To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Commission permanente de la fonction publique

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Commission permanente de la fonction publique

Version finale

31st Legislature, 2nd Session
(March 8, 1977 au December 22, 1977)

Thursday, October 20, 1977 - Vol. 19 N° 211

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 53 — Loi sur la fonction publique


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 53 Loi sur la fonction publique

(Dix heures onze minutes)

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de la fonction publique se réunit de nouveau ce matin pour terminer l'étude du mémoire de l'Association des cadres supérieurs du gouvernement, et pour entendre ensuite le mémoire du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, et celui du Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec.

Je vous rappellerai, au départ, que les membres de la commission sont: M. Bellemare (Johnson), M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Caron (Verdun) remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal); M. Chevrette (Joliette), M. de Belleval (Charlesbourg), M. Dussault (Châteauguay), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Gravel (Limoilou), M. Grégoire (Frontenac), M. Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Le Moignan (Gaspé), M. Marchand (Laurier), M. Marcoux (Rimouski), Mme Ouellette (Hull), M. Picotte (Maskinongé) remplacé par M. Pagé (Portneuf); M. Vaillancourt (Orford) remplacé par M. Mailloux (Charlevoix).

M. Chevrette: Mme le Président, pour les fins du journal des Débats...

Le Président (Mme Cuerrier): J'aurais aimé faire une petite mise au point...

M. Chevrette: C'est sur les présences.

Le Président (Mme Cuerrier): Sur les présences, d'accord.

M. Chevrette: Hier, vous ne m'avez pas nommé, et j'étais ici. Pour les fins du journal des Débats, ce serait très important.

Le Président (Mme Cuerrier): En effet, vous étiez là, M. le député de Joliette-Montcalm. Je puis en témoigner.

M. Chevrette: Merci.

Le Président (Mme Cuerrier): Je voudrais simplement faire une petite mise au point. Tous ceux qui ont l'habitude des commissions parlementaires et de l'Assemblée nationale savent fort bien que, quand le public dans les tribunes, ou que les observateurs observent, justement, pour ne pas me répéter, les débats, il est dans les règles du code qui nous régit que ces observateurs ne doivent manifester d'aucune façon.

On m'a demandé ce matin de laisser entrer tout le monde, parce que les observateurs, aujourd'hui, sont très nombreux. J'ai, bien sûr, fait ouvrir les galeries. Puisque vous avez pris la peine de vous déplacer pour entendre des discussions qui vous concernent, je ne vois pas comment on pourrait vous refuser, surtout en commission parlementaire, d'être ici.

Je vous demanderais tout de même de bien respecter le règlement de l'Assemblée, qui demande aux observateurs de ne pas applaudir — je sais que c'est parfois bien difficile — ni de manifester son approbation ou sa désapprobation de quelque façon que ce soit. Je vous remercie bien de votre collaboration.

M. le député de Johnson, vous vouliez intervenir?

M. Bellemare: Hier, le ministre de la Fonction publique nous a soumis une déclaration que je déclare ministérielle et que nous avons gardée en suspens pour ce matin. Le député de Jean-Talon et moi-même avons dit: C'est un peu contraire à l'habitude de déposer un texte aussi contentieux sans avoir eu l'occasion de le lire quelques minutes au préalable, ce qui fait que nous avons demandé, ce matin, de pouvoir donner la réponse qui nous convient.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, je vais entendre vos remarques. Je vous demanderais quand même d'être assez bref, parce qu'il y a beaucoup de gens ici qui ont été convoqués.

Comme nous ne siégeons que jusqu'à 13 heures, aujourd'hui, nous avons beaucoup de travail à faire, soit dit sans vous empêcher de faire vos remarques et de les faire de la façon dont vous en avez l'habitude.

M. Bellemare: J'espère, Mme le Président, que vous ne nous bâillonnerez pas, parce que nous avons...

Le Président (Mme Cuerrier): Sûrement pas, M. le député de Johnson, je vous accorde la parole avec plaisir.

M. Bellemare: Merci, Mme le Président, nous avons tellement de choses à dire sur ce sujet que nous ne tenons pas à être mis au rancart, parce que sa déclaration d'hier est un sauve-qui-peut pour le ministre. Dans cette déclaration, il dit, au quatrième paragraphe, ce qui est le plus contentieux, qu'à l'aire de la négociation — et je cite textuellement — "je voudrais signaler que, pour plusieurs des matières assujetties, en vertu du projet 53, au pouvoir réglementaire du ministre de la Fonction publique, la loi actuelle ne permet pas davantage leur inclusion dans l'aire de la négociation — remarquez bien cela —. C'est notamment le cas de la classification des emplois, du classement du personnel, seuls les appels étant matière à négociation, de la promotion et de l'avancement de l'établissement d'un code d'éthique et de discipline, seules les sanctions disciplinaires qui constituent la suspension et le congédiement

étant matière à négociation. Il est de même pour la déclaration d'aptitude tant pour le recrutement, l'avancement et la promotion que pour la mutation, le reclassement et, le cas échéant enfin, l'appel en matière de promotion et d'avancement."

Dans ce paragraphe, vous voyez véritablement où se dirige le ministre; il veut faire passer le projet de loi avec rapidité sans attendre les conséquences et surtout le résultat de l'enquête Martin, tel que je l'ai demandé par une motion, qui vont donner des choses très intéressantes dans la négociation.

Premièrement, M. le Président, le pouvoir de négocier toute condition concernant les syndiqués;

Deuxièmement, de conserver le pouvoir de formuler des griefs relatifs à tout différend, de quelque nature que ce soit;

Troisièmement, que la décision de l'arbitre ait préséance sur les règlements ministériels.

Là, M. le Président, vous voyez que le ministre, s'apercevant que sa loi va pas mal trop loin, prend la précaution d'aller encore plus loin, dans sa déclaration ministérielle d'hier, au paragraphe que je viens de citer. Je répète, madame, pour la millième fois, que c'est une loi arbitraire, que c'est une loi qui va sûrement enlever des droits acquis aux fonctionnaires et je dis que les pouvoirs que se donne le ministre, pour la première fois de l'histoire des fonctionnaires, dans l'article 3, dans l'article 45, où il y a une délégation de pouvoir à un sous-ministre ou à un directeur de personnel, et à l'article 70, où on va évaluer au mérite la mobilité d'un fonctionnaire, et à l'article 88, où n'importe qui, un sous-ministre ou un chef de ministère, un chef de personnel, peut faire rétrograder un employé parce qu'il ne l'aime pas, parce que sa face ne lui revient pas, parce que ce n'est pas tout à fait sa religion, c'est un peu à côté de ce qu'il pense. Ces articles 3, 45, 70, l'évaluation au mérite, sans critère, sans jamais connaître, avant l'adoption de la loi, comment va être formulée, dans l'ensemble, cette loi et particulièrement l'article 88 où, avec l'article 45, un pouvoir est délégué, un droit arbitraire sur les employés, dans un temps comme on en traverse, madame, — et je termine pour vous écouter docilement, pour ne pas avoir à subir vos foudres, parce que j'ai un paratonnerre qui peut m'en défaire — je dis que cette loi est arbitraire. Dans les temps modernes que nous traversons et après les luttes extraordinaires qu'ont menées les fonctionnaires, ce n'est pas le temps de bâtonner le fonctionnaire; ce n'est pas comme cela qu'on va avoir plus de rendement de la part des fonctionnaires. Je dis et je suis convaincu que le ministre va nous apporter des changements après les arguments qui vont nous être présentés dans différents mémoires.

Nous avons déjà reçu sept ou huit mémoires que nous avons entendus, et ils sont rares ceux qui chantent la louange du ministre. A plus forte raison, ceux qui sont chargés, par mandat, d'être dans l'Opposition au gouvernement devront travailler plus intensément à faire reconnaître et à faire protéger comme il se doit les droits acquis des fonctionnaires.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre, vous aviez des interventions à propos du mémoire qui est actuellement devant la commission? Quelqu'un d'autre a-t-il... M. le député de Mont-Royal.

Association des cadres supérieurs du gouvernement du Québec

M. Ciaccia: Mme le Président, suite aux remarques du député de Johnson, nous aussi, nous avons eu un peu l'occasion d'examiner la déclaration ministérielle, les propos du ministre hier au sujet de certains amendements qu'il songe à apporter à la loi. On peut dire que, premièrement, les propos qu'il nous a donnés hier ne changent rien pour les non-syndiqués. Il semble y avoir une claire contradiction entre les projets d'amendement du ministre et l'article 3. Si vraiment le ministre veut donner effet à l'intention de donner le droit de négocier toutes les conditions de travail et tout ce que les syndiqués et les fonctionnaires demandent, il faut absolument amender l'article 3. On soumet que les propos du ministre, hier, ne changent pas vraiment le projet de loi. Je voudrais demander aux invités devant nous s'ils sont satisfaits des amendements déposés hier. Est-ce que cela vous donne une certaine assurance? Est-ce que cela apporte certains changements à votre mémoire ou à la critique que vous allez y apporter?

M. Mérineau (Claude): Mme le Président, nous avons regardé très sommairement l'amendement qui a été proposé par le ministre hier, mais nous ne sommes réellement pas...

Le Président (Mme Cuerrier): Vous êtes M. Mérineau, n'est-ce pas?

M. Mérineau: C'est cela.

Le Président (Mme Cuerrier): Pour le bénéfice du journal des Débats, nous aimerions que vous vous identifiiez, s'il vous plaît. J'essaierai de vous reconnaître, mais vous êtes très nombreux.

M. Mérineau: C'est mon erreur, je m'excuse. Claude Mérineau.

Le Président (Mme Cuerrier): Ne renchérissez pas, M. le député de Johnson.

M. Mérineau: J'allais dire que nous avons regardé l'amendement proposé par le ministre hier, mais nous ne sommes pas ce matin en mesure de juger s'il répond adéquatement à nos inquiétudes par rapport à l'article 119. Il n'en demeure pas moins qu'on peut faire une remarque générale. Etant donné que l'article 119 est tout de même relié directement à la loi du régime syndical dans la fonction publique et qu'on ne sait pas encore comment cette loi sera modifiée, si elle doit être modifiée, à la suite de la commission Martin, c'est bien difficile de vous dire, à ce moment-ci, si on est d'accord ou pas d'accord. On vous demande, Mme le Président, le droit de revenir vous soumet-

tre des représentations sur cet article, parce qu'à ce moment-ci, ce qu'on pourrait dire ne pourrait pas refléter tout d'abord l'opinion de nos membres, car depuis hier soir, on n'a pas eu le temps de les voir et, ensuite, ce serait prématuré de donner un avis de cette nature.

M. Bellemare: Est-ce votre intention d'aller devant la commission Martin?

M. Mérineau: On n'a pas encore décidé cela. M. Bellemare: Pardon?

M. Mérineau: On n'a pas encore décidé si on y allait ou si on n'y allait pas.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Dans votre mémoire — je crois que c'est une de vos recommandations — vous ne voyez pas d'objection au pouvoir de délégation. Je voudrais comprendre exactement la portée de cette recommandation. Est-ce que, dans le projet de loi actuel, avec le pouvoir de réglementation contenu dans l'article 3, c'est votre position d'accepter le pouvoir de délégation, par exemple, dans le domaine des promotions et dans le domaine du recrutement? Si l'article 3 est retenu tel quel, est-ce que vous acceptez qu'on puisse déléguer ces pouvoirs?

M. Mérineau: Je pense qu'on a dit que...

Le Président (Mme Cuerrier): ... M. Mérineau.

M. Mérineau: Je pense que je me suis déjà nommé, Mme le Président. On a dit hier qu'on était d'accord avec le pouvoir de délégation. Sommairement, ce qu'on a dit hier n'est peut-être pas ressorti au cours de la discussion parce que, malheureusement, j'avais l'impression qu'on était dans le salon de Mme Récamier. C'était un peu douceureux comme argumentation, les coups de mouchoir se donnaient; cela allait bien, mais on n'a réellement pas vidé la question. Quant à nous, quand on parle de délégation, on parle de délégation de corps qui ont une autorité. Notre réaction au projet de loi est que c'est trop compliqué. Une vache perdrait son veau là-dedans! Ce n'est pas possible d'avoir autant d'organisme de contrôle que ça.

Le gouvernement américain vient à bout de mener tous les Etats-Unis avec 16 ministères. Nous, ça nous en prend 26. On a déjà cinq organismes de contrôle; on s'en paie un sixième. Je me demande jusqu'à quel point cela va améliorer la gestion de la fonction publique de multiplier les organismes de contrôle.

Notre position est la suivante: on a dit qu'on ne voulait pas de ministère de la Fonction publique. On a argumenté un peu à l'eau de rose. Fondamentalement, ce n'est pas qu'on en veuille à M. de Belleval d'être ministre de la Fonction publique; cela n'a rien à voir avec la personnalité de M. de Belleval. Cela serait un autre, ce serait la même affaire. C'est qu'on trouve que, de toute façon, il va falloir qu'il aille chercher ses pouvoirs au Conseil du trésor. Pourquoi, à ce moment-là, avoir deux organismes? S'il n'y avait que le Conseil du trésor pour assumer toutes les fonctions, ou s'il n'y avait que la fonction publique pour assumer les fonctions qui doivent être dégagées du pouvoir politique, c'est-à-dire le recrutement, la promotion et les concours ainsi que le premier recours, je pense que cela simplifierait l'administration gouvernementale.

Il y a des journées où, comme cadre, je pense que M. de Belleval qui est un ex-collègue, a perdu la mémoire depuis moins d'un an. Ecoutez, M. le ministre, vous vous souvenez certainement d'avoir été obligé de passer par le Conseil du trésor. C'est toujours une aventure. Vous êtes là, vous le savez maintenant. Ensuite, il faut que vous passiez par la fonction publique pour faire calibrer vos postes et après cela, il faudrait aller à une troisième patente pour faire recruter du monde. On va perdre nos veaux quelque part dans le chemin; ce n'est pas possible, c'est trop compliqué.

On se dit si ça prend un ministre pour faire appliquer la loi, celle-là ou une autre, une loi de gestion des fonctionnaires, de la fonction publique, qu'on laisse au vice-président du Conseil du trésor, le soin d'appliquer cette loi. Au moins, on n'aura pas un ministre dans un endroit et un ministre dans un autre, les deux seront à la même place. Ils auront plus de chance de se coordonner et ça fera une boîte de moins à soutenir.

Je ne sais pas si ça répond à votre question, mais dès l'instant où on parle de délégation, la délégation, à ce moment-là, viendrait ou du Conseil du trésor ou de la Commission de la fonction publique. Ce serait facile à identifier et je pense que ça ferait des organismes pour s'occuper de l'ensemble de la fonction de la gestion du gouvernement.

M. Ciaccia: On parle de délégation du ministre, mais quelle est votre réaction au principe de sous-délégation?

M. Mérineau: Ah, la sous-délégation! M. Ciaccia: Oui.

M. Mérineau: Je m'excuse, je n'avais pas compris.

M. Ciaccia: Parce que c'est accepté dans ce projet de loi.

M. Mérineau: Avec la sous-délégation, on peut être d'accord, pourvu, encore une fois, qu'on sache où ça s'arrête. Je me mets dans la peau de nos employés en arrière, ceux qui sont ici, les membres du syndicat; on est leurs "boss". Vous savez, nous les cadres, on se sent un peu comme la saucisse dans le pain à hot-dog. Si on regarde à gauche, ce sont nos patrons d'aujourd'hui, si on regarde à droite, ce sont nos patrons d'hier et ceux qui espèrent devenir nos patrons de demain, hein, M. Bellemare?

En arrière, ce sont nos employés. Nous sommes les emmerdeurs professionnels. Nous sommes les mauvais technocrates, ceux qui empêchent le gouvernement de marcher, apparemment. La population se plaint du pouvoir technocratique; ça fournit de la matière à éditoriaux tous les jours. La sous-délégation doit s'arrêter quelque part. Il faut trouver le coupable. Si ça se dilue au point où ça s'en va au dernier agent de maîtrise ou au chef de bureau, ce n'est pas possible de mener une boîte de cette façon. Donc, si le Conseil du trésor ou la commission délègue, il faut que ce soit très spécifique, que ce soit connu et que l'on sache à qui s'adresser et que la responsabilité de la délégation demeure à celui qui est délégué.

M. Bellemare: Vous n'avez pas fini, monsieur? M. Ciaccia: Je n'ai pas terminé.

Le Président (Mme Cuerrier): Vous n'avez pas terminé? M. le député de Mont-Royal. A moins que vous ne vouliez intervenir directement...

M. Ciaccia: Non, je...

M. Chevrette: Mme le Président, moi aussi, j'aurais une question à poser à M. Mérineau.

M. Bellemare: Je vais laisser à mon collègue le soin de terminer, par politesse, par délicatesse, par équité et par déférence.

M. Chevrette: Et vous, par courtoisie.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je remercie mon collègue et vous remercie, Mme le Président. Vous avez fait certaines déclarations. Il est vrai que, quelquefois, on lance des accusations, à savoir que les fonctionnaires sont de mauvais technocrates et que si le gouvernement a certains problèmes, c'est la faute de ceux qui sont dans la fonction publique. J'étais fonctionnaire, peut-être que vous le saviez, vous, et j'aurais eu peur, comme fonctionnaire aux cadres supérieurs, d'avoir le genre de pouvoir et de donner au ministre le genre de discrétion et de pouvoirs arbitraires qu'il se donne dans ce projet de loi.

Quand on parle de sous-délégation, d'après ce projet de loi, si je voulais me débarrasser, comme fonctionnaire, de personnes qui ne faisaient pas mon affaire, cela serait la chose la plus facile avec le pouvoir de réglementation du ministre, qui me déléguerait ou me sous-déléguerait.

On m'a toujours enseigné que, dans certains domaines, il faut enlever ce pouvoir afin d'avoir une fonction publique saine, et objective, qui peut faire le travail de l'Etat, peu importe le gouvernement au pouvoir, mais qui peut faire son travail de "public servant" de servir le public. Il ne faut pas donner ce genre de pouvoir discrétionnaire au ministre, mais soumettre cela à la Commission de la fonction publique.

Est-ce que ce principe n'est pas à la base même d'un bon fonctionnement de la fonction publique et n'est-ce pas ce principe qui est attaqué fondamentalement dans ce projet de loi?

M. Mérineau: Ecoutez. Hier, on a dit quelque chose qui ressemblait à cela, en disant qu'il faut que les pouvoirs du ministre ne soient pas discrétionnaires, qu'ils ne limitent pas le champ de négociation, que cela se limite à des choses qui ne sont pas négociables. Et encore, je pense que je dis une hérésie.

Je me souviens que, dans mes vieilles années de syndicalisme, j'enseignais aux délégués d'ateliers que tout était négociable. Il n'y a rien de non négociable. A partir de ce moment-là, je pense que les pouvoirs du ministre, dès l'instant où il limite le pouvoir de négociation, que ce soit pour les fonctionnaires, les professionnels ou les cadres, dès l'instant où les pouvoirs de négociation sont limités et s'ils encourent en plus un pouvoir de délégation accroché à cela, c'est bien évident qu'on n'est pas d'accord.

D'autre part, il ne faut pas oublier une chose. Le gouvernement va toujours continuer à être administré par des gens qui se présentent aux élections, qui sont élus et qui administrent le gouvernement. S'imaginer que le politique va disparaître complètement de la gestion de la fonction publique, c'est de l'angélisme. Tout le monde a vécu cela d'une façon ou d'une autre, c'est clair. Le ministre va toujours avoir quelque chose à dire dans son ministère, le Conseil des ministres va toujours avoir quelque chose à dire dans l'administration de son ministère et le Conseil du trésor, notre maître à tous, qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime pas, va toujours avoir quelque chose à dire sur les engagements financiers.

A partir de ce moment-là, on espère — on ne veut pas commencer à récrire le texte de loi — que le ministre va comprendre que peu importe ce qui est écrit dans la loi, quand va arriver le temps de négocier, s'il prétend que, parce que c'est marqué dans la loi que ce n'est pas négociable, tout ce que je dis au ministre, fraternellement, c'est qu'il s'achète du trouble. Ce n'est pas la paix qu'on va avoir dans la fonction publique, avec cette loi, c'est le contraire.

M. Ciaccia: Est-ce que le ministre...

M. de Belleval: J'aurais une question à poser à ce moment-ci. Compte tenu des remarques de M. Mérineau que tout est négociable, est-ce que c'est aussi l'avis du député de Mont-Royal que tout est négociable?

M. Ciaccia: Dans les structures actuelles, je crois que tout est négociable, d'après la loi actuelle, sauf certaines...

M. de Belleval: Négociables, sauf certaines... ou si tout est négociable?

M. Ciaccia: Dans la loi actuelle, vous n'allez pas aussi loin que l'article 3 qui vous donne l'arbi-

trage total. Je pourrais vous poser la question: Si, d'après la...

M. de Belleval: Je vous pose la question: Est-ce que, à votre avis, tout devrait être négociable? Oui ou non? C'est facile.

M. Ciaccia: Oui, je dirais que tout devrait être négociable, parce que, même si vous dites non, ils vont venir le négocier. C'est l'atmosphère que vous devez créer d'un fonctionnarisme aussi objectif que possible. Cela devrait être négociable.

M. de Belleval: D'accord, je viens de comprendre. Je suppose que vous parlez au nom du Parti libéral actuellement? Le Parti libéral est d'accord que, maintenant, dans les conventions collectives des fonctionnaires, tout devrait être négociable.

M. Bellemare: M. le Président, je pense que j'avais demandé la parole et que ce n'est pas à un ministre d'interroger un membre de l'Opposition ou un membre... en vertu...

M. Chevrette: En vertu de l'article 100, je m'excuse...

M. de Belleval: Si vous permettez, je vais continuer...

M. Bellemare: Mme le Président, j'avais demandé la parole avant vous...

M. de Belleval: Vous avez la parole, M. le député.

M. Bellemare: Je ne l'ai pas eue. J'espère que vous allez prendre votre trou ou votre tour.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson...

M. Chevrette: C'est très édifiant.

M. Bellemare: Mme le Président, je m'adresse...

Une Voix: II va faire son petit fou.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, un moment, s'il vous plaît! J'allais demander au ministre de ne pas faire de discussion sur un article de loi, puisque nous pourrons le faire...

M. Bellemare: Article par article.

Le Président (Mme Cuerrier): ... au moment de l'étude article par article, sauf que je vous ai laissé aller un peu, parce que le ministre intervenait directement sur l'intervention de M. le député de Mont-Royal.

M. Bellemare: Non.

Le Président (Mme Cuerrier): En quelques secondes, s'il vous plaît, M. le ministre.

M. Bellemare: Moi, qu'est-ce que je fais de mes droits?

Le Président (Mme Cuerrier): J'espère que ce ne sera pas une discussion comme telle. Je donne ensuite...

M. Bellemare: Vous m'avez reconnu tout à l'heure, vous m'avez dit oui.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, à l'ordre, s'il vous plaît! Vous savez fort bien...

M. Bellemare: A l'ordre, rappelez-en un à l'ordre, rappelez le ministre à l'ordre. Vous en avez peur!

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, vous savez fort bien que les interventions d'un ministre, au cours des séances d'une commission parlementaire, peuvent arriver à n'importe quel moment. Je demande à M. le ministre de procéder rapidement et je donne la parole à M. le député de Johnson immédiatement après.

M. Bellemare: En vertu de quel règlement? Je soulève un point de règlement. En vertu de quel règlement, et surtout en vertu de notre règlement, où est-ce inscrit qu'un ministre peut intervenir avant un simple député de l'Opposition? Je n'ai jamais vu cela.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député...

M. Bellemare: Je ne suis pas arrivé d'hier au Parlement, madame.

Le Président (Mme Cuerrier): Non, je conviens que vous avez beaucoup d'expérience, M. le député de Johnson, sauf que les interventions d'un ministre ne sont pas restreintes en termes de temps. Peut-être qu'à ce niveau-là nous allons discuter de la même chose. Ce que je vous dis, c'est que je vous donne immédiatement la parole après que M. le ministre aura rapidement fait son intervention.

M. le ministre.

M. Bellemare: Après m'avoir bafoué. M. Chevrette: Ah! vous faites bien pitié!

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, monsieur! M. le ministre.

M. Bellemare: J'aime bien mieux faire envie que pitié comme vous.

M. Chevrette: Faites votre "show", il y a du monde.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre, vous prenez la parole ou je la passe au député de Johnson.

M. de Belleval: Je prends la parole, Mme le Président, avec la permission du député de Johnson.

M. Bellemare: Non, je ne vous donne pas ma permission.

M. de Belleval: Je m'en passerai.

M. Bellemare: Oui, vous faites aussi bien.

M. de Belleval: J'ai noté quand même la réponse que m'a faite le député de Mont-Royal. J'ai l'impression qu'il m'a donné une réponse un peu rapide et qu'il voudra certainement la vérifier à nouveau au sein de son caucus. Je tiens seulement à lui souligner que si, effectivement, c'était maintenant la position du Parti libéral que, dans la fonction publique, tout devrait être négociable, ce serait un revirement de situation plutôt récent. Je tiens simplement à lui rappeler que, pendant six ans, il a refusé au syndicat le droit de syndiquer les employés occasionnels, ce qui a été fait au mois de juillet dernier, et que, par conséquent, il s'agirait d'un renversement très soudain et qui m'apparaît très opportuniste dans les circonstances, mais j'ai l'impression qu'une fois que le député de Mont-Royal aura vérifié avec son collègue de Jean-Talon, il voudra certainement clarifier sa réponse.

M. Ciaccia: Mme le Président, pourrais-je me permettre une question? Pourriez-vous faire rapport à la commission sur ce qui s'est passé dans ces négociations depuis les discussions sur ce sujet?

Le Président (Mme Cuerrier): Je vous demanderais maintenant...

M. de Belleval: Ce que je dis, c'est que je doute fort que le Parti libéral ait maintenant comme position que tout est négociable dans la fonction publique.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre, je pense que nous sortons du sujet et que notre mandat est d'entendre les gens qui sont venus ici présenter leur mémoire. M. le député de Johnson, c'est vous qui avez la parole.

M. Bellemare: Merci beaucoup, madame! Dans votre mémoire, M. Parent, et particulièrement M. Claude Mérineau, vous dites, à la page 11: "La division des responsabilités de la sauvegarde du régime de mérite. "

Vous dites que l'intention avouée du gouvernement est de confier à des agences apolitiques, la sauvegarde de l'impartialité dans le traitement des fonctionnaires. La commission et l'office de recrutement. C'est là que vous dites: ... une intention fort louable. Mais, immédiatement après, vous ajoutez ce paragraphe qui me pose des inquiétudes: "Comment expliquer, cependant, que le ministre se réserve le pouvoir de réglementation dans des domaines aussi cruciaux que la promotion, le classement, la rétrogradation, etc." Il est dit qu'il peut demander l'avis de la commission, mais il n'est nullement obligé de le suivre. Sur cela, je pense que la commission n'engage pas le ministre et le ministre ne s'engage pas non plus.

Je voudrais avoir certains éclaircissements quant à ce point de vue que vous avez manifesté dans votre mémoire. Est-ce qu'il y a un doute que la politique va revenir au sein de la Commission de la fonction publique? Est-ce que vous pensez que le grand tsar que va être le ministre, va avoir le droit de vie et de mort à cause de la politique? Est-ce que vous pensez cela, directement ou indirectement, parce que j'ai lu un autre paragraphe où vous avez dit clairement que la politique allait dorénavant s'infiltrer dans la gestion de la fonction publique, à cause des pouvoirs donnés en vertu de l'article 3, et, particulièrement, la transmission des pouvoirs, la redistribution des pouvoirs, en vertu de l'article 45.

Le Président (Mme Cuerrier): Voulez-vous, s'il vous plaît, vous allez manifester votre intention de prendre la parole, pour que je puisse la donner? Quand je vous appelle, à ce moment, vous savez... Pour autant que je sache qui veut intervenir... C'est M. Mérineau qui parlera maintenant? Allez.

M. Mérineau: Mme le Président, la question de M. Bellemare, évidemment, est un peu difficile, dans le sens suivant...

M. Bellemare: Ce n'est pas difficile. Dites-moi la véritable pensée qui vous anime et cela ne sera pas difficile du tout. C'est de la politique pure et simple. Dites-le moi.

M. Mérineau: Notre crainte, parce que vous savez que, d'habitude, je parle franchement, c'est que si les règles du jeu ne sont pas claires...

M. Bellemare: Ils sont peut-être un peu intimidés.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, messieurs! C'est M. Mérineau qui a la parole actuellement.

M. Mérineau: Notre crainte est que, si les règles du jeu ne sont pas claires, s'il y a trop d'intervenants, la responsabilité va être diluée et cela va être bien difficile de trouver qui, en fait, est responsable. C'était la raison de notre première remarque; on trouvait qu'il y avait trop d'organismes. Si les règles du jeu ne sont pas claires, et surtout quand on parle du mérite, quand on parle du mérite, c'est un peu comme quand on parle de la maternité, on est pour cela. J'ai hâte que cela arrive à mes deux filles, qui vont connaître les joies de la maternité. S'il fallait que cela arrive à ma femme, cela ne serait pas une joie, je peux vous dire cela. C'est la même chose.

M. Bellemare: Cela prouverait peut-être que vous avez de bons voisins.

M. Mérineau: Le mérite, c'est un peu cela. On est pour cela, mais c'est flou comme notion. Ce n'est défini nulle part et il n'y a pas de critère. Comme la toile de fond, si vous voulez, l'action de ces organismes demeure axée sur le mérite, on dit de quoi on parle. On vous dira si on est pour ou si on est contre quand on saura de quoi on parle. Nous autres, on dit: En plus de cela, c'est négociable et il faut que ce soit négocié et que les règles du jeu soient établies clairement. Nos craintes existent dans le moment, peut-être que nos craintes n'existeront plus lorsque les règles du jeu seront établies.

M. Bellemare: C'est-à-dire que vous n'aurez plus droit de parole.

M. Mérineau: Je suis dur à arrêter, vous savez cela.

M. Bellemare: Quand ce sera dans la loi, ce sera le dura lex.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Je voudrais demander à M. Mérineau de me dire en quoi le projet de loi 53 permet au régime politique d'être plus autoritaire que dans la Loi de la fonction publique actuelle. Sur quoi se base-t-il? J'ai posé une question. Vous auriez avantage à le lire vous aussi, M. Ciaccia.

M. Ciaccia: Lire l'article 3.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Mont-Royal!

M. Chevrette: Qu'il me donne la raison fondamentale pour affirmer telle chose...

Le Président (Mme Cuerrier): M. Mérineau.

M. Chevrette: ... par rapport à la situation actuelle.

M. Mérineau: Jusqu'ici, le ministre de la Fonction publique n'avait pas tellement de pouvoirs. Il prétend aujourd'hui qu'il s'en donne beaucoup, même si on trouve qu'il n'en a pas beaucoup.

Ces pouvoirs, peu importe par qui ils sont exercés, en fait, limitent la capacité de négocier et, comme tels, laissent plus d'arbitraire au pouvoir politique, dans ce sens.

Des Voix: D'accord.

M. Mérineau: En plus de ça, il y a une partie des pouvoirs que vous retrouvez donnés au niveau politique, au ministre qui étaient exercés par la commission.

M. Chevrette: Par rapport à l'aire de négociation? Avec les deux amendements?

M. Mérineau: Par rapport à la promotion...

M. Chevrette: Par rapport aux deux dépôts d'hier?

M. Mérineau: ... au classement, à la promotion.

M. Chevrette: Par rapport aux dépôts d'hier, qu'est-ce que ça change, par rapport à la situation actuelle?

M. Mérineau: Je n'ai pas compris, je m'excuse.

M. Chevrette: Vous avez dit tantôt, par rapport à l'aire de négociation, que c'était restrictif, vu que le ministre a déposé hier deux amendements qui, à toutes fins pratiques pour celui qui veut le comprendre, replacent la situation exactement où elle était avant. Il y a eu des affirmations faites par le député de Johnson à savoir que c'est pire que c'était. Est-ce que les deux amendements déposés par le ministre hier ne replacent pas l'aire de négociation telle qu'elle était préalablement?

M. Mérineau: Cela, c'est vous qui le dites, mais nous, on n'en est pas convaincu et on ne sait pas ce qui va arriver à l'autre loi, la loi du régime syndical. En plus de ça, nous ne savons pas ce qui nous arrive comme association de cadres. On vous a posé une question: Allez-vous nous reconnaître? On ne veut pas être reconnu par un arrêté en conseil non plus. Cela change trop souvent. On veut être reconnu par la loi.

Troisième élément, peut-être qu'on pourrait ajouter à ce que vous venez de dire que, si c'est vrai que ça remet les choses comme elles étaient avant, est-ce que c'est bien et est-ce que ça ne devrait pas être mieux que ça ne l'était avant, quant à faire des amendements?

M. Bellemare: Parfaitl

M. Chevrette: Dans votre mémoire, vous vous considérez comme des employés. Vous parlez employeurs-employés. A cause de votre fonction de cadres, est-ce que vous vous considérez comme des salariés employés?

M. Mérineau: Moi, je retire une paie tous les quinze jours. C'est écrit salarié.

M. Chevrette: Mais vous acceptez...

M. Mérineau: Je me sens drôlement salarié quand je regarde la loi...

M. Chevrette: Ce que je veux vous faire comprendre...

M. Mérineau: ... et je pense que tous les cadres aussi se sont sentis salariés depuis un an, parce qu'ils sont entrés en "gang" dans l'association.

M. Chevrette: Ce que je veux essayer...

M. Mérineau: Remarquez bien que c'était avant le 15 novembre.

M. Bellemare: Bon! C'est clair?

M. Chevrette: Oui, je reconnais que c'était en "gang".

M. Bellemare: Vous avez une bonne réponse.

Le Président (Mme Cuerrier): Je vous demanderais de ne pas établir de discussion entre les députés, s'il vous plaît.

M. Bellemare: C'est vrai, pas de discussion.

M. Chevrette: D'ailleurs, le député de Johnson n'aime pas qu'on l'interrompe, mais des traditions vieilles de 35 ans lui permettent d'interrompre les autres.

M. Bellemare: Non, non, non.

M. Chevrette: Je voudrais parler à M. Mérineau, Mme le Président, et vous demander...

M. Bellemare: J'ai dit que c'était clair.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Joliette-Montcalm, c'est vous qui avez la parole actuellement.

M. Chevrette: Merci!

M. Mérineau, quand le ministre, à l'article 3, propose une délégation de pouvoirs aux sous-ministres et même éventuellement à certains cadres supérieurs vous vous êtes déclaré favorable à cet article disant que, dans certaines circonstances, c'était essentiel qu'il y ait une délégation de pouvoirs. J'ai bien compris?

M. Mérineau: Vous avez très bien compris.

M. Chevrette: Merci! Cela, c'est en vue d'assurer une certaine souplesse sur le plan administratif, indépendamment des structures que vous pouvez contester.

M. Mérineau: D'accord.

M. Chevrette: A partir du fait que vous acceptez une délégation de pouvoirs vous donnant une fonction de gérance, à toutes fins pratiques, si vous héritez de la délégation de pouvoirs, comment pouvez-vous soutenir dans votre mémoire qu'une exigence de consultation vous rendant à la fois juge et partie, au moment où vous recevriez une délégation de pouvoirs en tant que cadres, pour exercer une fonction de gérance sur des employés salariés, comment pouvez-vous soutenir...

M. Mérineau: Ah bien!

M. Chevrette: ... être considérés comme employés salariés?

M. Mérineau: Ecoutez! Votre question, je l'aime beaucoup parce que ça me permet de dire pourquoi il y a une association de cadres.

C'est bien clair que comme corps de cadres, nous sommes des salariés. Donc, quand nous faisons partie d'une association, c'est pour les mêmes fins que les fonctionnaires ou les professionnels faisant partie d'un syndicat, c'est-à-dire pour protéger nos droits professionnels. Ce qui ne nous empêche pas, dans l'exercice de nos fonctions, d'accomplir des fonctions de gérance. Il n'y a rien d'incompatible à ce que des gérants se groupent pour défendre leur intérêt professionnel et qu'en même temps ils exercent un rôle de gérance. Ecoutez, M. Chevrette! Je ne voudrais pas être malin, mais je devrais vous rappeler que, dans le programme du Parti québécois, il est dit que vous allez favoriser le syndicalisme de cadre. C'est ce qu'on fait ici, et je ne vois pas ce qu'il y a d'incohérent là-dedans.

M. Bellemare: Voulez-vous que je vous le passe?

M. Chevrette: D'ailleurs, c'est mieux qu'une formation politique qui s'adapte en style couleuvre à toutes les circonstances et qui n'a pas de position.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Toujours sur la question d'hier, au moment où on a terminé, soit la question de la sélection au mérite ou de la promotion ou du recrutement par le mot sur lequel on achoppe, le mot "mérite".

J'aimerais savoir quelle différence il y a entre la façon dont vous entrevoyez la promotion ainsi que le recrutement dans le projet de loi par rapport à ce qui existe actuellement dans le recrutement et la promotion dans la fonction publique et, en deuxième lieu, comment vous le verriez puisque vous semblez vouloir exclure la sélection au mérite telle que présentée actuellement.

M. Mérineau: Madame...

M. Parent: M. Vigneau.

Le Président (Mme Cuerrier): Monsieur?

M. Vigneau: M. Vigneau.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Vigneau.

M. Vigneau: M. le député de Laviolette, d'abord, il est assez difficile de répondre parfaitement à votre question puisqu'il nous manque une des deux branches de l'alternative. Nous savons ce qui existe actuellement et nous nous doutons un peu de ce qui existera si la loi est acceptée. Nous ne le savons pas. Présentement, lors de la nomination, il y a des jurys qui rencontrent, bien entendu, les candidats, qui les mettent sur une liste d'admisssibilité et, d'une certaine façon, c'est

au mérite puisque les candidats sont placés selon l'ordre. Mais le ministre a le droit de choisir, dans la liste, à condition que les candidats soient sur la liste d'admissibilité.

M. Jolivet: Ce qui veut dire que, sur une liste de 50 personnes admissibles, on peut actuellement prendre la cinquantième comme on peut prendre la première?

M. Vigneau: Actuellement, c'est comme cela que les choses se passent. Je ne dis pas qu'on fait systématiquement exprès de ne pas prendre la première, mais cela arrive et c'est assez légal, de toute façon, que le ministre choisisse dans l'ordre qu'il veut. Si nous comprenons bien le projet, avec ce qui est déposé, à l'avenir, le candidat qui serait déclaré premier sur la liste d'admissibilité devrait nécessairement être choisi et nous sommes d'accord avec cela. Mais là où nous achoppons, c'est sur la notion générale du mérite. Il y a eu plusieurs déclarations qui ont été faites soit par des membres de la commission, soit par nous-mêmes, hier et ce matin. Nous ne prenons parti ni tout à fait pour ni tout à fait contre le projet de loi. Nous ne disons pas: Depuis le 15 novembre, cela a changé, c'est mieux, cela aurait été pire. C'est que, comme gestionnaires, nous avons un double rôle. D'une part, nous allons devoir travailler avec cette loi. Nous allons — et on l'a notamment souligné par la question de délégation—nous allons avoir à appliquer la loi. Il est donc normal que nous essayions qu'elle soit la plus claire possible. Donc, lorsque nous nous présentons devant cette commission, ce n'est pas pour dire: Ce n'est pas bien, cela aurait dû être mieux; c'est pour dire: II y aurait peut-être moyen que cela soit plus clair. Et, notamment, sur la question du mérite. Ce que nous demandons, et ce que nous pensons que d'autres représentants des syndicats demandent, c'est qu'on clarifie. Depuis quelque temps, on parle de clarté, de transparence. Or, il nous apparaît, à nous qui la souhaitons aussi, cette transparence, que la loi n'est pas aussi transparente qu'on l'eût souhaité. Nous aimerions, par exemple, que la question du mérite soit davantage expliquée. Tout le monde est pour le mérite. Parce qu'être pour le mérite, c'est être pour la vertu. Encore faudrait-il déterminer très clairement quels seront les paramètres de ce mérite et nous aimerions que, non pas seulement les cadres supérieurs, mais l'ensemble des fonctionnaires qui sont impliqués dans la gestion des affaires d'Etat puissent participer à la détermination de ce mérite sur lequel, je pense, tout le monde est d'accord en principe.

M. Jolivet: Merci.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Quand vous dites, dans votre mémoire, qu'à toutes fins pratiques, l'office et le Conseil du trésor, qui vont être chargés de la sauvegarde du régime de mérite, sont sous ta tutelle du pouvoir politique, j'aimerais bien cela... Vous étiez présent, M. Vigneau, quand on a écrit cela?

M. Vigneau: Oui.

M. Bellemare: Vous avez été d'accord pour signer le mémoire?

M. Vigneau: Je pense que mon nom y apparaît.

M. Bellemare: Comme c'est bien important que vous nous l'explicitiez ce matin, je vous demande à quoi cela rime, sous la tutelle du pouvoir politique, et l'office qu'on va créer et le Conseil du trésor, pour établir véritablement la sauvegarde du régime du mérite. C'est à la page 12, au troisième paragraphe.

M. Vigneau: Nous voulons signifier par là que la commission, comme l'office, a un pouvoir de recommandation dans bien des cas et le ministre n'est pas tenu... dans certains cas, il n'est pas tenu de demander l'avis et, même s'il le demandait, il n'est pas tenu de suivre l'avis de la commission.

La commission existe, l'office existe, mais le ministre qui représente le pouvoir politique — et je tiens quand même à préciser que dans notre esprit, pouvoir politique n'a aucune connotation péjorative — on ne dit pas que c'est là quelque chose de mal, que le pouvoir politique est en soi mauvais, on dit que cela nous fait peur et qu'on aurait souhaité, quant à améliorer...

Je pense bien que si M. le ministre a voulu changer la loi, c'est pour l'améliorer. Il nous semble que ce n'est pas pire qu'avant, mais qu'il n'y a pas autant d'améliorations qu'on aurait souhaité en voir.

On aurait aimé que, dans des cas précis, le ministre soit non seulement tenu de demander l'avis, mais soit obligé de suivre l'avis émis par l'office et par la commission.

On s'interroge également sur la véritable utilité d'avoir et l'office et la commission, comme M. Mérineau l'a expliqué ce matin. On trouve que cela fait beaucoup d'organismes qui vont venir travailler dans ce domaine.

On aurait souhaité — cela a peut-être été dit d'une façon ambiguë de notre part — M. le ministre a peut-être cru qu'on voulait faire disparaître, comme tel, le ministère de la Fonction publique, alors qu'on voulait simplement que les pouvoirs soient mieux identifiés et logés dans le moins de mains possible.

M. Bellemare: Ainsi, M. Vigneau, vous admettez que la loi est une amélioration?

M. Vigneau: Personnellement, je pense que, globalement, c'est une amélioration, oui.

M. Bellemare: Moi, je ne trouve pas cela. J'ai le droit de ne pas trouver cela. Je trouve que c'est pire parce qu'on donne au ministre, en vertu de l'article 3, un pouvoir discrétionnaire, et vous l'avez admis tout à l'heure.

M. Vigneau: Mais je pense qu'il y a des améliorations possibles.

M. Bellemare: Vous avez admis dans votre mémoire que cela tombait sous l'autorité du ministre, qu'il n'était pas obligé de suivre la recommandation de l'office et du Conseil du trésor, qu'en vertu de l'article 3 il avait des pouvoirs bien plus étendus qu'autrefois, le droit de vie et de mort. Je n'ai pas besoin de vous dire combien cela va coûter au gouvernement pour élargir les tablettes, parce que vous allez avoir un bon groupe qui va aller sur les tablettes.

Ma question est celle-ci: Qu'est-ce que vous pensez des pouvoirs aussi étendus qu'on donne au ministre, dans l'article 3, pouvoirs de rétrograder, de promouvoir, de baisser le salaire, etc?

Le Président (Mme Cuerrier): M. Mérineau.

M. Mérineau: M. Bellemare, je pense qu'on a dit très distinctement qu'on trouvait abusifs les pouvoirs...

M. Bellemare: C'est peut-être que je suis vieux, mais j'entends difficilement.

M. Mérineau: Je pense qu'on a dit très distinctement, dans notre mémoire, si vous le lisez au complet, qu'on n'était pas d'accord avec les pouvoirs qui sont donnés au ministre, à l'article 3, parce qu'on prétend que c'est négociable de A à Z.

M. Bellemare: Bon, d'accord, vous aussi vous négociez...

M. Mérineau: Oui, c'est clair.

M. Bellemare: Vous admettez que c'est négociable? Tous les points qui sont...

M. Mérineau: Nous, on ne l'admet pas, on le demande. C'est le ministre qui ne l'admet pas.

M. Bellemare: D'ailleurs, probablement que le rapport de l'enquête Martin va aussi définir que c'est négociable. Le ministre prend ses précautions. Vous l'aurez remarqué dans sa déclaration d'hier. Il dit, dans un paragraphe bien particulier: "C'est pourquoi, compte tenu de la constitution d'une commission d'étude Martin, la consultation destinée à examiner le régime syndical du secteur public est donc, entre autres, un réaménagement possible de l'aire de la négociation". Il admet déjà que cela va être négociable — comme le disait l'honorable député de Notre-Dame-de-Grâce...

M. Ciaccia: De Mont-Royal.

M. Bellemare: Oh, "yes" c'est encore plus haut! Mont-Royal, c'est peut-être plus "English".

M. Ciaccia: Non, cela se rapproche plus de l'est. Notre-Dame-de-Grâce, c'est plus dans l'ouest, monsieur...

M. Bellemare: Oui? Alors c'est moins "English".

Alors, je pense, comme vous et comme le député Ciaccia, que tout devrait être négociable. Je plains les gens qui vont avoir à négocier la prochaine convention collective, ce ne sera pas de l'eau de rose.

M. Ciaccia: Mme le Président, sur ce même point...

Le Président (Mme Cuerrier): II y a M. le ministre qui avait demandé la parole ainsi que le député de Laviolette, à moins que ce ne soit strictement sur le même point et que vous vous adressiez...

M. Ciaccia: C'est strictement sur ce même point.

M. de Belleval: C'est justement sur le même point que je veux intervenir.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre me demande la parole sur le même point. M. le ministre.

M. de Belleval: Mme le Président, à écouter ce qui se dit ici, depuis quelques minutes, j'ai l'impression d'assister à une représentation d'Alice au pays des merveilles. Le Parti libéral, et maintenant le porte-parole de l'Union Nationale, viennent de déclarer qu'à leur avis tout devrait être négociable dans la fonction publique. Eux qui, pendant des années ont été au pouvoir et ont refusé systématiquement d'élargir en quoi que se soit l'aire de négociation.

M. Bellemare: C'est pour cela qu'on a été battu!

M. de Belleval: Jusqu'où l'opportunisme politique... Mme le Président, les contradictions n'étouffent pas le député de Johnson.

M. Bellemare: Non, mais le repentir, par exemple.

M. de Belleval: Non seulement l'opportunisme politique, ce matin, l'amène-t-il à virer bout pour bout ses positions antérieures, mais sa dernière remarque est en contradiction flagrante avec tout ce qu'il m'a dit à moi-même et aux membres de la commission parlementaire des engagements financiers il y a quelques semaines où il déblatérait sans contrainte contre les fonctionnaires en général, nous avertissant en disant: Messieurs, vous aussi vous allez voir qui va vous faire battre aux prochaines élections. Ce sont les fonctionnaires. Maintenant, il vient nous dire ce matin que c'est parce qu'il n'a pas donné plus de pouvoirs aux fonctionnaires dans le passé qu'il a été battu. Mme le Président, je regrette qu'il n'y ait pas un âge limite pour certains députés de l'Assemblée nationale, parce que vraiment...

M. Bellemare: Je soulève un point de privilège. Mme le Président, une question de privilège.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, je n'accepte pas de question de privilège en commission parlementaire...

M. Bellemare: Ce n'est pas permis en commission. Je soulève une question de règlement.

Le Président (Mme Cuerrier): Sauf que je rappellerai, je demanderai à M. le ministre quand même de faire un peu attention à sa façon de dire les choses.

M. de Belleval: Mme le Président, je ne visais aucun député en particulier.

M. Bellemare: Mme le Président, je soulève un point de règlement. J'ai été attaqué personnellement...

Le Président (Mme Cuerrier): Sur une question de règlement, M. le député de Johnson.

M. Bellemare: ... parce que je suis un vieux, parce que je suis un homme âgé; mais je ne permettrai pas à ce jeune député qui, mane, thecel, pharès, je lui ai dit: Tu as été pesé, trouvé trop léger, tes jours sont comptés. Mais je lui dirai, par exemple, et je répète encore, que quand il est question de religion, de travail, cela peut être amélioré. Je le répète et je l'ai dit publiquement. Je n'ai pas honte de ce que j'ai dit. Vous n'essaierez pas de m'induire, vous personnellement, dans un chemin où je ne veux pas aller ce matin. Mais parce que vous m'attaquez personnellement, vous allez rencontrer une difficulté avec mot.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, je ne crois pas que ce soit une question de règlement. D'ailleurs, j'avais rappelé au ministre...

M. Bellemare: Oui, mais il va loin quand il dit qu'on devrait interdire aux vieux de se présenter. Ce serait peut-être lui répondre que sa majorité et la mienne sont différentes.

Le Président (Mme Cuerrier): Je considère l'incident clos, M. le député de Johnson. M. le député de Mont-Royal, sur le même point, ensuite M. le député de Laviolette.

M. Bellemare: Soyez sévère pour lui aussi. Ne le laissez pas aller ce nouveau tsar et nouveau dictateur.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, M. le député!

M. Ciaccia: Mme le Président, le ministre vient de dire que le Parti libéral commence à changer, il a insinué que c'était une volte-face de toutes nos politiques. Je voudrais dire que c'est entièrement faux. Maintenant, Mme le Président, je voudrais souligner au ministre que s'il y a eu certains endroits ou certains articles sur lesquels ils ne sont pas d'accord avec ce que le ministre dit aujourd'hui au sujet de la question de négociation... La réponse que le ministre apporte aujourd'hui ce n'est pas de réduire encore plus les endroits de négociation et les enlever totalement. La réponse c'est d'essayer de réviser et apprendre par les leçons du passé, parce que ce projet de loi nous recule de quinze ans. On a essayé d'avoir un fonctionnarisme qui pouvait répondre objectivement aux besoins de la population, sans favoritisme, sans patronage, sans intrusion du ministre et on enlève cela par deux articles, par tout l'esprit de ce projet de loi. Je me demande, Mme le Président, si c'est même possible de l'amender ou si la question n'est pas de le retirer totalement parce que c'est l'esprit du projet de loi. Quand on dit, que les articles sont négociables, c'est une question d'esprit. Vous ne pouvez certainement pas empêcher des gens qui sont de l'autre côté de la table de discuter, c'est une question d'ouverture d'esprit. On trouve que vous n'avez pas cette ouverture d'esprit.

M. Jolivet: Mme le Président, une question de règlement.

Le Président (Mme Cuerrier): Sur une question de règlement, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Je suis venu ici ce matin pour questionner les gens en face de moi et depuis tout à l'heure, on n'arrête pas. J'ai des questions à leur poser et j'aimerais bien leur poser.

M. Ciaccia: Je vais terminer très brièvement, Mme le Président.

M. Jolivet: Merci.

M. Ciaccia: Rapidement, c'est vrai qu'on est ici pour obtenir certains renseignements, c'est dans ce sens que nous avons posé les questions. Ce n'est pas nous qui avons commencé les tactiques du ministre en accusant les anciens régimes, ce qu'ils ont fait et ce qu'ils n'ont pas fait. On a le droit de se défendre, par exemple, Mme le Président. Les amendements que le ministre a apportés hier, cela ne change rien aux articles 3 et 4. Cela dit seulement que dans la convention collective vous pouvez discuter, vous pouvez négocier.

En ce qui concerne les cadres, c'est dans la position même où vous étiez avant que ce projet de loi soit déposé. C'est quasiment du maquillage, ça ne va pas au fond du problème et ce groupe-ci l'a très bien soulevé, que c'était la question de mérite. Ce n'est pas une question de mérite, on utilise ça, comme beaucoup de gouvernements qui utilisent... des gouvernements démocratiques... Parfois, je crains, quand on essaie de porter trop d'attention à ça, j'ai l'impression qu'on essaie de faire l'inverse, ce n'est pas le mérite, comme on l'a très bien souligné, c'est l'intrusion du pouvoir politique; c'est un recul total du progrès fait par le fonctionnarisme depuis les quinze dernières années.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre, vous m'avez demandé la parole?

M. de Belleval: Oui, juste un mot sur la question de l'ingérence politique dans l'administration de la fonction publique. Je pense que, là encore, certains de ceux qui sont à cette table ont une mémoire qu'on appelle sélective, et, sans vouloir employer un mot pire que "absence de mémoire", je voudrais simplement souligner, pour leur rafraîchir la mémoire, que les règlements et que les lois en cours actuellement, ont permis, entre autres, qu'un président de la Commission de la fonction publique soit amené à démissionner à cause de l'ingérence d'un conseiller politique auprès de l'ancien premier ministre, tel que révélé devant une commission d'enquête.

L'hypocrisie du système actuellement en cours est sans limite.

M. Ciaccia: Quelle garantie avez-vous contre ça dans le prochain projet de loi?

M. de Belleval: Le système des concours, actuellement, vous le savez...

M. Bellemare: Parlez du président de la Commission des accidents du travail.

M. Ciaccia: Quelle garantie...

M. de Belleval: ... est complètement détruit.

M. Bellemare: Vous parlez de Laporte, votre sous-ministre?

M. de Belleval: Les concours...

M. Ciaccia: Vous encouragez le plus...

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, messieurs! C'est M. le ministre qui a la parole. Je vous rappelle à l'ordre.

M. le ministre.

M. Bellemare: ... mentir...

M. de Belleval: Le système des concours bidonnés, qui est la règle depuis des années dans la fonction publique, c'est permis sous la loi actuelle. C'est justement le but des amendements qui sont apportés à cette loi de faire en sorte qu'à l'avenir, on sorte de ce régime où même le président de l'ancienne Commission de la fonction publique a été obligé de démissionner, a été amené à démissionner, à cause d'interventions politiques. Pour faire terminer ce système de concours bidons, tout à l'heure quand les professionnels viendront, j'aurai une lettre à leur montrer du président actuel de la Commission de la fonction publique, qui démontre très bien comment, avec le régime actuel, on peut bidonner n'importe quel concours et c'est de ça qu'on veut sortir.

M. Ciaccia: Quelle garantie avez-vous dans le projet de loi, que cela n'arrivera pas?

M. de Belleval: Les garanties? Vous ne voulez pas lire le projet de loi?

M. Ciaccia: On l'a lu.

M. de Belleval: Hier, les cadres ont très bien démontré qu'ils n'étaient même pas au courant des règlements en vertu desquels, par exemple, une grande partie de la gestion de la fonction publique est effectuée actuellement. En vertu du projet de loi, tous les règlements, à l'avenir, seront publics et non seulement seront-ils publics, mais ils devront être soumis à l'avis d'une commission indépendante. Non seulement cet avis sera-t-il public, mais, en plus, il devra venir à l'Assemblée nationale, qui pourra en discuter dans des commissions parlementaires. Actuellement, quels sont les règlements de la Commission de la fonction publique qui sont soumis ainsi publiquement au scrutin, à l'étude plutôt, non seulement de corps indépendants, mais des membres de l'Assemblée nationale.

Actuellement, les règlements de la Commission de la fonction publique, par qui sont-ils approuvés, sinon par le gouvernement? A l'avenir, ils ne seront pas approuvés par le gouvernement en secret, ils seront approuvés par le gouvernement en public, après une discussion publique. C'est ça la démocratie et c'est ça la différence qu'il va y avoir maintenant.

Non seulement ça...

M. Ciaccia: Cela ne répond pas à la question que j'ai posée...

M. de Belleval: ... mais les listes d'admissibilité...

M. Ciaccia: ... cela ne répond pas à ma question...

M. de Belleval: ... bidonnées où on peut nommer n'importe qui, comme vous le faisiez d'ailleurs. Le fils du député, même s'ils étaient cinquante sur la liste d'admissibilité, vous pouviez le choisir, alors qu'une personne choisie première par le jury n'était pas nommée. C'est fini. A l'avenir, ce sera un jury impartial, comme aujourd'hui d'ailleurs, selon les mêmes règles qu'aujourd'hui. A ce point de vue, il n'y a pas de changement, mais c'est le premier sur la liste qui va être choisi, c'est ça la différence. Le patronage que vous faisiez dans le temps va être fini.

M. Ciaccia: Vous consacrez le système encore plus par votre discrétion dans votre loi.

M. Bellemare: Mentir, mentir, mentir, mentez, mentez!

M. Ciaccia: Ce n'est pas ça, la transparence.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, messieurs! Monsieur le député de Joliette-Montcalm, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Chevrette: Cela fait mal, cela fait mal. Les souvenirs du passé font mal!

M. Bellemare: C'est épouvantable, ce qu'il a fait depuis qu'il est arrivé, lui.

M. Ciaccia: Vous consacrez le système et vous faites pire encore.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Laviolette. Vous avez la parole.

M. Jolivet: M. Mérineau, tout à l'heure, vous disiez que le projet de loi comme tel, au lieu de simplifier les choses apportait une augmentation au niveau des organismes; j'aimerais que vous me fassiez le parallèle entre ce que vous dites aujourd'hui, selon la loi actuelle et selon le projet de loi.

Comment, d'après vous, devrait-on changer le projet de loi, si on doit l'améliorer en conséquence?

M. Mérineau: Dans le moment, vous avez le Conseil exécutif, le Conseil du trésor, le ministère de la Fonction publique, la Commission de la fonction publique et le Vérificateur général, qui contrôle a priori. D'accord?

Là, on va encore avoir le Conseil exécutif, c'est bien clair, c'est l'autorité suprême, le Conseil du trésor, le ministère de la Fonction publique, la Commission de la fonction publique, l'office de recrutement et encore notre Vérificateur général.

Je ne peux pas voir comment, en multipliant ce genre d'organismes, on va accélérer les choses au gouvernement et cela va nous permettre de réaliser les projets du gouvernement. Je trouve que plus on met de ces organismes, plus cela complique le cheminement de la réalisation des projets du gouvernement. Notre approche là-dessus est très positive.

M. Chevrette: Mais, dans la loi actuelle, par rapport au projet de loi, les pouvoirs accordés à l'un et à l'autre sont-ils les mêmes ou sont-ils vraiment centralisés là où ils doivent l'être?

M. Mérineau: Les principes de gestion de personnel demeurent toujours les mêmes. Vous partez du recrutement jusqu'à la retraite ou au congédiement, avec tout ce qu'il y a entre les deux. Cela demeure encore la même chose, sauf que c'est séparé, c'est diminué, c'est réparti un peu partout. C'est réparti en trop d'endroits; c'est de cela qu'on se plaint.

M. Chevrette: Comment verriez-vous cela maintenant?

M. Mérineau: Je vous ai dit une chose, je pense que ce n'est pas le rôle d'une association de cadres de dire au gouvernement comment organiser sa gestion. On va y participer. On a fait une suggestion tantôt...

M. Chevrette: Ce n'est pas dans ce sens que je pose ma question. Je vais vous la poser comme ceci: Vous dites qu'actuellement il y a des organismes, qu'il y en a d'autres prévus dans le projet de loi, mais que vous êtes contre cette dernière formule. J'aimerais savoir, de votre part, comment corriger le projet de loi, puisque vous êtes ici pour nous dire les choses qui ne fonctionnent pas?

M. Mérineau: On a deux recommandations là-dessus. On dit: Laissez une seule commission de la fonction publique pour s'occuper du recrutement et pour être le premier niveau de recours des fonctionnaires, lorsqu'une décision d'un fonctionnaire supérieur ou d'un ministre est prise, et donnez-nous, en plus de cela, un niveau d'appel. Ce n'est pas vrai qu'il y a un droit d'appel là-dedans. On veut un niveau de recours qui soit la commission et un niveau d'appel qui soit ailleurs, et complètement en dehors du gouvernement.

En plus de cela, on veut que ce soit standard. Là, c'est encore compliqué. Vous avez des tribunaux d'arbitrage, des tribunaux d'appel, la commission et, dans les conventions collectives, vous allez encore avoir des conseils d'arbitrage. C'est compliqué, ce n'est pas possible. On dirait que cette loi n'est pas faite pour le monde. On dirait qu'elle est faite pour les spécialistes. Je regrette, mais c'est pour régir les conditions de travail de tous ceux qui sont dans la salle et de tous ceux qui travaillent dans les grosses bâtisses aux alentours.

Il me semble que le fonctionnaire, le dernier balayeur, devrait être capable de prendre la loi, la lire et la comprendre. Il faut lire jusqu'à l'article 64 pour savoir à qui cela s'applique. Je pense que ce n'est pas possible de continuer dans un projet de loi comme cela.

En plus de cela, il y a la peur. Vous savez ce qu'est la différence entre la peur et la crainte? La peur, c'est quand on ne sait pas ce qui nous arrive. La crainte, c'est quand on craint quelque chose, un pouvoir, une relation de force. Quand on négocie, d'habitude, il y a une crainte qui s'établit de chaque côté, parce qu'on ne connaît pas exactement le rapport de force. Dans le moment, c'est un rapport de peur. Pourquoi? Parce qu'il n'y a pas un mot qui soit défini, nulle part. Prenez l'article 3. Il n'y a pas un mot de défini. Cela veut dire quoi, une promotion, en regard du régime de mérite? Je ne le sais pas. C'est le règlement qui va nous le dire. On ne pourra même pas négocier cela.

Je ne suis pas capable de ne pas avoir peur et pourtant, Dieu sait que je ne suis pas peureux. Mais on a peur. Ce n'est pas clair. Tout ce que le ministre vient de dire, mon Dieu, qu'on aimerait cela, si c'était vrai, dans le sens que, si c'était défini clairement, établi mot à mot, dans les définitions, ce que veulent dire recrutement et fonctions de gestion, de façon très précise, de sorte que lorsqu'on ouvrirait la loi, on saurait de quoi on parle.

M. Bellemare: Dans votre recommandation no 2, vous dites: Supprimer l'office et supprimer l'affaire du ministre.

M. Mérineau: Oui.

M. Bellemare: C'est clair. Et vous ne revenez pas contre cela?

M. Mérineau: Non, bien sûr.

M. Bellemare: C'est votre recommandation?

M. Mérineau: M. Bellemare, on vous dit que c'est trop compliqué, le système qui est proposé. Nous autres, on vous dit: II faut "streamliner", pour parler latin. On veut éliminer une couple de choses, une couple d'endroits pour passer.

M. Beliemare: Nous autres, dans l'Opposition, on dit: Supprimer le ministre.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, soit dit peut-être en vous taquinant, vous avez pris la parole sans le demander au président, alors que le député de Joliette-Montcalm avait déjà demandé la parole.

M. Chevrette: Je passe.

Le Président (Mme Cuerrier): Non, vous aviez raison, M. le député de Johnson. Personne d'autre n'avait demandé la parole.

M. Bellemare: Merci de le reconnaître.

Le Président (Mme Cuerrier): II me reste à remercier l'Association des cadres...

M. Ciaccia: Mme le Président, si vous me permettez, pourrais-je demander aux invités s'ils ont autre chose à ajouter à leurs commentaires?

M. Parent: Une minute! Au nom de l'association, je remercie Mme le Président et les membres de la commission de nous avoir reçus et d'avoir pris le temps d'aller au fond de notre mémoire, qui voulait être une contribution positive à l'amélioration de la loi.

M. Bellemare: On peut souhaiter qu'un de vous autres ne soit pas sur les tablettes un de ces matins, parce qu'il y a quelqu'un qui a pris votre portrait. Pas moi.

M. Chevrette: On appelle cela de l'honnêteté intellectuelle.

Le Président (Mme Cuerrier): Je vous répéterai donc... A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: On appelle cela du patronage.

Le Président (Mme Cuerrier): Je vous répéterai donc que cette commission a apprécié le fait que vous ayez pris la peine de présenter un mémoire. Nous vous remercions de votre contribution, Messieurs de l'Association des cadres supérieurs du gouvernement du Québec, dont le porte-parole était M. Lucien Parent, président. Merci.

Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec

J'appellerai maintenant le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, dont le porte-parole est M. Jean-Louis Harguindeguy, président général.

Je remarque que, spontanément, les observateurs ont applaudi, ce qui est tout à fait contre les règlements de cette Assemblée. Je vous rappelle que vous ne pouvez manifester d'aucune façon et j'espère que vous vous en tiendrez là. Je sais que, parfois, c'est difficile, mais nous sommes régis par des règlements et je vous demanderais quand même de ne pas intervenir. M. le président général, si vous...

M. Bellemare: Ils ont au moins le droit d'applaudir leur président, c'est normal. Il n'a rien dit de mal encore. C'est un bon avertissement.

M. de Belleval: C'est pour cela qu'ils l'applaudissent.

Le Président (Mme Cuerrier): Je vous demanderais... A l'ordre! M. le député de Johnson, je sais que vous êtes très respectueux des règles de l'Assemblée et j'espère que vous n'induirez pas les gens en erreur à propos du code qui régit cette assemblée.

M. Bellemare: ... induire les gens en erreur! Mme le Président, débarquez de sur moi ce matin, parce que cela ne fera pas. Voyons-donc!

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président général du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, c'est vous qui avez la parole.

M. Harguindeguy (Jean-Louis): Avant de commencer, Mme le Président, je voudrais quand même vous remercier d'avoir accédé à notre demande de permettre à nos délégués au conseil syndical d'assister aux délibérations de votre commission. Si nous avons décidé de venir ici en grand nombre, c'est pour permettre à chacun de nos officiers d'évaluer au mérite chacune des interventions des parties. Ceci nous permettra ainsi ou permettra au moins à des gens d'éviter de prétendre que nous pouvons déformer l'information qui peut être donnée, puisque, sur ce sujet, c'est extrêmement important pour les fonctionnaires.

J'espère aussi qu'avant de commencer, nous ne serons pas limités à une intervention de 90 minutes, selon la convocation, car le contenu de ce projet de loi est extrêmement important pour le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, qui représente actuellement près de 36 500 membres et possiblement 46 000, selon la condescendance du ministre de la Fonction publique.

On ne peut décider, quant à nous, du sort de tous ces travailleurs de l'Etat en si peu de temps. J'ose espérer qu'on aura l'occasion comme tous les autres groupes, préalablement, de traiter dans le détail de notre mémoire. Je ne sais si vous

avez reçu le nouveau document de ce matin, qui complète le mémoire qui vous a été soumis au mois d'août.

Je commence. Je ne sais si c'est possible qu'on puisse prolonger les 90 minutes.

Le Président (Mme Cuerrier): Cette commission est maîtresse de ses travaux, M. le Président. Il n'y a rien qui ait été établi dans l'organisation même des travaux de cette commission qui fasse qu'on doive vous limiter à 90 minutes. Il n'en est pas question. M. le Président.

M. Bellemare: Mme le Président, est-ce que M. Harguindeguy pourrait nous présenter ses coassociés?

M. Harguindeguy: Je m'excuse. Je ne nommerai peut-être pas tous les délégués du conseil syndical, parce que nous sommes près de 400, mais, avec moi, à la table, en plus de notre procureur, Me Jean Poudrier, ce sont les membres de l'exécutif provincial. Je peux vous les nommer, en commençant par ma droite: M. Roland Saint-Jean, qui est premier vice-président de l'unité "ouvriers"; M. Pierre Chassé, 1er vice-président, unité "fonctionnaires"; M. Jean-Guy Fréchette...

M. Bellemare: Jean-Guy Fréchette... Pas trop vite.

M. Harguindeguy: ... 2e vice-président, unité "ouvriers"; M. Camil Thomassin, vice-président, unité "fonctionnaires"; à ma gauche, M. André Paris, secrétaire général; M. Marcel Lemieux, vice-président, unité "ouvriers"; M. Normand Duguay, vice-président, unité "fonctionnaires"...

M. Bellemare: Normand Duguay.

M. Harguindeguy: M. Marcel Ledoux, trésorier général; M. Normand Lépine, vice-président "ouvriers". Il y a un absent qui est actuellement en tournée d'information sur le projet de loi 53 sur la Basse-Côte-Nord, c'est M. Clément Daigle.

M. Bellemare: A la suite de M. Jean Poudrier, j'ai oublié, je n'ai pas pu prendre son nom.

M. Harguindeguy: C'est M. Roland Saint-Jean. M. Bellemare: Merci.

M. Harguindeguy: Nous ne faisons pas de discrimination sur les âges.

Mme le Président, M. le ministre, MM. les députés, bien chers patrons, qu'en 1977, il faille lutter pour conserver nos libertés syndicales, pour étendre et faciliter l'accession au syndicalisme, pour donner aux travailleurs de la fonction publique une voix au chapitre dans l'établissement des politiques sociales et économiques, pour rendre légal ce qui est juste, qu'en 1977, il faille combattre le projet de loi no 53, il n'y a pas de quoi se surprendre, mais il devrait y avoir de quoi comprendre que le gouvernement actuel, tout comme ses prédécesseurs, ne pose pas de gestes isolés et, possiblement, sans consultation préalable, comme cela a été le cas pour ce projet de loi.

Pour faire adopter son projet de loi no 53, le gouvernement, comme c'est d'ailleurs le cas depuis quelque temps, va essayer de convaincre tout le monde qu'il agit dans l'intérêt commun, y compris l'intérêt des syndiqués.

Comme à peu près tous les projets de loi, le projet de loi no 53 se présente sous des dehors vertueux, il veut pourvoir à l'organisation, à la gestion de la fonction publique et prévoit notamment que le personnel de la fonction publique est recruté et promu par voie de concours selon une sélection établie au mérite.

Cependant, la lecture en est fort compliquée. On peut facilement se laisser prendre dans la technique en essayant d'en comprendre les éléments. Pour éviter ces pièges, il faut d'abord en voir les principes.

C'est à ce niveau que nous allons découvrir que ce projet de loi est fondamentalement mauvais, car il s'attaque aux droits fondamentaux des travailleurs de la fonction publique québécoise. D'ailleurs, même le gouvernement précédent n'aurait pu avoir la décence ou je dirais l'indécence également de présenter un tel projet de loi, et nous aurions adopté la même attitude.

C'est une loi rétrograde, qui nous ramène à une période où, pour obtenir justice, les travailleurs de la fonction publique québécoise devaient quémander leur dû. L'essentiel, pour nous, est de démasquer le vrai sens politique visé par le projet de loi no 53.

Le gouvernement, par ce projet de loi, demande à l'Assemblée nationale de lui déléguer une partie des pouvoirs législatifs et judiciaires. C'est un autre signe de la décadence de la démocratie au Québec. Si le gouvernement réussit à faire adopter ce projet de loi dans sa forme actuelle, il aura abusé de sa majorité en Chambre, saboté le régime démocratique et établi un régime de tendance totalitaire.

Le gouvernement, par le projet de loi no 53, veut obtenir le droit de réglementer les conditions de travail de ses fonctionnaires, de créer par règlements de nouveaux crimes punissables de sanctions disciplinaires et de juger sans appel, après avoir confié le tout à la Commission de la fonction publique nommée par lui.

Le gouvernement dévoile une partie de ses intentions dans les notes explicatives et distille le reste dans les dispositions entortillées de ce projet de loi.

L Etat employeur se substituant à l'Etat gardien du bien commun, légifère d'une manière rétrograde et protège ses intérêts en brimant des droits et en commettant sciemment de graves injustices. C'est la mise en tutelle des syndicats et de leurs membres.

Le gouvernement cherche la destruction des structures syndicales dans la fonction publique en imposant une loi arbitraire alors qu'il est aujourd'hui difficile pour les membres, d'en mesurer l'impact et ce, jusqu'au jour où ils auront à en subir les conséquences pratiques.

Une autre astuce du projet de loi, c'est qu'il est rédigé le plus durement possible, le gouvernement, pensant et sachant d'avance que cela créerait un tollé, s'est donné amplement de jeu pour paraître bon prince. Cependant, ceci semble contradictoire avec les affirmations du ministre de la Fonction publique selon lesquelles le gouvernement actuel, contrairement au gouvernement précédent, ne se garde aucune carte disponible, toutes les cartes étant mises sur la table. Les dispositions du projet de loi no 53 vont également à l'encontre de certaines déclarations du premier ministre de la province, M. René Lévesque, car, en effet, dans son message inaugural, prononcé à l'occasion de l'ouverture de la deuxième session de la 31e Législature, le premier ministre déclarait: "Or, dans le fonctionnement d'une société démocratique, il n'est probablement rien de plus indispensable que la crédibilité des institutions politiques et celle des partis qui se forment dans le but d'en assurer la direction. "Cette crédibilité, les sondages ne sont pas seuls à nous apprendre qu'elle est dangereusement entamée par les temps qui courent. Il est non moins nécessaire, à notre avis, d'améliorer dans quelques secteurs clés la gestion interne du gouvernement afin de mieux assurer aussi bien l'intégrité que l'efficacité de l'administration publique. C'est ainsi que nous aurons à procéder à une refonte de la Loi de la fonction publique, de même qu'à l'adoption d'une loi sur le Vérificateur général. "De plus, à la suite de certains gestes préliminaires, nous entendons définir très prochainement un ensemble cohérent de nouvelles procédures administratives qui auront pour objectif de débarrasser l'administration publique de tout favoritisme politique— le souligné étant de nous — . Les fonds publics ne sont pas ceux du parti au pouvoir et ne doivent donc pas servir à favoriser des amis ou à récompenser ceux qui ont contribué au financement électoral. Tout comme les fonctionnaires doivent être nommés suivant la règle du mérite, les contrats gouvernementaux doivent être accordés en fonction de la compétence et du moindre coût. "Au cours des dernières années, des progrès ont été accomplis dans l'élimination du patronage, dans l'embauche des fonctionnaires et l'octroi des contrats gouvernementaux. Mais il est malheureusement resté des zones réservées où le bon patronage est demeuré roi et maître, notamment dans les contrats de construction de moins de $25 000, dans la location d'immeubles, dans l'embauche du personnel occasionnel et du personnel étudiant, dans les contrats de service professionnels et dans l'octroi de subventions discrétionnaires. "Le gouvernement a décidé de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin, autant qu'il est humainement possible, à tout patronage, quel qu'il soit."

Le premier ministre ne déclarait-il pas également à l'occasion du sommet économique que, quant à l'Etat lui-même et au gouvernement dans son rôle d'employeur, il pouvait d'ores et déjà assurer les interlocuteurs qu'il retrouvera à table avant bien longtemps, qu'il se prépare déjà à mettre sur cette table, dès le départ, toutes les cartes essentielles, de manière que l'on puisse les examiner ensemble, en pleine lumière et ainsi, de manière que tous les citoyens québécois soient bien au courant de ce que l'on fait avec leur argent et de ce que coûtent les grands services que nous avons à nous payer collectivement.

Le projet de loi no 53 sabote des droits de travailleurs qui sont reconnus par les conventions internationales que le Canada a ratifiées. Tout est hypocrite dans ce projet de loi. Il est censé traiter de gestion et de promotion et avancement au mérite. Il supprime le droit à la négociation. Il est présenté à un moment où les travailleurs concernés sont démobilisés et n'en verront les conséquences pratiques que dans quelques années. Par cette stratégie, le gouvernement tente d'isoler les structures syndicales pour mieux les écraser. D'ailleurs, un tel comportement semble être le cheval de bataille du ministre de la Fonction publique, qui se targue d'avoir écrasé les policiers provinciaux, les fonctionnaires provinciaux dans le conflit des itinérants et, tout dernièrement, les employés de la Société de cartographie du Québec.

La négociation libre repose sur le principe de l'égalité des parties en présence, mais sous l'empire du projet de loi no 53, les représentants syndicaux auront beau s'asseoir à une table de négociation et discuter aussi longtemps qu'ils voudront, la partie patronale n'aura aucun intérêt à modifier ses positions. Le gouvernement pourra donc dire aux syndicats: Je vous consulte sur mes propositions; j'entends vos représentations et, si vous êtes d'accord, nous signons la convention collective. Sinon, je décréterai vos conditions de travail.

Que l'on se souvienne des déclarations du ministre de la Fonction publique, particulièrement à l'Assemblée nationale, dans le cas du conflit des itinérants au cours des mois de juin et juillet.

Ne déclarait-il pas notamment, le 15 juin dernier, relativement aux frais de voyage, que ces aspects des conditions de travail des fonctionnaires, en vertu de la lettre même des conventions collectives en vigueur, sont exclus des négociations? Par conséquent, il n'y a pas négociation comme telle, la convention collective dit qu'il y a consultation.

Or, le projet de loi no 53, particulièrement à l'article 3, ne prévoit pas de délégation de pouvoirs. Il serait donc superflu d'essayer de nous faire croire qu'il nous sera possible de négocier les matières qui sont de la responsabilité du ministre. A tout le moins, peut-on espérer être consultés, avec tout ce que cela implique comme conséquences.

Il faut d'ailleurs croire que le ministre de la Fonction publique, c'est comme le vin: il y a de bonnes et de mauvaises années. La loi nie donc le droit fondamental des travailleurs de participer à la définition de leurs conditions de travail, ce qui implique nécessairement la liberté de travailler ou de cesser de travailler.

Le projet de loi no 53 n'a pas été préparé dans

le but d'améliorer les relations du travail dans la fonction publique québécoise. Si tel avait été le cas, le gouvernement aurait permis à la commission d'étude et de consultation sur la révision du régime des conventions collectives dans le secteur public et parapublic de faire son travail, de consulter les associations syndicales et patronales ainsi que tous les groupes et individus intéressés à la gestion des affaires publiques, afin de dégager le consensus le plus large possible sur les réformes à entreprendre afin de soumettre des recommandations sur toutes les matières reliées directement au régime de négociations collectives dans les secteurs public et parapublic et de nature à améliorer le fonctionnement de ce régime.

On peut aussi constater que le gouvernement a quand même pris ses précautions sur cette commission, sans vouloir mettre en doute sa crédibilité, puisqu'un des membres, un des commissaires, est un des organisateurs du Parti québécois.

Il serait d'ailleurs intéressant que le ministère de la Fonction publique, en tant qu'employeur, fasse connaître publiquement ses vues. Rien de cela n'a été fait et il est malheureux qu'un tel projet de loi ait été soumis sans consultation préalable des principaux intéressés et que le gouvernement n'ait pas donné suite à notre offre de formation d'un groupe de travail qui a été formulée le 7 février dernier. Ceci nous aurait permis, comme cela avait été le cas en 1965, de vous présenter un rapport sur les mécanismes qui devraient réglementer les relations du travail dans la fonction publique.

Depuis la venue du syndicalisme dans la fonction publique, les fonctionnaires et ouvriers ont voulu militer dans un mouvement syndical authentique, mais il y a plus. Nous avons toujours été convaincus que le fonctionnarisme, entendu dans son sens large, constituait un pivot dans notre société qu'il fallait à tout prix revaloriser pour en arriver à un Etat fort. Des fonctionnaires mal payés, soumis à un arbitraire constant, sans chance d'avancement, ne peuvent donner leur pleine mesure et, ainsi, des ressources considérables se trouvent mal utilisées.

A cette fin, nos démarches ont pour but de réviser le projet de loi qui, selon nous, pourrait permettre l'arbitraire, le patronage et le favoritisme. Or, le projet de loi no 53, dans sa forme actuelle, nie, à toutes fins pratiques, notre pouvoir de négociation.

Nous ne pouvons, en tant que groupe organisé, accepter une telle forme de relations du travail et nous vous réitérons notre offre de participer à l'élaboration d'une réelle politique de relations du travail dans la fonction publique.

L'Etat a le devoir de traiter convenablement ses employés et même d'être à l'avant-garde dans ce domaine, particulièrement lorsque le gouvernement au pouvoir est un gouvernement qui prétend avoir un préjugé favorable aux travailleurs, à moins que les fonctionnaires ne puissent être considérés comme des travailleurs ordinaires.

Il n'est pas raisonnable que l'Etat accorde des droits moindres à ses employés qu'il en accorde aux employés d'entreprises publiques et privées. Bien sûr, comme l'Etat est souverain, des dispositions particulières doivent être acceptées. Mais est-il acceptable que l'Etat, dans sa loi, se donne un mandat et des pouvoirs tels que celui-ci est juge et partie.

Nous sommes régis par un nombre considérable d'arrêtés en conseil qui nous défendent de faire telle et telle chose et qui ne nous permettent pas d'être des employés au service du citoyen. Le projet de loi no 53 nous prive d'une foule de libertés, tout particulièrement celle d'être un citoyen à part entière. Le système administratif en souffre, mais il faudra faire encore plusieurs débats pour donner à l'employé sa véritable place dans ce système administratif.

Lorsque l'on pense aux contrats accordés à des professionnels, aux sous-contrats d'entretien, de construction, de surveillance, de protection et l'embauche d'occasionnels, on ne peut fermer les yeux sur toutes ces dizaines de millions de dollars qui s'envolent pendant qu'un nombre considérable de fonctionnaires sont relégués aux tablettes ou mal utilisés. Lorsqu'on comprend les motivations du gouvernement face au projet de loi no 53, on peut facilement comprendre que, quels que soient les amendements apportés à cette loi, elle restera fondamentalement mauvaise. Devant une loi pareille, qui efface d'un seul trait de plume les conquêtes de plusieurs années de luttes et qui nie même le principe de la négociation, une seule attitude est possible.

Il nous faut refuser de négocier avec le gouvernement une loi qui nie dans les faits, le principe de la négociation. Le droit à la grève et à la négociation collective sont des principes non négociables et les fonctionnaires ne doivent pas se fourvoyer dans des commissions parlementaires pour en sauver des parcelles. D'ailleurs, notre comportement vis-à-vis de la commission parlementaire a pu paraître, particulièrement aux yeux du ministre de la Fonction publique, comme étant un geste purement stratégique, mais le fait que nous ayons demandé que le projet de loi no 53 soit mis en veilleuse jusqu'à ce que la commission Martin ait soumis son rapport peut également être considéré comme une mesure dilatoire. Mais, si aux yeux du ministre, une telle attitude est strictement un geste stratégique, que peut-on penser du comportement du gouvernement dans la présentation de son projet de loi no 53 et de la création de la commission Martin?

Voyons plutôt le cheminement des événements. Le 26 juillet dernier, le ministre de la Fonction publique déposait son projet de loi à l'Assemblée nationale. Dans le même temps, il décrétait également la création d'une commission d'étude et de consultation sur la révision du régime des négociations collectives dans le secteur public et parapublic.

Cependant, le ministre, à cette époque, s'était refusé à ce que le projet de loi no 53 soit étudié en commission parlementaire et ce ouvertement auprès de certains dirigeants syndicaux. Il est vrai que la tenue d'une commission parlementaire a été acceptée à la suite d'une demande provenant

du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec effectuée en date du 4 août dernier. Cette demande était adressée au leader parlementaire ainsi qu'aux chefs des partis d'Opposition, et ce, compte tenu de l'absence du ministre de la Fonction publique, en vacances.

Le gouvernement, par l'entremise du leader parlementaire, devait nous confirmer, en date du 12 août, la tenue d'une commission parlementaire. C'est le 17 août que nous transmettions notre mémoire à la commission parlementaire. De plus, nous avons reçu, en date du 23 août, confirmation du sous-ministre de la Fonction publique ainsi que du secrétaire associé des commissions parlementaires, nous spécifiant la date limite pour la présentation d'un tel mémoire.

Nous ne pouvions prévoir, à l'époque, que la commission Martin aurait également le mandat de procéder à l'étude du régime de négociation dans le secteur public puisqu'aucune confirmation officielle ne nous avait été transmise auparavant. Ce n'est qu'en date du 15 septembre que nous avons reçu une demande de la part du secrétaire de la commission Martin à l'effet de soumettre un mémoire. C'est d'ailleurs en date du 22 septembre dernier que nous demandions une rencontre avec la commission Martin afin de préciser la portée des mandats de cette commission, particulièrement en regard du projet de loi no 53.

Cette rencontre eut lieu le 4 octobre. .Les commissaires nous apprirent qu'une rencontre avait été sollicitée par la commission avec le ministre de la Fonction publique et qu'à cette occasion, le ministre avait reconnu que le mandat était proche, mais qu'il n'y avait pas de contradiction et que, de toute façon, le transfert de juridiction prévu par le projet de loi no 53 n'était pas préjudiciable à l'effet de déterminer ultérieurement le champ de négociation. Il lui semblait cependant nécessaire d'obtenir beaucoup plus de pouvoirs de réglementation, particulièrement vis-à-vis des employés non syndiqués.

La commission nous apprit également que le ministre n'avait aucunement l'intention d'annoncer publiquement que le projet de loi ne serait pas adopté avant la présentation du rapport de la commission Martin, puisque ceci permettrait à d'autres groupes d'effectuer la même démarche. Cette prise de position était reliée particulièrement au projet de loi no 45.

Cependant, la commission nous apprit que le ministre de la Fonction publique était prêt à faire le compromis suivant: poursuivre le calendrier de la commission parlementaire et procéder à l'étude des mémoires. Ensuite, rien ne serait précipité et l'étude, article par article, serait effectuée à la lumière des interventions à la commission parlementaire et du contenu du rapport de la commission Martin. L'adoption du projet de loi s'effectuerait après le dépôt du rapport de la commission. Cependant, en tant que syndicat, nous ne pouvions accepter un tel compromis, puisque le ministre se refusait à confirmer par écrit une telle déclaration.

Vous trouverez d'ailleurs confirmation de ces discussions dans la copie de lettre provenant de la commission Martin et qu'on vous a remise avec les documents. Cependant, compte tenu du comportement de la partie gouvernementale lors de l'ouverture de la commission parlementaire, et suite à son refus de nous garantir que le projet de loi no 53 ne serait étudié qu'après le rapport de la commission Martin, nous ne pouvons nécessairement croire en la bonne foi des porte-parole gouvernementaux, et c'est cette bonne foi qu'on semble vouloir nous faire accepter par le projet de loi no 53.

Cependant, nous ne pouvons être dupes d'un tel comportement. Il nous faut donc rejeter catégoriquement le projet de loi no 53, en exiger le retrait immédiat par le gouvernement, car les membres de l'Assemblée nationale devront comprendre que ce projet de loi constitue pour nous, membres de la fonction publique et par surcroît responsables syndicaux, la négation pure et simple de notre existence, de nos fonctions et de nos possibilités d'action, et qu'un nouveau projet de loi soit soumis à la suite du dépôt du rapport de la commission Martin.

A défaut pour le gouvernement d'adopter cette recommandation, ce qui est prévisible, si on se fie à son comportement général, les conditions minimales dans le projet de loi que nous pourrions accepter sont les suivantes:

Qu'aucune disposition législative ne puisse limiter ou faire obstacle à la libre négociation de toutes les conditions de travail afin de nous permettre de négocier toute matière, tel que prévu au Code du travail, et ainsi reconnaître aux fonctionnaires un complet statut de salarié au sens du Code du travail; que le gouvernement soit forcé d'accepter les conséquences du Code du travail où il se reconnaît employeur au même titre que tout autre employeur.

Pouvoirs du ministre. Par le projet de loi no 53, le ministre de la Fonction publique s'arroge la quasi totalité des pouvoirs qui appartiennent à l'heure actuelle à la Commission de la fonction publique. L'article 3 du projet détermine que le ministre a un pouvoir complet sur la gestion du personnel de la fonction publique, c'est lui maintenant qui réglementera la classification des emplois, l'évaluation du personnel, la promotion, l'affectation, le classement, le reclassement et la mutation des fonctionnaires. Le fait que de tels pouvoirs soient concentrés entre les mains d'un homme politique peut avoir comme conséquence de favoriser le patronage ou le favoritisme, ce qui nous ramènera plus de quinze ans en arrière.

En tant que membres du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, nous devons combattre une telle attitude car, en ce faisant, nous sommes certains d'être utiles non pas uniquement à nos confrères de travail, mais également à l'ensemble de la société. Compte tenu de cet accroissement de travail, il est bien compréhensible que le ministre ait voulu, par l'inclusion des dispositions de l'article 102, permettre à un ex-fonctionnaire qui cesse d'être député avant l'expiration d'une période de cinq années consécutives à son élection, de demander à l'office de vérifier ses aptitudes et de le nommer à un emploi

de la classe que l'office jugera en rapport avec ses aptitudes puisque, selon toute probabilité et compte tenu de la difficulté de satisfaire à toutes les demandes, le ministre de la Fonction publique actuel court des chances d'être le premier membre de l'Assemblée nationale à bénéficier de telles dispositions.

Cependant, nous sommes conscients que les pouvoirs du ministre de la Fonction publique doivent être modifiés et, à cet effet, nous estimons donc que la Loi du ministère de la Fonction publique devrait être modifiée afin qu'il soit prévu que le ministre de la Fonction publique représente le gouvernement du Québec en sa qualité d'employeur des fonctionnaires ouvriers qui font partie de la fonction publique du Québec, que le ministre soit chargé notamment a) d'établir les conditions de travail du personnel du secteur public non assujetti à une convention collective, b) de négocier les conventions collectives auxquelles le gouvernement du Québec est partie, c) de voir à l'application desdites conventions collectives en émettant des directives liant tous les ministères et organismes, en signant toute entente réglant tout grief ou différend, en assurant l'exécution de toute décision arbitrale, d) en assurant auprès des ministères et organismes du gouvernement un service permanent en matière de gestion du personnel et organisation des structures, e) en effectuant les études et les recherches qu'il juge nécessaire à la poursuite des activités de son ministère.

La Commission de la fonction publique. Par le projet de loi no 53, la Commission de la fonction publique perd l'ensemble de ses pouvoirs et particulièrement ses pouvoirs de sélection et de gestion du personnel, son seul véritable pouvoir, en vertu du projet de loi, étant d'entendre des appels soit de suspension, de congédiement, de rétrogradation ou de reclassement.

Comment peut-on concevoir que la Commission de la fonction publique, qui avait pour fonction de faire enquête et rapport sur le fonctionnement de la Loi de la fonction publique, l'observance de ses dispositions et de ses règlements d'exécution, n'ait pas jugé à propos d'en informer l'Assemblée nationale, comme il est de son devoir, à moins que le mandat de la commission, dans les faits, ait déjà été modifié et que cette même commission attende une demande du ministre de la Fonction publique afin de lui donner avis sur le nouveau projet de loi.

D'ailleurs, peut-on espérer que la Commission de la fonction publique, qui a été responsable de la gestion du personnel de la fonction publique au cours des douze dernières années, soumette ses vues sur les modifications à apporter à la loi actuelle?

Compte tenu du seul véritable pouvoir en vertu du projet de loi qui est accordé à la Commission de la fonction publique, comment peut-on justifier que la nomination de ses membres soit effectuée par l'Assemblée nationale puisqu'à toutes fins pratiques les juges des diverses cours de justice qui ont à statuer sur des causes plus impor- tantes ne sont pas nommés par cette même Assemblée nationale?

Peut-on également espérer que les personnes les plus compétentes soient nommées à ces divers postes puisque la durée du mandat n'est que de cinq ans, à moins que, de cette façon, on puisse ainsi exercer un meilleur contrôle sur les membres de la commission et, par ricochet, sur les décisions que ceux-ci seront appelés à prendre.

Quant à nous, nous estimons que le rôle de la Commission de la fonction publique devrait être le suivant: effectuer une surveillance de tous les aspects de la gestion du personnel de la fonction publique, en effectuant la vérification des opérations de gestion du personnel de chacun des ministères ou organismes, et la soumission de rapports sur ces questions et plus globalement la conduite d'études et d'analyses diverses à l'ampleur de la fonction publique.

La commission serait dans l'obligation de divulguer publiquement le résultat de ses études. Ce rôle pourrait ainsi être considéré comme analogue à celui du Vérificateur général dans le domaine financier.

De plus, la commission pourrait recevoir les plaintes individuelles des candidats à la fonction publique et effectuer les enquêtes appropriées afin de déterminer le bien-fondé de ces plaintes et prendre des décisions exécutoires, selon l'équité, permettant de corriger les torts constatés.

Egalement, la commission pourrait assumer le rôle d'arbitre pour les fonctionnaires qui ne sont pas assujettis aux conventions collectives de travail. Les membres de la commission pourraient ainsi être nommés par l'Assemblée nationale selon les dispositions de la loi actuelle, c'est-à-dire selon leur bonne conduite.

Nos droits légitimes. Tous les organismes internationaux reconnaissent que les employés contre qui une sanction est prise ont droit à un recours, à un appel. En droit commun, il n'est pas toléré que la partie qui accuse soit en même temps juge. Il est inacceptable que les employés du gouvernement ne puissent en appeler d'une décision de congédiement à un organisme extérieur à la fonction publique, suivant les règles édictées par la convention collective, comme cela est le cas actuellement.

Ce droit d'appel d'une décision semblable n'est exclusif à l'employeur dans aucune autre convention collective. Les employés du gouvernement ont donc droit à la même mesure de justice et d'équité.

Les fonctionnaires et ouvriers du gouvernement du Québec ont décidé de joindre les rangs d'un syndicat libre pour plusieurs motifs, principalement parce qu'ils désiraient établir un régime de justice et d'impartialité. Toute nouvelle loi ne protégerait pas les fonctionnaires et ouvriers en ce qui concerne leur droit d'être entendus et jugés impartialement serait loin de correspondre à leurs aspirations légitimes.

Or, le projet de loi no 53 donne des pouvoirs d'arbitre à des fonctionnaires employés et payés

par le gouvernement. Ce projet de loi remplace l'intervention des tribunaux par l'intervention d'un fonctionnaire interchangeable au besoin, qui est aux ordres et à la solde du gouvernement, lui-même employeur.

La procédure actuelle prévoit tout au moins que les arbitres, déterminés selon la convention collective, soient soumis à certaines règles de droit connues, doivent respecter certaines procédures et doivent donner aux fonctionnaires et ouvriers l'occasion de faire valoir publiquement leur point de vue. Tous ces droits et garanties, les fonctionnaires les perdent. La philosophie du projet de loi no 53 est quelque peu contradictoire avec celle qui a prévalu dans l'élaboration du projet de loi no 45, dans lequel le gouvernement a réellement fait la preuve de son préjugé favorable aux travailleurs, puisque l'on peut constater que, dans le cas des appels ou griefs, l'arbitre des griefs ou le président de la commission d'arbitrage des griefs ne devait avoir aucun intérêt dans le grief qui lui était soumis.

De plus, ces mêmes arbitres pouvaient rendre une décision selon l'équité et leur bonne conscience. Or, ceci n'est pas le cas avec la procédure envisagée par le ministre de la Fonction publique dans son projet de loi, puisque les employés ne pourront plus faire de griefs devant un arbitre choisi par les parties, relativement à leur classement, leur promotion, leur rétrogradation, leur destitution ou toute mesure disciplinaire puisqu'ils devront alors s'adresser à la Commission de la fonction publique dont le rôle est confiné à celui de juge chargé d'appliquer les règlements du ministre.

Les membres de cette commission ne sont cependant pas nommés après entente avec le syndicat, mais par l'Assemblée nationale et ce, pour une période restreinte de cinq ans. De plus, les membres de la commission qui statueront sur une plainte d'un fonctionnaire seront liés par les règlements adoptés par le ministre, puisqu'en effet, le ministre peut prévoir, par règlement, les motifs des mesures disciplinaires ainsi que les sanctions possibles.

Dans un tel cas, les membres de la commission ne pourront qu'appliquer les normes du ministre, contrairement aux pouvoirs habituels des arbitres de griefs. De plus, ce même projet de loi ne donne aucune garantie que la commission procédera par audition et qu'un employé pourra se faire accompagner de ses représentants syndicaux. Il s'agit là d'un changement majeur à ce qui existe aujourd'hui.

L'office du recrutement. Le recrutement des futurs employés de l'Etat est confié à un office de recrutement du personnel de la fonction publique qui aura pour principale fonction de procéder à la vérification de la compétence des candidats, à leur sélection et à leur nomination. Actuellement, ce rôle a été confié à la Commission de la fonction publique. L'indépendance de cet office est beaucoup moins grande que celle de la commission actuelle, puisque son président ne sera nommé que pour cinq ans et que les autres membres de l'office dépendront, une fois choisis, du ministre de la Fonction publique. C'est à croire que l'on crée une nouvelle structure, parce qu'on est malade de structurite et que cette maladie s'avère de plus en plus aiguë.

Même si l'office est supposément sous la responsabilité d'une seule et unique personne, son président, c'est en définitive le Conseil du trésor qui est le grand responsable, puisque celui-ci se donne une mainmise sur l'office en ce qu'il doit toujours en approuver les règlements. De plus, peut-on s'assurer les services de la personne qui serait la mieux qualifiée pour ce poste de président de l'office si le mandat n'est que d'une durée de cinq ans. Il est également important de noter que les pouvoirs de nomination, soit à l'occasion de recrutement ou de promotion, peuvent être délégués au sous-chef, même si, en vertu des dispositions de la loi, ils appartiennent au ministre ou à l'office du recrutement.

Comment peut-on espérer que les normes puissent être appliquées de façon identique lorsque plusieurs personnes peuvent intervenir dans son application, à moins que la règle du mérite soit celle d'être reconnu à titre d'ami du parti.

Il est également extrêmement intéressant de constater que c'est la seule loi au Québec qui permet un tel pouvoir de délégation. On peut donc se poser des questions sur la nécessité de telles dispositions et les buts qui sont poursuivis.

Nous estimons, pour notre part, que ce rôle devrait être assumé par les ministères et organismes, selon les dispositions des conventions collectives en vigueur dans le cas des postes visés par le certificat d'accréditation, ou selon les règlements du ministre de la Fonction publique dans tous les autres cas.

Cette façon de procéder éviterait ainsi au gouvernement d'avoir à légiférer à l'occasion de la création de nouveaux organismes, comme cela était le cas pour la Régie de l'assurance-maladie du Québec, ainsi que la Régie de l'assurance automobile.

Cheminement de la carrière ou la règle du mérite.

Le projet de loi no 53 introduit la notion de mérite dans le recrutement et la promotion des employés de la fonction publique. C'est le principal effet de l'article 70 du projet de loi. Cette notion n'est sûrement pas nouvelle, puisqu'elle se retrouvait déjà à l'article 34 de la loi actuelle qui prévoyait qu'à compétence égale l'ancienneté pouvait être un des critères considérés lors de la nomination des ouvriers et que l'article 38 prévoyait que tout examen devait être de nature à constater impartialement la compétence des candidats.

L'article 73 du projet de loi, plutôt que de parler de compétence des candidats, parle de valeur des candidats. C'est également un terme qui peut être assez difficile à définir.

D'ailleurs, le ministre de la Fonction publique avait l'occasion de rappeler "Que la Commission de la fonction publique était l'organisme indépendant dont le rôle est de faire le recrutement, la sélection et la classification du personnel de la fonction publique. Elle doit voir à ce que la règle du mérite, basée sur l'aptitude et ta compétence, préside à l'embauche des fonctionnaires."

Le ministre prétendait de plus "Que la règle du mérite n'existait pas véritablement tant on avait trouvé moyen de la contourner."

Le ministre de la Fonction publique notait cependant que "Le pauvre président de la Commission de la fonction publique est harcelé constamment de pressions pour obtenir des passe-droits et il doute que M. Gérin ait les moyens à sa disposition pour y résister, ce qui ne veut pas dire qu'il n'applique pas un certain régime de mérite, mais c'est plein de failles et ce n'est pas sa faute à lui."

Comment peut-on espérer que, par la possibilité de délégation et de sous-délégation, de telles formes de pression ne puissent être exercées contre les personnes responsables de ces mêmes promotions et nominations et, à tout le moins, comment peut-on croire qu'un homme politique comme le ministre de la Fonction publique, qui, en définitive, est le responsable des nominations, ne puisse pas faire l'objet de pressions politiques de la part de certains individus. Il en est de même du président de l'office qui dépend, en définitive, du ministre de la Fonction publique. De plus, les failles existantes demeurent.

Egalement, le projet de loi ne fait aucune obligation à un responsable d'organisme ou sous-chef d'un ministère de démontrer qu'un poste vacant existe avant de procéder à une promotion, comme cela était le cas selon les dispositions de la loi actuelle.

Comme le projet de loi permet au ministre de la Fonction publique de déléguer son pouvoir, de déterminer le niveau des postes en relation avec la classification à tout sous-ministre ou dirigeant d'organisme et que ces mêmes personnes peuvent procéder à la sélection, à la déclaration d'aptitudes et à la promotion des fonctionnaires, le contrôle que le ministre veut établir par son projet de loi sera également plein de failles et le patronage et le favoritisme régneront en roi et maître dans la fonction publique québécoise.

Pourtant, le ministre possède, selon les dispositions de la loi actuelle, les pouvoirs pour faire en sorte que les fonctionnaires soient des plus compétents, mais il serait nécessaire qu'il se donne la peine d'élaborer et d'appliquer une politique de développement des ressources humaines et établir et administrer des programmes de perfectionnement, ce qui, malheureusement, n'est pas le cas à l'heure actuelle.

Il est sûr que ce point particulier n'est pas l'une des priorités du gouvernement, puisqu'à toutes fins pratiques, les budgets qui pourraient être consacrés au perfectionnement des employés de la fonction publique sont quasiment nuls.

Ceci permettrait également de favoriser l'accession des fonctionnaires à des postes supérieurs, comme semblait vouloir le laisser croire les dispositions de l'article 39 de la loi actuelle, ainsi que semble vouloir le prévoir à nouveau le projet de loi, à l'article 75, et comme devaient également le permettre les dispositions de l'article 21 de notre convention collective.

Cependant, compte tenu du manque de contrôle et de pouvoirs du ministère de la Fonc- tion publique, il s'est avéré que de telles dispositions ont été pratiquement inappliquables.

Le projet de loi introduit une nouvelle notion, soit la rétrogradation; la révocation ou la destitution pour insuffisance professionnelle. Une telle rétrogradation, révocation ou destitution est possible dans le cas de tout fonctionnaire incompétent dans l'exercice de ses fonctions ou incapable de les exercer. Mais comment peut-on concilier les dispositions du projet de loi avec le projet de loi no 9 traitant des handicapés et qui, a l'article 73, interdit, dans une entreprise de 50 salariés ou plus, de congédier un salarié pour la seule raison qu'il devient une personne handicapée. Pourtant, le même projet de loi prévoit que celui-ci s'applique au gouvernement.

Pourtant, nous ne nous opposons pas à de telles dispositions, puisque nous les avons déjà acceptées lors des dernières négociations en 1975. Cependant, nous voulons nous assurer de certaines garanties et il est important pour nous que de telles dispositions continuent à être négociées.

Il est un article qui semble avoir une portée insignifiante, mais qui peut avoir de grandes conséquences pour l'avenir de chacun de nos fonctionnaires. Il s'agit de l'article 83 du projet de loi, qui prévoit que l'affectation d'un fonctionnaire, d'un emploi de la classe à laquelle il appartient à un autre emploi dans la même classe au sein du même ministère ou organisme, est faite par un écrit du sous-ministre ou dirigeant de l'organisme duquel il relève.

Or, le sous-chef ou dirigeant de l'organisme n'a aucune obligation d'indiquer les motifs d'une telle affectation et l'employé auquel une telle affectation est imposée n'a aucun recours pour contester cette affectation. Cet article du projet de loi confirme donc l'application de la sentence arbitrale rendue par le juge Jean Bérubé sur laquelle le ministre nous avait pourtant déclaré personnellement son désaccord.

Le régime syndical. Le projet de loi restreint la possibilité pour certains employés d'être assujettis à une convention collective. L'article 68 du projet de loi permet au ministre de la Fonction publique de soustraire totalement ou partiellement à l'application de la loi les emplois de caractère occasionnel, comme cela a été de la juridiction de la Commission de la fonction publique, en vertu de l'actuelle loi.

Pourtant, vous n'êtes pas sans savoir que le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec a entrepris des démarches depuis plus de quatre ans afin de permettre la syndicalisation de ces employés, ce qui fut fait le 12 juillet dernier.

Cependant, ceci n'a pas empêché le ministre de prévoir, par son projet de loi, la possibilité de réviser cette décision et d'annuler toutes les démarches entreprises depuis ce temps. Il est plutôt aberrant de constater l'incohérence des politiques du ministre de la Fonction publique, puisque, à toutes fins pratiques, dans l'espace de deux semaines, le gouvernement a révisé sa position et ce, même si des déclarations publiques avaient été effectuées par le ministre de la Fonction publique à

savoir que les employés occasionnels soient assujettis à une convention collective.

D'ailleurs, depuis cette date, et ce, même si l'entente conclue au cours du mois de juillet prévoyait que des négociations seraient entreprises pour déterminer les conditions de travail, à ce jour, aucune démarche n'a encore été effectuée et ce malgré nos appels fréquents. Il est donc à prévoir que le gouvernement veuille attendre l'adoption du projet de loi pour faire en sorte de n'être pas dans l'obligation de négocier les conditions de travail des employés occasionnels. D'ailleurs le ministre a prétendu le 13 octobre dernier: "Tout d'abord, le nouveau gouvernement, depuis le 15 novembre, a étendu un certain nombre de droits syndicaux qui n'étaient pas reconnus dans l'ancienne loi ou qui n'étaient pas reconnus de facto. Entre autres, du côté des employés occasionnels, nous avons obtenu de la Commission de la fonction publique une résolution qui fait que les employés occasionnels seront maintenant inclus dans l'unité de négociation. "D'ailleurs, la nouvelle loi prévoit que cette extension de l'unité d'accréditation est irrévocable. Elle est inscrite dans la loi. Elle ne sera plus soumise au pouvoir réglementaire du ministre."

Nous espérons que le ministre sera en mesure de nous indiquer l'article qui permet une telle interprétation, à moins que nous n'ayons pas le même projet de loi.

La reconnaissance par le gouvernement du droit d'association pour certaines catégories d'employés pose également des problèmes. La raison invoquée est le caractère confidentiel de leurs fonctions. Ainsi, l'article 114 du projet de loi enlève aux employés du service du personnel le droit de se syndiquer, contrairement à une décision rendue dernièrement par le Tribunal du travail.

Le gouvernement reprend-il à son compte une vieille rengaine qui veut que l'adhésion à un syndicat soit essentiellement un acte de trahison et un geste déloyal vis-à-vis de son employeur? La règle, admise d'ailleurs couramment dans l'entreprise privée, veut que seuls ceux qui sont employés à titre confidentiel, dans les relations entre l'employeur et ses salariés, soient exclus des unités de négociation.

Comment doit-on également évaluer la décision du gouvernement de ne pas assujettir à la Loi de la Fonction publique les employés de la Régie de l'assurance automobile ainsi que les employés de la Société de cartographie du Québec?

Qu'advient-il également des ouvriers de ta fonction publique à l'emploi du gouvernement depuis de nombreuses années et qui, par l'application des dispositions de la convention collective, possèdent le statut d'employés permanents? Le projet de loi est totalement muet à ce sujet. Pourtant, les conséquences du projet de loi peuvent être extrêmement grandes pour ces employés.

De plus, les dispositions du Code du travail interdisant l'utilisation des services d'une personne pour remplir les fonctions d'un salarié qui exerce son droit de grève ou qui est "lock-outé" devraient s'appliquer de façon intégrale.

Il serait également bon de se pencher sur la portée des dispositions de l'article 85 du projet de loi, puisque celui-ci ouvre une grande porte au favoritisme et au patronage et ce, sans possibilité de recours, tant pour l'employé visé que pour ses collègues de travail et ce, même si la règle du mérite n'a pas été appliquée.

D'ailleurs, toutes les dispositions prévues à la section 3 traitant de l'affectation, de la mutation, du classement et du reclassement sont inacceptables dans leur forme actuelle.

Rémunération et avantages sociaux. Les dispositions de l'article 119 du projet de loi semblent nous laisser croire que nous pourrions négocier la rémunération et les avantages sociaux.

Cependant, nous apprécierions d'être éclairés sur le contenu de ces négociations possibles, si nous faisons la relation avec les dispositions de l'article 3 du projet de loi qui prévoit que le ministre a comme devoir de faire des règlements concernant les conditions de rémunération et de travail.

De plus, c'est le ministre qui, en vertu de l'article 4, détermine le niveau des postes en relation avec la classification et que c'est le Conseil du trésor qui approuve les plans d'organisation de chaque ministère ou organisme, ainsi que les effectifs requis pour la gestion des ministères et la répartition de ces effectifs.

L'article 119 ne donne donc, à toutes fins utiles, au syndicat que le pouvoir de discuter des salaires, puisque c'est le ministre qui possédera tous les pouvoirs. C'est donc dire qu'on enlève aux employés les pouvoirs de négocier quant à leur classement, leur promotion, leur mutation, leur suspension, leur congédiement, leur sécurité d'emploi et toutes les autres conditions de travail. De plus, n'avons-nous pas à craindre que la fameuse "machine à saucisse", de sinistre mémoire, qui a été inventée alors par le ministre actuel des Finances, qui agissait alors comme conseiller financier du gouvernement, ne soit remise en fonctionnement afin de limiter nos augmentations et également réduire les échelles de salaire. Certaines déclarations ministérielles nous le laissent présager.

L'article 103 du projet de loi interdit à tout membre du personnel de la fonction publique de se livrer à un travail de partisan au cours d'une élection fédérale ou provinciale. Cette prohibition devrait disparaître, puisque les employés devraient pouvoir jouir de leur droit de citoyen à part entière, tout en gardant implicite leur devoir de loyauté. De plus, afin d'atteindre les objectifs de transparence de la fonction publique visés par le gouvernement, nous demandons que soit abolie l'obligation de prêter les serments d'allégeance et d'office ou de discrétion afin de traiter les fonctionnaires comme tout salarié régi par le Code du travail, tout en conservant le principe de loyauté inhérent au travail, mais sans expliciter de procédures spéciales pour les fonctionnaires.

En résumé, le seul fait de modifier le nom de la commission par celui du ministre et de créer un office de recrutement n'est pas suffisant pour changer tout un régime. La nouvelle commission,

ainsi que le nouvel office sont, en fait, une prolongation de l'employeur. De plus, on autorise la nouvelle commission à remplir la fonction d'arbitre ou de juge, ce qui est inacceptable. Ce projet de loi, tel que proposé, ne peut donc répondre aux aspirations légitimes des fonctionnaires et des ouvriers de la fonction publique québécoise.

Nous espérons que les membres de l'Assemblée nationale accepteront d'amender ce projet de loi pour en faire un outil efficace de revalorisation de la fonction publique. Il ne suffit pas que le projet de loi ne fasse que renfermer de bonnes intentions pour se justifier auprès de la population pour penser que le climat des relations du travail, dans la fonction publique, sera amélioré et permettra d'atteindre des résultats concrets au cours des prochaines négociations. Encore faudra-t-il que chacun des interlocuteurs puisse avoir son mot à dire, ce qui n'est sûrement pas le cas avec le projet de loi no 53. De plus, ce projet de loi revêt, pour l'ensemble des travailleurs du Québec, une grande importance, puisqu'éventuellement, certains des principes que vous soumettez, s'ils sont retenus, peuvent également être appliqués, notamment, dans les secteurs parapublic et privé. Nous estimons, de plus, que les employés de la fonction publique québécoise devraient avoir les mêmes droits et privilèges que leurs confrères travailleurs du Québec.

Je suis à votre entière disposition pour répondre à des questions, et éventuellement aussi, en poser quelques-unes, si vous le permettez, Mme le Président.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Tout d'abord, on va commencer par une question facile, si vous le voulez bien. Je vais procéder du plus facile au plus difficile. Ma première remarque a trait à la syndicalisation des occasionnels. J'aimerais que vous me citiez l'article de la loi actuelle qui me permettrait de soustraire les occasionnels du régime syndical.

M. Harguindeguy: De la loi actuelle, M. le ministre?

M. de Belleval: Pardon. Du projet de loi, je m'excuse.

M. Harguindeguy: Les articles 68 et 124.

M. de Belleval: Où, à l'article 68, me permet-on de soustraire les occasionnels au régime syndical?

M. Harguindeguy: L'article 68, s'il faut le lire, en fait, est identique, de façon pratiquement intégrale. Les seuls mots qui ont été modifiés sont ceux de "commission" remplacé par "ministre". Il faut peut-être, au point de vue pratique, constater que la Loi de la fonction publique et notre régime syndical, même avec les modifications que vous prévoyez, veulent prévoir...

M. de Belleval: Pardon? Je m'excuse.

M. Harguindeguy: C'est pour cela que je préférais attendre, M. le ministre, pour être sûr. La Loi de la fonction publique, à l'heure actuelle, dans la définition du terme "fonctionnaire" et également à l'article 55 définissait le fonctionnaire comme un employé assujetti à la Loi de la fonction publique. Vous dites, à l'article 1, à la définition de fonctionnaire, au paragraphe c): que le fonctionnaire est un membre du personnel de la fonction publique autre qu'un sous-ministre. A l'article 55, vous dites: "Font partie du personnel de la fonction publique les personnes qui ont été admises, conformément à la Loi du service civil et à la Loi de la fonction publique, ainsi que celles qui y sont admises conformément à la présente loi.

A l'article 68, on peut donc permettre la syndicalisation par l'article 55 pour y nommer des occasionnels, sauf qu'à l'article 68, vous dites, et c'est intégralement à l'article 3 de la loi actuelle et ça retourne même à 41, c'est également ça: "Lorsque le ministre de la Fonction publique décide qu'il n'est ni praticable, ni dans l'intérêt public d'appliquer la présente loi à un ou plusieurs emplois d'un caractère occasionnel dans la fonction publique, ou à un ou plusieurs emplois auprès d'un agent ou d'un délégué général du Québec, il peut"— le ministre — "avec l'approbation du Conseil du trésor, sur avis de la commission, les soustraire totalement ou partiellement à l'application de la présente loi et déterminer par règlement la manière dont seront régis ces emplois et leurs titulaires." Donc, vous fixez aussi leurs conditions de travail, ce qui ne devient pas nécessairement négociable.

M. de Belleval: Est-ce que je peux vous arrêter?

M. Harguindeguy: Oui, sûrement.

M. de Belleval: Vous avez bien lu que le projet de loi permet au ministre de les soustraire à l'application de la présente loi, mais pas à la Loi sur le régime syndical. Le régime syndical, en vertu du projet de loi, comprend toutes les conditions de travail négociables et le pouvoir qu'avait la commission de soustraire certains employés du régime syndical disparaîtra avec la loi, puisque la commission disparaît.

Alors, la seule chose que je pourrais faire, c'est que, d'ici l'approbation du projet de loi no 53, je pourrais toujours convaincre de nouveau la Commission de la fonction publique de revenir sur sa décision, mais, une fois que le projet de loi sera en vigueur, ces employés deviennent des fonctionnaires au sens de la loi, sont soumis au régime syndical et aucun article du projet de loi no 53 ne me permet de les soustraire au régime syndical. Autrement dit, la syndicalisation de ces employés est à sens unique maintenant. Je ne pourrai plus y revenir.

M. Harguindeguy: Votre texte...

M. de Belleval: Est-ce que vous me suivez?

M. Harguindeguy: Je vous ai suivi et saisi

aussi, mais le texte de loi n'est quand même peut-être pas aussi clair que vos affirmations, M. le ministre. Si vous regardez quand même l'article 124 aussi, on y parle...

M. de Belleval: L'article 124, je vais y répondre, vous y avez fait allusion.

M. Harguindeguy: Je n'ai encore rien expliqué, à moins que vous ayez déjà saisi ma pensée.

M. de Belleval: Oui, parce que l'article 124 traite des affaires pendantes en termes purement judiciaires. Il ne traite pas d'affaires pendantes en termes de pouvoirs de la commission. Les pouvoirs de la commission vont disparaître avec l'approbation du projet de loi no 53.

Alors, un pouvoir qu'avait la commission avant l'approbation du projet de loi no 53, ce n'est plus une affaire pendante. Ce qui est une affaire pendante, par exemple, c'est un congédiement dont l'appel serait devant la commission, non pas l'appel, mais dont l'instruction serait devant la commission, et continuera à être poursuivi devant la nouvelle commission, mais pas les pouvoirs de l'ancienne commission.

M. Harguindeguy: Si Mme le Président me permet, je pense qu'il faudrait regarder l'article 124, parce que ce n'est pas strictement les affaires pendantes, à moins qu'il n'y ait des affaires pendantes où une décision est déjà prise.

A l'article 124, on dit: "Les affaires pendantes devant l'ancienne commission sont continuées et décidées suivant la présente loi par le Conseil du trésor. La Commission de la fonction publique instituée par la présente loi, l'office ou le ministre de la Fonction publique, suivant la compétence qui leur est respectivement attribuée par la présente loi; le Conseil du trésor, la Commission de la fonction publique instituée par la présente loi, l'office ou le ministre de la Fonction publique, suivant le cas, peut exercer tous les pouvoirs de l'ancienne commission, y compris celui d'en réviser ou révoquer les décisions" — donc, il y a une décision de la commission d'assujettir les occasionnels à l'article 69 de la loi et les affaires pendantes, il n'y a sûrement pas de décision de prise — "ordres et certificats comme s'il en était l'auteur." Le texte dit ça, de réviser et de révoquer les décisions. Donc...

M. de Belleval: Les affaires pendantes, ce sont des cas judiciaires qui sont devant la commission, pas des pouvoirs de la commission.

M. Harguindeguy: II y a peut-être intérêt...

M. de Belleval: Alors, le pouvoir de la commission de faire des règlements disparaît avec la loi. Ce n'est plus une affaire pendante. Les affaires pendantes, si vous regardez la loi de l'interprétation de ce que c'est que des affaires pendantes, ce ne sont pas des pouvoirs, ce sont des cas de nature judiciaire, ou quasi judiciaire, dans le cas de la commission. Je ne peux pas revenir là-dessus. Ecoutez!

M. Harguindeguy: Sauf que...

M. de Belleval: II y a quand même une question de bonne foi minimale qui doit exister entre les parties si on veut s'entendre. Quand je vous dis — et je le répète — qu'en vertu de la loi et ce n'est pas mon intention de revenir là-dessus, je vous ai accordé une demande que tous les gouvernements antérieurs vous avaient refusée. Cela ne m'a pas pris beaucoup de temps, cela a pris quelques semaines, quelques mois. Remarquez que je n'en ai pas été félicité!

M. Harguindeguy: Mais ce n'est pas encore réglé, M. le ministre.

M. de Belleval: Remarquez que je n'ai pas été félicité! On est rarement félicité, mais on ne s'attend pas non plus à être félicité. Je le fais simplement remarquer. Premièrement, la bonne foi s'interprète par des gestes. J'ai fait en sorte que la commission permette que les occasionnels soient syndiqués. Deuxièmement, j'ai dit qu'il n'était pas question dans le projet de loi de me donner des pouvoirs pour revenir sur cette décision. Troisièmement, là, on peut s'embarquer dans des interprétations à n'en plus finir sur les textes des projets de loi, mais j'ai moi aussi des conseillers juridiques compétents et qui me disent: M. le ministre, en vertu du projet de loi actuel, vous n'avez pas le droit, vous ne pouvez plus revenir sur votre décision, maintenant les occasionnels sont syndiqués pour toujours, à moins que vous ne changiez la loi. Alors, s'il faut que j'aille plus loin que cela pour que ma bonne foi soit prise en considération, je me dis qu'il n'y a plus moyen de fonctionner.

M. Harguindeguy: Voici, M. le ministre. Si je ne vous ai pas remercié, je m'en excuse; je pensais l'avoir fait le 29 avril, quoiqu'il est vrai que ce n'est ni dans mes habitudes ni de remercier ni d'aller pleurer sur les épaules d'un ministre. Je pense qu'il y a quand même des textes qui sont écrits. Si vous me dites qu'il y a des affaires pendantes, cela veut dire qu'il n'y a pas encore de décisions de prises, si c'est pendant, s'il y a encore attente de décisions.

M. de Belleval: Ce sont des affaires particulières, je vous l'ai dit, ce ne sont pas des pouvoirs.

M. Harguindeguy: D'accord. Pour éviter toute ambiguïté, si c'est pendant, cela veut dire que c'est encore à l'étude. Pourquoi prévoyez-vous, au dernier paragraphe...

M. de Belleval: Les affaires pendantes, ce sont les auditions de cas devant la Commission. C'est ça, les affaires pendantes au sens juridique du terme. Demandez-le à votre conseiller juridique, il va vous le confirmer.

M. Harguindeguy: On a déjà répondu à cela avant.

M. Bellemare: Laissez-le répondre au lieu de l'interrompre continuellement.

M. Ciaccia: Est-ce qu'il pourrait nous dire où est l'article de la loi qui dit que les occasionnels sont des syndiqués? Pourriez-vous nous citer cet article?

M. de Belleval: S'il y a des articles qui disent que les occasionnels sont syndiqués?

M. Ciaccia: La loi sur le régime syndical qui...

M. de Belleval: La loi sur le régime syndical prévoit que...

M. Ciaccia: Quel est l'article qui dit que les occasionnels sont syndiqués?

M. de Belleval: La loi sur le régime syndical, c'est-à-dire les articles de l'ancienne loi qui sont transportés dans ce qu'on appellera maintenant la Loi sur le régime syndical, n'excluent du régime syndical aucun employé du gouvernement.

Le Président (Mme Cuerrier): Après cette incidente de M. le député de Mont-Royal, M. le président, vous avez la parole.

M. Harguindeguy: Merci, Mme le Président, je ne suis pas avocat — Dieu m'en garde — mais il y a quand même une chose qui est significative dans l'article 124.

M. de Belleval: On partage.

M. Harguindeguy: Au moins on partage cela, c'est quelque chose.

M. de Belleval: Je pense que si on baissait le ton, on s'entendrait sur beaucoup de choses. Vous allez voir!

M. Harguindeguy: Mon ton est naturel, M. le ministre. L'article 124, vous dites que les affaires pendantes sont des choses judiciaires. Vous ne parlez pas de pouvoirs. On va lire ensemble, si vous le permettez, tranquillement, pas vite, le dernier paragraphe de l'article 124, où on dit que "le ministre de la Fonction publique, suivant le cas, peut exercer tous les pouvoirs de l'ancienne commission." Or, si ce sont des affaires pendantes ou des choses judiciaires, il n'y a pas non plus de décisions de prises. Pourquoi, mentionnez-vous "y compris celui de réviser ou révoquer les décisions, ordres et certificats comme s'il en était l'auteur"? Biffez ce paragraphe et je vais vous donner raison, M. le ministre.

M. de Belleval: D'accord. Il y a une affaire qui est pendante devant la commission, disons un congédiement. Il faut que quelqu'un, une fois que la loi 53 est votée, puisse continuer l'audition de cette affaire qui est pendante. Il faut que la personne qui reprendra ce pouvoir d'audition ait le pouvoir d'aller jusqu'au bout. C'est ce que cela dit.

Cela veut dire que ceux qui succèdent à la commission auront les mêmes pouvoirs que la commission avait à l'égard de ces affaires pendantes, mais pas à l'égard de l'ensemble des pouvoirs de la commission.

M. Harguindeguy: Sauf que vous avez quand même voulu prendre la précaution d'inclure que vous pouviez réviser les décisions..

M. de Belleval: Y compris le pouvoir de révision qui existe quant à certaines affaires pendantes.

M. Harguindeguy: Comment peut-il y avoir des affaires pendantes quand il y a déjà une décision de prise? C'est cela que je comprends mal, M. le ministre.

M. de Belleval: La commission a un pouvoir de révision de ses décisions. Si, à l'occasion d'une affaire pendante, quelqu'un demande une révision, il faut que quelqu'un puisse entendre cette révision. Comme la commission n'existera plus, il faudra que ce soient les organismes qui lui succéderont. C'est seulement cela.

M. Harguindeguy: En tout cas, M. le ministre, parce qu'on ne peut pas en discuter bien longtemps et qu'on va tourner autour du pot, je pense que vous auriez intérêt, si vous voulez sincèrement que les occasionnels soient dorénavant syndiqués... je ne vois plus du tout l'utilité de l'article 68 de la Loi de la fonction publique...

M. de Belleval: Je vais vous l'expliquer ensuite.

M. Harguindeguy: ... d'exclure des personnes... Si elles sont syndiquées, elles sont syndiquées, et on va négocier leurs conditions de travail. L'article 68 vous permet de les soustraire totalement ou partiellement. Vous pourriez fort bien dire: Elles sont syndicables, mais je les soustrais de l'application de l'article qui permet des négociations sur tel et tel sujet. On peut diverger d'opinion là-dessus. Si on s'était rencontré avant, on aurait évité certains débats publics. Mais l'article 68 vous donne le pouvoir, comme il le donnait à l'ancienne commission, et à la Commission du service civil depuis 1941, d'exclure des employés de la fonction publique. Si vous voulez absolument qu'ils soient syndicables, prévoyez-le de façon implicite à l'article 117 de la Loi du régime syndical, disant que cela inclut également les employés fonctionnaires, quitte à les identifier comme étant des employés permanents, temporaires, saisonniers ou occasionnels. Là, je serai peut-être d'accord, M. le ministre. Mais, tant et aussi longtemps que cette ambiguïté demeurera, nous ne pourrons accepter comme telles vos déclarations, parce que, dans les textes de loi, il y a des contradictions flagrantes et qu'on ne veut pas se retrouver avec le même problème. Même si, depuis le mois de mars, vous avez donné suite à nos revendications pour que les occasionnels soient

inclus, il n'empêche quand même pas qu'à l'heure actuelle, au moment où on se parle, les ententes se terminent le 1er novembre prochain, soit mardi prochain. Vous avez d'ailleurs copie des ententes signées le 25 juillet, la veille du projet de loi. Il n'y a absolument rien de fait encore pour négocier les conditions de travail. Il n'y a même pas de mandat du Conseil du trésor, selon les informations que j'ai obtenues.

M. de Belleval: Pour revenir quand même...

M. Ciaccia: M. le ministre, d'après l'article 119...

M. de Belleval: Est-ce que je peux terminer? Je vais répondre à M. Harguindeguy...

M. Ciaccia: D'accord.

M. de Belleval: Je crois qu'on se comprend, alors, on va continuer pendant qu'on se comprend.

M. Harguindeguy: On s'est toujours compris.

M. de Belleval: L'article 68 est important et nécessaire malgré tout, parce qu'il permet d'exclure certains types d'emplois des procédures normales prévues dans la Loi de la fonction publique, et non pas dans la Loi sur le régime syndical. Par exemple, si on veut engager un contractuel pour une période de deux ou trois mois ou pour un an, comme c'est normal que cela puisse se faire à un certain moment, on ne l'assujettira pas nécessairement au concours prévu à l'article 70. C'est un employé temporaire, il faut donc, comme dans la loi actuelle, et c'est normal, que toutes les lois de la fonction publique prévoient une souplesse semblable pour permettre l'engagement d'employés temporaires. L'article 68, tel que rédigé, ne permet pas de les exclure de la Loi sur le régime syndical, seulement de l'application de la Loi sur la fonction publique. Ce sont deux lois séparées.

Une fois que le projet de loi 53 est adopté, en fait celui-ci donne naissance à deux lois: la loi 53 elle-même et la Loi sur le régime syndical, en vertu des articles 117 et 118. Si vous me dites qu'en plus de cela, vous aimeriez avoir, à l'article 119 de la nouvelle loi, soit aux articles pertinents de la Loi sur le régime syndical une précision à cet effet, on peut bien la mettre, mais nos juristes nous assurent que, comme la Loi sur le régime syndical ne prévoit pas d'exclusion, par inférence, tous les employés, quels qu'ils soient, sont syndicables. Cependant il y a des exclusions prévues, comme vous le savez, en vertu des articles qui traitent de l'accréditation, où on exclut nommément des corps d'emploi particuliers, mais on ne fait pas de distinction, dans ces articles, entre fonctionnaires et ouvriers; on le faisait autrefois avec ouvriers mais occasionnels, et vous remarquerez d'ailleurs qu'en vertu de la façon dont est maintenant rédigé l'article 53, les ouvriers sont automatiquement syndiqués. On ne peut pas non plus sortir... Parce que les ouvriers sont assimilés aux fonctionnaires.

M. Harguindeguy: De sorte qu'il reste des problèmes.

M. Ciaccia: Pas d'après l'article 119. D'après l'article 119, ils sont régis par la convention collective, et s'ils n'ont pas de convention collective, ils ne sont pas syndiqués.

M. de Belleval: II n'y a pas que l'article 119. Si vous allez aux articles 117 et 118, tous les articles qui traitent de ce dont M. Harguindeguy parle sont maintenus tels quels et aucun de ces articles n'exclut les occasionnels. Les occasionnels sont donc inclus.

Maintenant, si vous me dites: Ce sera "trop fort , casse pas", on devrait l'indiquer. On peut l'indiquer.

M. Ciaccia: II n'y a pas de convention collective. L'article 91 aussi...

M. Harguindeguy: Si je comprends, M. le ministre, la portée de votre affirmation, vous dites: S'il y a des employés qu'on doit engager pour une certaine période, allant jusqu'à deux ans — je peux vous dire que nous avons déjà accepté ce principe — vous pouvez, à ce moment, faire en sorte que la loi ne sera pas applicable pour eux, vous les excluez de l'application de la loi, est-ce cela?

M. de Belleval: De la Loi de la fonction publique, pas de la Loi sur le régime syndical.

M. Harguindeguy: De la Loi de la Fonction publique. Alors, vous les excluez. Vous décidez donc que tels groupes d'employés — parce que l'article 68 permet une catégorie d'employés, un ou plusieurs emplois d'un caractère occasionnel, dont on n'indique pas la durée — vous pouvez donc, décider, en vertu de l'article 68, que telles catégories d'emplois sont exclues de l'application de la Loi de la fonction publique.

Nous allons retourner voir les articles 118 et 119.

L'article 118 reporte dans la Loi du régime syndical les articles 69 à 75. Or, si on retrouve l'article 69, on y voit ce qui y est dit: On nous donne comme juridiction syndicale que le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec est reconnu comme représentant de tous les employés de la fonction publique, ce qui veut dire que si, dans l'article 68, vous permettez d'exclure certains groupes d'employés pour des durées plus ou moins limitées ou illimitées, automatiquement, ils ne seront pas dans notre régime syndical.

M. de Belleval: Voudriez-vous répéter, s'il vous plaît, votre dernière phrase?

M. Harguindeguy: L'article 118 prévoit que les articles 69 à 75 de la loi actuelle deviennent la loi

du régime syndical et donnent naissance, si on veut, ou reconnaissent "notre juridiction syndicale sur des groupes d'employés". Cette même loi actuelle, à l'article 69, nous dit que le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec est reconnu comme représentant de tous les employés de la fonction publique. Donc, vous m'avez dit, il y a deux minutes, que les employés exclus en vertu de l'article 68, pour des besoins bien spécifiques de durée plus ou moins limitée, ne seraient pas des employés assujettis à la Loi de la fonction publique, donc ne seraient pas dans notre régime syndical.

M. de Belleval: Un instant! On ne dit pas: Tous les employés assujettis à la Loi de la fonction publique. On dit: Tous les employés de la fonction publique. Tous les employés de la fonction publique qui sont de votre niveau de reconnaissance syndicale, cela comprend les occasionnels, n'exclut pas les occasionnels. Cela comprend tout le monde, y compris les ouvriers.

M. Harguindeguy: En tout cas, tel que le texte est là, M. le ministre, ce n'est pas ce que cela veut dire pour nous. On comprend peut-être mal.

M. de Belleval: On ne va pas commencer une bataille de juristes, mais je pense que nous avons des juristes compétents aussi.

M. Harguindeguy: Ce n'est pas la compétence des juristes qui est mise en doute, c'est le texte, tel qu'il est présenté à l'heure actuelle.

M. de Belleval: Oui, mais les juristes nous disent: Cela comprend tous les employés. De toute façon, si ce sont des choses comme celles-là qui vous font peur, nous les corrigerons. Nous mettrons: Tous les employés occasionnels, temporaires ou permanents. Cela ne me fait rien.

M. Harguindeguy: Quant à nous, il serait important que vous corrigiez quelques textes de loi, pour faire en sorte que les employés occasionnels que nous pourrions représenter, en vertu de leur classification, soient assujettis à notre régime syndical. C'est la demande que nous formulons et nous espérons que ce soit formulé dans la loi de façon bien claire, qu'il n'y ait aucune ambiguïté.

M. de Belleval: J'ai commencé par cet aspect des choses, parce que je trouvais, comme je l'ai dit, que c'était quelque chose de facile. Au fond, nous nous entendons sur les principes, nous sommes du même avis. Il s'agit maintenant de nous entendre sur une formulation précise ou de nous fier à l'interprétation que nous donneront des juristes compétents là-dessus, parce que, comme vous l'avez indiqué, ni vous ni moi ne sommes heureusement juristes.

Cet aspect des choses me paraît quand même illustrer l'approche qui devrait nous gouverner, c'est-à-dire qu'avant de mettre en cause la bonne foi du ministre ou ses intentions, on devrait au moins s'asseoir et essayer de voir si on comprend les mêmes choses de la même façon, et si des formulations nouvelles ne peuvent pas en arriver, justement, à traduire des points de vue qui peuvent être communs, au fond. Cela ne veut pas dire que nous nous entendrons sur tout, mais, au fond, il ne faudrait pas exagérer les différences.

Quoi qu'il en soit, il me paraît qu'il y a un autre aspect plus important que celui qu'on vient de soulever et qui devrait être aussi clarifié, particulièrement à la suite de ma déclaration d'hier midi. J'avais déjà indiqué à plusieurs reprises, au moment même d'ailleurs du dépôt du projet de loi 53, qu'il n'était pas dans mes intentions, ni dans les intentions du gouvernement, de modifier en quoi que ce soit les pouvoirs syndicaux en vigueur et l'aire de négociation consentie aux syndicats.

J'avais cependant admis que, sur un point en particulier, il y avait ce qui peut apparaître une exception à ce principe général selon laquelle, au nom du principe du mérite et d'une certaine uniformisation dans les interprétations, les arbitrages de certains griefs qui touchent à la règle du mérite, je souhaiterais que cela soit fait à l'avenir par la nouvelle Commission de la fonction publique. C'était ma position fondamentale qu'il ne fallait pas toucher au régime syndical, qu'il ne fallait pas toucher aux libertés syndicales et à l'aire de négociation en particulier, parce que, justement, il y avait une commission d'enquête qui siégeait là-dessus, que j'ai d'ailleurs créée en même temps que je déposais le projet de loi 53, et qui devait faire rapport sur ces points particuliers. C'était donc le statu quo qui devait être la règle pour l'instant. De façon à concrétiser cette approche, les articles 117 et 118 du projet de loi 53 créent une nouvelle loi qui s'appelle la Loi sur le régime syndical, qui elle, bien sûr, doit refléter ce statu quo et loi qui pourra être amendée, qui pourra être refondue, suite au dépôt du rapport de la commission Martin. C'est la position de principe que j'ai exposée dès le début, que je vous ai d'ailleurs exposée à certaines occasions, dans des rencontres que nous avons eues là-dessus. Je pense que cette position a d'ailleurs été comprise et acceptée comme telle pendant de nombreuses semaines suite à l'annonce de la mise sur pied de la commission Martin et suite au dépôt du projet de loi 53. Ce n'est, au fond, que depuis assez récemment que vous avez apporté des objections à cet égard.

Cependant, j'ai réexaminé la question parce que j'ai dit — et je vous ai d'ailleurs déjà dit à vous même — que j'entends conduire nos relations dans un esprit le plus rationnel possible. Et quand on me fait des remarques et qu'on me propose des solutions nouvelles qui m'apparaissent, somme toute, après réflexion, avoir du sens... Moi, je ne suis pas coulé dans le béton sur rien, je n'ai pas de position comme telle à défendre. Là-dessus, j'ai dit: Bon, d'accord, je pense qu'effectivement, malgré tout, il peut y avoir ambiguïté quant à la traduction de ces intentions. De façon à respecter intégralement le principe que j'avais déjà exposé, j'ai proposé un projet d'amendement qui fait que non seulement l'aire de négociation, les droits syndicaux en matière de négociations seront res-

pectés, mais que, aussi, en ce qui concerne la question des arbitrages, nous garderons le statu quo et le système d'arbitrage en vigueur sera maintenu. J'ai proposé un projet d'amendement, hier, à cet égard. J'ai dit que c'était un projet d'amendement et que, s'il n'était pas parfait, on pourrait toujours le revoir de façon que, quoiqu'il en soit, le projet de loi 53 traduise parfaitement les principes que j'ai mis de l'avant, à savoir que les droits syndicaux en vigueur, l'aire de négociation en vigueur doivent être maintenus. A mon avis, l'amendement que j'ai proposé hier reflète une des demandes principales de votre mémoire selon laquelle les pouvoirs de réglementation du ministre soient assujettis à la Loi sur le régime syndical. Maintenant, vous voudriez plus. Vous voudriez que la Loi sur le régime syndical elle-même prévoie que tout est négociable dans les conditions de travail. Là-dessus, je ne peux que vous renvoyer à la commission Martin puisque c'est la commission Martin qui, là-dessus, nous fera des recommandations après vous avoir entendus.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président général du syndicat.

M. Harguindeguy: Mme le Président, il y a quand même une différence entre la forme et la lettre. De nature, comme nous négocions des conventions collectives, il arrive fréquemment que le texte ne comporte pas exactement la pensée que les parties avaient à la table des négociations. Or, vous admettrez, je pense bien, qu'il est normal que, lorsque arrive un projet de loi à la rédaction duquel nous n'avons pas participé, nous ayons quand même certaines incertitudes et certaines craintes. Je n'emploierai pas le terme "peur" de mon prédécesseur, parce que je ne l'ai pas. Sauf que quand le ministre...

M. de Belleval: Je vous en félicite.

M. Harguindeguy: Je suis fait comme cela de nature. Les Basques sont faits comme cela.

Quand le ministre dit qu'il n'y a pas de modifications à l'aire des négociations, il est d'ailleurs revenu avec un amendement déposé hier soir, qui reprend textuellement, en fait, les dispositions de l'article 52a actuel. On voit quand même qu'il devait sûrement y avoir une différence fondamentale dans le projet 53 quand...

M. de Belleval: ... tantôt sur l'arbitrage à la Commission de la fonction publique.

M. Harguindeguy: Plus que cela, je ne suis pas encore rendu là. C'est que quand vous mentionnez à l'article 119a du projet de loi 53 qu'on pourrait dorénavant négocier sur la rémunération et sur les avantages sociaux, dans l'amendement que vous avez déposé hier, vous êtes revenu à l'ancien texte, le traitement et la rémunération additionnelle. Cela veut donc dire qu'il a nécessairement une signification différente, autrement vous auriez repris les mêmes termes. Mais quand vous dites aussi qu'il n'y a pas de modifications, c'est clair qu'il n'y a pas dans le projet de loi 53 de modifications de l'aire des négociations qui soient à la hausse. J'ai la forte impression — vous me le direz si j'ai tort, j'espère avoir tort — qu'il n'y en aura pas non plus. Au contraire, indirectement, dans certains textes, vous réduisez quand même notre champ de négociation actuel. Quand vous traitez à la section 3 de tout ce qui touche la mutation, l'affectation et le reclassement, ce sont des articles qui sont négociés actuellement. J'ai d'ailleurs déposé avec ce document ce matin copie des textes de conventions collectives actuelles, article 18.21. En touchant à ces matières-là par le projet de loi 53, vous modifiez donc nécessairement notre aire de négociation. Il y a aussi que même si le ministre nous dit: Tout ce qui va toucher à la négociation, cela va être la loi du régime syndical qui va le faire suite au rapport de la commission Martin, j'ai quand même des doutes que des choses vont pouvoir être négociables parce que votre mandat va vous être donné en vertu de la Loi de la fonction publique qui est le projet de loi no 53 dans lequel vous avez des dispositions bien claires et bien précises qui vous donnent un mandat bien spécifique sur certaines matières. Je suis bien d'accord — c'est d'ailleurs ce qu'on a demandé — pour suspendre les travaux de la commission pour attendre les recommandations. On vous demande de retirer purement et simplement le projet de loi 53 parce qu'on estime que, globalement, vous devriez attendre, pour l'ensemble, que la commission Martin ait soumis son rapport.

Que le ministre décide d'enlever les pouvoirs de la commission à l'heure actuelle, je suis plus ou moins concerné parce que c'est sûr que dans certains cas, avec la commission actuelle, on a aussi des problèmes. Sauf que j'estime qu'il est important qu'il y ait un organisme de contrôle dans la fonction publique parce qu'il y a bien des choses qui se font dans la fonction publique, dont déjà le gouvernement avait convenu avec nous, au moins dans la convention collective, qu'elles ne se feraient pas. Mais comme le ministre de la Fonction publique n'a aucun pouvoir pour forcer les ministères à appliquer les dispositions d'une convention collective, il s'est avéré que cela a été le fouillis le plus complet, chacun des ministères faisant ce qu'il voulait. Il n'y a personne qui contrôle pour savoir si c'est fait ou bien fait. J'ai d'ailleurs déjà soumis des dossiers assez volumineux à la commission sur des événements qui sont arrivés à la suite d'intégrations, où il y en a eu du patronage et du favoritisme. Mais comme c'était une décision du ministère et que cela dépendait du ministre de la Fonction publique du temps, il n'y a pas eu de changement de fait.

Je souhaiterais qu'on ait le temps de procéder article par article parce que cela nous permettrait de démontrer jusqu'où cela peut aller. Il y a peut-être des articles qui vous paraissent bien simples. Que vous les appliquiez aux employés non syndicables — on souhaite qu'ils soient syndicables, on demande d'étendre la syndicalisation, plusieurs vous l'ont dit d'ailleurs — d'accord, mais je suis ici pour défendre particulièrement les membres que

je représente et là-dessus, chez nous, nous avons fait l'unanimité pour dire que dans le projet de loi on perd pratiquement tout ce qu'on a. Il ne nous restera plus grand-chose à faire sinon des bébelles. Ce n'est pas mon fort de discuter parce que j'aime mieux avoir, pas un affrontement comme tel, mais, comme dans un match de lutte ou de football, quelque chose qu'on peut gagner, mais dans cela on ne gagnera pas grand-chose.

Dans tout votre texte du projet de loi, il y a des changements évidents sur notre mandat de négociations.

M. de Belleval: Où? Où?

M. Harguindeguy: Je pourrai vous les donner. Je peux tous les énumérer un par un. Vous allez voir! D'abord, juste en passant, si vous voulez qu'on les prenne article par article, cela peut être plus long, on est censé finir bientôt, mais j'imagine qu'on reviendra. Il y aurait intérêt, parce que vous y faites référence à l'article 107, quand on regarde l'article 1, parce qu'à l'article 107 vous faites allusion aux ouvriers de la fonction publique...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président général, un moment, il y a le député de Mont-Royal qui me demande la parole sur une question de règlement.

M. Ciaccia: Je ne veux pas interrompre nos invités, mais si on doit passer à un autre sujet que les occasionnels, j'aurais aimé intervenir sur cette question avant de passer à un autre sujet, si le ministre le permet.

M. Bellemare: Mme le Président, je pense que l'étude article par article vient après la deuxième lecture en Chambre, d'après nos règlements. Vous avez le droit de faire des déclarations générales comme celles que vous avez faites ce matin et je vais revenir dans mon intervention pour prouver que vous avez parfaitement raison dans bien des cas, mais l'étude article par article est réservée aux députés. Après la deuxième lecture, si le principe de la loi est adopté, nous pourrons discuter article par article. Mais ce sont les législateurs qui ont ce privilège.

M. de Belleval: Mme le Président, sur l'intervention du député de Johnson, je dois dire que les affirmations qui sont faites par le président du Syndicat des fonctionnaires sont extrêmement graves. Quand il dit à plusieurs reprises dans son mémoire qu'à toutes fins pratiques le projet de loi 53 fait que le syndicat n'aura à peu près plus rien à négocier, alors que je prétend exactement le contraire et que les amendements que j'ai déposés hier confirment exactement ce point de vue et qu'il vient lui-même d'admettre que l'article 52a est rétabli dans son intégrité, j'ai le droit de lui demander quels articles du projet de loi 53 il vise quand il dit que j'enlève des droits syndicaux. Je dis le contraire. C'est normal que je lui demande qu'il me cite les articles en question. Qu'il m'en cite au moins un.

M. Bellemare: Ce n'est pas sur cela que portait ma question de règlement.

M. de Belleval: Sinon, on laisse n'importe qui faire n'importe quelle affirmation générale et, ensuite, on ne peut pas les vérifier. Cela n'a pas de sens!

M. Bellemare: Non, non, non. Mme le Président, c'est quand...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Dans mon intervention, quand j'aurai le droit de parole, je relèverai dans leur mémoire certaines accusations, certaines affirmations qui me semblent fort graves et qui ont été répétées en maintes circonstances; j'en ai compté 29. Je me garde ce droit-là. Mais je voulais intervenir parce que j'ai vu le président général commencer à discuter article par article. Ce n'est ni la place ni l'endroit de discuter article par article. C'est ma seule intervention. Si le ministre veut faire des déclarations, essayer de se blanchir vis-à-vis de l'opinion publique, c'est son affaire.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député...

M. Bellemare: Quand j'aurai à faire mon intervention dans quelques minutes ou cet après-midi, je vais toucher à des points qui sont bien plus sensibles et qui vont prouver, comme le dit le mémoire...

Le Président (Mme Cuerrier): Vous sortez de la question de règlement maintenant, M. le député de Johnson. De toute façon, nous vous entendrons tantôt. Après ces deux questions de règlement, M. le député de Mont-Royal sur la question des occasionnels.

M. Ciaccia: Merci, Mme le Président. La question a été soulevée que les occasionnels...

M. Chevrette: Parlez plus fort, on ne vous comprend pas ici.

M. Ciaccia: Très bien, je vais parler plus fort pour vous accommoder. Allez-vous m'écouter mieux si je parle plus fort?

Une Voix: Oui, oui, oui.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: Alors, je vais parler plus fort.

M. Chevrette: Ce ne sera peut-être pas plus intelligible, mais en tout cas!

M. Bellemare: Ce sera peut-être plus compréhensible pour vous.

M. Ciaccia: Mme le Président, je crois que nos

invités ont soulevé un point important et je crois qu'ils ont raison dans leur interprétation de la question des occasionnels. Si on regarde l'article 119, il dit que "les fonctionnaires et ouvriers sont régis par les dispositions de la convention collective qui leur sont applicables ou, à défaut..." S'il n'y a pas de convention collective, il faut retourner à l'article 91 et l'article 91 donne au ministre le pouvoir de fixer, par règlement, la rémunération, las avantages sociaux et tous les articles, incluant la question du droit de syndicalisation. Si c'est l'intention du ministre de dire qu'il ne veut pas enlever le droit de syndicalisation aux occasionnels, il faudra absolument qu'il amende l'article 119. C'est vrai que nous ne sommes pas dans un débat juridique article par article, mais je pense que le principe est important. Il ne faudrait pas se cacher et dire: Nos juristes nous ont dit ceci, nos juristes nous ont dit cela. Je ne crois pas que cela soit juste pour nos invités. Si le principe est de ne pas leur enlever ce droit-là, qu'on le dise clairement. Qu'on n'oblige pas les gens à venir nous donner des interprétations sur les articles 68, 124, donner une contre-interprétation. Le seul fait qu'on soit obligé de faire cela soulève immédiatement des difficultés et cela crée beaucoup de doutes. D'après moi, il n'y aucun doute que le point qui a été soulevé est affecté clairement par les articles 119 et 91. Si ce n'est pas l'intention du ministre, qu'il dise clairement: Oui, je veux amender les articles 119 et 91, pour que ce droit ne soit pas atteint.

Le Président (Mme Cuerrier): Vous n'avez pas de question à poser au syndicat?

M. Ciaccia: Non. Je demandais au ministre si vraiment...

M. de Belleval: C'est exactement ce que je viens de dire. Je ne comprends pas...

M. Ciaccia: II prend l'engagement d'amender l'article 119-91.

M. de Belleval: Vous êtes en retard d'au moins une heure dans le débat, M. le député.

M. Ciaccia: Nous voulons confirmer que vous prenez cet engagement. Je ne l'ai pas entendu. Peut-être que vous ne parliez pas assez fort, à ce moment.

M. Chevrette: C'est parce que vous n'aviez pas compris. C'est différent.

M. de Belleval: Si vous voulez, Mme le Président, nous allons revenir à la question, quand même, qui est fondamentale. Vous en conviendrez, M. Harguindeguy. Je pense qu'il faut éclairer les gens le mieux possible là-dessus. Je pense l'avoir fait hier, par mes amendements, entre autres. J'ai dit que s'il fallait les clarifier encore davantage, on le ferait. Mais, à mon avis, je pense que, de votre côté aussi, vous devez faire un bout de chemin et admettre qu'il n'est pas question, dans le projet de loi 53, de toucher en quoi que ce soit aux droits syndicaux en vigueur.

M. Harguindeguy: M. le ministre, je ne peux dire que vous avez raison, parce que cela touche effectivement les droits syndicaux que nous avons à l'heure actuelle. C'est quand même un projet de loi. Si nous regardons notre juridiction syndicale, même en vertu des articles 117, 118 ou 119 qui nous permettent, même avec votre amendement, de renégocier sur certaines matières, même si vous avez transposé l'article 52a actuel en le modifiant pour tenir compte des concordances, il n'en demeure pas moins qu'à l'article 3 vous avez un droit de réglementer certaines conditions.

Vous ne pouvez pas étendre ces droits. Il n'y a pas d'indication non plus que vous avez l'intention de le faire.

M. de Belleval: Puis-je vous interrompre sur cela? L'article 52a me permet de concourir, par règlement approuvé, à la négociation des pouvoirs de l'article 3, de la même façon que c'était possible dans le passé, avec la commission, sauf qu'il y a un avantage supplémentaire, c'est que, maintenant, vous ne parlez plus à une commission indépendante qui ne veut pas vous voir ou qui ne peut pas vous voir, mais vous parlez au ministre de la Fonction publique qui est directement chargé, d'ailleurs, de vous parler et de négocier avec vous.

Vous me dites: Vous ne me donnez pas d'indication que c'est ce que vous allez faire. Sur cela je vous dis qu'en ce qui concerne l'aire des négociations, je reprends votre logique à vous. Vous m'avez dit, depuis deux ou trois semaines: Ne modifiez pas l'aire des négociations tant que la commission Martin n'aura pas soumis son rapport. C'est ce que je fais. J'avais un peu tendance, je l'ai admis, à modifier l'aire des négociations dans un sens contraire à vos vues, mais je reviens au statu quo absolu et je vous dis, dans ce cas: Moi aussi, je vous renvoie à la commission Martin, selon votre logique à vous-même, que j'admets, d'ailleurs, qui était la mienne. Je ne vous donne pas d'indication que j'ouvrirai, mais je ne vous donne pas d'indication que je n'ouvrirai pas non plus.

M. Harguindeguy: Sauf qu'à l'intérieur, vous enlevez quand même des droits.

M. de Belleval: Lesquels?

M. Harguindeguy: Quand j'ai parlé tout à l'heure de passer article par article, c'était dans ce sens-là, pour vous indiquer quels sont les changements que vous faites sur notre régime actuel, qui paraissent peut-être insignifiants à la lecture, qui ne paraissent pas avoir cette portée, mais il y a quand même des choses actuelles que nous avons dans notre convention collective.

M. de Belleval: Comme quoi, par exemple?

M. Harguindeguy: Vous semblez soumettre un projet pour garder l'article 91. On comprend mal

l'article 91, par rapport à l'article 3, d'abord, au point de départ, parce que si l'article 3 n'est pas applicable aux employés syndicables, l'article 91 du projet de loi n'a pas sa raison d'être.

M. de Belleval: Pardon. Comme vous le savez, l'article 91 parle des employés non syndicables, mais il parle aussi des employés syndicables, sur des questions pour lesquelles la convention collective serait muette. L'effet de l'amendement que j'ai apporté hier c'est d'assujettir tous les pouvoirs de réglementation du ministre aux dispositions du régime syndical. Autrement dit, je ne puis, en vertu de mes pouvoirs de réglementation, aller contre une disposition de la convention collective.

M. Harguindeguy: Malgré tout, est-ce qu'il faut quand même vous énumérer certaines modifications? L'article 28, dans le projet de loi, tel quel, l'article 119, que vous avez soumis hier, ne modifie quand même pas la portée de l'article 28 non plus.

M. de Belleval: Qu'est-ce que c'est l'article 28? Qu'est-ce qui se passe à l'article 28?

M. Harguindeguy: Les droits de la commission de statuer sur des recours, vous gardez quand même cela.

M. de Belleval: Je le garde pour les non-syndiqués, comme actuellement.

M. Harguindeguy: Ce n'est pas marqué. Je voudrais bien le lire.

M. de Belleval: Ce qui est marqué, c'est que l'article 90 dit que tous les pouvoirs du ministre sont assujettis au régime syndical. Or, le régime syndical dit, en vertu de l'article 52a, que les griefs, y compris sur la rétrogradation, etc., sont matière à négociation. Si c'est matière à négociation...

M. Harguindeguy: Matière à négociation, mais si vous avez une loi qui détermine déjà certaines choses, vous ne pourrez pas défoncer la loi dans vos négociations.

M. de Belleval: Sauf que l'amendement que j'ai apporté à l'article 90 dit très bien que tous les pouvoirs que me donnent la loi sont assujettis au régime syndical. Autrement dit, si, en vertu de la négociation, vous ne concourez pas à ce qu'à l'avenir les arbitres de griefs dans ces domaines, e, f et g, ce soit la Commission de la fonction publique, c'est la convention collective en vigueur qui s'applique, ou la prochaine convention collective que vous allez négocier qui va s'appliquer.

M. Harguindeguy: Mais si je regarde l'article "rétrogradation"...

M. de Belleval: Même chose.

M. Harguindeguy: Trouvez-moi, à 117 même dans votre projet, ce qui dit que, sur la rétrogradation, on a un droit de négocier là-dessus, même si on le fait dans la convention collective actuelle, par rapport à l'article 28 que vous conservez là, et par rapport à l'article 120, je crois qui dit que les dispositions de l'article 28 entrent en vigueur à la date de l'échéance de la convention collective.

M. de Belleval: En vertu du régime syndical, vous avez négocié la rétrogradation. Je ne peux plus, en vertu de l'article 3, passer un règlement qui irait contre les dispositions que vous avez négociées en vertu de la convention collective.

M. Harguindeguy: M. le ministre, on sera sûrement loin l'un de l'autre tout à l'heure; on semblait être près, d'après vous, mais je pense qu'on est loin, dans notre interprétation ou peut-être dans la connaissance de la loi actuelle, de notre convention collective. Actuellement, nous avons négocié une clause de rétrogradation. C'était une juridiction qui appartenait à la Commission de la fonction publique, qui n'était pas implicite dans la loi. Cela n'appartenait pas à la Loi de la fonction publique. Elle n'était pas prévue à l'intérieur de la loi.

M. de Belleval: Donc ce n'est pas restreint.

M. Harguindeguy: Non. Nous avions d'ailleurs prévu un mécanisme où, justement, la commission devait aussi statuer sur cette question de rétrogradation. Dans la loi, aujourd'hui, il y a l'article 28 où vous instaurez un recours en vertu de l'article 28 dans les cas de rétrogradation et vous indiquez dans la loi où cela doit aller. Vous ne dites pas que la commission, même dans sa réglementation, dans sa procédure d'appel, va négocier cette possibilité que nous avons à l'heure actuelle. Trouvez-moi où c'est écrit là-dedans que la commission comme telle va pouvoir le faire. Vous nous avez dit tout à l'heure: On ne parlera qu'au ministre. Je suis bien d'accord...

M. de Belleval: M. Harguindeguy, la réponse que je dois vous donner là-dessus, c'est que seules les choses qui sont restreintes explicitement par la loi continuent à être exclues de l'aire des négociations. C'est le statu quo de ce côté. Toutes les choses qui ne sont pas exclues de l'aire des négociations sont négociables et toutes les dispositions qui sont effectivement négociées prévalent en vertu de l'amendement apporté à l'article 90 sur les pouvoirs réglementaires du ministre. Je vais vous dire autre chose là-dessus, conformément au principe que j'ai exprimé tantôt si ce n'est pas encore assez clair, on le clarifiera encore plus, si vous voulez, mais c'est cela la décision du gouvernement là-dessus. Cela ne peut pas être plus clair que cela!

M. Harguindeguy: Ecoutez, dans les déclarations verbales...

M. de Belleval: Nos juristes nous disent que, compte tenu de la façon que c'est rédigé, c'est correct, c'est conforme à ce que je dis. Vous avez un juriste, il étudiera cela lui aussi, on se reverra, on a une commission parlementaire, et il n'est pas question d'aller plus vite qu'il ne le faut avec l'adoption du projet de loi. J'ai déjà promis, au tout début de cette commission, que le projet de loi 53 ne serait pas adopté avant le rapport de la commission Martin. Alors, nous avons bien du temps devant nous...

M. Harguindeguy: D'accord, M. le ministre.

M. de Belleval: ... pour raffiner tous les derniers détails, si vous voulez. L'important, il me semble, c'est qu'on se comprenne sur les principes de fond.

M. Harguindeguy: Vous me posiez bien...

M. Bellemare: Vous êtes en train de faire une déclaration qui est absolument fausse et disproportionnée à ce que j'ai déjà dit à cette commission. On a insisté avec acharnement pour faire adopter ma motion qui voulait que le ministre dise véritablement que cette loi ne serait pas adoptée en catimini, avant le rapport de la commission Martin, et le ministre a fait l'impossible pour que la motion ne soit pas adoptée. Aujourd'hui, il fait une déclaration, parce qu'il a le feu au derrière, il fait une déclaration, mon cher monsieur, pour se protéger, pour dire: Non, non, je ne l'accepterai pas avant le rapport Martin. Que va-t-on croire? La déclaration d'il y a deux jours ou celle d'aujourd'hui?

M. de Belleval: Mme le Président, j'ai été personnellement mis en cause...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson.

M. Ciaccia: Votons sur la motion, il accepte donc la motion.

M. de Belleval: ... par le député de Johnson, qui vient tout simplement, dans un drôle de vocabulaire, de m'accuser d'être un menteur. S'il veut relire la déclaration que j'ai faite au tout début de la commission parlementaire, il verra que c'est exactement l'intention que j'ai exprimée dès cet instant, et c'est d'ailleurs confirmé par le rapport des discussions qui ont eu lieu entre les syndicats et la commission Martin.

M. Bellemare: Pourquoi n'avez-vous pas voulu accepter ma motion?

M. de Belleval: La seule différence, c'est que non seulement je l'ai dit à la commission Martin, mais je l'ai aussi dit publiquement au début de cette commission.

M. Bellemare: Pourquoi n'avez-vous pas voulu accepter ma motion?

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia : Etes-vous prêt à voter en faveur de la motion?

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre!

M. Chevrette: C'est M. Garneau, hier, qui a demandé de ne pas voter, M. Ciaccia. Ayez au moins la décence de vous entendre dans votre propre parti avant de commencer à charrier.

M. Ciaccia: II n'y avait pas d'engagement de la part du ministre.

M. Chevrette: Un instant!

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre! A l'ordre!

M. Bellemare: A l'ordre! A l'ordre!

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, je vous en prie, messieurs! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: Question de règlement.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs!

M. Bellemare: Ah! Vous avez les pieds dans le béton!

M. Ciaccia: II ne voulait pas le vote parce qu'il n'avait pas l'engagement du ministre.

M. Pagé: II n'y avait aucun engagement du ministre.

M. Chevrette: Tu n'étais même pas là! M. de Belleval: Vous n'étiez même pas là!

Le Président (Mme Cuerrier): Messieurs, à l'ordre!

M. Chevrette: M. Pagé, ayez la décence de lire les journaux!

Une Voix: On se parle.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Joliette-Montcalm, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Chevrette: J'en appelle au règlement.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous plaît! Je veux simplement clarifier la situation. M. le député de Mont-Royal, vous n'étiez pas présent à la commission hier, alors que nous avons...

M. Chevrette: Bon!

M. Ciaccia: Excusez-moi, question de règlement. Le député de Mont-Royal était présent.

Le Président (Mme Cuerrier): Voulez-vous me permettre de terminer, M. le député de Mont-Royal, s'il vous plaît?

Une Voix: II était présent, c'est M. Pagé qui n'y était pas.

Le Président (Mme Cuerrier): Au moment de la demande du vote, si je me rappelle bien, vous n'étiez pas présent.

La motion a été en discussion hier, à laquelle la réplique a été faite. Il a été proposé de voter sur cette motion. L'ensemble de la commission s'est entendu pour reporter le vote après la présentation des différents mémoires; tout le monde était d'accord, à ce moment-là.

M. Chevrette: Y compris le député de Johnson.

M. de Belleval: Mme le Président, je comprends très bien que le député de Johnson essaie de se refaire une virginité prosyndicale, lui qui est un des plus anciens...

M. Bellemare: Mme le Président, je n'ai pas besoin d'exemple de vertu de la part d'un ministre fourbe. Je n'ai pas besoin de cela.

Une Voix: C'est antiparlementaire. Le Président (Mme Cuerrier): M. le député... M. Bellemare: J'ai simplement déclaré... M. Jolivet: C'est antiparlementaire.

M. Bellemare: ... Mme le Président, que, quand j'ai présenté une motion, vous l'avez déclarée inacceptable. Je tiens à vous dire, Mme le Président...

M. Chevrette: Madame...

M. Bellemare: ... qu'aujourd'hui le ministre essaie de revenir sur des antécédents...

M. Chevrette: Mme le Président!

M. Bellemare: ... et il essaie de me faire passer...

M. Chevrette: Je fais appel au règlement.

M. Bellemare: ... personnellement... Il y a une limite! Je n'endurerai pas cela.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson!

M. Bellemare: Pas de lui, surtout! Je ne suis pas un fonctionnaire, je suis un gars élu et je suis son égal.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, je vous demanderais à vous, comme au ministre, de respecter la procédure de cette commission.

M. Bellemare: Dites-le au ministre, pas à moi! C'est lui qui met le trouble partout! C'est lui qui présente la loi, en plus de cela!

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, vous êtes sans doute un peu bousculé. Je rappelle maintenant aux deux intervenants précédents que cette commission en est une d'échanges et d'écoute. Je demanderais à chacun de conserver un peu plus de calme dans ses propos.

M. le député de Joliette-Montcalm, sur une question de règlement.

M. Chevrette: Mme le Président, étant donné qu'il y a ici beaucoup d'auditeurs, je veux donner une information. Cela a été jugé irrecevable parce qu'on ne pouvait pas se substituer à l'Assemblée nationale. Vous avez même permis au député de Jean-Talon d'émettre un voeu. Le voeu a été émis, discuté et le vote a été, de consentement unanime, reporté à la fin. Quant à rapporter les faits, ne faisons pas les bouffons devant les gens, essayons de dire la vérité!

M. Bellemare: II n'y a pas de bouffon, par exemple...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député, ceci est superflu.

M. Bellemare: ... pour quelqu'un qui aspire à devenir ministre.

Le Président (Mme Cuerrier): Votre question de règlement a été entendue. M. le député de Johnson!

M. Chevrette: Je vais peut-être l'être avant de mourir!

M. Bellemare: Oui, et je ne regrette pas d'avoir été ministre... Arrêtez-les, ces gens-là. On me provoque continuellement et on me lance des flèches et vous voulez que j'aie la peau assez dure pour endurer tout cela? Jamais dans cent ans!

Le Président (Mme Cuerrier): Bon! Un moment, s'il vous plaît! M. le député de Johnson, à l'ordre! A l'ordre! M. le député de Joliette-Montcalm!

M. Bellemare: On ne peut pas continuer comme cela.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre! Je vais tenter de vous dire très calmement, aux uns et aux autres — puisque les observateurs n'étaient pas ici et pour votre information — que M. le député de Johnson avait apporté une motion demandant que la commission Martin dépose son

rapport avant que l'Assemblée nationale n'adopte ce projet de loi en deuxième lecture, ce qui a été jugé irrecevable parce qu'une commission ne peut pas diriger les travaux de l'Assemblée.

Cette motion a été reprise par M. le député de Jean-Talon, en émettant un voeu et c'est à ce moment que cette motion a été jugée recevable et c'est de cette motion que nous parlons quand nous disons que le vote sera reporté. Ceci dit, je considère que le débat sur cette question est terminé.

M. Bellemare: Cela va être bon cet après-midi, en tout cas... Je vous en réserve tout une.

Le Président (Mme Cuerrier): Les intervenants ont-ils terminé? Je ne vois personne qui me demande la parole maintenant.

Des Voix: Non, non.

M. de Belleval: C'est M. Harguindeguy qui avait la parole.

Le Président (Mme Cuerrier): M. Harguindeguy. Je remercie M. le ministre qui me dit que c'est M. le président général qui avait la parole avant cette intervention. M. le Président.

M. Harguindeguy: Une chance, ce n'est pas le seul qui est calme ici ce matin.

M. Bellemare: Vous pouvez peut-être m'attaquer comme on m'attaque.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, une petite remarque en passant, c'est M. Harguindeguy qui a la parole maintenant.

M. Harguindeguy: C'est que, Mme le Président, on est d'accord pour venir expliquer, en fait, notre point de vue, je pense qu'on est venu ici pour permettre à la commission de pouvoir se former une idée. Cependant, il y a quelque chose qui est fondamental pour nous, c'est le droit de pouvoir négocier. Si on se compare avec les autres travailleurs du secteur parapublic, indépendamment des gouvernements précédents, c'est sûr que la bataille qu'on fait à l'heure actuelle, on l'a déjà faite avec d'autres, ce n'est pas nouveau. On n'a pas réussi. Je pense que la plupart d'entre nous pensaient qu'avec le gouvernement actuel, on réussirait. Cela semble être aussi difficile.

C'est que, si on compare les employés du secteur hospitalier, dans la loi, on leur permet de négocier, aucun de ces mécanismes-là n'est prévu dans la loi. Si on regarde les enseignants, et je pense qu'au gouvernement actuel, il y en a plusieurs déjà qui ont aussi négocié pour les enseignants, il n'y a pas non plus de dispositions de ce genre. On permet la négociation, cela devient uns question de discussion, une question de priorité, une question de choix à la table des négociations; alors que, pour nous, dans bien des cas, les règles du jeu sont déjà fixées par une loi. Quand on arrivera pour négocier, même si on veut négocier de bonne foi, il n'en demeure pas moins qu'on va nous mettre à la face même la loi; 60, 58, 72, ne permettent pas cela, mutation, affectation d'un poste à un autre, la loi prévoit que c'est le sous-ministre; il n'y a pas de délégation de pouvoir pour cela, c'est le sous-chef qui l'a dans la loi. Ce sont des articles qui, actuellement, sont négociables.

Pourquoi le gouvernement tient-il encore à garder, pour ses fonctionnaires et ouvriers, un régime particulier, non pas privilégié, au contraire? Le gouvernement actuel suit le même raisonnement que le gouvernement précédent. Toutes les matières qui sont de la technique, de la cuisine, je dirais, pour les relations de travail, le gouvernement les met également dans une loi. C'est ce qu'on trouve aberrant, ce qui ne devrait pas être pour les employés syndiqués.

Que le ministre ait le pouvoir de la gestion de la fonction publique, on en est, on demande des pouvoirs. Qu'il légifère, qu'il réglemente les conditions de travail des employés non syndicables, cela, c'est son droit, mais, pour nous en tant que syndiqués, je pense qu'on se doit d'avoir les mêmes droits que tous les autres travailleurs du Québec, ce que nous n'avons pas à l'heure actuelle et ce que le projet de loi ne semble pas vouloir nous donner. Même si on attend après la commission Martin, je pense qu'en toute logique, il faudra attendre d'avoir l'ensemble, parce que, nécessairement, aujourd'hui, on est obligé d'empiéter sur ce qui va être l'aire des négociations.

On ne sait pas ce que la commission Martin va soumettre. On s'est présenté devant elle mardi de cette semaine. On a exposé notre point de vue là-dessus. J'espère que le gouvernement fera pareil, qu'il ira exposer son point de vue pour qu'on sache déjà là, publiquement, ce que le gouvernement veut faire. J'espère aussi qu'on pourra avoir, nous, en tant que partie, copie du rapport de cette commission, parce qu'actuellement, ce n'est pas possible. J'ai demandé à la commission, la seule personne à qui elle fait rapport, c'est le ministre.

J'espère que ce rapport sera au moins rendu public, mais c'est ce qui est dans la loi actuelle. J'ose espérer, en tout cas... On a peut-être bien des choses à vous dire. J'espère, étant donné qu'il est 13 heures et que vous suspendez les travaux bientôt, qu'on pourra revenir à la fin de l'après-midi pour vous expliquer chacun des articles et particulièrement l'article 70 du mérite. On est totalement d'accord sur la question du mérite, cela fait longtemps qu'on se bat pour cela. On a même des dispositions dans la convention collective qui le prévoient; cependant, elles ne sont pas appliquées et le projet de loi ne prévoit pas plus d'application ni de contrôle possible pour cela.

C'est toute cette philosophie que nous contestons actuellement, le fait que le gouvernement n'accepte pas que les syndicats de la fonction publique puissent négocier leurs conditions de travail comme tous les autres travailleurs du Québec.

M. Bellemare: Je vous ferai remarquer qu'il est 13 heures, Mme le Président, et je vous demande le droit de parole.

M. de Belleval: II n'est pas encore 13 heures. Vous pouvez me laisser au moins une seconde pour répondre à M. Harguindeguy.

M. Bellemare: Non, monsieur, le règlement veut que ce soit terminé à une heure.

M. de Belleval: Oui, mais vous dites souvent aussi que l'esprit vivifie.

M. Bellemare: Oui, oui, mais pas pour vous parce que vous n'en avez pas.

M. de Belleval: C'est de votre esprit qu'il est question.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Johnson, à moins qu'il y ait consentement unanime de la commission, nous ne pouvons pas continuer après treize heures. Cette commission ajourne ses travaux sine die, nous sommes régis par l'Assemblée nationale pour la prochaine convocation. Maintenant, il est bien entendu que, demain, il ne pourra pas y avoir de commission non plus, à cause du débat spécial qui sera tenu à l'Assemblée nationale sur la relance économique et les oppositions ont demandé qu'il n'y ait pas de commission en même temps; alors, demain, il n'y aura pas de commission non plus. D'ailleurs, cette demande des oppositions a été acceptée par le leader du gouvernement et le ministre de la Fonction publique; donc, ajournement sine die.

M. Harguindeguy: Est-ce que je peux, Mme le Président, avant de partir...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le Président général, c'est terminé et c'est déjà ajourné, mais vous pouvez quand même faire un commentaire.

M. de Belleval: Si M. Bellemare vous en donne le droit, mais je ne sais pas s'il va vous le donner.

M. Bellemare: Ce n'est pas cela, c'est parce qu'on a des feuilles où c'est écrit qu'on va siéger à 16 heures.

Le Président (Mme Cuerrier): Je n'ai plus juridiction, sauf que vous pouvez quand même faire un commentaire.

M. Harguindeguy: Advenant le cas où l'Assemblée nationale, cet après-midi, ajournerait ses travaux, il me semble qu'il était prévu que la commission siégerait ce soir vers 16 heures. Je tiens à vous dire que si vous désirez le faire, parce qu'il y a plusieurs personnes ici qui sont intéressées drôlement au débat, nous sommes disponibles, si vous le voulez, pour revenir à 16 heures. Nous serons au syndicat, vous n'aurez qu'à nous appeler et nous sommes disponibles pour revenir jusqu'à 23 heures s'il le faut. En tout cas, il nous avait été indiqué que c'était possible que l'on siège de 14 heures à 18 heures et de 20 heures à 23 heures. A défaut, nous allons bien entendu nous soumettre, vous êtes les grands patrons dans tous les domaines. On reviendra à votre convenance, mais on souhaiterait être convoqué assez à l'avance parce que nos gens ont l'intention d'assister à ce débat fort intéressant.

M. Pagé: On est d'accord pour siéger à 14 heures cet après-midi, mais est-ce qu'on peut prévoir qu'on va siéger à 16 heures cet après-midi?

Le Président (Mme Cuerrier): On ne peut pas prévoir actuellement qu'on siégera à 16 heures cet après-midi. De toute façon, vous savez fort bien, M. le député de Portneuf, que c'est l'Assemblée nationale qui décide...

M. Pagé: Vous pouvez quand même le prévoir!

M. Bellemare: C'est l'Assemblée nationale qui fait des programmes comme ceux-là, c'est elle qui nous dit qu'on siège.

(Fin de la séance à 13 h 3)

Document(s) related to the sitting