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(Douze heures seize minutes)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît:
Mesdames et messieurs, la commission élue permanente des finances
et des comptes publics est réunie pour étudier article par
article le projet de loi no 68, Loi modifiant diverses dispositions
législatives concernant les régimes de retraite, et, par la
suite, le projet de loi no 70, Loi concernant la rémunération
dans le secteur public.
Pour la séance de ce matin, les membres de la commission sont -
on me fera part des remplacements, s'il y en a - MM. Blais (Terrebonne),
Bourbeau (Laporte), de Belleval (Charlesbourg), Forget (Saint-Laurent), French
(Westmount), Gagnon (Champlain), Grégoire (Frontenac) remplacé
par Lachance (Bellechasse), Guay (Taschereau)...
Une voix: Forget (Saint-Laurent)? M. Bérubé:
Lui aurait voté pour!
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!
Lincoln (Nelligan), Paquette (Rosemont), Parizeau (L'Assomption)
remplacé par Bérubé (Matane).
Les intervenants sont: MM. Assad (Papineau), Fallu (Groulx), Mme
Lachapelle (Dorion), MM. Lafrenière (Ungava), Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Pagé (Portneuf), Ryan (Argenteuil),
Scowen (Notre-Dame-de-Grâce).
J'imagine que vous voulez faire certains remplacements,
particulièrement du côté de l'Opposition. Peut-être
pourrait-on mettre M. Ryan (Argenteuil) à la place de M. Forget
(Saint-Laurent).
M. Rivest: D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que M. Bourbeau
(Laporte) sera là?
M. Rivest: Non.
Le Président (M. Bordeleau): M. Bourbeau (Laporte) serait
remplacé par M. Rivest (Jean-Talon).
M. Ryan: M. Lincoln sera remplacé par M. Fortier.
Le Président (M. Bordeleau): M. Lincoln (Nelligan)
remplacé par M. Fortier (Outremont).
M. Ryan: Nous aurions aussi M. French remplacé par M.
Doyon.
Le Président (M. Bordeleau): M. French (Westmount)
remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert). Cela va?
M. Ryan: Si vous vouliez aussi ajouter Mme Thérèse
Lavoie-Roux, qui va venir un peu plus tard, comme intervenante.
Le Président (M. Bordeleau): Elle pourrait vous
remplacer.
M. Ryan: C'est ça, très bien.
Le Président (M. Bordeleau): M. Ryan (Argenteuil)
remplacé par Mme Lavoie-Roux (L'Acadie).
Je recevrais maintenant une suggestion pour nommer un rapporteur de la
commission.
M. de Belleval: M. Lachance (Bellechasse).
Le Président (M. Bordeleau): M. Lachance (Bellechasse).
Cela va pour tout le monde? Le rapporteur sera donc M. Lachance
(Bellechasse).
Nous commencerons par l'étude du projet de loi no 68. M. le
ministre, auriez-vous des remarques préliminaires?
Projet de loi no 68 Remarques
préliminaires
M. Bérubé: M. le Président, il s'agit d'un
projet de loi qui est d'allure un peu complexe dans la mesure où il
s'agit d'amender trois projets de loi différents et même plus que
ça, en fait un quatrième, qui est la loi des ex-enseignants
religieux.
On notera, à l'analyse du présent projet de loi no 68,
qu'à cause des interdépendances entre les divers régimes,
beaucoup de ces articles sont en pratique répétitifs et
reprennent simplement les énoncés généraux de la
loi; ils ont été expliqués en deuxième lecture. Ils
sont relativement simples; il s'agit essentiellement d'introduire l'indexation
proportionnelle pour la première année de
prestations de retraite. Il s'agit également, pour les
années futures de contribution au régime de retraite,
d'introduire la notion d'indexation, non plus à l'indice des prix
à la consommation tel qu'il est défini, par exemple, dans la Loi
sur le Régime de rentes du Québec, mais plutôt à cet
indice des prix à la consommation moins 3%, c'est-à-dire que les
premiers 3% de l'inflation ne se verraient pas corrigés par une
indexation équivalente. Également, soulignons que la contribution
de l'État aux régimes de retraite passe des ratios existant
antérieurement et qui varient suivant les régimes à un
ratio uniforme qui est de 50/50 et, finalement, notons que les taux de
cotisation pour les divers régimes doivent être ajustés en
conséquence. Ce sont là les quatre modifications essentielles que
l'on retrouve au coeur du projet de loi et exprimées de
différente façon suivant le régime que l'on touche.
Alors, M. le Président, dans la mesure où le débat
a été fait en deuxième lecture, je pense qu'il ne
m'apparaîtrait pas approprié de modifier de façon
importante, si vous voulez, mon intervention en essayant de la
compléter. Toutefois, j'aimerais souligner le fait que nous aimerions
déposer à l'avance quelques papillons, quelques amendements
où il s'agit essentiellement d'introduire des virgules dans des
nomenclatures de chiffres et j'y reviendrai lorsque nous arriverons aux
articles appropriés. Il s'agit des articles 23 et 42.
M. Fortier: Excusez-moi.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: Est-ce que le ministre pourrait décrire
brièvement les trois régimes dont on fait état dans ce
projet de loi?
M. Bérubé: Oui.
M. Fortier: Qui couvrent-ils?
M. Bérubé: Bon! dans le cas du Régime de
retraite des enseignants, il couvre tous les enseignants et cela - je crois
bien qu'il ne doit pas y avoir beaucoup d'enseignants centenaires, mais enfin
il s'agit de très vieux régimes - jusqu'à 1973; de la
même façon, le RRF (le Régime de retraite des
fonctionnaires) couvre tous les fonctionnaires jusqu'à 1973. À
partir de 1973, les employés de l'État sont couverts par le
régime appelé RREGOP. En nombre de participants, il en reste 45
900 au Régime de retraite des enseignants, 26 000 au Régime de
retraite des fonctionnaires et il y a 281 000 participants au RREGOP.
M. Fortier: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.
M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: Tout d'abord, juste une précision sur les
renseignements que vous venez de donner au député d'Outremont, M.
le ministre. Le RREGOP compte 281 000 participants, le Régime de
retraite des fonctionnaires 26 000 participants et l'autre, 49 900
participants.
M. Bérubé: 45 900.
M. Ryan: 45 900. Est-ce qu'il y en a qui peuvent participer
à deux régimes là-dedans ou si on ne participe qu'à
un seul régime?
M. Bérubé: On ne participe qu'à un seul
régime.
M. Ryan: Un seul régime.
M. Bérubé: On peut se faire transférer des
régimes existants: RRE, RRF au RREGOP maintenant. On me dit qu'un
fonctionnaire qui occuperait deux emplois, un fonctionnaire qui travaillerait
de jour pour le gouvernement et le soir dans un hôpital, par exemple,
pourrait participer à deux régimes. Donc, effectivement, c'est
possible, s'il cumule deux emplois.
M. Fortier: Excusez-moi. Est-ce qu'il se pourrait qu'il y ait des
fonctionnaires qui auraient travaillé depuis 1965 et qui auraient
contribué à un régime de 1965 à 1973 et, ensuite,
à l'autre régime de 1973 jusqu'à maintenant?
M. Bérubé: Ils peuvent être
transférés, mais, à ce moment-là, ils
rachètent des crédits dans le nouveau régime, RREGOP.
Le Président (M. Bordeleau): Vous pouvez vous asseoir
ici.
M. Ryan: Juste à votre gauche.
M. Bérubé: J'en profiterai pour vous
présenter M. Guy Monfette, le président de la CARR.
Une voix: De la quoi?
M. Bérubé: De la CARR (la Commission administrative
du régime de retraite). Il pourra vous répondre dans les cas plus
particulièrement techniques.
M. Ryan: Pourriez-vous nous dire comment fonctionne la Commission
administrative du régime de retraite, quant à y être, pour
qu'on parle dans des termes qu'on comprend tous?
M. Bérubé: Commençons par parler de la CARR.
La Commission administrative des régimes de retraite est un organisme
composé de douze membres. Quatre sont désignés par les
associations syndicales et huit désignés par le gouvernement. La
commission a pour fonction d'administrer les régimes de retraite ou les
régimes d'assurance qui nous sont confiés soit par une loi ou
soit par un décret du gouvernement. Les régimes qui sont
présentement en discussion sont administrés par la commission
administrative. La commission est composée de quelque quatre cents
employés qui recueillent les cotisations venant des employeurs, les
accumulent aux dossiers individuels et paient les prestations au moment
où la personne se retire.
M. Fortier: Et les fonds sont transférés à
la Caisse de dépôt et placement.
M. Bérubé: Certains des fonds sont
transférés à la Caisse de dépôt, d'autres
sont envoyés au fonds consolidé selon les dispositions de la loi.
Les fonds venant des employés, au niveau du RREGOP, sont envoyés
automatiquement à la Caisse de dépôt.
En réponse à la question que vous avez posée tout
à l'heure pour, les gens qui ont cotisé de 1965 à 1973
dans le Régime de retraite des fonctionnaires ou dans le Régime
de retraite des enseignants, s'ils ont opté, après 1973, pour le
RREGOP ou s'ils ont vu leurs services transférés dans le RREGOP,
la formule de prestation est celle du RREGOP, soit 2% selon la moyenne des cinq
meilleures années. C'est, en gros, la même formule que dans
l'ancien régime.
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: II y a une chose que nous voudrions bien clarifier. Nous
nous opposons au projet de loi no 68 parce que nous trouvons que le
gouvernement décide unilatéralement de retirer tout ce domaine
des régimes de retraite du champ de la négociation collective
dont ils faisaient partie, présumons-nous, jusqu'à maintenant, et
nous croyons l'avoir établi. Je ne veux pas faire de grands discours au
début, je pense que ça ne donnerait rien. On veut examiner le
projet de la manière la plus objective possible. Le ministre pourrait-il
résumer et étayer sur des pièces, dans toute la mesure du
possible, la thèse gouvernementale à ce sujet-là?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: La thèse...
M. Ryan: La thèse qui sous-tend le projet de loi.
M. Bérubé: ... à savoir si les
régimes de retraite ont été généralement
inclus dans le champ de négociation ou non? Est-ce bien le sens de la
question?
M. Ryan: C'est cela.
M. Bérubé: Indéniablement, les
régimes de retraite ont fait l'objet de négociations en 1973 et
en 1976. D'ailleurs, je dois avoir avec moi les textes précis. J'ai
l'habitude... Oui. En 1973, les conventions - je parle bien des conventions et
même pas de lettres annexes - contenaient l'article suivant: "La loi
créant le nouveau régime universel de retraite ne peut contenir
des dispositions moins favorables que celles prévues par la
présente convention et aucune modification à la loi, au cours de
la durée de la présente convention, ne peut rendre les
dispositions du régime moins favorables que celles prévues par la
présente convention, sauf s'il y a accord à cet effet."
Donc, dès 1973, les conventions collectives ont incorporé
un article en vertu duquel le gouvernement s'interdisait, par voie
contractuelle, de modifier à la baisse les régimes de retraite
qu'il allait créer, d'ailleurs, suivant des termes qui étaient
complètement explicités à l'intérieur même
des conventions collectives.
En 1976, dans la convention collective qui a suivi celle de 1973,
à nouveau, on retrouve, mais cette fois non pas au coeur des conventions
mêmes, des lettres annexes, qui ont évidemment le même poids
que la convention proprement dite, où il est dit: "Au cours de la
durée de la présente convention, aucune modification au
Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes
publics ne peut rendre les dispositions du régime moins favorables
à l'endroit des employés, sauf s'il y a accord à cet
effet." Donc, à nouveau, en 1976, il y a une clause de la convention
collective en vertu de laquelle le gouvernement se retire le pouvoir, si on
veut... Il ne se retire pas le pouvoir, puisque l'Assemblée nationale
reste toute puissante à cet égard, mais le gouvernement s'engage,
contractuellement, à ne pas introduire d'amendement législatif
qui aurait pour effet de réduire les présents régimes de
retraite en les rendant moins favorables à l'endroit des
employés.
Ces clauses qui restreignent le pouvoir gouvernemental disparaissent en
1979. De telles clauses n'existent pas. La seule clause qui existe et à
laquelle, d'ailleurs, l'Opposition, je pense, par le biais du
député de Vaudreuil-Soulanges, a fait référence -
ce qui est parfaitement exact - c'est la clause 5b, où il est simplement
indiqué que le taux de cotisation actuel est maintenu jusqu'au
1er juillet 1980. Le gouvernement rencontrera la partie syndicale
lorsqu'une hausse des cotisations est requise afin de discuter de tout
réaménagement de bénéfices jugé pertinent.
Ce n'est donc pas véritablement une thèse que le gouvernement
défend. (12 h 30)
M. Ryan: À l'article 5b, si vous le permettez, M. le
ministre.
M. Bérubé: 5b, oui. "Le taux de cotisation actuel
est maintenu jusqu'au 1er juillet 1980. Le gouvernement rencontrera la partie
syndicale lorsqu'une hausse des cotisations est requise afin de discuter de
tout réaménagement de bénéfices jugé
pertinent." Les clauses antérieures, en vertu desquelles le gouvernement
s'engageait à ne pas modifier législativement la
générosité des régimes de retraite à la
baisse sans l'accord des employés, disparaissent. Évidemment,
d'aucuns diront qu'il n'y avait pas, pour autant, l'acceptation par les
employés de l'État que le gouvernement puisse rouvrir à la
baisse les conventions collectives, mais je pense que je me contenterai de la
lettre des textes et dans la mesure où effectivement cette clause a
disparu, elle délie le gouvernement de son obligation à
négocier une réduction à la baisse des régimes de
retraite.
M. Ryan: Cela allait jusqu'au 1er juillet 1981 ou 1980?
M. Bérubé: Jusqu'au 1er juillet 1980. M. Ryan:
1980? M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: Ensuite, pourriez-vous nous raconter ce qui est
arrivé à compter du 1er juillet 1980? Le gouvernement n'a pas
bougé jusqu'à récemment. Est-ce qu'il y a eu des
rencontres avec les syndicats parce que 5b disait que "le gouvernement
rencontrera la partie syndicale, etc"? Qu'est-ce qui s'est produit depuis ce
temps jusqu'au dévoilement du projet de loi no 68?
M. Bérubé: Je vous rappellerai d'abord le discours
du budget de 1981, le dernier discours sur le budget, où le ministre des
Finances avait indiqué qu'il avait l'intention d'introduire un nouveau
régime de retraite pour les nouveaux employés qui, finalement,
serait identique au régime de retraite du RREGOP tel que nous l'amendons
aujourd'hui. Il avait mentionné, également, l'introduction de
deux mesures administratives, mais sans les spécifier dans ce discours
sur le budget et il s'agissait, à l'époque, de la pleine
coordination des régimes de retraite avec le Régime de rentes du
Québec et un deuxième article qui portait sur l'indexation
proportionnelle pour la première année et que vous retrouvez dans
le présent projet de loi.
Toutefois, lors du discours inaugural, le premier ministre a
indiqué l'intention du gouvernement d'aller plus loin dans le sens des
réformes annoncées par le ministre des Finances et d'introduire
une modification directement au RREGOP de manière à l'appliquer
non seulement aux futurs employés se joignant à la fonction
publique, mais à toutes les années futures de contribution dans
les régimes existants. En même temps, nous annoncions des
modifications aux régimes de retraite des enseignants et des
fonctionnaires. À la suite du discours inaugural, nous avons
préparé un ensemble de documents et subséquemment -je ne
pourrais pas vous dire, mais je pourrais obtenir les renseignements - il y a eu
des rencontres avec les différents syndicats pour leur faire part de
l'intention gouvernementale. Je pense que ça donne, en gros, l'ensemble
du portrait.
M. Ryan: Quand, approximativement, ces documents auraient-ils
été soumis aux syndicats concernés?
M. Bérubé: Ils ont été remis aux
syndicats le 19 mars.
M. Ryan: Le 19 mars. Dans la comparution devant cette commission,
vendredi dernier, les porte-parole des centrales syndicales disaient ceci: "Par
le projet de loi no 68, le gouvernement rompt les engagements pris le 2 mars
par le premier ministre Lévesque devant les présidents des
centrales de nous faire parvenir les documents pertinents et, par la suite, de
tenir des rencontres techniques pour échanger sur la question des
régimes de retraite. Les documents ne nous sont parvenus que tardivement
après rappel des engagements pris, mais les rencontres techniques
promises n'ont jamais eu lieu."
Là, ils continuent, ils disent: "Comme cela a été
fait en 1972 et en 1976, lors de la dernière ronde de
négociations, le front commun a négocié de bonne foi des
modifications aux régimes de retraite et une annexe aux conventions
collectives en fait foi." C'est une question, évidemment, sur laquelle
je vais vous interroger, parce qu'ils font, de toute évidence, allusion
aux conventions collectives en cours et non pas aux conventions
antérieures. "Jamais le front commun n'a renoncé à son
droit de négocier cette condition de travail. C'est donc abusivement et
en déformant les faits que le ministre Bérubé
prétend le contraire."
Il y a au moins deux questions qui se dégagent de ceci: D'abord,
est-ce qu'il est vrai que les rencontres techniques promises
n'ont jamais eu lieu avant le dépôt du projet de loi no 68?
Si oui, pourquoi? Deuxièmement, est-ce qu'il y aurait, en plus de
l'article 5b dont a parlé le ministre, une annexe aux conventions
collectives qui justifierait les prétentions formulées ici par
des centrales syndicales ces jours derniers?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Si je reviens au sens de votre
intervention, lors du discours inaugural, le premier ministre avait clairement
fait comprendre l'intention gouvernementale. Je dois souligner que nous n'avons
eu aucune demande de rencontres de la part des représentants des
employés de l'État pour discuter du contenu du discours
inaugural. Toutefois, le bureau du premier ministre a reçu une demande
officielle d'une rencontre un peu avant Noël, c'est-à-dire à
la fin de la session l'année dernière, une demande de rencontre
de toute urgence, compte tenu que le projet de loi devait être
adopté à l'Assemblée nationale. Donc, il était sans
doute déposé. Toutefois, la décision du gouvernement de
reporter l'adoption du projet de loi a fait en sorte que du côté
des centrales on a senti de façon moins urgente la
nécessité de tenir une rencontre avec le gouvernement. C'est ce
qui s'est passé en décembre.
Toutefois, notre intention étant d'aller de l'avant, nous avons
donc demandé à rencontrer les centrales syndicales pour leur
expliquer le contenu technique du projet de loi. Je dois souligner cependant
qu'entre-temps est survenue la décision gouvernementale de tenir un
sommet économique et les centrales nous ont également
demandé à ce moment-là de surseoir à la
présentation du projet de loi de manière à ne pas nuire au
climat général qui devait prévaloir à l'occasion du
sommet en partie. Je pense que c'est une raison qui a été
évoquée et à laquelle nous avons entièrement
souscrit. Par conséquent, la décision a été prise
à ce moment-là de reporter le dépôt du projet de loi
à l'Assemblée nationale. Lors de cette rencontre qui avait
été prévue avec le premier ministre, nous avons
également tenu, au niveau technique, des rencontres où on a pu
aller dans le détail des analyses avec les porte-parole des syndicats
plus directement concernés par les régimes de retraite et plus
familiers avec ces régimes. À la suite de cette rencontre du 2
mars, il y a eu transmission, le 19 mars, de documents techniques qui avaient
été demandés par la partie.
Donc, s'il n'y a pas eu beaucoup de rencontres antérieures, je
pense qu'il serait de bonne foi de souligner que personne n'a
véritablement fait pression, non plus, pour qu'il y ait de telles
rencontres et qu'il y a eu, à différentes occasions, de bonnes
justifications pour ne pas insister sur de telles rencontres, que ce soit la
décision prise en fin de session l'année dernière de ne
pas présenter le projet de loi et de ne pas discuter
immédiatement, que ce soit la décision de tenir le sommet
économique où, à ce moment-là, également il
n'a pas semblé approprié de déposer le projet de loi et
d'en venir à un débat public.
Un des problèmes auxquels nous avons fait face a
été celui du respect des droits de l'Assemblée nationale
dans la mesure où il y a toujours la question de savoir si on doit
saisir l'Assemblée nationale d'abord, pour ensuite saisir les parties
concernées. Dans le cas présent, nous avons choisi au moins
d'aviser nos partenaires, de discuter avec eux du contenu. Je dois souligner
que, lors de leur rencontre du 2 mars avec le premier ministre, les centrales
syndicales avaient souligné qu'elles pourraient avoir des suggestions
à faire, des modifications à apporter, soulignant qu'en 1973, par
exemple, elles avaient permis d'améliorer de façon
considérable, le projet de loi envisagé par l'administration
libérale d'alors grâce, finalement, à une contribution
très positive à l'élaboration du Régime de retraite
des fonctionnaires de l'époque. On nous avait donc souligné,
à l'époque - et de cela, je peux en témoigner - qu'une
discussion, une prise de connaissance par les centrales syndicales du contenu
de la proposition gouvernementale pourrait amener à des propositions
différentes qui pourraient peut-être soit permettre de bonifier le
projet ou le remplacer par autre chose. Nous n'avons eu aucune proposition
spécifique, soit directement sur le projet de loi ou directement sur la
problématique générale des finances publiques.
M. Ryan: Juste pour compléter là-dessus...
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: ... entre la remise des documents aux centrales, le 19
mars, et le dépôt du projet de loi, il y a eu le sommet
économique. À la suite du sommet économique, il n'y a eu
aucune initiative prise par le gouvernement pour provoquer une rencontre au
sujet des aspects techniques des réformes possibles avec les centrales
syndicales.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: C'est-à-dire que les contacts
sont continus entre les représentants des travailleurs et les
représentants de notre
direction des relations du travail du Conseil du trésor. Par
conséquent, dans la mesure où, d'une part, le 2 mars, on avait
procédé à un long exposé suivi d'une longue
discussion des propositions gouvernementales et dans la mesure,
également, où les centrales ayant demandé le contenu des
régimes de retraite de manière à pouvoir en faire des
commentaires, je pense qu'il était approprié, à la suite
de cette première réunion convoquée par le gouvernement,
s'il devait y avoir des réunions ultérieures, qu'elles soient
peut-être convoquées par la partie syndicale en vue d'amener le
point de vue syndical.
M. Ryan: II n'y a eu aucune demande de la part des syndicats.
M. Bérubé: Non.
M. Ryan: Est-ce que vous avez une réponse à la
deuxième partie de la question que je vous posais? Est-ce qu'il y a une
annexe quelconque aux conventions collectives traitant de ces questions ou s'il
n'y en a pas du tout? Dans le texte des centrales syndicales, on dit que comme
cela a été fait en 1972 et en 1976, lors de la dernière
ronde de négociations, le front commun a négocié de bonne
foi des modifications aux régimes de retraite et une annexe aux
conventions collectives en fait foi.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Oui. Il y a une annexe qui est une
lettre d'intention du gouvernement relative au RREGOP dans laquelle on
retrouve, par exemple, à l'article 5b - on doit avoir la même
chose dans les autres conventions d'ailleurs; cela, c'est l'entente nationale
des enseignants - le paragraphe que je vous soulignais tantôt,
c'est-à-dire que "le gouvernement rencontrera la partie syndicale
lorsqu'une hausse des cotisations est requise afin de discuter de tout
réaménagement de bénéfices jugé pertinent."
Mais tout article du type négocié par l'ex-administration
libérale, en 1976 par exemple, en vertu duquel le gouvernement
s'engageait à ne pas réviser à la baisse les
régimes de retraite existants, n'apparaît pas dans les conventions
de 1979. Vous me direz qu'il aurait dû apparaître, mais, enfin,
"you win some, you loose some".
M. de Belleval: Au contraire, c'est à dessein qu'il
n'apparaît pas.
M. Ryan: Est-ce qu'il y aurait moyen de prendre connaissance de
cette lettre, M. le ministre?
M. Bérubé: Certainement.
M. Rivest: On reviendra aux questions du chef de
l'Opposition.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Jean-Talon.
M. Rivest: J'ai une question d'ordre général. Selon
les chiffres fournis par le gouvernement, je pense que les modifications
apportées par la loi no 68 représentent une diminution de 141 000
000 $ des sommes qui auraient été autrement disponibles pour les
gens qui prendront leur retraite pour l'année budgétaire
1982-1983. J'ai ici des indications selon lesquelles, pour 1983-1984,
étant donné que ce sont juste les neuf premiers mois, ce serait
242 600 000 $ et pour l'année 1984-1985, 298 000 000 $. Prenons ces
trois années. Cela veut dire, en termes concrets et d'une façon
générale, que des personnes âgées, entre autres, qui
prendront leur retraite se voient, par ce projet de loi sur une période
allant d'ici à 1985 à tout le moins, privées d'une somme
de 700 000 000 $ qui leur serait par ailleurs disponible, à moins que je
ne me trompe, peu importe le montant, je ne veux pas faire un drame sur le
montant. Donc il y a une somme importante qui aurait été
disponible. Or, le ministre se rappellera que... Oui. (12 h 45)
M. Bérubé: Vous dites: Les personnes
âgées. Ce ne sont pas les personnes âgées; ce sont
tous les employés de l'État, parce que cette économie,
finalement, porte sur l'ensemble de ceux qui contribuent aux régimes de
retraite.
M. Rivest: Oui.
M. Bérubé: II ne s'agit pas seulement des
employés qui prennent leur retraite; au contraire, les employés
qui prennent leur retraite ne sont pas touchés.
M. Rivest: Mais la majeure partie, j'imagine, ce sont des
personnes qui ont pris leur retraite à un certain âge.
M. Bérubé: Non, celles-ci ne sont pas
touchées.
M. Rivest: Non?
M. Bérubé: Toutes les personnes - c'est pour cela
que je pense qu'il y a une confusion - qui ont pris leur retraite...
M. Rivest: Cela, je le sais.
M. Bérubé: ... sont complètement
immunisées. Toutes les personnes qui vont prendre leur retraite cette
année, par exemple, et qui ont contribué pendant 35 ans suivant
l'ancienne formule ne sont pas touchées non plus parce que le projet de
loi
ne s'applique qu'aux contributions futures aux régimes de
retraite.
M. Rivest: Après quelle date?
M. Bérubé: Après le 1er juillet. Par
conséquent, ça ne s'applique pas vraiment aux personnes
âgées, mais ça s'applique surtout aux jeunes personnes,
c'est-à-dire que ce sont surtout les nouveaux employés qui
commencent maintenant à contribuer à leur régime de
retraite qui se retrouveront avec une rente de retraite moins
généreuse que sous l'ancien programme; toutefois, quelqu'un qui
aura contribué aux trois quarts dans l'ancien régime aura aux
trois quarts une retraite prévue sous l'ancien régime.
M. Fortier: Une seule indexation.
M. Rivest: D'accord, le ministre a raison, je reviendrai sur ma
question à propos des 3% et des conséquences que cela
entraîne justement pour les personnes, parce que la valeur relative de la
rente va diminuer de 90, enfin va descendre un peu. J'y reviendrai tantôt
quand on parlera des 3%.
M. Ryan: Est-ce qu'on peut finir sur ce point-ci, si vous le
permettez?
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: L'article 5b de la lettre d'intention que le ministre a
cité tantôt a donné lieu de sa part à une
interprétation dont je ne suis pas sûr qu'elle soit exacte et
défendable. Il y a d'abord un 5b; quand il y a un 5b, il y a 5a. On y
dit que "le gouvernement, en consultation avec les membres de la Commission
administrative du régime de retraite, nommera un actuaire-conseil dont
le mandat sera de se prononcer quant à la pertinence des
hypothèses utilisées pour l'évaluation actuarielle; un
délai de trente jours lui sera accordé afin qu'il se prononce et
soumette au gouvernement l'ensemble de ses recommandations, lesquelles seront
rendues publiques. Le taux actuel des cotisations est maintenu - c'est 5b -
jusqu'au 1er juillet 1980. Le gouvernement rencontrera la partie syndicale
lorsqu'une hausse des cotisations est requise afin de discuter de tout
réaménagement des bénéfices jugé
pertinent."
Évidemment, à sa face même, ce texte-là se
prête à deux interprétations. Il y a une
interprétation qui peut impliquer des hausses de cotisation rendues
nécessaires à la suite des études actuarielles pour
prévoir le partage stable des bénéfices découlant
du régime. Je crois comprendre que c'est une interprétation qui
est défendue par la partie syndicale et qui, il me semble, s'est
dégagée, d'ailleurs, de la lecture directe du texte. Mais je
crois que c'est forcer l'interprétation que de faire dire à ce
texte-là que la partie syndicale consentait à ce que...
M. Bérubé: Je n'ai jamais dit qu'elle avait
consenti.
M. Ryan: Consentait à ce moment-là, pas maintenant,
mais à ce moment-là, en acceptant ce texte-là.
M. Bérubé: Vous savez, j'ai participé
d'ailleurs, à un moment donné, à des négociations
sur les ententes de la Baie-James et à d'autres négociations dans
le passé. Il arrive parfois que, pour en arriver à une entente,
on accepte de laisser des zones grises de manière justement à
pouvoir régler finalement. Alors, qu'est-ce que la partie syndicale
avait à l'esprit lorsqu'elle a signé? Et qu'est-ce que le
gouvernement avait à l'esprit lorsqu'il a signé? Cela fait partie
de la zone grise qui se perdra dans la nuit des temps et sur laquelle vous
n'aurez jamais de réponse. D'ailleurs, une des difficultés que
j'ai eues c'est lorsqu'il s'est agi de transformer en loi la convention de la
Baie-James. C'était une véritable catastrophe parce qu'une
convention, par définition, repose sur des ambiguïtés, mais
une loi ne peut pas reposer sur des ambiguïtés, et fabriquer des
textes législatifs à partir d'une convention a
entraîné de nouvelles négociations qui m'ont pris des
années de ma vie, je dois dire. Donc, qu'est-ce qu'il y a dans le texte,
dans l'esprit de ceux qui ont signé le texte? Cela, vous savez,
ça se perdra dans la nuit des temps et je ne pourrais pas, n'y ayant pas
été, n'ayant pas siégé à la table de
négociation à l'époque, vous dire exactement ce qui
prévalait comme esprit général à la table.
M. Ryan: M. le ministre m'a interrompu, mais j'ai
écouté son explication avec intérêt, quand
même, évidemment. D'abord, je lis ce texte. Vous pouvez donner
l'interprétation que vous voulez, mais je vais vous dire ce qu'on fait
à ce moment, en cas de conflit d'interprétation en temps normal.
"Le gouvernement rencontrera la partie syndicale lorsqu'une hausse de
cotisations est requise." Il me semble évident, à sa face
même, que ce texte veut dire si une hausse des cotisations
découlant des études actuarielles est requise, mais sur la base
du partage qui existait à ce moment. Il n'est pas du tout question d'un
changement dans le partage des cotisations devant être assumées
par l'une et l'autre parties.
Il est assez clair que la lettre d'intention du gouvernement a
été acceptée comme annexe au contrat sur la foi de cette
interprétation qui est fournie par l'autre partie. J'admettrais à
la rigueur que la
partie patronale fournisse une autre interprétation, mais il me
semble que, quand il y a divergence d'interprétation sur la
signification d'un texte qui fait partie d'une convention, on a recours
à l'arbitrage pour trancher le litige, mais aucune des deux parties ne
doit ou ne peut, à mon point de vue, s'arroger la faculté de
trancher cela unilatéralement et arbitrairement. Il me semble,
franchement, que le gouvernement force le texte, parce que j'essaie de voir
s'il y a quelque fondement. Dans la prétention syndicale qui a
été énoncée devant cette commission vendredi
dernier et à la lecture du texte, je suis obligé de conclure
qu'il y a plus qu'une zone grise destinée à se perdre dans la
nuit des temps, il y a une signification assez claire, qui est
contorsionnée, déformée par le gouvernement pour servir
ses fins budgétaires découlant de sa mauvaise administration.
M. Bérubé: Le député de Charlesbourg,
ayant été ministre de la Fonction publique...
M. Ryan: Y a-t-il moyen d'avoir une copie de ceci?
M. Bérubé: ... au moment des dernières
rondes de négociations, pourrait peut-être répondre
à la question du chef de l'Opposition, mais je me contenterais de dire
ceci, pour en avoir à plusieurs reprises entendu parler par la bouche du
ministre des Finances... Lier le pouvoir législatif de
l'Assemblée nationale par voie contractuelle n'était
peut-être pas retenu comme tel par le ministre des Finances d'alors. Je
pense que le problème est là et, de fait, les clauses des
anciennes conventions en vertu desquelles le gouvernement s'engageait à
ne pas légiférer à la baisse les régimes de
retraite, ont disparu lors de la dernière ronde de négociations.
Peut-être que le député de Charlesbourg aimerait
compléter.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: Je pense que le président du Conseil du
trésor et député de Matane vient de fournir
l'élément fondamental de réponse à la question du
chef de l'Opposition. Ce n'est pas en comparant et en examinant ad infinitum
les dispositions de la présente convention collective que le chef de
l'Opposition va trouver sa réponse. C'est en comparant les
présentes dispositions des conventions collectives avec les anciennes
dispositions des conventions collectives que le chef de l'Opposition va trouver
sa réponse. Ce n'est pas pour rien que les anciennes dispositions de
1973 et 1976, le ministre des Finances responsable des négociations
à l'époque a obtenu qu'elles disparaissent. Ne cherchons pas
ailleurs la réponse aux questions que se pose actuellement le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: Je m'excuse. On ne peut vraiment pas accepter cette
explication simpliste.
M. de Belleval: Je regrette, mais ce n'est pas une explication
simpliste et on voit très bien aussi, à la teneur du projet de
loi 68, que ce n'est pas simpliste, justement. Ce n'est pas pour rien que le
ministre des Finances a fait disparaître les dispositions des anciennes
conventions collectives.
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: Je vais poser une question. Est-ce que le
député prétend qu'il était présent lors de
ces négociations?
M. de Belleval: J'ai été mêlé
effectivement, et de très près à ces négociations,
bien que je n'aie pas été à la table même où
ces choses se discutaient. Cela se discute, comme vous le savez, entre des
représentants syndicaux et des représentants du gouvernement.
D'ailleurs, ni M. Laberge ni M. Rodrigue, à l'époque, ou
maintenant le président de la CEQ n'étaient présents
directement à la table. Mais, je le répète encore une
fois, ce n'est pas pour rien que le gouvernement a demandé et
réussi à négocier une convention collective avec le front
commun, dans laquelle les dispositions de 1973 et 1976 sont disparues. Ce n'est
pas pour rien et, de ce point de vue, il y a eu des discussions très
approfondies sur le plan technique entre les représentants syndicaux et
les représentants gouvernementaux, depuis le début du RREGOP,
depuis que les premières études actuarielles du RREGOP sur
l'évolution du Régime de retraite des enseignants et du
Régime de retraite des fonctionnaires ont été produites.
Tout le monde savait à quoi s'en tenir en 1979, au moment où on
allait conclure la convention collective.
Encore une fois, les réponses aux questions du chef de
l'Opposition, il va les retrouver non pas en faisant l'exégèse
des dispositions actuelles des conventions collectives, mais en se rendant
compte combien le fossé est grand entre les dispositions de 1973 et les
dispositions de 1976 et les quelques dispositions ancillaires qu'on retrouve
dans la convention collective actuelle.
Le Président (M. Bordeleau): Vous voulez ajouter un
complément, M. le ministre?
M. Bérubé: M. le Président, je pense que
ça donne également tout son sens à la
déclaration du ministre des Finances après avoir
signé les dernières conventions collectives, alors qu'il a
indiqué qu'il avait la très nette impression d'avoir bien
défendu l'intérêt de l'Etat lors de la dernière
ronde de négociations. L'analyse que nous faisons, c'est que, si nous
avions projeté les clauses des conventions signées par
l'administration libérale antérieure, la dernière
convention nous aurait coûté 2 300 000 000 $ de plus que ce
qu'elle nous coûte de fait. Je pense que, évidemment, le ministre
des Finances a négocié serré, parce qu'il était
conscient d'un certain nombre de problèmes causés par les
conventions collectives précédentes et qu'il voulait chercher
à apporter quelques correctifs.
M. Ryan: Oui, mais là je constate...
Le Président (M. Bordeleau): M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: Est-ce que le ministre a terminé?
M. Bérubé: Oui.
M. Ryan: Là, je constate que le ministre verse dans la
politique partisane et s'éloigne de la question que nous discutons. Nous
aurons amplement le temps de revenir sur ces aspects. Oui, absolument. Je pense
que personne ne va contester ça en logique, M. le
député.
Là, nous discutons d'un engagement qui a été pris
par le gouvernement au titre de l'annexe 15 de la convention collective des
enseignants de 1979-1982. Je pense que l'ancien ministre des Transports a
clairement établi, par ce qu'il n'a pas dit, qu'il n'a pas
autorité pour dire, ce qui s'est fait exactement à ce moment,
parce qu'il n'était pas là, il était ministre des
Transports à l'époque, et nous n'avons pas de leçon
d'interprétation à recevoir de lui sur ces questions.
Ce que je pose au ministre, c'est la double question suivante: D'abord,
est-il en mesure d'affirmer qu'il aurait été clairement entendu
entre les parties, au moment de la négociation et de la signature de la
convention collective, clairement établi par le gouvernement, que ce
passage concernant les hausses de cotisations pourrait être
éventuellement interprété comme s'appliquant à un
changement dans l'équilibre même du partage des cotisations et non
pas simplement des changements dans le quantum des cotisations découlant
des études actuarielles évoquées au paragraphe
précédent? Et, deuxièmement, devant
l'interprétation nettement opposée que donnent de cet article les
porte-parole syndicaux et la partie patronale, représentée en
l'occurrence par le ministre, président du
Conseil du trésor, est-ce que le gouvernement juge que lui doit
interpréter unilatéralement, de son seul pouvoir, cet article, ou
s'il n'aurait pas convenu de le soumettre à une interprétation
arbitrale, comme on le fait d'ordinaire dans un régime de saines
négociations collectives?
En posant ces deux questions, je ne veux pas du tout laisser entendre
que le gouvernement, ultimement, n'a pas la faculté de soumettre
à la volonté souveraine de l'Assemblée nationale toute
modification qu'il pourrait juger nécessaire à des engagements
qu'il a déjà pris. C'est une deuxième question dont nous
avons déjà discuté et dont nous discuterons de nouveau. Je
ne voudrais pas qu'on mêle les deux questions, comme le faisait le
député de Charlesbourg tantôt. (13 heures)
Je signale simplement à l'attention du président du
Conseil du trésor, vu qu'il a fait une incursion dans la politique
partisane, que, si le ministre des Finances a pu affirmer l'autre jour qu'en
s'en tenant strictement aux conditions négociées la fois
précédente cela aurait coûté deux milliards de plus
au gouvernement, les chiffres établis par le Bureau de la recherche sur
la rémunération établissent que le pourcentage
consolidé d'augmentation des rémunérations au cours des
trois dernières années a été de 52%, tandis que
pour les trois années et demie qu'avaient duré les conventions
antérieures, cela a été seulement de 42%. Je vous
soumettrai des chiffres tantôt, si vous le voulez. Je pense qu'on n'aura
pas le temps d'y revenir, mais on serait mieux de ne pas s'éjarrer trop
dans cette direction au stade de l'entrée en matière.
Le Président (M. Bordeleau): II est donc treize heures.
Est-ce que vous attendez la réponse immédiatement? On pourrait
donner la réponse en revenant à quinze heures.
M. Ryan: Si le ministre pouvait donner la réponse à
ces questions tout de suite, parce qu'au début de la séance de
cet après-midi je ne serai pas là, je vais être en
Chambre.
Le Président (M. Bordeleau): II me faudrait le
consentement des membres pour continuer quelques minutes. M. le ministre.
M. Bérubé: Malheureusement, je traîne avec
moi normalement mon dossier sur la loi 70, mais je ne l'ai pas
présentement. Donc, je ne peux pas vous donner exactement les chiffres
que vous avez mentionnés; je serais obligé de vous les donner de
mémoire à ce moment-là. De fait, une comparaison des
dernières rondes de négociations...
M. Ryan: Vous avez cela ici, c'est un tableau...
M. Bérubé: Non, j'ai un document qui est beaucoup
plus complet.
M. Ryan: Vous ne l'aimez pas celui-là.
M. Bérubé: J'ai un document beaucoup plus complet
et je serais beaucoup plus certain que les chiffres n'ont pas été
manipulés par un recherchiste du Parti libéral dans son
opération.
M. Ryan: Question de règlement, M. le Président.
Les chiffres que je voulais soumettre à l'attention du ministre sont
tirés directement et sans interprétation d'une étude faite
par le Bureau de la recherche sur la rémunération. Je pourrai
vous donner des précisions cet après-midi. C'est moi-même
qui les ai extraits de ce document et par conséquent il n'y a eu aucune
espèce d'interprétation.
M. Bérubé: De mémoire, l'écart entre
le secteur privé et le secteur public était de 16,3% au
début du renouvellement des présentes conventions. L'application
de l'actuelle convention a amené cet écart graduellement à
baisser à 13% et à 10% et, en 1981, cet écart a
commencé à se rétablir pour repasser à peu
près à 16%. Si on tient compte de la modification apportée
aux régimes de retraite, l'écart revient à 13%. Donc,
essentiellement, en tenant compte des modifications apportées aux
régimes de retraite, l'écart final en fin de convention serait de
13%, alors qu'il était de 16% en début de convention. Il y a donc
eu véritablement une réduction de l'écart entre le secteur
privé et le secteur public. Toutefois, si on ne devait pas adopter le
présent projet de loi, l'écart entre le secteur privé et
le secteur public serait identique en fin de convention à ce qu'il
était en début de convention. Voilà de mémoire
exactement les comparaisons.
M. Rivest: C'est ce que les recherchistes disaient. C'est ce que
disait Claude Forget, c'est exactement cela qu'il avait dit.
M. Bérubé: On ne l'a jamais caché. C'est
exactement cela.
M. Blais: Je regrette qu'il soit parti, d'ailleurs.
M. Ryan: Question de règlement. Si vous n'avez pas fini,
je voudrais bien que vous complétiez, parce que je ne serai pas ici au
début de la séance de cet après-midi.
Le Président (M. Bordeleau): Question de règlement,
M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: Je soutiens que le pourcentage consolidé
d'augmentation de vos conventions pour une période moins longue de six
mois a été de 52%, tandis que pour les conventions
précédentes, pour une période plus longue de six mois,
cela a été de 42%. En tout cas, je vous soumettrai des chiffres
extraits de vos propres...
M. Bérubé: Je les ai, les chiffres.
M. Ryan: Très bien. Mais je souligne que la comparaison
que vous faites nous transporte sur un autre terrain, celui de la comparaison
entre le privé et le public, et que la base de comparaison reste une
matière à discussion, que je ne veux pas ouvrir maintenant, mais
cela reste une matière à discussion importante et ce n'est pas
aussi clair qu'on peut l'affirmer.
M. Bérubé: Je pourrais vous souligner que, par
exemple, lors de l'ancienne convention, la moyenne d'augmentation a
été de 4% de plus que l'inflation et je vous fournirai les
chiffres cet après-midi. La dernière ronde de
négociations, si je ne me trompe pas, c'est 0,5% de plus que l'inflation
qui a été négocié. En d'autres termes, si l'on
compare sur une base objective les deux dernières rondes de
négociations, vous constaterez que sous l'ancienne administration, on a
signé des conventions où le taux de croissance de la
rémunération était de 4% supérieur à
l'inflation, alors que, sous la présente administration, il est de dix
fois inférieur comme écart, il était d'à peu
près 0,5%. Je pourrai vous fournir les chiffres exacts cet
après-midi.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Nous reprendrons
donc à 15 heures. La commission parlementaire suspend donc ses travaux
jusqu'à cet après-midi, 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 06)
(Reprise de la séance à 15 h 31)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre: La
commission des finances et des comptes publics reprend donc ses travaux. Je
voudrais d'abord, avant de continuer l'étude du projet de loi no 68,
m'excuser du retard au début des travaux. J'aimerais indiquer
également que ce n'est ni la faute des membres de la commission ni celle
de son président. Comme le président de l'Assemblée
nationale avait une décision importante à rendre en Chambre, il a
demandé de suspendre les commissions; ainsi, notre commission n'a pas
commencé à 15 heures comme prévu.
Nous revenons donc à notre discussion de ce matin. Au moment de
la suspension, nous en étions à des questions et réponses
générales sur le projet de loi no 68.
Effectivement, c'était M. le ministre
délégué à l'Administration et président du
Conseil du trésor qui avait la parole. M. le ministre.
M. Bérubé: Merci, M. le Président. Le chef
de l'Opposition s'était enquis des écarts entre les salaires des
secteurs public et privé et, plus particulièrement, des taux de
croissance. J'avais cité un certain nombre de chiffres de mémoire
et, maintenant, après vérification, je constate que ma
mémoire était effectivement fidèle. Il pourrait être
intéressant pour l'Opposition, je pense, d'en prendre note.
Ainsi, la convention de 1975-1979, pendant la période, a connu
une inflation, un accroissement des prix de 38,19%. Donc, il y a eu une
augmentation des prix de 38,19% durant cette période couverte par la
convention collective. De 1975 à 1979, je pourrais vous le calculer. De
toute façon, je vais vous les donner tous sur la même base.
Justement à cause du nombre d'années, il est dangereux de faire
des comparaisons.
M. Fortier: Une portion d'année.
M. Bérubé: Pour cette raison, je le regarde
globalement. Durant la même période, l'accroissement des salaires
dans le secteur public a été de 62,08%, ce qui veut dire que
durant la période de 1975 à 1979 l'enrichissement annuel consenti
dans les conventions a été, en gros, de 4,07%. Soulignons
cependant que le secteur privé aussi a consenti des augmentations
substantielles qui, pour la même période, donnent 57,60%
d'augmentation.
M. Fortier: C'est cela.
M. Bérubé: Ce qui fait qu'on constate que
l'écart entre le public et le privé s'est accru en moyenne de
0,7% par année. Il s'agit de comparaisons de salaires et non pas de
rémunération globale, mais véritablement salariale. Si,
maintenant, on compare la dernière ronde de négociations sur la
période de 1979 à 1982, la croissance due à l'inflation
est de 43,48%. L'augmentation des salaires dans les secteurs...
M. Fortier: Jusqu'à la fin de 1982?
M. Bérubé: Jusqu'au 31 décembre 1982.
M. Fortier: Avec une extrapolation.
M. Bérubé: Oui. De toute façon, je vous la
donne globalement, de telle sorte que c'est surtout par comparaison qu'il faut
analyser ces chiffres et non pas dans leur valeur absolue. À ce
moment-là, les salaires du secteur public croissent, eux, de 45,52%.
Notez l'écart: alors que l'inflation augmente de 43,48%, les salaires
augmentent de 45,52%, tandis que pendant la convention précédente
l'inflation a été de 38%, mais les salaires ont augmenté
de 62%. On s'aperçoit que pendant la convention de 1975-1979 il y a eu
une augmentation des salaires beaucoup plus rapide que l'inflation et cette
augmentation a substantiellement décru.
Ce qui est intéressant, c'est que durant la même
période, l'augmentation des salaires dans le secteur privé,
globalement, représente une croissance de 46,80%. Donc, les salaires du
secteur public augmentent de 45,52%, dans le secteur privé, de 46,80%,
donc, c'est plus rapide. Cela veut donc dire que l'écart entre les
secteurs public et privé a décru de 0,25% par année, alors
qu'il augmentait de 0,7% par année sous la convention
précédente. Oui, 0,25%, décroissance.
M. Rivest: M. le ministre, les affirmations du chef de
l'Opposition étaient basées sur - sans doute que vous êtes
familier, avec ces chiffres - les chiffres du Bureau de la recherche sur la
rémunération, entre autres, les tableaux 5 et 6.
M. Bérubé: Qui sont les mêmes. Le
problème, là-dedans, c'est qu'il y a tellement d'études et
tellement de données...
M. Rivest: M. le ministre, par exemple, sur la base de l'indice
100 pour la convention 1975-1979, au 30 juin 1975 jusqu'au dernier chiffre
qu'on a, le 1er juillet 1978, l'indice 100 de la convention 1975-1979 est
devenu 142,4. Donc, 42,4. Tandis que, pour la convention 1979-1982, indice 100,
toujours juin, on est arrivé à 151,85. Le chef de l'Opposition a
mentionné l'ordre, enfin, peu importe le pointage, à 42, sur
l'évolution des salaires, pour la période de 1975 à 1979
par rapport à l'indice 100, tandis que l'évolution des salaires,
au cours de la convention 1979-1982, est de 51,8. Donc, c'est 52 contre 42. Je
me demande dans quelle mesure on peut... Ce sont les tableaux 5 et 6 du Bureau
de la recherche sur la rémunération, c'est là-dessus que
le chef de l'Opposition a basé son affirmation.
M. Bérubé: Je suis entouré par tous les
spécialistes du Bureau de la recherche sur la
rémunération, y compris M. Bessette, qui ne se souvient
absolument pas de ce tableau. On est incapable de retrouver votre
référence. C'est pour cela que, ce matin, je ne voulais pas jouer
avec parce que rien ne nous dit que le tableau n'a pas fait l'objet d'un
certain nombre de transformations.
M. Rivest: Oui, j'imagine.
M. Bérubé: On va essayer de vous retracer l'origine
de ce tableau. Mais les chiffres que je vous cite sont les chiffres
d'une étude récente que nous avons demandée
à propos de l'évolution de la rémunération et sont
véritablement officiels. Les chiffres que vous avez, j'ignore ce qu'ils
représentent. Ce que l'on doit constater, c'est qu'effectivement
l'enrichissement dans le secteur public a été beaucoup plus
rapide en 1975-1979 qu'en 1979-1982. Je souligne à la décharge,
cependant, qu'également le secteur privé consentait un
enrichissement important. Donc, il faut faire attention à ne pas se
lancer dans une argumentation spécieuse. Il faut quand même
regarder ce qui se passait dans l'ensemble de la société. Donc,
il faut quand même constater qu'en 1975-1979 le secteur privé et
le secteur public ont consenti des enrichissements importants. Mais il faut
constater que l'enrichissement consenti dans le secteur public est beaucoup
plus rapide, plus important que dans le secteur privé, ce qui a
amené un accroissement de l'écart par rapport au secteur
privé. C'est la première observation et c'est très
net.
Vous avez un enrichissement moyen de 4% par année, alors que la
dernière convention donne 0,4%, en ce qui nous concerne, dans le secteur
public. Donc, l'enrichissement est dix fois moins rapide dans la nouvelle
convention qu'il ne l'était dans la convention antérieure. Il y a
eu véritablement un effort de fait, lors de la dernière
convention collective, pour essayer de réaligner la croissance explosive
du coût de la rémunération dans le secteur public et, de
fait, si on projetait - j'admets que c'est tout à fait relatif comme
affirmation - la tendance et les paramètres des conventions collectives
signées antérieurement, ces conventions nous auraient
coûté 2 300 000 000 $ de plus. Donc, on peut parler d'un
rajustement sérieux à la baisse lors des dernières rondes
de négociations pour s'aligner davantage en regard de la situation
économique.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: M. le ministre, je vous rappellerai qu'en fin de
séance, en plus du débat de chiffres, le chef de l'Opposition
avait quand même soulevé une première question qui ne
préjugeait pas de la possibilité pour l'Assemblée
nationale de légiférer comme elle l'entend, pour des raisons
d'intérêt public, mais qui se rapprochait des conséquences
de l'action du gouvernement dans le cadre du projet de loi no 68 sur le type de
relations du travail qu'il va y avoir désormais, entre autres en ce qui
concerne les régimes de retraite, compte tenu des mécanismes qui
avaient été prévus, je pense, en tout cas - il y a une
question d'interprétation sur l'article 5 - à la lettre
d'intention du gouvernement relative au RREGOP. Il vous avait posé la
question, si vous vous le rappelez, sur le strict plan des relations du travail
dans la mesure où il y a eu négociation, lettre d'intention,
annexe, enfin ce que le député de Charlesbourg évoquait.
Quelles seront les conséquences de l'attitude qu'a le gouvernement de
mettre de côté, à toutes fins utiles, les dispositions de
l'article 5b, au titre des relations du travail que vous avez, quand vous allez
dans d'autres domaines négocier, convenir, par exemple, avec les
médecins d'une convention collective? Quelle est la réflexion que
cela inspire au ministre? Cela vaudrait autant sur le bill 70. Quelle va
être l'attitude ou les conséquences au niveau des relations du
travail à l'avenir, lorsque le gouvernement va négocier de bonne
foi et arriver, j'imagine, à conclure une entente avec les syndicats?
Les syndicats, signant une entente avec le gouvernement, vont dire: Que vaut
cette signature? Nous ne le savons pas, parce que le gouvernement,
unilatéralement, peut, au bout d'un an, deux ans ou trois ans, se
retourner et mettre tout cela de côté. Je pense que le chef de
l'Opposition aurait aimé vous entendre à ce sujet.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: D'une part, j'ai eu l'occasion de
l'expliquer en Chambre, un gouvernement est à la fois employeur et
législateur. Il doit donc se préoccuper de l'intérêt
public en même temps qu'il doit négocier de bonne foi avec ses
employés. Ceci peut entraîner une situation conflictuelle lorsque
- et nous vivons la grève des médecins présentement -
à un moment donné, le bien de l'ensemble de la
société est en cause; cela peut amener le gouvernement à
décider d'intervenir. À ma connaissance, nous l'avons fait dans
le cas d'Hydro-Québec il y a deux ans, avec l'appui de l'Opposition.
Nous avons alors dicté une convention collective aux employés
d'Hydro-Québec, parce que nous étions en plein hiver, qu'il y
avait une situation de crise et qu'il y avait lieu d'intervenir. Le Parti
libéral a déjà décrété des conditions
de travail dans le passé.
M. Rivest: Qui ne modifiaient pas les conditions signées.
Il y a toute une différence.
M. Bérubé: Au contraire, lorsqu'un gouvernement
décrète des conditions de travail, il modifie les conditions qui
ont été acceptées par les parties lors de la convention
précédente. C'est exactement de même nature.
M. Rivest: Ah! non, c'était pour la
convention à venir.
M. Bérubé: Donc, il peut arriver, à la suite
d'une crise qu'un gouvernement se voie dans l'obligation de modifier des
ententes existantes. C'est courant. À titre d'exemple, le zonage
agricole modifie des contrats entre des citoyens qui peuvent avoir, de bonne
foi, négocié l'achat d'un terrain en vue d'une construction et
qui ne peuvent pas construire l'édifice auquel ils pensaient. Donc,
c'est le problème de la coexistence entre l'action du législateur
et l'action de l'État employeur.
Dans le cas des conventions collectives, la décision que le
gouvernement a prise - on pourra en discuter tantôt quand on verra la loi
70 - a été de ne pas intervenir en cours de convention,
d'attendre l'échéance de la convention le 31 décembre,
lorsque cette convention prendra fin. La convention elle-même dans
certains cas, pas toujours, et le Code du travail lui-même
prévoient comment reconduire, dans l'attente de la signature d'une
nouvelle convention, les conditions de travail de manière à ne
pas créer un vide juridique. Il est arrivé que des gouvernements,
dans le passé, sont intervenus après l'échéance des
conventions pour imposer de nouvelles conventions, c'est-à-dire ne pas
attendre la signature mais imposer des conventions sans la signature des
parties au nom de l'intérêt public. C'est le sens de la loi 70
dont on discutera tantôt. (15 h 45)
Dans le cas des régimes de retraite, nous nous retrouvons dans
une situation analogue: normalement, dans le passé, les régimes
de retraite ont été négociés. Toutefois, lors de la
dernière ronde de négociations, le ministre des Finances et les
négociateurs gouvernementaux n'ont pas voulu lier, comme par le
passé, le pouvoir législatif du gouvernement à une
convention collective. En d'autres termes - et c'est ce que je citais ce matin
- lorsqu'on examine les conventions antérieures, on doit constater que,
dans le passé, le gouvernement avait signé des clauses en vertu
desquelles il s'engageait... Je vous relis la lettre pour être bien
certain qu'on la comprenne soigneusement. En 1976, dans la lettre
annexée aux conventions, il est dit: Au cours de la durée de la
présente convention, aucune modification au Régime de retraite
des employés du gouvernement ne peut rendre les dispositions du
régime moins favorables à l'endroit des employés sauf s'il
y a accord à cet effet." Donc, en 1973 et en 1976, le gouvernement
libéral - je ne conteste pas sa décision, c'est lui qui
négociait - a voulu, dans sa convention même, s'interdire le
pouvoir de légiférer dans le domaine des régimes de
retraite. Il a limité son pouvoir; c'était son droit le plus
strict.
Toutefois, lorsque nous avons négocié, en 1979, le
renouvellement des conventions collectives, on a soulevé cette clause
restreignant les pouvoirs législatifs de l'Assemblée nationale.
Cette clause, à mon avis, est même illégale dans la mesure
où l'Assemblée nationale pourra, n'importe quand, décider
de légiférer, même si le gouvernement a dit qu'il
s'engageait à ne pas légiférer. Donc, il m'apparaît
même que le gouvernement ne peut pas, comme tel, dans notre
système parlementaire, engager le pouvoir législatif de
l'Assemblée nationale. C'est sur cette base que nous n'avons pas voulu
que soit insérée dans les conventions collectives une clause qui
interdirait à l'Assemblée nationale d'agir au nom de
l'intérêt public et de légiférer en matière
de convention collective comme cela a été le cas dans le
passé, puisque les régimes de retraite dans le passé ont
toujours fait l'objet d'une législation. Donc, cette clause restreignant
l'action législative du Parlement ayant été abolie, on
s'est retrouvé avec une clause, 5b, à laquelle vous faites
référence, qui ne fait maintenant que dire, que dans le cas
où il y aura lieu de hausser les cotisations, le gouvernement va
rencontrer la partie syndicale afin de discuter de tout
réaménagement de bénéfices jugé pertinent.
C'est le seul engagement que le gouvernement a pris lors de la dernière
convention collective.
Sur cette base strictement contractuelle, il nous apparaissait clair,
dans notre cas, que nous pouvions effectivement ouvrir les régimes de
retraite. Maintenant, est-ce que, dans une conjoncture économique
favorable, le gouvernement aurait décidé de rouvrir les
régimes de retraite? Je crois profondément que non. En d'autres
termes, la justification profonde du changement dans notre processus habituel
de négociation vient de l'existence d'une crise économique qui,
comme on le sait, a créé 150 000 chômeurs de plus au
Québec en l'espace d'une année, depuis septembre dernier. Comme
on le sait, cette crise provoque également une baisse rapide des revenus
de l'État à cause du chômage plus élevé et
d'une baisse des profits des entreprises, avec une augmentation du coût
des programmes sociaux; je pense à l'aide sociale, je pense aux
régime d'assistance-maladie ou autres. Tous ces programmes sociaux de
redistribution de la richesse prennent une importance accrue en période
de mauvaise conjoncture.
Donc, dans cette conjoncture économique que nous traversons, le
gouvernement a senti qu'il était absolument nécessaire que, au
nom de l'intérêt public, on examine dans quelle mesure nous ne
devions pas réduire certaines dépenses. C'est ainsi que nous
avons coupé des dépenses dans quantité de programmes pour
près de 1 500 000 000 $. C'est considérable comme
compressions budgétaires et cela touche aussi bien
l'éducation des adultes que l'éducation universitaire que le
réseau des affaires sociales que le fonctionnement des
ministères.
En d'autres termes, les compressions budgétaires ont
touché l'ensemble de l'activité gouvernementale. L'objectif
était de tenter, par tous les moyens, de maintenir des programmes
valables, des services auxquels s'attend la population à un coût
moindre. Évidemment, il y a eu des inconvénients réels, en
ce sens que certains services qui existaient précédemment
existent peut-être moins abondamment maintenant; c'est indéniable.
Mais devant ce choix où il fallait même s'attaquer à des
services, il a même fallu amender des lois et retirer à la
population des services auxquels elle était habituée.
Donc, dans la mesure où on a fait porter sur l'ensemble de nos
concitoyens le fardeau de la crise, en le répartissant, il nous est
apparu assez équitable d'examiner la situation des employés du
secteur public qui, en termes de conditions de travail, de
sécurité d'emploi, de fonds de pension, par exemple, et de
rémunération globale, ont un niveau de rémunération
qui est supérieur à celui de leurs collègues du secteur
privé. Donc, la justification de l'action gouvernementale, c'est dans le
cadre d'un effort pour faire partager la crise à l'ensemble de la
société plutôt que de le faire porter uniquement sur les
plus démunis ou sur ceux qui n'ont peut-être pas les moyens de
résister aussi facilement. C'est donc dans ce contexte-là. Je ne
prétends pas que le gouvernement devrait rouvrir
régulièrement les régimes de retraite sans qu'il y ait
discussion avec la partie syndicale, mais je dis qu'en période de crise,
quand le feu est pris, il faut l'éteindre.
M. Rivest: M. le Président, le ministre conviendra avec
moi, lorsqu'il place sur le même plan les coupures au niveau des
programmes gouvernementaux et les coupures qui sont effectuées à
l'égard des employés des secteurs public et parapublic quant aux
salaires et aux régimes de retraite, qu'il y a tout de même une
différence de nature. Les programmes gouvernementaux qui ont
été lancés dans le passé ne sont pas
encadrés juridiquement, et plus que juridiquement, par le consensus
social qui est à la base de cela. Les programmes gouvernementaux sont
laissés à la discrétion gouvernementale et de
l'Assemblée nationale à qui il appartient de les lancer. Ils ne
sont pas l'objet d'une négociation en tant que telle. Cela est la
première chose pour ce qui est de la partie des coupures et des choses
que le gouvernement doit faire compte tenu de la crise budgétaire.
Tandis que, lorsque nous parlons des employés des secteurs public
et parapublic, autant au niveau des régimes de retraite qu'au niveau de
la loi no 70, ces choses-là existent en vertu de nos lois dans un cadre
bien précis de négociation prévu par la loi. Les coupures
que le gouvernement effectue au niveau des programmes, ce sont des choses qui
existent en fonction d'une composante qui est l'initiative d'un gouvernement et
des lois qui sont votées à l'Assemblée nationale. Il n'y a
personne, il n'y a aucune des clientèles bénéficiaires de
ces programmes qui négocie ces choses-là. C'est le gouvernement
qui décide de les donner compte tenu de ses besoins ou de ses
orientations.
L'argument que le ministre vient de développer ne dispose
absolument pas de l'argument fondamental que le régime des relations du
travail, les conditions de travail, y compris les régimes de retraite,
cela se situe dans nos lois et même, en dépit des lois actuelles,
dans un cadre bien défini, qui est un cadre de négociation de
conventions collectives, compte tenu des réserves que le ministre a
apportées et qui font partie du dossier des particularités des
régimes de retraite. Donc, il y a une différence fondamentale
entre ce que l'on fait aux employés des secteurs public et parapublic et
ce que l'on fait au niveau des coupures de programmes. C'est vraiment comparer
des pommes et des oranges. Ce n'est pas du tout le même
problème.
Ceci dit, il reste que le ministre a parlé de la convention de
1976 où les questions de régimes de retraite étaient
définies. Il y avait un engagement, au fond; là-dessus, je suis
pas mal d'accord avec le ministre. C'est certain que, bien que le gouvernement
dans la convention de 1976 ait inscrit une clause, cela n'a pas départi
l'Assemblée nationale de ses pouvoirs; c'est une vieille théorie
de droit parlementaire qui est tout à fait évidente. Il y avait
quand même un engagement d'honneur pris à ce moment-là par
le gouvernement et j'ai l'impression que c'est comme cela que les centrales
syndicales l'ont interprété. Cet engagement de 1976 a
été modifié, j'en conviens, selon l'explication, mais a
quand même donné le texte de 5b. Dans le texte de 5b où il
n'y avait plus d'engagement d'honneur à négocier ces
choses-là comme il y en avait en 1976, il y a quand même des
obligations, des engagements - appelons-les engagements d'honneur aux fins de
la discussion - pour le gouvernement. Au cas où une hausse des
cotisations serait requise, afin de discuter tout réaménagement
des bénéfices jugé pertinent, le gouvernement avait pris
l'engagement de rencontrer la partie syndicale.
M. Bérubé: Ce que nous avons fait.
M. Rivest: Oui, mais est-ce que vous l'aviez prévenue de
votre intention...
M. Bérubé: Oui.
M. Rivest: ... en termes précis, de ce que vous vouliez
faire sur la question de l'inflation moins 3?
M. Bérubé: Oui.
M. Rivest: Toutes ces obligations ont été
remplies?
M. Bérubé: Oui, toutes les obligations
prévues dans la lettre en annexe à la convention collective nous
obligeant à rencontrer la partie syndicale pour lui donner le
détail des changements apportés. Nous avons même convenu
d'attendre un rapport, une proposition de sa part concernant lesdites
modifications de manière que si elle avait effectivement des
suggestions, des idées à apporter, elle puisse nous en faire
part. Cela a été fait.
M. Rivest: C'est une rencontre d'information que vous avez eue.
Vous avez fait à votre tête.
M. Bérubé: Plus que cela. Il y a eu une rencontre
d'information le 2 mars. Notez bien, c'est ce que j'ai expliqué ce
matin. D'une part, dès le mois de décembre, les centrales ont
demandé à rencontrer le premier ministre. Subséquemment,
elles ont retiré leurs demandes, ayant appris que le gouvernement
reportait la présentation de son projet de loi. Ce n'est que lorsque le
gouvernement a bel et bien indiqué son intention de présenter le
projet de loi à la session du printemps que nous avons organisé
une rencontre, le 2 mars, avec l'ensemble des parties syndicales. Nous les
avons tous vus, les uns après les autres, pour leur expliquer ce
qu'était le projet du gouvernement et nous avions également
convenu, lors d'une rencontre ultérieure en compagnie du premier
ministre, de suspendre la présentation du projet de loi à
l'Assemblée nationale de manière à permettre aux syndicats
d'examiner la proposition. Ceux-ci, d'ailleurs, nous ont fait part qu'en 1973
ils avaient apporté plusieurs suggestions extrêmement valables au
gouvernement dans la préparation du RREGOP et ils ont souligné
que ce n'était pas impossible, cette année, qu'ils soient
capables de la même performance. Ils nous avaient donc
suggéré d'attendre, de reporter et d'examiner leurs
réactions.
Or, finalement, ils n'ont pas déposé de
contre-propositions. Ils ont considéré qu'en ce qui avait trait
aux régimes de retraite comme à la proposition de gel
modulé des salaires pour le mois de juillet ils ne voulaient pas
accepter comme telles les propositions gouvernementales et ils demandaient,
à la place, qu'on s'engage à commencer plus rapidement des
négociations sans toutefois donner l'assurance qu'il serait possible de
régler l'impasse budgétaire.
Donc, il y a bel et bien eu des discussions tel que vous l'avez dit.
D'ailleurs, votre intervention, je l'ai trouvée parfaitement pertinente.
Vous avez bien fait ressortir la très grande différence entre la
convention de 1976 où le gouvernement signe une clause en vertu de
laquelle il s'interdit de légiférer avec les limites
légales d'une telle clause et la convention de 1979 où le
gouvernement n'a pas voulu s'interdire le droit de légiférer dans
une convention collective. Vous avez très bien fait la distinction et je
vous en félicite. On voit que vous avez bien compris le changement dans
les deux conventions collectives. Mais, maintenant, il faut pousser la logique
un peu plus loin. C'est qu'à partir du moment où le gouvernement
a refusé de s'interdire de modifier par amendement les régimes de
retraite, il ne faut pas se surprendre si on décide de les modifier.
M. Rivest: M. le Président, vous me permettrez un
commentaire sur la logique brutale du ministre.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Le ministre glisse allègrement sur le vrai
problème l'interprétation de la clause 5b et des rapports
antérieurs, peu importent les textes. D'ailleurs, je me le rappelle
très bien, parce que j'étais au sommet économique. Je
pense que c'est M. Laberge qui vous l'a dit très clairement, ou M.
Gaulin, je ne sais trop. Le problème, je pense bien que personne ne va
contester le pouvoir de l'Assemblée nationale de légiférer
en tout temps, compte tenu de la perception que l'Assemblée nationale,
que le gouvernement peut se faire de l'opinion publique sur quoi que ce soit.
Mais ce qui est absolument contestable et ce que les centrales syndicales sont
venues nous dire ici, ce que les travailleurs concernés
réprouvent - et la logique du ministre ne dispose pas de cela - c'est
que le gouvernement, dans ce dossier, dans la loi 68, comme dans la loi 70, a
procédé absolument unilatéralement. C'est cela qui est
profondément contestable dans la législation que l'on
véhicule. D'autant plus que cela - même les régimes de
retraite -avait un passé et était quasiment un acquis.
C'était de sens commun que cela se faisait par entente ou de concert et
qu'on échangeait des choses. La meilleure preuve, c'est qu'on faisait,
de part et d'autre, des propositions et que le gouvernement les
acceptait ou les refusait, selon son jugement de l'époque.
Mais la procédure actuelle est profondément
unilatérale. Au sommet économique qui a
précédé - quelle date était-ce, je ne sais trop -
je me rappelle très bien avoir entendu des représentants
syndicaux, à ce moment, dire au gouvernement: On vous met en garde
contre toute action unilatérale au niveau des régimes de
retraite. Vous avez fait fi de cette mise en garde que les syndicats vous ont
faite et vous êtes arrivés avec ce projet de loi qui est sur la
table et qui a créé les problèmes que l'on sait.
M. Bérubé: Je voudrais...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: ... en réponse à
l'argumentation du député de Jean-Talon...
Une voix: C'était un très bon intendant, Jean
Talon. (16 heures)
M. Rivest: Un très bon intendant, Jean Talon, vous devriez
vous en inspirer.
Une voix: Cela a bien changé depuis.
M. Rivest: Non, c'est parce qu'il y a des "Bigot" de l'autre
côté.
M. Bérubé: Je voudrais d'abord relever un certain
nombre de points qui m'apparaissent importants. Tantôt, le
député de Jean-Talon a eu dans son intervention quelques phrases
significatives. Il a parlé par exemple, des programmes que le
gouvernement a mis sur pied en vertu de lois - évidemment, puisque le
gouvernement ne peut agir sans ce pouvoir habilitant que lui confère la
loi - pour venir en aide souvent aux plus défavorisés de notre
société, aux gens qui doivent, par exemple, vivre de l'aide
sociale, enfin, une quantité de programmes. Il y a également des
lois que l'État a adoptées en vertu desquelles le gouvernement a
accepté de se soumettre à la négociation des conditions de
travail. Ce sont des lois qui définissent le cadre à
l'intérieur duquel nous fonctionnons. Le député de
Jean-Talon trouve que modifier une loi qui fera porter un fardeau additionnel
sur les classes les plus démunies de la société, c'est
normal, ce n'est pas grave. Ils ne sont pas organisés, ils ne peuvent
pas se défendre, ils ne peuvent pas faire pression sur le Parti
libéral et, par conséquent, c'est normal.
M. Rivest: M. le Président, question de
règlement.
M. Bérubé: Mais, par contre, avoir...
Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse, M. le
ministre.
M. Rivest: M. le ministre, je ne voudrais pas vous chicaner.
Le Président (M. Bordeleau): Question de règlement,
M. le député de Jean-Talon.
M. Rivest: Je vais juste soulever une question de
règlement. Ce n'est pas exactement ce que j'ai dit. Ce que je veux dire,
pour reprendre l'exemple que vous avez mentionné, c'est que, dans le cas
du zonage agricole, le gouvernement n'a pas négocié dans un cadre
juridique prédéterminé ce qui était pour arriver
à des gens qui possédaient des terres agricoles avec la
commission; cela n'a pas fait l'objet d'une négociation.
M. de Belleval: M. le Président, question de
règlement.
M. Rivest: Ce n'est pas du tout la même chose.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! M. le
député de Charlesbourg, vous avez une question de
règlement?
M. de Belleval: Je ne voudrais pas interrompre les vigoureux et
profonds échanges qui ont lieu actuellement; il est d'usage, quand on
étudie un projet de loi, de commencer par des remarques
générales. Mais, d'un autre côté, je voudrais faire
remarquer le plus humblement possible à mes collègues qu'on
s'éloigne quelque peu du sujet en cause, que nous pourrions revenir
à l'étude concrète du projet de loi 68 et que ces
discussions byzantines sur...
M. Rivest: C'est fin pour le ministre.
M. de Belleval: Ce n'est fin ni pour le ministre, ni pour vous.
Je donne mon opinion. Je regrette, mais ce n'est pas le ministre qui a
commencé une discussion sur l'interprétation des conventions
collectives en vigueur par rapport aux anciennes conventions collectives.
Là, vraiment, nous sommes en train, à mon avis, de dériver
sur...
Mme Lavoie-Roux: Question de règlement.
M. de Belleval: Est-ce que je peux terminer ma question, s'il
vous plaît?
Mme Lavoie-Roux: Oui, oui. Je me prépare pour la
prochaine.
M. de Belleval: Est-ce qu'on pourrait
revenir, autrement dit, M. le Président, à une application
un peu plus stricte de notre règlement?
M. Rivest: Nous allons penser à cela.
M. de Belleval: Je voudrais juste terminer en posant une question
au député de Jean-Talon qui a succédé au
député d'Argenteuil qui est absent. Est-ce qu'il a l'intention de
discuter longtemps de ces aspects aussi généraux et
ésotériques ou...
M. Rivest: Nous avons l'intention, M. le Président, pour
répondre à la question de M. le député...
Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, M. le
Président.
M. de Belleval: Est-ce que je peux terminer ma phrase, s'il vous
plaît?
M. Rivest: Oui, d'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: Ou bien si, après les remarques d'usage,
nous allons commencer bientôt l'étude article par article du
projet de loi?
M. Rivest: Pour répondre à votre question...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Jean-Talon, vous voulez répondre?
M. Rivest: Oui, nous avons l'intention de prendre tout le temps
qu'il faut pour discuter de ces projets de loi.
M. de Belleval: Oui, mais, justement, c'est le sens de ma
question: Est-ce que vous avez l'intention de commencer la discussion du projet
de loi ou bien si nous allons encore parler de choses aussi
ésotériques que celles que vous soulevez depuis le
début?
M. Rivest: Je vous ferai remarquer que, dans le domaine de
l'ésotérisme, vous avez vous-même participé ce matin
à ce débat.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! Avant
de donner la parole à Mme la députée de L'Acadie...
M. de Belleval: II me semble qu'il est assez clos.
Le Président (M. Bordeleau): ... je voudrais rappeler aux
membres de la commission qu'effectivement le but de la commission, l'objet de
notre réunion, c'est d'étudier article par article les projets de
loi 68 et 70. Il y a dans le règlement, également, la
possibilité de faire des remarques préliminaires - je pense que
c'est ce que nous avons fait - sur des questions qui concernent quand
même le projet de loi.
M. Fortier: Nous n'avons pas terminé.
M. Bérubé: Sur la question de règlement.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, mais, M. le ministre, je
vais d'abord, reconnaître Mme la députée de L'Acadie et je
vous reconnaîtrai ensuite. Je voudrais quand même terminer, moi
aussi. Je veux bien être assez large sur le règlement et ne pas
compter les minutes que prend chaque député. Par contre, si tout
le monde me dit que cela va prendre plusieurs heures, je vais devoir, comme
président, être plus strict sur le règlement et l'appliquer
un peu plus à la lettre, ce qui ne me ferait pas plaisir du tout. Alors,
Mme la députée de L'Acadie sur votre question de
règlement.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, c'était justement
pour obtenir votre avis sur le contenu des questions du député de
Jean-Talon qui, je pense, sont fort pertinentes au débat, mais je pense
que vous avez déjà réglé cette question. Quant
à la remarque sur le député d'Argenteuil, je dois vous
dire que le député d'Argenteuil est en Chambre à
critiquer, avec raison, Dieu merci, le budget du gouvernement du Parti
québécois, ce budget de faillite qu'il a
présenté.
M. Rivest: Qui est à la source du problème.
Mme Lavoie-Roux: Qui est à la source du
problème.
M. de Belleval: C'est faux. Le député d'Argenteuil
n'est pas en Chambre actuellement à discuter du budget, madame.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, sur votre
question de règlement.
M. de Belleval: II a, d'ailleurs, déjà pris la
parole sur le discours du budget, il n'a pas la parole actuellement sur le
discours du budget.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! M. le
député de Charlesbourg, je ne vous ai pas encore donné la
parole.
M. Rivest: M. le député de Charlesbourg, vous
n'êtes plus ministre, il vous faut demander la parole.
M. de Belleval: C'est que vous induisez
cette commission en erreur actuellement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, sur votre
question de règlement.
M. Bérubé: Je soulignerais que, personnellement, je
n'ai pas d'objection à ce qu'effectivement on fasse le tour de
l'ensemble du projet de loi, non pas que je sois en conflit avec mon
collègue de Charlesbourg, mais j'ai souvent pu constater que, lorsque
l'Opposition n'avait pas grand-chose à dire, dans le fond, sur les
articles pris un par un, il était approprié qu'on prenne le temps
de discourir autour du sujet, ce qui donne peut-être plus de champ pour
la discussion et ce qui nous permet d'expédier le projet de loi beaucoup
plus rapidement lorsque nous arrivons au coeur du problème. Par
conséquent, M. le Président, je n'ai pas d'objection à
continuer à discuter autour du sujet.
Le Président (M. Bordeleau): Oui. J'inviterais simplement
les membres à discuter du sujet ou autour du sujet.
M. Rivest: M. le Président, sur une question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): Sur une question de
règlement, mais j'avais averti le député de...
M. Rivest: Que le ministre adresse des reproches à
l'Opposition, c'est son droit, mais je ne voudrais pas qu'on se
méprenne, étant donné les questions que le chef de
l'Opposition a soulevées et que j'ai simplement reprises, pour
compléter la discussion. La dernière remarque du ministre que
c'était autour du sujet s'adresse aux interlocuteurs syndicaux qu'on a
entendus et qui ont soulevé ces questions. D'ailleurs, les questions
préliminaires du chef de l'Opposition étaient
précisément basées sur le mémoire du front commun.
Si le ministre adresse des reproches à l'Opposition, l'Opposition est
capable de les prendre, mais je voudrais bien qu'il ait au moins le respect de
la commission qu'il a consenti à convoquer précisément sur
ces questions, commission où on a entendu les représentants
syndicaux qui ont soulevé ces questions de principe.
M. Bérubé: M. le Président, toujours sur la
question de règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Je pense qu'il faut faire une
très grande distinction entre l'étude article par article et le
débat de deuxième lecture. En deuxième lecture, on doit
débattre du principe du projet de loi. Je pense que l'audition des
représentants syndicaux était tout à fait
appropriée dans le cadre du débat sur le principe même du
projet de loi, mais je rappelle cependant que les travaux de notre commission
portent sur l'étude article par article et non plus sur le principe du
projet de loi. À cet égard, le député de Jean-Talon
a erré dans son interprétation du travail que nous avons à
accomplir.
M. Rivest: Je commencerai à être inquiet le jour
où nous serons d'accord!
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! M. le
député d'Outremont, est-ce une question d'ordre
général?
M. Fortier: Oui. M. Rivest: Oui, oui.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, d'accord, ne prenez pas
panique, M. le député de Jean-Talon. J'avais reconnu ce matin
votre collègue de Louis-Hébert et je voudrais respecter la note
que j'avais prise à ce moment-là, sauf que, si vous vous entendez
ensemble, je n'ai aucune objection. M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, l'étude que nous
entreprenons du projet de loi doit se faire sur une toile de fond qui est
commune à un certain nombre de projets de loi qui sont devant
l'Assemblée nationale actuellement. Cette toile de fond, ce sont les
tentatives que fait le gouvernement pour diminuer ses responsabilités
vis-à-vis des fonctionnaires, vis-à-vis des gens avec lesquels il
s'est entendu auparavant et, en même temps, l'augmentation du fardeau
pour ces fonctionnaires et pour les membres de la fonction publique en
général.
Je pense que, si on regarde le projet de loi qu'on a devant nous - j'ai
eu l'occasion de le souligner lors d'une intervention que j'ai faite en
deuxième lecture - on s'aperçoit qu'aussi bien au niveau des
bénéfices qui seront ceux des bénéficiaires des
fonds de retraite qu'au niveau de la contribution qu'ils devront faire à
partir de l'adoption du projet de loi, les personnes qui sont
désavantagées sont les membres de la fonction publique, et c'est
le gouvernement qui tente de s'en tirer avec les honneurs de la guerre en
diminuant ses responsabilités.
Il faut aussi s'interroger à ce niveau sur certaines
déficiences du projet de loi, c'est-à-dire que, dans
l'étude article par article que nous allons faire, il faut aussi se
poser des questions sur des lacunes qu'il y a dans le projet de loi. J'ai eu
l'occasion de les souligner au ministre et d'attirer son
attention sur celles-ci. Je me réfère plus
particulièrement au cas - qu'il connaît très bien pour en
avoir été saisi - des religieux lal'cisés après
1965. Il connaît ce problème et j'ai eu l'occasion de lui
souligner que c'était une occasion en or - et qu'il ne s'en
présentait pas souvent - de régler finalement ce problème
en conformité avec des engagements fermes qui ont été pris
par le gouvernement.
J'aimerais que le ministre, dans les quelques mots qu'il aura
probablement à dire après mon intervention, nous dise son
évaluation des coûts de ça, les raisons qui
président à la décision que semble avoir prise le
gouvernement de mettre de côté les revendications des religieux
lal'cisés. J'aimerais que le ministre nous explique comment il peut
justifier cette position gouvernementale et j'aimerais aussi, M. le
Président, qu'il nous dise, une fois pour toutes si, oui ou non, les
gens qui ont été en contact avec lui, qui le sont avec certains
membres de l'Opposition officielle devront tout simplement faire leur deuil de
la demande qu'ils ont exprimée pour obtenir justice et obtenir un
minimum vital.
Cela est important et on ne peut pas étudier ce projet de loi
sans régler cette question. Il faudra, à un moment donné,
y venir et il va falloir que le gouvernement, là-dessus, comme il est en
train de le faire sur autre chose, montre ses vraies couleurs. On ne peut pas
toujours être entre deux eaux et être dans les limbes. À un
moment donné, il faut se brancher. Le gouvernement va devoir faire cela
d'une façon ou d'une autre, tôt ou tard. Si, dans ce projet de
loi, il n'accepte pas - comme cela semble être dans les intentions du
ministre - de prévoir des dispositions qui pourraient permettre aux
religieux lal'cisés de réintégrer un régime de
retraite qu'ils ont quitté pour obtenir des bénéfices qui
soient comparables pour des gens qui exercent des métiers semblables, il
va falloir que le ministre le dise clairement de façon que ce soit
compris et que les citoyens puissent tirer certaines conclusions.
Aussi, M. le ministre, il y a une autre lacune importante. Là, on
joint - et je pense qu'on doit le faire - le projet de loi no 70. J'ai eu
l'occasion de le souligner rapidement en deuxième lecture. Ce sont les
effets qu'auront sur les pensions futures les diminutions de salaires
annoncées par le gouvernement dans le projet de loi no 70.
Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi. C'est une question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie sur une question de règlement.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse auprès du
député de Louis-Hébert. Tout à l'heure, le
député de Charlesbourg m'a accusée d'induire la commission
en erreur en disant que le chef de l'Opposition n'était pas en Chambre
en train de parler. Le chef de l'Opposition est actuellement en Chambre, il
s'adresse à l'Assemblée nationale à propos du budget. Je
pense que c'est nécessaire de le dire.
M. Bérubé: Ce n'est pas une question de
règlement de la députée de L'Acadie, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Un instant, M. le ministre.
Mme la députée de L'Acadie, je m'excuse, mais je pense que vous
avez répondu à ce genre d'accusation.
Mme Lavoie-Roux: Non, non. Je n'y avais pas répondu.
M. Bérubé: Non mais un autre de votre
députation est intervenu et a effectivement -je parle du
député de Jean-Talon - souligné la présence du chef
du Parti libéral en Chambre pour discuter du budget, il y a quelques
instants. Évidemment, peut-être que votre attention ne pouvait pas
être aussi solidement ancrée à nos travaux et que vous n'y
avez pas prêté oreille, mais effectivement...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: ... le député de
Jean-Talon l'avait souligné. Enfin, même si vous le
répétez à trois minutes de son intervention, nous n'avons
pas vraiment d'objection, Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Surtout que le député de
Charlesbourg ne doit pas dire de choses fausses.
M. Bérubé: Mais il ne faudrait quand même pas
que le député d'Outremont...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!
M. Bérubé: ... que le député de
Louis-Hébert, dans trois minutes, à tour de rôle, nous
reviennent avec la même intervention, M. le Président. Il me
semble qu'on devrait régler la question une fois pour toutes. On est
absolument d'accord avec la députée de L'Acadie et le
député de Jean-Talon pour dire que, possiblement, le chef du
Parti libéral est en Chambre.
Mme Lavoie-Roux: Certainement, pas possiblement.
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le député de Louis-Hébert, je vous
invite à continuer.
M. Doyon: Oui, M. le Président, la conclusion que vous
semblez m'imposer.
M. Rivest: Tu as droit à vingt minutes.
M. Doyon: Vous dites: Je vous invite à conclure et je
viens de commencer...
Le Président (M. Bordeleau): Je n'ai pas dit conclure,
j'ai dit: "Je vous invite à continuer."
M. Doyon: Je m'excuse, j'ai mal compris.
M. Béïubé: En fait, il s'agit d'un autre
problème que l'on doit constater du côté de l'Opposition.
Ils n'ont par vraiment l'air de suivre les débats, M. le
Président.
M. Rivest: II parle n'importe quand, lui? Je comprends que cela a
été long dans le projet de loi sur l'amiante. Parlait-il toujours
comme cela, n'importe quand?
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Louis-Hébert, vous pouvez continuer.
M. Doyon: Je continue sans conclure, M. le Président. La
lacune que je soulignais au ministre, en deuxième lecture, me semble
vouloir persister dans ce sens que le ministre ne nous a donné aucune
indication. On a reçu des papillons, ce matin, qui mettaient des
virgules un eu partout, sauf qu'on n'avait aucune indication de la part du
ministre qu'il considérait comme grave cette lacune qui consiste
à faire porter sur un nombre indéterminé et
indéterminable d'années par des futurs retraités une
baisse de salaire momentanée, espérons-le, parce qu'on n'est pas
sûr de cela, on ne sait pas trop comment le gouvernement va
procéder pour les années futures. Mais ce qu'on sait, c'est que,
entre le 1er janvier 1983 et le 31 mars 1983, les quelque trois cent mille
employés de la fonction publique vont subir des baisses de salaires
importantes. J'aimerais que le ministre nous indique s'il considère, ou
si c'est moi qui fais erreur, comme importante la conséquence que va
avoir cette baisse de salaire pour des gens qui vont prendre leur retraite au
cours des prochaines années et qui vont voir leur salaire calculé
sur une base annuelle des cinq meilleures années. Ce seront des victimes
momentanées, ayant le malheur de devoir prendre leur retraite pour cause
de maladie ou parce que le nombre d'années de service requis aura
été accompli. Ces gens vont se retrouver avec un calcul des cinq
meilleures années qui sera déficitaire par rapport à ce
qu'ils auraient eu si le gouvernement n'avait pas agi d'une façon aussi
brutale et aussi injustifiée, absolument injuste envers les
employés de la fonction publique. (16 h 15)
II est bon de demander à des gens de faire un effort, de donner
un coup de collier. Le gouvernement nous fait de grands exposés disant
que c'est le temps de faire des corvées. On parle de solidarité,
on parle de construire la maison ensemble, etc. On dit: Mettez l'épaule
à la roue et donnez le coup qu'il faut. Ce discours du gouvernement, M.
le Président, je le soutiens, est contredit dans ses effets réels
quand on regarde ce que cela entraîne chez les futurs pensionnés
de l'État. Je pense que le ministre ne peut faire fi de cela. Bien
sûr, je n'ai pas les moyens techniques dont dispose le président
du Conseil du trésor pour savoir qui est affecté par cela,
combien de gens, qu'est-ce que cela veut dire, etc. Le ministre est très
bien équipé, il a des conseillers à ce sujet, il a des
moyens dont je ne dispose pas. Cependant, je dispose d'une chose, des plaintes
qui viennent à mon bureau, des demandes d'éclaircissement qui
viennent à mon bureau parce que je suis probablement plus accessible que
ne l'est le ministre. Je suis plus facilement sensibilisé à cette
question.
J'allègue que le fait d'adopter le projet de loi no 68 sans y
inclure de clause qui veille à ne pas prolonger dans le temps l'effort
momentané qu'on demande à un certain nombre d'employés de
la fonction publique, à la totalité, si vous voulez, c'est une
préoccupation qui doit être présente à l'esprit du
ministre. J'aimerais que le ministre en tienne compte et nous propose des
solutions. Si on passe par-dessus cela, cela veut dire que le gouvernement nous
propose une loi dont le seul but est de le dépanner
financièrement. Il faut voir plus loin que cela, il faut réaliser
quels seront les effets de cette loi. Il faut aller plus loin, il faut
dépasser les effets immédiats et réaliser que, si l'on
pose un tel geste législatif, cela aura des conséquences qui
risquent d'avoir des effets injustes pour une catégorie de la
population, les fonctionnaires.
L'autre point que j'aurai l'occasion de souligner au ministre -
j'aimerais qu'on en discute assez longuement - c'est la question de
l'administration des fonds qui sont confiés à la CARR. J'aimerais
que le ministre me dise si mes renseignements sont exacts selon lesquels il y
aurait quelque chose comme un montant de 9 000 000 000 $ qui comprendrait des
montants déjà versés comme parts des cotisants et du
gouvernement employeur en même temps que des écritures comptables,
si vous voulez, qui seraient ni plus ni moins - pour se comprendre,
étant donné que je ne suis pas un expert là-dedans - des
espèces de reconnaissances de dettes qui seraient faites
dans les livres de façon à savoir quelle est la
contribution attendue du gouvernement pour satisfaire aux obligations
actuarielles contractées en vertu des fonds de retraite.
Si je comprends bien le processus, la CARR est, jusqu'à un
certain point, la dépositaire de ces fonds. Elle en remet la gestion
à la Caisse de dépôt qui, elle, en fait le placement selon
son bon jugement et selon certains critères. J'aimerais que le ministre
nous assure et nous prouve que ces fonds sont administrés de la
façon la plus rentable possible. Les bénéfices des futurs
pensionnés doivent être administrés avec autant de soin par
le gouvernement que chacun de nous en met à administrer ses
économies actuelles en vue de la retraite. Le gouvernement se doit
d'être aussi prudent et d'agir en aussi bon père de famille - il
doit nous en faire la preuve, à part cela - que nous en avons le devoir
envers nous-mêmes et notre famille. Le gouvernement ne doit pas utiliser
ces fonds à des fins politiques pour acquérir des leviers
économiques quelconques et il doit se préoccuper avant tout de la
rentabilité de ces investissements. Ce dont je veux m'assurer, M. le
Président, c'est qu'en aucun moment le gouvernement ne prend avantage
des liens très étroits qu'il a avec la Caisse de
dépôt, avec la CARR et tout ça pour obtenir un financement
qui lui soit plus avantageux que celui qu'il pourra obtenir sur les
marchés financiers libres, premièrement, et, deuxièmement,
qui sera moins avantageux finalement pour l'ensemble des pensionnés que
s'ils avaient la possibilité de faire leurs dépôts aux
meilleures conditions possible. Je crois, M. le Président, que le
président du Conseil du trésor devra nous expliquer quelles sont
les lignes directrices qui le guident là-dedans.
Est-ce qu'il y a des proportions qui sont définies comme
étant plus souhaitables en ce qui concerne le placement dans ce qui peut
être un peu plus spéculatif, au niveau des actions des compagnies
inscrites à la bourse? Est-ce que le gouvernement a une proportion
déterminée là-dedans? Est-ce que le gouvernement
considère aussi une proportion déterminée en ce qui
concerne le placement en obligations de certaines compagnies, ce qui est
déjà plus sécuritaire, déjà plus fixe au
niveau des revenus? Est-ce que le gouvernement utilise lui-même ces fonds
en les empruntant et en émettant des obligations de la province de
Québec? Quel est ce montant et quels sont les intérêts
qu'il paie là-dessus? Est-ce que le gouvernement paie les mêmes
intérêts à la CARR, c'est-à-dire à la Caisse
de dépôt qui, finalement, en fait bénéficier la
CARR, que si ces fonds étaient placés au plus offrant sur les
marchés financiers?
Je pense que ce sont là des préoccupations, M. le
Président, qui sont générales au niveau des remarques
préliminaires, mais ce sont des préoccupations qu'on se doit
d'avoir parce que, autrement, on ne ferait qu'effleurer la surface. Ce sont des
moments comme ça, M. le Président, qui doivent être des
moments choisis pour rassurer les pensionnés qui ont des craintes
considérables et qui, justement, voyant agir le gouvernement, se
demandent si le gouvernement n'est pas en train de soi-disant tenter de
rétablir un équilibre dans les cotisations et de se servir de ce
paravent pour camoufler un certain manque dans l'administration de ces fonds ou
un certain avantage que pourrait tirer le gouvernement pour obtenir des fonds
dont, on le sait, il a grandement besoin.
J'aurai l'occasion, M. le Président, selon le déroulement
des débats de la commission, de revenir là-dessus. J'aimerais
dès maintenant indiquer au président du Conseil du trésor
que ce sont là des soucis que nous avons, nous de l'Opposition
officielle, ce sont des soucis qu'ont aussi les pensionnés et les futurs
pensionnés de l'État. Je pense qu'il est du devoir du
président du Conseil du trésor de les rassurer à ce
niveau.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Évidemment, il y a trois des
quatre points qui enfreignent le règlement, strictement en rapport avec
le présent projet de loi. Mais il y a un point qui effectivement touche
directement le projet de loi et qui porte sur l'impact du projet de loi sur les
salariés, du moins des pensionnés de l'État; je pense que
c'est directement relié au projet de loi et, effectivement, on pourrait
accepter d'en discuter. Je pourrais, cependant, ajouter aussi quelques
remarques.
D'abord, le député de Louis-Hébert a abordé
la question du problème des exreligieux. C'est un problème
extrêmement difficile et auquel j'ai donné une réponse. Par
exemple, à l'Assemblée nationale, le député de
Louis-Hébert a accusé le gouvernement de trimbaler les gens d'un
endroit à l'autre alors que, justement, c'est exactement le contraire.
J'ai expliqué clairement que la réponse était non,
après analyse, et qu'il n'y avait pas de modification que nous
apporterions à la loi 60 qui concerne les ex-religieux. Donc, on ne peut
pas nous accuser de renvoyer les gens d'un bureau à l'autre. La
réponse est claire, elle est nette, elle est précise, et si vous
ne comprenez pas, je n'y peux rien.
M. Doyon: M. le Président, question de règlement
là-dessus.
M. Bérubé: M. le Président, moi, j'ai
écouté le député de Louis-Hébert et il
passe
son temps en commission à interrompre les interventions que nous
donnons en réponse.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre...
M. Bérubé: Cela m'apparaît inadmissible,
c'est contraire aux règles de procédure et la seule façon
de fonctionner en commission, M. le Président, c'est de laisser un
intervenant faire son intervention, de prendre des notes et d'intervenir quand
c'est le temps.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, sur
votre question de règlement, M. le député de
Louis-Hébert, à condition que cela en soit une, cependant.
M. Doyon: Bien sûr, cela va en être une et elle va
être double, M. le Président. Le président du Conseil du
trésor vient de m'accuser d'avoir passé mon temps à
interrompre cette commission, alors que c'est la première fois - et on
pourra vérifier dans le journal des Débats - que j'ouvre la
bouche là-dessus aujourd'hui. Alors, sur la première question de
règlement, je pense que la preuve peut être faite très
rapidement.
M. Bérubé: Ce n'est pas une question de
règlement, vous m'avez interrompu.
M. Doyon: C'est la première fois que j'ouvre la bouche;
alors, je n'ai pas interrompu cette commission. Deuxième question de
règlement, M. le Président: si j'ai dit que les religieux
laïcisés étaient trimbalés, M. le Président -
et je réfère au journal des Débats - c'est que la ministre
de la Fonction publique a dit elle-même le 5 mai 1982...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Louis-Hébert, je m'excuse.
M. Doyon: C'est une question de règlement.
M. Bérubé: Non, ce n'est pas une question de
règlement et il n'y a pas de questions de privilège, M. le
Président.
M. Doyon: Question de règlement.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, M. le
ministre! II n'y a pas de question de privilège, mais jusqu'ici, M. le
député de Louis-Hébert...
M. Bérubé: Sortez-nous l'article.
Le Président (M. Bordeleau): ... ce n'est pas une question
de règlement; c'est une question de...
Mme Lavoie-Roux: 34.
M. Bérubé: 34, aucun problème. Moi, c'est
plutôt 142 auquel je réfère habituellement.
Le Président (M. Bordeleau): Si vous voulez faire une
correction à ce que le ministre a dit, vous pourrez...
M. Doyon: Ce que je veux établir, M. le Président,
c'est la question...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, je
vous redonnerai la parole. Je n'ai pas vu la pertinence d'une question de
règlement à ce moment-ci. Vous dites que ce que le ministre dit
à propos de ce que vous avez dit n'est pas exact. Alors, vous pourrez
redire la même chose tantôt. Vous pourrez intervenir en vertu de
l'article 96, par exemple, après que le ministre aura fini son discours.
À ma connaissance, ce n'est pas du tout une question de règlement
à ce moment-ci.
M. Doyon: Alors, il y en avait au moins une, M. le
Président.
Une voix: La première.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, le
député de Louis-Hébert ayant compris, il n'est pas
obligé de partager tout ce que je dis, pas plus que, lorsqu'il parle, je
ne partage ce qu'il dit, sauf que j'attends mon tour et j'interviens
subséquemment pour reprendre...
M. Doyon: Même quand je n'interviens pas.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!
M. Bérubé: ... ses interventions. C'est la seule
chose que je lui demande. Donc, il n'a qu'à...
M. Doyon: Et ma réponse?
M. Bérubé: Voilà, on est justement
dans...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît:
M. Bérubé: ... le cadre de ce type d'interventions.
Cela fait au moins trois interventions irrégulières directes du
député de Louis-Hébert.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, c'est vous
qui avez la parole.
M. Bérubé: Continuons, M. le Président.
M. Doyon: Pour une fois, je lui donne raison.
M. Rivest: En disant cela, tu violes le règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Quatre fois, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Allez-y, M. le ministre,
c'est à vous.
M. Bérubé: M. le Président, le
problème des ex-religieux enseignants est un problème très
délicat auquel s'était attaqué le député de
Charlesbourg. Il s'est absenté pour quelques minutes, mais il va
être de retour bientôt. C'est donc dommage qu'il ne soit pas ici,
parce que c'est lui-même qui a convaincu le Conseil des ministres de
corriger une anomalie qui résulte d'une mauvaise rédaction de la
loi de 1965 qui permettait aux religieux de contribuer au Régime de
rentes des enseignants, mais qui ne leur permettait plus, s'ils quittaient les
ordres, de racheter les années antérieures à 1965. Une
telle application a fait que, ultérieurement lorsque les religieux ont
quitté les ordres, ils se sont retrouvés dans
l'impossibilité, tout en continuant d'enseigner, de racheter des
années antérieures, alors qu'un collègue laïque ayant
fait exactement la même carrière ou un autre ayant choisi de
quitter les ordres avant 1965 se retrouvaient en fin de course avec une pension
complète et eux n'avaient pas droit à la pension complète,
ayant pourtant travaillé dans les mêmes conditions de
rémunération et suivant les mêmes conditions
normatives.
Donc, effectivement, la loi 60 est venue corriger cette anomalie. Elle
n'a pas tout corrigé et nous reconnaissons que la loi 60 présente
encore des difficultés d'application. Une d'entre elles en particulier
qui, je pense, devra un jour être corrigée -c'est ce qu'on regarde
présentement à la CARR - c'est le problème dans la loi 60
du calcul des crédits de rente et de l'équivalent d'une
non-indexation du rachat de la valeur de ces crédits de rente, qui fait
que ces crédits de rente, qui étaient intéressants en
1977, perdent de leur intérêt au fur et à mesure des
années. Il y aurait peut-être lieu de faire en sorte que les
crédits de rente soient indexés. Voilà une mesure
administrative qui pourrait être de bon aloi, mais qui coûte quand
même, si je ne m'abuse, près de 12 000 000 $. Il ne faut quand
même pas s'imaginer que ce sont des mesures qui ne coûtent rien,
c'est quand même 12 000 000 $. Nous ne voulons pas aller au-delà
de cela et le Conseil des ministres, dans la conjoncture économique
actuelle, n'a pas pris la décision de réévaluer la base de
calcul des crédits de rente. (16 h 30)
Nous ne voulons pas aller plus loin que cela, d'abord pour une raison
d'équité. Il faut bien comprendre que, dans le cas des
exreligieux enseignants, il s'agissait de personnes faisant exactement le
même travail, dans les mêmes conditions et se retrouvant avec des
pensions différentes. Nous n'avons jamais eu à l'esprit de
régler le problème de tous les ex-religieux. On pourrait
s'interroger: Si le gouvernement devait décider de régler le
problème des exreligieux, ne serait-il pas en même temps tenu de
régler le problème de la pension des religieux? Dans la mesure
où nous avons des religieux qui enseignent, comment pourrait-on
justifier, lorsque quelqu'un quitte les ordres, qu'on lui verse une pension,
mais lorsqu'il ne quitte pas les ordres, qu'il n'ait pas droit à une
pension pour avoir fait le même travail? Donc, il y a là un
problème d'équité sur lequel, d'ailleurs, s'est
déjà penché ou pourrait se pencher, si je ne m'abuse, la
Commission des droits de la personne parce qu'il pourrait y avoir
discrimination, effectivement. Le problème que pose une sorte de
correction, si vous voulez, des régimes de retraite pour les
ex-religieux, c'est que l'on pourrait être amené, en vertu de la
charte des droits et libertés, à l'étendre à
l'ensemble des ex-religieux, puisqu'on on ne peut pas faire de la
discrimination sur la base de la religion ou de l'appartenance à telle
ou telle communauté ou de la non-appartenance à telle ou telle
communauté. Donc, sur cette base, le gouvernement, l'État,
pourrait être entraîné, s'il se glissait le doigt dans le
tordeur, à devoir étendre cela à l'ensemble des religieux
et ex-religieux. Les calculs ont été faits... C'est le sens de la
question du député de Louis-Hébert. C'est absolument
dommage qu'il n'écoute pas, puisque c'est sa question. D'ailleurs, de
toute évidence, à voir son regard, il ne suit absolument pas la
conversation, auquel cas, je ne vois aucune raison de continuer à
répondre, M. le Président.
Mme Lavoie-Roux: J'étais intéressée, quant
à moi, M. le ministre.
M. Fortier: Oui, cela allait bien, là.
M. Bérubé: Si je comprends bien, vous vous
relayez.
Mme Lavoie-Roux: C'est une question que j'ai souvent
soulevée à l'Assemblée nationale.
M. Bérubé: Alors, pour la députée de
L'Acadie, qui manifeste de l'intérêt pour une question qui, je
pense, mérite intérêt, vous avez parfaitement raison, Mme
la députée de L'Acadie.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, M. le ministre, vous
pouvez continuer. Allez-y.
M. Bérubé: Donc, à partir de cette analyse
qui nous indique que, si on voulait effectivement prévoir le cas de tous
les ex-religieux, on pourrait être amené éventuellement
à couvrir également le cas de tous les religieux, les calculs
actuariels ont donc été faits pour connaître les
coûts que l'on pourrait encourir. Par exemple, l'extension à tous
les religieux enseignants pourrait nous coûter 190 000 000 $ attendez un
peu, j'ai 190 000 000 $ et 285 000 000 $ - un total de 475 000 000 $, si nous
voulions rétablir essentiellement tous les crédits de rente pour
les ex-religieux et religieux qui n'y ont pas eu droit dans le passé. Si
nous voulions rétablir ces crédits de rente et les indexer, tels
qu'ils existent présentement dans nos lois, le coût
représenterait tout près de 500 000 000 $. Alors, c'est à
partir de cette analyse actuarielle qu'il nous est apparu que, tout en
reconnaissant le problème très sérieux des ex-religieux ou
religieux qui pratiquent encore, le coût lui-même est très
très important.
Il nous faut également penser qu'il y a beaucoup de nos
concitoyens qui n'ont pas de régime de retraite aussi avantageux que
celui que nous avons pour les employés du secteur public. Là, on
pourrait se demander, si l'on se permet d'étendre les avantages de nos
régimes de retraite aux ex-religieux, pourquoi ne devrait-on pas le
faire pour l'ensemble des citoyens du Québec et faire en sorte que tout
le monde puisse avoir une pension véritablement raisonnable. Là,
les coûts sont faramineux. Donc, tout en partageant la
préoccupation des religieux et ex-religieux qui voudraient avoir une
rente plus attrayante, je suis malheureusement obligé, compte tenu des
ressources financières de l'État, de dire: Non, ce n'est pas
approprié. Je pense que ce serait induire les gens en erreur que de
laisser miroiter un espoir.
Je ne dis pas que, peut-être, un jour, la conjoncture
économique étant extrêmement favorable, l'État ne se
retrouvera pas dans une position où il pourra être beaucoup plus
généreux avec les régimes de retraite. Vous n'êtes
pas sans savoir que nous effectuons des études présentement sur
le fonctionnement de la Régie des rentes. Il n'est pas du tout
impossible qu'un jour on applique, pour l'ensemble des citoyens du
Québec, des régimes de rentes plus généreux. Mais
il nous apparaissait que faire une exception dans le cas de tous les
ex-religieux et leur donner droit à des avantages dont aucun autre
citoyen ne bénéficie était coûteux et
peut-être difficilement justifiable en termes d'équité.
Sans pour autant dire que ce serait inéquitable de bien les traiter, ce
serait inéquitable par rapport à tous les autres citoyens qui,
eux, n'auraient pas droit à ces mêmes avantages. C'est surtout en
ce sens que je parle de problème d'équité.
La deuxième question soulevée par le député
de Louis-Hébert porte sur l'impact de la réforme sur les pensions
qui vont être versées aux employés du secteur public. Je ne
cache pas qu'il va, évidemment, y avoir une réduction des
pensions versées. J'ai souligné en Chambre, à partir d'une
étude actuarielle d'un M. Colbert, je crois, que les coûts que
représente l'indexation des pensions sont absolument faramineux. Par
exemple, par rapport à une pension non indexée, si on devait
l'indexer de 3% par année, le coût de cette pension est de 36%
supérieur; si l'augmentation était de 6%, à ce
moment-là, le coût de la même pension est de 98%
supérieur. Comme nous indexons selon l'inflation à l'heure
actuelle et que les années récentes nous ont permis de
connaître de l'inflation jusqu'à 12%, vous avez une petite
idée de l'impact de l'indexation des pensions sur le coût de ces
pensions. Donc, l'indexation, en apparence anodine puisque c'est un mot bien
court, coûte épouvantablement cher et c'est une des raisons de la
création du déficit actuariel que nous connaissons dans nos
régimes de retraite.
Or, quel est l'état de la réflexion des actuaires qui se
préoccupent des problèmes de régimes de retraite à
l'heure actuelle? C'est que l'on constate que les besoins de nos concitoyens
évoluent avec l'âge. L'indice des prix à la consommation
représente l'augmentation des coûts pour une famille moyenne
canadienne. Or, il est bien évident que, lorsque vous n'avez plus
d'enfant, lorsque vous n'avez souvent plus de maison, souvent vous allez en
appartement, la structure de votre consommation évolue. Vous achetez
davantage de biens de consommation de type radio, téléviseur, par
exemple; par contre, vos dépenses d'automobile diminuent rapidement.
Donc, il en résulte que, pour maintenir le pouvoir d'achat constant, en
tenant compte du changement dans ce patron de consommation, les analyses
actuarielles nous montrent présentement, celles qui sont faites aux
États-Unis, qu'effectivement une indexation à l'indice des prix
à la consommation moins 3% permet de protéger
intégralement le pouvoir d'achat des personnes de plus de 65 ans.
D'ailleurs, c'est assez intéressant parce que d'autres
études qui ont été faites sur la propension à
l'épargne nous indiquent que le taux d'épargne additionnel est de
3%. En
d'autres termes, lorsque l'on indexe entièrement les pensions, on
constate que ça amène les pensionnés à
épargner 3% de leur rente annuellement, justement parce que ces 3% ne
sont pas véritablement requis pour leurs besoins courants. C'est donc
sur la base de cette réflexion que présentement les études
actuarielles nous indiquent qu'on devrait peut-être effectivement
modifier les taux d'indexation des régimes de retraite, tout en gardant
une protection complète et entière. Cela veut donc dire que, s'il
est vrai, comme le dit le député de Louis-Hébert, que les
pensions vont baisser à la suite de cette indexation partielle - c'est
inattaquable, indéniable - il reste que la pension sera
adéquate.
Autre point que le député de Louis-Hébert a
soulevé, c'est qu'à la suite de la baisse de salaire qu'implique
le projet de loi no 70, on va projeter dans le temps une réduction
importante des pensions. Là, je le mets en garde. La pension est
calculée sur la moyenne des cinq dernières années,
premièrement, et, deuxièmement, il faut quand même se dire
que les employés de l'État vont recevoir une augmentation de
salaire. Ce qui est en cause, c'est le quantum de l'augmentation de salaire;
c'est qu'au lieu de leur accorder 899 000 000 $ d'augmentation nous leur
accordons en pratique l'équivalent de 304 000 000 $, si on calcule
l'ensemble, syndiqués et syndicables, cadres et autres.
Donc, ce qui est en cause, c'est le quantum de l'augmentation qui va
être moins forte. Là-dessus, je pense que les interventions de
l'Opposition ont été assez claires; la députée de
Jacques-Cartier, Mme Dougherty, par exemple, a fait une intervention où
elle a dénoncé le fait que les employés du secteur public
étaient mieux rémunérés ou le fait qu'ils avaient
une charge de travail inférieure - je pense qu'elle se referait en
particulier à l'éducation - le fait qu'ils avaient la
sécurité d'emploi, ce que personne n'avait. Donc, la
députée de Jacques-Cartier en arrivait à la conclusion
qu'effectivement les employés de l'État étaient dans une
situation un peu exceptionnelle face à la crise puisqu'ils
étaient complètement immunisés contre une crise qui
touchait l'ensemble de leurs concitoyens.
Donc, à partir du moment où on a effectivement
l'impression que les employés du secteur public sont peut-être
avantagés par rapport à ceux du secteur privé, le fait de
les ramener à un niveau un peu plus acceptable ne les privera pas
à long terme d'une pension à laquelle ils avaient droit, mais va
peut-être ramener leur pension à un niveau qui peut-être
était ce à quoi ils avaient véritablement droit si on fait
la comparaison avec le reste de leurs concitoyens.
Finalement, le dernier point que le député de
Louis-Hébert a abordé, c'est la question de la rentabilité
des fonds investis à la Caisse de dépôt. Je partage sa
préoccupation quant à s'assurer que la Caisse de
dépât est bien gérée et obtient le rendement le plus
élevé possible sur ses investissements. C'est d'autant plus
important que, dans la mesure où on indexe les pensions, si nous
n'allons même pas chercher un rendement équivalent sur les
investissements, on va avoir des problèmes pour payer les pensions un
jour. Donc, indéniablement, je pense qu'il a raison de soulever ce
point.
Mais là où je ne partage absolument pas son point de vue,
c'est lorsqu'il dit: Les fonds placés à la Caisse de
dépôt ne devraient pas servir, par exemple, à des prises de
contrôle de sociétés. Là-dessus, il y a une
différence fondamentale de point de vue entre le Parti libéral et
le Parti québécois, et je m'explique. Lorsque nous voyons une
société comme La Prudentielle, compagnie d'assurances, ou Sun
Life choisir de quitter le Québec, nous sommes totalement impuissants,
à moins d'être indépendants. Évidemment,
l'indépendance nous permettrait de faire comme le gouvernement canadien
fait, d'édicter un ensemble de lois obligeant, par exemple, des
entreprises à maintenir des sièges sociaux au Québec.
Cela, ce serait possible. C'est, à mon point de vue, la solution
idéale de se donner les instruments normaux d'un État et de faire
en sorte qu'on puisse contrôler notre développement
économique, à nous.
Mais que faire tant que nous ne sommes pas indépendants et que
nous n'avons pas le moyen de contraindre les entreprises à venir
s'implanter chez nous? Par exemple, les compagnies américaines
d'automobiles sont venues s'implanter au Canada parce que le gouvernement
fédéral a mis en place des politiques, à l'époque,
qui ont amené la venue de ces entreprises. Il en va de même,
d'ailleurs, dans le cas des banques où l'État canadien veut
contrôler l'épargne des citoyens canadiens pour éviter
qu'elles ne quittent. Si le Québec pouvait faire la même chose, on
aurait, évidemment, à ce moment, des sièges sociaux
québécois, un capital proprement québécois
circulant au Québec. On aurait donc, à mon point de vue, un
meilleur contrôle de notre développement économique. Dans
la mesure où nous ne sommes pas indépendants, il apparaît
très clair qu'une des façons de garder le contrôle, c'est
effectivement d'utiliser notre épargne collective pour acheter des parts
dans les entreprises oeuvrant au Québec.
Un bel exemple, c'est Domtar. Domtar avait entrepris de restructurer
complètement son activité économique en dehors du
Québec, déménageant graduellement ses principales
activités de sièges sociaux et
ayant choisi de se réorienter sur les marchés de
Californie, les marchés ontariens, les marchés canadiens-anglais
et bloquant toute croissance économique chez nous.
Indéniablement, sans aucun contrâle sur le conseil
d'administration, nous ne pouvions rien faire. Mais aujourd'hui, c'est
stoppé parce que Domtar est contrôlée par le Québec.
De fait, à partir du moment où vous siégez à des
conseils d'administration, il n'est même pas nécessaire d'utiliser
votre pouvoir de vote. Vous pouvez être un "silent partner", comme on
dit. Toutefois, l'existence d'un "silent partner" à un conseil comme
actionnaire avec un pouvoir important de contrâle amène le conseil
d'administration à beaucoup plus de prudence parce qu'il ne sait jamais
si, à un moment donné, le "silent partner" ne décidera pas
de parler et de dire à ce conseil d'administration: Nous vous
remplaçons par d'autres parce que vous ne défendez pas nos
intérêts.
La présence de la Caisse de dépôt à un grand
nombre de conseils d'administration, peut-être pas des conseils
d'administration, mais au sein des actionnaires en pourcentage important pour
détenir une force de frappe importante m'apparaît à ce
moment extrêmement valable comme concept. Et je suis même surpris
que le député de Louis-Hébert qui n'est pas un
séparatiste ne se rende pas compte que, pour corriger
l'inéquité du système fédéraliste, il
devrait, au contraire, être favorable à une prise de
contrôle par la Caisse de dépôt d'entreprises.
Et, d'ailleurs, c'est une des thématiques que j'ai souvent eu
l'occasion de développer. Ce que nous constatons depuis les
années 1956, c'est une fuite continue de sièges sociaux qui a
touché l'industrie pharmaceutique, l'industrie de la finance, qui a
touché l'ensemble des secteurs industriels québécois.
C'est absolument frappant de voir le pourcentage des investissements canadiens
qui viennent au Québec depuis les vingt dernières années.
C'est un recul continu. Ce qui a empêché l'effondrement de notre
économie - à cet égard, les chiffres sont absolument
spectaculaires - c'est que les investissements de l'État, à
partir des années soixante, ont pris la relève des
investissements du secteur privé, de manière à maintenir
un minimum d'activité au Québec. De fait, c'est la
conséquence du fédéralisme qui, finalement, crée
des forces centrifuges. Il est normal qu'une compagnie canadienne ne se sente
pas à l'aise dans un contexte francophone québécois et
qu'elle cherche à se retrouver chez elle. Il est donc normal qu'on voie
les compagnies canadiennes quitter le Québec et s'en aller gérer
leur empire à partir de bases anglo-saxonnes; c'est tout à fait
normal. (16 h 45)
M. Rivest: C'est normal!
M. Bérubé: Cela s'est produit depuis 20 ans. Il n'y
a qu'une seule façon d'empêcher ça, c'est
l'indépendance ou la prise de contrôle de ces entreprises. Je ne
vois pas comment un parti de droite peut avoir une autre position que celle de
donner à la Caisse de dépôt un rôle de plus en plus
grand. La plus belle preuve, c'est que - que ce soit le Parti libéral
des années soixante, l'Union Nationale de 1960 à 1970, et Parti
libéral à nouveau - on s'aperçoit que le gouvernement
québécois est de plus en plus interventionniste, quel que soit le
régime politique. Pourquoi? C'est la conséquence du
fédéralisme. C'est le seul moyen pour effectivement assurer le
développement de notre économie. Quand le député de
Louis-Hébert souligne les problèmes de la Caisse de
dépôt et de l'intervention du gouvernement dans la prise de
contrôle d'entreprises oeuvrant au Québec grâce au capital
investi dans la Caisse de dépôt, moi, je dis: Dans le
régime dans lequel nous vivons c'est, pour l'instant, la seule bonne
solution que nous ayons.
M. Rivest: Sous la réserve de la sécurité
des fonds qui sont gérés de la sorte et de la rentabilité
au niveau de l'indexation.
M. Bérubé: Exactement.
M. Rivest: Mais je pense que le ministre est conscient de
ça. Je m'excuse auprès de mes collègues, mais ce que le
député de Louis-Hébert a...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, parce que ce sont eux
qui m'avaient demandé la parole.
M. Rivest: ... signalé, c'était sa
préoccupation et je voudrais bien que le ministre nous dise les mesures
qu'il prend, parce qu'il s'agit des fonds de retraite. Le ministre pourrait-il
ajouter quelque chose là-dessus?
M. Bérubé: C'était au début de mon
intervention, et mon intervention a été assez longue. J'ai
l'impression d'avoir couvert l'ensemble du territoire.
M. Rivest: En tout cas, on y reviendra.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: J'ai une question sur l'intervention du
ministre. Il dit que, selon les études actuarielles américaines,
une indexation de 3% inférieure au taux d'inflation est suffisante pour
garantir les revenus, par exemple, des gens qui sont à leur retraite. Il
n'y a pas de problème de ce côté-là. Est-ce que le
même raisonnement
s'applique à une indexation possible des revenus des gens qui
sont sur le marché du travail, c'est-à-dire qu'une indexation de
3% inférieure à l'inflation serait suffisante pour garantir le
pouvoir d'achat de ces personnes?
M. Bérubé: Non, dans la mesure où ceux qui
sont sur le marché du travail se rapprochent davantage de ce qu'on peut
appeler la famille moyenne, ils ont forcément des besoins dont
l'augmentation des coûts dans le temps doit être beaucoup plus
près de l'indice des prix à la consommation que dans le cas
particulier des personnes âgées.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Bérubé: Cela ne veut pas dire, pour autant, que
nous devions nécessairement indexer. Un des problèmes qui
existent dans l'indexation des salaires à l'indice des prix à la
consommation, c'est que ceci alimente l'inflation, et je m'explique. Si, par
exemple, les pays arabes décident de hausser le prix du pétrole,
leur objectif étant évidemment de s'enrichir par la vente de leur
pétrole, donc de pratiquer une ponction sur nos propres ressources
à nous, nous sommes donc moins riches. Mais, à la suite de cette
augmentation des prix, donc de cette inflation, si nous consentons une
augmentation de salaire équivalente pour permettre à la personne
d'acheter autant de pétrole qu'avant, il s'agit d'une augmentation de
salaire factice puisque la richesse n'est pas là; c'est de l'argent qui
est sorti du territoire national. Conséquence: nous enclenchons une
spirale inflationniste, puisque nous cherchons à nous protéger
contre une inflation qui ne vient pas d'ici, mais qui vient de
l'extérieur. Si les clauses d'indexation salariale - ceci fait
passablement l'unanimité - au coût de la vie, en apparence, sont
équitables, en ce sens qu'elles permettent de maintenir le pouvoir
d'achat, lorsqu'elles visent à maintenir le pouvoir d'achat dans des
circonstances où le pouvoir d'achat ne peut pas être maintenu,
elles entraînent plus d'inflation encore, donc plus
d'inéquité. Les clauses d'indexation devraient donc porter sur
des facteurs d'inflation qui sont contrôlables à l'interne et non
pas sur des causes externes. Indéniablement, si les Arabes augmentent le
prix du pétrole, quand bien même nous augmenterions le salaire des
employés du secteur public, les gens ne seront pas plus riches pour
autant. Ce que nous aurons fait, c'est plus d'inflation et évidemment
nous aurons enclenché une spirale. Donc, le problème de
l'inflation est un problème très complexe en
rémunération.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, est-ce que ça
répond à vos questions, Mme la députée de
L'Acadie?
M. le député d'Outremont.
M. Fortier: J'aimerais revenir au début, sur certaines
interventions qui ont été faites par les députés
d'Argenteuil et de Jean-Talon et sur les réponses du ministre en ce qui
a trait au fait que, lors des dernières conventions collectives, il y
avait cette annexe-ci ou, aux autres conventions collectives, il y avait un
article qui était très précis et qui, dans les deux cas,
je pense, donnait l'indication très ferme que le gouvernement ne pouvait
procéder d'une façon unilatérale. On a indiqué que,
dans les anciennes conventions collectives, il y avait un article qui
était peut-être ultravires dans un sens puisque l'Assemblée
nationale ne peut se départir de son pouvoir de légiférer.
Dans la dernière convention collective, il y a un article où on
dit, dans 5a et 5b, que le gouvernement, en consultation avec les membres de la
commission administrative, nommera un actuaire-conseil après
consultation et ensuite on s'entendra sur les hypothèses
utilisées.
Je pense que ce qu'il faut retenir de cela, c'est que
l'unilatéralisme, qui est blâmé par les syndicats et qui
n'est pas accepté par l'Opposition, ne peut réellement être
accepté, compte tenu des articles ou de l'annexe dont le ministre a fait
état. Le ministre nous a dit tout à l'heure que toutes les
conditions avaient été remplies à son avis. On dit,
justement, qu'après consultation avec les membres de la Commission
administrative du régime de retraite provenant du milieu syndical, il y
aura un actuaire-conseil qui sera nommé pour vérifier la
pertinence des hypothèses utilisées pour l'évaluation
actuarielle; un délai de trente jours lui sera accordé pour
qu'elle se prononce et soumette au gouvernement l'ensemble de ses
recommandations, lesquelles seront rendues publiques.
La question que j'aimerais poser là-dessus est celle-ci: Est-ce
que, de fait, il y a eu consultation avec les représentants syndicaux?
Est-ce que l'expert s'est prononcé sur la pertinence des
hypothèses? Est-ce que le rapport a été rendu public et,
s'il a été rendu public, est-ce qu'on peut en avoir une copie?
Quelles sont toutes ces hypothèses qui ont été retenues?
J'imagine que les hypothèses d'un tel rapport, qui sont semblables dans
tous les rapports des actuaires-conseils, couvrent non seulement les
contributions, mais couvrent l'inflation, couvrent le rendement des
investissements, couvrent le vieillissement ou l'âge moyen de ceux qui
contribuent, l'âge moyen de ceux qui prennent leur pension, les
pourcentages de chacune de ces catégories de personnes. J'aimerais
savoir, à la suite de ce dépôt-là, dans quel but
cela avait été fait et quelles ont été les
conclusions de ce rapport. Est-ce
que l'actuaire-conseil fait des études alternatives, à
savoir qu'il pourrait y avoir des améliorations à apporter au
régime de retraite du RREGOP, ou est-ce que l'actuaire-conseil a
reçu également le mandat de considérer que, les
coûts étant tellement élevés, il faudrait, dans un
deuxième temps, en arriver à négocier un régime de
retraite qui serait à la baisse et qui représenterait, dans une
certaine mesure, plusieurs articles qui sont dans le projet de loi qui est
devant nous?
Autrement dit, l'article 5a et l'article 5b en particulier laissent
entendre que la dynamique qui avait été acceptée lors des
négociations était que les deux parties s'entendaient sur des
études devant permettre qu'un expert puisse, à partir
d'hypothèses, j'imagine, qui seraient discutées de part et
d'autre, faire part de données qui permettraient aux parties de
s'entendre sur l'article 5b, qui était justement de s'entendre sur le
taux de cotisation. Alors, ce serait la première question. Est-ce que
réellement ce processus a été suivi ou, au contraire,
n'est-il pas vrai que le projet de loi no 68 intervient d'une façon
unilatérale dans un processus qui se voulait un processus de discussion
avec les syndicats ou avec les représentants syndicaux qui faisaient
partie, justement, de la Commission administrative du régime de
retraite. J'imagine que ce serait intéressant d'en savoir davantage sur
les hypothèses qui ont été retenues. Est-ce que toutes les
hypothèses, y inclus celles qui font partie du projet de loi qui est
devant nous, faisaient partie de cette étude et est-ce que le rapport a
été rendu public, comme le demande, d'ailleurs, l'article 5a?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Effectivement, conformément
à l'article 5a de l'annexe, un actuaire-conseil, M. Gaston Paradis, a
été mandaté pour étudier le régime tel qu'il
existait avant la réforme. En d'autres termes, le mandat qu'il avait
reçu était d'évaluer le régime existant, d'examiner
les postulats, les hypothèses actuarielles qui le sous-tendent et d'en
arriver à une évaluation des taux de cotisation actuellement en
vigueur, ce qui a été fait. L'étude a conclu qu'il fallait
rehausser les taux de cotisation au RREGOP en particulier - pas de beaucoup, je
ne me souviens plus de combien, mais c'était une faible fraction de
pourcentage, quelques dixièmes pour cent -tout en maintenant le
régime actuel dans sa forme identique. Il s'agissait simplement de
hausser les cotisations pour permettre de financer les bénéfices
garantis à l'intérieur de la loi.
C'est, en partie, lorsque nous avons dû constater qu'effectivement
il faudrait hausser les cotisations au RREGOP qu'en même temps nous avons
été amenés à examiner toute la problématique
des régimes de retraite et que nous avons été
amenés à conclure que nos régimes de retraite
étaient extrêmement coûteux, que le déficit actuariel
atteignait, frôlait ou dépassait les 9 000 000 000 $, que dans le
cas des régimes de retraite des enseignants et des fonctionnaires, en
dépit de la réforme introduite par le ministre des Finances en
1978, je crois, en vertu de laquelle nous inscrivions aux comptes non
budgétaires la contribution de l'employeur à ces régimes
en même temps que nous épongions le déficit actuariel sur
50 ans, nous devions constater que les provisions qui étaient faites
étaient insuffisantes et qu'il fallait contribuer de façon
beaucoup plus importante aux régimes de retraite des enseignants et des
fonctionnaires à la suite de la plus grande
générosité de ces régimes, de leur coût plus
élevé et du niveau de cotisations qui était nettement
insuffisant dans ces régimes.
Donc, ayant fait cette constatation, constatant qu'en même temps
on engageait, littéralement parlant, l'avenir du Québec dans un
régime de retraite auquel il faudrait un jour contribuer... N'oublions
pas que ce ne sont pas ceux qui ont 50 ans ou 55 ans qui seront affectés
par la réforme; ce sont ceux qui ont 30 ans. En d'autres termes, ce sont
les contribuables d'aujourd'hui qui décident maintenant de se payer une
pension moins généreuse plus tard. Pourquoi? Parce que, plus
tard, nous savons qu'avec le vieillissement de la population le fardeau des
pensions va devenir terriblement lourd et que l'impact fiscal sera
considérable sur les générations qui viennent. Donc, ce
sont les générations de maintenant qui décident de
réduire la générosité des régimes de
retraite de demain, de manière à alléger le fardeau fiscal
et à réduire le déficit. Il ne s'agit pas de s'en prendre
aux gens qui sont déjà à la retraite ou qui
s'apprêtent à prendre leur retraite; ils ne sont, pour ainsi dire,
pas touchés par le régime. Ce sont les cotisations futures aux
régimes de retraite qui sont modifiées.
Après cette analyse, nous devions conclure qu'effectivement il
fallait modifier à la baisse les régimes de retraite. Or, dans la
conjoncture économique que nous traversons, avec les problèmes
d'équilibre financier que nous avons, nous avions le choix entre
appliquer 150 000 000 $ de compressions à des services gouvernementaux
existants ou comprimer les régimes de retraite. Comme il était
inévitable qu'on ait à comprimer les régimes de retraite,
il nous a paru beaucoup plus logique de réaliser l'opération
maintenant plutôt que d'aller sabrer 150 000 000 $ dans des services
à la population actuellement et de faire en sorte que, l'année
suivante, de toute façon - parce
qu'il fallait s'entendre là-dessus à la table des
négociations - on soit obligé d'aller récupérer 150
000 000 $. Là, il faudrait prendre cet argent et le réinjecter
pour rétablir des services coupés l'année d'avant. Donc,
ça n'avait pas de sens d'essayer d'appliquer 150 000 000 $ de
compressions additionnelles dans les services publics. Nous avons donc pris la
décision de réaliser la réforme des régimes de
retraite six mois plus tôt. (17 heures)
M. Fortier: Oui, mais vous n'avez pas répondu à ma
question.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Est-ce que le rapport a été rendu
public? Est-ce qu'on peut en avoir des exemplaires? Est-ce que ce rapport a
considéré la performance ou les revenus futurs des montants
déposés? C'est là où on touche, M. le ministre,
toute la performance de la Caisse de dépôt. J'imagine que parmi
les hypothèses envisagées, l'expert qui a fait l'étude a
envisagé non seulement les contributions, les paiements qui ont
été faits, mais aussi le déficit actuariel qui provient
des revenus de la Caisse de dépôt. Je crois que la question du
député de Louis-Hébert était très
pertinente, à savoir quelle est la fonction fondamentale de la Caisse de
dépôt, puisque vous êtes arrivé à la
conclusion qu'il y avait un déficit actuariel considérable qui
vous porte maintenant à faire des changements unilatéraux et
à couper dans les contributions qui seront éventuellement
payées à ceux qui prendront leur pension. Je crois que cette
question est tout à fait pertinente: À quoi doit servir la Caisse
de dépôt?
Quant à nous, je crois que nous sommes d'accord avec ceux qui ont
fondé la Caisse de dépôt, à savoir que
sûrement l'objectif premier et primordial de la Caisse de
dépôt est de fournir les revenus qui permettront aux gens,
éventuellement, de prendre leur retraite dans des conditions normales.
Il est évident qu'un changement des priorités de la Caisse de
dépôt peut permettre une certaine intervention économique,
mais non d'atteindre le premier objectif qui avait prévalu à
cette même fondation. Le ministre a tenté d'expliquer les
interventions; il ne l'a pas dit mais, bien sûr, les politiques du
gouvernement depuis 1976 ont fait que plusieurs entreprises ont quitté
le Québec et que, de ce fait, maintenant on doit tenter de les garder de
force en achetant leurs actions.
Ceci, nous le comprenons bien, mais quand même j'aimerais que le
ministre ne passe pas sous silence le fait qu'un changement des
priorités, des objectifs de la Caisse de dépôt amène
une performance financière moindre. J'oserais espérer que
l'actuaire-conseil qui a étudié le programme RREGOP existant a pu
se pencher sur cette performance et a pu conclure si, par rapport à
d'autres plans d'investissement, d'autres performances de régimes de
retraite, il était satisfait de la performance de la Caisse de
dépôt ou s'il croyait que, compte tenu des objectifs du
gouvernement dans ce secteur, il fallait à tout prix changer les
régimes de retraite tels qu'ils avaient été
agréés par les centrales syndicales.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, l'intervention
du député d'Outremont est un peu décousue. J'ai un peu de
difficulté à comprendre la question comme telle. Pourriez-vous
juste résumer votre question?
M. Fortier: II y a deux questions importantes. La
première, c'est: Est-ce qu'on peut avoir un exemplaire du rapport de
l'actuaire-conseil? La deuxième: Est-ce que vous pouvez nous dire
maintenant si ce rapport a évalué la performance de la Caisse de
dépôt pour conclure que, justement, il fallait faire des
changements substantiels dans le programme RREGOP tel qu'il existe
présentement?
M. Bérubé: Dans le cas du rapport, l'article de loi
constituant les régimes de retraite prévoit que ces rapports sont
remis au conseil d'administration, lequel, comme vous le savez, inclut les
représentants des travailleurs syndiqués. On peut donc qualifier
ces rapports de semi-publics. Si l'Opposition libérale veut en avoir une
copie, il me fera plaisir de lui en faire parvenir. Je pense que le
président de la CARR va se charger de vous la faire tenir. Donc, on peut
considérer ce rapport comme semi-public. Il n'est pas public au sens
où nous ne le déposerons pas à l'Assemblée
nationale. Nous n'en faisons pas des milliers de copies pour nous conformer
d'ailleurs aux remarques du député de Sainte-Anne qui trouve
qu'il y a beaucoup trop de rapports gouvernementaux et que l'impression des
rapports gouvernementaux coûte trop cher. Nous ralliant à la
position du député de Sainte-Anne, évidemment, nous
éviterons d'avoir à multiplier les copies de ces rapports, mais
il nous fera plaisir d'en fournir une copie au Parti libéral. La
première question, ça va. La deuxième?
M. Fortier: La deuxième: Est-ce que, dans ce rapport, il y
a une évaluation du rendement donné par la Caisse de
dépôt qui permettait de conclure à un déficit
actuariel? M. le ministre, vous comprenez la question. C'est que, pour arriver
à un déficit actuariel, on escompte les revenus et on
escompte les dépenses. Alors, si le rapport a été
bien fait, bien sûr, on a dû faire une évaluation de la
performance financière qui serait apportée par la Caisse de
dépôt quant au revenu qui serait apporté à la
caisse.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: II y a une hypothèse qui doit
être faite, et c'est ce que je vérifiais, sur le rendement de la
Caisse de dépôt sur les placements que fait la CARR. Soit dit en
passant aussi, si je ne m'abuse, les placements de la CARR dans le compte non
budgétaire doivent donner des rendements équivalant à ceux
de la Caisse de dépôt, je crois. Alors, dans le compte non
budgétaire, le taux de rendement est celui des obligations du
Québec. Dans le cas de cette hypothèse, elle est simplement
prise, assumée par l'actuaire et celui-ci ne peut que vérifier
dans quelle mesure, effectivement, à l'heure actuelle, c'est conforme
aux projections, mais c'est tout. C'est-à-dire que l'actuaire n'a pas
comme tâche d'aller vérifier si la Caisse de dépôt
va, effectivement, livrer le taux projeté de rendement sur
l'investissement.
M. Fortier: II peut faire des comparaisons avec d'autres
organismes.
M. Bérubé: Non, ce n'est pas son mandat.
M. Fortier: Ce n'était pas son mandat ici. J'imagine que
la CARR n'a pas soulevé ces questions pour évaluer le
déficit actuariel qui était prévu, ce qui vous a fait
conclure que, justement, il fallait effectuer des changements substantiels dans
le plan RREGOP existant.
M. Bérubé: Exactement.
M. Fortier: En terminant, M. le Président, j'ai
noté tout à l'heure l'intervention de mon collègue de
Louis-Hébert sur les ex-religieux et les ex-religieuses. Ce que j'ai
retenu de ce que le ministre a dit, d'une part, c'est qu'il était
d'accord pour dire qu'il s'agissait d'une injustice flagrante à certains
égards. J'ai constaté qu'il n'était pas tout à fait
logique avec le constat qu'il avait fait, puisqu'il semblait d'accord que des
ajustements devraient être faits. Je n'ai pas tout à fait compris
les raisons qui l'avaient amené à ne pas proposer certaines
modifications dans le projet de loi qui est devant nous, même si ce
n'était pas la totalité des modifications qui étaient
demandées par ces personnes. À cet égard, je me demandais
si le ministre avait formulé une réponse qui était
définitive. Est-ce qu'il laisse encore la porte ouverte ou est-ce qu'il
a dit que la décision du cabinet était irrévocable
à l'égard des ex-religieux et des ex-religieuses qui ont fait des
demandes répétées dans le passé?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Je pense que le député de
Charlesbourg pourrait expliciter, si on veut, le sens de la réforme. Ce
que la loi 60 a fait a été de permettre à un ex-religieux,
qui a continué d'enseigner pour l'État, de
bénéficier de la pension à laquelle il aurait eu droit si,
par exemple, avant 1965, il avait quitté son ordre religieux et avait
continué d'enseigner. En d'autres termes, ce que la loi 60 a fait, c'est
qu'il n'y ait pas de différence entre quelqu'un qui choisit de quitter
les ordres religieux avant 1965 ou après 1965. En ce sens, on a
éliminé cette injustice qui prévalait dans la loi de
1965.
Le problème de tous les religieux ou ex-religieux qui ont pu
travailler pour l'État à des moments où il n'y avait pas
de régime de retraite n'est pas différent du problème de
centaines de milliers, sinon de millions, de nos concitoyens qui travaillent
également dans des conditions où ils n'ont pas de régime
de retraite. Ce ne sont pas des conditions différentes, ce sont les
mêmes. Donc, il n'y a pas d'injustice comme telle. On pourrait dire que
ce serait préférable que les ex-religieux puissent avoir, eux
aussi, une pension et qu'ils puissent racheter des années à
l'intérieur du RREGOP, du RRE ou du RRF. Présentement, c'est le
RREGOP seulement. Ce serait idéal, mais de la même façon
qu'il serait également idéal que tous les citoyens du
Québec puissent racheter des années de pension ou des
crédits de rente au sein du RREGOP afin de pouvoir s'offrir une pension
acceptable, raisonnable.
Ce serait tout à fait acceptable, mais le problème que
nous avons, c'est le coût. Si l'on permet à tous les ex-religieux
qui ont quitté l'enseignement et sont allés travailler ici ou
là, par exemple à l'université ou ailleurs, de racheter
des crédits de rente, il faut que le gouvernement apporte sa
contribution sur la base qui était prévue dans la loi. Donc, il y
a un coût pour l'État, il y a un coût pour la
collectivité. Là, on pourra s'interroger: Si c'est valable pour
les ex-religieux, est-ce que cela ne doit pas l'être également
pour les religieux? Sinon, la Commission des droits de la personne va
très rapidement invoquer le fait que notre législation, si on
devait en adopter une de ce type, discrimine en fonction du statut social.
Suivant que vous êtes ex-religieux ou non, vous avez droit à une
pension ou non. Alors, là, c'est tout à fait discutable, à
moins, évidemment, de prévoir dans la loi une clause "nonobstant"
en vertu de laquelle, évidemment, on décide que, comme
société,
on va distinguer entre ces catégories de citoyens. C'est
l'ensemble de ces contraintes qui font que, si on voulait faire en sorte que
tous les ex-religieux ou religieux puissent bénéficier d'une
pension de l'État en rachetant des crédits de rente pour les
années passées, si nous voulions atteindre cet objectif, il y
aurait un coût considérable qui y serait attaché.
M. Rivest: M. le Président, juste une remarque.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Jean-Talon.
M. Rivest: Je m'excuse auprès de ma collègue de
L'Acadie. La première question que je voulais poser au ministre: Est-ce
que le ministre a en main, actuellement - étant donné que les
ex-religieux se sont, quand même, promenés depuis fort longtemps
d'une officine gouvernementale à l'autre - un avis écrit de la
Commission des droits de la personne sur le caractère discriminatoire
qu'il évoque dans sa réponse? Sinon, je pense bien que le
ministre ne peut pas s'arroger le privilège de décider que cela
pourrait causer une discrimination. Il ne peut pas se prononcer à la
place de la Commission des droits de la personne, si c'est le seul argument
qu'il a pour rendre justice à ces gens.
Deuxièmement, un tel avis devra tenir compte aussi, quand
même, d'un premier effort qui est terriblement incomplet au niveau de la
loi de 1965 qui a existé et qui a réglé le problème
des ex-religieux. Enfin, elle n'a pas réglé leur problème,
mais il y a eu un commencement de règlement du problème pour les
ex-religieux laïcisés, mais qui ne concernait pas les religieux qui
ont continué de rester dans les ordres. Alors, j'aimerais bien que, sur
cette question de la discrimination, le ministre, à tout le moins,
s'engage à requérir l'avis de la Commission des droits de la
personne, si c'est le seul empêchement dont le ministre dispose.
Le ministre évoque tout le caractère discriminatoire que
cela pourrait créer. Or, il sait très bien - je suis content que
notre collègue soit ici - que de très nombreux ministres depuis,
sans doute, les années soixante-dix, mais en particulier depuis 1976,
ont écrit, promis, se sont engagés sur cette question. On a
cité des lettres à l'Assemblée nationale de Mme la
ministre d'État à la Condition féminine, de M. le
député de Charlesbourg et de la ministre de la Fonction publique.
On a toute une correspondance à ce sujet avec les gens. Ils ont des
lettres également du cabinet du premier ministre. Or, là,
après tout ce périple, on arrive à une commission
où justement on ouvre la question des régimes de retraite et le
ministre se retranche derrière une possibilité que la Commission
des droits de la personne voie un aspect discriminatoire dans la solution
évoquée par mon collègue de Louis-Hébert, sans
même que, pendant tout ce temps, nulle part au gouvernement quiconque ait
requis de la Commission des droits de la personne un quelconque avis. (17 h
15)
Alors, je pense bien que c'est le minimum auquel les gens auraient
dû s'attendre dans la mesure où ils se font dire aujourd'hui que
peut-être la Commission des droits de la personne émettrait un
avis défavorable à la solution qu'ils évoquent et qui leur
rendrait justice. J'aimerais que le ministre nous dise si, d'une part, le
gouvernement a requis un tel avis. Deuxièmement, si un tel avis existe,
est-ce qu'on pourrait en avoir une copie? Je voudrais que la commission
parlementaire -étant donné que cette question fait partie
intégrante de la loi que nous examinons -puisse étudier cet avis,
l'avoir en main, et qu'on puisse l'apprécier à sa valeur. Je veux
bien prendre la parole du ministre et son interprétation. Sans doute
est-il de bonne foi dans l'interprétation qu'il donne, mais on voudrait
avoir des documents. C'est une chose extrêmement sérieuse parce
qu'il y a des injustices - et le ministre le reconnaît -plus que des
inconvénients; ce sont des injustices profondes qui sont faites à
une certaine catégorie de nos concitoyens.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: La réponse à votre
question, c'est oui. Comme je vous le disais tantôt, je n'ai pas voulu
m'engager trop parce que je citais de mémoire. Je me souvenais surtout
de l'implication de la commission et des réticences que la commission
avait. Effectivement, en fouillant un document que j'avais tantôt et que
je n'avais pas consulté - le document que j'ai est de la séance
du 2 juin 1981 du Conseil du trésor, donc il y a déjà un
an; c'est pour cela que c'était assez vague dans mon esprit - il
était bien indiqué qu'un avis a été émis par
la Commission des droits de la personne à savoir qu'une loi de ce
type-là est discriminatoire selon la condition sociale à cause de
l'exclusion des enseignants religieux. C'était donc un des
problèmes qu'avait le ministre de la Fonction publique. Cet avis est
effectivement public, on m'a dit qu'il a été déposé
dans un rapport.
M. Rivest: Est-ce que le ministre sait si, au moment où la
Commission des droits de la personne a étudié cette
question-là - il nous apportera la réponse ultérieurement,
je conçois volontiers qu'il ne le sache pas - les gens les premiers
concernés, c'est-à-dire les
ex-religieux, ont été entendus par la commission?
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Charlesbourg, pour un complément de
réponse.
M. de Belleval: Dans le cas de la discrimination, ce ne sont pas
les exreligieux qui sont en cause, ce sont les religieux, parce que le projet
de loi no 60, de la même façon que ce qui avait
précédé, excluait les religieux des
bénéfices de la loi. Le problème est complexe; il met en
cause quelques religieux, mais surtout des exreligieux. Alors, l'avis de la
Commission des droits de la personne ne s'adresse pas aux ex-religieux; il
s'adresse aux religieux.
M. Rivest: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, je veux juste voir si le
ministre n'a pas autre chose à ajouter.
M. Bérubé: Non, je pense que l'intervention du
député de Charlesbourg est très claire. Il s'agit d'une
discrimination entre religieux et ex-religieux qui pourrait être
introduite par une loi à cet effet.
M. de Belleval: Je pense qu'il faut dire un mot
supplémentaire sur tout ce dossier.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: II est certain que, pour donner à tous ces
gens, c'est-à-dire aux ex-religieux enseignants qui ont continué
à oeuvrer dans le secteur public - parce que, là encore, il y a
tout le problème du secteur privé en tout cas - et qui, mutatis
mutandis, pourraient aspirer aux bénéfices du régime de
retraite des enseignants - parce que c'est de cela aussi souvent qu'il est
question, plus même que du RREGOP - pour donner, dis-je, à tous
ces gens les mêmes bénéfices que le Régime de
retraite des enseignants, ça coûterait extrêmement cher.
Oui, l'évaluation a été faite. Je ne veux pas reprendre
tout le débat sur la loi no 60, mais ça montait à
plusieurs centaines de millions de dollars d'engagements actuariels, je ne me
souviens plus, peut-être même des milliards. 600 000 000 $, 800 000
000 $ au moins, en tout, peut-être plus. En tout cas, ce sont des sommes
considérables.
Alors, on a essayé de trouver une espèce de terrain
d'entente, qui n'est pas parfait. C'est un compromis qui donne surtout aux plus
anciens enseignants des bénéfices qui, sans être
équivalents, sont quand même, dans une certaine proportion,
équitables; en tout cas on le croyait, à l'époque, quand
on a étudié la loi no 60. Il ne faut pas oublier qu'avec le
nouveau régime qu'on met sur pied, le nouveau RREGOP qu'on modifie, des
plus jeunes enseignants qui possédaient déjà des
bénéfices en vertu du Régime de retraite des enseignants
vont peut-être prendre avantage de la loi et transférer au RREGOP
et obtenir les bénéfices de la loi 60. De ce côté
aussi, cela devrait améliorer les choses.
Un des griefs aussi, c'est que les plus vieux enseignants, pour
bénéficier au maximum des dispositions de la loi 60, doivent
continuer à faire carrière souvent jusqu'à l'âge de
65 ans, parce qu'il y a une réduction actuarielle qui est prévue
dans le projet de loi actuel. Évidemment, comme souvent ils sont
entrés dans la carrière d'enseignants dans des juvénats,
à l'âge de 20, 22 ans, on sait très bien ce qui se passait
à ce moment-là, ils ont déjà accumulé
parfois 40 ans d'enseignement avec le stress que cela implique aujourd'hui
d'enseigner dans certaines classes, à certains niveaux, après
autant d'années. Évidemment, ils trouvent, pour obtenir les
pleins bénéfices de la loi 60, que continuer d'enseigner
jusqu'à 65 ans, c'est difficile.
Moi, je pense - je vous donne un avis personnel - qu'une fois que le
nouveau régime sera mis en place on pourra voir, dans six mois ou un an,
comment se comportent les plus jeunes enseignants par rapport au régime,
faire une revue de tout cela, voir aussi les bénéfices ou les
coûts que le gouvernement escomptait de l'application de la loi 60,
comment cela s'est comporté à ce moment. Est-ce que les
coûts ont été aussi importants que prévus, comment
les clientèles se sont-elles comportées? Peut-être qu'on
pourra alors faire une espèce de révision de tout cela, mais la
situation me semble encore mouvante de ce point de vue.
Finalement, je veux seulement mettre en garde les parlementaires. Par
rapport au problème central se greffent beaucoup de problèmes
particuliers qui sont soulevés par beaucoup de clientèles. Par
exemple, certains religieux - on a l'avis de la Commission des droits de la
personne - voudraient se voir donner des bénéfices. Je vous avais
expliqué tout cela lors de l'étude de la loi 60. Au fond, on
avait considéré qu'il y avait une espèce de concordat
tacite ou explicite entre l'Église catholique et l'État et qu'il
était entendu que les communautés s'occupaient de leurs
religieux. Il n'était pas question de leur donner des
bénéfices au point de vue du régime de retraite. Il y a ce
problème-là. Et il y a le problème aussi de certains
enseignants qui ont été dans le secteur privé plutôt
que dans le secteur public, y compris le secteur universitaire ou
collégial.
Il y a des catégories particulières. Il y a aussi des
employés qui étaient ancillaires au système
d'éducation comme tel, mais qui
vivaient à ce moment dans le système d'éducation,
par exemple une religieuse qui faisait la cuisine pour les religieuses
enseignantes. Les religieuses enseignantes ont droit à des
bénéfices et la religieuse non enseignante, mais qui faisait
partie de la même organisation, à toutes fins utiles, qui
collaborait directement, n'est pas couverte par le système.
Il faut faire attention. C'est très difficile, dans une
commission parlementaire comme celle-ci, de reprendre tout le débat, de
faire les distinctions entre ces différents problèmes et
d'essayer au fond de rouvrir le débat de la loi 60 à propos d'une
loi beaucoup plus générale qui affectera sans doute,
peut-être dans le bon sens, à mon avis, l'application des
dispositions de la loi 60. Il faudrait le reprendre dans un autre contexte et
après une étude que le ministre pourrait rendre publique
d'ailleurs, une étude actuarielle des bénéfices et des
coûts de la loi 60. Comment cela s'est-il comporté? Quels ont
été les coûts de cela? Est-ce que cela correspond aux
engagements gouvernementaux de l'époque? Est-ce que cela a
coûté plus cher, moins cher? Est-ce que cela a vraiment
donné les bénéfices escomptés? À partir d'un
rapport comme celui-là, tous les parlementaires pourraient prendre
position dans un meilleur contexte que d'essayer, à gauche et à
droite, d'intervenir à partir de différentes contestations
souvent légitimes, mais très diverses et qui ont finalement peu
de rapports directs et immédiats avec le projet de loi no 68.
Mme Lavoie-Roux: Juste une question.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Le député de Charlesbourg faisait
allusion au problème des personnes qui sont entrées dans
l'enseignement ou dans un régime de retraite à un âge plus
avancé, soit parce qu'elles ont été dans le secteur
privé ou qu'elles ont été des religieux, etc., et qu'elles
n'avaient pas accès à un fonds de retraite. Est-ce que, vu le
fait que leur pension, au moment où ils la prendront à 65 ans,
parce que ceux-là doivent continuer normalement jusqu'à 65 ans et
que souvent ce qu'ils doivent retirer... J'ai justement un cas en tête de
quelqu'un qui a seize ans d'enseignement et qui se retirerait avec une pension
d'à peu près 8000 $. Évidemment, cela dépend des
qualifications et des cinq meilleures années. Est-ce qu'un projet de loi
comme celui-ci, à longue échéance, va le pénaliser
du point de vue des bénéfices qu'il va retirer à sa
retraite, compte tenu du montant modeste d'une pension?
M. Bérubé: Depuis combien d'années
travaille-t-il pour l'État?
Mme Lavoie-Roux: Depuis 16 ans. M. Bérubé:
Depuis 16 ans?
Mme Lavoie-Roux: II faudrait que j'aie son salaire, n'est-ce
pas?
M. Bérubé: Oui.
Mme Lavoie-Roux: C'est 32% ou 30%. Cela fait peut-être 15
ans.
M. Bérubé: II a un salaire moyen de 25 000 $ aux
fins du calcul de sa pension. C'est le nombre d'années qui manque.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Bérubé: Un régime de retraite, c'est
toujours dans l'optique d'une carrière. On parle de 70% après une
longue carrière qui, normalement, est de 30 ans à 35 ans de
service. Alors, tous nos régimes accordent des bénéfices
importants lorsqu'il y a carrière dans les secteurs public et
parapublic; lorsqu'il y a moins d'années, les pensions en souffrent. Au
niveau du RREGOP, compte tenu que le régime est très jeune, les
pensions sont minimes, en moyenne, parce que justement il y a très peu
d'années de cotisations depuis la mise en place du régime en
1973.
M. de Belleval: Je pourrais répondre plus
précisément que le projet de loi no 68 ne vient pas, au fond,
modifier à la baisse les bénéfices de la loi 60;
ça, c'est certain. Ce qu'il pourrait faire cependant, c'est que, comme
le RREGOP va devenir moins dispendieux que, entre autres, le Régime de
retraite des enseignants, il se pourrait que des enseignants qui n'ont pas
voulu se prévaloir des dispositions de la loi 60, parce qu'ils
étaient relativement jeunes et qu'ils se disaient: Somme toute, le
régime de retraite des enseignants étant tellement favorable, je
suis aussi bien de me contenter...
Mme Lavoie-Roux: ... Les gens ont préféré
rester dans le Régime de retraite des enseignants en
général.
M. de Belleval: C'est ça. Compte tenu des nouvelles
dispositions du projet de loi no 68, il se pourrait que les enseignants qui ne
se sont pas prévalus des dispositions de la loi 60 trouvent maintenant
avantageux de s'en prévaloir. Dans ce sens-là, s'il y a une
influence de la loi 68 sur la loi 60, ce serait plutôt une influence
bénéfique à ce point de vue. La loi 68 ne vient pas
attaquer les bénéfices prévus par la loi 60.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, je...
M. Rivest: Juste avant, me permettez-vous?
M. Doyon: Oui, bien sûr.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Pour illustrer, je voudrais vous citer un cas pour
voir exactement ce dont on parle. C'est très court, je lirai deux
paragraphes simplement. La personne écrit: J'ai 60 ans et j'ai fait une
demande de pension pour le 1er juillet 1982. En finissant en juin 1982, j'aurai
38 ans de service dans l'enseignement, mais, pour fins de calcul, on ne m'en
compte que quatorze, ce qui me donne une pension annuelle de base d'un peu plus
de 6000 $, un crédit de rente de 1135 $, plus un crédit de rente,
selon l'article 14 de la loi 60, de 2128 $, pour un total de 9279 $. J'ai
racheté dix ans au montant de 4517 $ que je dois terminer de payer en
mars 1984. Selon mon opinion, il me semble qu'il aurait été
préférable que ces dix années viennent s'ajouter aux
quatorze ans pour fins de calcul de la pension. Est-ce que j'ai raison? Vous
trouverez ci-inclus, etc., photocopie.
Le problème, c'est quand vous prenez les cas un à un. Je
ne veux pas qu'on règle ce cas-là, mais je l'ai cité pour
illustrer la situation et le vécu de chacun des individus
concernés. Je veux bien que le député de Charlesbourg nous
dise qu'on l'évaluera prochainement. Mais le député de
Charlesbourg conviendra avec moi que, d'après la correspondance qui m'a
été transmise, des promesses de cet ordre, il y en a eu de tous
les horizons. C'est pour ça qu'on a soulevé le problème,
parce qu'il me semble que c'est une difficulté extrêmement
pénible que vivent certaines personnes. On a voulu l'illustrer pour une
raison très simple, c'est qu'on n'a pas trouvé d'autre moyen de
le faire d'une façon convenable, pour rendre justice aux nombreuses
représentations qui nous ont été formulées.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: Juste un dernier mot. Je ne veux pas revenir
là-dessus, mais j'ai fait un bout de chemin quand ce fut mon tour
d'être responsable du dossier. De toute façon, je suis le seul qui
ait essayé d'en régler une partie. J'étais conscient que
probablement je ne réglais pas tout et je me suis dit: II va falloir
mettre cela à l'épreuve. D'ailleurs, tout le monde de bonne foi
était d'accord avec ma position en se disant: Au bout de trois ou quatre
ans, on réévaluera cela. Tout ce que je veux dire, c'est que je
n'ai jamais fait d'autres promesses que de dire qu'il faudrait peut-être
réévaluer le dossier. J'ai d'ailleurs déjà,
à l'époque où j'étais ministre, fait des
représentations en ce sens auprès du Conseil du trésor.
Pour la suite des choses, je crois que c'est au responsable actuel des affaires
gouvernementales de voir si une suggestion comme celle que je fais a du sens ou
pas, mais je pense que ce serait la façon la plus positive de faire
avancer le dossier. (17 h 30)
Le Président (M. Bordeleau): D'accord.
M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Mon collègue de Jean-Talon a une question.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Une dernière question, ensuite on passera
à l'étude article par article. Dans un communiqué que vous
avez émis M. le ministre, par rapport au RRE et au RRF qui offrent des
avantages beaucoup plus grands que le RREGOP, vous mentionnez
l'admissibilité anticipée à la retraite et la transmission
des bénéfices pour le conjoint et l'orphelin. Vous savez ce que
je veux dire.
M. Bérubé: Vous parlez de...
M. Rivest: Le RRE et le RRF offrent des avantages plus grands.
C'est par rapport à l'égalisation de la participation.
M. Bérubé: Avez-vous le titre du communiqué
ou la date?
M. Rivest: Un instant. Le communiqué s'intitule: Une
réforme essentielle à l'assainissement des régimes.
M. Bérubé: Oui.
M. Rivest: Oui, j'ai la date, je crois.
M. Bérubé: À l'assainissement des finances
publiques.
M. Rivest: À l'assainissement des régimes.
Québec, le 20 mai.
M. Bérubé: Je l'ai.
M. Rivest: Regardez à la page 2, je crois. Dans le RREGOP,
qu'est-ce qu'ils prévoient, entre autres, pour la retraite
anticipée qui est vraiment subtantiel? En d'autres mots, quelle est la
différence essentielle avec les autres régimes? Dans le RREGOP,
qu'est-ce qu'il y a sur
l'admissibilité anticipée et sur la
transférabilité des bénéfices? Est-ce que ces
choses-là, d'une façon ou d'une autre, sont modifiées par
la loi 68?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Je pourrais demander qu'on fasse la
distinction entre les deux. Dans un cas, c'est 65 ans, 35 ans; allez-y
donc.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, au nom du ministre.
M. Bérubé: En fait, ce qu'on veut dire lorsqu'on
dit qu'il y a des critères d'admissibilité à la retraite
anticipée plus avantageux au niveau du Régime de retraite des
enseignants et de celui des fonctionnaires par rapport au RREGOP, c'est que les
critères d'admissibilité à la retraite sont plus rapides
au niveau de ces deux vieux régimes qu'au RREGOP. Juste à titre
d'exemple, on a des critères d'admissibilité âge et
années de service qui totalisent un facteur 87 dans le REF et dans le
RREGOP, c'est 90. Donc, la personne peut prendre sa retraite plus jeune au
niveau des vieux régimes et c'est ce qui coûte cher.
M. Rivest: Et pour la transmission des bénéfices au
conjoint.
M. Bérubé: En fait, c'est que dans le RRE et le
RRF, dès qu'un participant décède, son conjoint a
immédiatement droit à une rente équivalente à 50%
de sa rente acquise sa vie durant, alors qu'au niveau du RREGOP, c'est
seulement lorsqu'il est admissible à la retraite ou qu'il est un
retraité du RREGOP. Avant son critère d'admissibilité
à la retraite au RREGOP, il y a remboursement de cotisations purement et
simplement avec intérêt et non pas de rente de conjoint. C'est un
bénéfice plus avantageux également pour les vieux
régimes.
M. Rivest: Après cela, le communiqué poursuivait
sur le taux de participation. Il mettait, selon les différents
régimes, l'ordre de grandeur, la disproportion qui existait entre la
cotisation des participants et la cotisation du gouvernement. Cela est la
situation telle qu'elle était antérieurement et là arrive
le projet de loi 68 qui corrige cela.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce qu'on est prêt
à commencer l'étude article par article du projet de loi no
68?
M. Doyon: M. le Président, on a analysé de long en
large l'article 5a, 5b, etc. Ce que j'aimerais souligner, en passant, au
ministre, c'est que la lecture de cet article doit se faire dans son ensemble.
Si je comprends bien, le ministre nous fait valoir que le gouvernement a
renoncé à l'engagement qu'il avait pris dans certaines
conventions collectives antérieures, l'engagement sur l'honneur, comme
le disait mon collègue de Jean-Talon - de ne pas légiférer
ou de ne pas présenter de législation dans ce domaine à la
baisse, alors que dans la nouvelle convention, celle qui régit,
actuellement, les syndiqués, cette obligation sur l'honneur qu'avait
prise le gouvernement n'existe plus. C'est votre argumentation.
Ce que je veux faire valoir à cette commission, M. le
Président, c'est que les syndicats ont abandonné une chose pour
en obtenir une autre. C'est que le gouvernement auparavant, les yeux tout
simplement fermés, s'était engagé à ne pas
légiférer, c'est-à-dire à ne pas présenter
de loi dans ce domaine. À la lecture des articles 5a et 5b, il
paraît évident que les syndicats ont accepté de renoncer
à cet engagement de la part du gouvernement, mais à une condition
cependant, la condition étant la suivante: un rapport actuariel
pourrait, seul, permettre un rajustement à la baisse des cotisations ou
l'augmentation des cotisations. Cela me paraît évident si on lit
le texte, parce qu'on dit que "le gouvernement nommera un actuaire-conseil dont
le mandat sera de se prononcer quant à la pertinence des
hypothèses utilisées." À l'article 5a, on parle de la
pertinence des hypothèses. Si on va à l'article 5b, on retrouve
le même terme de pertinence quand on dit: "Le gouvernement rencontrera la
partie syndicale lorsqu'une hausse des cotisations est requise afin de discuter
de tout réaménagement des bénéfices jugé
pertinent." Jugé pertinent, comment et en fonction de quoi? En fonction,
bien sûr, de ce que définit comme étant la pertinence le
paragraphe précédent.
Je soumets à cette commission que l'abandon qu'ont fait les
syndicats de cet engagement sur l'honneur qu'avait pris le gouvernement s'est
fait avec une contrepartie, cette contrepartie étant une preuve que
serait invité à faire le gouvernement par les voies d'une
étude actuarielle de la nécessité de procéder
à certains réaménagements. C'est là le noeud du
problème, il ne faut pas faire abstraction de cela. Je pense que ce
serait se leurrer, se tromper de penser que les syndicats ont tout simplement,
les yeux fermés, abandonné cette obligation qu'avait le
gouvernement pour ne rien obtenir en retour.
Au contraire, les syndicats ont abandonné cette
possibilité, cet engagement du gouvernement, mais ils ont obtenu en
retour que tout changement, que tout réaménagement ne puisse se
faire que sur la base d'une étude actuarielle. Je pense qu'il faut tenir
compte de cela. Si on doit relier les deux, il faut relier les deux dans ce
sens-là. Maintenant, peut-être que le ministre pourrait
considérer cette jonction, cette transition d'une obligation du
gouvernement à une autre - le gouvernement s'est libéré
d'une obligation pour s'en mettre une autre sur les épaules - celle de
prouver par étude actuarielle la nécessité d'un
réaménagement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: En fait, le député de
Louis-Hébert a admis quelque chose en disant que le gouvernement
précédent s'était lié, les yeux fermés,
à ne pas modifier les régimes de retraite en cours de convention
collective. Effectivement, c'est bien la première fois que j'entends un
député de l'Opposition qui nous confirme qu'effectivement sous
l'administration Bourassa on gouvernait les yeux fermés.
M. Rivest: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: On ne peut quand même pas laisser passer cela.
Peu importe le gouvernement, que ce soit le Parti libéral ou le Parti
québécois, je pense que le ministre conviendra que ceux qui
étaient les proches collaborateurs du gouvernement dans la
négociation de 1976 sont substantiellement les mêmes
qu'aujourd'hui et ils manifestaient, j'en ai la conviction, les connaissant
pour la plupart, autant de sens de l'État en 1976 qu'en 1979.
M. Bérubé: Ayant maintenant constaté qu'en
1976 on avait gouverné les yeux fermés...
M. Rivest: M. le Président, il n'a pas le droit...
M. Doyon: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le
député...
M. Bérubé: Là, cela fait la cinquième
interruption.
Le Président (M. Bordeleau): ... j'ai
accepté...
M. Bérubé: J'admets effectivement...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre...
M. Rivest: J'ai soulevé une question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Jean-Talon, avant votre question de règlement.
M. Rivest: Bon!
M. Bérubé: II ne peut pas y avoir de question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous ai laissé
parler tantôt sur une question de règlement qui était
essentiellement une correction ou un avis différent de celui du
ministre. Cela ne constitue pas, en commission parlementaire ou ailleurs, une
question de règlement.
M. Rivest: Oui, mais là, j'ai une question de
règlement, une vraie.
M. Bérubé: Ah! Une vraie? Cela va faire
changement.
Le Président (M. Bordeleau): En vertu de quel article?
M. Rivest: Le ministre fait la comptabilité de ce qu'il
appelle des interruptions et des questions de règlement. Je l'inviterais
à faire la différence. Quand on soulève une question de
règlement, ce n'est pas une interruption, on s'adresse au
président.
Le Président (M. Bordeleau): À la condition que ce
soit une vraie question de règlement.
M. Rivest: On peut se tromper, M. le Président, en
soulevant une question de règlement. C'est au président de
décider et le ministre, depuis le début des travaux, s'arroge -
c'est à votre défense en ce moment, M. le Président, que
je me porte -des prérogatives qui vous reviennent.
Le Président (M. Bordeleau): Merci beaucoup, M. le
député de Jean-Talon. M. le ministre, c'est à vous la
parole.
M. Bérubé: II a admis que le gouvernement, sous
l'ancienne administration, gouvernait les yeux fermés. Maintenant, on
acceptera que l'Opposition s'oppose aussi les yeux fermés et qu'un bon
nombre de ses questions de règlement sont effectivement plus ou moins
solides.
M. Rivest: Que fait donc le gouvernement en ce moment?
M. Bérubé: Quant à argumenter autour du
point de vue exposé par le député de Louis-Hébert,
je pense qu'on n'avancerait pas beaucoup. Est-ce qu'il faut conclure de la
rédaction du texte qui est là, que nous avons
sous les yeux, dans l'annexe 4 ou 15, que la partie syndicale acceptait
le principe que le gouvernement puisse modifier les régimes de retraite
sans passer par le biais des mécanismes habituels de la
négociation? Je ne pense pas qu'on puisse tirer cette conclusion.
Deuxièmement, indéniablement, il faut également tirer la
conclusion que le ministre des Finances ne voulait pas lier le gouvernement
dans son pouvoir de soumettre des lois à l'Assemblée nationale et
cela, dans le cadre d'une convention collective. Cela est également une
réalité. Est-ce que le gouvernement, à l'époque,
avait l'intention de modifier les régimes de retraite? Je ne peux pas le
savoir.
Troisièmement, est-ce qu'à la table de négociation,
les parties ont toutes bien clairement compris les implications et leur ont
toutes donné le même sens? Je ne peux pas, non plus, l'affirmer,
n'y ayant pas été. Tout ce que je puis dire, c'est ceci - et je
pense que le député de Louis-Hébert l'a très bien
compris dans son exposé - le gouvernement dans le passé, jusqu'en
1976, acceptait de donner une garantie qu'il ne soumettrait pas à
l'Assemblée nationale des modifications législatives aux
régimes de retraite. C'était son droit le plus strict. Lors de la
dernière ronde de négociations, le gouvernement n'a pas voulu se
lier et, par conséquent, n'a pas voulu faire en sorte que les
conventions collectives lui interdisent de modifier par voie législative
les régimes de retraite. Lors de la négociation, il a convenu
d'un certain nombre de modifications à apporter aux régimes de
retraite, lesquelles ont effectivement toutes été
apportées conformément à la lettre d'entente qui est
annexée aux conventions collectives.
Les engagements que le gouvernement avait pris lors de cette
négociation ont été respectés et les modifications
requises ont été apportées. C'est le sens qu'il faut
donner à l'article portant sur la réévaluation actuarielle
des taux de cotisation des régimes de retraite. Ceci a également
été effectué dans le cadre de la convention collective et
des prescriptions qui y étaient mentionnées. Toutefois, le
député de Louis-Hébert peut inférer que ce qui
n'était pas défendu l'était implicitement ou le
gouvernement pourra argumenter que, si la capacité législative de
l'État n'était pas essentiellement limitée par les
conventions, le gouvernement, lui, estimait qu'il était libre à
ce moment d'intervenir. Il s'agit là de deux interprétations. Le
député de Louis-Hébert a-t-il raison lorsqu'il dit...
M. Doyon: Oui.
M. Bérubé: ... que même si le gouvernement,
lors de la dernière ronde de négociations, a pris la peine de
faire retirer l'article qui limitait le pouvoir de légiférer,
cela ne changeait absolument rien puisque, de toute façon, il
était lié? À ce moment, cela ne valait pas la peine d'en
discuter à la table de négociation; si on se retirait le pouvoir
de légiférer, il doit bien y avoir une raison pour laquelle on le
faisait avant et, le jour où on a retiré cette clause, il devait
bien y avoir une raison. Si l'on me dit que le fait d'avoir
éliminé cette clause n'a absolument aucune incidence sur le
contenu des conventions collectives et que c'est exactement comme si la clause
y avait été rédigée, à ce moment,
évidemment, c'est le point de vue du député de
Louis-Hébert. (17 h 45)
Je préfère m'en tenir au texte littéral, qui
astreint les parties et plus particulièrement le gouvernement à
un certain nombre de mesures. Par exemple, le gouvernement s'astreignait
à octroyer une participation aux syndiqués au sein de la
Commission administrative du régime de retraite; cette obligation a
été respectée. Il y avait également des obligations
qui étaient faites concernant les transferts et les mécanismes
d'évaluation actuarielle. Ces obligations inscrites dans les lettres et
annexes ont été respectées. La seule chose que nous
disons, c'est que, l'obligation faite antérieurement de ne pas changer
ayant été retirée, ces obligations doivent être
prises dans leur sens restrictif et il n'est pas du tout évident,
à partir de l'argumentation du Parti libéral, que le gouvernement
était tenu, à ce moment-là, à ne pas modifier par
voie législative.
M. Rivest: M. le Président, juste un dernier
commentaire.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Le ministre fait grand état des
interprétations libérales, il les refuse ou les récuse par
définition, dans la mesure où le Parti libéral n'est pas
une chose très familière au ministre. Je voudrais simplement dire
ceci en guise de conclusion sur ce débat. Ce n'est pas juste le Parti
libéral qui donne cette interprétation. Je vais lire un
très court paragraphe d'une déclaration des représentants
syndicaux, ici, de M. Robert Gaulin, le président de la CEQ, qui dit
ceci: "Nous avons déjà affirmé au gouvernement que toute
discussion qui viserait à réduire, sous quelque forme que ce
soit, la portée de nos régimes de retraite sera
considérée comme l'ouverture de la négociation de nos
conditions de travail dans leur ensemble. Nous rappelons au gouvernement que
toute atteinte par voie de législation à nos régimes de
retraite sera interprétée, en nos rangs, comme une
déclaration de guerre et sera traitée comme telle."
Donc, le gouvernement ou le ministre
peut avoir son interprétation, mais il reste qu'il y avait
d'autres interlocuteurs - nous, on n'y était pas - qui peuvent avoir une
autre interprétation. Si je fais une bonne lecture de
l'interprétation donnée au texte de M. Gaulin que je viens de
citer, ainsi qu'aux mémoires des particuliers du front commun, il y a
une profonde divergence sur les subtilités juridiques. Je pense que le
député de Louis-Hébert a fait état, en se basant
sur les textes, d'une autre interprétation et les affirmations du
ministre ne disposent pas du litige. Ce qui dispose du litige, malheureusement,
d'une façon unilatérale, c'est le geste arbitraire
unilatéral que le gouvernement s'apprête à poser avec les
projets de loi nos 68 et 70, mais de cela il en portera les
conséquences.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. On peut donc aborder
l'étude article par article.
M. Rivest: Juste une dernière petite question.
Après cela, on passe à l'étude article par article, je
vous le promets.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: C'est la question de la participation à la
cotisation de 50-50. Je sais que les régimes n'ont pas la même
substance, mais maintenant, de plus en plus dans le domaine des
négociations dans les secteurs public et parapublic, on va faire grand
état du secteur privé, on le fait au niveau de la
rémunération en général. Est-ce qu'au Conseil du
trésor on s'est informé de la pratique, à savoir pourquoi
on est arrivé à 50-50? Deuxièmement, est-ce que, en posant
ce geste, le gouvernement a mesuré toutes les conséquences,
effets de désincitation ou d'incitation que cela pourrait avoir au
niveau du secteur privé? Est-ce que c'est la pratique au niveau du
secteur privé? Je sais que les régimes ne sont pas de même
contenu, c'est peut-être difficile à comparer.
M. Bérubé: Oui, effectivement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Les régimes privés sont
souvent des régimes pleinement capitalisés, mais à
prestation indéterminée. La réponse qu'il faut donner
à votre question est plutôt sur la base de l'examen de la
rémunération globale entre le secteur public et le secteur
privé, parce que nous sommes obligés de comparer des
régimes complètement différents. Dans la mesure où,
dans le secteur privé, l'employé ne se voit pas définir
une rente a priori, il accumule un montant dans un fonds de retraite et
à la fin, il reçoit une rente basée sur les montants qu'il
a accumulés et le patron contribue une partie qui est
généralement la moitié du coût à ce
régime.
Si on veut véritablement avoir la réponse à votre
question, je pense qu'il faut regarder la comparaison de la
rémunération globale. Lorsque nous examinons cette
rémunération globale qui est de 16% en avance, avant modification
des régimes de retraite, ce que nous constatons, c'est que 2,7% de
l'écart dans les rémunérations globales découle de
la comparaison des régimes de retraite.
M. Rivest: De l'écart, c'est-à-dire, là
où le secteur public a plus que le secteur privé.
M. Bérubé: C'est cela.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Je pense qu'il y a une
question qu'on doit aborder maintenant parce qu'on ne pourra pas le faire
à l'étude article par article. Il y a une préoccupation
que j'ai en ce qui concerne la transférabilité des régimes
et les effets des changements qui sont proposés dans la loi no 68
vis-à-vis des ententes de transférabilité qui existent. Il
est connu qu'il existe - je pense que c'est la CARR qui signe ces ententes -
plusieurs ententes entre le gouvernement, entre le RREGOP, par exemple, et
certains régimes de retraite du secteur parapublic; je pense aux
municipalités, aux communautés urbaines, aux universités
et tout cela. Ces ententes sont extrêmement complexes, difficiles
à conclure. Je le sais par expérience, parce que j'ai eu
l'occasion de tenter, pendant les quelques années où j'ai
travaillé à la communauté urbaine, de faire
transférer un fonds de retraite que j'avais dans le RREGOP à la
communauté urbaine. J'ai été là pendant de
nombreuses années. Croyez-le ou non, les ententes de
transférabilité qui étaient déjà
discutées au moment de mon arrivée à la Communauté
urbaine de Québec n'ont jamais trouvé le tour d'être
conclues et encore moins d'être appliquées en ce qui me concerne
et en ce qui concerne de nombreux employés.
Ce à quoi je veux en venir, c'est qu'on passe pratiquement des
années à tenter de conclure des ententes de
transférabilité. Les employés du secteur parapublic, que
ce soit au niveau universitaire, municipal, des communautés urbaines, du
fédéral, ont droit à cela et cela ne doit pas rester
lettre morte. Après avoir consacré des efforts
considérables et qui m'apparaissent, si vous voulez mon avis, totalement
insuffisants à traduire dans des termes applicables dans les faits des
avantages destinés à la retraite de
ces gens, qu'on se voie dans une situation où l'on doive
renégocier, réajuster ou réaménager - je ne sais
pas quel terme employer - la totalité de ces ententes, cela me
paraît inquiétant. De toute façon, je profite de l'occasion
pour attirer l'attention du ministre responsable de la CARR sur le fait qu'il y
a sûrement là une lacune sérieuse. On ne peut pas
considérer comme normal que quelqu'un soit dans les limbes pendant des
années en ce qui concerne ses bénéfices de futur
pensionné. C'est ce qui se passe dans de très nombreux cas.
Je connais personnellement des employés de la Communauté
urbaine de Québec qui ne savent pas trop à quoi s'en tenir depuis
des années, qui sont passés du provincial à la
communauté urbaine. Cela se comprend, on n'a pas d'entente sur laquelle
se baser. On a toujours quelque chose de trop mouvant. Étant
secrétaire de la Communauté urbaine de Québec, j'ai
tenté de savoir à quoi m'en tenir là dessus,
personnellement. On ne savait pas trop, il n'y avait pas d'entente; il y avait
des conditions qui changeaient et, finalement, on ne savait pas trop. Le
Conseil du trésor avait dit de mettre la pédale douce
là-dessus, de garder cela sur la glace pour le moment.
Une inquiétude que je veux manifester, ce sont que les
conséquences, justement, de la loi no 68 sur ces nombreuses ententes qui
existent ou sont en voie de négociation. Il ne faut pas, non plus,
réinventer la roue continuellement et j'aimerais que le ministre
m'assure qu'il n'y aura pas de délais indus qui vont être
apportés ni dans les ententes qui sont en négociation, ni dans
celles qui sont déjà en vigueur. J'aimerais savoir du ministre
responsable de la CARR, le président du Conseil du trésor, si les
gens qui vont être finalement affectés par la bande - cela touche
aussi les organismes parapublics et je pense aux municipalités, comme
j'ai dit tout à l'heure - ont été consultés et
approchés. Qu'est-ce qu'ils pensent de cela? Est-ce qu'il y a eu des
démarches faites auprès d'eux ou si, ça n'apparaît
pas utile au ministre ou si, tout simplement, on verra dans le temps ce que
cela donne et on improvisera? Est-ce que c'est cela l'attitude du
gouvernement?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Je suis surpris de la question du
député de Louis-Hébert. Ayant été
secrétaire de la Communauté urbaine de Québec, donc le
plus haut fonctionnaire, je m'étonne qu'il n'ait pu obtenir de ses
employés réponse à ces questions. Est-ce que ses relations
avec ses employés étaient à ce point mauvaises qu'il ne
pouvait pas obtenir la moindre information? Je sais qu'il était en
chicane avec ses employeurs, mais je ne savais pas qu'il était en
chicane également avec les employés. En tout cas, disons qu'il
trouve le moyen de s'isoler complètement, si je comprends bien.
Je vais lui donner la réponse que ses employés auraient
dû lui donner comme patron qui est la suivante: Le régime de
retraite des employés de l'État à Québec est
tellement généreux que, lorsque l'on intègre un
employé de l'État dans une communauté urbaine ou dans un
autre régime privé, le coût imparti au régime
privé est tellement élevé que l'organisme privé en
question voit d'un assez mauvais oeil la conclusion de l'entente qui
entraîne chez lui des coûts très élevés. C'est
à cause de la très grande générosité des
régimes actuels du gouvernement du Québec que la
transférabilité des gens du gouvernement du Québec vers
l'extérieur est très difficile. C'est dommage que le
député de Louis-Hébert ait maintenu des relations aussi
mauvaises avec ses employés et qu'il n'ait pu obtenir une telle
réponse. Si je comprends bien, il est en train de semer la bisbille au
sein du Parti libéral en ce moment, et partout où il va cela
continue. On va lui souhaiter bonne chance.
M. Rivest: M. le Président, question de règlement
au nom du Parti libéral, une fois encore.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, M. le
député de Jean-Talon.
M. Rivest: Je ne vois aucun endroit dans le projet de loi,
actuellement, où l'expression "Parti libéral" est
mentionnée.
M. Doyon: M. le Président, je reconnais là de la
part du président du Conseil du trésor, la totale ignorance de la
Communauté urbaine et de son fonctionnement intérieur. Les
affirmations totalement gratuites qu'il fait selon lesquelles les mauvaises
relations que j'aurais eues avec mes employés ou avec mes
collègues sont tellement bien fondées que j'en veux pour preuve
que j'ai été élu, choisi et que je suis demeuré,
tant que j'ai voulu, président d'une association qui existait à
la Communauté urbaine et c'est là sûrement le signe de
très mauvaises relations. Alors, je pense que les faits parlent
d'eux-mêmes.
À propos du projet de loi proprement dit, le président du
Conseil du trésor ne m'a pas répondu. Je ne suis pas plus
avancé après qu'il a tenté de faire accroire à la
population que j'étais un semeur de troubles et un mauvais coucheur et
tout cela. Le caucus de la région de Québec est ici au grand
complet. Je vous assure que je m'entends très bien avec mon
collègue et voisin de comté, M. le député de
Jean-Talon
jusqu'à maintenant, pour faire une boutade. Le président
du Conseil du trésor nous laisse dans le vague en ce qui concerne les
raisons qui font fondamentalement que des ententes ne puissent pas être
conclues. Je conçois que ça puisse être coûteux pour
des organismes, mais est-ce que le fait que ce soit coûteux exempte de
l'obligation de conclure des ententes qui vont tenir compte de ces excès
de coûts là? Je pense que le président du Conseil du
trésor, puis tout le monde peut bien comprendre qu'il y a des
aménagements qui peuvent être faits à l'intérieur de
l'entente pour tenir compte des coûts et des bénéfices
futurs. Pas besoin d'être grand clerc pour comprendre cela, c'est facile
à comprendre.
L'autre chose à laquelle le ministre ne me répond pas,
c'est lorsque je lui pose la question: Qu'en est-il des contacts que
lui-même doit reconnaître comme étant désirables avec
des organismes qui ont soit déjà conclu des ententes ou sont en
voie d'en conclure? Est-ce que ces gens-là ont été
approchés? Est-ce qu'ils ont été consultés? Est-ce
qu'on prévoit que la conclusion d'ententes futures va être
facilitée à la suite de la loi no 68 ou si la situation va
être pire après qu'avant. Ce sont des questions qu'on est en
droit, nous l'Opposition, de se poser. Il ne semble pas, d'après ce que
le ministre dit et de la façon dont il esquive les réponses,
qu'il soit en mesure de nous répondre justement. (18 heures)
M. Bérubé: Bien au contraire, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, vous voulez
répondre?
M. Bérubé: D'ailleurs, je le remarque, le
député de Louis-Hébert chaque fois que je commence
à répondre, ses yeux vagabondent et il n'a pas
véritablement l'air de suivre la réponse; c'est ce qui explique
pourquoi il revient avec la même question.
Je lui ai expliqué que la raison qui fait que les accords de
transférabilité avec les organismes extérieurs au
gouvernement sont difficiles à conclure, c'est que la
générosité des régimes de retraite de l'État
du Québec fait que l'intégration dans un autre régime est
très coûteuse pour le régime qui reçoit le
postulant. Il est bien évident que, dans la mesure où ces
intégrations se feront sur la base de la valeur actuarielle des
contributions qui auront été accumulées et que l'on
réduira la générosité du régime de retraite
du gouvernement du Québec, les accords à conclure entre le
régime du gouvernement et d'autres régimes privés seront
plus faciles.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, cela va? Comme il est
18 heures, nous allons devoir suspendre les travaux. Est-ce que je pourrais
comprendre que tout le monde de la commission serait prêt à
entamer l'étude article par article?
M. Rivest: Comme le dirait le ministre de l'Éducation,
nous nous hâtons lentement.
Le Président (M. Bordeleau): Oui. Mais vous m'avez dit
tantôt que vous étiez prêts. J'ai accepté que l'on
pose des questions additionnelles.
M. Rivest: On verra, on verra. Il ne faut pas préjuger; on
va d'abord aller manger.
Le Président (M. Bordeleau): Mais est-ce que vous avez
terminé vos remarques préliminaires?
M. Rivest: M. le Président, il est 18 heures.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, la commission suspend
ses travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 02)
(Reprise de la séance à 20 h 25)
Le Président (M. Bordeleau): Messieurs, la commission des
finances et des comptes publics reprend donc ses travaux qui avaient
été suspendus à 18 heures, toujours aux fins
d'étudier article par article les projets de loi 68 et 70. Au cours de
la journée, nous avons, bien sûr, procédé à
des discussions préliminaires. Il m'avait semblé, à la
suspension de 18 heures, qu'on serait prêt à commencer
l'étude article par article. Est-ce que je peux appeler l'article 1?
M. le député de Westmount.
M. French: Je me demande si j'ai le droit de parole sans
être inscrit.
Le Président (M. Bordeleau): Non, effectivement, vous
n'avez pas le droit de parole, à moins qu'il n'y ait consentement des
membres.
M. Bérubé: Avez-vous quelque chose à
dire?
M. French: Ah! bien, cela, par exemple, il faudrait me donner le
consentement avant pour le savoir.
M. Bérubé: II faudrait se consulter avant, à
savoir si le député de Westmount a quelque chose
d'intéressant à dire.
M. French: Ah! c'est parce que, M. le
Président, le ministre a eu l'expérience
désagréable de se faire refuser le consentement vendredi
dernier.
M. Bérubé: Effectivement, vendredi dernier...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, vous avez le
droit de parole mais le député de Westmount ne l'a pas pour le
moment. Je veux bien le lui donner, remarquez.
M. French: C'était justement le problème vendredi
soir; c'est intéressant que vous souleviez cette question.
Le Président (M. Bordeleau): Pour le moment, il n'y a que
le député d'Outremont qui est membre de notre commission.
M. Bérubé: Je demanderais la parole, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, mais...
M. Fortier: Juste comme préalable, M. le Président,
la difficulté que nous avons, c'est que deux savants membres de notre
commission, Jean-Claude Rivest et Thérèse Lavoie-Roux, se
retrouvent à une autre commission pour étudier les services
essentiels et nous demanderions le consentement pour les faire remplacer par le
député de Westmount et le député de Laurier.
M. Bérubé: M. le Président, je voudrais
intervenir.
Le Président (M. Bordeleau): Voulez-vous donner votre
consentement?
M. Bérubé: M. le Président, je voudrais
quand même méditer sur la question parce que, vendredi dernier
nous avions un problème un peu semblable à la commission qui
traitait de la loi sur l'accès à l'information et le leader du
gouvernement, par suite de l'absence momentanée du député
de Taschereau, s'est trouvé effectivement dans une position
désagréable - disons le mot - se retrouvant minoritaire. Par
suite de l'intérêt marqué que j'ai pour la Loi sur
l'accès à l'information, comme tout le monde le sait, j'ai voulu
me présenter à la commission et obtenir le droit de parole, mais
l'Opposition libérale, y compris la députée de L'Acadie,
m'a refusé carrément le droit de parole et la permission
d'intervenir en commission. Je dois même dire, M. le Président,
que vous-même comme député vous étiez
présenté à la commission et on vous l'a également
refusé. Si je ne m'abuse, le député de Westmount faisait
partie de la députation libérale qui nous a refusé ce
droit de parole. Enfin, je voulais simplement souligner ces faits et vous dire
que j'accepte de lui donner un droit de parole.
M. Fortier: Quel grand coeur vous animeî
Le Président (M. Bordeleau): Oui, mais, avant de
continuer, est-ce que j'ai vraiment le consentement des membres de la
commission?
M. Bérubé: Oui, c'est cela. Pensez-y comme il faut,
M. le député de Charlesbourg. Moi, si j'étais à
votre place...
Le Président (M. Bordeleau): Je veux que ce soit clair. M.
le député de Bellechasse.
M. Lachance: Quant à moi, je pense que dans les
circonstances on doit faire preuve de magnanimité et, connaissant le
député de Westmount, c'est un individu qui peut avoir le repentir
réel. Alors, en ce qui me concerne, cela va. J'espère qu'on aura
une certaine collaboration de la part des membres de l'Opposition parce que je
suis un peu déçu de l'évolution de cette commission depuis
ce matin. Je trouve que cela n'avance pas vite.
M. Fortier: Là-dessus, M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Je crois que le ministre et d'autres
députés se sont permis des échanges
généraux, il est vrai. Quand on parle de progrès, il faut
savoir que, pour un projet aussi technique que celui-là les
délibérations que nous avons eues ne se sont pas perdues dans le
vague, mais nous ont permis de saisir les implications véritables de ce
projet de loi. Je voudrais inscrire ma dissidence sur les commentaires du
député de Bellechasse.
Le Président (M. Bordeleau): Justement, M. le
député d'Outremont, simplement pour compléter
là-dessus, je pense effectivement que vous avez en grande partie raison.
Je me suis permis comme président d'être assez large pour
permettre une discussion générale tout en présumant, bien
sûr, qu'on en arriverait, après quelques heures de discussion
générale, à l'étude article par article, qui est le
but de notre réunion.
M. Fortier: Est-ce que je peux avoir le consentement pour que le
député de Westmount remplace le député de
Jean-Talon?
Le Président (M. Bordeleau): M. Rivest (Jean-Talon) serait
remplacé par M. French (Westmount). (20 h 30)
M. Fortier: Et M. Sirros (Laurier) remplacerait Mme
Thérèse Lavoie-Roux (L'Acadie).
M. Bérubé: Nous ne saurions dire, cependant, s'il
s'agit d'une réelle amélioration, mais enfin!
M. Fortier: Vous jugerez aux fruits des arbres.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, s'il vous
plaît!
M. Bérubé: II faut bien prendre ce que l'Opposition
a à nous offrir.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaîtl M. le
député de Laurier remplacerait Mme la députée
de...
M. Fortier: L'Acadie.
Le Président (M. Bordeleau): L'Acadie.
M. Fortier: Mme Lavoie-Roux.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie) est remplacée par M. Sirros (Laurier) et je pense, en
même temps, qu'il y aurait peut-être une substitution du
côté ministériel.
M. Lachance: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Bellechasse.
M. Lachance: ... je vous propose de remplacer M. Gagnon
(Champlain) par M. Marquis (Matapédia).
Le Président (M. Bordeleau): Cela irait également?
Je laisse les membres de la commission y penser.
M. Bérubé: Oh! Vous savez, dans ces sommets de
qualité, il est difficile de pouvoir vraiment juger lorsqu'on
échange un membre. Enfin!
M. Sirros: On va le permettre pour pouvoir le voir.
Le Président (M. Bordeleau): C'est un consentement. M.
Marquis (Matapédia) remplace donc M. Gagnon (Champlain).
M. Bérubé: Mais que le député de
Portneuf ne demande pas à intervenir, par contre, parce que là
notre consentement serait tout à fait aléatoire.
M. Pagé: Ne soyez pas inquiet.
M. Bérubé: Parfait! Vous nous rassurez.
M. Fortier: II y aurait un autre changement, avec le
consentement. Le député de Sainte-Anne, M. Polak, viendrait
s'ajouter à la liste en remplacement de... Qui avez-vous sur la
liste?
Le Président (M. Bordeleau): J'avais M. Ryan
(Argenteuil).
M. Pagé: Remplacé par qui?
Le Président (M. Bordeleau): II remplaçait
déjà M. Forget (Saint-Laurent).
M. Fortier: Non, laissez-le là. Continuons.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord.
Une voix: Ce n'est pas un remplacement.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, c'est un
remplacement.
M. Fortier: Oui, c'est un remplacement.
Le Président (M. Bordeleau): Bien, une substitution.
Une voix: II n'est plus là.
M. Marquis: Comme intervenant, probablement.
Une voix: Une substitution.
Le Président (M. Bordeleau): Une substitution. Il y avait
M. Lincoln. M. Fortier est là. Dans les intervenants? M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce)?
M. Fortier: Oui, d'accord. C'est cela, en remplacement de M.
Scowen (Notre-Dame-de-Grâce).
Le Président (M. Bordeleau): Non? Il est là, mais
pas pour longtemps.
M. Fortier: Non, c'est exact, en remplacement de M. Scowen.
Le Président (M. Bordeleau): M. Scowen est remplacé
par M. Polak (Sainte-Anne).
M. French: Ça, c'est une amélioration.
M. Bérubé: M. le député de Portneuf,
nos hommages.
Le Président (M. Bordeleau): On peut donc entreprendre,
j'imagine, l'étude article par article du projet de loi.
M. French: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Westmount, sur des questions générales?
M. French: Je pense que oui.
Le Président (M. Bordeleau): Oui?
M. French: Oui.
M. Bérubé: C'est un désastre. Nous venons de
commettre une grave erreur de procédure.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Westmount.
M. French: Nous avons abordé certaines questions de
transférabilité à la fin de la séance de cet
après-midi et je pense que c'est d'autant plus important qu'on vide les
questions d'ordre général que le gouvernement n'a pas
procédé à une consultation très poussée avec
les employés du secteur public intéressés par le projet de
loi 68. Donc, il incombe à l'Opposition de remplir le vide, en quelque
sorte. Je voudrais demander au ministre en quoi le projet de loi inflige
à ses employés une réduction de flexibilité et de
transférabilité dans le régime des rentes.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: La réponse a été
donnée au député de...
M. Sirros: Louis-Hébert.
M. Bérubé: Oui, vous l'avez, Louis-Hébert.
Une réponse très complète a été
donnée au député de Louis-Hébert et vous
pourrez...
M. Sirros: II ne faut pas l'oublier.
M. Bérubé: ... certainement consulter la
réponse dans le journal des Débats.
M. French: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Westmount.
M. French: ... le ministre prétend donc que cette question
est totalement exposée et qu'il n'a pas d'autres commentaires
là-dessus.
M. Bérubé: Mes commentaires ont été
à ce point complets qu'à un moment donné le
député de Louis-Hébert a signalé, effectivement,
que ma réponse était adéquate, satisfaisante et qu'il ne
sentait pas le besoin de pousser plus loin.
M. French: II était complètement satisfait?
M. Bérubé: Entièrement.
M. French: Et les employés du secteur public? Le ministre
a-t-il une idée de ce qu'ils pensent sur cette question?
M. Bérubé: Les employés du secteur public ne
sont pas nécessairement ravis. Toutefois, ils sont très
conscients de la situation de crise que traverse l'Occident et de l'ensemble du
dossier.
M. de Belleval: Oui, mais le député de Westmount
pose une question sur la transférabilité.
M. Bérubé: Nous n'avons eu absolument aucune
intervention de quelque nature que ce soit concernant la
transférabilité.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Westmount.
M. French: Le ministre peut, évidemment, me corriger si
c'est une question qui a été soulevée plus tôt
aujourd'hui au cours des travaux de la commission. C'est, évidemment,
sous la pression de la fin de la session que l'Opposition se trouve dans la
nécessité de ménager ses excellentes ressources
humaines.
M. Bérubé: Je ne dirais pas, mais, enfin...
M. French: Je n'en doute pas.
M. Bérubé: ... je vous laisse la paternité
du jugement.
M. French: On laissera la population juger.
M. Bérubé: C'est ce qu'elle a fait à la
dernière élection.
M. French: C'est ça, elle fera de même à la
prochaine élection. Il devient donc nécessaire, afin de fournir
au gouvernement la chance d'exposer les points importants du projet de loi, de
changer nos joueurs, et nous le regrettons.
Dans ce contexte, la question que je voudrais poser au ministre - s'il y
a déjà touché, je l'invite à me le dire tout de
suite - c'est sur l'évaluation actuarielle du déficit des divers
régimes de retraite. On m'informe
que le chiffre de 8 900 000 000 $ qui découle de la
dernière évaluation, entre guillemets, n'est justement pas une
évaluation mais une estimation ou une mise à jour d'une
évaluation qui a été faite en 1978. Je me demande si le
ministre serait en mesure d'expliquer à la commission ce qui est
impliqué dans une évaluation actuarielle, qui serait à la
hauteur des termes techniques et de tous les standards et normes courants dans
ce milieu spécialisé, et de quelle façon la mise à
jour qui a été faite récemment tombe au-dessous de ces
standards.
M. Bérubé: Comme vous le savez, les études
actuarielles sont des études extrêmement complexes qui
présument, d'abord, que l'on connaisse et qu'on fasse des
hypothèses sur les clientèles, sur les espérances de vie,
les espérances d'inflation et les espérances de rendement des
différents investissements, lesquels ont fait l'objet d'une telle
évaluation. Le 31 mars 1981, nous avons réévalué
les études actuarielles précédentes et nous avons pu
démontrer qu'effectivement le déficit actuariel tendait vers 9
000 000 000 $. C'est la situation qui prévaut à l'heure actuelle
dans les régimes de retraite du RRE et RRF.
M. French: Le ministre n'a pas répondu au deuxième
volet de ma question, à savoir dans quel sens cette mise à jour
ou cette estimation est-elle inférieure en termes de précision,
par exemple? Quelle est la marge d'erreur par rapport à
l'évaluation actuarielle qui serait du même niveau que celles qui
ont été effectuées en 1974 et en 1978?
M. Bérubé: Je n'en ai pas la moindre
idée.
M. French: M. le Président, n'est-il pas important que la
population sache que, lorsque le ministre cite un chiffre, il n'a pas la
moindre idée de la précision du chiffre par rapport aux autres
chiffres à partir desquels il fait des projections? Il n'est pas capable
de dire si le chiffre de 9 000 000 000 $ est comparable, dans sa
précision, au chiffre de 6 500 000 000 $ de 1978 ou de 4 500 000 000 $
de 1974.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, dans la mesure
où, effectivement, les paramètres utilisés dans les
modèles n'ont pas véritablement variés de façon
substantielle depuis l'étude initiale du déficit actuariel, les
chiffres du 31 mars 1981 sont probablement fort exacts.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: À ce sujet, en l'absence de mes
collègues, cet après-midi, nous avons eu copie de cette annexe
qui faisait état d'un mécanisme d'évaluation actuarielle
et le ministre avait consenti à nous donner une copie du rapport des
actuaires. Est-ce qu'on pourrait avoir copie de ce rapport sur-le-champ?
M. Bérubé: On ne l'a pas sur-le-champ, mais j'ai
demandé à la...
M. Fortier: Cela nous permettrait d'évaluer certains
paramètres auxquels mon collègue se réfère. Je
croyais que cet après-midi, lorsque la demande a été
faite, le ministre avait dit très gentiment: Oui, vous l'aurez.
M. Bérubé: II n'y a pas de problème.
M. Fortier: Mais, de toute évidence, si on l'a la semaine
prochaine, cela ne sera pas tellement utile.
M. Bérubé: Donc, vous les aurez la semaine
prochaine.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier.
M. Sirros: M. le Président, en attendant le
dépôt du document qui semble être un document
important...
M. Bérubé: II n'y a pas de dépôt de
documents en commission. Par conséquent, nos règlements ne
permettraient pas le dépôt de documents. M. le
député de Laurier, je regrette infiniment, mais je conçois
que vous ne soyez pas familier avec le respect absolu des règlements de
l'Assemblée nationale. Je ne vous en veux pas, mais, dans la mesure
où nos règlements ne permettent pas le dépôt de
documents, je n'ai pas l'intention d'en déposer, non plus.
M. Fortier: M. le Président, je...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! M. le
ministre a raison là-dessus. En commission, il n'y a pas de
dépôt de documents.
M. Bérubé: J'ai raison tout le temps, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Je peux garder mes
réserves là-dessus, M. le ministre, mais, quand même, pour
cette fois-ci, je pense que vous aviez raison, à savoir qu'il n'y a pas
de dépôt de documents. Il y a des distributions de documents
possibles, à certaines occasions. Je vous rappelle toujours
que l'objet de notre rencontre est d'étudier article par article
le projet de loi, mais je ne voudrais pas, non plus, qu'on revienne à
des discours de deuxième lecture ou à des discours sur le
principe même du projet de loi.
Au niveau des remplacements, on a accepté des remplacements au
début, mais les droits de parole exprimés au cours de
l'après-midi sont cumulatifs par rapport aux personnes que vous
remplacez.
M. Sirros: Pardon.
Le Président (M. Bordeleau): Je disais que le droit de
parole est cumulatif. C'est le même droit de parole qui se continue par
rapport aux autres députés que vous remplacez cet
après-midi.
M. Sirros: Les gens qu'on a remplacés étaient,
évidemment, des membres à part entière de cette
commission. Alors, ils avaient le droit de parole.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, mais
M. Sirros: Cela veut dire qu'on l'a maintenant. J'ai droit de
parole.
Le Président (M. Bordeleau): Vous avez le droit de parole.
Je n'ai pas voulu, au début de la commission, être trop restrictif
sur les droits de parole, mais à l'étude d'un projet de loi
article par article, selon l'article 154, en particulier, et d'autres, il y a
un droit de parole pour des remarques préliminaires au début de
l'étude d'un projet de loi, qui est, bien sûr, comme tout droit de
parole, de vingt minutes par député. Sans avoir calculé,
à la minute près, les interventions, je peux simplement vous dire
qu'on a discuté depuis ce matin. On a mis en tout, trois heures et demie
sur des remarques préliminaires. J'aimerais bien qu'on ne recommence pas
au tout début et qu'on continue.
M. Sirros: Ce ne sont pas des remarques préliminaires, M.
le Président.
Le Président (M. Bordeleau): S'il ne s'agit pas de
remarques préliminaires, je m'excuse, mais, à ce
moment-là, on va complètement à l'encontre du
règlement.
M. Sirros: Ce que je voulais, c'était aider le ministre
à éclaircir certaines choses. J'étais aussi convaincu
qu'inspiré comme vous l'êtes de l'exemple de magnanimité
qu'a démontré le ministre par rapport aux remplacements qu'on
avait faits vous alliez aussi démontrer une certaine magnanimité
par rapport au fait qu'il s'agit quand même de deux personnes qui sont
arrivées comme nouveaux membres pour remplacer des gens qui
étaient ici. On a parlé d'un document. J'accepte la correction
qu'a faite le ministre quant au dépôt de documents; il n'y a pas
effectivement de dépôt de documents. Quant à la
distribution du document en question, je me demandais si en attendant cette
distribution - si ça nous arrive la semaine prochaine, ça serait
un peu trop tard, étant donné que les travaux de
l'Assemblée risquent d'être terminés d'ici la semaine
prochaine - si en attendant ce document, cette analyse actuarielle, le ministre
ne pouvait pas résumer en quelques mots, en quelques minutes, la teneur
de ce document. C'était la question que j'avais.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Nous y avons consacré amplement
de temps, M. le Président, au cours des trois heures et demie. Je
comprends que le député de Laurier devait être
occupé ailleurs à l'Assemblée nationale par des travaux
importants, mais je dois dire que ceux qui l'ont précédé
sont intervenus à plusieurs reprises avec des questions fort
pertinentes. Je suis convaincu que la lecture du journal des Débats,
avec les réponses que nous avons apportées, va lui donner tous
les renseignements qu'il cherche.
M. Sirros: Vous avez effectivement répondu quant au
contenu du document en question. Est-ce que le ministre a répondu
à mes collègues qui m'ont précédé sur le
contenu du document en question dont on attend la distribution? Sinon, je me
demande...
M. Bérubé: II n'y a pas de distribution.
Le Président (M. Bordeleau): II peut y avoir distribution,
mais... (20 h 45)
M. Bérubé: J'ai demandé à la
Commission administrative du régime de retraite de faire parvenir au
Parti libéral le rapport puisque, comme je l'ai expliqué, il ne
s'agit pas d'un rapport public; il s'agit d'un rapport semi-public qui est
adressé au conseil d'administration de la commission. Ce sont des
rapports effectués par des actuaires-conseils d'une grande
compétence. Je l'ignore, mais peut-être que le
député de Laurier est d'une grande compétence
également dans le domaine des calculs actuariels et que cette question
l'intéresse. Je suis convaincu qu'il recevra éventuellement, dans
les jours qui viennent, ce rapport d'une très grande complexité
et qui, sur le plan mathématique, analytique, demande une grande
compétence dans le domaine. Je suis convaincu que le
député de Laurier aura l'occasion d'exercer sa
sagacité
à l'analyser.
M. Fortier: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont, sur une question de règlement.
M. Fortier: Je crois que le ministre induit la commission en
erreur, puisque cet après-midi il a référé
lui-même aux articles 5a et 5b. Je lis l'article 5a: "Un délai de
trente jours lui sera accordé afin qu'il se prononce et soumette au
gouvernement l'ensemble de ses recommandations, lesquelles seront rendues
publiques." On fait allusion, au paragraphe précédent, au
rapport. J'ai demandé une copie du rapport. Le ministre a dit oui et
voilà maintenant, alors qu'il est bien clair que le rapport dont nous
voulions avoir copie nous ferait comprendre les raisons qui ont motivé
le gouvernement à vouloir modifier le programme RREGOP, qu'il nous dit
qu'on aura le rapport dans la semaine des trois jeudis. Il me semble que cela
n'est pas conforme aux discussions que nous avons eues cet après-midi
même.
Le Président (M. Bordeleau): Je veux simplement vous
rappeler, M. le député d'Outremont, que ce matin il a
été question du document auquel vous faites allusion. Je voudrais
vous rappeler l'article 154 de notre règlement qui dit: "En commission
plénière ou élue, après la deuxième lecture,
on ne peut discuter que les détails d'un projet de loi et il ne peut y
avoir audition publique." Il faut quand même qu'à un moment
donné on en vienne à discuter des détails d'un projet de
loi.
M. Sirros: M. le Président...
M. Fortier: Je vous ferai remarquer, M. le
Président...
Le Président (M. Bordeleau): Le ministre est libre de
distribuer certains documents s'il le juge à propos. Je vous souligne
que le champ de la commission est quand même très limité
à l'étude du projet de loi.
M. Sirros: Si vous me le permettez...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier.
M. Sirros: ... comme nous connaissons l'intérêt du
ministre à éclairer les membres de la commission sur cette
analyse qu'on doit faire article par article d'un projet de loi fort complexe,
technique, etc., je pense qu'il va de soi qu'il serait dans
l'intérêt de tous les membres de cette commission de recevoir
copie du document à temps, procédant ainsi à l'information
de tous les membres et nous permettant de regarder toutes les modalités
du projet de loi en question, article par article, comme vous le dites. C'est
le but de la commission, évidemment. C'est pour cela, encore une fois,
que je crois opportun que le ministre distribue le document
immédiatement. Si c'est techniquement impossible, au moins, étant
donné la capacité immense du ministre quant à la
possibilité d'expliquer tous ces problèmes techniques et ces
analyses fort complexes contenus dans le document, comme il l'a dit, qu'il nous
fasse au moins un résumé de la portée du document.
Il va de soi, M. le Président, que, si les membres de la
commission sont mieux renseignés, ils pourront faire une meilleure
étude du projet de loi. C'est votre objectif aussi, j'en suis certain,
M. le Président, de conduire les travaux de cette commission de
façon que le produit final soit vraiment amélioré,
quoiqu'il soit fort difficile de bonifier ce projet de loi. En tout cas, on
peut toujours faire un effort.
Le Président (M. Bordeleau): Vous avez posé une
question au ministre. M. le ministre.
M. Sirros: Oui, est-ce qu'il pourrait résumer le document
en question?
M. Bérubé: Non, M. le Président, n'ayant pas
consulté comme tel le document, je ne pourrais pas vous le
résumer.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Westmount.
M. French: M. le Président, j'ai une préoccupation
d'un autre ordre. On sait à quel point il est important que notre
travail se déroule dans la transparence et sans aucune ombre qui
subsiste quant aux travaux de la commission. Je suis inquiet. Justement, le
député de Bellechasse fait partie de mes inquiétudes. Je
le souligne parce que je sais...
M. Bérubé: C'est la plus grande erreur que vous
ayez pu commettre, M. le député de Bellechasse.
M. Lachance: Je ne suis pas inquiet.
M. French: ... que le député de Bellechasse serait
le premier à soulever la question que je vais poser s'il avait
imaginé que cela me préoccupait et que cela préoccupait
aussi la population du Québec. Est-ce que nous avons, parmi les membres
de la commission, des gens qui ont intérêt dans les régimes
de retraite et qui sont affectés par le projet de loi que nous
étudions ce
soir? Je pense que c'est important pour plusieurs raisons. D'abord,
c'est important parce qu'il pourrait y avoir un conflit d'intérêts
là-dedans que certaines personnes auraient pu imaginer.
Évidemment, il n'y a aucun membre de cette commission-ci qui
s'apprêterait à entrer dans ce qui serait vraiment un conflit
d'intérêts. Aucun membre ne le ferait jamais consciemment. Il y
aurait toujours possibilité que quelques soupçons puissent
exister et que quelques problèmes puissent surgir à la suite
d'une discussion qui implique, aux travaux d'une commission, la participation
de qens qui sont eux-mêmes affectés, qui ont des
intérêts en cause. Je me demande, par exemple - c'est un exemple
que je mentionne, parce que je le connais bien et je l'admire beaucoup - si le
député de Bellechasse en tant que pédagogue, directeur
d'école, je crois...
M. Polak: Ancien syndicaliste.
M. French: ... sans doute ancien syndicaliste, non, soyez
honnête, si le député de Bellechasse, dis-je, n'a pas un
congé sans solde peut-être et si son propre régime de
retraite ne serait pas en cause dans le projet de loi no 68. Je dois m'adresser
à vous, M. le Président, sur la question de conflit
d'intérêts qui est, en effet, une question de règlement. Je
vous pose la question à savoir comment peut-on être assuré
que les membres de la commission ne sont pas en conflit d'intérêts
en ce qui concerne ce projet de loi.
M. de Belleval: M. le Président, je peux répondre
à cette question?
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: Le gouvernement présente ce projet de loi
et les députés du côté ministériel appuient
ce projet de loi. Cela fournit la réponse au député de
Westmount puisque, comme le projet de loi diminue les avantages des
régimes de retraite, il y aurait un conflit d'intérêts si,
évidemment, les députés ministériels étaient
contre le projet de loi, c'est-à-dire contre la diminution de
bénéfices qui pourrait s'appliquer à eux. Comme c'est le
contraire, cela répond à la question du député de
Westmount. Maintenant, je ne peux pas parler pour les gens de l'Opposition, M.
le Président. S'il y a des gens de l'Opposition qui, eux, sont
affectés par ce projet de loi, ils sont effectivement en conflit
d'intérêts puisqu'ils s'opposent à la diminution des
bénéfices. Par conséquent, ils s'opposent à des
diminutions de bénéfices dans leur propre cas. Je ne peux pas
préjuger que des membres de l'Opposition sont touchés par les
dispositions de ce projet de loi.
M. French: M. le Président, sur la même question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Westmount, question de règlement?
M. French: Sur la même question de règlement.
Le Président (M. Bordeleau): De règlement?
M. French: Une question de directive.
M. Bérubé: Quelle question de règlement?
M. French: Question de directive, dans ce cas-là.
M. Bérubé: Une demande de directive.
M. French: J'en appelle à la présidence pour me
guider par rapport à cette question de conflit d'intérêts
possible. Je voudrais ajouter que le raisonnement du député de
Charlesbourg est fort intéressant, mais à peine convaincant quand
on sait que résumer un projet de loi de très haut niveau de
technicité contenant 49 articles en disant qu'il diminue les
bénéfices pour certaines personnes, c'est une façon
tellement...
M. Bérubé: M. le Président, l'article 80,
s'il vous plaît, de notre règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président: "Lorsqu'un
député désire accuser un de ses collègues d'un acte
qui le rend indigne de siéger à l'Assemblée nationale, il
doit présenter une motion de fond annoncée dans laquelle il
énonce l'accusation en termes explicites mais modérés, et
il doit conclure à ce que... Or, le député de Westmount
vient d'insinuer qu'il y aurait des membres qui pourraient être en
conflit d'intérêts et il vous demande, par voie indirecte, une
directive sur la façon que vous suggérez pour vous assurer que
les membres de cette commission ne sont pas en conflit d'intérêts.
Or, une accusation de conflit d'intérêts est une accusation
très grave et l'article 80 de notre règlement précise que,
lorsqu'un député désire accuser un de ses collègues
d'un acte qui le rend indigne de siéger, il doit présenter une
motion de fond. La formule est donc la motion de fond. La demande de directive
du député de Westmount est donc contraire au règlement. M.
le Président, je voudrais que vous le rappeliez à l'ordre.
Deuxièmement, je voudrais, M. le Président - je sais que
vous ne le pourrez pas - que vous mettiez fin à la mascarade
que nos concitoyens observent présentement et qui montre, de
façon explicite et on ne peut plus claire la bêtise la plus totale
du Parti libéral dans le dossier que nous avons sur la table
présentement.
M. Sirros: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Un instant! M. le ministre,
quant à votre question de règlement, pour une fois, cela en
était vraiment une en vertu de l'article 80. En tout cas! Le
député de Westmount avait posé une question. Le
député de Charlesbourg a voulu y répondre. Quant à
moi, même si votre question était adressée à la
présidence, je ne pense que ce soit au président d'une commission
parlementaire ou même à un président d'assemblée de
décider qu'il y a possibilité ou non de conflit
d'intérêts. Vous pouvez soulever la question et vous pouvez vous
attendre à avoir la réponse que vous avez eue ou d'autres
réponses.
M. le député de Laurier.
M. Sirros: Oui, M. le Président. Je tiens à dire
que la vraie mascarade dans cette affaire, ce sont les projets de loi 68 et 70
que le gouvernement présente pour effectivement renier sa signature et
déshonorer, ainsi, le gouvernement du Québec, peu importent qui
siège à l'heure actuelle aux banquettes et les droits du
président de l'assemblée. C'est cela, la vraie mascarade dans
cette histoire, M. le Président.
Quant à la question de directive que mon collègue a
soulevée, je pense qu'on a vu, à travers la réponse qu'on
a eue du député de Bellechasse, qu'effectivement, c'était
une question qui touchait au principe de l'affaire. Peu importe qu'il y ait un
conflit d'intérêts, cela touche des gens qui ont un
intérêt dans la matière discutée. Si le ministre
veut se cacher derrière des technicalités, il a tout le loisir de
le faire, mais qu'il cesse de parler de mascarade à ce moment-là,
parce qu'il est en train d'en perpétuer une qui est assez grave.
M. Polak: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne, sur...?
M. Polak: ... suis-je inscrit comme membre ou intervenant
à cette commission?
Le Président (M. Bordeleau): Vous êtes inscrit comme
intervenant, M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: Bon! Merci beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, mais vous voulez
intervenir sur...?
M. Polak: Sur le même sujet.
Le Président (M. Bordeleau): Quel sujet?
M. Polak: Sur le même sujet, le projet de loi no 68...
Le Président (M. Bordeleau): On en était à
des questions de règlement.
M. Polak: ... et le conflit d'intérêts.
Le Président (M. Bordeleau): Sur le conflit
d'intérêts, je m'excuse, mais il n'y a pas de questions à
poser.
M. Polak: Oui, mais c'est encore sur le même sujet. Eux
autres, ils ont parlé. Je n'ai pas le droit de parler au nom des
démunis de Sainte-Anne? Le ministre me connaît bien. Il
connaît mes interventions.
C'est lui qui donne toujours la permission pour que je parle...
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! S'il vous plaît!
M. Polak: ... parce qu'il veut tout de même se faire
renseigner sur ce qui se passe dans la classe ouvrière de
Montréal.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, M. le
député de Sainte-Anne! Je ne vous ai pas encore donné la
parole. S'il vous plaît! Je retiendrai les remarques préliminaires
de certains députés qui ont remplacé d'autres
députés au cours de la journée, mais je ne permettrai pas
non plus qu'on dise n'importe quoi ou de parler de n'importe quoi. En vertu de
l'article 154, on doit étudier le projet de loi.
M. Bérubé: Sur la question de règlement, M.
le Président, je voudrais intervenir pour dire que je pense que je
serais d'accord pour qu'on donne l'autorisation de parler au
député de Sainte-Anne. Quant à l'autorisation de dire
quelque chose, cela supposerait que, lorsqu'il parle, il dit quelque chose. Or,
selon mon expérience, cela n'a jamais été le cas. Vous
pouvez cependant lui donner l'autorisation de parler.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, s'il vous
plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous
plaît! S'il vous plaît!
M. Polak: M. le Président, je suis content de noter que le
ministre délégué à l'Administration et
président du Conseil du trésor...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne, même si le ministre vous donne le droit de parole, moi, je
ne
vous l'ai pas encore donné, à moins que vous ne me disiez
sur quoi vous voulez intervenir.
M. French: Vous ne pouvez pas demander cela, M. le
Président.
M. Fortier: Le ministre n'est pas respectueux de la
présidence.
M. Polak: On parle exactement du même sujet que les autres
intervenants des deux côtés de la table que vous connaissez bien
parce que vous êtes président. Vous avez suivi le débat
jusqu'à maintenant. Donc, je voudrais parler des remarques
préliminaires. J'aimerais qu'on finisse par étudier ce projet de
loi parce que cela me choque.
Le Président (M. Bordeleau): Sur le projet de loi?
Allez-y, M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: Merci, M. le Président. Le ministre va-t-il
revenir? D'habitude, aux engagements financiers, il m'écoute bien.
M. French: On ne parle pas, si le ministre n'est pas à sa
place.
M. Sirros: Oui, il faut que le ministre y soit.
M. Polak: J'aimerais bien que le ministre soit là, au lieu
de fumer sa pipe à part. Il se promène un peu nerveusement. Qu'il
s'installe pour écouter, parce qu'il peut bénéficier des
remarques que je vais faire.
M. le Président, c'est regrettable, parce qu'on parle d'une
action unilatérale. Je connais le ministre depuis maintenant un an car
je le rencontre à la commission des engagements financiers. C'est un
homme qui vient de Matane, et à Matane ce n'est pas du tout un
comté révolutionnaire. C'est bien connu qu'à Matane on a
les deux pieds sur terre. C'est bien connu. Ce sont des gens qui suivent le bon
sens. Le mot "unilatéral", ils ne sont pas capables de le comprendre.
J'ai été surpris et choqué quand j'ai vu le projet de loi
68 qui s'appelle Loi modifiant diverses dispositions législatives
concernant les régimes de retraite, présenté par M. Yves
Bérubé. C'est bien le même Yves Bérubé qui se
présente à la commission des engagements financiers. Pour en
être certain, il a écrit "ministre délégué
à l'Administration et président du Conseil du trésor".
Donc, on se connaît et on le connaît. Il a toujours
été un homme de raison et de bon sens. Je le connais ainsi depuis
un an.
Une voix: II a pris un virage technologique.
M. Polak: J'ai regardé cela et j'ai dit à ma femme:
Ce n'est pas possible. Ce n'est pas le même Yves Bérubé.
C'est un révolutionnaire. C'est un unilatéraliste. Qu'est-ce qui
se passe avec mon Yves? Dans la famille, nous autres, nous utilisons le
prénom du ministre, même si nous ne le connaissons pas trop
personnellement.
M. Sirros: A-t-il fait un virage? (21 heures)
M. Polak: Pas un virage technique ou révolutionnaire,
unilatéral, mais tout de même! M. le Président - je
siégeais cet après-midi à la commission des affaires
municipales au sujet de la Communauté urbaine de Montréal. On m'a
dit: Maximilien, tu es mieux d'aller à l'étude des lois 68 et 70;
pas parce qu'ils ont besoin de bonnes interventions, mais, au moins, il faut
que tu parles comme le député de Matane, les deux pieds sur
terre. Dans mon comté, le comté de Sainte-Anne, on a les deux
pieds sur terre. Le ministre le sait très bien, je représente un
secteur ouvrier de Montréal où la moitié de la population
vit d'aide sociale, d'assurance-chômage ou de la pension de vieillesse.
Donc, quand j'ai vu ce projet de loi, je suis entré ici et je pensais
qu'on en serait déjà à l'étude de l'article - je ne
sais pas - 12 ou 10, quelque chose comme cela. Mais je suis
étonné de voir que, à cause du comportement des
députés péquistes qui ne peuvent pas expliquer leur
attitude, de ce côté-ci on est forcé de les questionner sur
leur bonne foi.
M. Sirros: Ce n'est pas explicable.
M. Polak: Ce n'est pas explicable. Je rencontre le ministre. On
le rencontre une fois par mois, c'est un homme qui a les deux pieds sur terre
et nos travaux avancent tout de même assez rapidement parce qu'on
s'entend. On sait que nous ne sommes pas d'accord sur des points précis,
mais on va parler sur les modalités. Là, je vois le
député de Charlesbourg. C'est un ancien ministre que je respecte
beaucoup. D'ailleurs, je dois vous dire que je suis très
impressionné par ses interventions à l'Assemblée. Je me
demande toujours comment il se fait qu'il ne soit plus ministre, mais, en tout
cas, je ne connais pas le fonctionnement interne du Parti péquiste.
C'est un homme que j'admire beaucoup au point de vue de ses interventions.
Même lui est obligé de s'expliquer ici ce soir et les deux autres
députés péquistes à côté de lui ont le
visage long ce soir. Savez-vous, l'expression d'un visage ne se note pas dans
le journal des Débats, mais il faut que ce soit enregistré. Ils
ont le visage long, ils ne rient pas. Ils fument nerveusement parce qu'au fond
de leur coeur ils ne sont pas d'accord avec ce projet de loi, mais ils n'ont
pas le courage
de le dire. C'est vrai, il y a le député de Sainte-Marie
qui a fait encore une déclaration officielle disant qu'il est presque
prêt. Il l'était au mois d'octobre et de novembre, mais,
là, il est de plus en plus près de prendre une décision
finale. Au moins, je l'admire, même s'il a pris six mois avant de dire:
Je quitte mon camp.
Mais ce qui m'étonne le plus, c'est que le ministre et
président du Conseil du trésor, qui est un homme que j'admire
beaucoup sur le plan personnel... C'est vrai que ce n'est pas un avocat, il
n'est pas flexible, c'est un inqénieur en métallurgie. Il nous a
expliqué très souvent ce qu'il avait appris aux
États-Unis. Avec ce même ministre, je me le rappelle, j'ai eu une
grande discussion et je lui ai demandé: Comment se fait-il que le
gouvernement du Québec paie 75 000 $ pour envoyer des
Québécois au Maroc? Pour enseigner aux petits Marocains le
système scolaire québécois ou pour qu'ils reviennent au
Québec enseigner aux Québécois le système marocain?
Là, le ministre a répondu - j'étais étonné
et déçu - en disant: Voici, ces Québécois vont en
Europe. C'est vrai, cela coûte de l'argent à l'État, mais,
quand les petits Marocains de neuf, dix ou onze ans auxquels on enseigne auront
20 ou 21 ans et qu'ils seront devenus de petits commerçants marocains,
ils vont se souvenir de leurs professeurs québécois. Ils vont se
dire: Nous allons acheter du linge fabriqué au Québec parce qu'on
a eu des professeurs québécois. Je lui ai alors dit: M. le
ministre, président du Conseil du trésor, je ne pense pas que ce
soit la manière de vendre notre marchandise au Maroc. Il faut attendre
dix ans et espérer que les petits Marocains aient un bon souvenir de
leurs professeurs. Cela se peut qu'ils aient un mauvais souvenir de leurs
professeurs. On ne sait jamais. Là, il m'a répondu: Voici, il y a
aussi l'élément que vous, M. le député de
Sainte-Anne, ne comprenez jamais, la fierté nationale. Bien, la
fierté nationale, je connais cela. On investit dans Québecair,
Asbestos. Encore aujourd'hui, on parle même d'un autre...
Une voix: Pétro-Québec.
M. Polak: Oui, c'est cela, au lieu de Petro-Canada,
Pétro-Québec. Cela coûte cher en maudit. C'est cela qu'on
dit dans mon comté de Sainte-Anne, ce n'est pas moi qui le dis.
Donc, je suis venu ici ce soir en me disant: Le président du
Conseil du trésor, c'est un homme raisonnable; il faut que je le fasse
retourner à la base, la base de Matane, les deux pieds sur terre.
J'adore les crevettes de Matane. Ce produit de Matane s'exporte partout. Je
suis certain que c'est une industrie qui va très, très bien. Ce
ministre est un homme que j'ai connu, qui n'agit pas unilatéralement.
Soudainement, j'ai vu, comme ma femme le disait, qu'Yves est devenu mauvais.
J'ai dit: Une minute! Ce n'est pas possible, je vais essayer de le convaincre
parce que, tout de même, c'est un homme raisonnable. Soudainement, il est
devenu unilatéral. Je me rappelle ce ministre quand il me disait: M. le
député de Sainte-Anne, le moment va arriver où la
population, par consentement, par la volonté exprimée et jamais
de façon unilatérale parce que nous, à Matane, on ne croit
pas à cela, va voter pour un Québec libre, finalement, chez nous.
Je l'ai admiré pour cela et j'ai dit: Si tu peux gagner à ton
jeu, tant mieux. Je ne pense pas que vous gagnerez cette affaire-là,
mais, au moins, c'était correct, ce n'était pas
unilatéralement. Maintenant, il a changé, il vient avec le projet
de loi no 68, et je me demande si ce monsieur-là est vraiment un homme
objectif; j'ai toujours suivi sa ligne de pensée. Il a bataillé
pour ses idées, parfait, il essaie de vendre sa salade, c'est ainsi
qu'on appelle cela, aucun problème, on va essayer de vendre notre propre
salade. Mais, le projet de loi 68, cela est venu à coups de marteau,
boum! frappe sur la tête! Je sais que la population de Matane, ce n'est
pas sa manière d'agir; ce sont des gens gentils, comme lui au fond de
son coeur; ma femme m'a dit: Donnez-lui encore une chance; donnez-lui une
chance, parce que ce n'est pas lui qui parle. Il est peut-être
influencé par le ministre des Finances et il lui faut prendre sa
décision. C'est lui qui est obligé de vendre cette affaire.
Profondément, dans son coeur, il ne croit pas à cela, parce que
c'est un homme qui croit à une affaire bilatérale. Il y a
quelqu'un qui perd, quelqu'un qui gagne, mais on discute; il est ouvert aux
différentes modalités des formules de changement. Mais, du fait
de voir un projet de loi appliqué à coups de marteau, à
coups de matraque, ma femme a dit -excusez-moi M. le Président, si je
répète cela - ce n'est pas mon Yves; je ne crois plus à
cela, parce que vraiment j'avais confiance en lui.
Quand j'ai vu aujourd'hui notre whip en chef, j'ai dit: J'aimerais bien
participer au débat pour voir s'il y a moyen de discuter
raisonnablement, de prendre l'étude de la loi article par article, de
changer ces articles, de convaincre le ministre de changer d'opinion. Quand il
a parlé sur ce projet de loi là, je l'ai vu, il avait une belle
carte derrière lui, de couleur rouge, brune, bleue, de toutes sortes de
couleurs, pour démontrer ce que c'est, le Québec, mais son coeur
n'était pas là-dedans. Ce n'est pas un gars de Matane qui
parlait; il était presque devenu un fonctionnaire avec une pensée
unilatérale. Moi, j'ai toujours pensé et je pense encore que
c'est un homme flexible. Donc, si nous sommes capables de nous parler, et
j'espère qu'on le peut... Je note
avec plaisir que le ministre, président du Conseil du
trésor, commence à rire; il fume sa pipe un peu moins
nerveusement. Je pense qu'il y a une ouverture, il est plus relaxe.
Une voix: II relaxe!
M. Polak: Je pense qu'on sera capable de le convaincre, de se
parler et si nécessaire, de lui faire retirer ce projet de loi no 68. Je
dois vous dire honnêtement que, pour moi, 68, c'est un peu moins
sérieux que le projet de loi no 70; on parle sur le mérite, mais
les mêmes principes priment. Je sais que c'est un homme raisonnable parce
que, déjà, à la commission des engagements financiers, on
a eu des moments où il est intervenu et où il a dit: M. le
député de Sainte-Anne, vous avez raison. C'est vrai qu'il
m'insulte aussi et me dit: Vous ne comprenez rien à la culture, quand je
dis, à un moment donné: On ne mange pas de livres à
Sainte-Anne, il ne faut pas construire une bibliothèque de 3 000 000 $
et fermer les lits des hôpitaux. Cela est une question de
priorité. Il a pris cela de façon un peu trop absolue, mais il a
compris le message; il est flexible, on peut parler.
Nous sommes venus ici ce soir pour parler avec le président du
Conseil du trésor pour, encore une fois, faire appel à son
attitude comme citoyen de Matane, du comté de Matane. Des gens
raisonnables, on peut leur parler. Moi, j'ai été très
déçu vendredi dernier. J'étais ici à Québec
et j'étais avec le ministre, et tous les chefs syndicaux sont venus
devant nous avec des centaines de partisans. À un moment donné,
à 20 heures, on a suspendu le débat. J'ai dit au ministre: M. le
ministre, voulez-vous m'accompagner, parce que je vais dans la rue voir ces
démonstrations? On y va ensemble? C'est vrai que, chez nous, je ne suis
même pas un petit fantôme, je ne suis rien; je suis juste ce qu'on
appelle un frappeur d'urgence, savez-vous? Donc, je dis: M. le président
du Conseil du trésor, je suis prêt à vous accompagner,
allons dehors, c'est votre "game", ce sont des péquistes, parce que tout
le monde savait que 90% des gens avaient voté pour les péquistes.
Il y avait même un groupement, le Parti ouvrier communiste, à la
fin du défilé. J'ai vu tout le défilé. J'ai dit:
Moi, j'y vais, je n'ai pas peur qu'ils me pendent. Il a refusé mon
invitation.
Je sais qu'il est resté ici, en arrière de la
fenêtre, pour regarder ce qui passait. Moi, j'ai marché. Je
n'avais pas quelque chose en main pour dire: Parizeau au poteau!
Bérubé, poum, poum! Rien, parce que je respecte
Bérubé.
Une voix: C'est un PQ.
M. Polak: C'est cela, PQ hu-hu! Rien de cela. Savez-vous que j'ai
gardé mon imperméable. J'étais un peu comme un
détective anglais, avec mon imperméable gris. Ma femme a
appellé: Est-ce que Yves va t'accompagner? Parce qu'elle sait que j'ai
un contact spécial tout de même avec le président du
Conseil du trésor. Moi, ce que je suggérais, c'est qu'ensemble on
fasse face aux syndiqués, qu'on leur réponde. J'ai
rencontré la CSN, la CEQ, la FTQ, toute la patente. Savez-vous qu'ils
ont été bien corrects avec moi. Ils disaient: Maximilien, ce
n'est pas possible. Où sont les ministres? J'ai dit: Je ne sais pas
s'ils se cachent. Je ne veux pas accuser M. Bérubé, parce que
peut-être que, dans son bureau, il prépare un autre coup de
marteau sur votre tête. J'aurais vraiment préféré
aller avec lui dans la rue. Je suis allé dans le champ. On a
brûlé des choses. Moi, je n'ai rien brûlé, M. le
ministre, parce que que je suis comme les gens de Matane, un citoyen pacifique,
ordinaire, jamais unilatéral. Je pense toujours au bon consensus.
J'étais là et je cherchais des péquistes. Je cherchais
toujours le ministre Bérubé. C'était son projet de loi. Si
lui avait été là, j'aurais pu le sauver. J'aurais pu dire
à la foule qui était là: Donnez-lui une chance. On va
aller en commission parlementaire et on va lui parler. C'est un gars
raisonnable. On va changer ce projet de loi; il va le retirer, parce qu'il va
comprendre à la fin. Il était devant la fenêtre, il riait,
mais il ne se moquait pas du tout des protestations; en tout cas, je pense bien
qu'il y était. Il ne fumait pas la pipe, il avait le visage plus
pâle. Ce soir, il est un peu plus coloré.
J'aurais aimé qu'il marche avec moi, même si je suis un
petit gars, un frappeur d'urgence. J'aurais marché un peu
derrière lui; s'il avait eu des problèmes, je l'aurais soutenu.
J'aurais dit: Écoutez, vous autres, c'est votre gang, minute, est-ce que
je peux expliquer ce qu'il veut dire? En commission parlementaire, donnez-lui
une chance de se reprendre. J'étais prêt à faire cela, mais
la réponse fut négative. J'ai dit: Ce n'est pas possible. Il agit
encore de façon aussi unilatérale même quand il s'agit
d'essayer de rencontrer la foule. Tout de même, je me rappelle
qu'à un moment donné un journaliste péquiste a dit: Ah! il
n'y avait même pas 5000 personnes! Regardez donc Laberge dans la rue, il
est nerveux, il se frotte les mains. Mais moi, je savais ce qui s'en venait,
parce que, savez-vous, M. le Président, j'ai pris une petite boisson,
juste un petit "gin and tonic" parce que, comme député, on ne
gagne pas beaucoup. Donc, j'ai pris une consommation à l'hôtel
Concorde et j'ai vu la manifestation s'organiser. J'ai vu des autobus entrer,
de Matane même. J'ai dit: Cela vient du comté de M.
Bérubé. Je me rappelle très bien, c'était un
autobus pas
jaune scolaire, mais bleu, loué: Matane. Il y avait même un
petite pancarte.
Une voix: À bas, Bérubé!
M. Polak: Non. Bérubé pas du tout; C'était
écrit: "Les crevettes sont bonnes!" Je suis d'accord avec cela, parce
que j'adore les crevettes de Matane. J'ai vu ces gens s'organiser, par
milliers. Je savais, j'ai vu le journaliste, j'ai dit, attendez-vous, que ce ne
soit pas 5000. Ce n'est pas, comme on avait dit, 10 000, cela va être
plus que cela. J'ai vu tout le défilé, et j'ai même entendu
à la fin le Parti ouvrier communiste. Tout de même, je ne suis pas
d'accord avec lui, avec le communisme, mais j'ai tout entendu. Je suis
allé à la fin et j'ai vu ce qu'on appelle en anglais le "bon
fire". Je suis parti avec mon petit imperméable gris pour ne pas
être trop vu. Je ne voulais pas qu'on dise: L'Opposition pourrait prendre
avantage de cela. Mais non, je voulais protéger le ministre. J'ai
parlé avec les gens et ils m'ont dit: Maximilien, est-ce qu'il y a moyen
de sauver cela? Moi, j'ai dit: Oui. Au fond, le ministre est un gars correct,
parlable et on va en commission parlementaire pour parler des projets de loi no
68 et no 70. On va en parler. Je pense qu'on peut le convaincre de retirer ce
projet de loi. Au fond, ce n'est pas un homme qui agit de manière
unilatérale. Ce n'est pas quelqu'un qui occupe le territoire comme les
Argentins ont fait, quand ils ont occupé les Malouines. Voici ce qui est
arrivé. Le général argentin a été battu par
une femme, ce n'est pas possible parce qu'un Argentin, savez-vous, ne
respectait pas une femme, c'est Mme Thatcher, une femme d'Angleterre, qui les a
battus, ce n'est pas drôle. Je voulais prévenir cela. Je voulais
respecter et sauver la peau du ministre. Là, vous êtes allé
trop loin. Vous allez trop loin avec les projets de loi no 68 et no 70. S'il
vous plaît, il faut sauver cette situation. Nous, de l'Opposition, on est
prêt à vous aider à retirer ce projet de loi, à
laisser se calmer un peu l'humeur de tout le monde. On va arranger cela.
Quand je suis entré ici ce soir, je pensais qu'on en serait
déjà aux articles 5 et 6. On va changer la date, toutes sortes
d'articles, sur le RRE, le RRF, le RREGOP, on va en parler en détail.
Mais là, je note certaines choses parce que j'ai étudié le
projet de loi. Ma femme me dit toujours en fin de semaine: Maximilien, tu es
mieux de préparer en détail ce projet de loi parce que M.
Bérubé, c'est un homme parlable. Il veut entrer dans la "viande"
de l'affaire. Ayez donc de bonnes suggestions. As-tu étudié cela?
J'ai dit: Oui, ma femme. J'ai préparé trois cartes. Ce sont des
petites notes que j'ai prises parce que, comme avocat, on n'a pas besoin de
grands discours. J'ai pris l'essentiel, je suis prêt à faire face
à M.
Bérubé pour le convaincre. Unis, on va décider...
À un moment donné, il va être convaincu et il va être
heureux de retirer ce projet de loi. (21 h 15)
J'arrive ici, M. le Président, et qu'est-ce que je note? Les
longs visages, un air de deuil; les deux députés péquistes
sont de l'autre côté de la table et ont vraiment de longs visages.
Il y a un député qui vient d'entrer, c'est le
député de Terrebonne. Je sais que c'est un homme sur le plan
personnel bien aimable et bien parlable. Je ne me rappelle pas si j'ai
déjà pris une bière avec lui, mais cela ne me
gênerait aucunement d'en prendre une en sa compagnie. Je sais qu'il est
un peu l'assistant du ministre et je pensais: C'est un gars parlable. J'ai vu
le ministre, vendredi, j'ai constaté qu'il avait le visage pâle.
Ce soir, il est calme comme ingénieur du Massachusetts Institute of
Technology. Il m'a parlé de son expérience à Ottawa et il
m'a dit: Voici Maximilien, quand j'étais à Ottawa, la
manière dont j'ai été été traité! On
appelle cela en anglais un "hang up". Je comprends. Moi, je veux le
guérir. Je veux essayer de récupérer cet homme pour la
société, parce que c'est un homme très compétent
que j'admire beaucoup, sauf qu'à un moment donné, quand on lui
parle du fédéral, il voit rouge. Il ne voit plus blanc. Il n'a
plus de pipe. Il voit rouge. Il ne reste plus rien. Il devient
complètement hors de tout contrôle. Je dis que cet homme
présente les projets de loi 68 et 70 contre sa propre population. Si
c'était contre le fédéral, je dirais: Je comprends. Il
voit rouge. Il n'est plus raisonnable. Il a complètement perdu le
contrôle. Je comprends parce que ce n'est plus le même Yves! Mais
ma femme m'a dit: Ce n'est pas possible que, pour les projets de loi 68 et 70,
cet homme réagisse de la même manière qu'un
Québécois qui réagit contre les fédéraux.
S'il vous plaît, Maximilien, il faut que tu lui en parles, parce qu'il
est récupérable. Donc, M. le Président, ayant dit tous
ces...
M. Sirros: Ce n'est pas sûr.
M. Polak: Ce n'est pas sûr. Je vois cela par son attitude.
M. le Président, j'espère que le ministre aura l'esprit ouvert,
ayant vu la manifestation en fin de semaine, vendredi - ils étaient
seulement 15 000 ou 20 000 - ayant vu à Montréal les grandes
pancartes "manifestation du front commun". M. le Président, il y a
quelques années, il fallait poser trois pancartes, CSN, FTQ et CSD.
Maintenant, cela va tellement mal dans la province qu'on met tout le paquet
ensemble en écrivant "front commun." Cela leur fait épargner de
l'argent parce qu'ils sont unis dans la misère. Quand j'ai vu cela,
j'ai dit: Ce n'est pas possible. Il faut qu'on fasse quelque chose pour
éviter vraiment ce gros problème. Il faut parler à ce
ministre que j'ai connu à la commission des engagements financiers comme
étant un homme raisonnable. On a des batailles. On échange des
opinions...
M. Sirros: Vigoureusement.
M. Polak: ... vigoureusement. Je le respecte et je crois qu'il me
respecte partiellement, parce que c'est un ingénieur. Les
ingénieurs ne sont pas comme les avocats. Ils ne sont pas flexibles.
C'est un homme dur, un ingénieur. D'accord, il m'accuse d'être un
expert de la culture. Il m'a dit: Vous allez même devenir un expert en
ingénierie et je lui ai dit: Lui, au moins, il l'a été.
Pour étudier cela un peu plus en profondeur, on s'entend bien, mais je
dis que là, on est arrivé à un point, après ces
démonstrations et manifestations j'ai dit: Non, s'il vous plaît,
on est allé trop loin. Ce n'est pas pour appuyer le député
de Sainte-Marie qui va bientôt quitter le parti ou même la
députée de Maisonneuve qui est en période de
réflexion sérieuse ou d'autres députés. Je ne veux
pas du tout jouer sur les dissensions. Je crois que ce n'est pas correct. Il y
a une équipe. Il y a une autre équipe. Mais ce ministre, je
voudrais tout de même qu'il commence sérieusement à
étudier ce projet de loi et, si on le doit le retirer, on va le retirer
unanimement et vous serez soulagé. Tous ceux qui vous ont vus dans vos
comtés, qui vous ont demandé... Combien de temps me
reste-t-il?
Le Président (M. Bordeleau): II n'en reste plus.
M. Polak: II n'en reste plus. Donc, M. le Président, je
fais appel, encore une fois, au front commun des députés des deux
côtés pour que ce projet de loi soit retiré. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. J'appelle l'article
1.
Une voix: Oui, M. le Président.
Étude article par article
Le Président (M. Bordeleau): Article 1?
M. Fortier: À l'article 1 on dit: "... est modifié
par la suppression du paragraphe q." Le ministre pourrait-il nous indiquer de
quoi il s'agit?
M. Bérubé: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Bérubé: ... si je comprends bien, le
député d'Outremont a posé une question concernant
l'article 1. Il demande pourquoi on supprime le paragraphe q. Il s'agit tout
simplement de supprimer la référence à la ministre de la
Fonction publique comme étant la ministre responsable de la loi dans la
mesure où, désormais, c'est le président du Conseil du
trésor et donc, par flexibilité, plus loin, on verra que le
ministre responsable sera désigné par le gouvernement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Je crois que le ministre pourrait nous renseigner,
mais je pense que c'est de plus en plus la norme de ne pas assigner un ministre
spécifique. Est-ce que c'est la nouvelle politique au gouvernement,
puisqu'il peut y avoir des assignations différentes?
M. Bérubé: C'est ça.
M. Polak: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne, sur l'article 1?
M. Polak: ... quand j'ai étudié l'article 1, j'ai
tout de même éprouvé des sentiments contraires, parce que
je sais que le ministre de la Fonction publique est une femme. Je ne vais pas
mentionner son nom, mais c'est une femme. Le gouvernement a
décidé de la remplacer par le président du Conseil du
trésor. Je répète - parce que, savez-vous, M. le
Président, chez nous on parle en termes simples - ce que ma femme a dit:
Comment se fait-il qu'une femme soit remplacée par un homme? J'ai dit:
Minute, elle est remplacée par Yves, parce que, savez-vous, M. le
Président, à la maison, on ne dit pas M. le ministre
Bérubé; on parle d'Yves, elle connaît le prénom du
ministre. Elle m'a dit: Penses-tu que c'est correct? J'ai dit: Voici, il y a un
problème parce qu'il y avait une femme qui avait la
responsabilité de cela. Moi, savez-vous, M. le Président, je
viens des Pays-Bas et c'est un pays où on a toujours respecté
l'égalité entre hommes et femmes et il n'y a aucune raison
d'établir une primauté des hommes sur les femmes. J'ai donc dit:
C'est un problème, je suis d'accord avec toi, ç'aurait dû
rester entre les mains du ministre de la Fonction publique qui, on le sait, est
une femme.
D'un autre côté, je peux comprendre que, à cause
d'implications ça relève plutôt de la compétence du
président du Conseil du trésor, mais je me demande si ce n'est
pas encore une promotion pour le président du Conseil du trésor.
Le ministre a déjà eu une grande promotion, il est devenu
président du
Conseil du trésor. Il a enlevé une partie de la fonction
du ministre des Finances et, là, il prend encore une partie de la
fonction de la ministre de la Fonction publique. Qu'est-ce qu'il veut? Veut-il
créer un petit empire de Matane au sein du gouvernement? Cela
m'inquiétait. Donc, j'ai lu le paragraphe q, je l'ai
étudié et je me suis dit: II faut que j'en parle
honnêtement, parce que le ministre vient de répondre: On va juste
remplacer ministre de la Fonction publique par président du Conseil du
trésor. Mais ce qu'il ne dit pas, c'est: Je suis content de vous
annoncer que j'ai eu une promotion. J'ai enlevé un petit morceau
à une femme qui fait partie de mon propre Conseil des ministres et c'est
moi qui l'ai. Il aurait dû le dire honnêtement a la face de la
population. Est-ce que c'est normal, oui ou non? De notre côté, on
pense que la ministre de la Fonction publique essaie au moins de remplir sa
fonction du mieux qu'elle peut. On n'a pas de critiques graves à faire
à son égard. On pense qu'il faut l'appuyer et que vraiment cette
femme doit avoir sa chance, parce qu'il n'y a pas beaucoup de femmes au Conseil
des ministres.
Je ne veux pas trop insister sur les éléments
féminins et masculins, mais j'aimerais tout de même avoir une
interprétation. M. le Président, je pense parler au nom des
femmes du Québec qui tout de même représentent 52% de
l'électorat. Je pense que le ministre doit expliquer s'il y a quelque
chose au sujet de l'élément masculin et de
l'élément féminin ou pas du tout. Je suis prêt
à accepter son interprétation qu'il s'agit simplement d'une
promotion sur le plan technique, mais qu'il ne veut rien enlever à Mme
la ministre de la Fonction publique. Je voudrais savoir pourquoi on change un
ministre pour un autre et qu'en aucune manière on ne démontre
dans l'aile péquiste du gouvernement une certaine
préférence pour les hommes. J'aimerais avoir une explication de
la part du ministre. Je dis d'ailleurs d'avance que je suis bien prêt
à l'accepter, parce que je sais que le ministre...
M. Sirros Matane, les pieds sur terre.
M. Polak: C'est ça, Matane, les pieds sur terre, un homme
raisonnable. Même s'il est unilatéral dans ce projet de loi, je ne
pense pas qu'il cherche tellement de gloire dans ce projet de loi. Il y a
peut-être même un avantage pour la ministre de la Fonction publique
de dire: Vous êtes mieux de vous occuper de ça, M. le
président du Conseil du trésor, parce que ce projet de loi, c'est
tout de même une patate chaude. Je ne le sais pas, mais j'aimerais avoir
un peu plus de clarification, pour au moins, expliquer à mes
électrices pourquoi on a fait ce changement au paragraphe q.
Le Président (M. Bordeleau): L'article 1 est-il
adopté?
M. Bérubé: Adopté, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier.
M. Sirros: Le député de Sainte-Anne a
terminé son intervention en posant la question au ministre et, avant que
je puisse adopter cet article, il faudrait au moins savoir quelle est la
réponse.
Le Président (M. Bordeleau): La réponse? N'importe
quel député a le droit de poser n'importe quelle question et le
ministre a le droit d'y répondre ou de ne pas y répondre. Alors,
s'il ne me demande pas la parole, je demande si l'article est adopté. M.
le ministre.
M. Bérubé: II est adopté, M. le
Président, parce que l'intervention du député de
Sainte-Anne allait à l'encontre du règlement puisqu'il s'agit de
remplacer "le" ministre de la Fonction publique et non pas "la" ministre de la
Fonction publique. Donc, son intervention était
irrégulière. Maintenant, je voudrais simplement vous dire ceci,
M. le Président: J'ai fait un bref calcul tantôt. Le
député de Sainte-Anne est payé 35 000 $ aux frais des
contribuables et si on calcule le nombre d'heures où il doit
séjourner à l'Assemblée nationale, je calcule donc qu'il
gagne 50 $ l'heure pour faire le travail qu'il fait. Cela a permis à nos
concitoyens de s'apercevoir qu'ils sont en train de gaspiller 50 $ l'heure.
M. Polak: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): Question de règlement.
En vertu de quel article?
M. Polak: S'il y a un ministre qui, je pense, travaille fort,
c'est le président du Conseil du trésor et s'il y a un
député de l'Opposition qui travaille fort, c'est moi. Quand je
calcule le nombre d'heures, il gagne le double de ce que je gagne. Je n'ai
aucune objection, c'est comme maître plombier et plombier. J'accepte
cela, mais, lorsqu'il m'accuse de ne pas travailler, pour mes 35 000 $, M. le
Président, je calcule que je gagne moins que le salaire minimum et le
ministre un peu plus que le salaire minimum. Les deux, nous sommes mal
payés.
Le Président (M. Bordeleau): Ce n'était pas une
question de règlement, M. le député de Sainte-Anne.
M. le ministre.
M. Bérubé: Je voudrais compléter ma
réponse. En fait, j'ai fait une erreur en parlant de 50 $
l'heure. En effet, comme il y a quatre députés là, cela
fait exactement au moins 200 $ et, si je calcule également quatre
personnes ici, cela fait donc 400 $. Si je vous calcule, nous sommes à
450 $ et si je calcule l'ensemble des fonctionnaires du gouvernement qui sont
immobilisés présentement, c'est à peu près
l'équivalent de 700 $ à 800 $ l'heure. C'est ce que nous
gaspillons présentement. Cela permet à l'ensemble de nos
concitoyens de voir ce que l'Opposition fait avec les sommes qu'ils versent en
taxes.
M. Sirros: Sur ce point...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier.
M. Sirros: ... j'aurais une suggestion qui pourrait très
vite épargner énormément d'argent à l'État,
étant donné les difficultés qu'on connaît à
l'heure actuelle.
M. Bérubé: De le retirer?
M. Sirros: C'est cela, M. le Président, le retirer tout de
suite. Pensez seulement a tout l'argent qu'on pourrait épargner. Selon
les calculs du ministre, on n'aurait pas besoin d'étudier ce projet de
loi qui, de toute façon, va être...
M. Blais: M. le Président, il est adopté.
M. Sirros: ... à l'encontre de tous les principes de la
négociation libre, etc. Alors, retirons le projet de loi, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, est-ce que l'article 1
sera adopté?
M. Sirros: Non.
M. French: Sur division.
Le Président (M. Bordeleau): Adopté sur division.
Article 2, adopté?
M. Polak: Non.
Le Président (M. Bordeleau): II y avait peut-être le
député de Westmount que j'avais reconnu d'abord.
M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, l'article 2 se lit comme suit:
"L'article 7 de cette loi -là, on parle de la Loi sur le régime
de retraite des employés du gouvernement - est modifié par le
remplacement du deuxième alinéa par le suivant - voici le texte
péquiste - "Le régime ainsi établi est administré
par la Commission et le premier alinéa de l'article 113 et l'article
113.1 s'appliquent" Je n'ai jamais compris pourquoi on ne nous fournit pas un
texte complet avec l'article tel qu'il existe et l'amendement. Savez-vous, ils
nous forcent à fouiller partout. En deux semaines, on a eu seize projets
de loi et, pendant trois mois, on n'a eu rien sur la planche sauf la critique
du fédéral. Donc, j'étudie mes projets de loi
sérieusement. À un moment donné, je me le rappelle, en fin
de semaine, j'étais entouré de quatre grands livres pour chercher
113 s'applique et 113.1 et, ensuite, l'article 7 de la loi. Tout était
éparpillé par terre pour pouvoir me retrouver. Est-ce que
sérieusement on essaie de rendre service à la population?
Pourquoi ne faites-vous pas honnêtement comme la ville de
Montréal l'a fait cet après-midi, la Communauté urbaine de
Montréal? C'était très simple: on avait l'ancien texte et
le nouveau texte à côté. C'est très facile de
travailler avec cela. On voyait tout de suite l'amendement et, pas seulement
cela, on avait l'explication de l'amendement. Moi, j'ai été
obligé de fouiller partout pour savoir ce que veut dire "le
régime ainsi établi est administré par la Commission".
C'est un article peut-être innocent, mais c'est à la
manière de grands professeurs d'université ou d'école
primaire ou secondaire, parce que vous avez beaucoup de professeurs dans votre
groupe.
M. Blais: Ne parlez pas si fort.
M. Polak: Je n'ai rien contre les professeurs, mais, s'il y avait
eu un homme d'affaires dans la "gang", il aurait dit: Voici l'ancien texte,
voici le nouveau texte, voici la raison, exprimez votre opinion. (21 h 30)
M. le Président, on travaille sur dix-sept projets de loi en deux
semaines. Je travaille jusqu'à trois heures le matin chez moi avec une
petite "candie light" pour économiser l'énergie, ce n'est pas
drôle. Je me dis: Est-ce qu'ils font cela pour nous bloquer, pour nous
empêcher de poser des questions intelligentes, pleines de bon sens?
Veulent-ils rapidement passer leur patente pour que le public l'oublie durant
l'été ou s'ils veulent nous donner une chance d'étudier
cela? Encore une fois, je fais appel à l'intellect du
député de Matane. À Matane, je n'y suis pas encore
allé. J'ai invité le ministre à me rencontrer
là-bas, pour un débat.
Une voix: Pertinence!
M. Polak: Qu'il m'invite à parler de n'importe quoi sur le
budget, on va discuter ensemble devant sa "gang", son groupe.
Le Président (M. Bordeleau): Article 2.
M. Polak: M. le Président, j'ai vingt minutes pour
parler...
Le Président (M. Bordeleau): Sur l'article 2.
M. Polak: ... si je le veux, sur l'article 2.
Le Président (M. Bordeleau): Sur l'article 2, oui, pas sur
le député de Matane.
Une voix: Pertinence!
M. Polak: Non, sur l'article 2.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord.
M. Polak: M. le Président, je veux que les travaux
avancent; je ne veux aucunement prendre ma prérogative de parler vingt
minutes. Si vous insistez, je vais parler vingt minutes sur l'article 2, mais
je ne voudrais pas être accusé de bloquer le débat. Tout ce
que je veux dire, c'est que je ne comprends pas comment il se fait qu'on
reçoive cela. On doit avoir quatre projets autour de nous, des
amendements, des changements, on doit étudier cela ventre à
terre. On n'a pas seulement le projet de loi no 68, on en a 17 qui ont tous
été présentés en même temps. Je pense que ce
n'est pas raisonnable. J'aimerais que le ministre nous explique la
situation.
M. le Président, je voudrais souligner que le ministre qui
présente ce projet de loi, M. Yves Bérubé,
président du Conseil du trésor, lit maintenant un article sur la
fin de la guerre aux Malouines. Je n'ai rien contre cela, mais peut-il
m'écouter ou s'il se dit: Nous autres, on contrôle le vote, on
passe l'article 2 et je me fous de votre opinion. Je ne veux rien savoir, on
vote et boum! on a cinq votes, vous en avez trois et c'est fini? Est-ce cela
que vous voulez, qu'on vote tout de suite sur ce projet de loi? Je pense qu'on
pourrait être plus flexible. Aujourd'hui, avec la Communauté
urbaine de Montréal, on a eu une discussion intéressante. J'ai
voté avec les péquistes à un moment donné, sans
aucune objection, parce que j'étais pour un certain article du projet de
loi. On a discuté en profondeur de l'ancien texte et du nouveau texte.
Mais ici, on ne trouve pas cela.
Est-ce qu'on prépare une petite trappe? Est-ce que la semaine
prochaine on va se réveiller alors que quelqu'un va nous
téléphoner, un fonctionnaire peut-être, au sujet du RREGOP
- il y a trois régimes -pour dire: Maximilien, comment se fait-il qu'on
ait adopté l'article 2? N'as-tu pas compris ce que cela veut dire? Je ne
le sais pas. Je dois vraiment dire que j'ai étudié bien à
fond le projet de loi, mais j'ai de la misère à suivre cela.
J'aimerais que le ministre nous aide. Invoquant la transparence, j'aimerais
qu'il nous explique ce que cela veut dire. Est-ce que cet article est innocent?
Est-ce qu'il aime mieux continuer à lire son journal sur la fin de la
guerre aux Malouines ou peut-être le résultat des Expos qui ont
perdu hier soir? Je ne sais pas à quelle page il est rendu. Il y a
peut-être un article qui dit que j'ai critiqué hier le voyage des
gens de la CSST. Qu'il nous dise honnêtement ce que vise cet article. On
a besoin, de temps en temps, d'être informé un peu. Si sa
réponse est honnête et objective, on va l'accepter,
peut-être sur division, mais on va l'écouter.
Il n'a rien dit. Il se réfère au régime: "le
premier alinéa de l'article 113 et l'article 113.1 s'appliquent."
Qu'est-ce que cela veut dire? Je demande une simple explication. Si le ministre
dit "adopté", c'est qu'il est plus dictateur que je le pensais. Si c'est
un homme raisonnable, de Matane, et s'il a les deux pieds sur terre, il va
dire: Voici ce que cela veut dire. S'il me l'explique correctement, je vais
passer beaucoup moins de temps sur le prochain article.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 2 sera
adopté?
Des voix: Adopté.
M. Polak: Merci pour l'explication, M. le ministre.
M. Bérubé: L'article 2 est adopté, M. le
Président. Il s'agit, tel qu'il est indiqué, étant
donné la modification qui est apportée à l'article 113,
qui est subdivisé en 113.1, 113.2 et autres, de modifier l'article
précédent pour indiquer qu'il s'agit maintenant du premier
alinéa de l'article 113 et de l'article 113.1 qui s'appliquent. C'est
donc un article de concordance purement technique.
M. Polak: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Article 2, adopté sur
division. Article 3? M. le député de Charlesbourg.
M. de Belleval: M. le Président, je ne sais pas si je
comprends bien ce qui se passe de l'autre côté. Le recherchiste de
votre parti, qui, normalement, vous fournit les explications sur les aspects
techniques des projets de loi, ne vous a-t-il pas fourni les textes explicatifs
sur les aspects techniques de ces articles? Ne disposez-vous pas actuellement
des explications techniques qui s'adressent à ces articles? N'avez-vous
pas eu le temps d'examiner cela avant ou si vous n'avez pas eu les notes
explicatives que vous fournissent normalement les recherchistes qui
sont à votre dispostion et qui sont payés d'ailleurs par
les deniers de l'État pour vous fournir les services nécessaires
pour faire votre travail en commission parlementaire?
Modalités de transfert au RREGOP
La question est très simple. Vous demandez ce que veut dire
l'article 3. C'est un article très simple que normalement un
recherchiste explique sur le plan technique aux membres de l'Opposition quand
on étudie n'importe quel projet de loi, celui-ci en particulier; il
explique tout simplement qu'à l'avenir les gens pourront
transférer du Régime de retraite des enseignants ou du
Régime de retraite des fonctionnaires au RREGOP sans limite de
temps.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, je voudrais
signaler que le député de Vaudreuil-Soulanges qui, au nom du
Parti libéral, est censé être le porte-parole, en fait, sur
ce projet de loi, m'a demandé d'avoir des rencontres techniques avec le
personnel de la Commission administrative du régime de retraite et du
Conseil du trésor pour pouvoir se faire expliquer les aspects techniques
de chacun de ces articles, ce à quoi j'ai acquiescé
immédiatement. Ils ont eu effectivement, à ma connaissance, ces
rencontres et, par conséquent, tous les éléments
nécessaires pour leur permettre de comprendre comment était
rédigé le projet de loi, donc, pour pouvoir faire porter leurs
remarques sur les points essentiels. Par conséquent, M. le
Président, je n'ai pas d'objection à répondre aux
questions spécifiques sur le projet de loi, mais, au-delà de
ça, je ne pense pas le faire.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Westmount, sur l'article 3.
M. French: Oui et sur d'autres questions qui ont
été soulevées sur le processus des travaux de notre
commission, M. le Président. J'apprécie d'abord que le ministre
soit prêt à nous fournir des explications. Il y a effectivement un
problème, c'est que ni le ministre, ni le député de
Charlesbourg, je crois, n'ont eu l'expérience extraordinaire de
siéger dans l'Opposition à l'Assemblée nationale. Le
député de Charlesbourg, je m'excuse.
M. de Belleval: On n'a pas siégé comme
députés, mais on a l'expérience, effectivement, d'avoir
travaillé avec des députés de l'Opposition pour fournir
exactement les renseignements techniques dont l'Opposition a besoin pour faire
un bon travail.
M. French: Si le député de Charlesbourg est en
train de nous offrir le sous-ministre du Conseil du trésor pour nous
conseiller, je suis prêt n'importe quand.
M. de Belleval: On vous l'a offert. C'est ce que vient de dire le
ministre, président du Conseil du trésor, comme c'est normal,
d'ailleurs, dans des cas semblables. Pour des projets techniques, on fournit
toujours les services des fonctionnaires pour répondre aux questions
techniques, de façon à éviter des recherches fastidieuses
comme celles que mentionnait tantôt le député de
Sainte-Anne. Cela est tout à fait correct.
M. French: On apprécie beaucoup, d'ailleurs, qu'on puisse
discuter de ce sujet parce que le problème, effectivement, c'est que le
député de Vaudreuil-Soulanges est obligé d'être
à l'extérieur de Québec. Malheureusement, c'est le cas, vu
le grand nombre de projets de loi qui arrivent à ce point-ci de
l'année, nous n'avons pas à notre disposition les renseignements
techniques nécessaires.
M. de Belleval: Dans ce cas, c'est normal qu'on les fournisse
rapidement, parce que ce n'est pas très compliqué, de toute
façon.
M. French: Pour ma part, j'apprécierai les explications du
ministre qui ont jusqu'ici, sur les deux articles du projet de loi,
été très utiles. Si on pouvait procéder comme cela,
on est prêt à procéder comme cela.
M. Bérubé: Oui, je suis tout à fait
d'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que ça va dans
le cas de l'article 3?
M. Bérubé: II n'y a pas eu de questions sur
l'article 3, M. le Président. Je ne sais pas à quoi je
répondrais. Je peux vous en donner le sens, si vous voulez bien. Au
début de chaque article, je pourrais vous donner le sens de l'article et
je crois que cela pourrait permettre d'accélérer le travail.
Essentiellement, il s'agit pour les adhérents au Régime de
retraite des fonctionnaires et au Régime de retraite des enseignants de
pouvoir transférer au RREGOP.
Antérieurement, cette possibilité de transférer du
Régime de retraite des enseignants et du Régime de retraite des
fonctionnaires au RREGOP était limitée au 30 juin 1981. Nous
supprimons cette limitation du 30 juin 1981 pour permettre n'importe quand
à quelqu'un qui veut transférer d'un régime vers le RREGOP
de pouvoir le faire.
M. Fortier: Si vous le permettez, M. le
Président, ce matin ou cet après-midi, en réponse
à une question que j'avais posée, vous m'avez dit qu'à
partir du 1er janvier 1974, oui, à partir de 1973, c'est à ce
moment que les nouveaux employés, du moins, ou que la continuité
se faisait par le RREGOP. Quelles sont les raisons techniques qui pouvaient
pousser les gens à rester dans les vieux régimes de retraite?
Est-ce que le nouveau régime était plus avantageux? Est-ce qu'il
y avait des avantages pour certaines catégories d'employés de
rester dans les vieux régimes?
M. Bérubé: Oui, les anciens régimes de
retraite étaient beaucoup plus avantageux, comme nous l'avons
expliqué ce matin. Je dis "beaucoup plus avantageux"; ils étaient
plus avantageux, d'une part, parce que l'âge de la retraite était
avancé à 55 ans. Il y avait également une pension à
la veuve qui était plus généreuse, de même qu'aux
orphelins, je crois, pour une cotisation qui était même
inférieure à celle du RREGOP. En d'autres termes, on obtenait un
régime de retraite plus avantageux que le RREGOP à un coût
inférieur à celui du RREGOP. Or, à partir du moment
où, d'une part, nous gardons les avantages qui existaient dans le
Régime de retraite des enseignants et le Régime de retraite des
fonctionnaires, mais que nous exigeons le plein prix désormais pour ces
bénéfices tout en les partageant moitié moitié
comme dans le cas des autres régimes, évidemment, cela
entraîne une augmentation des cotisations de quelques points pour cent,
d'une couple de points pour cent, en pratique. Il peut alors devenir
intéressant pour quelqu'un qui commence à cotiser, par exemple,
ou qui ne cotise pas depuis très longtemps au RRE ou au RRF de passer au
RREGOP.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. Fortier:
Merci.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, quand j'ai étudié
ce projet de loi, j'ai vu que dans le RRE, le Régime de retraite des
enseignants, et le RRF, le Régime de retraite des fonctionnaires, il y
avait la retraite anticipée à 55 ans et aussi des
bénéfices au conjoint et aux orphelins, tandis que dans le
RREGOP, pour les employés du gouvernement et des organismes publics, ces
éléments n'existaient pas. Si quelqu'un opte pour changer et
participer au RREGOP, perd-il les droits acquis en vertu d'anciens
régimes? Tout de même, en vertu des anciens régimes, sa
prime était plus élevée que pour ceux qui étaient
déjà dans le RREGOP.
M. de Belleval: II perd les droits acquis...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: ... en vertu des anciens régimes.
M. Polak: Oui, mais il a payé plus, parce que quelqu'un
qui était dans le RRE ou le RRF payait plus que quelqu'un qui
était dans le RREGOP. Donc, cette personne, qui choisit maintenant de
participer au RREGOP et qui a tout de même payé une prime - j'ai
ici les chiffres, la cotisation actuelle est d'environ 1124,60 $ pour les deux
régimes, RRE et RRF, et cela descend maintenant à 1024,87 $ - va
être contente que sa prime soit moindre, mais, tout de même,
pendant des années, elle a payé une prime plus
élevée. De quelque manière que ce soit, les droits acquis
qu'elle a obtenus en payant une prime plus élevée vont-ils
être respectés ou est-ce une perte?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Sur les rentes au survivant, il
maintient ses droits. Le droit de prendre sa retraite à 55 ans, il le
perd.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. Polak:
Oui, je comprends.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Non, cela va.
Le Président (M. Bordeleau): Non? Cela va.
M. Sirros: Seulement une question. Est-ce que finalement le seul
avantage qu'aurait quelqu'un de transférer au RREGOP serait
effectivement la baisse de la prime? Pourquoi, si les avantages étaient
plus grands?
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: II peut y avoir d'autres raisons, par exemple, le
remboursement des cotisations. Dans le cas d'un fonctionnaire qui a moins de
dix ans de service, le remboursement des cotisations est obligatoire dans le
RRE ou le RRF. Dans le cas du RREGOP, le remboursement est facultatif, sauf
d'autres cas. En tout cas, c'est un aspect qui peut faire qu'à un moment
donné quelqu'un a intérêt à transférer du RRE
ou du RRF au RREGOP.
M. Sirros: Mais au fond, à l'heure actuelle...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier.
M. Sirros: ... il n'y a plus de nouvelles personnes qui peuvent
entrer dans le RRE, le Régime de retraite des enseignants. Ce sont
seulement les gens qui étaient là.
M. de Belleval: Le passage peut se faire seulement dans un sens,
c'est-à-dire du RRE ou du RRF vers le RREGOP.
M. Sirros: Cela ne s'alimente plus. Donc, c'est une population
qui diminue de plus en plus.
M. Polak: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Sainte-Anne.
M. Polak: ... tout de même, je veux établir le
principe que ceux qui ont participé aux vieux régimes RRE ou RRF,
par exemple, mon gendre qui fait partie du RRE parce qu'il a été
longtemps enseignant, tout de même, par ce projet de loi, le gouvernement
leur enlève quelque chose. C'est vrai que son conjoint, qui est ma
fille, et ses orphelins vont être protégés, mais il perd le
droit qu'il avait de prendre sa retraite à 55 ans. Ce droit existait
avant et il le perd maintenant.
M. de Belleval: Non, non, il n'est pas obligé de
transférer au RREGOP.
M. Polak: II n'est pas obligé, mais, s'il fait le
transfert et veut profiter d'une prime un peu réduite, à ce
moment-là, il perd l'avantage pour lequel il a payé. Donc, il y a
une certaine discrimination. Il faut être honnête et l'admettre.
(21 h 45)
M. de Belleval: C'est volontaire.
M. Polak: Oui, c'est volontaire, mais vous présentez une
formule assez attrayante parce que vous voulez vraiment que tous ceux qui sont
là participent au RREGOP. C'est l'idée en arrière de cela,
on peut le voir. J'ai même ici des dépliants qui ont
été envoyés aux enseignants, indiquant comment faire le
transfert. Il n'y a pas de doute que l'idée du gouvernement, c'est de
promouvoir le transfert de ces deux régimes au RREGOP. Vous voulez
vraiment arriver à un régime presque exclusif, sauf pour ceux qui
refusent, et la prime est réduite dans le RREGOP. Si quelqu'un opte pour
un transfert, il ne garde pas les droits acquis; donc, il y a une diminution
des droits acquis quelque part.
M. de Belleval: Oui, mais il choisit librement les avantages et
les inconvénients d'un régime ou de l'autre. Il fait la somme des
avantages et des inconvénients et il décide ensuite s'il est
mieux de transférer au RREGOP. Alors, s'il le fait, il n'est pas
obligé de le faire.
M. Polak: Quel sera l'avantage pour une telle personne d'opter
pour le RREGOP?
M. de Belleval: Je donnais tantôt un exemple: le
remboursement de ses cotisations ou bien la réduction de sa prime. Il
veut payer moins cher. Il se dit: Cela me va, une rente d'orphelin, moi, je
n'ai pas d'enfant -et le type est rendu à 45 ou 50 ans - je n'aurai
jamais besoin de cela, donc, ce n'est pas un bénéfice pour moi.
Par contre, je veux payer moins cher pour ma prime, je décide de
transférer. Il y a toutes sortes de raisons.
M. Polak: Quand il fait le transfert d'un régime à
l'autre, est-ce qu'on va lui rembourser la différence entre ce qu'il a
payé et ce qu'il aurait dû payer? Non. Donc, le gouvernement
pénalise quelqu'un...
M. de Belleval: On ne le pénalise pas puisqu'il n'est pas
obligé de transférer.
M. Polak: Non, il n'est pas obligé, je comprends, mais,
s'il veut rester dans l'autre régime, il faut qu'il paie plus.
M. de Belleval: II a toujours payé plus, c'est son
avantage. S'il veut payer moins, il transférera, mais il ne peut pas
manger à tous les râteliers ou, comme disent les Anglais, manger
son gâteau et l'avoir encore, il choisit.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que cela va pour
l'article 3?
M. French: Sur division.
Le Président (M. Bordeleau): Adopté sur division.
Article 4?
M. Bérubé: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, oui, sur
l'article 4.
M. Bérubé: ... conformément à
l'article 10 que nous venons de voir précédemment pour l'amender,
en permettant n'importe quand le transfert au RREGOP à partir des deux
autres régimes de retraite, sans date limite, l'article 4 signifie que
ce transfert au RREGOP devient effectif trois mois après la
réception de l'avis de transfert. Il s'agit tout simplement de
préciser les délais entre la réception d'un avis de
transfert du RRE ou
du RRF au RREGOP et le moment où le transfert se fait.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Westmount.
M. French: C'est pour que toute la paperasse soit
réglée. La seule chose qui pourrait arriver, c'est que le sujet
meure ou prenne une retraite surprise ou quelque chose comme cela, auquel cas,
il reste encore couvert par le plan précédent.
M. Bérubé: C'est bien cela. Votre sagacité,
M. le député de Westmount, me surprend.
M. Polak: M. le Président, j'ai une question.
Le Président (M. Bordeleau): Sur l'article 4, oui.
M. Polak: II y a tout de même une date qui est
fixée. Si celui qui contribue au régime n'opte pas pour le
changement, il ne peut plus le faire, ou est-ce que cette option, de laisser le
RRF pour le RREGOP, reste toujours ouverte?
M. Bérubé: C'est l'article précédent
que nous avons discuté.
Le Président (M. Bordeleau): L'article 3 vient
d'être adopté, M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: Non, non. Si vous aviez soumis un texte clair, en
donnant l'ancien texte et le nouveau, on aurait compris. Mais on était
fatigués, on travaille jusqu'à quatre heures du matin pour
comprendre vos lois. C'est cela, le problème. D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, cela va pour l'article
4.
Une voix: Oui.
M. French: Sur division.
Le Président (M. Bordeleau): Adopté sur division
toujours, oui. Article 5?
M. de Belleval: C'est un article de concordance.
M. Bérubé: Oui, c'est un article de concordance.
C'est .relié au nouveau partage des coûts. Attendez un peu, si
vous me parlez tous ensemble, j'ai deux oreilles.
M. Polak: C'est difficile, hein? Oui, c'est cela, c'est un projet
de loi difficile.
M. Bérubé: Nous avons une difficulté parce
que là il s'agit d'articles de concordance avec des articles qui vont
venir, l'article 17.
M. Polak: C'est cela.
M. Bérubé: Alors, je pense que le mieux, c'est de
vous donner...
M. Polak: C'est comme un frappeur au baseball, "240", "200".
M. de Belleval: À l'avenir, les coûts vont
être partagés 50-50.
M. Bérubé: Oui, voilà. Si vous reprenez
l'article 45 original, il était indiqué que, lorsqu'un
employé bénéficiait d'un congé sans solde, il
pouvait continuer à contribuer à son régime de retraite en
versant 240% des retenues qui auraient été effectuées s'il
n'avait pas été ainsi en congé. Pourquoi 240%? Parce que,
dans le RREGOP, l'employé versait 100% et l'État 140%; donc, la
somme des deux donnait 240%. Dans la mesure où maintenant, lorsque
l'employé verse 100%, l'État verse également 100%,
advenant un congé sans solde, il n'est plus normal de lui faire verser
240%, mais bien 200%.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? L'article 5 est-il
adopté?
M. French: Sur division.
Le Président (M. Bordeleau): Adopté, sur division.
Article 6?
M. Bérubé: II s'agit ici de modifier les taux de
cotisation pour en arriver à calculer la contribution de
l'employé au RREGOP. Dans la mesure où nous avons réduit
les bénéfices du RREGOP et diminué la part du gouvernement
au régime de retraite, il était nécessaire de
réévaluer les taux de cotisation et c'est ce que nous avons
à l'article 6 qui modifie l'article 47. La retenue est maintenant de
7,10% sur "le traitement admissible de tout employé qui excède
35% du maximum des gains admissibles" et l'exemption de 35% est
appliquée au prorata du nombre de périodes de paie au cours d'une
année, par opposition à 7,5% antérieurement. En d'autres
termes, le taux de cotisation baisse de 7,5% à 7,1%.
M. Fortier: Mais, en plus, il contribue également à
la Loi sur le Régime de rentes du Québec.
M. Bérubé: Oui.
M. Fortier: Et cela lui fait un total de 7,10% plus 2% ou 3%, je
ne me souviens pas.
M. Bérubé: 7,8% pour l'employé.
M. Fortier: Est-ce que c'est défini plus loin ce que
l'employeur va fournir? C'est pour l'employé ici.
M. de Belleval: L'employeur paie exactement la même chose
puisque le coût maintenant est de 50-50.
M. Fortier: C'est 50-50. Maintenant, ici, il est indiqué
qu'il y a une retenue de 7,10% qui est faite sur le traitement admissible qui
excède 35%. Sur ces 35%, est-ce qu'il y a une contribution qui est
calculée? Vous dites que c'est calculé à 7,10% sur le
montant admissible qui dépasse 35%, mais sur ces 35%?
M. Bérubé: Ils ne paient rien. M. Fortier:
Ils ne paient rien.
M. Bérubé: C'est finalement le Régime de
rentes qui couvre, si je comprends bien.
M. Fortier: Ah oui! Je comprends. Alors, vous dites, de cette
façon-là, que vous prenez la relève du Régime de
rentes.
M. Bérubé: II s'agit d'un régime
supplémentaire de retraite.
M. Fortier: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Oui, sur l'article
6, M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: Si j'ai bien compris le système, auparavant
cette contribution du gouvernement était de sept douzièmes et la
part de l'employé de cinq douzièmes. C'est devenu maintenant
50-50. Comment est-ce que cela se compare avec le secteur privé en
général?
M. Bérubé: C'est ce dont nous avons discuté
cet après-midi; c'est sensiblement aligné sur le secteur
privé. Nos régimes de retraite contribuaient pour à peu
près 2,7% de l'écart entre le secteur public et le secteur
privé à l'avantage du secteur public et, en se réalignant
de cette façon-là, nous continuons à avoir un
régime de retraite plus avantageux que ceux du secteur privé
puisque, dans le secteur privé, il s'agit presque tout le temps de
régimes de retraite à prestations indéterminées
dont les caractéristiques de prestation sont nettement
inférieures en général à ce qui est versé au
gouvernement. Donc, le régime de retraite du gouvernement continue
à être beaucoup plus avantageux que ceux du secteur privé,
mais nous réduisons tout de même de presque 3% l'écart de
rémunération avec le secteur privé grâce à
cette réforme.
M. Polak: J'ai une autre question à poser au ministre. Je
suis content de noter que le ministre redevient ce qu'il est vraiment, c'est un
homme qui veut renseigner.
M. Bérubé: C'est directement proportionnel à
votre attitude, M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: Oui, je note cela, on s'entend bien, M. le ministre;
ça prend un peu de temps. Qu'est-ce qui arrive à un
employé qui est dans ce régime-là et qui, à un
moment donné, quitte la fonction publique et va travailler, disons, dans
le secteur privé? Qu'est-ce qui arrive au point de vue de la protection
du fonds de pension?
M. Bérubé: Le problème de la
transférabilité est un problème très réel.
On n'a pas d'entente de transférabilité avec le secteur
privé. Et nous avons, d'ailleurs, eu une longue discussion sur les
problèmes de transférabilité cet après-midi avec
même le secteur public en présence du député de
Louis-Hébert.
M. Polak: En principe, c'est préférable pour un
employé s'il quitte la fonction publique de ne rien faire et d'attendre
jusqu'à l'âge de 65 ans.
M. de Belleval: Non.
M. Polak: Qu'est-ce qui est préférable pour
l'individu en question? A-t-il le droit de dire: Je quitte, je vais
récupérer ce que je peux et m'arranger ailleurs?
M. de Belleval: S'il aime mieux placer son argent sur un cheval
de course et s'il pense qu'il va faire plus d'argent comme cela que de laisser
son fonds s'accumuler, il peut le faire.
M. Fortier: Cela dépend de son âge; passé 45
ans, il n'a pas le droit de le faire.
M. de Belleval: Ensuite, s'il a plus de 45 ans et 10
années de service, à ce moment, on va le lui rembourser et, s'il
a moins de deux ans, on va le lui rembourser et, sinon, il décide ce
qu'il aime le mieux.
M. Bérubé: II peut laisser ses cotisations dans son
régime de retraite et obtenir une rente différée à
65 ans. La somme qu'il y a investie accumule des intérêts et,
éventuellement, il retire une rente sur l'argent qu'il a versé.
Ou il peut choisir...
M. Polak: À ce moment, j'espère que
c'est en dollars canadiens.
M. Bérubé: Écoutez, vous savez le
problème du dollar canadien. Je pourrais, d'ailleurs, vous donner un
échantillon que nous traînons tous; malheureusement, je n'en ai
pas.
M. Polak: J'ai plus confiance dans le dollar canadien qui baisse
que dans le dollar québécois qui n'est pas encore
établi.
M. Bérubé: Vous vous souvenez lorsque le Parti
libéral se promenait avec des faux dollars montrant le prix du
séparatisme et indiquait 0,85 $ pour un PQ, comme on l'expliquait
à l'époque. Je ferai remarquer que le PET vaut maintenant 0,78
$.
M. Polak: Pourriez-vous nous en donner l'assurance, M. le
ministre, parce que moi, j'ai une fille qui est mariée à un
enseignant? Tout de même, on se pose la question: Qu'est-ce qui arrive si
ces gens quittent la fonction publique, parce qu'ils y pensent? Je sais que le
ministre aime les discussions sur le plan constitutionnel.
M. Bérubé: En vertu de l'article 80, le
député de Westmount avait accusé des députés
d'être en conflit d'intérêts. Nous venons de
découvrir que le député de Sainte-Anne a une fille qui a
épousé un enseignant et il vient de souligner son
intérêt particulier pour la question. Est-ce que le
député de Westmount s'adressait au député de
Sainte-Anne en portant une accusation formelle contre son collègue de
Sainte-Anne? J'aimerais avoir un éclaircissement sur la question, M. le
Président.
M. French: Je suis très content que le ministre me donne
l'occasion...
M. Polak: II pensait que j'étais trop jeune pour avoir des
enfants mariés.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Westmount.
M. French: Mon seul souci à ce moment a été
d'exposer la question sans porter aucune accusation, et je n'en porte pas plus
maintenant. Je dis tout simplement que, dans la mesure où un individu
autour de cette table est encore assujetti à un tel régime, qu'il
soit en faveur ou non du projet de loi, moi, personnellement, je pense qu'il
faut qu'il s'interroge si c'est approprié qu'il continue et même
si c'est approprié qu'il vote sur le projet de loi. C'est cela que j'ai
dit et je continue de le croire. Je ne porte pas d'accusation, je voulais
clarifier cela.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier.
M. Sirros: Le ministre doit être d'accord avec mon
collègue de Westmount étant donné qu'il s'interroge sur le
fait qu'un membre peut avoir une fille qui est mariée avec quelqu'un qui
a un intérêt ici. À ce moment, le ministre devrait d'autant
plus, avoir le même souci par rapport aux gens qui sont eux-mêmes
impliqués directement, peut-être.
M. de Belleval: Est-ce qu'on peut adopter l'article 6 maintenant,
M. le Président?
Le Président (M. Bordeleau): Sur division. L'article 6 est
adopté sur division. J'appelle l'article 7.
M. Bérubé: "L'article 50 de cette loi est
abrogé." Il s'agit tout simplement de reporter cet article dans cette
autre section, qui s'intitulera Évaluation actuarielle et partage du
coût du régime, que nous verrons plus loin.
M. de Belleval: Les articles 16 et 17.
Le Président (M. Bordeleau): Ça va?
Adopté sur division.
M. French: Adopté.
Le Président (M. Bordeleau): L'article 8?
Indexation de la pension annuelle (moins 3%)
M. de Belleval: C'est le coeur du projet de loi, M. le
Président. (22 heures)
M. Bérubé: Essentiellement, M. le Président,
j'attirerais votre attention sur le premier et le deuxième
alinéas qui, je pense, mettent en relief les deux principes fondamentaux
de ce projet de loi. À l'alinéa 1, on indique bien que la partie
attribuable de la rente à du service antérieur au 1er juillet
1982 sera indexée de l'indice des rentes déterminé par
cette loi. Donc, toutes les cotisations antérieures au 1er juillet 1982
donneront droit à une rente, laquelle sera pleinement indexée. De
cette façon, on protège entièrement les droits acquis.
Pour la partie attribuable à du service postérieur au 30 juin,
donc, à partir du 1er juillet 1982 et, évidemment, dans la mesure
où ce service est nécessaire pour atteindre le maximum de 35 ans
de service prévu dans le régime, la rente qui sera gagnée
par ces cotisations sera indexée à l'indice des prix à la
consommation, moins 3%.
M. Fortier: Ce qui veut dire...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: ... que, pour le calcul de la pension qui est le
pourcentage des cinq meilleures années, c'est le pourcentage des cinq
dernières années de 1977 à 1982 qui est fixé.
M. Bérubé: C'est cela.
M. Fortier: Et à partir de maintenant, le calcul sera fait
sur la nouvelle base.
M. Bérubé: Non, non, ce sera toujours...
M. Fortier: C'est comme deux fonds de retraite tout à fait
séparés.
M. Bérubé: ... au moment de la retraite, la rente
calculée sur la moyenne des cinq dernières années. Le
RREGOP fonctionne de la façon suivante: vous accumulez 2% par
année de service jusqu'à concurrence de 35 ans; les 2% de rentes,
qui sont les 2% de la moyenne des cinq dernières années acquises
avant le 1er juillet, seront indexés entièrement à
l'indice des prix à la consommation. À titre d'exemple, prenons
un cas numérique. Si vous avez contribué 20 ans au RREGOP avant
le 1er juillet, vous aurez donc droit à 40% pleinement indexés
et, si vous continuez à souscrire à votre régime de
retraite pendant quinze autres années, vous aurez droit à 35%
indexés à l'indice des prix à la consommation, moins
3%.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Bérubé: Excusez-moi, quinze ans à
30%.
M. Polak: Pour prendre le même exemple, - je n'ai pas
d'opinion fixe là-dessus et je voudrais seulement me faire expliquer par
le ministre - si quelqu'un a pris sa retraite l'année dernière,
en 1981, il va bénéficier de la pleine indexation et ne va pas
être pénalisé par le moins 3%. Si quelqu'un d'autre prend
sa retraite trois ans plus tard, au moins pour les trois années, cela va
être moins 3%. N'y a-t-il pas un peu d'arbitraire là-dedans? On
demande tout de même à la population, en tout cas, à ces
fonctionnaires qui sont couverts par cette loi, à partir du 1er juillet,
que tout le monde ait l'indexation pleine moins 3%. Donc, n'y a-t-il pas une
catégorie qui est privilégiée par rapport à une
autre catégorie? La prime va être la même et elle est
même un peu augmentée. Donc, celui qui va recevoir moins 3% et qui
a maintenant 62 ans va payer pendant trois ans plus que l'autre et va recevoir
moins 3%. Je demande seulement, au point de vue de la parité du
traitement et de l'égalité, s'il n'y a pas de l'arbitraire
là-dedans. Cela ne bénéficie-t-il pas à quelqu'un
qui aurait heureusement 65 ans avant le 1er juillet? Cela ne va-t-il pas
pénaliser légèrement - parce que je comprends qu'ils sont
protégés pour l'année qu'ils ont acquise et qu'ils le sont
pour l'avenir - quelqu'un qui a par exemple, 55 ans maintenant, quand on
compare les deux?
M. Bérubé: Non, parce que les cotisations ont
baissé en conséquence.
M. Polak: Oui, mais je n'ai pas vu cela. Les cotisations ont
baissé.
M. Bérubé: Oui. La cotisation a baissé.
C'est dommage, le député de Sainte-Anne...
M. Polak: M. le Président, je sais que je ne suis pas
aussi vite qu'un ingénieur, mais je suis toujours prêt à
être convaincu.
M. Bérubé: ... est passé vite sur l'article
6. À l'article 6, nous avons indiqué que la cotisation est de
7,10% sur le traitement admissible de tout employé qui dépasse
35% du maximum des gains admissibles. Si nous n'avions pas fait la
réforme, il aurait fallu hausser à 7,95%. Donc, il y a une
réduction du taux de cotisation dans le cas du RREGOP. Il obtient ce
qu'il paie, finalement.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Laurier.
M. Sirros: L'arbitraire, M. le Président, ne se
trouverait-il pas dans le fait que, de façon unilatérale, le
gouvernement décide lui-même quelle serait l'indexation, quel
serait le taux de la rente et quel serait le paiement? N'est-il pas vrai que,
dans le passé, ce genre de choses se discutait entre les partenaires qui
étaient les employés de l'État?
M. Bérubé: II est vrai que cet après-midi et
ce matin nous en avons longuement discuté.
M. Sirros: Les 3% sont-ils basés uniquement sur les
besoins financiers encourus par le gouvernement après six ans
d'administration?
M. Bérubé: C'est basé sur plusieurs
études actuarielles qui tendent à démontrer que les
besoins des personnes se modifient avec l'âge. Ce que nous appelons
l'indice des prix à la consommation, c'est l'indice d'augmentation des
prix pour la consommation typique de la famille canadienne ou de la famille
bourgeoise, comme dit le député de Westmount; enfin, je ne dis
pas qu'il l'a dit. C'est donc basé sur
un type de consommation prédéterminé. À
titre d'exemple, le panier de provisions pour une famille de quatre est,
évidemment, différent du panier de provisions de personnes de 70
ans et plus qui consacrent moins d'argent à la nourriture, qui
consacrent moins d'argent aux dépenses pour l'automobile.
M. le Président, j'ai l'impression que le député de
Sainte-Anne est en train de soudoyer le député de Terrebonne en
lui offrant des cigarettes!
M. Polak: On a une relation spéciale!
M. Blais: Eh!
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Polak: M. le Président, M. le député de
Terrebonne dit: Eh! Il est gêné. Voulez-vous enregistrer? Je ne
veux pas que mes paroles soient mal interprétées.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous ferai remarquer que
le journal des Débats, c'est écrit et non pas
télévisé.
M. Bérubé: M. le Président, le
caractère échevelé de nos deux députés
m'inquiète! Il existe une sorte de, disons, fraternité qui, je
pense, est de mauvais aloi. Je voudrais recommander au député de
Terrebonne de n'accepter qu'avec la plus grande réticence les offres de
cigarettes venant du député de Sainte-Anne!
M. Blais: Est-ce que je ne peux pas faire une petite mise au
point, M. le Président?
M. Bérubé: Oui, après. Pour en revenir
à la question du député de Sainte-Anne, c'est basé
sur une modification des patrons de consommation qui font que, d'une part, il
faut modifier le taux d'indexation pour maintenir le pouvoir d'achat. D'autre
part, les caractéristiques même de la consommation font que les
besoins décroissent aussi dans le temps. Il va de soi qu'une personne de
90 ans ne consomme pas sur la même base qu'une personne de 65 ans. Donc,
sur cette base, les études actuarielles ont amené à
conclure qu'une indexation à l'indice des prix à la consommation
moins 3% permettait de protéger intégralement le pouvoir
d'achat.
Le Président (M. Bordeleau): On va revenir au
député de Laurier. M. le député de Laurier.
M. Sirros: C'était la question que j'avais posée.
Vous êtes finalement en train de nous dire: Quand les gens vont prendre
leur retraite, à 65 ans, on peut déjà déterminer
qu'ils n'auront pas besoin de l'indexation entière pour maintenir leur
pouvoir d'achat. Peut-on se fier sur les prédictions qui, il y a
quelques années, avaient été faites par le même
gouvernement sur le taux d'inflation, etc., au moment où vous avez
signé certaines conventions collectives que vous reniez aujourd'hui?
Avec quelle assurance pouvez-vous dire ça, aujourd'hui, pour les
prochains 10, 15 ou 20 ans, quand vous avez fait les mêmes
déclarations, il y a à peine deux ans et demi? C'était sur
un autre secteur, évidemment, mais c'étaient à peu
près les mêmes déclarations qui disaient que le taux
d'inflation sera de X et qu'on avait bien fait de signer ces ententes, alors
que, deux ans et demi plus tard, vous venez nous dire que ce que vous avez fait
à ce moment-là n'avait pas de bon sens.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Je vois le député
d'Outremont littéralement s'arracher les cheveux devant son
collègue! Enfin, non, la question de M. le député de
Laurier...
M. Fortier: Non, je ne m'arrache pas les cheveux, ils sont bien
en place; je ne les perds pas, moi!
M. Polak: On ne perd jamais ses cheveux!
M. Bérubé: M. le Président, le
député de Laurier confond deux choses. D'une part, il confond une
analyse statistique basée sur les comportements de consommation et,
d'autre part, les prévisions de l'indice des prix à la
consommation pour les prochaines années. Il est bien évident que
nul ne peut prédire quel sera l'indice des prix à la consommation
dans cinq ans ou dans dix ans, pas plus que nous ne pouvons savoir ce qu'il
sera dans deux ans. D'ailleurs, lorsque j'écoute les organismes de
prévisions économiques qui s'affairent
régulièrement à nous fournir des prévisions, on
doit constater que, à tous les trois mois, ils révisent leurs
prévisions. C'est donc difficile même de prédire
l'inflation de l'année courante. Prédire une valeur
précise de l'inflation ou de la croissance du produit intérieur
brut est une opération extrêmement délicate; je ne dirais
pas impossible, mais qui frise l'impossibilité. Par contre, mesurer des
comportements passés et analyser quels sont les rapports qui existent
entre les taux d'indexation requis pour des personnes d'une catégorie
d'âge donnée relève des études actuarielles qui sont
une science beaucoup plus rigoureuse et qui permettent des prévisions
relativement plus précises.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, dans le même ordre
d'idées, on connaît maintenant le taux de l'inflation, l'indice
des prix à la consommation. Je me demandais: Est-ce qu'il ne faut pas
fixer peut-être un taux variable au lieu de plafonner, par exemple,
l'indice des prix à la consommation à 11% d'augmentation, par
exemple? Qu'est-ce qui arrive si, la semaine prochaine, cela devient 15% ou 5%?
Si c'est 5%, 3% est très grand. Si c'est 15%, peut-être que cela
va augmenter de 3% à 4% ou à 5%. Il n'y a rien de prévu
dans la loi pour ajuster cela. La loi dit carrément moins 3%. Moins 3%
sur 5%, c'est grave; moins 3% sur 15%, peut-être faudrait-il aller plus
loin. Est-ce qu'il n'y a pas moyen d'être flexible là-dedans en
disant que ceci, au lieu d'être plafonné à tant, va
être ajusté au fur et à mesure, une fois par année,
par exemple, au 1er janvier de chaque année?
Un grand bouleversement dans les chiffres pourrait arriver, tout de
même. Aux États-Unis, on a pas mal contrôlé ce taux
d'inflation, beaucoup plus qu'ici, et ils sont rendus à beaucoup moins
que 11%. Je pense qu'ils sont à peu près à 5% ou 6%,
tandis que, dans d'autres pays de l'Ouest, en Europe, c'est même
au-dessus de 11%. Donc, on ne sait pas ce qui arrivera au Canada. Ce n'est pas
que je n'ai pas confiance au régime fédéral, contrairement
au ministre, mais on ne sait jamais ce qui peut arriver. Qu'est-ce que l'on
fera s'il y a un grand virage, soit en haut ou en bas de ce taux d'inflation?
Lorsque vos actuaires ont calculé cela, est-ce qu'ils ont pris en
considération que l'indice des prix à la consommation va rester
le même que maintenant ou est-ce qu'ils ont prévu une baisse ou
une augmentation? Cela peut fluctuer énormément.
Deuxièmement, M. le Président, je veux que le
député de Terrebonne, qui voulait intervenir auparavant, ait le
droit d'intervenir concernant l'échange de cigarettes qu'on a eu.
Le Président (M. Bordeleau): S'il le veut. Il
décidera lui-même. M. le ministre.
M. Bérubé: La raison pour laquelle ceci est inscrit
dans la loi, c'est, évidemment, pour enlever l'arbitraire que pourrait
introduire la possibilité pour un gouvernement de changer annuellement
son taux d'indexation. Je soulignerais - d'ailleurs, je l'ai fait à
l'Assemblée nationale - que plusieurs provinces du Canada n'ont pas de
taux d'indexation prévu dans la loi et que c'est le gouvernement qui
décide annuellement de ce que sera le taux d'indexation. Je crois que
ceci peut entraîner, à mon point de vue, en tout cas, un certain
arbitraire gouvernemental qui ne m'apparaît pas désirable.
Dans la mesure où 40% des besoins essentiels sont comblés
par les prestations de sécurité de la vieillesse existantes qui,
elles, sont indexées intégralement, donc, dans la mesure
où 40% des besoins essentiels sont pleinement indexés, ce que les
études actuarielles ont montré, c'est que les premiers 3%
d'inflation n'affectaient pas vraiment les besoins des citoyens, parce que ces
besoins des citoyens diminuaient de 3% eux-mêmes. Donc, on annule cette
diminution des besoins avec l'âge en ne compensant pas pour les premiers
3% d'inflation, mais il va de soi que, si l'inflation montait à 15%, ce
serait 15% moins 3%, donc 12% et, si l'inflation montait à 20%, ce
serait 20% moins 3%, donc 17%. Si l'inflation était de 3%, ce serait 3%
moins 3%, dont 0%. En d'autres termes, les premiers 3%...
M. Blais: Si c'était 2%, ce serait moins 1%.
M. Bérubé: Non. C'est l'excédent. On dit
l'excédent de 3%. Alors, on dit que les premiers 3% d'inflation ne sont
pas compensés.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. M. le
député Westmount.
M. French: Je vais juste enchaîner. Je pense que le
député de Sainte-Anne suggérait autre chose. Je veux bien
qu'il n'y ait pas d'arbitraire. Je sais qu'il y a de gros désavantages,
mais il suggérait une formule où le pourcentage de
différence entre l'indexation et le taux d'inflation serait
lui-même fonction du niveau de l'inflation dans une année
donnée. Il voulait dire que 3% moins 7%, c'est différent de 3%
moins 20%. C'est juste cela qu'il voulait faire valoir. Par contre, je
présume que cela créerait des problèmes extraordinaires au
point de vue des prévisions, au point de vue des simulations des
déficits actuariels. Cela créerait un cauchemar, je
présume. (22 h 15)
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: Par exemple, exprimé en pourcentage du
taux d'inflation plutôt qu'en seuil absolu, effectivement, cela causerait
de fichus problèmes de prévisions.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: J'aurais une question un peu technique.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: J'aimerais vous citer l'étude de
M. Calvert, au chapitre IV, portant sur "Pension and inflation" où il
conclut: "The basic 40% must be fully indexed. The balance needs not to be
protected only with respect to an inflation in excess of 3,3% a year". En
d'autres termes, les études actuarielles qui existent
présentement, j'imagine sur la base de l'inflation avec laquelle on a
été habitué de vivre au cours des dernières
années - je ne parle pas des dernières années, je parle de
la décennie -indiqueraient bien que 3,3% seraient raisonnables. Nous
n'avons pas pris 3,3%; nous avons pris 3%, en arrondissant.
D'ailleurs, cela confirme les études qui ont été
faites sur la propension marginale à épargner des
retraités dont la pension est pleinement indexée, où on
constate qu'il y a 3% de propension marginale à l'épargne qui
caractérisent justement une indexation trop forte.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Juste une question de définition. Le ministre
disait que l'indexation va se faire selon l'indice des prix à la
consommation. Je ne vois pas cela dans l'article 77.
M. Bérubé: Oui, je m'excuse.
M. Fortier: M. le ministre, vous avez dit, tout à l'heure,
que l'indexation va se faire selon l'indice des prix à la consommation.
Dans le premier et le deuxième paragraphes, on parle, pour la partie
attribuable à du service antérieur, "de l'indice des rentes
déterminé par cette loi." On réfère à quoi,
par l'indice des rentes? Dans le deuxième paragraphe, on parle de
"l'excédent de cet indice"; de quel indice parle-t-on? On ne parle pas
de l'indice des prix à la consommation.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: L'article 119 de la Loi sur le
Régime de rentes du Québec prévoit justement la
méthode d'indexation du Régime de rentes du Québec. Notre
loi constituant le RREGOP n'a pas elle-même de définition propre
quant à la méthode d'indexation et réfère à
la Loi sur le Régime de rentes du Québec.
M. Fortier: Et la Loi sur le Régime de rentes du
Québec s'appuie en grande partie sur l'indice des prix à la
consommation.
Une voix: L'indice des prix à la consommation du
fédéral. Statistique Canada, au fédéral.
M. Fortier: L'indice des prix à la consommation pour le
Québec ou pour l'ensemble du pays?
Une voix: Pour l'ensemble du Canada. M. Fortier: Pour
l'ensemble du Canada. Une voix:Oui.
M. Fortier: Pourquoi ne pas prendre l'indice des prix applicable
au Québec seulement?
M. Bérubé: Je pense que c'est en conformité
avec le régime fédéral. Il y a un problème de
conformité avec le régime fédéral.
M. Fortier: Oui, d'accord.
M. Bérubé: Je comprends votre déception et
votre attachement au fédéralisme, mais que voulez-vous, M. le
député d'Outremont, effectivement, nous sommes encore contraints
par ces limitations fort désagréables. Votre moue en a dit plus
long que vos paroles.
M. Fortier: Compte tenu que plusieurs personnes doivent se
mouvoir vers d'autres régions du Canada à cause d'un manque de
travail ici, je crois que c'est une très bonne contrainte.
M. Bérubé: Les journaux nous rappellent justement
que, pour ceux qui espèrent faire fortune en quittant le Québec
pour aller travailler à l'étranger, grâce aux politiques
dynamiques, dans le domaine énergétique, mises en place par le
gouvernement fédéral, il n'y a plus personne qui peut se trouver
de l'emploi en Alberta à l'heure actuelle.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Revenons les deux pieds sur terre, M. le
député de Matane. Je sais que, quand le ministre part sur une
tangente fédéraliste, on est bon pour jusqu'à minuit. Je
le sais par expérience, à la commission des engagements
financiers. Je veux éviter cela, nous voulons étudier ce projet
de loi.
J'aimerais poser une question au ministre. Quand les actuaires de son
ministère ont préparé les prévisions, ont-ils tenu
pour acquis que le chiffre de l'inflation, ou ce qu'on appelle l'indice des
prix à la consommation, va rester à peu près au même
niveau? Est-ce qu'on a travaillé sur un chiffre de 10%, 10,5%, 11% ou si
on a pris en considération une fluctuation possible? Qu'est-ce qu'on a
fait? Qu'est-ce qu'on a pris? J'aimerais bien savoir ce que prévoient
les actuaires de votre ministère pour
quelques années à venir, une moyenne.
M. Bérubé: II me fait plaisir de dire au
député de Sainte-Anne qu'en 1995, on prévoit un taux
d'inflation de 5%.
M. Polak: Je ne parle pas de 1995, savez-vous, M. le ministre,
excusez-moi...
M. Bérubé: Vous savez, notre boule de cristal dit
5% en 1995 et j'ai la confiance la plus absolue dans ses prévisions.
M. Sirros: De la façon dont les choses vont...
M. Polak: Pour 1983, 1984, qu'est-ce qu'on a appris? Pour
l'année 1983, qu'est-ce que vos actuaires ont prévu? Que ce
serait stationnaire, que cela va descendre ou monter beaucoup?
M. Bérubé: Leurs prévisions sont beaucoup
plus certaines dans l'avenir lointain.
M. Polak: M. le ministre, j'aimerais avoir votre réponse
parce que je suis certain qu'en 1983 je vais vous rappeler ce que vous avez
répondu. Je ne vous demande pas d'être capable de regarder dans
l'avenir, c'est très difficile, mais tout de même les
études actuarielles - on parle de quelque chose de sérieux - sont
basées sur des prévisions. Qu'est-ce qu'elles ont prévu
pour 1983, 1984? Je me rappelle qu'on a eu une discussion au point de vue des
frais d'intérêt du Stade olympique, les prévisions pour
quelques années à venir, ils nous ont donné des chiffres.
Quels sont vos chiffres pour 1983, 1984, 1985?
M. Bérubé: Effectivement, je dois vous avouer que
ce qui permet à nos actuaires de retomber sur leurs pattes, ce n'est pas
tellement qu'ils sont capables de prévoir avec précision le taux
d'inflation, mais que le rendement sur les investissements des fonds
dépend évidemment aussi de l'inflation. Fort heureusement,
lorsque l'inflation croît, le rendement sur l'investissement
s'accroît également et il y a une sorte d'autocompensation des
erreurs faites sur les taux d'inflation.
M. Fortier: C'est un bon exemple. M. Bérubé: Oui,
un excellent exemple.
M. Polak: Si vous vous basez sur les mêmes principes que le
ministre des
Finances, je n'ai pas beaucoup confiance dans les chiffres.
M. Bérubé: D'ailleurs, cela ne me fatigue jamais
beaucoup, les erreurs sur les prévisions d'inflation parce que, dans la
mesure où nos revenus s'accroissent avec l'inflation en même temps
que nos dépenses, en général, on retombe sur ses pattes au
bout du compte. Donc, une erreur sur les prévisions d'inflation n'est
pas catastrophique dans ces études actuarielles, sauf qu'il faut
évidemment, à intervalles réguliers, refaire les
études pour corriger le tir. Je ne pourrais pas vous dire quel est le
pourcentage qui a été utilisé par ces études
brillantes des actuaires, en général de firmes privées,
qui font ces calculs.
M. Polak: Est-ce qu'on peut dire qu'on a deviné... Le
ministre, pendant qu'il donne sa réponse, est en train de regarder
encore une fois le Journal de Québec, page à page, très
rapidement, nerveusement. Il pense encore à la guerre des Malouines! Je
pose des questions très raisonnables pour ceux qui vont recevoir une
pension de l'État.
M. Bérubé: Voyez-vous, M. le Président, le
dollar continue sa course folle et il baisse à 0,7855 $. De fait, c'est
extrêmement difficile d'aller prédire jusqu'où
l'économie pourra s'effondrer, jusqu'où l'inflation pourra aller.
Je laisse ce genre de calculs à des actuaires. La seule chose que je
peux vous dire, c'est qu'en 1995, et croyez-moi, l'inflation sera de 5%.
M. Polak: M. le Président, ni moi ni vous ne serons
ici.
M. French: M. le Président, je me demande si le même
genre de considération empêcherait le ministre de répondre
à la question suivante. Évidemment, ce qui est contenu dans
l'article 8 n'a pas tellement d'impact sur les quelque 140 000 000 $ que le
ministre va récupérer avec le projet de loi no 68 cette
année. Mais cela doit avoir un impact très important sur le
déficit actuariel du plan. Est-il en mesure de nous dire quelques mots
là-dessus ou est-ce que c'est une question qui exige trop
d'hypothèses ou trop de présomptions?
M. Bérubé: On me souligne, effectivement, c'est
parfaitement exact, qu'il n'a pas d'impact sur le déficit actuariel
parce que, dans la mesure où on maintient les droits acquis, on
maintient aussi le déficit actuariel.
M. French: D'accord, mais sur la croissance du déficit
actuariel, il doit avoir un impact.
M. Bérubé: Non, parce que ce que nous faisons,
c'est que nous ajustons les taux de cotisation de manière qu'il n'y ait
pas de croissance du déficit actuariel. Non seulement ça, mais
également l'opération qui est en cours, c'est une
résorption du déficit
actuariel sur 50 ans. Donc, dans le temps, le déficit actuariel
va se résorber et nous prenons les moyens pour qu'en ajustant les
cotisations, ce déficit actuariel ne puisse pas s'aggraver.
Là-dessus, je partage entièrement la préoccupation du
député de Sainte-Anne: Qu'arrive-t-il avec, par exemple, le taux
de rendement des placements de la Caisse de dépôt? Qu'arrive-t-il
avec l'inflation? Qu'arrive-t-il avec le taux de rendement des obligations
d'épargne du Québec? Qu'arrive-t-il avec - je ne sais pas, moi -
l'évolution du taux de mortalité par suite de nos mauvaises
tendances à abuser de la cigarette et de la pipe, par exemple?
M. de Belleval: Pas de la pipe.
M. Bérubé: De la cigarette essentiellement.
Modifiant, évidemment, les conditions de vie, modifiant l'expectative de
vie, modifiant l'ensemble des paramètres, il faut continuellement
réévaluer, actuariellement parlant, le coût des
régimes de retraite et ceci amène à des
réévaluations de cotisations. D'ailleurs - nous le verrons plus
loin - dans la loi même, nous prévoyons des mécanismes de
révision des taux de cotisation.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, j'ai une question
additionnelle. Si j'ai bien compris, on parle de moins 3%, mais, l'année
prochaine ou dans deux ans, rien n'empêche le ministre d'amender ce
projet de loi no 68 pour augmenter le déductible de 3% à 5%.
M. Bérubé: Ah! oui, par exemple, dans sept, huit ou
dix ans, effectivement, comme gouvernement, nous pourrions décider de le
faire!
M. Polak: Non, je parle du temps où vous serez encore ici;
dans un an ou deux au plus, vous pourriez augmenter le déductible de 3%
à 5%. Je prévois cette possibilité. Il faut, tout de
même, qu'on avise nos commettants. Il nous disent: Bon, c'est moins 3%;
au moins, je suis certain que, d'ici la fin de mes jours, il y aura un
déductible de 3%. Mais en discutant ici, vous êtes assez
honnêtes pour nous dire que cela se passe aujourd'hui. Si, l'année
prochaine, il y a un grand changement, comme je le dis, une fluctuation, cela
peut monter encore et on sera obligé d'amender la loi, peut-être
d'augmenter cela à moins 5% pour la catégorie des malheureuses
victimes de l'année 1983, au 1er juillet.
M. Bérubé: M. le Président, j'essaie de le
retrouver. Oui, c'est bien cela, l'article 168 de notre règlement dit
qu'une question est irrecevable si elle contient une hypothèse. Comme la
question du député de Sainte-Anne contient essentiellement une
hypothèse, elle est irrecevable. Au suivant.
M. Polak: On va vous rappeler l'hypothèse l'année
prochaine.
M. Fortier: Sur division.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, l'article 8 est
adopté sur division. Article 9?
M. Fortier: À l'article 9, il serait bon encore que le
ministre nous donne des explications parce qu'on réfère à
une annexe.
M. Polak: On n'est pas encore rendu là, c'est 77.1
M. Fortier: Non, c'est l'article 8.
Le Président (M. Bordeleau): On a adopté l'article
8.
M. Fortier: Tu n'es pas assez vite. M. Polak:
D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): C'est cela. On était
un peu plus bas dans la page.
M. Polak: M. le Président, vous devez accepter, tout de
même, que de temps en temps j'apprends. Par l'effort combiné du
ministre et du député d'Outremont, j'ai bien compris. L'article
77.1 est un petit article péquiste. On pense à tout. Je vous en
donne le crédit. Vous faites même la distinction entre les
journées dans une année. Je suis d'accord avec cela.
M. Fortier: S'il n'y avait pas d'ingénieurs ici, je ne
sais pas ce qu'on ferait.
M. Polak: C'est cela. M. Fortier: C'est cela.
Le Président (M. Bordeleau): Ce serait très
difficile.
M. Bérubé: Absolument d'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, l'article 9? Oui, M.
le ministre.
M. Bérubé: Tantôt, le député de
Sainte-Anne, en se plaignant, évidemment, de ce que je n'étais
qu'ingénieur et non avocat, soulignait que nous étions
inflexibles. C'est vrai, nous sommes inflexibles et honnêtes.
M. Fortier: Moi, je suis ingénieur et administrateur,
c'est la différence. En tout
cas...
Le Président (M. Bordeleau): Article 9? M. le
député d'Outremont.
M. Bérubé: Auparavant, vous aviez travaillé,
si je ne me trompe pas, dans l'industrie nucléaire canadienne qui fait
fureur sur les marchés internationaux, si je comprends bien.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! S'il
vous plaît:
M. Fortier: J'ai appris à administrer des millions et des
milliards.
M. Polak: II est devenu et resté
fédéraliste.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît:
M. Bérubé: Ah! bon, d'accord, je comprends.
Le Président (M. Bordeleau): Vous aviez une question, M.
le député d'Outremont?
M. Fortier: Non, non. J'aimerais que le ministre, s'il peut le
faire, nous explique la référence à l'annexe 1 et les
motifs de cette référence. On réfère à
l'article 86.
M. Bérubé: Alors, je relis le texte
proposé.
M. Fortier: Juste pour préciser le sens de ma question. On
a déjà déterminé à l'article 6 les
contributions qui doivent être faites par les employés. Alors,
qu'est-ce que cet article vient faire ici?
M. Bérubé: Bon. Il s'agit là d'une
pension... Vous avez sauté l'article 8? Ah! C'est vrai, j'oubliais. Bon.
Alors, "l'article 86 de cette loi est remplacé par le suivant..."
M. Polak: M. le Président, je veux prendre note que le
ministre avait le même problème que moi quand il a dit: Vous avez
sauté l'article 8? Il disait: Comme ingénieur, je comprends bien.
Mais, M. le ministre, je suis content que, finalement, vous joigniez le groupe
d'avocats qui sont flexibles. J'admets honnêtement que je pensais aussi
qu'on avait sauté l'article 8. Je vous félicite.
M. Bérubé: Ah! oui. Les avocats sont flexibles,
mais ils sont voleurs. (22 h 30)
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
Crédit de rente
M. Bérubé: II s'agit ici de modifier, dans le cas
des crédits de rente, les tarifs. En effet, pour les crédits de
rente afférents à du service antérieur au 1er juillet
1982, comme le partage était sur la base de 7/12 pour les cotisations
entre l'employé et le gouvernement, nous maintenons cela. Donc, pour les
crédits de rente afférents à du service antérieur
au 1er juillet, on maintient le partage antérieur, mais pour le service
postérieur au 30 juin, il faut modifier le tarif de prime pour tenir
compte du nouveau partage 50-50.
M. Fortier: C'est trop vite. Vous parlez de prime, alors vous
vous référez à quoi exactement? Il faudrait
peut-être préciser les termes.
M. Bérubé: Nous avions antérieurement,
à l'article 86, le montant que l'employé doit verser pour
acquitter le crédit de rente visé à l'article 85. Nous
verrons.
M. Fortier: Est-ce que c'est dans des cas de rachat?
M. Bérubé: Oui, c'est le rachat du service
antérieur.
M. Fortier: D'accord, vous parlez de rachat.
M. Bérubé: Et, donc, pour racheter du service
antérieur au 1er juillet 1982, nous rachetons sur la base, dans la
mesure où nous respectons les droits acquis, sur la base de 5/12 de la
prime qui sont à défrayer par l'employé, et 7/12 par
l'État. Donc, sur cette base-là, pour du service
antérieur, le crédit de rente est racheté sur la base du
partage antérieur. Pour le service postérieur, il est
racheté sur la base d'un partage 50-50.
M. Fortier: Est-ce qu'il y a un maximum qui peut être
racheté ou si c'est selon la Loi sur les impôts qui est de 3500 $
pour les années antérieures?
M. Bérubé: Oui, il y a un maximum. M. Fortier:
Selon la Loi sur les impôts.
M. Bérubé: Le maximum, c'est 15 ans et 2% par
année.
M. Fortier: Qui est défini dans la loi
déjà.
M. Bérubé: Oui, qui est défini ailleurs dans
la loi et qui ne fait pas l'objet d'amendement.
M. Fortier: Alors, ce tableau sert de cette façon-ci, il
détermine l'âge de l'employé au moment où il peut
faire des
rachats, c'est bien cela?
M. Bérubé: Oui. Est-ce qu'il n'y a pas un
amendement?
M. Fortier: II y a un amendement pour mettre une virgule.
M. Bérubé: C'est bien cela, c'est ce que j'allais
voir immédiatement.
M. Fortier: Sans cela, ça coûterait cher.
M. Bérubé: C'est l'article 23
ultérieurement. On n'a pas d'amendement à apporter
immédiatement. Il faut attendre à l'article 23 où nous
amenderons le tableau des primes de rachat.
M. Fortier: Pour amender les chiffres qui sont ici?
M. Bérubé: Oui, c'est bien cela. C'est qu'il y a
une erreur.
M. Fortier: Non seulement sur la virgule, mais sur les
chiffres.
M. Bérubé: Non, sur la virgule. Par exemple, pour
racheter une rente annuelle de 10 $, la prime, pour un homme âgé
de 18 ans, n'est pas de 3769 $, mais de 3,769 $.
M. Fortier: 769 millièmes.
M. Bérubé: Oui, on voit bien l'ingénieur
familier avec les millièmes de sous, de dollars, mais avec
l'effondrement du dollar canadien, bientôt il faudra calculer
entièrement en dollars.
M. Fortier: Mais pour quelle raison dites-vous que l'amendement
viendra plus tard? Ici, l'annexe I...
M. Bérubé: Parce que nous n'approuvons pas
l'annexe, pour l'instant.
M. Fortier: ... apparaît dans le texte. On dit: "À
l'égard du service antérieur... la somme déterminée
suivant le tarif de primes apparaissant..."
M. Bérubé: "... apparaissant à l'annexe
1.1."; et l'article 23 portant sur l'annexe 1.1 va apporter l'amendement dont
je parlais tantôt.
M. Fortier: D'accord, on y réfère.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va, M. le
député d'Outremont. M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, je vois les termes "Pour avoir
droit à un crédit de rente"; qu'est-ce qui arrive à
quelqu'un qui commence à travailler pour la fonction publique à
l'âge par exemple, de 40 ans? Disons que c'est l'ex-ministre
Bérubé alors qu'à un moment donné le gouvernement
est défait. Moi, je dis: Bon, il était correct tout de
même. Je vais trouver une fonction pour lui dans la fonction publique. Il
a des capacités, comme ingénieur, en tout cas quelque chose de
raisonnable dans la fonction publique. Mais il va dire: Écoute, j'ai
tout de même un certain âge. On va oublier sa pension comme
député et comme ministre; cela va être aboli, je
l'espère. Qu'est-ce qui arrive? Est-ce que cet homme a le droit de dire:
Moi, j'aimerais, rétroactivement, participer à cela parce que
j'ai tout de même atteint 40 ans et je commence? Est-ce que j'ai le droit
de participer à ce programme, de payer un certain montant en capital
pour participer au régime? Est-ce qu'un tel monsieur de 40 ans aura le
droit de dire: Je veux contribuer? Parce que, dans mon pays d'origine, les
Pays-Bas, cela existe. Même si quelqu'un a 50 ou 55 ans, il a
travaillé pour la fonction publique et il a le droit de dire: Je verse
un montant en capital pour ne pas être pénalisé d'avoir
juste 10 ans à faire, mais je peux faire ce qu'on appelle le "make-up"
en anglais. Est-ce que cela existe en vertu du projet de loi, parce que c'est
comme cela que j'interprète l'article 9? Je ne pense pas que ce soit
l'intention.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Non. On me dit que ce droit de rachat de
crédit de rente ne s'applique que pour du service effectué dans
les secteurs public et parapublic, dans les cas où l'employé n'a
pas contribué à un régime de retraite, mais cela ne
s'appliquerait pas, à ce qu'on me dit, à un employé du
secteur privé qui se joindrait au gouvernement.
M. Polak: Vous devrez y penser la prochaine fois, si vous
êtes encore au pouvoir.
M. Bérubé: M. le Président, le
député de Louis-Hébert avait dit une fois, en commission
parlementaire, que le pouvoir corrompt et j'avais assuré le
député de Louis-Hébert que je prendrais tous les moyens
nécessaires pour qu'il ne se fasse jamais corrompre.
M. Doyon: Cela ne m'a pas rassuré outre mesure, M. le
Président. Je suis encore dans le doute le plus absolu.
M. Fortier: Mais juste une petite question. Il y a obligation de
participer au
fonds de retraite, j'imagine, immédiatement ou un an,
après une période de temps, après qu'il est devenu
employé. C'est une obligation pour tous les employés de
participer au fonds de retraite.
M. Bérubé: Oui.
M. Fortier: Le cas où la personne n'aurait pas
contribué, c'est un peu aléatoire.
M. Bérubé: On me dit qu'au réseau des
affaires sociales, mais je ne le crois pas, plus de la moitié des
employés de l'État n'avaient pas de régime
supplémentaire de retraite avant le RREGOP.
M. Fortier: Donc, ce n'était pas obligatoire avant.
M. Bérubé: Non, c'est cela.
M. Fortier: Maintenant, ça l'est à partir de 1974.
C'est donc une bonne chose que le Parti libéral a faite à ce
moment. Vous êtes d'accord, M. le ministre?
M. Bérubé: Oui. Il y a un certain nombre de bonnes
choses que le Parti libéral a faites. Le seul inconvénient, c'est
qu'on passe notre temps à réparer le reste des pots
cassés, mais, en tout cas, il y a un certain nombre de choses
correctes.
M. de Belleval: La meilleure chose que vous avez faite, cela a
été de perdre le pouvoir en 1976.
M. Bérubé: C'est le plus grand service.
Le Président (M. Bordeleau): L'article 9, s'il vous
plaît!
M. Polak: Qu'on lance le débat, on est prêt!
Le Président (M. Bordeleau): Sur division.
M. Fortier: Adopté.
Le Président (M. Bordeleau): Adopté sur division.
L'article 10?
M. Fortier: Est-ce que le deuxièmement, c'est une nouvelle
possibilité; autrement dit, la personne peut payer comptant, peut payer
avec des valeurs de congés-maladie? C'est nouveau, cela?
M. Bérubé: Non.
M. Fortier: Cela laisse supposer que les congés-maladie
s'accumulent. C'est un passif assez extraordinaire qui n'a pas encore
été relevé par le Vérificateur
général du
Canada. Il doit y avoir un passif assez extraordinaire.
M. Bérubé: L'article 10 ne vise qu'à assurer
la concordance avec l'article 9 de la loi. Cela était déjà
dans l'article 87 qui spécifiait que c'était payable soit au
comptant, soit par versements. Il indiquait également que,
précédemment, l'employé pouvait utiliser la
totalité ou une partie de la valeur de ses congés-maladie; donc,
il s'agissait de clauses qui existaient dans la loi antérieure.
M. Fortier: Dans les conventions...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: ... qui existent présentement, j'imagine qu'il
est dit que les congés-maladie peuvent être monnayables. Je pense
que c'est la norme, malheureusement -enfin, je ne sais pas comment - de plus en
plus, quoique dans le secteur privé ce n'est pas monnayable dans bien
des compagnies. Mais est-ce qu'il se pourrait qu'à l'avenir, comme les
choses tendent à changer assez souvent, lors de nouvelles conventions
collectives ou selon une décision du gouvernement, les
congés-maladie ne soient pas monnayables? Donc, cette
possibilité-là deviendrait périmée.
M. Bérubé: D'accord, je le vois mieux. Il n'y a
absolument rien dans cet article-là.
M. Fortier: Vous faites l'hypothèse que, dans les
conventions futures, les congés-maladie seront toujours monnayables.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Non, mais je pense que l'on respecte le
contenu des conventions actuelles.
M. Fortier: Je croyais que vous aviez indiqué ce matin que
vous aviez fait de votre mieux pour diminuer l'hypothèque qui existait
présentement, mais je vois ici que vous voulez entériner...
M. Bérubé: Non, non.
M. Fortier: ... un des articles des conventions collectives qui
précise que les congés de maladie sont monnayables.
M. Bérubé: Non, la modification est très
succincte. Tout ce qui est indiqué, ici, à cet article, c'est
ceci: "L'employé peut payer les sommes déterminées
conformément à l'article 86", alors qu'auparavant on indiquait:
"... doit payer à la Commission, soit
comptant, soit par versements, la prime calculée selon l'annexe
I." Comme, maintenant, nous avons deux annexes, l'annexe I et l'annexe 1.1, ce
que nous faisons, c'est que, pour calculer la prime, nous
référons à l'article 86 qui indique comment calculer cette
prime-là et qui réfère à l'annexe. Donc, au lieu de
référer directement à l'annexe, nous devons
référer à l'article 86 qui, lui, nous réfère
à la méthode d'utilisation des annexes, puisqu'il n'y a plus
seulement une annexe; il y a deux annexes. C'est uniquement un article de
concordance.
M. Fortier: Non, mais là j'arrive au deuxièmement
qui dit: "par le remplacement du quatrième alinéa par le suivant:
Lorsqu'un employé utilise en tout ou en partie la valeur de ses
congés-maladie accumulés à son crédit pour
acquitter le coût du crédit de rente, l'employeur paie, selon le
cas, tout ou partie du crédit de rente selon les modalités
déterminées par la Commission." Alors, quel changement y a-t-il
par rapport à ce qui existait avant puisqu'on dit par le
remplacement...
M. Bérubé: Tout simplement le premier
alinéa. C'est que l'ancienne rédaction disait ceci: "... pour
payer la prime déterminée au premier alinéa." Comme on
vient de modifier l'article 87, la référence au premier
alinéa devenait superflue. À ce moment-là, nous l'avons
rédigé d'une façon différente, tout simplement.
M. Fortier: Ce sont les mêmes principes qui sont en
jeu.
M. Bérubé: C'est exactement la même
chose.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Sur l'article
10?
M. Polak: Oui, sur l'article 87.
M. Bérubé: M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Oui, M. le Président, j'ai deux questions.
M. Bérubé: Sur quel article?
M. Polak: Sur l'article 10, l'amendement à l'article 87.
J'aurais deux questions à poser au ministre. On parle de payer soit
comptant, soit par versements. Maintenant, pour inciter ceux qui le veulent
à payer comptant, il faudrait peut-être stipuler que les
versements porteront intérêt, parce qu'il n'y a rien qui le dit
dans le texte. Si cela est vrai, tout le monde paiera par versements. Vu que
l'on sait que vous êtes en faillite et que vous avez besoin de beaucoup
d'argent, vous espérez que tout le monde paiera comptant. Quelle est
l'incitation à payer comptant?
M. Bérubé: Lorsqu'il paie par versements, nous lui
calculons des intérêts.
M. Polak: Mais le projet de loi ne le dit pas. Est-ce qu'il ne
faudrait pas inscrire: soit par versements, au taux d'intérêt qui
prévaut à ce moment-là ou quelque chose à cet
effet-là? Parce qu'autrement on crée l'impression que "par
versements", il n'y a pas d'intérêts. De temps en temps, je fais
des amendements, M. le ministre, qui sont adoptés même par les
péquistes. Style Matane, savez-vous? Ayez confiance en moi, M. le
ministre, de temps en temps.
M. Fortier: Sans cela, il sera obligé d'aller vendre des
crevettes.
M. Bérubé: II faudrait référer
à l'article 88 de la loi qui indique que "tout montant non
acquitté par l'employé dans les 30 jours de la mise à la
poste d'un avis de la Commission indiquant le montant de la prime porte
intérêt au taux de 6% l'an."
M. Polak: 6%; Donc, en d'autres termes, je ne paierai jamais
comptant parce que je laisserai mon argent travailler dans des certificats
à la banque à 18% ou 16% et je vous paierai 6%.
M. Bérubé: On me dit que les valeurs de rachat ont
été calculées avec un taux d'intérêt de 6%.
Donc, pour maintenir la cohérence interne, il faut également que
les primes soient calculées sur la base de 6% de taux
d'intérêt. (22 h 45)
M. Polak: D'accord. Deuxième question. On parle "de
congés-maladie accumulés." Je n'ai jamais compris ça. J'ai
toujours pensé -évidemment, style Matane simple - que si
quelqu'un est malade, il prend congé, d'accord, mais s'il n'est pas
malade, il perd son congé. Comment interprétez-vous ça?
Disons que quelqu'un a droit à dix jours de maladie par année,
est-ce que ça devient d'autres vacances payées? J'ai eu une
grande discussion avec mon gendre à ce sujet - je vous ai dit qu'il
était enseignant - il m'a dit: Ce sont des vacances que le gouvernement
me donne, ne commencez pas à me chicaner. Moi, je suis un peu "vieux
style de Matane" et je lui ai répondu: Tu n'es pas malade, va à
l'école, enseigne et oublie ces jours accumulés à la fin
de l'année. Ne commence pas à calculer ça comme un don des
péquistes.
Pourriez-vous m'expliquer ça pour que, au moins, en fin de
semaine, je puisse donner une réponse claire et nette à mon
gendre?
M. Bérubé: La collectivité a des
problèmes avec votre gendre.
M. Polak: Voulez-vous répéter, M. le ministre?
M. Fortier: Je vous le traduirai en anglais!
M. Blais: C'est le "gendre" de problème que vous avez.
M. Polak: C'est un bon travailleur, mais il aimerait
peut-être avoir un texte. Si tu n'es pas malade, tu n'as pas de
certificat de médecin, tu n'accumules pas tes congés de maladie,
parce qu'on te donne déjà assez.
M. Bérubé: Si je comprends bien, votre gendre
détourne des fonds publics.
M. Polak: Du tout, il se base sur la convention et sur
l'interprétation gue vous en faites. Moi, je dis: Je ne pense pas, je
vais demander au ministre, qui est tout de même président du
Conseil du trésor, et il va expliguer une fois pour toutes ce gue veut
dire "congés-maladie accumulés". Si quelgu'un n'est pas malade,
est-ce qu'il perd ces journées ou s'il y a une banque et, guand il prend
sa retraite, il peut dire: Vous me devez 60 jours?
M. Blais: On parle de maladie physigue, là.
M. Polak: Je ne veux pas prendre les exemples du
député de Maskinongé, mais ça devient une prime de
séparation, tandis qu'on travaille encore.
M. Bérubé: Est-ce que vous avez des
difficultés de relations avec votre gendre, un peu comme comme cette
série américaine "It's all in the family" où le bon
Américain a un gendre "Polack", d'ailleurs?
M. Polak: Non, M. le ministre, j'ai un gendre qui est
influençable. Je veux donc demander l'aide du gouvernement, d'un homme
fort, président du Conseil du trésor, d'un homme qui,
unilatéralement, ose couper, ose geler les salaires. C'est vrai, c'est
mon gendre et tout de même, il y a une relation familiale, comme vous en
avez une avec votre femme et vos enfants. Je ne veux pas intervenir dans votre
vie privée, c'est la vôtre, comme ma vie privée est la
mienne. Mais tout de même, j'aimerais avoir une explication parce que, de
temps en temps, il me dit, comme d'autres professeurs: C'est un congé,
ce sont des vacances additionnelles, on appelle ça des vacances
péquistes. Je n'ai jamais compris ça.
M. Blais: Vraiment, ça suffit!
M. Polak: J'aimerais avoir une clarification là-dessus. En
d'autres termes, M. le Président, moi, je crois que quelqu'un qui
travaille et qui n'est pas malade, perd ces journées; ça, c'est
mon opinion personnelle. Si le ministre confirme ça, je suis le plus
fort. S'il ne confirme pas, je vais me battre pour gu'on change ça
à la prochaine convention collective.
M. de Belleval: Vous direz à votre gendre que ce ne sont
pas des vacances payées.
M. Bérubé: On me dit effectivement que, dans le cas
de la convention collective qui lie le gouvernement aux enseignants, les
congés de maladie sont monnayables. Si votre gendre est un enseignant,
non seulement il ne contourne pas la loi, mais il semble gue ce soit tout
à fait conforme à l'application de sa convention collective. Vous
lui offrirez mes félicitations et mes regrets d'avoir supposé la
moindre mésentente existant entre vous et votre gendre.
M. Polak: Je sais que je m'écarte un peu du sujet, mais on
parle quand même d'une chose assez importante. Est-ce que vous êtes
prêt à suggérer de changer ça une fois pour toutes,
lors de la prochaine ronde de négociations?
M. Bérubé: Avez-vous pensé à ce que
votre gendre va vous dire?
M. Fortier: II faudrait que son gendre parle au syndicat.
M. Bérubé: Oui, avez-vous pensé à ce
que votre gendre va vous dire? Il ne sera pas très content parce que,
présentement, ses congés de maladie sont monnayables et, si je
comprends bien, vous voudriez que votre gendre perde le caractère
monnayable de ses congés de maladie.
M. Polak: J'aimerais bien qu'il travaille pour ce qu'il
reçoit...
M. Bérubé: Ce que je regrette, c'est gu'il ne
puisse pas...
M. Polak: ... gu'il n'y ait pas d'enseignants qui prennent le
vendredi après-midi de congé, quand il fait beau, pour aller
faire du ski, pour ne revenir que le mardi. C'est comme ça qu'on prend
les congés de maladie. Ce n'est pas possible, je ne crois pas gue M. le
ministre approuve ça, parce que dans le "style Matane", là-bas,
on travaille fort. Quand on y va pour chercher des crevettes, il n'y a pas de
congés de maladie.
M. Bérubé: Si je comprends bien, vous voulez que
nous augmentions la tâche des enseignants.
M. Polak: Pas la tâche, mais, quand on n'est pas malade, on
travaille; c'est bien clair.
Une voix: Cela va? C'est adopté?
M. Polak: J'ai compris, je vais l'accepter.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Sur la question de principe que le ministre vient de
soulever, je pense que le point de vue du Parti libéral est très
clair là-dessus. Nous sommes d'accord pour dire qu'il fallait que la
différence qui existe avec le secteur privé diminue. Je pense que
notre différend est plutôt sur la méthode que vous utilisez
présentement. Sur l'article 10, je pense qu'on n'a pas d'autre question.
Adopté sur division.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va. Article 10,
adopté sur division. Article 11?
M. Fortier: C'est un article important. "Tout employé a
droit de faire compter, pour sa pension..." Il s'agit d'une chose qui
n'existait pas avant ou de quoi s'agit-il exactement?
M. Bérubé: Non, elle existait avant. Il s'agit
d'ajuster, en fait, l'article précédent de manière
à amener un taux de contribution moitié-moitié par rapport
au taux de cotisation qui existait antérieurement. J'attire votre
attention sur le deuxième alinéa: "II doit, à cette fin,
verser à la Commission, pour chacune de ces années, un montant
égal au taux de cotisation applicable à chacune de ces
années sur le moindre, etc." Donc, il s'agit ici de répartir
moitié-moitié le coût du régime.
M. de Belleval: C'est le même article qu'avant, sauf que
maintenant cela va être 50-50.
M. Fortier: Oui, mais ici on ne dit pas ça.
M. Polak: Avant, c'était quoi?
M. Fortier: C'était 140%. Si c'est le même article
qu'avant, je ne vois pas pourquoi cela paraît ici.
M. de Belleval: C'est le même article. Tout ce qu'on
change, ce sont les proportions.
M. Bérubé: Je compare, en ce moment, avec l'ancien
article.
M. Fortier: C'est dans le milieu du paragraphe; on dit: "un
montant égal au taux de cotisation."
M. de Belleval: C'est ça. C'est la même teneur de
l'article, sauf qu'on change les proportions. Au lieu d'être 5/12, 7/12,
comme dans l'ancien régime, maintenant, cela devient 50-50. On
prévoit qu'à l'avenir il peut racheter, mais il doit payer
moitié-moitié.
M. Fortier: Si je comprends bien, si une personne, disons, a
été député, ce n'est pas un rachat. On calcule
comme s'il avait été employé avant. Ce n'est pas un
rachat, techniquement. C'est ça, mais, si c'est le même paragraphe
qu'avant, je me demande pour quelle raison c'est ici.
M. de Belleval: Les taux de cotisation ne sont pas les
mêmes. Les taux de cotisation changent. Alors, on prévoit que,
pour la date avant l'entrée en vigueur de cette loi, ce sera l'ancien
taux; pour la date après, ce seront les nouveaux taux. C'est une simple
concordance.
M. Fortier: Ce n'est pas aussi explicite que vous le dites.
M. de Belleval: II va racheter les années, avant le 1er
juillet, au taux de l'ancien système, du système qu'on
connaît actuellement, 5/12-7/12 et, à partir du 1er juillet, quand
il va racheter, il va racheter au taux de 50-50.
M. Bérubé: La différence, c'est qu'on dit
"à chacune de ces années." Voilà, c'est ça, les
trois petits mots. D'accord.
M. de Belleval: Ce n'est pas le montant égal. C'est pour
les années antérieures et les années
postérieures.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, vous avez une
réponse?
M. Fortier: C'est applicable à chacune de ces
années.
M. Bérubé: Non, c'est que, dans l'ancien article,
on disait: II doit verser à la commission un montant, etc., au taux de
cotisation applicable à la date à laquelle le présent
régime lui devient applicable. Donc, il y avait un taux de cotisation
fixe qui s'appliquait au moment où il devenait un employé de
l'État et qui s'appliquait uniformément à toutes les
années où il avait été député. Or,
subtilité - parce que les mots sont assez semblables, on a de la
difficulté à voir la distinction - maintenant, on dit "un
montant égal au taux de cotisation applicable à chacune de ces
années." En d'autres termes, maintenant, on applique un taux à
chacune des années; il va y avoir des années antérieures
au 1er juillet 1982, auquel cas il aura droit à l'ancien taux qui
était basé sur le partage cinq douzièmes, sept
douzièmes et, pour les années postérieures au 1er juillet,
il aura droit à un taux différent. C'est ce que vous avez
expliqué?
M. Fortier: Un bon avocat aurait écrit "à chacune
de ces années ou de ces portions d'année", parce que, pour cette
année, c'est six mois seulement.
M. Polak: Oui, oui.
M. Fortier: Un bon avocat aurait mis cette précision.
M. Polak: J'avais vu cela tout de suite.
M. de Belleval: La Loi d'interprétation y
prévaut.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Le texte ne dit pas si quelqu'un qui était
député va aussi être régi par la diminution, le
déductible de 3%. Quand on lit l'article, il semble y avoir un
régime un peu à part pour les députés. Je voudrais,
tout de même, que ce soit clairement inscrit que quelqu'un qui est
député va être traité de la même
manière que tout autre fonctionnaire; en d'autres termes, que le
déductible de 3% s'applique aussi à eux.
Une voix: Bien sûr.
M. Polak: Oui, mais je ne le vois pas là-dedans, parce que
toute la page...
M. de Belleval: Ce n'est pas pour le paiement de la rente. C'est
pour le rachat. Vous faites allusion au paiement de la rente.
M. Polak: Établie.
M. de Belleval: C'est la même chose.
M. Polak: Le ministre répond oui?
M. Bérubé: Oui.
M. Polak: D'accord.
Une voix: II fait mieux de répondre oui.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? L'article 11 est
adopté.
M. Bérubé: Ce que j'admire, c'est la grande
confiance que le député de Sainte-Anne a à mon
égard.
Le Président (M. Bordeleau): Toujours sur division?
M. Fortier: Oui, sur division. M. de Belleval:
Adopté.
Le Président (M. Bordeleau): Adopté sur division.
Article 12?
M. Bérubé: Est-ce parce que vous êtes
divisés? Je ne vous comprends pas.
M. Fortier: Non, c'est parce qu'on n'est pas d'accord avec vous,
M. le ministre.
M. Polak: Sur le principe.
Le Président (M. Bordeleau): Article 12?
M. de Belleval: L'article 12 est-il adopté?
M. Fortier: Qu'est-ce que c'est, l'article 12? C'est une
abrogation.
M. Bérubé: On abroge l'article 107.
Le Président (M. Bordeleau): On abroge l'article 107.
M. de Belleval: On abroge l'article, parce que c'est prévu
à l'article 17. Les dispositions de l'article 12 vont être
prévues à l'article 17, de l'ancien article 107, si on veut.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. Fortier:
Oui, adopté.
Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article
13?
M. Fortier: C'est plus important, ça.
M. de Belleval: C'est cela, prévoir le mécanisme de
réajustement des taux.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
Ajustements à la cotisation à la suite
d'une évaluation actuarielle
M. Fortier: Le ministre pourrait-il préciser? Normalement,
ce qui est prévu, c'est qu'à tous les trois ans, il y a une
évaluation actuarielle et, ensuite, il y a des ajustements en
conséquence. Mais ici, on dit "à compter du 1er juillet 1982." On
pourrait
peut-être nous expliquer à quel moment va se faire
l'évaluation actuarielle et si cet ajustement va être
rétroactif ou si cela augmentera le déficit actuariel qui est
payable sur 50 ans. De quelle façon cela se fera-t-il?
M. Bérubé: La question qui est posée, c'est,
lorsqu'il y a un déficit actuariel courant constaté au moment de
l'évaluation, ce déficit passé est-il versé au
déficit actuariel accumulé ou si, au contraire, il fait l'objet
d'un réajustement des cotisations? Voyez-vous le sens de la question?
Effectivement, lorsqu'il y a un constat de déficit actuariel courant, la
cotisation est ajustée de manière à effacer le
déficit qui vient d'être créé dans le régime,
en même temps qu'elle assure pour l'avenir que ce déficit n'est
pas recurrent.
M. Fortier: Ici, j'essaie de lire. On dit: "Si, à la suite
de l'évaluation actuarielle d'un régime supplémentaire de
rentes..." Ma première question est la suivante: À quel moment y
aura-t-il des évaluations actuarielles?
M. de Belleval: Tous les trois ans. (23 heures)
M. Fortier: Ceci veut dire qu'on commence maintenant. Donc,
j'imagine qu'une évaluation a été faite, et on commence le
1er juillet de cette année.
M. de Belleval: 39 régimes supplémentaires, ils
n'ont pas tous la même date de révision.
M. Fortier: Non, mais là, la modification que vous faites
est à partir du 1er juillet 1982 quand même. On dit ici: "Si,
à la suite de l'évaluation actuarielle." Ça peut venir
à différentes dates. C'est cela?
M. de Belleval: C'est cela.
M. Fortier: "Si la Commission estime que la contribution de
l'employeur est supérieure à la cotisation des
employés..." Mais, dans le moment, elle est égale; vous la mettez
sur la base de 50-50.
M. de Belleval: Oui, mais si l'expérience du régime
démontre que ce n'est pas le cas?
M. Fortier: Alors, ce n'est pas "si elle est
supérieure..." .
M. Bérubé: Supérieure... M. Polak: Si
elle s'avère...
M. Fortier: Si elle s'avère supérieure dans les
faits.
M. de Belleval: Oui, c'est cela.
M. Bérubé: Et, à ce moment-là, on
dépasse le partage 50-50, en termes de contribution gouvernementale.
M. Fortier: On dit: "La cotisation est augmentée de 1/4%
par année à compter du 1er juillet." Pourquoi
déterminez-vous dès maintenant l'augmentation, si ça va
être déterminée par l'évaluation actuarielle?
M. de Belleval: C'est comme l'ancien article, c'est
évalué.
M. Bérubé: On reporte les clauses de l'ancien
article de l'ancienne loi assurant un rattrapage au rythme de 1/4%
annuellement.
M. Fortier: Ah oui!
M. Bérubé: Sans doute pour ne pas provoquer de
chocs trop brutaux.
M. de Belleval: C'est l'ancien 113, mais qui prévoit
maintenant, comme c'est 50-50, jusqu'à ce que ça atteigne 6,25%,
qui est le montant équivalent à 50-50, tandis que dans l'ancien
texte, c'est 6,25%, la même chose pour la Régie des rentes.
M. Fortier: C'est mal écrit, ce texte-là.
M. de Belleval: C'est-à-dire que c'est cela.
M. Bérubé: C'est le texte de 1973.
M. Fortier: On dit: "Si, à la suite de
l'évaluation..." Cela a été écrit par des
actuaires.
M. Bérubé: Ou cela a été écrit
par les avocats que l'ancien gouvernement engageait; que voulez-vous que je
fasse? On ne peut pas tout changer, on ne peut pas refaire le monde.
M. Fortier: Je pensais que vous en aviez engagé de
meilleurs, mais je vois qu'ils ont repris le même texte.
M. Sirros: C'est l'article 113.1 qui est nouveau?
M. Bérubé: Non, l'article 113 est
complètement remplacé. Mais, là est-ce qu'on a
adopté l'article 13?
Le Président (M. Bordeleau): On prend 113 et 113.1.
M. Fortier: On est à l'article 13. Vous dites que c'est le
même texte. Pourquoi est-ce le même texte? J'imagine que c'est
à
cause du fait que vous avez mis le 1er juillet 1982 dans le texte.
M. Bérubé: Oui, en particulier. M. Fortier:
Entre autres choses.
M. Bérubé: Oui, également. On indiquait,
dans l'ancien texte, à titre d'exemple: "Si une évaluation
actuarielle démontre à la Commission que la contribution de
l'employeur à un régime supplémentaire est
supérieure à 140% de la cotisation de l'employé." Parce
qu'auparavant elle était de 140% de celle de l'employé, alors il
y avait un mécanisme de réajustement. Dans la nouvelle loi on
dit: "Si, à la suite de l'évaluation actuarielle d'un
régime supplémentaire de rentes la Commission estime que la
contribution de l'employeur est supérieure à la cotisation -
c'est donc moitié-moitié; autrefois, c'était
"supérieure à 140% de la cotisation de l'employé", alors
vous avez une première modification - la cotisation est augmentée
de 1/4% par année à compter du 1er juillet 1982," alors que dans
l'ancienne loi on indiquait "à compter du 1er juillet 1973."
M. Fortier: En fait, je ne sais pas si un amendement serait
recevable. "Si la Commission estime que la contribution de l'employeur est
supérieure..." Si on changeait cela par "doit être". "Si, à
la suite de l'évaluation actuarielle, la commission estime que la
contribution de l'employeur doit être supérieure"; en fait, c'est
cela.
M. Bérubé: Elle ne doit pas être.
M. Fortier: Pour répondre aux normes de l'actuaire.
M. Bérubé: Non, la contribution de l'employeur ne
doit pas être supérieure; elle doit toujours être
fixée en vertu de la loi à un niveau...
M. de Belleval: Jusqu'au plafond, cependant, de 6,25%.
M. Bérubé: Jusqu'à ce que la cotisation de
l'employé atteigne le plafond de 6,25% et non pas celle de
l'employeur.
M. Fortier: Mais, comment peut-elle être supérieure,
si c'est 50-50?
M. de Belleval: Parce qu'on défonce le plafond.
M. Bérubé: Si, par exemple, le taux de cotisation
est de 6% pour l'employé et que l'on constate que, pour rétablir
l'équilibre actuariel, la contribution de l'employeur devrait être
de 6,5%, si je comprends bien, on va la réduire de 1/4% jusqu'à
ce qu'elle s'aligne sur celle de l'employé.
M. Fortier: C'est compliqué, cette affaire-là.
M. Bérubé: Parce que la contribution de
l'employeur, c'est le résidu entre le coût réel et la
contribution de l'employé.
M. Fortier: C'est un système garanti; donc, l'employeur
doit compenser la différence.
M. de Belleval: On se trouve à reconduire les dispositions
de l'ancienne loi de ce point de vue.
M. Fortier: "113.1 Aucun régime supplémentaire de
rentes ne peut être modifié sans l'autorisation préalable
de la Commission et toute modification apportée est à la charge
des employés si elle entraîne des coûts additionnels." Juste
une précision. Est-ce que les coûts d'administration du RREGOP et
des autres - enfin, c'est votre commission d'administration - sont à la
charge des fonds de retraite ou s'ils sont payés par le
gouvernement?
M. Bérubé: On me dit que, dans le cas du RREGOP,
c'est le gouvernement qui assume "l'entièreté" des coûts
d'administration.
M. Fortier: Tout à l'heure, vous m'avez donné le
budget. Cela monte à combien? C'est assez volumineux. Quelques millions
par année?
M. Bérubé: C'est 11 000 000 $. M. Fortier:
Ils ont oublié cela.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Louis-Hébert.
Baisse des pensions attribuable au projet de loi no
70
M. Doyon: Merci, M. le Président. On est toujours à
l'article 13, si je comprends bien. L'article 13 modifie 113, je suis à
l'article 113, deuxième paragraphe. D'ailleurs, je vais expliquer tout
cela si on me laisse continuer. À l'article 13, au deuxième
paragraphe de l'article 113 modifié, je vois qu'on parle du "traitement
moyen des cinq années de service les mieux
rémunérées." C'est l'occasion d'attirer l'attention du
ministre sur un problème qui se pose, à la suite du projet de loi
no 70. Ce n'est peut-être pas exactement le moment ici. Je me demande,
étant donné qu'on ne le trouve pas dans le projet de loi,
à quel moment je pourrais en parler si je n'en parle pas maintenant. Il
s'agit du problème qui se pose
pour les gens qui vont être frappés par la diminution de
salaire qui va être effectuée par le gouvernement au moyen de son
projet de loi no 70 qui va avoir pour effet, comme on le sait, de diminuer
d'à peu près 20% le salaire des employés de la fonction
publique. Il y a donc un effet momentané qui va... Ce n'est pas vrai, ce
que je dis là?
M. Blais: C'est faux.
M. Doyon: Cette diminution de salaire, qui va être
imposée unilatéralement par le gouvernement aux employés
de la fonction publique, se situe dans un laps de temps bien
déterminé, c'est-à-dire trois mois. Cela, c'est une chose.
C'est, cependant, une autre chose que de voir sa pension affectée pour
le reste de ses jours parce qu'on se trouvera dans une situation où,
pour le salaire moyen qu'on calculera sur la base des cinq meilleures
années, la période de temps où le salaire a
été diminué entrera dans cette période de cinq ans.
Je pense que le ministre a l'obligation de se soucier de cette
répercussion à long terme sur les futurs pensionnés qui
auront justement le double désavantage de tomber sous le coup du projet
de loi no 70 et d'être appelés à voir leur pension
calculée sur une période de temps qui incorpore la période
de temps qui va s'échelonner du 1er janvier 1983 au 31 décembre
1983, dans laquelle il y aura trois mois de diminution de salaire. J'aimerais
que le ministre nous rassure, nous explique s'il considère que c'est un
problème négligeable ou s'il y a des dispositions que je n'ai pas
vues dans le projet de loi, qui m'échappent peut-être et qui
seraient de nature à rassurer les futurs pensionnés. J'aimerais
avoir la position du ministre là-dessus et savoir s'il entend faire
quelque chose, s'il y a un problème à son avis.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Le problème ne se pose pas, M. le
Président, dans la mesure où c'est, justement, la moyenne des
cinq meilleures années. Si l'année en cours n'est pas une des
meilleures années, elle est automatiquement éliminée;
donc, elle n'entre pas dans le calcul.
Deuxièmement, je pense qu'il faut bien se dire une chose: Si les
salaires sont diminués momentanément pendant trois mois, si nous
prenons la période d'augmentation de six mois et que nous l'accouplons
à la réduction de trois mois, il reste un gain net réel.
À titre d'exemple, un employé qui gagne 13 150 $ par année
aura droit à une augmentation sur les neuf mois de 422,50 $. Un
employé qui gagne 22 000 $ par année aura droit, sur la
période des neuf mois, à 539,50 $. Un employé qui gagne 38
000 $ aura droit à une augmentation de salaire, sur les neuf mois, de
773 $. Donc, l'effet de la réduction de salaire auquel
réfère le député de Louis-Hébert n'est pas
de réduire le salaire de façon réelle, mais de faire en
sorte que l'augmentation soit plus faible que ce qui était
escompté. C'est ce que j'ai eu l'occasion d'expliquer; dans la mesure
où les salaires au gouvernement sont déjà
supérieurs à ceux du marché, la seule chose que cela fait,
c'est rétablir une certaine équité en comparaison avec,
par exemple, les employés faisant le même travail dans le secteur
privé.
Le Président (M. Bordeleau): Bon, nous allons laisser
terminer le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Vas-y.
Le Président (M. Bordeleau): Sur le même sujet?
M. Sirros: II me semble pourtant que, si l'on compare l'effet de
la réduction, il faudrait faire le calcul, d'abord, en regardant ce
qu'auraient été les salaires sans le projet de loi 70. Là,
vous parlez d'un rétablissement après avoir diminué
quelque chose. Vous parlez d'une augmentation; ce n'est pas une augmentation,
c'est simplement qu'après la coupure cela va revenir.
C'est-à-dire que l'on recule de deux pieds, puis l'on refait un pas et
demi pour remonter. Si vous regardez simplement ce qu'auraient
été les salaires...
M. Bérubé: Non, non.
M. Sirros: ... sans le projet de loi 70 et que vous les comparez,
même neuf mois après le projet de loi 70, ce n'est pas la
même chose.
M. Bérubé: Écoutez, je vous donne...
M. Sirros: En Grèce, on appelle cela un sophisme.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: J'ai les taux de salaires ici; cela, ce
sont les niveaux de salaires. Si on regarde les taux de salaires, un
employé qui gagne, au 30 juin, un taux de salaire annuel de 13 150 $,
-au 1er juillet passe à un taux de salaire 14 629 $, au 1er janvier
à un taux de salaire de 11 871 $ et, au 1er avril, à un taux de
salaire 14 683 $. Donc, son salaire hebdomadaire change en cours de
période. Si on regarde l'augmentation de revenu, c'est-à-dire
l'augmentation réelle, non pas les taux - mettons de côté
les taux de salaire et parlons uniquement de revenu -
à ce moment-là, suivant la convention collective, il
aurait dû recevoir une augmentation de revenu de 1 209 $ dans le cas du
salarié de 13 150 $ par année et il recevra, suivant le projet de
loi 70, 422,50 $. Donc, il reçoit une augmentation nette de revenu,
indéniablement.
M. Sirros: Mais, sans le projet de loi 70...
M. de Belleval: ... il aurait reçu davantage. C'est cela
que voulez dire?
M. Sirros: C'est cela.
M. Bérubé: 1 209 $. Il aurait reçu 1 209 $
en augmentation de revenu sur les neuf mois et il recevra 422 $ en vertu du
projet de loi 70.
M. Sirros: Cela fait une diminution de combien?
M. Bérubé: La différence entre 1 209 $ et
422 $.
M. Sirros: 800 $. Donc, il reçoit 800 $ de moins que ce
qu'il aurait reçu; c'est une diminution, cela.
M. Bérubé: C'est une diminution par rapport
à ce qu'il aurait reçu, mais ce n'est pas une diminution de son
salaire par rapport à ce qu'il avait avant.
M. Sirros: En réalité, c'est ce qu'il va avoir dans
sa poche.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Louis-Hébert, sur le même sujet?
M. Doyon: Sur le même article et sur le même propos,
M. le Président. Ce qui me paraît absolument
incompréhensible là-dedans, c'est que l'on se retrouve, si on
suit le raisonnement du président du Conseil du trésor, dans une
situation où le gouvernement va couper les salaires au moyen de la loi
70 - appelons-les choses par leur nom - et que, selon le raisonnement du
président du Conseil du trésor, les pensions des employés
- parce que c'est cela qui nous intéresse dans le moment; on aura le
loisir de s'attarder sur le projet de loi 70 - supposément, ne seraient
pas affectées à la fin du compte. (23 h 15)
Si on suivait son raisonnement, M. le Président, on se trouverait
dans une situation où finalement le salaire des employés serait
diminué si vous voulez, à zéro, et les pensions ne
seraient pas affectées pour les cinq dernières années.
C'est facile de démontrer par l'absurde que cela ne peut pas être
le cas, puisque les cinq dernières années doivent être
calculées normalement, et elles le sont toujours, sur les cinq
dernières années travaillées. Parce qu'on aura
là-dedans une mauvaise année, on sera obligé de la laisser
tomber et on sera donc obligé de retourner à des années
antérieures où notre salaire était moins bon, ce qui fait
que notre pension sera affectée d'une façon permanente, par le
calcul de la moyenne sur la base des cinq dernières années, cela
va de soi sur les autres années qui vont rester où on va
être pensionné.
Cela, c'est une répercussion du fardeau des coupures qui se font,
à un moment donné, et cela va se répercuter
indéfiniment sur les épaules des futurs pensionnés. Je
pense que le ministre doit admettre cette chose plutôt que nous faire je
ne sais pas quelle démonstration, nous disant que ce n'est pas une
diminution, que c'est une augmentation, mais une augmentation moindre. Notre
propos n'est pas de discuter qu'il va y avoir, dans une année
donnée, c'est-à-dire dans l'année 1983, une certaine
augmentation de salaire, nous le reconnaissons. Ce que nous disons, c'est que
ce ne sera pas une aussi bonne année que cela aurait été
s'il n'y avait pas eu le projet de loi 70. Par conséquent, diminution
cette année-là par rapport à ce que cela aurait
été sans le projet de loi 70 et, autre conséquence,
diminution de la pension à être reçue pour les gens dont le
calcul de la pension va se faire où l'année 1983 devra
entrer.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: L'intervention du député
de Louis-Hébert est extrêmement intéressante mais, en
même temps, elle souligne l'espèce d'incohérence de son
parti sur la question des salaires. Par exemple, il aurait dû
écouter l'intervention du député de Jacques-Cartier, qui
est de son parti à l'Assemblée nationale. Le député
de Jacques-Cartier s'est...
M. Sirros: Quand on ne veut pas répondre, on parle des
autres.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît,
laissez le ministre répondre, vous pourrez poser d'autres questions, M.
le député de Laurier, à loisir.
M. Bérubé: ... attaqué, par exemple, au fait
que la rémunération, dans le secteur public, était
beaucoup plus élevée que dans le secteur privé.
Également, il aurait dû écouter l'intervention de son chef
où celui-ci a souligné qu'effectivement la position officielle du
Parti libéral était un réalignement sur le secteur
privé...
M. Sirros: Négocié, respectant les
conventions.
M. Bérubé: ... qu'il soit négocié ou
pas. L'objectif poursuivi par le Parti libéral et ce que dit le Parti
libéral c'est: Si nous étions au pouvoir, nous abaisserions les
salaires au niveau de ceux du secteur privé. Alors, en réalignant
les salaires sur le secteur privé, les pensions calculées
à partir des salaires que vous auriez l'intention de verser seraient
forcément moindres. Donc, le Parti libéral nous dit: Nous, notre
objectif, c'est d'abaisser les salaires pour les réaligner sur ceux du
secteur privé, avec la conséquence inévitable sur les
pensions. Le projet de loi 70 a comme conséquence d'abaisser les
salaires davantage en ligne avec ceux du secteur privé et, par
conséquent, d'abaisser les pensions de la même façon pour
l'avenir. En d'autres termes, ce que fait le projet de loi 70 est absolument
identique à ce que veut faire le Parti libéral dans sa politique
salariale. Alors, peut-être que le député de
Louis-Hébert pourrait maintenant m'expliquer comment il peut
réconcilier le fait qu'il veuille abaisser les salaires pour les
réaligner sur ceux du secteur privé et, en même temps,
s'opposer à ce que cet effet de ce réalignement-là
amène une réduction des pensions qu'il vient de décrier,
de dénoncer, il y a trente secondes. Il y a une incohérence. Si
votre objectif est d'abaisser les salaires au même niveau que ceux du
secteur privé, cela a nécessairement comme conséquence
d'abaisser les pensions de la même façon, et si vous vous opposez
à abaisser les pensions en même temps que vous abaissez les
salaires, vous ne pouvez donc pas abaisser les salaires.
M. Sirros C'est sur le même point.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. J'avais d'abord
reconnu le député de Charlesbourg.
M. Sirros: C'est sur le même point?
Le Président (M. Bordeleau): J'imagine que oui.
M. de Belleval: J'ai écouté attentivement la
question du député de Louis-Hébert. Il a dit: Toute
compression sur les salaires, dans une année donnée, a des
conséquences sur les pensions au bout de la iigne, soit
instantanément pour ceux qui prennent leur pension à ce moment-ci
ou dans les mois qui suivent, soit par effet cumulatif à long terme.
C'est bien ce que je comprends. J'interprète bien la position du
député de Louis-Hébert?
M. Doyon: Ce ne sont pas les mots que j'ai utilisés, M. le
Président, mais c'est la façon qu'a le député de
Charlesbourg d'expliquer la chose. Alors, je le laisse continuer pour voir
où il veut en arriver. Je n'ai pas à endosser ses paroles.
M. de Belleval: J'explique la chose différemment, mais
est-ce que j'interprète mal la position du député de
Louis-Hébert? Il dit que toute compression sur les salaires a un effet
à la baisse sur la pension versée.
M. Doyon: Ce que j'ai surtout voulu faire valoir, M. le
Président, et c'était l'objet de mon propos...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: ... c'est la contradiction dans la démonstration
que nous faisait le président du Conseil du trésor, alors qu'il
tentait de nous faire croire que c'était une illusion d'optique que de
croire que, par ce projet de loi et par l'effet combiné qu'il a avec le
projet de loi no 70, il n'y aurait pas un effet continu dans les pensions qui
seront versées aux bénéficiaires.
M. Bérubé: Mais c'est évident, on
économise 141 000 000 $.
M. de Belleval: Un instant. Si je comprends bien...
Le Président (M. Bordeleau): Continuez, M. le
député de Charlesbourg.
M. de Belleval: ... on est sur la même longueur d'onde, on
dit la même chose. Ce que j'ai toujours compris des explications du
président du Conseil du trésor, c'est que oui, effectivement
ça va avoir un effet. Tout ce qu'on dit là-dessus et ce que le
président du Conseil du trésor vient de dire, c'est que oui,
ça va avoir un effet, comme vous le dites. Vous avez raison, M. le
député de Louis-Hébert, on vous donne raison, cela a un
effet. Dans le sens que vous le mentionnez, on est d'accord avec vous, mais la
seule chose qu'on dit, c'est que, de ce point de vue, la position de votre
parti sur les compressions salariales, que vous voulez, vous aussi, mettre de
l'avant et que vous mettez d'ailleurs de l'avant, pour réaligner les
salaires versés dans le secteur public avec ceux versés dans le
secteur privé, aurait exactement les mêmes effets. La seule
différence, c'est que vous dites que vous, vous l'obtiendriez, cet effet
de diminution, par voie de négociation et, si la négociation
échoue, souvenez-vous que le député d'Argenteuil a dit
qu'il utiliserait les prérogatives législatives du gouvernement,
tandis que nous, nous le faisons par le biais du projet de loi no 68 et du
projet de loi no 70. Je suis d'accord qu'on diverge d'opinion sur la
méthode, mais le résultat est le
même. La question est de savoir à quelle sauce on va cuire
l'oie, mais, de toute façon, au bout, elle va avoir maigri de la
même façon, avec votre proposition comme avec la nôtre. Je
ne vois pas pourquoi on s'étendrait là-dessus; on est d'accord
pour être en désaccord et on s'entend sur le mécanisme.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier.
M. Sirros: J'ai dit tout à l'heure au ministre,
président du Conseil du trésor, que, quand on ne veut pas
répondre, on parle des autres. Mais la différence dans ce que
vous faites, même si on est d'accord sur le principe de la
réduction de l'écart, ça me fait un peu penser au
problème de la surpopulation de la terre; il y a deux solutions: faire
exploser cinq bombes atomiques ou planifier les naissances. C'est à peu
près ça, vous avez choisi de faire exploser des bombes atomiques,
c'est tout.
M. de Belleval: Sur les analogies, ça ne nous
mènera pas loin!
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, je voudrais comprendre ce
problème. Par exemple, prenons un haut fonctionnaire qui, au 30 juin,
gagne 40 000 $. Au 1er juillet, il gagnera, disons, 44 000 $; au 31
décembre, 44 800 $ - je n'ai pas les chiffres exacts - ensuite, du 1er
janvier jusqu'au 31 mars, il retombe à 36 000 $. Mais le 1er avril, son
salaire va être gelé au même montant que celui qu'il gagnait
le 30 juin 1982. M. le ministre, vous devez admettre que, dans un tel cas, cet
employé gagnerait, du 1er janvier 1983 au 31 décembre 1983, moins
que l'année précédente.
M. Bérubé: Est-ce que vous voulez comparer les taux
ou si vous voulez comparer les revenus?
M. Polak: Je vais reprendre l'exemple du haut fonctionnaire dont
le salaire sera gelé, le 1er avril, à, je pense, au-dessus de 38
000 $ ou 37 000 $.
M. Bérubé: Prenons 38 000 $, pour que ce soit
facile.
M. Polak: D'accord.
M. Bérubé: S'il est à 38 000 $, son salaire,
sur une base annuelle, au 1er juillet, serait porté à 41 634 $.
Son salaire annuel, le 1er janvier 1983, serait porté à 33 786 $
pendant trois mois. Le gain qu'il a fait pendant six mois est effacé par
la perte qu'il fait pendant trois mois - pas complètement d'ailleurs,
mais en partie effacé - ce qui lui donne, le 1er avril, un salaire de 38
000 $.
Si je regarde maintenant son revenu...
M. Polak: Sur l'année civile.
M. Bérubé: Sur les neuf mois, de juillet au 1er
avril, comme revenu net, il aura 773 $ de plus dans ses poches.
M. Polak: Si on prend ce même employé du 1er janvier
1982 au 31 décembre 1982, l'année fiscale courante sur laquelle
il paie ses impôts, et ce même employé le 1er janvier 1983
jusqu'au 31 décembre 1983, qu'est-ce qu'il reçoit en comparaison
d'une année à l'autre? Là, je reviens à la question
du député de Louis-Hébert au point de vue de la
pension.
M. Bérubé: Je peux seulement vous faire le calcul
du 1er juillet au 1er juillet.
M. Polak: Non, mais il paie ses impôts du 1er janvier au 31
décembre.
M. Bérubé: Oui, mais, comme la convention
collective n'a pas été signée à partir du 1er
avril, je ne peux pas vous dire quel va être son taux de salaire,
après le 1er avril. Son taux de salaire sera défini dans la
convention collective. Donc, je ne peux pas vous dire ce qu'il gagnera à
partir du 1er avril. Je peux donc vous dire ce qu'il va gagner du 1er juillet
au 1er avril. Cela, je peux vous le dire. Du 1er juillet au 1er avril, cet
employé devant gagner normalement 38 000 $ aurait dû recevoir 3016
$ de revenu additionnel sur la période de neuf mois et il recevra 773
$.
M. Polak: Oui, mais disons que je suis employé de cette
catégorie. Je remplis ma formule d'impôt, c'est l'année
civile 1982. À la fin de l'année 1983, je remplis ma formule
d'impôt pour 1983. Je veux savoir comme employé quel est mon
revenu total brut 1982-1983 avec cette formule.
M. Bérubé: Est-ce que vous voudriez que je
décide maintenant quel devrait être le salaire de l'employé
pour l'année 1983?
M. Polak: Vous l'avez dit dans le projet de loi 70. Il est
gelé à partir du 1er avril.
M. Bérubé: Non, il n'est pas gelé a partir
du 1er avril. C'est une confusion que j'ai entendue à deux reprises dans
la bouche du chef du Parti libéral, mais c'est inexact. Le 1er avril,
son taux de salaire est rehaussé à des niveaux qui correspondent
à la proposition du 15 avril. Mais attention, comme il y a
négociation de convention
collective, le taux final auquel son salaire sera fixé sera celui
négocié. Donc, le salaire déterminé le 1er avril
n'est qu'un salaire temporaire.
M. Polak: Si les négociations ne fonctionnent pas, s'ils
ne veulent pas négocier, vous avez un projet qui prévoit ce que
sera la formule.
M. Bérubé: Non.
M. Polak: Parce que, à moins qu'on trouve une autre
formule par le moyen des négociations, on a établi que les
salaires de telle catégorie de hauts fonctionnaires seraient
gelés. À moins que j'aie mal lu tous les commentaires. Je n'ai
pas étudié toute la brique qui a été produite avec
le projet de loi 70.
M. Bérubé: Pour que ce soit facile, M. le
député de Sainte-Anne, je vais vous donner votre employé
de 38 000 $ qui vous fatigue.
M. Polak: C'est juste le commencement parce que je vais descendre
jusqu'à 13 000 $ après.
M. Bérubé: Alors, son salaire pour quinze jours
était, au 30 juin, de 1456 $; aux quinze jours, à partir du 1er
juillet 1982, il va recevoir 1596 $ pendant six mois. Il reçoit 1596 $
par quinzaine. Le 1er janvier 1983, il recevra aux quinze jours 1295 $. Le 1er
avril 1983, là, nous ne pouvons dire quel sera son salaire parce que son
salaire va faire l'objet d'une négociation de convention collective. En
attendant d'avoir conclu une convention collective, plutôt que de le
laisser à 1295 $ et de lui dire: Viens négocier, nous remontons
temporairement son salaire à 1456 $, mais il s'agit là d'un
salaire temporaire et, dès qu'il y a conclusion de la convention
collective, ce taux de salaire est ajusté rétroactivement.
M. Polak: Prenons le pire, parce que, tout à l'heure, avec
vos actuaires, vous avez prévu même jusqu'à 1995. Je parle
seulement du 1er avril 1983. Le 1er avril 1983, le gouvernement est à
court de fonds, les négociations ne fonctionnent pas; il décide
justement pour cette catégorie-là seulement: Vous autres,
messieurs, vous serez gelés par décret. Si cela arrive, ce
monsieur-là, qu'est-ce qui lui arrive dans l'année civile 1983?
Parce que, s'il reçoit plus qu'en 1982, le député de
Louis-Hébert n'avait pas raison au point de vue de la pension parce
qu'il reçoit un peu plus. Mais, selon moi, il reçoit moins.
M. de Belleval: Est-ce que je peux répondre?
M. Bérubé: Tout en me référant
à l'article 168, qui est un article que j'aime beaucoup, il est
indiqué à cet article...
M. Polak: Pour une question pénible, vous invoquez le
règlement.
M. Bérubé: ... "est irrecevable une question qui
contient une hypothèse." Or, par définition, la question du
député est purement hypothétique. Par conséquent,
la question est irrecevable. (23 h 30)
M. Polak: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Un instant. M. le
député de Sainte-Anne, un instant. Je vais vous donner la parole
dans quelques secondes, s'il vous plaît. Mais, depuis un certain temps,
vous discutez nettement de la loi 70 et non pas de la loi 68. Tant qu'il y
avait un lien avec les fonds de pension, je veux bien qu'on soit large et qu'on
discute des salaires qui ont rapport avec les fonds de pension, mais là,
depuis un certain temps je vous vois nettement aller du côté des
salaires. On va devoir discuter, de toute façon, la loi 70. Je vous
demanderais de reporter vos questions au moment où nous discuterons la
loi 70.
M. Polak: M. le Président, vous n'étiez pas assez
rapide ou peut-être trop rapide parce que j'arrive maintenant au projet
de loi no 68. Le ministre vient de répondre...
Le Président (M. Bordeleau): Merci.
M. Polak: ... en disant que ce qui arrive le 1er avril est une
hypothèse. Donc, je ne peux pas discuter de ça. Je ne veux rien
savoir, c'est une hypothèse. Je trouve cela un peu malheureux parce que
j'aurais bien aimé qu'il prenne l'hypothèse du gel le 1er avril.
Je retombe sur le projet de loi no 68. On parle du projet de loi no 68. Le
traitement moyen de cinq années de service. Comment peut-on expliquer
cela à nos commettants, quand on prend le traitement moyen de cinq
années de service les mieux rémunérées? Ils veulent
savoir ce qui arrive en 1983. Moi, je dis: Prenons le pire, c'est gelé.
Le ministre refuse de répondre. C'est à moi de faire le calcul?
Si vous refusez de répondre à cette hypothèse, j'accepte
la théorie du député de Louis-Hébert. Mais
peut-être que vous avez donné une réponse en disant que si,
le 1er avril, il est gelé, il aurait tout de même un peu plus
qu'en 1982, année civile. Peut-être avez-vous raison.
Je vais fortifier votre argument. Si on prend un gars qui gagne 13 000
$, de la manière dont, moi, j'ai fait le calcul, avec les chiffres et
quantités donnés, s'il n'y a pas de convention, je crois que ce
monsieur, en 1983 année civile, aurait un peu plus
qu'en 1982 année civile, de sorte que ce n'est pas sa pire
année, en 1983.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg, vous avez une réponse?
M. de Belleval: Je pense que les hypothèses
soulevées par le député de Sainte-Anne comme celles
soulevées par le député de Louis-Hébert sont tout
à fait correctes dans le sens suivant: les pensions étant
calculées sur les années civiles et non pas 3ur les taux
salariaux des années. Et mieux que ça, quand on dit les
années civiles, c'est 3ur les salaires effectivement versés
durant l'année civile.
M. Polak: C'est ça.
M. de Belleval: C'est ça qui arrive. Il est évident
que tout bouleversement dans les structures salariales, c'est-à-dire pas
dans les structures, mais dans les montants salariaux, les quantités
salariales versées dans une année donnée, en toute
hypothèse, a une influence sur les pensions ultimement versées.
C'est certain, ça. D'ailleurs, je dis en toute hypothèse. Par
exemple, quand on négocie des renouvellements de conventions collectives
et que des montants rétroactifs sont versés parfois, un an, un an
et demi après l'expiration d'une convention collective - on a
déjà vu ça, j'ai déjà vu, moi, des montants
versés rétroactivement deux ans après - ces montants
rétroactifs sont comptabilisés, pour fins de pension, dans
l'année où ils sont versés. Quelqu'un qui a pris sa
retraite entre-temps, dans des années qui se sont trouvées
à être des années relativement de vaches maigres par
rapport à cette année où il y a un surplus de
versé, cela affecte les pensions. De la même façon, cela va
les affecter durant l'année qui vient, mais le résultat final sur
un individu dépend de beaucoup de choses parce qu'il se peut qu'il
prenne sa pension 20 ans plus tard.
L'effet des changements de quantité dans une année,
donnée au point de vue salarial, va être absorbé, de toute
façon. Il ne verra rien de cela. Il y a les effets cumulatifs dans le
cas des compressions. Évidemment, les effets cumulatifs, qu'est-ce
qu'ils vont être dans 5 ans, dans 10 ans, dans 15 ans, dans 20 ans, en
bout de piste? On ne le sait pas non plus. Par contre, pour quelqu'un qui se
trouverait à prendre sa retraite juste dans ces années, disons,
de vaches maigres, à supposer qu'il y ait plusieurs années de
vaches maigres - il se pourrait aussi qu'il y ait plusieurs années de
vaches maigres; cela peut se retrouver aussi dans d'autres régimes de
retraite qui fonctionnent de la même façon, au gouvernement
fédéral ou dans l'entreprise privée, etc. - c'est
évident que le résultat va aussi être différent si
la personne se trouve à prendre sa retraite durant ces cinq
années, le calcul de sa pension va être affecté.
De la même façon aussi si, tout d'un coup, quelqu'un prend
sa retraite après cinq années de vaches grasses, c'est sûr
que sa pension, indexée au bout de 10 ans, 15 ans, 20 ans, va être
affectée. On comprend tout ça. On est d'accord avec l'Opposition
là-dessus. Je pense que, de ce point de vue, votre point est fait et
ça ne sert à rien d'en discuter davantage.
M. Polak: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: ...seulement une dernière question. C'est
malheureux, je ne peux pas poser la question au ministre, parce que maintenant,
au lieu de lire le Journal de Québec, il lit le Devoir. "La force
argentine se rend". Le texte est un peu différent, mais c'est le
même résultat. J'aurais pu vous dire le résultat, M. le
ministre, parce que je l'ai entendu ce matin à la radio, mais, au moins,
son adjoint parlementaire est beaucoup plus sérieux et il participe au
débat.
M. de Belleval: Je ne suis pas d'accord. Le ministre a
déjà répondu.
M. Polak: Je voudrais demander une chose: Ai-je bien compris que
le gouvernement n'est même pas prêt à donner une garantie
à toutes ces classes d'employés et de fonctionnaires qui sont
touchées par ce projet de loi qu'il n'y aura pas de réduction
dans l'année civile 1983 en comparaison avec 1982, qu'ils ont toujours,
même si cela peut être en définitive une petite
augmentation, une garantie au moins qu'elle ne sera pas moindre, de sorte que
leur pension ne sera pas touchée d'une manière aussi
préjudiciable?
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: D'abord, le ministre, président du Conseil
du trésor, a toujours répondu aux questions de l'Opposition, de
ce point de vue, dans le même sens que ce que je viens de faire. Je
comprends qu'à un moment donné il puisse être un peu
fatigué de répéter toujours la même réponse
à différents députés qui lui posent toujours la
même question. Je veux dire que, dans sa position, cela peut être
compréhensible. Ce n'est pas parce que le ministre refuse de
répondre. Il a toujours répondu la même chose. On a
toujours répondu la même chose, tout le monde, là-dessus.
Vous dites: Est-ce qu'on peut donner une garantie qu'un
employé, en 1983, n'aura pas un montant... M. Polak:
Moindre au total.
M. de Belleval: ...moindre au total, sur l'ensemble de
l'année, que ce qu'il aura reçu en 1982? J'avoue qu'il faudrait
que je voie les hypothèses devant moi, mais je n'ai pas l'impression que
cela puisse se produire. Même si cela se produisait, "so what"? Je ne
comprends pas quelle est, là encore, la signification finale de tout
cela. On parle d'une moyenne de cinq ans. Tout dépend. Cela va
dépendre, pour l'individu en question, sur quelle période
d'année sa pension va être calculée, parce que, si c'est
inclus, s'il prend, par exemple, sa retraite en 1983, la moyenne ne sera pas
changée, de toute façon, que les montants aient été
versés en 1983 ou en 1982. Cela ne changera absolument rien au
résultat de sa pension; de la même façon, s'il prend sa
retraite en 1984, en 1985 ou en 1986. Cela pourrait affecter un individu qui
prendrait sa pension en 1988 ou là, sa cinquième année -
la dernière année, si l'on veut, ou la première
année, selon le point de vue - serait une armée moins faste que
l'année qu'il aurait normalement eue si une partie de l'augmentation ou
de la compression avait été faite sur 1982 plutôt
qu'entièrement sur 1983. Mais là, que va-t-il se passer d'ici
cinq ans? Quel va être l'effet des compressions, à ce
moment-là? De toute façon, l'effet résiduel est de
combien, au bout de la piste, pour tout cela? Pour tout montant de compression,
c'est à peu près, au bout de la piste, un facteur de quoi? Un
dixième qui va être affecté, finalement, au bout, au niveau
du calcul de la pension, puisqu'il ne faut pas oublier que si les compressions
sont sur trois mois, le calcul de la pension, lui, se fait quand même sur
soixante mois, c'est-à-dire cinq fois douze mois, et 70% de ce montant,
etc.
M. Polak: À moins que vous ne veniez avec d'autres
réductions après.
M. de Belleval: D'ailleurs, on me fait remarquer une chose. On me
dit que ce ne sont pas les cinq dernières années, mais les cinq
meilleures années. À ce moment-là, toute cette discussion
est inutile.
M. Polak: Eh bien! Excusez-moi, M. le Président.
Des voix: Ah! Ah!
M. Polak: II est 23 h 40. Donc, je vais pardonner cela au
député de Charlesbourg, mais ne venez pas me dire, M. le
député de Charlesbourg, que les cinq meilleures années
vont être les années avant 1982. C'est impossible...
M. de Belleval: C'est l'hypothèse...
M. Polak: ...parce qu'il y a toujours eu des augmentations
progressives.
M. de Belleval: Ce n'est pas moi...
M. Polak: II n'y a pas un employé de la fonction publique
qui a gagné, en 1982 moins qu'en 1979. J'aimerais bien voir cet
individu, à moins que ce ne soit un "tabletté" qui a une autre
fonction.
M. de Belleval: Je veux bien l'admettre et c'était le sens
de toute mon explication, mais, ceci étant dit, c'est vous qui avanciez
l'hypothèse que les salaires seraient moins élevés dans
une année postérieure que dans les années
antérieures. Ce n'est pas moi qui ai fait cette hypothèse.
M. Polak: D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Oui, M. le Président, là-dessus,
j'aimerais, en passant, attirer aussi l'attention de la commission et du
président du Conseil du trésor sur l'effet que cela va avoir,
parce qu'il faut reconnaître - le député de Charlesbourg
l'a dit fort justement et puis très longuement aussi - qu'il va y avoir
un effet pour un certain nombre de pensionnés dont le calcul de la
pension va être basé sur des années qui vont comprendre
l'année 1983. Je pense qu'on peut s'entendre qu'il y a un effet quelque
part là-dessus.
Mais est-ce que le président du Conseil du trésor n'est
pas, comme moi, prêt à déplorer le fait que les 20% de
diminution salariale à peu près - c'est 18,7% je pense
-qu'annonce et que va imposer le projet de loi no 70 vont avoir un effet plus
considérable proportionnellement et plus désastreux sur le petit
salarié de l'ordre de celui que vous indiquez tout à l'heure, de
13 000 $, 14 000 $, que sur quelqu'un d'autre qui va se retrouver avec une
pension plus considérable compte tenu du fait que son salaire a
été plus considérable? Je voudrais entendre le
président du Conseil du trésor nous dire s'il n'est pas
prêt à déplorer cet aspect "bulldozer" de son projet de loi
qui met dans une situation plus difficile les petits salariés dont la
pension, justement, doit être comptée au compte-gouttes, à
"la cenne" près parce qu'ils ont déjà la difficulté
à arriver.
Je dis que le projet de loi no 70 va avoir un effet sur le calcul du
fonds de pension et que cet effet-là est déplorable si minime
soit-il, selon le raisonnement du député de Charlesbourg, sur la
pension des gens qui doivent déjà calculer jusqu'au
moindre sou pour arriver. Est-ce que le président du Conseil du
trésor, qui est plus habitué évidemment, lui, à
manipuler, à jongler avec des milliards, soient-ils déficitaires,
n'est pas prêt à reconnaître que cet effet-là est
néfaste et regrettable? C'est cela qu'on aimerait l'entendre dire.
Est-ce qu'un dollar enlevé dans la poche de celui qui en a le moins les
moyens n'est pas, finalement, quelque chose qui le tracasse davantage que le
dollar qu'on va chercher chez un pensionné dont la pension est
calculée sur une base de salaire de 35 000 $ ou de 40 000 $? Quelle est
la position du président du Conseil du trésor
là-dessus?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: La position que le gouvernement a
adoptée et qui, je dois le dire, est celle que je défends au nom
du gouvernement est on ne peut plus claire. La décision du gouvernement
dans le cas de la loi no 70 est de réduire le coût de la masse
salariale de 521 000 000 $ sur un coût qui est l'ordre de 12 000 000 000
$, donc d'à peu près 1/24. C'est l'objectif.
Deuxième principe qui sous-tend l'action gouvernementale, c'est
que nous ne profitons pas du projet de loi no 70 pour imposer des
récupérations normatives ou autres aux employés du secteur
public, mais nous laissons à la négociation normale le soin
d'établir l'ensemble des conditions de travail des employés du
secteur public. Or, les écarts de salaires existant entre les
employés du secteur public entraînent les augmentations suivantes.
Cela va?
M. Doyon: Si, si.
M. Bérubé: Je m'excuse, je n'étais pas
certain que vous me suiviez.
M. Doyon: Je ne lis pas mon journal, moi.
M. Bérubé: Ce qui avait été
négocié par les syndicats et le gouvernement était, pour
un salarié de 13 150 $, 1200 $ d'augmentation; pour un salarié de
22 000 $, 1850 $ d'augmentation; pour un salarié de 38 000 $, 3000 $
d'augmentation. Donc, ce qui a été négocié, ce sont
des augmentations qui, en pourcentage, sont constantes, respectant ainsi
l'écart ou le rangement interne existant entre les différents
niveaux salariaux au gouvernement. Le projet de loi ne modifie pas ce rangement
interne, ne modifie pas les écarts. Nous estimons que les écarts
existant entre différents emplois au gouvernement doivent faire l'objet
de la négociation. Nous avons simplement décidé comme
gouvernement qu'il y aurait 521 000 000 $ qui, eux, ne feraient pas l'objet de
la négociation. En d'autres termes, nous diminuons la quantité
d'argent, mais la diminuons uniformément en respectant les écarts
qui ont été négociés. Toutefois, le projet de loi
no 70 est très explicite: tout accord, toute entente entre les parties
prévaut sur la loi 70. Par conséquent, si la partie syndicale, au
contraire, voulait, dans le cadre de la récupération dont on
parle, modifier les écarts entre les bas salariés et les hauts
salariés, ce avec quoi nous sommes d'accord, il n'y aurait aucun
problème pour modifier la proposition et le faire par voie
négociée. (23 h 45)
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Là-dessus, le président du Conseil du
trésor n'a aucunement répondu à l'interrogation que j'ai
et qui est celle de nombreux futurs pensionnés. On sait que les
pensions, dans certains cas, peuvent être suffisantes, peuvent permettre
d'arriver assez facilement si on a évolué à un niveau
salarial qui est respectable. Disons qu'on peut s'organiser pour avoir une
retraite confortable ou, en tout cas, acceptable. Cela, c'est correct. Je vois
que le président du Conseil du trésor reprend son journal,
sachant déjà que la réponse qu'il va me donner ne sera pas
satisfaisante, c'est ce que je dois comprendre.
M. French: II relit sa lettre ouverte aux
Québécois.
M. Doyon: C'est ce qu'il fait, oui.
M. Bérubé: Elle est excellente, je vous
conseillerais de la lire.
M. Fortier: Cela a été écrit par le
sous-ministre?
M. Doyon: Cela lui permettra d'économiser des timbres
à l'Assemblée nationale puisqu'il n'aura pas besoin d'envoyer sa
propagande par la poste.
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Polak: II y a un journal qui reste, c'est la Gazette.
M. Bérubé: C'est le dernier que je lis. Quand je
veux me déprimer, je lis la Gazette.
M. Doyon: Le président du Conseil du trésor n'a pas
répondu au souci que je lui exprimais, à savoir que cette
diminution qui était acceptable pour des gens qui avaient
évolué à un niveau salarial donné, disons de 35 000
$ ou 40 000 $, en affectait d'autres
d'une tout autre façon. Au niveau pratique, je comprends qu'il va
me répondre en pourcentages, etc. Je comprends son discours
là-dessus. Mais dans les faits, la perte d'un seul dollar ou de dix
dollars de pension pour une personne qui est déjà pratiquement au
seuil de la pauvreté, cela n'a pas les mêmes effets que pour une
personne qui déjà peut avoir un coussin quelconque, et c'est
là-dessus que j'interrogeais le président du Conseil du
trésor. C'est cette préoccupation que je voulais lui voir
partager. C'est ce sur quoi je m'interrogeais et c'est ce sur quoi je n'ai pas
eu de réponse. Non seulement cela, j'ai eu une réponse qui
ressemblait pratiquement à une fin de non-recevoir puisqu'il passe des
journaux aux magazines.
M. Polak: Donnez-nous le titre du magazine? Playboy.
M. Doyon: C'est cela qui m'inquiète, M. le
Président. J'aimerais, au nom des gens qui n'ont pas de voix ici
à cette commission...
M. Blais: Question de règlement.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Terrebonne, vous avez une question de règlement.
M. Bérubé: Quel article, M. le
député?
M. Blais: Les articles 34 et 108 à 181. On reproche au
président du Conseil du trésor, qui s'évertue à
nous donner des réponses, de ne pas les donner, mais le
député de Louis-Hébert dit qu'il s'interroge. S'il
s'interroge lui-même, comment voulez-vous que le président du
Conseil du trésor lui réponde? Qu'il se réponde!
M. Doyon: M. le Président, il n'y a pas de question de
règlement là-dedans, entre vous et moi.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député,
non, ce n'est vraiment pas une question de règlement. M. le
député de Louis-Hébert, si vous voulez continuer votre
même question.
M. Doyon: Merci.
M. de Belleval: M. le Président, est-ce que je peux
répondre à la question du député de
Louis-Hébert?
M. Doyon: Je n'ai pas tout à fait terminé.
M. Bérubé: II n'a pas terminé encore.
M. Doyon: Ce que j'aurais aimé savoir du président
du Conseil du trésor, mais il ne semble pas prêt à
répondre puisqu'il est dans les magazines et dans les journaux, depuis
un certain temps, et c'est inquiétant pour les travaux de cette
commission, je le dis en passant...
M. Polak: Et pour les travailleurs et les travailleuses.
M. Doyon: J'aimerais être la voix de ceux qui ne sont pas
à cette commission et qui ont des inquiétudes. Comment vont-ils
faire, avec la diminution, si minime soit-elle? Le député de
Charlesbourg a fait valoir que ce n'était pas finalement, en bout de
piste, une très grosse diminution. Sauf que, quelle qu'elle soit, cette
diminution, elle a des effets plus néfastes pour une personne qui a un
salaire plus bas. C'est cela, le paradoxe, M. le Président: plus le
salaire est bas, plus l'effet est dommageable, et moins le président du
Conseil du trésor s'en occupe. C'est cela qui nous inquiète.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 13 sera
adopté?
M. de Belleval: M. le Président, avant...
M. Bérubé: Je vais laisser la parole au
député de Charlesbourg.
Le Président (M. Bordeleau): Non, non. Je vous pose la
question, comme tout bon président devrait le faire. M. le
député de Charlesbourg.
M. de Belleval: M. le Président, j'ai écouté
tantôt la réponse du député de Matane. Il a
répondu à la question du député de
Louis-Hébert que la façon, justement, d'éviter ces
désagréments, ces désavantages, c'est d'appliquer - on le
verra quand nous étudierons le projet de loi no 70 - l'article 5, je
pense qui permet de conclure, entre le gouvernement et les syndicats, un
arrangement qui ferait que, justement, les diminutions ne seraient pas
égales pour tout le monde, que les compressions seraient nulles dans le
cas des gens à petits salaires dont parle le député de
Louis-Hébert. Par conséquent, les effets, même plus ou
moins réels ou plus ou moins lointains, que le député de
Louis-Hébert a raison de mentionner, seraient aussi nuls. C'est la
réponse. Je pense que le député de Matane a répondu
au député de Louis-Hébert tout à l'heure, mais nous
allons répondre deux fois, ce n'est pas plus grave que cela.
M. Bérubé: On peut même répondre trois
fois, M. le Président, cela nous fait plaisir.
Le Président (M. Bordeleau): Bon, est-ce que cela va pour
l'article 13?
M. Doyon: Simplement une remarque, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: J'aimerais savoir de la part du président du
Conseil du trésor si c'est une nouvelle approche de la
négociation patronale-syndicale que de lancer des millions, par exemple,
comme cela, à la curée en disant: Voici, battez-vous pour les
avoir entre vous. Est-ce que c'est une attitude patronale responsable
destinée à améliorer le climat de travail? Je comprends le
député de Charlesbourg qui m'explique très bien; je
comprends cela 100 milles à l'heure, je n'ai pas de difficulté,
aucune. Mais c'est quand même curieux de voir que le gouvernement abdique
sa responsabilité de faire le partage des fonds publics. C'est cela, la
responsabilité d'un gouvernement. À ce moment-là, il
invite à la curée les syndicats, les syndiqués, les
classes d'ouvriers et d'ouvrières et leur dit: Voici, cela va
coûter tant ou nous allons mettre tant sur la table, au plus fort la
poche. C'est cela, l'attitude actuellement et je me demande si cela peut mener
à des négociations qui seront assises sur une base valable et
durable. C'est ce sur quoi j'interroge le président et le ministre.
M. de Belleval: Ce sont des ententes avec les syndicats, alors,
ce n'est pas une curée.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M.
Bérubé: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Oui. Je pense que le
député de Louis-Hébert a posé deux questions. La
première porte sur l'impact d'un réalignement des salaires sur le
marché privé, sur les pensions qui en résulteront.
Indéniablement, si nous stabilisons les salaires pour les
réaligner sur le marché privé, les pensions
découlant de salaires moins élevés seront également
moins élevées.
M. de Belleval: C'est la position du Parti libéral.
M. Bérubé: C'est la position du Parti
libéral. Donc, effectivement, tout effort pour réaligner la
rémunération dans le secteur public à un niveau
inférieur à celle qui prévaut a comme conséquence
de réduire les niveaux des régimes de retraite,
indéniablement. Comme la position du Parti libéral a
été très explicitement affirmée à plusieurs
reprises, il faut donc conclure que le Parti libéral et le parti
gouvernemental sont d'accord pour réduire le niveau des pensions
à un niveau qui soit plus compatible avec ce qui s'offrirait, pour un
travail équivalent, dans le secteur privé. Bon, voilà,
nous nous sommes entendus là-dessus.
Deuxièmement, si je comprends bien, le député de
Louis-Hébert va même plus loin. Il dit: Pour autant que nous
sommes concernés ou que je suis concerné - je ne sais pas si
c'est vraiment l'affirmation d'une volonté politique de l'ensemble de
son parti - nous pensons que votre proposition de juillet est nettement
meilleure et que, dans cet effort pour réaligner les salaires sur le
marché, vous devriez maintenir une avance des plus bas salariés
par rapport au marché, quitte à avoir de plus hauts
salariés en dessous du marché, puisque si, en moyenne, on est sur
le marché et que l'on veut garder les augmentations de salaire plus
élevées pour les bas salariés, cela veut dire que les bas
salariés seront en avant du marché et les plus hauts
salariés devront être en arrière du marché pour que
la moyenne soit sur le marché.
Donc, le député de Louis-Hébert nous propose une
augmentation de salaire supérieure pour les bas salariés, pleine
protection du pouvoir d'achat, à titre d'exemple, c'est-à-dire du
type de ce que nous avons proposé le 15 avril. En d'autres termes, ce
que le député de Louis-Hébert est en train de nous dire,
c'est: Nous sommes absolument d'accord avec la politique salariale
proposée par le Parti québécois avec les
conséquences que cela entraîne au niveau des régimes de
retraite, au niveau de la rémunération des bas salaires, des
hauts salaires et de l'ensemble de la politique salariale. C'est quand
même une des premières admissions que j'entends de la part du
député de Louis-Hébert, une admission qui est
intéressante, puisqu'il est d'accord avec tous les objectifs de
rémunération poursuivis par le gouvernement. Si je comprends
bien, il n'est en désaccord que sur un point: sur la méthode.
C'est ce que le député de Charlesbourg a très clairement
expliqué.
M. Polak: Est-ce qu'il connaît l'opinion libérale,
lui?
M. Bérubé: II dit: La méthode, je ne l'aime
pas. Je pense qu'on peut avoir toutes sortes d'opinions quant à la
méthode, mais là, je pense qu'il faut s'arrêter et
comprendre le pourquoi de cette méthode. Nous constatons, dans la crise
que nous traversons, qu'il faut absolument réaligner les salaires si
nous voulons protéger la mission essentielle de l'État de fournir
des services à nos concitoyens à un coût raisonnable et
sans hypothéquer l'avenir d'une façon inacceptable.
Là-dessus, l'Opposition est également d'accord, elle trouve que
les
impôts sont trop élevés, elle trouve que les taxes
sont trop élevées et elle trouve qu'il y a trop de compressions
dans les services. Donc, il ne reste finalement qu'à réduire les
salaires pour arriver à atteindre l'objectif qui semble être
poursuivi par le Parti libéral et qui est l'objectif
déclaré du gouvernement depuis un an. À nouveau, entier
accord quant aux objectifs de rémunération et non seulement sur
ça, mais quant à la nécessité d'atteindre ces
objectifs.
La différence entre le Parti libéral et le Parti
québécois est très simple. Le Parti
québécois a le courage de ses convictions et le Parti
libéral n'a pas le courage de ses convictions. Ce que nous disons,
c'est: Si la société doit s'imposer un sacrifice en
répartissant le plus équitablement possible l'effort, il serait
malhonnête de la part du gouvernement d'entrer dans une
négociation où il ferait croire que c'est négociable, que,
oui, il est prêt à maintenir l'avance des salariés du
secteur public sur ceux du secteur privé, qu'il n'a pas l'intention, en
aucune façon, advenant un désaccord, de l'imposer et que, par
conséquent, il est peut-être d'accord sur l'objectif, mais que,
non, il ne l'imposera pas. Alors que, au fond de nous, la décision est
prise, puisque c'est la seule solution, puisqu'il faut répartir
l'effort, il ne faut pas avoir la malhonnêteté de laisser croire
aux employés du secteur public qu'il s'agit là d'une position de
négociation discutable, négociable, réévaluable
à la baisse, sachant que, chaque fois qu'on réévalue
à la baisse, ce sont des services qui écopent, ce sont des
impôts qu'on envoie dans le visage des citoyens ou une hausse des
déficits.
Donc, la seule différence entre la position libérale et
celle du gouvernement, c'est que le Parti libéral prétend
poursuivre les mêmes objectifs, mais n'a pas le courage de ses opinions,
alors que le gouvernement a non seulement des objectifs qu'il entend poursuivre
au nom de l'intérêt public, mais, de plus, il a le courage de ses
opinons. Il ne cherche pas à intimider les travailleurs du secteur
public par de vaines menaces, mais, au contraire, il pense qu'une
société s'ajuste à la réalité lorsqu'elle
doit faire face à cette réalité. Ce que le gouvernement
dit, c'est: Soyons clairs, soyons nets, soyons précis et, par le projet
de loi no 70, arborons nos couleurs, plutôt que de faire comme le Parti
libéral qui passe son temps à tenir un langage sur la
rémunération excessive des employés du secteur public, sur
les taxes trop élevées, sur les déficits trop
élevés, sur les compressions de services inacceptables sans
jamais avoir la moindre position quant aux moyens pour atteindre ces
objectifs.
Deuxièmement, ils laissent croire que leur position n'est qu'une
simple position de négociation, qu'ils ne tiennent pas du tout aux
principes qu'ils ont énoncés et que, dans le cadre d'une
négociation, ils seront bien prêts à surtaxer les citoyens,
à augmenter les déficits, à sabrer dans les
dépenses publiques et à donner des augmentations de salaires
qu'ils viennent de réprouver. Voilà la différence entre
les deux positions et, entre vous et moi, M. le Président, je
préfère de beaucoup la nôtre.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Il est
maintenant minuit. Avant de terminer, est-on prêt à adopter
l'article 13?
M. Fortier: Adopté sur division.
Le Président (M. Bordeleau): L'article 13 est
adopté sur division.
M. de Belleval: Est-ce qu'on continue l'étude ce soir?
Le Président (M. Bordeleau): À moins du
consentement des membres, je devrai ajourner nos travaux. La commission ajourne
ses travaux sine die.
(Fin de la séance à minuit)