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Point de presse de M. Bertrand St-Arnaud, ministre de la Justice

Version finale

Le mercredi 13 février 2013, 11 h 24

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Onze heures vingt-quatre minutes)

M. St-Arnaud: Alors, bonjour à tous. J'ai été très heureux de déposer ce matin le projet de loi n° 17 qui vise à réformer notre système de justice disciplinaire en modernisant le fonctionnement des conseils de discipline des ordres professionnels.
L'objectif premier des changements proposés est de s'assurer d'une meilleure efficacité du système de justice disciplinaire, notamment en augmentant la célérité du processus de traitement. Fini les délais indus, fini les retards... On reprend ça. Fini les retards indus, fini les délais inacceptables, fini les dossiers qui traînent pendant des années.
Pour ce faire, le projet de loi constitue, au sein de l'Office des professions du Québec, un bureau des présidents des conseils de discipline. Ce bureau sera composé d'au plus 15 présidents de conseils de discipline, dont un président en chef qui assurera l'encadrement administratif, 15 présidents de conseils de discipline qui exerceront leur fonction à temps plein pour un mandat fixe d'au plus cinq ans. Les présidents seront dorénavant choisis via une procédure de sélection transparente, rigoureuse, non partisane, semblable à celle qui existe depuis un an pour choisir, pour nommer les juges pour qu'on ait, en fait, les meilleures personnes, les personnes les plus aptes pour exercer cette fonction de président de conseil de discipline. De plus, sera adopté par le gouvernement un code de déontologie applicable aux présidents et aux autres membres des conseils de discipline.
Le projet de loi introduit également l'obligation pour le président en chef de présenter annuellement au ministre de la Justice un plan dans lequel il expose notamment ses objectifs de gestion pour assurer la qualité et la célérité du processus décisionnel.
Lors des dernières semaines, à plusieurs reprises, le manque de célérité actuel a été rapporté. Il y a quelques jours à peine, le 4 février dernier, le chroniqueur Yves Boisvert écrivait dans un texte... en fait, titrait son texte Une justice malade de sa lenteur. C'est un exemple parmi d'autres de textes qui ont été publiés au cours des dernières semaines sur ce manque de célérité actuel. Nous voulons éviter que des situations semblables à celles qui ont été rapportées ces dernières semaines se poursuivent, des situations qui mettent en danger la sécurité du public, nous voulons éviter qu'elles se reproduisent à l'avenir.
Finalement, avec les allégations faites devant la commission Charbonneau, il était essentiel de fournir aux syndics des ordres professionnels de meilleurs outils pour faire enquête sur la conduite professionnelle de leurs membres qui s'adonnent à des actes dérogatoires et, s'il y a lieu, de porter la plainte appropriée devant le conseil de discipline.
Ainsi, à l'article 1, des dispositions faciliteront le travail des syndics pour porter une plainte disciplinaire contre le professionnel qui tente de commettre un acte impliquant de la collusion, de la corruption, de la malversation, de l'abus de confiance, du trafic d'influence ou de la fraude. Ceci favorisera une saine administration de la justice disciplinaire, un des éléments sur lesquels repose la confiance des citoyens envers le système professionnel.
En terminant, je tiens à remercier l'Office des professions et le Conseil interprofessionnel du Québec pour leur contribution dans la préparation de cet important projet de loi.

M. Journet (Paul): Ça fait combien de temps, M. St-Arnaud, que ça se prépare, ce projet de loi là? Est-ce qu'on réagit au fait que ce problème-là soit apparu dans les médias ou est-ce qu'on était déjà en train de travailler là-dessus depuis plusieurs semaines?

M. St-Arnaud: Non, et en toute honnêteté, M. Journet, le précédent gouvernement avait fait une première réflexion qui avait accouché d'un... qui avait débouché sur un projet de loi, le projet de loi n° 79 qui a été déposé à la dernière journée de la dernière session... la dernière journée de la dernière législature. Et nous avons retravaillé ce projet de loi, nous l'avons modifié à quelques endroits, mais...
Alors, c'est une réflexion qui, donc, avait court depuis un an au gouvernement. Lorsque je suis arrivé en fonction, j'ai été resensibilisé à ce dossier, et nous avons décidé d'agir parce que je pense, effectivement, et on en voit à tous les mois, là, on voit qu'il y a des situations... Vraiment, là, il y a des situations qui n'ont plus de bon sens, et je pense qu'il faut mettre fin à ces délais qui sont vraiment inacceptables, à ces retards, là, de présidents de conseil de discipline qui prennent des années pour rendre des décisions, souvent sur des cas assez graves, très graves dans certains cas. Alors, nous voulons mettre un terme à ça.
Présentement, vous le savez, le système actuel, je peux peut-être vous le décrire en quelques mots, les conseils de discipline, c'est trois personnes. C'est deux membres de l'ordre professionnel concerné - il y a 44 ordres professionnels au Québec - alors, c'est deux membres de l'ordre professionnel et c'est un président, et le président... présentement, le président, il exerce ses fonctions, c'est un avocat qui est nommé, sans aucun concours, par le gouvernement. Il n'y a aucun processus rigoureux de sélection.
D'ailleurs, je voyais qu'un de vos collègues, M. Lessard, avait écrit un texte en avril 2010 où il disait que, sur 14 avocats nommés comme présidents des conseils de discipline, 13 étaient de généreux... étaient des donateurs et souvent généreux à la caisse électorale du Parti libéral, alors des gens qui étaient nommés présidents des conseils de discipline sans aucun processus de sélection. Et souvent, bien, ils n'avaient pas de boss, ces gens-là, ils n'avaient pas de patron. Alors, ils prenaient... ils faisaient ça à travers leurs autres activités professionnelles, et, dans certains cas, ça entraînait des retards vraiment indus.
Alors, ce qu'on fait aujourd'hui, c'est qu'on crée un bureau des présidents des conseils de discipline qui va être au sein de l'Office des professions, un bureau qui va comporter 15 présidents, au maximum 15, probablement un peu moins, entre 12 et 15 présidents des conseils de discipline dont un président en chef, un président en chef adjoint, donc l'équivalent d'un juge en chef, d'un juge en chef adjoint, qui va gérer ses présidents, qui va leur donner des dossiers, qui va s'assurer que les délais qui sont prévus, dans certains cas déjà, au Code des professions, par exemple, dans...
L'audition d'une plainte doit se faire dans les 120 jours du dépôt de la plainte, mais présentement, dans bien des cas, ce n'est pas respecté. Il y a d'autres délais au Code des professions qui ne sont pas respectés. Évidemment, quand vous êtes rendus à quatre, cinq ans, là, c'est sûr que les délais n'ont pas été respectés. Alors, on crée ce bureau avec des gens qui vont être sélectionnés rigoureusement, avec, dans ce bureau, un président en chef et un président en chef adjoint qui vont s'assurer que les présidents rendent justice dans des délais raisonnables.
Je pense que c'est un très beau projet de loi. Moi, je suis heureux de voir... et, mon intention, c'est de le faire... J'ai sollicité, lors de l'étude des crédits, l'appui de l'opposition sur ces questions parce que je souhaiterais qu'on adopte ce projet rapidement.

M. Lavallée (Hugo): Vous parlez beaucoup des délais, M. St-Arnaud, mais c'est quoi l'objectif, là, concrètement, là? Quand un citoyen va déposer une plainte, vous, votre objectif, comme ministre, ce serait que ce soit traité à l'intérieur de quel délai entre le moment où la plainte est logée et la décision?

M. St-Arnaud: Bien, présentement, le Code des professions prévoit déjà certains délais, prévoit des délais mais des délais qui ne sont pas suivis, alors... parce que les présidents des conseils de discipline, là, je ne veux pas exagérer, mais, dans certains cas, ne tiennent pas compte des délais qui sont prévus au Code des professions. Alors, moi, ce qu'on veut s'assurer...
Parce qu'effectivement ils ne sont pas encadrés. Ils sont... Il n'y a pas de... Ils n'ont pas de patron, finalement. Ils n'ont pas quelqu'un qui surveille leur travail et qui surveille également la rapidité avec laquelle... ils entendent les plaintes, éventuellement ils rendent une décision et, s'il y a lieu, ils rendent une sanction. Et là il y a des délais qui s'accumulent.
Alors là, en créant ce bureau, il y aura un... Comme je vous dis, ce sont des gens qui seront là en permanence. On pourra assurer d'ailleurs une meilleure qualité rédactionnelle, une meilleure cohérence de toutes les décisions à l'intérieur du bureau des présidents des conseils de discipline, et, effectivement, l'objectif ultime étant, là, que rapidement on puisse entendre les plaintes et éventuellement rendre jugement.

M. Laforest (Alain): Vous avez fait un lien avec la commission Charbonneau.

M. St-Arnaud: Oui. En fait, c'est que...

M. Laforest (Alain): C'est quoi le rapport avec ce bureau-là et qu'est-ce que ça vient changer à la collusion et la corruption? Le lien n'est pas évident.

M. St-Arnaud: Oui. Alors, effectivement, l'essentiel du projet de loi n° 17, là, c'est toute la mécanique entourant ce bureau des présidents de conseil de discipline. Mais j'ai ajouté un article, qui est à l'article 1, qui vient ajouter un acte dérogatoire - je ne sais pas si je l'ai - un acte dérogatoire... qui vient ajouter au Code des professions un nouvel acte dérogatoire, en fait, quelques actes dérogatoires, mais notamment un qui est celui de - je le lis avec vous - qui est celui... En fait, on modifie le Code des professions pour dire que «constitue également un acte dérogatoire à la dignité de sa profession, le fait, pour un professionnel, dans l'exercice de sa profession, de commettre un acte impliquant de la collusion, de la corruption, de la malversation, de l'abus de confiance, du trafic d'influence ou de la fraude». Et ensuite on ajoute aussi, comme acte dérogatoire, la tentative ou le complot pour les mêmes...

M. Robitaille (Antoine): C'est étrange, quand même, parce que c'est comme si on disait: Il ne faut pas que les gens violent la loi. C'est comme évident, là. Pourquoi on est obligés de le spécifier?

M. St-Arnaud: Bien, écoutez, ce qu'on m'a dit, c'est... ce qu'on me dit, c'est que les... il y avait, dans le code actuel, une mesure qui disait que tu devais faire honneur à la dignité de ta profession. C'est à peu près le terme général. Mais ça ne donnait pas, me dit-on, assez de poignée aux syndics des différents ordres professionnels pour porter des accusations, en fait pour déposer une plainte devant un conseil de discipline. Alors là, on l'écrit noir sur blanc.
Et, comme je le disais dans mon introduction d'ouverture, ça devrait fournir aux ordres... en fait, ça va fournir aux ordres professionnels de meilleurs outils pour agir, eu égard aux professionnels qui, dans l'exercice de leurs fonctions, commettraient ce genre d'actes criminels. Vous avez raison, ce sont tous des actes criminels. Mais ça va donner, nous dit-on, un meilleur... de l'écrire dans le Code des professions, applicable à l'ensemble des professions, ça va donner de meilleurs outils aux différents syndics qui, semble-t-il, avaient, dans certains cas, de la difficulté avec la règle générale à portée de main.

M. Lecavalier (Charles): Est-ce que c'est un message que vous envoyez à l'Ordre des ingénieurs, de répondre à ce qu'on a eu devant la commission Charbonneau, les ingénieurs qui ont défilé parmi les...

M. St-Arnaud: Moi, ce que je peux dire... J'ai rencontré le président de l'Ordre des ingénieurs, il y a quelques semaines, et je sais qu'à l'Ordre des ingénieurs ils sont préoccupés par cette situation-là et qu'au cours des deux, trois dernières années, ils ont posé un certain nombre de gestes, hein? Il y a maintenant des examens qui... en matière d'éthique qui sont dispensés aux membres de l'Ordre des ingénieurs, il y a des guides qui ont été faits.
Je sais qu'il y a une... Je pense qu'il faut faire attention, évidemment, ne pas généraliser à partir de quelques cas, mais je sens une sincérité de la part du président de l'Ordre des ingénieurs. M. Lebel, pour régler ce genre de problème au sein de son ordre professionnel. Et c'est une action, m'a-t-on expliqué, qui se fait depuis quelques années à l'Ordre des ingénieurs.

M. Laforest (Alain): Et ce n'est pas déjà couvert par Marteau et par l'UPAC, ça, ce que vous ajoutez là? Qu'est-ce que ça va changer que les ordres professionnels aient le droit de sévir? Si ces gens-là sont pris, c'est un acte criminel, ils vont se retrouver en prison, là. Si on prend la commission...

M. St-Arnaud: Oui, mais là c'est au niveau de l'ordre professionnel. L'ordre professionnel pourra suspendre le membre pour une certaine période de temps, pourra éventuellement le radier, à tout le moins provisoirement, ou lui imposer éventuellement une amende. Là, c'est une infraction à... c'est une infraction déontologique, disciplinaire

M. Lecavalier (Charles): Est-ce que les ingénieurs coupables de corruption devraient perdre leur titre?

M. St-Arnaud: Pardon?

M. Lecavalier (Charles): Est-ce que les ingénieurs coupables de corruption devraient perdre leur titre?

M. St-Arnaud: Écoutez, je ne veux pas rentrer... je ne veux pas me prononcer sur ce genre de question aujourd'hui. Je ne veux pas me prononcer sur ce genre de question aujourd'hui.

M. Robitaille (Antoine): Est-ce que la loi n'aurait pas cet effet-là?

M. St-Arnaud: Bien, c'est-à-dire que cette... cette loi fait en sorte de... permet aux syndics, par exemple au syndic de l'Ordre des ingénieurs, de déposer une plainte. Lorsque le projet de loi sera adopté, il pourra y avoir une plainte disciplinaire eu égard à ce nouvel article.
Maintenant, je pense que ce n'est pas mon rôle à moi de... comme ça, en des termes généraux, de dire en des termes généraux quelles devraient être éventuellement les sanctions pour tel ou tel, tel acte. Éventuellement, je pense que je dois me garder une certaine distance par rapport aux conseils de discipline, par rapport aux faits qui peuvent entourer la cause x ou la cause y. Alors, c'est pour ça que, par rapport à votre question, je me garde une certaine distance.
Il y aura... cet article-là vient ajouter des actes dérogatoires à la dignité d'une profession dans le Code des professions. Ça fera en sorte que tous les ordres professionnels pourront déposer une plainte disciplinaire eu égard à cet article-là et, par la suite, ça instaurera une jurisprudence. Et je pense que ce n'est pas à moi, comme ministre, à m'insérer dans le processus en disant: Il faudra qu'il y ait tel genre de sanction ou tel autre. Je pense que je laisse cela à ces conseils de discipline.
Vous savez que vous pouvez aussi, par la suite, si vous n'êtes pas... si quelqu'un n'est pas satisfait d'une sanction qui est rendue au conseil de discipline, il y a un appel au Tribunal des professions. Le Tribunal des professions, c'est composé d'un certain nombre de juges de la Cour du Québec qui siègent en appel des différents conseils de discipline. Mais je pense qu'il faut que je garde une distance par rapport à des situations bien précises ou à des ordres bien précis.

La Modératrice: Dernière question.

M. Lecavalier (Charles): Vous n'êtes pas le bourreau, finalement, mais vous donnez l'arme aux ordres professionnels.

M. St-Arnaud: Je donne... je crée de nouveaux actes dérogatoires qui, effectivement, vont donner aux syndics des ordres professionnels des moyens supplémentaires pour faire face à cette question qui est manifeste, depuis quelques années, de collusion, de corruption, de malversation, de trafic d'influence, de fraude. Voilà. Ça va? Merci beaucoup, bonne fin de journée.

(Fin à 11 h 38)

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