(Onze heures vingt-neuf minutes)
Mme Anglade : Alors, aujourd'hui,
en période de questions, le chef de l'opposition a posé une question au premier
ministre par rapport à l'entreprise Velan, qui, depuis le mois de janvier, a
annoncé des centaines de délocalisations. Et le premier ministre, premièrement,
n'a pas répondu, ne s'est pas levé pour répondre à la question, il a préféré
laisser ce rôle au ministre de l'Économie. Mais, lorsqu'il s'est levé, c'était
pour cautionner le fait que, dans le fond, il y avait de la délocalisation.
La délocalisation, ça existe. Le fait
d'avoir le premier ministre du Québec qui vienne le cautionner, sous prétexte
que ce ne sont pas des emplois qui sont particulièrement payants, je pense que
ça fait preuve d'un manque de sensibilité par rapport aux familles qui sont
touchées par les délocalisations. Premièrement.
Et ça, en fait, ça vient un peu en
contradiction aussi avec ce qui se passe chez ABI, où le premier ministre a
décidé de prendre le côté de l'employeur et en disant que les emplois étaient
déjà de très bons emplois, des gens étaient trop bien rémunérés. Alors, quand
vous n'êtes pas bien rémunérés, ce n'est pas important; quand vous êtes trop
bien rémunérés, le premier ministre prend le côté de l'employeur. Quand est-ce
que le premier ministre prend le côté réellement des travailleurs au Québec?
Lorsqu'on regarde ce qui s'est passé hier,
avec le Groupe Maurice, on constate que le premier ministre maintenant dit que
ce n'est pas stratégique. Pourtant, lorsqu'il était dans l'opposition, il
disait lui-même que St-Hubert, c'était une entreprise qui était importante et
qu'il fallait garder ici. Le message qui est envoyé à ce moment-là c'est que,
pour les personnes aînées, ce n'est pas stratégique, mais, quand il s'agit du
poulet, par contre, ça, ça peut être considéré comme stratégique.
Aujourd'hui, on apprend que Bombardier
souhaite vendre les CRJ à la compagnie Mitsubishi. J'espère et je demande au
premier ministre... savoir s'ils sont impliqués présentement pour préserver les
emplois.
Quand ce genre de transaction est en train
de se matérialiser, l'important, pour le Québec, c'est de préserver des
emplois. Et là, je suppose qu'il ne va pas pouvoir dire que ce sont des emplois
qui ne sont pas payants. Je suppose qu'il ne pourra pas dire que ce n'est pas
une entreprise stratégique. Je me demande bien les propos qu'il va avoir.
Ce qui est important dans ce cas-ci,
encore une fois, c'est de préserver les emplois, c'est aller à la défense des
intérêts des travailleurs. Le gouvernement du Québec a été largement impliqué
avec l'entreprise Bombardier. Je pense que c'est la moindre des choses que de
s'asseoir avec l'entreprise et de voir de quelle manière on est capables de
préserver ces emplois.
Donc, ce que l'on demande, d'un point de
vue économique, c'est, franchement, beaucoup plus de cohérence. On nous a
promis mer et monde. Or, ce que l'on constate, c'est que présentement ce sont
des spectateurs, d'un point de vue économique, on ne voit pas d'effet réel sur
le terrain, et plusieurs annonces dans les derniers jours, dans les dernières
semaines, qui démontrent qu'on ne prend pas le côté des employés, on ne prend
pas le côté des travailleurs. Et ça, c'est préoccupant.
M. Dion (Mathieu) : Mais même
vous, quand vous étiez ministre, vous disiez souvent, mettons, dans le cas de
Vélan ou du Groupe Maurice, que vous aviez les mains liées, vous ne pouviez pas
faire grand-chose finalement. Reconnaissez-vous que le ministre de l'Économie
ainsi que son premier ministre sont dans la même situation que vous? Vous
l'avez été...
Mme Anglade : Non. Je vais
vous dire pourquoi. Parce que, depuis le départ, on a dit qu'il y a des
entreprises qui étaient stratégiques. Nous, on mentionnait que c'était des
importances d'entreprises stratégiques. Et d'autant plus que dans certains
secteurs on a pris des risques importants avec les entreprises pour les
accompagner. Donc, on a posé des gestes.
Mais même dans le cas de délocalisations,
même dans le cas où il y avait des transformations importantes d'entreprises,
on s'asseyait pour voir de quelle manière on allait préserver les emplois,
qu'on allait accompagner les travailleurs, qu'on allait faire... On ne
cautionnait pas les positions pour connaître la situation, mais on s'asseyait
avec les travailleurs pour essayer de voir de quelle manière on allait pouvoir
les accompagner.
Or, je ne sens aucunement cette
préoccupation-là. Quand le premier ministre ne se lève même pas pour répondre à
une question qui touche, quand même, des centaines d'employés au Québec, on
peut se poser la question : Est-ce que, même, ça l'intéresse? Et sa
réponse, c'est : Ce ne sont pas des emplois payants.
Moi, je vais vous dire une chose, peu
importe le salaire que faisaient les gens, quand j'étais ministre de
l'Économie, jamais je n'ai justifié ma non-implication par le fait que les
salaires étaient plus bas que la moyenne, jamais, et jamais vous ne me verrez
faire ça. On comprend tous qu'on veut des salaires plus élevés, mais on ne peut
pas non plus prendre les salaires les plus bas, puis dire qu'on ne fera rien
pour ça, puis que c'est normal, et que c'est la suite... c'est le cours des
choses. C'est quand même le premier ministre du Québec.
M. Dion (Mathieu) : Mais, dans
le cas du Groupe Maurice, il n'y a plus rien à faire pour le gouvernement,
n'est-ce pas? C'est purement d'intérêt privé, et le centre décisionnel demeure
ici, à quelque part...
Mme Anglade : Dans le cas du
Groupe Maurice, la chose que je souligne particulièrement, c'est l'incohérence
du gouvernement. On ne peut pas dire à la fois : On veut protéger les
sièges sociaux, et là on veut s'impliquer d'un point de vue stratégique, on
nous dit : Ce n'est pas stratégique. Mais c'est quand même le premier
ministre François Legault qui a déchiré sa chemise sur la vente de St-Hubert.
Il a littéralement dit : Il faut absolument tout faire par rapport à
St-Hubert, qui a été acquis par des intérêts ontariens. Or, aujourd'hui, en
quoi est-ce que St-Hubert est plus stratégique que nos aînés?
M. Dion (Mathieu) : Vous qui
avez eu les mains dedans, là, qu'est-ce que le gouvernement peut faire
concrètement avec Bombardier? Où sont ses options, réellement, pour faire
quelque chose dans le cadre d'une transaction qui pourrait survenir comme
celle-là?
Mme Anglade : Bien,
premièrement, il faut être impliqué en amont avec les entreprises importantes
du Québec, donc j'espère que ça fait longtemps qu'ils sont assis avec
Bombardier pour discuter des différentes options, premièrement; deuxièmement,
garantir les emplois, garantir les emplois à terme. On a beau dire ce que l'on
veut sur la transaction avec le CSeries, mais la réalité, c'est que les emplois
ont été garantis pendant 25 ans, puis il n'y a personne qui a perdu son emploi,
là. Alors, ça fonctionne toujours à Mirabel. Donc, il faut que le gouvernement
s'implique pour garantir les emplois puis être à la table.
M. Dion (Mathieu) : Quand vous
étiez là, est-ce que Bombardier vous tenait vraiment au courant de ce qui
allait...
Mme Anglade : Moi, j'étais
tout le temps... ah oui! mais pas juste avec Bombardier, avec les grands
donneurs d'ordres. On est tout le temps en discussions avec eux. Il faut être
en discussions avec les grands donneurs d'ordres.
M. Dion (Mathieu) : Donc,
pensez-vous que c'est différent avec la CAQ maintenant?
Mme Anglade : Bien, je ne le
vois pas. Je veux dire, un exemple de ça, c'est... honnêtement, la question sur
le groupe Velan, vous me direz : Ce n'est pas une aussi grande
entreprise...
M. Dion (Mathieu) : Non, mais si
on parle de Bombardier précisément?
Mme Anglade : Précisément.
Absolument. Il faut être constamment en communication.
M. Dion (Mathieu) :
...Bombardier, est-ce qu'ils vous tenaient au courant? Est-ce qu'ils vous
tenaient impliqués dans tout?
Mme Anglade : Absolument. On
était impliqués, on était impliqués.
M. Dion (Mathieu) : Est-ce
qu'il y a des choses qu'on croit que ça pourrait être différent maintenant?
Mme Anglade : Je ne le sais
pas. À eux de répondre à la question. Mais, quand je vois que l'on nous parle
de la vente de CRJ à Mitsubishi, je n'ai rien entendu de la part du
gouvernement pour venir rassurer les employés de ce secteur. Je n'ai rien
entendu, pas une communication, je n'ai rien vu. Alors, la question se pose :
Où sont-ils sur cet enjeu-là? Et on les voit absents sur d'autres enjeux. On
peut se poser la question : Où sont-ils?
Une voix
: Merci.
Mme Anglade : Merci.
(Fin à 11 h 36)