(Dix heures trente-cinq minutes)
M. Jolin-Barrette : Alors,
bonjour, tout le monde. Ce matin, je vous annonce que j'ai l'intention de
déposer une loi-cadre visant à faire suite au rapport Noreau qui a été déposé
en février 2014. Cette loi-cadre viserait à assurer la mise en place d'une
procédure formelle visant la sélection, le renouvellement et la nomination des
décideurs administratifs indépendants afin d'assurer leur indépendance, et leur
impartialité, ainsi que leur intégrité. Décideurs administratifs indépendants,
on s'entend, ce sont des juges administratifs. Donc, ceux-ci doivent être
sélectionnés en fonction de leur compétence, de leur expérience, de leur
aptitude et de la qualité de leur travail et non pas en fonction de leur
couleur politique, de leurs contacts politiques, et leur nomination doit être
exempte de toute ingérence politique.
Au Québec, il y a plus de 300 juges
administratifs qui oeuvrent dans 15 tribunaux administratifs. Ils rendent plus
de 140 000 décisions par année qui touchent directement la vie des citoyens,
notamment les accidentés de la route, les accidents du travail, les maladies
professionnelles, l'accès à l'information, les permis d'alcool, la déontologie
policière, le bail de logement quand vous contestez votre bail à la régie, les
tarifs d'hydroélectricité à la Régie de l'énergie, la qualité de la
construction par le biais des licences d'entrepreneur en construction, le
zonage agricole, l'environnement, les placements, les valeurs mobilières, les
licences pour être courtier, l'expropriation, la conduite des élus municipaux,
les libérations conditionnelles. Les Québécois et les Québécoises vont
certainement avoir recours aux tribunaux administratifs pour contester une
décision de l'État au cours de leur vie, et ces décisions-là touchent
concrètement la vie des citoyens du Québec. Ce sont des décisions générales ou
parfois des décisions personnalisées.
Il faut comprendre que notre système de
justice est basé sur l'indépendance et l'impartialité. Or, nos tribunaux
administratifs, avec le processus de renouvellement, de sélection et de
nomination, peuvent affecter cette indépendance et cette impartialité. Les
décideurs administratifs sont à risque. De plus, les décideurs administratifs
n'ont pas de règle déontologique pour neuf des 15 tribunaux administratifs, ils
ne sont pas assujettis au Conseil de la justice administrative. Neuf des 15
tribunaux administratifs n'ont pas de règle de sélection, de nomination et de
renouvellement, donc ils ne sont pas à l'abri de l'intervention politique. Il
n'y a aucune compétence particulière qui est exigée, il n'y a pas de critère de
sélection puis il n'y a pas d'appel de candidatures pour la plupart des
tribunaux administratifs. La durée des mandats varie d'un an à cinq ans au bon
gré du gouvernement, parfois en fonction de vos contacts politiques.
Dans le rapport Noreau, on a fait l'étude
et on a fait des entrevues avec 28 juges administratifs provenant de 14
tribunaux administratifs. On apprend des choses qui sont parfois très
surprenantes et qui démontrent clairement qu'il y a de l'intervention, de
l'ingérence politique. À titre d'exemple, je vais juste vous citer le répondant
180, à la page 251 du rapport, qui dit, en parlant des décideurs administratifs :
«Ils viennent d'un milieu politique et ils viennent, ça peut être, je ne sais
pas, moi, d'ailleurs, ce n'est pas toujours des gens compétents. Des vendeurs
d'auto, ça peut être un agent d'assurance, ça peut être des gens qui ont
travaillé comme secrétaire dans un tribunal. Ça peut être des anciens
politiciens, maires, mairesses, ça vient de partout. C'est qui tu connais pour
être nommé à la fonction de juge administratif.»
Donc, c'est extrêmement préoccupant, puis
c'est inacceptable que les juges administratifs qui se penchent sur le dossier
des gens, des dossiers concrets qui vont avoir un impact sur leur vie, ça soit
des nominations politiques pour certains.
Depuis son arrivée en poste, Philippe
Couillard a confié à Stéphanie Vallée, la ministre de la Justice, le mandat
d'étudier le rapport Noreau et de mettre en place les recommandations. Mais,
encore une fois, près de trois ans plus tard, le rapport a été tabletté. L'an
passé, j'avais posé une question à Stéphanie Vallée, au lendemain des crédits
budgétaires, au salon bleu pour lui dire : Qu'est-ce qui arrive avec ça?
Elle nous avait dit : Bon, on travaille là-dessus, on regarde ça. Un an
plus tard, ça va faire un an au mois d'avril, il n'y a rien qui s'est passé.
C'est encore de l'inaction de la part de la ministre de la Justice, c'est
encore de l'immobilisme le plus complet, et ça permet encore de nommer des amis
du parti.
Pourtant, c'est nécessaire de mettre en
place un processus de nomination, de renouvellement et de sélection en toute indépendance
des influences politiques. C'est nécessaire afin de maintenir la confiance du
public dans ses institutions et dans le processus qui va mener à la décision
sur l'administré. Donc, c'est important d'avoir des gens qui sont compétents,
qui sont intègres et qui possèdent les connaissances et expériences requises
dans le domaine où ils vont rendre des décisions.
C'est pour cette raison qu'aujourd'hui je
vous annonce que nous allons déposer, dans les prochains jours, une loi à l'Assemblée
nationale, une loi-cadre qui va faire suite aux recommandations du rapport
Noreau pour faire en sorte que les décideurs administratifs ne soient plus
nommés en fonction de leurs contacts politiques, en fonction de qui vous
connaissez, mais plutôt en fonction de leurs compétences. Il faut que le gouvernement
arrête de donner des jobs à ses chums.
Le Modérateur
: Merci.
Questions?
M. Bellerose (Patrick) :
Avez-vous vraiment espoir que le gouvernement va appeler la loi-cadre?
M.
Jolin-Barrette : Bien, écoutez, je l'espère. Tous les intervenants du
milieu juridique, des tribunaux administratifs souhaitent qu'une telle loi soit
mise en vigueur. Écoutez, actuellement, là, les nominations passent par le
Secrétariat aux emplois supérieurs. On pense encore en fonction du système de
post-it, en fonction de qui vous connaissez. Dans le rapport Noreau, là, c'est
très clair que les gens sont choisis en fonction de leurs contacts politiques
pour certains, ça facilite le processus. «Qu'est-ce que j'ai fait pour être
nommé? C'est des nominations politiques, vous le savez. Le ministre me dit :
Écoute, s'il y a une ouverture, moi, je te connais depuis peu, mais on m'a
parlé de toi, on s'est informé sur ton passé, tu as un très bon dossier. Alors,
écoute, tant qu'à nommer quelqu'un, on va nommer quelqu'un qui a la
compétence.» Voilà.
Donc,
il faut arrêter ça. Il faut que les gens, là, quand ils se présentent devant le
juge administratif, là, la personne, un, connaisse le domaine dans lequel il y
a une expertise, devant lequel ils présentent leur dossier, puis que ça soit en
fonction d'un concours, en fonction d'un concours écrit, d'une entrevue, un peu
comme un juge de la Cour du Québec, qu'il y ait un processus formel pour éviter
qu'il y ait des nominations politiques puis qu'il y ait des récompenses qui
soient données, parce qu'on joue avec la vie des gens dans ce cas-là sur un
dossier d'une personne, des gens qui vont recevoir une indemnité, ou qui
contestent une indemnité de l'État, ou qui veulent avoir un permis, ou qui
veulent faire valoir leurs droits. Ça prend des décideurs administratifs qui
vont être compétents puis qu'il n'y aura aucun doute sur leur impartialité, sur
leur intégrité et surtout qu'il va y avoir une séparation entre le politique
puis le judiciaire parce que, dans le rapport, ça en fait état aussi.
Actuellement,
là, les mandats, c'est entre un an puis cinq ans. Donc, qu'est-ce qui arrive?
Certains décideurs administratifs, vers la fin de leur mandat, là, prennent le
téléphone, appellent qui ils connaissent au bureau du premier ministre,
appellent qui ils connaissent dans les différents ministères titulaires et
disent : Écoute, moi, mon renouvellement, là, arrive à échéance, et donc
j'aimerais bien ça, être renouvelé. Ce n'est pas normal que ça se passe comme
ça. Ça prend une procédure de renouvellement formelle pour faire en sorte
qu'ils vont être à l'abri de toute ingérence politique.
M.
Laforest (Alain) : Vous, personnellement, est-ce que vous avez été
témoin de quelque chose? Vous, personnellement, en tant que juriste, vous avez
déjà vécu des choses?
M.
Jolin-Barrette : Bien, écoutez, il y a des gens qui ont été...
M.
Laforest (Alain) : Vous parlez de post-it, là. Avez-vous eu vent...
M.
Jolin-Barrette : Il y a des gens qui ont été nommés. Je vous donne un
exemple : Mme Françoise Gauthier qui a été nommée à la tête de la
Commission des libérations conditionnelles. Mme Gauthier, dans son C.V., elle
n'a aucune expertise dans ce domaine-là. Par contre, à part son passé libéral,
elle était à la CPTAQ avant, mais elle a été désignée à cet endroit-là. Même
chose pour John MacKay qui a été nommé, sous le PQ, à la Régie du bâtiment du
Québec. Il était régisseur, là, il rendait des décisions pour des licences d'entrepreneur
en construction en vertu de la Loi sur le bâtiment. C'est important, là, les
entrepreneurs, il faut qu'il ait la compétence pour rendre des décisions, ça
touche la vie concrète des gens. Bien, lui-même l'a dit qu'il n'avait aucune
expérience puis il s'est rendu compte qu'il fallait qu'il siège, en plus, puis
qu'il entende des gens qui faisaient valoir leurs droits devant ce tribunal administratif
là.
Donc, ça, c'est deux exemples concrets de
l'incohérence la plus totale. Les deux vieux partis ont fait ça au moment où
ils étaient au pouvoir, à la fois les libéraux, à la fois le Parti québécois.
Ils ont placé des gens, ils ont facilité la nomination de certaines personnes.
Mais ce n'est pas juste la nomination, c'est aussi le renouvellement puis la durée
du renouvellement. Si on veut faire en sorte, là, qu'ils sont complètement
indépendants, les décideurs administratifs, ce n'est pas normal qu'au moment...
un, ils ne sachent pas à quel moment ils vont être renouvelés oui s'ils le sont,
et ça peut avoir une influence sur le jugement, parce que, s'ils ne suivent pas
le courant majoritaire ou le courant de la boîte comme tel, bien, ça peut avoir
un impact sur leur renouvellement. Donc, ils sont à risque d'être influencés
dans la décision qu'ils vont rendre. C'est pour ça...
M. Laforest (Alain) : ...des
petits amis influençables, là.
M. Jolin-Barrette : Bien,
écoutez, pas tout le monde qui sont nommés juges administratifs, mais, à cause
que vous êtes dans un mandat à durée déterminée puis votre renouvellement
dépend du bon vouloir du gouvernement, ça prête flanc à certaines influences,
puis votre indépendance peut être plus limitée du fait que le processus passe
par le secrétariat aux emplois, aux nominations supérieures.
M. Croteau (Martin) : Est-ce
que vous êtes en train d'avancer que les décisions des tribunaux administratifs
ne sont pas crédibles?
M. Jolin-Barrette : Non, ce
n'est pas ce que je dis.
M. Croteau (Martin) : Bien,
c'est un peu ce que vous faites, parce que vous dites que les titulaires de
ces... les juges administratifs, etc., sont teintés politiquement et donc leurs
décisions ne sont pas légitimes à vos yeux.
M. Jolin-Barrette : Non. Ce
que je vous dis, c'est que... prenez quelqu'un qui est à la Régie de l'énergie,
O.K.? Hydro-Québec vient présenter une demande de hausse de tarifs, et là, lui,
son mandat se termine dans six mois ou dans un an. Peut-être que ça va placer
le décideur administratif dans une situation inconfortable, où son jugement va
être teinté par son indépendance personnelle et professionnelle.
Donc, c'est à risque. Je ne dis pas que
c'est ce qui arrive, mais le rapport Noreau en fait très clairement état dans
son rapport. Ils disent très clairement que ça peut avoir une incidence, à savoir,
si tu n'es pas renouvelé... Il y a des cas aussi de gens, dans le rapport, qui
disent : Écoutez, moi, je rendais mes décisions en toute indépendance, en
toute impartialité et je n'ai pas été renouvelé. Donc, ça n'explique pas, mais
soulève des questions.
M. Croteau (Martin) : Non,
justement, là, est-ce que vous considérez, oui ou non, qu'il y a un problème de
confiance à l'égard des tribunaux administratifs en ce moment?
M. Jolin-Barrette : Prenons
le problème à l'inverse. Si on ne garantit pas...
M. Croteau (Martin) : Oui ou
non? Est-ce qu'il y a un problème de confiance à l'égard des tribunaux
administratifs?
M. Jolin-Barrette : Si nous
ne garantissons pas un processus de sélection, de nomination et de
renouvellement formel, il peut y avoir un problème quant à l'indépendance de la
décision qui est rendue.
M. Lacroix (Louis) : Mais ,en
ce moment, est-ce qu'il y en a un problème, à votre avis?
M. Jolin-Barrette : Le
rapport Noreau démontre très clairement l'incohérence...
M. Lacroix (Louis) : Non,
mais on vous pose la question à vous. Quand même qu'on poserait la question au
rapport Noreau, il ne nous répondra pas. À vous, vous êtes devant nous, on peut
vous poser la question. Est-ce que vous croyez qu'actuellement il y a un
problème avec les tribunaux administratifs?
M. Jolin-Barrette : Bien, je
pense que le système, il a quelque chose de brisé qu'il faut réparer. Il faut s'assurer
que les gens qui vont être désignés là soient à l'abri de toute ingérence politique,
de tout contact politique pour être renouvelé. Donc, on place les décideurs
administratifs dans une situation qui est intenable. Ceux-là, ils vont rendre
leur décision, pour la majorité, en fonction de leur serment, en fonction de
leurs qualités, mais ça les place dans une situation difficile, ça les place
dans une situation qui est intolérable où ils doivent prendre en compte leurs intérêts
personnels et les intérêts du dossier qui est devant eux. Ça peut...
M. Laforest (Alain) : Ce que
vous dites, ça peut être des décisions bâclées, là, ou ça peut être des décisions
prises en fonction de leur couleur politique ou sous influence politique.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est
pas tant au niveau de la couleur politique...
M. Laforest (Alain) : L'influence
politique.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est
pas tant au niveau de l'influence politique, c'est à partir du moment où vous
ne savez pas si vous allez être renouvelé ou non, au niveau de l'inamovibilité,
au niveau de l'indépendance. Il n'y a pas de critères.
M. Laforest (Alain) : M.
Jolin-Barrette, il y a plein de monde qui vivent ça au Québec dans plein de
secteurs, là.
M. Jolin-Barrette : Non, mais
c'est différent.
M. Laforest (Alain) :
Pourquoi là c'est différent?
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est
différent parce que vous, M. Laforest, si vous présentez votre dossier
personnel... parce que c'est une décision qui est sur vous, O.K., ça va avoir
un impact concret dans la vie des citoyens, dans votre vie, parce que c'est un
dossier individualisé pour certains tribunaux administratifs. Il y a d'autres
tribunaux où c'est des décisions générales, supposons pour les tarifs
d'hydroélectricité, mais ça a un impact concret sur vous. Donc, c'est important
que le décideur qui rend la décision, le juge, là, un, soit compétent, ait les connaissances
requises pour rendre le jugement, parce que, si quelqu'un est nommé, puis il
n'a pas les compétences, puis il ne passe pas l'examen écrit, puis il ne passe
pas d'entrevue à savoir est-ce qu'il connaît le domaine, bien, c'est une
récompense politique qui est donnée en fonction de qui vous connaissez.
Donc, pour assurer d'avoir un système de
justice qui va prendre en compte l'intérêt des citoyens, c'est important de
mettre fin à cela et que la décision, dans le fond, soit la bonne décision, la
décision appropriée en fonction de la compétence des décideurs.
M. Croteau (Martin) : Si on
suit votre raisonnement jusqu'au bout, chaque décision de chaque tribunal
administratif au Québec est contestable puisque, comme vous dites, le système
est brisé.
M. Jolin-Barrette : Non, non.
Ce que je vous dis...
M. Croteau (Martin) : C'est
vous qui nous menez là, là.
M. Jolin-Barrette : Ce que je
vous dis, c'est que le processus menant à la sélection de certains juges administratifs
est problématique parce qu'il n'y a pas de critère de compétence, il n'y a pas
de critère de rendement, de qualité.
M. Croteau (Martin) : Le
résultat de ça est que chaque décision est conditionnée par des possibles
pressions extérieures politiques et que, vous dites, les juges administratifs
sont donc exposés à des pressions politiques. C'est ce que vous êtes en train
de nous dire. Donc, si on suit votre raisonnement, chaque décision qui est
rendue par un tribunal est contestable ou, à tout le moins, viciée à la base.
M. Jolin-Barrette : Non. Ce
que je vous dis, c'est que, si jamais il y a une erreur de droit dans la
décision, elle ne peut pas être portée en appel. Ça, c'est le processus
régulier. Au niveau de l'influence politique, la décision ne subit pas
d'influence politique comme telle, c'est la façon dont le décideur administratif
est placé dans son siège. Lorsqu'il ne sait pas s'il va être renouvelé ou non,
en fonction des règles actuellement, en fonction du renouvellement, il n'y a
pas de prévisibilité. C'est possible que ça teinte son jugement, c'est ce que
ça dit dans le rapport Noreau, par rapport à la décision qu'il aura à rendre,
parce qu'il ne bénéficie pas de toute l'indépendance requise par rapport au
processus de renouvellement lorsqu'il sera renouvelé, lorsqu'il sera nommé.
C'est en ce sens-là que je fais mon intervention.
M. Lacroix (Louis) : Est-ce
qu'il faudrait élargir le raisonnement, par exemple, aux présidents de société
d'État, par exemple, aux gens, aux hauts fonctionnaires? Est-ce que vous pensez
que la sélection de ces gens-là, qui est faite par le gouvernement, devrait
aussi s'appliquer?
M. Jolin-Barrette : Bien, il
y a deux choses, deux volets, là, si vous me permettez. Dans le fond, pour les
juges administratifs, c'est important de sortir ça du Secrétariat aux emplois
supérieurs. Dans le rapport, ils recommandent la création d'un secrétariat qui
relèverait de l'Assemblée nationale. Ça, c'est une chose, ils ont une fonction
juridictionnelle, c'est des juges. O.K.
Deuxième élément, sur ce que vous me dites
par rapport aux sous-ministres, par rapport aux dirigeants de sociétés d'État,
nous, on avait déjà déposé le projet de loi n° 393 qui faisait en sorte
que, un, les décideurs étaient sélectionnés en fonction de leurs compétences
puis qu'ils étaient assujettis au contrôle des parlementaires en commission
parlementaire, un peu comme ça se fait aux États-Unis, supposons, avec le
contrôle du Sénat, en auditions publiques. Nous, on est en faveur de ça, à ce
que les plus hauts dirigeants, qui occupent des fonctions superimportantes, que
ce soit des gens qui sont compétents puis qu'ils soient assujettis à la
procédure de contrôle des parlementaires.
M. Lacroix (Louis) : Je vais vous
lire une citation, vous me direz si vous êtes d'accord ou en désaccord avec.
«Si on veut faire un changement au Québec, il faut remplacer les personnes qui
font de la politique, mais aussi les sous-ministres, les présidents de société
d'État qui ne pensent pas comme nous, qui ne sont pas d'accord pour faire ces
virages.»
Est-ce que vous êtes d'accord ou en
désaccord avec ça?
M. Jolin-Barrette : Là, vous
faites référence à une citation de M. Legault...
M. Lacroix (Louis) : Exactement.
M. Jolin-Barrette : ...je
pense, en 2014.
M. Lacroix (Louis) : En 2012.
Le 24 août 2012.
M. Jolin-Barrette : En 2012,
oui. Au Québec, on a besoin d'un changement, on a besoin d'une équipe
dynamisée. Donc, lorsqu'un gouvernement arrive, c'est normal qu'il prenne des
gens qui veulent mettre en place le changement pour lequel l'équipe d'élus a été
élue par la population. Mais nous, dans cette perspective-là, on souhaite que
tous les sous-ministres, tous les présidents d'agence ou de société d'État passent
devant le processus formel avec le contrôle parlementaire, puis les gens
doivent être sélectionnés en fonction de leurs compétences, en fonction de
leurs qualités, en fonction de leurs feuilles de route parce que ces gens-là...
M. Lacroix (Louis) : C'est
aussi en fonction de ce que pense le gouvernement, selon ce qu'a dit M. Legault
dans cette citation-là.
M. Jolin-Barrette : Bien,
sous réserve de leurs compétences. Dans le fond, c'est important de prioriser
la compétence des gens puis de l'assujettir au contrôle parlementaire, mais il
y a une chose qui est sûre, c'est que les gens qui sont désignés dans ces
postes-là, c'est des postes importants, puis trop souvent, les gens qui sont
envoyés dans les sociétés d'État, c'est un parking parce qu'ils ont été nommés
en fonction des nominations politiques puis pas en fonction de la compétence. Puis
ça, c'est malheureux qu'il y ait des sous-ministres qui soient nommés, qui
soient gardés, qui soient tablettés pendant des années, qui ne se présentent
pas au travail.
Il y a certains cas, Mme Boucher qui a été
nommée à la tête de l'ACMQ, ça, c'est des situations inacceptables. Ils sont
payés à fort salaire. Les Québécois se lèvent le matin, ils vont travailler, ça
prend la même chose au niveau des sous-ministres, puis il faut que les gens
fassent leur travail.
Le Modérateur
: Je
pense qu'on avait plusieurs questions sur d'autres sujets ce matin.
M. Boivin (Mathieu) : M.
Jolin-Barrette, qu'est-ce que vous pensez du fait que les citoyens de
Saint-Apollinaire semblent craindre, à tout le moins se trouvés mal informés
sur l'installation d'un cimetière musulman dans leur région?
M. Jolin-Barrette : Bien, je
pense que c'est important, notamment au niveau du conseil municipal, de prendre
en compte l'opinion des gens puis de bien les renseigner sur comment serait
établi ce cimetière-là, quelles modalités ça prendrait. Je pense que l'information...
les gens du conseil municipal, la ville doit aller au-devant, doit écouter les citoyens,
prendre en considération leurs commentaires, les rassurer, voir comment ça se
passe, que les procédures, les demandes de permis... il y a une procédure
formelle puis que tout soit respecté.
M. Boivin (Mathieu) : D'après
ce qu'on comprend, les gens n'en veulent pas. Ils craignent que ce soit la
première étape vers quelque chose dont ils voudront encore moins. Il est assez
manifeste, là, que c'est non pour les gens qui ont déjà manifesté leur
opposition. Le conseil municipal, il fait quoi?
M. Jolin-Barrette : Bien, ça
relève des élus municipaux. Mais, ceci étant dit, la loi fait en sorte que, si
l'usage est légal, si l'usage est licite, ils doivent octroyer le permis, mais
il faut que ça soit très encadré en fonction des paramètres de la loi qui est
présentée. Mais les gens, dans le fond, qui font valoir leurs opinions, les
élus municipaux doivent les écouter, doivent les entendre puis ils doivent
s'assurer que tout le monde se parle puis se comprenne bien.
M. Boivin (Mathieu) : Est-ce
qu'il y a un concept d'acceptabilité sociale pour des choses comme celles-là?
M. Jolin-Barrette : Bien, je
ne suis pas familier avec la loi précisément pour l'instauration, là, de
cimetière. Je ne sais pas si c'est un critère ou non dans la loi.
M. Boivin (Mathieu) : Mais
dans le cas où est-ce que, manifestement, c'est un enjeu social important...
M. Jolin-Barrette : Bien,
actuellement, il faut regarder ce qu'il y a dans la loi, mais...
M. Boivin (Mathieu) : Vous
dites : Si la loi est respectée, le conseil va faire... va l'adopter,
c'est la loi. Peu importe ce que les gens auront dit, le conseil, si c'est
légal, il va le donner, là, le cimetière musulman. Les gens n'en veulent pas,
ils le disent. On fait quoi? Est-ce qu'il y a un concept d'acceptabilité
sociale?
M. Jolin-Barrette : Bien, présentement,
dans la loi, il faudrait voir, un, s'il y a le concept d'acceptabilité sociale.
Mais, vous savez, c'est important qu'il y ait des discussions, l'importance...
les gens font valoir leur opinion, le conseil municipal doit se gouverner en
conséquence aussi.
Le Modérateur
: Patrick
Bellerose.
M. Bellerose (Patrick) :
Qu'est-ce que vous pensez des critiques évoquées au sujet des menus en CHSLD
dans le journal d'aujourd'hui?
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez,
je trouve ça particulièrement pertinent en regard de la proposition qu'on avait
faite de doubler le budget pour les repas dans les CHSLD. Il y a déjà des
critiques. M. Barrette avait fait un gros show avec sa présentation l'autre
bord de la rue. D'ailleurs, le prix des repas qui avaient été servis était pas
mal plus élevé que ce qu'on sert réellement dans les CHSLD.
Donc, nous, notre proposition, c'était
d'avoir des aliments de qualité pour les aînés, des repas de qualité puis que
les repas qui soient servis aux aînés, bien, ce soient de bons repas, surtout
aussi que, pour la santé, pour la qualité de vie aussi... tu sais, c'est un
plaisir, manger, donc il ne faut pas lésiner sur la nourriture qu'on sert à nos
aînés, d'autant plus que lorsqu'on voit les investissements puis les repas qui
sont servis en prison, je pense que c'est questionnable puis le gouvernement
devrait mieux traiter nos aînés.
M. Bellerose (Patrick) : Vous
croyez qu'on traite trop bien les gens en prison, par exemple, la prison de Sept-Îles,
qui a été ouverte récemment, si on compare les deux?
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez,
90 millions pour une prison qui est flambant neuve quand nos aînés dans
nos CHSLD, eux, mangent des repas qui sont «so-so», ça soulève des questions.
M. Lacroix (Louis) : Là, on
aurait dû construire une vieille prison, c'est ça?
M. Jolin-Barrette : Non, on
n'aurait pas dû construire une vieille prison. Il y a des besoins aussi, mais il
y a une question qui se pose, à savoir où est-ce qu'on priorise les ressources,
et je pense que nos aînés, c'est à prioriser puis surtout la qualité de leur
nourriture qu'ils mangent, c'est important.
M. Laforest (Alain) : À votre
avis, est-ce qu'on devrait les faire travailler le long des routes, faire du
nettoyage, nettoyer les berges?
M. Jolin-Barrette : Bien,
nous, on avait proposé que les prisonniers paient une partie des frais de leur
incarcération. Donc, je pense qu'ils doivent contribuer aux coûts engendrés par
leur détention, parce que, vous savez, éventuellement, on souhaite qu'ils
soient réinsérés socialement, mais, ceci étant dit, durant le temps où ils
purgent leur peine, ils pourraient contribuer à la société par différentes
façons.
M. Laforest (Alain) : Gabriel
Nadeau-Dubois dans Gouin, vous en pensez quoi, si jamais il se présente?
M. Jolin-Barrette : Si jamais
il se présente, bien, écoutez...
M. Laforest (Alain) : Un
jeune qui arrive à l'Assemblée...
M. Jolin-Barrette : Moi, je
trouve ça réjouissant parce qu'il n'y a pas beaucoup de jeunes qui s'impliquent
en politique. Donc, tous les jeunes qui vont vouloir s'impliquer en politique,
c'est une bonne nouvelle pour le débat d'idées, pour assurer aussi qu'il y ait
une représentation aussi au niveau de l'Assemblée nationale, où les différentes
tranches d'âge de la population soient représentées. Donc, on lui souhaite
bonne chance, si d'aventure, il désire se présenter dans Gouin.
M. Bellerose (Patrick) :
Avez-vous l'impression qu'il va galvaniser la gauche?
M. Jolin-Barrette : Écoutez,
il va présenter son option. Les Québécois feront leur choix. Il y a une chose
qui est sûre, c'est que nous, la CAQ, on va être prêts pour 2018 avec nos
propositions qui vont toucher l'ensemble des Québécois, pas uniquement la
gauche.
M. Laforest (Alain) : Comme
la hausse des frais de scolarité.
M. Jolin-Barrette : Comme la
hausse des frais de scolarité? Je ne pense pas que M. Nadeau-Dubois est en
faveur de la hausse des frais de scolarité.
M. Laforest (Alain) : Mais
vous autres?
M. Jolin-Barrette : Bien,
nous, on est avec l'inflation, donc l'indexation telle qu'elle est
actuellement.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup.
M. Jolin-Barrette : Merci à
vous. Bonne journée.
(Fin à 10 h 57)