(Dix heures une minute)
Le Modérateur
: Alors,
bonjour, tout le monde. Bienvenue à ce point de presse sur l'enjeu de la
ségrégation scolaire et de la sélection des élèves au Québec, point de presse
de M. Cloutier, député de Lac-Saint-Jean, et M. Gabriel Nadeau-Dubois, député
de Gouin, avec plusieurs invités. Il y aura une période de questions sur le
sujet de l'éducation à la toute fin, mais d'abord je donnerais la parole à M.
Stéphane Vigneault, coordonnateur du Mouvement L'École ensemble.
M. Vigneault (Stéphane) :
Merci, Nicolas. Bonjour, tout le monde. Merci d'être là en si grand nombre. Je
vais commencer par vous présenter les intervenants à la conférence de presse d'aujourd'hui :
le député de Lac-Saint-Jean, Alexandre Cloutier, porte-parole de l'opposition
officielle en matière d'éducation; le député de Gouin, Gabriel Nadeau-Dubois,
porte-parole de Québec solidaire; Anne-Marie Boucher, ici, à ma droite,
responsable du comité aviseur du Mouvement L'École ensemble; Claire Lapointe,
qui est là, professeure et directrice du Département des fondements et
pratiques en éducation de l'Université Laval, qui est aussi membre du Conseil
supérieur de l'éducation; et Perrine Argilès, de l'AVEQ, l'Association pour la
voix étudiante au Québec.
Au Mouvement L'École ensemble, on base
notre action sur des constats qui font de plus en plus consensus, à savoir que
la ségrégation scolaire atteint des sommets inégalés au Québec. Par ségrégation
scolaire, on entend le fait d'éduquer les élèves dans des écoles ou des
programmes séparés en fonction de leurs revenus ou de leurs résultats
scolaires. On a, en ce moment, au secondaire 21 % des élèves qui
fréquentent le privé subventionné. On a, dans les projets particuliers
sélectifs du public, 20 % des élèves aussi, donc 41 % des élèves en
tout dans des voies sélectives. On sait que le public a décidé de concurrencer
l'école privée sur son propre terrain, le terrain de la sélection, et donc sont
apparus toute une série de projets particuliers et sélectifs.
Ça laisse l'école publique commune... Ce
qu'on peut appeler maintenant l'école ordinaire, ça la laisse avec un fardeau
alourdi, une surreprésentation des élèves en difficulté. En plus de ça, bien,
on l'écrème de ses élèves les plus performants, et donc le cercle vicieux est
reconduit. Les parents ont une mauvaise idée de l'école ordinaire, donc se font
lancer dans les bras du privé subventionné ou des projets particuliers
sélectifs. Donc, la ségrégation scolaire est constamment reconduite et ça nous
met dans un système d'éducation inefficace et inéquitable, et les intervenants aujourd'hui
pourront vous en parler.
Nos solutions, au Mouvement L'École
ensemble, on en a trois qu'on propose : la fin du financement de l'école privée
par les contribuables, la fin de la sélection au public et, troisième mesure,
la consolidation de l'aide aux enfants en difficulté, mais en plus ajouter une
offre d'enseignement enrichi pour les élèves les plus performants, parce qu'en
appliquant nos deux premières solutions, il y aura un afflux d'élèves de
projets particuliers et du privé subventionné vers ce qu'on pourrait appeler le
nouveau public. Donc, il faut pouvoir aussi leur donner un enseignement pour
ces élèves-là. Ce qu'on veut, au mouvement, c'est assez simple, c'est que nos
trois demandes soient reprises par les partis politiques, par tous les partis
politiques en vue des prochaines élections, en octobre 2018.
Quelques faits sur le mouvement rapidement.
On a une pétition en ligne. On est rendus à 2 200 noms. On commence aussi
à avoir de plus en plus d'appuis de la société civile, des organismes. On a eu peut-être
le plus notable en septembre, à la fin septembre, l'appui unanime des
commissaires de la CSDM, la commission scolaire de Montréal, donc la plus importante
commission scolaire au Québec, qui a décidé de nous appuyer. On aura aussi aujourd'hui
l'appui de l'AVEQ. Et je peux vous dire que vous allez recevoir deux
communiqués aujourd'hui, cet avant-midi d'appui, encore au mouvement : la
Fédération des comités de parents du Québec qui va nous appuyer, le réseau des
organismes communautaires de lutte au décrochage qui va nous appuyer aussi.
Donc, en terminant, s'il y a un message
que j'aimerais vous faire aujourd'hui, c'est qu'aujourd'hui on brise un tabou politique
avec la présence des députés Cloutier et Nadeau-Dubois. Le sujet, l'enjeu de la
ségrégation scolaire fait son entrée dans le débat politique au Québec. À mon
avis, c'est l'enjeu de politiques publiques le plus important auquel on fait
face. Et donc grâce au courage politique, je pense qu'il faut le souligner, des
députés Nadeau-Dubois et Cloutier, eh bien, cet enjeu-là va devenir
incontournable. Les candidats aux prochaines élections n'auront plus le choix,
devront se positionner d'une manière ou d'une autre sur l'enjeu de la
ségrégation scolaire. Voilà. Donc, je laisse la parole au député Cloutier.
M. Cloutier : Merci. Alors,
bonjour à vous tous et toutes. Merci aux différents partenaires qui se sont
joints à nous aujourd'hui.
C'est important de se souvenir que le
Conseil supérieur de l'éducation a rendu un rapport accablant à l'automne
dernier, à l'automne 2016, dans lequel ils ont conclu que l'école québécoise
était la plus inégalitaire, que l'école québécoise ne jouait plus son rôle de
creuset social de l'apprentissage du vivre-ensemble, de l'apprentissage des
différents milieux socioéconomiques où les jeunes ont à travailler et à
apprendre ensemble.
On aurait pu penser que, suite au dépôt du
rapport du Conseil supérieur de l'éducation, le gouvernement du Québec aurait
pris à bras-le-corps cet important enjeu de société. Quelques semaines après le
dépôt du rapport, c'est important de s'en souvenir, avait lieu un sommet sur
les enjeux de la réussite scolaire au Québec, et ce qui a mené au dépôt de la
politique de la réussite éducative. Je vous dirais que le grand oublié de cette
politique sur la réussite éducative, c'est l'enjeu de la mixité sociale. On ne
peut pas rester indifférents devant le rapport d'expert du Conseil supérieur de
l'éducation qui nous dit qu'il y a urgence d'agir parce que malheureusement des
jeunes en situation défavorable, des jeunes défavorisés sont plus susceptibles
qu'ailleurs au Canada de ne pas obtenir leur diplôme. C'est ce qui a été
documenté dans le rapport du Conseil supérieur de l'éducation.
Ce que nous souhaitons comme formation
politique, c'est de retrouver la fierté de l'école publique québécoise, de
s'assurer que les services soient offerts à tous nos jeunes, particulièrement
aux jeunes avec le plus de difficultés d'apprentissage. Nous avons réclamé que
dorénavant, dans chacune des écoles, il y ait des ratios pour soutenir les enseignants
pour des services d'orthopédagogues, de psychoéducateurs, de techniciens en
éducation spécialisée, pour que les services soient au rendez-vous. On veut que
les parents québécois choisissent l'école publique québécoise par fierté avec
des infrastructures et des écoles dignes de ce nom. Souvenez-vous que 90 %
du parc immobilier sur l'île de Montréal... pardon, à la commission scolaire de
Montréal, est soit dans un état insatisfaisant ou soit carrément dans un état
qui doit être démoli, des écoles qui doivent carrément être détruites.
Il y a donc des solutions, encore faut-il
qu'il y ait une volonté gouvernementale, et c'est dans ce sens que le Parti
québécois s'inscrit. On demande donc au gouvernement du Québec de prendre cet
enjeu à bras-le-corps et d'accepter d'ouvrir un vrai débat de société sur
l'importance du vivre-ensemble et de la mixité sociale au Québec.
M. Nadeau-Dubois : Merci
beaucoup. Bonjour, tout le monde. Le sujet qu'on aborde ce matin, c'est un
sujet qui est tabou. On aborde, je dirais, le grand malaise qui loge au coeur
de toutes nos discussions qui portent sur l'éducation au Québec. C'est un sujet
qui rend les gens mal à l'aise, c'est un sujet tabou, mais le Conseil supérieur
de l'éducation l'a démontré, il est dorénavant incontournable, ce sujet-là.
L'école québécoise est la plus inégalitaire au Canada. Pour une société qui se
prétend être une société de justice sociale, qui se prétend être un exemple en
Amérique du Nord en matière d'égalité des chances, c'est une situation
inacceptable.
Le mot de «ségrégation scolaire», c'est un
mot fort, c'est un mot qui peut déranger, c'est un mot même qui peut choquer, mais
c'est un mot qui est nécessaire pour sonner l'alarme et pour souligner une situation
qui ne peut plus durer, c'est-à-dire le fait qu'aujourd'hui, dans les écoles du
Québec, il y a des petits gars et des petites filles qui, parce que très tôt dans
leur vie, on leur met une étiquette d'enfant à problèmes ou d'enfant en difficulté,
bien, n'ont pas les mêmes chances que les autres de réussir leur vie.
Au nom de Québec solidaire, je veux donc
féliciter le Mouvement École ensemble, qui a pris le bâton du pèlerin, qui est
venu nous voir dans nos partis respectifs pour nous parler de cette problématique-là,
pour nous sensibiliser à l'impact que ça a sur les familles puis sur les
enfants du Québec. M. Proulx, aujourd'hui, le ministre de l'Éducation, va
déposer ce qu'il appelle... en fait, va présenter aujourd'hui ce qu'il appelle
un projet d'école du futur, hein, avec le projet Lab-école. Bien, pour nous,
l'école du futur au Québec, ça doit être une école inclusive, une école
équitable, une école qui permet à tous les enfants de se réaliser, une école où
on n'exclut pas, d'entrée de jeu, un enfant parce qu'il serait moins talentueux
ou parce qu'il aurait moins de facilité.
Notre système d'éducation, ça ne peut pas
être comme un sac de pommes où on met les plus belles sur le présentoir en
avant, puis les plus poquées, bien, on fait de la compote avec. Notre système d'éducation,
il faut qu'il prenne soin de tous les enfants, partout sur le territoire. Dernièrement,
le ministre Proulx s'est dit sensible, ce sont ses mots, à l'impact négatif de
la sélection des élèves. C'est une sensibilité que l'on salue, mais ce n'est
pas nécessaire. Il faut maintenant des actions concrètes.
C'est maintenant au gouvernement de
répondre, la balle est dans le camp du ministre. Les comités de parents se sont
exprimés, de plus en plus de commissions scolaires s'expriment, des parents
s'expriment ce matin. Québec solidaire joint sa voix à ces voix-là, et
maintenant on se tourne vers le ministre, et on attend de sa part des réponses
et des mesures concrètes, parce qu'il y a une chose qui est claire, c'est que
la situation actuelle ne peut plus perdurer. On ne peut plus échapper des
milliers d'enfants au Québec à chaque année parce qu'on leur donne une
étiquette de pas bons.
Le Modérateur
:
J'inviterais Mme Anne-Marie Boucher, qui est responsable du comité aviseur du Mouvement
L'École ensemble.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Bonjour. Je suis ici à titre de citoyenne, mais aussi à titre de parent, et
c'est avec ces deux rôles-là que je m'implique depuis les tout débuts au sein
du Mouvement L'École ensemble.
J'ai moi-même fréquenté des écoles
publiques très ordinaires pendant tout mon parcours. J'y ai côtoyé des élèves
ordinaires, j'y ai rencontré des professeurs, des enseignants et enseignantes
extraordinaires et j'ai eu la chance d'y vivre une expérience qui est aujourd'hui
rarissime au Québec, c'est-à-dire l'expérience de faire école ensemble, en
partageant les bancs d'école avec des enfants de toutes origines culturelles ou
sociales.
Pour moi, fréquenter l'école publique, ce
que ça voulait dire, c'était d'apprendre le sens de l'empathie, faire
concrètement l'expérience de la diversité, côtoyer des camarades parfois très
différents de moi, mais avec qui j'allais recevoir et construire un monde
commun. Aller à l'école publique, c'était et c'est toujours faire société
ensemble.
J'ai quitté l'école secondaire au milieu
des années 90, à une époque pas si lointaine, où la ségrégation scolaire,
c'était vraiment le fait de l'école privée et où l'école publique tentait toujours
d'être ce qu'elle est censée être, c'est-à-dire l'école de l'égalité des
chances. Je suis depuis devenue une mère. J'ai trois enfants à la maison, de
l'âge de 10 ans à 16 mois, et, comme beaucoup de parents, je suis préoccupée
par la question de la ségrégation scolaire au Québec.
Dans la dernière année, ce n'est pas pour
rien qu'il y a eu des dizaines de parents, des dizaines de mères et de pères
qui ont publié des lettres ouvertes, qui ont fait entendre leurs voix sur cette
question-là en interpellant le gouvernement sur la ségrégation scolaire même.
Alors qu'on est dans la gestion des couches sales, la préparation des lunchs
pendant nos soirées, pourquoi est-ce que des parents, des mères et des pères du
Québec, investiraient-ils temps et énergie pour changer la donne?
Je dirais que c'est parce qu'on sent qu'il
y a quelque chose d'inacceptable qui est en train de se produire au Québec et qu'il
y a quelque chose d'essentiel qui est en train d'être perdu, parce que l'école
qu'on appelle l'école du libre choix, aujourd'hui, c'est surtout l'école de la
libre concurrence, c'est l'école de la libre anxiété face aux examens de
sélection. Les parents ont, en effet, techniquement le choix de l'école de leur
enfant, mais ils n'ont jamais voulu ni choisi la ségrégation scolaire, jamais
choisi d'exclure les enfants les plus défavorisés au nom d'une supposée
excellence, jamais choisi l'abandon des écoles publiques par les parents de la
classe moyenne. Ils n'ont jamais choisi ce déni de solidarité, ils n'ont jamais
choisi la loi du plus fort.
Même si on a à coeur l'école publique, en
tant que parents, on se retrouve devant un dilemme qui est vraiment terrible.
On doit choisir, en quelque sorte, de sacrifier le bien commun au nom du meilleur
pour notre enfant. Puis évidemment, en tant que parents, on veut tous le
meilleur pour notre enfant. C'est quelque chose qu'on partage à l'échelle du Québec.
Mais je pense qu'au nom de tous les enfants du Québec, on peut exiger et on
doit exiger le meilleur pour toutes les écoles publiques, c'est-à-dire penser
le problème comme un problème collectif parce que c'est collectivement qu'on
peut le régler ensemble. Je crois que les pères et les mères du Québec n'ont
pas à porter l'odieux de la responsabilité de la destruction de l'école
publique québécoise. Ils n'ont pas à porter l'odieux d'un choix politique qu'on
n'a jamais vraiment choisi et pour lequel il n'y a jamais vraiment eu de débat.
Nos élus devront, rapidement j'espère, s'engager à régler ce problème, c'est-à-dire
le problème de la ségrégation scolaire.
Je finirais avec les mots de l'écrivaine
et professeure Annie-Claude Thériault, qui a signé, dans LaPresse
du 12 septembre dernier, une lettre ouverte sur la question et qui disait :
«...nous ne pouvons faire réellement société que si nous avons des buts communs
ou une vision commune du bien public. L'école doit cesser d'être [un vase] clos
et recommencer à être le pivot de cette cohésion.» Merci.
Le Modérateur
: Merci,
Anne-Marie. J'inviterais maintenant Claire Lapointe, professeure au Département
des fondements et pratiques en éducation à l'Université Laval.
Mme Lapointe (Claire) :
Bonjour. Alors, je voudrais préciser tout d'abord que je prends la parole en
mon nom personnel, bien que je sois membre du Conseil supérieur de l'éducation,
en tant que citoyenne. C'est mon opinion personnelle et de professeure-chercheuse
que je présente.
Alors, le changement demandé aujourd'hui
par le Mouvement L'École ensemble et appuyé par des députés de différents
partis politiques s'appuie tout à fait sur les résultats de recherches fiables au
niveau scientifique. En effet, des études rigoureuses, réalisées entre autres
en Finlande, en Allemagne, en Suède et aux États-Unis, ont démontré que le regroupement
des élèves dans des écoles, des programmes ou des classes différentes, sur la
base de leurs résultats scolaires ou de tests de sélection, diminue
significativement les taux de réussite scolaire en bout de ligne, alors que les
systèmes qui ont cessé cette sélection ont amélioré de manière importante la diplomation
au secondaire et ont augmenté l'accès aux études postsecondaires pour les
élèves venant de milieux défavorisés.
En Finlande, on a même constaté que les
revenus des enfants venant de milieux défavorisés, qui avaient donc eu
accès en plus grand nombre aux études postsecondaires, leurs revenus ont
augmenté par rapport à la classe sociale à laquelle leurs parents
appartenaient.
On note aussi, dans ces études, que
contrairement au mythe qui circule beaucoup, les élèves qui ont plus de
facilité à l'école et qui sont souvent issus de milieux plus favorisés ne sont
pas pénalisés par cette mixité dans la classe ou dans l'école. Leurs résultats
scolaires demeurent aussi bons, et probablement qu'ils développent des
compétences de vivre-ensemble qui sont extrêmement importantes de nos jours.
Comme l'a souligné le comité d'experts sur le financement, l'administration, la
gestion et la gouvernance des commissions scolaires, dont je faisais partie, un
rapport déposé en 2014, la mixité sociale à l'école aide tous les élèves à
mieux réussir. J'ajouterais qu'elle est un moteur économique puissant pour une
société comme le Québec, qui a une très petite population et qui doit donc
développer tout le potentiel de l'entièreté de sa population dans ce monde du
XXIe siècle de la grande compétition. Merci.
Le Modérateur
: Merci.
En terminant, je donnerais la parole à Mme Perrine Argilès, coordonnatrice
générale de l'Association pour la voix étudiante du Québec.
Mme Argilès (Perrine) : Merci
beaucoup. Bonjour à toutes et à tous. Alors, nous, à l'AVEQ, l'Association pour
la voix étudiante au Québec, nous représentons les étudiantes et étudiants des
universités de Concordia, de Rimouski et de Chicoutimi. À l'AVEQ, nous croyons
que notre mission première du mouvement étudiant est non seulement de défendre
l'accès à une éducation de qualité, mais également de faire entendre notre voix
sur des enjeux plus larges.
Le Mouvement L'École ensemble nous a
approchés, il y a quelques semaines, afin de savoir si nous étions intéressés à
les soutenir. Par un concours de circonstances, nous avions un congrès durant
ces mêmes dates, offrant un moment pour en discuter avec nos membres. Ce
soutien était d'une évidence à la suite de nos positions convergentes comme la
lutte pour la gratuité scolaire et contre la marchandisation de l'éducation.
Cela fait de nombreuses années que le gouvernement
s'attaque aux fondements du système d'éducation dans le but de le subordonner
aux intérêts du marché. Cette ségrégation scolaire au primaire et au secondaire
perpétue les inégalités dans notre société en créant un système à deux
vitesses. C'est une logique que l'on observe également au niveau des études
supérieures lorsque nous parlons des différentes hausses de frais de scolarité
ou de la non-reconnaissance du travail effectué par les stagiaires.
À l'AVEQ, nous croyons que l'éducation
doit être un tremplin pour toutes et tous et non pas un simple instrument au
service des indices de développement économique. Nous croyons fortement que le
Mouvement L'École ensemble apporte des solutions favorables à l'amélioration de
notre système d'éducation, un système équitable, accessible et représentatif
des différentes facettes de notre société. Merci.
Le Modérateur
: Merci.
Nous allons maintenant passer à la période des questions. Je vous prierais de
rester sur le thème du sujet de la conférence de presse, l'éducation. Au
besoin, les députés seront disponibles en marge de la conférence de presse pour
des questions sur d'autres sujets. Vous êtes nombreux. Une question, sous-question,
s'il vous plaît, et aussi si vous pouviez vous présenter, pour le bénéfice de
nos invités, ainsi que votre média. Merci.
Mme Cloutier (Patricia) :
Bonjour. Patricia Cloutier, journaliste pour Le Soleil. Je veux
savoir, M. Alexandre Cloutier, c'est quoi, votre position exacte. Parce qu'on
sait que L'École ensemble veut faire en sorte que les subventions au privé, ça
cesse de façon... tout de suite, là, si on veut, tous en même temps et que la
sélection aussi cesse, qu'on rende les armes en même temps. Votre position
là-dessus.
M. Cloutier : On a différentes
propositions qui explorent différentes avenues. Comme formation politique, on a
adopté, lors de notre congrès, de revoir l'ensemble du financement de l'école
privée et de l'école publique québécoise. Nous avons soulevé à l'Assemblée
nationale le fait qu'il y a des écoles publiques qui étaient plus coûteuses que
l'école privée, qu'il y avait des projets spécifiques qui étaient encore moins
accessibles dans l'école publique que dans certaines écoles privées.
Nous sommes d'avis qu'on doit revoir
l'ensemble de l'oeuvre, l'ensemble du financement, qu'il doit y avoir un débat
de société sur le vivre-ensemble, sur la ségrégation scolaire et que ces
enjeux-là doivent être débattus en toute sérénité, et on donne suite, dans le
fond, à cette préoccupation d'abord exprimée par le Conseil supérieur de l'éducation,
et on suit aussi les recommandations du rapport qui demande à l'État
d'intervenir et de ne pas maintenir le statu quo.
Maintenant, nous, on pense qu'on doit
revoir l'ensemble de l'oeuvre et on ne pense pas que juste de rejeter
simplement le financement d'écoles privées sans égard à l'école publique serait
la solution. On pense qu'il y a plusieurs approches qui sont possibles et on
partage cette volonté de vouloir s'attaquer à ce vrai problème.
Mme Cloutier (Patricia) :
Donc, je veux bien comprendre. Vous appuyez les trois revendications du
Mouvement L'École ensemble ou...
M. Cloutier :
C'est-à-dire qu'on partage la préoccupation qui est celle du vivre-ensemble, de
la mixité sociale, de l'importance que nos jeunes Québécois apprennent à vivre ensemble
dans la diversité. On pense qu'il y a plusieurs pistes de solution qui se
retrouvent entre autres dans le rapport du Conseil supérieur de l'éducation. Si
vous lisez en détail les propositions que nous avons déposées, entre autres
lors de notre congrès, vous allez en retrouver plusieurs : investissements
massifs, par exemple, dans les infrastructures des écoles publiques québécoises,
une pondération ou l'accès plutôt d'un nombre minimum, un seuil garanti de professionnels
pour les élèves en difficulté.
Dans le rapport du Conseil supérieur de
l'éducation, ce qu'on dit aussi, c'est qu'il faut agir aussi en amont, dès la
petite enfance, pour que les quartiers défavorisés, qui sont particulièrement
plus susceptibles de ne pas avoir accès à des programmes spécifiques, se
retrouvent pris, dans le fond, dans le système. Il propose donc un investissement
massif pour la maternelle quatre ans particulièrement dans les quartiers
défavorisés. Ce sont toutes là des prises de position qui vont dans le sens du
vivre-ensemble.
Maintenant, pour ce qui est du financement
des écoles publiques et privées, on pense qu'il doit y avoir un vrai chantier là-dessus
au Québec.
M. Dion (Mathieu) : Mathieu
Dion, Radio-Canada. Quelle forme prendrait le débat en question? Est-ce qu'on
parle d'une commission parlementaire, de consultations en ligne? Qu'est-ce que
vous voulez concrètement quand on parle d'un débat sur la chose? C'est large,
un débat.
M. Vigneault (Stéphane) :
À notre avis, on met au jeu trois propositions, trois solutions qui donc
changeraient et qui présentent... qui changeraient le système d'éducation, qui
présenteraient une nouvelle vision. Pour moi, le meilleur forum pour en
discuter, c'est la prochaine campagne électorale, donc dans une dizaine de mois,
et donc on souhaite que les partis se saisissent de nos propositions, et les
mettent au jeu, et proposent enfin aux électeurs de trancher.
On a un système scolaire au Québec, qu'on
vient de vous décrire, qu'on n'a jamais vraiment choisi. On a laissé les choses
aller. L'année prochaine, on va fêter les 50 ans, là, du financement de
l'école privée, et ça n'a jamais fait vraiment l'objet d'un choix collectif, et
là c'est le temps de trancher. Il y a un timing intéressant, les élections se
présentent l'année prochaine. Donc, pour moi, c'est le débat idéal.
M. Dion (Mathieu) : Est-ce
qu'aujourd'hui vous tentez d'éclipser l'annonce de Lab-école qui, selon le
Parlement, est une bonne nouvelle?
M. Vigneault (Stéphane) :
Non, et c'est un hasard. C'est un hasard complet. Donc, on ne savait pas que
cette annonce-là arrivait.
M. Nadeau-Dubois : On l'a
su hier. Mais, ceci étant dit, et je pense que ça tombe bien parce que
M. Proulx veut nous parler de l'école du futur, on est ici aujourd'hui
pour parler de notre école du futur. On est ici pour rappeler au ministre
Proulx que c'est bien beau parler d'architecture et du menu de la cafétéria,
mais que la question fondamentale pour l'école québécoise du XXIe siècle, c'est
celle de l'égalité des chances. Au-delà du bling-bling, comment on fait pour
donner les mêmes chances à tous les enfants du Québec? Et on espère que le
ministre Proulx va en tenir compte dans son annonce de ce matin. Et sinon, bien,
il s'expose aux critiques pas seulement de nos formations politiques, de tous
les parents au Québec qui sont tannés d'être déchirés à chaque rentrée
scolaire.
M. Chouinard (Tommy) :
Bonjour. Tommy Chouinard, journaliste à LaPresse. M.
Nadeau-Dubois, peut-être, est-ce que les trois revendications… les trois recommandations
qui sont faites par le mouvement, est-ce que vous les appuyez? Est-ce que c'est
des mesures que vous appuyez?
M. Nadeau-Dubois : C'est des
mesures que Québec solidaire appuie dans leur entièreté. C'est des mesures qui
étaient déjà à notre programme, alors, lorsque le Mouvement L'École ensemble
nous a contactés, ça a tombé sous le sens pour nous de les appuyer.
L'essentiel, ce matin, c'est de parler de
l'éléphant dans la pièce. C'est le fait qu'on a une école publique, on a un
système scolaire, d'une part, généralement, qui est absolument inégalitaire
puis une école publique qui est extrêmement inégalitaire.
Pour ce qui est des solutions, nous, on
les appuie, mais bien sûr qu'on peut discuter des modalités. Donc, par exemple,
sur le financement public de l'école privée, sur quelle période de temps est-ce
qu'on le diminue? Qu'est-ce qu'on réinvestit dans l'école publique? Quelle aide
on apporte aux élèves qui ont plus de facilité? Quelles options enrichies on
leur offre? Quel type de parcours on peut développer au sein du public pour que
tout le monde trouve son compte sans qu'il y ait de la sélection élitiste? Ça,
c'est des questions qui restent ouvertes.
Mais, sur le fond, on est d'accord avec le
diagnostic puis les grandes pistes de solution, c'est-à-dire il faut ramener la
priorité sur l'école publique, ramener l'argent des contribuables au sein du
système public puis renforcer cette école-là, qui est le socle de la société
québécoise.
M. Chouinard (Tommy) :
D'accord. M. Cloutier, peut-être. On parlait d'un sujet tabou, puis on en a eu
un peu la démonstration tout à l'heure, quand vous avez donné une réponse.
J'essaie de comprendre. Le programme du Parti québécois dit, d'un côté :
Il faut réduire de façon significative, assez rapide, là, dans un premier
mandat, le financement public aux écoles privées. D'accord? Bon, le chef est
sorti après pour dire : Non, non, ce qu'on va faire, c'est demander un
effort supplémentaire — de quel ordre, on ne le sait
pas — aux écoles privées, puis, si ces écoles-là refusent de faire un
effort supplémentaire, dont on ne connaît pas la nature, le
financement serait coupé.
Je veux comprendre, là, la position du
Parti québécois quand il dit qu'il appuie l'idée de lutter contre la
ségrégation scolaire, là. Qu'est-ce que ça veut dire concrètement, sur les
trois revendications qui sont… les trois recommandations qui sont faites?
M. Cloutier : C'est-à-dire
que, sur l'identification du diagnostic, qui est le diagnostic qui est posé
d'abord par le conseil supérieur, qui est repris ensuite par le mouvement, nous
partageons en totalité cette réflexion qui doit avoir cours au Québec sur l'importance
du vivre-ensemble.
Maintenant, dans les pistes de solution,
nous avons la prétention d'en avoir plusieurs à offrir aux Québécois. Parmi
celles-ci, c'est d'avoir des écoles publiques dignes de ce nom sur le plan des
infrastructures. C'est aussi dans les recommandations du Conseil supérieur de
l'éducation. Parmi les autres revendications, on retrouve entre autres
l'importance d'avoir un seuil garanti pour les services aux élèves qui ont le
plus de difficulté.
Pour ce qui est des écoles privées, le
Conseil supérieur de l'éducation aborde aussi cet enjeu, et ce qu'il propose,
le Conseil supérieur de l'éducation, c'est que l'école privée soit davantage
représentative du milieu dans lequel elle s'insère, comme par exemple qu'elle
soit plus représentative du nombre d'immigrants, de réfugiés, de personnes en
difficulté d'apprentissage, de personnes de milieux socioéconomiques plus
défavorisés. Il propose aussi que le financement soit lié à une meilleure
représentativité.
Et c'est dans cet esprit-là que notre chef
Jean-François a exprimé ses intentions, suite au congrès, et c'est pour ça que
le Parti québécois a adopté comme résolution de revoir la totalité du
financement, incluant le financement à l'école publique, qui, comme vous le
savez, est de moins en moins gratuite et de moins en moins accessible. Ce sont
là quelques propositions qui viennent répondre, je pense, en partie, à cette
problématique qui est celle de la mixité sociale, mais on est ouverts à un
véritable débat de société sur cet enjeu.
M. Chouinard (Tommy) : Donc,
vous dites : Il faut faire ce débat-là. Vous, vous voyez ça ici, à
l'Assemblée nationale, d'ici les élections? Concrètement, vous voyez ça
comment?
M. Cloutier : Bien,
idéalement, comme c'est, à notre point de vue, un problème qui est urgent et
réel, on souhaiterait que le gouvernement actuel prenne le dossier à bras-le-corps.
Malheureusement, je suis obligé de vous dire que, dans la politique sur la
réussite scolaire qui a été déposée, ce n'est pas le cas. Et, comme le disait
tout à l'heure mon collègue de l'Assemblée nationale, aujourd'hui, il y a une
annonce importante sur le plan gouvernemental en ce qui a trait aux
infrastructures, la qualité des infrastructures, l'alimentation, les saines
habitudes de vie, mais il y a quand même un éléphant dans la pièce. C'est :
Qui compose cette école publique? Qui auront accès à ces nouvelles écoles au
Québec?
Le Modérateur
: Merci,
Tommy. On va passer à Pascal puis on va faire ça ensuite... partager le micro.
Merci.
M. Dugas Bourdon (Pascal) :
Oui, M. Cloutier, encore. Je m'excuse de vous demander de retourner au micro.
Donc, Pascal Dugas de l'Agence QMI. Pour rebondir sur la question de mon collègue, est-ce qu'un
PQ porté au pouvoir en 2018 mettrait fin au financement public de l'école
privée?
M. Cloutier : Je pense que...
en fait, je crois avoir répondu en long et en large à la question. Ce que j'ai
dit, c'est que le financement à la fois de l'école publique et de l'école
privée doit être revu.
M. Dugas Bourdon (Pascal) :
Donc, c'est possible qu'on mette fin au financement public de l'école privée.
M. Cloutier : Ce n'est pas la
proposition qui a été adoptée lors de notre congrès. Par contre, nous nous
sommes engagés à revoir le financement pour nous assurer que l'école publique
soit plus accessible, que l'école publique soit plus représentative des milieux
défavorisés, etc. Puis là je ne veux pas reprendre toutes les explications que
j'ai données tout à l'heure.
Le Modérateur
:
D'autres questions sur ce sujet, s'il vous plaît?
Journaliste
:
...question sur un autre sujet. J'ai une...
Le Modérateur
: ...qui
s'adresse au député?
Journaliste
: Oui, oui,
oui.
Le Modérateur
:
Écoutez, alors on va faire ça en marge. On va permettre à tout le monde de
quitter puis on va rester là. On va vous trouver le temps pour les autres
questions. Merci beaucoup.
Des voix
: Merci.
(Fin à 10 h 30)