(Huit heures)
M. Nadeau-Dubois : Merci
beaucoup. Bonjour. Je veux vous parler ce matin de deux choses.
D'abord, je veux vous parler de
transparence. Depuis des semaines, Québec solidaire demande que soient rendus
publics les avis de la Santé publique qui justifient les mesures de confinement
social qu'on vit au Québec. Et, depuis des semaines, le gouvernement de
François Legault nous fait la même réponse, c'est-à-dire : On
aimerait bien les rendre publics, mais on ne peut pas, il n'y en a pas, des
avis écrits. Les Québécois et les Québécoises ont entendu le premier ministre
dire ça à plusieurs reprises.
Eh bien, ce matin, on apprend que c'est
faux. On apprend qu'il y a des avis écrits. On apprend que la direction
régionale de la santé publique à Montréal a rédigé un avis écrit, que le gouvernement
l'a entre ses mains depuis la fin du mois d'octobre et que ce document n'a
jamais été rendu public. Donc, le prétexte utilisé par le gouvernement pour ne
pas rendre publics les avis de la Santé publique, il vient de s'écrouler, ce
prétexte ne tient plus.
Ce matin, donc, je veux relancer un appel
à la transparence. Et, au nom de Québec solidaire, je vais demander au ministre
de la Santé de rendre public ce document de la direction de la santé publique à
Montréal. De toute façon, il y a de larges extraits qui sont déjà en
circulation dans les médias. Il n'y a aucune raison que le gouvernement
continue de cacher ce document-là, alors que c'est un document qui est
pertinent pour le débat public. C'est un document qui est pertinent pour qu'on
comprenne ce qui motive les décisions de confinement social du gouvernement
de François Legault.
Deuxièmement, je veux vous parler de la
transmission par aérosols. Il y a deux semaines, j'ai, au nom de Québec
solidaire, demandé au ministre de la Santé de garantir un masque N95 à
chaque soignante qui est en contact avec un patient atteint de la COVID. La
raison pour laquelle j'ai fait cette demande-là et la raison pour laquelle les
soignantes elles-mêmes font cette demande-là, c'est parce que, on le sait, les
masques chirurgicaux, les petits masques bleus que tout le monde connaît, ça ne
protège pas ou très peu contre la transmission par aérosols. À ce moment-là, la
réponse qui nous a été donnée, c'est... Ce n'est pas clair, la réponse qui nous
a été donnée. On nous a dit notamment qu'il n'y avait pas de preuve établie que
la transmission par aérosols existait. Eh bien, ça vient de changer. Santé
Canada, hier, a reconnu officiellement l'existence d'un risque de transmission
par aérosols.
Et donc, ce matin, je relance la demande que
j'ai faite au gouvernement il y a deux semaines. Il faut garantir un N95 à chaque
soignante qui est en contact avec un patient COVID. Pourquoi? Parce qu'il faut
garantir la meilleure protection possible à ces femmes et à ces hommes qui risquent
leurs vies pour nous sauver de la pandémie, parce que, s'il y a même une chance
infime que la transmission par aérosols existe, on ne peut pas prendre de
chances. Il faut appliquer le principe de précaution, puis le principe de
précaution, ce que ça veut dire, c'est garantir des N95 aux soignantes qui nous
défendent contre la pandémie.
La Modératrice
: On va
prendre vos questions.
M. Bossé (Olivier) : …M. Legault
a menti, qu'il y a effectivement des avis puis qu'il ne veut juste pas les
publier?
M. Nadeau-Dubois : Je n'ai pas
envie de jouer sur les mots ce matin. Le premier ministre, parfois, a dit :
La majorité des avis sont faits à l'oral. Il a utilisé plusieurs expressions.
Moi, ça ne m'intéresse pas de savoir... Puis je ne veux pas prêter d'intentions
au ministre. Par contre, là, le fait qu'on connaît l'existence de ce document-là,
ça démontre qu'il y en a, des avis écrits. On veut les voir pas pour faire la
job de la Santé publique à la place de la Santé publique, mais parce que la transparence,
là, c'est la clé pour que les gens comprennent pourquoi on leur interdit de
faire certaines choses plutôt que d'autres.
Et, si on se fie à ce qu'on lit dans les
médias ce matin, l'avis est justement détaillé. L'avis est détaillé parce qu'il
nous dit : Voici la mesure qu'on devrait prendre… pour les raisons
scientifiques suivantes, voici telles mesures qu'on devrait prendre parce qu'il
y a eu ou pas des éclosions dans ces milieux. C'est fascinant. C'est exactement
ça que demande l'opposition depuis des semaines. Ça fait des semaines que le gouvernement
nous dit : C'est plus compliqué que ça, ça ne marche pas de même. Bien, de
toute évidence, c'est faux, ça marche de même. Il y a des avis qui existent. On
veut les voir.
Mme Prince (Véronique) : …ce
qui est proposé dans cet avis-là, est-ce qu'effectivement le gouvernement doit
jeter du lest au niveau des mesures sanitaires?
M. Nadeau-Dubois : Moi, j'ai
toujours fait bien attention de ne jamais me mettre à la place de la Santé
publique puis de prétendre, mieux que la Santé publique, comment il faut gérer
le confinement ou le déconfinement au Québec. On a posé des questions. On a
demandé de la transparence. Moi, l'avis, je ne l'ai pas lu. On en a des
extraits dans les médias. Je ne m'improviserai pas expert du déconfinement puis
dire au gouvernement quoi faire. Par contre, si on veut susciter de l'adhésion
envers les décisions qu'on prend, il faut de la transparence. Cet avis-là, il
est pertinent pour le débat public. Il est pertinent pour qu'on comprenne ce
qui motive le gouvernement. C'est pour ça qu'il faut le rendre public.
M. Lacroix (Louis) : Restons
dans le thème de la transparence. Dans le dossier de Martin Prud'homme et du
départ d'Annick Murphy, en fouillant un peu, on se rend compte que le
fameux comité d'experts qui avait été mis sur pied par les emplois supérieurs,
composé de Michel Bouchard, de Louis Sormany et de
Luc Chamberland, ces trois personnes-là sont des proches
d'Annick Murphy. Les trois personnes qui ont été chargées d'analyser le
comportement de Martin Prud'homme ont travaillé avec Annick Murphy au
ministère de la Justice. Dans le cas de Michel Bouchard, il a été
sous-procureur général au moment où Annick Murphy était nommée DPCP. Donc,
il a travaillé avec elle à ce moment-là. Il était son sous-ministre.
Mme Murphy lui a même donné un contrat de 95 000 $ pour qu'il
produise un rapport sur les mégaprocès. Est-ce que vous ne trouvez pas qu'il y
a beaucoup de proximité entre ces gens-là puis Annick Murphy et que ça ne
démontre pas une apparence… je ne dis pas qu'ils sont en conflit d'intérêts,
mais, à tout le moins, une apparence de conflit d'intérêts?
M. Nadeau-Dubois : Il y a des
sujets, des fois, dans l'actualité où on vient à court d'images ou de métaphores.
Moi, le bordel permanent dans la gestion des corps policiers, dans la gestion
de l'UPAC, le bordel perpétuel des conflits entre la SQ, d'autres corps
policiers, et là, en plus, le DPCP, honnêtement, je ne sais plus quoi en dire
tellement c'est exaspérant. Il y a une culture à casser, là. Il y a une culture
de la guéguerre, une culture des rivalités de clans qu'il faut briser. Est-ce
que j'ai, ce matin, une solution miracle à offrir? Honnêtement, non. Mais
l'objectif, ce doit être d'assainir les moeurs puis les manières de travailler
en haut de l'appareil politicojudiciaire au Québec. C'est exaspérant de voir
tant d'apparence de choses qui ne tournent pas rond. Puis on essaie toujours
d'être prudents, nous, comme élus, de ne pas prêter d'intentions, de ne pas
voir des complots partout. On essaie vraiment de ne pas faire ça. Je pense, ça
ne serait pas responsable de faire ça. Mais à un moment donné ça devient
exaspérant, une dynamique comme celle-là.
M. Lacroix (Louis) : Quand on
sait que ce rapport-là a servi à Geneviève Guilbault pour prendre sa
décision et dire : On prend le dossier maintenant puis on l'envoie à la
Commission de la fonction publique, qui va déterminer si on doit recommander
le… est-ce que… quel poids ça donne, finalement, à ce rapport-là? Est-ce qu'on
peut se fier à un rapport qui est fait par des gens qui ont côtoyé pendant des
années, depuis une vingtaine d'années, Annick Murphy?
M. Nadeau-Dubois : Bien,
d'abord, même avant que les informations dont vous parlez aujourd'hui ne soient
révélées, il y avait déjà beaucoup de doutes puis beaucoup de flou sur le
processus entourant le départ de Martin Prud'homme. Déjà, nous, ça fait, quoi,
deux semaines ou trois… Le temps passe vite en pandémie. Déjà, il y a deux ou
trois semaines, on disait : Ce processus-là n'est pas clair. Donc, nous on
veut entendre Mme Murphy. C'est ce que j'ai dit hier. Je le redis aujourd'hui :
On veut l'entendre. On a besoin d'explications sur qu'est-ce qui se passe au
sommet de la pyramide, disons, policière juridique au Québec. On a besoin de
savoir ce qui se passe. Ces gens-là sont payés par des fonds publics. Ils sont
censés servir la justice, servir le bien commun, défendre les droits des Québécois,
Québécoises. Et on a l'impression qu'en ce moment il y a beaucoup de conflits
qui concernent des intérêts très différents.
M. Bergeron (Patrice) : Une
petite question sur la Santé publique, juste pour revenir là-dessus. Vous avez vu,
donc, qu'on recommande des assouplissements pour des zones rouges comme Montréal,
mais il y a d'autres zones rouges au Québec aussi, dont le Saguenay—Lac-Saint-Jean,
dont Québec. Est-ce que, par souci de cohérence, aussi, là, si on accorde des
assouplissements dans certaines régions, il ne faudrait pas en accorder aussi à
d'autres? Comme on voit, il y a de la contestation, notamment au Saguenay—Lac-Saint-Jean.
M. Nadeau-Dubois : Le meilleur
remède pour la contestation des mesures sanitaires, c'est la transparence puis
la documentation des décisions. Ça, qu'est-ce que ça veut dire? Il faut être
capable de dire aux gens : Voici pourquoi on vous confine, voici pourquoi
on vous déconfine. Il faut le faire avec des indicateurs objectifs, des
indicateurs scientifiques. Parmi les extraits qui circulent actuellement du
fameux avis de la Santé publique à Montréal, on nous dit notamment, en tout
cas, si on en croit ce qui circule dans les médias, qu'il faudrait envisager de
rouvrir les bibliothèques parce qu'on dit… et on justifie cette recommandation
en disant : Il n'y a aucune éclosion qui est survenue dans une
bibliothèque.
Ça, là, c'est exactement le genre
d'indicateur que Québec solidaire demande depuis des semaines. J'étais ici, à
ce podium, il y a deux semaines et je donnais cet exemple en disant :
Peut-on nous expliquer pourquoi on ferme les lieux culturels s'il n'y a pas eu
d'éclosion dans les milieux culturels? Et la réponse a été : Bien, voyons
donc, ça ne marche pas de même, c'est plus compliqué que ça. Mais là, de toute
évidence, ce n'est pas si plus compliqué que ça. C'est le raisonnement que fait
la Santé publique de Montréal. Donc, ça, c'est un bon exemple. Il faut qu'on
soit capables d'expliquer ce qu'on ferme et pourquoi on le ferme, ce qu'on
ouvre et pourquoi on l'ouvre, avec des indicateurs objectifs et scientifiques.
M. Nadeau-Dubois : Good morning.
Mme Senay (Cathy) : …about your… of the city of Montréal… well, not the city of Montréal, but the Public
Health of Montréal trying to get some restrictions
lifted, how do you think it is important to give some, you know, freedom to people so they reconnect with their normal lives? Because
it's harder right now, and Montréal is the center of theatre, arts. It's a lively city and now it's been
slowing down for months. So how important… to say : Well, at some point, yes, we have to have a better…
M. Nadeau-Dubois : You know, as a politician, it is not my job to draw the line
between what should be open and what should be closed. But I should be able, as
a citizen, to understand why some things are open and some things are closed,
and those decisions have to be justified by objective data. That's what I've
been saying for weeks now. And, each time we've asked for that data, the answer
was : Oh! you know, it's much more complicated than that. That is
basically what the Government
answered us. What we are learning this morning is that, obviously, this data
exists, at least in Montréal,
and that the regional health authorities are using that data to justify their
recommendations. So the authorities of Montréal are doing exactly what Québec solidaire has been asking for weeks. So it's not that impossible at all,
after all.
Mme Senay (Cathy) : I remember political parties here asking for a complete list of
where the outbreaks are just to have a clear overview of…
M. Nadeau-Dubois : Yes, I specifically asked for that type of data numerous times in
the last weeks. I've repeatedly said : You know, we have to know where are
the outbreaks in order to justify what is closed and what is open. I've often
used the comparison with British Columbia, that is publishing such a list. So,
if we want to fight the contestation of the shutdown measures, we have to fight
it with transparency and with scientific data. And what we're learning this
morning is that this data exists. Those written recommendations exist. We have
a very, very basic demand for the Government. We want to see those recommendations. We want to see those written
recommendations from public health authorities.
Mme Senay (Cathy) : It's frustrating to read that those recommendations, those advisories
do exist, and you couldn't be able to…
M. Nadeau-Dubois : No, it's the proof that, contrary to what has been said by the Government, the oppositions were not crazy
to ask for scientific justifications of political decisions. Those justifications
exist. They exist in a written form. We have to see them.
Mme Senay
(Cathy) : Last question. I remember asking you in
French last week… the risk of not having written documentation now, but even later on, after all this, what's the risk for the Government to not have written proof of
anything that was done?
M. Nadeau-Dubois : Well, yes, that's also something that concerns me on a more
long-term basis. You know, this
is not the last pandemic. And what experts are telling us more and more is that
the effect of human civilization on ecosystems is actually increasing the risk
of specifically that type of pandemic. So, when we will have to do the… You know, when we will have to reflect on
that crisis to gather some lessons for the future, we will need some documentation to reflect on. And the fact
that that Government refuses to produce such
documentation will prevent us from being prepared for the next crisis.
(Fin à 8 h 16)