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Version finale

31st Legislature, 2nd Session
(March 8, 1977 au December 22, 1977)

Tuesday, November 22, 1977 - Vol. 19 N° 253

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 53 — Loi sur la fonction publique


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 53 Loi sur la fonction publique

(Vingt heures neuf minutes)

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, messieurs!

C'est une nouvelle séance de la commission de la fonction publique dont les membres sont: M. Bellemare (Johnson) remplacé par M. Cordeau (Saint-Hyacinthe); M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Caron (Verdun), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. de Belleval (Charlesbourg), M. Dussault (Châteauguay), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Gravel (Limoilou), M. Grégoire (Frontenac), M. Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Le Moignan (Gaspé), M. Marchand (Laurier), M. Marcoux (Rimouski), Mme Ouellette (Hull), M. Picotte (Maskinongé) remplacé par M. Pagé (Portneuf); M. Vaillancourt (Orford).

Cette commission entendra ce soir le mémoire du Syndicat des agents de la paix de la fonction publique dont M. Laurent Caplette est le président provincial. C'est lui qui est le porte-parole du syndicat.

M. Chevrette: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: ... j'ignore comment vous entendez procéder ce soir, car le mémoire du Syndicat des agents de la paix est très volumineux. Je ne sais pas s'ils ont l'intention de tout le lire. On a deux heures à notre disposition pour poser des questions. Je ne sais pas, je serais prêt à faire une suggestion. C'est qu'ils nous résument les points forts de leur mémoire pour qu'on puisse questionner sur les points principaux.

M. Pagé: Mme le Président...

M. Chevrette: Ignorant d'avance la façon dont ils veulent fonctionner, vous avez peut-être une réponse à cela.

M. Pagé: ... on pourrait demander l'avis...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf.

M. Pagé:... de nos représentants. Nous avons quand même deux heures.

M. Chevrette: C'est cela, deux heures.

M. Pagé: Peut-être qu'ils peuvent procéder à la lecture intégrale de leur mémoire dans 25 minutes ou une demi-heure, ce qui nous laissera quand même une heure, une heure trente d'échanges et de discussion.

Le Président (Mme Cuerrier): Oui, monsieur? Vous êtes M. Laurent Caplette, j'imagine? Monsieur...

M. Caplette (Laurent): Nous préférerions lire le mémoire d'une façon intégrale.

Le Président (Mme Cuerrier): Vous préférez lire le mémoire?

M. Caplette: Oui.

Le Président (Mme Cuerrier): Si nous avons des intervenants, M. Caplette, pourrais-je vous demander de les identifier pour qu'on puisse les identifier aussi au journal des Débats?

M. Caplette: D'accord.

Le Président (Mme Cuerrier): D'accord. M. Caplette.

Syndicat des agents de la paix de la fonction publique

M. Caplette: Mme le Président, je suis accompagné de quelques membres du conseil d'administration du syndicat des agents de la paix. Nous sommes heureux d'être ici ce soir, d'autant plus qu'on a remis notre audition à trois reprises.

Pour faire suite au dépôt du projet de loi 53 et à l'avis public donné dans la Gazette officielle du 17 août 1977 invitant les personnes ou les groupes intéressés à faire leur représentation sur ce projet de loi, le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique qui regroupe au-delà de 2500 membres répartis comme suit: 440 agents de conservation de la faune: 67 agents de pêcheries: 76 constables de l'Assemblée nationale: 50 constables de la Cour de bien-être social; 380 constables des Travaux publics et Approvisionnement: 85 inspecteurs des autoroutes; 137 inspecteurs des Transports et 1483 surveillants, instructeurs et préposés aux soins infirmiers en établissement de détention, a décidé de déposer à la commission parlementaire de la fonction publique le présent rapport.

Les premières pages de ce mémoire représentent un aperçu général de notre position sur le bill 53. Suivra en deuxième partie une étude plus détaillée des articles qui, à nos yeux, nous semblent inacceptables et pour lesquels le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique souhaiterait obtenir tantôt des précisions, tantôt des modifications et de meilleures garanties.

Nous faisons aussi référence, à quelques endroits, à une étude menée par la firme de psychologues industriels conseils Pierre DuBois et Asso-

ciés; étude qui fut menée dans le courant de l'année 1976, dont le rapport fut déposé à nos bureaux au mois de novembre 1976 et dont le ministre de la Fonction publique ainsi que tous les ministères concernés par les membres que nous représentons ont obtenu copie lors d'une rencontre organisée le 17 décembre 1976. Précisons que cette étude fut faite auprès de 2500 membres de notre syndicat et portait sur le sujet suivant: "Etude du stress inhérent à la fonction d'agent de la paix".

Quant au projet de loi en lui-même, nous sommes d'avis que le gouvernement du Québec semble avoir privilégié une approche qui ne tient compte ni de l'existence et du rôle des syndicats dans la société québécoise, ni de l'apport qu'ils ont été et qu'ils continuent d'être à cette même société.

Cette approche, antisyndicale à nos yeux en ce qu'elle ne reconnaît pas le rôle principalement dévolu aux syndicats dans la fonction publique, est différente de celle que, par ailleurs, le gouvernement a choisi de se donner en d'autres secteurs (référence au bill 55).

C'est en effet en choisissant...

M. Chevrette: Pour les fins du journal des Débats.

M. Caplette: 45, excusez-moi, je me souviens de l'ancienne loi de la Fonction publique. C'est en effet en choisissant délibérément de restreindre le champ de négociation des syndicats et plus précisément en retirant, par exemple, les droits de griefs et d'arbitrage (sur la révocation, la destitution, les mesures disciplinaires), en instituant des mécanismes d'appel différents de ceux déjà prévus (notamment en matière de classement, de promotion) que le gouvernement du Québec a la prétention d'assainir la fonction publique. Nous pensons, quant à nous, qu'il a frappé à la mauvaise porte.

Une majeure partie du projet de loi 53 nous confirme que l'Etat-employeur a pris la ferme décision à la fois de réduire le pouvoir de négociation et de représentation des syndicats, en même temps qu'il prétend, d'autre part (d'une manière plutôt paternellement bienveillante en instituant de nouveaux mécanismes) qu'il pourra mieux sauvegarder les droits de ses employés.

Il nous semble cependant qu'il eût mieux valu faire l'exercice de pensée et la démonstration évidente, avant de changer quoi que ce soit dans les règles du jeu, que le libre exercice du syndicalisme dans la fonction publique fut à ce point nocif que son bon fonctionnement en était empêché, puisque au-delà des déclarations de principe qui veulent que le gouvernement vise, par ce projet, à assainir la fonction publique, il n'en demeure pas moins que sa conséquence première est de remettre en question l'existence même du syndicalisme.

Or, nous avions, sur ce point, la prétention contraire. Non seulement le syndicalisme n'a pas nui à la fonction publique, mais il lui fut d'un apport considérable, au point que nous en étions ve- nus à croire qu'il était enfin arrivé le temps où nous pourrions nous préparer à assumer un plus grand rôle.

Nous pensions que le gouvernement du Parti québécois, convaincu qu'il était aux valeurs de la démocratisation, serait prêt à tenir le pari d'étendre le champ de la convention collective en rendant possible la négociation de plusieurs secteurs qui étaient de la responsabilité de l'ancienne Commission de la fonction publique (nous citons la classification comme exemple).

Nous étions plusieurs à penser que le gouvernement du Québec était mûr pour explorer des avenues originales plus appropriées, plus scientifiquement et plus humainement défendables que ne le sont celles qu'il a choisies par l'introduction, entre autres points, de nouvelles notions comme celles de la rétrogradation, de la révocation ou de la destitution pour insuffisance professionnelle et incapacité d'agir, pour ne citer que celles-là.

Cette philosophie ne tient compte ni des besoins, ni des problèmes des employés et, de plus, ne correspond pas à une approche qui soit socialement acceptable. Nous croyons que ces cataplasmes (entre autres la rétrogradation) qui ne vont ni aux origines, ni aux causes du mal sont voués à l'échec et, de ce fait, ne constituent pas des solutions. Encore là, nous étions prêts à faire, conjointement avec les responsables du gouvernement et de la fonction publique, cet effort de réflexion pour trouver, sonder et expérimenter quelques voies particulières.

C'est d'ailleurs sur la règle du mérite que le ministre de la Fonction publique a fait preuve de sa plus grande intransigeance, de son "intraitabi-lité" la plus extrême. Le Soleil du 20 juin 1977 rapportait les propos du ministre en ces termes: "II y a, en tout cas, un point sur lequel M. de Bel-leval n'a pas envie de lésiner: la règle du mérite sera appliquée et sans détour. S'il est prêt à discuter avec les syndicats de ses modalités d'application, le principe, lui, n'est pas négociable".

Serions-nous revenus au temps où la "reine ne négociait pas avec ses sujets"? Nous ne sommes pas en possession tranquille de la vérité et nous présumons qu'il en est de même pour tous. Nous pensons que substituer à l'arbitraire de la commission l'arbitraire de la règle du mérite n'est pas et ne correspond pas au dessein du ministre de la Fonction publique de doter cet organisme d'un cadre de travail plus sain et va à l'encontre des objectifs des syndicats de procurer aux employés de la fonction publique un environnement de travail où les chances de promotion et de sélection seront plus égales et plus justes pour tous.

A la fin, nous énoncerons nos principales recommandations.

A l'article 3, Pouvoirs du ministre. a) Pouvoir de réglementation concernant: i) Classification. L'article 17.02 de notre convention collective conférait le droit au Syndicat des agents de la paix de la fonction publique de faire les représentations nécessaires sur toute éventuelle modification apportée à la classification en vigueur.

Avec les nouveaux pouvoirs qui sont dévolus au ministre en ce domaine, le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique n'a aucune garantie de pouvoir faire valoir ses positions.

L'article 17.06 garantissait au SAPFP la formation d'un comité conjoint chargé de faire l'évaluation de la classification et de faire les recommandations qui s'imposent. D'ailleurs, à ce chapitre, le SAPFP avait obtenu le 22 juin 1977 la formation d'un "comité consultatif permanent de la classification des agents de la paix pour toute modification apportée ou désirée par l'une des parties formant ce comité consultatif". Ces dispositions seront-elles désormais conciliables avec la réglementation?

C'est donc dire que rien en principe ne garantit aux syndicats la possibilité de négocier toute modification à la classification et rien ne nous permet de croire que les modifications qui pourraient être apportées à la classification par les règlements du ministre répondent à un besoin du milieu ou réfléchissent les préoccupations de ce milieu. ii) Conditions de rémunération et de travail.

Parce que nous n'avons pas plus de précisions sur ce chapitre, il est difficile de connaître les vues du gouvernement. Serait-ce un premier jalon de posé dans la fonction publique afin d'instaurer éventuellement le salaire au mérite tel que peuvent nous le laisser croire les tentatives qui sont actuellement faites auprès de la Fédération des principaux du Québec? Cet article aurait intérêt à mieux cerner les intentions du ministre. iii) Evaluation. Encore là, l'article 20.06 de notre contrat de travail permettait une consultation des parties sur les méthodes de notation. Cette consultation s'effectuera-t-elle? Le ministre usera-t-il de son pouvoir de réglementation pour fixer les conditions de l'évaluation du personnel à la fonction publique? iv à xi) Promotion, affectation, classement, reclassement, mutation, mise en disponibilité, rétrogradation, révocation ou destitution pour insuffisance professionnelle, sanctions disciplinaires.

Ici, en s'abstenant de faire une évaluation critique et suivie des dangers que comportent tous et chacun des points soulevés aux alinéas iv à xi de l'article 3a, il n'en reste pas moins que, globalement, les syndicats n'ont pas l'assurance d'être consultés sur tout projet de réglementation touchant tous ces points particuliers.

Les notions (promotion, affectation, destitution pour insuffisance professionnelle, etc.) ne sont pas clairement définies et recouvrent de nombreux articles de notre convention collective.

Il devient donc évident que tous ces articles par lesquels le ministre de la Fonction publique voudrait réglementer devraient être assortis au minimum d'une obligation faite à ce dernier non seulement de consulter les parties concernées sur les sujets visés, mais d'en négocier la forme et le fond.

D'ailleurs, le Code du travail n'impose aucune restriction au champ de négociation des employés du secteur privé et il faudrait donc connaître les motivations profondes du ministre de dissocier travailleurs du secteur privé et parapublic du secteur public.

Des commentaires plus précis apparaîtront un peu plus loin sur la plupart de ces points. b) Autres pouvoirs. Pourquoi encore ici le ministre tient-il tant à conserver le pouvoir de réglementation sur des sujets qui ne sont pas de la compétence ni de l'office ni de la commission? La loi serait-elle expressément muette sur certains points?

Article 4. Les articles 3c et 4 cernent le problème de la délégation et de la subdélégation de pouvoir et touchent entre autres "à la sélection, à la déclaration d'aptitude et à la promotion des fonctionnaires."

Alors qu'antérieurement la Commission de la fonction publique n'a jamais garanti l'impartialité totale de ses concours; et nous avons tous en mémoire certaines déclarations des hommes politiques selon lesquelles il était normal que le parti procède d'abord à l'embauche des amis du parti; il est normal que notre syndicat entretienne certaines appréhensions pour l'avenir. Le changement apporté dans la procédure, soit le transfert de ces responsabilités de la commission au ministre, ne nous offre pas des garanties plus solides et plus certaines d'une plus grande justice dans la sélection, la déclaration d'aptitude et la promotion des fonctionnaires.

Article 5. Il ne suffit pas d'énoncer des principes et de faire étalage de pieuses intentions pour que la réalité des faits soit transformée. S'il est un domaine où les programmes de perfectionnement sont importants, il s'agit bien des secteurs où oeuvrent les membres des différents ministères qui forment notre syndicat. Or, par le passé, il nous a été permis de constater que des politiques différentes selon les ministères concernés étaient appliquées. Qu'on songe en particulier aux programmes de formation et de perfectionnement dans le secteur de la détention. Depuis plusieurs années, nous piétinons et les mêmes demandes ont dû être reformulées de nombreuses fois sans que des solutions appropriées ne soient mises de l'avant, ni implantées.

Au niveau des constatations et des recommandations contenues dans le rapport DuBois sur le stress inhérent à la fonction d'agent de la paix, il y a des commentaires et des propositions que nous ne pouvons passer sous silence.

La recommandation no 5. Nous recommandons qu'une formation de base intensive de même qu'un recyclage périodique soient donnés à tous les agents de la paix affectés à une tâche jugée stressante par la présente recherche. Notre examen de la formation et du perfectionnement reçu par les agents de la paix nous a en effet révélé que, contrairement à toute attente, ces derniers sont souvent mal préparés à effectuer leur travail qui comporte pourtant des éléments réels au potentiel de danger et de risques. La formation reçue varie énormément en fonction des classifications si bien qu'elle est à peu de choses près inexistante dans certains cas. Il nous semble donc essentiel et indispensable de fournir aux agents de la paix un enseignement intensif sur les connaissances, les

habiletés, les techniques et les aptitudes susceptibles de faciliter leur tâche et d'augmenter leur rendement, ce qui aurait pour conséquence probable de rehausser la compétence du professionnel des agents de la paix tout en diminuant la perception du stress.

Ces programmes de perfectionnement, nous les réclamons d'abord pour nos membres, en tenant compte, bien sûr, que de telles mesures devraient s'accompagner de programmes adéquats pour les gestionnaires sous la gouverne desquels nos membres ont à travailler. Le rapport formule donc cette autre recommandation, que les personnes occupant le premier niveau de gérance reçoivent la formation technique et humaine nécessaire à l'exercice de leurs fonctions.

Nous désirons donc que des programmes appropriés à chaque groupe d'employés faisant partie de la fonction publique soient implantés et que les crédits nécessaires y soient affectés le plus rapidement possible.

Article 6. Nous remercions le ministre de reprendre à son compte le rôle que les syndicats ont toujours assumé, bien avant sa nomination, soit la surveillance de l'application des conventions. Nous n'en continuons pas moins de faire comme par le passé en gardant toujours à l'esprit que le ministre devra faire lui-même l'objet d'une stricte surveillance. Même s'il est clair que le ministre de la Fonction publique, en s'appropriant une grande partie du champ de négociation des différents syndicats, verra la surveillance qu'il aura à faire réduite d'autant de façons, nous aimerions connaître le type de coordination qu'il entend faire et s'il sous-entend par là qu'il pourrait diriger l'interprétation.

Articles 16 à 27. Commission de la fonction publique. Deux principaux points sont à retenir au sujet de la constitution de la Commission de la fonction publique. En premier lieu, le mandat de ses membres...

M. de Belleval: Est-ce que je pourrais vous interrompre une seconde?

M. Caplette: Certainement.

Le Président (Mme Cuerrier): Le ministre de la Fonction publique.

M. de Belleval: Je ne voudrais pas avoir l'air inconvenant, mais vous avez quand même 40 pages de texte à lire sur les articles, l'un après l'autre. Nous avons reçu les mémoires plusieurs semaines à l'avance. Je pense que la plupart des gens les ont lus et les membres de la commission ont des questions à vous poser. Evidemment, c'est votre privilège de lire tout ça, mais je me demande si ça ne serait vraiment pas plus productif pour vous comme pour nous que nous puissions passer aux questions, compte tenu que vous avez lu l'introduction de votre mémoire, qui fait bien le point sur l'ensemble des questions. Je me demande si c'est utile à ce stade-ci, que nous repassions tout ça, article par article. Là encore, je ne veux pas vous presser, mais, au rythme où vous allez, on n'aura pas le temps de vous poser beaucoup de questions.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du syndicat.

M. Caplette: Bien sûr, je présume que tout le monde a eu la chance de prendre connaissance de notre mémoire; de toute façon, pour ne pas passer chaque article, mais pour faire des commentaires au niveau de certains principes, par exemple les articles 70, 80 et 88 sur lesquels...

M. de Belleval: Ce serait plus...

M. Caplette: ... j'aimerais insister davantage, lire nos commentaires et ensuite passer à notre conclusion.

M. de Belleval: Je pense que oui. M. Caplette: Je suis bien disponible.

M. Marchand: Mme le Président, j'aurais une suggestion à faire.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Laurier, je veux simplement laisser terminer M. le Président, je vous donne la parole immédiatement après.

M. Marchand: D'accord.

Le Président (Mme Cuerrier): Avez-vous terminé, M. le président?

M. Caplette: C'étaient mes commentaires.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Laurier et, ensuite, M. le député de Gaspé.

M. Marchand: J'aurais une suggestion à faire. Ce qui reste à lire, je suggérerais au président du syndicat qu'il soit inscrit automatiquement au journal des Débats, ce qui lui épargnera d'en faire la lecture et il sera officiellement inscrit. A ce moment-là, je pense que cela pourrait être à la satisfaction du président du syndicat.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Merci, Mme le Président. J'aurais une suggestion. Il y a peut-être des points forts sur lesquels M. Caplette voudrait insister d'une façon spéciale. Il y a peut-être trois ou quatre endroits où il désirerait tout de suite attirer notre attention. Ce serait peut-être une façon, pour nous, de mieux comprendre vos préoccupations immédiates. J'ai parcouru votre mémoire, mais il y y a peut-être des points que vous aimeriez nous signaler en passant. C'est une suggestion personnelle que je fais.

M. Caplette: Comme je l'ai dit tantôt, j'aimerais lire les commentaires sur les articles 70, 80 et 88 et ensuite passer aux conclusions.

M. Chevrette: On va donner notre consentement à ce que M. Marchand a dit.

Le Président (Mme Cuerrier): C'est vrai, c'est le député de Laurier...

M. Chevrette: Excusez, je n'ai pas le droit... à ce que le député de Laurier a dit, et cela va permettre à M. le Président de nous donner les points forts du mémoire.

Le Président (Mme Cuerrier): Alors, il y a consentement pour que le mémoire soit reproduit au journal des Débats comme s'il avait été lu en entier, (voir annexe)

M. le Président du syndicat, vous vouliez appuyer sur un point en particulier?

M. Caplette: D'accord. J'inviterais les membres de la commission à passer à la page 20, à l'article 70. L'introduction du principe du mérite pour le recrutement et la promotion du personnel de la fonction publique suscite plus de questions sans réponse qu'il n'énonce de solutions aux problèmes que chercbe à résoudre le ministre.

Nous restons dans l'ignorance totale sur les points suivants:

Quels sont les critères des concours?

Quelle sera la définition du mérite?

Quelles seront les interprétations qu'en donneront les personnes chargées d'examiner le mérite de tel ou tel candidat?

De combien de personnes seront formés les jurys?

De qui seront-ils formés?

Quelles garanties d'impartialité aurons-nous au sujet de ces jurys?

Quelle compétence sera exigée des personnes appelées à exercer les fonctions du jury?

Quelle formation sera donnée à ceux qui seront appelés à y siéger sans détenir à cette date cette compétence?

Les syndicats seront-ils appelés à désigner des observateurs membres de ces jurys?

Ici, nous sentons la nécessité de rappeler l'une des recommandations contenues dans l'étude faite pour le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique par Pierre DuBois et associés.

Nous recommandons donc la révision des mécanismes actuels de promotion et l'établissement, au besoin, d'un programme systématique de promotion du personnel cadre.

Une meilleure formation et un système de promotion mieux articulé pourraient permettre d'atteindre cet objectif.

Au plan technique, il importe de fonder le système de promotion sur une batterie de tests psychométriques valides et sur l'entrevue psychologique en profondeur. Le personnel assigné à l'évaluation des candidats devrait posséder une formation et une expérience adéquates dans ce domaine de l'administration du personnel.

Ce système devrait mesurer les connaissances et le potentiel administratif des candidats de même que leurs compétences interpersonnelles.

Nous avons l'impression que cette recommandation est plus explicite que la nébuleuse notion de mérite et qu'elle présuppose un programme à moyen terme qui ne s'accommoderait pas d'une législation et d'une réglementation faites sans consultation.

A ces remarques préliminaires qui concernent plus précisément la sélection du personnel de cadre (promotion), nous ajoutons le pendant qu'elles possèdent au niveau de la sélection à l'embauche (nomination).

Nous recommandons une analyse complète des procédures actuelles de et l'établissement au besoin d'un système scientifique de sélection du personnel.

L'établissement d'un système scientifique de sélection du personnel permettrait de retenir les candidats qui partagent des caractéristiques psychologiques des agents de la paix qui s'acquittent avec facilité de leurs fonctions.

Ce système de sélection devrait reposer sur trois techniques d'évaluation, soit la fiche biométrique, les tests psychométriques et l'entrevue psychologique. La fiche biométrique et les tests psychométriques devraient être soumis au processus de validation et de normalisation. Les critères de validation devraient comprendre les mesures d'adaptabilité psychologique à la fonction.

Si le principe du mérite recouvre les recommandations telles qu'énoncées, nous nous en réjouissons.

Je devrais passer maintenant à l'article 80 qui est encore attaché à la question du mérite.

Le mécanisme d'appel prévu à cet article nous semble être un recours illusoire dans le cas où l'appel que pourrait faire l'employé le serait sur le mérite même. Comment la vérification sera-t-elle possible pour connaître si l'office a sélectionné effectivement en fonction de la règle du mérite? Puisque la règle du mérite risque de comporter une grande part de subjectivisme, comment un employé pourrait-il prétexter l'illégalité ou l'irrégularité?

Conséquemment au fait qu'aucun recours n'existe sur le mérite lui-même et bien que la commission soit appelée à surveiller l'application de la règle du mérite, comment pourrons-nous nous assurer que tous les fonctionnaires seront traités uniformément et équitablement partout, si les recours, nous le répétons, ne portent pas sur le mérite lui-même?

Je voudrais préciser qu'actuellement, la Commission de la fonction publique a un droit de regard sur le mérite, mais un employé qui se croirait lésé par une nomination, soit à l'embauche, soit à la promotion, ne peut pas en appeler sur le mérite même, à savoir selon ce qu'on peut en comprendre du mérite, sur la compétence ou si le meilleur candidat a été nommé.

A l'article 88 sur la fameuse rétrogradation et révocation pour insuffisance professionnelle, l'article 88 impose aux syndiqués du Syndicat des agents de la paix de la fonction publique les notions de destitution, révocation ou rétrogradation pour insuffisance professionnelle ou incapacité d'agir.

Quels seront les juges de l'incompétence et de l'incapacité d'agir de tel ou tel employé? En vertu de quels critères seront déterminées l'incompétence ou l'incapacité d'agir? Quelle uniformité y aura-t-il au sein de la fonction publique dans l'application des critères? N'y a-t-il pas risque qu'il y ait autant de définitions de l'incompétence et de l'incapacité d'agir qu'il y aura de sous-ministres ou de dirigeants d'organismes?

Nous pensons qu'à ce sujet, le gouvernement, dans l'incapacité qu'il était d'agir pour solutionner les problèmes qu'il avait avec ses cadres supérieurs, a décidé d'en faire une mesure universelle, rayant d'un trait de plume les ententes prises avec les syndicats où de telles clauses avaient été négociées et ne permettant pas l'ombre d'une discussion, d'une négociation chez les unités syndicales où des dispositions semblables n'apparaissaient pas dans leur convention collective.

D'ailleurs, de telles dispositions remettent en question la sélection qui a été faite à l'origine pour l'embauche des employés de la fonction publique. Or, si c'est cette question qui amène le gouvernement à prévoir des mécanismes de destitution, de révocation et de rétrogradation pour insuffisance professionnelle, c'est une intervention qui ne correspond pas à la racine du mal. Nous pensons que l'introduction de la notion d'insuffisance professionnelle devrait amener le gouvernement à se pencher d'abord sur ses échecs lamentables dans l'élaboration de ses programmes de recyclage et de perfectionnement. L'insuffisance professionnelle se développe lorsque l'employé n'est pas mis en face d'un train de mesures visant à maintenir sa compétence au niveau de l'évolution de sa tâche et des responsabilités qui en découlent. C'est justement à ce niveau que nous nous serions attendus à voir le ministre mettre l'accent.

D'autre part, la destitution, la révocation et la rétrogradation sont introduites pour les employés se trouvant dans l'incapacité d'agir. Quels sont les sombres desseins du ministre derrière cette question? Visent-ils les cas d'invalidité? L'invalidité oc-cupationnelle et non occupationnelle?

C'est donc dire que, là où l'emploi comporte des dangers supérieurs pour l'employé de devenir invalide, les protections seront moindres ou tout au moins les chances d'être révoqué, destitué ou rétrogradé plus sérieuses.

De telles mesures sont inacceptables et constituent la négation même de la responsabilité de l'employeur vis-à-vis de ses employés. Si les fonctions assumées par nos membres comportent des exigences, exigences qui en viendraient à diminuer les capacités physiques ou psychologiques de ces derniers à assumer leur tâche, il est de la responsabilité stricte de l'employeur de pourvoir à la sécurité de ses employés, sécurité tant sur le plan de leur santé comme celle de leur emploi.

Une saine question des ressources humaines commande de chercher les origines des maux plutôt que de mettre en place des mesures qui ressemblent beaucoup plus à des palliatifs.

Une récente étude faite chez les membres de notre syndicat par la firme de psychologues indus- triels conseils Pierre DuBois et Associés en arrivait à la conclusion suivante: 18% des agents de la paix éprouvent un stress professionnel constant dans l'exercice de leurs fonctions, alors que 24% de leurs confrères le ressentent d'une façon occasionnelle ou modérée;

Le stress professionnel observé chez les agents de la paix dépasse celui enregistré chez des groupes équivalents (policiers, pompiers);

Le stress professionnel ressenti par les agents de la paix entraîne un éventail impressionnant de problèmes de santé tant physique que psychologique. Ces malaises efou maladies, d'origine nerveuse pour la plupart, dépassent en fréquence et en gravité ceux ressentis par des groupes de comparaison équivalents (policiers et pompiers).

Donc, nos fonctions, en plus de comporter des risques évidents plus grands pouvant conduire à une invalidité professionnelle plus ou moins complète, minent quotidiennement la santé physique et psychologique de nos membres et peuvent les diriger à moyen ou à long terme vers un état pouvant permettre, en vertu de l'article 88, à des dirigeants d'organisme de conclure que ces personnes sont dans un état qui leur interdit désormais de remplir leurs fonctions.

A-t-on déjà songé à rétrograder un agent de la Sûreté du Québec? Pourtant, le même rapport faisait la recommandation suivante qui nous apparaît comme une réponse plus adéquate aux problèmes constatés chez nos membres. "Nous recommandons l'établissement d'un service de santé professionnel qui aurait pour objectif d'améliorer la santé physique et psychologique des agents de la paix, de dépister les agents de la paix qui présentent des problèmes psychologiques et physiques et d'implanter des programmes de prévention du stress professionnel".

Il aurait fallu privilégier une approche préventive plutôt que celle mise de l'avant dans le projet de loi qui, à nos yeux, sans aller aux sources des maux, visent à sauver les meubles lorsque tout l'édifice est sur le point de s'écrouler. Nous suggérons, d'ailleurs, aux auteurs du projet de loi de s'arrêter au discours de M. Pierre Marois devant les Hautes études commerciales, discours prononcé le 10 juin 1977, dont le thème était: "Santé, sécurité et qualité de vie au travail."

M. Marois disait qu'il serait naïf de croire, cependant, qu'il n'y a pas de problème sérieux de qualité de vie au travail.

Les indices d'une telle situation sont trop nombreux pour qu'on n'en tienne pas compte... Ces problèmes sont sérieux et il m'apparaît évident qu'il faudra éventuellement trouver des solutions originales. Et ce, d'autant plus que, si on ne le fait pas, ces problèmes risquent, à mesure que les situations vont se détériorer davantage, d'avoir un impact marqué sur le climat des relations de travail". M. Pierre Marois ajoutait à la fin de son discours: "II est encore trop tôt pour indiquer dans quelle mesure l'Etat québécois pourrait être appelé à intervenir dans cette direction".

Nous lui répondons donc que la fonction publique a trouvé sa voie et ses solutions originales,

ce sont celles de la matraque. Le ministre de la Fonction publique n'a pas plus de respect pour son personnel que les multinationales de l'amiante n'en avaient de leurs "amiantosés".

Cependant, et M. Marois le faisait remarquer, une telle attitude risque de marquer le climat des relations de travail. Il faudra donc s'entendre si c'est la concertation que l'on vise ou la confrontation.

Quant à nous, il nous semble évident que le gouvernement a déjà fait son choix. Il devra cependant en faire son lit.

Je passe à la conclusion, à la page 38. Nous considérons ce projet de loi no 53 comme antisyndical et, par conséquent, nous demandons: Que la classification, les conditions de travail et de rémunération, l'évaluation du personnel, l'affectation, le classement, le reclassement, la mutation, la mise en disponibilité et les sanctions disciplinaires deviennent ou continuent de faire partie du champ de la négociation.

Que la rétrogradation, la révocation ou la destitution pour insuffisance professionnelle ou incapacité d'agir soit abandonnée par le gouvernement tant dans ce projet de loi que dans son introduction dans les conventions collectives, car ce principe nie la responsabilité du gouvernement vis-à-vis de ses employés.

Que le gouvernement élabore et applique une véritable politique de perfectionnement qui, à ce moment-là, rehausserait la compétence professionnelle de ses employés.

Que des mécanismes assurant l'indépendance de l'Office de recrutement et de la Commission de la fonction publique vis-à-vis du gouvernement et du ministre de la Fonction publique soient prévus, notamment en ce qui regarde la durée du mandat et la nomination de leurs responsables.

Que soit retiré à la Commission de la fonction publique le rôle d'arbitre des griefs qui lui est conféré par le présent projet de loi et que soient maintenues les garanties prévues dans les conventions collectives.

Que l'Office de recrutement nous fournisse des assurances suffisantes que le recrutement, lorsqu'il sera fait à des paliers inférieurs de gérance (référence à l'article 45, 3e paragraphe: Délégation de pouvoir), ne sera pas l'occasion de camoufler un recrutement qui ne respecterait pas les articles 71, 72, 73.

Que le principe du mérite soit aboli s'il ne respecte pas les recommandations contenues dans "l'étude du stress inhérent à la fonction d'agent de la paix" (recommandations 8 et 12).

Qu'un mécanisme d'appel sur le mérite soit instauré dans l'éventualité où notre précédente recommandation ne serait pas retenue.

Que les employés de la fonction publique puissent profiter de tous les droits qui sont conférés à tous les autres citoyens en matière de "parti-sanerie" politique sous la réserve que ces droits ne s'exercent pas durant les heures de travail.

J'aurais une courte déclaration à faire, à la suite des amendements qui ont été déposés par le ministre, le 19 octobre dernier.

Depuis le dépôt de notre mémoire, le 16 septembre dernier, le ministre de la Fonction publique a déposé, le 19 octobre, des amendements qui, dans l'esprit du ministre, ont pour effet de ne plus toucher au champ de la négociation.

Nous croyons que les amendements déposés n'ont pas cet effet, que l'aire des négociations est effectivement touchée. Il est vrai, par contre, que l'arbitrage des mesures disciplinaires et des appels de classement demeure dans l'aire des négociations sous réserve du pouvoir réglementaire.

De plus, devant le manque de limpidité du projet de loi et de ses amendements, la non-concordance, quant à nous, entre l'esprit qui semble animer le ministre, le texte du projet de loi, ses amendements et le mandat de la commission Martin, il nous apparaît toujours que l'étude de ce projet de loi aurait dû et devrait être suspendue jusqu'au dépôt du rapport de la commission Martin.

Je vous remercie.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre de la Fonction publique.

M. de Belleval: Vous venez de dire que, malgré le dépôt des amendements, nous continuons à toucher à l'aire des négociations. Qu'est-ce qui vous fait dire cela?

M. Caplette: L'exemple qu'on a déjà invoqué à un autre endroit, la question de la rétrogradation. Actuellement, la Loi de la fonction publique, telle qu'elle est, celle en vigueur, ne parle pas du tout de rétrogradation.

M. de Belleval: Y a-t-il d'autres aspects que celui-là où on touche à l'aire des négociations?

M. Caplette: C'est un exemple à mes yeux qui est bien clair, qui est touché d'une façon ou de l'autre. On pourrait citer, deuxièmement, une chose qui touche aussi à l'aire de négociation, quant à nous: la question de la classification. Actuellement, la classification appartient à la Commission de la fonction publique et, par le biais des conventions collectives ou de certaines ententes, on a le droit de faire des représentations qui dépassent le stade des voeux pieux, qui sont basées sur une certaine structure, sur certains moyens de recherche.

Avec le projet de loi, le ministre aura le mandat de faire les règlements concernant la classification, c'est-à-dire que, par le biais de ce pouvoir de réglementation, il pourra, par exemple, si tel est son désir, faire en sorte qu'au lieu d'avoir 2600 membres, on en ait 1800. Il pourra changer les règles du jeu au niveau des critères de l'embauche, ce qui aura des conséquences directes sur la rémunération, les avancements de classe, etc.

Selon nous, le fait de prendre cette responsabilité touche à l'aire de négociation parce qu'effectivement ce sera la même personne, vous, M. le ministre, qui allez négocier les conditions de travail qui nous restent en vertu de l'article 119 que

vous avez déposé. Par contre, vous allez faire aussi la classification et cela a un lien direct, tandis qu'actuellement il y a une certaine garantie à cause de la Commission de la fonction publique qui fait ces règlements de classification, garantie absolue de consultation d'une personne qui n'est pas à la fois l'employeur, le législateur et le patron.

M. de Belleval: Pouvez-vous me citer l'article de la loi actuelle qui vous garantit un droit de consultation sur la classification?

M. Caplette: Vous savez très bien que c'est par le biais d'un arrêté en conseil.

M. de Belleval: Bon. Alors en quoi la nouvelle loi change-t-elle quelque chose par rapport à cela? L'ancienne loi vous ne garantit rien de ce côté.

M. Caplette: Vous aurez le pouvoir de réglementer la commission.

M. de Belleval: J'ai déjà ce pouvoir. Vous venez de dire vous-même que c'est en vertu d'un arrêté en conseil qu'on vous consulte. Ce n'est pas en vertu de la loi. C'est en vertu d'un arrêté en conseil. C'est en vertu d'un geste du gouvernement. Cela va continuer à être comme cela. Il n'y a pas de changement.

M. Caplette: II y a un changement énorme selon moi parce qu'actuellement c'est la Commission de la fonction publique qui fait les règlements de classification. Bien sûr qu'ils sont approuvés par le Conseil du trésor, etc. On a la garantie d'être consulté par l'intermédiaire de personnes qui ont une certaine impartialité.

Vous aurez tous les pouvoirs qu'a actuellement la commission au niveau de la classification. Ce sera avec vous qu'on va négocier notre contrat de travail et ce sera vous qui déterminerez unilatéralement ce que sera le contenu de notre classification. Cela fait une différence énorme, quant à moi.

M. de Belleval: Actuellement, c'est la Commission de la fonction publique qui, unilatéralement, décide cela. En vertu du projet de loi, c'est le ministre qui prend ces pouvoirs. Mais cela ne vous enlève aucune garantie par rapport à la situation actuelle. D'ailleurs, vous avez été incapable de me mentionner l'article de la loi qui vous garantissait un droit de consultation. Vous n'en avez pas n'en avez pas de droit de consultation. Vous avez obtenu le droit de consultation dans le cadre de vos négociations collectives, dans le cadre des négociations de bonne foi que vous avez eues avec vos employeurs. C'est exactement la situation qui va perdurer, une fois le projet de loi adopté.

J'ai lu tout votre document à plusieurs reprises et, en fait, ce que vous nous avez expliqué tout au long de cela, ce sont des questions qui dépendent essentiellement de la négociation col- lective et, de ce point de vue, le projet de loi ne touche absolument pas au système de négociation collective en vigueur. Toutes les revendications que vous nous faites, vous devez les faire à votre employeur quand vous négociez vos conventions collectives, pas au législateur quand il propose un réaménagement des pouvoirs des différents organismes en matière de gestion de la fonction publique. Je pense que, de ce côté-là, si vous avez des demandes à faire, c'est à votre table de négociation collective et pas à la table de cette commission. Vous parlez entre autres d'un mécanisme de perfectionnement du personnel, vous aimeriez avoir un meilleur mécanisme, de meilleures dispositions en matière de perfectionnement, en matière de plan de perfectionnement du personnel; c'est en vertu de vos conventions collectives que tout cela est négocié, cela n'a rien à voir avec le projet de loi qui est devant nous. C'est la même chose au niveau de la rétrogradation. Vous n'êtes pas capable de me citer un article de la loi actuelle qui sort du champ de négociation la régrogradation, pas plus que le projet de loi 53. C'est en vertu des conventions collectives que les clauses de rétrogradation ont été négociées, ce n'est pas en vertu d'un pouvoir de la Commission de la fonction publique. Alors, vous êtes le dernier syndicat, d'ailleurs, à faire face à une négociation collective dans laquelle l'employeur vous propose une clause de rétrogradation. Vous allez la négocier et cette clause sera finalement dans votre convention collective selon le résultat même de cette convention collective, pas en vertu d'un pouvoir discrétionnaire du ministre.

M. Caplette: Au niveau de la classification, M. le ministre, si cela ne change pas la renégociation, le fait que ce soit vous qui en ayez la responsabilité par rapport à la commission, cela change effectivement et c'est dans la convention collective. Il y a des lettres d'entente disant qu'on va avoir un comité consultatif, qui a une certaine indépendance d'esprit, qui est dans la classification.

M. de Belleval: Cela vous a été consenti par le gouvernement en vertu de ses pouvoirs discrétionnaires. Cela ne vous a pas été consenti par les anciens gouvernements en vertu de la loi. Ce n'est pas en vertu de la loi que vous avez le droit de consulter, c'est en vertu d'un règlement, exactement comme cela va être avec la nouvelle loi. Alors, cessez donc de dire que la loi vous enlève quelque chose. Elle ne vous enlève absolument rien. C'est le statu quo de ce côté-là.

M. Caplette: Au niveau de la rétrogradation, c'est la même chose. La loi ne nous enlève rien. Actuellement, avec la Loi de la fonction publique, vous avez mis des clauses dans la convention collective pour avoir le droit de rétrograder. Notre convention est échue depuis le 30 juin et, avec la convention qu'on avait, qui est encore en vigueur actuellement, vous n'avez pas le droit de

rétrograder chez nous. Actuellement, avec le projet de loi 53, indépendamment de l'article 88, si vous me dites qu'il ne s'applique pas chez les syndiqués ou s'il s'applique, je ne le sais pas, mais, de toute façon, cela va...

M. de Belleval: II ne s'applique pas chez les syndiqués, je vous l'ai dit à plusieurs reprises, vous le savez. Il ne s'appliquera pas chez les syndiqués, c'est sous réserve des conventions collectives. Je vous l'ai dit à plusieurs reprises d'ailleurs.

M. Caplette: Actuellement, avec les amendements et le projet de loi qui est sur la table, au niveau de la rétrogradation, on n'a aucune garantie que cela va être négociable et si cela devenait négociable, ce serait une modification à l'aire de négociation.

M. de Belleval: Je vous ai déjà déclaré, j'ai déjà déclaré d'ailleurs à cette commission que si les projets d'amendement étaient effectivement ce qu'ils étaient, c'est-à-dire des projets, et si en rétablissant intégralement l'article 52a comme il était dans la loi, il fallait en plus ajouter la rétrogradation, je vous ai dit qu'il n'y a aucun problème pour ajouter le mot "rétrogradation". Mes intentions sont très claires là-dessus. La rétrogradation sera assujettie, en vertu du projet de loi 53 au régime des négociations collectives, comme le congédiement.

M. Caplette: C'est-à-dire que vous allez l'ajouter à l'article 119?

M. de Belleval: Oui, c'est ça. Je vous l'ai dit à plusieurs reprises.

M. Caplette: Les droits résiduaires que vous avez gardés, à la fin de l'article 119, quand vous dites: "... à moins que selon le sujet, est attribué par la Loi de la fonction publique ou la Commission de la fonction publique à l'Office de recrutement ou au ministre de la Fonction publique, la commission, l'office ou le ministre n'y encourt par règlement, et qu'un tel règlement ne soit approuvé par le gouvernement". Cela a quelque signification, par rapport à l'aire des négociations?

M. de Belleval: C'est que l'aire des négociations en vigueur est maintenue intégralement. C'est le statu quo de ce côté.

M. Caplette: Si vous y encourez par règlement, si vous n'y encourez pas par règlement?

M. de Belleval: Si je concours par règlement à négocier certaines choses qui relevaient de la commission autrefois et qui n'étaient pas négociables, bien entendu, à ce moment-là, c'est la soupape qui permet, comme autrefois d'ailleurs, de négocier des choses qui, normalement, ne font pas partie de l'aire des négociations. Comme je l'ai déjà dit, c'est une amélioration de ce côté pour vous, puisqu'au lieu d'avoir affaire à un ministre qui peut se cacher derrière le paravent d'une commission indépendante, à l'avenir, c'est le ministre lui-même qui peut concourir par règlement, à négocier des choses qui, jusqu'à maintenant, ne faisaient pas partie de l'aire des négociations suivant la loi.

M. Caplette: Cela veut dire qu'effectivement, vous allez encourir par règlement pour qu'on puisse continuer à négocier certaines clauses qui touchent l'évaluation, la mutation, la mise en disponibilité, la sécurité d'emploi, etc.?

M. de Belleval: Toutes ces choses font partie déjà du champ des négociations.

M. Caplette: Elles ne font pas partie du champ des négociations. Ce qui fait partie du champ des négociations, c'est du paragraphe a) à g), ce qui est là.

M. de Belleval: Pardon?

M. Caplette: Ce qui fait partie du champ des négociations, c'est du paragraphe a) à g), et vous allez ajouter un rétro?

M. de Belleval: Spécifiquement, oui.

M. Caplette: Le restant ne fait pas partie de l'aire des négociations?

M. de Belleval: Pas nécessairement; c'est-à-dire seulement les matières qui, en vertu de la loi actuelle, relèvent de la Commission de la fonction publique. Par exemple, la rétrogradation ne relève pas de la Loi de la fonction publique. Cela ne relève pas de la Commission de la fonction publique, donc c'est négociable. Si vous aimez mieux qu'on l'ajoute, comme je vous dis, on l'ajoutera.

M. Caplette: Si vous ne l'ajoutez pas, ce ne sera pas négociable.

M. de Belleval: Oui, parce que de toute façon, en vertu de la loi actuelle, en vertu de la loi qui est en vigueur, la rétrogradation n'est pas une chose qui tombe sous la compétence de la Commission de la fonction publique, donc c'est négociable.

M. Caplette: II n'y a pas de clause de rétrogradation dans ma convention collective actuelle. Si la loi est adoptée demain, si vous n'ajoutez pas le mot "rétrogradation" à l'article 119, cela ne sera pas négociable, ce sera dans le pouvoir réglementaire du ministre, avec tous les pouvoirs de l'article a) et l'incidence...

M. de Belleval: Votre convention collective est le résultat d'une négociation de bonne foi. Mais il n'y a rien qui vous garantit que votre convention collective va être comme vous voulez qu'elle soit négociée. Elle va être le résultat du rapport de forces qui existe dans toute convention collective. Je ne peux pas vous garantir à

l'avance que tout ce que vous demandez dans la convention collective, vous allez l'obtenir. Vous ne pouvez pas non plus me garantir que vous allez accepter tout ce que je vous propose. Il va y avoir des négociations, il y en a, et finalement, il y a un résultat de ça, qui n'est pas parfait, qui n'est pas une oeuvre de logique, mais qui est le résultat d'un compromis. C'est tout.

M. Caplette: Indépendamment...

M. de Belleval: Cela va continuer à être comme ça.

M. Caplette: Indépendamment du résultat de la négociation de la convention actuelle, si effectivement, je veux souligner que c'est très important d'ajouter le mot "rétrogradation" à l'article 119, à ce moment-là, vous allez avoir le pouvoir de réglementer la rétrogradation, ce ne sera pas une chose négociable. C'est un exemple bien simple, bien clair, c'est pour ça que je le souligne, c'est un exemple qui touche l'aire des négociations d'une façon ou d'une autre.

M. de Belleval: Cela ne touche pas l'aire des négociations en vigueur.

M. Caplette: Selon la Loi de la fonction publique actuelle, M. le ministre...

M. de Belleval: La preuve, c'est qu'il y a des conventions collectives qui possèdent déjà cette clause, donc c'était négociable. Parce que si cela n'avait pas été négociable, cela ne serait pas dans les conventions collectives.

M. Caplette: M. le ministre, actuellement, avec la Loi de la fonction publique en vigueur, dans les syndicats où il n'y a pas de clause de rétrogradation, vous n'avez pas le droit de rétrograder, de la façon que la loi est faite. Vous modifiez la loi et vous donnez le droit de rétrogradation, c'est-à-dire qu'il faut que je négocie une clause de rétrogradation dans ma convention collective pour empêcher la rétrogradation. Autrement, si je ne le fais pas, vous allez avoir le pouvoir réglementaire de rétrograder, de faire un règlement et subséquemment, vos fonctionnaires vont pouvoir rétrograder, vos sous-ministres, qui vous voudrez. Pour moi, c'est un exemple bien limpide, bien clair, que votre projet de loi touche l'aire des négociations, à tout le moins chez nous, au niveau de la rétrogradation.

M. de Belleval: Surtout les articles qui sont négociables. De toute façon, en vertu de la loi, de n'importe quelle loi, un employeur, quel qu'il soit, n'est pas obligé d'accéder à quelque demande que ce soit d'une partie syndicale.

L'important, c'est qu'il y ait une négociation de bonne foi et qu'à un moment donné, il y ait un résultat qui sort de cela. Le résultat concret ne vous est pas garanti en fonction de la loi. Ce qui vous est garanti, c'est qu'il y a un champ, un champ normal, où les deux parties doivent négocier de bonne foi.

En ce qui concerne la rétrogradation, je vous ai déjà dit que, de ce point de vue, cela entrerait dans le champ du négociable et que, s'il faut, pour que ce soit très clair, que ce soit mis en toutes lettres, cela sera fait.

M. Caplette: Quant à nous, si vous ne le mettez pas à l'article 119, c'est une chose qui sera négociable en vertu d'un pouvoir réglementaire du ministre, point. Cela ne sera pas garanti par la loi.

M. de Belleval: C'est une question d'interprétation. Je vous ai déjà dit, de toute façon, que cela serait dans l'article 119.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, Mme le Président. Je tiens à remercier les intervenants de ce soir de la qualité du mémoire qu'ils nous présentent, et je tiens, de plus, à vous faire part que vous déployez beaucoup de courage et de détermination, en venant comparaître ce soir, sur le projet de loi 53, avec les commentaires que vous avez apportés, tout en constatant le fait que vous êtes quand même en négociation actuellement. Je trouve que c'est pas mal courageux de votre part de venir dire au ministre: Ecoutez, on n'est pas d'accord avec votre projet de loi, même si vous êtes en négociation.

J'espérais, Mme le Président, que M. le ministre puisse profiter du moment qu'il avait au début de nos travaux, après l'audition du mémoire, pour faire la lumière sur plusieurs points qui ont été soulevés par nos représentants de ce soir.

Ceux-ci ont demandé, par la présentation de leur mémoire, des précisions sur certains points, ont demandé au ministre les réponses les plus précises possible sur des interrogations qui, selon moi, sont fondées et j'ose croire que le ministre sera en mesure, d'ici dix heures, de répondre à ces questions.

J'aurais une première question, Mme le Président. Vous savez, vous m'avez interdit d'en poser directement au ministre. Si vous le permettez, je vais m'interroger, quitte à ce que le ministre réponde par la suite.

Mme le Président, c'est le cinquième ou le sixième groupe qu'on entend et tous ces gens qui ont comparu devant nous viennent nous dire: On veut des précisions, on s'inquiète du pouvoir réglementaire qui est conféré au ministre en vertu de l'article 119 et qui permettra, une fois la loi adoptée, au ministre de la Fonction publique d'intervenir par règlement pour restreindre, somme toute, le champ des négociations, et ce, par l'application de l'article 3.

Mme le Président, il faut ajouter à cela. J'ai eu l'occasion d'en faire état à quelques reprises depuis quinze jours; il y a une situation d'affrontement qui s'est élaborée, qui a poussé comme un champignon entre, d'une part, le gouverne-

ment, le ministre de la Fonction publique et les travailleurs de la fonction publique. C'est quand même un élément qui n'est pas du tout positif avec les campagnes de publicité de part et d'autre; on semble se tirailler royalement.

On n'a qu'à regarder le sondage qui est sorti il y a quelques jours et qui nous démontre que 93% des gens qui ont été interrogés, 93% des travailleurs de la fonction publique étaient contre le projet de loi qui, somme toute, aura à les régir éventuellement. C'est malsain en soi. 96% de ces travailleurs favoriseraient que leur syndicat respectif accentue les procédures ou les pressions auprès du gouvernement pour le faire céder sur certains points. Peut-être que le sondage du ministre pourra contredire ces chiffres. Libre à lui de le déposer oui ou non.

Ce que je dis, somme toute, c'est ceci. Il y a une situation où les syndicats s'interrogent, et ils sont en droit de s'interroger et je pense que tout le monde est unanime autour de cette table pour constater qu'il y a des questions auxquelles il n'y a pas de réponse précise.

Le gouvernement a jugé opportun, après plusieurs pressions de part et d'autre, de convoquer une commission parlementaire. Une commission parlementaire comme celle-là ne doit pas devenir un dialogue de sourds. C'est le moment le mieux choisi pour répondre à des questions comme celles-là.

Vous faisiez état, Mme le Président, tout à l'heure, de la question de la rétrogradation. Il faut se comprendre. C'est là-dessus que je m'interroge, Mme le Président, je vais en faire ma question au ministre. D'accord qu'actuellement, vous êtes à négocier votre convention collective.

Vous êtes à négocier une clause particulière sur ce sujet. Une fois que le projet de loi 53 sera adopté, que ce soit avant le dépôt du rapport Martin ou après, et, entre parenthèses, vous recommandez qu'on sursoie à l'étude du projet de loi jusqu'à ce que le rapport de la commission Martin soit déposé, on est d'accord avec vous, l'Opposition officielle, et je pense que mon collègue de l'Union Nationale l'est aussi. Ce qu'on a demandé au ministre — je suis convaincu que vous allez le réitérer ce soir et que vous allez peut-être dire que vous êtes d'accord avec nous — c'est qu'on sursoie à toute étude du projet de loi 53, et particulièrement qu'on ne passe pas à la deuxième lecture avant le dépôt du rapport Martin.

Je reviens à la question de la rétrogradation. Vous êtes à la négocier actuellement. Le pouvoir qui est conféré au ministre, en vertu de l'article 119 et de l'article 3, c'est d'intervenir par règlement. Le ministre nous dit: Je ne m'en servirai pas et je ne limiterai pas le champ de négociation par cela et cela ne changera rien de ce qu'il y avait avant. Le projet de loi, selon moi, le ministre... C'est l'interrogation que je me pose. Pourquoi le ministre ne profite-t-il pas, d'une part, des audiences? D'autre part, au moment où on en est, entre les première et deuxième lectures de ce projet de loi, pourquoi ne profite-t-il pas de cette étude pour établir clairement devant nos groupes qui comparaissent jusqu'où le champ de négociation ne serait pas restreint ou jusqu'où il serait restreint? Comment le ministre peut-il s'assurer et quelle est la garantie qu'il offre aux parties, à ses employés, qu'il n'usera pas de ce pouvoir pour restreindre des questions qui sont directement intégrées dans le champ de négociation, qui ont été gagnées par des négociations de conventions collectives? Je me dis: II y a quelque chose qui ne marche pas quelque part.

Nos gens, d'un côté, s'interrogent. Nos gens disent: Oui, M. le ministre, si on interprète 119 et si on interprète l'article 3, vous aurez le pouvoir, une fois que le projet de loi sera adopté, de limiter le champ de négociation. Le ministre dit: Non, je n'ai pas l'intention de le faire.

Je m'excuse, mais M. le ministre peut être appelé è d'autres fonctions éventuellement. Le ministre de la Fonction publique, la couronne de la fonction publique, parce que c'est vraiment la couronne, c'est Sa Majesté, en toute Sa Majesté, ce ne sera pas toujours le député de Charlesbourg qui va être là. Je me dis: Vous devriez profiter du débat qui intervient, des questions qui sont posées, et le plus bel exemple, c'est le cas de la rétrogradation. Il y a d'autres cas de précision comme cela. On parlait tantôt de l'article 88, le pouvoir qu'aura un sous-ministre ou un dirigeant d'un organisme de révoquer, destituer tout fonctionnaire incompétent dans l'exercice de ses fonctions.

Le pouvoir de destitution qui existait dans l'ancienne convention collective appartenait au gouvernement, mais sur recommandation de la commission après enquête. Pour appliquer l'article 88, il y aura certaines normes réglementaires ou autres de pratique ou d'usage qui vont se bâtir autour de cet article. Dans votre mémoire, vous faites état qu'il y aura peut-être autant de jurisprudence qu'il y aura de ministères. Vous demandez dans votre mémoire des précisions et vous êtes en droit de les demander. Y aura-t-il des normes qui seront applicables, sectorielles, ou est-ce que ce seront des normes générales qui découleront de ce pouvoir? En vertu de quoi ce pouvoir pourrait-il être appliqué? De quelle façon ces normes pourront-elles être appliquées? Je fais miennes les interrogations que vous vous posez. J'ai plusieurs autres questions à vous formuler. Je suis prêt à passer immédiatement le micro au ministre pour qu'il puisse, si possible, répondre à toutes ces questions. Je suis d'accord qu'il vous donne une assurance aujourd'hui, mais jusqu'où, entre autres, engage-t-il le prochain ministre de la Fonction publique, si prochain ministre il y a? Jusqu'où est-il disposé à dire, noir sur blanc, dans la loi — pourquoi ne pas dire dans la loi que telle chose entre dans le champ de négociation et que telle autre chose n'est pas négociable? — plutôt que de dire oui ou de laisser croire que c'est oui? La commission Martin va déposer son rapport. La deuxième lecture sera adoptée. La loi sera votée. Par la suite, tout sera négociable, jusqu'au jour où le ministre dira que cela ne l'est plus, que cela ne fait plus mon affaire.

En vertu de l'article 3 de la nouvelle loi, il aura le droit d'agir et il aura le droit de limiter ce champ de négociation. Ce n'est pas une attitude qui peut favoriser un débat serein, un échange sérieux, valable et concluant entre les parties que d'adopter une position comme celle-là. On voit jusqu'où ira l'escalade de procédure et d'affrontement entre les groupes, sur la foi de tout cela, non seulement de l'escalade et sur la foi des représentations qui nous sont faites, M. le ministre, vous devriez être en mesure de répondre avec beaucoup plus de précision aux interrogations que ces gens se posent. Entre autres...

M. Chevrette: M. le Président, question de règlement.

M. Pagé: Je ne veux pas faire de procédure.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Joliette-Montcalm...

M. Pagé: II ne faudrait pas se chicaner ce soir. C'est trop important.

Le Président (Mme Cuerrier): ... sur la question de règlement, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Mme le Président, c'est justement parce que je ne veux pas de procédure que j'en appelle au règlement. On n'en est pas au discours article par article sur un amendement ou quelque chose du genre. On est là pour interroger ceux qui sont venus. Je préférerais...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Joliette-Montcalm, j'allais justement demander...

M. Pagé: Je fais miennes les interrogations de ces gens. Je demande, par des interrogations que je me pose et que ces gens se sont posées... Qu'on regarde leurs commentaires à l'article 3, à l'article 6 à la page 12, à l'article 70 à la page 21, — si tout le monde a lu le mémoire — à l'article 80 à la page 24, concernant la règle du mérite; c'est une foule d'interrogations que ces gens se posent. Ils sont en droit d'avoir des réponses. C'est le moment et c'est le temps choisi, la commission parlementaire, pour y répondre. Je ne prendrai pas plus de temps. Je veux donner la parole tout de suite au ministre pour qu'il réponde à ces précisions pour que ces gens partent contents, qu'ils partent satisfaits. Ils vont savoir à quoi s'en tenir, il va y avoir moins d'escalade de procédures de part et d'autre et cela va améliorer le débat. Je vais avoir d'autres questions tantôt.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du syndicat, j'allais vous demander si vous vouliez intervenir sur les questions que M. le député de Portneuf se pose à lui-même.

M. Pagé: Est-ce que vous faites miennes les interrogations que je me pose?

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du syndicat.

M. Caplette: On a posé, dans notre mémoire, beaucoup d'interrogations que le député de Portneuf a soulevées de nouveau. Effectivement, au-delà de l'exemple de la rétrogradation... Je ne voudrais pas me mettre à négocier le mérite de la clause de rétrogradation, sauf qu'au niveau de nos commentaires, on a dit ce qu'on pensait de la rétrogradation. On a dit aussi qu'effectivement, cela change les règles du jeu avec le projet de loi 53, parce qu'obligatoirement devra figurer dans la convention collective une clause de rétrogradation parce que, si elle ne figure pas, vous aurez le droit de réglementer, tandis qu'avant cela, quand il n'y avait pas de clause de rétrogradation dans la convention collective, il n'y avait pas de rétrogradation possible.

C'est bien sûr qu'il y a plusieurs interrogations. Il ne faut pas recommencer le débat qu'il y a déjà eu dans cette enceinte au niveau de l'aire des négociations. Je trouve regrettable ou je me pose l'interrogation pour savoir clairement les intentions du ministre au niveau de la fameuse question de l'aire des négociations et du carcan réglementaire qui figure à l'article 3. Par exemple, dans l'amendement que vous avez déposé à l'article 91, vous faites allusion, à un moment donné, "régi par les conventions collectives ou en l'absence de dispositions dans les conventions collectives"; on négocie avec vous, M. le ministre. Evidemment, si, à un moment donné, on a une clause dans notre convention collective actuellement et, suite à une négociation, selon l'interprétation que vous donnez, cette clause disparaît de la convention collective, une clause, par exemple, sur la mutation ou je ne sais pas quoi, sur la mutation ou l'affectation ou la notation... La clause disparaît dans la convention collective. Subséquemment, on n'aura plus le droit de négocier cette clause, parce qu'il ne sera pas garanti par la loi de la négocier. On pourra toujours faire des interventions auprès de vous pour que, par règlement, vous accédiez à ce que ce soit négociable. Ce sont beaucoup d'interrogations, des interrelations qui existent entre le fameux article 3, l'article 91 et l'article 119 et d'autres droits qui apparaissent au niveau de votre réglementation et qui auront une influence majeure.

M. de Belleval: M. Caplette, là-dessus, cela ne change rien à la situation actuelle. Actuellement, il y a un tas de dispositions en matière de gestion du personnel, de conditions de travail qui peuvent être réglementées par le gouvernement et qui sont, effectivement, réglementées par le gouvernement.

M. Caplette: On négocie et on se fait répondre ça tout le temps: C'est couvert par tel règlement, c'est couvert par telle loi.

M. de Belleval: Non, je parle de choses dans l'aire des négociations actuelle, dans votre aire

de négociations; le fait qu'une chose soit négociable n'enlève pas au gouvernement, en vertu de la loi actuelle, le droit de faire des règlements. Le gouvernement a le droit de faire des règlements actuellement, indépendamment de vos conventions collectives. Cependant, et c'est là que c'est très important, ces règlements ne peuvent pas aller à l'encontre d'une disposition de vos conventions collectives. C'est ce que dit clairement l'article 91. C'est sûr que le gouvernement a un pouvoir général de réglementation. D'ailleurs, ce pouvoir s'adresse à des employés non syndiqués autant qu'à des employés syndiqués. Il faut donc que quelqu'un soit responsable de ce pouvoir quelque part. Il y a une philosophie derrière le projet de loi, je l'ai expliquée, à savoir qu'il était normal qu'à l'avenir, ce soit le gouvernement qui ait ce pouvoir, parce que c'est lui qui est responsable devant la population de l'efficacité de sa fonction publique. Cependant, il ne peut pas le faire de façon discrétionnaire. Il y a, dans le projet de loi, toute une série de batteries, de sauvegardes, qui font que ce pouvoir doit être exercé d'une façon impartiale, et non pas à l'en-contre des intérêts des employés.

En plus deça, pour ce qui est des employés syndiqués, ce sont les conventions collectives qui priment les règlements du ministre. En ce qui concerne le pouvoir qu'ont les associations syndicales de négocier librement les conventions collectives de travail, nous maintenons intégralement le champ actuel des négociations. Je vous accorde le point particulier sur la rétrogradation, qui est un cas spécifique, et je vous ai dit là-dessus et je vous le redis encore: La rétrogradation sera incluse dans l'aire des négociations clairement, de la même façon, par exemple, que le congédiement. Je pense que ça répond à une de vos préoccupations particulières, c'est-à-dire que cet aspect des choses sera autant négociable à l'avenir pour vous qu'il l'a été pour les autres syndicats. Ce droit sera garanti dans la loi et non pas, comme essayait de le faire croire tantôt le député de Portneuf, par l'arbitraire ministériel.

M. Pagé: Je le soutiens et l'avenir va le démontrer.

M. de Belleval: J'ai dit que ce sera fait conformément aux promesses et aux déclarations que j'ai faites, qui sont enregistrées, d'ailleurs, au journal des Débats et ailleurs, et qui ne...

M. Pagé: Ce n'est pas toujours vous qui allez être là...

M. de Belleval: ... peuvent être plus claires. On verra ça quand on en arrivera à l'étude, article par article, du projet de loi. Vous pourrez toujours me la remettre dans le visage à ce moment-là.

M. Pagé: Dans la pipe. On va en faire, des amendements. Préparez-vous!

M. de Belleval: Je pense que c'est un point important pour vous. Je le conçois que c'est un point important et, d'ailleurs, j'ai dit que ce sont des choses tellement délicates, à mon point de vue, sur le plan de la sensibilité des employés, que c'est normal que ce soit exclusivement prévu dans le cadre des conventions collectives, et ce le sera, et il y aura une disposition qui le garantira.

En ce qui concerne les autres aspects, par exemple, la consultation en matière de classification, l'aménagement du mécanisme de promotion, toutes ces choses relèvent déjà, actuellement, de la volonté gouvernementale et, de ce point de vue, il n'y aura pas de changement. Bien entendu, encore, dans le courant des négociations collectives et au seul titre des négociations collectives, non pas au titre d'une loi qui existerait actuellement, parce qu'il n'y en n'a pas là-dessus, on va continuer à en discuter et mettre dans les conventions collectives des dispositions particulières qui vont prévoir des mécanismes de consultation, etc., sur un tas de choses, mais la loi, de ce point de vue, ne change pas le statu quo; elle le maintient intégralement.

C'est la bonne foi des parties, dans le passé, qui a fait que ces choses ont été mises dans vos conventions collectives et ça va continuer. C'est évident que, si un ministre arrivait et n'était pas de bonne foi, s'il ne voulait pas que ces dispositions apparaissent dans les conventions collectives, il aurait toujours le droit de le faire. Tout ce que je tiens à vous dire là-dessus, c'est qu'il pouvait ne pas le faire non plus dans le passé, la loi ne disait rien là-dessus. Ce n'est pas en vertu de la loi que ces choses se font. C'est en vertu de la bonne foi, et la bonne foi, ça ne se légifère pas, vous le savez. C'est le résultat d'un processus de négociation normal.

Pour ma part, je dis qu'avec ces deux précisions, celle sur la rétrogradation, plus celle sur la garantie de l'aire des négociations en vigueur, une grande partie, la partie principale de vos revendications est satisfaite. Je sais, par ailleurs, que vous aimeriez que l'aire des négociations soit plus large qu'elle ne l'est déjà en vertu des lois en vigueur. Là-dessus, je vous dis que ce n'est pas le but du projet de loi no 53, ce n'est même pas le but de cette commission de discuter de ces aspects. C'est le but du mécanisme enclenché par la mise sur pied de la commission Martin. Quand la commission Martin aura remis son rapport, s'il y a des modifications à faire, ce ne sera même pas au projet de loi no 53 qu'elles seront faites, ce sera à la Loi sur le régime syndical, qui sera instituée à la suite de l'application éventuelle, de l'approbation éventuelle du projet de loi no 53 et qui comprendra toutes les clauses en vigueur qui, justement, traitent du droit de négociation, de l'aire des négociations, de l'accréditation, etc.

Je pense que j'ai été très clair là-dessus. Vous-même, je pense, l'avez reconnu, au moins au niveau des déclarations de principe, mais c'est justement à ce niveau qu'on en est pour l'instant.

Quand on sera en discussion, article par article, du projet de loi en commission parlementaire, évidemment, on verra comment la formulation précise doit refléter ces intentions.

Il vous sera toujours loisible à ce moment de critiquer cette formulation si vous pensez qu'elle n'est pas conforme aux intentions que j'ai exposées.

Je pense que l'important, pour l'instant, pour faire progresser le débat, au moins sur ces deux choses fondamentales, c'est que je vous dise clairement ce qui en est, et comme je vous ai dit, clairement, ce qui en est, c'est que nous allons maintenir intégralement l'aire des négociations en vigueur et nous allons faire en sorte que la clause de rétrogradation fasse l'objet des conventions collectives et non pas d'une réglementation qui enlèverait le droit aux syndicats de négocier une telle clause.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du syndicat.

M. Caplette: Merci. Au niveau de la rétrogradation, on ne demande pas de pouvoir en appeler devant un arbitre. On demande qu'on puisse négocier toute la question de la rétrogradation et que les règlements que vous pourriez faire ou qui pourraient être faits ou qui existent peut-être — je ne le sais pas — en vertu de l'article 88, ne s'appliquent pas.

Si vous nous donnez un droit d'appel sur la rétrogradation devant un arbitre et que, par contre, les règlements sur la rétrogradation continuent de s'appliquer, on tombe encore dans le même panneau. On n'est pas plus avancé.

M. de Belleval: J'essaie de vous suivre. Voulez-vous dire par là que...

M. Caplette: Vous avez le droit de réglementer.

M. de Belleval: Si vous refusez, dans le cadre de vos négociations collectives...

M. Caplette: Vous n'aurez pas le choix de...

M. de Belleval: ... de refuser une clause de rétrogradation, vous voudriez que le gouvernement s'interdise le droit de décréter une telle clause unilatéralement? C'est cela?

M. Caplette: Je ne vais pas jusque là. On est contre le principe de...

M. de Belleval: C'est cela.

M. Caplette:... ce que je sous-entends à l'article 81,4M est contre le principe d'une façon générale pour les motifs qu'on a expliqués. Indépendamment de cela, si vous rendez la rétrogradation négociable, il faudrait que tout ce qui entoure la rétrogradation, la réaffectation ou le reclassement ou le recyclage soit négociable, autant les modalités qui vont entourer la réaffecta- tion ou la rétrogradation que l'appel lui-même à un certain moment devant l'arbitre.

Nos propos ne sont pas... Je veux bien expliquer ma position. Si cela figure à un certain moment dans le projet de loi, on va être bien content de l'entendre.

M. de Belleval: Je suis d'accord avec vous là-dessus.

M. Caplette: Pour ce qui est de la question de l'aire des négociations, quant à nous, on ne veut pas s'obstiner sur des points-virgules très longtemps... Regardez attentivement vos amendements et le projet de loi et, dans la formulation actuelle, selon nos conseillers juridiques et l'étude qu'on en a faite, selon nous, cela touche à l'aire des négociations. C'est notre interprétation de ce qui est sur la table.

Si, effectivement, en deuxième lecture ou en troisième lecture, c'est modifié en cours de route et que cela devient plus clair et qu'il n'y a pas d'ambiguïté, il y en a, à l'article 119, en bas, on parle de sujet, à moins que, etc., cela ne nous apparaît pas clair du tout, dans l'analyse qu'on a faite avec nos conseillers juridiques et... précisément, selon nous, cela touche l'aire des négociations, si, effectivement, au bout du compte, cela n'y touche pas, cela n'y touchera pas. C'est ce qu'on en pense.

M. de Belleval: Bon. Alors...

M. Caplette: Pour passer à un autre sujet, j'aimerais vous poser une question.

M. de Belleval: D'accord. Juste là-dessus, pour terminer... Je suis d'accord avec vous que, premièrement, le principe est clair et on se comprend sur le principe. Quant à la formulation, nous aussi, de notre côté, on réétudie d'ailleurs toute cette formulation que, lorsqu'on arrivera à l'étude article par article, cela soit encore plus clair que cela ne l'est déjà, si nécessaire; sur le principe, je pense qu'on se comprend.

M. Caplette: Si on se comprend sur quelque chose, peut-être allons-nous nous comprendre sur autre chose tantôt.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Portneuf, vous vouliez continuer. Je vous demanderais...

M. Pagé: Oui, je vais filer vite vite. Je vous le promets.

Le Président (Mme Cuerrier): Je vous demanderais de faire rapidement, pour que d'autres personnes aient la chance de poser des questions aux représentants du syndicat.

M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Vous savez, Mme le Président, que vous avez toujours ma collaboration. Je vais faire vite.

A la page 27 de votre mémoire, vous dites que, d'autre part, la destitution, la révocation et la rétrogradation sont introduites pour les employés se trouvant dans l'incapacité d'agir. Je ne ferai pas état des sombres desseins du ministre. Vous posez la question suivante: Visent-ils les cas d'invalidité? Dans le cas de votre syndicat, il va de soi qu'il y a plus de risques pour un agent de la paix, un agent de conservation de la faune que peut-être pour un autre travailleur de la fonction publique que, par des situations données, des accidents, des circonstances ou autres un de vos employés souffre d'incapacité et d'invalidité pour une période déterminée.

Vous vous posez des questions là-dessus. Je pense que vous êtes en droit de vous en poser, c'est normal de vous en poser. Qu'on prenne le cas du gardien de prison, par exemple, ou de l'agent de conservation de la faune qui, à la suite d'une émeute dans le cas du gardien de prison ou d'une attaque dans le cas de l'agent de conservation de la faune, ou d'un accident en forêt, qui a 18% ou 20% d'incapacité physique dans une jambe ou ailleurs, c'est possible que ce type ne soit plus capable de remplir sa fonction comme il l'occupait avant. Vous avez certainement posé des questions au ministre, dans les échanges que vous avez eus. Vous vous êtes certainement interrogés. Est-ce que vous avez eu des réponses précises sur cette question?

Le deuxième volet de ma question, j'y arrive... C'était le premier volet, Mme le Président. Le deuxième volet, dans la dernière minute qui me reste, vous faites part, aux pages 11, 28 et 29, de la question du stress. Ce problème est très bien cerné, très bien indentifié. Il va de soi que c'est peut-être plus stressant — je pense qu'il faudrait que les membres de la commission en prennent conscience — pour un agent de la paix, ou un gardien de prison, ou un gardien de l'Assemblée nationale que le type qui est sur une balance de la voirie, par exemple. On ne sait pas quand on peut se faire attaquer dans une prison, etc.

Le problème, vous l'avez très bien cerné, je pourrais en parler plus longtemps, mais mon temps est limité. Vous faites état des recommandations précises du rapport DuBois. Est-ce que vous avez eu l'assurance, de la part du ministre, que les recommandations du rapport pourront être éventuellement mises en place, adoptées et mises de l'avant?

D'autre part, ne croyez-vous pas que cette question du stress, en raison de la fonction elle-même, pourrait entraîner une possibilité de révocation, de destitution ou autre toujours au sujet de ce problème qui est quand même inhérent à la fonction? Je pense que le contexte dans lequel vos membres ont à évoluer est assez particulier, qu'il devrait y avoir un aspect particulier dans le projet de loi ou dans la position du ministre sur ces sujets. Est-ce que vous avez eu ces assurances du ministre et quelles sont vos recommandations sur ces sujets? Là-dessus, Mme le Président, j'arrête, cela fait deux minutes et demie.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du syndicat.

M. Caplette: Au niveau de la rétrogradation, on est en négociation et, effectivement, le gouvernement a déposé une clause de rétrogradation avec diminution de traitement pour les cas d'invalidité. On l'a rejetée. Le comité de négociation est en consultation. Effectivement, il n'a pas encore été reconnu d'une façon précise. On n'a pas eu d'entente là-dessus. On trouve complètement aberrant, par exemple, de rétrograder un gars qui a travaillé 25 ans dans une prison, quand il s'est usé à la "job" — il y a les facteurs de stress professionnel et le contexte qui entoure cela — de diminuer son traitement et de l'envoyer ailleurs. C'est casser sa carrière.

Au niveau de la négociation d'une convention collective, on n'a pas d'assurance du ministre là-dessus et on n'en a pas non plus au niveau de l'introduction de certaines recommandations du rapport de Pierre DuBois et associés. Par exemple, il est question, à un moment donné, d'un service de santé professionnel et le tout petit bout de chemin que la partie patronale a fait, c'est d'être d'accord sur le principe d'un comité conjoint pour étudier la possibilité qu'il y ait un service professionnel de santé. On en est très loin. Je ne sais pas si c'est l'endroit pour discuter du contenu de la négociation actuellement. On a eu des offres finales globales le 21 octobre et on s'en va vers une consultation des membres. Effectivement, on est très loin du ministre et nous n'avons pas eu d'assurance dans le sens que vous le demandez, pas du tout. On en est très loin.

M. Pagé: ... c'est le temps.

M. Caplette: II y a eu, à un moment donné, quelque chose de déposé au niveau des accidents du travail. Peut-être que dans le cas des accidents du travail, s'il y a de la place, on sera réaffecté avec plein traitement, s'il y a de la place. Ce n'est pas du tout une chose impérative. C'est un voeu pieux, mais s'il n'y a pas de place, on va se servir de la rétrogradation, on va diminuer notre salaire et on va être envoyé un peu partout, signaleur sur la 20 ou ailleurs. C'est un objet qui est...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre de la Fonction publique.

M. de Belleval: Je pense que M. Caplette a répondu. Il savait quelle réponse, en fait, il fallait donner à la question que lui-même s'était posée, à savoir est-ce que c'est vraiment le lieu ici pour discuter de ces questions. La réponse, évidemment, c'est non. Actuellement, votre syndicat est en négociation avec le ministère de la Fonction publique et c'est dans le cadre de la table de négociation que ces questions doivent être discutées. C'est justement...

M. Pagé: C'est relatif... M. de Belleval: Bien non.

M. Pagé: Bien oui.

M. de Belleval: Cela n'a rien à voir avec la loi, puisque tout ce que la loi détermine là-dessus, c'est un cadre, et le cadre approprié, c'est la négociation collective. Ensuite, au niveau du contenu particulier précis, c'est dans le cadre des conventions collectives que toutes ces choses doivent être réglées, comme elles l'ont été avec les autres syndicats, d'ailleurs.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Merci, Mme le Président.

M. Pagé: Je m'excuse auprès de mon collègue, M. le ministre a peut-être omis de répondre à la deuxième partie de ma question sur le dépôt du rapport DuBois.

M. Le Moignan: II va répondre après.

M. de Belleval: C'est la même réponse, M. Caplette le sait très bien. Le rapport DuBois est un instrument intéressant pour discuter de ces questions dans le cadre de la table de négociations collectives qui existe actuellement. Cela n'a rien à voir avec la Loi de la fonction publique comme tel. Je pense que là, on mélange les choux et les raves.

M. Pagé: Relisez votre article et vous pouvez...

M. de Belleval: Je comprends le député de Portneuf, il n'est pas tellement familier avec ces choses-là et il mélange tout. Mais...

M. Pagé: M. le Président, demandez donc au ministre... D'ailleurs, ces gens-là avaient la même interprétation que moi...

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, M. le député...

M. Pagé: Les bons juristes donnent les mêmes interprétations des lois.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre!

M. Pagé: Ne soyez pas inquiet là-dessus. En toute humilité, M. le ministre.

M. de Belleval: Ramenez votre doigt, vous allez vous le faire couper.

M. Le Moignan: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): C'est M. le député de Gaspé qui a maintenant la parole. M. le député.

M. Le Moignan: Je vous remercie une fois de plus.

M. de Belleval: J'avais quelque chose à dire là-dessus, peut-être une dernière chose avant...

Le Président (Mme Cuerrier): Vous permettez, M. le député?

M. Le Moignan: Pour M. Caplette, oui, pour les autres, non.

M. Pagé: Pas pour moi?

M. Le Moignan: Non, pas pour le député de Portneuf.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du syndicat.

M. Caplette: J'ai une question à poser à M. le ministre; je suis bien d'accord pour ne pas amener tout le contenu de la négociation ici. Le fait que vous ayez déposé dans le projet de loi, à l'article 88, la rétrogradation, la révocation, etc, vous me dites: d'accord, cela devrait être négocié à la table de négociation des agents de la paix; mais le dépôt de ce fameux article 88 sur la rétrogradation dénote quand même, je suppose, les intentions du gouvernement du Québec ou du ministre d'un tel principe de rétrogradation et de révocation pour insuffisance professionnelle. C'est ce que je voulais souligner et vous faire remarquer de nouveau...

M. de Belleval: Je ne l'ai pas inventé d'ailleurs, je l'ai repris des conventions collectives en vigueur, négociées par l'ancien gouvernement de ce point de vue. Ce n'est pas moi qui ai inventé le principe de la rétrogradation. Là-dessus, je pense qu'on s'est expliqué suffisamment tantôt et qu'on s'est bien compris sur le fait que ça fait l'objet de vos négociations collectives. Cela ne fait pas l'objet d'une réglementation qui enlèverait ça du champ des négociations collectives.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Je reviens, Mme le Président, une fois de plus, et j'espère continuer jusqu'au bout, surtout à cause de nos intervenants.

Le Président (Mme Cuerrier): On ne vous laissera pas tomber pour la troisième fois, M. le député de Gaspé.

M. le Moignan: Non, mais étant donné qu'ils sont ici pour la troisième fois, eux, je voudrais leur éviter le supplice de revenir demain pour la quatrième fois. Ce serait pire ou que leur tour soit remis sine die et qu'ils soient appelés dans un mois comme la fonction publique. C'est pour ça que j'admire leur courage, leur patience, leur franchise, leur conviction, parce que ce mémoire est passablement bien préparé. C'est peut-être ce qui est frappant, depuis le début des audiences de cette commission, contrairement à la commission sur la langue, tous les intervenants, sans exception, sont inquiets. Ils ont tous un point d'interrogation. Je comprends un peu votre position, parce que vous avez à traiter avec

l'employeur, avec l'Etat et en même temps avec le ministre qui symbolise un peu, je ne voudrais pas employer la comparaison du député de Portneuf, avec sa couronne, qui symbolise...

M. Pagé: En termes juridiques, c'est vrai.

M. Le Moignan: En termes juridiques, c'est vrai.

M. Pagé: La couronne de sa majesté.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, M. le député de Portneuf!

M. Le Moignan: Le député de Portneuf a une démangeaison ce soir, mais ce n'est pas la première fois; de toute façon, c'est très bien.

M. Pagé: Cela n'a pas de bon sens ce projet de loi, vous le savez.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, M. le député, à l'ordre!

M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Je remarque que vous avez la science du doute; tous les autres groupes l'ont eue avant vous; vous vous sentez enfermé dans une espèce de carcan, il y a chez vous une atteinte au syndicalisme et je crois qu'il est bon que vous en fassiez mention au ministre. D'autres groupes reviendront après vous et ils auront encore les mêmes préoccupations. Quand on regarde la fonction publique, les différents intervenants, surtout vous, vous êtes des agents de la paix, vous auriez été mal venus d'écrire, en première page cet adage: Si tu veux la paix, prépare la guerre.

Autrement, on ne vous aurait pas pris au sérieux. Votre patience indique que, pour des agents de la paix, même si on vient de loin, j'en vois qui sont des agents de pêcheries, par exemple, qui n'ont peut-être pas la crainte, l'inquiétude, de se faire assommer dans une prison, mais qui pourraient se faire dévorer par un requin, par exemple, même si on est gros, même si on est...

M. de Belleval: Se faire avaler par une baleine.

M. Chevrette: Cela avale des tout petits poissons aussi.

M. Le Moignan: Se faire avaler par une baleine, ou encore, se faire apostropher par un manigaud. On ne sait jamais, les manigauds, cela dévore, c'est mauvais. Il y a un monsieur là-bas qui pourrait vous en dire quelque chose.

M. de Belleval: ...

M. Le Moignan: Vous me retardez tout le temps et vous êtes pressé.

M. Chevrette: Jonas dans la baleine.

M. Le Moignan: Mais vous êtes inquiets pour l'avenir de votre syndicat et je vous comprends. Vous avez mentionné — je ne veux pas tout reprendre ce qui a été dit — que ce soit la question du mérite, les nombreuses questions que vous venez de poser, d'autres groupes les ont posées avant vous et ces groupes attendent toujours une réponse. Si vous partez avec la réponse, vous êtes chanceux. Vous allez avoir le don de toucher le coeur du ministre. Et le ministre, sous des dehors tellement chaleureux, tellement sympathiques, conserve un intérieur plutôt glacial. Vous allez le sentir, vous l'avez déjà senti depuis que vous êtes ici. Je sais que vous avez une convention, j'ai regardé cela un peu, et vous vous sentez un peu brimés. Vous craignez que le pouvoir du ministre soit trop grand, avec l'abolition de la Commission de la fonction publique et, en ayant affaire au ministre, à ce moment-là, vous n'avez plus aucune sécurité.

On a parlé beaucoup de patronage dans le passé. Maintenant, le patronage du ministre est beaucoup plus inquiétant, parce qu'il sera, comme l'a dit mon confrère de Johnson, un tsar. C est un mot sur lequel il est revenu souvent et je crois que c'est inquiétant pour eux. Ils ont p sur, ils craignent pour l'avenir.

Quand on regarde les concours, cette impartialité... Je ne pose pas de question, M. le ministre, j'en viens à ma question. Je fais juste un préambule. Je veux vous préparer, M. le ministre, pour répondre à leurs questions.

M. Pagé: M. le député de Gaspé, le tsar, cela venait du député de Jean-Talon. La vraie identification, cela venait des libéraux.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre! A l'ordre, M. le député de Portneuf! Vous ferez cette mise au point...

M. Le Moignan: Pour toutes ces choses, sur les aspects qu'ils ont touchés, qui n'ont pas encore eu de réponse, je sais que le ministre réfléchit. Vous voyez, le ministre est revenu, il a le sourire. Tout à l'heure, il était inquiet, il était nerveux, et là, il est calme. I! a eu le temps de mijoter ses réponses. Vous allez les avoir, mais pas c 3 soir. De toute façon, cela arrivera un jour.

Vous avez mentionné des articles tout de même assez importants. Les articles 70, 80 et 88; je ne peux pas les reprendre, mais c'est le point névralgique de toute votre affaire. Qu'il s'agisse de révocation, de destitution, de classification, de promotion, tout joue là-dedans et, en définitive, tout cela va dépendre d'un seul homme. Qu'il soit ministre dans le gouvernement actuel ou dans un futur gouvernement, quelle que soit la couleur ou l'allégeance politique, je pense qu'il y a là quelque chose pour nous inquiéter. Mais c'est parce que vous avez cette science du doute qu'il est bon que vous posiez vos questions.

On a mentionné, la dernière fois, que le ministre aurait dû attendre le rapport de la commission Martin, j'y reviens encore — on l'a mentionné tout à l'heure, et c'est très important — autrement, on risque de faire fausse route.

Ma question, pour n'en poser seulement qu'une, vous avez parlé de matraque et de toutes ces choses-là, je sais très bien ce que vous voulez dire, je n'ai pas besoin de l'expliquer, tout le monde l'a compris, mais cette question du mérite, telle que vos questions sont formulées, si on regarde ce qui se faisait antérieurement, quelles sont vos craintes pour l'avenir, quand c'est un seul homme qui est roi et maître de toute cette situation?

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du syndicat.

M. Caplette: Le problème avec le mérite, cela a semé plusieurs interrogations, on ne sait pas exactement ce que cela veut dire. On entend parler de compétence, mais il n'y a rien, actuellement, dans la loi, telle qu'elle est faite, qui va garantir, selon nous, que les gens les plus compétents vont être nommés. C'est d'autant plus vrai que finalement, une personne qui se croirait lésée par une décision d'un jury, ou des personnes qui vont la nommer à une promotion, n'a aucun mécanisme d'appel prévu pour savoir si, effectivement, c'est le plus compétent — je n'emploierai pas le mot méritant, parce que cela sous-entend un paquet de choses — il n'y a absolument rien dans la loi, qui garantit que le plus compétent va être nommé.

La meilleure façon de le garantir, c'est de permettre à la personne qui a passé un cou-cours, qui se croit la plus compétente et qui n'a pas été nommée, d'en appeler par un mécanisme quelconque. Cela n'existe pas dans le projet de loi. Il n'y a rien qui garantit cela dans le projet de loi. Il y a la commission qui voit à l'application de la règle du mérite, mais, au niveau de la compétence, le projet de loi dit que le plus compétent doit être nommé. Cependant, il n'y a rien qui garantit un mécanisme d'appel à ce sujet dans le projet de loi. C'est pour cela qu'on dit que la question de la compétence ou du mérite est illusoire.

M. de Belleval: II y a l'appel, M. Caplette, qui est prévu.

M. Caplette: On est trois ici. On passe un concours. Si je pense être plus compétent que lui et qu'il est nommé, je ne peux en appeler à une tierce partie ou à une tierce personne pour lui demander de vérifier si c'est vrai, à moins qu'il y ait eu irrégularité ou qu'il y ait eu des vices de forme. Si cela apparaissait dans la loi, selon nous, ce serait la garantie que le plus compétent serait nommé. Avec la subdélégation, toute la ramification qu'il va y avoir dans l'application de cela et les textes réglementaires qui vont exister à ce sujet, il n'y a pas de garantie. Indépendamment de cela, il y a actuellement des vices de forme importants qui existent et des personnes incompétentes siègent à des jurys qui nomment des candidats aptes à des promotions. Le projet de loi ne corrige pas cela encore. Il va peut-être le corriger à long terme, mais c'est un apport de gestion.

M. de Belleval: Voulez-vous répéter, s'il vous plaît?

M. Caplette: Le point névralgique, c'est que les candidats ne peuvent pas en appeler, si ce n'est pas le plus compétent qui est nommé.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre de la Fonction publique.

M. de Belleval: Je pense que là encore il est important de voir les mécanismes nouveaux qu'introduit le projet de loi, qui assurent une impartialité beaucoup plus grande, qui renforcent les mécanismes, qui protègent le fonctionnarisme contre l'arbitraire et le favoritisme et qui rendent le fonctionnement de la loi beaucoup plus transparent que la loi actuelle.

En fait, quand j'ai rédigé ce projet de loi, j'ai pensé qu'un jour, évidemment dans beaucoup d'années, un nouveau gouvernement, un nouveau parti pourrait accéder...

M. Pagé: D'ici trois ans à peu près. Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre!

M. Pagé: Regardez les sondages, même pas, deux ans et demi, tout de suite après le référendum.

M. de Belleval: ... et qu'évidemment, par malheur, dans un moment de faiblesse, il...

M. Le Moignan:... le pouvoir à Montréal...

M. Pagé: 3000 personnes, en fin de semaine.

M. de Belleval: ... pourrait arriver qu'un très mauvais ministre...

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. de Belleval:... de la Fonction publique accède à la fonction. C'est pour cela qu'il y a, dans le projet de loi, des mécanismes nouveaux qui font reculer l'arbitraire et le favoritisme, mais, évidemment, je comprends que le député de Gaspé fasse semblant de ne pas les voir, parce qu'à ce moment-là il serait obligé d'admettre que la loi est bonne et l'Opposition ne peut pas admettre qu'une loi est bonne.

M. Le Moignan: Ah!

M. de Belleval: C'est normal. J'aimerais...

M. Le Moignan: Quand la loi est bonne, on le dit, nous autres de l'Union Nationale.

M. de Belleval: ... expliquer un certain nombre de choses. Cela répondra, je pense, explicitement aux remarques que votre mémoire soulève, entre autres, sur toute la question des concours.

Tout d'abord, les pouvoirs du ministre ne sont pas discrétionnaires. Il ne peut décider de gérer la fonction publique par simples directives administratives. Il faut qu'il le fasse dans un cadre réglementaire, un cadre stable. Ce cadre, ces règlements ne sont pas adoptés en catimini, ils sont publics et ils doivent être soumis à l'avis d'une commission indépendante, commission qui, contrairement, à la commission actuelle ne sera pas nommée par le gouvernement, mais sera nommée par l'Assemblée nationale. Vous faites une remarque d'ailleurs sur le terme d'office. Vous aimeriez que le terme soit plus long de façon à assurer encore davantage cette indépendance. Je trouve que c'est une remarque intéressante. On va se pencher aussi sur cet aspect de la question.

Donc, une commission indépendante donne son avis. Cet avis ne tourne pas en vase clos comme c'est le cas actuellement en vertu de la loi actuelle, mais il est transmis à l'Assemblée nationale, ce qui répond d'ailleurs à une critique qu'on fait souvent aux lois-cadres. On dit que les règlements ne sont pas soumis à l'Assemblée nationale pour pouvoir faire l'objet de l'étude, par exemple, d'une commission parlementaire, s'il y a lieu.

Ensuite, cette nouvelle commission de la fonction publique a le pouvoir d'enquêter, de sa propre initiative, sur tout aspect du fonctionnement de la loi. Par exemple, si un concours est entaché d'une irrégularité, si on pense qu'un jury n'a pas été formé d'une façon impartiale, quelqu'un peut se plaindre, ou la commission elle-même peut faire enquête. Les résultats de ces enquêtes sont publics et peuvent être embarrassants justement pour un gouvernement, ou pour un ministre, ou pour un fonctionnaire qui n'aurait pas suivi les prescriptions de la loi de ce côté.

Finalement, on en arrive au principe du mérite au niveau des concours. Vous faites un tas de remarques là-dessus. Comment seront constitués les jurys? Quels seront les critères? etc.

Je tiens à vous dire là-dessus qu'il n'y a aucune loi de la fonction publique, n'importe où dans le monde, qui met dans la loi même, qui répond dans la loi même aux questions que vous vous posez. Toutes ces choses doivent être déterminées par voie réglementaire. De ce point de vue, on suit la pratique générale, sauf que, comme je l'ai dit, il y a un organisme autonome, indépendant qui va surveiller le fonctionnement de cela, alors qu'actuellement, qu'est-ce qu'on a? On a un organisme qui est à la fois juge et partie, un organisme qui fait des concours. Si on se plaint de la qualité de ces concours, il faut s'adresser au même organisme qui vérifie si son concours est bon ou n'est pas bon. Cela s'appelle être juge et partie dans sa propre cause. C'est contraire à tous les principes de notre droit administratif. De ce côté, la loi met fin à cette pratique. A l'avenir, il y a un ministre qui exécute. Il y a un chien de garde qui le surveille en faisant rapport à l'Assemblée nationale, qui est le chien de garde ultime dans notre système démocratique.

En ce qui concerne la règle du mérite, on reprend des dispositions qui sont déjà en vigueur, les concours doivent être ouverts à tous ceux qui peuvent être admissibles. Ces concours doivent être de nature, comme c'est écrit dans la loi actuelle, à constater impartialement la compétence ou le mérite ou l'aptitude ou la valeur des candidats. Troisièmement, les nominations doivent être faites conformément aux résultats de ces concours, contrairement à la pratique actuelle où on peut faire du patronage par en arrière en ne nommant pas quelqu'un, même s'il a réussi un concours, et en nommant n'importe qui, peu importe sa compétence, à la suite du concours. Finalement, il y a un droit d'appel qui est permis sur la régularité du processus, ce qui n'existe pas en vertu de la loi actuelle. Bien sûr, vous dites que ce processus d'appel ne porte pas sur le contenu même du jugement du jury. C'est bien évident. Il n'y a aucune loi dans le monde qui traite de cette question, qui comprend les mêmes dispositions et qui permet un appel sur le jugement même du jury, parce que cela serait absurde. Cela reviendrait à dire que des gens de l'extérieur, un tribunal d'appel qui n'a pas suivi tout le processus pourrait substituer son jugement au jugement d'un jury régulièrement constitué. Cela n'existe nulle part. Ce qui est quand même très important, c'est de permettre un droit d'appel sur la régularité du processus; par exemple, on ne pourra plus exclure un fonctionnaire de l'accès à un concours de promotion si, normalement, il a le droit d'avoir l'accès à ce concours de promotion. S'il y a un conflit d'intérêts entre des membres du jury et des fonctionnaires qui sont jugés devant ce jury, le concours pourra être annulé et ces gens pourront être disqualifiés, etc. Je pense, Mme le Président, que tout cela constitue un progrès remarquable par rapport à la loi actuelle qui fera que le fonctionnement, l'administration de la gestion de la fonction publique devra se faire dans un contexte beaucoup plus transparent que maintenant. Je comprends pourquoi l'Opposition n'est pas tellement favorable à cela. Elle se dit: Si jamais on prend le pouvoir, on va être pris pour gouverner au grand jour. Ces gens n'ont jamais aimé cela.

M. Pagé: Mme le Président, vous avez noyé le poisson de la question...

M. Le Moignan: On va fermer la radio de Portneuf une seconde, madame, et on va prendre le poste de Gaspé. J'ai une dernière question.

M. Pagé: Je peux vous aider?

Le Président (Mme Cuerrier): Rapidement, M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Une dernière question qui demande une longue réponse, mais je la veux courte. Vous êtes en train de négocier, je crois, dans le moment. C'est votre petit bouquin, je ne vous demande pas de lire cela page par page. Quand vous regardez le projet de loi 53, est-ce que l'affrontement est difficile, pénible ou si cela s'annonce prometteur?

M. de Belleval: Mme le Président, je pense... Mais ça ne me fait rien qu'on y réponde, sauf qu'on perd du temps précieux pour discuter du projet de loi no 53.

M. Le Moignan: Non, j'ai demandé une réponse très courte, M. le ministre.

M. de Belleval: D'accord.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le président du syndicat.

M. Caplette: Au niveau de la négociation, on a eu des offres finales le 21 octobre, qui ont été refusées par le comité de négociation. On s'en va voir nos membres. Il est bien sûr que le ministre est à la fois le législateur, l'employeur, etc.

M. Pagé: Juge et partie, oui.

M. Caplette: ... juge et partie, si vous voulez. On n'a pas besoin de faire des grands dessins pour savoir...

M. de Belleval: Est-ce qu'il y a moyen de sortir de ce dilemme, M. le député de Portneuf?

M. Caplette: ... dans quel carcan on est pris actuellement. C'est bien sûr qu'on n'est pas proche d'un règlement — je le souhaite — je suis de bonne foi, le ministre aussi. C'est possible qu'on ait un règlement à un moment donné. Mais, bien sûr, l'employeur, au niveau de la rétro, a des intentions bien claires dans un projet de loi pour qu'on négocie finalement avec la même personne, et pour une question de rétrogradation, ça fait tout un poids avec lequel le ministre est bien placé pour négocier une clause par rapport aux syndicats. C'est pour ça qu'on a fait des remarques au sujet du projet de loi et on va continuer d'en faire au niveau de la négociation. Vous êtes à la fois employeur et législateur. C'est ça le problème des négociations dans le secteur public.

Je voudrais revenir à la question du mérite. Si on ne peut pas en appeler de la compétence, s'il n'y a pas de garantie que ce sera le plus compétent qui sera nommé, même s'il y a des règles qui existent, parce que ce sera finalement le ministre qui fera les règlements, je suis bien d'accord que la commission va regarder le mérite ou la compétence, mais, si on n'a pas la garantie d'en appeler sur le fait que le plus compétent va être nommé, quant à nous, ce sera l'arbitraire du mérite au lieu de l'arbitraire de la commission, parce qu'on n'aura pas de garantie. Il se fait des rapports...

M. de Belleval: II n'y a pas moyen d'en sortir.

M. Caplette: ... de jurys. Il y a un jury qui siège à Québec, il y a un jury qui siège à Montréal au niveau des inspecteurs, il y a des échanges entre fonctionnaires et ce sont ces mêmes fonctionnaires qui seront nommés. Ce sera un peu la question de "lécher le boss" pour avoir la promotion" parce qu'ils ne pourront pas en appeler et il pourra toujours y avoir des justifications et c'est très subjectif, un jury, et il n'y a pas de tests, il n'y a pas de règles bien précises qui existent, et si on ne peut pas en appeler, ce sera du patronage. Ce sera de la subdélégation, si c'est le directeur de la prison qui...

M. de Belleval: Avez-vous une solution à proposer là-dessus?

M. Caplette: Pardon?

M. de Belleval: Avez-vous une solution à proposer là-dessus?

M. Caplette: Que les membres puissent en appeler de la compétence de...

M. de Belleval: II n'y a aucune loi dans le monde qui permet ça et ce serait absolument impossible, puisque ça voudrait dire qu'on substituerait le jugement d'un autre jury, par exemple, à celui d'un premier jury. Il n'y a rien qui garantirait que le deuxième serait plus objectif que ie premier. Cela n'existe nulle part, M. Caplette, ce que vous demandez.

M. Caplette: Si on établit un...

M. de Belleval: Ce n'est pas pour rien que ça n'existe nulle part. C'est parce que ce n'est pas applicable.

M. Caplette: ...

M. de Belleval: Le seul appel qui peut être permis, qui n'est pas permis en vertu de la loi actuelle, mais qui le sera maintenant, c'est sur la régularité du processus. Cela n'existe nulle part dans le monde. Cela ne se peut pas non plus, ça se comprend bien.

M. Caplette: II y a des moyens et le rapport DuBois en soulevait, à savoir de rendre les concours de promotion, les jurys, une façon de procéder pour que ce soit le moins subjectif possible.

M. de Belleval: Je suis d'accord. Tout ça relève de la réglementation; ça ne relève pas de la loi.

M. Caplette: On parle au niveau de la loi actuellement. Si vous mettez dans la loi un appel pour savoir que quand ce n'est pas fait dans les formes et quand c'est fait dans les formes, c'est vérifiable, on demande que ce soit vérifié par un

appel, c'est-à-dire que ça apparaisse finalement dans les règlements au lieu d'une loi. Ce ne serait pas la même garantie, ce serait... C'est la seule façon, selon nous, pour assurer que les plus compétents seront nommés. C'est la seule façon qui existe. Dans les autres dispositions, cela peut devenir très arbitraire, surtout avec la subdélégation et la délégation qui vont exister au niveau des nominations et des promotions. Selon nous, ce n'est pas une garantie.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Joliette-Montcalm avait demandé la parole.

M. Chevrette: Mme le Président, j'ai plusieurs petites questions relativement courtes. Je voudrais précéder mes questions d'un petit préambule qui dit ceci:

A mon sens, c'est tout à fait normal que vous soyez un peu inquiet sur les bords, bien sûr, et que vous ne compreniez peut-être pas tout du premier coup...

Puis-je terminer?... En ce sens que le projet de loi est tellement galvaudé et charrié que vous en apprenez des bribes un peu partout. Je peux vous dire une chose. Il y a eu des réponses de données, il n'y a pas eu un dialogue de sourds ici. Il y a eu des réponses de données à plusieurs questions, dont une en particulier, l'aire des négociations, et je ne suis pas surpris qu'après une fois ou deux, une ou deux répétitions du ministre, cela soit encore ambigu. Cela fait une trentaine de fois qu'il le répète à la table et nos amis de gauche ne l'ont pas encore compris.

Donc, que vous autres — c'est la première fois — vous soyez un peu embarrassés, je le comprends personnellement, et je me permettrai de le répéter une autre fois en dernier.

La première question que je voudrais vous poser, c'est la suivante. Ai-je bien compris votre mémoire en disant que votre grand souci, le plus grand de vos soucis est de ne pas voir diminué le champ des négociations que vous avez actuellement diminué.

M. Caplette: Notre mémoire visait plusieurs choses. Entre autres choses...

M. Chevrette: Je parle de votre plus grand souci.

M. Caplette:... d'étendre le champ des négociations et à tout le moins, maintenir le champ actuel.

M. Chevrette: Je n'ai pas compris.

M. Caplette: D'étendre le champ des négociations dans le secteur de la fonction publique et à tout le moins, maintenir le champ actuel; si on change les règles du jeu, on dit simplement de les changer... Je donnais l'exemple de la classification tantôt. On change les règles du jeu dans la classification. Selon nous, cela touche l'aire des négociations. Qu'on la rende négociable parce qu'on change les règles du jeu.

M. Chevrette: Si j'ai bien compris, vous voulez, dans un premier temps, au moins maintenir le champ actuel, quitte plus tard, à le voir agrandir. C'est bien cela?

M. Caplette: Dans les premières pages de notre mémoire, lorsqu'il a été préparé et on maintient encore notre position, on trouve que lors d'une réforme de la Loi de la fonction publique, quant à toucher à cela, on aurait dû étendre le champ des négociations pour bien faire les choses dans un ordre de grandeur, pour ne pas les faire à la pièce et notre mémoire dit bien clairement qu'on doit étendre le champ des négociations.

Il est bien sûr que si les règles du jeu sont une partie de notre objectif, on va atteindre une partie de notre objectif. Les objectifs sont d'étendre le champ des négociations. Il y a la commission Martin. Il y a bien des choses. On dit ce qu'on pense de tout cela. L'objectif est d'étendre le champ des négociations.

M. Chevrette: Etes-vous conscient, avez-vous lu ou avez-vous entendu des déclarations du ministre de la Fonction publique indiquant à plusieurs reprises: Le statu quo est au moins assuré dans l'aire des négociations?

M. Caplette: On y a fait allusion tantôt ici. On y a fait allusion à plusieurs reprises. M. le ministre a répété aujourd'hui qu'il ne voulait pas modifier l'aire des négociations. On dit qu'actuellement, avec le projet de loi et ses amendements tels que déposés, à cause de certains articles en particulier, du pouvoir réglementaire, l'analyse qu'on en fait est que cela touche l'aire des négociations.

M. Chevrette: Au-delà du texte que vous avez devant vous, le texte du projet de loi 53, si le ministre vous dit... Vous savez que c'est en troisième lecture qu'on amende un projet de loi, article par article, mais prenez-vous la parole du ministre selon laquelle le statu quo est au moins maintenu actuellement? Si vous vous refusez dès maintenant de prendre la parole du ministre, c'est vrai que cela va devenir un dialogue de sourds.

M. Caplette: J'ai pris tantôt la parole du ministre là-dessus.

M. Chevrette: Pardon?

M. Caplette: J'ai pris tantôt la parole du ministre là-dessus. Je lui ai tout simplement dit qu'actuellement, selon nous, le texte de loi et ses amendements ne voulaient pas dire cela. Si, ultérieurement, cela veut dire ça, je vais être bien content. Je ne suis pas pour me mettre... Je l'ai dit tantôt.

M. Chevrette: Vous allez être très contents. Je sais que vous avez un processus mental plus rapide que celui du député de Portneuf.

A la page 4 de votre mémoire, vous dites ceci: II n'en demeure pas moins que sa conséquence première est de remettre en question l'existence même du syndicalisme. Vous dites que le projet de loi 53 remet en question l'existence même du syndicalisme. Est-ce que vous pourriez me dire en quoi?

M. Caplette: Monsieur, quand j'ai vu la première fois le projet de loi et quand j'ai vu que l'approche que le gouvernement avait décidé de prendre allait jusqu'à enlever les premières choses qui se négocient dans les conventions collectives: le droit d'arbitrage, les congédiements et les mesures disciplinaires, on était en droit et c'était notre devoir et notre responsabilité de syndicalistes de se poser de drôles de questions parce que...

M. Chevrette: Dans quel article du projet de loi pouviez-vous interpréter que le droit à l'arbitrage d'un grief vous était enlevé? Ce que vous aviez lu à l'époque, l'article 52 par rapport à l'article 91. Est-ce que vous aviez lu, à l'époque, l'article 52a par rapport à l'article 91?

M. Caplette: C'était clair, quand le projet de loi a été déposé, avant que les amendements ne soient déposés, qu'on nous enlevait un droit de représentation qui est la première chose qu'un syndicat négocie quand il est accrédité, le droit d'aller devant un arbitre pour qu'il puisse juger les recours sur les mesures disciplinaires. Quand le projet de loi a été présenté, il représentait quand même, je présume, l'intention du gouvernement; à ce moment-là, en partant, il y avait ce droit acquis qui était enlevé. Cela nous a amenés à nous poser la question et à en' conclure que ce projet de loi mettait en cause l'existence même du syndicalisme, d'autant plus — je ne veux pas revenir sur ce que j'ai déjà dit — que toute l'approche réglementaire qui est dans ce projet de loi va très loin; ce n'est pas une question de se cacher des choses, le ministre de la Fonction publique est à la fois employeur et législateur. Cela fait un carcan qui est très lourd. L'argument principal des employeurs en négociation —je m'excuse d'y revenir — c'est déjà dans la loi, c'est déjà dans tel règlement, cela s'applique déjà à tel secteur, etc. A ce moment-là, on s'est posé la question: A quoi sert, finalement, un syndicalisme si on ne peut même pas aller devant un arbitre au niveau d'un congédiement pour mesures disciplinaires?

M. Chevrette: Est-ce que l'article 91 n'oblige pas le ministre, ne soustrait pas l'autorité du ministre uniquement... Je vais la poser autrement. Est-ce que le ministre de la Fonction publique n'est pas impliqué uniquement au niveau des objets qui font l'objet précis d'exclusions à l'intérieur de la loi 53 et que vous retrouvez à l'article 52?

M. Caplette: Le nouvel article 91 ou l'ancien?

M. Chevrette: Les numéros, vous me pardonnerez...

Une Voix: Cela ne change rien.

M. Chevrette: ... je ne sais pas si c'est le nouveau ou l'ancien, je les ai assez lus... Je sais que le Code du travail vous permet de négocier tout en soi, d'accord. Sauf qu'à l'intérieur de la Loi de la fonction publique, il y a une clause qui exclut des objets bien précis. Ce sont ces objets qui ne sont pas négociables. Le ministre n'a qu'un pouvoir de réglementation sur les objets qui sont exclus de l'aire des négociations. En vertu des articles 52 et 91, je les ai lus à plusieurs reprises, le ministre n'a pas le pouvoir d'intervenir dans les objets de la négociation. Est-ce que vous avez retrouvé l'arbitrage des griefs comme étant exclu de la négociation pour soutenir l'argumentation que vous soutenez présentement?

M. Caplette: J'ai déclaré tantôt qu'avec les amendements il était évident que l'arbitrage, les mesures disciplinaires, les appels de classement, les suspensions ou les congédiements maintenaient le statu quo. C'est un bout de chemin qui a été fait par le ministre. Je suis content qu'il l'ait fait. Quand on a écrit le mémoire au mois de septembre, on était convaincu que le projet de loi, tel que déposé, mettait l'existence du syndicalisme en jeu. C'était la négation de certains droits.

M. Chevrette: En d'autres mots, M. Caplette, en vertu de la déclaration du ministre, des échanges qu'il y a eus, de l'article 52, de l'article 91, si vous aviez à réécrire votre mémoire, vous ne vous serviriez plus de l'argumentation sur laquelle vous vous basiez pour écrire que le projet de loi constituait un danger énorme pour le syndicalisme lui-même?

M. Caplette: Est-ce que vous attendez sérieusement une réponse?

M. Pagé: Pouvoir réglementaire.

M. Chevrette: Est-ce que je pourrais... M. de Belleval: Le souffleur.

M. Chevrette: Pardon?

M. Caplette: Est-ce que vous attendez sérieusement une réponse?

M. Chevrette: C'est pour vous démontrer que je vous ai fait faire un cheminement pour arriver à ce que je pensais.

M. Pagé: Est-il fort, ce jeune homme? M. Le Moignan: II voulait le dérider.

M. Chevrette: Je ne peux pas être aussi fort que la duchesse de Portneuf, c'est impossible. Deuxième question, M. Caplette. Vous dites, "avec les nouveaux pouvoirs qui sont dévolus au ministre dans ce domaine, le Syndicat — c'est à la page 7, je crois — des agents de la paix de la fonction publique n'a aucune garantie de pouvoir faire valoir ses positions." Par rapport au statu quo qui est décrété — à la page 7, deuxième paragraphe, de l'article "Pouvoirs et réglementations concernant la classification" — vous dites que vous n'avez plus aucune chance de faire valoir vos positions. Mais ce n'est pas l'objet de ma question.

M. Caplette: On a dit, je l'ai explicité tantôt, qu'on n'avait aucune garantie de faire valoir nos positions. Je me suis fié à un comité consultatif. La commission a accepté, par le moyen d'un règlement, un comité consultatif sur la classification. C'est une garantie qu'on a, jusqu'à preuve du contraire. Ce n'est pas dans la loi, mais c'est la commission qui a le pouvoir, ce n'est pas le ministre.

Il y a un règlement qui a été fait, c'est-à-dire que la commission a accepté une demande, cela a été concrétisé dans les conventions collectives. On n'a pas de garanties, avec le nouveau projet de loi, qu'on va nous consulter avant qu'il y ait des modifications de classification. Il est possible que, par règlement, le ministre décide de maintenir une forme semblable de statu quo. Mais, de toute façon, on va perdre une partie dans ces comités consultatifs, qu'est la Commission de la fonction publique.

M. de Belleval: Juste un petit mot. Je suis d'accord avec vous que vous n'avez pas de garantie, en vertu du projet de loi. Tout ce que j'ai dit tantôt, c'est que vous n'en aviez pas plus en vertu de l'ancien projet de loi. Il n'y a pas de changement là-dessus. C'est la bonne foi des parties qui va s'appliquer.

M. Caplette: Cela a pris dix ans de représentations pour pouvoir avancer et faire des représentations qui se tiennent au niveau des classifications.

M. de Belleval: Oui, mais le projet de loi ne change rien par rapport à cela.

M. Caplette: Selon moi, on a des droits acquis et, dans la convention collective, ce sont des garanties de trois ans en trois ans pour lesquelles il faut se battre souvent, pour les reconduire. Ce sont des garanties qui existent dans la convention collective, qui ne sont pas dans la loi.

Là, on dit tout simplement, dans notre mémoire, au niveau de la classification, qu'avec le projet de loi, on n'a plus de garanties. On n'a plus de garanties, parce qu'il faut recommencer à zéro. La commission n'aura plus ce pouvoir, ce n'est pas elle qui va faire la classification, qui va réglementer pour faire les classifications, cela va être le ministre. C'est donc dire que la garantie qu'on a acquise avec des luttes de cinq ou dix ans, on ne l'aura plus. Il va nous falloir recommencer à zéro avec vous, M. le ministre, pour avoir droit d'être consultés au niveau de la classification.

M. de Belleval: Non, je ne suis pas d'accord avec votre interprétation. Je m'inscris en faux contre cela. Vous n'avez pas moins de garanties avec le projet de loi actuel qu'avec l'ancienne loi. Ce n'est pas en vertu de la loi que vous avez ces garanties, c'est en vertu de vos conventions collectives et en vertu de la bonne foi des parties.

Le Président (Mme Cuerrier): Je me vois dans l'obligation, messieurs...

M. Chevrette: Mme le Président, je ne sais pas si on prévoit... si vous nous permettez, avant que vous ne prononciez le mot fatal.

Le Président (Mme Cuerrier): Deux minutes pour remercier les...

M. Pagé: II est dix heures moins deux.

M. Chevrette: II est dix heures moins deux, Mme le Président.

Le Président (Mme Cuerrier): Rapidement, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Je voudrais demander une prolongation, étant donné que nous sommes seulement deux ou trois à avoir parlé, c'est assez odieux, il y a des gens qui viennent de loin, peut-être qu'en dépassant de quelques minutes, nous pourrions permettre à ces gens de teminer leur exposé ce soir, je trouverais cela très décent pour eux.

M. Pagé: Oui. Vous avez mon consentement, Mme le Président. On va arrêter l'horloge.

Le Président (Mme Cuerrier): Tout le monde sait bien que nous sommes assujettis à un nouveau règlement de l'Assemblée nationale, que nous avons des contraintes...

M. Chevrette: Je me suis informé auprès du leader de la Chambre...

M. Pagé: L'assemblée est souveraine, Mme le Président. Il y a consentement unanime, Mme le Président.

M. Chevrette: II y a consentement unanime.

Le Président (Mme Cuerrier): Pour terminer l'intervention...

M. Pagé: M. le député de Joliette, M. le député de Laurier et un petit mot pour terminer, s'il n'y a pas d'autres intervenants. On est d'accord. M. le député de Saint-Hyacinthe...

Le Président (Mme Cuerrier): Est-ce que vous êtes prêts à fixer un certain moment pour terminer?

M. Pagé: Dix ou quinze minutes.

M. Chevrette: Si cela dure trop longtemps, on invoquera un règlement quelconque.

M. Pagé: Dix minutes.

Le Président (Mme Cuerrier): II y a consentement unanime. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Vous venez de me répondre sur la question de la classification. Je vais passer à l'ancienneté. Vous avez fait miroiter que l'ancienneté pouvait être un des critères de promotion, tout en parlant de compétence. Vous avez accolé cela... A une réponse au ministre, vous disiez ceci, face à la rétrogradation: Advenant qu'on ait le pouvoir de négocier les critères de mutation, ou d'affectation, ou de réaffectation... Le principe comme tel de rétrogradation, est-ce que j'ai bien compris que vous l'acceptiez, pour autant qu'il y ait cette possibilité de négocier les retours, les réaffectations?

M. Caplette: Ce que j'ai dit au niveau de la rétrogradation, c'est qu'on est contre le principe de prendre un employé qui s'est usé pendant 5 ans, 10 ans, 25 ans sur le "job" et de l'affecter à un "job" qui comporte une diminution de traitement. On trouve le principe même de rétrograder des individus inacceptable, parce que, finalement, il doit y avoir des dispositions, quand, à un moment donné, un employé n'est plus capable de remplir sa fonction, pour qu'il puisse s'en aller chez lui pour invalidité ou autre chose. La responsabilité de l'employeur, à ce moment-là, est très grande.

Tout ce que j'ai souligné, c'est qu'on devrait beaucoup plus parler, à ce moment-là, non pas de rétrogradation, mais de réaffectation. C'est-à-dire qu'à un moment donné, peut-être qu'un agent de la paix devrait avoir un droit dans la convention collective qui dirait que, quand il aurait fait un certain nombre d'années, cinq ans ou dix ans, et que c'est évident que c'est le "job" qui l'a usé, il aurait une possibilité, à son choix, d'être réaffecté ailleurs. Cela dépend si c'est de l'usure professionnelle ou que... Cette possibilité, je l'ai tout simplement évoquée comme cela, mais, quand même, au niveau de l'invalidité, notre précision c'est qu'on ne doit pas, après qu'un employé a travaillé dix ans ou quinze ans dans une fonction, le changer de classification avec une diminution de salaire. On doit beaucoup plus privilégier des avenues qui pourraient être, par exemple, de confier une partie des tâches qui sont dans la classification, la description de tâches, à ces employés, ou de leur faciliter l'accès à des "jobs" moins stressants, etc. Cela dépend des nuances à apporter. C'est un sujet qui est assez complexe. Cela dépend de chaque cas, etc.

L'approche de la rétrogradation, je la trouve aberrante, non acceptable, etc.

M. Chevrette: D'accord, mais, même si vous la trouvez aberrante, non acceptable, il y a souvent des positions dans le syndicalisme... J'en ai fait passablement. Vous savez qu'on est placé — peut-être que vous avez eu à en régler — parfois, dans des situations aussi aberrantes ou répugnantes; on efface un congédiement et, grâce à une clause du genre, on réussit à sauver quelques individus. Vous le savez aussi.

M. Caplette: Je l'ai déjà dit au ministre. Pour moi, révoquer quelqu'un ou le rétrograder, c'est à peu près la même chose, cela a la même signification et les mêmes répercussions. Je vais prendre un exemple bien précis. La clientèle que je...

M. Chevrette: Pour le droit au travail, vous maintenez cela même face au droit au travail, M. Caplette?

M. Caplette: Pardon?

M. Chevrette: Dans une rétrogradation, le gars ou l'individu, la personne conserve son droit au travail. C'est très différent d'un congédiement.

M. Caplette: Je dis que cela a les mêmes effets au niveau de l'employé. Actuellement, on a des cas d'invalidité. L'employeur n'est même pas capable de trouver des fonctions ou des "jobs". Il congédie le gars purement et simplement. C'est se conter une peur de penser qu'on va être capable de trouver à l'intérieur de la fonction publique des emplois où seraient reclassés ou réaffectés ces employés. Je dis simplement que si, pendant 25 ans, un agent de conservation de la faune, à un moment donné, a exercé son métier et qu'il a eu un accident de motoneige ou bien qu'il a eu des répercussions au niveau de sa santé qui ne lui permettent plus d'accomplir efficacement son "job", ce n'est pas en lui disant: Je te rétrograde et je t'envoie là avec une diminution de salaire qu'on fait quelque chose pour cet employé. C'est aussi mauvais pour lui que s'il était congédié et que de le renvoyer chez lui. Cela a le même effet psychologique sur l'individu, et il y a la frustration que cela engendre, etc. C'est ce que je dis. On devrait beaucoup plus essayer de trouver des emplois à ces gens où ils feraient une partie de la classification des agents de conservation de la faune ou, au pis aller, si ce n'est pas possible d'en trouver, regarder une réaffectation avec plein traitement et un "job" équivalents au niveau des avantages marginaux, etc. C'est complètement aberrant de croire qu'un employeur peut penser qu'après 25 ans, on va rétrograder quelqu'un avec une diminution de traitement qui, va affecter ses droits à la retraite, ses avantages sociaux, etc. Je trouve cela, complètement aberrant. Chez nous, une

étude l'a démontré, on a des problèmes graves de santé. Notre inquiétude est très grande. On est en négociation. On va faire la bataille avec les moyens qu'on a.

M. Chevrette: Je vais terminer rapidement, Mme le Président. Je vais prendre un exemple concret. J'aime parler dans le concret. Vous avez un gars qui occupe un poste de promotion, un poste d'autorité dans la hiérarchie. Il est petit patron, cadre intermédiaire, et il est syndiqué quand même, il a droit à la syndicalisation. Je suppose que le bonhomme en question prend un coup dans l'exercice de ses fonctions. Entre vous et moi, vous allez chercher à lui dire: Ecoutez, il ne mérite pas d'être à la porte, vous ne lui donneriez pas un poste de travailleur à une barrière, je ne sais pas? Ce n'est pas votre façon de fonctionner quand vous faites face à un congédiement?

M. Caplette: Ce que vous me dites là, M. Chevrette, c'est un nouveau principe que vous introduisez, parce que la rétrogradation actuellement est pour la perte d'un droit, l'incompétence, l'invalidité ou pour insuffisance professionnelle. Ce n'est pas une mesure disciplinaire. Si vous introduisez la rétrogradation comme mesure disciplinaire, je vais crier d'une autre façon. Dites-le moi, je vais faire d'autres représentations.

M. de Belleval: On ne l'a pas mis non plus.

M. Chevrette: M. Caplette, est-ce que celui-là se négocie de plein droit?

M. Caplette: M. Chevrette m'a posé la question tantôt. Comme mesure disciplinaire, qu'est-ce que j'en pense? La rétrogradation actuellement, selon l'explication, l'interprétation qu'on en fait, cela n'a jamais été une mesure disciplinaire. Si c'est pour donner une mesure disciplinaire...

M. Chevrette: Je terminerai, Mme le Président, en disant que je comprends que le mémoire, qui est plutôt teinté de négociation... C'est un peu normal parce que vous êtes en négociation présentement. J'ai bien l'impression que, inévitablement, vous avez été influencés par le contexte de la négociation, mais le mémoire, comme tel, représente beaucoup plus une position de négociation qu'une position de vision ou de perception de la loi. Je ne peux pas vous blâmer pour ça. Vous êtes sans doute influencés par le contexte, c'est bien évident. Mais je voudrais, une fois de plus, vous rassurer quant aux droits acquis et au statu quo. On vous a dit qu'au-delà du texte qui est devant vous, on va chercher, article par article, à ramener ça dans les circonstances en vous disant que la commission Martin siège et que, pour l'élargissement, on attend le rapport de la commission Martin. C'est ce qu'on a dit à plusieurs reprises. Peut- être que, ce soir, cela contribuera à faire poser d'autres questions par nos amis d'en face.

M. de Belleval: Et d'à côté.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Laurier.

M. Marchand: Mme le Président, merci. Moi aussi, comme il ne reste que quelques instants, je voudrais tout d'abord remercier le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique du sérieux de son mémoire, mais, par contre, je veux aussi lui dire que je sympathise avec lui. Je suis peiné, à l'instar de tous les autres groupes qui ont présenté des mémoires ici, que vous retourniez chez vous, ce soir, vous qui vous êtes déplacés de très loin comme tous les autres groupes, sans réponse. Je me demande si je pourrais même suggérer qu'on vous rappelle et que vous reveniez, parce que, comme le syndicat de la fonction publique, je me demande si vous devez repasser. Ils sont venus et ils sont retournés sans réponses, eux aussi. Je voulais suggérer qu'on vous rappelle, mais je me demande si ça vaut la peine qu'on vous déplace, parce qu'il semble que le ministre n'ait donné aucune réponse concrète. Il veut garder cette "tsarerie" et tout décider lui-même dans ses règlements, au Conseil du trésor, où il passera ce qu'il voudra, et je regrette infiniment pour vous. Je ne vous poserai pas...

J'avais deux questions et je ne vous poserai même pas la deuxième question. J'avais l'intention de vous demander si vous considériez que ce projet de loi est antisyndical. Je ne vous demanderai même pas de répondre. Je pense que, comme fonctionnaire, vous vous êtes déjà exposés pas mal et je vous félicite de ne pas avoir eu peur de dire ce que vous aviez à dire, de revendiquer... Ce que vous avez dit est vrai. Depuis dix ans...

Ce gouvernement, ces gens qui avaient tout prévu et promis qu'ils régleraient tout dans la grande démocratie, ils sont, je pense, les tsars aujourd'hui du Parlement de Québec, et de la province de Québec et je sympathise avec vous.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Merci, Mme le Président. Dans votre mémoire, quand vous parlez de l'article 88, à la page 27, vous mentionnez: Nous pensons que l'introduction de la notion d'insuffisance professionnelle devrait amener le gouvernement à se pencher d'abord sur ses échecs lamentables dans l'élaboration de ses programmes de recyclage et de perfectionnement.

Ma question est la suivante: D'après votre expérience passée, que reprochez-vous à ces programmes de recyclage et de perfectionnement?

M. Caplette: Je vais vous donner seulement un exemple bien précis. Au niveau du secteur de

la détention, où on a environ 1500 membres, cela fait à peu près dix ans qu'on fait des représentations pour qu'il y ait des programmes de formation et de recyclage cohérents. Tout ce que cela a donné, même au moment où on se parle, ce sont dix pénibles jours ouvrables par année pour les nouveaux employés et un recyclage pour tous les employés de dix jours par année depuis qu'ils sont entrés en fonction. Le rapport Pierre DuBois et Associés démontre très bien que, dans le milieu où on travaille, il faut du recyclage régulièrement et il faut une formation de base donnée par l'employeur indépendamment des capacités ou des compétences de l'individu. Là-dessus, on n'a jamais atteint nos objectifs, contrairement à d'autres secteurs, par exemple — je n'ai pas peur de le dire — comme les agents de conservation de la faune qui, effectivement, ont des programmes de formation et de recyclage qui sont cohérents, qui sont acceptables et qui sont bons. Au niveau du secteur de la détention, c'est une vraie cochonnerie. Cela n'a jamais abouti et cela ne mérite même pas le nom d'un programme de formation. C'est une tentative très timide et, en détention, il y a des problèmes de recrutement de personnel, etc., et on est toujours aux prises avec le même problème depuis l'existence du syndicat, soit depuis dix ans.

M. Cordeau: Votre problème date de plusieurs années?

M. Caplette: Depuis l'existence du syndicat, on se bat pour qu'il y ait une formation et un recyclage cohérents au niveau du secteur de la détention, cela fait onze ans.

M. Cordeau: Alors, nous devrons attirer l'attention du gouvernement sur ce manque de recyclage des employés.

Merci, Mme le Président.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Je pense que, sur les points fondamentaux, on s'est expliqué d'une façon assez extensive à plusieurs reprises. Je pense aussi que non seulement on s'est expliqué, mais aussi qu'on s'est rejoint sur pas mal de points.

Sur les points les plus essentiels, je pense qu'on s'est mis d'accord. Je comprends par ailleurs que vous avez des objectifs plus vastes et je les respecte. On pourra toujours en discuter dans un autre contexte.

Pour ma part, j'apprécie aussi votre souci de discuter de cette question d'une façon rationnelle pour essayer vraiment de cerner les problèmes et faire en sorte qu'on soit mutuellement sur la même longueur d'ondes et qu'autant que possible — c'est mon souci — sur les choses essentielles il existe quand même un consensus et qu'on établisse ensemble des règles du jeu mutuellement admises. Je suis particulièrement ouvert à un certain nombre de questions que vous avez soulevées qui touchent à certaines classes d'employés que vous représentez et qui ont des conditions de travail bien particulières. Dans mon propre comté j'ai un établissement de détention, un des plus importants du Québec. Je suis allé le visiter, j'entretiens des relations étroites comme député avec les employés de ce centre; avec les cadres aussi et je suis bien au fait de ce que cela implique. Je vous assure de ma sympathie par rapport à un tas de remarques que vous avez faites et qui touchent à ces questions. Je pense que si on maintient un climat d'ouverture, un climat de discussion par rapport à un climat qui serait plutôt un climat d'affrontement stérile, je pense qu'on va progresser. D'ailleurs, on n'a pas intérêt, ni vous ni moi, à maintenir des climats qui sont justement agressifs; nous devons, au contraire, essayer de maintenir un climat d'ouverture d'esprit et de dialogue. Je suis bien convaincu que c'est aussi votre point de vue, en tout cas c'est le mien.

Le Président (Mme Cuerrier): J'aimerais me faire le porte-parole de cette commission pour remercier le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique d'avoir bien voulu contribuer au travail de la commission. J'aimerais vous dire que nous n'avons dépassé l'heure de l'ajournement que de quelques secondes, malheureusement, nous devons ajourner maintenant sine die.

M. Caplette: Nous vous remercions, Mme le Président.

(Fin de la séance à 22 h 16)

ANNEXE

(Partie du mémoire du Syndicat des agents de la paix de la fonction

publique qui n'a pas été lue devant la commission)

Commission de la fonction publique

ARTICLES —16 à 27

Deux principaux points sont à retenir au sujet de la constitution de la Commission de la fonction publique.

En premier lieu, le mandat de ses membres est écourté à cinq ans. Bien qu'en principe une telle procédure puisse être un gage d'un certain renouvellement continu des ressources humaines siégeant à la Commission, nous nous devons de nous interroger sur la sensibilité qui se développera au sein de cette Commission aux changements politiques qui s'opèrent lors des élections et des tractations politiques qui les accompagnent malheureusement trop souvent.

Et même si le renouvellement du mandat des membres de la Commission ne coïncidait pas normalement à chaque élection, il n'en resterait pas moins que les habitudes, les procédures et la philosophie générale adoptées sous un gouvernement ne seront pas nécessairement celles du gouvernement qui le suivrait. Pour cette raison, l'indépendance de la Commission est contestable a priori.

En second lieu, puisque l'article 28 de la loi de la fonction publique vise à substituter aux arbitres de griefs les domaines qui relèvent aujourd'hui des conventions collectives (classification; promotion ou avancement de classe; rétrogradation; révocation ou destitution entendues ici comme mesures disciplinaires) pour édicter que ces sujets seront dorénavant entendus devant la Commission, les syndicats perdront le droit qu'ils avaient de déterminer, d'un commun accord entre les parties, les personnes qu'elles désiraient voir auditionner les causes litigieuses.

Puisqu'il semble qu'au niveau de ses intentions le gouvernement semblait déterminé à créer un organisme dont l'intégrité ne devait pas faire l'ombre d'un doute (réf: Art. 23: Loi de la fonction publique), nous nous attendions à ce qu'il crée une Commission qui, dans son fonctionnement, ne puisse pas être placée en conflit d'intérêt avec son créateur. Un organisme indépendant du gouvernement et du ministère de la fonction publique aurait acquis une crédibilité que n'aura jamais celle qu'il vise à mettre sur pied.

ARTICLE — 28 a)

Comme nous l'avons mentionné dans nos commentaires sur l'article 27, le gouvernement supprime la procédure d'arbitrage connue et la remplace par des appels à la Commission.

En termes clairs, ceci signifie que les recours prévus à l'article 17 de notre contrat et concernant la classification, l'article 18 concernant l'avancement de classe et l'article 22 concernant les mesures disciplinaires à la fois dans leur lettre comme dans leur esprit sont supprimés et remplacés. Il institue de plus chez les syndiqués du S.A.P.F.P. la rétrogradation, la révocation ou la destitution pour insuffisance professionnelle.

Les règles du jeu sont non seulement faussées mais il nous apparaît qu'elles le sont démesurément en faveur de l'une des deux parties puisque ces règles seront déterminées par les règlements du Ministre au lieu de faire l'objet de l'entente des parties.

A nos yeux, la Commission n'aura d'autre choix que de fonctionner tels que le prescritont les règlements.

ARTICLE — 28 b)

La Commission aura le mandat de faire "de sa propre initiative enquête sur le fonctionnement de la présente loi". Qu'adviendra-t-il si, à la suite de plaintes de divers syndicats sur le fonctionnement de cette loi, la Commission refuse d'user de son privilège d'initiative pour faire enquête? Il serait sain et normal qu'une procédure de plaintes sur le fonctionnement de la loi permette aux organismes touchés par le bill 53 d'être assurés qu'une enquête juste et impartiale sera menée jusqu'à satisfaction des parties.

Conséquence de la suggestion émise au paragraphe précédent, il serait utile que le pouvoir de recommandation qu'elle détiendra pour faire rapport aux autorités compétentes, pèse plus que des voeux pieux.

ARTICLE — 28 c)

Si la Commission commente sur la règlementation à venir, il serait sainement démocratique que cette dernière, premièrement, ne soit pas bâillonnée si le Ministre refuse de prendre avis de celle-ci et qu'en second lieu, les prises de position de la Commission vis-à-vis de la règlementation que le Ministre se propose de faire soient du domaine public et livrées à l'analyse des organismes concernés.

II nous semble donc que la Commission devrait adresser à l'Assemblée nationale ses avis sur les règlements que le Ministre entend faire même si ce dernier n'a pas cru bon de les lui demander. Peut-être serions-nous mieux éclairés si le Ministre décidait de bâillonner la Commission en s'abstenant de lui réclamer ses commentaires.

ARTICLE —28 d)

Quant à son pouvoir d'aviser sur le principe du mérite à savoir si les règlements y sont conformes ou non, on comprendra très bien que si cette définition laisse une place trop importante au subjectivisme, les avis qu'elle donnera auront autant de valeur que les avis que se partageront les personnes qui seront appelées à en appliquer les principes.

ARTICLE — 29 aucun commentaire

ARTICLE — 30 aucun commentaire

ARTICLE —31 aucun commentaire

ARTICLE — 32

Le règlement de la Commission concernant l'application de l'article 28 n'étant pas connu il est impossible de déterminer qui et combien de personnes siègeront pour statuer sur les recours visés au paragraphe a) du premier alinéa de l'article 28. Le syndicat sera-t-il assuré d'être représenté ou tout au moins de participer à la décision? La présence des procureurs du syndicat sera-t-elle permise? Quelle sera la procédure? Autant de questions sur lesquelles la loi est muette.

ARTICLE — 33 aucun commentaire

ARTICLE — 34 aucun commentaire

ARTICLE — 35 aucun commentaire

ARTICLES — 36 à 44

Le bicéphalisme n'est pas une garantie d'une meilleure organisation et d'un meilleur fonctionnement de la fonction publique. Les remarques faites quant à la durée du mandat des membres de la Commission s'appliquent à ceux de l'Office "mutatis mutandi".

ARTICLE — 45

Bien qu'à première vue la dichotomie faite entre l'Office et la Commission assure théoriquement (cette assurance, ce n'est pas nous qui l'avons mais le Ministre) une sélection du personnel plus juste, il n'en reste pas moins que l'Office, de par son organisation, n'offre pas de meilleures garanties que ne l'offrait par le passé la Commission de la fonction publique. Qu'il suffise d'avoir en tête que la personne présidant aux destinées de l'Office ne bénéficie que d'un mandat de cinq ans, que la délégation et la subdélégation de pouvoir risquent de noyer, d'éparpiller et de diffuser ce pouvoir d'admettre les candidats aux emplois de la fonction publique au sein de chaque ministère et, conséquemment, de compromettre le contrôle de la conformité à la fois à la lettre comme à l'esprit dans laquelle devraient se faire le recrutement, la sélection, la déclaration d'aptitude et la nomination des candidats.

ARTICLE — 46 aucun commentaire

ARTICLE — 47 aucun commentaire

ARTICLE — 48 aucun commentaire

ARTICLE — 49 aucun commentaire

ARTICLE —50 aucun commentaire

ARTICLE —51 aucun commentaire

ARTICLE — 52 aucun commentaire

ARTICLE—53 aucun commentaire

ARTICLE—54 aucun commentaire

ARTICLE —55 aucun commentaire

ARTICLE —56 aucun commentaire ARTICLE —57

Cet article reprend les dispositions de l'ancien article 45 de la loi de la fonction publique avec les différences suivantes: -"La mise en disponibilité" se fera de façon que le Ministre déterminera par voie de règlement. Or, comme les syndicats ne sont pas assurés d'être consultés sur ces modalités, tout se fera au bon vouloir du Ministre. La sécurité d'emploi sera donc rattachée à une foule de variables sur lesquelles les syndicats n'auront aucun contrôle. - Le traitement de l'employé est maintenu; cependant l'employé n'est pas assuré de continuer à obtenir les mêmes augmentations salariales qu'il aurait eues s'il était resté en poste au moment de sa mise en disponibilité. Certains fonctionnaires qui seront mis en disponibilité paieront donc de leur personne le manque de prévoyance des gestionnaires qui ne sont pas habiles dans la confection et la préparation de plan d'organisation.

ARTICLE —58

L'article 58 précise les volontés du Ministre de réglementer en vertu de l'article 3a) i) et iv). La Commission n'a plus aucun rôle à jouer, les syndicats non plus.

ARTICLE—59 aucun commentaire

ARTICLE —60

L'actuelle classification de tous les corps d'agents de la paix comportait déjà une clause permettant à l'employeur de faire accomplir "toutes les tâches connexes" à celles qui sont décrites dans la classification. L'article 60 confirme, tout comme dans l'ancienne loi, l'élasticité des tâches décrites dans la classification.

ARTICLE —61

Cet article décrit les recours d'un employé lésé par un nouveau classement. Au lieu de faire primer la négociation de bonne foi d'une entente entre les parties, le Ministre privilégie une procédure qui sera établie par la Commission sur laquelle ni le syndicat ni les employés n'auront de prise.

ARTICLE —62 aucun commentaire

ARTICLE —63 aucun commentaire

ARTICLE — 64 aucun commentaire

ARTICLE — 65 aucun commentaire

ARTICLE —66

Nous espérons que le prix des privilèges accordés au personnel politique ne taxera pas les chances d'un fonctionnaire de carrière d'obtenir une nouvelle affectation, une mutation ou une promotion. Le fonctionnaire de carrière sera-t-il moins bien considéré que le personnel politique?

ARTICLE —67 aucun commentaire

ARTICLE —68 aucun commentaire

ARTICLE — 69 aucun commentaire

ARTICLE —70

L'introduction du principe du mérite pour le recrutement et la promotion du personnel de la fonction publique suscite plus de questions sans réponse qu'il n'énonce de solutions aux problèmes que cherche à.résoudre le Ministre.

Nous restons dans l'ignorance totale sur les points suivants: -quels sont les critères des concours? -quelle sera la définition du mérite? -quelles seront les interprétations qu'en donneront les personnes chargées d'examiner le mérite de tel ou tel candidat? -de combien de personnes seront formées les jurys? -de qui seront-ils formés? -quelles garanties d'impartialité aurons-nous au sujet de ces jurys? -quelle compétence sera exigée des personnes appelées à exercer les fonctions du jury? -qu'elle formation sera donnée à ceux qui seront appelés à y siéger sans détenir à cette date cette compétence? -les syndicats seront-ils appelés à désigner des observateurs membres de ces jurys?

Ici, nous sentons la nécessité de rappeler l'une des recommandations contenues dans l'étude faite au Syndicat des Agents de la Paix de la Fonction Publique. 12.0 - NOUS RECOMMANDONS LA REVISION DES MECANISMES ACTUELS DE PROMOTION ET L'ETABLISSEMENT, AU BESOIN, D'UN PROGRAMME SYSTEMATIQUE DE PROMOTION DU PERSONNEL CADRE.

Une meilleure formation et un système de promotion mieux articulé pourraient atteindre cet objectif. Au plan technique, il importe de fonder le système de promotion sur une batterie de tests psychométriques valides et sur l'entrevue psychologique en profondeur. Le personnel assigné à l'évaluation des candidats devrait posséder une formation et une expérience adéquates dans ce domaine de l'administration du personnel.

Ce système devrait mesurer les connaissances et le potentiel administratif des candidats de même que leur compétence interpersonnelle. 3

Nous avons l'impression que cette recommandation est plus explicite que la nébuleuse notion de mérite et qu'elle présuppose un programme à moyen terme qui ne s'accommoderait pas d'une législation et d'une règlementation faites sans consultation.

A ces remarques préliminaires qui concernent plus précisément la sélection du personnel de cadre (promotion), nous ajoutons le pendant qu'elles possèdent au niveau de la sélection à l'embauche (nomination). 8.0 - NOUS RECOMMANDONS UNE ANALYSE COMPLETE DES PROCEDURES ACTUELLES DE SELECTION ET L'ETABLISSEMENT, AU BESOIN, D'UN SYSTEME SCIENTIFIQUE DE SELECTION DU PERSONNEL.

L'établissement d'un système scientifique de sélection du personnel permettrait de retenir les candidats qui partagent les caractéristiques psychologiques des agents de la paix 'qui s'acquittent avec facilité de leurs fonctions...

Ce système de sélection devrait reposer sur trois techniques d'évaluation, soit la fiche biométrique, les tests psychométriques et l'entrevue psychologique. La fiche biométrique et les tests psychométriques devraient être soumis au processus de validation et de normalisation. Les critères de validation devraient comprendre des mesures d'adaptabilité psychologique à la fonction. 4 3. Idem, page: 320 * Nous n'aborderons pas ici les caractéristiques de la fonction de l'agent de la paix qui font qu'à nos yeux un statut particulier devrait leur être accordé. Tout les différencie des autres groupes de travail de la fonction publique et, à ce titre, ils commandent un traitement différent de celui qui est accordé à tout autre fonctionnaire; que ce soit au chapitre de l'embauche, de la promotion, de la classification comme de bien d'autres domaines. 4. Idem page: 317

Si le principe du mérite recouvre les recommandations telles qu'énoncées, nous nous en réjouissons.

ARTICLE —71

Qui définira la "raisonnabilité" de l'occasion accordée à un candidat de postuler à un emploi ou à une promotion.

Si nous prenons en considération que les 2,500 membres de notre syndicat sont inégalement répartis sur toute la superficie du Québec, dans des centaines de lieux de travail, il est important que les parties s'entendent sur ce qu'il est raisonnable de faire pour communiquer aux intéressés les avis de concours. Il ne faudrait pas que l'isolement de certains lieux de travail pénalise ces employés.

ARTICLE—72 "Examinées" est-il synonyme de "retenues" dans l'esprit du Ministre.

ARTICLE —73

Quels sont les mécanismes prévus pour contester cette impartialité? N'y a-t-il pas risque, ici, que le même organisme soit juge et partie de l'impartialité? Les diverses conventions actuellement en vigueur contiennent à l'heure actuelle des dispositions qui permettent aux syndicats de s'assurer en partie du déroulement impartial des concours par la délégation de représentants syndicaux sur les jurys. Le Ministre entretient-il le désir de maintenir cette pratique?

ARTICLE —74 aucun commentaire

ARTICLE —75

Le Ministre aurait pu y aller en accordant d'abord le privilège aux employés faisant déjà partie de l'unité syndicale où se produit la vacance de façon à permettre entre autres cas la mutation, le reclassement ou la promotion interministériel privilégié entre le personnel faisant déjà partie de l'unité syndicale à laquelle ces employés appartiennent.

ARTICLE —76

Cet article confirme nos appréhensions contenues dans nos remarques à l'article 45.

ARTICLE —77 aucun commentaire

ARTICLE —78

Serons-nous consultés si le Ministre décidait de prolonger ou de réduire la période de probation actuellement définie dans le règlement de la classification des agents de la paix?

ARTICLE —79 aucun commentaire

ARTICLE —80

Le mécanisme d'appel prévu à cet article nous semble être un recours illusoire dans le cas où l'appel que pourrait faire un employé le serait sur le mérite même. Comment la vérification sera-t-elle possible pour connaître si l'Office a sélectionné effectivement en fonction de la règle du mérite? Puisque la règle du mérite risque de comporter une grande part du subjectivisme, comment un employé pourra-t-il prétexter l'illégalité ou l'irrégularité?

Conséquemment au fait qu'aucun recours n'existe sur le mérite lui-même et bien que la Commission soit appelée à surveiller l'application de la règle du mérite, comment pourrons-nous nous assurer que tous les fonctionnaires seront traités uniformément et équitablement partout si les recours, nous le répétons, ne portent pas sur le mérite lui-même?

ARTICLE —81

Notre convention à l'article 17.04 prévoyait une possibilité de grief sur ce sujet. La procédure est maintenant remplacée par un appel à la Commission. Cet article, tel que rédigé, nous semble ignorer la possibilité de pratiques injustes possibles. La présélection des candidats à des postes d'une classe supérieure n'est-elle pas validée de cette façon? Il suffira d'affecter temporairement un fonctionnaire à une classe d'emploi supérieure à celle qu'il occupe pour garantir de cette façon détournée un poste supérieur à tel candidat plutôt qu'à tel autre. En vertu de quel critère sera faite la déclaration d'aptitude?

Qui se prononcera sur cette déclaration d'aptitude? Cet article semble contredire les dispositions de la règle du mérite.

ARTICLE—82 aucun commentaire

ARTICLES —83 à 87

Les dispositions contenues dans ces articles permettront aux gestionnaires de se débaras-ser des employés dont ils ne sont pas satisfaits. Nous pouvons aussi nous demander jusqu'à quel point ces dispositions ne constitueront pas dans les faits des mesures disciplinaires déguisées en mesures administratives.

Nous ajoutons, de plus, que nous trouvons étonnant qu'aucune des personnes responsables de l'affectation, de la mutation, du reclassement et de la rétrogradation d'un employé ne soit tenue de justifier par écrit les raisons qui motivent le geste posé à leur égard.

Nulle part n'est inscrite la possibilité pour un employé de réclamer une nouvelle affectation, une mutation, un classement ou un reclassement différent de celui qu'il possède. La gestion du personnel est faite à sens unique.

ARTICLE—88

L'article 88 impose aux syndiqués du S.A.P.F.P. les notions de destitution, révocation ou rétrogradation pour insuffisance professionnelle ou incapacité d'agir.

Quels seront les juges de l'incompétence et de l'incapacité d'agir de tels ou tels employés? En vertu de quels critères seront déterminés l'incompétence et l'incapacité d'agir? Quelle uniformité y aura-t-il au sein de la fonction publique dans l'application des critères? N'y a-t-il pas risque qu'il y ait autant de définitions de l'incompétence et de l'incapacité d'agir qu'il y aura de sous-ministres et de dirigeants d'organisme?

Nous pensons qu'à ce sujet le gouvernement, dans l'incapacité qu'il était d'agir pour solutionner les problèmes qu'il avait avec ses cadres supérieurs, a décidé d'en faire une mesure universelle, rayant d'un trait de plume les ententes prises avec les syndicats où de telles clauses avaient été négociées et ne premettant pas l'ombre d'une discussion, d'une négociation chez les unités syndicales où des dispositions semblables n'apparaissaient pas dans leur convention collective.

D'ailleurs, de telles dispositions remettent en question la sélection qui a été faite à l'origine pour l'embauche des employés de la fonction publique. Or, si c'est cette question qui amène le gouvernement à prévoir des mécanismes de destitution, de révocation et de rétrogradation pour insuffisance professionnelle, c'est une intervention qui ne correspond pas à la racine du mal. Nous pensons que l'introduction de la notion d'insuffisance professionnelle devrait amener le gouvernement à se pencher d'abord sur ses échecs lamentables dans l'élaboration de ses programmes de recyclage et de perfectionnement. L'insuffisance professionnelle se développe lorsque l'employé n'est pas mis en face d'un train de mesures visant à maintenir sa compétence au niveau de l'évolution de sa tâche et des responsabilités qui en découlent. Et c'est justement à ce niveau que nous nous serions attendus à voir le Ministre mettre l'accent.

D'autre part, la destitution, la révocation et la rétrogradation sont introduites pour les employés se trouvant dans l'incapacité d'agir. Quels sont les sombres desseins du Ministre derrière cette question? Visent-ils les cas d'invalidité? L'invalidité occupationnelle et non-occupationnelle?

C'est donc dire que, là où l'emploi comporte des dangers supérieurs pour l'employé de devenir invalide, les protections seront moindres ou tout au moins les chances d'être révoqué, destitué ou rétrogradé plus sérieuses.

De telles mesures sont inacceptables et constituent la négation même de la responsabilité de l'employeur vis-à-vis ses employés. Si les fonctions assumées par nos membres comportent des exigences, exigences qui en viendraient à diminuer les capacités physiques ou psychologiques de ces derniers à assumer leur tâche, il est de la responsabilité stricte de l'employeur de pourvoir à la sécurité de ses employés. Sécurité tant sur le plan de leur santé comme celui de leur emploi.

Une saine gestion des ressources humaines commande de chercher les origines des maux plutôt que de mettre en place des mesures qui ressemblent beaucoup plus à des palliatifs.

Une récente étude faite chez les membres de notre syndicat par la firme de psychologues industriels conseils Pierre DuBois et Associés en arrivait à la conclusion suivante: 18% des agents de la paix éprouvent un stress professionnel constant dans l'exercice de leurs fonctions, alors que 24% de leurs confrères le ressentent de façon occasionnelle ou modéré...

Le stress professionnel observé chez les agents de la paix dépasse celui enregistré chez les groupes équivalents (policiers, pompiers).

Le stress professionnel ressenti par les agents de la paix entraîne un éventail impressionnant de problèmes de santé tant physique que psychologique. Ces malaises et/ou maladies, d'origine nerveuse pour la plupart, dépassent en fréquence et en gravité ceux ressentis par des groupes de comparaison équivalents (policiers et pompiers). 5 5. Idem, page: 276.

Donc, nos fonctions, en plus de comporter des risques évidents plus grands pouvant conduire à une invalidité professionnelle plus ou moins complète, minent quotidiennement la santé physique et psychologique de nos membres et peuvent les diriger à moyen ou à long terme vers un état pouvant permettre, en vertu de l'article 88, à des dirigeants d'organisme de conclure que ces personnes sont dans un état qui leur interdit désormais de remplir leurs fonctions. A-t-on déjà songé à rétrograder un agent de la S.Q.?

Pourtant le même rapport faisait la recommandation suivante qui nous apparaît comme une réponse plus adéquate aux problèmes constatés chez nos membres. 7.0 - NOUS RECOMMANDONS L'ETABLISSEMENT D'UN SERVICE DE SANTE PROFESSIONNEL QUI AURAIT POUR OBJECTIF D'AMELIORER LA SANTE PHYSIQUE ET PSYCHOLOGIQUE DES AGENTS DE LA PAIX, DE DEPISTER LES AGENTS DE LA PAIX QUI PRESENTENT DES PROBLEMES PSYCHOLOGIQUES ET PHYSIQUES. ET D'IMPLANTER DES PROGRAMMES DE PREVENTION DU STRESS PROFESSIONNEL. 6

II aurait fallu privilégier une approche préventive plutôt que celle mise de l'avant dans le projet de loi qui, à nos yeux, sans aller aux sources des maux vise à sauver les meubles lorsque tout l'édifice est sur le point de s'écrouler.

Nous suggérons, d'ailleurs, aux auteurs du projet de loi de s'arrêter au discours de Monsieur Pierre Marois devant les Hautes Etudes Commerciales, discours prononcé le 10 juin 1977, dont le thème était: "Santé, Sécurité et Qualité de vie au travail".

Monsieur Marois disait qu'"il serait naïf de croire cependant qu'il n'y a pas de problèmes sérieux de qualité de vie au travail. Les indices d'une telle situation sont trop nombreux pour qu'on n'en tienne pas compte... Ces problèmes sont sérieux et il m'apparaît évident qu'il faudra éventuellement trouver des solutions originales. Et ce, d'autant plus que, si on ne le fait pas, ces problèmes risquent, à mesure que les situations vont se détériorer davantage, d'avoir un impact marqué sur le climat de relations de travail." Monsieur Pierre Marois ajoutait à la fin de son discours: "il est encore trop tôt pour indiquer dans quelle mesure l'Etat québécois pourrait être appelé à intervenir dans cette direction."

Nous lui répondons donc que la fonction publique a trouvé sa voie et ses solutions oriaina-les, ce sont celles de la matraque. Le Ministre de la Fonction publique n'a plus de respect pour son personnel que les multinationales de l'amiante en avaient de leurs "amiantosés".

Cependant, et Monsieur Marois le faisait remarquer, une telle attitude risque de marquer le climat des relations de travail. Il faudra donc s'entendre si c'est la concertation que l'on vise ou la confrontation.

Quant à nous, il nous semble évident que le gouvernement a déjà fait son choix. Il devra cependant en faire son lit.

ARTICLE—89

Les mécanismes d'appel prévus à l'article 89 sont la négation des dispositions prévues dans les conventions collectives là où ces mesures existent. Encore là, et au risque de nous répéter, les règles de l'arbitrage font en sorte qu'il y ait concertation dans le choix des arbitres. Les mécanismes de la Commission ne prévoient rien à cet égard.

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ARTICLE—94

II s'agit encore ici d'un recul et d'une perte des droits de grief et d'arbitrage connus sur les sanctions imposables en vertu des normes de conduite et de discipline édictées par le Ministre. Et, puisque la Commission sera placée devant la réglementation que le Ministre aura fait adopter, on peut s'interroger jusqu'à quel point la Commission pourra exercer son libre arbitre. 6. Idem, page: 316.

D'autant plus qu'il est sans doute possible que cette réglementation équivaille au code de discipline tel qu'il est connu dans les corps policiers, et que chaque type d'infraction aux normes de conduite et de discipline soit assorti jusque dans le moindre de ses détails d'une série de sanctions, graduées ou non selon la gravité des gestes posés et de leur fréquence.

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ARTICLE — 96 aucun commentaire

ARTICLE — 97 aucun commentaire

ARTICLE —98

La révocation, la destitution, le relevé provisoire et les sanctions disciplinaires ne sont plus contestables par la procédure habituelle prévue à la convention collective.

Mais il y a plus. A l'heure actuelle, l'arbitre à l'article 22.03 ne pouvait imposer une sanction disciplinaire d'un niveau plus élevé que celui que l'employeur avait choisi de décerner à un employé alors que la Commission pourra dorénavant transformer par exemple une réprimande en révocation.

Cet article ne crée pas d'obligation vis-à-vis de l'employeur de formuler les raisons de l'imposition d'une ou des sanctions disciplinaires. On peut se demander dans quelle disposition l'employé touché par les mesures décrites à l'article 98 pourra en appeler à la Commission s'il n'en connaît pas les raisons.

L'article tel que rédigé vient non seulement à l'encontre des dispositions des conventions collectives mais nie et viole quelques principes de droit reconnus (droit à une défense pleine et entière, droit de savoir de quoi on est accusé, droit d'être représenté par une personne de son choix).

Il est enfin inadmissible qu'un membre d'un syndicat ne puisse en appeler d'une décision (art. 98) devant un arbitre selon des termes négociés. Il est abusif de confier une responsabilité d'arbitre à une tierce partie qui n'est pas choisie et qui ne fait pas l'accord des deux autres. Il s'agit à toute fin pratique de la disparition des clauses 22.01 —22.02 — 22.03 — 22.04 de notre convention collective de travail.

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ARTICLE —103

Le fonctionnaire demeure donc un citoyen de deuxième classe et confirme qu'il existe pour cette catégorie d'individus un délit d'un type bien particulier: le délit d'opinion.

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ARTICLE —105

L'ancien article 55 faisait que le travail partisan pouvait entraîner une destitution. Sous la férule du gouvernement du Parti québécois, un tel comportement devra comporter de façon automatique la destitution.

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ARTICLE —111

Les garanties prévues à l'article 3.03 de notre convention collective seront-elles reconduites dans les termes décrits à notre convention ou si la disposition prévue à l'article 111 en tiendra lieu?

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ARTICLE —119

Cet article a comme conséquence première de retirer du champ de négociation tout ce qui concerne le classement et les mesures disciplinaires.

Nous comprenons fort mal l'intention du gouvernement de vouloir retirer aux syndicats les droits de représentation et de négociation qu'ils avaient acquis historiquement sur ces sujets.

Ces mesures auraient été mieux comprises s'il s'était agi, comme dans le cas du projet de loi 45 et du secteur privé, d'assurer et de garantir une protection minimale à des fonctionnaires de l'Etat non visés et protégés par une convention collective.

Non seulement ce n'est pas le cas, mais le gouvernement retire effrontément aux syndiqués des droits que ces derniers avaient acquis par le biais des négociations collectives.

Il met donc ainsi en jeu l'existence même des syndicats puisque sa réglementation prétend pouvoir mettre sur pied des organismes et des mécanismes capables, à ses yeux, de mieux assurer la défense des employés.

Nous nous étions au contraire attendus à un élargissement du champ de négociation des syndicats faisant affaire avec l'Etat, et à une reconnaissance du rôle dynamique qui est reconnu aux syndicats dans la société québécoise.

Nous citons encore ici Monsieur Marois qui, rappelant l'expérience suédoise, en faisait un modèle-guide:

La Suède, par exemple, s'est déjà rendue assez loin dans cette direction: on va, par exemple, jusqu'à remettre en question le droit de gérance de l'employeur dans tous les domaines qui concernent directement les travailleurs.

De plus, alors que, d'une part, l'Etat a décidé de s'engager dans une voie où il veut laisser une place à la consultation et où il se vante de vouloir partager le pouvoir avec la population (réf. projet sur le référendum), d'autre part, il décide de faire machine arrière dans le secteur de la fonction publique. Ces deux voies sont irréconciliables et il faudra qu'il s'ajuste. Une loi n'est pas un phénomène marginal; elle est l'indicatif d'un type de gouvernement. Serait-ce alors celui que le Parti québécois a choisi de nous imposer?

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Nous considérons ce projet de loi 53 comme antisyndical et, par conséquent, nous demandons: -que la classification, les conditions de travail et de rénumération, l'évaluation du personnel, l'affectation, le classement, le reclassement, la mutation, la mise en disponibilité et les sanctions disciplinaires deviennent ou continuent de faire partie du champ de négociation; - que la rétrogradation, la révocation ou la destitution pour insuffisance professionnelle ou incapacité d'agir soit abandonnée par le gouvernement tant dans ce projet de loi que dans son introduction dans les conventions collectives car ce principe nie la responsabilité du gouvernement vis-à-vis ses employés; -que le gouvernement élabore et applique une véritable politique de perfectionnement qui, à ce moment-là, rehausserait la compétence professionnelle de ses employés; -que des mécanismes assurant l'indépendance de l'Office du recrutement et de la Commission de la fonction publique vis-à-vis le gouvernement et le Ministère de la Fonction publique soient prévus notamment en ce qui regarde la durée du mandat et la nomination de leurs responsables; -que soit retiré à la Commission de la fonction publique le rôle d'arbitre des griefs qui lui est conféré par le présent projet de loi et soient maintenues les garanties prévues dans les conventions collectives; -que l'Office du recrutement nous fournisse des assurances suffisantes que le recrutement, lorsqu'il sera fait à des paliers inférieurs de gérance (réf. art. 45, 3e paragraphe: délégation de pouvoir), ne sera pas l'occasion de camoufler un recrutement qui ne respecterait pas les articles 71-72-73; - que le principe du mérite soit aboli s'il ne respecte pas les recommandations contenues dans "l'étude du stress inhérent à la fonction d'Agent de la Paix" (recommandations: 8.0 et 12.0); -qu'un mécanisme d'appel sur le mérite soit instauré dans l'éventualité où notre précédente recommandation ne serait pas retenue; -que les employés de la fonction publique puissent profiter de tous les droits qui sont conférés à tous les autres citoyens en matière de "partisanerie" politique sous la réserve que ces droits ne devraient pas s'exercer durant les heures de travail.

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