(Douze heures treize minutes)
Mme de Santis : Bonjour. Mme la
ministre de la Justice, mesdames messieurs, le 24 novembre dernier, la
Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie
de la construction, aussi appelée la commission Charbonneau, présentait ses
conclusions. Le premier ministre Philippe Couillard a immédiatement annoncé que
notre gouvernement se mettait à l'ouvrage pour mettre en oeuvre les
recommandations de la commission. Comme le mentionnait la juge Charbonneau, et
je cite : «...la création [...] de la commission et la collaboration des
très nombreuses personnes dont elle a pu profiter prouvent que le Québec est
prêt à faire ce qu'il faut pour protéger ses valeurs d'intégrité et d'intérêt
public.» Fin de citation.
Dès mon arrivée en poste, je me suis
entendue avec le Directeur général des élections du Québec pour qu'il convoque
son comité consultatif dans les plus brefs délais. Ce comité consultatif est
composé des représentants de chacun des partis présents à l'Assemblée
nationale, soit le Parti québécois, la Coalition avenir Québec, Québec
solidaire et évidemment le Parti libéral du Québec, en plus du Directeur
général des élections et des membres de son équipe. Le comité agit comme un
forum de discussion permettant d'échanger au sujet de divers changements à la
Loi électorale en vue d'arriver idéalement à l'unanimité, sinon à un consensus
permettant au gouvernement de déposer des projets de loi qui représentent la
volonté de tous les partis.
Mon collègue le député de Marie-Victorin
pourrait d'ailleurs témoigner qu'il a su bénéficier de ce forum d'échange
lorsqu'il a déposé la Loi modifiant la Loi électorale afin de réduire la limite
des contributions par électeur, de diminuer le plafond des dépenses électorales
et de rehausser le financement public des partis politiques du Québec. Ce
projet de loi a été déposé le 6 novembre 2012 et adopté par
l'Assemblée nationale un mois plus tard, le 7 décembre 2012. C'est donc
dire l'utilité des discussions du comité consultatif. Et je suis convaincue que
nos échanges auront été utiles pour le projet de loi que je dépose aujourd'hui.
En fait, je devrais probablement dire «que nous déposons aujourd'hui» puisque
nous avons atteint un consensus, sinon l'unanimité sur l'ensemble des
recommandations.
Maintenant, j'aimerais souligner quelques
modifications particulièrement significatives dans ce projet de loi. D'abord,
le projet de loi propose de faire passer le délai de prescription pénale de
cinq ans à sept ans, ce qui permettrait au Directeur général des élections
d'étendre ses vérifications et enquêtes à une plus longue période. Nous
proposons aussi d'allonger de cinq à sept ans le délai de conservation des
documents avec lesquels le DGE prépare une preuve hors de tout doute
raisonnable. Rappelez-vous, on parle ici d'infractions pénales.
Mes collègues de la Coalition avenir
Québec ont fait valoir dans les médias qu'il faut un délai plus long pour
permettre au DGE de récupérer davantage de contributions électorales qui
auraient été versées contrairement à la loi. En supprimant le troisième alinéa
de l'article 100 de la Loi électorale, qui porte sur les poursuites civiles,
nous permettons au DGE de récupérer les sommes lorsqu'il aura pu préparer une
preuve prépondérante dans ce cas-ci puisqu'il n'y aurait plus de prescription
pour le remboursement de ces sommes autre que le délai usuel du Code civil.
Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire
que, si, en 2016, le Directeur général des élections apprend qu'il y a eu, en
1992, une contribution illégale — alors, il l'apprend en 2016 — il
a jusqu'à 2019, de 2016 à 2019, pour demander à un parti politique pour faire
le remboursement de cette contribution illégale.
Nous allons ici au-delà des recommandations
de la commission Charbonneau et proposons de donner plus de pouvoirs au DGE que
le simple devoir moral qu'il aurait dû invoquer à la suite de vérifications et
enquêtes qu'il fait présentement à la demande des partis politiques et dont le
résultat sera connu l'automne prochain.
Nous allons aussi plus loin que les recommandations
en proposant d'exiger du Directeur général des élections le dépôt d'un rapport
annuel — et pas quinquennal — sur le financement politique.
Cela lui permettrait ainsi de réagir plus rapidement afin d'adapter nos lois et
nos règlements lorsque son analyse de la situation lui permettrait de soulever
des cas où il faudrait intervenir.
Nous proposons aussi que les bénévoles des
campagnes électorales s'engagent à ce que leur contribution en temps et talent ne
soit pas faite en espérant une contrepartie, et ce, même lorsqu'ils agissent
dans leur domaine d'expertise professionnelle. Cependant, contrairement à la
commission, nous ne proposons pas d'exiger aux partis de dévoiler le nom de ces
bénévoles puisque cela constituerait un frein à leur recrutement. Tous les
partis l'ont souligné, c'était unanime et c'était vraiment une proposition d'un
des partis de l'opposition quand on a commencé à parler de cette recommandation.
Et, tout le monde, on a compris qu'il faut s'assurer qu'on encourage le
bénévolat mais le bon bénévolat.
Enfin, nous croyons qu'un prêt ou un
cautionnement, si utile aux partis, spécialement les partis émergents, ne doit
pas devenir un don caché. Pour cette raison, nous proposons de fixer le plafond
pour un prêt ou un cautionnement d'un individu à un ou plusieurs partis à
25 000 $. Et ça aussi, le montant, ça a été une suggestion qui a été
faite par un des partis d'opposition avec lequel tout le monde s'est mis
d'accord. Donc, il y a l'unanimité.
Comme je le mentionnais plus tôt, le
comité consultatif, dans sa composition actuelle, est tout à fait indiqué pour
permettre un travail sain et efficace des partis et du DGE en vue de modifier
la Loi électorale. Pour cette raison, les quatre partis représentés ont joint
leur voix à celle du DGE, joint leur voix à celle du DGE pour ne pas déposer de
proposition qui modifierait la composition du comité, et ce, pour conserver les
élus à titre de membres. Et, dans tous les cas, tout le monde reconnaît que le
Directeur général des élections a tout le pouvoir de se constituer un comité
aviseur avec les experts qu'il choisit.
Enfin, je confirme que le Directeur
général des élections nous a demandé de réviser certains champs d'application
de ses pouvoirs de vérification et d'enquête. Mon secrétariat et les membres de
son équipe travaillent ensemble pour proposer ensuite des modifications
législatives qui seront présentées au comité consultatif. Ça, c'est une chose à
venir mais sur laquelle on travaille.
En terminant, je tiens à vous assurer que
ceci est le premier pas que je pose pour mettre en oeuvre les recommandations
de la commission Charbonneau mais pas le dernier. Le travail de collaboration
se poursuivra avec les partis d'opposition en matière d'éthique et aussi de
lobbyisme. Je suis particulièrement fière du travail de collaboration démontré
par le député de Marie-Victorin, M. Drainville, le député de Borduas, M.
Jolin-Barrette, et la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, Mme Manon Massé,
ainsi que les représentants de leurs partis respectifs. Je remercie évidemment
aussi mes collègues du Parti libéral du Québec qui m'ont accompagnée aux trois
rencontres. Ce fut un plaisir de voir toutes ces personnes rassemblées autour
d'un but commun : moderniser la Loi électorale et assainir le financement
politique.
Je souligne aussi l'étroite collaboration
du Directeur général des élections du Québec, qui a travaillé en ayant à coeur
que la loi que nous déposons lui donne des pouvoirs réels et qu'ainsi les
Québécois seront rassurés qu'il va aussi loin que possible dans ses
vérifications et enquêtes. Je souhaite maintenant que cette belle collégialité
nous anime pour poursuivre les travaux, tant en vue de l'adoption de la présente
loi que pour la préparation des autres projets de loi qui mettront en oeuvre
les recommandations de la commission Charbonneau. Merci beaucoup.
Mme Vallée
:
Simplement, je souhaitais boucler la boucle parce que cette semaine a été une
semaine où on s'est donné rendez-vous à tous les jours pour vous présenter des
réponses, donc, que chacun, chaque collègue, apportait aux recommandations de
la commission Charbonneau. Le projet de loi présenté ce matin par ma collègue
reflète encore une fois notre volonté de nous doter vraiment des moyens nécessaires
qui vont prévenir les situations qui peuvent altérer la confiance des Québécois
et des Québécoises à l'égard de nos institutions démocratiques. Alors,
troisième annonce en trois jours.
Première annonce, je le répète, je pense
qu'il est important de souligner le travail que notre collègue Martin Coiteux a
fait en déposant des amendements importants au projet de loi n° 83, qui
vise à resserrer les pratiques en matière d'octroi de contrats municipaux,
d'éthique, de transparence et de financement politique.
Hier, j'ai déposé le projet de loi
n° 98, qui permet de renforcer la gouvernance et l'éthique au sein des ordres
professionnels et permet également d'élargir les pouvoirs du Commissaire aux
plaintes concernant les mécanismes de reconnaissance des compétences
professionnelles.
Alors, les faits parlent d'eux-mêmes. Avec
les trois annonces de cette semaine, le gouvernement du Québec a donc donné
suite, à ce jour, à 24 des recommandations de la commission, en tout et en
partie. Puis je vous dis «en tout et en partie» parce que, vous verrez,
certaines des recommandations touchent plus d'un ministère. Alors, la recommandation
37?
Mme de Santis : Oui.
Mme Vallée
: L'une des
recommandations est la recommandation 37. Donc, aujourd'hui, Rita y donne
suite; lundi, Martin y donnait suite. Et, dans le cadre, par exemple, de la
recommandation n° 9, Rita y donne suite... Excusez-moi. Non, c'était
Martin qui y donnait suite, et moi aussi. Donc, partiellement, certaines
recommandations vont toucher jusqu'à cinq ministères. Alors, lorsque l'on vous
dit : On y touche en tout ou en partie, c'est parce que chaque ministère
répond aux recommandations qui le touchent directement et au moment où il est
en mesure de le faire.
Donc, tout ça pour vous dire que nous
sommes en action. On se donnera certainement rendez-vous d'ici les prochaines
semaines parce qu'il y a d'autres bonnes nouvelles et d'autres annonces qui
seront présentées et vous seront présentées.
Donc, sur ce, je vous remercie de
l'attention, je vous remercie de votre intérêt pour les suites à donner aux
travaux de la commission Charbonneau puis je vous souhaite un beau week-end
parce que c'est jeudi, et donc, pour nous, ici, à l'Assemblée, le week-end
débute bien qu'il sera chargé.
La Modératrice
: On va
prendre quelques questions. Je vous demanderais de commencer par le sujet du
jour, s'il vous plaît.
Mme Lajoie (Geneviève) : Mme
de Santis, est-ce qu'avec les mesures que vous annoncez aujourd'hui, les
vérifications qu'a entreprises le DGE sur les 20 dernières années, est-ce que
ça va l'aider dans ce travail-là, faciliter les choses?
Mme de Santis : Je crois que
ça devrait lui donner un cadre légal à l'intérieur duquel lui, il peut
travailler. Ça veut dire que ses enquêtes qu'il fait, il peut demander
légalement à un parti politique de faire des remboursements de contributions
illégales. Si on n'avait pas fait les modifications à l'article 100 de la Loi
électorale , ils n'auraient eu qu'une obligation morale... que les partis
auraient. Maintenant, les partis ont une obligation légale. Mais il faut
comprendre que la prescription, c'est la prescription qu'on retrouve dans le
Code civil du Québec et ça va être trois ans à partir de la connaissance.
Donc, si le Directeur général des
élections a appris quelque chose en décembre 2015, il a jusqu'à décembre 2018.
Mais, si lui, il savait quelque chose en 2011 et n'a rien fait depuis 2011,
cette prescription est acquise parce que, maintenant, c'est une prescription de
connaissance. Et ça lui donne beaucoup plus de facilité d'agir à l'intérieur
d'un cadre légal.
M. Lavallée (Hugo) : Mais
dans l'exemple que vous donnez, où, justement, il n'y a plus ce délai au-delà
duquel on ne peut plus exiger le remboursement, si les documents ne sont pas
conservés plus que sept ans — parce que les documents sont conservés
cinq ans, ce sera sept ans à partir de maintenant si le projet de loi est
adopté — comment le Directeur général des élections va-t-il faire
pour savoir quelle contribution va avoir été faite illégalement s'il ne peut
pas vérifier l'état de la documentation?
Mme de Santis : Ici, il faut
discuter c'est quoi, le fardeau de la preuve quand c'est une infraction pénale
et la procédure que le Directeur général des élections va utiliser, qui est
plutôt une action civile.
Le pénal, on a adopté la recommandation
qui a été faite par la commission Charbonneau. Le pénal, cette recommandation
touche les individus qui auraient pu faire des contributions illégales.
Vis-à-vis ces individus-là, on adopte la recommandation. Donc, c'est différent
que la demande qu'on va faire à un parti de rembourser ou de payer maintenant
au ministre des Finances des contributions illégales. Le fardeau de la preuve
ici, c'est la prépondérance de la preuve et ce n'est pas aussi «heavy» que dans
une situation pénale. Alors, c'est pour ça que la façon qu'on traite les deux,
c'est différent.
La ministre de la Justice pourra expliquer
ça encore mieux, mais c'est la différence dans ce qui est le fardeau de la
preuve pénale civile, O.K.? Et rappelez-vous que la recommandation de la commission
Charbonneau ne touchait pas du tout la demande de remboursement qui devait être
faite à un parti politique. La recommandation touchait uniquement ceux qui
avaient fait un don ou une contribution illégale.
M. Lavallée (Hugo) : Et donc,
la preuve, vous répondez à une demande de la CAQ, là, vous l'avez souligné, notamment.
Mme de Santis : Non, ce n'est
pas à sa demande qu'on répond, pas du tout. J'ai souligné le fait que leur
préoccupation était que le Directeur général des élections n'aurait pas les
moyens d'aller faire des demandes de remboursement pour des choses qui ont été
payées il y a 15 ans ou 20 ans.
Quand on a commencé à discuter cette question
de prescription, c'est le Directeur général des élections qui nous a guidés
dans les discussions, et, tout le monde ensemble, on était d'accord depuis
longtemps parce que M. le premier ministre avait déjà dit que le Parti
libéral du Québec serait prêt à repayer tout don illégal que le Directeur
général des élections pourrait demander. Donc, il y avait déjà toutes ces
discussions-là qui avaient eu lieu. Quand on s'est assis avec le Directeur
général des élections, on a remarqué qu'il y avait un article additionnel, dans
la loi, qui n'avait pas été touché par la commission Charbonneau mais qu'en
modifiant cet article-là on venait à procéder de la façon que le premier
ministre lui-même avait suggérée.
M. Lavallée (Hugo) : Mais là
où je voulais en venir, c'est que la CAQ vous demandait aussi de placer des
sommes d'argent en fidéicommis pour justement éventuellement repayer <à
des... >des demandes qui pourraient vous être présentées par le
Directeur général des élections. Avez-vous l'intention d'agréer cette
suggestion-là?
Mme de Santis : Je suis là
pour parler du projet de loi. Maintenant, ce que le parti va faire ou ne pas
faire, je ne peux pas, à ce moment-ci, répondre à cette question. Mais le
projet de loi prévoit que, si le directeur général demande un remboursement
pour des contributions illégales, il peut le faire à l'intérieur d'un cadre
légal. Et c'est possible qu'il y ait un autre argumentaire qui pourrait se
faire, je n'ai aucune idée, mais l'idée, c'est que ces contributions soient repayées
et pas repayées à celui qui a fait le don parce que ça, c'est une autre
modification qu'on apporte à la loi. Présentement, l'article 100 dit que
le montant est remis à celui qui a fait la contribution. Ça n'a aucun bon sens!
D'abord, si la personne a fait une contribution qui était illégale, pourquoi on
le lui repaie, ce montant? Et, deuxièmement, c'est possible qu'on ne peut pas
retrouver la personne qui a fait le paiement et que, si jamais il y avait eu
des prête-noms, etc., on ne sait même pas à qui remettre l'argent. Donc, ça a
du bon sens que cet argent-là soit payé au ministre des Finances. Je crois
qu'on répond, de cette façon-là, aux inquiétudes des Québécois.
M. Boivin (Simon) : Dans la recommandation
rejetée en ce qui a trait aux bénévoles, j'imagine que, derrière la recommandation
de la commission Charbonneau, il y avait l'idée qu'on fasse en sorte qu'il n'y
ait pas, disons, des retours d'ascenseur donnés par des politiciens à des gens
qui auraient aidé bénévolement à leur campagne.
Expliquez-moi en quoi, là, le fait de
divulguer le nom des bénévoles pourrait être un frein au recrutement de
bénévoles avec une expertise particulière. Et est-ce qu'on ne laisse pas, justement,
la porte ouverte, en les gardant anonymes, à des suspicions de retours
d'ascenseur?
Mme de Santis : Bien non. D'abord,
on a une nouvelle disposition, dans ce projet de loi, qui dit que le bénévolat
doit être un bon bénévolat. Il ne faut pas qu'il y ait des contreparties,
considérations, et ça doit être fait volontairement. Alors, même si tu as une
expertise, ces conditions s'appliquent. Pourquoi on n'a pas accepté la
recommandation? Et, en effet, ce n'était pas nous qui avons soulevé cette
question-là, c'était soulevé par un membre d'un parti en opposition qui a dit :
Vous savez, quand nous, on prépare nos plateformes électorales, par exemple, on
va rencontrer des professeurs des universités, des économistes, toutes sortes
de personnes qui aident dans notre réflexion. On ne paie pas pour, c'est des
bénévoles. Mais c'est les mêmes personnes qui, peut-être, font ça pour le Parti
libéral du Québec ou un autre parti. Ces gens-là ne veulent pas que,
nécessairement, on les associe avec un parti politique définitif, mais ils sont
prêts à travailler avec tous les partis parce qu'ils veulent le meilleur pour
le Québec et, en s'essayant avec les différents partis politiques, ils donnent
de leur expertise. Il n'y a rien qui revient en contrepartie. Mais la
disposition que le bénévolat doit être volontaire, sans contrepartie, sans
considération s'applique aussi aux bénévoles qui ont une certaine expertise.
Alors, nous croyons que cela devrait suffire.
Vous êtes jeune, je suis vieille. Je me
rappelle quand il y avait beaucoup, beaucoup plus de bénévoles dans les organismes
communautaires comme dans les partis politiques. Aujourd'hui, c'est plus
difficile à attirer des bénévoles à venir faire de la politique à l'intérieur
d'un parti, comme c'est difficile à avoir ces bénévoles aux organismes
communautaires. Alors, si on fait quelque chose qu'eux ne veulent pas faire — pourquoi
je dois m'associer avec le PLQ, ou avec le PQ, ou avec la CAQ, ou Québec
solidaire publiquement? — ils ne vont pas venir.
M. Croteau (Martin) : Mme de
Santis, si vous me permettez une question plus large et une plus pointue après,
de manière générale, comment est-ce que ce projet de loi que vous présentez aujourd'hui
va transformer la façon dont on fait de la politique au Québec?
Mme de Santis : Vous savez,
c'est depuis 2010 qu'on a adopté différentes lois qui font qu'aujourd'hui la
façon qu'on fait le financement politique ou on fait la politique est
différente. Et ça, c'est quelque chose qui évolue et ça va continuer à évoluer.
Ça ne s'arrête pas dans le temps.
Aujourd'hui, j'espère qu'en adoptant les
mesures qui sont là, particulièrement en ce qui touche l'article 100 de la Loi
électorale, nos citoyens vont devenir un petit peu moins cyniques vis-à-vis ce
qui est politique et vis-à-vis les élus. J'aimerais qu'on augmente la confiance
de la population dans les personnes qu'ils élisent au gouvernement. Moi, je
crois énormément dans la démocratie et j'aime le fait que je porte le titre de
responsable pour la révision des institutions démocratiques, je suis absolument
fière de ça.
Aussi, il y a des petites choses qu'on
apporte dans ce projet de loi dont on n'a pas parlé. La formation des agents
officiels, des représentants officiels est une obligation qui va être
obligatoire, et il faut que tu fasses cette formation à l'intérieur d'un délai
précis, O.K.? Alors, ça aussi, ça apporte une modification dans la façon
d'agir. Le fait que, maintenant, les rapports annuels et d'autres rapports vont
être signés par le chef du parti ou par les plus hauts responsables, ça aussi,
ça apporte des changements. Les gens vont devoir réfléchir. Le chef du parti va
devoir signer une déclaration qu'il a fait certaines choses. Ça, ça mène à la
réflexion. Je trouve que tout ça, c'est positif, et j'espère que vous le
trouvez aussi.
M. Croteau (Martin) : Une
question plus précise : Est-ce qu'en allongeant les délais de prescription
et en déplafonnant, finalement, le délai pour les infractions, pour le DGE en
tout cas, est-ce que ça nécessite l'ajout de ressources au DGE? Parce qu'on
pourrait prévoir qu'il devrait multiplier les enquêtes si, effectivement, il y
a des allégations qui font surface.
Mme de Santis : Le DGE a
commencé à faire des enquêtes il y a quelques mois. On met tout ça dans un
cadre légal qui lui permet légalement de demander un remboursement. Donc,
d'après les pourparlers que j'ai pu avoir avec le DGE, pour l'instant, son
effectif est suffisant pour qu'il fasse bien son travail. Dans l'avenir, on va
voir, O.K.?
M. Lavallée (Hugo) :
Concernant le plafonnement à 25 000 $ des prêts ou des cautionnements
qui peuvent être contractés, est-ce que ça s'applique aussi aux courses au
leadership?
Mme de Santis : Maintenant,
ça, c'est très précis, et je ne me souviens pas exactement. Je ne crois pas. Je
ne crois pas, mais il faudrait que je révise le projet et la loi existante pour
vous donner une réponse qui serait exacte. Je ne crois pas, O.K.?
La Modératrice
: On va
revenir, Hugo...
M. Croteau (Martin) : Une
précision, si vous permettez. Donc, vous dites : Ces mesures ont fait
l'objet d'un consensus en amont. Donc, vous vous attendez à ce que le projet de
loi soit adopté à l'unanimité à l'Assemblée nationale?
Mme de Santis : Il y a
seulement un point sur lequel il n'y a pas l'unanimité, et c'est sur la
prescription qui touche les infractions pénales, O.K.? Pour moi, en tant que
juriste, je tiens à accepter la recommandation qui a été faite par la
commission Charbonneau et aussi par le Directeur général des élections à
plusieurs reprises. Pour moi, ça, c'est distinct du recours de se faire
rembourser l'argent par un parti politique. Si le souhait de la CAQ, si le
souhait de tout le monde était que l'argent qui a été collecté incorrectement,
illégalement soit repayé, je crois que les modifications à l'article 100
atteignent cet objectif, O.K.?
La prescription pénale, c'est autre chose.
On poursuit la personne qui a fait le don, et c'est quoi, les conséquences de
ça? La personne va devoir payer une amende, O.K.? Ce n'est pas plus que
l'amende. Maintenant, disons... Il y a des arguments légaux basés sur la
charte, etc., qui peuvent être utilisés par une personne si on essaie de
changer cette prescription.
Et, en plus de ça, le Directeur général
des élections nous a dit : Moi, mon effectif est tant. Si on va changer la
loi, il faut que, cette loi, on puisse l'appliquer. Mon effectif, je n'ai pas
des centaines de milliers de personnes qui travaillent pour moi, il faut que je
le mette où c'est plus certain que je vais avoir le résultat que je veux. Ça va
être très, très difficile de prouver au-delà de tout doute raisonnable que
quelqu'un a commis une infraction en 1996. Et, même si je pouvais, il aura à
payer uniquement l'amende de 1995 ou 1996, pas l'amende de 2016.
Alors, vous voyez? Mais je dis tout ça
pour répondre. Pour moi, on a l'unanimité sur presque tout, sauf une des
recommandations.
La Modératrice
: Je
pense que tu avais une question.
M. Lavallée (Hugo) : Oui,
pour Mme Vallée, concernant le projet de loi déposé par Mme Massé ce matin.
Avez-vous l'intention d'appeler ce projet de loi là?
Mme Vallée
: On
travaille... En tout cas, j'ai mentionné, tout à l'heure en Chambre, parce qu'il
y a eu également une motion qui a été présentée par ma collègue sur l'ensemble
des enjeux que vivent les enfants trans... Manon et moi, on a travaillé chacune
de notre côté, souhaitant répondre à une volonté de la Commission des relations
avec les citoyens. Vous vous rappellerez que, l'an dernier, il y a eu des
travaux qui ont porté sur les modalités permettant à un adulte d'obtenir la
modification du changement de sexe auprès du Directeur de l'état civil. Ces
modalités-là ont été étudiées dans le cadre d'un règlement, chose assez
inusitée ici, à l'Assemblée nationale. Et, suite à ça, la commission a formulé
des recommandations demandant au gouvernement d'apporter les modifications législatives
pour permettre une véritable égalité, une meilleure inclusion parce que le Code
civil prévoit que ces modifications-là sont possibles mais pour les personnes
majeures seulement.
Donc, toutes les deux, on s'est affairées
à travailler en parallèle. Donc, il y a une question de jours, je ne peux malheureusement
vous présenter et vous indiquer ce qui est compris dans le projet de loi que
j'entends déposer, parce que je suis là-dessus aussi. Donc, on va travailler
ensemble, mais ma collègue est au fait. Je pense qu'on a été assez transparente
l'une envers l'autre. Elle m'avait posé la question en commission parlementaire
lors de l'étude des crédits. Donc, on va regarder la volonté. La volonté, elle
est partagée. Maintenant, c'est plutôt dans la mécanique, dans la façon de
faire, s'assurer que tout se fait correctement parce que, il ne faut pas
oublier, dans cette question-là, il y a l'autorité parentale qui est importante,
et ça, il faut la considérer.
M. Lavallée (Hugo) : Donc, on
comprend que vous avez l'intention d'aller dans le sens du projet de loi
présenté avec peut-être...
Mme Vallée
: Oui, oui.
Et là-dessus, je pense que je l'ai affirmé et réaffirmé à plus d'une reprise,
pour moi, c'est important. Ces enfants-là vivent des drames humains qui sont
tout à fait inacceptables.
La Modératrice
: Merci
beaucoup.
M. Boivin (Simon) : Est-ce
que, juste rapidement, vous avez fait un post-mortem sur la panne informatique
qu'il y a eu au ministère de la Justice, et quant aux impacts sur le bon
fonctionnement, et aux raisons de ce qui s'est passé, et comment éviter que ça
se reproduise?
Mme Vallée
: Il y a un post-mortem
qui se fait. Je dois être bien honnête avec vous, ayant été retenue ici, là, je
n'ai pas tout le suivi encore, mais il y a un post-mortem, justement, qui s'est
effectué cette semaine avec les équipes pour voir à éviter, dans la mesure du
possible, qu'une situation comme ça puisse survenir. On se rappellera que c'est
une surcharge qui est à l'origine de tout ça. Maintenant, les fins détails
seront analysés par les équipes du ministère. Mais évidemment ça nous démontre
à quel point, parfois, on est à la merci de l'informatique et de la
technologie. C'est merveilleux, la technologie, mais, lorsque ça nous laisse
tomber, ça peut causer tout un brouhaha.
M. Boivin (Simon) : ...sur
les impacts ou sur le retard que ça peut causer dans le système?
Mme Vallée
: Il y a
plusieurs causes qui ont pu procéder. N'oublions pas, là, les greffiers et greffières
sont capables quand même de tenir les minutes de façon manuscrite. Donc, dans
bien des dossiers, la cour a pu suivre son cours malgré certains retards. Par
contre, ce qui a été impossible, c'était toute la question des visioconférences.
Alors, on a des visiocomparutions… Tous les systèmes étaient non fonctionnels.
Le téléphone au bureau de comté était non fonctionnel. Donc, c'était vraiment
tout, puis on réalise à quel point on est dépendants de tous les systèmes
informatiques.
Donc, oui, ça a créé des désagréments, ça
a créé des délais. Il y a quand même des équipes qui ont travaillé à éviter le
plus possible que ces délais-là ne posent problème pour la suite des choses.
Puis d'ailleurs je tiens à remercier les équipes du ministère de la Justice
parce que tout le monde a fait un travail assez incroyable dans des
circonstances qui étaient tout à fait imprévisibles.
La Modératrice
: Merci
beaucoup.
Mme Vallée
: Merci.
Mme de Santis : Merci
beaucoup.
(Fin à 12 h 47)<
>