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Point de presse de Mme Françoise David, députée de Gouin

Version finale

Le mardi 23 avril 2013, 13 h

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Treize heures deux minutes)

Mme David: Bien, bonjour. Bon après-midi. La semaine dernière, la première ministre a reçu, dans ses bureaux, des gens d'affaires avec qui elle voulait s'entretenir d'un certain nombre de choses, mais elle en a profité pour tester la température de l'eau en ce qui a trait à un éventuel report de l'atteinte de l'équilibre budgétaire. Alors, ça a fait couler beaucoup d'encre depuis ce temps-là.
À Québec solidaire, nous ne faisons pas partie des gens qui pensent que c'est inconcevable et inacceptable de reporter, ne serait-ce que d'un an, l'atteinte de l'équilibre budgétaire. Je vais revenir là-dessus.
La première chose cependant qui nous a troublés, et Mme Marois récidive cette semaine avec une rencontre avec le Conseil du patronat, c'est qu'elle discute de ce genre de chose, là, la température de l'eau, elle la teste avec les représentants des milieux d'affaires mais pas avec les élus de l'Assemblée nationale. Visiblement, elle ne teste pas ça avec les syndicats, les représentants des groupes communautaires, des groupes de femmes, des écologistes. Non, c'est avec le milieu des affaires que ça se passe. C'est sûr que ça nous amène à nous demander si Mme Marois a besoin de la permission des gens d'affaires pour prendre une décision politique qui affecte chaque jour la vie de toute la population.
Alors, à Québec solidaire, nous proposons à Mme Marois et au gouvernement du Québec, nous proposons une alternative, une manière de discuter qui nous paraîtrait plus démocratique. Nous lui proposons de convoquer la Commission des finances publiques qui serait saisie d'un mandat spécifique, un mandat d'initiative pour évaluer la possibilité de reporter d'un an l'atteinte de l'équilibre budgétaire. Donc, les députés participent à cette commission, et on pourrait aussi y entendre des experts, que l'on souhaite le plus indépendants possible, des milieux d'affaires.
On pense que ça serait fort intéressant et d'autant plus justifié que ce qu'on apprend à peu près aussi depuis une semaine, bien, c'est qu'il y a de plus en plus de grands organismes et de chercheurs qui remettent en question cette idée de l'austérité à tout prix.
Le Fonds monétaire international, qui n'est pas exactement un organisme de gauche, a envoyé, il y a quelques temps, des mises en garde aux gouvernements occidentaux en disant: Écoutez, ça n'a aucun sens. Ce que vous êtes en train de faire, c'est de tuer l'économie de vos pays. Il me semble que ça s'applique aussi au Canada et ça s'applique aussi au Québec.
Joseph Stiglitz est intervenu, bien entendu, et, plus récemment, on apprenait que des chercheurs américains s'étaient trompés dans leurs calculs sur les questions qui touchent le lien entre croissance et déficit budgétaire, et que finalement la base théorique sur laquelle les gouvernements se basaient pour dire: Il faut à tout prix atteindre l'équilibre budgétaire le plus vite possible, bien, cette base théorique, elle est inexistante.
Alors, plein de bonnes raisons pour suggérer vraiment vigoureusement à Mme Marois de reculer, oui - il y a des reculs très honorables dans le monde politique - et de consulter vraiment un ensemble d'experts et les députés qui représentent différentes familles politiques, pour aller de l'avant là-dedans.
Je pense aussi que, du côté des deux oppositions principales, la CAQ et le Parti libéral, une bonne petite réflexion ferait du bien. Voilà des gens qui, eux, en fait, sont indignés par le fait que Mme Marois ose poser cette question, mais, toutes les semaines, moi, je les entends à l'Assemblée nationale critiquer chaque compression dans chaque ministère. Bien là, il y a un problème, là. Il y a vraiment un problème parce qu'on ne peut pas demander à un gouvernement d'atteindre l'équilibre budgétaire dans un an et demi et puis en même temps lui dire: Vous ne pouvez couper nulle part et surtout ne touchez pas au monde des affaires. N'augmentez pas les taxes, n'augmentez pas les impôts, puis, les redevances minières, il ne faut pas les augmenter. Là, vraiment, tout ça, là, ça sonne un peu hypocrite, finalement.
Tout ce que ces partis d'opposition essaient de faire, c'est, dans le fond, de placer le gouvernement dans l'embarras. Ils agissent de façon extrêmement partisane. Nous autres, ce que nous leur demandons, c'est de la cohérence. Si vous voulez vraiment que le gouvernement atteigne l'équilibre budgétaire, trouvez les moyens, des moyens intelligents qui ne feront pas mal à la population, parce que les coupes qu'on connaît depuis plusieurs mois font déjà très mal dans beaucoup de secteurs.
Alors, en résumé, nous allons soumettre, nous, demain une motion lors de la période de questions pour demander que la Commission des finances publiques se penche sur cette question de l'atteinte de l'équilibre budgétaire. Merci.

M. Lavallée (Hugo): Donc, Mme David, vous ne pensez pas qu'effectivement l'atteinte du déficit zéro le plus rapidement possible serait de nature à rassurer les marchés financiers puis les milieux économiques? Parce que c'est un peu l'argument que Mme Marois met de l'avant en disant: Il faut rassurer tout le monde, montrer qu'on a la situation bien en main. Vous ne pensez pas qu'effectivement ça pourrait avoir cet effet bénéfique là si on s'en tenait à l'objectif qui est déjà en place?

Mme David: La cote de crédit du Québec n'a à peu près pas bougé depuis 10 ans, bon an, mal an, coupures, pas coupures, déficits, pas déficits. Donc, moi, je pense qu'on est en train de se créer des épouvantails. C'est toujours pareil. Je me rappelle d'une époque où je faisais partie de groupes qui demandaient l'augmentation du salaire minimum. À chaque fois, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante disait: On a plein de compagnies qui vont fermer. Évidemment, elles ne fermaient jamais. Il y a du gros chantage qui se fait. Là, on voit une mine... enfin, une compagnie minière dans l'uranium qui poursuit le gouvernement du Québec. C'est du chantage éhonté.
Et moi, ce que j'aimerais, c'est que le gouvernement du Québec rassure la population. Les milieux d'affaires, franchement, ils se débrouillent très bien, ils continuent de faire des profits, leurs affaires vont bien. C'est la population qu'il faut rassurer, et cette population-là, en ce moment, elle vit de plus en plus de problèmes au niveau du système de santé, elle en vit dans l'éducation, dans les services sociaux. Vous ne pouvez pas imaginer le nombre de dossiers qui s'accumulent sur mon bureau de députée. Il y a des vrais problèmes en ce moment dans la population, sans parler de l'aide sociale, bien sûr. C'est la population qui a besoin d'être rassurée. Moi, je pense que les milieux d'affaires sont tout à fait capables de vivre avec un report d'un an de l'atteinte de l'équilibre budgétaire. Je vous souligne que, sous M. Charest, l'équilibre budgétaire n'a pas été atteint deux années de suite, et, c'est curieux, les milieux d'affaires n'ont pas tellement protesté.

M. Lavallée (Hugo): Parce que ce matin Mme Ouellet prononçait une allocution, entre autres devant des compagnies minières, puis il y avait effectivement des gens qui sont allés au micro pour lui dire, bon: On a besoin de savoir où le gouvernement s'en va de manière générale, bon, évidemment, dans leur cas, un peu plus spécifiquement quant au régime de redevances minières. Il y avait quand même une certaine inquiétude, là. Vous, vous ne la sentez pas du tout, cette inquiétude-là, ou vous y êtes insensible?

Mme David: Moi, je pense que c'est une très mauvaise pièce de théâtre. Quand les compagnies minières disent: Écoutez, dépêchez-vous, ça ne va pas bien, si ça continue on va fermer nos projets... Allons donc! Le sous-sol québécois regorge de minerais qui sont précieux et qui sont importants pour les compagnies minières. Je pense que c'est tout simplement du chantage, et du chantage. au Québec, on en a déjà connu. À l'âge que j'ai, je me rappelle du coup de la Brink's, là. Ce n'est pas nouveau, ça.
Cependant, il y a quand même un point où je vais être d'accord avec les compagnies minières et avec l'ensemble de la population du Québec de toute façon: À quand la décision? Ça, c'est vrai. On aimerait beaucoup que le gouvernement du Québec la prenne, sa décision, là, sur la hausse des redevances minières et qu'il la rende publique. On approche du mois de mai, le gouvernement est en poste depuis septembre. Il est raisonnable de lui demander de trancher parce qu'il doit trancher là-dedans. Il ne pourra pas faire plaisir à tout le monde. S'il fait plaisir entièrement aux compagnies minières, il va déplaire à une large partie de la population québécoise à qui il a promis de hausser les redevances, et, évidemment, à l'inverse, bien, ça sera les autres qui seront moins contents. Alors, il faut que ce gouvernement-là ait le courage de trancher et qu'il le fasse le plus rapidement possible. Là-dessus, oui.

M. Dougherty (Kevin): Is there a danger of more of hazard, you know, if you say: OK, we are not balancing the budget now, the deficit... we've get out of control? Is that a problem, do you think?

Mme David: No, because we don't say the deficit is not a problem in general. We say: We can add one year and that will be less difficult for the population, because now the population of Québec has many problems with health system, with education, social welfare. So, just add one year and think about how have more money for the State budget. And we have proposals at Québec solidaire, like, yes, to increase the mining...

M. Dougherty (Kevin): Royalties?

Mme David: Royalties, thank you. So, why not? And go as rapidly as you can, take a decision. It's what we say to the Government.

M. Dougherty (Kevin): The federal Government, the Harper Government has done this. They have put off their balanced budget by a year. Do you think that's maybe an example for... I mean, if they can do it.

Mme David: I think you know how I hate the Harper... Pardon?

Une voix: Dislike.

Mme David: Dislike... Non, mais je pense que... en tout cas. I dislike the federal Government, especially that one, but, on this subject, just this one, I think he did the good thing. I have many examples of bad things.
Est-ce qu'il y a d'autres questions? Oui?

M. Chouinard (Tommy): ...

Mme David: Je peux, ça va prendre une minute.

M. Chouinard (Tommy): Mais simplement, donc, je comprends que vous demandez au gouvernement de reporter d'un an le...

Mme David: Ce qu'on demande au gouvernement québécois, précisément, c'est de convoquer la Commission des finances publiques avec un mandat d'initiative qui porterait sur la question suivante: Est-il possible, et à quelles conditions, de reporter l'atteinte du déficit budgétaire d'un an... l'atteinte de l'équilibre budgétaire d'un an et d'entendre des experts à cette commission, de différentes allégeances, indépendants autant que possible, des milieux d'affaires - je pense que les milieux d'affaires ont été suffisamment consultés - et que le débat se fasse entre parlementaires. Donc, ça, c'est la proposition concrète que nous allons faire demain avec une motion.
J'ai aussi souligné le rôle que j'ai qualifié d'un peu hypocrite, là, des deux oppositions qui, à la fois, poussent les hauts cris devant une simple hypothèse de report de l'atteinte de l'équilibre budgétaire, mais qui, en même temps, jour après jour, dénoncent toutes les coupes du gouvernement actuel. Alors, moi, ce que je leur dit, c'est: Là, il faut se décider. Est-ce que l'atteinte de l'équilibre budgétaire, c'est, pour vous, l'objectif le plus important? Bien, si oui, vous allez accepter les coupes qui vont avec, à moins que, par miracle, vous soyez d'accord avec nos propositions qui visent à augmenter le budget de l'État par des moyens comme la hausse des redevances minières ou de remettre en vigueur le crédit d'impôt pour les gains en capital et en dividendes, en agissant, là-dedans, avec souplesse, bien entendu.
Il y en a, des moyens d'aller chercher de l'argent pour le gouvernement du Québec, mais je doute fort que le PLQ et la CAQ soient d'accord avec les moyens que propose Québec solidaire. Donc, on ne peut pas tout avoir dans la vie, et c'est pour ça que nous autres, ce que nous disons, c'est: Vous voyez bien que ça ne marche pas. Vous voyez bien que ça ne marche pas, là, l'équilibre budgétaire.
Pour moi, le meilleur exemple, il est venu la semaine dernière, quand Mme Malavoy a annoncé des nouvelles coupes dans les commissions scolaires et qu'en même temps elle nous a annoncé qu'elle permettait à certaines commissions scolaires d'entrer en déficit ou, celles qui sont déjà en déficit, de continuer d'être en déficit en disant: On pourrait vous donner jusqu'à trois à cinq ans pour rembourser. Mais, écoutez, ça s'appelle comment, ça? C'est du pelletage. Donc, l'État québécois ou le gouvernement Marois pourra annoncer que lui, peut-être, il n'a pas de déficit dans un an, puis, à côté de ça, vous aurez plein d'établissements ou de commissions scolaires en déficit. Ça ne marche pas, là.
Alors, nous autres, ce que nous disons, c'est: Faisons le débat, faisons-le correctement. Est-ce qu'il est permis d'espérer que ça se fasse de la façon la moins partisane possible? Après quelques mois d'expérience, je commence à en douter, mais enfin.

M. Lecavalier (Charles): Quelle est la pire conséquence des mesures d'austérité, à votre avis?

Mme David: Moi, je trouve qu'en ce moment ce sont vraiment les coupes dans des populations vulnérables. Alors, évidemment, je ne vous ferai pas de discours sur l'aide sociale, je l'ai déjà fait quelques fois, mais ça, pour moi, c'est une conséquence néfaste. Bon. Mais il y en a d'autres.
Je vais vous donner un ou deux exemples, très rapidement. Quand j'ai, par exemple, sur mon bureau de comté, le dossier d'une dame de 80 ans qui attend depuis 21 mois sa place dans le CHSLD qui est conforme à sa situation, et que ça fait six fois qu'elle déménage depuis son ACV il y a deux ans... Et pourquoi c'est comme ça? Parce qu'il n'y a plus assez de places dans les CHSLD, le gouvernement précédent en a coupé 5 000. Et le gouvernement actuel n'en remet pas, évidemment, puisqu'il est en mode coupe. Ça, là, c'est un cas, et j'ai travaillé là-dessus avec mon équipe, je me fais dire partout: Mais, vous savez, Mme David, il y en a des centaines de cas comme ça. Bien, ça, ce n'est pas normal.
Quand j'ai, sur mon bureau de comté - deuxième et dernier exemple - des situations de familles avec des jeunes adultes lourdement handicapés, pour lesquels il n'existe à peu près pas de ressources, ni pour eux ni pour leurs parents qui n'en peuvent plus, il y a un problème, là. Et ça, ça touche toutes les couches de la population, là. Bon, les plus riches, j'imagine qu'ils s'arrangent avec toutes sortes de services privés, mais la classe moyenne est très, très touchée par ce que je vous dis là. Ce n'est pas seulement des gens pauvres, là. Ils ne savent plus à quel saint se vouer.
Ça, ce sont des vrais problèmes, des vrais, vrais problèmes qui, parfois, par exemple, vont amener des femmes, des mères de famille à laisser leur emploi parce qu'il faut qu'il y ait quelqu'un à temps plein à la maison pour s'occuper de cette personne handicapée. Laisser un emploi, bien, ça veut dire moins d'argent pour la famille, ça veut dire de l'endettement, ça veut dire des difficultés financières puis, bien entendu, ça veut dire moins d'impôts puis de taxes pour l'État. Ce sont des mauvaises décisions, c'est une mauvaise façon de concevoir les services publics.
Alors, moi, je pense que des conséquences, il y en a tous les jours auprès des populations que je rencontre. Manque de places en logement social, c'est criant, vous ne pouvez pas imaginer à quel point. Alors, tout ça, ça fait des gens pauvres, isolés, désespérés, qui surconsomment des médicaments, qui surconsomment des services de santé. Puis ça, si vous saviez comment tous les chercheurs en politique publique le savent et le disent depuis, dans mon expérience, à peu près 40 ans.
Ça fait que peut-être qu'il serait temps qu'on ait un gouvernement, surtout un gouvernement qui se dit social-démocrate, là, qui dise: O.K., on va investir dans les services publics, on va créer de l'emploi avec ça puis on va aussi faire en sorte que les familles québécoises vivent normalement, même celles qui ont des jeunes, des enfants ou des parents en difficulté. Donc, il y a un aspect économique, mais il y a un aspect humain aussi, dont il faudrait aussi parler de temps en temps.

M. Chouinard (Tommy): Vous avez eu une conversation avec Mme Marois la semaine dernière?

Mme David: Eh! Mais vous savez tout!

M. Chouinard (Tommy): Bien, je... mais est-ce que... C'est parce que j'ai vu quelque chose passer sur Twitter à ce sujet-là, pour tout dire.

Mme David: Pardon?

M. Chouinard (Tommy): J'ai vu quelque chose passer à ce sujet-là sur Twitter. Vous avez parlé à Mme Marois. Est-ce qu'elle a évoqué avec vous, d'une façon ou d'une autre, un report éventuel?

Mme David: Jamais.

M. Chouinard (Tommy): Jamais? Est-ce que le déficit zéro, ça a fait l'objet de...

Mme David: Pas du tout. Mme Marois m'a téléphoné, en fait. Soyons clairs, là. Moi, j'étais malade à la maison. Mais elle m'a téléphoné comme elle appelait les autres chefs de partis parce que c'était le matin en fait du jour où elle voulait présenter une motion unanime ou une déclaration unanime, là, à l'Assemblée nationale sur la Constitution. C'est pour ça qu'elle m'a téléphoné. C'est de ça qu'on a parlé. Quand elle a eu... puis ça a été très court parce que j'étais d'accord, puis il n'y avait pas de problème.
Quand on a eu fini de parler de ça, je lui ai dit: Me donnez-vous 30 secondes de plus? Elle m'a dit oui. Je n'avais pas beaucoup de voix, j'avoue, donc je lui ai juste dit: Mme Marois, l'aide sociale. Et là elle m'a tenu le même discours que Mme Maltais. Ça a duré deux minutes, et puis j'ai dit: Bon, bien, c'est correct. Merci et au revoir. C'est tout. C'est tout, vraiment, là. Merci messieurs.

(Fin à 13 h 20)

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