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Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le mardi 4 avril 1989 - Vol. 30 N° 50

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi 63 - Loi modifiant la Loi sur l'Université du Québec


Journal des débats

 

(Quinze heures cinquante et une minutes)

Le Président (M. Paré): Le quorum étant maintenant atteint, je déclare la séance de la commission permanente de l'éducation ouverte, en rappelant que le mandat de cette commission est de procéder à des consultations particulières dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi 63, Loi modifiant la Loi sur l'Université du Québec.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Paré): il n'y a donc pas de remplacements. Je vous rappelle l'ordre du jour. Déclaration d'ouverture du ministre et remarques préliminaires du porte-parole de l'Opposition officielle. Viendront ensuite les représentants de l'Université du Québec, pour une période de 90 minutes, et ceux de la Fédération des professeurs d'universités du Québec, pour une période de 60 minutes.

J'aimerais Informer les membres de la commission que l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue ne sera pas entendue ici à la suite d'une demande de sa part.

J'inviterais donc tout de suite, de façon à ne pas retarder les travaux de la commission, le ministre de l'Éducation à nous faire part de ses remarques préliminaires.

Remarques préliminaires

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, permettez-moi, tout d'abord, de saluer les membres de la commission parlementaire que je suis très heureux de retrouver après une période d'absence de quelques mois, puisque nous ne nous étions point revus, comme commission, depuis l'ajournement des fêtes. Lorsque nous nous sommes quittés, à l'ajournement des fêtes, nous avions déjà adopté en deuxième lecture, c'est-à-dire au stade du principe, le projet de loi 63 dont l'objet est la modification de la Loi sur l'Université du Québec. Nous étions convenus, vu les réactions qui nous étaient parvenues de milieux immédiatement concernés, de réserver du temps au début de la présente année pour l'écoute en commission parlementaire des vues que l'on voudrait bien communiquer aux députés et, par leur entremise évidemment, au gouvernement, ainsi qu'à l'Assemblée nationale.

Les séances que nous tiendrons aujourd'hui, demain et jeudi ont précisément pour objet de donner suite à cette décision prise par la commission d'entendre les organismes qui veulent présenter leurs vues sur le projet de loi 63. Je les avertis tout de suite que nous les écouterons du côté gouvernemental avec l'intérêt que nous portons toujours aux représentations qui nous sont faites en provenance de milieux extérieurs à l'Assemblée nationale et que, dans la mesure où l'on nous soumettra des représentations susceptibles de contribuer à l'amélioration du projet de loi, nous les accueillerons avec intérêt et ouverture d'esprit.

J'ai pris connaissance d'à peu près tous les mémoires qui ont été portés à l'attention de la commission parlementaire en prévision de ces auditions publiques et je crois constater que, de manière générale, les grands objectifs du projet de loi suscitent des réactions plutôt favorables.

Le premier objet du projet de loi vise à élargir la composition de l'assemblée des gouverneurs de l'Université du Québec et du conseil d'administration des universités constituantes de manière à faire une place plus large en particulier aux représentants des milieux socio-économiques de chaque région. Nous avons reçu des réactions qui ne sont pas nécessairement convergentes au sujet de cet objectif. Nous les examinerons attentivement, mais, dans l'ensemble, Je crois avoir constaté une adhésion assez répandue à ce concept suivant lequel l'université n'échappant point à la règle générale doit disposer autant que possible dans son sein de mécanismes de vérification de sa gestion et de sa performance qui permettent une participation assez large de la communauté, plus étendue, au service de laquelle elle a été placée par le législateur.

L'élargissement de la composition de l'assemblée des gouverneurs de l'Université du Québec et du conseil d'administration de chacune des universités constituantes que nous envisageons dans le projet de loi a pour objet de faire en sorte que cette implication de la communauté plus large soit plus sentie, plus substantielle, plus efficace. Nous sommes convaincus qu'il s'agit d'une orientation sage et apte à répondre à des attentes très répandues. Encore une fois, nous écouterons les réactions qu'on voudra nous soumettre à ce sujet parce que nous avons également le souci de faire en sorte que la mission propre, la nature, les éléments essentiels de l'institution universitaire soient traités avec toute la considération qui convient de la part d'une société civilisée et démocratique.

Le deuxième objet de ce projet de loi, c'est l'octroi à l'Université du Québec à Montréal d'un statut d'université associée en vertu duquel l'UQAM se verrait attribuer plusieurs prérogatives qui sont actuellement exercées de manière exclusive et entière par le siège social, c'est-à-dire par la direction générale de l'Université du Québec. L'octroi de ce statut particulier à l'UQAM répond à un voeu qui est exprimé depuis

longtemps par cet établissement universitaire et à la réalisation duquel la direction de l'Université du Québec n'a jamais été Indifférente. Les circonstances ont empêché que ce voeu ne se réalise. Depuis déjà plusieurs années, des circonstances électorales, parfois des circonstances attribuables à une conjoncture sociale ou politique particulière dans d'autres cas, ont empêché que ne se réalisent des projets conçus antérieurement par les autorités concernées de l'Université du Québec et de l'Université du Québec à Montréal, ainsi que par le gouvernement. Je crois que nous avons réuni, cette fois-ci, toutes les conditions qui devraient permettre d'en venir à un dénouement assez rapide de ce dossier qui a tardé à trouver sa solution.

Un corollaire de cette disposition que nous introduisons dans le projet de loi pour octroyer un statut d'université associée à l'Université du Québec à Montréal, c'est la modification d'autres dispositions de la loi constitutive de l'Université du Québec en vertu desquelles l'Université du Québec est apte à adopter des règlements susceptibles de s'appliquer aux universités constituantes et aux instituts affiliés. Nous avons trouvé une formule pour exprimer cet ajustement nécessaire, qui a soulevé des objections de la part de plusieurs milieux, en particulier de la part de syndicats de professeurs. Lorsque nous avons rédigé le texte, je dis en toute simplicité que nous n'avions pas cette intention en vue, c'est-à-dire l'intention de donner à l'Université du Québec le pouvoir d'imposer des règlements particuliers à chacune de ses constituantes, de les tenir au bout de la fourche pour ainsi dire, de les tenir à la merci de ses volontés passagères ou permanentes qui pourraient être entachées d'arbitraire.

J'ai pris connaissance avec beaucoup d'Intérêt des représentations relativement nombreuses dont nous avons été saisis à ce sujet et je voudrais assurer ceux et celles qui se sont exprimés en ce sens auprès des membres de la commission parlementaire que nous examinons avec intérêt le point de vue dont on nous a fait part. Je souhaite personnellement qu'il soit possible peut-être de réexaminer la formulation que nous avons retenue en vue d'en trouver une qui dira peut-être plus exactement ce que nous voulons dire, sans ouvrir la porte à toutes sortes de développements qui pourraient être Imprévisibles. Nous avons été attentifs à ces représentations et je pense que nous pourrons cheminer ensemble, les organismes qui viendront nous rencontrer et nous-mêmes, les députés, de manière à essayer de mieux comprendre ce que pourrait être une formule vraiment capable de donner satisfaction, de façon raisonnable, à tout le monde.

Un autre point intéressant dont j'ai pris note concerne la participation des chargés de cours à l'activité des organismes directeurs des établissements constituants, de même qu'à l'assemblée générale de l'Université du Québec.

Les chargés de cours, nous le savons, occupent une place très importante dans cette multitude de services d'enseignement que l'Université du Québec et ses constituantes mettent à la disposition de la population. Même si elles n'ont pas le statut de professeur permanent, ces personnes qui ont le statut de chargé de cours rendent des services signalés. Les chargés de cours, si mes renseignements ne datent pas trop, dispensent à eux seuls plus de la moitié des services d'enseignement offerts au premier cycle des études universitaires. On pourra me corriger si mes chiffres sont erronés, mais je ne pense pas qu'ils le soient beaucoup. On ne peut pas les considérer comme une matière secondaire ou comme des éléments négligeables. Ce sont des éléments très Importants. Nous avons déjà eu l'occasion de dire aux chargés de cours l'importance que nous attachons à leur travail. Il n'est pas facile de trouver des solutions à certains problèmes dont ils nous ont saisis, mais je voudrais vous assurer, M. le Président, que nous chercherons loyalement, à l'occasion des auditions publiques de la commission parlementaire, le moyen de faire droit au désir des chargés de cours d'avoir une participation à l'activité des organes directeurs suprêmes des établissements constituants de l'Université du Québec ou encore de l'assemblée générale de l'Université du Québec.

Je pense bien que les remarques que je viens de faire résument l'essentiel du projet de loi 63 et aussi, je pense, l'essentiel des représentations dont nous avons été saisis jusqu'à maintenant.

Il y a une autre représentation à laquelle je voudrais faire écho dès le début de nos travaux pour que nous puissions nous arrêter ensemble aux problèmes qu'elle soulève. Une association dont je préciserai le nom pour les fins du compte rendu de nos débats, mais je ne suis pas sûr si c'est le syndicat des professeurs des universités du Québec ou la Fédération des associations de professeurs des universités - si quoiqu'un peut me faire signe - nous a soumis un mémoire qui porte entièrement sur le thème de la liberté d'enseignement. Vous souvenez-vous du nom de l'organisme?

Une voix: C'est la FAPUQ.

M. Ryan: C'est la FAPUQ, la Fédération des associations de professeurs des universités du Québec, qui a soumis un mémoire traitant entièrement du thème de la liberté d'enseignement et de recherche à l'université. La FAPUQ, à l'aide d'une documentation abondante, ayant elle-même travaillé ce sujet d'une façon approfondie au cours des derniers mois ou des dernières années, nous a fait part de son voeu de voir Inscrire dans la loi constitutive de l'Université du Québec une disposition où serait garantie la liberté fondamentale de l'enseignant universitaire. Elle a cité, à l'appui de sa proposition, des dispositions que l'on trouve déjà dans

la charte de l'Université de Montréal et dans la charte de l'Université Laval. Je n'ai pas eu le temps d'examiner toutes les chartes des universités québécoises ou d'autres universités qui pouvant nous intéresser ailleurs au Canada, aux États-Unis, en France ou ailleurs, mais je voudrais simplement signaler, à ce moment-ci, que nous ne sommes pas indifférents à cette recommandation qui nous a été faite par la FAPUQ. Nous aurons le temps de l'examiner attentivement; la FAPUQ viendra présenter elle-même ses vues à ce sujet. Nous sommes tous convaincus, j'en suis persuadé, de l'importance tout à fait fondamentale de la liberté de l'enseignement dans l'économie d'un système universitaire digne de ce nom.

Comme, au Québec, nous avons toujours veillé à préserver avec un soin particulier le respect qui doit être inhérent à l'exercice de la fonction d'enseignement et de recherche universitaire, il faudra que nous nous demandions bien franchement, bien loyalement, si nous n'aurions pas intérêt - traitant de l'Université du Québec qui, à plusieurs égards, est déjà, de fait, et appelée à devenir, probablement davantage au cours des années, un de nos grands établissements universitaires québécois - s'il n'y aurait pas une sorte de responsabilité morale à tout le moins pour le législateur d'inscrire une disposition dans la loi constitutive de l'UQ reconnaissant le principe de la liberté de l'enseignant universitaire et garantissant cette liberté dans le texte qui constitue la matrice juridique à la base de toute l'activité de l'Université du Québec.

Voilà, M. le Président, quelques remarques que je soumets en toute cordialité à mes collègues de la commission parlementaire. Je voudrais, avant de clore, adresser des remerciements, tout d'abord, à la direction de l'Université du Québec, que nous aurons l'occasion d'entendre tantôt, et à la direction de l'Université du Québec à Montréal également lesquelles nous ont fourni, dans la préparation de ce projet de loi et dans l'examen des problèmes afférents à l'Université du Québec de manière plus générale, une collaboration exemplaire au cours des dernières années, plus particulièrement les derniers mois. Je voudrais leur adresser des remerciements sentis et les assurer de l'esprit dans lequel nous avons conçu avec eux le projet de loi et celui dans lequel nous en poursuivrons l'étude en écoutant, d'abord, les organismes qui veulent se faire entendre et, ensuite, en examinant article par article le projet de loi afin de l'acheminer vers le stade de l'approbation finale par l'Assemblée nationale.

Je termine mes remarques ici et je veux vous assurer de la pleine collaboration du gouvernement dans l'étude du mandat confié à la commission parlementaire de l'éducation autour du projet de loi 63.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le ministre. La parole est maintenant au critique de l'Opposition en matière d'éducation, le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, je vous remercie. Moi aussi, j'aurai l'occasion de saluer tous les intervenants qui, lors de la présentation de leur mémoire, viendront donner leur point de vue sur les dispositions concernant le projet de loi 63. Il est de coutume, M. le Président, dans les remarques préliminaires, qu'on ait la liberté de dire ce qu'on veut et j'en profiterai, pendant quelques minutes, avant de parler plus spécifiquement du projet de loi 63, pour rappeler un peu le contexte historique dans lequel s'inscrit ce projet de loi.

Sans faire un très long historique, il faut se rappeler que ce projet de loi témoigne, en tout cas en ce qui me concerne, du cheminement pour le moins laborieux du gouvernement dans le dossier universitaire, particulièrement en ce qui concerne le fonctionnement, les orientations et le financement du réseau UQ. Rapidement, sans faire une longue analyse, il faut se rappeler, de triste mémoire, le rapport Gobeil, la commission parlementaire de l'automne 1986 sur les universités, la création d'un groupe de travail sur révolution du réseau UQ, qui, lui, avait remis son rapport en juin 1987, la réaction du ministre de l'Éducation au rapport Després - une espèce d'encyclique qu'on a eu l'occasion de recevoir du ministre et que j'arrivais à peine, comme critique en matière d'éducation... Là, j'ai reconnu le ministre de l'Éducation en me tapant une magnifique lettre de 17 ou 18 pages et ça, c'est régulier - et, enfin, le dépôt du projet de loi 63. Mais, durant ce temps, du temps s'est écoulé.

À la lumière de tout ceci, je pense qu'on doit au moins constater que le projet de loi 63 se situe dans le prolongement des orientations définies par le ministre au printemps dernier qui, à certains égards, s'inspirent du rapport Després. On aura l'occasion, au cours des échanges de propos qu'on aura avec les différents groupes qui ont réagi au projet de loi 63, d'évaluer ce qui se rapproche des recommandations Després et ce qui s'en s'écarte très sensiblement. Il faut aussi constater que le projet de loi fournit une réponse très partielle à la fois aux nombreuses recommandations du rapport Després et aux préoccupations plus larges concernant l'avenir du réseau des universités constituantes ou de ce qu'on appelle dans le jargon le réseau UQ.

Il y a un problème majeur dans le réseau universitaire et pas uniquement dans le réseau UQ - je pense que le ministre était déjà sensible à cette problématique, son parti faisait accroire qu'il l'était beaucoup, j'aurai l'occasion d'y revenir - c'est toute la problématique, beaucoup plus fondamentale que le projet de loi 63, du financement des universités et, dans le cas qui nous intéresse, de l'Université du Québec. La situation précaire des universités est bien

connue: déficits accumulés de 140 000 000 $ au 30 juin 1988; formule de financement dépassée, désuète, inadéquate, Inappropriée. Deux ans et demi après la commission parlementaire sur le financement, on attend toujours le nouveau mode de financement promis par le Parti libéral lors de la dernière élection, tandis que le plan de transition du ministre finit cette année.

Vous pouvez continuer d'en parler à la députée de Jacques-Cartier; elle a écrit une longue lettre au premier ministre, disant: Je suis obligée de m'adresser directement au premier ministre. Une belle lettre, d'ailleurs, très bien faite; je vous félicite, Mme la députée de Jacques-Cartier. Mais c'est un peu étonnant qu'une membre de la commission de l'éducation soit obligée d'envoyer une belle lettre au premier ministre disant: Est-ce qu'il se peut que vous vous occupiez de cela à un certain moment?

On sait que l'Université du Québec a récolté une maigre part des crédits alloués dans le cadre de ce plan. Alors qu'elle compte 28 % de la clientèle étudiante, elle a récolté à peu près 17 % des sommes en jeu. Il faut se demander s'il s'agit d'une curieuse façon de récompenser le réseau UQ qui s'est imposé une sévère discipline budgétaire et a contenu son déficit dans des proportions fort modestes. Toutes proportions gardées, le déficit du réseau de l'université est le plus petit de l'ensemble du réseau universitaire. Je n'ai pas envie de faire le tour des problèmes de financement, mais il serait toujours temps de le faire, parce que le gouvernement ne semble pas avoir compris que les problèmes de financement du réseau UQ sont de plusieurs ordres, mais ils sont toujours aussi majeurs, aussi sérieux et aussi Importants.

Prenons le sous-financement de l'UQAM; la formule actuelle fondée sur les clientèles est inadaptée, à tout le moins, à la situation des instituts de recherche. Je ne connais pas un institut de recherche qui n'a pas dit: Cela n'a pas de sens. Et ces gens se targuent de faciliter et de favoriser la recherche, mais cela ne paraît pas dans la formule de financement. Mais ils sont pour cela à mort. La formule de tient pas compte des facteurs de taille et d'éloignement pour les universités en région.

Je vois le député de Rimouski Ici. Je suis convaincu que, s'il rencontre de temps en temps les gens de son milieu universitaire, il doit sûrement entendre dire qu'il est sous-financé. Je ne dis pas qu'il donne suite à ces discussions, mais il en entend au moins parler. Il doit surtout entendre parler de la responsabilité d'appui aux collectivités locales. Moi, j'ai toujours prétendu que le réseau UQ offre une excellente qualité d'appui aux collectivités locales des régions du Québec et je ne change pas d'avis: le Québec de base n'est pas seulement Montréal et Québec. Je n'ai rien contre les grands centres, mais les régions existent et il est Important que les universités donnent un appui aux collectivités locales. Elles le font. Cependant, elles ne reçoi- vent pas le financement requis pour le faire. Je vais y revenir. Je ne suis pas d'accord pour qu'on leur dise: Écoutez, ce sont des activités qui doivent s'autofinancer. Cela n'a pas de bon sens, parce qu'il y a d'autres types d'activités. On ne peut pas parler des deux côtés de la bouche en éducation. C'est un investissement ou ce n'en est pas. Si c'est un investissement, on va prendre le mesures requises, dans le même genre que la belle lettre que Mme la députée de Jacques-Cartier a envoyée au premier ministre. Elle était sérieusement convaincante. On verra les résultats. (16 h 15)

Au sujet des universités en région, le rapport Després recommandait l'Instauration d'un mécanisme semblable au Northern Grant ontarien, en vertu duquel les subventions de base des universités situées en région périphérique sont majorées de 10 % pour tenir compte des coûts supplémentaires. Parce que jamais on ne me fera accroire qu'il n'y a pas de coûts supplémentaires. Il y en a beaucoup dans les universités constituantes du réseau. Il y a des coûts supplémentaires et ce n'est pas vrai que la formule actuelle les assume. Le ministre n'a cependant pas fait connaître ses intentions à cet égard, se contentant de reporter le tout à l'éventuelle formule de financement.

Enfin, il n'y a rien, dans les crédits budgétaires déposés à la fin de mars, qui indique un véritable redressement pour 1989-1990. On sait que le manque à gagner des universités québécoises, par rapport à l'Ontario, est évalué à 150 000 000 $. On connaît le "show" de ce gouvernement par rapport aux crédits et au budget. Les crédits sont devenus une opération d'artifice qui ne veut pas dire grand-chose, parce que le gouvernement veut être capable de se flatter ce que vous savez, en disant: On est sensible aux revendications que les groupes nous font. Il va y avoir quelques petits ajustements de circonstance probablement dans le discours sur le budget, mais qui ne corrigeront pas du tout le problème de fond. Depuis plusieurs années, l'éducation devait être une priorité, un Investissement pour ce gouvernement. Ce n'était même plus une dépense, donc, c'est normal qu'on ne voie pas ça dans les crédits, ce n'est pas une dépense. Il n'y a pas de dépense en éducation avec ce gouvernement, ce n'est qu'un investissement pour (a jeunesse, pour l'avenir. C'est peut-être pour ça qu'il n'y a rien dans les crédits, même pas l'augmentation conforme à l'inflation. Il y a vraiment une réduction. Encore des coupures, tant au primaire et au secondaire qu'au niveau collégial. Une coupure de 12 000 000 $ au collégial.

Il ne s'agit pas de nier toute pertinence au projet de loi 63, mais de signifier clairement qu'il y a des problèmes urgents, majeurs, notamment en matière de financement, au sujet desquels le gouvernement devrait arrêter de faire ses devoirs et de virer les papiers à l'envers.

Tout cela, ça donne du temps et on fait toutes sortes d'analyses. On sait qu'on en a un qui analyse longtemps, notre cher ministre. Non seulement il écrit de longues lettres, mais il lit longtemps; il faut qu'il voie tout deux fois, il l'a dit en Chambre, cet après-midi. Pour lui, lire un document une fois, ce n'est pas assez; alors, il faut qu'il le lise deux fois pour être certain qu'il a bien compris. Et quand il a pris connaissance du document, souvent, il va consulter. Je n'ai rien contre ça, et là-dessus, je vais le féliciter de la consultation, sauf qu'à un moment donné, sur des sujets où tout le monde est unanime, lorsqu'on a le constat, qu'on a fait l'évaluation et qu'il faut arriver avec un correctif, je ne vois pas pourquoi il faut prendre quatre ans.

Au sujet du projet de loi 63, le ministre a rappelé l'objet de ce projet de loi. On aura l'occasion de voir si sa lecture des mémoires correspond à celle qui nous sera faite par les personnes concernées. Je n'ai pas l'intention d'être très long, en ce moment, sur les principes importants véhiculés par le projet de loi. En un mot, c'est un projet de loi qui modifie la Loi sur l'Université du Québec. Ce ne sont pas des dispositions bien compliquées, on est capables de comprendre ça. Cela modifie, entre autres, la composition des conseils d'administration, du siège social et des constituantes. Il y a une autre justification importante, c'est de conférer un statut d'université associée à l'Université du Québec à Montréal. Cela ne devait pas être bien dramatique dans le réseau, sauf qu'il y en a qui ont lu ça autrement et on va regarder ça avec eux. Bravo, je suis content qu'on ait l'occasion de regarder ça avec ceux qui l'ont analysé plus en profondeur. On a certaines questions à leur poser. Je porterai un Jugement à la fin de nos consultations, et on verra, à la suite des échanges de propos qu'on aura avec ces groupes, s'il y a une perception différente entre ceux qui nous en parleront et le ministre qui disait: Tout compte fait, il n'y a pas de problème; au niveau des grands objectifs, ça va. C'est le ministre qui disait ça tantôt.

J'ai aussi regardé la douzaine de mémoires reçus. Ils nous indiquent, d'ailleurs, que plusieurs aspects du projet suscitent des appréhensions sérieuses. Je ne dis pas que tout va, je dis qu'il y a des appréhensions sérieuses dans certains cas. Dans d'autres, il y a des réticences majeures et, dans certains cas, il y a même des objections catégoriques de la part d'intervenants. Donc, on mettra ça ensemble et on regardera si, à la sortie du tunnel, on peut dire encore: il n'y a pas de problème, la plupart sont d'accord avec ce projet de loi.

Comme Opposition - et if n'y a pas de cachette, je ne peux pas parler des deux côtés de la bouche - on s'était prononcés, en décembre, en faveur de l'adoption du principe du projet. Je ne change pas d'avis. Il y a des principes à l'état pur contre lesquels on ne peut pas être. Cependant, quand on déshabille le projet de loi, quand on l'analyse en profondeur, on se rend compte qu'il y a tellement d'éléments qui sont liés ou non au principe qu'on a le droit, je pense, de remettre en question la pertinence de notre appui ou pas. Ce n'est pas ce que je fais en ce moment. Tout ce que je dis, c'est que j'avais énoncé un certain nombre de réserves Importantes. J'avais suggéré des amendements en ce qui concerne, notamment, la composition de l'assemblée des gouverneurs et des conseils d'administration des constituantes. Je vais attendre de les voir.

Je vais rapidement résumer mes préoccupations et les premières réactions qu'on avait eues au sujet des structures de direction. Le projet de loi 63 modifie les règles de composition de l'assemblée des gouverneurs et du conseil d'administration des universités constituantes, essentiellement pour augmenter le poids des membres socio-économiques. Je n'ai pas d'objection à cela et je l'ai dit au ministre en Chambre lors du discours de deuxième lecture, mais je trouve qu'on y est allé un peu fort, même pas mal fort, parce qu'on a renversé les proportions. Les "socio" étaient 3 sur 22 et dorénavant ils seront 7 sur 24; en gros, on passe du septième au tiers. Alors, moi, Je trouve que c'est y aller fort. Il y a là-dedans une forme déguisée - puis, c'est ce qu'il faut fouiller avec les groupes - de privatisation sans le dire. Parce que ce sont d'excellents habilleurs. Ces gens-là sont très forts dans l'habillage, dans l'art de cacher des affaires. Alors, notre rôle, c'est de regarder d'une façon un peu plus Intégrale le produit fondamental. Cela ne m'intéresse pas de privatiser les universités, je ne suis pas pour ça. Quant à commencer à Incorporer un nombre passablement élevé de gens qu'ils vont s'arranger pour nommer, parce qu'on les connaît, j'ai des questions à poser là-dessus, surtout quand on y va dans la proportion de un tiers.

Les socio-économiques, J'adore ça, sérieusement, mais ils ne peuvent pas tout faire parce qu'ils sont très préoccupés, d'abord par leur appartenance à leur entreprise, en règle générale, et je ne suis pas convaincu qu'on peut avoir jusqu'à la moitié d'un conseil d'administration provenant de l'entreprise privée avec la seule préoccupation de l'entreprise privée et continuer à prétendre qu'on a une université moderne, démocratique, ouverte et sensible à d'autres préoccupations. Je ne suis pas un grand univer-saliste, mais je prétends qu'un élément important de la société, c'est effectivement d'être capable de traduire dans le milieu universitaire une sorte d'entièreté des courants, des courants de formation, des courants de pensée, des courants de recherche. En ce sens, même si je n'ai rien contre l'entreprise privée, je ne suis pas sûr qu'on doive faire des conseils d'administration des constituantes semblables aux grands CA de compagnies, aux grands CA de 'business" avec un gouvernement de "business". Là, tout ce qui les intéressent c'est de "balancer" les colonnes et les

colonnes ne 'balancent" pas, on a des problèmes. Ce n'est pas ça l'éducation universitaire et ta formation de l'avenir. Il faut que cette Institution demeure souple, ouverte aux préoccupations, à l'adaptabilité. On va examiner ça.

On a de sérieuses réserves qui semblent assez partagées - je suis content à ce sujet - au sujet de l'augmentation très significative du nombre de membres socio-économiques, je l'ai dit tantôt. L'ajout de deux "socio" par constituante, en tout cas en ce qui me concerne, me semble amplement suffisant. Je fais mes remarques en espérant qu'au-delà de vos mémoires, puisque je pense que c'est de cette façon qu'on réussit à bonifier une consultation, vous aurez le goût de faire des commentaires là-dessus. J'ai lu vos mémoires et, si vous venez nous relire ce qu'on a déjà lu sans autres commentaires, je ne suis pas sûr que ce soit bien éclairant pour un décideur qui a à améliorer le contenu d'un projet de loi. Alors, dans ce sens, j'espère que vous pourrez tous élargir un peu plus votre point de vue.

Une autre lacune majeure réside dans l'absence complète de représentations des chargés de cours. Le ministre en a parlé parce que je lui en ai déjà pas mal parlé. Mais je prétends que de plus en plus, pour des raisons de modernité - c'est ainsi que ça marche, que voulez-vous que je vous dise? - dans certaines universités, au-delà de 50 % des dispensateurs de formation en enseignement, en recherche ou autres, sont des chargés de cours. Alors, quelle est cette idée de ne pas leur donner une voix au chapitre? Il ne faut pas les voir comme il y a 35 ou 25 ans: un petit complément de revenus à l'université et ils continuent dans leurs terres - si vous me permettez l'expression - économiques, sans être associés au projet global de l'université, à la conception de l'avenir, à la recherche et à l'appui à la collectivité. Il faut qu'ils se sentent impliqués, partenaires et associés. Là, vous dites: C'est Important, mais on ne peut pas les placer là, on regardera ça un peu plus tard. Je ne suis pas d'accord. C'est l'endroit pour décider quelle place on leur donne. Je ne dis pas qu'avec ce que je viens de dire on aura réglé la problématique des chargés de cours. Je dis simplement qu'on ne pourra pas écarter cette problématique. Par qui est faite la majeure partie de renseignement au premier cycle? Par les chargés de cours. Donc, on ne peut pas être insensibles à cela, c'est une réalité du réseau universitaire; il faut regarder ça.

Au cours des dernières années, les chargés de cours ont multiplié les démarches auprès du ministre pour obtenir une représentation au sein de l'UQ. Concernant spécifiquement l'assemblée des gouverneurs, ils demandent d'avoir deux représentants, soit un nombre égal aux étudiants. Il me semble que ceci mérite d'être discuté. Je suis pour ça. Comment, en effet, justifier l'exclusion des chargés de cours du processus décisionnel, compte tenu de leur apport si- gnificatif et déterminant à la mission de l'université? Une reconnaissance tangible de cet apport passe par une représentation dans les instances de direction. On ne peut pas juste écouter. De temps en temps, après avoir écouté,

I faut conclure. Cette consultation permettra de recueillir l'opinion de divers groupes concernés et d'examiner les modalités de cette représentation. Concernant les CA des constituantes, c'est la même chose; ce sont les mêmes remarques. Donc, Je ne les fais pas. J'espère avoir à peu près les mômes commentaires.

Par rapport à la disparition de la consultation du corps professoral pour la nomination des deux personnes exerçant une fonction de direction - parce qu'on sait que les vice-recteurs perdent leurs postes protégés et les professeurs craignent qu'on ne se serve de ces deux postes pour nommer des administrateurs - le ministre devra indiquer ce qui justifie l'amendement proposé. Je réitère ma conviction que le corps professoral doit être associé de près aux procédures relatives à la nomination des recteurs et des directeurs de constituantes. Il me semble que certaines nominations récentes, d'ailleurs, aient donné lieu à des frictions dans le milieu. Les audiences permettront peut-être de jeter un peu plus de lumière en regard de cette procédure utilisée. Je donnerai quelques exemples au moment des questions.

Pouvoir réglementaire. Il me reste deux remarques avant de conclure. Alors que la loi actuelle permet à l'assemblée des gouverneurs et au conseil des études d'adopter des règlements généraux affectant, notamment, les structures et le fonctionnement des constituantes, l'organisation de l'enseignement, l'admission des étudiants, les procédures de promotion des professeurs, le projet de loi 63, lui, permettra d'adopter des règlements particuliers. Le ministre a dit: Ce n'est pas ce qu'on voulait. On ne voulait pas que ce soit dangereux. On ne voulait pas que cela donne la possibilité au réseau UQ d'intervenir. Mais que voulez-vous? On a ce problème-là comme Opposition. On se le fait dire constamment - on nous l'a dit encore à la période de questions - on ne comprend pas qu'on ne sache pas lire. Mais quand tout le monde, autre que nous qui ne comprenons pas et qui ne savons pas lire, nous dit la même chose, il y a un problème. il faudrait regarder ça. Tout le monde a compris que cette institution de pouvoirs particuliers pouvait être dangereuse et que cela pourrait effectivement être carrément une ingérence dans l'autonomie des constituantes. Tous les professeurs ont vu ça et ils prétendent que c'est une subordination dangereuse. Il va falloir regarder ça et s'Interroger là-dessus.

Quant au statut d'université associée de l'UQAM - qui est quand même un sujet majeur dans le projet de loi 63, c'est presque sa raison d'être - ce projet de loi permettra à l'Université du Québec à Montréal d'avoir un statut d'université associée. Cela vient donner force légale à

une entente déjà intervenue le 16 septembre 1987 entre l'UQAM et l'UQ et entérinée ensuite par l'assemblée des gouverneurs concernant le contenu du statut particulier de l'Université du Québec à Montréal au sein de l'Université du Québec. Je ne veux pas revenir sur cette entente qui constituait l'aboutissement de très très longues négociations et dont le contenu se retrouve dans le présent projet, à l'exception de la dimension du financement. J'ai déjà indiqué que, sur ce volet, lors de l'adoption du principe, on était d'accord avec ce nouveau statut d'université associée qui répond aux voeux de la communauté universitaire de l'UQAM et qui vient reconnaître sa situation particulière.

On peut faire de beaux discours de part et d'autre, mais c'est clair, en ce qui me concerne - je connais un peu le réseau UQ pour y avoir fait des études, pour avoir été commissaire-étudiant dans l'ancienne direction générale de l'Outaouais, pour avoir aussi été commissaire-étudiant à l'UQAT - que le réseau UQ est majeur, important, significatif, mais dans le réseau l'Université du Québec à Montréal n'est pas tout à fait de même nature que le reste des constituantes. De toute façon, cela a été longuement discuté, comme je l'ai mentionné tantôt, et on ne peut pas ne pas tenir compte de ce statut particulier. Si ce changement ne rencontre pas d'objections majeures, il a quand même suscité des inquiétudes qu'il va falloir regarder quant à l'avenir du financement et à l'avenir même du réseau UQ, pour ce qu'il en reste, et il faudra dissiper certaines craintes, et j'espère que les auditions, en tout cas, nous permettront de le faire. (16 h 30)

Conclusion. J'espère que les discussions qu'on aura nous permettront de clarifier certaines craintes parfois justifiées, d'autres fois injustifiées et, puisque le projet de loi a suscité des réactions assez mitigées dans le réseau - à l'exception du statut d'associée pour l'UQAM, les autres amendements sont loin de faire l'unanimité - ces consultations devront permettre de mieux comprendre les positions et les arguments, de part et d'autre. Il restera au ministre à en tirer profit, je l'espère, pour établir les consensus nécessaires et procéder aux réaménagements Institutionnels qui permettront à l'Université du Québec de mieux remplir ses missions d'enseignement, de recherche et de service à la collectivité. Je pense que l'université a fait la preuve qu'elle comprenait bien ses missions. Tout ce qu'il lui reste à obtenir, ce sont les sommes requises pour s'en acquitter convenablement; elle souhaite le faire et actuellement, pour ce qui est de sa mission d'enseignement, de recherche et d'appui à la collectivité, la preuve a été largement faite que le réseau de l'Université du Québec ne dispose pas des ressources qu'il devrait avoir pour s'acquitter convenablement de sa mission.

Voilà, M. le Président, les remarques préliminaires que je voulais faire avant de commencer à entendre les intervenants spécifiquement sur le projet de loi 63. Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. J'invite Immédiatement les représentants de l'Université du Québec à prendre place à la table. Ici, en avant.

Auditions

Je vous souhaite la bienvenue à la commission de l'éducation. Je demanderais à M. Hamel, le président, de nous présenter les personnes qui l'accompagnent en vous rappelant que les discussions dureront 90 minutes, que la présentation du début va être enlevée sur les discussions avec les membres de la commission et que le reste du temps sera réparti également des deux côtés de la table, donc entre chacune des formations politiques. La parole est à vous, M. Hamel, en vous rappelant de nous présenter les personnes qui vous accompagnent et, ensuite, de faire la présentation de votre mémoire avant la discussion avec les membres de la commission.

Université du Québec

M. Hamel (Claude): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mme et MM. les députés membres de la commission parlementaire de l'éducation, c'est avec plaisir que l'Université du Québec répond à l'invitation de la commission parlementaire de l'éducation pour fui faire part de ses commentaires au sujet du projet de loi 63, Loi modifiant la Loi sur l'Université du Québec. Comme vous le suggérez, M. le Président, je vous présente les collègues qui m'accompagnent. À mon extrême droite, M. Hubert Laforge, recteur de l'Université du Québec à Chicoutimi; M. Guy Massicotte, vice-président à la planification, au siège social; à ma droite immédiate, M. Michel Leclerc, vice-président à l'administration; à ma gauche immédiate, M. Jacques L'Écuyer, vice-président à l'enseignement et à la recherche et, à mon extrême gauche, M. Pierre Nadeau, secrétaire général de l'université.

Au moment où la commission s'apprête à aborder l'étude détaillée du projet de loi, il n'est pas nécessaire de faire une longue présentation de l'Université du Québec. La lecture des débats sur l'adoption du principe du projet de loi 63 nous permet de constater que le législateur est familier avec le rôle et la structure de l'Université du Québec et de son réseau. Comme le rappelait tout à l'heure le leader parlementaire et porte-parole de l'Opposition, le projet de loi présentement à l'étude à l'Assemblée nationale découle d'une lettre que le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, M. Claude Ryan, adressait au président de l'Université du Québec de l'époque, M. Gilles Boulet, en mai 1988. Cette lettre faisait suite au rapport que le ministre avait demandé à un groupe de travail

présidé par M. Robert Després, dont le mandat était d'étudier l'évolution de l'Université du Québec et d'en dégager les voies d'action pour l'avenir.

Cet exercice d'échange, d'analyse et de réflexion, qui s'est poursuivi pendant près d'un an et demi et qui regroupait à la fois le ministre, l'Université du Québec et les membres du groupe de travail, fut une occasion unique pour l'Université du Québec de faire le point sur ses structures, son fontionnement, le rôle de ses constituantes et ses rapports avec les autorités publiques. Après 20 ans - la création de l'Université du Québec remonte à 1968 - il est normal de procéder à ce genre de mise au point. L'Université du Québec fut mise sur pied pour promouvoir l'accessibilité des Québécois et des Québécoises aux études supérieures, pour décentraliser les lieux de formation et pour contribuer au développement de l'enseignement et de la recherche universitaires. L'Université du Québec s'est acquittée, avec succès croyons nous, de son mandat. Tous ceux et celles qui, depuis le début, ont oeuvré ou oeuvrent actuellement au sein de l'Université du Québec ont consacré des sommes considérables d'efforts et d'énergie pour que cette formidable entreprise soit une réussite. Forte de la confirmation de ce mandat par le ministre, l'Université du Québec entend poursuivre son action avec tout le dynamisme dont elle est capable et répondre aux orientations formulées par les autorités gouvernementales au meilleur de ses capacités.

Déjà, plusieurs gestes ont été posés dans le sens des orientations données par le ministre. La structure de la direction de l'Université du Québec a été simplifiée par la réduction du nombre de postes de vice-présidents, de cinq à trois. Nous sommes présentement à étudier les modifications qui pourraient être apportées pour simplifier et clarifier le fonctionnement des différentes instances de l'Université du Québec, soit l'assemblée des gouverneurs, le comité exécutif, la commission de planification, le conseil des études et, en général, tout le fonctionnement du siège social, ainsi que les autres comités et commissions qui s'y rattachent.

Une nouvelle procédure de nomination des chefs d'établissements fut mise à l'essai à l'Institut national de la recherche scientifique, à l'Institut Armand-Frappier et à l'École de technologie supérieure. Cette nouvelle procédure élaborée dans la foulée du rapport Després, permet d'alléger le processus en vue du renouvellement du mandat ou du remplacement d'un chef d'établissement. La procédure actuelle, il faut bien l'avouer, conduit à un phénomène de repli qui rend difficile l'exercice, a la fois par l'assemblée des gouverneurs et éventuellement par le ministre et le gouvernement, des responsabilités propres à chacun en ce qui a trait à la sélection et à la nomination des chefs d'établissements. La nouvelle procédure retient les étapes de consultation des professeurs lors de l'appel de candidature, et lors du dévoilement des candidatures proposées par le comité de sélection. Les délais pour la consultation sont toutefois plus courts. Une évaluation de ces expériences devra être faite avant de préciser de façon définitive cette procédure.

Je dois, d'ailleurs, reconnaître, à ce sujet, que ces expériences pilotes ne se sont pas faites sans soulever quelques remous, ici et là. L'évaluation que nous devrons faire tiendra compte, bien sûr, de ces réactions des professeurs dans nos différents établissements. C'est notre intention, dans la foulée de l'adoption du projet de loi 63, de mettre sur pied un groupe de travail de l'assemblée des gouverneurs, qui se penchera sur cette question et qui nous fera des propositions concernant la procédure révisée à établir pour la consultation en vue de la nomination des chefs d'établissements, car je pense que nous sommes tous conscients qu'il s'agit là d'un élément qui déborde le strict cadre du projet de loi.

Le 21 décembre 1988, je faisais parvenir au ministre un rapport sur les programmes exten-sionnés et offerts en association ou en conjonction. Ce rapport précisait que seuls les programmes extensionnés, soit un programme qu'un établissement souhaite offrir dans un autre établissement, ne faisaient pas l'objet d'un examen par le Conseil des universités. Ces programmes ne représentent qu'une faible proportion des programmes de l'Université du Québec, moins de 5 %, et des étudiants Inscrits, moins de 1, 5 %. On retrouve surtout parmi les programmes offerts en extension des programmes de deuxième et troisième cycles, ils sont offerts en vertu de protocoles dûment approuvés par le conseil des études et l'assemblée des gouverneurs. On remarque aussi que certains programmes extensionnés proviennent d'autres universités québécoises, soit Laval, Montréal et Sherbrooke. Certains de ces programmes sont même d'une durée limitée. En somme, cette pratique permet surtout d'offrir des programmes répondant à des besoins des constituantes en région, tout en minimisant les coûts de développement.

L'Université du Québec transmettra sous peu, conformément à la demande du ministre, un rapport détaillé sur les activités hors campus. Bien qu'encore incomplet, ce document fait ressortir l'effort considérable réalisé pour rejoindre les étudiants, jeunes et adultes. L'Université du Québec offre des enseignements dans plus de 100 municipalités au Québec.

L'Université du Québec, de concert avec la direction de l'institut Armand-Frappier et le ministère, a entrepris de donner suite aux recommandations du rapport Després visant la réorganisation des activités commerciales de l'institut. Malgré les difficultés rencontrées jusqu'à présent, nous avons bon espoir d'en arriver, dans des délais raisonnables, à une solution satisfaisante pour les parties impliquées.

L'École nationale d'administration publique a

entrepris, de son côté, la préparation d'un plan de développement. Le nouveau directeur de l'école, M. Pierre Decelles, entré en fonction à la fin de février, aura la chance d'Imprimer sa marque à cette étape Importante de la jeune histoire de cette institution. L'école a, de plus, collaboré étroitement avec le sous-ministre du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, M. Marcel Gilbert, à qui le ministre avait confié le mandat de revoir les modes de collaboration entre l'Université du Québec, l'École nationale d'administration publique et le gouvernement concernant la formation et le perfectionnement des cadres supérieurs de la haute fonction publique. La conclusion de cette étude est attendue avec un grand intérêt.

L'Institut national de la recherche scientifique, par ailleurs, a entrepris d'identifier de nouveaux créneaux de recherche et travaille activement à répondre à l'invitation du ministre de développer plus avant des collaborations interinstitutionnelles et d'associer le gouvernement dans le processus d'élaboration de son plan sexennal. Déjà, le ministre a reçu le projet de plan sexennal pour la période 1988-1994.

La direction de l'École de technologie supérieure a mis de l'avant son projet de transformer en programmes de génie les programmes de baccalauréat en technologie actuellement dispensés en vue de l'accréditation par le Bureau canadien d'accréditation des programmes d'ingénierie. Les modifications aux programmes de l'école ayant été approuvés par le conseil des études de l'Université du Québec, Ils seront offerts dès septembre 1989. À la demande de l'école, ces programmes seront soumis à l'examen du Bureau canadien d'accréditation des programmes d'ingénierie dont la décision devrait être rendue au mois de juin 1990. La reconnaissance par le Bureau canadien d'accréditation des programmes modifiés de l'école permettra, à l'avenir, aux diplômés desdits programmes d'être admis, selon les règles établies, comme membres de l'Ordre des ingénieurs.

Par ailleurs, l'École de technologie supérieure a collaboré étroitement avec les représentants des diplômés de l'école, de l'Office des professions du Québec, du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science et de l'Ordre des ingénieurs, dans le cadre du mandat confié à M. Gilles Perron par le ministre en vue de trouver une solution équitable aux problèmes de reconnaissance professionnelle des diplômés de l'école déjà sur le marché du travail. Et au-delà de ce qu'indique le texte de présentation, j'aimerais ajouter que nous avons également conclu, à l'intérieur du réseau de l'Université du Québec, une entente, comme le souhaitait le ministre, entre l'École de technologie supérieure et l'Université du Québec à Montréal pour toutes les questions qui touchent le développement du génie entre ces deux institutions et le développement éventuel de programmes de deuxième et de troisième cycles à l'École de technologie supérieure. J'ai, ce matin, adressé une lettre à M. le ministre pour lui faire un rapport détaillé de la situation en ce qui concerne l'École de technologie supérieure, parce que nous jugeons, de notre côté, qu'à ce moment-ci nous avons donné une réponse complète aux souhaits que M. le ministre formulait dans sa lettre au président de l'Université du Québec.

La Télé-université, en collaboration avec le siège social, travaille présentement à mettre au point une politique de collaboration entre la Télé-université et les autres constituantes pour promouvoir davantage l'enseignement à distance au sein du réseau de l'Université du Québec. La Télé-université poursuit aussi ses efforts en vue de développer ses propres programmes. Le Conseil des universités a récemment donné un avis positif au projet de programme de baccalauréat en communications soumis par la Téléuniversité. Cette dernière procède actuellement à des collaborations intéressantes avec l'Université du Québec à Hull et l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, en ce qui concerne l'enseignement à distance. (16 h 45)

Le rapport Després a aussi formulé des recommandations importantes concernant le financement de l'Université du Québec et j'avoue que je n'ai pas été tout à fait insensible aux remarques de M. le leader parlementaire et porte-parole de l'Opposition tout à l'heure. Ce rapport soulignait la nécessité de tenir compte des coûts supplémentaires encourus par les constituantes en région et par les institutions à vocation particulière principalement axées sur la recherche, tels l'Institut national de la recherche scientifique et l'institut Armand-Frappier. Dans le cadre de l'hypothèse de révision des bases et du niveau de financement des universités qu'il remettait aux recteurs en octobre dernier, le ministre proposait une méthodologie pour tenir compte des facteurs d'éloignement et de petite taille des constituantes régionales. La direction de l'Université du Québec juge que la proposition du ministre représente un compromis acceptable. Nous avons aussi transmis, dans la foulée de ces travaux sur la révision des bases de financement, des propositions concernant les établissements à vocation particulière de l'Université du Québec.

L'Université du Québec souhaite que ie gouvernement saura répondre de façon convaincante aux demandes pressantes de redressement financier formulées par les universités québécoises. Non seulement ce redressement est-il nécessaire pour permettre à l'Université du Québec et aux autres universités d'accomplir pleinement leur mission de formation et de recherche, mais aussi pour assurer que le Québec puisse faire face aux défts des années quatre-vingt-dix dans les domaines économiques, sociaux et culturels.

Pour en arriver maintenant au projet de loi 63, iI nous paraît fidèle à la lettre définissant les orientations que le ministre retenait pour

l'avenir de l'Université du Québec en réponse au rapport Després. Nous adhérons donc à ce projet de loi sans réserve. Ce projet vient modifier substantiellement la composition de l'assemblée des gouverneurs et des conseils d'administration des universités constituantes. Nous sommes d'accord avec la place réservée par le gouvernement aux membres socio-économiques. Un plus grand nombre de membres socio-économiques assurera une participation plus active de ces derniers aux travaux de l'assemblée des gouverneurs et des conseils d'administration. Il permettra au réseau de l'Université du Québec de profiter plus avant de l'expertise de citoyens et de citoyennes éminents et dévoués. Cette présence accrue des membres socio-économiques permettra d'accentuer l'enracinement de l'Université du Québec au sein de la société québécoise et dans les régions qui accueillent des constituantes. Dans ces régions, la présence plus active de membres socio-économiques permettra aussi de mieux répondre aux besoins exprimés en matière de formation et de recherche. Il est certain, par ailleurs, que, dans le choix de ces représentants du milieu socio-économique, il faudra être attentif pour s'assurer d'une représentation réellement large des différents milieux, tant sociaux, culturels et syndicaux que du milieu strictement économique et des affaires.

Le gouvernement procédera à la nomination des membres socio-économiques selon un processus qui sera établi par le ministre et qui comportera, nous le souhaitons, une consultation formelle de l'Université du Québec et des établissements concernés. En ce qui concerne les chefs d'établissements, le gouvernement entend conserver le pouvoir de nomination que lui confère la loi. L'Université du Québec accepte la décision du gouvernement à cet égard. Nous convenons qu'il s'agit là d'un exercice exigeant et rigoureux qui commande, de la part de l'Université du Québec, du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science et du gouvernement, une discipline particulière. Toutefois, avec sa loi constitutive, c'est par ce processus de nomination que l'Université du Québec peut afficher le caractère d'université publique qui est le sien.

L'équilibre proposé entre les différents groupes représentés au sein de l'assemblée des gouverneurs et des conseils d'administration nous apparaît sain. Il ramène à des proportions plus raisonnables la participation des membres en provenance de l'université même. Une présence plus forte de l'administration de l'université s'avérait utile au moment de la création de cette dernière. La maturité maintenant atteinte par le réseau de l'Université du Québec lui permet d'élargir à un éventail plus grand d'hommes et de femmes les instances décisionnelles appropriées.

Plusieurs Intervenants ont souligné que, malgré qu'ils dispensent un peu plus de la moitié des cours offerts par l'Université du Québec, les chargés de cours ne bénéficient d'aucune représentation formelle au sein de ses instances décisionnelles. Les syndicats représentant les chargés de cours ont, en particulier, demandé à de multiples reprises d'être représentés à ces instances. Présentement, les chargés de cours peuvent assister aux délibérations des conseils d'administration de plusieurs universités constituantes à titre d'observateurs La direction de l'Université du Québec n'aurait pas d'objection, si telle était la volonté du législateur, à assurer aux chargés de cours une représentation au sein de l'assemblée des gouverneurs et au sein des conseils d'administration de nos six universités constituantes à vocation générale. Il nous semble que, pour les établissements à vocation spécialisée, cette représentation ne serait pas pertinente. La représentation formelle des chargés de cours aux instances appropriées permet, de manière tangible, de reconnaître la contribution de plus en plus importante que les chargés de cours apportent à l'université dans l'accomplissement de sa mission.

Depuis plusieurs années, l'Université du Québec à Montréal souhaitait, en raison de la place qu'elle occupe dans le réseau de l'Université du Québec et du rôle qu'elle entend jouer dans la région montréalaise où elle se retrouve avec d'autres institutions universitaires, se voir reconnaître une marge de manoeuvre plus marquée au sein de l'Université du Québec. Les premières balises furent posées en 1984 pour apporter un règlement satisfaisant au litige entre l'Université du Québec à Montréal et l'Université du Québec. Le président de l'Université du Québec et le recteur de l'Université du Québec à Montréal, MM. Gilles Boulet et Claude Pichette, convenaient d'un premier protocole sur le statut particulier de l'UQAM, que l'assemblée des gouverneurs devait approuver par la suite. Une demande de modification à la loi fut adressée au ministre de l'époque qui n'eut malheureusement pas de suite. C'est le projet de loi, bien sûr, qui n'eut pas de suite. En septembre 1987, un second protocole fut convenu entre le président Boulet et le recteur de l'Université du Québec à Montréal, M. Claude Corbo, et approuvé par l'assemblée des gouverneurs en octobre 1987. Cette nouvelle entente survint pendant la période où le ministre procédait à l'étude du rapport Després. Nous constatons avec satisfaction que le projet de loi 63 constitue une confirmation par les autorités gouvernementales et législatives de l'entente intervenue alors entre le président de l'Université du Québec et le recteur de l'Université du Québec à Montréal.

En vertu du projet de loi 63, l'Université du Québec à Montréal pourra bénéficier du statut d'université associée. Ce statut lui conférera le pouvoir, premièrement, de décorner sus propres grades, diplômes ou certificats universitaires; deuxièmement, de conclure avec tout établissement d'enseignement ou de recherche tout accord qu'elle jugera utile à la poursuite de ses fins;

troisièmement, de recommander au ministre la nomination de son recteur; quatrièmement, de désigner parmi les vice-recteurs le remplaçant du recteur en cas d'incapacité ou d'absence temporaire.

En plus des pouvoirs qui lui sont conférés par le projet de loi, l'Université du Québec à Montréal, en vertu de l'entente approuvée par l'assemblée des gouverneurs, premièrement, pourra participer de plein droit aux organismes regroupant des établissements universitaires et assurer pour ses propres fins sa représentation auprès des organismes gouvernementaux publics, parapublics et privés; deuxièmement, se verra accorder par l'Université du Québec un financement établi selon les règles fixées par le ministère, moins les prélèvements consentis pour les services communs. À cette fin, l'UQAM pourra transmettre aussi directement au ministère ses prévisions budgétaires, ses états financiers et son rapport annuel d'activités; enfin, l'UQAM contribuera à l'établissement d'un fonds consacré au développement académique du réseau de l'Université du Québec.

L'ensemble de ces dispositions permettra d'assurer à l'Université du Québec à Montréal la reconnaissance de la place particulière qu'elle occupe dans le réseau de l'Université du Québec et de lui conférer une marge de manoeuvre nécessaire pour lui permettre de jouer un rôle de plus en plus présent dans la communauté montréalaise auprès des autres Institutions qui y oeuvrent. De plus, cette disposition assure la participation libre et active de l'UQAM aux activités de coordination et de concertation nécessaires à la vie universitaire en réseau et aux projets communs de consolidation et de développement de l'Université du Québec.

Le projet de loi 63 vient aussi corriger une lacune importante du texte actuel de la loi en permettant à l'assemblée des gouverneurs de désigner un vice-président pour remplacer le président en cas d'incapacité ou d'absence temporaire. L'assemblée des gouverneurs pourra aussi désigner, de façon analogue, un vice-recteur pour remplacer le recteur d'un établissement dans une situation semblable.

Le statut d'université associée accordé à l'Université du Québec à Montréal et les pouvoirs qui s'y rattachent demandent que certaines modifications techniques soient apportées à fa loi actuelle. Pour éviter toute ambiguïté entre le pouvoir de l'UQAM de décerner tous grades, diplômes et certificats universitaires et la responsabilité de l'assemblée des gouverneurs d'adopter les programmes d'études, i est nécessaire d'amender l'article 4 pour préciser le pouvoir de l'assemblée des gouverneurs d'adopter ces programmes. Cette modification ne vient que confirmer le rôle que l'assemblée des gouverneurs joue en cette matière depuis la création de l'Université du Québec. Certains ont cru voir dans cet ajout à la Loi sur l'Université du Québec un danger de centralisation excessive dans le domaine académique à la corporation centrale, au siège social. Je pense qu'il est important de bien comprendre que cet ajout à la loi ne vient que confirmer la réalité vécue à l'Université du Québec depuis 20 ans. C'est parce que l'UQAM, dorénavant, décernera elle-même ses grades, diplômes et certificats qu'il est important de spécifier que, par ailleurs, les programmes conduisant à ces grades et leur contenu demeurent placés sous la responsabilité de l'Université du Québec comme réseau.

Il est aussi nécessaire de modifier les articles 17 et 19 de la loi actuelle pour permettre à l'assemblée des gouverneurs et au conseil des études d'adopter des règlements applicables à une seule institution. La loi actuelle ne permet que l'adoption de règlements dits généraux applicables à l'ensemble des constituantes. Sans cette modification, l'Université du Québec ne pouvait pleinement donner suite à certains pouvoirs se rattachant au statut d'université associée conféré à l'UQAM, car il nous faudra, en effet, une fois la loi adoptée, procéder, à l'intérieur de l'Université du Québec, a l'adoption d'un règlement particulier en ce qui concerne l'Université du Québec à Montréal. Cependant, il n'est aucunement dans l'intention de la direction de l'Université du Québec de procéder à l'adoption de règlements visant de façon particulière l'un ou l'autre de nos établissements. Ce changement à la loi ne vise qu'à permettre à l'Université du Québec de se donner un règlement particulier pour l'UQAM et notre intention, pour toutes les autres matières, est de nous en tenir à des règlements généraux. J'ai noté la réaction de M. le ministre tout à l'heure et nous serions, nous aussi, tout à fait d'accord pour que cette formulation soit revue, puisqu'elle suscite des Inquiétudes, de façon à bien traduire les objectifs que nous poursuivons et qui sont limités, je le répète, tout à fait au statut particulier d'université associée accordé à l'UQAM.

Au-delà de ces commentaires, finalement, nous souhaiterions soumettre au législateur des propositions de modifications additionnelles à la Loi sur l'Université du Québec. Ces modifications, de nature technique, permettraient, à notre avis, de rendre certains articles de la loi plus conformes à l'évolution de la situation de l'Université du Québec.

Premièrement, les articles 12 et 37 de la loi actuelle indiquent que les vacances à l'assemblée des gouverneurs et au conseil d'administration sont comblées pour la durée non écoulée du mandat concerné. En raison du nombre important de nominations que doit faire le gouvernement à l'échelle du réseau de l'Université du Québec, il arrive fréquemment que des vacances surviennent en cours de mandat et que les procédures suivies pour assurer le remplacement d'un membre démissionnaire ne laissent que peu de temps de la portion non écoulée du mandat, tel que le prévoit la loi. Cette situation oblige à procéder simultanément parfois à une demande de renou-

vellement du mandat de ta personne ainsi nommée. Nous croyons qu'il serait plus simple et plus respectueux pour les personnes concernées qu'elles puissent être nommées pour la pleine durée d'un mandat.

Par ailleurs, l'article 14 de la loi concernant la nomination des vice-présidents pourrait être modifié, si on le juge opportun, pour tenir compte de la situation actuelle où l'on retrouve à la haute direction de l'Université du Québec un vice-président à l'enseignement et à la recherche, un vice-président à la planification et un vice-président à l'administration.

Troisièmement, dans le même esprit, les articles 15 et 16 de la loi actuelle pourraient être modifiés - et il s'agit là, à notre avis, d'une modification plus importante que la précédente - pour clarifier le pouvoir de l'assemblée des gouverneurs de confier par règlement au président ou à un membre de la direction de l'université, aux conditions qu'elle détermine, l'autorisation de signer des contrats et des engagements d'administration courante, ainsi que la possibilité pour l'assemblée des gouverneurs de déléguer certains pouvoirs au comité exécutif. (17 heures)

Quatrièmement, l'article 56 de la loi actuelle prévoit que les articles 17 et 19, et 41 à 47, s'appliquent mutatis mutandis aux instituts de recherche et aux écoles supérieures institués en vertu des articles 50 et 57. Nous constatons que l'article 40, qui prévoit que l'administration courante d'une université constituante relève d'un comité exécutif, ne s'applique pas dans le cas des établissements à vocation particulière. Nous croyons que l'article 40 devrait s'appliquer dans le cas de l'École nationale d'administration publique, de l'École de technologie supérieure, de l'institut Armand-Frappier, de l'Institut national de la recherche scientifique et, éventuellement, de la Télé-université. L'existence Inscrite dans la loi d'un comité exécutif donnera plus de poids à un tel organisme de façon que ces établissements ne soient pas traités différemment des universités constituantes à cet égard.

Nous croyons, M. le Président, que les modifications ainsi proposées sont de nature plutôt technique et ne remettent pas en cause le principe du projet de loi 63 adopté à l'unanimité par les membres de l'Assemblée nationale L'Université du Québec remercie M. le ministre et les membres de la commission parlementaire de l'occasion qui lui est fournie de témoigner de son appréciation du projet de loi 63 et de formuler quelques amendements qui permettraient de bonifier le texte actuel de la Loi sur l'Université du Québec. Merci.

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M. Hamel. Je veux juste rappeler aux membres de la commission qu'il est 17 heures. Il reste une heure exactement, donc, 30 minutes de chaque côté. La parole est maintenant à vous, M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement su- périeur et de la Science.

M. Ryan: M. le Président, je voudrais, tout d'abord, remercier M. Hamel du mémoire qu'il vient de nous présenter au nom de l'Université du Québec. Je voudrais également adresser des salutations cordiales aux personnes qui accompagnent M. Hamel, aux principaux collaborateurs de la direction de l'Université du Québec et également au recteur de l'Université du Québec à Chicoutimi, M. Hubert Laforge, qui fait partie de la délégation. Il nous fait grandement plaisir de vous retrouver pour le début des auditions publiques de la commission parlementaire sur le projet de loi 63. Je vous remercie de l'apport constructif que votre mémoire fait à notre démarche.

Je suis un petit peu gêné, à ce moment-ci, parce que, comme vous le savez, les hommes politiques, en général, n'aiment pas les éloges. Je vois que vous avez respecté ce souci qui nous honore. Mais vous avez énuméré tellement de choses faites ou en marche que j'ai trouvé que c'était encore plus précieux que n'importe quel éloge général. Je suis sûr que l'Opposition n'a pas été sans remarquer que la lettre de mai dernier, même si elle était peut-être un petit peu longue, n'était pas Inutile, parce qu'elle touchait beaucoup de sujets de très haut intérêt pour l'Université du Québec.

Il m'a plu de constater, en lisant le mémoire que vous nous avez remis pour cette séance, que vous avez fait le point de manière très intéressante sur le travail accompli au cours des derniers mois. Le mémoire que vous avez présenté illustre mieux que toute parole qui pourrait provenir de ma bouche le très vif intérêt que le gouvernement a porté, depuis 3 ans, au travail de l'Université du Québec. Cet intérêt est allé peut-être un petit peu trop loin, à certains moments. Il est allé jusqu'à vous donner l'ancien directeur de cabinet du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, qui vous accompagne dans les arrière-bans. Je pense que ce changement, qui nous a fait de la peine de notre côté pour le gouvernement, mais qui nous a réjouis pour l'Université du Québec, était le fruit du travail de collaboration qui s'est produit au cours des mois précédents. Les personnes en viennent à se connaître dans ces expériences il n'y avait pas, d'un côté, des gens qui revendiquaient ou critiquaient et, de l'autre, des gens qui essayaient de les empêcher d'agir; il y avait une commune volonté de faire progresser l'Université du Québec et |e pense que toutes les choses qui sont décrites dans le mémoire illustrent cette volonté, mieux que n'importe quel propos que nous pourrions tenir.

Je souligne, cependant, un point que vous avez mentionné et qui m'a particulièrement réjoui ces derniers temps. On sait que le problème de l'École de technologie supérieure traînait dans le paysage depuis longtemps. Cela avait été parti sur une patte de travers. Je ne blâme pas ceux

qui étaient là à l'origine, parce que c'est plus facile des fois d'y voir clair quinze ans après qu'au début, mais il y avait un problème qui traînait dans le paysage depuis longtemps: le statut des diplômes de l'École de technologie supérieure. Et vous avez dit tantôt que vous avez travaillé fort pour essayer de résoudre ce problème, en ce qui touche l'Université du Québec. Il me fait plaisir d'ajouter que nous avions également vu à ce que le travail se fasse du côté des corps professionnels concernés, en particulier de la corporation qui réunit les diplômés de l'École de technologie supérieure et de la Corporation des ingénieurs du Québec. Grâce au travail de dialogue, de collaboration que nous avons favorisé, ce qui donne une autre preuve de la valeur efficace du travail de persuasion en démocratie, tous ces éléments se retrouvent aujourd'hui autour d'une solution qui sera acceptable pour tous et qui permettra aux diplômés de l'École de technologie supérieure qui sont déjà sur le marché du travail de recycler leur formation, de la compléter, de manière à avoir accès à tous les avantages et privilèges de l'ingénieur professionnel, et qui assurera, en cette matière de statut professionnel, une égalité et une dignité de statut aux diplômés de l'école, ce qui sera très appréciable pour eux. Cela impliquait, évidemment, une participation de l'Université du Québec et des réaménagements d'ordre académique et administratif qui sont déjà très avancés. Je souligne ce point, parce que je pense qu'il illustre mieux que tout autre, si ce n'est déjà fait par le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui, le climat de collaboration constructive qui s'est institué entre le gouvernement et l'Université du Québec.

Je ne veux pas entrer dans la voie qu'indiquait tantôt l'intervention du député d'Abitibi-Ouest, c'est-à-dire la question du financement universitaire, parce que nous y viendrons à l'occasion de l'étude très prochaine des crédits du ministère de l'Enseignement supérieur et aussi, je l'espère, du prochain discours sur le budget. Je ne pense pas que nous pourrons éclairer beaucoup cette question aujourd'hui - vous y avez fait allusion dans votre intervention et je l'apprécie - mais il est évident que le projet de loi que nous voulons adopter à cette session ne préjuge en rien de la réponse que le gouvernement apportera à la requête qui nous a été présentée concernant le statut de l'UQAM pour fins de financement. Il a été bien convenu, quand nous avons décidé de présenter le projet de loi, que cette question se réglait à l'intérieur de l'UQAM, suivant les voies de financement générales prévues par le gouvernement pour les universités, mais nous ne sommes pas opposés à des discussions ultérieures qui pourraient contribuer à créer une situation encore plus intéressante pour tous.

Cela étant dit, vu que l'Université du Québec est favorable au projet de loi non seulement dans son ensemble, mais aussi dans la plupart de ses dispositions particulières, je ne veux pas m'étendre longuement. J'ai remarqué - et je veux que ça soit bien clair; vous me corrigerez, M. Hamel, si j'ai fait erreur là-dessus - à propos de deux articles qui créent des difficultés spéciales, surtout du côté des syndicats de professeurs, c'est-à-dire les articles 7 et 8 qui modifient les articles 17 et 19 de la Loi de l'Université du Québec, que vous avez dit tantôt que vous ne seriez pas opposés à une formulation qui viserait à effacer ou, à tout le moins, à atténuer considérablement les appréhensions dont on nous a fait part au sujet du pouvoir arbitraire ou capricieux que pourrait s'attribuer la direction de l'Université du Québec en raison du libellé actuel. Alors, j'aimerais peut-être que vous nous expliquiez plus exactement votre position sur cette question soulevée par les nombreux organismes que nous entendrons au cours des prochains jours.

M. Hamel (Claude): D'accord, M. le ministre. Ces objections ont été également portées à notre connaissance, à l'intérieur de l'Université du Québec, principalement par des groupes de professeurs, mais aussi par les directions de certains de nos établissements. La formulation qui est dans le projet de loi ne vient pas de nous. Cette formulation vient des juristes spécialistes de ces questions à l'intérieur du gouvernement. Ils nous ont proposé cette formulation comme étant la seule voie par laquelle on puisse permettre à l'Université du Québec d'adopter un règlement particulier pour l'Université du Québec à Montréal. Notre intention, notre besoin est de pouvoir adopter un règlement particulier pour confirmer de notre côté le statut d'université associée de l'UQAM. Nous n'avons pas d'autre besoin, nous n'avons pas d'autre intention que celle-là.

M. Ryan: Je vous remercie beaucoup. Je pense que votre réponse clarifie cette question. En ce qui touche le gouvernement, nous verrons à chercher, en consultation avec vous - et nous consulterons les autres organismes qui se présenteront devant la commission sur le même sujet - une formule qui permettrait de tenir compte de la difficulté qu'on nous a présentée avec assez de vraisemblance.

A la fin de votre mémoire, vous émettez le voeu que d'autres articles de la Loi sur l'Université du Québec soient examinés à l'occasion de l'exercice que nous faisons. Vous soulevez en particulier la possibilité de modifier les articles 12 et 37 de la Loi sur l'Université du Québec pour faire en sorte que, lorsqu'une vacance surgit au sein de l'assemblée des gouverneurs, par exemple, et du conseil d'administration d'un établissement, la nomination qui est faite vaille pour ta durée d'un mandat régulier plutôt que seulement pour la durée qui restait à écouler du mandat qui a pris fin d'une façon particulière. Nous allons consulter nos conseillers sur ce

point, mais je trouve que votre proposition est pleine de sens. C'est gênant pour nous d'inviter une personne à faire partie du conseil d'administration d'une institution pour six mois ou trois mois, par exemple. En générai, nous allons plutôt être enclins à négliger un devoir qui nous incombe de procéder à une nomination, en nous disant que c'est peut être mieux d'attendre que la période soit écoulée. Je pense qu'une disposition comme celle-ci, si elle ne présente pas de difficulté juridique par rapport à une politique générale du gouvernement en ces matières, peut être examinée avec intérêt et je pense bien qu'on devrait être capable d'y donner suite.

La modification proposée concernant les vice-présidents peut être examinée également. Il y aura peut-être moyen de trouver une formulation souple qui laisserait un peu de marge pour l'avenir, tout en tenant compte de la situation actuelle. C'est évident qu'il y a un changement qui s'impose parce que, même dans les termes ici, il y a des incompatibilités entre le libellé actuel et la situation réelle. Je pense qu'il faudra laisser un peu plus de latitude à l'Université du Québec en ces choses. On va examiner sérieusement la possibilité de tenir compte du point de vue émis dans votre mémoire.

Vous demandez qu'aux articles 15 et 16 de la loi actuelle nous procédions à une modification pour clarifier le pouvoir de l'assemblée des gouverneurs de confier par règlement au président ou à un membre de la direction de l'Université du Québec l'autorisation de signer des contrats et des engagements d'administration courante. Pourriez-vous expliquer cette recommandation que vous présentez, peut-être en résumant l'article actuel que vous voulez modifier et en indiquant plus clairement l'ajout dont vous voulez nous entretenir?

M. Hamel (Claude): M. le ministre, un mot et je vais demander à mon collègue, M. Nadeau, de vous donner une réponse plus détaillée. L'un des objectifs, c'est de nous permettre de donner au comité exécutif du réseau de l'Université du Québec un peu plus de pouvoirs. Actuellement, ce comité exécutif, prévu par la loi, dispose de peu de responsabilités en termes d'administration courante, ce qui nous amène à traiter à l'assemblée des gouverneurs des dossiers que nous jugeons d'administration courante. La lourdeur de l'organisation de l'assemblée des gouverneurs ne nous permet pas toujours de réagir aussi rapidement que nous le voudrions sur certains dossiers.

Mais, au-delà de ça, au strict plan juridique, je demanderais à M. Nadeau de vous donner une explication plus technique.

M. Nadeau (Pierre): Au-delà des pouvoirs du comité exécutif pour lesquels il existerait une disposition dans la loi actuelle par laquelle on pourrait accroître par décision de l'assemblée des gouverneurs les pouvoirs du comité exécutif - ce qui poserait quand même un problème de concordance, parce que les pouvoirs du comité exécutif dans la loi actuelle doivent se comprendre dans le sens de l'administration courante et cela de façon assez spécifique - il y a le pouvoir de déléguer à des officiers de l'université des tâches de signature ou d'autorisation de documents pour des actes que, dans te cours normal des affaires, on n'imagine même pas confier à un comité exécutif, mais qui sont d'utilité tellement courante qu'il faut les déléguer à des officiers, soit à des vice-présidents ou à des personnes responsables de signature de certains documents ou d'engagement de personnel de nature contractuelle. (17 h 15) il y a, dans les lois qui traitent des pouvoirs à l'intérieur des ministères, des dispositions analogues qui permettent une forme de délégation à des officiers ou à des personnes qui sont désignées par les lois. Cette procédure de droit administratif, je pense, n'était pas tellement courante lors de l'adoption initiale de la Loi sur l'Université du Québec, en décembre 1968, et les correctifs de droit administratif sont venus après, dans les formes de délégation à des officiers des ministères. Je pense que, de façon analogue, il s'agirait de corriger une lacune dans notre loi afin de procéder à cette forme de délégation.

Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien, M. Nadeau. M. le ministre, voulez-vous réagir?

M. Nadeau: Excusez-moi, je pense qu'il y a un texte précis, un projet de papillon, qui vous a déjà été transmis.

Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien. M. le ministre.

M. Ryan: SI je comprends bien, le comité exécutif a déjà la responsabilité de l'administration courante de l'université et il exerce aussi les autres pouvoirs qui lui sont conférés par règlement de l'assemblée des gouverneurs. De ce point de vue, je ne crois pas qu'il y ait de problème. Ce que vous visez, c'est la délégation de certains pouvoirs à une personne particulière, soit le président, soit le vice-président exécutif, si Je comprends bien.

M. Nadeau: C'est cela.

M. Ryan: C'est ce que vous voudriez. il faudra en faire la démonstration. On va demander des précisions sur ce point. Il faudra qu'on vérifie Jusqu'à quel point cela se fait dans d'autres organismes assimilables et, s'il y a déjà une pratique qui justifie l'Inclusion dans le projet de loi d'une disposition comme celle-ci, nous pourrons l'examiner. Je ne suis pas en mesure de fournir de réponse aujourd'hui, mais

nous allons l'examiner attentivement. Est-ce que cela va là-dessus?

M. Nadeau: Oui.

M. Ryan: D'autre part, vous souhaitez que l'article 40, prévoyant que l'administration courante d'une université constituante relève d'un comité exécutif, puisse également s'appliquer aux établissements à vocation particulière. C'est un point qui ne m'avait pas frappé jusqu'à maintenant, mais je pense que c'est nécessaire. Nous avons vécu des événements au cours des derniers mois qui l'établissent clairement et soyez assurés que nous allons examiner cette possibilité avec beaucoup d'intérêt. Je pense que, pour l'instant, cela dispose des questions que je voulais poser. Peut-être une au sujet de cette recommandation qui nous a été faite concernant l'inclusion d'un article relatif à la liberté d'enseignement et de recherche. Est-ce qu'il y a une réaction de l'Université du Québec?

Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M. le président. M. Hamel?

M. Hamel (Claude): Je vais demander à mon collègue, M. Leclerc, de répondre.

Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M.

Leclerc.

M. Leclerc (Michel): M. le Président, il est exact que, dans les chartes des universités de Montréal et Laval, il y a ces garanties quant aux libertés d'expression du corps professoral. Il y a aussi dans ces institutions des conventions collectives qui sont moins précises que celles que l'on retrouve dans le réseau de l'Université du Québec. Les conventions collectives que l'on retrouve dans le réseau de l'Université du Québec, et qui ont donc force de loi - vous connaissez la valeur des textes de ces conventions collectives qui sont déposées auprès du ministre du Travail - garantissent tout à fait ces droits que des professeurs pourraient demander. Je pense que la direction de l'Université du Québec n'aurait pas d'objection à ce que, dans un texte de loi, l'on puisse ajouter ces garanties, appelés garanties fondamentales, quant à l'exercice de la profession de professeur d'université. Je vous fais tout simplement remarquer que ce ne serait que reproduire les textes qui existent dans les conventions collectives. Notamment, vous retrouvez dans la convention collective des professeurs de l'Université du Québec à Montréal, à l'article 5, trois paragraphes très précis là-dessus qui sont beaucoup plus précis, qui donnent beaucoup plus de garanties aux professeurs quant à la liberté d'expression que ce que l'on retrouve effectivement dans la charte de l'Université Laval ou de l'Université de Montréal. Pour reprendre une expression fort simple, je pense bien qu'on n'aurait pas d'objection lorsque, pour tenir un pantalon, il y a déjà une paire de bretelles, d'y ajouter une ceinture, mais il faut être conscient que c'est de cela qu'il s'agit.

La Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien, M. Leclerc. M. le ministre, est-ce que vous voulez réagir?

M. Ryan: Non. Pour l'instant, cela va.

Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien. Je vais reconnaître maintenant le porte-parole de l'Opposition officielle, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: M. le Président, je voudrais en profiter, moi aussi, pour remercier M. Hamel et son équipe d'avoir pensé qu'il était utile de présenter un mémoire sur le projet de loi 63 pour nous communiquer leur point de vue, leur réaction. Je vais prendre moins de temps que le ministre n'en a pris pour vous féliciter de tous ces nombreux liens d'étroite collaboration qui ont été établis. D'ailleurs, ce n'est pas vous qui l'aviez énoncé. Je n'en ai pas vu tant que ça; il en a mis plus que le client n'en demande, c'est son problème.

Je constate, si je fais un résumé de votre mémoire - et, selon mes perceptions, c'est exact que vous avez rappelé que tout ça s'inscrit dans le suivi du rapport Després. J'ai dit la même chose; il n'y a pas d'incompatibilité là. Je résume et je vais revenir avec une question. Vous voyez, parce que c'est un point important de votre mémoire, la présence accrue des membres socio-économiques comme un moyen d'accentuer l'enracinement de l'Université du Québec au sein de la société et dans les régions. Là-dessus, je ne vois pas comment, mais j'y reviendrai. Mais c'est un point que vous mentionnez. Vous acceptez, bien sûr, la décision du gouvernement qui conserve le pouvoir de nommer les chefs d'établissements. Vous n'avez pas d'objection à ce que, éventuellement, les chargés de cours aient une représentation au sein des conseils d'administration des universités constituantes, mais à vocation régionale. Vous êtes heureux que le projet de loi constate et confirme l'évolution de l'entente avec le siège social et l'Université du Québec à Montréal concernant le statut d'université associée. Vous profitez également de ce mémoire pour faire des suggestions positives, bonifiantes, selon votre perception des choses, mais à caractère plus technique, et qui ne sont pas liées aux questions fondamentales. Voilà comment je résume, en gros, le mémoire.

Je retiens, cependant, qu'à deux reprises vous avez souligné, comme je le pense, d'ailleurs - c'est à la page 2 de votre mémoire - que "l'Université du Québec s'est acquittée, avec succès croyons-nous, de son mandat". Je suis pas mal de cet avis. Cependant, si on met ce jugement en relation avec ce que vous mentionnez à

la page 5, là il y a un problème. La relation très précise à la page 5, c'est: Pour être en mesure de faire face aux défis des années quatre-vingt-dix, tant dans les domaines économiques, sociaux et culturels, et pour assurer pleinement notre mission de formation et de recherche, on a besoin de redressement financier.

Même si je reconnais que ce n'est pas le moment - je ne veux pas le faire parce qu'on aura l'occasion pendant seize heures, imaginez-vous, d'avoir ce cher ministre présent devant nous pour discuter les crédits budgétaires - je vais revenir sur la formule de financement. Je voulais au moins, parce que je ne suis pas encore rendu aux questions, vous dire que Je suis heureux que, dans le mémoire, vous ayez mentionné avec raison que le problème du financement du réseau demeure toujours entier, en tout cas en termes de redressement. Ce n'est pas parce qu'il y a eu des discussions qui laissent voir que l'université, le siège social, serait assez d'accord avec la formule sur laquelle le ministre s'est arrêté pour commencer à crayonner des chiffres et, éventuellement, les soumettre au premier ministre et au Conseil du trésor... Parce que j'espère qu'il y a un bout de fait, jamais je ne croirai, en termes de demande, sur la base de la formule que vous avez discutée entre vous. Je veux vous dire: Vous avez bien fait de le rappeler; je suis content que ça figure dans votre mémoire.

Je passe tout de suite aux questions, M. le Président, parce que c'est surtout pour ça qu'on va avoir l'occasion de discuter avec vous. Ma première question porte sur le statut d'université associée qui est un des éléments Importants du projet de loi 63. J'aimerais que vous preniez quelques minutes pour m'expliquer - parce que ce n'est pas mentionné dans votre mémoire, mais c'est une question très pertinente - si vous avez la conviction que cela met uniquement un terme à de bonnes et fructueuses discussions qui ont eu lieu et que non seulement l'UQAM est satisfaite, mais que le problème de reconnaître que l'UQAM, dans le réseau, a toujours eu une responsabilité différente, c'est réglé par le projet de loi 63 et que dans la perspective où tout le monde serait d'accord là-dessus - ce qui est probablement un voeu pieux, mais au-delà de ça - on ne se retrouverait pas à court terme avec une réclamation très formellement poussée d'un statut d'autonomie complète. Est-ce que cela vous fait peur ou si cela ne vous dérange pas? Est-ce que, d'après vous, avec un statut d'université associée, c'est réglé, l'Université du Québec à Montréal est contente de cela et vous, vous avez la conviction qu'elle est toujours requise à l'intérieur du réseau, mais que, pour la conserver sans trop de tiraillements - parce que je connais un peu son passé, son histoire - il fallait lui consacrer, une fois pour toutes, un statut d'université associée, mais avec une bonne laisse qui la maintienne étroitement liée au réseau?

Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M. le président, M. Hamel.

M. Hamel (Claude): Ce qu'il faut d'abord rappeler, je pense, c'est que l'entente intervenue entre l'Université du Québec à Montréal et l'Université du Québec a été acceptée à l'unanimité par le conseil d'administration de l'UQAM et à l'unanimité par l'assemblée des gouverneurs de l'Université du Québec. Donc, là-dessus, il y a une entente claire, nette et définitive. Ce qu'il faut rappeler aussi, c'est que l'intégrité académique du réseau de l'Université du Québec est maintenue, c'est-à-dire que l'UQAM ne bénéficie d'aucun statut particulier dans le domaine de l'enseignement et de la recherche si ce n'est le petit élément qu'elle va décerner ses propres diplômes. Mais les programmes d'études demeurent des programmes de l'Université du Québec, l'intégrité académique est tout à fait préservée et les collaborations entre l'UQAM et les différentes constituantes de l'université, tant au plan de l'enseignement et de la recherche, vont continuer à se développer, d'autant plus que, dans le cadre de cette entente, nous mettons sur pied un fonds de développement académique du réseau de l'université qui nous donne des moyens financiers pour favoriser l'accroissement de ces collaborations.

Il faut bien reconnaître que, dans notre réalité Interne, nous vivons déjà, depuis un certain temps, cette forme de statut un peu particulier de l'UQAM. Nous avons pris les devants, par exemple, pour rétablir, M. y a quelques années, les bases de financement de l'Université du Québec à Montréal. Nous avons mis sur pied, cette année, le fonds de développement académique et l'UQAM, déjà, a fourni, comme il était prévu dans l'entente, 500 000 $ dans le cadre d'un fonds de 2 000 000 $ pour le développement du réseau. Donc, nous avons toutes les raisons de croire que les querelles, pourrait-on dire, constitutionnelles entre l'UQAM et le réseau de l'Université du Québec étant terminées à la satisfaction des deux parties, nous pourrons nous asseoir maintenant et travailler ensemble sur les vraies choses qui touchent l'université, le développement de l'enseignement et de la recherche, le service à nos collectivités régionales.

Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien, M. le président. M. le critique de l'Opposition officielle.

M. Gendron: il y a une deuxième question que je trouve très Importante et je vous l'ai laissé voir tantôt. Je vous avoue que j'aimerais que vous soyez un petit peu plus précis et volubile sur la prétention de votre mémoire, à la page 6, à savoir que l'augmentation ou "la présence accrue des membres socio-économiques permettra d'accentuer l'enracinement de l'Université du Québec au sein de la société québé-

coise et dans les régions qui accueillent des constituantes. "

(17 h 30)

Je vais juste poursuivre un peu. Je vous avoue que je ne suis pas capable de faire cette adéquation-là. Je ne vois pas du tout pourquoi - je voudrais que vous me l'expliquiez - vous dites: "Dans ces régions, la présence plus active de membres socio-économiques permettra aussi de mieux répondre aux besoins exprimés en matière de formation et de recherche. " Je comprenais que ce besoin était parfaitement senti par les constituantes depuis fort longtemps et je comprends mal que passer de deux ou trois "socio" à quatre ou cinq, ça aurait, premièrement, comme conséquence qu'on serait plus sensible à un besoin. Tous ceux que j'ai rencontrés, en tout cas dans les régions, m'ont toujours dit qu'ils connaissaient ce besoin-là. Donc, première réaction, j'aimerais vous entendre là-dessus, mais surtout sur le jugement que vous portez, à savoir que plus il y a de "socio", plus cela accentuera l'enracinement de l'université au sein de la société québécoise et dans les régions, parce que j'ai de sérieux doutes sur cette allégation. Pour toutes sortes de raisons normales de cycle de l'économie, de variations économiques, s'il y a quelque chose qui n'enracine pas beaucoup et qui n'est pas bien stable, c'est la présence des socio-économiques. D'ailleurs, on le voit par le roulement et le remplacement de ces gens-là. Ce qui est souvent plus stable, c'est l'institutionnel, même si je ne suis pas un vendeur des représentants Institutionnels du réseau. Il y a aussi toute l'autre problématique que j'ai laissé voir, la dimension recherche, enseignement du savoir, mais dans sa notion la plus pure. Et cela signifie qu'on n'a pas à porter un jugement d'avance pour dire que l'université doit être axée davantage uniquement sur tel type de formation ou pas. Là, au lieu de parler, j'aimerais vous entendre. Sur quoi assoyez-vous ce jugement premièrement et deuxièmement, la garantie que vous semblez exprimer que plus "socio", ça égale une meilleure perception que, là, on va en avoir, enfin, de la formation axée sur les besoins de recherche et de formation professionnelle, alors que je pensais que le milieu universitaire était bien collé à cette réalité?

M. Hamel (Claude): Un premier élément de réponse de nature générale à votre question découle de l'évolution qu'ont connue les universités au cours des 20 dernières années. Si on observe la composition des conseils d'administration des autres universités, on constate aujourd'hui une présence beaucoup plus forte qu'il y a 20 ans de représentants du milieu socio-économique. Qu'on regarde l'Université de Montréal, l'Université McGill, l'Université Concordia. On sait que l'Université Laval, cette année, se penche aussi sur cette question et veut ouvrir son conseil de direction à une représentation beaucoup plus forte de membres socio-économiques. L'Université du Québec se situe dans cette perspective également. La composition actuelle a été définie M y a 20 ans et, comme nous le disons dans le mémoire, il nous apparaît aujourd'hui que de réduire un peu la représentation de gens de l'interne pour s'ouvrir mieux au gens de l'externe, c'est tout à fait approprié.

J'ai également signalé dans la présentation tout à l'heure que, bien sûr, le choix des personnes est un élément très important pour favoriser l'atteinte de l'objectif que l'on poursuit. Nous croyons que nous devons nous assurer d'une provenance variée de ces gens-là, hommes et femmes, non seulement du milieu des affaires et du milieu économique, mais aussi des milieux culturel, syndical et social. Dans les conseils d'administration, au moment où se discutent les grandes questions de plans de développement des établissements, d'allocations des ressources, de priorités à établir, j'imagine que la présence importante de membres de l'extérieur est susceptible d'apporter des résultats très positifs et peut-être aussi, dans certains cas, plus d'objectivité dans les discussions et dans les décisions.

M. Gendron: M. le Président, j'ai écouté attentivement et je vous avoue que c'est un point de vue qui mériterait, en tout cas, d'être apprécié, et je n'ai pas nécessairement d'objection. Là où j'en ai, parce que je ne change pas ce que j'ai dit, c'est que, si c'était aussi gentil et large que vous venez de le dire, je n'aurais pas de problème. Mais ce n'est pas ce que le projet de loi dit. C'est ça, mon drame. Le projet de loi ne parle pas du tout d'encadrement à la notion de membres socio-économiques. Il me semble, pour vous avoir entendu, que vous avez donné une couverture passablement large qui risque de consacrer des gens qui, effectivement, ont plus d'enracinement dans leur milieu quand cela embrasse tout ce que vous avez évoqué comme amplitude. Mais on est dans les nuages, autant vous que moi, parce qu'à partir du moment où ne sera pas définie et ne sera pas clarifiée la représentation des femmes, des gens provenant du secteur culturel, du secteur syndical, du secteur coopératif, je n'ai aucune garantie de ça. Et n'oubliez pas que je sais à qui j'ai affaire, comme gouvernement. C'est ça qui est notre drame, à nous. Alors, les socio-économiques, pour eux, ça peut être assez restreint. C'est là-dessus, M. le ministre, qu'est mon drame.

Ma deuxième question. Les groupes à l'interne votent dans l'augmentation du nombre de membres socio-économiques un risque de déséquilibre dans la composition des instances dirigeantes. Ifs contestent leur représentativité. Je voudrais pouvoir porter un jugement sur l'ancienne formule qui était plus précise quant à la provenance des socio-économiques. Pensez-vous qu'il y aurait lieu de réintroduire dans le projet de loi une précision qui permettrait de les

sécuriser - même s) on aura à rediscuter sur le nombre un peu plus tard - sur la provenance des socio-économiques et seriez-vous d'accord là-dessus?

M. Hamel (Claude): Dans notre mémoire, nous ne prenons pas position sur cette question, mais nous signalons que, comme Université du Québec, nous souhaitons être consultés formellement au moment du choix de ces personnes, mais nous n'allons pas aussi loin que de demander que la nécessité de cette consultation soit inscrite dans la loi. Nous nous fions sur les bonnes relations entre l'université, le ministre et le gouvernement pour croire que cette consultation se fera, effectivement.

Le Président (M. Paré): Oui, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président Messieurs, il me fait plaisir de vous saluer. Vous allez me permettre, en même temps, de déplorer l'absence de femmes au sein de votre délégation. Cela m'amène au sujet qu'abordait mon collègue, M. Gendron, le député d'Abitibl-Ouest. Dans les dernières nominations que j'ai vu passer dans les différentes universités du Québec - pas seulement l'Université du Québec, les universités du Québec - j'ai peu ou pas vu de femmes; M y a peu de nominations féminines qui ont été faites. Votre discours touchant les vertus de l'accroissement de la représentation des socio-économiques au sein des conseils d'administration m'étonne un peu parce qu'il vient beaucoup en contradiction avec ce qu'on entend de plus en plus fréquemment: le danger qui menace nos universités que, tout à coup, tantôt, la recherche et la formation soient par trop soumises aux intérêts économiques particuliers du monde des affaires, avec les conséquences que vous connaissez comme universitaires sur la recherche et la formation. Alors, il me semble qu'il n'y a pas, dans ces remarques, suffisamment de vigilance par rapport aux problèmes que pourrait poser une présence accrue des représentants du monde des affaires. Et on en a vu passer. Les dernières nominations, celles que j'ai vues, au moment où je les suivais, venaient beaucoup du monde des affaires. Si vous me dites qu'en soit, c'est censé mieux enraciner les universités en région dans le milieu socio-économique, ça me pose des problèmes et j'ai l'impression qu'on n'a pas tout à fait la même interprétation. J'oserais dire, bien que je ne connaisse pas votre philosophie, qu'on n'a peut-être pas, non plus la même conception du rôle d'une université en région, qui doit répondre non seulement aux Intérêts économiques, mais surtout et aussi aux intérêts culturels, sociaux, au développement de façon générale, pas seulement au développement économique.

Alors, je voudrais, là-dessus, vous entendre, parce que c'est un discours... Je relisais tout à fait récemment dans un journal, un article qui disait que la menace qui plane sur nos universités, actuellement, où tout ie monde veut, avec moins, faire plus, c'était qu'on allait provoquer une distorsion dans les orientations et la mission des universités.

M. Hamel (Claude): Encore deux commentaires, madame. D'abord, en ce qui concerne l'absence de représentation féminine, je dois vous dire que j'avais invité mes collègues chefs d'établissements du réseau, à participer à cette présentation aujourd'hui et seul M. Laforge, qui, par ailleurs, se trouvait à Québec, a pu accepter cette invitation. Si d'autres avaient pu venir, notamment de la région de Montréal, j'aurais eu plaisir à vous présenter Mme Andrée Roberge que nous avons nommée, il y a quelques mois, à la direction de l'institut Armand Frappier.

Mme Blackburn: Je le sais.

M. Hamel (Claude): Par ailleurs, en ce qui concerne votre préoccupation sur le rôle des conseils d'administration par rapport à la vie académique d'enseignement et de recherche, il faut rappeler que dans nos universités, à côté des conseils d'administration, nous avons des commissions des études où ne siège personne de l'externe, où se retrouvent des professeurs, des étudiants et la direction de l'université. C'est là que se font les débats académiques, c'est là que se formulent des recommandations qui, de façon très générale, reçoivent une ratification du conseil d'administration de l'établissement. En ce qui concerne le réseau de l'Université du Québec, c'est la même chose. À côté de l'assemblée des gouverneurs, il y a un conseil des études qui, lui, est chargé de toutes les questions académiques et les recommandations, les résolutions du conseil des études sont simplement ratifiées à l'assemblée des gouverneurs, de sorte que nous ne reprenons pas là les discussions en ce qui touche les matières d'enseignement et de recherche. M. Leclerc.

M. Leclerc (Michel): Peut-être un élément supplémentaire, madame, si vous le permettez, en réponse à votre question, peut-être en deux parties. Nous avons de la difficulté, depuis un certain temps, à avoir pour les nombreux comités que l'assemblée des gouverneurs et le comité exécutif créent - comité de vérification, comité exécutif lui-même et beaucoup d'autres comités, comité de sélection pour les postes de chef d'établissement - des membres socio-économiques. Nous avons des membres socio-économiques actuellement - je pense qu'on a un exemple, M. Claude Gravel, qui est vice-président d'une compagnie d'assurances bien connue - qui se plaignent de devoir passer plus qu'une partie raisonnable de leur temps à l'administration de l'Université du Québec.

Le deuxième élément par rapport aux craintes que vous avez, c'est que, dans la loi

actuelle, à l'article 7e, on parle de trois personnes nommées par le gouvernement "après consultation des associations les plus représentatives du milieu des affaires et du travail", ce qui m'apparaît plus limitatif que la formulation qui est dans le projet de loi 63 où l'on dit: "après consultation de groupes socio-économiques". A la limite, l'ancienne formulation pourrait exclure des associations bénévoles, des groupes comme l'AFEAS. L'actuelle formulation "après consultation de groupes socio-économiques' nous apparaît plus large.

Mme Blackburn: Une toute dernière question, peut-être pour mieux nous illustrer ce que cela a représenté dans le passé et ce que cela nous garantit dans l'avenir. Dans les socio-économiques des différentes constituantes et de l'Université du Québec, combien y a-t-il de femmes? Vous me disiez tout à l'heure que je devrais être rassurée parce que les questions à caractère académique relevaient de la commission des études. Il me semble que c'est le minimum; ce serait bien le reste s'il fallait que cela soit décidé à un autre niveau. Pour avoir une idée de ce que cela représente actuellement - on sait qu'il y a 51 % des étudiants qui sont des étudiantes; elles sont en majorité actuellement -combien y a-t-il de membres socio-économiques, faisant partie des différents conseils d'administration des constituantes et de l'UQ, qui sont des femmes?

M. Hamel (Claude): Mme la députée, je peux vous donner une réponse en prenant trois cas précis auxquels nous pouvons référer, compte tenu des personnes présentes. À l'assemblée des gouverneurs, il y a trois membres socio-économiques, dont une femme. A l'Université du Québec à Chicoutimi, M. Laforge pourra y répondre. Je profite de l'occasion pour vous souligner l'arrivée de M. Claude Corbo, le recteur de l'Université du Québec à Montréal, et je lui demanderai aussi de répondre à votre question en ce qui concerne le conseil d'administration de l'UQAM.

Mme Blackburn: Ce n'est pas une préoccupation. (17 h 45)

M. Laforge (Hubert): Mme Blackburn et chère concitoyenne, pour ce qui est du conseil d'administration du l'Université du Québec à Chicoutimi, sur trois membres socio-économiques, il y a une femme, Mme Georgiev, d'Alma.

Mme Blackburn: C'est mieux qu'à l'Assemblée nationale. M. Corbo.

M. Corbo (Claude): M. le Président, je salue d'abord les membres de la commission en m'excusant d'être arrivé si tardivement. J'ai le regret d'informer la commission que, parmi les membres socio-écomomiques du conseil d'administration de l'UQAM, il n'y a pas de femme.

En revanche, sur neuf postes de direction, il y a quatre femmes dont deux vice-rectrices. À la commission des études de l'Université du Québec à Montréal, outre le recteur, siègent la doyenne des études de premier cycle, la vice-rectrice à l'enseignement et à la recherche, deux femmes sur les six professeurs membres de la commission des études et là-dessus, je dois dire que je m'inquiète un peu, les six étudiants de la commission des études de l'Université du Québec à Montréal sont six femmes. Nous avons un problème de représentation à l'inverse.

Mme Blackburn: J'en profite pour féliciter M. le recteur de l'UQAM. J'ai toujours su qu'il avait su s'entourer. C'est peut-être pour cela aujourd'hui qu'on a un projet de loi qui le touche profondément et qui vient améliorer la situation de l'UQAM. Je voudrais simplement vous dire, messieurs, que ma remarque ne voulait pas contester votre compétence pour occuper les postes que vous occupez, mais je m'interroge, cependant, sur une représentation équitable de votre clientèle féminine et des femmes du Québec de façon générale - c'était tout simplement cela - et, évidemment, sur les effets possibles sur la mission des universités.

Le Président (M. Paré): Oui, M. le député d'Abitibi-Ouest, en vous rappelant qu'il reste cinq minutes.

M. Gendron: À l'article 10, les professeurs craignent que le nouveau libellé de l'article 32 b) n'ait pour effet de les évincer des postes prévus pour les personnes exerçant des fonctions de direction. Vous êtes au courant qu'on a changé le texte. Alors, la question que je vous pose, c'est celle-ci: Pense2-vous que le nouveau libellé de l'article 32 b) du projet de loi par rapport à ce qu'il y avait auparavant servira effectivement à nommer des administrateurs, vice-recteurs ou autres qui ne figurent plus dans la nouvelle composition?

M. Hamel (Claude): C'est une question qui se pose au niveau des conseils d'administration des établissements et non au niveau de l'assemblée des gouverneurs. Le texte de la loi permet cela. Comment cela se réalisera en pratique, c'est à voir, mais j'aimerais rappeler, par ailleurs, que nos personnels de direction à l'enseignement et à la recherche dans les établissements sont fondamentalement des personnes sorties des rangs du corps professoral et demeurent, à notre avis, des professeurs.

M. Gendron: Une autre question, toujours dans le temps qui m'est imparti. Vous avez fait une suggestion que, personnellement, je partage, lorsque vous avez mentionné à la dernière page de votre mémoire, la page 10...

M. Ryan: Je vais prendre une note.

M. Gendron: Oui. Ne sortez pas votre calepin noir, vous. Vous croyez que l'article 40 devrait s'appliquer dans les cas de l'École nationale d'administration publique, de l'ETS. de l'Institut Armand Frappier et de l'INRS", et vous avez dit peut être ultérieurement pour la TELUQ, la Télé-université. Je voudrais savoir pourquoi cette réserve pour la Télé-université à ce moment-ci alors qu'il me semble qu'il y aurait une logique selon laquelle ces Institutions ou ces établissements à vocation particulière pourraient aussi avoir un comité exécutif.

M. Hamel (Claude): Dans le cas de la Téléuniversité, c'est pour une raison technique. Actuellement, la Télé-université n'a pas plein statut d'établissement autonome parce que la Télé-université n'a pas de lettres patentes. Donc, elle est rattachée au siège social de l'Université du Québec. Nous avons soumis une demande de lettres patentes pour la Télé-université et le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, sur l'avis du conseil des universités, a jugé opportun de ne pas donner suite immédiatement à cette demande. Mais nous préparons actuellement un dossier sur cette question et, une fois que nous aurons répondu à d'autres interrogations du ministre concernant les services que nous offrons en région, nous reviendrons à la charge avec une demande de lettres patentes pour la Télé-université. À ce moment, cette demande d'un comité exécutif devrait, bien sûr, être étendue à la Télé-université.

M. Gendron: Une dernière question, toujours très courte. Concernant les chargés de cours - il me semble avoir bien compris votre mémoire - vous n'aviez pas d'objection, mais il y avait quand même une nuance pour le type d'université. Alors, je voudrais que vous vous expliquiez en une phrase. Si on profitait de ce projet de loi pour inclure une présence des chargés de cours, • est-ce que vous seriez tout aussi d'accord avec le projet de loi?

M. Hamel (Claude): Oui. Sur les chargés de cours, ce que nous avons à l'esprit, c'est d'ajouter un chargé de cours à l'assemblée des gouverneurs, un chargé de cours aux conseils d'administration des constituantes à vocation générale. Cela va bien, parce que des chargés de cours sont présents dans les constituantes à vocation générale. Dans nos constituantes à vocation spécialisée, à l'INRS, il n'y en a pas de chargés de cours dans le personnel, à l'institut Armand-Frappier non plus, à la Télé-université non plus. À l'École nationale d'administration publique, c'est un autre type de statut. La question ne se pose pas aux autres endroits; c'est dans les constituantes à vocation générale qu'elle se pose.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le ministre.

M. Ryan: J'aurais peut-être une question pour M. Laforge. Comme il représente ici une université en région, j'aimerais lui demander - je le fais à dessein parce que j'avais déjà eu certains échos de réactions qui pouvaient venir de l'Université du Québec à Chicoutimi - comment il réagit dans ta perspective d'un statut d'associée pour l'Université du Québec à Montréal. Quelles peuvent être les répercussions de ce statut pour l'équilibre du réseau que constitue l'Université du Québec? Quels sont les problèmes qu'il faudra surveiller pour éviter que ça ne conduise, comme on l'a déjà prétendu, nous autres, à propos d'autres formules d'États associés, à la séparation pure et simple?

M. Laforge: Mon sentiment personnel, M. le ministre, sans doute partagé par certains collègues, c'est qu'on observe l'éloignement partiel de l'UQAM du réseau de façon neutre, parfois de façon un peu négative, en se demandant ce qui a bien pu amener une constituante à souhaiter se retirer du réseau. Sans faire une analyse en profondeur et sans reprendre l'histoire, je me permets d'exprimer le souhait que le réseau soit ou évolue vers ce qu'on pourra appeler un consortium d'universités. Je pense que la direction, le président, les vice-présidents ont, à plusieurs reprises, exprimé un désir dans le même sens, que le réseau, se sente plus fort parce que réseau, plutôt que d'être en présence de constituantes qui souhaitent plus ou moins, à court ou long terme, leur autonomie.

Un mot a été employé à l'occasion, celui de maturité, pour justifier à une certaine instance le geste qui serait posé éventuellement par la modification de la loi. Je vous assure que, dans les régions, être jugé comme non suffisamment matures encore pour arriver à un statut donnant une certaine autonomie, cela en a vexé et blessé plusieurs. J'espère que ça ne fait aucunement partie des considérants qui ont mené au statut d'université associée pour l'UQAM et qu'au contraire cela lui permettra, dans le cadre montréalais, de mieux évoluer, de mieux se développer.

Mais, je répète ce que je disais au départ: Le souhait est très fort pour que le réseau soit un véritable consortium et même j'ose exprimer le désir qu'un Jour on voie apparaître une candidature, de l'extérieur du réseau, à faire partie du réseau, tellement c'est intéressant de travailler en collaboration.

M. Ryan: Merci.

La Président (M. Paré): Alors, comme les discussions et le temps qui nous était Imparti sont terminés, je veux, au nom de tous les membres de la commission, remercier les gens de l'Université du Québec pour la présentation de leur mémoire et la discussion fructueuse qu'ils ont eue avec les membres de la commission. Messieurs les membres de la commission, Je

voudrais vous rappeler que les travaux vont reprendre à 20 heures et que nous allons entendre les représentants de la Fédération des professeurs d'universités du Québec. Alors, là-dessus, les travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 55)

(Reprise à 20 h 18)

Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous plaît!

Toujours avec le même mandat, j'ai un changement dans la composition de la commission. M. Forget (Prévost) va remplacer M. Hamel (Sherbrooke).

Nous allons maintenant entendre la Fédération des professeurs d'universités du Québec. Je vous souhaite la bienvenue à la commission. Je vous rappelle que nous avons une discussion qui dure 60 minutes, en vous invitant à laisser un peu de temps aux membres de la commission pour discuter avec vous. Donc, si vous pouviez faire une présentation d'à peu près 20 minutes, ça nous permettrait d'avoir ensuite 20 minutes de discussion avec chacune des formations politiques.

Je vous souhaite la bienvenue. Je vous invite à nous présenter votre mémoire, M. Leblond, et à nous présenter les personnes qui vous accompagnent.

Fédération des professeurs et professeures d'universités du Québec

M. Leblond (André): Merci, M. le Président. Je voudrais, tout d'abord, remercier les parlementaires de nous avoir donné l'occasion de participer à cette commission démocratique. Je veux, tout d'abord, vous présenter les membres de notre délégation. À ma droite, M. Joseph B. Mathieu, secrétaire de la fédération et professeur à l'Université du Québec à Chicoutimi; M. Claude Boucher de l'INRS-Énergle, professeur-chercheur; à ma gauche, M. Enrique Colombino, qui est professeur à l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue.

Notre fédération représente trois syndicats de professeurs comme vous avez pu le voir: Chicoutimi, l'INRS et Abitibi.

Vous me permettrez de résumer considérablement notre mémoire. De grandes parties vont être passées rapidement étant donné que d'autres mémoires de professeurs ont repris un certain nombre d'éléments sur ce sujet.

A la suite du rapport Després, la plupart des syndicats du réseau UQ ont produit des mémorandums ou des résolutions en réaction audit rapport. L'Intersyndicale des professeurs des universités québécoises produisait le 30 octobre 1987 une série de résolutions à ce sujet et le SPUQAC transmettait au ministre un mémorandum le 9 octobre 1987. Enfin, M. Ryan, dans une lettre de dix-sept pages, adressée au président de CUQ, prenait position sur le rapport Després. Il semble bien que le ministre a surtout tenu compte des interventions de l'assemblée des gouverneurs jusqu'à maintenant.

On en a la preuve avec le projet de loi 63 dont les grandes lignes sont les suivantes. Les pouvoirs du siège social sont modifiés pour faire place à la notion de règlements applicables à une université constituante, à une école supérieure ou à un institut de recherche. Ainsi, l'assemblée des gouverneurs pourra, entre autres, décider de la composition et du mode de fonctionnement de comités, de commissions ou autres d'une constituante et de la pertinence de l'existence d'un service ou d'un autre en son sein. Elle pourra également établir la façon d'engager le personnel de soutien et les professionnels de toute catégorie et, par conséquent, en fixer le nombre dans tel ou tel service, déterminer les critères de leur engagement, ainsi que ceux de la firme comptable susceptible, à son avis, de mieux étudier les livres des constituantes.

De plus, deuxième point majeur, le siège social se voit accorder le pouvoir d'adopter des programmes d'études et une nomenclature des grades, diplômes ou certificats universitaires, ce qui est différent de la situation actuelle. En fait, c'est l'autonomie déjà partielle des constituantes qui est remise en cause. L'assemblée des gouverneurs pourra donc imposer sa réglementation spécifique selon les conjonctures et les rapports de forces, la force, bien sûr, étant légalement de son côté. Par exemple, qui empêchera l'assemblée des gouverneurs d'établir sa propre procédure de nomination des vice-recteurs et des autres cadres universitaires? Qui l'empêchera d'exercer un contrôle absolu sur les négociations des conventions collectives, de désigner les recteurs de son choix sans consulter les professeurs, de mettre sous sa tutelle l'administration d'une université, de décréter l'existence ou non, de même que le contrôle des centres hors campus? La concertation étant remplacée par la coercition, qui l'empêchera de décréter que tel ou tel programme sera assuré ou non localement? La spécialisation des universités au détriment des étudiants et des régions ne sera-t-elle pas le nouvel évangile?

Nous avons eu l'occasion aujourd'hui d'entendre d'autres sons de cloche par rapport au statut de l'UQAM. Nous croyons que le statut de l'UQAM ne nécessitait pas ces deux amendements majeurs à la loi. Nous croyons, de plus, que le statut d'université associée accordé à l'UQAM devrait être dans la loi prévu aussi pour les autres universités.

Le projet de loi cristalise davantage l'actuel déséquilibre de la représentation des divers groupes d'intérêts à l'assemblée des gouverneurs. Le projet de loi augmente de trois à quatre le nombre de représentants des Instituts de recherche et des écoles supérieures et supprime les

quatre postes réservés aux vice-présidents. Celui des représentants des milieux socio-économiques passe de trois à sept et on y ajoute un représentant du collégial, le nombre de personnes extérieures s'élevant, à ce moment la, à huit, donc un gain de plus cinq du côté des socio-économiques. Celui des représentants du corps professoral, déjà minime, est maintenu à trois professeurs. Il en est de même de celui des représentants des étudiants qui est de deux. Est-ce là un sain équilibre de la représentation quand on connaît le rôle très Important des professeurs dans la gestion des affaires universitaires? Il nous apparaît clair que le projet de loi 63 va à l'encontre du bon sens et qu'il donnera un pouvoir réel accru aux gestionnaires de l'Université du Québec.

L'équilibre de la représentation des différents groupes dans les conseils d'administration des constituantes est aussi complètement modifié. On peut relever les constatations suivantes. Le corps professoral n'est plus consulté pour désigner deux personnes exerçant des fonctions de direction de l'enseignement et de la recherche. Désormais, c'est le CA qui désignerait, sur recommandation du recteur, deux personnes exerçant des fonctions de direction. Point à la ligne. Dans les faits, le nombre de professeurs au conseil d'administration est réduit de cinq à trois au sein du nouveau conseil de quinze membres (au lieu de quatorze) ainsi créé.

Les recommandations des organisations syndicales concernant la tradition démocratique universitaire de consulter le corps professoral pour la nomination des chefs d'établissements sont entièrement Ignorées par le projet de loi. Si l'autonomie universitaire a un véritable sens, ne doit-on pas également exiger que le recteur soit désigné par le conseil d'administration de l'université locale à la suite d'une consultation du corps professoral et des autres décideurs du milieu universitaire?

Si l'on admet généralement que la centralisation est la concentration des fonctions de planification, d'organisation, de direction et de contrôle entre les mains d'un petit groupe ou d'une seule personne dans un ensemble humain organisé, n'est-ce pas vraiment l'objectif dudit projet de loi? Le projet de loi accorde à l'assemblée des gouverneurs et au conseil des études le pouvoir de décider pour toutes les activités essentielles des constituantes. Il fait de ces organes du siège social les seuls interprètes de l'évolution des constituantes. Ce projet de loi lui assure une autorité Incontestable, l'affermit et fait des constituantes et de leurs recteurs des boites aux lettres et des facteurs. Une des conséquences de cette centralisation sera la création au sein de l'Université du Québec d'une série de services centraux chargés de régler, de décider, de sanctionner selon les règlements qu'il a adoptés. Ce qui est véritablement en cause dans le projet de loi 63, c'est bel et bien une philosophie de gestion. Toute cette opération se réalise au profit d'un siège social plus bureaucratique, plus centralisateur, plus uniforme, donc moins enrichi de l'apport de ses constituantes.

Ce qui serait préférable, c'est une plus grande autonomie des constituantes, en accroissant leurs pouvoirs et leurs possibilités de développement et d'Innovation. En d'autres termes, nous réclamons plutôt pour les constituantes une augmentation de leurs pouvoirs d'organisation et de décision. Nous voulons que les conseils d'administration et les commissions des études des constituantes aient la pleine maîtrise de leurs activités essentielles, donc, de l'enseignement et des programmes; autrement dit, qu'elles décident elles-mêmes ce qui convient le mieux à leur développement. Dans cette optique, il serait peut-être nécessaire de revoir le rôle du siège social, pour qu'il devienne un organisme de coordination démocratique associant l'ensemble des constituantes.

Comme je l'ai annoncé tout à l'heure, pour les pages 12 à 23 du mémoire, je vais tout simplement résumer et vous référer à ce mémoire. Je sais que la FAPUQ va reprendre l'idée d'une déclaration des libertés académiques et de l'autonomie universitaire. Ce qu'exposent ces pages, essentiellement, c'est le fameux dilemme qui existe entre les responsabilités des Intervenants universitaires, des intervenants au niveau de la gestion et du gouvernement, et ceci face au besoin de liberté académique des professeurs-chercheurs. (20 h 30)

Nous croyons fermement que la Loi sur l'Université du Québec, en plus de permettre la consultation des professeurs pour la nomination de leurs dirigeants, devrait contenir un énoncé sur les libertés universitaires. D'ailleurs, dans plusieurs pays, cela fait partie de leur constitution.

Je soulignerai aussi que, dans le mémoire, on dit que, dans des décisions ou des discussions à l'OCDE, on fait référence au besoin d'une grande autonomie des Institutions et des Individus, de façon à créer un système universitaire dynamique et entreprenant. Du 9 au 17 janvier 1989, j'ai assisté à la Conférence internationale de l'éducation, à Genève. Notre mémoire fait état de la recommandation 76 qui reprend, à son article 22, un énoncé sur les libertés universitaires. Je vous signale également que la même recommandation 76, à son article 9, Indique que les gouvernements - ce sont les gouvernements eux-mêmes qui ont adopté cette recommandation - se donnaient comme mission d'organiser dans chacun des pays un organisme permanent de coordination - on ne parle pas d'un organisme permanent de gestion et d'administration - et ce, dans le cadre de l'article 22 sur les libertés universitaires.

Sans plus, voici les recommandations de notre fédération. Il est recommandé ce qui suit:

1. Qu'un statut de pleine autonomie soit reconnu aux constituantes ou, à tout le moins, un statut d'université associée, en attendant l'obtention de leur pleine autonomie; qu'en conséquence: 2. Le projet de loi 63 soit modifié substantiellement ou qu'un nouveau projet de loi soit rédigé, de façon à répondre à la demande d'autonomie ou de statut d'université associée pleinement démocratique, de même qu'à l'objectif d'une coordination permanente respectueuse de l'autonomie des institutions et de la liberté académique des principaux acteurs du milieu universitaire, un tel projet de loi confirmant les missions d'enseignement, de recherche et de service à la collectivité des constituantes, ce qui n'est pas le cas présentement dans la loi; conservant aux professeurs le droit historique de participer au processus de sélection des personnes devant assumer le poste de chef d'établissement; donnant aux universités constituantes le droit d'adopter leurs propres programmes d'enseignement, de recherche et de service à la collectivité; permettant aux constituantes d'adopter les règlements régissant leur propre fonctionnement; conservant dans les conseils d'administration une représentation équitable des professeurs, occupant ou non des fonctions de direction d'enseignement ou de recherche, que nous estimons devoir être d'au moins le tiers des membres de ces conseils; maintenant le statu quo au niveau de la représentation des milieux extérieurs sur les conseils d'administration, de tels membres devant être proposés par et parmi les groupes sociaux, syndicaux et économiques, et de l'enseignement collégial généralement intéressés à la question universitaire; précisant que les professeurs désignés sur ces conseils le sont après une élection par et parmi les membres du corps professoral; consacrant le mandat des constituantes de dispenser l'enseignement universitaire en région et dans les centres hors campus; Intégrant une déclaration sur la liberté académique des universitaires et sur l'autonomie des universités; 3. Que soit réévalué le rôle du siège social pour en faire un organisme démocratique ayant pour objet principal la coordination des constituantes et des services communs qu'elles décident de se donner, le projet de loi prévoyant pour cet organisme un conseil d'administrateurs composé d'une égale représentation des établissements, dont chacun aura au sein de ce conseil au moins un professeur désigné par et parmi les membres du corps professoral; 4. Qu'en attendant la modification du projet de loi 63 ou la rédaction d'un nouveau projet de loi, une étude de nos demandes soit faite, un statu quo modifié en faveur de l'UQAM pouvant toutefois être accordé par un simple amendement à la loi actuelle.

Mesdames, messieurs les députés, merci beaucoup.

La Président (M. Paré): Merci beaucoup, M.

Leblond. Nous allons maintenant commencer la discussion avec M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Ryan: Je remercie la Fédération des professeurs d'universités du Québec du mémoire qu'elle a préparé à l'intention de la commission et dont elle nous a donné communication par l'intermédiaire de son président, M. Leblond. Nous avons eu l'occasion de rencontrer à plusieurs reprises les membres de la fédération, en particulier M. Leblond. C'est toujours un plaisir renouvelé pour nous d'échanger des idées avec ce groupe de professeurs universitaires regroupant les enseignants de plusieurs établissements différents.

Le mémoire, comme U est présenté, doit peut-être être discuté à deux niveaux différents. Tout d'abord, il faut viser à dissiper certaines ambiguïtés qui ont pu se créer à la suite de formulations du texte même du projet de loi qui peuvent prêter à des interprétations fort discutables.

J'ai signalé, dans mes remarques liminaires, cet après-midi, que les articles 17 et 19 en particulier, dont la formulation pourrait en principe conduire à des initiatives ou à des décisions abusives de la part de l'autorité de l'Université du Québec, seront sujets à réexamen. Nous allons tenter de les formuler d'une manière telle qu'ils indiquent clairement que l'Université du Québec continue, comme elle l'a fait jusqu'à maintenant, de faire des règlements pour l'ensemble de ses constituantes, avec la possibilité que ces règlements ne s'appliquent pas à l'Université du Québec à Montréal ou encore qu'elle puisse faire des règlements spéciaux dans le cas de l'Université du Québec à Montréal, étant donné le statut distinct que le projet de loi vise à conférer à l'Université du Québec à Montréal. Je pense qu'une fois que nous aurons nettoyé ce point il y aura déjà une certaine partie de la perspective qui s'estompera passablement.

Deuxièmement, il y a le problème relié à l'Université du Québec à Montréal. Si j'ai bien compris le mémoire qui nous a été résumé par M. Leblond et que nous avons lu au complet dans sa teneur intégrale, la fédération n'aurait pas d'objection de fond à l'octroi d'un statut d'établissement associé à l'Université du Québec à Montréal, mais elle voudrait que le même statut ou un statut de même nature soit accessible aux autres établissements qui composent le réseau. Ici, évidemment, quand on va un petit peu plus loin dans la pensée de la fédération, on s'aperçoit que c'est une approche qui a des conséquences considérables.

Je voudrais en faire valoir une qui se terminera, évidemment, par une question. S'il fallait accéder aux demandes formulées dans le mémoire concernant l'autonomie des établissements qui forment les unités - les universités constituantes du réseau de l'Université

du Québec - il faudrait vite se poser des questions sur la vocation du siège social, sur son rôle, sur sa composition, et vous le faites, d'ailleurs, dans le mémoire. C'est une perspective entièrement différente de celle que nous avons retenue. Je vous sais gré de nous l'avoir communiquée; cela vient s'ajouter à la réflexion gouvernementale. Je ne pense pas honnêtement que nous puissions accéder à cette demande maintenant, parce que c'est une remise en question foncière du réseau tel qu'il existe actuellement. Je ne sais si dans dix ou quinze ans le problème pourra se poser comme vous le posez, mais aussi longtemps que les constituantes présentent les disparités de taille que nous connaissons présentement, nous ne pouvons pas aller vers une approche comme celle-là dans un avenir prévisible, du moins selon ma perception actuelle des problèmes de l'Université du Québec que je crois avoir examinés avec beaucoup d'attention au cours des trois dernières années, en particulier.

Je vous pose, quand même, la question pour fins de clarification de votre point de vue. J'aurai un certain nombre d'autres questions ensuite. Quel rôle voyez-vous pour le siège social dans la perspective qui encadre vos recommandations? Que devient le siège social comparé à ce qu'il est aujourd'hui? Aujourd'hui, c'est une entité qui a un personnel - je n'ai pas le nombre exact de l'effectif, mais disons que c'est entre 150 et 200 - qui exerce des fonctions importantes dans le domaine des programmes, des contrôles financiers, etc. Quels changements verriez-vous pour que cela fonctionne à votre goût?

M. Leblond: C'est une bonne question. Je pense qu'après vingt ans d'existence les universités constituantes, à divers degrés, vous l'avez d'ailleurs souligné, ont acquis, au même titre que l'UQAM, une certaine autonomie. Cette autonomie va aller en grandissant et vous le prévoyez vous-même. Nous croyons que les budgets qu'elles ont à administrer, que les étudiants qu'elles ont et les programmes qu'elles ont développés historiquement chez elles en conformité avec ces paramètres budgétaires ont donné une couleur et une identité à chacune de ces constituantes.

Bien sûr, nous sommes conscients que l'autonomie totale des universités n'est pas conséquente. D'ailleurs, dans notre mémoire, nous disons que les universités doivent avoir leur autonomie de gestion. Nous croyons beaucoup à la concertation entre les chercheurs, entre les programmes de recherche, etc., entre les programmes d'enseignement. Nous croyons beaucoup aux vertus des échanges de programmes entre universités. Je crois que le siège social joue ce rôle en partie. Par contre, nous devons souvent extensionner des programmes soit de l'Université Laval, de l'Université de Montréal ou même de l'Université de Sherbrooke pour certaines constituantes et nous croyons qu'une concertation est nécessaire à ce niveau-là. Autrement dit, qu'on ait des cadres, d'anciens professeurs, qui fassent partie de ces organismes et qu'ils assurent cette coordination, nous sommes 100 % pour ça. Cependant, nous ne croyons pas que le rôle du siège social soit de dédoubler les niveaux administratifs et de faire de la gestion et ce genre d'opération. Nous croyons que les universités locales sont pleinement capables de faire ces choses-là et qu'elles le seront de plus en plus pour celles qui ont peut-être encore des difficultés.

La situation présente de la plupart des universités du réseau, vous la connaissez. Ce sont des problèmes non seulement de développement, mais également de fond. D'ailleurs, la loi ne prévoit aucunement un financement des universités régionales. On croit que ce n'est peut-être pas dans la loi 63 que cela devrait être, mais peut-être dans une loi sur le financement des universités. Je pense que l'autonomie est une chose complexe qui dépend à la fois des budgets qu'on leur fournit et de la maturité de ces constituantes. Actuellement, la plupart des constituantes du réseau ont, à divers degrés, atteint cette maturité. Il serait faux de croire qu'il faille absolument coordonner ces gens-là de façon coercitive, qu'on se doive de vérifier leurs états financiers, qu'on se doive de vérifier à toutes les étapes toutes les opérations de gestion. On y croit fermement et je crois que c'est un peu l'orientation que nous donnent la recommandation 76 et le rapport Angers, d'ailleurs.

M. Ryan: Selon la conception qui vous anime, combien resterait-Il de personnel au siège social, à supposer qu'il sort réorienté dans le sens que vous voulez? Combien resterait-il de personnel? Disons qu'il y a à peu près 175 personnes actuellement là-dedans. Combien y en aurait-il, d'après vous?

M. Leblond: C'est difficile de répondre à cette question. Nous n'avons pas fait d'étude.

M. Ryan: Vous n'avez pas fait d'étude là-dessus?

M. Leblond: Non. Nous n'avons pas fait d'étude là-dessus. Naturellement, à partir du moment où les universités seraient autonomes, il y aurait sûrement diminution de ces personnels. Je ne crois pas vraiment à une diminution si, par exemple, toutes les universités étaient, comme notre recteur de Chicoutimi nous l'a dit tout à l'heure, en consortium. Je pense qu'avec un changement de vocation ou une réorientation en fonction d'une coordination d'universités autonomes, entre guillemets, on admet, quand même, qu'on a besoin de plans de développement, d'expertise au point de vue de nos programmes. Nous-mêmes, les professeurs, nous acceptons constamment d'être jugés par nos pairs. Je pense que nos programmes d'études ont besoin

d'être... Naturellement, on doit consulter, on doit chercher des expertises pour valider nos modifications de programmes, etc. Jusqu'à un certain point, on peut le faire localement, mais je pense qu'une bonne gestion du système universitaire exige, tout de même, qu'il n'y ait pas de dédoublement forcené et débridé de nos programmes. Il faut que tout ça s'intègre dans une problématique que reconnaît l'OCDE, d'ailleurs. (20 h 45)

Dans notre mémoire, on relève une des conclusions de la conférence de l'OCDE. On dit: Tout de même, laissez de l'autonomie à vos universités mais incitez-les, incitez vos gestionnaires, vos professeurs à s'intégrer dans des plans nationaux. Je pense que les professeurs sont parfaitement conscients de ces objectifs. Par exemple, quand votre ministère a mis sur pied certains programmes de recherche subventionnés spécialement, je pense que les professeurs y ont adhéré jusqu'à un certain point. Je veux dire que je pense qu'il n'y a pas assez de programmes maintenant pour satisfaire les besoins des professeurs.

M. Ryan: On pourrait continuer là-dessus, mais vous me dites que vous n'avez pas eu le temps de faire d'étude approfondie de ce que pourrait être la mission d'un siège social à l'intérieur de la perspective sensiblement modifiée que vous proposez; c'est une question qu'on va continuer d'étudier avec vous, mais ça va prendre un certain temps. Il ne peut pas être question de transposer dans l'Immédiat cette conception dans le projet de loi. J'aime autant vous le dire franchement.

Il y a une autre question qui me préoccupe dans votre mémoire. Vous dites: On va augmenter le nombre de représentants des milieux socio-économiques. Cela ne semble pas vous convenir parce que vous demandez de garder le statu quo sur ces choses. Puis, vous dites: On croit sentir que le dessein du gouvernement au fond de ça, c'est peut-être la privatisation des universités. Je vais vous dire franchement que je ne comprends pas. Vous allez m'expliquer votre perspective parce que j'ai du mal à la comprendre. Il me semble que, si on laisse l'université s'administrer uniquement à partir de l'intérieur, on risque de la privatiser parce que ça va devenir la chose des seules personnes qui y oeuvrent, qui gagnent leur vie là-dedans et tout. En introduisant des représentants de la communauté élargie, l'université n'existe pas dans un vacuum; elle existe dans un milieu plus large. Dans le cas de l'Université du Québec à Chicoutimi, c'est toute la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean qui est le milieu où baigne l'université. On dit: Ce milieu plus large, sur, disons, 20 administrateurs au conseil d'administration, on va lui donner une représentation d'à peu près 30 %, 6, et vous trouvez ça trop fort.

M. Leblond: Actuellement, il y en aurait sept sur quinze, chez nous, en comptant le représentant du milieu collégial. Nous trouvons ça trop fort. D'abord, la commission Angers, rappelez-vous, recommandait une représentation équilibrée. A partir du moment où un groupe représente la moitié ou tout près, nous croyons que c'est démesuré. Quand on parle d'implication des gens du milieu et de la société en général, vous savez très bien que, dans les conventions collectives, il y a là une concertation qui va jusqu'au Conseil du trésor et peut-être à votre ministère. Les budgets des universités, ça ne se décide pas chez nous et ça ne se décide pas au conseil d'administration; ça se décide chez vous. En ce qui concerne l'implication dans le milieu, tous nos programmes d'études - c'est une chose que M. le président de l'Université du Québec n'a pas soulignée tout à l'heure - comportent un membre socio-économique. Cela veut dire que, si on a 60 programmes dans une constituante, on a 60 représentants des milieux socio-économiques à ces conseils de module. Nous, les professeurs, nous faisons des projets de recherche, constamment, avec les gens du milieu. Alors, les gens du milieu sont soit associés comme subventionnâmes ou associés comme bénéficiaires entièrement de ces recherches, que ce soit les grandes compagnies comme l'Alcan ou les groupes sociaux.

Ce que nous trouvons excessif, c'est, justement, cette disproportion de membres socio-économiques pour des décisions à prendre sur la gestion de l'université. Nous croyons que les gens qui doivent décider et analyser des dossiers qui sont soumis au conseil d'administration doivent avoir Intérêt à prendre ces décisions et doivent avoir aussi une certaine connaissance du milieu. Déjà, il y a un certain nombre de socio-économiques et ça amène un certain éclairage. Le problème qu'on rencontre surtout avec ces personnes, c'est, la plupart du temps, leur désintérêt, le surcroît de travail que ça leur Impose aussi. Le vice-président, M. Leclerc, l'a dit tout à l'heure, un membre socio-économique de l'assemblée des gouverneurs se plaignait de trop longues réunions. Alors, cela fait qu'historiquement le taux d'absentéisme de ces personnes dans les conseils est assez élevé.

Aussi, ce manque d'implication des socio-économiques et leur méconnaissance des dossiers a souvent pour effet de les faire voter dans le même sens que la direction, et ça c'est un piège à éviter. Quand on parle de privatisation, je pense qu'il faut faire le lien, là. C'est un danger. Ce ne sont pas des mauvaises intentions qu'on veut prêter, mais iI reste qu'à partir du moment où c'est le ministre qui nomme ces membres socio-économiques, si la propension actuelle de nommer uniquement des gens de l'industrie ou du milieu des affaires continue, il est bien sûr qu'on pourrait penser à une privatisation ou, en tout cas, à une implication d'un monde complètement étranger à l'université.

Nous croyons que c'est important d'avoir des gens de l'extérieur. Nous le faisons déjà dans

nos programmes, sort le programme de recherche, le programme d'enseignement, mais nous ne voudrions pas que toutes les décisions soient prises dans un conseil de sept membres socio-économiques auquel il faut ajouter trois administrateurs, ce qui fait dix. Donc, dix sur quinze, c'est gagné à tout coup. Donc, il n'est plus question d'avoir, là, un équilibre de discussion dans les conseils. On sait où le pendule va se ramasser toutes les fois. Alors, c'est ce qu'on veut éviter.

Nous croyons aussi que, si on veut valoriser les membres socio-économiques, ce n'est pas en augmentant leur nombre. C'est en augmentant la qualité de ces représentants et aussi en leur donnant peut-être des responsabilités plus grandes. J'ai été moi-même président d'un collège. J'étais membre socio-économique et la loi dit que le président doit être un membre socio-économique. Ceci a pour mérite, en tout cas, lorsqu'on a à décider ou à préparer des assemblées, que le membre socio-économique prépare les ordres du jour et, par le fait qu'il est un officier, ça oblige les cadres supérieurs à ouvrir les dossiers. Vous savez, on reçoit des dossiers pour une réunion, mais il y a d'autres dossiers en arrière qui appuient tout ça. Donc, nous croyons que ce n'est pas en augmentant le nombre de ces personnes qu'on va augmenter la qualité de l'administration des universités. Nous croyons que c'est en augmentant la qualité de ces représentants et en leur donnant peut-être un peu plus de pouvoirs.

M. Ryan: Voulez-vous me parler un petit peu de la représentation des professeurs au conseil d'administration, me préciser votre point de vue là-dessus: actuellement, le projet de loi et ce que vous désirez?

M. Leblond: Actuellement, le projet de loi nous retire deux postes de professeur.

M. Ryan: À quel niveau?

M. Leblond: En fait, présentement, il y a trois professeurs qui sont élus parmi leurs pairs. Cela ne change pas. Par contre, dans le corps professoral, il y a un certain nombre de professeurs qui occupent des fonctions de directeur de module, de directeur de département, de directeur de groupe de recherche, etc. Ces personnes, qui sont à la fois professeurs et directeurs, sont éligibles à deux postes, après consultation parmi le corps professoral. C'est la loi actuelle qui le prévoit. La nouvelle loi dit que les postes de vice-recteur s'en vont, mais, par contre, on dit que le recteur pourra suggérer au conseil d'administration deux noms de personnes occupant des fonctions de direction, point. Donc, ce ne sont pas des personnes occupant des fonctions de direction d'enseignement et de recherche; ce pourrait être deux vice-recteurs ou un directeur de service quelconque. Traditionnellement, nous avions cinq professeurs au conseil d'administration, donc à peu près un tiers, et, maintenant, la loi prévoit trois professeurs sur quinze.

M. Ryan: Vous avez bien noté qu'actuellement il y a quatre vice-recteurs qui peuvent faire partie du conseil d'administration et on laisse tomber cela parce qu'on trouve que c'est trop fort. C'est en retour de ça qu'on prévoit la nomination de deux cadres de direction d'études ou de recherche qui viendront assurer la représentation de cet élément très important de la communauté universitaire.

M. Leblond: Oui, peut-être que l'UQAM avait quatre vice-recteurs. La loi prévoyait quatre postes de vice-recteur mais la pratique vécue dans la plupart des constituantes, c'était deux vice-recteurs. Donc, pour nous, dans les faits, vous supprimez deux postes de vice-recteur, mais ce serait ces mêmes personnes qui reprendraient les chaises que nous occupions en tant que directeurs de département et de module. Je pense que ce serait une erreur d'écarter ces personnes qui ont une fonction Importante dans l'université. Ce sont des personnes qui dirigent les programmes, qui les modifient. Ce sont des personnes qui administrent les budgets départementaux, soit les directeurs de département ou de groupe de recherche, et nous croyons que ces représentants doivent être au conseil d'administration. Ce sont les personnes, peut-être avec les professeurs, les vice-recteurs et le recteur, les plus éclairées sur les dossiers. Donc, cela ajoute un élément différent, très important, à notre sens.

M. Ryan: Merci beaucoup.

M. Leblond: Si je peux dire un mot de plus, cela ne veut pas dire qu'on voudrait voir disparaître les deux postes de vice-recteur. On ne s'est pas prononcés pour accepter cette disparition. Je pense qu'il faudrait peut-être limiter le nombre à deux au lieu de quatre, par exemple.

M. Ryan: Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le ministre. La parole est maintenant au député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Je vous salue, M. Leblond, ainsi que vos collaborateurs, dont Enrique Colombino, que je connais plus personnellement, professeur à l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue. Je remercie la fédération des professeurs et vous, M. Leblond, comme président, d'avoir saisi l'opportunité qui vous était offerte d'exprimer votre point de vue. Moi aussi, je pense qu'il est toujours important qu'on puisse situer la lecture qu'on fait de votre mémoire. Je l'ai lu, mais U n'y a rien de mieux

que de l'évaluer rapidement, en présence de ceux qui l'ont rédigé pour savoir si, essentiellement, on résume bien avant d'aller à la discussion que je voudrais avoir avec vous. Je pense que c'est probablement un des mémoires les plus critiques du projet de loi 63. Globalement - Je répète que c'est un résumé - vous dénoncez le caractère centralisateur du projet de loi. Et, surtout, pour porter ce Jugement-là, vous l'associez à l'extension des pouvoirs confiés à l'assemblée des gouverneurs ou au conseil des études concernant leur capacité d'adopter des règlements où la forme de la réglementation va être différente de ce qui existait. Vous l'avez spécifié. Je sais une chose: dès qu'on aura à franchir d'autres étapes, probablement à l'étude article par article, c'est sûr qu'on devra préciser pourquoi, à un certain moment, on a supprimé le mot "généreux", comme ça, comme s'il s'agissait Juste de supprimer un mot: "la capacité d'adopter des règlements généraux" comparativement à "des règlements", tout court. Je n'ai pas été à l'école aussi longtemps que des docteurs, mais assez pour savoir la différence. C'est sûr qu'il faudra vérifier cela. Il y a là une volonté du gouvernement ou il n'y en a pas et c'est strictement parce que c'est arrivé comme cela. Je pense que vous faisiez bien d'être assez virulents sur cet aspect, parce que cela change passablement l'esprit du projet de loi.

Qualifier de centralisateur un projet de loi du ministre de l'Éducation actuel, c'est quasiment une vérité de La Palisse. On ne peut pas être en désaccord là-dessus. Vous réclamez plutôt une plus grande autonomie pour les constituantes par le biais d'un statut d'université associée. Là-dessus, il faudra se parler un peu plus clairement. Je comprends très bien ce que vous exprimez, mais quand J'ai à résumer cela et que vous dites: Dans le fond, les constituantes sont toutes assez grandes filles, si vous me permettez l'expression, pour voler de leurs propres ailes et, en conséquence, avoir un statut d'autonomie ou, à tout le moins, d'associée autant que l'UQAM, en principe, Je ne suis pas contre cela, sauf que, quand Je vais vous questionner tantôt sur le rôle du siège social dans un tel modèle, il faudra davantage me répondre sur le rôle du siège social que faire la justification de votre prétention que ce devrait être comme cela. Je n'ai pas d'objection, sérieusement, à me refaire une opinion. Mais jusqu'à présent, si j'ai à résumer votre mémoire, vous réclamez plutôt une autonomie pour les constituantes par le biais d'un statut d'université associée impliquant le pouvoir d'adopter telle et telle chose.

Vous déplorez la diminution du poids des professeurs dans les instances. Je trouve que, là-dessus, vous étiez passablement sur la bonne piste. Oui, il y a un danger d'ingérence du pouvoir politique, et je vais vous questionner à ce sujet, et une tendance à la privatisation. Le ministre fait semblant de ne pas comprendre; il n'est pas dans le bon gouvernement pour faire semblant qu'il ne sait pas ce qu'est la privatisation avec le Parti libérai. Il y a, effectivement, un danger de privatisation à partir du moment où l'on confie cela à un petit groupe d'amis, à un petit club privé, en disant: Occupez-vous de gérer le conseil d'administration des constituantes, sachant très bien que dans la réalité... Je ne sais pas des fois où il vit. (21 heures)

D'ailleurs, une dame le mentionnait tantôt. Par exemple: à Rimouski, les socio-économiques, on les appellerait pour une séance de travail au conseil d'administration de la constituante le jour et Us ne viendraient pas; ils ont d'autres préoccupations, ils n'ont pas le temps, ils sont pris. Je ne veux pas tomber dans des choses particulières, mais il ne faut pas penser que les "socio", ce sont des gens à temps plein. J'ai vécu dans le milieu des commissions scolaires et je connais un peu cela. J'ai, à de nombreuses reprises, regardé des gens complètement béats adulant le directeur générai: Mosus, qu'il connaît son affaire! Mais je vous dis qu'il passait "ses" affaires, entre vous et moi. Mais il connaissait son affaire! Je vous en passe un papier. Je vous dis que les commissaires trouvaient que cela passait vite et que c'était bien préparé. J'en ai vu quelques-unes. Alors, un recteur et un conseil d'administration le moindrement habiles peuvent faire exactement la même chose. C'est de ces dangers-là qu'il faut être conscient. Je pense que, là-dessus, vous résumiez très bien l'affaire.

Vous souhaitez que les profs désignés aux conseils soient élus directement et forment au moins le tiers des membres des conseils, je trouve que vous y allez fort. En attendant qu'un nouveau projet soit rédigé, est-ce qu'on n'aurait pas pu procéder par amendement pour donner à l'UQAM ce qu'elle réclamait depuis des années? Personnellement, je ne suis pas un grand juriste, mais je ne le crois pas. Voilà, j'ai fait le résumé de votre mémoire.

Maintenant, questions et échanges de vues. J'aimerais revenir un peu sur la piste du ministre de l'Éducation parce que je pense que, là-dessus, elle était valable. On ne peut pas, d'un côté, réclamer un pouvoir d'autonomie plus grand des constituantes... Je ne suis pas loin de cela, mais, compte tenu de la taille des constituantes, des responsabilités et des programmes d'études différents, personnellement - Je peux me tromper - je crois que le siège social, pour autant qu'il fait ce qu'il a à faire et non pas vous dédoubler dans toutes vos fonctions, a encore une responsabilité. J'aurais mieux aimé vous entendre dire plus directement en quoi le siège social est fatigant, ne se mêle pas de ses affaires et vous dédouble. C'est de cela qu'il faut parler franchement. Si vous êtes capables d'évaluer, de montrer qu'effectivement, sur plusieurs éléments, le siège social n'est pas à sa place, vous dédouble inutilement dans des responsabilités qui devraient être les vôtres et qu'on n'est pas capable de saisir, pour ce qui en resterait, la

justification de son maintien, on pourrait épouser davantage votre cause et reconnaître à toutes les constituantes un statut de grande fille ou de grand garçon. J'aimerais vous entendre là-dessus un peu plus clairement. Quand la question vous a été posée, vous avez plus justifié votre position que décrit ce qu'il resterait du siège social. Premièrement, il resterait quoi? Deuxièmement, est-ce que, d'après vous, I est requis qu'il y en ait un, compte tenu du même élément que celui que le ministre a souligné; la taille, l'histoire, les clientèles, ce n'est pas pareil? Je connais très bien le réseau UQ pour y avoir oeuvré un peu, en particulier les constituantes. J'aimerais que ce soit plus clair. Pourquoi pensez-vous qu'on devrait changer de modèle?

M. Leblond: Je pense que c'est une reprise de la même question, mais je vais essayer d'être plus clair. A la limite, dans 20 ans, on pourrait arriver à dire: Le siège social, on l'élimine. À ce moment-là, cela veut dire qu'on coupe tous les services, etc. Maintenant, ça, c'est dans l'hypothèse où toutes les universités un peu comme Laval, Sherbrooke et Bishop's, peuvent se dire autonomes. Je pense que les universités du Québec à Chicoutimi, à Rimouski ou à Trois-Rivières pourraient dire: Nous, on n'est pas pires que Bishop's, nous sommes capables de nous gérer nous-mêmes. Je pense que c'est passablement vrai. Donc, au siège social, présentement, il y a une coordination, il y a une gestion centralisée. La loi actuelle, il ne faut pas l'oublier, donne un pouvoir de contrôle budgétaire. Les budgets ne sont pas envoyés directement aux constituantes. Ils sont envoyés au siège social Ceci oblige donc à avoir des services comptables, etc., un service financier qui, dans une hypothèse de plus grande autonomie, pourrait être tout simplement enlevé. Je pense qu'il y a des bons comptables dans les régions. On peut même les engager en ville, si vous voulez. Mais je pense que nous pouvons faire des vérifications financières nous-mêmes à partir des budgets que nous avons.

Ce qui resterait au siège social, de façon nette? Si on dit qu'on a besoin d'un siège social pour coordonner, on est d'accord avec ça, même que ce soit élargi. Et même dans notre mémoire vous constaterez que nous ne sommes pas, non plus, contre une concertation avec les cégeps. Mais cela n'est pas possible actuellement. Ce n'est pas le siège social qui peut nous coordonner, nous, à Chicoutimi, avec le cégep de Jonquière, avec le cégep d'Alma, etc. Je pense qu'il y a là un jeu qui est à la fois à l'échelle provinciale et à l'échelle régionale. La même chose s'appliquerait à l'Abitibi. Donc, c'est difficile de répondre à votre question, à savoir: Qu'est-ce qui resterait au siège social et qu'est-ce qui ne resterait pas? Je pense que ça demanderait de reprendre la liste des 150 employés et chacun des services. Nous n'avons pas fait cet exercice-là.

M. Gendron: Si on veut progresser un peu, c'est plus en termes de ce sur quoi vous vous basez parce que je ne trouvais pas que c'était si difficile que ça. Je pose ma question autrement. Y aurait-Il éclatement du réseau dans votre modèle, oui ou non? Y aurait -il éclatement du réseau dans votre modèle à partir du moment où toutes les universités constituantes auraient un statut de pleine et entière autonomie? Il faut faire attention. Quand vous me dites dans 20 ans, il faut distinguer entre autonomie et capacité de l'être. On peut porter le jugement que, oui, vous avez la capacité de l'être, mais ne pas être d'accord pour vous la donner pour d'autres motifs, par exemple, pour qu'il y ait plus de coordination obligatoire. À partir du moment où il y a un siège social pour le réseau des constituantes, vous l'avez dit vous-même, une constituante ne peut pas faire ce qu'elle veut. Mais un législateur peut trouver légitime que ce soit comme ça compte tenu de ce qu'on est, des clientèles, des effectifs, de l'argent et ainsi de suite. Oubliez tout ce que j'ai dit. Est-ce que vous maintiendriez, dans votre esprit, un siège social/réseau dans la perspective où on appliquerait votre modèle de constituantes autonomes? D'après moi, non, mais |e veux le savoir de vous.

M. Leblond: Je pense qu'on est d'accord pour maintenir un organisme de coordination. Je pense que notre recteur de Chicoutimi a parlé tout à l'heure d'un consortium. Cette philosophie de gestion là se fait dans l'idée que les constituantes ont une certaine autonomie, ont une autonomie et, dans une organisation où elles sont librement associées, elles peuvent trouver des intérêts communs, l'Intérêt d'être ensemble.

L'autre philosophie est celle qui vient d'en haut, du gouvernement, et qui dit, dans la loi: Vous devez vous coordonner; vous n'avez pas le choix, il faut que vous montiez de votre conseil des études, au conseil d'administration, ensuite au siège social; vous êtes obligés d'aller là; vous êtes obligés d'aller à l'assemblée des gouverneurs, ensuite, vous êtes peut-être obligés d'aller au Conseil des universités. On est rendu à cinq paliers d'intervention. Ensuite, il y a le ministère.

Alors, vous voyez, on est pris dans ce système avec un niveau Intermédiaire de gestion qui vient dédoubler tous les niveaux d'intervention, à tel point que certains nouveaux programmes de baccalauréat, par exemple, pourraient être implantés à l'intérieur de deux ans ou d'un an chez nous, alors que cela prend souvent quatre ou cinq ans quand on suit toute la filière. Il y a donc là des dédoublements administratifs qu'on croit excessifs et qui pourraient être remplacés par un système où les universités ont une autonomie, une responsabilité de gestion. Qui dit autonomie dit aussi responsabilité face au budget que l'État leur accorde et, quand on veut coordonner, c'est parce qu'on a intérêt à le

faire...

M. Gendron: C'est parce que je trouve...

M. Leblond:... on entre dans le club. M. le recteur le disait tantôt: Imaginez si Laval entrait dans un club semblable, ça pourrait donner une dynamique tout autre. Nous le faisons, comme professeurs, dans des projets de recherche.

M. Gendron: Je pense que c'est de plus en plus clair. Je voulais que vous vous exprimiez là-dessus. Votre point de vue est plutôt un modèle Inversé par rapport à celui qui existe actuellement, et il y a effectivement des raisons de prétendre ça. Quand vous arrivez avec l'expression "consortium d'universités ou de fonctionnement", j'ai vu dans votre mémoire ce que ça signifiait, mais je voulais que vous ayez l'occasion de l'exprimer.

L'autre aspect de ma question qui n'a pas été touché, mais qui me parait important, vous avez parlé de danger de privatisation, mais également de contrôle politique par la nomination dus soclo économiques. J'aimerais vous entendre, parce que je trouve que les "soclo", c'est fondamental. Vous avez dit que nous avions oublié les diplômés, que vous aviez des modes de nomination qui vous rendent Insécures, et je trouve que vous avez raison parce qu'on n'a aucune information concernant le mode de nomination. Ma question précise: Qu'est-ce que vous avez à suggérer aux membres de cette commission pour sécuriser l'éventuel encadrement ou l'éventuelle nomination des socio-économiques pour éviter que ça ne soit - je le dis comme je le pense, je n'ai pas peur des mots - carrément des nominations politiques, partisanes, mais bien orchestrées, comme on l'a vu le lendemain de l'élection de 1985, alors que des gens m'appelaient pour me dire: Qu'est-ce que je fais là? Je ne comprends pas pourquoi on me nomme là, ça ne m'intéresse pas "pantoute". Alors, j'ai dit: As-tu travaillé pour eux pendant la campagne électorale? La réponse était oui. Je disais: Bien, c'est ça l'explication. Ce n'est pas que tu sois d'accord ou pas là-dessus. Alors, comment voudriez-vous qu'on encadre davantage les socio-économiques?

M. Leblond: La question est posée, M. le député?

M. Gendron: Oui et on s'adresse au président.

M. Leblond: C'est une chose assez complexe, parce que présentement les modes de nomination se font par des suggestions d'organismes au conseil d'administration de l'université; ensuite, cela passe à l'assemblée des gouverneurs - vous voyez, encore un autre palier - et ensuite au ministre. Souvent, les personnes suggérées ou nommées ne représentent pratiquement personne autre qu'eux-mêmes; c'est ça le problème. Quand on dit que les gens doivent représenter le milieu, on veut dire qu'il faut, quand même, qu'ils proviennent d'une organisation, d'un groupe. Comment le faire? Je pense qu'il faut le faire auprès des organismes et leur demander que ce soient des personnes représentatives. Quand on demande quelqu'un des cégeps, par exemple, souvent ça arrive au conseil d'administration du cégep et entre eux, ils disent: On va envoyer quelqu'un. On ne va pas voir les professeurs et les professionnels du cégep pour leur dire: Écoutez, il faut nommer quelqu'un, il faut élire quelqu'un pour aller au conseil de l'université. Cela ne se fait pas comme ça. Souvent, un industriel est choisi comme ça, il n'est même pas délégué par la chambre de commerce, il n'est même pas délégué par la chambre des constructeurs ou quoi que ce soit.

Nous croyons que la provenance devrait être diversifiée, d'une part, donc qu'ils soient de provenance syndicale, des groupes sociaux, économiques, du commerce, de l'industrie, etc., d'accord, mais qu'ils soient vraiment représentatifs, qu'ils aient dus comptes à rendre à quelqu'un. Quand on a là des gens qui ne représentent qu'eux-mêmes, je pense qu'on n'avance pas parce qu'ils n'ont pas de comptes à rendre. Nous, les professeurs au conseil, on a des comptes à rendre en arrière. On est élus par les professeurs et si, vraiment, on ne fait pas notre travail, la fois suivante, on est battus à l'élection. C'est la même chose pour les étudiants.

Il faut donc Inventer des formules. Vous m'avez posé cette question. Peut-être faudrait-il avoir une assemblée universitaire - la FAPUQ le propose; cela existe dans les modèles autres -qui regrouperait très largement les professeurs, les professionnels, les chargés de cours et toutes les personnes qui oeuvrent à l'université, de même que des personnes de l'extérieur. Peut-être y aurait-il là un vivier de représentants possibles qui pourraient, à un moment donné, représenter quelque chose. Il faut inventer des formules, être le plus démocratique possible et consulter le plus de monde possible. La formule est difficile à inventer parce qu'on n'est pas comme en Union soviétique où on peut faire des soviets de tel secteur; cela n'existe pas ici. Sans être des communistes, on pourrait peut-être innover au point de vue de la démocratie et essayer de trouver des formules plus démocratiques pour que ces gens-là soient élus également et soient représentatifs de leur milieu.

M. Gendron: M. Leblond, pour ce qui est de la nomination des recteurs des constituantes, si on lit attentivement votre mémoire, vous souhaitez rester très près et très associés au processus. Je ne veux pas mal vous Interpréter, mais j'ai compris que vous seriez d'accord avec ce que j'appelle une consultation, mais continue, qui permette que l'équipe professorale soit associée à toutes les étapes de la nomination d'un recteur.

Entre ce qui est proposé dans le projet de loi et l'expérience que vous avez vécue comme association de professeurs d'universités, quelles sont les différences fondamentales et surtout les conséquences sur la dynamique Intérieure de l'équipe professorale, à la suite de la nomination d'un recteur à laquelle vous ne seriez pas associés?

M. Leblond: Bon. D'abord, le projet de loi 63 n'incorpore pas de dispositions qui disent que la nomination des recteurs doive être consécutive à une consultation du corps professoral. Pourquoi n'est-ce pas inscrit dans la loi et que ce n'était pas dans la loi originale de 1968? C'est parce que, historiquement, dans le milieu universitaire, depuis des millénaires, en tout cas ça l'est au moins depuis 1000 ans, les recteurs ont toujours été élus parmi leurs pairs. Je suis allé en France dernièrement. Le recteur est même un syndiqué élu parmi ses pairs. C'est comme ça un peu partout dans le monde. Naturellement, on n'y a pas pensé en 1968. C'est une tradition qu'on n'a pas Incorporée. Cela ne l'est pas maintenant Nous croyons que ça devrait l'être.

Ce qui est arrivé dernièrement, c'est que le rapport Després recommandait, à l'annexe 3, je crois, une nouvelle façon de nommer les recteurs, une nouvelle procédure et disait de procéder à des expériences. Cela a été fait à l'INRS et à l'ETS dernièrement. Les gens ont accepté de procéder à des expériences. Le prétexte pour faire ces expériences était la longueur du processus. Je vous dirai, M. le député, que nous-mêmes, chez nous, à Chicoutimi, la dernière fois, nous avons fait un processus de consultation des professeurs parallèle. Nous avons procédé à une élection. Cela ne nous a pas pris trois jours. Nous avons fait une consultation, nous avons entendu les trois candidats Nous avons fait l'élection pendant deux jours et c'était fait. Pourquoi maintenant le siège social prétend-il que ce processus est long? On met le tort sur la longueur d'un processus qu'ils ont eux-mêmes mis de l'avant pour exclure graduellement les professeurs de la consultation et pouvoir recruter eux-mêmes les recteurs qu'ils désirent. C'est là le danger actuel. Nous croyons que la loi devrait prévoir la consultation obligatoire du corps professoral.

M. Gendron: Compte tenu du temps qui m'est imparti, Je vous remercie, M. Leblond et votre équipe.

Le Président (M. Paré): Est-ce que vous voulez réagir, M. le ministre?

M. Ryan: Oui, je voudrais dire un petit mot. Je pense que ça va demander qu'on réfléchisse beaucoup de part et d'autre, mais Je ne suis pas capable de souscrire à la conception de l'université que vous mettez de l'avant, je vous le dis bien franchement. Je pense que la conception de l'université moderne doit embrasser plus large que ça, surtout le rapport avec la communauté plus large. Je pense qu'il y a quelque chose qui fait défaut dans votre perspective. En tout cas, comme représentant du gouvernement, je ne suis pas capable d'y souscrire.

Vous disiez qu'un peu partout ailleurs les recteurs sont choisis par les professeurs et tout. Il faut se réveiller. Je pense que ce n'est pas le cas. Allez à l'Université Columbia, à l'Université Harvard, à l'Université Yale, à l'University Berkeley, ce ne sont pas les professeurs qui choisissent le recteur. Il y a des consultations qui se font. La nomination se fait au "Board of Governors" qui consulte, qui forme, évidemment, un comité spécial pour chercher des candidats. À McGill, c'est la même chose. Je crois que vous ne saisissez pas bien le rôle du conseil d'administration. Son rôle n'est pas de diriger la pédagogie. Ce n'est pas de dirigor l'activité scientifique de l'université. Il y a toutes sortes d'autres instances qui s'occupent de ça. Il y en a qui sont prévues dans la charte de l'Université du Québec, d'ailleurs. Le rôle du conseil d'administration, c'est d'assurer la gestion générale des affaires de la communauté universitaire et, dans le cas des grandes universités modernes, c'est d'assurer le lien avec la communauté plus large, de manière que la communauté plus large aille chercher des ressources pour aider l'université à bien fonctionner.

Cette dimension, en tout cas, nous autres, on veut l'introduire davantage et, quand on veut mettre plus de représentants des milieux socio-économiques, ce n'est pas pour contrôler l'enseignement de l'économie et l'enseignement des sciences de la gestion ou de la biologie ou de la zoologie. Pas du tout. C'est parce qu'on veut que cette perspective plus large de personnes qui ont été mêlées par leur expérience à des préoccupations diversifiées et à des Initiatives Intéressantes et profitables pour la communauté soit mise au service de l'université.

Je vous donne cette réaction bien simplement. Je respecte l'autre point de vue. J'ai l'impression qu'il y a quelque chose de médiéval là-dedans. L'université médiévale fut une grande chose, mais là nous sommes au XXIe siècle.

M. Leblond: Est-ce que je peux conclure, M. le Président?

Le Président (M. Paré): Oui, en espérant que vous ayez une réaction rapide.

M. Leblond: Bon, écoutez, je ne veux pas faire de politique, ce n'est pas mon rôle, mais puisqu'on a dit que nous proposions des théories médiévales, je pense que c'est aller un peu loin. Nous sommes des professeurs d'aujourd'hui, modernes et dynamiques. Nous l'avons prouvé à maintes reprises. Nous sommes le fer de lance de l'évolution du Québec. Ce qui nous manque présentement, c'est des professeurs. Vous nous avez fourni uniquement, depuis quelques années,

des chargés de cours. Ce dont on a besoin maintenant pour développer le Québec, c'est de professeurs et de rendre notre université dynamique, moderne et entreprenante. On ne peut pas avoir une université dynamique et entreprenante en gérant au quatrième niveau. Je pense qu'il faut la gérer au niveau de base, là où le dynamisme s'exerce.

C'est le modèle que nous proposons. Si le gouvernement ne le retient pas, je pense que c'est à lui de prendre ses décisions. Nous respectons l'opinion du ministre, naturellement, et nous voulons, en conclusion, le remercier de nous avoir permis, avec les autres membres, ses collègues parlementaires, de discuter de la modification de la loi 63, ce qui nous a amenés, et j'en suis très heureux, à regarder l'ensemble du modèle. Je pense que le ministre lui-même a annoncé des choses intéressantes et peut-être des modifications. Nous insistons, quand même, pour qu'il regarde à nouveau nos suggestions et nous croyons fermement que ces suggestions sont les meilleures pour notre université. Merci beaucoup.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Leblond, ainsi que les autres personnes qui vous accompagnent de la Fédération des professeurs d'universités du Québec, pour votre contribution aux travaux de cette commission.

Je rappelle aux membres de la commission que nos travaux reprennent demain avant-midi, à 10 heures. Donc, les travaux sont ajournés à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 21 h 22)

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