(Treize heures huit minutes)
M. Legault
: Ah! Même
les gens du Parti libéral qui sont là. Bonjour. Hein, Charles est toujours là,
hein, du Parti libéral.
Des voix
: ...
M. Legault
: Hein? Non,
mais j'espère qu'il va écouter puis il va rapporter ça à M. Couillard,
oui, comme il faut. C'est bon, il enregistre, même.
Bon, écoutez, d'abord, merci d'être ici.
Je sais que les journalistes n'aiment pas beaucoup parler d'économie, mais je
vais persister et en parler pendant les prochains jours, les prochaines
semaines, les prochains mois, les prochaines années parce que c'est la raison
pour quoi je suis en politique puis c'est la raison pour quoi j'ai fondé la
CAQ. C'est ma priorité.
Je vous ai remis un document où on montre
que, lorsqu'on regarde la richesse par habitant, le Québec est au 57e rang
sur 61 États. Ce qui est important de noter, là, c'est que les États qui
sont nos voisins ont des écarts importants. Qu'on parle de l'Ontario, qu'on
parle du Maine, qu'on parle — là c'est encore plus grand — de
New York, du Massachusetts, il y a un risque réel de déménagement des personnes,
peut-être, qu'on souhaite le moins perdre au Québec. Et on est en droit de se
demander : Est-ce qu'on peut continuer d'avoir des programmes sociaux, peut-être
même en qualité et en quantité, aussi bons sinon meilleurs que nos voisins avec
un écart de richesse aussi important?
Je vous rappelle que, si on regarde, par
exemple, là, par groupe, on a un écart de 15 % avec l'Ontario, on a un
écart de 27 % avec l'ensemble du reste du Canada puis un écart de
47 % avec les États-Unis. C'est énorme. Prenons juste le plus petit écart,
là, celui qui est avec l'Ontario : 15 %, c'est 8 milliards,
O.K., donc, 8 milliards. Actuellement, on est en train de travailler fort
à trouver 2 milliards, 3 milliards de réduction de dépenses pour
balancer le budget, mais il nous manque au moins 8 milliards de revenus.
Donc, c'est important de se donner des objectifs ambitieux puis un plan.
Or, dans le budget qui a été déposé il y a
une dizaine de jours par le gouvernement libéral, on voit que, pour les quatre
prochaines années — donc je ne parle pas juste de l'année actuelle,
mais pour les quatre prochaines années — la croissance qui est
prévue, c'est 2 %, 2 %, 1,7 %, 1,6 % en 2018. Ça veut dire,
une fois que toutes les mesures économiques proposées par le gouvernement
Couillard auront pris effet — on sait que la plupart commencent en
2017 — on sera encore à une croissance de 1,6 %. Quand on
regarde ce qui est prévu chez nos voisins, c'est partout supérieur à
1,6 %. Donc, ce que ça veut dire, c'est que, techniquement, on va reculer.
Donc, probablement qu'à la fin du mandat de M. Couillard, on va être
rendus 58e ou 59e.
Le rang, c'est une chose, mais ce que ça
signifie, c'est autre chose. Puis moi, je vous le dis, là, puis je vous le
prédis : C'est mathématiquement impossible, d'ici la fin du mandat de
M. Couillard, qu'on soit capables à la fois de financer correctement nos
services en santé et en éducation et à la fois qu'on réduise de façon
significative le fardeau fiscal des gens de la classe moyenne. Et, pour moi, il
y a une urgence d'agir. Actuellement, là, si vous vous promenez partout au
Québec, les gens de la classe moyenne vont vous dire, là : On est
étouffés, on n'arrive même pas à être capables de s'acheter puis de se financer
une maison, on n'arrive pas à se payer les services de base. Donc, il y a une
urgence d'agir.
Les chiffres qu'on a pour les quatre
prochaines années dans le budget de M. Leitão viennent confirmer que le
plan économique du Parti libéral est, de loin, insuffisant, qu'il n'est pas
assez ambitieux.
Donc, moi, je veux vous dire, là, que,
même si les journalistes n'aiment pas parler d'économie, moi, je vais continuer
d'en parler, puis la CAQ va continuer de le faire, pas pour le plaisir de
parler d'un rang en Amérique du Nord, mais parce qu'il y a une urgence de
défendre les gens de la classe moyenne, il y a une urgence de réduire le
fardeau fiscal de la classe moyenne. Puis, pour être capables de se donner les
moyens de nos ambitions, il faut créer de la richesse. On ne pourra pas réduire
les dépenses d'un autre 8 milliards pour se comparer juste à l'Ontario.
Puis l'Ontario, là, on est 47e, ici. Quand vous prenez Boston, Massachusetts,
il y a un écart de 85 %; avec New York, 84 %. Donc, mettez-vous à la
place de nos jeunes les plus brillants, là, s'ils veulent avoir une chance
d'aller augmenter leurs salaires, là, ils ont 56 États qui sont plus riches
que le nôtre.
Donc, ça, là, c'est un drame, puis, quand
je demande à Philippe Couillard : Avez-vous un objectif pour mobilier nos
acteurs, pour remonter un peu de quelques rangs?, M. Couillard n'a pas de
réponse, M. Leitão n'a pas de réponse. Ils sont actuellement obnubilés par
la réduction des dépenses pour attirer... pour rejoindre l'équilibre
budgétaire. J'en suis, j'en suis, mais c'est au moins aussi important, sinon
plus, de parler d'économie, de parler de créer des emplois de qualité.
Donc, actuellement, je ne vois pas de
lumière au bout du tunnel avec le gouvernement Couillard, puis je vais
continuer d'insister, à vous parler d'économie. Merci.
La Modératrice
: On va
passer à la période de questions. Régys Caron, Journal de Québec.
M. Caron (Régys)
:
Bonjour, M. Legault. Je vais vous parler d'économie, mais d'abord je
voudrais vous parler d'autres choses.
M. Legault
: Oui, O.K.
M. Caron (Régys)
:
Jugement de la Cour suprême qui renvoie la ville de Saguenay et son maire à la
laïcité, quel effet ça pourrait avoir, pensez-vous, sur la présence du crucifix
au salon bleu?
M. Legault
: Je pense
que... Ce qu'on m'a dit, c'est que, dans le jugement — je ne l'ai pas
lu, mais j'ai des gens qui l'ont lu dans mon entourage — le jugement
ne touche pas les signes comme le crucifix, ce qu'ils interdisent, c'est la
prière.
Moi, je pense que la solution est toute
trouvée. Il s'agit d'utiliser exactement la méthode qu'on a ici, à l'Assemblée
nationale, c'est-à-dire d'avoir un moment de recueillement. Je pense qu'en
faisant cet ajustement ça serait possible de respecter le jugement. Mais, moi,
de mon côté, là, je n'ai pas changé d'idée, la CAQ n'a pas changé d'idée, on
pense qu'on doit garder le crucifix à l'Assemblée nationale. Mais ça ramène une
question qui n'est pas réglée, c'est que Philippe Couillard n'a toujours pas
déposé son projet de loi pour encadrer les accommodements religieux. Puis, tant
que Philippe Couillard va avoir peur d'agir puis va attendre, bien, on va avoir
toutes sortes de jugements puis d'interprétations, puis les gens ne savent pas
trop à quoi s'attendre. Donc, il y a une urgence, là, que M. Couillard
dépose son projet de loi, mette en place un encadrement des signes puis des
accommodements religieux.
M. Caron (Régys)
: À
votre avis, le crucifix a-t-il encore sa pertinence à l'Assemblée nationale?
M. Legault
: Oui. Je
pense que ça fait partie de notre tradition, ça fait partie de notre
patrimoine, et avoir une ouverture aux autres, ça ne veut pas dire oublier ce qu'on
est, puis ça fait partie de ce qu'on est. Et ce n'est pas vrai qu'on va
commencer à enlever la croix sur le mont Royal puis on va commencer à enlever
tous les signes, les saints dans les noms des écoles ou peu importe, là. On a
une histoire, moi, j'en suis fier, puis je souhaite qu'on protège ces symboles.
M. Caron (Régys)
: L'histoire
sortie aujourd'hui au sujet des liens entre le premier ministre Couillard, et
une entreprise sur laquelle il a siégé au conseil d'administration, et un des
gestionnaires aux pratiques douteuses… Pourquoi n'avez-vous pas commenté cette
situation-là aujourd'hui? Est-ce que c'est parce que, par exemple,
M. Sirois siège avec M. Black au C.A. de l'OSM?
M. Legault
: Non,
j'attendais de le faire avec vous au point de presse. Écoutez, moi, je pense
que M. Couillard, dans le dossier avec M. Black, a manqué de
jugement. C'est une situation qui ressemble à la situation avec Arthur Porter.
Moi, je me souviens, je siégeais sur huit conseils
d'administration, j'en ai refusé, des conseils d'administration, parce qu'après
une petite enquête je voyais qu'il y avait des gens qui avaient peut-être un
passé douteux. Moi, je pense, c'est la responsabilité de toute personne qui
accepte de siéger sur un conseil d'administration de faire une petite enquête
sur ce dans quoi il s'embarque, surtout quand on est président du conseil d'administration.
Je pense que M. Couillard a manqué de jugement, a été insouciant, un peu
comme son association avec M. Porter.
Maintenant, pour ce qui est du cas de
Canadian Royalties, bien honnêtement je n'ai pas assez d'information pour être
capable de commenter, mais, si M. Couillard souhaite qu'on cesse de parler
du dossier de Canadian Royalties, je pense qu'il doit être totalement
transparent.
Ce qu'on nous dit, c'est qu'Investissement
Québec a fait un prêt de 100 millions de dollars. Investissement Québec ne
fait pas des prêts de 100 millions à chaque jour, là, c'est un montant
exceptionnellement important. Moi, je voudrais savoir quelles sont les obligations
d'investissement du secteur privé. Là, M. Daoust nous a dit ce matin :
Ils ne sont pas... On n'est pas les seuls à investir. Bon, bien, quelles sont
les obligations des autres parties? Bon, on parle de 350 emplois. Moi, je
voudrais avoir le portrait, là, global pour voir : Est-ce que c'était
raisonnable qu'Investissement Québec prête 100 millions de dollars à
Canadian Royalties, qui est une compagnie, maintenant, asiatique, qui n'est
plus une compagnie québécoise ou canadienne? Donc, moi, je pense que
M. Couillard a intérêt, dans ce dossier-là, à être plus transparent.
M. Caron (Régys)
: L'économie,
maintenant, une dernière. Vous avez évoqué les programmes sociaux, M. Legault,
au début de votre propos. Est-ce que les programmes sociaux, au Québec, minent
la richesse collective?
M. Legault
: Non, je ne
crois pas. Je crois...
Journaliste
: Mais
est-ce qu'il faut les éliminer?
M. Legault
: Non. Et d'ailleurs,
quand on regarde le plan du Parti libéral pendant la campagne électorale, ils
avouaient, eux autres aussi, que ce qu'on appelle les coûts de système, là,
bien, ils sont à 4 % dans le budget le plus important, qui est la santé,
puis à 3,5 % dans le deuxième budget le plus important, qui est l'éducation.
Donc, arrangez ça comme vous voulez, là, quand le gouvernement nous dit qu'il
prévoit une croissance économique de 1,6 %, là, ça ne balance pas. On ne
peut pas garder les programmes qu'on a, assumer les coûts pour l'inflation puis
les impacts du vieillissement puis à la fois réduire ce qui est urgent, le
fardeau fiscal de la classe moyenne. Ça ne balance pas, puis M. Couillard,
là, devrait fournir des explications. Moi, je souhaiterais, là, que de plus en
plus de journalistes s'intéressent à l'économie, s'intéressent aux finances
publiques puis demandent à M. Couillard : Comment pouvez-vous dire
qu'en 2018 vous prévoyez une croissance économique de 1,6 %? Comment
pouvez-vous promettre de protéger les programmes sociaux et comment pouvez-vous
promettre de réduire le fardeau fiscal de la classe moyenne? Ça ne balance pas.
La Modératrice
: Alain
Laforest, TVA.
M. Laforest (Alain)
:
Parlons d'économie des indulgences. Est-ce que, M. Legault, vous avez
l'impression que ça doit forcer, le jugement de la Cour suprême, M. Couillard
à agir sur la neutralité religieuse rapidement?
M. Legault
: Moi, je
pense qu'on va continuer, de façon régulière, à avoir des dossiers qui touchent
aux accommodements religieux. Je comprends que M. Couillard a un malaise à
parler des accommodements religieux, mais il faut tracer une ligne, il faut
tracer une ligne. Puis, moi, ce n'est pas vrai qu'on va renier notre passé en
laissant les juges décider, à la place de ceux qui font de la politique, ce qui
est souhaitable pour les Québécois. Moi, je suis fier du passé catholique des
Québécois. Moi, je pense qu'il n'est pas question d'enlever les arbres de Noël,
le crucifix à l'Assemblée nationale ou la croix du mont Royal. Mais, pour que
ça soit clair, il faut mettre des balises, puis M. Couillard, il ne veut
pas toucher à ça. Lui, là, il veut... il est du multiculturalisme. Bien, il
faut, à un moment donné, être capable de dire : Non, nous, il y a des
choses qu'on accepte puis il y a des choses qu'on n'accepte pas au Québec, en
fonction des valeurs québécoises. Je sais que M. Couillard a beaucoup de
misère à défendre les valeurs québécoises, mais il n'a pas le choix, il va
falloir qu'il agisse, ça va le rattraper régulièrement.
M. Laforest (Alain)
: Et
une question pour notre chaîne spécialisée en économie, Argent : Est-ce
que vous avez l'impression, avec les chiffres que vous avancez et le plan du gouvernement,
qu'on va juste avoir utilisé l'encre noire pour cette année et qu'on va se
retrouver à l'encre rouge encore l'an prochain?
M. Legault
: Bien, c'est
que le problème, ce n'est pas seulement une question d'encre rouge et d'encre
noire, c'est qu'on a besoin de dégager une marge de manoeuvre pour réduire de
façon importante les impôts de la classe moyenne. Ça urge. Actuellement, là,
tous les rapports le montrent, les gens n'ont pas assez d'argent pour
consommer, ils n'ont pas assez d'argent pour s'acheter une maison, ils sont
étouffés. On est les plus taxés en Amérique du Nord.
Actuellement, selon le plan puis les prévisions
de M. Couillard, je vous le prédis, là, c'est impossible, d'ici 2018, de
réduire de façon significative le fardeau fiscal des gens de la classe moyenne.
Puis ça, je trouve ça très grave, puis je souhaiterais qu'on en parle davantage,
pas seulement à la chaîne Argent.
La Modératrice
: On y
va avec les questions en anglais?
M. Legault
:Yes.
Journaliste
: Yes. Well, sir, how are you today?
M. Legault
: Good.
Journaliste
: So, you know there is this decision at the Supreme Court?
M. Legault
: Yes.
Journaliste
: It's very hard on Mayor Jean Tremblay. It singles him out for his
approach, very dogmatic. How do you react to the decision?
M. Legault
: OK. I think that, right now, there's a solution. We should do
exactly what we're doing here, at the National Assembly, which is to have a moment of silence instead of having a prayer.
So, I think, with an adjustment like this, we should be able to apply the judgement.
But it shows that it
becomes urgent that Mr. Couillard tables his bill to put some parameters
about what is allowed, what is not allowed in Québec regarding religious accommodations.
Journaliste
: And symbols. The decision doesn't deal with symbols, which were
fairly evident in Saguenay, and we're talking about statuary. Here, in the National Assembly, what is your thought, I
mean?
M. Legault
: I feel comfortable with those symbols. I think that we have a
Christian past in Québec and we
have the right to protect this past. And it's part of our «patrimoine».
Journaliste
: Heritage. And so, in Saguenay, you're comfortable with those
religious symbols remaining as well?
M. Legault
: Sure, sure. I think it's part of our heritage to keep those symbols
in municipalities offices and here at the National Assembly. Merci, tout
le monde.
(Fin à 13 h 24)