(Seize heures dix-sept minutes)
Le Modérateur
: Alors,
bonjour à tous. Bienvenue à ce point de presse des partis de l'opposition en ce
qui a trait au projet de loi n° 61. Vous entendrez, à tour de rôle,
M. Gaétan Barrette, député de La Pinière et porte-parole libéral pour
le Conseil du trésor, M. Vincent Marissal, député de Rosemont et
responsable solidaire en matière de justice économique et fiscale,
M. Martin Ouellet, député de René-Lévesque et porte-parole du Parti
québécois pour le Conseil du trésor, et finalement M. Guy Ouellet, député
indépendant de Chomedey.
M. Barrette, à vous la parole.
M. Barrette : Alors,
bonjour, tout le monde. Chers collègues, merci d'être là aujourd'hui,
évidemment, après la terminaison de nos consultations publiques sur le projet de
loi n° 61.
Je pense que vous avez remarqué que, et
hier soir et aujourd'hui, nous avons reçu des gens de grande crédibilité et qui
ont levé beaucoup, beaucoup, beaucoup de drapeaux. Il y a tellement de drapeaux
levés qu'on se croirait sur le parterre de l'ONU. Et ce sont des gens, encore
une fois, qui sont d'une grande crédibilité, d'une part.
D'autre part, vous avez constaté, dans nos
consultations publiques, qu'essentiellement tous les groupes, incluant ceux qui
sont en faveur du projet de loi n° 61, s'accordent, peu importe leur champ
d'intérêt, pour dire qu'on n'a pas besoin du projet de loi n° 61 pour
accélérer les projets d'infrastructures. La question a été posée, en tout cas,
moi, je l'ai posée à tout le monde, et tout le monde est unanime, peu importe
leur champ d'intérêt : on peut aller plus vite sans le projet de loi
n° 61, essentiellement en s'assurant que le gouvernement fonctionne
correctement. Et, aux dernières nouvelles, le gouvernement était sous
l'autorité des ministres en question, ce qui n'est pas banal.
Ça nous fait conclure... ça me fait
conclure que ce projet de loi là est d'abord et avant tout un prétexte. Un
prétexte pour faire en sorte que l'on puisse passer de nouveaux pouvoirs
exorbitants, selon certains, et qu'ils soient permanents. Le dénominateur
commun de tout ce projet de loi là est exactement ça : l'accession à des
pouvoirs exagérés de façon permanente, peut-être à l'exception de l'état
d'urgence, mais l'état d'urgence, lui, est clairement instrumentalisé. Ça a été
dit vraiment comme ça, même par le Barreau, l'état d'urgence devient un moyen,
ça devient un outil. Même que le président du Conseil du trésor l'a dit :
pour lui, c'est un outil de prévisibilité. Il faut le faire : l'état
d'urgence devient un outil de prévisibilité.
Je réitère un point. M. Dubé s'est
présenté comme CPA, le premier ministre l'a dit lui-même, ce sont censés être
des gens rigoureux, donc on ne peut conclure qu'il ne savait pas que le projet
de loi n° 50 était pour autre chose... pas le projet de loi n° 50,
pardon, mais 61, pour l'article 50, était autre chose qu'une vaste étendue
de pouvoirs. Et de nous dire aujourd'hui que c'est là juste pour
l'article 15 de Charbonneau, non, on ne peut pas croire ça. Alors, d'où la
conclusion que j'ai tirée.
Alors, vous, au moment où on se parle, vous
disposez d'une liste d'amendements... pas d'amendements, pardon, d'articles que
nous souhaitons voir retirer ainsi que d'éléments que nous souhaitons voir
ajouter.
À l'étape où on est rendus, où clairement,
pour nous, ce projet de loi est un prétexte, si ce projet de loi là est pour
avancer avec l'assentiment des oppositions, et je le répète, nous sommes tous
pour l'augmentation de l'activité économique, bien, il faudra réécrire certains
articles.
Ce que nous prenons comme position aujourd'hui,
essentiellement, c'est de dire au gouvernement : Vous voulez qu'on débatte
d'un projet de loi? Ce projet de loi là, tel qu'il est écrit, on ne peut pas
aller de l'avant. On vous invite à réécrire certains articles, dont vous avez
copie aujourd'hui. Vous savez lesquels dont on parle.
Et, le dénominateur commun de tout ce que
l'on dit, c'est qu'on ne rognera pas sur nos principes. Que ce soit sur la
rigueur, que ce soit sur les contrôles, que ce soit sur l'environnement, nous
souhaitons... que ce soit sur des pouvoirs recherchés, nous souhaitons que le
gouvernement arrive avec une nouvelle base de discussion. Alors, la liste, vous
l'avez. Et comme je l'ai dit il y a un instant, avant de passer la parole à mes
collègues, nous sommes pour l'augmentation de l'activité économique.
Et je termine en posant une question très
simple au gouvernement, pour laquelle on attend une réponse : Quels sont
les projets, là, quels sont — qu'on les identifie — les
projets que l'on peut lancer maintenant sans contrainte? Moi, je pense que c'est
la majorité des projets, ce qui va encore dans le sens de ce que je vous ai
dit, ce projet de loi là est un prétexte.
On peut aller plus vite dans le mode de
fonctionnement actuel en respectant les principes qui nous régissent depuis des
années et qui sont le résultat de beaucoup de travaux. On n'a pas à tourner les
coins ronds ni à affaiblir notre corpus législatif. Merci.
Le Modérateur
:
M. Marissal.
M. Marissal : Oui, merci.
Bonjour. Merci d'être là. Alors, comme le député de La Pinière vient de le dire,
on fait une sortie commune, aujourd'hui, parce que nous avons constaté
unanimement, et c'est le cas de l'immense majorité des groupes, en tout cas,
des groupes qu'on pourrait qualifier, là, de chiens de garde ou de
contre-pouvoirs, nous constatons avec eux que ce projet de loi est non
seulement malhabile, mais il est inadéquat. Il est peut-être même, en ce qui me
concerne, dangereux à certains égards parce qu'il va beaucoup trop loin. Il
cache vraisemblablement des intentions du gouvernement quant aux réelles
intentions. Il n'est pas nécessaire, c'est important de le redire.
Et c'est drôle parce que nous sortons
justement, en ce moment, de la dernière comparution, qui était la Vérificatrice
générale, je vous invite à aller relire son mémoire si vous n'avez pas écouté
tout à l'heure, c'est éloquent, encore une fois. La Vérificatrice générale qui
est une femme de peu de mots, qui pèse ses mots, qui est venu nous dire, comme
bien d'autres avant elle, qu'elle est extrêmement inquiète pour plein de
raisons, notamment parce que ce gouvernement n'a pas les contrôles nécessaires,
par exemple, dans l'octroi des contrats, n'a pas les contrôles nécessaires dans
le suivi, dans les analyses. Je pense, par exemple, au ministère des
Transports, mais je pense aussi et surtout, ça ne vous étonnera pas, à
l'environnement. Nous sommes, à ce jour, encore très inquiets d'une dilution
des évaluations environnementales qu'on ferait en catastrophe au ministère de
l'Environnement pour pouvoir aller plus vite.
Alors, c'est le mot-clé de ce projet, tel
que vendu par le gouvernement, «plus vite». Mais plus vite, ça ne veut pas dire
tout croche, ça veut dire qu'on doit le faire dans l'ordre. Effectivement, nous
sommes tous pour la relance économique du Québec, ça va de soi.
Alors, on demande au gouvernement
essentiellement d'aller refaire ses devoirs, de retourner à la table à dessin
et aussi peut-être de changer un peu la rhétorique. Le président du Conseil du
trésor nous tend la main, il nous a encore une fois tendu la main, même à la
toute fin des audiences des témoins tout à l'heure à la Commission des finances
publiques, nous remerciant pour notre collaboration. Bien, soit, il faut que ça
soit plus que des mots. Collaborons, de fait, collaborons, mais la balle est
dans le camp du gouvernement, qui nous a pondu un projet de loi bancal et
peut-être mal intentionné.
Il faut le réécrire à bien des endroits.
Vous avez la liste, comme l'a dit M. Barrette, alors il y a une longue
liste de préoccupations que nous voulons revoir. Et on demande au gouvernement,
à ce moment-ci, de refaire ses devoirs.
Et je demanderais au premier ministre de
changer sa rhétorique un peu simplette selon laquelle, si on s'oppose, c'est qu'on
est contre la relance économique du Québec. C'est insultant pour les gens qu'on
représente. On représente des gens qui veulent que le Québec reparte, et nous
sommes les porte-voix de ces gens-là. Et, encore ce matin, le premier ministre
essayait de brader nos principes contre des routes, ou contre des écoles, ou
contre des maisons des aînés, ou contre des lignes de métro. Alors, peut-être
que M. Dubé et M. Legault devraient se parler aussi pour ajuster leur
discours de collaboration. Merci.
Le Modérateur
: M. Ouellet.
M. Ouellet : Merci.
Donc, à mon tour de joindre ma voix avec les collègues. Évidemment, pour le
Parti québécois, le projet de loi n° 61 est inacceptable dans sa forme. On
reçoit des courriels de citoyens et de citoyennes. Il y a des mobilisations, il
y a des pétitions qui sont en ligne. Bref, tout le monde nous dit : Stop,
projet de loi n° 101... 61, pardon.
Qu'est-ce qu'on veut faire aussi? On veut
protéger trois choses. Ce qu'on cherche à faire, nous, c'est d'abord protéger
les contribuables. On veut protéger aussi nos principes d'éthique et la bonne
gestion. Et surtout on veut protéger la façon dont le gouvernement veut se
donner beaucoup plus de pouvoir. Pour nous évidemment aussi, la protection de
l'environnement est un enjeu fondamental dans ce projet de loi là, n° 61.
Nos demandes sont assez connues, mais je
vais quand même vous les résumer très brièvement. On voudrait qu'il retire les
pouvoirs élargis de contourner des lois, on voudrait qu'il retire aussi l'état
d'urgence prolongé de façon... indéfiniment, et surtout qu'il retire l'immunité
de poursuite qui est, elle, élargie. À cela, on aimerait aussi que le
gouvernement ajoute des mesures de reddition de comptes, des pouvoirs accrus à
l'AMP comme rempart des contrats publics pour pouvoir enquêter et avoir la capacité
d'enquêter beaucoup plus intensément. Et on aimerait aussi avoir un suivi plus
serré de la Vérificatrice générale sur chaque projet qui auront bénéficié de
mesures accélérées.
Alors, pour nous, si le gouvernement
répond à nos demandes, refait ses devoirs, représente un projet de loi, ça va
nous faire plaisir de l'étudier, d'en débattre et peut-être de l'adopter.
Cela étant dit, il y a une chose, et
celle-là elle est fondamentale pour nous, il n'est pas question qu'on rogne nos
principes ou qu'on marchande nos principes dans ce projet de loi là. À toutes
les fois qu'on a posé des questions — et ce n'est pas juste le Parti
québécois, c'est les autres collègues aussi — à l'Assemblée
nationale, qu'on a posé des questions sur des articles litigieux, ce qu'on
s'est fait répondre, c'était un marchandage pour les projets qui étaient dans
nos circonscriptions. Alors, il y en a 202, il pourrait y en avoir 400, il
pourrait y en avoir... écoutez, le PQI au complet aurait pu être mis dans le projet
de loi, mais, c'est fondamental pour nous, on n'embarquera pas dans ce
marchandage et on n'embarquera surtout pas dans ce jeu de négoce que le gouvernement
nous demande, plus de pouvoirs pour des routes, des ponts et des écoles. La
réponse, c'est non, et c'est ce qu'on vient porter aujourd'hui au gouvernement.
Merci.
Le Modérateur
: M. le
député de Chomedey.
M. Ouellette : Être le quatrième,
il faut éviter les répétions. Je pense que le Centre québécois de droit à
l'environnement a résumé les trois journées de consultations qu'on vient d'avoir
dans une simple phrase : Le projet de loi n° 61... c'est de conserver
l'intégrité des principes de l'État de droit. C'est ça qui est bafoué par le
projet de loi n° 61. Et je pense que c'est ça que les citoyens... il y a
au-dessus de 100 000 citoyens, là, qui ont signé une pétition — qui
va être remise au ministre des Finances dans les prochaines minutes, si ce n'est
pas dans les prochaines heures — au cours des deux dernières
journées.
Et on a entendu aujourd'hui la Vérificatrice
générale, on a entendu le Barreau, on a entendu la Protectrice du citoyen, la
machine, le gouvernement, les ministères ne sont pas prêts. Ils sont en
arrière. Le gouvernement, politiquement, est sur une ligne de départ, veut tout
bousculer, comme c'est à son habitude des deux dernières années, mais la
machine n'est pas prête.
La Vérificatrice générale a déposé un
rapport, mercredi dernier. Je lui ai fait dire que la vérification qu'elle
avait faite du temps de la sous-ministre, Mme Savoie, en 2016... elle a fait
une vérification en 2017, le gouvernement a été obligé d'envoyer l'Autorité des
marchés publics, en novembre 2019, faire une vérification sur la gestion
contractuelle du MTQ. Et, dans son mémoire, que je vous encourage à lire, elle
mentionne que les ministères lui font des cachettes, ne lui donnent pas accès
aux documents. Donc, la reddition de comptes, c'est très préoccupant.
Donc, je partage les préoccupations de mes
collègues, et je pense que le président du Conseil du trésor s'est montré
ouvert, disant que tout était perfectible. Je me suis posé une seule et unique
question : Pourquoi toutes ces choses-là? Par une simple consultation, que
ce soit des Premières Nations ou des autres, il y aurait pu y avoir déjà
plusieurs amendements ou un projet de loi beaucoup mieux étoffé que celui qui
nous a été déposé mercredi dernier. Merci.
Le Modérateur
: On va
passer aux questions. Simplement mentionner à qui s'adresse votre question.
Mme Crête (Mylène) :
Moi, j'aurais une question pour M. Ouellette, si vous ne quittez pas le
micro. Vous êtes député indépendant. Avez-vous l'intention de bloquer le projet
de loi n° 61?
M. Ouellette : Je vous
dirai que je suis un des 125 députés de l'Assemblée nationale. Je
représente les citoyens de la circonscription de Chomedey. Je partage les
préoccupations de mes collègues. D'ailleurs, on est tous les quatre ici, et je
pense que c'est une demande commune qui a été faite au président du Conseil du
trésor. Comme la vice-présidente... comme la vice-première ministre me l'a déjà
dit lors du projet de loi n° 1, on est tributaire des décisions qu'on
prend, et on vit avec les décisions qu'on prend. Et je me gouvernerai en
conséquence, en fonction de la suite des événements.
M. Dion (Mathieu) :
Dr Barrette, peut-être... Tantôt il y a eu des suggestions d'amendements,
là, qui ont été évoquées, là, par M. Dubé, à la fois pour l'urgence
sanitaire et l'article 50. Ce qu'il évoque, est-ce que c'est suffisant
pour vous?
M. Barrette : Regardez,
nous, là, on est rendus à une étape de la progression de ce projet de loi là où
on a entendu parler tout le monde. Tout le monde est venu nous dire que 61
n'était pas nécessaire. Tout le monde est venu nous dire que 61 comprenait des
exagérations. Les organismes qui sont indépendants nous ont dit : C'est
dangereux. Alors, nous, si on est pour avancer et débattre du principe du
projet de loi — j'insiste, le principe du projet de loi — on
veut débattre du principe d'un projet de loi qui soit acceptable. Actuellement,
le texte rédigé comme il est, bien, on ne peut pas débattre de ce principe-là
tel qu'il est rédigé. Pour nous, c'est inacceptable.
On vous a fait la liste des articles qui
sont inacceptables. Je vais vous donner un exemple. Si M. Dubé souhaite
écrire un article pour mettre en application 15 de Charbonneau
spécifiquement, qu'il retire 50 et qu'il écrive l'autre article. On ne
débattra pas le principe de donner à un gouvernement des pouvoirs accrus
illimités pour toujours. C'est ce que le gouvernement cherche par le prétexte
de 61, se donner des pouvoirs excessifs et permanents.
Nous sommes pour la relance économique.
Nous sommes pour débattre le principe d'un projet de loi, mais pas celui-ci qui
est écrit comme ça. On a dit tout ce qu'on avait à dire, et qu'ils réécrivent
les articles qui ont été écrits. Et nous exigeons qu'ils écrivent un article,
au moins, additionnel, sur les pouvoirs de l'AMP, qui, pour nous, doivent être
équivalents au bureau d'inspection de Montréal, qui a des pouvoirs décrétés par
la loi et aussi par la municipalité.
Jacques Duchesneau, Me Bishop, la Vérificatrice
générale sont venus nous dire leurs inquiétudes. Vous l'avez entendue aujourd'hui,
Mme la Vérificatrice générale, sa plus grande inquiétude est au municipal,
faute de contrôle. Le mot «contrôle» est le moteur de l'inquiétude de tous ceux
qui sont venus nous parler avec cette expertise-là. Le contrôle passe par des
pouvoirs donnés à quelqu'un qui a les ressources nécessaires pour exercer ce
contrôle-là. Pour nous, c'est fondamental, d'autant plus que la Vérificatrice
générale nous dit : Actuellement, il y a des problèmes chez ceux qui
contrôlent dans l'État. L'État n'est pas à la bonne place pour faire cette
job-là. On veut l'accélérer, l'amplifier. On n'a pas les outils. Allô, la Terre?
C'est simple, là.
M. Bellerose (Patrick) :
En même temps, si on modifie la quinzaine d'articles que vous avez identifiés,
le projet de loi est quand même vidé de son sens. Qu'est-ce qu'il reste dans le
projet de loi qui serait nécessaire à la relance économique?
M. Barrette : Nous
sommes... Bien, si le projet de loi avait été accepté sans les
15 articles, débattu sans les 15 articles, on peut bien le débattre,
là. Les autres articles n'ont probablement pas la portée recherchée par le gouvernement.
Mais, je le répète, si on est pour débattre le principe d'un projet de loi, le
principe, c'est un mot qui a une force. Le principe, là, fait référence à des
valeurs, fait référence aux citoyens, à la démocratie. Si on est pour débattre
du principe, on va débattre du principe d'un texte avec lequel on est
confortables, et actuellement vous avez une liste d'articles avec lesquels nous
ne sommes pas confortables, et il en manque au moins un, qui est celui des
pouvoirs de l'AMP.
M. Bellerose (Patrick) :
Est-il possible de régler le dossier d'ici la fin même de la semaine prochaine?
C'est quand même très important, ce que vous demandez comme réécriture, là, du projet
de loi.
M. Barrette : Écoutez,
moi, je vous dis une chose. J'ai été au gouvernement, là. Ils ont une armée de
légistes, ils savent très bien comment ça s'écrit, ces textes-là. Le président
du Conseil du trésor, à répétition, a dit : Ce n'est pas politique, c'est
légiste. Les légistes étaient sur place et ont pris des notes. Je ne veux pas
leur imposer du travail, mais ils sont capables. Je le sais, je l'ai vu. Alors,
ils savent où aller, ils ont des gens compétents pour rédiger. Qu'ils rédigent,
ça va me faire plaisir d'avancer après. Au moment où on se parle, ne serait-ce
que pour des questions de principe, c'est le cas de le dire, on n'avancera pas maintenant.
Mme Lévesque (Fanny) :
Vous avez une liste assez longue, là, vous demandez le retrait, donc vous
voulez qu'on les retire carrément ou vous voulez qu'on les réécrive de façon
plus convenable? Qu'est-ce que vous voulez?
M. Barrette : On ne peut
pas réécrire quelque chose sans l'avoir retiré à l'avance. Alors, on demande à
ce qu'on les retire, et qu'on les réécrive. Non, nous n'accepterions pas de
garder l'article 50 en disant : Oui, on va faire, entre autres, notamment,
virgule, l'application de la recommandation n° 15 de la commission
Charbonneau. Non. Nous n'accepterions pas de débattre, parce qu'ils sont
majoritaires, un article qui va leur donner des pouvoirs excessifs pour toujours.
Je le répète, ce projet de loi là n'en est
pas un d'infrastructures, c'est un prétexte pour se donner des pouvoirs permanents,
excessifs parce qu'on a un gouvernement qui le dit à répétition, il n'aime pas
ni le parlementarisme ni les règles qui nous gouvernent. Il trouve ça
compliqué. Ils veulent essentiellement... et M. Dubé l'a dit aujourd'hui,
il l'a dit en point de presse ce matin, ici, dans cette pièce :
Excusez-moi si vous m'avez mal compris, le projet de loi, l'article 50 que
j'ai écrit, vous avez pensé que je voulais faire toutes sortes de choses, je me
suis trompé, quasiment, tout ce que je veux faire, c'est 15. Bien, voyons donc!
c'est un CPA, là, il sait comment ça marche, la loi, puis ainsi que ses
avocats, là. Ils savent très bien que, quand on écrit ça, on sait tous qu'est-ce
que ça veut dire, c'est d'aller là.
Mme Lévesque (Fanny) :
Qu'est-ce qui arrive si le gouvernement ne va pas dans le sens de vos demandes,
si on ne répond pas à toutes ces exigences-là?
M. Barrette : Au moment
où on se parle, ce que je constate, c'est que les gens qui sont venus nous voir
sont affirmatifs et, je dirais, uniformes : on peut avancer dans les
dossiers d'infrastructures, dans les projets, sans 61.
Je demande qu'on nous indique pourquoi 61
est nécessaire pour chacun des dossiers. Combien de dossiers, actuellement, de
projets peuvent être faits sans 61? Moi, je vais vous le dire, c'est plus que
la majorité, et je vais le répéter.
Aujourd'hui, ce qu'on nous propose dans
les 202 articles, c'est de dépenser en moins d'années un PQI qu'on prévoit
sur 10 ans. Parfait. Vous voulez dépenser combien de millions de
dollars? Dites milliards de dollars, dites-le, quels sont les projets,
lancez-les. Les projets vont avancer à la vitesse grand V. Le premier
facteur de ralentissement de l'avancement d'un projet, c'est le gouvernement
qui le ralentit par son budget et ses procédures internes. Alors, qu'il
simplifie ses procédures, et c'est très simple à faire, et ça va avancer très
vite, d'où le prétexte.
M. Bellerose (Patrick) :
Donc, le Parti libéral va voter contre le principe, contre le projet de loi?
M. Barrette : On ne
votera pas contre le principe, on n'ira pas au principe s'il n'y a pas de
changement. Ça, c'est clair. Puis là je parle en mon nom, je pense que je parle
au nom des autres. Alors, on ne peut pas être plus clairs que ça. Nous sommes
pour l'augmentation de l'activité économique par le biais de la construction.
Ce n'est pas un plan de relance économique. Nous ne braderons pas nos principes
pour ça, alors qu'on réécrive ce qui est inacceptable et on va avancer.
En même temps, en même temps, faites-nous
la preuve que la majorité des projets ont besoin de 61, preuve qui n'est pas
faite. La preuve du contraire l'a été par tous ceux qui sont venus nous voir,
et nous voulons que l'AMP ait des pouvoirs accrus avec des ressources équivalentes
au BIG de Montréal, qui est l'organisation d'inspection et d'enquête qui a le
plus de pouvoir à l'extérieur du gouvernement.
Mme Crête (Mylène) :
L'article sur la prolongation de l'état d'urgence sanitaire, est-ce qu'il peut
être réécrit? C'est-à-dire, est-ce qu'il a une durée acceptable...
M. Barrette : Je vais
paraphraser Me Grondin, qui l'a tellement bien dit. Quand on s'arroge des
pouvoirs extraordinaires, il doit y avoir un inconfort pour le gouvernement.
Quelles sont les raisons que le gouvernement invoque pour se donner ces
pouvoirs-là? Ha! vous savez, hein, c'est compliqué revenir aux 10 jours,
hein, vous savez, le parlement va fermer cet été, il ne faudrait pas qu'on...
Ils veulent leur confort. La CAQ est un parti de réformes parlementaires.
Toutes les règles, tous les obstacles, tout le parlementarisme, il faut balayer
ça. C'est comme M. Legault : Ah! les commissions parlementaires... Bah!
écoutez, l'urgence sanitaire... C'est ça, la réalité.
C'est comme 14, rappelez-vous 14. Au
moment où on se parle, on a passé un projet de loi dans les infrastructures de
technologie qui fait en sorte qu'il n'y a plus d'appels d'offres. On fait des
appels d'intérêt, après on donne un catalogue, puis c'est du gré à gré. C'est
ça, la CAQ. C'est un parti de réformes parlementaires. On ne rate jamais l'occasion
pour se donner des pouvoirs et d'extraire, de retirer les projets de l'examen
des parlementaires. Or, le Barreau l'a dit aujourd'hui, il ne pouvait pas être
plus clair que ça, le Barreau : Notre démocratie est basée sur les
pouvoirs et les contre-pouvoirs, et ce projet de loi là affaiblit les
contre-pouvoirs. Tout le monde a dit la même chose.
Des voix
: ...
Une voix
: ...je serais
curieuse d'entendre les autres partis...
M. Marissal : ...sur l'urgence
sanitaire, posons-nous la question : Comment se fait-il qu'en quelques
jours à peine on est passés de deux ans à peut-être six mois? Le Barreau est
venu dire : D'habitude, c'est 10 jours, peut-être 30 max. Mais
ce n'est pas automatique, ce n'est pas une lettre à la poste. Comment se
fait-il qu'on ait écrit l'article 50 sur les contrats puis, tout d'un
coup, on dit : Ah! Bien non, excusez, vous m'avez mal compris, je voulais
faire autre chose...
La réalité, là, c'est qu'ils ont voulu
aller trop vite. Ils se sont fait pogner, puis la bonne nouvelle de la semaine,
c'est que les contre-pouvoirs fonctionnent, au Québec, y compris l'opposition. Parce
que tout le monde a levé le flag en disant : Non, non, non, ce n'est pas
vrai qu'on va vous laisser aller là, même pas au nom de la relance économique
du Québec. Ça, c'était un prétexte puis c'était fallacieux.
Alors, posons-nous la question. Comment ça
se fait que ça a été écrit comme ça puis qu'aujourd'hui on voie les premiers
reculs? Et je vous prédis qu'il y en aura d'autres. Ce n'est pas sérieux, là.
Un plan de relance économique après une pandémie comme celle qu'on connaît
encore parce qu'elle n'est pas finie, c'est supposé être sérieux. Ça, ce n'est
pas sérieux.
Des voix
: ...
Mme Crête (Mylène) :
Trois mois comme en Alberta, dans le cas d'une pandémie, c'est acceptable?
M. Barrette : Si vous me
permettez, je vais rajouter un élément. Christian Dubé, aujourd'hui, à
plusieurs reprises, et hier aussi, a invoqué sa rigueur de CPA. Quand qu'on se
présente comme étant rigoureux, on lit ses textes et on comprend ses textes.
Que Christian Dubé ne vienne pas nous dire que, quand il a écrit 50,
c'était juste pour un sujet. Qu'il ne vienne pas nous dire ça. C'est aussi
simple que ça.
À votre question, quand on regarde les
autres provinces, le Barreau l'a dit : Nous sommes dans l'excès par
rapport à tout le monde dans le Canada. Le Barreau l'a dit, là, c'est très
clair. C'est nous autres qui avons la règle la plus ouverte, et, pour le
moment, une étendue dans le calendrier la plus grande. Je comprends qu'on est bons
au Québec, là, mais est-ce que c'est nécessaire d'être les meilleurs dans
l'assouplissement de nos règles? Non, je pense que non.
Des voix
: ...
M. Ouellet : Oui, merci,
Guy. Deux choses. Souvenez-vous, il n'y a pas très longtemps, le directeur de
la santé publique était à la télévision avec le premier ministre et nous disait :
Écoutez, on aimerait ça déconfiner, on aimerait ça prendre... mais vous savez
quoi? On va voir la situation évoluer, ce n'est pas une science exacte, on va
prendre la meilleure décision en fonction de la connaissance terrain, puis,
d'ici deux semaines, on va être en mesure de vous dire c'est quoi.
L'urgence sanitaire, c'est ça. Il n'y a pas de prévisibilité dans l'urgence
sanitaire.
On s'est fait dire, et c'est correct,
pendant la phase du confinement, que la Santé publique regardait la situation,
évaluait et proposait des mesures. Pourquoi le gouvernement veut décréter,
aujourd'hui, là, dans le projet de loi, une urgence sanitaire à l'infini? En
plus, alors que la plupart des règles de confinement sont en train d'être
levées et qu'on va reprendre un certain rythme de vie, différent de ce qu'on a
connu depuis les trois derniers mois, mais quand même un rythme de vie, on
pourrait dire, un peu plus accéléré.
Alors, pourquoi le président du Conseil du
trésor a besoin de prévisibilité sur la santé publique? À part de nous dire :
Bien, vous savez quoi? Les experts nous disent : Il y aurait peut-être
effectivement une deuxième vague cet automne, donc, pour mieux organiser les écoles,
sachant qu'on a décrété, bien, ils vont pouvoir s'organiser pour... Non, non.
Ce qu'on veut, c'est que le gouvernement s'organise pour tous les scénarios. Et
la meilleure façon de le faire, c'est de prendre une décision d'urgence
sanitaire en fonction d'information connue et sue au moment qu'ils
l'apprennent.
Mme Crête (Mylène) :
J'essaie de comprendre. Est-ce que c'est tout ou rien pour vous sur ce
point-là? Si le gouvernement vous arrive avec...
M. Ouellet : Trois mois
ou deux mois, non. Il a le choix : aux 10 jours ou convoque l'Assemblée
nationale pour 30 jours. C'est assez simple. Pourquoi décréter? Parce qu'on
est fermé cet été? Je veux dire, on a trouvé des mesures de distanciation
sociale, on a été capables de se gouverner. Alors, aux 10 jours, s'ils ne veulent
pas nous voir, ou aux 30 jours s'ils veulent passer par le Parlement.
Merci.
M. Ouellette : Le
Barreau a été... Je pense que le Barreau a été très clair. Ils nous ont apporté,
avec leur mémoire, tout ce qui se passe au Canada. Puis les 10 jours, on a
ça au Québec. Ailleurs, ça va jusqu'à 14 puis 28 jours. Ça fait qu'il n'y
a pas d'indéterminé. Puis on a reçu, dans l'indéterminé... L'urgence sanitaire
amène des effets pervers aussi parce que ça permet au gouvernement de passer
des arrêtés en conseil, de ce qu'il veut, comme il veut, quand il veut. Et c'est
en train de créer des dommages collatéraux très importants et de créer des
inégalités chez nos anges gardiens.
On a eu des cris du coeur qui sont venus
hier nous le dire. Dans tous les postes qui sont dans la santé, qui sont sur la
ligne de front, on crée des inégalités. Il y a des démissions, il y a des
changements de profession, et etc. Puis je pense qu'il commence à y avoir une
préoccupation chez nos anges gardiens de ne pas avoir assez de monde pour une
deuxième vague. Donc, c'en est un, effet pervers, ça, qui nous a été porté à
notre attention hier.
M. Barrette : Peut-être
pour conclure sur l'urgence sanitaire, pour conclure, on est en lieu de penser
ou de se poser la question où, au point où on est rendus, est-ce que la Santé
publique, maintenant, est en train d'être instrumentalisée par la politique.
Cette question-là, elle est légitime.
Le Modérateur
: Merci.
Pas de question en anglais? On va sortir à l'extérieur prendre une photo si
vous voulez prendre des photos avec les quatre représentants des oppositions au
foyer. Merci.
(Fin à 16 h 48)