M. Brassard: En bas de 100, oui, d'accord. Mais il peut dire. Pour 60 hectares, je ne vais pas devant la commission. À ce moment-là, qui le ramène à l'ordre? C'est le notaire au moment de la transaction qui lui dit: Écoutez, monsieur, je regrette, mais cet acte-là ne sera pas valide si vous n'obtenez pas l'autorisation de la commission.

M. Pagé: II y a de fortes chances qu'après que les Informations sur les modifications à la loi auront été transmises, entre autres, aux notaires qui sont les professionnels instrumentants, dans un cas comme celui-là, le notaire indique: Écoutez, excusez-moi, mais en vertu des dispositions de la loi, vu que vous n'avez pas 100 hectares, ça prend un avis, une autorisation de la commission.

M. Brassard: Mais s'il y a une transaction qui se fait sans avis, est-ce que la transaction est invalidée par le fait même?

M. Blain: Non. Elle est annulable au sens de la loi.

M. Brassard: Elle n'est pas Invalidée? M. Pagé: Elle est annulable.

M. Brassard: Elle est annulée par le fait même.

M. Pagé: Annulable.

M. Brassard: Ce n'est pas automatique?

M. Blain: Ce n'est pas de droit absolu. C'était la demande de la Chambre des notaires lors de l'adoption de la première version de la loi, ce qui est une bonne affaire, parce que c'est du droit privé et, théoriquement, ça pourrait être autorisé ultérieurement. L'article 30 a toujours prévu qu'une transaction Immobilière, en contravention aux dispositions de lotissement ou de morcellement, à l'article 28 ou 29 de ta loi, peut être annulée par un juge sur requête. C'est l'article 30. Avec les années, généralement les notaires informent bien les parties et elles font une demande à la commission quand elles font un lotissement ou un morcellement qui serait contrôlé par la loi. Des fois, c'est la commission qui les attrape un peu et je pense même que c'est la plus grande partie des ordonnances que nous avons à faire. Ce sont, d'ailleurs, ces ordonnances-là qui, très généralement, sont volontairement exécutées par les parties qui refont les titres et corrigent leur affaire après coup parce qu'elles ne s'en sont pas aperçues en vendant. Il y en a encore quelques-unes.

Le Président (M. Richard): L'amendement à l'article 14 est-il adopté?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Richard): L'article 14, tel qu'amendé, est donc adopté. J'appelle l'article 15.

M. Pagé: À l'article 15, il s'agit encore une fois, M. le Président, d'une modification de concordance. On se rappellera que, dans la loi actuelle, l'article 18 prévoyant que la commission pouvait réviser ses décisions a été abrogé.

D'autre part, les décisions de la commission sont désormais, comme on le sait, appelables devant le tribunal d'appel. On parie, dans l'article 44 actuel, de l'obligation de la commission de "transmettre au demandeur, par lettre recommandée, sa décision motivée. Elle en avise toute personne intéressée, de même que la communauté et la corporation municipale dans lesquelles est situé le lot faisant l'objet de la demande. Sous réserve de l'article 18, la décision de la commission est finale et sans appel."

II convient donc, pour ces motifs, de supprimer purement et simplement le cinquième alinéa parce que ce n'est pas le cas que la décision de la commission est finale et sans appel.

M. Brassard: Parce qu'il y a un tribunal d'appel.

M. Pagé: C'est ça.

Le Président (M. Richard): L'article 15 est adopté. J'appelle donc l'article 16. Nous avons un papillon.

Zone agricole

M. Pagé: À l'article 59. c'est une demande qui nous a été formulée par le monde municipal. L'article 58 de la loi prévoit qu'une personne qui désire poser un acte pour lequel une autorisation de la commission est requise doit d'abord en faire la demande à la corporation municipale. Dans sa recommandation, ta corporation municipale devra dorénavant Indiquer si la demande est conforme ou non à ses règlements. En vertu du nouvel article 62.2, la commission pourra refuser une demande qui n'est pas conforme aux règlements municipaux.

Le môme principe s'applique aux municipalités régionales de comté. On dit ici qu'il s'agit d'une modification de concordance avec l'article 5 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, lequel prévoit que c'est le document complémentaire et non pas le schéma d'aménagement qui contient les normes minimales à respecter. Les municipalités nous ont dit: Le contenu de la matière à respecter est prévu non pas au schéma d'aménagement, mais au document complémentaire. Donc, pourriez-vous modifier l'article 16? Le paragraphe 2° de l'article 16 du projet de loi est modifié, à la troisième ligne, par le remplacement des mots "schéma d'aménagement" par les mots "document complémentaire".

M. Brassard: Est-ce qu'on pourrait suspendre cet article-là, s'il vous plaît?

Le Président (M. Richard): l'article 16 et l'amendement à l'article 16 sont suspendus. Nous sautons donc, on devient agités...

M. Pagé: Est-ce qu'on peut suspendre pour deux ou trois minutes?

La Présidant (M. Richard): Nous suspendons nos travaux pour trois minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 35)

(Reprise 17 h 42)

Le Président (M. Richard): À l'ordre, s'il vous plaît! Cela me fait grand plaisir de reprendre les travaux de la commission.

On avait fait un saut terrible, on avait sauté par-dessus l'article 16. Nous revenons donc à l'article 17.

M. Pagé: Quel article 16? L'article 16 est adopté''

M. Dufour: Suspendu jusqu'à demain.

La Présidant (M. Richard): Non, l'article 16 est suspendu. Je ne sais pas pourquoi, mais I est suspendu avec l'amendement aussi...

M. Pagé: II est suspendu jusqu'à quand?

Le Président (M. Richard): Je ne le sais pas.

M. Dufour: Demain matin, à la reprise des travaux.

M. Brassard: Oui, à demain, d'accord?

Le Président (M. Richard): La nuit portant conseil, à demain. Nous sautons donc a l'article 17 pour ne pas retarder indûment les travaux de la commission Nous avons à l'article 17 un papillon.

M. Pagé: Alors, l'article 16 est suspendu?

Le Président (M. Richard): L'article 16 est suspendu jusqu'à demain.

M. Pagé: Bon! Je ne comprends pas pourquoi, c'est à la demande des municipalités. On suspend.

Le Président (M. Richard): L'article 17. M. le ministre.

M. Pagé: À l'article 17, on réfère à l'article 62 qui est remplacé par un article 62 maintenant plus exhaustif, plus complet, parce qu'il reprend certaines dispositions qui étaient contenues à l'article 12 et qu'on retrouvait aussi à l'article 65, alinéa 3. On réfère aussi au fait, dans cet article, que la commission ne peut exclure un lot d'un secteur exclusif. Les autorisations accordées par la commission dans un tel secteur sont également soumises à d'autres critères mention-

nés à l'article 69.08. Un exemple d'utilisation de cette disposition, c'est qu'il faudra démontrer qu'il n'y a pas d'espace approprié disponible ailleurs dans la région, etc.

L'amendement qu'on propose ici - d'ailleurs je l'ai Indiqué au député de Lévis plus tôt ce matin, si ma mémoire est fidèle - vise le remplacement du deuxième paragraphe du deuxième alinéa par le suivant... C'est ça, au deuxième alinéa, on disait: "Pour rendre une décision ou émettre un avis ou un permis dans une affaire qui lui est soumise, la commission doit se baser sur: "1° le potentiel agricole du lot et des lots avoisinants."

Le texte actuel dit: "2° l'utilisation actuelle du lot, plus particulièrement le type et l'intensité d'agriculture qui s'y pratique et les possibilités d'utilisation du lot à des fins d'agriculture." Cela pouvait prêter à confusion à un point tel que ça laisse place à une ouverture, à une expression - entre guillemets, sans référence aucune à la politique - très libérale, très ouverte des dispositions contenues dans cet article.

Donc, il y a lieu d'enlever la notion "d'utilisation actuelle du lot, plus particulièrement le type et l'intensité d'agriculture qui s'y pratique" parce que ce critère aurait pu être utilisé à l'inverse pour autoriser des utilisations à des fins autres que l'agriculture dans le cas de terrains à bon potentiel agricole, mais laissés en friche, par exemple, comme on en volt dans la région de Montréal où il y a des sols à très bon potentiel. L'Union des producteurs agricoles nous le demandait dans son article.

À l'avenir, l'article 62, deuxième alinéa, deuxième paragraphe, devrait se lire: "Pour rendre une décision ou émettre un avis ou un permis dans une affaire qui lui est soumise, la commission doit se baser sur les possibilités d'utilisation du lot à des fins d'agriculture." C'est tout.

M. Brassard: M. le Président, avant d'aborder ça paragraphe par paragraphe, parce que je pense qu'on est au coeur de la loi, ça m'apparaît évident, j'aurais quelques questions à poser. La première porte sur la directive du ministre du 23 septembre 1986.

M. Pagé: Ce n'était pas une directive.

M. Brassard: Non? Qu'est-ce que c'était d'abord, un communiqué de presse?

M. Pagé: Je n'ai jamais donné de directive à la Commission de protection du territoire agricole. Jamais. Je vous l'ai dit en deuxième lecture et je vous le répète: Je n'ai jamais donné de directive à la Commission de protection du territoire agricole sauf que...

M. Brassard: C'est sur cette base que la commission a fait...

M. Pagé: J'ai peut-être péché par transparence. J'ai Indiqué publiquement les critères sur lesquels on s'appuierait au Conseil des ministres pour approuver ou modifier un projet de décret.

M. Brassard: Sauf que vous savez très bien, M. le ministre, que la commission s'est basée, s'est fondée, s'est appuyée là-dessus dans le cadre de la négociation avec les MRC. Le communiqué que j'ai ici, le tel bec daté du 23 septembre est très clair. Je vous cite l'annexe I: "Éléments de la politique gouvernementale en matière de révision des zones agricoles. Lors de la révision d'une zone agricole, la CPTA, la Commission de protection du territoire agricole, devra se conformer à la présente compte tenu de son mandat de protection du territoire agricole." Donc, ce n'est pas uniquement pour l'usage du ministre ou du gouvernement en vue de...

M. Pagé: M. le député.

M. Brassard: Cela veut dire que la CPTA devra se conformer à la présente.

M. Pagé: C'est dire qu'on se réserve le droit, nous...

M. Brassard: Les principes de base de la révision de la zone agricole...

M. Pagé: ...si ces objectifs ne sont pas respectés, de les appliquer. Ce n'est pas plus compliqué que ça. Cela se lit tel quel.

M. Brassard: Lors de la préparation, la CPTA doit tenir compte des critères suivants. Si vous n'appelez pas cela une directive à la Commission de protection du territoire agricole, je me demande ce que c'est. C'est évident que... D'ailleurs, en commission parlementaire, quand on a siégé à huis clos, M. le président a reconnu que ce document...

M. Pagé: Je ne le sais pas, je n'y étais pas, mol.

M. Brassard: Eh bien, moi, j'y étais.

M. Pagé: Comme c'était à huis clos, je ne l'ai pas su.

M. Brassard: Ce document lui était d'une grande utilité et, en quelque sorte, il en tenait compte dans sa négociation avec la révision. Donc, n'essayez pas de dire que ce n'est pas une directive à la CPTA.

Je reviens à ma question première: Lorsque la loi sera adoptée, si la loi est adoptée telle qu'amendée par l'amendement que vous proposez à l'article 62, est-ce qu'à ce moment cela signifie que la directive va être annulée et que la commission ne devra, dans ses pourparlers

avec les MRC, dans ses décisions, s'appuyer que sur ta loi et que sur les dispositions de la loi prévues à l'article 627

M. Pagé: On ne peut pas annuler ce qu'on n'a pas promulgué, ce qu'on n'a pas décrété. Le président de la Commission de protection du territoire agricole est ici. Je vous invite à lui demander s'il a reçu des directives du ministre, premièrement. Deuxièmement, si j'avais émis des directives, peut-être qu'elles auraient été suivies. J'ai été placé devant une situation cet été où j'ai imposé un moratoire, vous vous le rappelez. J'ai simplement indiqué, dans ce document du 23 ou du 27 septembre 1986, peu importe - j'ai peut-être commis un péché d'excès de transparence - sur quoi mol, comme ministre, je m'appuierais pour valider, c'est-à-dire signer un projet de décret à la suite d'une entente intervenue entre la CPTA et une MRC ou encore pour le modifier et j'ai indiqué les critères sur lesquels je m'appuierais pour le modifier.

M. Brassard: On joue sur les mots, M. le ministre.

M. Pagé: Écoutez, c'est votre appréciation.

M. Brassard: Parce que vous savez très bien qu'une fois ça connu, c'est évident que le message devient clair et que la Commission de protection du territoire agricole - d'ailleurs, le président l'a en quelque sorte admis - va tenir compte de cette directive, de cet ensemble de principes et de critères dont plusieurs ne se retrouvaient pas dans la loi. Il y en a qui se retrouvaient dans la loi et qui reprenaient des critères de la loi, mais il y en a plusieurs qui étaient tout à fait nouveaux. C'est évident qu'à partir de ce moment vous comprendrez bien que la commission, dans ses négociations avec les MRC, va tenir compte de cette directive.

M. Pagé: Le mandat fut donné à la Commission de protection du territoire agricole de négocier avec chacune des MRC du Québec la révision de la zone agricole et urbaine, ce qui était prévu comme devant arriver après un certain temps d'application de la loi 125, c'est-à-dire au moment de la confection des schémas d'aménagement Pourriez-vous me produire, M. le député - parce que c'est à la suite d'une loi adoptée à la fin de juin 1987 - les critères sur lesquels le ministre devait s'appuyer pour faire ses recommandations ou non au Conseil des ministres? Pouvez-vous me produire ici les critères sur lesquels la commission devait s'appuyer? Il n'y en n'avait pas.

M. Brassard: L'article 12.

M. Pagé: Non. ce n'est pas le même mandat. L'article 12, l'article 62.. Si vous voulez me laisser terminer, s'il vous plaît, on est dans le jus, on est. comme on le dit en droit, dans le "pith and substance'. En vertu des dispositions des articles 12. 62 et 65, lorsque la commission agit, elle agit dans un procossus quasi judiciaire Or. la renégociation de la zone agricole et urbaine, tout comme le mandat qui lui avait été dévolu au moment de l'adoption de la loi en 1978 pour réviser avec chacune des municipalités à ce moment-ià ce qui allait demeurer vert et ce qui allait devenir blanc, ce n'était pas un mandat quasi judiciaire. La commission ne remplit pas un mandat quasi judiciaire à ce moment-là, c'est complètement différent, et j'invite le président à répondre à certains éléments des questions que vous poserez.

M. Brassard: Avant d'inviter le président, je vous signale que l'article 12 de la loi actuelle stipule ce qui suit: 'Pour rendre une décision - là, la commission fonctionne comme tribunal, en quelque sorte - ou émettre un avis dans une affaire qui lui est soumise..." La révision du territoire agricole dans les MRC peut fort bien équivaloir à cela puisque fa décision finale, c'est le Conseil des ministres qui la prend par décret.

M. Pagé: L'avis auquel on réfère à l'article 12, c'est lorsque le gouvernement demande à la commission de lui donner son avis sur une question donnée. Exemple: est-ce qu'on doit dézoner une partie des terres de Mirabel pour autoriser Bell Helicopter? Dans ce cas, normalement, je présume que l'avis a été demandé à la commission. Cet élément de l'article 12 auquel vous référez s'appuie non pas sur un avis à donner au gouvernement pour aller remplir un mandat général de négocier, mais sur un avis formel et limité à l'objet d'une demande ainsi formulée et portant sur un avis à donner par le gouvernement du Québec, ce qui a été le cas, |e pense, pour l'autoroute 55.

M. Brassard: C'est votre interprétation.

M. Pagé: Non, non, ce n'est pas mon Interprétation Le président de la Commission de protection du territoire agricole est ici pour y répondre.

M. Brassard: II n'en reste pas moins que cela aurait été à la commission elle même de définir en s'appuyant sur la loi le cadre dans lequel les négociations allaient se faire et non pas au ministre. Or, on se retrouve avec une directive qui comporte.

M. Pagé: C'était impossible.

M. Brassard: des critères et des principes qu'on ne retrouve pas dans la loi.

M. Pagé: M. le président, pourriez-vous ajouter à cet échange très intéressant que nous

avons, mais qui, pour être complet, Implique votre participation?

M. Blain: Nous avions depuis le début une difficulté particulière. Dans notre rôle de négociateur - appelons cela comme ça - avec, au départ, les 1200 ou 1500 municipalités dans les années quatre-vingt et, ensuite, après l'amendement de 1985, avec les MRC et les municipalités, il n'y a jamais eu de critères là-dessus pour nous dire: Voici quelles sont les règles, quels sont les principes ou les paramètres que vous allez suivre dans votre négociation avec la municipalité de Saint-Profond ou de Saint-N'importe-Quoi. Il y avait, en 1978, une espèce de document général d'information émanant de la DPTA du ministère de l'Agriculture qui, lui, préparait les plans provisoires, qui était le document général d'information donné à tout le monde. Il y avait, d'autre part, une espèce de grand document d'information par une équipe technique, qui a eu une durée de deux ans, d'une trentaine de professionnels des Affaires municipales. C'était une équipe technique pour aider les municipalités à négocier avec la commission. Il y avait des paramètres d'urbanisme élémentaires de la part de l'équipe technique des Affaires municipales et des paramètres essentiels et je dirais aussi un peu élémentaires, à cause des circonstances, de la part du ministère de l'Agriculture en disant: Trouvons un périmètre d'urbanisation, négocions pour une période provisoire de trois à cinq ans. Disons cinq ans.

En général, sur le plan de l'aménagement, du zonage et de tout ce qui est devenu ensuite sous la juridiction de la loi 125, on était comme à l'abc de l'aménagement au Québec. En 1985, la première question qui nous a été posée après l'adoption de la loi par diverses MRC est la suivante: Quels principes allez-vous suivre pour réviser les zones agricoles? On a dit: Écoutez, il n'y a rien d'écrit là-dessus dans la loi. Les premiers à avoir travaillé sur deux choses, le bilan de tout ce qui s'était fait jusqu'en 1985 et ce qu'on devrait donner comme document de travail aux MRC pour qu'elles préparent leur demande, c'est la commission qui l'a fait avec Alain Leduc et d'autres, qui sont tous d'anciens professionnels de la commission. Cela s'est terminé par un document, dont il y a eu trois ou quatre versions, en octobre 1985. Cela a été diffusé à l'UPA et aux MRC. C'était le document générai d'information émanant de la commission sur les documents, les plans, les principes à suivre et les paramètres qu'on pouvait utiliser pour renégocier et réviser les zones agricoles avec la commission.

Parallèlement à cela, il y a une équipe de travail qui était encore dirigée par l'ancien directeur de la DPTA dans le temps de l'ancien ministre, qui, justement, étudiait ce problème parce que le ministre allait avoir à prendre des positions dans le COMPA et à recommander ou non des révisions de zones agricoles au

COMPADR et au Conseil des ministres. Là-dedans, la commission n'est pas quasi judiciaire. On faisait de bonne foi un travail de révision des zones agricoles pour ensuite soumettre le résultat final au ministre et au Conseil des ministres qui, lui, adopterait un décret révisant les zones agricoles.

Les demandes les plus constantes qu'on a eues, c'est de la part des MRC; elles étaient les suivantes: Êtes-vous capables de nous dire où on va? Est-ce qu'on doit réviser pour cinq ans, huit ans ou dix ans? Est-ce qu'on doit négocier uniquement les périmètres d'urbanisation ou d'autres affectations du sol dans tout notre territoire de MRC?

Je vous réfère au document que j'ai déposé à la demande de votre commission à huis clos iI y a quelques mois, qui était le document de Leduc ou de la DST, Direction des services techniques d'octobre 1985, et aux réponses que je vous donnais, en disant: J'ai eu connaissance du texte que le ministre avait donné et qui contenait en annexe l'annexe du travail fait par l'équipe de Jacques Landry qui recommandait au gouvernement ou au ministre de faire une directive générale qui aurait donné aux MRC et à la commission un cadre général en disant: Dans ces paramètres, cela aurait de l'allure; sans cela, on perd notre temps à réviser des zones agricoles si ce n'est pas conforme à la politique gouvernementale. Mais cela ne peut pas être une directive à la commission comme à un organisme quasi judiciaire parce que, là-dedans, on est un agent négociateur. C'est un peu comme définir notre mandat d'une certaine manière. Mais ce que j'ai dit, qui est encore bien plus sur le fond, c'est: Cela tombe bien, Landry, qui était depuis le début à la DPTA, Leduc, qui était là depuis le début avec les mêmes gars qui avaient négocié et qui connaissaient le terrain et les problèmes, en général, arrivaient à peu près aux mêmes constatations, aux mêmes recommandations, aux mêmes paramètres. J'ai dit: Très bien. Le document de Landry, c'est un maudit bon papier parce qu'il ressemblait pas mal à celui qu'on avait...

Le Président (M. Richard): M. Blain, je m'excuse...

M. Blain: Cela nous donnait un cadre pour...

Le Président (M. Richard): Je m'excuse, M. le président de la commission, puisqu'il est 18 heures, est-ce que nous ajournons ou si...

M. Brassard: On va ajourner. On reprendra. M. Pagé: Oui. À quelle heure demain? M. Brassard: À 10 heures. Le Président (M. Richard): Cela va?

M. Pagé: Pas d'objection.

Le Président (M. Richard): Nous ajournons tes travaux et les reprendrons à 10 heures demain matin.

M. Pagé: En indiquant, toutefois, M. le Président, qu'il est possible que je doive m'absenter demain, probablement à partir de 11 h 30

M. Brassard: A partir de...

M. Pagé: 11 h 15 ou 1l h 30 C'est ce pourquoi l'aurais peut-être aimé siéger à 9 h 30 parce qu'on a un Conseil des ministres demain et commencer plus tôt demain après-midi.

Le Président (M. Richard): Est-ce qu'il y aurai consentement de la part des membres de la commission afin de commencer plus tôt demain matin?

M. Pagé: L'idéal, ce serait...

M. Brassard: De 9 h 30 à 11 h 30?

M. Pagé: ...de 9 h 30 à 11 h 15 et on pourrait reprendre vers 14 heures.

M. Brassard: D'accord.

Le Président (M. Richard): Cela va. Alors, demain matin, au même endroit. Nous ajournons à 9 h 30 demain matin.

(Fin de la séance à 18 h 3)

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