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Whip

Définition

Député désigné par le chef d'un groupe parlementaire pour assurer la cohésion et l'assiduité au sein de ce groupe.

Ce terme est utilisé pour la première fois en 1769 en Grande-Bretagne par Edmund Burke, parlementaire et penseur politique anglo-irlandais. En effet, dans la chasse à courre, l'expression whipper-in désigne la personne qui, à l'aide d'un fouet, empêche la meute de se disperser.

Rôle du whip

Le whip est le gardien de la discipline de parti. Il doit notamment s'assurer qu'un nombre suffisant de députés est présent en Chambre et aux travaux des commissions, en particulier au moment d'un vote. Le whip répartit les tâches et les services de soutien aux députés. Il se prononce quant au choix des députés qui seront membres des délégations dans le cadre des relations interparlementaires.

Au Québec, le whip en chef du gouvernement assiste aux réunions du Conseil exécutif depuis 1994 sans toutefois être ministre. Il doit en particulier assurer la solidarité parlementaire des députés à l'égard des principales mesures soumises par le gouvernement.

Les whips sont membres d'office de la Commission de l'Assemblée nationale, ainsi que de la sous-commission de la réforme parlementaire.

Le groupe parlementaire formant le gouvernement et celui de l'opposition officielle ont chacun droit, en plus de leur whip en chef, à un whip adjoint si leur groupe respectif compte 40 députés ou plus. S'il compte 60 députés ou plus, deux whips adjoints peuvent assister le whip en chef1.

Historique

Au Québec, la fonction de whip existe depuis le XIXe siècle. Il faut attendre 1967 pour que la Loi de Législature2 soit modifiée afin que cette fonction soit rémunérée. René Lavoie et Pierre Laporte, respectivement whip du gouvernement et de l'opposition, sont les premiers à recevoir une indemnité. Ils occupaient leurs fonctions depuis 1966. Laporte s'acquittait à la même époque des responsabilités de leader parlementaire de l'opposition officielle. Une indemnité est aussi allouée aux whips des autres partis depuis les modifications apportées à la Loi de la Législature en 19713.

Diverses tentatives pour franciser le mot « whip » ont donné ces désignations : « chef de file », « rabatteur », « serre rang » ou même « cravacheur », termes qui ne se sont jamais imposés.

Au Royaume-Uni

En Grande-Bretagne, le terme « whip », qui signifie fouet en français, est utilisé en Chambre pour la première fois en mai 1769 par Edmund Burke, parlementaire et penseur politique anglo-irlandais. En effet, dans la chasse à courre, l'expression whipper-in désigne la personne dont l'une des tâches est d'empêcher, à l'aide d'un fouet, la meute de se disperser4.

Quant à la fonction elle-même, ses origines remontent au XVIe siècle avec le Parliamentary Secretary to the Treasury. D'abord simple secrétaire particulier du lord grand trésorier (Lord High Treasurer), ce fonctionnaire prend du galon après la Restauration anglaise (1660) en ajoutant notamment à ses fonctions administratives celle de parlementaire5.

À partir de 1711, deux sous-secrétaires d'État à la Trésorerie (Joint Secretaries to the Treasury) exercent ensemble trois grands rôles : ceux du Financial Secretary, qui chapeaute à la fois l'administration interne de la Trésorerie et la gestion des questions commerciales et budgétaires du gouvernement, et celui de secrétaire parlementaire, aussi appelé « secrétaire du patronage », dont l'action se concentre davantage en Chambre6.

Plusieurs auteurs font de John Robinson (1727-1802) et de Grey Cooper (vers 1726-1801) les archétypes des premiers whips. Ils sont à la fois députés et sous-secrétaires d'État à la Trésorerie au service de Frederick North qui, de 1770 à 1782, est premier lord de la Trésorerie et dirige par le fait même le gouvernement7.

L'importance de la Trésorerie vaut à Robinson et Cooper une autorité très étendue au sein de l'Administration britannique. Les racines de la fonction de whip aux Communes reposent donc, à l'origine, sur les hautes responsabilités des fonctionnaires que sont les sous-secrétaires d'État à la Trésorerie. Il n'y a alors aucune séparation entre les fonctions parlementaires et l'exercice d'une charge publique.

Robinson, en tant que Financial Secretary et bras droit de North, est absorbé par la gestion administrative des grandes orientations de la politique extérieure et commerciale britannique : approvisionnement des troupes en Amérique durant la guerre d'Indépendance, mesures en réaction à la crise commerciale de l'Irlande, etc.8. Ces tâches administratives font du Financial Secretary « one of the most essential functionnaries of the executive government » en s'assurant que l'Administration travaille dans l'intérêt de ce dernier9.

Au Parlement, Robinson est un député dont le rôle n'est effacé qu'en apparence. Il prépare de nombreuses lois relatives à la Trésorerie et connaît à fond les politiques du gouvernement, ce qui le rend essentiel à North. Robinson développe une très bonne connaissance de la composition de la Chambre grâce à la tenue de registres sur les votes et sur l'allégeance des parlementaires. Ces données stratégiques permettent d'assurer des majorités au gouvernement grâce à un autre rôle prépondérant du secrétaire parlementaire : la distribution du patronage10. North délègue ce rôle à Robinson qui, lui, utilise systématiquement ces multiples canaux souterrains pour amener les membres à voter tel « a flock of sheep »11. Si bien que lui et Cooper, bon orateur et maître des tactiques parlementaires, font du « parliamentary management an art », selon l'historienne Dora Mae Clark12.

Ces multiples fonctions aux contours flous et la lourdeur de la charge qui en découle rendent nécessaire une réforme. En 1805, la fonction de Permanent Secretary est créée. Elle place un fonctionnaire inéligible au Parlement à la tête du secrétariat du Trésor en tant que responsable des affaires administratives. Cette séparation du politique permet aux deux sous-secrétaires d'État à la Trésorerie de se concentrer désormais à leur rôle de Financial Secretary auprès du chancelier de l'Échiquier, ainsi qu'à celui de bras droit du premier lord de la Trésorerie quant aux questions de patronage et de gestion de la Chambre des communes13.

Ce dernier rôle mène à l'apparition de la fonction de whip et de la notion de discipline de parti au milieu du XIXe siècle, et ce, tant au sein du gouvernement que de l'opposition. Aujourd'hui encore, le secrétaire parlementaire senior est le whip en chef du gouvernement. Lui et ses adjoints ont la responsabilité de s'assurer que les membres sont présents pour les votes, de vérifier qu'ils votent conformément à l'orientation de leur parti, d'organiser leur pairage et de préparer le « whip », un document pour informer les députés des travaux de la semaine. Une autre tâche généralement attribuée aux whips est de compter les votes s'il y a « division »14 :

When a vote is held, the Speaker in the Commons - or Lord Speaker in the Lords - asks Members to call out whether they agree or not. The Speaker will then judge whether is a clear result. If this cannot be determined, the Speaker calls a division by announcing "clear the lobbies" (in the Commons) or "clear the bar" (in the Lords). [...]

During a division, Members literally divide into two separate areas. These are called the Aye and No lobbies in the Commons and the Contents and Not Contents lobbies in the Lords. As they pass through the lobbies, the Members have their names recorded by clerks and are counted by tellers15. Once the lobbies are empty the Speaker (Commons) or the Lord Speaker (Lords) announces the result of the division16.

Enfin, le whip du gouvernement porte un autre titre, celui de Parliamentary Secretary to the Treasury, qui fait de lui un ministre sans portefeuille siégeant au Cabinet17. Le whip joue donc un rôle de liaison crucial entre la direction du parti et les parlementaires18. Les whips des partis d'opposition travaillent, quant à eux, de concert avec le leader du gouvernement pour l'organisation des travaux parlementaires.

Au Canada

Au Canada, James E. Walker, whip en chef du gouvernement (1963-1966), estime que cette fonction « rend possible le fonctionnement du gouvernement, et sans lui vous auriez un "chaos" politique. Le Whip est le chef de police du Parti »19. Walker compare aussi le rôle du whip à celui de garde du corps puisque, en Chambre, il s'assoit derrière le premier ministre.

Les fonctions du whip sont d'assurer la discipline et d'assister le leader parlementaire en s'occupant de certains points administratifs. Il doit, par exemple, organiser les comités, assigner les bureaux aux députés au parlement et les pupitres en Chambre. Il doit aussi vérifier si le quorum en Chambre et dans les comités est respecté. Quand la cloche sonne pour la tenue d'un vote, il veille à ce que les députés soient présents20.

Les whips se rendent alors dans leurs antichambres respectives pour attendre leurs députés. Lorsqu'ils sont tous présents, « le whip en chef du gouvernement et le whip en chef de l'opposition se présentent à la porte de la Chambre des communes et se dirigent côte à côte par le centre vers leur fauteuil respectif21 », mettant ainsi fin à l'appel des députés. On peut alors passer au vote.

Les whips peuvent aussi prendre des dispositions afin de pairer deux députés. En effet, contrairement à l'Assemblée nationale du Québec, le pairage est toujours d'usage à la Chambre des communes. À la table, le greffier tient un registre des députés pairés « dans lequel tout député du parti ministériel et tout député d'un parti de l'opposition peuvent faire inscrire leur nom ensemble par leur whip respectif pour indiquer qu'ils ne participeront à aucun vote par appel nominal à la date inscrite sur cette page du registre22 ».

Au Sénat canadien, les partis représentés ont également leur whip.

Aux États-Unis

Aux États-Unis, le premier whip en fonction est le démocrate James Hamilton Lewis, choisi en 1913. Les républicains en nomment un deux ans plus tard23. Dans ce régime présidentiel, le travail des whips est plus complexe que celui de leurs homologues évoluant dans le parlementarisme de type britannique.

Le régime présidentiel ne repose pas sur la responsabilité ministérielle, mais bien sur la division des pouvoirs exécutif et législatif, offrant plus de liberté aux représentants du peuple. En effet, la discipline de parti est beaucoup moins forte à la Chambre des représentants et au Sénat américains. Par conséquent, les whips doivent « veiller à bâtir des majorités qui appuieront telle ou telle mesure législative favorisée par la direction du parti24 ».

Pour citer cet article

« Whip », Encyclopédie du parlementarisme québécois, Assemblée nationale du Québec, 14 novembre 2023.

Faites-nous part de vos commentaires à : encyclopedie@assnat.qc.ca

Pour en savoir plus

Clark, Dora Mae. « The Office of Secretary to the Treasury in the Eighteenth Century », The American Historical Review, vol. 42, no 1, octobre 1936, p. 22-45.

Peters, Siegfried (dir.). La procédure parlementaire du Québec, 4e éd., Québec, Assemblée nationale, 2021, p. 279.

Notes

1 

En vertu du paragraphe 11 de l'article 7 de la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale, le gouvernement et l'opposition officielle ont droit à un nombre de whips adjoints égal aux multiples de vingt députés en sus de vingt, les fractions de vingt n'étant pas comptées.

2 

Loi modifiant la Loi de la Législature, L.Q. 1967, c. 15, art. 5.

3 

Loi modifiant la Loi de la Législature, L.Q. 1971, c. 9, art. 15. Par ailleurs, durant la 39e législature, une modification temporaire à la Loi sur les conditions de travail des membres de l'Assemblée nationale ne prévoyait aucune indemnité pour le whip d'un tel parti (L.Q. c. 3, art. 1).

4 

Courtenay Ilbert et Cecil Carr, Parliament. Its History, Constitution, and Practice, Londres, Oxford University Press, 1960, p. 135; Walter J. Oleszek, « Whips », dans Donald C. Bacon et al., The Encyclopedia of the United States Congress, vol. 4, New York, Simon & Schuster, p. 2126.

5 

Jennifer Walpole et Richard Kelly, « The Whip's Office », Londres, Bibliothèque de la Chambre des communes, 10 octobre 2008, p. 2. www.parliament.uk

6 

Ils quittent leur fonction au départ du lord de la Trésorerie ou advenant un changement de gouvernement. Alpheus Todd, On Parliamentary Government in England : Its Origin, Development, and Practical Operation, vol. 2, 2e éd., Londres, Longmans, Green and Co., 1889, p. 555. Pour bien les situer, mentionnons que la responsabilité du lord grand trésorier est partagée par cinq lords qui, légalement, ont des pouvoirs égaux : le premier lord de la Trésorerie, le chancelier de l'Échiquier et trois junior lords, qui représentent l'Angleterre, l'Écosse et l'Irlande. Les sous-secrétaires d'État à la Trésorerie sont subordonnés au premier lord de la Trésorerie. Bien qu'ils soient membres du gouvernement, ils ne font cependant pas partie du Cabinet. Pour en savoir plus sur cette distinction, voir Frederic William Maitland, The Constitutional History of England, Cambridge, Cambridge University Press, 1908, p. 402-403. Sur le partage de la responsabilité du lord grand trésorier, voir p. 407-409.

7 

À cette époque, la fonction de premier ministre n'est pas encore bien établie. Celui que le roi choisit pour exercer la fonction de premier lord du Trésor devient en quelque sorte le chef du cabinet, ou chef du gouvernement, en raison de l'importance du Trésor. Sur l'émergence du premier ministre, voir la synthèse d'André Émond, Constitution du Royaume-Uni. Des origines à nos jours, Montréal, Wilson et Lafleur, 2009, p. 416-426.

8 

Ian R. Christie, Myth and Reality in Late-Eighteenth-Century British Politics : And Other Papers, Oakland, University of California Press, 1970, p. 151.

9 

Ibid., p. 151-154.

10 

Loc. cit.

11 

Moisey Ostrogorsky, Democracy and the Organization of Political Parties, vol. 1, Londres, Macmillan and Co., 1902, p. 139.

12 

D. M. Clark, op. cit., p. 39; Ian R. Christie, « Cooper, Grey (c. 1726-1801), of Worlington, Suff. », dans Lewis Namier et John Brooke (dir.), The History of Parliament. The House of Commons, 1754-1790, vol. 2, Londres, The History of Parliament Trust, 1964, p. 251.

13 

D. M. Clark, op. cit., p. 43-44.

14 

À Westminster, une division signifie que les membres des deux Chambres enregistrent leur vote en se rendant dans une pièce désignant le pour ou le contre. On utilise alors l'expression « dividing the House », tandis que les pièces sont surnommées « division lobbies », d'où l'utilisation du terme « division » pour parler du vote.

15 

Les « tellers » sont des membres de la Chambre. Il y en a quatre, deux provenant de chaque côté de la Chambre. Ce sont généralement les whips qui assument cette fonction.

16 

« Divisions », UK Parliamentary. http://www.parliament.uk/

17 

Norman Wilding et Philip Laundy, An Encyclopaedia of Parliament, 4e éd., Londres, Cassell, 1972, p. 786.

18 

L'état actuel de la recherche semble indiquer qu'il n'existe pas de réunions hebdomadaires des ministres avec les députés ministériels.

19 

James E. Walker, Les fonctions du whip au Canada, Ottawa, Bibliothèque du Parlement, 1972, p. 1.

20 

Ibid., p. 3.

21 

Jean-Pierre Gaboury et James Ross Hurley (éd.), Regards sur la Chambre des communes : mémoires des stagiaires parlementaires, Ottawa, Éditions de l'Université d'Ottawa, 1979, p. 281. (Travaux de recherches en sciences sociales; no 4).

22 

Règlement de la Chambre des communes, c. 6, art. 44.1, 2011.

23 

« Party Whips », U. S. Senate, 2013. http://www.senate.gov/

24 

J.-P. Gaboury et J. R. Hurley, op. cit., p. 279.