Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures deux minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission des affaires sociales se réunit afin de
procéder à l'étude du projet de politique de santé
mentale pour le Québec, tel qu'énoncé dans le rapport du
comité présidé par le Dr Gaston Harnois et rendu public le
30 septembre 1987.
Est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gauthier
(Roberval) est remplacé par M. Jolivet (Laviolette) et M. Polak
(Sainte-Anne) est remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert).
Auditions
Le Président (M. Bélanger): Excellent! Nous avons
quorum. Tout le monde est là. Nous allons donc mettre la rondelle au
jeu. Ce matin, nous recevons en premier lieu les organismes communautaires en
santé mentale de l'Abitibi-Témiscamingue. Je les invite à
prendre place à la table des témoins. Ils sont
représentés par Mme Anne-Marie Desmarais du Club des
handicapés de Val-d'Or inc., par M. Serge Lauzon du Soleil de Maladie et
par M. Bernard Michaud du Regroupement des organismes pour personnes
handicapées de l'Abitibi-Témiscamingue.
Vous connaissez sans doute nos règles de procédure. Vous
avez 20 minutes pour faire votre présentation et les parlementaires ont
40 minutes pour vous interroger sur le contenu de votre mémoire et, si
vous voulez, pour avoir plus de précisions. Donc, 20 minutes au
maximum.
Je vous prierais d'identifier votre porte-parole. Lorsqu'un autre membre
de votre délégation voudra prendre la parole, je lui demande de
bien vouloir se nommer avant de le faire. Pour le Journal des débats,
nous devons avoir l'identification exacte. Je vous prie donc de commencer.
Organismes communautaires en santé mentale de
l'Abitibi-Témiscamingue
Mme Desmarais (Anne-Marie): Comme vous avez dit que
j'étais la déléguée, je dis bonjour à tout
le monde. J'espère que notre équipe sera représentative de
notre milieu. Comme porte-parole, nous avons M. Bernard Michaud du RAPHAT, qui
est l'organisme régional pour les personnes handicapées de
l'Abitibi-Témiscamingue. C'est lui qui aura à définir le
rôle de chaque personne qui participe à cette commission
parlementaire et à vous donner les grandes lignes de ce dont on
parlera.
M. Michaud (Bernard): Dans un premier temps, je vais faire la
présentation des gens qui m'accompagnent. Moi-même, je suis
Bernard Michaud du Regroupement des associations de personnes
handicapées de l'Abitibi-Témiscamingue. On regroupe 22
associations membres locales. Mme Anne-Marie Desmarais est du Club des
handicapés de Val-d'Or, un organisme qui regroupe tous les types de
déficience. M. Serge Lauzon est du groupe Soleil, l'organisme local et
communautaire de la région de l'Abitibi-Témiscamingue dont les
buts et les objectifs se situent au niveau de la santé mentale. Il y a
Mme Louise Boucher du Centre de bénévolat de la Vallée de
l'Or et aussi Mme Josée Bellehumeur qui représente les usagers et
usagères du secteur de Malartic.
Le 10 novembre dernier, dans la région de
l'Abitibi-Témiscamingue, le groupe Soleil de Malartic avait
convoqué les organismes communautaires de la région
concernés par la santé mentale et plus particulièrement
par le rapport Harnois. C'était pour prendre position sur les principaux
éléments qui pouvaient toucher notre population, notre secteur.
Comme je l'ai dit précédemment, le groupe Soleil de
l'Abitibi-Témiscamingue, c'est le principal regroupement, dans notre
région, qui a dans sa charte des préoccupations de santé
mentale. Les organismes de la région sont concernés directement
par l'impact de la désinstitutionnallsation, par l'organisation des
services externes en psychiatrie et, bien sûr, par le bien-être des
usagers et des usagères.
Malartic est un milieu d'environ 4600 habitants qui accueille le centre
hospitalier à vocation psychiatrique et ses bénéficiaires
de la région - on vient à Malartic - ainsi que beaucoup d'autres
personnes du Québec.
Le RAPHAT, dans la région du Témiscamingue, c'est
l'organisme pour la défense et la promotion des droits pour les
personnes handicapées et pour les limitations. En fait, on se place dans
une situation d'identification des besoins des usagers en ce qui concerne les
services psychiatriques et surtout par l'entremise de nos groupes.
Le Club des handicapés de Val-d'Or regroupe 207 personnes dans ce
secteur et le club parraine aussi un regroupement local à charte qui
touche la santé mentale. Les groupes de prévention du suicide
apportent dans notre milieu un soutien aux personnes qui vivent avec des
problématiques suicidaires en les dirigeant vers les ressources
appropriées. Le Centre de bénévolat de la Valiée de
l'Or appuie tous les organismes communautaires du milieu en répondant
à leurs problématiques particulières.
Pour ce qui est du rapport Harnois, on a vu qu'il y avait de bonnes
intentions qui sous-tendaient l'idéologie et l'axe d'orientation. C'est
sûr qu'en ce qui concerne ce rapport il y a
quand même certaines choses qui ne nous sont pas apparues claires.
En fait, les bases du partenariat n'étaient pas définies et on ne
voyait pas le comment. Le mandat de confier aussi aux CRSSS, dans ce sens, nous
a amenés à nous poser beaucoup de questions.
II y a certains thèmes qu'on a considérés et qui
avalent quand même été oubliés dans le rapport,
c'est-à-dire lorsqu'on parle de l'intégration au marché du
travail, lorsque les personnes font le choix d un retour sur le marché
du travail ou d'une insertion au marché du travail. En fait, ce choix
doit être fait dans le respect des capacités et favorisé au
même titre que la possibilité d'avoir accès à des
logements convenables ou à des conditions de vie décentes.
On se questionne aussi sérieusement sur les problématiques
de systèmes de soins et de services en santé mentale. On nous
laisse percevoir que la reconnaissance est faite strictement en regard du
pouvoir médical du réseau et que les interventions sont
axées seulement sur le traitement. Là, on peut parler des
attitudes entre les intervenants et les usagers, des attitudes entre les
usagers et la population en ce qui concerne les traitements médicaux et
la médication.
Lorsqu'on parle de l'autonomie d'un groupe pour assurer son
équilibre et son plein sens, ce qu'on voit dans le domaine de la
santé mentale, c'est que le ministère puisse assurer quand
même l'émergence de nouvelles ressources alternatives
communautaires dans les principales villes où il y a un noyau de
personnes aux prises avec des problèmes émotionnels et qui n'ont
pas d'autre choix que de passer par le réseau.
Le rôle des ressources alternatives est de déterminer ce
rôle dans l'application de la politique, de reconnaître aussi
légalement le rôle de ces ressources alternatives, ce qui Implique
aussi que l'on prévoit les moyens et les outils nécessaires
d'intervention qui puissent garantir l'autonomie complète de ces
groupes.
Le partenariat, en fait, pour nous, ce serait définir des
règles claires et uniformes et pour toute la province, pour permettre
aux ressources de participer au développement des services en
santé mentale dans les municipalités et pour établir un
équilibre entre les besoins de la population, des usagers, des
organismes communautaires et des institutions en place.
Partenariat à part entière. La présente politique
détermine clairement les responsabilités de l'État dans le
partenariat. II faudrait que le rôle de l'État soit clair en ce
sens-là et l'organisation des services faite selon les besoins de la
communauté en tenant compte des disparités existantes et que les
ressources alternatives, qu'on considère très importantes, soient
associées à part entière à l'organisation des
services On a suggéré aussi un modèle pour favoriser la
promotion de la santé mentale dans une municipalité. On a
pensé à un comité multipartite composé de
représentants des ressources alterna- tives, de comités de
citoyens représentant la population, les commerçants, le CLSC, le
CSS, les institutions et services connexes et les usagers et
usagères.
Que le financement soit assuré par le ministère
lui-même. Le mandat serait d'évaluer les besoins identifiés
par chacun des représentants, de trouver des solutions, de fixer les
priorités et de s'assurer de la disponibilité de la gamme des
services prévus par la politique.
Enfin, les recommandations qui ressortiraient seraient acheminées
aux CRSSS. Un rapport serait envoyé au ministère pour qu'il
veille à ce que les CRSSS répondent aux demandes du milieu.
Attendu que tous les groupes communautaires s'adressent à une
même clientèle et qu'ils sont égaux dans leur action, on
recommande qu'ils soient considérés par le ministère et
traités de manière uniforme, que les enveloppes
budgétaires soient proportionnées aux services offerts, que la
barrière entre les ressources intermédiaires, alternatives et
communautaires soit franche et clairement définie, que le
ministère s'assure qu'il n'y ait aucune ingérence dans la gestion
de ces groupes et leurs programmes.
On dit aussi qu'en Abitibi-Témiscamingue la répartition
des services psychologiques et des services psychiatriques n'est pas uniforme.
On recommande qu'il y ait équité dans la répartition de
ces effectifs et ce, dans tous les secteurs de la région. On met aussi
en doute que la présence des nouveaux psychiatres ait
amélioré la qualité des soins et qu'il y ait plutôt
répartition égale de ceux-ci dans la région.
C'est une présentation générale du mémoire
qui a été déposé et on serait prêts à
répondre à vos questions.
Le Président (M. Baril): Merci beaucoup, M. Michaud. Mme
la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M le Président Je veux remercier
les porte-parole des organismes communautaires en santé mentale de la
région de l'Abitibi-Témiscamlgue. Je vais passer
immédiatement aux questions sans résumer d'abord votre
mémoire et les problèmes principaux que vous
énumérez. Une chose me frappe, c'est ce qui m'apparait comme
étant - c'est peut-être fondé, remarquez bien - vos
appréhensions - Je vais appeler cela vos appréhensions -
vis-à-vis du rôle que le Conseil régional de santé
et des services sociaux peut jouer.
Une des recommandations du rapport Harnois, c'est justement de redonner
au conseil régional des responsabilités de planification
régionale et sous-régionale en santé mentale. Je dois vous
dire qu'à cet égard nous avons reçu ici les
représentants de la région de l'Outaouais qui, par ce
truchement-là ou par ce mécanisme-là, ont réussi -
enfin, il faudra évaluer les résultats un peu plus tard - mais il
semble, en tout cas, dans un premier temps, qu'ils aient
réussi à planifier des approches non seulement
régionalement, mais aussi sous-régionalement, et à mettre
en place des ressources qui semblent satisfaire les besoins des personnes qui
ont des problèmes de santé mentale.
Ce qui m'a le plus frappé, c'est que cela m'est apparu comme
probablement la seule région du Québec - en tout cas c'est la
seule ou on a pu le constater - ou celui qui a un problème de
santé mentale aigu peut avoir accès à un service ou
à quelqu'un d'autre 24 heures sur 24.
En tout cas, tout ceci pour vous dire que la planification semble
fonctionner au niveau régional et cela ne semble pas être le cas
en Abitibi. On se demande même. en dépit de vos recommandations ou
vous dites. Écoutez, il faudrait des modifications d'attitudes il
faudrait que les rôles soient répartis autrement, etc., sans cela,
il n'y a pas de possibilité.
Mais je sens que c'est même plus profond que cela. J'ai
l'impression que ce que vous dites demeurerait des voeux pieux et que nous
pourrions dire, dans ce sens-là, compte tenu de ce qui semble être
une réelle brisure entre les organismes communautaires et le conseil
régional de la santé. C'est en ce sens, je pense, que vous dites
- je ne voudrais pas trop simplifier - qu'il ne faut pas donner rien de plus au
CRSSS, au contraire, il faut qu'on ait localement des comités qui soient
composés d'un représentant de la municipalité, dites-vous,
de groupes d'usagers, du CLSC, etc. Mais partout, le conseil régional
est exclu. Est-ce une situation absolument définitive ou qu'est-ce qui a
amené ce climat?
M. Michaud: En fait, si on regarde la structure du réseau,
dans le rapport, il est sûr qu'on voyait un rôle de planification
et de coordination pour le CRSSS. On voyait aussi qu'il y avait approbation de
ce suivi par le ministère. Mais dans la pratique, si on regarde le
nombre d'organismes dans une région qui peut avoir pour objet la
santé mentale dans sa charte, on voit que cela permet quand même
un très grand éventail au niveau du CRSSS. Si on parle de
I'organisation du service, on planifie, on coordonne, on peut aller en
consultation avec notre milieu et on peut voir aussi plusieurs organismes qui
sont issus du même réseau et qui se situent entre les deux.
Quand on parle de la consultation, vous étiez assis à la
table dans l'organisation de vos services, oui, mais comment? Quels groupes
seront assis également lorsqu'il y a peut-être de 22 à 30
groupes dans une région? Lequel de ces groupes ira s'asseoir là?
Est-ce le groupe qui aura la philosophie ou la ligne de pensée de
l'organisation des services? Si on pense réseau, si on pense
traitements, interventions ou institution, la façon pour les ressources
alternatives de se faire entendre là-dessus et de pouvoir participer
d'une façon bien définie - en principe, on irait même
jusqu'à dire de pouvoir participer à la décision - la
mécanique n'est pas apparente. Ce qui permet de donner toute la latitude
au CRSSS de coordonner, de planifier et d'associer qui il voudra bien. Ainsi,
on dira Vous participiez à cela.
Donc peut-on dire que l'organisation des services est vraiment issue du
milieu? Peut-on dire que les groupes sont vraiment les ressources alternatives
qui proviennent de la base, dans ce qu'on volt comme développement. II y
aurait peut-être aussi M Serge Lauzon qui pourrait apporter quelques
compléments de réponse. (10 h 15)
M. Lauzon (Serge): On dit tout le temps que le passé est
garant de l'avenir. II est certain qu'en Abitibi-Témiscamingue, ou des
ressources existent en santé mentale, le chemin n'a jamais
été celui du CRSSS, il a toujours été. Comment
pourrais-je dire? Quand le CRSSS, en 1963, a présenté un projet
pilote pour voir ce qui pourrait être fait de mieux en santé
mentale, un peu comme le rapport Harnois. on disait qu'il fallait consulter
tous les partenaires, etc, mais il n'y a jamais eu de consultation directe des
usagers et usagères ni de la population en général non
plus. Finalement, les choses sont toutes préparées par les gens
en place. II ne faut pas se le cacher, ce sont pratiquement tous des d g
d'hôpitaux qui se retrouvent dans les conseils d'administration des
CRSSS, etc. Donc, tout est préparé selon la philosophie
institutionnelle.
S'ils mettent leur brique sur la table et disent. On part avec cela pour
discuter, je verrais mal comment les gens qui n'auraient pas participé
dès le départ à un processus pour trouver une solution ou
un consensus régional pourraient arriver du jour au lendemain et
présenter une contre-argumentation ou trouver autre chose. Ce serait une
tâche très difficile. Finalement, où est la place des
usagers et usagères là-dedans? Où est la place de la
population, en pratique, là-dedans? Si on regarde dans le passé
et si on regarde même ce qui est actuellement proposé, leur place
n'est pas là. Le désir est là, mais la place comme telle
n'y est pas.
Quant aux ressources alternatives, je sais que, par exemple, notre
ressource était reconnue comme un service essentiel. Tout le monde
reconnaissait cela de A à Z, même ici, à Québec. Le
ministère de la Santé et des Services sociaux, l'hôpital,
etc, enfin, tout le monde le reconnaissait Pourtant, quand on fait des demandes
au CRSSS, il n'y a rien qui se passe. D'autres personnes - par exemple, il y a
un troisième congrès qui va se tenir dans notre coin - arrivent
de but en blanc, ils n'ont pas besoin de planifier quoi que ce soit, ils ont
tout de suite l'argent, tandis que nous, on est toujours laissés pour
compte, il faut toujours passer par la députation ou par en
arrière afin de réussir à avoir quelque chose. On n'a
jamais de garantie de quoi que ce soit, etc, alors que tout le monde est
unanime à dire qu'on est essentiels.
De plus, la vision des ressources alternatives, je crois que souvent
elle est très mai comprise, lis voient l'alternatif comme de
l'occupationnel, où on va placer des usagers issus du
phénomène de la désinstitutionnalisation; on va ies mettre
dans un coin pour qu'ils ne dérangent pas dans les cliniques externes,
dans les restaurants ou dans des endroits comme ceux-là. On fait
seulement les parquer là. On ne reconnaît pas que les ressources
alternatives puissent avoir une intervention qui va faciliter la
réinsertion sociale de ces gens sortis du réseau, pas
nécessairement avec un soutien adéquat. À ce
moment-là, le seul fait de ne pas avoir cette vision des ressources
alternatives fait que finalement on est un peu laissés pour compte et
qu'on a une tâche très secondaire; on est plus
considérés comme des - excusez l'expression - femmes de
ménage que comme des gens qui peuvent réellement avoir une
idéologie d'intervention et qui peuvent donner réellement un
service adéquat.
L'alternatif, ce qu'on entend par là, ce n'est pas
nécessairement offrir une alternative à des plans d'intervention,
mais beaucoup plus offrir des services que le réseau n'offre pas. Il y a
beaucoup de services que le réseau n'offre pas et qu'une ressource
alternative peut facilement offrir, et même à un coût
moindre. Si on ne fait que regarder le coût d'un psychiatre, son salaire,
on fait marcher avec cela une ressource alternative pendant un an. C'est
beaucoup plus naturel, cela rentre dans le désir que le gouvernement a,
celui de la désinstitutionnalisation. Le gouvernement désire
depuis nombre d'années que la population s'implique, que les usagers et
les usagères aussi s'impliquent dans leur processus de
réinsertion, qu'ils prennent ia part de responsabilités qui leur
revient, sauf que nulle part ils ne peuvent y participer, finalement.
C'est dans ce sens-là qu'on dit: Dans nos pratiques alternatives,
étant donné notre marginalité ou étant donné
qu'on est basés aussi sur une philosophie d'entraide, une philosophie de
bénévolat, cela laisse beaucoup de place à une implication
de la population. A ce moment-là, on considère qu'on peut donner
un service très adéquat et que le ministère de la
Santé et des Services sociaux a les outils et les expertises
nécessaires pour vérifier si le travail qu'on fait répond
à ses cadres et s'il a une certaine efficacité, etc. On ne veut
pas être en cachette, on ne veut pas être cloisonnés ni
marcher en dessous de la table...
Mme Lavoie-Roux: Je vous interromps... M. Lauzon: Oui.
Mme Lavoie-Roux:... parce que vous allez prendre mes 20
minutes.
M. Lauzon: D'accord. Je pourrais en dire beaucoup plus
là-dessus, mais en tout cas pour résumer, on n'a rien qui peut
nous laisser croire, de façon tangible, que cela nous laisserait le
droit même de penser.
Mme Lavoie-Roux: Ce que je crois comprendre, c'est une question
de représentation dans les décisions du CRSSS. SI les usagers,
les représentants des organismes bénévoles, communautaires
ou alternatifs, quoique je ne veuille pas mettre les trois dans le même
panier nécessairement, avaient une meilleure représentation,
est-ce que vous pensez qu'on pourrait évoluer vers une meilleure
collaboration entre chacun de ces éléments, sans que les uns
soient pénalisés par rapport aux autres ou que les uns soient
uniquement favorisés par rapport aux autres? Est-ce que s'il y avait une
meilleure représentation... D'ailleurs, il y en a plusieurs qui sont
venus nous demander, en particulier de la commission administrative de la
psychiatrie - il me reste deux minutes, je suppose... Le Président
(M. Baril): Non, madame...
Mme Lavoie-Roux: Quand je les vois écrire leur petit
papier! Ils sont venus nous demander Est-ce que vous pensez quand même
qu'on pourrait essayer de travailler? Sans cela, on va continuer chacun dans
nos directions. C'est exact que le rapport Harnois dit: Si on continue chacun
dans nos chemins parallèles, le bénéficiaire se trouve
toujours, à un moment donné, entre deux chaises ou parfois en
contradiction. Est-ce qu'une meilleure représentation pourrait
être un élément qui aiderait à résoudre le
problème, pas demain matin, si vous voulez, mais...
M. Lauzon: Disons qu'il faut être conscients que l'Abitibi
en soi, c'est quasiment un pays et à ce moment-là chaque ville a
pratiquement ses couleurs. Il faut rester en Abitibl pour comprendre cela.
Nous, ce que nous voyons...
Mme Lavoie-Roux: On voit un peu cela ici aussi.
M. Lauzon: On n'est pas contre l'idée de s'asseoir
ensemble. Au contraire, dans les propositions qu'on fait, on assoit le bon
monde à la bonne place. Où est-ce que la population peut
réellement le plus s'impliquer, si ce n'est pas dans sa propre ville?
Dans les structures que nous proposons, on demande justement que les gens qui
sont dans leur propre milieu aux prises avec leurs propres problèmes
particuliers s'asseoient ensemble et qu'ensemble ils trouvent des solutions.
Nous avons déjà expérimenté cette formule dans le
secteur de Maladie où l'hôpital, des représentants du CRSSS
et du CLSC, des gens d'affaires, la population, les usagers et les
usagères se sont assis ensemble autour d'une table. Là, chacun
peut parler de ses problèmes et tout le monde essaie de trouver ce qui
est le
mieux Cela ne va pas dans le sens contraire de ce que vous proposez,
sauf qu'au lieu dêtre noyés dans un régionalisme, on dit.
Pourquoi chacun dans son petit coin avec ses affaires à lui ne s'arrange
pas avec les autres? Ce serait beaucoup plus efficace.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas dans l'esprit des recommandations
que tout soit épelé par le CRSSS et que les gens localement, que
ce soit à Malartic, à Rouyn-Noranda, à Val-d'Or ou
à Amos, soient tenus d'exécuter un dessin très
précis qui aurait été pensé par le CRSSS. Au fond,
le CRSSS avec les différentes sous-régions leur laisse
suffisamment de latitude, mais d'un autre côté il faut quand
même qu'il y ait un certain cadre de référence.
Sur cela je m'arrête. Je voulais simplement que vous m'expliquiez
une chose. Dans votre introduction, vous dites. "Nous avons le sentiment
très net d'un recul des actions concrètes amorcées aux
années soixante" II est bien sûr que ce qui a été
amorcé au début des années soixante a été
une désinstitutionnalisation un peu à la va-comme-je-te-pousse.
S'il faut qu'on retourne même devant cela, Je voudrais que vous me le
justifiiez. J'ai l'impression que, fondamentalement, le partenariat vous fait
peur, parce que vous avez peur d'abord d'être
récupérés - vous l'avez écrit en noir et blanc -
vous avez peur que, finalement, vous ayez encore moins d'autonomie que la
petite autonomie ou les ressources que vous pouvez avoir. J'aimerais que vous
m'expliquiez comment vous pouvez dire que le rapport Harnois est un recul par
rapport aux actions des années soixante.
Mme Desmarais: C'est peut-être un grand mot de dire que
c'est un recul. Tout de même, nous entrevoyons mal nos chances
d'avancement. Si on voit tous les comités d'étude qu'il y a eu
depuis X années, on est toujours au même point, on n'avance pas
dans tout ce qui est pour personnes handicapées, affaires sociales, CLSC
ou peu importe. Si je vous dis que, pour les personnes handicapées
à Val-d'Or, le CLSC n'est pas accessible, vous pouvez voir une marge.
Nous avons commencé à travailler, cela fait environ quinze ans
que nous avons demandé l'accessibilité et nous ne l'avons pas
encore dans un nouveau service. C'est peut-être cela qui nous fait dire
des mots comme recul. Maintenant, nous travaillons pour la
désinstitutionnalisation. Autrefois, en 1960, nous travaillions pour
contester et pour faire entrer des gens en institution, mais on est
arrivés sur un chapiteau, on a reviré de bord, mais qu'est-ce
qu'on a fait de travers? On défait ce que nous avons commencé
dans ces années.
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas le temps de répondre à
cela, parce qu'il y a un collègue qui veut intervenir avant Je vais le
laisser faire Merci, madame.
Le Président (M. Baril): M le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M le Président. J'ai
écouté avec beaucoup d'attention le résumé de votre
mémoire. Vous l'avez fait rapidement compte tenu du temps qui est
disponible. Lorsqu'on regarde ta trame complète de votre mémoire,
on ne peut pas dire que nous sommes en désaccord profond avec vous. Au
contraire. Même si vous êtes d'Abitibi-Témiscamingue, on
ressent des problèmes à peu près équivalents dans
d'autres régions. Quand on regarde justement la façon dont le
CRSSS est formé, avec souvent la défense pour les membres du
conseil d'administration du CRSSS de protéger un peu leurs institutions,
dans ce contexte, ce qu'on ressent probablement - je vous pose la question -
vous l'avez ressenti de la même façon, le CRSSS dit. On est bien
d'accord avec tout cela, on sent que c'est bon, votre affaire, mais poussez
à Québec parce que, à Québec, ils vont vous
débloquer de I'argent et vous allez l'avoir. Finalement, ce qu'on
ressent en cours de route - je l'ai vécu chez moi - c'est que le CRSSS
dit. C'est une très bonne idée, cela va très bien, mais
nous n'avons pas d'argent pour vous, c'est Québec qui va
débloquer cela. Alors, vous faites des pressions sur Québec qui
dit. Oui, mais le CRSSS a de l'argent pour telle et telle chose. (10 h 30)
Finalement, vous vous sentez un peu coincés entre le CRSSS, le
conseil des CSS, les CSS régionaux qui disent à peu près
la même chose et Québec qui dit. On n'a pas d'enveloppe
protégée par le CRSSS. En conséquence, vous faites des
pressions sur votre député qui débloque de l'argent
à Québec et finalement le CRSSS est obligé d'embarquer,
avec un budget qui vous est donné annuellement et qui ne vous permet pas
d'être sûrs d'année en année. II y a les demandes
qu'on peut faire aux groupes communautaires. II y a des demandes qu'on peut
faire au CRSSS lui-même. Et finalement vous vous retrouvez d'année
en année. C'est ce qu'on disait, il n'y a pas de sûreté,
dans un programme de deux ans, de trois ans, surtout de trois ans, qui
permettrait de vous assurer une viabilité et de faire le partenariat que
vous voulez, vous aussi. Je suis sûr que vous n'êtes pas contre ce
phénomène, dans la mesure où vous sentez que vous avez une
voix et que, de temps en temps, vous avez une écoute tellement attentive
que c'est votre idée qui passe. Mais si vous avez toujours l'impression
qu'on récupère votre idée et que finalement on ne la met
pas en pratique autrement que par les institutions, vous vous sentez un peu mis
de côté Est-ce que je me trompe quand je présente les
choses comme cela?
M. Michaud: Non Je pense que c'est un peu le sens auquel on
revient. Si le CRSSS choisit ses joueurs pour s'asseoir à la table pour
la
consultation ou l'organisation des services et si on donne ce pouvoir au
niveau régional, il est sûr qu'on aura une équipe sans
problème. Donc, dans le milieu, si on a la même façon de
voir, il n'y a pas de problème, tout est beau. S'il y a divergence dans
la façon dont l'attribution des budgets va se faire, on va chercher
à avoir une équipe comme telle. Par contre, le fait qu'on voyait
de la part du ministère une garantie un peu plus grande dans les
demandes adressées pour les subventions, cela permettait de dire:
L'étude sera beaucoup plus basée sur des critères
d'attribution précis, scientifiques, etc., en termes de services rendus
et autres. Dans une région, le phénomène qui peut se
présenter, c'est que cela enlève quelque chose de sain à
la représentation du milieu, pour ce qui est du rôle. On parle de
rôle communautaire et on parle de partenariat, mais si on
détermine qui vient s'asseoir, le partenariat est loin.
M. Jolivet: Dans votre exposé général,
à l'introduction 2. 1, vous dites: "Pour nous, le fait que les
véritables responsables du partenariat souhaité ne soient pas
clairement identifiés ni la façon d'appliquer les orientations
arrêtées nous laissent déçus. " C'est la
première chose que vous dites. Et vous dites: 'Les regroupements
craignent d'être récupérés par le partenariat, que
ça serve davantage aux intervenants. " - Vous parlez probablement des
institutions, à ce moment-là. - "Être partenaires, c'est
être égaux dans nos interventions, l'usager comme le
professionnel, le bénévole comme le psychiatre ou le psychologue.
Est-ce cela, le partenariat souhaité? Si c'est oui, cela peut changer
votre idée. Dans ce contexte, je vous pose la question suivante: Si, au
niveau du CRSSS, pour la santé mentale il y avait une enveloppe
protégée, s'il y avait un changement quant à la commission
qui s'occupe de la santé mentale, une représentation où
vous êtes présents comme groupe alternatif ou communautaire,
est-ce que votre idée serait différente de ce que vous dites du
rapport Harnois?
M. Lauzon: II ne faut pas penser que le fait d'être au
CRSSS ou non, c'est une question de sous. Si vous n'avez pas d'argent, vous ne
vivez pas, c'est garanti. Mais c'est plus que juste une question de sous, je
pense. Quand on est une ressource alternative, on est un peu, comme on pourrait
dire, en marge de la société, etc. C'est justement ce qui fait un
peu notre force. C'est comme si on était
réinstitutionnalisés finalement en rentrant dans le
réseau. Cela sous-tend cela aussi, en même temps. Ce n'est pas
juste une question de sous. Il ne faudrait pas penser qu'on a peur que ceux qui
siègent au CRSSS décident d'envoyer leur argent ailleurs ou des
choses comme celle-là. Ce n'est pas juste cela. Je ne sais pas si vous
saisissez. S'il y a des garanties quelque part là-dessus, tant mieux!
D'accord, on ne crachera pas là-dessus comme de raison. Mais il faut
bien penser que ce n'est pas seulement une question de sous, c'est une question
de philosophie en même temps.
M. Jolivet: C'est une question de mentalité pour les
personnes qui interviennent dans le système. Je donne un exemple. Hier
soir, on avait l'occasion de rencontrer le dernier groupe où un
psychiatre d'un hôpital psychiatrique de Montréal, avec un groupe
alternatif communautaire dans le milieu, a dit: Moi, j'ai décidé
aujourd'hui d'aller voir ce qui se passe à l'extérieur; comme on
parle de désinstitutionnalisation, je veux savoir où vont les
personnes que je veux envoyer à l'extérieur de mes murs. Dans ce
contexte-là, au lieu de rester seul avec ses idées, il a
décidé d'aller dans le milieu, il est allé voir les
groupes autour, le Chaînon et d'autres personnes qui étaient ici
hier. Avec elles, il a regardé comment une personne en institution
pourrait faire le joint pour aller dans une vie plus normale, dans un milieu
plus naturel et à ce moment-là avoir une mesure de transition
entre l'institution et la vie normale. Dans ce contexte-là, il a
bougé de son bord. Ce que vous demandez, c'est que d'autres personnes du
CRSSS ou des institutions le fassent, parce que vous êtes prêts
à le faire, si j'ai bien compris. Dans ce contexte, le partenariat, ce
serait de faire chacun notre bout de chemin pour permettre que toutes les
ressources du milieu et des institutions soient utilisées pour le
bien-être des personnes que vous avez sous votre
responsabilité.
M. Lauzon: Oui, je suis d'accord avec cela.
M. Jolivet: Je reviens. Vous dites des choses, dans vos
commentaires essentiels à l'article 2. 2, qui m'ont laissé un peu
sur mon appétit, dans le sens où on vit cela un peu partout. Je
vais les reprendre là où vous dites: "Le CRSSS, dans la pratique,
se préoccupe davantage des problèmes du réseau que de la
population et des ressources communautaires alternatives en santé
mentale. " Donc, il s'occupe plus du réseau que de la population et des
ressources communautaires. C'est ce que vous dites. En deuxième lieu,
à la page suivante, vous dites: "Pour se faire entendre, les citoyens et
les groupes communautaires passent presque exclusivement par le
député de leur secteur et/ou directement par le ministère
de la Santé et des Services sociaux. Quand on passe par le CRSSS, nous
aboutissons de toute façon au ministère. Et si une action est
prise, dans la plupart des cas. elle a obtenu la sanction par Québec. "
Pour terminer, vous dites plus loin: "II n'y a pas à l'heure actuelle
une reconnaissance dans la région. Incluant le CRSSS, des ressources
alternatives communautaires. " Cela veut dire que, actuellement, l'un des
problèmes que vous avez chez vous, c'est ce changement de
mentalité-là, si je comprends bien.
M. Lauzon: Effectivement et d'ailleurs à plusieurs
niveaux. II n'existe pas non plus de comité de
bénéficiaires, par exemple dans les institutions exclusivement
psychiatriques. Comme à Malartic, il n'y a pas de comité de
bénéficiaires. Par exemple, le comité de citoyens
s'était un peu insurgé parce qu'il trouvait que la
tolérance de la population n'était pas respectée. Encore
là, ils sont obligés de venir ici, à Québec, pour
faire entendre leurs doléances. Si Québec n'avait pas fait
pression sur le CRSSS, il n'y a rien qui aurait bougé pour asseoir les
gens ensemble et faire en sorte qu'ils jasent. II y eut récemment une
tournée ministérielle et on a été chanceux, on a eu
un bon mot de M. Voisine qui a fait en sorte qu'on puisse venir ici et qu'on ne
soit pas obligés de tout payer de nos poches. Ce sont des choses comme
cela. Eux, ils ne font jamais rien spontanément dans ce sens-là.
Quand il arrive des affaires de l'extérieur, si cela met l'Abitibi sur
la "map", ah là! d'accord, ils sont prêts à faire presque
n'importe quoi. Mais quand ce sont des choses concrètes de la vie
quotidienne, pour cela ils n'ont rien à faire.
Quand on parle de jaser, il faut le faire aussi avec le langage que les
gens ont, pour que les usagers et usagères soient capables d'avoir le
même langage que les intervenants du réseau. Cela leur prend des
outils ou des interprètes pour être capables de le faire, pour
être capables d exprimer clairement leurs besoins.
Je me rappelle à un moment donné que le groupe Soleil
avait fait une recherche sur la qualité de vie. On s'est assis avec les
intervenants, on a présenté notre affaire et, à un moment
donné, ils se sont aperçus. Ah! regarde donc cela, on faisait
telle ou telle intervention et on y allait dans le beurre parce que,
finalement, il y avait autre chose à côté qui faisait que
cela nuisait à l'intervention qu'on faisait. C'est pour cela que
ça tournait en rond.
À un moment donné, j'entendais lors d'une émission
télévisée quelqu'un - je ne me rappelle pas si c'est M.
Harnois - qui disait. Même déjà, actuellement, le
ministère de la Santé et des Services sociaux répond
à un faible pourcentage des demandes et de tous les besoins qu'il peut y
avoir au niveau de la santé mentale. II est sûr que le
réseau qui est là est lui-même essouflé. Ces
personnes sont là seulement pour maintenir des choses plutôt que
de faire progresser des choses. À ce moment-là, ils ont
peut-être moins le temps d'aller voir réellement ce qui se passe
avec la désinstitutionnalisation. Je lisais un cahier qui venait du
gouvernement du Québec sur la désinstitutionnalisation en
santé mentale qui disait clairement qu'il y avait eu
désinstitutionnalisation de la clientèle, mais il n'y avait pas
eu désinstitutionnalisation des services.
Ce sont toutes des choses avec lesquelles le client compose, et quand il
arrive à l'extérieur, il est aux prises avec lui-même et
quand il se sent mal pris, la seule chose qu'il y a à faire pour se
protéger, c'est d'avoir des comportements qui vont faire en sorte qu'il
va entrer en dedans pour avoir cette protection. Je pense que ce sont ces
choses-là qui pourraient être évitées, et qui
coûtent énormément chères à la
société. Les ressources alternatives sont très près
du milieu et étant donné que le milieu s'implique très
facilement dans une ressource alternative et que c'est plus difficile de
s'impliquer dans une institution à ce moment, ces changements d'attitude
souhaités par tout le monde se feraient beaucoup plus rapidement qu'en
continuant à garder quelque chose en haut quelque part Je vais dire
comme les Chinois disent. Si chacun nettoyait le devant de sa maison, toute la
ville serait propre. Je pense que c'est à peu près dans ce
sens-là que nous, on veut aller, quand on parle de nos comités
multtpartites locaux.
M. Jolivet: C'est pour cela que je reviens à la fin de
votre texte, à votre recommandation numéro 1 où vous
dites. "Que le ministère assure l'émergence de nouvelles
ressources alternatives communautaires dans les principales villes ou il y a un
noyau important, etc", que le ministère assure leur survie
financièrement et leur autonomie" et "qu'il favorise le partenariat"
dont on faisait mention.
Vous terminez en disant "Les recommandations" - parce qu'il va avoir un
financement et le groupe va faire des recommandations - "les recommandations
ayant obtenu consensus seraient acheminées au CRSSS et un rapport serait
envoyé au MSSS, au ministère, pour que ce dernier veille à
ce que le CRSSS réponde aux demandes "
Vous ne trouvez pas que, si vous présentez une équipe de
partenariat où vous voulez changer des mentalités, ce ne serait
pas nécessaire, cette chose-là? Au fond, ce que vous deviez
avoir, c'est la confiance mutuelle de l'un à l'autre. C'est là
que je vous pose la question. S'il y avait une enveloppe protégée
pour la santé mentale et les groupes communautaires alternatifs, le
réseau aurait sa part de gâteau dans la mesure où le groupe
de partenariat que vous souhaitez le distribue équitablement. Vous
n'auriez pas besoin de faire un pélerinage à Québec ou de
presser votre député pour qu'il fasse des pressions à un
moment donné sur la ministre actuellement en place ou sur un autre pour
que le CRSSS agisse. Ne croyez-vous pas que c'est du temps perdu et que s'il y
avait un véritable partenariat, vous ne seriez pas obligés de
faire cela?
M. Lauzon: Probablement que oui. II ne faudrait pas seulement
avoir un budget protégé, mais s'assurer que, toutes les fois
qu'on téléphone au CRSSS en ce qui concerne la santé
mentale, ce soit au moins deux fois de file la même personne qui
réponde, parce que c'est un roulement tellement fort que tu es toujours
obligé de recommencer les dossiers, parce que ce
n'est jamais la même personne qui est là. Il y a toujours
quelqu'un de nouveau, soit qu'il est parti, transféré de place,
en congé de je ne sais pas quoi. Alors, c'est cela aussi qui fait que le
fonctionnement des CRSSS devrait être tout chambardé pour faire en
sorte au moins que tu sois capable d'avoir quelqu'un quelque part avec qui
communiquer.
Si pour nous, en Abitibi, c'est plus facile d'avoir accès au
député que d'avoir accès à une personne qui
intervient au CRSSS, quand tu as un besoin, tu t'organises pour aller voir
celui qui veut te répondre et non pas celui qui t'envoie à
Pierre, Jean, Jacques, alors que tu es obligé de tourner en rond tout le
temps. Cela aussi, il faudrait que ce soit inclus dans l'affaire. Ce n'est pas
juste une question de sous aussi.
M. Jolivet: Ce que j'ai bien compris, c'est une question de
mentalité à changer, suivant laquelle les gens se font confiance
les uns les autres et travaillent dans le même sens avec les
capacités qu'ils ont de réagir dans chacune de leurs
interventions, selon le milieu dans lequel ils sont.
M. Lauzon: C'est cela. C'est dans ce sens-là aussi qu'on
demandait que le ministère de la Santé et des Services sociaux
l'inscrive dans la loi, s'il accepte les recommandations que le Comité
Harnois fait en ce qui concerne le partenariat et la place qui va être
donnée aux ressources alternatives et à l'usager et à
l'usagère. Que cela ne reste pas juste un voeu pieux sur les
tablettes.
C'est dans ce sens-là aussi, car des voeux pieux... l'enfer est
pavé de bonnes intentions. Ce n'est pas tout de faire des voeux ou de
bien cerner la problématique, mais il faut donner des outils en
même temps. Cela, c'est essentiel. Je pense qu'en donnant au CRSSS un
certain monopole ou, en tout cas, un certain chèque en blanc sur tout ce
qui devrait être bon et rentable dans une région pour
répondre aux besoins, cela ne veut pas nécessairement dire que,
dans la pratique, cela va se faire. (10 h 45)
M. Jolivet: Deux autres questions, l'une traitant de vos
recommandations 14 et 17 dans lesquelles vous dites: 'Nous recommandons qu'ils
soient considérés par le ministère et traités de
manière uniforme" en parlant des groupes communautaires. Vous dites
à la fin: "Que le ministère s'assure qu'il n'y ait aucune
ingérence dans la gestion de ces groupes et leurs programmes. J'aimerais
connaître votre pensée là-dessus parce que, jusqu'à
maintenant, si on amène les gens à leur donner un montant
d'argent, il faut s'assurer que les services soient donnés. Donc, tout
le monde n'a pas d'objection à ce que l'on vérifie si le service
est rendu, mais vous allez un peu plus loin, à mon avis, en disant:
"Aucune ingérence dans la gestion de ces groupes et de leurs
programmes". J'aimerais connaître votre opinion.
M. Lauzon: Je pense que cela touche plus l'aspect philosophique
de la ressource. Par exemple, une ressource comme la nôtre, on a
décidé d'adopter une philosophie d'un certain type: Par exemple,
on considérait qu'un ex-patient, qui avait lui-même réussi
à se réinsérer socialement d'une façon
adéquate, pouvait servir de modèle et pouvait, comme ressource,
être encore plus apte que celui qui a passé cinq ou six ans
à l'université pour donner le genre de service qu'on veut donner.
On aimerait que cela soit accepté. On sait qu'en pratique, chez nous,
quand on a voulu faire cela, les professionnels comme tels et les gens du
réseau nous disaient: Ah! vous ne serez jamais capables de rien faire;
vous êtes inaptes, patati et patata; vous ne serez jamais capables de
gérer rien et des choses semblables.
Encore là, c'est une question d'attitude, me direz-vous
là-dessus, mais il reste que c'est en ce sens qu'on ne veut pas subir
d'ingérence.
Nous ne voulons pas subir d'ingérence dans le sens que, si nous
décidons d'avoir tel type d'orientation, parce que cela répond
aux besoins de nos gens... Encore là, je citerais le document sur la
désinstitutionnalisation en santé mentale, fait par le
ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec,
qui disait que, bien souvent, la perception et la vision des besoins par les
usagers et les gens du milieu étaient souvent diamétralement
opposées à celles des gens du réseau, parce que les gens
du réseau analysent, alors que les gens du milieu sentent. Le rationnel
opposé à l'émotionnel n'a jamais fait rien de bon.
M. Jolivet: Mais d'une façon ou d'une autre, vous ne serez
pas surpris d'apprendre que j'appuie même des groupes dans mon coin qui,
eux, sont des ex-psychiatrisés qui veulent agir au même titre que
des organismes aidant les gens qui ont des problèmes d'alcool. Ayant
vécu des problèmes, ils connaissent peut-être le meilleur
moyen de s'en sortir, mais il faut quand même qu'ils soient soutenus par
des gens.
Ma dernière question va dans ce sens, parce que je pense que les
travaux se terminent. Vous dites qu'il devrait y avoir répartition
égale de ceux-ci dans la région, en parlant des psychiatres. Je
vous pose une question qu'on a posée à des groupes de
psychiatres. Est-ce que les médecins omnipraticiens,
préparés pour répondre à cela à
l'intérieur des institutions hospitalières, ou des
infirmières de niveau post-collégial ou post-secondaire et
formées en vue d'un bac en psychiatrie seraient des moyens de
régler la pénurie actuelle?
M. Lauzon: Cela pourrait être un excellent moyen. En tout
cas, c'est mon opinion personnelle, parce qu'on ne s'est pas penchés
particulièrement sur la question que vous nous posez
là. Personnellement, je verrais bien cela. Même si
l'Abitibi est éloignée, ce n'est quand même pas l'Afrique,
On n'aime pas que les colonisateurs ou les coopérants d'autres pays...
Je veux dire que cela fait un petit peu... Je pense qu'on est capables dans
notre coin de se prendre en main. Il s'agit de se faire donner des outils et
l'argent nécessaire.
M. Jolivet: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Thuringer: Merci, M. le Président. Le rapport vise la
sensibilisation. Vous-mêmes, dans votre recommandation, vous dites que
c'est le ministère qui doit fournir aux groupes de base les outils et
les fonds nécessaires pour sensibiliser et informer la population, les
intervenants, etc. C'est la recommandation 2. 3. Avez-vous déjà
des programmes de sensibilisation en marche? Sinon, pouvez-vous préciser
les types de programmes dont vous parliez? Deuxièmement, avez-vous fait
des programmes dans les écoles ou dans les petits commerces? Comment
cela pourrait-il se faire? Je sais qu'on n'a pas trop de temps, mais
pouvez-vous me résumer cela?
M. Lauzon: Oui. On a déjà fait une recherche
à caractère scientifique là-dessus. On s'était fait
aider par des gens de l'université. C'était une recherche sur la
qualité de vie des gens vivant hors institution. Non seulement nous
avons sensibilisé la population, mais nous avons aussi
sensibilisé les professionnels. Ils ont autant besoin d'être
sensibilisés que la population. On avait fait des présentations
dans les journaux. On a fait des ateliers de discussion sur différentes
problématiques. On incluait, par exemple, des avocats et des juges.
Selon les types de problématique, on allait chercher les professionnels
en place. On ne faisait pas ces discussions fermées, c'est-à-dire
seulement les usagers et les usagères dans leur petit coin. On allait
aussi chercher tes autres gens autour pour qu'ils viennent s'asseoir avec nous
et jaser de ces problématiques. Par exemple, on fait aussi des
pièces de théâtre. Les gens, dans des pièces de
théâtre, pourraient exprimer ce qu'ils auraient à dire dans
leur vécu quotidien, dans ce qu'ils perçoivent avoir besoin comme
services. Dans ce sens, c'est quand même assez actif. Je ne dirai pas que
c'est actif dans tout l'Abitibi-Témiscamingue parce que des ressources
à volet exclusivement mental il n'y en a qu'une. Comme on le dit, on
essaie de s'organiser chez nous le mieux possible. Mais dans le sens que vous
demandez, ce sont déjà des choses amorcées et faites.
M. Thuringer: Comment cela a-t-il été reçu?
Avez-vous fait des prévisions, pour piger dans tes autres domaines?
M. Lauzon: Cela a été très bien perçu
par tout le monde. On était bien contents. À un moment
donné, les gens avalent un peu perdu de vue ce qui pouvait se passer.
Celui qui vit hors de l'institution, qui est sans ressource et qui souvent
n'est pas capable de s'affirmer ou quoi que ce soit, ce n'est pas lui qui va
dire quels sont ses problèmes, etc. Ces échos ne se rendent pas
dans les endroits où des gens pourraient intervenir de façon plus
massive. Il y a un petit bout de la question que j'ai oublié, je
m'excuse.
M. Thuringer: Deuxième point. Est-ce que vous voyez
d'autres champs d'activité sur lesquels vous voulez vous pencher?
M. Lauzon: C'est sûr. Par exemple, les membres nous ont
exprimé leurs besoins, ils nous ont dit: On n'a pas tellement d'outils
de réinsertion sociale, etc.; souvent, on va être
hospitalisés juste parce qu'on fait de l'angoisse dans nos chambres,
qu'on est stressés par tel petit événement qui peut
paraître insignifiant, etc. On a déjà mis sur pied des
programmes de gestion du stress, par exemple. Pourquoi celui qui vivrait un
moment de stress serait-il obligé de se faire hospitaliser? Je pense
que, si tous ceux qui vivent du stress étaient hospitalisés, il
n'y aurait plus de place dans les hôpitaux. Étant donné que
cette clientèle est plus démunie que d'autres gens, on va dans ce
sens. On dit: Si vous voulez vous réinsérer comme il faut, il
faut que vous appreniez à entrer en contact avec des gens qui sont
autour de vous; il faut que vous appreniez à comprendre leurs besoins,
etc. Donc, dans ces cas. on a des programmes pour faciliter la communication et
les échanges entre les besoins d'une population, les besoins des usagers
et des usagères et même les besoins des professionnels.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'il y a
d'autres intervenants, d'autres questions? M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Je tiens à vous remercier. J'ai lu avec
beaucoup d'attention votre mémoire. Il reflète une
particularité importante, la façon dont vous avez pris soin de
servir les besoins de votre population, et je vous en félicite. Je vous
demande surtout de continuer et de ne pas lâcher.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Je veux vous remercier de votre
présentation. Je suis heureuse qu'on vous ait donné les moyens de
venir. J'ai cru comprendre que, si tel n'avait pas été le cas,
vous n'auriez pas pu vous déplacer. Je comprends que, quand on vient
d'Abitibi, cela coûte assez cher de transport. Je veux vous remercier
pour
le travail que vous faites dans votre communauté.
Évidemment, à un moment donné, tout le monde se tourne
vers une structure quelconque pour actualiser ou appliquer des politiques. On
sait fort bien qu'il y a des écueils et des difficultés qui se
sont développés au cours des années. Pour modifier les
mentalités et les habitudes. II va falloir examiner de plus près
ces problèmes et peut-être regarder du côté de la
représentation Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie les organismes communautaires en santé
mentale de l'Abitibi-Témiscamingue et appelle à la table des
témoins la Société Alzheimer des Laurentides qui sera
représentée par Mme Francine Legault Mme Réjane Vendette
Mme Lina Valade, Mme Lise Gendron-Savard, Mme Louisette Guillemette, Mme
Françoise Pelletier et Mme Jocelyne Trudel. Bonjour, mesdames! Vous
connaissez nos règles de procédure. Vous avez 20 minutes pour
faire la présentation de votre mémoire et les parlementaires ont
40 minutes pour vous poser les questions qu'ils jugeront pertinentes concernant
votre mémoire et vos positions.
Chaque fois que I'une d'entre vous voudra prendre la parole, que d'abord
elle s'identifie, c'est pour le Journal des débats afin qu'on ait
l'identité de l'intervenant. Comme ils ne vous connaissent pas et qu'ils
ne sont pas dans la salle, ils n'ont pas d'autres moyens de vous identifier que
si vous le dites vous-mêmes. Alors, je vous prierais de bien vouloir
donner vos noms chaque fois que vous avez à parler.
J'invite votre porte-parole à nous présenter le
mémoire. Je vous en prie.
Société Alzheimer des
Laurentides
Mme Legault (Francine): Bonjour, Mme la ministre, Mmes et MM les
députés. Nous vous remercions de nous recevoir en audition et de
nous permettre ainsi d'exprimer l'opinion de la Société Alzheimer
des Laurentides sur le projet de la politique de santé mentale pour le
Québec.
Nous vous prions d'excuser l'absence de notre président, M.
Morin, qui est retenu par ses fonctions. Avant de laisser la parole à
Mme Françoise Pelletier, je vous demanderais, si c'est possible, de
parler assez fort afin qu'elle entende bien les interventions qui seront
faites. Je laisse la parole à Mme Françoise Pelletier.
Mme Pelletier-Lamarche (Françoise): Bonjour, mesdames et
messieurs. Nous ne sommes pas loin de l'an 2000. Plus d'un tiers de la
population québécoise actuelle aura alors atteint l'âge de
la retraite. On s'attend donc à une recrudescence des maladies
imputables au grand âge. Or, nous sommes conscients que les maladies
neuropsychologiques, en l'occurrence, la maladie d'Alzhelmer a pris des
proportions effarantes depuis quelques années. Peut-être parce que
l'on est davantage informé et que nous l'avons démystifiée
puisque jadis on I'appelait sénilité, donc maladie
inhérente à la vieillesse, et que personne ne sen
préoccupait. Ce n'est qu'une infime partie des gens âgés
qui en sont atteints soit les 40 à 60 ans, quoique le nombre augmente
chez les octogénaires. Les facteurs déterminants peuvent
être dus à différentes causes isolement, stress continuel,
insécurité matérielle ou affective, problèmes
génétiques avec réserve.
Ce syndrome a un impact important au point de vue
socio-économique, car les patients Alzheimer en soins prolongés
représentent une partie importante de la clientèle
hospitalière, ce qui nécessite des coûts énormes
à l'État.
Nous nous permettons, d'une façon succincte, d'apporter quelques
réflexions sur cette problématique. C'est une pathologie qui
évolue progressivement en trois étapes plus ou moins longues,
selon le type de malade. L'aspect physique n'est pas atteint avant le milieu de
la deuxième étape. Pour ces motifs, idéalement, nous
préconisons le maintien à domicile le plus longtemps possible en
dépit de la bonne volonté des familles aux prises avec l'un des
leurs atteint de cette maladie.
Les ressources actuelles étant encore très
limitées, nous rendons hommage aux CLSC qui, depuis leur implantation au
Québec, offrent un certain soutien. Ils sont présentement en
pleine mutation. Malgré qu'ils accroissent leurs services, ils sont
encore insuffisants pour répondre à la clientèle
spécifiquement Alzheimer.
Présentement, la famille responsable du malade a très peu
de ressources pour le maintenir le plus longtemps à son domicile. II
s'avère qu'elle songe au placement prématuré, très
néfaste pour le malade. On le déracine, ce qui augmente davantage
le processus de la maladie
Nous croyons que les gouvernements pourraient investir davantage dans
ces organismes afin d'accroître les services offerts, plutôt que
d'injecter des sommes fabuleuses dans les hôpitaux de soins de longue
durée, puisque ces malades requièrent peu de soins infirmiers
dans les deux premières phases de la maladie.
Les besoins inhérents à la famille seraient, en
priorité, un service de garde bi-hebdomadaire afin que le conjoint ou la
personne responsable - il n'est pas rare que ce soit une fille du malade -
puisse voir à ses affaires personnelles et se ventiler. Nous savons bien
par les expériences vécues que le malade épuise toutes les
énergies de la personne aidante par ses comportements et une
surveillance accrue à cause de ses pertes de mémoire progressives
des faits récents. Au fil des mots et des années, l'aidant ne
peut récupérer ses forces tant physiques que morales qui se
désagrègent. On est contraint à des solutions d'urgence,
néfastes pour tous.
Incidemment, les autres services que nous préconisons
auprès des familles seraient que les intervenants aient une meilleure
connaissance de la maladie, de son impact sur la famille et la
société. Pour ce faire, une formation
spécialisée par un neurologue ayant de l'expérience pour
ce type de patient. Ou faire appel à des organismes déjà
existants dans la province, en l'occurence, les sociétés
Alzheimer. On en compte présentement huit au Québec.
Un autre service essentiel serait la formation d'un groupe de soutien
aux families, animé par un travailleur social préalablement
formé, sans oublier une thérapie à l'aidant avec suivi.
Cette personne requiert beaucoup de soutien individuel si elle ne veut pas
elle-même sombrer dans l'épuisement.
Les mêmes attentes s'adressent aussi aux milieux hospitaliers,
c'est-à-dire, la formation du personnel soignant. L'implantation
d'unités de soins spécialisés pour les cas d'Alzheimer et
pour les autres pathologies du même type.
Certains centres psychiatriques ont présentement des lits
disponibles à cause de la nouvelle approche de
désinstitutionnalisation. Ces unités énoncées dans
cet exposé seraient certes la solution à long terme au placement
homogène. Une autre perspective serait aussi à envisager. Ces
unités pourraient être bénéfiques dans un premier
temps, pour un placement à court terme, afin que la famille puisse
prendre un peu de répit salutaire à son épanouissement
personnel, sachant bien que la garde quotidienne d'un malade Alzheimer devient
stressante et épuisante. Il est fréquent que l'aidant devienne
aux prises avec des problèmes psychosomatiques, tels qu'ulcères,
"bum out", etc.
Dans un second temps, d'autres services pourraient s'ajouter à
ces unités. En l'occurence, un centre de jour spécialisé,
doté d'une équipe multidisciplinaire. Nous voyons l'importance
d'un ergothérapeute, d'un musicologue et d'un travailleur social,
travaillant en collaboration avec la famille du malade. La
Société Alzheimer des Laurentides couvre la grande région
des Hautes-Laurentides. Nous préconisons que le centre hospitalier des
Laurentides de L'Annonciation ait sa future unité à titre de
projet pilote (appui de M. Serge Morin, membre du conseil
d'administration).
Nous ne pouvons mettre un terme à cet exposé sans qu'il
soit question de recherche sur la maladie d'Alzheimer. Depuis cinq ans,
d'énormes progrès ont été faits, mais il en reste
encore beaucoup à accomplir. En 1988, nous sommes convaincus qu'investir
davantage afin de trouver les causes véritables de la maladie et d'y
apporter des solutions tangibles serait un grand pas en avant. Quant aux
traitements, ils devraient éliminer le plus possible les
inconvénients des effets secondaires.
Avec l'aide gouvernementale, nous sommes assurés que, d'ici
à quelques années, nous pourrons envisager les mécanismes
en termes de prévention. Ce sera donc la victoire pour ces malades
présentant les débuts symptomatiques de la maladie, voire une
meilleure qualité de vie pour ceux qui en sont à un stade plus
avancé.
(11 heures)
Nous demeurons très optimistes quant à l'intervention
éventuelle du gouvernement et ce, en regard de son projet de politique
de santé mentale pour le Québec. Le jour n'est pas loin où
l'on percevra la lumière au bout du tunnel.
Messieurs, mesdames, est-ce que j'ai suffisamment de temps pour vous
lire les commentaires verbaux à la commission parlementaire? Cela va
peut-être faciliter vos questions.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie,
madame, procédez. Il vous reste cinq minutes.
Mme Pelletier-Lamarche: Merci. Selon notre expertise en tant
qu'organisme d'entraide sur la maladie d'Alzheimer, nous avons fait un
échantillonnage des cas Alzheimer. Le pourcentage serait plus
élevé chez les personnes de 80 ans et plus, et la plupart d'entre
elles sont en centre d'hébergement. Nous avons émis plusieurs
hypothèses sur les raisons pour lesquelles ce nombre était plus
élevé que pour les 60 et plus et exceptionnellement les cas de 40
à 60 ans, à savoir cette maladie est-elle davantage
identifiée par les intervenants de la santé? Serait-ce dû
au peu de communications que ces malades ont avec leur entourage familial et
hospitalier? Lors de leur admission dans ces centres, bien souvent, la cause
initiale de l'hospitalisation est tout autre, soit chirurgicale ou
médicale, nécessitant une hospitalisation prolongée.
Or, le déracinement de leur habitat naturel a-t-il une incidence
sur leur comportement actuel? Il faut être prudent dans nos
déductions. Toute personne devant subir une hospitalisation à
long terme n'est pas susceptible un jour d'être atteinte de la maladie
d'Alzheimer. Plusieurs facteurs sont en cause, en l'occurence la
vulnérabilité de cet individu. La maladie d'Alzheimer
étant une maladie organique, le stress, l'isolement, etc., peuvent
affecter d'autres organes dont chaque individu accuse une fragilité.
Faisant référence aux ulcéreux, il n'est donc pas
nécessaire qu'un placement prolongé provoque la maladie
d'Alzheimer.
Sachant bien qu'en 1988, le milieu hospitalier est davantage
sensibilisé à cette problématique, il est utopique de
croire qu'il peut dispenser ses services individualisés à chacun
de ses patients atteints d'Alzheimer, c'est-à-dire mobiliser un
préposé à chacun des cas Alzheimer. Pour l'État,
cela représenterait des coûts astronomiques, même si nous
sommes conscients que cela éviterait l'évolution de la maladie
chez les sujets vulnérables.
Chez les personnes en deçà de 80 ans, le nombre de malades
est statistiquement moindre. Serait-ce qu'ils ne sont pas connus? Il existe
encore un mythe sur cette maladie, surtout dans les familles. Elles en parlent
très peu, jusqu'au moment où elles deviennent démunies
faisant appel à l'aide. On entend souvent dire de façon
informelle par les personnes que nous rencon-
trons un tel, un proche semble avoir la maladie d'Alzheimer, sa
mémoire est de plus en plus déficiente.
À cause des médias d'information les personnes
symptomatiques de 40 ans et plus se révèlent de plus en plus.
À cet âge, on a de I'espoir et on se soumet plus facilement au
test diagnostique du moins dès le début de son apparition. Ce
phénomène est encore trop récent pour permettre
d'établir des statistiques.
Des solutions pour améliorer la qualité de vie de ces
malades, pour leur donner l'attention appropriée et également les
moyens de stopper la maladie à ses débuts, il y en a. Dans un
premier temps il s'agit de se concerter avec tous les organismes
gouvernementaux, hospitaliers et d entraide afin d'étudier les mesures
concrètes et peu coûteuses pour I'État. Dans un second
temps lors des prochaines réformes fiscales, accorder un crédit
d'impôt pour les personnes aidantes à domicile, que ce soit une
employée ou un membre de la famille. Ce crédit serait comme un
salaire que l'État pourrait verser et ce serait beaucoup
inférieur aux coûts quotidiens des centres
d'hébergement.
Peut-être est-ce avant-gardiste d'avoir des garderies
privées - appellation disgracieuse mais exprimant clairement le besoin -
ouvertes de 7 h 30 à 18 h 30. Le membre de la famille gardant ce type de
malade ne serait pas contraint de quitter son emploi, chose qui n'est pas
rare.
Ces établissements pourraient être subventionnés par
les gouvernements. Étant une solution de rechange pour les familles,
cela n'exclut pas les centres de jour dont nous avons parlé dans le
mémoire. Nous avons palpé le pouls des bénévoles.
C'est une solution à très court terme. On ne peut pas toujours
compter sur la disponibilité de ces personnes au moment où le
besoin se fait sentir à cause de leurs obligations personnelles, et cela
se conçoit très bien. Comme ce n'est pas un travail à
temps plein, elles fonctionnent à leur rythme
Concernant notre région, les belles Laurentides. Est-ce que vous
me le permettez, je suis déshydratée? Comment cela
fonctionne-t-il?
Le Président (M. Bélanger): Dévissez le
bouchon. Comme ça.
Mme Pelletier-Lamarche: Je ne suis pas.
Le Président (M. Bélanger): Comme cela; c'est
suffisant.
Mme Pelletier-Lamarche: Merci beaucoup. Bon! je
répète. Concernant notre région, les belles Laurentides,
nous avons remarqué quelques lacunes dans un de nos centres
hospitaliers. Quelques malades au stade des fugues requièrent une
surveillance accrue. Malgré la vigilance et le dévouement du
personnel surchargé et restreint, le malade court des risques personnels
dangereux pour lui même.
En voici concrètement un exemple. Jeanne se promenait dans son
fauteuil roulant dans le couloir adjacent au département. Là se
trouvaient des ascenseurs et bureaux peu achalandés les fins de semaine.
Alors, notre Jeanne s'est approchée de l'ascenseur pour y monter
lorsqu'un visiteur en est sorti. Comme par hasard, c'était un membre de
la Société Alzheimer des Laurentides. Nous avons ramené
Jeanne dans son département après avoir averti le personnel sur
place, et tout s'est bien terminé. Cela aurait pu être un jeune
visiteur qui par ignorance, aurait laissé Jeanne pénétrer
dans I'ascenseur. C'est pourquoi nous avons songé que la porte reliant
un département à un autre soit munie d'un dispositif
électronique peu coûteux sécurisant à la fois le
personnel et le patient.
Un autre aspect qui nous tient à coeur est que, dans quelques
semaines, débuteront des travaux de réfection au centre
hospitalier Laurentien à Saint-Agathe-des-Monts. On commencera par le
troisième étage, département des soins de longue
durée. Or, les patients doivent emménager dans des unités
modulaires adjacentes à I'hôpital, et cela pour la durée
des travaux, peut-être pour une couple d'années.
II appert que ces modules sont en location. Nous avons donc fait une
requête au directeur du centre hospitalier, afin que ces bâtisses
demeurent en permanence après les travaux, pouvant ainsi servir comme
unités de soins spécialisés pour les patients
Alzheimer.
Notre demande est présentement à l'étude et nous
espérons avoir I'appui du ministère de la Santé et des
Services sociaux. Cette solution peut être une économie future de
plusieurs milliers de dollars épargnant l'agrandissement éventuel
de ce centre hospitalier qui devient davantage populeux au fil des ans
Concernant le centre hospitalier psychiatrique des Laurentides de
L'Annonciation, tel qu'énoncé dans notre mémoire, c'est un
endroit privilégié pour desservir un bassin de population
d'environ une cinquantaine de lits.
Le Président (M. Bélanger): Si vous le permettez,
madame, je dois vous interrompre. Si vous voulez conclure très
rapidement, le temps est maintenant écoulé.
Mme Pelletier-Lamarche: C'est terminé?
Le Président (M. Bélanger): Mme Pelletier.
Mme Pelletier-Lamarche: Nous sommes assurés que ce sera le
meilleur investissement pour l'avenir comme centre pilote. Voilà les
infrastructures et les solutions d'avenir peu coûteuses pour les
gouvernements et pour le mieux-être de notre population vieillissante.
Merci, mesdames et messieurs, de nous avoir entendues et d'avoir accepté
notre mémoire. (11 h 15)
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
madame. Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier
les porte-parole de la Société Alzheimer des Laurentides et Mme
Pelletier particulièrement, qui a été la rédactrice
du mémoire. C'est le premier groupe qui vient nous parler de la maladie
d'Alzheimer. Non pas que nous puissions l'oublier parce qu'il s'agit d'aller
dans nos centres d'accueil, dans nos hôpitaux de soins prolongés
ou même dans nos hôpitaux psychiatriques de longue durée
pour voir le nombre de personnes atteintes de cette maladie.
Il faut avouer au point de départ que, même si on parie de
la maladie d'Alzheimer depuis au moins dix ans - en tout cas, tous les gens
sont familiers avec cela et se demandent s'ils ne la développeront pas
dès qu'ils ont une petite perte de mémoire. - II reste qu'on n'a
pas fait de grands pas, même au Canada. Aux États-Unis,
évidemment, il y a plus de recherche; en Angleterre également
ainsi qu'en Israël. Mais au Canada et au Québec, on en est encore
aux balbutiements de la recherche dans ce domaine. Avec le vieillissement de la
population, cela devient un problème de plus en plus aigu.
J'ai lu votre mémoire, que vous nous avez d'ailleurs
présenté. D'abord, je veux vous féliciter pour le travail
que vous faites et pour la démarche que vous avez entreprise ici
aujourd'hui. Cela va nous permettre, même si c'est très
brièvement, au moins d'en discuter et de nous y sensibiliser. Si on
n'est pas plus avancé là-dedans, c'est peut-être parce que
les gens, même s'ils sont conscients de la maladie, ne
l'établissent pas parmi leurs priorités. Je pense que ce ne sera
pas long avant qu'on soit. obligé - on devrait le faire
déjà - de s'y pencher d'une façon mieux
organisée.
Je dois vous dire que, dans le plan de désengorgement des
urgences, nous avons ajouté ou consolidé des unités de
gériatrie et nous avons créé également des
unités mobiles de psychogériatrie à Montréal et
à Québec. Ces unités vont à l'extérieur des
hôpitaux et sont préoccupées évidemment par cette
pathologie. Eux aussi, ils en sont encore à penser aux meilleures
façons d'intervenir.
J'allais dire qu'il y a des éléments dans votre
mémoire qui me paraissent un peu contradictoires. D'une part, vous dites
- J'imagine qu'il vous faut aussi vous fier aux recherches qui sont faites et
elles ne sont pas très nombreuses - qu'il semble y avoir des facteurs
reliés au stress, à l'isolement, etc., et qui semblent propices
au développement des symptômes reliés à la maladie
d'Alzheimer. Par contre, vous insistez à la fin pour dire que c'est une
maladie organique. Donc, d'une part, vous semblez y relier des facteurs d'ordre
social et psychologique et, d'un autre côté, vous semblez affirmer
que c'est une maladie organique et qu'il faut intervenir en ce sens.
Quand vous parlez, à un moment donné, de
déracinement de ces personnes, vous nous dites qu'il vous semble, par
exemple, que, dans la région des Hautes Laurentides, ces personnes
devraient être regroupées au centre hospitalier de L'Annonciation
ou encore dans des unités de l'hôpital Laurentien. Il me semble
que c'est un petit peu en contradiction avec le fait qu'on doit tenir ces gens
dans un milieu naturel le plus longtemps possible, les tenir en contact avec la
réalité le plus longtemps possible.
J'ai visité des unités en Israël où on
s'occupait de malades d'Alzheimer, et l'approche est vraiment de les laisser
dans leur milieu de vie, à la limite. On peut les garder à faire
certaines activités qu'ils ne font plus du tout une fois qu'ils sont
rendus dans un milieu institutionnel.
Votre désir d'utiliser des unités de l'hôpital de
L'Annonciation pour des malades d'Alzheimer, je trouve que cela a
peut-être même un côté inquiétant. D'une part,
évidemment, tout le monde ne vient pas de L'Annonciation, même si
ce sont les Hautes Laurentides. Déjà, il y a une sorte de
déracinement parce que celui qui vient d'une municipalité par
rapport à une autre... La région des Grandes Laurentides est
quand même assez étendue.
Deuxièmement, regrouper ces malades-là toujours ensemble,
est-ce que c'est bon? Je n'ai pas la réponse, je vous le demande. Qu'ils
soient regroupés pour des activités de réadaptation ou de
protection de pertes d'autonomie pour certaines activités dans une
journée, je peux l'admettre. Évidemment, il y a les grands
malades, pour qui, pour le moment, on n'a rien. Il y a quand même
quelques signes encourageants. On me disait qu'aux États-unis il y a
maintenant un médicament qui semble avoir un effet, non seulement pour
ralentir la perte de mémoire, mais peut-être même pour une
certaine récupération de la mémoire. Si on compare
l'argent qui a été consenti à la recherche dans ce
domaine-là, comparativement à l'argent consenti à la
recherche dans le domaine du cancer, il y a des gens qui disent: On se trouve
au point où la recherche sur le cancer a débuté il y a
cinquante ans, on se retrouve au même point aujourd'hui vis-à-vis
des symptômes de cette maladie.
Ma question précise, c'est vraiment vis-à-vis du
regroupement à L'Annonciation. Je comprends que c'est pour les gens des
Hautes Laurentides, mais cela pourrait causer aussi un certain isolement. C'est
une municipalité qui a quoi? - M. Hétu pourrait nous le dire, le
député de Labelle - j'allais dire 6000 habitants, mais c'est 3500
à 4000. Alors, il n'y en aurait probablement pas beaucoup qui seraient
immédiatement de L'Annonciation ou des alentours de L'Annonciation. Je
ne suis pas sûre que ceci est en conformité avec les causes de la
maladie que vous développez. J'aimerais avoir votre réaction
là-dessus. Pourquoi voulez-vous les regrouper? Évidemment, vous
dites que c'est parce qu'il y a
des unités libres, on pourrait les mettre ensemble, mais je ne
suis pas sûre que ce soit la bonne approche.
Mme Pelletier-Lamarche: Si vous le permettez, j'ai
écouté religieusement vos arguments. Ils sont très
pertinents. Quant à savoir si c'est une maladie organique, moi, je fais
une analogie avec les ulcéreux évidemment vous vivez un stress
continuel, puis finalement il se développe des ulcères. Vous, ce
sont des ulcères, un autre, c'est un trouble cardiaque et circulatoire
C'est pourquoi la maladie d'Alzheimer, c'est une maladie organique, mais
évidemment il y a des sujets vulnérables à cette
maladie-là. Au lieu d'avoir des ulcères, ils vont avoir la
maladie d'Alzheimer. Est-ce génétique? On se pose des questions,
on fait beaucoup d'hypothèses évidemment. Sur ce point-là,
je ne peux pas vous donner de précisions. Évidemment, je ne suis
pas généticienne, mais d'après notre expérience
depuis cinq ans, notre petite expérience, évidemment, on a fait
un relevé statistique des personnalités Alzheimer et on s'est
aperçus que c'étaient des gens qui vivaient des stress, des
conflits. C'est une des questions que vous posiez
Quant à la seconde, les maintenir le plus longtemps dans leur
milieu. Je suis entièrement d'accord avec vous Madame la ministre, mais
à un moment donné, la famille n'en peut plus. Quand le malade
répète toujours, qu'il radote, comme on dit en bon
Québécois cela devient stressant pour l'entourage. La famille
envisage le placement, surtout quand la personne fait de l'incontinence. Ils
ont peur de l'incontinence C'est très dérangeant, la nuit comme
le jour.
Cela veut dire que, si on vous fait une requête pour unité
de soins spécialisés, c'est précisément pour
alléger la famille. Cela peut être à court terme, cela peut
être comme un centre de jour. Alors, là il y aura des gens qui
seront formés pour pouvoir aider la famille Idéalement, je suis
d'accord avec vous, Mme la ministre, que tant et aussi longtemps qu'on peut les
maintenir à domicile parce que ce sont des malades qui physiquement ne
requièrent pas de soins infirmiers. Évidemment, iI y a des
conjoints qui vont laisser leur emploi. C'est toute une problématique au
point de vue de la famille.
Mme Lavoie-Roux: Je dois dire que, lorsqu'on admet les carences
ou les lacunes, c'est peut-être à partir de là qu'on
commence à progresser. Je le répète, au Québec, on
en est vraiment aux balbutiements vis-à-vis de cette maladie. Je pense
que nous avons des responsabilités et que nous ne pourrons pas y
échapper. II y a des suggestions Intéressantes que vous avez
faites. Si on veut garder les gens dans leur milieu, il y a des compensations
ou un appui qui peuvent être. Vous avez énuméré
différentes formules qui mériteraient d'être
examinées, peut-être pas dans le contexte immédiat de la
politique de la santé mentale, mats c'est une pathologie à
laquelle on va devoir s'intéresser de plus en plus.
Mme Pelletier-Lamarche: Quant à
I'homogénéité des cas, vous avez fait mention aussi qu'on
peut les placer par exemple dans une unité de soins comme à
L'Annonciation ou il y aurait un étage éventuellement disponible.
De par ma petite expérience, j'ai remarqué en soins de longue
durée qu'il y a des malades de toutes sortes. Or, cela pertube. Le cas
d'un malade atteint d'Alzheimer, à un moment donné quand il lui
prend
I'idée de fuguer, ce n est pas drôle ni pour le personnel
ni pour les autres patients. De même quand il se met à chanter ou
à crier. Pour une partie de leur vie, ces malades ont caché leurs
émotions. Là il n'y a plus de convention sociale, il n'y a plus
rien et les émotions sortent. La voisine d'à côté
quand elle entend pleurer. Vous savez! Je suis d'accord avec vous que ce serait
mieux que ce soit un groupe hétérogène du moins pour le
début de la maladie d'Alzheimer. La voisine qui est bien lucide,
évidemment elle peut l'aider. Je suis d'accord avec vous sur cela. Mais
quand le malade est rendu au milieu de la deuxième phase de la maladie,
iI n'est plus question d'être d'accord ou ne pas être d'accord, je
pense que ce n'est plus possible.
Mme Lavoie-Roux: D'accord Combien y a-t-il de cas d'Alzheimer
dans les Hautes Laurentides pour que vous vous soyez formés en
association?
Mme Pelletier-Lamarche: Dans les centres hospitaliers de longue
durée sur 40 malades, il y en a peut-être une vingtaine. Je vous
dis honnêtement que nous n'avons pas de statistiques précises.
C'est encore un mythe, cette maladie.
Mme Lavoie-Roux: Vous êtes-vous intéressés
à eux à partir des personnes qui souffraient de cette maladie et
que vous avez retrouvées en institution comme par exemple à
L'Annonciation, pour prendre un exemple d'institution de soins
prolongés, ou à partir de situations familiales, soit les
vôtres ou celles de vos proches, ou de vos amis ou de vos milieux?
Pourquoi vous êtes-vous intéressés à cette
pathologie?
Mme Pelletier-Lamarche: C'est précisément votre
deuxième question. J'ai vécu ce cauchemar avec ma mère.
J'ai appris que c'était la maladie d'Alzheimer une semaine avant qu'elle
décède. Alors, évidemment après les sentiments de
culpabilité, j'avais deux choix me laisser aller ou bien faire quelque
chose de concret. C'est là que naquit notre organisme. C'est un
défi et une vengeance un peu à la maladie. Je n'admettais pas mon
ignorance. Alors, nous étions trois co-fondatrices, puis cela va
très bien. II y a encore un mythe. Évidemment, c'est une petite
région, ce n'est pas la métropole. On dirait que
les gens sont mal à l'aise de dire. Bon! ma mère est
atteinte d'Alzheimer. C'est pour cela que je ne peux pas répondre de
façon pertinente à votre question, à savoir
statistiquement comment il y en a. Comme je vous l'ai dit, j'évalue cela
à peu près d'après ma petite expérience à
une quinzaine sur 40 malades. La maladie, il faut quelle soit
diagnostiquée. Vous savez mieux que moi qu'il y a bien des pathologies
qui ressemblent à celle d'Alzheimer. Celui qui a un problème
cardio-vasculaire va avoir les mêmes symptômes que la maladie
d'Alzheimer et, six mois après la vie va être belle, il va avoir
récupéré et tout ira bien. (11 h 30)
Vous allez peut être dire que je suis très optimiste. Oui
je le suis, parce que la recherche a beaucoup évolué avec le THA
associé à la lécithine, on peut même la stopper la
maladie dès le début. Alors, c'est superbe. Tout cela pour vous
dire que.
Mme Lavoie-Roux: Merci, je vais laisser un peu de temps aux
autres.
Mme Pelletier-Lamarche: Oui.
Le Président (M. Baril): Merci, avant de laisser la parole
au député de. Oui, madame, aurrez-vous un commentaire?
Mme Gendron-Savard (Lise): Oui, j'ai un commentaire. Ma
belle-mère est morte au mois d'août dernier. Elle était
à la résidence Riviera à Montréal, sur le boulevard
Gouin, je crois. C'est une ancienne maison qu'on a convertie en petit
hôpital, il n'y avait même pas d'escaliers mobiles et il y avait
environ dix cas d'Alzheimer au 3e étage de cette maison. Les gens
faisaient des fugues. L'eau n'est pas loin. II y en a une qui a failli se noyer
une fois. Ma belle-mère, ils sont allés la ramasser dans un
centre commercial. II n'y a pas assez de surveillance dans ces hôpitaux,
de même qu'à L'Annonciation.
M. Bernard Latour est décédé aussi depuis un an.
J'y suis allée souvent le voir avec sa dame qui était de
Sainte-Agathe. Elle a gardé son mari jusqu'à la dernière
minute, mais quand on change le lit trois fois dans une nuit. Elle passait 24
heures à s'occuper de lui et elle ne pouvait plus le garder. Elle m'a
dit Viens-tu? On va aller à L'Annonciation. Avec tout le conseil
d'administration, on est venus à bout de le faire entrer à
I'hôpital de L'Annonciation, mais cela n'a pas été une
très bonne chose, parce que là il s'est
détérioré. De plus, il n'était plus avec sa femme.
II est vrai que, quand ils ne sont plus avec leur famille, ils s'en vont de
plus en plus bas et ils ne reconnaissent plus personne. Il est mort sans
reconnaître sa femme. C'est pareil pour ma belle-mère, elle ne
nous reconnaissait plus depuis un an. Je veux vous dire que les soins ne sont
pas du tout appropriés. Je vous remercie de m avoir
écoutée.
Mme Lavoie-Roux: Merci
Le Président (M. Baril): Merci. Avant d'aller plus loin
pour les fins du Journal des débats, j'aimerais, Mme Pelletier, que vous
nous présentiez vos invités qui sont en avant, s'il vous
plaît.
Mme Pelletier-Lamarche: Excusez-moi, j'ai un handicap, je suis
malentendante.
Le Président (M. Baril): D'accord. J'aimerais que vous
nous présentiez vos invités pour les fins du Journal des
débats ici, en commission, s'il vous plaît.
Mme Pelletier-Lamarche: Avec plaisir Mme Lise Gendron
conseillère, Mme Louisette Guillemette, conseillère, Mme
Françoise Pelletier-Lamarche (moi-même) personne-ressource, Mme
Jocelyne - bon! un cas d'Alzheimer potentiel, j'ai un trou de mémoire -
Trudel, secrétaire de la société, Mme Lina Valade,
conseillère, Mme Réjane Vendette, secrétaire et Mme
Francine Legault, trésorière.
Le Président (M. Baril): Merci, madame. Je vais laisser la
parole au député de Laviolette. Merci.
M. Jolivet: Merci M. le Président. Je vais commencer par
la boutade que vous venez de faire. Voilà un cas d'Alzheimer! On
n'entendait pas cela dans le passé et on l'entend de plus en plus. Si
quelqu'un oublie quelque chose, il dit. Ah! j'ai la potentialité. On a
dit de la maladie d'Alzheimer que chacun, un peu comme d'autres maladies
quelles soient somatiques ou psychosomatiques, a en lui un germe pouvant mener
à cette chose, mais, d'un autre côté, cela dépend
des circonstances dans lesquelles nous sommes placés dans la vie et qui
font que certains connaissent de plus en plus cette maladie.
II y a aussi des moments de rémission. Si on pense à la
leucémie. II y a des moments de rémission. Mon filleul est mort
après avoir subi cette maladie pendant plusieurs années. Je
connais des gens qui ont des moments de rémission. Je connais des
personnes de mon coin qui ont eu des attaques, si on peut les appeler ainsi, et
qui sont bien aujourd'hui, parce qu'elles ont été traitées
à temps ou qu'elles ont eu cette chance d'avoir un temps de
rémission. On ne sait pas si, dans deux ou trois ans, elles n'auront pas
d'autres attaques.
Ainsi, les gens parlent de plus en plus de cette maladie. Les
médias ont fait mention dernièrement de cas comme celui du
cinéaste qu'on connaît, de sorte qu'on en parle un peu moins en
cachette. Vous le dites bien en rappelant qu'il y a encore des gens qui ne
veulent pas qu'on sache que leur mère, leur frère ou quelqu'un
d'autre sont atteints de cette maladie.
D'un autre côté tout le monde souhaite que la personne qui
a des soins puisse, au départ, être à la maison le plus
longtemps possible.
Dans le passé, on sait comment cela se produisait. Les gens
gardaient à la maison leurs parents malades, leur fils ou leur fille
malades. Mais l'évolution a amené un modèle
d'institutionnalisation qui fait qu'on s'est retrouvé avec des
institutions tellement grandes qu'on ne rendait pas service à la
personne malade et qu'on empirait dans bien des cas son état, de telle
sorte qu'on est arrivé dans d'autres années à sortir ces
gens et à les remettre dans un milieu dit plus naturel.
Mais pour ce faire, il faut donner de l'aide aux familles qui acceptent
de les prendre en charge. Vous avez raison de dire qu'à
l'intérieur des centres hospitaliers de longue durée on n'a
peut-être pas pris le temps ou le soin d'aller vérifier de quelle
maladie étaient atteintes les personnes. On dit. II est sénile,
donc on va le placer là et on va lui donner les soins qu'on est capable
de lui donner pendant le temps qui reste.
Cela a donné cette impression d'une personne qui part de la
maison, entre dans un HLM, d'une certaine façon, de là s'en va au
centre d'accueil et, après ça, s'en va au centre hospitalier de
longue durée. Là, la personne dit. J'approche tranquillement de
l'échéance. Dans ce contexte, plus on approchait vers les cas
lourds, plus on leur donnait des soins qui n'étaient pas
nécessairement appropriés.
Ce que vous nous dites, c'est que les personnes ou les familles sont
prêtes à garder les malades à la maison dans la mesure ou
on leur donne un répit. J'ai cru comprendre qu'une des formes de
répit était un centre de jour pendant que les personnes pouvaient
récupérer, sortir un peu de la maison, aller voir d'autres
parents ou aller magasiner. Pendant ce temps-là, on pourrait non pas
faire, comme on le fait actuellement, parquer nos vieux ou nos malades, mais
plutôt leur donner un lieu ou ils pourraient se rencontrer, où ils
pourraient avoir d'autres formes de soins et aussi une forme d'agrément.
Dans ce sens, et ce que j'ai compris de ce que vous nous proposiez ce matin,
c'est l'installation d'un centre de jour et aussi en même temps d'un
centre un peu mieux organisé pour éviter que les gens aient des
goûts de fugue.
Dans mon coin, dans le temps des fêtes, avant Noël et
après Noël, il y a eu quelques fugues et il en a
résulté des noyades. On ne sait pas de quoi étaient
atteintes les personnes. Mais vous savez ce qui arrive dans la tête de
certaines personnes quand elles se sentent atteintes de quelque chose. Elles ne
veulent pas le subir. Alors, elles se noient ou encore elles vont à
d'autres places. Ce que vous souhaitez, c'est qu'on évite ces choses.
Pour les éviter, vous voulez qu'on donne de l'aide aux familles et en
même temps vous voulez qu'il y ait des moments de répit et un
centre de jour.
Dans ce sens, je ne peux pas être en désaccord. II faut
toujours cependant tenir compte des capacités de l'État à
fournir ce que vous demandez. Mais vous dites. Les CLSC nous donnent un bon
service, ils devraient être mandatés pour le continuer et, en
même temps, les centres hospitaliers devraient davantage avoir des
centres de gériatrie ou on aurait aussi des centres de jour permettant
de donner à la famille les moments de répit que vous
cherchez.
Je pense que c'est cela. Si vous voulez ajouter autre chose à ce
que j'ai dit, libre à vous maintenant.
Mme Pelletier-Lamarche: En effet je suis entièrement
d'accord II y a juste un petit point. Vous semblez croire qu'il y a certains
cas qui ont des périodes de rémission et vous avez
entièrement raison mon cher monsieur. C'est que ces gens sont
très insécures. Or, si les membres du personnel sont
sensibilisés et informés, évidemment, l'approche est
beaucoup plus sécurisante pour ces malades. Donc, effectivement, ils ont
des périodes de rémission.
M. Jolivet: Vous m'avez fait mention d'une chose. En tout cas,
dans le texte, vous avez parlé de musicologues, d'un lieu possible de
musicologie. Cela m'a fait penser au cas d'une personne qui a ces
problèmes et qui, elle, a besoin de ces choses. Mais est-ce que vous
étendez cette chose à tout le monde quand vous dites
ça?
Mme Pelletier-Lamarche: Cela dépend des cas. Celui qui
était un mélomane évidemment est très
sensibilisé à la musique. Alors, il se calme beaucoup plus avec
une belle musique qu'il aime qu'avec des valiums ou n'importe quel
tranquilisant.
M. Jolivet: Vous ne demandez pas qu'il apporte sa trompette pour
réveiller le monde.
Mme Pelletier-Lamarche: Ah! bien s'il le faut!
M. Jolivet: Ha, ha, ha!
Mme Pelletier-Lamarche: Cela dépend. Si c'est pour le
calmer.
M. Jolivet: Mais comme vous l'avez dit, ils sont actuellement
dans des soins prolongés et ils dérangeraient pas mal le monde.
Mais ce que vous voulez dire, c'est un lieu où ils pourraient
écouter de la musique et se détendre en même temps, selon
les besoins.
Mme Pelletier-Lamarche: Oui, effectivement. II y a aussi une
autre mise au point à faire, mais disons que cela me préoccupe
moins qu'il y a cinq ans. II y a cinq ans, il y avait surmédication.
Entre vous et moi, la maladie d'Alzheimer - je ne parle pas des cardiaques
ou
d'autres pathologies - mais les malades de la maladie d'Alzheimer ne
requièrent pas de médicaments, sauf qu'il peut arriver qu'un tel
malade peut avoir un trouble cardiaque. Je suis d'accord qu'il a besoin de
pilules pour son coeur. Mais pour la maladie d'Alzheimer comme telle, il n'y a
pas de médicaments. J'ai vécu personnellement cette
expérience avec ma mère. Si vous voulez régresser, prenez
des médicaments.
M. Jolivet: En fait, on va donner des pilules pour baisser ou
remonter la pression. On va lui dire: Vous avez probablement une crise de rage
parce que vous vous mettez à crier ou à chanter. À ce
moment-là, on va lui donner un médicament pour le calmer. On lui
donne des calmants. Vous dites qu'on devrait davantage centrer notre recherche
sur la nature de la maladie. Si on découvre qu'elle a la maladie
d'Alzheimer, il ne faut pas lui donner des médicaments comme moyen de la
guérir. Dans la mesure où il y a actuellement des recherches qui
nous amènent à penser qu'il y a un moyen de stopper
l'évolution de la maladie, comme vous le dites, il est donc possible que
des médicaments soient nécessaires.
Mme Pelletier-Lamarche: Entièrement d'accord avec vous
pour les sujets de 40 à 50 ans, mais je ne parle pas de la personne de
80 ans. Il ne vaut pas la peine qu'on s'en occupe. On va lui donner beaucoup
d'amour, beaucoup de soins, d'accord, mais de là à lui faire
subir une batterie de tests, je suis un petit peu moins d'accord. Mais pour la
personne de 40 ans et plus, il y a des possibilités.
M. Jolivet: Vous m'inquiétez un petit peu dans ce que vous
venez de dire, dans le sens où vous dites: Parce qu'elle a 80 ans, on
s'en occupe moins.
Mme Pelletier-Lamarche: Non, non. Je veux dire faire subir une
batterie de tests, faire subir une tomographie axiale, des injections, etc.
C'est très éprouvant pour la personne de 80 ans. On va lui donner
une bonne qualité de vie, d'accord. C'est très important pour
elle. Mais pour la personne de 40 ou de 50 ans, dès les premiers
symptômes... parce que vous savez mieux que moi que cela prend six mois
pour faire un diagnostic de la maladie d'Alzheimer. Cela prend bien six mois.
Il y a des examens neuro-psychologiques, physiques, etc. Six mois pour
être sûr... Enfin, on n'est jamais sûr - je vais vous faire
rire - tant qu'il n'y a pas d'autopsie. Ce n'est pas le malade lui-même
qui va le savoir, ce seront les autres qui sauront que c'était bel et
bien la maladie d'Alzheimer. Mais aujourd'hui, avec la tomographie axiale, je
pense qu'on est pas mal sûr du diagnostic.
M. Jolivet: Je vous remercie. Je vous félicite pour le
travail que vous faites. Je pense que c'est important. La ministre devra, dans
sa politique sur la santé mentale, tenir compte de ce que vous avez dit.
Je suis quand même bien conscient qu'elle ne pourra pas répondre
à tout, mais au moins si un pas additionnel est fait, ce sera tant mieux
à ta fois pour votre organisme et pour les gens que vous
représentez. Merci beaucoup.
Mme Pelletier-Lamarche: À mon tour de vous remercier. Vous
êtes tous sympathiques et au plaisir de vous revoir!
Le Président (M. Baril): Madame, je m'excuse, il reste
encore un peu de temps au côté ministériel pour vous poser
des questions. M. le député de Labelle aurait peut-être
quelques questions à vous poser.
M. Hétu: Mesdames, je voudrais vous féliciter et
vous remercier aussi pour le travail que vous faites dans les Laurentides. Mme
Pelletier, je sais que vous vous occupez des malades de la maladie d'Alzheimer
depuis assez longtemps. Vous avez une bonne connaissance du milieu
également. Depuis que vous avez commencé à vous occuper de
ces malades, est-ce que vous pouvez établir la progression du nombre de
personnes dans les limites des Laurentides, disons? Au début, vous aviez
quand même détecté certaines personnes malades, comme votre
mère, dont vous parliez tout à l'heure, mais dans l'ensemble de
la population, selon vous, est-ce qu'il y a une progression
accélérée?
Mme Pelletier-Lamarche: Je ne parle pas de Sainte-Agathe, parce
qu'on y est trop connus, mais dans la périphérie de
Sainte-Agathe, oui. les gens ou le commun des mortels va identifier son
père, sa mère en disant: Oh! il souffre peut-être de la
maladie d'Alzheimer. Nous intervenons et nous leur donnons des renseignements.
Ils sont beaucoup plus réceptifs.
M. Hétu: Mais avez-vous une idée du
pourcentage?
Mme Pelletier-Lamarche: Ah! les statistiques n'ont jamais
été mon fort, mais, comme je vous le dis, iI y en a
peut-être 8 %, peut-être 8 % de la population.
M. Hétu: C'est beaucoup 8 %, quand même.
Mme Pelletier-Lamarche: Oui, c'est énorme. (11 h 45)
M. Hétu: Maintenant vous parlez d'un comité de
concertation, de se concerter avec le milieu, le CLSC et le CRSSS. Est-ce que
vous avez eu des rencontres avec ces organismes en fonction?
Mme Pelletier-Lamarche: Ah! mon Dieu! ils sont très
sensibilisés, les CLSC surtout.
M. Hétu: L'organisme communautaire qui est passé
avant vous disait qu'à un moment donné iI avait de la
difficulté à avoir des comités de concertation et qu'il
soit écouté à ce niveau. Est-ce votre cas dans le milieu
des Laurentides?
Mme Pelletier-Lamarche: Nous avons été vraiment
bien servis dans notre région.
M. Hétu: Alors, je vous remercie.
Le Président (M. Baril): J'aimerais demander au
député de Laviolette de nous donner son mot de la fin.
M. Jolivet: En fait, ce sera bien simple. Merci pour les gens que
vous représentez. Félicitations et ne lâchez pas!
Le Président (M. Baril): Mme la ministre,
Mme Lavoie-Roux: Merci sincèrement pour votre
présentation. En tout cas, c'est important pour nous de ne pas oublier
tout ce domaine de la psychiatrie qui touche majoritairement des personnes
âgées. Encore une fois, ce sont peut-être des petits pas
qu'on pourra faire, mais si on ne les fait pas, ce sera un problème
vraiment très crucial, au plus tard d'ici dix à quinze ans.
Alors, je vous remercie de vos suggestions.
Mme Pelletier-Lamarche: Je sais à l'avance que vous
êtes bien sensibilisés. C'est un gros pas.
Le Président (M. Baril): Je vous remercie beaucoup. Je
vous souhaite un bon voyage de retour.
Une voix:...
Le Président (M. Baril): Je vous remercie et je vous
souhaite un bon voyage de retour.
Mme Pelletier-Lamarche: Merci beaucoup, mesdames et
messieurs.
Le Président (M. Baril): J'invite immédiatement M.
Yves Lecomte et son groupe, s'il vous plaît.
Bonjour, M. Lecomte.
M. Yves Lecomte et Mme Marie Guertin
M. Lecomte (Yves): Bonjour.
Le Président (M. Baril): J'aimerais que vous
présentiez la personne qui vous accompagne, s'il vous plaît.
Mme Guertin (Marie): Je me nomme Marie Guertin.
Le Président (M. Baril): Vous êtes madame? Mme
Guertin: Marie Guertin.
Le Président (M. Baril): Cela me fait plaisir, madame.
Vous savez que vous avez 20 minutes pour votre présentation et 40
minutes pour les questions après votre présentation.
M. Lecomte: Tout d'abord, on tient à excuser l'absence de
M. Yvon Lefebvre qui est en train de faire de la formation dans un des centres
de crise financé par le ministère, celui d'Hochelaga-Maisonneuve.
Comme c'était déplacer beaucoup de monde, il n'a pas pu venir
finalement..
Dans un premier temps, je vais vous lire le résumé du
mémoire et, dans un deuxième temps, Mme Guertin va vous illustrer
comment fonctionne notre projet.
Mesdames et messieurs, nous vous remercions d'avoir accepté de
nous rencontrer et de discuter d'un projet clinique que nous
expérimentons depuis 17 ans. Professionnels non-médecins, nous
avons participé à une équipe de professionnels et de
citoyens qui a mis sur pied le Centre de santé mentale communautaire de
Montréal, structure-pivot - c'est un terme qui va revenir dans le
mémoire - des années soixante-dix et soixante-quinze dans les
quartiers centre-sud et centre-ville de Montréal, donc, dans des
quartiers très défavorisés.
Cette expérience que nous poursuivons toujours a
évolué au cours des ans, mais s'appuie encore sur les mêmes
principes Initiaux. Ce travail clinique - pour nous, c'est extrêmement
important de venir vous parler clinique, de venir vous parler des besoins des
patients à qui devrait s'adresser une politique de santé mentale,
à savoir les patients chroniques - ce travail clinique sert de point de
repère au projet soumis dans notre mémoire. Donc, dans une
première partie, nous exposons ce projet et, dans la deuxième
partie, Mme Guertin illustrera avec exemples à l'appui comment
fonctionne une telle structure.
La lecture du rapport. Pour un partenariat élargi, à la
lumière de notre expérience clinique, nous amène à
vous proposer une hypothèse pour actualiser les principes et
orientations du projet de politique, soit la création d'un réseau
de centres locaux de santé mentale entièrement dévolus
à la santé mentale, qui traiteraient en priorité les
malades mentaux chroniques et qui joueraient le rôle de structure-pivot
des services en santé mentale dans un secteur
déterminé.
Avant de décrire ces centres, deux étapes doivent
être franchies: décrire la philosophie, les objectifs et les lieux
de service du système dans lequel nous voulons oeuvrer et situer des
partenaires du système québécois actuel en fonction de ce
système-guide.
Le système sur lequel est fondée notre analyse se nomme
système de soutien communau-
taire. La philosophie de ce système stipule que I'être
humain est un être biologique et psychologique, imbriqué dans un
réseau social et culturel qui facilite, soutient ou inhibe le
développement de la personne. Ce système se fonde sur la
définition qu'a donnée le comité Harnois de la maladie
mentale. On a souvent tendance à oublier cette définition, mais
c'est le coeur de ce projet-là et toutes les propositions
découlent de cette définition qui est centrale. Ce réseau
se divise selon le tableau qui est inclus dans le mémoire en page 11 -
pour ceux qui ont le mémoire - entre le réseau social informel et
le réseau social formel. Je vous invite à consulter ce tableau -
comme on dit, une image vaut 1000 mots - et vous allez voir un peu comment est
le système actuel.
Le premier comprend les usagers, les familles, les amis les lieux de
travail de loisir, les ressources alternatives et est peu structuré.
Dans ce réseau, situé à gauche du tableau, l'intervention
est immédiate et faite par des non-professionnels pour des
problèmes légers, alors que le réseau formel -
c'est-à-dire que le réseau informel était à droite
et le réseau formel était à gauche, si je me souviens bien
- est constitué par les institutions et les professionnels. Ce
réseau est très structuré et traite les problèmes
graves. Dans ce modèle le réseau formel est complémentaire
du réseau informel. On n'entend pas cela souvent mais pour nous, en fait
cela découle de la philosophie du rapport Harnois. Le premier
intervenant, c'est le réseau informel. Le réseau formel entre en
jeu lorsque le réseau informel ne peut vraiment aider les gens en
difficulté. Cela fait référence aussi aux dires du Dr Aird
qui est déjà venu devant une commission il y a deux ou trois ans
et qui avait dit que le réseau actuel prenait en charge tous les
services et que c'était une illusion finalement sur laquelle les
services actuels étaient fondés, mais que cela ne devait pas
être ce réseau qui devait prendre en charge tous les
problèmes. Dans ce modèle, le réseau formel est
complémentaire du réseau informel. II intervient lorsque les
problèmes dépassent les capacités d'adaptation et de
résolution des membres du réseau informel.
Dans le système de soutien communautaire, les modèles
organisationnels sont multiples, car ils sont développés par les
communautés. II faudrait revenir, à un moment donné, sur
les minorités ethniques dont on n'entend pas beaucoup parler et qui,
dans les années futures, vont exercer énormément de
pression sur le système pour recevoir des services.
Afin de faciliter sa souplesse, le réseau formel a des mandats
orientés vers des objectifs et non vers des services spécifiques.
Les objectifs sont au nombre de six la promotion, la prévention,
l'identification des personnes en difficulté, la croissance,
l'intervention et la restauration, la stabilisation de la crise et - un mot
barbare - la sustentation, c'est-à-dire aider les personnes à
conserver leur niveau de fonctionnement maximal.
Si on compare les lieux de service du système
québécois à ceux du système communautaire qui est
la base de notre proposition, la classification des lieux se présente
comme suit le lieu naturel, constitué par la famille, les amis, le lieu
amélioré, c'est la famille, le milieu de travail et les amis qui
ont reçu une certaine aide, le lieu créé,
c'est-à-dire les ressources alternatives - maintenant, on va entrer dans
le réseau institutionnel - le lieu de soutien qui se divise entre
privé et public. Le lieu public est constitué par les cliniques
externes de psychiatrie, les urgences psychiatriques, les CLSC, les centres de
crise. Les lieux de soins privés comprennent les cliniques
médicales ou les cliniques de psychothérapie. Les lieux
protecteurs sont constitués par les centres hospitaliers psychiatriques
les pavillons, les familles d'accueil, les unités de soins, les foyers
de protection sociale, etc. L'analyse - là, on arrive à un point
important qui est le nerf de la guerre à notre avis - de ces divers
lieux de service démontre qu'au Québec le système est
hospitalo-centrique et que 99 % des sommes dévolues à la
santé mentale le sont dans le réseau formel,
particulièrement dans les centres hospitaliers psychiatriques. Pour
rendre ce système opérationnel et efficace, utiliser de
façon maximale ces divers éléments et en faire la
coordination en fonction de ces objectifs, il faut un organisme pivot
implanté dans la communauté, voué à la santé
mentale communautaire, cet organisme devrait offrir des services directs et les
coordonner avec les services sociaux de santé déjà
présents dans le territoire desservi.
Donc, nous proposons comme structure-pivot ce qu'on appelle le centre
local de santé mentale. Ce centre est un organisme du réseau
public dont le conseil d'administration est composé des
représentants des divers réseaux des usagers et des citoyens
nommés par suffrage. Le centre est implanté dans un secteur ou il
assume la responsabilité de tous les services de soutien public en
santé mentale et coordonne tes services de santé mentale des
autres partenaires lesquels respectent les particularités
socio-économiques des populations.
Ces services sont assurés par une équipe
transdisciplinaire et un intervenant est responsable du patient tout au long de
son cheminement de façon à assurer la continuité des
soins. Le centre poursuit les six objectifs énumérés
précédemment. Sa clientèle prioritaire, ce sont les
patients chroniques. Le centre est donc amené à réaliser
et à coordonner sur son territoire la politique de
désinstitutionnalisation. L'institutionnalisation actuelle rend le
système de soins centralisé à tel point que, dans un seul
lieu des centres hospitaliers psychiatriques, les patients chroniques
reçoivent au moins 21 services couvrant autant de besoins de ces patient
habitation, soutien financier, gérance
des crises, suivi médical, etc.
Désinstitutionnaliser implique que tous ces patients sont
maintenant traités dans la communauté, c'est-à-dire dans
un système dorénavant très décentralisé dans
lequel les patients doivent satisfaire leurs besoins, souvent dans autant de
lieux qu'il y a de besoins. Si aucun organisme localisé dans la
communauté n'assume la responsabilité de ses patients et ne
coordonne les lieux qui satisferont leurs besoins, le risque est souvent grand
que des problèmes soient engendrés.
Pour cela, je me base sur une étude que nous avons faite sur le
système américain. Fragmentation des services, rejet de ce qu'on
appelle les patates chaudes, refus de la responsabilité de traiter ces
patients, qui ne reçoivent alors de services nulle part, la porte
tournante par laquelle ils sont obligés de recourir à l'asile
pour solutionner leurs problèmes, absence de coordination et
d'unification des services.
Tôt ou tard, si nous voulons un système de soins
décentralisé dans lequel les patients chroniques reçoivent
en priorité les services auxquels ils ont droit, il s'avérera
essentiel qu'une structure de soins devienne responsable de leur traitement, de
la coordination et de l'unification des lieux de soins, de l'animation du
milieu pour les accepter, etc.
Donc, il faut prévoir une structure pivot communautaire, sinon
ces patients devront, à nouveau, se tourner vers les asiles pour
être accueillis et soignés. La création de ces centres nous
semble possible par une réallocation des effectifs professionnels et des
budgets actuellement dévolus aux centres hospitaliers
psychiatriques.
Avant d'allouer de nouvelles sommes importantes aux institutions
psychiatriques, il nous semble opportun d'analyser les possibilités de
réallouer ces ressources vers des lieux de traitement communautaires
dont le centre local de santé mentale, en vue d'atteindre
l'équité des ressources au bénéfice des patients
chroniques
Mme Guertin: Je vais maintenant prendre le relais pour essayer
d'illustrer le fait que le modèle dont vient de parler mon
collègue, Yves Lecomte, n'est pas un modèle qui existe uniquement
sur papier et qui a été formulé uniquement pour les
besoins de la cause actuelle. C'est un modèle
opérationnalisé au centre de santé mentale de
l'hôpital Saint-Luc depuis déjà plus de quinze ans.
Au départ, le centre de santé mentale a été
un organisme qui a été subventionné directement par le
ministère à une époque où il n'y avait pas de
service psychiatrique dans le secteur de l'hôpital Saint-Luc. Au moment
de la réforme Castonguay-Nepveu, il y a eu intégration de ce
centre de santé mentale dans le giron du centre hospitalier, les centres
psychosociaux et les centres de santé mentale ne pouvant plus exister
sous cette forme.
(12 heures)
Par contre, en ce qui concerne l'intégration à
l'hôpital dans le projet de négociation de notre
intégration, on a réussi à préserver un certain
nombre, je dirais, de privilèges et une certaine philosophie de travail
qui nous a été laissée et qui nous permet de travailler
d'une façon assez particulière en plus du fait que nous avons
conservé de façon active la corporation du centre de santé
mentale - c'est ainsi qu'elle s'appelait à l'époque - qui est
devenue maintenant COSAM. Nous avons continué d'utiliser cet OSBL, comme
on I'entend souvent dire. Nous l'avons conservé pour pouvoir mettre en
place des projets que le milieu hospitalier ne nous permet pas de mettre en
place, non pas par mauvaise volonté ou parce qu'ils sont contre, mais
parce que le milieu hospitalier universitaire de pointe à
Montréal est beaucoup trop lourd pour penser que I'on puisse très
rapidement mettre des choses en place au chapitre de la santé
mentale.
Donc, dans ce contexte, je veux vous présenter un petit peu
l'évolution du travail qu'on a fait à Saint-Luc et qu'on continue
de faire depuis plus de quinze ans.
Au début, je dois vous dire qu'on arrivait, jeunes
professionnels, avec une idéologie et une philosophie extrêmement
radicales et extrêmement anti-asilaires. Ce n'est donc pas d'hier qu'on
est contre l'asile, sauf qu'à cette époque on ne savait pas de
quoi on parlait, parce qu'on ne savait pas ce qu'était la maladie
mentale. On ne savait pas ce qu'était la schizophrénie et la
psychose au jour le jour.
Dans un premier temps, donc, il n'était question d'hospitaliser
personne. C'était d'autant plus facile qu'on n'avait pas de lits
à notre disposition, les lits de l'hôpital Saint-Luc
n'étant apparus qu'en mai 1973 ou quelque chose comme cela. Pendant un
certain nombre d'années, on peut dire qu'on a fonctionné un peu
sans filet et on faisait des hospitalisations à domicile. C'était
une époque assez glorieuse et assez naïve. De toute façon,
la plupart des patients que l'on recevait venaient de l'asile Ils venaient de
Saint-Jean-de-Dieu à l'époque. Ils ne voulaient pas
précisément y retourner. Ils étaient contre l'asile, comme
nous étions contre l'asile. On s'entendait bien là-dessus
jusqu'au moment où on s'est rendu compte, à partir de ces
contacts quotidiens que l'on a eus avec une clientèle extrêmement
lourde et extrêmement défavorisée sur le plan
socio-économique - cela ajoute considérablement aux
problèmes qu'on éprouve - on s'est rendu compte, à un
moment donné, qu'on avait besoin de ressources et de services. On avait
donc besoin de toutes les ressources et de tous les services.
Naturellement, je vous fais des raccourcis, mais ce qu'on vous dirait
à ce moment-ci à Saint-Luc, c'est que pour les patients dont on
s'occupe, on a besoin.. Je dis "patients", parce que, pour moi, cela reste le
mot le plus noble et
le plus significatif. Ce n'est pas gratuit. Patient veut dire souffrance
étymologiquement; patient veut dire quelqu'un qui attend et qui doit
accepter qu'il y ait des délais avant que des choses se passent. Je
préfère conserver ce mot dans mon vocabulaire. Ce n'est pas
médical pour moi, le mot patient.
Donc, on s'est rendu compte qu'on avait besoin de tout, qu'on avait
autant besoin de lits d'hôpital qu'on avait besoin de la fonction
asilaire jusqu'à la chambre en ville, mais pas le taudis en ville, la
chambre subventionnée, la chambre rénovée, comme la ville
de Montréal l'a fait cette année à Montréal. On
peut dire que nous sommes extrêmement satisfaits de cet aspect. Je pense
qu'ils n'ont pas tout fait pour la personne itinérante, mais que l'on
rénove des centaines de chambres, je vous avoue que c'est
drôlement utile en termes de qualité de vie pour la
clientèle dont on s'occupe.
Nous avions donc besoin de la chambre subventionnée et
rénovée jusqu'à des lits à long terme et qui
peuvent jouer à un moment donné une fonction asilaire
auprès d'une population extrêmement démunie et
détériorée. On avait donc besoin de tout cela, en passant
bien sûr par toutes les activités thérapeutiques qu'on peut
imaginer à l'intérieur comme à l'extérieur des
institutions, en utilisant tout ce que le réseau alternatif peut nous
offrir en complémentarité des services. Je pense que c'est un
point très clair pour nous. On se situe toujours dans une optique de
complémentarité. On a l'impression qu'il y a de la place pour
tous les gens qui veulent venir jouer avec nous dans cet immense terrain de la
santé mentale. Il ne s'agit pas de faire un "free-for-all". Il ne s'agit
pas que n'importe qui fasse n'importe quoi, mais je pense qu'on peut affirmer
qu'il y a de la place pour tous les gens qui veulent travailler en santé
mentale, moyennant un certain nombre de conditions dont on a parlé dans
le mémoire, particulièrement dans celui de M. Yves Lecomte.
On a donc besoin de tout, du lourd au léger, de l'alternatif
à l'institutionnel en passant par l'intermédiaire. Pour en
arriver à ces conclusions, on s'est fondés beaucoup sur un
processus d'évaluation qu'on a énormément rigorisé
au fil des années. Les premières années où on
rencontrait les patients, on fonctionnait un peu à la bonne franquette,
ce qui n'était pas mauvais. Mais il y avait bien souvent des choses qui
nous échappaient. Il y avait un certain nombre de dimensions qui
pouvaient être autant psychologiques que biologiques ou sociales et qui
pouvaient nous échapper dans la cueillette des informations et des
données qu'on voulait ramasser à leur sujet. On s'est rendu
compte à un moment donné que, lorsqu'il s'agissait de faire un
projet thérapeutique, on n'avait peut-être pas un outil
suffisamment détaillé.
On s'est attardés beaucoup à développer un outil
d'évaluation et on s'est attardés beaucoup au processus
d'évaluation auquel on consacre encore maintenant
énormément de temps dans le travail qu'on fait. Ce processus
d'évaluation va beaucoup plus loin que simplement un processus de
diagnostic. Il comprend, bien sûr, l'aspect plus médical du
diagnostic, bien que je revendique personnellement comme psychologue le droit
au diagnostic. C'est quelque chose que je peux faire, un diagnostic
psychologique. Il y a certains de mes collègues aussi qui, selon leur
profession, peuvent poser aussi des diagnostics professionnels. Mais il reste
que ce formulaire ou ce protocole qu'on utilise va beaucoup plus loin que le
simple diagnostic psychopathologique. C'est une évaluation dans laquelle
on essaie de ramasser vraiment toutes les données qui vont nous
permettre, de façon assez souple, d'élaborer par la suite en
équipe un projet thérapeutique.
Donc, à un moment donné, après avoir
rencontré quelqu'un - cela peut être à une reprise,
à deux ou à trois reprises selon le problème qui est
présenté et tous les éléments qu'on a à
prendre en compte - on va se rencontrer en équipe très
régulièrement. Il n'y a pas une évaluation qui n'est pas
discutée dans l'équipe, l'équipe se composant de tous les
professionnels qu'on retrouve en santé mentale, parce que nous, on est
une clinique externe de psychiatrie au sens classique si l'on veut, mais on a
des particularités comme je vous le soulignais tout à l'heure.
Ces différents professionnels qui ont toujours travaillé, c'est
quelque chose qui nous est resté de notre tradition passée, dans
une approche assez consensuelle, assez démocratique et assez
respectueuse où les gens ont quand même des
spécificités, mais où les gens partagent des choses...
Le Président (M. Bélanger): Si vous vouliez
conclure, s'il vous plaît.
Mme Guertin:... élaborent un projet thérapeutique
qui peut comprendre l'utilisation de toutes les ressources dont vous avez pu
entendre parier ici avec, comme personne-pivot, le thérapeute principal
qui prend en charge cette personne et qui assure la coordination du traitement
tout au long du traitement C'est-à-dire parfois pour quinze ans. C'est
mon cas, pour certains de mes patients.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
madame. Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Je veux remercier M. Lecomte et Mme... non pas
Giguère?
Mme Guertin: Guertin.
Mme Lavoie-Roux:... Guertin pour leur mémoire. Vous
apportez à la commission une expérience différente de
celles qui nous ont été présentées jusqu'ici. Je ne
m'attarderai pas sur la question du centre communautaire en santé
mentale. Mon collègue, le député de Laurier, veut
revenir sur ce sujet. Je voudrais simplement vous faire préciser
un point au tout début, quand vous nous avez présenté
votre tableau de la page 11 ou de la page 15 dans lequel vous faites une
différence entre le réseau formel et le réseau informel.
À ce moment, j'ai cru comprendre que les gens devraient en premier lieu
arriver au réseau informel et par la suite, j'imagine selon les besoins
ou les circonstances, le réseau formel interviendrait selon le type
d'interventions qui semblerait requis. Est-ce que j'ai bien compris ou si j'ai
mal compris? Si j'ai bien compris que c'était comme cela ce
réseau informel ou les gens s'adresseraient en premier, pour vous,
est-ce votre centre de santé en maladie mentale, un centre de
santé mentale ou un organisme sans but lucratif? En deuxième
question, vous travaillez dans une clinique externe à Saint-Luc, mais
vous travaillez aussi à l'intérieur d'un organisme sans but
lucratif. J'aimerais que vous nous fassiez connaître un peu la nature de
cet organisme sans but lucratif et les liens qu'il a avec des services de
clinique externe que vous offrez.
M. Lecomte: D'abord, pour savoir ou on s'en va, il faut avoir des
objectifs, mais préalablement il faut avoir un système dans
lequel on classifie les organismes ou les partenaires si l'on veut, prenons le
terme du rapport Harnois. Dans le tableau que vous avez devant vous, cela se
divise entre réseau informel et formel. Le réseau informel, c'est
l'ensemble des partenaires que nous avons tous conjoints, famille, etc. Et on a
essayé de les classifier pour savoir à qui on avait affaire, quel
genre de partenaires on pouvait retrouver dans ce réseau. Le principe du
système de soutien communautaire, c'est que toute personne qui a des
difficultés devrait trouver autour d'elle une personne pour l'aider. Si
un conjoint est déprimé, si cela a mal été à
son travail, il est évident que, si le soir il en parle à sa
conjointe, celle-ci va l'écouter et lui apporter un certain soutien, ce
qu'on appelle des aidants naturels, si l'on veut.
Dans le milieu du travail, c'est la même chose, on peut partager
ce qui nous est arrivé. Supposons qu'il y a eu une chicane la veille -
prenons l'exemple inverse - entre les deux conjoints qui travaillent -
maintenant la plupart travaillent - ils peuvent en parler au travail et ils
obtiennent une certaine aide, si l'on veut. Mais si - prenons l'exemple de la
dépression, l'état de tristesse - cela dure, si cela s'aggrave,
si la personne devient disfonctionnelle et ne trouve pas dans son réseau
les amis, etc, l'aide qu'il faut, elle va donc devoir tôt ou tard
s'adresser, si elle ne veut pas que cela se détériore au point
qu'elle devienne disfonctionnelle, à une structure ou à un
professionnel, à un lieu qui sera plus structuré, d'où le
modèle est, si l'on veut, révolutif. D'un côté, ce
sont des problèmes légers, temporaires et, quand on fait affaire
au réseau institutionnel, ce devrait être des problèmes
plus graves. Mais te problème actuel, c'est la porte d'entrée
dans le réseau formel. Alors, on sait fort bien que ce sont les centres
hospitaliers, que ce sont les urgences psychiatriques en majorité pour
les problèmes de santé mentale.
Bien souvent, dans ce réseau pour X raisons, les gens vont
peut-être "prioriser" des problèmes tégers pour lesquels
nous pensons qu'ils pourraient être aidés par les ressources
alternatives ou par les aidants naturels. Ce réseau devrait "prioriser",
d'après nous, les problèmes graves. Donc c'est pour cela qu'on
parle des malades mentaux chroniques. Le réseau, le CLSM qu'on propose,
devrait être à la jonction de ces deux systèmes. Il devrait
être dans le tableau "le réseau de soutien social" sous la
rubrique "formel" dans le secteur public. Il serait dévolu
entièrement à la santé mentale il serait légalement
reconnu par le ministère comme un CLSC, un CH, un CAR, un CSS, ce serait
la cinquième structure si Ion veut. Nous, idéalement, on
privilégie qu'il relève d'une division de la santé mentale
au ministère. Je peux vous sortir le tableau. Cest un gros truc, le
ministère. Alors, plutôt qu'être éparpillé il
aurait sa propre division et relèverait de la santé mentale.
Donc, ce réseau serait dévolu à la santé
mentale, en priorité pour les malades mentaux chroniques. Ici, au
Québec, une statistique circule de ce temps-ci, c'est 60 000 Statistique
qu'il faudrait contrôler, elle vient des États-Unis. II y a eu des
études et on dit que 1 % de la population a des problèmes mentaux
graves. On pourrait faire une gradation là-dedans pour situer te plus ou
moins grave. Mais disons que généralement c'est grave, mais on
peut avoir des niveaux de gravité plus grands que d'autres
Ce qu'on oublie de dire, Mme la ministre, dans les statistiques, c'est
que le Dr Tatbot aux États-Unis dit que 6 % de ce 1 % ont besoin de
vivre dans un milieu extrêmement protégé comme l'asile.
Donc, si on applique la structure ici, on réduit sensiblement la
population asilaire. D'environ 10 000 actuellement, on pourrait la
réduire à environ 3000. Si on applique cette statistique de 1 %,
cela fait environ 60 000 patients chroniques.
Quand on parle de réallocation de ressources, c'est fondé
et il faut une volonté ferme pour que cela puisse se faire. Vous le
savez comme moi, ce n'est pas facile. Si on veut un véritable
partenariat. Je suis pour le partenariat, je trouve que c'est une bonne
idée du comité Harnois, mais il faut donner les outils pour qu'il
se réalise, ce partenariat. On le voit dans le tableau, 99 % de l'argent
va dans le réseau formel. Si vous ne donnez pas d'argent à une
structure qui puisse concurrencer les CH psychiatriques, qui puissent prendre
charge dans la communauté des patients dont ils ont la
responsabilité habituellement et que vous ne donnez pas un peu d'argent
au réseau informel, même un peu, disons beaucoup, entre autres
aux
ressources alternatives - je vais vous amener à parler de COSAM,
notre ressource alternative - il n'y en aura pas de partenariat. C'est
impossible. (12 h 15)
Mme Guertin: C'est cela. On pense qu'il ne peut y avoir de
partenariat qu'entre des partenaires, qui ne sont peut-être pas de force
égale, mais qui peuvent quand même être de taille à
se confronter et à se rencontrer sans être absolument certain
qu'il va y avoir un gros qui va écraser un petit quelque part dans un
coin. Cela, je pense que c'est fondamental et là, on est tout a fait
dans le sens du rapport Harnois, le premier principe étant celui de la
personne au centre du traitement - je pense que c'est ce qu'on vous a
démontré tout à l'heure - le deuxième principe
fondateur étant celui de l'équité.
L'équité, c'est l'équité des allocations
financières et des ressources humaines. On a l'impression, nous,
actuellement - on n'est pas des spécialistes de la question, mais cela
fait quand même un bout de temps qu'on travaille dans le domaine - que,
s'il y avait réallocation des ressources financières et humaines,
on pourrait peut-être faire énormément de choses sans
même qu'il y ait injection d'argent neuf. C'est une hypothèse, en
tout cas, qui serait drôlement intéressante à
considérer de façon sérieuse.
M. Lecomte: Pour conclure sur ce point, Mme la ministre, si on
pratique la désinstitutionnalisation - l'expérience
américaine le démontre - Il faut que les employés qui sont
syndiqués et qui veulent garder leur emploi - moi aussi, je suis un
syndiqué, remarquez bien; donc, je tiens à mon emploi - il faut
que ces gens puissent pratiquer dans un lieu qui puisse leur permettre
d'utiliser leur capacité et de se développer.
Or, vous savez que, actuellement, dans le réseau de la
santé mentale - II y a environ 12 000 personnes qui y travaillent - 40 %
sont dans le secteur administratif, 25 % sont des préposés et je
ne me souviens pas des statistiques, mais plus de 15 % sont des
infirmières.
Si vous sortez les patients, il va falloir relocaliser ces
gens-là quelque part, il va falloir qu'ils puissent travailler. Donc, il
faut qu'il y ait un milieu ou une structure qui puisse les accueillir dans le
réseau public, mais qui soit dans la communauté.
Deuxièmement, il faut que ce milieu soit assez flexible pour
permettre de former, entre autres, les préposés... mais c'est
quand même important qu'on les forme et les gens qui sont dans te travail
de bureau, disons, qu'on puisse les former pour qu'ils rendent d'autres
services que ceux qu'ils rendent actuellement...
Donc, qu'on améliore leur formation et qu'on leur permette
l'exercice de leur nouvelle fonction. Là, j'en viens à COSAM,
notre organisme. Nous, à l'origine, le Centre de santé mentale
communautaire de Montréal - c'est un OSBL qui a été
créé en 1970 par des anglophones et des francophones à la
suite d'une recherche - a pris charge de la santé mentale dans les
quartiers centre-sud et centre-ville. À la suite d'une pression dans les
médias, il a obtenu de l'argent du ministère, 350 000 $ en 1972 -
si on actualise ces chiffres, c'est quand même assez élevé
- pendant deux ans.
La loi 65 est arrivée et là on a dû entrer dans une
des quatre cases. Là, on est entrés à l'hôpital
Saint-Luc. On a réussi à cause de la force du groupe à
pouvoir se faire accepter et à pouvoir exercer selon la philosophie qui
était à l'origine, parce que, nous, on s'est inspirés
fortement - ce n'est pas pour rien qu'il s'appelle Centre de santé
mentale communautaire de Montréal - des Communities Mental Health
Centers américains.
Mais, contrairement à ces centres américains, dès
le début, on a priorisé les malades mentaux chroniques qui
venaient de Louis-H. -Lafontaine. Là, on a fait une recherche
financée par Santé et Bien-Être Social Canada avec trois
groupes contrôles. Il y avait 180 sujets, 60 par sujet comparés
à un groupe traité à Louis-H. -La-fontaine, un groupe
traité au centre et un groupe de citoyens. On a réussi à
avoir les résultats, après trois ans de travail, que les patients
traités au centre avaient atteint le niveau d'insertion sociale, selon
les échelles de quatre, semblable aux citoyens du quartier, ce qui fait
que ce n'était plus notre problème à ce moment-là.
Cela devenait un problème plus large, plus politique.
Mais je vous apporte cette statistique, parce qu'au Québec on dit
toujours ou, en tout cas, on a tendance à dire: L'herbe est toujours
plus verte chez le voisin. Alors, on oublie de regarder un peu ce qu'on fait,
et il se fait des bonnes choses au Québec. On pourrait vous en parler.
Il ne faut pas seulement faire des critiques parce qu'ici il se fait aussi des
bonnes choses. Par exemple, pendant que le Dr Voisine est présent, il y
a deux ans, le ministère - je n'ai jamais su pourquoi - a donné
de l'argent à notre organisme. C'était un montant de 56 000 $,
soit 28 000 $ par année.
Le ministère nous a permis de démarrer un projet qut
s'appelle PART et qui fonctionne depuis le 1er septembre 1987. C'est un projet
selon lequel des patients psychiatriques font du gros ménage chez des
personnes âgées dans le quartier du CLSC centre-sud. Ils sont six
et cela fonctionne très bien. Les personnes âgées ne les
paient pas, mais comme elles sont satisfaites des services, elles leur donnent
des pourboires. Je ne suis pas censé le dire - ils sont sur le BS - mais
elles leur donnent des pourboires, du linge, etc.
Le ministère fait parfois preuve d'une très grande
ouverture d'esprit. Il prend des Initiatives. Mais pour ce faire, il ne peut
pas passer par un centre hospitalier, ce n'est pas sa mis-
sion. Le centre hospitalier est fart en fonction d'un modèle et
cela fonctionne très bien. On y rend des services. On n'a pas à
critiquer cette affaire-là, cela fonctionne. Mais pour la santé
mentale, l'illusion est de croire qu'un milieu hospitalier peut réaliser
un projet tel que le propose le rapport Harnois. On ne pense pas que cela
puisse marcher. Comme on dit dans notre langage, un milieu hospitalier, c'est
un gros utérus. C'est un "vacuum", comme on dit en anglais. Cela aspire.
Il est tellement gros qu'il se tourne vers lui-même et rend des services
aux gens, mais il n'est pas tourné vers la communauté.
Vous savez que j'ai déjà entendu, dans le milieu, des gens
dire que les asiles étaient les ressources alternatives au réseau
informel. C'est quand même pas mal comme vocabulaire. On a
déjà vu...
Mme Lavoie-Roux: Mais là il va rester quatre minutes pour
mon collègue de Laurier...
M. Lecomte: COSAM est un OSBL qui a son conseil d'administration
et à la suite de l'intégration des effectifs du centre de
santé mentale à l'hôpital Saint-Luc, on a gardé
opérante la corporation. On a décidé alors de l'orienter
vers des services psychosociaux complémentaires aux services cliniques
d'un hôpital. On joue donc un peu sur les deux structures. On
édite la revue Santé mentale au Québec et on aimerait bien
avoir une subvention du ministère pour cela - pendant qu'on y est, je
vais vous le dire - parce qu'on a des problèmes. On a le projet PART. On
a une communauté thérapeutique depuis décembre 1980,
où habitent cinq de nos patients au premier étage. On a une
subvention du ministère pour cela et on l'en remercie.
Au deuxième étage, on a trois appartements
supervisés et notre maison est construite avec la SCHL, et c'est
maintenant la SHQ qui s'occupe de cela. On est installés au Plateau
Mont-Royal, de biais avec le métro Mont-Royal. On ne peut pas demander
mieux. On a un service de fiducie. On offre un compte de banque aux patients de
l'hôpital Saint-Luc et l'hôpital Saint-Luc offre une
secrétaire qui a développé une expertise de gestion des
patients. Elle en a 80 par mois. Ils déposent de l'argent dans ce compte
et parmi ces patients, il y en a certains qui peuvent venir tous les jours et
ils ont un chèque en deux minutes. Je ne pense pas qu'un milieu
hospitalier puisse faire aussi bien que cela. On n'entre pas dans
l'informatique quand on fait cela.
Mme Lavoie-Roux: M. Lecomte, ce n'est pas parce que ce n'est pas
intéressant, mais on a des règles. J'espère que j'ai
toujours conservé mes quatre minutes pour mon collègue.
Le Président (M. Bélanger): Oui, oui, ça va
aller. M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: C'était bien parti. J'ai écouté
avec beaucoup d'attention. En fait, ce que vous proposez semble être
à la fois une certaine forme de révolution pour tous ceux qui,
actuellement, gravitent autour du réseau interne, que ce soient les
psychiatres, les psychologues ou d'autres personnes, et peu rassurant pour
d'autres peut-être, dans la mesure où ce que vous proposez est une
structure additionnelle à l'intérieur de la structure. Vous dites
que vous proposez un projet qui vous permet d'avoir un centre local de services
en santé mentale. Vous dites aussi qu'il y a les CLSC, les CH... Vous
connaissez la nomenclature du ministère. Vous voudriez être
là tout en ayant, si j'ai bien compris, une autre jambe ailleurs, et
vous voulez demeurer indépendant du ministère. Je ne sais pas si.
J'ai bien compris. Je veux me faire expliquer cela, parce que le danger qu'on
pourrait voir, c'est que vous proposez un nouveau centre local de services, qui
soit un centre de services de santé mentale plutôt que de services
communautaires. Là, je vous dirais: II y a peut-être le CLSC qui
va réagir en disant: Un instant, je voudrais être la porte
d'entrée du patient pour ensuite l'envoyer dans le système ou aux
organismes bénévoles.
Je sais que je vous fais faire plusieurs réactions, mais je veux
bien saisir comment vous présentez ce centre. Est-ce qu'il est dans une
structure organisationnelle du ministère ou s'il se trouve à
côté? S'il se trouve à côté, de quelle
façon fonctionne-t-il?
Mme Guertin: Si vous le permettez, je peux vous répondre.
D'une part, effectivement, c'est une structure qui se trouve dans
l'organisation des soins tels qu'ils existent actuellement. II ne s'agit pas du
tout de se dissocier de cela. Donc, c'est une structure du réseau. D'une
certaine manière, ce serait simplement pour nous un déplacement,
à savoir que les cliniques externes de psychiatrie, qui sont très
souvent au confluent d'un tas d'activités, de ressources et
d'échanges entre le milieu, la communauté et le milieu
institutionnel intérieur, sont, à notre avis, des groupes
déjà formés, qui pourraient jouer ce
rôle-là.
Pour notre part, on a l'impression, en tout cas, que c'est ce qu'on fait
et que c'est ce qu'on pourrait continuer à faire. Mais le fait d'avoir
une plus grande autonomie, donc d'être détachés de
l'hôpital, mais en contrat de services avec l'hôpital, comme on
peut être en contrat de services avec d'autres institutions ou en rapport
de services et d'échanges avec d'autres institutions, ce serait tout
aussi efficace, mais on aurait les coudées plus franches, si on pouvait
intégrer dans notre structure des activités qu'actuellement on
est obligés de réaliser par COSAM. c'est-à-dire l'OSBL
dont on vous parlait tout à l'heure, et qu'il serait très
difficile à intégrer dans la très lourde structure
hospitalière, qui n'est pas assez mobile et qui n'est pas
assez souple pour qu'aux patients qu'on administre chez nous, qui
viennent deux ou trois fois par semaine chercher des chèques afin
d'être sûrs d'avoir de l'argent jusqu'à la fin du mois, on
puisse leur remettre des petits chèques selon leurs besoins et qu'on
puisse être extrêmement souples.
Cette souplesse, c'est "the small is beautifull", auquel on croit
beaucoup. Elle permet une très grande souplesse, une très grande
adaptabilité et permet aussi que, de façon régionale, les
gens puissent se définir en fonction vraiment des besoins de la
population dans laquelle ils travaillent. Il y a relativement peu
d'inconvénients. Déjà nous, par exemple, on est à
l'extérieur de l'hôpital, comme plusieurs cliniques externes sont
à l'extérieur des murs hospitaliers. Dans Montréal, c'est
comme cela, ainsi que dans plusieurs autres endroits. Alors, on a l'impression
que, de toute façon, on a déjà quelque chose d'un peu
particulier et que cela ne changerait pas énormément de choses,
mais que cela nous donnerait une liberté de mouvement plus grande et une
efficacité plus grande aussi. Actuellement, on est obligés de
courir deux structures à la fois, ce qui est extrêmement lourd
parce qu'on le fait en supplément, bien sûr, du travail qu'on fait
à la clinique.
M. Lecomte: En fait, si vous le permettez, M. Jolivet...
M. Jolivet: Oui.
M. Lecomte:... seulement 30 secondes là-dessus. Ce serait
une cinquième structure... au ministère, qui serait régie
par la loi, qui aurait son financement propre, un conseil d'administration,
etc., qui serait sectorisée. Nous croyons beaucoup à la
sectorisation. Plusieurs critiquent cela, mais nous, on ne peut pas faire de
psychiatrie communautaire sans sectorisation. C'est illusoire. Alors, on
pourrait en discuter longtemps, mais il faut quand même en être
conscient. Donc, il y aurait cette cinquième case, si l'on veut,
dévolue entièrement à la santé mentale, ce qui
n'est peut-être pas la tendance actuelle, mais nous, nous pensons que la
santé mentale nécessite des services spéciaux.
Pour constituer ce réseau - il pourrait y en avoir une centaine
au Québec, si on veut - nous, on pense qu'il devrait y avoir une
réallocation des budgets des centres hospitaliers psychiatriques. S'ils
décroissent, bien... Comme le disait le docteur Pomerleau, il semble
aussi difficile de désinstitutionnaliser les budgets que de
désinstitutionnaliser les patients. Alors, il faudrait bien qu'on soit
conséquent, sinon on maintient toujours le poids; les ressources
étant limitées, on ne peut quand même pas aller les
chercher dans d'autres pays; ils ne nous les donneront pas. Alors, il faut
qu'on s'autosuffise.
Ce réseau traiterait en priorité les malades mentaux
chroniques, mais iI recevrait les deman- des du secteur pour faire
l'évaluation et il travaillerait en concertation - dans son conseil
d'administration, il y aurait des usagers; on aimerait bien
réfléchir à un mode d'élection comme iI y a dans
les commissions scolaires - avec les organismes, etc. Il serait
entièrement dévolu à la santé mentale, et ferait la
jonction entre le milieu hospitalier et le milieu communautaire. (12 h 30)
Un dernier point là-dessus, si vous voulez vraiment de
l'équité dans le partenariat, il va falloir que, tôt ou
tard, vous créiez une ressource avec budget pour contrer le pouvoir qui
est entièrement dans le milieu hospitalier. Cela n'est pas
inventé par nous. L'AHQ l'a dit en 1984. Le système est
hospitalo-centré.
M. Jolivet: Je comprends tout cela. Vous êtes partis d'une
organisation qui était en dehors du centre hospitalier. Vous l'avez
expliqué tout à l'heure. Vous avez dû vous intégrer
à un centre hospitalier; vous avez fait, à coudées
franches, d'une certaine façon à coups de coude, votre
entrée, et on vous a permis cela. Bravo! Mais vous dites: On devrait
ressortir de cette partie pour revenir, d'une certaine façon, à
un centre local en santé mentale. Ce centre local en santé
mentale devrait être une case du ministère. Là, je vous dis
- c'est ma crainte - qu'au bout de la course, quand le président du
Conseil du trésor va se prononcer sur les budgets qu'ils vont vous
donner, il va y avoir des contrôles qui vont devenir aussi difficiles que
les contrôles hospitaliers que vous avez actuellement, de telle sorte que
la flexibilité que vous recherchez actuellement ne sera pas là.
À long terme, peut-être que, sur le coup, cela va bien
paraître, mais à un moment donné il y a un ministre quelque
part qui va décider: C'est assez, il y a trop de déficit dans ce
coin-là, je mets le tordeur là-dedans, vous allez régler
cela de même, je prends le pouvoir là-dessus, parce que vous
dites: En vertu de la loi. C'est là une partie.
Vous dites en même temps une autre chose: Les gens de soins
prolongés au plan psychiatrique, les cas profonds, si je comprends bien,
devraient être sous votre responsabilité. Les CH qui les ont
actuellement avec les psychiatres et tout le système qu'il y a là
vont dire: Un instant! Ils vont mettre des holà. Je veux bien comprendre
que ce que vous proposez, c'est l'intégration des ressources
alternatives, les ressources communautaires dans le milieu vous permettant de
donner un meilleur service à ceux qui sont
désinstitutionnalisés, d'une certaine façon, et qui vivent
dans un milieu dit plus naturel, dans les conditions les plus normales
possible, comme vous le dites pour les logements de Montréal qui sont
rénovés par la municipalité en vertu de l'Année des
sans-abri, cette année, mais cela ne se fera pas tous les ans. Il
devrait, cependant, y en avoir continuellement.
Pendant ce temps-là, c'est un modèle qui pourrait, comme
vous le dites si bien, être viable, mais je me replace. Tout à
I'heure, on avait des gens de Rouyn-Noranda Témiscamingue il peut y en
avoir dans mon coin, il y a le CH de Sainte-Thérèse qui,
actuellement agit selon ses formules à lui en vertu de la Loi sur les
services de santé et les services sociaux. II faudrait se poser la
question. Serait-on prêt à accepter votre proposition à
savoir que dans le secteur du centre de la Mauricie il y ait quelque chose
comme cela ou à Rouyn-Noranda ou n'importe ou au Québec?
M. Lecomte: Écoutez, il est évident qu'il va y
avoir des résistances. Vous le soulignez et vous vous faites l'avocat du
diable ce qui est très bien. D'ailleurs, nous, nous venons vous exposer
une hypothèse, nous ne sommes pas quand même naïfs à
ce point-là.
Si vous voulez vraiment implanter des propositions du rapport Harnois,
qui a un discours très progressiste pour les malades mentaux chroniques,
qui était son mandat principal, il va falloir que vous réformiez
le système actuel. Ce n'est pas seulement une question d'attitude, comme
vous le souligniez au début. II faut un lieu d'exercice ou vont
s'implanter ces principes. Cela va prendre plusieurs années, mais il
faut au moins donner un lieu d'exercice.
II est évident que le ministère a des contraintes qui ne
sont pas mauvaises. II faut quand même savoir, quand on donne des fonds,
où ils s'en vont, mais je ne pense pas que le ministère vienne -
je pense qu'on va se défendre contre cela, admettons qu'on l'aurait -
nous dire quoi faire dans la pratique comme telle. D'ailleurs, le
ministère ne peut pas faire cela, parce qu'il irait contre un des
principes du comité Harnois qui est la régionalisation. Nous,
nous disons. Régionalisation, oui. Mais on dit
Sous-sous-régionalisation, pour que le gens dans les quartiers aient
accès aux services, aient le pouvoir là-dessus et qu'ils puissent
avoir des services selon leurs caractéristiques. C'est toujours le
même dilemme, c'est centralisation-décentralisation. Je vous l'ai
dit dans la présentation.
Mme Guertin: On a très peu de temps et je trouve important
d'illustrer des choses comme celles-là par exemple, et de souligner le
fait qu'il est extrêmement important qu'il y ait des centres
sous-régionaux de décisions. Nous, nous travaillons dans le
centre-ville, le centre-sud de Montréal. On fait actuellement une
étude socio-démographique de notre population pour se rendre
compte que les impressions qu'on avait sont très en-deçà
de la réalité. On travaille dans le tiers monde canadien.
Dans le centre-ville de Montréal, 54 % des familles sont
monoparentales. On sait quel indicateur en termes de santé mentale cela
représente. Dans le centre-sud de Montréal, 46 % des familles
sont monoparentales. II y a 197 % fois plus de problèmes d'alcoolisme et
de problèmes physiques consécutifs à l'alcoolisme dans le
centre-sud et dans le centre-ville de Montréal. Les bébés
du centre-sud de Montréal à la naissance ont la grosseur des
bébés du tiers monde. Or, on sait que statistiquement cela
entraîne tout un paquet de problèmes de mésadaptation
psychosociale. Je pourrais vous en sortir comme cela pendant des heures.
Donc, il faut que, dans le secteur ou on travaille, on puisse mettre en
place des réseaux et des mesures de soutien qui n'existent pas et qui
sont complètement éclatés. Il faut qu'on puisse mettre en
place des choses que le secteur d'à côté ne va pas
forcément avoir besoin de mettre en place, parce que sa
communauté ne va pas être aussi éclatée et que les
besoins tout aussi importants qu'ils vont avoir vont être totalement
différents. II faut que cela puisse être respecté et qu'on
arrête d'avoir toujours à se battre. Cela fait des années
qu'on se bat pour dire par exemple. Nous du centre ville et du centre-sud de
Montréal, c'est effrayant comment on fait pitié. On en a ras le
bol de dire cela. On n'en a rien à foutre de la pitié. Ce qu'on
veut, c'est que cela soit reconnu. II y a une étude sérieuse du
DSC de Saint-Luc qui vient de sortir, datée de 1987, sur l'état
de la santé du DSC de Saint-Luc et qui donne ces chiffres. Si on peut
travailler avec cela on est capables à ce moment de mettre en place des
correctifs et de commencer à pallier certains problèmes. Si on
est toujours en train de dire Moi, dans mon secteur, je veux ceci ou cela, on
nen sort jamais. Si chacun dans son secteur était respecté pour
le travail qu'il peut faire, la connaissance de son secteur et la
compétence qu'il peut avoir développée, je pense quon
épargnerait beaucoup de temps et beaucoup d'énergie. Cela me
paraît quelque chose d'extrêmement important à souligner.
C'est pour cela qu'on demande d'une manière ou d'une autre que nous soit
reconnue un peu plus d'autonomie.
M. Jolivet: Vous avez raison, M Lecomte, de dire que je me
faisais l'avocat du diable. C'est l'une de mes habitudes justement de faire
sortir ce que quelqu'un a I'intention de présenter et de bien le
comprendre, surtout pour l'ensemble des gens qui vont avoir à prendre
des décisions. Je poserais la question autrement en disant. Vous avez
vécu une expérience dans le passé, vous êtes
intégrés dans un système. Vous dites. Ce n'est pas la
façon de procéder. Vous dites, en fin de compte, que vous
présentez un projet qui pourrait être examiné selon la
meilleure possibilité.
Est-ce que je vous comprends très bien en disant ceci. Pour
pouvoir faire cette révolution - je vais l'appeler ainsi, parce que
c'est plus qu'une évolution, à mort avis - Il faudrait
peut-être, au lieu de lancer cela et de dire qu'on fait cela partout au
Québec, aller dans des
secteurs précis, qu'on connaît d'ailleurs? On leur dirait:
Voici, on vous donne une structure et là, on va donner les mandats
précis, que ce soit au CRSSS ou ailleurs - souvent il y a des blocages
qui se font dans ces secteurs - ou aux centres hospitaliers. On dirait: Eux,
ils ont un mandat, on va leur donner ce mandat et on va l'expérimenter
dans la mesure où on pourra l'étendre si on s'aperçoit que
c'est l'une des meilleures solutions, mais l'étendre là où
les besoins se font sentir et non pas nécessairement l'étendre
"at large" et faire en sorte que finalement vous vous retrouviez en disant:
Cela ne marche pas ailleurs, cela ne marche pas ici, donc, finalement, on
laisse tomber. Une meilleure expérimentation dans votre milieu et dans
d'autres plus précis au Québec, dans les centres aussi populeux
que les vôtres, effectivement aurait de bons résultats et de
bonnes conséquences.
M. Lecomte: Je suis d'accord avec vous. Avant de se lancer dans
une telle opération, il faut quand même faire des programmes
expérimentaux. Ceci m'amène à dire que l'une de nos
propositions, c'est qu'il y ait un institut national de santé mentale,
dûment reconnu par le ministère, qui aurait des budgets. Cet
institut pourrait, à la lumière des projets concrets qui sont
présentés, financer les projets expérimentaux pour qu'on
puisse évoluer. On parlait de pays sous-développés dans le
quartier centre-sud. En recherche psychosociale au Québec, c'est
sous-développée. Tout le monde le sait et tout le monde le dit.
C'est effrayant comme c'est pauvre. Nous, à la revue, on veut même
publier des recherches, mais il n'y en a presque pas.
Cet institut pourrait avoir des fonds qui pourraient être
alloués à des projets expérimentaux comme vous le dites.
Cela va tout à fait dans le sens de ce qu'on souhaiterait. Cet institut
pourrait aussi financer des projets de recherche dans des instituts. Il y a un
excellent centre, en passant, c'est l'unité de recherche psychosociale
du Douglas. C'est un excellent centre. Il peut y en avoir d'autres au
Québec. Alors, nous, on pense qu'il faudrait qu'il y ait un institut
national de santé mentale avec un budget protégé. J'ai
appris en fin de semaine que le ministère qui fait des efforts
sérieux pour financer la recherche a alloué 1 000 000 $ au CORS
en santé mentale, mais il y a 600 000 $ qu'on ne peut pas
dépenser actuellement, il n'y a pas assez de projets.
Comme on est sous-développés, il ne faut pas s'imaginer,
parce qu'on investit de l'argent, que tout le monde va arriver comme cela. Il
faut créer l'intérêt. En ayant des budgets
protégés, cela va permettre d'aller dans différents types
de recherche, d'améliorer tranquillement les équipes et, à
un moment donné, on va élever le niveau. C'est ce qu'on disait au
début. On a fonctionné comme cela. Ce n'est pas parce qu'on met
de l'argent... Le ministère a fait un gros effort, je dois le dire, mais
il faut quand même former des équipes. Nous pensons qu'un institut
national permettrait de donner le temps, de ne pas tes mettre en concurrence
avec les autres. Cela, c'est une autre affaire. Nous disons qu'il y a des
services spéciaux en santé mentale, alors que, actuellement,
c'est tout à fait intégré, c'est en concurrence avec la
médecine.
Un bon exemple de cela, pour terminer. Vous entrez dans un
hôpital... Voulez-vous donner de l'argent pour une fondation, pour de
l'équipement? J'ai toujours le goût de leur dire:
L'équipement, des machines à électrochocs, pour nous, cela
n'a pas de sens. Il faut être conscient de cela. Si la pathologie est
spécifique, les lieux doivent être spécifiques et tout
s'ensuit: la structure, les budgets, etc. Il faut être
cohérent.
M. Jolivet: Dans la mesure où vous souhaiteriez un projet
pilote dans votre propre secteur, des centres hospitaliers du milieu, du CLSC,
du département de santé communautaire, du CRSSS, du CSM, du CSS,
quels sont vos intuitions ou vos contacts réels vous permettant de dire
qu'il n'y aurait pas de réticence à mettre en place un tel centre
local de services en santé mentale?
Mme Guertin: Aucun problème. Quand on dit qu'on a
opérationnalisé le modèle, c'est vrai, c'est-à-dire
que, depuis des années, on fonctionne de façon extrêmement
harmonieuse - ce n'est pas exagéré de le dire - avec les deux
CLSC de notre secteur, le CLSC centre-ville et le CLSC centre-sud; ce sont des
CLSC auprès desquels on a fait très régulièrement
de la consultation, avec lesquels on a des échanges de services; donc,
les relations sont excellentes avec ces CLSC.
Dernièrement, on a mis sur pied un programme de formation
auprès du BSS centre-ville. Avec une de mes collègues, je donne
toute une série de séances de formation cette année aux
travailleurs sociaux qui sont aux prises avec des problèmes de
santé mentale extrêmement lourds dans leur clientèle et
pour lesquels ils se sentent souvent très débordés. C'est
tout un travail qu'on fait cette année. On a les meilleurs rapports avec
les gens du réseau d'aide, on siège dans leur comité de
santé mentale. Le réseau d'aide a la plupart de ces organismes
dans notre quartier, dans notre secteur. Ce qui fait que nos rapports avec les
institutions actuellement autour de nous, les groupes institutionnels ou non,
sont excellents. Cela fait des années qu'on travaille avec eux, qu'on
leur accorde énormément d'attention et qu'on travaille dans un
rapport d'échanges et de respect. Cela, je pense que c'est quelque chose
de très important.
Je ne sais pas si vous me permettriez d'aborder un autre
élément que je trouve quand même important, dont on a
très peu parlé et qui pour nous est extrêmement important.
C'est cette question justement de l'équipe, un peu comme si... Qui
sommes-nous, nous qui prétendons pouvoir faire cela? On a quand
même mentionné tout à l'heure qu'on était,
présentement en tout
cas, des professionnels compétents, bien formés et
réputés compétents. Je pense qu'ii serait important que,
effectivement, dans ces centres-là, les gens qui offrent les services
à la clientèle la plus lourde aient une excellente formation de
base. On n'a pas une position corporatiste à tout crin, mais on pense
que n'importe qui ne peut pas faire n'importe quoi. On peut très bien
reconnaître, par exemple, que le médecin est absolument essentiel
pour ce qui est de l'aspect biologique et médical du traitement, comme
il peut y avoir des leaders d'autres professions qui peuvent s'occuper de toute
la dimension sociale. Pour nous, c'est extrêmement important.
Il est extrêmement important aussi de savoir qu'on connaît
fort peu de choses sur la maladie mentale actuellement. Quand on parle de
recherche, on peut parler de recherche sociale, c'est sûr, mais on peut
parler d'interventions, il faut aussi qu'on se dise, et qu'on soit bien
conscient, qu'on connaît très peu de choses au sujet des causes et
des origines des maladies mentales. Il y a encore énormément de
travail à faire. On travaille sans cesse finalement avec les limites de
la connaissance; on travaille avec l'état des connaissances actuel, mais
elles sont très limitées. Il est très important de
continuer à essayer d'aller plus loin pour comprendre ce qui se passe
quand on parle de maladie mentale. Il ne s'agit pas seulement de mettre en
place des structures, des services, des ressources, des organismes, des
institutions ou n'importe quoi d'autre, il faut aussi savoir à quoi ils
s'adressent, pourquoi et en fonction de quoi, et cela est assez limité
encore effectivement, peut-on dire présentement, les connaissances qu'on
en a, Et il faut qu'on continue à travailler très fort dans ce
sens-là. (12 h 45)
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laurier.
M. Sirros: Merci, M. le Président. Évidemment, on a
très peu de temps. Vous avez répondu en partie dans votre
dernière réponse à l'une des questions que j'avais. Mais,
pour moi, c'était beaucoup plus en ce qui concerne la création de
la cinquième structure autonome.
Vous avez regardé, à un moment donné, toute la
question des CLSC. Vous dites même que c'est une option. Vous donnez
trois raisons pour lesquelles ce ne devrait pas ou ce ne pourrait pas
être les CLSC. Je peux vous dire qu'à la première lecture,
beaucoup de vos objections me semblent des objections qu'on pourrait
peut-être soulever même par rapport au centre local de santé
mentale, surtout quand vous dites que l'institution elle-même devient le
moteur de son propre développement.
Une autre institution ne deviendrait-elle pas la même chose? Mais
pourquoi écartez-vous si rapidement l'idée d'intégrer le
centre de santé mentale aux CLSC, plutôt que de créer une
autre structure avec un autre conseil d'administration, d'autres directions
générales, d'autres locaux et tout le tralala qui va avec?
M. Lecomte: Écoutez, pour ce que j'en sais des CLSC... Je
pense que vous êtes mieux placé que moi. Vous connaissez mieux les
CLSC que moi. Dans les contacts que j'ai eus, dans mes discussions, les CLSC
revendiquent la première ligne. Nous, on s'oppose à ce
vocabulaire technocratique pour les patients là où ce langage n'a
aucun sens.
Alors, la première ligne s'adresse aux problèmes
légers. Les patients chroniques sont des problèmes lourds et les
CLSC n'en veulent pas. Nous, notre centre veut s'occuper en priorité des
patients lourds. Donc, si le CLSC est prêt à faire ça, on
est bien d'accord, remarquez bien.
Vous avez raison de dire pourquoi vous voulez créer... Cela se
discute. On y a même pensé sérieusement. Mais il y avait
cette objection majeure de s'occuper des patients lourds et c'est une
volonté ministérielle, une politique de tout gouvernement,
d'après nous, de devoir s'adresser aux patients les plus démunis
parmi les démunis, que sont tes patients lourds.
Si les CLSC sont prêts à faire ça, à nous
donner les coudées franches, on est bien d'accord. Mais autre chose
qu'il faut dire, c'est que s'ils acceptent cela ils devront modifier leur
philosophie. Ce ne sont plus des services à court terme, des
problèmes légers, ce sont des services à très long
terme qu'il faut offrir.
Je vous invite à lire le prochain numéro de Santé
mentale au Québec. On est en retard, parce qu'on n'a pas
d'employés permanents. D'où l'idée d'une subvention que je
demande au ministère. On va avoir un article sur l'intégration de
la clinique Saint-Jacques à un CLSC. Ne mentionnons pas le CLSC.
Évidemment, c'est la vision des gens, mais comme c'est public, on va le
publier et on peut le dire. C'est qu'on leur fait un déni du traitement
psychodynamique à long terme.
Dans le projet que propose le comité Harnois, c'est
extrêmement important, cette orientation psychodynamique. Donc, notre
objection majeure est à cause du projet clinique. Mais en termes de
structures, vous avez tout à fait raison. Cela se conçoit fort
bien et ce serait la structure la plus naturelle.
Mais si on va dans les CLSC, moi, je pense qu'il faut y aller pour tous
les patients et ils devraient... D'ailleurs, il y a des médecins qui
évoquent chez nous l'idée que les cliniques externes devraient
être localisées dans les CLSC et que les hôpitaux se
consacrent à l'expertise de consultation, à ce qui est bien
populaire de ce temps-ci, la psychosomatique, à l'évaluation des
médicaments, et au traitement à court terme, qui nécessite
une hospitalisation pour les patients très lourds. Les centres
hospitaliers psychiatriques devraient se consacrer - avec des services
de recherche, etc - aux patients lourds qui ne peuvent vivre dans la
communauté. Comme je vous l'ai dit tantôt, cela commence à
se résumer à peu d'individus. Même si le nombre absolu est
assez élevé, professionnellement, c'est très peu
d'individus.
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, M le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci de l'ensemble de votre proposition. Je pense
qu'il vaut la peine de la regarder avec beaucoup d'attention. Ce que je vous
souhaite, c'est la meilleure des conclusions et qu'une politique de
santé mentale en arrive à donner les meilleurs soins, tout en
considérant les capacités que l'État a de payer, mais en
sachant que les projets pilotes peuvent être faits à mon avis dans
la mesure ou on a cette volonté de les faire. C'est une décision
politique à ce moment-là
Mme Lavoie-Roux: Je veux également vous remercier Je pense
que ce sont des perspectives relativement nouvelles que vous nous apportez. Je
profite toujours. enfin je triche toujours un peu en conclusion pour faire
quelques messages. Premièrement, ce qui me frappe un petit peu, c'est
qu'il y aurait votre institut national de recherche en santé mentale et
qu'il y aurait les nouvelles cliniques communautaires en santé mentale.
En admettant que ce serait la solution parfaite, je vous assure qu'à
l'heure actuelle, dans le réseau, vendre une nouvelle structure n'est
pas facile. Vous l'avez mentionné et je vous en remercie.
En fait, cette année, le budget de la recherche sociale au
Québec, comment appel-le-t-on ce comité - je me mêle
toujours avec le FRSQ - mais iI s'appelle, le CQRS, bon merci. Au CQRS, le
budget est de 500 000 $ pour la santé mentale et 500 000 $ pour
l'alcoolisme et la toxicomanie. Mais étant donné qu'il n'y avait
qu'un budget de 1 700 000 $, si je ne me trompe, cela fait un budget
considérable. Je pense que l'alcoolisme et la toxicomanie comportent
aussi des aspects de santé mentale. C'est faible et j'étais fort
consciente que le CQRS - tant mieux pour eux, car ils font vraiment de
l'excellent travail - ait pu se développer. Les chercheurs dans le
domaine social, s'il y en a plusieurs, je ne sais pas où il sont, mais
enfin, ils n'ont pas réussi à progresser
Je dois vous dire qu'il faut peut-être examiner quel serait le
meilleur endroit pour articuler ce partenariat entre tous les intervenants dans
le domaine de la santé mentale, mais je verrais difficilement que l'on
puisse ajouter une structure nouvelle. Est-ce qu'on peut le faire à
partir d'une structure ou d'un type d'établissement qui existe
présentement? En tout cas, je pense qu'on peut raisonnablement se poser
la question. Mais ce qui m'intrigue, c'est qu'hier soir on avait ici des
représentants, enfin il y avait un représentant qui ne
représentait pas l'Hôtel-Dieu, mais qui était psychiatre
à l'Hô- tel-Dieu. Comme c'est public, je pense que je peux en
parler.
Mme Guertin: Nous le connaissons bien.
Mme Lavoie-Roux: Bon! II voulait venir chercher des psychiatres
de Québec qui seraient prêts à travailler dans une approche
beaucoup plus communautaire et qui s'apparente, j'imagine, à bien des
égards, à ce que vous prônez vous-mêmes. Mais ce que
je ne comprends pas, c'est que vous êtes presque voisins, soit Saint-Luc
et l'Hôtel-Dieu - vous êtes à un peu plus d'un mille, mais
à peine, pas beaucoup plus - et on ne semble pas capables de se
rencontrer. Je pense que les deux font parties du DSC de Saint-Luc, à
moins qu'ils n'appartiennent au General, mais je ne le sais pas.
Mme Guertin: Ils appartiennent au General.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais vous êtes quand même.
Mme Guertin: On est proches et on a aussi des projets
communs.
Mme Lavoie-Roux: Vous êtes très proches. On allait
même jusqu'à nous demander des ressources de la ville de
Québec pour réaliser ce type de projet pour lequel ils semblent
avoir des difficultés à trouver des alliés à
Montréal. Remarquez qu'une partie est mon interprétation. Ce
n'est pas ce qu'il m'a dit précisément, mais c'est la perception
que j'en ai eue. Je me demande si les efforts locaux sont suffisants, et
là, peut-être qu'on rejoindrait l'idée d'un projet pilote
un peu élargi auquel faisait allusion le député de
Laviolette, mais, en tout cas, ce sont des questions qu'il faut se poser.
Mme Guertin: II n'est pas obligatoire que ce soient des
psychiatres, de toute façon, qui le fassent. Ce qui est important, c'est
qu'on ait effectivement des psychiatres pour le rôle particulier qu'ils
ont à jouer, mais il y a aussi plusieurs autres gens qui peuvent le
faire. D'ailleurs, on a des projets communs. Je participe à un projet
commun avec l'Hôtel-Dieu. Je ne sais pas si le Dr Lauzon est au courant,
mais il reste qu'il y a certains projets qui existent de collaboration à
l'égard, par exemple, d'appartements supervisés ou des choses
semblables.
Mme Lavoie-Roux: En tout cas, je vous remercie. Vous avez fait la
démonstration que vous étiez bien convaincus de l'approche que
vous avez. Je pense que c'est ce genre de modèle que l'on cherche pour
vraiment actualiser le mieux possible les principes de la politique. Je vous
remercie de votre participation.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales vous remercie et suspend ses travaux jusqu'à 15
heures.
(Suspension de la séance à 12 h 55)
(Reprise à 15 h 7)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission des affaires sociales se réunit afin de
procéder à l'étude du projet de politique de santé
mentale pour le Québec tel qu'énoncé dans le rapport du
comité présidé par le docteur Gaston Harnois et qui a
été rendu public le 30 septembre 1987.
Les remplacements sont les mêmes de toute façon. On va
continuer avec la même séance. J'appelle donc à la table
des témoins Mme Micheline Lynch et Mme Sylviane Lalonde.
Je veux simplement vous rappeler nos règles de procédure
et vous dire que vous avez 20 minutes pour faire la présentation de
votre mémoire et que les membres de la commission ont 40 minutes pour
procéder à l'interrogatoire. Je vous prie de commencer, madame.
Tout d'abord, si vous voulez bien vous identifier.
Mme Micheline Lynch et Mme Sylviane Lalonde
Mme Lynch (Micheline): Oui, bonjour! Je suis Micheline Lynch,
ombudsman au centre hospitalier régional de Lanaudière à
Joliette. Ma consoeur et moi avons souhaité nous partager le temps, si
vous le permettez. Je m'excuse d'avoir à vous lire un texte. J'aurais
préféré vous parler de façon plus
dégagée, sans texte, mais vous comprendrez que les commissions
parlementaires ne faisant pas partie de mon quotidien, Je souhaitais m'enlever
un stress. Je suis certaine que vous allez comprendre. Je vous remercie.
C'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai
étudié, au chapitre du respect des droits, les propos
énoncés par les membres du comité présidé
par le docteur Harnois. En effet, il est rassurant de constater que ce chapitre
occupait une place importante au tout début du projet de politique de
santé mentale pour le Québec. Lorsque l'on voit dans ce projet de
politique affirmer le respect auquel a droit la personne comme principe de base
et que l'on voit que l'on souhaite qu'une série de moyens relatifs aux
droits de la personne soit mise de l'avant, on ne peut que constater le long
chemin parcouru. Il était primordial que l'on amorce une politique de
santé mentale en reconnaissant l'importance que les psychiatrisés
soient reconnus comme des citoyens à part entière pour arriver
ainsi à briser les résistances du milieu et la stigmate
d'incompétence permanente que l'on colle à ces
bénéficiaires.
De même, lorsqu'il apparaît essentiel d'assurer le
développement plus systématique d'une véritable fonction
d'"advocacy" au Québec, je ne peux que souscrire à cet
énoncé et souhaiter participer à l'officialisation d'une
telle fonction. Aujourd'hui, dans les quelques minutes qui me sont
allouées avant que nous puissions discuter, je souhaiterais insister sur
deux points qu'il me semble essentiel de réunir pour en arriver
justement à planifier et développer un véritable
système "d'advocacy" sérieux et utile aux
bénéficiaires.
Je choisis d'utiliser le terme "bénéficiaire", puisqu'il
est évident que je m'attache, de façon exclusive, aux
bénéficiaires Inscrits, hospitalisés ou
hébergés dans un établissement de santé du
Québec. L'expertise que j'ai acquise depuis trois ans auprès de
cette clientèle me permet d'énoncer que la reconnaissance et la
défense des droits des psychiatrisés commencent en
établissement. Une personne, éprouvant au cours de sa vie des
difficultés de nature psychiatrique, devra, dans la presque
totalité des cas, se présenter à l'urgence du centre
hospitalier de son secteur et y demeurer rattachée parfois pour
longtemps par le biais de l'hébergement interne, les cliniques de
secteur ou les ressources intermédiaires.
Les deux points que je souhaite mettre en exergue aujourd'hui vous ont
déjà été soumis dans le texte que je vous ai fait
parvenir et qui se présentait comme une opinion devant les
recommandations R-3 et R-4 du rapport Harnois. Ce sont les suivants: 1° la
nécessité qu'un ombudsman soit présent au coeur de
l'établissement de santé et que sa place lui soit reconnue par
une loi ou un ajout à une loi existante, cela restant à
préciser; 2° que son rôle en soit un de défenseur des
droits et, pour ce faire, iI est essentiel que son mandat lui reconnaisse un
véritable pouvoir d'enquête et un pouvoir de faire agir, ces
modalités étant également à préciser.
Mon premier point, soit la nécessité de la présence
d'un ombudsman au coeur de l'établissement, m'apparaît essentiel
à la mise en place d'un véritable système assurant la
défense des droits des bénéficiaires. Le rapport Harnois
t'indique bien et je cite: "L'importance accordée à cette
fonction implique sa mise en place le plus près possible où se
vivent les situations qui font problème. " Je diverge d'opinion
lorsqu'on souhaite placer l'ombudsman dans un cadre régional;
l'établissement de santé est un lieu important où se
vivent des situations qui font problème.
À cet égard, lors de ma première
présentation écrite, premièrement, j'ai insisté sur
les difficultés que rencontrent les bénéficiaires
lorsqu'ils veulent adresser des demandes d'information ou des plaintes à
des intervenants extérieurs au centre hospitalier, lorsque l'on sait que
l'institutionnalisation crée la vulnérabilité en minant
les droits des bénéficiaires à l'autonomie et à
l'indépendance.
Deuxièmement, j'ai parlé de l'impossibilité
pour les intervenants cliniques d'être à jour sur toutes
les règles à connotation juridique. De plus, la charge toujours
grandissante des tâches qu'ils ont à effectuer leur fait souhaiter
travailler en complémentarité avec un intervenant qualifié
pour ce faire. Lorsque des règles ou procédures
d'établissement devenant désuètes ou caduques ne
permettent pas de respecter les droits des bénéficiaires, elles
doivent alors être modifiées. Il est, en effet, essentiel pour eux
de pouvoir s'appuyer sur des politiques et procédures claires,
entérinées par les instances décisionnelles de
rétablissement pour ainsi agir en toute sécurité dans
l'intérêt du bénéficiaire. En plus, ils ont besoin
pour cela d'être soutenus adéquatement et quotidiennement.
J'ai parlé du projet de loi 20, de la déjudiciarisation du
droit des personnes, de la multitude des lois régissant le domaine de la
santé et de la difficulté pour les bénéficiaires
d'être assistés sur place par un avocat ou conseiller juridique,
de façon rapide. Ces derniers, les avocats, considèrent souvent
cette clientèle comme peu intéressante. De plus, les milieux
psychiatriques ne leur ouvrent pas encore les portes à deux battants;
l'asile avec ses portes verrouillées n'est pas bien loin de nous.
Finalement, un quatrième point, j'ai également
parié de tous les autres problèmes à connotation non
juridique que vivent les bénéficiaires en établissement et
qui peuvent, s'ils ne sont pas réglés, mettre en péril
leur relation thérapeutique. D'où l'importance qu'une personne
indépendante puisse les entendre rapidement, de façon
personnalisée et hors du contexte thérapeutique ou clinique.
Toutes les plaintes formulées par les bénéficiaires
méritent un traitement, car elles mettent en lumière une
problématique pour laquelle le bénéficiaire n'a pas
trouvé de solution. Il est parfois nécessaire d'aider le
bénéficiaire à reformuler sa plainte ou à la
préciser, car l'expérience m'a prouvé qu'il y a toujours
quelque chose derrière, et parfois c'est surprenant. J'ai la ferme
conviction qu'il est essentiel qu'un ombudsman soit présent sur place et
qu'il est aussi essentiel que son rôle n'en soit pas un d'agent de
relations publiques de l'établissement, ayant comme mandat de vendre les
politiques de l'établissement aux bénéficiaires. Pour ce
faire, iI doit avoir un mandat clair, non négociable pour être
crédible aux yeux de tous.
Cela m'amène à mon deuxième point: Pour que
l'ombudsman puisse jouer son rôle de défenseur et d'informateur
des droits, il devrait essentiellement jouir d'une indépendance tant
auprès de l'établissement que du réseau de la
santé, tout en étant encadré par une définition
claire de son rôle et de son mandat. En plus d'être disponible et
constamment présent dans le milieu, iI devrait pouvoir faire
enquête sur les cas qui lui sont soumis.
Pour étayer mes propos de façon concrète, je
choisis de vous présenter cinq brefs cas vécus qui ont
heureusement été résolus dans un premier temps, parce que
quelqu'un les a entendus et a cru le bénéficiaire et, dans un
deuxième temps, parce que les intervenants concernés ont
accepté que lesdits problèmes soient réglés, mais
rien actuellement ne les obligeait. Cela a quelquefois nécessité
du harcèlement jovial de la part de l'ombudsman que je suis, qui n'a
actuellement qu'un pouvoir d'influence sans véritable pouvoir
d'enquête reconnu. Cela a également nécessité que
j'entreprenne des démarches à l'extérieur de
l'établissement auprès d'organismes qui pouvaient nous aider
à les résoudre adéquatement: Commission des affaires
sociales, commission d'examen, procureur de la couronne, Protecteur du citoyen,
Curatelle publique, Aide juridique, pour ne nommer que ceux-là. Voici
donc ces brefs cas vécus.
Mon premier cas. Gérard est un bénéficiaire admis
à une unité de courte durée psychiatrique qui a
été placé en cure fermée selon les règles de
la protection du malade mental. Il souhaite contester sa cure fermée,
car il ne pense pas représenter un danger pour lui-même ou pour
les autres. Il pense plutôt qu'on veut l'obliger à demeurer
à l'unité par commodité et parce que sa famille a
menacé l'unité de poursuites s'il quittait l'hôpital. On
préfère ne plus le voir chez lui. Il adresse donc sa
requête de contestation de cure fermée à la Commission des
affaires sociales, tel que la loi le lui permet. La CAS communique avec le
bureau du directeur des services professionnels pour vérifier les
allégués de Gérard. Le DSP, après
vérification auprès du psychiatre, avise la CAS que la cure
fermée est levée. En effet, il apparaît au dossier que le
psychiatre a levé la cure fermée de Gérard. Jusqu'ici,
aucun problème. Tout a été fait selon les
règles.
Mais voilà que, malencontreusement, au cardex et au plan de
soins, on a oublié de retirer la pastille rouge qui identifie que ce
bénéficiaire est en cure fermée. Gérard ne peut
quitter l'unité sans être accompagné et iI subit tous les
inconvénients de la cure fermée. La CAS lui a indiqué
qu'elle n'a plus juridiction puisqu'il n'est plus légalement en cure
fermée et Gérard ne sait que faire. Quel est son pouvoir?
À qui peut-il se plaindre sur place? En qui peut-il avoir confiance? Qui
a le véritable pouvoir d'enquêter de façon sérieuse
sur la situation qu'il vit et surtout qui a le pouvoir de faire en sorte que
des pratiques comme celle-ci ne se reproduisent plus et que les responsables de
cette situation soient avisés que l'établissement ne
tolère pas et ne cautionne pas de tels agissements?
Mon deuxième cas. Gilbert et Germaine sont conjoints. Ils se sont
connus en établissement et ils se sont mariés voilà quinze
ans. lis vivent ensemble depuis ce temps. Leur vie n'est pas toujours facile,
mais c'est celle qu'ils ont choisie. Mais voici qu'ils se retrouvent tous les
deux en difficulté, et une réhospitalisation est
rendue nécessaire. On les hospitalise on résorbe la crise
et on oriente par la suite leur dossier au comité d'orientation et
d'allocation des ressources en vue dun hébergement à long terme.
Après I'étude des dossiers. II est décidé que
Germaine irait en famille d'accueil et de réadaptation et Gilbert en
pavillon. C'est pour leur bien et tous les intervenants s entendent sur cela
Ils sont séparés mais on est convaincus que c'est beaucoup mieux
pour eux Germaine et Gilbert pensent le contraire. Que peuvent-ils faire? Ils
sont en panique. À qui peuvent ils s'adresser? Qui peut les informer de
leurs droits et recours? Qui peut exiger que les intervenants s'assoient et
revoient la question? Qui peut faire en sorte que ces
bénéficiaires soient entendus et que leur désir soit
respecté, et dans quel délai? Quel appel ont-ils des
décisions prises sur eux et qui auront des conséquences sur leur
vie?
Mon troisième cas Stéphane est admis au centre
hospitalier, sur l'ordonnance du lieutenant-gouverneur il a fait usage de faux,
un faux chèque. Un psychiatre la déclaré inapte à
subir son procès. II reçoit des soins psychiatriques et, huit
mois plus tard, iI est toujours en établissement. Que peut il faire pour
crier qu'il existe, qu'il est là et qu'on l'oublie? Les intervenants lui
disent que c'est le lieutenant-gouverneur qui l'a envoyé en
établissement et que cest lui qui lui permettra de sortir.
Stéphane n'a pas d'avocat et ne sait que faire pour en avoir un.
C'était son premier faux chèque.
Le problème de Stéphane était le suivant la cour
avait omis de faire parvenir son ordonnance à la commission d'examen. La
commission d'examen aurait dû venir l'entendre après six mois de
mise sous ordonnance tel que I'indique le Code criminel, mais elle na pu venir
puisque aucun dossier n'avait été ouvert à son nom. Le
psychiatre, de bonne foi, était convaincu qu'il n'y avait rien à
faire, sinon d'attendre la visite de la commission d'examen pour que son cas
soit réévalué. Le procureur de la couronne pensait que
l'établissement allait faire parvenir le dossier à la commission
d'examen et le centre hospitalier pensait que la cour l'avait fait. Une fois la
situation corrigée. Stéphane a été cité
à son procès et a quitté. Qui a le pouvoir de faire
enquête et d'exiger que des règles soient écrites et
suivies, que des procédures claires respectant les droits des
bénéficiaires soient suivies sans risque d'erreur de cette sorte
et qu'une telle situation ne se reproduise plus, principalement lorsque deux
lois ou deux ministères différents sont en cause?
Mon quatrième cas Conrad est admis au centre hospitalier. II a
des démêlés avec la Justice. Mais voici, il est
déclaré inapte à subir son procès. II conteste
l'évaluation que le psychiatre a faite de sa condition. II se sait
malade, mais il souhaite être jugé. II comprend ce qu'on lui
reproche, il est en mesure d'aider son avocat et de comprendre la portée
d'une condamnation. Mais voilà, le psychiatre refuse qu'un
confrère le réévalue Conrad souhaite justement qu'un
psychiatre indépendant et surtout familier avec les procédures
légales puisse I'examiner sur sa capacité à subir un
procès. Mais sectorisation oblige, c'est le refus. À qui peut-il
présenter sa demande? Qui peut assurer qu'une deuxième expertise
puisse être faite? Conrad et moi sommes des toqués qui avons
finalement eu gain de cause. II a subi son procès la semaine
dernière.
Mon dernier cas Ginette est très malade. Elle est en psychose
aiguë. Elle est dans une unité de soins intensifs. Elle
reçoit de la cour un bref lui indiquant qu'elle doit s'y
présenter. Son mari veut divorcer, obtenir la garde de ses enfants et
vendre la maison familiale. L'audition doit avoir lieu dans la semaine. Qui
verra à s'assurer qu'un avocat la représentera à la cour
malgré son absence pour éviter que son conjoint ne procède
par défaut? Qui communiquera avec le juge pour l'informer des
difficultés présentes de Ginette et demander un report pour
quelle puisse être en mesure de se présenter et de se
défendre de façon pleine et entière lorsqu'elle sera
mieux?
Je pourrais continuer la description de ces faits encore longtemps. Les
pistes que je propose pour éviter que de telles situations demeurent
sans solution et que des droits fondamentaux ne soient pas respectés
sont premièrement la présence au coeur de l'établissement
d'un ombudsman adéquatement formé qui aura pour tâche
d'enseigner au personnel les droits des bénéficiaires,
d'enseigner aux bénéficiaires leurs droits et de défendre
les droits des bénéficiaires. Deuxièmement, cet ombudsman
devrait être rattaché à une instance organisée,
indépendante du réseau mais près du ministère.
II est certain que ledit rattachement n'est pas simple et que les
modalités d'encadrement des ombudsmen sont à définir.
Cependant, à ce stade, il est important de souligner que cet encadrement
devrait voir à ce que son mandat soit clair, avec des normes uniformes
de formation et d'intervention pour tous les établissements.
Troisièmement, pour travailler de façon efficace, cet
ombudsman devrait avoir un véritable pouvoir d'enquête. II devrait
être indépendant de l'établissement où il travaille.
II devrait pouvoir se référer à un contentieux
indépendant et intéressé aux situations que vivent les
bénéficiaires en établissement, de même qu'à
un groupe d'intervenants, psychiatres, psychologues, travailleurs sociaux, etc,
extérieurs au réseau, mais ayant des habiletés et des
expertises reconnues pour l'aider dans sa tâche. Merci.
Le Président (M. Leclerc): Merci, madame Mme Lalonde.
Mme Lalonde (Sylviane): Je suis Sylviane Lalonde, ombudsman au
centre hospitalier. Douglas à Verdun.
Dans les prochaines minutes, je vais tenter de résumer
l'essentiel de mon document qui traite de la question des "ombudspersons", de
la section 1. 1. 4, c'est-à-dire le respect des droits dans le cadre du
rapport Harnois. J'ai choisi de traiter plus particulièrement de la
situation des "ombudspersons" qui travaillent dans les centres hospitaliers
psychiatriques, parce que ce sont ces personnes qui sont chargées de
faire respecter les droits des bénéficiaires qui
présentent des problèmes de santé mentale dans les
centres.
Dans le rapport Harnois, on dit qu'"il faut", et je cite, "affirmer le
respect auquel une personne a droit comme principe de base. " On dit
également "qu'il est devenu essentiel d'assurer le développement
plus systématique d'une véritable fonction d'"advocacy" au
Québec. "
On parle également de l'importance du respect des droits des
personnes. Je crois que le comité de la politique en santé
mentale a fait un effort, dans le sens qu'il a consacré des
recommandations à la question du respect des droits, sauf que c'est
incomplet et insuffisant parce que je considère qu'il existe de
nombreuses lacunes quant à la fonction d"advocacy" telle que
présentement pratiquée au Québec.
Certains points vont recouper ce que Micheline a dit, mais je pense
qu'il est important que ce soit dit. Ces lacunes sont une entrave au
développement et à la reconnaissance du respect des droits des
bénéficiaires tel que prôné par le rapport qui nous
concerne aujourd'hui.
Étant donné que j'ai jugé que ce qui était
dans le rapport Harnois était très insuffisant, j'ai
décidé de faire les recommandations suivantes,
c'est-à-dire que, dans chaque établissement psychiatrique, il
devrait y avoir une personne 'qui occupe la fonction d'ombudsman parce que,
malgré le mouvement de désinstitutionnalisation qui s'est
déjà amorcé, les établissements psychiatriques
demeurent aujourd'hui un endroit où on retrouve, dans le cas des gros
établissements, plusieurs milliers de personnes. C'est là qu'on
retrouve beaucoup de gens qui ont des problèmes de santé mentale.
De toute façon, je pense que la plupart des hôpitaux ont compris
cela et ont déjà engagé des "ombudspersons" dans plusieurs
de ces institutions jusqu'à maintenant.
Deuxièmement, disons que je recommande que tous les
départements de psychiatrie des hôpitaux généraux
devraient être couverts par une "ombudsperson" qui serait
habilitée à travailler en ce qui concerne les droits, les lois et
l'éthique également spécifiques au domaine psychiatrique.
Je sais que là c'est très différent des hôpitaux de
soins généraux, de soins physiques. Je désire insister sur
la spécificité du domaine de la santé mentale pour ce qui
est de la façon dont cela fonctionne concernant les droits.
Je recommande aussi que les "ombudspersons" oeuvrant dans le domaine
psychiatrique au Québec se rapportent à une autre instance. Sans
aller aussi loin que ma collègue, je considère tout de même
que la personne qui travaille, qui a la fonction d'"advocacy" dans un
hôpital ne devrait pas être rattachée à un
hôpital, à l'hôpital où elle travaille. Cela, dans le
but évident d'éviter les possibles conflits
d'intérêts et de donner une plus grande marge de manoeuvre aux
"ombudspersons.
Je pense qu'il est parfois délicat de s'élever contre son
propre employeur. Je me demande aussi comment on peut avoir la
possibilité et le pouvoir de porter un regard critique et surtout de
dénoncer les politiques décidées par un conseil
d'administration ou une direction générale qui nous emploie. Il
faut donner une plus grande marge de manoeuvre et un pouvoir de recommandation
réel. En ce moment, la situation est que le pouvoir de recommandation
que l'on a dépend de la bonne volonté des gestionnaires de
l'hôpital et la possibilité d'obtenir gain de cause pour les
patients est bien souvent tributaire de la sympathie que les gestionnaires vont
nous accorder.
Je pense qu'il est important de clarifier cela pour augmenter la
crédibilité que nous pouvons avoir auprès des
bénéficiaires, des familles, de la population - cette
crédibilité est souvent remise en question par notre appartenance
à l'hôpital psychiatrique, à l'hôpital comme tel -
pour briser aussi l'isolement vécu par les "ombudspersons*, et Dieu sait
qu'il est bien réel, pour favoriser une concertation pour des
recommandations quant aux problèmes vécus dans toutes les
institutions, pour créer une force, finalement.
Que le rôle de l"ombudsperson" dans le domaine psychiatrique soit
clarifié, homogénéisé et reconnu. Je pense qu'il
est important de clarifier le rôle de l'ombudsman parce que de la
façon dont il est vécu présentement dans les
différentes institutions, il n'est vraiment pas clair et il est
vécu de façon très différente. La description de la
tâche est différente. Ou encore la description de la tâche
est actualisée de façon différente, étant
donné la marge de manoeuvre réduite, selon les centres
hospitaliers. Les intervenants, enfin, les "ombudspersons" se rapportent
tantôt au DG, tantôt au DSQ. tantôt au conseil
d'administration. On a accès ou non aux dossiers des
bénéficiaires. On fait partie de plusieurs comités ou
d'aucun. Les méthodes de travail varient.
La formation n'est pas la même non plus. Je pense que c'est une
lacune importante. Il y a les infirmières et les travailleuses sociales,
iI y a des administrateurs, des secrétaires. Je pense qu'il y a une
lacune, une carence importante au niveau de la formation des "ombudspersons'
tant sur le plan juridique que parfois sur le plan clinique. Je ne parle pas du
domaine de l'éthique qui reste à développer
également. Où en suis-je rendue dans le temps? Vous
m'arrêterez.
Le Président (M. Bélanger): II vous reste deux
minutes encore.
Mme Lalonde: II me reste deux minutes. Bon! c'est parfait.
Lorsque je parle du statut de l'ombudsman qui devrait être reconnu, je
pense aussi à la question de l'article 118. 5 de la Loi sur les services
de santé et les services sociaux au Québec qui traite des
comités de bénéficiaires, l'article de la loi 118. 5, les
paragraphes 1° à 4° inclusivement. Je voudrais vous dire qu'en
ce qui concerne les comités de bénéficiaires de Louis-H.
-Lafontaine, de Robert-Giffard et de Douglas, à ma connaissance, du
moins, ces comités de bénéficiaires se sont
élevés contre les ombudsmen pour revendiquer les fonctions qui
sont les nôtres présentement en vertu de cet article.
On assiste alors, à ce moment, à des affrontements pour la
revendication d'un pouvoir qui est de toute façon bien mince, tel qu'il
est présentement. Je pense que ce serait à revoir. Il faudrait
revoir cette question. Voilà, c'est terminé
déjà.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
madame, de votre bonne collaboration. Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Je vais laisser... Je reviendrai peut-être
par la suite, je m'excuse.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laurier? Je vous en prie.
M. Sirros: Merci, M. le Président. Vous voyez que ce
n'était pas aussi épeurant que cela, finalement Non?
Mme Lalonde: On survit.
M. Sirros: D'ailleurs, c'était fort intéressant
aussi parce que je pense que c'est la première fois, depuis tes huit
jours qu'on suit ces auditions, qu'on a des gens qui sont finalement des
spécialistes d'un domaine qui est touché dans le rapport Harnois,
qui a concerné beaucoup de groupes différents, surtout les
groupes de promotion des droits des patients...
Mme Laionde: C'est ça.
M. Sirros:... ou des ex-patients psychiatriques. Comme vous avez
une certaine expérience très concrète sur le terrain, vous
pourrez nous éclairer pas mal dans ce sens.
En commençant, j'aimerais savoir une chose. Ce n'est pas tous les
hôpitaux qui ont un "ombudsperson"? (15 h 30)
Mme Lalonde: Non.
M. Sirros: Alors, on en a deux qui en ont un. Comment cela est-il
arrivé et pourquoi? Est-ce par rapport à la direction du service
à la clientèle ou est-ce que cela était plus
spécifique?
Mme Lynch: Je pense qu'on ne peut pas répondre de
façon globale pour l'ensemble des hôpitaux où un poste
comme celui-là a été créé.
M. Sirros: Chez vous?
Mme Lynch: Chez nous, c'est né de la volonté du
directeur général de l'époque d'avoir quelqu'un au service
à la clientèle. Avec le temps, il a été
nécessaire de distinguer entre le traitement des plaintes et la
défense des droits des patients. Ce sont deux volets du travail des
ombudsmen, mais qui, à mon avis, devraient être regardés de
près. En ce qui me concerne, en tout cas, le programme
d'appréciation de la qualité des soins pourrait régler une
partie des plaintes courantes, il n'est pas nécessaire qu'un ombudsman
soit sensibilisé ou soit contacté par un
bénéficiaire parce que le préposé à
l'entretien ménager a laissé des moutons en dessous de son lit.
Un ombudsman doit régler ces plaintes forcément. Il est important
aussi que ce soit centralisé à un endroit pour que
l'établissement ait l'oreille et soit aux écoutes de ce qui se
passe. Mais dans les hôpitaux où on a des ombudsmen,
c'était une volonté d'offrir une qualité de services aux
citoyens. Il faut aussi différencier, je pense que c'est très
important, la vocation des hôpitaux, l'intervention en soins aigus
physiques, en psychiatrie ou en longue durée physique. Aujourd'hui, on
s'attache à la psychiatrie, mais en longue durée physique, nos
bénéficiaires en centre d'accueil ou en CHSLD ont aussi des
problèmes importants, vivent aussi des problèmes importants. Les
intérêts à créer un poste d'ombudsman
diffèrent selon la vocation de l'établissement.
M. Sirros: J'aimerais aussi vous entendre préciser
davantage comment vous voyez le rattachement de l'ombudsman. À qui? Vous
avez dit, à un moment donné, que vous n'êtes pas en accord
avec le rattachement régional.
Mme Lynch: Non.
M. Sirros: Nous avons l'idée qu'il y aurait quelqu'un au
conseil régional qui serait responsable pour la région comme
telle. Vous mettez beaucoup l'accent sur le fait que la personne devrait
être dans l'établissement. Par contre, il ne faudrait pas qu'elle
soit rattachée à l'établissement même.
Mme Lynch: Oui.
M. Sirros: On peut voir aisément pourquoi.
Mme Lynch: Oui.
M. Sirros: Avez-vous pensé un peu plus à qui on
pourrait le rattacher? Est-ce que le Protecteur du citoyen, par exemple, serait
une instance intéressante pour rattacher un
ombudsman dans un hôpital comme cela?
Mme Lynch: Le rattachement au Protecteur du citoyen est une des
solutions envisageables, en tout cas, logiques, à l'heure actuelle, ce
qui impliquerait une modification de sa loi évidemment. C'est un des
rattachements logiques actuellement. Il y en aurait peut-être d'autres.
Il serait sûrement intéressant de regarder la chose dans un
comité ou qu'une étude exhaustive soit faite sur la question. Ce
que je souhaite, c'est que l'ombudsman soit rattaché à une
instance extérieure au réseau pour éviter qu'on soit
tenté dans beaucoup d'occasions de ménager la chèvre et le
choux, qu'on soit pris dans des conflits d'intérêts où,
quand on a à "manager" avec un établissement, on soit
porté à dire: Je te donne cela, tu me donnes cela. J'aimerais que
cela relève d'une instance - j'ai avancé le Protecteur du citoyen
- neutre, indépendante pour qu'il y ait un espèce d'encadrement
du travail des ombudsmen pour qu'ils puissent être soutenus. Mme Lalonde
pariait tout à l'heure de l'isolement des ombudsmen. C'est vrai que dans
nos établissements on est seul au monde très souvent.
Forcément, la fonction le veut. C'est heureux, mais un rattachement
serait important et essentiel.
J'ai parlé à la toute fin de ma présentation
d'aujourd'hui de l'importance d'avoir un contentieux indépendant, de
l'importance d'avoir des gens formés et intéressés aux
bénéficiaires, qui ne sont pas en conflits
d'intérêts, qui sont extérieurs a l'établissement et
au réseau pour qu'ils puissent nous soutenir et nous aider. Les cas que
je vous ai présentés aujourd'hui, si j'avais eu accès
directement à un psychiatre Indépendant qui puisse me donner une
expertise ou à un conseiller qui puisse me pister rapidement ou qui
puisse m'aider à préparer une requête de façon
rapide, j'aurais évité beaucoup de temps parce que maintenant, on
travaille... Je dis que j'ai un pouvoir d'influence et je dois m'en servir.
C'est sûr. C'est du marketing quotidien. Mais dans le nombre de plaintes
ou de demandes de bénéficiaires, c'est beaucoup de temps. On
investit beaucoup de temps à convaincre les gens de nous aider. Si
c'était déjà organisé et qu'on pourrait demander
conseil ou faire référence directement à un groupe
organisé, indépendant et en autorité, ce serait beaucoup
plus simple.
M. Sirros: S'il y avait une structure à l'extérieur
qui fournirait les services de soutien nécessaires...
Mme Lynch: Oui. Le soutien...
M. Sirros:... comme le Protecteur du citoyen pourrait avoir un
genre de "staff" pour avoir accès finalement à des avis
juridiques, accès à des services spécialisés.
Mme Lynch: Oui, quelque chose comme cela. Je peux vous dire
qu'actuellement, de façon informelle, j'utilise le Protecteur du citoyen
de façon quotidienne ou, en tout cas, hebdomadaire, pour des
problèmes de bénéficiaires qui sont à l'interne et
qui ont des problèmes avec leur aide sociale, par exemple lorsqu'un
bénéficiaire n'arrive pas - ce n'est pas un être
désincarné, il vivait avant d'arriver et on souhaite qu'il vive
après aussi - quand il a un problème d'aide sociale, un
problème d'hébergement, un problème, peu importe
lequel...
J'ai parlé beaucoup de problèmes à connotation
juridique. Il y a d'autres problèmes. Mais il faut qu'on ait une
instance où on peut se référer quand ce n'est pas dans
l'établissement uniquement que le problème se vit. Le
problème peut se vivre a d'autres paliers, à ce moment-là.
Oui, j'ai fait affaire avec le Protecteur du citoyen, cela a été
rapide; à la Curatelle publique aussi, il y a des ententes que j'ai
développées avec eux qui font que les plaintes se règlent
rapidement. La Commission des affaires sociales, la commission d'examen, ces
gens-là me connaissaient et maintenant, quand je téléphone
et que je dis que j'ai un problème, cela va rapidement, mais ce serait
Intéressant que tous les ombudsmen puissent bénéficier de
ces services, que ce ne soit pas à refaire chaque fois. C'est tout ce
que je veux dire, c'est important d'être appuyé.
M. Sirros: D'ailleurs, pendant que vous décriviez les cas
tout a l'heure, vous avez mentionné différentes instances qui, en
quelque sorte, sont intervenues pour la...
Mme Lynch: Oui.
M. Sirros:... protection du bénéficiaire...
Mme Lynch: Oui.
M. Sirros:... ou du patient ou du client. Donc, j'imagine qu'en
créant la structure d'ombudsman spécifiquement rattachée
à la santé mentale, il y aurait peut-être lieu aussi -
c'est ma question - de revoir un peu les différents rôles, que ce
soit celui du comité des bénéficiaires ou celui de la
Commission des affaires sociales, etc. Comment voyez-vous cela?
Mme Lynch: II ne faudrait pas revoir nécessairement tes
différents rôles, mais qu'on ait accès à un
contentieux ou à une instance qui connaît ces lois-là et
qui peut nous aider rapidement. Quand un bénéficiaire est
isolé ou moi-même seule dans mon établissement et qu'un
bénéficiaire vit un problème qui implique deux
ministères ou deux lois, qui a, à un moment donné, le
pouvoir de nous dire: Là, tu appelles à telle place, eux vont
faire ce bout-là, ce bout-là se fait ailleurs? C'est beaucoup
d'énergie et beaucoup de temps. Si on avait des personnes
compétentes pour nous aider, cela allégerait.
Le fait que ces démarches son! faites, ceta augmente la
crédibilité de l'ombudsman parce que les unités de soins
maintenant me demandent de faire partie des équipes multidisciplinaires.
Ce que je souhaite qu'il arrive un jour au Québec, c'est que l'ombudsman
fasse partie, en psychiatrie, d'une équipe multidisciplinaire lorsque
des décisions vont être prises quant à un
bénéficiaire si elles impliquent sa vie et ont une connotation
juridique. Que l'ombudsman ne soit pas là comme un chat sorti d'un
chapeau, mais soit une personne partie à la discussion, qu'on vienne le
chercher normalement, que ce ne soit pas une surprise et un fait isolé,
que cela fasse partie de nos rouages d'établissement. Cela commence,
chez nous, à l'être.
M. Sirros: Est-ce que, par exemple, avant l'imposition d'une cure
fermée, l'ombudsman, selon vous, pourrait être impliqué
dans ie cas tout de suite...
Mme Lynch: Oui...
M. Sirros:... au départ...
Mme Lynch:... c'est ce que je vis...
M. Sirros:... pour s'assurer que...
Mme Lynch: C'est cela. C'est ce que je vis chez nous. Quand on
travaille en équipe multidisciplinaire, c'est sûr qu'actuellement,
c'est la décision du psychiatre; mais quand l'infirmière a
informé le patient des conséquences de sa mise en cure
fermée, des raisons, premièrement, des conséquences et de
ses droits, là, ils m'appellent, on s'asseoit ensemble, on en parle, on
l'explique, parce que j'ai cette expertise que l'infirmière n'a pas
nécessairement. Les mises en curatelle, c'est exactement la même
chose. On regroupe les familles pour leur expliquer ce qu'est la curatelle. On
les invite, on s'asseoit ensemble et on parle. L'ombudsman est partie prenante
à la discussion, au même titre que les thérapeutes ou les
intervenants cliniques.
M. Sirros: Votre établissement, ce n'est pas uniquement un
centre psychiatrique, c'est un centre régional...
Mme Lynch: Non. Il y a 500 bénéficiaires...
M. Sirros: Je serais curieux de savoir, du côté de
Douglas, comment vous vivez l'expérience et si la problématique,
selon vous, est la même pour un centre hospitalier régional que
pour un centre psychiatrique.
Mme Lalonde: Non, je ne le crois pas parce que les
problèmes sont quand même différents, il y a toute la
question de la sectorisation dans la région de Montréal qui est
un problème, à mon avis, très important. Enfin, la
sectorisation qui est une... Vas-y, Micheline.
Mme Lynch: Je voudrais juste réagir à cela, je
m'excuse, mais pour moi, du monde, c'est du monde; un patient, c'est un
patient, peu importe où il est, qu'il soit à Tombouctou, pas
à Tombouctou, mais à Wabush ou à Montréal. Nous
aussi, nous vivons la sectorisation; on la vit dans l'hôpital. Un
bénéficiaire va être admis en fonction de son lieu
d'origine à telle unité de soins, il ne sera pas admis en
fonction de sa pathologie. Pour moi, il n'y a pas de problème, un
psychiatrisé, c'est un psychiatrisé.
M. Sirros: Je pensais plus au fait qu'il y aurait
peut-être, du côté des patients psychiatriques, moins...
Est-ce que, par exemple, la famille, les proches du patient jouent un
rôle plus présent du côté des patients psychiatriques
que du côté, par exemple, des patients qui sont à
l'hôpital pour d'autres choses? Est-ce que le fait qu'ils ne sont pas
dans l'hôpital...
Mme Lynch: Je comparerais les patients en psychiatrie avec les
patients qui ont des soins physiques à longue durée. Les familles
sont aussi - parce que j'ai les trois - malheureuses ou démunies face
à la maladie, autant face au vieillissement qu'à la maladie
mentale. C'est facile pour eux... C'est vrai que la psychiatrie, l'asile et les
portes fermées ne facilitaient pas... On n'invitait pas facilement les
familles. On commence à le faire, mais pour les patients qui ont besoin
de soins physiques à longue durée, c'est comparable.
M. Sirros: J'ai peut-être une autre question et je
laisserai un peu de temps pour d'autres collègues. Le rôle de
l'ombudsman, tel que vous le souhaitez, et la relation que vous pouvez voir,
par exemple, avec les groupes de promotion comme Auto-Psy, avez-vous des
commentaires là-dessus?
Mme Lynch: Je trouve que c'est essentiel et je souhaiterais que
les comités de bénéficiaires continuent à jouer
leur rôle de mouvement organisé de pression. Je considère
que c'est essentiel pour un ombudsman et un comité de
bénéficiaires de fonctionner ensemble. On se complète, Je
comprends mal les divergences et les guerres. En tout cas, je favorise que les
comités de bénéficiaires règlent tout ce qu'ils
peuvent régler. Mais quand cela concerne des problèmes qui
peuvent être vécus dans plus d'une unité ou quand ces
problèmes ne sont pas résolus dans l'unité, l'ombudsman
peut jouer ou doit jouer.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. On parle de la loi de
la curatelle qui devrait être révisée.
Par le fait même, plusieurs groupes qui sont venus ici ont dit:
Avant de mettre en place une "ombudsperson" dans tous les centres, il serait
peut-être mieux d'attendre que la toi de la curatelle soit
révisée et d'utiliser entre-temps les comités de
bénéficiaires qui, comme vous le dites si bien, ne devraient pas
être en contradiction, mais qui le sont cependant dans les faits.
Quand les gens de Louis-Hippolyte-Lafon-taine sont venus ici, Ils nous
ont dit: C'est nous qui devrions nous occuper des gens, voici ce qu'on fait et
voici les bénéficiaires qu'on représente. J'aimerais vous
entendre réagir. Je sais que Mme Lalonde a davantage parlé de
cette partie, en disant qu'elle ne voyait pas comment la personne pourrait
être rattachée à un centre si jamais il y avait une
"ombudsperson" et qu'en conséquence elle devrait être dans un
organisme indépendant pour éviter, comme vous le disiez, Mme
Lynch, d'être en même temps sous la pression de l'employeur d'une
certaine façon et du centre hospitalier.
J'aimerais vous entendre réagir là-dessus.
Mme Lalonde: Oui. Disons que je ne vais peut-être pas aussi
loin que ma collègue lorsqu'elle dit que l'ombudsman devrait être
rattaché à un organisme indépendant même du
ministère de la Santé et des Services sociaux. Je pense que j'ai
des visées disons peut-être plus modestes lorsque je dis que les
ombudsmen devraient être regroupés sous une coordonnatrice ou un
coor-donnateur qui serait directement sous la ministre ou le sous-ministre -
c'est là un détail technique. Disons que je voudrais quand
même qu'ils demeurent à l'intérieur du ministère. Je
ne vois pas pour l'instant la pertinence qu'ils soient rattachés aux
conseils régionaux parce que le conseil régional aussi, en ce qui
concerne le traitement des plaintes, n'a pas un pouvoir d'enquête comme
tel non plus. Il a seulement un pouvoir de recommandation. Son service à
la clientèle fonctionne de la même façon.
En ce qui concerne la question des comités de
bénéficiaires, c'est une réalité qui se vit de
façon assez quotidienne et assez importante dans les centres que je vous
al mentionnés: Ro-bert-Giffard, Louis-H. -Lafontaine, à Douglas.
C'est une situation bien présente bien que le comité de
bénéficiaires soit moins organisé sur la question en tant
que telle.
Je trouve extrêmement malheureux de voir des situations comme
cela, c'est-à-dire de voir des confrontations ou des affrontements. En
ce qui me concerne, je n'en tiens pas compte ou je ne rentre pas
là-dedans comme on dit. Je trouve absolument malheureux qu'il y ait des
affrontements. C'est une perte d'énergie absolument inutile, alors qu'on
devrait travailler ensemble, en collaboration dans le même
intérêt, c'est-à-dire pour les
bénéficiaires.
Dans ce sens, je pense que, sur le plan de la législation, il y a
des lacunes en ce qui concerne notre rôle qui n'est pas défini.
Effec- tivement, je pense qu'on a été parachutés de par la
bonne volonté des centres hospitaliers qui, bien souvent, je crois, ne
savaient pas trop dans quoi ils s'embarquaient finalement. Il y a une
expression anglaise qui dit: "Do not rock the boat too much". Cela veut dire:
On nous engage pour défendre les droits des bénéficiaires,
pour les représenter ou représenter leurs intérêts
au conseil d'administration ou à l'endroit où on est
rattachés, sauf que lorsqu'on commence à aller trop loin, cela
commence à être dérangeant. Là, c'est
dérangeant. À ce moment, comme je le disais, on est soumis
à la bonne volonté des gestionnaires. Le pouvoir que l'on a est
somme toute inexistant. Lorsqu'on parle d'un pouvoir de recommandation, il est
tributaire justement de la bonne volonté des gestionnaires. Alors,
à ce moment, pour ce qui est de l'effet réel et de
l'efficacité de nos recommandations, je ne suis pas certaine que ce soit
bien efficace, bien valable. (15 h 45)
M. Jolivet: Oui, Mme Lynch, allez.
Mme Lynch: Votre question était de savoir si on ne devrait
pas attendre et donner plus de pouvoirs aux comités de
bénéficiaires. C'était ça, votre question? Avant
d'organiser... Pardon?
M. Jolivet: Le changement de la curatelle. Toute la question de
la Loi sur la curatelle publique.
Mme Lynch: C'est ça. La lof sur la curatelle, c'est une
des lois auxquelles les bénéficiaires en psychiatrie ont à
faire face. La loi sur la curatelle est en profonde refonte. J'ai parlé,
dans mon texte que je vous ai envoyé du projet de loi 20. Pour moi, la
loi sur ta curatelle, je le répète, c'est une des lois...
Ça ne change rien pour moi que les comités de
bénéficiaires restent des groupes de soutien mieux
organisés qu'ils ne le sont maintenant. Chez nous, je ne vis pas de
conflit. On travaille ensemble. Mon patron, finalement, c'est le comité
de bénéficiaires. Je le dis souvent de façon caricaturale,
mais c'est vrai. C'est comme ça que je le souhaite et c'est comme
ça que je le perçois. On travaille ensemble. Je dois faire partie
d'un hôpital très différent. On accepte que je sois
dérangeante. Cela fait partie de la fonction. Lorsque le directeur des
services professionnels me dit qu'il m'aime bien, mais que je suis bien
fatigante, pour moi c'est un compliment. Il sait que c'est ce que j'ai à
faire.
Donc, pour mol ce n'est pas incompatible la présence actuelle des
ombudsmen dans les établissements et les comités de
bénéficiaires, et la façon d'organiser tout cela. Mme
Lalonde a raison lorsqu'elle dit qu'à partir du moment où on aura
un vrai rôle, un mandat clair, net, non négociable, par
l'administration de rétablissement, ça va être plus facile
pour tout le monde de se comprendre, évidemment.
M. Jolivet: Le comité de bénéficiaires -
quand il est venu ici - a dit. II faudrait changer la Loi sur la santé
et les services sociaux pour nous permettre d'avoir plus de pouvoirs. Vous,
comme "ombudsperson" vous dites. Si on veut avoir plus de pouvoirs et
être sûrs de ne pas être à la volonté des
gestionnaires il faudrait aussi amender la loi et nous permettre d'avoir ces
pouvoirs ou prendre une structure qui nous le permette. N'avez-vous pas aussi
l'impression que les comités de bénéficiaires pourraient
avoir ce réflexe dans le contexte actuel? Et cela, dans la mesure ou on
dit comme Mme Lalonde disait. Tant et aussi longtemps qu'on ne brasse pas trop
la cage on n'est pas trop dérangeant, ça va mais quand on
commence à brasser la cage on commence è être
dérangeant. Dans ce contexte, le comité de
bénéficiaires peut s'apercevoir que vous n'êtes pas
capables de remplir tout votre rôle et dans une hypothèse comme
celle là. II dit. On serait peut-être mieux d'être les seuls
à les défendre parce que.
Mme Lalonde: Oui. II a tout à fait raison à part
ça. Lorsque le comité de bénéficiaires peut se
rendre compte, par les demandes qu'il nous fait, par exemple, qu'on n'est pas
capables de lui obtenir, disons, ce qu'il demande pour les
bénéficiaires du centre hospitalier, oui, il peut remettre en
question notre "pouvoir" - toujours entre guillemets et sous réserve -
de changement ou d'influence, si vous le voulez. Je pense qu'il y a un
problème de ce côté - c'est mon opinion - lorsqu'on parle
de la fonction des comités de bénéficiaires dans I'article
118 5. II y a un problème parce qu'on n'est pas Je pense que les
directions des hôpitaux n'ont pas tenu compte de cet article.
Mme Lynch: On parle de la défense des
intérêts. L'article 1181 et suivants parlent de la défense
des intérêts des bénéficiaires. On ne parle jamais
de la défense des droits.
M. Jolivet: En fait, je crois comprendre que, si votre rôle
était mieux décrit et qu'il était mieux entré dans
la loi, vous travailleriez avec des comités de
bénéficiaires beaucoup plus facilement que dans le contexte
actuel.
Mme Lynch: Ce que les comités de
bénéficiaires actuellement reprochent aux ombudsmen, c'est
d'être des éteignoirs de plaintes, c'est-à-dire que je n'ai
pas de mandat, je n'ai pas de juridiction, donc, je ne peux pas rien faire avec
ta plainte ou I'ombudsman lui dit. Ah! on m'a dit que tu étais
psychotique, donc, je ne peux pas recevoir ta plainte, tu es malade, tout ce
que tu dis n'a pas de valeur. C'est ça que les comités de
bénéficiaires reprochent aux ombudsmen. La
crédibilité de l'ombudsman peut en prendre pour son rhume
à certaines occasions.
M. Jolivet: Est-ce que je peux aller plus loin en disant que tout
à l'heure vous avez dit une chose et là, vous vous êtes
arrêtée à cette partie. Vous avez dit. La tendance est que
les "ombudspersons" ou les ombudsmen comme on les appelle soient parties
à la discussion.
Mme Lynch: Oui.
M Jolivet: dans le groupe multidisciplinaire. J'ai eu crainte de
dire que vous étiez quasiment tentée de dire Partie à la
décision.
Mme Lynch: À la discussion.
M. Jolivet: J'aurais eu peur si vous m'aviez dit Partie à
la décision, parce que comment voulez-vous être à la fois
juge et partie dans vos décisions?
Mme Lynch: Oui mais qu'on soit partie à la discussion
c'est ce que je disais. C'est ce qui est important.
M. Jolivet: Oui, cest ce que jai compris mais je voudrais
être bien sûr que cest bien ce que vous vouliez dire, mais
ça ne I'est pas.
Mme Lynch: Je peux peut-être juste ajouter, si vous le
permettez, que le comité de bénéficiaires, moi, j'y crois
quand ce sont des bénéficiaires qui sont impliqués et qui
le possèdent, que ce soit eux vraiment, leurs besoins, leur vécu,
leur quotidien. C'est pour cela que chez nous on fonctionne en comité
élargi. Tous les mois, tous les bénéficiaires
intéressés se rencontrent en assemblée
générale et discutent des problèmes qu'ils vivent dans les
unités de soins, mais cest vraiment leur quotidien. C'est un groupe de
pression interne. C'est comme cela que je voudrais bien qu'on le voie.
M. Jolivet: Est ce que je suis dans la bonne voie quand je dis
que le poste d'"ombudsperson" tel que proposé et le système de
parrainage "advocacy" qu'on propose s'opposent peut-être dans les faits,
dans la mesure où Padvocacy" tel que présenté selon le
système américain, c'est un groupe d'experts ou d'aide autour de
la personne qui, au fond, jouerait le rôle d"ombudsperson" par un
coordonnateur qui serait le coordonnateur de l'ensemble de ce groupe? Est-ce
que je les oppose dans les faits ou si les deux peuvent avoir une
possibilité dans les hôpitaux?
Mme Lalonde: Je ne suis pas certaine de bien comprendre votre
question.
Mme Lynch: Moi non plus.
M. Jolivet: Vous avez parlé d'"advocacy" si j'ai bien
compris.
Mme Lalonde: Oui.
M. Jolivet: Et on a parlé d'"ombudsperson". Je veux juste
savoir si l'"advocacy" tel que présenté ou tel qu'il pourrait
s'installer dans les centres pour répondre aux besoins et aux droits des
bénéficiaires pourrait être en contradiction avec le poste
d'"ombudsperson". Est-ce que les deux peuvent être dans l'hôpital
ou dans des endroits différents?
Mme Lalonde: En tout cas, de la façon dont je comprends le
terme d'"advocacy", si on parle de fonctions d'"advocacy", on parle des
fonctions regroupées sous le terme "advocacy", "advocate", et
l'"ombudsperson" est responsable d'assumer ces fonctions d'"advocacy". De la
façon dont je le vois, ce n'est vraiment pas une contradiction, au
contraire.
De la façon dont je le vois très concrètement,
c'est une personne qui est dans un centre hospitalier qui fait la fonction
d'"ombudsperson", bien sûr, mais qui n'est pas rattachée au
conseil d'administration, au DG, ou enfin à n'importe qui. Il peut y
avoir un coordonnateur ou une coordonnatrice et de la concertation, mais il est
à l'intérieur du centre hospitalier, évidemment.
Coordonnateur et je ne sais pas où - Dieu sait où - sauf que les
personnes sont à l'intérieur des établissements. C'est
très important d'être présent.
M. Jolivet: Elle aurait à ce moment-là une
équipe de personnes autour d'elle pour...
Mme Lalonde: Oui, je trouve cela intéressant. À
l'hôpital Douglas, entre autres, il y a ce qu'on appelle le comité
des droits et éthique où on retrouve environ une douzaine de
personnes intéressées à la question des droits et de
l'éthique aussi, parce que c'est un domaine en plein
développement qui suscite de plus en plus d'intérêts. On
veut d'ailleurs s'intéresser davantage à toute la question de
l'éthique en psychiatrie parce que la littérature couvre
l'éthique en ce qui concerne les soins et la question des traitements en
médecine physique, mais en psychiatrie la littérature est
malheureusement assez pauvre jusqu'à maintenant. On veut
s'intéresser à cela. Alors, le comité des droits et
éthique appuie l'ombudsman dans ses fonctions. Il peut même y
avoir un comité ad hoc qui est créé dans le but de traiter
des problèmes spéciaux ou urgents, un comité ad hoc qui
vient du comité des droits et éthique. C'est un système de
soutien à l'intérieur des établissements.
M. Jolivet: En fait, ce que je crois comprendre de part et
d'autre, c'est que vous cherchez à obtenir que l'"ombudsperson" soit
appuyée, que cette personne-là ne soit rattachée ni au
CRSSS ni à l'établissement, qu'elle soit indépendante,
donc qu'elle puisse prendre des décisions et qu'elle ait des pouvoirs
à la fois d'enquête et de décision et non seulement de
recommandation et qu'au bout de la course il y ait un rattachement à une
section du ministère pour permettre que ces gens-là aient tous la
même mentalité dans tout le Québec pour avoir des droits
préservés de la même façon, et d'un autre
côté, si on veut aller plus loin, qu'il y ait un rattachement soit
au Protecteur du citoyen actuel ou à un autre organisme qui pourrait
être créé.
Mme Lynch: C'est cela exactement.
Mme Lalonde: Je suis plus ou moins d'accord avec l'idée du
Protecteur du citoyen. Je ne sais pas d'où vient cette affaire, mais je
suis vraiment plus ou moins d'accord avec cela. Je pense que...
M. Jolivet: Vous n'êtes pas d'accord parce que vous ne
voulez pas en demander trop.
Mme Lalonde: Parce que je n'ai pas envie de mélanger les
patates avec les navets, dans le sens qu'on est à l'intérieur du
ministère de la Santé et des Services sociaux et je pense qu'il
faudrait rester... C'est une spécialité; en fait, c'est assez
spécial. L'ombudsman du Québec n'a pas présentement
juridiction sur toute la question...
M. Jolivet: Mais ce qu'on pourrait peut-être faire pour
régler votre problème, entre les deux, c'est de dire qu'il y
aurait peut-être un organisme, pas nécessairement rattaché
au ministère ni au Protecteur du citoyen, mais un organisme
chapeauté sur le plan national.
Mme Lynch: Je pense, en tout cas, qu'il serait important - je ne
sais pas quels seront les commentaires ou les recommandations qu'il y aura
après le rapport Harnois - et intéressant qu'un comité
soit formé uniquement pour cette partie des droits.
Dans le texte que je vous ai présenté, je parlais du
projet de loi 20. Maintenant, c'est heureux que notre Code civil soit revu,
corrigé et mis à l'heure du jour, sauf qu'on le reconnaît
maintenant, on "démédicalise" ou on sort du contexte
médical ce qui était la mise en curatelle ou toutes les cures
fermées et tout cela, en les enlevant au directeur des services
professionnels pour les remettre au directeur général. Je vous
rapporte à l'article 283 du projet de loi 20, de même qu'à
l'article 26 qui dit que, maintenant, ce ne sera plus uniquement le psychiatre,
mais un médecin ou toute personne intéressée qui pourra
acheminer au juge une demande de curatelle. Alors, je pense que cela devient de
plus en plus corsé et qu'on va judiciariser de plus en plus. C'est
important qu'on s'asseoit et qu'on revoit le rôle des ombudsmen et leur
nécessité. On n'en est pas actuellement à savoir
à qui il doit être rattaché, mais bien à voir
quel est son mandat, quelle est la réalité qu'il vit et le besoin
du bénéficiaire, parce qu'il ne faut jamais le perdre de vue, car
c'est pour lui. Quand je parlais d'un système utile au
bénéficiaire, c'est cela. C'est pour cela que les conflits avec
le comité des bénéficiaires, je ne les comprends pas parce
qu'on travaille pour la même affaire.
M. Jolivet: Merci.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Thuringer: Merci, M. le Président. J'ai trouvé
que les deux mémoires éclairaient beaucoup le rôle de
l'"ombudsperson". Une chose que j'aimerais peut-être aborder, c'est
celle-ci: Quels sont les problèmes ou les domaines où les droits
des patients sont souvent niés? Autrement dit, dans le système,
qu'est-ce qui vous bloque le plus dans votre travail?
Mme Lalonde: Qu'est-ce qui nous bloque le plus dans notre
travail?
M. Thuringer: Oui.
Mme Lalonde: Bien, c'est l'absence de pouvoirs, de
recommandations réelles finalement. C'est-à-dire que notre
recommandation s'arrête là où on est. Dans mon cas, c'est
le conseil d'administration. Elle s'arrête là. Alors, lorsqu'il y
a un problème qui n'est pas réglé, disons que je suis
particulièrement têtue, je monte au conseil régional et je
me suis servie à quelques reprises du conseil régional pour
régler les problèmes que les patients m'apportaient. Est-ce que
vous voulez.., Je veux bien comprendre...
M. Thuringer: Le type de...
Mme Lalonde: Est-ce que vous voulez savoir le type de
problème?
M. Thuringer: C'est cela, rien de plus,
Mme Lalonde: II y en a plusieurs. II y a la fameuse question de
la sectorisation.
M. Thuringer: Oui.
Mme Lalonde: Oui, absolument. Il y a la question de l'argent, la
façon dont l'argent est administré pour les patients, II y a
toute la question des cures fermées. Il y a...
M. Thuringer: Le travail, par exemple.
Mme Lalonde: Oui, c'est cela. Alors, les plaintes... On va
recevoir des plaintes concernant les cures fermées, les médecins
qui n'ont pas le temps de voir leurs patients, les divergences quant à
un patient qui a été placé sous la Curatelle publique et
qui n'est pas d'accord. Il y a de la discrimination qui est faite, par exemple,
pour les gens en psychiatrie concernant le logement, l'emploi, les
difficultés relationnelles de toutes sortes, les abus aussi, les abus
physiques et les abus verbaux, les attitudes des employés, enfin le
patient qui veut consulter son dossier et qui se le voit refuser. Il y en a une
infinité. Cela part des toasts qui sont trop brûlées le
matin jusqu'à la question de la médication inadéquate
selon le bénéficiaire et qui veut avoir son mot à dire
dans son traitement ou dans son plan de traitement et qui n'a pas son mot
à dire. C'est très varié, très vaste.
Le Président (M. Bélanger): Brièvement,
madame.
Mme Lynch: Ce que Mme Lalonde vient de nous dire, cela me
ramène à ce que je disais tout à l'heure; du monde, c'est
du monde, parce qu'en régions. Ils vivent exactement les mêmes
choses; les problèmes sont là, ce sont les mêmes. Cela peut
être tout et on ne sait jamais à quoi on s'attend le matin et ce
qu'on va avoir dans la journée. Ce que j'ai le goût de mettre en
lumière quand vous parlez des problèmes ou des limites, c'est la
formation des gens en place. Quand on a à défendre des droits, je
pense... En tout cas, pour soigner du monde, on n'engage pas encore d'avocats
ou des gens qui ont une formation juridique. Donc, je pense que, pour
défendre des droits, cela prendrait un mimimum d'informations et de
connaissances juridiques. C'est une des limites importantes.
M. Thuringer; Merci.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission
vous remercie. M. le député de Laviotette. (16 heures)
M. Jolivet: Alors, on vous remercie de l'information que vous
nous avez donnée compte tenu de l'expérience que vous avez, en
espérant que, dans la future politique de santé mentale au
Québec, on puisse vraiment bien définir le rôle des
personnes et les pouvoirs de ces personnes, et les pouvoirs de ces personnes
dans la mesure où c'est toujours, comme vous dites si bien, sur les
bénéficiaires que votre travail doit porter. Merci.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laurier.
M. Sirros: Je vous remercie, également. Je pense que c'est
un des domaines sur lequel te ministère se penchera avec un
intérêt particulier, sur toute la question de l'"ombudsperson",
avant d'établir une politique définitive.
Mme Lalonde: Merci.
Association des ressources alternatives en
santé mentale de la Montérégie
Le Président (M. Bélanger): On vous remercie de
votre présence. J'appelle à la table des témoins, le
Comité consultatif régional en santé mentale de la
région... excusez, l'Association des ressources alternatives en
santé mentale de la Montérégie - je m'excuse,
j'étais un groupe en avance - qui est représenté par M.
Roland Godet et Mme Claudine Laurin. Vous connaissez nos règles de
procédure. Vous avez 20 minutes fermes pour faire votre
présentation. Il y a 40 minutes dévolues aux parlementaires pour
leur permettre de poser des questions sur votre mémoire. Je vous
prierais, chaque fois que vous prenez la parole, de bien vouloir vous
identifier pour les besoins du Journal des débats, afin qu'on sache qui
intervient et que le débat soit le plus fidèlement retransmis
possible. Je vous demanderais donc de vous présenter et de
présenter votre mémoire.
M. Godet (Roland): Bon après-midi à tous! Mon nom
est Roland Godet. Je suis actuellement et nouvellement président de
l'Association des ressources alternatives en santé mentale de la
Montérégie, et aussi responsable d'une ressource alternative, la
Maison alternative de développement humain à Saint-Hyacinthe. La
personne qui m'accompagne, Mme Claudine Laurin, est responsable de la Maison
sous les arbres à Chateauguay et membre de l'association, enfin, de son
organisme. Je crois comprendre qu'on doit déplorer l'absence de Mme
Lavoie-Roux pour un bout de temps. C'est ça?
Le Président (M. Bélanger): Malheureusement, il y a
un Conseil des ministres cet après-midi et sa présence est
absolument requise. On n'a vraiment pas le choix, mais soyez assurés que
la commission va se faire un devoir de bien informer Mme la ministre, qui a lu,
d'ailleurs, votre mémoire, et qui est au courant. Soyez sans crainte
là-dessus.
M. Godet: Merci de l'absence motivée. Le mémoire
qu'on présente, vous l'avez entrevu, se résume en quatre
principaux points. On va traiter d'une réflexion sur la
définition du partenariat, les plans de services individualisés,
les ressources alternatives, leurs définitions, mais aussi leur
financement et, en dernier lieu, la formation. Pour compliquer la tâche
de la personne qui s'occupe des micros, on s'est donné la peine de se
partager le texte. S'il veut être vigilant, on va se promener de l'un
à l'autre.
L'honorable Mme Thérèse Lavoie-Roux et membres
députés de la commission des affaires sociales, concernant le
partenariat à définir. Il est possible qu'on interrompe en cours
de route la lecture pour ajouter quelques réflexions. On a le temps, je
pense. Notre mémoire n'est pas très long.
Le Président (M. Bélanger): Cela vous appartient
entièrement.
M. Godet: C'est avec grand intérêt que l'Association
des ressources alternatives en santé mentale de la
Montérégie a reçu le projet de politique en santé
mentale. Pour nous, cette dernière fait un énorme pas en avant en
centrant son action sur l'individu. Le questionnement vis-à-vis des
services de santé mentale face à ta dépersonnalisation,
qui accompagne hélas trop souvent le diagnostic, a fait partie,
dès notre émergence, de nos philosophies d'interventions. Nous
sommes également heureux que nous reconnaissions, par le fait
même, l'urgence de diversifier tes interventions et le traitement, ce qui
amène la reconnaissance de l'approche biopsychosociale. Cette
dernière pour nous regroupe la réalité vécue par un
individu et laisse place à plusieurs modèles d'intervention.
La maladie mentale appartient d'abord à l'individu et, dans ce
sens, on doit associer ia personne à toute démarche visant la
réintégration de sa santé et de sa réadaptation.
Cependant, de telles mesures supposent un décloisonnement des services
encouragés par un changement d'attitudes et de pratiques. En ce sens, la
région 06-C a, nous croyons, une pratique établie depuis
plusieurs années et c'est de par ce vécu qu'il nous semble
pertinent d'informer la commission sur différents points essentiels
à respecter pour la réalisation d'un tel mandat.
Afin de situer la commission sur la réalité de la
région, nous vous ferons un bref historique des groupes membres de notre
association. La région 06-C fut ia première au Québec
où le conseil régional a appliqué le décret 3179-79
par une politique d'implantation de ressources alternatives en santé
mentale. L'objectif visé était alors d'une ressource par
territoire de CLSC. Présentement, te territoire regroupe onze ressources
alternatives reconnues par le CSSSM.
Mme Laurin (Claudine): À ce niveau-là, on veut
justement parler des résistances aux changements dont on a oublié
de parler dans le rapport Harnols. C'est beau de vouloir élargir le
partenariat, mais quelque part il y a aussi, il ne faut pas l'oublier, une
résistance aux changements.
Selon la volonté de notre CRSSS d'établir onze ressources,
il y avait une volonté du conseil régional qui était de
favoriser l'élargissement des partenaires en santé mentale pour
la région. On a obtenu, depuis maintenant deux ans, que deux
représentants des ressources siègent à ia commission
administrative en santé mentale au CRSSS.
Malgré tous ces efforts, notre région n'est à peu
près pas parvenue à faire reconnaître les ressources comme
partenaires égaux possédant une expertise dans le champ de la
santé mentale. On nous reconnaît comme groupes consultatifs,
comme groupes possédant une expérience dans le domaine,
comme groupes complémentaires qui peuvent donner certains services, mais
hélas, malgré que la plupart d'entre nous desservent une
clientèle quasi exclusivement psychiatrique, nos expertises ne sont pas
reconnues, notre approche thérapeutique visant la réinsertion
sociale de ces derniers n'est pas non plus reconnue. Chaque ressource dans la
sous-région se volt face au cloisonnement des pratiques et souvent
exclue des structures de planification qui en appellent aux
établissements.
Il va donc de soi que nous souhaitons ardemment que le projet de
politique reconnaisse les différents partenaires oeuvrant dans le champ
de la santé mentale. Cependant, il nous faut malheureusement tenir
compte de la réalité et du vécu de la pratique. Aussi il
faudrait, croyons-nous, identifier les différents partenaires et
peut-être même spécifier la notion de partenariat.
Serons-nous partenaires à une institution ce qui amène la
notion de complémentarité des services institutionnels ou
partenaires à un individu vivant des difficultés psychiques,
d'où parfois l'ambiguïté entre la notion
complémentaire et l'agencement de services; iI y a pour nous une grande
nuance. Agencer des services c'est en fonction de l'individu, alors que la
complémentarité est, hélas, souvent utilisée en
fonction d'être complémentaire à un réseau ou
à une institution.
Quant à nous, iI nous apparaît clair que nous devons
être partenaires à l'individu, ce qui entraînera alors un
décloisonnement des interventions, seule garantie du succès des
différentes expériences visant la réinsertion sociale ou
le maintien dans la communauté des individus concernés. Nous
demandons donc en résumé au ministère, pour ce chapitre,
d'identifier et non pas de définir le rôle, et je tiens à
le préciser, des partenaires oeuvrant dans le champ de la santé
mentale et de clarifier davantage la notion de partenariat.
M. Godet: Dans cet ordre d'idées, la recommandation R-2
qui vise l'implantation de façon obligatoire et progressive d'un plan de
services individualisé à l'intention de toute personne
engagée dans un processus de réinsertion sociale ne respecte pas
la reconnaissance du partenariat face à l'individu. Nous pensons, tout
comme le comité, qu'un plan de services individualisé pourrait
être une garantie pour ia clientèle de recevoir les services qui
lui sont requis.
Cependant, ayant toujours comme souci premier de considérer
d'abord et avant tout l'individu, nous comprenons mat la pertinence de rendre
par voie de recommandation formelle l'obligation de l'individu à un tel
plan de services, ceci venant renforcer t'a priori du comité
alléguant que le plan de services individualisé doit appartenir
en premier lieu à la personne qui en est le bénéficiaire.
Ceci nécessite donc le respect d'un engagement volontaire pour
l'individu à participer à un tel service.
Plusieurs questions surgissent également à ce chapitre. La
présente politique n'ayant pas voulu entrer dans l'organisation des
services nous laisse croire ou entrevoir que la coordination du PSI, plan de
services individualisé, se fera par un Intervenant actif dans la
situation. Comment s'arrimera cet intervenant face aux autres ressources
extérieures nécessaires à son client? Il nous faudra
d'abord vivre un partenariat élargi pendant un certain temps et
décloisonner les interventions si nous voulons réussir un
véritable plan de services.
Peut-être, à ia suite de cette pratique, jugerons-nous
nécessaire de créer des cases "managers" ou des agents de
liaison, lesquels ne relèveraient pas des boîtes offrant des
services, ce qui garantirait la neutralité des PSI et aurait par le fait
même une meilleure efficacité.
Mme Laurin: Quant à l'appellation des ressources
communautaires, toujours dans une Idée d'élargir les partenaires
et par respect des différences de l'individu, nous regrettons de voir
notre appellation de "ressources alternatives en santé mentale"
évincée et changée par "ressources communautaires de
services". On peut difficilement comprendre comment, dans un
énoncé de politique se voulant pour un partenariat élargi,
l'identité même des ressources se voit définie et
régie par une appellation et une définition pour laquelle elles
n'ont jamais été consultées. Nous craignons encore une
fois que nous ne reconnaissions pas notre expertise dans le champ de la
santé mentale. Nous aimerions porter à l'attention de la
commission que ce n'est pas par hasard que nous nous définissons comme
ressources alternatives en santé mentale. D'ailleurs, même le
comité de la politique reconnaît à ces ressources une
mission que Je n'aimais pas au départ, qu'on disait supplétive.
Mais après avoir cherché dans le Robert, je pense que je
peux m'en servir. Supplétive, c'est remplacer ce qui manque. C'est
l'essence même de nos ressources. Nos maisons ont émergé
d'un manque de services qui n'étaient pas donnés de la même
façon, d'une zone grise jusqu'alors non desservie par aucune
institution. Pour reprendre une phrase du regroupement provincial, nous sommes
Tailleurs et l'autrement".
Une appellation aussi générale que ressources
communautaires de services risquerait, à plus ou moins long terme, de
nous renvoyer à un rôle de soutien aux services existants et
à anéantir la richesse de notre expertise si durement acquise.
D'ailleurs, je me demande si cette expertise est clairement comprise par tous
les membres de la commission et de la politique Harnols. Nous ne sommes pas que
des services d'hébergement. Nous avons une expertise
thérapeutique.
Dans cet ordre d'idées, pour un plus grand respect des ressources
dans l'élargissement du partenariat, il nous apparaît normal que
nous puissions conserver et être reconnus sous le vocable que l'on s'est
donné, soit "ressources alternatives en santé mentale". De plus,
une telle définition nous amène à considérer les
groupes de soutien et d'entraide de même que les groupes de
défense comme faisant partie de la même appellation. La
communauté s'est dotée de ressources dont les services sont
diversifiés, respectant ainsi les disparités régionales et
leurs besoins. Nul n'est besoin pour nous de scinder en trois groupes les
ressources. Ceci pourrait avoir comme incidence l'appauvrissement des
communautés en sclérosant tout développement de services
au sein de ces dernières.
Il nous semble évident que le cloisonnement des institutions et
de leurs services a été en partie responsable des échecs
de réinsertion en santé mentale. Nous demandons donc au
ministère de ne pas cloisonner les différentes approches de
services par la définition de trois types de ressources. Nous
recommandons au présent comité de prévoir la
définition des ressources communautaires et d'en appeler du vocable de
"ressources alternatives en santé mentale" et ce, pour l'ensemble des
groupes.
Comme association, nous nous Interrogeons également sur la
pertinence de l'obligation pour la communauté de faire une contribution
équivalant à un minimum de 10 % du budget accordé. Nous
pensons qu'une telle mesure va à rencontre même du
bénévolat et que ce n'est pas une garantie de participation et
d'implication communautaire.
Ici, je vais faire un aparté qui n'est pas dans le texte parce
que c'est beaucoup plus régional et spécial à la
Montérégle. On se demande aussi quelle est la pertinence de
mettre justement 10 % quand déjà certaines ressources,
peut-être beaucoup en province, ne sont pas subventionnées de
façon récurrente. Déjà dans la
Montérégie, il y a deux ressources alternatives qui, au 1er avril
1988, ne savent même pas ce qui va arriver de leurs services qui offrent
des places d'hébergement au nombre de 27. Ce n'est pas 10 %, c'est 100 %
qu'il va falloir aller chercher.
Nous pensons qu'une telle mesure va à rencontre même de la
définition de bénévolat. Il ne peut s'agir d'une garantie
de notre participation communautaire. À titre d'exemple, à peu
près tous les hôpitaux ont leur fondation et leur organisation de
bénévoles, ce qui ne les définit pas comme communautaires.
Qu'une évaluation de l'atteinte des objectifs fixés et de la
pertinence des services sur une base régionale soit effectuée
périodiquement est pour nous la meilleure garantie du respect de notre
mission communautaire. On reconnaît que l'objectif de s'assurer de la
participation communautaire est prioritaire, mais cela devrait reposer sur
d'autres moyens qu'un moyen comptable. Cela peut être l'élargis-
sement des corporations, rendre plus accessible la communauté, etc. En
fait, me semble-t-il, il y a plusieurs autres moyens que financiers. (16 h
15)
M. Godet: Le dernier point: la formation. Comme dernier point, il
nous semble important de faire part au comité d'une expérience de
recherche-action-formation fort enrichissante vécue par l'ensemble des
ressources de la région Ayant bénéficié d'une
subvention du ministère, nous venons de terminer une recherche
action-formation avec l'équipe de l'École de service sociale de
Montréal. Ce projet visait à faire participer à la
recherche-formation tous les niveaux hiérarchiques des ressources
concernées, soit les usagers, les intervenants, la direction et les
membres du conseil d'administration. Entre parenthèses, cela a
été fait.
Grâce à ce projet, les ressources ont pu approfondir de
beaucoup leurs connaissances, tant au niveau de la gestion, de l'intervention,
de leur clientèle et sur bien d'autres points. Une telle
expérience de formation est d'autant plus riche par l'implication de
tous les niveaux, permettant ainsi des changements d'attitudes et de pratiques
globales. Par cette recherche-action, nous avons réussi à percer
le cloisonnement des rôles en impliquant la gestion face à
l'intervention, face au client et vice versa. Nous croyons donc qu'une
formation, se voulant dans l'optique de la politique, soit
l'élargissement du partenariat, devrait privilégier tout projet
où plus d'un secteur sera concerné, de même que le
débordement des milieux traditionnels de pratique vers les milieux
où se vivent les problèmes et se définissent de nouvelles
approches.
Nous terminons en remerciant les membres de la présente
commission de l'attention portée à ce mémoire et formulons
l'espoir, tel qu'énoncé par la politique, que l'individu soit le
principal acteur et que l'on réussisse enfin le décloisonnement,
ceci pour le plus grand intérêt de tous. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie de
votre présentation. Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier
les représentants de l'Association des ressources alternatives en
santé mentale de la Montérégle.
Évidemment, il y a une partie des problèmes que vous
soulevez qui ont été discutés à quelques reprises
ici. Vous devez être la cinquième région au moins qui vient
nous présenter ses points de vue. Vous insistez beaucoup sur la
différence entre les ressources alternatives et les ressources
communautaires. Peut-être insistez-vous davantage là-dessus que
d'autres ne l'ont fait avant vous, de peur d'être éventuellement
associés à des ressources communautaires. Je pense que ce que
vous apportez est la définition des ressources communautaires comme des
ressources de
soutien ou des ressources pour compléter un travail par exemple
de réinsertion sociale alors que dans te cas des ressources alternatives
vous vous situez parmi des ressources qui sont une alternative à la
psychiatrie plus traditionnelle. C'est comme cela, je pense qu'il faut
comprendre?
M. Godet: Entre autres. Mais je pense qu'on a tous les deux un
réflexe là-dessus. Mon premier réflexe vient d'un besoin
fondamental de l'individu de développer un sentiment d'appartenance
à un groupe social. Je pense que depuis que le mot a été
lancé il y a plus ou moins une dizaine d'années s'est
développé un cheminement d'un certain nombre d'individus vers un
certain nombre de groupes et d'un certain nombre de groupes entre eux pour se
regrouper autour du terme alternatif qui à mon avis représente ce
qu'on fait quelque chose d'autre et d'ailleurs.
J'ai des échanges de vues avec des groupes communautaires. Je ne
suis pas capable de mettre une démarcation extrêmement
précise. Mais pour moi, il y a quand même dans la pratique des
différences importantes. C'est que je ne suis pas sûr - les
groupes communautaires pourront le dire - que les groupes communautaires
pourraient prétendre, comme la plupart d'entre nous en s'identifiant
alternatifs qu'ils offrent une approche dite thérapeutique,
c'est-à-dire que nous ne prétendons pas, en tant qu'individus,
travaillant dans un groupe des non-professionnels, à avoir un rapport
privilégié d'individu à individu qui permette à une
personne de progresser thérapeutiquement vers un épanouissement.
Mais je constate, depuis les sept ans que je suis en ressources alternatives
par rapport aux trois ans que j'ai été en centre hospitalier, pas
comme résident mais comme employé qu'il y a un contexte favorable
des mises en situation avec des personnes-ressources qui font qu'un individu
change ou modifie ses comportements, trouve un peu plus sa voie et clarifie ses
objectifs en passant par chez nous.
Au début, toutes ces choses se sont faites probablement, en bonne
partie, de façon intuitive et par la bonne volonté, et je pense
aussi avec I'amour des gens à qui on veut rendre service. Mais avec le
recul, on commence - en tout cas, si je parle particulièrement de
l'association ou je travaille - à établir une espèce de
compréhension des grandes lignes et des caractéristiques qu'on
offre pour que le passage d'une personne soit enrichissant et même
à éclairer les personnes qui ne conviennent pas à la
démarche qu'on peut offrir. Alors, on est plus clairs maintenant et je
pense qu'une personne, qui passe par une ressource alternative, peut même
avoir le privilège de magasiner, en tout cas en
Montérégie, différentes approches et choisir celle qui lui
convient davantage ou avoir le privilège d'être orientée
par une ressource à la suite d un séjour dans une des ressources
qui lui convient moins ou, après avoir identifié certains besoins
spécifi- ques d'être orientée vers une autre ressource qui
lui conviendrait davantage en dehors du réseau. Cela est mon premier
réflexe.
Mme Laurin Je voudrais ajouter quelque chose. Si on se fait
appeler "ressources communautaires", quelque part, on ne reconnaît pas
notre expertise, à savoir qu'on a développé des
méthodes effectivement thérapeutiques entre autres en
Montérégie il existe des thérapies par I'art et il y a
quand même un cheminement il y en a d'autres par le travail. II y a
peut-être la notion quon ne comprend pas, quon maintient une
clientèle difficile dans la société. On pense
peut-être quon fait affaire à des groupes que des organisations de
bénévoles peuvent maintenir, mais du délire cela existe
dans nos ressources ce sont les trois quarts de nos clients. On les maintient,
on traverse on fait une réflexion également sur la folie sur les
délires quits traversent et avec cela on a quand même
développé une expertise. C'est surtout cela qu'on aurait
énormément peur de voir évincé pour une notion de
services et pour des services d'hébergement seulement alors qu'il y a
une tout autre approche qui sous-tend cela.
Mme Lavoie-Roux: C'est vraiment une approche
thérapeutique, finalement.
Mme Laurin. Oui.
Mme Lavoie-Roux: une autre forme de thérapie.
Mme Laurin: Out, mais qu'on ne peut pas définir d'une
thérapie quelconque, parce qu'il y a onze groupes, il y a effectivement
onze façons d'intervenir.
Mme Lavoie-Roux: Oui
Mme Laurin: mais il y a quand même une réflexion. De
par la recherche-action qu'on a faite, on a quand même réussi
à clarifier les grandes lignes de notre thérapie pour chacune des
ressources.
M. Godet: J 'ajouterais qu'il y a des condilions
préalables qui nous permettent maintenant de mettre le doigt un peu plus
sur notre intervention et dêtre capables de la définir et de voir
les différences avec les autres. C'est que pour bon nombre d'entre nous
il y a eu du financement récurrent, ce qui nous a enlevé le souci
daller chercher des subventions par le biais de campagnes de souscription qui
demandent énormément d'énergie et qui finalement se
différencient dans le mode de financement des ressources communautaires
qui s'adressent habituellement au soutien des organismes communautaires, qui n
ont pas un financement récurrent et qui chaque année, doivent
passer beaucoup de temps non seulement à la rédaction
des demandes de financement, mais aussi à aller combler le manque
à gagner par des campagnes de souscription ou par autre chose. Alors,
c'est différent.
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas quelle ressource alternative vous
représentez, vous l'avez peut-être dit au point de départ
et je n'étais pas arrivée. Pouvez-vous me dire - je ne sais pas
si vous êtes dans la même ressource - premièrement si vous
êtes dans la même ressource et, deuxièmement, si vous
êtes dans des ressources différentes? Étant donné
que ce sont des personnes que vous recevez et que votre approche est une
approche thérapeutique, dans chacune de vos ressources, ce sont quand
même des gens qui sont avec vous pendant un certain nombre de temps. Dans
une année, vous recevriez combien de personnes? Combien de personnes
sont suivies, par exemple, et restent avec vous entre six et douze mois? Est-ce
que vous avez certaines statistiques là-dessus?
M. Godet: Je vais parler pour ma maison, c'est la Maison
alternative de développement humain à Saint-Hyacinthe,
communément connue sous le nom de MADH. Disons que maintenant on a deux
maisons d'hébergement qui nous permettent de faire une différence
dans le cheminement des gens. Chez nous, une personne peut vivre une transition
de trois à quatre mois et s'en aller directement en appartement ou, si
elle veut développer un projet de vie, elle peut l'actualiser dans une
deuxième maison et y vivre pendant un an. Alors, si on fait le total des
gens les plus lents, on peut aller jusqu'à quinze mois ou aux alentours,
ce qui est significatif pour nous du respect du cheminement de chaque individu;
certains vont plus vite, d'autres sont plus lents et ont besoin de plus de
sécurité, mais je pense que c'est aussi fonction de la
difficulté et de la gravité de la situation de l'individu ou de
la détérioration de l'individu.
Mme Laurin: Sur le plan statistique, la Maison sous les arbres,
à Châteauguay, où je travaille, a essayé, depuis les
trois années, de recenser ce que c'était ta moyenne, parce qu'il
y en a qui viennent pour trois mois et d'autres pour six. La moyenne de
séjour est de neuf mois. On était partis avec quatre mois de
séjour; on a été souples et on s'aperçoit que la
moyenne de séjour pour les années a été d'environ
neuf mois. Nous passons en moyenne 27 places d'hébergement par
année. Il y a 27 individus différents; ce ne sont pas...
Mme Lavoie-Roux: Vous avez combien de places d'hébergement
dans votre maison?
Mme Laurin: Pardon?
Mme Lavoie-Roux: Vous avez combien de lits?
Mme Laurin: Treize. Mme Lavoie-Roux: Treize.
Mme Laurin: On offre aussi le programme, comme beaucoup de
ressources également, en externe. Il y a là aussi environ 20
places à l'externe, des gens qui viennent participer. C'est souvent une
entrée à la ressource. Ils sont incapables de passer tout de
suite de la famille d'accueil ou de la famille naturelle qui n'en peut plus,
qui est comme incapable et qui est aux prises avec, et ils ne veulent pas
retourner à l'hôpital. À ce moment-là, ils viennent
d'abord comme externes et ils commencent à se sécuriser et, par
la suite, ils entrent avec une place d'hébergement et leur programme est
plus complet.
M. Godet: En termes de chiffres, chez nous, on accueille entre 25
et 40 différentes personnes par année dans notre première
maison en transition. La deuxième varie entre dix et quinze. C'est
sûr qu'ils doivent tous passer par la transition. Ces gens-là ont
un cheminement plus lent et ils sont libérés moins vite, mais
environ 35 à 40 personnes, c'est différent. Donc, depuis les sept
ans, vous pouvez faire le calcul des différentes personnes qui sont
passées par chez nous.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Vous étiez
présents lorsque d'autres groupes ont présenté leur
demande et se sont dits, comme vous d'ailleurs, insatisfaits de la
définition qu'on faisait de services communautaires dans le sens
supplétif, dans la mesure où on ne définissait pas de
façon précise les organismes alternatifs. Dans ce contexte, vous
dites qu'on devrait s'assurer davantage que, s'il y a un partenariat, on soit
dedans et qu'on ne soit pas considérés un peu comme quelqu'un qui
dérange, mais plutôt comme quelqu'un qui vient donner un service
à des gens qui sortent de l'institution et qui doivent, comme je le dis
souvent, retourner dans un milieu plus naturel et plus proche de leurs
préoccupations.
Dans ce contexte, vous ramenez ici les discussions qu'on a eues avec
d'autres groupes quant à votre implication que vous voulez voir
précisée dans la future politique de santé mentale.
Serait-il possible que vous me disiez le rôle que vous voyez jouer par
vos ressources alternatives dans la future politique de santé
mentale?
Mme Laurin: Le rôle qu'on remplit présentement, sauf
que cela sous-entend autre chose,
cela sous-entend, comme le regroupement provincial des ressources
alternatives du Québec l'a dit qu'il faut démocratiser les
structures parce que notre CRSSS a quand même voulu nous faire embarquer
et on le dit dans notre mémoire. Mais ce n'est pas tout de vouloir. II
faut permettre qu'on puisse se situer au coeur du champ des plans
d'organisation et des plans décisionnels Tout cela est
interrelié. Si on ne reconnaît pas notre mission alternative en
santé mentale, si on nous appelle ressources communautaires. Je vais
être appelée pour la consultation mais jamais comme pouvoir
décisionnel, et il ne faut pas se faire d'illusions je pense que c'est
là qu'il faut être, mais cela sous-tend qu'on démocratise
les CRSSS et quon mette un tiers un tiers et un tiers la même
proposition. À ce moment là c'est pour nous une garantie qu'on
est quand même capables de prendre notre place. On ne demande pas au
ministère de nous dresser une place comme on ne voudrait pas qu'il fasse
une ligne directive provinciale. Ce n'est pas un modèle mais qu'il y ait
au moins des aménagements comme la démocratisation des CRSSS. (16
h 30)
M Godet: Moi, j'ai une demande précise en deux temps. La
première. Je prétends que cela va dans le sens de l'association.
L'association est d'accord, je pense avec ce qui est proposé il me
semble pour le comité d'experts qui verrait à analyser les
meilleures conditions pour la désinstitutionnalisation dans chaque
région et qui serait nécessairement composé de gens
concernés qui s'en sont sortis, ou de gens qui sont à la veille
de sortir, c'est-à-dire des bénéficiaires des centres
hospitaliers, mais aussi de représentants des ressources alternatives.
Je ne vois pas comment nous pourrions être exclus de cette
démarche.
Par contre, je pense quon souhaiterait être bienvenus et non pas
imposés. C'est peut-être ma personnalité qui veut cela.
J'aime être invité ou j'aime me sentir à l'aise là
ou je suis et non pas imposé par ur décret. II peut y avoir des
choses recommandées, de pointées. J'irais plus loin, mais
là je n'engage que moi. Je pense que nous aurions, pour la plupart, et
nous le faisons peut-être un peu déjà par notre action, des
avantages à être - je ne sais pas de qu'elle façon -
inscrits dans le processus de formation des intervenants qui oeuvrent
auprès des gens qui sont dans I'institution pour faciliter leur
réinsertion. Pendant des années, un certain nombre de gens ont
vécu en institution et ont été souvent, entre guillemets,
"parentalisés" un peu par le personnel. Je parle en connaissance de
cause pour y avoir travaillé. Si on pense à acheminer une
personne en dehors de l'institution, évidemment avec son consentement,
mais en la faisant réfléchir à sa situation et en lui
disant. Éventuellement, il va falloir que tu sortes, ça
I'insécurise et ça remet en question aussi le rôle des
travailleurs qui depuis un certain temps oeuvrent auprès de lui pour le
faire cheminer
Je ne suis pas sûr que si du jour au lendemain aux gens qui
travaillent en institutions infirmiers auxiliaires préposés on
dit. Vous allez travailler en communauté ils vont se sentir à
l'aise. Je pense queux aussi sont en partie institutionnalisés. En tout
cas ils ont adopté des comportements tels qu'ils ne laisseraient pas
partir leur clientèle facilement. Je pense qu'on pourrait être
utiles peut-être pas imposés mais utiles dans l'apprentissage
nouveau à une approche nouvelle de type communautaire de
réinsertion sociale communautaire.
M.
Jolivet. Est-ce que dans les groupes
représentés par vous aujourd'hui il y a des gens qui sont une
ressource alternative basée sur des ex-psychiatrisés des
personnes qui ont connu I'institution et qui ont décidé de venir
en aide à leurs semblables en disant. J'ai passé par telle chose
j'ai peut-être la possibilité et la capacité de t'aider
à passer à travers? Avez-vous dans vos groupes des gens comme
ceux-là?
M Godet: Je vais parier pour Saint Hyacinthe. Des membres du
personnel qui ont oeuvré, et Dieu sait s'il y a eu du monde, avant de
trouver du personnel plus stable, depuis le début de la ressource
auprès des gens qui avaient besoin de services, je ne me trompe pas en
disant que le tiers de ces gens ont eu ou avaient déjà eu une
hospitalisation à leur crédit, et sont devenus intervenants.
D'ailleurs, quand la res source a été mise sur pied, moi,
j'étais préposé en psychiatrie et les trois premiers
engagés sur le projet avec moi étaient trois
ex-psychiatnsés. Par la suite, il y a eu des gens qui avaient un autre
cheminement. Il y a quand même eu quelqu'un qui avait un passé
psychiatrique avec trois hospitalisations assez solides, qui a travaillé
chez nous pendant quatre ans en tenue de livres. On lui a donné sa
chance.
Au niveau du conseil d'administration il y a maintenant une place
réservée nécessairement à un des résidents
lis peuvent assister, devenir membres de la corporation et sont
éligibles comme n'importe qui au conseil d'administration. C'est notre
contribution, mais nous, on ne prétend pas être un groupe
principalement reconnu comme un groupe de psychiatrisés. On est surtout
principalement reconnu comme un groupe d intervenants donnant des services.
Mme Laurin: Là-dessus, j'aimerais il faut comprendre la
situation de la Montérégie et peut-être qu'on va comprendre
la dynamique de la naissance d'une ressource. Je trouve la question pertinente.
C'est qu'en Montérégie, effectivement, on représente onze
groupes. Il devrait s'en adjoindre un douzième qu) est,
premièrement, une ressource de soutien faite par des
psychiatrisés. Mais comme en Montérégie, les onze
ressources sont nées de I'adoption d'un
décret, la dynamique de la naissance d'une ressource dite
communautaire n'a pas été respectée dans tous les cas.
À ce moment-là, c'est parti justement de ressources où les
usagers, au départ, ne participaient pas aux CA. Avec la
recherche-action-formation, avec une réflexion, de plus en plus de
ressources ont ouvert des places dans le CA aux usagers. Chez nous, entre
autres, II y a de la place pour les usagers au CA et de plus en plus de
ressources... Il y a aussi l'Entre-Deux à Longueuil qui commence
à voir l'importance de l'implication, mais il faut comprendre qu'au
départ on n'a pas respecté la dynamique communautaire. Cela
aurait sûrement donné autre chose. Disons que c'est devenu bien,
on a impliqué l'usager, mais cela a pris une démarche plus
longue.
M. Jolivet: En fait, ce pourquoi je dis cela, c'est parce que.
effectivement, je suis en accord avec l'aide apportée à ces
gens-là. Je comprends la réticence que peuvent avoir les
personnes, que ce soient les conseils de services sociaux ou d'autres. Parfois,
au lieu de faire une étude sur la ressource elle-même, elles
regardent les gens qui composent la ressource et disent: lis sont difficiles
à vivre parce qu'ils ont vécu des problèmes dans le
passé. Je pense que ce n'est pas la façon dont on doit agir si on
veut vraiment mettre en place les structures alternatives, des ressources
alternatives.
D'un autre côté, vous dites que les 10 %, au même
titre que le regroupement ou d'autres personnes formant des alternatives comme
les vôtres, vous trouvez cela dur à supporter. Qu'est-ce que vous
proposez? Je ne poserai pas la même question que j'ai posée ce
matin, vous étiez là.
Mme Laurin: Je l'ai entendue et hier aussi. Les 10 %, d'abord, ce
n'est pas une garantie communautaire, c'est une mesure comptable. Je ne vous
répéterai pas ce que j'ai dit quand je suis venue avec le
regroupement provincial, je l'ai défendu de la même façon.
Je trouve un peu fâchant, pour nous qui avons oeuvré si longtemps
avec de si petits budgets, qu'en Montérégie, pour nos places
d'hébergement, comme je le disais tantôt dans le mémoire il
y ait deux ressources qui ne savent pas ce qui va arriver le 1er avril 1988;
cela représente 27 places d'hébergement. J'en suis une de ces
ressources. Je n'ai pas de budget récurrent.
Je lis, dans le rapport Harnois, qu'on me demande d'aller chercher 10 %
de ma contribution. Ce n'est pas une garantie de ressource communautaire. On me
demande d'élargir ma corporation, c'est ce que je propose comme moyen.
Qu'on me demande de prouver mes méthodes d'interventions dans la
communauté, que la communauté rentre dans la ressource, qu'on
l'ouvre, mais qu'on ne me demande pas de mesure comptable, je trouve que ce
n'est aucune garantie. C'est un peu la position. Il y a deux ressources qui,
comme je le disais tantôt, vont être obligés d'aller
chercher 100 % de leur budget et ce sont 27 places d'hébergement.
M. Godet: Moi, ce n'est pas une mesure que je propose, c'est un
fait que je constate. La plupart des gens - je ne fais pas cela par rapport
à l'établissement, je n'ai pas de jugement à porter sur
eux - la plupart des intervenants, qui travaillent à notre service ou
des gens qui n'ont pas de passé, au fur et à mesure, s'impliquent
en communauté; ils s'impliquent à la naissance, dans
l'étape de concertation aussi avec des groupes communautaires qui ont
une relation étroite avec nous. Cela fait partie de notre travail.
Notre travail, c'est vrai qu'il est auprès de la clientèle
en termes de services, mais c'est aussi un travail qui rayonne dans notre
communauté. Je pense que la contribution particulière de chaque
ressource et de chaque intervenant de chaque ressource, c'est aussi de
s'associer avec d'autres ressources communautaires ou alternatives de notre
sous-région et de créer des liens nouveaux, de
dédramatiser et de démystifier la santé mentale. Quand on
s'implique dans l'étape de concertation, entre autres choses la table de
concertation-jeunesse à Saint-Hyacinthe, et qu'on est un organisme de
santé mentale et qu'on se donne la peine d'aller
régulièrement aux rencontres, je pense qu'on crée un
impact de démystification avec les gens avec qui on fait affaire. On
s'assure, autant que possible, non pas d'être absolument partout, mais
d'être là où on invite, là où on pense que
c'est notre intérêt
Alors, je vous dis qu'en termes de rayonnement, en plus de l'implication
bénévole des membres du conseil d'administration et de
l'assemblée de chacune des ressources, les intervenants propres
s'impliquent à différents niveaux et je pense que leur travail
permet une sensibilisation et une dédramatisation, un paquet de choses
impalpables en termes d'argent, mais drôlement intéressantes en
termes de relations et d'intégration sociale de nos résidents ou
ex-résidents, dans le changement des mentalités et des
attitudes.
Mme Laurin: Je voudrais juste ajouter quelque chose. Je vous
entendais ce matin, je vous al entendu hier et vous sembliez dire que c'est
parce que vous avez peur qu'on soit récupérés par
l'État ou qu'on perde... Ce dont j'ai peur dans cette mesure, c'est que,
à force de comptabiliser le bénévolat, cela ne devienne un
abri fiscal. J'aimerais que vous y réfléchissiez. On est
peut-être en train de transformer le bénévolat. Il y a
également cela.
M. Jolivet: Une autre question concernant le plan de services
individualisé. Vous dites oui au plan de services. D'un autre
côté, je crois comprendre que, comme tous les organismes
comme le vôtre, vous dites: II devrait y avoir une
collégialité quant à la prise de décision et quant
au plan de services individualisé à partir des besoins de
l'individu avec, bien entendu, une personne pour faire la coordination de tout
cela. Mais si, d'une certaine façon, on veut qu'il y ait obligatoirement
un comité pour évaluer le besoin et pour préparer le plan
de services individualisé à partir des besoins de l'individu,
vous dites cependant: Pas obligatoirement au fait que l'individu... Vous dites
cela autrement, vous dites: "Cependant, ayant comme toujours souci premier de
considérer d'abord et avant tout l'individu, nous comprenons mat la
pertinence de rendre par voie de recommandation formelle l'obligation de
l'individu à un tel plan de services. "
Je voudrais comprendre ce que vous vouiez dire. Est-ce que vous voulez
dire qu'il devrait y avoir un plan de services, mais que ce soit l'individu qui
le demande et non pas l'organisme qui l'impose?
M. Godet: Non seulement cela va-t-il dans ce sens-là, mais
cela se fait déjà. Chez nous, pour la personne qui vient à
une entrevue, qui pose sa candidature pour venir résider chez nous et
faire une démarche de réinsertion sociale, quand on analyse ses
besoins et, selon ce qu'elle nous présente d'elle-même et non pas
ce qu'on a appris d'autres, à moins qu'il y ait de sérieux
doutes, on s'entend pour lui donner une perception de l'endroit où on la
situe dans sa démarche, ses forces, ses faiblesses, les besoins qu'elle
nous présente. On essaie de clarifier sa démarche avec elle et
d'être assez honnête pour lui dire: Écoute, actuellement,
nos services ne peuvent pas convenir à ce que tu as le goût de
vivre ou c'est un autre service, une autre orientation qu'on le suggère.
On fait continuellement de l'orientation.
Très souvent, je dirais même généralement,
cela se fait en collaboration, chez nous en tout cas, avec le centre
hospitalier. Si on entend dire qu'une personne veut poser sa candidature chez
nous, on dit quoi faire à l'intervenant. Cela veut dire que cette
personne doit prendre un rendez-vous chez nous et on la reçoit. À
la suite de la rencontre, on donne à la personne le mieux qu'elle peut
comprendre d'elle-même et, la plupart du temps aussi, on va recontacter
l'intervenant. Je vous parle de gens qui ont souvent été
hospitalisés plus de trois mois, six mois, un an ou deux ans; on parle
de désinstitutionnalisation dans notre cas, parce qu'à
Saint-Hyacinthe il y a 75 lits à long terme. On est un bassin à
long terme particulièrement intéressant pour la
sous-région où il en manque et il y a actuellement des luttes
à ce niveau-là.
Une démarche est donc faite pour aider l'individu à se
clarifier là-dedans. Évidemment, c'est écrit pour nous sur
une fiche; ce n'est pas un dossier. La personne ne retourne pas avec une
analyse de ses besoins au centre hospitalier, "si elle est refusée;
même si elle est acceptée, c'est pour notre perception
personnelle. Mais on lui dit à peu près où elle se situe.
Il y a même des organismes qui nous demandent de faire
l'évaluation de leur clientèle pour voir à quel niveau ils
sont rendus et on les contacte ensuite à nouveau pour leur donner notre
perception parce qu'ils nous reconnaissent une spécialité. Cela
m'est arrivé dernièrement, à la suite de doutes de gens
qui s'occupent d'un organisme d'alcooliques et de toxicomanes, d'avoir à
faire une vérification chez nous pour savoir s'il n'y avait pas aussi
des problèmes de santé mentale. (16 h 45)
Cela se fait, mais ce n'est pas sur papier. Cela pourrait l'être
dans la mesure où on le suggère ou que quelqu'un le
suggère à l'individu et que l'individu dise: Je m'en viens chez
nous, mais Je veux avoir un papier pour savoir où je suis rendu,
voulez-vous me le faire? On va se donner la peine d'écrire notre
perception. Elle va repartir avec cela, mais cela se fait verbalement, oui. Pas
de façon obligatoire, mais de façon volontaire, mais cela se fait
systématiquement.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Châteauguay.
Mme Cardinal: Merci, M. le Président. Je tiens tout
d'abord à remercier et à féliciter vos organismes parce
que je connais très bien, si je me fie à ma région, le
travail exceptionnel que vous faites. Chez moi, en tout cas, c'est tellement
discret et efficace que je voudrais vraiment savoir le type réel de
votre clientèle. On parle de clientèle légère, de
clientèle plus lourde. Ce qui m'a frappée tantôt, c'est que
vous avez mentionné des cas de délire. Est-ce exceptionnel ou si
vraiment vous avez à traiter, j'oserais dire régulièrement
ou joumalièrement, ce type de problème?
Mme Laurin: Oui, ce n'est pas exceptionnel. Je dirais que c'est
75 % de la clientèle, oui. Ce ne sont pas des cas si... Disons qu'on a
une multiclientèle. Il y a des cas de dépression, mais 75 % de
notre clientèle souvent entre en délire ou a un délire
à l'intérieur même. Je dis le mot "délire", je
n'aime pas cela, mais je voulais être Claire. C'est parce qu'on ne marche
pas par diagnostic. Je voulais être bien comprise. Je ne savais pas
comment expliquer cela. Oui, nous desservons une clientèle très
lourde. D'ailleurs, dans Châteauguay, je pense que vous êtes au
courant, il n'y avait pas de service psychiatrique, l'hôpital est
à 40 milles, c'est quasiment nous qui avons offert l'alternative, mais
qui avons justement repris les gens qui probablement, si on n'avait pas
été là, ou sûrement à 95 %, seraient
allés à l'hôpital.
Dans ce sens, on influence directement le syndrome de la porte
tournante. On ne les retourne pas dès qu'il y a un accroc.
Mme Cardinal: Effectivement parce que nous
avons à aller chercher nos services soit à Longueuil ou
à Valleyfield.
Mme Laurin: C est ça.
Mme Cardinal: Dans d'autres services aussi. Je pense que Mme la
ministre est très consciente et elle tend justement à corriger
ces disparités. Cela étant dit, je voudrais aussi vous demander
si les itinérants, je sais qu'il y en a dans la région, font
partie également de votre clientèle, parce qu'il faut constater
qu'il y a quand même un pourcentage assez important de gens
psychiatrisés ou ex-psychiatrisés? À ce moment une
ressource comme la vôtre peut-elle toucher ou rejoindre, ou de quelle
façon peut-elle rejoindre ces gens?
Mme Laurin: On rejoint les itinérants - je parle pour
notre ressource - qui sont à caractéristique psychiatrique. C'est
souvent, à ce moment, la police qui vient nous les reconduire ou c'est
le CLSC qui reçoit à son urgence psychosociale un cas ou on
s'aperçoit justement qu'il y a une caractéristique, une
composante psychiatrique. Nous ne rejoignons pas I'itinérant vagabond,
rendu clochard, et qui n'a pas de connotation psychiatrique. Ce dont on a peur,
c'est qu'on devienne une mission de dépannage. Comme on a une approche
thérapeutique, on reçoit l'itinérant qui n'avait pas
d'autre ressource et qui est allé, mais qui avait une connotation
psychiatrique ou de maladie ou même détérioration de
santé mentale.
Mme Cardinal: Pourriez-vous me donner à peu près un
estimé des résultats concrets de réinsertion? Cela
m'apparaît, vos cas m'apparaissent, enfin, votre clientèle
m'apparaît très lourde. Pouvez-vous quand même donner un
pourcentage de réinsertion et quand même de résultats
positifs de vos approches?
Mme Laurin: Oui Cette année, le résultat a
été de 42 % pour un retour en appartement autonome. Pour nous,
c'est aussi significatif parce que, même s'ils demeurent
bénéficiaires de l'aide sociale, ce sont des gens qui entrent
à 85 % soit de leur milieu familial, de familles d'accueil ou
d'hôpitaux, mais qui n'ont jamais été capables de vivre en
appartement autonome, à ce niveau. Pour ce qui est de la
réinsertion au travail, disons qu'on a plus ou moins bien réussi
cette année, c'est 20 %
II a été une année où nous avions
très bien réussi. C'est qu'on a eu un commerce de patates frites,
et la clientèle psychiatrique, il y en avait de la lourde aussi qui
allait là, était, à ce moment, sur un plateau de travail,
donc, ils étaient en contact avec les gens Ils vivaient le stress de
vendre leurs hot dogs, etc. Cela avait fait un taux de réussite de 53 %
de réinsertion sociale les deux années ou on a fait ce programme.
Malheureusement, il manquait d'effectifs, il nous manquait des moyens
financiers pour payer une ressource humaine qui aurait pu tenir le programme et
on était à bout de force. Au bout de deux ans on a
abandonné le projet de patates frites, ce que je trouve dommage.
Mme Cardinal: Oui, effectivement. Maintenant, j'aimerais savoir
également comment vous êtes perçus dans le milieu. Enfin je
le sais, mais j'aimerais que vous me l'expliquiez. Comment ce genre de services
que vous offrez à la population est perçu dans les
régions''. C'est quand même particulier, on n'est pas encore au
bout des tabous, de certaines craintes, d'appréhensions. On ne sait pas
encore très bien la différence entre la déficience mentale
et les problèmes de santé mentale. Alors.
Mme Laurin: De ce côté-là, disons, comme vous
l'avez dit nous sommes très discrets dans Châteauguay. Je pense
qu'il y a beaucoup de ressources qui sont obligées de faire cela aussi.
II y en a certaines qui ont passé, au début, par des certificats
de reconnaissance de famille d'accueil, mais le CSS a fait comme un moratoire
et a demandé qu'il n'y en ait plus de délivrés. Nous, nous
n'avons pas de certificat de famille d'accueil. Donc, on n'est pas sous
l'égide de la loi 158. Donc, face à la population il faut d'abord
parler de problèmes de dépression et beaucoup de gens ne savent
pas. On ne peut pas se permettre le luxe d'arriver et de parler directement de
la clientèle qu'on dessert parce qu'on pourrait être
évincés, on est considérés comme quasiment un foyer
clandestin, n'étant ni famille d'accueil, donc pas couverts par
l'article 158, ni famille naturelle non plus. Cest une situation assez
ambiguë.
Mme Cardinal: Merci. M. Godet: Est-ce que.
Le Président (M. Bélanger): Vous avez un
commentaire. Je vous en prie.
M. Godet: Oui. Est-ce que je peux prendre quelques questions de
Mme la députée, mais de façon régionale?
Alors, de façon régionale, pour avoir passé presque
deux ans seulement en recherche-action, pour avoir côtoyé d'autres
ressources, les onze ressources, et bientôt probablement douze ou treize,
je sais que nos approches sont très diversifiées. La
clientèle peut aller de personnes quf n'ont jamais connu
d'hospitalisation, mais qui sont en phase sérieuse de dépression
suicidaire ou, à la rigueur, même en perte de contact avec la
réalité jusqu'à des gens qui ont un passé
psychiatrique assez lourd, qui sont suivis par des travailleurs sociaux et qui
sont placés dans une ressource qui s'apparenterait un peu plus à
une structure intermédiaire malgré quelle soit de type organisme
à but non lucratif avec des
services propres.
Alors, on a, à mon avis, une gamme très variée de
clientèles, mais une chose est sûre, c'est que la plupart des
ressources ou toutes les ressources sans exception, je pense, peut-être
pas en termes de statistiques précises, mais en termes d'optique,
réussissent à éloigner ou à éviter
l'hospitalisation. Si j'accorde une importance particulière à la
réflexion qu'un chef de département d'un centre hospitalier de
court terme me faisait à Saint-Hyacinthe il n'y a pas tellement
longtemps, ce sont moins des gens connus de la psychiatrie qui reviennent, ce
sont des figures nouvelles. Alors, on a tendance à croire par cette
réflexion que les gens qui avaient le syndrome de la porte tournante,
comme on l'appelle, ont pu, finalement, être absorbés dans notre
ressource ou d'autres ressources et maintenus en société par le
biais d'un centre de loisirs dont on a pris l'initiative.
Alors, ce n'est peut-être pas en termes de chiffres que je peux
vous parler, mais en termes de résultantes d'une utilisation moins
fréquente des services hospitaliers. Dans ce sens-là, je pense
qu'on peut parler de réussite.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Lâviolette.
M. Jolivet: Oui. Je tiens à vous remercier de votre
implication au nom de ceux qui profitent de votre expertise. Je souhaite, comme
vous, qu'on puisse dans la future politique de santé mentale - je ne
devrais pas dire cela comme tel - non pas définir les rôles de
chacun, mais plutôt dire qu'il y a des gens qui font des choses et leur
permettre par des moyens financiers de pouvoir y participer.
Je voudrais dissiper, en ces derniers mots qu'il me reste, ce qui vous
est peut-être passé par l'esprit: Vous avez dit que le fait de
financer plus, c'est-à-dire de financer à 100 %, ce serait une
récupération par l'État, je n'ai jamais dit cela. Si je
l'ai dit, c'était seulement dans mon rôle d'avocat du diable par
les questions que je posais, mais ce n'est pas ce que j'en pensais. Au
contraire, je dis que les groupes comme les vôtres doivent être
aidés et qu'on doit leur permettre de faire des choses qu'aucun centre
hospitalier ni aucun centre d'accueil du réseau ne peuvent faire, mais
avec l'effort de bénévolat et d'action par les groupes comme le
vôtre, on peut le faire à des coûts moindres. En
conséquence, on doit à ce moment-là, tout en tenant compte
des capacités de l'État, vous permettre de vivre avec une
sécurité à plus long terme, de façon
récurrente. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais à mon tour vous remercier
pour les services que vous rendez à la communauté, surtout pour
la persévérance avec laquelle vous le faites. Je sais que c'est
souvent dans des conditions difficiles et c'est parce que vous croyez au
travail que vous faites que vous pouvez le poursuivre.
Nous allons essayer de réconcilier, au moment de la
rédaction finale de la politique en santé mentale, ce qui peut,
à première vue, paraître irréconciliable, quoique,
au fur et à mesure des journées d'auditions, il m'apparaisse que
fondamentalement il y quand même des consensus qui se dégagent sur
les principes de base. Sur les modalités, évidemment, des
précisions devront être apportées. Je vous remercie de
votre contribution.
M. Godet: Est-ce que je peux exprimer un souhait avant de
quitter?
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
M. Godet: Je souhaite ardemment que le comité ne tombe pas
dans le piège de l'homogénéité et du
stéréotype, et je m'explique. Depuis la journée et demie
que j'assiste à ces travaux, j'ai trouvé très enrichissant
de voir présentées ici différentes approches et
différentes solutions particulières à chaque région
et à chaque sous-région.
Pour moi, il est essentiel de donner le financement nécessaire
à chacune de ces initiatives, tout en pensant que les autres
régions ne seront pas nécessairement jalouses qu'une Initiative
soit encouragée dans un secteur ou dans une région
comparativement à une autre parce que, à mon avis, les
règles du jeu sont différentes et les valeurs qui sont
véhiculées le sont aussi. Ce qui fait qu'une solution qui
convient à un endroit ne va pas nécessairement convenir à
un autre endroit. Le règne de la concurrence entre nous est
révolu. Ce n'est pas pour rien qu'il y a un regroupement provincial et
des regroupements régionaux; même de la part 'd'un
établissement, à l'intérieur de l'établissement, on
souligne des initiatives très intéressantes, comme l'initiative
de M. Lecomte, entre autres, et de sa dame. Je trouve cette initiative
très intéressante. Il y a un changement d'attitude aussi à
l'intérieur des institutions. Mais nous ne serons pas jaloux si c'est
encouragé là; nous trouverons peut-être des choses
intéressantes à aller chercher, mais à adapter dans
chacune de nos régions. Merci.
Comité consultatif régional en
santé mentale, région 02
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
La commission des affaires sociales remercie l'Association des
ressources alternatives en santé mentale de la Montérégie
et appelle à la table des témoins le Comité consultatif
régional en santé mentale de la région 02,
c'est-à-dire de la région Saguenay-Lac-Saint-Jean, si ma
mémoire
est bonne.
J'appelle donc à la table M. Réal Lajoie, M. Laval
Laberge, M. Ghislain Girard, Mme Michelle Harvey, Mme Jennifer-Anne Corriveau
et M. René Jacob.
Bienvenue parmi nous. Je suis un bon saguenéen de naissance, de
Chicoutimi. Cela me fait toujours plaisir. Nous avons donc à notre table
les représentants du Comité consultatif régional en
santé mentale de la région 02. Vous connaissez nos règles
de procédure Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation.
Si, au cours de cette présentation ou au moment de répondre aux
questions, puisqu'il y a une période de questions de 40 minutes, vous
avez à prendre la parole, s'il vous plaît, vous vous identifierez
avant de le faire pour les fins du Journal des débats afin que
soient consignés de façon fidèle les débats et les
intervenants. Je demanderais donc à votre porte-parole de s'identifier
et de procéder à la présentation de votre mémoire.
(17 heures)
M. Lajoie (Réal): Je suis Réal Lajoie. J'aimerais
soumettre un petit document, des commentaires additionnels à l'avis que
nous avons présenté en novembre.
Nous tenons à remercier la présente commission de nous
recevoir en audition. Je voudrais d'abord vous dire quelques mots du
Comité consultatif régional en santé mentale,
région 02. dont la majorité des membres sont présents
aujourd'hui dans cette salie. Ce comité fut formé au printemps
1983, sous l'initiative du Département de santé communautaire de
l'Hôpital de Chicoutimi qui continue toujours de le soutenir
financièrement, techniquement et professionnellement.
Il est actuellement composé de douze personnes
représentatives des divers milieux régionaux concernés par
la santé mentale. C'est ainsi qu'on y retrouve un représentant du
Conseil régional de santé et des services sociaux, Michelle
Harvey, des représentants des deux DSC de la région 02, Laval
Laberge, Josette Bouchard et mol-même. Deux représentants des
CLSC, soit un pour le Lac-Saint-Jean, Paul BoMn, et un autre pour le Saguenay,
René Jacob. Des représentants des deux centres psychiatriques de
la région, Ghislain Girard de l'Institut Roland-Saucier et Bernard
Ouellet, du Centre psychiatrique de Roberval. Des représentants de
l'Association canadienne pour la santé mentale, dont René Jacob,
qui, en même temps, représente une de ces associations dans la
région. De même qu'un représentant des ressources
alternatives, Jennifer Corriveau.
C'est un comité consultatif, régional et qui a des centres
décisionnels. Ce n'est pas le comité d'une Institution
particulière. La formation de ce comité répondait à
un vide et le travail qui y fut fait nous semble être important pour
faciliter rétablissement de ce que le rapport Harnois appelle le
partenariat. Cette notion de partenariat nous apparaît d'ailleurs
très importante. Le rapport du comité de la politique pour un
partenariat élargi était très attendu. C'est un document
important, qui pourrait être l'occasion d'un débat de
société capital en ce qui concerne la santé mentale et les
changements de mentalités, d'attitudes et de pratiques qui sont
souhaités depuis longtemps, mais qui sont souvent restés
longtemps des voeux pieux.
Ce document certes, comporte des points forts et des points faibles,
dont plusieurs ont déjà été mentionnés dans
le débat en cours. Afin qu'il y ait le moins de
répétitions possible, je n'en ferai pas la lecture de l'avis de
façon intégrale. Je présenterai un court
résumé pour ensuite vous présenter quelques commentaires
sur des points qui ont été moins touchés et qui nous
apparaissent particulièrement importants.
D'abord, les commentaires généraux. Comme premier
commentaire, il faut souligner l'importance que revêt à nos yeux
le projet de politique en santé mentale du fait qu'il soumet de
façon officielle les orientations à prendre et les tâches
à effectuer. Deuxièmement, il s'agit également d'un
document qui, après avoir reconnu tes principes d'équité
comme préoccupation fondamentale de toute action en santé mentale
et de la primauté de la personne ainsi que du respect auquel elle a
droit, soumet sept orientations spécifiques avec lesquelles nous sommes
entièrement d'accord et qui ne nécessiteraient pas - cela se
retrouve aux pages 49 et 50 du document Hamois...
Troisièmement, compte tenu de ce troisième commentaire
général, compte tenu des orientations spécifiques bien
intentionnées, on peut qualifier le document de vertueux, auquel on ne
peut que souscrire. L'atteinte des objectifs proposés nous doterait d'un
des meilleurs systèmes au monde. Un autre commentaire se
réfère au caractère politique de ce document. En effet,
nous avons eu l'impression qu'on a pensé éviter les batailles
d'institutions en remettant aux régions le soin de définir leurs
partenaires et de préciser leurs tâches respectives. Tel que
présenté, te document pourrait être le résultat d'un
compromis que les membres du comité de ta politique de santé
mentale ont dû faire afin que le document soit axé sur le
consensus.
Ce qui nous est présenté ici - cinquième
commentaire - concerne davantage le champ de la santé mentale. Pour
nous, c'est une politique de services à laquelle devra s'ajouter le
volet préventif.
Sixièmement, il faudra beaucoup d'énergie et une
réelle volonté politique pour que le projet qui nous est
présenté devienne réalité. En ce sens, le document
pourrait être le point de départ d'une discussion et de
l'établissement d'un mécanisme de concertation. Le
septième commentaire fait allusion au questionnement qui a surgi
spontanément, à savoir - et c'est notre dernier commentaire -
quel pouvoir réel serait donné aux conseils régionaux pour
réaliser te mandat proposé.
Dans le projet de politique, nous avons identifié six forces qui
se réfèrent à des principes généraux et six
faiblesses qui font ressortir les éléments imprécis de
l'opérationnalisation.
Les forces. La plus grande force du document réside dans le fait
qu'il place la personne en besoin au centre des préoccupations. De plus,
pour éviter toute interprétation possible, te document ajoute,
dans un même souffle, que cette place a prérogative sur les
questions de structures, de champs de responsabilité ou
d'exclusivité de pratique.
La deuxième force, la volonté de régionalisation,
nous apparaît également comme majeure. Cette orientation nous
permet en effet une lecture régionale des problèmes et des
besoins suivie d'une recherche de solutions adaptées à ces
besoins. Cependant, pour que cette orientation se situe du côté
des forces, il faudra que les régions aient accès à un
pouvoir réel et qu'elles puissent utiliser les sommes monétaires
selon les besoins exprimés régionalement. Nous croyons qu'il faut
être vigilants à ce niveau, car l'histoire nous a
déjà démontré qu'il est possible d'amputer tes
décideurs régionaux d'une partie importante de leur
capacité de gouverner.
La troisième force constitue également, à nos yeux,
une grande force; c'est la reconnaissance des trois axes organisateurs de la
santé mentale: l'axe biologique, l'axe du psychodéveloppement et
l'axe contextuel, qui se réfère à l'insertion de
l'individu dans une société, à ses relations avec son
environnement et ses milieux significatifs.
Nous croyons qu'il faudra réaffirmer souvent l'importance de ces
trois axes, car en situation de crise ou de tension, la tendance est que ces
axes deviennent en opposition et qu'ainsi ils ne soient plus
complémentaires. On peut alors imaginer la difficulté qui en
découle, car s'il y a opposition et que la résultante est la
réduction des axes, on restreint alors la globalité de l'approche
et de l'intervention, et on assiste à une pratique isolée des
psychosociaux et à une pratique Isolée du monde médical et
des milieux de réinsertion.
Le comité provincial a bien compris ce danger en soulignant qu'un
des sept problèmes prioritaires auquel on devra tenter de trouver une
solution est celui de la difficulté pour une personne d'être
considérée de manière globale et de se voir offrir des
services continus, respectueux de son cheminement et intégrant les
dimensions biologiques, psychologiques et sociales.
Une autre force du document est qu'il reconnaît l'importance du
rôle de la famille et des proches. Trop souvent, en effet, par le
passé a-t-on mis ces derniers de côté en se privant parfois
ainsi de partenaires incomparables. Nous sommes d'accord avec le texte
lorsqu'il stipule que "les milieux doivent être écoutés,
associés à toutes les phases de l'intervention et appuyés
adéquatement". Cependant, pour éviter plusieurs
difficultés d'opérationnallsation en ce domaine, nous aimerions
voir modifier le libellé de la famille et des proches pour celui des
personnes significatives telles qu'identifiées par te
bénéficiaire ou l'usager.
Un autre point majeur, selon nous, est celui du partenariat, qui devient
important et reconnu comme élément essentiel de toute
organisation en santé mentale Je vais revenir sur ce point plus tard. La
dernière grande force que nous désirons souligner concerne la
proposition du PSI, plan de services individualisé. Nous souscrivons aux
objectifs qui sous-tendent la recommandation 2 de même qu'aux
critères devant présider à l'élaboration de ce
plan. Nous nous interrogeons cependant sur certains points qui se
réfèrent à la personne-pivot, sur ses
responsabilités, sur sa présence dans le réseau et la
communauté, sur les aspects de la confidentialité, des
mécanismes d'évaluation de même que du cadre juridique de
sa responsabilité.
Les faiblesses maintenant. La lecture du projet de politique n'a pas
fait ressortir que des points forts. En effet, certains se sont classés
dans la catégorie des faiblesses en raison surtout de leur
caractère Imprécis. Il faut se souvenir qu'on a cherché
à établir un consensus, mais il faudra bien régionalement
se pencher sur les six éléments que nous pourrions qualifier de
faibles.
Parmi ces derniers, la pauvreté des moyens
d'opérationnallsation a principalement retenu notre attention.
Cependant, si cette déficience face aux moyens opérationnels
signifie qu'on laisse aux régions un pouvoir réel de
décider des moyens les plus appropriés pour elles, on ne parlera
plus de faiblesses, mais de défis à relever. Nous nous sommes
également demandé si le fait qu'un document aussi vertueux ne
contenait que peu de moyens opérationnels n'invitait pas certains au
statu quo alors qu'ils pourraient se dire: Voilà ce que nous avons
toujours fait, par exempte, l'approche globale centrée sur le client,
etc. Pourtant nous savons que la réalité est
différente.
Le deuxième point, l'aspect financier, nous a également
fait poser des questions; nous reviendrons plus tard sur ce point.
Une troisième faiblesse. Il nous est également apparu que
le document n'établissait pas clairement la différence entre
ressources intermédiaires et ressources communautaires. Pour nous, iI
est clair et évident que les ressources intermédiaires ne sont
aucunement des ressources communautaires, mais elles sont en fait des
ressources institutionnelles Installées dans la communauté.
L'imprécision entre les deux types de ressources se poursuit d'ailleurs
dans la définition des différentes formes que peuvent prendre les
ressources communautaires de services. Pour cette nomenclature, on retrouve
même les centres de jour, les maisons de transition, les sites
d'hébergement et autres. Nous croyons donc que le ministère de la
Santé et des Services sociaux devra préciser ce qu'il entend
réellement par ressources intermédiaires, ressources
communautaires et ressources alternatives.
Une autre faiblesse du document, c'est l'omission de ressources telles
que les comités de bénéficiaires. On sait également
qu'actuellement les hôpitaux de courte durée ne sont pas
obligés d'avoir de tels comités et lorsqu'ils existent, leur
soutien financier provient de leur établissement. On peut alors imaginer
les occasions de conflits d'influences qui peuvent surgir quand certains droits
sont revendiqués, certaines critiques formulées. Dans le projet
de politique, on a pensé résoudre le problème en
recommandant aux conseils régionaux la nomination d'un "ombudsperson".
Nous nous demandons si c'est le meilleur moyen pour que les droits des
personnes en besoin soient le mieux assurés. Est-ce que le fait que
cette personne soit nommée par le conseil régional est
adéquat? Plusieurs questions nous assaillent à ce sujet, de
même que sur la pertinence d'un nouveau système.
Néanmoins, advenant la nécessité d'instaurer un
nouveau service de protection des droits, nous croyons que les principes qui
devraient guider sa mise sur pied sont les suivants. Ce service devrait
être facilement accessible à l'ensemble des individus ou de la
population à desservir et non seulement à celle qui est
institutionnalisée, il devra avoir un pouvoir réel
d'enquête et bénéficier d'un budget indépendant.
Le projet de politique présente également des faiblesses
quant au thème de la formation. Je vais y revenir un peu plus tard.
La dernière faiblesse qu'on a retenue, c'est que malgré
que l'on parle de partenariat comme point de départ à la
planification régionale, dans le document, on ne sent pas, relativement
aux mécanismes additionnels, le poids des ressources alternatives et des
ressources communautaires. Dans le texte, on permet aux régions
l'organisation de ce partenariat; il faudra alors se demander comment on fera
pour que tous les partenaires soient crédibles et entendus.
En termes d'acquis régionaux en matière de santé
mentale, nous reconnaissons que l'opéra-tionnalisation de cette
politique ne sera pas sans nécessiter beaucoup de bonne volonté
et d'énergie de la part des régions, de leurs
établissements et de leurs ressources, sans parler des différents
paliers d'intervenants. Sans vouloir nier l'énormité de ta
tâche encore à accomplir, il nous faut néanmoins constater
qu'au Saguenay-Lac-Saint-Jean, on peut déjà compter sur de
nombreux acquis. Sans être exhaustifs et dans le but d'illustrer notre
propos, nous aimerions en citer quelques-uns.
Concernant l'identification des besoins, II y a le résultat de
l'enquête Santé-Québec qui devrait être
diffusé à l'été 1988, qui sera un outil disponible,
l'enquête sur les besoins et les problèmes en santé mentale
par le CLSC des Grands-Bois qui est à paraître, une étude
sur le suicide par le CLSC de Le Norois qui est à paraître. Au DSC
de Roberval, il y a eu l'étude sur la situation des femmes victimes de
violence et le recensement des personnes handicapées de la région
02. Au DSC de Chicoutimi, il y a une recherche sur l'isolement social de la
personne âgée, ensuite le portrait des ressources et services en
toxicomanie et l'étude du Centre de prévention du suicide 02 sur
les connaissances et attitudes relatives au suicide. Ces réalisations
sont dans le domaine de l'identification des besoins.
En ce qui concerne les mécanismes de concertation, la
région peut compter sur une table de concertation en santé des
jeunes et en gérontologie, qui inclut le volet de la santé
mentale. Il n'y a pas de table de concertation en santé mentale comme
telle parce que cela aurait été nier que cela devait faire partie
de chacune des tables de concertation, en santé des jeunes et en
gérontologie, par exemple. Il y a un regroupement des organismes
bénévoles subventionnés par le CRSSS; iI y a le profil du
réseau des services Intégrés pour femmes victimes de
violence conduit par le CRSSS; iI y a le comité régional en
santé mentale; il y a une table de concertation en santé mentale
dans le secteur Lac-Saint-Jean.
Concernant le volet de la formation, il y a déjà plusieurs
expériences de partenariat qui se font tant au Saguenay qu'au
Lac-Saint-Jean. Pour n'en citer que quelques-unes, on peut mentionner que le
DSC de Chicoutimi a, depuis quatre ans, investi beaucoup dans ce domaine et
que, depuis 1986, le DSC de Roberval a également emboîte le pas.
Ainsi, depuis plus de trois ans, l'Institut Roland-Saucier offre à deux
ressources alternatives en santé mentale du temps-intervenant pour de la
formation et du soutien et ce, sur une base hebdomadaire. Cette institution a
déjà également accepté d'autres demandes provenant
du réseau. Le CLSC-Saguenay-Nord fait de même avec certains
intervenants psychosociaux des autres CLSC. (17 h 15)
Concernant une campagne de sensibilisation aux besoins de personnes aux
prises avec un problème d'ordre mental, la ressource alternative Le
Phare devrait bientôt publiclser un document à ce sujet, un
vidéo. Concernant les services psychiatriques, on peut affirmer que la
réorganisation des services psychiatriques au Lac-Saint-Jean est
réellement réenclenchée, que l'Institut Roland-Saucier, au
cours des dernières années, a établi des ressources
intermédiaires qui ont su répondre à plusieurs
besoins.
Concernant le volet de ta santé communautaire, il ne faudrait pas
oublier que les services communautaires comportant un volet de santé
mentale sont très nombreux: les programmes s'adressant au suivi de
grossesses à risque, du counselling en période de crise, de suivi
post-natal, d'expériences de garderie en milieu
défavorisé, de programmes scolaires et en toxicomanie, en
particulier, de suivi des personnes âgées, de familles en perte
d'autonomie, etc.
Cette nomenclature nous permet de constater qu'il y a beaucoup de gestes
qui sont posés dans la direction qui nous est proposée. On peut
déjà penser que le processus est bien amorcé dans la
région.
Il y a trois points sur lesquels, en terminant, je voudrais apporter
votre attention, pour le partenariat principalement. Historiquement, la
responsabilité qui concerne la santé mentale a été
remise à la psychiatrie. Ce n'est pas une prise de responsabilité
usurpée par cette dernière, mais un choix implicite de
société. La psychiatrie communautaire des années
soixante-dix comportait une tentative de sortie de l'asiie et une tentative
d'impliquer la communauté en ce qui concerne la maladie mentale.
Dans les faits, cependant, la psychiatrie a gardé la
responsabilité des soins et les équipes multidisciplinaires des
divers secteurs ont été rapidement écrasés par la
demande. La mission était impossible. L'espoir est maintenant permis. Le
rapport Harnols pointe vers un nouveau choix de société,
c'est-à-dire élargir davantage la base de responsabilité
en ce qui concerne les soins pour maladie mentale et les interventions en
santé mentale. Le partenariat devient capital si la
responsabilité assumée par la psychiatrie est partagée
beaucoup plus largement. Attention cependant, et là je voudrais
interpeller tous les groupes en cause. Pour la psychiatrie, le partenariat
risque d'être compris ainsi: Nous avons trop d'ouvrage, bienvenue au
partenariat! Nous allons pouvoir enfin nous faire aider. Nous allons avoir plus
de ressources à notre disposition dans l'accomplissement de la
très lourde responsabilité que nous avons, mais de grâce,
augmentez nos budgets, nous n'en pouvons plus.
Pour le reste de la communauté, c'est-à-dire les
ressources psychosociales de CSS, d'associations de bénéficiaires
bénévoles, regroupements divers autour de problématiques
particulières, ressources alternatives, ressources en privé,
etc., le partenariat peut facilement faire naître la réflexion
suivante: Nous ne suffisons pas à la tâche. Nous avons besoin de
ressources supplémentaires. Donnez-nous-en et nous serons en mesure de
répondre aux besoins. Le partenariat, avant même d'être
développé, risque de devenir concurrence pour les mêmes
rares dollars, et te fonctionnement parallèle va se poursuivre. Nous
croyons qu'il est impossible d'établir un véritable dialogue, et
c'est une condition essentielle au partenariat souhaité. Pour ce faire,
la psychiatrie devra reconnaître le développement important des
capacités des autres à intervenir auprès d'Individus qui,
à un moment donné, devaient être pris en charge par
elle.
De plus, elle devra reconnaître la légitimité
d'interventions qui lui sont moins familières et qui peuvent être
très efficaces, groupes d'entraide, soutien social, soutien individuel
dans les CLSC, CSS, commissions scolaires, le travail dont on a parlé
tantôt dans les ressources alternatives. C'est une bonne nouvelle pour ta
psychia- trie. Elle n'est plus obligée, comme avant, de porter toute la
responsabilité en santé mentale. Elle n'est plus obligée
non plus de coordonner les autres ressources. Elle garde, cependant, une grande
responsabilité. L'expertise qu'elle a accumulée, elle doit
trouver moyen de la mettre au service des autres ressources, non seulement dans
le domaine du curatif, mais aussi dans celui de la prévention.
De leur côté, les autres ressources, si elles veulent
pouvoir assumer une responsabilité plus grande en santé mentale,
devront reconnaître l'importance d'ajouter à leur expertise
respective celle que possède la psychiatrie. Les uns ne peuvent survivre
sans les autres. Le partenariat est essentiel. Ceci nous amène à
une des faiblesses du projet de politique, la formation. L'objectif
proposé d'améliorer ta compétence est tout à fait
louable. Cependant, la lecture du document semble nous suggérer que les
plans de cette formation relèverait du provincial ou seraient
axés sur ce qu'on appelle la formation-réseau. Le danger serait
alors de croire que les bonnes formations seront celles-là.
En santé mentale, l'outil de travail privilégié est
la relation d'aide. Toute part de la qualité de cette relation
thérapeutique. Il est utopique et présomptueux de croire que le
perfectionnement de cet outil puisse se faire dans une session de trois jours
ou de deux fins de semaine. On doit plutôt favoriser une formation
à long terme. Une façon d'incorporer ce type de formation dans le
quotidien des intervenants serait d'encourager, entre les diverses
institutions, un véritable partenariat ou la mise sur pied d'un
système de partage d'expertises. C'est ainsi que les intervenants qui,
par leur formation, leur tâche et leur pratique professionnelle, auraient
développé un type d'expertise particulière dans le domaine
qui nous concerne pourraient se voir confier par leur établissement la
tâche de partager cette expertise avec un groupe d'intervenants d'une
autre institution, d'une autre ressource, communautaire ou alternative, qui
voudrait améliorer sa capacité d'intervention.
Ainsi, par exemple, les intervenants d'une ressource alternative
pourraient passer une ou deux heures avec un thérapeute d'une
institution psychiatrique qui les aiderait dans leur travail avec les clients
difficiles. L'intervenant impliqué et l'institution pour qui il
travaille pourraient ainsi mieux apprécier l'importance et la pertinence
du service fourni par cette ressource alternative. Ce genre d'échange
pratiqué sur une grande échelle, en plus de contribuer de
façon très significative à la formation des intervenants
du réseau, faciliterait un partenariat beaucoup plus harmonieux, un
décloisonnement des diverses professions et des divers milieux sans
exiger des budgets supplémentaires importants.
Un dernier point. On a demandé beaucoup de budgets et je pense
que chacun a raison. Nous croyons que le partenariat pourra plus facilement
s'établir s'il y a un minimum d'argent
neuf disponible, mais pas pour les raisons invoquées de part et
d'autre. Il nous semble que, pour l'établissement des plans
régionaux de services et surtout pour leur mise en application,
l'organisme qui en sera chargé devra avoir à sa disposition un
minimum de marge de manoeuvre du point de vue budgétaire. Nous sommes
convaincus que la seule méthode Robin des Bois, prendre de l'un pour
donner à l'autre, sera antipartenariat. Cet argent neuf ne devrait pas
être donné à la psychiatrie ni aux autres ressources, mais
il devrait être mis à la disposition de l'organisme
régional chargé des plans de services afin qu'il puisse
être redistribué selon les besoins régionaux ou
sous-régionaux.
Il va sans dire que, sur ce point, les dés ne doivent pas
être pipés d'avance; cela implique que chacun des partenaires est
représenté équitablement et que le processus de
concertation puisse se faire dans le respect de chacun. Cet organisme devra
également avoir le pouvoir de mettre en application les décisions
prises.
S'il n'y a pas d'argent neuf, le partenariat peut quand même se
développer, comme c'est en train de se faire ici et là. Nous
pensons que ce sera plus long, plus difficile et à certains endroits
impossible. Le partenariat implique avant tout un respect mutuel,
l'établissement d'une relation de confiance entre tes divers partenaires
et la conviction que les autres partenaires ont aussi un rôle essentiel
à jouer dans l'atteinte de nos objectifs communs.
Nous retournons, ce soir, dans notre région. Je n'en suis pas si
sûr quand je vois la température!
Le Président (M. Bélanger): J'ai l'impression que
ce ne sera pas ce soir.
M. Lajoie: Beaucoup reste à faire. Le projet de politique
a déjà permis l'amorce d'un débat qui ne fait que
commencer et qui suscite de l'espoir, car il légitime un partenariat qui
s'est fait souvent dans la clandestinité ou presque.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Je cède
la parole à Mme la ministre de la Santé et des Services
sociaux.
Mme Lavoie-Roux: Je veux remercier sincèrement tes
représentants du Comité consultatif régional en
santé mentale pour leur mémoire sur le projet de politique.
Vous êtes les derniers, vous êtes le dessert. Je dois vous
dire qu'il y a un peu quelque chose d'un dessert dans votre mémoire et
souvent, quand on arrive au dernier, on dit... C'est quand même un
mémoire réaliste, un mémoire d'espoir et un mémoire
qui... Vous allez dire: Comme gouvernement, vous êtes bien heureux de
cela, mais je pense que, plus sérieusement, il ne remet pas uniquement
au gouvernement les efforts qu'il doit faire dans le sens d'affirmer sa
volonté politique ou de mettre des ressources disponibles, mais que la
grande partie de tout cela revient aux gens qui travaillent dans les
différents milieux, les gens qui sont déjà
impliqués à quelque palier que ce soit ou dans quelque ressource
que ce soit.
Je suis d'accord avec vous sur le fait que les ressources additionnelles
qui pourront être obtenues ne devraient pas aller nécessairement
selon l'ordre des demandes qui ont été adressées ici.
D'ailleurs, il faudrait que je me mette à imprimer de l'argent la
semaine prochaine! Vraiment, je suis d'accord avec vous pour qu'il soit remis
aux régions et que celles-ci déterminent, en collaboration avec
les intervenants, pour chacune des sous-régions ou
sous-sous-régions... enfin, je pense que ce sera aux régions de
déterminer quel type d'organisation elles veulent. Je pense que dans une
région plus grande ou plus populeuse géographiquement, cela peut
se présenter différemment dans chacune de ces
sous-régions.
Puisque mon collègue de Louis-Hébert voudrait intervenir,
je vais seulement parler des faiblesses, je ne parlerai pas des forces.
Généralement sur les forces, on peut s'entendre plus facilement.
Les faiblesses c'est évidemment celles qui doivent être
corrigées. Je trouve intéressante votre approche de formation. Je
pense qu'on ne nie pas qu'il puisse y avoir une formation peut-être plus
strictement scolaire, que ce soit à partir de recyclage ou d'autres
choses.
Vous insistez sur le fait qu'il ne faudrait pas perdre tout l'ajout ou
la richesse qui peut venir de l'échange d'expériences positives
et que, sur le plan pratique et sur le plan de l'intervention, cela a
peut-être plus de chances de réussite parce que bien souvent les
gens ne partent pas sans antécédent ou sans formation quelconque.
Il s'agit de l'enrichir et de la tenir à jour, etc. C'est un ajout
à la formation tel que je t'ai compris du rapport Harnois, c'est un
volet nouveau qui m'apparait intéressant.
Vous également, comme d'autres, avez regretté que les
tâches ne soient pas définies de façon plus rigoureuse.
Pendant un bout de temps, j'ai interprété le rapport Harnois,
mais une journée je suis allée leur demander: Est-ce bien ce que
vous voulez dire? Tous les jours ou à peu près, je faisais une
Interprétation. On me confirme que j'ai fait la bonne
interprétation. J'ai compris que te rapport Hamois avait voulu justement
éviter le piège des définitions extrêmement rigides,
parce que la rigidité dans le système est un des obstacles et des
écueils qu'on affronte. Je pense qu'ils n'ont pas voulu dire:
Désormais le psychiatre fait n'importe quoi et tous tes autres en place.
Ils ont vraiment voulu s'éloigner des chapelles, que ce soit des
corporations ou des chapelles des établissements ou même des
chapelles des ressources alternatives ou des ressources communautaires, tout le
monde pensant que ce sont eux qui ont la meilleure réponse.
Au fond, la démarche pédagogique qu'ils ont
tenté de faire faire, c'est que - une avenue qui apparaît
prometteuse ou qui devrait être poussée un peu plus loin c'est
celle du véritable partenariat - comme vous le dites, ce n'est pas
uniquement l'argent, ce sont des changements d'attitudes, ce sont des remises
en questions profondes. C'était déjà amorcé et on a
peut-être fait un pas de plus durant la commission parlementaire, mais il
faut que cela ait des survis dans les différents milieux.
Vous avez parlé de l'"ombusperson" Je ne voudrais pas revenir sur
des choses que j'ai dites surtout que je vous entendais dire que vous
êtes ici depuis une journée et demie. Vous allez trouver
peut-être qu'on se répète. Je veux vous remercier pour
votre mémoire. Je pense que vous avez bien fait tout le tour de la
question. Je pourrais avoir plusieurs questions mais je vais vous en poser une
seule. C'est à lia page 13 de votre mémoire Vous indiquez aussi
tout le travail qui est déjà fait, la mise en marche dans
l'identification des besoins, dans la réorganisation des ressources.
À la page 13, vous dites "Concernant les services psychiatriques, on
peut affirmer que la réorganisation des services psychiatriques au
Lac-Saint-Jean est réellement enclenchée" Je voudrais que vous
explicitiez un peu plus de quelle façon et comment la population et les
intervenants - II me semble que je surs allée faire un tour au
Lac-Saint-Jean - acceptent cette réorganisation. Pourquoi je vous
demande cela? C'est qu'on est obligés de se pencher sur d'autres
réorganisations dans d'autres parties du Québec Alors,
j'aimerais.
M. Laberge (Laval): M Laval Laberge, Hôtel-Dieu de Roberval
Concernant le transfert de psychiatrie active vers l'Hôtel-Dieu de
Roberval, il y a eu beaucoup d'évolution dans ce dossier
particulièrement depuis l'été, où, à la
suite de la décision de la ministre, il y avait quand même
certaines réactions localement, particulièrement concernant les
autorités municipalesl II y avait certaines inquiétudes qui
filtraient au niveau économique et par rapport à la
sécurité d'emploi, etc. Tout cela s'est calmé sensiblement
depuis ce temps. Depuis septembre dernier, le centre psychiatrique qui, si l'on
veut, est victime du transfert, si vous me permettez l'expression, a
décidé de collaborer à un comité directeur qui a
été créé par le CRSSS qui, lui, a reçu le
mandat de procéder à l'organisation ou à la planification
du transfert. Depuis ce temps, il y a eu des rencontres
régulières du comité directeur en question où
assistaient deux représentants du centre psychiatrique de Roberval, deux
représentants de l'Hôtel-Dieu, ainsi que deux représentants
du conseil régional. (17 h 30)
En cours de route, on a aussi rencontré les différents
partenaires du réseau pour leur soumettre la programmation de
l'Hôtel-Dieu de Roberval, à savoir, si on veut résumer, les
CLSC, les CSS, les centres d'hébergement ainsi que les centres d'accueil
et de réadaptation du territoire qui à toutes fins utiles, sont
les principaux partenaires. On excluait à ce moment-là les
ressources alternatives pour la bonne raison qu'à Roberval même,
contrairement au Saguenay ou il existe des ressources qu'on connaît, le
Phare et l'Escale, il n'y a pas encore ce type de ressources sur le territoire.
Donc, les partenaires en question ont pris connaissance de la programmation de
l'Hôtel-Dieu, ce qui a semblé faire consensus. II y a aussi
consensus sur l'idée de ne pas oublier de mettre l'accent sur
l'installation d'abord, du moins en même temps des points de service
externe et des ressources intermédiaires ou un peu avant de
transférer l'interne. Ce que nous signalaient les principaux partenaires
comme une avenue intéressante.
Depuis le mois de novembre, l'Hôtel-Dieu de Roberval, en plus de
la planification des services a déposé au conseil
régional, si vous me permettez l'expression, les prévisions
financières et les ressources humaines requises pour mettre en
application la programmation prévue et, à toutes fins utiles,
approuvée à certains niveaux actuellement.
Donc, du côté de l'Hôtel-Dieu, on est en principe, si
vous voulez, prêts à faire feu. Le conseil régional regarde
de son côté aussi, en termes de transfert éventuel de masse
monétaire ia partie centre d'accueil du budget du CPR, par rapport
à la partie du centre hospitalier. II semble, à première
vue, qu'il y aura à peu près correspondance entre
l'évaluation quon a faite des coûts récurrents de
fonctionnement et l'évaluation qui a été faite en
collaboration avec le CPR de la partie, si vous me permettez (expression, CH de
leur budget éventuellement transférable. De sorte que, à
toutes fins utiles, comme base de départ ou comme base de
négociation, cela ne semble pas vouloir poser trop de problèmes
concrets pour le financement.
Juste pour revenir, parce que c'est quand même une
préoccupation importante, à la réaction de la population,
cela s'est sensiblement tassé. Le rationnel a fini par triompher de
l'émotif, et il y a des deuils qui devaient se faire. Je pense que c'est
un processus assez normal. Mais il semble que l'ensemble de la population, y
compris les chambres de commerce qui avaient peut-être réagi un
peu fort au début ont compris que la décision de la ministre qui
n'était peut-être pas facile politiquement, ont finalement compris
que cela allait dans le sens de toute une philosophie de normalisation des
interventions en santé mentale et en fin de compte vers le bien des
bénéficiaires qui est, théoriquement en tout cas, la
raison d'être des établissements. Cela résume en gros
l'état du dossier actuellement à Roberval.
Mme Lavoie-Roux: Cela a surtout fait ressortir que c'est au
niveau de la population que ces opérations sont souvent difficiles. Je
vais parler dans mon micro, sinon on ne pourra pas
m'enregistrer. C'est surtout au niveau de la population dans une
municipalité moins grande ou sur un territoire moins populeux qui est
habituée à ses institutions et les voit se modifier. C'est
déjà une réalité à laquelle i! est difficile
de faire face pour la population et à ceci s'ajoutent aussi les
appréhensions pour les familles, là où il y a encore des
familles, que leurs proches soient désinstitutionnalisés et, par
la suite, la capacité de la population ou de la communauté de les
intégrer.
Je vous remercie, Je laisse la parole à mon collègue de
Laviolette.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. La ministre faisait
mention tout à l'heure d'un dessert. Je dois vous dire que, souvent,
quand on arrive au dessert lors d'un repas de conférence, le cliquetis
des cuillers sur les tasses de café enterre quelquefois les... J'ai
écouté religieusement ce que vous avez dit et surtout je l'ai lu
avec attention.
J'ai remarqué qu'avec des groupes de votre région qui sont
venus ici, à la commission, vous avez intégré dans votre
regroupement l'ensemble de ce qui, de près ou de loin, touche - que ce
soit communautaire, alternatif ou au niveau du réseau - les personnes
qui ont à travailler pour - là, on cherche le terme - le patient,
le bénéficiaire ou le client, mais la personne qui reçoit
un service.
Je lis, dans le document que vous avez passé tout à
l'heure et que vous avez lu, le danger qu'il y a de la part de l'un et de
l'autre de dire: Bien, cela va prendre plus d'argent, plus de ressources, alors
que, dans bien des cas, c'est un changement de mentalité qu'il faut et
en même temps une utilisation plus rationnelle des services que l'on a,
que ce soit un service de réseau ou hors réseau.
Vous ajoutiez: C'est une bonne nouvelle pour la psychiatrie; maintenant,
elle n'est pas obligée, comme avant, de porter toute la
responsabilité de la santé mentale; il faut donc la partager. Je
pense qu'on ne peut pas être en désaccord avec vous.
Au contraire, iI faut, dans cette politique de santé mentale qui
doit venir, amener de plus en plus toutes les personnes, les proches, les
intervenants, le réseau lui-même, les services autour à
faire en sorte qu'ils allient leurs capacités. Si je dis cela, c'est
parce que, à la page 6 de votre document qui parle du budget, vous
dites: Cet argent neuf ne devrait pas être donné à la
psychiatrie ni aux autres sources, mais devrait plutôt être remis
à ia disposition de l'organisme régional, chargé des plans
de services, afin qu'il puisse être redistribué selon les besoins
régionaux ou sous-régionaux. Là, on dit: II va sans dire
qu'au niveau de tout organisme régional, les dés ne doivent pas
être pipés d'avance. Ceci implique que chacun des partenaires est
représenté équitablement et que le processus de
concertation puisse se faire dans le respect de chacun Cet organisme devrait
également avoir le pouvoir de mettre en application les décisions
prises.
Est-ce que je serais mai venu de dire que ce que vous présentez
pourrait être cet organisme régional ou est-ce autre chose que
vous voyez? Est-ce que le fait que vous soyez ici rassemblés
représentant près de douze secteurs d'activité - pas
nécessairement douze, parce qu'il y en a qui sont deux dans le
même CLSC ou DSC - regroupant au moins l'ensemble des services ou si vous
voyez autre chose? Ce serait quoi si vous voyez autre chose?
M. Jacob (René): Oui, je pense que le comité
consultatif qu'on forme à partir des travaux qu'on a faits
jusqu'à maintenant trouve des grandes vertus à cette formule.
Cependant, je ne suis pas sûr que cette instance que nous sommes, si
efficace qu'elle puisse être pour discuter des questions, devrait
être nécessairement une instance décisionnelle.
Cependant, étant donné les vertus qu'on lui a
trouvés dans nos travaux, à travers les années... Je
pourrai épiloguer là-dessus tantôt. Je pense que l'instance
décisionnelle qui semble être plus ou moins le CRSSS selon le
rapport Harnois aurait avantage à être harnaché à
des avis d'un comité du genre de celui qu'on a eu dans chacune des
régions.
C'est un peu...
Le Président (M. Bélanger): Pouvez-vous vous
identifier, s'il vous plaît?
M. Jacob: D'accord. Excusez-moi. René Jacob.
Le Président (M. Bélanger): Merci.
M. Jolivet: Est-ce que je pourrais, à partir de ce
moment-là, vous poser la question sur la formation des CRSSS dans ie
sens demandé par le regroupement des organismes communautaires ou
alternatifs, à savoir qu'il faudrait donc changer fa composition du
conseil d'administration du CRSSS en trois parties, un tiers venant des
Institutions, un tiers venant des groupes communautaires et alternatifs - parce
qu'ils font bien ia différence entre les deux, eux - et, en
troisième lieu, des personnes venant du socio-économique.
M. Jacob: Le CRSSS manifestemment n'est pas actuellement une
instance où les ressources de la population ou les ressources
alternatives se sentent complètement chez elles. Je pense qu'il y a une
certaine évidence là. Par ailleurs, si on souhaite avoir avec ces
ressources un rapport de partenariat, elles doivent se sentir chez elles au
CRSSS.
Alors, est-ce que la formule idéale, ce serait de changer le
conseil administration en trois parties? Je ne sais pas si c'est cela, mais je
pense qu'on doit trouver effectivement une formule qui fasse que les ressources
alternatives, la communauté par ses ressources se sente chez elle et
à l'aise d'intervenir et d'influencer la direction de l'organisation des
services dans la région.
Je ne veux pas critiquer la notion d'un tiers, car ce peut être
une formule à retenir effectivement.
M. Jolivet: On pourrait peut-être poser la question
à Mme Corriveau des groupes alternatifs. Non, non, je ne vous poserai
pas la même question qui a été posée l'autre jour
mais...
Mme Corriveau (Jennifer-Anne): C'est parce que c'est moi qui al
apporté cet argument pour une commission administrative idéale.
C'était pour ma ressource alternative personnelle.
M. Jolivet: En tout cas, d'une façon ou d'une autre, iI
est important de retrouver dans la composition le moyen pour les gens de se
faire entendre et d'être compris.
M. Jacob: Oui, compris et qu'ils sont là chez eux et
partie prenante aux décisions qui seront prises là. Je pense que
c'est une des prémisses pour obtenir un partenariat réel.
M. Lajoie: J'ajouterais que le comité que l'on forme
pourrait avoir à jouer un rôle Important comme chien de garde dans
la préoccupation pour la santé mentale. Là, on en parle
beaucoup, mais dans six mois, parlerons-nous encore beaucoup de fa santé
mentale? On aurait très peur d'être récupérés
complètement par le CRSSS et de devenir aux prises avec des contraintes,
des prises de décisions qui vont devoir se faire. Mais la
préoccupation en santé mentale, le chien de garde... Enfin,
est-ce qu'on peut être en même temps le chien de garde et celui qui
a charge de,.. ? Dans ce sens, on a essayé de se demander où
s'insérerait un genre de comité comme le nôtre à
l'intérieur d'une nouvelle structure. Comme nous ne sommes pas un
comité décisionnel d'institution ni un comité du
département de santé communautaire, même si c'est soutenu,
ce chien de garde devra se développer quelque part ou prendre forme.
Est-ce que ce sera spontanément comme on l'a fait ou si on devra penser
à devoir doter chaque région de ce type de comité qui
pourrait avoir un regroupement provincial, lui? On en discutait ce matin et ce
pourrait être un mandat qui pourrait être donné à une
association comme l'association de santé mentale, par exemple. Mais on
n'a pas d'avis ferme, sauf que je ne pense pas qu'on puisse être le
comité qui va devoir, au niveau de la région, prendre des
décisions. Comprenez-vous ce que je veux dire?
M. Jolivet: Oui. J'ai compris. En fait, ce que vous voulez dire,
c'est que vous vous êtes spontanément créés en
provenant de différentes associations ou différents organismes du
réseau pour simplement réfléchir sur l'ensemble de la
santé mentale.
M. Lajoie: Oui.
M. Jolivet: Vous dites que l'organisme devra agir de telle
façon et s'il n'agit pas, nous pourrons, nous, comme organisme
consultatif créé spontanément, dire que cela n'a pas de
bon sens et le faire savoir à qui de droit
M. Lajoie: Seulement un exemple. Ce comité a
été formé à la suite d'une lettre qui a
été envoyée à chacune des institutions que nous
représentons, et disant qu'on voulait former un comité qui se
préoccupe de santé mentale. Un mandat a été
donné et envoyé au directeur général:
Accepteriez-vous de nommer un représentant? On a eu des
représentants de chacune des Institutions, ils sont des gens
Impliqués dans la clinique. Je suis certain que, si le comité
avait comme mandat de définir la distribution des budgets, ce ne serait
pas nécessairement quelqu'un de la clinique qui serait
délégué par le directeur général pour y
venir. Comprenez-vous?
M. Jolivet: Oui.
M. Lajoie: De sorte que, jusqu'à un certain point, c'est
un comité d'expertise, mais... Oui.
M. Girard (Ghislain): Pour revenir à...
Le Président (M. Bélanger): Veuillez vous
identifier, s'il vous plaît.
M. Girard: Ghislain Girard.
Le Président (M. Bélanger): Merci.
M. Girard: Pour revenir à la distribution de l'argent, on
sait que l'argent est le nerf de la guerre. Il devient extrêmement
important d'en faire la distribution. Ce que nous voulons surtout, c'est nous
assurer qu'aucun monopole ne s'installera, soit de représentation
professionnelle ou de représentation d'institution ou de quelque
organisme que ce soit, nous assurer également que, dans la distribution
de cet argent, il y ait une large représentation de l'ensemble, des
ressources. C'est essentiellement là-dessus que nous voulions
intervenir. Comment cela pourra-t-il se composer? Ça... (17 h 45)
M. Jolivet: D'accord. Une autre question qui revient toujours
à la page 3. On aurait tendance à penser que vous dites:
Donnez-nous du budget, donnez-nous des ressources supplémentaires,
donnez-nous, donnez-nous... Est-ce que cela veut
dire... Là, certainement que je me fais l'avocat du diable, j'en
suis sûr, mais je veux avoir votre réaction. Cela ne veut pas dire
que vous ne croyez pas qu'il ne devrait pas y avoir de l'argent
supplémentaire de mis dans la santé mentale et que la ministre ne
devrait pas s'appuyer sur cela pour ne pas mettre te double de prévu par
le rapport Harnois? Je comprends...
Mme Lavoie-Roux: Le double! L'argent qui est
dépensé en santé mentale, c'est à peu près 2
000 000 000 $. S'il fallait que je mette le double, ce serait près de...
Il y en a près de 2 000 000 000 $.
M. Jolivet: D'accord. Mais c'est parce qu'il y en a qui ont
parlé du double. Oui?
Mme Harvey (Michelle): Au fond, par rapport au budget, ce qu'on
dit essentiellement, c'est qu'il devrait y avoir un minimum d'argent qui
devrait être injecté à nouveau dans les services de
santé mentale dans les régions. L'argent, on sait que c'est un
moteur, un incitatif et ne parler que de réallocation ou de
redistribution, cela fait que tout le monde va se chicaner pour le même
montant, alors que, si on injectait de l'argent nouveau, c'est comme si on
injecte un espoir nouveau. Là, on peut s'asseoir ensemble autour d'une
table et se dire: D'accord, comment distribue-t-on cela et à qui
l'accorde-t-on? Là, on peut chercher nos priorités. On peut
réussir à obtenir des consensus. Je pense qu'il est important
qu'il y ait de l'argent nouveau qui arrive dans le système.
M. Jolivet: Merci.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Oui. Merci, M. le Président. Mme la ministre a
signalé que l'analyse que vous faites du rapport Marnois est
extrêmement intéressante. Vous êtes des gens qui avez une
expérience dans tous les milieux de la santé mentale. Vous avez
analysé le rapport Harnois en praticiens et en gens qui désirent
voir un certain nombre d'améliorations. L'analyse que vous faites vous
amène à déceler un certain nombre de forces et à
signaler, en passant, des faiblesses.
De toute façon - on le signalait tout à l'heure - que vous
vous soyez regroupés comme cela, spontanément, je pense que c'est
symptomatique de l'intérêt que maintenant toutes les questions de
santé mentale soulèvent dans la population en
général. La ministre me le faisait remarquer tout à
l'heure, on n'aurait pas vu, il y a quelques années - en tout cas, je
n'étais pas au fait de cela - des gens, spontanément,
considérer que la santé mentale est devenue quelque chose qui se
traite autrement que dans les milieux asilaires ou en cabinet privé.
C'est devenu pratiquement comme une sorte de problè- me de
société dont on doit collectivement partager la
responsabilité.
C'est peut-être dans ce sens-là - le rapport Harnois
l'indique - qu'il faut se diriger pour trouver des solutions. Il y a des
tentatives qui sont faites et toute la mise en place d'une politique en
matière de santé mentale nous oblige à faire la
réflexion que vous avez faite vous-mêmes, mais étant dans
le milieu, vous l'avez faite avec beaucoup plus d'acuité que ce que nous
pouvons faire nous-mêmes. Vous vous qualifiez d'espèce de chien de
garde de toute la question de la santé mentale dans votre région.
À ce titre, l'analyse que vous faites du rapport vous donne encore une
plus grande crédibilité.
Vous faites des réflexions sur la question des fonds
supplémentaires, mais évidemment, vous ne les rejetez pas, mais
vous n'y voyez pas là une condition sine qua non d'atteindre des
objectifs. Vous reconnaissez que cela peut être plus lent, plus difficile
et que cela peut demander plus de concertation et de consultation. Quand on
sait les montants considérables qui sont consacrés
déjà à la santé mentale, la ministre me signalait
que c'est de l'ordre de 2 000 000 000 $ si on tient compte de...
Mme Lavoie-Roux: Tout près de.
M. Doyon: Oui, près de, quelque chose s'y rapprochant
parce qu'il est difficile de savoir exactement où les fonds vont, mais
c'est évidemment beaucoup d'argent
On nous a fait valoir - vous avez été ici -
différents types d'approches qui pouvaient être pris. On nous
suggérait, par exemple, que la question de la santé mentale soit
l'objet d'une structure particulière, qu'on mette de côté
la question de la santé mentale pour consacrer cela, pour avoir une
structure verticale et qui monterait directement au ministre. Je ne sais pas si
vous avez eu le temps de réfléchir à des choses
semblables, ou ce que vous en pensez, personnellement. Est-ce que vous pensez
que la santé mentale est une maladie qui se traite au même titre
que d'autres maladies ou si elle devrait faire l'objet d'une structure
particulière qui la mettrait à part et qui permettrait de
disposer de budgets réservés, etc., avec tout ce que cela
comporte aux niveaux structurel et bureaucratique? Est-ce que vous avez
réfléchi à cela?
M. Lajoie: Je pense qu'une décision importante a
été prise avec le rapport Castonguay-Nepveu et, par hasard, en
1972 et en 1976, je travaillais au ministère, dans un poste
équivalent à celui du Dr Voisine, à l'intérieur de
la structure du ministère. Cela avait été une
décision-veu et de l'intégration de la psychiatrie ou de la
santé mentale dans les services. Comme je le disais tantôt, on a
une table de concertation en santé des jeunes, mais le volet de la
santé mentale y était présent de sorte qu'on ne voyait
pas la nécessité d'une table de concertation en
santé mentale.
Ce que nous avons entendu ce matin, par exemple, est très
pertinent, dans le sens qu'il va falloir qu'il y ait des moyens qui soient
donnés. J'ai entendu un de mes amis qui travaille dans un CLSC, iI y a
quelques jours, dimanche dernier. II me disait que c'était dramatique
parce que maintenant on lui interdisait de voir quelqu'un plus d'un an. Cela
pose le problème qui a été posé ce matin de
façon très aiguë. Les problèmes pour les personnes
qui sont les plus atteintes, ce ne sont pas des problèmes d'un an, ce
sont des problèmes de très longue durée. Je pense que,
pour être conséquent et pour intégrer l'aspect de la
santé mentale - peut-être que ce n'est pas une structure,
j'hésiterais beaucoup à avoir une structure particulière -
il va falloir que quelqu'un soit responsable et qu'il y ait des
possibilités d'intervention, que ce soit élargi.
Le concept de ce matin est un concept intéressant. Si dans les
CLSC les gens qui interviennent ne peuvent pas voir quelqu'un plus d'un an, on
s'imagine qu'ils ne voient pas les gens qui sortent des institutions et qu'il
faut voir pendant des années et des années... C'est une
réalité, c'est quelqu'un qui me l'a dit. Dans son CLSC, on lui
interdit cela. Il dit: Je suis aux prises avec des gens que je vois depuis un
an et qu'est-ce que je fais avec eux? Je leur ai annoncé cela et cela ne
marche pas. De sorte que la réflexion va sûrement devoir... si on
ne fait pas une structure parallèle ou une autre, il va falloir modifier
les mandats.
M. Doyon: Évidemment, cette réalité est
là. Il va falloir y faire face. Je pense que vous concourez
jusqu'à un certain point à mentionner le problème qui nous
a été exposé ce matin. Parmi les faiblesses que vous
qualifiez de certaines faiblesses du rapport, vous mentionnez qu'il n'y a pas
suffisamment de détails par rapport aux moyens
d'opérationnalisation et de ia façon dont les choses devraient se
taire et quels sont les moyens opérationnels qui seraient requis, etc.
Vous demandez si ce ne sera pas là une raison pour conserver le statu
quo et tout simplement dire: Ce sont des choses qu'on fait déjà,
qu'on a déjà faites, qu'on a toujours faites et qu'on va
continuer compte tenu que c'est un peu vague.
D'un autre côté, vous y voyez aussi une possibilité
que ce soit un défi de prise en main par les responsables
régionaux qui devront apporter ces définitions. Vous faites une
constatation dans laquelle vous dites: Qu'on parle d'approches globales, qu'on
parle d'approches centrées sur le client, etc., ce sont des beaux mots
ni plus ni moins; on connaît déjà cela, on a
déjà entendu cela. Vous déplorez que la situation dans les
faits soit vraiment différente. Quelle est cette situation
différente que vous n'exprimez pas et à laquelle vous faites
allusion ici au bas de la page 7?
M. Lajoie: Si j'ai bien saisi votre question, je pense que la
situation actuellement est un peu dramatique. Je me réfère
à la psychiatrie et à l'absence de ia psychiatrie à ce
débat. Je ne parie pas de psychiatres individuels, mais de la
psychiatrie comme corps. Ils possèdent une expertise très
importante. Il est possible que cette expertise puisse être très
utile et avec les structures actuelles, elle peut être diffusée,
mais il y a un enfermement de la psychiatrie dans les hôpitaux. Je pense
que la réalité, de la façon que je peux comprendre,
à laquelle ils sont confrontés tous les jours avec des situations
très difficiles, avec beaucoup de travail, fait qu'il y a une perception
de la réalité qui, je pense, est très restreinte, avec
très peu de possibilité de sens critique pour un grand nombre
actuellement. Ils font du mieux qu'ils le peuvent; quelquefois, la psychiatrie,
c'est bon, mais il faut en sortir et iI y a beaucoup de gens qui n'en sont pas
sortis. Je ne sais pas si cela répond à votre question. Depuis
cinq ans, j'ai fait environ 1400 sessions de groupes avec 36 groupes
différents dans douze institutions différentes, 30 sessions par
groupe, pour une moyenne d'environ 250 intervenants dans mon travail au DSC qui
est à mi-temps. Il est possible d'aller ailleurs, de sortir du
réseau, de le faire sans coût astronomique. Mais pendant
longtemps, je n'étais pas perçu comme psychiatre dans la
région. Je ne sais pas si je le suis maintenant, mais...
Des voix: Ha! ha! ha!
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. En
conclusion j'inviterais le député de Lavioiette.
M. Jolivet: Oui, je vous remercie surtout de voir que votre
groupement s'est formé de façon spontanée et qu'au fond iI
répondait peut-être à un besoin que vous avez et que
d'autres devraient peut-être observer dans tout le Québec, dans le
sens d'être un groupe où on va parier de santé mentale pour
continuer le travail qui s'est fait jusqu'à maintenant, en sachant,
comme vous le dites si bien, qu'il faut que des gens soient le chien de garde
de ce qui va se passer, pour s'assurer que ce ne soient pas de vains mots, mais
que ce soient des réalités qui s'actualisent dans les mois et les
années futures. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais également vous remercier. Je
ne sais pas comment c'est dans la vie quotidienne, mais en tout cas, ici. vous
avez fait probablement une démonstration de ce partenariat que tout le
monde souhaite. On retrouve autour d'une même table des
représentants de départements de santé communautaire,
d'hôpitaux psychiatriques, de ressources alterna-
tives du CRSSS du CLSC et différents professionnels ou
différents types d'intervenants Je pense que vous nous avez donné
passablement de matière à réflexion, et Je vous remercie
beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie le Comité consultatif régional en
santé mentale, région 02 Je vous souhaite un bon retour dans la
mesure du possible. Je pense que la température refuse de collaborer
avec vous, au moins à égale valeur avec la collaboration que vous
nous avez donnée. Comme c'était le dernier organisme,
cest-à-dire le 66e que nous recevions je présume que M le
député de Laviolette et Mme la ministre auront quelques
commentaires avant qu'on ajourne les travaux M le député de
Laviolette.
M. Jolivet: M le Président, je serai bref pour dire que
ces huit journées n'auront pas été mutiles. C'est un
travail qui a été long d'une certaine façon,
considérant le temps dans une journée, mais profitable quant
à ce qui est ressorti comme idées dans tout le Québec. II
est évident que nous aurions aimé que le débat se fasse
sur une vraie politique de santé mentale présentée
peut-être dans un livre blanc de la part de la ministre. Nous en sommes
encore, si je peux emprunter certains mots de la ministre sur d'autres choses
ce matin, aux balbutiements de cette politique de santé mentale.
Ce que l'on trouve un peu déplorable cependant, c'est qu'elle ait
utilisé le rapport Harnois un peu comme un tampon ou un lieu où
les coûts sont arrivés de telle sorte que, finalement, ce n'est
pas sa politique qu'on a regardée jusqu'à maintenant, mais ce
qu'un comité a fait. Il est évident, cependant, qu'on va en
retirer le meilleur des bénéfices, aussi bien les membres de
l'Opposition et, je l'espère, le gouvernement qui aura à
présenter au Québec une réelle politique de santé
mentale.
Nous aurons l'occasion, je l'espère, avant que la politique
s'applique, de la critiquer, non pas négativement, comme quelquefois les
gens ont l'impression que l'Opposition fait. Notre travail à faire comme
membres de l'Opposition, c'est d'essayer d'aider le gouvernement à
trouver la meilleure des solutions en sachant qu'on n'aura jamais la
perfection.
Mais d'un autre côté, j'aimerais que la ministre retienne
que, lorsqu'elle déposera sa polit. que de santé mentale, avant
que son implication vienne, on ait la chance de faire peut-être un tour
de table avec des intervenants dans le milieu pour voir si vraiment elle a bien
écouté les représentations de tous et chacun et si elle a
porté le meilleur jugement sur la décision qu'elle aura à
prendre. Entre-temps, on va se souhaiter bonne chance.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie M le
député de Laviolette Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: J'imagine que j'ai le consentement - il est 18
heures.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
Mme Lavoie-Roux: À la fin de nos travaux parlementaires je
voudrais d'abord remercier toutes les personnes qui nous ont appuyés
durant cette exercice. Je voudrais d'abord remercier le président ou les
présidents. Vous avez eu un substitut pendant quelques jours. Je
voudrais remercier tous ceux qui font partie de I'équipe de soutien,
ceux qui ont enregistré nos travaux et surtout ceux qui les
transcrivent. J'espère qu'on n'a pas été trop confus. J'ai
toujours de la sympathie pour eux!
Je voudrais également remercier tous ceux qui nous ont
facilité la tâche que ce soient des personnes du ministère,
particulièrement les membres de la Commission Harnois qui se sont
relayés ici durant presque trois semaines. Cela aurait fait trois
semaines demain.
Comme le disait le président, nous avons entendu 68
mémoires et nous en avons reçu 104 ou 103, au moment où
nous nous parlons. Évidemment, il avait été convenu que
ceux qui nous arrivaient après le 23 décembre, on ne pouvait pas
les entendre. Mais cela indique quand même une préoccupation
importante pour ceux qui travaillent dans le milieu et pour ceux qui vivent ce
problème. Je pense recevoir au-delà de 100 mémoires. C'est
quand même extrêmement important.
Je voudrais également remercier tous ceux qui sont venus en
commission parlementaire. Sans vous, cela aurait été un exercice
absolument nul. Merci surtout pour les différents éclairages qui
nous ont été apportés Je pense que tout le monde est venu
ici en tentant, non seulement de faire valoir son point de vue, mais de faire
avancer le débat et de faire préciser des choses.
Je pense qu'un pas majeur a été franchi dans cet exercice
et que nous avons maintenant un cadre de référence qui a fait
consensus, je dirais, de façon générale quant aux
objectifs, aux principes et aux orientations.
Je voudrais juste corriger un mot ou enfin donner mon point de vue sur
un mot du député de Laviolette qui. en passant, comme d'ailleurs
l'Opposition, nous ont donné une collaboration remarquable. Je ne
voudrais pas non plus passer sous silence le travail de mes collègues.
Tout le monde s'est relayé de façon très
persévérante pendant trois semaines de temps Est-ce que cela veut
dire que j'ai fini, ça? Ha. ha, ha'
Mais, ce matin, quand je faisais référence à des
balbutiements, je faisais référence à nos balbutiements au
sujet de la maladie d'AIzheimer...
M. Jolivet: J'ai utilisé votre mot
Mme Lavoie-Roux: Ah! c'est cela! D'accord Alors, c'est parfait.
II reste que les consensus
qui se sont dégagés sont autour de la place qui doit
être réservée au patient ou au bénéficiaire -
je ne sais pas si un jour on s'entendra sur les termes - et qui doit demeurer
la personne devant être au centre des préoccupations.
Je pense que les gens réalisent également que ce sont les
besoins de la personne qui doivent guider les actions et non pas les
rôles respectifs des professions qui, elles, viennent pour appuyer la
personne. Également, je pense qu'on est tous d'accord sur l'approche
biopsychosociale. Il y en a qui ont élargi le sens un peu; je pense que
ce n'est pas dommageable.
Les points principaux sur lesquels les travaux de la commission ont
porté, c'est-à-dire les points sur lesquels on pourrait tirer des
conclusions quant à des remarques qui ont été reprises par
à peu près l'ensemble des intervenants, je ne les prends pas
nécessairement par ordre de priorité, cela a été,
par exemple, l'exercice de la fonction "d'advocacy" et du rôle qui
pourrait être joué paf un "ombudsperson", mais qui doit
être précisé; le plan de services individualisé
comme instrument de continuité, mais beaucoup de questions quant
à la coordination de ce plan de services et quant à la
définition, si je peux dire, ou la désignation des personnes
responsables; l'importance de mettre en place des programmes de répit
pour ies families et de rendre l'information disponible à la famille et
aux proches pour qu'elles puissent mieux assumer leur rôle.
Évidemment, toute la question de la formation a été
abordée à plusieurs reprises, la question de la recherche. C'est
hier ou peut-être ce matin où on insistait pour que la recherche
et l'évaluation soient le plus possible intégrées aux
pratiques. Une formule souple d'organisation et de fonctionnement, telle que
celle proposée par tes démarches de planification
régionale, doit être privilégiée, sauf pour une
région. Ce matin, je dois dire que, du côté
régional, tout le monde favorisait la démarche, et vous l'avez
explicitée pas mai cet après-midi. Évidemment, les
questions qui sont restées les plus débattues et où je
pense que les gens, à part l'assurance qu'on pouvait leur donner, sont
peut-être partis sur leur appétit, c'était la
définition des mandats, des responsabilités des
établissements, des organismes et des intervenants.
Il y aurait d'autres points à faire ressortir, mais je dirais en
conclusion qu'il est évident que le rapport Harnois était un
point de départ pour l'établissement de la politique. Parfois je
disais que ce n'était pas mon rôle de le défendre, mais
à certains moments, je n'ai pas pu m'empêcher de m'y identifier
jusqu'à un certain point Sans cela, je ne l'aurais peut-être pas
apporté en commission parlementaire, de toute façon.
Il reste beaucoup de choses à préciser. Il y a des
orientations, peut-être pas fondamentales, mais certaines orientations
qui devront être modifiées. Je pense que ce qui va demeurer
important à définir, c'est quelles sont les clientèles que
nous allons prioriser? Évidemment, on nous a demandé beaucoup de
ressources. Je ne peux pas oublier le mandat original que j'avais donné
à la commission Harnois, qui a été à la source, je
pense, de nos préoccupations en santé mentale. Il y a d'abord et
avant tout les personnes, je le répète, qui sont à
désinstitutionnaliser. À quel rythme le fait-on? Il faudrait
examiner cela de plus près.
Il y a aussi les personnes qui ne sont plus institutionnalisées
et qui sont trop souvent laissées pour compte dans la
société. Il me semble que nos premières obligations
doivent être envers ces personnes. Évidemment, le fait de leur
donner le soutien nécessaire implique toute la panoplie de services et
d'intervenants dont on a parlé.
Ce qui ne doit pas exclure, et c'est d'ailleurs l'autre dimension que le
rapport Harnois fait valoir, toute la question de la prévention qui peut
s'exercer de façon très générale au niveau
interministériel, mais la prévention pour les personnes qui sont
en situation de conflits ou en situations plus difficiles qui font que, s'ils
n'ont pas l'appui nécessaire, les problèmes peuvent
dégénérer en problèmes de santé mentale plus
profonds. Enfin, ce sont des questions auxquelles je ne peux pas apporter de
réponses aujourd'hui.
Le point final est évidemment d'aller chercher un minimum de
ressources, soit dans un échéancier qui pourrait être
prévu mais qui donnerait aux différents intervenants et à
la population le sentiment - cela traduirait également la volonté
politique du gouvernement -d'agir en ce domaine.
En conclusion encore une fois, merci à tout le monde et on aura
sûrement l'occasion d'en reparler. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme
la ministre. Je voudrais déposer en terminant la liste des organismes et
des individus qui ont fait parvenir un mémoire et qui n'ont pu
être entendus par ia commission parlementaire, soit parce qu'ils
étaient en dehors des délais ou soit parce qu'ils avaient
manifesté l'intention de ne déposer que leur mémoire, et
les rassurer en leur disant que leurs mémoires sont ou seront lus,
analysés et considérés dans la rédaction
définitive du rapport du Or Hamois et de son équipe. Qu'ils se
considèrent rassurés là-dessus. Je dépose donc une
liste de 29 organismes qui étaient très
intéressés.
Je voudrais également remercier tout le monde pour
l'exceptionnelle discipline avec laquelle on a procédé durant les
travaux. La commission parlementaire, ayant acquitté son mandat, ajourne
ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 10)