(Quatorze heures quarante et une minutes)
La Modératrice
:
Bonjour et bienvenue à ce point de presse sur les coupes en santé publique.
Prendront la parole aujourd'hui M. Mathieu Masse Jolicoeur ainsi que
M. Michel Mongeon du Mouvement citoyen pour la santé publique, et suivront
M. Jean-François Lisée, député de Rosemont et porte-parole de l'opposition
officielle en matière de prévention, ainsi que M. Amir Khadir, député de Mercier.
M. Masse Jolicoeur (Mathieu) :
Alors, avant de commencer, on aimerait vous présenter le vidéoclip, le dernier
vidéoclip qui a été fait par des membres du Mouvement citoyen pour la santé
publique. Alors, c'est un vidéo qui présente la menace qui pèse sur la santé
publique avec les coupes budgétaires actuelles.
(Présentation audiovisuelle)
• (14 h 42 — 14 h 43)
•
M. Masse Jolicoeur (Mathieu) : Alors,
30 % de coupes en santé publique, ça représente une incapacité d'améliorer
la santé de vie des Québécois, de peut-être aussi améliorer leur espérance de
vie. Nous, on trouve que c'est insensé. Il devrait y avoir un changement.
Alors, je suis un membre actif du
Mouvement citoyen pour la santé publique et je vous invite à venir consulter le
vidéo et surtout remplir la pétition en ligne qui s'oppose aux coupes en santé
publique et qui demande au ministre responsable de surseoir à sa décision.
Je vous présente M. Michel Mongeon,
qui va venir faire une présentation de c'est quoi, la prévention et pourquoi
les coupes actuelles en santé publique ne sont pas que des coupes
administratives, mais vont toucher véritablement des services et surtout le
bien-être de la population.
M. Mongeon (Michel) : Oui,
bon, merci, Mathieu. Bonjour. Merci. En fait, je suis un citoyen impliqué dans
le Mouvement citoyen pour la santé publique et je peux dire que je suis un
citoyen qui est préoccupé, inquiet du mouvement que le gouvernement a de
réduire, au fond, les budgets en prévention au Québec. Oui, on parle de
30 % de coupures, c'est important. La prévention, ça a toujours été un
petit morceau du budget de la santé, un 2 % sur 40 milliards, donc on
parle d'à peine 70 millions. Donc, on vient trancher, là, au fond, sans tomber
trop dans les chiffres, 30 %. C'est beaucoup de monde, c'est beaucoup de
ressources.
On entend du gouvernement, sur plein de
plateformes, que les coupes sont administratives. Au fond, avant le projet de
loi n° 20, les directions de santé publique faisaient partie des agences de
santé et des services sociaux, donc les agences, et bien sûr tout le personnel
des agences, le personnel qui… au fond, je peux dire, entre guillemets,
bureaucratique et les directions de santé publique qui font partie des agences,
comprennent des équipes professionnelles, des nutritionnistes, des infirmières,
des toxicologues, des urbanistes, des sociologiques, en fait toute une équipe
multidisciplinaire qui travaille à l'implantation de programmes de santé.
Toucher à l'une et l'autre de ces ressources-là — et, au fond, il y
en a pour près de 30 millions de ces ressources-là qui ont quitté le
réseau durant les dernières semaines — bien, c'est toucher, au fond,
aux programmes de prévention qui font une différence dans notre société en
termes de réduction de la maladie. Parce que l'équation est assez simple :
moins de prévention dans le système équivaut, au fond, à plus de recours aux
services; plus de recours aux services, au fond, ça veut dire plus de coûts. Donc,
on comprend mal la logique de notre gouvernement-ci.
C'est pour ça qu'on est là aujourd'hui,
pour demander à notre ministre de la Santé non pas d'arrêter… parce qu'on n'est
pas, au fond, contre les coupures, mais on demande de le faire… Est-ce qu'on
peut reconsidérer… Parce qu'on veut participer au mouvement de coupures, au
Québec, en santé publique, mais pas 30 %. C'est beaucoup trop, c'est
beaucoup plus que se fait dans la plupart des programmes et services. Donc, on
dit : Attention! Parce que la société, à long terme, y compris le projet
de loi du ministre Barrette, il va y avoir des retombées en termes économiques
parce que, comme je dis, moins de prévention dans le système…
Ce n'est pas de la bureaucratie, je le
répète, c'est des ressources qui travaillent sur le terrain à faire des activités.
Je donne juste un exemple : par exemple, un toxicologue, qui fait partie
des ressources qui peuvent être remerciées… nutritionniste, bien, ça travaille
avec des CLSC. Tous les CLSC ne peuvent pas embaucher des toxicologues, des nutritionnistes,
des urbanistes. Donc, ces gens-là ne sont pas… Au fond, donner les meilleures
pratiques en santé.
Puis un dernier mot. Je crois, et toute la
littérature économique et scientifique le dit : 1 $ investi en
prévention nous fait économiser 6 $ en services de santé. Donc, avec une
telle équation, pourquoi couper dans les budgets de santé publique? Bien, pour
nous, c'est une grande énigme.
Donc, je passe la parole.
M. Lisée
: Merci,
Mathieu, merci, Michel. Écoutez, on est devant des décisions qui ne sont pas
seulement budgétaires. D'abord, on le sait, la démonstration a été faite,
prenons seulement le tabagisme, par exemple. On sait que le tiers des
hospitalisations sont liées au tabagisme. Alors, si on investit un peu plus
dans la prévention pour réduire le taux de tabagisme, bien, on rentre dans
notre argent très rapidement en réduisant le nombre d'hospitalisations. Je veux
dire, la règle est très, très simple.
Mais on sent qu'il y a autre chose derrière
ça. C'est que les gens de la Santé publique donnent aussi des avis sur l'impact
qu'aurait sur la santé tel projet pétrolier, tel casino, une décision de
modifier l'accessibilité à l'alcool. Et là les gens de la Santé publique disent :
Écoutez, c'est au gouvernement à décider, mais, si vous faites ça, il va y
avoir un impact négatif sur la santé. Bien, ça, le gouvernement libéral n'aime
pas ça, il considère que c'est de la politique. Un peu comme Stephen Harper, là,
ils ne veulent pas le savoir. Alors, on sent que…
Parmi les gens qui ont été mis à la porte,
il y a, évidemment, des nutritionnistes, des sexologues, des toxicologues, mais
il y a aussi des sociologues, et des psychologues, et des urbanistes, qui, eux,
donnaient ces avis-là. Et maintenant ce que fait le gouvernement, c'est
affaiblir la capacité de scientifiques de nous dire dans le débat public :
Vous déciderez ce que vous voudrez, mais voici l'impact sur la santé. C'est des
gens, aussi, qui s'occupent beaucoup des… ce qu'on appelle les déterminants de
la santé publique et comment la pauvreté a un lien avec la santé. Et, si on
luttait davantage et plus efficacement contre la pauvreté, on aurait des gens
en meilleure santé, on aurait moins de coûts de santé, d'hospitalisations, et
des citoyens plus épanouis, plus productifs. Alors ça, il semble que, les
libéraux, ils ne veulent pas entendre ça non plus.
Et il y a une citation de la ministre
responsable de la Santé publique, qui a dit, en privé : «Écoutez, ça, c'est
de la politique; si vous voulez faire de la politique, faites-vous élire.» Mais
ça, c'est un genre de dérive, de refus de la science auquel on pensait que le
Québec avait échappé. On pensait que ça se passait juste au Canada, mais il
semble que ça commence à se passer au Québec, puis il faut dire non, il faut dire
non à ça. On a besoin de la Santé publique pour la prévention, on a besoin de
la Santé publique pour le débat public, pour la science, et on a besoin que ces
coupes-là non seulement disparaissent… Puis on veut bien optimiser, mais on
veut investir davantage en prévention parce qu'on le sait, c'est
scientifiquement avéré, si on met 10 % de plus en prévention locale, on
réduit le nombre de maladies, on réduit le nombre de cancers, de diabètes, de
maladies cardiovasculaires, on réduit la mortalité infantile.
Alors, il y a une coalition, et j'invite
tout le monde à signer la pétition Mieux vaut prévenir. Allez sur
Internet, trouvez ça, signez la pétition, participez aux manifestations, parlez
à vos députés, il ne faut pas que ces coupes-là deviennent réalité. Merci.
Amir.
M. Khadir
: Alors,
pour compléter ce que vient de dire mon collègue Jean-François Lisée et surtout
nos amis de santé publique, j'insiste sur le fait qu'on peut prendre n'importe
quels chiffres parce qu'il y a différents ratios coût-bénéfice des dollars
investis en santé, parfois ça peut même aller jusqu'à 10 $ pour chaque
dollar investi en prévention — je pense notamment aux programmes de
lutte en toxicologie — parfois moins, mais quels que soient les
chiffres, à chaque fois qu'on investit un dollar en santé, on en économise.
Alors, moi, je voudrais aller un peu plus
loin et proposer à Mme Charlebois, à la ministre responsable… Je comprends
qu'elle est sous les… je dirais, l'injonction du cabinet et surtout du ministre
de l'austérité, M. Coiteux, du Conseil du trésor, qui demande de couper aveuglément
un peu par idéologie, mais il faudrait que Mme Charlebois nous permette de
l'aider. Je suis prêt à l'accompagner, je pense que Jean-François également, à
convaincre ses collègues qu'en matière de dépenses en prévention, si on veut
balancer et équilibrer le budget, c'est la chose à faire.
On a mentionné quelques chiffres. Si on
prend le 6 $ d'économie par dollar investi, qu'est-ce que ça veut dire? Ça
veut dire que, si aujourd'hui, au Québec, au lieu de dépenser 2 % de notre
budget annuel en santé, qui se chiffre à 33 milliards de dollars, on
passait de 2 % à 6 % — moi, j'ai fait les
calculs — ça voudrait dire qu'on dépenserait 1 milliard de plus
en prévention — imaginez ce que ça pourrait ajouter au budget de 600
quelques millions qu'il y a actuellement — mais ce 1 milliard
générerait des économies, en bout de piste, de 6 milliards de dollars.
Autrement dit, il y a une économie de 5 milliards de dollars à aller
chercher si on va dans les évaluations les plus généreuses. Mais même si c'est
moins que ça, ce qu'on sait assurément, c'est que chaque dollar investi finit
par rapporter, ça ne coûte rien.
Donc, pour équilibrer le budget du Québec,
si la volonté réelle de Mme Charlebois, c'est aider son gouvernement à
équilibrer le budget, la première chose, c'est, ensemble, aller voir le ministre
Coiteux et dire : Non, non, non, en prévention, en santé publique, il faut
investir davantage si on veut réduire les dépenses inutiles dans le domaine de
la santé. Merci beaucoup.
La Modératrice
: Merci
beaucoup.
M. Lisée
: On a été tellement
clairs qu'il n'y a pas de questions!
(Fin à 14 h 52)