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Version finale

39th Legislature, 1st Session
(January 13, 2009 au February 22, 2011)

Wednesday, June 2, 2010 - Vol. 41 N° 125

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante-sept minutes)

Le Vice-Président (M. Gendron): Bonjour, chers collègues. Bon mercredi. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Nous allons procéder à ce qui est prévu dans notre règlement, c'est-à-dire la déclaration des députés. Et je suis prêt à entendre la première déclaration. M. le député de Gaspé, à vous la parole pour votre déclaration du jour. À vous.

Souligner la Journée de la Gaspésie
et des Îles-de-la-Madeleine

M. Georges Mamelonet

M. Mamelonet: Merci, M. le Président. M. le Président, depuis quatre ans déjà, une tradition s'installe, initiée par notre Commission jeunesse et les comités d'accueil des nouveaux arrivants de Place aux jeunes. Pendant cette même période, la Péninsule gaspésienne et l'archipel des Îles-de-la-Madeleine affichent un solde migratoire positif, preuve de la fin d'une époque, et c'est avec fierté que jeunes professionnels, nouvelles familles et jeunes retraités viennent y bâtir leur avenir.

Avec fierté pour l'ensemble de la région Gaspésie-- Les Îles et celle du comté de Gaspé, avec cette fierté contagieuse que portent également mes collègues de Bonaventure, des Îles, de Matane et de Matapédia, avec tous les Gaspésiens et Madelinots, j'invite l'ensemble de mes collègues de la Chambre à participer simplement à notre journée en bleu. Le thème Soyons fiers de nous!, choisi pour le premier jeudi de juin, se traduira demain par le port du bleu, bleu du ciel, bleu de la mer ou bleu du fleurdelisé, un bleu qui nous marque et qui nous distingue, Gaspésiens et Madelinots de souche, d'adoption, de coeur, de parenté et même de visite. C'est donc à un rendez-vous en bleu que la Gaspésie--Les Îles convoque le Québec demain. Vêtements ou accessoires, chaque petite touche de cette belle couleur d'horizon sera un signe d'hommage à ce joyau du territoire national où a commencé l'histoire, où elle continue fièrement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci. Même si j'adore le bleu, là, ça ne donne pas plus de temps imparti, alors il faut essayer de viser une minute. Merci, M. le député de Gaspé. Je cède maintenant la parole à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. À vous la parole.

Saluer l'initiative du Regroupement
des comités logement et associations
de locataires du Québec pour
l'établissement d'un registre des baux

Mme Carole Poirier

Mme Poirier: Merci, M. le Président. Le Regroupement des comités de logement et associations des locataires du Québec, le RCLALQ, a recueilli plus de 12 000 signatures pour l'établissement d'un registre des baux obligatoire. Je salue l'initiative du RCLALQ afin d'offrir aux locataires du Québec l'information nécessaire à l'établissement du coût de leur loyer. Actuellement, au Québec, c'est près de 450 000 personnes qui consacrent plus de 30 % de leurs revenus pour payer leur loyer. Les locataires ont le droit de connaître le coût du loyer payé par le locataire précédent. Les propriétaires doivent compléter la section G du bail qui indique le coût du loyer et les autres conditions du bail du locataire précédent.

Devant le manque de logements et le taux d'inoccupation actuellement très en dessous du seuil minimal, les locataires sont devant des choix nécessairement difficiles. Je félicite les Québécoises et les Québécois qui ont à coeur la défense des locataires et j'encourage le RCLALQ dans sa volonté de mettre en place un outil qui permettra la transparence en matière d'information sur le coût du loyer.

**(9 h 50)**

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, madame. Bel exemple. Alors, merci de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Marguerite-D'Youville pour sa déclaration d'aujourd'hui. À vous la parole.

Souligner la Semaine québécoise
des personnes handicapées

Mme Monique Richard

Mme Richard (Marguerite-D'Youville): M. le Président, c'est sous le thème rassembleur de Vivre à part entière que se déroule actuellement, du 1er au 7 juin 2010, la 14e édition de la Semaine québécoise des personnes handicapées. Rappelons, M. le Président, que l'objectif de cette semaine est de sensibiliser l'ensemble de la population québécoise à l'importance du respect des différences dans la société et à connaître la réalité vécue par les personnes handicapées, de manière à favoriser leur intégration scolaire, professionnelle et sociale. Vivre à part entière, c'est vivre sa vie pleinement, au meilleur de ses talents, de ses capacités et de ses connaissances. C'est aussi être en mesure de faire ses propres choix et de participer à la vie de sa communauté.

Cette année 2010 marquera le premier anniversaire du plan d'action À part entière: pour un véritable exercice du droit à l'égalité. Dans toutes les régions du Québec, nos concitoyennes et concitoyens sont conviés à participer à des activités de toute nature. Je souhaite bon succès à tous les organisateurs d'événements. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci pour votre déclaration. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Bourassa-Sauvé pour sa déclaration d'aujourd'hui. À vous la parole, Mme la députée.

Souligner la Journée de l'air pur

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. J'aimerais souligner la Journée de l'air pur, qui se déroule aujourd'hui. Comme vous le savez, la qualité de l'air est une des grandes préoccupations environnementales actuelles. Que ce soit par le biais des changements climatiques, de l'amincissement de la couche d'ozone, des épisodes de smog ou des précipitations acides, on constate que la pollution atmosphérique a de nombreuses répercussions sur la santé humaine et l'environnement.

La Journée de l'air pur se veut une célébration d'activités écologiques qui font la promotion de l'air pur et de la santé partout au Canada. Ces activités de sensibilisation sont de belles occasions pour poser des gestes concrets et contribuer à l'amélioration de la qualité de l'air.

Pour sa part, le gouvernement du Québec propose aujourd'hui un nouveau Règlement sur la déclaration obligatoire de certaines émissions de contaminants dans l'atmosphère. Vous comprenez, M. le Président, que j'invite tous les Québécois à participer aux activités proposées et organisées dans leurs communautés en cette Journée de l'air pur.

Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie, Mme la députée, de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Bonaventure pour sa déclaration d'aujourd'hui. Mme la députée, à vous la parole.

Féliciter les pompiers forestiers ainsi
que tous ceux et celles qui oeuvrent
actuellement auprès des communautés
touchées par les feux de forêt

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, je souhaiterais féliciter les pompiers forestiers et tous ceux et celles qui oeuvrent actuellement auprès des communautés touchées par les incendies, par les feux de forêt qu'on connaît tous au Québec.

Ils font un travail extraordinaire. Vous me permettrez de saluer leur ténacité, leur détermination. Ils font preuve, et je pense qu'on en conviendra tous, d'un engagement hors du commun. Leur expertise est essentielle pour la protection des citoyens, de nos citoyens et de notre patrimoine forestier, un patrimoine, qui, on le reconnaît, est d'une importance capitale pour nos communautés.

Ces incendies qui font rage actuellement sollicitent de façon intensive les efforts des pompiers de la SOPFEU de même que tout le personnel du centre des mesures d'urgence du ministère des Ressources naturelles et de la Faune, le personnel en soutien aux opérations de même que tous les acteurs mobilisés tels que la Croix-Rouge et les municipalités qui ont accueilli avec grand bonheur les sinistrés. Grâce à l'accord d'aide mutuelle en cas d'incendie de forêt, des pompiers provenant d'autres provinces et même des États-Unis sont venus prêter main-forte aux équipes québécoises.

Alors, vous me permettrez, M. le Président, de profiter de l'occasion qui m'est offerte pour les remercier de leur aide.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, Mme la députée de Bonaventure. Je cède maintenant la parole à M. le député de Jonquière pour sa déclaration d'aujourd'hui. M. le député de Jonquière, à vous la parole.

Féliciter l'équipe du Festival des
musiques de création du
Saguenay
--Lac-Saint-Jean inc.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault: Oui, merci, M. le Président. Du 20 au 29 mai dernier s'est tenu le 19e Festival des musiques de création. Ce festival est un leader parmi les organisations culturelles du Saguenay--Lac-Saint-Jean. En plus d'être un rendez-vous international de renom, cet événement est une manifestation culturelle unique enracinée à Jonquière et dont le public et moi-même, on est très fiers.

Je tiens à souligner le dévouement et l'implication exceptionnelle de toute l'équipe du festival; en premier lieu, du directeur général et artistique, Pierre Dumont, qui, par son engagement, rehausse année après année, depuis 21 ans, la réputation du festival. Par la diversité de la programmation et la place qu'il fait aux talents musicaux, artistiques et de création du Saguenay--Lac-Saint-Jean, le Festival des musiques de création est une vitrine sans pareille pour la région.

Bravo aux artisans du Festival des musiques de création et longue vie à ce moteur de développement culturel de notre région. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie pour votre déclaration d'aujourd'hui. Je cède maintenant la parole à M. le député de Jean-Lesage pour sa déclaration d'aujourd'hui. M. le député de Jean-Lesage, à vous.

Féliciter l'école de la
Seigneurie, à Québec, pour
son programme d'enseignement
des techniques de réanimation
cardiorespiratoire

M. André Drolet

M. Drolet: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais souligner aujourd'hui l'implication d'une école secondaire du comté de Jean-Lesage, l'école la Seigneurie. Cette institution scolaire s'est jointe au Programme RCR au secondaire. Ce programme permet aux élèves du secondaire d'apprendre les techniques de réanimation cardiorespiratoire. Grâce au Programme RCR au secondaire, c'est plus de 100 000 jeunes du Québec qui ont acquis des connaissances et des compétences qui leur permettront peut-être un jour de sauver des vies.

Je félicite l'initiative de la direction, M. Éric Arsenault et M. Marc-André Mercier qui ont initié le Programme RCR au secondaire à l'école la Seigneurie afin de donner l'opportunité à nos jeunes de devenir des citoyens encore plus impliqués dans la communauté. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député de Jean-Lesage. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Rosemont pour sa déclaration d'aujourd'hui. Mme la députée de Rosemont, à vous la parole.

Condamner l'attaque israélienne
contre le convoi d'aide humanitaire
pour la bande de Gaza

Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président. Les réactions d'indignation continuent d'affluer du monde entier quelques jours après le raid israélien contre une flottille d'aide humanitaire en route vers Gaza.

Cette intervention de commando de la marine israélienne a eu lieu dans les eaux internationales, a fait une dizaine de morts. Des dizaines de blessés et des centaines de civils de plusieurs nationalités ont été ou sont encore détenus dans les prisons d'Israël.

Ce n'est pas être, M. le Président, un ennemi d'Israël que de condamner une action répréhensible, inacceptable, disproportionnée. Ce n'est pas remettre en cause l'existence d'Israël que de manifester vigoureusement son désaccord avec le gouvernement israélien actuel sur ce sujet. Le secrétaire général des Nations unies l'a fait, la France, du président Sarkozy à la première secrétaire du Parti socialiste, Martine Aubry, l'ont fait. Plusieurs en Israël même l'ont fait. Au Liban, le premier ministre Saad Hariri a déclaré avec raison: «L'attaque israélienne contre le convoi d'aide représente une étape dangereuse...

Le Vice-Président (M. Gendron): Madame...

Mme Beaudoin (Rosemont): ...et folle qui va exacerber les tensions dans la région.»

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui. Le problème, c'est qu'une déclaration ne doit pas dépasser une minute, et là on est rendus à 1 min 2 s. Je vous remercie de votre déclaration, Mme la députée de Rosemont. Je cède maintenant la parole à M. le député de Chomedey pour sa déclaration d'aujourd'hui. M. le député.

Souligner la Semaine de la
sécurité routière dans les sociétés
de transport en commun

M. Guy Ouellette

M. Ouellette: Merci, M. le Président. J'aimerais porter à l'attention de cette Chambre la tenue de la semaine de sécurité routière dans les transports en commun du Québec. Cette semaine thématique se tient, cette année, du 31 mai au 4 juin. Elle est une heureuse initiative de l'Association du transport urbain du Québec. Et la Société de l'assurance automobile du Québec collabore à cette campagne de sécurité routière pour une quatrième année consécutive.

Cette semaine s'adresse particulièrement aux chauffeurs d'autobus urbains mais aussi aux piétons et aux usagers du transport en commun. Le partage de la route et la sécurité des piétons sont les principaux thèmes abordés. Pour comprendre l'importance de cette initiative, je souligne qu'à chaque année quelque 3 500 piétons sont victimes d'un accident de la route au Québec. L'Association du transport urbain du Québec, qui regroupe neuf sociétés de transport, ainsi que ses partenaires veulent ainsi rappeler aux conducteurs d'autobus et aux piétons l'importance d'adopter des comportements sécuritaires et respectueux les uns envers les autres, notamment aux intersections. Il s'agit d'une campagne qui va dans le sens des objectifs et des actions du gouvernement du Québec en vue d'améliorer le bilan routier, qui mérite l'appui de cette Assemblée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le député de Chomedey. Et cette déclaration met fin aux déclarations d'aujourd'hui.

Alors, nous allons suspendre les travaux pour quelques instants. Les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 9 h 58)

 

(Reprise à 10 h 10)

Le Président: Bonne journée, chers collègues. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir.

Alors, nous poursuivons aux affaires courantes, là. Il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Vous pourriez appeler l'article a du feuilleton.

Projet de loi n° 103

Le Président: À l'article a du feuilleton, Mme la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine et ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française présente le projet de loi n° 103, Loi modifiant la Charte de la langue française et d'autres dispositions législatives. Mme la ministre responsable de l'application de la charte française, vous avez la parole.

Mme Christine St-Pierre

Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. Je dépose le projet de loi n° 103, Loi modifiant la Charte de la langue française et d'autres dispositions législatives.

Ce projet de loi apporte diverses modifications à la Charte de la langue française. En matière de langue d'enseignement, il permet au gouvernement de déterminer par règlement le cadre d'analyse et les règles applicables pour évaluer une demande d'admissibilité à recevoir un enseignement en anglais financé par l'État.

Concernant les établissements d'enseignement collégial et les universités, le projet de loi prévoit qu'ils devront diffuser leur politique linguistique et la rendre accessible. Ils devront de plus la réviser périodiquement et transmettre au ministre un rapport sur son application. Le projet de loi confère au ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport le pouvoir d'exiger des correctifs.

Concernant les organismes municipaux, le projet de loi accorde au ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française le pouvoir d'exiger qu'ils se dotent d'une politique relative à l'emploi et à la qualité de la langue française dans leurs activités et qu'ils en fassent rapport périodiquement à l'Office québécois de la langue française.

Concernant les organismes de l'administration, le projet de loi confère à l'office le pouvoir de leur demander de lui faire rapport et de prescrire les mesures correctives qu'il juge appropriées. Le projet de loi revoit aussi certaines dispositions pénales, notamment en haussant le montant des amendes.

De plus, face au problème des écoles dites passerelles, il prévoit une nouvelle infraction pour prévenir la mise en place ou l'exploitation d'un établissement ayant pour but d'éluder l'application du principe de l'enseignement en français prévu à l'article 72 de la charte.

De plus, ce projet de loi modifie la Charte des droits et libertés de la personne pour y consacrer l'importance du français, la langue officielle du Québec.

Enfin, ce projet de loi contient des dispositions modificatrices de concordance.

(Applaudissements)

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.

Question de privilège concernant une
motion adoptée qui empêcherait la
présentation du projet de loi n° 103

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Article 55 de la Loi de l'Assemblée nationale, question de règlement. M. le Président, à la lecture des notes explicatives... Et les applaudissements du gouvernement n'auront pas pour effet de diminuer l'outrage qu'il fait actuellement au Parlement. Je vous rappellerai la motion qui a été adoptée à l'unanimité par cette Assemblée il y a de cela deux semaines:

«Qu'à la suite de l'invalidation de la loi n° 104 par la Cour suprême du Canada, [que] l'Assemblée nationale du Québec exige -- pas demande, pas souhaite, exige -- du gouvernement libéral qu'il rejette toute solution qui aurait pour effet de permettre à des parents d'enfants actuellement non admissibles à l'école anglaise d'acheter pour leurs enfants un droit d'accès à l'école anglaise par le biais d'un passage dans une école privée non subventionnée.»

M. le Président, cette motion a été adoptée à l'unanimité: 97 pour, aucun contre. La plupart des membres du Conseil exécutif étaient présents lors de l'adoption. Et je dépose le procès-verbal de cette adoption, M. le Président.

Le Président: Consentement pour le dépôt?

M. Bédard: Le règlement à l'article 69...

Le Président: Il y a consentement pour le dépôt? Il y a consentement pour le dépôt.

M. Bédard: L'article 69, évidemment, me permet et, en tout état de cause, la Loi de l'Assemblée nationale me permet, lors de... lorsque le fait se produit, lorsqu'on atteint aux droits du Parlement, que ce soit une question de privilège ou même des principes constitutionnels bien connus, de se lever au moment du fait. Et c'est l'article 69 qui balise cette réalité, M. le Président.

Or, il est évident que de strictement vous demander de mettre aux voix lors de l'étape de la présentation ce projet de loi est en soi un outrage au Parlement. Pourquoi, M. le Président? Parce que la motion, elle est claire, la motion est un ordre. Elle a été rédigée en ces termes. Ce n'est pas un souhait, ce n'est pas un désir, c'est un ordre, M. le Président. Et les mots ont tout leur sens, «exige», M. le Président, «l'Assemblée nationale exige». Et c'est le droit de cette Assemblée d'exiger, que ce soit à l'Exécutif mais à n'importe qui, c'est un ordre qu'on peut donner. Vous le savez, M. le Président, cette Assemblée est souveraine, elle a le droit d'ordonner ce qu'elle veut, M. le Président, à l'intérieur de ses règlements.

D'ailleurs, vous retrouverez dans la jurisprudence une décision, en 1984, sur laquelle... qui distingue bien ce qui est un ordre de ce qui n'en est pas, M. le Président. Et, dans ce cas-ci, les mots choisis révèlent très bien qu'il s'agit d'un ordre qui a été donné au Parlement, mais évidemment à l'Exécutif, de ne pas... de ne pas, M. le Président, donc proposer un projet de loi qui aurait pour effet d'acheter, d'acheter un passage à l'école anglaise, M. le Président.

D'ailleurs, ce n'est pas une opinion, c'est clair, M. le Président, et vous le verrez à la lecture de cette décision -- je vais la déposer pour que vous l'étudiiez dans le cadre de votre décision -- elle clarifie très bien les deux aspects de ce qui est un souhait, une demande ou un ordre qui est donné. Et ça indique très bien qu'une motion sans préavis peut effectivement être un ordre. Et, dans ce cas-ci, nous sommes exactement devant le cas: «exige», il n'y a pas de terme plus fort qu'«exiger».

Et d'ailleurs cet ordre a été donné dans la même... dans la même session que nous vivons actuellement. Bien là, il y a deux semaines, M. le Président, mais... dans ce cas-ci. Dans l'autre cas, on avait eu... il y avait eu un nouveau discours inaugural qui avait fait tomber plusieurs aspects des projets de loi, plusieurs projets de loi mais aussi des motions. Mais nous sommes actuellement dans la même session, en plus dans la même législature, M. le Président, vous le savez.

Donc, c'est un ordre, M. le Président. Or, on pourrait vous invoquer, M. le Président, que cet ordre n'a pas pour effet de contraindre ou d'attaquer la souveraineté du Parlement, du pouvoir de faire les lois qu'il veut.

Notre règlement, M. le Président, prévoit des règles de procédure, et ça, c'est mon deuxième argument. Je pense qu'au départ vous devez identifier qu'il s'agit d'un outrage. Le deuxième, c'est qu'à l'article 186 de notre règlement, M. le Président, il est clairement indiqué qu'un ordre peut être révoqué. Il peut être révoqué, M. le Président, et de la façon suivante: «Un ordre ou une résolution ne peuvent être révoqués que sur motion sans préavis d'un ministre.» Voici ce qui est prévu dans nos règlements.

Or, c'est déjà arrivé, M. le Président, en 2002, où on a balisé les règles de la révocation et on ne pouvait pas d'ailleurs, à travers une même motion, faire en sorte de révoquer et en même temps convoquer. Cette révocation doit faire l'objet d'une motion... d'une motion qui est à part d'une motion distincte, M. le Président, des autres motions. Pourquoi, M. le Président? Parce qu'un ordre de l'Assemblée a une valeur légale contraignante pour tout le monde qui est dans cette Assemblée. Et ce pouvoir de révoquer, donc ce pouvoir ultime du Parlement qui lui est donné et qui n'entache pas sa souveraineté, donc ce pouvoir qui lui est donné peut être révoqué, mais pas de façon, je vous dirais, indirecte, il doit être fait de façon directe, par motion présentée par un ministre. À l'évidence, le gouvernement ne l'a pas fait, à moins que vous m'informiez qu'il y a une motion qui est présentée et qui... avant le dépôt que souhaite la ministre, qu'il y a eu une motion qui était présentée. À ma connaissance, il n'y a aucune motion qui révoque, qui révoque ce qui s'est passé il y a deux semaines, l'adoption à l'unanimité de cette motion, M. le Président.

Troisièmement... Donc, mes deux premiers arguments, vous comprendrez, sont que vous ne pouvez ordonner la mise aux voix actuelle en vertu de l'article 2, paragraphe 4°, M. le Président, vous ne pouvez ordonner cette mise aux voix sans causer un outrage au Parlement, M. le Président. Deuxièmement, vous ne pouvez ordonner la mise aux voix de ce projet de loi sans... en ne tenant pas compte et en passant outre à l'article 186 de notre règlement.

**(10 h 20)**

Troisièmement, M. le Président, il est bien reconnu, et là, ça, c'est de façon subsidiaire, M. le Président, que, si vous concluez que le mot «exige» ne serait pas un ordre... mais ce qui m'étonnerait beaucoup, M. le Président, parce qu'on ne peut pas être plus clair qu'exiger. D'ailleurs, la règle... Exiger, c'est un ordre en soi.

Mais, dans tous les cas de figure, M. le Président, il y a un principe qui gouverne cette Assemblée, et pas seulement la nôtre, le Parlement britannique a cette même règle, et c'est la règle qu'on ne peut porter atteinte à l'autorité et à la dignité de cette Assemblée. Cette règle a pour effet qu'on ne peut tourner en ridicule l'Assemblée. Cette règle fait en sorte que, lorsqu'on adopte une motion qui exige, on ne peut d'une autre main... alors que ce qu'on sait maintenant, c'est, lorsque cette motion a été adoptée, des gens avaient une information apparemment contraire au sens de la motion et de l'ordre qui avait été donné en cette Chambre. Vous soustraire... pas vous soustraire, mais vous rendre complice en mettant aux voix cet... ce projet de loi à l'étape du dépôt ferait de vous effectivement un complice d'une atteinte à l'autorité de cette Chambre et à la dignité.

Je vous invite, M. le Président, à faire comme il s'est fait, et je cite rarement ce qui se passe dans d'autres Parlements... mais ce qui s'est fait à Ottawa, où le président, il n'y a pas si longtemps, M. le Président -- et je vous invite à lire attentivement cette décision -- le président Milliken a réaffirmé la souveraineté du Parlement et des principes qui doivent guider les liens entre l'exécutif et le législatif -- je vous la dépose aussi -- et qui a réaffirmé le principe que l'Assemblée peut se contraindre. Elle peut se contraindre et elle peut contraindre l'exécutif. Est-ce que cela a pour effet d'empêcher le Parlement d'agir dans le temps ou atteindre sa souveraineté? Non. Mais elle a le pouvoir de contraindre, M. le Président.

Donc, je vous invite à lire attentivement les décisions que je vous cite, M. le Président, la doctrine qui dit clairement qu'en matière de procédure -- et ce n'est pas une atteinte à la souveraineté du Parlement -- que l'on peut, M. le Président... et c'est le principe d'ailleurs des lois constitutionnelles, d'adopter des règles de procédure qui rendent plus difficiles l'adoption d'un projet de loi ou les modifications d'un projet de loi. On ne peut pas suspendre le droit d'un Parlement d'agir. On peut le rendre plus difficile et le contraindre à rencontrer des conditions pratiques et de procédure. Dans ce cas-ci, c'est exactement le cas, M. le Président. Je peux même vous dire qu'à la lecture de la doctrine, que vous lisiez Peter Hogg, Henri Brun, vous constaterez, M. le Président... ou François Chevrette, vous constaterez que cette souveraineté, elle peut, dans certains cas, être contrôlée par les parlementaires eux-mêmes, M. le Président.

Donc, pour toutes ces raisons, à cette étape, M. le Président, je vous demanderais, avant la mise aux voix, de constater cet outrage et de forcer le gouvernement à adopter une procédure qui est conforme à nos statuts, à nos règlements mais surtout à la Loi de l'Assemblée nationale, M. le Président.

Documents déposés

Le Président: Je comprends qu'il y a consentement pour le dépôt des différents documents auxquels a fait allusion M. le leader de l'opposition officielle? On peut prendre les documents? M. le leader du gouvernement.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Permettez-moi de féliciter le leader de l'opposition officielle pour la grande préparation de ce qu'il vient de vous présenter. Malheureusement, ça pèche, M. le Président, quand on lit le règlement attentivement, et particulièrement l'article 186.

Le leader plaide qu'il s'agit d'un ordre de l'Assemblée et il fait référence à la motion qui a été adoptée par l'Assemblée nationale le 19 mai 2010, relativement au sujet dont il est question. Or, un ordre, M. le Président, ça existe «quand l'Assemblée enjoint à une commission, à un député ou à toute autre personne de faire quelque chose». Et c'est là où son argumentation pèche, M. le Président, puisque la motion, puisque la motion n'ordonnait pas à un député, à une personne ou à une commission de faire quelque chose, d'une part.

D'autre part, M. le Président, nous sommes à l'étape du dépôt du projet de loi. Comment, comment, M. le Président, peuvent-ils porter un jugement sur un projet de loi qui est déposé, dont ils n'ont pas encore... dont ils n'ont pas encore pris connaissance? Les notes explicatives, les notes explicatives qui sont lues par le ministre au moment du dépôt du projet de loi ne font pas foi des articles et des dispositions qui sont inclus dans le projet de loi, ne font foi simplement que d'un résumé du projet de loi, M. le Président, et le projet de loi fera l'objet éventuellement de débats.

Ce que le leader de l'opposition officielle essaie de faire ce matin, c'est de provoquer, avant que les étapes de l'étude d'un projet de loi ne soient appelées, de provoquer un débat au moment du dépôt du projet de loi, M. le Président. Dans les circonstances, M. le Président, vous devez accepter le dépôt du projet de loi. Les étapes qui s'ensuivront, soit l'adoption de principe, commission parlementaire éventuellement pour entendre des groupes, commission parlementaire pour faire l'étude article par article, débat à l'Assemblée nationale lors de toutes ces étapes et débat en commission, feront l'objet de ce que l'Assemblée nationale, de façon souveraine, peut discuter, mais ça fait l'objet d'un débat. Au moment du dépôt du projet de loi, M. le Président, vous devez accepter le dépôt.

Le Président: Alors, toujours sur la même question de privilège, parce qu'il s'agit d'une question de privilège, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Bien, c'est plus qu'une question de privilège, M. le Président. C'est une question de privilège, mais c'est une question qui concerne l'outrage au Parlement, et qui dépasse même parce qu'elle concerne tous les membres de cette Assemblée, tant individuellement que collectivement.

Deux des arguments soulevés par mon collègue. Je vous dirais qu'effectivement l'article 186 est clair, il parle d'«un député -- et je pense que la ministre était un député, à moins qu'elle nous confirme le contraire -- ou [...] toute autre personne de faire quelque chose». Si je prends la motion, elle exige de ne pas faire ce qu'on tente de faire actuellement. Première chose.

La deuxième chose, c'est que les notes explicatives sont justement là pour éviter ce qui se passe actuellement, M. le Président. C'est pour faire comprendre les tenants et aboutissants du projet de loi. Et, si on me dit qu'ils n'ont... qu'on est capable de faire le contraire dans un projet de loi que dans les notes explicatives, je pense que, M. le Président... j'ai hâte de vous lire en train de me dire ça, là.

Je vous dirais, M. le Président, que ce qui a été déposé, à sa face même, est un outrage au Parlement. Ce que je vous demande... Si vous permettiez son dépôt actuellement, on deviendrait tous, et vous personnellement, on deviendrait tous complices de cette violation et de cet outrage au Parlement. Alors, je vous demande, M. le Président, de clarifier et de faire en sorte... Parce que, si c'est un ordre, et je n'en ai aucun doute, pourquoi le gouvernement est allé de façon contraire à ce qui est prévu au règlement et à la Loi de l'Assemblée nationale?

Le Président: Sur la même question, M. le leader du gouvernement.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: La même question, M. le Président. Premièrement, une affirmation que le leader de l'opposition officielle fait au soutien de son argumentation ce matin, c'est toute la question d'acheter des droits. Or, M. le Président, le projet de loi...

Des voix: ...

M. Dupuis: Or, M. le...

Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Richelieu, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Or, M. le Président, le projet de loi confirme, au contraire de ce que dit le leader de l'opposition officielle, qu'il n'y a pas de droit, qu'il n'y a pas de possibilité d'acheter des droits par le biais de ce projet de loi là, d'une part.

D'autre part, M. le Président, je soumets à votre attention la décision du président Jean-Pierre Saintonge, rendue le 11 juin 1990, donc c'est une jurisprudence qui est constante: «...l'Assemblée nationale ne peut donner un ordre que dans les limites de ses prérogatives et de son autorité. Dans notre droit parlementaire, l'exécutif n'est pas strictement tenu de donner suite à une motion adoptée par le législatif et n'est lié que par législation expresse.» Or, la motion, qui a été adoptée unanimement par l'Assemblée nationale, enjoignait au «gouvernement libéral», donc, M. le Président, pas à un député, pas à une personne et pas à une commission de l'Assemblée nationale.

Le Président: Et alors... Alors, je suis saisi d'une question que je dois... pour laquelle je dois rendre une décision maintenant. Alors, vous me permettrez de suspendre quelques instants pour vous revenir sur la décision.

(Suspension de la séance à 10 h 30)

 

(Reprise à 12 h 14)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Décision de la présidence

Alors, je suis maintenant prêt à prendre ma décision concernant la question de privilège soulevée par le leader de l'opposition officielle concernant la présentation du projet de loi n° 103, Loi modifiant la Charte de la langue française et d'autres dispositions législatives.

Selon le leader, le leader de l'opposition officielle, la ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française commettrait un outrage au Parlement si le projet de loi devait être présenté, puisque cela aurait pour effet de contrevenir au paragraphe 1° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale. Cet article prévoit que, et je cite, «nul ne peut porter atteinte aux droits de l'Assemblée. Constitue notamment une atteinte aux droits de l'Assemblée le fait de:

«1° refuser d'obéir à un ordre de l'Assemblée, d'une commission ou d'une sous-commission.»

Au soutien de sa question de privilège, le leader de l'opposition officielle est d'avis que la motion adoptée par l'Assemblée le 19 mai constitue un ordre de l'Assemblée qui empêche la présentation du projet de loi n° 103 et que seule la révocation de cet ordre pourrait le permettre. Cette motion se lit comme suit:

«Qu'à la suite de l'invalidation de la loi n° 104 par la Cour suprême du Canada, que l'Assemblée nationale du Québec exige du gouvernement libéral qu'il rejette toute solution qui aurait pour effet de permettre à des parents d'enfants actuellement non admissibles à l'école anglaise d'acheter pour leurs enfants un droit d'accès à l'école anglaise par le biais d'un passage dans une école privée non subventionnée.»

L'article 186 du règlement, quant à lui, énonce ce qui suit:

«Toute motion adoptée devient soit un ordre, soit une résolution de l'Assemblée: un ordre quand l'Assemblée enjoint à une commission, à un député ou à toute autre personne de faire quelque chose; une résolution quand elle exprime une opinion ou une intention, affirme un fait ou un principe.»

Comme l'a déjà rappelé le président Saintonge, dans une décision rendue en 1990:

«Une motion qui devient un ordre implique, pour la personne visée, une obligation de poser un acte, de faire quelque chose, une action, un geste. Par ses ordres, l'Assemblée régit ses [commissions], ses membres, ses fonctionnaires, la marche de ses propres travaux et les actes de toutes les personnes désignées dans l'ordre.»

Cependant, «l'Assemblée [...] ne peut donner un ordre que dans les limites de ses prérogatives, de son autorité. Or, «dans notre droit parlementaire, l'Exécutif [ne peut être] tenu de donner suite à une motion adoptée par le législatif et n'est lié que par législation expresse». C'est pourquoi une motion qui enjoint le gouvernement ou le ministre de faire quelque chose «engendre une contrainte qui est strictement d'ordre politique ou moral». Il s'agit donc d'une résolution. Fin de la citation de M. Saintonge.

Le leader de l'opposition officielle a fait référence à la décision récente du président de la Chambre des communes concernant la production de documents par le gouvernement. La situation actuelle est fort différente. La motion adoptée par la Chambre des communes visait la production par le gouvernement de documents nécessaires à l'exercice des prérogatives du Parlement et de ses membres, en d'autres mots, à ce que le Parlement dispose des informations nécessaires à l'exercice de ses fonctions de contrôle sur le gouvernement. Dans le cas présent, refuser la présentation du projet de loi en s'appuyant sur la motion adoptée le 19 mai aurait l'effet contraire, c'est-à-dire d'empêcher l'Assemblée d'exercer un de ses rôles fondamentaux, soit l'exercice de son pouvoir législatif.

D'ailleurs, la Cour supérieure a déjà affirmé, dans l'affaire opposant Guy Bertrand et Paul Bégin, que d'empêcher l'Assemblée d'être saisie d'un projet de loi constituerait une atteinte injustifiable aux attributions fondamentales de l'Assemblée nationale, de même qu'une atteinte à ses privilèges les plus essentiels.

Dans le présent cas, c'est donc à l'Assemblée de décider si elle se saisit ou non du projet de loi n° 103. Elle seule, dans sa souveraineté, peut décider s'il est opportun ou pas d'étudier ce projet de loi et d'en apprécier le contenu. Au moment des différentes étapes du processus législatif, les députés, le cas échéant, auront l'occasion d'exprimer leurs opinions, ils pourront présenter des amendements en conformité avec leurs positions sur le sujet.

En somme, la présidence, en permettant la présentation du projet de loi, ne se porte pas complice de quoi que ce soit. Au contraire, la présidence permet ainsi à l'Assemblée et à ses membres d'exercer leur rôle constitutionnel le plus fondamental, soit celui de légiférer. En conséquence, nous pouvons maintenant procéder à la présentation du projet de loi.

Je tiens à préciser, en terminant, qu'il n'y a pas eu, en l'espèce, d'outrage au Parlement à première vue. Même si cela avait été le cas, cela, comme le mentionnait le président Bissonnet en novembre 2007, ne pourrait empêcher la ministre de présenter le projet de loi ni l'Assemblée de l'étudier et d'en apprécier le contenu. Voilà la décision. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bédard: M. le Président, votre décision est pour le moins étonnante, je vous dirais. Elle est...

Des voix: ...

**(12 h 20)**

M. Bédard: Ah! Ça fait rire... ça fait rire nos amis d'en face, là, évidemment. Que le Parlement soit tourné en ridicule, je pense qu'il ne nous restait plus rien que ça, M. le Président.

Il y a une chose qui est claire: le Parlement peut s'astreindre à des règles. Notre règlement est le principe même où le Parlement s'astreint à des règles, et c'est ça, le principe d'adopter des règles et de réglementer. Ce n'est pas une atteinte à la souveraineté, c'est réglementer la façon qu'on peut et qu'on doit soit adopter les projets de loi, adopter des motions.

Ce que vous êtes en train de me dire par votre décision, c'est que tout le règlement est une atteinte à la souveraineté du Parlement. Parce qu'on ne peut pas, bien que ce soit écrit à l'article 186, on ne peut pas faire en sorte que le gouvernement... empêcher le gouvernement ou même quiconque à cette Assemblée de faire quoi que ce soit.

Je vous rappelle, M. le Président, dans sa prérogative, le Parlement a même le droit d'emprisonner, et vous le savez, il a tous les droits. On disait même à l'époque que le seul droit qui lui était interdit, c'était celui de changer un homme en femme, puis je peux vous dire que, depuis ce temps-là, ça a peut-être changé, M. le Président.

Ce que vous faites, vous faites reculer, par votre décision, les droits parlementaires, et j'en suis fort déçu, M. le Président. Je le constate et j'en suis fort déçu.

La deuxième chose que je constate, M. le Président, c'est que même le gouvernement a invoqué, dans le cadre de la motion -- et vous irez à ce qu'a fait... au commentaire qu'a fait le leader adjoint du gouvernement -- des motifs qui laissent croire effectivement qu'on ne pouvait aller plus loin dans nos commentaires, et je vous référerais à son intervention, sinon on parlerait du fond du projet de loi, fond qui maintenant, on le sait... qu'il connaissait parce que le projet de loi était en préparation. Cela indiquait bien, M. le Président, qu'au moment de la motion les gens savaient de part et d'autre pour qui ils... pour quoi ils votaient.

L'autre question que vous n'avez pas répondue dans mes arguments, et c'était la troisième, subsidiairement: M. le Président, le fait d'avoir voté, il y a deux semaines, une motion qui fait exactement le contraire de ce que fait le projet de loi, est-ce que ça tourne en ridicule le Parlement? Est-ce que ça porte atteinte à l'autorité et à la dignité de l'Assemblée? Autrement dit, en termes encore plus concrets, est-ce que cette Assemblée, qui est le siège de la démocratie... Le gouvernement n'est pas le siège de la démocratie, c'est le Parlement. Pourquoi? Parce qu'il est composé strictement d'élus, ce que n'a pas le gouvernement. Le gouvernement est même composé, peut être composé, M. le Président, de non-élus. Donc, ce siège de la démocratie peut donner un ordre à qui que ce soit. On a même réglementé, M. le Président, la façon même de blâmer les individus.

Ce que vous me dites, M. le Président, aujourd'hui, c'est que ce qu'a fait le gouvernement en votant en connaissance de cause et en faisant exactement le contraire... Est-ce que je dois comprendre de votre décision que cela n'a pas pour effet de porter atteinte, autrement dit, que le gouvernement, à chacune des motions que nous votons, à chacune des interventions qu'on fait, que les... ce que dit... et même ce que votent les membres du gouvernement n'a aucune valeur, et qu'ils peuvent se dédire sans aucune procédure, et même les ordres du Parlement peuvent être ou non suivis, tout dépendant, je vous dirais, de la façon dont le gouvernement interprète ces ordres?

M. le Président, nous avions un ordre clair, nous avions une façon d'affirmer clairement cette souveraineté qui, à bien des égards, surtout dans un système parlementaire, là, est mise à rude épreuve. Malheureusement, M. le Président, je pense sincèrement que vous avez perdu une belle occasion de réaffirmer cette souveraineté du Parlement.

J'aimerais par la suite -- je comprends qu'aujourd'hui on aura d'autres débats -- avoir quand même une précision de votre part en ce qui concerne qu'est-ce qui peut, M. le Président, porter atteinte à l'autorité et à la dignité de l'Assemblée. Comment cette règle-là qui fait partie de nos... Le principal droit et privilège qui fait qu'un membre ne peut pas théoriquement même mentir en cette Chambre, c'est la règle qu'on ne peut pas porter atteinte à la dignité, alors comme le fait de déposer un projet de loi qui va directement à l'encontre d'une motion dûment déposée. Alors, étant donné que... J'aimerais savoir: Est-ce que ça porte atteinte à la dignité de l'Assemblée? Et j'aimerais avoir une décision écrite. Évidemment, aujourd'hui, je ne l'aurai peut-être pas, puis je ne vous le demande pas aujourd'hui, mais j'aimerais que vous précisiez ces éléments-là pour qu'à l'avenir on sache la valeur de nos motions, les débats qu'on fait ici, quelle valeur ça a finalement.

Puis que... ce ridicule, là, et ce cynisme dans lequel on est plongés, bien, aujourd'hui, on vient d'atteindre un degré supplémentaire, M. le Président, et sur une question qui est la plus fondamentale, l'avenir de la langue française au Québec.

Le Président: Alors, M. le leader de l'opposition officielle, je veux vous remercier de vos commentaires.

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 103 (suite)

Il n'y a pas d'autre demande d'intervention sur le sujet. Cette décision est donc rendue, ce qui nous amène à vérifier si l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bédard: ...nominal.

Le Président: Alors, nous allons procéder par appel nominal. Je pense que les députés ont déjà tous été appelés, Mme la whip de l'opposition officielle?

**(12 h 26 -- 12 h 28)**

Le Président: Alors, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion présentée par la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine et ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française proposant que l'Assemblée soit saisie du projet de loi n° 103, Loi modifiant la Charte de la langue française et d'autres dispositions législatives.

Mise aux voix

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Charest (Sherbrooke), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Normandeau (Bonaventure), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Courchesne (Fabre), Mme Beauchamp (Bourassa-Sauvé), M. Bachand (Outremont), M. Bolduc (Jean-Talon), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Ménard (Laporte), M. MacMillan (Papineau), M. Simard (Dubuc), M. Auclair (Vimont), Mme St-Pierre (Acadie), M. Dutil (Beauce-Sud), Mme James (Nelligan), Mme Vien (Bellechasse), M. Bernier (Montmorency), M. Corbeil (Abitibi-Est), Mme Thériault (Anjou), M. Gignac (Marguerite-Bourgeoys), M. Arcand (Mont-Royal), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), M. Moreau (Châteauguay), Mme Boulet (Laviolette), M. Lessard (Frontenac), M. Hamad (Louis-Hébert), Mme Blais (Saint-Henri--Sainte-Anne), Mme Charlebois (Soulanges), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Gautrin (Verdun), M. Ouimet (Marquette), M. Whissell (Argenteuil), M. Bachand (Arthabaska), M. Bernard (Rouyn-Noranda--Témiscamingue), M. Morin (Montmagny-L'Islet), M. Paquet (Laval-des-Rapides), M. Reid (Orford), M. Dubourg (Viau), Mme Gaudreault (Hull), Mme Gonthier (Mégantic-Compton), M. Ouellette (Chomedey), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), Mme Vallée (Gatineau), M. Huot (Vanier), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Diamond (Maskinongé), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Carrière (Chapleau), M. Lehouillier (Lévis), M. Mamelonet (Gaspé), M. Matte (Portneuf), M. Pigeon (Charlesbourg), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance--Viger), Mme St-Amand (Trois-Rivières), M. D'Amour (Rivière-du-Loup).

M. Deltell (Chauveau), Mme Roy (Lotbinière), M. Grondin (Beauce-Nord), M. Bonnardel (Shefford).

M. Caire (La Peltrie).

**(12 h 30)**

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bédard (Chicoutimi), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), Mme Beaudoin (Rosemont), Mme Malavoy (Taillon), Mme Lapointe (Crémazie), M. Simard (Richelieu), M. Aussant (Nicolet-Yamaska), Mme Doyer (Matapédia), M. Trottier (Roberval), M. Ferland (Ungava), Mme Champagne (Champlain), Mme Bouillé (Iberville), Mme Beaudoin (Mirabel), M. Bergeron (Verchères), Mme Richard (Duplessis), M. Girard (Gouin), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), M. Bérubé (Matane), M. Blanchet (Drummond), Mme Hivon (Joliette), M. Marceau (Rousseau), Mme Maltais (Taschereau), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Drainville (Marie-Victorin), M. Curzi (Borduas), M. Pelletier (Rimouski), M. St-Arnaud (Chambly), Mme Richard (Marguerite-D'Youville), M. Kotto (Bourget), M. Dufour (René-Lévesque), M. Lemay (Sainte-Marie--Saint-Jacques), M. Gaudreault (Jonquière), M. McKay (L'Assomption), M. Rebello (La Prairie), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Villeneuve (Berthier), M. Gauvreau (Groulx), M. Tremblay (Masson), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Leclair (Beauharnois), M. Robert (Prévost), M. Pelletier (Saint-Hyacinthe), M. Traversy (Terrebonne), M. Boucher (Johnson).

M. Khadir (Mercier).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions? M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour: 65

Contre: 45

Abstentions: 0

Le Président: Alors, c'est donc adopté. M. le leader du gouvernement, pour la suite des choses.

Consultation générale

M. Dupuis: Je présenterais une motion, M. le Président, conformément à l'article 235 du règlement, afin:

«Que la Commission de la culture et de l'éducation procède à une consultation générale sur le projet de loi n° 103 [et tienne des auditions publiques à compter du 2 septembre 2010];

«Que les mémoires et les demandes d'intervention soient reçues au Secrétariat des commissions au plus tard le 16 août 2010; et

«Que la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Mise aux voix

Le Président: Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

Il n'y a pas de dépôt de documents.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission des relations avec les citoyens et député de Montmorency.

Étude détaillée du projet de loi n° 105

M. Bernier: M. le Président, je dépose le rapport de la Commission des relations avec les citoyens qui, le 1er juin 2010, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 105, Loi concernant l'adoption d'enfants d'Haïti arrivés au Québec au cours de la période du 24 janvier au 16 février à la suite du séisme du 12 janvier 2010. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

Le Président: Ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, M. le député de Mercier.

Tenir une enquête publique sur la Commission
de la santé et de la sécurité du travail

M. Khadir: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 705 pétitionnaires. Désignation: citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant le droit fondamental des travailleuses et travailleurs accidentés d'avoir une compensation et des soins de santé adéquats ainsi qu'un traitement digne;

«Considérant que les travailleuses et travailleurs accidentés subissent continuellement des jugements humiliants et injustes;

«[...]que les travailleuses et travailleurs se disent victimes d'actes d'intimidation, de harcèlement, de discrimination, d'atteinte à la dignité et à l'intégrité de la part de la CSST et de certains des professionnels de la santé lors de la contre-expertise de leur dossier;

«[...]que les travailleuses et les travailleurs accidentés sont en état de vulnérabilité et que les nombreuses vexations bureaucratiques et les atteintes à leur dignité aggravent leur situation de santé et leur causent des dommages monétaires, psychologiques, familiaux et autres;

«Considérant que l'Association des travailleuses et travailleurs accidentés de l'Abitibi-Témiscamingue, un organisme à but non lucratif, a fait plusieurs représentations auprès des autorités concernées pour redresser ces injustices qui ne font qu'augmenter;

«Considérant l'urgence d'agir;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«L'Association des travailleuses et travailleurs accidentés de l'Abitibi-Témiscamingue demande au gouvernement du Québec de mettre sur pied, d'ici la fin de l'année 2010, une commission d'enquête publique sur les abus de pouvoir de la CSST et sur le manque de neutralité de certains professionnels de la santé qui rendent des jugements toujours en faveur de la CSST.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original.

Le Président: Cet extrait de pétition est déposé. Toujours aux pétitions, Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: Merci, M. le Président. M. le Président, je demande le consentement de cette Assemblée pour déposer l'extrait d'une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement? Il y a consentement.

Tenir une enquête publique sur
l'industrie de la construction

Mme Champagne: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 682 pétitionnaires. Désignation: citoyennes et citoyens du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que de sérieuses allégations concernant l'ensemble de l'industrie de la construction ont été soulevées au cours des derniers mois;

«Considérant de sérieuses allégations dans le processus d'octroi des contrats publics au Québec;

«Considérant la limite des enquêtes policières;

«Considérant que seule une commission d'enquête peut faire toute la lumière sur cette situation et recommander les correctifs nécessaires;

«Considérant que le gouvernement s'entête à refuser de déclencher une enquête publique;

«Considérant que ce refus contribue à miner la confiance des citoyens envers les institutions;

«Considérant que cette situation exceptionnelle nécessite des mesures exceptionnelles;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«C'est pourquoi les soussignés, citoyens et citoyennes du Québec, demandent à l'Assemblée nationale d'exiger du gouvernement du Québec la tenue d'une commission d'enquête publique et indépendante sur l'industrie de la construction.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cet extrait de pétition est donc déposé. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Poirier: Merci, M. le Président. Je demande le consentement de cette Assemblée pour déposer l'extrait d'une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement? Il y a consentement. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Instaurer un registre des baux obligatoire

Mme Poirier: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 12 096 pétitionnaires. Désignation: citoyennes et citoyens du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le loyer est la dépense principale d'un ménage locataire;

«Attendu qu'en 2006 448 840 ménages consacraient plus de 30 % de leur revenu pour le loyer;

«Attendu que les loyers ont augmenté de 137 $ par mois entre 2000 et 2008, une hausse de 27,6 %;

«Attendu qu'un nouveau locataire a le droit de connaître le loyer le plus bas payé au cours des 12 mois précédant le début du bail;

«Attendu que les propriétaires omettent de remplir la section G du bail, laquelle précise le prix du loyer et les autres conditions du bail;

«Attendu qu'il n'existe aucune sanction envers les propriétaires qui ne se conforment pas à cette obligation;

«Attendu que les locataires ont le droit de contester une hausse abusive de loyer lors de la signature d'un bail;

«Attendu que les locataires ne disposent pas de l'information nécessaire pour se prévaloir du droit à faire fixer le loyer à la Régie du logement;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, les personnes soussignées, demandons à l'Assemblée nationale d'instaurer un registre des baux obligatoire. Un tel registre permettrait aux locataires de consulter le prix des loyers. Les locataires bénéficieraient ainsi des informations nécessaires pour entreprendre les recours prévus par la loi en cas de hausses abusives du loyer.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

**(12 h 40)**

Le Président: Cet extrait de pétition est déposé.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et réponses orales des députés. Et je cède la parole à M. le député de Borduas, en question...

Projet de loi n° 103 modifiant la
Charte de la langue française

M. Pierre Curzi

M. Curzi: Merci, M. le Président. Alors même que l'ensemble du Québec s'inquiète de l'état du français, après que nous ayons démontré que Montréal s'anglicise, on apprend aujourd'hui qu'on peut, au Québec, acheter le droit d'angliciser ses enfants et tous leurs descendants. La Cour suprême vient encore une fois de gagner. Et la Cour suprême jugera éternellement que les moyens que nous mettons en place sont disproportionnés, même quand l'Assemblée nationale au grand complet est unanime. Ce qui est disproportionné, M. le Président, c'est l'aplaventrisme du premier ministre et de ce gouvernement-là devant le pouvoir fédéral et devant ses lobbys.

Aujourd'hui, le gouvernement propose un projet de loi qui vient sanctifier le règne de l'arbitraire et crée deux classes de citoyens au Québec. La mise en place d'un parcours scolaire authentique, c'est le pire des scénarios qui pouvaient être adoptés. Depuis le 22 octobre, le Parti québécois, le Conseil supérieur, tout le monde dit au gouvernement: Ne faites pas cela.

Pourquoi la ministre trahit-elle l'esprit...

Des voix: ...

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Dupuis: Vous savez très bien, M. le Président, quels articles je vais invoquer. Bien sûr, l'article n° 77. Je comprends que le député de Borduas est un acteur accompli, mais le sujet...

Des voix: ...

M. Dupuis: ...mais le sujet, M. le Président, est suffisamment sérieux pour toute la société québécoise pour que nous puissions avoir un débat, un débat qui soit quand même serein. Et la meilleure façon de le faire, M. le Président, c'est de poser des questions conformes au règlement. Je vous demande de rappeler à l'ordre le député de Borduas.

Le Président: Sur la même question de règlement, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bédard: Je pense que le leader et son gouvernement sont bien mal placés pour faire la leçon à qui que ce soit aujourd'hui, après faire exactement le contraire sur le quoi on a voté il y a encore deux semaines. Donc, le gouvernement est bien mal placé. J'espère qu'il va continuer à réfléchir là-dessus.

La deuxième chose, c'est que rien dans le règlement, M. le Président, ne nous empêche, j'espère, de dire que la ministre a trahi la pensée de la Charte de la langue française, l'esprit...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Sur la même question de règlement.

M. Dupuis: Très succinctement, M. le Président...

Le Président: Succinctement.

M. Dupuis: ...pour ne pas allonger les débats. Vous savez très bien que le terme qui est employé par le député de Borduas, à l'article... en raison de l'article 77, est à bannir dans le vocabulaire, bien sûr.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! En...

Une voix: ...

Le Président: Très rapidement, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bédard: Le contexte est... dans lequel, trahir l'esprit... Je peux vous dire que, là, il va falloir brûler bien des livres, M. le Président, puis bien des expressions. «Trahir l'esprit», ce n'est pas comme «trahir» tout court.

Le Président: Bien. Alors, je vous demande votre collaboration à tous et toutes pour que la période se déroule correctement, dans le respect de nos règles également. Je suis maintenant prêt à donner la parole à Mme la ministre. Mme la ministre.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. D'abord, permettez-moi de réaffirmer en cette Chambre et à toute la population du Québec que la primauté de la langue française est non négociable. Non seulement, M. le Président, elle est non négociable...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Il n'est pas permis d'interrompre. M. le député de Richelieu! Je vous demande votre collaboration. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Courchesne: Non seulement, M. le Président, la primauté de la langue française est non négociable, mais elle constitue une valeur fondamentale de notre société. Ce projet de loi que nous avons déposé ce matin, et soyons très clairs, fait d'abord l'interdiction des écoles passerelles au Québec. Il n'y a plus d'écoles passerelles au Québec et il n'y aura plus d'écoles passerelles au Québec. Première chose.

Nous avons, M. le Président, fait le choix d'appliquer le jugement de la Cour suprême...

Le Président: En terminant.

Mme Courchesne: ...et, oui, nous allons définir le parcours authentique de l'élève, M. le Président, sans brimer les droits et suspendre les droits des citoyens...

Le Président: En première complémentaire, M. le député de Borduas.

M. Pierre Curzi

M. Curzi: M. le Président, la primauté de la langue française est non négociable, mais elle est achetable, et c'est là le problème. Les écoles passerelles existent et vont continuer d'exister. Il en coûtera maintenant seulement un peu plus cher pour acheter un droit.

Vous venez de créer deux classes de citoyens. Vous allez exactement à l'encontre, à l'encontre de l'esprit de la Charte de langue française. Et non seulement une ministre est responsable de cette trahison, mais trois ministres en porteront l'odieux.

Le Président: M. le député de Borduas, je vous inviterais à faire transiter vos questions par la présidence de l'Assemblée. Il y a un terme également qui a été utilisé. Tout à l'heure, j'ai jugé, dans le contexte, qu'il ne... qu'il pouvait l'être, compte tenu qu'on faisait allusion à... dans le contexte dans lequel il était utilisé. Mais le dernier terme, vous l'avez utilisé très directement, sans le lier à un contexte particulier. Je vous demanderais de ne pas le réutiliser. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Dupuis: Il doit, il doit le retirer, purement et simplement, M. le Président. D'ailleurs, vous venez d'indiquer qu'il ne peut l'utiliser, alors je vais vous demander de lui demander de le retirer et de ne pas récidiver.

Le Président: Alors, je vais demander la collaboration du député. Je pense bien qu'il ne récidivera pas sur le terme utilisé. C'est ma décision. Nous continuons à la question de... à la réponse de la ministre.

Une voix: ...

Le Président: M. le leader du gouvernement rapidement, sur la question, rapidement.

M. Dupuis: Vous avez clairement indiqué, vous avez clairement indiqué que le terme ne pouvait pas être utilisé dans le contexte dans lequel il l'a utilisé. Je demanderais... je vous demanderais de demander au député de le retirer, tout simplement. S'il le retire, c'est correct.

Le Président: M. le député de Borduas, M. le député de Borduas...

Des voix: ...

Le Président: Un instant. Je vais...

Des voix: ...

Le Président: Un instant. M. le leader de l'opposition officielle, rapidement.

M. Bédard: Vous avez rendu une décision, c'est clair. Donc, voulez-vous demander au leader d'arrêter de se lever? Ça ferait... Là, on pourrait passer aux questions, ça serait bien.

Le Président: M. le député de Borduas, je comprends que ce terme est retiré. Mme la ministre.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, encore une fois, soyons clairs, le projet de loi ne permet pas d'acheter un droit constitutionnel. Soyons clairs. Acheter un droit constitutionnel, M. le Président, ça veut dire de payer une facture et d'avoir automatiquement un certificat d'admissibilité. Ce n'est pas ce que le projet de loi fait, M. le Président. Voilà.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Nous en sommes à...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Drummond, ce n'est pas «oui», je vous demande de ne pas interpeller les gens pendant que les réponses sont données.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Mme la ministre.

Mme Courchesne: M. le Président, chaque cas devra être étudié selon des critères qui sont bien énumérés dans le jugement, M. le Président, et, de cette façon-là...

Des voix: ...

Le Président: Bien. Alors, je vais me lever aussi longtemps que requis pour que nous puissions entendre les réponses données.

Voilà, c'est mieux. Mme la ministre.

Mme Courchesne: On n'achète pas un droit constitutionnel, on définit un parcours authentique selon des critères et un contexte bien énumérés dans la loi, M. le Président...

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Borduas.

M. Pierre Curzi

M. Curzi: M. le Président, ce gouvernement fait comme d'habitude, il dit une chose et il fait le contraire. Comment trois ministres peuvent-elles aller à l'encontre de trois principes qui sont fondamentaux, M. le Président, dans la démocratie? L'inégalité des droits, qui est constituée, l'application subjective de critères au cas-par-cas et une porte ouverte à toutes les contestations juridiques, voilà le système qui vient d'être mis en place par le gouvernement maintenant.

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation et du Loisir.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, à ce que nous sachions, ce jugement a aussi été contesté. Quelle est la solution du Parti québécois? Astreindre les écoles...

Des voix: ...

Mme Courchesne: ...astreindre les écoles à la loi 101? Mais que font-ils de la clause dérogatoire, M. le Président? Pourquoi...

Quand est-ce qu'il vont nous répondre à la question: Pourquoi n'avez-vous pas exclu ces écoles en 2002? C'est ça, la vraie question qui doit être répondue dans cette Chambre, M. le Président. Et, à cet égard-là, qui dit vrai? La chef de l'opposition, qui dit qu'on n'a pas besoin de la clause dérogatoire, ou le député de Borduas, qui prône pour la clause dérogatoire? Qu'ils nous disent donc quelle est leur véritable position, M. le Président.

**(12 h 50)**

Le Président: En question principale, Mme la chef de l'opposition officielle.

Application de la Charte de la
langue française aux écoles
privées non subventionnées

Mme Pauline Marois

Mme Marois: ...M. le Président, la solution, elle est simple, c'est d'appliquer la loi 101 avec la clause dérogatoire. Or, le gouvernement...

Des voix: ...

Mme Marois: Le gouvernement vient confirmer nos pires craintes sur la façon dont il veut répondre au jugement de la Cour suprême sur la loi n° 104. Oui, il a choisi le parcours authentique, la ministre le confirme. Il passe ainsi... le gouvernement passe outre à l'avis du Conseil supérieur de la langue. Oui, ça va permettre à des parents qui ont les moyens financiers de pouvoir acheter à leurs enfants le droit à l'enseignement en anglais.

Le président du Conseil supérieur de la langue française, M. Ouellon, avait pourtant mis en garde le gouvernement qu'il ne devrait pas être possible de s'acheter un droit constitutionnel en payant pour les études de son enfant au secteur non subventionné, parce qu'on risquerait de créer, comme l'a dit mon collègue, deux classes d'immigrants: ceux qui ont la capacité de payer et d'accéder à l'école anglaise et ceux qui sont exclus, M. le Président.

Deux recommandations du conseil. Le conseil recommande...

Des voix: ...

Le Président: Un instant. Un instant. Je vous en prie. S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Mme la chef de l'opposition officielle.

Mme Marois: Non seulement les immigrants, d'ailleurs, M. le Président, mais tous les citoyens. Nous sommes en très bonne compagnie, de ce côté-ci. Le Conseil supérieur de la langue française recommande de soumettre les écoles privées non subventionnées à la Charte de la langue française.

Le premier ministre est-il conscient qu'en agissant comme il le fait son gouvernement ouvre la porte à la mise en place d'un système qui va favoriser ceux qui auront l'argent pour s'acheter un droit et ceux qui ne l'auront pas? C'est ça, la question actuellement, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Alors, une première chose, M. le Président. La Cour d'appel du Québec et la Cour suprême du Canada ont toutes les deux invalidé, invalidé et exposé une brèche dans la loi que le Parti québécois avait fait voter à l'Assemblée nationale du Québec. Et ce que nous proposons aujourd'hui, c'est de colmater la brèche qui est dans la loi. La cour dit ceci, qu'il faut définir le parcours authentique, M. le Président, et c'est exactement ce que nous faisons.

Maintenant, M. le Président, on élimine les écoles passerelles, on définit ce que c'est, le parcours authentique également, M. le Président. Dans ce que nous proposons aujourd'hui, nous allons également renforcer la primauté de la langue française. On va modifier la Charte des droits et libertés: dans le préambule, également sur les règles d'interprétation, également sur les...

Des voix: ...

Le Président: Un instant, M. le premier ministre. S'il vous plaît! J'ai été patient pour me lever, pensant qu'on arrêterait de... ce bruit d'ambiance qui est trop fort. Alors, je vous demande votre collaboration pour qu'on entende le premier ministre. Il est le seul à qui j'ai accordé la parole. M. le premier ministre.

M. Charest: J'allais dire qu'on modifie la Charte des droits et libertés également pour renforcer la primauté de la langue française dans le préambule, sur les règles d'interprétation, également sur les mesures d'accueil, également sur le droit de participation des citoyens du Québec au rayonnement également, M. le Président. On va également, sur l'imputabilité à la fois des municipalités, également des collèges et des universités, agir. Et, sur l'administration publique et sur l'affichage, M. le Président, de la langue française, nous allons également renforcer les mesures, M. le Président, de surveillance et les amendes. Alors, voilà ce que nous proposons justement dans le respect de nos valeurs vis-à-vis la langue française au Québec, M. le Président.

Maintenant, ça aurait été agréable aujourd'hui, même souhaitable que la chef de l'opposition officielle puisse être constante au moins dans ses positions. Elle disait que ce n'était pas nécessaire...

Le Président: En terminant.

M. Charest: ...la clause dérogatoire, alors qu'elle dit exactement le contraire aujourd'hui, M. le Président.

Le Président: En première complémentaire, Mme la chef de l'opposition officielle.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, un enfant qui aujourd'hui n'a pas accès à l'école anglaise au Québec en vertu de la charte pourra s'acheter ce droit après quelques années dans une école subventionnée, dans la mesure où son parcours scolaire est jugé authentique. Elle nous l'a dit, la ministre, tout à l'heure. Au lieu de mettre fin aux écoles passerelles, en fait, on les renforce par des critères probablement et sûrement subjectifs et arbitraires.

Comment le premier ministre a-t-il pu décider de recourir à une telle proposition qui crée une véritable...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, je veux être très clair. À la fois la Cour d'appel du Québec puis la Cour suprême rendent des jugements où ils invalident la loi du PQ, ils identifient la brèche. On colmate la brèche puis on dit en même temps: Voici l'encadrement du parcours authentique.

Des voix: ...

Le Président: Un instant, M. le premier ministre.

Des voix: ...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Charest: La chef de l'opposition officielle nous demande aujourd'hui de faire un geste qu'elle même a refusé de poser en 2002. «Je ne peux pas envisager l'hypothèse où le Parti québécois invoquerait une clause dérogatoire et mettrait de côté les droits fondamentaux de notre charte pour quelque solution que ce soit en matière linguistique. Il faut chercher une autre solution.» Ça révolte le député de Richelieu, ce que je viens de dire? Je viens de citer au mot l'ancien premier ministre Lucien Bouchard, M. le Président. Voilà ce que lui pense de votre position, M. le Président.

Le Président: En deuxième complémentaire, Mme la chef de l'opposition officielle.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je cite un premier ministre: «Mais finalement, lorsqu'il a fallu arbitrer [...] j'ai arbitré du côté des droits collectifs en acceptant d'appliquer la clause dérogatoire. [...]je suis le seul chef de gouvernement en Amérique du Nord qui avait la justification morale d'agir de la sorte [...] je suis [...] à la tête d'une communauté très minoritaire dans l'ensemble du continent. Qui peut le mieux et qui doit le plus défendre, protéger, promouvoir la culture française, si ce n'est le premier ministre du Québec?» Robert Bourassa, décembre 1988.

Qu'allez-vous faire maintenant, M. le premier ministre?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, je veux remercier la chef de l'opposition officielle de l'introduction, parce que...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Regardez, je comprends que nous débattons, mais on va s'organiser pour que les gens s'entendent, soient entendus. M. le premier ministre.

M. Charest: M. le Président, merci à la chef de l'opposition officielle d'introduire l'histoire, parce que la suite de l'histoire, c'est quoi? C'est Claude Ryan, à l'Assemblée nationale du Québec, qui présente la loi n° 178 sur l'affichage, qui n'utilise pas la clause dérogatoire, la loi que vous avez combattue directement, M. le Président, et qui vient établir un équilibre dans l'affichage, M. le Président. Voilà la solution qui a été durable dans le temps au lieu d'utiliser la clause dérogatoire. C'est ça, la fin de l'histoire, pour tous les citoyens du Québec. Et, M. le Président, dans cette pure tradition des Québécois...

Le Président: En terminant.

M. Charest: ...qui respectent les droits et la langue française, nous...

Le Président: En troisième complémentaire, Mme la chef...

(panne de son)

Mme Pauline Marois

Mme Marois: ...le même devoir qu'avait Robert Bourassa, de protéger la langue française au Québec, M. le Président. Ce que lui dit le Conseil supérieur de... pardon, de la langue française, c'est ceci: «Le Québec ne peut accepter de voir remises en question ses orientations fondamentales et risquer de briser la cohésion sociale autour d'une langue commune, le français.»

«En effet, tout laisser-faire risque d'ébranler ce fragile équilibre linguistique forgé au fil des ans...»

M. le premier ministre, qu'avez-vous à répondre au Conseil supérieur de la langue française?

**(13 heures)**

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Bien, M. le Président, la seule question qu'on se pose aujourd'hui, c'est: Où était la chef de l'opposition officielle en 2002, lorsqu'elle avait l'occasion de faire exactement ce qu'elle nous demande de faire aujourd'hui?

Et je reviens à Robert Bourassa, M. le Président, et à l'histoire qu'elle a elle-même introduite. Est-ce qu'elle ne reconnaît pas aujourd'hui que la bonne solution pour le Québec, dans la trame de cette histoire, c'est justement la solution que le gouvernement libéral a mise en place pour l'affichage, qui n'invoque pas la clause dérogatoire, qui fait en sorte qu'on n'est pas obligés de brimer, de suspendre des droits, mais de trouver des solutions qui vont durer dans le temps, M. le Président, dans l'esprit de ce que Lucien Bouchard, ancien premier ministre du Québec, disait? Il croyait puis il disait: Je ne peux pas envisager que ce soit possible d'envisager la clause dérogatoire.

Pourquoi, aujourd'hui, vous nous demandez de faire une chose que vous avez toujours...

Le Président: En question principale, Mme la chef de l'opposition officielle.

Recours à la clause dérogatoire
pour appliquer la Charte de la
langue française aux écoles
privées non subventionnées

Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, le premier ministre revient toujours à cette loi n° 104 que nous avons adoptée à l'unanimité en espérant, oui, éviter d'avoir à utiliser la clause dérogatoire. Ce n'est pas un souhait que nous avions. Cependant, nous avons été déboutés, vous et nous, devant la Cour suprême, qui a décidé de permettre à des gens qui n'avaient pas accès à l'école anglaise d'y avoir accès, M. le Président. C'est ça, la difficulté devant laquelle nous nous trouvons.

Or, le premier ministre dit toujours qu'on ne doit pas recourir à la clause dérogatoire. Son propre gouvernement y recourt régulièrement. La ministre responsable du Conseil du trésor, lorsqu'elle a proposé une loi modifiant divers régimes de retraite, y a fait référence, M. le Président. Mais oui! Donc, ce n'est pas un drame, ce n'est pas un crime contre l'humanité.

M. le Président, je plaide auprès du premier...

Des voix: ...

Le Président: Un instant! Mme la chef de l'opposition... Un instant!

Des voix: ...

Le Président: Collègues, s'il vous plaît! Au même titre que les réponses doivent être entendues, les questions doivent être entendues. Mme la chef de l'opposition officielle.

Mme Marois: M. le Président, le premier ministre est le représentant du seul peuple francophone d'Amérique, M. le Président. Nous lui demandons d'assumer pleinement ses responsabilités, de protéger notre langue, de la défendre, et non pas d'être complice de la Cour suprême du Canada, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: C'est pour moi, M. le Président, un privilège et une fierté d'être le premier ministre de tous les Québécois, sans exception. C'est pour moi une très grande fierté d'aller partout sur la planète et dire qu'au Québec ce que nous avons réussi, c'est unique dans le monde: de préserver notre langue et notre culture sur 400 ans, de la faire rayonner partout sur la planète, et de la faire rayonner conformément à nos valeurs à nous, les Québécois.

Et, dans les valeurs que nous avons, il y a la primauté de la langue française. C'est pour nous notre source d'identité, M. le Président. Et, pour faire rayonner notre langue à nous, on n'a pas besoin de suspendre les droits des autres, M. le Président. On la parle fièrement, notre langue. Nous la défendons fièrement, notre langue, parce que nous y croyons. Puis on n'a pas besoin de faire ça en suspendant les droits des autres. Au contraire, nous le faisons parce que nous y croyons, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: En question complémentaire, Mme la chef de l'opposition officielle.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, le premier ministre peut parler fort, se faire applaudir, il dit une chose et fait le contraire, exactement. Cette loi... cette loi va permettre l'existence -- oui, l'existence -- d'écoles passerelles. On va définir des critères pour permettre d'avoir accès à l'école anglaise, alors qu'on n'y aurait pas accès si la loi 101 s'appliquait. J'invite le premier ministre à accepter la recommandation du Conseil supérieur de la langue française et à vraiment protéger notre langue, pas seulement en parlant fort.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Voyons, voyons les faits, M. le Président. En 1996, la chef de l'opposition officielle faisait partie d'un gouvernement qui disait qu'il ne pouvait pas envisager l'hypothèse d'invoquer la clause dérogatoire en matière linguistique, qu'il fallait chercher une autre solution. En 2002, elle a eu l'occasion d'invoquer la clause dérogatoire ici puis elle a refusé de le faire, puis elle avait les mêmes conseillers juridiques, M. le Président. Et plus récemment, au mois de mars, hein, le 11 mars, autour du 11 mars, elle disait: Le gouvernement n'est pas forcé d'invoquer la clause dérogatoire pour éliminer le subterfuge des écoles passerelles, hein?

Alors, quand, quand, M. le Président, on arrive sur la question de la constance, je pense que la chef de l'opposition officielle aurait intérêt à faire un petit examen de conscience sur la question, justement, des droits linguistiques et de l'équilibre. Il faut défendre...

Le Président: En deuxième complémentaire, Mme la chef de l'opposition officielle.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Vous venez légaliser, légaliser le droit d'accès à l'école anglaise même en ne répondant pas aux critères de la loi 101. C'est exactement ce que vous êtes en train de faire. Alors, vous ne pouvez pas vous lever, tenir un discours enflammé pour dire que vous défendez la langue française, alors que vous faites exactement le contraire par la loi qui est présentée aujourd'hui, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, si j'en parle avec passion, c'est parce que j'y crois profondément, parce que j'ai l'occasion, comme premier ministre du Québec, de me présenter partout avec fierté pour dire que chez nous, au Québec, ce que nous avons réalisé, c'est unique dans l'histoire, la grande histoire de l'humanité. Et je le dis sans prétention, sans prétention, M. le Président, mais on a été capables de le faire en respectant les droits. D'ailleurs, la loi 86, j'ai dit 178 tantôt, c'est la loi 86, sur l'affichage, qui n'utilise pas la clause dérogatoire, c'est un très bon exemple d'une solution d'un gouvernement libéral qui a promu...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Les débats peuvent être vigoureux tout en évitant de s'interpeller.

Une voix: ...

Le Président: M. le député de Nicolet-Yamaska, M. le député de Nicolet-Yamaska, est-ce assez clair? Je viens de... je viens de vous indiquer de ne pas interpeller, vous êtes le premier à le faire au moment même où j'ai la parole. Je vous rappelle à l'ordre une première fois. M. le premier ministre.

M. Charest: Le peuple québécois a fait la démonstration que nous étions capables de défendre notre langue et de trouver des solutions durables et des solutions équilibrées, M. le Président. C'est exactement ce que nous faisons.

Le Président: En question principale, Mme la leader du deuxième groupe d'opposition.

Détenus libérés par erreur

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: M. le Président, en cette Chambre, le 10 février dernier, je posais exactement cette question au ministre de la Sécurité publique, en se souvenant du triste sort d'Alexandre Livernoche, agressé sexuellement de façon tragique par Mario Bastien, prédateur sexuel, récidiviste violent. D'autres innocentes victimes ont fait les frais de la négligence de notre système carcéral. Rappelons tristement Isabelle Bolduc et Hélène Morneau. Comme le disait Yves Thériault, le problème... dans son livre, le problème avec notre système correctionnel, c'est qu'il s'est détourné de sa vraie mission: protéger le public. Depuis, on a eu le rapport Corbo. Cinq ans plus tard, on apprenait sous sa plume qu'il n'y avait rien de fait. 10 ans plus tard, on apprend que les détenus sont libérés par erreur et que ce laxisme existe toujours.

À ma question, le ministre de la Sécurité publique a dit que c'était outrageant, qu'il demanderait des enquêtes. Maintenant, ces mesures musclées ont conduit à ce qu'il y avait 34 détenus libérés par erreur l'an dernier et, cette année, 37 détenus libérés par erreur.

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Oui, bien, alors, évidemment, évidemment, M. le Président, lorsque la députée de Lotbinière rappelle les tragiques... les tragédies qui sont survenues, celles qu'elle a mentionnées, je ne peux que concourir avec elle sur la compassion qu'elle exprime, et il faut tous exprimer une compassion.

C'est la raison pour laquelle, M. le Président, nous avons mis en vigueur la Loi sur les services correctionnels, que nos amis d'en face n'avaient pas mise en vigueur, pour être capables, M. le Président, d'avoir des règles plus strictes sur le fait que les détenus doivent purger les sentences que les juges imposent.

Il y a eu évidemment, M. le Président, je... je l'admets, et c'est toujours aussi outrageant, des gens qui ont été libérés par erreur parce qu'un certain nombre de personnes ont fait des erreurs dans le calcul des sentences. Dès que cette situation fut connue, dès que cette situation fut connue, nous avons pris des mesures, M. le Président, pour qu'elles ne se reproduisent pas, c'est-à-dire: il se fait dorénavant une double vérification, dès qu'un calcul de sentence intervient, par une personne en autorité qui revoit le travail de celle qui a fait le premier calcul, d'une part.

**(13 h 10)**

Le Président: En terminant.

M. Dupuis: D'autre part... Bon, je reviendrai en... en additionnelle.

Le Président: Mme la leader du deuxième groupe d'opposition, en question complémentaire.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: M. le Président, les mesures prises par le ministère de la Sécurité publique sont tellement bonnes qu'il y a deux ans il y avait 25 détenus libérés par erreur, l'an dernier, 34, puis, cette année, 37. J'aimerais savoir, avec son enquête, s'il a pris des sanctions contre les personnes qui ont libéré ces criminels dangereux par erreur.

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Je veux ajouter à ce que j'ai déjà dit, M. le Président, qu'un avocat, une personne-ressource qui connaît le calcul des sentences, a aussi été engagé par le ministère pour donner une formation à tous les gens.

Ceci étant dit, les erreurs n'ont pas été commises de mauvaise foi. Je ne veux pas accabler les gens qui les ont commises, mais, oui, il y a des sanctions disciplinaires qui ont été prises contre un certain nombre de ces personnes-là. Mais je ne veux pas les accabler. Il a été considéré, dans les sanctions qui ont été prises, le fait qu'elles n'ont pas agi de mauvaise foi. Souvent, le calcul des sentences est une opération qui est relativement complexe, on le comprend. Mais notre devoir à nous, à la Sécurité publique, c'est de faire en sorte qu'on calcule comme il faut les sentences pour que les gens ne retrouvent leur liberté qu'à bon droit.

Le Président: En deuxième complémentaire, Mme la leader du deuxième groupe d'opposition.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: M. le Président, je n'accepte pas que le ministre minimise la gravité de ces erreurs-là. L'an passé, il y a eu un pédophile qui a été libéré et qui avait eu des contacts sexuels avec un mineur, un autre cas Bastien peut-être. Il y a aussi eu un batteur de femmes. Il y a aussi eu quelqu'un qui avait une interdiction de contact avec sa victime, qui a été libéré par erreur. Ces erreurs-là ne sont pas que des petites erreurs. J'aimerais savoir quelles sanctions ont été prises contre ces gens qui ont mis des personnes... la population du Québec en danger.

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Je ne peux pas accepter, M. le Président, que la députée affirme que je minimise les événements. Au contraire, M. le Président, dès que la situation a été connue, j'ai demandé qu'on resserre les façons de faire au ministère de la Sécurité publique et dans les établissements de détention pour que ces cas ne se produisent pas. J'indique, je répète, je l'ai déjà fait à l'époque, que cette situation est inacceptable et que nous réagissons immédiatement dans tous les cas pour que ça ne se reproduise pas. C'est pour ça qu'on a pris les mesures. Et, au contraire, je rassure la population: d'aucune façon le ministère de la Sécurité publique ne minimise ces événements-là.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Crémazie.

Déclaration obligatoire des
incidents et des accidents
dans les résidences privées
pour personnes âgées

Mme Lisette Lapointe

Mme Lapointe: Merci, M. le Président. Hier, tout le Québec a été choqué par la bien triste histoire de M. Maurice Gibeau, décédé dans des conditions inacceptables et inhumaines à la Résidence du Parc Jarry, qui a sciemment dissimulé à la famille les circonstances du décès de leur père, tout comme l'a fait le Centre de santé et de services sociaux du Coeur-de-l'Île qui s'est fait complice de ce silence.

Or, la lecture de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès nous apprend que, dans les hôpitaux, dans les services de garde, dans les prisons, notamment, tous les décès qui surviennent dans des circonstances obscures ou violentes doivent obligatoirement être déclarés au coroner, alors que les résidences privées pour aînés, les ressources intermédiaires, les centres d'hébergement ne sont pas soumis à cette obligation. C'est invraisemblable.

Pourquoi le gouvernement tolère-t-il une telle discrimination à l'égard des aînés?

Le Président: Mme la ministre déléguée aux Services sociaux.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault: Oui. Merci, M. le Président. Hier, j'ai eu l'occasion de dire que les centres d'hébergement, de soins de longue durée qui sont des établissements publics sont soumis à cette loi-là. Et je vous dirais même, M. le Président, que n'importe qui qui a connaissance d'un décès dans des circonstances obscures doit aviser soit les agents de la paix, donc la police, ou le coroner pour qu'il y ait enquête.

Hier, j'ai eu l'occasion de dire à la députée de Crémazie que le coroner ferait enquête sur ce qui s'est passé à la résidence Jarry, qu'il aura l'occasion de faire toute la lumière et de faire des recommandations, M. le Président. Et je conviens cependant que les membres de la famille de M. Gibeau ont des questions et qu'ils méritent des réponses. Mais vous me permettrez de laisser le coroner faire son travail, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Crémazie.

Mme Lisette Lapointe

Mme Lapointe: M. le Président, dans le cas de M. Gibeau, la résidence privée n'a pas cette obligation de déclaration au coroner. C'est la même chose, les résidences privées, les ressources intermédiaires. C'est inacceptable. Combien de cas semblables ont été dissimulés? Vous savez que le professeur Plamondon nous a dit dans une étude que le tiers des décès signalés au coroner sont des questions de négligence. Là, on sait qu'il y en a beaucoup plus...

Le Président: Mme la ministre déléguée aux Services sociaux.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault: M. le Président, hier, j'ai énoncé clairement, également, dans une réponse complémentaire, que le ministère de la Santé et des Services sociaux a entrepris des travaux justement pour s'assurer que les résidences privées pour les personnes âgées aient l'obligation de divulguer les incidents et les accidents qui se produisent dans les résidences, mais qu'ils aient également l'obligation d'informer le coroner lorsqu'il y a des décès.

Et, je l'ai mentionné hier, je le rementionne encore aujourd'hui: la certification des résidences privées pour les personnes âgées, nous avons des modifications à faire pour l'automne, et on est en train de regarder le dossier, M. le Président. C'est ce que j'ai mentionné hier à la députée. Mais il y a quand même une enquête de coroner, et je vais attendre les recommandations du coroner, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Crémazie.

Mme Lisette Lapointe

Mme Lapointe: Ce qui est inconcevable, M. le Président, c'est qu'il y a des déclarations obligatoires dans les prisons, dans les écoles, dans les CPE, les garderies, dans les hôpitaux, hein, où il y en a plus, beaucoup de décès.

Pourquoi pas nos aînés? Pourquoi les résidences pour nos aînés ne sont-elles pas sur un pied d'égalité avec les autres établissements?

Le Président: Mme la ministre déléguée aux Services sociaux.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault: Oui. Merci, M. le Président. Vous savez, la députée de Crémazie a généralement de très bonnes questions. J'ai répondu hier, à sa question, que les résidences privées auront, elles aussi, l'obligation de déclarer les incidents et les accidents. Je l'ai dit hier, je vous l'ai dit tout à l'heure, je peux vous le répéter encore une fois. Vous savez, le monopole de la compassion, M. le Président, n'appartient pas qu'au Parti québécois. Les aînés, c'est une priorité pour notre gouvernement. Que ce soit la ministre des aînés, qui va déposer, pour contrer la maltraitance qui est faite chez les aînés, un plan prochainement, que ce soit moi comme ministre responsable...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

Mme Thériault: ...des centres d'hébergement, de soins de longue durée, des résidences privées, M. le Président, la sécurité de nos aînés, on a ça à coeur et, je l'ai dit, nous allons faire des modifications.

**(13 h 20)**

Le Président: En question principale, M. le député de Richelieu.

Coûts d'entretien de
l'immeuble de l'îlot Voyageur

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Oui. M. le Président, le ministre des Finances a eu 24 heures pour dépoussiérer ses notes sur l'îlot Voyageur. Justement, est-ce que le ministre sait combien le fiasco coûte aux Québécois par période de 24 heures? Je vais lui donner une réponse: c'est au moins 27 000 $ par jour qu'il en coûte aux Québécois. Pourquoi? Pour se faire dire qu'on négocie avec Busac, pour se faire dire que tout va bien. 27 000 $ par jour pour une station d'autobus sans autobus, sans liaison avec le métro, 27 000 $ par jour, 189 000 $ par semaine, 756 000 $ par mois, tout ça pour regarder rouiller le squelette du fiasco libéral en plein centre de Montréal.

M. le Président, combien de 27 000 $ le gouvernement va continuer à payer pour entretenir le signe évident, clair de ce fiasco?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Raymond Bachand

M. Bachand (Outremont): M. le Président, j'ai eu l'occasion hier de répondre amplement en détail aux questions du député de Richelieu et particulièrement de lui dire aussi qu'il y avait des négociations en cours pour essayer de combler le règlement de ce dossier-là, et que je ne commenterais pas davantage sur les négociations.

Mais, puisqu'il parle, M. le Président, de contrôle de dépenses, est-ce que le député de Richelieu, qui était à la commission parlementaire avec moi, pourrait expliquer pourquoi le Parti québécois s'oppose à la réduction des dépenses de l'État? Pourquoi le Parti québécois continue à traîner ce projet de loi? Pourquoi le Parti québécois s'oppose à cette réduction de 25 % des dépenses de formation, de publicité et de déplacement?

Est-ce que le Parti québécois pourrait, M. le Président, collaborer à la mise en oeuvre du projet de loi n° 100, qui assure la stabilité d'un budget responsable, le retour à l'équilibre budgétaire, la réduction de la dette du Québec et le financement de la santé, au lieu d'entretenir l'instabilité sur les finances publiques du Québec, M. le Président?

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Richelieu.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): M. le Président, ça fait la deuxième journée que je pose des questions sur l'îlot Voyageur sans avoir aucune réponse. Il y a six mois, on m'a répondu que ça s'en venait. Avec Busac, c'était dans quelques jours. Là, on me dit qu'on négocie. 27 000 $ par jour que les Québécois paient à des avocats, à des négociateurs pour entretenir un immeuble qui est vide, qui se dégrade.

M. le Président, nous sommes ici pour faire... pour rendre imputable ce gouvernement. Il a des comptes à rendre. Où en sont les négociations...

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Raymond Bachand

M. Bachand (Outremont): M. le Président, le député de Richelieu le sait très bien, comme vous le savez très bien, qu'on ne négocie pas sur la place publique, et, qu'une fois que les négociations seront complétées, bien sûr, ça nous fera plaisir de faire rapport, globalement, sur l'ensemble de la situation.

Mais, pendant qu'il se préoccupe des délais... Et il a raison de se préoccuper des délais, moi aussi, je trouve ça long comme négociation. Parfois, les situations sont complexes, M. le Président. Mais, puisqu'il se préoccupe de dépenses publiques, peut-il arrêter leurs tactiques dilatoires, cinq heures de motions dilatoires, cinq heures...

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bédard: Je pense que le ministre s'attire bien des problèmes, là. Je comprends que son gouvernement a besoin d'un «pep talk». On ne peut pas imputer des motifs. Je comprends que c'est dur à défendre, une loi sur le budget, quand on impose un ticket modérateur aux Québécois. Il va continuer à le faire en commission.

Le Président: Alors, M. le ministre, à la question posée, en évitant d'imputer des motifs.

M. Bachand (Outremont): M. le Président, je ne savais pas qu'on ne pouvait pas utiliser ce mot-là, alors, bien sûr, je le retire. Mais c'est... Il faudrait peut-être que le leader de l'opposition lise les projets de loi, parce qu'il n'y a pas de franchise et de ticket modérateur dans le projet de loi. Aucunement. C'est dans le débat auquel on va faire... Ce projet de loi là vient contrôler les dépenses de l'État...

Le Président: En question principale...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de Richelieu, M. le ministre. La question a été posée, la réponse a été donnée. Nous en sommes au député de Groulx, en question principale.

Sécurité des éducateurs dans
les centres jeunesse

M. René Gauvreau

M. Gauvreau: Merci, M. le Président. L'automne dernier, une étude panquébécoise révélait que dans les centres jeunesse, principalement dans les centres de réadaptation, la majorité, je dis bien la majorité des éducatrices et éducateurs étaient victimes de voies de fait -- voies de fait au sens du Code criminel -- plus de une fois par semaine, environ 68 fois par année.

Ce rapport a été publié en septembre 2009. Je veux savoir de la part de la ministre si elle en a pris connaissance. Je suis prêt à lui remettre. Et, de plus, je voudrais savoir de la part de la ministre quel fut son parcours authentique pour prendre la défense des seuls travailleurs au Québec dont l'employeur laisse d'autres personnes poser des voies de fait.

Le Président: Mme la ministre déléguée aux services sociaux.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault: Merci, M. le Président. Vous allez me permettre de remercier mon collègue de Groulx d'appuyer le parcours authentique. Je pense que c'est important dans un... dans le cas qui nous préoccupe aujourd'hui.

M. le Président, j'ai eu l'occasion de répondre au député de Groulx que les intervenants viennent en aide quotidiennement à nos jeunes qui sont en centre jeunesse. J'ai eu l'occasion également de lui répondre que la sécurité de nos intervenants en centre jeunesse, c'est une préoccupation...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Un instant. Mme la ministre, vous continuez, s'il vous plaît, à votre réponse.

Des voix: ...

Mme Thériault: ...parle beaucoup de l'autre côté.

Le Président: S'il vous plaît! Un instant, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Seule Mme la ministre a la parole. Mme la ministre.

Mme Thériault: Oui. Merci, M. le Président. J'ai eu l'occasion également de rappeler au Parti québécois que nous avions baissé le nombre de jeunes par intervenant de 29 à 19, ce qui a allégé considérablement les charges de travail. J'ai eu l'occasion également de répondre qu'il y a un programme d'aide aux employés et que 80 % des employés des centres jeunesse qui ont eu recours à ce programme-là ont été satisfaits des services qui ont été offerts. M. le Président, vous allez me permettre de lever mon chapeau aux intervenants en centre jeunesse. On sait que ce n'est pas facile et on travaille avec eux, ainsi que l'association, pour trouver des solutions. Merci, monsieur...

Une voix: ...

Le Président: C'est sur une question de règlement?

D'abord, ceci met fin à la période de questions et de réponses orales des députés.

Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: ...permettre de solliciter auprès du leader de l'opposition officielle, et du deuxième groupe d'opposition, et des députés indépendants le consentement pour qu'on puisse, à ce stade-ci, procéder à deux motions sans préavis et aux avis touchant les travaux des commissions.

Des voix: ...

Le Président: Alors, je constate, M. le leader, qu'il n'y a pas de consentement, et donc la Chambre suspend ses travaux à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 27)

 

(Reprise à 15 h 3)

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Mmes et MM. les députés, bon après-midi. Veuillez vous asseoir.

Motions sans préavis

Nous reprenons nos travaux. Et nous étions aux motions sans préavis. Alors, je reconnais un membre du groupe formant le gouvernement. Alors, je reconnais M. le député de Vanier.

M. Huot: Mme la Présidente, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante, conjointement avec le député de L'Assomption, le député de Beauce-Nord, le député de Mercier, le député de Chutes-de-la-Chaudière et le député de La Peltrie.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, allez-y, M. le député.

M. Huot: Consentement?

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Pardon?

Souligner la Journée mondiale
de l'environnement

M. Huot:«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée mondiale de l'environnement, qui se tiendra le 5 juin 2010 sur le thème Des millions d'espèces -- Une planète -- Un avenir commun et qu'elle réaffirme, en cette Année internationale de la diversité biologique, la nécessité d'agir pour protéger la vie sur terre.»

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Gautrin: ...que nous l'adoptions sans débat, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. Il n'y a pas d'autre motion sans préavis?

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Excusez-moi. M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

Des voix: ...

Dénoncer l'utilisation des mines
antipersonnel et demander au gouvernement
et à ses sociétés d'État de respecter la
Convention sur l'interdiction
des mines antipersonnel

M. Deltell: Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je demande le consentement de cette Assemblée pour déposer la motion suivante, conjointement avec le ministre des Finances, la députée de Rosemont, le député de Mercier et le député de La Peltrie.

«Que l'Assemblée nationale dénonce l'utilisation des mines antipersonnel et demande au gouvernement du Québec et à ses sociétés d'État qu'ils respectent la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel.»

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le chef du deuxième groupe d'opposition. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Gautrin: ...consentement, Mme la Présidente, pour que nous puissions l'adopter sans débat, s'il vous plaît.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté? Adopté. Est-ce qu'il y a d'autres motions? Toujours M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Deltell: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais que cette motion soit envoyée à tous les dirigeants de sociétés d'État du Québec.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. À tous les dirigeants de?

M. Deltell: Les présidents de société d'État du Québec.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): À tous les dirigeants des sociétés d'État du Québec. Alors, l'Assemblée nationale va se charger de la faire transmettre. Il n'y a pas d'autres motions sans préavis?

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous sommes aux avis touchant les travaux des commissions, et je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gautrin: Je vous remercie, Mme la Présidente. Il me fait plaisir d'aviser cette Assemblée que la Commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 102, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière municipale, aujourd'hui, dès la lecture du présent avis, et ce, jusqu'à 18 heures ainsi que de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 100, Loi mettant en oeuvre certaines dispositions du discours sur le budget du 30 mars 2010 et visant le retour à l'équilibre budgétaire en 2013-2014 et la réduction de la dette, aujourd'hui, dès la lecture du présent avis, et ce, jusqu'à 18 heures ainsi que de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Que la Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 48, Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale, aujourd'hui, dès le présent avis, et ce, jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May;

Que la Commission des transports et de l'environnement poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement concernant la gestion des matières résiduelles et modifiant le Règlement sur la compensation pour les services municipaux fournis en vue d'assurer la récupération et la valorisation des matières résiduelles, aujourd'hui, de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May -- j'en prends et donne une copie et je continue la suite;

Que la Commission de la santé et des services sociaux poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 67, Loi sur l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, aujourd'hui, de 20 heures à 22 h 30, à la salle du Conseil législatif;

La Commission de la culture et de l'éducation entreprendra... entendra, excusez-moi, les intéressés et procédera à l'étude détaillée à l'égard du projet de loi d'intérêt privé n° 223, Loi concernant le Collège Presbytérien de Montréal, mercredi le 9 juin 2010, après les affaires courantes, et ce, jusqu'à midi;

La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée à l'égard du projet de loi d'intérêt privé n° 219, Loi modifiant la Loi concernant le Pipeline Saint-Laurent, mercredi le 9 juin 2010, de midi à 13 heures;

La Commission des finances publiques entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi n° 222, loi concernant le Club Brûlé inc.; le projet de loi n° 221, Loi concernant la cession de la totalité des biens ou de l'entreprise de Promutuel Capital, société de fiducie inc.; le projet de loi n° 227, Loi concernant Exceldor Coopérative Avicole, mercredi le 9 juin 2010, après les affaires courantes, et ce, jusqu'à 13 heures et, si nécessaire, de 15 heures à 18 heures; et enfin pour terminer

La Commission de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi n° 224, concernant la ville de Rouyn-Noranda; le projet de loi n° 226, loi concernant la Charte de la Ville de Laval; le projet de loi n° 220, concernant la Municipalité régionale de comté de Rocher-Percé; le projet n° 225, Loi concernant les MRC d'Avignon, de Bonaventure, de La Côte-de-Gaspé, de La Haute-Gaspésie, du Rocher-Percé et la municipalité des Îles-de-la-Madeleine, mercredi le 9 juin 2010, après les affaires courantes, et ce, jusqu'à 13 heures et, si nécessaire, de 15 heures à 18 heures.

**(15 h 10)**

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le leader adjoint du gouvernement.

Pour ma part, je vous avise que la Commission des finances publiques se réunira en séance de travail aujourd'hui, mercredi 2 juin, de 18 heures à 18 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de discuter des suites à donner au mandat d'initiative sur l'indexation des régimes de retraite des secteurs public et parapublic et du projet de rapport intérimaire.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous sommes aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bédard: Oui. Mme la Présidente, nous allons bientôt être en assemblée pour discuter des projets de loi. J'ai appris malheureusement qu'on vient de décaler le projet de loi qui concerne les gens qui sont ici, qui sont venus d'un peu partout, qui sont les représentants de la communauté ukrainienne du Québec et l'ambassadeur d'Ukraine au Canada. Ils ont une contrainte de temps... que je salue, d'ailleurs.

Je vous rappelle, Mme la Présidente, qu'il s'agit d'un projet de loi qui porte sur la reconnaissance d'un génocide où un nombre impressionnant, malheureusement, de personnes y ont trouvé la mort, et vous savez dans quel contexte.

Je pense, c'est un geste officiel de cette Assemblée, qui a une grande valeur pour eux et pour nous. Nous souhaiterions le faire en leur présence. Nous demandons au leader d'appeler tout de suite, à la première étape, le projet de loi portant sur la reconnaissance de l'Holodomor, de façon à ce que nous puissions dignement parler d'un projet de loi qui concerne une communauté fière du Québec, et en même temps, je pense, de façon conforme à nos us et coutumes, et, dans le respect de l'institution, adopter ce projet de loi, et non, comme je viens de l'entendre, de passer à un projet de loi n° 83 qui peut être appelé un peu plus tard.

Une voix: ...

M. Bédard: Alors, si le ministre... le député me le confirme, j'en serais bien heureux, monsieur...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, M. le leader de l'opposition officielle, votre question est posée. Je donne la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gautrin: ...l'espace d'une minute, pour échanger, de part et d'autre, sur ce sujet.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Vous souhaitez une suspension?

M. Gautrin: Oui.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Quelques minutes?

M. Gautrin: Une minute.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Alors donc, je vous laisse une suspension de quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 12)

 

(Reprise à 15 h 13)

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, est-ce que vous pouvez, M. le leader adjoint du gouvernement, répondre à la question du leader de l'opposition?

M. Gautrin: Mme la Présidente, j'ai compris qu'il y avait une contrainte de temps, qu'il y a des éléments qui sont dans nos galeries actuellement, des personnes qui malheureusement doivent prendre des avions, etc., et, par déférence envers eux, je n'ai aucune raison de vouloir être malintentionné à leur égard. Et je vous demanderais, dans ces conditions, Mme la Présidente, d'appeler l'article 31 du feuilleton.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors ça, c'était la réponse aux renseignements des travaux sur l'Assemblée. Nous sommes toujours à cette rubrique.

Avis de sanction de projets de loi

Je vous avise qu'il y aura sanction de projets de loi au cabinet de Son Honneur le lieutenant-gouverneur aujourd'hui, à 17 heures.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Gautrin: Alors, Mme la Présidente, c'est un plaisir de vous demander d'appeler l'article 31 du feuilleton, s'il vous plaît.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, à l'article 31 du feuilleton...

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Donc, à l'article 31 du feuilleton -- je m'assure -- Mme la députée de Rosemont.

Des voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): S'il vous plaît! J'ai besoin d'avoir du calme, parce qu'il y a trop de bruit dans cette Assemblée. J'invite les députés qui doivent quitter pour vaquer à d'autres occupations de le faire maintenant.

Projet de loi n° 390

Adoption du principe

Merci. Alors donc, à l'article 31 du feuilleton, Mme la députée de Rosemont propose l'adoption du principe du projet de loi n° 390, Loi proclamant le Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens (l'Holodomor). Y a-t-il des interventions? Mme la députée de Rosemont.

Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, Mme la Présidente. Alors, c'est avec beaucoup d'émotion puisque, depuis un an, avec la communauté ukrainienne de Montréal, nous avons discuté de ce projet de loi que nous avons déposé d'ailleurs il y a quelques mois en présence même aussi de représentants de la communauté et, depuis ce temps, Mme la Présidente, nous avons travaillé de concert, en collaboration, avec le gouvernement, avec le ministre des Relations internationales. Et, croyez-moi, après beaucoup d'émotions -- au pluriel cette fois -- je suis très heureuse que, cet après-midi, en leur présence et en la présence de l'ambassadeur d'Ukraine au Canada, nous puissions procéder à l'étude du projet de loi. C'est donc avec une profonde empathie pour tous nos concitoyens d'origine ukrainienne que je nous invite, aujourd'hui, à procéder à l'adoption du projet de loi n° 390 ayant pour objet de proclamer le quatrième samedi de novembre de chaque année Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens, l'Holodomor.

Avant tout, permettez-moi, Mme la Présidente, de saluer donc à nouveau les nombreux membres de la communauté ukrainienne du Québec ainsi que l'ambassadeur qui sont avec nous aujourd'hui. Je tiens à remercier tous mes collègues particulièrement du parti ministériel mais aussi tous les collègues de l'Assemblée nationale pour leur appui pour l'adoption de ce projet de loi, et de souligner à nouveau la collaboration du ministre des Relations internationales. Cette collaboration, Mme la Présidente, fait en sorte que la communauté ukrainienne pourra, je le souhaite, donc être aujourd'hui témoin de la volonté unanime de tous les parlementaires de l'Assemblée nationale de reconnaître et de commémorer la famine génocide ukrainienne.

J'ai été sensibilisée à l'importance de reconnaître le génocide ukrainien lors de ma participation, en août dernier, au banquet annuel célébrant l'indépendance de l'Ukraine. Lors de cet événement, plusieurs membres de la communauté, dont Mme Marika Putko et le Pr Roman Serbyn, m'ont demandé que le Québec reconnaisse officiellement l'Holodomor, et j'ai accepté de leur donner mon appui donc en déposant ce projet de loi. Je pense qu'il est de notre devoir, afin d'agir en conformité avec les valeurs démocratiques de la société québécoise promouvant les droits de la personne, refusant l'intolérance et l'exclusion ethnique, de reconnaître et de dénoncer de façon officielle ces atrocités pour éviter qu'elles ne se reproduisent.

Afin de commencer dès à présent cet exercice de mémoire collective, permettez-moi, Mme la Présidente, de rappeler brièvement les circonstances entourant la famine génocidaire perpétrée volontairement en Ukraine par le régime soviétique de Joseph Staline dans les années 1932-1933. Le terme «Holodomor», qui signifie littéralement, en ukrainien, extermination par la faim, désigne la grande famine qui eut lieu en Ukraine dès le début des années 1930 et qui atteignit son paroxysme à l'hiver 1932 et au printemps 1933. Cette famine est aussi nommée famine artificielle, car le manque de vivres résultait non pas d'un désastre naturel, mais plutôt de la confiscation par l'État soviétique des denrées alimentaires indispensables, notamment sous forme de quotas céréaliers exorbitants. Enlevés aux producteurs, les céréales et les autres produits agricoles furent emmagasinés sous bonne garde en Ukraine puis transportés en Russie ou vendus en Europe. Nation agricole par excellence, qualifiée de grenier à blé de l'Union soviétique, les Ukrainiens furent littéralement condamnés à mourir de faim. Afin d'empêcher l'exode massif de la population à la recherche de nourriture vers les républiques voisines mieux pourvues, des unités armées de la police soviétique ont bloqué les frontières des territoires de l'Ukraine et de la région du Kouban, dans le Caucase du Nord majoritairement peuplé d'Ukrainiens, causant volontairement la mort de millions de personnes. En 1932 et 1933, près de 25 000 personnes mouraient tous les jours. L'Holodomor a ainsi exterminé à peu près 20 % de la population de l'Ukraine soviétique.

**(15 h 20)**

Selon les historiens, cette famine fut provoquée par le régime stalinien dans le but d'écraser toute résistance au pouvoir bolchevique. En effet, en décidant de vaincre les fermiers ukrainiens par la famine artificielle, Staline souhaitait anéantir le renouveau national ukrainien, né dans les années 1920, qui alimentait les aspirations à l'indépendance de l'Ukraine. Pour Staline, la question nationale était, par essence, une question paysanne, et la paysannerie, constituant la force principale du mouvement national, devait en l'occurrence être éliminée. Ainsi, cette grande famine meurtrière reflète certainement une des facettes les plus sinistres de la politique impériale soviétique en Ukraine. Le régime totalitaire stalinien a délibérément créé des conditions qui rendaient la survie des Ukrainiens impossible. Ces conditions correspondent à la définition élaborée par la convention des Nations unies sur le génocide, adoptée en 1948, qui définit le génocide, et je cite, comme «l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel, [notamment par un acte de] soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle», fin de la citation. Le régime communiste avait ciblé les Ukrainiens sur leurs territoires et comme groupe ethnique dans la république soviétique de Russie, en particulier au Kouban.

Raphaël Lemkin, juriste juif polonais, réfugié en 1941 aux États-Unis, qui a inventé en 1943 le terme et le concept de génocide et qui l'a fait valoir d'abord au tribunal de Nuremberg puis à l'ONU en 1948, a traité explicitement, dans ses différents écrits, l'Holodomor comme un génocide. Principal instigateur de la Convention sur la prévention et la répression du génocide, Raphaël Lemkin fut l'un des premiers universitaires non ukrainiens à étudier le massacre par la famine en Ukraine et à le qualifier de génocide. Il a clairement écrit dans son étude Le génocide soviétique en Ukraine: «Nous ne sommes pas simplement en présence d'un massacre, écrit-il, mais d'un génocide, de la destruction non seulement d'individus, mais d'une culture et d'une nation.»

L'Ukraine, qui commémore à chaque quatrième samedi de novembre, depuis 1998, le Jour du souvenir de la famine des années 1932-1933, a d'ailleurs légiféré, à l'automne 2006, en qualifiant juridiquement l'époque de l'Holodomor comme un génocide. L'ancien président ukrainien a d'ailleurs déclaré, en 2009, et je le cite: «Nous le savons avec certitude, c'était un génocide. C'était l'extermination de notre peuple par la famine, combinée avec un massacre féroce d'intellectuels, des membres du clergé et des activistes civils et politiques.»

Pendant des décennies, l'URSS a nié l'existence de l'Holodomor. Aujourd'hui, la Russie et le Kazakhstan refusent toujours de reconnaître la famine de 1932-1933 comme un acte génocidaire puisqu'il ne fut pas, selon eux, un massacre dirigé vers un seul groupe ethnique. Cependant, à ce jour, 16 pays à travers le monde ont déjà reconnu le génocide ukrainien, soit le Canada, l'Australie, l'Argentine, l'Équateur, le Chili, la Colombie, le Brésil, l'Autriche, l'Estonie, la Géorgie, la Lituanie, la Slovaquie, la Pologne, la Hongrie et l'Espagne. Les États-Unis ont également condamné, dès 1934, par une résolution de leur Congrès, le massacre ukrainien. Par la suite, ils ont reconnu les actes commis par Staline et son entourage comme un génocide envers le peuple ukrainien, une première fois en 1985 dans un rapport de la Commission du congrès sur la famine, puis dans une résolution de la Chambre des représentants du 20 octobre 2003.

L'Ontario, le Manitoba, l'Alberta, la Saskatchewan ont également proclamé une journée commémorative du génocide ukrainien. Le 10 novembre 2003, une déclaration aux Nations unies, en lien avec le 70e anniversaire de la grande famine en Ukraine de 1932-1933, a rappelé, je cite, «le devoir de mémoire envers les victimes». Le Parlement européen, quant à lui, a reconnu, dans une résolution du 23 octobre 2008, l'Holodomor en Ukraine comme, et je le cite, «un crime effroyable, perpétré contre le peuple ukrainien et contre l'humanité, qui a été planifié de manière cynique et cruelle par le régime stalinien pour imposer la politique soviétique de collectivisation de l'agriculture contre la volonté de la population rurale d'Ukraine».

Comme nous pouvons le constater, Mme la Présidente, l'existence du génocide ukrainien est déjà reconnue sur le plan international par plusieurs pays qui, ce faisant, dénoncent de façon claire ces actes inadmissibles et font en sorte que toutes les sociétés en tirent des leçons importantes sur le plan du respect des droits et de la vie humaine. Je me permets d'insister sur le fait que ces reconnaissances successives et diverses sont issues d'autorités étatiques responsables, crédibles et fiables.

En proclamant le quatrième samedi de novembre de chaque année Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens, l'Assemblée nationale du Québec ajoutera sa voix à celle de tous ces autres membres de la communauté internationale afin de reconnaître ces terribles événements. La famine génocide des Ukrainiens doit être ramenée à la mémoire collective de l'humanité, d'une part, pour honorer les victimes et condamner les tortionnaires, et d'autre part pour tirer la leçon que ce triste événement nous livre et apprendre du passé afin d'éviter que de tels actes ne se reproduisent.

C'est donc un devoir de mémoire et de reconnaissance que nous accomplissons aujourd'hui envers tous les Ukrainiens du monde, mais plus particulièrement envers nos 30 000 concitoyens d'origine ukrainienne installés au Québec depuis le début du XXe siècle, dont parmi ceux-ci des survivants de la famine et leurs descendants, qui ont apporté une contribution inestimable à la société québécoise. Tel que nous l'avons fait pour la communauté arménienne du Québec en adoptant, le 28 novembre 2003, la loi proclamant le Jour commémoratif du génocide arménien, il faut souligner notre appui à la communauté québécoise d'origine ukrainienne et reconnaître les injustices et les malheurs dont le peuple ukrainien a souffert. Il importe de se souvenir, car, au-delà de tout travail de deuil, de réconciliation et de restauration, le pardon requiert la mémoire vive de l'ineffaçable. Comme le disait Todorov, philosophe et historien franco-bulgare, je le cite: «La vie est perdue contre la mort, mais la mémoire gagne son combat contre le néant.»

Mme la Présidente, permettez-moi, en terminant, tout simplement de dire qu'en effet, si, comme députée de Rosemont, j'ai voulu présenter ce projet de loi, c'est parce que la communauté ukrainienne du Québec a longtemps vécu dans cette circonscription et qu'il y a beaucoup encore d'Ukrainiens d'origine qui habitent Rosemont.

C'est au tournant du XXe siècle que les premiers Ukrainiens sont arrivés à Montréal, je l'ai dit. Cette première vague d'immigration a été suivie de deux autres au cours des années vingt et à la fin des années quarante. L'arrivée des Ukrainiens dans la circonscription de Rosemont est liée à un événement majeur de l'histoire du quartier. C'est en 1904, alors que les grands ateliers Angus du Canadien Pacifique ont ouvert leurs portes, que les premiers Ukrainiens arrivent dans Rosemont pour chercher du travail dans ce qui est communément appelé, encore aujourd'hui dans Rosemont, les shops Angus. Considérés comme d'excellents travailleurs, d'excellents ouvriers, ils se feront une spécialité du déshabillage des bouilloires des locomotives.

Par la suite, les Ukrainiens sont de plus en plus présents dans la vie du quartier de Rosemont. Et, si on se promène aujourd'hui dans un quadrilatère situé entre Rosemont et Beaubien, entre la 8e et la 12e Avenue, on peut découvrir la richesse de la culture ukrainienne, la magnifique cathédrale orthodoxe de Sainte-Sophie qui se dresse au coin de Saint-Michel et Bellechasse. Et, dans ses murs, je sais qu'il y a une école du samedi ukrainienne où les enfants peuvent apprendre la langue, la culture, la littérature et l'histoire de l'Ukraine. Un coin de rue plus loin, à l'angle de la 10e, on peut apercevoir l'église de la paroisse catholique de l'Assomption-de-la-Bienheureuse-Vierge-Marie. Elle abrite entre ses murs un musée ukrainien. Il y a aussi une caisse populaire Desjardins ukrainienne de Montréal, dans le quartier de Rosemont, qui aide les personnes âgées. Il y a quelques maisons, aussi, de retraite qui abritent plusieurs représentants de cette communauté.

**(15 h 30)**

Alors, vous me permettrez, en terminant... en disant qu'il y a aussi, et j'invite tous les Québécois à y participer, tous les ans, non seulement le banquet annuel pour fêter l'indépendance de l'Ukraine, mais il y a, au parc de l'Ukraine, au coeur de Rosemont, le plus grand événement culturel de la communauté ukrainienne montréalaise où se rassemblent donc, tous les mois d'août, plusieurs milliers de visiteurs, qui viennent découvrir les musiques, les danses, la gastronomie et l'histoire de cette communauté, que je suis très fière de représenter. Merci.

(Applaudissements)

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la députée de Rosemont. Je veux juste signaler à nos visiteurs qu'on va vous applaudir, mais vous ne pouvez pas applaudir. Alors, je reconnais maintenant M. le ministre des Relations internationales et de la Francophonie. M. le ministre.

M. Pierre Arcand

M. Arcand: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Permettez-moi, dans un premier temps, de saluer le Dr Ostash, qui est l'ambassadeur de l'Ukraine au Canada. Je dois dire que nous sommes désolés évidemment du retard, mais, suite à ce que j'appellerais des tergiversations parlementaires... et ce n'est pas le moment aujourd'hui de savoir qui est responsable de ces tergiversations, mais, le moins que l'on puisse dire, c'est que nous avons accepté aujourd'hui de présenter ce projet de loi d'abord et avant tout par respect pour la communauté ukrainienne qui s'était déplacée de Montréal, aujourd'hui, et qui est présente parmi nous.

Je voulais profiter de l'occasion pour vous dire aujourd'hui que l'histoire de l'humanité est malheureusement entachée d'événements qui suscitent notre indignation. Certains de ces événements laissent souvent des empreintes qui sont majeures. C'est le cas de la tragédie de ce qu'on a appelé la grande famine en Ukraine, que l'on appelle l'Holodomor. Ce terme désigne cette famine qui a eu lieu en Ukraine entre 1932 et 1933 et qui se solda, selon les estimations des historiens, par la mort de 2,6 à 5 millions de personnes, et donc ce sinistre bilan a bien sûr de quoi nous heurter profondément dans nos valeurs. Imaginez ce chiffre désolant qui représente déjà une très grande partie de la population québécoise. L'Holodomor s'est produit dans le contexte plus général des famines soviétiques de 1931 à 1933 qui ont fait 7 millions de victimes dans l'ensemble de l'Union soviétique, qui ont touchées les régions agricoles d'Ukraine, du Belarus, du Kazakhstan, de la Moldavie et de plusieurs régions de Russie.

Cette famine, qui a été téléguidée par Joseph Staline, a décimé la paysannerie, engendré des millions de victimes, des otages d'un système de collectivisation forcée, et, à partir de 1928, le régime de Staline a commencé à éliminer ce qu'on appelait les koulaks ou les riches paysans, à détruire les meilleures exploitations ukrainiennes. Le gouvernement communiste de l'époque avait confisqué les biens des paysans. En 1929, il a étendu la collectivisation totale. Cette politique d'assujettissement systématique de la paysannerie a provoqué la chute des rendements agricoles et une baisse de la productivité.

Selon un rapport déposé à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe en mars 2010, les faits objectifs qui entourent l'Holodomor ukrainien sont bien établis. On peut lire dans ce rapport qu'à l'automne 1932 les régions, les villages, les fermes collectives qui ne parvenaient pas à livrer les quantités de céréales qui leur étaient imposées étaient placées sur une liste noire, soumis à des amendes en nature. Ils étaient alors cernés par des unités armées qui empêchaient tout approvisionnement de l'extérieur et interdisaient à la population d'aller chercher de la nourriture ailleurs. Les magasins et les habitations étaient fouillés armes au poing et toutes les denrées alimentaires et autres produits de première nécessité étaient confisqués.

En vertu d'une loi qu'on a appelée la loi des cinq épis, promulguée en août 1932, les paysans affamés qui commettaient un vol, aussi minime fut-il, pouvaient être condamnés à 10 ans de camp ou encore à la peine de mort. De juin 1932 à décembre 1933, 125 000 personnes furent condamnées, dont 5 400 à la peine capitale, certains pour avoir volé quelques épis de blé ou de seigle dans les champs. Tout particulièrement au cours de la deuxième année de cette famine artificielle, il était interdit aux paysans de quitter les régions touchées, et toute introduction de nourriture dans la zone de la faim était interdite. Des villages entiers et de vastes régions se retrouvèrent complètement dépeuplés.

La communauté internationale a donc, comme l'a mentionné la députée de Rosemont, ce devoir de mémoire vis-à-vis des millions d'hommes, de femmes et d'enfants qui ont été sacrifiés sur l'autel d'une stalinisation démesurée, des millions d'hommes, de femmes et d'enfants qui ont vu s'éteindre leurs espoirs, leur dignité réduite à néant. Leur droit inaliénable à la vie a été cruellement bafoué, et l'oubli, ou pire encore, l'indifférence à l'égard d'une tragédie d'une telle ampleur a été un affront à l'humanité.

En 2003, à l'occasion de la grande commémoration du 70e anniversaire de la grande famine, 25 pays, dont le Canada, les États-Unis et la fédération de Russie, se sont associés à une décision présentée aux Nations unies par l'Ukraine appelant à se souvenir de la grande famine comme une tragédie nationale pour le peuple ukrainien.

La douma russe, dans une déclaration du 2 avril 2008, commémorant les 75 ans de la grande famine des années trente sur le territoire de l'URSS, a fait état d'une terrible tragédie qui a coûté la vie à 7 millions de personnes dans une très grande partie de l'Union soviétique et a accusé le régime stalinien d'anéantissement des petits propriétaires agricoles et l'industrialisation accélérée comme étant les principales causes de cette famine.

La Chambre des communes du Canada de même que les Parlements de l'Ontario, du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta ont adopté, en 2008 pour la plupart, ou encore en 2009 dans le cas de l'Ontario, des lois qui instituent le Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens et reconnaissent cette famine ukrainienne de 1932-1933 comme un génocide.

Le 23 octobre 2008, le Parlement européen a adopté la résolution sur la commémoration de l'Holodomor, cette famine donc artificiellement provoquée. Cette résolution comportait une déclaration à l'effet que le Parlement européen reconnaît l'Holodomor comme un crime effroyable perpétré contre le peuple ukrainien et contre l'humanité, et exprimait sa sympathie à l'égard du peuple victime de cette tragédie, et rendait hommage à ceux qui sont décédés en conséquence de cette famine artificielle de 1932-1933.

Le 28 avril 2010, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a adopté une résolution qui condamne avec force les politiques cruelles qui ont été menées par le régime stalinien, déclenchant, en 1929, ces grandes famines dans les régions céréalières de l'ex-Union soviétique, et qui avait donc atteint son paroxysme quelques années plus tard.

Aujourd'hui, donc, le Québec est heureux d'unir sa voix à celles d'autres États pour exprimer sa solidarité à l'endroit du peuple ukrainien et, de façon plus particulière, vis-à-vis les quelque 30 000 Québécoises et les Québécois d'origine ukrainienne. Ces descendants d'un peuple profondément écorché ont su faire preuve de résilience. Ils sont bien enracinés dans les régions et les villes du Québec, où ils élèvent leurs enfants, où ils travaillent et où ils participent à l'édification de notre société. Et, depuis de très nombreuses années, Mme la Présidente, l'apport des Ukrainiens établis au Québec est indéniable, qu'il s'agisse de la création d'entreprises dans plusieurs domaines d'activité, des nombreuses institutions à vocation sociale et culturelle et de leur implication générale dans la société québécoise.

J'aimerais vous citer quelques exemples de personnalités, et vous m'excuserez parfois la prononciation qui n'est peut-être pas tout à fait adéquate, mais, entre autres, d'abord, la présidente du Festival ukrainien de Montréal, Mme Alexandra Kindrat. Le Festival ukrainien de Montréal est la plus grande fête et le plus grand événement culturel de la communauté ukrainienne montréalaise.

En 2000, à l'initiative du Dr Mukola Kulishov, la communauté s'est réunie pour célébrer le neuvième anniversaire de l'indépendance de l'Ukraine au parc de l'Ukraine, dans le quartier Rosemont. Cette célébration a connu un tel succès que l'expérience se répète annuellement au mois de septembre et rassemble des milliers de personnes.

Et une autre personnalité qui contribue au dynamisme de sa communauté est le directeur du musée ukrainien Patriarche Joseph Slipyj, à Montréal, M. Orest Pawliw. Le musée propose chaque année de nombreuses expositions et vernissages, dont les vernissages de différents artistes ukrainiens montréalais, Volodymyr Illyushchenko et Sergiy Burtovyy.

Alors, Mme la Présidente, il me fait plaisir de solliciter le consentement de l'Assemblée nationale pour le dépôt du projet de loi n° 390, la loi qui proclame le Jour commémoratif de la grande famine et du génocide ukrainiens (l'Holodomor). Merci, Mme la Présidente.

**(15 h 40)**

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le ministre des Relations internationales et de la Francophonie. Et je cède la parole à M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Gérard Deltell

M. Deltell: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme la Présidente, c'est avec beaucoup d'humilité et d'émotion que je joins la joie... la voix, pardon, de ma formation politique au projet de loi... très bon projet de loi déposé par la députée de Rosemont.

L'Holodomor, Mme la Présidente, fait partie de ces grandes tragédies du XXe siècle. Les orateurs précédents auront rappelé toute la douleur, toute la tristesse qui marquent ces événements alors que Staline visait à écraser les Ukrainiens et aura ainsi provoqué de toutes pièces la famille et aura également exterminé les élites ukrainiennes. Ces événements douloureux, ces événements terribles se sont produits dans les années 1932-1933, et, comme le disait M. le ministre tout à l'heure, c'est près de 5 millions de personnes qui auront péri dans cette catastrophe.

Il aura aussi fallu de longues et de patientes démarches pour que l'humanité entière reconnaisse le drame qui est survenu. Oui, ça a été reconnu en certaines assemblées. Oui, ça a été reconnu en certains lieux du monde. Mais il y a encore d'autres endroits qui manquent encore à l'appel. Et il reste beaucoup à faire pour reconnaître cette tare terrible qui est survenue au XXe siècle.

Au Québec, il y a 30 000 Ukrainiens qui vivent ici et qui démontrent dans toute leur splendeur que justement on peut survivre à des drames semblables. Et nous saluons l'initiative de la députée de Rosemont et le concours du parti ministériel pour que le Québec joigne sa voix internationale à la... à l'assemblée internationale, si on veut, pour reconnaître l'Holodomor.

Mme la ministre... Mme la députée, pardon, de Rosemont parlait de son quartier... de son comté, où les gens vivaient, dans son quartier. Je tiens également à signaler que, dans la région de l'Abitibi, beaucoup d'Ukrainiens sont venus dans les années 1910, 1920, 1930 et auront ainsi, de façon magnifique et de façon très ouvrière et très travaillante, permis, comme... à titre de pionniers, de développer l'Abitibi. Et ça, bien, les gens d'Ukraine... nous devons, nous, les Québécois, être très reconnaissants aux gens d'Ukraine d'avoir permis à développer l'Abitibi il y a de cela 100 ans.

Je disais, Mme la Présidente, que c'est avec humilité et émotion que je participe à ce débat... et émotion, c'est bien simple, puisqu'il y a ici des dizaines de gens de descendance ukrainienne. Parmi eux, déjà, des gens qui sont les descendants de ceux qui ont survécu à l'Holodomor. Et votre présence ici, en votre Assemblée nationale, illustre de la façon la plus magnifique que le désir de vivre et de survivre triomphera toujours de la bêtise humaine. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le chef du deuxième groupe d'opposition. Y a-t-il d'autres interventions?

Mise aux voix

Alors le principe du projet de loi n° 390, Loi proclamant le Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens (l'Holodomor), est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Des voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gautrin: Je vous remercie, Mme la Présidente. Je fais motion, conformément au premier alinéa de l'article 243 du règlement, pour envoyer l'étude de ce projet de loi en commission plénière.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gautrin: Je vous remercie, Mme la Présidente. Je ferai maintenant motion, conformément à l'article 106 de notre règlement, pour que cette assemblée se transforme en commission plénière afin de procéder à l'étude article par article dudit projet de loi.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): La motion de M. le leader du gouvernement proposant que l'Assemblée se constitue en commission plénière est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. En conséquence, je suspends les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi n° 390, Loi proclamant le Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens (l'Holodomor). Donc les travaux sont suspendus pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 45)

 

(Reprise à 15 h 49)

Commission plénière

Mme Houda-Pepin (présidente de la commission plénière): Alors, Mmes et MM. les députés, l'Assemblée est constituée en commission plénière conformément à la motion qui vient d'être adoptée.

Nous sommes donc réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi n° 390, Loi proclamant le Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens (l'Holodomor). Est-ce qu'il y a des remarques préliminaires?

**(15 h 50)**

Une voix: ...

Étude détaillée

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Non? Très bien. Pas de motion? Alors, nous allons directement à l'étude détaillée du projet de loi n° 390. Y a-t-il des interventions sur le préambule du projet de loi?

M. Arcand: Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous écoute, M. le ministre.

M. Arcand: Alors, Mme la Présidente, pour ce qui est de l'amendement que nous aimerions apporter, un premier amendement au niveau du préambule, ce serait d'insérer, dans le premier alinéa du préambule, le mot «grande» avant le mot «famine». Ce serait le premier élément.

Deuxièmement, supprimer, à la... Oui?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): ...M. le ministre, est-ce que vous êtes dans le premier paragraphe, le premier...

M. Gautrin: Deuxième paragraphe du considérant.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui. Deuxième paragraphe du considérant?

M. Arcand: C'est ça.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Votre amendement porte sur...

M. Arcand: Alors, «grande» avant le mot «famine».

La Présidente (Mme Houda-Pepin):«Grande» avant le mot «famine».

M. Arcand: Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): O.K. Alors, c'est tout ce que vous avez comme amendement?

M. Arcand: J'ai un autre amendement dans le préambule.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): O.K. Allez-y.

M. Arcand: Alors, deuxièmement, supprimer, à la fin du deuxième alinéa du préambule, les mots «en vue d'anéantir les aspirations du peuple ukrainien à la liberté et à l'indépendance».

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Supprimer?

M. Arcand: Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): On supprime à partir de «en vue»?

M. Arcand:«En vue d'anéantir les aspirations du peuple ukrainien à la liberté et à l'indépendance».

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Est-ce qu'il y a un autre amendement?

M. Arcand: Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui? Je vous écoute.

M. Arcand: Insérer, entre le deuxième et le troisième alinéa du préambule, l'alinéa suivant: «Considérant que la collectivisation forcée de l'agriculture imposée par le régime soviétique de Joseph Staline a entraîné la mort de millions de personnes parmi les autres peuples de l'ex-Union soviétique.»

La Présidente (Mme Houda-Pepin): ...vous pouvez déposer... Est-ce que vous pouvez déposer le...

M. Arcand: Je vais le déposer.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): ...l'amendement pour que l'opposition en prenne connaissance?

M. Gautrin: Peut-être qu'on devrait... Mme la Présidente, il serait peut-être... là, comme il y a beaucoup d'amendements, qu'on les adopte étape par étape, si vous permettez. Ce serait peut-être plus facile.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Vous préférez qu'on y aille étape par étape?

M. Gautrin: Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): D'accord. Alors donc, très bien, étant donné que ça devient de plus en plus complexe, on va aller du plus simple au plus compliqué. Donc, le premier amendement qui a été déposé, c'est d'ajouter «grande» avant «famine».

Est-ce qu'il y a des interventions? Ça va? L'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): O.K. Est-ce que je peux avoir les amendements écrits à la table, s'il vous plaît?

M. Arcand: ...faire une copie, là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Alors, en attendant la photocopie, on peut continuer... on peut procéder. Le deuxième amendement qui a été fait par le ministre, ça concerne l'alinéa deux, n'est-ce pas, en supprimant «en vue d'anéantir les aspirations du peuple ukrainien à la liberté et à l'indépendance de l'Ukraine», ce qui reviendrait à dire que l'alinéa deux se lirait comme suit: «Considérant que des millions d'Ukrainiens ont alors péri, victimes de la famine provoquée délibérément par le régime soviétique de Joseph Staline.» Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Beaudoin (Rosemont): Adopté.

M. Gautrin:«Victimes de la grande famine», Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Houda-Pepin):«Victimes de la grande famine», oui, vous avez raison, M. le... D'accord.

Là, pour ce qui est du troisième amendement, je vais attendre l'écrit parce que j'ai besoin d'avoir le texte.

M. Gautrin: Est-ce qu'on a adopté le deuxième amendement, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): On a... J'y arrive, là. Alors, le premier amendement, la «grande famine», est adopté. Le deuxième amendement, la suppression, est également adopté. Donc, nous arrivons au troisième considérant... avant le troisième considérant.

M. Arcand: ...troisième considérant, Mme la Présidente, serait un ajout qui serait le suivant: «Considérant que la collectivisation forcée de l'agriculture imposée par le régime soviétique de Joseph Staline a entraîné la mort de millions de personnes parmi les autres peuples de l'ex-Union soviétique

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Est-ce que l'opposition a une copie des amendements?

Mme Beaudoin (Rosemont): Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est très bien. Excusez-moi. Donc, cet ajout, parce que là il s'agit d'un ajout d'un autre considérant entre le deuxième et le troisième... est-ce que cet amendement est adopté?

Mme Beaudoin (Rosemont): Adopté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. M. le ministre, la parole est à vous, toujours dans les amendements.

M. Arcand: Alors, c'était dans les amendements, toujours dans le préambule, supprimer l'avant-dernier alinéa du préambule.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): L'avant-dernier alinéa, qui se lit: «Considérant que nos concitoyens d'origine ukrainienne tiennent profondément à perpétuer la mémoire des...» C'est ça? Cet alinéa, vous le supprimez?

M. Arcand: Exact, oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Est-ce que cet amendement est adopté?

Mme Beaudoin (Rosemont): Adopté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. Est-ce que le préambule, tel qu'amendé, est adopté?

M. Arcand: Il reste un dernier point, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): D'accord. Alors, vous avez encore un amendement?

M. Arcand: Un dernier amendement, qui est: Supprimer, à la fin du dernier alinéa du préambule, les mots «et de l'exclusion ethnique», ce qui se...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, ça veut dire que le dernier considérant se lirait comme suit: «Considérant la volonté des Québécois de défendre les valeurs démocratiques et les droits de la personne ainsi que leur refus de l'intolérance.» Ça s'arrête là. Ça va? Est-ce que cet amendement est accepté?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, l'amendement est adopté. Tous les amendements ont été adoptés. Est-ce que le préambule, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. Parfait, merci. Alors, nous sommes rendus à l'article 1. Y a-t-il des interventions sur l'article 1? Pas d'interventions sur l'article 1?

M. Dufour: Peut-être le lire pour que ce soit dans les galées.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, d'accord. Alors, très bien. Alors, l'article 1 se lit comme suit: «Le quatrième samedi de novembre de chaque année est proclamé Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens (l'Holodomor).» Cet article est adopté?

M. Arcand: Alors, c'est «de la grande famine», là, mais c'est adopté.

M. Gautrin: Mme la Présidente, par concordance, je pense qu'il faudrait utiliser «la grande famine», si vous me permettez.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, il y a un amendement de concordance qui consiste à ajouter avant «famine», dans l'article 1, «grande», pour «grande famine». Cet amendement est accepté?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. Alors, j'aimerais l'avoir par écrit, M. le ministre, s'il vous plaît, votre amendement à l'article 1. Déposé à la table, s'il vous plaît.

M. Arcand: Il y a un article 1.1 que nous aimerions ajouter.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Je veux d'abord avoir l'amendement par écrit pour l'article 1, s'il vous plaît, à la table.

M. Arcand: Avec «grande», hein, c'est ça que vous avez besoin?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Exactement.

M. Arcand: Ça, on ne l'a pas. On peut... On va l'écrire.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Écrivez-le, s'il vous plaît. Ajouter... ou plutôt... Ajouter, avant «famine»...

M. Gautrin: Ajouter le mot «grande» devant le mot «famine» à l'article 1...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est ça. Et déposé à la table.

M. Gautrin: Ajouter le mot «grande» avant l'article... le mot «famine» à l'article 1.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors donc, l'amendement s'en vient. En attendant le dépôt, allez-y, M. le ministre, avec l'amendement que vous voulez ajouter, 1.1.

M. Arcand: J'aimerais ajouter, Mme la Présidente, un amendement qui dit simplement la chose suivante: «Il est entendu que le Jour commémoratif de la grande famine et du génocide ukrainiens (l'Holodomor) n'est pas une fête légale ni un jour non juridique.»

Ça, je peux vous le déposer.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je comprends que cet amendement, c'est un ajout après l'article 1.

M. Arcand: C'est ça. On pourrait peut-être le mettre comme article 2, c'est ça?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Est-ce que l'opposition a une copie de l'amendement? Est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. Parfait. Alors, l'article 2: La présente loi entre en vigueur le -- évidemment, indiquer ici la date de la sanction de la présente loi. C'est beau? Adopté?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. Alors, est-ce que l'article 1... Pardon. L'article 1, nous l'avons adopté tel qu'amendé. L'article 1.1 a été également ajouté comme amendement et adopté. Est-ce que le titre du...

**(16 heures)**

M. Gautrin: Mme la Présidente, je crois que vous aurez probablement... comme on a rajouté un nouvel article, vous avez besoin d'une motion de renumérotation.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien.

M. Gautrin: On renumérote, en ce moment, les articles du projet de loi.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, on va d'abord adopter le titre. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté.

Alors, votre motion de...

M. Gautrin: Pour qu'on renumérote les articles du projet de loi.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté.

Donc, la commission plénière ayant accompli son mandat, je mets fin à ses travaux. Je remercie ceux et celles qui ont participé à faciliter notre séance.

Et je suspends les travaux quelques instants, et je prie donc les personnes de l'extérieur de quitter l'Assemblée pour nous permettre de poursuivre nos travaux.

(Suspension de la séance à 16 h 1)

 

(Reprise à 16 h 2)

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, allez-y, M. le député.

M. Dufour (président de la commission plénière): Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 390, Loi proclamant le Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens (l'Holodomor), et qu'elle l'a adopté avec des amendements.

Mise aux voix du rapport de la commission

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député. Alors, ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gautrin: Je vous remercie, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Chambre pour déroger à l'article 230 du règlement et nous permettre d'adopter maintenant, en version finale, le projet de loi tel qu'il a été amendé.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): La prise en considération avant, oui, hein? Donc, le rapport a été adopté, et nous sommes rendus à l'étape de l'adoption du projet, l'adoption finale, et j'ai besoin, effectivement... Mme la députée de Rosemont, qui propose l'adoption du projet de loi n° 390, Loi proclamant le Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens (l'Holodomor).

Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 230 du règlement prévoyant que l'adoption d'un projet de loi doit avoir lieu à une séance distincte de celle de l'adoption du rapport de la commission plénière? Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix: Consentement.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Il y a consentement.

Adoption

Donc, y a-t-il des interventions à cette étape-ci de l'adoption finale? Nous sommes à l'adoption finale. Mme la députée de Rosemont.

Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, Mme la Présidente. Je serai très brève. Je veux tout simplement, en terminant, remercier d'abord tous mes collègues parce qu'ils ont été très patients. Ça fait plusieurs mois que ce projet de loi m'occupe et me préoccupe. Dans un premier temps, il a été déposé, donc, il y a plusieurs mois. La représentante de la communauté ukrainienne québécoise était là à ce moment-là aussi, et il y a eu, donc, beaucoup de travail qui a été fait depuis ce temps. Donc, je veux les remercier vraiment de leur patience, particulièrement, donc, la whip, le whip adjoint, le leader de l'opposition, la chef de l'opposition officielle, parce que c'est sûrement avec, évidemment, beaucoup d'émotion aujourd'hui que ce projet de loi sera adopté, en tout cas de notre côté de la Chambre, étant donné qu'il est quand même assez rare, je crois, Mme la Présidente, qu'un projet de loi, donc, de l'opposition, comme ça, on réussit ensemble, unanimement, à cheminer et à faire en sorte qu'on arrive à la séance d'aujourd'hui en mesure d'adopter ce projet de loi.

Je remercie le chef de la deuxième opposition et je remercie, bien sûr, particulièrement le ministre des Relations internationales ainsi que son cabinet. Il me permettra de nommer Catherine Maurice -- il sait que je l'aime beaucoup, que je l'apprécie beaucoup -- ainsi que Marc-André Beaulieu, du cabinet de la chef de l'opposition officielle.

Ça a été un travail d'équipe, et je pense que, pour, en effet, notre présence sur la scène internationale, d'adopter ce type de projet de loi, le député de Chauveau l'a fait remarquer tout à l'heure, c'est notre inscription dans le monde aussi, bien évidemment. Mais, pour nos concitoyens d'origine ukrainienne, c'était extrêmement important que ce projet de loi soit adopté aujourd'hui.

Je veux aussi remercier, bien évidemment, mon bureau de circonscription, et donc Véronique Bergeron et Jean-Pierre Sylvain, et ma jeune stagiaire Jean-Charles-Bonenfant, qui est formidable, Laurence Fouquette-L'Anglais. Alors, je remercie tout le monde et puis je crois que nous venons de poser un beau geste, c'est une belle action. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Rosemont. Je cède la parole à M. le ministre des Relations internationales et de la Francophonie.

M. Pierre Arcand

M. Arcand: Merci, Mme la Présidente. Je veux, moi aussi, prendre seulement quelques instants pour vous dire que nous sommes toujours... au niveau des relations internationales, nous tentons toujours, nous, du Québec, d'être à l'avant-garde et de ne pas être en reste avec les autres sur le plan économique, par exemple, sur le plan social.

Je pense que ce que nous avons adopté aujourd'hui était un projet de loi qui faisait en sorte que nous nous unissons à une grande famille internationale et que le Québec réussit aujourd'hui à faire entendre sa voix à celle d'autres États justement pour exprimer cette solidarité à l'endroit d'un peuple qui a toujours été un peuple absolument extraordinaire pour le Québec et qui a toujours été un peuple qui fait partie de ces peuples qui font en sorte que le Québec est toujours plus fort. Alors, encore une fois, je pense que nous sommes très heureux de la rédaction finale de ce projet de loi et de son acceptation.

Je remercie la députée de Rosemont parce que nos discussions se sont faites avec énormément de diplomatie, ce qui est toujours le cas lorsque les relations internationales doivent être impliquées. Et je remercie également toute l'équipe du ministère des Relations internationales et de mon cabinet qui ont travaillé à la négociation et à la rédaction de ce projet de loi. Et, encore une fois, merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. le ministre. Y a-t-il d'autres interventions?

Alors, le projet de loi n° 390, Loi proclamant le Jour commémoratif de la famine et du génocide ukrainiens (l'Holodomor), est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Bravo! Oui, M. le whip adjoint de l'opposition officielle.

M. Dufour: ...le vote par appel nominal, s'il vous plaît.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): ...

M. Gautrin: Mme la Présidente, dans ces conditions-là, je vais me prévaloir de la possibilité de reporter ce vote demain, après la période des affaires courantes.

Vote reporté

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Alors, le vote est reporté à demain. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gautrin: Mme la Présidente, il me reste encore un petit projet de loi et... Attendez un instant que je retrouve... Article 22 du feuilleton, s'il vous plaît.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Parce qu'on n'a pas fini, là. Le projet de loi est terminé, adopté, félicitations, mais on va revenir au menu. À l'article 22 du feuilleton, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 83, Loi encadrant l'obligation faite à l'État de financer certains services juridiques. Y a-t-il des interventions? Mme la ministre de la Justice.

Projet de loi n° 83

Adoption

Mme Kathleen Weil

Mme Weil: Oui. Merci, Mme la Présidente. Merci. C'est avec fierté que je propose aujourd'hui l'adoption du projet de loi n° 83, la Loi concernant l'obligation faite à l'État de financer certains services juridiques.

Ce projet a pour objet de modifier la Loi sur l'aide juridique afin d'uniformiser le processus par lequel l'État paie les avocats représentant des accusés impliqués dans certains procès longs et complexes ou des accusés bénéficiant d'une ordonnance rendue en vertu du Code criminel. Ce projet de loi permettra de mieux encadrer les services juridiques fournis à ces accusés.

**(16 h 10)**

Rappelons qu'actuellement les tribunaux, se fondant sur l'article 7 et, le cas échéant, l'article 11d de la Charte canadienne des droits et libertés, ordonnent à l'État de rémunérer l'avocat d'un accusé financièrement admissible ou non à l'aide juridique en vue de lui assurer un procès équitable. L'État a donc l'obligation de respecter de telles ordonnances. Ces ordonnances sont rendues dans le cadre de causes longues et complexes de nature criminelle ou pénale, surtout dans le cadre de mégaprocès. Par ailleurs, à titre de Procureur général, je dois également me conformer aux ordonnances judiciaires imposant à l'État le paiement des honoraires et débours des avocats désignés par la cour en vertu de certaines dispositions du Code criminel. Ainsi, Mme la Présidente, afin de permettre un meilleur contrôle des coûts assumés par les contribuables dans ces affaires particulières, le projet de loi prévoit de confier à la Commission des services juridiques et aux centres régionaux la responsabilité de gérer la prestation de services juridiques à la fois pour les personnes admissibles à l'aide juridique et celles qui ne le sont pas. Parmi les outils mis à la disposition de la Commission des services juridiques se trouve la possibilité de recourir aux services d'un groupe élargi d'avocats disposés à agir dans les dossiers, ce qui faciliterait la représentation d'un accusé. De plus, un tarif d'honoraires adapté à ce type d'affaire serait offert aux avocats afin de répondre mieux aux particularités rencontrées dans le type de dossier visé.

Comme vous pouvez le constater, Mme la Présidente, le projet de loi prévoit des règles visant à s'assurer que l'État puisse rencontrer les obligations qui lui incombent en vertu de la Constitution canadienne et du Code criminel. Notons que le Québec innove, puisqu'il est le premier au Canada à intervenir législativement afin d'encadrer ainsi ces obligations faites à l'État.

Mme la Présidente, le 23 mars dernier, nous avons procédé à l'audition de divers groupes et organismes invités à nous présenter leurs observations à l'occasion de consultations publiques. Je remercie encore les divers intervenants qui ont participé aux consultations publiques, soit le Barreau du Québec, l'Association québécoise Plaidoyer-Victimes, l'Association québécoise des avocats et avocates de la défense, la Commission des services juridiques et l'Association des avocats et avocates de province.

À la suite des ces consultations publiques, la Commission des institutions a entamé l'étude détaillée du projet de loi, laquelle s'est terminée le 11 mai dernier. Je remercie d'ailleurs les membres de cette commission de leur grande collaboration, dont ma collègue de l'opposition officielle pour ses commentaires qui, comme nous le verrons, ont contribué à bonifier le projet de loi.

Ainsi, si le projet présenté a reçu un accueil favorable dans ses grandes lignes, quelques amendements y ont été apportés. En plus de modifications de forme et de concordance, les amendements proposés portent notamment sur le titre de la loi, que le projet modifie, lequel deviendrait Loi sur l'aide juridique et la prestation de certains autres services juridiques, afin de bien distinguer le régime d'aide juridique des autres services juridiques visés par le projet de loi.

Ensuite, un amendement vient préciser que, dans les cas où une personne n'a pas fait le choix particulier d'un avocat ou que ce dernier refuse de fournir ses services au tarif offert et que le directeur du centre régional où doit se dérouler le procès ne peut offrir les services d'un avocat, il reviendra alors à la Commission des services juridiques de procurer les services d'un avocat à la personne qui y a droit, qu'elle soit admissible ou non à l'aide juridique. À cette fin, le projet permet à un nombre élargi d'avocats d'agir dans ce type de dossier, soit les avocats salariés du centre régional du lieu du procès et les avocats de la pratique privée de la région concernée qui acceptent d'être rémunérés au tarif indiqué, mais également les avocats salariés de tous les autres centres régionaux, les avocats salariés recrutés par la commission et les avocats de la pratique privée de toutes les régions du Québec.

À la suite des travaux de la Commission des institutions, un amendement a été apporté afin de préciser que la Commission des services juridiques peut exceptionnellement conclure un contrat de services professionnels avec un avocat lorsque l'expertise particulière de cet avocat est requise pour permettre à la commission de s'acquitter de son obligation de fournir un avocat à une personne ou si la conclusion de ce contrat permet d'assurer une gestion efficace des services et des ressources.

Un autre amendement vient préciser le pouvoir réglementaire du gouvernement en établissant clairement que la reddition de comptes est la norme.

Finalement, des règles particulières entourant la prise d'effet d'un tarif d'honoraires dans le cadre de la loi ont été précisées, et, dans le cas où, faute d'entente, un règlement devrait être édicté par la ministre, avec l'approbation du Conseil du trésor, les règles habituelles de la Loi sur les règlements seront applicables.

Il est à noter que le tarif des avocats pour des services rendus en vertu du chapitre III de la loi, actuellement en négociation et qui fera, le cas échéant, l'objet d'une entente conclue entre la ministre de la Justice et le Barreau du Québec, prendra effet le jour de sa publication à la Gazette officielle du Québec. Cette négociation permet à la majorité des personnes directement concernées de connaître la portée de ce tarif et de faire leurs commentaires en temps opportun par l'entremise du Barreau. Cette entente sera rendue publique peu après sa conclusion. Les citoyens seront dès lors informés de son contenu, il ne s'agit pas d'une entente secrète.

S'il devait s'avérer que la ministre de la Justice et le Barreau du Québec ne parviennent pas à s'entendre sur le contenu de ce tarif, la ministre de la Justice pourra imposer un tarif par règlement, et les dispositions de la Loi sur les règlements s'appliqueront. Ce n'est que pour une période transitoire, soit pour l'établissement du premier tarif des avocats et pour l'édiction des quatre premiers règlements de mise en oeuvre des nouvelles mesures, à condition qu'ils soient adoptés en 2010, que l'application de certaines dispositions de la Loi sur les règlements est écartée. Une telle dérogation est nécessaire afin d'assurer une application rapide, cohérente et concomitante des nouvelles mesures.

En terminant, Mme la Présidente, je tiens à rappeler que l'objectif premier du projet est d'encadrer et de resserrer les coûts et la gestion de services juridiques que l'État est obligé de défrayer en vertu de la Constitution canadienne ou du Code criminel. Le projet de loi n° 83 permet d'outiller le gouvernement et la Commission des services juridiques à cette fin. Je vous remercie de votre attention.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, Mme la ministre de la Justice. Je reconnais maintenant Mme la députée de Joliette, porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice. Mme la députée.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon: Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis heureuse d'intervenir à mon tour à l'étape ultime de l'adoption de ce projet de loi n° 83 sur lequel, je crois, nous avons très bien travaillé de nombreuses heures en commission parlementaire mais qui ont eu pour effet, je pense, de bonifier le projet de loi et d'y apporter des clarifications et des améliorations, comme la ministre l'a mentionné. La ministre a d'ailleurs fait un tour, je pense, assez complet des objectifs et du contenu du projet de loi.

Pour ma part, on a voté, jusqu'à ce jour, en faveur de ce projet de loi là parce qu'on pense qu'il vient remplir un rôle, je dirais, de plus grande efficacité, prévisibilité et d'encadrement accru du processus pour doter un accusé au criminel d'un avocat quand on est face à des situations exceptionnelles de causes, donc, longues et complexes, la situation d'un accusé qui, en temps normal, n'aurait pas droit aux services d'aide juridique parce qu'il n'est soit pas admissible financièrement ou qui y aurait droit, mais pour un tarif avec lequel il aurait de la difficulté à se trouver un avocat. Donc, on vient permettre une souplesse, mais on vient permettre cette souplesse-là, en fait, à la suite de décisions des tribunaux en vertu, là, du droit qui est reconnu à un procès juste et équitable pour les accusés, donc, dans le domaine du droit criminel.

Donc, je vous dirais qu'on est vraiment face à un cas où la séparation des pouvoirs entre l'exécutif, le législatif et le judiciaire est très bien illustrée, et avec les réalités que ça comporte. Et, donc, le judiciaire ayant décidé que, dans certaines circonstances, le droit à l'avocat devait être assumé par l'État, même si la personne n'était pas admissible à l'aide juridique, on s'est retrouvé face à une situation où, donc, la ministre de la Justice a décidé d'agir, et aujourd'hui, comme législateurs, on est en train, donc, d'adopter ce projet de loi là.

**(16 h 20)**

Donc, sur le principe, on pense que c'est une bonne chose. Ça devrait aussi permettre, donc, de bien encadrer les coûts. Parce qu'il y a des coûts importants qui vont découler de ce projet de loi là, je pense que c'est important de le souligner. À ce jour, à cause des procès longs et complexes et de cette obligation qui est faite à l'État de fournir les services d'un avocat dans certaines circonstances, c'est plusieurs millions de dollars qui ont été engagés comme frais. Donc, on espère une meilleure prévisibilité de ces dépenses-là et un meilleur encadrement pour l'État.

Il y a deux commentaires que j'ai faits à plus d'une reprise dans le cadre de l'étude de ce projet de loi là. C'est toute la question que je pense qu'il faut mettre ce changement-là en perspective et envoyer clairement à la population un signal que c'est compte tenu des obligations constitutionnelles qui sont faites à l'État que l'on vient aujourd'hui prévoir que les services d'avocats, dans des circonstances exceptionnelles, vont être assumés par l'État pour des accusés. Parce qu'on sait que beaucoup de gens n'ont pas accès à la justice en matière civile, en matière familiale, en matière administrative, c'est un problème fondamental à l'heure actuelle. Il y a une désaffection des gens à l'égard du système de justice et des tribunaux parce que tout simplement, à moins qu'ils soient très pauvres et donc admissibles à l'aide juridique, la classe moyenne et même la basse classe moyenne n'a tout simplement pas accès, dans bien des cas, aux services d'un avocat et doit donc abandonner des recours ou diminuer substantiellement les montants en somme pour aller à la Cour des petites créances.

Donc ça, c'est un problème important. Et on a attiré, évidemment, l'attention de la ministre à ce sujet-là, et on a espoir qu'elle en prenne pleinement compte et qu'elle aussi admette à quel point c'est un problème important et envoie un signal clair à la population, qui peut ressentir une certaine frustration, évidemment, si on n'explique pas bien les choses, à savoir qu'en matière de droit criminel les accusés ont des services qui, en matière civile, évidemment, sont difficilement accessibles.

Par ailleurs, on a eu un témoignage éloquent, lors des consultations particulières, de l'Association Plaidoyer-Victimes qui, évidemment, demandait que les droits des victimes soient aussi bien pris en compte par le gouvernement, par la ministre de la Justice. Parce que, oui, les accusés ont des droits constitutionnels, et ça va de soi, mais les victimes aimeraient aussi être davantage reconnues dans notre système de justice, être davantage soutenues, pas uniquement financièrement, mais en termes de services, et d'accompagnement, et de compréhension de la nature de leurs difficultés et des droits qu'ils devraient avoir quand elles doivent cheminer dans le système de justice. La ministre a pris l'engagement de regarder cette situation-là avec attention. Donc, on va être intéressés à voir les solutions et ce qu'elle pourra proposer aux victimes du Québec.

Donc, oui, on a très bien travaillé, mais, en terminant -- la ministre y a fait allusion dans ses remarques -- il y a eu une pierre d'achoppement qui a fait en sorte qu'on a quand même, je pense, travaillé... On a voulu travailler pour le bien supérieur de cette législation-là et on a fait progresser les choses, mais on doit déplorer le fait que la ministre se soustrait à la Loi sur les règlements, qui, je dois le répéter aujourd'hui encore, relève d'elle et de l'application de la ministre de la Justice. Et franchement on aurait souhaité qu'elle se soumette à la Loi sur les règlements parce qu'il n'y a pas d'urgence, il n'y a pas de circonstances exceptionnelles qui font en sorte que la ministre devrait s'y soustraire.

Et c'est donc quatre règlements et le tarif qui va être négocié, mais qui aussi risque d'aboutir à un règlement s'il n'y a pas de dénouement heureux de la négociation en ce qui a trait au tarif, donc, qui va devoir être mis de l'avant pour la rémunération des avocats dans ces procès longs et complexes. Donc, on trouve ça bien malheureux que, pour tous ces règlements, ces premiers règlements... Parce que la ministre insiste pour dire qu'ultérieurement les autres règlements vont être assujettis à la loi, sauf qu'évidemment on comprend que ce sont les premiers règlements qui viennent vraiment poser l'armature, au même titre où c'est le premier tarif qui vient vraiment mettre en place toutes les balises, tout l'encadrement. Donc, c'est un peu une vue de l'esprit de dire que, par la suite, ils vont être assujettis à la loi ou ils vont l'être, mais tout le corps du système réglementaire va être mis en place en se soustrayant aux obligations de prépublication.

Alors, on estime que c'est très regrettable pour le rôle de législateur parce qu'on sait que le pouvoir réglementaire du gouvernement est important, il y a des balises qui sont expressément prévues dans la Loi sur les règlements pour qu'il y ait contrepoids, pour que les citoyens et les élus, à l'occasion, puissent se prononcer. Et donc on estime que c'est quelque chose qui est tout à fait regrettable, et on espère sincèrement que ce n'est pas une nouvelle habitude que gouvernement va prendre, de se soustraire à cette loi-là, parce que c'est inquiétant, tout simplement, pour le respect de nos institutions, et, nous, dans l'opposition, évidemment on doit défendre cette loi et l'application du processus correct en toutes circonstances.

Mais, ceci étant dit, pour le principe du projet de loi et, je pense, l'encadrement général qu'il fournit, le nouveau rôle qu'il donne à la Commission des services juridiques, qui, je pense, est la bonne instance pour assumer ce rôle-là, nous adoptons ce projet de loi et nous allons voter en faveur du projet de loi.

Et, en terminant, je tiens à remercier la ministre pour l'écoute qu'elle a eue, du moins à certains égards, certains amendements. Malheureusement, vers la fin, avec toutes les questions réglementaires, ça a été moins facile, mais on a quand même réussi à faire adopter certains amendements. Et on remercie toute l'équipe qui l'accompagnait, des légistes fort compétents qui ont siégé de nombreuses heures, de nombreuses journées en commission avec nous, et au personnel de la Commission des services juridiques. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Joliette. Y a-t-il d'autres interventions?

Mise aux voix

Alors, le projet de loi n° 83, Loi encadrant l'obligation faite à l'État de financer certains services juridiques, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. M. le leader du gouvernement.

Ajournement

M. Gautrin: Mme la Présidente, étant donné que de nombreuses commissions siègent à l'heure actuelle, pour le projet de loi n° 48, le projet de loi n° 102, le projet de loi n° 100, le projet de loi n° 57, je fais motion pour ajourner nos travaux au 5... au 3 juin 2010, à 9 h 45. J'allais dire le 5, mais c'est le 3.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté.

Donc, j'ajourne nos travaux au jeudi 3 juin 2010, à 9 h 45. Bonne soirée.

(Fin de la séance à 16 h 27)