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(Quinze heures cinquante et une minutes)
Le Président (M. Paré): Le quorum étant
maintenant atteint, je déclare la séance de la commission
permanente de l'éducation ouverte, en rappelant que le mandat de cette
commission est de procéder à des consultations
particulières dans le cadre de l'étude détaillée du
projet de loi 63, Loi modifiant la Loi sur l'Université du
Québec.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Non, M. le Président.
Le Président (M. Paré): il n'y a donc pas de
remplacements. Je vous rappelle l'ordre du jour. Déclaration d'ouverture
du ministre et remarques préliminaires du porte-parole de l'Opposition
officielle. Viendront ensuite les représentants de l'Université
du Québec, pour une période de 90 minutes, et ceux de la
Fédération des professeurs d'universités du Québec,
pour une période de 60 minutes.
J'aimerais Informer les membres de la commission que l'Université
du Québec en Abitibi-Témiscamingue ne sera pas entendue ici
à la suite d'une demande de sa part.
J'inviterais donc tout de suite, de façon à ne pas
retarder les travaux de la commission, le ministre de l'Éducation
à nous faire part de ses remarques préliminaires.
Remarques préliminaires
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, permettez-moi, tout d'abord, de
saluer les membres de la commission parlementaire que je suis très
heureux de retrouver après une période d'absence de quelques
mois, puisque nous ne nous étions point revus, comme commission, depuis
l'ajournement des fêtes. Lorsque nous nous sommes quittés,
à l'ajournement des fêtes, nous avions déjà
adopté en deuxième lecture, c'est-à-dire au stade du
principe, le projet de loi 63 dont l'objet est la modification de la Loi sur
l'Université du Québec. Nous étions convenus, vu les
réactions qui nous étaient parvenues de milieux
immédiatement concernés, de réserver du temps au
début de la présente année pour l'écoute en
commission parlementaire des vues que l'on voudrait bien communiquer aux
députés et, par leur entremise évidemment, au
gouvernement, ainsi qu'à l'Assemblée nationale.
Les séances que nous tiendrons aujourd'hui, demain et jeudi ont
précisément pour objet de donner suite à cette
décision prise par la commission d'entendre les organismes qui veulent
présenter leurs vues sur le projet de loi 63. Je les avertis tout de
suite que nous les écouterons du côté gouvernemental avec
l'intérêt que nous portons toujours aux représentations qui
nous sont faites en provenance de milieux extérieurs à
l'Assemblée nationale et que, dans la mesure où l'on nous
soumettra des représentations susceptibles de contribuer à
l'amélioration du projet de loi, nous les accueillerons avec
intérêt et ouverture d'esprit.
J'ai pris connaissance d'à peu près tous les
mémoires qui ont été portés à l'attention de
la commission parlementaire en prévision de ces auditions publiques et
je crois constater que, de manière générale, les grands
objectifs du projet de loi suscitent des réactions plutôt
favorables.
Le premier objet du projet de loi vise à élargir la
composition de l'assemblée des gouverneurs de l'Université du
Québec et du conseil d'administration des universités
constituantes de manière à faire une place plus large en
particulier aux représentants des milieux socio-économiques de
chaque région. Nous avons reçu des réactions qui ne sont
pas nécessairement convergentes au sujet de cet objectif. Nous les
examinerons attentivement, mais, dans l'ensemble, Je crois avoir
constaté une adhésion assez répandue à ce concept
suivant lequel l'université n'échappant point à la
règle générale doit disposer autant que possible dans son
sein de mécanismes de vérification de sa gestion et de sa
performance qui permettent une participation assez large de la
communauté, plus étendue, au service de laquelle elle a
été placée par le législateur.
L'élargissement de la composition de l'assemblée des
gouverneurs de l'Université du Québec et du conseil
d'administration de chacune des universités constituantes que nous
envisageons dans le projet de loi a pour objet de faire en sorte que cette
implication de la communauté plus large soit plus sentie, plus
substantielle, plus efficace. Nous sommes convaincus qu'il s'agit d'une
orientation sage et apte à répondre à des attentes
très répandues. Encore une fois, nous écouterons les
réactions qu'on voudra nous soumettre à ce sujet parce que nous
avons également le souci de faire en sorte que la mission propre, la
nature, les éléments essentiels de l'institution universitaire
soient traités avec toute la considération qui convient de la
part d'une société civilisée et démocratique.
Le deuxième objet de ce projet de loi, c'est l'octroi à
l'Université du Québec à Montréal d'un statut
d'université associée en vertu duquel l'UQAM se verrait attribuer
plusieurs prérogatives qui sont actuellement exercées de
manière exclusive et entière par le siège social,
c'est-à-dire par la direction générale de
l'Université du Québec. L'octroi de ce statut particulier
à l'UQAM répond à un voeu qui est exprimé
depuis
longtemps par cet établissement universitaire et à la
réalisation duquel la direction de l'Université du Québec
n'a jamais été Indifférente. Les circonstances ont
empêché que ce voeu ne se réalise. Depuis
déjà plusieurs années, des circonstances
électorales, parfois des circonstances attribuables à une
conjoncture sociale ou politique particulière dans d'autres cas, ont
empêché que ne se réalisent des projets conçus
antérieurement par les autorités concernées de
l'Université du Québec et de l'Université du Québec
à Montréal, ainsi que par le gouvernement. Je crois que nous
avons réuni, cette fois-ci, toutes les conditions qui devraient
permettre d'en venir à un dénouement assez rapide de ce dossier
qui a tardé à trouver sa solution.
Un corollaire de cette disposition que nous introduisons dans le projet
de loi pour octroyer un statut d'université associée à
l'Université du Québec à Montréal, c'est la
modification d'autres dispositions de la loi constitutive de
l'Université du Québec en vertu desquelles l'Université du
Québec est apte à adopter des règlements susceptibles de
s'appliquer aux universités constituantes et aux instituts
affiliés. Nous avons trouvé une formule pour exprimer cet
ajustement nécessaire, qui a soulevé des objections de la part de
plusieurs milieux, en particulier de la part de syndicats de professeurs.
Lorsque nous avons rédigé le texte, je dis en toute
simplicité que nous n'avions pas cette intention en vue,
c'est-à-dire l'intention de donner à l'Université du
Québec le pouvoir d'imposer des règlements particuliers à
chacune de ses constituantes, de les tenir au bout de la fourche pour ainsi
dire, de les tenir à la merci de ses volontés passagères
ou permanentes qui pourraient être entachées d'arbitraire.
J'ai pris connaissance avec beaucoup d'Intérêt des
représentations relativement nombreuses dont nous avons
été saisis à ce sujet et je voudrais assurer ceux et
celles qui se sont exprimés en ce sens auprès des membres de la
commission parlementaire que nous examinons avec intérêt le point
de vue dont on nous a fait part. Je souhaite personnellement qu'il soit
possible peut-être de réexaminer la formulation que nous avons
retenue en vue d'en trouver une qui dira peut-être plus exactement ce que
nous voulons dire, sans ouvrir la porte à toutes sortes de
développements qui pourraient être Imprévisibles. Nous
avons été attentifs à ces représentations et je
pense que nous pourrons cheminer ensemble, les organismes qui viendront nous
rencontrer et nous-mêmes, les députés, de manière
à essayer de mieux comprendre ce que pourrait être une formule
vraiment capable de donner satisfaction, de façon raisonnable, à
tout le monde.
Un autre point intéressant dont j'ai pris note concerne la
participation des chargés de cours à l'activité des
organismes directeurs des établissements constituants, de même
qu'à l'assemblée générale de l'Université du
Québec.
Les chargés de cours, nous le savons, occupent une place
très importante dans cette multitude de services d'enseignement que
l'Université du Québec et ses constituantes mettent à la
disposition de la population. Même si elles n'ont pas le statut de
professeur permanent, ces personnes qui ont le statut de chargé de cours
rendent des services signalés. Les chargés de cours, si mes
renseignements ne datent pas trop, dispensent à eux seuls plus de la
moitié des services d'enseignement offerts au premier cycle des
études universitaires. On pourra me corriger si mes chiffres sont
erronés, mais je ne pense pas qu'ils le soient beaucoup. On ne peut pas
les considérer comme une matière secondaire ou comme des
éléments négligeables. Ce sont des éléments
très Importants. Nous avons déjà eu l'occasion de dire aux
chargés de cours l'importance que nous attachons à leur travail.
Il n'est pas facile de trouver des solutions à certains problèmes
dont ils nous ont saisis, mais je voudrais vous assurer, M. le
Président, que nous chercherons loyalement, à l'occasion des
auditions publiques de la commission parlementaire, le moyen de faire droit au
désir des chargés de cours d'avoir une participation à
l'activité des organes directeurs suprêmes des
établissements constituants de l'Université du Québec ou
encore de l'assemblée générale de l'Université du
Québec.
Je pense bien que les remarques que je viens de faire résument
l'essentiel du projet de loi 63 et aussi, je pense, l'essentiel des
représentations dont nous avons été saisis jusqu'à
maintenant.
Il y a une autre représentation à laquelle je voudrais
faire écho dès le début de nos travaux pour que nous
puissions nous arrêter ensemble aux problèmes qu'elle
soulève. Une association dont je préciserai le nom pour les fins
du compte rendu de nos débats, mais je ne suis pas sûr si c'est le
syndicat des professeurs des universités du Québec ou la
Fédération des associations de professeurs des universités
- si quoiqu'un peut me faire signe - nous a soumis un mémoire qui porte
entièrement sur le thème de la liberté d'enseignement.
Vous souvenez-vous du nom de l'organisme?
Une voix: C'est la FAPUQ.
M. Ryan: C'est la FAPUQ, la Fédération des
associations de professeurs des universités du Québec, qui a
soumis un mémoire traitant entièrement du thème de la
liberté d'enseignement et de recherche à l'université. La
FAPUQ, à l'aide d'une documentation abondante, ayant elle-même
travaillé ce sujet d'une façon approfondie au cours des derniers
mois ou des dernières années, nous a fait part de son voeu de
voir Inscrire dans la loi constitutive de l'Université du Québec
une disposition où serait garantie la liberté fondamentale de
l'enseignant universitaire. Elle a cité, à l'appui de sa
proposition, des dispositions que l'on trouve déjà dans
la charte de l'Université de Montréal et dans la charte de
l'Université Laval. Je n'ai pas eu le temps d'examiner toutes les
chartes des universités québécoises ou d'autres
universités qui pouvant nous intéresser ailleurs au Canada, aux
États-Unis, en France ou ailleurs, mais je voudrais simplement signaler,
à ce moment-ci, que nous ne sommes pas indifférents à
cette recommandation qui nous a été faite par la FAPUQ. Nous
aurons le temps de l'examiner attentivement; la FAPUQ viendra présenter
elle-même ses vues à ce sujet. Nous sommes tous convaincus, j'en
suis persuadé, de l'importance tout à fait fondamentale de la
liberté de l'enseignement dans l'économie d'un système
universitaire digne de ce nom.
Comme, au Québec, nous avons toujours veillé à
préserver avec un soin particulier le respect qui doit être
inhérent à l'exercice de la fonction d'enseignement et de
recherche universitaire, il faudra que nous nous demandions bien franchement,
bien loyalement, si nous n'aurions pas intérêt - traitant de
l'Université du Québec qui, à plusieurs égards, est
déjà, de fait, et appelée à devenir, probablement
davantage au cours des années, un de nos grands établissements
universitaires québécois - s'il n'y aurait pas une sorte de
responsabilité morale à tout le moins pour le législateur
d'inscrire une disposition dans la loi constitutive de l'UQ reconnaissant le
principe de la liberté de l'enseignant universitaire et garantissant
cette liberté dans le texte qui constitue la matrice juridique à
la base de toute l'activité de l'Université du Québec.
Voilà, M. le Président, quelques remarques que je soumets
en toute cordialité à mes collègues de la commission
parlementaire. Je voudrais, avant de clore, adresser des remerciements, tout
d'abord, à la direction de l'Université du Québec, que
nous aurons l'occasion d'entendre tantôt, et à la direction de
l'Université du Québec à Montréal également
lesquelles nous ont fourni, dans la préparation de ce projet de loi et
dans l'examen des problèmes afférents à
l'Université du Québec de manière plus
générale, une collaboration exemplaire au cours des
dernières années, plus particulièrement les derniers mois.
Je voudrais leur adresser des remerciements sentis et les assurer de l'esprit
dans lequel nous avons conçu avec eux le projet de loi et celui dans
lequel nous en poursuivrons l'étude en écoutant, d'abord, les
organismes qui veulent se faire entendre et, ensuite, en examinant article par
article le projet de loi afin de l'acheminer vers le stade de l'approbation
finale par l'Assemblée nationale.
Je termine mes remarques ici et je veux vous assurer de la pleine
collaboration du gouvernement dans l'étude du mandat confié
à la commission parlementaire de l'éducation autour du projet de
loi 63.
Le Président (M. Paré): Merci. M. le ministre. La
parole est maintenant au critique de l'Opposition en matière
d'éducation, le député d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: M. le Président, je vous remercie. Moi aussi,
j'aurai l'occasion de saluer tous les intervenants qui, lors de la
présentation de leur mémoire, viendront donner leur point de vue
sur les dispositions concernant le projet de loi 63. Il est de coutume, M. le
Président, dans les remarques préliminaires, qu'on ait la
liberté de dire ce qu'on veut et j'en profiterai, pendant quelques
minutes, avant de parler plus spécifiquement du projet de loi 63, pour
rappeler un peu le contexte historique dans lequel s'inscrit ce projet de
loi.
Sans faire un très long historique, il faut se rappeler que ce
projet de loi témoigne, en tout cas en ce qui me concerne, du
cheminement pour le moins laborieux du gouvernement dans le dossier
universitaire, particulièrement en ce qui concerne le fonctionnement,
les orientations et le financement du réseau UQ. Rapidement, sans faire
une longue analyse, il faut se rappeler, de triste mémoire, le rapport
Gobeil, la commission parlementaire de l'automne 1986 sur les
universités, la création d'un groupe de travail sur
révolution du réseau UQ, qui, lui, avait remis son rapport en
juin 1987, la réaction du ministre de l'Éducation au rapport
Després - une espèce d'encyclique qu'on a eu l'occasion de
recevoir du ministre et que j'arrivais à peine, comme critique en
matière d'éducation... Là, j'ai reconnu le ministre de
l'Éducation en me tapant une magnifique lettre de 17 ou 18 pages et
ça, c'est régulier - et, enfin, le dépôt du projet
de loi 63. Mais, durant ce temps, du temps s'est écoulé.
À la lumière de tout ceci, je pense qu'on doit au moins
constater que le projet de loi 63 se situe dans le prolongement des
orientations définies par le ministre au printemps dernier qui, à
certains égards, s'inspirent du rapport Després. On aura
l'occasion, au cours des échanges de propos qu'on aura avec les
différents groupes qui ont réagi au projet de loi 63,
d'évaluer ce qui se rapproche des recommandations Després et ce
qui s'en s'écarte très sensiblement. Il faut aussi constater que
le projet de loi fournit une réponse très partielle à la
fois aux nombreuses recommandations du rapport Després et aux
préoccupations plus larges concernant l'avenir du réseau des
universités constituantes ou de ce qu'on appelle dans le jargon le
réseau UQ.
Il y a un problème majeur dans le réseau universitaire et
pas uniquement dans le réseau UQ - je pense que le ministre était
déjà sensible à cette problématique, son parti
faisait accroire qu'il l'était beaucoup, j'aurai l'occasion d'y revenir
- c'est toute la problématique, beaucoup plus fondamentale que le projet
de loi 63, du financement des universités et, dans le cas qui nous
intéresse, de l'Université du Québec. La situation
précaire des universités est bien
connue: déficits accumulés de 140 000 000 $ au 30 juin
1988; formule de financement dépassée, désuète,
inadéquate, Inappropriée. Deux ans et demi après la
commission parlementaire sur le financement, on attend toujours le nouveau mode
de financement promis par le Parti libéral lors de la dernière
élection, tandis que le plan de transition du ministre finit cette
année.
Vous pouvez continuer d'en parler à la députée de
Jacques-Cartier; elle a écrit une longue lettre au premier ministre,
disant: Je suis obligée de m'adresser directement au premier ministre.
Une belle lettre, d'ailleurs, très bien faite; je vous félicite,
Mme la députée de Jacques-Cartier. Mais c'est un peu
étonnant qu'une membre de la commission de l'éducation soit
obligée d'envoyer une belle lettre au premier ministre disant: Est-ce
qu'il se peut que vous vous occupiez de cela à un certain moment?
On sait que l'Université du Québec a récolté
une maigre part des crédits alloués dans le cadre de ce plan.
Alors qu'elle compte 28 % de la clientèle étudiante, elle a
récolté à peu près 17 % des sommes en jeu. Il faut
se demander s'il s'agit d'une curieuse façon de récompenser le
réseau UQ qui s'est imposé une sévère discipline
budgétaire et a contenu son déficit dans des proportions fort
modestes. Toutes proportions gardées, le déficit du réseau
de l'université est le plus petit de l'ensemble du réseau
universitaire. Je n'ai pas envie de faire le tour des problèmes de
financement, mais il serait toujours temps de le faire, parce que le
gouvernement ne semble pas avoir compris que les problèmes de
financement du réseau UQ sont de plusieurs ordres, mais ils sont
toujours aussi majeurs, aussi sérieux et aussi Importants.
Prenons le sous-financement de l'UQAM; la formule actuelle fondée
sur les clientèles est inadaptée, à tout le moins,
à la situation des instituts de recherche. Je ne connais pas un institut
de recherche qui n'a pas dit: Cela n'a pas de sens. Et ces gens se targuent de
faciliter et de favoriser la recherche, mais cela ne paraît pas dans la
formule de financement. Mais ils sont pour cela à mort. La formule de
tient pas compte des facteurs de taille et d'éloignement pour les
universités en région.
Je vois le député de Rimouski Ici. Je suis convaincu que,
s'il rencontre de temps en temps les gens de son milieu universitaire, il doit
sûrement entendre dire qu'il est sous-financé. Je ne dis pas qu'il
donne suite à ces discussions, mais il en entend au moins parler. Il
doit surtout entendre parler de la responsabilité d'appui aux
collectivités locales. Moi, j'ai toujours prétendu que le
réseau UQ offre une excellente qualité d'appui aux
collectivités locales des régions du Québec et je ne
change pas d'avis: le Québec de base n'est pas seulement Montréal
et Québec. Je n'ai rien contre les grands centres, mais les
régions existent et il est Important que les universités donnent
un appui aux collectivités locales. Elles le font. Cependant, elles ne
reçoi- vent pas le financement requis pour le faire. Je vais y revenir.
Je ne suis pas d'accord pour qu'on leur dise: Écoutez, ce sont des
activités qui doivent s'autofinancer. Cela n'a pas de bon sens, parce
qu'il y a d'autres types d'activités. On ne peut pas parler des deux
côtés de la bouche en éducation. C'est un investissement ou
ce n'en est pas. Si c'est un investissement, on va prendre le mesures requises,
dans le même genre que la belle lettre que Mme la députée
de Jacques-Cartier a envoyée au premier ministre. Elle était
sérieusement convaincante. On verra les résultats. (16 h 15)
Au sujet des universités en région, le rapport
Després recommandait l'Instauration d'un mécanisme semblable au
Northern Grant ontarien, en vertu duquel les subventions de base des
universités situées en région périphérique
sont majorées de 10 % pour tenir compte des coûts
supplémentaires. Parce que jamais on ne me fera accroire qu'il n'y a pas
de coûts supplémentaires. Il y en a beaucoup dans les
universités constituantes du réseau. Il y a des coûts
supplémentaires et ce n'est pas vrai que la formule actuelle les assume.
Le ministre n'a cependant pas fait connaître ses intentions à cet
égard, se contentant de reporter le tout à l'éventuelle
formule de financement.
Enfin, il n'y a rien, dans les crédits budgétaires
déposés à la fin de mars, qui indique un véritable
redressement pour 1989-1990. On sait que le manque à gagner des
universités québécoises, par rapport à l'Ontario,
est évalué à 150 000 000 $. On connaît le "show" de
ce gouvernement par rapport aux crédits et au budget. Les crédits
sont devenus une opération d'artifice qui ne veut pas dire grand-chose,
parce que le gouvernement veut être capable de se flatter ce que vous
savez, en disant: On est sensible aux revendications que les groupes nous font.
Il va y avoir quelques petits ajustements de circonstance probablement dans le
discours sur le budget, mais qui ne corrigeront pas du tout le problème
de fond. Depuis plusieurs années, l'éducation devait être
une priorité, un Investissement pour ce gouvernement. Ce n'était
même plus une dépense, donc, c'est normal qu'on ne voie pas
ça dans les crédits, ce n'est pas une dépense. Il n'y a
pas de dépense en éducation avec ce gouvernement, ce n'est qu'un
investissement pour (a jeunesse, pour l'avenir. C'est peut-être pour
ça qu'il n'y a rien dans les crédits, même pas
l'augmentation conforme à l'inflation. Il y a vraiment une
réduction. Encore des coupures, tant au primaire et au secondaire qu'au
niveau collégial. Une coupure de 12 000 000 $ au collégial.
Il ne s'agit pas de nier toute pertinence au projet de loi 63, mais de
signifier clairement qu'il y a des problèmes urgents, majeurs, notamment
en matière de financement, au sujet desquels le gouvernement devrait
arrêter de faire ses devoirs et de virer les papiers à
l'envers.
Tout cela, ça donne du temps et on fait toutes sortes d'analyses.
On sait qu'on en a un qui analyse longtemps, notre cher ministre. Non seulement
il écrit de longues lettres, mais il lit longtemps; il faut qu'il voie
tout deux fois, il l'a dit en Chambre, cet après-midi. Pour lui, lire un
document une fois, ce n'est pas assez; alors, il faut qu'il le lise deux fois
pour être certain qu'il a bien compris. Et quand il a pris connaissance
du document, souvent, il va consulter. Je n'ai rien contre ça, et
là-dessus, je vais le féliciter de la consultation, sauf
qu'à un moment donné, sur des sujets où tout le monde est
unanime, lorsqu'on a le constat, qu'on a fait l'évaluation et qu'il faut
arriver avec un correctif, je ne vois pas pourquoi il faut prendre quatre
ans.
Au sujet du projet de loi 63, le ministre a rappelé l'objet de ce
projet de loi. On aura l'occasion de voir si sa lecture des mémoires
correspond à celle qui nous sera faite par les personnes
concernées. Je n'ai pas l'intention d'être très long, en ce
moment, sur les principes importants véhiculés par le projet de
loi. En un mot, c'est un projet de loi qui modifie la Loi sur
l'Université du Québec. Ce ne sont pas des dispositions bien
compliquées, on est capables de comprendre ça. Cela modifie,
entre autres, la composition des conseils d'administration, du siège
social et des constituantes. Il y a une autre justification importante, c'est
de conférer un statut d'université associée à
l'Université du Québec à Montréal. Cela ne devait
pas être bien dramatique dans le réseau, sauf qu'il y en a qui ont
lu ça autrement et on va regarder ça avec eux. Bravo, je suis
content qu'on ait l'occasion de regarder ça avec ceux qui l'ont
analysé plus en profondeur. On a certaines questions à leur
poser. Je porterai un Jugement à la fin de nos consultations, et on
verra, à la suite des échanges de propos qu'on aura avec ces
groupes, s'il y a une perception différente entre ceux qui nous en
parleront et le ministre qui disait: Tout compte fait, il n'y a pas de
problème; au niveau des grands objectifs, ça va. C'est le
ministre qui disait ça tantôt.
J'ai aussi regardé la douzaine de mémoires reçus.
Ils nous indiquent, d'ailleurs, que plusieurs aspects du projet suscitent des
appréhensions sérieuses. Je ne dis pas que tout va, je dis qu'il
y a des appréhensions sérieuses dans certains cas. Dans d'autres,
il y a des réticences majeures et, dans certains cas, il y a même
des objections catégoriques de la part d'intervenants. Donc, on mettra
ça ensemble et on regardera si, à la sortie du tunnel, on peut
dire encore: il n'y a pas de problème, la plupart sont d'accord avec ce
projet de loi.
Comme Opposition - et if n'y a pas de cachette, je ne peux pas parler
des deux côtés de la bouche - on s'était prononcés,
en décembre, en faveur de l'adoption du principe du projet. Je ne change
pas d'avis. Il y a des principes à l'état pur contre lesquels on
ne peut pas être. Cependant, quand on déshabille le projet de loi,
quand on l'analyse en profondeur, on se rend compte qu'il y a tellement
d'éléments qui sont liés ou non au principe qu'on a le
droit, je pense, de remettre en question la pertinence de notre appui ou pas.
Ce n'est pas ce que je fais en ce moment. Tout ce que je dis, c'est que j'avais
énoncé un certain nombre de réserves Importantes. J'avais
suggéré des amendements en ce qui concerne, notamment, la
composition de l'assemblée des gouverneurs et des conseils
d'administration des constituantes. Je vais attendre de les voir.
Je vais rapidement résumer mes préoccupations et les
premières réactions qu'on avait eues au sujet des structures de
direction. Le projet de loi 63 modifie les règles de composition de
l'assemblée des gouverneurs et du conseil d'administration des
universités constituantes, essentiellement pour augmenter le poids des
membres socio-économiques. Je n'ai pas d'objection à cela et je
l'ai dit au ministre en Chambre lors du discours de deuxième lecture,
mais je trouve qu'on y est allé un peu fort, même pas mal fort,
parce qu'on a renversé les proportions. Les "socio" étaient 3 sur
22 et dorénavant ils seront 7 sur 24; en gros, on passe du
septième au tiers. Alors, moi, Je trouve que c'est y aller fort. Il y a
là-dedans une forme déguisée - puis, c'est ce qu'il faut
fouiller avec les groupes - de privatisation sans le dire. Parce que ce sont
d'excellents habilleurs. Ces gens-là sont très forts dans
l'habillage, dans l'art de cacher des affaires. Alors, notre rôle, c'est
de regarder d'une façon un peu plus Intégrale le produit
fondamental. Cela ne m'intéresse pas de privatiser les
universités, je ne suis pas pour ça. Quant à commencer
à Incorporer un nombre passablement élevé de gens qu'ils
vont s'arranger pour nommer, parce qu'on les connaît, j'ai des questions
à poser là-dessus, surtout quand on y va dans la proportion de un
tiers.
Les socio-économiques, J'adore ça, sérieusement,
mais ils ne peuvent pas tout faire parce qu'ils sont très
préoccupés, d'abord par leur appartenance à leur
entreprise, en règle générale, et je ne suis pas convaincu
qu'on peut avoir jusqu'à la moitié d'un conseil d'administration
provenant de l'entreprise privée avec la seule préoccupation de
l'entreprise privée et continuer à prétendre qu'on a une
université moderne, démocratique, ouverte et sensible à
d'autres préoccupations. Je ne suis pas un grand univer-saliste, mais je
prétends qu'un élément important de la
société, c'est effectivement d'être capable de traduire
dans le milieu universitaire une sorte d'entièreté des courants,
des courants de formation, des courants de pensée, des courants de
recherche. En ce sens, même si je n'ai rien contre l'entreprise
privée, je ne suis pas sûr qu'on doive faire des conseils
d'administration des constituantes semblables aux grands CA de compagnies, aux
grands CA de 'business" avec un gouvernement de "business". Là, tout ce
qui les intéressent c'est de "balancer" les colonnes et les
colonnes ne 'balancent" pas, on a des problèmes. Ce n'est pas
ça l'éducation universitaire et ta formation de l'avenir. Il faut
que cette Institution demeure souple, ouverte aux préoccupations,
à l'adaptabilité. On va examiner ça.
On a de sérieuses réserves qui semblent assez
partagées - je suis content à ce sujet - au sujet de
l'augmentation très significative du nombre de membres
socio-économiques, je l'ai dit tantôt. L'ajout de deux "socio" par
constituante, en tout cas en ce qui me concerne, me semble amplement suffisant.
Je fais mes remarques en espérant qu'au-delà de vos
mémoires, puisque je pense que c'est de cette façon qu'on
réussit à bonifier une consultation, vous aurez le goût de
faire des commentaires là-dessus. J'ai lu vos mémoires et, si
vous venez nous relire ce qu'on a déjà lu sans autres
commentaires, je ne suis pas sûr que ce soit bien éclairant pour
un décideur qui a à améliorer le contenu d'un projet de
loi. Alors, dans ce sens, j'espère que vous pourrez tous élargir
un peu plus votre point de vue.
Une autre lacune majeure réside dans l'absence complète de
représentations des chargés de cours. Le ministre en a
parlé parce que je lui en ai déjà pas mal parlé.
Mais je prétends que de plus en plus, pour des raisons de
modernité - c'est ainsi que ça marche, que voulez-vous que je
vous dise? - dans certaines universités, au-delà de 50 % des
dispensateurs de formation en enseignement, en recherche ou autres, sont des
chargés de cours. Alors, quelle est cette idée de ne pas leur
donner une voix au chapitre? Il ne faut pas les voir comme il y a 35 ou 25 ans:
un petit complément de revenus à l'université et ils
continuent dans leurs terres - si vous me permettez l'expression -
économiques, sans être associés au projet global de
l'université, à la conception de l'avenir, à la recherche
et à l'appui à la collectivité. Il faut qu'ils se sentent
impliqués, partenaires et associés. Là, vous dites: C'est
Important, mais on ne peut pas les placer là, on regardera ça un
peu plus tard. Je ne suis pas d'accord. C'est l'endroit pour décider
quelle place on leur donne. Je ne dis pas qu'avec ce que je viens de dire on
aura réglé la problématique des chargés de cours.
Je dis simplement qu'on ne pourra pas écarter cette
problématique. Par qui est faite la majeure partie de renseignement au
premier cycle? Par les chargés de cours. Donc, on ne peut pas être
insensibles à cela, c'est une réalité du réseau
universitaire; il faut regarder ça.
Au cours des dernières années, les chargés de cours
ont multiplié les démarches auprès du ministre pour
obtenir une représentation au sein de l'UQ. Concernant
spécifiquement l'assemblée des gouverneurs, ils demandent d'avoir
deux représentants, soit un nombre égal aux étudiants. Il
me semble que ceci mérite d'être discuté. Je suis pour
ça. Comment, en effet, justifier l'exclusion des chargés de cours
du processus décisionnel, compte tenu de leur apport si- gnificatif et
déterminant à la mission de l'université? Une
reconnaissance tangible de cet apport passe par une représentation dans
les instances de direction. On ne peut pas juste écouter. De temps en
temps, après avoir écouté,
I faut conclure. Cette consultation permettra de recueillir l'opinion de
divers groupes concernés et d'examiner les modalités de cette
représentation. Concernant les CA des constituantes, c'est la même
chose; ce sont les mêmes remarques. Donc, Je ne les fais pas.
J'espère avoir à peu près les mômes
commentaires.
Par rapport à la disparition de la consultation du corps
professoral pour la nomination des deux personnes exerçant une fonction
de direction - parce qu'on sait que les vice-recteurs perdent leurs postes
protégés et les professeurs craignent qu'on ne se serve de ces
deux postes pour nommer des administrateurs - le ministre devra indiquer ce qui
justifie l'amendement proposé. Je réitère ma conviction
que le corps professoral doit être associé de près aux
procédures relatives à la nomination des recteurs et des
directeurs de constituantes. Il me semble que certaines nominations
récentes, d'ailleurs, aient donné lieu à des frictions
dans le milieu. Les audiences permettront peut-être de jeter un peu plus
de lumière en regard de cette procédure utilisée. Je
donnerai quelques exemples au moment des questions.
Pouvoir réglementaire. Il me reste deux remarques avant de
conclure. Alors que la loi actuelle permet à l'assemblée des
gouverneurs et au conseil des études d'adopter des règlements
généraux affectant, notamment, les structures et le
fonctionnement des constituantes, l'organisation de l'enseignement, l'admission
des étudiants, les procédures de promotion des professeurs, le
projet de loi 63, lui, permettra d'adopter des règlements particuliers.
Le ministre a dit: Ce n'est pas ce qu'on voulait. On ne voulait pas que ce soit
dangereux. On ne voulait pas que cela donne la possibilité au
réseau UQ d'intervenir. Mais que voulez-vous? On a ce
problème-là comme Opposition. On se le fait dire constamment - on
nous l'a dit encore à la période de questions - on ne comprend
pas qu'on ne sache pas lire. Mais quand tout le monde, autre que nous qui ne
comprenons pas et qui ne savons pas lire, nous dit la même chose, il y a
un problème. il faudrait regarder ça. Tout le monde a compris que
cette institution de pouvoirs particuliers pouvait être dangereuse et que
cela pourrait effectivement être carrément une ingérence
dans l'autonomie des constituantes. Tous les professeurs ont vu ça et
ils prétendent que c'est une subordination dangereuse. Il va falloir
regarder ça et s'Interroger là-dessus.
Quant au statut d'université associée de l'UQAM - qui est
quand même un sujet majeur dans le projet de loi 63, c'est presque sa
raison d'être - ce projet de loi permettra à l'Université
du Québec à Montréal d'avoir un statut d'université
associée. Cela vient donner force légale à
une entente déjà intervenue le 16 septembre 1987 entre
l'UQAM et l'UQ et entérinée ensuite par l'assemblée des
gouverneurs concernant le contenu du statut particulier de l'Université
du Québec à Montréal au sein de l'Université du
Québec. Je ne veux pas revenir sur cette entente qui constituait
l'aboutissement de très très longues négociations et dont
le contenu se retrouve dans le présent projet, à l'exception de
la dimension du financement. J'ai déjà indiqué que, sur ce
volet, lors de l'adoption du principe, on était d'accord avec ce nouveau
statut d'université associée qui répond aux voeux de la
communauté universitaire de l'UQAM et qui vient reconnaître sa
situation particulière.
On peut faire de beaux discours de part et d'autre, mais c'est clair, en
ce qui me concerne - je connais un peu le réseau UQ pour y avoir fait
des études, pour avoir été commissaire-étudiant
dans l'ancienne direction générale de l'Outaouais, pour avoir
aussi été commissaire-étudiant à l'UQAT - que le
réseau UQ est majeur, important, significatif, mais dans le
réseau l'Université du Québec à Montréal
n'est pas tout à fait de même nature que le reste des
constituantes. De toute façon, cela a été longuement
discuté, comme je l'ai mentionné tantôt, et on ne peut pas
ne pas tenir compte de ce statut particulier. Si ce changement ne rencontre pas
d'objections majeures, il a quand même suscité des
inquiétudes qu'il va falloir regarder quant à l'avenir du
financement et à l'avenir même du réseau UQ, pour ce qu'il
en reste, et il faudra dissiper certaines craintes, et j'espère que les
auditions, en tout cas, nous permettront de le faire. (16 h 30)
Conclusion. J'espère que les discussions qu'on aura nous
permettront de clarifier certaines craintes parfois justifiées, d'autres
fois injustifiées et, puisque le projet de loi a suscité des
réactions assez mitigées dans le réseau - à
l'exception du statut d'associée pour l'UQAM, les autres amendements
sont loin de faire l'unanimité - ces consultations devront permettre de
mieux comprendre les positions et les arguments, de part et d'autre. Il restera
au ministre à en tirer profit, je l'espère, pour établir
les consensus nécessaires et procéder aux
réaménagements Institutionnels qui permettront à
l'Université du Québec de mieux remplir ses missions
d'enseignement, de recherche et de service à la collectivité. Je
pense que l'université a fait la preuve qu'elle comprenait bien ses
missions. Tout ce qu'il lui reste à obtenir, ce sont les sommes requises
pour s'en acquitter convenablement; elle souhaite le faire et actuellement,
pour ce qui est de sa mission d'enseignement, de recherche et d'appui à
la collectivité, la preuve a été largement faite que le
réseau de l'Université du Québec ne dispose pas des
ressources qu'il devrait avoir pour s'acquitter convenablement de sa
mission.
Voilà, M. le Président, les remarques préliminaires
que je voulais faire avant de commencer à entendre les intervenants
spécifiquement sur le projet de loi 63. Merci.
Le Président (M. Paré): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. J'invite Immédiatement les
représentants de l'Université du Québec à prendre
place à la table. Ici, en avant.
Auditions
Je vous souhaite la bienvenue à la commission de
l'éducation. Je demanderais à M. Hamel, le président, de
nous présenter les personnes qui l'accompagnent en vous rappelant que
les discussions dureront 90 minutes, que la présentation du début
va être enlevée sur les discussions avec les membres de la
commission et que le reste du temps sera réparti également des
deux côtés de la table, donc entre chacune des formations
politiques. La parole est à vous, M. Hamel, en vous rappelant de nous
présenter les personnes qui vous accompagnent et, ensuite, de faire la
présentation de votre mémoire avant la discussion avec les
membres de la commission.
Université du Québec
M. Hamel (Claude): Merci, M. le Président. M. le ministre,
Mme et MM. les députés membres de la commission parlementaire de
l'éducation, c'est avec plaisir que l'Université du Québec
répond à l'invitation de la commission parlementaire de
l'éducation pour fui faire part de ses commentaires au sujet du projet
de loi 63, Loi modifiant la Loi sur l'Université du Québec. Comme
vous le suggérez, M. le Président, je vous présente les
collègues qui m'accompagnent. À mon extrême droite, M.
Hubert Laforge, recteur de l'Université du Québec à
Chicoutimi; M. Guy Massicotte, vice-président à la planification,
au siège social; à ma droite immédiate, M. Michel Leclerc,
vice-président à l'administration; à ma gauche
immédiate, M. Jacques L'Écuyer, vice-président à
l'enseignement et à la recherche et, à mon extrême gauche,
M. Pierre Nadeau, secrétaire général de
l'université.
Au moment où la commission s'apprête à aborder
l'étude détaillée du projet de loi, il n'est pas
nécessaire de faire une longue présentation de
l'Université du Québec. La lecture des débats sur
l'adoption du principe du projet de loi 63 nous permet de constater que le
législateur est familier avec le rôle et la structure de
l'Université du Québec et de son réseau. Comme le
rappelait tout à l'heure le leader parlementaire et porte-parole de
l'Opposition, le projet de loi présentement à l'étude
à l'Assemblée nationale découle d'une lettre que le
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, M. Claude Ryan,
adressait au président de l'Université du Québec de
l'époque, M. Gilles Boulet, en mai 1988. Cette lettre faisait suite au
rapport que le ministre avait demandé à un groupe de travail
présidé par M. Robert Després, dont le mandat
était d'étudier l'évolution de l'Université du
Québec et d'en dégager les voies d'action pour l'avenir.
Cet exercice d'échange, d'analyse et de réflexion, qui
s'est poursuivi pendant près d'un an et demi et qui regroupait à
la fois le ministre, l'Université du Québec et les membres du
groupe de travail, fut une occasion unique pour l'Université du
Québec de faire le point sur ses structures, son fontionnement, le
rôle de ses constituantes et ses rapports avec les autorités
publiques. Après 20 ans - la création de l'Université du
Québec remonte à 1968 - il est normal de procéder à
ce genre de mise au point. L'Université du Québec fut mise sur
pied pour promouvoir l'accessibilité des Québécois et des
Québécoises aux études supérieures, pour
décentraliser les lieux de formation et pour contribuer au
développement de l'enseignement et de la recherche universitaires.
L'Université du Québec s'est acquittée, avec succès
croyons nous, de son mandat. Tous ceux et celles qui, depuis le début,
ont oeuvré ou oeuvrent actuellement au sein de l'Université du
Québec ont consacré des sommes considérables d'efforts et
d'énergie pour que cette formidable entreprise soit une réussite.
Forte de la confirmation de ce mandat par le ministre, l'Université du
Québec entend poursuivre son action avec tout le dynamisme dont elle est
capable et répondre aux orientations formulées par les
autorités gouvernementales au meilleur de ses capacités.
Déjà, plusieurs gestes ont été posés
dans le sens des orientations données par le ministre. La structure de
la direction de l'Université du Québec a été
simplifiée par la réduction du nombre de postes de
vice-présidents, de cinq à trois. Nous sommes présentement
à étudier les modifications qui pourraient être
apportées pour simplifier et clarifier le fonctionnement des
différentes instances de l'Université du Québec, soit
l'assemblée des gouverneurs, le comité exécutif, la
commission de planification, le conseil des études et, en
général, tout le fonctionnement du siège social, ainsi que
les autres comités et commissions qui s'y rattachent.
Une nouvelle procédure de nomination des chefs
d'établissements fut mise à l'essai à l'Institut national
de la recherche scientifique, à l'Institut Armand-Frappier et à
l'École de technologie supérieure. Cette nouvelle
procédure élaborée dans la foulée du rapport
Després, permet d'alléger le processus en vue du renouvellement
du mandat ou du remplacement d'un chef d'établissement. La
procédure actuelle, il faut bien l'avouer, conduit à un
phénomène de repli qui rend difficile l'exercice, a la fois par
l'assemblée des gouverneurs et éventuellement par le ministre et
le gouvernement, des responsabilités propres à chacun en ce qui a
trait à la sélection et à la nomination des chefs
d'établissements. La nouvelle procédure retient les étapes
de consultation des professeurs lors de l'appel de candidature, et lors du
dévoilement des candidatures proposées par le comité de
sélection. Les délais pour la consultation sont toutefois plus
courts. Une évaluation de ces expériences devra être faite
avant de préciser de façon définitive cette
procédure.
Je dois, d'ailleurs, reconnaître, à ce sujet, que ces
expériences pilotes ne se sont pas faites sans soulever quelques remous,
ici et là. L'évaluation que nous devrons faire tiendra compte,
bien sûr, de ces réactions des professeurs dans nos
différents établissements. C'est notre intention, dans la
foulée de l'adoption du projet de loi 63, de mettre sur pied un groupe
de travail de l'assemblée des gouverneurs, qui se penchera sur cette
question et qui nous fera des propositions concernant la procédure
révisée à établir pour la consultation en vue de la
nomination des chefs d'établissements, car je pense que nous sommes tous
conscients qu'il s'agit là d'un élément qui déborde
le strict cadre du projet de loi.
Le 21 décembre 1988, je faisais parvenir au ministre un rapport
sur les programmes exten-sionnés et offerts en association ou en
conjonction. Ce rapport précisait que seuls les programmes
extensionnés, soit un programme qu'un établissement souhaite
offrir dans un autre établissement, ne faisaient pas l'objet d'un examen
par le Conseil des universités. Ces programmes ne représentent
qu'une faible proportion des programmes de l'Université du
Québec, moins de 5 %, et des étudiants Inscrits, moins de 1, 5 %.
On retrouve surtout parmi les programmes offerts en extension des programmes de
deuxième et troisième cycles, ils sont offerts en vertu de
protocoles dûment approuvés par le conseil des études et
l'assemblée des gouverneurs. On remarque aussi que certains programmes
extensionnés proviennent d'autres universités
québécoises, soit Laval, Montréal et Sherbrooke. Certains
de ces programmes sont même d'une durée limitée. En somme,
cette pratique permet surtout d'offrir des programmes répondant à
des besoins des constituantes en région, tout en minimisant les
coûts de développement.
L'Université du Québec transmettra sous peu,
conformément à la demande du ministre, un rapport
détaillé sur les activités hors campus. Bien qu'encore
incomplet, ce document fait ressortir l'effort considérable
réalisé pour rejoindre les étudiants, jeunes et adultes.
L'Université du Québec offre des enseignements dans plus de 100
municipalités au Québec.
L'Université du Québec, de concert avec la direction de
l'institut Armand-Frappier et le ministère, a entrepris de donner suite
aux recommandations du rapport Després visant la réorganisation
des activités commerciales de l'institut. Malgré les
difficultés rencontrées jusqu'à présent, nous avons
bon espoir d'en arriver, dans des délais raisonnables, à une
solution satisfaisante pour les parties impliquées.
L'École nationale d'administration publique a
entrepris, de son côté, la préparation d'un plan de
développement. Le nouveau directeur de l'école, M. Pierre
Decelles, entré en fonction à la fin de février, aura la
chance d'Imprimer sa marque à cette étape Importante de la jeune
histoire de cette institution. L'école a, de plus, collaboré
étroitement avec le sous-ministre du ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science, M. Marcel Gilbert, à qui le ministre
avait confié le mandat de revoir les modes de collaboration entre
l'Université du Québec, l'École nationale d'administration
publique et le gouvernement concernant la formation et le perfectionnement des
cadres supérieurs de la haute fonction publique. La conclusion de cette
étude est attendue avec un grand intérêt.
L'Institut national de la recherche scientifique, par ailleurs, a
entrepris d'identifier de nouveaux créneaux de recherche et travaille
activement à répondre à l'invitation du ministre de
développer plus avant des collaborations interinstitutionnelles et
d'associer le gouvernement dans le processus d'élaboration de son plan
sexennal. Déjà, le ministre a reçu le projet de plan
sexennal pour la période 1988-1994.
La direction de l'École de technologie supérieure a mis de
l'avant son projet de transformer en programmes de génie les programmes
de baccalauréat en technologie actuellement dispensés en vue de
l'accréditation par le Bureau canadien d'accréditation des
programmes d'ingénierie. Les modifications aux programmes de
l'école ayant été approuvés par le conseil des
études de l'Université du Québec, Ils seront offerts
dès septembre 1989. À la demande de l'école, ces
programmes seront soumis à l'examen du Bureau canadien
d'accréditation des programmes d'ingénierie dont la
décision devrait être rendue au mois de juin 1990. La
reconnaissance par le Bureau canadien d'accréditation des programmes
modifiés de l'école permettra, à l'avenir, aux
diplômés desdits programmes d'être admis, selon les
règles établies, comme membres de l'Ordre des
ingénieurs.
Par ailleurs, l'École de technologie supérieure a
collaboré étroitement avec les représentants des
diplômés de l'école, de l'Office des professions du
Québec, du ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science et de l'Ordre des ingénieurs, dans le cadre du mandat
confié à M. Gilles Perron par le ministre en vue de trouver une
solution équitable aux problèmes de reconnaissance
professionnelle des diplômés de l'école déjà
sur le marché du travail. Et au-delà de ce qu'indique le texte de
présentation, j'aimerais ajouter que nous avons également conclu,
à l'intérieur du réseau de l'Université du
Québec, une entente, comme le souhaitait le ministre, entre
l'École de technologie supérieure et l'Université du
Québec à Montréal pour toutes les questions qui touchent
le développement du génie entre ces deux institutions et le
développement éventuel de programmes de deuxième et de
troisième cycles à l'École de technologie
supérieure. J'ai, ce matin, adressé une lettre à M. le
ministre pour lui faire un rapport détaillé de la situation en ce
qui concerne l'École de technologie supérieure, parce que nous
jugeons, de notre côté, qu'à ce moment-ci nous avons
donné une réponse complète aux souhaits que M. le ministre
formulait dans sa lettre au président de l'Université du
Québec.
La Télé-université, en collaboration avec le
siège social, travaille présentement à mettre au point une
politique de collaboration entre la Télé-université et les
autres constituantes pour promouvoir davantage l'enseignement à distance
au sein du réseau de l'Université du Québec. La
Télé-université poursuit aussi ses efforts en vue de
développer ses propres programmes. Le Conseil des universités a
récemment donné un avis positif au projet de programme de
baccalauréat en communications soumis par la
Téléuniversité. Cette dernière procède
actuellement à des collaborations intéressantes avec
l'Université du Québec à Hull et l'Université du
Québec en Abitibi-Témiscamingue, en ce qui concerne
l'enseignement à distance. (16 h 45)
Le rapport Després a aussi formulé des recommandations
importantes concernant le financement de l'Université du Québec
et j'avoue que je n'ai pas été tout à fait insensible aux
remarques de M. le leader parlementaire et porte-parole de l'Opposition tout
à l'heure. Ce rapport soulignait la nécessité de tenir
compte des coûts supplémentaires encourus par les constituantes en
région et par les institutions à vocation particulière
principalement axées sur la recherche, tels l'Institut national de la
recherche scientifique et l'institut Armand-Frappier. Dans le cadre de
l'hypothèse de révision des bases et du niveau de financement des
universités qu'il remettait aux recteurs en octobre dernier, le ministre
proposait une méthodologie pour tenir compte des facteurs
d'éloignement et de petite taille des constituantes régionales.
La direction de l'Université du Québec juge que la proposition du
ministre représente un compromis acceptable. Nous avons aussi transmis,
dans la foulée de ces travaux sur la révision des bases de
financement, des propositions concernant les établissements à
vocation particulière de l'Université du Québec.
L'Université du Québec souhaite que ie gouvernement saura
répondre de façon convaincante aux demandes pressantes de
redressement financier formulées par les universités
québécoises. Non seulement ce redressement est-il
nécessaire pour permettre à l'Université du Québec
et aux autres universités d'accomplir pleinement leur mission de
formation et de recherche, mais aussi pour assurer que le Québec puisse
faire face aux défts des années quatre-vingt-dix dans les
domaines économiques, sociaux et culturels.
Pour en arriver maintenant au projet de loi 63, iI nous paraît
fidèle à la lettre définissant les orientations que le
ministre retenait pour
l'avenir de l'Université du Québec en réponse au
rapport Després. Nous adhérons donc à ce projet de loi
sans réserve. Ce projet vient modifier substantiellement la composition
de l'assemblée des gouverneurs et des conseils d'administration des
universités constituantes. Nous sommes d'accord avec la place
réservée par le gouvernement aux membres
socio-économiques. Un plus grand nombre de membres
socio-économiques assurera une participation plus active de ces derniers
aux travaux de l'assemblée des gouverneurs et des conseils
d'administration. Il permettra au réseau de l'Université du
Québec de profiter plus avant de l'expertise de citoyens et de
citoyennes éminents et dévoués. Cette présence
accrue des membres socio-économiques permettra d'accentuer
l'enracinement de l'Université du Québec au sein de la
société québécoise et dans les régions qui
accueillent des constituantes. Dans ces régions, la présence plus
active de membres socio-économiques permettra aussi de mieux
répondre aux besoins exprimés en matière de formation et
de recherche. Il est certain, par ailleurs, que, dans le choix de ces
représentants du milieu socio-économique, il faudra être
attentif pour s'assurer d'une représentation réellement large des
différents milieux, tant sociaux, culturels et syndicaux que du milieu
strictement économique et des affaires.
Le gouvernement procédera à la nomination des membres
socio-économiques selon un processus qui sera établi par le
ministre et qui comportera, nous le souhaitons, une consultation formelle de
l'Université du Québec et des établissements
concernés. En ce qui concerne les chefs d'établissements, le
gouvernement entend conserver le pouvoir de nomination que lui confère
la loi. L'Université du Québec accepte la décision du
gouvernement à cet égard. Nous convenons qu'il s'agit là
d'un exercice exigeant et rigoureux qui commande, de la part de
l'Université du Québec, du ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science et du gouvernement, une discipline
particulière. Toutefois, avec sa loi constitutive, c'est par ce
processus de nomination que l'Université du Québec peut afficher
le caractère d'université publique qui est le sien.
L'équilibre proposé entre les différents groupes
représentés au sein de l'assemblée des gouverneurs et des
conseils d'administration nous apparaît sain. Il ramène à
des proportions plus raisonnables la participation des membres en provenance de
l'université même. Une présence plus forte de
l'administration de l'université s'avérait utile au moment de la
création de cette dernière. La maturité maintenant
atteinte par le réseau de l'Université du Québec lui
permet d'élargir à un éventail plus grand d'hommes et de
femmes les instances décisionnelles appropriées.
Plusieurs Intervenants ont souligné que, malgré qu'ils
dispensent un peu plus de la moitié des cours offerts par
l'Université du Québec, les chargés de cours ne
bénéficient d'aucune représentation formelle au sein de
ses instances décisionnelles. Les syndicats représentant les
chargés de cours ont, en particulier, demandé à de
multiples reprises d'être représentés à ces
instances. Présentement, les chargés de cours peuvent assister
aux délibérations des conseils d'administration de plusieurs
universités constituantes à titre d'observateurs La direction de
l'Université du Québec n'aurait pas d'objection, si telle
était la volonté du législateur, à assurer aux
chargés de cours une représentation au sein de l'assemblée
des gouverneurs et au sein des conseils d'administration de nos six
universités constituantes à vocation générale. Il
nous semble que, pour les établissements à vocation
spécialisée, cette représentation ne serait pas
pertinente. La représentation formelle des chargés de cours aux
instances appropriées permet, de manière tangible, de
reconnaître la contribution de plus en plus importante que les
chargés de cours apportent à l'université dans
l'accomplissement de sa mission.
Depuis plusieurs années, l'Université du Québec
à Montréal souhaitait, en raison de la place qu'elle occupe dans
le réseau de l'Université du Québec et du rôle
qu'elle entend jouer dans la région montréalaise où elle
se retrouve avec d'autres institutions universitaires, se voir
reconnaître une marge de manoeuvre plus marquée au sein de
l'Université du Québec. Les premières balises furent
posées en 1984 pour apporter un règlement satisfaisant au litige
entre l'Université du Québec à Montréal et
l'Université du Québec. Le président de
l'Université du Québec et le recteur de l'Université du
Québec à Montréal, MM. Gilles Boulet et Claude Pichette,
convenaient d'un premier protocole sur le statut particulier de l'UQAM, que
l'assemblée des gouverneurs devait approuver par la suite. Une demande
de modification à la loi fut adressée au ministre de
l'époque qui n'eut malheureusement pas de suite. C'est le projet de loi,
bien sûr, qui n'eut pas de suite. En septembre 1987, un second protocole
fut convenu entre le président Boulet et le recteur de
l'Université du Québec à Montréal, M. Claude Corbo,
et approuvé par l'assemblée des gouverneurs en octobre 1987.
Cette nouvelle entente survint pendant la période où le ministre
procédait à l'étude du rapport Després. Nous
constatons avec satisfaction que le projet de loi 63 constitue une confirmation
par les autorités gouvernementales et législatives de l'entente
intervenue alors entre le président de l'Université du
Québec et le recteur de l'Université du Québec à
Montréal.
En vertu du projet de loi 63, l'Université du Québec
à Montréal pourra bénéficier du statut
d'université associée. Ce statut lui conférera le pouvoir,
premièrement, de décorner sus propres grades, diplômes ou
certificats universitaires; deuxièmement, de conclure avec tout
établissement d'enseignement ou de recherche tout accord qu'elle jugera
utile à la poursuite de ses fins;
troisièmement, de recommander au ministre la nomination de son
recteur; quatrièmement, de désigner parmi les vice-recteurs le
remplaçant du recteur en cas d'incapacité ou d'absence
temporaire.
En plus des pouvoirs qui lui sont conférés par le projet
de loi, l'Université du Québec à Montréal, en vertu
de l'entente approuvée par l'assemblée des gouverneurs,
premièrement, pourra participer de plein droit aux organismes regroupant
des établissements universitaires et assurer pour ses propres fins sa
représentation auprès des organismes gouvernementaux publics,
parapublics et privés; deuxièmement, se verra accorder par
l'Université du Québec un financement établi selon les
règles fixées par le ministère, moins les
prélèvements consentis pour les services communs. À cette
fin, l'UQAM pourra transmettre aussi directement au ministère ses
prévisions budgétaires, ses états financiers et son
rapport annuel d'activités; enfin, l'UQAM contribuera à
l'établissement d'un fonds consacré au développement
académique du réseau de l'Université du Québec.
L'ensemble de ces dispositions permettra d'assurer à
l'Université du Québec à Montréal la reconnaissance
de la place particulière qu'elle occupe dans le réseau de
l'Université du Québec et de lui conférer une marge de
manoeuvre nécessaire pour lui permettre de jouer un rôle de plus
en plus présent dans la communauté montréalaise
auprès des autres Institutions qui y oeuvrent. De plus, cette
disposition assure la participation libre et active de l'UQAM aux
activités de coordination et de concertation nécessaires à
la vie universitaire en réseau et aux projets communs de consolidation
et de développement de l'Université du Québec.
Le projet de loi 63 vient aussi corriger une lacune importante du texte
actuel de la loi en permettant à l'assemblée des gouverneurs de
désigner un vice-président pour remplacer le président en
cas d'incapacité ou d'absence temporaire. L'assemblée des
gouverneurs pourra aussi désigner, de façon analogue, un
vice-recteur pour remplacer le recteur d'un établissement dans une
situation semblable.
Le statut d'université associée accordé à
l'Université du Québec à Montréal et les pouvoirs
qui s'y rattachent demandent que certaines modifications techniques soient
apportées à fa loi actuelle. Pour éviter toute
ambiguïté entre le pouvoir de l'UQAM de décerner tous
grades, diplômes et certificats universitaires et la
responsabilité de l'assemblée des gouverneurs d'adopter les
programmes d'études, i est nécessaire d'amender l'article 4 pour
préciser le pouvoir de l'assemblée des gouverneurs d'adopter ces
programmes. Cette modification ne vient que confirmer le rôle que
l'assemblée des gouverneurs joue en cette matière depuis la
création de l'Université du Québec. Certains ont cru voir
dans cet ajout à la Loi sur l'Université du Québec un
danger de centralisation excessive dans le domaine académique à
la corporation centrale, au siège social. Je pense qu'il est important
de bien comprendre que cet ajout à la loi ne vient que confirmer la
réalité vécue à l'Université du
Québec depuis 20 ans. C'est parce que l'UQAM, dorénavant,
décernera elle-même ses grades, diplômes et certificats
qu'il est important de spécifier que, par ailleurs, les programmes
conduisant à ces grades et leur contenu demeurent placés sous la
responsabilité de l'Université du Québec comme
réseau.
Il est aussi nécessaire de modifier les articles 17 et 19 de la
loi actuelle pour permettre à l'assemblée des gouverneurs et au
conseil des études d'adopter des règlements applicables à
une seule institution. La loi actuelle ne permet que l'adoption de
règlements dits généraux applicables à l'ensemble
des constituantes. Sans cette modification, l'Université du
Québec ne pouvait pleinement donner suite à certains pouvoirs se
rattachant au statut d'université associée conféré
à l'UQAM, car il nous faudra, en effet, une fois la loi adoptée,
procéder, à l'intérieur de l'Université du
Québec, a l'adoption d'un règlement particulier en ce qui
concerne l'Université du Québec à Montréal.
Cependant, il n'est aucunement dans l'intention de la direction de
l'Université du Québec de procéder à l'adoption de
règlements visant de façon particulière l'un ou l'autre de
nos établissements. Ce changement à la loi ne vise qu'à
permettre à l'Université du Québec de se donner un
règlement particulier pour l'UQAM et notre intention, pour toutes les
autres matières, est de nous en tenir à des règlements
généraux. J'ai noté la réaction de M. le ministre
tout à l'heure et nous serions, nous aussi, tout à fait d'accord
pour que cette formulation soit revue, puisqu'elle suscite des
Inquiétudes, de façon à bien traduire les objectifs que
nous poursuivons et qui sont limités, je le répète, tout
à fait au statut particulier d'université associée
accordé à l'UQAM.
Au-delà de ces commentaires, finalement, nous souhaiterions
soumettre au législateur des propositions de modifications
additionnelles à la Loi sur l'Université du Québec. Ces
modifications, de nature technique, permettraient, à notre avis, de
rendre certains articles de la loi plus conformes à l'évolution
de la situation de l'Université du Québec.
Premièrement, les articles 12 et 37 de la loi actuelle indiquent
que les vacances à l'assemblée des gouverneurs et au conseil
d'administration sont comblées pour la durée non
écoulée du mandat concerné. En raison du nombre important
de nominations que doit faire le gouvernement à l'échelle du
réseau de l'Université du Québec, il arrive
fréquemment que des vacances surviennent en cours de mandat et que les
procédures suivies pour assurer le remplacement d'un membre
démissionnaire ne laissent que peu de temps de la portion non
écoulée du mandat, tel que le prévoit la loi. Cette
situation oblige à procéder simultanément parfois à
une demande de renou-
vellement du mandat de ta personne ainsi nommée. Nous croyons
qu'il serait plus simple et plus respectueux pour les personnes
concernées qu'elles puissent être nommées pour la pleine
durée d'un mandat.
Par ailleurs, l'article 14 de la loi concernant la nomination des
vice-présidents pourrait être modifié, si on le juge
opportun, pour tenir compte de la situation actuelle où l'on retrouve
à la haute direction de l'Université du Québec un
vice-président à l'enseignement et à la recherche, un
vice-président à la planification et un vice-président
à l'administration.
Troisièmement, dans le même esprit, les articles 15 et 16
de la loi actuelle pourraient être modifiés - et il s'agit
là, à notre avis, d'une modification plus importante que la
précédente - pour clarifier le pouvoir de l'assemblée des
gouverneurs de confier par règlement au président ou à un
membre de la direction de l'université, aux conditions qu'elle
détermine, l'autorisation de signer des contrats et des engagements
d'administration courante, ainsi que la possibilité pour
l'assemblée des gouverneurs de déléguer certains pouvoirs
au comité exécutif. (17 heures)
Quatrièmement, l'article 56 de la loi actuelle prévoit que
les articles 17 et 19, et 41 à 47, s'appliquent mutatis mutandis aux
instituts de recherche et aux écoles supérieures institués
en vertu des articles 50 et 57. Nous constatons que l'article 40, qui
prévoit que l'administration courante d'une université
constituante relève d'un comité exécutif, ne s'applique
pas dans le cas des établissements à vocation
particulière. Nous croyons que l'article 40 devrait s'appliquer dans le
cas de l'École nationale d'administration publique, de l'École de
technologie supérieure, de l'institut Armand-Frappier, de l'Institut
national de la recherche scientifique et, éventuellement, de la
Télé-université. L'existence Inscrite dans la loi d'un
comité exécutif donnera plus de poids à un tel organisme
de façon que ces établissements ne soient pas traités
différemment des universités constituantes à cet
égard.
Nous croyons, M. le Président, que les modifications ainsi
proposées sont de nature plutôt technique et ne remettent pas en
cause le principe du projet de loi 63 adopté à l'unanimité
par les membres de l'Assemblée nationale L'Université du
Québec remercie M. le ministre et les membres de la commission
parlementaire de l'occasion qui lui est fournie de témoigner de son
appréciation du projet de loi 63 et de formuler quelques amendements qui
permettraient de bonifier le texte actuel de la Loi sur l'Université du
Québec. Merci.
Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M. Hamel.
Je veux juste rappeler aux membres de la commission qu'il est 17 heures. Il
reste une heure exactement, donc, 30 minutes de chaque côté. La
parole est maintenant à vous, M. le ministre de l'Éducation, de
l'Enseignement su- périeur et de la Science.
M. Ryan: M. le Président, je voudrais, tout d'abord,
remercier M. Hamel du mémoire qu'il vient de nous présenter au
nom de l'Université du Québec. Je voudrais également
adresser des salutations cordiales aux personnes qui accompagnent M. Hamel, aux
principaux collaborateurs de la direction de l'Université du
Québec et également au recteur de l'Université du
Québec à Chicoutimi, M. Hubert Laforge, qui fait partie de la
délégation. Il nous fait grandement plaisir de vous retrouver
pour le début des auditions publiques de la commission parlementaire sur
le projet de loi 63. Je vous remercie de l'apport constructif que votre
mémoire fait à notre démarche.
Je suis un petit peu gêné, à ce moment-ci, parce
que, comme vous le savez, les hommes politiques, en général,
n'aiment pas les éloges. Je vois que vous avez respecté ce souci
qui nous honore. Mais vous avez énuméré tellement de
choses faites ou en marche que j'ai trouvé que c'était encore
plus précieux que n'importe quel éloge général. Je
suis sûr que l'Opposition n'a pas été sans remarquer que la
lettre de mai dernier, même si elle était peut-être un petit
peu longue, n'était pas Inutile, parce qu'elle touchait beaucoup de
sujets de très haut intérêt pour l'Université du
Québec.
Il m'a plu de constater, en lisant le mémoire que vous nous avez
remis pour cette séance, que vous avez fait le point de manière
très intéressante sur le travail accompli au cours des derniers
mois. Le mémoire que vous avez présenté illustre mieux que
toute parole qui pourrait provenir de ma bouche le très vif
intérêt que le gouvernement a porté, depuis 3 ans, au
travail de l'Université du Québec. Cet intérêt est
allé peut-être un petit peu trop loin, à certains moments.
Il est allé jusqu'à vous donner l'ancien directeur de cabinet du
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, qui vous
accompagne dans les arrière-bans. Je pense que ce changement, qui nous a
fait de la peine de notre côté pour le gouvernement, mais qui nous
a réjouis pour l'Université du Québec, était le
fruit du travail de collaboration qui s'est produit au cours des mois
précédents. Les personnes en viennent à se connaître
dans ces expériences il n'y avait pas, d'un côté, des gens
qui revendiquaient ou critiquaient et, de l'autre, des gens qui essayaient de
les empêcher d'agir; il y avait une commune volonté de faire
progresser l'Université du Québec et |e pense que toutes les
choses qui sont décrites dans le mémoire illustrent cette
volonté, mieux que n'importe quel propos que nous pourrions tenir.
Je souligne, cependant, un point que vous avez mentionné et qui
m'a particulièrement réjoui ces derniers temps. On sait que le
problème de l'École de technologie supérieure
traînait dans le paysage depuis longtemps. Cela avait été
parti sur une patte de travers. Je ne blâme pas ceux
qui étaient là à l'origine, parce que c'est plus
facile des fois d'y voir clair quinze ans après qu'au début, mais
il y avait un problème qui traînait dans le paysage depuis
longtemps: le statut des diplômes de l'École de technologie
supérieure. Et vous avez dit tantôt que vous avez travaillé
fort pour essayer de résoudre ce problème, en ce qui touche
l'Université du Québec. Il me fait plaisir d'ajouter que nous
avions également vu à ce que le travail se fasse du
côté des corps professionnels concernés, en particulier de
la corporation qui réunit les diplômés de l'École de
technologie supérieure et de la Corporation des ingénieurs du
Québec. Grâce au travail de dialogue, de collaboration que nous
avons favorisé, ce qui donne une autre preuve de la valeur efficace du
travail de persuasion en démocratie, tous ces éléments se
retrouvent aujourd'hui autour d'une solution qui sera acceptable pour tous et
qui permettra aux diplômés de l'École de technologie
supérieure qui sont déjà sur le marché du travail
de recycler leur formation, de la compléter, de manière à
avoir accès à tous les avantages et privilèges de
l'ingénieur professionnel, et qui assurera, en cette matière de
statut professionnel, une égalité et une dignité de statut
aux diplômés de l'école, ce qui sera très
appréciable pour eux. Cela impliquait, évidemment, une
participation de l'Université du Québec et des
réaménagements d'ordre académique et administratif qui
sont déjà très avancés. Je souligne ce point, parce
que je pense qu'il illustre mieux que tout autre, si ce n'est
déjà fait par le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui,
le climat de collaboration constructive qui s'est institué entre le
gouvernement et l'Université du Québec.
Je ne veux pas entrer dans la voie qu'indiquait tantôt
l'intervention du député d'Abitibi-Ouest, c'est-à-dire la
question du financement universitaire, parce que nous y viendrons à
l'occasion de l'étude très prochaine des crédits du
ministère de l'Enseignement supérieur et aussi, je
l'espère, du prochain discours sur le budget. Je ne pense pas que nous
pourrons éclairer beaucoup cette question aujourd'hui - vous y avez fait
allusion dans votre intervention et je l'apprécie - mais il est
évident que le projet de loi que nous voulons adopter à cette
session ne préjuge en rien de la réponse que le gouvernement
apportera à la requête qui nous a été
présentée concernant le statut de l'UQAM pour fins de
financement. Il a été bien convenu, quand nous avons
décidé de présenter le projet de loi, que cette question
se réglait à l'intérieur de l'UQAM, suivant les voies de
financement générales prévues par le gouvernement pour les
universités, mais nous ne sommes pas opposés à des
discussions ultérieures qui pourraient contribuer à créer
une situation encore plus intéressante pour tous.
Cela étant dit, vu que l'Université du Québec est
favorable au projet de loi non seulement dans son ensemble, mais aussi dans la
plupart de ses dispositions particulières, je ne veux pas
m'étendre longuement. J'ai remarqué - et je veux que ça
soit bien clair; vous me corrigerez, M. Hamel, si j'ai fait erreur
là-dessus - à propos de deux articles qui créent des
difficultés spéciales, surtout du côté des syndicats
de professeurs, c'est-à-dire les articles 7 et 8 qui modifient les
articles 17 et 19 de la Loi de l'Université du Québec, que vous
avez dit tantôt que vous ne seriez pas opposés à une
formulation qui viserait à effacer ou, à tout le moins, à
atténuer considérablement les appréhensions dont on nous a
fait part au sujet du pouvoir arbitraire ou capricieux que pourrait s'attribuer
la direction de l'Université du Québec en raison du
libellé actuel. Alors, j'aimerais peut-être que vous nous
expliquiez plus exactement votre position sur cette question soulevée
par les nombreux organismes que nous entendrons au cours des prochains
jours.
M. Hamel (Claude): D'accord, M. le ministre. Ces objections ont
été également portées à notre connaissance,
à l'intérieur de l'Université du Québec,
principalement par des groupes de professeurs, mais aussi par les directions de
certains de nos établissements. La formulation qui est dans le projet de
loi ne vient pas de nous. Cette formulation vient des juristes
spécialistes de ces questions à l'intérieur du
gouvernement. Ils nous ont proposé cette formulation comme étant
la seule voie par laquelle on puisse permettre à l'Université du
Québec d'adopter un règlement particulier pour
l'Université du Québec à Montréal. Notre intention,
notre besoin est de pouvoir adopter un règlement particulier pour
confirmer de notre côté le statut d'université
associée de l'UQAM. Nous n'avons pas d'autre besoin, nous n'avons pas
d'autre intention que celle-là.
M. Ryan: Je vous remercie beaucoup. Je pense que votre
réponse clarifie cette question. En ce qui touche le gouvernement, nous
verrons à chercher, en consultation avec vous - et nous consulterons les
autres organismes qui se présenteront devant la commission sur le
même sujet - une formule qui permettrait de tenir compte de la
difficulté qu'on nous a présentée avec assez de
vraisemblance.
A la fin de votre mémoire, vous émettez le voeu que
d'autres articles de la Loi sur l'Université du Québec soient
examinés à l'occasion de l'exercice que nous faisons. Vous
soulevez en particulier la possibilité de modifier les articles 12 et 37
de la Loi sur l'Université du Québec pour faire en sorte que,
lorsqu'une vacance surgit au sein de l'assemblée des gouverneurs, par
exemple, et du conseil d'administration d'un établissement, la
nomination qui est faite vaille pour ta durée d'un mandat
régulier plutôt que seulement pour la durée qui restait
à écouler du mandat qui a pris fin d'une façon
particulière. Nous allons consulter nos conseillers sur ce
point, mais je trouve que votre proposition est pleine de sens. C'est
gênant pour nous d'inviter une personne à faire partie du conseil
d'administration d'une institution pour six mois ou trois mois, par exemple. En
générai, nous allons plutôt être enclins à
négliger un devoir qui nous incombe de procéder à une
nomination, en nous disant que c'est peut être mieux d'attendre que la
période soit écoulée. Je pense qu'une disposition comme
celle-ci, si elle ne présente pas de difficulté juridique par
rapport à une politique générale du gouvernement en ces
matières, peut être examinée avec intérêt et
je pense bien qu'on devrait être capable d'y donner suite.
La modification proposée concernant les vice-présidents
peut être examinée également. Il y aura peut-être
moyen de trouver une formulation souple qui laisserait un peu de marge pour
l'avenir, tout en tenant compte de la situation actuelle. C'est évident
qu'il y a un changement qui s'impose parce que, même dans les termes ici,
il y a des incompatibilités entre le libellé actuel et la
situation réelle. Je pense qu'il faudra laisser un peu plus de latitude
à l'Université du Québec en ces choses. On va examiner
sérieusement la possibilité de tenir compte du point de vue
émis dans votre mémoire.
Vous demandez qu'aux articles 15 et 16 de la loi actuelle nous
procédions à une modification pour clarifier le pouvoir de
l'assemblée des gouverneurs de confier par règlement au
président ou à un membre de la direction de l'Université
du Québec l'autorisation de signer des contrats et des engagements
d'administration courante. Pourriez-vous expliquer cette recommandation que
vous présentez, peut-être en résumant l'article actuel que
vous voulez modifier et en indiquant plus clairement l'ajout dont vous voulez
nous entretenir?
M. Hamel (Claude): M. le ministre, un mot et je vais demander
à mon collègue, M. Nadeau, de vous donner une réponse plus
détaillée. L'un des objectifs, c'est de nous permettre de donner
au comité exécutif du réseau de l'Université du
Québec un peu plus de pouvoirs. Actuellement, ce comité
exécutif, prévu par la loi, dispose de peu de
responsabilités en termes d'administration courante, ce qui nous
amène à traiter à l'assemblée des gouverneurs des
dossiers que nous jugeons d'administration courante. La lourdeur de
l'organisation de l'assemblée des gouverneurs ne nous permet pas
toujours de réagir aussi rapidement que nous le voudrions sur certains
dossiers.
Mais, au-delà de ça, au strict plan juridique, je
demanderais à M. Nadeau de vous donner une explication plus
technique.
M. Nadeau (Pierre): Au-delà des pouvoirs du comité
exécutif pour lesquels il existerait une disposition dans la loi
actuelle par laquelle on pourrait accroître par décision de
l'assemblée des gouverneurs les pouvoirs du comité
exécutif - ce qui poserait quand même un problème de
concordance, parce que les pouvoirs du comité exécutif dans la
loi actuelle doivent se comprendre dans le sens de l'administration courante et
cela de façon assez spécifique - il y a le pouvoir de
déléguer à des officiers de l'université des
tâches de signature ou d'autorisation de documents pour des actes que,
dans te cours normal des affaires, on n'imagine même pas confier à
un comité exécutif, mais qui sont d'utilité tellement
courante qu'il faut les déléguer à des officiers, soit
à des vice-présidents ou à des personnes responsables de
signature de certains documents ou d'engagement de personnel de nature
contractuelle. (17 h 15) il y a, dans les lois qui traitent des pouvoirs
à l'intérieur des ministères, des dispositions analogues
qui permettent une forme de délégation à des officiers ou
à des personnes qui sont désignées par les lois. Cette
procédure de droit administratif, je pense, n'était pas tellement
courante lors de l'adoption initiale de la Loi sur l'Université du
Québec, en décembre 1968, et les correctifs de droit
administratif sont venus après, dans les formes de
délégation à des officiers des ministères. Je pense
que, de façon analogue, il s'agirait de corriger une lacune dans notre
loi afin de procéder à cette forme de
délégation.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien, M.
Nadeau. M. le ministre, voulez-vous réagir?
M. Nadeau: Excusez-moi, je pense qu'il y a un texte
précis, un projet de papillon, qui vous a déjà
été transmis.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien. M. le
ministre.
M. Ryan: SI je comprends bien, le comité exécutif a
déjà la responsabilité de l'administration courante de
l'université et il exerce aussi les autres pouvoirs qui lui sont
conférés par règlement de l'assemblée des
gouverneurs. De ce point de vue, je ne crois pas qu'il y ait de
problème. Ce que vous visez, c'est la délégation de
certains pouvoirs à une personne particulière, soit le
président, soit le vice-président exécutif, si Je
comprends bien.
M. Nadeau: C'est cela.
M. Ryan: C'est ce que vous voudriez. il faudra en faire la
démonstration. On va demander des précisions sur ce point. Il
faudra qu'on vérifie Jusqu'à quel point cela se fait dans
d'autres organismes assimilables et, s'il y a déjà une pratique
qui justifie l'Inclusion dans le projet de loi d'une disposition comme
celle-ci, nous pourrons l'examiner. Je ne suis pas en mesure de fournir de
réponse aujourd'hui, mais
nous allons l'examiner attentivement. Est-ce que cela va
là-dessus?
M. Nadeau: Oui.
M. Ryan: D'autre part, vous souhaitez que l'article 40,
prévoyant que l'administration courante d'une université
constituante relève d'un comité exécutif, puisse
également s'appliquer aux établissements à vocation
particulière. C'est un point qui ne m'avait pas frappé
jusqu'à maintenant, mais je pense que c'est nécessaire. Nous
avons vécu des événements au cours des derniers mois qui
l'établissent clairement et soyez assurés que nous allons
examiner cette possibilité avec beaucoup d'intérêt. Je
pense que, pour l'instant, cela dispose des questions que je voulais
poser. Peut-être une au sujet de cette recommandation qui nous a
été faite concernant l'inclusion d'un article relatif à la
liberté d'enseignement et de recherche. Est-ce qu'il y a une
réaction de l'Université du Québec?
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M. le
président. M. Hamel?
M. Hamel (Claude): Je vais demander à mon collègue,
M. Leclerc, de répondre.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M.
Leclerc.
M. Leclerc (Michel): M. le Président, il est exact que,
dans les chartes des universités de Montréal et Laval, il y a ces
garanties quant aux libertés d'expression du corps professoral. Il y a
aussi dans ces institutions des conventions collectives qui sont moins
précises que celles que l'on retrouve dans le réseau de
l'Université du Québec. Les conventions collectives que l'on
retrouve dans le réseau de l'Université du Québec, et qui
ont donc force de loi - vous connaissez la valeur des textes de ces conventions
collectives qui sont déposées auprès du ministre du
Travail - garantissent tout à fait ces droits que des professeurs
pourraient demander. Je pense que la direction de l'Université du
Québec n'aurait pas d'objection à ce que, dans un texte de loi,
l'on puisse ajouter ces garanties, appelés garanties fondamentales,
quant à l'exercice de la profession de professeur d'université.
Je vous fais tout simplement remarquer que ce ne serait que reproduire les
textes qui existent dans les conventions collectives. Notamment, vous retrouvez
dans la convention collective des professeurs de l'Université du
Québec à Montréal, à l'article 5, trois paragraphes
très précis là-dessus qui sont beaucoup plus
précis, qui donnent beaucoup plus de garanties aux professeurs quant
à la liberté d'expression que ce que l'on retrouve effectivement
dans la charte de l'Université Laval ou de l'Université de
Montréal. Pour reprendre une expression fort simple, je pense bien qu'on
n'aurait pas d'objection lorsque, pour tenir un pantalon, il y a
déjà une paire de bretelles, d'y ajouter une ceinture, mais il
faut être conscient que c'est de cela qu'il s'agit.
La Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien, M.
Leclerc. M. le ministre, est-ce que vous voulez réagir?
M. Ryan: Non. Pour l'instant, cela va.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien. Je
vais reconnaître maintenant le porte-parole de l'Opposition officielle,
M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: M. le Président, je voudrais en profiter, moi
aussi, pour remercier M. Hamel et son équipe d'avoir pensé qu'il
était utile de présenter un mémoire sur le projet de loi
63 pour nous communiquer leur point de vue, leur réaction. Je vais
prendre moins de temps que le ministre n'en a pris pour vous féliciter
de tous ces nombreux liens d'étroite collaboration qui ont
été établis. D'ailleurs, ce n'est pas vous qui l'aviez
énoncé. Je n'en ai pas vu tant que ça; il en a mis plus
que le client n'en demande, c'est son problème.
Je constate, si je fais un résumé de votre mémoire
- et, selon mes perceptions, c'est exact que vous avez rappelé que tout
ça s'inscrit dans le suivi du rapport Després. J'ai dit la
même chose; il n'y a pas d'incompatibilité là. Je
résume et je vais revenir avec une question. Vous voyez, parce que c'est
un point important de votre mémoire, la présence accrue des
membres socio-économiques comme un moyen d'accentuer l'enracinement de
l'Université du Québec au sein de la société et
dans les régions. Là-dessus, je ne vois pas comment, mais j'y
reviendrai. Mais c'est un point que vous mentionnez. Vous acceptez, bien
sûr, la décision du gouvernement qui conserve le pouvoir de nommer
les chefs d'établissements. Vous n'avez pas d'objection à ce que,
éventuellement, les chargés de cours aient une
représentation au sein des conseils d'administration des
universités constituantes, mais à vocation régionale. Vous
êtes heureux que le projet de loi constate et confirme l'évolution
de l'entente avec le siège social et l'Université du
Québec à Montréal concernant le statut d'université
associée. Vous profitez également de ce mémoire pour faire
des suggestions positives, bonifiantes, selon votre perception des choses, mais
à caractère plus technique, et qui ne sont pas liées aux
questions fondamentales. Voilà comment je résume, en gros, le
mémoire.
Je retiens, cependant, qu'à deux reprises vous avez
souligné, comme je le pense, d'ailleurs - c'est à la page 2 de
votre mémoire - que "l'Université du Québec s'est
acquittée, avec succès croyons-nous, de son mandat". Je suis pas
mal de cet avis. Cependant, si on met ce jugement en relation avec ce que vous
mentionnez à
la page 5, là il y a un problème. La relation très
précise à la page 5, c'est: Pour être en mesure de faire
face aux défis des années quatre-vingt-dix, tant dans les
domaines économiques, sociaux et culturels, et pour assurer pleinement
notre mission de formation et de recherche, on a besoin de redressement
financier.
Même si je reconnais que ce n'est pas le moment - je ne veux pas
le faire parce qu'on aura l'occasion pendant seize heures, imaginez-vous,
d'avoir ce cher ministre présent devant nous pour discuter les
crédits budgétaires - je vais revenir sur la formule de
financement. Je voulais au moins, parce que je ne suis pas encore rendu aux
questions, vous dire que Je suis heureux que, dans le mémoire, vous ayez
mentionné avec raison que le problème du financement du
réseau demeure toujours entier, en tout cas en termes de redressement.
Ce n'est pas parce qu'il y a eu des discussions qui laissent voir que
l'université, le siège social, serait assez d'accord avec la
formule sur laquelle le ministre s'est arrêté pour commencer
à crayonner des chiffres et, éventuellement, les soumettre au
premier ministre et au Conseil du trésor... Parce que j'espère
qu'il y a un bout de fait, jamais je ne croirai, en termes de demande, sur la
base de la formule que vous avez discutée entre vous. Je veux vous dire:
Vous avez bien fait de le rappeler; je suis content que ça figure dans
votre mémoire.
Je passe tout de suite aux questions, M. le Président, parce que
c'est surtout pour ça qu'on va avoir l'occasion de discuter avec vous.
Ma première question porte sur le statut d'université
associée qui est un des éléments Importants du projet de
loi 63. J'aimerais que vous preniez quelques minutes pour m'expliquer - parce
que ce n'est pas mentionné dans votre mémoire, mais c'est une
question très pertinente - si vous avez la conviction que cela met
uniquement un terme à de bonnes et fructueuses discussions qui ont eu
lieu et que non seulement l'UQAM est satisfaite, mais que le problème de
reconnaître que l'UQAM, dans le réseau, a toujours eu une
responsabilité différente, c'est réglé par le
projet de loi 63 et que dans la perspective où tout le monde serait
d'accord là-dessus - ce qui est probablement un voeu pieux, mais
au-delà de ça - on ne se retrouverait pas à court terme
avec une réclamation très formellement poussée d'un statut
d'autonomie complète. Est-ce que cela vous fait peur ou si cela ne vous
dérange pas? Est-ce que, d'après vous, avec un statut
d'université associée, c'est réglé,
l'Université du Québec à Montréal est contente de
cela et vous, vous avez la conviction qu'elle est toujours requise à
l'intérieur du réseau, mais que, pour la conserver sans trop de
tiraillements - parce que je connais un peu son passé, son histoire - il
fallait lui consacrer, une fois pour toutes, un statut d'université
associée, mais avec une bonne laisse qui la maintienne
étroitement liée au réseau?
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M. le
président, M. Hamel.
M. Hamel (Claude): Ce qu'il faut d'abord rappeler, je pense,
c'est que l'entente intervenue entre l'Université du Québec
à Montréal et l'Université du Québec a
été acceptée à l'unanimité par le conseil
d'administration de l'UQAM et à l'unanimité par
l'assemblée des gouverneurs de l'Université du Québec.
Donc, là-dessus, il y a une entente claire, nette et définitive.
Ce qu'il faut rappeler aussi, c'est que l'intégrité
académique du réseau de l'Université du Québec est
maintenue, c'est-à-dire que l'UQAM ne bénéficie d'aucun
statut particulier dans le domaine de l'enseignement et de la recherche si ce
n'est le petit élément qu'elle va décerner ses propres
diplômes. Mais les programmes d'études demeurent des programmes de
l'Université du Québec, l'intégrité
académique est tout à fait préservée et les
collaborations entre l'UQAM et les différentes constituantes de
l'université, tant au plan de l'enseignement et de la recherche, vont
continuer à se développer, d'autant plus que, dans le cadre de
cette entente, nous mettons sur pied un fonds de développement
académique du réseau de l'université qui nous donne des
moyens financiers pour favoriser l'accroissement de ces collaborations.
Il faut bien reconnaître que, dans notre réalité
Interne, nous vivons déjà, depuis un certain temps, cette forme
de statut un peu particulier de l'UQAM. Nous avons pris les devants, par
exemple, pour rétablir, M. y a quelques années, les bases de
financement de l'Université du Québec à Montréal.
Nous avons mis sur pied, cette année, le fonds de développement
académique et l'UQAM, déjà, a fourni, comme il
était prévu dans l'entente, 500 000 $ dans le cadre d'un fonds de
2 000 000 $ pour le développement du réseau. Donc, nous avons
toutes les raisons de croire que les querelles, pourrait-on dire,
constitutionnelles entre l'UQAM et le réseau de l'Université du
Québec étant terminées à la satisfaction des deux
parties, nous pourrons nous asseoir maintenant et travailler ensemble sur les
vraies choses qui touchent l'université, le développement de
l'enseignement et de la recherche, le service à nos collectivités
régionales.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien, M.
le président. M. le critique de l'Opposition officielle.
M. Gendron: il y a une deuxième question que je trouve
très Importante et je vous l'ai laissé voir tantôt. Je vous
avoue que j'aimerais que vous soyez un petit peu plus précis et volubile
sur la prétention de votre mémoire, à la page 6, à
savoir que l'augmentation ou "la présence accrue des membres
socio-économiques permettra d'accentuer l'enracinement de
l'Université du Québec au sein de la société
québé-
coise et dans les régions qui accueillent des constituantes.
"
(17 h 30)
Je vais juste poursuivre un peu. Je vous avoue que je ne suis pas
capable de faire cette adéquation-là. Je ne vois pas du tout
pourquoi - je voudrais que vous me l'expliquiez - vous dites: "Dans ces
régions, la présence plus active de membres
socio-économiques permettra aussi de mieux répondre aux besoins
exprimés en matière de formation et de recherche. " Je comprenais
que ce besoin était parfaitement senti par les constituantes depuis fort
longtemps et je comprends mal que passer de deux ou trois "socio" à
quatre ou cinq, ça aurait, premièrement, comme conséquence
qu'on serait plus sensible à un besoin. Tous ceux que j'ai
rencontrés, en tout cas dans les régions, m'ont toujours dit
qu'ils connaissaient ce besoin-là. Donc, première
réaction, j'aimerais vous entendre là-dessus, mais surtout sur le
jugement que vous portez, à savoir que plus il y a de "socio", plus cela
accentuera l'enracinement de l'université au sein de la
société québécoise et dans les régions,
parce que j'ai de sérieux doutes sur cette allégation. Pour
toutes sortes de raisons normales de cycle de l'économie, de variations
économiques, s'il y a quelque chose qui n'enracine pas beaucoup et qui
n'est pas bien stable, c'est la présence des socio-économiques.
D'ailleurs, on le voit par le roulement et le remplacement de ces
gens-là. Ce qui est souvent plus stable, c'est l'institutionnel,
même si je ne suis pas un vendeur des représentants
Institutionnels du réseau. Il y a aussi toute l'autre
problématique que j'ai laissé voir, la dimension recherche,
enseignement du savoir, mais dans sa notion la plus pure. Et cela signifie
qu'on n'a pas à porter un jugement d'avance pour dire que
l'université doit être axée davantage uniquement sur tel
type de formation ou pas. Là, au lieu de parler, j'aimerais vous
entendre. Sur quoi assoyez-vous ce jugement premièrement et
deuxièmement, la garantie que vous semblez exprimer que plus "socio",
ça égale une meilleure perception que, là, on va en avoir,
enfin, de la formation axée sur les besoins de recherche et de formation
professionnelle, alors que je pensais que le milieu universitaire était
bien collé à cette réalité?
M. Hamel (Claude): Un premier élément de
réponse de nature générale à votre question
découle de l'évolution qu'ont connue les universités au
cours des 20 dernières années. Si on observe la composition des
conseils d'administration des autres universités, on constate
aujourd'hui une présence beaucoup plus forte qu'il y a 20 ans de
représentants du milieu socio-économique. Qu'on regarde
l'Université de Montréal, l'Université McGill,
l'Université Concordia. On sait que l'Université Laval, cette
année, se penche aussi sur cette question et veut ouvrir son conseil de
direction à une représentation beaucoup plus forte de membres
socio-économiques. L'Université du Québec se situe dans
cette perspective également. La composition actuelle a été
définie M y a 20 ans et, comme nous le disons dans le mémoire, il
nous apparaît aujourd'hui que de réduire un peu la
représentation de gens de l'interne pour s'ouvrir mieux au gens de
l'externe, c'est tout à fait approprié.
J'ai également signalé dans la présentation tout
à l'heure que, bien sûr, le choix des personnes est un
élément très important pour favoriser l'atteinte de
l'objectif que l'on poursuit. Nous croyons que nous devons nous assurer d'une
provenance variée de ces gens-là, hommes et femmes, non seulement
du milieu des affaires et du milieu économique, mais aussi des milieux
culturel, syndical et social. Dans les conseils d'administration, au moment
où se discutent les grandes questions de plans de développement
des établissements, d'allocations des ressources, de priorités
à établir, j'imagine que la présence importante de membres
de l'extérieur est susceptible d'apporter des résultats
très positifs et peut-être aussi, dans certains cas, plus
d'objectivité dans les discussions et dans les décisions.
M. Gendron: M. le Président, j'ai écouté
attentivement et je vous avoue que c'est un point de vue qui mériterait,
en tout cas, d'être apprécié, et je n'ai pas
nécessairement d'objection. Là où j'en ai, parce que je ne
change pas ce que j'ai dit, c'est que, si c'était aussi gentil et large
que vous venez de le dire, je n'aurais pas de problème. Mais ce n'est
pas ce que le projet de loi dit. C'est ça, mon drame. Le projet de loi
ne parle pas du tout d'encadrement à la notion de membres
socio-économiques. Il me semble, pour vous avoir entendu, que vous avez
donné une couverture passablement large qui risque de consacrer des gens
qui, effectivement, ont plus d'enracinement dans leur milieu quand cela
embrasse tout ce que vous avez évoqué comme amplitude. Mais on
est dans les nuages, autant vous que moi, parce qu'à partir du moment
où ne sera pas définie et ne sera pas clarifiée la
représentation des femmes, des gens provenant du secteur culturel, du
secteur syndical, du secteur coopératif, je n'ai aucune garantie de
ça. Et n'oubliez pas que je sais à qui j'ai affaire, comme
gouvernement. C'est ça qui est notre drame, à nous. Alors, les
socio-économiques, pour eux, ça peut être assez restreint.
C'est là-dessus, M. le ministre, qu'est mon drame.
Ma deuxième question. Les groupes à l'interne votent dans
l'augmentation du nombre de membres socio-économiques un risque de
déséquilibre dans la composition des instances dirigeantes. Ifs
contestent leur représentativité. Je voudrais pouvoir porter un
jugement sur l'ancienne formule qui était plus précise quant
à la provenance des socio-économiques. Pensez-vous qu'il y aurait
lieu de réintroduire dans le projet de loi une précision qui
permettrait de les
sécuriser - même s) on aura à rediscuter sur le
nombre un peu plus tard - sur la provenance des socio-économiques et
seriez-vous d'accord là-dessus?
M. Hamel (Claude): Dans notre mémoire, nous ne prenons pas
position sur cette question, mais nous signalons que, comme Université
du Québec, nous souhaitons être consultés formellement au
moment du choix de ces personnes, mais nous n'allons pas aussi loin que de
demander que la nécessité de cette consultation soit inscrite
dans la loi. Nous nous fions sur les bonnes relations entre
l'université, le ministre et le gouvernement pour croire que cette
consultation se fera, effectivement.
Le Président (M. Paré): Oui, Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président Messieurs, il me
fait plaisir de vous saluer. Vous allez me permettre, en même temps, de
déplorer l'absence de femmes au sein de votre délégation.
Cela m'amène au sujet qu'abordait mon collègue, M. Gendron, le
député d'Abitibl-Ouest. Dans les dernières nominations que
j'ai vu passer dans les différentes universités du Québec
- pas seulement l'Université du Québec, les universités du
Québec - j'ai peu ou pas vu de femmes; M y a peu de nominations
féminines qui ont été faites. Votre discours touchant les
vertus de l'accroissement de la représentation des
socio-économiques au sein des conseils d'administration m'étonne
un peu parce qu'il vient beaucoup en contradiction avec ce qu'on entend de plus
en plus fréquemment: le danger qui menace nos universités que,
tout à coup, tantôt, la recherche et la formation soient par trop
soumises aux intérêts économiques particuliers du monde des
affaires, avec les conséquences que vous connaissez comme universitaires
sur la recherche et la formation. Alors, il me semble qu'il n'y a pas, dans ces
remarques, suffisamment de vigilance par rapport aux problèmes que
pourrait poser une présence accrue des représentants du monde des
affaires. Et on en a vu passer. Les dernières nominations, celles que
j'ai vues, au moment où je les suivais, venaient beaucoup du monde des
affaires. Si vous me dites qu'en soit, c'est censé mieux enraciner les
universités en région dans le milieu socio-économique,
ça me pose des problèmes et j'ai l'impression qu'on n'a pas tout
à fait la même interprétation. J'oserais dire, bien que je
ne connaisse pas votre philosophie, qu'on n'a peut-être pas, non plus la
même conception du rôle d'une université en région,
qui doit répondre non seulement aux Intérêts
économiques, mais surtout et aussi aux intérêts culturels,
sociaux, au développement de façon générale, pas
seulement au développement économique.
Alors, je voudrais, là-dessus, vous entendre, parce que c'est un
discours... Je relisais tout à fait récemment dans un journal, un
article qui disait que la menace qui plane sur nos universités,
actuellement, où tout ie monde veut, avec moins, faire plus,
c'était qu'on allait provoquer une distorsion dans les orientations et
la mission des universités.
M. Hamel (Claude): Encore deux commentaires, madame. D'abord, en
ce qui concerne l'absence de représentation féminine, je dois
vous dire que j'avais invité mes collègues chefs
d'établissements du réseau, à participer à cette
présentation aujourd'hui et seul M. Laforge, qui, par ailleurs, se
trouvait à Québec, a pu accepter cette invitation. Si d'autres
avaient pu venir, notamment de la région de Montréal, j'aurais eu
plaisir à vous présenter Mme Andrée Roberge que nous avons
nommée, il y a quelques mois, à la direction de l'institut Armand
Frappier.
Mme Blackburn: Je le sais.
M. Hamel (Claude): Par ailleurs, en ce qui concerne votre
préoccupation sur le rôle des conseils d'administration par
rapport à la vie académique d'enseignement et de recherche, il
faut rappeler que dans nos universités, à côté des
conseils d'administration, nous avons des commissions des études
où ne siège personne de l'externe, où se retrouvent des
professeurs, des étudiants et la direction de l'université. C'est
là que se font les débats académiques, c'est là que
se formulent des recommandations qui, de façon très
générale, reçoivent une ratification du conseil
d'administration de l'établissement. En ce qui concerne le réseau
de l'Université du Québec, c'est la même chose. À
côté de l'assemblée des gouverneurs, il y a un conseil des
études qui, lui, est chargé de toutes les questions
académiques et les recommandations, les résolutions du conseil
des études sont simplement ratifiées à l'assemblée
des gouverneurs, de sorte que nous ne reprenons pas là les discussions
en ce qui touche les matières d'enseignement et de recherche. M.
Leclerc.
M. Leclerc (Michel): Peut-être un élément
supplémentaire, madame, si vous le permettez, en réponse à
votre question, peut-être en deux parties. Nous avons de la
difficulté, depuis un certain temps, à avoir pour les nombreux
comités que l'assemblée des gouverneurs et le comité
exécutif créent - comité de vérification,
comité exécutif lui-même et beaucoup d'autres
comités, comité de sélection pour les postes de chef
d'établissement - des membres socio-économiques. Nous avons des
membres socio-économiques actuellement - je pense qu'on a un exemple, M.
Claude Gravel, qui est vice-président d'une compagnie d'assurances bien
connue - qui se plaignent de devoir passer plus qu'une partie raisonnable de
leur temps à l'administration de l'Université du
Québec.
Le deuxième élément par rapport aux craintes que
vous avez, c'est que, dans la loi
actuelle, à l'article 7e, on parle de trois personnes
nommées par le gouvernement "après consultation des associations
les plus représentatives du milieu des affaires et du travail", ce qui
m'apparaît plus limitatif que la formulation qui est dans le projet de
loi 63 où l'on dit: "après consultation de groupes
socio-économiques". A la limite, l'ancienne formulation pourrait exclure
des associations bénévoles, des groupes comme l'AFEAS. L'actuelle
formulation "après consultation de groupes socio-économiques'
nous apparaît plus large.
Mme Blackburn: Une toute dernière question,
peut-être pour mieux nous illustrer ce que cela a
représenté dans le passé et ce que cela nous garantit dans
l'avenir. Dans les socio-économiques des différentes
constituantes et de l'Université du Québec, combien y a-t-il de
femmes? Vous me disiez tout à l'heure que je devrais être
rassurée parce que les questions à caractère
académique relevaient de la commission des études. Il me semble
que c'est le minimum; ce serait bien le reste s'il fallait que cela soit
décidé à un autre niveau. Pour avoir une idée de ce
que cela représente actuellement - on sait qu'il y a 51 % des
étudiants qui sont des étudiantes; elles sont en majorité
actuellement -combien y a-t-il de membres socio-économiques, faisant
partie des différents conseils d'administration des constituantes et de
l'UQ, qui sont des femmes?
M. Hamel (Claude): Mme la députée, je peux vous
donner une réponse en prenant trois cas précis auxquels nous
pouvons référer, compte tenu des personnes présentes.
À l'assemblée des gouverneurs, il y a trois membres
socio-économiques, dont une femme. A l'Université du
Québec à Chicoutimi, M. Laforge pourra y répondre. Je
profite de l'occasion pour vous souligner l'arrivée de M. Claude Corbo,
le recteur de l'Université du Québec à Montréal, et
je lui demanderai aussi de répondre à votre question en ce qui
concerne le conseil d'administration de l'UQAM.
Mme Blackburn: Ce n'est pas une préoccupation. (17 h
45)
M. Laforge (Hubert): Mme Blackburn et chère concitoyenne,
pour ce qui est du conseil d'administration du l'Université du
Québec à Chicoutimi, sur trois membres socio-économiques,
il y a une femme, Mme Georgiev, d'Alma.
Mme Blackburn: C'est mieux qu'à l'Assemblée
nationale. M. Corbo.
M. Corbo (Claude): M. le Président, je salue d'abord les
membres de la commission en m'excusant d'être arrivé si
tardivement. J'ai le regret d'informer la commission que, parmi les membres
socio-écomomiques du conseil d'administration de l'UQAM, il n'y a pas de
femme.
En revanche, sur neuf postes de direction, il y a quatre femmes dont
deux vice-rectrices. À la commission des études de
l'Université du Québec à Montréal, outre le
recteur, siègent la doyenne des études de premier cycle, la
vice-rectrice à l'enseignement et à la recherche, deux femmes sur
les six professeurs membres de la commission des études et
là-dessus, je dois dire que je m'inquiète un peu, les six
étudiants de la commission des études de l'Université du
Québec à Montréal sont six femmes. Nous avons un
problème de représentation à l'inverse.
Mme Blackburn: J'en profite pour féliciter M. le recteur
de l'UQAM. J'ai toujours su qu'il avait su s'entourer. C'est peut-être
pour cela aujourd'hui qu'on a un projet de loi qui le touche
profondément et qui vient améliorer la situation de l'UQAM. Je
voudrais simplement vous dire, messieurs, que ma remarque ne voulait pas
contester votre compétence pour occuper les postes que vous occupez,
mais je m'interroge, cependant, sur une représentation équitable
de votre clientèle féminine et des femmes du Québec de
façon générale - c'était tout simplement cela - et,
évidemment, sur les effets possibles sur la mission des
universités.
Le Président (M. Paré): Oui, M. le
député d'Abitibi-Ouest, en vous rappelant qu'il reste cinq
minutes.
M. Gendron: À l'article 10, les professeurs craignent que
le nouveau libellé de l'article 32 b) n'ait pour effet de les
évincer des postes prévus pour les personnes exerçant des
fonctions de direction. Vous êtes au courant qu'on a changé le
texte. Alors, la question que je vous pose, c'est celle-ci: Pense2-vous que le
nouveau libellé de l'article 32 b) du projet de loi par rapport à
ce qu'il y avait auparavant servira effectivement à nommer des
administrateurs, vice-recteurs ou autres qui ne figurent plus dans la nouvelle
composition?
M. Hamel (Claude): C'est une question qui se pose au niveau des
conseils d'administration des établissements et non au niveau de
l'assemblée des gouverneurs. Le texte de la loi permet cela. Comment
cela se réalisera en pratique, c'est à voir, mais j'aimerais
rappeler, par ailleurs, que nos personnels de direction à l'enseignement
et à la recherche dans les établissements sont fondamentalement
des personnes sorties des rangs du corps professoral et demeurent, à
notre avis, des professeurs.
M. Gendron: Une autre question, toujours dans le temps qui m'est
imparti. Vous avez fait une suggestion que, personnellement, je partage,
lorsque vous avez mentionné à la dernière page de votre
mémoire, la page 10...
M. Ryan: Je vais prendre une note.
M. Gendron: Oui. Ne sortez pas votre calepin noir, vous. Vous
croyez que l'article 40 devrait s'appliquer dans les cas de l'École
nationale d'administration publique, de l'ETS. de l'Institut Armand Frappier et
de l'INRS", et vous avez dit peut être ultérieurement pour la
TELUQ, la Télé-université. Je voudrais savoir pourquoi
cette réserve pour la Télé-université à ce
moment-ci alors qu'il me semble qu'il y aurait une logique selon laquelle ces
Institutions ou ces établissements à vocation particulière
pourraient aussi avoir un comité exécutif.
M. Hamel (Claude): Dans le cas de la
Téléuniversité, c'est pour une raison technique.
Actuellement, la Télé-université n'a pas plein statut
d'établissement autonome parce que la
Télé-université n'a pas de lettres patentes. Donc, elle
est rattachée au siège social de l'Université du
Québec. Nous avons soumis une demande de lettres patentes pour la
Télé-université et le ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science, sur l'avis du conseil des
universités, a jugé opportun de ne pas donner suite
immédiatement à cette demande. Mais nous préparons
actuellement un dossier sur cette question et, une fois que nous aurons
répondu à d'autres interrogations du ministre concernant les
services que nous offrons en région, nous reviendrons à la charge
avec une demande de lettres patentes pour la
Télé-université. À ce moment, cette demande d'un
comité exécutif devrait, bien sûr, être
étendue à la Télé-université.
M. Gendron: Une dernière question, toujours très
courte. Concernant les chargés de cours - il me semble avoir bien
compris votre mémoire - vous n'aviez pas d'objection, mais il y avait
quand même une nuance pour le type d'université. Alors, je
voudrais que vous vous expliquiez en une phrase. Si on profitait de ce projet
de loi pour inclure une présence des chargés de cours,
est-ce que vous seriez tout aussi d'accord avec le projet de loi?
M. Hamel (Claude): Oui. Sur les chargés de cours, ce que
nous avons à l'esprit, c'est d'ajouter un chargé de cours
à l'assemblée des gouverneurs, un chargé de cours aux
conseils d'administration des constituantes à vocation
générale. Cela va bien, parce que des chargés de cours
sont présents dans les constituantes à vocation
générale. Dans nos constituantes à vocation
spécialisée, à l'INRS, il n'y en a pas de chargés
de cours dans le personnel, à l'institut Armand-Frappier non plus,
à la Télé-université non plus. À
l'École nationale d'administration publique, c'est un autre type de
statut. La question ne se pose pas aux autres endroits; c'est dans les
constituantes à vocation générale qu'elle se pose.
Le Président (M. Paré): Merci. M. le ministre.
M. Ryan: J'aurais peut-être une question pour M. Laforge.
Comme il représente ici une université en région,
j'aimerais lui demander - je le fais à dessein parce que j'avais
déjà eu certains échos de réactions qui pouvaient
venir de l'Université du Québec à Chicoutimi - comment il
réagit dans ta perspective d'un statut d'associée pour
l'Université du Québec à Montréal. Quelles peuvent
être les répercussions de ce statut pour l'équilibre du
réseau que constitue l'Université du Québec? Quels sont
les problèmes qu'il faudra surveiller pour éviter que ça
ne conduise, comme on l'a déjà prétendu, nous autres,
à propos d'autres formules d'États associés, à la
séparation pure et simple?
M. Laforge: Mon sentiment personnel, M. le ministre, sans doute
partagé par certains collègues, c'est qu'on observe
l'éloignement partiel de l'UQAM du réseau de façon neutre,
parfois de façon un peu négative, en se demandant ce qui a bien
pu amener une constituante à souhaiter se retirer du réseau. Sans
faire une analyse en profondeur et sans reprendre l'histoire, je me permets
d'exprimer le souhait que le réseau soit ou évolue vers ce qu'on
pourra appeler un consortium d'universités. Je pense que la direction,
le président, les vice-présidents ont, à plusieurs
reprises, exprimé un désir dans le même sens, que le
réseau, se sente plus fort parce que réseau, plutôt que
d'être en présence de constituantes qui souhaitent plus ou moins,
à court ou long terme, leur autonomie.
Un mot a été employé à l'occasion, celui de
maturité, pour justifier à une certaine instance le geste qui
serait posé éventuellement par la modification de la loi. Je vous
assure que, dans les régions, être jugé comme non
suffisamment matures encore pour arriver à un statut donnant une
certaine autonomie, cela en a vexé et blessé plusieurs.
J'espère que ça ne fait aucunement partie des considérants
qui ont mené au statut d'université associée pour l'UQAM
et qu'au contraire cela lui permettra, dans le cadre montréalais, de
mieux évoluer, de mieux se développer.
Mais, je répète ce que je disais au départ: Le
souhait est très fort pour que le réseau soit un véritable
consortium et même j'ose exprimer le désir qu'un Jour on voie
apparaître une candidature, de l'extérieur du réseau,
à faire partie du réseau, tellement c'est intéressant de
travailler en collaboration.
M. Ryan: Merci.
La Président (M. Paré): Alors, comme les discussions et le
temps qui nous était Imparti sont terminés, je veux, au nom de
tous les membres de la commission, remercier les gens de l'Université du
Québec pour la présentation de leur mémoire et la
discussion fructueuse qu'ils ont eue avec les membres de la commission.
Messieurs les membres de la commission, Je
voudrais vous rappeler que les travaux vont reprendre à 20 heures
et que nous allons entendre les représentants de la
Fédération des professeurs d'universités du Québec.
Alors, là-dessus, les travaux sont suspendus jusqu'à 20
heures.
(Suspension de la séance à 17 h 55)
(Reprise à 20 h 18)
Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Toujours avec le même mandat, j'ai un changement dans la
composition de la commission. M. Forget (Prévost) va remplacer M. Hamel
(Sherbrooke).
Nous allons maintenant entendre la Fédération des
professeurs d'universités du Québec. Je vous souhaite la
bienvenue à la commission. Je vous rappelle que nous avons une
discussion qui dure 60 minutes, en vous invitant à laisser un peu de
temps aux membres de la commission pour discuter avec vous. Donc, si vous
pouviez faire une présentation d'à peu près 20 minutes,
ça nous permettrait d'avoir ensuite 20 minutes de discussion avec
chacune des formations politiques.
Je vous souhaite la bienvenue. Je vous invite à nous
présenter votre mémoire, M. Leblond, et à nous
présenter les personnes qui vous accompagnent.
Fédération des professeurs et professeures
d'universités du Québec
M. Leblond (André): Merci, M. le Président. Je
voudrais, tout d'abord, remercier les parlementaires de nous avoir donné
l'occasion de participer à cette commission démocratique. Je
veux, tout d'abord, vous présenter les membres de notre
délégation. À ma droite, M. Joseph B. Mathieu,
secrétaire de la fédération et professeur à
l'Université du Québec à Chicoutimi; M. Claude Boucher de
l'INRS-Énergle, professeur-chercheur; à ma gauche, M. Enrique
Colombino, qui est professeur à l'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue.
Notre fédération représente trois syndicats de
professeurs comme vous avez pu le voir: Chicoutimi, l'INRS et Abitibi.
Vous me permettrez de résumer considérablement notre
mémoire. De grandes parties vont être passées rapidement
étant donné que d'autres mémoires de professeurs ont
repris un certain nombre d'éléments sur ce sujet.
A la suite du rapport Després, la plupart des syndicats du
réseau UQ ont produit des mémorandums ou des résolutions
en réaction audit rapport. L'Intersyndicale des professeurs des
universités québécoises produisait le 30 octobre 1987 une
série de résolutions à ce sujet et le SPUQAC transmettait
au ministre un mémorandum le 9 octobre 1987. Enfin, M. Ryan, dans une
lettre de dix-sept pages, adressée au président de CUQ, prenait
position sur le rapport Després. Il semble bien que le ministre a
surtout tenu compte des interventions de l'assemblée des gouverneurs
jusqu'à maintenant.
On en a la preuve avec le projet de loi 63 dont les grandes lignes sont
les suivantes. Les pouvoirs du siège social sont modifiés pour
faire place à la notion de règlements applicables à une
université constituante, à une école supérieure ou
à un institut de recherche. Ainsi, l'assemblée des gouverneurs
pourra, entre autres, décider de la composition et du mode de
fonctionnement de comités, de commissions ou autres d'une constituante
et de la pertinence de l'existence d'un service ou d'un autre en son sein. Elle
pourra également établir la façon d'engager le personnel
de soutien et les professionnels de toute catégorie et, par
conséquent, en fixer le nombre dans tel ou tel service,
déterminer les critères de leur engagement, ainsi que ceux de la
firme comptable susceptible, à son avis, de mieux étudier les
livres des constituantes.
De plus, deuxième point majeur, le siège social se voit
accorder le pouvoir d'adopter des programmes d'études et une
nomenclature des grades, diplômes ou certificats universitaires, ce qui
est différent de la situation actuelle. En fait, c'est l'autonomie
déjà partielle des constituantes qui est remise en cause.
L'assemblée des gouverneurs pourra donc imposer sa réglementation
spécifique selon les conjonctures et les rapports de forces, la force,
bien sûr, étant légalement de son côté. Par
exemple, qui empêchera l'assemblée des gouverneurs
d'établir sa propre procédure de nomination des vice-recteurs et
des autres cadres universitaires? Qui l'empêchera d'exercer un
contrôle absolu sur les négociations des conventions collectives,
de désigner les recteurs de son choix sans consulter les professeurs, de
mettre sous sa tutelle l'administration d'une université, de
décréter l'existence ou non, de même que le contrôle
des centres hors campus? La concertation étant remplacée par la
coercition, qui l'empêchera de décréter que tel ou tel
programme sera assuré ou non localement? La spécialisation des
universités au détriment des étudiants et des
régions ne sera-t-elle pas le nouvel évangile?
Nous avons eu l'occasion aujourd'hui d'entendre d'autres sons de cloche
par rapport au statut de l'UQAM. Nous croyons que le statut de l'UQAM ne
nécessitait pas ces deux amendements majeurs à la loi. Nous
croyons, de plus, que le statut d'université associée
accordé à l'UQAM devrait être dans la loi prévu
aussi pour les autres universités.
Le projet de loi cristalise davantage l'actuel
déséquilibre de la représentation des divers groupes
d'intérêts à l'assemblée des gouverneurs. Le projet
de loi augmente de trois à quatre le nombre de représentants des
Instituts de recherche et des écoles supérieures et supprime
les
quatre postes réservés aux vice-présidents. Celui
des représentants des milieux socio-économiques passe de trois
à sept et on y ajoute un représentant du collégial, le
nombre de personnes extérieures s'élevant, à ce moment la,
à huit, donc un gain de plus cinq du côté des
socio-économiques. Celui des représentants du corps professoral,
déjà minime, est maintenu à trois professeurs. Il en est
de même de celui des représentants des étudiants qui est de
deux. Est-ce là un sain équilibre de la représentation
quand on connaît le rôle très Important des professeurs dans
la gestion des affaires universitaires? Il nous apparaît clair que le
projet de loi 63 va à l'encontre du bon sens et qu'il donnera un pouvoir
réel accru aux gestionnaires de l'Université du
Québec.
L'équilibre de la représentation des différents
groupes dans les conseils d'administration des constituantes est aussi
complètement modifié. On peut relever les constatations
suivantes. Le corps professoral n'est plus consulté pour désigner
deux personnes exerçant des fonctions de direction de l'enseignement et
de la recherche. Désormais, c'est le CA qui désignerait, sur
recommandation du recteur, deux personnes exerçant des fonctions de
direction. Point à la ligne. Dans les faits, le nombre de professeurs au
conseil d'administration est réduit de cinq à trois au sein du
nouveau conseil de quinze membres (au lieu de quatorze) ainsi
créé.
Les recommandations des organisations syndicales concernant la tradition
démocratique universitaire de consulter le corps professoral pour la
nomination des chefs d'établissements sont entièrement
Ignorées par le projet de loi. Si l'autonomie universitaire a un
véritable sens, ne doit-on pas également exiger que le recteur
soit désigné par le conseil d'administration de
l'université locale à la suite d'une consultation du corps
professoral et des autres décideurs du milieu universitaire?
Si l'on admet généralement que la centralisation est la
concentration des fonctions de planification, d'organisation, de direction et
de contrôle entre les mains d'un petit groupe ou d'une seule personne
dans un ensemble humain organisé, n'est-ce pas vraiment l'objectif dudit
projet de loi? Le projet de loi accorde à l'assemblée des
gouverneurs et au conseil des études le pouvoir de décider pour
toutes les activités essentielles des constituantes. Il fait de ces
organes du siège social les seuls interprètes de
l'évolution des constituantes. Ce projet de loi lui assure une
autorité Incontestable, l'affermit et fait des constituantes et de leurs
recteurs des boites aux lettres et des facteurs. Une des conséquences de
cette centralisation sera la création au sein de l'Université du
Québec d'une série de services centraux chargés de
régler, de décider, de sanctionner selon les règlements
qu'il a adoptés. Ce qui est véritablement en cause dans le projet
de loi 63, c'est bel et bien une philosophie de gestion. Toute cette
opération se réalise au profit d'un siège social plus
bureaucratique, plus centralisateur, plus uniforme, donc moins enrichi de
l'apport de ses constituantes.
Ce qui serait préférable, c'est une plus grande autonomie
des constituantes, en accroissant leurs pouvoirs et leurs possibilités
de développement et d'Innovation. En d'autres termes, nous
réclamons plutôt pour les constituantes une augmentation de leurs
pouvoirs d'organisation et de décision. Nous voulons que les conseils
d'administration et les commissions des études des constituantes aient
la pleine maîtrise de leurs activités essentielles, donc, de
l'enseignement et des programmes; autrement dit, qu'elles décident
elles-mêmes ce qui convient le mieux à leur développement.
Dans cette optique, il serait peut-être nécessaire de revoir le
rôle du siège social, pour qu'il devienne un organisme de
coordination démocratique associant l'ensemble des constituantes.
Comme je l'ai annoncé tout à l'heure, pour les pages 12
à 23 du mémoire, je vais tout simplement résumer et vous
référer à ce mémoire. Je sais que la FAPUQ va
reprendre l'idée d'une déclaration des libertés
académiques et de l'autonomie universitaire. Ce qu'exposent ces pages,
essentiellement, c'est le fameux dilemme qui existe entre les
responsabilités des Intervenants universitaires, des intervenants au
niveau de la gestion et du gouvernement, et ceci face au besoin de
liberté académique des professeurs-chercheurs. (20 h 30)
Nous croyons fermement que la Loi sur l'Université du
Québec, en plus de permettre la consultation des professeurs pour la
nomination de leurs dirigeants, devrait contenir un énoncé sur
les libertés universitaires. D'ailleurs, dans plusieurs pays, cela fait
partie de leur constitution.
Je soulignerai aussi que, dans le mémoire, on dit que, dans des
décisions ou des discussions à l'OCDE, on fait
référence au besoin d'une grande autonomie des Institutions et
des Individus, de façon à créer un système
universitaire dynamique et entreprenant. Du 9 au 17 janvier 1989, j'ai
assisté à la Conférence internationale de
l'éducation, à Genève. Notre mémoire fait
état de la recommandation 76 qui reprend, à son article 22, un
énoncé sur les libertés universitaires. Je vous signale
également que la même recommandation 76, à son article 9,
Indique que les gouvernements - ce sont les gouvernements eux-mêmes qui
ont adopté cette recommandation - se donnaient comme mission d'organiser
dans chacun des pays un organisme permanent de coordination - on ne parle pas
d'un organisme permanent de gestion et d'administration - et ce, dans le cadre
de l'article 22 sur les libertés universitaires.
Sans plus, voici les recommandations de notre fédération.
Il est recommandé ce qui suit:
1. Qu'un statut de pleine autonomie soit reconnu aux constituantes ou,
à tout le moins, un statut d'université associée, en
attendant l'obtention de leur pleine autonomie; qu'en conséquence: 2. Le
projet de loi 63 soit modifié substantiellement ou qu'un nouveau projet
de loi soit rédigé, de façon à répondre
à la demande d'autonomie ou de statut d'université
associée pleinement démocratique, de même qu'à
l'objectif d'une coordination permanente respectueuse de l'autonomie des
institutions et de la liberté académique des principaux acteurs
du milieu universitaire, un tel projet de loi confirmant les missions
d'enseignement, de recherche et de service à la collectivité des
constituantes, ce qui n'est pas le cas présentement dans la loi;
conservant aux professeurs le droit historique de participer au processus de
sélection des personnes devant assumer le poste de chef
d'établissement; donnant aux universités constituantes le droit
d'adopter leurs propres programmes d'enseignement, de recherche et de service
à la collectivité; permettant aux constituantes d'adopter les
règlements régissant leur propre fonctionnement; conservant dans
les conseils d'administration une représentation équitable des
professeurs, occupant ou non des fonctions de direction d'enseignement ou de
recherche, que nous estimons devoir être d'au moins le tiers des membres
de ces conseils; maintenant le statu quo au niveau de la représentation
des milieux extérieurs sur les conseils d'administration, de tels
membres devant être proposés par et parmi les groupes sociaux,
syndicaux et économiques, et de l'enseignement collégial
généralement intéressés à la question
universitaire; précisant que les professeurs désignés sur
ces conseils le sont après une élection par et parmi les membres
du corps professoral; consacrant le mandat des constituantes de dispenser
l'enseignement universitaire en région et dans les centres hors campus;
Intégrant une déclaration sur la liberté académique
des universitaires et sur l'autonomie des universités; 3. Que soit
réévalué le rôle du siège social pour en
faire un organisme démocratique ayant pour objet principal la
coordination des constituantes et des services communs qu'elles décident
de se donner, le projet de loi prévoyant pour cet organisme un conseil
d'administrateurs composé d'une égale représentation des
établissements, dont chacun aura au sein de ce conseil au moins un
professeur désigné par et parmi les membres du corps professoral;
4. Qu'en attendant la modification du projet de loi 63 ou la rédaction
d'un nouveau projet de loi, une étude de nos demandes soit faite, un
statu quo modifié en faveur de l'UQAM pouvant toutefois être
accordé par un simple amendement à la loi actuelle.
Mesdames, messieurs les députés, merci beaucoup.
La Président (M. Paré): Merci beaucoup, M.
Leblond. Nous allons maintenant commencer la discussion avec M. le
ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la
Science.
M. Ryan: Je remercie la Fédération des professeurs
d'universités du Québec du mémoire qu'elle a
préparé à l'intention de la commission et dont elle nous a
donné communication par l'intermédiaire de son président,
M. Leblond. Nous avons eu l'occasion de rencontrer à plusieurs reprises
les membres de la fédération, en particulier M. Leblond. C'est
toujours un plaisir renouvelé pour nous d'échanger des
idées avec ce groupe de professeurs universitaires regroupant les
enseignants de plusieurs établissements différents.
Le mémoire, comme U est présenté, doit
peut-être être discuté à deux niveaux
différents. Tout d'abord, il faut viser à dissiper certaines
ambiguïtés qui ont pu se créer à la suite de
formulations du texte même du projet de loi qui peuvent prêter
à des interprétations fort discutables.
J'ai signalé, dans mes remarques liminaires, cet
après-midi, que les articles 17 et 19 en particulier, dont la
formulation pourrait en principe conduire à des initiatives ou à
des décisions abusives de la part de l'autorité de
l'Université du Québec, seront sujets à réexamen.
Nous allons tenter de les formuler d'une manière telle qu'ils indiquent
clairement que l'Université du Québec continue, comme elle l'a
fait jusqu'à maintenant, de faire des règlements pour l'ensemble
de ses constituantes, avec la possibilité que ces règlements ne
s'appliquent pas à l'Université du Québec à
Montréal ou encore qu'elle puisse faire des règlements
spéciaux dans le cas de l'Université du Québec à
Montréal, étant donné le statut distinct que le projet de
loi vise à conférer à l'Université du Québec
à Montréal. Je pense qu'une fois que nous aurons nettoyé
ce point il y aura déjà une certaine partie de la perspective qui
s'estompera passablement.
Deuxièmement, il y a le problème relié à
l'Université du Québec à Montréal. Si j'ai bien
compris le mémoire qui nous a été résumé par
M. Leblond et que nous avons lu au complet dans sa teneur intégrale, la
fédération n'aurait pas d'objection de fond à l'octroi
d'un statut d'établissement associé à l'Université
du Québec à Montréal, mais elle voudrait que le même
statut ou un statut de même nature soit accessible aux autres
établissements qui composent le réseau. Ici, évidemment,
quand on va un petit peu plus loin dans la pensée de la
fédération, on s'aperçoit que c'est une approche qui a des
conséquences considérables.
Je voudrais en faire valoir une qui se terminera, évidemment, par
une question. S'il fallait accéder aux demandes formulées dans le
mémoire concernant l'autonomie des établissements qui forment les
unités - les universités constituantes du réseau de
l'Université
du Québec - il faudrait vite se poser des questions sur la
vocation du siège social, sur son rôle, sur sa composition, et
vous le faites, d'ailleurs, dans le mémoire. C'est une perspective
entièrement différente de celle que nous avons retenue. Je vous
sais gré de nous l'avoir communiquée; cela vient s'ajouter
à la réflexion gouvernementale. Je ne pense pas honnêtement
que nous puissions accéder à cette demande maintenant, parce que
c'est une remise en question foncière du réseau tel qu'il existe
actuellement. Je ne sais si dans dix ou quinze ans le problème pourra se
poser comme vous le posez, mais aussi longtemps que les constituantes
présentent les disparités de taille que nous connaissons
présentement, nous ne pouvons pas aller vers une approche comme
celle-là dans un avenir prévisible, du moins selon ma perception
actuelle des problèmes de l'Université du Québec que je
crois avoir examinés avec beaucoup d'attention au cours des trois
dernières années, en particulier.
Je vous pose, quand même, la question pour fins de clarification
de votre point de vue. J'aurai un certain nombre d'autres questions ensuite.
Quel rôle voyez-vous pour le siège social dans la perspective qui
encadre vos recommandations? Que devient le siège social comparé
à ce qu'il est aujourd'hui? Aujourd'hui, c'est une entité qui a
un personnel - je n'ai pas le nombre exact de l'effectif, mais disons que c'est
entre 150 et 200 - qui exerce des fonctions importantes dans le domaine des
programmes, des contrôles financiers, etc. Quels changements verriez-vous
pour que cela fonctionne à votre goût?
M. Leblond: C'est une bonne question. Je pense qu'après
vingt ans d'existence les universités constituantes, à divers
degrés, vous l'avez d'ailleurs souligné, ont acquis, au
même titre que l'UQAM, une certaine autonomie. Cette autonomie va aller
en grandissant et vous le prévoyez vous-même. Nous croyons que les
budgets qu'elles ont à administrer, que les étudiants qu'elles
ont et les programmes qu'elles ont développés historiquement chez
elles en conformité avec ces paramètres budgétaires ont
donné une couleur et une identité à chacune de ces
constituantes.
Bien sûr, nous sommes conscients que l'autonomie totale des
universités n'est pas conséquente. D'ailleurs, dans notre
mémoire, nous disons que les universités doivent avoir leur
autonomie de gestion. Nous croyons beaucoup à la concertation entre les
chercheurs, entre les programmes de recherche, etc., entre les programmes
d'enseignement. Nous croyons beaucoup aux vertus des échanges de
programmes entre universités. Je crois que le siège social joue
ce rôle en partie. Par contre, nous devons souvent extensionner des
programmes soit de l'Université Laval, de l'Université de
Montréal ou même de l'Université de Sherbrooke pour
certaines constituantes et nous croyons qu'une concertation est
nécessaire à ce niveau-là. Autrement dit, qu'on ait des
cadres, d'anciens professeurs, qui fassent partie de ces organismes et qu'ils
assurent cette coordination, nous sommes 100 % pour ça. Cependant, nous
ne croyons pas que le rôle du siège social soit de
dédoubler les niveaux administratifs et de faire de la gestion et ce
genre d'opération. Nous croyons que les universités locales sont
pleinement capables de faire ces choses-là et qu'elles le seront de plus
en plus pour celles qui ont peut-être encore des difficultés.
La situation présente de la plupart des universités du
réseau, vous la connaissez. Ce sont des problèmes non seulement
de développement, mais également de fond. D'ailleurs, la loi ne
prévoit aucunement un financement des universités
régionales. On croit que ce n'est peut-être pas dans la loi 63 que
cela devrait être, mais peut-être dans une loi sur le financement
des universités. Je pense que l'autonomie est une chose complexe qui
dépend à la fois des budgets qu'on leur fournit et de la
maturité de ces constituantes. Actuellement, la plupart des
constituantes du réseau ont, à divers degrés, atteint
cette maturité. Il serait faux de croire qu'il faille absolument
coordonner ces gens-là de façon coercitive, qu'on se doive de
vérifier leurs états financiers, qu'on se doive de
vérifier à toutes les étapes toutes les opérations
de gestion. On y croit fermement et je crois que c'est un peu l'orientation que
nous donnent la recommandation 76 et le rapport Angers, d'ailleurs.
M. Ryan: Selon la conception qui vous anime, combien resterait-Il
de personnel au siège social, à supposer qu'il sort
réorienté dans le sens que vous voulez? Combien resterait-il de
personnel? Disons qu'il y a à peu près 175 personnes actuellement
là-dedans. Combien y en aurait-il, d'après vous?
M. Leblond: C'est difficile de répondre à cette
question. Nous n'avons pas fait d'étude.
M. Ryan: Vous n'avez pas fait d'étude
là-dessus?
M. Leblond: Non. Nous n'avons pas fait d'étude
là-dessus. Naturellement, à partir du moment où les
universités seraient autonomes, il y aurait sûrement diminution de
ces personnels. Je ne crois pas vraiment à une diminution si, par
exemple, toutes les universités étaient, comme notre recteur de
Chicoutimi nous l'a dit tout à l'heure, en consortium. Je pense qu'avec
un changement de vocation ou une réorientation en fonction d'une
coordination d'universités autonomes, entre guillemets, on admet, quand
même, qu'on a besoin de plans de développement, d'expertise au
point de vue de nos programmes. Nous-mêmes, les professeurs, nous
acceptons constamment d'être jugés par nos pairs. Je pense que nos
programmes d'études ont besoin
d'être... Naturellement, on doit consulter, on doit chercher des
expertises pour valider nos modifications de programmes, etc. Jusqu'à un
certain point, on peut le faire localement, mais je pense qu'une bonne gestion
du système universitaire exige, tout de même, qu'il n'y ait pas de
dédoublement forcené et débridé de nos programmes.
Il faut que tout ça s'intègre dans une problématique que
reconnaît l'OCDE, d'ailleurs. (20 h 45)
Dans notre mémoire, on relève une des conclusions de la
conférence de l'OCDE. On dit: Tout de même, laissez de l'autonomie
à vos universités mais incitez-les, incitez vos gestionnaires,
vos professeurs à s'intégrer dans des plans nationaux. Je pense
que les professeurs sont parfaitement conscients de ces objectifs. Par exemple,
quand votre ministère a mis sur pied certains programmes de recherche
subventionnés spécialement, je pense que les professeurs y ont
adhéré jusqu'à un certain point. Je veux dire que je pense
qu'il n'y a pas assez de programmes maintenant pour satisfaire les besoins des
professeurs.
M. Ryan: On pourrait continuer là-dessus, mais vous me
dites que vous n'avez pas eu le temps de faire d'étude approfondie de ce
que pourrait être la mission d'un siège social à
l'intérieur de la perspective sensiblement modifiée que vous
proposez; c'est une question qu'on va continuer d'étudier avec vous,
mais ça va prendre un certain temps. Il ne peut pas être question
de transposer dans l'Immédiat cette conception dans le projet de loi.
J'aime autant vous le dire franchement.
Il y a une autre question qui me préoccupe dans votre
mémoire. Vous dites: On va augmenter le nombre de représentants
des milieux socio-économiques. Cela ne semble pas vous convenir parce
que vous demandez de garder le statu quo sur ces choses. Puis, vous dites: On
croit sentir que le dessein du gouvernement au fond de ça, c'est
peut-être la privatisation des universités. Je vais vous dire
franchement que je ne comprends pas. Vous allez m'expliquer votre perspective
parce que j'ai du mal à la comprendre. Il me semble que, si on laisse
l'université s'administrer uniquement à partir de
l'intérieur, on risque de la privatiser parce que ça va devenir
la chose des seules personnes qui y oeuvrent, qui gagnent leur vie
là-dedans et tout. En introduisant des représentants de la
communauté élargie, l'université n'existe pas dans un
vacuum; elle existe dans un milieu plus large. Dans le cas de
l'Université du Québec à Chicoutimi, c'est toute la
région du Saguenay-Lac-Saint-Jean qui est le milieu où baigne
l'université. On dit: Ce milieu plus large, sur, disons, 20
administrateurs au conseil d'administration, on va lui donner une
représentation d'à peu près 30 %, 6, et vous trouvez
ça trop fort.
M. Leblond: Actuellement, il y en aurait sept sur quinze, chez
nous, en comptant le représentant du milieu collégial. Nous
trouvons ça trop fort. D'abord, la commission Angers, rappelez-vous,
recommandait une représentation équilibrée. A partir du
moment où un groupe représente la moitié ou tout
près, nous croyons que c'est démesuré. Quand on parle
d'implication des gens du milieu et de la société en
général, vous savez très bien que, dans les conventions
collectives, il y a là une concertation qui va jusqu'au Conseil du
trésor et peut-être à votre ministère. Les budgets
des universités, ça ne se décide pas chez nous et
ça ne se décide pas au conseil d'administration; ça se
décide chez vous. En ce qui concerne l'implication dans le milieu, tous
nos programmes d'études - c'est une chose que M. le président de
l'Université du Québec n'a pas soulignée tout à
l'heure - comportent un membre socio-économique. Cela veut dire que, si
on a 60 programmes dans une constituante, on a 60 représentants des
milieux socio-économiques à ces conseils de module. Nous, les
professeurs, nous faisons des projets de recherche, constamment, avec les gens
du milieu. Alors, les gens du milieu sont soit associés comme
subventionnâmes ou associés comme bénéficiaires
entièrement de ces recherches, que ce soit les grandes compagnies comme
l'Alcan ou les groupes sociaux.
Ce que nous trouvons excessif, c'est, justement, cette disproportion de
membres socio-économiques pour des décisions à prendre sur
la gestion de l'université. Nous croyons que les gens qui doivent
décider et analyser des dossiers qui sont soumis au conseil
d'administration doivent avoir Intérêt à prendre ces
décisions et doivent avoir aussi une certaine connaissance du milieu.
Déjà, il y a un certain nombre de socio-économiques et
ça amène un certain éclairage. Le problème qu'on
rencontre surtout avec ces personnes, c'est, la plupart du temps, leur
désintérêt, le surcroît de travail que ça leur
Impose aussi. Le vice-président, M. Leclerc, l'a dit tout à
l'heure, un membre socio-économique de l'assemblée des
gouverneurs se plaignait de trop longues réunions. Alors, cela fait
qu'historiquement le taux d'absentéisme de ces personnes dans les
conseils est assez élevé.
Aussi, ce manque d'implication des socio-économiques et leur
méconnaissance des dossiers a souvent pour effet de les faire voter dans
le même sens que la direction, et ça c'est un piège
à éviter. Quand on parle de privatisation, je pense qu'il faut
faire le lien, là. C'est un danger. Ce ne sont pas des mauvaises
intentions qu'on veut prêter, mais iI reste qu'à partir du moment
où c'est le ministre qui nomme ces membres socio-économiques, si
la propension actuelle de nommer uniquement des gens de l'industrie ou du
milieu des affaires continue, il est bien sûr qu'on pourrait penser
à une privatisation ou, en tout cas, à une implication d'un monde
complètement étranger à l'université.
Nous croyons que c'est important d'avoir des gens de l'extérieur.
Nous le faisons déjà dans
nos programmes, sort le programme de recherche, le programme
d'enseignement, mais nous ne voudrions pas que toutes les décisions
soient prises dans un conseil de sept membres socio-économiques auquel
il faut ajouter trois administrateurs, ce qui fait dix. Donc, dix sur quinze,
c'est gagné à tout coup. Donc, il n'est plus question d'avoir,
là, un équilibre de discussion dans les conseils. On sait
où le pendule va se ramasser toutes les fois. Alors, c'est ce qu'on veut
éviter.
Nous croyons aussi que, si on veut valoriser les membres
socio-économiques, ce n'est pas en augmentant leur nombre. C'est en
augmentant la qualité de ces représentants et aussi en leur
donnant peut-être des responsabilités plus grandes. J'ai
été moi-même président d'un collège.
J'étais membre socio-économique et la loi dit que le
président doit être un membre socio-économique. Ceci a pour
mérite, en tout cas, lorsqu'on a à décider ou à
préparer des assemblées, que le membre socio-économique
prépare les ordres du jour et, par le fait qu'il est un officier,
ça oblige les cadres supérieurs à ouvrir les dossiers.
Vous savez, on reçoit des dossiers pour une réunion, mais il y a
d'autres dossiers en arrière qui appuient tout ça. Donc, nous
croyons que ce n'est pas en augmentant le nombre de ces personnes qu'on va
augmenter la qualité de l'administration des universités. Nous
croyons que c'est en augmentant la qualité de ces représentants
et en leur donnant peut-être un peu plus de pouvoirs.
M. Ryan: Voulez-vous me parler un petit peu de la
représentation des professeurs au conseil d'administration, me
préciser votre point de vue là-dessus: actuellement, le projet de
loi et ce que vous désirez?
M. Leblond: Actuellement, le projet de loi nous retire deux
postes de professeur.
M. Ryan: À quel niveau?
M. Leblond: En fait, présentement, il y a trois
professeurs qui sont élus parmi leurs pairs. Cela ne change pas. Par
contre, dans le corps professoral, il y a un certain nombre de professeurs qui
occupent des fonctions de directeur de module, de directeur de
département, de directeur de groupe de recherche, etc. Ces personnes,
qui sont à la fois professeurs et directeurs, sont éligibles
à deux postes, après consultation parmi le corps professoral.
C'est la loi actuelle qui le prévoit. La nouvelle loi dit que les postes
de vice-recteur s'en vont, mais, par contre, on dit que le recteur pourra
suggérer au conseil d'administration deux noms de personnes occupant des
fonctions de direction, point. Donc, ce ne sont pas des personnes occupant des
fonctions de direction d'enseignement et de recherche; ce pourrait être
deux vice-recteurs ou un directeur de service quelconque. Traditionnellement,
nous avions cinq professeurs au conseil d'administration, donc à peu
près un tiers, et, maintenant, la loi prévoit trois professeurs
sur quinze.
M. Ryan: Vous avez bien noté qu'actuellement il y a quatre
vice-recteurs qui peuvent faire partie du conseil d'administration et on laisse
tomber cela parce qu'on trouve que c'est trop fort. C'est en retour de
ça qu'on prévoit la nomination de deux cadres de direction
d'études ou de recherche qui viendront assurer la représentation
de cet élément très important de la communauté
universitaire.
M. Leblond: Oui, peut-être que l'UQAM avait quatre
vice-recteurs. La loi prévoyait quatre postes de vice-recteur mais la
pratique vécue dans la plupart des constituantes, c'était deux
vice-recteurs. Donc, pour nous, dans les faits, vous supprimez deux postes de
vice-recteur, mais ce serait ces mêmes personnes qui reprendraient les
chaises que nous occupions en tant que directeurs de département et de
module. Je pense que ce serait une erreur d'écarter ces personnes qui
ont une fonction Importante dans l'université. Ce sont des personnes qui
dirigent les programmes, qui les modifient. Ce sont des personnes qui
administrent les budgets départementaux, soit les directeurs de
département ou de groupe de recherche, et nous croyons que ces
représentants doivent être au conseil d'administration. Ce sont
les personnes, peut-être avec les professeurs, les vice-recteurs et le
recteur, les plus éclairées sur les dossiers. Donc, cela ajoute
un élément différent, très important, à
notre sens.
M. Ryan: Merci beaucoup.
M. Leblond: Si je peux dire un mot de plus, cela ne veut pas dire
qu'on voudrait voir disparaître les deux postes de vice-recteur. On ne
s'est pas prononcés pour accepter cette disparition. Je pense qu'il
faudrait peut-être limiter le nombre à deux au lieu de quatre, par
exemple.
M. Ryan: Merci.
Le Président (M. Paré): Merci, M. le ministre. La
parole est maintenant au député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Je vous salue, M. Leblond, ainsi que vos
collaborateurs, dont Enrique Colombino, que je connais plus personnellement,
professeur à l'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue. Je remercie la fédération des
professeurs et vous, M. Leblond, comme président, d'avoir saisi
l'opportunité qui vous était offerte d'exprimer votre point de
vue. Moi aussi, je pense qu'il est toujours important qu'on puisse situer la
lecture qu'on fait de votre mémoire. Je l'ai lu, mais U n'y a rien de
mieux
que de l'évaluer rapidement, en présence de ceux qui l'ont
rédigé pour savoir si, essentiellement, on résume bien
avant d'aller à la discussion que je voudrais avoir avec vous. Je pense
que c'est probablement un des mémoires les plus critiques du projet de
loi 63. Globalement - Je répète que c'est un résumé
- vous dénoncez le caractère centralisateur du projet de loi. Et,
surtout, pour porter ce Jugement-là, vous l'associez à
l'extension des pouvoirs confiés à l'assemblée des
gouverneurs ou au conseil des études concernant leur capacité
d'adopter des règlements où la forme de la réglementation
va être différente de ce qui existait. Vous l'avez
spécifié. Je sais une chose: dès qu'on aura à
franchir d'autres étapes, probablement à l'étude article
par article, c'est sûr qu'on devra préciser pourquoi, à un
certain moment, on a supprimé le mot "généreux", comme
ça, comme s'il s'agissait Juste de supprimer un mot: "la capacité
d'adopter des règlements généraux" comparativement
à "des règlements", tout court. Je n'ai pas été
à l'école aussi longtemps que des docteurs, mais assez pour
savoir la différence. C'est sûr qu'il faudra vérifier cela.
Il y a là une volonté du gouvernement ou il n'y en a pas et c'est
strictement parce que c'est arrivé comme cela. Je pense que vous faisiez
bien d'être assez virulents sur cet aspect, parce que cela change
passablement l'esprit du projet de loi.
Qualifier de centralisateur un projet de loi du ministre de
l'Éducation actuel, c'est quasiment une vérité de La
Palisse. On ne peut pas être en désaccord là-dessus. Vous
réclamez plutôt une plus grande autonomie pour les constituantes
par le biais d'un statut d'université associée. Là-dessus,
il faudra se parler un peu plus clairement. Je comprends très bien ce
que vous exprimez, mais quand J'ai à résumer cela et que vous
dites: Dans le fond, les constituantes sont toutes assez grandes filles, si
vous me permettez l'expression, pour voler de leurs propres ailes et, en
conséquence, avoir un statut d'autonomie ou, à tout le moins,
d'associée autant que l'UQAM, en principe, Je ne suis pas contre cela,
sauf que, quand Je vais vous questionner tantôt sur le rôle du
siège social dans un tel modèle, il faudra davantage me
répondre sur le rôle du siège social que faire la
justification de votre prétention que ce devrait être comme cela.
Je n'ai pas d'objection, sérieusement, à me refaire une opinion.
Mais jusqu'à présent, si j'ai à résumer votre
mémoire, vous réclamez plutôt une autonomie pour les
constituantes par le biais d'un statut d'université associée
impliquant le pouvoir d'adopter telle et telle chose.
Vous déplorez la diminution du poids des professeurs dans les
instances. Je trouve que, là-dessus, vous étiez passablement sur
la bonne piste. Oui, il y a un danger d'ingérence du pouvoir politique,
et je vais vous questionner à ce sujet, et une tendance à la
privatisation. Le ministre fait semblant de ne pas comprendre; il n'est pas
dans le bon gouvernement pour faire semblant qu'il ne sait pas ce qu'est la
privatisation avec le Parti libérai. Il y a, effectivement, un danger de
privatisation à partir du moment où l'on confie cela à un
petit groupe d'amis, à un petit club privé, en disant:
Occupez-vous de gérer le conseil d'administration des constituantes,
sachant très bien que dans la réalité... Je ne sais pas
des fois où il vit. (21 heures)
D'ailleurs, une dame le mentionnait tantôt. Par exemple: à
Rimouski, les socio-économiques, on les appellerait pour une
séance de travail au conseil d'administration de la constituante le jour
et Us ne viendraient pas; ils ont d'autres préoccupations, ils n'ont pas
le temps, ils sont pris. Je ne veux pas tomber dans des choses
particulières, mais il ne faut pas penser que les "socio", ce sont des
gens à temps plein. J'ai vécu dans le milieu des commissions
scolaires et je connais un peu cela. J'ai, à de nombreuses reprises,
regardé des gens complètement béats adulant le directeur
générai: Mosus, qu'il connaît son affaire! Mais je vous dis
qu'il passait "ses" affaires, entre vous et moi. Mais il connaissait son
affaire! Je vous en passe un papier. Je vous dis que les commissaires
trouvaient que cela passait vite et que c'était bien
préparé. J'en ai vu quelques-unes. Alors, un recteur et un
conseil d'administration le moindrement habiles peuvent faire exactement la
même chose. C'est de ces dangers-là qu'il faut être
conscient. Je pense que, là-dessus, vous résumiez très
bien l'affaire.
Vous souhaitez que les profs désignés aux conseils soient
élus directement et forment au moins le tiers des membres des conseils,
je trouve que vous y allez fort. En attendant qu'un nouveau projet soit
rédigé, est-ce qu'on n'aurait pas pu procéder par
amendement pour donner à l'UQAM ce qu'elle réclamait depuis des
années? Personnellement, je ne suis pas un grand juriste, mais je ne le
crois pas. Voilà, j'ai fait le résumé de votre
mémoire.
Maintenant, questions et échanges de vues. J'aimerais revenir un
peu sur la piste du ministre de l'Éducation parce que je pense que,
là-dessus, elle était valable. On ne peut pas, d'un
côté, réclamer un pouvoir d'autonomie plus grand des
constituantes... Je ne suis pas loin de cela, mais, compte tenu de la taille
des constituantes, des responsabilités et des programmes d'études
différents, personnellement - Je peux me tromper - je crois que le
siège social, pour autant qu'il fait ce qu'il a à faire et non
pas vous dédoubler dans toutes vos fonctions, a encore une
responsabilité. J'aurais mieux aimé vous entendre dire plus
directement en quoi le siège social est fatigant, ne se mêle pas
de ses affaires et vous dédouble. C'est de cela qu'il faut parler
franchement. Si vous êtes capables d'évaluer, de montrer
qu'effectivement, sur plusieurs éléments, le siège social
n'est pas à sa place, vous dédouble inutilement dans des
responsabilités qui devraient être les vôtres et qu'on n'est
pas capable de saisir, pour ce qui en resterait, la
justification de son maintien, on pourrait épouser davantage
votre cause et reconnaître à toutes les constituantes un statut de
grande fille ou de grand garçon. J'aimerais vous entendre
là-dessus un peu plus clairement. Quand la question vous a
été posée, vous avez plus justifié votre position
que décrit ce qu'il resterait du siège social.
Premièrement, il resterait quoi? Deuxièmement, est-ce que,
d'après vous, I est requis qu'il y en ait un, compte tenu du même
élément que celui que le ministre a souligné; la taille,
l'histoire, les clientèles, ce n'est pas pareil? Je connais très
bien le réseau UQ pour y avoir oeuvré un peu, en particulier les
constituantes. J'aimerais que ce soit plus clair. Pourquoi pensez-vous qu'on
devrait changer de modèle?
M. Leblond: Je pense que c'est une reprise de la même
question, mais je vais essayer d'être plus clair. A la limite, dans 20
ans, on pourrait arriver à dire: Le siège social, on
l'élimine. À ce moment-là, cela veut dire qu'on coupe tous
les services, etc. Maintenant, ça, c'est dans l'hypothèse
où toutes les universités un peu comme Laval, Sherbrooke et
Bishop's, peuvent se dire autonomes. Je pense que les universités du
Québec à Chicoutimi, à Rimouski ou à
Trois-Rivières pourraient dire: Nous, on n'est pas pires que Bishop's,
nous sommes capables de nous gérer nous-mêmes. Je pense que c'est
passablement vrai. Donc, au siège social, présentement, il y a
une coordination, il y a une gestion centralisée. La loi actuelle, il ne
faut pas l'oublier, donne un pouvoir de contrôle budgétaire. Les
budgets ne sont pas envoyés directement aux constituantes. Ils sont
envoyés au siège social Ceci oblige donc à avoir des
services comptables, etc., un service financier qui, dans une hypothèse
de plus grande autonomie, pourrait être tout simplement enlevé. Je
pense qu'il y a des bons comptables dans les régions. On peut même
les engager en ville, si vous voulez. Mais je pense que nous pouvons faire des
vérifications financières nous-mêmes à partir des
budgets que nous avons.
Ce qui resterait au siège social, de façon nette? Si on
dit qu'on a besoin d'un siège social pour coordonner, on est d'accord
avec ça, même que ce soit élargi. Et même dans notre
mémoire vous constaterez que nous ne sommes pas, non plus, contre une
concertation avec les cégeps. Mais cela n'est pas possible actuellement.
Ce n'est pas le siège social qui peut nous coordonner, nous, à
Chicoutimi, avec le cégep de Jonquière, avec le cégep
d'Alma, etc. Je pense qu'il y a là un jeu qui est à la fois
à l'échelle provinciale et à l'échelle
régionale. La même chose s'appliquerait à l'Abitibi. Donc,
c'est difficile de répondre à votre question, à savoir:
Qu'est-ce qui resterait au siège social et qu'est-ce qui ne resterait
pas? Je pense que ça demanderait de reprendre la liste des 150
employés et chacun des services. Nous n'avons pas fait cet
exercice-là.
M. Gendron: Si on veut progresser un peu, c'est plus en termes de
ce sur quoi vous vous basez parce que je ne trouvais pas que c'était si
difficile que ça. Je pose ma question autrement. Y aurait-Il
éclatement du réseau dans votre modèle, oui ou non? Y
aurait -il éclatement du réseau dans votre modèle à
partir du moment où toutes les universités constituantes auraient
un statut de pleine et entière autonomie? Il faut faire attention. Quand
vous me dites dans 20 ans, il faut distinguer entre autonomie et
capacité de l'être. On peut porter le jugement que, oui, vous avez
la capacité de l'être, mais ne pas être d'accord pour vous
la donner pour d'autres motifs, par exemple, pour qu'il y ait plus de
coordination obligatoire. À partir du moment où il y a un
siège social pour le réseau des constituantes, vous l'avez dit
vous-même, une constituante ne peut pas faire ce qu'elle veut. Mais un
législateur peut trouver légitime que ce soit comme ça
compte tenu de ce qu'on est, des clientèles, des effectifs, de l'argent
et ainsi de suite. Oubliez tout ce que j'ai dit. Est-ce que vous maintiendriez,
dans votre esprit, un siège social/réseau dans la perspective
où on appliquerait votre modèle de constituantes autonomes?
D'après moi, non, mais |e veux le savoir de vous.
M. Leblond: Je pense qu'on est d'accord pour maintenir un
organisme de coordination. Je pense que notre recteur de Chicoutimi a
parlé tout à l'heure d'un consortium. Cette philosophie de
gestion là se fait dans l'idée que les constituantes ont une
certaine autonomie, ont une autonomie et, dans une organisation où elles
sont librement associées, elles peuvent trouver des
intérêts communs, l'Intérêt d'être
ensemble.
L'autre philosophie est celle qui vient d'en haut, du gouvernement, et
qui dit, dans la loi: Vous devez vous coordonner; vous n'avez pas le choix, il
faut que vous montiez de votre conseil des études, au conseil
d'administration, ensuite au siège social; vous êtes
obligés d'aller là; vous êtes obligés d'aller
à l'assemblée des gouverneurs, ensuite, vous êtes
peut-être obligés d'aller au Conseil des universités. On
est rendu à cinq paliers d'intervention. Ensuite, il y a le
ministère.
Alors, vous voyez, on est pris dans ce système avec un niveau
Intermédiaire de gestion qui vient dédoubler tous les niveaux
d'intervention, à tel point que certains nouveaux programmes de
baccalauréat, par exemple, pourraient être implantés
à l'intérieur de deux ans ou d'un an chez nous, alors que cela
prend souvent quatre ou cinq ans quand on suit toute la filière. Il y a
donc là des dédoublements administratifs qu'on croit excessifs et
qui pourraient être remplacés par un système où les
universités ont une autonomie, une responsabilité de gestion. Qui
dit autonomie dit aussi responsabilité face au budget que l'État
leur accorde et, quand on veut coordonner, c'est parce qu'on a
intérêt à le
faire...
M. Gendron: C'est parce que je trouve...
M. Leblond:... on entre dans le club. M. le recteur le disait
tantôt: Imaginez si Laval entrait dans un club semblable, ça
pourrait donner une dynamique tout autre. Nous le faisons, comme professeurs,
dans des projets de recherche.
M. Gendron: Je pense que c'est de plus en plus clair. Je voulais
que vous vous exprimiez là-dessus. Votre point de vue est plutôt
un modèle Inversé par rapport à celui qui existe
actuellement, et il y a effectivement des raisons de prétendre
ça. Quand vous arrivez avec l'expression "consortium
d'universités ou de fonctionnement", j'ai vu dans votre mémoire
ce que ça signifiait, mais je voulais que vous ayez l'occasion de
l'exprimer.
L'autre aspect de ma question qui n'a pas été
touché, mais qui me parait important, vous avez parlé de danger
de privatisation, mais également de contrôle politique par la
nomination dus soclo économiques. J'aimerais vous entendre, parce que je
trouve que les "soclo", c'est fondamental. Vous avez dit que nous avions
oublié les diplômés, que vous aviez des modes de nomination
qui vous rendent Insécures, et je trouve que vous avez raison parce
qu'on n'a aucune information concernant le mode de nomination. Ma question
précise: Qu'est-ce que vous avez à suggérer aux membres de
cette commission pour sécuriser l'éventuel encadrement ou
l'éventuelle nomination des socio-économiques pour éviter
que ça ne soit - je le dis comme je le pense, je n'ai pas peur des mots
- carrément des nominations politiques, partisanes, mais bien
orchestrées, comme on l'a vu le lendemain de l'élection de 1985,
alors que des gens m'appelaient pour me dire: Qu'est-ce que je fais là?
Je ne comprends pas pourquoi on me nomme là, ça ne
m'intéresse pas "pantoute". Alors, j'ai dit: As-tu travaillé pour
eux pendant la campagne électorale? La réponse était oui.
Je disais: Bien, c'est ça l'explication. Ce n'est pas que tu sois
d'accord ou pas là-dessus. Alors, comment voudriez-vous qu'on encadre
davantage les socio-économiques?
M. Leblond: La question est posée, M. le
député?
M. Gendron: Oui et on s'adresse au président.
M. Leblond: C'est une chose assez complexe, parce que
présentement les modes de nomination se font par des suggestions
d'organismes au conseil d'administration de l'université; ensuite, cela
passe à l'assemblée des gouverneurs - vous voyez, encore un autre
palier - et ensuite au ministre. Souvent, les personnes suggérées
ou nommées ne représentent pratiquement personne autre
qu'eux-mêmes; c'est ça le problème. Quand on dit que les
gens doivent représenter le milieu, on veut dire qu'il faut, quand
même, qu'ils proviennent d'une organisation, d'un groupe. Comment le
faire? Je pense qu'il faut le faire auprès des organismes et leur
demander que ce soient des personnes représentatives. Quand on demande
quelqu'un des cégeps, par exemple, souvent ça arrive au conseil
d'administration du cégep et entre eux, ils disent: On va envoyer
quelqu'un. On ne va pas voir les professeurs et les professionnels du
cégep pour leur dire: Écoutez, il faut nommer quelqu'un, il faut
élire quelqu'un pour aller au conseil de l'université. Cela ne se
fait pas comme ça. Souvent, un industriel est choisi comme ça, il
n'est même pas délégué par la chambre de commerce,
il n'est même pas délégué par la chambre des
constructeurs ou quoi que ce soit.
Nous croyons que la provenance devrait être diversifiée,
d'une part, donc qu'ils soient de provenance syndicale, des groupes sociaux,
économiques, du commerce, de l'industrie, etc., d'accord, mais qu'ils
soient vraiment représentatifs, qu'ils aient dus comptes à rendre
à quelqu'un. Quand on a là des gens qui ne représentent
qu'eux-mêmes, je pense qu'on n'avance pas parce qu'ils n'ont pas de
comptes à rendre. Nous, les professeurs au conseil, on a des comptes
à rendre en arrière. On est élus par les professeurs et
si, vraiment, on ne fait pas notre travail, la fois suivante, on est battus
à l'élection. C'est la même chose pour les
étudiants.
Il faut donc Inventer des formules. Vous m'avez posé cette
question. Peut-être faudrait-il avoir une assemblée universitaire
- la FAPUQ le propose; cela existe dans les modèles autres -qui
regrouperait très largement les professeurs, les professionnels, les
chargés de cours et toutes les personnes qui oeuvrent à
l'université, de même que des personnes de l'extérieur.
Peut-être y aurait-il là un vivier de représentants
possibles qui pourraient, à un moment donné, représenter
quelque chose. Il faut inventer des formules, être le plus
démocratique possible et consulter le plus de monde possible. La formule
est difficile à inventer parce qu'on n'est pas comme en Union
soviétique où on peut faire des soviets de tel secteur; cela
n'existe pas ici. Sans être des communistes, on pourrait peut-être
innover au point de vue de la démocratie et essayer de trouver des
formules plus démocratiques pour que ces gens-là soient
élus également et soient représentatifs de leur
milieu.
M. Gendron: M. Leblond, pour ce qui est de la nomination des
recteurs des constituantes, si on lit attentivement votre mémoire, vous
souhaitez rester très près et très associés au
processus. Je ne veux pas mal vous Interpréter, mais j'ai compris que
vous seriez d'accord avec ce que j'appelle une consultation, mais continue, qui
permette que l'équipe professorale soit associée à toutes
les étapes de la nomination d'un recteur.
Entre ce qui est proposé dans le projet de loi et
l'expérience que vous avez vécue comme association de professeurs
d'universités, quelles sont les différences fondamentales et
surtout les conséquences sur la dynamique Intérieure de
l'équipe professorale, à la suite de la nomination d'un recteur
à laquelle vous ne seriez pas associés?
M. Leblond: Bon. D'abord, le projet de loi 63 n'incorpore pas de
dispositions qui disent que la nomination des recteurs doive être
consécutive à une consultation du corps professoral. Pourquoi
n'est-ce pas inscrit dans la loi et que ce n'était pas dans la loi
originale de 1968? C'est parce que, historiquement, dans le milieu
universitaire, depuis des millénaires, en tout cas ça l'est au
moins depuis 1000 ans, les recteurs ont toujours été élus
parmi leurs pairs. Je suis allé en France dernièrement. Le
recteur est même un syndiqué élu parmi ses pairs. C'est
comme ça un peu partout dans le monde. Naturellement, on n'y a pas
pensé en 1968. C'est une tradition qu'on n'a pas Incorporée. Cela
ne l'est pas maintenant Nous croyons que ça devrait l'être.
Ce qui est arrivé dernièrement, c'est que le rapport
Després recommandait, à l'annexe 3, je crois, une nouvelle
façon de nommer les recteurs, une nouvelle procédure et disait de
procéder à des expériences. Cela a été fait
à l'INRS et à l'ETS dernièrement. Les gens ont
accepté de procéder à des expériences. Le
prétexte pour faire ces expériences était la longueur du
processus. Je vous dirai, M. le député, que nous-mêmes,
chez nous, à Chicoutimi, la dernière fois, nous avons fait un
processus de consultation des professeurs parallèle. Nous avons
procédé à une élection. Cela ne nous a pas pris
trois jours. Nous avons fait une consultation, nous avons entendu les trois
candidats Nous avons fait l'élection pendant deux jours et
c'était fait. Pourquoi maintenant le siège social
prétend-il que ce processus est long? On met le tort sur la longueur
d'un processus qu'ils ont eux-mêmes mis de l'avant pour exclure
graduellement les professeurs de la consultation et pouvoir recruter
eux-mêmes les recteurs qu'ils désirent. C'est là le danger
actuel. Nous croyons que la loi devrait prévoir la consultation
obligatoire du corps professoral.
M. Gendron: Compte tenu du temps qui m'est imparti, Je vous
remercie, M. Leblond et votre équipe.
Le Président (M. Paré): Est-ce que vous voulez
réagir, M. le ministre?
M. Ryan: Oui, je voudrais dire un petit mot. Je pense que
ça va demander qu'on réfléchisse beaucoup de part et
d'autre, mais Je ne suis pas capable de souscrire à la conception de
l'université que vous mettez de l'avant, je vous le dis bien
franchement. Je pense que la conception de l'université moderne doit
embrasser plus large que ça, surtout le rapport avec la
communauté plus large. Je pense qu'il y a quelque chose qui fait
défaut dans votre perspective. En tout cas, comme représentant du
gouvernement, je ne suis pas capable d'y souscrire.
Vous disiez qu'un peu partout ailleurs les recteurs sont choisis par les
professeurs et tout. Il faut se réveiller. Je pense que ce n'est pas le
cas. Allez à l'Université Columbia, à l'Université
Harvard, à l'Université Yale, à l'University Berkeley, ce
ne sont pas les professeurs qui choisissent le recteur. Il y a des
consultations qui se font. La nomination se fait au "Board of Governors" qui
consulte, qui forme, évidemment, un comité spécial pour
chercher des candidats. À McGill, c'est la même chose. Je crois
que vous ne saisissez pas bien le rôle du conseil d'administration. Son
rôle n'est pas de diriger la pédagogie. Ce n'est pas de dirigor
l'activité scientifique de l'université. Il y a toutes sortes
d'autres instances qui s'occupent de ça. Il y en a qui sont
prévues dans la charte de l'Université du Québec,
d'ailleurs. Le rôle du conseil d'administration, c'est d'assurer la
gestion générale des affaires de la communauté
universitaire et, dans le cas des grandes universités modernes, c'est
d'assurer le lien avec la communauté plus large, de manière que
la communauté plus large aille chercher des ressources pour aider
l'université à bien fonctionner.
Cette dimension, en tout cas, nous autres, on veut l'introduire
davantage et, quand on veut mettre plus de représentants des milieux
socio-économiques, ce n'est pas pour contrôler l'enseignement de
l'économie et l'enseignement des sciences de la gestion ou de la
biologie ou de la zoologie. Pas du tout. C'est parce qu'on veut que cette
perspective plus large de personnes qui ont été
mêlées par leur expérience à des
préoccupations diversifiées et à des Initiatives
Intéressantes et profitables pour la communauté soit mise au
service de l'université.
Je vous donne cette réaction bien simplement. Je respecte l'autre
point de vue. J'ai l'impression qu'il y a quelque chose de
médiéval là-dedans. L'université
médiévale fut une grande chose, mais là nous sommes au
XXIe siècle.
M. Leblond: Est-ce que je peux conclure, M. le
Président?
Le Président (M. Paré): Oui, en espérant que
vous ayez une réaction rapide.
M. Leblond: Bon, écoutez, je ne veux pas faire de
politique, ce n'est pas mon rôle, mais puisqu'on a dit que nous
proposions des théories médiévales, je pense que c'est
aller un peu loin. Nous sommes des professeurs d'aujourd'hui, modernes et
dynamiques. Nous l'avons prouvé à maintes reprises. Nous sommes
le fer de lance de l'évolution du Québec. Ce qui nous manque
présentement, c'est des professeurs. Vous nous avez fourni uniquement,
depuis quelques années,
des chargés de cours. Ce dont on a besoin maintenant pour
développer le Québec, c'est de professeurs et de rendre notre
université dynamique, moderne et entreprenante. On ne peut pas avoir une
université dynamique et entreprenante en gérant au
quatrième niveau. Je pense qu'il faut la gérer au niveau de base,
là où le dynamisme s'exerce.
C'est le modèle que nous proposons. Si le gouvernement ne le
retient pas, je pense que c'est à lui de prendre ses décisions.
Nous respectons l'opinion du ministre, naturellement, et nous voulons, en
conclusion, le remercier de nous avoir permis, avec les autres membres, ses
collègues parlementaires, de discuter de la modification de la loi 63,
ce qui nous a amenés, et j'en suis très heureux, à
regarder l'ensemble du modèle. Je pense que le ministre lui-même a
annoncé des choses intéressantes et peut-être des
modifications. Nous insistons, quand même, pour qu'il regarde à
nouveau nos suggestions et nous croyons fermement que ces suggestions sont les
meilleures pour notre université. Merci beaucoup.
Le Président (M. Paré): Merci, M. Leblond, ainsi
que les autres personnes qui vous accompagnent de la Fédération
des professeurs d'universités du Québec, pour votre contribution
aux travaux de cette commission.
Je rappelle aux membres de la commission que nos travaux reprennent
demain avant-midi, à 10 heures. Donc, les travaux sont ajournés
à demain matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 22)