(Neuf heures trente-deux minutes)
M.
Turcotte
:
Donc, on tenait à faire un point de presse aujourd'hui, avant l'interpellation
que je ferai au ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, dans quelques
minutes au salon bleu, sur la question des carrefours jeunesse-emploi, parce
que le ministre a annoncé une modification majeure dans la mission des
carrefours jeunesse-emploi, qui fait en sorte qu'on a deux jeunes qui sont ici
avec moi : Myriam Croussette et Kevin Lacasse.
Donc, Myriam a eu des services du carrefour
jeunesse-emploi, et Kevin a des services, à l'heure actuelle, du carrefour
jeunesse-emploi, rt c'est deux exemples de jeunes qui, avec la réforme proposée
par le ministre, n'auraient pu accès ou n'auraient pas eu accès aux services
des carrefours jeunesse-emploi du Québec. Il faut savoir actuellement qu'il y a
60 000 jeunes par année qui sont aidés par les carrefours jeunesse-emploi.
Avec la réforme, c'est 40 000 jeunes sur les 60 000 qui seront mis de
côté.
Ironie du sort, l'ancien premier ministre
du Québec, le premier ministre Jean Charest, se disait fan numéro un des carrefours
jeunesse-emploi. Il aurait aimé être celui qui crée les carrefours
jeunesse-emploi, il aurait aimé que ça soit son parti politique qui crée les
carrefours jeunesse-emploi. C'est encore une autre ironie du sort, c'est son
parti politique, à l'heure actuelle, qui veut mettre fin à la mission, à
l'originalité, à la particularité des carrefours jeunesse-emploi, qui font leur
force, qui amènent les résultats qu'on connaît, quand on voit que finalement le
coût des carrefours jeunesse-emploi n'est pas un coût, c'est plutôt un
investissement… ça rapporte plus à l'économie québécoise puis à l'État québécois
d'avoir les carrefours jeunesse-emploi que de ne pas avoir les carrefours
jeunesse-emploi.
J'aimerais aussi rappeler que le ministre,
M. Blais, n'a toujours pas visité son carrefour jeunesse-emploi de sa
circonscription, malgré des invitations répétées. J'ai eu l'occasion hier de le
faire. J'ai eu l'occasion aussi de rencontrer des jeunes de carrefours
jeunesse-emploi de Pierre-De Saurel, d'Iberville—Saint-Jean, de d'autres jeunes
de Québec, mais aussi des jeunes un peu partout au Québec, des gens des carrefours
jeunesse-emploi, qui m'ont témoigné et qui me témoignent encore… D'ailleurs, il
y en aura une vingtaine de jeunes qui seront avec nous à l'interpellation
aujourd'hui, qui m'ont témoigné de l'apport inconsidérable des carrefours
jeunesse-emploi pour leur cheminement professionnel, pour leur cheminement
académique, pour faire en sorte que ces jeunes-là puissent se lever chaque
matin et avoir le goût de faire leur travail, d'avoir un emploi de qualité qui
les valorise comme personne.
Avec les chiffres de l'emploi qui sont
sortis aujourd'hui, on voit que, depuis l'arrivée au gouvernement du Parti
libéral, 82 000 emplois temps plein ont été perdus. On n'a pas les moyens
de mettre de côté un outil aussi important que les carrefours jeunesse-emploi
qui aident actuellement des jeunes à se trouver un emploi ou à se chercher un
emploi. On n'a pas les moyens de mettre de côté aucun jeune et aucun outil qui
aide nos jeunes à se trouver un emploi quand on voit des chiffres aussi
catastrophiques que 82 000 emplois de perdus à temps plein depuis avril
dernier.
Donc, je vais céder la parole à Myriam qui
va nous faire un témoignage de son passage au carrefour.
Mme Croussette (Myriam) : Oui.
Bonjour. Dans le fond, moi, je suis Québécoise d'origine puis j'ai été aux États-Unis
pour faire mes études, dans le fond, j'ai eu un baccalauréat et puis une M.B.A
des États-Unis. Et puis je suis revenue au Québec pour des raisons financières,
parce que j'avais besoin de subvenir à mes besoins.
Et puis pourquoi le carrefour jeunesse-emploi?
Dans le fond, c'est parce qu'en ayant un… Je pouvais faire ma recherche
d'emploi efficace tout en travaillant pour subvenir à mes besoins, comme je
disais. Et puis, aux États-Unis, la recherche d'emploi est vraiment différente
du Québec. Donc, c'était vraiment pour réapprendre un petit peu la culture de
la recherche d'emploi au Québec.
Ce que m'a apporté le carrefour
jeunesse-emploi, dans le fond, c'est vraiment très simple, ça va sonner cliché,
mais c'est que j'ai pu décrocher l'emploi de mes rêves, qui
était — ce qui est un petit peu notre sport national — qui
était d'entraîner dans le sport du hockey. Donc, c'est un milieu très fermé
puis probablement dominé à 95 % par les hommes. Donc, si je n'avais pas eu
le soutien du carrefour jeunesse-emploi, ça n'aurait probablement pas été
possible de décrocher cet emploi-là. Donc, c'est vraiment ça, je trouve que c'est
vraiment important d'avoir les soutiens du carrefour jeunesse-emploi pour
vraiment nous guider, nous structurer, nous pointer où aller. Donc, si on perd
ce service-là, je pense que ça va être vraiment une erreur monumentale. Donc,
je vous invite à vraiment inciter le soutien des carrefours jeunesse-emploi.
Merci.
M. Lacasse (Kevin) : Bonjour, tout
le monde. Moi, ça fait trois ans que je bénéficie de services au carrefour
jeunesse-emploi. J'ai fait mon orientation là-bas après avoir travaillé dans
différents domaines. Je ne trouvais plus ma place, je n'avais plus ma chaise.
Donc, j'ai eu la chance de rencontrer une très bonne conseillère en orientation
qui m'a permis de terminer mon secondaire, retourner à l'école pour étudier en
éducation spécialisée, où j'étudie présentement au cégep de Sainte-Foy.
Comme je disais, ça fait trois ans que je
suis au carrefour. Je bénéficie toujours de services qui me donnent un coup de
main pour m'accompagner dans mon cheminement scolaire. Au fil du temps, je me
suis rendu compte que, pour moi, le carrefour, c'est un petit peu comme un
cabanon. Un cabanon, c'est un espace supplémentaire d'entreposage quand la
maison déborde. C'est un endroit où on y stocke nos outils, parce que, pour
moi, c'est ça, le carrefour jeunesse-emploi, c'est une possibilité pour les
jeunes d'avoir des outils pour mener à terme leurs choix de carrière, donc éventuellement
leur vie.
Ça peut paraître cliché, mais, des fois,
notre cabanon, c'est un endroit de ressourcement. Des fois, on a besoin d'être
seul, on a besoin de réfléchir, on a besoin de bricoler sur un projet. Encore
une fois, c'est une autre opportunité que le carrefour jeunesse-emploi donne
aux jeunes parce que le carrefour met les jeunes en avant-plan, en premier
lieu. Donc, c'est le jeune qui va être maître de son parcours.
Avec la décision du gouvernement, présentement,
moi, je vais perdre mes services à compter du 1er avril qui s'en vient. Je vous
dirais que l'accompagnement que j'ai au carrefour a été comme une sorte de
bouffée d'air, quelque chose qui m'a gonflé à bloc et qui a fait en sorte que,
si je n'avais pas eu ces gens-là dans mon parcours, je n'aurais probablement
pas terminé mon secondaire V et je ne serais probablement pas allé au cégep, parce
que, pour moi, le cégep, c'était juste beaucoup trop gros. Donc, je tiens,
encore une fois, à remercier les artisans du carrefour qui donnent un coup de
main à la majorité des jeunes qui sont dans le besoin au Québec. Merci.
M.
Turcotte
: Donc,
en terminant, avant la période de questions, ce que j'aimerais rappeler, c'est
qu'avec la réforme proposée par le ministre tous les jeunes de moins de 18 ans
n'auront plus accès aux carrefours jeunesse-emploi. Tous les jeunes qui ne sont
pas à l'aide sociale ou qui ne sont pas sur l'assurance-emploi n'auront plus
accès à l'aide des carrefours jeunesse-emploi. Donc, un jeune qui a un travail
précaire, qui veut avoir un emploi de meilleure qualité, ne pourra plus avoir
de service aux carrefours jeunesse-emploi. Un jeune qui ne peut pas avoir de
l'aide sociale, parce que ses parents gagnent un peu trop ou parce que le jeune
est sans adresse — un itinérant, par exemple, j'ai des cas dans
ma circonscription qui ont été aidés, qui s'en sont sortis à cause de l'aide du
carrefour jeunesse-emploi — ces jeunes-là n'auront plus accès.
Donc, c'est les 40 000 jeunes, sur
les 60 000, qui seront mis de côté par la réforme proposée par le
ministre. Donc, je demande, puis c'est pour ça aujourd'hui qu'on fait
l'interpellation, pour que le ministre réalise, comprenne l'ampleur de la
réforme qu'il propose, pour qu'il puisse recorriger le tir et faire en sorte
que tous les jeunes au Québec soient aidés. Donc, je vous remercie beaucoup.
Est-ce qu'il y a des questions?
Mme Montgomery (Angelica)
:
O.K. Bien, je vais commencer en français pour M. Turcotte. On vient d'apprendre
que le Québec a perdu 100 000 emplois à temps plein. Est-ce que je
pourrais avoir votre réaction?
M.
Turcotte
:
Bien, c'est 82 000 emplois qui ont été perdus à temps plein depuis
l'arrivée au pouvoir du gouvernement libéral. C'est clair que c'est un désastre
pour le Québec. 82 000 emplois, quand le gouvernement libéral, le Parti
libéral, en campagne électorale, s'était engagé à créer 250 000 emplois
durant le mandat, on est vraiment loin de la création du 250 000 emplois,
surtout quand on sait que leur politique économique est basée sur le Plan Nord
et on voit la chute des prix des métaux; quand elle est basée sur la stratégie
maritime, et qu'on voit qu'il n'y aura pas d'emplois créés d'ici deux ans avec
la stratégie maritime et avec l'accord de commerce… de l'Union européenne. C'est
des emplois qui n'existeront pas rapidement.
Donc, de voir 82 000 emplois de
perdus seulement depuis l'arrivée du gouvernement libéral, où il devait y avoir
un effet libéral qui devait faire en sorte que l'emploi est créé partout au
Québec, moi, je trouve que c'est vraiment urgent, urgent... Il reste encore
quelques jours, quelques semaines au Parlement pour que le gouvernement dépose
une stratégie économique. Il a mis de côté notre stratégie économique, soit,
mais qu'il en dépose une, parce qu'on voit le résultat de l'effet libéral,
c'est 82 000 emplois de moins au Québec à temps plein depuis leur
arrivée au gouvernement.
Mme Montgomery (Angelica)
:
Ah, bien... Vraiment, c'est la nouvelle aujourd'hui, ça vient juste de sortir,
c'est 100 000 maintenant. Mais je...
M.
Turcotte
:
C'est encore pire.
Mme Montgomery (Angelica)
:
Je me demande en quelle manière est-ce qu'on pourrait dire que c'est à cause
des actions libérales que ça arrive? De quelle manière... Est-ce que vous tirez
un lien direct avec le gouvernement actuel?
M.
Turcotte
:
Mais c'est clair en ce moment, avec le discours ambiant qu'on a de la part du
gouvernement, avec l'abolition des CLD, avec l'abolition des CRE, avec la
modification de la mission des carrefours jeunesse-emploi, avec les coupures
dans tous les ministères, le gouvernement lance un message aux investisseurs et
aux entrepreneurs du Québec : Faites attention, ça va mal sur le plan
économique. C'est ça, le message du gouvernement. Donc, c'est clair, c'est
clair que, si le gouvernement ne dépose pas une stratégie économique, une vraie
stratégie économique comme on avait déposé, nous...
Quand on était au gouvernement, il y a des
emplois qui ont été créés sous notre gouvernement, des milliers d'emplois qui
ont été créés. Depuis qu'ils sont arrivés au gouvernement, la seule chose
qu'ils ont faite, c'est de tasser notre stratégie économique qui créait des
emplois, ils n'ont pas déposé de stratégie économique. La nature ayant horreur
du vide, ça fait en sorte qu'on perd ces milliers d'emplois là à temps plein au
Québec. Puis on n'a pas les moyens d'en perdre parce que c'est des revenus de
moins pour le gouvernement.
Puis, en plus, avec l'entêtement du
gouvernement de couper dans les services pour rééquilibrer les finances
publiques, nous, on considère que c'est dans l'augmentation des revenus du
gouvernement qu'on peut faire en sorte d'équilibrer les finances. S'il y a plus
de gens qui travaillent, s'il y a plus d'entrepreneurs qui créent de la
richesse, bien, ça va faire en sorte qu'il y ait plus d'argent qui rentre dans
les coffres du gouvernement. On n'aura pas besoin de tout couper, de tout
sabrer puis, par exemple, aujourd'hui, de mettre fin à la mission des
carrefours jeunesse-emploi qui aident 40 000 jeunes à se trouver un
emploi. Ces 40 000 jeunes là par année qui seront mis de côté, bien,
c'est des jeunes de moins qui vont pouvoir contribuer au gouvernement.
Mme Montgomery (Angelica)
:
Madame, vous parlez anglais?
Mme Croussette
(Myriam) : Yes.
Mme Montgomery
(Angelica)
: Can I ask you what kind of impact you think this
will have on young people looking for work?
Mme Croussette
(Myriam) :I think it's going to be
devastating. I mean, if you have some financial responsibilities and, you know,
you can't really get enough help from the Government, well, you have to work. So, if you can't get that help from the carrefour jeunesse-emploi, well, this is
going to cut a lot from that help. And, I mean, what are people going to do?
They're going to go and, you know, sell stuff? You know… So I just think that,
if you have a goal, you've got to reach that goal, and, if they cut on that,
people won't be able to get their dream jobs, so…
Mme Montgomery
(Angelica)
: When you hear that Québec has lost 100,000 full-time jobs, what
are your thoughts?
Mme Croussette
(Myriam) :I mean, it's not really good,
that's pretty simple. I think we're… we want to create jobs, you know, we want
to contribute to the economy, so, if we cut on those things to help people find
jobs, well, we cut on the economy and we won't be able to decrease our debts,
so…
Mme Montgomery
(Angelica)
: Puis-je avoir votre nom et votre titre?
Mme Croussette (Myriam) : Oui.
Je suis Myriam Croussette, je suis entraîneuse de hockey dans un sport-études.
Mme Montgomery (Angelica)
:
Et vous travaillez dans un carrefour…
M.
Turcotte
:
C'est une jeune qui a eu des services d'un carrefour jeunesse-emploi et, avec
la réforme, n'aurait pas eu droit au service.
Est-ce qu'il y a d'autres questions? Ça
va? Je vous remercie beaucoup.
(Fin à 9 h 46)