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Point de presse de Mme Martine Ouellet, porte-parole de l'opposition officielle en matière de transports, de stratégie maritime, d'électrification des transports et de télécommunications, M. Harold LeBel, député de Rimouski, Mme Manon Massé, députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques, et M. Amir Khadir, député de Mercier

Version finale

Thursday, November 26, 2015, 9 h 15

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Neuf heures vingt minutes)

La Modératrice : Donc, bonjour et bienvenue à ce point de presse. Prendra la parole, pour commencer, Mme la députée de Vachon, elle est porte-parole en matière de transports, Martine Ouellet. Ensuite, prendra la parole la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, Mme Manon Massé; ensuite, de l'organisme Non à une marée noire dans le Saint-Laurent, M. Martin Poirier, M. Benoit St-Hilaire et M. Stéphane Poirier... Est-ce que je me trompe?

Une voix : Non.

La Modératrice : C'est ça. Ensuite, de l'organisme Tache d'huile et du réseau québécois des groupes écologiques, prendra la parole, Mme Maude Prud'homme et, pour terminer, de la coalition des citoyens engagés pour la sécurité ferroviaire de Lac-Mégantic, M. Robert Bellefleur. Mme Ouellet.

Mme Ouellet : Oui. Bien, bonjour. Ça me fait plaisir d'être ici aujourd'hui, vous voyez, avec plusieurs personnes... et non partisan, avec des gens de Québec solidaire, avec des comités de citoyens d'un peu partout au Québec, on parle des gens de Rimouski, d'Amqui, de Saint-Hyacinthe, de Lac-Mégantic, de Sorel aussi, donc concernant le dépôt d'une pétition de 10 367 noms qui a été préparée par le comité de citoyens Non à la marée noire de Rimouski et parrainée par mon collègue Harold LeBel, qui va être déposée à l'Assemblée nationale, et cette pétition-là concerne le projet Chaleur Terminals, dit non au transport par train pour exportation du pétrole bitumineux.

C'est quoi, le projet de Chaleur Terminals? Bien, c'est un projet de transport par train de 240 wagons par jour à partir de Vaudreuil, qui traverse Montréal, la Rive-Sud, Saint-Hyacinthe, Drummondville, Lévis, Rimouski, tout le Bas-Saint-Laurent et la vallée de la Matapédia, donc simplement pour exportation, donc aucune transformation, aucune consommation au Québec. Et on sait que c'est un projet qui est dangereux parce que c'est sur les rails du CN, avec l'état des rails dans certains endroits, et c'est un projet qui est un projet d'appauvrissement économique. À 240 wagons par jour, on parle de 87 600 wagons par année. Des villes, par exemple, comme Drummondville tripleraient leurs matières dangereuses qui passent en plein centre-ville.

Donc, c'est un projet extrêmement inquiétant. Les élus municipaux ont voté des résolutions. Il y a plusieurs villes, Amqui, Rimouski, Saint-Hyacinthe, Montréal et bien d'autres, qui ont voté des résolutions contre le projet Chaleur Terminals. Et je vais laisser maintenant la parole à Manon Massé de Québec solidaire.

Mme Massé : Merci beaucoup, Martine. Alors, bien, ce projet-là, ce que ça a fait, c'est que ça a mobilisé des gens, et ça, partout à travers le Québec. Plusieurs représentants, représentantes sont avec nous ce matin. Ce n'est pas surprenant, parce qu'en matière de protection de l'environnement, c'est toujours les citoyens et citoyennes qui sonnent l'alarme, c'est toujours eux et elles qui font en sorte que le gouvernement est obligé de faire des prises de conscience. Et, dans le cas qui nous intéresse présentement, au-delà de la pétition, il y a aussi les municipalités qui prennent leurs responsabilités, parce que les matières dangereuses qui transigent pour se rendre à Belledune... est très inquiétant, bien sûr, pour la sécurité, mais aussi pour la santé, etc.

C'est préoccupant aussi parce que le gouvernement du Québec semble de plus en plus contourner cet extraordinaire outil qu'on a depuis plus de 20 ans au Québec, c'est-à-dire le BAPE, et c'est pourquoi que la pétition exige d'avoir un BAPE sur le projet qui nous concerne. Quand je dis qu'il le contourne, bien, c'est sûr, et là on l'a vu dernièrement au niveau de, voyons, l'environnement que... au niveau de l'EES — ça va venir — où le gouvernement, au lieu d'accorder un BAPE de façon claire sur l'ensemble des données que nous besoin pour prendre des décisions comme citoyens et citoyennes, bien, il a opté plutôt pour une étude environnementale stratégique dans laquelle, comme on le sait, là, il y a plusieurs éléments, et les citoyens vous en parleront plus longuement tantôt.

Je voudrais juste terminer en vous disant qu'à Montréal c'est inquiétant quand on parle de densité, traverser Drummondville. Oui, traverser Montréal, c'est épeurant, surtout quand on voit qu'il n'y a pas plus tard que quelques semaines, de façon un peu négligée, il y a un train qui est sorti de ses rails et qui est allé atterrir à côté d'un édifice. Alors, voyez-vous, les citoyens ne se préoccupent pas pour rien. Et je terminerai juste en vous disant que ce n'est pas pour rien que je vais à Paris. Je pense que c'est important que le monde entier sache qu'il y a ici, au Québec, des enjeux qui ne seront pas nommés si je n'y suis pas. Et je passe donc la parole à Martin Poirier.

M. Poirier (Martin) : Bonjour. Si on est ici aujourd'hui pour le dépôt de la pétition, c'est vraiment pour souligner cette implication citoyenne, et j'oserais même dire l'intelligence citoyenne parce que, dans ces différents dossiers, ces dernières années, c'est cette vigile citoyenne qui est sur le terrain, qui est présente, qui fait ressortir ces projets-là. S'il n'y avait pas eu les groupes citoyens, il n'y aurait pas eu un focus sur le projet Chaleur Terminals. Il faut souligner le travail du groupe Tache d'huile d'avoir mis en évidence ce projet-là. C'est la représentation des individus et des gens qui se sont présentés dans leurs conseils municipaux pour réclamer des résolutions, des résolutions qui ont été montées par des citoyens.

Donc, nous, aujourd'hui, c'est ce qu'on veut souligner. Il y a le projet Chaleur Terminals, mais il y a aussi les projets qu'on voit déjà, qui sont déjà en branle avec le projet de Kildair à Sorel-Tracy. On sait que, depuis la catastrophe de Lac-Mégantic, tout le Bas-Saint-Laurent est touché par le transport ferroviaire en direction du Kamouraska, le Témiscouata, pour se rendre au Nouveau-Brunswick. Donc, pour nous, c'est un refus catégorique, et je céderais la parole à mon collègue Benoit St-Hilaire.

M. St-Hilaire (Benoit) : Bonjour. Alors, moi, ce matin, non seulement je veux souligner l'intelligence citoyenne que mon collègue faisait référence tantôt, je voulais aussi remercier les différents groupes citoyens qui ont su, au travers les dernières années, informer la population des enjeux auxquels on fait face avec le transport ferroviaire.

Nous avons, ce matin, avec nous, la chance d'avoir des gens qui viennent des quatre coins du Québec. On a des représentants d'un groupe citoyen de Lac-Mégantic qui est ici ce matin. Merci beaucoup. On a aussi le groupe Convoi-citoyen qui a fait la route, on a Tache d'huile, le groupe... le RVHQ  ainsi que le Regroupement citoyen contre les sables bitumineux.

Alors, je pense que le message doit être clair aujourd'hui, non, on ne veut pas de ces projets de transport de pétrole là, non, le Québec ne deviendra pas une autoroute d'exportation du pétrole. Merci. Je vais laisser la parole à M. Stéphane Poirier.

M. Poirier (Stéphane) : Merci. Bonjour. En fait, ce que je voudrais... poursuivre en lien avec ce que mes collègues viennent de rajouter, c'est tout simplement, en fait, pour dénoncer le processus de l'évaluation environnementale stratégique menée aujourd'hui par le gouvernement.

Et, depuis des années, en fait, on a été consultés, nombreux, nombreuses, les Québécois et Québécoises, sur le dossier des hydrocarbures en général, mais on n'a toujours pas eu, en fait, aucun moratoire, cela dit. C'est bien important de le noter. C'est sûr que là il y a la question, évidemment, qui relève de la juridiction fédérale concernant les trains et les oléoducs. On va se concentrer sur les trains aujourd'hui parce qu'on parle de Belledune, mais, cela dit, le Québec, en fait, a tous les moyens, si les Québécois désirent, en fait, pour empêcher le projet, justement, qui nous concerne, qui est celui de Belledune et le transport ferroviaire par pétrole.

Malgré le fait qu'on soit une province, ça reste que le Québec a des compétences. Il peut justement faire valoir ces aspects-là sur l'aspect de la qualité de l'environnement et aussi l'autodétermination, en fait, à occuper librement le territoire québécois, parce qu'aussi on parle d'intégrité du territoire. Ça va beaucoup plus loin que le transport énergétique, ça va aussi sur l'avenir que le Québec... en fait, comment on voudrait développer le Québec.

Donc, présentement, l'EES, en fait, on le sait, est bâclée, critiquée de toutes parts, que ça soit par les citoyens aux Îles-de-la-Madeleine, par unanimité. Les mémoires qui ont été déposés aux Îles-de-la-Madeleine, en fait, critiquaient le processus. Les citoyens, en fait, on n'a pas le temps de consulter adéquatement les études, il manque des études aussi stratégiques pour bien comprendre les enjeux concernant l'évaluation environnementale globale sur les hydrocarbures.

Et, cela dit, je terminerais sur le fait que le Québec peut décider librement de développer son avenir énergétique comme bon lui semble. Merci. Et je passerais la parole à Mme Maude Prud'homme.

Mme Prud'homme (Maude) : Bonjour. J'arrive ici de la Gaspésie avec une certaine exaspération. On a vu Mégantic, tout le monde a vu Mégantic. On a vu aussi, suite à ça, en prêtant attention, la dimension exponentielle de la présence d'hydrocarbures sur les rails partout en Amérique du Nord, y compris au Québec. En Amérique du Nord, on parle d'une augmentation de 28 000 % au fil des dernières années. C'est dans le très exponentiel.

On pourrait s'attendre à ce qu'un gouvernement prête attention à ce genre de phénomène et prenne des mesures adéquates. Ça n'a pas été fait et ça n'a pas été fait malgré le refus des communautés de risquer leur milieu de vie, de risquer leur sécurité pour permettre l'expansion de projets qui sont destructeurs à la base, que l'on parle des sables bitumineux d'Alberta ou du shale de Bakken, de l'extraction de pétrole par fracturation aux États-Unis.

C'est des milieux de vie qui sont fragiles. On a parlé des trains. Dans le cas de Belledune, on traverserait, par exemple, la vallée de la Matapédia, on traverse des rivières à saumon, on traverse des milieux fragiles, des milieux précieux. Tout ça aboutirait ensuite aux abords de la baie des Chaleurs, qui est un autre milieu précieux, un autre milieu fragile.

La quantité et la diversité des acteurs qui sont mobilisés dans ce dossier-là, ça implique de nombreuses municipalités qui ont demandé un BAPE, qui ont exigé que le gouvernement prenne ses responsabilités. Beaucoup d'organisations aussi diversifiées que la table des femmes de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine, que des gens du milieu de la santé, il y a des médecins qui sont venus témoigner de leurs inquiétudes... et il y a les communautés micmaques, qui ont été oubliées dans ce dossier-là, qui poursuivent actuellement le gouvernement du Nouveau-Brunswick , qui poursuivent la compagnie puisqu'ils n'ont pas été consultés convenablement, et le gouvernement du Québec, à mon sens, avait aussi des responsabilités à cet égard. On parle des communautés de Gesgapegiag, de Listiguj, de Gespeg, qui sont réunies sous le Mi'gmawei Mawomi Secretariat, qui actuellement est en poursuite.

Sur ce, j'espère que vous aurez de nombreuses questions. Et je vous présente M. Bellefleur, de Mégantic, qui aura certainement beaucoup à vous dire.

M. Bellefleur (Robert) : Oui, bonjour. Alors, nous, les gens de la Coalition des citoyens et des organismes engagés pour la sécurité ferroviaire de

Lac-Mégantic, on est heureux d'être ici pour appuyer les gens du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie parce qu'on sait ce qui les attend. On a connu, nous, l'horreur de ces trains de la mort, ces grands chapelets de 120 wagons qui passent et puis qui sont venus anéantir le centre-ville de Lac-Mégantic.

Alors, on est ici en appui à eux autres, puis ce qu'on demande au gouvernement, c'est de prendre tous les moyens politiques ou légaux possibles pour empêcher ce transport-là, parce que ce n'est pas vrai qu'on va accepter, au Québec, de prendre tous les risques de voir passer du pétrole qui va être transporté pour la Chine et pour l'Asie du Sud-Est et qu'on va assumer tous les risques de ce transport-là. Donc, on est solidaires aux gens du Bas-du-Fleuve et de la Gaspésie, puis on souhaite que le gouvernement du Québec mette ses culottes dans ce dossier-là puis prenne toutes les options possibles pour bloquer ces projets-là. Merci.

La Modératrice : Merci. Alors, on va passer aux questions. Marco Bélair-Cirino, Le Devoir. Juste dire que les questions porteront sur le sujet, puis, s'il y autre chose, on se parle après. Merci beaucoup.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Très bien. Mme Ouellet, je me demandais si l'abandon ou le refus de l'administration Obama de donner son feu vert au projet de pipeline de Keystone XL avait créé, disons, un certain empressement ou une... du côté de l'industrie pétrolière albertaine, notamment celle des sables bitumineux, pour exporter à tout prix son pétrole que vous qualifiez de sale et que des projets de pipelines ou de transport par train via la Québec devenaient de plus en plus urgents pour eux, puis si vous ressentez ça, dans le fond, dans le milieu.

Mme Ouellet : Bien, c'est clair. C'est clair. Le pétrole ne passe pas par l'ouest avec Northern Gateway, la Colombie-Britannique a dit non; il ne passe pas par le sud, Barack Obama a dit non. Donc, il reste juste l'est. Et que ce soit par pipeline, que ce soit par train, que ce soit par bateau... moi, souvent, je pose la question aux gens et j'essaie de trouver les bons mots. Est-ce que c'est juste au Québec qu'on va être assez bonasses pour accepter ce projet-là, alors que c'est dangereux? Parce qu'à Mégantic les DOT-111 ont explosé. Souvent, les gens me disent : Oui, mais là c'est les rails du CN, puis les DOT-111 sont renforcés. Mais les DOT-111 renforcés ont explosé à Gogama, en Ontario, et c'étaient les rails du CN. Et les comités de citoyens, ils ont demandé à des gens d'aller vérifier les rails, et on a vu des photos, et je vous dirai, transporter, là, des bombes sur ces rails-là, c'est très dangereux, et ça passe à travers les centres-villes. Vous le savez, les municipalités ont été construites autour des rails, au Québec comme partout ailleurs dans le monde, donc il y a...

Ce qu'on veut au Québec, c'est diminuer notre consommation de pétrole et diminuer le transport de pétrole, surtout pas l'augmenter, et on est bien placés pour ça avec notre électricité verte, notre expertise en transport électrique. On a tout ce qu'il faut pour diminuer et non pas augmenter. Il y a plusieurs résolutions municipales qui ont été votées, ça fait que c'est les citoyens, mais les municipalités aussi, les maires, les mairesses qui appuient toute cette démarche-là citoyenne. Donc, moi, je pense que c'est important que le message soit porté et je pense que, les journalistes, vous êtes vraiment la courroie de transmission indispensable pour sensibiliser sur ce projet-là.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce qu'il y a un changement de ton entre les gouvernements Harper et Trudeau? Est-ce que c'est blanc bonnet, bonnet blanc sur la question du transport du pétrole et la nécessité de l'exporter?

Mme Ouellet : Il y a un changement de ton, mais il n'y a pas un changement de fond. Et, aux élections du Canada, les trois partis fédéralistes canadiens, que ce soit le Parti conservateur, le NPD ou le Parti libéral du Canada, ont tous les trois appuyé le projet de Chaleur Terminals et de Belledune.

Donc là, il va falloir que le gouvernement du Québec, le gouvernement libéral du Québec arrête de faire la carpette, là, puis se tienne debout, parce que ce n'est pas vrai qu'on va accepter, au Québec, de servir d'autoroute d'exportation des sables bitumineux. Et les citoyens l'ont dit, on en a des poignées. C'est sûr que, si le Québec était indépendant, ça serait plus facile, mais, même comme une province, on est capable d'avoir des poignées, et c'est au gouvernement à développer un rapport de force, et c'est pour ça qu'il y a des municipalités qui ont demandé un BAPE. Un BAPE, ça donne un rapport de force, ça donne des informations sur un projet de transport sur rail, même si on sait que le transport ferroviaire est de compétence canadienne.

La Modératrice : Régys Caron, Journal de Québec.

M. Caron (Régys) : Alors, oui, bonjour. Pour bien vous comprendre, votre pétition, ça demande quoi au juste?

M. Poirier (Martin) : La fin de notre pétition, le soussigné, c'est que le Québec utilise ses compétences pour refuser le transport de pétrole par train pour exportation. Il y a tous les considérants autour du projet Chaleur Terminals, mais, comme on l'a cité tout à l'heure, il y a différents projets. Et il faut savoir aussi que, même si les projets d'oléoduc se font, que ce soit Énergie Est, on parle du renversement, là, de la ligne 9b d'Enbridge qui devrait débuter sous peu, il faut savoir que ces projets-là par train ne sont pas les mêmes promoteurs que les projets d'oléoduc. Dans le cas de Chaleur Terminals, on le voit très bien avec la compagnie Secure Energy, elle n'a aucun lien avec TransCanada ou avec Enbridge. Donc, c'est des projets qui sont totalement indépendants.

Et, dans la phase II — parce qu'il faut savoir aussi qu'il y a une phase II au projet Chaleur Terminals, tout ce qui va revient, vous le savez, avec les trains — il faut savoir que, dans la phase II, il y aurait la construction de réservoirs supplémentaires pour ramener les diluants. Parce que, quand on parle de sables bitumineux, on parle d'exporter une mélasse, en soi, pour vous le vulgariser, à laquelle on doit ajouter des diluants. Ces diluants-là sont extraits à travers les différentes raffineries à l'international et reviennent par bateau. Dans le projet de Chaleur Terminals, il y a de ramener ces diluants-là, et les oléoducs, eux, ne vont que dans un sens. Donc, ces diluants-là vont devoir revenir par train.

Donc, c'est un faux débat, si on s'attarde à oléoduc ou train. Même si on accepterait des projets d'oléoduc, les projets par train vont suivre. Donc, le Québec doit utiliser de sa compétence.

M. Caron (Régys) : Vous demandez un BAPE. Est-ce à dire que vous comptez sur le BAPE pour dire au gouvernement : Ça n'a pas de bon sens, vous refusez ce projet-là? Pourquoi pensez-vous que le BAPE dirait ça?

M. Poirier (Martin) : Dans un BAPE, ce qui est clair, c'est que, pour nous, c'est un outil démocratique où la société civile peut être consultée. Les scientifiques, les différents experts, l'ensemble des citoyens peuvent déposer des mémoires, et, à partir de là, le BAPE fait des recommandations.

Et nous, on le voit, en deux ans à travailler sur les dossiers d'exportation par train, c'est des projets qui sont tellement insensés que, pour nous, il est inconcevable que le BAPE puisse faire des recommandations d'aller de l'avant avec ce type de projet là.

Et, au-delà d'un BAPE, c'est sûr qu'il faut utiliser les compétences qu'on a. Et, pour nous, le BAPE a démontré, à travers les années, quand il est bien utilisé, que le BAPE peut faire fi, pour mettre fin à certains projets... on l'a vu dans le cas la filière du nucléaire, on l'a vu dernièrement, les derniers BAPE n'ont pas été très tendres envers les différents projets dernièrement. On a qu'à penser à Mine Arnaud, la filière de l'uranium.

Donc, pour nous, on est vraiment confiants que ce projet-là, qui ne ramène absolument rien pour le Québec... Et même s'il ramenait quelque chose d'économique, il n'y a rien qui justifie qu'on prenne tous ces risques-là au niveau de la société civile.

M. Caron (Régys) : Pourquoi dites-vous que l'étude environnementale stratégique, l'EES, qui a été évoquée tout à l'heure, pourquoi dites-vous que c'est bâclé?

M. Poirier (Martin) : Bien, si vous avez suivi les médias, chaque ville où est passé... les consultations de l'évaluation environnementale, les groupes citoyens ont d'abord souligné, avant leur présentation, qu'ils ne reconnaissaient pas l'évaluation environnementale, qu'ils la déclaraient bâclée. Et, si vous voyez l'article de Bertrand Schepper au niveau de l'IRIS, il est très clair qu'il aurait fallu lire à peu près 63 pages à l'heure pour être capable de passer au travers des différentes études qui ont été lancées à la dernière minute.

Donc, pour nous, c'est inconcevable puis c'est une voix unanime. Ce n'est pas simplement les gens qui sont ici aujourd'hui, c'est l'ensemble des villes qui ont été consultées au niveau de l'évaluation environnementale qui le dénotent, cet aspect-là.

La Modératrice : Merci beaucoup. M. Croteau.

M. Caron (Régys) : ...

La Modératrice : Rapidement.

M. Caron (Régys) : ...quand même besoin. Mme Ouellet a évoqué tout à l'heure qu'il faut cesser notre dépendance au pétrole, mais ça ne se fait du jour au lendemain. Donc, il faut le transporter, le pétrole. Comment on le fait, si on ne le fait pas par train?

M. Poirier (Martin) : Bien moi, j'apprécie beaucoup ce genre de question là, je vous dirais tout simplement, parce que c'est le genre de question qu'on retrouve quand il manque d'information au niveau de ces projets-là. Il faut savoir que les projets, ce matin, qu'on met sur la table, c'est des projets d'exportation. On ne parle pas de la consommation de pétrole pour les besoins du Québec. Au niveau de la sécurité énergétique, au niveau de l'approvisionnement du Québec, il n'y a pas d'insécurité à ce moment-ci. On parle plutôt de projets d'exportation. Donc, il n'y a absolument rien à voir avec ce qu'on met à la pompe. Oui, on a une dépendance au pétrole, à laquelle on doit faire face. Les pays du monde ont une résilience pour sortir de leur empreinte au niveau du carbone. On doit décarboniser notre économie, mais ce n'est surtout pas en devenant une autoroute d'exportation qu'on va se sortir de cette dépendance.

La Modératrice : Martin Croteau, La Presse.

Mme Ouellet : Peut-être juste ajouter sur l'EES, là, en plus, l'EES, elle n'est pas indépendante. Donc, ça, c'est très important et c'est les libéraux qui utilisent ces outils-là avec... cette fois-ci, c'est des sous-ministres qui sont responsables. Moi, comme ministre des Ressources naturelles, j'ai reçu l'EES de Genivar dans le golfe du Saint-Laurent, et Genivar est aussi un sous-traitant... était un sous-traitant des pétrolières. Donc, je pense que ce que les citoyens et ce qu'on demande aussi au Parti québécois, c'est que ce soient des études indépendantes.

M. Croteau (Martin) : Bonjour. M. Poirier, ce projet, est-ce qu'il serait plus sécuritaire à vos yeux si le pétrole était acheminé par pipeline plutôt que par train?

M. Poirier (Martin) : C'est un peu comme je disais, train ou oléoduc, pour nous, c'est un faux débat. Il faut plutôt se dire : Est-ce que le Québec doit devenir une simple autoroute d'exportation? On voit les différentes provinces... je suis allé rencontrer différents groupes au mois de juin, qui se réunissent à travers le Canada, qui sont aux prises avec ça. Il faut savoir, présentement, les sables bitumineux sont engorgés en Alberta.

M. Croteau (Martin) : ...les arguments que vous invoquez, la sécurité, le risque de filtre, le risque de déraillement, le risque de déversement, tout ça serait possiblement évité si on construisait un pipeline.

M. Poirier (Martin) : Pas nécessairement.

Une voix : ...

M. Poirier (Martin) : Exactement. Quand je vous dis que c'est un faux débat, les oléoducs d'exportation vont nécessiter le retour de ces diluants-là. On parle de pétrole non conventionnel. Il faut savoir que c'est du «bitumen», comme les anglophones le disent très bien, et le «bitumen» n'est pas un pétrole traditionnel. C'est un pétrole non conventionnel. Donc, ces diluants-là doivent revenir.

Présentement, on le voit, la raffinerie de Hardisty en Alberta réutilise ces diluants-là. Donc, ils doivent revenir, et ces diluants-là, au retour, sont encore plus dangereux que l'exportation des sables bitumineux eux-mêmes, parce qu'ils sont hautement volatiles, hautement explosifs.

M. Croteau (Martin) : À quel point est-il clair, à vos yeux, que le gouvernement du Québec a une emprise pour bloquer ce projet-là?

M. Poirier (Martin) : Bien, premièrement, il doit démontrer une volonté, et nous, on croit qu'il y a présentement une situation que je qualifierais personnellement de mépris envers la population du Québec. On a eu la tragédie de Lac-Mégantic. Et, on l'a vu, vous pensez juste au Japon avec Fukushima, le retrait des différents pays, par la suite, du nucléaire. On avait tous les éléments, nous, pour mettre...

M. Croteau (Martin) : ...ans le partage des pouvoirs, là, est-ce que le Québec a vraiment le pouvoir de bloquer ce projet-là?

M. Poirier (Martin) : On a le pouvoir de démontrer qu'il n'y a pas d'appui social à ce genre de projet là.

M. Croteau (Martin) : ...le pouvoir de le bloquer? C'est ce que je disais....

M. Poirier (Martin) : Oui. On le voit directement avec la Colombie-Britannique...

M. Croteau (Martin) : ...vous avez dit : Il a le pouvoir de le démontrer, mais pas de le bloquer.

M. Poirier (Martin) : Oui, on peut le bloquer si on le veut vraiment. Le meilleur exemple, quand on prend l'exemple de la Colombie-Britannique avec le projet Northern Gateway, l'Office national de l'énergie avait donné l'autorisation à Northern Gateway, et Enbridge n'est pas allée de l'avant parce que l'ensemble de la population, les communautés amérindiennes refusaient ce projet-là. Mais là, présentement, on est face à un projet qui est en pleine poursuite par les trois communautés micmaques de la Gaspésie.

M. Croteau (Martin) : Donc, c'est une opposition politique qui peut bloquer le projet, ce n'est pas une opposition légale ou... il n'y a pas d'emprise légale pour le gouvernement.

M. Croteau (Martin) : Nous, on croit qu'il y a du multitactique. Nous, on joue le rôle citoyen et, dans ce rôle citoyen là, on croit qu'on peut faire remonter différents paliers politiques, et chaque palier politique a un rôle à jouer. On l'a vu dans le cas des municipalités, ils ont un devoir de sécurité publique, et, dans la plupart des résolutions, cet élément-là ressort énormément.

M. Croteau (Martin) : Mme Ouellet, Mme Massé, considérez-vous que les mesures...

M. Khadir : Juste un moment, juste un moment. Rappelez-vous qu'en Colombie-Britannique un des leviers qu'a utilisés le gouvernement de la Colombie-Britannique, c'est les redevances. Le Québec a le droit d'imposer des redevances tellement prohibitives que ça peut complètement faire dérailler — excusez-moi le jeu de mots — le projet.

M. Croteau (Martin) : Mais ma question, si vous permettez : Mme Ouellet, Mme Massé, considérez-vous que les mesures annoncées en fin de semaine par l'Alberta rendent le pétrole bitumineux plus acceptable?

Mme Ouellet : Le pétrole bitumineux restera un pétrole un des plus polluants sinon le plus polluant de la planète. Et je pense qu'ils peuvent faire des efforts pour diminuer la pollution, mais ça restera le pétrole le plus polluant.

Et les outils, vous dites, qu'on peut utiliser, comme je vous dis, si le Québec était indépendant, ce serait plus facile, mais il y en a des outils, tant pour les pipelines... Les pipelines vont avoir besoin de beaucoup de certificats d'autorisation, du dézonage agricole. Ça, c'est des outils qui sont entre les mains du gouvernement du Québec. Et Chaleur Terminals et le CN, parce que c'est les deux ensemble...  Vous savez, le CN, il est allé faire des travaux sans certificat d'autorisation dans la fosse aux saumons, là, à Sainte-Florence. Bien, là encore, c'est une façon de dire non, on ne va pas aller permettre d'attaquer la fosse aux saumons et toutes les réparations qui doivent être faites. Et le BAPE, c'en est un autre, outil. Et un autre outil qu'ont les municipalités, c'est qu'elles sont responsables de la sécurité civile, et, très clairement, avec ces convois-là, elles ne peuvent pas assurer la sécurité civile parce que les risques d'explosion sont beaucoup trop grands, et c'est en plein centre-ville.

La Modératrice : Michel Corbeil, Le Soleil.

M. Corbeil (Michel) : ...

Mme Massé : Excusez...

Une voix : ...

Mme Massé : Oui, exactement. Merci. Bien, en fait...

Mme Prud'homme (Maude) : ...

Mme Massé : Tu veux venir aussi, oui? Bien, tiens, vas-y, je vais y aller après. C'est vous autres, les experts.

Mme Prud'homme (Maude) : Juste rapidement pour dire qu'on travaille aussi en collaboration avec la Ligue des droits et libertés, à savoir que les États sont liés à des pactes, ont signé des pactes de droits humains à l'échelle internationale, et, à cela, sont assorties des responsabilités. C'est à eux de se générer l'attraction politique nécessaire pour assumer les responsabilités qui sont liées aux pactes qu'ils ont signés. Ce n'est pas le problème des citoyens de trouver toutes les failles, les règlements, les ci, les ça. Le gouvernement a une responsabilité d'assumer les responsabilités liées au pacte de droits humains dont il est signataire.

Mme Massé : Et d'ailleurs ça fait partie de notre Charte des droits et libertés, ça fait partie de notre Loi de la qualité de l'environnement. Et c'est pourquoi les BAPE sont si fondamentaux, parce que notre Loi sur la qualité de l'environnement, c'est notre principal levier pour pouvoir nous imposer en matière judiciaire, parce que, toute cette dimension-là, quand on parle de droits, on parle de matières judiciaires. La jurisprudence est claire, à travers le Canada, le BAPE est le meilleur outil d'évaluation et c'est le meilleur outil d'évaluation qu'on doit suivre, mais ça prend un BAPE.

Sur la question de l'Alberta, inévitablement, toute la communauté scientifique internationale est claire, si nous voulons ne pas atteindre le 2 %... pas le 2 %, le 2°, pardon, d'augmentation du climat, il va falloir laisser dans le sol le deux tiers du pétrole non connu. Et les sables bitumineux, on en connaît un bout. L'Alberta nous dit : O.K., on va faire «business as usual» jusqu'en 2030 puis, après ça, on va réfréner. Moi, je pense que, bon, c'est mieux que c'était, mais ce n'est pas du tout ça qui va nous permettre d'atteindre nos objectifs du budget carbone que la planète nous donne.

M. Corbeil (Michel) : Bonjour. Le seul pétrole, finalement, qui est acceptable à vos yeux, c'est le pétrole pour consommation au Québec?

M. Poirier (Stéphane) : Je pourrais peut-être répondre là-dessus. Bien, en fait l'idée, là, et c'est décrié partout sur les tribunes internationales, c'est de sortir du pétrole. Au Québec, en fait, il faut comprendre, là, ce que vous amenez sur la question du pétrole québécois, jusqu'à preuve du contraire en...

M. Corbeil (Michel) : ...sur le fait qu'on importe le pétrole de l'extérieur et que ça passe par le fleuve ou par les pipelines.

M. Poirier (Stéphane) : Oui, tout à fait. Bon, à peu près 14 milliards, environ, par année, là, que ça coûte au gouvernement, mais le but, c'est de réduire ce 14 milliards là avec des politiques intelligentes, des politiques fortes, politiques... mais ça, ça prend une volonté. La volonté, elle part souvent, bien souvent, par les citoyens.

M. Corbeil (Michel) :...exportation de pétrole. Je vous demande : Est-ce que le seul pétrole qu'on peut transporter au Québec, c'est du pétrole pour approvisionner les besoins des Québécois?

M. Poirier (Stéphane) : Bien, en fait présentement, c'est de réduire, O.K., ces importations-là. Présentement, le Québec, là, c'est des hydrocarbures non conventionnels, que ça soit Anticosti, que ça soit Old Harry, que ça soit en Gaspésie, même c'est des... en fait, c'est des réservoirs compacts, donc la fracturation, nécessairement, va être utilise pour aller chercher cesdits pétroles.

Mais l'important, comme je vous dis, c'est d'orienter une politique de libération, de décarbonisation des hydrocarbures. C'est sûr que ça ne se fera pas du jour au lendemain. Mais, dans le contexte actuel, en plus de COP21, je veux dire, l'urgence est unanime, là. Les scientifiques de façon indépendante, avec le GIEC, le cinquième rapport est très clair, il faut absolument laisser 80 %, en fait, des hydrocarbures connus dans le sol.

M. Corbeil (Michel) : J'aimerais quand même avoir une réponse comme on dit en Chambre.

Mme Ouellet : Écoutez, c'est sûr que l'objectif, c'est d'en consommer le moins possible, mais on est réalistes, et tout ce qui est pour exportation, je l'ai dit un peu plus tôt, que ce soit par pipeline, par train, par bateau, c'est non. C'est des risques qui sont beaucoup trop importants. Et il va falloir mettre les politiques en place et le financement nécessaire pour diminuer notre consommation de pétrole pour qu'éventuellement il ne s'en transporte plus de pétrole au Québec.

M. Corbeil (Michel) : Mais, dans ce cas-ci, quelle est votre position? Vous avez été favorable au projet d'exploration et d'exploitation...

Mme Ouellet : On a dit qu'on prendrait les questions sur les autres sujets en aparté. Ça me fera plaisir d'aller vous voir.

M. Corbeil (Michel) : C'est lié pas mal à ce sujet.

Mme Massé : Bien, moi, je... Oui, s'il vous plaît. Moi, je vais y aller. C'est clair que, là, il faut se mettre en mode transition. Si on n'arrête pas de dire : Bien, oui, mais on en utilise déjà, ça fait que, parce qu'on en utilise, il faut continuer à en utiliser, moi... on ne sort pas du problème, et nos petits-enfants, c'est eux autres qui vont être dans la mauvaise situation en 2050.

Alors donc, prenons acte de ça et disons-nous : O.K., c'est quoi qui est le moins pire? Le pétrole connu, il y en a 80... là, j'avais le chiffre de deux tiers, alors on discutera ensemble, mais 80 % du connu doit rester dans le sol, bien là, ce qui est inconnu ne doit pas en sortir du tout. Comprenez-vous? On le sait, on ne peut plus faire semblant qu'on ne le sait pas. Ça, c'est le premier élément.

Nous, on est plutôt clairs, le pétrole... Bien, en fait, non, désolée, pour y arriver, ça prend des politiques, ça prend des enlignements, ça prend des investissements. Tout l'argent qui est investi en soutien aux entreprises en hydrocarbures, bien, on pourrait-u l'orienter vers d'autres formes d'énergie, vers d'autres formes d'organisation qui nous permettent de sortir du pétrole, pas commencer dans 30 ans? Ça aussi, à Paris, tout le monde est clair, il faut commencer maintenant. Et, dans ce sens-là, on va y arriver, et, entre-temps, bien sûr qu'il y aura du pétrole qui transigera au Québec. Assurons-nous que ce soit le plus sécuritaire possible, mais faisons surtout que d'ici cinq, 10, 15 ans, on n'en ait plus besoin.

Des voix : Merci.

(Fin à 9 h 52)