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Conférence de presse de M. Luc Thériault, député de Masson et porte-parole de l'oppositionofficielle en maière de réforme des institutions démocratiques

Commentaires sur le dépôt d'une motion concernant le mode de scrutin

Version finale

Le mardi 31 mai 2005, 11 h 49

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Onze heures qurante-neuf minutes)

M. Thériault: Bon, alors, vous comprendrez qu'on vient de recevoir... qu'on a reçu hier cette motion. On va prendre le temps de l'analyser dans tous ses aspects. Mais c'est plutôt les réponses du ministre, ce matin, qui me font réagir d'emblée parce qu'effectivement on a été... Et là les négociations, là, il n'y en a plus depuis au moins trois semaines, sinon quatre semaines. Et je comprenais mal pourquoi on avait autant de difficultés à se comprendre, et je pense que, ce matin, on le comprend.
Au fond, vous voyez un ministre qui nous met, si vous voulez une image, devant un jello pas de plat. Et ça fait en sorte que - prenons juste sur la question des modalités d'adoption de l'avant-projet de loi, là, ou du projet de loi, quand on sera rendu à l'étape de l'adoption de la loi - contrairement à ce qui se fait ailleurs, il n'y a pas de décision qui a été mise en place au départ. On garde le contrôle partisan, du haut de la majorité parlementaire, et en plus on dit aux gens: Bien, il n'y aura pas de référendum, on va questionner les gens s'il devrait y en avoir un; on pourrait utiliser la majorité simple, alors que je ferai remarquer, là... Et rappelez-vous M. Charest, là, le premier ministre, quand il est intervenu par rapport au financement des partis politiques, il a dit que c'était le genre de débat qui prenait le consensus. Mais là, quand on change les règles démocratiques d'une société entière, bien là, le ministre arrive devant nous, un universitaire, avec toute la profondeur qu'il a et la compréhension qu'il a d'une démocratie, et aujourd'hui, au moment où il veut entamer le processus de consultation, il n'est pas prêt à nous donner l'heure juste là-dessus.
Le ministre, en étude des crédits, à plusieurs reprises, même s'il avait un sourire en coin, laissait entendre que l'opposition officielle ne collaborerait pas, ne serait pas assise lors de ces consultations-là, n'accepterait peut-être pas d'y participer. J'avais l'impression que c'était rendu son mantra. J'avais l'impression que c'était quasiment un fantasme, un désir inavoué qu'on se mette à saboter le processus. Moi, je voudrais vous dire, ce matin, nous y serons, sauf que ce qui est proposé ici c'est un genre de chimère parce que justement on est devant un avant-projet de loi, et quand on est devant un avant-projet de loi et que l'on a dit - et ça, c'est à peu près la seule chose qui est claire - qu'il y aura, en terme de mode de scrutin, une application en 2011-2012, ça veut donc dire qu'on a du temps pour faire les choses correctement.
Et quand le ministre dit: En Colombie-Britannique, ils ont fait un référendum, bien oui, tu sais, ça prenait 60 %, hein. On n'est pas obligé de faire les mêmes erreurs qu'ailleurs, là. Il y a quand même une majorité de gens qui ont dit qu'ils en voulait un, changement, mais ils n'y allaient pas à 60 %.
Alors là, écoutez, on est donc devant une démarche où le ministre ne nous dit rien qui puisse rencontrer les attentes qu'on avait. C'est très différent, quand tu es dans un avant-projet de loi, que tu veux bâtir une démarche correcte, c'est très différent de garder le contrôle de tout ça encore. Il aurait pu être bon joueur puis dire: À ce stade-ci, puisqu'on n'est pas devant un projet de loi, allons-y de façon paritaire avec les partis, avec les citoyens. Bélanger-Campeau, hein, comme modèle, ça aurait été intéressant. C'est ce que nous recherchions, et là, il aurait montré sa bonne foi à vraiment regarder la question puis à être ouvert, et à inclure vraiment les citoyens. Alors, les citoyens ne sont pas inclus présentement. Ils ne seront que présents pour donner leur point de vue quand bon leur semble, mais ils ne pourront pas prendre la parole pendant la commission.
Alors, j'arrête là-dessus.

M. Chartrand (Yves): ...la négociation, monsieur...

M. Thériault: Pardon?

M. Chartrand (Yves): Il a parlé que vous ne négociiez plus.

M. Thériault: Bien, c'est nous qui avons demandé, entre autres, qu'on ne parte pas en commission avec 711 articles; on a demandé justement qu'il y ait un cahier du participant; on a demandé que soit scindée la problématique du mode de scrutin versus la question des aménagements à la Loi électorale. Ça, c'est présent comme volonté, sauf que, quand on a posé la question à l'étude des crédits: Quels étaient les argents... l'argent nécessaire pour partir en consultation, qu'est-ce qui avait été prévu comme budget, on nous a répondu comme réponse: aucun. Donc, le gouvernement envoie des dépliants publicitaires à tout le monde, là, pour vanter ses mérites, dépense de l'argent pour ça, mais n'a pas budgété, dans son propre ministère, des argents pour informer les gens.

M. Chartrand (Yves): C'est accessoire comme débat, ça, là?

M. Thériault: Pardon?

M. Chartrand (Yves): C'est accessoire comme débat. Pourquoi vous parlez de budget, là?

M. Thériault: Bien, c'est parce que, écoutez, vous voulez informer la population pour qu'elle vienne participer à des consultations pour changer les lois et les règles démocratiques de la société, mais vous n'avez prévu aucun argent pour informer et faire la promotion de ça pour que les gens soient présents à cette consultation-là.

M. Chartrand (Yves): Donc, ce que vous dites, c'est que ça va être une consultation bidon. C'est ce que vous dites?

M. Thériault: Ce que je dis, c'est qu'on risque fort de retrouver, dans cette consultation-là, les gens qui sont intéressés par la démarche, mais la population en général, il faut qu'elle soit dans le coup. Et, depuis le début, on dit que, pour que la population soit dans le coup, ça prend vraiment une commission spéciale qui n'a pas de spécial que son nom.

M. Dutrisac (Robert): Juste préciser justement qu'est-ce que vous proposez. Vous dites: le modèle Bélanger-Campeau. Donc, Bélanger-Campeau était présidée par des gens qui n'étaient pas...

M. Thériault: Exact, un président et un vice-président neutres.

M. Dutrisac (Robert): Est-ce qu'on pourrait faire, par exemple, les états généraux qui ont eu lieu sur... Ce serait un petit peu le même modèle, quoi?

M. Thériault: Non, parce que les états généraux ont mis en place un certain nombre de principes. O.K. Et le ministre est d'accord avec ça, là, qu'au niveau du principe on peut partir de là. Maintenant, nous, on aurait aimé la deuxième étape. La deuxième étape des états généraux, la recommandation des états généraux à cet effet-là, c'était un comité justement indépendant. La commission parlementaire n'a rien d'un comité indépendant qui va soumettre aux parlementaires un modèle. Alors, en plus, on prend le modèle puis on le clôture dans un texte législatif. Alors, nous, on a travaillé pour faire en sorte qu'il y ait au moins un cahier du participant. Tu ne pars pas en consultation itinérante avec 711 articles dans un texte législatif, ça n'a pas de bon sens. Imbriquer les deux, c'est en quelque sorte viser l'échec du processus.

M. Thivierge (Jean): M. Thériault, est-ce qu'il a déjà été question, dans vos discussions avec les libéraux, que ce soit effectivement une commission paritaire?

M. Thériault: Oui, oui. Nous avons, dès notre première séance, dit: Nous voulons un président et un vice-président neutres; nous voulons que tous les partis politiques soient représentés de façon paritaire; nous voulons que les citoyens soient représentés, face aux parlementaires, de manière paritaire; et nous voulons la parité hommes-femmes autant que possible. C'est ce qu'on a demandé dès le départ.

M. Thivierge (Jean): Ça n'a jamais été vraiment pris en considération par les libéraux?

M. Thériault: Bien, en fait, regardez ce qu'ils nous déposent ce matin. On va l'analyser, mais c'est une chimère.

M. Thivierge (Jean): À aucun moment des discussions, il n'est apparu qu'il y avait une ouverture.

M. Thériault: Non. La première réponse du ministre a été de dire: Nous sommes élus, et, si les gens ne veulent pas de la démarche qu'on a mise en place, ils voteront pour un autre parti à la prochaine élection, se mettant derrière le processus parlementaire, sa majorité parlementaire. C'est comme on veut réformer les choses, mais... parce qu'on dit qu'il y a des distorsions, mais on se sert de cette distorsion-là pour faire cheminer le projet. Il y a quelque chose d'absolument paradoxal là-dedans.

M. Dutrisac (Robert): Vous dites que c'est une chimère, etc., mais vous avez participé donc une chimère...

M. Thériault: Le résultat est une chimère. Le résultat, c'est-à-dire qu'on est devant non pas une Bélanger-Campeau, on est devant une commission parlementaire bien ordinaire qui aura comme particularité qu'elle pourra siéger à l'extérieur des murs et qui verra siéger avec elle des citoyens dont on dit qu'il y aura un tirage au sort. Mais, parmi ceux qui sont accessibles, le choix sera fait parmi ceux qui sont accessibles, on ne définit pas les conditions de l'accessibilité. Moi, j'aimerais ça savoir c'est quoi les conditions d'admissibilité.

M. Dutrisac (Robert): Mais vous ne m'expliquez par pourquoi vous y participez même si vous trouvez que l'exercice est mal foutu d'avance.

M. Thériault: Bien, écoutez, on est devant une commission parlementaire. Vous pourrez toujours poser la même question aux citoyens, là, qui seront... qui voudront y participer. Moi, j'avais de dire par rapport aux groupes à qui j'ai parlé, là, le MDN, Féminisme et Démocratie, j'aurais envie de dire: je ne sais pas ça va être quoi leur réaction, mais c'est mieux qu'une claque sur la gueule. Je veux dire, il y a un processus qui est amené, là, on ne peut toujours pas... on va évidemment le contester, on va le dénoncer. La motion, je ne pense pas qu'elle va passer comme ça, comme une lettre à la poste, il y a moyen de l'amender, on va essayer d'amender des choses, s'il y a ouverture, mais à ce stade-ci, j'ai l'impression qu'il n'y en a plus d'ouverture. Et je pense qu'entre ne pas y être du tout, les 12 citoyens en question, bien, ils vont choisir au moins d'y assister, j'imagine. Alors, dans ce sens-là, c'est bien évident qu'on ne peut pas dire: on boycotte, là. Est-ce que vous nous proposez de boycotter cette consultation-là?

M. Chartrand (Yves): Moi, je me situe, M. Thériault, au niveau de mode de scrutin puis la question centrale, là, la proportionnelle et tout ça. Pouvez-vous répéter...

M. Thériault: Où se situe le Parti québécois?

M. Chartrand (Yves): Oui.

M. Thériault: Bien, écoutez, je ne l'ai jamais caché et je l'ai dit à plusieurs reprises, et c'est ce que M. Dupuis tentait, le précédent ministre tentait de camoufler, il y a un débat à faire effectivement sur le modèle. Et cet avant-projet de loi là, évidemment n'a fait que des insatisfaits parce que plutôt que de répondre aux aspirations de l'ensemble des gens, il ne répond à rien, il consacre le tripartisme. Nous ne sommes pas pour ce modèle, ça, c'est clair et certain, on l'a déjà dénoncé. Mais en ce qui concerne l'introduction de proportionnalité, il y a parmi les gens au Parti québécois des tendances, et c'est pour ça que, dans une Bélanger-Campeau, sans un texte qui est clôturé d'une manière législative, on aurait pu... Et je pense... j'espère qu'on aura l'occasion de faire valoir les différents modèles.
Il y a des gens, aux états généraux, qui étaient campés vers le modèle scandinave. Il y a, parmi nos gens, des gens qui préfèrent un modèle de type scandinave, proportionnel, territorial.

M. Chartrand (Yves): Si je comprends bien, que le PQ n'a pas vraiment...

M. Thériault: Il y a des gens...

M. Chartrand (Yves): ...une position claire.

M. Thériault: Non, effectivement. Vous comprendrez effectivement que - et ça, c'est vrai pour nous et c'est vrai pour l'ensemble de la société québécoise - c'est une chose de dire qu'on introduit de la proportionnelle; ç'en est une autre de déterminer le modèle qui est le meilleur pour l'ensemble de la société.
Et la raison pour laquelle on a insisté autant que ça pour la participation citoyenne, c'est le fait qu'entre un modèle et un autre il y a des arbitrages à faire, puis c'est à la population à faire cet arbitrage-là. Ça n'appartient pas... le droit de vote, ça n'appartient pas aux politiciens ni aux experts, ça appartient aux électeurs.
Et donc, parmi les politiciens que nous sommes, il y a des tendances que je vous ai expliquées qui s'expriment, il y a un débat à faire là-dessus: scandinave, proportionnelle modérée, proportionnelle plus forte.
Il y a Daniel Turp qui a écrit un livre, dernièrement, où il propose que la représentation des régions et la proportionnalité passe par une représentation régionale. On ne s'en cache pas. Ce n'est pas vrai que le débat est clos, ce n'est pas vrai que le débat est terminé.
Maintenant, donnons donc les assises nécessaires à un forum où le réel débat pourra se faire dans toutes ses dimension. Et ce n'est pas en contrôlant un processus de consultations sur un débat aussi fondamental par sa majorité parlementaire qu'on crée les conditions nécessaires à l'exercice qui va nous amener à un résultat.

M. Chartrand (Yves): Il me semble que ce serait plus facile, si le PQ réussissait à avoir sa propre position. Là, si je comprends bien, il va falloir, à l'intérieur même du PQ, faire un débat pour que le modèle soit adopté, ou quelque chose du genre, parce que, là, ce ne sera pas le chef qui va décider comme ça quel modèle va être adopté, non?

M. Thériault: Savez-vous...

M. Chartrand (Yves): Ça va être long...

M. Thériault: Savez-vous, M. Chartrand, le problème, quand on pense un mode... une réforme de ce type-là, le problème, c'est de la penser dans les balises partisanes. L'opposition officielle, depuis le départ, ne pense pas... ne fait pas ses commentaires en fonction de la balise partisane. Ce qu'on a revendiqué, c'est un processus non partisan, transparent et citoyen, justement parce qu'on est conscients qu'un tel débat implique qu'un certain nombre de modalités, de modèles soient mis devant le bon jugement de la population.
Or, si on dit d'entrée de jeu que l'ensemble des Québécoises et des Québécois ne seront pas consultés par voie de référendum... Pourquoi je dis par voie de référendum?
On change les règles démocratiques d'une société. Le consentement libre et éclairé là, c'est le minimum qu'on doit faire quand on veut changer les règles dans une société. Avoir le libre choix de son modèle et de faire les arbitrages, c'est ça qui va faire qu'on va s'en sortir. Ça fait 30 ans dont on dit que le débat se tient là, puis c'était l'argument du ministre et du ministre précédent. Ça fait 30 ans que ça se passe. Donc, on va de l'avant. Bonjour, le débat est clos.
Si ça fait 30 ans qu'on en parle puis que le débat n'est pas terminé, c'est parce qu'on n'a pas eu le courage de le mettre dans la place publique, sur la place publique, et on n'a pas eu le courage de le redonner à la population. Bien, pour faire ça, il faut que la population soit impliquée avant, pendant et après. Or, on aurait dû, au moins aujourd'hui, ne pas présumer de comment la population va participer pendant, mais solliciter sa participation puis son intérêt en disant: Vous allez devoir vous prononcer sur la conclusion de ce débat-là. C'est comme ça qu'on intéresse le monde. Sinon, on ne peut pas les intéresser.

(Fin à 12 h 4)

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